> =. BTS SR ntas US TES TT RS | Ni LL | % ñ =. a ne d'iR L  den Pi ie LE ve Fur vo he 1108 nr L “ Ne ces 4 À L 4 M | A L : LI : 12 en _ : ” & . A CA % h ….. pe = cm. L n : = … OBSERVATIONS | SUR LA PHY$STQUE, SUR: L'HISTOIRE NATURELLE ÉTUSURKRLES ARTS, AVEC. DES PLANCHES EN TAILLE-DOUCE DÉDIÉES AM:. LE COMTE D’ARTOIS; Par M. l'Abbé RozrER, de plufieurs Académies , & par M. J. À Moncez le jeune, Chanoine Reégulier de Sainte- Geneviève, des Académies Royales des Sciences de Rouen ; de Dijon, de Lyon, &c. &c. DACN WW T'ER, 17 83. TOME XXII AGP A Re S'S AU BUREAU du Journal de Phyfique, rue & Hôtel Serpente, MD CC -LXXX TEL AVEC BRIFILEGE DU ROLL fe ans ae sav ; Oo TAG did ave, CPE VA ai à RTE EU DE at site oué L Les x so OM 1% 15 HO sono CES 13628 vi ae ce set et F4 Re ” €: n RS? » de ‘à À À! « we Fa À ? LA À Eh à 3 ane = 4 MT 1 LAPS ES U + \ A j ï f nn nee ÉVR RS KR + Me < + ane Hu SET Bei se pt Et ul trot 1h A #7 En “ Sun Men tre ee enter obée cs Ne A, Fe nie PÈRE 99 au À ë pi. PEAR “104 SOÈAINTA LL ; ME 1,0 Eu OBSERVATIONS ET MÉMOIRES SUR LA PHYSIQUE, SUR L’HISTOIRE NATURELLE, ET SUR LES ARTS ET MÉTIERS. ET OSG'"E + DEiM NAVIER, Par M. Vrc@e-DAzY®e. P IERRE-JOUSSAINT NAVIER, Docteur en Médecine de Reims ; Médecin du Roi pour le traitement des maladies épidémiques, Corref- pondant de l’Académie Royale des Sciences de Paris, Membre de celle € Châlons-fur-Marne, & Affocié regnicole de la Société Royale de Médecine , naquit le 1°*: Novembre 1712, à Saint-Dizier en Champa- gne , de Pierre Navier & de Françoife Lefur. Tome XXII, Part. I, 1783. JANVIER. A2 Va 4 - OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, La Nature femble jetter les hommes fur la furface du globe, comme elle y répand les germes au hafard. L’efprit le plus fait pour les grandes chofes a befoin qu’on le cultive; & pour former un Savant utile à fa Pa- trie , il faut furmonter tant de diffculeés , qu'en y réfléchiflant, on et moins étonné du petit nombre de ceux qui parviennent à mériter ce titre. On doit fur-tout compter parmi ces obftacles les faveurs exceflives de Ja fortune , & fon exceflive médiocrité. Les unes, en accélérant le progrès des pañlions , nuifent à celui des idées ; elles apprennent plutôt à fentir qu'à penfer; elles offrent aux fens le preftige du plaifir, & l'ame féduite n'ofe plus fe livrer à la réflexion ni au travail: l’autre arrête la marche de lefprit ; elle en defsèche le germe, enle privant des fucs fans lefquels il ne peut ni s’accroître, ni fe fortifier ; elle étouffe ces heureufes difpofi- tions que les hommes reçoivent plus fouvent qu'ils n'en profitent. Tel au- roit été le fort de M. Navier, fans le fecours d’un de fes oncles, Chanoine à Châlons-fur-Marne. Ce parent généreux forma Le deflein de l’arracher à lobfcurité; & il deftina à la dépenfe de fes études, un revenu qui neft pas toujours employé d’une manière aufli recommandable, Après avoir achevé fes humanités dans le Collége de Chälons-fur- Marne , M. Navier fut envoyé par fon oncle à Paris, où il étudia en Philofophie au Collése d'Harcourt. La Médecine ayant enfuite fixé fon choix, il fuivit les leçons des Profelfeurs les plus diftingués de la Capi- tale; & le titre de Doéteur lui fut conféré en 1741 à Reims , d'où il partit pour fe rendre à Châlons fur-Marne , où il fe fixa. Les hommes qui n'ont été que célèbres , peuvent être loués par-tout avec un fuccès égal ; quelquefois même, plusle Panégyrifte eft éloigné de leurs foyers, plus il eft libre fur le choix des couleurs, & plus fon difcours peut caufer de furprife : mais l'éloge des hommes dont la bienfaifance a formé Le caractère , a befoin, pour produire fon effet , d'é- tre prononcé dans le lieu même où ils ont vécu , & en préfence de ceux qui ont été témoins de leurs actions. Il eft alors mcins difficile d'être éloquenr : c'eft au cœur, & non à l’efprit, qu'il faut parler ; lun eft bien plus indulgznt que l'autre. Le premier s’élance en quelque forte au devant de l'Orateur ; le fecond attend qu’on le frappe , & fe refufe à rout ce qui ne l’ébranle pas avec la plus grande force. L’un femble offir fes applaudiffemens ; il faut les arracher à l’autre. Enfin , le cœur aime qu'on Le touche; il fe plaît à être perfuadé : lefprit au. contraire fe laiffe difficilement convaincre; &, rival de celui qui cherche à le captiver , il ne fe dérermine qu'avec la plus grande réferve à en fuivre les imprellions. Combien il feroit donc à fouhaiter pour moi d’avoir à lire cer éloge de 1. Navier au milieu de fes Concitoyens ! Remplis du fujet dont jaurois . à les entretenir, ils ne s’appercevroïent pas. des fautes que je pourrois commettre en leur parlant d’un homme dont la: mémoire leur eft fi chère. cu SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. $ Ceux qui n'ont communiqué les détails de fa vie, ont principalement infifté fur Le plaiäir qu'il avoit à faire le bien, « N'oubliez pas, m'ont- » ils écrit, que , pendant une pratique heureufe de trente années , il a » mille fois expolé fa vie dans le traitement des maladies populaires ; » dites que fon Ouvrage chéri étoit fon Traité des contre-poifons , parce » qu'il le regardoit comme devant être d'une utilité générale ». Fidèle interprète de leurs fentimens, j'ai commencé cet éloge, en faifant con- noître les vœux & les regrets de fa Patrie, Si l'homme bienfaifant a des droits à la reconnoiflance de tous les hommes , celui qui en écrit l’hiftoire n'en a-t-il pas aufli quelques-uns à leur indulgence ? M. Navier fe livra, pendant fon féjour à Paris , à l'étude de la Chy- mie & de l’Anatomie. MM. Geoffroy , Hellot & Boulduc , lui apprirent les élémens de la première de ces deux Sciences , dont il s’eft occupé depuis avec tant de fuccès. Ils lui enfeignèrenc non-feulemet l’art difficile de bien obferver , mais on pourroit dire l’art encore plus diffwile de faire des découvertes. Il prit dans leurs lecons & dans leur entretien cet ef- prit d'invention, qui,-s’écartant de la route déjà tracée , fait s’en frayer à propos une nouvelle, Le célèbre M. Fexrein ladmit aufli dans fon amphithéâtre, & lui infpira le goût le plus vif pour l'Anatomie. Ce dernier genre de travail lui fufcita une querelle littéraire , dont il s'eft trop occupé pour fon repos, Le périroine , fur les infertions & les dupli- catures duquel les opinions ont fi long temps été partagées , en fur le fujet. M. Navier avoit avancé, dans une lettre publiée en 1751, que cette expanfion enveloppe immédiatement les inteltins. Un Médecin critiqua très amèrement cette aflertion ; & à plufeurs argumens ; dont la réfuta- tion étoit facile, il ajouta. les inculpations les plus graves: il ne craignir pas même de difcuter la conduite de M. Navier vis-à-vis de fes malades ; & il laccufa d’avoir commis des fautes, qui , ne relevant d’aucun autre tribunal que de celui de la confcience intime , & ne pouvant être citées devant aucun Juge, ne donnent par conféquent aucune prife au dénon- ciateur. M. Navier donna à cet écrit plus d'attention qu'il n'en méritoit; &c il «prouva , en y répondant longuement (1), & peut-être avec trop de cha- leur , qu'il y avoit été très-fenfible. Nous aurions nous-même contribué , par notre filence , à laiffer cette Réplique dans l'oubli, fielle n’avoit pas été, pour le Savant que nous reorettons, la fource d'un chagrin de plu- fieurs années. La voix de la poftérité peut-elle d’ailleurs fe faire trop tôc entendre contre ces tyrans de l'opinion publique , qui, ne s’élevant que … (Réplique à la critique ou Libelle de M. ,..,, imprimé en 1752 à Paris, x vols in-12. 6 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fur des ruines, & ne refpectant rien dans leurs rivaux , wont fouvene d'autre avantage que d'être les feuls qui ofent employer de pareïlles ar- mes ? Ceux qui travaillentavec courage à l'édifice des Sciences, peuvent- ils doncignorer qu'il y aune claffe d'hommes uniquement occupés à dé- truire, qui mettent toute leur gloire à troubler celle des autres, toute leur jouiffance à les affliger, toute leur adrefle à les diftraire ; dont on eft für de triompher , en n'engageant point le combat, & avec lefquels route autre victoire compromettroit celui qui ne craindroit pas de fouiller fes mains en cueillant de femblables lauriers ? ! Une obfervation fur une dilatation des gros inreftins, communiquée en 1750 äl’Açadémie Royale des Sciences, des réflexions fur la caufe du ramolliffement des os (1), publiées en 1751, font de nouvelles preuves des progrès de M. Navier dans l'étude de l'Anatomie. : Cette Science, aux travaux de laquelle les préjugés ont toujours ap- porté tant d'obftacles , ne peut fur-tout être cultivée avec fruit dans les Provinces; il faut prefque y commettre un crime; il faut y affronter l’o- pinion publique, pour s’en procurer les moyens. Le pauvre, au-delà du malheur de fuccomber dans les Hôpitaux, voit.encore celui d'y être livré, après fa mort, au fcalpel de l'Anatomifte , & ce n'eft pas cette frayeur dont il'eft le moins occupé, Le riche met une partie de fon luxe à défen- dre , autant qu'il eft en lui , fes dépouilles du râvage du temps; & il croit faire beaucoup , lorfqu'en employant toutes les reffources de Fart , il fufpend , pour quelques momens , une décompofition néceffaire à la reproduction des êtres. Aînfi, l'homme , couvert pendant {a vie du man- teau de la feinte ; enveloppé après fa mort dans la nuit du tombeau, où il et défendu de pénétrer, femble être voué pour toujours à s’ignorer lui- mème ; & l’Anatomie, dont on célèbre tant l'utilité, fans en favorifer les découvertes, paroît être condamnée à ne faire des progrès qu'au mi- lieu des grandes Villes , où les abus étant plus multipliés, il eft plus fa- cile de fe dérober aux loix qui s’oppofent à fon avancement. Combien de fois M. Navier a fait des vœux inutiles , pour qu'il lui füt permis de fuivre à Chälons-fur-Marne ce genre de travaux ! L'impoflbilité de sy livrer , l’engagea à parcourir une autre carrière, dans laquelle il a bien mérité de fa Patrie. ) Indépendamment des caufes qui affectent la fanté de chaque individu ; il y en a de générales , dont l'influence s'étend fur tous les Habitans d'une contrée , où elles multiplient des maladies du même genre , dont la fource eft fouvent cachée, le caractère douteux & le traitement incer- tin. Celui qui fe propofe de donner des foins utiles dans ces circonf- oo, (x) Obfervations théoriques & pratiques fur le ramolliffement des os en général, & en particulier fur celui qui à été obfervé fur la dame Supiot, 1755, à Paris, in-12. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 7 tances fâcheufes , doit joindre l'inftruétion à la prudence & à la fermeté, Ce n'eft pas affez qu'il pofsède les connoiffances que requiert la pratique ordinaire de notre art; il faut qu'il foit en état 7 rechercher dans les ualités de l'air & des eaux, dans la nature des alimens, dans la fituation }s climat , dans l'examen fcrupuleux de tout ce qui a précédé l'origine du mal dont il veut arrêter les progrès : il faut qu'il remonte à fa pre- mière invafñon, qu'il en fuive la marche, qu'il en découvre les commu- nications , qu’il mette des bornes à la contagion, ne en a déterminé l'exiftence ; qu’il s'élève en quelque forte au-deffus de la condition hu- maine , au fecours de laquelle il vole; & qu'après avoir oublié tous Les dangers qui l'entourent , il raflure , il confole , il porte partout le calme , en même temps qu'il rétablit la faniré. | Tela été M. Navier, tant que fes forces lui ont permis de parcourir les campagnes, dont les Habitans avoient recours à fes lumières : tel on l'a vu en 1748 , au Mefnil près des Vertus, & à Herpon près de Sainte- Menehould ; en 1754à Nuifemont (1), en 1757 à Snipes & aux Grandes- Loges, en 1772 à Grauve (2), en 1773 à Barbonne (3), oùil a traité, de la manière Ja plus heureufe , un grand nombre de malades attaqués de différentes épidémies (4). Les divers cantons de la Champagne, frap- és de ces fléaux , ont été, pendant plus de trente années, témoins de fes fuccès. Il n’y a régné aucune maladie fâcheufe , contre laquelle ce Mé- decin n’ait fignalé fon zèle: Il n’a deliré, pour toute faveur , qu’un Brevet honorable, dans lequel le Roi l’a décoré du titre d’/nfpeëteur pour Les Epidémes de la Province ($): c'eftà-dire , que Sa Majefté lui a donné, pour prix de fes peines, le droit honorable de courir de nouveaux dan gers , en rendant de nouveaux fervices. Accoutumé à multiplier fes bienfaits , & à les répandre dans une claffe de Citoyens , dont la plupart ne pouvoient lui offrir que leur fenfi- bilité, M. Navier n’avoit jamais fongé à les faire valoir auprès de l’Admi- fiftration. Quelques gratifications lui fournirent un encouragement dans fes travaux ; mais elles ne lui enlevèrent pas la douce fatisfaétion de {1) La même maladie régna à Ecurie, à quelques lieues de Châlons. {21 Près d'Fpernai. (3) Près de Sézanne. (4 En177s, il a foigné les malades attaqués d’une épidémie très-grave à Snipes. De plus il a dirigé le traitement des maladies qui ont régné en 1758 , en Janvier, à Orvillers ; en 1773, en Avril, à la Lobbe; & en Août, à Gifancourt , près de Sainte-Menchould ; en 177$ , en Janvier, à Ville-en-Lardenois; en Mai, à Smide, près de Réthei; & en Juillet, à Langres ; en 1776 ,en Mai & Juin , à Chemizé, prés de Vaucouleurs , & à Banogne, ainfi qu'à Recouvrance , près de Réthel. (s) Ce Brevet de Médecin du Roi pour les maladies épidémiques de la Champagne; a été expédié le 20 Décembre 1774, &.regiltré au Grele de la Subdélégarion le 10 Février 177$. 8 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, croire que l’Etat lui devoir plufeurs de ces fervices pour lefquels on re- çoit ordinairement peu de récompenfes , fans doute parce qu'il eft im- poñlible d’en donner aflez, & parce qu'on laifle à la reconnoiffance pu- blique le foin de les acquitter dignement. M. Navier tenoit un regiftre exact de fes obfervations , & ce cahier renfermoit l'hiftoire de toutes les épidémies , au traitement defquelles il avoit été employé dans la Généralité de Champagne. Il en a extrait des réflexions fur une dyffenterie épidémique , fur la pétite-vérole , la rou- geole , la fièvre pourprée & la coqueluche , qui ont été imprimées en 1753; & fur la maladie terrible qui a enlevé tant de bétail depuis 1744 jufqu'en 1745. Sa droiture & fon amour pour la vérité étoient connus & refpectés dans toute fa Province. MM. de Beaupré, de Saint-Conteft & Rouillé d'Orfeuil, qui fe font fuccédés dans lIntendance de la Champagne , lui ont donné les mêmes marques de confiance. Jamais il n’a follicité des fecours que pour des maux réels; mais aufli il n’en a jamais vu de tels, fans en demander & fans en obtenir. Aucun Adminiftrateur n’au- roit ofé rejetter fa prière ; c’auroit été refufer le père du Peuple; & quelle que foit la dureté des hommes, la voix d’un père qui demande pour fes enfans , trouve toujours quelqu'un qui l'écoute. Soit que M, Navier parcourût les campagnes , foit qu'il exerçat la Mé- decine à Châlons-fur-Marne , l’eftime publique le fuivoit par-tout , & certe eftime appartenoit autant à fa perfonne qu'à fes talens, Ce n'étoit point un de ces hommes dans lefquels on trouve un Médecin, fans y rencontrer un ami; que l'on ne confulte, comme loracle , qu'en tremblant, & aux confeils defquels on obéit plutôt qu'on n'y défère. Il étoit doux , affable ; jamais il n’a porté l’effroi dans uue ame déjà troublée par la maladie : il favoit fur-tout infpirer cette confiance que l’on peut regarder comme un des plus grands bienfaits de la Médecine , puifqu’elle peut, dans tous les cas, donner quelqu'efpérance aux malades les plus affoiblis, & que c'eft apporter unfoulagement réel à leurs maux , que de leux en faireen- trevoir La poffibilité. Une diflertation fur les affections fcorbutiques , qui a été publiée en 1753, des réflexions fur les remèdes propres à fondre les pierres uri- naires (1), des recherches fur quelques vertus particulières du baume de Copahu (2) , & fur les effets de la teinture de pavots rouges (3) (1) Differtation fur les Lithontripriques, communiquée à l'Académie de Chälons en 1754 (2) Gazette de Médecine, n°.25, Avril 1762. Il publia auffi, dans la même année, des remarques qui prouvent combien il eft utile , dans le traitement des maladies, de connoître l’aétion du petit-lait fur les fels de Seignette & végétal. 1bd., n°. 31, in- 82. 1761. (3) Mémoire concernant l'effet fingulier de la teinture de pavots rouges fur le corps donnée S UR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 9 donnée intérieurement , font autant d'Ouvrages utiles , dus aux obferva- tions que M. Navier avoit faites en pratiquant la Médecine, Attentif à tout ce qui pouvait intérefler Ja fanté, il veilloit fur les fautes que l’on commet fi fouvent & avec fi peu de fcrupule dans le régime. Comme il defiroit que fes confeils fuflent fuivis, il fe gardoit bien d’être trop exigeant: il favoit que les loix trop rigoureufes font raremenc exécutées, lorfqu'elles font d’un ufage journalier, & qu'en modifiant fes habitudes , l'homme fait tout ce que Pon doit en attendre. D'après ces principes, M. Navier ne groflit point le nombre de ceux qui ont écrit de longues & inutiles differtations contre l'ufage du rabac ; mais il indiqua les moyens de le préparer d’une manière capable d'en prévenir les fi- cheux effets, fans diminuer fon agrément (1). Le cacao & le chocolat furent auñfi le fujet d'un Ouvrage dans lequel il rafflembla tout ce qui eft relatif à l'emploi de ces fubitances. Par-tout il a fait de louables efforts pour concilier la fanté de ceux dont il avoit la confiance, avec leurs goûts & leurs plailirs : il s’eft toujours fouvenu qu'il trairoit avec fes fem- blables ; il n'a pas oublié qu'il n'en eft pas d'un Médecin qui donne aux gens du monde des avis fur leur régime , comme de celui qui foi- gne un malade, Le premier ne peut être écouté qu'en prefcrivant une conduite facile , & en préfentant fucceflivement les différents points de la réforme qu’il projette ; le fecond doit être plus févère : on lui feroit même un crime de fa complaifance. Sans ces précautions, on multiplie des con- feils qui ne font pas fuivis, & on manque fon but, faute de sêtre ap- pliqué à connoître les hommes , avant d’avoir fongé à les guérir. Énvironné de fubftances capables de porter le trouble dans fes organes, privé, ou au moins dépourvu , dans l'état actuel, de linftinét qui con duit la brute, & poflédant l'art funefte de déguifer les poifons , l'homme eft continuellement expofé à leur atteinte, Ce:re Science , qui apprend à, diftinguer les végétatix vénéneux d'avec ceux qui font bienfaifants & alimentaires , eft une arme de plus qu'il a tournée contre lui-même ; & comme il y a plus à fe défier de la méchanceté de fes femblables que de fes propres méprifes , ilferoit peut-être à fouhaiter que, moins éclairé fur la nature des dangers qu'il court , il n’eût rien à craindre que de fon ignorance. Une : ces plantes que lon n’ofe nommer, & que l'on humain, &c., préfenté à l'Académie des Sciences en 1757, & imprimé dans le Journal de Médecine, tome VIL,. page 333. Cette teinturc avoit coloré les parois des inteftins tellement , qu’on avoit mal-à-p:opos regardé ces taches comme l'effet d’un poifon. Cette obfervation & tant d'autres prouvent que l’on doit être bien réfervé dans les jugements que l’on porte fur ces [ortes de matières. (x) Obfervations fur les bons & [es mauvais effets du tabac, & fur les moyens de lui donner une qualité bienfaifante & agréable. (Gazerre de Médecine, n°.5, Juillet 1762.) Tome XXII, Part, 1, 17983. JANVIER. PB 19 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, n'auroit jamais dû faire connoître au Peuple, de lefpèce de celles qui fubitituent un délire furieux à la raifon la plus faine, & qui , après avoir agité Le corps par des convulfions violentes, le laiffent dans un affaiflement mortel, avoit été mangée en falade par plufieurs perfonnes qui étoient dans l’état le plus fâcheux , lorfque M. Navier fut appellé : il leur fit prendre des acides, & il excita le vomiffement avec l’oxymel {cillitique, dont il confeilla l'ufage dans le Journal de Médecine (1) , lorfqwen pareil cas l’eftomac a befoin d’être évacué. Qüelques précautions que l’on prenne contre les ravages des poi- fons , les fecours les mieux adminiftrés font prefque toujours moins fürs que les coups de l'ennemi dont on cherche à triompher. S'il étoit poñlible d’eflayer leurs effets fur quelques-uns de ceux qui ont la cruauté de les répandre , & de les foumerttre enfuite aux divers traite- ments, parmi lefquels il eft important de choifir le meilleur , on acquer- roit fans doute des inftructions très-précieufes. Le. Citoyen barbare qui auroit ofé former le projet de tuer fes frères, feroit rappellé à fon premier devoir par l'expérience dans laquelle il leur deviendroit utile ; fa vie feroie moins expofée que celle de fes malheureufes victimes, puifque, connoife fant la nature du poifon qu'il auroit pris, on y apporteroit plus facile- ment un remède convenable, & il feroit le genre de réparation le plus digne de l'humanité offenfée, puifqu'il feroit en même temps Le plus doux pour le coupable , & le plus profitable pour elle. Cette obfervation n’étoit que le prélude des travaux que M. Navier projettoit fur les contre-poifons, Sans cefle ce des dangers qui afié- gent l’homme, il lui a fait connoître tous lesrifques qu’il court, foit en fe nourriffant avec des fubftances que la moïndre négligence de la part de celui qui les affaifonne, ou la nature des vaifleaux dans lefquels on les prépare, rendent fufpe@s , foit en ufant de boiflons que la cupidité a dénaturées. Le lait, le plûs doux des aliments, deviènt lui-même véné- neux , lorfqu'il a féjourné long-temps dans des vafes de cuivre. L'âge le plus tendre n'eft point exempt de ces craintes. La nourriture liquide que l'on emploie à certe époque , peur s’altérer aflez dans des poëions de même métal , pour donner aux enfans des douleurs de coliques, dont on attribue fouvent la caufe à des circonftances très-éloignées. Les couvertes de ver- nis coloré, faites avec la chaux de plomb, dont les cafferoles de terre font enduites , nuifent à la fanté du pauvre , qui fe fert de ces vafes fimples pour apprèter des mets grofliers. Par-tout la vie eft aux prifes avec la mort; vérité terrible, que nous n’aurions ofé prononcer, fi l'Ouvrage dans lequel M. Navier en a donné le développement , n'indiquoit pas des . G)Tome IV, page 113. Il préfère, dans ces cas , les émétiques-végétaux aux an- ämoniaux. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 11 moyens faciles & certains pour prévenir ces différens abus, qu'une police fage & éclairée a déjà éloignés en partie de la Capitale. Mais ce qui jerroit dans fon ame douce & bienfaifante de l'amertume & de l'effroi, c’écoit le tableau des malheurs occafonnés par les poifons: c'éroit cette fuite d’horreurs dont nos hiftoires font remplies, & qui ne fe renouvellent que trop fouvent; c'étoit cette fcélératefle réfléchie , habile à cendre des piéges, qu'on ne peut ni éviter, ni connoître , qui préfente en careflant un breuvage funefte, qui , fachant infecter les fources les plus pures de notre exiftence, & cacher les femences de la mort fous les apparences, même de la vie, prend encore des mefures pour faire foup- çonner des mains innocentes. Cet attentat tient le premier rang parmi les crimes , comme l'hypocrifie parmi les vices; il ne fuppofe pas même dans celui qui le commet , la hardie/fe d'en paroître l’auteur ; il exclut jufqu’à cette audace , qui, en rendant l'affaflin intrépide, lui donne au moins une forte de courage, & il femble être le propre de l'ame la plus méchante, la plus perfide & la plus abjecte, Affligé par ces réflexions humiliantes pour l'humanité, M. Navier avoit rélolu de lutter, autant qu'il ferait en lui, non contre ces trames qu'il ne lui étoit pas poñible d'empêcher , mais contre leurs effets, en cherchant dans la Chymie des remèdes capa- bles de s’oppofer à leurs ravages. Tranfportons-nous au moment où il conçut le plan de fes recherches ; confdérons-le lorfqu'il en commença l'exécution: nous le verrons , éloi- gné de la Capitale & des troubles qui l’agitent, ifolé parmi fes Conci- toyens, parce qu'il ne trouvoit qu'en lui-même les reflources néceflaires pour diriger & varier des expériences aufñli délicates, concentré tout en- tier dans fon projet, interrogeant la Nature avec cetteinquiétude que don- nent le defir de la jouiffance & l'incertitude du fuccès. Déjà il eft entouré des poifons les plus pénétrantsw&e les plus corrofifs; il frémir à l’afpect de ces: fléaux réunis dans un petit efpace ; il contemple avec indignation ces armes terribles de la trahifon & de la perfidie. Nouvel enchanteur, il va chercher à en fufpendre l'activité; il les analyfe ; il les mêle avec d’autres agents. . ... Mais quelle douleur le pénètre au milieu de fes travaux! ...., 11 s'apperçoit qu'il eit plus facile d'exalter que d'af- #oiblir Pénergie de ces fubitances, & qu'il en coûte moins de peine & de oins pour détruire que pour réparer. Rien au refte ne peut arrêter fon zèle, chaque jour voit recommencer de nouvelles tentatives. Au milieu des difficultés qui retardent fa marché, un rayon d'efpoir vient l'encou- rager ; il emploie le fecours des doubles affinités chymiques. Enfin, il parvient à dénaturer les poifons ; illes décompofe ; illes change en des fubftances moins malfaifantes. . ... Qui pourra peindre toute l'étendue &c la pureté du plaifir qu'il reffent? Son cœur , jufqu'’alors ferré , fe dilate ; il eft heureux , parce qu’il a fu fe rendre utile à fes femblables; il s'emprefle de leur offrir l'Ouvrage qu'il leur deftinoit depuis long-temps; il publie Tom XXII, Part, 1783. JANVIER. B 2 12 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fes découvertes, mais il le fait fans fafte & fans oftentation; fon langage eft celui de la modeftie & de la vérité, comme fon travail a été celui de Ja bienfaifance & de la vertu (1). Tel eft le fpeétacle que M. Navier a préfenté, pendant plufieurs années, à un petit nombre d'amis : il a je ne fais quoi de doux & de confolant pour les ames affligées par la préfence des crimes dont nos grarides Villes font remplies ; & plus l’Auteur s’eft efforcé de le dérober aux regards du Public, plus je l'ai cru digne de fa reconnoiffance & de fa fenfibilité. Ily a deux marières de remédier aux effets des poifons chymiques ou corrofifs : la première , qui eft générale, & qui confifte dans l'ufage des déläyants (2), des adouciflants & des évacuants, a été fouvent utile ; elle eft propre à calmer les fymptômes de l’irritation : mais elle n’attaque point la caufe , & elle annonce l'imperfection de l'art, qui ne peut l’offrir que comme un foible fecours. La feconde méthode confifte dans l'emploi de différents remèdes, dont utilité eft immédiate. En portant leur ation fur des fubftances vé- péneufés même , ils peuvent changer leur nature, & leur enlever la pra- priété corrofive & rongeante. Cette claffe de moyens exiftoit à peine avant M. Navier; il l'a créée en quelque forte par fes expériences & par fes re- cherches. C’eft à une pratique fage à en appréciei les avantages, à en perfectionner les moyens, & à en déterminer les applications. La qualité malfaifante de plufieurs minéraux ne dépend que de la com- binaifon de leurs principes , qu'il fufft de défunir pour en prévenir les fâcheux effets. Quelquefois un de ces principes féparés eft encore den- gereux; il faut alors le faire entrer dans une combinaifon nouvelle , qui foit incapable de nuire à la fanté. Enfin, fi les principes unis ou défunis ne deviennent malfaifants qu'à raifon de leur folubilité dans les humeurs animales, il eft indifpenfable de s’oppofemà ce mélange. En partant de ces notions , & après s'être afluré de la nature des diffé- rentes fubftances vénéneufes , M. Navier les a traitées avec des agents ca- pables de les priver de leur acrimonie, & il a pris les mefures néceffaires our donner intérieurement, fans danger , & avec le moins de dégoût poffible, les fubftances propres à opérer ces décompofitions. L’arfenic, le fublimé corrofif, le vert-de-gris & les préparations de plomb, font les poifons chymiques qui fe préfentent le plus fouvent à (1) Contre-poifons de l’arfenic , du fublimé cotrofif, du vert-de-oris & du plomb, faivis de trois Diflertations , &c. ; par Pierre-Touflaint Navier, &c.2 vol. in-12. À Paris, 1778. (2) Les molécules délétères , étendues dans use grande quantité de fluide, ou en- veloppées d’un mucilage, perdent néceflairement une partie de leur aétivité. Lorfqu’il eft pofhble de les évacuer ou de les dénaturer ,on diminue le mal encore plus füre- rent. X Ü SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 13 l'homme. Le premier peut fe combiner par la voie humide avec le fou- fre, avec les alkalis & les matières calcaires. Lorfqu'on verfe du foie de foufre en liqueur fur une diffolution d’arfenic faite par l'eau , il fe forme une'efpèce d'orpin beaucoup moins nuifble, parce qu’il eft plus furcharge de foufre que le réalgar ordinaire, avec lequel M. Navier ne Fa point confondu: [l a principalement inffté fur les inconvénients de ce dernier, en parlant des maux auxquels les Peintres s’expofent , lorfqu'ils portent imprudemment à leur bouche des pinceaux chargés de couleur jaune à l’orpiment. La grande affñinité du fer avec l’arfenic, a donné à M. Navier un autre moyen de s'en emparer. En mêlant du foie de foufre martial avec ce dernier diflous dans l’eau, celui-ci fe précipite , & il fe joint aw foufre & au fer (1). « Les différents foies de foufre agiflent aufli fur le fublimé corroff; ils forment , en le décompofant ,‘un fel neutre non cauftique, par la com- binaifon de l'acide avec l’alkali, tandis que Le foufre fe dégage & s'unit au mércure, a partie métallique du vert-de- gris , précipitée par les alkalis fous la forme de chaux , ou difloute par eux, peut pénétrer dans les vaiffeaux , & feméler aux humeurs. Le foie de foufre martial, en dégageant le cui- vre quüi s’unit au foufre, s’oppofe à cette intreduétion , qui pourroit avoir des fuites fâcheufes: Un baume, préparé avec l'huile d'olive & une petite dofe de foufre & de favon, remplit les mêmes vues, & convient fur- tout pour précipiter le {el cuivreux diffous dans les graifles ; & pris inté- rieurement: avec des aliments (2). Enfin, ces mêmes remèdes, donnés à plus petite dofe , & plus long-temps , pourroient ; fuivant M. Navier, être fubftitués à l’ufage de ceux que l'on emploie dans IË traitement des coliques de plomb. | Les principes que nous venons d’expofer font la bafe des confeils qu'il a donnés, & du plan de conduite qu'il a tracé pour combattre chaque forte de poifon. . ‘Le Médecin eft alors appellé dans deux cas très-différents l’un de Pautre , foit dans le moment même où le poifon vient d'être pris, foic quelque temps après qu'il a été avalé. Lesefecours que M. Navier a (1) ILeft faux que Parfenic coagule le lait, dans lequel il elt très-foluble. Le foie de foufre martial en précipite les molécules, lors même qu'elles font fufpendues dans ce fluide. Le lait eft; donc préférable aux huiles , qui ne diffolvent point ce minér2!. Une, eau légèrement alkaline une diffolurion de fer dans du vinaigre, où même de l’en- cre très-délayée , fi lon manque d’autres {cours | peuvent encore lui donner des entraves sitiles. Enfin, l’ufage des, eaux minérales fifareufss eit très-propre à terminer la cure, & à diffiper les accidents qui font les plus opiniâtres. (2) Quelques boiffons acidules , en diffolvant complètement ce fl, le difpofent à êxe plus. facilement décompolé par le foie de foufre. 14 OBSERPATIO NS SUR LA PHYSIQUE, propofés, font principalement utiles dans le premier cas (1). Dans le iecond , ily a deux indications à remplir: la première, qui eft fournie par Les érolions & les douleurs, exige les adouciffants & les délayants dont M. Navier a prouvé que l'on ne devoir point ufer indiftinétement. I a confeilléle lait pour remédier aux cffèts de l’arfenic qu'il diffout ; l'eau pure, bue abondamment , pour diminuer ceux du fublimé - corroff; & la décoétion de.graine*de lin très-lésèrement alkalifée, lorfque l'empoi- fonnement a été fait par Le vert-de-oris. La feconde indication, lorfque les premiers accidents font calmés , tend à changer la nature du poifon, foit que fes molécules aient pénétré dans les vaifleaux ; foit qu'il en refte encore quelques-unes dans les inteftins. Les différents foies de foufre & le baume favonneux , donnés à petite dofe, & combinés avec les remèdes généraux , produifent ce double avantage, puifqu’en fe: mêlant facile- ment avec les humeurs, ils peuvent agir même fur les portions de la fubftancé vénéneufe , abforbées par les extrémités des veines fanguines & Iympha- tiques, Ils doivent donc être regardés comme aliérants ; &, confidérés fous cet afpett, ils auront quelquefois un avantage: marqué fur les fudo- tifiques & fur les remèdes fpiritueux & éthérés, que des Médecins très- eélèbres ont employés avec fuccès : ils fourniffent au moins un fecours de lus dans ces circonftances malheureufes. Le Il éroit jufte qu'un travail enttepris pour le Public lui füt offert. Le Gouvernement en fentit l'utilité, & M: Navier eut la fatisfaétion de voir fon Ouvrage extrait par deux de fes fils (2) , répandu dans les Provinces qui n’ont jamais reçu un préfent plus digne de la bienfaifance du Prince ; des lumières du fècle , & de la reconnoiflance de la Nation. Lorfque M. Navier fic paroitre fon Traité des contre - poifons , il étoit déjà connu comme Chymifte, & l'Académie Royale des Sciences l’avoit infcrit au nombre de fes Correfpondants. Il avoit préfenté à cette Compa- gnie , en 1741 (3), un procédé pour la préparation d’une efpèce d’é- ther jufqu’alors inconnue , qu’il obtint en mêlant & en agitant de l'efprit- de-vin avec de l'acide nitreux. Cette découverte , qui eft confignée dans tous les livres de Chymie , auroit feule tranfmis fon nom à la poftérité, quand même cette Science ne lui auroit pas eu d’autres obligations. Un fait nou- (1) Une portion della matière vénéneufe féjournant encore dans l’eftomac,, ilslagirone far elle d’une manière plus fire -& moins dangereufe pour les organes. ; (2) Précis des moyens'de fecourir les perfonnes:empoifonnées par les poilons cor- rofifs , extrait de l'Ouvrage des contre-poifons, &c.; par MM. Navier fils ; &c.rde lmprimerie Royale, $ 5 ‘pages: { ) (3) Mémoire contenant la découverte de lécher nitreux ; préfenté à l'Académie Royale des Sciences en 1741. ñ Nouvelles obférvations fur l’éther nitreux , provenant de différentes {olutions mé talliques nixeufes , &c, , communiquées à l’Académie des Sciences ‘en 1771, 4 253 à SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 15 veau eftun pas de plus vers la vérité; & cette route, qui conduit à une célébrité durable, éroit la feule qui für digne des vœux du Savant que nous avons perdu. Jamais il n'a fatigué la voix de la renommée , qui fait quelquefois fuccéder un filence éternel à des faveurs d’un moment. Ce Médecin a plutôt éprouvé un fort contraire. Long-temps ignoré, il n’a- voir ni-rivaux, ni admirateurs. Ses recherches ayant enfin fifé l’atren- tion du Public , on accorda, fans prévention comme fans enthoufiafme, des applaudiffèments à fes travaux ; mais fa réputation ne fut jamais égale à fes talents , parce qu'il s’éroic repofé fur les autres du foin de les faire comnoître , & qu'il ne favoit peut-être pas lui-même ce qu'ils va- lojenth lies . M:Navier ne $eft pas contenté d’avoir obtenu une nouvelle efpèce d'éther, Ayant employé dans cette préparation différentes, folutions mé- talliques-nitreufes , il a obfervé que plufeurs de ces fubitances lui reftoiene unies, & il a indiqué celles qui fe font refufées à cette combinaifon (x). Ces expériences ont été jugées très-favorablement par l'Académie Royale des Sciences. : Elle à rendu la même juftice à deux Mémoires du même Auteur , fur différents moyens de difloudre le mercure par l’acide végétal & par uelques fels neutres, & fur une nouvelle méthode de le rendre foluble de: l'eau , fans le fecours d'aucune efpèce d'acide , avec des réAexions fur les avantages que la Médecine peut retirer de ces préparations (2). Ayant mis en ufage la méthode indiquée par Homberg , & pratiquée par Boërrhaave, pour réduire le mercure en une poudre fine par le feul fecours du mouvement long-temps continué (3), M. Navier eft parvenu à le rendre foluble dans l’agide végétal (4). Le {el ammoniac & le fel acé- teux mercuriel , dont il a publié les procédés , font fur-tout très-utiles (1) Ces recherches l’ont conduit à la préparation d’un éther d’or, analogue aux gouttes du Général La Motte, En mélant une diffolution nitreufe mercurielle avec Pef- prit-de-vin , il fe forme des cryftaux foyeux , comme ceux ‘qui réfultent de Punion de l'acide végétal avec le mercure. L’acide niticux elt alors tellement adouci, qu'il pa- roîtlavoir changé de nature, La bafe dvec laquelle il eft uni, femble être plutôt une xerre extraite du mercure, que: le mercure lui-même. (2).En employant le mercure précipité de l’acide nitreux par: l’alkali fixe, M. Na- vier la rendu foluble dans l’acide de la crème detartre & dans celui du petie-lait; il Ta également combiné avec l’alun & le fl ammoniac, foir par la voie sèche, foir par la voie lrumide ; en le triturant avec ce dernier {el ilen réfulte une poudre grile, qui, expofée dans unimatrasiau bain de fable, fe füblime en cryftaux blancs fort légers, lefquels, fondus dans feau, y occafionrenc un froid trés-confidérable , & laiffent pré- cipiter une poudre blanche, qui , fablimée une feconde fois, forme des feuillets très- luifants, d’une grande blancheur, & auf légers que le! fel fédarif, a (3) M: Navier füfpendit ‘une bouteille prefque remplie de mercure, à lextrémiré d'un pieu qui étoir mis en mouvement par la route d’un moulin. {4) LU en réfulte un {el neigeux-mercuriel, 16 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, dans la pratique de la Médecine. L'un eft plus doux que la panacée ; l'au- tre a moins d'activité que les fels de la même nature, préparés avec les acides minéraux. Lorfque M: Navier commença ces belles expériences, leur compofñition étoit tenue fecrette par les fieurs Keyfer & Mollée, qui les vendoienr à leur profit M. Navier, en les faifant connoître, rendit un doubl@fervice ; il dévoila , par la même opération , deux des plus importants myftères de l'Empyrifme , & il offrit à la Médecine deux moyens de guérifon qui lui manquoïient, La réunion du fer & du mercure a été longtemps l’objet des vœux de plufieurs Chymiftes. M. Navier l’a obtenue par dix procédés différents (x) , qui fe réduifent à mêler enfemble une diffolution de fer & une diflolution de mercure, faices l’une & l'autre par le vinaigre ou par l'acide vitriolique. Le précipité falin , compofé de ces deux fubitances métalliques, paroît fous la forme d’une neige cryftalline brillante, & femblable, quant à l'extérieur, au fel fédatif. Une autre découverte de cet Académicien, eft la diffolution du mer- cure dans Le foie de foufre , que perfonne n'avoit tentée avant lui, & qui lui a fourni un remède fondant très-utile dans le traitement des maladies fcrophuleufes , & de plufieurs maladies cutanées, Ces expériences , expofées dans l'Ouvrage même, font accompagnées d’un grand nombre de circonftances nouvelles , d’obfervations fines, de détails intéreffants , qui annoncent dans leur Auteur ce taét & ce coup- d'œil que la Nature femble ne donner qu'à ceux auxquels elle veut bien révéler quelques-uns de fes fecrets. M. Navier n’a pas feulement voué fa vie entière à l'étude des Sciences ; il a encore eu la gloire de leur élever un monument durable , en contri- buanc, avec MM. Dupré, Delaulnei, Befchefer & Hoguelin, à l'éta- bliffement d'une Académie des Sciences & Belles-Lertres à Chälons-fur- Marne, Les noms de ces Citoyens eftimables méritent d'être confignés dans notre Hiftoire avec celui de M. Navier : ils l'ont aidé de leur zèle & de leurs lumières dans une entreprife difficile; il eft jufte qu'il foit auprès de la poftérité Le garant de leurs fervices. Ce fut en 1752 qu'il jeta Les fondements de cette Académie. Depuis cette époque jufqu'au mo- ment où la mort l’a enlevé, il en a été l’ornement ; il a vu l’émulation fe répandre dans fa Patrie , l'efprit d'obfervation y faire des progrès, — (1) Mémoires {ur la manière d’unir le mercure au fer fous une forme falino andro+ gine ; {ur les moyens de rendie le mercure foluble dans l’eau, fans le fecours d’aucun acide , lu à l'Académie des Sciences le 8 Août 1764 ; fur la manière de diffoudre le mercure par l’acide végétal, fpar l’acide même animal , préfenté à l’Académie des Sciences en r760 3 fur les moyens d'obtenir, par l'union du mercure à l'acide du vi- naigre, un fel foyeux d’une grande utilité dans le traitement de plufieuts maladies, préfenté à la même Académie en Décembre 1774. & SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 17 & la Province entière en éprouver les avantages; lui-même en a recueilli les fruits , & il a affez vécu pour jouir de fes fuccès, Nous croyons devoir rappeller iei que plufieurs Villes ont à des Mé- decins célèbres la même obligation que celle de Chälons-fur-Marne a contractée envers M. Navier. Déjà, en rendant un tribue d'éloge à la mémoire de quelques-uns des Confrères que nous avons perdus, nous les avons préfentés comme ayant , par la fondation de différentes Aca- démies , des droits à la reconnoiflance publique. Ce font en effet: autant d’afiles confacrés au culte de la vérité: en les multipliant, on efk für d'augmenter & d’affermir fon empire. S'il en eft loin des grandes Villes, dans lefquelles on ne l'interroge pas d’une ma- nière aflez preflante pour lui faire rendre fouvent a, nouveaux oxa- cles, les Habitans de ces contrées n'en font pas moins difpofés à la re- cevoir & à l’entendre : on n’y voit plus, comme autrefois, des hommes conftitués en dignité, fe glorifier de leur impéritie ; ils rougiroient de fe montrer aujourd'hui tels qu'ils étoient dans la nuit épaifle des préjugés & de l'erreur. Qu'il nous foit permis de faire des vœux pour que , nourries dans le fein des Univerfités, épurées dans celui des Académies, foute- nues par l'accord de ces deux genres d'Inftitutions fi bien faites pour feu- rir enfemble , & pour orner les différentes époques de la vie, les Scien- ces & les Lettres fubjuguent de proche en proche toute la furface du globe, pour qu'elles forcent fes Habitans à devenir meilleurs, & fur- tout pour quelles préviennent, en répandant leur douce clarté , ces grands crimes de l'ignorance & de la fuperftition, qui retiennent encore tant de Peuples dans leurs chaînes , & qui ont fait quelquefois la honte & le malheur de plufeurs fiècles. Le plus grand bien que l'on puiffe attendre des Corps Académiques répandus dans les Provinces , lorfque les circonftances ne les mettent pas à portée de fe livrer aux recherches de la Phvyfique tranfcendante , c'eft d’expofer fidellement ce que les Provinces dans lefquelles ils font établis préfentent d’intéreffant & de défectueux ; c’eft de chercher à leur procurer les reffources que la Nature leur a refufées; c’eft de remédier aux abus qui sy font introduits. D’après la leéture de plufieurs Ecrits publiés par M. Navier , & lus dans les Séances de l’Académie de Chä- lons-fur-Marne , il eft facile de voir que ce plan étoit celui qu'il avoit conçu. Il fiten 1756 des recherches chymiques fur la nature des diffé- rentes fortes de terres de la Champagne , & fur les moyens de les amélio- rer (1). Dans l'année fuivante , il communiqua l’analyfe d’une eau miné- (1) Mémoire contenant des recherches économiques fur la manière d’augmenter la produétion & la végétation des grains dans les terres arides de la Champagne, lu à l'Académie de Châlons en Juin 1756. Tome XXII, Part I, 17834 JAN VIE R, C LA 18 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, sale dela fource de Rouay (1). Enfin , on doit attribuer aux mêmes motifs fon Ouvrage fur Les dangers des exhumations précipitées , & fur les inconvéniens des inhumations dans les Eglifes, publié en 1775+ Plufeurs accidens arrivés à Châlons-fur-Marne , donnèrent lieu à ce tra- vail, M. Navier ajouta à ces exemples un précis des malheurs occalionnés par ces abus, & il répondit aux objeétions qui avoient été faites contre le projet de les réformer. Déjà un Prélat aufli refpectable qu’éloquent (2) avoit prévenu es in- quiétudes que la piété alarmée auroit pu fe permettre fur ces changemens. Déjiplufieurs Cours Souveraines avoient ordonné la profcription de ces ufa- ges. Plufieurs Auteurs eftimables avoient donné des proférs-qui concilioiene lesdifférentes opinions. On avoittraité avec tout le ménagement pofhble les prétentions même de l’orgueil & de la vanité, qui font ce qui meurt le dernier dans l’homme : on leur avoit afligné un efpace de terre tout ä- fait féparé , où leur fafte auroit aifément fuppléé au luxe des tombeaux élevés dans nos Femples. Malgré tous ces efforts & toutes ces précautions , il n’y a qu'un uès petit nombre de Villes, hors de lenceinte defquelles on ait porté les fépultures. Si jamais cette révolution fe fait d’une manière aufi complette qu'elle eft néceflaire, M. Navier devra être compté au nombre de ceux qui y auront contribué, La Faculté de Médecine de Paris avoit propofé en 1774 un Prix fur Ja nature & le traitement de la Pefte. M. Navier y concourut, & auroït même été couronné, fi cette illuftre Compagnie n'avoit pas remarqué , dans un des Mémoires envoyés, des obfervations faités par un Méde- cin habile {3), qui avoit trairé des peftiférés à Conftantinople. Ce dernier travail fut préféré, & M. Navier obtint l'Acceffir. Tant d'i-crits eftimés, une célébrité juftement acquife, ne firent point defirer à ce Médecin de paroître fur le grand Théâtre de la Capitale; & qui auroit pu lui rendre l'attachement , la déférence de fes Conciroyens , & cette confidération perfonnelle qu'il chérifloic plus que fa réputation ? Quelle jouiffance peut fuppléer à celle du cœur, pour les hommes qui ont le bonheur d’en connoître tout Le prix ? Il refta donc au milisu de fa fa- mille, & il vit s’écouler paifiblement des jours qu'une rivalité jaloufe auroit remplis d'amertume, fi l'ambition J'avoit éloigné du foyer de fes pères. Il fe contenta de former dans fa retraite deux de fes fils, qu'il def- tinoit à vivre loin de lui dans le fein de deux Ecoles célèbres ; ils jouif- fent, l’un à Paris, l’autre à Reims, de la confiance publique & de l'ef- time de leurs Confrères. mens — (1) Mémoire fur l'examen & l’analyfe de leauminérale de Rouay , fiuée à trois lieues de Reims, lu àl'Academie de Châlons en 1757. . {2) Monfeigneur l’Archevêèque de Fouloufe. {) M. Paris, Médecin à Berre , près d’Arles , Correfpondant de la Société. nm > SURL'HIST. NATURELLE ÊÉT LES ARTS. 719 . La Société , dans le moment de fa première inftitution , plaça M. Na- vier à la tête de fes Adjoints , titre qui a été changé en celui d'Affocié | pare Lettres-Patentes de 1778. Nous avons recu de lui un expofé des malädies qui ont régné depuis 1744 , avec le tableaugdes épidémies dont il a dirigé le traitement, & par conféquent celui des dangers qu'il a ‘courus, Ain. un Militaire rappelle fes fervices, en nommant les batailles où il s'eft trouvé ; l'un & l’autre méritent des hommages : nous prions feulement que l'on fe fouvienne qu'un Médecin tel que M. Navier eft le foldac de tous les jours, de toutes les circonftances , de tous les pays ; que pour lui le champ de bataille eft toujours ouvert, & qu'il combat, non les rivaux denotre gloire, mais les ennemis de notre exiftence & Les fléaux de l'humanité. À l’âge de foixante-un ans, M- Navier commença à éprouver des dou leurs dans la révion de la veñie, Cette maladie fit des progrès , & le tourmenta à différentes époques pendant l’efpace de fix années. Ses forces s’affoiblirenc, & il fuccomba à fes fouflrances Le 16 Juillert 1779, étant alors Directeur de l'Académie de Châlons - fur-Marne , & âgé de 67 ans. : Jamais on n'eut un plus grand défir d’être utile; à une qualité auf précieufe , il joignoit une modeftie fi vraie, que cet éloge, quoique forc au-deffous de fes talens, paroîtra peut-être exagéré à ceux qui ne l'auront pas connu. On pourra dire de lui ce qui ne conviendroit pas à tous les hommes célèbres, qu'il n'a jamais été plus recommandable pour! per- fonne, que pour celui” qui a été chargé d'écrire fon hiftoire. J'ai rempli un devoir facré, en faifant de foibles efforts pour rétablir dans tous fes droits la mémoire d'un Confrère ; qui n’a jamais rien follicité que par fes Ouvrages & par fes fervices. MÉMOIRE Sur la calcination de la Pierre calcaire, Et fur fa vitrification , foit feule, foit combinée avec d’autres terres ; lu à la rentrée publique du Collégé Royal de France, par M. DARCET, Doc- teur-Régent de la Faculté de Médecine de Paris, & Leëleur & Profèffeur Royal de Chymie , le 11 Novembre 1782. ARMI les diverfes fubftances qui compofent la mafle du globe ter- reftre , on remarque la pierre calcaire, Cette fubftance s’y crouve fous les Tome XXII, Part, I, 1783. JANPIER. Ga 20 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, deux formes de terre & de pierre , toujours dans un état de combinaifon , & jamais dans fa pureté & fa fimplicité primitive. Ce genre de pierre exilte dans la terre ancienne comme dans la terre nouvelle: dans celle-ci , elle forme la plupart des couches horizontales ; dans l’autre au contraire elle marche toujours par couches plus ou moins inclinées, &. fait ainfi la partie la plus importante, & l'une des plus confidérables de l'une &c de l’autre. Dans la terre nouvelle, les couches horizontales n’ont d'autre courbure que celle des terreins fur lefquels elles portent ; leurs bancs font plus ou moins interrompus par d'autres couches intermédiaires , & s’érendent fouvent depuis la furface jufqu’à des profondeurs énormes, C'eft dans ces couches horizontales que fe trouvent incruftées, & très-fouvent placées par familles , Les différentes coquilles , quelquefois fofiles, mais commu- nément pétrifiées. Dans la terre ancienne au contraire, cette pierre ainfi que les fchiftes & les granits qu'elle accompagne , monte & s'élève en formant des cou- ches plus où moins inclinées. Ces couches fe montrent dès le pied des grandes montagnes , & à leur naiffance au bord des plaines. C’eft ainf qu'elles fe trouvent partout ke long des Pyrénées, & que je les ai ob- fervées depuis dans ces montagnes , qui font les premiers échelons des Alpes du côté de la Brefle. Cette pierre fait la mafle entière de ces mon- tagnes déjà très-élevées , & ces couches inclinées s'y montrent également depuis leur bafe jufqu’a leur fommet. Cette pierrey eft plus grisâtre , plus colorée , plus dure que dans fes couches horizontales: elle renferme encore! des coquilles pétrifées ; fon grain eft plus ferré; c’eft déjà une efpèce de marbre , un marbre groflier,, qui prend toutefois un ailez beau poli. Certe pierre s'élève avec les mon- tagnes qui fe fuccèdent; prend, chemin faifant , des formes & des ca- ractères différens ; mêle enfuite fes couches avec celles des autres genres de pierres ; perd peu-à-peu les empreintes des coquilles & des madrépores ; en un mot, les traces des débris du règne maritime y deviennent infi- niment rares, ou difparoiflent toutsà-fait. À mefure qu'on s'élève davan- tage, cette pierre prend un grain plus fin, plus blanc , plus homogène, & finit par former, jufques dans le centre même de la grande chaîne , des rochers entiers de beau marbre, & même des montagnes de la plus grande élévation. La pierre calcaire eft donc très abondante dans la Nature : fes grands caractères diftin@ifs font de fe convertir en chaux vive à un grand feu; de {e difloudre dans les acides; avec une vive effervefcence & fans chaleur ferfble; de former des [els différens, fuivant fon efpèce & la nature de ces acides ; d'être même folublé dans l’eau , fur-tout dans les eaux fouter- reines, en plus grande quantité que les autres terres, & plus abondam- ment encore lorfqu’elle a paffé par le feu : on peut dire même que, de SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 21 toutes les fubitances terreufes, c’eft la pierre calcaire qui paroït le plus avide de combinaifon. Lorfque la pierre calcaire eft convertie en chaux vive, elle acquiert des propriétés très-différentes de ce qu'elle étoit auparavant: on trouve alors qu'elle a perdu prèsde la moitié de fon poids , fur-tout fi elle eft fans mé- lange de terre étrangère. De douce , d'infipide qu'elle éroit d'abord, elle a pris une faveur âcre, brülante , cauflique; elle décompofe & détruit les * fubftances végétales & animales ; elle eft très-avide d'eau, & elle s'y éteint avec un bouillonnement, une effervefcence & une chaleur telle , qu'on l'a vue allumer du bois & autres matières combuftibles. Cette cffervef- cence eft accompagnée de lumière, lorfque cette extinction fe fair en mafle & dans l’obfcurité (1) 5 il s'en élève alors des torrens de vapeurs aqueufes , & celle exhale une odeur de feu qu'on ne peut mécon- noître. A mefure que la chaux s'éteint dans l’eau , elle éclate , fe gonfle, {e brife , forme une maffe plus ou moins fluide, fans perdre grandchofe de fa caufticiré. Cette chaux ainfi éteinte , prend corps avec le fable , la brique pilée, les terres cuites, la pouzzolane, &c.; fait ce qu'on appelle le ci- ment, matière qui acquiert fouvent une dureté extréme , devient impé- nétrable à l’eau, fert à lier lesypierres dans Les bâtimens, & donne, avec le temps , à route la conftruction une dureté qui égale prefque celle des rochers. | Quelle peut être la caufe du durciffement du ciment, foit dans l’eau , foit à l'air libre ? C’eft à quoi on ne peut répondre, qu'après avoir exa- miné l’état des anciens ciments eux-mêmes. 1°. Du ciment pris & tout ré- cemment découvert dans la démolition des murs du Perir-Châreler , traité par les acides, toute las partie calcaire s'y eft diffoure avec une vive effervefcence , & l'acide en a pris les it ; le réfidu eft du fable dela ri- vière. 2°. Du ciment déraché avec peine des Bains de l'Empereur Julien, rue de la Harpe, traité de même, il s'en eft diflous aufli une grande par- tie avec une vive effervefcence, & le réfidu eft encore du fable de la ri- vière. 3°. Le ciment de l'ancien aquéduc Romain, dont les veftiges fub- ftent en dehors des murs & contre la porte taillée à Befançon , s’eft éga- lement diffous avec effrvefcence, & le réfidu eft de la brique pilée. Or, tous ces ciments anciens, & par conféquent les plus durs, mis {ur la lan. gue, y font infpides, innocens & fans caulticité. 4°, J'ai appris que des ciments faits pour effai, & qu'on a tenus fous l'eau pendant quatre ou cinq ans, y ont déjà acquis de la confiftance à l'extérieur, & y ont perdu pour ainfi dire toute la vaufticité de la chaux ; tandis que dans l’intérieur (1) MPélletier eft le premier, à ma connoiffance, qui aït obfervé cet intéreffant phénomène, Voyez le Journal de Phyfigue pour le mois de Juit 1782. 22, OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, . de la mafle, ils n’ont encore aucune fermeté , & brülent la langue comme la chaux vive. D'après rous ces faits, ne peut-on pas dire que le durciflement que les ciments acquièrent avec le remps, n'eft du qu'à l'introduétion & à la pénétration lente & fuccellive de l'air fixe dontla chaux fe fature; que cer air qui fe combine avec elle en fépare l'eau,remplic tous Les efpaces vuides qui fe trouvententre la chaux & le cailloutage ; & qu'enfin cette dureté & la force d’adhéfion qui la produit, n'eft que le réfultat de cette combinaifon & de la continuité du plein? car le fable, dans les ciments anciens , n'a fouffert aucune altération ; la chaux feule s'alrère :8&c change de nature, La chaux vive peut fe difloudre toute entière dans l’eau. Cette eau de- vient cauftique , & conferve fa cranfparence ; mais bientôt la chaux s'en fépare par le contaét de l'air extérieur, fous la forme d’une croûte faline, perd fa caufticité , reprend fon premier poids , & revient ainfi à fon état primitif, De tous les Chymiftes qui ont parlé de la terre calcaire , quelque rare mérite qu'ils aient d’ailleurs, aucun ne peut être mis à côté du célèbre Black & du fage Meyer. Ces deux hommes nous en ont bien fait con- noître la nature , la combinaifon, & les fingulières & infinies propriétés. -« La pierre calcaire, expofée long-temps à un grand feu, foit qu’on l'y traite à découvert ou dans des vaifleaux fermés ; perd , avons-nous dit, fa dureté, fa confiftance & une grande partie de fon poids; ce qui s'en volatilife eft une petite portion d’eau & une fubftance aëriforme très- élaftique ; de nature acide , foluble dans l’eau , & qui éteint la lumière & tue les animaux. Cette fubftance , qui figure en Phyfique fous tant de noms différens, fait au moins les + du poids total de la pierre , & fou- vent même près de la moitié; en forte qu'il eft vrai de dire, quelque choquant que cela paroifle au premier mot , que la moitié prefque de la mafle rotale des pyramides d'Egypte , de l'Eglife de Notre-Dame, de la Colonnade du Louvre, du Louvre même tout entier, n’eft autre chofe que de l'air. J'ai traité la pierre calcaire dans des vaifleaux rigoureufement fermés , tels que ceux que j'ai employés autrefois pour le diamant, Ces creufets , tant ceux qui font d’une pâte plus commune que ceux qui font de por- celaine, font très-cuits , & ferment avec un bouchon auf de porcelaine ufé dans le goulot. . Ces creufets étant remplis de marbre blanc, bien bouchés & même fcellés à la lampe d'Emailleur, n'empêchent pas que la terre calcaire ne s'y convertifle en chaux vive ,& qu'elle n’y perde toujours une très-grande partie, ou plutôt près de la moitié de fon poids , fans qu'ils fouffrent eux- mêmes la moindre altération. Cette calcination s'exécute conftamment , & d’une manière plus ou moins complette, fuivant que le creufet eft plus ou moins denfe, plus ou moins épais, & que le feu eft plus fort & plus foutenu. Du marbre blanc de Carrare , mis dans des vaifleaux doublement SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. ‘23 couverts fous le four d’un Faïencier, a été bien calciné, & a perdu les 7- de fon poids. l Pareïlle quantité de fpath calcaire blanc, bien choifi, a perdu les {? de fon poids. Du marbre de Carrare choifi , m8 dans un creufet de porcelaine, bou- ché avec fa cheville ufée dans le goulot, à un feu plus fort & plus fou- tenu, s’eft bien calciné , & a perdu les ee de fon poids. 26 Le même marbre , renfermé dans un creufet de porcelaine bouché & fcellé à chaud , s’eft également calciné , & a perdu Les 7 de fon poids, L Le même marbre, dans un femblable creufer fceilé à la moufle , a perdu les À de fon poids. J'ai remis de cette chaux de marbre, qui avoit déjà été expofée à l'air pendant dix-huit mois, dans un pareil creufet & avec de femblables pré- cautions ; elle a perdu fous le four d’un Faïencier les 2 de fon poids. La même chaux de marbre, enfermée dans un creufer de porcelaine bien bouché, a perdu les = de fon poids. La pierre calcaire, celle même qui a le plus de durété, & qui eft la plus pure, comme le marbre de Carrare , le fpath blanc cryfallifé, fe calcine donc , & fe convertit en chaux vive dans les vaifleaux les plus compactes & les plus exaétement fermés, ainfi que dans ceux qui le font le moins. L'eau & l'acide aëriforme qui lui font combinés , s'en féparent, & font tellement atténués & fubrilifés par la violence de la chaleur , qu'ils fe font jour à travers les pores mêmes de la porcelaine, qui devient dans cet embrafement perméable comme une éponge, & que la matière du feu pénètre de toutes parts. La chaux qui en réfulre a dès-lors routes les mêmes propriétés que celle d'une pareille pierre qu'on auroit caleinée à feu nud : elle délite à l’air libre , & reprend de latmoiphère la même fubftance élaftique aëriforme qu'elle avoit perdue. Cette chaux vive s’échauffe fortement lorfqu'on l’éreint dans Peau ; elle eft violemment cauftique, décompofe le fel ammoniac, & rend caufti- ques tous les alkalis, comme la chaux ordinaire ;enfin , elle eft foluble dans les acides avec une vive chaleur & fans effervefcence , tandis que la ierre elle-même s’y diflout avec une forte effervefcence & fans chaleur. “La chaleur qu’on obferve dans ces diffolurions n’eft donc pas un phé- nomêne du frottement des parties des corps qui fe combinent , mais bien Veffer d’une matière qui fe dégage, & qui eft mife à part dans l’inftant de la combinaifon. D'ailleurs, l’ôdeur de feu qu'exhale la chaux vive , la lumière qu'elle donne lorfqu’on l'éteint dans l'obfcuriré , la couleur qu'elle communique à Ja pierre a cautère, enfin ,, la propriété qu’elle a dé réduire les chaux & le verre de plomb , tout nous prouve , ce me femble , qu'à mefure qu’elle fe dépouille du principe aéritormé, elle reprend le principe ignée dans la calcination. | 24 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, L'acide aëriforme dont nous venons de parler , n’eft pas Le feul des acides qui abandonneda terre calcaire : l'acide vitriolique , tout puiffant qu'il eft , en eft chaffé par le feu ; & la terre calcaire , devenue libre , fe convertit également en chaux. Prenez de la félénite, de la pierregplâtre, de l’albâtre gypfeux, ou tel autre gypfe cryftallifé que vous voudrez; expofez-le à un grand feu un peu continué dans des vaifleaux bien couverts : vous le trouverez alors âcre & cauftique , &, comme la chaux, foluble avec chaleur & fans effervel- cence dans les acides ; en un mot, ce ne fera plus du gypfe , mais une vraie chaux vive, & elle en aura tous les caractères, à Il arrive même fouvent qu'a mefure que l'acide vitriolique s’en fépare , cet acide fe combine avec le phlogiftique que le torrent de la flamme lui préfente; qu'il fe forme du foufre; que ce foufre fe diffout aufli-rôt par la chaux, & fait un hépar de chaux. , La chaux vive, qui réfulte ainfi de la décompofition du gypfe, expofée à l'air libre, y délice comme la chaux ; elle reprend de l’atmofphère l’a- cide aëriforme , devient foluble avec effervefcence dans tous les acides ; en un mot , elespréfente les mêmes phénomènes que la chaux vive , & fubit les mêmes combinaifons. J'ai vu quelquefois le gypfe ainfi décompofé, & n'ayant qu'un léger commencement de fufion aux parois du creufet , y prendre un coup-d’œil verdâtre ,; comme j'ai dit que cela arrivoit à certains fpaths cryf- tallifés. On fait que le fpath phofphorique , quelle que foit fa couleur , fe fond en un verre plus ou moins tranfparent, lorfqu'on l’expofe à un grand feu. Ce fpath fouffre alors la même décompoftion ; fon acide eft chaflé dès l'inftanc de la vitrification , c’eft-à-dire, qu'alors la pierre calcaire fe dé- barrafle de l’acide fpathique, qui lui tient fortement attaché; qu’elle s’é- branle la première , qu’elle attaque les autres terres qui entrent dans la combinaifon du fpath; & de cette nouvelle diffolution intime, faite à l’aide du grand feu , il réfulte un verre tranfparent. Une once de ce fpath, en poudre & bien fec , a perdu jufqu'à 1 gros & 20 grains de fon poids dans la vitrification, Prenez de ce verre, met- tez-le en poudre très-fine , traitez-le à chaud par l'acide vitriolique con- centré, & vous verrez qu'il ne s'en décage plus un veftige d'acide fpa- thique. Je regarde cette perte comme l'expreflion de la quantité d’acide contenue dans l’once de Ed ; laquelle s’eft volatilifée. > IL eft une autre efpèce de terre ou de pierre calcaire ; c’eft la terre pe- fante, que MM. Scheele & Bergmann nous ont fait connoître, & qu'ils ont nommée ainfi d’après fa pefanteur (1). On ne la trouve que dans un (1) Cette pierre eft un vrai gypfe, & forme, ce me femble, une efpèce dérerminée état SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 5 état de combinaifon avec l’acide vitriolique, &: dans l’état de fpath ‘pefant. Ce fpath, expolé également à un très-grand feu , s’y décompole, quoique bien plus lentement & avec plus de difnculté que le gyple 3 l'acide vitriolique qu'il contient s’en dégage > & la terre pelante devient chaux. . Deux onces de fpath pefant ayant été tenues dansune capfule, couverte d'une gazette , à un feu de près de huit jours , en font revenues d’un blanc grisâtre, un peu jaune, comme s'il yeûc eu du foie de foufre, J'ai pefé cette matière au fortir du feu, elle avoit perdu 2 gros & 48 grains; & dans une autre occafion , la même quantité de ce fpath a perdu 2 gros & 63 grains de fon poids. Cette terre, féparée de fon acide, & calcinée, fe diffout dans l'eau, & fair de l’eau de chaux. Cette eau de chaux fe trouble par l'addition de l’alkali fixe, & plus encore par l’acide vitriolique. Enfin, cette chaux délite à l’air libre, & y reprend avec l'acide aëriforme la propriété de faire effervefcence avec les acides. Ces propriétés eflentielles, qui font communes à la terre pefante & aux autres terres calcaires ordinaires , n'empêchent pas celles qui lui font pro- pres, & qui la diftinguent d'une manière fi-particulière. ILeft une autre propriété de la terre calcaire prife en général; pro- priété qui la diftingue de toutes les autres terres , confidérées dans le plus grand état de pureté & de fimplicité où La Nature les préfente : c’eft le Changement ultérieur qui lui arrive , lorfqu'on lui applique la plus grande intenfité du feu. Da: routes les terres calcaires que j'ai eu occafion d’éprouver au feu de porcelaine, je n'en ai pas trouvé une feule qui ne fondit en un verre plus où moins tranfparent , ou qui ne laifsât au moins dans le creufet des traces vilibles d'un commencement de vitrification. Je puis donc pofer ce fait comme un principe fondamental; je l’ai toujours vu ainf avec la ierre à bâtir, avec les marbres, les pierres fpathiques cryftallifées, les différentes ftaladites, les terres précipitées de différents acides , &c.: mais toutes néfondent pas avec une égale facilité. Une ftalaétite, par exemple, calcaire & pure , qu'on trouve à Montmartre , une terre féparée par les acides de la marne de la même montagne, celle qu'on précipite du gypfe, toutes fondent plus facilement que le marbre, & font un verre tranfparent. L'albâtre gypfeux, tel que celui de Lagny, donne un verre tranfparent. Enfin, la terre précipitée du fpath pefant fe comporte de L de cégenre, puifque c’eft une terre particulière à la vérité, mais toujours Combinée avec l'acide vitriolique ; & je ne fais pas pourquoi MM. Scheele & Bergmann lui one donné le nom de fpari pefant: celui de sypfè pefant conviendroit d'autant mieux à cette pierre , que cette dénomination eft fimple & vraie, & ARSNE exprime encote un excès de pefanteur de plus , dans une efpèce dont le genre eft déjà très-pefant par lui-même, Tome XXII, Part, 1,1783.JA NVIER, D 26 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, même , & donne un verre tranfparent. J’obferve encore qu'il importe peu que laterre gypfeufe dans le gyple & dans l'albâtre , ainfi que la terre pe- fante dans le fpath pefant, foient féparées de leur acide, ou qu'elles ini foient combinées, lorfqu'on les foumet au feu; la vitrification s’en fait également dans les deux cas, & le verre qui en réfulte et d'un verd tirant fur le jaune, toujours le même & très tranfparent. En an mot , l'acide vitriolique s'en fépare par la violence du feu , & ne refte jamais dans la vitrifcation, dont il troubleroit la tranfparence, comme on le voit dans le tartre vitrioié & le fel de Glauber , qui fondent en une maffe opaque, dans laquelle l'acide refte fixe , & ne fe volatilife point. On peut voir dans mes Mémoires imprimés, & dans le premier fur tout, plufeurs exemples de ces combinailons de la terre calcaire avec l’a- cide vitriolique , tels que les différents gypfes, la félénite, &c., qui onc fondu en un verre tratfparent, où qui du moins ont préfenté des traces non équivoques d'un commencement de vitrification, Voici encore d’autres exemples plus récents pris du fpath pefant , ou gypfe pefant. J'ai mis en poudre ties fine 4 gros de fpath pefant, cryltallifé & tranf- parent, & je l'ai expofé dans une capfule de porcelaine à un très-grand feu ; il y a coulé en un verre d’un verd foncé & affez tranfparent. J'ai expofé au même four une capfale de porcelaine avec 3 gros de fpath pefanttranfparent en poudre : celui-ci a bien moins fondu que le précédent. Cependant la matière a coulé prefque en entier fur les bords, & dans le centre éroit une mafle sèche, aflez ferme & agglutinée + mais avec le:conratt de l'air , elle a délité; elle s'eft mife en poudre, & elle exhaloit une odeur hépathique. Cette terre fe diffout dans l’eau , & fair de leau de chaux. Enfin, elle décompofe Le fel ammoniac, & rend caufti- que l’alkali volatil. Une différente dans l’intenfité du feu, une poñtion plus ou moins heu: reufe dans ie four , rendent raifon des variations que préfentent Les mêmes matières dans lens divers deurés de tufñion & de vitrification. : Deux gros de terre effervetcente , précipitée du fpath pefanc, ônt fondu parfaitement en un verre tranfparent. Cette expérience a été répétée avec le même fuccès. À Deux gros de terre végétale , diffoute par l'acide nitreux , & précipitée par l'alkali f e bien édulcorée & expofée au même feu, ont-bien fondu - mande le plus grand feu ; le fpath fufible fond avecplus de facilité; il fic un émail blanc, & nattaque point les creulets : de-là vienc que cette piérre eft à la Chine, comme en Œurope, ie tondant de la vraie porcélaine. Le fpath phofphorique enfin répand une fuvière phofphorefcente, lorfqu’on l’expofe à une médiocre chaleur ; il fond ä-peu- près au même degré de feu que le fpath fufible : mais il dote un verre tranfparent, & dévore fortement les creufets, (2) On feu qu'il net queftion dans ce Mémoire, & îci en particulier, que de {a gerre calcaire proprement dite, ou de la terre magnélienne, & que je fais abüraétio® 30 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, C'eft ainfi que 200 grains de zéolite de Feroë pure, expofée feule au eu de porcelaine , ont fondu & faitun verre émail blanc , tandis qu'elle & donné un verre verd tranfparent, en ajoutant à la méme quantité de cette pierre $O grains ou + de marbre, Enfin, G, après avoir féparé de la zéolite, à l'aide de l'acide du vinaigre, la plus grande partie de le terre fedlitzienne qu’elle contient (1), on l’expofe féparément au même feu , on verra qu'elle n'y fond pas davantage que fion y eût mis du quartz feul, ou un mélange de quartz & d'argile, ou d'argile & de pierre à fufil. La portion de terre magnéfienne qui entre dans la zéolite, ainfñi que Le peu de marbre que j'y ai ajouté , font donc la caufe première & le vrai principe de fa fufbilité & de fa vitrification. : Voyez les différentes analyfes qui ent été faites à l'aide des menftrues . & vous trouverez que la pierre calcaire , foit pure , foit dans l'état de fé- lénire, entre toujours plus ou moins dans les produits. C’eft donc elle qui donne par-tout le branle à la fufon; c’eft elle qui , étant dépouillée des acides avec lefquels elle peut y être combinée, devient dans l’embrafe- men: un menftrue puiffant, qui attaque, diflout & entraîne la terre quart- zeufe , le filex, l'argile dans la vitrification. Loxfqu’elle s’y trouve dans de juftes proportions , tout pafle à une fonte facile & liquide ; fi au contraire elle manque, ou fi elle n’y eft qu’en petite quantité, alors la diffolution eft incomplette ou nulle, & la compofition eft réfractaire , ou ne fait que s’'ébranler au plus grand feu: car des mêlanges d'argile & de pierre à fu- fil, de quartz & d'argile, même de quartz, d'argile & de pierre à fufl , fans pierre calcaire, à quelque feu qu'on les foumette , ne fouffrent ja- mais aucune altération, à C'eft d’après ces confidérations, tirées d’expériences femblables, prifes des Auteurs , ou confignées dans mes Mémoires imprimés, que j'ai cru pouvoir m élever contre le principe fameux de Henckel & de Port, de- venu dans le temps prefque un axiome, que plufieurs,matières infufibles par elles-mêmes, devenoient fufibles par leur union. C’eft que ces deux grands hommes regardoient alors la terre calcaire en général comme réfraétaire, ou qu'ils ignoroïient qu’elle entrât dans quelqu'un des éléments de leur combinaifon. C’eft donc toujours par ce principe calcaire que la fonte commence : C'eft alors un menftrue puiflant, qui attaque les autres terres, forme avec elles un verre plus fuñble; & ce fondant une fois établi , il agne de proche en proche, & tout entre en vitrification. C'eft d'après tous ces faits, conftatés par des expériences diverfes & multipliées, que j'ai ofé avancer dès 1770, que je regardois la terre cal- | ven ou terres métalliques, qui font aufi elles-mêmes un principe puiflant de füu- 1DLHITE., (1) Voyez l'anatyfe de la zéolite de M. Pelletier, Journ. de Phyfigue, Déc. 1782 With d Me SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 3£ æaire, non-feulement comme la terre effenticllement vitrifiable par elle-même, mais.encore comme étaht médiatement ou immédiatement dans toutes Les terres & les pierres qui font fufcepribles de fondre , le wrui & Le premier principe de La virrification. Cette propriété qu'a la terre calcaire de fondre par elle-même, & de fervir de menftrue , de fondant aux aûtres terres, n'eft pas , comme nous l'avons déjà vu, la feule qui la diflingue : celle-ci tient à une autre plus gé- nérale encore, dont nous avons déjà parlé. C’eft à fon alkalefcence & à da facilité qu’elle a de fe décompofer , c'eft à-dire, de quitter les princi- pes qui la faturenc, foit par la voie humide, foit à l'aide d'un grand feu,"& d'acquérir dans l’un & l’autre cas une cauflicité d'autant plus grande , qu'elle eft devenue plus fimple , plus libre, & par conféquent plus avide de combinaifon; car la caufticité , comme l’a parfaitement ob- fervé M. Macquer , n’eft autre chofe que la tendance de la matière à la “ombinaifon. Mais comme parmi des corps de la Nature qu'il eft poffible de Tou- mettre à nos fens , il ny en a point qu'on puifle confidérer dans un état de fimplicité abfolue & primitive 3 que la matière étant doués d’une force active, qui la fait toujours preffer & agir fur tout ce qui l’envi- ronne , & y adhérer méme, en raifon de fes rapports : il s'enfuit que tour ft dans un état , non de faturation parfaire, mais de combinaifon plus cu moins intime: cette tendance s'exerce donc en raifon de la plus grande fimpilicité, de l’homogénéité de la matière ; elle et même fi forte alors, que les dernières mixrions ne fe rompent qu’autant qu'on préfente aux principes qui les compofent , d'autres principes auxquels ils s’uniflene, pour former de nouvelles combinaifons. C'eft ainfi que tout eft dans une activité conftante dans la Nature; que däns les corps les plus dursmême, Ja matière agit, s’unit & fe prefle fans cefle , ou fe relâche, {e fépare & fe décompofe ; delà un fecond ordre de chofes commence toujours là où le premier finit. De-xoures les fubftances terreufes , la terre calcaire eft fans contredit celle: qui nous préfenre tous ces phénomènes dela manière la plus frap- pante & la plus marquée: de-là vient le grand ufige dont elle eft parmi les hommes, Îl eft tel qu'elle eft même devenue aujourd'hui un menftrue, qui le difpute prefque aux plus accrédités dans les Arts & la Chymie, La Nature eile-même paroît faire de la terre calcaire un ufage plus “tendu encore que de toutes les autres, & cet ufage tient à fa folgbiliré: auf l'a t-elle choifie pour être la bafe , pour ain dire , d: toute produc- tion, parce qu’en fe elle la trouve par-rout, toujours diffoute, toujours prête à fe diffoudre dans l'air comme dans l'eau , quifont entre fes mains deux des plus grands matériaux & infiruments en même temps de toute #ærganifation, C'eft en effet La pierre calcaire qui forme la partie folide, la bafe ex 32 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, - un mot des végétaux & des animaux, Cette terre peut, à l’aide du grand moyen de la Nature , la putréfaétion, ainfi qu'avec le fecours des menftrues & du feu fur-tout, être tellement dégagée de l'état de combinaifon où elle s'ytrouve, qu'elle reparoît alors à volonté fous fes premières formes de terre calcaire ou de chaux, capable toujours. de fondre à un grand feu, d’être le fondant des autres terres ; énfin , de fe diffoudre de nouveau dans l'air & dans l'eau, & de fervir encore à la Nature de matière première pour les mêmes ou pour de nouvelles combinaifons. C'eft d’après la contemplation de trous ces phénomènes , que j'ai encore ofé dire, que s’il y avoit une terre primitive dans la Nature, ce ne pourroit dre que La verre calcaire. “ Ce n’eft donc pas fans raifon, fans doute, que cette terre fe trouve ré- pandue avec tant de profufon dans la mafle du globe terreftre ; qu'elle s’y trouve fous tant de formes & dans des états fi différents; par-tout à la porte, pour ainfi dire, des divers laboratoires de la Nature & d’une mul- titude de productions des trois règnes, fervant de bafe , de matrice même au quartz , au cryftal de roche, à l'amiante, & à tant d’autres fubftances qui en paroiflent pourtant fi éloignées. j C’eft-là cette terre qui avoit le plus frappé le célèbre Rouelle , dans un temps où l'Hiftoire Naturelle parmi nous étoit à fon berceau. Inftruit par Paliffy , il faifoit déjà de l’hiftoire du glose, & de la pierre cal- caire fur-tout, l'objet de fes plus fublimes contemplations , lorfque , jeune encore , & prefque fans autre reflource que fon courage , mais déjà lié d'une amitié étroite avec un homme unique, Bernard de Juflieu, il en fuivoic l'étude avec cette application opiniâtre qui décèle les hommes de génie ; ces hommes, qui, formés fans Maîtres, voyoient déjà dans l'objet de leurs recherches des rapportsimal faifis ou ignorés jufqu’a eux. On fentoit bien, dans les leçons de M. Rouell:, à quel point ce grand Mai- tre en étoit nourri, par Le grand ufage & l'heureufe application qu'il em faifoit. En effet, quelle idée plus neuve, plus riche, plus féconde en confé. quences, que fa grande diftinétion de la terre ancienne & de la terre nouvelle; des montagnes de première origine & des montagnes de fe- conde formation ; l’ordre des couches qui Heur font propres; la difpofr- tion & le caraétère particulier des mines & des autres productions qui les font reconnoître; les amas de coquilles foffiles difpofées par familles dans les climats terreftres , ainfi que Les coquilles vivantes le font au- jourd'hui dans les différences mers ; les effets cerribles & défordonnés d'un déluge fubit & rapide , comparés avec les dépôts tranquilles : & les révolutions lentes & fucceflives d’une mer qui gagne ou qui fe retire; le développement de l'origine des bancs & des couches de pierre calcaire, des mines de fuccin & de charbon deterre; la caufe & la matière pre+ mière des volcans ; leur diftinction en ceux qui brûlent tranquillement dans LA à. ÉLARS Le … SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 33 dans Le fein de la terre, & ceux qui fe manifeitent par d'effrayantes érup- tions; en un mot , leurs effets rerribles & multipliés fur la furface du globe; qu'ils ont tellement bouleverfée , qu'aujourd'hui on reconnoît, à des fignes certains, ceux même qui ont brülé dans des temps fi reculés , que les tra- ces en font effacées depuis des fiècles de la mémoire des hommes, mais que la terre préfente encore écrites en caractères ineffaçables dans les faftes éternels de leurs ruines, Interrogeons fur ces grands objets M. Defina- reft , un des plus laborieux, des plus vrais & des plus infatigables Obfer- vateurs de nos jours , qui fe glorifie encore aujourd'hui de fon Maître ; & que M. Rouelle avouoit avec complaifance pour Difciple & pour ami, Ce font la les idées donc il donnoit déjà le développement dans fes le- çous dès 1740 , c'eftà-dire , plufeurs années avant que perfonne eût écrit fur cette matière parmi nous; c'eft à certe doctrine nouvelle , alors - annoncée chaque année en public à des centaines d’auditeurs avec la cha- leur qu'infpirent les chofes grandes & élevées à l'homme de génie qui s'en eft pénétré, que nous devons ce qu'on fait aujourd'hui de plus re= marquable fur cette partie importante de l'Hiftoire Naturelle : de-là en- core cette foule de Cabinets , dont le nombre & la richefle font époque dans le fiècle où nous vivons. Avant lui, trois ou quatre hommes à peine s’occupoient , à l'exemple de Réaumur & des célèbres de Juflieu , ‘ des différentes branches de l'Hiftoire Naturelle. M. Rouelle paroît; il en fait une Ecole publique, & ce goût inné en lui, fecondé de fes profondes connoiflances, de fes continuelles méditations , éclairé fur-tout du grand flambeau de la Chymie, ce goût entre dans toutes les têtes, qu'il échauf- foic dans fes leçons avec unenthoufafme prefque. divin. Dès-lors ces idées füblimes que nous venons d’énoncer ; ont travaillé les efprits, & font de- venues un germe fécond , qu'il a tranfinis comme un héritage à fes nom- breux Difciples; ils les ont répandues dans l’Europe, & portées même au-delà des mers. Le lien facré qui m'attache à fon fang , peut bien dans le particulier me condamner à la rélerve fur fon éloge, même à la modeftie du filence ; mais en public, il m'impofe le devoir cher à mon cœur, d'honorer fon nom & d’être le défenfeur de fa mémoire, e Je ne craindrai donc pas de donner ici à M. Rouelle l'éloge qui n'ap- partient qu'à ces hômmes rares , que le Cielfufcite quelquefois pour avan- cer le progrès des Sciences & des Arts , &pour l'enfeignement des Na- tions. Le préfenter autrement, feroit ne pas connoître ce grand Homme, ni l'état où il a porté la Chymie-parmi nous. De peu importante, d'ab- jeéte, de dangereufe même qu’on la croyoit autrefois, il en a faît, d’après Beccher & Stahl, une des branches la plus importante de la Phyfique, & fans laquelle plufeurs autres ne peuvent fe Aatter de faire de ces pro- Tome XXII, Part, 1, 1783. JANVIER, E 34 ‘ OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, grès, qui fonr comme époque & révolution dans les connoiflances des hommes. OBSERVATIONS S'LRINL ES NE V\L EU S\ESSW D OLR IT OLN: Par M. LE FEBVRE, Prêtre de l'Oratoire, Profeffeur de Phyfique du À Collège de Lyon. A L'OCCASION de la tefflemblance que M. de Mairan foupçonne entre la matière de la lumière zodiacale, celle de l’aurore boréale, & celle de ces nébulofités qui accompagnent quelques étoiles, j'ai eu la curiofité de revoir la nébuleufe de l’épée d'Orion , dont la figure m'avoit toujours paru différente de celle que lui ont donnée MM. Hughens & de Mairan, La voici telle que j'ai cru l'appercevoir le 15 Février 1779 , par un ciel très- pur, à onze heures & demie du foir , ayant à peu-près 17 degrés de hau- teur. Voyez Planc, I, fig. 3. Les fept étoiles qui la compofent m'ont paru entièrement hors du nuage , fur-tout les trois inférieures, qui laifloient entrelles & le nuage un intervalle obfcur bien tranché, à l’exception de celle qui en eft la plus proche, qui pouvoit me laifler quelque dote M. de Mairan croyoit déjà que , depuis 1756 ( temps de l’obfervation de Hughens) , cette nébulofité avoit éprouvé quelque changement. Il feroit zu ourd'hui bien plus confidérable, & fur-tout la pofition des étoi- les , détachées du nuage, fembleroit indiquer qu’au moins la nébulofité n'eft produite par aucune de ces étoiles. Voyez les fig. de la PI. X. La fig. 1°". eff celle de M. Hughens , en 1656. La fig. 2, celle de M. de Mairan , en 1725. ( Ces deux figures font renverfées ). La fig. 3 ef? droite, & repréfente la nébulofité, telle qu’elle a paru ceue année 1779, obfervée avec umuélefcope de 3: pieds. GE SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 35 ) Dar CS ir LS 2 De M. ce CHevazieR DE LAMANON A M. l'Abbé Moncez, Auteur du Journal de Phyfique, Relative aux Offements foffiles qui ont afpartenu à de grands Animaux. Mowsreur, J'ai prouvé dans le Journal &e Phyfique du mois de Mai 1780, que les défenfes & les dents fofliles qui ont appartenu à de grands animaux ne font point des dépouilles d'éléphant comme le croient pluleurs Savans, mais qu'elles font dues à un animal fans analogue aujourd'hui , qui avoit des dents particulières à fon efpèce & des défenfes a-peu-près femblables à celles des élephants; je vous prie d'inférer dans votre Journal la note fuivante, qui fait voir que ma façon de penfer à ce fujet eft con- forme à celle du Docteur Hunter, Le Daubenton de l'Angleterre. (1) « Il paroït que les animaux de l'Amérique n’ont pas toujours été » plus petits que ceux des autres parties du globe. On.a trouvé près des » rives de l'Ohio un grand nombre d’os d’une grandeur étonnante. L’en- » droitsoù l’on a fait cette découverte ferouve à cent quatre-vingt-dix » milles plus bas que le confluent de la rivière Scioto avec FOhio, & à » près de quatre milles de la rive de cette dernière du côté d’un marais » nommé Le grand marais falé. Ces os fe trouvent en grande quantité »à$ ou 6 pieds fous terre, & la couche en eft vifble fur le bord du » marais falé. ( Journal of Colonel George Croghan , mf]. entre les mains » de l'Auteur ). Cet endroit paroît marqué avec exactitude dans la Carte # d'Evans : ces os doivent avoir appartenu à des animaux d’une grandeur >» énorme, Les Naturaliftes qui n’ont jamais connu d'animal vivant d’üne >» pareille ftature , ont d’abord été portés à croire que c’étoient des fubf- »# tances minérales, Après en avoir reçu plufieurs échantillons de diffé- » rentes parties de la terre , & après les avoir examinés avec plus d'at- {1) Hifhoire de l'Amérique , par M. Robertfon, traduit de l’'Anglois, Paris, chez Panckoucke, 1778 , tom. II, note xxx1v. Tome XXII , Part, 1, 1783. JANVIER. E 2 Al: dus D) de. NW: DE * L 36 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, > tention , on eft enfin convenu que c'étoient des os de quelques # animaux. ‘Comme l'éléphant eft le plus grand quadrupède connu , & » que les dents qu’on a trouvées reffemblent beaucoup à celles des élé- » phants, tant parla qualité que par la forme, on en a conclu que les > fquelertes trouvés près de l'Ohio étoient de cette efpèces mais le Doc- >» teur Hunter, l’un des Savans de ce’ fiècle qui eft Le plus en état de » décider cette queltion , après avoir examiné attentivement plufieurs » morceaux des défenfes , des dents mächelières & des mâchoires en- # voyéss de l'Ohio à Londres, a prétendu qu’elles r’appartenoient pas >» à l'éléphant , mais à quelque grand animal carnivore d’une efpèce » inconnue. ( Phrl. Tranfaë. vol. 58, pag. 34). On a trouvé des os de la »-même efpèce. & d’une grandeur auli remarquable près des embouchures » de l'Oby, de la Jenifeia & de la Lena , trois grandes rivières de Sibérie 5 ( Stralhenberg , Defcription des parties feptentrionale € orientale de l'Europe » 6 de l'Afe, p.402 ). L'éléphant paroit né pas fortir de la zone torride , » & ne point multiplier au-delà. Il ne pourroit vivre dans ces froides » régions qui bordent la mer glaciale: l’exiftence de ces grands animaux » en Amérique pourroit ouvrir un vafte champ aux cenjectures. Plus >» nous confidérons la nature & la variété de fes produ@ions , plus nous » devons être convaincus que ce globe terraqué a fubi d’étranges chan- » gemens par des convulfions & des révolutions dont l'Hiftoire ne nous » a confervé aucune trace ». Je fuis, &c. A Sallon-de-Crau en Provence , le 2 Mars 1783. D pren, DES. UC OUR ES Prononcé à la Séanee publique de l’Académie des Sciences , Belles-Lettres & Arts d’ Amiens , le 25 Août :782; Par M. le Comte D'AGAY , Intendant de la Province, fur les avantages de La Navigation intérieure, auquel on a joint la Carte de la communication dela Mer méditerranée avec la Mer du nord, par Le canal projeté en Bourgogne, & par les Canaux de Picardie. Gus un égarement prefque général d'admirer plus volontiers les fic- tions qui plaifent à l'imagination, que Les vérités utiles au bonheur de la ont ; SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 37 Société, Cette préférence injufte , & les éloges frivoles que l'on prodigue fi facilement aux Ouvrages d'agrément, ont retardé long-temps les décou- vertes précieufes à l'humanité. ' Par quelle heureufe révolution cette Nation ingénieufe, formée pour la bienfailance, mais taxée trop fouvent de légéreté , a t-elle fixé fes regards conftans & fenfibles fur Les befoins de la Société ,'& déployé tous les ref forts de fon génie vers les Arts utiles ? Quelle nouvelle lumière femble. éclairer notre fiècle, & l'euflammer du defir d'étendre les connoiffances qui ont une influence rapide fur ie bonheur de l'humanité, N'éteignons point ce vif-enchouliafne des Sciences & des Arts, cette ardeur générale d'en précipiter les progrès & d'en recueillir les fruits; mais qu'elle foi: éclairée par la vraie philofophie, par la raifon épurée de l'ame fenfble aux intérêts de la Société, & jamais éblouie par la faufle glcire. N'interdifons point la noble carrière des Sciences & des Arts, aux di- vers ralens que:la Nature a formés dans tous les genres, pour étendre fes bienfaits , en dévoilant fes fecrets. Telles font les fages difpoftions de l'Auteur de la Nature, qui a fondé la Société humaine fur une dépen- dance de befoins réciproques , & qui en reflerre fans ceffe les liens par les nouveaux avantages & les découvertes utiles dont les talens variés & réunis enrichiflent la Société. Cet certe heureufe variété des talens animés, par l'amour du bien pu- blic , qui a formé des Compagnies dépolitaires des cônnoiffances hu- maines, & qui honorent leur Parrie en éclairant leur fiècle. Quel honneur pour cette Province d'avoir produit des Savans, des Littérateurs, des Ar- tiftes diftingués , &- d’avoir réuni dans cette Compagnie les fuccefleurs de leurs talens & les émules de leur gloire ! Si la place que j'ai l'honneur de remplir n''aflocie à des avantages fi précieux, je fens, qu'elle m'impofe l'obligation de les mériter perfonnelle- T À ment, en confacrant mes recherches à des objets utiles au bonheur public. C'eft fous ce point de vue que j'envifage aujourd'hui , dans ce Sanc- suaire des Sciences & des Arts utiles, les grands avantages de la Navi- gation intérieure par les rivières & les canaux, pour tous les Peuples en général, & pour la France en particulier, Quel fujet plus digne d'incé- refler votre attention & votre reconnoifflance, en développant la bien- faifance d'un Gouvernementaufli éclairé que vigilant ! Le premier fondement de tous les Etats policés , et l'Agriculture; & le principe le plus général de leur profpérité, eft le Commerce. Ces deux fources de richefles , qui font ordinairement la mefure & la ba- lance de la puiflance des Empires, font circuler rapidement l'abondance qui les fuit, par la navigation intérieure, qui fule peut vivifier un Etat du centre Jufqu’aux extrémités. Les Peuples anciens qui ont fondé de grands Empires ; en défrichant 38 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, - & peuplant de vaftes contrées, ont été les premiers Inftituteurs de fa Navigation intérieure, qu'ils ont perfectionnée par la conftruétion des canaux, Les Chinois, qui exaltent beaucoup leur antiquité , leurs loix , leur population , méritent peut-être, à plus jufte titre, une fupérioriré marquée fur les autres Peuples , par l'ancienneté de leurs travaux de defféchement & de navigation, qui exiftoient ayant que a Grèce für ci- vilifée. Leur conftance à perfectionner cette branche importante de l’a- bondance & de la félicité publique , avoit rendu , plufeurs fiècles avant V'Ere vulgaire , leurs rivières navigables, affuré leur communication par des canaux , & formé dans ce vafte Empire une navigation générale, qui préfente l’image d’une feule Ville immenfe flottante fur les eaux. L'Egypte , qui difpute aux Chinois leur antiquité, n'étoit pas moins leur rivale dans l’art de fixer la fécondité & la circulation dans le cli- mat le plus ingrat, en multipliant, pat des canaux innombrables, le feul fleuve qui l'arrofe ; monumens détruits en grande partie par des Conquérans barbares, mais plus honorables pour l'Egypte dans leurs veftiges & leurs ruines, que ces fameufes pyramides, ces mafles fur- renantes & inutiles, qui perpétueront long-temps l'orgueil de leurs dec Pourquoi ne rappellerions-nous pas ici Le plus grand projet que l'ef- prit humain ait ofé concevoir & entreprendre dans l'antiquité, la commu nication dela Mer Méditerranée avec la Mer Rouge, en ouvrant l'Ithme de Suez dans une largeur de trente lieues ? L'exécution de cet admira- ble projet, commencé par les anciens Rois d'Egypte, renouvellé fous les Empereurs Romains , & repris quelquefois par les Princes Ottomans (1), immortalifera Le fiècle & la Nation qui l'acheveront, & produira une grande révolution dans la balance du Commerce. Il femble , en parcourant les Annales de l'Univers, que l'Hiftoire des grands Empires anciens & modernes , eft en même temps celle des grands monumens érigés à la navigation intérieure, & que fes accroiffemens font l’époque de leur force & de leur fplendeur. La célèbre Babylone jouit encore de la gloire des fuperbes aqueducs & canaux élevés par Sé- miramis, augmentés par fes fucceffeurs, & détruits avec cet Empire. Les plus grands Rois de Perfe, Cyrus & Xercès, au plus haüt degré de leur puiffance & de leurs conquêtes , devinrent les bienfaiteurs des Peuples qu'ils avoient foumis, par les ouvrages remarquables qu'ils exécutèrent pour leur procurer l'abondance par la navigation intérieure. La Grèce, qui renverfa leur puiffance , lorfque le génie des Sciences (x) Muftapha II y penfa férieufement; Haly Bey s'étant emparé de l’Egypte, dans fes dernières années , forma auffi-tôt ce projet. Jraëcé des Péages ; page 33. LA SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 39 & des Arts la faifoir déjà régner fur les autres Peuples, ne fut pas moins jaloufe de vaincre la Nature, pour créer une navigation intérieure , en creufant des canaux en Thrace & en Béotie, jufqu'a la mer (1), en ou- vrant Le fein des montagnes, & en perçant des rochers qui fembloient braver rous les efforts de l’art & du génie. Il manqueroit fans doute un trait intéreffant de grandeur & d'élévation au Peuple célèbre qui a foumis l'Univers à fes loix , s'il n’avoit pas fignalé fon Empire , fa politique & fa bienfaifance par de grands monumens de navigation intérieure. Rome, dans fa foible origine, & fous le gou- vernement de fes Roïs, entreprit déja Re en navigationdu Tibre, & continua de s'en occuper au milieu des progrès de fa puiflance & de fes vaftes projets, Céfar , devenu maître du monde & de fa Capitale , voulue rendre fa navigation digne d’un fi grand Empire, & fit exécuter des ou- vrages auffi confidérables qu'utiles à l'embouchure du Tibre & dans fon couts; fes fuccefleurs continuèrent ces travaux, & même étendirenc les branches de cette navigation dans l'intérieur des terres, en rendant navi- gables les rivières qui fe rendoïent dans ce fleuve. Trajan , digne de ré- gner pour le bonheur des Peuples , deffécha les marais Pontins , fi fu- neftes à la falubrité de Rome; & par la conftruction de canaux de deflé- chement & de navigation , fit fuccéder à ces marais infects un air pur & des campagnes cultivées. Dans quelle partie du monde anciennement connue , la domination Romaine n'a-t-elle pas pénétré & laiflé des traces de fa grandeur , dans des monumens célèbres de navigation ? En Afie, la communication de f'Euphrate & du Tigre s'ouvre prefque fubitement pour la navigation d’une armée Romaine, commandée par l'Empereur Sévère, En Afrique , le génie & l’activité de Trajan renouvellent les travaux abandonnés des anciens Rois d'Egypte, pour la communication du Nil avec la Mer Rouge, & lui réuniflent ce fleuve par un canal dont on trouve encore des veftiges. L'Europe feule préfente mille monumens d'ouvrages Romains pour la navigation, dont l'exiftence ou les ruines même impriment du refpeét pour ce grand Empire. En Italie, plufieurs embranchemens du P6, qui multiplioient fes communications avec la mer (2) ; les canaux de Tof- cane , & principalement celui de Ravenne (3) , célèbre par fe nom d’Au- gufte fon fondateur , & par fon utilité : dans les Gaules, le canal de (1) Plufieurs Auteurs difent qu'ils étoient repardés comme une des grandes merveilles du Monde. Strabon affure qu'il fallue percer des montagnes fur me étendue de plufieurs Jieues , & tailler dans le roc des puits dans tonte leur hauteur, Trairé des Péages , page 35. ‘ | fn Pline , livre 3, chapitre €. (3) AL le Beau, Hiftoire du Bas-Empire, tome VI, page 189, 40. . OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Marius , pour faciliter la communication du Rhône avec la mer, celui de Drufus, pour joindre le Rhin à la rivière d’Iffel , & la rendre navi- gable jufqu'à l'Océan feprentrional (x). Le feul projet formé par un Gé- néral Romain d'unir la Mo/elle à la Saône, & par conféquent le Rhône au Rhin, auroit Ans l'Empire de Néron , par la jonétion de la Méditerranée avec l'Océan dans l'intérieur des Gaules: mais la malignité & la jaloufie arrêtèrent l'exécution de ce projet mémorable , pac une faralité atrachée aux grandes entreprifes du génie (2). Tant de monumens de la grandeur & de l’induftrie des Romains , élevés par leurs mains viétorieufes , {ervoient également leur politique , en faifant circuler l'abondance & leur ambition , en facilitant deurs expéditions mi- litaires ; mais d’autres Peuples alors ignorés du refte de l'Univers, unique- ment amateurs de la paix & du bonheur de l'humanité , fe dévouoient à l'A oriculture & à la Navigation intérieure, C'eft ainfi que l'heureux Em- pire des Incas, redevable à lui-même de l'invention des Arts & de leur perfection, avoit créé, par fon propre génie , les monumens d’embellif- fement & de communication qui honorent les Peuples les plus inftruits (3) ; heureux alors de préférer les richeffes de la terre & les avantages de la navioation intérieure qu'il avoit portée au plus haut degré, à ce métal fi recherché & fi funefte qui a caufé la deftruction des Péruviens, Après avoir puilé dans l'hiftoire des Peuples anciens, conquérans ou conquis, gouvernés par un defpotifme aveugle, ou fondés fur une fage léviflation, de grands exemples de la navigation intérieure, fixons nos regards fur les progrès qu’elle a faits parmi les Peuples modernes, & l'influence qu’elle a eue fur leur profpérité. Deux Peuples renommés par leur induftrie & leur activité, ont fondé leur puiffance fur le Commerce, & leur commerce fur la Navigation in- térieure, l'Etat de Venife & la République de Hollande : l’un raflem- blant dans une lagune inacceflible les débris d’un Peuple fugitif , a élevé au milieu des eaux une Ville fuperbe , qui a dominé fur les mers, attiré dans fon fein toutes les richefles de l'Univers , & agrandi fa puiflance fur terre , en y réuniflant une partie de l'Italie : l’autre a fu fouftraire à l'invafion de la mer des rerreins fangeux, pour les convertir en campagnes abondantes ? a transformé des Pécheurs indigens en riches Commerçans ; & embraflant toutes les parties de l'Univers par fon commerce, a rendu tous les Peuples tributaires de fon induftrie, — (1) M. de la Lande , furles Canaux de Navigation , page 501. On aura fouvent oc- afion de citer dans cet Difcours ce excellent Ouvrage. (2) Tacite, Annales 13, 53- (3) Dans le grand nombredes canaux de navigation de cet Empire, il ÿ en avoit un de cent vingt lieues de long & de 12 pieds de profondeur. Hiffoire des Incas , tom. [°°, page 165 & 167. Ces Li :+ dé SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 41 Ces deux Erats épuifant également toutes les reffources de l'Art pour perfectionner leur navigation intérieure ,ont établi des communications plus commodes & plus multipliées que Les grands chemins, entre les Villes, les Bourgs &c les Villages, & ont réuni, par des canaux , les rivières qui lesarrofent. A Venife , les canaux forment ies rues ; en Hollande , les gran- des routes font des canaux: mais cette République , toujours menacée d’être envahie par La mer qui la domine, lui oppofe continu:llement , par un prodige de l'Art, ces digues admirables, qui contiennent dans fes bornes cec élément redoutable. En comparant ainfi l’ancienne fplendeur de Venile & la profpérité actuelle de la Hollande qui fe font développées dans le commerce maritime, mais dont le principe eft la Navigation in- térieure, qui alimente & vivifie le commerce extérieur, on peut juger à quel point de richeffe & de profpérité un Etat peut s'élever en perfec- tionnant fa navigation intérieure. Après ces deux exemples frappants, on ne doit pas être furpris que tous les Peuples de l'Europe recherchent avec ardeur les grands avantages qué Y'induftrie leur aflure par ces fortes de travaux, dans un fiècle aufli éclairé, où les Sciences & Les Arts concourent à la profpérité des Etats, & où l'in- fluence des armes eft balancée par le calcul des richeffes & de la popu- lation. L’Angleterre, qui doit fa puiffance au Commerce, a faifi , depuis quel- ques années , les grands avantages de la Navigation intérieure , & n'a pas moins veillé à la perfectionner, qu'à fayorifer les progrès de fon com- merce maritime, Cette Ifle induftrieufe , après avoir rendu fes rivières navigables, s'occupe avec activité à conftruire des canaux de communica- tion entrelles, & même entre fes différents ports principaux. Le monu- ment le plus remarquable qu'elle ait exécuté dans ce genre, eft le canal de Bridgewater, pour l'exploitation des mines de charbon dans la Pro- vince de Lancaftre , achevé en 1776 (1): il eft creufé en partie fous une montagne, foit dans le roc, foit dans la terre, dans une étendue de 2500 toifes, & palle fucceflivement au-deffus des rivières & des grandes routes, Les principaux canaux exécutés ou ordonnés en Angleterre , font les canaux de Merfey au Trent, du Trent au Swern , le canal d'Oxford & celui de Liverpool. L'Italie, qui a recueilli däns fon fein les Sciences & les Arts exilés par les Barbares , a reflenti la première leur activité bienfaifante , dans les ouvrages que fes différents Peuples, éclairés avant les autres , ont érigés avec profulion à la Navigation intérieure, On y voit fréquemment le fpec- tacle intéreffant des canaux, qui portent la fécondité dans les rerreins A (1) Il a été conftruit aux frais du Duc de Bridgewater, & a coûté $ millions, Canaux de Navigation, page 526. Tome XXII, Part. 1,1783. JANVIER, E 42 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fecs & arides , par leur arrofement, & dans les terres marécageufes , par leur defféchement, & qui ajoutent un nouveau prix à leurs produétions, par le Commerce & la Navigation. : Le Milanois a commencé , dans le douzième fiècle , des canaux de na- vigation , qui font regardés aujourd'hui comme l'ouvrage le plus parfait & le plus célèbre que l'Architecture hydraulique ait produit avant la reftauration des Sciences & des Arts (1). Le Piémont jouit aulli de plu- fieurs canaux moins anciens & moins confidérables, mais très-atiles pour la navigation &ela communication de fes rivières. Dans les confins de l'Italie, on a propofé la jonction du golfe Adriatique avec Le Pont-Euxin ar le Danube, : L'Efpagne, occupée pendant long-temps des tréfors de l'Amérique , a reconnu combien la Navigation intérieure pouvoit ajouter à fa puiflance : & au bonheur de fes Peuples: elle fait exécuter actuellement de grands canaux d’arrofment & de navigation , qui réuniront le double avantage de la fécondité & de la circulation. Dans le Royaume de Murcie, on a commencé, depuis plufieurs années, un canal célèbre, qui doit fervir à l'importation des marchandifes de la Méditerranée dans l'intérieur du Royaume , à l'exportation des productions du pays, & fur-tout au tranfport des bois de marine jufqu’à l’Arfenalde Carthagène ; mais le canal de Navarre , ou canal Impérial, répand déjà fes heureufes influences jufqu'à Saragoffe (2), & aflure la navigation & l’arrofement de cam- pagnes immenfes qu'il fertilife. S'il eft continué jufqu'à la Méditer- ranée, & fi l'on exécute le canal de Caftille, celui de Campos qui doit s’y réunir, & le canal de Madrid jufqu'à la mer, ils feront, pour le Royaume d'Efpagne, Pheureufe époque d’un nouveau commerce inté- rieur, qui l'unira de plus en plus avec fes riches Colonies, & d’une gloire immortelle pour le Roi d'Efpagne, qui exécute des projets fi eflen- tiels au bonheur de fon Royaume, pendant une guerre aufñli difpen- dieufe. : L'Allemagne , ce grand Corps politique partagé en différentes Sou- verairetés, ne favorife point, par fa conftitution, l'unité de Gouverne- ment & de vues, qui feule peut former & exécuter un grand fyftème de Navigation intérieure ; mais fes Souverains les plus puiffants & les plus éclairés dans PArt du Gouvernement , ont déjà employé avec fuccès l'in- duftrie de leurs Peuples à créer & perfectionner leur navigation particulière dans les heureufes pofiions que la Nature a préparées. Déjà la Hongrie, fous le Gouvernement bienfaifant de l’Impératrice- “ (1) Ces canaux forment lacommunication du Téfin avec PAdda, & fe réunifleat 3-Milan. Traité des Rivières, par le.P. Frifi. (2) Gazeue de France du 16 Août 1782. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. ‘4; Reine , a vu tracer une multitude de canaux & de communications, dont l'exécution lui annonce un commerce actif & floriffant. La communication du lac Bataton avec le Danube , eft devenue promptement , par la rapidité de fes travaux, la première époque d'une navigation intéreilante dans ce Royaume, Combien ñe doit-elle pas s’accroître & fe perfectionner par l'influence des grandes vues & des profondes connoiffances réunies dans l'illuftre Souverain qui a parcouru l’Europe en obfervateur éclairé, pour ‘rendre fes Peuples plus heureux par la jouiflance des Arts, du com- merce & de l'abondance! La Save & le Danube foumis à {es ordres, vien- nent de recevoir, par fes foins paternels, la première navigation de com- merce qui réunic Vienne avec Conftantinople par la Mer noire (1). La jonétion de cette Mer avec la Mer Adriatique , par la communication du port de T'riefte avec le Danube, paroît fixer aujourd’hui l'attention de fon gouvernement a@tif & vigilant, dans l’ordre des travaux qui doivent éten- dre & perfectionner la Navigation & le commerce de fes Royaumes, Les Etats du Roï de Prufle jouiffent'aujourd’hui des avantages précieux d'une nävigation multipliée & parvenue promptement à ce point de per- fection , qui porte l'empreinte d’un Monarque puiflant , dirigé par le énie, & fupérieur à tous les obftacles. Ce Prince, infatigable dans les foins ft Gouvernement, a fait ouvrir de nouvelles communications dans fes Etats entre la Mer d'Allemagne & la Mef Baltique, par des canaux ou des rivières navigables, À peine pofleffeur d’une partie de la Pologne, réunie à fes Etats , il a commencé & fait en trois ans, dans fa nouvelle domination , çe que les Polonoïis n'avoient jamais ofé entreprendre, le Canal de Bromberg (2), qui facilite les tranfports par Stettin & Dantzick jufqu’à la mer, & qui établit une nouvelle communication de fes anciens Etats avec La partie de la Pologne qui leur eft nouvellement réunie. Combien l’heureufe fituation de l'Allemagne n'a-t-elle pas fait conce- voir & même ténter d’autres projets de navigation , qui ont été fufpen- dus & abandonnés par la diverfité d'intérêts entre les Puiffances qui par- tagent le Corps Germanique ! L'ancien & célèbre projet de Charlemagne, d'unir l'Océan avec le Pont-Euxin , par la jontion du Rhin avec le Da- nube , a été renouvellé fouvent, & l'examen récent qui en a été fait par ordre d’un Flecteur de Mayence (3), en a prouvé la Rciliré & les + tages; mais des obftacles politiques ont arrêté ce projet utile. Cette com- inunication importante, également projettée par l'Empereur Charles IV (4;, & plus récemment encore par l'Empereur Jofeph L*, par la jonction dé {n Gazette de France du $ Juillet 1782. 2) Il a été commencé en 1772 & finien 1775. Canaux de Navigation, page 514. (3) Jean Philippe. (4) En 1350. Tome XXII, Part. I, 1783. J4 NVIE R. F2 44 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, V'Elbe avec le Danube, a eu le même forr. Tel eft le pouvoir des préju- * gés qui aveuglent la partie la moins éclairée d'un Peuple, & qui enchaî- nent l’autre fur fes véritables intérêts. Le canal d'Enrreroche, près d'Yver- dun, commencé en 1637, dans la République de Berne, & qui pouvoit faciliter une grande communication entre le Rhône & le Rhin, eit refté imparfait par les anciennes préventions qui ont fait profcrire fouvent les rands chemins & les canaux (1). Achevons de tracer les progrès intéreffants de la Navigation intérieure chez les Peuples modernes. La Pologne, toujours languiflante dans le fein de la fécondité, a conçu plufeurs projets de communication entre la Mer Baltique & la Mer Noire; entre la Viftule & le Boryfthène. Le Comte Oginski a eu le courage de commencer cette entreprife en 1776 , & l'honneur d'exécuter le canal qui . porte fon nom; mais les troubles qui ont agité ce Royaume, & les diffen- tions civiles qui l'ont déchiré , ont arrêté les progrès & la perfection de cette entreprife patriotique, qui avoit déterminé fes Concitoyens en 1768 à lui ériger une ftatue. e La Suède, plus guerrière que commerçante , avoit tenté foiblement de faire valoir les avantages de fon heureufe pofirion {ur différentes mers, & des grands lacs & rivières dont elle eft arrofée; plufieurs fois on avoit formé Le projet important d’euvrir une communication entre la Mer d’Al- lemagne & la Baltique , indépendante du détroit dangereux du Sund: quelques travaux avoient été commencés & abandonnés plufeurs fois, par l'extrême difficulté de rendre navigable le fleuve Gotha. Il étoit ré- fervé au Roi Citoyen, qui ne refpire que le bonheur de fes Peuples , de triompher de ces obftacles, & de confommer ce grand ouvrage , par ladivité & l'induftrie des travaux qui annoncent fa perfe@ion prochaine. La Suède touche au moment de faire circuler le commerce dans fes Pro- vinces intérieures, par une navigation aufli facile qu'indépendante, Le Danemarck paroït , à l'exemple de la Suède , apprécier les avan- tages d’une communication intérieure entre la Mer Baltique & l'Océan; fon Gouvernement a fait examiner différents projets, & a fixé fes vues fur le canal d'Æofflein , qui unirales ports de la côte occidentale de Da- néliarck, avec ceux de la côte orientale , avec Lubeck |, Dantzic & la Ruffie ; & qui évitera une navigation dangereufe de cinq à fix cents milles, en defféchant des Provinces marécageufes qui feront vivifiées par l’Agri- culture & la falubrité de Pair. L'Empire de Ruffie, qui correfpond par fa grande étendue à plufeurs parties du monde , à quatre mers différentes (2), a conçu & même (1) Canaux de Navigation, page 509. {z) Mer Balique, Mer Blanche , Mer Cafpienne & Mer Noire. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 45 exécuté en'grande partie de vaftes projets de Navigation intérieure , di- gnes de fa puiflance, & aflotis à {a pofition. Pierre le Grand, nouveau Légiflateur , ou, pour mieux dire, créateur de fa Nation , dictoir dés loix à {es Peuples, & traçoit de fa main des canaux , qui devoient former une navigation circulaire dans ce vafte Empire, ouvrir fes communica- tions avec les mers, & rendre Péterfbourg une nouvelle Alexandrie, IL ‘avoit embraffé dans fon plan fix grands canaux, dont le premier, qui et le canal Ladoga, commencé en 1718 , a jetté les fondements de la com- munication de la Mer Cafpienne avec la Baltique, par le grand Zac La- doga, qui s’unit yar ce canal avec Péterfbourg. Le fecond , qui eft le canal du Volga, achève cette grande commühication, en formant une navigation de fix cents lieues par le fleuve Vo/ga jufqu'à la Mer Caf- ienne. Après l'exécution de ces grands ouvrages (1), qui forment la émmu- nication de la Mer Cafpienne avec la Baltique, il ne reftoit plus qu’à étendre cette navigation jufqu'au Don (ou Tanaïs), pour réunir Pérerf bourg avec la Mer noire, l'Archipel & la Méditerranée ; la proximité du Don & du Volga, femble faciliter cette importante jonétion, Le projet en avoit été formé par Pierre le Grand, & commencé en 1707. L'Împératrice Catherine Il, digne de remplir fes grandes vues & de furmonter tous les obftacles , en a repris l'exécution en 1766 (2). Certe illuftre Souveraine , qui s’eft occupée fans relâche à faire ouvrir des ca- paux & rendre des cañaux navigables, pendant la guerre qu’elle a foute- nue avec gloire contre les Ottomans, rendra fon nom également mémo- rable à Ja poftérité par ces monuments précieux de fon règne. Fixons enfin nos regards fur la Navigation intérieure dela France, que je vais tracer däns fon état atuel. Je réunirai enfuite , fous quelques points de vue principaux , les projets intéreffants qui peuvent concourir à {on extenfion & à fa perfection, Si l’on en croit un ancien Hiftorien (3), il n’eft point de climat où la Nature ait répandu avec autant de profufion que dans cette partie des Gaules que nous habirons , tous les avantages qui favorifent la navigation des rivières & grands fleuves qui la traverfent , & toutes les facilités qui femblent inviter les Peuples à vaincre les obftacles qui les féparent. Les Romains, dont le génie élevé rempliffoit de monaments auf admirables qu'utiles l'Univers fubjugué par leur puiffance , ont fait de grands ou- vrages ne étendre la navigation intérieure des Gaules , & avoient formé des projets plus grands encore pour ouvrir dés communications (1) En 1732. » (2) Cette opération a été interrompue en 1774, par la mort funefte de M. Lowis, qui K au FR & qui a été tué par les Rebelles du parti de Pugatfchew. (3) Strabon, Liv. 4. 36 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, entre les mers : mais les révolutions fréquentes de cet Empire, & fon en- tière décadence ,en ont prefque effacé le fouverir. Sans le fecours des Sciences & des Arts, Charlemagne , éclairé par fon feul génie, a ofé faire revivre l’entreprife mémorable de la communi- cation des mers. Des guerres olorieufes | mais toujours fatales aux Peu— ples, même victorieux, firent échouer ces projets d’une politique bienfai- fante;, & pendant fix ou fept fiècles d’ignorance & de barbarie, la France fembloit avoir oublié les avantages de fon heureufe poñtion, & les moyens fouvent projettés pour élever fa puiflance par le commerce & la navigation intérieure, C’eft à l'époque de la reftauration des Sciences & des Arts, fous le règne immortel de François I (1), que l’on vit renaître l’émulation pour Jes grandes entreprifes , & l’activité du génie toujours prêt à fe dé- ployer par les feuls regards favorables des Souverains. On propofa de nouveau la jonction des mers, reconnue fi importante, & la navigation intérieure du nord au midi de Ja France, par la réunion de la Saône avec la Loire au travers du Charolois. Ce projet, qui étoit l’ouvrage du célèbre Adam de Crapone (2), fut adopté par Henri IF; mais les tra- vaux déjà commencés furent interrompus par la mort de ce zélé Ci- toyen. Sans perdre jamais de vue cette jonction importante des deux mers, tous les Princes qui ont régné depuis , &onvaincus de la gloire & de l'u- tilité de cette grande entreprife, ont varié trop fouvent dans le choix du projet. Sous le règne de Charles IX, on propofa la jonction directe de la Saône avec la Seine par Dijon , comme plus utile à la France que celle de la Saône avec la Loire ; parce qu’elle établiroit une communication plus directe au travers du Royaume , & une navigation plus commode. L'exécution de ce projet ,ou même fa décifion, furent fans doute fufpen- dues par les circonftances malheureufes de ce règne, Le Prince le plus chéri, & fon Miniftre immortel , Henri IV & Sully, dont les noms font inféparables dans l'Hiftoire de la Monarchie & dans Vamour.des Peuples , entreprirent de nouveau la jonction des Mers; & après avoir balancé la grande utilité du canal de Bourgogne avec la fa- cilité du canal du Charolois, que l’on propofoit de réunir à la Capitale en joignant la Loire à la Seine par un canal particulier, ils adoptèrent ce projet, qui eft l’origine du premier canal important & difficile que l'on ait exécuté en France. Dans ce projet, la jonction de la Seine avec la Loire , qui feule ou- (1) En z515. , } (2) Adam de Crapone, né à Salon, eft célèbre par un grand canal d’arrofement qu'il a fait exécuter en Provence en 1558 ,& qui porte fon nom. Canaux de Navigation, page 171. - SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 47 vtoit lacommunication de la Ville de Paris avec toutes les Provinces qui avoifinent la Loire , décida le commencement des travaux (1) par la contraction du canal qui fort de la Loire, près de Briare, dontil a re- tenu le nom, & fe réunit à la Seine par la rivière de Loing, près de Morer, Cet ouvrage utile & célèbre, interrompu à la mort, funefte de Henri IV, fut repris & rerminé en 1642 par le Cardinal de Richelieu , & paroît être l’époque des premieres éclufes qu’on ait exécutées en France pour faire monter & defcendre les bateaux dans les chütes des ca- naux (2). , L. Mais quelque utile que fût ce canal important, la difficulté de remon- ter la Loire au-deflus d'Orléans pendant les fécherefles fréquentes de l'été, détermina dans la fuite Louis XIV (3) à permettre à M. le Duc d’Or- Jéans la conftruction d’un fecond canal’, qui commence daps la Loire un peu au-deflus d'Orléans , & fe joint au canal de Briare à Montargis, IL a étéconftruit depuis un troifième canal , joignant la rivière de Loing , qui n'eft qu’une prolongation des deux autres, pour éviter les dangers de la navigation de cette tivière. ; Une grande partie de la France, & fur-tout la Capitale , jouiffent au- jourd'hui des avantages précieux de cette navigation , qui n’étoit dans fon origine qu'un embranchement du projet de communication des Mers par le canal du Charolois; mais ce canal, projetté depuis long-temps , examiné plufieurs fois, & ordonné à différentes époques par Louis XII & Louis XIV , eftenfin jugé par le Gouvernement moins avantageux au Royaume que le canal de Bourgogne, d'après les calculs de commerce & d'utilité de lun & de l’autre (4). Suivons l’ordre des progrès de la Navigation intérieure de la France, fans anticiper fur l'exécution des projets importants qui concourent au- jourd'hui à fa perfection. Il étoit réfervé au règne de Louis XIV , fi célèbre par l'émulatiôn des talents & les productions du génie en tous genres, d'exécuter la pre- mière communication des Mers, & le plus grand monument de naviga- tion intérieure dont la France jouifle. On ne peut mieux exprimer les (1) En 1605. “ (2) Le canal de Briare a 28,200 toifes de longueur , & contient z4 corps d’éclufes 8e 41 baflins. (3) En r679. pa (4) Depuis que ce Difcours a été prononcé, les Etats de Bouraovne ont préfenté au Roï les plans du canal du Charoloïs,, qu’ils entreprennent de conftruire entre la Saône & la Loire, pour la jonétion des deux Mers. Quelque parti que l’on prenne für le choix du canal de Dijon ou de celui du Charolois , l’exécution de l'un ou dé l’autre annonce également la néceffiré d'achever le canal de Picardie , pour former la comimunication des Mers du midi & du nord de la France, la plus avantageufe, & indépendänte du rajer dangereux de la Manche. 48 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, grands avantages du canal de Languedoc , qu'en employant les expref- fons éloquentes d'un Auteur moderne fur cet ouvrage célèbre. « Prefque » au centre de l'Europe, entre l'Océan & la Méditerranée , la France >» joint, par fa pofition & fon étendue, aux forces d'une Puiflance de » terre, les avantages d’une Puiflance maritime; elle peut tranfporter >» toutes fes productions d'une Mer à l’autre, fans pafler fous le canon » menaçant de Gibraltar, & fous le Pavillon infultant des Barbarefques. » Uncanal préférable au Pactole , verfe les richefles de fes plus riantes » Provinces dans Les deux Mers, & les tréfors des deux Mers dans fes plus 2» belles Provinces, Aucun Peuple Navigateur n’a joui d'une communi- » cation fi prompte & facile, entre fes ports par fes terres, & entre fes >» terres par fes ports », Tel eft ce menument admirable de l’induftrie humaine, qui fuffit pour immortalifer la magnificence de Louis XIV, l'adminiftration du grand Colbert , & le génie de Riquet, qui en a conçu le projet & Va exé- cuté (1), maloré toutes les difficultés phyfiques & morales qu'il a éprou- vées. Ce fuperbe canal élève les bateaux jufqu'à 600 pieds au-deffus des mers, & les fair également monter & defcendre d’une mer à l'autre, par le moyen de 62 corps d'éclufes, Il enrichit particulièrement deux grandes Provinces, par le tranfport facile de leurs productions ; il fait cir- culer, avec autant de rapidité que d'économie, entre l'Océan & la Méditerranée, les approvifionnements militaires pour les befoins de la guerre ; & dans tous les temps , il fait éviter, par une navigation füre de cinquante-quatre lieues , le circuit d’une navigation incertaine de douze cents lieues autour des côtes d’Efpagne. C’eft ainfi que l’heureufe exécution de la jonétion des Mers dans les Provinces méridionales, apprenoit à la France qu'il manquoit à fa gloire & à fa profpérité d'accomplir l’ancien & célèbre projet de la communica- tion des Mers du nord'au midi, par l'intérieur du Royaume, & d'éra- blir une Navigation générale , dout la* Capitale doit être le centre. Déjà cette communication pour la partie méridionale étoit tracée dans diffé- rents projets de navigation, qui fe réuniffoient dans les eaux de la Seine, &c fe terminoïient avec elle à fon embouchure :"mais la Nation, qui s'é- clairoit de plus en plus par fes fuccès , formoit des vœux & des projets pour étendre cette navigation dans le Provinces les plus feptentrionales ; Joindre Amfterdam avec Paris & Marfeille (2), & achever, par cette D (1) Le canal de Languedoc à été commencé en 1661, & terminé entièrement en 1682 , après la mort de M. Riquer. M. le Maréchal: de Vauban témoiona fa für- prife, en vifirant le canal , de ne pas y voir la ftatue de M. Riquet au point de partage des eaux qui domine les deux Mers, (2) Voyez la Carte, PI, IH, nouvelle SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 49 nouvelle route, la plus avantageufe communication des Mers du midi au nord de la France, Ce grand projet, trop long-temps négligé pour Fhonneur & l'avanrage du Royaume, fe prépare heureufement par des travaux commencés en Bourgogne , & par des décifions du Gouverngment fur les opérations in- terompues en Picardie. Il eft intéreflant pour tout François patriote de concevoir une jufte idée de cette grande entreprife. Après un fiècle d'examen & de difcuflion, de décifions & de varia- tions fur le choix du canal de Bourgogne ou de celui du Charolois , pour la communication des Mers, le canal de Bourgogne par Pouilly en Auxois, réunifloit enfin les fuffrages des plus célèbres Ingénieurs ; mais la confi- dération de la dépenfe , fi fouvent fatale aux entreprifes les plus utiles, en fufpendoit l'exécution ou même la décifion. En 1751, le zèle de M. Joly de Fleury, alors Intendant de Bourgogne, engagea le Gouverne- ment à s'en occuper férieufement , & à faire travailler aux vérifications &c nivellements du canal de Bourgogne , par des Ingénieurs habiles (1), Louis XV, fenfble à la gloire des monuments de grandeur & d'utilité, adopta ce projet; mais les premiers fonds ne furent aflignés qu'en 1774 (2), & les premiers travaux commencés en 1775. La direction de ce canal ne peut être défignée que dans fes points principaux convenus par les Ingé- nieurs, & refte foumife dans les autres détails aux confdérations lo- cales. Le canal commence au-deffus de Joigny , vers l'embouchure de lAr- mançon dans l'Yonne; près de Tonnerre, il recevra fes eaux de lAr- mançon , quittera cette rivière pour fuivre la rive droite de la Brenne, & reprendra le vallon de l’Armançon jufqu'à la fource de cette rivière , près de Pouilly en Auxois, où fera le point de partage des éaux, Ce point de partage ou fommer du canal fera de 888 pieds au-deflus de l'Yonne, & de 674 pieds au-deffus de Saint-Jean-de-Laune ; le canal defcendra par le vallon de Louche à Dijon, & continuera par la plaine de Longecourt, jufqu'à Saint-Jean-de-Laune, où il fe terminera dans la Saône. Sa longueur Rra d'environ 120,000 toifes , que l’on parcourra par le moyen de cent cinquante fept corps d'éclufes : c’eft le feul incon- vénient que l’on objeéte contre cer utile projet (3), qui facilitera, par — (x) MM. de Regemorte & de Chezy. (2) Arrêts du Confeil des 7 Septembre 1773 & 9 Août 1774. (3) On croit que la conftruétion entière du canal de Bourgogne coûtera environ 18 millions : mais l'Etat en fera dédommagé avantageufement par l’économie an- nuelle de 3 millions fur le prix detranfport des marchandifes de quatre mille bateaux ; par la fuppreffion des chevaux qui font employés au tranfport de terre, & par la ren- trée au profit de la Sgciété, du terrein immenfe qui eft employé à leur nourriture, Canaux de Navigation, page 143. Tome XXII, Part. I, 1783. JAN VIE R, G so OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, une navigation non interrompue , le commerce de Marfeille & Lyon avec Paris, Rouen & les Provinces feprentrionales, & qui ouvrira de plus une nouvelle circulation aux denrées & productions de quatre Pro- vinces très-fertiles, la Champagne , la Lorraine, la Franche-Comté & le Duché de Bourgogne , dont il réndra la communication facile avec Paris. ” Mais ce grand fyftême de Navigation intérieure ne peut atteindre à fa perfection , que par la jonction de la Seine avec les Provinces feptentrio- nales. La Nature a préparé heureufement cette importante opération, par la réunion de l'Oife avec la Seine, & femble n'avoir laiflé qu'un grand obftacle à vaincre, pour honorer l'induftrie de notre fiècle par un monu- ment admirable dans l’intérieur de cette Province. (Le refle, qui traite du Canal de Picardie, au mois prochain.) PR EN CL TS D'UN MÉMOIRE Sur le lieu & les autres circonftances de la formation des Glaçons Jpongieux que les rivières charrient (1) ; Par M. DESMAREST. M. HALESs eft le premier Phyficien qui ait parlé des glaçons que lesrivières charrient , & des circonftances de leur formation. Il cite d’abord M. Plot, qui, dans fon Hiftoire de la Province d'Oxford, remarque, d'après le rapport des Bateliers, que les rivières de cette Province commençoient à geler par le fond. M. Hales joint à ce témoignage celui des Bareliers de la Tamife, qui afluroient avoir retiré plufieurs fois du fond de cette rivière de gros glaçons à l’aide de leurs pics. Comme il a fenti que ces affertions étoient trop vagues , il y ajoute fes propres ob- fervations ; mais il faut avouer qu’elles ne font rien moins que concluantes en faveur de fa Thèfe: auf M. l'Abbé Nollet trouva-til tanc de confufion dans les détails de ces obfervations, & fi peu de précifion dans leurs réfultats, qu'il crut devoir entreprendre en 1743 une fuite d'expériences & de recherches , dans la vue de conftater Le fait avancé par M. Hales, ou de le détruire, ou enfin d’éclaircir ce qu'il y avoit d'équivo- que. Ce Phyfcien, en rendant compte de fon travail , combat viéto- 1 (n Ce Précis a été lu à la Séance publique de l'Académie nces le 14 Avril 3781. C SUR L'HIST. NATURELLE'ET LES ARTS. SI rieufement la théorie de M. Hales ; mais il ne lui oppofe aucune obferva- tion propre à décider la queftion, & feulement des préfomptions aflez fortes, qu'il fait valoir avec beaucoup d'art. M. de Mairan, en adoptant les raifonnements de M. l'Abbé Noller, foit dans l'Hiftoire de l'Acadé- mie, foit dans fon Traité de la Glace , ne le fait cependant pas fans quelque réferve. I] avoue que le fair avancé par M. Hales termineroic toute difcufion, s’il étoic bien conftaté & bien vu. Cet aveu m'a fait foup- gonner que M. de Mairan n’envifagsoit pas la formation de la glace fur le fond des rivières, comme abfolumentYcontraire à la théorie. J'ai donc cru devoir fuivre de nouveau cette queftion intéreflante ; & à me- fure que j'ai recueilli des faits, je me fuis convaincu que la formation des glaçons ne pouvoit avoir lieu que dans des circonftances totalement différentes de celles qu’avoit annoncées M, Hales. J'ai étudié d'abord les glaçons flottants , leur compoftion, les circonftances de leur appari- tion , de leur accroiflement, de leur diminution ; & tous ces faits rappro- chés, tendoient à prouver que les glaçons des rivières fe formoient fur le fond avant que de venir flotter à la furface. Ceci forme la matière d’un Mémoire lu & préfenté à l'Académie en 1776. Il me reftoit encore à voir ces glaçons fe former & croître {ur le fond , s’en détacher & venir Aotter à la furface. Le détail de cette obfervation, qui complette toutes les au- tres , & qui s'y raccorde merveilleufement , fait l'objet de ce Mémoire : on y trouvera toutes les circonftances que M. de Mairan defiroit de voir conftatées pour terminer toute difpute, Dans la première partie, j'expole la fuite & les détails des faits concernant la formation de la glace au fond d'une rivière , & la théorie que j'ai déduite de ces faits; dans la feconde, je fais l'application de cette théorie à quelques phénomènes obfervés dans différentes parties du cours des rivières qui charrient. “ PREMIÈRE PARTIE, De la formation de la Glace fur le fond des Rivières ; & des circonflances de cette formation. Les Etats de Languedoc ayant réfolu d'introduire les machines & les procédés Hollandois dans un des moulins à papier d'Annonay, je fus - chargé en 1780 de veiller à l'exécution de ce projet, fi favorable à l’ac- croiflement de l'induftrie nationale. Le moulin à papier de M. de Mont- golfier ayant été choifi pour cet établiflement , j'y fixai mon féjour au mois d'Octobre de la même année , & les différents travaux qu'on y a exécutés l’ont prolongé jufqu’à la fin de Janvier 1781. C'eft à, des cir- conftances aufli fatteufes, que je dois l’obfervation du fait curieux dont je me propofe de décrire tous les détails. Au commencement de Décembre 1780 , après la chûte de neiges abon- dantes, le froid redoubla par un vent de nord aflez vif; & quoique le ciel fût couvert de nuages épais & continus, il augmenta jufqu'à 6 & 7 Tome XXII, Part. 1, 1783. JANVIER, G 2 52 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, degrés au-deflous du point de la congelation, La rivière de Déome, fur laquelle eft bâtie la Papeterie où j'étois établi, gela d’abord par la fuper- ficie dans les parties où l'eau du courant étant foutenue & tranquille , n’a- voit que très-peu de mouvement: comme ces glaces fuperfcielles & com- paëles s'agrandifloient chaque jour aflez rapidement , j'étois occupé à fuivre leurs progrès , lorfque j'apperçus le long des bords de la rivière, à environ 2 ou 3 pieds de profondeur fous l’eau , des amas de fable qui me femblèrent fingulièrement agglutinés enfemble, J'ignorois quelle étoit l'efpèce de ciment qui pouvoit avoir formé cet affemblage. Je tâchai d'en détacher des morceaux avec un pic, afin de les examiner de plus près: je fus très-furpris, lorfqu’au lieu d’un poudingue où amas de fable, je ramaffai un glaçon d’une ftruéture fingulière. Les fables y étoient réunis par des cloifons de glace , qui formoient autant de cellules qu'il y avoit de grains de fable. Quelques-uns des morceaux que je détachai, après avoir roulé pendant quelque temps fur le fond de la rivière, s’élevèrent infenfblement, & vinrent fe montrer à la furface du courant. [ls me rappellèrent, par leur forme & leur tiffu, les glaçons fpongieux que j'a- vois vu plufeurs fois fortir de l'eau , & flotter à la fuperficie du courant de la Marne à Châlons, & de la Seine à Troyes. J'avoue que, d'après cette première obfervation, je fus tenté de croire que j'avois découvert le lieu & les circonftances de la formation de ces glaçons fpongieux ; dont je nr'étois occupé depuis long-temps ; mais je conçus qu'il me restoit encore beaucoup de circonftances à fuivre & à connoître, avant que de pouvoir prononcer fur ce point de Phyfique. Le lendemain, le froid fe foutenant à-peu-près au même degré , je vis que nôn-feulement ces affemblages de fables & de glace s’étoient agrandis dans le premier endroit où je les avois obfervés la veille, & fur-tour le long des bords de la rivière; mais encore que de femblables glaçons commencçoient à fe former fur plufieurs autres parties du fond des envi- rons , & même au milieu du lit où le courant étoit le plus rapide. Je re- marquai ce jour-là que ces efpèces de poudingues glacés avoient une couleur grife plus où moins foncée, fuivant la proportion des fables renfermés dans les cellules. Quelques-uns de ces glaçons , où les fables fe trouvoient en moindre quantité, vus à travers 2 pieds d'eau, reffembloient affez à des éponges. Les jours fuivants, les glaçons s’étoient myltipliés bien davantage en- core fur certaines parties du fond , quoiqu’en général ils me paruflent plutôt augmentés en groffeur qu'en fuperficie. Enfin, ils revétifloient pref- qu’entièrement le fond & les bords d’un canal qui conduit & diftribue fur les différentes roues du moulin à papier l’eau de la rivière, foutenue par une digue. Après que j'eus acquis l'habitude de diftinguer les glaçons fpongieux du fond fur lequel ils étoient adhérents, & de les reconnoître à travers 3 ou SUR L'HIST, NATURELLE ET LES ARTS. 53 & pieds d'eau, je parcourus les parties du canal de la rivière au-deffus & au-deflous de la Papeterie. Je trouvai que les glaçons éroient dans ces parties aufli nombreux qu'aux environs; qu'ils fe préfentoient fous les mêmes formes , & qu’ils recouvroient de la méme manière certaines parties du fond, & fur-tout celles des bords, pendant que d’autres parties aflez étendues n’en offroient aucuns veltiges ; j'allaimême reconnoître quelques portions du canal d’une rivière qui fe réunit à celle de Déome au-deflous d’Annonay, & j'y obfervai les mêmes phénomènes. A peine toutes ces obfervations furent-elles terminées, que le dégel furvint aflez promptement. L'eau de la rivière ayant augmenté , ainfi que la rapidité du courant, les glaçons du fond diminuèrent fenfiblemenc , foit par l’action du courant, dont la vitefle étroit accélérée, foit par la chaleur de l'eau: il sen détacha même du fond de gros morceaux, dont une partie fe traîna long-temps fur le fond; & l’autre , après avoir perdu beaucoup de fables & de vafes, qui commuaiquoient fur leur trace une teinte jaunâtre à l’eau de la rivière, remontèrent & vinrent otter à fa fur- face, Pendant tous cestranfports & cette deftruétion des glaçons fpongieux , la rivière fe troubla au point qu'on fut obligé d'interrompre le travail des moulins à papier. Enfin, le lendemain du dégel, à quatre heures après-midi, on n'appercevoit plus , tant fur lesfond du lit de la rivière, que le long des bords, aucun de glaçons fpongieux qu'on avoit vus’y for- mer & s’y agrandir pendant cinq ou fix jours de fuite; tandis que les glaces compactes & folides , qui s'étoient formées à la furface de l'eau, étoient encore prefque entières : elles ne furent entraînées que par une crue quifui- vit le dégel. Pour donner une idée de la quantité de glaçons qui fe trouvoient adhé- rents au fond du lit de la rivière, lors du dégel, je dirai que l'eau du cou- rant , qui, le 16 Décembre au matin , couloit bord à bord danse canal dont j'ai parlé, baïfla d’un pied & demi le foir , après que les glaçons eu- rent été entièrement déblayés, & cela , malgré la crue que la fonte des neiges & des glaces avoit dû produire, Je jugeai, d’après une foible eftime , que ces glaçons fpongieux occu- poient fur le fond du lit de la rivière, à-peu-près la place de 2 pieds d'eau. Par ces premières obfervations, j'ayois reconnu le lieu où fe formoient les glaçons fpongieux , & déterminé la caufe de leur tiflu cellulaire ; j'en- trevoyois même le mécanifme de leur accroiflement & de leur augmenta- tion en épaifleur: mais préfumant que ces glaçons pouvoient être em- ployés par la Nature à fournir au convoi continuel des buuins que les grandes rivières charrient, j'ignorois encore par quels moyens elle mettoit en œuvre ces matériaux ; car, avant le dégel , rous ces glaçons reftèrent adhérents au fond , & aucunne s’en déracha. Il eft vrai que pendant tout le temps qu'ils fe formèrent & prirent des accroiflements, le ciel fut ÿ4 - OBSERVATIONS SUR LA PHFSIQUE, conftamment couvert de nuages épais ; Le foleil ne fe montra jamais; & enfin il ne furvint aucune variation un peu confidérable dans le froid , du jour à la nuit. Or, je favois depuis long-temps que ces circonftances s’oppofoient à l’apparition des glaçons qu'on voit flotter fur les grandes rivières, & je foupçonnai que ces mêmes circonftances avoient pu tenir les glaçons fpongieux attachés au fond. J'attendis donc que des circonftances favorables à la folution de ces difficultés fe préfentaflent. Après douze jours de dégel , Le froid reprit plus vivement que la première fois, & le $ Jan- vier , les glaçons fpongieux commencèrent à paroître de nouveau fous les mêmes formes qu'à la première gelée , tant au milieu du lit que le long des bords de la rivière. Pendant les quatre premiers jours que je vis les glaçons fpongieux fe former fur le fond de la rivière, & particulièrement fur celui du canal dont j'ai parlé ; le progrès de leur accroiflement me parut uniforme, c’eft à-dire, aufñi confidérabie Le jour que la nuit. Outre cela ,ces mêmes glaçons, quelqu’épais qu’ils fuffent, ne m'offroient que des mafles conti- nues & fans aucune interruption , en forte qu'il n’étoit poflible d’en déta- cher des morceaux qu’en les brifant avec un pic ; le courant même de la rivière le plus rapide ne les entamoit que foiblement , & n’en enlevoit que de petits débris dans le$ parties anguleufes & faillantes les plus expofées à fon action. Je ne dois pas omettre une circonftance dont j'ai déjà fait mention ci- deffus, & qui influe d’une manière particulière fur les effets que j'expofe ici, Pendant tout ce temps, le ciel fut couvert de nuages épais que pouf foit un vent du nord aflez vif, & le froid n’éprouva pas de variation bien fenfible du jour à la nuit. Ainf , l’accroifflement uniforme des glaçons fpongieux, & leur continuité, me parut être la fuite du degré de froid conftamment égal. Ce qui acheva de m'en convaincre, ce furent les chan- “HR que ces glaçons éprouvètent en conféquence d’un fyftème différent ans la diftribution du froid , lequel eut lieu dès le fixième jour. Le ciel fe découvrit, & le foleil parut environ cinq à fix heures; ce qui produifit une grande variation dans le froid, & par conféquent dans fes effets. Les glaçons fpongieux prirent des augmentations confidérables pendant la nuit, & le jour ces accroiflements furent ralentis & même entièrement fufpendus. Je m’affurai de tous ces effets & de leurs nuances par des mefures précifes , que je pris régulièrement plufieurs jours de fuite fur les glaçons. Je vis en même temps que les glaçons nouvellement formés depuis que le foleil s'étoir montré la première fois, étoient féparés les uns des autres par des intervalles bien nets & bien marqués: ils formoient autant de lits diftinéts qu'il y avoit eu de nuits depuis que le foleil avoit paru ; & quoique, dans les intervalles, de foibles linéamens de glace les euffent comme foudés les uns aux autres, ils fe défunifloient facilement, & cé- doient au moindre effort qu'on ‘faifoit pour les détacher : d’ailleurs, le SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. ss courant de la rivière, qui éprouvoit une certaine augmentation & une accélération de viîtefle proportionnée pendant les cinq heures du jour que le froid étoit adouci, attaqua plufeurs de ces glaçons, & les détacha les uns des autres par les intervalles qui donnoient Je plus de prife à fon action. Il me fut facile de reconnoître dans ces glaçons ainfi diftribués par lits fur le fond de la rivière, les produits de la congelation, qui chaque nuit fe rétablifloit fur ce fond; &, dans les intervalles qui les féparoient, la fuite de l'interruption de cette congelation, lorfque le froid éroit adouci pendant cinq ou fix heures du jour. Je crus voir aufli dans cette nouvelle difpofition les moyens que la Nature employoit pour détacher les glaçons fpongieux du fond des ruiffeaux & des rivières fur lequel ils fe forment chaque jour, & les tranfporter jufqu'aux rivières principales, Comme cer objet exige un certain développement , j'y reviendrai dans la fuire de ce Mémoire. En attendant, je crois devoir prévenir ici que je connois lufieurs faits analogues à celui que je viens d’expofer ; je me propofe de LÉ publier à la fuite de ce Mémoire. Tous prouvent qu'une certaine di- minution périodique & journalière dans le froid occafionne une diftinétion & une féparation entre les glaçons formés d'une intermittence à autre. J'ai déjà dit que les glaçons fpongieux étoient un affemblage de James de glaces , qui compofoient des efpèces de petites cellules où fe rrouvoient logés des grains defable ou de terre , qui donnoient la forme à ces cellules. En continuant d’obferver ces glaçons, & comparant leur ftruéture & leur compofition fingulière avec le lieu de leur formation , je vis que toutes ces circonftances étoient favorables à leur formation. Je compris que l’eau difperfée au milieu des fables du fond de la rivière y jouifloit d'un repos & d'une tranquillité aflez grande pour recevoir l’impreflion du froid extérieur; ue d’ailleurs la congelation de cette eau y étoit favorifée par le contact LE fables & des terres, qui pouvoient y être refroidis à un degré encore plus bas que celui de la glace. 3 Toutes ces circonftances font aflez conformes à la loi générale à la- quelle M. de Maïran ramenoit toujours les partifans de la théorie de M. Hales, qui prétendoient, fans avoir aucun fait pour eux, que la glace fe formoit fur le fond des rivières avec l’eau agitée du courant ; ce qui paroiffoit incroyable à M. de Mairan, attaché à cette rèole , pour laquelle tous les phénomènes dépofent: favoir , que l’eau qui fe gèlene reçoit cette nouvelle modification que par le contaël ou l'approche de quel- qu'autre corps folide ou fluide , dont le degré de froïdeur furpalfe celui quelle avoit avant de fe geler, & va tout au moins jufqu'au froid de la congelatior, Dans le cas préfent , l’eau fe gèle, non fur le fond , mais dans le fond même ; & au lieu de fe renouveller à chaque inftant, comme celle du courant, elle y eft ftagnante au milieu des fables , qui, la tou «6 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, chant par leurs faces refroidies, la réduifenr en petites lames de glace: Pour que tous ces effets s’opèrent, il fuffit que fur le fond des rivières du fecond & du troifième ordre, il puifle fe trouver une certaine quantité d’eau engagée au milieu des fables, & tranquille au-deffous de l'eau courante, Cette eau me paroît propre à former les glaçons fpongieux, routes les fois que le froid extérieur peut l'atteindre au milieu de ces fables , & refroidir le tout jufqu'au degré de la congelation, Cette théorie étant une fois conçue & établie d'après des obfervations fimples , toutes les autres circonftances de la formation des glaçons fpon- gieux que j'avois reconnues à la première gelée, & que je continua de voir à la reprife du froid , me parurent s'expliquer aufli facilement. Ain, 1°. fi les glaçons fpongieux ont paru d'abord le long des bords de la ri- vière de Déome, & à une moyenne profondeur fur le fond, c'eft parce que, dans cette potion , les fables & l’eau difperfée au milieu d'eux, éoient plus accellibles à l'impreflion du froid extérieur que par-tout ail- leurs : en conféquence, le progrès de la formation des glaçons fur les autres parties du fond , fuivit le progrès du refroidiffement que l'eau & les fables pouvoient y éprouver les jours fuivants ; & il me parut ‘qu’à environ 7 degrés au-deffous de la glace , le froid ne s’éroit pas fait fencir au-delà de 4 pieds & demi de profondeur fous l'eau courante. 2°. La formation des glaçons fpongieux fuppofant une eau tranquille &e difperfée au milieu des fables , par-tout où le fond de Ja rivière en étoic dégarni, & où le courant libre rouloit immédiatement fur des rochers à nud, on n’apperçut jamais le moindre veftige de glace : au contraire, par-tout où ces fables fe trouvoient dépofés, les glaçons s'y multiplièrent fuivant la proportion de ces amas de fables. Les différences les plus remar- quables que m'offrirent les glaçons, foic relativement à leur volume, {oit relativement à leur folidité & à leur conlftance, étoient dé- pendantes de l'abondance ou de la petite quantité de ces fables. Les glaçons étoient foibles & ifolés dans les parties où les fables étoient rares, & ils ne prirent des accroiflements confidérables & fuccellifs que dans les parties du fond comblées par des dépôts fort épais de terres & de fables. 3°. Les glaçons ne fe formoient pas feulement fur le fond des rivières ; c'étoit aufli fur ce fond & par la partie inférieure qui touchoit au fond , que ces glaçons prenoient leur accroiffement fucceflif. Suivant ce méca- nifme , la glace déjà formée étoit foulevée continuellement par la force expanfve de la glace qui fe formoit ,jointe à fa pefanteur fpécifique moindre que l'eau; & tant que les fables réfidants au fond, & l'eau difperfée au mi- lieu d'eux, fournifloient des matériaux à la congelation, il fuccédoit chaque jour un nouveau /fratum de glace au-deflous des glaçons formés les jours précédents. En obfervant cette marche , j'ai vu que certains glaçons, en une feule nuit , avoient été foulevés de 5 à6 pouces, & avoient acquis une bafe ( SUR L'HIST. NATURELLE ETLES ARTS. 57 bafe de pareille épaiffeur,; quelques-uns même, par des fous-additions journalières & aflez égales , avoient crû de manière à former des Ifles de glace, qui figuroient au-deffus de l'eau courante. Le fyftème de cette formation & de ces accroiffemens étant une fois bien connu & bien conitaté, il en réfulte que chaque jour le fond des rivières peu profondes, lorfque les cifconftances que j'ai décrites font fa- vorables , peut fournir un certain convoi de glaçons affez nombreux, qui font entraînés parle courant; car à mefure que les glaçons fupérieurs fe détachent, les glaçons inférieurs leur fuccèdent & fe reproduifent fans interruption, SECONDE PARTIE. Application des principes déduits des faits précédents, à quelques phénomènes de l'apparition des Glaçons. Je pourrois faire ici l'application des principes que j'ai déduits des cir- conftances de la formation des glaçons fur le fond des rivières , aux phé- nomènes qui accompagnent lefir afparition, & morntrers l'union de tous ces phénomènes avec ces circonftances; mais je m'attacherai feulement à expliquer ici pourquoi les rivières ne commencent à charrier que lorf- que Le froid eft adouci journellement par l'apparition du foleil , où par quelqu'autre caufe équivalente. Comme ce problème eft un des points de la queftion préfente Le plus difficile à réfoudre, il m'a paru exiger une difcuffion un peu étendue, & le rapprochement de tous les faits , pour que fa folution rentràt naturellement dans la théorie , & fervit en même temps à la confirmer. Les Bateliers qui fréquentent la Marne & la Seine , m'ont appris depuis long-temps qu'on ne voit jamais Les glaçons flotter fur ces rivières, & en interrompre la navigation , quoique le froid foit confidérable , tant que le cielbeft conftamment & uniformément couvert de nuages épais ; mais que fi le foleil fe montre, ces rivières, peu de jours après, commencent à charrier des glaçons; qu'alors , inftruits par leur propre expérience , ils profitent de l'intervalle qu'il y a entre l'apparition du foleil & l'arrivée des glaçons, pour gagner un port où ils puiffent mettre en füreté leurs ba- teaux, Les Meüniers, qui ont un intérêt pareil & une égale facilité d’ob- ferver ces circonftances , m'ont fait part aufli des mêmes réfulrats, Quoique je ne connufle pas la raifon de ces phénomènes , je n’en ai pas été moins attentif à les vérifier dans goutes Les occafions qui fe font préfentées depuis environ vingt ans. Pendant ce temps, les circonf- tances indiquées par les Bateliers & les Meüniers, comme précédant l'ar- rivée des glaçons ottans , foit fur la Seine, foie fur la Marne, ont éré conftamment fuivies de l'effer, coutes les fois que je les ai obfervées. Ce- pendant j'ai reconnu, aufli que l’apparition du foleil n'étoit pas une cir+ conftance qui précédàt néceflairement l'arrivée des glaçons ; & pourvu Tome X XII, Part. I, 1783. JANVIER. L s8 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, que , pendant le jour, il furvint une diminution‘un peu confidérable dans le degré de froid qui régnoit la nuit, à peu-près comme elle a lieu lorf- que le foleil paroît , cet adouciffement journalier du froid , quand même le ciel éroit couvert, pouvoit être envifagé comme un prognoltic de l'arrivée des glaçons flottans fur les rivières , aufli certain & auili für que l'apparition du foleil pendant cinq ou fix heures du jour. Ce fait étant vérité & réduit à fes véritables circonftances , il eft queftion maintenant d'en indiquer la caufe. Il me fufñt de montrer la dépendance néceflaire qu’il y a entre l’adoucifflement du froid par l'ap- païition du foleil, ou par une autre caufe équivalente, & l'arrivée des glaçons flottans fur les grandes rivières ; ce qui m'eft facile, d'après les obfervations faites à Annonay. Nous avons vu que fi la diminution du froid pendant le jour étoit telle, que Le travail de la congelation füt fufpendu entièrement au fond de la rivière, cinq ou fix heures feulement, les glaçons produits par la congelation qui fe rétablifloit chaque nuit, étoient féparés par des inter- valles très-marqués ; que ces glaçons ; formés d’une intermittence du froid à l’autre, n’adhéroient que très-lésèrement enfemble ; qu’ainfi , le moindre choc du courant de la rivière , ou l’impreflion de la plus foible chaleur, pouvoient les défunir , les déracher du fond , & les faire mon- ter à la furface. Or , nous avons vu que tous ces phénomènes ne fe montroient , & que ces effets n'avoient lieu qu'autant que le foleil paroif- foit cinq ou fix heures du jour , ou que le froid étoit adouci. Il n’eft donc pas étonnant qu'il s’établiffe un convoi de glaçons fur les grandes rivières deux ou trois jours après que ce fyflème de variation dans la températuge de l’atmofphère y a été introduit & foutenu par l’appari- tion du foleil, où par quelqu’autre caufe équivalente. Nous avons vu au contraire que , lorfque le ciel étoit couvert We mément & conftamment le jour & la nuit, comme il n’y avoit point'd'in- terruption dans le travail de la congelation au Fond dBs rivières, on ne remarquoit pas de féparation dans les produits de ce travail; & que ces mafles continues de glaçons adhérant très-fortement au ford des rivières & aux fables qui les y fixent , ne pouvoient en être détachées par l’ef- fort du courant, ni venir flotter à la furface. Il ne doit donc point paroître de glaçons fur aucune rivière, tant que le ciel eft couvert conftamment de nuages épais. Mais de ce que les rivières ne voiturent point de glaçons, il ne s'enfuit pas qu'il ne s’en forme point pour lors fur leur fond , fi le froid peur l’atteindre. Le fyftème feul de leur formation & de leur com- pofition s'oppole à ce qu'ils fe détachent du fond pour fe montrer à la furface, 1 Il eft encore une circonftance qui tient à l’adouciffement du froid pen- dant le jour, en conféquence du ciel découvert ou de toute autre caufe; & cette circonftance eft favorable à l'apparition des glaçons fur les ri- SUR L'HIST. NATURELLE ET LES: ARTS. $9 vières: c'eft l'augmentation de l’eau des ruiffeaux par la fonte des neiges & des glaces, & l'accélération de virefle qu'en reçoit le courant. [A eft vi- fible que cette circonftance contribue à détacher pendant le jour les gla- çons adhérents au fond des rivières, & à vaincre la réfiftance de. ceux qui n'avoient pas cédé pendant la nuit. Cette augmentation du courant libre éroit telle dans la rivière de Déome , que, pendant le jour , deux mou- lins , qui la nuit chommoient faute d'eau, pouvoient tourner environ huit heures, Concluons de tous ces’ détails, que trois moyens concourent à déta- cher du fond des ruiffeaux & des rivières les glaçons fpongieux qui s'y for- ment: 1°, la féparation des glaçons formés chaque nuit, féparation pro- duite par l'adouciffement du froid pendant le jour , en conféquence ou de l'apparition du foleil, eu de toute autre caufe femblable ; 2°. la cha- leur, qui lors de l'adouciffement du froid £e fait fentir jufqu’aux glaçons fixés au fond des rivières, & détruit la foible foudure de glace Si les unifloit enfemble ; 3°. end l'augmentation journalière de l’eau des ri- vières qui charrient, & l’actélération du courant précifément aux heures où les glaçons fpongieux s'élèvent du fond en plus grand nombre, & viennent flotter à la furface. : On m'objeétera peut-être que ces différens moyens indiqués ici, d'a- près l'obfervation, comme les feules reflources que la nature, emploie pour former les glaçons fpongieux & les détacher du fond des rivières , font infuffifants, & n’ont aucune proportion avec les effets connus ; que les rivières affluentes du premier & du fecond ordre , qui fe jettent dans les principales, que les rivières principales elles-mêmes , ne peuvent four- nir aux convois nombreux & continuels des glaces que les rivières prin- cipales charrient; qu’ainfi cette découverte ne fatisfait pas à routes les conditions du problème que j'ai entrepris de réfoudre. J'avoue que fi l’on confidère la grande quantité de glaçons que charrie une rivière principale, comme la Seine par exemple, dont le canal eft fouvent pendant plulieurs jours , fuftout à Paris , couvert de glaçons très-ferrés , qui s’entre-choquent continuellement, & qui, faute d'un cer- tain jeu , ne peuvent plus obéir au courant & finiflent par s'arrêter, il eft Mficile de fe perfuader qu'ils foient formés fur le fond des petites & des moyennes rivières qui fe jettent dans la Seine; d’ailleurs, fi l'on examine attentivement les glaçons tels qu'ils font à Paris & au-deflous , on croira encore moins que fous la forme & le volume confidérable qu'ils y ontacquis, ils puiffent s'élever du fond des rivières; enfin, fi l'on obferve ces mêmes glaçons dans les parties fupérieures du cours de la Seine à Troyes ou de la Marne à Châlons, il ne reftéra plus aucun doute à ce fujet. C’eft d'après cet examen fuivi & cette comparaifon détaillée des glaçens que charrient ces rivières dans les différentes parties de leur cours, que j'ai reconnu que la glace fpongieufe , la glace qui , fuivant mes dernières obfervations , fe Tome XXII, Part, 1,1783.J4 N VIE R: H à 60 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, forme fur le fond des rivières, eft tout au plus la cinquième partie de celle qui entre dans la compoñition des glaçons flottants qu'on voit à Paris. Il eft vrai qu’elle fe trouve en plus grande proportion dans ceux qu’on voit à Troyes ou à Châlons, & qu'elle en forme au moins le tiers & même quelquefois la moitié; mais les hutins y font moins nom- breux , & n'ont pas encore acquis un volume auf confidérable que lorf- qu'ils arrivent à Paris. Il faut donc diftinguer plufeurs efpèces de glaces qui entrent dans la compofition des glaçons flottants ou butins: la glace fporgieufe qui en fait la bafe , & la glace compaite & d'un tiflu ferré qui fe forme deflus cette bafe pendant le trajet que peuvent faire les glaçons à la furface de l'eau; voilà Les feuls matériaux qui contribuent à former les glaçons flottants. Ces obfervations fur Les glaçons flottants, fur la proportion de la glace, Ou fpongieufe, ou compaële , qui entre dans leur compofition , fur leur forme, fur le progrès de leur accroiffement | font l'objet d'un Mémoire que j'ai préfenté à l'Académie en 1776. Elles font deyenues encore plus intéref- dantes pour moi, depuis que j'ai découvert l'oine des glaçons /pongieux , qui métoit pour lors abfolument inconnue. En même temps que ces recherches m'ont appfis à réduire la glace fpongieufe à fa véritable pro- portion, elles m'ont fait connoître aufli gue certe glace fpongieufe étou conf- tammient la bafe de rous les glaçons flottants à la furfate du courant des rivières 3 qw'elle er compofoit fur-cout dans les parties [upérieures de leur cours le premier lit & La premiére ébauche, de manière que, fans ces noyaux , il ne s’etabliroit jamais aucur convoi de glaçons fur les rivières; qu'enfin, mal- gré les changements & les altérations que cette glace fpongieufe éprouve dans les divers accroiflements que prennent Les glaçons flottants, on peut toujours la reconnoître à fon tiflu cellulaire qu’elle conferve jufqu'au dégel, & dont on diftingue ehcore des traces bien fenfibles dans le progrès de la fonte de ces glaçons. : S'il eft décidé maintenant que les glaçons fpongieux ou cellulaires n’en- trent que pour ure quantité peu comfidérable dans Les glaçons ou burins que les grandes rivières charrient, fur-tout vers le milieu & dans les par- ties inférieures de leur cours, il s’enfuit que la quantité qui peut fe former ur le fond des ruiffeaux & des moyennes rivières affluentes , ainfi que fur les parties du fond des grandes rivières que Le froid peut atteindre , eft en proportion avec l'emploi que la Nature en fait, & qu'il faut fe bor- ner à cette reflource, puifque l'obfervation nous la fait connoître comme luffante. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 61 SR D PRG EE REF ET APE OP AMOR TUE DES DÉTONNATIONS CHYMIQUES; Par M. CKHaPTAL, Profefleur de Chymie des Etars de Languedoc. 1, P ARTIES égales d'air déphlosiltiqué & de phlogiftique donnent une explofon des plus violentes. Si on préfente à la furface du vale qui contient ce mélange un charbon ou tout autre corps, embrafé, on apper- çoit une flamme bleue dans le moment de la déronnation (1). 2°. Deux parties d'air déphlooiftiqué & une d'air inflammable retiré du Charbon par une première diftillation , donnent une explofion terrible pi le contaét d’un corps embrafé, & la Aamme qui paroît à l’inftant de la étonnation eft blanchâtre. . L'explofion de trois pouces cubiques de ces mêlanges équivaut à celle d'un violent coup de fufl. De ces deux expériences, je déduis la théorie de toutes les détonna- tions poffibles. I. Qu'eft-ce que l'or fulminant? c'eft une chaux métallique imparfaite, puifqu'il contient de l'air déphlogiftiqué & du phlooiftique. 1°, I contient de l'air déphlogiftiqué. Si on précipite l’or de fa ‘diflo- lution par un alkali fixe, & qu'on diftille ce précipité après l'avoir féché , on en retire de l'air déphlosiftiqué en abondance. C'eft ce que j'ai vérifié d'après l’expérience du célèbre Scheele, fe. xxxix , Traité Chymique de L'air & du feu, 2°, Il contient du phlogiftique. J'ai diffous de la chaux d’arfenic dans de l'alkali volatil; j'ai décanté & laiffé repofer la diflolution pendant fix mois : au bout de ce temps , j'ai trouvé au fond du vafe des cryftaux oc- taëdres de régule d'arfenic de la plus grande beauté, J'ai d’autres expé- riences fur le même phénomène , que je rendrai bieftot publiques. Ainfi , l'alkali volatil qui fe dénature en précipitant For de fa diffolution , donne du phlogiftique à ce métal, Lors donc que j'expofe de l'or fulminant à une douce chaleur , le phlo- (1) Pour avoir le phlogiftique dans fon dernier degré de pureté, il faut épuifer le charbon de tout fon air inflammable , par le moyen d’une diftillation des plus vives & des plus longues : alors on le mêle avecia pierre calcaire pulvérifée; on diftille forte- ment, & l’on obtient encore de l'air inflammable, dont on précipite l'acide méphirique par le moyen de lalkali cauflique ; ce qui refe eft le phlogiftique pur, donnant une “amme bleue plus où moins belle, fuivant fon degré de pureré. 62 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, giftique & l'air déphlooiftiqué s’en dégagent, fe combinent & s'enflam- ment par la fimple chaleur. I. Les précipités mercuriels, qui, mêlés avec du foufre, fontexplofion, felon M. Bayen, déronnent par la même raifon; ici le phlogiftique du foufre fondu par la chaleur, fe combine avec l'air déphlogiftiqué du pré- cipité. tr. Les métaux que l’on réduit par le flux noir produitent de légères détonnations dans le creufet , qui ne proviennent que de ce que l'air dé- phlogiftiqué des chaux métalliques fe combine avec le phlogiftique , qui fe dégage du charbon , & s’enflamme à mefure. , IV. Dans la poudre fulminante, le foufre, Le nitre, l’alkali, entrent en fufion à une douce chaleur , & ne forment qu'une mafle liquide; alors l'alkali cherche à s'emparer de l'acide, le phlosiftique du.foufre fe dé- gage en même temps que l'air déphlogiftiqué du nitre, & leur mélange détonne. Ayant Ge tous Les débris d’une grande quantité de poudre fulminante , je n'y ai trouvé que du tartre vitriolé, V. Le nitre ne détonne que lorfqu’il eft en contact avec le phlogiftique , parce que la réunion & la combinaifon de ces deux principes deviennent néceffaires , pour que la détonnation ait lieu. VI. L'air inflammable & le phlogiftique pur ne détonnent point ; mais fion les mêle avec l'air armofphérique , l'explofion de ce mélange eft plus ou moins forte, felon que la quantité d'air déphlogiftiqué eft plus ou moins confidérable. VII. L’acide nicreux diftillé fur l'extrait de vin, m'a donné d’abord une quantité confidérable d'air nitreux ; mais lorfqu'il n’en eft plus paflé , l'air déphlogiftiqué de l'acide nitreux qui s’étoit combiné avec le refte du phlo- giftique s’eft exhalé , & l'explofon a été des plus fortes. On voit, par ce nombre fufffant d'applications , que cette théorie eft d'accord avec tous les phénomènes ; ce qui forme à mes yeux une preuve convaincante de fa folidité. ue EXTRAIT DES REGISTRES DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES, Du 4 Septembre 1782. M. le Marquis DE CoNporcet , M. Lavoifer, M. le Comte de Milly , ayant été nommés par l'Académie pour examiner un Mémoire pré- fenté par M. Leger fur des mèches préparées d’une manière particulière , & qui réuniffent plufeurs avantages , ils vont en rendre compte dans ce Rapport. Les mèches de M, Leger font compofées de coton treffé fur le métier, = Ca 1 SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 63 de différentes largeurs & de différentes formess c’eft-à-dire, rondes & plates, fuivant l'ufage qu'on veut en faire : elles font enduites d'une fub{- tance grafle , & d’une odeur qui n'eft point défagréable & foiblemenc aromatique. Les avantages que M. EU attribue à fes mèches font, 1°, de ne former en brülant aucun noir de fumée; 2°. de ne donner aucune odeur , quelle que foit l'huile FR emploie; 3°. de brüler avec égalité & fans ofcillation; 4°. de confumer moins d'huile dans un temps donné que les lampes ordinaires, & de durer plus long-temps que les mèches de coton connues jufqu'à préfent. ; Pour conltater les qualités attribuées aux nouvelles mèches, nous avons fait les expériences fuivantes. Nous avons rempli une lampe de fer-blanc avec de l'huile de navette la plus commune & du plus bas prix. La pefanteur de la lampe diminuée , l'huile qu’elle contenoit,pefoit 3 onces $ gros & 41 grains. Cette lampe, défignée fous le n°. 1°, avoir une mèche préparée à [a manière de M. Leger. Pour avoir un objet de comparaifon , nous avons mis la même quantité de la mêmehuile, pefée exaétement , dans une autre lampe n°. 2, de la même force & de la même matière que le n°. 1°':cette feconde lampe portoit une mèche de coton ordinaire fans préparation, mais de même forme que celle de M. Leger. fer . Ces deux lampes ont été pofées fur un même plan, & on a placé au-deflus, à 1 pied & 6 lignes de diftance , deux plats d'argent de même grandeur , pour recevoir la fumée, & obfèrver laquelle des deux lampes en donnoient davantage. Les deux lampes ont été allumées en même temps le 28 Août à minuit 26 minutes, Effess. La mèche préparée , n°.1°, a donné une flamme claire, uniforme & brillante, quine s'eft élevée qu'à 10 lignes , & qui eft reftée conftammert à la même hauteur, fans prefque vaciller, quoiqu'on ouvrit {a porte de la chambre ; & elle n’exhaloit aucune fumée. La mèche non préparée, n°. 2, a donné une famme plus volumineufe , mais moins claire & d'une teinte inégale, qui s’eft élevée à 4 pouces & un quart de haut, en forme de cône , vacillant beaucoup, & fumoit de matière que le plat d'argent placé au-deflus a été bientôt noirci, tandis que celui du n°, 3° n’a pas même été terni. Ces deux lampes bräloient encore le lendemain à dix heures 41 mi- nutes du matin; celle du n°. 2 s’eft éteinte à dix heures 41 minutes , & le n°. 1° a duré jufqu’à onze heures & un quart. Ainfi ,la mèche non pré- parée a brülé pendant dix heures & un quart, & la mèche préparée pen- dant dix heures 49 minutes. La différence n'eft que de 34 min, Le plat d'argent, placé pour recevoir la fumée de la mèche, n°, 1°, 64 » OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, n'a point été noirci; à peine étoit-il terni à la fin de l'expérience par une légère vapeur blanchâtre , qui provenoit plutôt de l'humidité de l'air & de la décompofition de la partie de la mèche expofée à Faction du feu, que de l'huile de la’ lampe. Le plat qui couvroit la lampe , n°. 2, étoit couvert de noir de fumée , qui, ramaflé & mis dans la balance docimaftique , pefoit r grain fort, Pour conftater de plus en plus les avantages des mèches de M. Leger fur les autres, nous avons répété le 31 Août à quatre heures 33 min. du matin, les mêmes expériences , avec les mêmes précautions , & nous avons obtenu à-peu-près le même réfultat. A dix heures fo minutes, la flamme des deux lampes commencçoit à s’affoiblir ; lé haut de la mèche du n°, 1% eft devenu un peu charbonneux , & celui de la mèche du n° 2 avoit un champignon qui étouffoir prefque la flamme. On a mouché les deux mèches également, & la flamme a repris vigueur avec les mêmes phénomènes dont on vient de parler ; c’eft à-dire, que le n°. 2 a donné beaucoup de fumée, & le n°. 1° point du tout.” Le but de ces premières expériences étoit 1°. de conftater le plus ou le moins de fumée fournie par ces deux lampes. 2°, De déterminer la dépenfe de l'huile comparativement dans un temps donné, Mais il nous reftoit à connoître la différence de l’odeur , dont nous n'avions pas pu juger dans les premières expériences, parce que les deux lampes Ééaienr dans le même lieu , & l’une auprès de l’autre. Pour cet effet, on a misla lampe, n°. 1%, avec fa mèche préparée , dans un petit cabinet bien clos de forme parallélogramme , dont les crands côtés ont 8 pieds, & les petits 6 fur7 pieds de haut, Cette lampe y eft reftée pendant huit heures , fans y donner de l’odeur , quoiqu'elle eut échauté l'atmofphère du cabinet au point d’avoir fait monter le thermo- mètre d'un degré, Le 2 Septembre, à minuit, la même lampe, chargée d’une mèche non préparée, a été placée dans le même cabinet , le thermomètre étant à 15 degrés : elle y eft reftée jufqu’à huit heures du matin ; elle a répandu beaucoup d'odeur & beaucoup de fumée , au point de-noircir un vafe de propreté plein d’eau, qui s’eft trouvé dans Le cabinet ; le thermomètre a monté d'un demi-deoré. ‘ ‘ Toutes ces expériences faites comparativement , nous ont prouvé que les mèches de M. Leger ont plufeurs avantages fur celles dont on s'eft fervi jufqu’à préfent : 1°. elles donnent une lumière plus claire & moins vacillante ; 2°, elles confomment moins d'huile; 3°. elles ont la propriété remarquable de ne donner ni odeur , ni fumée, quelque commune que foit huile qu'on emploie. Ainfi, on peut les fubftituer à tous les moyens d'éclairer plus difpendieux , connus jufqu'à préfent ; elles nous ont paru réunir des avantages , dont toutes les clafles de la Société peuvent tirer parti, & qui font d'autant plus précieux , qu'ils regardent plus di- rectement SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 6$ tectement la claffe des Citoyens les moins riches, dont on ne s'occupe que trop rarement. Nous penfons donc que les mèches de M. Leger méritent à tous égards l'approbation de l'Académie. Signés le Comte DE MiLiy , le Marquis D£ ConNDporcET & LAVOISIER. Je certifie le préfent Extrait conforme à l'Original & au jugement de l'Aca- démie, ce $ Septembre 1782. Signé le Marquis DE CON DORCET. CELA RE mm DURS CaRvIE. PT: O0.:N DE L'AUZOMÈTRE Inventé par M. ADbAms de Londres, Conffrufeur des Inffruments de Mathématique & de Philofophie du Roi d'Angleterre ; Communiquée à l Académie Royale des Seïences de Paris, le 17 Avril1782, par J. H. DE MAGELLAN, Gentilhomme Portugais, Membre de la So- cité Royale de Londres, & d'autres Académies, &c. L'avzontrez dont je vais donner la defcription, eft un inftrument nouveau inventé à Londres par M. George Adams , au moyen duquel on trouve , par une opération fort fimple & aifée, le groilifiement des lu- nettes ou tubes dioptriques qu'on emploie pour voir les objets diftants fous un angle plus Éand qu'ala vue fimple. Cet inftrument eft compofé de trois petits tuyaux de métal, dont la longueur n’eft que de 1 pouce & un quart, lorfqu'ils font fermés l’un fur l'autre, & d'environ 11 lignes en diamètre. Le premier, du côté de l'œil, eft au-dedans des autres, comme on le voit par aber, dans la fig. 4, Planc. I. Celui-ci porte une lentille à une certaine diftance du trou c où l'on applique l'œil, comme dans les tuyaux des oculaires des lunettes communes. Le fecond tuyau pmof, au-dedans duquel gliffe le premier tuyau, porte à fon bout une plaque de corne tranfparente 0 , qui eft divifé: par des lignes parallèles , dont la diftance n'eft que d'un centième de pouce An- glois. Enfin, le tuyau extérieur g s sr eft ouvert tour-à-fait, & ne fere qu'à mettre la plaque 0 à la diftance convenable, pour recevoir le Tome X XII, Part. I, 1783. JANVIER, I 66 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, peëtre lumineux formé par les rayons de la lunette , ou , fi l’on veut , qui repréfente l'ouverture de fon objectif, au bout du tuyau des oculaires, dans le même endroit où l’on applique l'œil à la lunette, lorfqu’on oblerve quelqu'objer. C'eft fur ce même tuyau extérieur gs £r que fe trouve ur pouce Anglois, divifé en dixièmes , avec un des mêmes dixièmes, fubdivifé en centièmes de pouce. Voici à préfent en quoi confifte l’opération-pratique de cet inftrument: . 2°. ajuftez la lunette dans la pofition qu'il faut pour voir les objets diftinc- tement; 2°, tirez en dehors le tuyau intérieur a em b, en forte que regardant dans l'air, vous puifliez voir bien diflirétement les lignes pa- railèles qui font fur la plaque de corne 7 0; 3°. approchez à prélent lauzomerre du tuyau des oculaires de la lunerte , & gliflez le tuyau ex- térieur gs sr autant qu'il le faut, pour que, regardant par €, vous puif- fiez voir bien diftinétenent le fpeétre lumineux fe loculaire .de la lunette , fur les divifions qui font fur la petite plaque de come m0; 4°. comptez combien de ces divifions font remplies par ce fpectre lu- mineux; $°. prehez avec un compas le diamètre de l'objectif de la lu- nette, & divifez-le par le. nombre des centièmes occupés par le fpeétre lumineux dont on vient de parler, & le quotient fera le vrai groflille- ment de la lunette avec l'équipage qu'elle a. Comme par exemple, fup- pofons que le fpeétre lumineux de Foculaire couvre 15 centièmes de ouce dans la plaque femi tranfparente #0 , & que le diamètre de l'ob- jeétif de la lunette eft d'uz pouce & demi; dans ce cas , la lunette avec cet n 5 , i : 150 . équipage ne groffit plus que dix fois les objets ; car on 10; mais file fpeétre lumineux couvre avec un autre équipage d’oculaires feulement 5 certièmes dans Ja plaque tranfparente , alors la lunette avec cet équipage : » Le , ; 150 . grofi trente fois l'objet qu'on obferve, parce que = 30. Ceux qui $ font verfés dans la dioptrique, favent bien qu'il y a toujours un rap- port conftant entre les ouvertures des junettes dioptriques, & le fpectre lu- mineux qui eft formé fur le dernier oculaire , où l'œil de l’obfervateur eft appliqué. Mais c’eft à M. Adams qu’on eft redevable d’avoir tiré un avan- tage [1 fatisfaifant de la propriété de ce rapport , moyennant un petit inftrument fi fimple & fi aifé dans la conftruction, pour déterminer ce problème de pratique, fans aucun recours à d’autres opérations difficiles & laborieufes , comme celles qu'on employoit jufqu'ici, par des règles ou bafes divifées, qu'il n’étoit pas aifé de bien rapporter au même objetobfervé dans le même temps à la vue fimple , & fans aucun æecours au calcul des foyers des verres employés ; ce qui ne laiffe pas d'être fort embarraffant, orfque le tuyau des oculaires eft compofé de plus d’une lentille, Il eft prefque inutile d’avertir que l’auzomètre ne peut point opérex fon effet SÛR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 67 dans les lunetres de Gallilée , où l’oculaire eft concave, parce qu'on n’y remarque aucun fpectte vrai; mais dans les télefcopes à téflexion, où il y a un vrai-fpectre lumineux formé dans l'oculaire , l'auzomètre ne manque pas d'en donner fon grofliffement, pourvu qu'on l’applique à la raie dif tance où Le fpeétre fe trouve bien tranché & bien diftinétement formé. Pour qu'on entende mieux l'effet de l’auzomètre , nous ajouterons la démonf- “tration fuivante (fiy. &) : Soit 4 d l'objectif d’une lunette aftronomique , & fo fon oculaire, & que les foyers de ces deux verres convexes fe préfentent en 7; tour le monde fait que la force ou degré du grofiffement de cette lunette fera connu , en divifant la longueur du foyer a n de l’objeétif par celle » z de l'o- culaire. Or, puifque les triangles 74 &fng, ou plutôt x»y, reftene toujours les mêmes dans le cas de vifion diftinéte , ce fera toujours la même chofe de divifef an para, ou ad par 7 y5 ouenfin 2 ad (—=b a+4-a d) par 277 (—17+23x), qui fonc des côtés homologues des mêmes triangles. . MÉMOIRE SCIRV'E ACTD'E D'UNSTVCREND'ENLAMT: Traduit du Suédois de M. SCHEELE (x) , par Madame P ***, de Dijon. S:I. .e fucre de lait eft un fel effentiel qui fe trouve diffous dans le lait, & qui, à caufe de fon goût douceître , a reçu le nom de fucre, Le goût du lait eft d'autant plus doux & plus agréable, qu'il tient plus de ce fel. On Rue voir , dans la Chymie pharmaceutique , La manière d'obtenir le fucre e lait, . $. IL. Le fücre de lait donne à la diftillation les mêmes produits que tout autre fucre. Il eft cependant remarquable que l'huile empyreumatique a une odeur qui approche de celle du fel de benjoin. Nous favons que le fucre commun tient un acide qui eft abfolument néceffaire dans les expériences de Chymie, à caufe de fa grande affinité avec toutes les terres, & particulièrement avec la chaux. Le principe de Le formation de cet acide eft la déphlogiftication du fucre par le moyen (x) Mém. de l’Acad. de Stockholm, ann. 1780, quatrième trimeftre, Tome XXII, Part. I,1783. JANVIER. I 2 68 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, de l'acide nitreux. On va voir, par l’expérience fuivante, comment le fucte de lait f comporte avec le même acide, $. II. Sur 4 onces de fucre de lait puriñé, & réduit en poudrefine, on verfa 12 onces d'acide nitreux délayé, que lon mit dans une cornuede verre fur un bain de fable. Lorfque le mélange eut pris un certain degré de chaleur , on remarqua une violente ébullition , ou plutôt une effervef- cence ; ce qui obligea de retirer la cornue du fable , & de la porter fur le bord avec le récipient. Le mélange devint toujours plus chaud & leffervefcence plus forte, avec des vapeurs d’un rouge brun, & continua à bouillir de cette manière fur le bord , fans feu, une demi-heure. Il fe dégagèa pour lors une grande quantité de gaz nitreux & d'acide méphitique; c’eft pourquoi , en répétant cette expérience, on ne doit pas prendre une cor- nue trop petite, ni luter trop fort le récipient. Lorfque l’ébullition eut ceflé, on replaça la cornue dans le fable, & on#diftilla l’acide nitreux jufqu'à ce que le mélange prit une couleur jaunätre, temps auquel on enleva bien vite la cornue du fable. Après un efpace de deux fois vingt- quatre heures, la diffolution ne parut avoir éprouvé aucun changement fenfible , ni difpofée à donner des cryftaux ; c'eft pourquoi on y verfa encore 8 ‘onces du même acide nitreux , & la cornue fut remile comme auparavant dans le bain de fable. Dès que le mélange fut chaud, la couleur jaune difparut, & la matière entra en effervefcence comme la première fois, cependant avec moins de violence. Lorfque le mouve- ment eut ceflé , on diftilla de nouveau l'acide nitreux, jufqu’à ce que la diffolution, qui, pendant ce temps-là , avoit été troublée par une poudre blanche , eût pris une couleur un peu jaunäâtre : alors on retira la cornue du fable. Le rout étant refroidi , on trouva dans la cornue une matière épaiie , que l'on fit rediffoudre dans 8 onces d'eau, & le tout fut en- fuite jetté fur le filtre. Il refta fur le filtre une poudre blanche, qui étant édulcorée & féchée, pefoir 7 drachmes & demie. La liqueur qui avoit paflé par le filtre éroie abfolument acide; elle fur évaporée en con- fiftance de fyrop: alors on y mêla de nouveau 4 onces d'acide nitreux, que l’on fit paffer encore à la diftillation fur le bain de fable, Après le re- froidiffement, ontrouva de petits cryftaux longs & acides , avec un peu de poudre blanche très-fine : on fépara les cryftaux; & fur le reftant de l'acide, on verfa encore de l'acide nitreux, qui fut de même diftillé, & il fe forma. plufieurs cryftaux femblables. Cette opération fut répétée plu- fieurs fois, & à la fin tout fut changé en cryftaux pareils , qui pefoiene environ, $ drachmes. Ce fel fe comporta dans toutes les expériences comme l'acide du fucre. : 6. IV. J'ai parlé dans le Paragraphe premier d’une poudre blanche , qui , pendant l'opération , s’étoit féparée de la diffolution , & qui pefoic 7 > drachmes, Je crus d’abord que cette poudre pouvoit n'être autre ce SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 69 chofe que du fäccharte calcaire, parce que j'imaginai que | comme le lait tient toujours un peu de terre calcaire, il étoic pofhble que cette même terre exiftt aufi dans le fucre de lait, & formät par conféquent une de fes parties conftituantes, qui, par fon union avec l'acide du fücre A auroit produit le faccharte calcaire dont ils’agit : mais une feconde expérience m'a fait voir que je m'étois trompé ; Car ayant verfé de l'a- cide du fucre dans une diffolution de fucre de lait, je nai apperçu aucune précipitation. Cette poudre , jettée dans un,creufet rougi, LE brülé comme de l'huile, & a laïflé à peine après elle quelques traces de cendres, $. V. L'eau froide (1) na paru avoir aucune action fenfble fur cette poudre: mais l’eau bouillante en a diflous quelque chofe, quoiqu’en très-petite quantité; car pour une partie de la poudre, il fallur foixante parties d'eau bouillante. Lorfque la diflolution fut refroidie, il s'en fé- para de nouveau un quart de la poudre , en forme de très-perits cryfaux: on recueillit le furplus de cette poudre, en évaporant l'eau fur le feu; à la fin il refta un peu d'acide du fucre (à-peu-près la vingtième partie de la poudre), qui n'avoit pu être enlevé au commencement par l’édalcora- tion, Alors je reconnus que certe poudre étoic un fel, en ce qu'elle éroit foluble dans l'eau. Elle fut purifiée au moyen de cette diffolution & de la cryftallifation. Voici les propriérés de ce fel. $. VI. Une demi-once de ce fel fut diffoute dans 30 onces d’eau bouil- lante, dans un#ballon de verre, & la diflolution refroidie fut filtrée, Cétre diffolution avoit un goût acide ; elle roupifloit la teinture de tournefol # & faifoit effervefcence avec la craïe. Deux drachmes de ce fel furent diftillées dans une cornue de verre à feu nud; il coula très-promprement , devint noir , & s’éleva confidérable- ment en écume ; il fe fublima au col de la cornue un fel brun, qui avoit une odeur pareille à celle d'un mélange de benjoin & de fuccin. IL refta 11 grains de chatbon au fond'de-la cornue. On trouva dans le réci- pient une liqueur brune , fans aucune apparence huileufe; elle avoit le même goût que le fel fublimé ; elle tenoit en effee un peu de ce même fel en diffolution ; que l'on en fépara par une évaporation lente. Le fublimé pefoit 35 grains; il avoit un goût acide ; il fut aifément diffous dans l’ef- prit-de-vin, mais plus difficilement dans l’eau, & il brôla fur le feu avec flamme. L'acide vitriolique concentré , diftillé fur ce fel, devint noir, écuma beaucoup; & le détruifit enfin entièrement. Ain, l'on voit que ee , (JT y a dans Poripinal Æa/hyarter , qui veut dire eau de chaux ; mais il y a appa- rence que c’eft une faute d’imptéflion , & qu'il faut lire kafvaren , eau froide, More du Trsduéleur, mo OBSERFATIONS SUR LA PHYSIQUE, . J . . LA 1 dé : . ce fel doit être rangé parmi les acides végétaux , fous le nom d'acide du fucre de lait (ou acide fuccharo-galaülique). De la manière dont l’Acide du Sucre de Jrait fe comporte avec les Alkalis. $. VIE. Dans une diflolurion chaude de potaffe , on verfa goutte à goutte un peu d'acide du fucre de lait purifié, jufqu’à ce qu'il n'y eût plus d’effer- vefcence. Le mélange donna bientôt une quantité de petits ctyftaux, qui exigèrent huit fois autant d'eau pour leur diffolution. Quand l'eau fut re- froidie, la plus grande partie des cryftaux s'en fépara de nouveau. Notre acide fe comporta de même avec La foude ; mais on n'eut befoin que de cinq patties d'eau pour difloudre une partie de ce fel neutre. Sion mêle à cette diffolution un peu de diffolution de potalle, il fe forme fur- le-champ une quantité de petits cryftaux, à raifon de fon affinité fupérieure avec l'acide, Ces deux fels font parfaitement neutres. Saturé d’alkali volatil, il donne un fel ammoniacal, qui, après une calcination douce , eft acide. A la diftillation , il monte d’abord de#fal- kali volatil, qui précipite l'eau de chaux ; l'acide reftant dans la cornue, donne enfüuite à une plus forte chaleur les mêmes produits que ceux dont il a été parlé aus, VI. Avec Les Terres. S. VIIT. L'acide du fucre de lait donne, avec toutes Mes terres, des fels infolubles dans l’eau, Je ne rapporterai en conféquence que les expériences que j'ai faites avec ces terres par la voie de la précipitation. Si on verfe goutte à goutte une diffolution de muriate barotique , ou de nitre barotique, dans une diflolution froide de notre acide ($. VI) , la verre fe précipite bientôt unie à l'acide. Cet acide fe comporte de la même manière avec les diffolutions de calce, mais la diffolution de vitriol calcaire n’eft pas décompofée. La même chofe arrive avec les diffolutions de magnéfie dans les acides minéraux & végétaux, & avec la terre d’alun. Cependant toutes ces diflolutions furent - décompofées par le fel neutre dont il a été parlé ci-deffus, Avec les Métaux. $. IX. Cet acide fe comporte avec les métaux de [la même manière qu'a- vec les terres. Il fe diffout en fi petite quantité dans l’eau, que le diflol- vant eft foible , & agit à peine fenfiblement fur les métaux ; maisavec leurs terres, il fe forme des fels peu folubles dans l’eau , ou même entièrement infolubles. Le nitre d’argent eft précipité en blanc par l'acide du fucre . de lait: ilen eft de même du nitre mercuriel & du nitre de plomb. Les SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 71 vitriols de fer , de cuivre, de zinc & de manganèfe ne font pas précipités; ils ne décompofent pas les diffolutions muriatiques d'étain & de mercure, mais le muriate de plomb eft précipité. Les fels neutres dont il a été fait mention au 6, VIL, décompofent toutes les diflolutions métalliques. . NOUVELLES LITTÉRAIRES. Norme MÉ£MoiREs ou Cahiers fémeffres de l'Acadèmie de Dijon, pour la partie des Sciences & des Arts , propofes par fouftription. Rien ne contribue davantage aux progrès des Sciences & des Arts que la prompte circulation des découvertes , des obfervations, des recherches de ceux qui les culrivent; elle éveille leur attention fur les objets d'un intérêt préfent; elle leur fait du travail d'autrui des échelons pour arriver à un but plus élevé; elle hâte le moment où leurs opinions deviennent des vérités , après avoir foutenu les regards de la critique ; elle entretienccerte émulation qui les prefle de produire, pour partager la gloire de ceux qui fe rendent utiles. : Toutes les Sociétés favantes, animées d'un même efpric , fe font en conféquence impofé l'obligation de publier, au moins tous les ans, les fruits de leurs travaux, L'Académie de Dijon , après avoir fuivi cet exemple, s’eft vue forcée , depuis plufeurs années, d'interrompre la publication de fes Mémoires, par des circonftances qu'il eit inutile de retracer. Mais les fecours que les Etats généraux de Bourgogne lui ont accordés pour l'entretien d’un Laboratoire & d’un Jardin de plantes, l'ayant mife à portée d'étendre fes travaux & fes correfpondances, d'entreprendre des luites d'expériences , de donner chaque année des cours publics de Miné- ralogie, de Chymie, de matière médicale & de Botanique, & l'émula- tion de fes membres étant fans cefle excitée par les érabliflements, elle croiroit manquer à ce qu'elle doit à la Société, fi elle ne prenoir tous les moyens poflibles pour parvenir àla faire jouir des Mémoires & Oblerva- * tions qu'elle a en dépôt dans fes porte-feuilles, qui fe multiplient tous les jours, & dont plufieurs ont déjà été cités , quoiqu'en manufcrit, par ceux qui traitoienut les: mênies matières, Les moyens qui lui, ont paru les plus propres à remplir fon objet , font, 1°. de donner un Recueil particulier de tout ce qui concerne les Sciences & Arts; 2°, de le répandre par la voie de la Souicription. Ain, on n'inférera dans l'Ouvrage annoncé, que des Mémoires, Ob- - fervations & autres pièces relatives aux Sciences & aux Arts , l'Académie, fe réfervant de publier féparément les pièces de Littérature. Par ce moyen, chacun pourra acquérir la partie de fon genre , fans être obligé de payer un volume pour un ou deux morceaux qui l'intéreflent; ce qui rebute à-la-fois & le Savant & le Littérateur. L’inconvénient devient de plus er plus fen- fible, à mefure que les livres fe multiplient. La voie de la foufcription luia paru indifpenfable, foit pour accélérer la circulation, devenue très-difficile & toujours difpendieufe , fur-tout pour les Provinces ; foit pour n'être pas expofée à faire tirer en plus grand nombre qu'il n’y a de curieux , ce qui écrafe le plus fouvent les éditions de livres de Sciences. Ce Recueil , de format in-8°, fera divifé par année , & le volume de chaque année partagé lui-même en deux Cahiers, compofés chacun de quinze à feize feuilles d’impreflion , avec des gravures en taille-douce , lorf- qu'elles feront néceffaires. Le premier Cahier, formant la première partie de l’année 1782, eft actuellement fous preffe ; il fera délivré à MM. les Soufcripteurs le:15 Jan- vier 1783, & le fecond cahier au 1$ Juillet de la même année. Les ca- hiers pour les années fuivantes feront ainfi publiés aux mêmes époques ; de fix mois en fix mois. Cependant l'Académie ne propofe d'engagement que pour les deux premières parties; & après les avoir reçues, on fera libre de ceffer ou de continuer la foufcription, Le prix des deux cahiers brochés eft de 6 liv., pris à Dijon , &de71. 19 fols, pour les recevoir , francs de port, par la Pofte, dans tout le Royaume. On paie d'avance , en recevant la reconnoiffance de fouf- cription, On foufcrit à Dijon, chez Le ffeur Cauffe , Imprimeur de l'Académie, place Saint-Etienne. À Paris, chez M. Hucherot, rue du Four Saint-Honoré, maifon de M. Pottemain, la troifième porte cochère à droite en entrant’ par la rue Saint Honoré. MM. les Soufcripteurs pourront remettre la même fomme de > liv. rof. au Bureau des Poftes dans les Provinces ; & en affranchiffant feulement la lettre d'avis au fieur Caufle, dans laquelle ils lui indiqueront leurs adrefles & la date de la remife de l'argent au Bureau de leur Ville , ils feront fürs de recevoir exaétement les cahiers aux termes indiqués, 72 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, + - Programme de l'Académie Royale des Belles-Lettres , Sciences & Arts dè Bordeaux , du 2$ Août 1782, Autant l'Académie a de regret, lorfque, parmi les Ouvrages qui lui font SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. ; font préfentés au concours ; elle n’en trouve auçun qui ; fous aucun rap- port , puifle mériter fes fuffrages, & qu’elle eft obligée de refuler les cou- ronnes dont elle peut avoir à difpofer ; autant elle a d'empreflement à fai- fin les occalions où , lors même qu'elle n’a pas de fuccès complets à cou- ronner , elle trouve du moins ou d'heuxeux talents à encourager , ou de louables efforts à récompenfer. Elle avoit quatre Prix à diftribuer cette année, Ê Deux réfervés, qu'elle avoit deftinés aux queftions fuivantes : Ï. « Exifte-t-il quelqu'indice fenfible qui puille faire connoître aux ob- >» fervareurs les moins exercés le temps où les Arbres, & principalement » les Chênes, ceffent de croître, & où ils. vont commencer à dépérir? Et » cesindices ( 4 fuppofer qu’ily en ait) ont-ils généralement lieu, & affec- # tent-ils néceflairement les Arbres , dans quelque forte de terrein qu'ils ». foient venus ? IL» Quelle eft la loi Hydraulique qui en fixant la hauteur d'eau » néceflaire pour le jeu des Moulins , préferveroit les fonds riverains » d'inondation ? Et s'il n'exifte point de loi pareille qui puifle être gé- » nérale, & s'appliquer à coutes les efpèces de Mouliris à eau, placés fur » quelque rivière que ce foit, quelles font Les'loix particulières qui con- » viendroient à chaque efpèce ? .... 2°. Les circontances du poids de » l'eau, de fon volume & de fa pente, étant données , de quelle efpèce » doit être un Moulin.pour produire le plus grand effet » 2 Le Prix extraordinaire , deltiné par une Mère de famille refpeétable , à l’Auteur du meilleur Mémoire où l’on «indiqueroit les Ouvrages qui # traitent du Leéfi-minéio (1); quelle eft la,caufe , ou manifefte, ou ca- » chée, de cette infirmité; quels en font les principes , qu'elle foit habi- >» tuelle ou par périodes réguliers , ou à des intervalles inégaux ; quels » font les remèdes qui ont été propofés pour la guérir | & ceux enfin » qu'une expérience conftante peut faire regarder comme fpéci- » fiques ». % | | Dans lenombre des Pièces que: l’Académie a reçues fur Le ptemier de ces fujets , un Mémoire Latin, portant, certe Devile : Quelibet orta ca- dunt, 6 finem cœæpta videbunt; lai a paru-feul pouvoir mérirer fon atten- tion , & devoir enfin réunir fs fuffrages., Elle lui a adjugé Le Prix. Non cependant qu'elle fe foir diflimulé que Le fyftème {ur la circulation de la féve, d’après lequel PAuteur a cherché à établir l'indice ou le figne qu'il s’'agifloit de trouver ; quoique déjà foutenu. par de célèbres. Phyf- ciens , a été rejetté & fortement combattu par d'autres; &, qu'en cou- ronnant fon Ouvrage, elle ait entendu. adopter ce fyftème, Le voile fous lequel La Nature a jufqu'a-préfent encore dérobé aux recherches des plus (tr) Ecoulemént involontaire d'urine ‘pendant la nuit. Tome XXII, Part, 1,1783. JAN VIE R, K 74 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, habiles obfervateurs, le mécanifme du mouvement de la féve dans les plantes , met cette Compagnie dans le cas de devoir répéter ici ce quelle a plus d’une fois déclaré ( notamment en 1733, à l’occalion de cette même hypothèfe ), qu’en couronnant un fyftéme , elle ne prétend point l'em- preindre du fceau de la vérité ; qu’elle n’en adopte aucun qu'il n’ait en- trafné le confentement de tous les Phyficiens , par le nombre & l'exaéti- tude des obfervations & des expériences qui lauront confirmé ; que juf- qués-là , en donnant fes fuffrages, elle garde fes fcrupules ; & que le Prix qu'elle adjuge à un Ouvrage dans le concours, n’eft qu'une marque ho- norable de la préférence qu’elle lui donna fur les autres... Non auff qu'elle ait regardé comme pouvant être auf infaillible que l’Auteur a cru pouvoir l’annoncer , le figne qu'il indique, & qu'il ne lui foit refté aucun doute à cet égard : mais déterminée par la confidération que l'Ouvrage, écrit d’ailleurs avec tout l’ordre , la méthode & la clarté qu’elle pouvoit defirer , lui a paru préfenter un point de vue fimple, qui; faif par différens ob- fervateurs , pourroit conduire , un jour peut-être, à l'importante découverte qu'elle a eue pour objer. L’Auteur de ce Mémoire eft M. Sébald-Juflin Brugmans , Maître ès- Arts, & Docteur en Philofophie , à Groningue, N'ayant reçu aucun Ouvrage fur la queftion concernant les Moulins , PAcadémie a cru devoir abandonner ce fujet, & elle a réfervé Le Prix qui lui étoit deftiné, Enfin, à l'égard de la queftion propofée fur le Leëfi-minétio , V'Acadé- mie , moins libre dans la difpofition du Prix qui lui étoit confacré , a cru ne pouvoir l'adjuger qu'autant qu’elle eût trouvé dans les Pièces qui lui ont été envoyées fur ce fujet , un fpécifique qui eût pu tranquillifer cette Mère intéreflante qui l'a demandé, & qui eût entièrement répondu aux vues d'humanité qui lui ont infpiré le noble deffein d’en étendre générale- ment le bienfait. ‘ Une fomme de 300 livres étoit promife à l'Auteur qui auroit réfolu , de la manière la plus fatisfaifante , les différens points de la queftion , & une de 1 fo à celui qui , fans prétendre à la Couronne Académique , au- roit donné la recette d'un remède ; dont l’eficacité eût été conftatée- par des Commiffaires de l'Académie. De quatre Mémoires que cette Compagnie a reçus, relatifs à l’enfem- ble de la propofition, le feul qui ait pu fixer fon attention , eft un Mé- mojre portant pour épigraphe ces deux vers d'Ovide: j ‘s Principiis obfla ; ferd medicina paratur , Cm mala per longas invaluëre moras, LD Elle l'a jugé digne des plus grands éloges, par les immenfes recherches SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 75 dont il eft rempli , & par le pénible travail dont il eft le fruit. Mais le flambeau de l'expérience ne s'étant point malheureufement préfenté fous la main de l’Auteur, pour léclairer FA no fur les caufes qui peu- vent donner lieu ; chez de jeunes perfonnes bien porrantes d'ailleuts , aux retours périodiques, & fouvent très-diftants les uns des autres , de l'in- firmité dont il s'agit, & pour lui donner dans ce cas l'indication d'une Méthode curative particulière, l’Académie n'a pu fe croire permis que de Jui accorder le jufte tribut de louanges dont elle Fhonore ici. Dans vingt-deux Lettres qu’elle a aufli reçues fur certe queftion , on s’eft feulement contenté de lui indiquer différens prétendus fpécifiques , & elle a dû chercher à s’aflurer , ou de leur inefhicacité ou de leur fuccès. Mais le temps & les circonftances ne lui ont pas encore permis de pro- noncer définitivement fur aucun. D'après ces confidérations, & du confentement de la Mère de fa- mille qui fournit aux frais du Prix , elle a détérminé d'en renvoyer la dif- tribution à deux ans: & elle propofe de nouveau le même fujet, & fous les mêmes conditions, pour 1784. Pour le Prix courant de la même année, qu'elle doublera d’un de fes Prix réfervés, elle demande maintenant : « Quel feroit le meilleur pro- »# cédé pour conferver , le plus long-temps poffible , ou en grain où en » farine, le Maïs ou Bled de Turquie ( Fruélum Indicum , Maïs dic- » sum. Cs B. P,),plus connu dans la Guienne fous le nom de Bled .» d'Efpagne; & quels différens moyens il y auroit pour en tirer parti » dansles années abondantes , indépendamment des ufages connus & » ordinaires dans cette Province »? Sujets qui fe trouvent propofés pour cette année 1783. « Quel eft le moyen de prévenir, dans l'ufage ordinaire d'allaiter les ». Enfants-Trouvés, les dangers quièn réfulrent , foit pour ces enfants , » foit pour leurs nourrices, &, par une fuite néceffaire, pour la popula- » tion en général ? Ou bien , quelle eft la méthode la meilleure, & » en même temps la er économique de fuppléer au lait de fémme » pour la nourriture de ces enfants ? ( Pour un Prix extraordinaire de » 200 iv. , réuni avec une Médaille. Programme du 2ÿ Août #» 1781». ) L'Académie ne recoit les Pièces au concours que jufqu'au 1° Avril de chaque année, lorfqw'elle n'a pas fixé d'autre terme aux Auteurs, Elle rejette celles qui font écrites én d’autres langues qu'en François où en Latin, & celles dont les Auteurs fe font connoître direéfement ou indirec- temens, Is doivent feulement mettre une Sentence au bas de leurs Ou- vrages, & y joindre un billet cacheté , fur lequel la même Sentence Tome XXII, Part. 1,1783. JANVIER. K 2 76 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, foit' répétée , & qui contienne Leurs noms, leurs qualités & leurs adreffes. \ Les Paquets feront affranchis de port, &adreffés à M. de Lamontaigne , Confeiller au Parlement, & Secrétaire perpétuel de l’Académie. Mémoires fur les Polypiers de Mer , par M. J. E, Roques DE MaAuMoRT, Profeffeur de Philofophie , & Pafleur de l'Eglife Françoife , à Zell. A Zell, chez Runge , 1782 , in-8®. de 7$ pages & 16 Planches, L’Auteur prépare un très-grand Ouvrage fur l'Hiftoire Naturelle, dont celui-ci eft comme un, échantillon. Après avoir fait l'extrait de tout ce que Bomare , Davila & Ellis ont dit fur les polypiers , M. de Maumort rapporte ce qu'il a iobfervé lui-même ; & il décrit l'origine , l'accroiffe- ment & la multiplication de divers coraux, La Nature confidérée fous fes différens afpeëts , ou Journal des Trois Rè- gnes de la Nature , nouvelle édition , première Epoque , tome IV , par M. Buc'noz , Médecin de Monsieur. À Paris , chez l'Auteur , rue de la Harpe, près celle de Richelieu-Sorbonne ; & chez Laporte , Libraire , rue des Noyers. Ce Journal intéreflant traite en forme de Lettres tout ce qui peut piquer la curiofiré & l'intérêt dans tout ce qui a rapport à la Science Phyfque de l'Honime, à l'Art Vétérinaire, à l'Hiftoire des différents Animaux, à la connoiffance des Plantes , à l'Agriculture, au Jardinage & aux Arts, à l'exploitation des mines, aux fingularités & à l'ufage des différents fofliles. Eléments de Géographie ; in-8°. de 116 pages , avec Cartes, À Paris, chez la veuve Ballard & fils, Imprimeur du Roi, rue des Mathu- rins , 1782. Ces Elémens font très.bien faits ; & par leur briéveté , ils convien- nent parfairement. à des enfans, dont il ne faut pas trop charger la mémoire. Mais ne pourroit-on pas faire le reproche à lAuteur d’avoir tellement dépouillé fes Cartes , fous prétexte de les rendre moins con- fufes, qu'il en a retranché les noms des Villes, excepté feulement ceux de quelques Capitales ? encore y a-t-il plufieurs Cartes où il n'y en a pas un feul. Puifque l’Auteur les cite dans fon Difcours, il nous paroît na- turel de penfer qu'elles devroient fe trouver fur les Cartes. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 77 Phyfique générale & particulière , par M. L: Comte DE LA CÉPEDE , Colo- nel au Cercle de Weflphalie , des Acadèmiss & Sociétés Royales de Di- jon, Touloufe , Stockholm , &c. Tome 1°°, grand in-12 avec figures. À Paris, chez Didor le jeune. Il faut bien diftinguer cet Ouvrage d’une foulé de femblables, qui pa- roiffent depuis trois ou quatre ans à la honte des Sciences, & qui veu- Jent renverfer des fyftémes au moins vraifemblables ; & que la raifon ap- prouve, pour y fubltituer des chimères. M. le Comte de la Cépède , déjà fi ayantageufement connu par fon Ouvrage fur l'Electriciré , entre- prend de parçourir fucceflivement & d'approfondir toutes les parties de ce rand tout que nous connoiffons fous la définition de Science de la Nature. An non-feulement la Nature, confidérée en grand, fixe fes regards ; maïs encore fes trois Règnes particuliers. Ce premier volume contient d’abord un Difcours ou une Introduétion , où il expole l'enchaînement des connoiffances qu'il fe propofe de développer, & des préceptes géné- raux fur la meilleure manière d'étudier & de traiter la Phyfique. Six cha- pitres compofent ce premier volume : dans Le premier, il parle de l’e/pace , & a grand foin de le diftinguer de l’érerdue ; car l'éendue n'elt qu’une propriété de la matière, & ne peut exifter fans elle , tandis que l'efpace en ef indépendant ; l’étendue eft finie, & peut fe divifer en tiers , en quarts: l'efpace au contraire eft infini, & l'on ne dira point le tiers ou Le uart de l'efpace en général. L’efpace le conduit naturellement à traiter ds différens vuides de la Nature , de ceux que le Phyfcien peut former, & des avantages que la Phyfique retireroit du vuide le plus parfait pofi- ble, Dans le fecond chapitre, il examine Ja matière , fon eflence & fes propriétés, mais feulement dans les corps fimples, c'eft-à-dire , dans Les molécules ou les atomes. Le temps l’occupe dans le chapitre troifième, De ces trois chapitres, que l’on peut confidérer comme la Métaphyfique de la fcience de la Nature , M. le Comte de la Cépède pafle dans le quatrième aux propriétés générales des corps , à leur porofité , leur cohé- rence, leur pénétrabilité & leur divifbilité, &c. Le cingüième chapitre eft confacré tout entier à l’attraétion, dans lequel, aux deux termés fixés par Newton , la raifon directe des maffes & la raifon inverfe du quarré des diftances fuffifans pour les grandes diftances, il prouve que l’on doit en ajouter un troifième pour les petites diftances, la variété des figures. Enfin , dans le dernier chapitre de ce volume, il traite de la cohérence & de l'adhérence. 78 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Le Vigneron-Expert, ou la vraie manière de cultiver la Vigne ; Ouvrage qui a concouru à l'Académie Royale des Sciencesi de Nancy. À Paris, chez Durand neveu , rue Galande, in-12 de 112 pages. D'excellents préceptes pour la culture de la vigne, & la meilleure ma- nière de faire & de gouverner les vins des ezvirons de Nancy , comme Pobferve très-bien l'Auteur, doivent faire diftinguer ce Mémoire , écrit à La vérité du ton Le plus dogmatique & Le plus fingulier. Francifei de Paulé Schrank, &c. Enumeratio Infeflorum , &c: Enumération des [nfeites indigènes d'Autriche, par M. Schrank, in-8°. avec figures. À Vienne , chez la veuve Klett & Frank, & fe trouve à Strafbourg chez Kaœnig , 1781. , Cette Infeétologie renferme 1127 efpèces , fans compter les variétés, M. Schrank a adopté les genres de Linné , en fupprimant cependant lar- ecllabus , & en adoptant le genre de la cardinale de Geoffroy ( Pyrochroa); & comme lui, il a féparé le méloé du pro-fcarabée. Parmi les efpèces les plus rares, on diftingue la blatte de Laponie, le capricorne des Alpes & lecoufin d'Egypte, d'Haflelquift ; & parmi les nouvelles , Le /éarabeus chryfomeloïdes., la chryfomèle de Bulgarie, celle au corceler verd , le cha- ran{on fans aîles, le capricorne élégant , la cardinale pourprée , la phry- gane à crochets, & l'abeille des champs. Ephemerides Affronomice, anno 1782 & 1783 , ad Meridianum Medio- lanenfem fupputatæ , ab Angelo de Cæfaris. Accedit Appendix ; cum Obfer- vationibus & Opufeulis , &c..A Milan, chez Jofeph Galeazzi, Libraire, 4781, 2 vol. in-8°. Ces deux volumes renferment les rables des mouvemens céleites pour lès années 1782 & 1783. Outre cestables, on y trouve des Mémoires très-intéreffants fur différents objets d’Aftronomie. Dans le premier vo- lume, on litun Mémoire fur l'orbite de la Comète, qui parut au com- mencement de l’année 1770 à Milan, par M. Reggiosles obfervations de la même Comète, par M: Oriani ; une Differtation fur les Machines de lObfervatoire de Milan, par M. Regoio; les occultations des étoiles fixes fous le difque de la lune, obfervées par M. Oriani ; un Mémoire fur la Comète de 1781, par M, Reggio; les obfervations de la Comète qui pa- rut aux mois d'Oétobre & de Novembre 1789, faites à Paris par M. Mefier, Le fecond volume contient, 1°. Commentarius Francifei Reggio de latitu- dine fpeculæ Afironomicæ Mediolanenfis ; 2°. de la préceflion moyenne des équinoxes , déduite des obfervations des anciens Aftronomes , par De; Cu SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 79 M. Oriani ; 3°. obfervations de Mercure faites par le même en 1778 & 1779; 4°, obfervation de l'oppofition de Jupiter avec ke Soleil en 1780 , par M. Reggio; 5°. obfervation de loppoftion de Saturne avec le Soleil, par le même; 6°. obfervation de RERETS de fon aphélie.en 17804 par le même ; 7°. obfervation de l’oppofition de Saturne avec le Soleil en 1787 , par le même; 8°. obfervation de l'oppoñition de Jupiter avec le Soleil au mois de Mai 1781 , par M, Allodio; 9°. oppoñition de Mars avec le Soleil en 1781, déterminée par les obfervations , & comparée avec les cables, par M. de Cefaris; 10°. oppofition de Saturne avec le Soleil en 1781, déterminée par Les obfervations de M, Oriani ; 11°. obfervation de Mercure près de fon aphélie en 1781, par M. Reggio; 12°. obfervations dé Vénus avant & après fa conjonétion fupérieure avec le Soleil en 1781 , par M. Allodio; 13°. obfervation de la Comète découverte au mois de Mars 1781, par M. Oriani ; 4°. obfervations de l’éclipfe du Soleil du 16 O&obre 1781, par le même; 15°.obfervations des Satellites de Jupiter, faite avec un tube Grégorien de 2 pieds, par MM. Reggio & de Cefaris, comparées avec Les principales obfervations correfpondantes & avec les tables, par M. Wargentin; 16°. obférvations des Sarellites de Jupiter , faites avec un tube achromatique de Dollond , de 8 pieds, par M. Oriani; 17°. obfervations météorologiques faites en 1780 à l'Obfervatoire de Milan, par M. Reogio. An inquiry intothe caufe of motion, Gc. Recherche [ur la caufe du Mouve- ment ; ou Théorie générale de la Phyfique , enrichie de planches en taille-douce ; par M. S, MiLLER , in-4. Londres, chez Ethérington , 1782. Nous ne pouvons rien dire furscette nouvelle théorie, parce que nous ne conooiffons encore que le titre de cet Ouvrage.s Georgii Profchaska , Med. D. & Profeffor Anatomie | Gc. de flru&tura Nervorum Traëlatus Anatômicus , &c. Traité Anatomique de La firu&ure des Nerfs ,par M. Profchaska ; Profeffleur à l'Univerfité de Prague. À Vienne, chez Graeffer , 1782 , in-8°. de 137 pages, fig. De nouvelles obfervations fur les Nerfs font le mérite de cet Ou- . vrage, Fi So OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Aëta Societatis Jablonovianæ , ab anno 177$ ad 1779. Mémoires de la So- ciété de Jablonoïwski , fur divers fujets , depuis l'année 1775 jufqi'en 1779, tome V. À Léipfick, chez Kæper , 1780 , in-4°. de 296 pag. , avec fig. L'imprefion & la diftribution de ces Mémoires font dues à la généro- fité du Prince Jablonowski, Prefque tous les Mémoires qui compofent cet intéreflant Recueil font des réponfes à plufieurs queftions utiles, pro- polées avec des Prix par ce Prince. Voici les titres des Mémoires qui compofent ce cinquième volume. 1°. De ufivererum Scriptorum Ruflicorum in Agricultur& hodiern4, par M. Kunz , Confeiller de Stolberg. 2°. De lue bovinä, par M: Barth , Médecin. 3°. Un Mémoire fur le même fuje, par M: Bickholz. 4°. De Helice, par M. Gulden. 5°. Traëtaus de Cochled par M. Geï:lach , Profeffleur d’Architeéture Militaire à Vienne. 6°. De caufis & effeclibus migrationum à Populis Septentrionalibus in Provincias TImp. Rom. fufceptarum , pat M. Kehrer, 7°. Quibus ex rationibus Impera- cores & Reges Carolingicæ ftirpis recentiores in Germaniâ Dignitatem Du- calem reflituerint, quemque poflea Duces potenti& gradumgint confecuti , par M. Becker, Secrétaire des Finances à Lubeck, 89. Deinfluxu lucis in vegetationem plantarum , pat M. Ludewio. 0°, De ratione inter Agricul- turam 6 rem pecuariam maximè proficui, par M, Roefig , Avocat à Léipfick. Vingt-huitième , vingt-neuvième & trentième livraifons des plantes vé- néneufes de la France, par M. Bulliard, Ces deux livraifons contiennent , 1°. La renoncule âcre , Flor. Franç. rarunculus acris , Lin. Spec. polya. polyg. 770 2°. L'agaric turbiné, agaricus vurbinatus. 3°. Le feigle commun ergoté. Flo. Franç; /écale cereale , Lin. (Spec. ‘Plant. 124. 4°. L'agaric piluliforme ; agaricus piluliformis. $°. L'Œnanthe fafranée , Flor, Frarç.; æranthe crocatz, Lin. Spec. Plant., pent. dyg. 365. 6°. Le boler polymorphe ; #o/etus polymorphus. 7°. Le genêt griot, Flor. Franc. ; geniflé purgans , Flor. Franç. ; fparttum purgans ; Lin. Spec. Plant. , diand. décand, 474. 8°. La pezize noire ,peziga nigra ; ehela IL. Schæff., tab. CLvit1;pezige polymorpha, Flor. Scot.; peziza conica nigra , Hall. 9°. La renoncule des champs, Flor. Franç. ; ranunculus arvenfis | Lin. Spec. Plant., polya. polyg. 780. 10°. L’agaric blanc d'ivoire, agaricus eburneus. 11°. La parifette à quatre, feuilles, Flor. Franc. ; paris quadri- folia. Tin. Spec. Plant. , offand. tetrag. ÿ27. 12°. L’agaric orange ( vraie), agaricus aurantiacus. Cette précieufe: Collection fe continue avec fuccès ; les foins, l'exactitude & le fini que l’on remarque dans Le deflin & les couleurs, méritent certainement les plus grands éloges. Mémoires / / SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 81 Mémoires Phyfico-Chymiques fur L'influence de la Lumière Solaire, pour modifier les êtres des trois Règnes de la Nature, © fur-tout fur ceu& du Règne Végéval; par M. J, SENEBIER , Miniffre du Saint-Evangile, Bi- bliothécaire de la République de Genève, Membre de la Société Hollandoife des Sciences de Haarlem, 3 vol. in-8°, Genève, chez Barthelemi Chirol, 1782. Cesnouvel Ouvrage de M. Senebier , déjà fi connu par plufieurs excel- lents Mémoires de Phyfique, & dont nous en avons imprimé plufieurs dans notre Journal, renferme dix-huit Mémoires , où il parcourt fuc- ceflivement toutes les modifications que la lumière folaire fait éprouver aux diverfes fubftances qui lui font expofées. Tous les objets qu'il y traite font ou nouveaux, ou préfentés d’une manière nouvelle, comme on pourra en juger en les parcourant. Le premier volume tout entier ne ren- ferme qu’un feul Mémoire, divifé en 40 paragraphes , dans lefquels on voit un détail immenfe d'expériences fur l'inuence de la lumière du foleil dans la production de l'air que les végétaux laiflent échapper quand ils y font expolés. Tout le monde connoît les expériences de M. Ingen- houze, par lefquelles il a démontré que les plantes expofées au foleil laifloient échapper de l'air déphlogiftiqué crès-pur; mais qu'à l'ombre elles ne donnoient que de l'air fixe. Celles de M. Senebier confirment la première propofition , & on doit la regarder à préfent comme une vérité inconteftable. Le Savant de Genève n'’eft pas, fur la feconde, du même fentiment que celui de Vienne ; & il attribue la production de l'air fixe à un commencement de décompofition de la plante , au lieu que le fecond la regardoit comme un acte de la végétation. Il eft difficile de fe refufer à embraffer le fyftème de M. Senebier, en lifant fon Ouvrage, & fur-tout le grand nombre d'expériences par lefquelles il appuie fon fen- timent, Il les a variées de toutes les façons; & à la fin, on voit destables, dans lefquelles il donne les réfultats de {es expériences , & la quantitécommre la qualité d'air fourni par les feuilles des arbres, des arbuftes , des plantes Léo, aromatiques , étrangères, expofées à l’action du foleil fous l’eau commune & fous l'eau faturée d'air fixe. Plufeurs principes que nous avons développés dans le premier volume du Diétionnaire Phi, au mot Air, fe trouvent ici confirmés par les expériences de M. Se- nebier, Le fecond tome renferme, 1°. un Mémoire fur cette efpèce de conferve , qui paroît dans les vaifleaux pleins d'eau expofés à l'air, & fur l'influence de la lumière du foleil pour les développer ; une partie de ce Mémoire a été imprimée dans notre Journal, 1781. 2°. Deux Mémoires fur l'éticlement ou fur l'influence de la lumière pour co- Jorer en verd les feuilles vertes des plantes, 3°. Un Mémoire fur Tome XXII, Part, 1, 1783, JANVIER, # 82 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, quelques mouvements des feuilles & des pétales , qui font la tendance continuelle au parallélifme , la nutation & l'ouverture de ,quelques fleugs à certaines heures. 4°. Un Mémoire fur l'influence de la lu- mière, pour changer la couleur des bois; ce Mémoire eft très-curieux , & les réfulrats en font piquants & finguliers. Ce volume eft terminé par quelques additions aux Mémoires précédents. Le troifième renferme , 1°. un Mémoire fur l'influence de la lumière pour changer la couleur verte des feuilles obtenue par le moyen de l’efnrit-de-vin; 2°. des obfer- vations fur les feuilles des plantes, qui rougiffent quand elles font-fur le point de tomber; 3°. un Mémoire fur les panachures des feuilles; 4°. uñ Mémoire fur l'influence de Ja lumière , pour changer la couleur des pétales, & fur-rout celles de leur teinture; $°. un Mémoire fur l'influence de la lu- mière folaire pour la coloration des fruits; 6°. un Mémoire fur l'influence de la lumière folaire furles pepins, les noyaux, Les boutons à fruits, la moëlle, les racines, les réfines & les huiles végétales. De tous ces Mémoires fur la Phyfologie végétale, M. Senebier en tire d'excellents corollaires poux Vhiftoire de la végétation, dans le Mémoire qui termine ce troifième vo- lume, non moins intéreffant que les deux premiers, Il feroittrop long de les analyfer, ainf que cinq autres Mémoires renfermés dans le même vo- lume , & qui traitent de l'influence de la lumière folaire fur le règne animal & fur le règne minéral. On doit diftinguer fur-tout le dix-feptième Mé- moire fur la lumière en général , qui jette un très-grand jour fur cette partie de la Phyfique, Traité de la Maladie des grains, par M. l'Abbé Téssrer. À Paris, in-8°. 1783. avec fig. , chez la veuve Hériffant, rue Neuve Notre-Dame , & chez Barrois le jeune , rue du Hurepoix, Nous donnerons quelques détails fur cet Ouvrage intéreffant. Hifloire Naturelle de Provence, contenant ce qu'il y a-de plus remarquable dans les Règnes végétal, minéral , & la partie géoponique ; par M. DAR- LUC, Doëleur en Médecine , Profeffeur de Botanique en l'Univerfité d'Aix, de la Société Royale de Médecine, &c, À Avignon, chez J:J. Niel, Im- primeur-Libraire, rue de la Balance, 1782, in-8°. 1°° vol. L’Auteur a adopté la divifon par Diocèfes, comme la plus commode: il décrit dans ce premier volume les Diocèfes d'Aix, d’Apt, d’Arles & de Riez; fon Ouvrage eft une Hiftoire fuccinte des Voyages qu'il a faits pour vifiter les plus hautes montägnes de Provence, & d’un grand nombre de courfesentrepriles, non fans beaucoup de rifques & de peine. M. Darluc a eu foin d'indiquer les principales plantes dont on peut tirer quelqu’avan- * tage , tant pour les remèdes que pour Les Arts, Ce Médecin Natura- # :. PES SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 83 lifte donne auñfi la Topographie Médicale des divers Cantons de la Pro- vence , l’analyfe des eaux minérales, la Nomenclature des oifeaux & des poiflons qui s'y trouvent. Ce premier volume, qu'on lit avec beaucoup d’intérét, contient des détails utiles dans plus d’un genre, & fait defirer que M. Darluc nous donne bientot la fuite de fon travail. . Hommage aux Amateurs des Arts , ou Mémoire contenant un détail abrégé d’Inveniions utiles & agréables dans la Mécanique , l'Optique , l'Hydrau- lique, la Baliflique, la Phyfique , la partie Magnétique , l’Horlogerie ; la Mufique, la Géographie, 6c, &c.; par le fieur PELLETIER, Ingénieur» Machinifl: penfionné de S. A. R. Dom Gabriel, Infant d'Efpagne ; in-8°, À Saint-Germain-en-Laye, chez l'Auteur, rue de Poilly ; & à Paris, chez la veuve Thibouft , place Cambrai, ERRATA Pour le Cahier de Novembre 1782. 7 220 379 , ligne 12, lifez commeil fui, La feétion hotizonrale de certe verge ( que la figure devoit montrer comme un fo lide borné par des arcs de cercle ) eft repréfentée par 44 ,fig.2;cc elt la plaque de derrière, & 7 fontles chevilles de la roue D, fig. 6. Soit la pièce fs , repréfentée par #4 , attachée à la tige del’ancre qui porte une feule palette dans cet échappement, On voit cette palette au milieu de la pièce 4 & (même fig. 2), & fon jeu doit être enttg les deux 7 r, qui en font trop éloignés dans certe figure, Cette pièce porte, Re, . Ibid. ligne 24, ff, Lifez fs. Dage 380, Lgne19 ” — 16 $ fig. 6, lifez fig 5, — 19 84 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, &: D'ANBYENE DEs ARTICLES CONTENUS DANS CE CAHIER. Eocr de M. Navier, par M. ViCo-D'Azye. Page 3 Mémoire fur la Calcination de la Pierre calcaire, © fur fa virrifica- sion , par M. DARCET. 19 Obfervations fur les Nébuleufes d'Orion, 34 Lettre de M, le Chevalier DE LANANON & M. l'Abbé MonGEz, re- lative aux Offemens foffiles qui ont appartenu à de grands Animaux. 35 Difcours prononcé à la Séance publique de l Académie des Sciences , Belles- Lettres & Arts d'Amiens , le 2$ Août 17823 par M. le Comte D'AGAY, fur les Canaux navigables. 36 Précis d'un Mémoire [ur Le lieu & les autres circonflances de la formation dés Glaçons Jpongieux que les rivières charrient 3 par M. DESMARETS. $0 Théorie des Détonnations Chymiques , par M. CHAPTAL. 61 Extrait des Regiftres de l’Académie Royale des Sriences, du 4 SP 1782 , fur des Mèches économiques, ° 62 Défcription de l'Auzomètre inventé par M. ADAMs de Londres, 65 Mémoire fur l'Acide du Sucre de Lait, par M, SCHEELE. ; 67 Nouvelles Littéraires, : 72 APPROBATION. J'« lu , par ordre de Monfcigneur le Garde des Sceaux, un Ouvrage qui a pour titre: Obfervations fur Le Phyfique, fur l’Hiftoire Naturelle & fur Les Arts, Gc.; par MI. Rozrer & AoONGEz le jeune, &c. La Colleétion de faits importans qu'il offre périodi- quement à fes Leéteurs, mérite l'accueil des Sayans; enconféquence, j'eftime qu’on peut en permeure l’impreflion, A Paris , ce 20 Janvier 1783. VALMONT DE BOMARE, PULL MAATAN PAT \ AU AU È W et RARE Qt AAA À j DAME NP A ur AU A HR | AE UNE cul qUr ( j\ { il KV qi 1} Z due KQ L-d'ôleron la Garonne y Limoges MAT | © | Angouleme ° Ckrmont Bordeaux ayonne Aontauban ss CET OUT" 5 100 Luues lence À 4 Pique A LR Ann PARIS Le © Moulins, LS ntntt/nt pe nue LA Hanovre Here, N71707 w) D LE DiQue FU AS Rouen’ HT Q Se cS uutement : CEE , Lreves Fnmeort © se (OUZ Inence (78 Judo ‘ Yu = n° w Ratibone Danube L ° Much Alpes #Chaumber: Cre ob le Me & = Lhnon Dié es Marie up, ne THE ii cas cuttle left 2 lu Nord, 4 Hollande e44e 4x Flndre Nr dintern A de lafranex ttes pres ue Lorte de Tocean were parer ’ { pur la Manche - Ut CONUNETEE POUR 1 HUE À. Gmal vanter tente Canbrar #1 da Some L S' Quentin. . Coul'evecute en Lr Somme # Joie. z C cal Prop cn Bouryoone pour out la Saone id Yonne g'urE! Arnançon aXoue Loin Orleans st Brirs 82 pour route? LE ec NÉ D a qe A RRETe | | JOURNAL DE PHYSIQUE. à FÉVRIER 1783: RECHERCHES, CHYMIQUES Sur la Couleur Bleue retirée des os de différens Animaux; Par GUILLAUME-HENRY-SÉBASTIEN BUCHOTZ ; traduit par M. MARTIN /e jeune. Os m'a demandé depuis peu , fi, par des procédés chymiques, ainfi ue par les différentes couleurs bleues qu’on retire de différents os, il étoic poffible de décider fi un os inconnu appartenoit à un homme ou à un ani- mal ; j'ai fair à ce fujet les expériences fuivantes : Premier Procédé, J'ai fait pulvérifer groflièrement 1 once du crâne d’une jeune perfonne faine , tuée malheureufement par la chüûte d’un arbre; jy ai ajouté 1 once de fel de tartre; j'ai fait calciner ce mélange lente- ment à un feu modéré, jufqu'a ce qu'en le mêlant, la fumée & la flamme euffent ceflé entièrement. J'ai verfé le mélange dans un vafe de cuivre ; à mefure qu'il fe refroidifloit & qu'on ôtoit le couvercle, il répandoir une forte odeur de fel ammoniac volatil. J'ai mis cette poudre noire dans un vafe de verre, qui contenoit 4 onces d’eau chaude; je l'ai recouvert de papier , & noté ce qu'il contenoir. Second Procédé. Bien dépouillé de toutes les membranes, 1 once de Ja poudre groffière d’un crâne de bœuf a été unie à 1 once de fel de tartre réduit en poudre fine , & foumife aux procédés de l'expérience pré- cédente. Le réfidu de la calcination laïfloit échapper la même odeur de fel d'urine. Je l'ai jetté de même dans un vafe qui contenoit 4 onces d’eau chaude , recouvert de papier, & noté le contenu. Troifième Procédé, J'ai ajouté 1 once de fel de tartre à 1 once de pou- dre groffière d'un crâne de mouton , exactement dépouillé de fes mem Tome XXII, Part. I, 1783. FÉVRIER. M 36 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, branes'; je l'ai calciné avec les mêmes précautions indiquées au premier procédé, jufqu'à ce qu'il ne parëärplus ni farime , ni fumée, En le verfant dans Je vale de icuivre , & pendant fon refroidiffement , ls mélange répan- doit la même odeur de fel d'urine. Je le verfai enfuite dans un vafe qui contenoit 4 onces d’eau chaude ; je l’airecouvert, noté & mis à côté des vafes des expériences précédentes. Quatrième Procédé. Une once de râpure de corne de cerf a été mélée avec 1 once de fel de tartre. J'ai mis ce mélange dans un creufet, & l'ai calciné comme dans les expériences précédentes , jufqu'à ce qu'il ne parüt plus ni flamme, ni fumée. Je reconnus toujours la même odeur urineufe pendant que je retirois le réfidu, & pendant fon refroidiffemenr. Je jettai pareillement cette poudre noire dans unvafe où il ÿ avoit 4 onces d’eau chaude; je l'ai recouvert, mis à côté des autres verres, après en avoir marqué le contenu. Cinquième Procéde, Les vafes qui renfermoient ces mélanges ayant été expofés pendant vingt-quatre heures dans un'air où le thermomètre de Farenheit varia du $o degré au $ 5°, & ayant été remués quelquefois pen- dant cet intervalle, je filtrai ces diffolutions les unes après les autres; & après que l'eau de la diffolution eut paflé , je jetai encore 2,onces d’eau de fontaine fur le réfidu de la filtration , pour le laver complettèment. Sixième Procédé. Je pris d'abord la diflolution du crâne humain , pour la foumettre à plufieurs précipitations. J'en mis donc dix gouttes dans un gobelet , & je pris différents acides , que j'employai dans l'ordre faivant : 1°. Je verfai de l'acide vitriolique goutte-à-goutte dans la diflolution, jufqu'à ce que je n’apperçufle plus d’effervefcence , & que le mélange für neutralifé : il devint à peine trouble. Après une heure de repos, il y na- geoit très-peu de floccons d’un bleu grisâtre. [ls étoient en fi petite quan- tité, qu’ils ne méritoient pas de plus amples recherches, À 2°. Je faturai la diffolution avec de l'acide nitreux; je ne remarquai aucun changement de couleur pendant que je verfois goutte-à-goutte de cet acide : il s’élevoit une vapeur femblable à celle qui s’exhale, lorfqu'on fait un mélange d'acide nitreux, d’efprit volatil d'urine , & d'efprit de corne de cerf. Je ne vis aucun changement de couleur après une heure ; je jettai Le tout. L 3°. J'ai verfé de l'acide marin fur dix gouttes de la diflolution; elle prit un coup-d'æil laiteux. Le précipité blanc que j'ai obtenu n'a pas changé de couleur après une heure. 4°. Le vinaigre diftillé fit peu d’effervefcence avec la diffolution, s‘” Le vinaigre concentré & diftillé avec la crème de tartre, fit au contraire une forte effervefcence, mais ne caufa aucun changement de couleur au mélange. 4 SURL'HISTRNATURELLENET LES ARTS. 87 6°. La diflolution de fucre de Saturne dans de l’eau n'occalonna au- cun changement de couleur, fi ce n’eft que le mélange devint laiteux. L'efprit acide retiré du bois de hêtre, concentré & diftillé, fc une forte effervefcence avec la diffolution; le mélange refta cranfparent , & il n'y eut aucun précipité. Il eft démontré, par ces expériences , que l'on ne peut efpérer de re- tirer que très-peu de parties bleues de certe diffolurion , puifque l'expé- rience m'a appris que dix gouttes de leflive ordinaire de fang , faturées d’a- cide vitriolique, fourniflent un précipité bleu très-remarquable, & que lorfqu'on le farure avec l'acide marin, il en réfulte un beau précipité d'un bleu foncé. , Septième Procédé. J'ai verfé peuä-peu de l'acide vitriolique fur dix gouttes de la diffolution de crâne de bœuf, jufqu'à ce que la faturation air eu lieu. La couleur ne changea aucunément; tous les réactifs & aci- des furent employés en vain, comme dans les expériences du fixième rocédé. | Huitième Procédé. J'ai fait les mêmes expériences fur la diffolution du crâne de mouton, mais avec aufli peu d'effet. Neuvième Procédé. Les mêmes expériences furent répétées fur la diffolu- tion de corne de cerf ; je n’en obtins pas le moindre changement de cou- leur. Dixième Procédé. Je pouffai mes recherches plus loin, & j'effayai les effets du vitriol martial fur cette diflolution. Je fs donc. difloudre ue demi once de bon vitriol martial dans 4 onces d’eau bien limpide; je fil- trai la diffolution, & j'en verfai une once fur chacune des quatre diffolu- tions dont j'ai déjà parlé, & je laiflai repoferle mélange pendant une nuit, Le lendemain, tous les mêlanges avoient lâché un précipité d'un bleu jaunâtre ; je les portai tous à part füur le filtre ; je Jes lavai quatre fois avec de l'eau fraîche, & ils prirent tous alors à leur furface une couleur de rouille de fer. : £ Ongième Procédé. On fait que l'on retire très-bien Le bleu de Pruffe par le moyen de acide marin. Je mis donc une partie du précipité de crâne humain dans l'efprit de fel adouci, & j'obtins à l'inftanc une belle cou- leur bleue, qui prit de l'intenfité après quelques heures. Je réfolus alors d'employer ce moyen fur les quatre précipités. : " Douxième Procédé. J’ajoutai à*4 onces d’eau 2 gros d'efprit de fel; je retirai le précipité mouillé de crâne humain de deflus le filtre avec un couteau de bois, & je le mis dans cer efprit de fl adouci; je remuai bien le tout, & dans peu de temps, le mélange devint bleu; la couleur de- vint plus belle d'heure en heure. Le lendemain je filtrai le mélange , & je le pefai, après l'avoir lavé: il pefoit 10 grains; la couleur étoit bleue, mais n'avoit pas autant d'intenfité que le bleu de Pruffe, Tome XXII, Part, I, 1783. FÉVRIER. ‘ M2 88 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Treigième Procédé. Je pris les mêmes précautions pour retirer e préci- pité de crâne de bœuf; je fis le même mélange de 2 gros d'efprit de fel, & de 4 onces d’eau; je le mis dedans , & je remuai bien ce mélange. Je neus qu'une couleur fale, qui, après deux heures , devint bleuâtre. Le len- demain la diflolution étoit d'un bleu clair, & il s’étoit fait au fond du vafe un précipité d’un bleu foncé : je le portai fur le filtre & le lavai; après avoir été féché , il ne pefoit qu’un grain. Quatorgième Procédé, Le précipité de crâne de mouton fut retiré & traîté avec les mêmes précautions indiquées au treizième procédé, & mis dans de l'efprit de fel adouci. Ce mélange ne prit qu'une couleur vert- jaunâtre : après deux heures, il ne changea pas , & refta le même le lendemain. Je n'apperçus aucun précipité bleuâtre au fond du vafe; je Je fis filtrer ; je lavai le précipité & le féchai: il pefoit 1 grain & demi; fa couleur étoit d'ün gris jaunâtre, à-peu-près comme la pierre calami- naire, Quinzième Procédé, Le précipité de corne de cerf a été traité comme les précédents , dans la même proportion d’eau & d’efprit de fel. Il fe mani- fefta dans l’inftant une couleur bleue remarquable , qui prit de l’intenfité après deux heures; le lendemain le précipité étoit déjà Éleu foncé. Porté fur le filtre , lavé & féché, il pefoit 2 grains, & c'étoit celui de tous dont la couleur approchoir le plus de celle du bleu de Pruffe, I] paroït, par ce qui précède , qu’on retire plus de couleur bleue du crâne humain que des autres os ; &*s'il eft vrai que cette couleur dépend de petites molécules ferrugineufes combinées avec le phlogiftique , il eft démontré, par ces recherches , que les os humains contiennent plus abon- damment ces deux principes. J'ai voulu n''affurer fi les principes retirés des os, & le changement de couleur , fouffriroient unewariation dans la quantité. Je pris donc 3 onces de crâne de bœuf mêlées avec 1 once de fel de tartre; j'ai pouffé le toutà la calcination, en fuivant la méthode que j'ai indiquée. J’obtins par ce moyen 3 grains d’un beau précipité bleu clair. J'ai fur-rout répété cette expérience, pour que ceux qui voudroient Jes faire en grand connuffent fürement les proportions d'os & de fel de tartre qu'il faudroit qu’ils em- ployeffent. ù LA ES. ee sé dhé SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 89 Die Lei RE A M BERTHOLON, d Lyon. Réfultats des Expériences faites à Thierny , près Laon , avec lŒnomèrre, pendant la vendange de 1782. Moxsreur, J'ai lu , avec le plus grand plailir, vorre Mémoire fur le Décuvage des Vins, qui vous a mérité à jufte titre La Palme, au jugement d'une célèbre Compagnie (1), toujours attentive à ne prononcer qu'en faveur du talenc &c du mérite. Arrivé dans ma Patrie, dont l’unique commerce elt celui du vin, je me fuis empreflé de faire connoître votre Mémoire; il a été goûté comme je m'y attendois: ona été frappé fur-tout de la fimplicité de Finftrument que vous avez imaginé pour faifir l'inftant de la plus grande fermentation , & déterminer en conféquence le moment du décu- vage. Nombre de perfonnes ont fait conftruire cet inftrument; & fi l'effet n'a pas répondu pleinement à cë qu’on atrendoit ,il faut s'en prendre, Sel la température fâcheufe qui a précédé & accompagné nos vendanges; 2°. à l’omifion d'un point eflentiel que vous recommandez dans votre Mémoire : je veux parler du fecond fond qui fert à contenir le marc dans la liqueur , & que peu de perfonnes de ce pays-ci ont adopté. On a été furpris de voir le Alotteur de votre inftrument fuivre une marche oppofée à celle que vous annoncez. Pour peu qu’on eût réfléchi fur la caufe de fa marche, on auroit fenti que, puifqu'il indique les différents mouvements que lewvin éprouve dans la cuve, le flotreur doit defcendre lorfque le marc a la liberté de monter: car il ne peut le faire fans laifler un vuide que le vin tend à remplir; & pour cela, il faut néceflairement que le ni- veau du vin baifle.. Par la même raifon, lorfque la fermentation com- mence à cefler , & que le marc s’affaifle, il fait refluer la liqueur ; elle s'élève dans la cuve, & le fotteur, en fuivant fes mouvements , doit monter. L'effet eft contraire dans une cuve dont le marc eft retenu & comprimé par un fecond fond; dans ce cas , le vin feul a la liberté de monter & de defcendre. Les progrès de la fermentation s’annoncent denc —.__—…———_—— — — —— ———— ——————…”…”"…—…"”"…”"”"’”"’”…"’….….….…_…’…’…-____…_)…)_’—)’)…)’…)……….….. (x) La Société Royale des Sciences de Montpellier, qui couronna en 1780 le Mé= moire del M. Bertho/on fur cetre queftion : Déterminer , par un moyer fixe , fimple & à la portée de tout Cuhivareur , Le momenc auquel l& vin em fermentation dans da euve aura acquis toute La force & rouvre La qualité donc il eft fufceprible, 90 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, : par l’afcenfion du flotteur , & fon abaiflement indique un affoibliffement dans la fermentation. J'ai fait ufage de votre œnomètre, Monfieur, dans une cuve à deux fonds , ainf que vous le recommandez , & dans des cuves fans fecond fond , dont les unes ont été couvertes & les autres ne l'ont point été. La vendange a été égrenée à moitié, excepté celle de la fixième cuve, qui ne l'a point été. Vous verrez , dans la Table que je joins ici, le journal exact de la marche de cetinftrument; vous y remarquerez , comme moi ;, des irrégularités apparentes, qui tiennent fans doute au mécanifme de la fermentation , dont les effets nous font encore en grande partie inconnus, J'ai lieu de croire, Monfeur, que votre inftrument, bien obfervé, con- tribuera à nous en dévoiler quelques-uns. Quoi qu'il en foit, je me borne dans cette Lettre à vous expofer fidellement le détail de mes expériences, & les remarques que j'ai faices , en vous priant; Monfieur , de les exami- ner, de les difcuter, &, fi vous Le jugez à propos , de me faire part de vos réflexions par la voie de ce Journal , pour l'inftruction de mes Com- patriotes & pour la mienne. Je crois devoir dire yn mot de la température que j'ai annoncé plus haut comme ayant été fort contraire au but de nos expériences, Les mois d'Août & de Septembre ont été froids & pluvieux ; le raifin n'étoit point mûr , nous n’ayons yendangé que le 17 Oétobre , un mois plus tard que l’année dernière. Il gela à glace le premier jour des vendanges; la campagne étoit blanche; le raifin fut Aétri, Nous eûmes les jours fuivants ou des brouillards , ou de la bruine, ou de la pluie. Vous jugez , Monfieur, qu'avec une pareille température, les cuves n’ont dû fermenter que fort tard. Vous en jugerez par la table fuivante, qui vous mettra fous les yeux le temps que chaque cuve a cuvé & fermenté, dans un pays où le vin ne cuve ordinairement que 5o ou 60 heures. N°. Durée | Durée u dés du de la cuves. | Cuvage.|ferment. heures. |heures. 1 179 107 » 2 206 144 ; - Ar 3 192 122 À 4 180 108 |! ‘ $ 67 64 6 67 65 Vous voyez, Monfieur, qu'à l'égard des quatre premières cuves, il s'eft écoulé 72 heures avant que la fermentation s'établit | & qu’elle a duré fort long-temps. À l'égard des dernières cuves , j'aurai lhonneur de vous obferver , Monfieur , que la vendange a été foulée dans ces cuves au : . , SUR'LHIST. NATURELLE ET LES ARTS. {1 moment où elles venoient d’être vuidées ; que le raifin avoit paré pen- dant près de deux jours avant d'être foulé, & que ce raifin étant ce , qu'il y avoit de moins mûr, il étoit deftiné à faire ce que nous appel- lons du verderon. Les cuves en fermentation avoient peu d’odeur; l’écume éroir blanche & peu abondante; le gaz qui s'en développoit n’éteignoit la chandelle que lorfqu’on la préfentoit à une ouverture faite dansle marc. Les cuves ne fe font point échauffées, quoiqu'elles paruflent bouillir vivement , & elles ont continuésde fouffler la chandelle jufgu'au moment du cuvage, quoique l’ænoniètre annonçât une, diminution marquée dans La fermen- tation. Vous voyez, Monfieur , combien de pareilles lenteurs , occañon- nées par des circonftances aufli défavorables, ont dû inAuer fur les effets de votre inftrument, & ledifcréditer dans l'efprit de certaines perfonnes qui fe croient autorifées à prononcer d’après un premier effai , fans faire attention à des circonftances étrangères, qui ont pu le faire mäniquer en partie. J'ajouterai que la pefanteur des flotteurs qu'on a conftruits à Laon, a pu nuire aufli à la fenfibilité de l'inftrumenr, Is font de bois léger à la vérité, mais beaucoup trop longs & trop épais ; ils frottent nécefMt fairement contre les parois du cylindre, lorfqu'on n’a pas la précaution de les contenir au moyen d'un couvercle percé , précaution qu'on a né- gligée, ; Je paffe maintenant au détail de mes expériences. ë me DS Oflobre 17382. Première Cuve (a). PE — + A Marcke. Marche Obférvarions. Jours | Bures | PSS || Jours | Heures | Fe S : du du de du de Êt de du (2) Cette cuve avoit deux 4] mois. | jour. l'œno- |thermo- ||mois. | jour. | l’œno- | thermo- fonds. mètre. | mètre. "| mètre. _mètre. (8) La fermentation com- À po. li, | degrés. || |h. po. I. | degrés, |mençoit à étrefenfible. 1917 f\"4 3 9,0 || 23 | 6 fl $ 6 | 10,0 | (c)La cuvedébordoit: ona 20/75 m.| 4 4 8,0 to fs 7 | 10,0 |tiré trois feaux de vin ;l’œno- 6 Gate z 735 24 | 64 m.| $ 8 | 10,0 |mètre a defcendu d’environ 21/7: m.| 4 4 6,5 9 m.|6 o | 10,0 |3 lignes. midi 4 6 7,9 || (d) to ml s 9 92 | (d) Onaencoretiré 3 feaux (ls £la 8 7,0 2 VIN T 9 9,4 |de vin avant l’obfervation. 22/7 om. 41 8,0 Re PURE 9,0 : (e) ce a encore tiré trois | J midi. o 8, e) ; 6 o eaux de vin. 6 : 2 FA eo tr £ { " TOCE) On a encore tiré deux | 23175. m.|:5 .6 10,0 67 ml $ 7 9,0 feaux de vin après l’obferva- midi, SN 10,0 (f) midi $ 9 8,s luon. l | ()lh£ Cls 9 10,0 ALI 0 ET AET 8,$ (g) On a pris la cuve qui N 26(g)| 93 L|s :8 2,9 |bouilloit encore, & qui fouf- CCE EE: 9,s |foit la chandelle, 02 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, | Seconde Cuve (A). | roi EC NSteE Ohfrééonte | Jours | Heures | Marche || Jours | Heures | Marche (4) Cette Cuve avoit commencé à fermenter | du di de du | du de [le 22; elle n’avoit point de fecond. fond , & mois. | jour. |l’œnom. ||mois. | jonr. |l'œnom. |elle étoit couverte avec des planches. | h po. li. LE po. lig| (1) Le marc touchoit les planches ; il ne pou- | 23 25 [| 9 o 26 | 5 m| 8 10 |voit plus monter; il falloit que le vin s’élevät. 6 f|9 o (2) 3 | o1o (À) A dix heures du matin, j'ai fait fupprimer ro f| 8 10 ro | 9 les planches, & renfoncer le marc. 5 24 67 m.| 8 o ||27 TO) MORE) (4) On a pris la cuve qui fermentoit encore, | 10 m.| 8 10 midi. | 9 3 |& qui fouffloir la chandelle. 2 (EE RE A nCILSUS (m) Cette cuve n’avoit pointde fecond fond, 73 [| 8 4 + | 9 4 |[& nétoir point couverte ; elle avoit commencé (éltor fl'9 9 ||28(0)| s m.l 9 4 [àfermenter le 23 à deux heures du foir. 25 (k) 63 m.|10 2 7 Cinquième Cuve (p). (2) Ou a renfoncé le marc. midi. | 9 3 Fret se (o) On a pris la cuve qui fermentoit & fouf- 2 MEN C||PORES z Lors # |foit encore la chandelle, us | 8 4 52: : 1 p A Û AT OO S ÿ 8 (p} Je n'ai point placé Pœnomètre dans la 26 = mliot-s0l|e Re "C 4 quatrième cuve : cette cinquième cuve étoit ms Chou _() L' MAR dans le même état que la troifième; elle con- to flo :—: Sixième Cuve (9: |tenoit du verderon, & avoit commencé à fer- 27 8 m9 o ||29 s fl 7 6 \menter le 26 à dix heures du foir , trois heures midi. | 9 o 10 f| 8 o [après avoir été foulée, | 92 |o 7 m8 2 (g) Ona pris cette cuve qui fermentoit encore. mil 2 rom.) 8 UE (r) Cetre cuve contenoit auffi du verderon ; 28()] $ mo 7 to f|8 6 |ellen’a point été égrenée, elle a été foulée le 31 midi, | 7 10 |29, & elle fermentoit le même jour à 4 h. du foir. (s) 6 f|8 4! (s) Ona renfoncé le marc. | Nov.io f|8 1 (4) On a pris la cuve ; la fermentation paroif- 1 (tl 8 m.]8 x |foitbienaffoiblie. | > ———— Er jf Je vous prie, Monfieur, d'examiner avec foin le Tableau que je viens de vous mettre devant les yeux. Vousremarquerez que la marche de l'æno- mètre, dans la troifième & la cinquième cuve, paroît avoir été contraire à ce qu’on devoir atténdre. J'aurai l'honneur aufli de vous faire obferver que dans les cuves fans fecond fond , l'ænomètre commence par monter. Ce n'eft qu'après un certain temps, & lorfque la fermentation approche de fon maximum , qu'il defcend pour monter enfuite de nouveau , & annon- cer que ce maximum eft paÎlé , &c. &c. J'avoue qu'il y auroit eu plus d’exactitude dans mes expériences, fi: javois placé l'œnomètre dans chaque cuve aufñli-tôt après le foulage. La première & la fixième ont été dans ce cas; mais comme je n'avois que deux œnomètres , il ne m'a pas été poflible de faire mieux. Je me propofe de m'en procurer plufieurs , pour recommencer ces expériences l'année pro- chaine. Je LS SE SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 93 Je ne parle point du thermomètre, dont je n'ai fuivi la marche que dans la première cuve. Comme les cuves fe font p:u échauffées, il ne s'elt pas beaucoup plus élevé qu'à l'air extérieur. Je penfe qu’en général cet inftrument eft un mauvais guide pour fixer le moment du décuvage. J'en dis autant de l'épreuve de la chandelle, de la déguitation , de 1. deur , &c. ;, & rien en ce genre ne me paroït jufqu’ici préférable à votre inftrument, : Je fuis, &c. CoTTE, Prêtre de l'Oratoire , Cor- refpondant de l'Académie Royale des Sciences, &c. Thierny , 2 Novembre 1782. SALUT ILE D'UMDISCAURS Prononcé à la Séance publique de l’Académie des Sciences ; Belles-Lettres & Arts d'Amiens , le 25 Aoûr 1782 ; Par M. le Comte D'AGAY , Intendant de la Province, fur les avantages de la navigation intêtieure , © [ur Le Canal de Picardie. Le Picardie ; diftinguée par fon heureufe pofition entre les Provinces commerçantes du Royaume , réunit aux différentes branches de navigation intéreffantes dont elle eft fufceptible , l'avantage d’ouvrir la communica- tion de la Capitale & des Provinces méridionales & occidentales avec les Pays-Bas, la Hollande & les Royaumes du Nord; traverfée dans fa _ partie fupérieure par la rivière d'Oife , qui fe joint à la Seine, elle eft en même temps l'origine de deux grandes rivières , la Somme & l'Eftaur, qui ; par leurs cours oppofés, étendent la Navigation, & forment des communications différentes, l’une avec la Manche , l'autre avec la Mer du Nord. L’Elcaut , qui prend fa fource auprès de l'Abbaye du Mont-Saint- Martin , parcourt Le Cambrefis & le Haynault jufqu'à Valenciennes , où Tome XXII, Part, 1, 1783. FÉVRIER. N 94 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, devenu navigable , il continue fon cours par Condé, Mortagne, Tournay, Cand & Anvers, où il fe termine dans la mer. La Somme, qui commence deux lieues au-deflus de Saint-Quentin , prenant une direction oppofée , traverfe la Picardie dans toute fa lon- ueur ; & réuuilfant au-deflous d'Amiens {es eaux partagées en différents canaux, elle forme une navigation intéreffante , mais difficile, par Abbe- ville’ jufqu'à la nier, où fon cours fe termine entre le port de Saint-Valery & l'ancien port du Crotoy. La proximité fi précieufe de trois grandes rivières a fixé l'attention par- ticulière du Gouvernement , qui a formé le projet de les réunir entrelles, & de perfectionner leur Navigation. Telle eft l’origine des trois canaux importans, que des vues fupérieures d'adminiftration ont adoptés & or- donnés dans cette Province. La grande utilité de ces canaux, dont lun eft terminé , & les deux autres commencés , ne peut s’apprécier que par les avantages ineftimables qu'ils procureront au commerce général du Royaume après leur entière exécution. Le premier canal que l'on ait exécuté dans cette Province, connu fous le nom d'ancien canal de Picardie ou canal de /4 Fère , eft l'ouvrage de M. Crozat, pour former la jonction de la Somme avec l'Oife (1); ce ca- nal, tiré des eaux de la Somme, près Saint-Quentin, côtoie les étangs de cette rivière jufqu'à Arthem , où il partage fes eaux, pour en conduire une branche , par différentes éclufes (2) , jufqu'à FOife, vis-à-vis de: Chauny ; & avant cette jonétion , il arroïe une nouvelle branche , qui pro longe la Navigation jufqu’aux Fauxbourgs de la Fère. Par ce premier canal, la Picardie a commencé de jouir d’une Navi- gation importante avec la Bretagne par la Seine, le canal de Briare ; la Loire; & avec la Bourgogne, par la Seine & l’Yonne; mais cette commu- nication concentrée dans un point de la Picardie, ne pouvoit vivifier le commerce de cet:e Province, & franchir leswbitacles qui 14 féparent de la Elandre & des Pays Bas, que par la jondion de la Somme avec l'Ef- cad par une navigation formée dans le fein de la Somme , ou fur fes bords. Le Gouvernement, convaincu de l'importance de ce double pro- jet, en confia l'examen & l'exécution (3) à M. Laurent , célèbre par des monuments de génie & de zèle (4), qui rendent fon nom écalement re- (1) Ce canal, commencé en 17218, a été rendu navigable en 1738; le Roi en a fait Pacquifiion en 1767 , & l'a réuni à fon Domaine. (2) Ces éclufes font celles de Pont, Juffy, Poyaux , Bargnières, Terony , Vitry & Le icourr. (3) Arrêts du Confeil des24 Février 1767 & 18 Mai 1770. (4) La Navigation de la Scarpe, le defféchement de dix mille arpents fur les bords. de cette rivière , les machines propres à l'exploitation des mines de charbon du Haynaulr, Ja machine pour lever & defcendrela grille poterne à Valenciennes, &c. Nécrologe des Hommes célébres , de 1774. ; SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 9$ commandable dans les Provinces d'Artois , de Flandres , de Picardie & de Haynaulr, © Le projet de rendre la Somme navigable dans fa partie fupérieure, & de perfectionner fa Navigation dans fa partie inférieure , réunit les plus grands avantages pour le Commerce & l'Agriculture de cette Province, D'une part, ouvrir la circulation de fes grains d'une extrémité à l'autre, & leur verfement dans les autres Provinces; faciliter l’inportation d: toutes les épiceries qu'elle fait circuler dans l'intérieur du Royaëme, & l'expor- tation de fes Manufactures qu’elle débice aux Etrangers & aux Natio- taux; la décharger des tranfports par terre des convois militaires , fi oné- reux en temps de guerre; d'autre part , deffécher & rendre à l'Agriculture près de deux mille arpens de marais , ou d'étangs formés par lépanche- ment des eaux de la Somme: c’eft une opération digne d’un règne bien- faifant , & donc cette Province éprouve l'utilité à meure que les circonf- tances permettent d'en avancer les progrès. Le canal (1) qui doit former la Navigation de la Somme jufqu'à Amiens, fur ure longueur de cinquante milles , commence à Saint-Simon , où il fe fépare de l’ancien canal, pour fuivre la rive gauche de la Somme, ê& deffécher quinze cents arpents de marais qui font fur fes bords: il tra- verfe plufieurs fois cette rivière, pafle près de la Ville de Ham; & fe portant fous les murs de Péronne dans une longueur d'environ dix-fepr milles , qui contiendra cinq éclufes , il cotoie & traverfe fucceflivemenc différents étangs, parvient à l’éclufe qui fera conftruite près de la Ville de Bray, & fe réunic enfin à la rivière de Somme, dont il fuivra le cours jufqu'à Amiens, en faifanc difparoitreflles finuofités qui s'y rencontrent. Certe Navigation , plus fimple & plus courte (2) que celle des anciens projets, feroit aujourd'hui achevée & perfetionnée , fi elle n’avoit pas éprouvé des contradictions, & même une fufpenfon, par des ordres fu- périeurs , en 1775. Préfent à la difcuflion quia épuré ce projet fous les yeux du Gouvernement, éclairé par d’habiles Ingénieurs , mon zèle & mes vœux pour le bien de cette Province ont été fatisfaits, par la déci- fion qui a ordonné la continuation des travaux du canal de la Somme en 1777 : ils font dirigés avec autant d'intelligence que d'économie par M. Laurent de Lionne, dont les talents, formés par un oncle célèbre, lui ont mérité la confiance du Gouvernement, & l’honneur d’être aflo- cié à cette Compagnie, e (1) Cet Ouvrage a été commencé fous l’adminiftration de “M. Dupleix , alors Inten- dant de Picardie. | (2) Le canal de M. Laurent eft plus court de quatre mille toifes, & contient deux éclufes de moins que le canal anciennement projerté. Tome XXII, Part, 1,1783. FÉ VRIE R, 2 N'a 96 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Dans le plan des travaux de la Somme , l'utilité d’une Navigation nou- velle dans fa partie fupérieure, avoit fait préférer cet ouvrage aux tra- vaux qui doivent perfectionner fa Navigation inférieure ; mais les barre- ments que les fables de la mer avgmentent fans cefle à l'embouchure de la Somme , & les variations continuelles du lit de cette rivière , qui ren- dent cette Navigation auf difficile que dangereufe, ont accéléré les vues du Gouvernement®@{ur Le rétabliffement du port de Saint-Valery, & fur la füreté de la Navigation dans cette partie, par la conftruction d’un canal fur la rive gauche de la Somme; les vérifications & nivellements préli- minaires ont été ordonnés en 1778 & adoptés cette année par un nouvel Arêt(1), qui étend jufqu’au port d'Amiens, le projet de perfectionner promptement cette Navigation. Vous fentez, Meflieurs, tout le prix de ce nouveau bienfait de Sa .Majetté , qui partage , comme un père tendre (2) & généreux , les befoins: & les dépenfes du commerce de la Province dans cette entreprife utile, & qui applaudit à La bienfaifance de Monfeigneur le Comte d'Artois dans les fecours qu'il s’emprefle aufli d'accorder pour le fuccès d’une Navigation aufli avantageufe au Ponthieu. Ces faveurs particulières com- blent les vœux & la reconnoiflance de cette Province, & ne lui laiffent à defirer, pour la perfection de fa Navigation, que la continuation du mo- nument le plus important pour cout le Royaume , qui doit joindre la Somme avec l'Efcaut, & ouvrir la communication La plus intéreflante entre les Mers, Les Navigations intérieures fe multiplioienc de toute part dans les Provinces feprentrionales. L’Artois avoit converti en rivières navigables FA , la Lis & la Scarpe ; la Flandre entière étoit déjà percée par des ca- naux , qui l’unifloient intimément avec les nouvelles Navigations de PAr- tois , & qui devoienc la réunir par le canal de la Senf£e avec le Haynault & le Cambrefis. Ces deux Provinces projettoient d'achever la Navigation de l'Efcaut dans fa partie fupérieure, & toutes enfemble confondoient leurs vœux avec ceux de la Picardie, pour former une Navigation générale par la jonction de la Somme avec l'Éfcaur: Ce projet étoit digne d’une grande Monarchie, par fes grands avantages & fes difficultés. Le Gouvernement éclairé fur Les uns & les autres, mais convaincu de la gloire & de l’uti- lité d’une pareille entreprife, chargea M. Laurent de cette importante opé- ration. î Dans lefpace intermédiaire qui fépare la Somme de l'Efcaut, fur les confins de la Picardie, entre Saint-Quentin & Cambray , s'élèvent des (x) Arrêts du Confeil des 19 O&obre 1778 & 20 Mars 1782. (2) Le Roi a accordé une fomme annuelle pour contribuer aux dépenfes de ces tra vaux. Monfcigneur le Comte d'Artois a voulw yeconcourir par un don confidérable. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 97 hauteurs entrecoupées par des vallées, qui avoient fait échouer tous les projets de réunion de ces deux rivières, foit par la grande dépenfe nécef- faire pour les ouvrir, foit par la rareté des eaux dans cette partie. M, Lau- rent vérifia différentes fois le nivellement des vallées & la hauteur des eaux, & reconnut avec certitude que la communication de la Somme avec l'Efcaut, par un canal à ciel ouvert, coûteroit au moins 20 millions; qu'il enleveroit à l'Agriculture un terrein immenfe, par la largeur de l’ou- verture & la hauteur des talus; qu'il exigeroit un grand nombre d’éclufes, & qu'il feroit prefque toujours en danger de manquer d’eau. Ces difficultés réunies auroient triomphé de toutes les reffources de Part; mais c’eft le privilége du génie de vaincre tous les obftacles. M. Lau- rent conçut le projet d'établir une navigation fouterreine, par un canal percé fous la montagne, fur une longueur de fept mille, qui diminueroie beaucoup l’obftacle des niveaux très-difproportionfés des deux rivières (1), abrégeroit la longueur de la Navigation, & la mettroit conflamment à l'abri de la difette d’eau; conferveroit à l'Agriculture dix-huit cents ar- pens de terre , & n'excéderoit pas 4 millions de dépenfe.' La nobie hardiefle de ce projet fut foumife aux vérifications propres à régler la confiance du Gouvernement fur les vrais obftacles qu’une pru- dence impartiale exigeoit d'approfondir , {4 nature du terrein & la, fuff- Jance des eaux ; & l'on reconnut, après des fondes réitérées, que les dif- rents bancs de pierre qui fe trouvoient dans le lit de l'excavation , étoienc affez folides pour épargner la maçonnerie de la voûte dans une partie du canal, & pouren permettre facilement (2) la conftruction dans les en- droits qui l'exigeroienr. IL fut aufli vérité que les eaux des puits du pays étant fupérieures de 32 & même fo pieds au canal projetté, & n'étant fujettes à aucune variation , elles feroient toujours plus que fufifantes pour fournir à la Navigation du canal , fans aucun fecours étranger. Ces différentes opérations éclairoient la fagefle du Gouvernement fur la poflibilité d’un projet auñi intéreffant , dont le fuccès ne pouvoit qu'ho- norer l’induftrie de La Nation: mais la prudencé vouloit que cette entre- prife célèbre füt encore autorifée par la néceflité de l’employer, ou du moins de la préférer , en la comparant à l'ancien projec , fouvent pro- pofé , d'ouvrir la communication la Hollande & de la Flandre avec Vintérieur du Royaume, par la jonction de l'Efcaut à la Sambre, & de la Sambre à l'Oife. Cette furabondance de fagefle & de précaution ne Jaïiffa point la préférence indécife entre les deux projers. Des obfer- — (r) L’Efcaut , en le prenantà fà fource , eft 60 pieds plus haut que la Somme. Le anal fourerrein , à fon ouverture près de Pundhuille, elt 45. pieds plus bas que l'Efcaur, & ss pieds plus haut que la Somme. (2) L’abondance des matériaux permet’ de voñter auffi facilement que de percer fa: montagne, 98 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, vations aufli exactes qu'avantageufes au projet du canal fouterrein , ache- vérent de fixer les vues & la confiance du Gouvernement en faveur de ce monument. [left aifé de les fentir & de les apprécier. L Si l'on compare les deux projets pour la facilité de la Navigation, en reconnoît qu'il y auroit au moins cinquante éclufes à parcourir dans le trajet de Valenciennes à la Fère, au lieu de vingt-cinq qui fufront pour le mème trajet, en achevant la communication de l'Efcaut avec la Somme par le canal de Picardie (1). Le commerce du Caimbrefis, de l’Artois & d'une grande partie de la Flandre , auroit vingt-fepc lieues de chemin à faire de Cambray à la Fère par la Sambre, au lieu de dix-fept pa le canal de Picardie ; il paroifloit même très-douteux aux yeux de M, Laurent, que les eaux de la Sambre , au-deflus de Landrecy , puilent ali- menter en tout temps cette Navigation, & des perfonnes aufli inf- truites qu'impartiales cOnfervent cette opinion, Le canal de Picardie au con- traire fera , par fa pofition profonde, conftamment à l'abri de ces variations fi nuifibles au commerce. Enfin, la jontion de lEfcaur à l'Oife par la Sambre , couteroit au moins 8 millions, pour remplacer très-imparfaite- ment le canal de Picardie , dont le premier devis eft de 4 millions, & qui ne coûtera plus à l'Etat que 550,009 livres pour l’achever & le perfec- tionner (2). C'eft d'après l'examen le plus réfléchi de ces différents projets, que le canal de Picardie fut adopté (3), & les travaux commencés fous la di- rection de M. Laurent, La tête du canal eft placée près de Saint-Quentin, d'où il s'étend au couchant pour entrer fous la montagne, près du Vil- lage de Lefdin , à quatre milles de Saint-Quentin ; il doit la parcourir par une galerie fouterreine de fept mille vingt toifes, pour en fortir près du Village de Vandhuille, & continuer fon cours à ciel ouvert jufqu'à Cambray , partie dans la Picardie, partie dans le Cambrefis; il fera éclairé par des puits de diftance en diftance : fa largeur, fuivant les premiers pro- jets, feroit de 20 pieds, fur laquelle des banquettes de 2 pieds de chaque côté, pour le hallage, laifleront 16 pieds d’eau pour le paflage des ba- teaux , & fa hauteur feroit de 20 pieds, ou même EE. fuivant Îes décifions du Gouvernement. Enfin, pour achever les détails Les plus effen- ——————_—_—_—_—_—_—]__——.—— (x) Perfonne n’ignore combien la multitude d’éclufes augmente les embarras de la Navigation > & même la fufpend fouvent par le dérangement & les réparations d’une feule éclufe. (2) Suivant l'offre faite par une Cempagnie, qui & foumet à l’achever fous ceite condition , & moyennant une jouiflance fuffifante pour l'indemnifer de cette entreprife patriotique. Y (3) Par Arrêt du Confeil du 29 Février 1769 , qui ordonne auffi les travaux à faire, pour rendre l'Efcaut navigable depuis les limites de la Picardie jufqu'à Valenciennes, ; St nomme M. Laurent Direéteur général de ces Ouvrages. altaté à. Étienne. SUR" L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 99 tiels de la communication de la Somme avec l'Efcaut , les parties du. ca- nal à ciel ouvert contiendront fix éclufes , dont crois du côté de [a Somme & trois du côté de J'Efcaut. Ce monument, dirigé par le zèle le plus a@if, s’accrédira prompte: ment par le fuccès des premiers travaux , & fa réputation s’étendit auffi rapidement dans Les Pays étrangers que dans le Royaume, En 1772, pour démontrer d’une manière foie la folidiré du terrein, on exécuta une partie en grand de galerie fouférrcine dans les dimenfions de 20 pieds de hauteur & de largeur que doit avoir le canal ; & cette partie, qui fub- filte aujourd'hui fans aucune altératioh , excita la curiofité de M. le Duc Madame la Duchefle de Cumberland , que j'eus l'honneur d’y recevoir par ordre du Roi, & qui témoignèrent leur admiration de cet ouvrage (1), En 1773, la galerie fouterreine étoit percée fur la longueur de cinq mille toifes, & la célébrité de ce monument s'accrut encore par la*vifite & le fuffrage dont Monfeigneur le Comte d'Artois daigna l’honorer en 1774, & par le concours du Public & des perfonnes les plus diftinguées par leur rang & leurs connoiffances , qui fe font empreflées de l'examiper depuis cette époque. Si la critique la plus févère a fu répandre des doutes & des nuages fur ce monument mémorable, & ena fait fufpendre Les travaux après la mort ‘de fon Auteur; fi les fuffrages réunis d'Obfervateurs éclairés de toutes les Nations n’ont pu le fouftraire entièrement à la fatalité qui pourfuir les grandes fentreprifes, il recevra fans doute un nouvel éclat de la fageffe fou- veraine, qni décidera fa continuation & fa perfection. Je me retracerai point à vos yeux, Meflieurs, les dificultés fi fouvent approfondies & toujours renaiffantes contre ce monument, donc Pinfpec- tion locale fait évanouir les objections & les préventions ; mais j'intéref- ferai vivement votre attention, en fuivant dans ces voûtes fouterreines les traces de l'illuftre Voyageur, dont la vifite eft aufli mémorable par fes ob- fervations éclairées fur cet ouvrage, que par fon rang fuprème. L'Empereur , fous le nom de Comte de Falkeïnftein , après avoir vifiré les grands monuments de PEurope , & confidéré avec une attention par- ticulière ceux qui intéreflent la Navigation depuis la Mer Cafpienne juf- qu'aux extrémités de l'Italie, fe rendit le 28 Juiller 1781 au canal .fou- rerrein , dont il examina beaucoup le fite extérieur. Defcendu dans la ga- Jerie fouterreine, il reconnut au premier coup-d'œil l'empreinte du génie dans la grandeur & la fimpliciré de ce monument, & témoigna fon ad- miration par ces expreflions fublimes : Je fuis fer d’être homme , en voyant * (x) Eertre de M. Prevôt de Bellinge, Lieutenant Général des Armées du Roi d’An- gleterres, datée du 26 Septembre 1773 , adreflée à M. Laurent, par ordte de M. le Duc & Madame la Duchefle de Cumberland. 100 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, un demes pareils concevoir & exécuter un ouvrage femblable ; je fens que cette idée nélève l'ame ! L'augufte Voyageur, parcourant en bateau une partie de la galerie fouterreine, difcuta, pendant cette Navigation extraordinaire, les diffé- rents objets de commerce qu'une communication plus facile par ce nou- veau Canal feroic circuler entre fes Etats des Pays-Bas, la Hollande & l'intérieur de la France. Calculateur aufi éclairé qu'impartial de la ba- lance de ce commerce , il apprécia la graffde utilité du canal de Picardie pour le commerce de la France, par l’économie des tranfports dans l'in- térieur du Royaume en temps de paix, leur füreté pendant la guerre Mc par la réunion de cette navigation avec toutes les mers qui baignent la France (1). Mais en témoignant fa furprife de l'interruption de cet ou- vrage, il voulut être inftruit de la nature des difficultés qui avoient fait naître des doutes, & fe livra pendant deux heures à cette difcuflion intéref- fante, dont Le réfultat vous découvrira la profondeur de fes connoiflances fous le voile de la Majefté Souveraine. . L'illuftre Obfervateur fixant d’abord fon attention fur la folidité de l'ouvrage, examina curieufement la nature du terrein dans lequel il eft conftruit; & reconnoiffant par-tout des bancs de pierre très-durs, dont il eft difficile de détacher quelques morceaux , il marqua la plus grande con- viction de la folidité d’un ouvrage creufé dans ces mafles, qui ne pourroit Je détruire, ajouta-t-il , que par une révolution dans Le globe. Le projet de voûter en maçonnerie les parties du terrein qui fauroient moins de confiftance, lui parut concilier parfaitement la folidité de cet ouvrage avec l’économie, ” La fufhfance des eaux pour la Navigation du canal, & l'effet de leur filtration dans lesterres, fe préfentoient naturellement dans l’ordre des ob- jections que l'Empereur vouloit approfondir. La grande élévation de l’Ef- caut fur le canal, qu'il avoit reconnue lui-même; la tendance des eaux du Pays au ben de celles de la galerie fouterreine, certifiée par plu- fieurs vilites nouvelles ; enfin, l’état actuel des eaux du canal , dans un temps de grande féchereffe , démontrèrent à fes yeux combien le prétendu danger du manque d’eau ou de leur filtration nuifible au canal , étoit peu fondé (2). Pour éclairer fcrupuleufement fur tous les points un fuffrage aufñli ref- peétable , l'inconvénient qui pourroit naître de la réfiftance des eaux dans _— (1) Avec la Manche, par la Somme & la Seine; avec l'Océan, par la Loire; & -avec la Méditerranée, par le canal de Bourgogne & le Rhône, (2)-L’Empereur voulut bien vérifier lui-même que le bruit d’une chûte d’eau que Le se dénoncé comme un gouffre où les eaux fe perdojent, provenoit d’un fimpie atardeau. un SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, ÿvor un canal étroit, fut expofé fidellement aux yeux de l'Empereur : mais l'expérience faite par M, Laurent de Lionne dans un canal de mêmes lar- geur & profondeur que le fourerrein , avec un bateau tel qu'on les em- ploie dans les canaux de Flandres, & avec la même vitefle de marche des Mariniers , ayant prouvé que l'accroiffement de la réliftance eft peu fen- fible , parut à ce Prince fupérieure aux doutes & aux contradiétions (1). Mais les recherches de l'illuftre Obfervateur du canal n'étoiene ‘poinc épuifées par l'examen qu'il avoit fait de la poflibilité & de la füreté de cet ouvrage : il fxa fon attention fur Les obitacles phyfiques qui avoient fait profcrire le project d'un canal à ciel ouvert, pour y fubftituer un ca- nal fouterrein. En confidérant fous ce point de vue la pofition des vallées les plus bafles entre la Somme & l'Efcaut , qui font beaucoup plus élevées que la fource de l’Efcaut , il reconnut la nécefité qu'il y auroit , ou de tenir fort élevé le canal à ciel ouvert, ce qui leferoit manquer d’eau ; ou de Pa- baiffer beaucoup par de profondes excavations avec de larges ouvertures dans lagpartie fupérieure, ce qui occafionneroit d'énormes dépenfes, ou- tre la LÀ de quinze cents arpens de terre : obfervant d'aïlleurs qu'il fau- droit douze à treize éclufes pour defcendre de l’Efcaut à la Somme, & que toutes ces dépenfes & pertes coûteroient environ 20 millions; il confirma, pe fes éloges, la hauté idée qu'il avoit conçue de l’entreprife du canal outerrein. Ses réflexions méritent d'être confervées dans leurs propres ter- mess Ce quime fait admirer , dit ce grand Prince, le génie de l'Auteur , £'eff d'avoir épargné, par ce fouterrein, plus de 12 millions à la France, @ confervé beaucoup de terres à L Agriculture ; d’avoir, par la direélion de fa digne, & par l'épargne des éclufes , raccourci la Navigation, avec la certi- tude de ne jamais manquer d'eau : tout cela me préfente l'ouvrage d'un homme de génie, & qui peut [ervir de règle pour établir des'communications impofft- bles ou trop difpendieufes à ciel ouvert. Avant de fortir du canal , l'Empereur fe rappella que l’on avoit voulu le détoygner de vifiter cet ouvrage, par le danger de la grande fraîcheur & de l'air mal-fain qu'on y refpire , & il s’expliqua encore dans ces termes : .De- puis deux heures que je fuis dans ce fouterrein , occupé à voir , écouter G& par- ler, je n'y éprouve d'autre froid que celui qui règne dans tous Les fouterreins d'une certaine profondeur ; j'y refpire un air bien renouvelé, exempt de ces vapeurs meurtrières que l'on ne rencontre que trop fouvent dans nos mines d'Allemagne , où je fuis defcendu plufieurs fois , & où un million d'hommes (1) M. Laurent de Lionne cita l'exemple des éclufés de Saint-Omer , qui ont 16 pieds d'ouverture , & reçoivent librement les plus grands bateaux de Flandres, qui ont de 13 à 14 pieds & demi de largeur, comme le canal fouterrein ; & il ajouta d'offre qu'il a faite au nom d’une Compagnie , qui fe charge de faire paffer dans le canal foutereriæ tous les bateaux de deux mille quintaux, moyennant 30 liv. par bateau , quoiqu'il eæ coûte Le double pour remonter la Seine fur une pareille longueur. Tome XXII, Part, 1, 1783. FÉVRIER, ar +02 OBSÉRVATIONS SUR LA PHYSIQUE, paffent fans contrainte plus des deux tiers de leur vie 3 Les tireurs de bateaux R'auront ici aucun danger à courir (1). L'augufte Voyageur termina fa vifite du canal par l'infpe“ion des tra- yaux extérieurs , & voulut examiner les déblais de cette grande excava- tion. Après les avoir confidérés avec lattention & les connoiffances d'un Minéralogifle , & n’y avoir reconnu que de la craie & des cailloux\, il lui arut certain que la voête du canal ne peut être détériorée par l'infiltration infenfible & néceffaire des eaux pluviales ; ce qui ne pouvoit arriver que dans Le cas où des lits de glaife arrétant les eaux pluviales, les forceroient de fe porter vers un point plutôt que vers un autre ; ‘inconvénient que l'on ne doit pas craindre dans un terrein homogène G de pure craie ; comme L’eft céluict. ; L'iliuttre Souverain finit fes obfervations par la comparaifon glorieufe de l'utilité du canal de Picardie , qui doit ouvrir en France la communi- cation la plus importante des Mers ,avec les grands canaux de Ruflie qu'il avoit vifités, & quiréuniflent les mers dans ce valte Empire. IL fe rendit enfuite au Port de Saint-Quentin, où l’on embarque Les cs def- tinés pour la Marine de Sa Majelté, quiiles fait venir des forêts du Nord our défendre les droits de l'Amérique & venger la liberté des mers. Ce fpectacle renouvella fes regrets fur la fufpenfion du canal; qui feroit jouir le Royaume d’une Navigation non interrompue, depuis le fond du Nord jufqu'à Breft, en évitant la traverfée dangereufe de la Manche, & en épargnant des tranfports par terre très-onéreux à l'Etat (2). L'Empereur faifit avec bonté cette dernière occafion de marquer à M. Laurent de Lionne fon eftime pour fes connoiffances & [es talens , dignes de porter ce grand ouvrage à fa dernière perfetion; & ïl honora des té- moignages les plus précieux de fatisfaétion & de fenfibilité, mon zèle ource monument, & mon emprefflement refpectueux de fatisfaire fa cu- ziofité (3). (1) L'Empereur obferva , dans le canal fouterrein, un nid d’hirondelle, qu'il voulut reconnoître lui-même, comme une preuve de la température de l'air dans ce monu- ment. les tranfporte, pour les embarquer au Port de Saint-Quentin, faute de communication entre l'Éfcaur & la Somme. Il eft reconnu que fi le canal de Picardie avoit été continué & achevé, l’économie (ur les tranfports des convois militaires & approvifionnements de marine, depuis le commencement de cette guerre, auroit fufi pour dédommager des frais de fa conftruction ; ce qui auroit encore évité l'extrême dégradation des grandes routes dans la Picardie & le Cambrefis. (3) L'Empereur éroit accompagné , dans cette vifite au canal, du Général Tercy & de M. Romberg , célèbre Commerçant des Pays-Bas. M. de la Gatinerie , Ingénieur de la Marine, & M. Rigaud, Phyficien de la Marine , & Correfpondant de l'Académie des Sciences, afliftèrent à cette vilite, & eurent l’honneur d'entretenir fouvent l'Em- pereur , &d’en recevoir des témoignages de fatisfaétion, 2) Les mâts que l’on tire du Nord , viennent par eau jufqu'à Bouchais , d’où on q julq ; SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 103 Telle eft Ja vifite mémorable, qui doit être précieufement confervée dans les Annales des Sciences & des Arts. C’eft ainfi que Pierre le Grand préparoït la félicité de fes Peuples dans les chantiers de la Hollande, dans les Manufaétures de France , & dans la vilite des monumens con- facrés par les Sciences & les Arts à l'utilité & au bonheur de l'huma- nité. Sa gloire fe perpétuera, comme fon exemple ; dans les auguftes époux , l'efpérance du Nord & les délices de la France. par leurs ver tus aimables, qui ont captivé l'amour & ladmiration des Peuples. Leur paflage rapide dans cette Province , qui a volé fur leurs pas, m'a rendu dépolitaire de leurs regrets de ne pouvoir pas examiner le canal fouterrein, & de l'intérêt plein d’eftime qu'ils ont témoigné pour ce monument, dont la célébrité eft connue dans le Nord (x). Sa perfection fera l'épo- que la plus éclatante de la Navigation intérieure du Royaume, & j'y trouverai le prix le plus Aatteur de mon amour pour la vérité, & de mon zèle le plus ardent pour le bonheur de cette Province (2). Les grands monumens de Navigation intérieure que je viens de préfen- ter à vos yeux, Meflieurs, ne font pas les feuls qui méritent l'attention du Gouvernement bienfaifant qui veille au bonheur d’une grande Nation également digne de l'amour & des bienfaits de fon Souverain. Com- bien de Provinces fertiles, mais languiffantes , faute de communication, voient circuler dans leur fein des rivières anciennement nayigables, ou qui Le deviendroient aifément , & qui les enrichiroient mutuellement par l'échange du fuperfu de cette abondance funeite ! l’Arroux dans l’Autu- nois, pays très-fertile, & qui fournit des productions de tout genre ; dans le Berry, centre du Royaume , l'Evre & le Cher, qui, en perdant leur ancienne Navigation , ont éteint le Commerce & l'Agriculture dans cette Province; dans le Limofin , la Vienne & la Wezère , dont on peut fa- cilement prolonger la Navigation ; dans le Poitou ,le CZuir, qui a joui long-remps d’une Navigation, interceptée aujourd'hui par les digues des moulins , défordre très-commun & très-funefte à la Navigation inté- rieure du Royaume! à Dans la Bretagne , combien de projets ont été propofés pour vivifer l'Agriculture & le Gommerce intérieur de cette importante Province, in- culte en grande partie , & qui verroit fans doute renaître fa fécondité & (1) Le canal fouterrein a été vifité’par ordre de l’Impératrice de Ruflie , par M. de Kerfacoff, Capitaine du Génie’ au fervice de Ruffie, (z) M. de la Millière, Intendant des Ponts & Chauflées , a été chargé par le Gouver- nement d'examiner cet ouvrage, & a rempli fes vues avec autant d'exactitude que d'impartialité. On ne doute pas que fur le compte qu'il a dû en rendre, M. Joly de Fleury, Miniftre des Finances , fi zélé pour le bien & la gloire du Royaume , ne pro- pofe à Sa Majefté la continuation & la perfection de ce monument. Tome XXII, Part. I, 1783. FÉ VRIER. Q 2 104 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fa population , par la Navigation des petites rivières qui: l’arrofent , & par les communications projettées entre les autres (1) ! Dans les Provinces méridionales, combien de rivières inutiles à la cir- culation , s'offrent à l’induftrie & aux fpéculations, pour y créer des Na vigations particulières , qui s’uniroiententr'elles & formeroient des commu- nications générales ! Dans les Provinces orientales, combien d'anciens projets formés par les Romains , s’exécuteroient plus aïfément par les heureufes inventions des Aïts modernes ! Dans la Lorraine, le grand projet, conçu fous l'Empire de Néron, de joindre les Mers par la réunion de la Saône avec la Mofelle, a été renouvellé récemment (2). Dans la Franche- Comté, la jonction du Rhin par la rivière d'H// avec le Doubs , qui fe perd dans la Saône , ouvriroit un grand commerce des Provinces méridio- nales avéc la Suifle & PAllemagne, & formeroit une nouvelle communi- cation des Mers: mais la feule Navigation du Doubs , déjà reconnue avec exaditude , fera circuler dans l’intérieur du Royaume, par le canal de Bourgogne, les produétions abondantes de cette Province. Dans ce concours de projets utiles aux différentes Provinces de la Mo- narchie , le bien général de l'Etat a fixéle choix des grands monumens commencés pour la jonétion dés Mers, & ‘pour la communication des extrémités du Royaume avec la Capitale. Quelques projets particuliers, favorifés par les convenances, doivent déjà leur exécution & leur perfec- tion au règne bienfaifant de LOUIS XVI; la rivière de Layon en Anjou eft devenue promptement navigable, & a pris le nom de canal de Mon- SIEUR, pour confacrer le fouvenix de la protection accordée par ce Prince augufte à cet ouvrage. Mais il n’eft aucune Province dans cette Monarchie, qui n'ait conçu les plus grandes efpérances, & fondé fa félicité fur les vertus d’un Sou- verain adoré de fes Peuples par fa juftice & fa bienfaifance , & refpecté dans tout l'Univers comme ami & protecteur de l'humanité, Ses loix ont aboli les traces de la fervitude (3); fa bienfaifance & fa religion ont fou- lagé Les malheureux dans les fers & fous le glaive de la Juftice (4); fon (1) En 1736, on propofa aux Etats d'établir la communication de Rennes avec Dinan & Saint-Malo en joignant la Reme à la Vilaine; d'exécuter la jonction de la P'ilaine avec la Loire par l'Erdre, & joindre les rivières d'Ouhi & de Blaver, entre Rohan & Pontivy. (2) En 1773, par M. de la Galaïzière , Intendant de la Lorraine. (3)Editdu Roi, du mois d’Août 1779 , qui fupprime Îe droit de Main-morte & de “Servitude dans les Domaines du Roi. (4) Déclaration du Roi, du 24 Août 1780, concernant l’abofition de la Queftion préparatoire; autre Déclaration du Roi, du 30 Août de la même année, portant éta- bliffement de nouvelles Prifons. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 10$ Économie paternelle refpire fon amour pour fes Peuples, & le defir de les rendre heureux, Dans fes alliances, une fage politique fait toujours concilier heureufement la dignité de fa Couronne & l'avantage de fon Royaume , avec l'intérêt général des Nations; & la confiance de l'Europe dans fa modération , affermit cette neutralité inébranlable des Puiffances, qui prépare le bonheur de l'humanité. Arbitre d’un Peuple prêt à fe dé- truire par fes divifions , il y rappelle les loix & la concorde par une fermeté prudente & calme, Défenfeur généreux des Nations de l'A méri- que & de l'Inde, il déploie fes armes de routes les Mers, pour proté- ger la caufe la plus glorieufe, celle de l'humanité. Tant de Peuples, péné- trés d'amour pour LOUIS leur bienfaireur, & qui fera leur pacificateur, ont partagé les tranfports de la France à la naiffance d'un Héritier du Trône , qui perpétuera fes'verrus 8 la bienfaifance d'une REINE augufte , qui partage avec LOUIS l'amour & la reconnoïflance des Peuples ! - L'ART 0 PE HN POUR LA GÉOGRAPHIE-PHYSIQUE; Par M. pu CARLA. Je voudrois examiner la caufe des féchereffes , des pluies , des tempéra- tures, des vents, des courants, des inégalités & des déplacements de la mer, & lire jufques dans l'intérieur du globe : j'ai fait pour cela un travail dont je vais avoir l'honneur de préfenter le plan. Je commence par développer ce que M. Buache appelle charpente ex- térieure du globe, d'et& diec les divers ténemens de la planète, leur contexture , les lignes qui les bordent & les divifent, les éléments de ces lignes, & les points de leur concours. Le défordre qu’on voit dans les ramif- cations des chaînes , fera un fyftème fuivi depuis un point quelconque des terres, jufqu'à un point quelconque des creux foumarins. Je n’ajoute que des détails, des définitions & des noms à la.doctrine de M. Buache ; elle eft tout- à-la-fois & d’évidence mathématique , & à la portée des perfonnes même qui n'ont jamais lu) dans un livre. ! Ayant pris connoiffance de la fcène, j'examine tour-à-tour ce qui s’y pale ; je dis pourquoi un même vent ef pluvieux & féc fur les divers points de fa route, en forte que la pluie inonde une face de certaines montagnes, tandis que la féchereffe règne fur la face oppofée; pourquoi Ja pluie eft ordinairement plus abondante fur les montagnes plus élevées, 106 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; & julqu'à quel point l'afpe& d’un pays influe fur la permanence & {a quantité de fes pluies. Cette matière me conduit aux vertes refroidis par Ll'évaporation ; nous verrons un même vent tempéré chez nous, en Californie, au (Chili, porter une froidure excellive à l’Ifle de Terre-Neuve, aux Patagons, au Kamtichatka : un vent alifé brûlant fur la cô’e de Guinée, eft fouvenc froid fur la côte voifne, quoique Le temps foit ferein & le foleil au zé- nith. Plufieurs autres exemples fort connus, ferone rapportés à un prin- cipe encore plus connu. Ê De ces difcuflions, qui occupèrent les Savans & le vulgaire de tous les temps & de tous les pays, je pale aux irondations produites par Les vol- cans allumés. Les relations & la théorie nous apprendront que les pluies y croiffent avec les feux, & font modifiées , fufpendues , cachées par des -circonftances , la plupart aflignables, Ce principe nous montrera l’origine de ce nuage attaché au fommet des montagnes en plus grande mafle & plus obftinément, à mefure qu'elles font ifolées. Ceruage , qu'on pourroit appeller parafite , naît, fe diffout, fe répare, prend une denfité, des diméhfions toujours variables, qui fer- vent de barofcope aux Laboureurs & aux Marins. En même temps les nuages épars dans l'horizon & pendant le calme apparent , courent vers ces fommités par tous les rumbs , & avec une virefle accélérée, comme s'ils y étoient attirés par une affinité de diftance, Ils y perpétuent les té- nèbres, & ces bruines froides qui deviennent la matière principale des fleuves, Je n''attache enfuite au phénomène le plus vaite , le plus continuel, le plus faillant & le plus ignoré de l’atmofphère : c’eft cet anneau de va- ‘peurs noires qui entourent le globe fur une largeur de trois cents lieues; qui, toujours parallèle à l'équateur, & toujours fitué fur le foleil, va tous Les fix mois d'un tropique à l’autre verfer 80 pouces d’eau fur les lieux de fon paflage; donne deux hivers à l’intérieur de la torride; s’élar- it, fe rétrécit, samincit, s’épaillit , fe fond , fe rajufte, fuivant les con- “ina du terrein & le ton de l’année. Get anneau fe trouvera le même fur les planètes voifines ; nous l'y verrons de nos propres yeux, avec les modifications réfultantes des axes , des mouyemens, des alentours & des diftances, C'eft ce que les Aftronomes appellent les bandes de Mars , de Jupiter & de Saturne. Ces détails nous feront connoître la géographie même de ces planètes: on verra combien la charpente du globe doit être préfente à ceux qui en étudient les grands faits , & combien nous devons à M. Buache, qui nous l’a montrée, Tout ceci étant bien déterminé, j'examine les températures des di- vers climats, & les diverfes températures des mêmes latitudes, fuivant 13 faifon , la diftance des mers, la quantité des plantes, la nature , la couleur , l’afpe& , l'inclinaifon, la hauteur, la forme & les environs de SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 107 chaque terrein. Les températures feront la caufe la pus ordinaire & la plus forte des fécherefles & des pluies. Ces connoiflances, appropriées à ce que nous éprouvons & à ce qu'on nous raconte, nous conduiront à la théorie, qui joue le plus beau rôle dans l'univers: c’eft celle des co- lonnes afcendantes, dont j'ai donné les éléments dans mon premier Ou- yrage. Ce qui précède eft principalement deftiné à faciliter l'intelligence de ce ue j'ai à dire fur Les verts ; fujet difcuté depuis Bacon par Vofius | Hal- ley, Bernoulli, Francklin. Mais ces belles théories, toutes d’accord , quoi- que toutes différentes , ne font guère que des apperçus , bornés même aux bandes alifées. M. d'Alembert a aufli donné lä-deflus un Mémoire François & Latin, couronné par l'Académie de Prufle; je réunirai ces lumières à ce qu'elles m'ont fait découvrir daps les cinq zônes du globe, & dans les di- verfes régions de l’atmofphère. Cette théorie des vents, que je fonde uniquement fur l'hydroftatique , détermine celle des courants maritimes. Nous Les verrons du moins, dans les zônes torrides & tempérées, fuivre une direétior périodiquement conf- tante, lors même que des caufes accidentelles & fortes donnent à l'eau de la furface une direction contraire, Ces courants forment un tourbillon autour de la terre , d’un océan particulier ,d’une méditerranée , d'un golfe, & traverfent toutes les latitudes, pour porter, en tout ou en partie dans chaque plage, la température de toutes. Ce que les Voyageurs appellent rombe , typhon , rourbillons , eft une conféquence des trois articles précédents, Parmi près de foixante relawons, toutes aflez longues, que j'ai copiées en entier , aucune ne m'a fourni tous les caractères de ce fair; ces caractères fe trouvent par quatre, par dix, par vingt dans chaque Auteur ; quoique leur identité foit toujours re- connoiffable, Cetaccord des détails, parmi des préjugés fi divers & des circonftances fi oppofées, montre la bonne foi des Obfervateurs , lors même que l'intérêt de la rivalité femble annoncer Îes plus grands écarts. Parmi les folutions que les Phyficiens ont données pour la théorie des trombes , celle du Doéteur Francklin eft la feule dont je me fers; quoi- qu'il n’ait qu'ébauché la matière , je lui dois mes meilleurs éléments: ce nom-là ne paroït dans aucun genre, que pour y jouer un premier rôle. Munis de tous les principes & de tous les faits annoncés ci-deffus, nous pourrons examiner le riveau des deux océans , féparés par l'ifthme de Panama: nous trouverons que l’atlantique eft beaucoup plus élevée que la mer du fud ; d’où nous déduirons les changements qui fuivront la per- foration de cet ifthme,, par le travail, foit de la Nature, foit del’Art, & qui feroit de la terre une planète nouvelle. Pour ne rien laifler de ce que je puis donner fur l'extérieur du globe, j'établirai plufeurs des caufès mécaniques qui changent graduellement 108 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, niveau ; concourent aujourd’hui , fe combartoient hier , & s’entre-modi< fieront demain, pour poufler dans tous les fers & toujours diverfement le fyftême des eaux ; en forte que l’océan répand füur les plus hautes mon- tagnes les madrépores, les coquillages , les couches calcaires, & autres veftiges de fon féjour, ftratifiés, mêlés, épars , felon les variétés de fes mouvements & de fes repos fur chaque plage. Je traiterai enfin des creux volcaniques ; cette partie , qui tient à l’arti- cle précédent, eft trop volumineufe & trop intéreflante pour n'être pas diftinguée par untitre particulier. Nous difcuterons les élémens fur lef- de on peur préfumer la profondeur & la multiplicité de ces creux , & ur-tout leur influence fur la pofition du centre général. Mais je n’en tire- rai point de conféquence déterminée, parce que ces élémens, quoique certains, ne font pas calculables, même par approximation. Plufeurs Auteurs fort eftimés ont écrit fur la Géographie-Phyfique , qui, comme tous les autres objets de nos connoiffances, fera toujours iné- puifable , quels que puiffent être les progrès de l’efprit humain, Ces grands hommes, bien loin de fuffire à leurs titres, n'ont fait que pofer des écha- faudages pour élever cette Science ; j'ajouterai quelque chofe à leur tra- vail. Je voudrois ne dire que des chofes évidentes ; car nous fommes fatigués des conjectures fublimes dont Le fuccès ephémère a décrédité prefque l’ef- prit d'invention lui-même: voilà pourquoi je ne traite qu'une fort petite partie de la Science. Je n'annonce point une Géographie-Phyfique , mais des Vies fur la Géographie-Phyfique ; je ne me mets pas dans la néceflité de faire du rempliffage pour dire tout. Parmi Les chofes même dont je crois être afluré, je ne préfenterai que celles que peut vérifier, fans prefque fortir de chez lui, Fhomme le moins exercé dans nos Sciences; car il faut fur-tout tourner le grand nom- bre des hommes vers la Science , fi l’on veut que le grand nombre des hommes ttavaille pour la Science. Pour établir chaque article , j'expoferai à mes Lecteurs les principes unanimerhent admis, & nous parcourrons enfuite tous les climats connus , pour nous bien mettre en état de voir facilement ce qui fe pafle tous Les jours fous nos yeux: chacun de mes treize articles fera un voyage autour du monde. J'ai donné, dans le Journal de MM. Rozier & Mongez , dans le Mer-' cure, dans le Journal Encyclopédique & dans ma te , plu- fieurs des fujets que j'annonce, Ces effais abrégés n’étoient deftinés qu'à fonder le goût des Connoïffeurs ; qu'à me mettre à portée de découvrir a meilleure manière que je pourrois employer pour le progrès des Sciences ; qu'à obtenir des avis fur les méprifes & même fur les erreurs qui auroient pu m'échapper ; qu'à m'exercer dans l'art dangereux de par- ler au Public. Quelque foibles que foient mes progrès , je crois ne pou- voir SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 109 voir retenir plus long-temps captives le peu de vérités dont je puis être dépofñitaire, & je vais leur donner toute l’érendue, la force & l'union qui font en mon pouvoir. J'ai la fatisfaétion de ne choquer jamais aucune des opinions accrédi- tées , jufques-là même que je nai point à choifir parmi les diverfes hy- - pothèles qui peuvent encore partager les Phyficiens , parce que je ne fuis forcé d'employer que les principes {ur lefquels ils font tous d'accord, Ce n'étoit point là précifément ce que je m'étois propofé; mais je publie mes combinaifons avec plus de confiance , en voyant qu’elles n’ont pas même des préjugés à combattre. J’emploierai fouvent dans cet Ouvrage ma Méthode pour l'expreffion des nivellements. N. B. M. du Carla renfermera , dans quatre volumes in-8°. avec figures, fes Wues pour la Géographie-Phyfique. Les perfonnes qui voudront acquérir cet Ouvrage, font priéessde fe faire infcrire chez l’Auteur , Cour du Commerce, près la rue des Cordeliers; & chez M. Quillau aîné, Li braire , rue Chriftine. On trouvera ordinairement l'Auteur chez lui le matin, mais plus fürement le Jeudi. Le prix de la foufcription eft de 20 liv., dont on paiera 5 liv. en recevant chaque volume. Les quatre vo. lumes terminés, l'Ouvrage fe vendra 24 liv. RP D) PAUSE R TAMPON" CHMMI QUE Sur les diverfes proportions dans lefquelles les Métaux contiennent le phlosiffique ; Soutenue par M. NicoLas TURNsORG , M. TOPERN BERGMANN}; Préfident; traduit par M. MAR C HA1S. 6. I". De Pabondance du Principe inflammable. L: phlogiftique , ainfi que les éléments, fe trouve au moins dans Ia terre difléminé dans tous les corps, cependant avec une abondance re- marquable dans ceux des règnes que nous appellons orgauifés. Beaucoup moins abondant dans les foffiles , à peine en trouveroit-on un pourtant qui en fût totalement deftitué ; & fi tous les caractères nous manquoient pour l'y découvrir , les couleurs dont ils font revêtus, & qui indiquent {a préfence , nous le décéleroient bientôr. Ce principe f fubril , qui jouit d'une telle ténuité, qu'ifolé il échappe Tome XXII, Part. I, 1783. FÉVRIE R. Ë 2110 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, à nos fens, qu’il pénètre toutes les matières, & que nul appareil ne peut le coërcer, fuiroit encore à l'examen chymique, sil n’adhéroit point dans les corps par une forte attraction , inégale cependant, & tellement élec- tive (1), que lon peut facilement le tranfporter d’uné combinaifon dans une autre. On peut donc juger en quelque façon de ce qu'il eft, par les propriétés dont les corps jouiffent avant & après qu'ils lui ont été unis. Ses propriétés étonnantes changent en entier, fuivant fon plus ou moins d'abondance: par lui nous voyons ici l’acide vitriolique pefant , inodore &c fans couleur , fe répandre en une atmofphère acide très- volatile, élaftique, femblable à l'air, & à peine plus pefante, mais en même temps d'une odeur fuffoquante ; là nous voyons cet acide fe condenfer en foufre folide, & n'avoir plus ni odeur, ni acidité , ni faveur. En fcrutant les opérations de da Nature par des expériences bien imaginées, il faut tenter de pareilles métamorphofes, fruits de nouvelles unions & de proportions différentes, Les multiplier de toutes Les façons, & fe tenif en garde contre celles qui pourroient en impofer. Le grand Stalh, marchant fur les traces de Becher, a pour ainfi dire créé La doctrine du phlogiftique ; les Chymiftes qui l'ont fuivi l'ont porté au plus haut degré de perfection, & mis dans tout fon. jour: mais peu fe font occupés de mefurer la-proportion dans laquelle cet élément eft entré dans les corps. Nous admirons les recherches des Aftronomes, qui s’appli- quent continuellement à déterminer les grandeurs & les différences des corps céleftes: quoiqu'ils n'aient point encore trouvé de mefures abfolues, ils approchent cependant des valeurs réelles; & en attendant , ils em- ploient avec fuccès les relatives dans leurs calculs. Pourquoi ne cherche- rions-nous pas à connoître la quantité au moins relative du principe in- flañmable qui exifte dans les métaux, qui, felon les Alchymiftes , corref- pondent ici-bas aux différentes planètes ? Quelle lumière cela répandroit dans la Métallurgie! Stalh jadis , & enfuite quelques autres Chymiftes , ont tenté de déterminer la quantité que le foufre ordinaire contenoit de phlogiftique : mais le premier de tous à diftinguer dans cette difficile car- rière , eft fans doute l’illuftre Chymifte de Dijon , M. de Morveau; il sy eft montré aidé de la Phyfique & des Mathématiques, & il eft parvenu à exprimer numériquement l'attraction que le mercure exerce fur les autres métaux. Nous allons, dans cette Differtation, chercher à déterminer, par un (x) L’attraétion éleétive fimple a lieu dans la fimple unioh de deux corps, avec ex- clufion d’un troifième ; l’éleétive double dans celle de deux compofés, formés chacun de deux feuls principes prochains , que le mélange fait mutuellement changer de place. Pid. Suppl. du Journ. de Phyf. 1777, pag. 298, Mémoire de JL. Bergmann fur Les Auraitions, ( Notc du Tradutkeur ñ SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 111 nouveau moyen, la quantité de principe inflammable contenue dans les métaux. On doit & l’on peut, par des tentatives multipliées , diminuer Les points que nous ignorons. S. II. Métaux précipités des acides par d'autres Métaux | au moyen d'une double attraëlion. F: C'eit mal à-propos que l’on a confidéré jufqu'ici ces précipitations comme l'effer d'une attraction éleétive fimple. Il eft à préfent trè$-reconnu que les métaux ne font point diflous par les acides, fans y avoir éprouvé aupara- vant une perte convenable de phlogiftique. Ils adhèrent donc à leurs menf= crues plus ou moins calcinés ; & par l’addicion d’un autre métal, ils ne peuvent reparoître revivifiés , s'ils n’ont repris le phlogiftique qu'ils avoient perdu, & que le feul métal précipitant peut leur fournir, lui-même s’en étant dépouillé , s’il a pu être diflous. L'expérience nous apprend que les chaux métalliques ne fe précipitent point les unes les autres, ou au moins ne fuivent pas le même ordre que les métaux, Ne pouvons-nous donc point déterminer la DS de phlo- giftique contenue dans tel métal , en comparant le poids du précipité & du précipitant ? Les expériences fuivantes répondront à cette queftion , mais attachons-nous d'abord à l’examen général des faits qui fe préfenteront dans de telles circonftances. Soit A le métal précipitant , » le poids d’acide néceffaire pour diffoudre les cent parties À, x la quantité de phlogiftique qu’elles contiennent , B le métal à précipiter, 7 m le poids du menftrue qui a diflous les cent parties B, &: y le phlogiftique qu'elles contiennent ; 7 eft le rapport avec l'unitéa , & n peut être égal , ou plus grand , ou moindre. 1°. Soitrz—1,m1{era—nm, Alors fix=y , nulle difficulté ; car le menftrue peut diffoudre un poids égal de l’un ou de l’autre , & B recouvrer d'A autant de phlogiftique qu’en exige fa réduction. Six> y , rien n'empêche que la précipitation n’ait lieu. Mais fi x << y, une partie feulement de B fe précipitera , à moins qu’il ne fe fépare peu-à-peu quelque portion du précipitant , ou bien il y aura quel- qu'autre caufe qui aide la précipitation. 2°. Soitr >> 1, &m fera Cr m.lci les phénomènes feront, quant au phlogiftique, les mêmes qu’au n°. 1 , mais les obftacles feront moindres, 3°. Soit 2 » m. Ainfi, B ne peut pas être tout préci- pité, à moins querx—=7y,ourx >y; car la portion z du précipitant 100 À eft feule diffoute, . Ces principes une fois connus, confultons l'expérience ; elle pourra nous Tome XXIT, Part. 1, 1783. FÉVRIER. P2 12 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fournir quelque différence. Nous connoiflons bien diftinétement cinq mé- taux : mais comme il faudroit tenter plus de cent précipitations pour les examiner tous, & que l’on ne pourroit les décrire en un feul Mémoire, jen ai choifi deux, très-propres fur-tout à cette efpèce de tentative ; l’ar- gent ; qui eft précipité par plufieurs métaux, & Le zinc , qui ne peut l'être par aucun. $. III Précipitations de ? Argent , effayées par d'autres Métaux. Excepté l'or & la platine, tous les autres métaux précipitent largene diflous dans l'acide nitreux. Pour mieux faire conroître ces opérations, exa- minons les chacune féparément. A. Cent livres docimaftiques d'argent furent diffoutes dans l'acide ni- treux , de manière qu’à peine il eût pu s’en charger d’une plus grande quan tité. Tous Les fels métalliques rougiflent la teinture de tournefol , & l’on ne peut ôter cer excès d'acide , fans décompofer le fel. J'ai donc eu foin que , dans toutes mes diflolutions, cet excès fût le moindre poflible, de peur d’être obligé d'employer une plus grande quantité de précipitant qu'il n'eût été néceflaire , ce qui, vu le but de mes expériences, m'étoir très-important à favoir: aufli la précipitation eft-elle beaucoup plus lente ; mais excepté dans un petit nombre de cas, elle a toujours lieu. Dans toutes mes expériences , j'ai ajouté un quintal docimaftique de métal précipitant; & fi ce n’eft lorfque j'en avertirai expreflément , j'ai cherché le point de faturation Le plus complec qu'il m’a été pollible. Ce quintal d'argent étant diflous , je l'ai étendu dans Le double d'eau dif: tillée ; j'ai introduit plufieurs fois du mercure, & il s’eft trouvé que j'en avois employé 490 livres. Il fe produifit plufieurs arbres de Diane, mais avec différentes figures, fuivant les diverfes proportions d'argent diffous & de mercure. En effet, dans les places où ce dernier fe trouve jetté plus abondamment en raifen du métal à précipiter, les végétations fe produifent bien plus lentement; mais elles font plus belles , plus bril- fantes, plus fortes, & quelquefois cryftallines & prifmatiques. Le mer- cure , après avoir été jetté dans la diffolution d'argent, fe durcit ; fa fur- face devient inégale, & enfin il poufle des rameaux , qui s’augmentent & s’accroiffent peu-à-peu. Ces arbrifleaux , ramaflés, lavés & féchés, pesèrent 455 liv. Ainfi, 45$—100= 355$, quantité du mercure qui s’y étoiramalgamé, & 490 — 355$ —13$, portion difloute dans l’acide. La liqueur, après l'introduétion du mercure , étant enfin devenue claire, ne laïffa plus rien précipiter pendant dix jours , quoiqu'elle eûr été mife en digeftion à une douce chaleur. C’eft pourquoi on peut conclure que 135 livres de mercure revivifièrent completement par leur phlogiftique SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 1:17; le quintal d'argent diffous , & par conféquent calciné, lequel {e trouvant uni prefque avec le quadruple de mercure , forma l'amalgame cryf- tallifé. B. Il fallut 234 livres de plomb pour précipiter 100 livres d'argent. La lame de plomb noircit promptement, & en peu de moments fe trouva couverte d’une enveloppe d'argent , compofée de petites aiguilles eryflal- lines. Les dernières portions fe précipitent plus lentement , fi, dans cette expérience , de même que dans RTS bee on ma recours à Ja chaleur. Le précipité étant raflemblé, pèfe toujours 8 ou 10 livres au- deffus du quintal, ce qui vient d’une portion très-apparente de plomb calciné qui s’eft précipité ($. V.E.). C. Une lame de cuivre bien décapée, pefant 375$ livres, fe couvrit très-vite d’une croûte d'argent cryftalline, après que je l’eus mife dans la diffolurion. Lorfque tout l'argent fur précipité , la lame de cuivre étant bien lavée, fe trouva avoir perdu 32 livres. Le précipité d'argent rendit jufte le quintal. D, Pour connoître la force des diffolvants, je mis du cuivre dans une diflolution d’un quintal d'argent par l'acide vitriolique ; 30 liv. feulemenc fufirent pour le précipiter. Nous pouvons donc en quelque façon dérermi- ner ici l’avidité avec laquelle l'acide nitreux fe faifit du phlogiftique; avidité qu'il pofsède dans un degré plus éminent que l'acide vitrio lique. E. Le fer montre un caraétère particulier. Une lame très-polie & très- malléable ayant été mife, pendant plufieurs femaines, dans une diffolution d'argent , il n’y eut point de changement apparent , & rien ne fe précipita; c’eft pourquoi j'ajoutai une portion d'acide nitreux: mais rien ne m'annon- çoir qu'il y eût de diflolution , quoique j'eufle employé le fecours de la chalèur. Le vafe ayant été abandonné à lui-même dans le laboratoire, on apperçut au bout de quelques jours à la fuperfcie de la lame des végéta- tions d'argent , mais rares & peu garnies de rameaux; elles devenoient cependant très belles, mais peu-à peu & très-lentement: on remettoit au- tant d'eau diftillée que l’évaporation enlevoit de fluide ; & la couleur de la diffolution, qui jaunifloit , indiqua que le fer éprouvoit une diffolu- tion , fans qu'il fût poflible d’ailleurs de s’en appercevoir en regardant la lame. La précipitation ne fut point accélérée par l’addition d'autant d’a- cide nitteux qu'il en avoit fallu pour difloudre largent, Les végétations ayant été retirées avec la lame, & plongées dans de l'eau diftillée, noir- cirent promptement, & fe couvrirent d’ochre, Je tentai cependant ces expériences fur plufieurs fortes de fer, foit caflantes à froid ou à chaud, foit malléables, ou même fur du fer crad & fondu avec peu de char- bons (fer fpentané , en Suédois hardfott), ou au contrairé celui fondu avec beaucoup de charbon ( fer forgé , zodfart ); mais aucun , excepté le 114 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ter crud brun cendré , fragile à froid, provenantde la forge de Hufeby dans le Smoland , & les parcelles fondues provenant du forage des canons à Hallefors, ne produifirent des phénomènes différents. Après l'avoir in- troduit dans une diffolution , l'argent {eft d'abord promptement précipité avec fon brillant , mais femblable à de l'argent mufcif , & compofé de petites écailles. Une remarque bien intéreflante, c’eft que le fer d'Hufeby, converti en acier, ne vaudroit plus rien, & que les parcelles venues d'Hal- lefors ne produiroit aucun effet avant d’avoir été fondues dans un creufer, Un quintal d'argent et précipité par 48 Liv. de fer crud d'Hufeby; mais après la diffolution, ce fer crud lui-même fe précipite fous la forme d’o- chre , fur-tout quand la chaleur devient plus forte. Cette précipitation ré- pand de l'embarras dans l'expérience. F. L'argent diflous par l'acide vitriolique eft précipité très-bien & pr'omptement , au moyen d'une lame polie du même fer, dont l'inertie eft fi grande dans l'acide nitreux. La lame, après la précipitation des 100 parties , s’eft trouvée plus lé- gère de 39 liv. Les métaux que l'acide vitriolique diffout facilement , y font précipités plus aifément qu'ils ne Le feroient d’une femblable diffolution par l'acide nitreux, Dans l'ufage de la docimafie par la voie humide , ce fait doit être bien remarqué. G. L’étain en feuilles précipite promptement l'argent, & même avec un afpect cryftallin; mais la liqueur noircit fort vite, & demeure dans cet état plufeurs fois vingt-quatre heures, 88 liv. d’étain précipitèrent le quin- tal d'argent à une chaleut médiocre; mais le précipité , lavé jufqu'à ce que Veau fortit claire, pefoit 215 liv. Cette augmentation du poids éroit dûe à la chaux d’étain, qui s’étoit jointe au précipité: elle étoit tachée par une matière noirâtre. H. Au premier inftant, le bifmuth précipite bien l'argent; mais à la fin on ne peut en déterminer la quantité qu'avec la plus grande difficulté, Une diffolution de bifmuth , portée à la plus parfaite faturation , ne peut fupporter le feu ou l'eau, fans laiffer dépofer une poudre blanche qui fe mêle au précipité, & dont on ne peut le féparer que très-difficilement. Le précipité d'argent eft tellement fpongieux, qu'il abforbe la totalité du fuide; en forte que, vers la fin, les morceaux de bifmuth n'en trouvent plus pour fe diffoudre, & que l’on ne peut les obferver diftinétement. Lorf- que les dernières portions ne s’apperçurent qu'à peine , j’effayai d'exprimer tout Le fédiment entre deux lames de verre, pour en retirer le Auide; je précipitai enfuite le bifmuth par l'eau, & le refte de l'argent par l'acide inarin. Alors par le poids de l'argent dans l’état falin , je connus la quan- tité qui s’en étoit précipitée par le poids donné de bifmuth. J'ai trouvé, par ce moyen ; que le thermomètre étant à 15 degrés, il en falloic 174 liv. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. x1$ En lavanr le précipité qui avoit été exprimé, l'eau cependant blanchiffoic & fembloit emporter quelques portions de bifmuth. Tout le fédiment mé- tallique pefa 180 liv. Les premiers morceaux de bifmuth que l’on introduit dans la diffolution, au lieu de noircir d’abord, fe blanchiflent au contraire & fe couvrent de cryftallifations d'argent petites & brillantes. Le milieu fe diflout en con- fervant fa ftruéture lamelleufe, & prend un afpect terreux blanchâtre , ra- rement revétu de l'état métallique; mais vers la fin , les morceaux que l'on continue d'y ajouter noirciflent tout de fuite, I. Le nickel, dès qu’on le met dans la diffolution d'argent, fait verdir la liqueur ,.& quelque chofe paroît fe précipiter; car on apperçoit à la fur- face du précipitant des taches HE ro & brillantes, mais éparfes , & qui naiflent lentement. J'ai effayé d'accélérer l'opération , par l’ex- cès d'acide & par la chaleur de la digeftion, pouffé même jufqu'à l’ex- ficcation ; mais inutilement. Il faut de nécefité réduire ce demi-métal en poudre fine, Cette manipulation, qui n’eft pas en général néceflaire pour les autres métaux, eft indifpenfable pour le nickel, & fur-tout pour le régule d’arfenic: tous les autres précipitent fans difficulté l'argent, foic qu'on les plonge dans la diffolution , ou en lames, ou par morceaux. Cette propriété eft d'une grande commodité: car c’eft avec la plus grande peine, pour ne point dire inutilement, que l’on cherche à n'en jerter que la quantité néceflaire pour la précipitation ; & l'on ne peut facilement ôter ce qui s’en trouve de trop, ni le calculer avec pré- cifion, 64 livres de nickel font néceffaires pour précipiter un quintal d’argent. Le précipité eft rempli de petits cryftaux, & fali par une poudre brune: il pefoit en totalité 116 liv. J'employai aufli le régule ordinaire, c’eft-à-dire , celui que l’on obtient par la première réduétion (1): il recèle encore beaucoup de fubftances hétérogènes. Lorfqw'il eft pur, il en faut moins pour-la précipitation, puifque j'ai recueilli jufqu’à 16 livres de matières qui lui étoient étran- gères. K. De tous les régules, c’eft celui d’arfenic qui précipite l'argent avec le plus de difficulté. On doit le pulvérifer ; car s'il eft en morceaux, il blanchit à fa furface, & le refte n’eft point attaqué. C’eft en vain —— (x) Les Chymiftes Suédois nous ont fait les premiers connoître le nickel, & difene qu'on ne l’obtient à-peu-près pur & féparé des autres fubftances qu’il renferme, fur- tout le fer, qu'après plufieurs calcinations & revivifications. id. Didionnaire de Chymie ; au mognickel, & Le mois d'Ofobre 1776, Journal de Phyfique. ( Nor du 1 radutleur ), 116 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, que l’on emploieroit , & l'excès d'acide, & les évaporations à ficcité rél- térées plufeurs fois. 92 livres précipitent le quintal d'argent. Le régule natif précipite un peu mieux en grandes mafles , que ne le fait celui obtenu par la réduction. Le précipité, lavé & féché , pefa 140 liv., parce qu'il s’y étoit mêlé de la chaux d’arfenic. L. Le quintal d'argent eft précipité par 39 livres de cobalt, fous forme cryftalline , fans le fecours de la chaleur & de la pulvérifation. La diflo- lution rougit tout de fuite, à M. Le zinc noircit dès qu’on le met dans une diffolution d'argent ; il fe couvre d'une mouffe cendrée , qui , en peu de moments, acquiert l'éclat de l'argent. 55 liv. fufäfent pour la précipitation ; & lors de leur introduc- tion , il s’excite de la chaleur. : N. La précipitation fe fait aufli fort bien par le régule d’antimoine ; le précipité a même un afpeét particulier. Le métal revivifié reffemble à des fragments tortillés de feuilles d'argent. La diffolution peut bien fupporter l'eau, mais non pas la chaleur, ce qui empêche que les dernières portions d'argent ne fe féparent facilement. Il fallut environ 83 livres de précipi- tant, & le précipité pefa 209 liv. , c'eft-à-dire , le double de l'argent em- ployé. Cette augmentation provenoit de la chaux d’antimoine qui s'étoit toute précipitée; car la liqueur en contenoit à peine quelques livres. O. La manganèfe fe recouvre tout de fuite d’une pellicule d'argent: il fe produifit pendant cette opération , une poudre en partie noire & en partie verdâtre , qui pefoit 11 Liv. Il fallut 44 liv. de précipitant , & le pré cipité fe trouva plus folide que par les autres métaux : il tiroit un peu fur le jaune, Précipitations des Métaux diffous dans les Acides, effayées par d’autres Métaux , € fur-tout par le Zinc, A. Un quintal d’or non allié, diffous dans l’eau régale avec le moins d’excès d'acide poflible, pour que la précipitation eut lieu ,exigea 217 liv. de zinc, B. Une pareille quantité d’or fut précipitée par:301 liv. d’étain d’Angle- terre, 66 liv. d’or furent complettement revivifiées , & on retira 160 liv, d’un noir pourpre, Le refte de la liqueur étoit encore pourpré; mais elle ne fut point décompofée à une médiocre chaleur , par l'addition d’une nou- velle quantité d’étain. 1 58 liv. de zinc précipitèrent une poudre tirant fur le pourpre, qui , lavée & féchée, pefa 212 liv. C. Un quintal de platine ordinaire fut diffous dans l'eau régale, au point que , par l’ébullition , le menftrue ne put pas s’en charger d'une plus grande quantité: il fallut cependant 416 liv. de zinc pour porterla diffolution à une faturation complete. La liqueur prend une couleur de fang, & eft remplie S UR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 117 remplie de molécules noires , qui fe féparent avec une vive effervefcence, Tout mouvement inteftin étant appaifé , il fe précipite une poudre noire , qui, lavée & féchée, pèle 77 livres. Le refte de la liqueur eft jaunârre , & fournit, par l’évaporation, de petits grains cryltallins, fur-tout f l’on ajoute quelque peu d'alkali yégétal. La poudre noire, mife fur un char- bon, & foumile à l’action de la flamme avec le chalumeau des Email- leurs, répand d'abord une fumée blanche , & reprend l'éclat métallique , non pas parfairement blanc, mais feulement cendré, Avant ou après fon expolition au feu, elle n’eft point attirable à l'aimant. D. Nous avons vu (6. IE. M.) les phénomènes que l'argent préfente avec le zinc. Bÿ Cent parties de mercure exigent 44 livres de zinc, pour être préci- pitées de l'acide nitreux. F, Le quintal de plomb, diffous dans ce même acide , eft précipité par 26 liv. de zinc. Ce qui fe précipite à une chaleur médiocre jouit d’a- bord de l’afpeét métallique , & même cryftallin, mais en peu de temps fe change en une poudre blanche. On n'obtient à là chaleur de l’ébulli- tion qu'une chaux , qui , lavée & féchée, pèfe 124 livres. G. 164 livres de zinc précipitent un quintal de cuivre diffous dans l'a- cide nitreux. La diflolution , qui eft bleue d’abord , devient enfuite verte. Outre le cuivre fous forme métallique , il fe précipite une poudre , partie blanche , partie verdâtre:jroutle précipité pèfe 211 livres. H. 38 livres de zinc précipitèrent 26 Livres de cuivre d'un quintal de : vicriol bleu. I. Le fer diffous par l'acide nitreux ne donne avec le zinc qu'une chaux , qui même fe fépare fpontanément, en forte qu'il eft impoñlible d'établir une proportion certaine. K. Un quintal de vitriol verd, mis dans un matras fermé & fans au- cune chaleur , pour prévenir la déphlogiftication du précipité, ne laifla précipiter avec Le zinc que très-peu d’un fédiment ochreux, & le poids du demi-métal n'étoit pas diminué au bout de huit jours. L. IL faut 68 livres de zinc pour précipiter uñ quintal d'étain, diflous dans l’eau régale. Le précipité ne jouit pas de l'afpect métallique , & l'on obtient une chaux blanche, qui pèfe 149 liv. M. 49 livres de zinc en précipitenc 100 de bifmuth, diflous dans la- cide nitreux. À une chaleur médiocre, il eft fous forme métallique ; mais à un degré de feu fupérieur, on ne retire qu’une chaux pefant 133 liv. N. Un quintal de régule de nickel diffous dans l'acide nitreux , laifla précipiter 80 livres d'une matière noire , qui étoit prefque en entier de larfenic, & même dans l’état de régule : il fallut ÿ4 livris de zinc. Par une plus longue digeftion avec ce demi-métal, il ne fe fépare plus qu'une poudre d'un blanc verdätre , qui n'eft autre que Le mêlange des chaux Tome XXII, Part. I, 1783. FÉVRIER, Q 118 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, de zinc & de nickel. Le refte de la diflolution refte entièrement verte, fars aucun affoibliflement. On peut donc féparer par ce moyen , beaucoup mieux que par les calcinations , l'arfenic qui fe trouve encore dans le régule de nickel. ; ©. Le zinc, mis dans la diffolution d’un quintal de régule d’arfenic par l'eau régale, n'en a précipité d'abord que des particules noirâtres, qui blanchifloient pendant la digellion, & qui ont été accrues par une nou- velle quantité E poudre blanche. Le poids du précipité étoit de 123 livres, & la perte éprouvée par le précipitant de 126 liv. P. Le cobalt laifle précipiter , par l'addition du zinc, & avec le fecours de la digeftion, une poudre en grande partie ochreufe, qui pèfe 31 liv. La couleur de la diflolution refte intaéte , & le poids du zinc eftsrès- peu diminué, quoique l’on poufle à pluñeurs fois Pévaporation jufqu’à ficcité. Q. La diffolution d’un quintal de régule d’antimoine dans l'eau ré- gale , eft précipitée par 70 livres de zinc ; l’antimoine fe trouve fous la forme d’une poudre blanche , & l’on n'obtient la diflolution bien claire qu’au moyen d’un excès d'acide. Le précipité eft plus ou moins chargé de chaux de zinc, fuivant l’intenfité de la chaleur. ë R. La manganèfe laiffe plus où moins bien que le fer, le nickel & Le cobalt, précipiter les fubftances étrangères qui lui font unies. Le mor- ceau du précipitant rouoit, pour peu qu'il y ait du cuivre; & ce métal, étranger à la manganèle, peut par ce moyen, bien mieux que par tout autre , y être découvert: il fe dépofe une poudre verte & blanche, phéno- mène que nous avons déjà reconnu au cuivre ( $. IV. G. ) Le peu d’abor- dance du précipité prouve bien -que la manganèfe n'exifte point par le cuivre , puifque l’on peut l’en féparer en entier , fans qu'elle perde rien de fes propriétés. À 6. V. Corollaires. Nous pouvons tirer plufeurs conféquences bien importantes des ex- périences que je viens de rapporter; favoir : À. Que les métaux adhèrent aux. différents acides , dans différents de- grés de déphlogiftication. Par exemple , 100 livres d'argent, diffoutes dans l'acide nitreux, en exigent 32 de cuivre pour leur réduction ; tandis que, dans l'acide vitriolique , il ne léur en faut que 30 ( S. INCSDL). 100 livres de cuivre dansl’acide vitriolique n’emploient que 146 livres de zinc; & dans celui du nitre, il leur en faut 164(. IV. G, H. ). 23 liv. de cuivre précipitent de l'acide nitreux un quintal de mercure; mais dans l'acide marin, 16 livres feulement font néceffaires. Concluons donc que l'acide nitreux déphlogiftique beaucoup les métaux ; l'acide vitriolique un peu moins, & enfin , l’acide muriatique encore moins. B, Puifque les diffolutions fur lefquelles nous avons fait nos expé- TS PT NET TPS mn lg * : SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 119 riences éroient avec {e moins d'acide poflible, il eft évident, par Le poids du précipité & du précipitant, que les diverfes quantités de phlogiltique font dans des proportions inverfes, Ainfi , fi nous appellons la quantité de phlogiftique contenue dans le quintal d'argent, 109 , nous appellerons celle contenue dans celui de mercure, 74: dans le plomb , 43; dans le cuivre, 312; dans le fer , 256; dans l'étain , 114; dans le bifmuth, 573 dans lenickel, 156 ; dans l'arfenic, 109; dans le cobalt, 270 ; dans le zinc, 182; dans l'antimoine, 120 ; & enfin , dans la manganèfe , 227 (ISITL), ” C. Pour mieux comparer ces nombres avec les autres précipitations , *xprimons la quantité Fa RPLORAGRE contenue dans le zinc par 182 , comme nous l'avons en effet trouvé, D’après ce calcul , nos quantités fe- ront , pour le quintal d’or, 394; la platire, 756 ; le mercure, 80 ; le plomb , 47; le cuivre , 2923 le bifmuth, 64 ; & l’antimoine, 127( $.IV.). Les différences peu confidérables qui fe trouvent entre ces quantités nu- mériques, doivent être examinées par de nouvelles expériences. Dans ce choc de faits, je penfe que l’on doit fur-tout fe confier à ceux du $. II ; car avec un feu] grain de fel marin, on connoît tout de fuite fi la totalité de l’argenta été ou non parfaitement précipitée de fa diffolution, L'argent diffous ne perd point fon caractère & fes autres propriétés. . D. Il eft déjà facile d’appercevoir l'application des principes établis $. IT, relativement à l'argent défigné par B, A; c'eft-à-dire, le préci- pitant nenous donne jamais 2 — 1. Le plomb & le mercure nous donnent 2>>1(1); mais le cuivre, le fer, l’étain ( le bifmuth}), le nickel, l’ar- fenic, le cobalt, le zinc, l’antimoine & ia manganèle, donnent 7 1. Le zinc, regardé comme précipitant, ne fournit point d'exemples où = 1 : mais la platine, le fer & l’antimoine donnent 2 >> 1; tous les autres au contraire > 1 & x —ou> y, eft la fuite d'une diffolution plusabondante du précipitant , qu'il ne feroit néceffaire pour réduire Le métal à précipiter, Si ce foupçon eft réel dans rous les cas pareils, notre calcul n’a plus de bafe ; peut-être une attention fcru- puleufe fur tous ces phénomènes dénouera-t-elle ce nœud gordien, qui eft notre ouvrage. Toute diffolution de métal eft accompagnée du dé- veloppement d’un fluide aëriforme ,ce qui produit d'effervefcence: mais fa précipitation, quand la diffolution eft bien faturée , n'offre point ce oo (1) 1 fur, je crois, reétifier une erreur d’impreffion dans l'original, où le bifmuth eft mis pour << 1, puifque les quantités indiquées ci-deflus B, même , font 74 pour le mercure , 43 pourle plomb, & 57 pour le bifmuth, tous les autres étant r > 1. ( Mote du Traduiteur ). Tome XXII, Part. 1,1783. FÉ VRIER. Q 2 120 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, phénomène ; on ne voit'point de bulles , ou il n'y en aque de très-petites & peu fréquentes, Le fer, qui fe laiffe facilement attaquer par tous les menftrues, & qui n'en retient qu'une petite quantité , le fer demeure intact pendant plufieurs femaines dans des diflolutions nitreufes de plomb & d'argent. J'élève peu de doutes fur toutes les précipitations de l'argent, rapportées $. III, parce qu’elles fe font faites en entier, & que tout le phlogiftique s’y eft Len confervé : mais celles du &. IV ne me paroiflent pas mériter la même confiance, parce que , dans les unes , on attrape difficilement le point de fafuration; que dans les autres , il f produit quelquefois de l’efervefcence ; & enfin , parce qu’il en eft où le précipité & le précipitant suniffent. Le corollaire F démontre çom- ment , dans le cas où 7 Infettes Marins, deftruéleurs des Bois. L. A mer, champ oùl’homme recueille fans avoir femé , forme plus de {a moitié de la Nature, par l'immenfité de fes productions ; les feuls in- fectes marins, quoique peu connus, femblent l'emporter fur tout le refte, par la variété, la fécondité, &c. Si on y joint ceux de la terre & de l'air, quelle reffource n'offre pas certe feule claffe du règne animal , pour la fanté , la nourriture, le vêtement , &c! Mais combien d’ennemis redoutables y trouvons-fous ! Quoique ceux de mer n'attaquent pas toujours immédiatement nos perfonnes, ils ne laiffenc pas de nous faire périr. Il ne fera point queftion ici de ceux qui font connus, & contre lefquels le Na- vigateur & le Riverainfont obligés de lutter à grands frais | & fouvent fans fruit. Ilen eft de beaucoup plus petits, qui, par leur nombre & leur a@ivité, ruinent en peu de temps nos travaux. J'ai fait connoître ceux qui, détruifant là furface des pierres , obligent à réparer nos éclufes & autres ouvrages de ce genre (1). Apprenons à connoître maintenant ceux qui font à peu-près les mêmes opérations fur toutes fortes de bois. Depuis long-temps on étoit dans l'ufage, au Havre , de conferver les fapins deftinés à la mâture des vaiffeaux du Roi, dans un balin nommé la bare-floride, On s'apperçut, il y a quelques années , que la furface de ces (1) Veyez tome XVIII, 1781 , Septembre, page 2123 & tome XX, 1782, Sep- tembre, page 228 , les Méimoires avec figures de M, l'Abbé Dicquemare , (ur deux ef pèces d’infectes marins, deftructeurs des pierres, 22 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fapins étoit détruite par des infectes marins ; qui avoient creufé dans les parties Les plus tendres jufqu'à 1, pouce & demi , ce qui diminuoit leur diamètre de 3 pouces : on craignit que le bois s’attendriffant de proche en proche par l'action de l'eau , ne fût enfin totalement détruit par ces infectes , ou mis abfolument hors de fervice. Je ne fais fi on a cherché ‘quelqu’autre moyen de parer à cesinconvéniens, que celui d'abandonner ce lieu , & de transférer Les fapins demi-rongés &'autres dans les foflés de la Ville & dans un autre baflin où eft l'atelier de la mérure. N'éroit- ce point faciliter à des ennemis inconnus, & qu'on tranfportoit avec les fapins, le moyen de nuire à l'avenir plus efficacement, & de fe-multi- jer dans deslieux plus vaftes? Lorfque , par hafard , & après le tranf- qe j'eus connoiflance d’un déoût auf confidérable fait fur un approvi- fionnement rare & précieux, je cherchai fecrètement fi, dans quelque lieu d'un accès plus libre, je ne pourroïis pas rencontrer ces nombreux enne- mis ; & je découvris une vieille pêcherie qui en étoit infeftée , dans la- quelle le frêne , l'orme , le chêne même en étoient attaqués fort avant, & où , quoique logés, les animaux pouvoïent être mis à découvert par des fraétures auxquelles le propriétaire fort honnête ne fe refufoit pas, J'en tirai un certain nombre, que je plaçai dans l'eau de mer fur plufeurs morceaux de différents bois imbibés, mais intaéts : ils s’y logèrent en moins de douze heures, Ilne me refta donc aucun doute. Quelques Ou- vriers de la Marine m’avoient dit que c’étoient les puces de mer, ou des {colopendres rouges que les Pêcheurs à la ligne nomment ploufes, qui avoient détruit les fapins. Outre que ces Ouvriers obfervent peu, il eft facile de fe tromper, parce que fouvent les loyemens d’un infeéte marin fervent de retraite à beaucoup d’autres. J’avois inutilement placé des puces de mer & des fcolopendres ploufes fur du fapin aubier & imbibé; elles n'y avoient fait aucune impreflion : mais l'ennemi, tiré de fes logemens , ne tarda pas à en faire de nouveaux en ma préfence. Faifons-le paroître fur la fcène, & employons quelques figures , fans le fecours defquelles il n’eft guère facile de reconnoître ces fortes d’objets. La figure première , Planche I, repréfente, de grandeur naturelle, la coupe & un peu de la furface d’un petit morceau de bois , où nos in- fectes fe font logés, & où on en voit encore quatre. Cette petite figure fufic ici. L'infecte eft repréfenté plus grand que nature pardeflus & par- deffous , figures 2 & 3. [left de forme demi-cylindrique , ou à peu-près, revêtu d’une peau écailleufe , partagée inégalement en quatorze parties, dont les plus larges font vers la tête, & les plus étroites à la partie pof- térieure , qui et coupée en bizeau ou en fiflet: on y remarque diffcile- ment l'anus. La tête au contraire eft arrondie & terminée en deffous par une forte de bec obtus, fig. 4, avec lequel l’animal creufe vraifembla- blement le bois, puifqw'on le voit s’y enfoncer la tête la première, & que l'on apperçoit le déblai qui paffe entre fes pattes fous fon ventre, Fe | | RSS ES rc Apte SUR L'HIST. NATURELLE ÆT LES ARTS. 123 & dont le dos même fe trouve fouvent couvert fous la forme d'une pouflière humide & blanchätre. Cette tête eft ornée de quatre antennes. Les pattes font au nombre de fepc des deux côtés, & une double de chaque côté du corps; ce qui fait en tout feize ; d’autres, à caufe de la double, pourroient compter dix-huit , & plufñeurs nageoires fous la partie oftérieure, comme les puces de mer &l'aëif (1) : tout l'animal eft d’un Janc fale. La figure $ préfente la partie poftérieure & l'anus comme une fente horizontale, mais peu fenfible : on y voir aufli de petits corps ver- dâtres, qui femblent fortir accidentellement à travers la peau écailleufe. Ces infectes m'ont donné les uns cinq petits tout formés , d'autres moins : mais une fingularité qui ne doit pas échapper, c'eft ait y en a qui don- nent quelquefois des œufs plus ou moins avancés. Ces petits ou les œufs fortent du milieu & du deffous de l'infecte par une ouverture triangulaire, & viennent de la partie antérieure dece deflous, qui paroît alors gon- flée ; elle eft tranfparente, & on voit les petits où même les œufs à travers. On voit auffi la forme de ces œufs plus ou moins avancés dans les f- gures 6 & 7. Je fuis donc porté à croire que ces animaux font vivipares ; mais qu'ils pourroient être ovipares , lorfque quelque circonftance les y oblige. L'un. d'eux m’a paru vouloir retenir , avec fes pattes & fes nageoi- res, fes œufs, qui fortoient peut-être malgré lui, à caufe que je le tenois fans eau & fur le dos. Connoître fes ennemis, c'eft le premier pas ; le moyen de les écarter ou de Les détruire, c’eft le dernier. J'en ai déjà fait le fujet de mes ex- périences , & elles deviendront celui d’un Mémoire. IL feroit très-utile qu'on établit dans les Ports une police à cet égard: c'eft de la vigilance qu'on doit attendre les plus grands effets. (1) L’aéfifeft un infeéte marin , dont la découverte eft aufli due àM. l'Abbé Dicque- mare , & qui a fuggéré des vues fur les premiers & les derniers termes apperçus de lani- malité. Nous en donnerons la figure & la*defcription. 124 OBSÉRVATIONS SUR LA PHYSIQUE MÉMOIRE Le # Sur les parties conflituantes de la Tungflène où Pierre pefante, Traduit du Suédois de M. ScHEELE (1), par Madame P**Y, de Dijon. | LÉ: parties conftituantes de cette efpèce de pierre ont été, à ce que je penfe, jufqu’à préfent inconnues aux Chymiftes. Cromitedt en fait état parmi les minéraux ferrugineux, fous le nom de ferrum calciforme , terrd quâdam incognité intimè mixtum (2). Celle que j'ai employée dans mes expériences avoit une couleur perlée, & venoit des mines de fer de Bitzberg; & comme mes différentes recherches n’ont fait découvrir fes parties conftituantes , je crois devoir en préfenter à l'Académie le ré- {ultar, \ L $. [: 4. La rungftène n’éprouve au féu aucun changement fenñble ; & le verre de borax n’a aucune aétion particulière fur elle. b. Mais expofée au feu du chalumeau avec le phofphate ammoniacal ou le fel microcofmique, elle donne un verre coloré en verd de mer. Si ontienc ce globule de verre en fufon à la pointe extérieure de la flamme , fa couleur change peu-à-peu: une très-petite quantité de nitre détruit auf bientôt la couleur; mais elle revient, lorfqu’on dirige fur lui la flamme bleue. Ainfi , le phlogiftique de la flamme eft la caufe de la cou- leur. c. Une partiegéduite en poudre fine dans un mortier de verre, fut mêlée avec quatre parties de potafle, & mife au feu dans un creufet de fer. Lorfque ce mélange fut fondu , il fut coulé fur une lame de fer & | a —————"———— © ————————————— (1) Mém. de P'Acad. de Stockholm, ann, 178r, fecond Trimeftre. FL (2) Effai de Minéralogie de Cromftedr, &c., $. CCX, page 272 de la traduétion . Françoife. C’eft le cryftal d’étain blanc, ou 7érnfparh des Allemands , dont un Chy- rifte affuroit, il y a quelques années, avoir retiré jufqu’à 64 livres d’étain pur par quin- k: tal, Il n°y a pas de moyen plus für de faire oublier promptement ces erreurs ,'que d’ap= RL: pliquer à ce minéral une dénomination plus conforme à fa nature. En le nommant sng- ; ftène, on aura l'avantage de s'entendre avec les Suédois , qui nous Pont fait connoître, & celui de prévenir toute confufion avec le barote ou terre pefante. L’acide particulier dela tungfiène fera acide tungftique, comme celui de la molybdène eft l’acide mo- Iybdique. ( Vore du Tradutteur ). diffous SUR L'HIST. NATURELLE ET LES- ARTS, 125 diffous dans douze parties d’eau bouillante. Quelque temps après, on dé- canta la leflive de deflus la poudre blanche qui sétoit dépofée au fond. d. Cette poudre ayant été édulcorée, on jetta deflus de l'acide nitreux, jufqu'à ce qu'il ne fic plus d'effervefcence , & il y en eut par-là une grande partie de diffoute. e. Le réfidu terreux fut féché, mêlé de nouveau avec quatre parties de potafle, & fondu comme la première fois; la mafle fut rejettée dans l’eau ; & ce qui refta , fuc diffous dans l'acide nitreux , qui ne laïiffa alors qu'une très-petite quantité de poudre ue f. La lefive (lettre c) fut faturée d’acide nitreux; le mélange s'épaiffit alors , & donna une poudre blanche, qui fut lavée dans l'eau froide, & enfuite féchée. g. La diffolution par l'acide nitreux (lettre 4) fut précipitée par la po- tafle , & donna un précipité blanc, qui fut féché. $. IL. 4. L'eau bouillante n'a abfolument aucune action fur la poudre de la tungftène, b. Sur une partie de tungftène réduite en poudre fine, on jetta deux parties d'acide vitriolique concentré, & on diftilla. L’acide pafla non altéré: on jetta de l’eau diftillée fur le réfidu , qui avoit une couleur bleuâtre ; on ft bouillir, enfuite on filtra de nouveau; & la liqueur refroidie , on trouva au fond un peu de vitriol calcaire, ’ c. Sur 4 fcrupules de tungftène bien pulvérifée, on verfa 12 fcrupules d'acide nitreux commun , ou eau-forte pure: ce mélange ne fit point effer- vefcence. Il fut expofé enfuite à une forte digeftion , & bientôt il donna une poudre d’un jaune citron. L’acide décanté fut mis dansun flaconäpart, & la poudre jaune ayant été édulcorée dans l'eau, fut mife dans un fem- blable facon. d. On verfa fur cette poudre jaune 8 fcrupules d’alkali volatil cauftique; & on fitchauffer; la couleur jaune difparut bientôt, & la poudre devint blanche. Le menftrue fut pareillement décanté dans un flacon féparé, & la poudre fut édulcorée. Comme la pierre avoit été vifiblement diminuée par ce procédé, la première opération fut répétée fucceflivement plufeurs fois avec la même poudre ; d'abord par le moyen de la digeftion dans l’a- cide nitreux, & enfuite dans l’alkali volatil; la pierre fut enfin difloute our la plus grande partie. Le réfidu infoluble peloit 3 grains, & parut être du quartz. La tungftène fe comporte avec l'acide muriatique de la même manière qu'avec l'acide nitreux; cependant la diflolution tire plus au jaune. $. IL. 2. Les diffolutions préparées avec l’acide nitreux ayant été toutes mêlées, on y verfa quelques gouttes d’alkali pruflique , qui occafñonnèrent un précipité d'environ 2 grains de bleu de Pruffe, Tome XXII, Part, I, 1783. FÉVRIER. R 126, OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, B. Le mêlange fut enfuite faturé avec l'alkali volatil cauftique: mais comme il parut peu de précipité, on ajouta une diflolution de potafle; alors il fe dépofa une poudre blanche , qui , après avoir été lavée & fé- chée , pefoit 2 fcrupules & $ grains, Cette terre fe trouva être une pure chaux méphitifée. C’eft aufli la même efpèce de terre que celle qu’on ob- tient fuivant le procédé rapporté au 6. I, lettre g. & c: La diflolution obtenue par l’alkali volatil fut précipitée, par l'acide nitreux , le précipité lavé dans l'eau froide & féché. Ce précipité étoit ab- folument femblable à celui dont il a été faitmentionK. I, lettre f. d. Ce précipité eft de nature acide ; car il eft foluble dans l’eau, quoi- qu'une partie exige pour fa diffolution environ 20 parties d’eau bouil- lance: elle rougit la teinture de tournefol , & même elle a un goût acide. $. IV. Comme laterre féparée de la tungftène par l'acide nitreux étroit de la chaux ($.IIT, lettre £), il s’agifloit préfentement de faveir fi l'acide dont il a été fait mention, en fe combinant avec la chaux , régénéroit la tungftène. Attendu que, fuivant les. II , lettre « , la tungftène ne fe dif- fout pas dans l’eau bouillante, je mêlai une partie de la diffolution acide CS-II, d) à fix parties d'eau de chaux limpide. Le mélange fut un peu troublé: mais comme après quelques heures, il fe dépofa quelque chofe , je fs bouillir le tout, & alors il fe fépara promptement une poudre blan- che pefante, qui, après avoir été féchée, colora en verd de mer le verre microcofmique , devint bleuâtre en bouillant avec l’acide vitriolique , & jaune citron avec Les acides nitreux & muriatique. C’éroit par conféquent de la pure tungftène. $. V. Pour acquérir une connoiffance plus parfaite de la nature de cet acide, j'ai fait les expériences fuivantes. a. Au feu du chalumeau, l'acide fec eft devenu d’abord fauve, enfuite brun , & à la fin noir. Il ne donna ni fumée , ni aucun figne de fufon, b. Il donna , avec le borax, un verre bleu , & avec le phofphate ammo- niacal, un verre coloré en verd de mer. Cette, couleur eft fujette aux mêmes changements que Le verre dont il a été parlé, 6. I, lettre 2. c. Si on fait bouillir l’acide de la tungftène pulvérifée avec un peu d'acide nitreux ou muriatique , la poudre devient jaune, & bleuâtre avec l'acide vitriolique. d. L'acide de Ja tungftène , diffous dans l'eau, & faturé de potafle, donne un fe] neutre en très-petits cryftaux. e. Il forme , avec l’alkali volatil, un fel ammoniacal figuré en petites aiguilles. Ce fel neutre laiffe aller à la diftillation fon alkali volatil cauf- tique , & l'acide fe trouve dans la cornue fous la forme d'une poudre sèche, mais coloré en jaune. Ce fel ammoniacal décompofe le nitre cal= caire , d'où il réfulte de la tungftène régénérée, = SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 127 f. Notre acide forme , avec la magnéfie, un fel moyen, difficilement foluble dans l’eau. g. Les diflolutions de chaux & d’alun n’éprouvent aucun changement; mais l’acère barotique eft décompofé par cet acide. Le précipité elt abfo- Jument infoluble dans l’eau. k, L'acide de la ungftène précipite en blanc les diffolutions vitrioliques de fer, de zinc & de cuivre , les: diffolutions nitreufes d'argent , de, mer- cure & de plomb, & le muriate de plomb; mais le muriate d'étain eft précipité en bleu, Le muriate mercuriel corroff& la diflolution d’or n'é- prouvent aucun changement. $. VI. Quañd l'acide de la tungftène eft calciné dans un creufer, il perd la propriété de fe diffoudre dans l'eau. La couleur bleue qu'il prend avec les Aux vitreux ($. V , lettreb), prouve qu'il eft difpofé à attirer le phlo- giftique. En conféquence, je mêlai l'acide fec avec un peu d'huile de lin, & je l'expofai à un feu violent dans un creufet luté. À près le refroidifle- ment, l'acide fe trouva noir, mais du refte n’étoit pas changé. Je mélai pareillement une partie d'acide fec avec deux parties de foufre, & je diftillai, Je mêlai au réfidu deux autres parties de foufre , qui futde même fublimé : l'acide fe trouva alors de couleur orife ; mais au furplus , il n’a- voit éprouvé aucun changement. La diffolution d’hépar de foufre eft pré- cipitée en verd par notre acide ; mais l’alkali pruffique donne un précipité blanc. Ce dernier précipité eft foluble dans l’eau. Si on mêle quelques gen d'acide muriatique à la diflolution aqueufe de cet acide ($.IN, ettre d), & qu'on en mette fur une lame polie de fer , de zinc ou d’étain, ou que l'on plonge un de ces métaux dans cet acide , il prend une belle couleur bleue. \ ) $. VII. Comme l'acide de la molybdène prend aufñi la couleur “bleue avec les métaux précédents, on pourroit croire que l'acide de 1a tungftène n’eft autre chofe que l'acide de la molybdène; mais puifqu'il fe comporte d’une manière toute différente dans les autres expériences, cet acide doit être d'une nature particulière: car , 1°. l'acide de la molybdène eft fufible , & fe liquéfie au feu (1), ce que ne fait pas l'acide de la tung- fiène (S. V, lettre z); 2°. le premier a une plus forte affinité avec le phlopiftique , comme on le voit par fon union avec le foufre, & le chan- gement qu'il éprouve lorfqu'il eft traité avec l'huile; 3°. le molybde calcaire n'eft pas jauni par l'acide nitreux , & s’y diffout très-facilement : avec la tungftène , c’eft tout le contraire; 4°. le molybde barotique eft foluble dans l’eau, & non le fel réfultant de l'union de notre acide avec le barote; $°: l'acide molybdique a moins d’afhinité avec la chaux que notre acide : car fi on fait digérer le molybde calcaire avec une diffolution du fel am- (1). Mém. de l'Acad. de Stockholm, ann. 1778, troifième trim. Journ, de Phyf. 1782, com. XX, pag. 342. , Tome XXII, Part. I, 1783. FÉ VRIER, R 2 123 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, moniacal dont il a été parlé au 6. V, lettree, on obtient de la tungftène régénérée. Le fer que l’on retire de quelques efpèces de tungftène doit être regardé comme s'y trouvant accidentellement. ÿ ADDITION DE M BERG MANN. J: fis, ily a quelques années, l'examen des parties conftituantes de fa tungftène ; fa pefanteur remarquable m'engagea à y chercher Le barote ou terre pefante: mais le procédé par lequel on la dégage ordinairement, ne dônna qu’une vraie terre calcaire; & la première diffolution alkaline qui avoit été faite avec l’eau, ayant été décantée avant de jetter de l'acide fur la mafle fondue , donna , par l'addition d’un acide , un précipité blanc de nature acide. Je ne répéterai pas les expériences dans lefquelles mes ré- fultats ont été les mêmes que ceux de M. Scheele, Il ne fera cependant pas inutile de faire mention de quelques petites différences dans les effais au chalumeau. La tungftène feule décrépite au feu du chalumeau , mais elle ne fond as. Elle s’unit à la foude dans une petite cuiller d'argent, avec un peu d’ef- ‘ fervefcence , & le fragment fe divife en pouflière. Avec le phofphate ammoniacal , ou le fel microcofmique , elle fait d’a- bord un peu d’effervefcence, & laiffe enfuite un réfidu difficilement folu- ble; mais le globule de verre prend une belle couleur bleue célefte , fans la moindre apparence de rouge dans la réfraction, comme il#arrive avec le cobalt. Avec une plus grande addition, le globule devient brunâtre, cependant encore tranfparent ; mais fi on en met davantage, le globule devient noir & ge : Le borax la diflout fans effervefcence & prefque fans couleur; mais quand il en eft furchargé, le globule devient enfin, par Le refroidiffement, brun ou blanc & opaque. Laterre acide feule fait un peu d’effervefcence avec la foude. Avec le phofphate ammoniacal, elle donne un globule , qui eft d'abord d'un bleu clair; en en mettant davantage, Le bleu devient obfcur, cependant fans au- cune apparence de rouge dans la réfraction ; & en ajoutant encore plus d’a- cide, le globule devient brun. Le borax prend une légère nuance de bleu; mais en augmentant la dofe, il devient jaune-brun : il conferve cependant fa tranfparence, pourvu quon nen ajoute pas davan- ‘age. S : à Je n'ai pu détruire cette dernière couleur brune, ni avec le nitre, ni par la famme extérieure. Un moyen très-facile de diftinguer la tuhgftène de coutes les autres SUR L'HIST, NATURELLE ET LES ARTS. 129 efpèces de pierres connues jufqu’à préfent , eft de la réduire en poudre , & de verfer deffus de l'eau-forte ou de l'acide muriatique , & d’expofer le tout à la chaleur de la digeftion. On ne tarde pas à voir, fur-tout avec le dernier , que la poudre prend à la fin une belle couleur jaune-clair ; ce qui arrive non-feulement avec celle de Bitfberg , mais encore avec toutes celles ue j'ai eu occafion d’éprouver dé divers endroits(1); ce qu'on nomme or- ADEME dire mine d’étain blanche , ou cryftaux d'étain blancs (zinn- graupen ), appartient fouvent à cette efpèce. En ce qui concerne la nature acide de cette terre, elle a beaucoup de rapport avec la terre acide qu'on retire de la molybdène, & routes les deux font dans un état qui reflemble à celui de l’arfenic blanc. Il eft connu que le demi-métal qu'on nomme arfenic n’eft autre chofe qu’un acide par- ticulier complettement faturé de phlogiftique , & que fa chaux blanche eft un état moyen entre l'acide & le métal , tenant feulement aflez de phlo- giftique pour rendre l'acide concret ; & pourtant encore foluble dans l'eau, & donnant des marques d’acidité. Si on veut conclure par analogie , tous les autres métaux doivent être de même compofés d'acides principes dif- férents, qui, avec une certaine quantité de phlogiftique , fe coagulent en un corps terreux fec, & qui, par la faturation , paflent completement à L'état de métal. Voici les raifons qui me portent à croire que les terres acides ci-deffus nommées font des acides métalliques, qui font mis par le phlogiftique dans cet état de chaux métallique, qui laifle encore diftinguer l'a- cidité, 1°, L'une & l’autre de ces terres refflemblent à l’arfenic blanc par la forme, par la réaction avec les acides , & par une foible diflolubilité dans l'eau. 2°. La pefanteur fpécifique : celle de l’arfenic blanc, eft:: 3,750; celle de la terre de molybdène : : 3,460 ; & celle de la terre acide de la rung- ftène , à-peu-près : : 3,600: A ASE , k ; CRE 3°. La précipitation par l’alkali pruffique. On n’a pas vu jufqu'à préfent qu'il précipität d’autres matières que les métaux ; fur quoi il faut remarquer ue l’arfenic diffous convenablement dans l'acide muriatique , donne, par l'alkali pruffique , un précipité foluble dans l'eau , précifément comme la terre acide de la tungftène. 4°. La propriété de eindre les flux vitreux, Les chaux métalliques tei- gnent ces flux , chacune à fa manière , & je ne connoïis aucune autre ma- tière qui pofsède cette vertu. On fait ce que donne l’arfenic par ce pro- QE (1) Une partie des cryftaux d’étain blancs qu’on voiten France dans les Cabinets, vient de Sauberg, près d’Ehrenfriederfdorf, M. de Moryeau en a éprouvé un, qui s'eft trouyé êure de la vraie tungftène. More du Tradutteur. 130 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, cédé. J'ai indiqué plus haut ce que produifoit la terre de la tungftène, & celle que l'on retire de la molybdène n’eft pas moins puiffante; car elle communique une belle couleur verte au fel microcofmique, Le borax, qui en eft bien faturé ; paroït gris, vu par les rayons réfléchis, & violet obfcur ar réfraction. T'elles font les raifons qui m'ont déterminé à regarder les terres acides dela molybdène & de la tungftène comme des efpèces de chaux métalli- ques. Mes occupations ne m'ont pas permis jufqu'à préfent de confirmer cette opinion, en les traitant par la réduction ; mais je ne devois pas moins en faire mention en cette occalion , puifqu'il pourra arriver que quelqu'autre avant moife charge d'en donner la preuve convenable pour le progrès des Sciences (1). PANNE EEE I IPN D EE) MÉMOIRE Sur la génération fingulière d'une efpèce de Grillor ; Qui découvre un fait de plus de l'analogie qui exifte entre Les Règnes: animal & végétal; ‘Par M, le Comte DE FRAULA, Cr: T en multipliant la connoiffance des faits, que l'on augmente véritablement la mafle des connoiffances humaines; & ce n'eft que de la connoiffance de tous les faits, s’il eft pofible de les connoître tous, que l'on faifira la fcience du fyftème de la Nature. Le grillon , dont on voit ici la figure , eft muet, & je le crois ennemi des efpèces qui chantent; car, depuis que cette première efpèce s’eft établie chez moi, je n’entends plus chanter. Cet infecte, comme on peut le voir’, eft de deux figures. Planc. I, A eft le mâle, B la femelle; la couleur de celle-ci eft noire , comme vernie de quelqu’humidité : on lui voit feulement comme une ébauche d'ailes ; elle eft plus groffe que le mâle : celui-ci n'eft que brun-noir , tirant fur le (1) J'ai déjà annoncé qu'un Difciple de M. Bergmann étoit en effet parvenu à retirer le régule de la molybdène. Voyez ma note fur le $. X de l'Effai de M. Scheele fur la molybdène, dans un des précédents çahiers du Journal de Phyfique, More du Traduiteur. D UT PE) UNE SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 131 roux , & ila des aîles véritables. Mais venons au fait par lequel cet infeéte nérite d’être connu. La femelle pond une gouffe, qui reffemble affez à la goufle des pois. Cet œuf ou cette goufle, comme on peut le voir lettre C , a fur un des côtés de fa longueur une efpèce d’arrête de toute la longueur de la goufle, De cette arrêre , il part des deux côtés des rayons parallèles. Ces rayons paroiflent à l'extérieur formés par des féparations, qui divifent la goufle dans fon épaifleur en autant de cellules ou emplacements , comme on peut le voir lettre E. Ces rayons font plus relevés près de l’arrête , dimi- nuant d'élévation aflez rapidement, pour que‘bientôt ils deviennent im- erceptibles. Toute l’arrête, vue à la loupe, paroït avoir jufqu'à 15 lig., à diftances égales les ünes des autres, partant du fommer de l’arrête vers l'intérieur de la goufle. Ces lignes forment des divifions entre les rayons dont nous venons de parler. La loupe m'a toujours fait voir deux de ces lignes entre chaque rayon. Pendant la ponte, l'arrête eft rournée vers le dos de la femelle, Ces œufs font abandonnés à la chaleur du local, qui les fait éclorre. Lorfque les petits qu'ils contiennent font perfectionnés, l’arrète s’en- trouvre & les laifle fortir ; ils en fortent tels qu'on les voit ici, lettre D. La gouffe qui les a contenus demeure en fon entier: on ne peut la re- connoître entre les autres , tant elle eft bien refermée; de {orte qu’en la preffant par les deux bouts , comme pourles rapprocher, alors la goufle s'ouvre tout le long de l'arrête qui fe fépare en deux lèvres , ce que ne font pas Les gouffes dont les petits ne font pas fortis, La génération de cette efpèce de grillon eft donc analogue dans tout cet arrangement à la génération des pois & autres végétaux , qui donnent leur graine dans des gouffes non en mafle, mais les unes à côté des autres, une aune & en une même ligne. Ces œufs contiennent , fuivant leur grandeur , plus ou ou moins de petits; & par un calcul commun que j'ai fait de tubes œufs , j'ai vu que chaque goufle en avoit contenu de dix à treize (1). Cer œuf eft à-peu-pfès Le tiers de la longueur de la femelle, & le tiers de la groffeur. On fent bien que la ponte d’un œuf pareil eft lente & la- borieufe: auñi voit-on la femelle fe promener plufieurs heures avec fes œufs plus où moins hors du corps. J'ai remarqué qu'elles fe trouvoient prefque toujours dans les entre-deux des portes ou des fenêtres |, ou en d’autres lieux raboteux , qu’elles cherchent apparemment, afin que les frottements les aident à fe débarrafler. AE AE 2 TN RER AUS Per CRE he mé ion ne 70 5e (1) Je ne donne pas ce nombre comme abfolu , mais comme approchant: une goufle cn deux , vuides, peuvent m'être échappées parmi les non vuidées qui me font reftées, 132 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Une femelle , déjà occupée à pondre, que je pris & enfermai fous un verre circulaire , où il n’y avoit par conféquent aucun frottement , fut en- core plus de quarante-huit heures avant d'avoir mis bas. Ces animaux ont plufieurs pontes. Une femelle, tenue fous cloche , a pondu deux fois en quinze jours ; de plus, le grand nombre des petits de toute grandeur que l’on voit courir dès le mois de Mai jufqu'à la fin de Septembre , & la grande quantité d'œufs que l'on trouve pendant le mêrne intervalle , prouvent aflez qu'ils ont plufeurs pontes , & qu'ils font d’une extrème fécondité, ; Cet infecte fe dépouille (1). J’ai eu la fatisfaction d'en examiner un dans cette opération; l’animal avoit de temps en temps de violentes con- vulfions , qui donnoient à fon corps un mouvement rapide d’ondulation, qui faifoit avancer un gonflement depuis Le bas jufqu'à la tête , à-peu-près comme une vague qui eft pouflée par Le vent. Ce mouvement fe réitéroit plufieurs fois de fuite , après quoi l'animal paroifloit en léchargie? Ces con- vulfons font fendre la peau noire, puis augmentent l'ouverture, jufqu'à ce que cet infecte vienne à bout de s’en tirer entièrement: alors il eft tout blanc, comme s’il n'avoit confervé que fa chemife; mais avant vingt- quatre heures , il commence dèjà à reprendre fa couleur. Je crois cet animal grand jeüneur; car quoique chez nous nous faflions tout ce que nous pouvons pour leur couper les vivres & les chaffer par famine, nous ne pouvons réuflir: aufli , lorfqu’il trouve de la nourriture, il eft d'une voracité extrême. S'il rencontre un navet , il y fait une petite ouverture, le vuide entièrement, n'y laiffant qu'une pelli- cule extrêmement mince, qui lui conferve fa forme comme s’il étoit en- tier. Cet animal contient beaucoup d'huile; car lorfqu'on l’écrafe fur un plancher, il s'y forme une tache de graifle confidérable. Quant à ce que j'ai pu obferver de fes facultés morales, il eft naturel- lement familier ; fe promène la nuit , foit qu'il y ait de la lumière ou qu'il n’y en ait pas, foit que l'on faffe du bruit ou que l’on n’en fafle pas : mais des qu'il a été une fois chafé , il devient craintif, fuit dès qu'il apperçoit la lumière ou qu'il entend le bruit: foit par fa courfe, foit par d’autres moyens , un feul communique fa peur aux autres. Tous Les Voyageurs, qui ont abordé dans des Ifles défertes, nous parlent de même des oifeaux qu'ils y ont trouvés; ils ne perdoient leur familiarité naturelle , qu'après que quelques individus en avoient été la victime, (1) Comme l’on voit des animaux qui fe dépouillent & d’autres qui ne fe dépouillent pas , l’on voit de même des végéraux qui perdent leur verdure, & d’autres qui ne la perdent pas, Voici CPR. PES { $ SUR.L'HIST. NATURELLE,ET LES ARTS, 13: Voici ma dernière obfervation. Ces infectes peuvent fupporter üne - chaleur extrême : cachés derrière la platine du End de là cheminée de la cuifine, le feu ne les fait fortir qu'à la longue ; & fi on les chafle, ils y retournent, reviennent peu apres , y retournent encore fi on Les y force , & ne reparoiflent plus. REMARQUES-PRATIQUES SUR LE TÉNIA; Par M. CussoN fs, Docteur en Médecine dans l'Univerfité de Mont- pellier, Membre de la Société Royale des Sciences , & Médecin de la Cha- rité (*). D: rous les vers qui s’engendrent dans le corps humain , celui qui ; dans tous les temps , a le plus fixé l'attention si Naturaliftes & des Médecins , & dont la longueur exceflive a caufé plus d’une fois un ile étonnement , eft le rénia , improprement appellé ver folitaire. Ce ver, eft particulier à l'homme & à certaines efpèces d'animaux (1); il eft extré- mement rare chez les enfans, & on ne le trouve guères que dans les adultes de l’un & de l'autre fexe. Les Anciens (2) le connoiflojent fous le nom de ver folitaire. A cette dénomination vicieufe ( à laquelle femble avoir donné lieu l'idée où ils étoient que ce ver fe trouvoit toujours feul dans les inteftins ), les Modernes ont fubftitué avec raifon les noms de rénia ou de ver plat , à caufe de la reffemblance qu'il a avec une bande ou un ruban. L'opinion des Anciens fe trouve démentie par des obfer- vations exactes & décifives. On fait depuis long-temps que , dans un même füjer , il peut fe rencontrer plufeurs ténia ordinaires, & dans un au- tre , plufieurs ténia cucurbitins (3): on fait encore que le dernier fe trouve quelquefois mêlé avec le premier, & quil eft poflible que ces deux ef- pèces exiftent fimultanément (4); enfin, l'expérience a fait voir qu'il n'é- toit pas rare d’obferver chez la même perfonne le ténia réuni à.des lom- brics ou à des afcarides ($). On n’eft pas d’accord fur le fiége de ce ver. Un Auteur moderne (6) n’a pas craint d'avancer qu'il ne fe logeoit que dans les gros inteftins, — © {*) Voyezles notes à la fin du Mémoire. Tome XXII, Part, 1, 1783. FÉVRIER. s 134 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Les obfervations de la plupart des Médecins de l'antiquité & de nos jours prouvent cependant , d'une mahiére évidente, que ce ver n'a aucune place fixe, & qu'il peut, felon qu'il eft plus ou moins long , occuper le tuyau inteflinal en tout ou en partie (7). Parmi les Auteurs qui ont parlé des différentes efpèces de sénia (8), Linné eft celui qui en admet un plus grand nombre. Ce favant Naturalifte en diftingue quatre efpèces, dont trois, réduites à deux avec raifon par quelques Modernes, intéreflent effentiellement le Praticien , parce qu'il n'eit pas aufi rare qu’on l'a cru de les obferver , & que d’ailleurs le mème p'onoftic ne convient pas aux deux efpèces, L'une porte les noms de snia a anneaux courts , ténia a épine, ténia ordinaire (9): on a donné à l’autre ceux de réria à anneaux longs, ténia fans épine, ténia cucurbitin (10), Cette dernière efpèce , moins commune, à ce que l'on croit, que la pre- mière, eft aufli celle qui préfente le plus de difficulté dans fon traitement, Je n'entrerai dans aucun dérail fur l'hiftoire naturelle de ces reptiles; je ne les confidère ici qu'en Médecin, & je n'ai en vue que de fixer les méthodes Les plus propres & en même temps les plus füres de délivrer de cet hôte incommode les fujets qui en font tourmentés. Je crois néan- moins effentiel, après avoir donné une defcription abrégée des deux ef- èces communes, de tracer le tableau des fignes qui annoncent , de la nière la moins équivoque , leur préfence, & de faire connoître les angers auxquels ils expofent. Le ténia à anneaux courts ( Ag. 1°") eft un ver de couleur blanche , de forme longue & applatie, compofé de plufieurs anneaux très-courts , articulés les uns aux autres, & traverfés dans leur longueur par une ef- pèce de veine. A. Cette veine, plus ou moins apparente, lui a fait don- ner le nom de sénia a épine; elle eft bleuâtre ou rougeâtre, ou fimplement de couleur blanche ; quelquefois elle fe manifefte par une tache blanche ow noire, fenfble au milieu de chaque anneau, & garnie fur les deux furfaces d'un mamelon peu apparent. La queue ou terminaifon poftérieure de ce ver, B, n'a jamais pu être obfervée, parce qu'il fe rompt, Son corps C eft ordinairement long de plufeurs aunes (11), & applati en forme de ru- ban; il {e rétrécit peu-à-peu vers fa partie fupérieure , & fe termine en un fi D fort menu , d’un pied de longueur & même plus. La pointe E , qui , à Pœil nud , paroît très aiguë, examinée avec une fort microfcope, fe renfle & préfente une tête cerminée par quatre cornes de longueur inégale , que l’on regarde, avec aflez de fondement , comme des fuçoirs qui fervent à nourrir l’antiual. Le ténia à anréaux longs ( fig. 2) difière du précédent , en ce qu'il eft dépourvu de cette veine longitudinale dont nous venons de parler ; il en diffère encore par les anneaux qui le compofent, qui font beaucoup plus longs À , ftriés dans leur longueur , & garnis fur leurs bords d’un feul mamelon; leur union mutuelle eft aufi beaucoup plus aifée à fe x om ne ‘1 SUR L'HIST, NATURELLE ET LES ARTS. 135 rompre » & leur reflemblance avec des femences de chardon ou de courge a mérité à cette efpèce le nom de #nia cucurbitin. La forme des anneaux articulés enfemble, varie encore beaucoup; ils font plus longs vers l'ex- trémité inférieure B , plus ferrés, plus étroits , plus minces & plus courts vers la fupérieure C , & fe terminent, après avoir diminué infenfiblement , par un filer D’, analogue à celui que nous avons obfervé dañs léfpèce pré- cédente. Aucun Auteur queje fache , fi l'on en excepte Andy & M. de Bomare qui en parle d’après lui, n'a fait mention de ce filet. Les Na- turaliftes & les Médecins même les plus modernes gardent à ce fujet le filence, Il n’eft cependant plus permis de douter de la terminaifon uni- forme des deux efpèces, depuis que M. Beaumes a fait rendre à un Nègre un séria à anneaux longs , pourvu de ce filet (12). Ce Médecin eftima- ble*a fixé nos connoïflances fur cet objet; & cette découverte n’a été vrai- femblablement comme oubliée , que par la facilité avec laquelle Les articu- lations de ce ver fe féparent, & par la difficulté qu'il y a de l'avoir en- tier (13). IL. I y a beaucoup de variété dans le nombre & l'intenfité des fymp- tômes que Le ténia produit. Il eft des fujets qui en rendent, fans que leur exclufion ait été précédée d'aucune incommodité marquée. S'ils s’'annon- cent chez d’autres par quelques accidens , ils ne diffèrent fouvent pas de ceux que les diverles affections vermineufes peuvent faire naître, [l'arrive enfin quelquefois que leur préfence fe manifefte d’une manière ficheufe & même alarmante : il n’eft alors aucune maladie grave , aucune affeétion fymptômatique qu'ils ne foient capables de produire , & dont le plus fou- vent on ne les foupçonne pas la caufe. 1 Selon les Médecins les plus recommandables par l’exaditude & la fidélité de leurs obfervations, ou par une pratique auñi fage que lumi- neufe , les fignes qui indiquent l'exiftence du ténia, font la pâleur du vi- fage , le larmoiement, la vue trouble, les érourdiffements, les vertiges, le fréquent tintouin,fgpuanteur de labouche, le chatouillementdel’œfophage, accompagné quelquefois d'une toux affez foutenue , le crachottement conti- nuel, Ce verexcite fouvent aufli des naufées, des vomiflements; les ma- lades fe plaignent vers la région du foie, fur-tout à jeun , de douleurs, dont la violence leur fait affez ordinairement perdre tout-à coup la pa- role, Leur appétit eft dérangé; ils éprouvent communément une faim dévorante, à laquelle fuccède quelquefois un dégoût général ou un ap- peu bizarre ; ils font tourmentés de gonflements après les repas, de orboryfmes , de frémiflements dans leurs entrailles, d’envies d’aller à la felle , précédées de tranchées plus ou moins vives, fouvent même de co- liques infoutenables. Ils éprouvent un fentiment de froid autour de l'om- bilic , un fentiment de fuccion interne & d’agitation onduleufe. Quelques- uns, malgré la grande nourriture queda faim extrême les force de prendre, maigriffent horriblement ; d'autres cependant confervent leur embonpoint, Tome XXII, Part. 1,1783. FÉ VRIE R, S 2 136 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Le gonflement plus ou moins marqué du ventre eft encore un fymptômé qui fe rencontre chez'certains fujets; il donne aux femmes une faufle appa- rence de groflefle , d'autant plus fufpeéte, qu’elle eft pour l'ordinaire ac- compagnée de la fupprefion des règles. Les déjections font glaireufes, & prélentent des exctémens mous, battus, fouertés, & refflemblants à la fiente de bœuf. On obferve dans les felles', de petits corps qui ont la forme des graines de citrouille ou des femences de chardon, auxquels on a donné le nom de vers cucurbiins. Ces petits corps ne sy rencon- trent cependant pas toujours, & il eft des cas où elles offrent des por- tions du ténia plusou moins grandes, Leténia , par fa préfence, peut, de même que les autres vers, donner lieu à des maladies graves , telles que les convulfions , l’apoplexie, la paralyfie ; mais fes effers les plus ordi- naires font d’exciter des cardialgies , de jetter dans la fièvre lente , le ma- rafme , la boufhflure, l'afcite, la tympanite, &c. &c. À ce tableau effrayant, mais fidèle, des fymptômes du ténia, il con- vient, pour l'exactitude , de joindre les fignes qui fe tirent de l’âge , du tempérament, de la conftitution vermineufe ; de la nourriture , de la fai- fon, du climat. On le foupçonnera donc plutôt chez les fujets d’un rem+ pérament lâche, pituiteux , & dont les fonétions s'exerçent d’une manière languiffante ; chez ceux qui portent évidemment une difpolition aux affec- tions yermineules , toujours prête à fe reproduire, dès qu'on cefle de la combattre; chez les perfonnes qui fe nourriflent habiruellemenr de vian- des crues , falées, de poiffons, de fruits peu mûrs, de farineux , de lai- tases, de fubftances praifleufes , & qui , pour leur boïflon , ufent d'eaux chaudes & impures. Enfin, le climat & la faifon fourniront encore des indices du ténia , fi l’on fait attention qu'il eft beaucoup plus fréquent dans les pays entourés de rivières, de lacs, dans ceux où l'on abufe de relâchants (14), & que le printemps & Vautomne font les temps où ce ver exerce fes ravages avec le plus d'énergie (15). Si les fignes que nous venons de donner , comme sggopres à annoncer la préfence du téria, éroient tous d’une égale valeur s'ils indiquoient tous, avec le même degré de certitude , l’exiftence de ce ver, il convien- droit fans doute de n'en négliger aucun:mais comme dans leur nombre, il en eft qui fontcommuns au ténia & à d'autres affections vermineufes , que certains même fe rencontrent dans des maladies de nature diffé- rente, il convient de faire un choix & de difcuter, parmi ces fignes , ceux qui font propres à éclairer le Médecin & qui méritent toute fa confiance. ” Parmi ceux que je vais foumettre à un examen particulier, plufeurs ne font que des fignes fubalrernes, capables feulement de donner: des foupçons plus ou moins fondés ou des vraifemblances plus où moins fortes; un feul annonce d'une manière füre & poñtive la préfence du ténia. Les fignes fubalternes font Le larmoiement , la faim extrême, l'amaigrifle- & » SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 137 {ment , malgré la nourriture que les malades prennent, les tranchées &c les vomiffemens lorfque l’eftomac eft vuide, la douleur du coté du foie , le fentiment de froid autour du nombril, les déjeétions glaireules , molles, battues , fouettées , quelquefois liquides. Le larmoiement n'eft pas un figne qui foit revêtu du fuffrage "des Médecins qui ont SRE temps reculés, où même de nos jours, Seroït-il poflible qu'il eût échappé à leur fagacité ? Elt-ce parce que ce figne n'efPlpas ordinaire, que les Médecins qui traitent du ténia n’en par- lent point? Eft-ce par un effet du hafard que le séniaire, chez qui Mor gagni a obfervé ce fymptôme, ainfi que ceux que M. Gouan a vus, l'ont tous prélenté (16) { Eftce enfin parce que les Praticiens qui ont eu le plus occalion de voir des malades tourmentés de ce ver, chez lefquels ce fymptôme a exifté, n'ont point publié leurs obfervations ? Quoi qu'il en foit, ce figne eft cohérent avec les affedtions du globe de l'œil. de Ja prunelle, de la rétine, des paupières, qui produifent les lombrics (17), Je ne les rapporte que d’après des Oblervateurs dignes de foi, & pour réveiller l'attention des Praticiens , qui feuls peuvent fixer fa valeur, « Les tranchées, les coliques , les naufées , les vomiffemens , doivent fouvent leur origine à des caufes qui n'ont fouvent rien de commun avec le tévia. Un fimple coup-d'æœil fur ces diverfes maladies en! fournit la preuve, La circonftance d’avoir lieu, fur-tout à jeun , n’a rien de carac- rériftique, Les exemples de coliques qui s’appaifent par la nourriture , & qui s’aigriflent logfque l’eftomac eft vuide, ne fonc pas rares dans l’hif toire dés maladi n trouve aufli des naufées , des vomiflements , qui font dans le même cas. Ces fignes font donc propres feulement à faire foupçonner le ténia, fans joies d'une manière certaine fa pré- fence, La faim dévorante & l’amaigriflement, mage la grande quantité d'ali- ments que prennent les mala@les , font deux fignes qui foufftent des ex ceptions. On trouve ,'comme nous favons déjà remarqué , des malades travaillés du ténia, qui font dégoütés & maigriflent ; & d’autres qui mangent avec appétit & confervent leur embonpoint : aulli ces fignes , lorfqu'ils fe rencontrent, ne peuvent-ils faire naître que des foupçons. Une connoiffance, même légère , de l’étiologie pathologique, démon- tre combien de caufes, autres que le ténia , peuvent produire une dou- leur qu’on rapportera du côté du foie, Cette douleur n'établit donc qu'une vraifemblance, Le froid autour du nombril préfente quelque chofe de particulier ; ce figne pourtant n'eft rien moins que certain. On trouve des perfonnes chez qui on ne fauroit foupconner le ténia, & qui cependant fe plai- gnent d'un fentimenc de froid dans le bas-ventre, dans une partie du bas-ventre, autour du nombiil, 138 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; Les déjections glaireufes, molles, battues & comme fouettées , font un bon figne, quoiqu'il ne foit pas affuré; il manque très: rarement dans les affections téniales ; la conftipation même, qui paroît par intervalles, re le détruit pas, parce qu’elle ne furvient ordinairement qu'après des dé- jetions abondantes & plus ou moins foutenues, La qualité des felles pré- fente ici quelque chofe de particulier; elles me font cependant pas pro- pres au ténia. On voit des maladies diarrhoïques , fans fièvre & Même avec fièvre , où les matières rendues ont beaucoup d'analogie Avec celles dént nous venons de parler. La préfence des vers cucurbitins dans les felles eft regardée par pref- que tous les Auteurs comme un figne certain de l’exiftence du ténia ; mais on a trop donné‘d'extenfion à ce figne , en le regardant comme propre à annoncer le ténia en général. Ces vers n’indiquent , d’une manière cer- taine , que l’efpèce que nous avons appellée série à anneaux longs, ou cénia cucurbicins , la feule qui, comme le remarque le €hevalier Linné , donne lieu à la fortie des vers cucurbitins , par la féparation de fes articu- lations. L'obfervation rapportée dans le Journal de Médecine (18) fur des vers cucurbitins rendus en quantité & à plufeurs reprifes , fans avoir été fuivis du ténia, & avec la ceffation totale des fymptômes , ne détruit point cette propolition; elle prouve feulement que les articulations de ce ténia, que l'on fait fe détacher très-facilement les unes des autres , fe font dans ce cas féparées toutes ou d'elles mêmes , ou par l’action des remèdes, On peut douter fi l’'excrétion d'une certaine cité de vers cu- curbitins ne fufät pas quelquefois pour faire taire LM ncipaux fymp- tômes que ce ténia occafionne, On peut former le même doute fur le serie à anneaux courts, dont on a rendu de grandes portions. Il eft cependant afluré que les malades ne font réellement guéris que lorfqu’ils ont rendu Le fil dans l'une & l’autre efpèce, & que le fujet qui a donné lieu à l'ob- fervation rapportée plus haut d’après le Jôtrnal de Médecine, n'ayant point rendu ce fil, évidemment ne l’étoit point , quoiqu'il y eût deux ans que l'épilepfe qu'il éprouvoit eût ceflé (19). Quoiqu’on ait donc rendu beaucoup de vers cucurbitins ou de grandes portions de ténia de ce nom, one doit point fe croire entièrement délivré de ce reptile , quelque confiderable que foit d’ailleurs le temps qui s’eft écoulé fans avoir éprouvé les fymptômes qu'il produifoit auparavant, & fans en avoir rendu des portions. Il faut avoir fait le filet pour être ‘afluré d’une guérifon radi- cale, & la néceflité d'avoir ce filet rend l’obfervation de M. Bezumes d'autant plus précieufe , qu’elle nous fait connoïître quand eft-ce que nous devons cefler d'agir, & nous met dans le cas de pouvoir .annoncet la guérifon d'une manière pofñtive. Les obfervations par lefquelles il eft conftant que des füjets, fans avoir fait des vers cucurbitins, ont pourtant rendu des ténia , prouvent feulement quele ténia, que nous avons ap- # 4 4 1 | . SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 139 ellé rénia à anneaux courts | ne fauroit produire des vers cucurbitins. lufieurs Auteurs ayant regardé ces derniers vers comme des indices fürs de la préfence des deux efpèces de ténia, je me fuis cru obligé d'infifter für cout ce que je viens de dire, pour détruire cette erreur. L’exclufion de portions, même petites , de ténia | de quelque efpèce qu'il foit, font le feul figne non équivoque de la préfence de ce reptile ; elle fuit feule pour la mettre hors de tout doute, & elle feule l’établic avec certitude relativement au séria & anneaux courts. Nous avons déjà obfervé que le rénia cucurbitin avoit un autre figne für , qui eft l’exciufon des vers R même nom. L'infpection des portions tendues fournira donc un moyen afluré de connoître l'efpèce de ténia que l'on a à combattre, Les autres lignes que nous venons de difcuter , & qui fe préfentent en nombre plus ou moins grand chez les divers malades , ne donnent que des foupçons plus ou moins fondés ,ou des vraifemblances plus ou moins grandes : réunis en un certain nombre, ils peuvent dire beaucoup , & mé- titent certainement l'attention du Médecin. Il convient aufli de ne pas négliger ceux qui fe tirent de l’âge’, du tempérament, de la conflitution vermineufe , de la nourriture, de la faifon & du climat, dont nous avons déjà parlé. IT. L'état actuel de nos connoiffances permet de tempérer le pronof- tic fâcheux que quelques Auteurs portent fur le ténia. Nous favons déjà qu'il eft des circonftances où ce ver n’incommode prefque pas les fujets chez qui il habite. Hippocrate avoit connu ces cas, puifqu'il nous dit que ce ver n’abrège point la vie, & qu'on peut, en le portant, poufler très- loin fa carrière (20). Si, dans quelques fujets, il a produit des fymptô- mes graves, ils deviennent pour nous moins alarmants qu'ils ne l’étoient pour nos prédéceffeurs. Ily auroit cependant autant de témérité de le méprifer entièrement, que de pufllanimité de défefpérer de le détruire , & l'expérience de deux Praticiens célèbres nous apprend qu’il n’eft point fans danger (21). Le pronoftic doit donc varier fuivant que ce ver fe com porte paifiblement, ou qu’il fe fait plus ou moins reffentir, * [] fera fans doute à craindre, s’il occafionne des accidens graves, tels que la faim dévorante, les fyncopes fréquentes , les cardialgies vives ; s’il jerte les malades dans la fièvre lente, le marafme; s’il donne lieu à des maladies chroniques de nature dangereufe : il eft évident qu'alors les jours du malade font menacés, & que l’on atout à craindre , fur-tout s’il eft très-long , s’il n’eft pas feul, parce que les accidens ne pourront'manquer de croître en intenfiré & en nombre, Les deux efpèces de ténia nefont pas également dangereufes. On s’ac- - corde affez généralement à regarder le rénia à anneaux courts comme beau- coup plus redoutable que le £nia à anneaux longs, C'eft cette dernière ef- pèce qui a fait dire à certains Auteurs, que le ténia n'ocçafionnoit jamais 149 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, des fymptômes fâcheux. Ces derniers fe font tompés , en ce qu'ils ont iguoré les cas où la première efpèce a produit des accidents graves, & en ce qu'ils n'ont connu que ceux où la feconde ne s’eft fait reflentir que d’une manière légère. ‘ L'état des fujets que le ténia attaque, doitencore entrer pour beaucoup dans le pronoftic. On conçoit aifément que , fi ce ver exerce fes ravages pendant le cours d'une maladie aiguë, il en retardera & rendra la con- valefcence longue, pénible, fujette aux rechütes, S'il fe loge chez une femme enceinte, qu'il donne lieu à des vomiffemens , à des diarrhées abon- dantes, à des coliques vives, il lui fera courir des rifques qu’elle n'auroit point courus dans une autre circonftance. [1 fauten dire autant d’un vieil- lard fans forces , d’un adulte épuifé. Dans tous ces cas , Le péril attaché à ce ver ne peut qu'augmenter notablement. à Enfin , relativement à la méthode curative , l'expérience a fait voir que, pour l'ordinaire , le réxia à anneaux courts préfente moins de dif- ficultés dans fon expulfion, que celui qui eft à anneaux longs. IV. Le ténia, dit un Auteur eftimable (22), eft de tous les vers le plus difficile à détruire. IBes tentatives infruétueufes & le peu de fuccès des Anciens dans le traitement de ce reptile, leur avoient fait defirer & recher- cher un fpécifique. Divers Médecins fe font occupés de cette recherche ; & l'empreffement avec lequel ils ont publié les remèdes, dont l’expé- rience leur avoit confirmé l'efficacité , a porté de nos jours le traitement de ce ver à une perfection dont il étoit bien éloigné. On peut ranger fous deux méthodes tout ce que les Auteurs ont propofé pour le coms battre :la première mérite le nom de méthode aëlive ; la feconde, par oppoñition , peut être appellée méthode douce. Les purgatifs énergiques & les vermifuges (23) combinés enfemble , affociés de différentes manières, & réduits pour la plupart fous la forme bolaire , conftituent la première méthode ; la feconde a pour bafe les huiles vermifuges & légèrement purgatives (24), jointes aux anthelmin- tiques ou aux purgatifs moyens. Parmi les divers fpécifiques de nature aétive qui ont mérité à leurs Auteurs une réputation, & qui, encore aujourd'hui, font regardéscomme les plus eicaces , il convient de placer celui du Docteur Herrenfchvand ; celui qui, en 1776, fut publié par ordre du Roi, fous le nom de Méthode de Madame Nouffer ; enfin, celui que M. Renaud , Médecin, 2 configné dans le premier volume de la Société Royale de Médecine. Ils ne font pas les feuls connus; & l’on en trouve dans plufieurs Ouvrages beaucoup d’autres vantés par leurs Auteurs : mais l'expérience, qui peut feule les apprécier, n'a pas encore prononcé en leur faveur d’une ma- nière décilive (25). Le Docteur Herrenfchwand employoit en trois dofes une poudre com- ) ; pofée SUR L'HIST. NATURELLE.ET LES ARTS. xax pofée derracines de fougère mâle, de gomme-gutte & de gratiole, qu'il faifoit précéder d'un purgatifcompol® de Mercure doux & de diagrède (26). Madame Nouffer commençoit fon traitement par une foupe beurrée, fuivie le lendemain de la poudre de racine de fougère mâle , & deux heures après d'un bol compofé de panacée mercuriel , de réfine, de fcammonée d'Alep & de gomme-gutte, incorporés dans la confectiomd'hyacinthe (27). Enfin, M. Renaud donne la racine de fougère mâle en poudre pendant plufeurs jours de fuite, & lui fait fuccéder des bols faits avec l'aquila-alba, le jalap & la rhubarbe. La boiflon ordinaire eft la décoction de racine de mürier (28). Parmi les fpécifiques doux, je ne ferai mention que de trois, quoique plulieurs autres puiflent être rangés fous certe clafle (29). Ceux qui me paroiffent mériter à juite titre la confiance des Médecins , font d'abord celui que M, /a Chapelle a publié , & que l’on fait être l'huile de noix com- binée avec le vin d’alicante (30); celui dont on eft redevable à M, Odier, dont les ingrédiens font l'huile de ricin & la racine de fougère mâle (31); enfin, untroifième , qui m'a été communiqué par M. Gouan , & qui ne diffère du fpécifique de M. Odier , que par l'affociation des narcoriques , & par un plus grand degré d'activité produit par le‘jalap, que l’Auteur mêle à petite dofe à la fougère mâle (32). « ‘ Maintenant fi nous voulons fixer ; d’après l'expérience, la valeur des méthodes dont nous venons de donner le tableau, nous verrons d’abord que les méthodes actives font fouvent fâcheufes, par les fecoufles vives, les fpafmes violents , les évacuations aufli profufes que douloureufes, qu’elles ne produifent que trop fouvent, & par l'excès de fenfibilité & les coliques habituelles qu'elles laiflent après elles pendant un temps plus ou moins confidérable. ue M. de Haen (33) nous a confervé l’hiftoire d’une femme attaquée du ténia, chez laquelle il fallut recourir aux potions*calmantes, pour remédier aux tranchées vives & aux déje&ions fanguinolentes auxquelles un remède draftique avoit donné lieu (34). Le fpécifique de Madame Nouffer a excité les mêmes fymptômes chez plufieurs malades de Lyon & de Cadix, pour lefquels M. Gouan a été confulté. IL fallut un ufage très-long-temps foutenu de mucilagineux pour dilliper les douleurs de ventre & les riraillements confidérables que ce remède avoit caufés. Je lui ai vu produire, chez un fujet affez vigou- reux , des douleurs d’entrailles , quoiqu'il eût été donné àdofes amoindries, & que le malade n'eût pas UE on vomir une partie. d L'obfervation que M. Bajet, Docteur en Médecine de la Faculté de Paris, a inférée ie le Journal de Médecine, prouve encore que le re- mède de Madame Nouffer n’a fait que tourmenter inutilement dans un cas où l'ufage du vin doux & de la limonade ont fait rendre plufeurs por- tions de ténia (35). Les raifins pris en quantité , firent également Tome XXI, Part, I, 1783. FÉVRIER. T 142 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fortir chez un homme de Neufchâtel, une portion du ténia d'environ 2 pieds (36). 5 3 ti Par celle que M. Turgot, ancien Miniftre d'Etat, a confionée dans le Journal de Phyfque (37), iliparoît que l’épilepfie qu'a éprouvée la femme quien a fait le fujet, ne doit être attribuée qu'au mème remède, pris dans la vue de fe délivfer d’un ténia*qu'elle portoit, puifqu'auparavant elle n'a- voit jamais été fujette a cette maladie convulfive. Enfin, l'ufage de la gratiole , confcillé par un Chirurgien de campa- gne à un fujet de trente ans atteint du ténia, le jetta, fans procurer l'ex- oulfion de ce ver, dans un dépériflement fi confidérable, qu'il parut tomber EL la phthife, Les methodes douces n’ont jamais les inconvénients que nous venons de reprocher aux méthodes actives: aulfi bénignes dans leur action que fûres dans leurs effets, elles ont conftamment eu les fuccès les plus heureux éntre les mains des Médecins qui les ont tentées. IL fuffic, pour s’en con- vaincre, de lire les obfervations que MM. /a Chapelle, Binet & Beaumes (38) ont publiées , & celles que M. Odier a conlignées dans le Mémoire qu'il a donné fur cette matière (30): celles que M.'Gouan m'a communiquées, & celles que j'ai eu occafion de faire moi-même, viennent encore à l'ap- pui de l'affertion de ces Médecins célèbres. De ce que je viens de dire, on peur conclure, 1°. qu'il eft peu de cir- conftances qui permettent d'employer fans crainte les méthodes actives; qu'elles font prelque roujours dangereufes pour les fujets fenfibles délicats, valétudinaires ; & que fi elles peuvent être tentées chez les fujets vigoureux, ce ne doit être qu'avec beaucoup de ménagement , toujours en diminuant les dofesprefcrites par Les Auteurs relativement aux remèdes actifs, & après avoir tenté fans fuccès les méthodes douces. : 2°. Que ces dernières doivent être conftammient préférées, puifqu'elles opèrent d'une manière auih füre qu’innocente , & que parmi ces mé- thodes, celle de M. Odier mérite la plus grande confiance , tant par les fuccès mulripliés qu'elle a eus entre les mains de fon Auteur, que par, ceux dont M. Gozan & moi avons été les témoins. Je ne puis en dire au- tant de la méthode de M. La Chapell: , que j'ai toujours regardée comme moins füre, & que pour cette raifon je n'ai jamais tentée, Son efficacité n'eft cependant pas douteufe, & nous favons qu’elle a réufli dans plu- fieurs occafons où fon EInventeur l’a employée , & qu'elle a mérité les éloges de MM. Bines & Beaumes. Il eft évident que, dans les cas où la fenf- bilité des enträilles fera exquife, la méthode de M, Gouan fera celle qu'il faudra tenter de préférence, par le double avantage qu'elle a de calmer les douleurs & d’expulfer le ver. Quoique j'aie trouvé des inconvénients aux méthodes actives, que je ne les aie autorifées que fous certaines reftrictions , on n'eft pas en droit d'en conclure qu'elles font efficaces, Les obfervations que nous avons SUR.L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 143 rapportées, d’après les Auteurs qui les ont éprouvées (40); celles que les Médecins de Paris ont publiées (41); celles enfin que pluleurs Mé- decins de Montpellier & moi-même avons eu occafon de faire, ne per- mettent pas de douter de leur fuccès, quoiqu'elles aient eu des inconvé- nients marqués chez plufeurs fujets. Si donc la méthode de M. Odier , ou telle autre méthode douée, venoit à manquer , je crois qu'il ne faudroit pas balancer d'employer une méthode aétive , en la proportionnant au fujet, & en fuivant dans l’adminiftration des remèdes Les règles que dicte la prudence. Je terminerai ces remarques par deux réflexions qui me paroiffent éga- lement eflentielles. La première porte fur la néceflité qu’il y a de ne point donner le de en même temps que le purgatif, & d'adminiftrer ces deux remèdes féparément, Cette pratique, recommandée par Oribafe, Sylvius Sennert , eft celle que Madame Nouffer a conftamment fuivie ; & c'eft à la précaution qu’elle a de donner le fpécifique quelque temps avant le bol purgatif, que font vraifemblablement dus les fuccès de fa mé: thode, La feconde et, que peut-être il n’eft pas indifférent de choilir tel ou tel temps pour le traitement du ténia. Il eft douteux , fi, l'exclufon des portions de ce ver ayant lieu, d’après les obfervations de Fabrice de Hilden, de le Clerc, de Zimmermann , dans des temps déterminés & à certaines époques fixes, ilne convient point de choilir de préférence ces époques pour l'admi- niftration des moyens curatifs : c’eft ce que des obfervations ultérieures & exactes pourront décider. Quoi qu’il en foit, je regarde cette précaution comme une des plus propres à aflurer le fuccès du traitement, & j'exhorte les Médecins à ne pas la négliger. NOTES, (1) À à le trouve dans quelques quadrupèdes , tels que le chien, le chat, le bœuf, lecheval, Le lapin, &c. ; quelques poiflons, tels que la brème, le brochet, le turbot piquant, la perche, la tanche , le faumon, &c.; quelques oifeaux , cels que l'hirondelle , le canard, &c. &c. (2) Hippocrate, De Morb., lib. IV, cap. XP.—Spigel, De Lumbr, lato , cap. X,— Andry , de la génération des Vers, &c. (3) On trouve des Obfervarions pareilles dans Edward Tyfor , Tran- fat. Philofoph. , année 1678 , n°. 146, — Dionis, Diflert. fur le Ténie ou Ver plat.— Vandoeweren, Diff. de Vermib. inteflin. — Lifter, Philofoph. Tranfaë. Abrigd. , tom. III, — Foxeltus De Inseflinal, Aff., tom. IIL. — Tulpius, Obferv. Med. , lib. IT, çap. 42.— Wan-Swieten, de Morb. Tome X XII, Part. I1,1783.FE VRIER, ma 144 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Infant. , tom. IV, $. 1363. — Bonnet , Sav. Etrang. , tom. I. — Weifler, Differts de Verimibsinteffinalib.— Dans les Mém. de l'Acad. Roy. des Scienc. de Paris, vol. XVIE. — Dans l'Ouvrage intitulé: Traitemenr contre le Ténia, publié par ordre du Roïen 1776.— Jouwrncde Phyf.1777,t.1X ,p. 243 (4) M. Lepreux , Médecin de la Faculté de Médecine de Paris, a confi- gné, dans le Journal de Médecine (année 1781; tom. LV, pag. 274), l'obférvation d’une jeune fille attaquée du rénia, qui rendoit des portions de ce ver à anneaux courts avec une quantité confidérable d’autres petits corps reffemblants à la graine de courge; ce qui force de reconnoître l'exif- rence fimulranée de ces deux efpèces. (5) M. Rarlin ( Malad. occalionn. par Les variations de l'air) rapporte - V'obfervation d’un homme qui rendoit des lombrics avec des portions de ténia. On trouve des obfervations pareilles dans Wepfer, cicur. aquat. Hiff. & noxe, cap. XII. — Dans le Journal de Médecine! ann, 1756 , tom. V ). — Dans le trairement contre le ténia déjà cité. — M. Beaumes a connu une fille de 21 ans, attaquée du ténia cucurbitin depuis nombre d'années, qui rendoit des vers cucurbitins & des portions de ce ver avec beaucoup de lombrics, — M. de Haen (Rat. medend. , tom. VIT ) parle d'un chien dans lequel ôn trouva plufieurs ténia avec plufieurs Jombrics : il nous a auf confervé l'hiltoire d'une femme âgée de 30 ans, à laquelle Nixer, Médecin de la Haye, fit rendre dix-huit ténia avec leurs filets , accompagnés de plu: fieurs cucurbitins & de plufeurs afcarides, — J'ai vu , dans une hirondelle, qui venoir d’être tuée, dix à douze dragonneaux ou gordius,. & environ le’ double de ténia ordinaires. (6) Voyez leJournal de Médecine, ann. 1763, tom. XVIII. (7) « Omnium, (ræniarum ) dit Lifter ; extremum tenuius fuperiora fpec- tat, ac fc defcendenti chylo inhiaret ».— Au rapport d'Aadry (loc. cie. ) 3 d’Allen ( Abrézé de toute la Médecine-Prarique , tom. TL); de M. Bo- mare ( Dit. d'Hift. Nat. tom. V), ce ver prend fa nourriture vers le pylore, ou dans les inteftins gréles. Selon Lomnius ( T'abl. des Malad.}, il caufe aux malades une faim dévorante, parce qu'illeur dérobe la nouwirure dès le mo- ment qu'ils lent prife. — Baglivi (Oper. Medic.) & M.de Bomare (loc. cir.), penfent qu'il peut croître aflez pour égaler la longueur des inteftins; & Spigel (loc. cir.) trouva dans le cadavre d’une Demoifelle , qu'on croyoit groffe , un ténia qui occupoiït toute cette étendue. — M. Hagrenor ( Mém. de la Société Royale de Montpellier, tom. 1) a obfervé dans un chat deux ténia, l’un dans l'eftomac, l’autre dans Le duodénum. — Wepfer( Ephém. D. HIT, ann. Il) en a également vu plufieurs dans le duodénum & le jeju- num des brochets,— 4zdry (Loc. cie. ) nous dit qu'une Däme rendit par la bouche un ténia vivant; & Skinkius (Obferv. Cur., tom. 1 ) parle d'un homme , qui, après avoir foufferr des maux de tête violents, - en vomit un de la même manière. — Il mionte quelquefois, dit M. Lieutaud (Syrop, Med, Praë,) , jufqu'à la bouche , & quelques perfonnes rat 19e SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 14ç en ont rendu par cette voie: on en a même trouvé , ajoute t-il ; des por- tions confidérables dans l'eftomac. — Au rapport de Baglivi (loc. cir.), un jeune homme, à Rome, en vomit un de 30 aunes de long.— Enfin, Lomnius ( Loc, cit.) parlant des fignes communs aux vers longs & aux plats, dit qu'onen rend tantôt par les felles , & quelquefois par les narines. (8) Andry (loc. cie, ) en décrit deux, qu'il diftingue par Les noms de rénia à épine & ténia fans épine , auxquelles Dionis ( loc, cit. ) en ajoute une troi- fième efpèce , qu'il appelle’ rézta à enveloppe. M. Gouan , Profefieur de l'Univerlité de Montpellier, qui a eu occafion de voir ce cas particulier , obferve que cette efpèce ne doit point être admife, parce que le ténia qui fut rendu écoit le série cucurbitin , & que la circonftance d'être logé dans un fac ne change point l'efpèce. L'illuftre M. Bonnet ( loc, cit. ) donne aufli la defcription de deux efpèces de sénia, l'un qu'il appelle sénia à anneaux longs | & l'autre ténia à anneaux courts. (o) Lumbricus latus, feu t@nta inteflinorum. Plater. ( Prax.1om. III). — Ténia , ver folitaire, folium a épine. Andry ( Loc. cit. ; chap. III, art. 2), — Ténia à anneaux courts: Bonnet ( Etrang., vol, 1). Lumbricus la- tus. Spigel (Monogr.) — Tænia prima Plareri. Leclerc (Hift. des Vers ), = Tania acephala & tænia capitata. Vogel (de cognoféend. & curand. corp. hum.affe&lib.).— Tenia grifea, tænia lata, Vallas (Zooph.). Tenia vulparis , éftulis lateralibus geminis.— Tænia lata ,ofculis lateralibus folitaris. Lin. mæus (Syff. Nat, part, IL. ). ! (no) Wermis cucurbismus. Plater‘(loc. cit.). Ténia fans épine ; ver cucur- bitaire. Andry (loc. ci. ).—Ténia à anneaux longs: Bonnet (loc. cir, ), — Vermi cucurbitini. Vallifneri (Nuove Offervazioni ). — Tænia fècunda. Leclerc (loc, cit.) — Tœnia cucurbitina. Vogel (Loc. cit.), — Tænia cucurbi- tina. Pallas ( Loc, cit.) — Tænia folium , ofeulis marginalibus folirariis, Linn, (loc, cir.). (11) Rien n’eft plus indérerminé que la longueur de ce ver; elle eft quel- quefois prodigieule, Boerrhaave a vu un ténia de 306 aunes, & l’on trouve une obfervation pareille dans le Journal de Médecine pour l’année 1777, tom. XLVIE. Je pofsède deux énia cucurbitins, dont l'un a ÿ4 aunes, & l'autre 60. - (12) Voyez fa Lettre fur le Ténia, Journal de Médecine , année 1787, tom. LVI. (13) Je faifis avec empreflement cette occafñon de témoigner publique- ment ma reconnoiflance à M. Beaumes. L'amitié qui nous die m'ayant permis de lui faire part de mes doutes fur l'obfervation qu’il avoit publiée, d'après l’idée où j'étois avec le général des Auteurs, que le #nia à anneaux longs étoit dépourvu de ce filet ; ce Médecin , aufli généreux que modefte, m'envoya dans une bouteille le ver qui en avoit fait le fujet, & me fournit par-là l'occafion de me convaincre moi-même, En efkr, ” 146 . OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, après l'avoir étendu dans l’eau, j’apperçus très-diftinctement à l'œil nud Le El dont Ændry avoir parlé ; & l'ayant comparé avec le fil d'un zéria à anneaux courts que j'avois, je n’y trouvai aucune différence. Cela ne pa- roîtra point furprenant, fi l'on fait attention que les articulations de ces deux efpèces de vers, quoique très-différentes dans leurs corps, doivent néceflairement fe confondre vers l'extrémité fupéiieure, à raifon de leur petirefle. Je poffède maintenant trois série cucurbitins , pourvus chacun de leurs fils. (14) Ce ver s'obferve aflez conftamment dans certaines contrées , telles que l'Allemagne, la Hollande , l'Ukraine. [left beaucoup plus commun à Scockholm, en Rule, en Finlande, qu'a Upfal & en Suifle. Les Hollan- dois, ainfi que le remarque M. Rofen (loc. ci. ), y font fi difpofés , que | fur deux fujets vermineux, ily en a un qui ale ténia , tandis qu’en Suiffe, il n'y en a qu'un fur dix, Au rapport de M, Haffelquitz( Voyage en Paleftine), ce ver attaque un gros quatt des Habitants de l'Egypte & du Caire; & M. Bourgeois obferve que le #ria à anneaux courts {e rencontre plus or- dinairement en Suifle, à Bâle , &:d@hez les Habitants du bord du Rhin & des autres fleuves d'Allemagne , que par-tout ailleurs. (15) Fabrice de Hilden ( cent. II , obferv. 73) a vu le ténia fortir fpon- tanément & à plufieurs reprifes fur la fin du printemps. «— M. Faxe (Obferv. des Médecins des Provinces de Suède ) nous ditque les mois de Septembre & d'Octobre font ceux où les Habitans de Biærneborg en fonc les plus tourmentés. — Leclerc (Hiff. lac. lumb. , cap. XV) rapporte auffi avoir vu fortir ce ver une ou deux fois l’an à des époques réglées, fans ce pendant déterminer le temps, — Enfin, Rofen (Loc. cit. ) oblerve que le dé- clin de la lune & fon renouvellement font les temps où ce reprile fe fair le plus fentir ; & l’on trouve chez M. Zimmermann (Traité de l'expérience }, lobfervation d’une femme, qui , aux derniers quartiers de la lune , rendoic plufieurs portions de ténia. (16) Morgagni eft un des premiers qui ait obfervé le larmoiement chez les fujets attaqués du ténia: Depuis cet homme célèbre , aucun Auteur, que je fache , n'avoit fait mention de ce fymptôme. Cependant M. Gouan, qui a eu occafion de l’obferver affez conftamment, le regarde comme un figne prefque afluré , & qui ne laifle aucun doute de la préfence de ce reptile, lorfqu'il fe trouve joint à d’autres. Parmi les diféreniténiaires que j'ai vus, ce figne ne s’'eft préfenté à moi qu'une fois; c’'étoit chez une fille de 1 fans attaquée du zénia cucurbiuin. (17) Nous favons que la dilatation extrême de la prunelle eft un des fignes les moins équivoques de la préfence des lombrics, & tous les Pra- ticiens s'accordent à regarder aujourd’hui ce figne comme un des moins fautifs. Les obfervations de MM. Monro & Camper ont mis cette vérité hors de tout doute, & l'expérience journalière la confirme, Je re- : À L L' LS D 117 l i SUR LHIST. NATURELLE ET LES ARTS. 147 marquerai cependant que ce fymptôme n’accompagne pas toujours les affeions vermineufes , & qu'il manque que/quetois. (18) Ann. 1764 , tom, XX. (19) On trouve dans M, de Haen (Rar. Med. tom. VII ) Y'obfervation d'un enfant de 12 ans, qui, après avoir été tourmenté pendant quel- que temps par le ténia , parut en être délivré par l’excrétion de différentes portions; mais au bout de douze ans , il commença à éprouver les mêmes fymptômes que das la première époque. = Les Médecins de Paris (T rai tement contre le Fénia déjà cité) rapportent aufli l'exemple d’un ténia qui fortit en grandes portions , après avoir incommodé un certain temps, & qui fe fit reflentir de nouveau , après avoir refté trois ans fans donner aucun indice de fa préfence. Mon père.a fait rendre , en traitant ure fièvre putride, un renia cucurbitin que le malade portoit depuis trenre ans, n'éprouvant que de petites coliques pâr intervalles | rendant alors lus où moins de vers cucurbitins, & confervant d’ailleurs tout fon em- Danbéite Il reftoit un ou deux ans {ans rendre de vers, & fans éprouver de coliques , après lequel temps la colique fe faifoit reffentir, & ces vers reparoifloient. [1 fut dans cetre alternative de tranquillité & de fouffrance légère pendant trente ans; il eur feulement une fois un intervalle de cinq ans , pendant lequel il n'éprouva aucun reflentiment de fon ancienne in- commodité. Le malade guérit complettement de fa fièvre putride ; mais les excès en vin le difpotèrent à l'hydropifie, dont il mourut huit ansaprès, — J'ai fous les yeux , dans le moment préfent , une jeune fille attaquée du ténia cucurbitin ; qui eft délivrée des attaques de coliques vives que ce ver lui occafonnoit , depuis qu’elle en a rendu 8 à 10 pans. Elle n’eft cependant point guérie, parce qu’elle n'a point fait le fil, (20) Eï qui hoc arimalculum habet , toto quidem tempore nihil horrer- dum accidir; .....,: mortem autem non infert , fed ad fenc&tutem ufquè co- mitatur. — W'andoeweren fait également mention d’une Dame qui rendit un ténia aflez long , fans qu'aucun fymptôme fâcheux eût précédé fon ex- clufion. =— L’obfervation que nous avons rapportée dans la note ci-deflus, de cet homme qui n’éprouva , pendant trente ans qu’il porta Le ténia, que des coliques lévères, & à intervalles très-féparés, eft une preuve de ce que nous avançons, — J'ai fait rendre un ténia à anneaux courts à un fujet âgé de 28 ans, qui avoit fait plufieurs voyages en Suiffe , qui n’avoit pour tout fymptôme qu'un appétir décidé, la face plombée , & de petites cliques par intervalles. — J'ai également connu un jeune Médecin Génevois, atta- ué du ténia, qui en étoit à peine incommodé, — M. Peniffor, Médecin x Montpellier, a été confulté par une Dame qui portoit un #éria cucwr- bisin, & qui. malgré cela , étoit très-crafle, très-fraîche , & nourrifloit un enfant, qui jouifloit de la meilleure fanté. (21) Le danger n'eft pas fi grand , dit Senert (lib. JET , part. 2, G@. x, chap. V), « Si rulla occafio accidat ob quan latus vermis moveatur aut irri- 148 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, » setur : nam fi æger , autmotu aut exercitio delinquat , aut viflum contra- >» rium ufurpet, aut medicamenta affumat ; aut humor aliquis in inteflinis. » gencretur, mmulfa mala , imd ipfam mortem , inferre poteff; & nonnullos » hydrope & atrophié ab hoc verme mortuos effe expertentia docuit ».— On croit , dit M. Lieutaud ( loc. cir. ), que le ténia peut vicillir avec l'homme, fans caufer de grandes incommodités; mais outre les convulfons qu'il peut exciter , iljette dans la fièvre lente, le marafme, la boufiflure, l'af cite , la tympanite, &c. &c. : (22) Vandermonde, Journ. de Méd., tom. VI. (23) On trouvé parmi les premiers le mercure doux , le turbith miné- ral , le féné, la rhubarbe, Le jalap, l’éfule , la fcammonée, la gratiole , la coloquinte, la gomme-outte, &c.; & parmi les feconds, la racine de gentiane , de mürier, de gingembre, de zédoaire , la rhue, l'aloës, la fabine , la coralline de Corfe , la racine de fougère male & fe- melle, &c. &c. (24) Telles font les huiles d'amandes douces, d'olives, denoix , de rhue, de ricin. (25) Diofcoride ( Mater. Med. , interpret. Cornario , lib. 16, cap. CL XIII) confeille , pour chaffer Le ténia, la racine de fougère (4 gros), aflociée à la fcammonée (40 grains) ou à l’ellébore noir: il exige fur-tout qu'au- paravant on ait pris de l'ail. — Plarer vante des pilules faites avec laloës , la racine de gentiane , le diagrède & le fuc d'abfynthe. — Le Doéteur de Lille fe fervoit de l'extrait d’ellébore noir combiné avec le vitriol de Mars. — Rothen , Werlhof, Kalischmid , eftimoient beaucoup un mélange de jalap (4 onces), de uraine de perroquet (2 onces) , de fcammonée, choilie ( demi-once), & de gomme-gutte ( 2 drachmes) , digéré dans trois demi-fetiers d'efprit-de-vin rectifié fur l'écorce de citron ou autre aro - mate analogue. — La gomme-gutte elt regardée par Binet (EN. & Obf. de Médecine ) comme un remède des plus fürs, — ARofen. (Loc. cit. ) vante beaucoup des pilules faites avec l'extrait de tanaifie , d’affa-fœtida , de Jemen-contra ( 36 grains de chaque) , le vitriol martial ( 12 grains ), & fuffifante quantité de miel pour dix pilules , d’un grain chacune , prifes de trois entrois heures. Cet Auteur fait encore l'éloge d'une poudre com- pofée de charbon de terre, de poudre à tirer (1 drachme & demie de chaque), & de poivre pilé (6 grains), divifée en trois dofes égales, prifes pendant trois jours de fuite dans une petite quantité d’eau-de-vie , & rendue plus énergique le quatrième.ou le cinquième jour par le jalap, lorf- qu’elle opère peu. — Le Docteur Mirer, & d'après lui Var-Swieten, ont vu des bons effets d'un mélange de fcammonée ( 12 grains), de jalap (6 grains), de curbith minéral (2 grains), dont on faifoit, avec l'efprit-de-vin, cingbols pour deux dofes.— L'huile de pétrole &c de térébenthine (depuis 20 gouttes jufqu'à demi- drachme } , eft, dit M. Aafelquitz DA ; #. SUR L'HIST. NATURELLE ET.LES ARTS. 149 M. Haffelquift (Voyage en Paleftine), un des remèdes les plus efficaces, & c'eft le feul qu'emploient Les Habirants de Biærnerborg pour fe délivrer du téria. — Dans la Bothnie occidentale , le Peuple eft dans l’ufage de prendre , pendant feprt jours de fuite , le matin à jeun, un mêlange de parties évales de lait & de goudron. — M. Murray donne , d'après la Pharmacopé: do- meftique Suédoife de Darelius , la formule d’un élixir fait avec la racine de gentiane rouge , l'aÿa-fœrida où la myrrhe , le camphre , l'écorce d’o- range sèche, le caftoreum, l'extrait d'aloës & le fafran (1 drachme de chaque ) ; le tout broyé & digéré pendant fix à fept jours dans $ livres d’efprit-de-vin & 2 livres de vin de Portugal. Rofén rapporte, dans les Mémoires de l’Académie de Stockholm, année 1747, l’oblerva- tion d'un homme , qui fut délivré du ténia par cet 'élixir, & l'exemple fingulier d’un enfant, qui, en ayant pris pour fuer dans une forte dofe d'eau-de-vie, rendit tout-à-coup une quantité prodigieufe de ténia, Il dit encore (ibid, , année 1768) avoir fait rendre un ténia entier à une Dame à laquelle il avoit confeillé de boire les eaux de Spa & de manger de l'ail à morceaux. — Les Médecins de Berlin (Colleét. faite à Berlin de différentes pièces pour les progrès de la Médecine, &c., 1773-1774, tom. V & VI) ont vu de bons effets d’une eau minérale faite avec le tartre vitriolé avec excès d’acide & le vitriol de Mars dans l’eau, Ils ont auffi vu réufir le vin pris avec excès. — La décoction de racine de fougère mâle (2 onces), & de régliffe (1 pincée), dans deux pintes d'eau com- mune réduites à une, à laquelle, par intervalle , on fubititue les pilules de Bontius à la dofe de 12 grains , eft encore un remède employé par cer- tains.— Wieuffens fe fervoit d’un mêlange de fel d’abfynthe (1 drachme) , ou de fel de tartre (2 fcrupules ) , de gomme-gutte ( depuis 8 grains jufqu'à 12), & de manne (2 onces ) ; il faifoit prendre la veille trois cuillerées d'huile de noix & une cuillerée d’huile de rhue. Ce remède a réuñi entre les mains de MM. Fargcon & Peniffon, Médecins de Montpellier. Ce dernier lui a vu opérer l’expulfon d’un ténia cucurbitin. — Storck confeil- loitun mélange defel polychrefte, de poudre de jalap, de racine de grande valériane: & d'oxymel fcillitique. — M. Richard (Manière de connoître & de traiter les maladies qui attaquent le peuple ) a employé avec fuccès un bol pris en deux dofes , fait avec la gomme-outte (10 grains), les pe- pins de coloquinte (3 pepins) , une amande amère, & fufhfante quantité de fyrop d’abfynthe, pour une dofe que le malade répétoit de huit en huit jours , jufqu’a ce que Le ver füt expulfé, — Le {pécifique de M. Rou- gères ( Journal de Médecine, année 1766 , tom. XXIV }) confifte dans un purgatif fait avec le féné (2 drachmes ) , la rhubarbe & le /émen contra (1 demi-drachme de chaque ), auquel on ajoute, aprèsla colature, l'alkali de tartre (15 grains); il le fait fuivre de 2 bols, l'un fait avecle mer- cure doux , la rhubarbe ( 1 fcrupule de chaque ), le diagrède (12 grains}, & fuffifante quantité de fyrop d'abfynthe; l’autre avec le mercure doux Tome XXII, Part. I, 1783. FÉVRIER. V jo OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, (1 fcrupule), le diagrède (demi-ferupule), la racine de fougère male, d'écorce de mürier (1 ferupule) , & {ufifante quantité de {yrop d’agaric compofé. — Celui que M. Rathier a configné dans le même Journal (année 1768 , tom. XX VII) , eft compofé de deux bols pris matin & foir, faits avec la fabine (20 grains) , la graine de rhue (15 grains), le mer- cure doux (10 grains); le tout incorporé dans fufhfante quantité de fyrop de pêcher: demi-heure après chaque bol , le malade prend un go- belet de vin, dans lequel ont infufé pendant deux heures vingt noyaux de pêches, — M. Laborde a également publié ( même Journ., année 1769, tom. XXXI ) un fpécifique ue dit être très-efhcace. Il eft compofé d’un bol pris pendant trois jours de fuite au renouvellement de la lune, fait avec l'aloës hépatique (8 grains), Les trochifques alhandal (3 grains), l'a- guila alba , les trochifques de myrrhe ( 10 grains de chaque) , & le fyrop de pêcher. L'effet de ce bol eft foutenu par une décoétion de pourpier & de racine de fougère mâle. —M. Zagère donne aufli (ibid., année 1776, tom. XLV), comme une méthode très-aflurée, de faire prendre la veille un lavement au malade avec la décoction de figues grafles, & de lui faire avaler le lendemain matin à jeun un mélange de petite valériane { 1 drachme ), & de coquilles d'œufs récemment porphyrifées & calcinées (20 grains ); de le purger le quatrième jour avec un bol compoñé de mer- cure doux ( 10 grains), de panacée mercurielle (4 grains ), de diagrède foufré (12 grains), de coquilles d'œuf calcinées & porphyrifées (20 gr.), & fuffifante quantité de fyrop de pêcher, & de lui faire boire , deux heures après ce bol , une tifane faite avec le féné (demionce), & l’alkali fixe de taitre (grains), dans deux livres d’eau commune; le foir il répète le lavement. Îl recommande de commencer Le traitement par l'émétique chez les fujets vigoureux, & qui préfentent des fignes de cacochytie. La poudre vermifuge doit être pour l'ordinaire réitérée pendant trois jours, & le purgatif après. Les dofes font pour un adulte , & doi- vent être variées felon l’état & l’âge du malade. On trouve dans ia Ga- zette de Santé (année 1781 ,n°. SO), que ce traitement a réufli à M. Martin, chez un fujet attaqué du renia cucurbitin : au lavement de figues grafles, confeillé par M. Lagène , il en avoit fubftitué un fait avec l'infufion de féné & l’alkali de tartre. Madame Nouffr employoit dans le traitement de cette efpèce, chez Les fujets d’une forte complexion, des pilules faites avec le diagrède & l'extrait d'ellébore noir (1 drachme de chacun), le kermès & la graine de tilli (1 fcrupule de chaque), & la gomme- gutte ( 1 drachme & demie ); elle méloit le tout, & en formoit des pi- lules de 4 grains, — J'ai connu un Empyrique , qui fe difoit pofféder un fecret pour détruire le ténia, dont les inzrédiens étoient la racine de fou- gère mâle, la coralline de Corfe, l'iris de Florence ( 1 drachme de chaque), la racine ou barbe de poireaux (1 poignée), & le miel (2 cuillerées); il faifoit bouillir Le rout dans 8 onces d’eau réduites à la moitié ; & après SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 15ç1 . avoir coulé le mêlange , le malade l’avaloit. Il avoit foin de le préparer . Auparavant par un ou deux purgatifs. — Enfin, nous favons que MM. de Haller & Bertrand étoient l'un & l’autre poflefleurs de fpécifiques , qui, à ce que je crois, n'ont point été publiés ; celui de M. de Haller éroit fur- cout eMicace, dit M. Bourgeois, contre le sénia à anneaux longs; & M. Bertrand , fans déterminer l'efpèce, aflure, d'après fa propre expérience, que le fien faifoit fortir le ténia dans l'intervalle de quatre heures & demie. Nous avons à regretter que de pareils fpécifiques foienc reftés inconnus, & le filence de ces deux Savants a de quoi nous furprendre. (26) M. Murray ; qui a donné la formule de ce fpécifique, d'après un Médecin, à qui Herrenfchwand avoit communiqué , ne fait entrer dans fa compoftion que la gomme-gutte à la dofe de 10 à 20 grains, & le fel d'abfynthe cryftallifé , depuis 15 grains jufqu’à 20. Cette dofe, qu'il dit être celle des adultes, excite pour l'ordinaire le vomiffement, ou poufle par le bas : deux heures après l'exhibition de cette première dofe , on en répète une pareille, & ainfi de fuite toutes les deux heures, jufqu’à ce que le malade ait rendu le ver. — Vogel ( de cognoftend. & curand. Corp. Hum. Affe&. ) prétend que l’Auteur ajoutoit à ce mélange du charbon de bois de frène.— Selon quelques Auteurs, la gomme-outte eft la bafe de ce fpécifique ; felon d'autres, le fer & l’étain en font la partie principale : il en eft enfin qui veulent que ce foit le mercure. C’eft ce qu'aucune ana- lyfe n'a pu conftater à M. Model. Le ver de l’efpèce des lombrics, defféché, mis en poudre, & affocié , felon les circonftances , à des amers ou à des purgatifs, eft encore regardé par certainscomme le remède dont le Doc- teur Herrenfchwand fe fervoit. Quoi qu'il en foit, la formule la plus géné- ralement adoptée, & qui a eu les fuccès les plus conftants, eft celle qui fe trouve dans le Traité des Maladies des Enfants, de Rofen ( pag.427), ou dans la Matière Médicale de Bergius (tom. IT, pag. 847). Les ingré- diens qui La compofent , font la racine de fougère mâle , depuis 15 grains jufqu'à 30 ; la gomme-outte , depuis r jufqu'à s; & la gratiole, depuis $ jufqu'à 12. On divife le tout en trois dofes ; & après avoir fait précé- der un purgatif compol£ de 10 grains de-mercure doux & tout autant de diagrède fulfuré, on donne une dofe de la poudre prefcrite. Pour l'ordi- naire , elle fait vomir & lâche le ventre ; deux heures après , on en donne une feconde , qui purge vivement & fouvent chaîle le ver, Lorfque cette feconde dofe eft fans effet, une troifième , donnée à une égale diftance, opère prefque toujours l'expulfion. (27) Madame Nouffer, fans autre préparation , donne la veille une foüpe faite avec 2 ou 3 onces de beurre frais, 2 onces de pain coupé à petits morceaux, & fufhfante quantité de fel dans 1 livre & demie d’eau ; deux heures après, le malade prit un bifcuir moyen dans un verre de vin blanc pur ou coupé avec l’eau. S'il n’a pas été à la garde-robe ce jour-là, ou s’il eft conftipé, il prend un lavement avec les feuilles de mauve, de Tome XXII, Part. I, 1783. FÉVRIER. V2 152 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, guimauve , le fel & l'huile d'olives. Le lendemain matin, huit à neuf heue res après la foupe, il avale 3 gros de racine de fougère male en poudre fine, délayée dans 4 à f onces d’eau diftillée de fougère ou de Reurs de tilleul , où même d’eau fimple. Il n’eft pas indifférent d'employer telle ou telle efpèce de fougère. Celle qu'il faut conftamment préférer , comme la plusefficace , eft la fougère mâle, fix ramofa dentata. C. B. Pin. 358; Tourn. Inftit. 536. Polypodium filix mas, Lin. Spec. Plant. 1$ 51. Mal- à-propos on lui fubftitue quelquefois le Polypodium aculeatum , le Po/y- podium flix fæmina , & le Pteris aquilina de Linné, quoique cette der- nière , qui eft la fougère femelle, jouifle à-peu- près des mêmes propriérés que le mâle qu'elle ne vaut cependant pas ). Deux heures après, le malade prend un bol fait avec 10 à 12 grains de panacée mercurielle, fublimée quatorze fois, tout autant de réfine sèche de fcammonée d'A- lep ou de jalap, de 4 à 7 grains de rte fraîche; le tout incor- poré dans 2 fcrupules ou 2 fcrupules & demi de confeétion d'hyacin- the, Ce bol pris, le malade avale une ou deux tafles de thé verd , fe pro- mène, & en continue l'ufage dès que les évacuations commencent à s'é= tablir, jufqu’à ce que le ver foit rendu : alors , & pas avant, il prend un bouillon, qui eft bientôt fuivi d’un autre, ou d'une foupe, s'il la préfère; il dîne & foupe ce jour-là légèrement , fe repofant par intervalles , après s'être un peu promené. (Voyez Journ, de Phyf. 1775 , Tom. VI, pag. 460). Dans tous Les fujets , ceçte méthode n’expulfe point le ver avec la même promptitude. On en trouve qui ne gardent pas le bol, ou qui n'en font as aflez purgés. Dans ces cas, on en foutient L'effet par le fel d'epfom ou de fedlitz diflous dans un verre d’eau bouillante, depuis 2 gros jufqu'a 8. IL eft rare alors que le ver ne forte pas. Il tombe pour l'ordinaire en pe- tits pelotons ; d’autres fois fe trouvant engagé dans des glaires tenaces, il file. Dans ce dernier cas , le malade doit patiemment refter à la garde- robe, fans le tirer, & boire du thé léger un peu chaud. Lorfque, mal- gré cela, il ne veut point fortir, il a recours alors à une dofe de fel d’epfom ou de fdlitz, fans changer de fituation, jufqu'a ce que le ver oit rendu. Il eft rare, dit Madame Nouffer, que les malades qui ont gardé le fpé- cifque ne rendent point le ver avant l'heure du diner. (Je l'ai vu rendre une heure & demie après le fpécifique pris ). Ce cas particulier a lieu, lorf que le ver tué refte en gros pelotons dans les grosinteftins, de façon que les matières ordinairement plus claires fur la fie la purgation , paflent à travers , & né l’entraînent pas. Le malade peut alors diner; & l’on a ob- fervé que le manger, joint à un lavement , concouroit à la fortie du ver. Quelquefois il fort par l’attion feule du fpécifique , avant que le malade ait pris le bol; alors il fufñt de donner les deux tiers de celui-ci, ou de fubitituer le fel. Les chaleurs , le mal-aife qu'éprouvent les malades pendant l'action du ! ’ SUR L'HIST. NATURELLE ET:LES ARTS, 153 remède, avant ou après une forte évacuation , ou lorfqu'ils font prêts à rendre le ver, ne font point dangereufes : le vinaigre feul , refpiré par le nez, les diflipe. Lorfque les malades ont vomi le fpécifique & le bol, ou n'en ont gardé qu'une partie , il eft à craindre qu'ils ne rendent point le ver ce jour-là; alors il faut leur faire reprendre le foir la foupe , le bif- cuit, la boiflon , & fuivant les circonftances le lavement. Sile ver ne fort pas dans la nuir, on donne le lendemain de bon matin une nouvelle dofe de fougère , deux heures après 6 à 8 gros d’un des fels fufdits, & on dirige du refte le malade comme le jour précédent, à l'exception du bol qu'on fupprime. Les grandes chaleurs diminuent un peu l'action du remède, Madame Nouffér préféroit de l’adminiftrer dans le mois de Sep- rembre; & quand elle n’avoit pas le choix de la faifon, elle le donnoit de Ra matin (Traitem. contre le Ténia ). Il eft très-vraifemblable que Le fpécifique dont M. Pouteau , déjà cité, célèbre Chirurgien de Lyon, {e fervoit pour chafler le ténia, étoir le même que celui de Ma- dame Nouffer. Ce qui me porte à le croire, c’ef: qu'il préparoit comme elle fes malades par des foupes chargées de beaucoup de beurre ; que d’ail- leurs fon remède agifloit à-peu-près dans le même temps; qu'il caufoic des naufées, des maux de cœur, de légers fpafmes , & produifoit enfuite des évacuations marquées, effets: ordinaires de celui de Madame Nouffer. Ils avouent de plus l'un & l’autre que leur fpécifique agit beaucoup plus fürement fur Le énia à anneaux courts , que fur Le cucurbitin. Cle T'Editeur des chef d'œuvres de M. de Sauvages, d'après des effais faits fur des chiens attaqués du ténia, regarde la-petite efule (euphorbia exigua, Linn,) comme le principal ingrédient du fpécifique de M. Pouteau. I] aflure que ce dernier l’avoit acheté d’un Suite , à qui le hafard avoit fait connoître la propriété qu’avoit cette plante de chafler ce ver. Un chien qu'il avoit en ayant rendu un tout entier , peu de temps après avoir mangé de cette plante, il profita de cette découverte, & fit fur l'homme des expériences qu'un fuccès marqué couronna. (28) Ce Médecin , qui dit avoir vu réuffir fa méthode chez un jeune homme ‘de 20 ans, atraqué du snia, avant que celle de Madame Nouffer fût publiée, fait prendre la veille un lavement préparé avec l'eau de fontaine & r gros de favon. Le lendemain il donne à jeun 1 gros de racine de fougère mâle porphyrifée & délayée dans un verre d'eau de pourpier. Il fait continuer ce remède pas cinq jours de fuite ; après uoi il joint à cette poudre des bols faits avec l'aguila-alba, le jalap , la rhubarbe & le miel. Il donne pour boiffon ordinaire la racine de mürier en décoction. (Mém. de la Éciéré Royale de Méd. , année 1776, p. 280 de l'Hift.) | ; (29) Mead & Alflon fe fervoient avec avantage d'un bol fait avec parties égales de rapure d'étain , de corail rouge , réduits en poudre très- fine, & incorporés dans la conferve de fommités d’abfynthe marine, Ils L ‘ 154 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, donnoient 1 gros par jour de ce mêlange en deux fois. — Lewis a vu fin- gulièrement bien réuflir une poudre compofée d'étain, d'éthiops minéral & de fucre. — M. Marteau a vu de bons effts d’un mélange d’oxymel fcillitique & d'huile d'amandes douces. — M. Raymond a plufeurs fois fait fortir le ténia, en confeillant de grandes dofes d’huile d'olives ou d’a- mandes douces, & en faifant prendre la racine de muürier femelle réduite en poudre à la dofe de 2 drachmes. — On trouve dans le Journal de Mé- decine (année 1756, tom. V), une obfervation de M. Gontard, par la- quelle il confte qu'un cathartico-émétique fit rendre à un homme de 4$ ans un ténia de 6 pieds. — M. Magars de Cagelles a confiné dans le même Journal (année 1768 , tom. XXIX) un fait pareil, dans lequel un mi- noratif aiguifé de ce gouttes de fyrop de Glauber, firent rejetter par le bas , à une femme feptuagénaire, un ténia. — On trouve dans les Mém. de la Soc. Roy. des Scienc. de Montpellier (tom.I, pag. 116 de YHift.) l'obfervation d'un homme, qui, après une médecine , rendit une poftion de ténia de 10 à 12 pieds de long. J'ai rapporté plus haut l'hiftoire d'un autre, qui en fut délivré par l'effec d'une tifane royale, Les eaux de Camarés l'expulfèrent aufli chez une demoifelle à qui M. Gauteron les avoient confeillées; & peu de temps après , les eaux de Balaruc lui en firent fortir encore plufieurs portions, (30) Ce Médecin donnoit aux malades, à jeun, ÿ onces d'huile de noix ; & deux heures & demie après, 4 onces de vin d’alicante. Il foute- noit ce remède jufqu’à l'exclufion du ver, qui d'ordinaire avoit lieu après douze à quinze jours de fon ufage. [l fait mention d’une femme qui leren- dit au bout de douze jours, & d’un homme chez qui il fortit au quin- zième. ( Voy. le Journ, de Méd., ann. 1757, tom. VI). M. Binet ( ibid. année 1761) a aufli fait rendre par cette méthode à une femme grofle, un fénia en treize jours. Il obferve que l'huile de noix excite fouvent des naufées que le vin d’Alicante diffipe dans Pinftant. Il convient donc , dans des cas pareils, de faire prendre le vin beaucoup plutôt que ne le confeille M. Lachapelle; quelquefois même il eft utile de Le faire fuivre de très-près lhuile de noix, & même de donner au malade de l’eau ou du fuc de men- the. Ce dernier fecours a diflipé des naufées qui avoient réfifté à plufieurs bons remèdes. M. Beaumes a vu le remède de M. Lachapelle opéreren vingt- quatre heures, & produire l’exclufñon de trois aunes de rénia cucurbitin. (Ibid. , ann. 1781, tom. LVI). (31) M. Odier prefcrit fimplement 1 ou 2 gros de racine de fougère mâle en poudre , & fait prendre immédiatement , ou quelques heures après, 2 ou 3 onces d'huile de ricin. Il foutient l’ufage de ces deux remèdes jufqu’à ce que le malade ait rendu le ver. J'ai conftamment obfervé qu'en combinant la racine de fougère male avec la coralline de Corfe & l'huile de ricin , on obtenoit un remède beaucoup plus für :aufli fuis-je dans l’ufage de donner , Le matin à jeun, depuis demi-drachme jufqu'à une drachme SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 15 de racine de fougère male , & tout autant de coralline de Corfe en pou- dre dans une eau appropriée , & immédiatement ; encore mieux deux heu- res après, 2 ou 3 onces d'huile de ricin, délayée dans un demi-gobeler d’eau fucrée , & une cuillerée d’eau de menthe diftillée, Je fais continuer ce remède tous les jours , jufqu’à ce que Le ver foi forti , ce qui arrive quel- quefois’au fecond , au troifième (comme j'ai eu occafion de le voir), quel- quefois pourtant au fixième , feprième & au-delà, Cette méthode eft d'au- tant plus précieufe , qu'elle eft également efficace contre le sénia ordinaire & contre le ténia cucurbitin. . On connoît deux procédés, dit M. Canvane ( Differt. fur l'Huile de Ricin, traduite de l'Anoloïs par M. Lachapelle ) , pour extraire l'huile de ricir , autrement dite huile de palma-chrifli ou de caflor. Le premier, qui eft le meilleur, confifte à cueillir les graines duricin (ricinus foliis pelta- tis, fubpalmatis. Linn. ); à les piler, aprés les avoir dépouillées de leurs cofles, dans un mortier de marbre, ou à les faire moudre à un moulin : on enveloppe enfuite cette mafle, après l'avoir fait deffécher jufqu'à un certain point à une chaleur douce, dans un fac de toile neuve & forte: on la met à la prefle entre deux plaques de fer, & on tire par expreflion l'huile qui coule abondamment dans le vaiffeau deftiné à la recevoir. Dans le fecond procédé, après avoir dépouillé les graines de leur enveloppe, les avoir pilées & renfermées dans un fac, au lieu de les mettre fous la prefle, on les fait bouillir ainfi enveloppées dans un pot avec fept à huit fois leur poids d'eau commune, L’ébullition fépare l'huile ; elle furnage , & on l’enlève avec une cuiller, tant qu'il ën paroît à fa furface. Cette der- nière méthode; quoique fourniflant une plus grande quantité d'huile que la première , eft cependant moins eftimée, parce que l'ébullition dépouille la graine d’une partie de fa douceur , & difpofe l'huile à rancir. Cette huile, pour être bonne , doit être douce & fans äcreté; lorfqu'elle eft récente, elle eftun peu louche, tandis qu'elle acquiert par Le temps une eouleur tranfparente & fafranée : elle vaut alors moins, & celle qui eft fraîche doit toujours être préférée, Cette huile, comme celles de cette claffe, n’eft foluble ni dans l'efprit- de-vin , ni dans l’eau ; mais elle le devient par certains intermèdes, tels que lefucre, le miel, les sommes, les mucilages : aufli la meilleure mé- thode de la combiner intimément avec le véhicule , eft de faire d’abord un mucilage avec la gomme arabique ou la gomme adragant, ou même le fucre & l’eau , & d'y ajouter l'huile peu-à-peu : en triturant dans un mor- tier Le mélange, ilen réfulte une émulfion parfaitement blanche, à la- elle on peut ajouter telle quantité que l’on veut d’eau de menthe, ou de autre liquide, fans que l'huile fe fépare. (32) La méthode de M. Gouan confifte à faire prendre le foir au ma- lade un julep fait avec 1 once de fyrop diacode, 1 demi-once d’eau de fleurs 156 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, d'orange & de menthe, & 1 cuillerée d'huile de ricin ; à lui faire avaler le lendemain matin 2 drachmes de racine de fougère mâle en poudre dans l'eau de fleurs d'orange, à deux ou trois heures de diftance. Si le malade ne fe plaint d'aucune pefanteur d'eflomac, on répète la même dofe de fougère, à laquelle on aflocie , felon l'âge, 8 à 10 grains de jalap. Le foir, on donne le même julep pendant tout le traitement; & chaque troi- fième ou quatrième jour , fi le ventre n'eft pas Libre , on fait prendre une fimple tifane royale. Par ce traitement, M. Gowan eft parvenu à chaffer le ténia quelquefois au bout de neuf jours. Il n’a jamais été obligé de donner plus de 4 drach- mes de racines de fougère , tandis que dans les autres méthodes, il faut quelquefois en porter la dofe jufqu'à 2 onces. Ila auffi conftamment ob- fervé que les malades ne fe plaignent pas autant des douleurs , qui d'or- dinaire Les tracaflent le matin à jeun, & qu'après quelques jours ils n’en reffentoient prefque pas. Ces changemens , il les attribue bien plus au narcotique qui entre dans la compofition du julep, qu'à la fougère. Il penfe que le premier agiffant fur Le ver, & lengourdiffant , en fufpend les mouvemens ; & il eft porté à croire que, dans cet état d’engourdiffement, un fimple purgatif, fous forme de bol ou d’opiat , fansle concours de la fougère , peut fuffire pour en déterminer l'exclufon. Il regarde comme effentiel d’aflocier aux préparations opiatiques les eaux cordiales, tant pour éviter les cardialgies & les défaillances que les narcotiques caufent fouvent, que pour augmenter l'effet vermifuge. Enfin , ilconvient, dit-il, de donner la préférence à cette méthode, toutes les fois que les malades font tourmentés d’infomnies, de mélancolies ; qu'ils font très-mobiles , & que la fenfibilité des entrailles eft exquife. Dans ce dernier cas même, il faut n’employer que les vermifuges combinés avec les opiatiques , fans y joindre les purgatifs, même à très-petite dofe. (33) Rat. Medend., tom. VI. (34) Le remède qui avoit été employé dans ce cas, étoit celui que Îe Doéteur Niter propofe , & dont nous avons déjà parlé. Les ingrédiens qui le compofent font la fcammonée , Le jalap & le turbith minéral.( Voy. la note, n°. 25, page 148 ). : (35) Ann. 1780, tom. LIV. (36) Traitement contre le ténia déjà cité, (37) Année 1776 , tom, XLVI. (38) Journal de Médecine , année 1757 , tom. VI.— 1761 ,tom. XV. — 1781, tom. LVI. (39) Mémoire fur l'efficacité de l'huile de ricin contre le ver folitaire, imprimé à Léipfck dans le Recueil des Differtations choilies à l’ufage des Médecins cliniques, part. III. : (40) Voyez la note n°. 25 , pag. 148. (41) Traitement contre le ténia déjà cité. NOUVELLES LITTÉRAIRES. == ne ———— NOUVELLES LITTÉRAIRES. j 2, HRCERCR PAPAS RARE univerfelle, c'efl-a-dire , l'art de donner aux Plantes des noms tirés de leurs caraülères (x) ; noùveau Syflême , au moyen duquel on peut de foi-même , fans Le fecours d'aucun Livre, nommer tou- tes Les Plantes qui croiffent fur La furface de notre globe. À la publica- sion de ce Syflme, on joint les Figures , les Deftriptions Les plus métho- diques , l’'Analyfe, les Propriétés, les Wertus, l'Ufage , l'Etymologie 6 la Synonymie de toutes les Plantes de la France. Ouvrage propofe par Souféription , par M. BERGERET, Chirurpien, Démonfirateur de Bo- Lanique, PROSPECTUS. Livré par goût & par état à l'étude de la Botanique , enfeignant pu- bliquement cette Science , j'ai fouvent été témoin des erreurs auxquelles mes Difciples fe trouvoient entraînés par la leéture de certaines defcrip- tions fouvent en contradiction avec la Nature, & qu’on trouve dans des Ouvrages imprimés de nos jours, « Les défagrémens qu’ils éprouvoient dans ces circonftances, me firent {entir la néceffité d'un Ouvrage qui, en les inftruifant , les empêchàt de tomber dans aucune méprile. Je m'y livrai tout entier, & j'entrepris en 1776 la defcription de tou- tes les plantes qui croiffent aux environs de Paris. Ce travail me conduifit à la formation d’un fyflême: je gpruriqui à mes Difciples; ils pa- rurent m'en favoir gré. * Dans différentes herborifations , leur ayant mis entre les mains les principes de mon fyftème, j'ai eu la douce fatisfaétion de les voir le bien faifir, 6 j'ai vu avec plaifir que, par le moyen de ces mêmes ‘principes ; ils parvenoient fans peine à me nommer phytonomatotechniquement tou- tes Les plantes qui fe trouvoient fous leurs pas. Les démonftrations de joie de leur part s'étoient point équivoques ; ils fe voyoient pour ainf dire créateurs de noms, & cette joie devenoit d'autant plus fenfible, qu'ils reconnoifloient la jufteffe de l'application des lettres aux différents carac- (1) En 1776, parut en Allemagneun Ouvrage femblable, {ons le nom de Genere Plantarum , vocabulis charatteriflicis definit:, fans nom d’Auteur, dont nous avons donné la notice dans notre Journal 1781, tom. XVII, pag: 404: Tome XXII, Part. I, 1783. FÉVRIER. X 158 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, tères, par la conformité de ces noms avec ceux que j'avois déjà im- pofés. à Ces premiers fuccès ont fait defirer la publication de mes defcriptions , & de ma mérhode ou de mon fyftêéme. Je n'ai différé de fatisfaire à ces defirs, que parce que je n’avois pas donné à ce travail toute la perfec- tion dont je le voyois fufceptible, Je defire ardemment qu'il foit utile ; par fon moyen, j'ouvre une nouvelle route à l'étude de la Botanique. Le temps , Les circonftances & les gens plus favants que moi, la rendront fans doute un jour plus aifée, plus facile à parcourir. Jufqu'à préfent on a fait imprimer différentes mérhodes , qui condui- fent plus ou moins fäcilement à la connoiffance des plantes; mais, quelles que foient ces méthodes & quelque bien qu'on les pofsède , elles ne difpenfent point les Etudians d'apporter avec eux l'Ouvrage dans lequel les plantes font rangées felon les principes de l’Auteur qu'ils étudient. Ces Ouvrages font la plupart très-volumineux , & par conféquent très- embarraflans. Quiconque poflédera les principes de ma aa ; pourra aifément , fans le fecours d'aucun livre, pas même de celui qui contient cette méthode , nommer toutes les plantes qu'il n'auroit jamais vues. Mais , bien plus, cent perfonnes parlant cent langues différentes, éloi- gnées de cent lieues les unes des autres, nommeront & écriront les noms des mêmes plantes , de la même manière, que je les aurois écrits. Les principes de mon fyftème font faciles à faifir & à retenir. Ceux qui con- cernent & qui font connoître les noms des différents genres de plantes , peuvent être écrits fur moins de douze cartes à jouer. Il en eft de même des principes qui concernent & font connoître les efpèces de plantes 3 les uns & les autres feront détaillés dans l'introduction de lOuvrage que jannonce (1): jy expoferai, de la manière la plus fatisfaifante , tous les termes dont je me fervirai dans E di qui font le principal ob- jet de l'Ouvrage que j'annonce. les defcriptions feront faites felon le modèle joint au Profpeétus. , La grande quantité de planches dont cet Ouvrage doit être enrichi, ne me permet pas de me livrer aux frais de l’impreflion, fans le fecours des Soufcripteurs. Voici les conditions que je propofe. 1°. L’Auteur ne fera imprimer de fon Ouvrage que deux cents exem- plaies; en conféquence, la foufcription ne fera ouverte que jufqu'à la concurrence de deux cents Soufcripteuis, dont moitié pour les figures en- luminées, & moitié pour des figures non enluminées, 22. II fera envoyé aux Soufcripteurs tous les deux mois , à commencer du mois de Janvier 1783 , un cahier contenant douze planches, & vingt- quatre pages d'imprefion, de format in-folio. G) L'introduction paroîtra inceflamment , & fe vendra féparément. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 159 3°. Chaque Soufcripteur, pour les exemplaires enluminés, paiera #1. par année; favoir, 18 liv..en recevant le premier cahier, 9 liv. en rece- vant Le fecond, 9 liv.en recevant le troifième, 9 liv. en recevant le qua- trième , 9 liv. en recevant le cinquième , & le fixième fera remis gratis. Les perfonnes qui foufcriront pour des cahiers non-enluminés , ne paieronc que la moitié des prix ci- deflus. 4°. On donnera aux Soufcripteurs une reconnoifflance fignée de l’Au- teur ou du Libraire, dans laquelle on fera mention des différens prix pour les cahiers avec planches enluminées ou non enluminées. 5°. On nefera pafler aucun autre cahier aux perfonnes dont la Souf- cription fe trouvera remplie, qu'elles n'aient auparavant renouvellé l'a- bonnement, & configné les fommes pour l’année fuivante. 6°. L'Ouvrage fera imprimé des mêmes caraétères que le préfent Prof peëlus , & fur le même papier que les fioures. Il n'en fera tiré que douze exemplaires fur papier de Hollande, L'AUTEUR , rue d'Antin; D1DOT Lejeune, Libraire-Imprimeur de MONSIEUR, 7°, On foufcrira chez quai des Auguflins ; POISSON , Graveur en Taille-Douce , cour du Cloi- tre Saint-Honore. Nouveaux Memoires de ! Académie de Dijon, pour la partie des Sciences & des Ares , premier Semeftre, 1782. Dijon , chez Causse, Libraire , 1783. Ce Recueil de Mémoires d'une Académie célèbre , & certainement lune des plus laborieufes de l'Europe, juftife l'idée que les Savans de France & des Pays Etrangers ont du mérite des Membres qui la compo- fent, Quand eft-ce que l'émulation, l'amour de la gloire , le defir d’être utiles , réveilleront la plupart de nos Académies nationales , qui ne font connues fouvent que par les travaux qu’elles probe i à des Etrangers, & non par ceux dont elles s'occupent? L'exemple de l'Académie de Dijon doit Leur apprendre qu’elles n’ont qu'à le vouloir, qu'il fortira de leur fein des productions excellentes, des differtations intéreflantes , des découver- tes utiles, & que la République des Sciences & des Arts les regardera comme fon appui & fa gloire. Je fais les peines , les embarras ; les dé- penfes dans lefquels entraîne néceflairement l'impreflion des Recueils de Mémoires ; je n'ignore pas les traverfes que l’Académie de Dijon a éprou- vées pendant long-temps , peut-être dans la crainte que fes Mémoires ne préfentaffent des difcuilions, autant en matière politique, qu’en fait de Sciences Phyfiques proprement dites. Toutes les Académies ne peuvent pas à la vérité imprimer des Collections , dont les frais font toujours Tome XXII, Part, I, 1783. FÉV RIER. X'2 - _ 160 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, - confidérables; mais toutes ont un moyen für & aufli prompt qu'il eft poffible , de faire part au Public & à.toute l'Europe de leurs productions, par la voie de notre Journal, qui , dans çe moment , eft traduit dans plufieurs langues étrangères, & circule partout où l’on cultive les Scien- ces. Combien de fois n'avons-nous, pas fait des offres pareilles à toutes les Académies de France! combien fouvent n’avons-nous pas même reçu de réponfe! Nous aimons à croire que f elles confervent chez elles leurs travaux, C'eft qu'elles fe propofent un jour d’en former une Collection , & d’en faire part au Public, comme l'Académie de Dijon, Au refte, nous renouvellons aujourd'hui nos offres à toutes les Académies, & nous les engageons, au nom du Public, qui defire ardemment de profiter de leurs produétions, à nous adrefler leurs différens Mémoires | promettant de notre côté de mettre à leur publication toute la célérité qui dépendra 1 de nous. Ce premier Semeftre de l’Académie de Dijon contient onze Mémoi- ves , tous très-intéreflants. 1°. Recherches pour perfectionner la prépara- tion des couleurs employées dans la Peinture, par M. de Morveau, Après avoir examiné les blancs connus employés en peinture, & leur altérabilité par les vapeurs phlogiftiques, M. de Morveaua fait plufieurs effais pour en trouver quelques-uns. qui fuffent à l'abri de leur ation, & fon travail lui a fait découvrir celui de la chaux de zinc, d’un très-beau blanc & inaltérable (x). 2°. Mémoire fur la conftruction d’un Hôpital , dans lequel on détermine quel eft le meilleur moyen à employer pouren- tretenir dans les Infirmeries un ait pur & falubre, par M. Marer. Ce moyen confifte dans la forme & la diftribution des falles , auxquelles PAuteur veut qu'on donne une forme ellyptique plus ou moins alongée, & tron- quée à chacun de fes foyers. 3°. Obfervation fur la congélation de l’A- cide vitriolique concentré, par M. de Morveau. Ce favant Chymilte l'a obrenu gelé à 2 degrés au-deflous de zero. 4°. Table des Arcs femi-diur- nes, fous le parallèle de Dijon, 47°. 19/ 20”, calculés de cinq en cinq minutes de déclinaifon , tant boréale qu'auftrale , depuis © jufqu’à 31 deg. 5°. Examen des Mines de Cuivre , appellées Verd de Montagne, Bleu de Montagne , & de ce qui conftitue leur différence, par M. de Mor- veau. Ileft bien prouvé que ce n’eft pas l'alkali volatil qui colore ces chaux de cuivre; mais, par l’analyfe & la fynthèfe, M. de Morveau dé- montre, que la chaux de cuivre n'eft bleue que parce qu'elle, retienc une plus grande quantité de phlogiftique que la chaux verte. 6°. Mé- moire {ur l'air, dégagé de la crème de chaux & du minium, par M. Marer, : (1) On peut en voir un tableau , fous le n°, 23 , dans une des Saïles de lAffemblée générale de la Correfpondance , chez M. de la Blancherie , Hôtel Vallayer , rue Saint- André-des-Arts, c SUR L'HIST. NATURELLELET LES ARTS, 161 D'après les expériences, l'air de la crème de chaux eft un véritable acide méphitique, un véritable air fixe, & celui du minium eft un air déphlogiftiqué, mêlé d'un fixième environ d'acide méphitique. 7°. Mé- moire fur les Eclufes des Canaux de Navigation, par M, Gauchey, 8°. Obfervations Minéralogiques & Chymiques fur le Spath pelant, & fur la manière d’en retirer le barote ou terre barogique , par M, de Mor- veau. Le fpath pefant vient d'être découvert en Bourgogne ,à Thote. 9°. Mémoire d'Anatomie fur les Vaiffleaux omphalo-méfentériques, par M. Chaufier. Ce favant Médecin décrit ici deux vaifleaux fanguins qui fe portent de l’ombilic au méfentère ; qui fuivent toute la longueur du cordon ombilical, & vontife ramifier fur une membrane particulière , entièrement diftincte de l’allantoïde , du chorion & de l'amnios. 10°. Mé- moire fur Les pierres belliaires , & fur l'efficacité du mélange d'écher vitrio- Jique & d’efpric de térébenthine dans les coliques hépathiques produites par ces concrétions, par M. Durande. Cet illuftre Médecin , après avoir décrit les fymptômes des coliques hépatiques , ces accidens fi cruels & fi dangereux, parle des différens remèdes & craitemens qui ont été pro- pofés; les obfervations qui doivent accompagner ce Memoire, paroîtront dans le Semeftre prochain, 11°, Hiftoire Méréorologique de 1782, par M. Marer, Voyage aux Indes Orientales & à la Chine; fait par ordre du Roi depuis 1774 jufqu'en 1781, 6c.; par M. SONNERAT, Cormmiflaire de la Marine, Naturalifte penfionné du Roi, Correfpondant de fon Cabinet & de l'Académie Royale des Sciences de Paris, &c, 2 vol, in-4f. avec 140 gravures, ou 3 vol. in-3°. avec. fig. À Paris, chez L'AUTEUR , rue Saint-André des Arts, vis-à-vis celle de l'Eperon ; & chez Froullé , Nyon & Barrois le jeune, Libraires: Lyon, chez Bruyfec & Roilet, Libraires : Genève , chez Chirol. M. Sonnerat, déjà connu très-avantageufement dans la République des Lettres, & fur-tout pour la partie des oifeaux , des quadrupèdes, des in- feétes & des poiffons , par fon Voyage à la Nouvelle Guinée , donne dans ce nouvel Ouvrage fes obfervations & fes réflexions pendant fon féjour aux Indes orientales durant un efpace de fept ans. Tout ce qui regarde l'Hiftoire , la Topographie, le Commerce, les Mœurs, les Ufages, la Religion, & les révolutions de ces contrées, fur-tout de celles que les pofiefions Européennes nous rendent plus intéreflantes & comme propres, y eft expofé avec le plus grand détail & la fidélité la plus exacte. Les Chi- nois, ce Peuple fi fameux , fi vanté & fi peu connu par la plupart de ceux qui ont voulu le décrire, occupent M. Sonnerat dans le fecond volume. Etudié avec lefprit philofophique , fans prévention & fur-rout fans enthoufiafme, ce Peuple lui a paru avec tous fes défauts , avec les défauts 162 OBSERPATIONS SUR LA PHYSIQUE, communs à tous les Peuples. Les fables que l'on a tant racontées & tant répétées , s’évanouiffent fous fa plume fage & critique: en un mot; M. Sonnerat rapporte qu'ila vu , ce que lui ont raconté les Chinois eux- mêmes, & ce qu'il a appris par leurs traditions; &ila vu que ce Peuple - en général éroit crès-fuperftitieux, lâche, fripon , fier & infolent; que fes connoiflances aftronomiques étoient pour la plupart ou faufles ouvridicu- les, & qu'ilétoit crès-peu verfé dans les Arts; qu'à la Chine enfin, le peuple gémit fous l’oppreflion & la misère, & qu'én y achète Le droit de commettre les crimes impunément. Le Peou, les Ifles de Madagafcar , de France & de Bourbon, le Cap de Bonne-Efpérance, les Ifles de Ceylan, des Maldives, de Malacca , des Philippines & des Moluques, lui fourniflent des détails très-intéreflants. Enfin, iltermine le fecond volume par l’hiftoire des quadrupèdes, des oifeaux & des plantes les plus curieufes qu'il a obfervés dans fes voyages. Parmi les oifeaux , on trouvera le coq & la poule fauvages , & dans Vétat de nature: on remarquera facilement ce que la civilifation leur a fait perdre. L'Ouvrage de M. Sonnerat, confidéré comme un Recueil d'Obferva- tions Philofophiques , Politiques & Naturelles, mérite certainement les plus grands éloges; fi on le confidère enfuite du côté de l'exécution, du ftyle, de la gravure & de la beauté du deflin, il faudra avouer qu'il réunit complettement tout ce que l'on peut defirer dans un Ouvrage de ce genre. Carte Générale de la Terre, appliquée à l'Aflronomie pour l'étude de la Géographie terreffre & célefle , dreffée par Le fieur FLECHEUX d'après Les cbfervations les plus récentes, Cette Carte, en une feuille, papier grand aigle, eft projettée fur un horizon, dont le zénith ef fitué à la fe“tion formée fur l'équateur, par le premier méridien des François, Ifle de Fer , pour l'hémifphère fu- érieur. L'hémifphère inférieur tient par les poles à l'hémifphère fupérieur , & il eft coupé ep deux à l’équateur ; fa projection eft auffi fur un hori- zon, dont le zénith eft fur l'équateur, mais à la fection formée par fa rencontre avec le méridien de 180 degrés de lonoitude, en forte que le zénith d'un hémifphère eft antipode de l'autre. L'hémifphère fupérieur comprend l’Europe, l'Afrique , l’Afie, jufqu’au 90° degré de lonoitude, & l'Amérique jufqu'au 270° de longitude , & préfente le tableau de l'océan en une feule pièce, ainfi que fa communi- cation par les poles avec l’hémifphère inférieur. i Cette communication préfente une double projection de la Carte, & la’ SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 163 rend fort intéreffante.. Cette feconde projection eft faite fur l'équateur dont le zénith eft aux poles. Cette nouvelle coupe du globe procure l’a- vantage de voir le développement des méridiens dans toute leur éten- due des 360 degrés , & donne une facilité fingulière de trouver dans l'inftant les antipodes d'un lieu propofé, Cette Carte comprend le tableau de toutes les Ifles remarquables , les Mers, les Terres connues , les Côtes Maritimes, Ports, Caps, Baies, Fleuves , Rivières remarquables, Villes principales ( nommément celles fur les Côtes Maritimes ), Les routes & découvertes du fameux Capitaine Cook vers les deux poles, &c. Cette Carte préfente en outre la configuration de 23 étoiles principa- les, par leur rapport avec les divilions de la cerre pour tous les jours , à l'inftant que le premier degré du bélier pafle au méridien de 180 de- grés de longitude terreftre, ou , ce qui revient au même , à l’inftant qu'une defdites 23 étoiles paflz au méridien fur lequel.elle eft placée fur la Carte: on y voit leurs arcs de longitude & de latitude , leurs arcs d’af- cenfion droite & de déclinaifon , au moyen de ceux que le fieur F/echeux a abaiflés du centre de cesaitres, perpendiculairement fur l'écliptique & l'équateur , de même que les parallèles à l'équateur qu'ils décrivent cha- ue jour. Le Soleil eft figuré à l’orient & à l'occident de la Carte , au zénith des folftices & des équinoxes; le lieu de cet aftre du jour , dans chaque fi- gne du zodiaque, ainfi que le lieu du parallèle à l'équateur , qu'il dé- crit depuis fon lever jufqu’à fon coucher , y font marqués pour tous les jours de l’année, Deux colonnes à droite & à gauche de la Carte en don- nent l'explication. Le fieur Flecheux eft connu du Public par fon Planétaire ou Planifphère célefte mobile, & par fon Loxocofme, le cout fuivant le fyftème de Co- pernic. Il vient encore de donner au Public un Quart-decercle, peur prendre hauteur du Soleil dans les appartements, y tracer la méridienne, régler les montres & pendules, &c. On trouve ces différens Ouvrages chez l'Auteur , rue du Sentier, près le Boulevard , à l'Hôtel de Madame la Préfidente de Meflay , & aux adreffes ordinaires, Le prix pour la Province, en s’adreffant direétement à l’Auteur , efts pour chaque objer tour encaiflé, favoir : ExrCarre générale deta Ferre géants ee es rliv, Le Planétaire ou Planifphère mobile, avec fon livre. : . 24 Leborocofme, avec fon livre, 210" 4 Ne... 144 Et le Quart-de-cercle, dans fon étui, & fon livre. , . , 30 164 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, &r. LAB, LE Des ARTICLES CONTENUS DANS CE CAHIER, Rrcrenives CaYMIQUES fur la Couleur Bleue retirée des Os de différens Animaux , par GUILLAUME - HENRI -SÉBASTIEN Bu- CHOTZ ; traduit par M. MARTIN Le Jeune. Page 85 Lettre a M. BERTHOION, de Lyon. Réfultats des Expériences faites à& Thierry, près Laon, avec l'Œnomètre, pendant la vendange de 1782. 89 Suite du Difcours prononcé à la Séance publique de l'Académie des Sciences, Belles-Letvres © Arts d'Amiens, le 25 Août 1782, par M. le Comte D'AGAY, Zntendanr de la Province, fur lesævantages de la Navigation intérieure, @ fur le Canal de Picardie. 93 Vues pour la Geographie-Phy que ; par M. Du CARLA. 10$ Differtation Chymique fur les diverfes proportions dans lefquelles les Metaux contiennent le phlogiflique ; foutenue par M. Nicoras TuRNBORG , M. TOoBErRN BERGMANN , Préfident ; craduit par M. MARCHA1IS. 109 Suite des Extraits du Porte-Feuille de M. l Abbé DICQUEMARE. 121 Mémoire fur les parties confftuantes de la Tungflène ou Pierre pefante, par M. SCHEELE ; traduit du Suédois par M. px P*** de Dijon. 124 Mémoire fur la Génération fingulière d’une efpèce de Grillon , qui découvreur fait de plus de lanalogie qui exifle entre les Règnes animal & végétal ; par M. leComte DE FRAULA. 14 Remarques-Pratiques [ur le Ténia ; par M. CussoN fils, Doëleur en Méde- cine dans l'Univerfité de Montpellier. 133 * Nouvelles Litéraires. on APPROBATION. J' lu , par ordre de Monfcigneur le Garde des Sceaux, un Ouvrage qui a pour titre: Oëfervations fur la Phyfique, fur l'Hiftoire Naturelle &-fur les Arts, &c.; par AM. Rozien & MoncEz ke jeune, &c. La Colle&tion de faits importans qu'il offre périodi- quement à fes Lefteurs, mérite l'accueil des Savans; enconféquence, j’eftime qu’on peut en permettre l'impreffion, À Paris , ce 20 Février 1783. VALMONT DE BOMARE. ù — TAN Zerrier 17853. V2 Fig.1. D DRE raison ail On” 3 DEL W QU ee ÉCART OR EEE WA PÉLELCELE LA it REPÉRER PRET HIT Tr RE ERTEe HET Hi 44 FH (TTH nt fevrier 1787; Jeller Ve, " VAT TOUT s 9] | Ÿ | JOURNAL DE PHYSIQUE. | si Mars 2783. 14 Es ne ee pes OBS URIN TA. T:I O N:5S e Sur la Glace qui fe forme à la fuperficie de la terre végétale dans les pays de granits ; Par M. DESMAREST. b FA 1 promis, dans mon Mémoire fur la formation des glaçons que les rivières charrient (1), de publier quelques obfervations nouvelles fur la gace , qui peuvent offrir des phénomènes analogues à ceux que j'expofois ans ce Mémoire, Aujourd’hui je crois devoir remplir mes engagements, en donnant la defcription des couches de glace qui fe trouvent à la [u- perficie de la terre végétale en Limoufin , & dans les autres pays de gra- nits, & en indiquant les différentes circonftances de leur formation. Ce futen 1763 que jobfervai , pour la première fois, cette glace d'une forme fingulière. Depuis plufeurs jours , le temps avoir éré conftamment à lapluie, & la terre étoit fort détrempée; mais le vent étant tourné au nord , il gela fortement dès le foir mème du jour où ce changement eut lieu. La gelée continuant le lendemain, je partis de Limoges avant le lever du foleil. A quelques lieues de Limoges, je m'app-rçus que le chemin étoit couvert d'une efpèce de croûte affez épaifle, dans la- quelle enfonçoient les pieds des chevaux, & à laquelle je ne fis pas une certaine attention, La prenant d’abord pour de la boue, dont la furface étoit durcie par la gelée. Elle en avoit extérieurement la couleur. Ayant eu occafion de mettre pied à terre, je vis avec furprife que cette croûte étoit une couche de glace , compofée d’un nombre infini de petits filets très- limpides , parallèles entreux, & adhérents aflez fortement enfemble, Je ne puis mieux comparer cette croûte de glace qu'au gypfe à filets, ex- cepté cependant que ces filets étoient plus diftinéts que dans le gyple; (1) Journal de Phyfique , Janvier 1783 , page 50. Tome X XII, Part. 1, 1783. MARS, N - £, \ 4 166 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, qu'ils avoient même une forme prifmatique aflez marquée, qui étoit La fuice de l’aflemblage intime de chacun de ces éléments. Le lieu où je fis cette première obfervation étoit une partie de grand cheminnouvellementachevée. La furface des accottements, compofée d’une terre débris de granits , étoit très-unie, La chauflée , formée intérieure- ment de pierres dures, étoir recouverte extérieurement des mêmes terres, & les talus ou foflés , creufés dans des granits tendres--ææ milieu defquels le chemin avoit été ouvert, étoient tranchés très-ner. | Par l'examen que je fis des croutes de glace qui couvroient les diffé- rentes parties du grand chemin , je reconnus ‘que leur épaifleur , c’eft-à- dire, la longueur des filets, éroit à-peu- près la même fur une certaine étendue ; mais elle n'étoit'pas égale lorfqu'on pañloit d'une partie à l’au- tre: elle me parut varier depuis 1 demi-pouce jufqu'à 2 pouces; &, au- tant que j'en pus juger pour lors , cette Longueur dépendoit de la nature de la bafe terreufe que recouvroient ces croûtes de glace, fuivant qu'elle étoit plus ou moins sèche, plus ou moins propre à s'imbiber d'eau dans les temps humides & à la conferver. L Les filets étoient fort courts, quand la terre approchoïit davantage de la nature du fable, & ils éroient plus longs lorfqu'elle étoit formée par un mêlange de fable & de fubftance argilleufe, Je remarquai d'ailleurs que Vépaifleur de la terre imbibée d’eau avoit influé fur celle de la croûte de glace, & ce que j'ai eu lieu de voir par la fuite, m'a prouvé quexoutes ces circonftances étoient aflez conftamment les mêmes. Les filetstde glace qu'on diftinguoit dans les couches étoient perpen- diculaires au plan de terrein où ils avoient été formés. Aïnfi, l'inclinai- fon des talus, qui, dans certaines parties, excédoit 4$ degrés, n'em- pèchoit pas que chaque filet ne fût exactement perpendiculaire au pla fur lequel il étoit établi, & on ne découvroit nulle part que la pefan- teur en eût fait pencher l'extrémité fupérieure vers l'horizon. Ils’ étoient aufi régulièrement aflemblés & aufi parfaitement parallèles entr'eux que les filets qui s’étoient formés fur les accottements, & qui fe trouvoient en même temps perpendiculaires, & àla furface du terrein, & à l'horizon. Dans la couche de glace qui recouvroit le milieu de la chaufléebombée, la direction des filets étoit affujettie aux deux plans inclinés du bombement. En certaines parties , tant des accottements que de la chauffée , la fuperficie des croûtes de glace offroit un grand nombre de gerçires, qui formoient des prifmes exagonaux , dont la bafe avoit environ 2 pouces de dia- mètre ; quelques-uns de ces prifmes paroifloient encore fubdivifés en d’au- tres prifmes, la plupart exagonaux , mais moins réguliers que les grands, leurs faces étant moins aflujetties à la ligne droite. Chacun de ces petits prifmes étoit compofé de filets de glace, qui n'étoient plus parallèles en- treux, ni exactement perpendiculaires à la furface de leur bafe. Les fi- lets de glace qui paroïloient à la circonférence extérieure de chaque SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 167 prifme fe courboient à mefure qu'ils s’éloignoient du fol, pour fe rappro* cher du centre de l’axe du prifme partiel , & les extrémirésdes filets de cha-" ae etit prifme fe courboient encore vers Le centre du grand, qu , par fa ubdivifon , paroifloit avoir formé les petits. La difpofition de tous ces petits faifceaux de filets de glace, indiguoit l’ancienne unien avant les ger- çures , & le fyftème génétald'inclinaifon vers un centre commun ,la marche qu'avait fuivi la retraite , d'où étoit réfultée la fubdivifon des prifmes. En réféchiffant fut tous ces phénomènes , je compris aifément qu'ils ne tenoient pas à des circonftances locales, circonfcrites dans la partie du grand chemin oùj'avois borné les obfervations dont je viens É rendre compte. Je portai donc mes regards fur les terres cultivées voifines , qui étoient enfemencées depuis environ deux mois; jy vis, comme fur la route , des couches de glace fuperfcielle également compofée de filets diftinéts & parallèles; jy remarquai de même quelques gerçures, qui avoient partagé ces couches , dans certains endroits feulement, en prif- mes exagonaux plus ou moins réguliers. Enfin, je continuai ces obferva- tions dans un trajet de huit lieues, & par-tout je trouvai les mêmes phénomènes. J'avois vu prefque tout le jour ces couches de glace à filets au milieu des terres végétales, qui font vifiblement les produits de La deftrudtion des granits, puifqu’elles en offrent les débris : mais lorfque je fus parvenu entre le Fay & Argenton, vers la ligne où les granits font place aux couches horizontales , je n’apperçus plus de pareilles formes dans Les gla- çons difperfésau milieu des terres. Le lendemain & les jours fuivants, quoique Le froid fe foutint au même degré , je ne trouvai pas entre Argen- ton & Châteauroux, entre Châteauroux & Orléans , le moindre vettige de glace à filetss & les recherches que j'ai faites depuis aux environs de Paris, ont achevé de me convaincre qu'’inutilement on en chercheroit au milieu des marnes & des arpiles des pays à couches horizontales. L'an- née fuivantes, un de mes amis , prévenu de tous ces phénomènes, étant parti de Limoges le 4 Janvier, au commencement d'une gelée , eur occa- fion d'obferver Les couches de glace à filets , comme je l'avois fait l’an- née précédente , jufqu’aux limites des granits : mais ni ce jour-là même, ni Jes deux jours fuivants, il ne lui fut pas poflible de les retrouver au milieu des terres marneufes ou des mêlanges de marnes &sde fables , ou dans les produits du délitement des pierres calcaires. Pendant ce même temps, j'obfervai de mon côté aux environs de Limoges les glaces à filets; elles fe foutinrent peu à-peu au même état, & même m'offrirent de nou- veaux détails, que je décrirai par la fuite. Depuis cette époque, j'ai toujours continué mes obfervations chaque hiver en Limoufin , jufqu'en 1771 ; & les phénomènes ont été conf tamment Les mêmes, Je les ai vus auûi dans d’autres pays de granits, comme dans les montagnes d'Auvergne, en Velay, dans le Vivarais , Tome XXII, Part. I, 1783. MA RS. X2 168 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, aux environs d'Annonay & dans le Forez : mais inutilement jen ai fait la recherche dans Les pays à couches horizontales ou inclinées. Je dois ce- pendant indiquer une exception pour les pays volcanifés. Ce fut à Rome & aux environs d’Albano , que je remarquai , pour la première fois , en 1766, ces couches de glace à filets au miljudes terres cuites par les volcans ; & depuis je les ai trouvées aux Nbr Dot , en Velay proche le Puy, en Vivarais à la Chartreufe de Bonnefoy, aux environs de Cette, toujours à la furface des matières volcaniques bien pulvérifées, ou même Jorfque ces matières étoient diftribuées au milieu des couches horizon- tales. : Après avoir reconnu les différents pays où £ montrent les couches de glace à filets prifmatiques, & déterminé leurs limites par celles des gra- nits, il me refte à décrire les principaux phénomènes qu'elles m'ont offerts dans les diverfes circonftances où j'ai eu occalon de les obferver pendant environ dix ans en Limoufin, ou en d'autres pays de gra- nits. 1°. Les couches de glace À filets ne fe forment que dans les endroits couverts d'une certaine quantité de terre végétale plus ou moins épaiffe; j'en ai vu même à la fuperficie des granits tendres & feuilletés , qui éprouvoient un commencement de décompofition à leur fuperficie , & fe pénétroient d’eau jufqu’à un certain point. Mais par-tout où la terre végétale manquoit, par-tout où le fol ne préfentoit que des rochers de granits ou de fchiltes durs & folides, ou bien de gros fables débris de feld-{path ou de quartz , on n'y remarquoit que des croûtes de givre & de glaces informes. 2°. Je n’aitrouvé les glaces à filets par couches fuivies & continues, qu'à la fuite de pluies aflez abondantes, & foutenues pendant quelques jours. 3°. Ces couches de glaces ne fe montrent à la furface de la terre, que lorfque le froid eft un peu vif, & que le thermomètre eft au moins à 3 ou 4 degrés au-deffous du terme de la glace. j 4°. L'épaifleur de ces couches varie beaucoup; mais en général elle m'a paru d'autant plus confidérable , que la fuperficie du fol éroit recou- verte de terres plus profondes, que les pluies qui avoient précédé la gelée avoient été plus abondantes , & que le froid avoir pris plus brufquemenr. Lorfque routes ces circonftances favorables fe trouvoient réunies , les couches de glace avoient 1 pouce & demi & quelquefois 2 pouces d’épaif- feur; elles éroient même affez folides pour rélfter au poids d’un homme. Mais fi quelqu'une de ces circonftances manquoit, la glace à filets ne fe montroit que par morceaux ifolés, fans fuite , où les filets prifmatiques fe trouvoient courbés de mille manières différentes, & fans aucune adhé- rence intime. ; 5°. Les couches de glace n’ont pas, dès le premier jour, toute leur épaifleur, fur-tout lorfqu'elles doivent être un peu confidérables, Ces accroi flements s’opèrent fucceflivement pendant trois ou quatre jours feu- Pare, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 169 lement; après ce temps , les couches n’éprouvent plus d'augmentation, pe le froid continue toujours. Seulement s'il furvient quelque faux égel , les couches de glace précédemment formées fervent de bafe à de nouvelles additions , qu'il eft aifé de reconnoître. « 6°. L'accroiflement des Map de glace fe fait toujours conftamment par la partie inférieure qui touche immédiatement à la terreimbibée d’eau, & le travail de cette congélation fucceflive s'exécute de manière que ce qui a été formé la veille fe trouve foulevé par ce qui fe forme le lendemain , & en occupe la place. La fuperficie des couches de glace eft en conféquence foulevée chaque jour d’une quantité égale à l’épaifleur des additions, la- quelle diminue chaque jour aflez confidérablement. 7°. Lorfque le froid n’éprouve pendant le jour aucune diminution fen- fible , les couches de glace , quoique réfultats d’une congélation fuccefive & continuée pendant trois ou quatre jours, n'offrent cependant que des males parfaitenrenc uniformes dans toute leur'épaiffeur. Non-feulement lesiparties formées Le fecond jour & les jours füivants , ne font pas diftinguées des parties qui ont été forméesile premier jour; mais encore chaque filet de glace, chaque petit prifme fe trouve prolongé exaétement fur la même ligne d’un bord à l’autre de la couche: ce que je regarde comme l'effec d'un travail qui n’a pas été fufpendu par l’adouciffement du froid. 8°. Si au contraire le froid s’adoucifloit ou diminuoit fenfiblemene pendant le jour , par l’apparitiom du foleil ou par d’autres caufes, pour lors Les produits de chaque reprife du froid pendant la nuit fe trouvoient dans les couches de glace, féparés les uns des autres par des intervalles rem- plis ou de terre ou de glaces informes. Outre cela, les filets de glaces prifmatiques, quoique toujours très-nets & très-diftinéts dans chaque ad- dition , ne fe raccordoient plus d'une addition à l’autre, de manière à fe trouver fur le même alignement: on ne remarquoit plus dans toutes ces couches féparées le même fyftème de prifimatifation , ni la continuité des mêmes prifmes, quoique tous ces filets y fuffent affujettis à [a même direc- tion générale, ss Les trois circonitances que je viens d’indiquer ici fur l’accroiffement des couches de glace à filets, fur la continuité ou la diftinétion des addi- tions fucceilives qu'elles reçoivent, font parfaitement analogues avec celles que j'ai obfervées dans les glaçons qui fe forment au milieu des fables . & des vafes réfidants au fond des rivières. Ces phénomènes correfpondants s'éclairent par le rapprochement que je fais ici. 9°. Dès que les couches de glace n’augmentent plus, elles commen- cent aufli-tôt à diminuer: on y voit d'abord des gerçures qui les parta- gent en différentes portions prifmatiques, Je me fuis afluré , par plufeurs obfervations , que ces serçures, même lorfqu’elles paroifloient dès le pre- mier jour de la gelée, étoient une preuve infaillible que les couches ne recevroient plus aucune augmentation ; enfuite les filets ou petits prifmes 170 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, élémentaires fe détachent les uns des autres, & c’eft alors qu’on peut les féparerfans aucun effort, & s’aflurer que la rotalité de la couche n’eft compolée que de ces prifmes ; enfuite chacun de ces prifmes s’arronditen fe décompofant , & ce n’eft plus à la fin qu'un affemblage de petits filets d’une grande ténuité, qui difparoiffent entièrement les uns après les au- tres. Le progrès de cette deftruction, que j'ai fuivie fouvent, m'a paru très-accéléré dans certaines circonftances, MÉMOIRE SUR LE LAiT ET SUR SON ACIDE; Traduit du Suédois de M. SCHE&ELE (1), par Madame P *** de Dijon. O: fait que Le lait de vache contient du beurre, du fromage , du fucre de lait, quelques parties extraétives, un peu de fel, & que le refte n'eft que de l’eau; maisil y a encore beaucoup à faire pour en avoir une connoiffance chymique exacte. Je traiterai d'abord en peu de mots de la féparation du petit-lait avec le fromage, &c, &c:; j'examinerai enfuite l'acide qui fe forme par la chaleur du petit-lait ou du lait, & fes pro- priétés. $. IT. a. Sion met quelque peu d'acide végétal ou minéral dans Le lait , il y a, comme tout le monde fait, une coagulation. Cette coagulation ne devient complete que quand le mêlange eft aidé de la chaleur, parcequ'a- lors-les parties caféeufes fe réuniflent & forment une mafle. La coagulation par un acide minéral donne une moindre quantité de fromage que lorf- qu'elle fe fait avec un acide végétal. b. Si on met dans du lait bouillant autant de quelque fel neutre qu'il peut en difloudre, le fromage fe féparera pateillement du petit lait. La même chofe arrive avec tous les fels moyens & métalliques, ainfi qu'avec le fucre & la gomme arabique. $. III. Les alkalis cauftiques diffolvent le fromage à l’aide de la chaleur, & il peut être de nouveau précipité par les acides, ce qui porteroit à croire que le fromage eft tenu en diffolurion dans le lait par quelque alkali. Pour le vérifier, j'ai coagulé le lait avec un peu d'acide nitreux; j'ai filtré & évaporé le petit-lait; mais je n'ai pas eu la moindre trace de nitre, (1) K'ongl. veranskaps Acad, handlingar , &e. ,ann. 1780, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 171 mais feulement Le fucre de lait ordinaire, La coagulation par les acides a dû par conféquent avoir une autre caufe. 6: IV. z. Le fromage que l’on obtient avec Les acides minéraux donne toujours quelques fignes d'acide, & l'eau bouillante peut en diffoudre une partie. b. Si, à une partie de fromage nouvellement précipité & non féché, on ajoute huit parties d’eau , dans laquelle on aura mis de l'acide miné- ral, jufqu'a ce qu'elle ait prisun goût acide, & qu’on fafle bouillir le mélange, le fromage fera diffous. Le fromage n'eft que peu ou point diflous par les acides végétaux & par l'acide du lair. On voit par-là pour- quoi on obtient une plus grande quantité de fromage, en coagulant le lait avec les acides végétaux, que lorfqu'on emploie les acides minéraux (S. IL. 4.). On trouve encore ici le principe de la coagulation du lait par les acides. Le fromage attire en efher unè certaine quantité d'acide , & cette combinaifon exige une beaucoup plus grande quantité d’eau pour fe tenir en diffolution, que le lait n’en porte avec lui. c. Si on mêle Le lait avec dix parties d’eau , on n'obtient point de fro-- mage. j 4 d. Si on jette un peu d’acide minéral concret dans cette diffolution acide du fromage , alors la plus grande partie du fromage fe précipite de nouveau, [l eft également précipité par l’alkali & l’eau de chaux; mais fi on en met en trop grande quantité, le fromage fe rediffout. e. Quand le fromage tenu en diffolution par la chaux ou l’alkali caufti+ que eft précipité par le vinaigre, il fe répand une odeur hépatique défa- gréable. La caufe pour laquelle les fels neutres & moyens, là gomme & Le fucre coagulent le lait ($. IT, feét. 6), pourroit bien fe trouver dans l’af- nité plus grande de l’eau avec ces fels, qu'avec le fromage. Comme l’in- fufion des plantes aftringentes donne toujours des fignes de quelque acide libre & non combiné, il eft facile de concevoir pourquoi elles coagulent le lait; & puifque la plupart des plantes, fi ce n'eft pas toutes, portent avec elles une matière femblable au fromage , on voit aufñli par-là pourquoi la décoction de quinquina coagule les émulfons, $. V. Pour ce qui eft des parties conftituantes du fromage , elles font, à ce que je crois , abfolument inconnues , comme celles de routes les autres matières animales gélatineufes. Il eft feulement certain que la terre du fromage eft la terre animale commune , & qu’elle eft formée d'acide rs phorique faturé de chaux avec excès ; car , au moyen de plufieurs diftil- lations de l'acide nitreux fur le fromage, j'ai enfin obtenu un réfidu blanc, qui étoit du nitre calcaire & une terre animale. J'ai retiré la même ef- pèce de terre du réfidu de la diftillation du fromage, en le calcinant par le nitre dans un creufer; car il feroitgrès-difcile de Le faire pañfer à l'état 172 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, de cendres fans le fecours du nitre. Trente parties de fromage fèché tiennent à-peu-près trois parties de terre animale. $. VI. Rien ne reffemble plus au fromage que Le blanc d'œuf cuit, & celui-ci n’eft en effet autre chofe que du rar ail Le blanc d'œuf cuir fe diffout dans un acide minéral très-délayé, & cette diffolution fe préci- pite quand on y ajoute de l'acide concentré, Il fe diffout auf dans l'al- kali cauftique & l’eau de chaux , & il eft alors précipité par les acides ; &, ce quieft affez remarquable , cette précipitation eft aufliaccompagnée d'une odeur entièrement femblable à celle de l’hépar de foufre, & qui noircit l'argent & l’acète de plomb, propriété qui appartient aufli à la partie caféeufe du lait (S. [V.), Il eft encore fingulier, quoique généralement connu , que la feule chaleur coagule le blanc d'œuf, & cela fans dimi- nution de poids, Je ne fache pas que la vraie caufe de ce phénomène ait été connue jufqu'à préfent; je crois cependant pouvoir l'indiquer, Le fromage & le blanc d'œuf peuvent s'unir avec les acides, & par-là font coagulés; mais comme toutes les fubftances qui s’uniffent aux acides, peuvent auf s'unir à la matière calorifique ( en quoi cette matière reffemble fouvent aux acides), il paroît très-probable que la matière calorifique forme ici avec le blanc d'œuf une vraie combinaifon chymique, ce qui eft caufe qu'il durcit, Ce pourroit être la raifon pour laquelle Le lait & le blanc d'œuf cuits ont un autre goût que quandils font cruds, & auli pour- quoi Le blanc d'œuf durcit, lorfqu’on le mêle avec la chaux éteinte & la litharge d'argent. Je fus bien confirmé dans cette opinion ; lorfque j'eus ob- fervé la même coagulation du blanc d'œuf de la manière fuivante. Je mêlai une partie de blanc d'œuf avec quatre parties d’eau , & j'y verfai un peu d’alkali cauftique ; après quoi j'ajoutai autant d'acide muriatique qu'il étoit néceffaire pour la faturation , & le blanc d'œuf fur coagulé comme Le fromage. Comme j’avois miêlé de l’eau au blanc d'œuf, il arriva de-là qu'on ne pouvoit s'appercevoir de la chaleur qui étoit dégagée de l'alkali cauftique par l'acide, & à laquelle on avoit attribué légèrement tout le phénomène. Il y a donc ici une double décompofition ; favoir : l'union de la lefive alkaline avec l'acide muriatique, & l'union de la ma- tière calorifique avec le blanc d'œuf. Si on emploie de l'alkali méphitifé ou non cauftique , & que l'on opère dela mèm@manière , il n'y aura point de coagulation, Si on mêle bien exactement le blanc d'œuf avec dix parties d'eau, & que l’on faffe bouillir enfuite le mélange , le blanc d'œufreftera diflous (1); (£) Les blancs, à ce que nous a appris M. Darcet, étant délayés dans de l’eau froide, peuvent enfuite fouffrir l’ébullition pendant très-long-temps, fans qu'il y ait coagula- tion. Il nous à fait part de l'expérience füivante: Vingt-quatre blancs d'œufs ont été délayés dans 30 pintes d’eau froide, laquelle à été portée enfuie à l’ébullition, & rap- prochés à 2 pintes, fans qu'il y ait éuféoagulation. More du Rédatteur. mais SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 173 mais fi on verfe quelqu'acide , la diffolution fe coagulera comme du lait. 1e : $. VIT. On fait qu’en été le lait met peu de temps à s’aigrir & à s’é- paiflir. L’acide augmente fucceflivement, & au bout de quatorze jours, il fe trouve avoir acquis fa plus grande force. Si on filtre alors Le petit- lait, & qu'on l’évapore à moitié , il fe dépofe de nouveau un peu de fro- mage; fi on filtre encore une fois , & que l’on mêle un peu d’acide tar- tareux , on voit une heure après fe former une quantité de petits cryftaux , ui fe précipitent , & qui ne font autre chofe que du tartre. Le tartre que l'on trouve ici ne peut venir de la petite quantité de muriate de potafle que Le lait contient toujours , Car c'eft trop peu de chofe Hi quon en puifle rien retirer : mais il doir être attribué à la préfence d'un fel effentiel “dans le lair; ce qui réfulte aufli de ce que, quand le petit lait eft cuit feul jufqu'à ficcité , & enfuite réduit en charbon dans un creufet (par où ce fel eflentiel eft détruit), ce charbon fe trouve contenir un alkali vé- gétal , mêlé d'un peu de muriate de potaffe , que l’on peut en retirer par élixation. Le petit-lait tient aufli en diffolution une partie de terre animale, que l'on-peut appercevoir quand on fature le petit-lait avec l’alkali vo- latil cauftique ou l’ead”de chaux. Ainfi , l’acid2 du petit-lait contient du fel effentiel , de la terre animale, du fucre de lait, un peu de muriate de potafle & un peu deemucilage. Il s’agit maintenant de féparer de l'acide toutes ces parties hétérogènes, pour l’avoir'aufli pur qu'il eft poiñole. Si cela pouvoir fe faire par la diftillation, il n'y auroit point de voie plus courte; mais elle ne réuflit pas, parce que, quoiqu’elle donne quelque figne d'un acide qui eft un vinaigrestrès-foible, ce qui eft la caufe du goût acide du petit-lait, la plus grande partie demeure dans la cornue ; & fi on pouffe Le feu , il £& décompofe. C'eft pourquoi j'ai employé le pro- cédé Hoi É x s. VIEIL J'ai fait Éévaporer le petit-lait acide tiré du lait, jufqu'à ce qu'il en reftät à-peu -près le huitième. Pendant ce temps-là , tout le fromage s'en fépara , après quoi je filerai l'acide. Pour obtenir la erre animale, je ne vis pas d’autre moyen que de faturer l'acide d'eau de chaux , qui a la pro- priété de précipiter cette terre (S.WIT. ). Cela fait, je filcrai la diffolution, & la délayai avec trois fois autant d'eau. Pour retirer enfuite la chaux de fon diffolvant, l'acide faccharin m'offroit un excellent moyen: j'en fis dif foudre un peu dans de l'eau ; j'en jettai dans la diffolution , jufqu'à ce qu’elle ne précipirât plus de faccharte calcaire, & j'eus grande attention de ne as mettre trop d’acide faccharin , ce qu'il étoit facile d’éprouver par l’eau Fe chaux. Il reftoit maintenant à féparer les autres matières de l'acide du lait; je fs en conféquence évaporer l'acide jufqu’en confiftance de miel ; après cela, l'acide épaifli fut rediffous dans de l’efprit-de-vin rectifié : par-là de fucre de lait , aufli bien que trous les mélanges étrangers qui n’apparte= - Tome XX, Part. L 1783. MARS. Z 174 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, noient pas à l'acide, en furent féparés, & l'acide fe trouva feul diffous dans l’efprit-de-vin , qui fut alors filtré. J’ajoutai un peu d’eau pure à cette diffolution ; je rediftillai l'efprit , & pour lors l'acide du lait refta dans la cornue auf pur qu'il eft poflible, à mon avis, de l'obtenir par les moyens chymiques (1). S.IX. J'ai trouvé que cet acide fe comportoit de la manière fuivante, feul & avec les terres , les alkalis & les métaux. ; 1. Réduit en confftance d'extrait, ilne donne point de cryftaux; & lorfqu’on l’a pouffé à ficcité, il redevient liquide. 2. Lorfqu’on le traite à la diftillation, il s'élève d'abord du flegme , en- fuite un acide foible , qui reffemble à l’efprit de tartre; après cela, de l'huile empyreumatique , & une nouvelle portion du même efprit, du gaz mé- phitique & du gaz inflammable (eid faengd) , & il refte dans la cornue un peu de matière charbonneufe. 3. Saturé avec la potafle , il donne un fel déliquefcent , & foluble dans l'efprit-de-vin. à 4. Il donne pareillement avec la foude un fel incryftallifable , mais qui fe diflout dans l’efprit-de-vin. s. IL forme avec l’alkali volatil une efpèce de#fel ammoniac, qui ef auf déliquefcent, & qui laiffe aller à la diftillation la plus grande partie de fon alkali, avant que la chaleur ait détruit l'acide. * 6. La barore, le calce & Walumine forment avec cet acide des fels moyens déliquefcens; mais uni à la magnéle , il donne de petits cryftaux, qui à la fin fe réfolvent auffi en liqueur. 7. Le bifmuth, le cobalt, l'antimoine , l'étain ,le mercure , l'argent & Jorne font attaqués par cet acide, ni à la digeftion, ni à la chaleur de Pébullition. Cependant l’âcide qui a paflé fur létain , précipite en noir la diffolution d’or dans l’eau rétale. ? 8. IL diffour le fer & le zinc, & il s’en dévage de l'air inflammable (antaendelig). La diflolution de fer eft brune, & ne donne point de cryf- taux ; celle de zinc fe cryftallife. 9. Il prit d'abord avec le cuivre une couleur bleue, qui paffla au verd, &c enfin au brun obfcur: elle ne cryftallifa pas. 10. Tenu en digeftion fur le plemb pendant quelques jours, il Le dif- fout. La diffolution a un goût doux & acerbe; elle ne donne point de cryftaux. IL fe forma dans cette diflolution un léger fédiment blanc, qui fe trouva être,du vitriol de plomb. Ainf, le lait préfente auffi quelque traces d'acide vitriolique. . (1) M. Darcet, dans fon dernier Cours au Collége royal, où il a traité le Règne änimal , parla de cet acide , & il en montra à fes Auditeurs ; mais il n’examina paint, comme l'a fait Scheele, fes affinités. More du Kétadkeur. e FEU SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 175$ s. X. Ces expériences prouvent clairement ,que l'acide du lair eft d'une nature particulière ; & quoiqu'il À l'acide acéreux de l'acère de potaile , il paroît difpofé, pour ainfi dire, à donner un vinaigre, mais qui, par le défaut de la matière qui produit l'efprit dans la fermenta- tion , n'a pas été volatilifé , quoiqu’une partie ait réellement atteint ce degré, & paffé à l'état de vinaigre; car fans fermentation fpiritueufe & fans efprit- de-vin , il n’eft par pollible d'obtenir du vinaigre. Mais l'expérience fui- vañte prouve que le lait peut fubir une fermentation complete, quoiqu'il ne paroifle aucune trace Die devine Si on remplit une bouteille de lait frais, qu'on la renverfe dans un vaifleau qui contienne de même aflez de lait pour que l’orifice de la bouteille Puiflé être plongé au-deflous de fa furface , & que l’on expofe cette boureille dans cette fituation à une cha- leur qui furpaffe un peu les chaleurs ordinaires d'été , on trouvera, au bout de vingt-quatre heures, que non-feulement le lait fe fera caillé , mais aufñi qu'il a baiflé dans la bouteille ; & deux jours après, le gaz méphiti- que, qui fera dégagé du lait, en aura chaffé la plus grande partie de la bouteille. J'ai dit que l'acide de lait ne pouvoir être converti en vinaigre par le défaut dela matière qui produit l’efprit dans la fermen- tation. C’eft un fait qui fe démontre aulli de lui-même ; car fi on mêle dans une ranne (1) de lait fix cuillerées de bon efprit-de-vin, & qu'on expofe à la chaleur ce mêlange bien bouché , avec l'attention néanmoins de donner de temps entempsua peu d'iffue au gaz de la fermentation, on trouvera un mois après plus ou moins, que le petit-lait s’'eft changé en bon vinaigre , que l’on peut pafler à travers un linge & conferver dans des bouteilles. (x) M. de Morveau, dans fes notes {ur les Opufcules de M. Bergmann, tom. I, pag. 100, dit que la ranne de Suëde équivaut à z pintes £ de Paris. More du Friduc- æur. Tome XXII, Part. 1,1783. MARS. Z 2 176 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, LE FeFUR'E s D.EUME :G AÏQAUMEN Doyen de la Faculté de Médecine de Reims, Sur une Saxifrage dorée. FE ES objets les plus difficiles à faifir en Botanique, font fans contredje ceux que leur petitefle , l'incertitude de leur caraétère &z leur rareté mer- tent fouvent dans le cas d'ignorer & de confondre; telle eft l'efpèce que je mets fous vos yeux. Cette plante vient en gäzon avec des moufles fur les eaux courantes, au milieu des roches; elle Aleurit de bonne heure. Sa: hauteur eft de 2 à 3 pouces ; fes tiges font aflez droites, d'un verd pale & tranfparent ; elles fe bifurquent à la partie fupérieure, & portent ordi- nairement cinq petites fleurs fur chaque divifion ; fes feuilles font oppo- fées, prefque rondes & crénelées ; les inférieures ou radicales font pétio- lées, plus larges que les autres, de couleur de feuille morte , & chargées de poils à leur furface fupérieure. Les feuilles des tiges fonc plus étroites , prefque fefliles , glabres & d'un verd foncé. Les racines font tra- çantes, tendres & cranfparenres. Les fleurs font ramaflées par bouquet, accompagnées Ja plupart de bractées ou feuilles Aorales ; elles font fans corolle, Le calice eft divifé conftamment en quatre parties égales , ou folioles aflez épaifles, d'une figure ovale un peu aiguë, & d’un verd affez léger. Il y a huit étamines , dont les filets égalent la hauteur des folioles du calice, & font implantés fur l'ovaire à l'angle de chaque di- vifion, & au milieu de la bafe de chaque foliole, Les anthères paroif- fent divifées par un fillon perpendiculaire ; & donnent à la fleur un air jaunâtre. Les piftils font deux fur l'ovaire, leurs ftils font droits & de la hauteur à-peu-près des étamines. Les ftigmates font fimples ou'obtus, La capfule a deux éminences féparées par un fillon tranfverfal ; elle n'a qu'une loge ; elle eft bivalve , & environnée du calice. Les femencés font fphériques, très-petites, & au nombre de quatre au moins. D’après ces caractères , il feroic naturel de croire que cette plante; fuivant le fyftème de Linnæus, appartient à la deuxième fection de la hui- tième claffe, l’oétandrie dyginie, Cependant la defcription des quatre genres dont il y eft fait mention, ne convient nullement à certe efpèce ; de *+ VIT. + CRT: te | «x Due SÛR L'HIST. NATÜRELLE ET LES ARTS. 179 forte qu'avec la plus fcrupuleufe attention l'Obfervateur fe trouve en défaut, & croit avoir trouvé une efpèee inconnue. S'il ne fe rappelle alors qu'aucun fyftème n’eft aflez parfait pour ne pas fouffrir quelques ex- ceptions , il courerifque de créer, un’ genre nouveat, & d'augmenter la no- menclature plutôt que les connoiffances réelles. En effet , dans la décandrie digynie , on trouve que le genre de CAryfof- pleninm a des caractères variables , qui peuvent convenir à éette efpèce, qui eft effectivement le Chryfofplenium oppofitifolium de Linnæus, quoi- qu'elle n'ait pas dix étamines ,, que le calice n’en foit pas coloré autrement qu'en verd , qu'il foit toujours divifé en quatre parties, & que ces caractès res foient conftants dans l'individu que j'ai eu occafion d'éxaminér emboôd, état, Elle eft connue fous le nom de Saxifrage dorée, creffon doré ou. de roches. Je doute qu’elle ait les vertus béchiques , apéritives & dépurativer qe quelques Auteurs lui attribuent. Elle eft d’un gente acerbe ; qui lui onneroit plutôt une place parmi les plantesitoniques ou vulnéraires af-- tringentes. C'eft à l'expérience à prononcer là-deffus, Morifon & Œder., Danois ,en ont donné ; je érois, la defcriprion. .&c la figure; mais comme ces Ouvrages ne-fe trouvent pas dans les mains de la plupart des Botaniftes, & que cetté plante. n’éft pas commune das: nos contrées, car Vaillant n’en parle pas dans fon Botanicon Parifienfe ; j'ai fait delliner exaétement un pied-de cetté planté fleurie, & trouvée à fix ou fept lieues de Reims, au fud entre Nefle & Saint-Martin d'Ablois, aux lieux dits Z Sourdon ; dans Les eaux qui sécoulent d'entre les roches. . Pour éviter toute équivoque , & ne pas multiplier les genres ,ne pour- roit-on pas nommer ainfi cette efpèce ? nsiup Chryfofplenium oétandrum. C. folis oppofitis , fubrotundis ; érenatis ; ra= dicalibus larioribus fupernè , pilofis ; caulinis anguflioribus., glabris : caulibus . dichotomis , floribus ad apicem confeëlis, " Voyez Planche IT , fig: I. F. A. La plante entière , de grandeur natu- relle, vue avec fa racine traçante & fes filaménts. ! | : F.B. Une fleur, vue à la loupe. F: C. L'ovaire, furmonté de deux ftils coupés fur Le côté. Telles font , Meffieurs, les réflexions quej'ai cru pouvoir communiquer aux Amateurs de la Botanique; fur cette efpèce de plante, par la voie de vorre Journal , qui eft devenu par vos foins uñe-mine précieufe, que tous les Savants fe plaifent à fquiller &c à enrichir; Je fuis, &c. à é NP \ x78 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, OBSERVATIONS Sur les Infeëtes polypiers qui forment le tartre des dents ; Par M. MAGELLAN, de Londres. J ’Ar obfervé plufieurs fois au microfcope, non fans étonnement, les figures baroques & fingulières des petits vers qui forment cette matière blanchätre qui croît entre les dents humaines. Je délayois pour cet effet de cette matière dans l'eau tiède, & je ne manquois pas alors de voir diftinc- tement, par le microfcope , les petits vers qui forment cette matière À prefque chacun d'une forme différente des autres : il y en avoir d’oblongs, quarrés , ronds, triangulaires , &c. &c. J'ai foupçonné que cette ma- tière , appellée le sartre ou la pierre des dents, qui croît en forme con- crète autour & vers la racine des dents , étoit produite par ces mêmes vers : mais ce n'eft que depuis une ou deux années que je crois en avoir la démonftration prife fur moi-même; car ayant perdu une des dents inférieures du devant, j'ai obfervé qu’au bout de quelque temps, cet intervalle a été prefque rempli de cette matière qui s'accroît petit à petit, & s'y endurcit, malgré Le foin que j’ai de la nettoyer & de la frotter chaque matin avec une petite broffe ordinaire , en nettoyant le peu de dents qui me reftent. Au bout de quelques mois , cette matière endurcie eft tombée , par quelqu'’effort qu’elle a fouffert , en introduifant dans la bouche des comeftibles durs ; mais au bout de trois meis ou environ , cette quan- tité de pierre s'eft rétablie à-peu-près comme auparavant. En l'obfervant : à la loupe , elle a une furface raboteufe , reflemblante-aux mérépores , & femble s’accroître de bas en haut par de petits amas, &c. Il femble donc que nous portons fur nous-mêmes dans la bouche un amas de polypiers ou petits infectes , comme ceux qui formentles coraux , les mérépores, &c. &c. Toute fingulière & extraordinaire que cette idée puifle paroître aux yeux du vulgaire, le Philofophe fe gardera bien de la regarder avec mépris, refpectant avec admiration les merveilleufes opérations de la Nature, dont il ne nous eft point permis de 0 les reflorts, ni de comprendre les caufes finales , c'eft-à-dire, le but & le pourquoi elles font opérées. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 179 MÉMOIRE Sur les changements qu'éprouvent les Terres mêlées avec les Chaux des Métaux imparfaits & des demi-Métaux , lorfqu'on les expofe au feu de fifion | Par M, ACHARD. P: ESQUE toutes les opérations par lefquelles les Chymiftes com- _pofent & décompofent les corps, font fondées fur l'action des menftrues, Il eft donc de la plus grande importance de déterminer, par des expé- riences exactes, quelles fonc les fubitances qui peuvent mutuellement fe diffoudre. ” Toute fufñon peut être confidérée comme une diflolution opérée par la matière ignée feule , ou au moyen de la propriété qu'a le feu de rendre fluides la plupart des corps, & de les mettre par-là en état de diffoudre d’autres corps fur lefquels ils n’ont point d’aétion , tant qu'ils font foli- des. Ain , en déterminant les altérations que fubiffent des fubftances non volatiles par le feu, l’on détermine en même temps fige Auide igné peut les diffoudre immédiatement ou médiatement, au moyen de la fluidité qu'il donne à l’une de ces parties compofantes, Dans ce Mémoire , je rapporterai le réfultat d'un grand nombre d’ex- périences faites dans la vue de déterminer l’aétion du feu fur les terres mélées en proportions différentes, mais connues, avec les chaux métal- liques. L'illuftre Pott, dont le profond favoir, joint à une afliduité infatiga- ble , a enrichi la Chymie d'un grand nombre de découvertes importantes, & qui le premier a montré l’avantage que la Minéralogie peut retirer de la Chymie, nous a donné, dans fa Lithogéognofie ÿ#des expériences fur ce qui fait l’objet de ce Mémoire : mais dans le temps où il a travaillé, lon regardoit encore l’argile, le tale, legypfe, &c. &c.,comme desterres pures, & l'on ne connoiff@it pas encore la magnéfie du fel d'Angleterre, Son excellent Ouvrage devint beaucoup moins utile , dès qu'on découvrit que les terres qu’il avoit, avec tous les Chymiftes de fon temps, regardées comme pures , étoient des mélanges de plufieurs terres. Outre cela, plufeurs Chymiftes reprochent à Pott d’avoir manqué d’exactitude ; mais je fuis perfuadé que c'eft à rort. Baumé & Macquer ont répété enfemble la plupart de fes expériences, & les réfultats ont été très-conformes à ceux qu'a indi- qués ce Chymifte , aufli profond dans la chéorie, qu'habile dans Ja pratique, f18o | OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, L'on connoît quatre fortes de terres, c’eft-à-dire , la terre vitrifiable, la terre calcaire, la terre du fel amer & la terre de l'alun. Depuis peu, lün a découvert une terre minérale particulière , contenue dans le fuor de fpath , que j'ai aufli trouvée dans Ja chryfophrafe de Siléfie, & dont j'ai recherché les propriétés dans un Mémoire que j'eus l'honneur de lire l’'an- née paflée à l'Académie, Outre ces cinq fortes de terres que nous fournit le règne minéral, j'ai cru qu'il feroit intéreflant de faire des expériences fur la terre animale & fur la terre destvégétaux , pour dé- terminer de quelle manière elle agit fur les chaux métalliques par voie de fufon. à Afin de ne pas pafler les bornes d’un Mémoire Académique , je ne rap- porterai maintenant que les expériences que j’ai faites avec la terre vitri- fiable; laterre calcaire , la terre du fel amer & la terre de l'alun ; dans un autre Mémoïre., je détaillerai les expériences que j'ai faites dans la même vue fur la terre animale &c la terre végétale; & dans un troifième, je donnerai les réfultats des expériences que j'ai faites pour déterminer l'action de la terre contenue dars le fluor de fpath , qui fe volatile, par lintermède des acides, furles méraux&cleurs chaux. La Nature ne nous fournit aucune de ces terres parfaitement pures , & ce n'eft cependant que dans cet état qu’elles peuvent être employées aux expériences. Il fallut donc imaginer. plufeurs procédés, fondés fur les propriétés de ces terres, pour les obtenir pures & en féparer routes les au- ‘tres fubftances étrangères avec lefquelles elles font ordinairement combi- nées , ou-du moins mêlées., Je vais indiquer en peu de mots les opérations par defquelles j'ai obtenu la terre vitrifiable , la terre calcaire, la terre alumineufe & la terre du “el amer dans le plus grand état de pureté poñlible. La terre qu'on nomme fort improprement vitrifiable , parce que, fon- due avec parties égales ou avec la moitié du fel de tartre , elle forme un verre, propriété qu’elle a de commun avec les autres terres, qui routes , finon par l’alkali, du moins par d’autres fels, comme le borax & le fel fé- datif, forment des verres; & qu’on pourroit parconféquent , avec autant de raifon, nommer tefres vitrifiables, eft la feule qui foit abfolument indif- foluble dans les'acides. Les Chymiftes, dans toutes leurs opérations , ont cru pouvoir y fubftituer un fable bien blanc, & par conféquent exempt de parties métalliques , que l’on croit être uniquement compolé de terre vi- trifiable, Avant d'adopter cette idée aflez généralement reçue , je: crus devoir faire un examen du fable. Je trouvai que le fable blanc de Freyen- walde, qui eft très-blanc , & qu’on regarde comme très-pur, contient plus d'un tiers de terre alumineufe & de terre calcaire , qu'on en extrait facile- ment au moyen des acides, après avoir divifé fes parties par la fufton avec le fel de tartre, . Comme il me falloir pour mes expériences une quantité confidérable de 6 terre | | L $ SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 181 terre vitrifable, je mêlai vingt-cinq livres de fable blanc de Freyenvalde avec cent livres de fel de tartre ; & après avoir diftribué ce mélange dans différents creufets, je Le fis fondre & obtins par {a diffolution dans l'eau 400 cartes de liqueurs de cailloux ; je la décompofai enluite par de l'acide vitriolique, & après avoirédulcoré le précipité, je Le fis fécher. Ce précipité étoit compolfé de toutes les terres qui avoient été difloutes dans l'eau par l'intermède de l'alkali; & comme de toures ces terres il n'y avoir que la terre vitrifiable qui fût indifloluble dans les acides, je fs digérer ce précipité avec 50 cartes d'acide marin : toutes les autres terres furent diffoutes, à l'excep- tion de la terre vitrifiable, que j'obtins de cette manière parfaitement pute. La terre calcaire eft de toutes les terres alkalines, & par conféquent diffolubles dans les acides, la feule qui retienne l'acide marin avec aflez de force pour que l’action du feu feule ne foit pas capable de l'en féparer. Cette propriété me fournit un moyen de la purifier & de la féparer de toutes les autres terres. Je fis diffoudre pour cet effet quinze livres de craie dans une quaritité fuffifante d'acide marin, & je diftillai cette folu- tion jufqu’à ficcité : j’obtins par-là un fel neutre terreux, que les Chymiftes nomment fel ammoniac fixe ; je le fis rougir fous une moufle pendant deux heures; l'acide marinfut dégagé de toutes les autres terres qu'il avoit diffoutes , excepté de la terre calcaire. J'étois donc für que la lellive de ce fel ne pouvoit contenir que de la terre calcaire, que je féparai de l'acide marin auquel elle étoit unie, en y ajoutant une folution de fel de tartre. La terre alumineufe fe trouve dans l’alun, & la magnéfie dans le fel amer. Je retirai ces deux terres par précipitation avec une leive alkaline , de la folution de l’alun & du fel amer que j'avois purifiés auparavant par plufieurs cryftallifations. Les chaux métalliques produifant dans la virrificarion des effets diffé- rents, fuivant qu’elles font plus ou moins déphlogiftiquées , il eft néceflaire de rapporter de quelle manière j'ai produit celles qui ont fervi aux expé- riences qui font le fujet de ce Mémoire. Les métaux parfaits ne pouvant pas être privés de leur phlogiftique , ne peuvent pas être réduits en chaux; ce qui m'a empêché de les foumerttre au même examen. Pour obtenir la chaux de cuivre, j'ai diffous ce métal dans de l'a- cide nitreux , & j'ai décompofé cette diffolution par de l’a'kali fixe. J'ai obtenu de la même manière la chaux de fer, la chaux de plomb & la chaux de zinc. Afin de priver l’étain de fon phlogiltique, je l'ai traité avec de l’acide nitreux. L'on fait que cet acide a la propriété de le cal- ciner & de le réduire en chaux très - blanche. Pour produire la chaux de bifimurh , j'ai décompofé fa folution faite dans de l'acide nitreux avec de Veau. Enfin, la chaux d’antimoine dont j'ai fait ufage a été faite comme Tome XXII, Part. I, 1783. MAR 5, Aa 132 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, . celle d’étain, c’eft-à-dire, en calcinant le régule d’antimoine par l'acide nitreux, Comme les différences entre les portions dans lefquelles étoient faits les mêlanges des rerres avec les chaux métalliques devoient néceffairement beaucoup changer les réfultats des expériences, j'ai cru devoir faire chaque mêlange dans Les fept différentes proportions fuivantes : 19, parties égales x 2°. une partie de terre contre deux parties de chaux métallique ; 3°. deux parties de terre contre une partie de chaux métallique ; 4°. une partie de terre contre trois parties de chaux métallique ; 5°, trois parties de terre contre une partie de chaux métallique ; 6°. une partie de terre contre quatre parties de chaux métallique; & enfin , 7 .quatre parties de terre contre une partie de chaux métallique. Comme je ne pourrois , fans A de beaucoup les bornes d’un Mé- moire, détailler en particulier le réfultat de chaque expérience , je pré- fère , tant pour cette raifon, que pour faciliter au Lecteur la comparai- fon des réfultats, de les marquer dans des tables, dont la première colonne indique la terre & la chaux métallique qui y a été ajoutée; la feconde , la proportion dans laquelle le mêlange a été fait; la troifième fait voir fi le mélange a été altéré par le feu de fufon, & quels font les changements qu'il a fubis ; la quatrième indique la couleur-du produit de l’expériences & lacinquième, fa dureté. Les quatre tables fuivantes renferment les expériences que j'ai faites: la première contient celles que j'ai faites avec la terre vitrifiable; la feconde , celles que j'ai faites avec la terre calcaire; la troifième, celles que j'ai. faites avec la terre alumineufe ; & la quatrième, celles que j'ai faites avec la terre du fel amer. MASBUL IE : -PORUE:M ISERE Mélange. TProporri.| R éfulrar. Î Couleur. | Dureré: Couleur dé plomb . à la furface , noire|Donnedesétincel- Scorie. & polie dans la| les avec l'acier. fraétion. Couleur de plomb| : Terre vitrifable ,[E partie. Mañfe en fcorie qui avoit percé|à la furface, noire Donnedes étincel- Chaux de fer, |2 parties. le creufer. & polie dans la les avec l’acier. fra&ion. Terre vitrifiable ak partie. Chaux de fr, |r parti, ————, er ET VAR Facile à pulvérifer Terre vitrifiable, |: parties. Maïfe qui n’étoit pas entrée entre les doigts. Chaux de fer, |r partige en fufon. Noire, Couleur d’ardoife se .… |Ma ï étoi: ée |: : : Terre vitrifable ,!r partie. ps a) de ep Ne A à la furface, noire Donne desétincel- Chaux de fer, 3 parties. > q fe HIpoise & polie dans la’ les avec Pacier: SEA fraction. ne Pl omremmmmmemalemonsmlene— Terre vitrifiable,|3.parties.| Mafle qui n’étoit pas entrée Noi Facile à réduire Û oire: Chaux de fer, |1 partie. en füuñon. en poudre, Re IN SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. Mélange. D ce Proporti. Terre vivrifable. | Ir partie Chaux de fer, pau | K éfulrar. Maffe fondue, poreufe, qui avoit percé le creule:. à la furface , noire "| Dureré. k | Couleur. | L Couleur d’ardoife| Donne beaucoup d’érincelles avec l'acier. dans la fraétion. i Terre viniuable ,|4 parties. TRE 4e Chaux de fer , a ee Mafle fondue. Noire. Facile à pulvérifer, Terre vitrifiable ,|x partie. Chaux de cuivre, 1 partie. Refte en poudre. Terre vitrifiable , L parte. Refteen poudre. Chaux de cuivre, 2 parties, Terre vitrifiable , |2 parties. Chaux de cuivre, |1 parte. Refte en poudre. Terre virifiable , ,|2 partie. Maffe quin n'avoit pas éprouvé Noi Facile à réduire en Chaux de cuivre ,|3 patties.| le moindre degré de fufion. | . oire, poudre. Terre aile, |; parties. Chaux de cuivre, partie. Refte en poudre. Terre vin vitrifiable ,|1 : partie, Chaux de cuivre, |4 parties. Refte en poudre. Terre vitrifable ,|4 parties. Chaux de cuivre,[r partie. Refte en poudre. Terre virifiable [1 partie. L Chaux de plomb ,|1 id Male non fondue. Blanche. Dure. T k LE bl f Maffe qui étoitentréeenfufñon; Ne donne pas d’é- CE de le se T parté.lelle éroitfort poreufe,& paroif Jaunâtre. [rincelles avec l’a- aux de plomb, |2 parues. | Git vitrifice dans la fraction. Icier. Terre vitrifiable , z parties. Chaux de plomb, I partie. Refte en poudre. | st : Ne donne pas d’é- Que PRAAE à I parue. * Verre. Verditre. tincelles avec l’a- aux de plomb ,|3 parties. Re Terre virifable, 3 parties. ‘ Chaux de plomb, |r patte | Refle en poudre. NE: : Ne donne pas d'é- Terre vitrifiable,lr partie. Verre Verdätre. tincelles avec l’a Chaux de plomb ,|4 parties AE Terre vitrifable ,|4 parties.| ; Chaux de plomb ,|1 partie. Refte en poudre. Terre viifiable |1 partie. | se fes | te Male. Grile. Facile à pulvérifer. Chaux _ d'étain ? F. DR | Terre vitrifiable ,|r partie. Chaux d’étain ,!2 parties. 2 parties. Terre vitrifable, fr partie. ]Chaux d'érain , Mafle fondue & vitrifiée. Maffe qui n’avoi: pas éprou- vé de fufon. Blanc àla furface, N & jaune mêlé de verd dans la frac- tion. e donne pas d’é- tincelles avec l’a- cier. Blanche. | HOME dure. a ——————_—— 0 Tome XXII, Pars, 4, 1783. MA RS. Aa2 184 Mélange. |Proporti. ù j c Terre viuifiable, r partie. Chaux d’étain, |3 parties. Terre vitrifiable, 3 parties. Chaux d’érain, |1 partie. Terre vitrifiable ,|T partie Chaux d’étain ,,4 parties Terre vitrifiable , 4 Parties. Chaux d'érain ,[T patte Terre vivifiable ,|z partie. Chaux de bifmath, Terre viuifiable, Chaux de bifinuth, Terre vitrifiable ,|2 Chaux de bifmuth, Terre vicifhable, Chaux de bifmuth, Terre vitifable , Chaux de bifmuth, II pattie. !2 parties. parties. I païtie, I partie. 13 parties. 3 parties. II partie. Terre vitrifiable ,|r partie. Chaux de bifmuth,|4 parties. Terre vitrifiable ,|4 parties. Chaux de bifuth,lr partie. Rs te ARE Terre vitrifiable ; Chaux d’antimoi. sm nes Terre viifñable, Chaux d’antimoi. 1 partie. 1 partie, 1 partie. 2 parties. Pc Er = RPM" Terre viuifiable ,|1 parties. Chaux d’antimoi. Terre ‘vitrifiable , trifiable ,Ir partie. Chaux d antimoi 3 parties. Terre virifable ,|5 parties. Chaux d’antimoi. p partie. Terre vitrifable , I partie Chaux d’antimoi APRES I partie. me 1 partie. Terre vitrifiable ,|4 4 parties. Chaux. d’antimoi |r parte. Terre vicrinable , fr partie, Chaux de zinc,|r partie. Terre vitrifiable , I partie. Chaux de zinc, |2 parties. | Réfitrar. | Maffe vitrifiée. Maffe qui n’avoit pas éprouvé de fufion. Verre. Refte en poudre. Refte en poudre. Mafle non fondue. Refte en poudre, =, Mafle qui n’avoir pas éprou- vé le moindre degré de fufion, Refte en poudre, l Verre, Refte en poudre. Verre. Verre. Mate non fondue. Verre, Maffe qui n’avoit pas éprouvé de fufion. Mañle parfaitement fondue & cp Mañle qui n’avoit pas éprou- vé de fufon. Refte en poudre. Mae qui, àla partie füpérieu- re, n’étoitpasentréeen fufion, mais qui, aux endroïs où elle! avoir touché le fond du creufer, avoit commencé à fe vitrifer, OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Couleur. Blanche, Blanche. Jauve. : Grife. Grifâtre. Jaune foncé. Blanc. Jaune. Grife. ——— Jaunûtre. Grilfe. Rougeâtre, tant à la furface, que dans la fra@ion. Grife. Blanche. Dureré. Ne donne pas d’é- tincelles avec l'a- cier. Facile à réduire en poudre. el Ne donne pas d’é- L tincelles avec l’a- cier. Facile à pulvérifer. Facile à réduire en. poudre. Ne donne pas d’é- tincelles avec l’a- cier. BRAS Donnedes étincel- les avec les avec l'acier. Donnedes éincel. érincel- les avec l’acier. Facile à réduireen poudre. Donne des étincel- les avec Pacier. Facile à pulvérier, Donne des étincel- les avec l’acier. Facile à Facile APRES Dure. me SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. | Mélange. Réfutrar. Terre vitrifiable ,|2 parties. Chaux dezinc, [1 partie. D | Proporri.] Refte en poudre. Male qui étoir parfaitement Terre vitrifiable ,|1 partie. 1 entrée en fufion. Chaux de zinc,!3 parties. Terre vitrifable ,|3 parties, Relte en poudre. Chaux de zinc,|r partie, | Mafñle poreufe & opaque , qui Terre vicrifiable ,|r partie.|étoit ‘entièrement entrée en Chaux de zinc ,|4 parties. fuñon. Terre vitrifable 4 parties. Kehe co pondre. Chaux de zinc, [x partie. PAL CCRRNIMERNE SEL T'AB'ÆE ES EFICLONN-DLE, Mélange. |Proporti.| Terre calcaire ,|1 partie. Chaux de fer, [1 parie. Maffe fondue & poreufe. Maïfe qui étoitentrée parfai- Terre calcaire ,|1 partie. tement en fufion ; elle éroit po- Chaux de fer, |» parties. |reufe , & avoit un brillant métallique. Mafle fondue , compofée de 2 parties. | 4 c P petits cryftaux très-brillants. 1 partie, Terre calcaire , Chaux de fer, D de ne de dope er PR re Maffe fondue, compofée de 3 parties.| petits cryftaux brillants, dont Terre calcaire , < 1 partie.| Ja furface étoit inévale, Chaux de fer, © Maife fondue, polie , qui avoit 1 partie. |percé le creufer, & dont la fur- Terre calcaire, x S 3 parties. |face étoit cryftallifée. Chaux de fer Terre calcaire , Chaux de fer, Terre calcaire , Chaux de fer, 4 parties. Mafle fondue, polie & non I partie.| __ porcule. Mañle fondue, poreufe, d’un 1 partie. | brillant métallique, qui avoit 4 parties. | percé le creufer. Male fondue , qui avoit un très-beau poli: à la furface, 1 partie.|elle étoit demi-tranfparente ; 1 partie. |& au fond, il fe trouva un bouton de cuivre. a —— Terre calcaire , Chaux de cuivre, — —_—_—_—_—_—_—_—_— Terre FT RUR .[Maffe virifiée, qui avoit per- cé le creufer. calcaire , 1 partie Chaux de cuivre, zpartes. “ts | porn e = = T lea; . [Maffefondue, qui n’avoit que; pres, Ca/Caire ;|z parties. peu de poli, poreufe; au fonddu! Chaux de cuivre ,[x PATUE. creufer, il fe trouva du cuivre. Réfuler. | 138$" Couleur. | Dureté. Blanche à la fur-| face, grisâtre dans la fraétion. onne desétincel- es avec l'acier. ps sl Ne donne pas d'é- tincelles avec l’a- cier: LIRE I, Blanche. CREER TS Dureré. ————__ Couleur. | Donnedes érincel. Noire. ; les avec Pacier. Donne beaucoup d’étincelles avec l'acier. Noire. LA Ed den cr; Donne des étincel. les avec l'acier. ae PET ERIQEe —————— Noire, Donne des étincel- les avec l'acier. Pre Donne beaucoup d’étincelles avec l'acier. —_—_—_—_—_—_—me Donnedes étincel- les avec l'acier. Eee. Gris foncé. Noire. Noire. Donne beaucoup d’étincelles. Noire, Donne des étincel- les avec l’acier, Rouge. Mélange de verd re 2 Tooge & de!Donnedesétincel- gris les avec l’acier. Donne desérincel- Rouve. z Es les avec l'acier. | 186 Mélange. Terre calcaire ,l3 parties. Chaux de cuivre ,|1 partie. ——— Terie calcaire , r partie. Chaux de cuivre »3 parties. Terre calcaire ;', parties. Chaux de cuivre »\1 partie. a —— a Terre calcaire ,!r partie. Chaux de cuivre > 4 parties. ————— 1 partie. [ partie. Terre calcaire , Chaux de plomb, Terre calcaire , Chaux de plomb, ! partie. parties. 2 parties. 1 partie. Le ? Terre calcaire , Chaux de plomb, ————…—s Terre calcaire , arties. Chaux de plomb, SH J partie. Terre calcaire, Chaux de plomb, Terre calcaire , Chaux de plomb , | Térre calcaire, I partie. Chaux de plomb, l4 parties. Terre calcaire ,|r partie. Chaux d’étain, Îr partie. 1 partie. 3 parties 4 parties, 1 partie, Terre calcaire »|r partie. Chaux d’érain, 2 parties. Terre calcaire ;|2 parties. Chaux d'étain, |r partie. Terre calcaire , EE arties. Chaux d’étain, 3P 1 partie. Terre calcaire ,|1 partie. Chaux d’étain, |3 parties Terre Chaux calcaire ,| 4 parties. d’étain , | partie. QU | Proporti.| Réfulrar. Male fondue & poreufe : au fond du creufet il fe trouva du cuivre. Mafle non poreufe, demi- tranfparente , qui avoit un très-beau poli: elle avoit percé le creufet; il fe trouva un grain de cuivre, Une partie avoit commencé à entrer en fufon; le refte éroit encore en poudre. Maffe fondue , non poreufe ; qui avoit beaucoup de poli : il fe trouva au fond du creufec un grain de cuivre. Verre. Verre. Verre qui avoit percé le creuler, Refte en poudre. Maffe vitrifice, Refte en poudre, Verre qui avoit percé le creufet. Maffe demi vitrifiée. a Mañle fondue, demi-tranfpa- rente , dont la furface étoit couverte d'une cronte blanche, opaque. Verre. IP OMRE Maffe qui avoit commencé, aux endroits où elle touchoit le creufet, à entrer en fufion ; mais qui, au milieu, étoiten- core reftée en poudrè. Verre dont la furface étoit couverte d’unecroûte blanche. opaque. Verre. » OBSERVATIONS SUR EA PHYSIQUE, | Couleur. | Rouoe. Gris. Rouge-jaune dans la fraétion, noir Ÿ é à la furface. Jaune. Jaune. Jaune. D'un gris jaunâtre. Jaune. Jaune. Jaune. Jaune verdätre. Dureré. Donnedes étincel- les avec l’acier. Donne des étincel- les avec l'acier. Donne desétincel- les avec l'acier. Donne desétincel les avec l'acier. Donne desérincel- les avec l’acier. Donnedesétincel les avec lacier. Donne des étincel- les avec l'acier. Donne desérincel- les avec l'acier. Done heaucoup d’étincelles avec l'acier, Donne beaucoup d’étincelles Pacier. avec Jaune foncé. Jaune verdâtre. La partie demi- fondue donne des érincelles avec l'a- cier, D Donne des étincel- les avec l’acier. Donnedesétincel- Jes avec l’acier. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. Mélange. \Proporti.| lerre calcaire kr partie. Chaux d’érain , :4 parues. ‘erre calcaire ,|1 partie. Chauxde bifmuth,!r partie. Terre calcaire ,|1 partie, Chaux de bifmuth,|2 parties Terre calcaire ,|2 parties Chaux de bifimuth,|1 partie PESTE Rats Terre calcaire ,|3 parties Chaux debifmuth,|r partie. Terre calcaire ,|r partie, Chaux de bifmuth,|3 parties. Terre calcaire ,|4 parties. Chauxde bifmuth, 1 partie. 1 partie. 4 parties. L partie 1 partie Tene calcaire , Chaux de bifmutb, Terre calcaire , Chaux d’antimoi. Terre calcaire Chaux d’antimoi 2 parties 1 partie. calcaire »,3 Parties. 1 partie. Terre -alcaire ? ‘’haux d’antimoi Re l'erre Chaux d’antimoi- 1 partie. 3 parties. Terre calcaire , Chaux d’anumoi Terre calcaire , à alcaire ,|4 parties. Chaux d’antimoi, 1 partie. Terre calcaire ,]! Patte. haux d’antimoi.|4 parues. J'erre calcaire [1 parue. Chaux de zinc |1 parue. Terre calcaire >|1 partie. Chaux de zinc,|2 parties. Terre calcaire ,|2 parties. Chaux de zinc ,|1 partie. Terre calcaire ,|3 parties. Chaux de zine,|1 partie. Terre calcaire ,|T partie. Chaux de’zinc ,|3 parties Terre calcaire ,,1 partie. Chaux de zinc ,|4 parties. Réfulrar. Male vitriforme, pelie, non poreufe, couverte d'une croire blanche opaque. Refte en poudre. Mafe vitriforme , qui n’avoit que peu de poli. Refte en poudre. Maffe vitriforme, poreufe & polie. Verre. Refte en poudre, Verre. Verre qui avoit percé le creufet. Mäffe parfaitement fondue, ,[T partie |lemi-tran{parente , qui avoit z parties. beaucoup de poli. Refteen poudre. Maïle fondue , demi-tranfpa- rente , polie. Maffe demi-tranfparente aux bords, opaque dans le mi- lieu, qui n’avoit que peu de poli. Mafe un peu moins que demi- tranfparente , qui avoicbea - coup de poli. Verre qui avoit percé le creufet. Verre. Verre. Verre. Maffe fondue, un peu poreule, dans laquelle il y avoit de pe- dits cryftaux brillants. Verre qui avoit percé le creufer. Verre. | | Couleur. Jaune foncé. Verdätre. Verte. Jaune. Jaune. Jaune. Jaune rougeätre. Jaune grisätre. Jaune avec des taches rouges & bleues. Jaune grisatre. Jaune foncé. Jaune foncé. Jaune foncé. Jaune foncé. — Jaune orisâtre. re" © Jaune. Jaune foncé. | Dureré, Donne beaucoup d’étincelles l'acier. avec Ne donne peu d’é tincelles avec l’a cier. Donnedes érincel- les avec lacier. Donne des étincel- les avec l'acier. a Donne des étincel- les avec Pacier. Donne des étincel- les avec l'acier. Donne beaucoup d’étincelles avec l'acier. RAR PTE Donnedes érincel- les avec l'acier. Donne beaucoup d’étincelles avec l'acier. Donne desétincel- les avec l'acier. Donnedesétincel- les avec l’acier. Donnedes éiincel- les avec l’2cizr. Donnedescuncel- les avec l'acier. Donne des étincel- les avec l'acier. Donne desétincel- les avec l'acier. Donne des érincel- les avec Pacier. Donne des étincel- les avec l'acier. 187 — 188 TA BLE TROUS LIÉÈME: Mélange. Terre d’alun ,]1 partie. Chaux de fer, |r partie. Terre d’alun ,|r partie.| Chaux de fer, |2 parties. Terre d’alun ,|: parties. Chaux de fer, |r partie. Terre d’alun ,|1 partie Chaux de fer, |3 parties. Terre d'alun ,|3 parties. Chaux de fer, |1 partie. Terre d’alun ,ft partie. Chaux de fer, + partiess Terre d'alun , Chaux de fer, Terre d'alun, Chaux de cuivre, Terre d’alun , Chaux de cuivre , Terre d’alun , Chaux de cuivre, 4 parties. 1 partie. 1 partie. \ partie. L partie. 2 parties. 2 parties, partie. | Proporai. | Réfiulrar. Mafe qui n’étoit entrée qu’en partie en fuñon. Maffe fondue, poreufe, dont la furface avoicun brillant mé tallique, & qui avoir décruitle creufet. TRANS ENS RSR UP EAU PRE Maffe qui n’étoit entrée qu'en partie en fufion. Mafle fondue , poreufe, dont la furface avoit un brillant métallique. Maffe qui n’étoit entrée qu’en partie en fufon. Maffe poreufe,qui avoit percé le creufer, & donc la furface avoit un brillant métallique Refte en poudre. Maffe qui n’étoir entrée qu’en partie en fufon. Maffe qui n’avoit pas éprouvé du tout de fufion. Refte en poudre. d’alun , Chaux de cuivre, Terre d’alun , Chaux de cuivre, Terre 1 partie. 3 parties. 3 parties. 1 partie. Terre d’alun , Chaux de cuivre, 4 parties. 1 partie Terre d’alun 1 partie. Chaux de cuivre, 4 paities. Terre d’alun - L I partie. | Chaux de plomb ,|r partie. Terre d’alun ,|r partie. Chaux de plomb .|2 parties. Terre d’alun ,l2 parties. Chaux de plomb ,|r partie, Terre d’alun ,|r partie. Chaux de plomb ,| 3 parties. Terre d’alun , 3 parties. Chaux de plomb ,|1 partie. Mafñfe qui n’étoit entrée qu’en partie en fulon. Refte en poudre, Refte en poudre. ——————— — Maffe qui n’étoit qu'en partie entrée en fufion : J'y trouvai quelques cryftaux, qui avoient un brillant métallique. Refte en poudre. Reite en poudre. Refte en poudre. Refte en poudre. Refte en poudre, | Couleur. Gris foncé, prefque aoir. Noire, Gris foncé , prefque noir, Noire. Noire. Noire. Brune rouge. Gris foncé. Brun rougeitre. —__——_—— |, “-Dureré. OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Donne des étincel. les avec l’acier. a Donne beaucoup d’étincelles avec l'acier. Donnedes ctincel- les avec l’acier. PS Donne beaucoup d’étincelles avec l'acier. Re Donnedes ctincel- les avec l'acier. Donne beaucoup d’étincelles avec l'acier. Donne beaucoup d’étincelles. Facile à réduire en ; Î À SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. | © Dureté. Mélange. Terre d’alun LE partie. Chaux de plomb ,|4 parties. Terre d’alun ,|4 parties Chaux deplomb,|1 partie. Terre d’alun ,|' partie. L partie. Sete Chaux d’érain, Terre d’alun ,|1 patte. Chaux d’érain, |? Parues. Terre d'alun ,|? Parties Chaux d’étain, |! PArtie. Terre d’alun ,|1 Partie. Chaux d’érain, [3 Parues Terre d’alun ,|3 parties. Chaux d’étain, [1 partie Terre d’alun ,4 parties. Chaux d’érain ,|L partie. Terre d’alun |! partie Chaux d’érain , [+ parties. Terre d’alun |! patte Chaux de bifinuth,}!_ Parts Terre d’alun ,[r pattie. Chaux de bifmuth.}2 parties. Terre d'alun , 2 parties. Cbaux de bifmuth,| r Terre d’alun ,|r partie. Chaux debilmuch,| ; parties. Terre d’alun , 3 parties. Chaux debifmuth,|1 partie. Terre d’alun ,|4 parties. Chaux de bifmuth,| 1 partie. Terre d’alun ,|r partie. Chaux de bifmuth, | 4 parties Terre d’alun ,|1 partie. Chaux d’antimoi.|r partie. Terre d’alun ,[x partie. Chaux d’antimoi.|2 parties. | Tome XXII, Parn I,1783. MARS. |Proporri. | Réfulrar. lifée. Refte en poudre. Refte en poudre. Mafle fondue, poreufe, qui n’avoit prefque pas de poli, dans laquelle il fe trouva des grains de métal difperfés, Refte en poudre. éprouvé la fufon: elle avoit peu de poli, & fa furface avoit 1 brillant femblable au bril- lant métallique. Refte en poudre. ————_—_—_—_— Refte en poudre. ie refte étoit en poudre. Maffe qui n’avoit pas éprouvé Ja moindre fufion. Maffe qui wavoit pas éprouvé une entière fufion ; fa furface étoit couverte de petits cryf- taux brillants, prises en trouva auffi dans la fra@ion. Refte en poudre, Refte en poudre, Refle en poudre. Refte en poudre, Refte en poudre. Refte en- poudre. Une partie refta en poudre, [ment de fufion, Maflenon poreufe, qui avoit] Maffe dont une partie avoit commencé à entrer en fulion ;, Pautre éprouva un commence- | Couleur, Verre dont la furface éroit inégale , & paroifloit eye Jaune foncé. Grife. Grile. — | 189 Donne des éincel les avec l'acier. Donne beaucoup d'étincelles av ’acier. ES a Donne beaucoup l'étincelles ‘ave l'acier. Donnedesérincel. les avec l’acie es Facile à écrafe avec les doigts 190 Mélange. Lerre d'alun , 2 parties. Chaux d'antimoi. I partie. |Proporri. Terre d'alun A Chaux d’actimoi. Terre d’alun ? Chaux d’antimoi. Terre d’alun , Chaux d’anumoi. Terre d’alun , Chaux d’antimoi. 1 partie. 3 parties. 3 parties. 1 parte. 4 parties. I païtie. I partie. 4 parties. Terre d’alun , Chaux de zinc, Terre d’alun , Chaux de zinc, Tare d’alun , ; Chaux de zinc, Terre d’alun Chaux de zinc, I partie. I partie 2 parties. I partie. T partie. 2 parties. »|3 parties. 1 partie. feire d'alun Chaux de zinc, Terre d’alun Chaux de zinc, >[T partie, 3 parties. >|z païtie. 4 4 parties. Terre d’alun , 4 parties. Chaux de zinc,]r partie. Male qui avoit ne un commencement de fufon. | Maffe qui n’avoit pe éprouvé du tout de füfon. Refte en re Refte en poudre. Mafledéjdih avoit éprouvé les premiers degrés de la fufon. Refte en poudre. Refte en poudre, Refte en poudre. Refte en poudre. Refte en poudre. Refte en poudre. Refte en poudre. Couleur. Grile, Bianche, | Grife. ———— mie OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, | Réfulrar. | Rere Donne des étincel- les avec l'acier. Facile à pulvérifer. Donne des étincel- ARE TR | 0 ji les avec lacier. [LE TABLE QUATRIÈME. Mélange. Terre du fel amer ir partie. Chaux de fer, |r partie. Terre du fel amer, 1 partie. | Chaux de fer Terre du fel amer, |2 parties. Chaux de fer, (£ partie. ,|2 parties. Terre du {el amer, h partie. Chaux de fer, É parties. | Terre du fel amer, | 3 parties. Chaux de fer, |1 partie. ———— Terre du felamer,|1 partie. Chaux de fer, |4parties "|Proporti. ] Réfulrar. qui n’avoit pas éprou- vé de fufon. DE Mañfle demi-fondue. (Mañe qui avoit pas éprou- vé le moindre degré defufon. Mafle demi-fondue, dont les parties méroient pas toutes réunies. Maïfe qui n’avoit pas éprou- vé le moindre degré de fufon. Male viifiée, qui avoit per- cé le creufet, Es lequel n' n étoit refté qu’ un grain mé- taHique. Terre du fel amer, | 4 parties. Chaux de fer, | partie. Terre du fel'amer, Chaux de cuivre, 1 partie. 1 partie. Rte] esse Terre du {el amer, !x partie, Chaux de cuivre, |2 parties. D nn ere een Male qui n° avoit pas éprouvé le plus peur degré de fuñon. Maffe qui avoit éprouvé un commencement de fufon. Mafe demi-fondue. Couleur. Noire. Gris Brun foncé. foncé. Grife. Noire. Grife. Grife. Dureté. Affez dure. Donnedes étincel- les avec l’acier. Facile à pulvérifer.Î Donnedes éuncel- les avec l'acier. CNE PU ECRRS Facile à réduire en poudre. Donne des étincel les avec l'acier. D ERENT e Facile à réduireen poudre. PE NE a EE Donne des étincel- les avec l’acier. Donne des éuncel- les avec l'acier. | ES PRO PS ET ns À re SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. Mélange. Terre du felamer,]2 parties. Chaux de cuivre,|r partie. |Proporti. Terre du fel amer |; partie. Chaux de cuivre, 3 ‘parties. Terre du fel amer, 1 partie. Chaux de cuivre, 4 parties. LEE Terre du fel amer, |4 parties. Chaux de cuivre,lt partie, HR 1 partie. 1 partie. => 1 partie. 2 parties. Terre du fel amer, Chaux de plomb, es Terre du {el amer, Chaux de plomb, Terre du fel amer, Chaux de plomb, Terre du fel amer, Chaux de plomb, 2 parties. 1 partie. 1 partie. 3 parties, a Terre du {el amer, 3 parties. Chaux de plomb, 1 partic. Terre du fel amer, 1 partie. Chaux de plomb, 4 parties. ——— 4 parties. I partie Terre du fel amer, Chaux de plomb , Terre du fel amer, Chaux d'étain , 1 partie, 1 partie. Terre du fel aimer, Amer,|r parte. Chaux d’étain, 2 parties. a ——— Terre du fel amer, r : E 2 parties. Chaux d’étain, I partie. Terre du fel amer, lamer,|r partie. Chaux d’étain, 3 parties. Terre du fel amer, arties. Chaux d’étain, 3P I partic. Terre du fel amer, I partie, Chaux d’étain, 4 parties | Réficlrat. Maffe demi-fondue. Maffe poreufe,quiavoit éprou- vé le premier degré de fufon ; dans la fraétion , elle avoitun brillant femblable au brillant métallique. Male qui éroitentréeenfufion, mais dont les parties n’étoient pas toutes réunies, Refteen poudre. Refte en poudre. a ——————— —— Relte en poudre. Maffe qui n’avoit pas éprouvé le moindre degré de fufon. Maffe qui n’avoit pas éprouvé la moindre fufon. ne SR Qu Maffe qui n’avoit pas éprouvé le moindre degré de fufon. Maffe poreufe , fondue , qui n’avoit que peu de poli, & dans laquelle il fe trouva des grains de plomb revivifié. Refte en poudre. PURES RES RL S pepe red Maffe qui avoit éprouvé la fu- fon, maisdont les parties n’é- toient pas toutes réunies. Mafle fondue, porcufe, qui n’avoit que peu de poli. Mafle poreufe, qui n’avoit éprouvé qu'une demi-fufon. Mañle poreufe , qui avoit éprouvé la fufon; elle n’avoit dans la fraétion que peu de po- li, & fa furface étoirinégale. Maffe dontune partie étoit en- trée en fufon , & dont l’autre étoit reftée en poudre. Maffe fondue, dontune partie s’étoit changée en un verre, tandis que le refte étoit opa- ique , & avoitune {urface iné- igale. Tome XXII, Part, 1, 1783. MARS, LpL: Dureré, Couleur. | Donne des érincel- Guie. les avec l’acier. Grile, Donnedesétincel- les avec l'acier. Giile. Donnedesétincel les avec l'acier. tt ’ PERRET s Facile à réduire en Bianche. poudre. Blanche. Affez dure. | Blanche. Facile à écrafer. Donne des étincel Gris jaunätre. les avec l'acier. Re lune TRS MUR RAT ct” Donne beaucoup Blanc (ale. d'étincelles avec l'acier. EE ) Donne beaucoup d’étincelles avec Pacier. Blanc fale. Ce PR Donne beaucoup d’étincelles avec l'acier. Blanc fale, . Donne beaucoup d’étincelles avec l'acier. Gtis jaunâtre, ns, | La partie fondue Blanche. donne des étincel- les avec l'acier. ms Jaune grisâtre. Donnedesétincel. les avec l’acier. Bb 2 192 Mélange. Terre du fel amer, |4 parties. | Chaux d’étain, [1 partie. Terre du {el amer, Chauxde bifimuth, I partie, 1 partie. I partie. 2 parties, Terre du fel amer, Chaux de bifinuth, 2 parties. L partie. À Terre du fel amer, Chaux de bifmuth, 1 partie. 3 parties, Terre dufel amer, Chaux de bifmuth, Terre du fel amer, |3 parties. Chaux debifmurh,|1 partie. I partie. Terre du fel amer, L 4 parties. Chauxde bifmuth, Chaux de bifmuth, Le Terre du {el amer, Chaux d’antimoi. 1 partie, — I parue. 1 partie I partie. Terre de fel amer, 2 parties. Chaux-d’antimoi. parties. r partie. Terre du fel amer, Chaux d’antimoi ———— 1 partie, 3 parties. er — | Terre du fel amer, Chaux d’antimoi Terre du'fel amer, Chaux d’antimoi 3 parties. 1 partie. —_———___—— 1 partie. 4 parties. — Terre du fel amer, Chaux d’antimoi Terre du felamer, haux d’antimoi. 4 parties. 1 partie, DER I partie. 1 paitie. 1 partie. Terre du fel amer, Chaux de zinc, [Terre du fel amer’ Chaux de zinc» Terre du felamer , | 2-parties. Chaux de zinc ,[r partie. A RS | Proporti| OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Réfulrar. Maffe dont une partie n’étoi que recuite, & l’autre entrée paifaitement en fufon. Refte en poudre. Mañfe qui n’avoit pas éprouvé le moindre commencement de fufñon. Refte en poudre. Refte en poudre. Maffe qui n’avoit pas éprouvé le moindre degré de fufions = nm Refte en poudre. Terre du fel amer, |4 parties. |Maffe qui n’avoit pas éprouve le plus petit degré de fufon. Relte en poudre, Mafle qui avoit éprouvé les| premiers degrés de la fufon ; fes parties n’étoient pas toutes réunies. — Maffe qui n’avoit pas éprouvé la moindre fufion. 2 CARS Une re Pete nn Male qui avoit éprouvé les premiers degrés de fufion. tm Maffe qui n’avoit pas éprouvé, la moindre fufon. Mafle fondue, opaque, qui brilloit comme du fucre. Maffe qui n’avoit pas fubi de fufon. — Refte en poudre. Refte en poudre. Refte en poudre. | Couleur. | Dureré. ; Je. q Blanche Donnedesérincel- les avec l'acier. Facile à réduireen ‘ Blanche. poudre entre les doigts. Facile à réduire en poudre entre les doigts. Blanche, ——_—————@—— Facile à pulvérifet entre les doigts. Blanche. | Donne desérincel- les avec l'acier. Grife. Facile à réduire en poudre , en la fer- entre les Blanche. Donne desétincel- les avec l'acier. Grile. Facile à pulvérifer entre les doigts. Blanche. Donne desétincel- Blanche. les avec l'acier. A ——— Facile à réduireen poudre entre les doigts. 2 ———— SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 197 À EEE ___ Mélange. | Proporii.| Kéfulrar. | Couleur. | Dureté. | [Maffe qui étoir entréeen partie en füufion ; elle étoir poreufe, Terre du (el amer, |1 partie. | avoit peu de poli, &ilyavoit ; Donnedesérincel- Chaux de zinc ,|3 parties. |à fa furface de petits cryftaux ; Grife. les avec l'acier. | fes parties n’étoient pas toutes réunies, —————. ne Terre du fel amer, |3 parties.|Maffe qui n’avoi: pas éprouvé Maure Facile à pulvérifer Chaux de zinc,|r partie. de fufon. C entre les doigrs. Ne donne que peu Chaux de zinç ,|4 parties. poli, & étoit inégale à fa Brune. d’étincelles avec farface. l'acier. Facile à pulvérifer E A 2 . 4 1 4 * Er Te £ NRA Maffe Age ses BAS SRIOENC Blanche. en la ferrant entre pynau e »j1 partie. . de fulion. | les doigts. Il ne me refte rien à ajouter, fi ce n’eft que la plupart de ces mè- langes, fur-tout ceux qui exigeoient, pour être mis en fufon, un grand degré de chaleur, ont été placés dans un fourneau où l’on fait la porce- laine, dans l'endroit où la chaleur eft la plus forte, & qu'ils y font reftés pendant tout le temps qu'il a fallu pour la porcelaine. Or, ce degré de chaleur étant bien fupérieur à celui que donnent des fourneaux à vent ordinaires , je fuis für que les mêlanges qui n'ont pas été mis en fufñon, réliftent fans recevoir dé dede au feu que peuvent produire des four- neaux femblables à celui duquel Pott a fait ufage pour les expériences dont il donne la defcription dans fa Lithogéognofie, & dont on fe fert ordinairement dans les Laboratoires pour les fulons & les vitri- fications. GO NOMME DRE à OUT MESUVRE-ANG LE; Par M. CARANGEOT. Mucri les progrès qu'a faits parmi nous, depuis quelques années , de goût de l'Hiftoire Naturelle, on ne peut fe diflimuler que l'étude de la Minéralogie, qui en eft une des branches effentielles, n'eft pas aufi avan- 164 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, cée qu'elle devroit l'être , fi l’on confidère fur-tout les excellents Ouvrages qui ont paru en ce genre. Sans vouloir les citer chacun en particulier, & pour ne pas s'écarter de notre objer, il en eft peu qui offrit des principes plus fimples & plus fürs pour la connoïffance des minéraux , que l'Efai de Cryftallographie publié par M. Romé de Ffle en 1772. Certe Science, apperçue dans fes premiers élémens par Von-Linnée, étendue & fondée en principe par notre favant Cryftallographe, fembloit, fuivantléx pre fion d’un de nos plus habiles Minéralooiftes, devoir Jetter un grand jour Jur l'Hifloire Naturelle du Règne Minéral (1), puifqu'elle nous fournit un moyen de plus pour reconnoître les fubftances de ce Règne, ainfi que /es principes qui entrent dans la compofition des corps (2). On devoit donc s'attendre au moins qu’en reculant les bornes de nos connoïffances , elle contribueroit à réformer les erreurs reçues, & empêcheroit d’en accréditer de nouvelles. Maïs, avouons-le, nous fommes uñ peu fuperficiels ; une étude ap- profondie nous effraie : on ne veut pas fe donner la peine d'étudier: on aime mieux fuivre d'anciens fyftèmes, en bâtir de nouveaux, que chacun tâche d'étayer à fa manière ; au lieu de fuivre la marche fimple, conf- tante & uniforme de la Nature, on établit différentes efpèces dans une même fubftance, fuivant les couleurs , la tranfparence ou l'opacité, qui lui font purement accidentelles, & on ne fait que s'égarer & multiplier les difficultés & les erreurs dans l'étude de la Minéralogie. Les cryftallifa- tions à la vérité ont été accueillies, même recherchées; mais plutôt pour leur éclat & le brillant de leurs grouppes, que par Le defir de les étudier, de les comparer, & d’en tirer des connoïflances fur leur nature, leur formation , leurs différences ou leurs rapports réciproques. Bien des gens regardent donc encore aujourd’hui l'étude des cryftaux comme une étude vaine & à-peu-près inutile : il en eft même qui vont jufqu'à reprocher à M. de l'Ifle la peine qu'il prend de prouver le rapport à une forme primitive, de certaines variétés, qui, au premier afpect, en paroiffent abfolument différer. Il auroit dû, dit-on, voir les chofes plus en grand , s’en tenir à la méthode de Linnée , dont il auroit pu développer les principes, & s'abftenir de détails minutieux & de rapports quelquefois forcés, &c. On ne veut pas voir que plus les variétés paroïflent éloignées de leurs - formes primitives, & deviennent par conféquent méconpoiffables à des yeux peu exercés, plus il eft important, dansun Livre Elémentaire fur-tout, d'en faire voir la liaifon & l'identité, par les paflages intermédiaires de l'une à l’autre; mais il eft inutile de juftifier 1à-deflus M. Romé de l’Ifle Gr) Sage , Eléments de Minéralogie, page 30. (2) DePlie , Effai de Cryftallog. , Difcours Prélim, , page 9. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 195$ L'accueil des vrais Savants, la traduétion en plufeurs langues de fon Effai de Cryftallographie, dont l'édition a été bientôt épuifée, prouvent aflez que rout le monde ne raifonne pas aufli fuperficiellement. Rien ne prouve mieux la juftefle & la profondeur de fa théorie, que la conftance des angles dans les formes cryftallines des fubftances minérales, & qui exiftent dans les variétés qui en paroiflent les plus éloignées. En efler, il eft géométriquement démontré que toute fubftance faline, pierreufe ou métallique , a une forme polyèdre, conftante & dérerminée, qui ne varie que par des troncatures plus ou moins fortes, plus ou moins multipliées, mais dont les angles font conftamment les mêmes dans tous les cryftaux de la même efpèce. Plufieurs Auteurs avoient obfervé les angles de certaines faces ifolées de différens cryftaux, & nous ent donné les mefures des triangles ifocèles du cryftal de roche & du tartre vitriolé, des rhombes & rhomboïdes du cryftal d'Iflande, de la félénite, du grenat, &c. Mais on n'avoit point tiré parti de ces premières données pout la mefure des folides eux-mêmes, & pour connoitre Le rapport géométrique des faces entrelles. Cette ob- fervation , qui aflure l'identité des fubftances par l'identité des formes, qui fimplifie l'étude de la Minéralogie, en ramenant à une mefure primi- tive & conftante quantité de variétés , dont on avoit fait autant d’efpèces, doit donc être regardée comme abfolument neuve, & due au hafard, ainfi que tant d’autres découvertes. L'Auteur, novice en Cryftallographie, mais très-defireux de fe former par une étude approfondie fous les yeux & par les inftructions du créateur de cette Science, travailloit à tailler & modeler en argile, d’après nature, des cryftaux que M, de l’Ifl: fait exécuter en terre cuite, pour accompa. gner le favant Ouvrage qui vient de paroître, Défefpéré, après plufeurs “tentatives infruétueufes, de ne pouvoir rendre avec vérité une forme très- bizarre du cryftal de roche, il s’avifa de découper , en tâtonnant dans une carte, l'angle que formoient deux des faces entrelles. Ces deux faces taillées, il fur furpris de trouver le même angle aux deux faces oppofées, & ainfi fuccellivement aux autres faces du même cryftal. L'expérience ré- pérée fur tous les cryftaux de roche qu'il avoit fous la main, il reconnu avec fatisfaction que les angles étoient conftants, & produifoient ; favoir, 104° pour la jonction des bafes de chaque pyramide, &. par confèquent 76° pour leur fommet, 142 pour l'incidence des faces de la pyramide fur celles du prifme, & 120° pour chacun des fix angles du prime, quelque forme bizarre qu'eut le cryftal. Il $empreffa de faire part de cette expé- rience à M, de l'Ifle. Ce Savant, qui en fentit toute l'utilité, la Jui fc * répéter, & reconnut, avec le plus grand plaifir, qu'elle avoit conftamment lieu fur les cryftaux des différentes fabftances minérales, Il étoit intéreffant, d’après cela, d’avoir un inftrument à l'aide duquel on pût, fans-aucune opération géométrique, & à volonté, mmefurer les 196 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, angles, non-feulement des cryftaux ifolés ou folitaires, mais de ceux qui, plus où moins engagés ou grouppés, quoique petits, préfentent aflez de furface pour en déterminer quelques-uns. E’Auteur a tâché de remplir ce but, en faifant exécuter par le fieux Vinçard, Ingénieur en Inftruments de Mathématiques, Elève du fieur Caniver, quai de l'Horloge , à Paris, celui qu'il a appellé goniomètre ou mefure-angle, & dont il a déjà donné la defcription dans Les Nouvelles Eittéraires de M. de la Blancherie, mais qu'il a perfectionné depuis. Il eft compofé de deux lames de cuivre où d'argent, de 3 lignes de large environ fur 3 à 4 pouces de long, fig. 8, Planc. I, A, B, E, D. La partie inférieure de chaque lame, qui fe termine en pointe obtufe A,E, eft évidée dans le milieu en coulifle d'une ligne de large, fur un pouce en- viron de long. Dans cette coulifle eft une vis garnie de fon écrou C, qui fert en mème temps de centre aux deux branches de cette efpèce de compas, & de vis de preffion, pour les contenir dans la fituation où on les defire. La partic fupérieure de la branche dormante A, B, eft évidée à queue d'hirondelle, & contient une coulifle du même métal , à laquelle eft fixé en I, au moyen de deux vis L, K, un quart, ou plutôt un demi-cercle G,H, I, divifé en 180 degrés. Certe couliffe, & le quart de cercle qui y eft adapté, font réunis au centre par une lame d’acier , de manière que Ja partie inférieure de l’inftrument peut s'alonger ou fe raccourcir à vo- lonté, fans que le quart de cercle change de centre, fuivant la grofleur ou la petitefle des objets à mefurer ; ce qui fe fait aifément après avoir defferré la vis, en prenant l'inftrument d’une main en B, & de l’autre en F, pour faire avancer plus ou moins vers la pointe A, la vis du centre, & le quart de cercle qui y tient, après quoi on en fait autant à la branche D, E. Certe feconde branche, qui fert d’alidade, n'eft en cuivre ou en argent que depuis la pointe E jufqu'en ». La partie fupérieure eft en acier, & ne conferve plus que la moitié de fa largeur, parallélement à la ligne du centre, afin de marquer exactement fur le quart de cercle les différentes ouvertures des pointes du goniomètre. Les deux premiers métaux étoient trop flexibles fur auffi peu d’épaiffeur, & l'acier rélifte beaucoup mieux aux différentes impreflions que la main fait éprouver à cette lame, pour lui faire parcourir fur tous les fens les degrés du quart de cercle. Comme la juftefle de l’inffrument conffte dans l'exactitude de la divi- fion & la folidité, pour obvier au travail du métal fur une étendue aufli confidérable , on a adapté au quart de cercle pour fupport au point F, une lame d'acier qui y ef fixée d’un bout par deux vis, & de l’autre par une feule à celle du centre ; de manière que l’un ne peut varier de pofi- tion refpectivement à l'autre. Il eft certain que l’analyfe chymique ef un des moyens Les plus fürs pour reconnoitre SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. x97 reconnoître les fubftances minérales ; mais on n’eft pas toujours à portée de faire ces effais, qui font plus ou moins longs, qui exigent une grande habitude dans les manipulations, & des connoiffances préliminaires & abfolument indifpenfables. Il fera donc vrai de dire que la Cryftallogra- phie eft une Science exacte , qui fera dorénavant du plus grand fecours pour l'étude de la Minéralogie; & que toutes les fois qu'une fubftance fera cryltallifée, la forme & la mefure de fes cryftaux, jointes à leur pefan- teur fpécifique, feront des moyens infaillibles pour les juger : dès- lors le quartz opaque cryftallifé , l'hyacinthe de Compoiltelle, l'améthifte d'Au- vergne, ne feront plus qu'une feule & même efpèce de cryftal plus ou moins homogène , plus ou moins tranfparent, ou diverfement coloré ; on diftinguera avec la plus grande exactitude le fpath pefant ou féléni- teux d'avec Ja félénite , & le prétendu quartz cubique fufñble fans addition ne fera plus qu'un fpath Auor traverfé ou encroûté de quartz. . BEST TRE ; D'ÉMMPIFE RRIS, SUR DEUX EXEMPLES DE FOUDRE ASCENDANTEi < j FLE avez inféré, Monfieur, dans votre Journal du mois de No- vembre 1782, une Lettre à M. de Volta fur la foudre afcendante, Je puis vous communiquer deux faits non moins curieux que ceux qui y font rapportés, Je tiens le premier, d’un homme qui n’étoit point Phyficien ; c'eft à caufe de cela que fon récit n’eft pas imaginé. Il y omet fans doute quel- ques circonftances dignes d’être remarquées ; mais un mauvais Obferva= teur (les bons nefont pas communs ) y auroit peut-être ajouté du fien, À force de tout voir, il auroit trop vu. £ Quoi qu'il en foit, voici le fait, tel qu'il m'a été raconté par un té- moin oculaire. Après avoir dépaflé un bois qu'il venoit de côtoyer, il s'at- têta pour voir le ciel, qui, ferein par-tout ailleurs, commençoit à fe couvrir au-deffus de fa tête; & ayant regardé derrière lui, il vit le long du bois une bordure de fraifiers chargés de fruits mûrs, tels qu'on en voit dans les jardins autour des plate-bandes; ce qui l'éronna beaucoup , parce qu’il ne s’en écoit pas apperçu en paffant par le même endroit. A quelques pas plus loin, il regarda encore derrière lui, pour confidérer Tome XXII, Part.I, 1783. MARS, Cc 198 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ces belles fraifes qu'il fe reprochoit de n'avoir pas goûtées ; mais au lieu de frailes, il vit de petites Aammes qui s'élevoient en pointes inégales à la hauteur commune d'environ un demi-pied. Cependant le temps fe couvroit du-deflus du bois fur-tout, & notre Voyageur Séloignoit. A la diftance de plus d’un quart de lieue, il fe retourna encore, & découvrit une Aamme qui s’élevoit à la moitié envi- ron de la hauteur des arbres, & le nuage qui defcendoit fort près de leur fommet. A quelques pas plus loin , il entendoit derrière lui des coups multipliés de tonnerre ; il redoubla fa marche, & s'applaudic de ne s'être pas arrété pour cueillir des fraifes. : Je puis citer le fecond fait , comme en ayant été moi-même témoins Je voyageoïis ; le tonnerre grondoit à mon côté, & un nuage effrayant , qui fuivoit la direétion du chemin que je prenois , s’étendoir infenfble- ment vers moi. J'allois à toute bride, afin d'arriver avant qu'il ne crevat. Je tournois cependant fouvent mes retards du côté de l'orage, moins pour en confidérer l’afpect frappant, que pour eftimer fes progrès, lorf- que la vue d’une flamme qui s'élevoit de terre à la diftance d'environ une lieue, fixa mon attention. Comme elle me paroïfloit occuper un efpace en longueur d'environ cent cinquante toifes, & que je ne pouvois pas difcerner {ur quoi fa bafe portoit, je crus d’abord que c'étoit un de ces incendies fi fréquens en Picardie ; & comme le fort de l'orage étoit immédiatement au - deflus, je penfois que ce pouvoit étre l'efler d'un coup de tonnerre qui auroit embrafé des maifons toutes couvertes de chaume, ; Mais je fus détrompé, en obfervant que le feu étoit plus bleuätre & moins clair que celui d’un incendie ; qu’il montoit bien moins haut; qu'il ne fe plioit pas au vent: & fur-tout, parce que je ne voyois point de fumée, j'en conclus que ce ne pouvoit être qu'une électricité terreftre, répandant la clarté d’une flamme par elle-même, ou allumant la vapeur qui s'élève des tas de fumier répandus fur un champ à labourer. . Indépéndamment de ces faits & de tant d’autres, qui établiflent l’exif- tence de la, foudre afcendante , la théorie y conduit tent naturellement, Lorfque la matière électrique eft furabondante dans l’atmofphère où dans quelqu'une de fes parties, elle cherche, ainfi que tous les ‘fluides, à fe mettre en équilibre ; fon effort produit l'orage, la foudre defcendante, & la pluie avec laquelle elle pénètre dans le fein de la terre. La terre à fon tour fe trouve imprégnée de matière électrique , qui doit s’accumuler en certains endroits, à caufe des circonftances particu- lières, ainfi qu'un nuage s’en trouve plus chargé qu'un autre. L'électricité terréftre , autant que l'électricité atmofphérique, doit donc chercher à mettre en équilibre, & produire des éclairs & des explofions ; en un mot, la foudre afcendante, ! à h SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. ‘199 Cependant, quoiqu’on conçoive aifément l’analogie de ces deux éleéri- cités atmofphériques & terreftres, on eft embarraflé lorfqu'il faut en faire Yapplication aux faits particuliers. C’eft dans les temps d'orage, & lorf- FE les nuages femblent chargés de matière électrique, qu'on obferve la oudre afcendante, & c’eft alors qu'elle devroit moins paroître, puifque c'eft alors que l'électricité de l'atmofphère pénètre la terre avec la pluie, & que la nuée, chargée elle-même, doit repoufler l'électricité terreftre, au lieu de l’attirer vers ellé. ri plus habile & plus verfé dans certe matière que moi, réfoudra fans doute cette difficulté. Je fuis, &c. P.S. Parmi tous ceux qui ont fait inférer des articles dans votre Jour: nal fur l'électricité, il n’y en a aucun qui ne fuppofe la diftinétion entre l'électricité politive & négative, & l’exiftence de l'une & de l’autre ; mais je ny trouve nulle part une notion précife de ces deux éleétricités & de leurs propriétés. Celui de vos Correfpondans qui traiteroit avec précifion ce petit objet, feroit plaifir à bien de vos Lecteurs, EYE'T TRR'E DE M. Le PrRiNce DE GALLITZIN, Sur la forme des Conduëleurs éleétriques. . Messieurs, Vous n’ignorez pas que jufqu'ici on a regardé la forme pointue comme la plus propre & la plus efficace pour terminer Les conducteurs électriques qu'on place fur les bâtimens, Plufieurs célèbres Phyfciens étoient conve- nus que, fi la pointe attiroit de plus loin le tonnerre, elle l’épuifoit en même temps au point d'en amortir le coup ou de le rendre plus foi- ble, &c. L'année pañlée, à Londres, M. Wilfon prétendit que c'étoit aux formes rondes au contraire que l'affoibliffement du tonnerre étoit dû. Pour prou- ver fon affertion , il fit, dit-on , des expériences publiques aux Waux-Hadl , Tome XXII, Part. I, 1783. MA RS. Cca »00 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, & ne manqua pas d’approbateurs. Y agit-il de bonne foi ou non? c’eft ce qu'il ne me convient pas de décider ici: mais toujours il eft certain qu'il eut des partifans , & que la difpute commençoïit à s’échauffer, Sur ces entrefaites, Sa Majefté le Roi de Pruffe confulta fon Académie de Berlin fur la forme qu'on devoit donner au faîte des conducteurs qu’il vouloit faire placer dans fa Capitale. M. Achard propofa l’ancienne mé- thode (les pointes): il les multiplia même ; c'eft-à-dire, au lieu d’une, il en vouloit autant que poflible, comme la figure 10, PL 1%, ce qui ne s’éloignoit guère de la routine ordinaire : mais depuis, ayant fait des expériences , il eft revenu fur fes pas , & en a propofé une toute nouvelle, qui s'éloigne également de l'une & de l’autre. {1 veut que les conducteurs foient terminés par une figure plane, par une afliette de métal. ; ; C’eft donc pour concilier ces différens avis, que j'ai été obligé de faire de mon côté des expériences, qui puflent conftater un jour lequel des trois mérite la préférence. J'ai l'avantage fur ceux qui m'ont précédé, de les avoir faites en prand, Ils ny employoient qu'une feule bouteille, qui, quelque grande qu'elle fût, n'égaloit pas, je crois, les batteries de 128 bouteilles qui m'ont fervi à ces expériences. Je m'y fuis pris de toutes les manières poflibles; & n’y cherchant que la vérité, aucun motif ne me portoit à pencher plus pour l’un que pour l'autre parti. Le temps ne m'ayant point non plus manqué, j'ai employé, fans me preffer, tout celui qu'il falloir pour vérifier ces expériences avec la plus fcrupuleufe exactitude. Voici les procédés que j'ai obfervés. 1°. J'ai commencé par favoir au jufte en combien de temps mes bat- teries de 128 bouteilles, chargées à.3$°. d’élévation de l’éleétromètre de Henley, s’épuifoient entièrement. Cette connoiffance me fervit enfuite-de règle, pour juger fi les corps que je leur préfentois contribuoient à leur épuifement, & de combien ils l'accéléroient, , 2°. Je préfentois alors à mes bouteilles (1}les trois formes en queftion , féparément & chacune ifolée, à 4 pouces de diftance d’une verge mé- tallique qui failloit hors des batteries. La pointe les épuifa, mais très-peu , & les deux autres corps ne firent aucun effet. Les bouteilles s’épuisèrent jufte dans l’efpace de temps qu'il leur faut ordinairement lorfqu'elles s'épuifent d'elles - mêmes. e o 25 Pie A g + di J ., 3°. Je répétai la même expérience , avec la différence feule, que j’ex- pofai Les trois corps à 3 pouces de diftance ; j'en eus le même réiultat, (x) Pour ne pas toujours répéter , j’avertis que , pendant toutes ces expériences , mes bateries ont été chargées à 35 degrés d’élévation de l’életromèrre de Henley. | ‘4 om nl >, ns GO à 2, à nine ” SÛR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 201 à l'exception que la pointe paroît avoir encore un peu plus accéléré l'épui- femenc des batteries. 4°. La même expérience, répétée à 2 & à 1 pouces de diftance , donna les mêmes réfultats ; les corps ronds & plats ne firent guère d'effer, & la pointe paroifloit agir à proportion de fon rapprochement des bou- teilles. Ces diverfes expériences m'occupèrent plufieurs jours. £ $°. J'expofai enfuite les corps aux bouteilles, les faifant communiquer par une chaîne ou plancher mouillé, ou la laiflant tomber daus un feau d'eau, & à 6 pouces des batteries. Le corps rond ne fit aucun effet ; le corps plat foutira l'électricité, 8 en fermant les volets, je il la foutiroit par un côté de fes bords. La pointe accéléra de trois "Quarts- d'heure l’épuifement des batteries, 6°. À 5 pouces de diftance, le corps rond ne fir rien ; le plat fic encore plus d'effet que dans l'expérience précédente, & la pointe accéléra de $2 minutes l’épuifement des batreries. 7°. Pour abréger, j'aurai l'honneur de vous dire, Meflieurs, que le corps rond ne commença à agir d’une manière marquée, que lorfqu'il fe trouva à 2 pouces de la batterie ; le piar lépuifoit alors avec force, & la pointe ne lui laifloit prefque pas le temps de conferver fon électricité. On entendoit un fifflement ; & les volets des fenêtres fermés, on voyoit une étincelle au fommet de la pointe, ce qui fe manifeftoit dans toutes les expériences où elle fe trouvoit à portée d'agir fur les batteries. 8°. Je terminai toutés ces expériences , en faifant communiquer ces trois différents corps avec les batteries, avant de charger celles-ci, c'eft- à-dire, éleétrifant les corps régarivemenr. Dans ces cas-là, la pointe em- pêchoit les batteries de fe charger. Le corps plane fit la même chofe , lorf- qu'il fut près d'elles. Le corps rond en étant à 2 pouces, en attira une étin- celle & fr l'office de l’éleétromètre. de Lafne ; & à 3 pouces , il occa- fionna® une décharge totale dans les batteries , & l’explofion en fut forte, # 9°. J’effayai aufli de décharger mes batteries avec un excitateur ter- minéen pointe. En ces cas-là, l'explofion n’en eft jamais bien forte ; le coup paroît être bien amorti. De toutes ces expériences , il réfulte, à mon avis, 1°, que la pornre elt celle qui attire le plus puiffamment l'électricité; & 2°. qu'elle paroïît en effet devoir épuifer l'électricité du nuage & en amortir le coup. 11 me femble par conféquent qu’on lui doit la préférence fur toutes les autres formes, & qu'en plaçant des conducteurs fur les bâtimens , on feroic bien de s'en tenir là. Je dois cependant vous avouer, Meflieurs, que toutes ces recherches fur Les formes en queftion me paroïffent peu importantes ; tout confifte 02 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, dans la manière de placer le conducteur. Si, d'une part, il eft ifolé de Æaçon à ne pas tranfmertre l'électricité du tonnerre au batiment ; fi, de l'autre, fa chaîne en eft aflez éloignée pour ne Fe donner de la crainte ‘qu'elle ne lâche l'électricité dans quelque coin de ce bâtiment; que d'ail- leurs cette chaîne communique fans interruption avec l'eau ou la terre humide, notre habitation fera fufifamment garantie des effets de la fou- dre: qu'importe après cela que le coup de tonnerre foit fort ou foible ? l'effentiel eit de s'en préferver, Or, cet effet eft immanquable , fi on peut £e fier aux expériences & aux règles que les plus habiles Phyfciens nous - ont prefcrites. ; S On m'a objecté à Londres, que l'électricité du nuage eft quelquefois en fi forte dofe , qu'elle fond les plus gros fils d’archal; mais que la pornte attirant de Loin, & épuifant par-là même le nuage de fon éleétricité , l'em- pêche d'en accumuler une fi forte dofe , & par conféquent un fi grand effet de la foudre ne peut jamais avoir lieu envers elle. Soit: mais de- puis qu'on fait quelle eft l’épaifleur du métal que l'électricité naturelle ne fauroit fondre, pourquoi ne pas-donner une épaifleur fufhfante à certe chaîne , au lieu d'y employer le fil d’archal , tant cet objet eft peu difpen- dieux? Je viens de placer un conduéteur fur le Château de Rofendal en Gueldres. Tout cet appareil a coûté, tous frais faits, & fans que j'aie faic d'avance aucun marché avec les Ouvriers, environ 50 florins d'Hol- lande, Ma chaîne a 2 lignes de diamètre : vous conviendrez , Meflieurs , gue , pour fi peu de chofe, il ne vaut pas*la peine de s'arrêter. Je crois devoir vous parler ici, Meflieurs , d’une Obfervation inférée dans le Journal de Phyfique de M. l'Abbé Rozier (Mars 1778, page 270) de la part de M. Brongniard , qui, par le moyen de lalkali-volatil- Auor , prétend rappeller à la vie les animaux tués par une commotion électrique : il en appelle à MM, le Marquis de Bullion & le Comte dela Cépède, qui ont répété les mêmes expériences avec un égal fuccès. Je fuis bien éloigné de lui contefter le fait; je voudrois feulemert qu’a- vant d’en conclure, on vérifiat fi c’eft bien à l’alkali qu'on doit ces effets merveilleux, Voici ce qui me porte à en douter. Perfonne , peutêtre, n’a plus facrifié que moi de ces efpèces d’ani- maux à l'électricité. Je croyois pouvoir parvenir à découvrir la manière dont elle occafonnoit la mort. J'en ai donc tué quantité. M. Munichs , très-habile Anatomilte ( Profefleur à Goningue), en a difféqué plufeurs: Dans le nombre de ceux qui ont effuyé le choc de mes batteries , la plu: part font reftés fous le coup. Plufeurs cependant qui paroïfloient morts , en font revenus péu-à-peu, fans qu’on ait pris d’autres foins que de trem- per ( quelques-uns même ) dans l’eau , & certainement fans qu'on ait penfé feulement à y employer de l'alkali, car alors je ne me doutois pas encore qu'il produisit quelqu'eftet en pareil cas. Je l'ai eflayé , depuis LA S UR L'HIST, NATURELLE ET LES ARTS. 203 e M. Sage nous en a découvert l'ufage , mais je n’en aï vu aucun uccès. Un de-ces animaux naturellement reflufcités, m'a fourni une obferva- tion fort curieufe, C'étoit une poule: elle effuya un choc de 6gboureilles, & parut morte. Un quart d'heure après, on vint me dire qu’elle commen- çoit à refpirer. Jen pris foin; elle revint peu-à-peu , & dans une heure de temps, elle put marcher : mais elle me parut aveugle & même im- bécille, fi je puis m’exprimer ainl; car elle étoit toujours dans les deux extrêmes, ou parfaitement tranquille & ne bougeant pas de la place, ou courant de toutes fes forces vers le mur & fautant contre. Cette céciré & cette frénélie lui durèrent quatorze à quinze jours ; elle mangeoit très- peu. Le troifième jour après le choc , elle eut une attaque d’épilepfie, qui de jour en jour devint plus fréquenté, fi bien que le jour de fa mort, elle ne difcontinuoit prefque pas de lavoir. Elle a vécu environ trente-deux jours. Je l'ai obfervé jufqu'à fa fin avec toute l'attention poflible ; & à l’inftant qu’elle fut morte, M. Mu- nichs l’a difféquée. Il l’a trouvée dans un marafme parfait, & maigre au- tant qu'un animal encore en vie peut l'être, Tout l'intérieur du corps étoit cependant en très-bon état ; mais la têre , où étoit le fiége du mal, étoir la chofe du monde la plus curieufe. J'en aï fait préfent à M. Camper ,'& il a bien voulu n’en donner le deflin & la defcription que j'ai l'honneur de vous préfenter ici. j AT LR Je ferai très-flaté, Meflieurs, fi cette Differtation peut le moins du monde vous intérefler. Recevez la avec votre indulgence ordinaire , & comme une marque de l'attachement fincère, de l'eftime parfaite & de La confidération très-diftinguée de celui qui a lhonneur d'être, &c, Explication des Figures. P Figure 11. repréfente la partie intérieure & fupérieure du crâne d’une poule morte un mois après avoir recu un grand coup éleétrique fur cette partie, par M, le Prince de Gallitzin, qui m'a fait préfent de cette pièce, que je garde pour la fingularité. À, B, C, eft la future coronaire .ordi- naire; & A,B,C,E, D, les os pariétaux qui forment la voûte du cräne fous laquelle eft' placée la cervelle. a;e,d,c,b,a. L'os frontis, entièrement régénéré, eft plus épais que n'étoit l'os original avant le coup dont cet os eft mort. Fig. 12, le même objet vu du dedans. j C,K,G,N,F,H,D,E. Les pariétaux formant la voute, divifés _en deux parts , une ligne ofleufe, K, D, le long de laquelle court le finus longitudinal. : ; H,1,N,G,K, M,H.L'os frontis mort elt entièrement féparé; on y 204 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE), voit, L, K, la ligne offeufe, qui eft La continuation de K, D,E, D, finuofité de l'os près de l'os occipitis. ; b,i,g,h,c,d,e,f, F. Os régénéré & embraflant avec deux portions g,h,f,f3 N, os mort; en forte que l'os original mort eft mobile dans l'os régénéré. 4 -Explication du Phénomène. Le coup a fait mourir l'os frontis entre les deux yeux de la poule ; il s’eft formé entre l'os mort & le périofte , un cal qui a pris la figure de l'os ori- ginal. Ce cal a auñi doublé le dedans des orbites , car H, L,M &HG, font les parties intérieures des orbites. Quand dans l'homme ( dans lequel cela arrive très-fouvent , fur-tout dans la jeunefle-) le tibia meurt, 1l fe forme un os tibia nouveau, mais plus épais , gatdant la même figure & aufli implantation des mêmes mufcles. J'ai dans mon cabinet plufeurs pièces de cette nature. M. Hun- ter a donné une figure & la defcription d'un tibia régénéré , dans le fecond volume des Medical Obfervations and Inquieries plate. Mais M. Troja, Napolitain, fi je ne me trompe , a donné dernièrement en r775, à Paris, une Difertation à ce fujet, dont on peut voir le précis dans le Suppléfhent du Dictionnaire Encyclopédique , avec des planches. Voyez la Table VII de Chirurgie, & Le huitième Mémoire de La Corref- pondance de Médecine, ê ConNcLUSIONn. Le coup électrique a donc détruit la vie de l'os frontal de la poule , fans faire mourir l'animal, & fans détruire l’organifation du périofte. IL faut donc que l’animal ait vécu long-temps après , puifque la régénéra- tion de cet os étoit fans cela impofhble. P. M. CAMPER, 29 Juin 1778. N.-B. Je dois ajouter ici que cet os régénéré ( ou plutôt engendré }) étoit comme enchaîné dans l'os frontal , & y eft comme dans un étui, d’où on l’ôte quand on veut, More du Prince de Gallirzin. ea sx ue LETTRE SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 205$ ARR EEYA RÉFÉZ Ce 2 A pE M. LE. Prince DE GALLITZIN, Où il rapporte quelques expériences nouvelles de M. ACHARD, A L'AUTEUR DU JOURNAL DE PHYSIQUE. * M. ACHARD , dont vous avez déjà rapporté plufieurs belles décou- vertes dans votre Journal, m'a prié de faire parvenir à votre connoif- fance ce qui vient de lui arriver au moment qu'il étoit occupé de faire des expériences fur les conducteurs électriques. Pour ne différer en rien de ce qu'il defireroit vous faire favoir , j'aurai l'honneur, Monfieur , de vous tranfcrire ici mot pour mot fa Lettre, » IL s’en faut de beaucoup que ce qu'on vous a écrit relativement à mon travail fur les conduéteurs , & fur-tout à l'égard des conclufions que j'en ai tirées , foic jufte. Je n’ai jamais dit ni foutenu que les conduc- font inutiles ; je fuis dans une idée entièrement contraire. Ce qui peut avoir fait fuppofer que je doute de l'utilité des conducteurs, c’eft un Mémoire que j'ai lu à l'Académie, dans lequel j'ai rapporté des obferva- tions que j'ai faites fur la foudre pendant l'été paflé. Je rapporte deux cas où la foudre eft tombée fur :0à corps beaucoup moins élevés, qui étoient très-peu diftans de corps plus élevés. Dans un de ces cas , Les deux corps étoient conducteurs dans le même degré : dans l’autre, le corps le plus élevé éroit une tour d'Eglife, furmortée d'une girouette de fer; & le corps beaucoup moins élevé fort près de la tour, fur lequel la foudre tomba, étoit une maifon de Payfan fans féraille au toit , & couverte de paille; en forte qu’on peut la regarder comme un bien moindre conduc- teur que la tour. Je dis, en terminant le Mémoire qui contient le détail de ces obfervations, qu’il me paroît difficile de concilier ces faits avec la belle théorie des LR FERA Voilà, Monfeur, ce qui peut avoir fait juger que je niois l'utilité des conduéteurs. Ayant appris qu'on me rendoit coupable de ce crime, que je fuis bien éloigné d’avoir commis, vous me rendrez un grand fervice , fi vous voulez bien faire inférer ma Lettre dans votre Journal, parce que je fuis fort intéreflé à défabufer le Public à ce fujet. Si vous fouhaitez de voir le Mémoire qui renferme ces obfervations Tome XXII, Part, 1, 1783. MARS. D d 206 OBSERVATIONS SUR LA FHYSIQUE, tel que je l'ai lu à l'Académie, je n'attends que vos ordres pour vous en envoyer une copie. » Je me fuis occupé, depuis quelque temps, à rechercher l'effet que produifent les différentes fortes d’airs fur les animaux par infufflation entre cuir & chair. J'ai fait mes expériences fur des chiens & fur différentes fortes d’oifeaux , même fur de petits oifeaux très-délicats. L'air fixe , l'air inflammable , l'air commun & l'air phlogiftiqué , n’en ont faitmourir aucun. Je nai pas fait l'effai avec l'air nitreux , parce que je ne doute pas qu'il ne produife une mort fubire. Deux chiens, auxquels j'ai infufflé de l'air in- flammable, ont paru triftes pendant quelques jours: mais cependant ils m'ont pas ceflé de manger de très-bon appétit ; l’opération ne paroît pas douloureufe. L'abforprion de l’air commun, phlooiftiqué & inflammable, #e faitavec à-peu-près la même facilité; mais l'air fixe s’'abforbe très-vite. Je parvins à faire abforber de cette manière, à un chien de taille moyenne, dans lefpace d'un jour, 10 quartes d'air fixe; ce qui m'engage à pro- pofer aux Médecins l'infufflation de l'air fixe entre cuir & chair comme un remède peu douloureux , point dangereux, & très-propre dans les maladies putrides. La grande furface qu'on peut mettre de cette manière en contact avec l’air fixe & la quantité proportionnée qui peut être abfor- bée par les parties fluides de l'animal, ne permettent pas de douter des avantages qu'il y a d’adminiftrer l'air fixe de cette manière, qui me pa- roît mériter beaucoup la préférence fur l’adminiftration qu'on peut en faire par lavement , ou en boiflon mélée avec de l'eau. HAN | tificiel, fait avec l’air commun , fe pratique d’ailleurs comme remèdes cela avec fuccès chez les Nèores. » M. Moulines, Académicien , & Miniftre du Saint-Evanoile, a préfenté ces jours paflés à notre Académie une machine électrique de fon invention, très-ingénieufement imaginée , dans laquelle le plateau de verre eft entrerenu pendant huit heures dans un mouvement très-uniforme, & aufi prompt que l'exige la production des phénomènes électriques. Quoique le plateau n'ait que 7 à 8 pouces de diamètre , il charge cepen- dant très-bien une bouteille de Leyde. La machine qui fert à mettre le plateau en mouvement , peut, par un léger changement, lui donner , üivant qu'on le juge à propos, un mouvement horizontal ou vertical. L'on peut aufli y faire mouvoir un cylindre ; elle eft fort fimple & d'un petit volume, n'étant compofée que d’un reffort & de quelques rouages , renfermé dans une cage de 15 pieds en quarré; ce qui fait que cette ma- chine eft portative, & qu'on peut la placer fur une table, Au moyen de cette machine, l'on peut, enla montant de 8en 8 heures, faire des ex- périences pour découvrir les effets d’une éleétricité continue pendant un temps quelconque, ce qui, avec les machines ordinaires , feroit fujet à des difficultés infinies. Sans parler d’une infinité de découvertes qu'on SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 207 pourra faire avec l’automate électrique de M. Moulines, je remarquerai feulement qu'elle eft très-propre à faire faire des progrès rapides dans l'é- lectricité médicale, » J'examine maintenant quel changement les airs fubiffent , lorfqw'ils féjournent pendant quelque temps entre la peau & la chair d’un animal. Quand je ferai plus avancé , je ne manquerai pas de vous en inftruire. Je fuis, &c. EE Y APPREND UE X Pour L'Analyfe Chymique de la Pierre de Saint-Ambroix , imprimée dans Le Supplément du Journal de Phyfique, 1782, page 394—401. D EPUIS la rédaction de ce Mémoire , & pendant qu'il s'imprimoit , on s’eft occupé à déterminer, par la vitriolifation , la quantité exacte des principes de la pierre de Saint-Ambroix, fuivant le rélultat moyen de plufieurs Analyfes. La pierre contient au quintal : , 1°: De terre calcaire pure, . . . . 411 + 2°. Deterre alumineufe, , . . . 14 7 3°. de terre de magnéfie , quantité inappréciable. Ca D CC Te AE ROBERT act 5°. De quartz, foufre & débris de pyrites, 7 6°. D'eaude cryltallifation &acideaërien, 32 2. 100 15. (EF # Cette pierre de Saint-Ambroix net point unique de fon efpèce : déjà on lui connoît deux analogues que s'eft procuré le Baron de Servières. 1°, Un morceau tiré des environs du Vigar. Cette pièce a tous Les ca- ractères extérieurs de celle de Saint-Ambroix : fa couleur eft feulement moins foncée ; les cryflaux fpathiques font aufi plus brillants & plus gros. | 2°, Une corne d'Ammon, venue du Dauphiné, fans qu’on ait pu fa- voir précifément de quel endroit. Ce rare morceau a $ pouces dans le fens Tome XXII, Part. 1,1783. MARS. Dd 2 208 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, de fon petit diamètre , & 7 pouces dans le plus grand. Ses propriétés coitt+ munes à la pierre de Saint-Ambroix font: a. Une croûte extérieure d’un bol jaunâtre. b. Une pefanteur confidérable, c, L'étincellement avec le briquet dans l’obfcurité , mais moins fenfible que dans la pierre de Saint- Ambroix , & accompagné d'une odeur fulfu- reufe , au lieu que l’autre répand dans les mêmes circonftances une odeur de caillou. d. La même nature de pâte, mais moins grife, avec des cryffaux fpa- chiques plus petits. e. La diflolution avec effervefcence dans les acides. : f. Le précipité noirätre que la noix de galle & le foie de foufre occafon- nent dans cette diflolution. Ces deux morceaux feront dépofés, ainfi que des échantillons de {a pierre de Saint Ambroix , au Cabinet de Sainte- Geneviève, où les Curieux pourront les voir. - Ne pourroit-on pas regarder également comine analogue à la pierre de Saint- Ambroix , une pierre appellée par Emmanuel Mendes da Cofla( Na- tural Hiftory of fofcils, pag. 235. LXX VIII ), Marmor fufto-cinereum Eu- trochis refertum. Marble With Eurochi from the Peak in Darbishite. Woopwarp, Cat. A. X, 4. GI ? ERRATA pour le Supplément du Journal de Phyfique, 1782. Page 394, ligne 21, Acad. des Sciences, 1721, lifez Acad. des Sciences , 1718. Ibid., lig. 27, lamelleux romboïdaux , fe lamelleux rhomboïdaux. Ibid. , lig. 28, cryftallifée, Lez cryftallifé. Pag. 395, après la quatrième ligne, ajourez , alinéa, frottée , elle répand une odeur fulfureufe où phlogiffiquée très {enfible. Ibid. , ligne 20 , après blanchâtre, merrez un point. Le mot extérieurement , qui commence la phrafe, doit êrre {éparé par une virgule du mot ainfr, Pag. 396, lig. ur , défignés ci deflus, 4/87 défignés ei-deffous. Pag. 398, lis. 8, fe montrent, Lez fe rencontrent. RE SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 209 EXTRAIT De la Séance publique de l'Académie des Sciences , Arts € Belles-Lettres de Dijon , tenue le 18 Août 1782. M. MaARET, Docteur en Médecine, Secrétaire perpétuel , a ouvert la Séance par la proclamation des Prix que l'Académie a adjugés, Le fujec étoit : La Fièvre intermittente. À confidérer la fréquence de certe maladie , on pourroit croire qu'elle étoit fi parfaitement connue, w’on n'avoit plus rien à defirer fur la théorie & fur la méthode à fuivre pes fon traitement. M. Maret, qui fait cette remarque , obferve qu'en général les maladies qui s'offrent le plus fréquemment à la fagacité des Obfervateurs , font celles fur lefquelles on a le moins d'idées füres, & dont le traitement eft le moins facile & le moins efficace. La raifon qu’il en donne, eft prife de l’impreflion que fait l'habitude de voir le même objer. On fe perfuade le bien connoître, parce qu’on l’a eu fréquemment fous les yeux; & de-là fe forme un préjugé, qui s’oppofe à ce qu'on en acquière une connoiffance plus intime. C'eft ce qui eft arrivé à l'égard de la fièvre intermittente ; & contme la Nature la guérit quelquefois d'elle-même , indépendamment de la mé- thode qu'on a fuivie dans fon traitement, il en eft réfulté qu'il éroit inté- reffant d'interroger encore les Obfervateurs fur une maladie dont jes fuites font fi fouvent funeftes. Déjà Morton, Senac , Verloff, Torti, Van Swieten ,avoient ouvert les yeux du Public fur l’effence des fièvres intermittentes, fur la propriété fpécifique du fébrifuge par excellence , du quinquina, fur la méthode qui pouvoit en aflurer l'efficacité. Mais malgré le jour avantageux fous lequel ces favants & célèbres Mé- decins avoient mis & ces maladies & l’action du remède qui doit en pro- curer la guérifon , la lumière qu'ils avoient portée fur cet objet n'avoit as encore frappé avec aflez de fuccès tous ceux qu'elle auroit dû éclairer. 1 falloit que, dans un fiècle où l'efprit philofophique a multiplié les dé- couvertes & afluré la marche des Obfervateurs & des Prariciens; il falloit que des hommes inftruits par la leéture de tous les Ouvrages des Aureurs qui les ont précédés, attentifs à fuivre les progrès journaliers de la Science qu'ils cultivent , éclairés par une pratique étendue & lumioeufe, vouluffent bien ajouter à la mafle des connoiffances acquifes , celles dont leurs réflexions , leur expérience, les avoient enrichis. C'eft dans l'efpérance de Les y engager , que l'Académie, toujours at= 2To OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, tentive à remplir les vues de fon illuftre Fondateur , à juftifier l’eftime qu'on daigne lui accorder, avoit invité les Médecins de toutes les Nations à « déterminer, avec plus de précifion qu'on ne Ja fait jufqu'à préfent, » le caractère des fièvres intermittentes ; à indiquer, par des fignes non >» équivoques , les circonftances dans lefquelles les fébrifuges peuvent être » employés avec avantage & fans danger pourles malades », Cette queftion , comme on le voit, préfentoit tout ce qu'il étoit né- ceffaire de favoir fur les fièvres intermittentes; fa réponfe ne pouvoit mé- riter les fuffrages de l’Académie, qu’autant qu’elle auroit été donnée par des Médecins confommés dans la pratique : & cette Compagnie annonce, avec la plus vive fatisfaction , que l'intérêt de Vhumanité, bien plus que la palme offerte à ceux qui triompheroïient, a fair defcendre dans la lice qu'elle avoit ouverte, des Praticiens confommés ; qu’elle eft enfin dans le cas de s’applaudir d’avoir dirigé l'émulation fur cet objet: , Parmi les Memoires qui lui ont été envoyés , elle en a diftingué cinq , dont trois lui ont paru dignes d'être cités avec éloge. Nous les ferons connoître , en rappellant leurs épioraphes dans un ordre relatifà l'impref- fion favorable que leur lecture a faite. Les deux autres , en réuniffant tous les fuffrages, ont mis l'Académie dans l'embarras de prononcer fur leur mérite refpectif : tous deux écrits avec fagefle , avec éruditien , avec mé- thade , caractérifent Les fièvres intermittentes d’une manière à ne pas per- mettre qu'on puifle jamais les méconnoître; tous deux déterminent les cir- conftances où l’on doit employer les fébrifuges , avec une exactitude faite pour prévenir la plus légère erreur. L'un de ces Ouvrages eft écrit en Latin , & l'autre left en Fran- çois. L'Auteur de celui-ci a fait, avec la liberté d’un Artifte maître de fon fajet, un portrait des fièvres intermittentes, dont la vérité eft frappante. Toutes les parties de ce tableau précieux font ordonnées avec une intel. ligence fupérieure ; & quoique le Peintre les ait traitées d'une manière large , il n'a point facrifié les détails intéreflants au defir de produire de l'effer. Si Penchaînement de fes principes & de fes conféquences , fi la préci- fion de fes taifonnementsexigent, de la part des Lecteurs, une attention foutenue , la clarté des développements ne rend point cette attention fa- tigante; & l'élégance du ftyle de cet Ouvrage , difons mieux , l’élo- quence propre au genre de cette production , en rend la lecture agréable & attachante. \ L’Auteur de l'autre Mémoire a donné des mêmes maladies une Hiftoire d’une fidélité , d’une exactitude qui ne laïffent rien à defirer. Un plan lu- mineux, rempli par les détails les plus inftru@ifs, rend cette Hiftoire un Ouvrage vraiment clafique. La multitude des obfervations dont l'Au- D, à , , 3 cut l'a enrichi, joint l'exemple au précepte , offre aux Lecteurs La faci- SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 217 lité de comparer l’état de leurs malades avec celui des malades dont on Leur a mis l’hiftoire fous Les yeux, & favorifant l'application des princi- pes, donne à ce Mémoire un degré d'utilité peu commune. Certe idée générale des deux Ouvrages qui ont réuni les fuffrages de TAcadémie, & que nous juftifierons par leurs extraits, ne peut manquer de faire appercevoir qu'il étoit difficile de prononcer fur leur mérite ref- petit; que fi l’un, par la beauté de fon enfemble & de fon exécution, étoit digne de la palme, lautre, par la richeffe de fes détails, méritoit également de l'obtenir; enfin , que tous deux rempliflant parfaitement les vues de l'Académie , il y auroit eu de l'injuftice à décerner le Prix à l'un , tandis qu’on n’auroit donné que l’acceffrt à l'autre ; qu'ainf, le parti que la Compagnie paroifloit devoir prendre, étoit de le partager égale- ment entre les Auteurs deces deux Ouvrages , puifque l’un .& l’autre y avoient un droit égal. Ce partage ne leur eût probablement pas été dé(a- gréable ; l'honneur d’avoir faitun Ouvrage reconnu bon & utile, eft fans doute ce qui les flattera le plus. Maïs tour annonçoit que ces Auteurs étoient des Médecins confommés dans la pratique ; & l’Académie , qui fent tout Le prix.du facrifice important qu'ils ont dû faire des feuls mo- ments de libres que leur ont laiflé leurs occupations journalières, a cru que fa reconnoiffance devoit fe marquer d’une manière plus éclatante, Elle a penfé qu’en déclarant que les deux Ouvrages dont nous allons faire connoître les Auteurs, ont également mérité le Prix propofé, elle devoit doubler ce Prix, & adjuger deux Médailles d’une égale valeur. L’Auteur du Mémoire Latin, qui a pour épigraphie: Quæ profuerunt , ob reélum ufum profuerunt , et M. Strak, Profefleur en Médecine en l'U- niverfité de Mayence. Celui du Mémoire écrit en François ,.eft M. Voullonne, Profeffeur ‘en Médecine dans l’'Univerfité d'Avignon. Ce favant Médecin remporta déjà , en 1776, le Prix de notre Académie, dont le fujet étoit: « La pré- > férence à donner dans l’occafion à la Médecine expectante fur la Mé- æ decine agiflante, & vice versé ». Le Public a confirmé, par fes fuffra- ges, la bonté du jugement de l'Académie ; & cette Compagnie efpère que le nouvel Ouvrage qu’elle couronne aujourd'hui ne fera pas moins favo- xablement accueilli. Les Mémoires dont l’Académie a jugé à propos de faire faire une mention honorable, font : Premièrement, celui qui porte pour devife le même paffage d'Hippo- -crate, qui fert d'épigraphe au Mémoire de M. Strak : Que enim profue- tunt, ob relum ufum profuerunt, 6c. Cet Ouvrage, écrit en fort bon Latin, eft vifiblement celui d'un Mé- decin Praticien très inftruit , & d’un homme de beaucoup d’efprit : on y EN des détails du plus grand mérite, des idées neuves & très- es. 212 OBSERVATIONS SURILA PHYSIQUE, : Parmi celles qui doivent faire honneur à cet Auteur , eft l'invention d’un Nozomètre, à l’aide duquel il propofe de claffer toutes les maladies. Les différents degrés du développement de la chaleur animale , font les termes dont ce Médecin forme fon échelle. Il place dans le point le plus élevé les maladies qu'il nomme phlosiftiques, eu égard à l'abondance de ce prin- cipe, décélée par Les fymptômes; & dans le plus bas, celles où la chaleur au-defleus de la naturelle, annonce que le feu vivifiant eft fur le point de s'éteindre : invention ingénieufe , dent l'application peut être d’une grande utilité dans la pratique médicinale, & qui doit donner une idée bien avan- tageufe de fon Auteur. Auffice Savant eüût-il difputéle Prix , peut-être avec avantage, fi le defir de tout dire ne l’eût pas jetté dans une diffufon fati- gante; fi, emporté par fon imagination, il n’eût pas employé la plus grande partie de fon Mémoire à l'explication de la caufe prochaine de la fièvre, explication des plus ingénieufes , & très-favante, mais qui tient à une théorie trop peu avancée pour entraîner la conviction ;enfin , s’il n’eût as cru devoir traiter de tous les genres de fièvres, & fe fütrenfermé dans Je fujet propofé. 1 Le fecond Mémoire que l'Académie a jugé à propos de faire citer avec éloge, eft celui qui porte pour épigraphe ce vers de Lucrèce : Prima caloris enim pars eff poftrema rigoris. Son Auteur paroîcun Médecin guidé par une excellente théorie, & éclairé par une pratique heureufe. Ses idées fur La caufe prochaine de la fièvre in- termittente, font, à peu de chofe près, très-juftes. Il verra, par la lec, ture des Mémoires couronnés , qu'il ne lui reftoit qu'un pas à faire pour dé- terminer cette caufe d'une manière convaincante. Ses vues générales fur le traitement de la fèvre intermittente font excellentes. Tous les détails dans lefquels il eft entré fur les trois principales efpèces de cette fièvre , juftifient ce que nous avons dit, & l’annoncent comme un bôn Praticien : on eft feulement étonné que l’expérience l’autorife à aflurer queles purga- tifs, à la fuite de l’'ufage du quinquina , ne rappellent pas la fièvre ,tandis qu'elle paroît avoir prouvé le contraire à tous les autres Médecins. Si cer Auteur n’a pas eu , dans le concours, tout le fuecès qu'il pouvoit efpérer, c'eft que la crainte de la prolixité lui a fait négliger de faire une mention plus exprefle des efpèces fecondaires de fièvres intermittentes ., & de s'occuper des maladies qui leur fuccèdent; c’eft que la partie du ftyle , quoique par elle-même peu importante dans un Ouvrage de Sciences , donne, même à mérite égal pour le fond , bien de l'avantage aux Con- currents lorfque Ile eft foignée. Nous efpérons qu'après avoir lu les Ou- vrages qui l'ont emporté fur le fien , l'Auteur n'accufera pas l'Académie de trop de févérité. Le troifième des Mémoires dont l'Académie a voulu qu'il füt fait une mention bien die ti SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 213 mention avantageufe , a pour devife une affertion [umineufe de Syden- bam : Ef? febris ipfa Nature infirumentum. Certe vérité, à laquelle l'Auteur donne un peu trop d’extenfion , eff {a bafe de fa théorie; c’eft d'après elle qu'il définit la fièvre intermittente, &c qu'il explique tous les phénomènes qui caratérifent cetre fièvre. I n'admet point de levain fébrile particuliër. ILne croit pas que le quin- quina agifle par une propriété fpécifique ; il le regarde feulement comme tonique & antifeptique. Îl eft probable qu'il fe trompe : mais fa pratique n'en eft pas moins fage , tant il eft vrai que les théories font fouvent indif- férentes ; ce font des routes diverfes qui conduifent au même but. Le Mé- moire dont il eft queftion eft très-bien écrit , & prouve que fon Auteur eft un homme d'efprit. Les détails qui le rempliflent, annoncent qu'il eft l'ouvrage d'un Médecin qui a lu avec fruit , mais qui n’a pas encore eu l'avantage d être éclairé par une pratique étendue ....; & un laconifinc qui pourroit faire foupçonner que l'Auteur n'a pas faili, toute l'étendue de la queftion propolés, fait reflembler fon Ouvrage à la première efquifie d’un tableau qui refte encore à faire. Nous terminerons cette Notice des Mémoires que l'Académie a cru devoir diftinguer , par une réflexion bien fatisfaifante pour tous les véri- tables amis des hommes, & fur-tout pour les Médecins que l'humanité rend fenfibles aux progrès de leur Art. Tous les Auteurs de ces différents Ouvrages ont reconnu que Le quinquina étoit Le fébrifuge par excellence: tous le confeillent fouvent à très-grande dofe, toujours comme un re- mède à continuer dong-temps. Le préjugé qui le fait fi fréquemment re- garder comme pernicieux, dira-t-il que les climats en varient l'eMicacité? Nous avons à lui donner une réponfe qui ne permet pas de réplique. Un des Auteuts couronnés habite l'Allemagne, l’autre une des Provinces mé- ridionales de ce Royaume. Celüi donc nous avons cité l'Ouvrage au pre- mier rang parmi ceux dont l'Académie a voulu qu'on fit une mention honorable , nous a paru réfider en Italie. Il eft probable que les Auteurs des deux autres font François, La diverfité des climats n'infue donc pas, comme on le préfume, fur les effers de ce précieux fébrifuge; & fi nous ofions apporteren preuve de cette vérité notre pRoRe expérience , nous pourrions dire que, depuis plufieurs années, éélairés notamment. par Verlof & Torti, nous lui avons vu opérer des prodiges; & que dans celle-ci, où les occalons d'y avoir recours fe font fi menton mul- tipliées , enhardis par l'unanimité des fuffrages des Auteurs qui ont con- couru pour le Prix, nous l'avons employé avec le fuccès le plus atteur, Tout confifte à faifir les circonftances où ce fébrifuge peut être utile: Les Mémoires couronnés les ont déterminées avec une précifion qui doit bannir toute inquiétude. Leur lecture portera fur cet ae le jour Le plus lumineux; & leur extrait, que nous allons lire, pourra tout au moins Tome XXII, Pare, I, 17983. MARS. . Ec 214 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ébranler un préjugé, que nous voudrions pouvoir détruire , parce qu'il eft infiniment dangereux. , k ESP IRUANTOT DU" MÉ M O'I1RBSD.E M. STRA K.. 8 . C E Mémoire, que nous avons dit être écrit en Latin, eit divifé en trois livres, & chacun de ceux-ci en plufeurs chapitres. Dans le premier, l’Auteur donne tout ce qui a rapport aux fèvresin- termittentes , à leurs caufes éloignées & prochaines ,à la marche de leurs accès , à leurs récidives, & au traitement que, fuivant les circonftances , il convient d: faire aux malades qui en font attaqués. Il a confacré le fecond à l'expolition des maladies , qui, fous des ap- parènces trompeufes, font de véritables fièvres intermittentes, & qu'il nomme fièvres intermittentes mafquées. Il décrit dans le troifième les maladies qui fucéèdent fouvent à des fiè- vres intermittentes vraies. ° Le premier, qui eft fous-divifé en neuf chapitres, préfente, avec le plus grand détail, tout ce qui peut faire reconnoître les différentes efpèces de fièvres intermitteatess tout ce qui peut éclairer fur J& méthode à fuivre, dans leur traitement. quelles que foient les circonftances dans lefquelles fe trouvent les malades. La caufe prochaine de cette fièvre eft, felon M. Strak, un miafme par- ticulier, dont l’explofion produit les accès , mais qui a befoin de trouver, foit dans les premières voies , foit dans la maffe humorale, foit dans quelques parties du corps, des humeurs difpofées à s’aflimiler avec lui. Il compare ce miafme à celui de la variole, qui eft fans effec fur ceux donc les humeurs ne font pas difpofées à entrer en combinaifon avec lui. La même comparaifon fert à M. Strak pour rendre railon des variétés de la fièvre interinitrente & d2s événemenhcs divers qui la terminent: A l’aide de cette théorie, l'Auteur rerd fenfible pourquoi ces fièvres règnent épidémiquement en différentes faifons, & font endémiques en certains pays; pourquoi il eft des perfonnes qui ne l’effuient point; pour- quoi elle eft bénigné & cède promptement chez les uns , tandis que chez les autres elle eft opiniâtre, & prend fouvent un caraétère de malignité; enfin, pouiquoi la Nature la guérit quelquefois feule; pourquoi lAre parvient fouvent a même but par le fecours des relächants , -des dé- layants & des évacuants , & pourquoi il eft prefque toujours obligé de rep éd ln 3 C = à cn re x at d SAME F « SUR LHIST. NATURELLE ET LES ARTS. 21$ recourir au SAR que l’Auteur regarde comme le feul fébrifuge proprement dit, à raifon d’une propriété fpécifique ; tous ceux qu’on dé- cure de,ce nom-n'étant que des correctifs des humeurs, & n'opérant la . guérifon de la fièvre que par la deftrüction du foyer néceffaire à l'explo- fion du mialme fébrile. « Cette théorie guide M. Strak dans le développement de la méthode à employer contre les fièvres incermittentes, . Comme il admer qu'ik ef des circonftances où ces fièvres font un re- mède, en tant qu’elles peuvent epérer la réfolution de plufieurs engorge- ments & dépurer la maffe humorale , il s'attache à défigner celles qu'il faut abandonner aux feuls foins dela Nature. Quant aux autres, il veut qu'on les attaque par le fpécifique , dès qu'il eft pôflible de le faire fans danger; & pour faire reconnoître cette pof- fibilité, il fair obferver que chaque accès de fièvre intermittente eft ter- miné par uve crife ; qu'il s'en opère une autre après un certain nombre d’aceès ; & enfin, une troifième après la ceffation de cette maladie. La première , toujours partielle & incomplerte, n'autorife pas l'ufage “du quinquina ; ce n'elt qu'après la fecande qu'on peut l'employer avec fuccès. Ce reinède n’eft plus nécefTaire après la troilième, qui elt prefque toujours l’effec de l'action du fébrituge. L ; Une expolñrion claire des fignes qui caractérifenc La feconde efpèce de crife, met tous les Praticiens en état de faifir le moment favorable pour attaquer La fièvre par fon fpécifique: mais fouvent il feroit dangereux d'attendre ce moment ; les accès ont une intenfité maligne, qui ne tarde- roit pas à les rendre funeftes. M. Strak en fait la remarque , indique les fignes auxquels on reconnoïîtra qu'atrendre plus long-temps pour adminiftrer ce remède, ce feroit expofer la vie des malades, & veut qu’alors on brufque l'ufage du quinquina; on en porte la dofe fort haut. - “ z La diminution des accès, leur ceffation même, ne paroiffent pas à ce favant Médecin être .fuffantes pour engager à cefler l'ufage id q'in- quina , lorfqu'on a commencé de le donner. Le miafme fébrile peut n'é- tre qu'afloupi & dépofé dans quelques vaiffeaux , dans quelques points du tiflu cellulaire, éloignés du torrent de la circulation. Ce n'eft qu'à l'ap- parition d'une urine abondante & claire, qu'il confeille de cefler L'ufage de ce remède. fl en a xdonné quelquefois. jufqu'à 6 onces & plus. Tous les confeils de ce célèbre Praticien font juftifiés par une infinité dobfervations concluantes ; & ce qui doit augmenter la confiance qu'ils méritent, c'eft que , parmi ces obfervations, il en eft dont la date re- monte jufqu'en 1749. On ne peut pas dès-lors foupçonner dans l’Auteur de cet excellent Mémoire , l'enchoufiafme de la jeunefle, qui fait voir bien fouvent ce que l’on defire. Tout ce qu'il avance fur l'ufage du Tome XXII , Part, 1,1783.MA RS. Écr2 216 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, quinquina eft autorifé par une pratique de plus de trente-deux ans, & l'on voit que ce‘remède a été pris avec le plus grand fuccès par des nourrices, par des femmes en, couches, & même par des femmes en- ceintes. Des obfervations non moins concluantes wiennent appuyer les préceptes dont les deux autres livres de ce Mémoire font remplis. - Toutes les maladies, qui ne font que des fièvres intermittentes maf- quées , font décrites dans le fecond avec une fidélité digne des plus grands éloges; leur caractère y eft défigné par des fignes faciles à faifir & dé- cififs ; leur traitement, expofé avec une clarté, avec une fimplicité qui portent la conviction: on y voit que le quinquina', employé avec les mé- mes attentions, les mêmes réferves , la même prodigalité que dans les vraies fièvres itermittentes, a procuré la guérifon de ces maladies dé- guifées. £ C'eft encore par un grand nombre d’obfervations que M. Strak, dans fon troifième livre, prouve les avantages que l’on doit attendfe du quinquina dans les maladies qui font fréquemment la fuite des fièvres intermittentes. IL y faic mention d’obftruétions confidérables, de jauniffes , d’hydropilies guéries par ce remède, parce que le miafme fébrile dépofé fur les vifcères en étoic la caufe. Mais ce qui fait un honneur infini à ce favant Profeffeur , c’eft la méthode qu'il confeille de fuivre en pareilles . circonftances. À Si la fièvre a ceffé, il veut qu'on la rappelle par des purgatifs & des apéritifs , qui feront en quelque forte fortir de fa tanière le miafme fébrile, pour l’expofer à l’action du fpécifique. Ce trait de génie auroit fuff pour mériter à l’Auteur la palme que l'Académie lui a adjugée. On verra, par Fextrait du Mémoire de M, Voullonne , que la Compagnie , en ne par- tageant entre les Auteurs que l'honneur de la victoire , en donnant à cha- cun d’eux une médaille de la valeur de 300 livres, comme une marque diftinguée de fon eftime, n’a fait qu'un acte de juftice. y PASSER À DO DU MÉMOIRE DE M VOULLONNE. La UTEUR n'annonce point de divifions dans fon Ouvrage; mais un enchaînement de principes & de conféquences, une diftribution mérhodi- que des différentes queftions renfermées dans le Programme de l’Acadé- mie, donne avec la plus grande clarté ce que Auteur n'a pas cru de- voir promettte en commençant, SURL'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 217 A des réflexions fages fur l’exiftence réelle des fébrifuges, fur Jescaufes de l'erreur qui a fait décorer de ce nom un nombre prodigieux de mé- dicaments, fur l'importance de la queftion propofée par l’Académie, M. Voullonne fait fuccéder une expofition du point de vue fous lequel il a envifagé cette queftion. &« On nous FE à ; ditil, d’afigner Va » bord à la fièvre intermittente fon véritable caratère, & de marquer en- » fuite quels font dans cette maladie Les fignes qui exigent qu’on l’at- > taque par des fpécifiques >. On peut, d'après cet énoncé, juger du plan que va fuivre l’Auteur ; & ce plan, il l’a rempli d’une manière fi heureufe, qu'il feroit peut - être impoñlible de faire mieux. Il définit la fièvre intermittente « une maladie qui réfulte de l’enfem- » ble de plufieurs maladies fébriles, dont chacune eft aflez courte dans » fa durée, & paroît effentiellement diftinguée de celle qui la précède & » decelle qui la fuit, auxquelles cependantelle reflemble pour l'ordi- » naire », a Il établit une diftinétion entre les fièvres périodiques & les fièvres inter- mitrentes ; ne compte parmi ces dernières que celles dont les intervalles des accès ne s'étendent pas au-delà de quatorze jours; relègue parmi les périodiques toutes celles dont les intervalles font plus prolongé, fair ob- ferver que, dans les intervalles des véritables intermittentes , la maladie fubfifte toujours d’une manière fenfible, tandis qu'il n’en exifte rien dans ceux des périodiques ; que chaque accès d’intermittentes a, de même que les maladies aiguës, trois temps diftindts ; mais que ces temps, marqués ordinairement dans les premiers par un froid plus ou moins vif, par une chaleur forte, par une fueur qui termine l’accès, ne font pas abfolument effentiels tous trois pour caraétérifer une fièvre intermittente. Que le premier , que le«froid , qui fouvent eft à peine fenfble, com- mence toujours par les pieds, & fouvent eft remplacé par une légère toux; que le fecond leur eft commun avec toutes les fièvres aiguës; & que le troifième eft , dans quelques efpèces de fièvres intermittentes, interrompu par l'arrivée d’un nouvel accès. Il en conclut que ce n’eft dans aucun de ces trois cas , pris féparément, qu'il faut chercher de caractère diftinétif de la fièvre intermittente, ni dans leur rapport entr'eux , eu égard à la to- talité des accès, ou à leur durée, parce que ces temps fe confondent dans dre circonftances ; enfin , qu'on trouvera ce caractère dans l’obferva- tion de la rapidité de la marche des accès... .. « Quelle que foit une fièvre » intermittente, c'eft toujours avec une efpèce de mouvement accéléré que » la maladie s’avance vers fon plus haut degré , & s’en éloigne enfuite ; de » forte qu'un accès de fièvre intermittente fera toujours reconnoiffable , » en combinant le changement d’état du malade de bien en mal & de » mal en bien , avec la brièveté du temps dans lequel ce changement s’efk » opéré », 218 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, A l’aide de ce développement des fignes caractériftiques de la fièvre in- termitrente, M. Voullonne fait fentir qu'il ne fera plus poffible- de fe mé- prendre fur la réalité de L'exiftence de ces fortes de fièvres ; qu'on ne les croira plus où elles ne font pas, & qu'on les reconnoîtra toujours où elles feront. Ses remarques judicieufes fur la confufion des premiers & derniers temps, le conduifent à divifer les fièvres intermittentes en manifeftes &c obfcures , & cette divifion devient de la plus grande utilité dans la pra- tique. . Les premières ont leurs trois temps bien marqués ; les autres ne font fou- vent caractérifées que par le ralentiffement notable des fonctions vitales, & par une rémiffion momentanée des accidents du troilième , que le re- tour du premier abforbe en quelque forte. Une grande attention à ces différentes phafes empêchera qu'on ne puiffe confondre les fièvres fubintrantes , les fubcontinues & les rémitren- tes, avec les continues ; maisicelles-ci fuccèdent quelquefois aux intermit- tentes & les remplacent. Il eft de la plus grande importance de faifr le moment de ce changement. M. Voullonne donne les fignes qui le feront révoir os Ce feront la durée totale de l'accès ‘plus grande qu'elle navoit coutume de l'être ; celle du fecond temps beancoup plus confidérable que celle des autres ; la brièveté du premier & du troifième, & la diminution de leurintenfité, : : Nous omettons À regret rout ce que l'Auteur dit fur la combinaifon de différentes fièvres intérmittentes entr'elles, & de celles-ci avec la conti- nûe; fur la fous-divilion des fièvres intermittentes obfcures, en bénignes & en malignes. Par-tour les fignes qui caraétérifent ces différentes compli- cations, font préfentés avec fagacité. Mais nous devons nous hâter d’ar- river aux préceptes que notre Auteur donne fur l’ufage du fébri- fuge. | . IL pofe d’abord en principe , qu'ily a des fébrifuges; que ce genre de remède a une propriété fpécifique contre la caufe des fièvres inter- mittentes, caufe qu’il aflimile ; avec Mead , à une efpèce de poifon: idée qui rentre, comme on le voit, dans celle qui fait la bafe de la théorie & de la pratique de M. Strak ; que le fébrifuge eft Le quinquina , mais qu'il na aucune efficacité contre la caufe matérielle des fièvres con- tinues. : _ Que ce remède n’agit que prophylaétiquement, en tant que fébrifuge, contre l'accès futur, & non pas contre l'accès préfent. Il ne guérit que les fièvres intermittentes effentielles, & non pas les fymptômatiques , parce que fon action fe bornant à détruire le miafme, caufe des premières ,ne peut pas attaquer avec fuccès, ni anéantir lescau- fes des fecondes. al LL NI : SUR L'HIST. NATURELLE, ET LES ARTS. 219 Après avoir ‘ainf circonfcrit les propriétés du quinquina, Auteur examine quand & comment on doit y avoir recoûrs. On préfume, par ce que nous avons dit , qu'il en bannit l'ufage de tou- tes Les fièvres intermittentes entretenues par une fuppurationinterne, par une altération vénérienne ou fcorburique des humeurs ; qu'il ne le permet pas dans les continues; ques’il a réufli dans celles qui font putrides-mali- gnes , c’eft en qualité,d’antifeptique. Mais toutes les intermitrentes. vraies ne lui paroiflent pas devoir être combattues par ce médicament. JL en reconnoît de néceflaires au réta- bliffement des fonétions , à la deftruction de quelques maladies chroni- ques ; il donne les fignes auxquels on peut reccnnoître ces fièvres falutaires, & qui âvertiflent les Médecins de fe borneräu rôle de fpectateurs. *Lorfqu'il traite de celles qu'on peut & qu’on doit combattre par le fé- Drifuge, il fait remarquer que ce remède ne doit point être employé avant que les hunreurs n’aient été dépurées par des évacuations & par une crife manifefte ; qu'il ne faut pas le donner pendant l'accès, parce que n’agiflant que prophylaétiquement, & contre l'accès futur ,il ne peut rien dans cette circonftance ; que l’effetfu quinquina exigeant un certain efpace de temps, on doit commencer à le donner dans les fièvres intermittentes manifeftes, immédiatement à la fin des accès , Le continuer jufqu'a leur retour, & en prolonger l’ufage long-remps après leur ceflation abfolue , pour PAIE les récidives, en détruifant completement le miafme fébrile ; enfin , que, malgré la bénignité d’une fièvre intermittente , il faut toujours. recourir au quinquiva, dès que la coction le permet. PL Le momentoù il faut placêr ce remède dans Les intermittentes obfcures, eft celui où l'accès diminue fenfiblement : alors la force des dofes doit fuppléer au temps qui manque; & en général dans toutes les intérmitten- tes dont Les accès ont peu d'intervalle entr'eux , ou n’en ont point du tout , il faut commencer par une forte dofe , puis en donner de moindres, & on peut la porterjufqu'à demi-once. AUne réflexion de l’Auteur fur la vertu prophylaétique du quinquira’, Vengage à demander fi ce n’eft pas à raifon de ceîte propriété qu'il réuflit fur la fin des fièvres malignes ; fi l’analogie ne pouroit pas en- hardir à le, prefcrire, parle même motif, dans les fièvres continues déjà avancées: mais trop circonfpect pour réfoudre cette queition , il en ap- pelle à l'expérience. L . Î Nous ne pourrions , fans donner à cegextrait une étendue peut-être in- difcrète , entrer dans tous des détails qui montrent dans M. Voullonne un Médecin éclairé par une pratique réfléchie , un homme fait pour inf- truire, & qui, à la logique la plus füre; à la Sri la plüs vive, joint le talent de donner à fes expreflions® la clarté , l'énergie, qui aflu- rent à Ja vérité L'empire qui lui eft dû. » ï Quoique nous ayions fouvent dans cer extrait emprunté les propres 220 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, termes de l’Auteur , nous n'aurions donné qu'une foible idée de fon ftyle, de la manière dont il rend fes idées, fi nous ne détachions de fon Méz moire quelques morceaux ; & nous ne croyons pa$ pouvoir mieux y réuflir, qu’en copiant le réfumé qui termine fon Ouvrage , & qui, rapprochant toutes les parties du fyftême-pratique de l’Auteur, rendra plus fenfisle l'équité.du jugement de l’Académie. 7 æ En rapprochant, dit-il, tout ce que l'obfervation a appris jufqu’ici + d'un côté {ur les caractères des fèvres"éflentielles, tant intermittentes » que rémittentes ou continues , & de l’autre fur l'efficacité du quinquina, » feroit-il .impofible de réduire à une loi unique tous les rapports d'uti- » lité que peut avoir ce fpécifique avec l'objet direct de fa vertu fébri- » fuge, qui eft la fièvre en général ? Effayons de l'entreprendre. » Qu'on étudie la marche d’une.fièvre quelconque durant l’efpace de » quarante-huit heures ; qu'on remarque avec attention combien, dans » cetintervalle de temps, la fièvre différera d'elle-même , en comparant » l'état de la plus grande force avec l’état de la diminution la plus fen- » fible ; cette différence donne , à notre avis, la Joi que nous cherchons; » c'eft-à-dire, qu'elle forme le figne le plus univerfel & le moins équivo- » que du quinquina , comme fpécifiquement fébrifuge, En effet: » Dans les Aves intermittentes fimples , cette différence eft infinie; & dans ces fièvres , le fébrifuge eft fouverainement utile. » Dans les fièvres continues Fe , cette différence eft nulle ; & dans ces fièvres , le fébrifuge eft parfaitement inutile, S » Dans les fièvres rémittentes , cette différence peut varier depuis le néant jufqu'à l'infini, & l'utilité du fébrifuge croit & décroît avec elle # dans une proportion rigoureufe. >» Il nous femble que tout ce que l’expérience peut nous avoir appris, » & cout ce que les plus grands Maîtres ont écrit de mieux fur cetre ma- » tière, n’eft que le développement plus ou moins étendu, la confirma- » tion plus ou moins fenfible de cette Loi , aufli fimple qu'elle nous pa- » roît générale, & füre dans fon application ». x Après la proclamation & la diftribution des Prix, M. de Morveau a lu le rélultat d’une expérience qu'il a faite pour congeler l'acide vitrio- lique. : M. Macquer a annoncé , dans la feconde édition de fon Diétionnaire de Chymie, d’après l’obfervation de M. le .Duc d'Ayen, que Pacide vi- triolique fe congeloit à un froid®de 13 à 15 degrés. Cette affertion engagea M. de Morveau à faire l'experience dont il rend compte, Ce fut le 15 Février, fur les quatre heures du foir , dans . une Séance du Cours de Chymie , qu'il la tenta , avec la précaution d’ex- pofer au même degré de froid , de l'acide vitriolique concentré par trois heures d'ébullition , & du même acide affoibli par deux parties d'eau. 2? v 2 ou 2 C2 Il / SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, o1 Il mit de ces acides dans deux vafes de figure conique , plaça ces vafes dans de la glace pilée, dans laquelle il avoit plongé un thermomètre à étui de verre , conféquemment moins fenfible que les autres. Il verfa fur la glace de lefprit de nitre fumant, & fit, parce moyen, un froid de 16 degrés. L’acide affoibli ne fe congela point; mais le concentré fic appercevoir très-promptement un bourreler de glace, qui s'éleva & s'accrut, quoique la température diminuât pendant la nuit, celle de l'air auquel Les vafes étoient expofés n'étant que de 6—0* pendant la nuit. Une portion de la liqueur ne fe gela point : mais on reconnut, par des expériences décifives , que fon degré de concentration l’avoit privée de Ja faculté d'attaquer les métaux, & de noircir les fubftances végétales & minérales. i La glace de l'acide rélifta long-temps à fon dégel; & quoiqu’expofée dans une chambre dont la température n'étoit pas au-deffous de 2—0*, elle ne commença à fondre que le 18. La liqueur dégelée & verfée dans un autre vafe, fe gela à la température de 24—0, & la diffolution du glaçon ne fut complette que le 4 Mars, le thermomètre marquant 7+0*. D'où il réfulte que l’acide vitriolique peut f congeler à une tempéra- ture moins froide que 13%—0, & même à 2—o*, & rélifter très-long- temps à fa fufon. M. de Morveau obferva que la glace de cet acide ne prit point de forme régulière , & reffembloit à de la neige taflée. IL attribue le fuccès de fon expérience à l’extrème concentration de fon acide, Le même Académicien a mis fous les yeux de l’aflemblée un appareil diftillatoire , au moyen‘duquel on peut faire , fur un Bureau , une infinité de diftillations intéreffantes. M. Bergmann , qui eft l'inventeur de cette manière d'opérer , l’avoit fait connoitre à M. de Virely , Préfident à la Chambre des Comptes de Bourgogne , que le defir de s’inftruire avoit conduit à Upfal; & c’eft d'a- près l'idée qne celui-ci en avoit donnée dans une Lertre à M. de Morveau, que notre Académicien avoit conftruit l'appareil qu'il a fait voir. Il conffte en une très-petite cornue de verre mince, du diamètre de 8 à 9 lignes, avec fon vaifleau de rencontre, & une lampe à efprit-de-yin, Le bec de la cornue paffe dans un lacet de fil-de-fer attaché à un bras de levier , auquel on donne l’inclinaifon que l'on defire, La lampe eft portée fur une tablette qu'une vis élève à volonté ; & par ce moyen, on peut graduer la chaleur, & échauffer peu-à-peu la cornue, en lexpofant fuccellivement à la pointe de la flamme, ou l'en envi- xonnant, Pour faire apprécier cet appareil, M. de Morveau l'a employé à déter- Tome XXII, Part.I, 1783. MARS. FF 223 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, miner fi l'acide formicin a plus d’afhnité que l’acide tartareux avec l'alkalÿ végétal. Îl a mis du tartre de foude dans la petite cornue, a verfé deflus de l’a- cide formicin , & a allumé la lampe à efpritde-vin. La cornue n'a pas tardé à rougir ; le fel s’eft liquéfié, mais les vapeurs blanches n’ont point annoncé le dégagement de l'acide tartareux , & le formicin eft pañlé feul dans le récipient. La Séance a été terminée par M. Maret, qui a lu le réfultat de l’ana- lyfe des eaux de Sainte-Reine , faite par les Commiflaires de l’Académie , fur la demande de MM. les Adminiftrateurs de l'Hôpital de ce Bourg, renommé par fes eaux minérales. Ilen ef trois fources, diftinguées par les noms de Fontaine des Corde: liers, Fontaine des bains ou de l'Hôpital, & de Fontaine de la Porte d'Alize. MM. les Commiffaires de l’Académie ont analyfé les eaux de ces trois fontaines , fuivant la méthode de MM. Bergmann, Giovanetti & Four- croy: ils ont reconnu qu’elles font fans faveur , très-limpides, prefque auñli légères que l’eau diftillée ; qu'elles contiennent toutes de l'air atmof- phérique en aflez grande quantité, mais très-peu d'acide méphi- tique ou air fixe. ” Que dans toutes il y a du muriate calcaire, du muriate de foude , du calce, du fer, de l’alumine, du quartz, du vitriol calcaire & de la ma- tière extractive , mais en quantité extrèmement peu confidérable; que le fer, le vitriol calcaire & la matière extraétive y font prefque inapprécia- bles, & que l’eau des Cordeliers tient encore en diffolution un infiniment petit de muriate magnéfen. D'où il fuit que ces eaux peuvent être aflimilées aux plus pures que fon connoifle, & qu'à l'avantage de pouvoir être toutes trois employées: utilement pour boiffon ordinaire , elles réuniffent celui d'être apéritives, roborantes , d’une énergie très-modérée, abforbantes du phlogiftique, &s conféquemment rafraîchiffantes , & d'offrir un délayant , un diflolvant très- efficace, Que l’eau des Cordeliers, à raifon de fes principes & de leur dofe , mérite la préférence, pour la boiffon ordinaire, fur celle des bains & de la Porte d'Alize; mais que celles-ci doivent être préférées, en tant qu'a- péritives. L'efficacité reconnue de l’eau des bains contre les maladies dartreufes & pforiques ne leura pas paru juttifiée par le produit de leur analyfe; mais l'expérience journalière qui la conftate leur paroît fuffire pour en autorifer- Pufage dans ces maladies. Ils croient d’ailleurs que l'extrême pureté de: cette eau pent en rendre l’ufage extérieur très-avantageux. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 223 SERPENT TETE EEE PACE TON IA EURE PENSE SC PP CON ENNPM CEE ETES LE LCI RE DE CM LC A RINUS, Profeffèur de Philofophie à Rhodez, fur les Eudiomètres & Les Paratonnerres. Mowsteur, Dans ma Lettre fur les Eudiomètres, inférée dans Le Journal du mois de Mai 1782, je fniflois, en aflurant gw'il évoie très-poffible qu'un ani- mal vécät plus leng-temps dans un perit volume d'un air moins falubre, qu'ur autre animal, également bien conflitué, ne vivroit dans un égal volume d’un autre air plus falubre ; d'où l'on pouvoit conclure que la méthode de ju- ger de la falubrité d'un air par le temps plus où moins long , pendant lequel un animal quelconque peut en refpirer impunément un petit va- lume , n'étoit pas très-exacte, J'annonçois en même temps que je tâcherois de développer cette vérité dans une autre Lettre, Il me fera néanmoins affez difficile de tenir ma promefle, parce que depuis onze mois j'ai tota- lement perdu de vue cet objet intéreffant. Voici en deux mots , autant que je puis me Le rappeller , comment je concevois la chofe. L'air peut fe charger de fubftances très-nuifñbles, qui n’agiffent fur l'économie animale qu'à la longue, comme dans l’efpace de deux, trois, quatre , ou un plus grand nombre de jours, L'air d’un pays où règne la pefte me femble bien devoir être dans ce cas. Cela pofé, qu'on prenne d’un côté une chopine, par exemple , de gaz déphlogiltiqué , imprégné de quelques atômes pefti- lentiels, & de l’autre une chopine , compofée de gaz déphlogiftiqué & de gaz méphitique, moitié de chacun. Qu'on introduife une fouris dans la première chopine , & une autre fouris également vivace dans la feconde chopine : quelle fera celle de ces deux fouris qui devra vivre plus long- temps? N'eftil pasévident que ce fera la première > Je fuis même per- fuadé qu’elle réfiftera à-peu-près aufli long-temps qu’elle l'auroit fait , fi on l’avoit plongée dans une même mefure de gaz déphlogiftiqué pur, parce que les atômes peftilentiels, que je fuppofe être aufli dangereux our les fouris que pour l’homme , n'auront pas Le temps de développer leur a@ion, & ne contribueront par conféquent en rien à la mort de ce petit animal. A s’en tenir donc à l'épreuve des fouris , on jugeroit le pre- mier gaz beaucoup plus faiubre que le fecond ; tandis que, dans Ja Tome X XII, Part. I, 1783. MARS, FF 2 224 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, vérité, le premier feroit très-dangereux à refpirer, & qu'il n'y auroit pas le moindre danger à refpirer le fecond, puifque, fuivant de très-habiles Chymiftes, il feroit bien plus falubre que l'air ordinaire, qui contient, à ce qu'ils aflurent , les trois quarts de gaz méphitique. Il eft facile d'appliquer ce que je viens de dire à l'air des Hôpitaux , comparé à celui des Salles de Spectacles ; le premier peut contenir des corpufcules morbifiques, beau- coup plus nuifbles de leur nature que ceux qui peuvent fe trouver dans le fecond. Il me femble pouvoir conclure de certe Lettre & de la précé- dente , que ni l’épreuve de l'eudiomètre , ni même celle des animaux, ne fauroient nous diriger à coup für, dans tous les cas, pour le choix de l'air auquel nous donnons la préférence. Dans ma première Lettre, j'avançois aufli que l’eudiomètre ne me paroifloit pas propre à nous faire connoître avec exactitude la pureté de l'air, ou la quantité de fubftañces étrangères à fa propre nature, quipeu- vent fe trouver combinées avec lui. La vérité de certe affertion ne#era pas fans doute conteftée par les Chymiftes. Connoiffant la manière dont les. corps agiflent les uns fur les autres, ils n'ignorent pas qu'il faut raifonner bien différemment des fubftances qui font feulement mélangées enfemble, & de celles qui font chymiquement unies. Ainfi, trois mefures de gaz dé- phlogiftiqué peuvent être faturées par une mefure d'une autre fubftance , selle que Le compofé qui‘en rélultera , fera inattaquable au gaz nitreux, tandis que trois mefures de gaz méphitique peuvent former, avec une me- fure de gaz déphlogiftiqué, un compolfé très fufceptible d'être attaqué par le gaz nitreux. Si l'on me faifoit voir , 1°. que le gaz nitreux n'a d'action que fur les parties vraiment aëriennes qui fe trouvent dans un compofé aëériforme ; 2°. que cette action dy gaz nitreux aura toujours également lieu , quelles que foient les fubftances unies à ces parties aériennes; 3°, que lorfque le gaz nitreux exercera fon action, les fubftances fur lefquelles il n'agira pas, conferveront toujours un volume proportionné à leur due : alors je commencerois à. croire qu'on peut juger , non pas de la alubrité, mais de la pureté d’un gaz, par la diminution qu’il éprouve dans l’eudiomètre. Je fens bien, Monfieur, que de bonnes expériences, faires avec préci- fion & une attention fcrupuleufe, vaudroient infiniment mieux que mille raifonnements ; mais furchargé de befogne , j'ai encore le malheur d’être dansun pays entièrement perdu pour les Sciences. Ainfi , je n'ai ni le temps, ni la commodité de rien tenter. Je fuis, &c. P. S. On a déjà beaucoup écrit fur les paratonnerres. Voici cepen- dant deux réflexions que je n'ai vues nulle part , & qui me femblent pou- voir être de quelqu'utilité, foit pour faire éviter une dépenfe inutile, foit SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, o2ç pour engager à prendre des précautions , dont l’omiflion pourroit avoir quelquefois des fuites fâcheufes. 1°. Onadi: que, pour qu'un paratonnerre püt préferver en même temps de la foudre defcendante & afcendante, il falloit garnir fon ex- trémité inférieure de quelques pointes tournées vers la terre, Cette idée ap- partient à un Savant refpectable, qui jouit d'une réputation bien mé- ritée ( M. Bertholon , Profeffeur de Phyfique expérimentale à Monrpel- lier). J'avoue que cette idée eft très-ingénieufe & très féduifante au pre- mier coup-d’œil. Mais eft-elle aufli folide qu'elle le paroît d'abord? Je m'en rapporte à M. Bertholon lui-même, qui eft trop éclairé pour trou- ver mauvais que je lui expofe modeftlement mes doutes. Si un nuage doit tirer une étincelle du globe terreftre, cette étincelle ne partira- t-elle pas toujours de l'extrémité fupérieure du paratonnerre, qu'il foit ou ne foit pas garni de pointes vers le bas ? Y a-t-il apparence que le courant élecriqueiuitre la terre humide, dans laquelle fe trouve en- foncée l'extrémité inférieure du paratonnerre, pour fe porter à travers l'air , vers les pointes en queftion? L'électricité ne fuit-elle pas toujours les meilleurs conducteurs? .... Je fuis bien perfuadé que ces pointes feroient parfaitement inutiles, quand bien même elles ne fe trouveroienc qu’à la diftance de 2 pouces de la furface de la terre , & l'expérience m'a fait voir que J'érois fondé à penfer ainfi.[l y a plus: il feroit abfolument poflible (c’eft ici une idée que je hafarde) que ces pointes fuffent dange- reufes dans certaines circonftances. Si le paratonnerre n'a pas beaucoup de capacité, un coup de foudre defcendant paflera en partie du côté des ointes, & foudroiera à fa fortie un homme, ou d’autres corps placés près d'elles. Mille expériences démontrent qu'un courant abondant de fluide électrique peut ainf fe partager en pluñeurs. 2°. On a confeillé de commencer toujours à conftruire un paratonnerre par le bas. Mais puifque la foudre s'élève très fouvent de terre , peut-être même plus fouvent qu'elle ne defcend des nues (je ne parle ici que des foudres qui font des ravages fur notre globe), n'eft-il pas évident qu’on s'expofe à-peu-près au même danger, foit qu'on commence par le bas la coritruétion d’un paratonnerre , foit qu’on la commence par le haut ? Si cette réflexion eft fondée , on doit en conclure que , dans les endroits où les orages font très-fréquents , l’on doit tâcher de placer toutes les par- ties du paratonnerre dans le moins de temps poflible. On peut déduire auffi de la mème réflexion, que les communications avec le réfervoir commun pour le grand conducteur de M. de Volta , ne font point fans danger ; elles peuvent faire foudroyer les cabinets où elles aboutiffent, nd OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, LS 22 FRAGMENT D’UN MÉMOIRE DE M. L'ABBÉ DICQUEMARE, Sur les premiers & les derniers termes apperçus de l'Animalité. LE: A connoiflance de Ja Nature ne peut être fondée que fur de nombreufes expériences , & il feroit impoñlible d'en concilier les réfultats , fans avoir fait foi-même les principales opérations. Quoique j'aie fuivi cette voie, je n'ai imprimé qu'avec circonfpeétion fur un objet important , que jé me propofe de développer dans la fuite, & fur lequel jeyais m'expliquer en peu de mots, quoiqu'il m’oblige à reprendre les chof®s dans leurs prin- cipes. Au moment même de le faire, une confidération me retient en- core; c'eft que la verité ne permettra peut-être pas que je fois d'accord avec tous ceux qui fe font occupés des mêmes objets. Je ne parle point ici de ces hommes faux, qui nièrent l'exiftence de Dieu, celle de l’efpric &. de la matière, conféquemment la leur propre ; par-là même elle étoit prouvée, puifque le concept actuel de lexiftence démontre que l'homme exifte, & que la première idée philofophique que nous avons eft celle de l'efprit : nide ceux qui parürent tendre au même but par une voie diffé- rente ; qui, fur des connoiffances uniquement puifées dans des Bibliothè- ques ou dans des cabinets, fur le fimple rapport de quelques décou- vertes d’un phénomène, d’une obfervation ifolée, fe hâtèrent de fabri- quer des hypothèfes générales & fouvent fantaftiques, dans lefquelles , lorfqu'ils s'entendirent eux-mêmes , ils ne furent que trop bien entendus. Ce que je crains , ce feroït de rompre en vifière à des Auteurs refpecta- bles , qui fe feroient trompés de bonne foi. Lorfqu'au coucher du foleil , Le tendre azuré d’un beau ciel eft enrichi de nuages légers, teints de mille couleurs éclatantes , pénétrés de toutes parts par les rayons lamineux ; que ce fpectacle refplendiflant fe répère dans une mer calme ; que le fpectateur, placé dans la direction des rayons réfléchis, fe trouve pour ainfi dire noyé dans la lumière l'horizon fenfible qui fépare la terre d'avec le ciel lui échappe , & lui laifle croire que le ciel & la merne fonc qu'un, Telle dut être à-peu-près l’illufñon de ceux qui fixèrent de nouveau les limites , jufqu'alors connues , des règnes de la Nature; la ligne qui les fépare leur parut effacée, & ils conclurent, fur cet apperçu, qu'il ny a que des individus, & point de règnes; que tous les êtres font de même ordre , fans différence eflentielle ; qu'on doit re- garder la Nature comme un tout infiniment gradué , fans ligne de fépara- tion réelle , comme un feul être modèle, dont les autres ne font que des métamorphofes & des variations , &c, \ SUR L'HIST, NATURELLE ET LES ARTS. 327 Ils auroient pu, ce me femble, reconnoître, par des obfervations plus exactes , faites fur des objets mieux choifis, & par l'ufage des facultés in- tellectuelles , que l'intelligence (1) eft la ligne de démarcation entre l’homme & l'animal ; la fenfbilité, celle de l'animal du végétal; & l’or- ganifation évolutive par l'intus-fufception , celle du végétal au minéral; que fentir , difcerner, agir, c'eft être animé ; qu'être infenfible , mais croître & fe reproduire, c'eft végérer; & que, recevoir parjuxta-pofition laccroiffement , une figure accidentelle ou régulière, fans organifation évolutive , fans fenfibilité , fans faculté générative, c’eft le propre -du minéral. Ce coup-d'œil d'échelle de la Nature, de nuances impercepti- bles, de trait unique, qui circonfcriroit tous les êtres, &c, préfenta d'abord qe chofe de grand , parce qu'il étoit comme la contre-épreuve ‘un grand deflin. Quelques uns furent féduits par un refte d'ordonnance, & par la douceur: les tons afloiblis n’y caractérifoient plus aflez les objets délicats; les extrêmes s’y confondoient ; rien n’étoir prononcé : on ofa retoucher; il eût fallu n'être pas maniéré , le tableau de- vint infidèle. L'idée, la penfée , le raifonnement, l'intelligence , permettent à l'homme de franchir même les bornes de l'Hiftoire Naturelle, & peuvent devenir la bafe de connoiffances fupérieures. Quelqu’opaque que foit le voile qui nous dérobe le principe de la fenfibilité, & même certaines parties du mécanifme par lequel fes phénomènes fe manifeftent , quelque difficulté que nous ayons à nous aflurer que tel être en foit ou n'en foit pas doué, en eft-il moins évident que l’organifation feule ne peut rendre la matière fenfible ? On apperçoit à la mer un nombre confidérable d’êtres inconnus jufqu'ici, dont la forme, & conféquemment les manœuvres bien diffé- rentes de tout ce qu'on pourroit imaginer, dévoilent cependant qu'ils fentent leur exiftence & pourvoient à leurs befoins. Or, la raifon feule indique, & l'intelligence nous fait connoître qu'il y a une diftance pref- que aufli grande entre l'être qui fent fon exiftence & celui qui ne la fenc pas, qu'entre l’être & le non-être. Il y a donc, indépendamment des divifions que nous offre l'Hiftoire Naturelle, & qui font très-bien fon- dées , une diftinétion effentielle entre Les êtres qui fentent leur exiftence & ceux qui font privés de la faculté de fentir. Sentir ! pourroit-on équi- voquer encore fur ce mot? N’a-t-on jamais été touché? Tout être qui fent fon exiftence, eft un être animé , ou, ce qui eft la même chofe, c’eft un animal & non un fimple végétal ; & comme on ne peut être en même temps fenfible ou animé, &ne l'être pas, il fuit qu'il n’y a ni plantes animales , ni animaux plantes , point de zoophytes. J'ai fait de même voir ailleurs qu'il n'y a point de Zrhophytes , c’eft-à-dire , de plantes- pierres , ou pierres-plantes. La raifon , ni l'infpeétion des animaux les plus extraordinaires que j'ai découverts & fait connoître par la gra- (:) L'abus fréquent qu’on fait de ce mot, ne détruit point l'idée qui y eft attaché, 8 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, vure, n'ont donc pu mé faire perdre de vue la ligne de démarcation qui fépare les règnes de la Nature. N'eft-il pas évident que la féduction du premier afpect a pu feule donner lieu à cette loi de continuité tant préco- nifée, & qui a révolté même les Naturaliftes, qui l’avoient d’abord ad- mife en tout ou en partie ? Plus on voit la Nature, & plus on eft certain qu’elle offre diffé- rentes manières d'êtres & c'eft parce que je l'avois long-temps obfervée à la mer, où les extrémités des trois règnes femblent fe rapprocher le plus, que j'ofai retracer cette ligne de démarcation qui les fépare, lors même qu'on publioit par-tout qu'elle étoit effacée. Combien de fois ne s'éroit- on pas mépris, en croyant appercevoir dans desanimaux , mieux connus depuis , la nuance intermédiaire, tandis qu'un fimple examen, dégagé de tout efprit de fyftème , eût levé le voile! J'ai fuivi même, avec le microfcope folaire , l'organifation de ces animaux, & celle d'animaux in- finiment plus fimples en apparence par leurs formes, leurs manœuvres, leurs reproductions naturelles & accidentelles, totales & partielles, leur génération , leurs monftruofités. J'ai, par une marche contraire , dans la vue d’obferver fous toutes les faces , comparé les apperçus les plus foibles avec Les chofes les plus évidentes qui leur font analogues; &, J'ofe le dire , tout a concouru à me faire voir qu’on s'eft trompé, Outre ce qu'on pourroit appercevoir à l'avenir par le fecours de mi- EE ae parfaits , il y aura toujours des animaux foiblement connus. Quoiqu'aflez grands , les limites fembleront fe rapprocher. On fe plaira peut-être à Les confondre de nouveau; mais ceux qui continueront à ob- ferver, avec cet amour de la vérité, cher aux amateurs de la faine philo- fophie , reconnoïtront la vérité que j'ai ofé défendre, L’extrémre petiteffe de certains êtres que je me fuis difpenfé de figurer, pour ne pas devenir minu- tieux, ne peut retarder la confiance que je me fens en droit de réclamer. L'obfervation que j'ai fouvent faite en nageant autour des orties marines, d’efpèces différentes , aufli grofles que la tête de l'homme , ou de celles qui ont des membres longscomme le bras, m'a permis de les confidérer dans Leur plus grande liberté , & de reffentir vivement les piquures qu'elles me faifoient, &c. C’eft-là que n''eft venue l'idée de les regarder, avec plu- fieurs autres animaux marins, comme autant de fyftèmes nerveux unis à peu de matière, deftinés à exercer leurs fonétions dans un Auides & lorf que, fatigué de rechercher les extrémités des règnes de la Nature dansles lieux où le reflux des plus grandes marées laiffe peu d’eau , je fuis allé, la tête la première , reconnoître des fonds plus cachés & plus riches, les fin- gularités fe font offertes en foule. Plufñeurs Savans en ont vu dans ma mé- nagerie marine, & elles leur ont paru mériter une attention fourenue, Quel fpectacle de Les voir réunies à la mer, fe difputer pour ainfi dire l'avantage d’être les premières apperçues , & inviter l'Obfervateur à les tirer de l'oubli & du mépris où elles font expofées! Après y avoir fuivi leurs manœuvres de ts SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 229 manœtvres, leurs reproductions, &c., combien n'eft-on pas tenté de s’intéreffer à celles qui dévoilent lanimalité fous la forme la plus fédui- fante d'une plante, d'une fleur , d’un caillou, ou de quelqu'autre corps dans un état accidentel , & même d’une glaire , comme les anémones de mer, les Aoriformes , le reclus marin, le boudin de mer, les porte-iris , &c. &c.! Je me réferve à mettre un jour fous les yeux du Public quel- ques tableaux vrais du fond de la mer, MÉMOIRE SUR LE MÉPHITISME DES PUITS; Par M, CADET DE VAUX, Infpeëleur Général des Objets de Salubrité , &rc. &ec: Lu à l’Académie Royale des Sciences le 25 Janvier 1783. O N connoit, depuis plufieurs fiècles , la propriété que Le feu a de pu- tifier une atmofphère chargée de miafmes infeéts ou dangereux ; mais, par une fatalité fingulière, les Chymiftes & les Phyficiens n’ont pas cherché à multiplier , autant qu'ils l’auroient pu , les heureux effets de cet agent , le plus puiffant de ous, & à l'appliquer aux circonftances fur lefquelles il peut influer le plus utilement. Cela vient fans doute de ce que l'amour- propre attache bien plus d'importance à une découverte , fouvent très-mi- nutieufe , qu'à l'heureufe application de moyens déjà connus. Les Sciences font un champ où lon n'aime point à glaner : condamné à ne pas récol- ter, on veut encore y femer. Dans les grandes Villes, où fe trouvent réunies tant de caufes d’infa- lubrité , il importe de donner de la publicité aux obfervations qui tendent à faire connoître La vertu que le feu a de rendre à l'air le refforr & l’activité né- ceffaires à fa falubrité, de décompofer les miafmes qui l’altèrent &l’infectenr, enfin, d'annihiler le méphitifme. Je me borneraià parler dans ce Mémoire de celui des puits; toutefois je n’entrerai pas dans le détail des nombreufes obfervations que les circonftances m'ont mis à portée de recueillir fur ce fujet important. Je m'arrêterai aux principaux phénomènes ; j'indiquerai les accidens , & fur-tout les moyens de les prévenir & d'y remédier. Le méphitifme a exercé beaucoup de ravages depuis quatre ou cinq ans ; où, pour mieux dire, depuis quatre ou cinq ans , on s'eft occupé de ces événements, qui , avant cette époque , ne fixoient lattention ni des Savans , ni du Gouvernement. En eflec, un puits , une foffe avoient-ils Tome XXII, Part. I,1783. MA RS. Gg o 230 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, coûté la vie à quelques infortunés, on les fermoit ,on Les combloit : on enterroit la victime , morte ou vive, c’eft-à dire, feulement afphyxiée ; & quatre jours après , il n'étoit plus queftion de l'accident, , Deux puits creufés en 1779, l’un rue de Bourbon-Villeneuve , l'autre Fauxbourg de Gloire , font les deux feuls exemples que je citerai. Le terrein de la rue de Bourbon-Villeneuve offre jufqu'à 10 pieds de rofondeur des terres rapportées, dont on connoît l’origine , & qui ne font nullement fufpectes d'infection. Elles proviennent de la Butte Saint-Roch, lorfque , dans le fiècle dernier, le fameux Lulli, qui le premier a bäti rue des moulins, fut obligé de faire couper la partie trop élevée de ce terrein. Au-deflus de ces terres rapportées eft un fable clair, net, parfemé de petits filex, & aufli beau que le plus beau fable de rivière. Malgré la bonne qualité d’un pareil fol, les Ouvriers ont éprouvé, en en faifant la fouille , de la toux, de la gêne dans Ja refpiration , de la lafitude, du mal de tête. Ces accidents augmentoient en raifon de la progreflion du travail ; c'eft-à-dire, que la toux devenoit convulfive ; que la difficulté de refpirer alloit jufqu'à la fufflocation; la parole brève, de profonds foupirs, de la chaleur, un abattement général ; tous fymptômes enfin femblables à ceux qu'on éprouve dans la grotte du chien. Mais de tous les accidens, ceux dont les Ouvriers étoient le plus vivement affectés, & qui tardoient le plus à fe diffiper, c’étoit un mal de tête cruel ; elle leur fembloit étreinte dans un cercle, dont deux points d’appui euffent porté fur les rempes, Je fus appellé pour remédier , s’il étoit poffible , à cet accident. L'En- trepreneur étoit décidé à abandonner la conftruétion de ce puits : une bou- gie s'y éteignoit à 6 pieds, & un flambeau à 8, Je remis au lendemain matin mon opération. Un jeune homme , fort & vigoureux, voulut defcendre dans le puits pour y placer un baromètre , un thermomètre & des capfules, contenant des réactifs ; mais bientôt il fallut le remonter. Aux accidents précédem- ment décrits, fe joionoient un tintement d’oreilles , un éternuement géné- ral qui tenoit de l’hébêtement, & une chaleur fatigante, Il s’agifloit de remplir lobjet pour lequel j'étois appellé; en confé- quence je tentai peu d'expériences , & me hâtai de rendre habitable un endroit, dont le méphitifme , qui avoit crü de jour en jour, eût fini par rendre ce lieu Je tombeau des environs. à Je fs plaçer mon appareil pneumatique décrit dans la figure de la p/anche IT, qui confifte en un vafte fourneau de réverbère , furmonté de fon dôme, afpirant par fon cendrier ,au moyen d’un corps de tuyaux qui fe prolonge dans toute la profondeur du puits, jufqu'à $ ou 6 pieds au-deffus du fol ou de la furface de l'eau. Maïs pour faciliter les moyens de plager cet appa- reil, c'eft à-dire , d’aflujettir le corps’ de tuyaux dans le puits il fallut le déméphitifer, ne füt-ce que pour le remps que les Ouvriers avoient à y fé- journer, J'eus à cet effet recours au moyen ingénieux imaginé par M. de SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 23r Morveau , à l'acide marin, que je dégageai par le moyen de l'acide vi- triolique. Le mélange porté au fond du puits, dansun vaifleau fufpendu à une ficelle, en eut bientôt rempli l'intérieur de la vapeur de l’efprit de fel , qui, bientôt combinée avec la fumée des flambeaux, qu'on avoit éteints à plufeurs reprifes dans le puits, donna l'odeur qui réfule du champignon philofophique : mais au bout de $ minutes , on ne recon- noifloit plus cet acide que par l'incoërcibilité de fa vapeur ; il ne lui reftoit que le piquant d'un acide volatil , fans aucun cara@tère diftinéti£. On obfervera que l'union de l'acide marin avec le œaz méphitique , & peut-être leur décompolfition réciproque , excite une chaleur vive qui failie les Ouvriers, lorfqu'ils defcendent dans le puits. Nous avions déjà obfervé, MM. Laborie , Parmentier & moi , das notre travail fur les fofles d’aiz fances, un phénomène à peu près femblable. L'effet du fourneau ventila- teur eft de déterminer un courant d'air, & tout courant d'air eft froid. Ce pendant, de l’union de ce courant d’air atmofphérique avec l'air hépati- que qui règne dans Les foffes , il réfulte une chaleur qui élève le thermo- mètre de plufieurs degrés, & va quelquefois jufqu'à mettre les Ouvriers en nage. Je reviens à mon fujet. L'appareil difpofé, on alluma le feu. Au bout d'une demi-heure, je permis aux Ouvriers l'accès du puits. Le prémier qui y defcendity féjourna une heure entière; le jeune homme, qui, fur les fix heures du matin, avoit éprouvé des accidents fi graves , y redefcendit à neuf, & ne re- trouva pas la plus légère apparence de méphitifme , dans le fond du puits feulement; car voici une obfervation fingulière: L'appareil pofé , le méphitifme difparoît dans les $ ou 6 pieds qui occupent la furface du fol ou de l'eau ; il eft également détruit vers la partie fupérisure: mais re- fugié dans le centre, il occafionne la roux & les fymptômes accefloires ; les Jumières continuent à s’éteindre, & ces phénomènes durent encore pendant quelques heures, ce qui prouve que l'atmofphère n'agit pas par une preffion égale fur la mafle de l'air du puits, mais que les courants d'air s’établifflent latéralement , c’eft-à-dire le long du mur , pour fe orter vers le fond , d’où ils foulèvent la colonne méphitique , & la fou- Msere jufqu’à une hauteur donnée. Ce ne fur que vers une heure. de l'après midi que la totalité de l'air fe trouva purifiée, & cefla de donner des indices de méphitifme. Pendant les nuits, il fe renouvelle, maïs avec moins de force, & il fe diflipe le lendemain matin, du moment où le fourneau eft allumé. Je paffe fur-le champ à l'autre obfervation, Le nommé Cheradame faifoir conftruire au Fauxbourg de Gloire , près la Chapelle . ur puits de 60 pi-ds de profondeur fur 4 & demi de diamètre. Les Ouvriers éprouvèrent , pendant fix femaines que dura ce travail , les accidents que j'ai décrits dans l’obfervation précédente. Encore cirq ou fix jours, & le puits éroit achevé , lorfque La fouftraétion précipité des Tome XXII, Part. I, 1783, MARS. Gg 2 - - 232 OBSERVATIONS SUR LA PHPSIQUE, étais fupérieurs occafionna un éboulement. Le jour deftiné à l'enlèvement des terres encombrées, le premier Ouvrier qui defcend et à peine au fond du puits, qu'il jette un cri, tombe & meurt; un de fes camarades vole à fon fecours, & fubit le même fort; un troifième , un quatrième tentent inutilement de defcendre dans ce gouffre, ils ne peuvent gagnex le fond ; à quelques toifes de profondeur, ils font afphyxiés. De ce mo- ment, les Ouvriers proteftent de ne plus s’expofer à de nouveaux dan- gers. M. le Lieutenant-Général de Police, qui avoit fuivi l'expérience de la rue Bourbon-Villeneuve, raflura ce Particulier, qui fe voyoit forcé d'abandonner une conftruétion , dont la dépenfe montoit déjà à 5000 L, Je me tranfportai au Fauxbourg de Gloire ; les Ouvriers s’y étoient rendus , plutôt par curiofité, que dans l'intention de reprendre. un travail qui coûroit la vie à plufieurs de leurs compagnons qui en avoit mis deux autres en danger de mort, & qu'ils nenvifageoient plus qu'avec confternation, 4/ y auroit , difoient-ils, au fond de cet abime ur rréfor qu'on pourroit faifir avec la main, il y feroit bien en féreré. Mais l’aflurance que je leur donnai de faire ceffer les accidents, leur infpira de la confiance. Mon projet étoit de tenter quelques expériences. J’expofai à cet effer au fond du puitsun appareil contenant plulieurs réactifs, entr'autres l'eau de chaux & le vinaigre de Saturne, qui fe décomposèrent à l'inftant ; mais J'infftai -peu fur ces détails phyfiques. Il n’eft guères poflible de fe livrer froidement à des expériences, lorfque le danger d'autrui com- mande , & qu'on fe trouveenvironné d’afphyxiés , fouvent même de morts, comme cela arrive dans ces malheureufes circonftances: d’ailleurs, exe pofé foi- même à l'effet dangereux de cesvapeurs , on aime mieux les combat- tre, que de chercher à les mieux connoître; car onne les refpire jamais impu- nément, &J'enai toujours été plusou moins vivement affedté dans ces cas- R. Enfin, dans celui dont il s'agit, je ne pouvois pas réfilter plus long- temps à l'impatience de voir files moyens dont j'avois rout récemment à mapplaudir , alloient être confirmés par de nouveaux fuccès, & fi je pourrois établir , fur la déméphitifation des puits , des principes certains, comme j y fuis en effet parvenu. Je m'occupai à déméphitifer d’abord le puits, pour donner aux Oë- vriers le temps de pofer l'appareil; & j'eus recours à l'alkali volatil Auor , mon intention étant de confirmer ou d’infrmer une théorie fort en vogue alors. Le gaz méphitique ayant un caraétère acide , en en concluoit que l’alkali volaril devoit le neutralifer jufques dans les poumons & le cerveau de l’afphyxié; prétention contre laquelle notre travail fur les foffes d’ai- fances nous avoit mis dans le cas d'élever des foupçons fondés , puifque jamaisnous n'avons pu , en prenant F'afphyxie fur le temps mênie, en pré- venir les effets par le moyen de l’alkali volatil. J'invitai plufieurs Mem- bres de l’Académie des Sciences, MM. le Roi, Tillet, & M. Sage lui- même’, à fuivre cette expérience. Je mis de la chaux vive dans une vafte _ dé ll : SUR LAIST. NATURELLE ET LES ARTS. 233 capfule; j'y verfai une diffolution d’une livre de fel ammoniac : on def- cendic à l’aide d’une corde le vaifleau au fond du puits. Après un inter- valle de dix minutes, la bougie , qui avant s'éteignoit à 18 pieds, Le fut à 7: en forte que ce moyen avoit prodigieufement ajouté au méphitifme , au lieu de le diminuer; ce qui prouve qu'il en eft, en Phyfique , des ex- périences en petit, comme des calculs en petit en Mécanique ; fouvent vicieux, lortqu'on en fait l'application en grand. J’eus donc recours à la décompofition du fel marin par l'acide vitriolique , pour enchaïner les vapeurs d’alkali volatil, dont la préfence nous devenoit fi nuifible : mais nous ne gagrâmes que 4 pieds fur l'extinétion de. la lumière. Cet acide , au lieu d'agir fur l'air méphitique , fe trouva employé à neutralifer l'al- kaii, & furcharyea de ce nouveau réfulrat un air déjà très-pefant par lui-même: d’ailleurs la vapeur des chandelles , des flambeaux éreints à plufieurs reprifes, & fur-tout la fumée de la paille, que Les Ouvriers avoient en vain cherché à tenir allumée , rendoient cette atmofphère très- compofée & difficile à déplacer. Je fus donc obligé de defcendre dans le puits , à l'aide d’une chaîne de fer, un vafte brafier parfaitementallumé , pour confumer une partie de cet air ; & je verfai au préalable vingt faux de lait de chaux vive parle moyen d’arrofoir, ayant foin d'en laver la furface du mur. Cette expérience, dont je rendis compte à M. Francklin, lui en rap- pella une à-peu-près femblable , qu'il avoit faite étant à Philadelphie, On découvrit un puits, dans lequel étoit une pompe qui exigeoit des répa- rations; il fut impoñble d'y defcendre, car le méphitifme eft de tous les climats : Les champs de l'Italie, de la Sicile, de la Grèce , en font la preuve, En vain on y préfenta des lumières ; elles s'éceignirent : on y fit déronner fans plus d’effét quatre onces de poudre à canon. M. Francklin imagina de pulvériler de la chaux vive , & de la faupoudrer dans le puits ;: à l'aide d'un tamis fin, ce qui produifit un heureux effet; tant il eft vrai que le génie a le droit d'anticiper les découvertes qui ne font dues communé- ment qu'à la maturité des fiècles où elles fe font : encore M. Francklin n’avoit-il pas pardevers lui la théorie des gaz, qui depuis nous a conduits à l'emploi de ce moyen. On parvint à pofer l'appareil, & on alluma le feu du fourneau. Je ne permis l'accès du puits qu’une heure après. Le premier Ouvrier qui y defcendir, jet- tancun coup-d'œil fur le fond du puits, apperçut le chapeau & le bonnet de fes deux camarades morts: fon imagination s’affect:; la peur le faifit , il jetteun cri: on le remonte, mais il avoit à peine changé de couleur, Un jeune Phylcien, préfent à l'expérience , voyant les Ouvriers aff:étés de ce nouvel événement , qui ne tenoit qu'au moral, fe fit defcendre , pafla un quart-d’heure à charger des matériaux , & remonta enfuite. A dater de ce moment, les Ouvriers reprirent confiance , & fe mirent à travailler ; mais ils ne pouvoient pas féjourner plus d'une demi-heure dans Le puits ; 234 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ils remontoient , non qu’ils fuffent affectés de méphitifme , mais ils avoient befoin de remonter, Quel eft donc, me demandai-je , ce nouveau phé- nomène, le nouvel obftacle que j'ai à vaincre ? Je voulois, & j'en con- cevois la pofibilité, parvenir à rendre à 60, à 100 pieds de profon- deur, une atmofphère égale à celle de la furface, puifque l'effet de mon appareil eft d'établir des ruiffeaux, des courants d'air; enfin, de forcer cette atmofphère à fe déplacer, & à entraîner avec elle les vapeurs méphi- tiques, de même que les eaux de deux fleuves forcés dans ur confluent fe confondent entrelles. Enfin, je trouvai l'explication de ce phénomène. J’avois remarqué que le méphitifme varioit aflez ordinairement felon la température de l'air; qu'il n’eft jamais plus fenfible que lorfque le temps eft chaud & le ciel ferein , tandis qu’il diminue d’intenfité dans les temps frais & mébuleux. J'en tirai cette conféquence , que la chaleur de mon four- neau s’oppofoir à ce qu'il s’introduisit dans le puits un volume d’air fuf- fifant. En effer, c’éroit l'air trop raréfié qui rendoit à la longue la ref piration pénible : en conféquence j'écartai le fourneau de 2 toifes environ de l'orifice du puits, & je prolongeai le corps de tuyaux ; dès-lors les Ou- vriers euflent paflé des heures entières dans le puits, Le même phénomène avoit lieu pendanr les fortes chaleurs du jour; l’äir, raréfié par la pré- fence du foleil, n'érablifloit plus un courant d’airfufhfant, & les poumons fouffroient. J'y remédiai , en faifant placer fur l'ouverture du puits une banne, que de temps à autre on arrofoit d’eau. Dans cet état des chofes , le travail ne préfenta plus d’obitacle , & fut terminé en fix jours. Cepen- dant les accidents n'ont jamais varié à une profondeur donnée à celle de 18 pieds, où fe trouvoit une couche de terre noire de 2 pouces d'é- paifleur , qu'on eût prife à l’afpeét pour une terre végétale , & qui recéloit un méphitifme tel , que les Ouvriers, parvenus à ces 18 pieds ,.ne pou- voient placer qu'un , deux, & les plus robuftes trois moëllons. Après cette tâche, très-courte, mais très-pénible , il falloit les remonter, plus ou moinsaffcétés. Jamais les lumières n'ont pu dépaffer cette langue de terre que j'avois fait marquer d'une trace noire. Les Ouvriers , en defcen- dant & montant , jettoient conftamment un cri à cer endroit , lors même que. la totalité de l’atmofphère du puits fut déméphitifée. Le méphitifme fuintoit de cette langue de terre à travers les pierres mêmes ; ils éroient attentifs à ne pas refpirer au paflage dangereux de cette ligne : mais c'é- toit par les pores de la peau qu'ils étoient affeétés , & ce phénomène n'éroit pas nouveau pour moi. Je vais me réfumer , & je finis. L'appareil pneumatique confifte dans un fourneau de réverbère , fur- monté de fon dôme, fur lequel on ajufte $ ou 6 pieds de tuyau. Ce fourneau afpire par fon cendrier , au moyen d’un corps de tuyaux qui fe rolonge dans la profondeur du puits à $ ou 6 pieds au-deflus du fond. J'ai obtenu de la bienfaifance de M. le Prévor’ des Marchands , & du Corps Municipal , l'appareil que j'ai l'honneur de prélenter à l'Académie ; Ÿ ; ME SURL'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 2135 il fera dépofé dans l'Hôtel-de-Ville , les Habitans auront le droit de l’en- voyer chercher dans les circonftances qui en exigent l'emploi, C’eft un corps de tuyaux en cuivre, emboités dans une gorge , à l'aide d’anneaux & d’une chaîne qui les foutient, On le place dans le puits, fans être obligé d'y defcendre ; ce qui fimplifie l'opération, en ce que les Ouvriers n'ayant point à pofer ces tuyaux, ileft inutile de déméphitifer le puits par la vapeur de l'acide marin. Mais fi on eit forcé de recourir aux tuyaux de tôle, il faut recourir à la déméphitifation ; fur-tout il faut avoir foin d'employer des tuyaux neufs, & de les bien emboîter. J'ai vu, rue de Seine, près le Jardin du Roi, dans la maifon où eft le Bureau des Meffageriesg, un Ouvrier qui a man- qué périr, parce qu'un moëllon défemboîta É.. 2 fon milieu le corps de tuyaux. Îl jetta un cri : on le retira ; il étoit afphyxié, Il y avoit une mi- nute au"plus que la direction de l'air étoit changée , & cette minute avoit fufñ pour donner lieu à cet accidenr, On conçoit que le feu du fourneau eft entretenu par l'air qu'il déplace au fond du puits, & que remplace un volume confidérable de l'air de Yatmofphère, qui, ee l'air méphitique & s'y confondant, finit par le rendre fans effet, On écartera le He de l'orifice du puits, en raifon de l'air qu'il raréfie, quand il en eft trop près. Dans le cas où il y auroit au fond d'un puits des vannes infectes ou méphitiques, on y verferoit plu- fieurs feaux de lait de chaux vive pour les décompofer ; car c’eft une vé- rité portée jufqu'à l'évidence , que la chaux vive eft Le feul moyen de dé- compofer les vannes méphitiques. Tels font ces moyens , tout-à-la-fois fi efficaces & fi fimples, d’annihi- ler le méphitifme, & de commander en quelque forte à la vie & à La mort, S'ils ne font, je le répète, que l'application des effets déjà connus du feu, de la propriété qu'a cet élément de ramener tous les autres à leur état de pureté & d’homogénéité, je n'ai pas beaucoup à me glorifier de certe heureufe application : mais il eft des jouiflances plus flatteufes que celles que procure l'amour propre ; c'eft de pouvoir fe dire: La vie, la confervation de mes femblables a été l'unique but demes travaux. J'ai fixé l'attention du Gouvernement fur ces objets importans, & pas un feul ac- cident de mort n’a démenti, & jamais un feul ne démentira l'efficacité du procédé que j'indique , lorfqu’on fera fidèle à l’exécuter. #36 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, EE RE a NOUVELLES LITTÉRAIRES. O0. M. AuGusTI BROUSSONET , Med. Doë. Societ.. Reg. Londi- nenfis & Monfpelienfis Socii, ICHTHYOLOG1A fiflens Pifcium deferiptio- nés @ icones. In-fol., fiv. À Paris, chez Didot le jeune. A Londres , chez Elmfly. À Vientfe & à Léiphck , chez Græffer. Ce nouveau fyftème ichthyologique fe délivrera par décades , & cetre première livraifon contient, 1°. la dédicace de l’Ouvrage à M, Banks , Préfident de la Société Royale de Londres, au zèle duquel les Sciences ont déjà & auront encore plus d’obligation , par la publication des ob- fervations intéreflantes qu'il a faites dans le cours de fes voyages; 2°, une efpèce d'introduction , dans laquelle l’Auteur expofe fes principes: nous en parlerons tout-àl'heure; 3°. la defcription & la gravure de dix poif- fons, tous des mers du fud ; qui font le gobius ftrigatus , ou le taiboad'O- taheite; Le gobius ocellaris, où awaou du même endroit ; le p/euroncëles mancus, Où le pathi-maure de l’Ifle Ulictea; le chæcodon trioflegus de l'Ile Sandwich; le chætodon faber des Ifles de la Société; Le chætodon longiroftris des Ifles Sandwich &de la Société; le polinemus plebeïus , ou emoi de l'Ifle d'Otaheite ; le c/upea cyprinoïdes de l'Ifle de Tanna; le c/upea thriffa de Chine; le c/upea Jettroffris de l’Ifle de Tanna. Peu d’Aureurs ont donné des defcriptions détaillées de poiffons : les anciens ne nous en ont laiflé , à p'oprement parler, aucune; & parmi les modernes, Artedi , Linné, Gronovius, Haffelquift, Pallas | Leske , font prefque les feuls qui aient décrit, d’une manière détaillée, quelques efpèces. L’Auteur a fent l'impofbilité où il étoit de compofer un bon Syfléme Ichthyelogique , sil navoit pas de pareilles defcriptions , auxquelles il pût renvoyer. Une méthode diftingue les efpèces par une phrafe courte & comparative; elle ne porte que fur peu de parties, & le plus fouvent il eft impoñlible de trouver dans cette courte defcription des caractères fufifants pour faire diftinguer l'efpèce déjà connue, d’avec celle qui ne left point, Un fyftème doit être regardé comme un Diétionnaire, qui in- dique les mots , & cite les Ouvrages où ces mots fe trouvent employés, Les Naturaliftes ont toujours fenti l'utilité d'une méthode; mais ils ont été perfuadés qu'il falloir auñi des livres où on pût trouver des defcrip- tions détaillées des efpèces , & tout ce qui a rapport à leur phyfologie, C'eft à ces livres qu’ils ont renvoyé le Lecteur. On auroit donc tort de les blâmer d’avoir compofé des fyftèmes : on leur a au contraire l'obligation de SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 237 de nous avoir donné pour ainfi dire le moyen d'acquérir des connoiflances avec peu de peine. « L'Auteur a commencé , avant que de publier le Syféme , à décrire au long chaque efpèce, & d'abord celles qui fone Le moins connues. Il a compolé fes deferiprions en Latin, & à la manière des Auteurs fyltéma- tiques , pour ne pas trop multiplier le nombre des volumes. Chaque d:f cription eft contenue à-peu près dans une demi-feuille, l’on ne trouve point de numéros au haut des pages, afin que dans la fuite on puifle ar- ranger les-efpèces à côté les unes des autres. À chacune il a joint une gra- vure , & quelquefois même deux, À la fin de chaque defcriprion , on trouve les principaux caractères qui diftinguent l’efpèce qui vient d'être décrite d’avec celle qu’on connoît déjà. IL promet de publier la defcription de ‘toutes les efpèces de dix en dix, c’eft-à-dire, par décades, en employant les mêmes caractères , papiers , &c. S'il voit que la première foit bien ac- eueillie , il fe propofe d'en publier au moins quatre ou cinq tous les ans; ce qui formeroit un volume in-4°. affez fort. L’Auteur a employé des mefures comparatives, comme un carattère fpécifique. Il commence par déterminer , au moyen d’un compas, dont il rapporte l'ouverture fur un pied de Roï, le nombre de lignes compris entre le bout du mufeau & la bafe de la nageoire de la queue ; il détermine enfuite le nombre de lignes entre le bout du mufeau & l'anus; & pour lors , fuppofant , par exemple , que le premier terme foit 80 & le fecond 20 , il les compare de la manière fuivante: + L'c\YM: 801: 20: L c fignifie Longitudo corporis , c’elt-à-dire, la longueur du corps, où l'efpace compris entre le bout du mufeau & la bafe de la nageoire de la queue. À veut dire aus , en fous-entendant la diftance qu'il y a du bouc du mufeau à l'anus: donc la longueur du corps elt à l'efpace compris -entre le bout du mufeau & l'anus , comme 80 eït à 20. Il exprime enfuite la diftance qu'il y a entre le bout du mufeau & le point antérieur de la bafe de la nageoire dorfale; entre le bout du mufeau & le point poltérieur de la bafe de la même nageoire; entre le même point & la bafe des nageoires pectorales, leur extrémité ; la bafe des nageoires ventrales , l:ur extrémité ; le point antérieur de la bafe de la nageoire annale, Le point poftérieur de la bafe de cette nageoire ; l'ex- trémité des rayons intermédiaires de la nageoire de la queue , l'extré- mité des plus longs. Il compare tous ces termes au terme moyen, qui eft la longueur du corps. Pour les exprimer plus brièvement , il fe fert feulemenr des lettres initiales, Ainfi, DI ( Dorfalis inirium ) marque la diftance qu’il y a entre le bout du mufeau & le comunencement de la nageoire dorfale; DF (Dorfulis finis), la fin de la bafe de la même nageoire , ou le point poltérieur de fa bafe; PB ( Peéforalium Tome XXII, Part, 1,1783. MARS. Hh 238 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, bafis) , la bafe des nageoires pectorales ; PA ( Peëloralium apex) , l'ex- trémité de ces nageoires; VB ( Venrralium bafis) , la bafe des nageoires ventrales; V A (Ventralium apex ) , leur extrémité; AT ( Analis initium), le commencement de la nageoire anale ; AF (Analis finis), fa fin; C M (Caudalis medium ), le milieu de la nageoïire de La queue, ou l'extrémité des rayons intermédiaires ; C A (Caudalis apex ), l'extrémité des rayons les plus longs. Par exemple: TC Dale: 80: 10: LC:DF::80:40. LC:PB::80: 72. LC:PA::80: 16. & ainf de fuite. Les mefures que les Auteurs d’'Hiftoire Naturelle avoient données juf- qu'ici, quoique très-détaillées , ne pouvoienc fervir qu'à diftinguer les individus ; le feul moyen de les faire fervir pour déterminer les efpèces, éroir de les rendre comparatives, ...,. Ainfi, de la manière dont l’Au- teur a écrit les dimenfions , on peut dire qu’il a donné celles de l’efpèce & non de l'individu. Il croit, avec tous les Naturaliftes , que les diffé- rentes parties des animaux croiffent en proportion les unes avec les autres. Suppofons que nous trouvions le poiflen K , & que nous voulions le rap- porter à une efpèce déjà décrite; parmi Les defcriptions que nous avons fous les yeux , celle du poiflon R nous paroît le plus convenir au poiflon K. Nous prenons d’abord la mefure du poiffon K; noûs le trouvons de 20 lignes de long, Nous ne prenons pas d’autres me- fures; mais nous comparons le terme 20 avec chacun des termes du poif- fon-R , donc les dimenfions font: LC:A::80l:20.|"LC:AlI::80:60, LC:DF::80 : 40 &c, &c. Nous trouvons d’abord que 80:20 ::20:5$; que 80:40:: 20:10; que 80 : 60::20: 15, & ainfi de fuite pour chaque terme. Nous prenons pour lors tous les termes que nous avons trouvés , & nous vérifions, par le compas, fi l’efpace contenu entre le bout du mufeau & Panus eft de $ lignes; fi l'efpace compris entre le bout du mufeau & la fin de la nageoire dorfale eft de 10 lignes; entre le bout du mufeau & le commencement de la nageoire anale, de 15, & ainfi de fuite; & fi nous trouvons que tous ces termes que les règles de trois nous avoient donnés foient exacts , nous ne doutons plus que les poiflons K & R ne foient de la mème efpèce. L’Auteur ne fait pas du refte attention à une demi-ligne où à un quart, fur-tout fur des gros individus, (Il me paroît que cette méthode pourroit être employée avec fuccès dans les defcriptions des repuiles), SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 239 L’Auteur a employé encore une autre méthode pour connoître d'un coup-d'œil la pofition. des nageoires. Il ouvre un compas depuis le bout du mufeau jufqu’à la bafe des nageoires pectorales, & il porte la même ouverture depuis Le bout du mufeau jufqu'à l'extrémité de la queue: divifant le poiffon en autant de parties imaginaires , qu’il nomme régions, celle qui eft entre le bout du mufeau & la bafe des nageoires peétorales cft la première. Il commence par dire en combien de régions le poiflon elt divité, & indique les fractions de la dernière région; fi elle n'eft point auñi longue que les autres. Il dit enfuite dans quelles régions fe trouvent les nageoires, par exemple: R.4, 5-P. 2. V. 2, D. 3,4. À. 3,4. C, 4, R. 4,%. fignifie que ce poiflon eft divifé en quatre régions & demie ; P. 2., que les nageoires pectorales font dans la fecorde; V. 2.,les ven- trales aufli; D. 3,4, que la dorfale fe trouve dans la troifième & qua- trième ; À. 3,4. de même ; C.4,-., que la caudale eft dans la quatrième & la moitié de la cinquième. Le trait fur le $ , marque que cette région n'eft pas aufli longue que les autres, Par les lettres a ,4, &c., il marque la première & La feconde nageoïre dorfale , quand il s’en trouve deux. L'Au- teur renvoie au LXXXL vol. des Philofophical Tranfaëlions, où il décrit au long ces mefures. Nous ne croyons pas néceffaire de donner l'explication des lettres ma- jufcules B. D. P. V. A. C. Tous les Naturaliftes Le que, dans tous les livres d'Ichthyologie, elles marquent les différentes nageoires , & les nom- res qui font à côté ou au-deffous la quantité de rayons dont elles font pourvues. Il a employé plufeurs termes techniques nouveaux, dontil fe propofe de donner l'explication dans le Philofophia Ichthyologica , qu'il cfpère publier peu de temps après le Syffema. Les poiflons que l'Auteur a décrits, & ceux qui paroîtront dans beau- coup d’autres décades, font de chez le Chevalier Banks. L’Auteur en a auf décric plufeurs au Mufeum Britannicuin. Hifloire de la Socieré Royale de Médecine , avec les Mémoires de Médecine & de Phyfique Médicale pour l'année 1779. Paris, chez Didot , 1782, in-4°. fig. Voici Le troifième volume que la Société Royale de Médecine offre au Public depuis fon établiflement, Le recueil de fes travaux intérefle de plus en plus, & pour la Médecine en elle-même , & pour la connoiflance gé- nérale de la France , par rapport à fon climat , aux maladies qui affectent fes Habitans ou ravagent les beftiaux. L’énoncé des principaux objets que renferme ce volume, confirmera ce que nous venons de dire. Dans la Tome XXI , Part, 1, 1783. MARS, Hh 2 = 240 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, partie de l'Hiftoire, on doit diftinguer les éloges des Médecins de la So- ciété , morts dans l'année; ils font de M, Vicq-d'Azyr: nous avons fait connoître dans notre Journal celui de M. Navier. La partie qui regarde la Météorologie , tant nationale qu'étranoère, a été rédigée par le P. Cotte, cet illuftre Obfervateur , à qui cette partie de la Phyfique a tant d'obliga- tion. Dans la partie de la Médecine-pratique, on lit les Obfervations de M. Colombier, fur la maladie vénérienne & le miller dont les enfans nou- veaux-nés font attaqués , avec des réflexions fur la nature & le traitement de ces deux maladies; les nouvelles Obfervations de M. Mauduyt {ur L'é- leétricité médicale , d’après lefquelles il eft conftant que vingt-cinq para- lytiques, traités par ce fage Médecin avec- l’éleétricité, ont tous obtenu, ou une entière guérifon , ou un foulagement plus où moins confidérable ; l'afloibliffement du taét a totalement difparu , ainfi que la gène dans les mouvements, avec ou fans douleur: des enfants , foiblement conf- titués & gêvés dans l’ufage de quelques-uns de leurs membres, ont re- pris des forces ; des rhumatifmes fe font entièrement diffipés par le trai- tement d: l'électricité. Sur trois fourds , un feul a été foulagé. Il en a été de même de trois perfonnes attaquées de goutges fereines incomplettes ; mais une quatrième , attaquée d'une ophtalmie très-invérérée, commen- çoit à en éprouver Les meilleurs effets, quand des craintes ridicules l’ont em- péchée de continuer ce traitement. À Londres, on emploie ce traitement avec beaucoup d’avantase pour les maladies des yeux caufées par enger- gement. Une femme, perclufe par l'effet d'un lait épanché , a été très- foulagée , & l'électricité parut diminuer différentes tumeurs. On lit en- fuite le fondant découvert par M. Durande, Médecin de Dijon, pour les pierres biliaires, qui confifte dans le mêlange de 2 gros d’efprit de térébenthine avec 3 gros d’éthier, dont on fait prendre tous les matins au malade un cinquème , & quelquefois un quart. Cet habile Médecin recommande les rafraîchiffants, avant & pendant l'adminiftration de. ce reniède, Cette Notice eft fuivie des recherches fur les concrétions animales, par. M. Vicq-d'Azvr (Nous les ferons connoîrre dans notre Journal); des Obfervations curieufes de M. Rathier , Chirurgien à Langres , fur les ma- ladies des os ; d'Obfervations fur le traitement des tumeurs anévrifmales par compreflion, fur la difpofition des vaiffeaux. dans la membrane pitui- taire du cheval & des ruminants, & fur l'état des corps dépofés dans le caveau des Cordeliers à Touloufe. La partie de la Chymie médicale renferme, 1°, un Mémoire très-in- téreffant de M Macquer fur la préparation & l’ufage intérieur de la ma: guéfie tirée. du fel d’epfom , confidérée comme médicament. On l'obtienr, fuivant ce favant Chymifle , d’une finefle, d'une blancheur & d’une légè- reté extrêmes, en diflolvant du fel d’epfom dans quioze ou vingt fois fon poids d’eau bouillante , filtrant La diffolution , & la précipitant coute ‘ | à SUR L’'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 241 bouillante avec une leffive filtrée & très-chaude d’un fel alkali quelconque, en quantité plus que fufifante pour décompofer tout le fel d'epfom ; la terre fe précipite: on filtre & on lave à l'eau bouillante la terre qui eft reftée fur Le fiitre , jufqu'à ce qu'elle foit abfolument inlipide; 2, l'exa- men analytique de la racine de co/ombo , de la racine de Jean de Lopez, par M. Jofle, Maître en Pharmacie; 3°, des Obfervations fur !: me lange du quinquina avec le tartre ftibié, par M. Cornette. La partie de Botanique contient des réflexions fur deux efpèces de quin- quina découvertes nouveliement aux environs de Santa-Fé, dans l’Amé- rique méridionale, donc l’ufage ne peut.qu'éte très-avantageux. Dans la Phylfque médicale, on voit, 1°. des recherches & expériences de M. Pe- rolle , relatives à l'organe de l'ouie & à la propagation des fons: nous les citerons’dans notre Journal; 2°.des Obfervations fur une opération céfarienne , par M. Chabrol; 3°. l'ufage du Zichen pixioïdes dans la co- queluche, Les Mémoires, imprimés enentier, font: 1°. des Obfervations fur {a conftitution de l’année 1779 , à Paris, par M. Geoffroy , & fur la toux épidémique de la fin d: cette même année, par M. Coquereau; 2°. un Mémoire fur la maladie épidémique de Rouvray-Saint-Denis, par M. VAbbé Tefier; 3°. un Précis biftorique de l'épidémie dyffentérique de l'automne de l’année 1779; 4°. fur une maladie épidémique qui a régné pendant l'hiver de 1779 à Boifleroy , près Anet, par M. Gateron; $°. fur des maladies, à Dinan en Bretagne, parmi les prifonniers Anglois en 1779 , par M. Jeanroy ; 6°. la fuite de cette maladie, par M. de La- ouette ; 7°. un Mémoire fur la Topographie médicale de Montmo- rency & de fes environs, par le R. P. Corre; 8°. un Mémeire de M. de Laflone, fur quelques moyens auf efficaces que prompts & faciles de re- médier à des accidents graves qui furviennent aflez fréquemment dans les petites-véroles & les rougeoles de mauvais caraétère; 9°. un Mémoire de M. Lorry fur la graifle , confidérée dans le corps humain, fur feseffets, fes vices, & fur les maladies qu’elle peut caufer; 10°. propriétés & effets de la racine. de dentelarre dans le traitement de la gale; 11°, Mémoire fur une nouvelle manière de préparerles favons acides, & fur leur ufage en Médecine, par M. Cornette ; 12°. Mémoire fur lhydrocéphale in- terne , ou hydropifie des ventricules du cerveau, par M. Odier de Ge- nève; 13°. Mémoire fur les bains de vapeurs de Rule, confidérés pour la confervation de la fanté & pour la guérifon de plufieurs maladies, par M. Ribeiro Sanchez (nous en donnerons l'extrait dans notre Journal)s 14°. Effai fur la fièvre miliaire qui règne dans plufeurs cantons de Ja Nor- mandie , par M. Varnier ; 15°. Obfervation fur un anévrifine confidérable de l'artère axillaire , fuivi de la fraêture des côtes, par M.de Horne ; 16°.Re- cherches & Obfervations fur l'épilepfe effentielle, ou maladie facrée 242 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, d'Hippocrate, par M. Saillant; 17°. Mémoire fur les inconvénients des étables , dont la conftruétion eft vicieufe , par M. l'Abbé T'eflier ; 18°. Pré- éis hiftorique de la maladie épizootique qui a régné dans la Généralité de Picardie en 1770, par M, Vicq-d'Azyr; 19°. Mémoire fur la morve, par M. Chabert, Infpecteur-Général des Ecoles Vétérinaires (nous en donnérons l'extrait dans notre Journal) ; 20°. Mémoire fur l'irritabilité des poumons, par M. Varnier; 21°. Réflexions fur le but de la Nature , dans la conformation des os du crâne , particulière à l’enfant nouveau-né, ar M, Thouret ( nous le ferons connoître dans notre Journal ); 22°. Ob- fervations fur les phénomènes & les variations que préfente l'urine dans l'état de fanté, par M. Hallé; 23°. Mémoire fur l'analyfe & les pro- priétés de l’ipécacuanha, par MM. de Laffone fils & Cornette; 24°, Re- cherches chymiques fur les diflérents procédés employés jufqu'ici pour préparer le tartre émétique , par M. Caille; 25°. Obfervations & Recher- ches fur l’ufage de l’aimant en Médecine , par MM. Andry & Thouret. La première partie de ce Mémoire intéreflant contient de nombreufes récherches fur,la connoiffance que les anciens & Les modernes ont eue. de Vaimanc & de fon ufage en Médecine, & fe termine par l'éloge de l'Abbé Lenoble, dont Les fuccès nombreux dans lapplication de l’aimant lui ont acquis avec raifon l’eftime & la confiance du Public. La feconde partie renferme les nouvelles obfervations fur l'ufage de l'aimant dans le traitement de plufieurs maladies, d’après lefquelles il paroît conftant qu'il eft très-avantageux dans toutes les maladies qui font de la clafle des affections nerveufes: quarante-huit obfervations le confirment. Dans la troifième , on examine les effets généraux, la nature & l'ufage du fluide magnétique , confidéré comme médicament; & c'eft fans contredit ce qui aété le mieux penfé & le mieux fait jufqu'à préfent fur cette impor- tante matière. 26°. Enfin, des Obfervations fur les propriétés de l'écorce d'un arbre connu à Madagafcar fous le nom de 6ela-aye, par M. Son- nerat. La Mécanique appliquée aux Aris, aux Manufaëlures, à l'Agriculture & à la Guerre; 2 vol, in-4°, ornés de 132 Planches. Seconde & dernière divraifon. Le fieur Berthelot, Ingénieur-Méchanicien , Penfionnaire du Roi, donne avis à MM, fes Soufcripteurs qu'il a eu l'honneur de préfenter , le 7 du mois de Novembre, au Roi & à la famille Royale, le fecond & dernier volume de fon Ouvrage. Il contient, comme le précédent, une infinité de Machines de la plus grande utilité; Travaux publics, Entre- rife particulière, Grandes-Routes, Carrières, Moulins, Grues à bäti- ments, Hydrauliques, il n'eft point d'objet important qu'il n'embraffe. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 243 L’Auteur a ajouté à ce dernier volume un Mémoire particulier fur la manière de conftruire les baromètres, d’après les principes du fieur Aféer- Perica, l'un des meilleurs Artiftes de Paris en ce genre. Une maladie longue l'a privé de la fatisfaction de remplir plutôt fes engagements: mais pour donner à fes Soufcripteurs une efpèce de dé- dommagement, il a augmenté fon Ouvrage de 12 Planches, ce qui en porte le nombre à 132, au lieu de 120 qu'il avoit promifes, Jaloux de mériter de plus en plus leftime & la confidération de fes Concicoyens , le fieur Berthelot a fait réimprimer fur grand papier l’édi- tion entière du premier volume, qui fe trouvoit d’un format trop petit pour les planches, & dans laquelle il s'étoit gliflé beaucoup d'erreurs. MM. les Soufcripteurs , qui auroient encore un exemplaire de cette édi- tion fautive, pourront en faire l'échange , & retirer le fecond volume moyenrant 24 liv., faifant, avec les 48 Liv. du premier volume , la fomme de 72 liv. , paix de la Soufcription. L'Ouvrage fe diftribue à Paris: Chez L'AUTEUR, rue de la Marche, au Marais , maïfon de M. Mañé ; Menuifier ; Et chez DEMONVILLE , Imprimeur-Libraire de l'Académie Françoife ; rue Chrifline, Cryflallographie, ou Defcription des formes propres à tous les Corps du Règne minéral, dans l'état de combinaifon aline, pierreufe ou métallique, avec figures & tableaux fynoptiques de tous les cryflaux connus ; par M, ROMÉ DE L'IsLE, de plufieurs Académies, feconde édition, 4 vol. in-8°, Chez Didot, Imprimeur de MONSIEUR, 17383. Plus l'étude de l'Hiftoire Naturelle a fait des progrès , & plus on a fenti la néceflité de bien connoître les formes extérieures des corps, & fur-tout les formes cryftallines. Les Auteurs qui ont traité de cette matière ne l'ont pour ainfi dire qu'efquiffée. M. Romé de lIfle l’avoit un peu plus approfondie dans la première édition de fa Cryftallographie ; dans cette feconde , il l'a pouffée jufqu'au point où nos conneiflances nous le permet- tent. Après avoir expofé, dans une Introduétion , la théorie de la cryftal- hfation & fes phénomènes, il donne dans la première partie les formes cryftallines qu'offrent les fels , & leurs différentes combinaifons ; dans la feconde, celle des cryftaux pierreux ; & dans la troifième, celle des cryf- taux métalliques. Le quatrième volume contient 12 planches, qui ren- ferme tous les cryftaux , avec des tableaux où font leur développement, & un tableau abfolument neuf & infiniment intéreffant des principaux an- gles que préfentent les cryftaux. Nous reviendrons fur le détail de cer Ouvrage dans le mois prochain, 244, OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, 6c: FAIBLE DEs ARTICLES CONTENUS DANS CE CAHIER, O>;: SE RVATIONS fur la Glace qui fe forme à la fuperficte de la terre végétale dans les pays de granits ; par M. DESMARETS. Pag. 16$ Mémoire [ur le Lair & fur fon Acide, par M, SCHEELE ; traduit du Sue- dois , par Madame P*** de Dijon. - 170 Lettre de M, Caque, Doyen dela Faculté de Medecine, fur une Saxifrage dorée. 176 Obfèrvations fur Les Infèéles polypiers qui forment léBtartre des dents ; par M. MAGELLAN, de Londres, + 178 Mémoire fur les changements qu'éprouvent les Terres mêlées avec les Chaux des Mécaux imparfaits & des demi-Métaux, lorfqwon les expofe au feu de fufion; par M. ACHARD. 179 Goniomètre, ou Mefure- Angle ; par M. CARANGEOT. 193 Lettre de M. FERRIS, [ur deux exemples de Foudre afcendante. 197 Lettre de M. le Princé DE GALLITZIN , fur La forme des Conduéteurs électriques. O9 Lettre de M. le Prince DE GALLITZIN , où il rapporte quelques Expe- . rierces nouvelles de M. ACHARD. 20ÿ Appeñdix pour l’analyfe chymique de la Pierre de Saint- Ambroix. 207 Extrait de la Séance publique de l’Académie des Sciences, Arts @ Belles- Lettres de Dijon , tenue le 18 Aokt 1782. 209 Lettre de M. Carnus, Profeffeur de Philofophie à Rhodez, fur les Eudio- mètres 6 les Paratonnerres. : 223 Fragment d'un Mémoire de M. ! Abbé DICQUEMARE , fur les premiers 6: les derniers termes apperçus de lAnimalité. 256 Mémoire fur le Méphitifme des Puits ; par M. CADET DE VAUX, Infpec- ceur Général des Objets de Salubrité, Gc. &c. 229 Nouvelles Lirtéraires. 236 ASP: PR OPA TPO'N- J lu, par ordre de Monfeigneurle Garde des Sceaux, un Ouvrage qui a pour titre: Obfervations fur la Phyfique, fur l'Eiftoire Naturelle & fur Les Arts, &e.; par MI. Rozrer & MoNGEz Le jeune, &e. La Colleétion de faits importans qu’iloffre périodi- quement à fes Lecteurs, mérite l’accueil des Savans; en conféquence, j’eftime qu’on peut en permeure limpreflicn À Paris ,ce #8 Mars 1783. VALMONT DE EOMARE, Mars 1783 + dé th AE NX ï SN { 4 HE RER | CE L'art à AE ME vs & 2 |" e.c1 N Re À Mars 1-83. TS EEE Ne 7 . jour na DE PHYSIQUE, | | . AVRIL 2783. 2 MÉMOIRE Sur l'analogie qui felrouve entre la produétion & les effets de l'Eleëricite & de la chaleur , de même qu’entre la propriété des corps de conduire le fluide electrique & de recevoir La chaleur ; avec la defeription d'un Inflru- ment nouveau , propre à mefurer la quantité de fluide éleétrique que peuvent conduire des corps de différente nature, placés dans les mêmes circonflances ; Par M, ACHARD. C E Mémoire , dont le temps ne me permet de donner aujourd'hui qu'un abrégé fort court >a pour but de prouver l’analogie qui fe trouve entre le ar à de la chaleur & celui de l'électricité, Je le diviferai en trois par- ties : dans la première , je tâcherai de prouver que la produétion de l’élec- tricité ‘eft femblable à celle de la chaleur ; dans la feconde , je ferai voir que les effets que produit le Auide électrique font analogues à ceux que produit Le Auide igné ; & dans la troifième , je montrerai qu'il fe trouve un rapport exact entre l'aptitude des corps à conduire le Auide électrique, & leur aptitude à recevoir la chaleur, PREMIÈRE PARTILE. La produélion de la Chaleur ef? fémblable à celle de l'Eleékicité. Tout frottement produit dela chaleur ; il en eft de même de lélec- tricité. « Il femble d'abord qu’on peut objecter que , fi l'analogie entre la produc- tion de la chaleur & de l’électricité étoit parfaite, il faudroit que le frot- tement d'un corps quelconque produisit à l'électricité ; ce qui paroît être contraire à l'expérience, puifque les métaux & les corps, qu’on nomme * conduéteurs en général, ne deviennent électriques ; fuivant l'opinion Tome XXII, Part, 1, 1783. AVRIL. Ii 246 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, généralement reçue de tous les Phyficiens, que par le contaét des corps originairement électriques frottés, & que le frottement immédiat de ces corps peut les rendre électriques. Pour répondre à cette objection , je remarque que, lorfqu'on éleétrife un corps originairement électrique, en le frottant contre un corps con- duéteur ; ce dernier , lorfqu'il eft ifolé, donne des fignes d'électricité auffi marqués que ceux que donne le corps éleétrique par lui-même. Certe électricité ne lui a pas été communiquée par le corps originairement élec- tique, puifqu'elle eft oppofée, & qu'on la trouve négative, lorfque l'électricité du corps originairement éle@rique eft politive , tandis qu’elle eft politive, lorfque l’éleétriciré du corps électrique par lui-même elt né- gative. Cette obfervation prouve , non-feulement que les .corps conducteurs deviennent électriques par frottement, aufli-bien que les corps origi- nairement électriques, mais encore que , pour la production de l'élecri- cité, il faut que le corps frottant communique de la matière électrique au corps frotté, lorfque le premier eft de nature à devenir pofitivement élec- trique par frottement; tandis que, lorfque le corps frotté eft de nature à devenir négativement électrique, il faut, pour que l'électricité puifle fe produire, que le corps frottant reçoive une partie de la matière électri- que que renfermoit le corps frotté. La production de l'électricité exige donc que l'équilibre entre la quantité de matière électrique renfermée naturellement dans les corps dont le frottement produit l'électricité , foit rompu. Or, pour que la matière éleétrique cefle d’être en équilibre dans le corps frottant & dans le corps frotté, il faut qu’elle s’'accumule dans un de ces corps, & qu’elle diminue dans l’autre. Si Les deux corps ont une aptitude égale à recevoir & à tranfmettre le fluide électrique , ils eft clair que l'équilibre de la matière électrique dans ces deux corps ne pourra être détruit, parce que, dans l’inftant où l’un des deux corps recevroit une partie de la matière électrique que renferme l’autre, elle fe partageroit uniformément par fon élafticité entre les deux corps, puifque., fuivant da : fuppoñition que j'ai faite , ils reçoivent le Auide électrique avec la mème facilité. D'où je conclus : 1°. Que l'électricité produite par le frottement de deux corps, doit être d'autant plus confidérable , que la différence entre les degrés dans lefquels ils peuvent tranfinettre le fluide électrique eft grande, puifque c'eft en rai- fon directe de cette différence, que lun des corps peut être chargé & l'autre privé de matière électrique. : 2°. Que dans le cas. où les deux corps ont une aptitude égale à rece- voir & à tranfmettre le fluide électrique, ils ne donnent aucun fige d’élec- tricité; non qu'ils ne foient de nature à ne pas pouvoir devenir électriques par frottement, mais parce que l'électricité produite par le dérangemens | . { C J 4 ] / ke à + n” SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 247 de l'équilibre de la matière électrique dans les deux corps fe perd dans l'inftant même où elle eft produite par le rétabliflement de l'équilibre de la matière électrique, qui, trouvant la même facilité à pénétrer dans les deux corps , fe partage uniformément, Cet par cette raifon qu'on ne peut éleétrifer un corps originairement électrique , en le frottant avec un corps de la même nature. à Concluons de la théorie que je viens de développer , & qui eft fondée fur des faics : M 1°, Que dans tous les cas, & quelle que foit la nature des corps, le frottement produit roujours de l'électricité ; & que lorfqu'elle n’eft pas fen- fible , cela ne provient que de ce qu'elle fe perd dans l'inftant même où elle eft produite. ; 2°. Qu'il n’y a aucun corps qui , par frottement contre un corps qui tranfmet le fuide électrique avec plus ou moins de difficulté, ne donne des fignes d'électricité , & que les métaux font tout aufli éleétriques par eux-mêmes que le verre & les rélines. La contradiction: queñparoît d'a- bord renfermer cette propofition, n’eft qu'apparente, & un examen plus approfondi la fait bientôt difparoître. © 3°. Que le frottement produifant toujours , & dans tous les cas, de” l'éleétricité, il fe trouve une analogie parfaite entre La produétion de Ja chaleur & de l'électricité, SEC 'OUN ER EMA RUN) je E; Les effets que produit l'Eleülricité font femblables à ceux que produit La chaleur. 1°. La chaleur dilate tous les corps. Cette dilatation ne peut provenir que d'une force répulfive que le Auide igné communique à leurs parties, Deux corps qui ont la même électricité, foit politive ou négative, & qui font électriques au même degré, fe repouffent : donc auñli toutes les par- ties d’un corps électrifé doivent fe repoufler ; & fi l'on ne remarque pas de dilatation, comme dans les corps qu'on échauffe, l'on ne peut l'at- tribuer qu’à l'attraction des parties 4 corps, qui, furpaflant la force ré- pulfive que l'électricité leur communique , les empêche de s'écarter. Le fluide électrique agit donc à cet égard fur Les corps Comme le fluide igné. pt 2°. La chaleur accélère la végétation & la germination ; l'éleétricité produit le même effer. Mais ce qu’il y a de très-remarquable , & qui peut fervir à donger une idée de la manière dont la chaleur agit fur les corps , c'eft que l'électricité pofitive accélère la végétation autant que l'électri- cité négative; d’où il fuit que les effets du fluide électrique ne pro- Tome XXII, Part. I, 1783. AVRIL. Lie 248 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, viennent point de l'augmentation ou de la diminution de fa quantité, mais feulement de la répalfion des parties des corps qui ont un degré d'é- lecricité, foit pofitif ou négatif, différent de celui qu'a le milieu dans lequel ils fe trouvent. } 3°. Par la même raifon , l'électricité pofitive accélère l’évaporation aufli- bien que l'électricité négative; ce qui forme un troifième point d'analo- ie entre les effets de la chaleur & de l’éleétricité. 4°. La chaleur accélère le mouvement du fang dans les animaux ; l'é- lectricité produit le même effet. Pour s'en convaincre, il fuffit de comp- ter les battements du pouls de la même perfonne, lorfaw'elle eft élec- trifée & non éleétrifée. L'on trouve conftamment que le pouls bat dans la même perfonne, plus fouvent lorfquelleeft électrifée , que lorfqu'elle ne left pas. Dans la crainte que l'inquiétude, la fituation génée , ou l’atention que la perfonne électrifée porte à l'expérience, ne füt la caufe de l'accélération du pouls , j'ai fait cette expérience avec un chien en- dormi, & jai toujours trouvé que l’électrifation augmentoit le nombre des battements du pouls. — © 5°. L'expérience que j'ai faite fur des œufs de poule , &celles qu'ont faites plufeurs Phyfciens en électrifant des œufs de papillon , prouvent que l'électricité favorife, tout comme la chaleur, le développement des animaux. 6°. Le fluide électrique met des métaux & d’autres corps en fufon; effet que produit également la chaleur. 7°. Lorfque deux corps, qui ont des degrés de chaleur égaux fe touchent, la chaleur du corps le plus échauflé fe partage uniformément entre les deux corps ; de même un corps non éleétrifé, qui touche un corps élec- trifé , perd , lorfque le corps a une électricité négative, & reçoit, lorfqu'il a une éleétricité pofitive, autant de matière électrique qu'il faut qu'il en reçoive ou qu'il en perde , pour qu'elle ait la même denfité dans les deux corps. Concluons donc qu’il fe trouve une très-grande analogie entre les effers de la chaleur & de l'électricité. 4 ŒYR'O EST EME PARTIE. Il fe trouve un rapgort exaët entre l'aptitude des Corps & conduire le fluide # éleitrique & à recevoir la chaleur. Si lon place des corps de différente nature , qui ont des deorés de cha- leur égaux, dañs un milieu d'une température différente ; îls prennent tous, au bout d’un certain temps, un même degré de chaleut ; mais l'on frouvye une très-grande différence entre le temps néceflaire à chaque corps STAR SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 249 pour prendre la chaleur du milieu dans lequel il fe trouve. IL faut, par exemple, beaucoup moins de temps aux métaux qu’au verre, pour rece- voir & pour perdre des degrés de chaleur égaux. : Suppofons qu’on place différents corps non éleétrifés dans un milieu électrique , par exemple, dans de l’eau éleétrifée; au bout d'un certain temps, l'on trouve que tous ces corps, fansexception, ont pris le deoré de l'électricité du milieu, maisil y a une différence très-confidérable entre le temps qu'il leur faut pour recevoir la mème quantité de fluide électrique, En portant quelqu’attention à l'examen des corps qui reçoivent & qui perdent le plus promptement le degré de chaleur qu'ils ont, lorfqu'ils font placés dans un milieu d'une température différente, l'on trouve que ce font exactement ceux qui reçoivent ou qui perdent dans le moins de temps le Auide électrique. Les métaux s'échauffent & fe refroidiffent le plus promptement ; c'eft aufMi de tous les corps ceux Se & qui perdent le plus vite le Auide électrique. Les bois s'échauffent & fe refroi- diffent moins vice que les métaux; ils reçoivent & perdent. aufli avec beaucoup plus de difficulté le Auide électrique que les métaux. Enfin, le verre & les réfine n’admettent & ne perdent le Auide électrique que fort lentement, & ce font les corps qui prennent le plus difficilement le degré de température du milieu qui les entoure, EL on échauffe l'extrémité d’une branche de fer jufqu'à la faire rou- gir , l’autre extrémité , quand même la branche auroit plufieurs pieds de longueur, s’échauffe en très-peu de temps , au point qu’il eft impoiflible de la tenir ; ce qui vient de ce que le fer conduit fort promptement la chaleur, tandis qu'un tube de verre de quelques pouces de longueur peut être échauffé à une extrémité jufqu’à faire fondre le verre , fans que Eu tre s’échauffe fenfiblement. De la même manière, le fluide électrique fe communique d'une extrémité d’une barre de fer à l’autre dans un temps fi court, qu'il eft impofñfible de le mefurer ; tandis que ce n’eft qu'ap:ès un temps très-confidérable qu'un tube de verre , dont une extrémité fe trouve en contact avec un corps éleétrifé , donne des marques d'électricité à l'exy trémité oppofée. « Les obfervations que je- viens de rapporter, prouveht que plufieurs _ corps qui reçoivent & perdent difficilement leur degré de chaleur actuel, reçoivent & perdent aufli avec difficulté l’électricité. Afn de déterminer fi certe loi eft générale & ne fouffre aucune exception , il falloit des ex- périences très-multipliées. Pour pouvoir faire ces expériences & comparer Les corps, relativement à leur propriéré de conduire le Auide igné & la matière électrique, il étroit éceflaire d’avoir uh inftruruent propre à mefurer les degrés dans lefquels les corps conduifent l'électricité. Cette connoiffance efb encore d'une frès-grande utilité pour expliquer une infinité d'expériences ‘élec- triques , & elle répand beaucoup de jour fur la théorie de l'éle&ricité, Il 250 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, » eft étonnant que les Phyfciens n'aient pas porté plus d'attention à, cette recherche, qui, quoique très-importante, paroît avoir été entièrement négligée, . h Suppofons deux corps, l'un électrifé & l’autre non électrifé ; que le der- nier ait un degré d'électricité connu , & que le premier, en le touchant pendant un temps déterminé, le prive d’un degré d'électricité donné : cette privation d'une partie de fon électricité détermine la facilité ou la difficulté avec laquelle le corps qui touche le corps électrifé tranfmet le fluide électrique. Outre la foure & le volume de ce corps, la durée du temps où ces deux corps reftent en conta& , influe fur la privation de l’é- lectricité du corps électrifé; de manière que toutes les autres circonftan- ces étant les mêmes, la propriété des corps de priver d’autres corps d’une partie de leur électricité, ou de conduire le Auide éleétrique , eft en raifon inverfe du temps qu'il leur faut pour leur faire perdre un degré d'électricité égal. J'ai fait faire un inftrument, ( PI. I.), dont la conftruction fe fonde fur les principes que je viens d'établir , au moyen duguel l’on melure avec beaucoup d’exactitude la quantité d'électricité que perd un corps dans un temps donné , par l'attouchement d'un autre corps non éle@rifé. Cet infttument eft compofé d'une balance exttémement mobile AB; aux extrémités des bras de cette balance font attachées deux boules de laiton creufes, qui doivent être aufli légères qu'il eft poffible , afin qu'elles n'aug- mentent pas par leur poids le frottement de la balance. CF D eft un demi- cercle divifé en degrés ,‘ättaché à la chape qui foutient l'axe de labalance , de manière que lorfque le fléau A B eft horizontal , l'aiguille E F séponde à la ligne qui divife le demi-cercle CF D en deux parties égales. La chape eft affermie à une capfule de laiton , qui eft cimentée fur un tube de verre G G’, fixé à la planche QR ST. Ce tube doit avoir au moins 2 pieds de longueur. ? U eft une bouteille de Leyde. A la barre de métal ZZ/, qui com- Munique avec fon enduit intérieur , font fixées horizontalement trois autres branches de métal VZ, XZ & ZY, aux extrémités V, Y & X defquelies font attachées des boules de laiton creufes, La bouteille U eft atrachée à la planche QRST , de manière que, lorfque le fléau AB eft horizon- tal, & par conféquent en équilibre , la boule B touche exactement la boule V , comme le repréfente la figure. KN eft un levier de métal, traverfé en I d’un axe autour duquel il peut fe mouvoir librement dans un plan vertical , qui doit coïncidér avec celui dans lequel fe trouvent la balance À B & la barre de méral VX. Ee levier KN eft foutenu par une colonne de bois IH, afférmie à la planche QRST,. A l'extrémité K, qui eft recourbée à angle droit , eft ung vis à laquelle on peut attacher le corps L , fur lequel l’on veut faire des expé- riences pour déterminer Le degré dans lequel il conduit l'électricité, ES RS ES PE À de Te SUR L'AIST. NATURELLE ET LES ARTS. 251 Ce corps doit avoir la figure d’un cylindre arrondi à fon fommet, de manière qu'il forme un hémifphère. A l'extrémité N du levier eft attaché un fI NO , qui a en O un petit crochet, auquel on peut fufpendre la boule P..La colonne 1H doit être aflez éloignée de la bouteille U , pour que, lorfqu'on fait baïfler l'extrémité N , le corps L, en montant, touche en un point la boule X. Le rapport du poids des bras du levier & de la boule P au corps L, de même que le rapport de la hauteur de la colonne IH à la longueur du fl NO, doit être tel que, lorfqu’on fuf- pend la boule P par fon crochet au crochet O, & qu'on la laifle tomber, le corps Ltouche en un point la boule X, & que dans le même moment la boule P , en tombant fur la planche QRST, fe dérache du fil NO. Le corps L retombera alors par fon poids, en forte je touchera toujours la boule X pendant un temps égal & de très-peu de durée. Pour faire ufage de cet inftrument, l'on fait communiquer par un fil + d’archal a chape de la balance avec la branche de métal Z Y , & lon électrife la bouteille U, en attachant à la boule Y une chaîne qui reçoit l'électricité du globe. Les boules V & B devenant électriques , fe HP fent; & l'angle que forme l'aiguille EF fur le demi-cercle CFD , déter- mine la force de la répulfon, & par COQ le degré d'élec- tricité. Je fuppofe qu’il foit de 20 degrés : l’on fait alors donner, de la manière que je l'ai décrit , le corps L contre la boule X. Ce corps ab- forbe une quantité de fluide électrique proportionnée à l'aptitude qu'il a à - le recevoir & à le tranfmettre ; la balance baifle en proportion de la quantité de fluide éleétrique qui a été abforbée, & cet abaiflement eft mefuré pour la diminution de l'angle que l'aiguille forme avec le demi- cercle. Suppofons que cette diminution foit de 5 degrés; qu’on répète enfuite la même expérience , en fubftituant au corps L un autre corps de mème figure , mais de différente nature: je fuppofe qu’on trouve que la diminution de l'angle, au lieu d’être de ÿ degrés , foit de 8 degrés ; dans ce cas, les degrés dans leQuels ces deux corps pofsèdent la propriété de conduire le Auide électrique, feroit dans la proportion" de $ à 8. Le temps ne me permettant pas de détailler les expériences que j'ai faites avec l’inftrument dont je viens de donner la defcription , je me centente- rai de dire qu'elles prouvent toutes qu’il fe trouve un rapport exaét entre Ja propriété des corps de recevoir & de perdre la matière électrique & le fluide igné, SR bÿ> OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, OBSERVATIONS SUR LADURANCE, Faites par ordre de l’Adminifiration du Pays dans les fois de Septembre & d'Oélobre de l'année 278053 u Par M. BERNARD, Diretteur-Adjoint de l'Obfervatoire de la Marine de Marfeille , de l'Académie de la même Ville, & de la Société d’ Agriculture d'Aix. Re des terres ftériles, en améliorer de foibles, y répandre, d’une manière régulière , les principes de la fécondité, en y ouvrant des ca- naux d'arrofage ; rendre à l'air une falubrité néceffaire; foutenir & ac- croître la population, en anéantiffant des marécages ; augmenter, en multipliant les prairies, les beftiaux , les engrais, & par conféquent l'a- bondance des denrées ; faciliter enfin le tranfport des biens qu’on feroit naï- tre; &lier, au moyen des eaux , des contrées éloignées : tels font les principaux avantages qui réfulteroient de l'exécution du projet de donner à la Durance un lit dérerminé , & c'’eft ce qui a fourni le fujer d’un des premiers Prix de la Société d'Agriculture. La fomme promife aux concurrents ne paroïffant pas fufifante pour exciter leur zèle, on prit la réfolution de faire travailler par économie fur le fujec propofé, & j'eus l'honneur d'être chärgé de raflembler les obfer- vations néceflaires pour le traiter convenablement. Quoique mon voyage ait duré un mois & démi , & quoique j'aie relté pendant plus d'un mois fur les bords de la Durance , je fuis éloigné de pouvoir donner toutes les inftruétions que la Société demandoit. En ren- dant compte de mon travail ; je reconnois qu'il eft extrèmement imparfait, Je dois dire pourtant, moins pour ma juftification, que“pour celle des perfonnes diftinguées qui m'ont employé, que je ne pouvois, avec les #oibles fecours qui m'ont été accordés (1), remplir la tâche qui m'étoit impofée, Ainfi, j'attends de la juftice du Public qu'il n’oubliera pas, en me jugeant, les bornes qui métoient prefcrites , & la difficulté du fujet. a — (Gi) MM. les Procureurs du Pays fixèrent à 600 livres la dépenfe que je devois faire. Les SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 253 Les moyens qu'on emploie pour contenir & diriger les rivières , diffè- rent effentiellement, felon l'idée qu'on fe forme des effets de la rapidité des eaux , de la nature du fol fur lequel elles coulent, & de l’origine des matières qu'elles charient. Il eft donc de la plus grande importance d’étu- dier chacun de ces objets , & de connoître l'influence qu'ils ont fur la flabilité & la durée des ouvrages qu'on peut élever pour prévenir la dé- gradation des campagnes: | Je n'ai pas fait à beaucoup près autant d'obfervations que j'aurois defiré fur la vitefle de la Durance. Comme le. principal courant ne fe trouve pas toujours près de fes bords ; & comme fa rapidité eft fort diffé- rente, felon que les eaux font plus ou moins élevées , il auroit fallu à-la- fois que, dans le court efpace de temps que j'ai mis à voyager, il y eût eu des crues confidérables; que je me fafle trouvé dans des poftions favo- rables pour mefurer La vicefle des eaux , & qu’on eût fait des obfervations correfpondantes dans les points du cours de la rivière où je ne pouvois pas être. é Il ya une infinité de connoiffances particulières qu’il faut raffembler, pour prendre une idée un peu jufte de l’action d'une rivière dans tout fon cours, Le temps & des fecours multipliés dont j'aurois eu befoin me man- quant, je me fuis trouvé dans l'impuiffance de pouvoir préfenter un tableau exact de la rapidité & de l’action de la Durance dans fes divers états & dans les diverfes contrées qu’elle traverfe. J'ai fait pourtant le plus d’obfervarions qu'il m'a été poflible ; fur-tout lorfque je prévoyois qu'elles pourroient fournir des conféquences utiles pour perfectionner la théorie des rivières, IL étoir effentiel de connoître avec exactitude la nature des montagnes voilines de la Durance, & de déterminer l’origine des amas énormes de cailloux roulés qui fe trouvent dans fon lit & fur fes bords. Les obferva- tions qui concernoient ces objets éroient fondantentales , & d'autant plus intéreflantes, que l'autorité des Phyficiens & l'opinion publique. avoient confacré de très-grandes erreurs, Comme je n’avois pas befoin , pour raf- fembler ces obfervations, de fecours étrangers , j'y donnai- toute mon atrention : aufli je regarde cette partie de montravail comme complette, D'g"s\C 281. PT ON Des bords de la Durance, depuis Sifleron jufqu'a fon embouchure dans le Rhône. . Le ol de la Provence eft fingulièrement inégal. Les montagnes dont il eft hériflé ne font ordinairement féparées que par des vallées étroites. Les principales montagnes, au voifinage defquelles la Durance coule , font Tome XXII, Part. I, 1783. AVRIL, KK 2$ÿ4 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, celles de Lure & du Leberon; elles font l’une & l'autre formées par couches , & uniquement compofées de Sa calcaires & de marnes. À Sifteron , la Durance pañle entre deux montagnes, qu'on peut re- garder comme une dépendance de celle de Lure. Elles font nues dans un certain efpace, & elles font remarquables } en ce que leurs dits font pref- que perpendiculaires à l'horizon, :& dans le même plan fur les deux bords. La rivière eft fort reflerrée en cet endroit ; elle y coule fur unro- cher calcaire , & fous une archeunique de 14 toifes & demie de longueur, ui forme le dernier pont qu'on trouve fur fon cours. IL eft extrêmement rare que la Durance foit contenue par des rochers calcaires ou par des bancs 4 marne, même lorfque le haut des monta- gnes ; au pied defquelles elle coule, n’offre que ces efpèces de pierres. Je commençai à obferver cette rivière à une petite lieue de Sifteron. J'ai re- marqué, en la fuivant jufqu'à fon embouchure, qu’elle couloit prefque fans interruption entre des collines (1) formées de cailloux arrondis, & entaflés les uns fur les autres. Il arrive fouvent que ces cailloux font fans liaifon , mais d’autres fois ils font unis par un ciment fort dur. Il y a de ces collines graveleufes qui font adoffées contre des montagnes calcaires , & on en voit aufli un très-grand nombre qui font entièrement ifolées. Au-deffus de Sifteron, & fur la rive gauche de la Durance, les points "Tes plus élevés où on trouve des cailloux roulés ,ne font pas, autant que j'ai pu l’eftimer, à plus de 25 toifes fur le niveau de la rivière: on y re- marque quelques plaines affez étendues , où ces cailloux fonttoujours ap- parents , ou du moins à peine recouverts d'une couche mince de terre la- bourable. Ces amas de cailloux font dominés par une montagne efcarpée, formée principalement de terres marnéufes: parmi les torrens qui defcen- dent de cette montagne , il s’en trouve qui, ayant rencontré des bancs de cailloux fans liaifon , s’y font creufé des lits profonds. Jai remarqué alors que les bancs de caîlloëx avoient d'autant moins d’épaiffeur, qu'ils étoient plus élevés fur la montagne, & qu'ils étoient appuyés dans quel- ques endroits fur des couches de marne. » Au-deflus de Sifteron , on obferveque les cailloux qui font dans le lie de la Durance font de même efpèce que ceux qui compofent les collines voifines; ils font prefque tous vitrifiables. Les quartz de différentes cou leurs y abondent; les pierres calcaires font en petit nombre: on y trouve (x) Je ne doute pas qu’en remontant plus haut la Durance, je n’eufle encore tronvé far fes bords des collines organifées de la même manière. Lorfque M.. Guettard , ou M. Faujas de Saint Fond publieront PHiftoire Naturelle du Dauphiné , on connoitr4 les lieux où la Durance commence à couler près de ces amas extraordinaires de pierres roulées. SUR L'HIST. NATURELLE/ET LES ARTS, 255 des ferpentines & des variolites. J’ai-ramaffé de es dernières efpèces de pierres au haut des collines, dans destas de cailloux qu'on avoit formés pour rendre fertiles des champs où ils étoient auparavant difperfés. La grofleur de ces cailloux varie fingulièrement; pourtant les plus gros ont rarement plus d’un pied & demi de diamèce: quoiquils ne {oient pas difpofés dans les collines d’une manière régulière relative- ment à leur mafle, il eft aflez ordinaire que les plus gros fe trouvent -dans les lits les plus bas des collines: d’ailleurs, la feule différence, qu'il y aitentre les cailloux qui font dans le lit de la rivière & ceux qui font fur les hauteurs voifines, c’eft que ceux-lMf8nt parfaitement lifles , & que la furface de ceux-ci, par l'influence des éléments, eft un peu irrégulière, Les cailloux calcaires font ceux qui font plus fenfiblement dé- gradés. … La Durance, au-deffus de Sifteron, frappe dans quelques points de fon cours fur la rive droite, contre des. bancs de marne; mais elle eft aufli contenue dans beaucoup d’endroits fur les deux bords par des ra- chers formés de cailloux roulés. Le Buech entre dans la Durance au-deflus de Sifteron. Cette rivière eft confidérable & fort rapide. Comme elle ne roule guère que des pier- res calcaires , j'ai jugé qu'elle ne rencontroit pas dans fon cours des col- lines organifées comme celles que la Durance traverie. Au-deflous de Sifteron, on obferve des deux côtés de la Durance des cailloux roulés ; ils fe trouvent quelquefois à plus de 25 toifes au deflus du niveau de la rivière, Si on cefle de les voir, ce n’eft jamais que dans de petits efpaces, & on découvre alors le rocher naturel de la montagne, qui eft prefque roujours marneux. Le$ collines entre lefquelles la Durance coule depuis Sifteron jufqu'à Volonne, font fort voifines, Comme les cailloux dont elles font compo- fées font dans ces efpaces prefque toujours liés par un ciment fort dur , ils forment comme des murs de quai, qui contiennent les eaux de la ri- vière , & quidempèchent de prendre une plus grande largeur. On obferve fouvent , fur des lits de cailloux roulés , des bancs de fable. Ceux qu'on trouve fur les coilines de Château-Arnoux , préfenrent des ob- jets bien extraordinaires : on y voit repofer de groffes mafles arrondiesde pierre calcaire bleue fort belle & fort dure. Ce font ces blocs ifolés qui ont fourni la pierre de taille, avec laquelle on a bâti le pont de Malijai , & d’autres ponts qui fonr fur la route de Sifteron. Il eft évident que ces blocs n'ont jamais appartenu aux montagnes voifines aétuellement exif- tantes, puifqu'elles ne préfentent que:des pierres geliffes. En fuivant la rive gauche de la Durance depuis Volonse jufqu'à Jou- ques, on voit fur tout cet efpace, en s’élevant jufqu'à Mouftiers, des cal- lines entièrement formées de cailloux roulés & de fable. Leur organifa- tion ne peut être mieux prononcée ; elles ne renferment que rarement Tome XXH, Part, 1, 1783. AVRIL, Kk 2 256 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, des bancs de pierres différentes: auffi eft-on réduit , dans la plupart des Villes & Villages qui sy trouvent , à conftruire les édifices avec des cailloux ronds. ) Il y a au haut de ces collines des plaines extrèmement étendues , & qui ne font interrompues que par des ravins formés par les eaux pluviales. Ce qui eft encore fort remarquable, c'eft que le niveau de ces plaines eft dans quélques endroits élevé de plus de 150 toifes fur le lit de la Du- rance, & qu'il eft auffi plus élevé fur le niveau de la mer d'environ 70 toi- fes , que les collines de cailloux roulés que j'ai obfervées auprès deSifteron, Je reviendrai [ur ces SL: lorfqu’il s'agira de déterminer l'origine de ces amas de cailloux roulés. ° Je fuivis la rivière de Bleaune jufqu'à Mirabelet. J'obfervai qu’elle couloit entte des collines uniquement formées de cailloux roulés, & qui æfétoient guères moins élevées de 100 toifes fur fon niveau. On nvaflura que ces collines ne fe terminoient qu’à environ 3 lieues de diftance de l'embouchure de la rivière, On voit fur les deux bords, des torrents dont le lit eft fort large, & rempli de cailloux fournis par les collines voifines, Ces collines ne s'étendent guères du côté du nord à plus d’une lieue. Les torrents qui ont un cours plus long fe diftinguent aifément, parce qu'on trouve dans leur lit quelques pierres marneules, PR” En examinant la nature des cailloux des collines de Malijai Mes Mes, d'Oraifon , de Valanfolle, &c. j'ai obfervé affez généralement que la lupart de ceux qui forment les lits les plus bas des collines font vitrifia- les. Mais dans les parties un peu élevées, les cailloux calcaires font fans comparaifon plus nombreux. On trouve pourtant toujours à leur voifinage quelques quartz, des granits & des grès affez abondamment, -Ces cailloux calcaires font fort durs, & ils fourniffent une des meïlleures chaux qu'on puifle employer, Depuis Château-Arnoux jufqu'à l'extrémité du bois de Negreouls, près de Mirabeau, on voit aufli prefque toujours des cailloux roulés fur la rive droite dela Durance. Si les collines ain organifées font quelquefois in- terrompues, c’eft pour faire place à des bancs plus où moïnsæétendus de fable, qui eft fouvent durci, & qui forme alors du grès. Au refte, les collines de cailloux. roulés fe terminent à une petite diftance de ce’ côté de la rivière, Les coilines de fable s’en éloignent davantage, & on les voit très-fouvent appuüyées fur des bancs de marne, qui font-des expan- fions du fol naturel des montagnes de Lure & du Leberon. On commence à obferver une efpèce de rocher bien extraordinaire au fommet des montagnes de Ganagobie & de Lurs. Comme il accompa- gne enfuite: prefque fans interruption les collines de fables & de cailloux , comme il eft fouvent mêlé & confondu avec elies , il peut fervir à indi- quer l’originé de ces cailloux , & à détruire quelques fyftèmes qu’on pour- roit faire fur la formation des collines où on les voit raffemblés, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 257 Il n'eft perfonne qui n'ait pu obferver , parmi les matières que la mer jecre fur fes bords, des débris de coquilles arrondis & ufés par le frot- tement, Les livres d'Hiftoire Naturelle font mention de plufieurs contrées extrêmement favorables à la multiplication des coquillages, & où les ri- vages de la mer ne préfentent d'autre fable que celui qui peut être formé de la décompofition de ces, êtres, Si onfe repréfente un volume immenfe de ce fable coquillier , réuni par un ciment naturel, on aura l'idée la plus exaGte des rochers dont je veux parler. Rien n'eft pourtant f ordinaire que d’y rencontrer des corps marins d'une parfaite confervation. Il entre conftamment du fable dans leur compolition, & on y voit aufli quelque- fois des cailloux arrondis de toute grandeur , & qui font indifféremment quartzeux , filicés , calcaires. Ces rochers forment fouvent, fanseinterruption ; des collines éten- dues. On remarque prefque toujours qu'ils font difpofés par couches pa- rallèles. Ils préfentent plufieurs variérés. Lorfqu'ils font principalement formés de débris fort petits de coquilles , on les taille comme le tuf; ils font alors aflez tendres dans la carrière : mais ils durciffent à l'air, & ils réfiftent parfaitement aux injures du temps. Lorfqu'ils renferment beaucoup de coquilles entières , ils font alors moins durs, & ils font fujers à fe décompoler; lorfqu'enfin il y a du cail- loutage mêlé avec les coquilles , ils forment une mafle fort dure, qu'on ne peut pastailler facilement. Au relte, il y a peu de collines formées de pierre coquillière qui ne renferment à-la-fois des bancs de toutes les variétés que je viens d'indie uer. [l eft aufli fort ordisaire de voir des lits de pierre coquillière fur AE OR de fable & de cailloux roulés , & réciproquement. Je me réferve de parler avec qu:lqu'étendué des curiofités naturelles que préfentent les collines formées de pierres coquillières. Je me borne à préfent à annoncer qu'on y trouve principalement des huîtres , des ourfns, des madrépores , des cames , des cœurs & des vis, Le terroir de Lurs n'offre que du fable, des cailloux roulés & de {a pierre coquillière. Le fable eft. ordinairement appuyé fur de la marne, De Lurs à Pierrerue , les terres font fablonneufes : on ebferve du grès qui fe décompofe aifément, & les collines préfentent des bancs de pierre coquillière. De Pierrerue à Forcalquier, le terrein eft toujours {ablonneux, & il eft fouvent appuyé fur de la marne. Les collines voilines de For calquier font couronnées de pierre coquillière. A Mane, le terrein eft encore fablonneux dans une grande étendue : on y trouve de la pierre coquillière *dans plufieurs endroits, & il y ena même une belle carrière qui fourpit aux contrées voifines. Il y a au nord de Mang des montagnes calcaires avec des lits marneux. On voit dans ces rochers une quantité immenfé*de buccins & de lima çons plats. Les coquilles ne fublftent plus: on ne remarque que leur 258 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, noyau. Je ne fais mention de cette efpèce de pierre, que parce qu'elle fe trouve fouvent au voifinage des autres rochers coquilliers. Le Leberon eft une montagne à couche; fes lits font entièrement dif- tinéts ; ils foncou calcaires , ou marneux, ou féléniteux : il renferme beau- coup de bancs de houille (1): il fe termine, du côté de left , vers Volx. On voit ainfi qu'il eft environné de collines, qui n’ont pas été formées de fes débris. A Manofque’, tout ce qui n'appartient pas au Leberon ne préfente que des pierres coquillières, des fables & des cailloux roulés. De Manofque aux Jourdans , on trouve fouvent la pierre coquillière , des bancs de grès, de la roche marneufe & des côteaux de cailloux roulés, Les mêmes ab- jets fe préfentent à Grand-Bois : on y remarque de plus des maffes épaifes de fable argilleux rougeûtre, dans lefquelles leseaux pluviales ont formé des ra- vins profonds , jufqu’à ce qu'elles aient rencontré les bancs de cailloux roulés. Les fables légers font abondants à la Tour-d’Aigues, ainfi que la pierre coquillière & les graviers de la Tour-d’Aigues. A Pertuis, le fable eft la terre ordinaire : on en voit des bancs qui renferment une quantité infinie de détriments de coquilles. En fuivant Le torrent qui vient à Per- tuis, on remarque que les fables repofent fouvent fur de la marne bleue. La Durance, après avoir ferpenté dans des plaines étendues depuis les Mées , fe rétrécit vers Mirabeau, & elle eft contenue alors entre des montagnes peu éloignées, Sur la rive droite , on ne voit, dans un efpace d'environ deux lieues, que des rochers calcaires qui finiflent vers la partie du terroir de Pertuis, où font établies les digues qui défendent le terri- toire de cette Ville: mais dès que ces rochers ont difparu , il leur fugcède des collines de cailloux roulés qui s’étendent dans tout le terroir. IL y en a un banc très-confidérable , qui eft prefque entièrement compofé de pier- res vitrifiables ; d’ailleifrs le territoire de Pertuis fournit de belles carrières de pierre coquillière , des roches de pierre blanche pleine de noyaux de buccins & de limaçons plats, & des bancs de fable & de grès, Les rem- parts de la Ville font appuyés, du côté du nord, fur un rocher de cette dernière efpèce, mais qui eft mauvais & feulement remarquable, en ce qu'il contient beaucoup de coquillages marins décompofés, & qui fe réduifent , lorfqu’on les touche, en une pouflière blanche extrêmement fine. Les bancs de pierre coquillière, de fable & de cailloux roulés ne font pas bornés du côté du nord & du nord-oueft par le territoire de Per- tuis: on les fuir encore dans les Villages voifins qui font dans les diréc- tions que je viens de marquer. Le Leberon eft alors aflez éloigné. * “ EL en (1) Voyez men Mémoire {ur les Mines de Houille qui font en Provence. 3 1} : SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 2$$ En parcourant fucceflivement les terroirs de Villelaure , de Cadener & de Lauris, on voit la continuation des cailloux réulés, des fables & des roches coquillières. * De Laurisà Merindol , Le Leberon fe rapproche beaucoup de la Du rance. Dans plufieurs endroits, de petites pierres caléaires dérachées de la montagne par les eaux pluviales , couvrent l’ancien fol; mais on ne laifle pas de voir de temps en temps des bancs de cailloux roulés avec des mafles de roche coquillière. A Merindol, la Durance frappe au-deffous du Village dans une aflez grande étendue contre un rocher de pierre calcaire fort dure ; maïs au- deffus de ce banc de rocher , quieft élevé dans quelques endroits d’en- viron 10 toiles fur le lit de la Durance , il y a une plaine inculte couverte de cailloux roulés, prefque tous vitrifiables , avec quelques gros bancs de pierre coquillière. En allant du côté de Cavaillon, on voit une petite plaine formée de petites pierres defcendues du. Leberon. Ces petites pierres repofent fur des cailloux roulés qui paroiffent dans le lit des ravins , & dans les lieux où on a fait des tranchées un peu profondes, À un quart de lieue de Merindol , on ne voit plus de colline auprès du Leberon. Cette montagne refte alors ifolée; elle a l'afpect le plus défagréable ; elle eft prefqu'entiè- rement nue. Les rochersidont elle eft formée font fort durs , & difpofés fur une pente rapide, Il nous refte.a décrire la rive gauche de la Durance, depuis Jouques, La pierre coquillière y eft fort commune, ainfi qu’à Pepe Ce dernier Village eft bâti fur un rocher de cette efpèce, & on en trouÿe de très- belles carrières à une petite demi-lieue vers le fud-eft. En allant les vifitét, je remarquai beaucoup de cailloux roulés quartzeux fur les côteaux voifins. | G De Peyroles à Meyrargues , on n'obferve que des caillouxraulés dans la plaine. On les a#trouvés dans plufieurs endroits liés par un ciment fort dur, Les collines les plus voifines n’offrent que des grès , des pierres co- quillières & des cailloux arrondis, Les côteaux du terroir de Meyrargues , ‘qui font vers la Durance , ne renferment guères que des cailloux roulés. Cette rivière vient battre quel- uefois contre des rochers formés de ces cailloux réunis , & qui fe trouvent Le la plaine. Les côteaux de Fons-Colombe reffemblent à ceux de Meyrargues, Vers Janfon, il. y a des montagnes calcaires qui ne fe terminent qu’à la Du- rance. De la Roqueà Malemorr, il y sant is de cailloux roulés. Ce *_ dernier Village eft bâti fur une colline où on: trouve des fables , de la pierre calcaire & de la roche coquillière. Dans toute la plaine qui s’étend vers le bois de Taillade, on trouve à une petite NC: à des cailloux roulés ; da pierre coquillièfe y eft abondante. On m'a dir que c'ésoir de-là 260 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, qu'on avoit tiré celle qu'on a employée à la prife d'eau du canal Boif- gelin, & à d’autres ouvrages fur le même canal. La plaine de Senas, qui joint celle de Malemort, & qui s'étend jufqu’au pied des montagnes d’Allein , de Lamanon , d’Aiguières & d'Orgon, n'eft prefque compofée que de pierres roulées. A niefure que le fol eft plus élevé fur le niveau de la Durance , la terre labourable a moins de pro- fondeur, & Les cailloux font plus apparens. On trouve dans le terroir de Senas , du côté où le fol eft plus élevé fur le lit de la rivière , des rochers étendus de pierre coquilliète qui ont fourni les blocs qu’on a employés à la conitruétion des digues. Le canal de Crapone paffe entre deux montagnes affez voifines à La- manon. Celle qui fe trouve à left du canal eft calcaire , & elle ne mon- tre des rochers différents qu'auprès de Salon, où la pierre coquillière eft extrèmement abondante. La montagre de Lamanon eft formée de grandes mafles de grès & de pierre coquillière. Ces deux efpèces de roches font fouvent mêlées & con- fondues. La montagne s'étend vers Aïguières , & elle pafle au nerd de ce Village. On fait que la Crau commence à Salon & à Aiguières; mais cette plaine tient aux bancs de cailloux roulés de Senas. Si, en fuivant le che- min de Salon, on les voit difparoïître , ce n’eft pas qu'il ne s’en trouve à, une certaine profondeur. Les lits de ces efpèces de pierres font d'autant plus éloignés de la furface de la terre , qu'on s’approche davantage de la montagne calcaîte , dont les déblais fe-font étendus dans la plaine, & ont couvêrt Les pierres roulées qui formoient l’ancien fol. A Orgon, les montagnes font calcaires’, élevées & nues. A leur bafe & fous les maifons , on trouve une pierre blanche coquillière d'un grain fin, & qu'on polit facilement, En allant d'Orgon à Bonpas, on marche pendant quelque temps fur des éboulements des montagnes calcaires voifines. Où obferve pourtant bienrôr des cailloux roulés. La terre labourable qui couvre ces efpèces de pierres n’acquiert de l’épaifleur qu'à mefure qu'on s'approche de la Du- rance, & qu'on traverfe les lieux fertilifés par le canal de Crapone. J’ai parcouru la colline fur laquelle eft bâtie la Chartreufe de Bonpas. A fa partie inférieure vers l'eft, on voit des bancs de marne; vers le cou- chant, c’eft du grès un peu micacé. On trouve épars çà & là des cailloux roulés, quartzeux. En s’élevant, on continue de voir dés cailloux de même efpèce , le grès devient moins commun : on obferve quelques bancs de marne bleue fablonneufe & micacée : on remarque des carrières de pierre coquillière , où l’on diftingue des lits de fable. En montant encore plus haut, on voit une autre carrière de pierre coquillière , plus blanche, plus dure & moins fablonneufe que celle qui eft plus voifine de Bonpas. Les collines de Noyes, quoique fort voifines de Bonpas , ne préfentent pas SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 261 pas la même efpèce de pierre ; elles font calcaires: on voit pourtant à leur fommet des cailloux roulés. On trouve fur la route de Noves à Saint-Andiol un banc fort étendu & prefque fuperficiel d’un tuf argillo-calcaire formé évidemment dans des eaux’ftagnantes, & qui repofe fur la pierre coquillière. En allant d'Orgou à Sainr-Remy , on laifle fur La gauche une chaîne de montagnes calcaires , qui vont fe terminér dans le territoire de Taraf con. Le fol de la plaine eit, dans une affez srande étendue, couvert de leurs déblais. On ne Laiffe pas pourtant de découvrir , d'intervalle en in- tervalle, des cailloux roulés. On m'a affuré qu’en creufant à une profon- deur fufifante , on en trouvoit conftamment. : Ce qui prouve d’ailleurs que l’organifation du terrein ne change point, c'eft qu'on trouve au pied des montagnes de Saint Remy du grès & de la pierre coquillière. A l'extrémité de ces mêmes montagnes , dans le rerricoire de Tarafcon, on trouve beaucoup de cailloux roulés; & ces amas de gra- vier ont donné lieu de croire à beaucoup de gens du pays , que la Durance. les avoit dépofés dans ces lieux dans des temps reculés. £ En allant de Tarafcon à Barbantane, on trouve, à une lieue environ, des montagnes calcaires : on les traverfe enfuite , fans qu'elles préfentent rien de remarquable. En arrivant dans la plaine qui eft au fud de Bar- bantane, &ouil ya un étang, on obferve la roche coguillière. On la perd dans un petit efpace; mais on la retrouve au nord de la colline [ur laquelle le Village eft bâti, & on la fuit fur plufeurs collines qui s’é- tendent vers left, | é La pierre coquillière de Barbantane eft remarquable par la grande quantité de madrépores & d’ourfins qu’elle renferme. Les mêmes collines où elle fe trouve, offrent différentes carrières de grès, & on remarque que le terrein qui la couronne , quoiqu’élevé de plus de fo roifes fur Le niveau de la Durance , eft, dans une grande étendue, entièrement com- pofé de cailloux roulés: on y diftingue des grès, des quartz blancs &c jaunes; mais les pierres les plus communes font d’une efpèce de roche uartzeufe , & entièrement femblables à celles de Bonpas, de Malemort , dE la Crau, &cw Tout le Village de Barbantane elt pavé avec des cailloux roulés, qu'on a pris fur le fommet de la montagne. Ce qui efttrès-fingulier , c'eft qu’on ne trouve plus de ces cailloux dans le refte du territoire , non-feulement dans des terreins moins élevés, mais pas même dans la plaine. La plaine de Barbantane eft très-belle & très-ferrile ; le cerrein y eft li- moneux & fort profond. On m'aflura qu’on pouvoit y creufer des puits & avoir de l’eau abondamment , fans rencontrer du gravier, pourvu qu'on ne fouillât pas trop près dela Durance. C'eft-là que cette rivière fe perd dans le Rhône. Son lit n’eft pas à beaucoup près aufli large , près de fon embouchure, que dans les parties fupérieures de fon cours. Lorfque je Tome XXII, Part. I, 1783. AFRIL. A 262 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, l'obfervai , le canal qu’elle occupoit au-deffous de la dernière Ifle qu’elle forme , n’avoit guère plus de 30 toifes de largeur: elle eft fans doutealors fort profonde. La violence du ventm’empêcha de mefurer fa vitefle. Ses bords font fort élevés ; ils ont quelquefois plus de 1$ pans avant qu’on trouve le gravier, &ileft rare qu'ils aient moins d’une toife. ; Il y a au-deffous du confluent un gros banc de cailloux roulés , beau- coup plus petits généralement que ceux que j'avois obfervés dans la Du- rance, jufqu'à Bonpas. Il s'en trouvoit de calcaires, mais en petit nombre : on y voyoit des quartz, des grès, & fur-rout beaucoup de granits. La Durance coule fur le gravier jufqu'à fon embouchure. Mais en re- montant cette rivière depuis l'endroit où elle fe confond avec le Rhône dans un efpace de ÿ à 600 toiles, j'ai obfervé que les cailloux fur lefquels elle coule alors, font extrêmement différents de ceux qu’elle montre fu- périeurement dans prefque toute l'étendue de fon li. On peut à peine compter fur une toife quarrée cinq à fix cailloux de la groffeur d’un œuf: On en voit enfuite de la groffeur d’une noix, d’une amande, & ceux ui forment fans comparaifon le plus grand nombre ont les plus petites dimenfiohs. Cette obfervation prouve que la Durance , malgré fa rapi- | dité, ne charrie pas beaucoup de cailloux; autrement on en verroit à fon embouchure de même groffeur que ceux qu'on obferve dans les par- ties plus élevées de fon lit. En defcendant le Rhône depuis Barbantane , on obferve rarement des graviers fur fes bords. On en trouve pourtant beaucoup à Tarafcon, & ils font en général beaucoup plus gros que ceux qu'on voir au voifinage de l'embouchure de la Durance. Plufeurs Capitaines de navires m'ont affuré qu’à une lieue & demie de Tarafcon, le Rhône couloit fur du fable , & qu’àmefure qu'on s'éloignoit de la chauflée , le fond étoit formé de graviers toujours plus petits, jufqu’à l'endroit où ils difparoiffent en- tièrement, La Ville d'Arles eft bâtie fur un rocher de pierre calcaire , qui s'étend vers left dans l'efpace de quelques centaines de toifes: on y voit des car- rières aflez belles. La colline la plus voifine d'Arles eft celle de Mont- majour. Ce n'eft proprement qu'une grande mafle de pierre coquillière fort dure. Les rochers.qui s'élèvent fur les étangs à l’eft & au nord-eft de Montmajour, font aufli formés de pierre coquillière, & ils vont fe confondre avec les bancs de même efpèce qui font à Fontvieille, La Crau commence à un quart de lieue d'Arles vers left. Les terres la- bourables font alors profondes, & les cailloux fe trouvent affez bas ; mais infenfiblement ils deviennent plus apparens , & il arrive enfin qu'on ne voitrien autre dans les champs. Il y a une variété fingulière dans la groffeur de ces cailloux, mais il m'a-paru qu’ils étoienten général plus gros, à mefure qu'on s'éloignoit d'Arles. Au-delà de Saint-Martin de-Crau , on a été oblicé d'enlever du eu F&r. A2 2 Sert w SURL'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 263 chemin ceux qui avoient des dimenfons trop grandes. Le diamètre des cailloux qui paroiffent former le plus grand nombre, eft d'enviro 6 pou- ces; ais il s’en trouve qui ontjufqu'a 1 pied & demi. Il y a parmi ces cailloux des pierres calcaires , des grès, des variolites,' des ferpentines, dès quartz , des granits; mais l'efpèce qui eft fans comparaifon la plus abondante , eft une pierre de roche quartzeuze fort dure, d’un blanc fale; fa couleur extérieure eft rougeâtre communément. La plaine-de la Crau eft environnée, du côté du nord , de rochers de pierre coquillière, On en trouve à Fontvicille, aux Baux, à Aureilles, à Mouriès , à Aiguières. On fait la même obfervation du côté de l’eft. La . . CAN A] > . A x e pierre coquillière eft commune à Salon, à Peliffane, à Lançon, à Calif- fane, à Grans , à [ftres : mais que dis-je? la Craugen renferme prodi- gieufement. J'en ai vu fur le chemin avant d'arriver à Saint-Martin de Crau. On n'a afluré que dans beaucoup de quartiers , elle exiftoit à trois ou quatre pieds de profondeur, & qu'elle étoit connue fous le nom de tuf. Enfin, j'ai vu un Particulier qui avoit demeuré long-temps dans une ferme fituée au milieu de la Crau, & qui me parloit avec étonne- ment de la quantité prodigieufe de coquilles qu'il avoit vues dans des rochers tendres. Je joindrai encore ici quelques obfervations intéreffantes, On trouve des amas de cailloux roulés & des bancs de pierre coquillière au-delà du Rhône, On m'a dit qu'à Saint-Gilles on ne bâtifloit qu'avec des cailloux ronds. La pierre coquillière que Le terroir de Beaucaire fournit, ne diffère de celle de Fontvieille que par la couleur. La rive gauche du Rhône au-deflugid'Avignon, offre des plaines im- menfes de cailloux roulés. Il y a trés-erande apparence qu'ils ont la même origine que ceux qui font au voilinage de la Dürance , & je ne doute pas qu’on ne parvienne, en faifant des obfervations fuivies, à s’af- furer que ces bancs de cailloux font réellement continus. On laifle , en allant de Salon à Aix, la pierre coquillière à Peliffane, On trouve enfuite des montagnes calcaires: mais en approchant de Saint- Canat, près du Château de M. Demons, on voit un grand nombre de collines formées de cailloux roulés, qui font prefque tous calcaires. A la Pile, même terroir, on retrouve la pierre coquillière , &.on la fuic jufqu'à Rognes. rès d'Aix , fur le chemin d'Avignon , en coupant des collines, on a trouvé des bancs de cailloux roulés, Au-delà de cette Ville, fur le che- min de Marfeille, on obferve aufli un très-grand nombre de collines qui en font formées, & qui offrent aufli des bancs de grès. Les mêmes ob- jets fe préfenteront , fi, en s'élevant vers le nord, en paffant par le terroir de Venelles , on s'approche de la Durance. Lorfqu'on eft au fommet des plus hautes montagnes des Mées, où on voit des terres profondes, on ne foupçonneroit pas qu'elles repofent {ur Tome XXII , Part, I, 1783. AVRIL Ll 2 lu re Œ 264 * OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, dès maffes énormes de cailloux roulés. On n’en eft convaincu , que lorfqu’on a obfervé les magnifiques bancs de Poudingue , au pied'defquels la Ville eft bâtie. ù Comme les collines voifines d’Aix font couvertes de terres profondes, elles n’ont pas une organifation auffi décidée qu'un grand nombre de celles qui font près de la Durance: mais le Naturalifte , en reconnoif- fant les mêmes efpèces de pierres qu'il avoit trouvées fur les bords de cette rivière, ne peut guères douter qu'elles n'aient toutes une origine com- mune. Ce qui achève de le convaincre, c’eft la continuité & la réunion des mêmes matières qu'il avoit conftamment obfervées ailleurs. En effet, le territoire d'Aix vers Saint-Marc offre la pierre coquillière dont la Ville eft bâtie, & qui ne diffère.en aucune manière de celle de Peyroles, &c. D'ailleurs on a découvert en une infiniré d’endroits des amas d'huîtres & des débris d’autres corps marins fur des lits de cailloux roulés ou con- fondus avec eux. On emploie beaucoup à Marfeille Ia pierre coquillière du Cap-Cou- sonne. M. Groffon, mon Confrère à l’Académie de Marfeille , a obfervé au voifinage de ces carrières des bancs étendus de cailloux roulés. Je fuis perfuadé que les bancs de pierre coquillière du Cap-Couronne font une fuite de ceux qui occupent un fi grand nombre de collines à l'eft de la Crau. J'efpère m'affurer bientôt de la vérité de cette idée ; en obfervant ces contrées. Quoique j'aie décrit le plus fuccintement qu’il m’a été poñfible les en- virons de la Durance , on trouvera d’abord que plufieurs des obfervations que je rapporte font étrangères à Jfôbjet que je devois avoir uniquement en vue : mais j'efpère qu'on penfera autrement , Lorfqu’on aura vu l'ufage que j'en fais, pour la folution des diverfes queftions relatives à la Durance. L La fin au Cahier prochain. A REMARQUES S'LER CL EN SSP ATEN NF EEUNOKRE Traduit du Suédois de M. SCHEELE (1), par Madame P***, de Dijon. sr J E préfentai en 1771 à la Société Royale quelques expériences - que j'avois faites fur le fpath-Auor , qui furent inférées dans les Mémoires a — (:) Mém. de lAcad. de Stockholm, ann, 1780. k | S UR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 265$ de la même année, & par lefquelles je prouvois que les parties confti- tuantes de cette e‘oèce de pi-rre étoient la chaux, & un acide particulier , que j'appellai acide Auorique. Environ deux ahs après , M. Boullanger chercha à établir, dans un petit Traité (1), que cet acide n’étoit autre chofemque l'acide muriatique , qui étoit exactement combiné avec quelque fubftance rerreufe. Quelque temps encore après parurent les expériences de M. Monnet fur le même minéral (2). IL foutint que l'acide que j'avois retiré du fpath-Auor n'étoir autre que l'acide vitriolique , qui étoit volatilifé par le moyen d’une combinaifon extraordinaire avec le fpath fluor. ‘ $. IT. Nous avons donc ici maintenant trois opinions différentes fur cet acide, & il y a lieu de croire que ceux qui aiment la vérité dans les Sciences naturelles , defreront favoir quelle eft celle de ces opinions à la- quelle ils doivent fe tenir. Loin de chercher à foutenir avec opiniâtreté ce que j'ai une fois publié, je vais examiner en peu de mots les principes fur lefquels ces deux Chymiftes établiffent leurs fyftèmes. ; $. IL. M. Boullanger appuie fa doctrine fur ce que l'acide fluorique précipite aufli bien les diflolutions d'argent que celles de mercure; que les premières donnent du muriate d'argent ou lune cornée, & que fi on fait fublimer demi-once de précipité de mercure , on obtient du muriate mercuriel doux. [left vrai que l’acide fluorique précipite l'argent & le mer- cure. J'en ai fait mention dans mon Mémoire fur le fpath-fuor ; mais le précipité que l’on obtient eft en très petite quantité ( parce que le fpath Auor , ainfi que tous les minéraux formés de la chaux , portent toujours avec.eux un peu de fléommun ), & ce quirefte de l'acide en plus-grande quantité ne précipite pas ces mêmes difloutions , ce qu de- vroit cependant arriver, fi l'opinion de M. Boullanger étoit fondée. IL falloit aufli qu'il eût employé une très-grande quantité d'acide fluorique pour obtenir autant de précipité ; car poanpaste que m'ont donné 2 onces de fpath-fluor très-pur , je n'ai retiré que demi-drachme de muriate d’ar- gent : mais je montrerai comment on peut féparer de l'acide fluorique cette petite partie étrangère d'acide muriatique. Que l’on prenne de l'argent précipité de fa diffolution nitreufe par la potafle; que l’on édulcore ce précipité , & que l’on verfe enfuite deflus de l'acide fluorique, jufqu'à ce qu'il furnage : alors on filtre la liqueur; on verfe de cette diffolution d'argent dans l'acide Auorique, jufqu'à ce qu'il ne fe précipite plus rien ; on filtre par le papier, & on diftille dans la cornue jufqu'à ficcité. L’eau #élève d’abord dans le récipient : vient enfuite l'acide fluorique qui en- (x) Expériences & Obfervations fur le fpath vitreux ou fluor-fpathique , par M. Boul- langer, 1773. (2) Journal de Phyfique , tome X , page 106. 266 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, duit La cornue, le récipient & la furface de l’eau d’une croûte épaiffe de quartz. Cet acide ainfi reétifié ne peut ni précipiter la diflolution d’ar- gent, ni donner Les moindres traces d’acide muriatique. Si l'opinion de M. Boullanger étoit fondée, cet acide ainfi purifié devroit encore préci- piter la diffolution d'argent, puifqu'il croit que s'il pouvoit étréféparé de la fubftance terreufe , il ne feroit autre chofe que de l'acide muriatique pur (1). Nous favons maintenant que cette fubftance terreufe (2) eft une poufière quartzeufe. Si M. Boullanger peut , avec cette fubftance , ou toute autre matière quartzeufe, & de l'acide muriatique , faire de l'acide fuorique , alors j'embraflerai tout de fuite fon fyftème, mais non au- paravant. Si cela étoit, pourquoi l'acide fluorique, mêlé avec l'acide ni- treux, ne diffout il pas l'or? Pourquoi n’obtient-on pas de muriate mer- curiel corrofif, quand on diftille le fpath-fluor avec le vitriol de mercure? Pourquoi ne fe forme-til pas de muriate de plomb, quand on verfe cet acide dans une diffolution de nitre de plomb? &c. &c. Tout cela ne de- vroit-il pas arriver , fi l'acide fuorique pur contenoit de l’acide muriatique ? Je veux bien croire que M. Boullanger n’a pu dégager l’acide du fpath- le] fluor , par l'acide nitreux & l'acide muriatique très-concentrés: mais s'il eût employé des acides un a moins concentrés , ou délayés comme le font ordinairement les acides nitreux & muriatique, le fpath-fluor eût été très-certainement aufli bien décompofé pour lui , qu'il Pa été pour moi; car commie ces acides n’attirent pas aufli puiflamment la chaux que l'acide vitriolique , on doit y ajouter un peu d'eau ; & de cette ma- nière , le fpath-fluor eft décompofé, Hi d’une double affinité. $. IV. Je viens préfentement à M. anet, qui foutient, contre mes expériences & celles de M. Boullanger, que le fpathfluor ne contient ni acide, ni chaux , maïs que cette efpèce de pierre , en fe combinant avec fufifante quantité d'acide vitriolique, devient volatile , ce qui donne alors ce qu'on appelle acide uorique ; que le réfidu trouvé dans la cornue, ou le fel cryftallifé que M. Boullanger & moi avons appellé félénite, n’eft rien moins que de la félénire , & que ce fel, de même que la partie qui fe fublime, exige feulement plus d'acide vitriolique pour être trans- (r) Expériences & Obfervations , &c., par M. Boullanger, page 29. Vous voyons même qu'on peur ramener l'acide fparhique à l'efprit de fel pur, & qu'il n'eft que l'acide du fel combiné avec une fubftance rerreufe , dont il eff trés-difhcile de Le dégager; & page 31, après avoir démontré la préfence de l’acide muriatique dans l'acide fluori- que ,ilajoute: Ne réfulre-1-il pas de ces expériences, que l'acide fpathique n'ef au fond qu’un efprir de [el , qui, à notre avis, ne différe de l'efprit de fel ordinaire & pur , que parce quil ef combiné avec une matière que je regarde comme ter- reufe. (2) On verra , dans le fecond volume des Opufeules de M. Bergmann , que ZW. Meyer a prouvé, depuis peu, que cette pouffière n’étoir autre chofè qu’une portion de verre que l'acide enlevoir à la furface dès vaiffeaux. Note du Traducteur. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 267 formé en acide fluorique. C’eft ainfi que raifonne M. Monnet, Nous avons donc une nouvelle fubftance terseufe , qui a été jufqu’ici inconnue aux Chymiftes, & qui, fi je ne me trompe, pourra l'être encore long- temps. Ce doit être une efpèce de terre bien admirable, que celle qui étant fixe par elle-même, peut néanmoins volatilifer l'acide vitriolique fans Le fecours du feu , & qui, unie avec lui, donne un air qui demeure élattique, même après le refroidiflement ! Mais fi je peux prouver , comme je le crois , que l'acide Auorique ne contient pas un atôme d'acide vitrio- lique ; que rour l'acide vitriolique que j'ai employé dans ces diftillations, fe retrouve encore dans la cornue ; que là il s’unit avec la bafe du fpath fluor, & que cette bafe eft de la chaux , la théorie de M. Monnet tombe néceflairement, $. V. Sur 1 once de fpath-fluor très pur, & pulvérifé très fin, on verfa 3 onces , pefées exactement, d’acide vitriolique concentré: on diftilla ce mélange au bain de fable, & on mit dans le récipient 12 onces d’eau dif tillée : on pefa enfuite très exaétement 3 onces du même acide vitriolique, que l'on délaya avec 24 onces d’eau: on y verfa de la diflolution de po- tafle , dont on avoit également déterminé le poids auparavant, jufqu'à ce u'on eût atteint bien jufte le point de faturation, & on pefa ce qui ref- toit de la leflive de potaffe. Quand la diftiflation fut finie , après avoir été continuée pendant huit heures à une telle chaleur qu'il ne püût s'élever de l'acide vitriolique, ôn brifa la cornue avec précaution: on en tira la mafle , que l’on broya dans un mortier de verre; & äprès y avoir mêlé 24 .onces d'eau , on jetta le tout dans une cucurbite. Lorfque le mélange eut bouilli pendant quelques minutes, ou y ajouta exactement la même quantité de potaffe qui avoit faturé les 3 onces d'acide vitriolique. Quand la liqueur eut encore bouilli quelques minutes , on effaya enfin la diffo- lution , & on trouva qu'elle étoit complettement neutralifée ; car il n'y avoit excès ni d'acide, ni d’alkali, mais feulement du vitriol de potaffe, & Mas une goutte d'acide vitriolique furabondant. On retira enfuite tout le fel par l’eau chaude , & on fic fécher la chaux, x pefa alors 9 drachmes = : on fit difloudre 2 drachmes de cette chaux ans l'acide muriatique délayé ; il refta quelque chofe qui ne voulut pas fe difloudre, qui me parut être du fpath fluor non décompofe, & qui, après avoir été féché, pefa 9 grains. On verfa dans une partie de cette diffolution de l'acide faccharin, qui précipita bientôt du faccharte cal- caire: on mit dans une autre partie de l'acide vitriolique, ce qui pro- duifit fur-le-champ de petits cryftaux, qui éroient du vitriol calcaire ; & une troifième partie de la diffo!ution , évaporée à ficcité, donna un fel déliquefcent. La dernière partie de calce méphitifé ayant été mife dans un creufet couvert & calciné à un feu violent, il en réfulta précifément une chaux vive, qui donna l’eau de chaux , & qui .s'unit au foufre pendant la digeftion. Je crois qu'il n’eft pas néceffaire d'apporter d'autres preuves 268 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, que {a bafe du’ fpath-fluor eft une vraie chaux, Comme j'ai déjà démontré que toute la quantité d'acide vitriolique étoit retenue par cette chaux , il feroit encore abfolument inutile de rapporter toutes les expé- riences que j'ai faites pour examiner fi l'acide du fpath-fluor contenoit réellement de l'acide vitriolique. J'en placerai feulement ici quelques- unes, pour achever de détruire Le fyftême de M: Monnet. 1°. L'acide fluorique pur ne précipite pas les diffolutions de terre ba- rotique. 2°. IL ne précipite pas non plus la diffolution nitreufe de plomb. 3°. Cet acide , faturé de porafle , évaporé à ficcité, mêlé avec de la ouffière de charbon, & pouffé à la fufñon , ne donne point de foie de foufre, fans compter que plufieurs acides font en état de dégager celui du fpath-fluor. M. Monnet pourroit-il encore infifter , en foutenant que le fpath-fluor a la propriété d'être volatilifé par tous les acides, même par les acides fixes du phofphore & de l’arfenic? Mais il n’eft pas poflible qu'un bon Chymifte accorde que la croûte fublimée au col de la cornue & dans le récipient, de même que la maffe féléniteufe reftée dans la cor- nue & diftillée de nouveau avec l'acide vitriolique, aient été abfolument & en entier transformées en acide fluorique. à $. VI. Pour mieux prouver que le fpath-fluor ne contient point de’ chaux, M. Monnet rapporte l'expérience fuivante: Il fond enfemble par- ties égales d’alkali & de fpath fluor, & voit que: par là cette pierre n’é- prouve que peu ou point de changement , parce qu'après qu'il a enlevé, par la lixiviation, la partie alkaline, il a diffous dans l'acide nitreux le fpath-fluor refté fur le filtres & qu'ayant verfé de l'acide vitriolique dans cette diflolution, il n’en réfulta aucun précipité ; d'où il conclut que le fpath fluor ne tient point de chaux. Je foutiens au contraire que toute diffolution de. fpatfluor donne de la félénite, quand on y ajoute de l’a- cide vitriolique. Pour que l’on püt défendre l’expérience de M. Monnet, il faudroit qu'il eût délayé fa diffolution dans une plus grande quagrité d’eau. Mais pourquoi ne prend-il d’alkali qu'une quantité égale à Celle du fpath-fluor , tandis que j'indique dans mon,Mémoire quatre parties d’alkali contre une de fpath-fluor ? J'y ai aufli annoncé que , lorfqu'on fondoit Le fpath-fluor avec l'alkali cauftique, 11 n’éprouvoit aucune alté- ration. M. Monner ne peut pas douter que, quand l’'alkali eft expofé à un feu violent, fans pouvoir fondre , il devient cauftique ; & voilà préci- fément ce qui arrive dans l’expérience de M. Monnet. Le fpath-Auor fe comporte d'une manière bien différente avec quatre parties d'alkali ordi- naire, car il eft décompofé par une double affinité , & il refte dela chaux fur le filtre. M. Monnet croit encore que le fpath-fluor peut être précipité par l'al- kali pruflique, parce qu'il en a obtenu une bien plus grande quantité de bleu de Pruffe que n’en pouvoit donner le peu de fer qui fe trouve dans le RE RE 2% SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 2:69 Ve fpath-fluor. Nous aurions donc maintenant une connoïffance plus par- faire de la nature particulière du fpath-Huor ; favoir qu'il eft une nouvelle efpèce de terre métallique, puifqu'on fait qu'il n’y a que les terres mé- talliques . donnent un précipité avec l’alkali pruflique. Quand un Chy- mifte parle de la leflive préparée avec le fang , ou de l'alkali PE cela doit toujours s'entendre de la leflivé dans laquelle il n’y a point d'al- kali furabondant, & qui eft parfaitement neutralifé : mais il y a grande apparence que celle que M. Monnet a employée , n'éroit pas farurée ; car je puis afurer que l’alkali pruflique ne précipite pas le fpath-fluor, Enfin, M. Monnet foutient , contre tous ceux qu# ont diftilié l’acide- fluorique, qu'il n’a point vu que le verre en fût attaqué. Tous ceux qui ont.confervé quelque peu de cet acide dans un flacon, peuvent donner des preuves évidentes de la fauffeté de fon opinion. Ainfi, je crois avoir démontré que l’acide fuorique eft réellement un acide minéral particu- lier, mo | OBSERVATIONS DE MÉTÉOROLOGIE ET DE BOTANIQUE, LI Sur quelques Montagnes du Dauphiné ; Par M. Vizzars, Médecin de PHôpital Militaire de Grenoble. 1 parcourant les montagnes de cette Province , pour connoître les riches productions végétales qu’elle renferme , j'ai fouvent regretté de n'a- voir pu porter avec moi un baromètre, un thermomètre & un hygro- mètre, pour joindre à mes recherches des obfervations météorologiques, toujours intéreffantes à la Phyfique , & fouvent néceflaires à la Médecine. J'eus occafion, en 1781, de répéter quelques voyages dans les hautes-. Alpes, avec M. Pittion, Chirurgien du Bugey. Je me munis des deux premiers inftrumens , dans la vue de connoître d’abord la hauteur & la - température refpectives de quelques montagnes. Nous partimes de Gre- noble le 24 Juiller, & voyageimes, par un temps affez beau, jufqu'à la fm d’Aoûc, aux environs de Vizile, de la Mure, dans le Beaumont, le Champfaur , & finîmes nos herborifations fur une grande montagne ap- pellée Chaillol-le-Vieux, qui eft afife au N. N. E. de Saint-Bonnet , en- * tre {a Vallée de Champoléon, où le Drac prend fon origine ; les Vallées Tome XXII, Part, 1,1783. 4 VRIL, Mm 270 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, de Molnies en Champfaur, celles de Vallouife & de Valgaudemar. Cetté montagne forme une efpèce de noyau ou de pyramide , des rideaux de la: quelle partent les corrents qui parcourent ces pays. Lorfqu’on eft parvenu fur fon fommet, la vue fe porte jufqu'à la mer à plus de trente lieues entre Aix & Salon au midi, & à plus de dix lieues à l'O. $. O. & N. O., cette montagne dominant fur toutes les autres, excepté celles qui féparent la Berarde en Oizans du Valgaudemar , qui lui reftent au nord. Elle eft éloignée d'environ douze lieues de Grenoble. Celle du Tremeni, à la tête de la Vallée du Trièves, & entre le Devoluy , montagne calcaire un peu moins élevée , n’eft éloignée de la même Ville que de huit lieues. Ces remarques font néceflaires pour l'intelligence d'une découverte in- téreffante à laquelle nos obfervations barométriques ont donné lieu, Ceux qui ont voyagé dans les Alpes y ont fans doute remarqué plu- fieurs climats différents , foit par la haureur, la température, foit par la nature de leurs productions. Les’ plaines ou le fond des berceaux des val- lées font couverts par les bleds & les vignes; les côteaux font habités par les feigles & les avoines; plus haut fe trouvent les bois; enfuite les gazons; les pelonfes ou prairies des Alpes; & enfin, Les débris ftériles des cîmes des hautes crètes , climat des glaciers & des neiges perpétuelles, Voilà cinq climats affez marqués , aflez fenfibles aux yeux de tout homme qui ob- ferve en général les grandes montagnes. Quoique les bois réfineux, fur- tout le fapin blanc (1), refufent ordinairement l’expofition au midi, il n'eft pas moins vrai qu'ils tracent pour l'ordinaire une Kgne horizontale habitent une bande des montagnes , féparée d’un côté#par la ceflation des terres cultivées , & de l'autre par le commencement du gazon des Alpes. Cette bande fe porte de 24 pouces du baromètre à 22, aux en- virons de Grenoble, & depuis 7 à 900 toifes au-deffus du niveau de la mer(2}. Le mélèze (3), les pins (4) , les bouleaux (5) & les petits fau- les des Alpes (6) ne fe bornent pas toujours à cette zône particulière aux fapins. Mais outre que les efpèces nombreufes de ce dernier genre reffem- blent fouvent, par leur petitefle , aux gazons plutôt qu'aux bois , il eft vrai auf que les autres deviennent fi clair-femées au-deffus des fapins, que la ligne de démarcation eft toujours fenfible. L'air, fouvent agité par les vents, porte-+-il l’atmofphère entière d'un (1) Pinus picea. Linn. (2) M. de Luc dit, que les bois ceffent de croître à7 ou 800 toiles d’élévation. Re=: cherches fur L Athmof. I. 119. Nous parlerons ailleurs de la caufe qui élève ou abaïfle. ceïte région de l'air. 4 {3) Pinus larix. Linn. (4) Pinus [ylueftris moncana. L. Pinus Genevenfis. J, B. (5) Berula alba L. Flor. Lapp. (5) Salix reiculate. L. Sal, danats L, Sal, herbaçec, Sal. remfa, Se. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 271 pays à un autre, au point de lui faire parcourir 850 toiles par minute (1); ou fi les vents ne font qu'agiter , fouler fa furface , former des efpèces de vagues femblables à celles que les tempêtes produifent fur la furface des mers , fans entrer bien avant dans leur profondeur? Le tranfport des nua- es & des autres corps que Les vents portent , femble favorifer la pre- miète hypothèfe. Mais les vaifleaux parcourent les mers, fans que la même eau qui les porte les accompagne ; & l'infalubrité d'un pays fe fou- tient, ainfi que la falubrité dans d'autres , en dépit des vents. Il eft pofi- ble que les vents ne remuent &-ne cranfportent que certaines couches, peut-être même certaines parties de l’atmofphère. Nous n'avons pas en- core aflez multiplié nos obfervations, pour ofer le décider, En portant le baromètre fur les montagnes , mon projet, outre l'efpèce de nivellement que je m'étois pro de , étoit d’abord d’afligner à chacun des cinq climats relatifs aux Produdiqus particulières dont nous avons parlé, leur élévation moyenne au-deflus du niveau de la mer. Mais quel a dû être mon étonnement , lorfque , fur de petites diftances de dix à douze lieues , j'ai trouvé la hauteur d’un de ces climats affez variable, pour que les bois fe trouvaflent à l'élévation où je comptois trouver les gazons, les feigles à la place des bois, &c, Le même ordre exiftoit pour- tant entreux , à part quelque diminution dans l’épaifleur de la couche atmofphérique correfpondante; & cette diminution, ainfi que leur éléva- tion, m'ont paru relatives à l'élévation du fol principal qu'occupe la ri- vière dans chaque vallée. Je fais que l’expofition de chaque pays doit in- fluer en plus où en moins fur les différences; que les courants des vents, plus libres ou fermés, doivent compliquer les caufes de ces variations. Je n’ignore pas non plas que l’évaporation plus où moins forte doit encore y concourir, & que cette même évaporation eft en raifon du mou- vement des eaux fur la furface d’un pays quelconque. Cependant la complication de ces caufes ne nous a pas empêchés d'en connoître la véritable ; & fi, étant elles-mêmes trop foibles pour produire les effets conftatés par nos obfervations, il s’en trouve une plus puiflante , il s'en fuivra néceffairement qu'elle eft la principale. Un coup-d'œil fur le tableau ds ces obfervations , fera mieux fentir leur utilité, que tout ce que je pourrois dire à leur avantage. Je les ai faites dans un beau temps, ayant toujours un baromètre ftationnaire, ui fervoit de point de comparaifon. Je n'ai pu faire ufage du thermo- mètte dé M. de Luc , que je ne connoiflois pas alors, non plus que de l'hygromètre de M. Retz, que jen'avois pas. Mes obfervations ne pour- ront par conféquent donner que des approximations, & non des mefutes précifes; mais elles fuffront pour en faire fentir l'utilité, & pour que a (1) Méwm: de l'Acad, des Scienc. ; 1757. De'Luc, Recherches! fur l'Atlfin. I, 3, Tome XXIT, Part. I, 1783. AVRIL, Mm 2 72 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, des Phyficiens plus exercés puiflent les répéter. avec des inftruments plus exacts. Je le delire, avec d'autant plus de raifon, queje fais, par expérience , qu'en cherchant à vérifier une découverte, chaque Obferva- teux en fait de nouvelles plus intéreflantes. J'ai dit plus haut, que le mouvement des vapeurs flottantes dans l'at- mofphère d'un pays, étoit en raifon de celui des eaux qui parcourt fa fur- face, & celui-ci eft en raifon de fa pente. Le cours des vents n’y contri- bue pas moins. C’eft ainfi qu’un pays de plaine, entouré de bois , chargé de marais, d'eau dormante , abrité par une montagne qui force les vents de s'élever au- deflus pour laifler fans mouvement la partie de. . l'atmofphère qui en forme pour ainfi dire le rempliffage , devient un pays humide , mal-fain, fujet aux fièvres d'accès, aux cachexies, &c., en rendant nulles toutes les caufes capabllés de contribuer à fa falubrité ; tan- dis que d’autres plus couverts d'eau, mieux garnis de bois, mais en pente, & balayés par des vents continuels qui rafent la furface de la terré , aidés par, la chüte des eaux ou par l'expofition favorable , de- viennent des pays plus fains , quoique plus froids. C’eft fur ces trois con-. fidérations, la fituation , la pente & les vents, que font calqués les ré- fultats des fublimes obfervations d’Hippocrate, Notre fiècle ne fauroit fe borner à de fimples réfultats ; il exige plus de détails fur Penfemble des caufes & l’enchaïînement des effets. Sans cette liaifon foutenue, les réful- tats nous échappent ; hous n’en fentons pas l'application, & nous perdons le prix des obfervations les plus utiles, Si nous parvenons à rendre l'hy- gromètre de M. Retz, ou tout autre , vraiment comparatif, nous aurons, avec le baromètre & le thermomètre, trois mefures déterminées pour établir des points de comparaifon entre l'humidité, le poids & la tempé- rature d’un pays à un autre. Des obfervations bien faites; Le coup-d'œil d'un Médecin-Phÿficien exercé fur la phyfonomie, la taille , les mala- dies habituelles d’un pays; fur la nature des plantes, leur grandeur , leurs couleurs ; le défaut de proportion entre les feuilles & les fleurs chez les mêmes efpèces en différents pays, les infeétes, &c., donnent bien une idée du devré de falubrité d’un pays. Toutes les fois, par exemple, que les fleurs des plantes nous frappent par leur grandeur & par leur éclat ,on peut aflurer, fans examiner fon enfemble , qu'un tel pays eft aëré & fäin. Au contraire, fi elles fontétiolées, pâles, foibles, à petites Aeurs, fouvent rôngées par. les infectes, quoiqu’en plein air, elles annoncent la même gène dans l’organifation animale, parce que l’un & l’autre règnes ont pour agents communs la lumière, la chaleur & l'air. Mais outre que ces vé- rités ne font pas à la portée de tous les Obfervateurs , foit parce que plu- fieurs font confinés dans les grandes Villes, foit parce qu'elles fuppofent un enfemble de connoiffances qui ne font pas du goût d'un chacun , ilen_ eft de la phyfionomie des plantes comme de celle des hommes; il faut y avoir perdu beaucoup de temps avant de pouvoir fe les rendre familières. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 273 Elles fuppofent l'étude réfléchie d’un grand nombre d'individus de l'un & de l’autre règne ; une mémoire chargée d’une infiniré de faits ifolés, avant de pouvoir Les employer comme comparatifs avec les cas qui fe préfenrent, Les inftruments de Météorologie abrègent cette étude; ils of- freut d’abord des points fixes, qui rapprochent les faits analogues, & les préfentent comme ifolés & à portée de notre jugement, Mais combien l'ef- prit de fyftème devient ici féduifant ! L'abftraétion métaphyfique d’une in- finité de caufes qui échappent à nos fens , qui cependant exiftent & mo- difient les phénomènes de l'univers, nous le prouve; mais en devenant néceflaire , elle nous avertit de la défiance que nous devons avoir de nos propres lumières, Oëfervations faites en Juillet 1781. Barcom, Therm, Be VON rie SU NERO SN UE rime CRE 24. À Saint-Barthelemi, climat des Seigles. . . . . . . . . 2$ 11 12 Bois de bouleaux , expofition au nord. died 1e nn2S, art 25. À la Mort, Berceau habité, un peu incliné 3 l'E.S. E.très-froïd 214 3 12 26. Bois de fapin au midi & au couçhant. . «OR CIRE TA A 1 08 Peloufe, gazons où font les Chalets ou Jats-de-Vaches fur Taillefer. 22 6 10 Les arbuftes, même les rhododendron, finiflent à. . . . . . 22 3 Les neiges perpétuelles commencent à . . . , , . . . 22 © 28 Août, méme année, Barom. Therra AYSdh=-Rohnetal Sue Que SL Sete DOUSNERS 1, 2613: 18 Chaïllol, Paroifle, climat des Seigles, , + . . . . D. eos Col du Vafivier, où ceflent les bois, où commencent les g PER EUR © Haut col du Vaflivier, où finiflent les monts calcaires & c ncent les neiges perpétuelles. . . . : + 20 9 10 Sommet ou Pic le plus élevé de ChailloËle Vieux “ä midi, l'ombre 6 191 6h D La glace de la nuit précédente avoit, à la même heure, 2 lignes d'épaifleur, par un beau temps ferein N. ©. Unetempête paflagère , avec orage, grêle , tonnerre, s'étant élevée fur Taillefer pendant quatre heures, le mercure baïfla de 2 lignes, & le thermomètre de 6 degrés; au lieu que fur les mêmes inftruments, ces dif- férences ne furent, à la Morte , dans le même temps, que de 3 lignes & 3 degrés feulement. Voici quelques obfervations intermédiaires entre ces deux extrêmes, faites fur une montagne qui tient le milieu , quant à fa diftance de Gre- noble , mais un peu plus au couchant que la ligne de direétion de ces deux premières. Elle eft très-élevée , quoiqu'entièrement calcaire: on la xoit de Grenoble au-delà de Lamure ; elle eft contiguë aux grandes mon. 274 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; tagnes du Devoluy , au Mont-Auroufe, Lacelles de Durbon, & porte; dans plufieurs Villages circonvoifins, le nom d'Obion. Obfèrvations du 7 Septembre 1781. Barom. Therre. ASaïnt-Didier ‘ent Dévoluys We MEME EME roc Col du Noyer , & au-deflus du Dumas, climat des Seivles mn Nr aan Les/razonsid'Obioniinifient ae Ne US Somme OBS CRAN NE LUE EU ME A NAT PITC PE NS A0 NO PER Le ele Les mel e à eat Me ER 2 RENTE Saint-Etienne & Rionpes en DExOluy EN EPMRE PL ER EN INeS Corp , Saint-Jean & Saint-Laurent-en Beaumont. 25 $ ‘14 J'ajouterai encore la hauteur moyenne du baromètre à Mont-Dauphin, obférvée par M. Charmeil, Chirurgien-Major de cette place 247 #Brançon:-dans/la Ville, clletelt de 2:00 ML Re PEROU 24 © Au Village de Mont-Genèvre , où fe trouvent des feigles , des avoines, &c. , d’après les obfervations de M. Piftan, favant Phyficien de Marfeille. 22 7 Ces dernières obfervations font voir que les climats des feigles, des bois , &c. dopt nous avons parlé, font d'autant plus élevés , que Les pays font plus éloignés fur la mème pente, en remontant le cours des ruiffeaux ou des torrents qui occupent Le fond des vallées. IL eft clair préfentement que le fol où les feigles peuvent croître. & mü- ir fur le Mont-Genèvre, eft réellement plus élevé qu'un pareil fol aux environs de Grenoble de plus de 250 toifes , puifqu'à température moyenne, le mercure s’y tient plus élevé d'environ 1 pouce 8 lignes, & que , à l'élévation de Taillefer ; où le mercure fe tient à 22 pouces 7 lig., terme moyen d -Genèvre , fe trouvent les Peloufes, les Chalets, où Les arbuftes. es refufent même de croître. n'eft pas moins vrai encore qu'au terme moyen du baromètre à Ja Paroifle de Chaillol , où fe trouvent des” feigles , même quelques fruits à noyau , du jardinage, quelques froments, le mercure fe tient au-def- fous de 24 pouces, tandis qu'à la même élévation fur Faillefer, les bois de fapin ceffent de croître. Enfin, le tableau fidèle de nos obfervations préfente un parallèle facile à faire fur plufieurs endroits différents , dont on peur voir les diftances fur les cartes de M. de Caffini. Nous préférons au détail de ces répétitions quelques recherches fur la caufe de ces différences, après avoir prévenu quelques objections. Ayant fait nos obfervations fur plufieurs endroits différents, dans toutes fortes d'expolitions, il faut remarquer d'abord que l'afpe&t y a fi peu de part, que le berceau de la Morte, de Eavaldens, près Faillefer, eft à- peu-près au midi, par conféquent plus favorable que celui du Mont-Ge- nèvre, qui s'ouvre du S, O. au N. E., enfoncé entre deux montagnes au nord & au midi. Chaillol eft plus ouvert, plus aëré que Lavaldens. dl fait» PP OT. 1 D'OR PIN IUT I ONIPT IE JP STE} de D En re € k:' SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 975$ partie du Champfaur, pays fec & frais , grand berceau bien évalé, expolé au nord, le plus fain fans contredit qu’on puifle defirer; mais Moluies, autre petite vallée, reflerrée par les grandes montagnes -expofée au nord, offre a-peu-près les mêmes productions que Chaillol , à la même élévation, Hya de Chaillol au Drac, fond de la Vallée, 1 pouce de différence feu- lement; au lieu qu'il y ena plus de 3 de la Morte à la Romanche, qui. pale à Vizile. Orcière, paroïffe fituée près de la fource du Drac, per- çoit de l'orge, du chanvre & du jardinage , quoique le mercure s’y tienne au-deffous de 24 pouces ; mais Le Drac n’eft point enfoncé , & fe trouve au niveau de cette Vallée, à . D'après ces obfervations, & cent autres qu'on pourra faire dans certe Province , il paroît démontré que Grenoble, fitué fur I confluent du Drac &de l'Isère, deviendroit beaucoup plus froid , fi ces deux rivières creu- foient leur lit en l’élargiffant d'environ un quart de lieue; que Paris devien- droit plus froid auf, fi la Seine s’enfonçoit confidérablement: l’on pour- roit même en quelque forte admettre au calcul le degré de froid de ces Villes , relatif à différentes profondeurs de leurs rivières. Par une raifon contraire , fi les vallées enfoncées venoient à fe remplir, les pays fitués fur leurs bords deviendroient moins froids ; & s’il éroit pofible d'établir une ample terrafle de quelques lieues de diamètre fur les pics les plus élevés FA nos Alpes glacées, je ne doute pas qu'on n'y vit germer le bled, & peut-être la vigne. F . N'ayant fait ces fuppoñtions , que pour mieux faire fentir le réfultat de nos obfervations , nous laifferons ces belles théories à développer à des ima- ginations plus fécondes, à des plumes plus éloquentes. Les faits font le partage des efprits ordinaires. à Pourquoi des endroits différents, à hauteur égale , indépendamment des expolitions, font ils plus froids, lorfqu’ils ont à côté des lits de ri- vières très-enfoncés ? Les émanations de la terre, relatives à leur conti- nuité , à l'afpect du foleil & non à fon éloignement, cefleroient-elles de réagir fur elles-mêmes , en ceflant de paroïître dans la même couche de Fair au même niveau? ou iroient-elles ruiffeler , fe précipiter en raifon de leur gravité, de l'agitation de l’air dans ces bas-fonds, pour laifler fur les côteaux un air plus léger, moins fufceprible d’être échauffé par Les rayons du foleil & de réagir fur lui-même > Nous nous abitiendrons encore de toute explication à cet égard. Si nous cherchions à en donner, nousren- drions nos obfervations fufpectes ; leur principal mérite, c’eft la bonne foi, la fimplicité. Nous renverrons à d’autres circonftances, à parler de la hauteur de nos montagnes, de la forme de leurs glaciers. Ce que MM. de Sauflure, de Luc, Grunner, ont écrit de ceux de la Suifle , furpaffe infiniment tout ce que nous pourrions dire de ceux du Dauphiné. Une feule obfervation que nous n'avons pas trouvée dans leurs favants Ouvrages, c’eft que , dans les 276 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, crevafles des glaciers, nous avons remarqué jufqu'à vingt-cinq & même trente couches de neige glacée, féparées par un filet terreux horizontal, dépôt des vents fecs dans les Alpes pendant les mois de Juin & Juiller, temps où il tombe rarement de la neige, Les plus fupérieures de ces cou- ches ont ordinairement 3 pieds, les autres diminuent fucceflivement ; de manière qu'après Les dernières, qui n’ont que 2 à 3 pouces, on remar- que 2 ou 3 pieds de neige grife, où elles font confondues : preuve bien évidente de la certitude de la théorie de M. de Sauflure, qui a dit, avec cette noble fimplicité qui caractérife le vrai Naturalifte , que Les glaciers diminuent pardeffous , à mefure qu'ils croiflent pardeflus (1). Nous pourrions répéter encore, d’après ce Savant diftingué , que fa re- marque des adoffés fur les montagnes primitives dans leur jonction avec les grandes montagnes calcaires , fe vérifie très-bien fur Chaillol-le- Vieux. Indépendamment d'une ancienne mollafle , terreufe , roufsatre, qui renferme plufieurs noyaux arrondis d’un demi-pouce, à 1 pouce & demi de diamètre , d’une dureté à impatienter les Ouvriers , réfiftant aux pointes les plus vives; ils fortent quelquefois entiers , plutôt que de fe brifer , ont une couleur vive, fouvent chatoyante & ferrugineufe. On re- marque dans le même endroit une très-belle branche rougeâtre , formée de fragments angulaires, rarement roulés, de roches granitiques, mi- cacées , de fchorls, de feld-fpath , de pierre calcaire , enchaflés dans un gluten rougeitre , réfractaire, ferrugineux ,de couleur de lave. Ces deux pierres forment des couches épaifles de 4à 10 pieds, quelquefois plus. La première laiffe entrelle & les roches primitives, des couches fchifteu- fes & calcaires, mais rarement l'autre. Elles finiffent à la hauteur des montagnes calcaires, oùle mercure fe tient à 20 pouces 6 lignes, comme nous l'avons déjà dit. Le pic de Chaillol-fe-Vieux, qui domine , fe trouve formé par des crètes particulières , adoffées les unes aux autres, d’une nature granitique mélangée , fouvent traverfées par de groffes veines de quartz, de 2à 3 pieds d'épaifleur, qui coupent les félures de la montagne prefque à angle droit , s’élevant un peu au nord, au lieu que les premières couches des montagnes calcaires s'appuient fur la montagne au midi , fur un plan très-incliné. Cette pointe peut avoir environ 200 toifes au-deflus des montagnes calcaires , puifque le mercure baiffe de plus d'un pouce pour y parvenir; ce qui, en fuivant les mefures de MM. de Sauffure & de Luc pour conf- tater la hauteur du Buet, où le mercure fe tienc à 19 pouces 6 lignes, ainfi que fur Chaïllokle-Vieux , nous porte à croire que cette pointe eft élevée d'environ 1600 toiles fur le niveau dela mer. Ce qu'il ya de (1) Voyage aux Alpes, tom. [°', pag. 436 & füiv. particulier, ou SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 277 particulier , c’eft que le fommer du Buet eft tout calcaire: or , nous n'a- vOns certainement aucune montagne calcaire dans la Province, où le mercure fe tienne fi bas ; & j'ai lieu de croire que les montagnes calcaires de la Suifle ne font pas plus élevées que les nôtres! La raifon de cette dif. férence peut venir de ce que j'aiobfervé mon baromètre un jour de beau temps; mais je fais d'un autre côté que la variation du mercure dimi- nue dans le baromètre à mefure qu'on s'élève plus haut dans les monta- gnes , au point qu'elle eft à Grenoble de 18 lignes, à Saint-Bonnet feu- lement de 11 , à Briançon feulement de 10. Quant à celui dont je me fuis fervi , ila 2 lignes de diamètre, & fe tenoit conftamment 6 lignes plus bas qu'un autre d'une ligne & un quart, auquel j'ai rapporté le premier, par la raifon que le dérnier a été conforme avec celui de M. Pifton de Mar- feille, qui venoit de le comparer avec ceux de M. de Sauflure. Les mon- tagnes du Valgaudemar & de la Berarde , à en juger par les pics & les glaciers qui dominent Chaillol-le-Vieux , ont environ 300 toiles au-def- fus ; de forte que nos plus hautes montagnes vont à 2000 toifes environ d’élévation fur le niveau de la mer, Je fais que Scheuchzer a cru que La variation du baromètre étoit très- grande fur les montagnes ; mais il l'aura obfervé dans les vallées, ou em- ployé un mauvais baromètre; car nos obfervations s'accordent avec la théorie & avec celles de M. de Luc. Ce qui m'étonne encore, c'eit que. M. Pifton vient de me dire que le baromètre varie de 18 lignes fur le Saint-Gothard autant qu'à Marfeille ; ce qui m'a paru impofible , d’après des obfervations que j'ai faites pendant quatre à cinq années de fuite. ; Nous n'avons remarqué l’efpèce d'effouflement ou de gène dans la ref- piration , dont a parlé aufli M. de Sauflure (1), que dans la pan de la montagne au-deflus des neiges, près du fommet; & même, fur dix per- fonnes qui y ont monté, il n'yen a eu que js perfonnes qui s’en foient plaints, & j'étois du nombre. Comme je fuis Médecin , le Lecteur me permettra de faire là-deflus quelques obfervations. # . Quoique j'aie parcouru les Alpes de Dauphiné depuis près de vingt ans à plufeurs reprifes , je fuis rarement parvenu fur ces pics ifolés, moins pour m'en éviter la peine, que parce que ceux qui m’accompagnoient fe dé- goûtoient coujours Les premiers ; que d'ailleurs j'y trouvois à peine quel- ques lichen , peu de plantes, & fouvent les brouillards me privoient du plus beau point de vue qu'on puifle defirer, Je fis la lifte, cette fois-ci, de toutes les plantes au-deflus des neiges perpétuelles, & au fommer des montagneÿ calcaires: je la rapporterai ci-après ; c'eft-à-dire, de la partie (1) Voyage aux Alpes, Tome XXII, Part, 1, 1783. AVRIL, Na 578 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, méridionale de la montagne, car il n’y a prefque rien fur les autres ex- poñtions. Mon oppreflion fut plutôt une fatigue, qui, en génant la poi- trine , portoit d'abord fur les jambes. La première fe diflipoit, en s'arré- tant une ou deux minutes pour refpirer; mais la feconde me demandoit plus du double. Quant à la rougeur animée du teint , on l'éprouve plutôt en défcendant la montagne qu’en montant. Elt-ce la réaftion des fibres nerveufes de la peau qui ont befoin d’un certain temps pour réveiller leur irritabilité , ou celle des vaiffeaux , qui s'étant un peu relâchés dans un air plus lévcer, & qui, en augmentant leur effort fiftaltique & celui du cœur en raifon de la réfiftance qu'ils éprouvent dans un air plus denfe , portent le fang à la peau & la font rouoir? Ceci eft indépendant de l'effet qu'ont obfervé MM. de Sauflure, Sauvages, Scheuchzer, &c., par l'effet du Soleil fur les parties nues. Cer effet a. lieu les beaux jours , dans un temps calme , un endroit à l'abri; mais celui dont nous parlons fe fait fentir par un temps couvert , à l'ombre, & même dans un temps de pluie, La feule caufe qu'il en faut déduire , c’eft celle de la chaleur, toujours moin- dre fur les montagnes élevées que dans les endroits plus bas. Nous allons pañler à la lifte des plantes , avec les noms de Linnée & de Haller, &c., lorfqu'elles nous paroïîtront connues; & nous emploie- rons pour celles qui ne Le font pas Les noms fous lefquels nous les avons défignées dans notre profpectus fur l'Hiftoire des Plantes de Dauphiné. Carex leporina. Linn. Hall, Hift. Gentiana Brachyphylla. N. Nat., 1367. Gentiana alpina. N. Carex ariffata , N. Hall, 1391. Plantago alpina. L. Carex attrata. Linn, Lapp. 324. Plantago ovina. N. Euphrafiæ officinalis, L. Varietas Sedum attraturn. L. cerulæa. . *° Gnaphalium fupinum. L, — Helveticorum flore lurso. Hall. Viola calcarata. 1. 303, IL L. Boccon. Mufz. 64. Alchimilla alpina. 1. Hedypnoïs Pyrenaïëa. N, Leontod. Ælchimilla pentaphillea. L. Gouan Ill, Arenaria verna. L. Cherleria fedoides. L. | Ranunculus glacralis. L. Pou alpina. L. , & B. Vivipara. Cnicus fpirofiffimus. 1. Senecio incanus. L. Silene acaulis. L, Fefluca ariftata. N. Saxifraga bryoïdes, L. Pedicularis roffrata. L. — Crfpitofa. L. Pedicalaris Gyroflexa. N. à = — Trichodes fcop. Chrifanthemum alpinum: 1. Lichen Pafchalis. L, # Juncus fpicatus. L. Lichen polyrrhizos. L, Juncusfpadiceus.N,Hall.,n.1329*. Lichen decuffatus. N. — Campeftris. L, — Geographicus, L. SUR L'HIST. NATURELLE ETLES ARTS. 279 Veronica alpina, L. Sibbaldia procumbens. L. Bartzia alpina. L. Cardamine refedifolia. L. Ceraflium crigynum, N. Hall. 890? Myofotis nana. Allion. au. 9. ’ Epilobium alpinum. L, Arcemifia Murellina.N, Hall.,n.126. Liguflicum fimplex. N. Laférpitium. Polytrichum commune. L. B. Id.L. Quelques .efpèces de Bryum fans Salix herbacea. L. | fleurs, & difficiles à déterminer, Salix ferpilifolia. Scop. Cain. 1207. ainfi que: plufieurs lichen crufta- Tab. 61. cés, gris ou ferrugineux, Hieracium alpinum. L. La couleur des fleurs de ces plantes eft très vive ; & quoique la Nature ait retranché plus des deux tiers de la grandeur de li plante, pour Fac- commoder à la briéveté du remps propre à la végétation & à Ja foraifon dans ces climats glacés, leurs fleurs font les mêmes qu'ailleurs , & même plus grandes, L'été dans ce pays ne, dure qu'un mois ou un mois & demi tout au plus. Le foleil diflipe, pendant le mois de Juin, le peu de neige qui eft refté des avalanches de l'hiver ou du mois de Mai fur ces fommets inaccefibles, Le mois de Juillet eft à peine fini, que les gelées arrivent, & les leurs tardives font grillées par le givre. Îl muürit pourtant quel- ues graines: mais ce qui contribue Le plus À perpétuer les efpèces ; ce ont les boutures , car ces plantes So toutes vivaces. Une remar- que bien intéreflante pour les Jardins.de Botanique , où l’on cherche à acclimater ces plantes, & qui a été conftatée plufieurs fois par M. Chaix, Prieur-Curé des Baux, près de Gap , qui a fu faire de fa folitude un {é- jour délicieux par la belle collection de plantes qu'il y cultive , c’eft que ‘la plupart de celles des Alpes, quoiqu’enfevelies fous plufieurs pieds de neige pendant neuf mois de l'année , ne réliftent pas aux premières ge- lées. Les Phyficiens favent tous qu’il ne gèle pas à quelques pieds fous {a neige; maisils auront de la peine à imaginer que la neige précède ordi- nairement la gelée dans des pays aufli froids & auli élevés, puifque nous avons dit avoir remarqüé 2 lignes de glact fans neige le 8 Août 1781. IL faut fuppofer alors que la chaleur de la terre garantit les plantes de ces premiers froids paflagers dansles Alpes, au lieu que. leur durée & leur in- tenfité dans le mois de Novembre les fait périr avant que la neige tombe dans nos jardins. Le moyen de conferver ces plantes n’eft pas différent de ceux qu’on emploie pour les plantes exotiques. Des abris, des paillaffons, une terre sèche , l'abri du nord & de la pluie font les plus ME a de Tome XXII, Part. 1,1783, AVRIL. Nn [e] 080 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, \ DE naine sat entre ot PSS NE 5 dun es pe qe Du tj fe US CPR es + "| DESCRIPTION DU CHRONHYOMÈTRE, Ou d'une nouvelle Machine météorologique avec laquelle on peut mefurer la durée de la pluie ; Traduïte de l'Italien du Chevalier MARS 1110 LAN DRIANI, par M. COURET DE VILLENEUVE, {mprimeur du Roi, Direëfeur du Journal de l'Orléanois , Membre de la Société de Phyfique, d'Hif- toire Naturelle & des Arts d'Orléans , Correfpondant du Mufée de Paris. UOIQUE ce ne foit que par les expériences faites dans ces der- niérs temps, que l'on ait été convaincu, de la manière la plus évidente, que lorfqu'on agite dans l’eau l'air irrefpirable, il eft poffible de lui tendre fa première falubrité , il eft certain néanmoins que les Anciens n’ignoroient pas que Les pluies contribuoient beaucoup à épurer l’atmofphère ; & il eft d’obfervation conftante que dans les endroits où l'air eft mal-fain, foit par le genre de culture auquel les Habitans fe livrent (1), foit encore à caufe des eaux ftagnantes ou minérales, cet air eft d’autant plus pernicieux, qu'il fe pafle plus de temps fans qu'il y tombe des pluies abondantes. Ce que nous avançons à cet égard eft confirmé par plufieurs Auteurs, qui regardent cette difette d'eau comme donnant naïflance à toutes les mala- dies endémiques. Ils appuient leur opinion fur l’obfervation qü'ils ont faite, que ces maladies ont plus particulièrement exercé leurs ravages dans les années qui n’ont point été pluvieufes, & dans les faifons où l'air étoit chargé d'une plus grande quantité d’exhäalaifons , & où conféquem- ment une pluie abondante devenoit néceffaire pour lui rendre fa première pureté. ù Dans les marais Pontins , dans les campagnes de Sienne , voifines de la mer, ainfique dans quelques endroits de la Lombardie Autrichienne, comme dans la plaine de Collico , &c , auffi-tôt après une pluie d'orage, les Habitans ne craignent plus de s’expofer à l'air. Les vapeurs qui le chärgeoient étant entraînées ou divifées par les gouttes d’eau , laiflent alors à leurs mufcles fa liberté de leurs fonétions, qui n'éprouvent plus ce relâchement fubit occafonné par la préfence de ces mêmes exhalaifons, lefquelles influent d'autant plus fur le fyftème mufculaire , qu'elles agiffent SUR L’'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 281 puiffämment fur nos corps, en les rendant plus pefants. La chaleur cu- tanée eft effectivement moins confidérable ; la refpiration devient plus libre, & eft moins laborieufe , du moment que les nuages orageux fe rélolvent en pluie. L'atmofphère , chargée des miafmes putrides & phlo- giftiqués qui s'élèvent continuellement des eaux ftagnantes ou minérales, ainfi que des corps qui font en putréfaétion, &c., ne peut être fuf- famment épurée parle feul air que produit la végétation, parce que dans cette circonftance elle eft toujours fans reflort par le défaut des humeurs, ui néceffairement lui fervent d’aliment & de moyens de fe régénérer. Elle a donc befoin pour cela que l'air, épuré par les pluies, lui rende fa première vigueur; ailleurs les pluies qui arrofent le terrein, qui amollif fent la furface des feuilles féchées & brülées par l’ardeur du foleil, les difpofent À infpirer le gaz méphitique qu’elles abforbent de l'atmofphère, & à le changer en un air déphlopiftiqué, qui , fe confondant avec L'air atmofphérique , contribue fürement beaucoup à le rendre plus pur, Les fontaines , devenues ftagnantes par leur médiocre quantité d’eau, ou qui, par la lenteur de leur cours , laiffent le fol fangeux à découvert, tendent promptement à fe corrompre; mais le volume d’eau fe trouvant fubitement augmenté par les pluies, la chaleur que la fermentation brü- lante a établie dans la Ée eft bientôt diminuée par la préfence du Auide. Si les miafmes ne font pas alors détruits entièrement , au moins ne font-ils pas en aufli grand nombre, ? , Un plus long détail fur les autres avantages que procurent les pluies, feroit à-peu-près inutile ici : ils ont été reconnus des. premiers Phyhciens: qui fe font livrés à l'étude de la bonne Phyfique. Bientôt ils ont cherché les moyens de déterminer la quantité d'eau qu'elles pourroient produire, & d'en fixer la durée. Ces objets ont paru aflez importans pour fixer l’at- tention de l'Obfervateur , dont les vues tendent toutes à la connoiflance de la nature des climats , & à aflurer, d’une manière fixe & invariable, quel eft l'effet de leur influence ‘fur la fanté de leurs Habitans. Mais, quoiqu'avec le fecours des bons hyomètres on foit parvenu à mefurer avec exactitude la quantité d’eau tombée en différents jours & en divers endroits; quoiqu’enfin on ait réufli à obtenir une mefure certaine de fon volume tombé dans un même lieu, perfonne n’a, je crois, penfé à en mefurer la durée avec une égale précifion, & à fixer le ombre de jours & d'heures pendant lefquels elle eft tombée. Le journal de ceux qui fe font occupés de ce foin , indique feulement le jour , fans marquer les heures où la pluie a commencé , où elle a continué, & le moment enfin où il a ceffé de pleuvoir. C’eft donc pour remédier à ce défaut, que j'ai imaginé une machine (te que perfonne n’a tenté avant moi), par le moyen de laquelle je prévoyois pouvoir me procurer ces réfultats : mais j'étois fur-tout perfuadé que la connoiffance de la durée de la pluie , principalement pen- + 282 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, dant la nuit, dépendoit abfolument de la perfeétion de mon inf- trument. à ; Je n'en occupois à peine, que j'ai réfléchi aufli-tôt, que fi la pluie “étoit toujours uniforme & égale, la quantité d’eau tombée indiqueroit le temps pendant lequel il auroit plu. Je me fuis alors appliqué férieufement, afin de découvrir un moyen fufifant pour faire en forte que , dans ua lieu donné, & en toute circonftance de pluie, foit médiocre , foit abondante, foit exceflive , on püt y fubftituer le produit d'une pluie toujours égale & ‘uniforme: mais l'effet de mes obfervations a été tel, que je n'ai pu y parvenir, fans éprouver quelques inconvéniens. J'ai donc abandonné le projet de me fervir d’une pluie artificielle uniforme, qui commençät ou cefsät en mêmetemps que la pluie naturelle, & alors j'ai fait ufage d’un fyphon, qui, dans tout état de pluie, pût toujours couler uniformément, & qui commençait & cefsät avec elle. Placez fur le comble d'un toit un grand baflin de cuivre'A À (fig. 1, PI. Il) : la figure première repréfente la fe&tion verticale de ce vafe , qui fe ter- mine en cône, afin que la pluie qui y tombe puiffe facilement fe réunir dans le fond. Ce vaiffeau doit être foutenu par quatre groffes barres de fer , qui le tiennent éloigné du toit. Dans le fond conique de ce vale, placez un petit fyphon de cuivre X, dont la courbure’eft éloignée du fond d'environ 2 ou 3 lignes. La branche la plus longue V de ce fyphon traverfe le toit, le grenier ou la voûte de la chambre qui eft au-deflous, & entre enfin dans un vafe propre à recevoir l'eau qui coule par ce fy- phon. A côté du fyphon eft foudé un tube de cuivreS , dont l'extrémité , qui entre dans le vafe AA, eft élevée d'environ 1 ligne au-deffus de la courbure du fyphomXV. Le diamètre de ce tube eft ä-peu-près d’un pouce & demi. Son ufage eft d'empêcher que l’eau, qui fe raflemble dans le fond du vaifleau À A , s'élève de plus d’une ligne au-deflus du fyphon XV, parce que, lorfqw'elle s'élève plus haut , elle fort par ce tube S, & fe décharge fur le toit; de manière que, foit que la pluie foit médiocre, foit qu'elle devienne plus forte , l'écoulement du fyphon eft toujours égal : l'eau fe trouvant , dans tofit état de pluie, à une hauteur toujours uniforme dans le vafe déjà indiqué AA, le fyphon coule donc toujours égale- ment. Ainfi , quand j'ai , une fois pour toutes , déterminé la quantité d’eau écoulée par lefyphon, par exemple dans l’efpace d'une heure, il me fera facile de fixer la durée de la pluie par la quantité du fluide tombée dans le vafe qui reçoit l’eau du fyphon. Ce chronhyomètre, que l’on pourroit appeller le Tanzale Météorologique, fervira encore à mefurer la quantité de pluie qui fera tombée, en faifant en forte que l’eau, au lieu de s’écouler du tube fur Îe toit , fait recueillie dans un autre Vaifleau, par le moyen d’un lono tube : alors l'eau ainfi réunie, à laquelle on ajoutera celle qui s’eft écoulée du fyphon, donnera dans le baflin la quantité de pluie tombée. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 283 Mais, quoique cette machine indique la durée de la pluie , elle ne mar- que pas Les heures pendant lefquelles elle eft rombée, Afin de la rendre plus utile , il eft néceflaire de faire le vafe A À d’une plus grande capa- cité : il recevra beaucoup d’eau , lors même qu'il en tombera médiocre- ment. Pour remplir ce fecond objet , j'ai imaginé une machine très-fim- ple, qui me réuflit à fouhair; & je fuis d'autant plus convaincu de fa bonté, que , d’après mes expériences, j'ai trouvé la fomme exaéte qui remplit les vues pour lefquelles elle a été conftruite, Au moyen d'un mouvement d'horloge aufli facile à imaginer qu'à exé- cuter, on fairmouvoir une platine ou plaque circulaire de lairon À A (fg.2), -de manière qu’elle faffe une révolution entière dans l’efpace de vinot-quatre q P 8t-q heures. Cette platine , d’un pied de diamètre, eft terminée par un bord de trois quarts de pouce, coloré en noir; le refte de certe aire circu- laire doit l’être d’un blanc de lait. Toute la circonférence de cette aire eft divifée en vingt-quatre parties égales , dont chacune donne le chiffre d’une heure, laquelle eft fubdivifée en quinze autres parties ; de forte que chaque fubdivifion marque quatre minutes. Si l'on fait ce’ cercle horaire d’un dia- mètre plus grand qu'un pied, la divifion de l'heure pourra étre de vingt, trente , & même foixante parties: mais il n’eft pas néceflaire de connoître la durée de la pluie dans une précifion fi minutieufe; d’un autre côté , un cercle horaire de plus de 12 pouces , devient trop embarraffant. Ainfi, je crois que la première méthode eft plus que fufhfante pour obtenir une machine au moyen de laquelle on puiffe opérer avec certitude. La zône noire circulaire ne doit pas être verniflée; mais aufli il eft bon qu'elle ne foit pas trop liffe, parce que, fi elle l’étoit trop, le crayon blanc, qui doit marquer les heures pendant lefquellesla pluie eft combée , n'y laif- feroit pas de traces fenfibles. Un beau vernis eft feulement néceffaire à la portion du cercle horaire qui eft blanche, afin d’y mieux conferver les divifions , & de leur donner une apparence plus brillante & plus ftable, Au lieu d’un vernis blanc , on peut faire cecercle de laiton, & y graver les heures & les minutes. Toute l'aire comprife au dedans de la zônesnoite ui environne ce cercle horaire peut être argentée ; ou bien il eft poflible je faire ce cercle horaire en ébène ou en bois de poirier noirci, É que fur cette fubftance le crayon blanc laifle facilement des traces fenfbles. = Au centre de ce cercle horaire eft un trou circulaire Z, par lequel il eft adapté fur latige du pignon qui le fait mouvoir , fans qu'il foit re- tenu par aucune vis ; de façon qu'étant parfaitement libre, on puifle le lever avec facilité par un fimple foulèvement horizontal, A côté de ce cercle horaire, à la diftance d'environ 1 pouce d’éloignement , eft placé un levier de laiton L , qui porte une légère pièce de ce même métal MN, longue d'environ 20 pouces. Cette pièce fe meut librement fur deux pi- vots 3.elle eftfoutenue plus haut que le cercle horaire À A parun effort X 234 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, attaché au levier. A la diftance d'environ 7 ou 8 pouces de l'extrémité N de cette bande, précifément où ellecorrefpond à la bande noire , eft un petit tube de laiton fendu , afin de pouvoir y appliquer un crayon blanc Y; & fur l'extrémité N eft un petit entonnoir P, qui a dans fon fond coni- que un petir trou par lequel l’eau puiffe couler difficilement & goutte-à- goutte, quand l'entonnoireneft rempli. Lorfque cet entonnoir eft vuide, la force du reflort X eft plus grande que le poids de toute la bande MN, & par conféquent tient foulevé & fufpendu le porte-crayon Y#u-deffus de la zône noire. Mais lorfque l'entonnoir P eft plein d’eau, fon poids fufñt pour furmonter la force du reflort X , & pour faire que Le crayon Y appuie fur le bord noir du cercle horaire ; & aufh-eôt que l’entonnoir P vient à fe vuider par la ceffation dela pluie, alors le reffort X , appliqué à la bande, la foulève, & revient à faire que Le crayon Y ne s'appuie plus fur la zône noire, & n’y laifle plus de traces. D'après la defcription de cette machine, on comprend aifément que toutes les heures & minutes tracées fur la zônc noire A A , font celles pendant lefquelles la pluie eft tombée, puifqu'en prenant les moyens pour que l’eau du ciel tombe dans l’entonnoir P, & continue à y tom- ber pendant tout le temps de La pluie , le crayon blanc marquera la zône noire pendant toutes les heures & les minutes où il aura plu ; que la pluie ceffant ,l’entonnoir P fe vuide en fo ou 60 fecondes, & le crayon blanc Y étant foulevé par Le reflort X, il demeure dans cet état, jufqu’à ce que, par une nouvelle pluie , l'entonnoir fe rempliffe de nouveau. Sur la zône de ce chronhyomètre, on peut avoir une femaine en- tière d'obfervations, parce qu'en divifant la zône noire A A en fept par- ties égales (comme on le voit dans la fig. $), & faifant mouvoir le porte-crayon , il ne s’agit plus que de tranfporter de jour en jour le crayon au milieu de chaque zône, qui fe rapportera au jour de l’obfervation. Pourrendre ce crayon mobile, on fait fur la bande N M une fente oblongue dans laquelle on puiffe conduire le crayon Y, qui étant ajufté dans-un porte-crayon de laiton , qui coule le long de l’ouverture faite fur la bande, peut être fixé par une vis de preflion à un point quelconque de la fente oblongue, Dans mon chronhyomètre, la zône la plus extérieure eft celle du Dimanche. Le crayon Ÿ doit être de ce paftel blanc , connu fous le nom de blanc de Peintre, parce que ces Artiftes s'en fervent pour defliner fur des fonds noirs & colorés , & il doit être fait en cône , pour avoir plus de réfif- tance. Au lieu de ce crayon, on peut fe fervir plus utilement de tripoli blanc, qui, étant plus téndre que cette première compolition , laiflera des traces plus vifibles fur la zône noire. Comme j'ai remarqué, en faifant ufage de cette machine , que quel- uefois l'entonnoir ne fe vuide pas, quand la pluie cefle, parce qu'il arrive États que quelques grains de fable ou autre tombant avec la pluie, # SURL'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. :28ÿ pluie, bouche néceflairement l'ouverture, & empêche qu'il ne fe vuide. J'ai donc, au lieu d'un entonnoir oûvert, adapté à la bande N M un petit vafe conique CC, tel qu'il eft repréfenté plus en grand dans la fig. 3. Ee vale a deux entailles triangulaires XY , dont.Ja première a été faite , afin que l’eau arrivant au point de cette entaille par laquelle elle fe décharge dans un vafe EE mis au-deffous , Le vafe conique CC ne puifle jamais être remplid'eau au-delà déicerte limite. Avant de faire l'entaille trian- gulaire X , on verfe de l’eau dans le vafe conique C C , jufqu'à cequele poids de l’eau ainfi verfée fafle abaifler la bande N M , & preffer le crayon Y fur la zône noire AA. Cela éranttrouvé, on marque fur le paroi du vafe CC la hauteur de Peau , dont le poids eft fufifant pour faire baiffer la bande NM; & avec une lime à troïs quarts, on fair lentaille triangulaire X, dont la pointe doit être au-deffous de {a limite d'environ une bonne demi- ligne , afin que cette demi-ligne d'eau de plus compenfe le poids du laiton que la lime a ôté pour faire l'entaille X : l'autre entaille plus pe- tie Y ferc à foutenir un petit fyphon OP, lequel a une branche capillaire P, & l’autre, d'un diamètre qui excède une ligne & demie. La branche capillaire P doit! être d’une telle longueur, que lorfque fon extrémité touche à peine l’eau , cette eau attirée monte d'elle-même par le tube, & qu'en furmontant la courbure du fyphon © P; elle coule par lautre branche O: de cetre manière, lorfqu'il vient à pleuvoir, l’eau rem- plit le vafe conique; le furplus de l’eau fe tranfvafe , tombe par l'en- taille triangulaire X, & une partie coule en petites gouttes par le fyphon O P. La pluie venant à cefler , le fyphon tire & décharge la totalité de l'eau contenue dans le vaifleau. Au lieu du fyphon°O P, dont les branches font d'un inégal diamètre , javois pris d'abord un fyphon capillaire: d’un:diamètre égal dans toute fon étendue : mais j'ai reconnu dans la fuite que les fyphons capillaires ne peuvent abfolument fervir pour cet ufage , d'autant que, lorfque l'en- ronnoir eft rempli , une feule goutte d’eau venant à s’arrèrer à l'extrémité de la branche du fyphon qui eft end'air, ce fyphon n’afpire plus & ne tire plus l'eau; d'autant encore qu'il eft connu qu'un tube capillaire , qui a l’ou- verture fupérieure occupée par une goutte d'eau , fi petite qu'elle foit, cefle d'attirer l'eau au-deffus de fon niveau. Ainf, il n'eft pas étonnant ft Peau dans mon fyphon , dont les deux bras étoient capillaires , ne montoic pas toujours, & fi elle nes’en écouloit pas. Les différentes expériences que j'ai faites pour trouver un fyphon qui ne s’arrêcât point , & dont l’écoulement fe fic goutre-à-goutte , m'ont conduit à comprendre qu'on ne peut faire ufage, pour le chronhyomètre, d’un autre fyphon que de celui dont Je bras P puife dans le vafe conique CC, & dont l'autre bras, qui pend dans l'air , a un diamètre de 3 ou 4 lignes: mais il fufroit qu'il fût d'une ligne & demie, quand la feétion de fon Tome XXII, Part. I, 1783. 4 FRIL, Oo à 286 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, . “extrémité eft oblique, comme elleeft repréfentée dans la figure 4, parce que fi, au lieu d'étre telle, elle étoit horizontale, l’eau rempliffant l’ex- trémité empécheroit qu'elle ne fût attirée du fyphon, comme il arrive dans Le fyphon qui a deux branches capillaires. Au contraire, fi la bran- che O eft d'un diamètre de 3 ou 4 lignes, ou que fon extrémité foit taillée comme celle d'une plume à écrire, l'eau ne pourra jamais s'arrêter fur le fond du tube, ni en clore l’ouvertitre. De plus, il eft néceflaire que le bras P foit affez capillaire pour que l'entonnoir, plein d’eau jufqu'à l’origine de l'entaille Y, fe vuide dans l'efpace de $o ou 60 fecondes; puifque , d’après beaucoup d'expériences que j'ai faites en différentes circonftances de très-petires pluies , il m’en ft réfulté que, dans une pluie à peine fenfible , l'eau que fournit un hyomètre de 4 pieds quarrés de fuperficie, en 60 fecondes , eft toujours en plus grande quantité que celle qui s'écoule par un petit fyphon, qui en 40 fe- condes vuide le vafe conique CC , rempli d’eau jufqu’à la hauteur de l'en- taille X ; d'autant aufli que pendant la plus petite pluie, le vafe conique CC demeure toujours plein. Comme il eft difficile de faire le bras P d’une telle capillarité(2), que tout l’entonnoirCC foit vuidé dans l'efpace d'environ 40 fecondes , j'ai coutume de reftreindre le diamètre du tube capillaire, jufqu'à ce qu'en y infinuant différentes foies de porcs oucrins, les gouttes ET Mens du bras O ne fe fuccèdent que dans l'efpace de 2 ou 3 fe- condes, La longueur de la branche capillaire O P du petit fyphon n’eft pas in- différente, puifqu'il faut néceffairement qu’elle foit telle, que l’eau, attirée par cette branche, lorfqu'’elle y eft à peine plongée, puille furpafler la courbure du fyphon O P; de plus , il eft à propos que la longueur de cette branche, placée dans l'entaille X , ne parvienne pas à atteindre le fond du vafe conique , maïs qu'elle en foit à la diftance d’une bonne ligne, afin que s’il tomboit par hazard dans le vafe conique C C quelque grain de fable ou autre chofe , il ne puiffe fermer l'ouverture du tube capillaire P, & empêcher l'écoulement, Comme le poids de la branche O eft plus grand que celui de la branche capillaire P, le fyphon OP pofé dans l’entaille neromberoit pas perpendiculairement , fi on l’abandonnoit à fon propre poids, & la branche capillaire ne fe tiendroit pas à la diftance du fond conique que nous avons aflignée. Pour éviter cet inconvénient , j'ai foin de fixer, au moyen d'un peu de cire, le petit fyphon O P au bord de l’en- tonnoir CC , de façon que la branche O pende perpendiculairement. Aulieu_de cire, on peut faire ufage d'un porte-{yphon d'un petit ca- nal courbé , qui ait au deffous deux petites lames minces de laiton, qu'on aflujettit [ur les bords du vafe conique C C avec du maitic, & erfuire on fixera avec le petit canal Le fyphon, fuivant l'inclinaifon qu'on jugera da plus convenable. . « RE Pour avoir le nombre d'heures & de minutes pendant lefquelles la pluie SUR L'HIST. NATURELLE ETLES ARTS. 287 eft tombée, ïi fuffira de couvrir une portion du toit avec une D Le de fer blanc verniflée, deftinée à conduire l'eau de la pluie dans un tube qui la portera jufqWes dans l’entonnoir € C : mais comme il eft toujours mieux qu'une même machine ferve à plulieurs ufages, le même vaifleau qui fert à recueillir la pluie (ou le vafe de l’hyomètre ) fervira aufli pour le chron- hyomètre, IL y a dans les hyomètres l'inconvénient ordinaire , qui eft que la tota- lité de l'eau de pluie ne fe rafflemble pas dans lentonnoir OO, fig.2, parce qu'une portion de cette eau s'attache aux parois du tube ; qui la con- duit dans la chambre au-deffous. Pour éviter cette difperfion, le fond de l'entonnoir dont je me fers pour cet objet, fe termine bien en un tube co- nique , mais non continu , & feulement de la longueur d'environ 2 pou- ces , parcé qu'immédiatement au-deffous du fond de cet entonnoir OÙ eft foudé un tube de plomb KK , lequel a une largeur double de l'ouver- ture conique S. Par ce moyen, l'eau de pluie qui tombe dans l’enron- noir OO, pañle librement par l'ouverture du me KK., fans fe glifler le long des parois de ce tube, Le même tubz K K continue à être cylindrique jufqu'à environ 6 pouces au-deflus du plan du cercle horaire A À ; enfuice, à cette diftance, il eft reftreint en forme d’un cône ouvert, afin que dans les plus petites pluies , l’eau fe raflemble, tombe dans le vaifleau CC, & de ce vaiffzau dans un autre vafe O M. La forme de ce vale, qui eft d’étain, doit être parfairement cylindri- que , avec deux petits tubes de la même matière FT qui y font foudés, & qui en rafent les fonds, A l’un de ces tubes cit adapté un petit robiner Q, & à l’autre un tuyau de cryftal cylindrique I8f , qui fe pliant à angle droit, AA IR au même vale O M , & qui eft accompagné d'une échelle, qui en divife la lonoueur. Comme le poids d’une ligne d’eau de pluie, reçue dans l'entonnoir OO, eft précifément de 35 onces (au moins dans le mién ), j'ai verfé une même quantité d’eau diftillée dans le vafe, obfervant à quelle hauteur elle s’é- lève dans le tuyau IT, & divifant cette hauteur en cent parties. Comme tout le vaiffleau OM eft parfaitement cylindrique , j'ai Evité le refte de la longueur du tuyau IT en parties égales, chacune fubdivifée en cent. Ainf , j'ai fa quantité d’eau produite par la pluie, jufqu’à la précifion de == de ligne, & même de =, parce qu'on peut très-bien eftimer à la vue la moitié d’une des fufdites divifions. On pourroit avoir aufñi facilement la quantité d’eau produite par la pluie pendant les différentes heures du jour & de la nuit; moyen qui don- neroit à la fin de chaque année Le nombre des heures qui font les plus plu- vieufes , parce qu’en faifant placer fur un cercle 24 vafes d'étain , & fai- fant, par le moyen d'un mouvement d'horloge, que ce.cercle exécute une révolution entière en vingt-quatre heures, & qu'à chaque heure un de ces vafes fe préfente fous l'ouverture du tube de plomb KK , l'eau de Tome XXII, Part. 1,1783. AVRIL. Oo 2 288 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, pluie tombée dans thacun de ces vafes donnera la quantité d’eau qu'aura fouriie la pluie pendant les différentes heures du jour & de la nuit: mais je me füuis contenté d’avoir, par mon appareil météorologique , le nombre d'heures pendant lefquelles l'eau eft tombée, fans m'occuper d'avoir le produit de l’eau tombée à chaque heure, : Afin de m’aflurer fi mon chronhyomètre avoir toute la précifion que je devois attendre de mes foins, pour indiquer les heures pendant lefquelles la pluie étoit tombée, j'ai prisun grand vaifleau plein d’eau ; & avec une pendule à fecondes, j'ai déterminé exactement le temps que trois fyphons de différents diamètres emploieroient à le vuider. J'ai trouvé que le pre- mier de ces fyphons vuidoit le vafe en deux heures vingt-cinq minutes ; le fe- cond,, en deux heures cinquante; & le troifième en cinq heures vingt-cinq. Ces différents remps déterminés, j'ai rempli de nouveau le vafe, & ÿ ai plongé le fyphon, qui lavoit vuidéen deux heures vingrcinq minutes ; & jai fait tomber l’eau qui s’en écouloit dans Le vale conique. [1 s'eft rempli en un moment; & la pointe du crayon s’eft abaiflée pour comprimer la zône noire, & y former des'traits. Dans l’efpace de deux heures vingt-cinq mi- nutes l'écoulement du fyphon ayantceffé, l'entonnoir s’eft vuidé, & le crayon s'eft élevé, laiflant fur la zône noire une trace qui correfpondoit exacte- ment à la durée de l'écoulement du fyphon employé; les deux autres fyphons m'ont donné un réfultat conforme , parce que le crayon seit abaiflé & élevé toujours & conftamment au commencement & à la fin de cette pluie artificielle , indiquant les heures & les minutes pendant lef- quelles elle étoit tombée, & ne laiflant pas de trace , lorfqu’effeétivement iln’avoit pas plu. Quoique jufqu’à préfent il y ait eu cette année peu de jours pluvieux, les vicillicude® de la durée de la pluie ont été marquées fidellement & avec précifion par mon chronhyomètre. : IL faut dire aufi que , dans les circonftances d’une très-petite pluie, Le chronhyomètre PE pas le moment précis où la pluie a commencé à tomber , parce qu'avant que l’eau fe foit réunie dans l’entonnoir , il s’é- coule néceflairement un efpace de temps aflez fenfible ; aufli quelquefois uné wpluie fine eft fi imperceptible , qu'elle ne parvient à former des gout- tes qu'après quelques moments, Dans ce dernier cas, lorfque les indications du chronhyomètre man- queroïent de quelques minutes, on ne devroit pas en conclure que cet inftrument ne remplit pas Pobjet pour lequel il a été inventé; &eflective- ment l'erreur de quelques minutes dans ces obfrvations eft trop peu im- portante, & ne mérite pas qu'on y fafle attention. IL fera toujours vrai de dire que, parle moÿen de cette machine, on pourra déterminer le nombre des jours pendant lefquels il aura plu ; fi une année a été plus abondante en pluie qu'une autre; combien il fera tombé d’eau dans une année, & pendant chaque jour. : Les obfervations combinées de la qualité, de la durée & de la force 2 SUR Ll'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 289 des vents qui auront dominé ; celles de la falubrité , du poids , de l'hu- midité & delachaleur de l'air; le nombre & la qualité des maladies , pourront ouvrir une voie füre pour mieux connoître la nature de notre climat, & l'inuence de l'élément dans lequel nous vivons. Notes du Traduiteur. (1) Par exemple, dans les cantons où l'on cultive le riz, & qui font reconnus pour être très-mal-fains. (z) J'ai aimé miêux faire un mot françois de capil/arisa, que d'employer une cir- conlocution qui n’auroit fürement pas aufli bien rendu l’idée de l’Auteur ltalien ; notre langue n’ayant'point de terme pour exprimer lé plus petit diamètre poffible d’un tube ou d'un fyphon, . Ce Mémoire a été rraduir au mois de Novembre 1782, & Lu dans la Séance de La Société de Phyfique, d'Hifloire Naturelle & des Arts d'Orléans , Le 6 Décembre de d2 même année. re 10 ei Doupo jA. Ot : M M ARS es ba © Des couches fuperpofées de laves du volcan de Boutaref]e en Auvergne, Er Obférvations fur une planche travaillée par La main de l'homme , € trouvée fous des coulées de laves ; Par M, l'Abbé SO ULAVIE, de diverfes Sociétés Lirtéraires, & Corref- pondant de l Académie Royale des Infer'ptions. M. LE Marquis DE SIMIANE ayant obfervé fur les lieux , décrit, long- temps examiné en given , & fait porter à Paris des blocs confidérables de chaque couche de laves d'un volcan , a bien voulu les faire connoître à M. Cadet, de l'Académie des Sciences, & à moi, Voici le réfultar du travail des trois Obfervareurs, Dans la Paroifle de Saint-Alyre-les-Montagnes , & dans le terrein commun du Village nommé Boutareffe , entre plufieurs perires montagnes, fe trouvent les reltes d’un volcan, qui a inondé de fes laves divers ob- jets intéreffants. Plufieurs couches & fubftances hétérogènes font fuper- pofées en cet ordre. Première couche inférieure, Inférieurement fe trouve une terfe autrefois 290 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, végétale, Il ne paroït pas cependant qu’il y ait une grande quantité de: matières organifées détruites comme dans notre terre végétale ; qui a nourri une grande quantité de végétaux , qui abonde en matières huileu- fes & qui décèle fa qualité végétale au fimple coup d'œil. La terre trou- vée fous les coulées volcaniques contient quelques grains de quartz ; elle eft mélangée néanmoins avec des particules calcaires , car elle a fait une légère effervefcence avec les acides. C’eft dans cette couche des terres végétales inférieures que M. le Mar- quis de Simiane a trouvé de grandes & petites branches , & quelques ra- cines. IL eft évidents que les reftes d'arbres ont fouffert l’aion du feu ; ils font la plupart charbonifés ; ils brûlent encore comme nos charbons or- dinaires, & laiffent émaner alors une odeur analogue à celle du fuccin. La terre végétale qui avoifine les branches d'arbres eft toute noire, &c imprégnée des parties exhalées du bois pendant l'action du feu. Un de ces morceaux de bois n’eft pas tout-à fait changé en charbon; if eft d’unc dureté extraordinaire , & il eft fufceptible de poli , mais fans être pétrifié. Une planche grotefquement travaillée par la main de l’homme, & trouvée dans cette mêm® couche, permet des réflexions importantes fur l'hiftoire de la Nature; elle paroît avoir été formée à coups de hache. Le travail de la fcie ne s’y manifefte point : on n'y trouve que les coups de l'inftrumert tranchant; obfervation qui confirme celle que j'ai faite en Vivarais, où j'ai trouvé fous des laves des reftes du travail de homme, Cette planche paroît être une portion de pin: on en voit les nœuds pa- rallèles & salternes; fes branches font fymmétrifées , & elles font difpofées eñ étages. ï Seconde couche. Cette couche, de 4 pieds d'épaiffeur , qui a recouvert les branches & les arbres, eft d’une matière tuffacée , mélangée.avec des parties calcaires ; car elle faic aufli une légère effervefcence avec les. acides. RE Troifième couche, Cette couche eft une cendre volcanique blanche, folide , happant l’eau fort promptement. Elle paroît d'abord un reîte de pierre blanche calcaire; mais M. Cadet l'ayant expofée à l'aétion du fel ammoniac, na trouvé aucune décompolition. Cepenglant , quand on jette cetté pierre dans l'eau, elle fe fufe comme la chaux. Quatrième couche. Celle-ci eft d’un pied de profondeur , & le grain en eft plus fin que celui de la précédente. Cinquième couche. Celle-ci , d’un pied & demi d'épaiffeur , eft une cen- dre volcanique grisâtre. Cettescouche a fubi divers retraits dans fes par- ties, & je crois que cette forte de pouzolane feroit excellente pour le ciment. Sixième couche. Toutes les chofes précédentes ont été couvertes par une : lave bafaltique d'environ 100 pieds dépaifleur , de différente inclinaifon’, & de différents ordres de retraits. , E SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 2971 Inférieurement cette couche de lave eft divifée horizontalement, for- mant des fuperpoftions d’un pouce d'épaifleur ; fa totalité forme un plateau d'un pied. «+ Touteft couvert enfin par le grand plateau fupérieur bafaltique prif- matifé , appartenant à un volcan dont M. le Marquis de Simiane n'a pu trouver le cratère, ni la correfpondance de la coulée à la bouche igni- vome. F Toutes ces matières fuperpofées horizontalement ont été coupées pof- térieurement par les courants de rivières , qui ayant miné d'abord diffici- lement la couche de bafaite fupérieure , entraînent & creufent les couches de cendres inférieures plus aifément, & coupent à pic, ou d’une mahière inclinée, les matières inférieures. . Il réfulte donc de ces obfervations : 1°. Que ces matières appartiennent à une éruption très-ancienne ; car les laves du cratère, le cratère luismême , & routes les appartenances d’un volcan ont été déblayés par les eaux , excepté la coulée folide & com- patte du bafalte , dont il refte encore des plateaux Fame 1 2°. 11 confte que cette lave bafaltique coula d’abord pendant l’érüprion du volcan, dans des bas-fonds; car les Auides obéiffent à l’inclinaifon du fol. Or, ce qui étoit alors bas-fonds ou vallée , ou plaine inférieure, eft aujourd’hui fommet de montagnes, & plateau fupérieur bafalrique , formé depuis l'excavation des vallées par les eaux courantes, & devenu fail- ant depuis que le fol voifin a été détruit. ) 3°. Il eft certain qu'avant l’effufion volcanique, le terrein étoit hors du fein de la mer ; car ces racines, ces planches, ces charbons de bois & cette terre végétale annoncent le règne des arbres jouiflant de l'air at- mofphérique, & non pas la ftation d’une mer fur ces lieux , comme le di- fent les perfonnes qui croient que les volcans de la France méridionale éroient tous fous-marins à l'époque de leurs éruptions. 4°. Il confte que cer ancien monde étoit peuplé; car ces planches tra- vaillées annoncent un être intelligent qui façonne le bois pour fes ufages. $°. Etil paroît probable enfin que nos Arts mécaniques , enfants du befoin , de l'imagination & de f'induftrie, n’étoient peut-être pas dans l'é- tat de perfection où ils font aujogglhui. Une hache groflière & fimple paroît avoir façonné cette planche, au lieu d’avo : été travaillée par la {cie ; inftrument qui fuppofe beaucoup plus de réflexion dans l'Art du Charpentier. On pourroit dire, il eft vrai, qu'on auroit pu avoir des fcies, fans les mettre en ufage à cette occalion : mais cette planche curieufe & intéreffante eft route de nœuds ;elle a été façonnée après beaucoup de travail & de peine, & fi l'Ouvrier avoit connu la fcie, il eût obvié aifé- ment à toutes les difficultés, en employant cet inftrument. Tels font les réfultats que nous ont patu donner les cendres & les laves 2 OR. 292 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fuperpofées , & la planche travaillée par la main de l’homme. Ces objets forment fans doute un chapitre intéreflant dansla Chronologie naturelle; Science trop ignorée, parce qu'on a étudié jufqu'à ce jour as nos Pro- vinces trop de fuperficies & trop peu de fuperpoñitions, Dans mes recher- ches fur cette partie de mon Ouvrage , jai toujours eu en vue le principe que toute couche fuperpofée à une autre hétérogène, eft plus récente que l'inférieure. Je crois qu'il ne manque que des obfervätions en Minéralo- gie, & qu'il ne faut plus que quelques méditations locales fur la füuperpo- fition réciproque des granits , des grès , des marbres, des laves , des poudin- gues,des mines, des jades , des ardoifes, des argiles, des couches de cail- louxwoulés , des porphyres, des pierres blanches calcaires , &c. &c. pour écrire l’hiftoire ancienne du monde minéral , & pour que cette partie de l'Hiftoire Naturelle, qu'on confidère encore comme abfolument {yftéma- tique fans la connoître, foit fufceptible d’une forte de démonftration , fondée für le principe des fuperpofitions, Après ces obfervations, je réfume encore les faits expofés dans ce Mémoire, pour joindre l'hiftoire contemporaine du monde minéral à celle du monde vivant. Il paroît en effet que le volcan de Boutareffe , dont nous avons vu les coulées inonder des arbres, du bois & l'ouvrage de l'homme, vomit dans le continent. IL eft certain d’autre part que plufñeurs volcans de l'Auvergne inférieure ( ceux , par exemple, deswenvirons de Clermont, dont les Javes que j'ai obfervées fur les lieux , font mélangées avec des matières calcaires) ont vomi de deflous le fein des eaux de- l'ancienne mer, qui a dépofé, comme on fait, toutes les matières calcaires & co- quillières du globe. Il fut donc un âge dansia Nature où le fol de la France étoit plongé dans le fein des eaux d'un ancien océan , tandis que le fommet des mon- ragnes d'Auvergne étoit ftationnaire hors de l'élément liquide; alors ce fommet formoit une Ifle hériffée de volcans actifs. Les plus élevés de ces volcans brüloient hors du fein des eaux ; les volcans moins élevés brülèrent , ou répandirent au moins leurs torrents enflammés fous les fots maritimes. Tel de nos jours l'Etna : il domine dans la Sicile ; il élève fa bouche faillante , ignivome, dans les airs, & il eft environné de volcans. fubalternes, baignés par les eaux de la Méditerranée. Lipari, Stromboli, &c. font de ce nombre. Or, l’homme vivoit dans les ancien- nes Ifles d'Auvergne avant l’effufon des volcans ; car il a délaiflé fous leurs coulées des reftes de fes ouvrages, j Après avoir réuni les obfervations minéralogiques & rapproché les fairs de la nature vivante, de ceux de la nature morte, d’après des faits locaux, il ne manque plus que de leur donner l’ordre chronologique établi par les principes ci-deffus énoncés. IL paroit donc; 1°, Que la mer a inondé d’abord le fol dela France, Aucun Natura- lite Es L SUR L'HIST. NATURELLE ET-LES ARTS. 293 lifte éclairé ne révoque en doute cette vérité. Les matièses coquillières en font le monument inçonteftable, 2°. Que les fommets des montagnes d'Auverone ont été long-temps ftationnaires au-deflus du fein des eaux, & leurs bafes long-temps fous les eaux. 3°, Que ces fommets ont formé alors des Ifles, 4°. Que ces Ifles ont été habitées par des êtres intelligens. 5°. Que des végétaux y ont été cultivés: 6°, Que des coulées de laves ont inondé & les végétaux , & les êtres intelligents , & une partie du fommet des Ifl:s. Ces coulées démontrent les cinquième & quatrième réfulrats. 7°: Que des volcans inférieurs ont été baiïgnés par les eaux de l'an- cienne mer ; car ils ont des laves mélangées avec la matière coquillière. Ce mélange prouve la feconde partie du fecond réfultar, 8°. Que la mer étant defcendue des hauteurs de toute l'Auvergne, même inférieure , a abandonné ce terrein aux eaux pluviales. 9°. Que celles-ci en ont fillonné la furface, formée de vallons 8: vallées, & creufée dans les coulées de laves ; ce qui nous permet d'obfer- ver les fuperpoftions coupées à pic, de lire dans les archives de la Na- ture, & de dorner à ces faits fucceflifs un ordre de chronologie qui cox- firme celui que j'ai érabli dans l'Hiftoire-Chronologique publiée à Paris, chez Mérigor & Belin, 1 volume in-8°”. avecles plans & les cartes de chaque re Les fubftances qui ont donné lieu à toutes ces fpéculations, ont été foigneufement examinées par M, le Baron de Marivets , par M. Cadet, de l'Académie des Sciences. Cette précaution a paru néceflaire, parce que plufeurs Auteurs (embarraflés des nouvelles obfervations qui dérangent les méthodes & les plans qu'ils ot imaginés pour nous dévoiler la Na- ture) prennent le parti de douter des faits obfervés, Or, la defcription préfente démontre une vérité qui renverfe l'opinion de ceux qui difent: Que les volcans éteints de la France méridionale ont été tous fous-martns & L'époque.de leurs effufions. IL faut fans doute le concours des eaux maritimes por opérer l'explo- fion, puifqu'on a obfervé que tous les volcans éroient ou dans des Jfles, ou dans le voilinage de la mer. Mais il ne faut pas confondre Le volcan fous-marin , celui-là même qui prépare fes explofions fous les eaux & vomit fous les eaux, avec celui qui pofe fes enfembles, fes bouches, fes courants ,fa montagne coniforme & fon cratère hors du fein de la mer, comme la plupart de nos volcans éteints de la France méridionale. Enfin , j'obferverai ici en finiffant, que ce feu volcanique foys-marin exifte dans les entrailles du globe terreftre , très-profondémert, comme je l'ai prouvé , même fans le concours de l'air atmofphérique alimentaire. Tome XXII, Part.I, 1783, AVRIL. Pp F à à LA 204 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, de Les flammes qui fortent des bouches ignivomes font occafionnées fans doute par l'action de cet air , aliment du feu; mais la lave incandefcente , cette matière fondue, fouterreine, peut être conçue exiftante fous les eaux maritimes ,. fans le concours de l'air, comme le fer exifte, incandefcent, fluide & fondu, dans le centre du boulet de canon, dont la fuperficie com- mence à fe confolider en fe refroidiffant , tandis que le centre eft encore dans un état de fluidité. Ces affertions peuvent être foutenues en bonne Pbyfique. Je ne puis concevoir autrement cette immenfe matière fondue que nos volcans ontexpulfée des entrailles de la terre , & dont les éjections forment les territoires d’un grand nombre de nos Provinces méridionales, Les feux tranfitoires occalionnés par l'incendie d’une mine de pyrires ou de houille , ne peuvent opérer de fi grands efféts; & je me propofe de prouver que les feux fouterreins volcaniques , alimentés & produits pat d’autres caufes plus générales, tiennent à la conftitution de notre globe, & doivent leur origine à fon origine même, + = EXPÉRIENCES ET OBSERVATIONS Sur labforption opérée par le Charbon ardent dans F’Air atmofphérique & dans les différents Gaz; Par M. le Comte MOROZZO. C E S expériences & obfervations font le fujer d'un Mémoire que j'ai préfenté à l’Académie Royale des Sciences de Turin. Comme il con- tient des vérités importantes , tirées d’après des expériences dont je réponds pour l'exactitude , & que le Docteur Cigna , & quelques autres de nos Phyficiens & Chymiltes m'ont fait l'amitié de voir répéter, j'ai été en- gagé par ces Meflieurs d’en publier un extrait , en attendant la publication du volume de l'Académie , dans la perfuafion qu'elles jetteront un grand jour fur la nouvelle doétrine des gaz, & pourront être la fource de gran- des découvertes dans la Phyfique & dans la Chymie. C’eft à M, l'Abbé Fontana que l’on attribue la découverte de l'abforp- tion sorale de l'air atmofphérique par le charbon. Quoique je n’aie trouvé nulle part dans fes Ouvrages, ni même dans l'intéreffante Collection du Journal de Phyfique, le détail de cette expérience, je me bornerai à rapporter ici ce que M. Prieftley nous dit dans la fection X de fon der- L sas SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 29$ nier Ouvrage (a), laquelle a pour titre: L’Air inflammable efl diminué parle Charèon. ns En confèquence de la découverte de l'Abbé Fontana, dit-il, fur l'ab- Jorption de l'air par Le charbon , je plongeai des morceaux de charbon ardent dans une fiole d'air inflammable , € je la renverfai auffi - 16: dans le mer- re. Lorfqu'un: tiers de la quuntiré totale eut ère abforbé),-je trouvais que le réflant, ainfi que l'air qui fut de nouveau chaffé du chathon , lorfqueye le Plongeai dans l'eau , étoit inflammable (2), Le premier ne paçoiffoit pas df= férent de ce qu'il avoit été, mais Le dernier étoit un peu moins inflammable. Et dans l’appendix du même volume, au 6. IX, il dit (3): Une dé- couverte curieufe, qui, ft onda médite, donnera peut-être de nouveaux: éclair- ciffements fur cette matière, éefcelle que M. l'Abbé Fontana vient de faire de la propriété fingulière que pofsède le charbon qui ef .embrafé, d'attirer & d'abforber des grandes quantités d'air, en fe refroidif[ane. Enfin, on trouve dans la Gazette Salutaire: (4), que, dans les Séances de l'Académie de Dijon, Le 18 Avril, M. de Morveau a fait voir l'ab[orp- tion cotale de l'air commun par un charbon ardent enfermé dans ur bocal que l'on renverfa dans un baf}ir rempli de mercure. Il\a annonce que cette “expérience li avoit èté communiquée par quelqu'un qui l'avoir vu: executer par le célèbre Fontana en Italie. Ce phénomiène eftd'autant plus intéreffant, que l'on avoit lieu de penfer qu'il n'y avoit que L'air déphlogiflique qui-pät étre ainfL abforbë entotalité; qu'il y avoit méme encore : des doutes fur ce point , ce qui avoit engagé M. de Morveau a faire exécuter un appareil très- commode: pour mettre en contaël l'air déphlogifliqué avec touves les matières que l'on voudroit, & particulièrement iavèc l'hépar martial; le vitriol de fer, la chaux vive, Les alkalis cauffiques , les fleurs de zinc récentes. . M. le Chevalier Landriani m’aflura lui-même, à fon Paflage à Turin, avoir fait cette expérience à Milan ; nous l'avons répétée enfemble. On prit une jatte de porcelaine remplie @e mercure , dans lequel nous renver- simes un bocal de verre. Nous introduisimes enfuite. ES ce «bocal. le charbon embrafé, en lefaifane/pafler à travers Le mercure. Nous eûmes en effet quelqu'ablorption; maislelle étoit :encore fort éloignée d’une abforption sotale à laquelle nous nous attendions.: Néanmoins, comme (r) Expériences & Obfe:vations fur différentes branches de la Phyfique, édition françoife, tome'XIT, page 149. : : (2) Qu'il me foic permis de faire obferver en paflant que l’abforption obtenue parcerte méthode , n’écoit pas entièrement due au charbon, mais aufli à la raréfaétion de L'air qui eft dans le tube par l'iitroduétion des charbons , puifque l’on en obtient une confidérable par l’introduétion d'un ver rouge dans un matras ; que l’on renverfe tour de fuite dans Je mercure. (3) Ibid. , page 194. (4) N°. XXI du 30 Mai 1782. Tome XXII, Part. I1,1783. AVRIL, Pp 2 2356: OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, cètre expérience a été faite à la hâte , & foupçonnant qué peut-être quel: que caufe étrangère en avoit empêché le fuccès, je me fuis mis à exa- miner le fait plus particulièrement ; & maloré ces refpectables témoigna- ges, la matière me patoïffant fort intéreffante , j'ai cru que c’étoit à l’ex- périence feule à en décider. 1 Les bornes de cet extrait ne me permettent pas d'entrer dans les détails de toutes les expériences que j'ai faites , pour vérifier fi réellement cette abforption avoit lieu, ou bien fi elle éroic uniquement due à la chaleur du charbon. Dans ce defein, j'ai fubftitué au charbon différents corps dans l'état d'incandefcence , lefquels n’ont pas donné la moindre abforption. Ayant au contraire reconnu très-diftinétement que le charbon embrafé avoit la propriété d'abforber, mais avec quelque modification, Je me contenterai de rapporter en abrégé les expériences les plus intéreffantes que j'ai faites à ce fujet. Afin d’être plus affuré du réfultat de mes expériences , j'ai tâché de les faire en parité de circonftances, en me fervant, foit de verres parfaite- ment égaux, foit avec des charbons du même poids & volume. À cet éffet, j'ai pris des tubes de verre d'un pouce de diamètre & de 12 pouces de longueur , ayant reconnu qu'avec 5e tubes plus courts, dont je m'é- tois fervi au commencement, les abforptions confidérables qui fe faifoient dans quelques cas, ne me mettoient pas en état de juger avec précifion des réfulats. Ces tubes étoient fermés par un bout, & je leur ai attaché à chacun une échelle , divifée en pouces & en lignes. Les charbons que j'ai employés dans toutes ces expéricnces , étoient de bois de hêtre ; ils avoient 1 pouce fur 8 lignes de diamètre, & pefoient chacun 1 drachme & demie. " Expérience 1°. Si on prend un chatbon ardent, qu'on le plonge’dans du mercure (dont on remplit une jatte), pour le faire pafler tout de faite dans la cavité d'un tube plein d’air atmofphérique qui eft renverfé dans ce mercure, l'abforprion commence , & ira en augmentant jufqu’à 3 pouces 6 lignes, favoir un peu plus da quart de la capacité du tube; & elle n'excédera point ce terme, quelque force qu'elle puifle ètre. Dans plus de vingt expériences , je n'ai jamais reconnu de différence plus fenfible que de 2 livnes environ, & j'attribue cette différence à la plus où moins grande bonté de l'air atmofphérique, comme l'on verra ci-après. Voici une expérience qui contredit ce que l’on a avancé jufqu à pré- -fent fur l'abforption rorale de l'ait atnrofphérique par le charbon. Si avec un opturateur que vous pafléz fous le mercure vous fermez exactement la partie inférieure du tube , & que vous le renverliez , en ÿ plongeant une bougie allumée, elle s'éteint tout de fuire; ce qui prouve que le réfidu de l'air s'eft vicié. Les charbons, après l'opération , augmentent conlidérablement de SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 297 poids; c’eft le mercure qui s'infiltre dans les pores du charbon qui caufe cette augmentation, laquelle eft plus forte à mefure qu'on met plus de temps à faire pafler le charbon à travers le mercure, pour l'introduire dans la capacité du tube, Experience II. Je remplis de mercure un tube cylindrique, que je renverfe dans une jatte pleine du même fluide, Je déplace enfuite le mer- cure du tube, en y Ée pafler, par le moyen d’un fyphon , de l'air fixe extrait de la poudre de marbre , & de l’huile de vitriol. J’y introduis en- fuite le charbon , comme dans l'expérience précédente , & j'ai une abforp- tion très-rapide de 11 pouces environ, Ayant répété plufieurs fois cette eee , qui avoit lieu de me frapper , j'aieu conftamment les mêmes réfultats. Si le tube dont on fe fert pour cette expérience étoit plus court, l’abforption eft totale; & l’on a un fpectacle intéreffant, celui de voir le mercure monter pardeflus le charbon, lorfque celui-ci touche le bout férmé du tube. ; : Expérience III. Si je déplace le mercure du tube par le gaz nitreux extrait du fer avec l'acide nitreux, eh opérant comme dans l'expé- rience précédente , le charbon que j'y introduis me donne uné abforp- tion de 6 à7 pouces environ. L'air réfdu eft rrès-vicié encore, & n'en- retient point la Aamme. Le gaz nitreux extrait de l'étain, préfente les mêmes rélultats. . Expérience IV. En remplaçant le mercure dont le tube eft rempli, avec du gaz déphlogiftiqué extrait du précipité rouge par le feu, & y faifant enfuite pafler le charbon ardent , l'on a une abforption très- petite de la capacité du tube, lorfque ce gaz elt très-pur. [l eft bon d’ob- fetver qu’en faifant certe expérience, il faut non-feulement_laïffer fortir tout l'air de la capacité dans laquelle on réduit le précipité , mais auffi, pour être afluré de la bonté de ce gaz l’éprouver au comnrencèment, en en rempliffant un petit tube à part, avant que de l'introduire dans le grand tube qui doit fervit à faire l'expérience. Je recommande parti- culièrement ces précautions, puifque j'ai reconnu que le premier pro= duit, favoir le premier gaz, qui fe développe du précipité rouge, eft incapable d'entretenir la Aamme, comme contenant quelque partigsd'air nitreux. À En examinant le réfidu de l'air contenu dans le tube, on le recon- noît encore très-déphlogiftiqué ; la famme s’y alonge , & y brille d’une vivacité extrême, & le lumignon d’une bougie récemment éteint sy en- _ flamme rapidement. * Expérience V. Si, au lieu du précipité rouge , on retire le gaz dé- phlogiltiqué du nitre, labforption opérée par ie charbon, lorfque ce gaz eft de la Aeoitie pureté , n'excède pas les 2 pouces, Cette expérience pour retirer du gaz entièrement déphlogiftiqué , eft très-difhcile à faire; car fi l'on fe fert d'une retorte d'argile , il fe fait une décompoftion du nitre C2 98 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ar la petite portion de l'acide vitriolique contenue dans l'argile, & il fe ne de l'acide nitreux ; & une partie du gaz que l’on retire, eft alors nitreufe, Si l’on opère dans le verre , comme le nitre aide la fufion du verre, il arrive fort fouvenr qu'il fe fond; & la matière coulant fur les charbons laiffe un libre paflage à l'air atmofphérique , & l'expérience de- vient inconcluante. Il faut par conféquent fe fervir de verres bien lutés, & éprouver auparavant dans un petit tube le gaz qui fe développe , pour être afluré de fa bonté , puifque les premiers produits contiennent toujours un peu d'air nitreux , ainfi que nous l'avons déjà dir. L'air déphlogiftiqué retiré de l'eau dans un grand matras expofé à la lumière du foleil pendant un mois environ, & dont j'avois éprouvé au- paravant La bonté , m'a donné un-réfulrat crès-approchant de celui des au- tres gaz déphlogiltiqués ; car le charbon introduit dans ce gaz me donna une abforption de 2 pouces & 1 ligne environ, Ces trois dernières expériences fur Les différents gaz déphlogiftiqués , font voir, àce qu'il me paroït, combien peu fondée étroit l'afleffion de ceux qui foutiennent que Pair déphlogiftiqué eft entièrement abforbé. Expérience VI. Le charbon introduit dans Le gaz inflammable retiré du fer par l'huile de vitriol, me donna une abforprion de 2 pouces environ. Le réfidu de l'air étant examiné, fe trouva être inflammable comme au- paravant , faifanc une petite déronnation à l'orifice du tube , mais brûlant avec une Aamme lécharfte dans toute fa capacité. La différence du réfultat de cette expérience , d'avec celle de Prieftley que j'ai rapportée ci-deflus , fait clairement appercevoir que Fabforption qu'il a eue, n'étoit pas tout-à-fait due au charbon , comme je l'ai foup- conné dans la note ,n°.2, page 295. Expérience VII, Ayant déplacé le mercure du tube par le gaz alkalin retiré d'une partie du fel ammoniac fur trois parties de chaux mêlée avec un peu d'eau (1); ayant enfuite introduit À travers le mercure le charbon dans la capacité du tube, il fe fit tout de fuite une abforption rapide, la- quelle continua jufqu’à près de 8 pouces & 8 lignes, où le mercure de- meura flationnaire. $ Lemélidu de cet air étant examiné, il éteignit une bougie. Je n'ai pas manqué d'examiner l’abforption que Le charbon auroir opérée dans plufeurs airs viciés par différents procédés phlogiftiquants ; favoir l'air vicié par l’extinétion d’une bougie, par la vapeur du foufre, par un mé- 1) « Pour Qter tout foupçon que l’air ne fût pas humide, voici lappareil dont jé » me füuis fervi: J'ai misun récipient à la moitié 1 tube qui veñoit du matras pour faire » égoutter l’efpric du fel'ammoniac qui fe formoit, & ur autre cube partoit du récipient » dans le cylindre rempli de mercure ; enfin, j'ai exactement fuivi le procédé de Prieft- » ley (8). Voyez tom, $ , page 217, Expériences & Oblervations fur différentes ef- » péces d'air ». ” SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 299 lange de deux parties de limaille de fer avec une de foufre un peu hu- meété ; l'air vicié par la refpiration animale d'une fouris , d’un lapin, d’un pigeon , d’un moineau : & j'ai conftamment obfervé que l'abforprion n’a jamais excédé les 3 pouces & quelques lignes ; favoir, qu'elle a été à-peu- près égale à celle de l'air atmofphérique. Je ne dois pas omettre de faire obferver que les réfidus de tous ces différents airs phlogiftiqués font très- viciés encore. L’abforption opérée par le charbon dans l'air rendu méphitique par la putréfaction végétale a été plus confidérable que les précédentes: mais elle eft toujours en raifon de la plus ou moins grande décompofition que ces matièresnt fubie; favoir , felon la plus ou moins grande quantité d'air fixe qu eft développée : de façon que l'air vicié par une plante, qui ge" reftée dans l'appareil ou deux jours, donne par exemple une ab Orprion de 4 pouces, pendant que la même plante qui y a demeuré huit jours donne une abforption de 6 à 7 pouces. Je n’entreprendrai pas, pour le préfent , de donner l'explication de ces phénomènes furprenants , dont quelques-uns font en oppolition à la doc- trine reçue fur les gaz. J'ofe cependant me flatter d’être dans le bon chemin pour parvenir à réfoudre la queftion ; mais je ne me permettrai pas encore de hafarder mes conjectures , les réfervant pour un fecond Mémoire, lorfque j'aurai achevé un nombre d'expériences auxquelles je travaille actuellement. J’efpère, en attendant , que les Phyficiens ne me fauront pas mauvais gré de leur avoir préfenté quelques anneaux , quoique détachés, de l’ad- mirable chaîne des connoïflances humaines. Pour rapprocher fous un-même coup-d'œil les réfultats de ces expé- riences, j'ai arrangé le tableau ci-apres, . goo OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, TABLEAU Des différentes abforptions opérées par le Charbon ardent introduit æ travers le mercure dans les différens Airs & Jubflances aëriformes. < La hauteur des tubes au-deflus du niveau du mercure, étoit de 12 pouces. Abforption, Pouces. Lignes, PAR IGN (DENT Ues dette el Mois cthte lee Locle 5 ds 6 nil Méphitique ou Air fixe (r). ile #: | Alkalin, AU UE . . a 118..-18 Ci UEBUX Me RE VOS LE 2H ete ae ten 6.10% L Infaminable EME SECTE NE EE EE Extrait du précipité rouge. . 2 2 Déphlogiftiqué. { du, nitre ONU Se ie r de l'eau: {auto nemqie Par l'extin@tion d’une bougie. . . . . . . 3 8 Par la vapeur du foufre. MM es cent agite He Par un mélange de limaille & de foufre un peu : S umecté, SRE EN TONER l'ÉNTESS 6 Æirs phlogifliqués ; d'une] fouris.10 1,0 eme : 4 Parla refpiration } d’un lapin. . . . . ER” animale d'un pigeon, . . ATP d’un moineay, 31004 ; Pan 24 , (1) Lorfque je fäifois cette expérience avec des cubes de ro pouces, en me fervant des mêmes éharbons ,_ l’air fixe éroit entièrement abforbé, & le tube parfaitement rempli de mercure, EXPÉRIENCES Sur la vitrification de la Terre végetale & animale, mélée en différentes proportions avec des Chaux métalliques ; Par M. ACHARD. 1e. promis , dans un Mémoire fur les changements qu'éprouvent les terres mêlées avec Les chaux des métaux imparfaits & des demi-métaux, lorfqu'on Les expofe au feu de fufion , de donner , dans un Mémoire par- ticulier , # | SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 301 ticulier , le détail des expériences que j'ai faites en travaillant la terre des végétaux & des animaux par la voie sèche avec les chaux métalliques. C’eft ce travail qui fait le fujec du préfent Mémoire. Je tirai la terre animale, dont je fis ufage dans mes expériences, d’os de bœufs ; ils furent calcinés à blancheur, enfuite diffous dans de l'acide ni- ” treux , & cette folution fut précipitée bar de l'alkali fixe. Afin d'obtenir de la terre végétale, je réduilis en cendre une certaine uantité de bois de chêne; pour en emporter l’alkali & les autres fels, je tâchai de la lefliver: mais après lavoir lavée avec plus de deux cents feaux d’eau bouillante , je la trouvai encore fort alkaline , ce qui me fit perdre l'efpérance d'en féparer les fels par cette voie. Pour y parvenir plus vite, je La fis difloudre dans de l'acide nitreux, & je, précipitai cette fo= lution dans de l’alkali fixe. Wallérius rapporte , dansles Mémoires de l’Académie de Suède, les expériences qu'il a faites fur la terre de plufeurs fubftances végétales &c animales. Il n’en a féparéhles fels, après l'incinération , que par le lavage avec l’eau; & comme cette féparation ne peut fe faire de cette manière que fort imparfaitement, il eft probable que ce font les fels qui font reftés adhérents à ces terres, qui leur ont donné la propriété de fe vi- trifier par elles-mêmes fans radition: car la terre végétaie & animale, que j'ai féparée de la manière fufdite de tous les fels ave lefquels elle étoit unie , eft crès-réfractaire; & expofée feule au feu Le plus violent , elle n’é- prouve pas même le plus petit degré de fufñon. Les chaux métalliques dont j'ai fait ufage , ont été préparées de la ma- nière indiquée dans le Mémoire que j'ai cité. Afin d'éviter des répétitions & de rendre la comparaifon des expé- riences moins pénible, j'ai marqué leurs réfultats dans les deux Tables fuivantes, La première fait voir l'effet du feu fur la terre végétale mêlée avec des chaux métalliques, & la feconde indique quelles font les altérations que reçoit de la part du feu la terre animale mêlée avec des chaux métalliques. La première colonne indique les mélanges ; la feconde, la proportion entre la terre & la chaux métallique; la troifième fait voir fi le mélange a été altéré par le feu, & quels font les changemens qu'il a fubis; la quatrième indique la couleur que Le feu a donnée au mélange ; & Le cin- quième, la dureté qu'il a acquife. Tome XXII, Part. 1,1783. AVRIL, Qq 302 TABLE PREMIERE. ÎLElange. |Proporti. | Réfrlrar. | Couleur. | Dureré Maffe qui éroit entrée parfai- tement en fufion: elle avoit N oire dansla frac- Terre végétale ,|r partie. |beaucoup de polidans la frac- bye G a vert Donne des étincel- Chaux de fer, |? partie.|tion ; {a fürface avoit un bril- = les avec l'acier lant AbLDIE au brillant mé- k tallique. Donne, beaucoup Terre végétale ,|r partie.iqui avoit dans la fraction Noire. d’étincelles avec Chaux de fer, |3 parties. beaucoup de poli ; fa furface Pacier. n’étoit pas polie. FREE ——— , Mafle qui étoir parfaitement se Terre végétale 3 parties. entrée en fufñon, & qui avoit Noire Donne des étincel- Chaux de! fer, Îr partie. [un très-beau poli dans la frac- 1 les avec l'acier. tion. . Mañe qui avoit peu de poli ; elle étoit entrée parfaitement #. Terre végérale >| partie. en fufion, & avoit percé le Rouge. Donne desétincel- Chaux de cuivre, |r partie. |creufet , se lequel il fe trouva un petit bouton de cui- vre revivihé. en nel creer meme Mafle qui étoitentrée parfaite- ment en fufion ; glle avoirdans partie. [la fraétion un beau pal ; fa fur- 3 parties. face étoir inégale ; il e trouva au fond du creufer un bouton Terre végétale ,|r Chaux dun cuivre, = - |Maffe parfaitement fondue , lde cuivre. Terre végétale | ,3 parties. | Maife parfaitement fondue, Chaux de cuivre ; ni païtie.| qui n’avoir pas de poli. en — Male qui étoir entrée com- plettement en fufon; elle Terre végétale ,|1 partie. | n'avoit pas de poli: fa far- Chaux de Plomb, 1 partie.|face étoig inégale, & brilloit comme fielleé étoic compofée de petits cryftaux. Terre végétale >|1 partie. V Chauxde plomb, |3 parties. | AE Terre vépétale ,|3 parties. Vers Chaux de plombs partic. Mañle parfaitement fondue, Terre végétale ,|T partie. dont une partie étoit opaque, Chaux d’étain ,|1 partie. |tandis que l’autre avoit formé un verre tran{parent, Lan Jaune dans la frac- tion, grife à la fur- face. Grife & rouge. Jaune. Jaune. Jaune verdatre. Grisâtre. OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, les-avec Pacier. ———————— Donnedesétincel- les avec l'acier. Donnedes étincel- les avec l'acier. ————— Donne des étincel- les avêc l'acier. onne des étincel- les avec l’acier. [D Donne beaucoup d’érincelles avec Pacier. Donne desérincel- les avec l’acier, \ SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 303 ] [" Dureré. [Le verre jaune ,| , ne " « | : : la croûte qui ] Donne des ctincel e SA couvroit blanche, | 15 avée l'acier. Couleurs Mélange. a Proporti.| Réfulrar. _ Terre végétale ,1 partie.| Verre couvert d’une croûte {Chaux d’&ain ,|3 parties. opaques ———_— me Male vitrifiée , poreufe, dont lé i : D es étincel Terre végétale »]3 PATUES. eo utes les parties n’étoient pas Verte. onne des cri as Chaux d’étain, |1 partie. VRREEE les avec l'acier. ER ETES Ee us hi Terre végérale , 1 parti d v Done des érincel Chaux d’antimoi.|r partie. eue Jaune. les àvec l'acier. Le verre jaune 4 À ", [Donnedes étin foncé , la croûte cel Terre végétale ,|r partie. Verre couvert d’une croûte ’antimoi i les avec l’aci Chaux d’antimoi,|3 parties. opaque. blañche, avec l’acier. Terre végétale, |3 parties. v J F Donne desérincel- Chaux d’antimoi.|1 partie. ee aune verdatre. |les avec l'acier. Donne des étincel- EE Terre végétale ,|1 partie. Chaux de bifinurh, [x partie. Mere Jaune verdätre. | {es avec l'acier. Terre végétale , [1 paitie.! Verre qui avoit attaqué le Jaune tirant fur le| Donnedesétincel. Chaux de bifmuth,|3 parties. creufet. verd, les avec Pacier. nr k [Donne beaucoup Terre végétale ,|3 parties. Verre, Jaune. d’étincelles avec Chaux debifimfuth,|t partie. (acier. SERRE TIRE ENS et EP à Be LUE (nie aa 9 fe an Ra R RUES Terte végétale ,|1 partie. v Jaune tirant fur le! Donnedes “tiacel- Chaux de zinc,it partie. LES verd. les avec l'acier. ————— | ——— Maffe parfaitement fondue, D b anne beaucoup très-beau poli & beaucoup Blanche, d’étincelles avec |d’éclar. Fa |lacier. \, Terre végétale ,|r partie.|tranfparente , qui avoir un Chaux de zinc, |3 parties. a. TABLES, SEC O:NMBE; . | ” Mélange. |Proporii.| Réfulrar. | “Couleur. | Dureré. iTerre animale ,r partie.| Maffe qui n’avoit pas éprou- à F Chaux de fer , fr partie.| vé la moindre fufon. Noire, , Dure. | ——— me [Noire à la fofion, jaune à la partie Dure. inférieure. Maffe qui n’avoit pas éprouvé de fufon. Terre animale ,|3 parties. Chaux de fer, |r partie. 5 Maffe qui avoit éprouvé une Terre animale ,[r pattie.|fufion parfaite, & qui avoi No: Donnedes érincel- Chaux de fer, |3 parties. |percé le creu(er; fa furfa Hs les avec l'acier. ? étoit cryftallifée. Terre animaie ,[1 partie.| Maffe qui n’avoir pas éprouvé Gil Ar Chaux de cuivre ,jr partie. | - le moindre degré de fufion. res SAROATE: RE — Malle qui avoit éprouvé une entière fufon ; le creufer étoit un peu attaqué; il s’y trouva au fond quelques petits bou- tons de cuivre. Tome XXII, Part TL, 1783 AVRIL. Qgq2 Terre animale ;|f partie. Chaux de cnivre ;|3'parties. 304 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, LEE Se A ER ET CO RE 7 - = Mélange. ” |Proporii.| Réfilrar. | Cour. | Dureré. Terre animale ,|3 parties.|Maîfe qui n’avoit pas éprou- Grife Facile à pulvérifer g . . 1 à . n Chaux de cuivre,|r partie. vé de fufon. 6 entre les doigts. LR te ARR RE dfaeres Maffe qui avoit éprouvé une | Terre animale ,[r partie.|entière fufion ; elle étoirextré- Grife Donne des étincel- Chaux de plomb ,|r partie |mement poreufe & entière- les avec l'acier. RENE opaque. n Terte anifhale ,[£ partie. |Mafle qui n’avoi. pas éprou- CR Facile à écrafer Chaux de plomb ,|3 parties. vé de füufon. entre les doigts. Tenue animale, |3 parties. Maffe qui n’avoit pas éprouvé mois Facile à pulvérifer : fanché. Chaux deplomb,|r partie: de fufon. Maffe qui éroitentièrementen- 1 partic.|trécen fufion ; fa furface étoit 1 partie. |inégale, & n’avoit pas de poli. Terre animale. Chaux d’étain, Maffe quiavoit éprouvé un pe- tit commencement de fufion ; fes parties n'étoient pas tou- tes réunies. 3 parties. L partie. Terre animale, Chaux d'éain, me Maffe qui avoit fubi une par- faite fufion; fa furface étoir inégale, & n’avoit point de Terre animale, I partie. Chaux d’érain, 3 parties. Maïfe qui n’avoit pas éprouvé de fufion ; fi ce n’eft dans les] endroits où elle touchoit le fond du creufet, auquel un petitcomme nent de fufion la rendoit ali adhérente. Terre animale, 1 partie. Chaux de bifmuth, 1 partie. Maffe vitrifiée, demi-tranfpa- rente, polie à la furface & dans la fraétion ; elle avoit diffous une partie du creufer. Terre animale, à 1 parte, Chaux de zinc, 1 partic. Male qui avoir éprouvé les premiers degrés de la fañon , 3 parties. [mais d les parties n'éroient 1 partie.|pas ta éunies; elle avoit beauco@p agi fur le creufetaux endroits où elle le rouchoit. Terre animale, Chaux de zinc, a ——_— |Maffe qui avoit éprouvé une x partie.[fufñon parfaie, polie à la 3 parties. Müurface, opaque ; elle avoit détruit le: creufer. Mafle qui avoit éprouvé une 1 partie. lenrière fifion ;elle n'avoit pas x partie.|de poli; fa furface éroit iné- gale, & elle étoit fort poreufe. Terre animale, Chaux de ziñc, 2 ——— Terre animale, Chaux d’antimoi. ER EE CR EE ER RS Blanche à la für- poli, non plus que fa fration.|tion. Blanche à la fur- face, verd faledans la frattion. Blanche. face , verd foncé &t fale dans la frac- Blanche. : = | Maïle qui avoit éprouvé les Terre animale ,|3 parties. |! q de £ f Blanche. Chaux de bifmuth,|r partie | P'émiers degrés de füfions D ANR a = : Terre animale ,|r partie. Maffe LR EUENS CRETE les Blanche. Chaux de bifinuth,|3 parties.} Premiers degrés de fufon. Jaune, tirant {ur le gris. Blanche. Grile. Gris verdâtre. entre les doigts. Donne desétincel- les avec lacier. Donne desétincel- les avec l’acier. Donne des étincel. les'avec l'acier. Facile à pulvérifer les doigts. Donredes étincel- les avec l'acier. Donnedes étincel- les avec l’acier! 7 Donne desétincel- les avec l'acier. Donnedes étincel- les avec Pacier, Donne beaucoup d’étincelles ‘avec l'acier. Donne des érincel- les avec l'acier. ee en en en la ferrant entreb SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 305 Mélange. |Proporti.| R éfulrar. | Couleur. | Dureré, © — ——— — © ——— ——— n ñ Terre animale ,|3 parties.| Maffe qui n’avoit pas éprouvé Donne des érincel- Sr PP HEURE ; Blanche Due Chaux d’antimoi.|1 partie. de fufon, : les avec l’acier. mn RUN EE Re QE UT 1 Male virrifiée, demi-tranfpa- rente , qui formoit dans le creufet une cryftallifation ir- régulière. Cete mafle, quoi- que parfaitement fondue, for- moit. des efpèces de ramifica- tions. Il fe peut que certe ap- parence de cryitallifation ait| , Verdâtre. été produite par la ceflation trop prompte du feu, qui a empêché que les parties, qui peut-être bouillonnsient , n'aient pu fe rapprocher , & font tout d’un coup devenues folides. Donnedes étincel- les avec l’acier, * Terre animale ,{1 partie Chaux d’antimoi.|} parties. es me Tous ces mélanges ont été expofés au feu dans un fourneau où l’on fait la porcelaine ; ils ont par conféquent éprouvé la chaleur néceffaire pour les mettre en fufñon dans le cas où ils font de nature à pouvoir de- venir fluides par le degré de chaleur qu'on peut produire au moyen des fourneaux. r En comparant Les réfultats marqués dans la première Table à ceux que j'ai marqués dans la feconde Table du Mémoire (1)) que j'ai citéen commen- çant, l'on fe convaincra aifément qu'il fe trouve une twès-grande analogie entre la terre des végétaux & la terre calcaire. La comparaifon de la première & de la feconde Table du préfent Mémoire , prouve que la terre animale eft entièrement différente de la terre des végétaux, & par conféquent aufli de la terre calcaire, puifqu'elle produit dans la vitrifica- tion des effets tout-à-fait différents; ce qui fert à augmenter le nômbre des reuves que j'ai données de la différence de ces terres, dans mon Mémoire Fe l'examen des propriétés de la terre des végétaux & des animaux, Cette différence ne peut pas provenir de l'acide phofphorique combiné avec la terre des os, puifque cet acide en a été féparé par les opérations qui ont #ervi à obtenir la terre animale dans fon plus grand degré de pureté ; & à lagéparer des parties hétérogènes auxquelles elle étoit unie, (1) Voyez Février , page 185. (EE 306 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, SU ET RUES DES EXTRAITS DU PORTE-FEUILLE De M. l'Abbé DIicQUEMARE, Correfpondant de l Académie des Sciences de Paris, de plufieurs Sociétés & Académies Royales de France , Efpagne, Allemagne, & Correfpondant de l'Académie Royale de Marine. corps me dé AN Ed Enfant de 21 ans. R ICHARD-MARTIN POUPEL a ététransféré de la Paroifle d'Octe- ville , Gouvernement du Havre, où il eft né le 30 Juillet 1767 , à celle de Heuqueville , à la Saint-Michel de la même année. Il eft fils de feu Nicolas Poupel & de Geneviève Bernard, âgée maintenant de près de $5 ans; il eft entré avec fa mère à l'Hôpital de cette Ville, le 28 Février 1783 , après avoir demeurés 22 ans à Heuqueville. © Quoiqu'âgé de 21 ans, Martin n’a de hauteur que 2 pieds 4 pou- - ces 3 lignes; fa tête, qui a toujours été demi-chauve , eft, par rapport au corps , d'une grandeur difproportionnée , & plutôt formée comme celle d'un homme que comme celle d’un enfant. (Voyez la figure 2 , planche I°%, ). Elle a quelque difformité à la jonction fupérieure du coronal & à celle de l’occipital ; elle eft aufli un peu alongée. Du menton au fommet il y a 8 pouces, Le front ( voyez la figure 3) eft petit, ridé &c légèrement couvert de poil brun; les cheveux qui ne laiffent pas d’être longs, font de la même couleur, ainfi que les cils & les fourcils: ces derniers font mal formés. Les yeux font d’un gris bleuâtre & un peu trop écartés l’un de l'autre; les paupières fupérieures un peu recouvertes par le milieu , le deffüus des inférieures gonflé; l'origine du nez eñfoncée ; le nez gros, large , formé à-peu-près comme celui des Nègres dû Congo ; la bouche fort grande , les lèvres groffes, fur-rout l’inférieure ; la Me tieure , les joues & le menton, font couverts d’un poil follet brun: c'eft, je crois, la feule marque de puberté qu'on remarque fur tout le corps, fi même c'en eft une , car les poils du front jettent quelque équivoque ; cependant ceux qu'on pourroit prendre pour de la barbe font nouvellement pouffés. Le menton eft un peu court, les joues fon: bien , les oreilles très- grandes , 2 pouces $ lignes de longueur & une largeur proportionnée. II ne manque qu'une dent incifive fupérieure. Les premières dents ont été oi f SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 307: plus long-temps à poufler & à tomber qu'aux autres enfants. La langue paroît être un peu trop grande ; elle couvre les dents inférieures pendant la maftication , ce qui peut influer fur Ja digeftion, La peau, particulie- rement celle du vifage , eft bife, & on apperçoit fur Le front & fur les joues beaucoup de ces petites tâches qu’on nomme grains de vefce. Le tronc eft très-difforme, boffu parderrière & pardevant, les vertèbres dorfales & partie de celles des lombes étant confidérablement rentrées. Le col eft très-court ; les omoplates dérangées reflortent beaucoup , & les vertèbres du col font très-courbées en dedans. La poitrine eft élevée, le ventre gros , le nombril pendant. Ce tronc n’étant pas facile à mefurer exactement, Les dimenfions fuivantes fufront. Du bas des omoplates au- devant de la poitrine , 7 pouces 2 lignes; d'un côté à l’autre, 6 pouces ; de laiflelle au bas du tronc pardevant, 9 pouces. Les parties de la génération font beaucoup plus ter que nele com- porteroit la hauteur du corps; elles auroient plus de proportion avec la tête, les oreilles , les pieds, &c. . Les extrémités fupérieures n’ont pas les articulations auñli libres qu’elles devroient l'être , ce qui provient en païtie de l'ufage trop long du chariot à ufage d'enfants. Le bras eftun peu menu, & a 6 pouces de long. L’avant- bras eft plus nourri, mieux formé, & a depuis le coude jufqu'au bout des doigts 8 pouces $ lignes. Les mains font un peu larges, très-ridées, mème à gros plis ; fillonnées & marquées de points, comme dans les per- fonnes d’un âge avancé : cependant on n’y remarque point de poils. Les extrémités inférieures , quoiqu'un peu mieux que les fupérieures , ont aufli des défauts. Du bas du tronc au genou, il y a $ pouces. Le genou droit eft plus gros que l’autre , & vers le haut du tibia droit, un peu en dedans, on fent au tat, on voit même un peu, une production offeufe ou cartilagineufe , grofle comme une petite noiferte. Du genou à la plante du pied , on mefure 8 pouces 6 lignes. Les pieds font gros & ont $ pouces 4 lignes de longueur. La chauflure qui fert à cer enfant eft celle d’un enfant de cinq ans. Les malléoles, fur-tout l'externe , font fort grofles , ce qui fait que le dehors du pied touche. à terre avant la partie intérieure, ce qui eft encore dû , en partie, au trop long ufage du chariot. Le fujet ne peut marcher qu'on ne le tienne par la main, mais alors il marche affez bien. La voix de cetenfant eft un peu plus mâle que celle d'un enfant auf petit ET ven Il ne dit prefque que des mots, oui, non, un coco , adieu , Je neveux pas, je ne peux pas, &c. Il contrefait le chien, le chat , le mouton; montre du doigt les chofes qu'il connoît, loxfqu'on les lui demande ; rit, pleure , a ordinairement l'air trifte , parle peu & comme les enfans ; paroît entendre plus qu'il ne parle , même lorfqu'on s'exprime métaphoriquement, Cependant il femble n'être occupé de rien, fi ce n’eft de prendre & laifler quelque chofe, de fe bercer, &c, Enfin on peut le 308 OBSERPATIONS SUR LA PHYSIQUE, regarder comme un enfant de trois ans, à moins qu'en l'étudiant plus long-temps , on ne parvienne à le mieux connoître. Sa fanté paroit foible ; fa refpiration eft gênée ; fon pouls fi foible, qu'à peine peut-on le fentir: il eft aufli fréquent que celui des enfans. Sa mère, à laquelle j'ai parlé, m'a dit qu'il naquit fi foible , qu’il fembloit n'avoir point d'os , fur-tout d'épine, & n'étoit cependant pas boflu ; que jufqu'à l'âge de dix ans , il s'eft plaint de maux d’eftomac & de coliques. Cecte femme , qui eft aflez bien , n’a eu aucuns enfans mal faits; deux filles & un garçon plus âgés que Martin , & deux filles plus jeunes vivent & fe portent bien. Le garçon a 24 ans, eft blond, bien fait, mais pref- que imberbe, Je lui ai parlé plufieurs fois de fon frère; fes dépoñtions s'accordent parfaitement avec celles de fa mère & avec celles de plufieurs anciens du Village de Heuqueville, auxquels j'ai fait des queftions rela- tives à l'enfant. J'ai deffiné cet enfant le 6 de ce mois ( Mars 1783 ), & lorfque je préfentai les deffins à l'original , il leur fit une petite fête. Peut-être n'étoit« ce que comme à des Jou-Joux. De tous les phénomènes que la Nature préfente, eneft-il quelqu'un plus digne des méditations du Philofophe, que ceux de l’économie animale confidérée dans l’homme ? Mais aufli quel arrondiffement de connoiffances n'exiperoit pas l’explication même des plus DEN ; de ceux qui, comme celui dont nous nous occupons , fembient n’offrir aucune complication: pour le bien fentir, il faudroit connoître profondément l'homme phyf- ue & l’homme moral, avoir recueilli & contemplé les variétés, les acci- PS les conformations extraordinaires, les monftruofités ; en un mor , & fi on peut parler ainfi, les écarts de la Nature. Quoique je fente ma foibleffe , une enfance perpétuelle , au moins une enfance de près de 22 ans , Ma paru un phénomène aflez rare, aflez intéreflant, pour ne le pas laïffer ignorer. Je regrette beaucoup de n’avoir point été à portée d'en fuivre les progrès, quoiqu’ils fuffent peut-être moins importants que l'état actuel, & que ceux qui pourront fuivre. Peut-être aufli touchons-nous au moment où les plus intéreffans vont s’opérer. A l’aide de quelques évolu- tions dans le phyfique , & fur-tout dans cet organe intérieur, point où fe réuniflent ceux des fens , l'ame pourra dévoiler un jour fes facultés. Cette image de lEtre fuprème , cet être immatériel , inaltérable , immortel , qui eft le même dans l'enfant, l'adulte, le vieillard décrépit, le génie fupérieur & l’imbécille , le fou & l’homme réfléchi ; cet Etre qui femble aux yeux du vulgaire fe perfectionner fucceflivement & en même temps que nos organes , & fe détériorer avec eux , eft ici dans une forte de con- trainte, qui paroît entr’autres , lorfque l'enfant , follicité vivement à faire ou à dire quelque chofe , répond triftement & d’une manière peinée, Je me peux pas. On ne peut lui entendre prononcer ces mots , fans reffentir quel- que peine, Je SUR LHIST. NATURELLE ET LES ARTS. 309 Je me propofe de fuivre les développemens de cet individu fingulier , sil en éprouve , & me ferai un devoir de Les communiquer. LETTRE De M. Le Cuevazie DE LAMANON A M. l'Abbé Moncez, Auteur du Journal de Phyfique, Relative à l'Ornitholithe de Montmartre, décrit dans le Cahier du mois de Mars 1782. U N de mes amis vient, Monfieur, de me faire pafler l'extrait d’un article des Nouvelles de la République des Lettres & des Arts, par M. de la Blancherie (1) où j'apprends que des Naturaliftes, que M. de la Blan- cherie ne nomme pas, ont cru voir un amas de plantes , au lieu d’un oifeau foflile, dans l'ornitholithe que j'ai décrit dans votre Journal (2). Ces Naturaliftes me paroiflent devoir abandonner leur opinion , qu’une infpec- tion mornentanée a fait naître , dès qu'ils obferveront avec plus d'attention ce précieux foflile ;.& s'ils veulent bien, en l'ayant fous Les yeux, lire le Mémoire que j'ai fait à ce fujet, & examiner la figure que j'en ai donnée, ils feront convaincus de l'exactitude de ma defcription. Permettez en attendant, Monfeur , que je tranfcrive ici la critique inférée dans la feuille de M. de la Blancherie , en y ajoutant quelques obfervations. « Hifloire naturelle, 30. On a expofé deux morceaux de gypfe, repréfen- » tant l’un un oïfeau pétrifié , dont la partie qui paroît eft en, bas relief, » l’autre le creux de cette même partie ». Obfervation. Dans la partie qui porte l'empreinte du relief, il y a non- feulement un creux , mais eâcore une certaine quantité de la fubftance même de l'oifeau:on y voit fur-tout la moitié. d'un os qui s'eft partagé dans Je fens de fon épaiffeur, lorfqu’on a fendu la pierre ; & quoiqu'il y ait un an que je n'ai pas vu ce foflile, je m'en fouviens très-bien. 5) 1783 ,.n°. 7, du Mercredi 12 Février, page 39, article 30. 2) Defcriprion de divers fofféles rrouvés à Monrmartre , prés Paris , & Vues géné rales für l'origine des”"pierres gvpfeufes, Journ. de Phyf. 1782 , au mois de Mars. Tome. XXII, Part. I, 1783. 4 VR IL, Rx 510 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, æ Ce morceau ainfi annoncé dans le Journal de Phyfique du mois de » Mars dernier, a dû piquer la curiofité des Naturaliftes. En effet, plu: > fieurs fe font attachés à confidérer cette pétrification, qu'on pourroit » dire unique, puifque ce qui eft connu jufqw’à ce jour des fubftances ani- » males incruftées, n'eft en effet rien moins qu'une véritable pétrification , >» fi on entend fous ce nom des formes confervées & vraiment imprégnées » d’une fubftance minérale, qui ont pris la place des fubftances enfouies , » ou qui, en fe combinant avec elles , leur aient donné les qualités miné- » rales, fans cependant intervertir le type ou la forme primordiale ». Obfervation. me femble, Monfieur, queles Critiques fe trompent, &'que cette pétrification n’eft vraiment curieufe , que par la raifon qu’on n'avoit pas eu jufqu’à préfent de preuve complerte de l'exiftence des orni- tholithes. Le mot de pérrification a chez les Naturaliftes deux. acceptions différen- tes. Dans le fens le plus général, on donne ce nom à tout corps qui in- dique le féjour dans laiterre d'une fubftance animale ou végétale ; c'Eft d’après cette notion que Wallérius met fous le titre de PETRIFICATA les végétaux & les dépouilles d’atiimaux fofliles , naturelles ou altérées, leurs noyaux ou leurs empreintes, Bourguet dans fon Traité des pétrifications , M. Valmont de Bomare dans fa Minéralogie , Gefner dans fon livre De petrificatis , Bertrand dans fon Diétidnnaire , & en général rousles Auteurs qui ont traité des fubftances organifées fofliles , fe font exprimés de même ; & c’eft en partie dans ce fens que j'ai nommé orxicholithe Voifeau trouvé à la butte Montmartre, entre deux couches de pierres gypfeufes & à plus de 20 toifes du fommer, - Dans l’acception la plus-ftriéte, on donne le nom de pétrification à: des corps organifés , changés en pierre en tout où en partie , fans que leur forme primordiale foit altérée au point de ne pouvoir plus la recon- noître; dans ce fens encore, l’oifeau foflile de Montmartre peut être nommé ornicholithe , ou oifeau pétrifié, puifque la pierre qui lentouroit a été imprégnée du bitume qui s'eft formé par la décompofition des parties molles, & que la trace que çe bitume a laïffée , conferve la forme d’oifeau : d’ailleurs les os ne font pas tout-à-fait dans leur état naturel , ayant fubi quelque altération par leur féjour dans la pierre gypfeufe. En prenant le mot de pétrification dans ce dernier fens, qui me paroît être celui des Critiques , ils ne devroient pas dire qu'une pareille pétrifica- tion feroit unique, car il n’y a rien de fi commun, Les ourfins qu'on trouve dans la craie de Meudon , ceux qui font renfermés dans une efpèce de molaffe à Iffy , les iéthyolithes de Montmartre ( dont le genre de pétrification a tant de rapport avec celui de l'ornitholithe ) , & la plus grande partie des poiffons & coquilles qu'on rencontre par-tout , font dans cet état. | C'eft à vous, Monfieur, à nous expliquer comment s'opère le méca- nifme de la pétrification animale, en appliquant aux dépouilles des ani- SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 311 maux la belle théorie que vous avez mife au jour dans votre Mémoire fur la pétrification des bois (r). IL vous eft réfervé de fubftituer des idées claires & précifes à tout ce qu'on débite fur les gluten, Les fucs cryftallins & lapidifiques , & fur les formes imprégnées de fubitance. : « Qu'ont-ils cru voirici, ces Naturaliftes ? une mafle agoglomérée de » plantes du genre des capillaires ou fougères , dont les tiges confervenc >» encore le tiflu cortical , la portion pulpeufe & le médicullium ; tous » reconnoiffables , le premier à fa couleur brune , le fecond à fa confif- » tancé médullaire, & le troilième à fon canal uniforme, & fans afpérités # apparentes qui caractérifent le méditullium offeux ». Obfervation. Les Critiques prennent pour des tiges de véritables 05, Comment les méconnoitre, puifqu'ils ont la même couleur jaunâtre, le même tiflu, la même dureté que tous les offemens qu'on rencontre dans les pierres gypfeufes de l'Ifle de France? Ils fe comportent de la même façon dans les acides minéraux, donnent le même rélidu-; enfin ils font entiérement femblables à ceux que M. Rouelle avoit autrefois trouvés à Montmartre, & qu'il avoie reconnus pour des: offemens d'oifeaux. Je ne conçois pas comment on a pu regarder ceux ci comme des tiges de plantes: aufli n’a-t-on pas fu s'il falloit rapporter à des capillaires ou à des fougères ces prétendues tiges ; quoique srès-reconnoiffables. D'ailleurs on n’a jamais vu dans le cœur d’une pierre des tiges de ‘plantes confervant encore la portion pulpeufz; encore moins a-t-on pu reconnoïtre le tifflu cortical à la fimple couleur. On n’a qu'à examiner fa nature intérieure, & les précendues tiges feront reconnues pour de véritables os. Je ne faurois non plus trouver à la portion pulpeufe d'une plante, une confiitance médullaire ; ni voir des afpérités au méditullium d2s offemens d’oifeaux, « Quant à l’arrangement fortuit de ces tiges, de manière à préfenter » l'illufion d'un oifeau , ils ont obfervé qu'aucun oifeau n’a les commif- > fures du bec tranchées à angle aigu , mais toujours par: une .forte » d'amoïtiflement qui ne va jamais au-dela.de la perpendiculaire à l'orbite "a del'œil ; au lieu que dans la prétendue, pétrification ornithologique, ce > bec n'a ni pointes, mi proéminences!, ni trous nazaux , ni commiflures » régulières. Ajoutez à cela que le prétendu corps de l'oifeau pétrifié » leur paroît une maffe informe, dans laquelle la fimple vue , ou du moins ».une loupe ordinaire , trouveroit des traces de tiges tranfverfales , qu’on, » pe peut aflimiler à aucun des offemens compoñfant la charpente d’un » oifeau quelconque ; en forte que, fans vouloir fronder l'imagination de » ceux-qui ont cru voir dans ce gyple un oifeau pétrifé , on peut croire > que le hazard a tracé dans un paquet detigés de fougères ou de capil- > Jaires, une de ces reflemblances fpécieufes, analogue à celle que les » nuages diverfement amoncelés. préfentenc à.l'obfervateur , qui trouve (1) Journ. de Phyf. 1785, tom. XVIND, pag. 255. Tome XXII, Part. 1,1783. AR I L, Rr 2 312 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, » l’occafion de flatter fon imagination, en réalifant ou rendant corrects » des deflins fantaftiques ». Obfervation. 1 me fera facile ,; Monfieur , de répondre à toutes ces objections , qui n'ont d'autre fondement qu'une trop légère obfervation du foffile ; & quelques principes erronés d'anatomie comparée, Je me füuis plu fouvent à examiner dans les divers animaux la pofition des yeux relativement à l'ouverture de la bouche , & j'ai vu qu'en dé- pouillant la têre d’un homme , d'un quadrupède, ou d'un oifeau, de toutes les chairs qui la couvrent , on trouve les cavités des yeux toujours placées de façon que la perpendiculaire tirée du centre de ces cavités , rencontre les mâchoires ou le bec. Le centre des yeux eft donc toujours plus près de l'extrémité du mufeau Ou du bec , ou de la perçendiculaire tirée à cette extrémité, que les articulations qui réuniflent les deux mà- choires. Dans l’ornitholithe de Montmartre ;'les parties molles ont été diffoutes comme je l'ai dit dans mon Mémoire. Ainf, quelle que füc l'efpèce de cet oïfeau foffile , Vorbite de l'œil doit être placée telle qu'on le voir & qu'elle a été deflinée. IL feroit contre nature que les deux man- dibules , en fe prolongeant, n’euflent pas rencontré la perpendiculaire tirée du centre de l'orbite de l'œil ou du centre de fa cavité. Les chairs qui recouvrent les mâchoires des quadrupèdes & une partie du bec des oïfeaux , forment ce qu'on appelle la bouche, dont les com- miflures font plus ou moins éloignées, felon les efpèces , de la pointe du bec ou de l'extrémité du mufeau. Dans l’ornitholithe de Montmartre on n'a pas dû appercevoir de commiffure , parce que le bec y eft dépouillé de fa chair; & ce qu'on prenoit pour la place de la commiflure , paroif- foit aigu, parce que dans Le fquelette d’une tête d’oifeau , les deux mandi- dules forment entrelles un angle d'autant plus aigu , que le bec eft moins ouvert, à En général la poftion des yeux dans les différens animaux , a le” plus grand rapport avec la manière dont ils faififfent les objets qui leur fervent d’alimens. Dans les tigres, les panthères , les requins , &c. la bouche rencontre les perpendiculaires tirées de l'orbite destyeux ; ilen eft autre- ment dans la chèvre, le cheval & la plus grande partie des poiffons. Dans Fhomme , la ligne tirée’du centre des yeux aux coins de la bouche , doit faire avec la bouche un angle d’environ* 100 degrés. Plus cèt angle diminue , plus la bouche devient difforme par fa trop grande, largeur ; tel eft le cas des boffus, qui ont ordinairement la bouche trop fendue. Permi les oifeaux ,il y en a beaucoup qui ont les yeux au-delà des coins de la bouche , comme la bécafle, le râle-d’'eau, le pigeon: mais il en exifte dont les coins extérieurs des yeux font plus près de la pointe du bec que les coins de la bouche ; tels font l'oie de Roland, le corbeau de nuit » & fur-rout le cormoran, Dans ceux-ci la commiffure fe trouve Ph. [4 SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 313 bien au-delà de la perpendiculaire à l'orbite de l'œil; ain, de quelque côté qu'on l’envifage , la pofition de l'œil dans lornitholithe de Montmartre n'a rien que de fort ordinaire. ; Je ne faurois donc voir dans ce foflile ,avec les Naturaliftes anonymes , cités par M. de la Blancheris , une mafle de plantes, mais bien une pétrifi- cation ornithologique de la plus belle confervation. On y diftingue, comme je l'ai die dans mon Mémoire cité , le bec, la tête, une partie des os , dans un état prefque naturel ; les traces de toutes les plumes de la queue, &c. &c, Les parties molles,en fe décompofant, ont pénétré dans la pierre, & y ont formé quelques dendrites confufes qui ont pu tromper les Critiques, Pendant plus d’un mois que ce foflile a refté chez moi à Paris, plufieurs Naturaliftes qui s'y connoïffent, l'ont vu & reconnu pour un oifeau pétrifié; tels entr'autres MM. Adanfon , le Baron de Servières , la Métherie & Berniard. M. Darcet qui me l’avoit remis, n’a jamais douté que ce ne füt un ornitholithe , non plus que MM. de Condorcet, Mongez J'ainé, Dutillet, Pelletier, d’Antic, vous, Monfieur, & en général tous ceux qui afliftoient l’année dernière au cours de Chymie de M. Darcet, & tous les Carriers de Montmartre, Je fuis , &c. A Sallon-de: Crau en Provence , le 2 Mars 1783. EC DIET MARNE" SNS D'Ù !.B'A RO NAPDSES PIE TRI CH, Secrétaire Général des Suifles & Grifons, AM MONGEZ le jeune, Auteur. du Journal de Phyfique ; # Sur la Mine d'Allemond en Dauphiné, Le me paroîc intéreffant , Monfieur , d'afleoir les idées des Savans fur la nature de la mine d’or de la Gardette en Dauphiné, & fur les cobalts des mines des Chalanches , près d’'Allemond , dans la même Province. Voici quelques détails fur ces objets, que vous m'obligerez d'inférer dans votre Journal. À Il exifte, Monfieur , à la Gardette , un filon principal, très-bien réglé, très-bien encaiffé, découvert & vifble à la furface de la montagne , dans une continuité de plus de 1 5o toifes de longueur , qui çoupe les couches du rocher dans une direétien principale de 7 heures # de la kouflole , 514 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ayant une inclinaifon méridionale de 76°. 30". Sa gangue eft du quart , ayant depuis deux pouces jufqu'à deux pieds d'épaifleur, & cette gangue renferme des pyrites martiales & cuivreufes, de la mine d'argent & de cuivre grife & de la galène, tenant quelques onces d’argent au quintal ; plus un indice d’or; l'or natif s'y trouve en paillettes , en lames, en filets, en ramifications , au milieu du quartz le plus dur, ou dans la galène , fouvent aufli dans des cavités où il eft accompagné d’ochre martial, mais jamais en pepites. La plus grande partie des pyrites cuivreufes & martiales des Alpes dau- phinoifes, que M. Schreiber , ( Directeur des mines d’All:mond, auquel appartiennent les détails précédens ), a eflayées , donnent des indices d’or. Plufieurs perfonnes ont eu grande opinion des cobalts d’Allemond ;ona étu même qu'on les y jettoit dans les Halles au rebut. Mais M. Schreiber vous aura dit, pendant votre féjouren Dauphiné, qu'il n'exifte point de filon de cobalt pur aux Chalanches; le cobalt ne s’y trouve qu'accidentel- lement : il y eft prefque toujours accompagné d'argent, foit natif, fait nrinéralifé , & dans ce cas on en extrait l'argent. Sur cent quintaux de minérai on trouve à peine vingt livres de cobalt put & propre à donner du fafre ; & depuis cinq ans que M. Schreiber eft Directeur des mines, iln’eft pas parvenu à en ramafler deux quintaux de cette nature. M. Binelly, ancien Directeur de ces mines , n’avoit pas oublié Les cobalts ‘d’Allemond : il exifte des procès-verbaux d’effais faits à la manufacture de Sèvre, du temps que la mine étoit au Roi; ils conftatent que les cobalts d’Allemond étoient de mauvaile qualité , raifon quia empêché l'Adminif- tration de MBNstEUR de rechercher le paiement de plufieurs quintaux de pareille mine vendus ci-devant à des Genevois. Si ce que l’on nomme communénient mine de cobalt d’Allemond n'étoit fouillé que par un trop grand mêlange de fer , on auroit'cherché à-en faire ufage. M, Gerhard de Berlin nous apprend qu’on peut tirer parti des cobalrs de cette nature (1): mais, à la petite quantité près de bon cobalt que M. Schreiber a précieufement raffemblée, la plupart de ces prérendues mines de cobalt d'Allemond font, d’après les expériences de M. Baumé, plurôt de la chaux de nikel qu'un cobalr. Celui-ci y entre même dans une fi petite proportion , qu'on peut à peine en obtenir de l'encre de fympathie , & la petite quantité de bleu qu'il donne eft des plus pales. Ontrouve au furplus aux mines dés Chalanches le nikel fous les formes décrires aux $$. 253: & 254 de la Minéralogie de Cronftedr, È RÉPONSE de l’Auteur du Journal, Je puis certifier , Monfieur, la vérité de tout ce que vous dites, pour l'a- voir vu moi-même au mois de Septembre 178 2, lorfque j'ai été à Allemond, où M. Schreiber eut la complaifance de m'inftruire de tous les détails con- cernant la mine d’or & celle d'argent, . ER EAN 2e Ta à (z) Journ. de Phyf., 1782, Suppl. , tom. XXI, pag. 314. à lt »* SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 315 LPS RP PDP RRQ ALTER CR SPEEPNATE TRE NE DUREE RENE ES EEE RC EAP TRE EET UC FETE EX ERA -E'T D'une Lettre communiquée par M. le Baron DE DIETRICH à / Académie Royale des Sciences ; [ur ur Enfant monflrueux. } E reçois, Meflieurs , une Lettre du fieur Eyfen, Miniftre Luthérien au Village de Niderbronn, en Baffe-Alface , qui appartient à mon père : cet endroit eft connu par fes bains & fes eaux minérales; le fer & le fel de Glauber qu'elles contiennent , les rendent en même temps toniques & apéritives. Cette lettre contient un fait que je prends la liberté de vous communi- uer; peut-être méritera-t-il votre attention, en ce qu'on y trouve réunies de monftruolités , qu'il n’eft pas commun de rencontrer fur un même fujer. Voici l'extrait de cette Lettre. « Je connois trop, Monfieur, l'intéréc que vous prenez à tout ce que æ la Nature peut vous offrir d'intéreflant & d’extraordinaire , pour ne pas » vous faire part de la naiflañce d’un enfant auprès duquel mon miniftère -» m'a conduit; on le difoit-expirant ; & la fage-femme refufoic de le » baptifer., parce qu’elle ignoroit s'il appartenoit à l'efpèce humaine. » En effer, fon afpect étoit auffi hideux que nouveau pour moi : de 2 tout fon vifage il n'y avoit que le menton & la lèvre inférieure con- > formés régulièrement ; la lèvre fupérieure manque entiéremenr , & il » n'ya point de nez: mais cette partie du vifage eft comme fendue per= » pendiculairement , & laifle voir à découvert la bouche , la langue , le » palais & jufqu'à la felle pituitaire. Les yeux font deux boffes hideufes de la grandeur d’une noix , avec une crevafle au milieu , qu’il m’a été impoflble de féparer pour voir la prunelle ; à côté de chaque œil ; on » remarque un morceau de cartilage avec une narine. Le front n’a qu'un » pouce de largeur ; tout le finciput & Les’ os pariétaux manquent: on voit >, au-deflus de la tête, du fang corrompu enveloppé dans différentes pelli- #cules rangées par couches, & on apperçoit le mouvement. .» Le mal eft que cet enfant ne peut pas être nourri , çar il.ne peut pas # faifir le mamelon; je lui ai donné un peu de lait avec une petite cuil- » ler, en preffant la langue & laiffanc couler une goutte après l'autre » dans l'œfophage: il a tout rendu à l'inftant. Il vit depuis 25 heures : » fon corps eft celui d’un petit garcon charnu & bien proportionné ; le > méconium eft encore tout en lui, & la trachée-artère eft terriblement » chargée , car l'enfant gargouille toujours: il périra faute de nourriture ». CL “ 316 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Extrait d'une feconde Lettre du même jour. ce L'enfant au fujet duquel j'ai eu l'honneur de vous écrire ce matin, eft » mort ce foir à 9 heures, Je my fuis tranfporté avec Le fieur Petry , votre » Médecin , lequel, après avoir écarté le fang qui couvroit le crâne , a # obfervé que ce crâne étoit troué ; & l'ayant voulu enlever , il l'a trouvé plus tenace que dans un adulte. Il n’a pas découvert la moindre trace de cerveau nide nerfs. » Je regrette bien , Monfieur , que vous ne vous trouviez point ici; » vous auriez mis votre Médecin à portée d'examiner demain cette tête » de plus près. Les parens me preflent d'enterrer cet enfant , je ne puis » my refufer », CERF CET SERIE SEEN SEE TA ANNEE TUE EEE TUE CON SEE PTS SRE SEE y Ÿ t OBSERVATIONS Sur une Montagne brûlante en Perfe ; Par M. PALLAS: Extrait de l'Hifloire des Découvertes faites par divers favants, Voyageurs Ruffès. Ï Lya dans fe diftriét des Bafchkires Murfalarskiens , attenant à celui- ci , non loin du Village de Sulpa , qu'on appelle aufli du nom de fon Chet atuel Muflæt-Aul , une montagne brûlante. Cette montagne , appellée Kargufch-Kugifchtan , s'éloigne, en décrivant un grand demi-cercle , de la Jurjufe qui décrit pareillement une courbe. La Jurjufe pafle entre la partie feptentrionale & la plus élevée de cette côte efcarpée , dont elle fe rappre- che, & une autre montagne fitüée vis-à-vis, appellée Mœngilfchak. C’eft à l’endroit où la vallée fe refferre qu'on voit, dans la defcente très-rapide de la première de ces montagnes, qui regarde le fud, & qui eft coupée dans cette partie par des enfoncemens très-profonds , fur trois des plus confidérables de ces fections, de grandes places rougeâtres entièrement dénuées de bois, tandis que tout le refte de la montagne en eft couvert. Ce font proprement ces places rougeâtres qui brülent, & que nos Voya- geurs allèrent voir de plus près, àla faveur d’un fentier affez périlleux, pratiqué dans le flanc de la montagne. Toutes les plantes étoient déjà( 26 Mai 1770 ) dans la plus fuperbe floraifon , & le Aora s’y trouvoit beau- | coup SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 317 coup plus avancé que dans les autres diftriéts ; à quoi l'incendie de la mon- tagne & la chaleur qui s'en exhale & fe répand dans tous les environs , contribuent inconteftablement beaucoup. De ces trois feétions de la montagne qui brûloient alors, c’eft celle de l'oueft qui eft la plus élevée, & M. Pallas l’eltime à cent toifes de hau- teur perpendiculaire. Il y a près de trois ans que cette fection brûle, mais avec moins de véhémence que celle du milieu, dont toute la partie mé- tidionale eft calcinée , & qui entretient, dit-on , le feu fouterrein depuis près de douze ans. Or voici de quelle manière cet incendie a pris naif- fance. Il y a onze à douze ans, difent les anciens Bafchkires établis dans cette contrée , que la foudre étant tombée fur un gros pin, fortement enraciné tout au pied de la colline du milieu, vers l'oueft, mit le feu à cet arbre & le confuma jufques dans fes racines, Ce même feu fe com- muniqua au refte de la montagne, qui depuis cette époque a brülé inté- rieurement fans interruption ; de manière cependant que l'incendie eft actuellement éteint au pied de la montagne, & qu'il s’en faut encore de beaucoup qu'ilen gagne le fommet. Toute la partie méridionale , qui fe trouve actuellement tout-à-fait nue , étoit auparavant, comme tout le refte , entièrement couverte d'arbres & de brouflailles , que le feu a tota- lement confumés partout où il a déployé fon activité, & cela dans un efpace dont le petit diamètre près du pied de la montagne , vers le fommer , a plus de foixante & dix toifes, & le grand , au-delà de cent. L’incendie avoit aufli gagné la colline attenante du côté de l'oueft, & s'étoit étendu fur un efpace affez confidérable ; mais tout eft éteint à préfent, & l'on y voit Reurir diverfes plantes, entr'autres la belle & odoriférante efperis Jyberica , le lupinofler & un affragalus. Maïs la fetion la plus orientale de la montagne, à laquelle le feu s'eft communiqué il ya près de trois ans Cen 1767 ), en parcourant une bande de terrein fort étroite au travers d'une vallée couverte de bouleaux & qui commence déjà à reverdir, brûle toujours ävec beaucoup de violence, & laiffe voir une place incendiée , prefqu'aufli étendue que celle de la colline du milieu. La roche dont la montagne eft compofée, particulièrement aux endroits incendiés, confifte en partie en une pierre à moilons, qui, quoique cal- cinée en confiftance de bonne brique, & quoiqu’elle en rende un bon fon, eft cependant de nature calcaire ; le refte et une pierre fchifteufe , friable , calcinée S&alamellée en feuilles très-minces , qui paroît avoir ren- fermé entre fes couches une autre matière dont il ne refte que la cendre. M. Pallas ayant fait fouiller dans la feétion orientale de la montagne, aufi avant que la chaleur de l'incendie le permettoit , obferva que les couches fupérieures fe divifoient en affez groffes tables de roche groflière ; mais que plus on enfonçoit , plus elle devenoit fine, laminée & friable, & que ces couches paroifloient s'incliner de l’oueft à l’eft, quoiqu'il füc Tome XXII, Pare. I, 1783. AVRIL. Ss 318 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, en général aflez difficile de bien diftinguer l’ordre de leur pofition , à caufe de l'éboulement de la partie incendiée. On y rencontre en plufeurs endroits une pierre ferrugineufe calcinée, où wulm, tantôt en fanouine ou hématite , tantôt en ochre jaune; & au pied de la montagne d'oueft on trouve par-touc entre la pierre, une terre marneufe très-friable , d’un rouge vif. Les places incendiées font remplies de crovafles & de fiffüres ; de forte qu'on 1ÿ fauroit marcher fans rifque. On enfonce quelquefois jufqu'aux genoux dans la terre vésétale que la calcination a réduite en pouilière en Certains endroits, & l’on a bien de la peine à s’en tirer fans reflentir les impreflions du feu. Il fort continuellement des crevalles ouver- tes, une vapeur fubtile, trémulante au foleil , & d’une chaleur brülante, infupportable aû taét , & qui allume des copeaux de bouleaux bien fecs en peu de minures. Dans des nuits orageufes & fort fombres, on voit aufli fortir de ces crevafles brûlantes, des flammes rougeâtres & fubriles , ou uhe vapeur enflammée qui s’élance à quelques archines de hauteur. Noncbftant tout cela, il n’exifte pas dans toure la montagne le moindre vellige de vapeur fulfureufe , ou de la nature de celle qu'exhale le charbon de terre; & les exhalaifons qui s'élèvent de ces crevafles , n’ont ni plus de confiftance ni plus d’odeur que la vapeur fufloquante qu’exhale un four ardent, lorfque le feu en eft entièrement confumé, A quelque profondeur qu'on creufat, on ne s’appercevoit pas qu'il y eût pour cela plus d’odeur, & cependant les pierres dévenoient à la fin fi brülantes, que tout liquide qu'on jettoit deflus s’évaporoit à l’inftant avec bruit, & que les pelles de bois s’allumoient. Ce n’eft pas feulement dans fon contour , mais auffi cout au milieu ‘de la place incendiée , qu'on trouve des endroits entièrement refroidis, qui fe recouvrent déjà de plantes , entr’autres de quantité d’arroche vulgaire, qui paroît le moins craindre le voifinage du feu. Le pied de la colline du milieu eft tout couvert d'un bois taillis d’une très-forte venue, qui, fi l’on en croit les Bafchkires , n’exiftoit point avant l'incendie, Il y croît encore de la belladonä commune , de l’armoife & d’autres plantes de ce génre. La montagne abonde aufli en vipères; mais elles y étoient déjà très-fréquentes avant l'incendie, Les Bafchkires affurent qu'en hiver, non- feulement, comme il eft naturel de le préfumer, la neige ne tient point fur ces collines brülantes; mais que tout le contour des places qui biülent, conferve conftamment un beau verd, & qu'il n’eft pas rare d'y voir des plantes en fleurs long-temps après La chüte des neiges. EP CE SUR L'HIST. NATURE LLE.ET;.LES. ARTS. 319 ee A ——— NOUVELLES LITTÉRAIRES. MR de Mémoires fur la Mécanique & La Phyfique, par M. l'Abbé RocHoN, de l'Académie Roÿale des Sciences & de celle de Marine, in-8°, fig. Paris, chez Barrois l'aîné, Libraire , quai des Augultins, 1783. 6 M. l'Abbé Rochon , fi avantageufement connu dans des Sciences, a réuni dens ce volume, des Mémoires lus à l’Académie des Sciences ; & dont le Public en avoit entendu plufeurs dans les féances publiques de cette Académie, L'Ouvrage commence par une notice qui renferme différents extraits des regiftres de l’Académie au fujet de ces * Mémoires, principalement fur le moyen propofé par ce Savant pour mefurer les angles par le moyen de la réfraction des prifmes de cryftal de roche & de verre. Tiès peu d’Auteurs avoient obfervé que le cryftal de roche jouifloir d'une double réfraétion , analogue à celle du fpath calcaire ou du cryftal ‘d'Irlande; M. l'Abbé Rochon l'a confirmé & en a tiré un très-grand avantage. Il feroit crès - utile pour l'Hif- toire Naturelle de poufler plus loin ces recherches , & d'examiner chaque pierre orientale, de conftater fi elle jouit de cette propriété, & à quel degré. Ce feroit peut-être un nouveau caraétère minéralogique à ajouter à ceux déjà connus. L’Auteur examine enfuite la nature de la lumière des étoiles fixes , à l'aide de fes prifmes ; les couleurs font bien moins vives, & elles difparoiïffent aufi fous un angle réfringent moins grand. Des expériences répétées par les Commiflaires de l’Acadéraie prouvent , comme l'avoit imaginé M. Rochon , qu'én irtroduifant un fluide diaphane entre les verres qui compolent un objeétif achromatique, on diminue conldérablement l'effet des imperfections des quatre fur- faces internes des trois verres. Suivent enfuite des recherches très-inté- reflantes fur la vifion , où il examine comment on voit les objets droits, comment avec les deux yeux on ne voit qu'une feule image , & fur quel principe eft fondé le jugement que nous portons fur la diftance des objets. Après ces recherches favantes , il donne la deicription du dias poramètre optique , ou d'un inftrument propre à mefurer la difperfion des couleurs, Ce die poramèrre elt un prifme à angle variable, L'Auteur a cherché auf à rendre l'hélioniètre de M, Bouguer, propre à mefurer des angles confidérables , afin de faciliter les obervations de diftances d'étoiles à la lune ; & le quartier de réflexion de M. Hadlei , fufceptible de mefurer les angles compris depuis zero jufqu'à 180 degrés. Il donne enfuite de nou- Tome XXII , Part. I, 1783. À VFRIL, Ss 2 320 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, veaux détails fur fa lunette à prifme, avec laquelle on peut facilement : 1°, la grandeur d'un objet étant donnée, déterminer fa diftance; 2°, la diftance d’un objet étant donnée ," déterminer fa grandeur ; 3°. la gran- deur & la diftance de l’objet étant abfolument inconnues , déterminer & fa grandeur & fa diftance. M. l'Abbé Rochon donne dans un Mémoire la defcriprion & l’ufage d’un nouvel inftrument propre à mefurer ,‘avec une très grande précifion , les hauteurs folfticiales , & généralement tous les grands angles ; & dans un autre des détails plus confidérables fur Le dias poramètre , avec une table de la refraction & de la difperlion , dans diffé- rentes fubftances , mefurées à l’aide de cet inftrument. On fait que ce Savant a imaginé une machine très-ingénieufe pour graver; il en donne dans ce Recueil la defcription , mais il feroit à fouhaiter qu'eile fût plus détaillée. Enfin cer Ouvrage elt terminé par un eflai fur les degrés ‘de chaleur des rayons colorés, & par des réflexions fur les lunettes achromatiques. Bibliothèque phyfico-cconomique , inffrutfive & amufunte , recueillie en 1782: contenant des Mémoires & Obfervations-pratiques fur l'économie ruflique, Les nouvelles découvertes les plus intéreffantes , la defcription de nouvelles machi- nes G inffrumens inventes pour la perfection des Arts ,&c. &c.On y a joins zombre de recettes , pratiques & procédés découverts en 1782, fur Les mala- dies des hommes € des animaux, fur l'économie domeflique , & en géne- ral fur tous les objets d'agrément & d'utilité dans la vie, &c. fig. in-12. Prix 3 liv. relié, & 2 liv. 10 [. broché , franc par la pofle , 1783. A Paris, rue & hôtel Serpente. On trouve dans ce Recueil tout ce qui a paru l'année dernière de bonnes chofes éparfes de tous côtés; & le grand mérite de cet Ouvrage eft de les réunir dans un feul volumein-12,de 432 pages. De! Application de l'éleétricite à l'Art de guerir ; Differtation inaugurale Soutenue par Jean-Baptifle BONNEFOI , de Lyon ,in-8°. A Lyon , chez Aimé de la Roche, 1782. Dans cette thèfe très-intéreffante, pleine de recherches & de di‘cufions non moins fages que favantes; l’Auteur confidère l'électricité comme Phyfcien, comme Phyfologifte & comme Médecin, & il divife en trois claffes toutes les maladies que l'électricité guérit ou foulage : 1°. maladies par défaut d'irritabilité , les paralyfies & afphyxies; 2°. maladies par excès d'irritabilité, les infammations , les fièvres , les fpafmes & les douleurs; 3°. maladies par le ftafe des humeurs, les tumeurs & les fuppreffions. L'Au- teur fe montre dans cer Ouvrage Phyficien inftruit, Phyfologifte éclairé & Médecin habile, Es SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 3at Analyfe de quelques pierres précieufes, par M. ACHARD , de l'Académie de Berlin, Ouvrage traduit de l Allemand par M. Dugois, Confeiller de la Cour de Sa Majefté le Roi de Pologne, Membre de plufieurs Aca- démies, À Paris, chez Moutard , 1783. Le nom de M. Achard eft très-connu dans la République des Sciences, Nous avons inféré dans notre Journal un très-grand nombre de fes Mé- moires. Son vrai mérite, comine Phyficien & comme Chymilte , l’a élevé à la place de M. Margraff, & il eft fon fuccefleur. Ce petit Ouvrage renferme l’analyfe chymique du rubis oriental, du faphir oriental, “à l'éméraude orientale, de l'hyacinthe orientale , du grenat de Bohème & de la chryfoprafe de Siléfie; on voit avec plaifir dans les notes de M. Dubois, combien M. Achard fe trouve d'accord avec M. Bergman dans fes analyfes, quoique ces deux favans Chymiftes aient employé des pro- cédés différens. On licàla fin un Apperdice fur la génération des pierres: précieufes, démontrée par l'expérience ; il feroit bien à fouhaiter qu'on fe donnât la peine de répéter à Paris ces fameufes expériences , d’après Les détails exaéts que donne ici M. Achard, Lettre de M, le Baron de Mariverz à M. le Comte de la Cépède , fur lE- laflicité, in-8°. de 62 pages, Nous avons annoncé dans ce Journal les deux Ouvrages de ces Savans; J'un fous le nom de Phyfique du monde, par M, le Baron de Mariverz, & l'autre fous celui de Phyfique générale & particulière. Amis rivaux, ils courent tous deux la même carrière ; mais des principes différens font les bafes de leur fyftème. M. le Baron de Marivetz rejettant lattraétion , our y fubftituer limpulfion des foleils communiquée au plein éthéré ; M. le Comte de la Cépède , fidèle difciple du Newtônianifme , regarde l'attraction comme la bafe du fyftème univerfel, & la retrouve jufques dans l’élafticité. Dans fon premier volume il en défend les droits avec force, & dénonce toutes les théories même les plus ingénieufes , dont elle n'eft pas le principe. M. de Marivetz croyant être attaqué perfonnellement dans cet endeo ; répond à fon ami dans certe Lettre, en développant fes principes & fes idées. S'appuyant tour-à tour des autorités des plus grands Phyficiens de ce fiècle , & de Newton même, il fait valoir ces deux prin- cipes fi fimples , fur lefquels roule tout fon fyftème : L'efpace ef? rem- pli d'un fluide élaffique ; & le Soleil , en tournant au milieu de ce fluide , en frottant contre lui, agite toutes les parties dont il eft formé. Le ton hon- .nête avec lequel ce Savanc fe défend & répond à fon ami, eft un beau modèle que la plupart des Savans de nos jours imitent bien peu dans leurs difputes, 322: OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Herbier de la France, par M, BULLIARD , vrentetroifième livraifon. Cecahier contient la Pédiculaire des marais, Flor. Franc. Pedicularis palufiris. Lin. Spec. Plant. didin. angiof. 845. La Gratiole Officinale Flor. Franç. Gratiola officinalis , Lin. Spec. Plant. diand. monog. 24. Le Menyanthe trèfle. Flor. Franç. Menianthes trifoliata , Lin. Spec. Plant. pentang. monog. 208, Et le Bolet rude, Bolerus fcaber. Inftruétions conctrnant les femmes enceintes , celles qui font accouchées , de la manière d'élever les petits enfans , avec les moyens d'éviter l'abus & les préjugés funefles qui les font périr très-ordinairement, Mémoire couronné ; par M. S....de plufieurs Académies. À Strasbourg , chez les frères Gay , Libraires , & à Paris, chez Mequignon l’aîné , rue des Cordeliers. Ce Mémoire très-intérefant & très-bien fait , devroir être entre les mains de toutes les jeunes femmes; on verroit moins de couches funeftes, fur-tout par leurs fuites. Hifloire Naturelle de la France méridionale , par M. l'Abbé SOULAVIE , some VI. À Paris, chez Quillau , Libraire, rue Chriftine. Ce nouveau volume renferme l'Hiftoire Naturelle du Gévaudan , la defcription des montagnes de orès du Gätinois, de Malesherbes & d'Er- menonville , & des réflexions fur les époques des montagnes granitiques que l’Auteur confidère fous trois âges. C’eft dans le fecond âge des mon- tagnes granitiques , au-deffous des eaux de la mer, que M. l'Abbé Sculavie place la formation de la matière calcaire. L'explication qu'il en donne eft trop neuve & trop fingulière pour que nous ne la citions pas ici.…..« Quand 5 les eaux dela mer eurent produit Les familles des cruftacées , dons il ne rojie » aucun defcendant dans les mers du voifinage , toute la vafe maritime, com- 5 poféede matière granitique, quartzeufe, cruftacée, mélangée avec les dé- » bfis des coquilles de tous les animaux marins , reçut une qualité alkaline, >», de vitrifiable , la changea en calcinable ». Voilà d’un {eul motla folution du Plus grand problème que nous offre l'Hiftoire Naturelle; &. la preuve 2... c'eft. ainfi que l'efpric de fyffème & le defr de tour expliquer font hazarder une infinité de propoftions que l’on fuppofe vraies pour fa commodité , fans s'inquiéter de leur connexion & de leur rapport avec les faits. Vouloir appliquer de très-petites obfervations à de grands phéno- mènes, à des UE générales, c’eft rifquer trop fouvent de s'écarter du chemin de la vérité. L’on peut en dire autant pour les différentes épo- ques que l'Auteur a établies dans la formation des vallées divergences & convergentes. Ce volume eft terminé par quelques Lettres fur différents points de Minéralogie & de Géographie-Phylque. “hit LL 2 Née RÉ h +02 SUR L’'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 323 Papillons d'Europe, peints, gravés & enluminés d'après nature | feptième cahier. À Paris, chez M. Delaguette ,- Imprimeur-Libraire , rue de la Vieille-Draperie; & chez M. Bazan , Marchand d'Eftampes, rue & hôtel Serpente. La feptième livraifon de cette magnifique collection contient la fuite du N°. 91. bis ; la première & feconde efpèces de l’arguStfariné changeant; une variété du papillon le Miroir , la chenille du papillon nommé la bande noire, l'ardent, le filvius , le point d'Honsrie ; une variété du N°* 98 , le grand Apollon de Rule, l'Apollon Hongrois, le petit Apol- lon; une variété femelle du veiné verd ; le papillon blanc , veiné de noir; la femelle du N°. 108 , que Linnæus nomme belia ; la chenille de la Diane, la Proferpine , le fafrané & l’orangé ; une variété de la femelle du fouci , le Endide , une variété de la grande tortue, la chenille & la chryfalide du filvain azuré; le japon , la chenille du filène , l’aéteon , le monta- goard , l’ariane , leporte-queue brun à une ligne blanche , le porte-queue gris- brun, le myrmidon , le Protée, l’azuré ; une variété du N°, 85; l'ar- us brun , l'argus bleu turquin, & une variété femelle de l’arous myope. é [ci finit la colleétion des papillons de jour, & commence celle des pa- pillons fphynx. M. Gigot d'Orcy, l'Auteur de cette précieufe colle@ion , les diftingue avec raifon des phalènes, qui font vraiment les papillons de nuit, quoique les Auteurs les aient confondus jufqu’à préfent. Tous les caractères que les äifférens Naturaliftes avoient défignés pour les diftin- guer, les diviler & les claflèr, étant prefque tous infufifans ou faux , M. d'Orcy. a été obligé d'en chercher d’autres , & il les a trouvés dans la forme des ailes de ces papillons. Tout ce genre paroît donc divilé en trois claffes : 1°.les fohynx , dont le bord des quatre aïleseft uni; 2°. les fphynx à aîles inférieures feftonnées ; & 3°. les fphynx dont les quatre aîles fonc feftonnées ou dentelées, Il a adopté encore pour cette partie, du moins pour les grandes efpèces., la gravure à plufeurs cuivres, ss applique les couleurs en même temps que les traits; elle nous a païu d'une très elle exécution , & fe rapprocher beaucoup plus près de la nature, que la ample ‘enluminure au pinceau fur la gravure ordinaire. RL La première claffe des fphynx & la pfemière famille , celle des p/us granäs fphynx , contient le fphynx du troëne , le fphynx du liferon , le fphynx du pin; feconde famille , />kynx mouches , le {phynx du caille-lait à le grand fphynx gazé, le chryfidiforme, l'afiliforme , le fphéciforme , Le crabroniforme, le firéciforme , le fphynx mouche minime, le vefpiforme, l'œftriforme , le grand & le petit culiciforme, l’empiforme, le grand & le petictipuliforme, le tenchrediriforme, l’ichneumoniforme ; troifième famille, frhynx beliers , le fphynx de la pilofelle. N. B. Les Analyfes de l'Ouvrage de M. l'Abbé Teffier fur les Maladies des Grains ; & de celui de M. Romé de l'ffle fur la Cryftallographie, n'ayant putrouver place ici, font renyoyées au mois prochain, 324 VOBSE REFPTETTETEIS RVATIONS SUR LA PHYSIQUE, 6e. RITES TA4.B LE - DEs ARTICLES CONTENUS DANS CE CAHIER. M ÉMOIRE fur lanalogie qui fe trouve entre la produttion &' Les effets del E= leétricire. Page 245 Obfervations fur la Durance , faites par ordre de l'Adminifiration du Pays dans les mois de: Septembre & d'Oflobre de l'année 1780 ; par M. BERNARD, Directeur- Adjoint de l'Obférvatoire de la Marine de Marfülle, de l'Académie de la même Ville, &c. 252 Remarques [ur le Spath-Fluor ; traduit du Suédois de M. SCHEELE , par Madame P**X%* de Dion. 264 Oëférvations de Météorologie G& de Botanique, fur quelques Montagnes du Dauphinés par M. ViLLARs, Médecin de PHôpital Militaire de Grenoble. 269 Defcription du Chronhyomètre, ou d’une nouvelle Machine météorologique avec laquelle on peut mefurer La durée de la pluie ; craduite de l'Ivalien di * Chevalier MARS 1110 LAN DRIANT,par M. COURET DE VILLENEUVE, linprimeur du Roi. 280 Défcription des couches fuperpofées de laves du Volcan de Boutareffe en Au- verone , G& Obfervations fur une planche travaillée par la main de l'homme, & trouvée fous des coulées de laves ; par M, l'Abbé SOULAVIE, de diverfes Sociétés Litéraires. 289 Expériences & Obfervations fur l'abforption opérée par Le Charbon ardent dans P Air atmofphirique & dans Les différents Gaz ; par M. le Comte M o- ROZZO. 294 Expériences [ur la vitrification de La Terre végétale € animale, mélée en diffè- rentes proportions avec les Chaux métalliques ; par M. ACHARD, 300 Suite des Extraits du Porte-Feuille de M. ? Abbé DICQUEMARE. 306 Lettre de M. le Chevalier DE LAMANON & M. l'Abbé MONGEZ, relative a POrnitholithe de Montmartre. 309 Lettre du Baron DE DiEtTricH 4 M. Abbe MONGEZz. EU Extrait d’une Lettre communiquée par M. le Baron DE DIETRICH 4 / Aca- démie Royale des Sciences. 315 Obfervations fur une Montagne brélante en Perfe ; par M.PALLAS. 316 Nouvelles Litiéraires, 319 APE P ROEB' A TION; ’AIlu, pär ordre de Monfeigneur le Garde des Sceaux , un Ouvrage qui a pour titre: Obfervations fur La Phyfique, [ur l’Hiftoire Naturelle & [ur Les Aris , Ëc.; par MH. Rozier & Moncez{le jeune, 6e. La Collection de faits importans qu’il dHÉe périodi- quement à fes Leéteurs, mérite l'accueil des Savans; en conféquence, j’eftime qu'on peut en permettre l’impreflion, À Paris , ce 24 Avril 1783. VALMONT DE BOMARE. : 4 DEsguomare del Jedi Seugr 2727 *g soonod perd z 1 | ji I il 1 | | l | en [ui il { [=== Dre a mme mme à 792 N / nt a — Se | + M 4% :783. | Sur les grands avantages d'une efpèce d’Ifolement très- imparfait ; Par M. DE VOLTA: traduit de l'Icalien par M, ***, Sur la Capacité des Conduéteurs conjugués. PREMIER MÉMOIRE. Dans lequel on démontre les avantages très- confidérables d’une forte d'Ifolement fi imparfait, qu'on peut à peine lui donner ce rom, [ur l’Ifolement le plus parfait. . . Introdulion, < N°. D une Lettre à M. de Sauflure, inférée dans les Opufcules © Choifies, part. IV & V, après avoir traité de la capacité des conducteurs fimples , je promis de publier peu de temps après un autre Mémoire fur la capacité des conducteurs conjugués. Je déligne par ce nom tout con- ducteur, qui, au lieu d’être abfolument ifolé , c’eft-à-dire, éloigné de tout autre corps déférent , fe trouve en face à une petite diftance d'un de ces corps. J’avois dès-lors pouffé fort loin les expériences, & il ne me reftoit plus que quelques pas à Air parvenir aux féfultats tout-à-fait nouveaux & furprenants auxquels des recherches que j'avois été obligé d'interrompre depuis un temps confidérable , & que j'ai reprifes cette année 1780, m'ont conduit fans peine. Une expérience facile , qui offiit par hazard à un Amateur d'électricité (1), un phènomène auquel il ne fe feroit (1) M.le Marquis Bellifomi , un de. ces Amateurs qui ne fe contentent pas de répéter flérilement les expériences ordinaires , mais qui fait en imaginer de nouvelles, faifant , Tome XXII, Parc. I, 1783. MA 1. æc % 326: OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, jamais attendu, & dont il a bien voulu me faire part, n'a pas peu con« tribué à me faire revenir fur cet objet. N°. IT. Je dis des réfültats nouveaux & furprenants , perfuadé que c'eft le jugement qu’en portera quiconque aura des connoiffances même aflez mé- diocres en matière déletrieire, parcs contredifent ouvertement quel- ues-üuns des principes les plus généralement reçus. Cependanicomme - d’ailleurs ils s'accordent admirablement avec cette partie effentielle de: la théorie électrique , qui concerne lation des atmofphères ; ces réfultats, fi l'on veut fe donner la peine de les approfondir , ferviront à confirmer de plus en plus les principes lumineux dont ils font, j'ofe le dire, les conféquences néceflaires. N°. LIL. L'ordre le plus naturel me prefcrivoit de commencer par les expériences, dans lefquelles je me contente d'approcher jufqu'à un certain point les deux conducteurs l'un de l'autre , de paffer enfuite à celles où je les approche de plus près, & de finir par lecontact. Ce:te approximation lui-même en bon Mécanicien qu'il eft, lorfqw’il lui en prend envie, de nouveaux inftru= mens, ou perfetionnaot ceux qui font déjà connus. Un jour, ayant pofé par hafard fon élettrophore fur une table couverte de peau, & l’ayantlevé peu de remps après, y ayant approché le doiot, il far bien étonné d’en tirer encore une petite érincelle. 11. répéta plufieurs fois la même expérience , & toujours avec le même fuccès. Il eut lhon- nêteté de me faire part d’un phénomène qui le rempiüfloit d’éronnement, & m'en de- manda l'explication. Je la lui donnaifur-le-champ, en variant de plus fous fes yeux , & en retournant en cent manières différentes les effais & les tentatives ; en devinant à point nommé quels en feroient les réfultats; en prédifant que l’éleétrophore conferve- roit ou ne conferveroit pas aflez d’éleétricité aprèsle contaët, pour donner une étincelle felon qu’il toucheroit tel ou tel plan. Quelques jours après, ayant pourfuivi à deffein les mêmes tentatives , je découvris dès-lors prefque tout ce que je vais expofer dans cer écrit, & je le communiquai d’abord à M. le Marquis Bellifomi , puis à quelques autres perfonnes. On-prend le bon moyen(je le dis avec une forte de complaïfance) de faire des progrès rapides, lorfque, partant d’un principe bien fondé, on marche enfüite en droite ligne. J'ai roujourseu en vue l’aétion des atmofphères éleétriques : déjà j’avois apperçu dans ce principe commenthil fe faifoit qu'un conduéteur con/ueué , c'elt-à- dire, un condnéteur ifolé à la vérité, mais en face & près d’un autre qui ne left poine , ait plus de capacité en raifon de ce qu'il en eft plus près & de ce qu’il lui pré- fente une plus grande furface, qu’une dofe donnée d'életricité y dép'oie une moïndre renffons je veux dire, qu’elle faffe un moindre effort pour en fortir. De là entrautres # chofes, javois tiré une explication naturelle & très-fimple de la vertu des pointes ; ex- plication que je donnai de vive voix ; il y a long-temps, à plufieurs Savants de mes amis, verfés fingulièrement dans les matières concernant l'élericité ; tels que, M. de Sauflure, P'Abbé Veniri, le Chevalier Landriani & le P. Barletri. Dans le deffein où j'étois de. pourfuivre mes recherches tendantes à approcher toujours de plus en plus l’un de l’autre deux ondbMents , Pun éleëtrifé & Fautre non ifolé, il ne me reftoit plus qu'à mettre deux furfaces planes en contaét , puifque j'avois déjà eflayé de fubftiruer un déférent imparfait à l’un des conducteurs. Voilà, dis-je, ce qui me reftoit à faire, quand M. le Marquis Bellifomi me prévint, fans y penfer; & par-là me donna l'envie de füivre, cer objet avec plus de chaleur, 2 SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 317 graduelle des conducteurs nous auroit mis en quelque forte fous les yeux l'action des atmofphères , fes loix, fa mefure & la manière dont fe produi- fenc les phénomènes qui en dérivent, Mais fi l'ordre & la clarté deman- doient que je fuiviffe cette marche , d'un autre côté j'ai cru appercevoir un grand avantage à prélenter d'abord un petir nombre d'expériences choïfies parmi une foule d’autres. En fe montrant tout-à-coup, pour ainfi dire , fans être attendues , elles en feront plus propres à frapper par leur merveilleux & à piquer la curiofité , que fi elles venoient mérhodiquement à la fuite les unesdes autres, à la faveur d'un grand nombre de déduc- tions, J'ai fait encore une autre réflexion; c’eft que ces expériences , en même temps qu'elles font les plus merveilleules , font aufh plus faciles à exécuter que celles qui devroient les précéder, en fuivant l'ordre des cho- fes: on peut même en tirer quelqu'utilité, relativenfent à beaucoup d'u- fages auxquels on emploie l'électricité , comme on le verra en fon lieu, Tels font les motifs qui m'ont déterminé à commencer par Les expériences dont il s’agit, & à en faire le fujet de ce premier Mémoire, en réfervant les autres pour un ou plufieurs Mémoires qui fuivront celui-ci. Je tâche- rai, en remontant aux principes, de mettre en évidence, autant qu’il me fera poffible , l’action des atmofphères électriques. Après cela, toutes les expériences que j'aurai citées , & d’autres fans nombre analogues à celle-ci, trouveront leur explication dans les mêmes principes, & n'auront prefque plus befoin d'autre éclairciffement. N°. IV. Je commence d@nc par propofer Jun après l'autre , & tour fimplement, quelques problèmes, qu'on peut appeller avec raifon des paradoxes éleétriques, puifqu’ils beurtent de front les maximes reçues de- puis long-temps parmi les Phyfciens électrifants: de-là je pafferai à la folution de ces problèmes , en marchant au flambeau de quelques expé- riences principales également fimples , démonftratives & fécondes en co- rollaires intéreffants. Pour faire mieux comprendre les différentes expé- riences , & pour diriger les perfonnes qui voudroient Les répéter , je dirai quelque chofe par anticipation, toutes les fois que l’occafion l’exigera , fur Ja caufe des phénomènes , en faifant ufage de ce qu'on fait déjà concer- nant les atmofphères électriques. Au refte , je ferai en forte que ce Mé- moire puifle aller feul , fans être lié néceflairement avecceux qui fuivronr. Problémes ou Paradoxes éleflriques. N°. V. Probléme I‘. Faire en forte qu'un conduéteur de métal, ou un autre, quel qu'il foit , conferve très-long-temps l'électricité qu'on lui aura communiquée , quoiqu'il ne foit point du tout , ou du moins quoiqu'il foit très-mal ifolé. Je dis plus ; qu’il laconferve même avec plus de ténacité que s’il étoir ifolé au mieux poilible. : N°. VL Problème IT. Accumuler dans un conducteur très-mal ifolé, Tome XXII, Part, I, 1783. MA I. ARTE 328 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, comme je viens de le fuppofer, une plus grande quantité d'électricité qu'il ne pourroit s'en accumuler dans le même conducteur ifolé de la ma- nière la plus parfaite, N°. VII. Problème III, Faire qu'un conduéteur de métal, quoiqu'il ait une mafle peu confidérable, ne perde pas route fon électricité, malgré qu'on le touche & retouche avec un autre métal ou avec un doigt non ifolés; de manière que ces attouchements quelquefois répérés & quelque- fois prolongés pendant un temps confidérable, comme par exemple de 20 où 30 feçondes , ne l’empêchent pas de conferver une vertu fufffante, pour donner une étincelle paflable. N°: VIIL. Probléme IV, Pendant que le conduéteur de métal fe trouve en contact avec le doigt ou avec un autré métal, ou bien même avec les deux enfemble non ifolés , faire en forte que l'électricité qu'on lui donne ne fe diflipe pas toute entière ; mais qu'il lui en refte affez pour donner quelqu'étincelle. S . N°. IX. Probléme V. En faifant jouer une machine électrique or- dinaire, dont le premier conducteur ifolé au plus mal, fi cependant l’on “peut dire qu'ille foit en aucune manière, ne peut donner ni étincelles, bi aücun autre figne d'électricité, jufques-là qu'un fl très-mobile fait à peine femblant de fe mouvoir, lorfqu’on l’en approche de très-près (C’eft ce qui arrive lorfque le conducteur touche un des murs de l'appartement, ou lorfqu'une chaîne qu'on y attache pofe fur une table , ou même fur le plancher); en faifant, dis-je, jouer une pareille machine , en fe fervanc d'un premier conducteur qui communique avec le plancher, & qui eft par conféquent de la plus grande inertie, porter & accumuler dans un fecond conduéteur aufli mal ifolé qu'il touche , une électricité aflez forte pour fournir des étincelles vigoureufes. N°. X. Problème VI. Obtenir le même réfulrat , quand la foiblefe extrème qu'on remarque dans le premier conduéteur provient du défaut de la machine même , qui , foit à raifon de Ja petitefle ou de la mauvaife qualité du verre, foit par le défaut des frottoirs, à caufe de l'humidité , foit enfin par quelle autre caufe que ce puiffe étre , défavorable à l’élec- tricité, peut à peine donner de foibles étincelles. N°. XI. Probléme VII. , Faire pañler également & accumuler une forte ; une abondante électricité dans un conducteur fi mäl ilolé , qu'à peine peut- on dire qu'il le foit ; l'y faire pafler & l’y accumuler, en le touchant fim- plement avec le crochet d’une bouteille de Leyde chargée fi foiblement , qu'elle ne peur jetter la plus petite étincelle par ce même crochet, & qu’elle a bien de la peine à attirer un fil très-léger , d’une bouteille qu’on croiroie avoir déchargée, en y appliquant trois ou quatre fois l'arc conducteur à Ja manière accoutumée , ou en touchant avec le doigt long-temps & à diffé- xentes reprifes. Avec un refte de charge fi chétif & rout-à-fait infenfible , fans aucun autre fecours , fans avoir befoin d’une nouvelle excitation , SUR L'HIST, NATURELLE ET LES ARTS. 329 porter dans le conduéteur mal ifolé , une fi grande quantité d’éleétricité , qu'il ait de quoi jetter une trèssvive étincelle , après cette première une feconde , une troifième, & ainfi de fuite jufqu'à cent & plus, & cela en le touchant fimplement & en le retouchant à chaque fois avec le crochet de cette même bouteille exémement pauvre, pour ne pas dire abfolu- ment épuifée, r N°. XII. Probléme VIII. Rendre fenfible & manifefte l'électricité de l'atmofphère en tout temps, lors même que le ciel eft ferein , parle moyen d’un conducteur, qui ne foit pas fort élevé & qui ne traverfe qu’une très- petite quantité d’air , quoiqu’on n’en puifle pas appercevoir dans lefon- duéteur même, qui n’en donne aucun figne; rendre , dis-je, une pareille électricité manifefte & très-fenfible, en la faifant paffer de ce conducteur dans un autre mal ifolé. N°. XIIL Probléme LX. Exciter une éle&tricité vive & accompagnée d'é- tincelles dans un conduéteur de métal très-imparfaitement ifolé, comme ci-deflus, en le frottant, ou migux en le frappant avec un autre conduc- teur , qui appartient plutôt à la claffe es déférents qu’à celle des cohibents, par exemple avec un morceau dedrap , de cuir, de feutre, &c. Ces fortes de corps, à moins qu'on ait foin de les bien fécher auparavant, & de les chauffer au feu, ne s’électrifent prefque point par le frottement, & par conféquent ne font guères propres à ifoler les corps. Toutes les fois qu'ils touchent un conduéteur ifolé , ou le crochet d'une bouteille chargée , l’é- lectricité fe porte abondamment vers eux; ils en prennent une quantité proportionnée à leurs maffes, s’ils font ifolés , ou ils la diffipent en entier, s'ils communiquent avec la terre. Ils font donc perméables au fluide élec- ærique; ils font déférents, bien qu'on les regarde comme des déférents im- parfaits, par la raifon qu'étant moins perméables que les métaux , ils tranfmettent & déchargent l'électricité avec une forte de lenteur, fans étincelles, ou du moins avec de foibles étincelles, Or , il s’agit ici, en employant de tels corps , le drap, le cuir, &c. up peu fecs tout au plus, mais fans les avoir chauffés , c’eft-à dire, dans un état où ils font déférents , en donnant avec un de ces corps quelques coups feulement à un con- duéteur de métal , d'y exciter la vertu électrique , au point d’en obtenir une étincelle paflablement forte. N°. XIV. Tels font les problèmes ,ou, fi on veut les appeller ainfi ,les paradoxes électriques que je fuis parvenu à réfoudre & à expliquer, en les rappellant tous à un feul principe, & en faifant dépendre d'une feule &e unique condition la réuflte des expériences que je propofe, & d'une in- finité d’autres analogues à celles-ci. Paflons au détail de ces expériences. 339 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, P-R'E M ILE RE MA CR DA E. Expériences tendantes à faire voir qu'un conduéteur acquiert la vertu de conférver beaucoup mieux l'éleétricité qu'on lui donne, au moyen d'une certaine communication, qui, fé elle ne détruit pas tout ifolement , le rend au moins très-imparfait. ”, XV. Je prends une lame plane de métal , émouffée & bien arron- die par Les bords , que j'appellerai dorénavant Le difque ; je tiens ce difque foulevé en l'air par trois cordons de foie , ou avec un manche de verre enduit de cire Fine , en forte qu'il fe trouve bien ifolé ; & en cet état, je lui communique une forte électricité; après quoi je ‘l'approche d'un mur, d’un plateau de bois, d’un: table de marbre ou d'autre fem- blable corps ,en le portant jufqu'au contaét. Qu'en arrivet-il? Quand ces corps ne font pas mouillés ou pleins d'humidité , fi on leur applique le difque bien à plat, enle retirant enfuite, & en l'examinant après l'a- voir retiré du contatt, je trouve qu'il me donne encore une vive étincelle. N°. XVI. On me dira peut-être que Le conta@ de ces corps, qui, étant parfaitement fecs , font a cohibents plutôt que des déférents, n’a pas rompu l'ifolement de mon difque. J'accorderai une chofs , c’eft que les corps dont je fais ufage font des déférents fort imparfaits ;"mais pourtant ni le marbre , ni le bois , quelque fec qu'il foit natutellement (c’elt-à dire, fi l'on ne l'a pas féché au four & chauffé jufqu'à rouflir) , ni encore moins un mur, ne font des cohibents qui puiffent fervir à bien ifoler un corps. Perfonne ne s'eft jamais avifé de les faire fervir comme ifolateurs pour les ufages ordinaires dans les expériences électriques, & fans doute on effaieroit inutilement de lesemployer à cette fin. Le premier conduc- teur d’une machine touche-t-il un des murs de l'appartement; la chaîne qué vous y avez attaché: vient-elle à pofer fur une table de marbre, quel- que fec que. vous le fuppoñiez , ou fur une table de bois qui n’ait pas été bien féchée au four; n'attendez pas que votre conducteur retienne beau- coup d'éleétricité : il n’en confervera que peu ou point du tout. Comment fe fait-il donc qu'en appliquant le difque métallique, felon fon plan, à ce mur, à ce marbre , à ce bois , on ne le dépouille point de toute fon électricité ? Voilà le merveilleux, voilà ce qui doit fembler un paradoxe. N°, XVIT. Mais peut-être le contact ne dure-t-il pas long-temps ; peut- être ne fe fait-il qu’en un petit nombre de points ? Non, il eft étendu & très-érendu ; il eft d’une durée raifonnable, & même d’une affez longue durée; peut-être aufli n'eft-ce qu’un petit refte d'électricité qu’on obferve dans le difque, après l'épreuve dont nous parlons ? C’eft route autre chofe qu'un refte ; fouvent c’eft prefque toute l’éleétricité qu’on lui a donnée , ou SUR L'HIST., NATURELLE ET LES ARTS. 33r le plus fouvent c’en eft une bonne partie. Cela paroît incroyable ; cela eft pourtant vrai. Je peux montrer la vertu éleétrique dans mon difque , après qu'il a été en contaét avec ces corps pendant plufieurs fecondes ,auff forte à peu de chofe près qu'elle l’étoit auparavant; aflez paffablement forte encore , telle au moins qu'on ne peur dire qu'elle foic très-foible, après qe le contact a duré un quartd'heure, une demi-heure, & quelquefois es heures entières, Je peux faire voir que cela a lieu, non pas lorfqu'on applique le difque au plan de marbre, au mur ou à la table de bois par un petit nombre de fes points feulement , mais bien par un grand nombre de oints, ou plutôt dans toute une furface fort étendue. N°. XVIIE. Arrétons-nous ici , pour obferver attentivement comme lus le contact eft étendu, & mieux la furface du difque de métal s'applique à celui qu'on voudra des plans, mieux aufli l'expérience réuflit ; c'eft-a-dire, plus long-temps le difque conferve l'électricité, & plus la dofe qu'il con- ferve eft confidérable : au lieu que s'il ne touche le plan que par un de fes côtés, ou bien fi on ne l'applique que fur l'angle du plan, ou sil n'y a qu'une petite partie du plan pofée fursl'autre , & que le refte dé- borde , toute ou préfque toute la vertu életrique fe diffipe en peu de temps & même en peu de fecondes ; elle pafle vifiblement du difque au plan touché, fous la forme d’étincelles , foibles à la vérité , mais pourtant fen- fibles. Ce plan , je le répète, eft donc un déférent , quoique déférent im- parfait; imperfection que marquent aflez le peu de je & le foible pé- tillement des étincelles, N°. XIX. Nous ne devons point paffer légèrement fur de telles expé- riences; il eft à propos degles confronter les unes’avec les autres , afin de mieux fentir & de mieux apprécier ce qu’elles nous offrent d’extraor- dinaire & de fingulier ; j'ai prefque dit, d'incroyable. Sile plan de mar- bre, le plan de bois & le mur font affz déférents pour s'emparer de l'électricité du difque de métal qui ne rouche quelqu'un de ces plans que dans un petit nombre de points , comment ne font-ils plus en état de l'en dépouiller, lorfque le difque multiplie les points de contat , lorfque le dilque leur eft appliqué de la manière la plus ample & la plus étendue 2 Ett-il plus ifolé alors? n’eftil pas au contraire plus que jamais éloigné de l'être, tandis qu'il pofe & qu'il eft appliqué immédiatement par fa plus grande furface à un corps qui n’eft pas un déférent parfait, il eft vrai, mais qui-eft pourtant plus déférent que cohibent (XVI. XVIII ) 2 Comment peut-il donc cônferver fa vertu au point de me donner une forte étincelle au doigt, toutes les fois qu’en le retirant de cet ample contact, je viendrai à l'éprouver? C'eft ce qui arrive néanmoins; telle. ment que la propolition fuivante a beau avoir l'air d’un paradoxe, elle eft trop bien établie fur des faits pour qu'on puiffe la révoquer en doute. Dans un grand nombre de cas, comme dans celui qui nous occupe a@uellemenr, un conducteur eft d'autant plus propré à conferver l'électricité , que l’ifo- lement devient moins parfait, ou, ce qui revient au même, à mefure x 332 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, qu'on approché de plus près ce conducteur d'un corps, qui, s’il n’eft pas un déférent parfait, du moins appartient beaucoup plus à la cleffe des déférents qu'à celle des cohibents , & qu’on rend cette communication plus ample & plus étendue; en forte qu'il n'eft jamais plus difpofé à con- ferver long-temps l'électricité que dans le cas où il communique avec €e corps de la manière la plus étendue, & du plus près qu'il eft pof fible, N°.XX. En un mot, & pour reprendre les expériences qui fe font avec le dique , il eft conftant qu'un ifolement parfait eft moins favorable à la confervation & à la durée de la vertu électrique, qu’une certaine efpèce d'i- folement très-imparfait, fi pourtant on peut lui donner le nom d’ifole- ment. Si vous foutenez le difque en l'air par fes cordons de foie, ou par un manche ifolant, quel qu'il foit, il aura perdu pour l'ordinaire , au bout de quelques minutes ; toute l'électricité que vous lui aviez donnée; au contraire, fi vous le pofez fur un des plans dont nous avons parlé, auxquels on ne peut refufer le nom de déférents (XVI. XVIL), quoi- qu'ils le foient téès-imparfaitement ( une table d’albatre ou d’un marbre de Carrare, life & bien poli, fort vieux , & qu'on ateru toujours à l'abri de la grande humidité, fe trouve dans ce cas plutôt que tour autre corps) , il ne s'en dépouillera peut-être point dans l'efpace d’une heure. Pofé fur un gros pain de foufre ou de réline récemment Étdus l’un & l’autre & bien nets, qui foient par conféquent abfolument ifolants , le difque perdra en- core fa vertu électrique , plutôt que lorfqu'on le met fur la table dont nous venons de parler. Enfin, fi vous le placez à un carreau de ce même marbre de Carrare, fi propre à conferver l'électricité, fur un plateau de bois pareillement bien conditionné, maisqui foient foutenus par un corps ab- folument ifolant , tel que feroit une petite colonne d’un verre bien fec, l'électricité du difque dans certe fituation durera bien moins que fi vous laiMiez le marbre ou Le bois qui le foutiennent communiquer avec d’autres déférents. Il eft donc vrai que le plan fur lequel on applique le difque de métal, ne*doit pas être abfolument cohibent par fa nature; & que, lorf- qu'il eft tel qu'il doit être précifément, déférent imparfait, où tenant le milieu entre déférent & cohibent, loin de le tenir ifolé par des cohibents parfaits, il faut au contraire lui laifler une libre communication avec la terre, ion veut qu’il conferve plus long-temps fon électricité. N°. XXI. Pendant qu'il eft ainfi en ample contact avec un plan qui n’eft ni cohibent par lui-même, ni ifolé, notre difque acquiert une fi grande ténacité pour conferver fa vertu électrique, qu'il ne s'en laifle pas entièrement dépouiller par une perfonne non ifolée, qui le touche à diffé- rentes reprifes avec le doigt, ou qui lui donne plufieurs coups avec un métal quelconque. [left vrai qu'il perd alors une bonne partie de fon élec- tricité , & que fi l'on infifte trop à le soucher avec le doigt, ou à Le frapper avec le métal, on vient à bout enfin de la lui faire perdre entièrement. Je M fais SUR L'HIST. NATURE LLE:ET LES. ARTS. 333 fuis pourtant parvenu , enme fervant d’un difque bien uni de 2 pieds de dia- mêtre , qui pofoit fur une table de marbre blanc , & même avec d'autres moins grands de 6 à 8 pouces au plus, que j'emploie plus ordinairement pour faire ces expériences , ayant foin qu’ils pol:nt pareillement fur des plans de marbre ou de bois très-fecs, ou quelqu’autre plan bien condi- tionné; je fuis parvenu, dis-je, à pouvoir tenir tantôt le doige ; tantôt une verge de métal, appliqués au difque pendant l’efpace de 30 fecondes & plus , fans lui ôter toute fon électricité, dont il lui reftoit même aflez pour donner une étincelle paflable , quand on venoit à le foulever de deflus le plan, Je fuis parvenu à le frapper avec une clef de fer, à le mar- teler & à lui donner bien cinquante ou foixante coups, fans que cela l'empéchâc de jetter encore une petite étincelle , quand je le levois. N°. XXII, Voilà une chofe qui doit paroître étrange & bien furprenante à quiconque a la plus légère connoiffance & le moindre ufage des expériences électriques. Ici il n’y a plus l'ombre d’ifolement; il y a contact avec des défé- rents imparfaits, avec des déférents parfaits; un contact de longue durée , étendu & très-étendu avec les premiers; moins durable & moins étendu avec les feconds, il eft vrai, affez pourtant & beaucoup plus qu'il ne le faut pour dépouiller un conducteur de route fon électricité, eût -il 109 ou 1000 pieds de long. Comment fe peut-il donc que notre petit difque, après avoir été touché tant de fois & fi long-temps, conferve encore un refte d'élec- tricité , qu'il en conferve mème une dofe qui n'eft pas petite? On fera na- turellement porté à chercher s’il n'y a pas Hs efpèce d’ifolement dans la perfonne même qui touche le difque ,fi la fécherefle du plancher ne forme pas quelque obftacle à la diflipation de l'électricité. Mais on n’aura plus de fcrupule , il ne reftera pas l'ombre de difficulté, quand je ferai voir que le difque conferve une aflez grande quantité, d'électricité, quoique la perfonne ou a verge de métal qui le touche à différentes reprifes, commu- ” nique non-feulement avec le plancher de la falle, mais encore avec un fil de fer qui fe rend dans un puits où il y a beaucoup d’eau. N°. XXIIE. Il y a une autre difficulté que je dois prévenir; elle eft fpé- cienfe , & fi je la laïflois fans éclairciffement , elle feroir capable de féduire. Le plan, me dira-t-on , fur lequel vous pofez le difque, étant un déférent imparfait , il doit partager la nature & les propriétés des cohibents; il pourra donc faire en quelque forte l'office de l'éleétrophore. Où eft la merveille alors que le Rifque de métal pofé fur ce plan , & touché avec le doigt dans cette pofition, lance une étincelle dès qu'on vient à le lever? n'eft-ce pas là précifément la fonétion & le jeu du difque d'un éleétrophore quelconque? Mais prenez-y bien garde; il y a une grande différence, que je vous prie de bien obferver. L'éleétrophore n'eft jamais en aétion ; jamais il ne produit les effets qui lui font propres, fi on ne l’anjme auparavant en imptimant l'électricité à fa face ifolante, Certe électricité ne pale outre & ne fe diffipe qu'après bien du temps ; mais elle refte adhérente & comme Tome X XII, Part, I, 1783. MAT. Vy 334 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, collée à la furface cohibente. Tañt que cet état dure, le difque qui pofe fur cette furface , fait effort pour fe décharger d'autant de fon propre feu , &il s'en décharge réellement sil peutle faire, par exemple, fi on le touche avec Le doigt ( je fuppofe que l'électricité qui continue d'être collée à la face ifolante eft ‘en plus : fi elle eft au contraire er moins , le difque, touché femblablement, attire d’autantà lui le feu étranger). Enfin, le difque acquiert toujours une électricité contraire à celle qui rélide dans la face ifolante, éleûricité contraire , qu'il ne manifefte que lorfqu’on vient à le féparer de cette face électrifée & à le lever. Ce jeu , qui fe répète autant de fois que vous le voulez, eft conftamment le même: toujours l'électricité rénace- ment adhérente à la furface ifolante, le doit ou un autre corps qui touche le difque, appliqués à cette furface, occalionnent la forte électricité con- traite ce dernier manifefte dans la féparation. Quand l’une ou l'autre de ces circonftances vient à manquer, l'effet cefle également d’avoir lieu, c'eft-à-dire , foit que l'électricité qu'on a imprimée à la face ifolante vienne à fe diffiper entièrement, foit que n'étant pas entièrement diflipée, on omette de toucher avec le doigt ou quelqu'autre équivalent le difque ap- pliqué, & delui faire prendre par-là une électricité contraire. : N°. XXIV, Ileneft tout autrement de notre difque de métal (qui eft pourtant fort teflemblant au difque de léleétrophore), électrifé féparé- ment, & couché enfuite fur un plan de marbre ou autre plan femblable. En premier lieu , fi on lapplique au plan parailèlement & bien à plat, qu-ique forte électricité qu'on lui ait donnée , il n'arrive jamais qu'il en refte le moins du monde imprimé à la furface du marbre: celle ci own'en prend point du tout, ou fi elle en prend quelque peu , certe électricité ne s'arrête pas à la furface, mais fe répand dans la fubftance même du marbre qu'elle pénètée, & va fe perdre. En fecond lieu , l'électricité qui fe retrouve conftamment dans notre difque , lorfqn'après avoir été pofé & touché on le lève enfuite , n’eft pas contraire à celle qui a été imprimée d'abord , comme cela arrive toujours dans l'électrophore (XXIIE): mais elle eft de la même efpèce; c’eft évidemment un reftant de l'éleéricité qu’on avoit donnée au difque de ce métal, avant de le pofer & de le tou- cher. Dès qu’une fois vous avez épuifé ce réfidu , en foutirant une étin- celle, vous avez beau remetrre le difque fur le plan de marbre, le toucher & le lever, il ne vous donnera plus le moindre figne d'électricité; troi- fième différence effentielle entre les effets de l’életrophore & ceux dont il s'agit, & preuve manifefte qu'il n’y a aucune électricité inhérente à la fur- face du marbre. N°. XXV. Je conviens qu'il peut arriver quelquefois qu'il s'attache un peu d'électricité à la furface d’un carreau de marbre ou à celle d'une table de bois , & qu'on obtienne par-là tous les effets d’un véritable életro- phore : mais il faut pour cela que le bois foit extrèmement fec (non pas qu'il foit abfolument néceffaire de Je chauffer jufqu’à rouflir, puifqu'il fuffc qu'on le fafle bien fécher au foleil ); il faut également que le marbre foie SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 335 parfaitement fec, s'il ne faut pas même qu'il ait été chauffé au feu ou au foleil: Enfuire, quelque bien difpolés que foient ces plans de marbre, de bois, pour imprimer l'électricité à leur furface, il faut ou employer un frottement confidérable , ou porter fuccellivement fur une op partie de leur furface, ou le bout d’un conducteur ifolé , ou le bou- ton d'une-bouteille de Leyde chargée. Mais fi on fe contente de poler à plat le difque de métal fur la furface du marbre ou du bois, après l'avoir électrifé ; même avec la plus grande force, il ne leur imprimera pas la . moindre électricité, * N°. XX VI, En s’y prenant de cette manière, on ne parviendroit pas même à électrifer la face ifolante d’un excellent életrophore. Pour l’animer ou pour lui imprimer l'électricité , il faut porter le difque de métal électrifé fur la face ifolante , non pas felon fon plan, mais à l'angle ou de côté, & le faire mouvoir en effleurant ladite furface, & en parcourant un grand nombre de fes points. On y parvient encore plus fürement en électrifant le difque , tandis qu’il pofe fur fon plateau : toutefois il faut que l’élec- tricité foit d’une Pie convenable pour produire l'effet qu’on, defire. Si elle eft foible, fi on touche le difque, par exemple , avec le crochet d'une bouteille foiblement chargée, il retient tout ce qu'on lui donne, foit qu’il LP fur la face ifolante d'un éleétrophore , foit qu'on lemette fur la furface emi-ifolante d’une table de marbre, qui en fait l'office en quelque forte. Ce n'eft que dans le cas où la bouteille eft fortement chargée, qu’elle parvient à imprimer une partie de fon électricité au plan qui foutient le difque, & alors ce qu'il en reçoit s'attache à {a furface en tout ou en partie: en tout , fi c'elt plan abfolument cohibent ; en partie , sil tient le milieu N le cohibent &le déférent ; le refte de l’électricité, dans ce dewnier cas, pénètre & fe répand dans l'inté- rieur même du plan. Or, c’eft-là précifément le cas où fe trouvent le bois,bien fec , le marbre, quandil eft aufli extrémement fec, fur-cout fi on l'a chauffé, & tout autre corps de même nature , c'eft-à-dire , tout corps guitient un milieu entre les déférents & les cohibents; & quand cela arrive il eft certain que les effets de l'életrophore fe confondent avec ceux qui font l’objet de ce Mémoire. N°. XXVIL. Ilne peut donc y avoir ni doute, ni équivoque, par rapport aux expériences que j'ai rapportées ci-deflus (XXI & fuiv.), & à beaucoup d’autres que j'expoferai dans la fuite ; ni relativement à celles où on procède de la manière & avec les précautions prefcrires (XXV & XXVI ); ni enfin relativement à celles où le plan fur lequel on pofe le dif- que de métal eft trop perméable au Auide éledtrique , & par-là même in- capable de retenir l'électricité atrachée à fa furface ; & vels font le marbre dans fon érat ordinaire, quand il n’a été ni féché, pi chauffé ; le bois, Jorfqu'il n’eft pas fort fec, un mur, & quantité d’autres corps, auxquels cependant fi vous appliquez le difque de métal électrifé, & fi, dans cette Tome XXII, Part. I, 1783. MAI. Vv2 336 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, pofition ; vous le touchez plufeurs fois avec le doigt, avec une clef, &c., il vous donnera encore une petite étincelle au moment où vous l'en retire- rez (XXI). Quoi donc , me dira quelqu'un , pourra-t-on pofer le difque fur tel plan déférent que ce foitavec un égal fuccès , fans qu'on puifle lui faire perdre fon électricité qu'au bout d'un temps confidérable, même en le touchant à différentes reprifes avec le doigt, avec un métal, &c.? Ce n'eft pas là ce que je dis: Je dis au contraire qu'il y a un certain terme au-delà duquel on ne peut point aller. Il eft donc effentiel de remarquer qu'il n'eft pas nés ceffaire que le plan partage la nature des cohibents , jufqu’à rerenir attachée à fa furface une portion d'électricité ; que d’autres déférents moins impartaits, tels qu'il ne feroit pas poñfible de fixer dansune de leurs parties, prife déter- minément, la moindre électricité , ni d’empêcher-qu’elle ne fe répande éga- lement dans toute leur fubftance en très-peu de temps, font capables néan- moins de retenir la vertu électrique dans le difque de métal qu'ils foutien- nent, & à fe l’attacher pour ainfi dire aflez pour que, en le touchant avec le doigt ou autre corps Ébie on ne le dépouille pas entièrement. Maisil faut pourtant convenir que ces fortes de corps font moins propres à conferver long-temps l’éleétricité, à proportion qu'ils font de meilleurs déférents, tellement que les Conduéteurs parfaits ou prefque parfaits ne font plus bons à rien. C'eft ainfi que des furfaces métalliques nues , des étoffes humides, des bois encore verds , de telles furfaces , je ne parle pas de l’eau, appliquées tant bien que vous voudrez à notre difque de métal, ne font pas propres’à y retenir l'électricité, au moins pendant un temps notable; le marbre même , que nous avons trouvé excellent lorfqu'il eft bien fec & bien net à fa furface , ne vaut plus rien s'il eft mouillé, ou feulemernt terni, Quand je mets Le difque électrifé en contaét avec un autre plateau de mé- tal, j'ai beau le retirer avec la plus grande célérité , j'obferve qu'à peine a-t-il retenu affez d'électricité pour attirer un fl léger. Si je ne le faistou- cher au plateau que de côté , ou bien s’il le touche d’une manière quel- conque, mais dans un petit nombre de points feulement , quelqu'habile que je fois à le retirer, ilne m’eft plus poflible d'y appercevoir le plus petit refte d'électricité. Approché de l’électromètre le plus fenfible, il ne lui imprime pas le moindre mouvement. N°. XXIX. Ainfi ,jufques dans le cas où l’on applique l’un fur l’autre deux conducteurs parfaits, c'eft-à-dire , métal fur métal , on y retrouve le phéno- mène qui a excité notre admiration (XIX.XX.) dans les expériences avec des déférents imparfaits; nous y voyons l'électricité fe diffiper plus lente- ment, quand c'eft toute une grande furface qui touche, que fi le contaét ne fe faifoit que dans un petit nombre de points, N°. XXX. Mais quelle contact de notre difque avec un autre métal lui faffe perdre fon électricité en très-peu de remps (XXVIII), & beaucoup plus preftement lorfque le contaét ne fe fait que dans un petit nombre de hi hd CRORET PAL OT EE Lire SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 337 points (XXVIII. XXIX.), foit: néanmoinsil ne parviendra pas à l'épuifer entièrement tout-d'un-coup , pas même dans l’efpace de plufieurs fecondes , fi à ce contact du difque avec un petit nombre de points métalliques , il sen fine un autre bien plus ample avec un.déférentimpartait, N'avons-nous pas vu en effet (XXI) qu'en t@uchant le difque, même à plufieurs reprifes, avec le doigt, avec une clef, &c., pourvu qu'il pofe dans le même temps fur un plan de marbre, de bois fec ou autre femblable , on ne le dépouille pas fi promptement de fon électricité qu'il ne donne encore une petite étin- celle la première fois qu'on le lève? La même chofe arrive, fi un ou plu- fieurs petits morceaux de métal, une ou plufieurs pointes fe trouvent au niveau de la furface d'un des plans dont nous parlons, quand même ces morceaux de métal, ces pointes déborderoient tant foit peu. Le difque de mésal pofé fu ce plan, conferve quelque peu d'électricité , graces au plan qu'il couche , ou peu s’en faut ; tellement qüe fi on ne le laifle que peu de temps en contact avec les pointes de métal, & qu'or le foulève prompte- ment, il pourra encore donner quelque petite étincelle : au lieu que fi ces pointes débordoient beaucoup au-deflus du plan, fi elles fe treuvoienc feules en contact avec le difque loin du plan, l'électricité difparoïîtroit es entièrement. # N°. XXXI. Ce que nous avons obfervé dans les trois numéros précé- dents , au fujet du contact du difque.de métal avec d’autres métaux, a lieu à-peu-près également dans le contact de ce même difque avec d’autres conduéteursepaffablement bons , tels que font les charbons, l'eau , les parties pleines de fucs des animaux & des végétaux , & detout autre corps mouillé au dehors, ou très-humide intérieurement. Mais laiflons à part de pareils corps , qui étant d’aflez bons conducteurs , enlèvent une partie confidérable de l'électricité, s'ils ne la détruifent pas entièrement, & re- tournons aux déférents moins parfaits, qui n’empêchent pas que l’éleétri- cité ne dure, ne fe conferve fort long-temps & prefque dans toute fa force, dans le difque qu'ils foutiennent (XV. XVIL.), pourvu toutefois qu’ils touchent par des furfaces larges & planes, & non pas par les angles ou dans un petit nombre de points feulement (XVIII), qui confervent même fi longtemps l'électricité dans le difque, avec lequel ils font fuppofés avoir une ample communication, qu'un parfait ifolement dans l'air le plus pur & Le plus fec, produiroit peut-être un moindre effect (XX); & ce qu'il y a de plus merveilleux encore, qui la retiennent fi opiniâtrément ; qu’on peut toucher plus d’une fois le difque, & même aflez long-temps chaque fois, fans le dépouiller en entier (XXI). N°. XXXIL. Quels font donc, parmi ces déférents imparfaits, les plus propres pour cet effet? Précifément les plus imparfaits, comme nous l’a- vons déjà fait remarquer ( XXVIIT ); ceux qui approchent de la nature des cohibents, fans être tels à la rigueur. N°, XXXIII, Un cohibenr, dans Le fens vrai & rigoureux , eft un corps 333 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, qui ne permettant à l'électricité ni de pénétrer à travers fa propre fubftarre ni de glider le long de fa furface , la contraint de s'arrêter & de s'attacher aux points fur lefquels ong'imprime immédiatement. Fels font a de verres (je dis Peaucoup , parce qu'il y en a qu'il faut excepter , qui lai fent pafler l'électricité plus où moins facilemen®@), le foufre , les réfines , les poils, les foies, les bois chauffés jufqu'à rouffir ; tous corps dont on peut faire & dont on fait de très-bons ifolateurs pour Les machines électriques ordinaires, Ce font tous de véritables cohibenrs, & on les appelle encore idio-eleëtriques , ou fimplement éleéfriques , eu égard à la vertu que tout cohibent pofsède, de s’électrifer par le frottement, On donne le nom de déferents aux autres corps qui diffèrent des premiers, en ce que l’éleétricité, au lieu de fe concentrer dans ceux de leurs points qui la reçoivent immé- diatement , pénètre & fe diftribue également dans toutes leuxs parties : on les appelle autrement fémper-éleétriques ou anéleétriques , à caufe de la pro- priété qu’ils ont de n’être point électrifables par le frottement, mais feu- lement par communication. Ceux-ci pourtant fe partagent en deux ef- pèces : les uns offrent le paflage le plus libre au fluide électrique , en forte qu'il fe répand en une manière égale & uniforme dans toutes leurs parties, avec la plus grande liberté & prefque en un inftant; on les nomme défe- rents parfairs ou bons conduëfeurs : les autres au contraire oppofent a fluide électrique une réfiftance notable, qui en retarde fenfiblement la diffufon ; ils portent le nom de mauvais condufleurs ou déferents imparfaits, d'autant plus imparfaits, qu'ils fe laiffenc plus difficilement & pluslentement pénétrer par le Auide électrique. Parmi les déférents parfaits, viennent d'a- bord les métaux, qui l’'emportent fur tous les autres; enfuite les charbons bien cuits; après ceux-ci, l’eau qui commence déjà. à faire éprouver au fluide électrique une réfiftance fenfñble, & très-fenfible lorfqu'il pale en grande quantité à travers un perit filet d’eau; après l’eau , les animaux, foit vivants, foit nforts. pourvu qu'ils ne foient pas defféchés; enfin , les plantes vertes, & généralement tous les corps, quand ils fonc abreuvés copieufement d'humidité, Pour ce qui eft des déférents imparfaits , il eft à remarquer qu'il y en a certains qui réfiftent au point qu'une partie de l'électricité s'accroche, pour ainfi dire, & demeure atrachée à l'endroit où on l'imprime, tandis que le refte fe répand également & promptement dans toutes leurs parties. Ce font alors des déférents d’une relle imperfec- tion, qu'ils tiennent de la nature des cohibents, & par conféquent de celle des idio-éle&riqués ; en forte que, fi on les frotte bien fort , fur-vout après Les avoir chauffés un peu, ils s'électrifent toujours plus ou moins(1). — e (1) Iy-a certains corps qui font de très-mauvais déférents, & qu’on a beau néan- moins frotter avec toutes les précautions pofibles | on ne parvient pas à y exciter fufifamment la vertu éleétrique , pour qu’ils puiffent atürer par eux-mêmes le fil le SURL'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 339 Tels font cerrains marbres & d'autres pierres dures, les enduits de plâtre fu de chaux bien fecs, le bois féché de longue‘main , l'ivoire , coute forte plus léger. On fervit en conféquence porté'a croire qu'ils ne s’éle@rifent point du rout, & qu'amf ils montuien de commun avec les corps idio-éleétriques. Maïs prenez un de ces corps qui ait-unefurface,plane 8efuifamient étendue , & frottez-la ; appliquez à certe furface, qui vous .paroît d’une parfaite inertie, une lame de métal également plane , telle qu'eft un difque, d’éleétrophore,, & frvez vous précilément du même procédé qu'on emploie avee l’éleéttophore, Après l'avoir touché avec le doigt ou avec quelqu’autre corps, levez cetr: lame, ce difque ifolé ; il vous donnera des fignes d’é- leétricité, que le corps que vous avez frotté refufe de vous donner lui-même. Vous trouvez ici dans la réalité tout le jeu & l’aétion de Péleétrophore, dont le difque, touché avec le doiot, prend uneéleétricité contraire à celle qui eft attachée à la face ifolante ; éleétri- cité contraire , que le difque déploie aufli-tôt qu’on le lève, avec un degré d’intenfité bien fupérieur à celüi qui paroît dans la ficeifolante, comme ileft aifé de le voir par la vivacité de létincelle- qu'il lance , & par les vibrations qu’il imprime à l’éleétromètre, bien plus fortes que celles que la face ifolante pourroit imprimer elle-même, Il ne faut donc plus s'étonner qu'un femblable jeu. puifle rendre fenfble l’éle&tricité que le frone- ment imprime à certains corps trop foibles pour être apperçue immédiatement. Voilà un expédient heureux, au moyen duquel on decouvrira dans bien des corps une vertu éléc- triquewriginaire , dont nous les eulions cru privés au moins dans certaines circonftances ; par exemple, dans les marbres, dans lesos, dans les bois qui ne font pas extrêéme- ment fecs. C’eft encore un moyen, lorfque Péleétricité n’ett pas tout-à-fait impercep- tible, & qu'elle fe fait fentir ur les furfaces frottées , d’en accroître les fignes, & de les rendre merveilleufement fenfibles; ce qui eit d’un tiès-grand avantage, fingulièrement pour connoître de quelle efpèce eft l’éleétricité. Ajoütons qu'on peut fouvent s’épar- gner Ja gêne de frotter d’abord , avecun corps quelconque, celui dans lequel Péle@tri- cité ne peut s’excier que foiblement , & de lui appliquer enfuite la lame-:ouyle difque, en le frotrant immédiatement avec le difque même. Si ce moyen ne réuffit pas bien, quand on frotte dur contre dur, il nous offre un avantage d'autant plus grand, lorf- u’an des deux corps eft fufifamment flexible. Sitel eft le corps même dont on veur Ces la vertu électrique originaire; fi c’eft , par exemple, ‘du cuir, du papier , du drap, &c., il n’en faut pas davantage ; fi c’eft un corps dur, comme du marbre, du bois, un os , en pareil cas, on pourra revêtir la face du difque qui fert à frotter, d’un morceau de drap ou de peau, avec une petite lame de pers pardeffus , ou bien une feuille de papier doré, la dorure étant en dehors. Le difque ainfi préparélfera admira- blement bon pour froer ; il pourra aufli fervir comme difque d’éleétrophore, & à beaucoup d’autres ufages. L’expédient dont nous avons parlé jufqu'ici, fl commode pour obtenir les fignes d'électricité les plus manifeftes , de certains corps qui paroïflent par eux-mêmes d’une inertie abfolue , on prefque ste après qu’on les a frottés ,en les foumettant à l'épreuve de léleétrophore, n’a pas échappé à M. Cavallo. Voici ce qu'il en dit dans les Tranfa@tions Anglicanes , & ce qu'il répère dans le dernier Cha- pitre de fon Traité complet für Péleétricité. « Ayant obfervé qu’on peut tirer uneforte étincelle de la lame de métal de la machine de. M. de Volta , quand le carreau élec- trique out feul refufe abfolument de donner la plus petite étincelle, j'imaginai natu- * rellement de faire ufage de cere lame pour découvrir l’éleétricité dans les corps qui m'en ont qu’une très-foible , qu'il feroit autrement impoflible d’appercevoir , & dont on ne pourroit pas füreinent diftinguer la nature , à caufe de fon extrême foiblefle. En conféquence, jefaçonnai plufieurs carreaux de différentes prandeurs , à commencer par un , que je fis de ce métal commun dont on fe fert pour les boutons ; & que je pofai 340 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, d'os, leyparchemin & une peau quelconque, le papier, le drap , fa toile, toujours dans la fuppolition que ces corps foientbien fecs. J'encends des bois, des os, du cuir, du papier, du drap, &c., fecs autant qu'ils peuvent l'être naturellement ou par vieillefle , ou pour avoir été long-temps dans un endroit bien fec, ou pour avoir été chauffés doucement au foleil ou au feu; car nous favons d’ailleurs que fi on les fait chauffer jufqu’à ce qu'ils commencent à rouflir, fi on les sèche au four au point d’exhaler une fumée abondante , ils deviennent par-là même de vrais & parfaits cohibents, tout-à-fait impénétrables au fluide électrique, conféquemment très-propres à ifoler de la manière la plus parfaite; des dio-éleétriques, en un mot , qui ne le cèdent ni au verre, ni aux réfines (1). N°. XXXIV. La digreflion que je viens de faire, n'offre rien de nou- veau , il eft vrai ; elle ne contient que des chofes qu'on favoit déjà. On ne doit pourtant pas la regarder comme fuperflue, puifqu’elle préfente les chofes fous un pointde vue très-propre à fixer les juftes limites des expé- riences avec leurs véritables réfultats, & qued'après cela on eftbien plus en état de déterminer quels font & comment on doit concevoir les déférents imparfaits, que nous avons vu ( XX VIII ) être les feuls qu'on puiffeemployer avec fuccès dans les expériences dont il s'agir. Je l'ai déjà dit (XXVIIT. XXXIT) , & je le répète maintenant, qu'ileft bien plus aifé de le concevoir; Les corps qui tiennent le jufte milieu entre les déférents & les cohibents, tels que nous les avons décrits plus haut(XXXIIT , vers la fin), qui font à la vérité perméables au fluide électrique, mais qui oppofent une affez rande réfiftance à fon: paflage , qui s'électrifent même quelque peu par le Ace ces corps font les plus favorables de tous à la durée de l’élec- tricité dans le difque de métal pofé fur ces corps , felon fon plan, & ils Le rendent fi ténace, qu’il ne fe laifle pas entièrement dépouiller, lors même qu'on le touche avec un doigt ou un métal à différentes reprifes. N°. XXXV. S'ileft vrai que les déférents parfaits ne valent rien, & que les déférents imparfaits font d'autant plus favorables à la durée de fur une petite colonne de cire d’Efpagne. J'obtins par fon moyen une électricité très- fenfible des poils de mes jambes & de toute autre partie de mon corps après les avoir frottés, de mes cheveu# & de ceux de toute autre perfonne prefque fans excep- tion. En m’y prenant de cette manière , le dos d'un chat, une”peau de lièvre ou de la- pin , un morceau de flanelle ou de papier me donnent de fi fortes étincelles, que je peux avec chacune de ces fubftances charger immédiatement une bouteille armée , &c affez vigoureufement pour faire un trou dans une carte à jouer avec fa décharge ». (1) On peut confulter là-deffus une de mes Differtations imprimée en 1771, D: cors poribus ererreleéfricis que fiunt idio-eleitrica, Experimenta argue Obfèrvariones , dans Faquelle je parle d’une machine éleétrique entr’autres que j'ai conftruite à difque de car- ton, qui me donnoit de belles & fortes étincelles , qui me chargeoient aflez fortement ane bouteille de Leyde , &c. l'électricité # SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 34 l'électricité dans le difque qu'ils foutiennent, qu’ils font plus imparfaits &c plus près d’être cohibents{ XX VIII, XXXII. XXXIIL. ). I paroîtroit donc que les cohibents parfaits devroient être les plus convenables de tous à cette fin. Cela n’eft pourtant point. Il faut prendre ( précifément comme on l'a dit) des corps qui tiennent le milieu entre les déférents & les cohi- bents , tout jufte entre Les deux extrêmes. En effèt , nous avons vu (XX) qu’en plaçant le difque fur un gros pain de réfine bien pure, ou fur un autre ilolant parfait, il conferve moins long-temps fon électricité, que lorf- qu'il pofe fur un plan de beau marbre bien fec, ou fur un autre demi- cohibent. ” N°. XXXVI. La différence n’eft pourtant pas fort grande , à s'en tenir ” à cette épreuve; je dirai même, pour ne rien diflimuler , que l’avantage eft du côté du cohibent parfait, toutes les fois que l’autre plan fe trouve * être un déférent imparfait, mais non pas au plus haut degré d’imperfec- tion, J'ajouterai encore qu'il y a peu de marbres qui foiert tels, & que, fi vous en exceptez le beau marbre blanc de Carrare & quelques albâtres, je n'en ai trouvé aucun jufqu’à préfent qui ait confervé plus long-temps l'é- lectricité dans le difque pofé deflus, qu'un plan parfaitement cohibent. J'y fuis parvenu avec des tables de bois chauflées fortement, quand elles n’é- toient prefque plus déférentes, quand elles étoient pour ainfi dire cohi- bentes , électrifables ant foit Peu par le frottement. Néanmoins , quoique l'électricité fe maintienne plus long temps indubirablement dan le difque, lorfqu'il eft en repos fur un plan d'albâtre ou de bois defféché, que fi on le met fur un plan qui foit un véritable & parfait cohibent , la différence , comme je l'ai dir, n'eft pas fort grande jufques-là : elle eft très-grande, elle eft frappante , elle eft édive à l'avantage du plan qui n'eft pas un co- hibent parfait, quand on vient à le toucher avec le doigt, une clef de fer, &c. On peut le toucher durant plufeurs fecondes , fans qu'il perde entièrement fon électricité (XXI), lorfque le plan fur lequel il repofe tient le milieu entre Le déférent & le cohibent, ou bien même qu'il eft plus déférent que cohibent, comme les marbres ordinaires , le bois féché fimplement à la longue, un mur fec, de quelque manière que ce foit (XVI. XVILE. XXXIIL.); au lieu que fi ce même difque eft pofé fur un cohibent parfait , telle qu'une couche épaifle de réfine pure fur un carreau de verre net , épais & bien fec, fur un difque de bois bien defléché, & devenu conféquemment un cohi- bent parfait, en un mot, s'il fe trouve parfaitementifolé; en ce cas, loin de tenir contre des attouchements multipliés, il fuir de le toucher une feule fois avec le doigt pour lui enlever toute fon éleétricité. N°. XXXVII. Le difque f défélectrife également dès la première fois qu’on le touche, bien que placé fur un carreau du meilleur marbre ou fur un plateau de bois très-fec, pofition cependant dans laquelle il la conferve fi bien pour l'ordinaire; il perd, dis-je, fon électricité, lorfque ce pla- Tome XXII, Part. I, 1783. MAI. x 342 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, teau , ce carreau, portent fur une colonne ifolante, ou qu’on les tient fuf- pendus avec des cordons de foie, ou qu'on les empêche d’une autre ma nière quelconque de communiquer avec la terre. N’ai-je donc pas droit de dire que l’ifolement parfait eft beaucoup moins favorable qu'un autre ifolement très imparfait à La confervation de l'électricité dans notre difque ? Si quelqu'un pouvoiten douter encore , d’après tout ce que nous avons dit, pour achever de le convaincre, je lui f2rois voir qu'en faifant ceffer l'ifolement du plateau ou du carreau de marbre , au moyén d’un conduéteur qui établiffe une communication entreux & le plancher, le difque de métal reprend cette ténacité merveilleufe qui le met en état de fouffrir qu’on le touche plufeurs fois avec le doigt, fans beaucoup de préjudice our fon électricité. : N°. XXXVIIT, Ainf, d'un côté les déférents imparfaits ou demi-cohi- bents, qui, par leur nature, & plus que tous les autres corps, ont la vertu de difpofër le difque de métal qu’ils foutiennent à retenir l'électricité dans fon fein, en dépit d'attouchements redoublés; ces déférents, dis je, ne valent plus rien, lorfque leur communication avec la verre vient à être rompue; lorfque , à une petite diftance de la furface qui touche le difque, il fe trouve des cohibents qui forment un véritable & parfaitifolement, ( XX, XXXV.XXXVI.XXX VIT. ). Mais d'un autgecôté aufli, ces mêmes cohi- bents , incapables par leur nature de donner une pareille ténacité , devien- dront propres à produire cet effèt dans le cas où, tout près de leur furface extérieure , il fe trouvera une communication avec la terre; c'eft-à-dire , dans le cas où le vrai cohihent ne formant qu'une couçhe un peu épaifle, il y aura fous cette couche un corps quelconque de la clafle des dé- férents. : N°.XXXIX. Il n’y a donc qu'un feul cas où l'électricité de notre dif- que n’eft point à l’épreuve des attouchements avecle doigt, &c. : c’eft celui où il a fa furface forc éloignée de route autre large furface, qui foit défé- rente & en communication avec la terre , ce qui peut arriver de deux ma- nières ; ou bien parce qu'on le tientifolé dans l'air à une certaine hauteur, ou parce qu'on le place fur une couche cohibente fort épaifle, Mais quand le difque touche felon fon plan & par une large furface un déférent impar- fair, ou qu'il en eft fort près fans le toucher, n’en étant féparé que par une couche d'air , où même par une couche cohibente peu épaïlle , il ac- quiert alors cetre prodigieufe ténacité dont nous parlons, cette difpofition 4 ne point fe deffaifir de fon électricité , quoïqu'on le touche à différentes repriles 5 k: N°. XE. J'ai toujours fuppofé que le difque de méral étoit couché felon fon plan , même dans le cas où il eft féparé du déférenc imparfait par une couche cohibente peu épaiffe, circonftance effentielle ; car s'il touche cette même couche pat un angle fort ouvert où dans un petit nombre de ” | 4 à (SUR L'HIST, NATURELLE ET LES ARTS. 343 points de quelque manière que ce foir, une bonne partie de l'électricité du difque s'y déchargera, en s'attachant à cès mêmes points, ott en traver{anc toute la couche, fi elle eft bien mince, Ÿ N°. XLI. Au lieu donc d’une table d’albâtre où de bois extrêmement fec, nous pouvons employer pour nos expériences une lame de métal en- duite de foufre, de cire-d'Efpagne ou d’autre matière réfineufe ; eñ un mot, un plateau d'éléétrophore , & ce dernier conviendra admirablement, En pofant fur cette couche réfineufe non éleétrifée un autre difque dé métal, celui de l'éleétrophore qu’on aura éleétrifé à part, il neluiimprimera point d'électricité, puifqu'après l'avoir levé, on trouve cette couche réfineufe dans la même efpèce d'inertie abfolue qu'auparavant. Il n'en imptimera point, dis-je, mais àune condition qui eft abfolument indifpenfable (XX V. XXVI); C'eft que vous pofiez bien exactement le difque felon fon plan. Pour lui 1 la confervera fi bien , qu'après des heures entières, quelquefois au bout d'un jour entier , il pourra vous donner une petite étincelle au moment où vous Le leverez ; bien entendu qué pendant tout ce temps de repos, on ne laura point touché du tout : lors même qu’on l'aura touché plufieurs fois avec le doigt ou autrement durant l’efpace de quelques fecondës , il aura encore la force de rétenir quelques reftés d'éleétricité. N°. XLIL. Il ya ici une remarque bien importante à faire; c'eft qué l'électricité f maintient pluslong-temps dans le difque de méral, lorfqu'il pofe fur une mince couche ifolante, que lorfqu'on le place fur le plan de marbre nud , ou fur celui de bois très-fec; mais qu'il réfife moins à lé: preuve des attouchemens extéricurs dans le premier cas que dans le fe. cond, Le même difque de métal, qui, placé fur une couche de réline peu épaifle, conferve pendant tout un jour un refte d'électricité ; n’en conférvéra peut-être autant que l'efpace de deux où trois heures , couché fur une table de beau marbre blanc de Cartare, qui eft pourtant de tous les déférens imparfaits le plus favorable à la confervation de l'éleétricité dans le difque. Mais en revanche, il en gardera aflez dans ce dernier cas pour étinceler encore , après avoir été touché une où deux minutes entières, & à plufieurs reprifes avec le doigt : aù lieu que, placé fur la couche rélineufe , il fe défélectrifera entièrement en quelques fecondes, quoiqu’on ne le touche que fort légèrement, & que chaque contaét ne dure que très-peu de temps; & il fe déféleétrifera d’autant plus prompte- ment, que la couche cohibente fera plus épaifle: tellement que fi cette couche a plufieurs lignes d’épaiffeur , on la dépouille entièrement en la touchant deux ou trois fois avec le doigt; une feule fois même fufñr, fi elle eft épaiffe d'un pouce(XXXVHE). Alors en effec nous fommes dans le cas del’ifolement parfait, où le difque eft fort éloigné de tout plan déférent ( XXXIX ) ; ifolement qui (je le répète) ne donne point au dif- que la force ‘de rélilter à l'attouchemgnt d’un corps déférent, fans que Tome XXII, Part. I, 1783. MAL. Xx2 Æ\TT 344 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fon électricité n’en fouffre , fi elle ne fe perd pas entièrement, cette prérogative érant réfervée fpécialement à l'ifolement imparfait dont il aété queftion jufqu’ici. : N°. XLIIT. C'eft pourquoi, tout confidéré , je regarde comme ifole- . ments imparfaits , & comme deux chofes à-peu-près équivalentes, pofer un corps fur un plan demi cohibent & demi-déférent, tel que le marbre, le bois fec, la chaux sèche , ou le pofer fur une mince furface cohibente qui couvre un déférent ; par exemple, fur un carreau de métal légèrement incrufté de cire d'Efpagne, ou bien verniflé , fur un plateau de bois ou de carton femblablement incrufté ou verniflé, fur une toile cirée, fur une table , un banc ou un lit couverts d’une étoffe de foie, &c. Dans le fait, fi vous faites defcendre une chaîne du conducteur d’une machine ordinaire fur un de ces plans revêcus comme nous venons de le dire, vous obferverez qu'on ne peut accumuler que très-peu ou point d'électricité dans le conducteur ; qu’elle paffe entièremeut ou peu s’en faut danse plan, fi la couche dont il eft revêtu n'’eft point un cohibent parfait, ou bien fi elle eft d’un tiflu rare , poreux, interrompu par des crevafles, ou qu’elle s'attache aux points feulement où la chaîne aboutit, & à un petit nom- bre de points voifins ; fi c’eft un cohibent parfait, ferré & uni, tant qu'y abondant continuellement , elle fe trouve en force fufifante pour vaincre la réfiftance que lui oppofe la couche cohibente, & pour sy ouvrir un paflage. La même chofe n'arrive pas, quand la chaîne du conducteur tombe fur une chaîne fort épaifle de matière parfaitement ifolante: on peut alors accumuler l'électricité dans le conducteur au je haut degré, Hé ! n’emploie-t-on pas en effet de gros pains de foufre ou de réfine pour ifoler convenablement une perfonne? Faites au contraire monter certe même perfonne fur une lame de métal , fur une petite planche légèrement enduite de cire d'Efpagne ou d'une autre matière réfineufe , ou feulement verniflée , {ur une table couverte d’une toile cirée , fur un banc revêtu d’une étoffe de foie, &c., vous perdez votre peine, Vous avez beau fatiguer votre machine, vous ne parviendrez pas à tirer de la perfonne , fi mincement ifolée , une de ces belles étincelles qu’elle vous donneroit , fi elle montoit fur un gâteau épais de cette même réfine , fur La même étoffe pliée à plu- fieurs doubles, N°. XLIV. Et cependant, fi vous pofez notre difque ordinaire felon fon plan fur cette même lame de métal, ou fur cette planche, légèrement incruftées l’une & l’autre de réline , ou même verniflées feulement , fur:certe même table couverte d’une fimple toile cirée , fur ce même banc couvert d’une étoffe de foie, il confervera plus long-temps l'électricité qu’on lui aura imprimée auparavant , & il en fera incomparablement plus ténace que fi vous Le pofez de la même manière fur une couche épaiffe de réfine ; puifque nous voyons dans ce dernier cas toute l'électricité s'évanouir dès la D _ SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 345 première fois qu'on touche le difqueavec le doigt ( XXXVIII. XXXIX), & nous la voyons au contraire à l'épreuve de plufeurs attouchemens dans le fecond cas , comme on l’a déjà dit € XXXVIII. XLI.). N°. XLV. Nous voilà donc ramenés par ces dernières expériences faites fur a couverts d’une couche cohibente peu épaifle (expériences qui ne diffèrent pas pour le fond decelles que nous avons faites fur des plans demi-cohiber.ts de leur nature ) ; nous voilà, dis-je, ramenés toujours au même point d'être forcés de reconnoître que le meilleur érat où puifle êtreun conduéteur pour conferver fon électricité, n’eft pas celui du plus grand & du plus parfait ifolement, mais bien au contraire , un état d'ifo- lement fi imparfeit , qu'on peut à peine lui donrer Le nom d'ifolement , ainfi que nous nous étions propolé de le faire voir. N°. XLVI. Mais j'ai avancé quelque chofe de plus, & les avantages qu'on peut fe procurer, en pofant le conducteur felon fon plan fur des corps très-peu cohibents , plutôt que de le tenir parfaitement ifolé , s’é- tendent plus loin, I y en a un bien plus confidérable que celui dont on vient a a cet dépend la folution de la plupart des problèmes avancés dans les premières pages de ce Mémoire, & c’eft de quoi nous . allons nous*occuper dans une feconde partie. Il me femble à propos néanmoins, avant de terminer celle-ci, de defcendre dans un détail plus - particulier fur les différentes efpèces de corps que j'ai employés avec plus ou moins de fuccès, eu égard à leur propre qualité & aux circonftances actuelles , tant pour les expériences que j'ai décrites jufqw’ici , que pour un grand nombre Re analogues à celles-ci, que je décrirai dans la fuite, Ce détail ne fera pas inutile à ceux qui auroient envie de répéter ces expé- riences. N°. XLVII. J'ai nommé bien des fois le marbre comme un des corps ui conviennent le mieux pour ces fortes d'expériences; mais auf j'ai de à entendre en plufieurs endroits , que tous les marbres ne réufliffenc pas également bien, & que le meilleur que j'ai trouvé eft le beau marbre de Carrare, & quelques albâtres (XX.XXXVI.) J'ai dir encore qu'il faut un marbre bien net , & fur toute chofe bien fec à fa furface (XX. XXVIIT) ; mais ce n'eft pas encore aflez. S'il eft humide intérieurement, comme il eft affez ordinaire quand il y a peu de temps qu'on l’atiré de la carrière ou qu’on l’a taillé , quand il a été long-temps expofé à l’eau, alors il eft trop déférent; ilne vaut rien ou prefque rien (XX VIII. XXXÏII, XXXIIL.). Inutilement l’effuierez-vous à fa furface: il faut le mettre chauffer quelques heures au feu ou au foleil. C’eft ce qu'il faut prefque toujours faire à l'égard des marbres qui ne réufliffent pas bien , comme {a plupart de ceux qui ont des taches, J'en ai pourtant beaucoup amélioré quelques- uns, en les féchant d’abord au four , en les graiffant enfuire avec de l’huile fine, & répétant plufieurs fois ces opérations, Les tables de marbre bien vieilles , qui fe trouvent communément dans nos falles , font prefque tou- 346 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, jours bonnes pour cet ufage, & fur-rout celles de marbre blanc : elles le font même, lorfque l'air eft chargé de vapeurs. IE weft pas befoin de les chauffer ; il fufhit de les efluyer, quand elles font vifiblement humides, C'eft en pofant le difque de métal fur quelqu'une de ces tables de marbre, & fpécialement de beau marbre blanc de Carrare, que je fuis parvenu à lui faire conferver l'éleétriciré pendant plufieurs heures, lorfque je ne le. touchois pas (XVII); pendañt plufieurs minutes, én le touchant par in- tervalles jufqu'à foixante fois, & quelquefois une demi-minute de fuite, avec un doigt, une cléf de fer, &c., en tambourinant même fur le difque avec mes doigts l'efpace de 20 fecondes & plus. N°. XLVIIT. Après le marbre, que j'ai foumis le premier à l'expé- rience, j'ai éprouvé d'autres pierres, & j'ai tiré un très-bon parti de plu- fieurs des plus dures , des carreaux d’agathe, de chalcédoine, &c. Ces fortes de pierres paroiffent l'emporter peut-être fur les meilleurs marbres,& les albätres,; mais le mal eft qu'on n’en trouve pas facilement pour en faire l’'ex- périenceen grand, Je n'ai pas obtenu grand'chofe de quelques autres pierres, . quoique dures auili , telles que Le granit, le porphyre, K peu ou rien des pierres molles & fpongieufes, à moins qu’elles n’euflenc été expofées long- temps au feu ou au foleil , avant de les éprouver. N°. XLIX. Les carreaux d'ivoire & d’autres os ne m'ont jamais beau- coup réuif , excepté dans des endroits où il n'y avoit point d'humidité, & par des temps très-fecs : encore falloit-il avoir la précäution de les bien Chauffer avant & pendant l'expérience, [l n’en eft pas de même de quel-. ques carreaux d'écailles, qui, fans avoir befoin d'une telle préparation, ont donné au difque qui repofoit fur eux, la force de conferver fon élec- tricité pendant pluleurs minutes, & de fouffrir plufieurs attouchements’ avec le doist, fans beaucoup de préjudice. N°.L. Je pafle aux bois, dont j'ai tait fouvent ufage, en les employant tantôt nuds , tantôt revêtus, préparés pat la Nature ou par le fecours de l'art. Je n’ai rien trouvé de mieux que des plateaux de bois frits précédem- ment dans l’huile‘de lin, mais qui, dégradés de l’état de vrai cohibent , ne faifoient plus qu'un déférent très-impartait , ainfi que d’autres petites tables chauffées dans le four prefque jufqu’à rouflir, & par confequent réduites à cet état moyen qui convient Le mieux pour les expériences doncil s'agit. Le difque placé fur. ces fortes ide bois a maintenu fon électricité, à peu de chofe près, comme fur les meilleurs marbres. Il l’a moinsbien confervée fur des planchertes de bois, que je n’avois pas fait rouflir au four , mais qui étoient pourtant Fort sèches de longue main, & que j'avois encore eu la précaution de faire fécher de nouveau & chauffer au foleil avant l'expérience. Avec de petites cables de bois bien nettes, bien unies & préfervées avec foin de l'humidité , fingulièrement quand elles étoient marquetées, ÿai con- fervé l'électricité du difque à épreuve de quelques attouchements, maïs en petit nombre, Si on vient à employer un bois tendre , qui ne foit pas bien _ SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 341 uni, ni extrêmement humide, ni extrêmement fec, un peu fale, l'expé- rience ne réuflit jamais bien, Le difque, pofé fur un tel bois, perd fon électricité en peu de minutes , quelquefois en deux ou trois fecondes, [ an- noñce pourtant une certaine ténacité , puifqu'on peut le toucher une où deux fois avec le doigt à la hâte, fansle dépouiller entièrement , tandis qu'il eft dans cette pofition, C’eft route autre chofe fi 14 table eft raboteufe , vifi- blement humide & abfolument fale. Placer le difque fur une rable pareille & lui faire perdre route fon électricité, c’eft prefque une feule & même chofe : il ne faut rout au plus, pour achever de le dépouiller , que le tou- cherun inflant avec le doigt, , - N°, LE Des bois médiocremient fecs , mais depuis long-temps enduits de Plâtre , font mieux pour lordinaire que des bois nuds, & réuffiffent aufli-bien qu'un mur qui n’eft ni mouillé extérisurement, ni intérieure- ment humide. Appliqué à ceux-là comme à celui-ci, notre difque retient l'éleétricité depuis 4 ou $ fecondes, jufqu'à 2, 3 minutes & plus, Il peut fouffiir en outre, fans la perdre toute entière , qu'on le touche une, deux, jufqu’à dix fois, pourvu qu'on ne le touçhe pas long-temps à chaque fois, à proportion que l'enduit de plâtre ou de chaux eft plus ou moins ec. LIT. Maïs un enduit qui vaut encore mieux que ceux dont nous venons de parler, c'eftun enduit de cire d'Efpagne, au de toute autre matière réli- neufe , ou de beau vernis. J'ai éprouvé de petites tables de bois, de carton , même de métal, enduites de la forte ; entr’autres certaines cu- vettes d'Angleterre, appellées communément cabarets | qui fènt faites de cuivre verniflé. Le difque leur ayant été appliqué , a gardé fon éleétricité, tantôt pendant un quart-d'heure, tantôt pendant une demi-heure ; quel- quefois même lorfque l’enduit étoit réfineux, durant plufieurs heures & jufqu’à un jour entier : d’ailleurs je pouvois le roucher (fpécialement quand il évoit appliqué à des plans verniflés) des dix, vingt, trente fois dans l'efpace d’une minute, fans le dépouiller entièrement. N°. LIT. Des tables éouvertes d’une toile cirée , m'ont rendu à-peu-près Je même fervice ; des toiles de tableaux peintes à l'huile m'ont également bien fervi, ou peu s’en faut. Mais il ne faut pas croire que route toile cirée ou peinte ait un égal fuccès. Comme celles qui font mouillées ou humides ne valent rien du tout , aufli les meilleures font les plus dures & les plus sèches , pourvu qu’elles foient d’ailleurs bien liffes & bien propres. Il eft à remarquer ici que les toiles peintes font plus variables que les voiles tirées ; pour peu qu'on les laiffe expofées à l'humidité , elles s'en reffentent immanquablement: celles pourtant des vieux tableaux , confervées Bien sèches dans les appartements , font bonnes en tout temps. N°. LIV. J'ai éprouvé diverfes peaux, le parchemin, le papier, com- munément avec peu. de fuccès, parce que ce font pour l'ordinaire, des corps fpongieux & très-humides: à proportion cependant qu'ils l'étoient 348 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, moins parfois, & par conféquent qu'ils fe trouvoient des déférents plus imparfaits , ils ont aufli confervé l'électricité dans Le difque de métal, mis en contact avec eux, pendant un certain temps , même après qu'il avoit été touché une, deux fois ou plus, avec le doigt. N°. LV. Enfin, le velours , Le raz , & toutes les éroffes de foie, même les plus fines, étendus fur un mur#tfur une table ou fur un lit, m'ont _toujours affez bien réufli; puifque ces étoffes, en leur appliquant le difque de métal électrifé felon fon plan , ne le dépouilloient qu'après un temps confidérasle, & qu’elles lui faifoient conferver une affez bonné partie de fon électricité , après avoir été touché plufieurs fois avec le doigr. Ces étoffes de foie fingulièrement , celles même de poils, tels que le camelor, réufiffent paflablement bien en tout temps, fans excepter les jours nû les lieux où il y a beaucoup de vapeurs, à moins qu’elles ne foient tout-à- fait fales ou vifiblement chargées d'humidité. Pour ce qui eft des étoffes de laine, elles demandent à être préfervées de l'humidité avec plus de précaution, & il en faut encore plus pour Îles toiles de coton & celles de lin, qu'il fera ordinairement convenable de faire fécher au feu ou au foleil, avantde s'en fervir pour nos expériences. Mais ces étoffes de laine, ces toiles de coton ou de lin, de même que les étoffss de foie, feront mieux, fi on les prend d’un tiflu ferré & plus rafes que velues. N°. LVI. J'ai indiqué les corps qui ont befoin pour l'ordinaire d’être féchés ou chauffés préalablement pour réuflir dans un temps même où l'air n'elt pas fort fec, J'ajouterai qu'il eft fouvent à propos d'entretenir une chaleur moyenne durant l'expérience même. Néanmoins on pourra fe pañler de cette précaution , dans le cas d’une grande & longue féchereffe, fur-tout fi elle eft accompagnée de gelée & d’un grand vent de nord, alors les bois , les os, les murailles, les pierres, les briques même, les étoffes de foie , de poils & autres, le cuir, le papier, tous ces corps, de quelque qualité qu'ils foient, font paffablement bien, pour ne rien dire . des toiles cirées ou peintes , qui font des merveilles. N°. LVIL. Ainf, nous pouvons dire qu'il n’y a que les matières mé- talliques , les charbons , Les pierres molles & fpongieufes , dans des temps & des lieux humides, les bois verds ou ceux qu'on n'a pas gardés aflez Long-temps ; enfin , tout corps ouhumide ou très-fale , & l'eau elle-même, qui enlèvent très-promptement l'électricité à un conduéteur, lors même qu’on l’applique à ces corps felon fon plan & par une large furface. L'huile & les autres liqueurs inflammables emportent bien auffi une grande partie de l'électricité; mais elles en laiffent toujours une petite dofe, tellement que notre difque ordinaire éle&rifé, & pofé légèrement fur un plateau métallique couvert d’une couche d'huile peu épaifle & levé peu de temps après , fe trouve en état d'attirer un fil léger, & de donner, quoiqu'avec bien de la peine , une petite étincelle. N°. LIL, Quant aux autres corps dont nous avons fait l'énumération (depuis SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 349 ( depuis Le n°, XLVI jufqu'au n°. LVI ), ces corps qu’on doit ranger dans la claffe des déférents, puifqu'ils ne font que peu ou point cohibents (XXXIIT) , enlèvenc bien aufli au difque de métal fon éleétricité , & l'en dépouillent même entièrement-en peu de temps, dans le cas où celui-ci ne les touche que par un de fes angles ou dans un petit nombre de points (XVI, XIX. XL ): mais s’il les touche felon fon plan & par une large furface , ils fe comportent de manière que l'électricité fe maintient dans le difque en entier, ou en partie plus grande ou plus petite, tantôt plus, tantôt moins long-remps ( XV. XVII. XVIII. XXVIIL. XXXIL XXXIV. &c.), même malgré plufieurs attouchements avec un doigt, avec una clef, &c., qui fufhroient pour Le déféleétrifer entièrement dans toute autre circonftance. Cette prérogative, particulière aux déférents imparfaits, ne convient nullement aux vrais & parfaits cohibents ( XXXVI) , fi ce n'eft dans la circonftance où ils ne font guères propres à ifoler; je veux dire dans Le cas où ils ne forment qu’une couche peu épaiffe fous laquelle il fe trouve un deférent, comme nous l'avons vu (XXX VIII. XXXIX. XLI & fuiv.). S N°. LIX. Cette dernière circonftance de la promptitude avec laquelle le difque de métal perd fon éleétricité, lorfqu'il touche un plan demi- déférent & demi-cohibent à angle ou dans un petit nombre de points feulement, eft une des chofés fur lefquelles j'ai infifté plus fouvent dans le cours de cet écrit , fpécialement aux n° XXVIIL & fuivants, pour faire fortir davantage ce qui a véritablement l'air d'un paradoxe; favoir, qu'en rendant la communication plus étendue, en multipliant les points de con- tact du difque de métal avec un même corps démontré perméable au fluide électrique , celui-ci, loin de fe difliper en entier & plus prompte- ment, s'y fixe incomparablement mieux, &sy maintient plus long-temps. I! falloit faire fentir combien la proximité & le contaét d’un petit nombre de points feulement éroient préjudiciables, & combien au contraire un contact étendu étoit favorable à la confervation de l’électricité. C’eft auffi ce que j'ai inculqué avec beaucoup de foin , en infftant fortement {ur la nécellité de pofer le difque felon fon plan, & non par le côté. Je n'ai pas voulu dire par-là que dans le cas d’un contaét peu étendu, le difque perdit toute fon électricité à l'inftant; au contraire, ou j'ai toujours mo- difié la propoftion avec un prefque , ou je me fuis fervi de ces expreflions : bientôt , en peu de temps, où autres équivalentes, pour donner à entendre que toutes les fois que le contact qui fe fait dans un petit nombre de points feulement fera très-court , alors on appercevra dans le difque quel- que petit refte d'électricité. C’eft fur quoi je me fuis expliqué encore bien plus clairement, lorfque j'ai parlé de la réfiftance & du retard que les déférents imparfaits apportent au paflage du fluide éleétrique (XXXIIT). Ainfi, qu'en tenant mon difque électrifé par fon manche ifolant , je Le fafle tou- cher par le côté à un mur , à un carreau de marbre ou à du bois bien fec, Tome XXII, Part, 1, 1783. MAL. Y y 350 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, une feule fois, en le retirant preftement , j'y trouverai encore un refte d'électricité ; il attirera un fil; il pourra même me donner une petite étin- celle, pourvu que ce marbre, ce bois, ce corps quelconque que j'ai tou- chés avec le difque, aient les conditions requifes, c’eft à dire ,que ce foit des conducteurs très-imparfaits & prefque cohibents. La petite étincelle fera encore plus fenfible , fi ces corps font enduits de réfine ou de vernis. N°. LX. Je dois faire part du moyen dont je me fers pour éprouver fi tel ou tel corps eft bon, & ce que je dois en attendre , quand je veux en faire un plan pour y pofer le difque à l'ordinaire. Je choifis, comme les meilleurs , ceux qui laiffent au difque électrifé , après qu'il les a touchés de côté, la vertu de me donner au doigt une étincelle, qui ne foit ni forte, ni aufli extrêmement foible : extrèmement foible , elle m'apprend que le corps touché eft trop déférent , & qu'il ne manqueroit pas de défélectrifer le difque en peu de temps, quand même je le lui appliquerois felon fon plan (XXVIIT) ; fi l'étincelle eft forte , jen conclus que le même corps touché eft trop cohibent , & que par conféquent le difque que je lui appli- querai felon fon plan pourra bien conferver long-temps fon électricité, tant qu'on ne le touchera point avec le doicrt , avec une clef de fer, &c., mais qu'il ne la défendra point contre des attouchements multipliés de ces mêmes corps, La fuite au Mois fuivant. SEVPOTIT: EE DES OBSER VATIONS SUR LA DURANCE; Par M. BERNARD. Queflion I"°. Le: cailloux arrondis qu'on voit dans le lit de la Du: rance , dans les plaines & fur les collines voifines de fes bords , font-ils des corps primitifs , & qui foient fortis des mains de la Nature tels qu'ils font & dans la place qu'ils occupent? J'ai remarqué qu'il y avoit la plus grande variété dans la nature de ces cailloux ; que les quartz de différentes couleurs , les pierres de roche, les ferpentines , les grès, les filex , les granits étoient confondus & placés in- différemment à côté les uns des autres; que ces cailloux étoient ordinaire- ment défunis , & que, lorfqu'ils formoient des rochers, ils étoient liés par des matières qui leur étoient étrangères ; enfin , que chaque caillou appar- tenoit, de la manière la plus déterminée , àun genre diftiné, L fuffit de connoitre la manière dont font organifées les montagnes for« # fl ' SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS: 351 mées de chacune de ces diverfes efpèces de pierres, pour favoir qu'elles s’exclueñt pour ainfi dire mutuellement. Or , ici les pierres dés montagnes à couches {e trouvent confondues avec les productions des montagnes à f- lons. L'organifation des premières s'annonce pourtant de la manière la plus marquée: on Voir très-fouvent les cailloux arrondis difpofés fur les collines par lits, & repofant fur des couches de fable, de marne, ou fur des débris d'anciens êtres vivants. J'ai ramaflé dans le torrent des Mées , des cailloux calcaires arrondis fur lefquels on voyoit des empreintes de portions de groffes cornes d'ammon. IL eft donc évident qu'il y æeu un temps où ces cailloux appartenoient à des mafles plus confidérables, & où ils n’étoient qu'une matière molle plongée dans la mer. Il y a eu des Phyfciens, qui, renouvellant l’opinion de Poflidonius, ont prétendu que les cailloux roulés qu’on voit raflembiés dans des lieux éloi- gnés des bords des rivières, étoient originairement du limon charrié par des eaux courantes dans des lacs , & que ce limon avoit pris de la confif- tance & de la dureté à mefure que les eaux s'éroient diiipées : mais ce {yfRème eft entièrement deftitué de vraifemblance. En effet, fi la matière des cailloux qu'on obferve fur les collines voifines de la Durance avoit été toute molle à-la-fois, ilauroit fallu que les parties propres à former cer- tains genres de pierres ,fe fuflent raflemblées comme par enchantement. Il auroit fallu, par exemple , que le mica, le feld-fpath & le quartz fe féparant des parties crayeufes & argilleufes qui nageoïent à leur voifinage, fe fuffent réunis pour faire les granits, Mais ce n’eft pas là Le cout; il faudroit encore rendre raifon de la rondeur des cailloux. Or , Le limon fe fend bien en durciffant ; mais les gerçures font toujours verticales & anguleufes : on ne peut lui faire prendre une forme arrondie qu'en Le mutilant & qu'en le roulant. On, peut donc aflurer que les cailloux qui forment les plaines & les collines voifines de la Durance ne font pas des corps primitifs; qu'ils ap- partenoïent originairement à des roches de différentes efpèces ; qu'ils ont été tranfportés à la place qu'ils occupent, & que leur forme arrondie & le poli de leur furface eft un indice certain des mouvements qu'ils ont efluyés. Queflion II. Ces cailloux ont-ils été fournis par les montagnes voifines des endroits où on les voit accumulés ? Nous l'avons déjà dit; on n’obferve fur les montagnes de la haute-Provence que des marnes & des pierres cal- caïres : aufli tous les torrents qui y ont leur origine , & qui fe jettent dans la Durance , ne tranfportent pas une pierre vitrifiable. IL faut pourtant ex- cepter le Verdon , qui, traverfant quelques contrées où le fable quartzeux eft abondant , a des grès dans fon lit: mais d’ailleurs les cailloux calcaires charriés par les torrents, diffèrent eflentiellement de ceux qui font réunis en mafle au voifinage de la Durance. Ceux-ci font beaucoup plus durs, Tome XXII, Part, I, 1783. MAL. Yÿ2 352 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, mieux arrondis, & ils donnent une chaux fort fupérieure à celle que Les autres fourniflent. Comme les cailloux calcaires font placés près des granits, & confondus avec un grand nembre d’autres efpèces de pierres étrangères à la partie de la Provence où elles font raflemblées, il n’eft pas doüteux que toutes ces pierres arrondies n’aient été tranfportées & accumulées par la même caufe ; mais il eft évident aufli que les montagnes actuellement exiftantes qui en- vironnent ces amas de cailloux, n’en ont fourni aucun, quoiqu’elles foient beaucoup plus élevées. Queflion III, Ces cailloux ont-ils été tranfportés par la Durance ? C'eft une opinion ancienne & généralement adoptée, que le tranfport du gravier ne dépend que de la rapidité des eaux courantes, & que les ri- vières qui ont toujours beaucoup de vitefle en charrient continuellement. 11 faut avouer que cette idée eft , en apparence , très-conforme à la raifon; & lors même que des phénomènes multipliés la démentent de la manière la plus formelle, on a de la peine à l’abandonner, tant les préjugés éta- blis par l'imprefion des fens ont pour nous d’empire. J'ai avancé le premier, dans un Mémoire couronné par l'Académie de Lyon, que cette opinion, érigée en principe dans tous les livres d'Hy- draulique , étoit fau. J'avoue aujourd'hui avec fatisfaction que j'ai trouvé les arguments les plus décififs pour la combattre , en obfervant la rivière qui paroît raflembler au premier coup-d'æil tout ce qui peut contribuer à l'étayer. En effet, la Durance a toujours un volume d’eau fort confidé- rabl: ; ayant environ 3 lignes de pente par toife , fon principal courant eft conftamment rapide ; fes eaux ne font jamais limpides; elle a dans fon lit des amas énormes de cailloux arrondis , qui paroïflent partager fon infta- bilité. Enfin , dévaftant fucceflivement chacun de fes bords, tantôt elle engloutit des terres labourables, & vantôr elle en rend de nouvelles à YAcriculture. Tous les anciens Auteurs ont parlé de la Durance comme d’un torrent extrêmement rapide ; mais il n’en eft aucun qui ait exprimé d’une manière plus précife les effets des eaux , d'après l'imprefion qu'elles font générale- ment , que Tite-Live, à l'occafion de l'expédition d’Annibal. Voici fes paroles (1):« Detoutes les rivières qui ont leur fource dans les Alpes, il » n'en eft point qui foit plus difficile à pafler que la Durance; la mafle » d’eau qu’elle roule eft immenfe, & cependant elle n’eft pas navigable : » elle n’a pour ainfi dire point de bords : elle occupe à-la-fois plufieurs (r) Is G ipfe ( Druentia) Alpirus amnis longi omnium Aluminum difficilimus tranfiue eff. Num cum aquæ vim vehat ingentem, non tamen navium patiens ef? , quiz nullis coer- cirus ripis , pluribus fimul neque iifdem à Locis fluens, nova femper vada novosque gurgitus faciens (& ob id pediri quoque incertz via efE), ad hæc faxa glareofx vel glo- merofa volyens , nihil flubilis nec tuti ingredienti prober. Tite-Liv. Décad, 3, liv. r. SUR L'HIST, NATURELLE ETLES ARTS. 353 » lits, fans en avoir jamais de permanents: il s'y forme à tous moments de » nouveaux gués & de nouveaux gouffres, de manière que les piétons » même n’y ont pas de paflages fixes ; comme d’ailleurs elle entraîne con- » tinuellement des cailloux arrondis , elle n'offre à ceux qui yentrent qu’un » fond fugitif & qu'une rraverfée dangereufe », J'obferverai d'abord que M. d'Anville , dans fa Carte de l'expédition d’Annibal en Italie , marque le paflage de ce Général vers la fource de [x Durance. On voit ainfi que Tite-Live n’a parlé de cette rivière que parce qu'elle lui fournifloit occafion de faire un tableau intéreffant. Sa defcriprion n'eft point relative aux lieux où s'effectue le paflage de l’armée , & il me fera aifé de faire voir qu'elle renferme les plus grandes exagérations relati- vement au tranfport des cailloux. J'ai indiqué, dans le Mémoire déjà cité, les dirconftances néceffaires pour que les eaux courantes puiflent charrier du gravier. J'efpère traiter cette matière avec plus d’exactitude & de précifion , dans un Ouvrage que je publierai bientôt fur les meilleurs moyens de diriger les rivières. Je me bornerai à préfent à rapporter quelques obfervations qui démontrent que la Durance ne charrie réellement pas beaucoup de gravier. J'ai mefuré, dans différents points du cours de la Durance, fa vîteffe Le moyen que j'ai employé eft extrémement imparfait; mais par-là même il eft propre à fournir des arguments plus difficiles à détruire, Je mefurois fur les bords de la rivière, & parallèlement à la diretion du courant, une bafe étendue, Je me plaçois à l'extrémité fupérieure, tandis qu'une autre perfonne éroit à l'extrémité inférieure. Je jettois au-deflus de la place que j'occupois des morceaux de bois léger, aflez longs pour qu'on püc les diftinguer facilement, mais qui, par cette raifon, éprouvoient plus de ré- fiftance de la part de l'air, & prenoient plus difficilement la vitefle de l'eau. Dans l'inftant où ces corps arrivoient devant moi , je mettois en mouvement un pendule, qui battoit exaétement les fecondes , & je comp- tois les vibrations, jufqu'à ce que l’autre obfervateur m’annonçit, par un mouvement rapide , l'inftant où ces corps légers pafloient devant lui. Je faifeis ordinairement huit à dix expériences dans le même lieu, 5 Un efpace de 80 pieds fut franchi en dix fecondes au-deflus des Mées , près d'un endroit où la Durance vient frapper contre un rocher. J'ignore fi c’étoit là le principal courant. Les eaux de la rivière étoient troubles , mais elles écoient bafles. Dans les mêmes circonftances, des corps légers parcouroient 8 pieds par fecondes à Ganagobie , à l'endroit où le bac étoit établi. Le long d’une digue de Peyrolles, dans un endroit où les ondes étoient «affez confidérables, il fallut quelquefois vingt-quatre fecondes aux mor- ceaux de bois pour franchir un oi de 160 pieds. Mais il arriva auf que ces corps légers arrivèrent à l'extrémité de la bafe en vingt-une fe- 354 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, condes. IL étoit rare qu’ils ne fuflent pas jettés dans des tournants voifins du principal courant. Au-deffous de l'endroit où les eaux étoient fi agitées à la fur- face, je mefurai une bafe de 64 pieds: elle fut parcourue une fois en fix fecondes; mais dans la plupart des expériences , il fallut fept à huit fecon- des ; les eaux étoient troubles, mais aflez bafles. Au-deffus de l'endroit où étoit établie la barque de Pertuis , dans un ef- pace qui fuccédoit à un courant, & où les eaux avoient une furface fort unie, je trouvai que ces corps légers parcoururent un efpace de 160 pieds “ tantôt en feize, tantôt en dix-fept, & tantôt en dix-huit fecondes; l'eau étoit un peu trouble , mais il n'y avoit pas eu de crue depuis quelque temps. En faifant fonder à mefure que je paflois dans la barque, je trouvai que la rivière avoit 4 pieds"de profondeur dans l'endroit où elle étoit plus ra- pide. Dans la plus grande étendue de fonlit , elle n'avoit guère que 3 pieds; mais dans d’autres , elle avoit $ pieds. Enfin, il fe trouva quelques points aflez voifins du bord, où l’eau étroit plus tranquille, mais où elle avoit 6 pieds de profondeur. La Durance éroit divifée en deux bras; le petit étoit peu confidérable , & le grand avoit $o toifes de largeur. A Merindol , au-deflous de l'endroit où la barque eft établie, un efpace de 102 pieds fur parcouru en douze fecondes ; les eaux étoient afñez bafles, & ily avoit long-temps qu'il ny avoit pas eu de crue. Si je n'ai pas fait un plus grand nombre d’obfervations fur la viteffe de la Durance, c'eft que lorfque je me trouvai dans des lieux où cesexpériences étoient praticables, Le vent m'empêcha de remplir mes vues. J'aurois fur- tout defiré de faire ces obfervations à Bonpas , & près de l'embouchure. Autant que j'ai pu juger, les eaux n'écoient pas aufli rapides à Bonpas qu’à Pertuis; elles éroient réunies dans un litunique, qui avoit fo toiles envi- ron de largeur: mais la profondeur étoit plus grande qu'à Pertuis. Les Bateliers me dirent qu'au temps des crues, la Durance étoit rapide au point que, fi on vouloit la traverfer alors, le bac feroit infailliblement emporté. Comme dans les expériences précédentes , Les morceaux de bois ne pre- noïent jamais la vitefle du courant , il fuit que la Durance parcouroit, dans un temps où fes eaux étoient baffes, & où non feulement elles ne char- rioient pas du gravier, mais où ellesétoient léoèrement troublées, 10 pieds par feconde dans un grand nombre de points de fon cours. Or, il eft dé- montré que cette viteile eft fort fupérieure à celle qui eft néceflaire pour charrier du gravier. Il eft donc certain que le tranfport du gravier ne dé- pend pas précifément de la rapidité des eaux , & que la Durance n'en charrie point, lorfqu'elle eft dans fon état ordinaire. Mais on peut fe con- vaincre aifément que, lors même que cette rivière eft fort enflée , elle ne tranfporte pas loin le gravier, Parmi un grand nombre d'obfervations ‘ SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 3ss particulières que je pourrois citer pour prouver ce que je viens d'avancer, je n'en choifirai qu'une , dont les détails m’ont été fournis à Villelaure. La Durance couloit dans un lit affez étroit, vis-à-vis du Puy ; mais une partie de fes eaux , au temps des crues, fe dirigeant du côté de Villelaure , caufoit à ce dernier territoire,des dommages confidérables. A l’origine de ce courant particulier, on établit fur une aflez grande étendue un lit de fafcines qu'on couvrit de cailloux. Cette barricade , fi foible , a réfifté pen: dantun grand nombre d'années à l’impétuofité des eaux ; elle ne s’eft abaiffée que parce que le bois des fafcines s'eft pourri. Au refte , il eft bon d’avertir que les fafcines étoient plus nuifibles qu'utiles à la ftabilité de cette efpèce de levée, parce que le bois ayant une moindre pefanteur fpécifique que l’eau , devoit tendre à s'élever , &c. Mais il y a une obfervation générale , qui prouve fans réplique que la Durance charrie très peu de cailloux. Son cours eft connu depuis plus de deux milleans; & depuis lors, elle ne s’eft jamais écartée des établiflements formés fur fes rives, & elle a toujours eu fon embouchure à une petite diftance d'Avignon, Il eft certain qu’on voit dans un grand efpace, avant qu'elle entre dans le Rhône , que fes attériflements ne font formés que de cailloux confidérablement plus petits que ceux qu’on obferve fupérieurement dans toute l'étendue de fon lit. Si tous ces gros cailloux étoient charriés par elle, on les verroit à fon embouchure; s'ils n'y parviennent pas, c'elt une preuve que leur mouvement progreflif eft extrêmement lent. ù Si on m’objeétoit que ces cailloux entrent dans le Rhône , on feroit éga- lement embarraffé pour favoir ce qu'ils deviennent ; car on cefle d'en trouver dans le lit de ce fleuve à peu de diftance de Tarafcon : d’ailleurs on fait ue le Rhône en charrie lui-même, & on reconnoît immédiatement au- dure de l'embouchure de la Durance, à la grande quantité de granits qui font dans les attériflements , que cette rivière ne les a pas fournis, Enfin , il feroit poflible que la Durance coulat près de fon embouchure fur de très-gros cailloux, fans que cela-prouvât qu'elleles eût charriés ; car on verra par la fuite de ce Mémoire que ces cailloux arrondis font le fol na- turel fur lequel la rivière coule. Je ne crois pas que perfonne osât dire férieufement, d'après Gugliel= mini, que les cailloux roulés par la Durance prennent un mouvement fi rapide , qu'ils fe réduifent en fable avant d'entrer dans le Rhône, Mais on pourroit faire une objection fpécieufe pour prouver que la Durance a la puiflance de charrier beaucoup de gravier | même fort près de fon embou- chure. Voici cette objection. C’eft un fait que cette rivière n’a pas de lits fixes ; qu’elle s’en forme elle-même fouvent de nouveaux , & qu’elle com- ble ceux qu’elle abandonne : or, elle ne peut pas produire ces effets dans tout fon cours, & jufqu'auprès de fon embouchure, fans tranfporter même alors des mafles énormes de gravier. 356 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, y Pour répondre à cette objection, il fuffit de confidérer ce qui fe pafle dans un champ où l’on met la charrue. Le foc ouvre & déplace la terre fans l'emporter ; il creufe & comble tour-à-tour des fillons. Voilà l'image fidelle de l'effet que produifent les eaux dans Le lit des rivières; & certai- nement fi les chofes ne fe pafloient pas comme je le dis, fi les mafles énormes de cailloux que la Durance déplace dans tous les lieux où elle fe creufe de nouveaux lits , étoient pouffées devant elle , ces cailloux ne par- venant pas jufqu’à fon embouchure , & pouvant former des dépôts extraor- dinaires dansune feule crue, on verroit pour ainfi dire le lit de la rivière s'élever continuellement, & il ne lui faudroit qu'un petit nombre d'années pour combler les valléés qu’elle traverfe. Si les mauvais raifonnements des Phyficiens peuvent alarmer les Ha- bitants des bords de la Durance , d’un autre côté l'expérience doit les raf- furer. Depuis Volonne & Les Mées jufqu'à Cavaillon & à Noves, on n’a pas plus à craindre fes ravages que lorfque ces lieux eurent leurs premiers Habitans ; les eaux ne font pas devenues plus menaçantes , & fenfiblement plus élevées. Elles fe balancent, il eft vrai, dans un lit vafte: mais en fe formant des rives nouvelles ; elles ne déplacent guères dans les mêmes lieux que les mêmes cailloux. j IL y a des perfonnes qui prétendent que la Durance approfondit fon lit, & que fes eaux étoient autrefois plus élevées qu'elles ne le font à préfent ; mais cette opinion eft aufli peu fondée que celle que nous venons de com- battre. En effet, il eft certain que tous Les torrents qui fe jettent dans la Du- rance y amènent du gravier (1); & cela eft produit avec d'autant plus de facilité , qu'une grande partie des coilines qui font fur les bords de la ri- -vière, font prefque entièrement formées de cailloux roulés. . Left certain d'un autre côté qu'il y a très peu de cailloux qui franchif- fent l'embouchure de la Durance: aïnfi,il y en entre plus qu il n’en fort, Le lit de cette rivière doit donc s'élever conftamment, Comme il eft im- menfe, les dépôts des torrents ne peuvent devenir fenfibles qu'après des temps très-longs ; mais fon élévation n’elt pas moins réelle , quoiqu'on n'en puifle pas fixer les progrès, On voit évidemment à Arles, que les eaux du Rhône font beaucoup plus hautes qu’autretois : mais il n’y a pas, que je fache , fur les bords de la Durance , d'anciens monuments , qui puiflent fervir à faire connoître (1) Toutes les plaines qui font au pied de collines formées de cailloux roulés , fur-tout lorfque celles-ci font cultivées , s'élèvent fenfiblement. On peut s’en convaincre dans une infinité d’endroits. On voit des aoyers antiques, des chênes, dont le tronc eit prefque entièrement enterré, de . SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 357 de combien le lit de cette rivière s’eft élevé depuis un certain nombre de fiècles.… On voit, dans tous les endroits où la Durance refferrée trouve des mon- tagnescalcaires (1), qu’elle coule même alors fur des bancs de gravier pro- fonds. Si elle creufoit fon lit, fes eaux peferoient immédiatement fur les racines des montagnes voifines, & non pas fur les mêmes efpèces de cail- loux qu’elle montre dans tout fon cours. Ce qui a fait croire fans doute que la Durance approfondifloit toujours plus fon lit, c’eft qu’il y a un grand nombre de torrens ,qui, avant de s'y jetter, s’en font creufé de très-profonds dans les collines qu'ils traverfent. Mais il faut remarquer que cela ne s’obferve que fur des collines penchan- tes, où les cailloux font peu adhérents, & où ils roulent pour ainfi dire d'eux-mêmes, quelque petite que foit la force qui les mette en mou- vement, ? . En admettant que les cailloux qu'où obferve fur les bords de [a Du- rance ontété tranfportés par cette rivière, foir qu'on prétende qu'elle creufe fon lit, foir qu'on penfe qu'elle l'élève, on tombe néceffairement dans les contradictions les plus palpables, En effet, il eft certain que dans une in- finité d'endroits, la Durance eit appuyée & coule fur des rochers formés de cailloux roulés. Or, fi elle creufe fon lit, on ne devroic pas ÿ trouver des cailloux , puifqu’on fuppofe qu'elle les apporte ; & fi au contraire fon niveau s'élève toujours, elle ne peut pas avoir formé les. collines qui font fur fes bords, Puifque les mêmes effets répondent toujours aux mêmescaufes, & puit que toutes les rivières élèvent leurs lits , il fuit que les plaines formées de cailloux roulés qui font voilines de la Durance , & qui font élevées au- deffus du niveau des plus hautes eaux , n'ont pas été formées par cette ri- vière ; à plus forte raifon les collines qui dominent ces plaines & offrent la même organifation , doivent-elles leur exiftence à une caufe difé- rente. Lorfqu’on voit depuis Malijai , fur la rive gauche dela Durance, dans un efpace de fept à huit lieues fur une largeur qui en a quelquefois plus de quatre, des montagnes continues , uniquement formées de cailloux roulés ou de fable, & élevées de plus de 150 toifes (2) fur le lic actuel (1) A Mirabeau , à Janfon , à Orgon, &c. (2) M. Pifton , connu par fon exaétitude & fon goût diftingué pour les Sciences na- turelles ,a déterminé, avec un excellent baromètre, la hauteur d’un grand nombre de montagnes de ceue Province fur le niveau de la mer. Voici quelques obfervations qu’il m’a fo'rnies. A Sifteron, devant la Paroïfle, le mercure étoit plus bas qu’au niveau dela mer, de ‘ : . . , . . . . 19 lie. A la terrafle du Château de Lurs, qui eft un peu moins élevée que les rochers co- Tome XXIL, Part, I, 1783. MA I, Zz 358 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, de la rivière, quelqu'idée qu’on fe forme de fa puiffance, il faut avoir un goût extrème pour le merveilleux , pour croire que ces montagnes lui doi- vent leur exiftence, En comparant des obfervations barométriques faites à Sifteron & à Saint-Maxime, près de Riez, qui font indiquées dans les notes , on trouve que ce dernier endroit eft plusélevé que l'autre de 70 toifes fur Le niveau de la mer, Or, les collines de cailloux roulés les plus élevées auprès de Sifteron, font inférieures au fol de la Paroiffe: donc la difpofition & la hauteur des dépôts de la rivière feroiene en fens contraire de fon cours. Si fa Durance avoit charrié les cailloux qui font au-deflous de Sifteron, comme elle n'a pu jamais pafler qu'à travers la montagne où fe trouve le ont , il faudroit néceffairement qu’elle eût laiflé des cailloux fur fon cours à une élévation au moins approchante de celle des montagnes de Riez. Or, c’eft ce qu’on n’obferve pas. A peu de diftance de Sifteron , les collines graveleufes qui font fur la rive gauche de la Durance font peu élevées , & celles qui les dominentenfuite, & qui s'étendent vers l'eft ,font formées de pierres calcaires ou de marne, & elles fonc dans l'efpace de plufieurs lieues de plus de 6o toifes au-deffous du niveau des montagnes de Riez. On dira peut-être que la Durance feule n’a pas fourni ces amas de cail: Joux roulés, & que les rivières qui les traverfent en ont fourni une partie; mais cela n’eft pas foutenable. J'ai fuivi dans un aflez grand efpace le Ver- don au-deflus & au-deffous de Caftellane, Tant que cette rivière pafle dans le pays marneux , on ne voit aucun caillou roulé au-deffus de fon lit; mais à une lieue & demie au-deffas de Beauduen, elle entre fubitement dans une vallée bordée des deux côtés de montagnes de cailloux roulés, élevées de plus de 100 toifes fur fon niveau. Parmi une infinité de preuves , qui démontrent que ces montagnes cailloureufes ne peuvent pas être fon ou- vrage, je n'en choifirai qu'une, Au-deffous de Bsauduen , le Verdon paffe à travers une montagné calcaire contiguë aux montagnes graveleufes, & de même élévation qu'elles: là des rochers efcarpés lui fervent de bords dans une certaine étendue, & lui forment un lit aflez étroit pour l'empêcher , au temps des crues, de s'échapper avec facilité. Si certe rivière a formé les collines graveleufes, il faut reconnoître qu’elle a aufli formé la montagne calcaire. quilliers & cailloutés qui couronnent [a montagne, u : = 21 ie. A Riez, à la Paroïfle, : - ; : : : 20 lig. A YEplife de Saint-Maxime , près de Riez, qui n’eft pourtant qu'a la partie la plus baffe d'une plaine de cailloux reulés, qui va toujours en s’élevant vers Moutiers, 24 /ig. M. Pifton, en fuppofant que chaque ligne d’abaïffement da mercure dans le baro- mètre répondoit à 14 toifes de hauteur , trouva que la terraffe du Château de Lurs étoit élevée de 112 toifes fur le riveau de Ja Durance. En confervant la même valeur pour chaque ligne d’abaiflement du baromètre, l'Eglif de Saint Maxime fe trouve élevée de 154 toiles far le niveau de la Durance, vis-à-vis de Eurs. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 359 J'ajoute ençore cette réflexion : S'il y a eu un remps où la Durance char- rioic une fi grande quantité de cailloux , pourquoi a-t-elle ceflé de produire les mêmes effets, & comment arrive:t-il aujourd'hui que, malgré fa rapi- dité , elle n'en amène plus jufqu'à fon enibouchure ? | On a vu, dans la defcription des environs de la Durance, que la Craute- noit aux plaines & aux montagnes decailloux roulés que j'ai fuivies jufqu’au- deflus de Sifteron, Ainfi cette plaine , ff merveilleufe aux yeux des Phyfi- ciens, n’eft réellement qu'une portion peu confidérable d’une contrée fort érendue, où la Nature a raffemblé une quantité immenfe de cailloux. On trouve dans Ja Crau des variolites, des ferpentines , &en général les mêmes pierres dont font compofées les collines voifines de la Durance à Sifteron, à Barbentane, &c, Mais ces obfervations , en indiquant que ces collines & la Crau doivent leur exiftence à la même caufe, ne prouvent en aucune manière que la Durance les a formées. Les cerres falées qu'on trouve au nord d'Arles, à une petite profondeur, dépofent que la mer y venoit dans des temps reculés. On fait que ce font les.créments du Rhône qui l'ont éloignée ; d’un autre côté, l'étang de Berre recevant les dépôts de la rivière d'Arc, a dû diminuer continuellement. La Crau étoit ainl environnée autrefois par la mer de tous les côtés , excepté vers Le nord. Si dans ce temps, la Durance y avoiteu fon embou- chure ; elle eût dépofé fur fes bords des terres fertiles, comme elle La faic à Barbentane; fi elle eût charrié quelques cailloux , ils euffent été fort pe- tits. Mais reconnoît-on , en voyant la Crau, les dépôts d’une rivière par- venue à fon embouchure ? Puifqu’oneft conduit conftamment à des abfurdités , en fuppofant que les cailloux qu'on obferve danse lit & fur les bords de la Durance ont été charriés par cette rivière , il faut néceffairement , pour fe rendre raifon de leur origine, recourir à une caufe plus puiffante. La mer eft la feule qui fe préfente ; je l’avois indiquée dars un temps (1) où je n’avois pas fait aflez d'obfervations fur les contrées voifines de la Durance, & où je n'étois encore guidé fur les effets des eaux courantes que par la théorie ordinaire, Mais à préfent la queftion eft entièrement décidée; mes prin- cipes, fi je ne té trop, feront accueillis par les Phyficiens: quant aux perfonnes qui voudront des preuves plus palpables, je les conduirai fur les bancs de pierre coquillière , qui, depuis Ganagobie jufqu'à Barben- tane & jufqu'au Cap Couronne, accompagnent fans interruption les amas de cailloux roulés (2) : en leur montrant les effets de l'agitation des eaux (1) Mémoire furle Rhône , couronné par l’Académie de Marfeille. (2) On voit des collines de cailloux roulés depuis Antibes jufqu’au-delà du Var, & depuis la mer jufqu’à Vence , & en général jufqu au pied des montagnes calcaires élevées qui forment le commencement des Alpes maritimes. On ne peut certainement pas attribuer l'origine des collines aux rivières qui les traverfent; elles offrent une conformité Tome XXII, Pare. I, 1783. MA I. Æa2 360 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fur des débris de rochers, je leur ferai voir que dans le même temps & dans les mêmeslieux , la nature formoit des montagnes de débris d'êtres vivants; elles trouveront à chaque pas les pierres arrondies qu'on ne trouve communément que dans le lit des rivières confondues avec les productions de la mer; & l’état où celles-ci font réduites . l’arrondifflement de leurs angles leur indiquera qu’elles étoient foumifes à la même puiffance qui ballotoit & polifloit Les cailloux. Mais ces pierres coquillières & ces amas de cailloux roulés ont-ils été formés dans une mer aufli tranquille que la Méditerranée? C'eft ce qui ne paroît pas vraifemblable. Les Phyfciens qui ont penfé que la Crau étoit un dépôt nouvellement formé par la mer, fondoient fans doute leur opinion fur ce qu’on voyoit au milieu de cette plaine & fur fes bords des coquil- lages fofliles d’une parfaite confervation. Mais cette preuve devient bien foible , lorfqu’on a obfervé des coquillages aufli confervés à Lurs & à Ma- nofque qu’à litres & au Cap Couronne ; lorfqu'on n’a obfervé aucune différence entre ceux qui font pour ainfi dire encore baignés par les eaux de la mer, & ceux qui font élevés de plus de 3co toifes fur fon niveau, » Du lit de la Durance, & des effes généraux qu'elle produit. Il étoit néceffaire de prouver que la Durance ne charrie pas une grande quantité de cailloux , malgré fa rapidité; car fi , en lui donnant des bords, fon lit devoic être comblé facilement & s'élever toujours, il feroit plus dangereux qu’utile de contenir cette rivière : elle auroit tôt ou tard fon cours au-deflus du niveau des campagnes, & elle finiroit infailliblemenc par les dévafter. La première chofe qu'il faut déterminer , avant d'entreprendre de fixer la Durance, c’eft la largeur du lit qu’elle doit avoir: or, gette largeur doit varier felon les lieux où elle coule. Perfonne n'ignore que cette rivière eft bien plus puiffante lorfqu'elle a reçu Bleome, Afle, le Verdon, que lorfquelle n'a pas encore été groflie par ces torrents. La détermination de la largeur du lit de la Durance eft un point ex- trêmement délicat, & qui demande des obfervations & des difcuflionstrès- étendues. Je me contente de remarquer qu’en fixant cette largeur, il faudroit fe garder de fe régler fur celle de cette rivière dans les lieux où elle eft naturellement reflerrée entre des rochers. Les ouvrages qu’on feroit pour la fingulière avec les collines qui font fur les bords de la Durance. J'ai obfervé qu’elles étoient avoifinées depuis Biot jufqu'à Vence, paryun banc de pierre coquillière, en- tièrement femblable à ceux qui fe trouvent fur les collines voifines de la Durance. Foyez mon Mémoire fur les engrais, couronné par l'Académie de Marfeille, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 36: contenir feroient plus aifément affouillés; leur conftruction feroit beau- coup plus coûteufe, & les ravages qu'elle feroit en forçant fes digues, feroient infiniment plus grands. On a toujours parlé de la Durance comme d’une rivière extréèmement rapide; mais fa grande vitefle n'eft pas à beaucoup près l’obftacle le plus grand qu'on rencontre pour la fixer. C’eft la nature du fond de fon lit & des terres qui font fur fes bords, qui fait naître les plus grandes difi- cultés, en contribuant à rendre plus coûteufe & plus incertaine la ftabilité des ouvrages qu’on peut entreprendre pour l’encaifler. Les gros blocs de pierre qu'on emploie à la conftruétion des digues ne font jamais emportés; mais rien n'eft fi ordinaire que de voir détruire la bafe fur laquelle ils repofent, & alors ils tombent & s’écroulent d’eux- mêmes, 4 S'il y avoit dans le lit de la Durance des rochers peu profonds, fur lef- quels on püût afleoir des digues , rien ne feroit fi aifé & fifür que de fixer cette rivière; mais prefque par-tout les cailloux fur Jefquels elle coule font détachés les uns des autres, & n’ont aucune adhérence. Lorfque Les bords d'une rivière font déterminés, & fur-tout lorfqu’elle coule par un fol uniforme , Les affouillements ont aufli une profondeur qui change peu. Ainfi, dans les parties différentes du cours de la Durance, en connoiflant la plus ER profondeur du principal courant, il faut néceflairement, en conftruifant une digue, placer les fondements au-def- fous du fond de ce courant. Les traînafles , les paniers, & en général les ouvrages en fafcinage qu'on emploie avec fuccès fur les perires rivières , ne réhftent pas à J’ac- tion de la Durance, Cela vient de ce que ces ouvrages n’ont que des fon- dements très-peu profonds; aufñli ils font affouillés & emportés , lorfqu’un courant un peu confidérable fe dirige fur eux. Dans les lieux où la Durance eft reflerrée, fes eaux fe raffemblent prefque toujours dans un feul courant, & le fond de fon lit n'eft jamais plus uniforme & plus égale : mais dans les endroits où elle n’eft pas con- tenue, fes eaux , en fe difperfant, s'affoibliffent; elles fe creufent une mul- titude de lits, & elles forment & embraflent dans leur cours des atterriffe- ments énormes. Il eft généralement vrai que les rivières ont leur principal courant du côté où elles font mieux contenues: aufli il eft rare que les plus grands bras de la Durance s’écartent de fes véritables bords. Comme ces bords font compofés prefque par-tout de graviers & de terres légères, on ne doit pas être furpris qu'ils foient minés facilement. Les ifles qu'on voit dans cette rivière font des conquêtes qu’elle a faites fur fes rives , & elle les augmenteroit continuellement, fi la Nature ou les hommes n’oppofoient pas des obftacles à la fureur de ces eaux. Si on excepte les lieux voifins de l'embouchure de la Durance, cette 362 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, rivière dévafte tous ceux où ellefe répand ; elle dégrade les campagnes, & elle en enlève les terres au lieu d’y "EE des dépôts. I ne s'arrête jamais du limon fur du gravier nud. Ce n'eft qu'à mefure qu'il y naît des faules & des peupliers, que les dépôts s'élèvent; même j'ai remarqué conftamment dans les îles que les couches de limonétoient peu profondes. : | Les lieux où la Durance-occupe un lit plus vafte font ceux où les eaux ont réellement moins de puiflance , & où pouttant , par le concours de di- verfes caufes , elles occafionnent réellement les plus grands ravages, 1°. Le fol des îles étant conftamment plus bas que celui qui forme les véritables bords , les eaux corrodent ceux-ci de préférence , parce qu'elles y éprou- vent une plus grande réfiftance. 2°. Le fol «des îles ‘ft garanti naturelle- ment par des plantations, tandis que fouvert les terres .voifines de la Du- rance font cultivées jufqu'à fes bords. Il arrive même quelquefois que fes terres font arrofables ; & comme l'effet des eaux deftinées à Les fertilifer eft de les rendre plus meubles, même à une grande profondeur , elles de-" viennent par-là fufceptibles d’une moindre réfiftance, lorfque la rivière les attaque. 3°. Enfin, comme les îles dirigent , de la manière la plus irrégu- lière', les différens bras dela rivière, rien n'eft.fi ordinaire que de voir des terres ficuées parallèlement au cours général des eaux, & pourtant atta- ‘quées perpendiculairement par des courants particuliers. La Durance charrié une quantité prodigieufe de limon au temps des crues. La rapidité qu’elle conferve jufqu’à fon embouchure , lui permet de de tranfporter jufques-:là selle ne forme des dépôts que dans les lieux où elle peut perdre fon mouvement. -Onparvient pourtant ; avec de la pa- tience , à Créer dés ‘terres fertiles fur les graviers qu'elle a abandônnés. On oppofe aux ‘eaux qu'on‘en dérive, des foflés qui f rempliflent de limon, & que l'Agriculteur vuide, dès que les eaux fe font retirées. On parvient, en répandant uniformément ce limon, à former des terreins très-pré- cieux. C'eft principalement au limon que la Durance charrie qu'on doit attti- “buer les biens inifinis qu'ont produits Les canaux qu'on en a dérivés (1). On “bénit aujourd’hui la mémoire de ceux qui ontentrepris & fait exécuter ces ouvrages. Heureux les Adminiftrateurs qui peuvent fe promettre la même reconnoiffance de la part de la poñtétité! C’éft au canal de Crapone qu’on doit l'élévation du fol & la fertilité des plaines qu'il traverfe , & qui n'of- froient autrefois que des cailloux roulés, Des eaux limpides auroient bien pu fournit à des plantations d’olivièr , de müriers , &ic , une fraîcheur fufifante pour favorifer la végétation: mais il falloit des eaux chargées (1) On peut dire la même chofe des canaüx qui font entretenus par les autres rivières de la haute-Provence , parce qu'elles paflent prefque toutes fur des-térres marneufes. CL SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 363 des dépouilles des montagnes, pour changer l’afpeét des lieux jufques dans la Crau. Sans leur influence, cette plaine immenfe n'eûr jamais montré des moiflons , & elle n'eür eu d’autre verdure & d’autres pâturages que l'herbe que les brebis cherchent encore fous des cailloux dans les lieux qui n’ont jamais joui des bienfaits de l'irrigation. Le limon de la Durance eft prefque uniquement formé de la marne bleue dont font Fi ou nos hautes montagnes. Le fable quartzeux fin qui fe trouve combiné avec cette marne avant fa décompofition, refte- en- core après, mêlé avec elle: il contribue , lorfqu'il eft trop abondant , à di- minuer la fertilité du limon, C'eft ici le lieu de rapporter une obfervation générale , qui prouve bien évidemment que les cailloux arrondis qu'on voit dans lelit & fur les bords dela Durance, lui font pour ainfi dire étrangers, & qu’ils ne forment aucune liaifon avec les matières qu'elle charrie proprement. Qu'on obferve {es atterriflements dans tout fon cours : on verra par-tout les cailloux. de différentes grandeurs mêlés indifféremment & finis brufquement ; tandis u'on obfervera au-deffus d'eux des lits plus ou moins épais de: marne & de fable fin. Si les différentes matières qui font dans Je lit de la rivière avoient une origine commune , ne remarqueroit-on pas au moins. dans leurs. di- menfions une dégradation fucceflive ? Mais ici tout eft différent & tranché, On eft étonné de trouver fi peu de bois dans les îles de fa Durance & fur fes bords. On en voit affez à Oraifon , depuis Manofque jufqu’à Mira- beau , à Peyrolles; mais par-tout ailleurs, il ne croît que des faules & d’autres arbres aquatiques nains. Les principales caufes qui empéchent Le développement de ces arbres, font, 1°. qu'en général les îles & les bords de la Durance font livrés à des chèvres , qui fe nourriflent des poufles ten- dres des arbres , des qu’ils commencent de naître, & ne leur permettent jamais de prendre beaucoup d’accroiflement; 2°. ces bois ne font pas formés de fujets de choix: on ne les plante jamais , & il eft rare qu'on les entre- tiennes 3°. ces bois appartenant prefque toujours à des Communautés, font dégradés par des Particuliers; 4°. comme la Durance change de lie, & comme elle agrandie 8 diminue fucceflivement.le même territoire ; on fe prefle par-tout de jouir d’un bien qui a peu de ftabilité. On préfère de dégrader de jeunes arbres, sie ; en atténdantqu'ils devinffene gros, ongourroit rifque de les voir paffer en la, puiflance des propriétaires de Ja tive oppofée. Des Digues. J'ai obfervé avec attention les digues qui fe trouvent fur la Durance. & celles qui font fur la rivière de Bleome dans la partie de fon cours où elle coule entre des collines formées de cailloux roulés, Toutes les digues ne font pas conftruites de la même manière, I[ y en a qui fonc entièrement 364 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, formées de grandes pierres de taille, & exceflivement épaifles; il y en a d'autres qui {ont proprement des levées de cailloux roulés, revêtues de pierre de taille: il y en a enfin qui font en maçonnerie. L'effet des eaux eft le même fur toutes ces digues; les plus minces ne font jamais emportées ; elles font feulement affouillées. Les plus folides font expofées aux mêmes inconvéniens que les plus foibles. Les disnesde cailloux roulés ont le défavantage, que , lorfqu’elles font furmontées par les eaux, elles s’écroulent & s’abaiflent entièrement. Je penfe qu'il vaudroit infiniment mieux employer de la terre, fur-tout s'il s'en trouvoit d'argileufe ; la ftabilité de la digue feroit fans comparaifon plus grande. On pourroit fe fervir d'arbres & de gazons pour la fortifier; reffource dont on ne peut pas faire ufage en conftruifant les digues avec des cailloux. J’ai fait une remarque facheufe; c’eft que dans tous les endroits où on a conftruit des digues , on a négligé de faire des plantations de bois pour former de nouveaux atterriffements, & pour conferver ceux qui exiftoient déjà. L’urilité de ces ouvrages & leur ftabilité dépendent pourtant beaucoup du foin ultérieur de fortifier les terres voifines. ' Je ne dirai rien à préfent fur la conftruction des digues, parce que cela exigeroit des détails trop étendus, fuivant la difpofñtion qu'on voudroit leur donner, & felon les lieux où il faudroit les établir. Je me borne à une feulé remarque; c'eft qu'elles font toujours attaquées par les fonde- ments. Ainfi, c'eft-là le principal inconvénient qu'il faut prévenir; l'épaif- feur énorme qu’on leur donnoit, fouvent n'étoit qu'une dépenfe inutile & perdue, L Des moyens d'encaiffer La Durance. Pour fixer la Durance dans un lit, il faut oppofer à l’action de fes eaux une réfiftance qu'elles ne puiflent pas furmonter. Il feroit ridicule de vouloir produire de grands effets avec de petits moyens: il faut donc néceflairement conftruire des digues. Ecoutons d'abord ce qu'on pourroit faire de mieux. « IL eft certain (M. Boflut, Recherches fur les Digues , Chap. IT, pag. 21) « qu'un bon mur de quai eft l’obftacle le plus puif- » fant qu'il y ait à oppofer à la fureur des eaux, & que la meilleure » manière de fixer Le lit d’un fleuve , eft de l'enfermer entre deux de ces * murs conftruits en bonne maçonnerie, revêtus en pierres de taille, établis >» folidement fur le ferme ou fur pilotis, & élevés au deffus des plus gran- » des crues ». La dépenfe qu'entraîneroit ce moyen de contenir la Durance, en a fait imaginer d’autres. Au lieu de conftruire des digues contiguës, on a pro- polé de les ifoler & de ne les placer qu'à une certaine diftance les unes des autres; mais on peut les placer fur les bords oppofés , vis-à-vis , ou de BY \ SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 365 de manière qu’elles ne fe correfpondent pas. Examinons les avantages & les inconvénients de ces ouvrages {ous tous ces rapports. Ne confidérons qu’une feule rive. Suppofons qu'on conftruisit les digues parallèlement au fil de l'eau , & qu'on leur dornât par exemple ço toifes de longueur ; il eft certain alors que plus la longueur de la digue feroit confidérable , & mieux elle détermireroit la direction du principal cou- rant: mais il eft certain aufli que, dès que les eaux cefferoient d'être foute- nues, elles auroient , précifément parce qu'elles fe feroient mieux dirigées vers la digue , plus de puiffance pour s'ouvrir une route dans une direction différente ; & cet effet feroit produit d'autant plus fürement , que la digue. fuivante feroit plus éloignée. Îl arriveroit dans ce cas infailliblement qu'on feroit obligé de rapprocher beaucoup les digues les unes des autres, &c même on pourroit être infenfiblement forcé de Les réunir en une feule , pour empêcher les eaux de prendre un cours différent. Si on plaçoit deux digues vis-à-vis l’une de l’autre , il arriveroit ou que le courant fe détermineroit vers une feule rive, ou qu'il fe parrageroit & _qu'il y en auroit deux qui feroient à peu-près également puiflants près de chaque digue. Dans Le premier cas, il fe formeroit néceffairement des atter- riflements du côté où ne feroit pas Le plus fort courant, & les eaux cefle- roient de fuivre La direction des digues; dans le fecond cas, les deux courants, dès qu’ils cefleroient d’être foutenus, formeroient un atterrifle-. ment entr'eux, & les eaux s’écarteroient des deux côtés de ladirection qu’on vouloit leur donner, : fl paroît qu'il y auroit quelque avantage àne pas placer les digues vis- a-vis les unes des autrés, & à les difpofer de manière qu'il ny eür jamais a-la-fois qu’un feul bord qui fût garanti. IL eft bien vrai que le courant feroit déterminé jufqu’à un certain point par les digues; mais il arriveroit aufli que le courant , une fois établi près d'une digue , fe foutiendroic toujours dans la même direction, qu'il fe formeroit des aterriflemeñts vis-a-vis de la digue inférieure , & qu'elle deviendroit ainfi une caufe plus puiflante pour changer la direction qu'on voudroit donner aux eaux. Si , au lieu de diriger les digues parallèlement au fl de l’eau , on leur donnoit une direction oblique au courant , alors il arriveroit ou quescette obliquité pourroit tendre à donner aux eaux une direction différente de celles qu'elles avoient en rencontrant la tête de la digue; & dans Ce cas, il réfulteroit quelques défavantages. L'unité de direction feroic rompu ; la digue feroit plus rourmentée par le courant , & la dépenfe de conftruc- tion pour défendre le mênie térrein feroit plus confidérable, Si l'obliquité étoitaffez grande pour que la digue fûr purement cffenfive, & que fes eaux ne la fuiviflent pass alors cette difpoñition feroit encore mal entendue, puifqu’il feroit beaucoup plus économique de la conftruire dans une direction perpendiculaire au courant. Je ne m'arrète pas à mon- trer les avantages qu’il y auroit à placer à-la-fois des digues obliques fur Tome X XII , Pare, I, 1783. MAL, Aaa 366 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, les deux rives: ils font trop fenfibles. De toutes les digues ifolées, celles qui font difpofées à angles droits fur le courant , font fans contredit les meillèures ; elles obligent les eaux à former au-deflus & au-deffous d’elles dss atterriffements. Cependant l'effet de chacune de ces diouss eft néceffaires ment borné, & il eft effentiel de Les multiplier pour foutenir les eaux dans Ja même direction. Il eft fimple que plus ces digues fervient nombreufes; & plus elles auroient d'efficacité; mais aufli la dépenfe augmenteroit en même raifon. Si les digues ne devoient être placées qu'à la diftance mar- quée par la longueur qu'on leur donneroit, il ane mieux dans ces cas faire tout fimplement des murs de quai; il n'en coûteroit pas davan* tage , & les bords feroient mieux défendus. En écartant trop les dioués, on feroit expofé aux mêmes inconvéniens que nous avons détaillés en par- lant de celles qui étoient parallèles au fil de l’eau. Les digues ifolées ont un défavantage immenfe ; elles ne fauroient ga- rantir des inondations les campagnes qu'elles défendent. Une rivière qui a un volume d’eau aufli confidérable que la Durance, & qui coule fur un fond aufli mobile , ne peut pas ceffer d'être contenue, fans qu'on ait à redouter les plus grands ravages. Les bons effets des digues ifolées qu'on y obferve , doivent moins en général être attribués à ces digues qu’au défaut d'ouvrages pareils fur le bordoppofé. Mais il ne s'agit pas ici d'augmenter un territoire aux dépens d’un autre; il faut les confer- ver tous également. Je l'ai déjà dit, la rapidité que les eaux de la Durance confervenr, même lorfqu’elles font baïfes , eft caufe qu'elles ne forment pas naturelle- ment des dépôts de limon, Le meilleur moyen d'arrêter ces dépôts précieux, parce qu'il eft en même temps le plus efficace & le plus économique , con- fifte à former des plantations. On parviendroit de cette manière à accumu- ler fur des graviers des terres fertiles, qu'on pourroic élever toujours au moyen des irrigations, car le projet d'encaifler la Durance ne doit pas être féparé de celui d'améliorer toujours plus fes bords, en leur fourniflant abondamment des eaux limoneufes, , Pour réuflir à fixer la Durance avec tous les avantages poflibles, il faudroit néceflairement élevér des deux côrés une digue continue. Il eft bien certain qu’un projet ps ne peut être exécuté fur toute l'étendue de la rivière, Dans tous les lieux où fon cours'eft bien établi, & où elle eft contenue fur quelqu'un de fes bords par des rochers, il fufhroit de conf- truire fur là rive qui né féroit pas naturellenrent garantie des digues ifolées , placées à angle droit fur Le courane, & le plus près qu'il feroit pofible les unes des autres. Mais il y a des parties de fon cours où on conçoit que le projet de la contenir entièrement pourroit être exécuté; c'eft lorfqu'elle traverfe des plaines immenfes. Il ne s'agiroic dans ce cas que de déterminer l'étendue du terrein qu'une toife courante de digue pourroit garantir & améliorer pour toujours , & de comparer la dépenfe de cet ouvrage avec : P».; . SUR L'HIST. NATURELLE ET.LES ARTS. 367 l'augmentation de valeur du térrein correfpondant, J'ai cru reconnoître dans plufieürs endroits qu’il y auroit de l'avantage à fixer la Durance, mêino avec des digues continues, Mais il m'eft impofible de rien dire de précis fürwet objet, parce que Le temps ne m'a pas permis de raffembler aflez de connoiflances locales, Il ne feroit ni coûteux , ni difficile d'examiner avec attention quelques territoires particuliers , en commençant par ceux de Peyrolles , de Meyÿrar- gues & de Pertuis. Après cet examen, on pourroic prononcer fi le projet de fixer la Durance eft praticable ou non. Au refte ,il ne feroit pas néceflaire, pour qu'on dût entreprendre de fixes la Durance, que la valeur du terrein qu'on gagneroit excédât la dépenfe qu'il faudroit faire pour. le garantir. 11 faudroit compter pour beaucoup l’affurance de la propriété & l'amélioration des terres déjà cultivées, Les facilités qui réfulreroient pour la navigation ; la falubrité de l'air, l'augmentation de la population, &ec. &c. &c. D'ABLSAG RL LE AOINN Dé l'Eraïin fulfüreux de Sibérie ; ou Or muffif natif ; Traduit du Suédois de M. BERGMANN (1), par Madame P * ** de Dijon. Ox fait que l'Art unit facilement l'étain au foufre , & que ; fuivant les différentes proportions, ce compofé prend des formes ablolumenc diffé- rentes. Si on fait entrer dans cette efpèce de minéralifation à-peu-près 20 pour cent de foufre, elle a le brillant métallique; elle et rayonnée dans Ja caflure, & approche très-fort du zinc pour la couleur. L'étain peut prendre cette quantité par la fufion dans un creufet; mais en ÿ ajoutant du mercure ou du fel ammoniac, & au moyen d'un feu convenable & long-temps continué , on parvient à faire entrer dans cette compofition un peu plus de 40 pour cent de foufre ; & pour lors on obtient une ma- tière en forme de pellicule mince ,*changeante, de couleur d'or, que l'on nomme or muffif. Comme ces combinaifons artificielles fe font très-facilement, & que d’ailleurs le foufre fe trouve abondamment dans l'atelier de la Nature, on a'éçé étonné avec raifon que jufqu'à préfent les Minéralogiftes n'aient (1) Mém. de l’Acad. de Stockholm, ann. 1781, quatrième trimeftre. Tome XXII, Part. I, 1783. MAL. Aaa 2 363 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, recherché aucune de ces minéralifations. Je puis annoncer à l’Académie que l'une & l'autre exiftent dans Le règne minéral, Dans une colleétion de minéraux que je reçus dernièrement de Rifsland, il fe trouva dans une boîte quelques petits morceaux , qui, au premier coup-d'œil ,; reflembloient à l'or muflif, au point que je crus d’abord qu'ils’ étoient faits par art. Mais après un examen plus approfondi, je vis que cette matière étoit commeune croûte aurour d’un noyau rayonnant dans fa caflure, reflemblant à un métal blanc , qui, après avoir été entamé au couteau ,, étoit d'une couleur tout-à fait changeante, & qui donna une poudre noire. Ces circonftances, jointes à une chaux blanche volatile, avoient fans doute fait penfer que c’étoit de l’antimoine ; &' en effet, l'étiquette en portoit le nom. Ce minéral très-rare avoit été trouvé dans un endroit appellé Nerchinskoi. Les expériences que je vais ‘rapporter, démontrent fufifamment qu'il n’y a point ici d’antimoine ; mais que le noyau & la croûte qui l'entoure tiennent feulement de l’érain & du foufre, & un peu de cuivre. . $. IT. La croûte extérieure , que l'on peut appeller or muñlif natif, fe comporte au chalumeau de la manière fuivante. (a) Un morceau, expofé feul à la flamme extérieure , senflamma & donna en brülant une couleur bleue, avecune odeur abfolument femblable à celle du foufre enflammé. (b) Lorfque le foufre fut brûlé, le réfidu fut encote calciné, & fe chan- gea par-là en une poudre blanche comme de la craie, qui ne montra pas a moindre difpofition à la fufon , quoiqu’elle für long-temps à la flamme bleue intérieure. (c) L’addition du fel microcofmique ou phofphate ammoniacal le décida également à la fufon; mais il fallut un grand coup de feu. Le globule de verre étoit de couleur de lair, & montra en refroidiflant des taches rouges , & particulièrement à la partie inférieure, qui conferva le plus long-temps fa chaleur. (d) La couleur rouge pouvoit d’ailleurs être produite ou ‘détruite à vo- lonté; le premier , en plaçant le globule de verre devant la flamme exté- rieure ; & le fecond , en le plongeant dans la Aamme intérieure. (e) On peut aufli détruire la couleur laiteufe ou opale par la flamme intérieure ; de forte que le globule de verre devient abfolument tranfpa- rent: il faut cependant une chaleur plus forte & plus long-temps continuée que pour enlever la couleur rouge. Le blanc opaque revientà la flamme extérieure ; de cette manière, on peut changer aufli fouvent que l’on veut la couleur & la tranfparence , & ces changements forment un coup-d'œil très-agréable, Cette manière de fe comporter , manifefte clairement le foufre (a), l’é- tain (6, c, e) & le cuivre (c,d). Pour rendre la démonftration plus complette, j'ai fait les effais de comparaifon dont je vais rendre compte. SURL’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 369 (f) L'étain précipité de la diffolution régaline par l'alkali fixe, bien édulcoré & féché, fuc fondu avec le phofphate ammoniacal. La diffolution fe fit difficilement ; cependant on obtint à la fin un globule laiteux de la même nature que celui dont il a été parlé ci-devant (c, e): mais on ne remarqua aucune tache rouge, ce qui n'étoit pas étonnant , puifque l’étain diflous étoit abfolument pur. (g) Le globule précédent , fondu avec le précipité de cuivre en aufñli pe- tite quantité qu'on en pouvoit prendre avec les doigts, montra abfolument la même couleur que celle qui a été décrire (c, d). Ainfi , il ny a plus de doute fur les parties conftituantes, $. IIL. Le noyau intérieur rayonnant , d'un brillant métallique, fut foumis aux mêmes épreuves. 3 (a) I rouoit feul, & donna une odeur de foufre; maisil ne parut au- cune flamme. (&) Lorfqu’on le calcine davantage, il devient tout blanc, & répand au- tour de lui une quantité de poudre blanche. On fait que lorfqu'on fait fondre dans un creufet de l’étain fur lequel on jette peu-à-peu du foufre , il donne abondamment des fleurs blanches, prefque femblables à celles que le zinc répand en brülant. (c) La chaux blanche obtenue fe comporta feule & avec le phofphate ammoniacal abfolument‘de même que celle qu’avoit produit la calcina- tion de la croûte écailleufe extérieure ($.IL, 4, c,4d,e): elle fut dif- foute lentement, & donna un globule*de couleur opale ou tranfparent, avec du rouge ou fans rouge, fuivant que l’action de la flamme étroit diri- gée différemment. $. IV. La petite quantité que j'ai pu me procurer jufqu'à préfent de cette rare production du règne minéral, n’étoit pas fufhfante pour la trai- ter au creufet, & pour déterminer plus précifément les proportions. Mais fur ce quiwient d’être expofé, on peut néanmoins regarder comme certain ue l’étain fulfuré*exifte dans l'atelier de la Nature, & fe préfente fous Me afpects différents , abfolument #femblable à celui qui eft fait artifi- ciellement. Les principes conftituants font bien les mêmes dans l'un & l'autre ; favoir , de l’étain , du foufre , & quelques parcelles de cuivre ; mais les différentes proportions du foufre les éloignent fi fort pour les qualités extérieures , que l’on eft fondé à les confidérer comme deux ef- pèces particulières. } $. V. A cette occafion, je préfenterai quelques remarques fur la poudre métallique qui eft employée à bronzer les buftes & autres ouvrages de fculpture en plâtre , ce qui fe fait en les frottant fimpiement de cette pou- dre. Elle reffemble à l'or muflif, mais elle a une couleur plus rouge ; & , fuivant les recettes qu'on en a données dans plufieurs livres, elle peut n’être réellement que de l’or muflif , mêlé de plus ou moins de cuivre précipité de l’eau forte en état de métal par le moyen du fer, Cependant, 370 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, en l’examinant de plus près, je n'ai pu y découvrir aucunes parcelles d'étain , ni de foufre , foit par la voie humide, {oit par la voie sèche. Ex: pofée au feu du chalumeau , elle noircit promptement ; mais elle ne donne point l’odeur du foufre , & répand une fumée peu différente de celle de la graifle btûlée. À un.feu plus fort, elle fe fond en un globule métallique abfolument femblable à un alliage de cuivre & de plomb, & fe laifle paffablement étendre fous le marteau. En ajoutant du fel microcofmique où phofphate ammoniacal , on obtient un verre verd , bleu ou TOuge , die vant les circonftances. Le bleu & le verd fe montrent dans un globule de verre tranfparent; mais la couleur rouge eft, à l'ordinaire, accompagnée d’opacité. Cependant je n'ai pastrouvé la moindre reflemblance avec cette couleur laiteufe ou efpèce d’opale demi-tranfparent que produit Pétain. La diflolution par l'acide nitreux ne m'a fait découvrir autre chofe que du cuivre & du plomb, COIN: T" ÉBOT ONE PrHNES'E COL LS SL OR TIQURE ES Sur l'origine des Cailloux quartzeux répandus & amonceles dans les environs de Nimes , principalement au-delà du Viftre (*); Par M. le Baron DE SERVIÈRES. + Mons cadèns defluit, & faxtm transferer de loco fue. j Jos., Cap. XIV, verf. 18. DÉSTE à tous Les hommes , le grand , l’admirable livre de l'Univers ne peut être lu que par un très-petit nombre. Aux yeux de la multitude les plus merveilleux phénomènes n’ont rien de frappant. Pour elle lé ma- BAS fpeétacle du lever du Soleil n'eft qu'un fait ordinaire. Familiarifé de borne heure avec tous Les Etres qui l'entourent , ils n'attirent & n'exci- tent ni fon attention, ni fa curiofité. Le Philofophe feul a droit d’inrerro- ger & de contempler la Nature: à force de méditation , il lui arrache ms (*) Voyez les notes à la fin du Mémoire. : € x. = ge + es SUR L'HIST. NATURELLE ÉT LES ARTS. 37t quelques-uns de fes fecrets, & foulève un petit coin du voile épais qui cache fes opérations fublimes. Les régards de l'obfervateur éxercé ne fe portent fur aucun objec, qu'il n'y trouve matière à réfléchir : par-tout il découvre des vérités nouvelles, & les chofes qui linfttuifent Je plus s font otdinairement celles que le vulgaire méprife & foule aux pieds. Lé fujet dont je traite dans ce Mémoire en fournit une preuve bien fenfible. Un Naturalifle qui parcourt attentivement le territoire de Nimes , ne tarde pas À reconnoître qué ce canton, dans des temps fort reculés, faifoit partie du domaine de l'antique océan, ce vieux père des chofes, De toutes parts il y voit la confirmation de cet événement co/#igue annoncé pat Horace, OvipE, & démontré fi clairement par VALISNTERt , & fur tout par l'illuftre BUFFON , d’après les témoignages unanimiès des Ariciens & des Modernes ,favoir : gue la mèr à fuccéffivement inondé & abandonné ls différentes parties du Globe terraqné. EffcŒivement les monticules qui avoilinent Nimes font toutes calcaires & formées des débris de pluleurs elpèces de corps marins. Certain que dans l’arrondiffement de Ménes il n'esifte que du calcaire, l'obfervateur ne doit pas être peu furpris de rencontrer au-delà du #iffre une prodigieufe quantité de cailloux quartzeux roulés. La terre en eft totale- ment couverte dans l’efpace compris entre Le Wiffre, Caiffargues, Bouillar- gues, Bellegarde, Saint-Gilles, Franguevaux, Vauvert, Candiac, Veftrie & Aubord. Dans les bois de Campagne @ de Bellecofe , des tranchées mettent à découvert un lit de cailloux de 2$ à 30 pieds de profondeur. À Saint-Gilles on remarque ün énorme poudingue de divers Jilex roulés , lequel a plus de fo pieds de hauteur, & dont la mañle nè fauroit être déterminée , parce qu'une partie de la Ville eft bâtie deffus. L'obfervation d’un phénomène quelconque , conduit toujours le Pky/fcier à en rechercher les caufes: dans cette vue, je hafarderai quelques conjectu- res fur l'origine des cailloux de Nônes. Quand un Navigateur, échoué dans une Ifk, y apperçoit les veltiges des pas d’un homme , il conclut avec raifon que l'Ifle eft habitée : de même le Géologue, qui voit dans un vallon calcaire des amas immenfes dé filex roulés , conclut que ces cailloux font étrangers, & qu'ils n’ont pu être apportés que par un vafte fleuve, De ce principe il fuit néceffairement que ke Rhône feul a dépofe dans les: environs de Nimes, les cailloux dont il s'agit ici. Ce n'eft pas que je croye que ce fleuve ait jamais creufé fon lit dans le Diocèfe de Némes ; onen retrouveroit les traces (1). Mais femblable aux Conquérans qui laif- fent des marques de leur paflage dans les pays qu'ils traverfenc , le Rhôre - a entraîné autrefois ces calloux, lors de fes débordemens. Je vais développer les fairs qui fervent de bafe & de preuves à mon j'igee 1°. Les cailloux de Nimes font exactement de même forte que ceux difféminés {ur les bords du Rhône, depuis Genève jufqu’à l'embouchure de 372 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ce fleuve dans la mer. C’eft notamment près de Wienne , de Valence ; de Montelimart & d'Orange, mais fur-tout entre Avignon & Remoulins, que ces dépôts caillouteux font les plus confidérables. La refflemblance ett fin- gulièrement frappante dans beaucoup de maifons de Bouillargues, de Saint-Gilles & de Vauvert, qui, comme celles du voifinage de Lyon , font conftruites avec. ces cailloux. Il eft une preuve démonffrative des anciennes excurfions du Rhône dans le territoire de Nimes: ce font les variolites qu’on trouve fréquemment à Vauvert (a). On fait que les rivages de ce fleuve à £von & jufqu'à Avi- gnon , n'offrent point de variolites 3 jamais on n'en rencontre qu'au deflous du confluent de la Durance & du Rhône, entre Avignon & Barban- tane, Elles font amenées dans la Durance par le torrent de la gorge ou vallée de Servières , dans le Diocèfe d’'Embrun, non loin de Briançon , qui eft le lieu originaire des variolites, & dans lequel plufieurs Naturaliftés aflurent avoir trouvé cette pierre en grandes mafles. 2°, De tout temps le Rhône a produit à fon embouchure des atterriffe- mens fort étendus, STRABON , PTOLEMÉE , PLUTARQUE, PompoNius- (2) C’ett à M. l'Abbé DorTHEs que je fuis redevable de cette importante obferva- tion, & de plufieurs variolites RUES à Vauverr ; dot l'une pèfe ;8 onces. Un accidenrtrès-remarquable de ces variolires de Vauivert, c’eft que le fond , au lieu d’être verd , comme dansles wariolires ordinaires ; eit dans plafieurs d’un beau 4/ere eurguin. M. Donrurs demande ff lerir long féjour dans La terre n’auroit pas produit ce changement? La chofe me femble affez probable, 1°. parce que La TOURRETTE (2) &c Faujas (3) ont reconnu que les vuriolires font colorées par le fer, & parce que moi- même j'en ai retité un fuperbe 4/eu de Pruffe ya °. parceque Fauras & Jaskevice (4) ont vu des Zzfa/res & des lives poreufes, dont la couleur a pris celle du 6%x de Pruffe À Bleybergen Carinrhie & à Chemnitg , on trouve une argile parfemée da points Blan- châtres , qui, parle feul contaét de l'air, fe changent en 4ew de Prafje. De Born a fait (s) la même remarque. M. DE Morveau ayant prouvé (6) que la chaux de cuivre, appellée flex de montagne, contient une plus grande quantité de phlogiftique où prin- cipe métallifant que la chaux verte ÿ nommée verd de montagne , je penfe qu’on peur ap- pliquer la même théorie aux couleurs verres & bleues dû fer. À l'égard de la méramor- phofe du verd des variolies en bleu, c’eft un phénomené dont la Nature s’eft réfervé le Jecrer. Les variolites méritent d’être étudiées autant qu'elles l'ont été peu jufqu’ici Je me pro- ofe d’en faire l'examen chymique le plus rigoureux , & d’en placer une collection nom Pet dans le Cabinet de S'uinre-Geneviéve : on y trouvera quatre variétés , {avoir : 1°. Les variolires verts ordinaires. 2°. Les variolites bleues de Vauverr. 3 39. Les variolies rouses. 4°. Les variolires blanches. M. Davgenron a oublié les yario/ites dans fon utile Takleau Minéralogique. Fn attendant que leur genre foit fixé, on peucles placer dans ce Tubleau , parmi les pierres de nature non avérée. MELA 7 7 SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 373 MeLA & PLINE, en parlent formellement à l'occafon de la fo/fe creufée par Marius. 3°. Le profond Asrruc (7), Pitor (8) & PouGET (9), ont très- bien prouvé qu'il fe forme journellement des atterriffemens fur toutes les côtes de Languedoc, par les dépôts de limons , de vafes, de fables, de graviers , de galets & de cailloux que le Rhône charrie habituellement dans la mer. Ces’ tranfports s'étendent fi loin , qu'on trouve du fable gris du Rhône au-delà du pied des Pyrénées, dans le Go!fè des Rofës en Efpagne. L'immenfité de ces acterriffèmens n'a rien qui doive étonner , puifque ce euve porte en tribut à la médirerranée les eaux de près du tiers de la France. 4°. ANIBERT établit fur des faits hifloriques (10) , qu’au treizième fiècle PEmbouchure du Rhône éroit d'environ deux lieues plus voiline de la ville d'Arles, qu’elle n’eft aujourd'hui. Selon le même Écrivain , cinq cours , élevées depuis le milieu du quinzième fiècle, font autant de m0- Aurmens remarquables de la prolongation du canal du Rhône & du recule- ment graduel de la mer. 5°. AMMIEN MARCELLIN (11) dit que de fon temps, c'eft-à-dire au re fiècle de notre Ere, lenbouchure du Rhône étoit diftante d'Arles € dix-huit milles, environ 4+ lieues de Provence, chacune de trois mille toiles. Maintenant il y a huit lieues d'Arles aux bouches du Reuve. Donc en quinze fiècles la rerraite de la mer a été de 3° lieués. 6°. Les pétrificarions de Bouronnet, petit Village auprès de Montpellier, décrites par AsTkucC , indiquent fufifamment l’ancien féjour de la mer fur le fol de cette Ville. A certe preuve déjà fi décifive , ce favant Méde- cin en ajoute de plus fortes. Ecoutons-le lui-même, ec Il eft vilble que les érangs qui s'étendent le long de la côte du bas » Languedoc, depuis Aigues-mortes jufqu'à Agde, ont fait partie autrefois » de la mer même, dont ils ne font féparés que par un long banc de >» fable qui s'eft formé entre deux, connu fous le nom de la plage. Leur » fituation, leur niveau avec la mer, la falure de leurs eaux , ne permet- » tent pas de douter de ce fair. On doit porter Le même jugement des » étangs d'E/camandre & d'Efcoute ; des grands marais qui #ont auprès , » le long de la Robine & du Piffre ; des étangs qui font autour d’Aigues- » mortes , qu'on nomme les éangs de Saint-Laurens , de Refpouffet, de la » Ville , du Roi, &c. » Ce n’eft pas même tout. L'état des lieux montre que la mer s'étendoit » autrefois au-delà de l'efpace que ces écangs occupent aujourd'hui ; » qu'elle alloit du côté d'Avignon , jufqu’aux pieds des montagnes qui Poibue une chaîne continue depuis ce lieu jufqu'à Mirevaux , & » qu'on appelle le Piéfegnié, où la montagne de Saint-Felix ; qu'elle » avançoit de [à jufqu’au pont Juvenal, près de Montpellier ; qu'elle cou- » vroit enfuite toute la plaine de Maugio , Candillaigues, Lanfargues , Tome XXII, Part. I, 1783. MAL. Bbb 2» 374 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, » Maffillargues, le Cuila, Franquevaux, jufqu'à Saine-Gilles, & que les » deux lits même du Rhône fe trouvoient alors moins longs qu'ils ne >» font,de près de trois lieues. Si l’on prend la peine de décrire fur une © carte de Languedoc use ligne courbe, qui renferme le pays qu’on vient » de marquer, on aura parce moyen La véritable étenduë de-cet ancien » Golfe, dont STRABON fait mention , & qu'on ne fauroit plus recon- » noitre dans l’état où fe trouve aujourd'hui cette côte. # À juger par les atterriffemens qui fe font faits fur ces côtes depuis dix- » nèut-cents ans, de ceux qui ont dû sy faire de même dans des temps » plus reculés, on ne fauroit douter que ces côtes n'aient dû s’accroitre » dans l’efpace de deux ou trois mille ans, de toute l’étendue que nous > avons marquée ». we Deux conféquences majeures pour mon objet découlent des faits précédens, 1°. La première eft ,comme l'ont très-bien vu le fameux KIRCHER (12), PouGrT & DarLUC , que la plaine maritime D'ARLES € Ifle de la Camargue font l’ouvrage du Rhône : il faut en dire autant de la plaine de Ja Crau car malgré que SOLERY (13)8& M. le Chevalier pe LAMANON (14) attribuent à la Durance feule la formation de la Crau, il me paroîc infini- ment vrailemblable que le Rhône y a coopéré. C’eft aufli l'opinion de GUETTARD (15)." A l'occafon des atterriffemens du Rhône, il ne féra point inutile de rap- peller quelques autres fzuves qui-ont produit de femblables dépôrs. Chez les Anciens , la Baffe-Egypte, nommée Delta, à caufe de fa figure triangulaire , a toujours été regardée comme un préfent du M2. Les Echinades, connuesaujourd’hui fous le nam d’Ifles de Sainte-Maure, paflent pour avoir été formées par le fleuve Achelous. On fait honneur de pareils arrerriffemens au Gange & à l'Indus. La Mer noire (Pontus euxinus) & la Mer d'Azoph ( Palus meotides) , - fe comblent tous les jours par les dépôts du Danube , qui depuis long- temps produit des atrerriffemens confidérables, Il eft reconnu que les Provinces de Hollande & de Zelande font lou- vrage de l'Efcaut, dela Meufe & du Rhin, Toute la Teuthranie & les plaines de Troye ont été formées par le Méandre. IL en eft de même de la grande Ifle à l'entrée du fleuve Amour dans la mer orientale de la Tartarie Chinoife (4). La campagne de Ferrare eft due aux atterriffemens du P6. — (a) En Amérique, la partie méridionale de Ja Louifiane, près du fleuve Mififipi, & la partie orientale fituée à l'embouchure de la rivière des Amazones , font des terres nouvellement formées par le dépôt des grands fleuves. SUR L'HIST, NATURELLE ET LES ARTS: 375 Venife & les Iflors qui l'entourent font le produit des fables du P6 & l'Adige. Le Port de cette orgueilleufe Ville s'encombre tous Les jours, Proche Verone, M. SEGUIER a vu des collines entièrement caillou- teufes formées par les alluvions de l’Adige. Suivant M. le Chevalier DE LAMANON , le Valais, la plus grande vallée de Suiffe, a été produite par le Rhône. La magnifique vallée d'Afface, depuis Bafle jufqu'à Srrafbourg, n'ett, felon GueTTARD, qu'un arrerriffement du Rhin. Enfin il n'eit pas douteux que le riant jardin de [a Touraine ne foit né des eaux du Cher & de la Loire. Après cette difgreflion infiniment liée au fujet, il faut venir à la feconde conféquence des premiffes : elle eft la plus importante pour expliquer l’ori- gine des cailloux de Nimes. 2°. Puifque la mer s’eft infenfiblement resirée de deflus les rerres jufqu'à fon lis aëluel, elle a dû , en un temps quelconque, couvrir & la ville d'Arles & les lieux placés au-deflus d’elle. Cela eft prouvé par de gros anneaux de fer attachés aux rochers près de Sains Gabriel, entre Arles & Tarafcon (16). ViRGILE de la BASTIDE (17), fondé fur des raifons phyfi- ques , affirme que l’efpace depuis Beaucaire jufqu’à la mer, n'étoit originai- rement qu'un Golfe: alors l'embouchure du Rhône fe trouvant à-peu-près vers Beaucaire, ce Aeuve contenu par la mer & refoulé par les vents de fud, ne pouvoit manquer dans fes débordemens de fubmerger la plaine de Nimes, & d'y laiffer les cailloux que nousy voyons, & dont les ana- logues furent, à la même époque, portés jufques dans le voilinage de Montpellier ; où on les rencontre aufli en ride quantité. La diftance de Beaucaire à Nimes n’étant que de :+ lieues , & celle jufqu’au Viffre moindre d'environ 2 500 toifes, il n’eft pas furprenant que le Rhône put s'étendre , dans quelques circonftances ; jufqu'au Wiffre: on fait que dans la mémorable inondation de 175$ , il fe répandit jufqu’à Saint-Remy , au Diocèfe d'Arles, éloigné de trois lieues de Tarafton, En 1674 (18) & 1570 (19), fes crues n'avoient pas été moins violentes, Souvent le fleuve vient noyer les ezvirons de Bellegarde, & il eft évident qu'il ravageroit auñli le territoire de Bouillargues , i les collines de cait- doux qu'il a formées autrefois ne lui oppofoient une infurmontable barrière. " Telle eft donc la feule origine admiffible & raifonnable des cailloux de Nimes : toute autre explication feroit chimérique & précaire. C’eft beaucoup fans doute que d’avoir découvert d'où ces cailloux fonr venus; mais ce n’eft pas affez: il faut déterminer, s’il eft poffible , à quelle époque ces f£lex ont été dépofés aux lieux où on les trouve. Ci-devant j'ai avancé que la grande plaine de la Crau eft l'ouvrage de la Durance & du Rhône. La Crau eft, comme l’on fait, oralement recou- verte de cailloux parfemés fur un immenfe poudingue, dont l'épaifleur , ea Tome XXII, Part. 1,1783. MA I. Bbb 2 376 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, quelques endroits , eft de so pieds. Les cailloux de Nîmes & ceux de la Crau font de méme forte; ainli ils doivent avoir méme origine. Examinons les idées des Anciens fur la Crau. STRABON , POMPONIUS- MELa & PLEINE , l'appellent Campus Lapideus, Campus Herculeus , en mémoire d’une prétendue pluie de pierres avec laquelle Jupiter fecourut Hercule , manquant de traits dans un combat contre A/bion & Bergior , fils de Neptune. Cette fable ridicule montre que les Grecs étoient aufli peu inftruits que nous fur le temps de la naiflance dela Crau. Chez eux la Mythologie fuppléa toujours au filence de l’Hiffoire. « Athéniens , difoit un æ Prêtre d'Egypte à Solon , Athéniens , vous êtes femblables à des enfans ; 2 vous ne connoiflez rien de ce qui eft plus ancien que vous : remplis de » votre propre excellence & de celle de votre Nation , vous ignorez tout » ce qui vous a précédés : vous croyez que ce n’eft qu'avec vous & qu'avec » votre Ville que le monde a commencé d’exifter ». Ce reproche philofophique eft applicable à la plupart des hommes de nos jours. Les Annales humaines font trop modernes pour renfermer un fair auffi ancien que la formation de la Crau; il ne peut être gravé que dans les fafles Les plus anciens de la Nature : compulfons-les foigneufement, & à coup sûr nous y trouverons l’objet de nos recherches. Parmi les cailloux de la Crau, il en eft un grand nombre qui ont perdu toutes les qualités féliceufes , & qui par une décompojition aulli lente qu'incompréhenfble , paflant à l’état argilleux , ont perdu la moitié de leur poids. Tantum ævi longinqua valer mutare vetuftas. En 1778 M. le Chevalier pe LaMANoN fit une colle“tion unique de ces cailloux , depuis le premier degré de décompofition jufqu'à la décompofr- tion parfaite. Cette collection eft à Salon, dans le cabinet de M. DE Lamanon. Depuis, cet habile Naturalifte a trouvé de femblables cai//oux à Chireauneuf du Pape, à Bellegarde, près de Montpellier, &c. À ce fujet M. DE LAMANON obferve très-fagement que «Jamais on ne æ crouve ces cailloux fur les bords des rivières , mais feulement dans les: » plaines caillouteufes qui en font un peu éloignées. Lesicailloux roulés » alluellement par les rivières font trop modernes pour avoir fubi cette décom- » pofition : on n’en trouve que dans les plaines antiques cailloureufes >», Entre Mmes & Saint-Gilles, entre Saint-Gilles & Vauvert , mais fur- tout dans les vignes de ce dernier lieu , fe trouve une prodigieufe quantité de cailloux décompofés , où l’on voit clairement les différentes nuances de décompoftion (a) : ils s’écrafent fous les roues , comme feroit de la (a) Je dépoferai une Colle&tion complette & choifie de ces cailloux dans le Cabinet de Saine-Geneviéye , où les curieux pourront les examiner. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 377 craie; les Habitants qui les connoiffent , les appellent cailloux pourris & les rejettent pour la bâtifle. M. SEGUIER a dans fon cabinet des cailloux de même forte , tirés du voifinage de Viviers. J La décompofition des filex a été également remarquée en Velai, par M. Fausas. Quoique ces caï/loux n'appartiennent point au Rhône , je placerai ici la deféription très-fidelle qu’en donne cet excellent obfervateur , parce qu’elle convient parfaitement à-tous les cailloux décompofés. « Immédiatement après les /aves décolorées , on trouve de gros frag- » ments irréguliers d’une efpèce de pierre qui refflemble à la pierre blanche » ordinaire, dong les angles font émouflés & arrondis ; plufieurs de ces > fragments font friables & argilleux ; d'autres font folides & prefqu'aufi » durs que les pierres à chaux communes: elles font très-blanches ; mais » leur crodte extérieure eft recouverte d'une /ubflance ochreufe jaune: on æ remarque quelques /aves poreufes décolorées parmi ces pierres blanches ; » lorfqu'on jette quelques fragments de cette /ub/fance pierreufe dans l'acide » nitreux , elle y die un peu d’effervefcence pendant un moment ; l'ébullitior » cefle , & la pierfe réfifte enfuite aux plus forts acides... Ayant jetté des » éclats de cette matière pierreufe blanche dans l'acide marin , j'ai formé , >».par l'intermède de l'a/kali phlogiflique, un précipité en bleu de pruffe , » des plugiépais & des plus foncés en couleur, quoique cette pierre n'eût »> aucun principe ferrugineux apparent (20) », Le Pline François paroît être le premier qui ait obfervé les cailloux décompofes. IL en parle en ces termes dans fa Théorie de La terre : a Si le feu fait changer promptement de forme à ces fubftances { largille #» & Le fable), en les vicrifiant ; le verre lui-même , foit qu'il ait fa nature > de verre, ou bien celle de fable ou de caillou, fe change naturellement en » argille , mais par un progrès lent & infenfible. » Dans les terreins ou le cai/ou ordinaire eft la pierre dominante , les » campagnes en fonc ordinairement jonchées ; & le lieu eft inculte & # que ces cailloux aient été long-temps expofés à l'air fans avoir été » remués , leur fuperficie fupérieure eft toujours srès-blanche , tandis que » le côté oppofé qui rouche immédiatement la terre eft srès brun , & » conferve fa couleur naturelle: fi on cafe plufeurs de ces cailloux , on æ reconnoîtra que là b/ancheur n'eft pas feulementau dehors, mais qu’elle # pénètre dans l'intérieur plus ou moins profondément, & y forme une » efpèce de bande qui n’a dans certains cai/loux que très-peu d'épaiffeur , » mais qui dans d’autres occupe prefque toute celle du caillou. Cette » pierre blanche eft un peu grenue , entièrement opaque, aufli tendre que » de ARE & elle s'attache à la langue comme les bo/s , tandis ue le > refte ; u caillou eft life & poli, qu'il n'a ni fil ni grain, & qu'il a con- » fervé fa couleur naturelle, fa tranfparence & fa même dureté, Si on * met dans un fourneau de ce même caillou à moitié décompofé, fa 378 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, » partie blanche deviendra d’un rouge couleur de tuile | & fa partie brune d'un » très-beau blanc. Qu'on ne dife point avec un de nos plus célèbres Natura- » liftes , que ces pierres font des ca//oux imparfaits de différens âges, qui » n'ont päs encore acquis leur perfection ÿ* Car pourquoi feroient-ils tous » impartaits? pourquoi le feroient-ils tous du même côté & du côté qui » eft expofé à l'air? [l me femble qu'il eft aifé de fe convaincre que ce » font au contraire des cailloux altérés | décompofes, qui tendent à repren- » dre la forme & les propriétés de l’argille & du bo! dont ils ont été >» formés. Si c'eft conjeéturer que de raifonner ain, qu’on expofe en plein » air le caillou.le plus caillou ( comme parle ce fameux Naturalifte ), le >» plus dur & le plus noir; en moins d’une année il changera de couleur à » la furface, & fi on a la patience de fuivre cette expérience , on lui verra » perdre infenfiblement & par degrés fa dureté, fa tranfparence & fes au- » tres caractères fpécifiques , & approcher de plus en plus chaque jour de » la nature de l’argille. » Ce qui arrive au caillou, arrive au fable; chaque grain de fable peut » être confidéré comme un petit caillon | & chaque caillou comme un » amas de grains de fable extrèmement fins & exéétement engrénés. » L'exemple du premier degré de décompofition du fable fe trouve dans # cette poudre brillante , mais opaque , ice, dont l’argille & l’ardoife font » toujours parfemées., Les cailloux entièrement tranfparens , les quartz » produifent, en fe décompofant, des sales gras & doux au toucher , aufli » pétriffables & duétiles que la glaife , & vitrifiables comme elle, rels que » ceux de Wenife & de Mofcovie; & il me paroît que le sec eft un terme 5 moyen entre le verre, le caillou tranfparent & l'argile , au lieu que le » caillou groflier & impur , en fe décompofant , pale à l'argile fans in- » termède. » Notre verre faétice éprouve auffi la même a/rératior ; il le décompofe à » l'air & fe pourrit en quelque façon , en féjournant danses terres. D'abord » fa fuperfcie s’irife, s'écaille, s'exfolie ; mais lorfque fa décompo/irion elt » plus avancée , il s’écrafe entre les doigts & fe réduit en poudre talqueufe P ? 8 P q » très-blanche & très-fine ». M. DE BUFFON revenant fur le même objet , cite dans fes Epoques de la Nature, une expérience de NADAULT (21), qui femble indiquer que le grès fe convertit en argille , par fon féjour dans l'eau (22). à Au refte quelque inconcevable que paroïffe la converfion du fix en argille, on ne doit pas oublier que STAHL regardoit /4 verre vitrifable comme l'élément terreflre primitif, dont les autres verres ne font que des modifications. Cette opinion de STAHL a été renouvellée par BAUMÉ, qui a cherché à l’étayer de différentes preuves ; mais quelque féduifantes sr foient les expériences de ce Chymifte , elles ne font pas tenues pour émonftratives par deux grands maîtres, BERGMANN & MACQUER. Poftérieurement, M. ACHARD a voulu foutenir que le cryffal de roche » t 1 J k ; ÿ É SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 379 n’eft que de la verre argilleufe, faturée d'air fixe où ga méphirique (23) : mais l'expérience du Profeffeur de BERLIN répétée avec le plus grand foin par MM. BRissON , CADET & FONTANIEU , n'ayant point eu de fuccès , & M. ACHARD n'ayant rien publié depuis 1778 {ur cet objet , on ne peut prendre aucun parti fur fa découverte ; d'autant plus que BERGMANN a produit de véritables cryffaux de roche factices , au moyen du quartz pul- vérife, de l'acide fpathique & de l'eau , mis dans une bouteille où ily avoit continuellement une légère évaporation. Depuis peu, ScopoLt a préter.du avoir formé des cryflaux de quartz avec de la terre calcaire faturée d'acide marin. Ce probléme ne peut être complettement réfolu qu'avec le temps & par des expériences mulripliées : toutefois divers phénomènes femblent annon- cer le changement du flex en argille. Ces phénomènes font : 1°. La difolution de la serre filiceufe dans les eaux de quelques fon- taines , conftatée par les analvfes de BERGMANN. 2°. Le durciffement de l’aroille cuite au point de faire feu avec le bri- quet, propriété reconnue aullh dans la marne par HENCKEL, 3°. Et ceci eft un fait inconteftable , la décompoition des fflex roulés & leur paffage graduel à l'état d'argille, Réfervanc pour un autre Mémoire l'examen chymique des cailloux dé- compofes, je vais montrer que des fubftances cour aufli dures que le flex , éprouvent chaque jour fous nos yeux la méme aliération ; voici comme BERGMANN s'exprime à cet égard: « Les viciffitudes ou changemens alternatifs de Patmofphère | attaquent &c >» corrodent la plupart des pierres & des montagnes. Tôt ou tard leur fur- >» face devient tendre, & les parcelles perdant leur cohérence , font charriées » par les eaux météoriques & s’afflemblenc enfin dans les vallons & dans > les plaines », | I! r'eft point de Minéralogifle qui n’ait vu des granirs altérés & dégradés par l'air & rendus ternes & friables. BARTOLOZZ1 a raflemblé fur ce point des obfervations bien authentiques (24). « M. HiLL, dans fon Hifloire des pierres , rapporte que les colonnes de » la place de Séville, quoique modernes , ont beaucoup fouffert: mais elles » font faites d’un granit qui n’étoit pas encore bien formé ; & M. de la » CONDAMINE a remarqué à Alexandrie que l'obélifque de Cléopatre, du » côté Le plus expofé au vent ; a tellement fouffert , qu'on n’y reconnoît >» plus les Aiérog/yphes qui éroient gravés deflus. Le granir de la montagne » de Baveno , dans la fuperficie & vers le fommet de la montagne, s’eft » décompofë & a blanchi dans l'épaifleur de plufeurs pouces ; j'ai trouvé » auffi fur cette montagne deux grofles mafles de granit qui avoient été » tout-à-fait détachées du refte depuis long temps, qui font devenues en- » tièrement blanches. D'après cela, on peut croire que le granit roue , » en vieilliffant dans l'endroit où il s’eft formé , devient blanc , pulse 380 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, » les Alpes très élevées & les montagnes les plus anciennes compofées de » cette pierre, font blanches; mais cette hypothèfe doit être confirmée, # comme on pourroit le faire en vifitant les anciennes carrières de l’ Arabie » & dela Haute-Egypte, d'où l’on a enlevé depuis quarante fiècles Les » obélifques Egyptiens ». - Dans fon voyage aux Indes, à Trevicarré, Aldée voiline de Pondicher , SONNERAT a obfervé des fe/d-fpaths & des quartz décompofës. Suivant le Chevalier HAMILTON & FERBER , les laves filiceufes expo- fées aux vapeurs de l'acide fulfureux , fe convertiflent en argille blanche. Le père Mrmast confirme cette obfervation (25), & dit « avoir trouvé à » Lipari, dans la grotte de Diane , le lapis obfidianus changé en argille , æ & une urne lacrymatoire , dont le verre, du côté qui touchoit la terre » dans un ancien tombeau , avoit fubi le même changement. » Le temps feul, dit FAUJAS, calcine à la longue, à l’aide des vapeurs » qui font répandues dans l'air ou par d’autres moyens cachés , les Pafaltes » les plus purs ; cette opération eft longue à la vérité, mais elle n’en exifte » pas moins. Plufieurs bafaltes du plus beau noir & de la plus extrême » dureté, ne paroiffent gris que parce qu'ils font expofés au grand air , > qui les mineinfenfiblement, & rend leur première croûte terreufe; fi » on rompt le moindre de ces morceaux, on voit dans la caflure un > bafalte vif, noir & fain. Voilà donc un fecond moyen que la Nature » emploie pour attendrir Les laves. Ce moyen eft long ; mais la Nature ne > compte pas avec le semps ». Pour preuve de cette affertion, M. FAUJAS énumère beaucoup de mor- ceaux de laves & bafalres décompofës & convertis en arpille blanche. Les terreins fitués au pied de l'£rra & du Véfuve, & fur-tout le vigno-" ble où croît le vin délicieux appellé Zacryma Chriffi, doivent leur merveil- leufe fertilité à la serre végécale formée par la décompofirion des matières volcaniques (a). Suivant un célèbre Agronome, l'Abbé Rozter (26), « tous les Pays- (2) « Toutes les /aves étant réduites en poudre , dit M. de Buffon, font ,comme le verre, » fufceptibles d’être converties par l’érrerméde de l’eau , d’abord en argille, & peuvent » devenir enfuite, par le mélange des pouffières & des détrimenrs de végéraux, d'excel- » lents terreins. Ces faits font démontrés par les belles & grandes forêts qui environnent » lErna, qui toutes font fur un fond de /ave recouvert d’une 4onne serre de plufeurs » pieds d’épaiffeur. Les cezdres fe convertiffent encore plus vite en terre que les poudres » de verre & de lave. On voit dans la cavité desterarères des anciens volcans a@tuelle- » ment éteints, des verreins fertiles : on en trouve de inême {ur le cours des anciens » torrents de /ave. Les dévaffarions caufées par les volcans font donc limitées ‘par le » temps; & comme la Nature tend toujours plus à produire qu’à détruire , elle répare, » dans l’efpace de quelques fiècles , les dévaffarions du feu {ur la terre, & lui rend fa # fécondité, en fe fervant même des matériaux lancés pour la deftruttion ». ( Supplé- ment à l'Hiftoire Naturelle, tom. X ,in-11, pag. 157—158.) » Bas, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 38r » Bas, depuis le Puy-en-Velay jufqu'au delà de la Limagne d'Auvergne , » font d'une fertilité furprenante, La rerre eft un dépôr des laves & des » montagnes volcaniques. Ces laves fe font décomipofées à L'air ; elles ont »_été réduites en pouflière , & formenc certe excellente terre qui aflure » les plus belles moiffons dans la Limagne d'Auvergne ». La grande fécondité des terres végétales produites par la déeompoftrion des matières volcaniques , n’a rien d'éconnant, Les analyfes de ces fubftances faites par Port , ROUELLE , BERGMANN (27), CADET “28) & SAGE (29) , ayant montré que l’argille y domine, il s'enfuir que leur dé- compojtuon doit fournit des cerres fortes : telles font en effet celles de la Linagne. DUT er DA € LL Le a C0 STUNT NOIRE aQ UOIQUE je dife ici que Le Rhôre n’a jamais eu fon /i dans le rerre- toire ae Nifmes , il elt polfible & même vraifemblable que ce fleuve y a long temps coulé; mais dans la crainte de fembler trop paradoxal, je me {uis abftenu de rifquer cette afertion , que des phénomènes analogues favorifent beaucoup. M. Gu£TTA8D parlant ( Mémoires [ur différentes parties des Sciences & Arts, Paris, 1770 , in-4°, 3 vol;t. 3, p. 296, fixième Mémoire des monticules caillouteux de la Brifè , rivière qui fe jetge dans le Rhin au- deffus & proche Bafle, dit : « Si ces monticules font dus aux cailloux que la Brife a roulés , il faut » qu'elle ait changé un peu fon Zs, ce qu'il y a lieu d: penfer , la plupart » des rivières & des fleuves ayant ordinairement parcouru route l'étendue » des vallées que leurs eaux arrofènt, lors fur-tout que ces rivières & ces » fleuves font rapides , & qu'ils entraïnint beaucoup de cailloux ». Plus bas (p. 297 ), ce favant Académicien ajoute: «Les cailloux font fi abondans depuis Huningue jufqu’à Sainte Colombe, » qu’on prétend en A4/üce qu'on a laiflé cette partie en bois, n'étant pas >» propre à être autrement cultivée ; l'on voir, à ce qu'on prétend , encore » en A/face dans ce bois un ancien Lis du Rhin, qu'il a été obligé d'aban- » donner par les amas de cailloux qu'il a formés dans cette partie de fon » COUIS ». ” (2) LA TOURRETTE , Lerre a M. l AbbéRoZxER , fur les variolites de la Durance, ( Journal de Phyfique , 1774, O&tobre, feconde partie , p. 320 & feq. ). ( 7; ) FAUJAS, Hifloire Natur. du DAUPHINÉ , 1782 , Grenoble ; ir-8° , c. 1%. p. 244—2$54; & DarLUC , Hifloire Naturelle de la Provence 3" Avignon, 1782, in-5°, t. 1°", p. 290—292, Voyez encore fur Les vario- Tome XXII, Part, I1,1783. MAI, Cce \ 382 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, lies LANGruS, LEMERI, OLAUS - BoricHIUS, BoMARE , BERTRAND, WALLERIUS , L'ENCYCLOPÉDIE, SAUSSURE , voyage dans les Alpes, tom. I, p. 133, &c. &c. (4) FAUJAS, volcans éteints , p. 141, & JASKEVICH , voyage minéra- logique de Vienne à Freiberg ( Journal de Phyfique, 1722 , fupplément , p- 309 & 308 ),& GERHARD , ( ibidem, p.319 ). (5) ce Cæruleum Berolinenfe nativum in argill@ cinered ex Alpibus vachi- » nienftbus Carinthiæ (DE BORN, index foffilium, Pars altera. Pragæ 1775, » in-8°, p. 136 ). (6) Nouveaux Mémoires de l'Académie de Dijon , 1782, 1°. femeftre, a783 , p. 100—106. - (7) ASTRUC, Mémoires pour l’Hifloire Naturelle de la province de Languedoc. Pañs, 1737, in-4°, partie 2 , Cap. 2, p. 369—381. (8) PITOT , Académie des Sciences , 1741 , p. 265 & fuivantes. « Dans le Bas Languedoc , entre Beaucaire , Aigues-mortes & Mauguio , >» il y a environ trente mille arpens de marais. Toute la côte de la er du » Bas Languedoc, principalement du côté d’Aigues-mortes, eft un pays æ plat & bas, dont une grande partie eft encore un étang , une autre > partie en marais, & le refte en terres labourables ou terres cultivées » très-bafles , & par cette raifon très-fujettes aux inondations. A la pre- » mière infpection de ce pays, il m'a paru que ces terres labourables &c æ ces marais n'ont été formés que par les dépôts des fables , des limons » & crémens des rivières du Rhône, du Wiftre, du Vidouelle , &c, Les » dépôts prefque coptinuels de ces rivières ont comblé & reculé les bords » de la mer. Tout le monde fait que le Roi Saint-Louis s’embarqua à >» Aigues-mortes pour la Terre Sainte , Pan 1269; ce qui a fait penfer que » depuis ce temps la mer s’étoit retirée & avoit baiffé : mais il eft aifé de » reconnoître & de voir évidemment que les fables & les limons entraînés » par les rivières, ont formé une nouvelle plage , diftante de celle du » temps de Sains Louis de trois à quatre mille toifes ; à cette nouvelle plage » les vagues & l'agitation des hautes mers ont amoncelé les fables & ont » formé des dunes : on voit encore près d’Aigues-mortes les dunes de » l'ancienne plage. » Prefque tout l’efpace que la mer a laHié entre l’ancienre & la rouvelle » plage, eft refté d’abord en étang; tels font les étangs d’Aiowes-mortes , » de Mauguio, &c. &c.Les dépôts de fable & de limon des rivièrés , dans % Le temps de leurs grandes eaux, diminuent continuellement ces érangs , > tant en étendue qu'en profondeur: les érangs d’Aigues-mortes n'ont >» guère qu'environ trois pieds de profondeur , & l'ésang de Mauguio trois > ou quatre pieds, « Les parties comblées de ces. érangs font changées d'abord en marais , » & ces marais deviennent dans la fuite des terres labourables : on ne » trouve pas dans toutes ces terres La moindre petite pierre, ce qui eft en SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 383 » Core une preuve que ces terres ne font que les limons & crémens des > rivières. > Le Ahône, dans le temps de fes grandes eaux, coule avec tant de » rapidité, que fes eaux entrainent des cailloux que l’on voit & que l’on >» entend defcendre & rouler fous les eaux ; mais au-deffous d'Arles, où le » Rhône n’a prefque plus de pente, ces cailloux difparoiflent, on n’en voir >» pasun feu. Tous ces cailloux s'arrêtent du côté d'Arles & de Fourgues, » où les eaux, faute de pente, n'ont plus la force de les entraîner , les » premiers arrérant & fervant de barrière aux fuivans ; de forte qu'il fe » forme bientôt en différens endroits des tas ou amas de ces cailloux , » qui font couverts par les fables & les limons que les eaux dépofent ; » ces amas de cailloux, ainfi couverts de fable & de limon, forment » comme des aserrifflemens & de petites Ifles : en effet, en faifant fonder » & fouiller ces fortes d'atterriffèmens , on ne trouve que des cailloux » dans le fond », (9) PouGEr , Mémoire fur Les arterriffmens des côtes du Languedoc, Affemblée publique de la Société Royale de Montpellier , le 30 Décembre 1777 ; p: 46—64;& Journal de Phyfique , 1779 , tome XIV, page 281. (10) ANIBERT , Mémoires hifloriques & critiques fur l'ancienne Républi- que d'Arles , fuite de la troifième partie, p. 330; & Mémoires fur l'ancien- netéd’ Arles, 1782,in-12, Arles ,p. 93—96. - Conf. AsSTRUC xbifuprà , p. 374, n°. 93 & BOUCHE, Chorographie & Hifloire de Provence ,t 1°, p. 23. Ils parlent de neuf tours rangées de diftance en diftance le long du fleuve , favoir cinq du côté gauche &c quatre du côté droit. (11) AMMIAN MARCELLIN , rer. geff. lib. XV , cap. 2. « Spumeus >» ( Rhodanus ) Gallico mari concorporatur per patulum finum , quem vocant » ad gradus ab Arelate oflavo decimo fermè lapide difparatum ». (12) Athanafi KiRCHERI Mundus fubrerraneus , Amftelodami , 166$ , 2 vol. in-folio t. 1°, p. 80, a. lib. cap. 12 , $ où il dit: « Arelaten/is ager >» maritimus una cum Comarso infulà Rhodani partus ef», (13) SoLERY dans fes Mémoires manufcries fur les anriquités de Pro- vence. (14) Journal de Phyfique , t. XIX, Janvier & Mars 1782, & Mercure de France du 13 Avril 1782, n°. 1$,p. 87—91. (15) GuETTARD , Memoires fur différentes parties des Sciences 6 Arts. Paris, 17790 ,in-4° , 3 vol.;t. III, p. 293. Sixième Mémoire fur les dépôts faits par les averfes d'eau , les rivières 6: les fleuves. «Un fleuve auñi rapide que le Rhône, & dans lequel il entre des rivières » qui ont Ja rapidité du Drac & de la Durance , ne peut que rouler dans » fes eaux beaucoup de pierres, lors fur tout qu'il fort des hautes mon- » tagnes, & que plufieurs rivières qui y entrent y ont aufli leurs fources, Tome XXII, Part, I, 1783. MA 1. Ccc2 384 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, » Ces rivières font ordinairement des rorrens formés par les eaux qui tom- » bent avec violence de ces montagnes; cette violence efttelle ,qu'ils arra- »# chent fouvent des quartiers de pierres énormes, & qu'ils entraînent, fi » on ofe le dire, avec autant de facilité que les autres rifières roulent de >» petits cailloux. [1 n'eft donc pas étonnant que Le Rhône fafle des arrer- » riffemens confidérables à fon embouchure dans la mer | qu'il en fafle de » grands fur fes bords; & iln'ya guète lieu de douter que cet amas de » cailloux accumulés dans cet endroit nommé la Crau d'Arles , ne lui » foit dû. On ne peut non plus guère douter que les arrerriffemens qui fe 2 font fur les côses du Languedoc n'aient la même origine, comme on 2 le fera voir, d’après MM. AsrruC & PiTorT , dans le Mémoire » fuivant, * » Quoique ce fleuve ait beaucoup de rapidité à quelques lieues de fon » embouchure , fa rapidité diminue à un point, fa pente diminuant elle- » même beaucoup, qu'il ne peut, fuivant une remarque de M. PrTor , de » l’Académie des Sciences , entraîner jufqu'à la mer les cailloux qu'il a » roulés dans fon fein jufqu’à cet endroit ». -(16) ANIBERT nous apprend ( Differtatinn topographique € hifforique fur la montagne de Cordes & [es monumens , Arles, 1779, in-12, p. 9 ) que la montagne de Cordes , fituée à environ une lieue nord-eft de la ville d’Arles (conféquemment au-deflus d'Arles ), & à une grande portée de fufil au midi de l'Abbaye de Montmajour, étoic fortifiée du côté du fud ( p. 34), & que lon voyoit naguères des anneaux de fer ou de bronze ( p. 37) attachés aux remparts. Il ajoute ( p, 39 & 40 ) qu'une file d'érangs , depuis celui de Peluque à cinq ou fix cents pas SE de la montagne de Cordes jufqu'à l'étang de Galejon | qui communique à la mer , donne à croire que ce canton étoit autrefois un bras de mer. I] cite plufieurs actes (p.41 & 42), qui prouvent qu'aux X & XIII* fiècles la montagne de Cordes & celle de Montmajour étoient des Iles. (17) Charles VIRGILE , fieur de la BASTIDE , Obfervations phyfiques Jur Les terres qui font à la droite & à la gauche du Rhône , depuis Beaucaire Jufqu'a la mer. Avignon, 1733,1n-4° , 14 pages, chez M. SEGUIER. æ Toutes les terres qui font depuis Beaucaire jufqu’à la mer, dans l’efpace > de huit où dix lieues de Languedoc, font des crémens ou atterriffemens du > Rhône ( p. 1°" ). On croit pouvoir avancer que la mer a été autrefois > jufqu’à Beaucaire. La preuve en eft évidente, fi l’on examine la qualité du » terroir de Beaucaire, & fon élévation au-deffus du bord de la rer ( p.4 ). >» La qualité du terroir de Beaucaire elt crément, ( ibidem ). » L'efpace qui eft depuis Beaucaire jufqu'à la mer n'étoit originairement » qu'un go/fé ou bras de mer, dans lequel le Rhône fe déchargeoir. » Comme cett: rivière a toujours entraîné beaucoup de limon , il eft > arrivé par fucceffion de temps que ces efpaces occupés par l'eau de la SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARPS. 38ç »# mer, ayant été remplis par le limon du Rhône, ont été defféchés. » Mais... cela n'a pas été fait en peu de temps. ( p. $ ) ». (18) Deéjcription du débordement du Rhône dans Avignon en l'année 1674, le 16 Novembre, en vers latins & françois. Avignon, 167$ ,in-12, chez M. SEGUIER. … (19) Le Mardi $ Décembre 1570 , le Rhône déborda de manière # qu'il entra dans Avignon; il rompit les chauflées vers Arles , & inonda » la Camaroue : dès le 2, ce fleuve avoit emporté à Lyon à la Guillotière, » plus de deux cents maifons & rompu les arches du Pont, dont l’on abat- » tit deux pour lui donrer paflage ; il avoit encore rompu un arc du » Pont de Vienne ».( Louis de PÉRUSSiS , Hifloire des guerres du Comté Venaiffin, de Provence, de Languedoc , &c. &c. dans les Pièces fugirives pour fervir à l'Hifloire de France , par le Marquis d'AUBAIS , ir-4°. Paris , 1759, t. I, partie première, p. 120 ). . (20) FAUTAS, volcans éteints du Vivarais & du Velay , 1778 , in-folo, P-199,n°, 5. (21) Dès 1757 M. NADAULT avoit annoncé ce changement du grès en argille. ( Mémoires de l'Académie de Dijon ,t. K°, kif p. lij). (22) Voyez fur cette matière les judicieufes obfervations de M, de MoRVEAU. ( Opuftules Chymiques & Phyfiques de BERGMANN ; trad. en franç. Dijon , 1780 ,in-8° , p. 310 ). (23) Dans l’affemblée de l’Académie des Sciences du 17 Juin 1782 , M. MAGELLAN fir voir à certe Compagnie un eryflal de roche artificiel , que M. ACHAKD difoit avoir produit en faturant de gaz méphitique la terre d'alun. ( Mercure de France du $ Juillet 1778, p. 63 & feq. ). (24) BARTOLOZZ1, Journal de’ Phyfique, 1782 , fupplément , p. 4704 (25) Cor.Lint, Confidération fur ls montagnes volcaniques. Manheim , 1781, n-4° , p.42, note o. (26) RoziER , Cours complet d'Agriculture ,t. 1°, p. 273 ,au mot Agriculture, (-7) BERGMANN , Analyfe des matières volcaniques , Journal de Phyfi- que, 1780,t. XIV, p.109—229 & 266—289; & Lertres de TROÏL fur lIflinde , trad. du Suédois; par LINDBLOM. Paris, 1781, r-8°. (22) CADET , Analyfe des laves, dansles Mémoires de l'Académie des Sciences, année 1761. (24) SAGE, Elémens de minéralogie docimaflique, t, 1°, ner 386 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, SO TUNTAEE DES EXTRAITS DU PORTE-FEUILLE DE M. LABBé DICQUEMARE., \ CN Gas = » LAAICETUILES Durs long temps j'avois apperçu dans l’eau de mes vafes, quelques individus d’un infete marin brun qui nageoïit très-vite , & j'avois négligé de l'obferver comme beaucoup d'autres , à caufe de fa petitefle. Mais ayant confidéré plus particulièrement pendant l'été de 1781 fon agilité , fa forme , fes manœuvres, &c., je crus qu'il deviendroit utile à la fuite de mes obfervations, & je penfai à m’en procurer un nombre fuffifant. L’oc- cafion ne fut pas long-temps à fe préfenter : en regardant la mer près d’une pêcherie des environs du Havre, je remarquai qu'il y en avoit beau- coup; j'en fis pafler dans une bouteille: c’eft ainfi qu'on pourra s'en pro- curer jufqu'à ce qu’on ait découvert leur oîte. Pendant plus de quinze jours il me fut impoñible de trouver l’infecte arrêté ; il alloit çà & BA, cherchoit , fembloit attraper quelque chofe ou venir refpirer à la furface , plongeoit , tournoit , fe culbutoir , fe précipitoit avec une vivacité étonnante , & fes mouvemens paroifloient toujours déterminés par quel- que recherche, ce qui me le fit nommer l'aéhif. Il étoit impoffible de le fixer par les moyens dont on ufe ordinairement ; en conféquence aucun infecte ne m'a donné plus de peine pour le defliner : je l’aurois abandonné volontiers, mais une chofe m’a engagé à ne Le pas faire ; c'eft que fes mouvemens m'ont paru refflembler beaucoup à ceux des infectes dont [a mer eft remplie , & qui font fi petits , que le microfcope folaire nous permet à peine de failir en gros leur forme & d’obferver leur allure. Cette analogie n’eft pas indifférente : fi ces animaux microfcopiques , qu'on pourroit prendre dans des vues fyftématiques , ou avec des yeux peu exer- cés, pour atre chofe que pour des animaux, reflemblent à l'aéif; cet vraiment de quoi nous perfuader que l’animalité eft toute entière chez eux. Nous avons à la mer des ennemis redoutables aufli petits que l'aëif., & lui-même pourroit bien en être un: or , il eft bon de les connoître, Cet infecte a depuis une ligne jufqu'à trois de longueur, & en largeurMles cinq GAY | SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 387 douzièmes de fa longueur : fa forme tient un peu de celle d'un cloporte & de celle de la puce de mer; fa couleur efk aufñi celle des cloportes marins , ceft-à-dire un gris mêlé de brun & de parties blanches. Il court quelquetois trés-vite fur le fond des vafes & cherche à fe cacher ; fes pieds font ronds & articulés fept de chaque côté : tour le deffous du corps eft blanc comme les pieds; on y voit vers la queue cinq doubles nageoires & plufieurs autres qui terminent la partie poftérieure ; l’antérieure ( car l'infeéte n’a point de tête apparente ) eft ornée de deux yeux bruns à facettes | qui paroiflent prefque autant pardeffous que pardeflus , à caufe de la tranfparence, & quatre antennes , dont deux compoféss d’arti- culations excèdent la moitié d: la longueur du corps ; les deux autres font très courtes : il y a même encore deux petits barbillons plus en avant, Le corps eft cempofé de douze parties au moins, qui le rendent flexible , fur-tout en deffous:elles font ornées d’efpèce d'arborilations en brun , & autres deflins qui varient en forme & en couleur. L’animal entier devient aufli quelquefois blanchâtre , & je crois qu'il change de peau ou de croûte. Voyez les figures 1°", feconde & troifième , PI. 1%. La pre- mière repréfente Le dos, la feconde le deffous, lune & l'autre beaucoup plus grande que Nature; la troifième le fait voir de grandeur naturelle, Cet infecte eft vorace. Comme je ne m'occupai pas du foin de le nourrir , je m’apperçus qu'un petit fcarabée qui s’étoit noyé , fut dévoré par un aëlif; je jettai dans un vafe où il y en avoit une douzainê*, une mouche en vie : prefque tous paflèrent & repaffèrent fort vite à côté d’elle comme pour la reconnoître ; ils tournoyèrent beaucoup autour , lui firent quel- ques attaques , s’enfuirent , revinrent à la charge, l’attaquèrent de nou- veau fous les aîles , par le corcelet, par le col ; & enfin, malgré fes efforts, elle devint leur proie, Ceci eft arrivé autant de fois que je leur en ai préfenté. me BAROMÈTRES A APPENDICES, Qui ont un niveau conftant , mefurent la pefanteur de l'air dans les profondeurs inacceffibles , &c. &c. &c. ; Par M. CHANGEUX. C Equilya de nouveau dans la conftruction des baromètres que l'on va décrire#confifte en une fimple addition d’une ou plufeurs appendices , & ces appendices font des tubes de verre, L'on voit la forme de ces iaftru- ments , Planche ÎE, figures r & 2, 338 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Dans le premier, l’appendice eft placée au réfervoir. Ce baromètre a [a propriété de conferver roujours le même niveau. Dans le fecond , l'appendice eft appliquée à la partie fupérieure du tube. Ce baromètre a la propriété de melurer la pefanteur de l'air dans Les pro- fondeurs inacceflibles. Dans Le troifième (que je ne ferai qu’indiquer ), l'appendice eft placée au réfervoir , & inclinée dans un fens contraire à l'inclinaifon de l’appen- dice du premier baromètre : il a pour propriété de faire connoître la pe- fanteur de l'air à des hauteurs fur lefquelles on ne voudroit point fe ha- farder de monter foi-même. Je termine ce Mémoire par l'explication de la figure 3 de la Planche IF. Cette figure repréfente un baromètre compofé des deux premiers : auffi réunit il la propriété de l’un & de l’autre. Ces objers , & quelques autres qui en dépendent, feront la matière d'au- tant d'articles féparés & très-abrégés. ARTICLE PREMIER. Baromètre à niveau conflant. $. 1°. Effers du changement duns la ligne de niveau. Lorfque la colonne de mercure defcend dans le réfervoir du baromètre, ce réfervoir s'effiplit ; & lorfque la colonne monte, le réfervoir fe vuide, La quantité de mercure n’eft donc jamais conftante dans le réfervoir ; ce ui fait varier fans cefl: la ligne de niveau, & complique les indications du baromètre ( par les raifons que tout Phyficien connoît) de telle ma- nière que, lorfqu'on n’a point égard à cette complication, le baromètre eft infidèle. Tous les baromètres à réfervoir font plus ou moins füujets au défaut que je remarque , à raifon de la grandeur du diamètre de ces réfervoirs, relativement au diamètre des tabes. Je dois dire encore, à l'égard de la grandeur (ou des divers diamètres) des réfervoirs , qu’étant différente dans prefque tous les baromèrres dont fe fervent les Obfervateurs, cette différence donne lieu à un autre inconvénient confidérable : je veuxdire qu'elle empêche ces inftruments d'être parfaitement comparables, $. IT. Corrections imaginees jufqu’a ce jour pour parer aux défauts dont il vient d'être queflion, Les conftructions ou moyens de correction imaginés pour parer aux défauts qui réfultenc du changement dans la ligne de niveau , fe réduifent à quatre, # I. Baromèrre SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 389 L. Baromètre en forme de Syphon. Je mets à la têre des inventions de ce genre le baromètre à fyphon. N'ayant point de réfervoir, il n’en peut avoir les inconvénients; mais auf il n’en a pas les avantages. Îl n très-peu fenfible; le mercure n'y parcourt que la moitié de l'échelle des variations. ; IT. Renflement du réfervoir à fon extrémité fupérieure. Pour empêcher les changements dans la ligne de niveau , on a imaginé de donner à la cuvette ou au réfervoir du baromètre une forme partiçu- lière, [ On fait un renflement à fa partie fupérieure; c’eft une efpèce de gout- tière ou rigole dans laquelle le mercure qui defcend va fe rendre , & d’où il reflue lorfque le mercure monte, La rigole dont je parle entoure la cuvette, & et placée à la ligne de niveau du mercure. Cette conftruétion , quoiqu'ingénieufement conçue, ne remplit pas com- plettement fon objet. L'expérience prouve que le mercure ne fe répand qu'avec peine dans la rigole; c’eft-à dire, que l'effet n'a lieu que dans les grandes defcentes de mercure. TIL. Grends Réfervoirs, ou Réfervoirs à grands diamètres. Quelques Phyficiens ont confeillé les grands réfervoirs. La différence , ont-ils dit, dans la colonne de mercure, lors de f4 plus grande defcente &c de fa plus Les élévation, équivaut à 2 pouces = ou environ de mercure de même diamètre que le vuide du tube qui le renferme. Si donc on fait tomber dans un très-grand réfervoir cette quantité de mercure, elle fe ré- .pandra en une furface, dont l’épaiffeur diminuera d'autant plus, que la capacité de ce réfervoir fera plus grande, Les liquides pèfent en raifon de leur bafe & de leur hauteur. Ainf, dans la conftruction préfence , 2 pouces & demi de mercure contenu dans le tube, quand ils occupe- ront le réfervoir fuppofé , adfont une hauteur ou épaifleur prefque nulle ;* le niveau ne s'élevera pas fenfiblement. On n'arrive par ce moyen qu'à des appreximations ; & de plus, un réfervoir, aufli grand qu’il faut de fuppofer pour rendre prefque nulle la différence du niveau , exige une quantité de mercure qui rend l'inftrument un peu difpendieux & très-dificile à manier. LV. Baromètre à Déchargeoir. Ce baromètre.eft conftruit de façon que dans la defcente du mercure, Tome XXII, Part, 1, 1783. MAL. Ddd 399 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ce fluide vient fe rendre dans le réfervoir, s’y tient dans fa quantité con- venable , fa furabondance fe déchargeant dans un vafe ou tuyau, Si le niveau ne change point dans un pareil inftrument , lorfque le mercure defcend, il change lorfque le mercure monte, L’effeceft donc in- complet ; d’ailleurs cet inftrument exige que l'Obfervateur reverfe de temps en temps dans le réfervoir la quantité de mereure qui s’eft écoulé. dans le tuyau ou vafe de décharge. Nota. Je me crois difpenfé de parler de quelques autres inventions qui fe rapportent à cette dernière, & qui ont des inconvénients analogues, Tels font les baromètres à doubles cuvettes, que l’on fait plonger l'une dans l’autre ; tels font encore les moyens mécaniques imaginés pour con- noître les changements qui ont eu lieu dans la ligne de niveau pendant l'abfence de l'Obfervateur, $. III. Défériprion du Baromètre à niveau conflant. Un baromètre à niveau conftant feroit celui qui fe corrigeroit de lui- même, foit dans l’afcerfion, foit dans ladefcente du mercure. Il faudrojt pour cela que ce réfervoir fe remplit & fe vuidät tour ‘à-tour de la jufte quantité & à l'inftant précis où la variation dans la colonne auroit lieu. Voilà ce que fait l'inftrument repréfenté dans la figure 1°", AAA eft un baromètre ordinaire ou d’une feule pièce, auquel tient un réfervoir quelconque. On peut donner un très-petit diamètre à ce ré- fervoir. ÿ BB eft une ligne ponétuée, repréfentant le niveau. Cette ligne de niveau fera prife du point où fe trouve le mercure , lorf- u’on le fait monter à fon plus hant degré d’élévation , & même à 29 pouces À l'échelle de graduation , quoique dans nos climats il ne monte jamais fpontanément jufques-là. C. Appendice ou tube foudé à un côtétde réfervoir. Ce tube eft placé dans la direction de la ligne de niveau , & on lui donne une légère incli- naifon de bas ‘en haut. 3 Effets. La On conçoit que le mercure, dans fa defcente, ne peut fe rendre dans le réfervoir , fans refluer aufli-tôt dans l'appendice. Le mercure remonte-t-il dans le tube , la même quantité revient d'elle- même de l'appendice dans le réfervoir. La furface du mercure contenu dans le réfervoir ne peut donc s’élever dans l’abaiflement de la colonne de mercure, ni s’abaifler dans le cas oppofé. Le niveau ne change jamais , parce qu'il n’y a jamais dans Le réfer- voir ni plus. ni moins de mercure dans ün temps que dans un autre. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 391 Nota, Je n'ai pas befoin d'obferver que cette invention convient à des baromètres à cuvette. Elle feroit auf avantageufe aux baromètres renverfés & à cadran. Il faudroit, dans ces derniers inftruments , placer l'appendice à leur partie fupérieure. Ainf , je confeille d'en ajouter une au baromètre dont on voit la forme dans la defcription de mon Barométrographe. ( Voyez le Journal de Phyfique pour l’année 1780 , mois de Novembre , Planche LI, lettres P P P. Remarque fur l'inclinaifon de L Appendice. L'inclinai(on de l’appendice eft néceffaire pour que le mercure revienne dans le réfervoir, & cette inclinaifon femble Re donne lieu à un chan- gement dans la ligne de niveau; changement très-petit, dont je n'ai pas fait mention, parce que l’on peut l’évaluer d'une manière très-commode & non moins exacte. Je fuppofe, par exemple , que l'appendice ait 1 ligne d’inclinaifon, le niveau changera de 1 ligne dans la plus grande defcente du mercure, je veux dire dans celle de 3 pouces; variation extrême, qui n’a jamais lieu dans nos climats. Ce feroit donc un trente fixième d'erreur dansce cas ex- traordinaire , fi l’on n'y faifoit nulle attention. Dans les petites variations , l'erreur ne feroit point fenfible ; & même, dans les moyennes variations , je ne fais fi l’on devroit y avoir égard. Mais des erreurs que l'on peut évaluer par l'inftrument, ne {ont pas des défauts dans cet inftrument, Nota. Si l’appendice avoit 2 ou 3 lignes d'inclinaifon , le changement dans la ligne de niveau deviendroit un objet de confidération. Par exem- ple, dans le cas où l'appendice feroir irclinée de 3 lignes , il y auroit un douzième par pouce de correction à faire fur l'échelle des degrés ; mais un pareil inftrument feroit mal fait, ARTICLE Il. Baromètre propre à mefurer La pefanteur de l'air dan$ Les profondeurs inacceffibles. = Cetinftrument eft lé baromètre à fyphon, auquel j'adapte une appen- dice au fommet de la grande branche & au degré 29 de l'échelle, L'appendice aura ou le même diamètre que le tube, ou un diamètre plus perit, mais d’une proportion connue avec celui du fyphon. J'ai donné arbitrairement une longueur de 6 pouces à mire on l'augmentera d'autant plus, qu'on aurade La en effets à obtenir; c’eft- à-dire, qu'on aura de plus grandes profondeurs à mefurer. Voyez la figure 2. A A À. Baromètre à fyphon. Tome XXII, Part. I, 1783. MAI. Ddd 2 392 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, B. Appendice, Son inclinaifon forme un angle qu’on peut rendre plus ou moins aiou. Ufage & Effers. Quand on voudra fe fervir de l'inftrument, l'on verfera du mercure dans {a petite branche ou branche inférieure du fyphon, jufqu'à ce que ce fluide monte dans la grande branche au degré 29, c’eft-à-dire, jufqu'à ce qu'il fe trouve au niveau de l'appendice. Cette opération faite, fi l'on defcend le baromètre dans une profon- deur, la preflion de l’air augmentant graduellement & agiflant de plus en. plus fur le mercure, tendra à le faire monter dans la grande branche ; mais, à mefure que Le mercure montera , il fe répandra dans l'appendice. Ce qui f:ra tombé de mercure , indiquera la pefanteur de l'air dans la pro= fondeur. Je fuppofe , par exemple, que j'aie defcendu l'inftrument dans un puits de dix toifes. Je le retire & je trouve dans l'appendice nne demi-ligne de mercure. J'en conclus que l'air intérieur du puits a la même pefanteur que l'air atmofphérique (1). Si l'air du puits eûc été plus pefant, la quantité de mercure tombé dans l’appendice eût été plus confidérable ; elle eût été moindre fi Pair eût été moins pefant (2). On voit que la mefure de la profondeur eft connue par la corde qui fere à defcendre Le baromètre , & la pefanteur de l'air par la quantité de mer- cure qui fe trouve dans l’appendice. De la comparaifon de ces deux chofes réfute la découverte de la troifième que l’on cherche , c’eft.à-dire , que l’on conclut d’une manière très-sûre que l'air d’une profondeur pèfe plus ou moins que l'air de Patmofphère (3). Première remarque fur Air atmofphérique pris pour terme de comparaifon. Mais celui-ci a-t-il une pefanteur fixe & invariable, dont on puifle partir pour établir Les comparaifons dont il s'agit ? (1) Je compte ici dix toifes par demi-ligne , parce que le baromètre à fyphon ne fait que la moitié des variations du barometre à réfervoir. (2) L'air de certains puits, de quelques mines & autres profondeurs , eft bien plus. chargé que lait atmofphérique. [lréfidte des obfervations faites par M. Deluc dans les mines du Hartz, qu'on doit compter environ 14 toiles par ligne pour les mefures des rofondeurs, en fe fervant du baromètre ordinaire ou à réfervoir. Ileft des profondeurs où Pair eft d’une pefanteur où d’une légéreté extrême , & fi dan- ereux , que l'on ne peut ÿ pénétrer. C’eft pour connoître ces qualités , que le baromètre appendice eit fur-tout fait , & qu'il deviendroit fouvent iodifpenfible. (3) Si Pon vouloir avoir des effets très-fenfibles & former de grandes divifions fac l'échelle de l’appendice , l’on donneroit à cette appendice moins de diamètre qu’au fy- hon. Ainf, fi l’appendice a la moitié du diamètre du {yphon , elle s’emplira de 1 lig., Be le fyphon y verfera une demi-ligne de mercure. o Le] \ da SUR LHIST. NATURELLE ET LES ARTS. 393 Je fuis éloigné de Le penfer , quoique ce que je vièns de dire femble linfinuer. Je prends la pelanteur de l'air atmofphérique pour terme de comparaifon , en atendant que l'on en ait trouvé un plus exact. Ce tra- vail eft encore à faire, & il eft à fouhaiter que quelque Phyficien s'en charge pour donner à la Météorologie un degré de perfection qui lui manque. Seconde remarque fur la manière de graduer l'Inflrument. A mefure qu’on defcend le baromètre en queftion , la quantité totale de mercure ART ( celle qui tombe dans l'appendice devant étre défalquée ), tandis que la pefauteur & la quantité de la colonne de l'air augmente. fe rapport entre ces deux puiffances varie donc par des degrés pros portionnels, & qui méritent l'attention des Phyficiens , qui voudroient conftruire une échelle exacte pour l'inftrument propofé. Je crois que la méthode mécanique où de târonnement doit être em- ployée ici concurremment avec la méthode rationnelle, Troifième remarque fur l'ufage de lInffrument. Pour faire ufage de ce baromètre à appendice , il faudra trouver [e moyen de le defcendre fans lui faire éprouver de fecouffes. Je laiffe imaginer une machine qui rempliffe parfaitement cet objet; il faudra d'ailleurs prendre des précautions fur lefquelles je n’ai pas deffein de m'étendre. Je préfente mon inftrument comme exécuté & sür ; s’il peut fervir aux Phyficiéns , ils n’auront pas de peine à trouver l’art dele manier, Voici feulement à ce fujet quelques indications. Un pareil baromètre pourroit être attaché à une corde très-unie , enve- loppée fur un rouleau que l’on feroit mouvoir doucement par un levier ou une manivelle. IL feroit même bon, pour rendre le développement de la corde plus doux, d’ajouter une poulie à ce petit appareil ; c'eft-à-dire , de faire pafler la corde du rouleau fur cette poulie qui lui feroit parallèle, Voici encore un moyen qui m'a été indiqué par M. de Lamanon , & qui me paroît fort bon. Avant de defcendre le baromètre dans une profondeur , Bon fermera avec un bouchon la petite branche du fyphon ; le bouchon fera affujetti par un reffort qui tendra à le foulever ; enfin un poids pendant & attaché à une corde conrierdra l'effort du reffort, "Suppofons à préfent que l’on defcende le baromètre ainfi préparé dans une profondeur quelconque ; l'air n'aura aucune action fur le mercure = tant que durera Ja defcente : mais l'inftrument ne fera pas plutôt arrivé au 394 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, | fond de la profondeur, qué le poids appuyant à terre perdra fa ay teur, & que le bouchon cédant au reffort fera foulevé. Le poids de l'air agira & l’on conçoit le refte. Quand on retirera l'inftrument de la profondeur, le reffort preffant de nouveau fur le bouchon , refermera l'ouverture du baromètre , &c. Quatrième remarque fur les Thermomètres à appendices ou à fachets imaginés par MM. Jean Bernoulli & Kraff, € idée d’un Baromètre fait [ur ces mo- dèles. Seroit-il propre à mefurer les profondeurs inacceffibles ? Dans la differtation fur la comparaifon des thermomètres par M. J. H. Vanfwinden , page 254 & fuivantes, l’on voit la defcription des thermo- mètres à petites appendices imaginées par MM. Jean Bernoulli & Kraff. L'on voit auili dans le même ouvrage les figures de ces inftrumens. Ces thermomètres femblent pouvoir fervir de modèle à un baromètre propre à mefurer l'air dans des profondeurs inacceflibles. ” Pour avoir l'idée d’un baromètre de cette nature , il fufit de concevoir qu'à la place de l'appendice de la figure troilième , d:puis le degré 29 jufqu'à l'extrémité du tube, on a foudé de petits tubes très courts les plus près poilibles les uns des autres, à une ligne par exemple de dif- tance, Il faudroit que ce baromètre eût un grand réfervoir ,ou une appen- dice d’un fort diamètre attachée à fa cuvette. IL eft évident que fi l'on defcend un pareil inftrument dans une pro- fondeur quelconque , le mercure ne pourra monter dans le tube fans remplir Les fachets ou petites appendices : on voit aufl que le réfervoir fourniffant coujours de ce fluide, la ligne de niveau feroit fujette à chan- ger beaucoup ; Gi, comme je l'ai dit, on ne joignoit une appendice à ce réfervoir. L'opération faite, c’eft-à-dire , lorfqu'on aura fait remonter l'inftru- ment, les fachets ou petites appendices qui feront remplies de mercure , indiqueront la hauteur jufqu’à laquelle fe fera élevée la colonne du fluide. Quoïqu'un tel baromètre fuc bien plus fidèle que’ les thermomèrres imaginés par les Phyficiens que j'ai nommés ( ces thermomèrtres ayant des défauts effentiels qui ont été indiqués dans l'Ouvrage cité ci-deflus) , il feroit extrêmement imparfait. Remarquons d’abord que le baromètre à petites appendices eft un inf- trument que j'ai tenté en vain de faire exécuter, Je ne crois guères poñlible de rendre ces appendices aufli petites qu'il feroit néceffaire , & de les atta- cher à un tube très-près les unes des autres { à une ligne de diftance, par exemple ). Ce n’eft pas tout , & dans ce cas-là même , on n'’auroit la mefure des profondeurs qu’à environ dix toiles près, Combien cet inftru- ment ne manqueroitil pas de jufteffe ! de SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 39% Si donc jindique ce baromètre , c'éft par égard pour l'autorité de MM. Bernoulli &.Kraff. On peut penfer qu'ils ont fait exécuter ou qu’ils 15 à DL MEN ER QU LAS J oc cru exécutable leur shermomèrre à fachets; d 4 infère qu'on trouvera peut-être quelque jour des moyens d'exécuter aufli le baromètre à fachets, dont ces Savants d’ailleurs n’ont pas parlé & n’ont pas eu d'idée. P P c 1 ARTICLE III. /ndication d’un Baromètre propre à mefurer lès hauteurs A RE qu'on ne voudroit pas parcourir foi-même, IL faffit de jetter un coup-d'œil fur la figure 2 , pour avoir une idée de cet inftrument. On y voit repréfentée par des points une appendicé appliquée au fommer de la petite branche du baromètre à fyphon ; cette appéndice lui eft inclinée , & forme avec elle un angle qui peut être plus ou moins aigu. Ufage & Effets. Dans la mefure des hauteurs par le baromètre , le mercure fait des mouvemens inverfes à ceux qu'il Aie dans la mefure des profondeurs. Plus on éleve l'inftrument, plus le mercure defcend. Lorfqu'on fera l'expérience avec le baromètre que j'indique , l’on ver- fera du mercure dans la petite branche du fyphon, jufqu'à ce qu'il fe trouve au niveau de l'ouverture de lappendice. Alors fi l’on fait tranfporter par quelqu'un cet inftrument jufqu’au fommet d'une montagne, la grande colonne de mercure deviendra plus courte ; le fuide en defcendant dans la petite branche du fyphon, fe rendra aufli-tôt dans lappendice. La quantité de mercure qui y fera tombée indiquera à l'Obfervateur , à qui lon remettra l’inftrument , la vraie pefanteur de l'air à la hauteur qu'il n'aura pas voulu ou pu s'élever. Nota. Les ofcillations du mercure dans le tranfport d’un pareil inftru- ment, & les erreurs qui en pourroient réfulter, feroient ici fort faciles à prévenir. Il ne s’agiroit pour cet effet, que de fermer avec un pifton l’ouverture du baromètre, La perfonne chargée de faire l'expérience n’ouvriroit le pifton qu’à fon arrivée au terme de fa ftation, après avoir placé le baro- mètre dans une poñtion bien verticale, & avoir attendu que le mercure für dans un parfait repos, | La raifon de cette manœuvre & les effets qui en doivent être la fuite , font fenfibles. Pendant le trajet l'air n’aura aucune action fur le mercure ; mais il la développera dès que l'opérateur aura débouché l'inftrument. Alors le défaut de pefanteur de l’air permettra à une partie de la colonne du mercure de fe rendre dans la petite branche du fyphon, d'où elle s'écou- lera dans appendice. * 396 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, L'opérateur fermera de nouveau l'orifice du baromètre avant de defcen- dre la montagne ; ou s'il l'aime mieux, & ce qui feroit plus aifé, il mar- quera avant fon départ fur le tube de l'appendice , la quantité de mer- cure qu'il y verra contenue. ARTICLE IV. Explication de la figure 3 , laquelle repréfente un Baromètre mixte, qui a la double proprièté de conferver la méme ligne de niveau, 6 de mefurer la pefanteur de l'air dans les profondeurs inacceffibles. IL fuffic de jetter un coup-d'œil fur la figure 3 , pour connoître la conftruétion du baromètre à appendices mixtes. 1°. L'appendice fupérieure dans ce baromètre eft placée plus haut que dans celui de la figure 2 ; je la mets pour plus de sûreté & de commo- dité à quatre pouces au-deflus du degré 29 de l'échelle, 2°. L'appendice inférieure eft placée comme dans le baromètre de la figure 1 ; elle fe recourbe de bas en haut à fon extrémité , & fon orifice doit être évafé pour recevoir un bouchon. 3°. Le réfervoir eft prolongé perpendiculairement par un tube de fix pouces de bauteur ( on peut lui en donner davantage }: ce tube a un diamètre égal au diamètre du grand tube du baromètre. À A À. Baromètre, B. Appendice fupérieure placée à 33 pouces de hauteur: C. Orifice recourbé de l’appendice inférieure. D. Prolongement du réfervoir , & fon élévation perpendiculaire. Effets. Ce baromètre étant compofé des deux que nous avons décrits articles premier & fecond , a les propriétés de l’un & de l’autre. Son appendice inférieure lui fait conferver fa même ligne de niveau , & fon appendice fupérieure le rend propre à mefurer la pefanteur de l'air dans les profondeurs inaccefibles. Pour être employé à ce fecond ufage, il exige une légère préparation. On commencera par boucher l’orifice recourbé C. de l'appendice infé- rieure, On verfera enfuite dans le tube D. ou prolong-ment du réfervoir, affez de mercure pour qu’il s'élève dans le baromètre jufqu'au niveau de lappendice fupérieure. On pourra alors opérer avec cet inftrument comme avec le baromètre à fyphon de la figure 2, puifqu'il n’en différera plus eflentiellement; ce fera un vrai baromètre à fyphon. Nota. Les machines ci-deffus expliquées font d’une conftruction fi fim- ple & fi facile, qu'il n’y a pas d'Ouvriers en verre qui ne les puiffent fabri- * quer. Le neur Moffi, Marchand d'inftrumens Météorologiques & conftruc- teur : re cn SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 397 teur en toutes fortes de machines de Phyfique , les vendra au même prix ue les baromètres ordinaires. Cet Artifte très-connu & bréveté de l’Aca- émie, étant celui que j'ai choili pour les exécuter , & s’en étant parfaite- ment acquitté , j'ai cru qu'il convenoit de l'indiquer aux Amateurs de la d . Phyfique, EEE ——— NOUVELLES LITTÉRAIRES. PRE NATURELLE de la France méridionale , feconde partie: Les végétaux ; t0me premier, contenant Les principes de la Géographie Phy- Jique du règne végétal, lexpofition des climats des plantes , avec des cartes pour en exprimer les limites; par M. l'Abbé Soulavie. À Paris, chez Quillau, Libraire , rue Chriftine. M. l'Abbé Soulavie reconnoît queæl’idée du climat des plantes n'eft pas neuve: mais il la développée ; & , pat fes nombreufes obfervations , il a mis cette vérité botanique dans tour fon jour. L’obfervation de ce phénomène pourroit être d'un très-grand fecours en botanique , s’il n'étoit pas de fait qu'il y a une très-grande quantité de plantes errantes qui fe rencontrent fouvent dans des climats bien oppofés; il eft vrai qu’elles n’y végètent jamais avec cette vigueur qui les accompagne dans le climat qui leur eft propre. Mémoire [ur Llinoculation de la pefle, avec La defcription des poudres fumigatives anti-peflilentielles Lettre fur les expériences des friélions glaciales, pour la guérifon de la pefle & autres maladies putrides ; par M. D.SamotROwITZ , Chiruroien Major du Sénat de Mofcow , & membre dé la Commiffion contre la pefle. À Strasbourg, chez les frères Gay, & à Paris, chez Méquignon l'aîné , rue des Cordeliers. Nous ferons connoître plus particuliérement ces intéreffans Mémoires. Tentamen hifforie Lichenum , &c. &c. Effai fur l'hifloire des Lichens , € principalement fur ceux qui croiffent en Pruffe ; par M.C. G. HAGEN, Doëteur en Médecine, & membre de l'Académie Impériale des Curieux de la Nature. À Kænisberg, chez Hortung, & à Strasbourg, chez Kænig, 1782 , 27-8°, fig. enluminées. On fait combien l’hiftoire des lichens eft encore incomplette en bota- Tome XXII, Part, I, 1783. MAL. * Et'e 398 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, nique: très. peu connus, parce qu'ils ont été très-peu obfervés en général, ils méritoient cependant de l'être par leur variété, & fans doute aufli par le parti que l'induftrie humaine pourroit en tirer. M, Hagen , après avoir donné les caractères génériques des lichens, parle de leur fubftance , dé leur ftru@ure , de leurs couleurs , de leur croûte, de leur racine, de leur fructification , des endroits où ils naïflent, du temps où ils font en vi- gueur , des variétés & de leur famille. Non-feulement fuivant ce favant Botanifte, ces petites plantes ne font pas capables de nuire aux arbres fur lefquels elles croiffent, mais il penfe qu'elles peuvent être d’une utilité particulière à la fertilifation ; qu’elles excirent la végération comme engrais, Éa teinture en a fu tirer parti, & la Médecine en fait ufage. Les animaux fauvages mangent les lichens ; & les Canadiens, au rapport de Kalm, fe nourriflent fouvent avec un lichen particulier à leur pays glacé. Ù A treatife on the nature and properties of air, &c, Traité [ur la nature & Les propriétés de l'air, ainft que des autres fluides conflamment élafliques ,pré- cédé d’une introdu£tion à la Chymie ; par M. TiB8ERE CAVALLO , mem- bre de la Société Royale de Londres, in-4°. À Londres, chez Dilly, 1782. L'Ouvrage de M. Cavallo , dont le mérite eft connu de tous Les Phyfi- ciens , efkun très-orand Traité fur les gazes ;& non-feulement il ÿ a réuñi toutes Les vérités démontrées par les Prieftey, L:s Fontana, &c. &c, mais fes propres obfervations Le rendent aufli complet qu'il peut être. Traité des maladies des Grains, €c. ; par M. l'Abbé TeEssrer. Etre utile aux hommes , en cherchant le principe de leurs maladies, & le moyen ou de ies prévenir ou de les difliper, en s'occupant de tout ce ui les intérefle , & für-rourcerte claffe fi précieufe, qui, exilée dans le fond de campagnes, ne refpire que pour arracher avec peine à Ja terre des tré- fors dont jouiflent les Habitans des Villes , tel a toujours été le morif qui a infpiré & guidé tous les travaux de M. l'Abbé Teffier. Le nouvel Ouvrage dont nous allons parler en eft le fruit. Non moins intéreffane ue Le dernier que nous avons annoncé ( Ob/érvaions fur plufieurs mala- dies de Befliaux) , du moins il n’a pas expofé fon Auteur à étre la vidtime de fon zèle ; de fes foins & de fes fatigues. mais il eûe été de la même nature , que la crainte du danger n’eût pas arrêté un inftant M. l'Abbé Tefier ; il n’eût pas balancé entre fon intérét perfonnel & Fintérêe général. Quelle eft la nature des maladies des grains ? peut-on les en préferver, & quelle influence peuvent-elles avoir fur la fanré des hommes? voilà les quettions que M. l'Abbé Teffier cherche à réfoudre dans ce Traité. Six ans d'un travail fuivi, & dans un pays ( au milieu des plaines de la Beauce) SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 399 où l’immenfité des terres cultivées l’a mis à même d'étudier la Nature en grand , lui ont procuré Les moyens de les difcuter pleinemeni, - Les grains dont il a étudié les maladies, font le feigle, le froment, l'orge & l'avoine ; & les maladies principales font l'ergor, la rouille, la carie & le charbon. Il les confidère fous deux rapports , phyfiquement &e indépendamment des effets, & relativement aux effets. Sous le premier rapport, il donne la defcription de la maladie, la manière dont elle fe forme ; l'analyfe chymique de fes produits & fes caufes ; fous le fecond, il examine l'influence qu’elle peut avoir fur la fanté des hommes & fur la fortune des Cultivateurs , & les moyens les plus propres à en préferver le grain, foit entièrement , foit en partie. Tel eft le plan de tout cet Ou- vrage. Le feigle l'occupe d'abord. Après avoir donné quelques détails fur les efpèces za cette plante, fur fa végétation, & principalement fur fa fécon- dation, fur Le jeu de fes anthères, fur leurirritabilité, fur La maturité du grain, il parle de fes maladies, L'ergor eft une efpèce de graine ordinairement courbe & alongée , rarement arrondie dans la longueur: mais on y remarque trois angles moufles , féparés par des lignes longitudinales, qui fe portent d'ur bout à l’autre ; la couleur eft noire ou d’un violet fombre. L'intérieur eft une fubftance d’un blanc terne & d’une confiftance ferme , qui ne s’en fépare que difficilement: L’ergot deffléché eft plus léger que le feigle, Cette maladie peut attaquer tous les feigles ; mais elle fait fes ravages principale- ment dans les terreins humides. Rien de fi difficile que de pouvoir expli- uer comment il fe forme. M. l'Abbé Teflier a cru trouver fon origine et une fubitance blanchatre & mielleufe, plus alongée qu’un grain de feigle, & fans organifation diftinéte: on la remarque dans quelques balles ; & effectivement , par -tout où il a obfervé cette fubitance , il a vu quelques jours après un ergot bien formé & coloré en violer. L'analyfe chymique a démontré qu'il y a des différences fenfbles entre les principes conftitutifs de l'ergot & ceux du feigle, & que le premier étoit une graine émulfive. On peur réduire à quatre Les principales opinions fur les caufes de l’ergot. La première, la plus ancienne & la plus générale, attribue la naiffance de cette graine à l'humidité de l'air, froide felon les uns , chaude felon les autres; la feconde à des piquures d’infeétes ; la troifième à l'humidité du fol, & la quatrième regarde l'ergot comme une maladie occafionnée par un défaut de fécondation. Un très-grand nombre d'expériences ont porté l'Auteur à donner la préférence à la troifième. Il y a eu aufi deux opinions fur les effets de l’ergot. Les uns ont pré- tendu que fon ufage étoit très-dangereux & occalionnoir des maladies qui conduifoient à la mort; les autres au contraire, qu'il étoit innocent. M. l'Abbé Tefier prouve, par une fuite d'expériences très-bien faites & très-exactes, 1°. que l’ufage de l'ergot nouveau eft très-dangereux ; 2°. que les ani- Tome XXH, Part, 1,1783. MAI, Eee 2 400 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, maux oht une répugnance extrême pour lergot; & 3°. que l’ufage de lergot ancien n’eft pas moins funefte que celui de l'ergot nouveau. Les maladies qui ont régné dans les pays où l’ergot eft commun, paroiffenc avoir été fouvent produites par ce grain pernicieux , comme le montre le parallèle entre leurs fymptômes & ceux des maladies des animaux quiont été nourris avec de l’ergot, e Les moyens les plus fimples de détruire l'ergot dans un pays, fuivanc M. l'Abbé Tefñier, eft de bien deffécher les terres, de donner un écou- lement aux eaux , & d'élever les fillons. Le froment eft rarement attaqué de l’ergot, mais très-fouvent de [a rouille , de la carie , du charbon & du rachitifme. La rouille n’eft d'abord que de petites taches d’un blanc fale, éparfes fur les feuilles & les tiges du froment, qui s'étendent par degrés & prennent une teinte roufsâtre. Bientôt il fe forme au même endroit une pouffière de couleur jaune oranger , ou d’ochre , peu adhérente, inodore & fans fa- veur, qui jaunit tout ce qu’elle touche. Cette pouflière, qui prend naif- fance fous lépiderme des parties affectées de la rouille, le foulève , Fa- mincit & le crève pour fe montrer au dehors. Lorfque la rouille attaque les bleds déjà avancés , fouvent elle détruit des récoltes entières: car elle occafonne une déforganifation , foit dans les feuilles , foit dans les tUYaUx z les tiges noirciflent comme fi elles avoient paflé au feu; l'accroiflemenc cefle , une partie de l’épi jaunit; les grains, flérris dans leurs balles, ne peuvent plus atteindre à leur groffeur ordinaire, La caufe principale de la rouille paroït être Les brouillard®, fur-tout ceux qui font fecs & ont une odeuriléfagréable, qui , fuivant M. l'Abbé Teflier, fuppriment dans ces cas la tranfpiration des plantes, comme il le prouve par l’expérience , en produifant artificiellement fur des tiges de bled une vraie rouille. La carie, appellée boffe en quelques pays , fur-tout en Beauce , cloque dans Le Vexin , chambuche dans le Lyonnois, &c., eft un petit grain, qui, fous une écorce aride & sèche, renferme une poudre noire, fine, grafle au toucher, fans faveur, mais d’une odeur très-infeéte de poiffongpourri. Les grains cariés fe trouvent dans les mêmes épis que les grains fains: tantôt ce n'eft qu'un côté de l'épi qui en eft attaqué ; tantôt ce n’eft que le quart: quelquefois Les grains malades font épars çà & là , & entremêlés des fains. De Panalyfe chymique de la carie, il réfulte que certe fubftance contient une matière extractive, dont l’altération donne de l’alkali volatil, une huile graffe , épaifle, de laquelle dépend la partie colorante , un principe odorant, beaucoup de gaz, la plus grande partie inflammable , très-peu de terre calcaire, & une petite quantité d’alkali fixe, Cette fingulière maladie fe communique & eft très contagieufe , non- feulement demiges tiges, mais encore de grains à grains; & quelle que foit SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 401 la première caufe qui l’occafionne, il paroît qu’il ne faut pas l’attribuer aux brouillards , ni aux différents engrais , ni à la nature du fol. . Sida carie n’eft pas aufi funefte à l'économie animale que l’ergot, elle fait plus grand cort aux récoltes, en multipliant & en perpétuant les mauvais grains. On a propofé une très-grande quantité de recettes & de moyens pour préferver les bleds de la rouille. M. l'Abbé Teffier donne le détail des quatre méthodes principales , & compare leurs avantages réciproques, C’eft dans. l’'Ouvrage même qu'il faut les lire. Le charbon attaquant plus particulièrement l’avoine que le froment, c'eft à l’article avoire que M. l'Abbé Teflier entre dans de grands détails au fujet de cette maladie. Les épis charbonnés paroiffent noirs, comme s'ils avoient été brûlés ; if ne fubfifte des balles & des arêtes que des débris informes de couleur blan- châtre , qui font furchargés d’amas de pouflière noire ; qui fe sèche ou fe délaie à la pluie, & fe difperfe ; en forte que long-temps avant la moiflon, il ne refte plus que le fupport, ou plutôt que le fquelerte de l’épi. Quand la feuille fupérieure d’une tige , fur-tout de froment, eft pana- chée de jaune & de verd, & sèche à fon extrémité, on peut prévoir qu'il en fortira un épi charbonné. e La poudre d'avoine charbonnée, d'après l’analyfe chymique , contiene une matière extractive en plus grande quantité que l’avoine faine, dont cependant onen retire aufli, au lieu de cette fubftance amidonnée que fournit l’évaporation de la décottion du froment; 2°. dans la diftillation à feu nud , l’avoine charbonnée donne moins d'eau , plus d'huile empyreu+ matique , un efprit plus roux, un charbon plus pefant que n’en donne l’a- voine faine. Au refte , Le charbon de l’un & l’autre eft alkalin , & les ef prits font acides. Le charbon fe communique & fe propage à-peu-près comme la carie; IL paroît aufli, d'après les expériences de M. l'Abbé T'effier, que la pou- dre des grains charbonnés n’eft pas nuifible. j Ce favant Traité eft terminé par la comparaifon des différentes mala- dies des grains que l’Auteur vient de parcourir. Cryflallographie , où Deftription des formes propres à tous les Corps du Règne minéral, dans l’état de combinaïfon faline , pierreufe, &c, &c. ; par M. RoMé DE L'Isce. Dans ce moment où l'étude de l'Hiftoire Naturelle fait de fi grands pro- grès , où fon amour femble embrafer tous les efprits, où ce goùûr nouveau multiplie les colleétions, & entafle de tous côtés un nombre prodigieux d'échantillons de ce que la Nature a de plus riche ou de plus joli dans fes roduétions ; la connoiffance des fubftances pierreufes & métalliques , confidérées fous le rapport de leur compolfition, eft aflez avancée, Les 302 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, defcriptions & les analyfes que l’on en a données commencent à'jetter le plus grand jour fur cette partie. Mais il eft une*autre connoiffance qui doit avec raifon piquer la curiofité de ceux qui étudient la Nature fous rous fes rapports , & qui avoit été négligée, difons-le même, Me mr été prefque méprifée jufqu'à préfent; c'eft celle des formes polyèdres régulières des minéraux. M. Romé de lIfle , qui depuis très- long-temps s'eft livré à cette étude particulière , développe, dans l'Ouvrage que nous annonçons & fes recherches, & les moyens que l'an peut employer pour les pouffer encore plusloin. Dès 1772, il avoit donné un Effai fur la Cryftallographie , qui fut accueilli des Naturaliftes avec les éloges qu'il méritoit. Depuis dix ans, l'Hiftoire Naturelle a infiniment acquis dans ce genre. En Suède, en Allemagne, en Italie & en France, plufeurs Savants s'en font occupés fpécialement , & il eft à croire que nous poffédons beau- coup plus de richeffes en Cryftallographie que l’on n’en découvrira dans ‘la fuite, M. Romé de l'Ifle commence fon Ouvrage par une introduétion , dans laquelle il donne toute la théorie de la cryftallifation. A près avoir expliqué ce que l’on doit entendre par le mot cryflal, & avoir étendu cetre déno- mination à tous les corps du règne minéral, qui ont une figure polyèdre&c géométrique , c'eft-à-dire , qui ef compofée de plufeurs faces planes & de certains angles déterminés , foit que ces corps foient diaphanes ou non, il traite des éléments fecondaires des corps ou des principes jufqu'auxquels l'analyfe chymique a pu remonter jufqu'à préfent. A la place delair , du feu , de la terre & de l'eau, que les Anciens avoient regardés comme les vrais éléments, & que Les travaux des Modernes ont démontré être tous compofés , il fubftitue, 1°. l'acide ou principe de la cohéfion des corps; 2°. le phlogiffique ou principe inflammable , qui peut être aufli celui de toute fluidité & de toute volatilité; 3°. le principe serreux, qu'il défigne dans l’état le plus fimple où nous puillions l'obtenir, fous le nom de terre abforbante; 4£. le principe aqueux. Il eft peu de Sciences en général où il paroifle plus permis à un chacun de fe faire de nouveaux fyftémes, de rejetter à fa volonté les anciens, pour en élever d’autres, que l'on croit plus vrais, ou du moins plus vraifem- blables que la Phyfique ou l'Hiftoire Naturelle ; mais aufli il n'en eft point où l’on foit plus libre de difcuter, aux poids de l'expérience & de la rai- fon, les idées nouvelles , & de n'être pas du fentiment d’un Auteur qu'on eftime à tous égards. 1°. A la place de Pair, comme élément, M. Romé de lle place l'acide ou principe de la cohéfion des corps: il faudroit en même temps qu'il défignât cequ'ilentend par cet acide, principe de la cohéfion des corps; ce qu'il eft, où ileft, & comment il annonce fa pré- fence. L'air armofphérique eft un mixte très-compolé; mais on connoît les fubftances qui concourent à {a faturation : Les différentes proportions de l'air vital ou pur, ou déphlogiltiqué , & de l'air méphitique ou acide aërien, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 403 “conftituent la bafe de l'air atmofphérique. Eft-ce un de ces deux airs qu'il nomme acide par excellence? ou cet acide n’eft-ik pas un air? Sil ne l'eft pas , qu'eft-il? & qui fuppléera dans la Nature à l'air proprement dit? Ce font autant de queitions que l'on eft en droit de faire à ce Savant , dès le moment qu'il retire de la claflè des éléments l'air, un des principes vitaux le plus actif & Le plus énergique des deux premiers règnes dela Nature , le végétal & l’animal. Elle eft fi fimple dans fes opérations , qu'il faut la re- connoïtre telle dans fes moyens, & dès-lors on doit croire que cefonc les mêmes éléments qui compofent les trois règnes. “ 2°. M, Romé a eu très-grande raifon d’ôter de la claffe des éléments le feu & la terre; d’y fubitituer le phlooiftique & le principe terreux, parce que nous favons que le premier, d'apres les belles expériences de M.Scheele, eit une combinaifon du phlogiftique avec l'air du feu, ou l'air pur, & que le fecond eft communément un mélange de terres de différente na- ture. Maïs qu'il nous foit encore permis de demander ici fur quoi fondé le favant Cryftallographe regarde la terre abforbante comme le principe terreux ? Le principe terreux doit être celui qui fait la bafe de toutes les terres connues ; il doit fe retrouver dans la terre pefante , la terre filiceufe, la terre argilleufe, la terre de la chaux & la terre magnéfienne, Or, ils’en faut de beaucoup qu'il foit démontré que cette rerre abforbante, qui , füui- vant lui, eft unie à l'acide phofphorique animaldans Les fubftances offeufes, à l'acide méphitique dans la terre calcaire, à lacide igné dans: la chaux vive, à l'acide vitriolique dans la félénire, &c., foit la même qui conf titue les cinq terres que nous venons de nommer, & que M. Bergmann , avec un très-grand nombre de Chymiftes , regardent comme pures , ou du moins comme ayant des caractères fi particuliers qu'on ne peut les confondre enfemble. Nous croyons que la Chymie & l'Hiftoire Naturelle font en- core bien loin de nous avoir découvert le fecret de la Nature, & de nous avoir indiqué quelle eft la terre primitive & élémentaire, Des éléments, M. Romé de l'Ile pafle à l'explication des phénomènes de la cryftallifarion , qui confiftent dans leur formation , l’adhérence d’agré- gation & de compofition, la tranfparence des cryftaux , dans leur eau-mère ou matière grafle, la dureté fpécifique, la conftance de la forme, les diffé. rentes époques de formation, & il les termine par des axiomes & des prin- cipes généraux, Il n’eft aucun de ces articles qui ne mérite route l’atten- tion des Lecteurs , & qui ne demande à être médité attentivement. C’eft un fil qui peut conduire fürement dans ce labyrinthe immenfe; & jufqu'à- préfent , on n'avoit point raflemblé des notions aufli completrés , & en général auffi certaines, fur la Cryftallographie. C’eft ainfi qu'une lecture ré= féchie nous les a fait voir. Comme nous nous fommes occupés depuis quelque temps de cette partie, nous y avons apporté toute l'attention que l'intérêt perfonnel fembloit demandez, & c'eft avec le plus grand plaifir que nous avons retrouvé dans cette introduétion des principes que nous avions entrevus & difcutés dans un Mémoire fur les cryftallifations 404 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, métalliques , dont la première partie a été lue à l'Académie en 1780, Nous. - ne différons que fur l’article des éléments de la cryftallifation. Ces mots parties fimilaires où intégrantes , principes primitifs ou confli- tuants , mal entendus & mal expliqués, font la caufe de la différence qui fe rencontre chez tous ceux qui ont voulu expliquer le phénomène de la cryftallifation. M, de Morveau l’attribue à la réunion , fous forme régu- lière , des parties fimilaires ; M. Macquer, des parties intégrantes ; M. Romé deJ'ffle, confondant ces deux mots, l’attribue à la réunion des parties f£- . milaïres ou intégrantes ; & nous, rendant à ces mots leur jufte valeur, nous ne l’attribuons ni à l’un, ni à l’autre, mais à la réunion des parties élé- mentaires. Cette queftion , qui ne paroît être d’abord qu'une queftion de mots, eft peut-être plus importante qu’on ne le penfe au premier coup- d'œil ; l'explication de ces trois mots va conduire à la folution. Les parties fimilaires d’un corps font fes molécules , de même nature & de même forme. Un corps fimple eft compoféde parties fimples fimilaires; un mixte, de parties mixtes fimilaires. Les parties élémentaires d’un corps font les molécules abfolument nécef- ] faires , fimples ou mixtes, de quelque nature qu’elles foient, quille confti- tuent un tout, & qui fufifent pour le faire. Les parties intégrantes font toutes celles qui peuvent concourir à linté- | grité d'un tout, & qui en font le complément, fans lui être abfolument néceflaires, bien différentes en cela des parties élémentaires fans lefquelles | le corps ne pourroit fubfifter, & qui lui font tellement néceffaires, qu’on L ue en ôter une, fans que le cout ne change de nature. our mieux faire fentir la différence que nous croyons exifter entre les parties fémnilaires , élémentaires & intégrantes, prenons pour exemple le tartre vitriolé. Ses parties élémentaires font d'un côté les molécules acides vitrioliques proprement dit, dépouillées de toute eau étrangère, qui ne fait que Les tenir en diflolution, & celles de l’alkali fixe végétal également pures & fimples. Ses parties fimilaires font l'amas ifolé. de chaque prin- cipe ; toutes les molécules acides fone fimilaires: toutes celles alkalines font fimilaires : mais elles font diflimilaires les unes des autres. Ses parties intégrantes font, outre les parties élémentaires , une certaine portion d'air, de feu , d'eau, &c., qui fe trouvant dans le tartre vitriolé, concourent à fa perfection , à fon intégrité, mais qui ne le font point. à Cela pofé , il nous paroït clair que la cryftallifation confifte dans la L réunion des parties élémentaires ; car s’il n’y avoit que Les parties fimilaires ui cryftallifaffent, il faudroit que , dansun mêlange d'acide vitriolique & dallkati végétal étendus dans une certaine quantité d’eau, l'acide vitriolique cryftallisât à part, ainfi que l’alkali végétal , ce qui n’a pas lieu. S'il falloic les parties intégrantes , il n’y auroit de cryftallifation que lorfque toutes les fubtances hétérogènes que l’on rencontre dans un cryftal, & que l'on peut cependant fouftraire , fans changer fa nature , fe trouveroient abfo- lument SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 40$ lumenc réunies, Or, le fait prouve le centraire, Le fel marin, par exemple, contient prefque toujours de la terre calcaire & de la magnélie, & ni l'un ni l’autre ne lui font effentielles ; & ily a des cryftaux de fel marin, fans terre calcaire, ni magnélie, … Ileft probable encore que dans tout fel ou cryftal neutre ou mixte, la figure cryftalline eft Le réfultat des figures des éléments qui le compofent, quelle que foit la figure de chacun en particulier. Ainf, dans le fel marin, la figure cubique réfulte des figures particulières de l'acide marin & de l'alkali minéral ; figures qui influent néceffairement fur celles qu'adoptent les différentes combinaifons de ces principes avec d’autres fubftances, comme le fel fébrifuge de Sylvius , ou le muriate de potafle (Nom, de M. de Mor- veau) , le fel ammoniac, &c. &c. D'après cette explication, on fent fa- cilement que nous n'adoptons point le principe de M. Romé de l'Ile, page 101, où il dit que Les molécules intégrantes du Jel marin font effen- tiellement cubiques. L'idée que mous attachons aux molécules intégrantes l'empêche, & il eft permis de croire que la figure cubique n'appartient pas eflentiellement & également à l'acide marin , à la potafle , à l'air , à l'eau , à la terre calcaire, &c. &c., qui peuvent compofer le fel marin, d'autant Plus encore que l’on fait que la figure cubique peut réfulter de plufeurs autres figures. L'abus des termes eft prefque toujours la fource de quelque erreur : nous venons de le voir au fujet des parties fimilaires ou intégrantes ; nous en trouvons encore un exemple dans l'article de leau-mère & de la matière graffe des cryftaux, page s5 , où M. Romé de l'Ifle s'exprime ainf : Te/le ef cette portion du fluide qui refle après la cryflallifation des fels, € qui eff connue fous le nom d'eau-mère. Ce réfidu de la cryftallifation , chargé de molécules huileufes, nées du rapprochement & de la combinaifon des Jubflances Jalines qu’il tenoit en diffolution , &c. &c. Cette affertion eft appuyée par un paflage des Lettres fur la Chymie du Docteur Demelte, vol. 1, p. 58, où il eft dit que « Lorfqu'’un fel eft tenu en diffolution dans de l'eau , & » que cette diflolurion dl aflez concentrée pour que le fel puifle cryftallifer, » les parties conftituantes de la fubftance faline fontaffez rapprochées pour » qu'elles puiffent réagir l’une fur l’autre de manière à produire des molé- » cules huileufes. Celles-ci prennent alors naïffance aux dépens des mo- » lécules falines, dont la quantité diminue à proportion de l'huile qui s'eft » ainf produite, &c, &c. ». | Voilà Fe une matière huileufe produite par la réaction des fels. On n’avoit jamais foupçonné cette origine. Que de queftions fe préfentent dans cette hypothèfe , routes aufli difhciles à réfoudre les unes que les autres ! 1°. L’eau- mère d'un fel fimple ne produira donc pas de matière huileufe, puifque dans ce cas il n’y a pas de réaétion entre des fubftances falines différentes? 2°. Comment fe peut-il faire qu’un acide , un alkali , de l’eau , réagiflant les uns contre les autres , produifent une matière huileufe ? 3°, A-t-on autant Tome XXI, Part. I, 1783, MAI, FFF 406 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, de matières huileufes différentes, qu'il y a d’eaux-mères différentes? 4°. SE elle eft par tout la même, comment des caufes, différentes produifent-elles un même effet? 5°. Si la matière huileufe eft le réfultat de la réaction des principes conftituants d’une fubftar.ce faline, l'huile proprement dite ne diffère donc pas d’un fel quelconque par les principes, mais feulement par une fimple modification ? On fent facilement jufqu'où l'on pourroit pouf- fer les queftions ; mais fans aller fi loin, je crois que la réponfe à celle- ci arréteroit toute cette nouvelle théorie: Démontrer que leau-mère d'un fei, comme celle d’un mélange d'acide vitriolique & d’alkali purs, eft une matière huileufe. Prouver par le fait que cette matière eft fufceptible de fe brûler avec flamme, fumée & fuie, & de former un charbon (on n'exige pas qu’on l’enflimme par le moyen des acides). N'eft-il pas à craindre que l’on n'ait donné le nom de matière grafle aux eaux-mèêres des fels, dans le même fens qu'on a donné celui d'huile de vitriol à l'acide vitriolique concentré ? Qu'on n'aille pas croire cependant que nous niors ici l’exiftence de prin- cipes huileux dans l’eau-mère de quelques fels , fur-tout de ceux qui ont été les réfulrats des décompofitions animales & vegétales, comme les nitres & les fels ammoniacaux. Dans ces cas , l'huile n’eft pas produite par la réaction des fubftances falines ; elle éroit mêlée avec elles avant la cryftal- lifation; elle s'en fépare au moment, & elle paroît après. If en eft alors de l’huile comme de la magnéfie, de la terre calcaire, qui fe trouvent dans les eaux-mères du fel marin. On ne dira jamais que ces deux terres foient le produit de Pacide marin & de l’alkali minéral, réagiflant l'un contre l'autre. Après cette introduction, M. Romé de l'Ifle entre en matière , & il par- court tous les fels réfulrants de la combinaifon des différents acides avec différentes bafes ; & comme dans le fyftème qu'il a adopté , il ne peut exif- ter de cryftallifation que dans la combinaifon d'un acide avecune bafe, on ne doit pas être étonné de voir la zéolite être peur-être une combinaifon de l'acide phofphorique modifié d’une façon quelconque , le quartz peur- étre une efpèce de vitriol , les gemmes des fels pierres, dont à la vérité on ne défigne pas Pacide un principe acide, quel qu'il puifle être, entrer dans la combinaifon du feld-fpath, & dans les métaux un foufre phofpho- rique très-fubtil. Nous ne difcurerons pas ici ces idées nouvelles ; fi rien ne- prouve en leur faveur , rien auffi ne prouve contre..Ïl en eft de même d'un très-grand nombre de principes chymiques , qui font difléminés dans l'Ouvrage entier, que l’on peut admettre ou rejetter, fans pour cela di- minuer fon mérite réel pour la partie de la Minéralogie fur-touc & de [a Cryftallographie. Nous ne nous étendrons pas fur les éloges qui font dus au travail & aux recherches qui font la bafe de la première ; c’eft en lifant l'Ouvrage que lon pourra en fentir tout le prix. Nous obferverons feulernent que la critique que M. Romé de l'Ifle fait des analyfes des pierres | DS Le 2 SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 407 précieufes par M. Bergmann, tom. IT qe. 175, & les raifons qu'il ap- porte pour lés regarder comme bien au-deflous de la réputation de cet habile Chymifte, ne démontrent point du tout que ce favant Suédois fe foit trompé. Ce n’eft que par des expériences que l’on détruit des expérien- ces. Les raifonnemens & les analogies peuvent triompher d’un fyftême d’une théorie qui ne porte pas fur des faits; mais ici, M. Bergmann ne forme aucun fyftème: il démontre, par l'expérience, que les pierres gemmes font compofées de terre argilleufe, de ‘terre vitrifiable , de terre Calcaire & d’une portion de fer à l’état de chaux ; & c’éroit, une nou- velle analyfe à la main, qu’il falloit affurer que M. Beromanns'étoittrompé, & que non-feulement lui, mais encore MM. Gerhard & Achard , opérant à Berlin, obtenant les mêmes réfultats que l’'Académicien d'Upfal , ayoient cru trouver dans les pierres précieufes ce qui effectivement n’y étoit pas. Le meilleur moyen de démontrer qu'ils fe font trompés , c’eft de répéter leurs expériences. Par rapport à la Cryftallographie proprement dite, M. Romé de l'Ifle ayant découvert que toutes les variétés de cryftaux pouvoient être rame- nées à fix bafes principales , le terraëdre , le cube , l’octaëdre rectangulaire, le rhombe , l’oétaëdre rhomboïdal & le dodécaëdre à plans triangulaires, ilen a tracé Gr bleus, ù l’on voit la bafe & toutes les modifications qui réfultent de l’alongement des taces & qes tonus a —… pr en a ajouté un feptième , où il développe Les, différentes modifications de l'oûaëdre & du parallélipipède , foit reétangulaires, foit rhomboïdaux. Ces tableaux font fuivis d’un autre abfolument neuf, qui-offre la fuite des principaux angles que préfentent les cryftaux. Nos connoïflances en cé genre font trop peu étendues pour prononcer fur ce grand travail ; c’eft à ceux qui s’en occupent fpécialement à le juger. Nous terminerons enfin ces obfervations , en engageant l’Auteur à re+ trancher , dans une nouvelle édition, certaines phrafes qui déparent abfolu- ment fon excellent Ouvrage , & que tout le Public a vu avec peine , fur- tout au fujet d’un Corps non moins inftruit que refpectable , auquel La France fayante doit tout fon éclat. 408 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, 6e. TABLE Des ARTICLES CONTENUS DANS CE CAHIER. Moirz fur Les grands avantages d'une éfpèce d'Ifolement très-impar= - fäic; per M.Ds VoLTA: traduit de l'Iralien par M. ** *, Page 32$ Suite des Obfervations fur la Durance; par M. BERNARD. 350 Déftriptien de L Etain [ulfureux de Sibérie, ou Or muffif natif; traduit du Suë- dois de M. BERGMANN , par Madame P * ** de Dijon. 367 Conjeëlures Phyfico-Hifforiques fur l'origine des Cailloux quartzeux répandus € amoncelés dans les environs de Nimes , principalement au-delà du Viffre ; par M. le Baron DE SERVIÈRES, 370 Suire des Extraits du Porte-Feuille de M, ? Abh# Drraressanse 386 Dvunsuve à cippenuices, qui Ont un niveau confiant , mefurent les pefan- seur de L'air dans les profondeurs inacceffibles , Erc. &c. &c,; par M.CHAN- GEUX: 387 Nouvelles Livéraïres, 397 APPROBATION. J': lu, par ordre de Monfeigneur le Garde des Sceaux , un Ouvrage qui a pour titre: Obfervations fur La Phyfique, [ur l'Hiftoire Naturelle & fur les Ars, Gc.; par MAL. Rozier & MoNcEz le jeune, &c. La Collection de faits importans qu'il offre périodi- quement à fes Leéteurs, mérite l’accueil des Savans; en conféquence, j’eftime qu’on peut gn permeutre l’impreflion, À Paris , ce 24 Mai 1783. VALMONT DE BOMARE. IT.T RS Rs > ren”: 2 at sara 1- 44. 17 AL A 1, == a — JOURNAL DE PHYSIQUE. | j| JurnN 1783. PRET | dé ——— il, MÉMOIRE HI SPORIQUE ET, PHYSIQUE SUR LE CIMETIÈRE DES INNOCENTS; Par M. CaDeT DE VAUX , Infpeëleur Général des Objets de Salubrité, de plufieurs Académies , Cenfeur Royal, &c. &c. ; lu à l’Académie Royale des Sciences en 1781. L A Loi qui profcrit l’ufage des fépultures dans l'intérieur des Villes, a été adoprée du moment où elle a paru , par toutes les Nations policées. Elie n'eft reftée fans exécution que là où cette profcription étoit devenue indifpenfable, dans la Capitale; elle feule fe refufoit à la plus fage des Loix que fes Provinces , que l'Europe entière recueilloit avec empreffe- ment. Aufli les Etrangers font-ils, à jufte titre ,étonnés en arrivant à Paris, d'y voir fubfifter l'ufage d’enterrer dans fon enceinte ; ils doivent l'être fur-tout de l’exiftence du cimetière des Innocents , fitué dans le quartier le plus habité & de routes parts environné de maifons plus ou moins élevées. " Cet emplacement avoit été concédé par Philippe-le-Bel, pour la fépul- ture des morts de la grande Paroifle , devenue depuis celle de Saint- Germain-l Auxerrois. Il étoir hors de l’enceinte de la Ville & fort vafte alors , vu le petit nombre d'Habitans que renfermoit Paris. Mais depuis long-temps ce cimetière fe trouvoit au centre de la Capitale, par l’agran- difflement qu’elle n’a ceflé de prendre fous les diverfes règnes. Ce n'étoit plus la feule Paroifle de Saint-Germain-l'Auxerrois ie y enterroit : ving-trois autres avoient droit d’y porter leurs morts; en forte que lenom- bre des fépultures augmenté en raifon de la population, fe montoit annuel- lement à deux ou trois milliers. On conçoit qu'un pareil amas de cadavres ne pouvoit que répandre Tome XXII, Part, I, 1783. JUIN Ggeg 410 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, l'infection dans une aufñi étroite enceinte, & conféquemment exciter les plus vives réclamations de la part des Habitants : auûi rendirent-ils plaintes en 1724, 1725 & 1737. Elles furent de nature à fixer l'attention du Parlement , qui commit par Arrêt M. Hunault, MM. Lemery & Geoffroy, pour prononcer fur l’infalubrité de cet air. Les moyens que ces Chymiftes propofèrent, ne devoient remédier que momentanément au mal, Auffi les plaintes furent. elles renouvellées en 1746 & en 1755. Cependant on a Ofé avancer dans des Mémoires particuliers & dans des Ecrits publics , que non-feulement cet air n'éroit pas nuifible, mais même que c'étoit un air plus vital que tout autre qu'on, püt refpirer. On s’étayoit de l'autorité de Moflins ( le fameux Dumoulins) , comme fi l'opinion d’un Médecin clinique pouvoit ,. en pareil cas , contrebalancer celle des Chymiftes & des Phyficiens. Ce n’elt pas qu'on"ne puifle fans doute citer des exemples de Jongévité dans le voifinage de cette enceinte. Mais tranfportohs-nous , pendant un moment, dausces mines profondes du Nord; nous verrons tel individu quiyeft né, quiy vit, qui y parvient au terme de la vieilleffe, fans avoir , pour ainfi dire, joui de la clarté du Soleil ; & qui , habitant de Londres ou de Stockholm, n’eût peut-être pas atteint l'âge de puberté. En concluera- t-on qu'il foit préférable de vivre dans les abîmes de Ha terre , plutôt qu'à la furtace du Globe? D'ailleurs , il eft d’obfervation que dans les grandes Villes , où tant de caufes & fur-tout l’infalubrité de l'air concourene à abréger le terme commun de la vie, le nombre des centenaires y eft cependant, proportion gardée, plus confidérable que dans les plus beaux climats; & jufqu'à préfent on ne s'eft pas avifé d'enttirer cette confé- quence, que l'air des Cités füc plus falutaire que celui de nos Provinces -méridionales. % L On avançoit ces propofitions révoltantes, dans le tempsique le Parle- ment de Paris, dépofitaire facré des Loix , les oppofoit avec force à un üfage aufli contraire à l'humanité , & conféquemment à la Religion , dont le Parlement devenoit dans ce moment l'organe; car c’eft ,onle répète, l’Arrêc de ce Tribunal augufte qui a fait alors révolution en Europe fur ce point important. Cependant un des objets publics que M. le Eieutenant-Général de Police avoit le plus à cœur, c’étoit la fupprefion des cimetières, & fur- tout celle du cimetière des Innocents. Les connoïflances nouvellement acquifes fur la nature de Pair mettant à portée de prononcer plus politi- vement fur fon infalubrité , ce Magiftrat defira qu'on püt fixer l'opinion du Gouvernement fur celui du cimetière des Innocents, & j’eus l'honneur d'être chargé de ce travail. Je n’entrerai point ici dans le détail de mes expériences. Je me borne à obferver que l'air du cimetière des Innocents étroit le plus infalubre des airs qu'on püt refpirer, égal à celui de l'intérieur des Hôpitaux les plus SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 4x infe&s. M. l'Abbé Fontana, qui a bien voulu répéter avec moi cette ana- lyf , a été étonné de fes réfulrats ; réfultats aflez inquiétants en effet , pouc que M. le Lieutenant-Général de Police ait cru devoir alors ne pas en permettre.la publicité. Je me contentai de confacrer dans le fein de la Société Royale de Médecine , mes expériences & mes obfervations, M. Vicq d’Azyr a depuis publié le rapport qu’en fit alors la Société , dans fon Ouvrage, qui a pour titre : Effai fur Les lieux & les dangers des fépultures. nfn , au mois de Mai de l’année dernière , les caves de trois maifons de la rue de la Lingerie, fe trouvèrent méphitifées , au point que les lo- cataires , effrayés des accidents auxquels ils étoient expolés , rendirent plainte, On avoit établi, vers la fin de 1779, dans la partie du cimetière des Innocents, voiline de la rue de la Lingerie , une fofle de cinquante pieds de profondeur, deftinée à contenir quinze ou feize, cents cadavres. Dans Le courant du mois de Février 1780 , le fieur Gravelot , principal locataire d’une de ces maifons , vit avec furprife la lumière s’éteindre à l'entrée d'une de fes caves. Un flambeau qu’il voulut fubftituer aux chan- delles & aux lampes qu’il avoit allumées, s'éteignit pareillement. Ces maifons ont deux étages de caves, & le méphitifme ne régnoit encore que dans les fecondes , lefquelles fe prolongent au-deffous du charnier, ce qui fait que leur mur & celui du cimetière font mitoyens. Au mois de Mars , le mal ne faifant que croître, on crut parvenir à en arrêter les progrès, en condamnant, au moyen d'une bonne maçonnerie , la porte de la cave la plus voifine du cimetière, Le méphitifme , loin de céder à un pareil moyen, acquéroit de jour en jour plus d’intenfité. On s’adreffa au Chapitre de Notre-Dame, devenu, depuis que celui de Saint- Germain-l'Auxerrois lui eft réuni, propriétaire de l'emplacement du cimetière des Innocents. Le Chapitre ordonna la conftruction d’un contre- mur en moëllons, recouvert d’un fort enduit de plâtre ; opération de Jaquelle il n’eft rélulté que d’avoir expofé les ouvriers à des accidents plus ou moins graves., C'étoit une trop foible barrière contre un mé hitifme fans cefle renaïflant , & dont un des caractères eft de pénétrer à travers les pierres mêmes. [l étoit parvenu à un degré , tel que la fumée des corps combuftibles refufoit de s’exhaler; celle du genièvre qu’on y brüla ne put s'élever à un demi-pied, On tenta au moins de déménager les caves, qui dès ce moment ne pouvoient plus être d'aucune utilité aux locataires. Cette opération man- qua coûter la vie à deux Tonneliers ; ils éprouvèrent tous Les fymptô= mes avant-coureurs de l’afphyxie, fuffocation , tremblement , päleur , vertiges, & cela, malgréla communication immédiate que l'ouverture des trappes établifloit avec l'air extérieur. Ces accidents , à la vérité , fe difli= poient du moment où on refpiroit dans une atmofphère moins impure , mais pour faire place à des accidents d’un autre genre, qui fe manifeftoienc Tome XXII, Part, 1,1783. JUIN, Gsg2 412 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, cinq ou fix heures après: c’eft ce qui arriva aux deux Tonneliers ; fur le foir ils fe mirent au lit, attaqués de vomiflements affreux , ayant une dou- leur de crête cruelle, & touchant au moment de périr. A quelques jours de là un jeune homme fut dans le même cas. Voulant juger de l'impreflion de l'air de ces caves , il eut la témérité d'y defcen- dre ; & afin que fon voyage ne füt pas inutile, fl fe chargea d'une capfule d’eau de chaux, pour la mertre en expérience. Je ne dis pas que bientôt elle fat décompofée ; on fait que tel eft l'effec que produit fur cette liqueur l'air méphitique. Il remonta affecté des mêmes fymptômes dont l’avoient été les Tonneliers; fymptômes qui , comme je l'ai obférvé , ne tardoient pas à fe difliper à l'air. Mais fur les cinq heures du foir il fut pris de filon, de fuffocation, de délire, d’un vomiflement confidérable. IL fe troûva dans un état général de fpafme , & fur-tout il fe plaignit d'une douleur cruelle à la tête. Je Le fis étendre à terre, & nud, On lui appliqua fur le front & les tempes des éponges trempées dans de l’eau de puits & fans cefle renouvellée; on lui en verfa fur la poitrine, & cet état fi ef- frayant céda heureufement au bout de quelques minutes , au moyen que j'avois cru devoir employer. On doit conclure de certe obfervation , que l'efpèce de méphitifme qui tégnoit dans ces caves, fe trouvoit compliquée de miafmes ou d’une forte de gaz cadavéreux, qui lui donne le caractère d’un poifon réel, & dont la principale action fe porte fur le fyftéme nerveux. © De fon côté l'époufe du fieur Gravelot venoit d'éprouver une maladie grave, qui n'avoit point eu de caractère diftintif ,& qui n'avoit d'autre caufe que d'avoir été expofée à l'impreflion de cer air. La place qu'elle occüpoit d'habitude dans fa boutique , près du foupirail de la cave , lavoit mife dans le cas de le refpirer depuis plufieurs mois. … C'eft à cette époque, le 30 Maï, que le fieur Gravelot , craignant les fuites qui pouvoient réfulter d’un pareil événement , crut devoir rompre le filence. Il alla faire fa dépofition chez M. le Commiffaire Serreau. On informa’ à la requête de M. le Procureur du Roi , #& il intervint une Ordonnancerde M, le Lieutenant Général dé Police , par laquelle je fus nommé pour me tranfporter fur les lieux , à l'effet d'avifer aux moyens de remédier , s'il étoit poffible , aux fuites funeftes de cet événement. Trois maïifons étoient alors également atteintes de méphitifme ; celle du fieur Gravelot, la maifon voiline, & une à quelque diftance , occupée par un Limonadier. Non-feulement il régnoit dans les premières caves , ainfi que dans les fecondes; mais fon énergie était telle qu'il fe manifeftoic dans le rez-de-chauflée mème : ce dont on Sappercevoit fur-tout les Fètes & Dimanches, jours où les boutiques étant fermées, la communi- cation de l'air extérieur fe trouvoit moins libre. Il en étroit de même au moment de l'ouverture des portes. Maintes fois la femme du Limonadier S'eft trouvée mal, le matin en defcendant à fon comptoir. Il ÿ a plus : SUR l'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 413 convaincue du danger de vivre dans une pareille atmofphère ; ‘elle s’étoir décidée à écarter de chez elle un enfant qu’elle chérifloic, & qu’elle eût appréhendé ne pouvoir pas conferver fans ce facrifice. On conçoit que je m'y occupai peu d'expériences PRATIES La première avoit penfé coûter la vie à celui qui l’avoit tentée : d'ailleurs prefque toujours appellé dans des circonftances où la vie des hommes eft intéref- fée , je ne veux point avoir à me reprocher des inftants donnés à tout autre objet, En pareil cas, l’'amour-propre de faire des découvertes doir le céder à l'humanité, & le réfuleat le plus heureux qu'on puifle offrir , eft celui-ci: J'ai fauvé la vieà un Citoyen. Cependant il s'agifloit de rendre ces caves acceflibles , ne füt-ce que pour en retirer les marchandifes & les provifions de toute efpèce qu'elles contenoient. J’eus pour cet effet recours à un moyen dont des expériences réitérées m'avoient confirmé le fuccès, le ventilateur par le feu. En con féquence , je fis placer fur un trépied un valte fourneau de reverbère en cuivre , afpirant par fon fond, plein de charbons allumés, & furmonté de tuyaux auxquels je donnai iflue par les trappes. Au bout de quelques minu- tes cette première cave fut déméphitifée, On defcendit l'appareil dans la feconde ; à peine y fut-il placé , qu'on put entrer dans ce fouterrein fi redou- table un moment auparavant Que plus terrible que la grotte du chien près de Naples; la vapeur méphitique que cet antre exhale, n'étant pas dans cette circonftance-ci unie à un gaz cadavéreux , quien fait un des poifons les plus énergiques ; poifon qui porte fur tous les organes , fur toute l'économie animale | & corrompt tous Les corps unis en contact avec lui. : . Je peux citer une preuve de fon action {ur les fubftances organifées. Fondé à foupçonner d'infeétion la légère portion d'humidité qui ré- gnoit à la furface du mur de ces caves ; je donnai le confeil de s’en ifoler, Un Maçon y pofa imprudemment la main; & au lieu de la laver fur-le- champ avec du vinaigre , comme je le lui prefcrivis , il fe contenta de l'effuyer: au bout de trois jours la main &/l’avant-bras {e tuméfièrent avee douleur, ce qui avoit été précédé par un engourdiflement général, 11 furvint des boutons à la furface de la peau , & cela fe termina par un fuintement âcre & féreux qui dérruilit l'épiderme. L'art heureufement n’eft point encore parvenu & ne parviendra vrai- feniblablement pas à préparer de tels poifons. Dans l'ordre naturel, aucun ‘dés trois règnes n'en donné de femblables à cette humidité cadavérenfe. Il fexoit, par comparaifon, permis de dite qu'en fe joue avec le fublimé corrofif & l'arfenic ; il faut”, pour que le fuc du toxicodendron & le virus variolique agiflent, que l'épiderme" foit offenfé. Les fucs des vévéraux vénéneux , la bave écumeufe du Serpent qui fert à armer les flèches de l’Amérique , & les alcines de Macaffar , ne font pas aufli redou- tables. Le Chaffeur peut impunément porter fa flèche à la bouche, il la 4t4 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, : mouille même de fa falive avant de la décocher; pour devenir mortelle 3 il faut que, traverfant le tiffu cellulaire , elle aille dépofer fon fuc dans nos liqueurs: mais ici c’eft le fimple contat. Ce que la Fable nous a traufmis de l'Averne & du Cocyte ; ce que l’Hiftoire nous raconte de ces grottes, de ces fouterreins fameux par les moffètes qui s’en exhalent , ce que l'ancien& le nouveau Mondes enfin produifent de poifons les plus énergiques ; tous ces phénomènes impofans de la Nature , qui détournenc de fa route le Voyageur curieux, Paris avoit l’avantage, pour l'intérêt de la Phyfique & le malheur de l'humanité , de les réunir au mois de Juin dernier dans quelques maifons de la rue de la Lingerie, Cette humidité n’exerçoit pas une action moindre fur quelques-uns des produits du règne végétal, Du vin de Condrieux mis en bouteille m'offrit le phénomène que voici. Le vin des bouteilles dont le bouchon touchoit le mur, s'eft trouvé entièrement décompofé, Il étoit noir & fétide; tandis que les bouteilles placées en fens oppofé , le pontis contre le mur , ren- fermoiïent un vin excellent. Quant au vin en pièces, au lieu d’avoir fouffert de fon féjour dans cette cave, il avoit beaucoup acquis ; car c’eft une propriété des caves où règne le méphitifme , d’influer eflentiellement fur Ja ‘bonne qualité da vin: obfervation que j'ai été plufieurs fois à portée de faire en pareille circonftance, 5 J'avois conclu à ce que les caves fuffent fermées, à ce que toute com- munication en füt interceptée, J'en prévins les locataires, ce qui leur de- venoit à-peu-près égal, puifque depuis environ fix femaines l'accès leur en étoit interdit par Le fait, qu'ils ne pouveient ufer de leurs provifions , pas même les enlever. Mais l'heureux effet du ventilateur les farta de quel- que efpoir. Ils crurent que ces caves, dans lefquelles ils me voyoienten- trer alors fans inconvénient , & où travailloient pôur le moment les mêmes Tonneliers qui précédemment avoient manqué y périr; ils cru- rent, dis-je , que ces caves pourroient leur redevenir utiles. Mais le mal -étoit fans remède, La caufe qui écartoit le méphitifme ceffant d'agir, il devoit reparoître avec la même énergie : hydre fans cefle renaiflante , il auroit fallu exercer fur lui une action continue, Pour en convaincre les locataires , je fis enlever le fourneau, Les hommes employés à déménager les caves, remontèrent au bout de trois minutes, mais en déclarant qu'ils ne redefcendroient point, à moins qu’on ne leur rendit le fourneau ; déjà leur lumière commençoit à languir , déjà ils éprouvoient de l’oppreflion & les fymptômes avant-coureurs de l'afphyxie. J'avois plufeurs fois vu ce phénomène dans les foffes d’aifance & dans les puits méphitiques , qu’en fufpendant l’action du feu , tous les accidents reparoifloient avec la même fureur ; c’eft ce qui fit dire à M. l’Abbé Fontana , témoin d'une de ces expériences , qu'avec cet appareil je com- mandois à La vie & àla mort, En effet , une de celles auxquelles il afifta , SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 415 marqua de devenir fatale aux Ouvriers. Malheureufement avant de pou- voir prononcer fur les heureux effets du ventilateur , il falloit, partois , rendre nulle fon influence. Je convainquis donc par-là les locataires de la PRE régénération du méphitifme , & de la néceflité indifpenfable de ermer pour toujours les caves de leur maifon, puifque rien ne pouvoit maîtrifer la vapeur mortelle qui s’en exhaloit. D'un autre côté , l'évènement venoit de juftifier une prédiction que je m'étois permis de faire; que fi les chaleurs continuoient ( & le thermo- mètre alloit alors de vingt-huit à vingt-neuf degrés) , toutes les maifons de la rue de la Lingerie feroient tour à-tour atteintes de méphitifme. En effet le Samedi 3. Juin, il fe déclara dans, deux maifons voifines , & le Dimanche 4, dans une troifième. À cette époque le temps changea; il furvint de l'orage: le thermomètre defcendit de dix degrés , & le méphi- tifme {e borna à ces fix maifons. Des intérêts divers fembloient fe réunir contre l’exécution d'ordres nécef- faires, & il écoit prudent d'ôter tout prétexte de réclamation à cette clafle de gens fans ceffe fe plaignant & du bien qu’on fait & du bien qu'on ne fait pas ; qui déjà difoient qu'on donnoit à la chofe beaucoup trop d’im- FER ,; & que c'étoit attenter à la propriété , un de ces mets dont on a ouvent abufé depuis quelque temps : car le mal fe fait en un.clin-d'œil ; quant au bien , il faut des fiècles pour lopérer, & par une fatalité fingu= lière , celui-là même qui a pour objet le plus grand nombre d'individus, le bien public, eft celui qui éprouve le plus d'entraves & qui demande le plus de courage. Cependant il fallut fe décider à mettre à exécution les moyens que javois propofés , qui confiftoient à étendre fur le fol des caves fix pouces de chaux vive, à fermer les portes & les foupiraux en murs de moëllons , recouverts d'un fort enduit de plâtre ; ce qui fut exé- cuté les jours fuivans. Il reftoit une autre opération non moins intéreffante , qui confltoic à élever , s'il étoit poñlible, une barrière contre le méphitifme qu'une foffe remplie de 15 ou 1600 cadavres pouvoit propager au loin, fur-tout au retour des chaleurs ; de la furface de laquelle Fr RER lors des chan- gements de temps, & fur-tout le matin & le foir, des vapeurs méphiti- ques &,infectes, efpèce de baromètre incommode & fur-tout dangereux pour le voifinage. En effet la corruption de l’atmofphère étgit portée à un degré tel que les aliments , récemment préparés, pafloient fur:le- champ à la putréfaction ; & c'eft un pareil ait qui trouvoit des Apolosif- tes; air dont tous les Habitants fe plaignoient , ou au moins dont tous étoient. bien dans le cas de fe plaindre ! Car il en étoit:quelques-uns que : l'intérét perfonnel , la modicité de la location, difpofoient à un peu plus d'indulgence : témoin un Particulier habitant d'une maifon voifine du cimetière, que j'interrogeois far l’infalubrité de l'air de cette enceinte ; il m'avoua que {on bouillon, fon lait fe gâtoienc en peu d'heures ; que fon LA 416 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, vin s’aigrifloit lorfqu'il étoit en vuidange ; mais que lui & fa famille fe portoient à merveille: Cet homme avoit des obitructions au foie , fa femme une maladie de poitrine , & fa fille les pâles couleurs. La nuit du Samedi au Dimanche fut deftinée à arrêter le méphicifme de la-foffe. Vinge Ouvriers furent employés à cette opération. On décou- vrit ce réceptacle dans toute fa furface: parvenu aux premiers lits de cadavres, on forma un lit de plufeurs pouces de chaux vive ; :on en remplit des tranchées profondes, faites dans le pourtour de la foffe. Pen- dant le temps que dura le travail, des feux clairs allumés à des diftances dans l'intérieur: de cette enceinte ; y établiffloient des courants ‘d'air, & contribuoient à purifier l'atmofphère, chargée de miafmes cadavéreux. J'ai dit que le but de cette opération étoit d’oppofer une barrière au méphitifme , toutefois s'il étoit poffible. En effet, arrêté par des lits fu- périeurs & latéraux de chaux vive , il ne s’exhale plus de la furface de la foffe ; il eft concentré dans fa partie inférieure. Mais à quelques jours de là, il fe fait une iflue ; & peut-être le mur du charnier , les dalles dont il eft pavé, ne peuvent pas le retenir , & cette partie de l'enceinte extérieure du cimetière eft infectée. De nouvelles plaintes de la part des Habitants ; qui voient l'acheteur déferter leurs magafns ; en forte qu'il fallut s'occuper d’incercepter cètte nouvelle communication. Si je ne me fuis pas permis d'infifter fur quelques-uns des phénomènes que j'ai été dans le cas d’obferver , je m'arrêterai encore moins {ur des objets étrangers; cependant je pourrois efquiffer le tableau le plus pittorefque & le plus impofant peut-être qu'on puifle imaginer. Le filence de la nuit troublé pour la première fois depuis des fiècles dans ce trifte afyle; un terrein exhauflé de plufieurs pieds des débris de l'efpèce humaine ; des Jambris d’offemens encombrés; des flambeaux allumés ; des feux difperfés & alimentés du refte des cercueils:; leur clarté prolongeant les ombres de cestombes, de ces croix funéraires çà & là dif- perfées ; ces épitaphes, ces monuments que détruit Le temps ; qui trompe la piété filiale, & le plus fouvent l’orgueil qui les élèvent ;ici une habita- tion pour quelques vivants au milieu de plufieurs milliers de morts; plus loin , dans ‘un des coins de cette lugubre enceinte, un jardin peigné,, un berceau où croît la rofe là où auroit dû ne croître que le cy- rès. .. «Mais je ne m'apperçois pas que de pareils détails appartiennent à la lyre d'Young ou au pinceau du Pujet, & qu’ils font déplacés dans ce Mémoire. Toutefois , fi le Poëte ou le Peintre vouloientune ombre au tableau , la voici. Bientôt éveillé, le voifinage accourt : ce n’eft plus le rendez-vous de la mort, mais celui de jeunes filles: La gaieté, compagne de la jeunefle, nous diftrait de nos idées lugubres. On voit briller dans leurs yeux la joie, en apprenant que cette enceinte va fe fermer pour toujours; qu'on yrefpirera un air moins impur ; que la fraîcheur de leur âge ne fera plus altérée par des exhalaifons cadavéreufes, 8 qu'enfin les morts ne troubleront e | j SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 417 troubleront plus l'exiftence des vivants. Tous béniffent le Monarque , dont la bienfaifance ne fouffrira pas que cet afyle foit de nouveau ouvert ; ils bé- niflent également le Magiftrat, dontle vœu enfin s'accomplit , dont le zèle courageux opère cette révolution : nouveau bienfait qui ajoute aux ‘droits que lui donnent furla reconnoiffance de fes concitoyens, fon zèle pour leur confervation & fon amour pour l'humanité. R'É FLE: X TO: N:'S Sur le but de la Nature dans la conformation des os du crâne , particulière à l'enfant nouveau-né ; ou Mémoire [ur un nouvel ayantage attribué à cette conformation : Extrait du troifième volume des Mémoires de la Socié:é Royale de Médecine. Par M. THOURET. 1 EE que l'enfant éprouve en naïffant eft un des points les plus effen- tiels du mécanifme de SE ar , que lon n’a point fufhfamment approfondi. Les Modernes, il eft vrai, ont bien démontré que la fortie de l'enfant n’elt point due à fes propres efforts, comme l'avoit penfé route l'antiquité, puifque, le fœtus étant mort ou vivant, le travail fe termine avec la même facilité.Mais en réfutant ainfi l'opinion des Anciens , en dé- montrant que, loin de s’agiter pendant le travail, l'enfant eft purement pañif dans l'accouchement, les Modernes n’ont pas ençore faifi com- plettement la vérité, On peut, fuivant M. Thouret , leur reprocher de n'avoir pas fenti les conféquences de la doctrine qu'ils établifloient , de ne s'être pas apperçus'que leur fentiment ouvroit la porte aux difficultés les plus grandes, & qu'ils remplaçoient une erreur par un prodige. En effet , fi, comme on ne peut le révoquer en doute , l'accouchement doit être auf douloureux pour l'enfant qu'il l'eft pour la mère , peut-on concevoir rien de plus étonnant que ce calme profond, où l’on voit plongé, pendant une crife de douleurs très-aiguës , un être doué de la fenfibilité la plus vive ? M. Thouret s'attache à démontrer que le travail de l'accouchement eft pour le fœtus lui-même un état violent & douloureux, Le ane una- nime des Auteurs eft la première preuve qu'il apporte à l'appui de cette Tome XXII, Part, 1, 1783. JUIN. Hhh 418 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, vérité, relativement à laquelle il fuffit , pour l'érablir. inconteftablement, de jetter Les yeux fur ce qui fe pafle dans les divers accouchements. Quelque facile & naturel que foit le travail, on fait qu'il eft toujours accompagné de beaucoup de douleurs & de difficultés : on fait égalemenr qu’elles font occafonnées par la réfiftance qu’oppofent à leur diftenfion les parties qui doivent livrer paflage. C'eft le corps de l'enfant qui opère certe dift:ufion, de laquelle réfultent les douleurs du travail. Mais comme il eft prouvéen Phylique que la réaction des parties diftendues eft égale à Faction qui les dilate , le corps de l'enfant eft donc foumis à leffort d’une comprellion égale à celle qui opère la dilatation des parties de la mère; mais qui doit être plus douloureufe encore pour lui, à raifon de la plus grande fenfibilité qui le caractérife. Dans les accouchements laborieux , la preffion qu'éprouve le fœtus eff encore plus douloureufe ; alors les obitacles qui s’oppofent à fon paflage font beaucoup plus confidérables, & les efforts de contraétion de la ma- trice augmentent en même proportion pour les furmonter, On fait à quel point ils font portés dans les accouchements très-laborieux, lorfque les eaux font depuis long-temps écoulées : on connoît le fentiment de gène & de douleur que la conftruction de la matrice imprime au bras de l’'Ac- coucheur , lorfqu'ileft forcé de porter la main dans fa cavité. Mais com- bien Le corps tendre & délicat de l'enfant ne doit-il pas fouffrir davantage , en reftant pendant des heures, des jours entiers ,foumis à cette violente compreffion! Dans ces efpèces d'accouchements , on fe permet fouvent les manœu- vres les plus douloureufes. Si la tête de l'enfant fait obftacle à la fortie, onla faifit , on la ferre fortement entre Les branch:s du forceps. Lorfque la cir- conftance exige qu'il foit amené par les pieds, on l’empoigne avec” vi- gueur; on emploie la force pour le retourner. Dans ces manœuvres vio- . Jentss, il arrive fouvent que quelques-uns de fes membres fe luxent ou fe fracturent. On a recours quelquefois à des manœuvres encore plus cruelles, Si quelqu'une des parties du fœtus fortie à l’orifice , & qu'on ne peut faire rentrer, s’oppofe à ce que la main puifle être introduire dans la cavité de la matrice, on l’arrache en la tordant. On porte fur lui des crochets aigus, qui le déchirent: on fe fert enfin d’inftruments tranchants pour lui ouvrir le crâne , & procurer ainfi l’affaiffement du cerveau. Il eft quelque- fois arrivé qu'on s'eft mépris alors fur l’état du fœtus qu'on croyoit mort, & qu'on l'a extrait encore vivant, comme l'ont prouvé d'affreux exemples. Dans toutes ces circonftances, l'enfant paroît plongé dans le calme le plus profond ; & fon immobilité même eft d'autant plus parfaite, que l’ac- couchement étant plus laborieux , il eft foumis à l’action de caufes capa- bles de lui faire éprouver de plus grandes violences, C’eft cet état même & À ' % ÿ à (9 he LS TE 12 € d | d 2 SUR L'AISTANATURELLE ET.LES, ARTS. 419, dé calme 8e d'immobilité, qui crop de fois malheureufement a trompé [ur l'étac de vie ou de mort du fœtus, Mais comment, doué comme il et d'une conititution très-fenfible , très-délicare, apportant , comme il faiten näiflant, une difpolicion fi marquée aux convullons, ne s’apite-t-il pas, pendant. le travail avec les plus violents efforts ? 3 On ne peur .objecter., dic M, Thourer, que l'immobilité du fœtus dé- pend alors de fon état de foiblefle, qui ne lui permet que de légers mou- vements, ou de la contraction de la matrice , qui l'empêche de mouvoir fes membres & de s’agiter. Foible & délicat comme il eft , fans doute le fœtus imprime qu'un léger degré de force aux mouvements qu'il fait vo- lontairement, Mais il n'en feroit pas ainfi de ceux que les convulfons lui occañoônneroient, Il fuffit , pour s'en convaincre , pre effayé, comme dit. M, Tiflor,, de réfilter aux membres convulfés d’un enfant dansles pre- miers jours de fa vie. La magrice n'oppoferoit qu'un foible obitacle à la violence de ces mouvements ; l'expérience néW°a que trop appris. On fait que lorfque l'enfant eft agité de mouvements convulffs dans le fin de fa mère, il déchire les parois de la matrice. Le fœtus n’éprouve donc dans letravail de l'accouchement aucune des impreflions de douleurs auxquelles il elt alors foumis , puifque leur effec éclaire feroit de lui RE des mouvements convulüfs, qui feroient fuivis, dans Le plus grand nombre des accouchements, de la rupture de la matrice, & que cet accident for- midable eft tout-à-fait extraordinaire. L'enfant , dans le travail de l’accou- chement , n'eft donc pas dans un état purement pañlif, comme les Mo- dernes l’ont démontré. On doit admettre encore qu'il eft alors privé de toute fenfibilité. - Mais quelle eft La force faprèmz qui réduit ainf l’esfant dans un étac d'infenfbilité abfolue? M. Thourer penfe que cette caufe eft la compreffion du cerveau produite par le rapprochement des os du crâne. L'obfervation & l'expérience ont appris que lorfque la maffe du cerveau eft foumife à l'effort d'une comprellion confdérable & générale , on anéantie dans d'homme & les animaux le mouvemert & la fenfbiliré. Ces preuves font trop connues pour qu'il feit befbin de les rappeller. L'expérience a appris encore que, ce qu'un efort de compreflion confi- dérable & générale fur la mafle du cerveau produit d’altération dans es fonctions, un degré de compreflion beaucoup moindre fur quelques por- tions particulières de cer organe, peut également l’occafionner. Ces par- ties fonc, fuivant M. de la Peyronnie, le corps calleux , & plus fpéciale- ment la moëlle alongée, d'après les belles expériences de M. Lorry. L'ob- fervation , par une fuite de cette première vérité, nous a de même faic connoître que de toutes les compreflions exercées fur la furface du cer- veau , la.plus propre à produire laffoupiffement eft celle qui étant exercée fur la région fupérieure de cet organe , fe dirige vers le corps calleux ou Tome XXII, Part. I, 1783. JUIN. Hhh2 410 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, la moëlle alongée, c’eft-à dire , du fommet de la voûte du crâne vers la bafe. En appliquant ces principes à l’efpèce de comprefion que peut faire éprouver au cerveau le rapprochement des os du crâne, M. Thouret fait voir qu'elle doit plonger le fœtus dans l’afloupiffement. Les os, par l'effet de ce rapprochement, font portés les uns vers les autres au point de fe toucher , & même de fe croifer en gliffant légèrement fur leurs bords; mais alors la voûte du crâne , en fe reflerrant de toutes parts , en per- dant une g'ande portion de fa capacité, n’exerce-t-elle pas fur le cerveau, qui, dans l’état naturel, la remplit exaétement , un effort de compreflion confidérable & général ? En fecond lieu, les intervalles qui féparent les pièces offeules étant plus confidérables au fommet de la tête ou fur le Vertex, qu'à leur jonétion avec les os de la bafe du crâne, il s'enfuit que ces pièces, en cédant à l'effort qui les comprime, doivent fe rapprocher davantage vers le fommet, 8 elles trouvent plus de vuide & de mobilité, qu'elles de tendent à s'approcher par leurs bords inférieurs: mais alors la voûte du crâne fe trouvant abaiflée vers la bafe dans tous fes points, la prellion ne fe trouve-t-elle pas exercée principalement fur la région fupé- rieure du cerveau , & dans la direétion la plus propre à coniprimer le corps calleux ou la moëlle alongée, en fe dirigeant du fommet de la voûte à la bafe du crâne ? Soit donc que dans le rapprochement des os du crâne, on confidère l'effort & l'étendue de lacompreflion , foit qu'on ait égard à la direction fuivant laquelleelle agit fur le cerveau , on doit reconnoître que certe compreflion eft telle, qu'elle doit plonger le fœtus dans le plus profond engourdiffement, : A ces preuves, tirées de ce que l’obfervation & l'expérience ont appris des effets de la compreflion du cerveau dans l’homme & chez les animaux, M. Thouret ajoute des preuves encore plus directes pour établir fon opi- nion. Nous avons des obfervations qui nous ont appris que dans les enfans nouveaux-nés on a quelquefois exercé fur la tête un effoir de compreflion , porté au point de déterminer le rapprochement des pièces offeufes, qui forment à cet âge la voûte du crâne. Dans tous ces cas , l’engourdif- fement de l’enfant a été l'effet de la compreflion du cerveau qui en a ré- fulré. Il eft arrivé que des Sages-Femmes fe font permis de pétrir la tête de l'enfant nouveau-ré, pour lui donner une meilleure forme. Dans ce cas, on a fouvent obfervé que l'enfant eft tombé dans un affoupiflemene dangereux , les os du crâne érant reftés croifés par l'effort, & après l'em- ploi d'une pareille manœuvre. Il eft arrivé auf que des Nourrices ont ferré trop fortement la tête de l'enfant; & plus d’une fois, cette caufe a plongé dans un affoupiflement inattendu des enfants, qui , le moment aupara- vant , fe portoient bien. M. Levret avertiffoit que cet accident'pouvoit fur- venir, en fe fervant d’un bonnet trop étroit pour coëffer l'enfant. Dans le SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 41 traitement de l'hydrocéphale , on emploie en Allemagne des efpèces de bourrelets pour reflerrer la voûte du crâne à mefure que les eaux s'éva- cuent, après leur avoir préparé une iflue; & M. Vogel rapporte qu'on voit les enfants dans ce cas romber dans un affoupiffemenr plus ou moins long , dont on ne doit pas s’effrayer. Enfin, l’obfervation nous a appris que les os du crâne reftent fouvent croifés aux futures, fur-rout après un premier accouchement, L'enfant dans ces cas eft dans un état d’engour- diflement , dont on ne le voit fortir qu'après avoir rétabli Les pièces ofufes. Si on tarde à le faire , il refte plus long-remps ensourdi, C'eft donc dans l'enfant, dans le fœtus lui-même un effet néceflaire du rapprochement des os du crâne, de produire un état d’engourdiffement profond , en comprimant le cerveau. Cette vérité eft folidement établie ; & fi l'on excepte des expériences directes, qu'il ne feroit pas convenable de tenter , on ne peut en defirer de plus fortes preuves. M. Thouret s’ap- plique à prouver que cet état de rapprochement a lieu dans rouesles efpèces d'accouchements, & qu’il y eft alors proportionné à l'effort des caufes de la part defquelles les fœtus éprouveroient de plus grandes violences, Dans les accouchements laborieux & difficiles, où la tête de l'enfant qui fe pré- fente eft engagée dans les détroitstrop ferrés du baflin , & fe trouve génée dans fon paflage, on ne peut révoquer en doute cet érat de rapproche- ment ; il eft alors porté au plus haut point: mais il a également lieu, quoiqu’en un moindre degré , dans l'accouchement , foit naturel, foie contre nature. Dans l'accouchement naturel, quelque facile qu’on le fuppofe, la tête de l'enfant qui fe préfente & fraie elle même’ le paflage , éprouve toujours de la part des parties qu’elle dilate un effort de compreflion plus ou moins confidérable : mais le crâne dans le fœtus ne tenant fa forme que de la maffe même d: l'organe qu'il recouvre , cet effort peut donc être confi- déré comme s'il portoit à nud fur le cerveau. Maintenant fi l'on compare la confiftance de cet organe mol & pulpeux avec la force de réaction des parties diftendues par la tête, ne voit on pas que, quel que foit l'effort opéré par l’accouchement , il eft toujours affez confidérable pour faire éprouver au cerveau un état réel de compreflion , ou, ce qui eft la même chofe , pour produire dans les os du crâne un véritable état de rapproche- ment. Cette vérité n’a point échappé aux plus célèbres Auteurs; ils ont ob- fervé dans l'accouchement , même naturel , le changementide forme que fubit la têre dans fon paflage. Roederer & pluñeurs Auteurs le notent formellement, M. Levret fur tout Le fait remarquer dans fa belle explication du mécanifme de l'accouchement naturel, & dans les planches dont il l'a accompagnée, . Dans l'accouchement contre nature, ce n’eft point de la part des parties qui doivent livrer paflage que la tête du fœtus eft comprimée, Placée 422 OBSERMATIONS SUR LA PHYSIQUE, alors dansla cavité de la matrice , elle efk foumife à l'effort de contrac- tion de ce vifcère : mais la force avec laquelle les parties de la matrice, en {2 contactant , appuient fur le crâne de l'enfant, n’eft_elle pas égale & même fupérieure à celle avec laquelle dans l'accouchement naturel les par- ties preflent la têce , qui les dilate pour fe faire paflage , puifque cette force contrebalance & furmonte même alors leur aétion , & certe force ne doit- elle pas agir de même fur le crâne, en forçant les os à fubir un état de rapprochement réel ? On ne peut douter de cette vérité; les Auteurs n'ont fait d’ailleurs aucune difficulté de admettre, Ils reconnoiffent que le tond de la matrice , en appuyant fur le fommet de Lattre, l’applatit & lui fait prendre plus de largeur , d’où il réfulte un obftacle à fon paflage à travers Je baflin dans cette efpèce de direction de l'enfant, En quelque fi- tuation donc qu’on fuppofe le fœtus dans l’accouchement , & quel que foit alors le travail ; c'eft-à-dire, facile ou laborieux, naturel ou contre na- ture , la têre du fœtus fe trouve foumife à l'effort d'une compreffion , qui, forçant les os du crâne au rapprochement , fe communique dès-lors à la male du cerveau. à Les avantages qui réfultent de cer érat, font, après ce que nous ve- nons de dire, faciles à preflentir. Sans cerre fage précaution de la Nature, non-feulement l'enfant foumis à tous les efforts du travail auroit éprouvé les plus vives douleurs; mais les mouvements que la fenfibilité lui auroit arrachés, lui feroient devenus très-préjudiciables. En effet , le fœtus au- roit oppofé lui-même des obffacles à fa fortie , en troublant par es mouve- ments l’action de la matrice; mais les jours de la mère auroient été fur- tout expofés par la même caufe aux plus grands dangers. L’obfervation a fait connoître avec quelle facilité la matrice fe déchire , lorfque l'enfant eft agité dans fon fein de mouvements convulfifs. Mais fi l'enfant, pourvu de route la fenfibilité qui le caractérife, eût éprouvé les impreffions de douleurs auxquelles il eft foumis dans le travail de l'accouchement , -il au- roit éprouvé dans tous ces cas les plus violentes convulfons, On fait à quel point cet accident eft formidable dans les accouchements. C'eft donc pour les plus puiffantes raifons que la Nature s’eft propofé pour but d’afloupir l'enfant dans le rravail de l'accouchement. Le méca- nifme qu’elle emploie pour cette opération , eft fondé fur les moyens les plus fimples. Les os du crâne féparés à cet âge fe rapprochent par l'effort de compreflion que la tête éprouve dans l’accouchement ; & en preffant fur le cerveau aus compiiment , ils anéantiflent dans le fœtus toute fen- fibilité, L'enfant une fois dégagé ; les pièces offeufes fe rétabliffent, & la fenfibilité reprend tous fes droits, On ne peut imaginer fans doute de mé- canifme plus fimple , & c’eft bien évidemmeñt un nouvel avantage de la conformation du crâne dans l'enfant, A ce fujet, M. Thouret demande fi cette conformation du crâne étant commune à tous les animaux vivipa- res; fila forme-de l’accouchement étant la même dans toutes les efpèces de { SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 423 ces animaux, c’eft-à-dire, emportant pour le fœtus & pour la mère les plus grands dangers de l'état de douleur que celui-ci éprouveroit ; il de- mande , dis-je, fi le nouveau phénomène qu’il indique , l’afloupiflement de l'enfant en naïffant , n’eft pas aufli commun à tous les fœtus des animaux vivipares. Enfuite, en portant fes regards fur les autres claflès , telles que des ovipares, qui forment avec les précédentes toute la famille des animaux, en remarquant que dans les ovipares le fœtus n'eft foumis en naïflant à l'action d'aucune caufe dont il puiffe réfulter pour lui des imprellions de douleur, & pour la mère aucune efpèce d'inconvénient, M, Thourer de- mande fi l’on ne doit pas regarder comme une loi générale de la Nature le foin qu’elle femble avoir pris pour la confervation des fœtus, de ces êtres fi fuibles , fi délicats, de les préferver en naiflant de route efpèce de douleur. Dans les ovipares , Les moyens que la Nature emploie {ont fenf- bles & évidents. Dans les vivipares, le mécanifme que M. Thouret a indiqué paroît établi fur des fondements trop folides, pour qu'il foit pofi- ble de le révoquer en doute. Au refte, la caufe, qui, dans le mécanifme de l'accouchement ÿroduit la compreflion du cerveau, étant la même que celle d’où il réfulteroic de la douleur pour le fœtus, on voir que les ref fources font prifes.par la Nature dans la fource même d’où naîtroient les dangers , & que les uns & les autres fe trouvent naturellement propor= tionnés enfemble : aufli, dans les accouchements laborieux où la preilion piéton le fœtus étant plus forte & plus violente , il éprouveroit plus e douleur, obferve-t-on que la compreflion du cerveau eft non-feule- ment portée au plus haut point, mais aufli que l'immobilité de l'enfant eft Page ; & ce qu’on doitfur-tout bien remarquer, elle ne l'eft en aucun cas davantage que dans la circonftance où la compreflion qu'éprouve la tête , eft aufli la plus confidérable qu’elle puiffe être, dans l’état d'enclave- ment réel. Le témoignage des Auteurs eft formel fur ce point. M. T'houret trouve , dans l’idée qu'il a failie, & qu'il développe dans fon Mémoire, la caufe de plulieurs phénomènes dont on n’avoit point en- core donné de raifons fatisfaifantes. L'affoupiflement habicuel du fœtus pendant le cours de la groffeffe ; le féjour du méconium & de l'urine que l'enfant ne rend point dans le fein de fa mère, mais que l’on trouve accu- mulés dans les organes deftinés à les expulfer ; la conformation du crâne, la pofition de la fontanelle, fon exiftence conftante dans tous les fœtus des animaux vivipares; enfin , la direction du corps de l'enfant dans l’ac- couchement ordinaire, s'expliquent naturellement dans fon opinion. C’eft la preffion de la matrice fur le crâne & fur le cerveau qui engourdit l’en- fant dans le fein de fa mère; c’eft cet étar d'engourdiflement , qui, émouf fant la fenfibilité , rend les organes des différentes déjeétions fourds à l'im- preflion des matières capables, après un long féjour, & par leur mafle & par leur âcreté, de les fimuler vivement ; c'eft pour déterminer fur la ré- gion fupérieure du cerveau le plus grand rapprochement des os du crâne , 424 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, pour diriger vers le corps calleux ou la moëllealongée , c’eft à-dire, de la ivoûte à la bafe du crâne, l'effort de compreflion qui en réfulte, quela fonta- nelle, & la future fagitrale qui lui fert de prolongement, paroiffent deftinées, cetre efpèce de compreflion étant, comme le prouvent différentes obferva- tions , très-concluantes, la plus propre à produire l’affoupiffement, Enfin , dans l’accouchement naturel, M. T houret fait remarquer que la tête étant la partie qui forme le paffage, & fe trouvant comprimée tant qu'elle agit pour produire cet effet, la fenfibilité fe trouve par cette précaution anéan- tie dans le fœtus pendant l’efpace de temps où le travail de l’acèouchement lui feroit éprouver de la douleur. . Quelques autres phénomènes relatifs à l'accouchement font également faciles à expliquer dans cette opinion. Tels font la caufe de mort qui fait périr en fi peu de temps le fœtus, s'il refte , après l'écoulement total des eaux foumis à de fortes contractions de la matrice ; l'écoulement du mé- conium, regardé dans certains cas d’accouchemens laborieux comme un figne de la mort prochaine de l'enfant; enfin, fon état d'impaflibilité, lorfqu'on applique fur la partie de fon corps la plus fenfible, fur fa tête, les deux Pt du forceps, & qu’on les ferre fortement. Dans le pre- mier cas, c’eft la trop forte compreflion du cerveau qui fait périr l'enfant, comme le prouve le genre de mort dont il paroît alors frappé , genre abfolument approchant de l'état d’apoplexie. Les Auteurs avoient afligné le froiffement du corps du fœtus, qu’ils fuppofoient pouvoir être écrafé par la violente contraction de la matrice. Quant à l'écoulement du méco- nium , ce phénomène fingulier, dont on n'avoit point rendu raifon juf- qu'ici, eft une des plus heureufes preuves de l'opinion de M. Thouret. Il fait voir que la fortie involontaire des excréments eft un effet néceffaire & connu de la forte compreflion du cerveau; qu’on fobferve à la fuite des grandes plaies de la tête , accompagné d'un épanchement qui occafionne un degré de compreflion mortel; qu’on le rernarque , qu’on le produit même à volonté {ur les-animaux , en déterminant une violente compref- fion du corps calleux, ou même de la mafle du cerveau. Toute compref- fion de cette nature, fi elle eft portée au point de gêner les parties les plus effentielles du principe des nerfs , eft accompagnée d'une infenfbilité abfolue & de la fortie involontaire des excréments. On voit, par cette explication , en quoi ce figne eft fâcheux dans l'accouchement, & com- ment il eft lié avec le danger que court l'enfant. Enfin, relativement au forceps, M. Thouret fait voir avec combien peu de fondement on a cherché à décrier l’ufage de cet inftrument précieux, en annonçant que , par fon application douloureufe pour l'enfant , il pourroit contribuer à lui occafionner des mouvemens convulffs. L'action du forceps ayant pour effet néceffaire de porter les os du crâne au rapprochement , il doit anéan- tir tout fentiment dans le fœtus en même proportion que fon application pourroit lui occafionner de la douleur. DESCRIPTION SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 425 ed emma mme mime temnnimmbiienmintemiléiniemnmmainns | DE SC INT RIRE EMNO EN D'ELS MINES DORVDE STB.ÉR LE} Par M. PALLASs. CG a LT M ÿ Extrait de l'Hifloiré des Découvertes faites par divers favants Voyageurs, * M. PALLAS partit le 24 Juin 1770 de Catharinenbours, pour fe rendre au lavoir de Berefofien ou Soloto-Promywolnoi-Sawod, re à quinze Werts de la Ville, Notre Savant longea dans fa route le lac Efchertafch , & traverfa, en fuivant le grand chemin , un Village fitué fur la rive occi- dentale de ce lac , & qui contient plus de cent bonnes maifops de Payfans , bien bâties, & habitées par d’anciens Croyants ou Rofskolniki, qui la plupart font le commerce ou exercent des profeffions , & font très- à leur aife. On voit fur les bords du lac quantité de caifles faites de ma- driers , & pofées fur des poteaux. Les Habitants y sèment des concombres, qui ne réufliffent guère que dans ce feul endroit de toute la contrée froide & couverte de bois des environs de Catharinenbouro. De l'autre côté du lac eft la montagne des mines; elle eft toute couverte de bois, & s'élève par une pente très-douce, en s'étendant vers la Pyfchma. C'eft dans fon fein qu’on trouve les mines aurifères. Après l'avoir pañlée, on arrive , au bout de fept werts, à Berefotskoi-Sawod, qui contient un grand nombre de maifons ; & c’eft-là qu’habitent tous les Ouvriers atta- chés aux mines d’or. Les tables à lavage, qui font au nombre de cent vingt, avec les deux bocards à neuf pilons chacun, & les lavoirs à bras, font dif- tribués dans deux angars. Cet établiffement livre annuellement près de deux poudes & demi de fchlick ou poudre de mine d’or. Les lavoirs qu'ona établis fur la Pyfchma , à fept werts d'ici, font plus confidérables que ceux- ci & ceux d'Uktuski. Toutes les mines d'or actuellement en exploitation font entre la Pyfchma & le ruifleau de Berefofskoi , à diverfes diftances de la Fonderie de Berefof, Cependant depuis 174$, époque &laquelle les premiers travaux relatifs aux mines des bords de la Pyfchma ont eu lieu, l'on a découvert dans quan- tité d’autres contrées de la dépendance de Catharinenbourg , principale- ment au bord de l'Ifett , de la Pyfchma , de la Neiwa & du Tagit, des minéraux femblables ; & l’on a même commencé à faire des fouilles dans * Tome XXII, Part. I, 1783. J U I N lii 426 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, la plupart de ces endroits-là : mais comme aucune de ces mines ne s’eft trouvée aflez riche pour être exploitée, excepté celle qui l’eft atuellement dans le diftriét de la haute Pyfchma , & la mine de Schilofski, tous ces - autrestravaux ont étépeu-à-peu abandonnés, & l'on fe borne à exploiter avec le plus grand foin les mines qu'on a ouvertes entre la Pyfchma & le Bere- fofska. Les indications de mines qu’on a découvertes dans les montagnes avancées de l’Ural lui-même vers lorient , confiftent principalement en filons quartzeux , de la même nature que ceux que nous allons décrire; tandis que dans toutes les contrées qui s'étendent le long des rivières qui dirigent leurs cours vers lorient, [à où les montagnes fe perdent dans la plaine & les couches du terrein prennent une difpofition horizontale, il ne s’eft trouvé que quelques pierres ferrugineufes & quelques ochres qui fe foient montrées légèrement aurifères ; de forte qu’on ne peut les envifager que comme des fragments détachés des vraies veines, Les mines appellées mines Pyfchminkiennes, font les plus anciennes de toute la contrée , & ont été découvertes en 1745. Il y en a deux autres très-importantes en exploitation , à peu de diftance de celles-là , dans la montagne qui s’avance vers la Pyfchima ; l’une porte le nom de Romanofs- koi , & l’autre de Kejutfchefskoi-Rudnik. Les travaux de la première ont commencé en 1762, &.font dirigés vers la fuperficie : la dernière a été ouverte en 1763, & l’on y a rencontré les flons les plus continus "& les plus riches; un entr'autres qui fe trouve au deflous du puits principal , où l’on s’eft afluré déjà de plus de 60 toifes en direction horizontale ; les rameaux même ont communément 20 à 30 toifes en longueur. On comprend fous la dénomination de mines de Berefofskoi , quatre mines , fituées dans Le voifinage du ruifleau & de la Sawode de ce nom, & qui font en exploitation depuis l'année 1752. Les travaux de ces mines fe pourfuivent avec beaucoup de diligence; & tout ce qui a rapport à cette exploitation , qu’en a déjà pouffée de a jufqu’à quinze brafles de pro- fondeur & au-delà , fe fait en tous points dans le plus grand ordre & felon les meilleures règles. IL paroît qu'aucune mine de la Sibérie ne s'eft mon- trée dans la difpofition de fes filons d’une manière auñli régulière & auffi conforme aux loix de la Minéralogie Allemande, & n’a en même temps contredit aufi manifeftement les principes que M. Gmelin s’étoit formés fur l'irrégularité des veines métalliques de cette partie du globe , que celle dont nous donnons ici la defcription : car quoique la plupart des filons & les petites veines qui les coupent n'aient point encore été fuivis à une grande profondeur , & que les maîtres filons des mines de Klintfchef & de Berefofskoi n’aient point encore été exploitées plus bas que vingt braffes , ils donnent non-feulement les plus belles efpérances, quant à la continuité, mais leur marche eft encore très-répulière ; foi en fuivant la ligne horizontale , foit en s’inclinant. Voici donc la potion générale & la nature des mines aurifères de ce SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 427 pays-ci. La partie de ces montagnes qui eft riche en métaux , abonde en filons & en petites veines fixes, & qui ont prefque une même direction du couchant au levant, & entrent dans la profondeur fous différents an- gles de foixahte à quatre-vinats degrés du nord au midi. IL n’eft cependant pas rare de rencontrer des filons & de petites veines qui fe croifent diago- nalement ou tranfverfalement; mais en général, la majeure partie fe di- rige communément fur la même ligne. Toutes ces veines métalliques, qui font compofées d’un quartz caverneux & cryftallifé, différent beau- coup en longueur & en force : plufeurs ont à peine 1 pouce d’épaifleur; d’autres ont 2 palmes & au-delà, Souvent on remarque encore qu'un filon, mince dans le principe, groflit en fe prolongeant plus avant, tandis qu'un plus épais diminue peu-à peu. Quant à leur étendue en longueur , on les trouve ordinairement de ÿ , 8 à 10 brafles, à l'exception de la feule mine de Klint{chefski, où l'on a découvert des filons beaucoup plus con- fidérables, & où le maître filon qui fe trouve au-deffous du puits d'épuife- ment , s'étend à une diftance de 60 à 70 brafles dans la montagne , & laifle conjecturer qu'il eft aufli conftant dans la profondeur. Les petits.fi- lons ordinaires & les veinules font communément plus riches en or pendant les premières brafles ; & au bout de 7, 8, jufqu'à 10 braffes en profon- deur , ils deviennent toujours plus pauvres, quoiqu'ils s’enfoncent beau- coup plus : obfervation qui peut, à bon droit, paroître fort extraordi- naire. Là où les filons ceffent, ils fe divifent ordinairement en fibres ou vei- nules , ou bien ils s’'aminciffent au point de fe terminer en coin. On a ob- fervé généralement dans cette montagne, que les veines métalliques font couchées dans un banc d'argile blanche, ou d’un gris jaunâtre, tendre 4 un peu fibreufe & micacée, qui fe dirige du fepcentrion au midi, & qui preñd de $ à 10 braffes en largeur, & fouvent 20 > brafles en longueur dans la montagne. Ce banc d'argile donne à ces filons une grande facilité à fe détacher, & s’exploite très-aifément ; mais aufli l’on rencontre fré- quement autour des filons une écorce de roche cornée , grife , tacherée de rouge, tellement adhérente au filon, qu'on a beaucoup de peine à l'en féparer , & fi difficile à percer, qu’on n'en vient à bout qu’en [a faifant fauter avec de la poudre. Dans ce banc corné & argilleux , ou dans cette falbande, il y a des filons ou veinules qui ne font diftants les uns des au= tres que d’une demi-aune ; d’autres ont entr'eux quelques aunes , 8: même jufqu'à 4 & $ braffes. Dans les côtés & dans les profondeurs , ce banc argilleux eft coupé par-tout par une argile sèche , dont la couleur eft un très-beau vermillon tacheté de blanc. On la regarde généralement ici comme le voleur des métaux, & on lui a donné le nom de kraffik, parce qu’elle fert à faire une bonne couleur rouge. Dès que l'on eft parvenu à certe argile ftérile, très-digne d'être remarquée , on ne doit plus compter fur aucun indice métallique ; & de même dans la profondeur, l'argile Tome XXII, Part, 1,1783.JU1 N, Liiz ‘ 428 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, grife ou la gangue, ainfi que le filon lui-même , font étouffés & radica- lement coupés par cette matière rouge. Il y a cependant quelques exceptions à obferver dans la poftion des veines métalliques que nous décrivons ici. Par exemple, dans fa plupart des fouilles Berefofskiennes, le métal fe trouve ordinairement dans la pierre de corne dorit nous avons parlé ci-deflus, & pour lors il faut beaucoup de travail pour rompre la pierre & féparer la mine. Outre cela, le grand fi- lon , placé fous le puits d’épuifement Kejutfchefskien a pour roche uné pierre argilieufe rougeâtre ; fableufe , friable & diaprée ; & à d’autres en- droits de la même fofle , la mine aurifère confifte, à ce qu’on aflure , en un lit de fable mêlé de caïlloux quartzeux, & qui reflemble à du fable de rivière; à quoi il eft effentiel d'ajouter que les cailloux quartzeux ne préfentent pas le moindre veftige d’or. - Nous pañlons à la defcription de la mine aurifère même, 8 des autres particularités remarquables qui fe préfentent dans fes filons. La mine la plus commune dans toutes les fofles, confifte principalement en une fubf- tance d’un brun foncé ou noirâtre, tantôt compacte & femblable à une “pierre ferrugineufe , tantôt fpongieufe & en manière de drufe , laquelle eft abondamment parfemée de cubes fillonnés très-remarquables , P/. 11, que nous décrirons plus bas: elle eft de plus accompagnée d'une belle ochre fort. riche, d’un jaune brun, qui s’eft mélangée dans le quartz caverneux d’une manière auffi confufe qu'elle eft extraordinaire. C’eft dans cette matière brune, & dans l'ochre qui l'accompagne , que l'or fe trouve communément femé en fine pouflière ou fchlick, & ce n’eft que rarement que l'on trouve ce métal noble fur de la mine plus compaéte & dans le quartz même , en petites feuilles ou en paillettes vifibles, plus ou moins confidérables ; même les morceaux de mine où l’on a peine à diftinguer la pouflière d'or à la loupe, ne font pas pour cela dénués d’or, & c'eft principalement avec de pareilles mines que les lavoirs font maintenus en activité. Le quartz fté- tile en foi de veines métalliques, eft par-tout couvert, jufques dans fes plus petites fffures, d’une belle efflorefcence d’un jaune brun , & quel- quefois gorge de pigeon. ; L'or n'eft point répandu dans les filons d’une manière uniforme, & il paroît même que Ja mine la plus riche fe préfente bien plutôt en nids L quoiqu’à l'extérieur & dans la nature du filon, On ne s'apperçoit d'aucun changement vifible, mais on y rencontre en nids & en rognons des mor- ceaux de mine d’or, & d'autres fofliles d’un genre tout-à-fait particulier & digne de l'attention des Obfervateurs. Il n'en eft point fur-tout qui mé- rite autant qu'on la fafle connoître par une defcription détaillée, que le bimfleinertz ( mine pierre-ponce) , que l'on trouve particulièrement dans les mines de Klijufchefski & de Perdunof , ainfi que dansles Berefofskiennes, mais bien plus rarement, & même point du tout dans les autres, Cette SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 429 mine remarquable fe préfente en gâteaux ou mafles plus ou moins confi- dérables, au milieu du filon aurifere, dont elle fe détache régulièrement par fa couleur d’un brun jaunâtre & une croûte fableule, L'intérieur de ce gireau, qui eft d'une extrême légèreté, reffemble, au premier afpect, à u pain blanc à petits yeux , ou à de la pierre-ponce , ou plus exactement encore au tiflu délicat & lamelleux d'un os fponoieux: Cette fubftance eft en effet compofée de lames très-fines & très délicates , qui fe croifent en toutes fortes de fens, & elle furnage fur l'eau comme la pierre-ponce. La couleur de cette fubitance celluleufe eft blanche ou jaunâtre, avec quel- ques taches brunes; quelquefois elle eft grife comme une pierre-ponce, & d’un tifflu aufli ferré : c’eft celle qui eft la plus riche. Les cellules de cette mine , dont la fubftance lamelleufe paroïr être entièrement de nature ee contiennent une grande quantité de poudre d'or très-fine , ont elles font comme pénétrées , & qui eft tellement détachée , qu’on en peut fecouer beaucoup hors des morceaux brifés. De toutes les mines au+ tifères de cette contrée , celle -ci eft la plus riche , relativément à fon poids, & pour l'ordinaire on peut très-aifément y diftinguer la poudre d’or à la vue fimple. Ce {chlick fe fépare aufli du refte de la fubftance métallique fans aucune peine , par le feul lavage , dans l’auge mème, cette matière fe broyant avec la plus grande facilité. On obtient de cette manière, d’un poude de minerai , entre 2 & 6 folotniks ( depuis un tiers d’once jufqu'à 1 once) de fine poudre d’or. Au refte, ce métal précieux ne fe préfente pas en abondance, mais feulement par nids. M. Pallas a vu un morceau de mine de ce genre, qui étoit compofé d’un tiflu plus grofier. IL avoit en quelques endroits la confiftance d'in vrai quartz, & refflembloit tout-à-fait à un quartz vermoulu. L Mais la mine brune ou noirûtre ordinaire forme aufli dans quelques en- droits un tiflu léger & fpongieux , entièrement femblable, I] arrive même quelquefois que {es drufes fpongieufes ont pris une couleur de plomb, qui n'empêche pas qu’elles ne contiennent de For. Ces morceaux , de diverfes grandeurs, incruftés dans la mine dont nous avons parlé plus haut , & qui adhèrent communément l'un à l’autre par leurs angles, font même pour la plupart compofés intérieurement d’une fubftance d’un brun rougeâtre , plus dure à la vérité , mais cependant un peu fpongieufe , quoiqu'ils pré- fentent à l'extérieur une furface fort dure , luifante , & qui donne du feu lorfqu’on le frappe avec le briquet. Ces cubes font par eux-mêmes de la forme la plus régulière qu'il foit pollible d'imaginer; chacune de leurs fix faces eft légèrement fillonnée de lignes parallèles, de manière que les lignes des faces qui fe touchent font conftamment en fens contraire ou tranf- verfales , tandis que celles des faces oppofées ont une même direction, Ces cubes, qui fe détachent aifément de la mine & du filon, ont depuis un quart de pouce & au-deflous jufqu'à 2 pus & fort rarement jufqu'à 3 pouces cubes ( fig. 1 &2).Leur groffeur [a plus ordinaire eft de 6 à 439 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, 12 lignes, M. Pallas en a vu dont la croûte étoit compofée en certains endroits, & même une partie de tout le cube, d’une TA pyrite aqueufe Cpyrius aquofus), On trouve quelquefois des cubes fillonnés précifément comme ceux-là , dont route la fubftance n'eft qu’une pyrite aqueufe. [1 pa- roît aufli quelquefois des lamelles d’or à leur fuperficie ,: & de la poudre d’or dans leur intérieur; & la mine commune n’eft fouvent qu’un compofé de pareils cubes fpongieux , entaffés pêle-mêle en un monceau. L'on trouve aulli de temps en temps, & principalement dans le Perdu- nofskoi-Rudnik , mais bien plus rarement encore que celle que nous ve- nons de décrire , une mine de couleur de plomb , qui paroïît grenée , & qui eft très-friable. Elle contient de l’or; mais elle eft, comme nous l'avons déjà dit , extrêmement rare. On prétend encore qu'il y a pareillement de l'or dans une argile micacée blanche , dont on a trouvé, me la mine de Berefof, que quelques boules creufes de différente grandeur étoient rem- plies. eine avoientune croûte d’un brun jaune , de la nature du grès ; ce qui les fait reflembler beaucoup aux foi-difants melons,du Mont-Carmel. Ceux dont nous parlons étoient totalement remplis à l’intérieur de certe argile molle dont on a parlé plus haut , où M. Pallas n'a pas pu diftin- guer la moindre trace de pouflière d’or, mème en l’épurant avec Le plus grand foin , mais bien une grande quantité de particules de mica blanc. 7 IL fe préfente auf d’ailleurs dans les filons aurifères , non-feulement des drufes quartzeufes, mais encore des topazes ifolées , ou raffemblées en drufes. Elles font de différents degrés de bonté, & ont fouvent 1 pouce d'épaifleur ; leurs cryftaux exagones, à pointes diverfement alongées ou applaties , font tantôt clairs comme de l’eau , tantôt couleur de fumée & plus ou moins foncés. On prétend que dans le puits d’épuifement de la mine de Kljufchefski , il fe trouve au fond de l’eau une maffe de topaze énorme, dont cette même eau n’a point encore permis de fe mettre en pof- feffion; mais on a pu en détacher des morceaux très beaux & très clairs. Les filons où l’on rencontre des topazes s’ennobliffent pour l'ordinaire , & deviennent plus riches. Ces filons aurifères fourniffent encore une affez grande quantité de pyrites aqueufes ou 7iffpikkel, qui fe tiennent dans le quartz, & qui prennent quelquefois une forme cubique dans la fracture. Indépendamment des Hlons aurifères, on a d’autres filons , particalière- ment dans Les mines de Berefofskoi, qui contiennent du cuivre, du plomb & de l'argent. On a trouvé aufli dans la foffe Berefofskienne, n°, 7, entre des grès, dans des filons compofés d’un quartz gras, mêlé & confondu d’une manière étonnante , non-feulement une belle galène vierge groflière en rognons, & quantité de pyrites aqueufes, dans lefquelles il y a quelque- fois de belles cavités , revêtues d’un azur bleu foncé; mais aufli ce fpath de plomb rouge fi remarquable , fur lequel M. Lehmann , Confeiller des mines , a publié un Mémoire imprimé, & dont on n'a point chçore dé- SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 431 couvert le pareil , ni dans la Ruflie , ni au dehors de cet Empire. Ce fpath pefant , tantôt de diverfes couleurs , tantôt d’un rouge de cinabre, & à demi-tranfparent, fe trouve cryflallifé en quilles groffes ou minces , lon- gues ou courtes , tant dans Les cavités du quartz que dans celles de la falbande de grès, & aff:cte, là où il fe trouve de l'efpace, cette même figure de prifme quadrangulaire applati , dont les extrémités fe terminent à vives arêtes à deux faces plus ou moins alongées. On le trouve aufli cryf- tallifé fur du quartz en pyramides courtes, de Piais & irrégulières , comme de petits rubis. Broyé, il fournie un guhr d’un beau jaune vif, qu’on pourroit employer dans la miniature, Dans toutes les épreuves auxquelles on a foumis cette mine dans le Laboratoire de Catharinenbourg, elle a conftamment rendu , outre une grande abondance de plomb qui alloit fou- vent prefque à la moitié du poids de la mine , fon grain d'argent ; ce que M. Lehmann n’a pas pu remarquer , par la raifon, fans doute, qu'ayant fait fes effais fur une trop petite quantité de matière, l'argent n’a pas pului devenir fenfible. Comme pour l'ordinaire on ne travaille pas précifément dans l’endroit où ce fpath de plomb fe trouve , parce que la communication d'air y manque, il eft aflez dficile pour le moment dè s’en procurer de bons fragments, & fur-tout en affez grande quantité pour en faire des épreuves. On s’oc- cupa cependant dans l'hiver de 1770 à 1771, à percer un puits pour favo- rifer la communication d'air dans cette mine, M. Pallas en a vu un frag- ment qui contenoit en même temps de cette galène groflière & de ce fpath de plomb dans le quartz. On trouve encore, dansces mêmes veines de quartz mélangé , où fe forme ce minéral fi rare, de petits cryftaux alongés , ter- minés en pointe à chaque extrémité & couchés. Ils ont une couleur jaune de foufre, qui leur donne l'apparence du foufre vierge ; les Mineurs les donnent même pour tels; mais ils ne s’enflamment pas au feu, & n’écla- tent pas non plus à la Aamme , comme le fpath de plomb rouge ; de forte qu'ils pourroient bien être une efpèce de fpath métallique : mais il ne fera point du tout aifé d'en recueillir en aflez grande quantité pour en faire les épreuves néceflaires, On trouve cette petite cryftallifation éga- lement fur le quartz & fur le grès. Actuellement (en l’année 1770) la totalité des travaux métalliques de ce diftrict occupe cinq cents Mineurs , qui fufffent à peine pour la fouille des mines, à laquelle on procède fur-tout en hiver. Le travail long & en- nuyeux du brifement & de la féparation du métal , qui fe fait.hors de la mine avec des marteaux de féparation (marteaux en forme de coin pour concafler & féparer les mines ) fous des angars ouverts, exige encore bien plus de bras: aufli a-t-on défigné pour ce genre de travail quelques milliers de Payfans , qui font obligés de le faire par corvées ; ce qui tient lieu de capitation. Cela n'empêche pas qu'ils ne reçoivent encore, en pro- portion de leur âge & de l’ouvrage qu’ils font, un petit falaire journalier 432 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, de 3 jufqu'à 6 copeks. On a aulli l'attention de ne les employer que dans les temps où ils ne font pas occupés des travaux de la campagne. C'eft ce qui fait qu’en été, où la plus grande partie du travail extérieur de la mine pourroit s'effectuer, on manque fouvent d'Ouvriers, Le métal détaché, autant qu'il eft poflible, de fa gangue, fe partage par les Ouvriers en première & moyenne qualités, & en une troifieme qualité compofée des miettes de la mine féparée au marteau dans la montagne. C’eft ce qu'on appelle pe: tit métal (en Allemand K/ein-erfz , & en Rule podre-drok ): on le lave dans des tamis fufpendus au-deflus de plufieurs grandes cuves ; & lorfqu'il eft éclairci, on Le trie. Ces trois qualités de minerai fe portent pour lors à l'Atelier que nous avons défigné plus haut fous le nom de lavoir , où on les met fous les bocards, & où elles rendent, après avoir fubi les opé- rations décrites ci-deflus , fuivant une évaluation faite à- peu près & l’une dans l’autre , de mille poudes de minerai, 30 à 40 folotniks, & jufqu'à une demi-livre de fchilck-fin ou de poudre d’or. Or, on tire annuellement de ces mines jufqu'à deux cents mille poudes de minerai, dont la meil- leure qualité fait environ la dixième partie, & le petit métal la plus forte. Les trois établiffements pour le lavage peuvent rendre annuellement de cinq à {ep poudes de fin fchilck (1). DES VENTS REFROIDIS PAR L'ÉVAPORATION, Par M. pu CARLA. Me SSEMBROECK nous a fait connoitre le refroidifflement produit par l'évaporation; mais cette découverte fur prefque oubliée en fe mon- trant, M. de Mairan la trouva fur fon chemin , & devinrcomme le Fonda- teur d’une Science nouvelle, Quoiqu'il ne püûcen voir d’abord toute la fécon- dité , il la pouffa de manière à tourner vers elle l'attention des Phyf- (1) Six mille poudes de mineraï ne rendent qu'au plus demi-livre de fin fchilck ; deux cents milie poudes ne doivent en rendre que cent livres; ce qui ne feroit que deux poudes & demi, puifque le poude eft de quarante livres , poids de Ruflie. Mais en ad- mettant que ces trois lavoirs rendent chaque année 6 poudes de fin {chilck , cela ne feroie pas encore quatre cents marcs d'of ; d’où l’on peut conclure que dans un pays où la main-d'œuvre , le bois & les denrées ne feroient pas à aufli bon compte qu’en Sibérie, & où l’on n’emploieroit pas la reffource des corvées, toujours onéreufes au Peuple , le produit de ces mines ne balanceroit point, à beaucoup prés , les énormes dépenfes qu'elles occafionnent, { Vox de l’Edireur François ). ciens. » SUR L'HIST. NATURELLE, ET:LES ARTS, 433 ciens. M. Richmann étudioir , prefqueren même temps, ce nouvel objet à Pérerlbourg , & contribua peut-être à le répandre , fans ÿ porter ni la par tience , ni l'activité, ni la circonfpeétion de l'Obfervareur François. Enfin, M. Cullen s’empara de ce domaine en Légiflateur, comme pour lui don: ‘ per une rroifième naiflance. L'Académie de Turin accueillit & conftata fes réfulrats par les foins de M. Cigna l'un de fes Membres. MM, l'Abbé Noller & Baumé donnèrent à ce genre une nouvelle authenticité , & pref- ge tous les Phyficiens obfervateurs vérifièrent ce.qu'ils en avoient appris ans les livres. M. Roux montra que plufieurs grandes Narions Orien- tales, long-temps avant la naïflance de l'Hiftoire , employoient l'évapora- tion pour rafraîchir leurs liqueurs : il fit mieux; il joignit à ce travail le Mémoire de Cullen, traduit en François. . 2, Tandis qu'on fe réunifloit pour s’aflurer une jouiflance inattendue, M. Crawfort déceuvroir des vérités, qui, fans paroître liées avec Les ex- périences de Cullen , devoient en donner la folution. Il diftingua dans l'és Jément du feu l’état thermométrique, dans lequel il fair bouillir les fluides, fond les métaux , brûle les corps; & celui de feu larent dans dequel, quelle que puifle être fa quantité, il n'agir point fur le chermomètre. M. La- voilier a traité la même matière fous la dénomination de feu com- biné. ; 3. M. Crawffort, traduir par M. Magellan , prouve que l'eau fluide con- tient 57,77* de feu latent plus que la glace; en forte qu'en fuppofant la glace à Oo, & lui ajoutant 574 deschaleur ,elle fondra fans que le ther- momêtre bouge, Il trouve dans la vapeur de l’eau 368,88* de feu latent plus que dans la glace. La vapeur auroit donc une-extrêmne froidure, fi dès l'inftant de fa RAR elle étoit reftée feule dans le monde: mais la chaleur qu:lconque des êtres environnants , cherchant toujouts l'équilibre thermométrique, afflue rapidement vers cette vapeur , qui n’eft qu'un point EE eux; & c’eft cette tendance qui refroidir fubitement les corps voi- ins, & à proportion qu'ils font plus. voifins. d 4- Ainfi l'air , qui fait, à l'égard de j'eau évaporante, la fontion de diflolvant, eft 2boidi , en recevant dans fes intertices une vapeur excefli- vement froide , qu’il échauffe à 1 inftant aux dépens de fa propre chaleur. 5. Pour mettre Le fait à portée de tout le monde , on s’affurera du refroi- diffement produit dans l’atmofphère par l'évaporation , en arrofant fa chambre d'une eau de même température que certe chambre : on éprou- vera prefque à l'inftant une véritable fraîcheur ; car certe eau açquérant alors une furface prefque égale à celle de la chambre , eft évaporée tout- à la-fois par un grand nombre de points. Or, certe fraicheur ne_vient pas précifément de certe eau, qu'on fuppofe de même température que l’ap- partement, mais de fon évaporation; l'air prend la froidure de la vapeur qu'il afpire, 6. Ce refroidiffèment , quoique fenfble, eft ordinairement peu conli- Tome XXII, Part: I, 1783. JUIN. Kkk 434 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, dérable, parce que l'air renfermé dans la chambre eft comme immobile ; les molécules contiguës an plancher fe faturent d’eau avant d'en laifler pafler aux couches horizontales fupérieures: ainfi de chacune ; ‘chacune fe fature d’eau avant que la couche qu’elle porte & qu’elle touche puiffe fe faturer, & la vapeur eft très-lente dans cette propagation: au lieu que dans la campagne , l'agitation de l'air fait monter & Étddre fes molé- cules beaucoup plus vite. Sur ce principe, MM. les Phyficiens que j'ai nommés , établirent qué le vent, en renouveilant l'air autour des corps évaporants, accélère leur évaporation , tout comme pourroit le faire un fourneau allumé , & rend leur froidure d’autant plus confidérable; aufñ ont ils tous employé des foufflets dans leurs expériences pour augmenter Le froid de l’évaporation. . 7. Après avoir bien faifi ce principe, il fera facile de concevoir que les vents qui caufent une évaporation fe refroidiffent à l'inftant. Tous les vents fecs qui trouveront de l’eau , fe refroidiront donc. Ainfi, un vent fec, ar- rivé au bord d’un grand lac , perdra beaucoup de fa chaleur en parcou- rant ce" lac. Ce même vent trouveroit aufhi beaucoup d’eau dans une grande forêt, L'eau pluviale que d’autres vents y ont abandonnée , fort lentement da labyrinthe formé par l’entrelacement des arbres debout, courbés, cou- chés ; des arbuftes, des plantes rampantes , des branches tombées, des racines faillantés , des troncs pourris, des herbes droites ou jonchées. Une couche de feuilles & de fruits , tombée tous les ans , en fait des digues imperméables innombrables, qui s'élèvent & fe fortifient fans cefle au milieu de tous ces embarras; peut-être même l'humidité qui s'attache à la furface même des plantes en vigueur, eft-elle la plus grande portion de ce réfervoir. Auffi Pair y eft-il chargé d’une quaritité d’eau qui fe rend fenfble, long temps après les pluies. L'air le plus fec s’y fature prefque en arrivant, & ne peut par conféquent eh fortir fans marifefter la froidure que l’éva- poration lui a fait contraéter. Pour prendre une idée de l'humidité qu’exha- lent les forêts, il fuffit de favoir qu'un tournefol , bien arrofé par Halles, exhaloit dans un jour autant qu'il pefoit lui-même. 8. Les vents humides ne font point refroidis par l’évaporation , puifque l'humidité n’érant que l'excès de leur faturation , ils dépofent au lieu de diffoudre ; l'air eftalorsun menftrue furfaturé, dont le précipité s'appelle pluie ,& ces vents ne font point refroidis par leur paflage foic dans les forêts , foit fur les mers, = 9. On trouve dans le Journal de Phyfique, Décembre 1781 , un Mé- moire fur les vents pluvieux , qui montre, dans un grand détail, pour- quoi les vents font pluvieux en allant des mers aux grandes chaînes , fecs en continuant leur route de ces chaînes à la mer, & que la fécherefle & l'humidité de ces vents augmente avec la quantité de leur afcenfion; par conféquent l'air, devenu très-afpirant après fon paflage par de hautes mon- tagnes, pompe violemment Fhumidité qu'il trouve enfuice fur fa route. Il S'UR L'HIST. NATURELLE ETLES ARTS. 455 fe refroidira donc violemment , fi, après être defcendu d’une grande hau- teur, il crouve la quantité d’eau néceffaire à fa faturation, Il fuffira donc deconnoître , d’une part, les dimenfions & l'afpeét des montagnes dans Chaque région; de l'autre Les vents qui y dominent, & la quantité dont ils y dominent, pour déterminer théarétiquement la température de ces régions ; & fi ce raifonnement fe trouve confirmé par des relations füres, multipliées & claires, nous pouvons regarder cette théorie comme cer- taine. C'eft ce que nous allons vérifier. 10. Quant aux vents, j'ai recueilli tout ce que j'ai pu trouver dans l'ob- fervation, & qui me paroït fuffire pour prouver que les vents tenant ouelt font les plus forts & les plus fréquents dans les zones moyennes, prin- cipalement en hiver. Ce fait avoit été déduit théorétiquement par Halles, Bernouilli , Francklin. J'efpère de fournir beaucoup de preuves qui n'a- voient pas été apperçues; ce fera le fujet de ma feptième vue fur la Géo- graphie-Phyfique. L'extrait feul de tous ces matériäux occuperoit trop de place dans ce Journal. Je prie le Lecteur de regarder provifoirement comme aflurées cette fréquence & certe force des vents oueft dans les zones moyennes. 11. Les vents aliféstenant E. entre les 30% N. & S, font fi connus & fi certains, que j'établis Leur perpétuité fur les mers libres , comme une forte d'axiome. Je ne négligerai cependant point de la vérifier dans l'Ou- vrage annoncé, 12. Puifque les vents d'entre le N.O.& le S,O, dominent dans nos da- titudes , Le froid doic y être vif & long dans tous les lieux humides où ils font defféchants, Or, le Mémoire fur les vents pluvieux déjà cité, prouve qu'ils font fecs en Chine, dans les Colonies Angloïfes, chez les Patagons Orientaux ; ils y font donc froids à proportion de l’eau qu'ils y rencontrent, & les relations vont nous tranfporter fur les lieux. 13. Vents tenant O., dit Wode, 4 lorient des terres Magellaniques, & froid très-vif le 2 Janvier 1708 , vers 53% 11/ S. Air chaud, ditle P. Quiroga, le G Février 1746, par 49% S. près des Patagons Orientaux ; ce qui nous étonne beaucoup , parce que le chaud ef très-rare fur cette cote. Au Port Saint-Julien, le feu nous brüloit pardevant , € nous gelions parderrière. Le froid règne fur toute certe côte | même en èté : aufft n’a:t elle point d'Habi- tants, Temps auffi froid qu'en Angleterre ,sau même moment, le 30 Oétobre 1764, dit le Capitaine Byron , par 3$* 50! S. devant l'embouchure de la Plata, Vents tenant O.le 16 Novembre vers 461 S., vent S. ©. très fort. Froid plus vif qu'en plein hiver dans le Golfe de Gafcogne le 6 Décembre par 47° S. La beauté du ciel nous fit croire que ces parages n'étoient pas abfolu- ment fans été. Versle 12, par $O* 33/8. , le temps ayant étégénéralement beau, mais froid , nous convinmes que l'été de ces climats ne différoit de nes hivers que par la longueur des jours, Froid très-vif , dit Wal- lis, au 30 S. le 12 Novembre; la neige ne fe montroit que dans les vallées , Tome XXII, Pare. I , 1783. JUIN. Kkk2 436 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE € par couches profondes dans la Terre de feu le 28 Février. Temps nébuleux ; froid orageux dans le Magellan; de Décembre en Avril 1767. Le froid ; dit M. Coock , excira les plaintes des Matelots , qu'on habilla en conféquence vers 47% 8. le 6 Janvier , près Les Ifles Falkland, Le temps , qui avoit été auffi beau que notre mois de Mai, devint nébuleux & froid, avec des bouffées de Vent très-piquant, accompagné de neige, De douze hommes partis le matin 12 Janvier, avec MM. Bancks & Solander, qui alloient herborifer fur Le N. E. de la Terre de feu , deux moururent de froid : on défefpéroit d'un 1r01fième; les autres en furent malades. Le pays ef} en général uni; les hauteurs, quoiqu'affez élevées , ne peuvent Ss'appeller des montagnes. Le thermomètre n'étoit monté qu'une fois à 10° dans le Magellan le 8 Décembre. Il baif[a de Sa 7°k10, & variade 8% a SA les 14 & 15, IL fur ordinairement a 84 ou 0, tandis qu'un beau foleil fondoit la neige , qu'une tempête $. O.répan- dit de nouveau Jur toutes les montagnes. Dans la Terre de feu, elle ef bleue, auffi vrerlle que le monde, Nous fommes donc aflurés que cette côte du Bréfilau Magellan eft d’une exceflive froidure au fort de fon été. Elle eft plus voifine de l'équateur ce- pendant, que la côte d'Europe comprife entre les Mers Méditerranée & Baltique. Les vents dominants tenant ©. y defcendent de la plus haute chaîne de la terre avec une force afpirante proportionnée à cette hauteur, Ces oueft n'ayant pu fe faturer fur le continent, doivent donc fe refroidir encore en allant vers lorient fur l’atlantique , & devenir glaciaux vers le méridien du cap de Bonne-Efpérance , puifqu'en avançant ils fe faturenc toujours , & fe refroidiffent à mefure. Ecoutons encore les Navi gateurs. Le thermomètre, dit Forfter , étoir à 2,644° Le 6 Septembre 1772, avan: d'atteindre le 49% 40/ S, vers le méridien du Cap de Bonne-Efpérance. Ifle de glace le10 , vers le SoŸ $/. 4 environ deux lieues au-deffis du vent étoit une 1fle de glace femblable à de la terre blanche ; après-midi, nous pafsdmes près d'une autre haute G& longue de 2000 pieds. Par $4 S., le 14 Décembre 1772, vent N.O...,.., je me mis en panne dans une eau tranquille , fous une pointe de glace, dit M. Coock ; je me remis à longer Le bord de la glace de huit heures du matin à une heure ; puis je tournai pour courir une mer fans glace, & où nous fimes enfermés après quatre lieues, ayant eu laglace a tribord , & ne trouvant qu'une fele iffue ; tout le refle étoit une maffe folide, dont un jour un peu clair pouvois nous montrer le bout. Le 15, beaucoup de neïge, nos après tapifles de verglas, un peuple d’Ifles de glace. ..... Le 15 , la grande maffe de glace s'étendoit du S.S. O. a l'E....,.Le 18 , je longeai toujours la glace, où je ne trouvai point de paflage pour le S...,... A midi, j'étois par $5* 16/ S. Nous vogu.ons parmi une quantité innom- brable de hautes glaces... .... Le 18 ,,7e voguai deux heures avant d'être ab- folument enfarmé. Nous ne fortimes de la plaine de glace que pour voguer parmi des Ifles de glace, Les mers de Groënland font couvertes; pendant SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 437 cout l'été, d'une plaine de glace femblable à celle que nous longions. C2 font des morceaux de 30 à 40 pieds quarrès , empilés, dont il n'efl pas aifé de fixer l'âge. Le Fahrenheit [e tenoit généralement fous la congelation. Le refte de ce détail eft à-peu-près fur le même ton. Voilà donc un climat fitué dans la même latitude que la Hollande, couvert des vlaces qui caracté- rifent les mers fituées au nord de Spitzbergs car les vents tenant O. ve- nus des Patagons avec une force afpirante exceflive, produifent fur ces mers une évaporation exceflive , & par conféquent une froidure qui s’ac- croit toujours iufqu’a leur faturation complette, Coock va nous en fournir une autre atteftation. L’Ifle de Georgie, par $4 S., & toujours vers Le mé ridien du Can de Bonne-Efpérance , étoit couverte prefque en entier à plufieurs braffès de profondeur, fur-tout vers le S. O. , d'une neige glacée, Le 20 Janvier 1775, la quantité qui s'en rouve dans les vallées ef? incroyable. Au fond des bayes , la mer aboutiffoit à un mur de glace fort épais. Nous ne virres fur La côte aucun courant d’eau-douce. La neise ne fond que fur la côte N. E. Re- marquez que le fort de la glace eft versle S. O., côté tourné vers PA- mérique, & qui par conféquent reçoit toute l'impreflion des vents afpi- rants O. La glace fond vers le N. £., qui, par fa polition,, eft garanti de ces mêmes vents. ‘ 16. Bouvet , envoyé pour la découverte desterres Auftrales en 1738, ne découvrit que des glaces: dès /e 48%S., grande glace fuivie de plufieurs autres , entourées d'un grand nombre de glaçons d® différentes groffeurs ; elles avoiéntentre 2 & 300 pieds de hauteu”fur la face des mers ; leur circon- férence étoit d’entre un quart de lieue € trois lieues. Il fallut avancer au travers des glaces tout lejour 1$ Décembre ; neige , gréle, froid extrémement piquant. À mefure qu'on uvançoir vers le S, , les glaces fe multiplioienr, Le 20 après-midi, l’on ne trouva de paffage libre qu'a l'E. 17. L’Auteur anonyme du troifième voyagéde Coock, rapporte ceci: Le 12 Décembre 1776 , par 46% 18! S. , nous eñmes , pour La première fois, grêle & neige, froid extrême. Pour écarter la gelée des pofles des Matelors , nous garnimes de toile Les écoutilles , allant du Cap de Bonne Efpérance au Cap Van d'Hiemen, c’eft-a-dire , vers LE. Le 13 , nous pafsämes entre deux Ifles couvertes de neige & de brume , fans arbriffeaux ni êtres vivants. Halley avoit aufi vu des glaçons dans les mêmes latitudes & faifons en 1700. 18. Toutes ces relations ont produit ou confirmé ce préjugé célèbre’, que le continent auftral étoit beaucoup plus froid que le boréal: mais cette froidure , véritablement inconcevable, n'appartient dans cet hémi£- phère qu'aux mers qui font à l'orient des Patagons ; la grande mer qu'ils ont à l'occident a les températures propres en général aux faifons & aux Jatitudes, Tontes mes recherches n’ont pu me faire découvrir un feul trait qui reflemble pour la mer du fud a tout ce qu'on vient de voir pour la partie auftrale de l'atlantique : les Navigateurs femblent ne s'occuper du 438 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, froid qu'avant de paffer le détroit magellanique, & n’en parlent ni directe- ment ni indirectement , lorfqu’ils ont pénétré dans la mer du fud. Coock nous donne même une affertion pofitive à cet égard : Je ne pus trouver des glaces, divii, qu'au Go* S. dans la mer pacifique ; & il en avoit trouvé 200 lieues plus au N. ou à 0! dans l'atlantique: & quelles glaces ! & en quel nombre ! Dans les latitüd:s moindres que 0OŸ € dans cette mer pacifi- que, le thermornètre defcendit raremient a la congelation ; au lieu que dans l'atlantique, il s’y tenoic dés le $4, C’eft qu'il y avoit des glaces & plus étendues € plus nombreufes au N. dans les mers atlantiques & indienne , que dans la mer du fud. Et en effer les vents O., conftammenc & forte- ment fupérieurs entre Les 40% & 604 de latitude, ne defcendent pas des montagnes pour courir fur la mer pacifique; elle n’a pas même des terres fur ce parage & fur ce rumb: ces vents tenant O. n’y font donc pas deffés chants, ils n’y produifent donc point d'évaporation , l’évaporation ne les refroidit donc pas: leur température y eft celle des faifons & des latitudes, & les glaces pouflées du pole par les courants & les vents, s’y fondenc fuivant la loi des latitudes, au lieu que ces mêmes O. pénètrent dans l'atlantique après avoir franchi cette cordillière , qui eft la chaîne Ja plus élevée & la plus continue de la terre, & après avoir pris par conféquenc yne force afpirante proporrionnée à cette élévation. Suivant le Mémoire fur les vents pluvieux déjà cité, produifant une évaporation brufque & abondante fur l'atlantique”, ils fe refroidiffent violemment fur l'atlantique. 19. Après nous être bien aflufés du refroidiflement produit par l’éva- poration dans la partie fud de cet océan, voyons ce qu'il eft dans la partie N, 20. La gelée eft toujours produite en Viroinie, dit Abbé Prevoft , par Les vents d’entre le N, E. 6 le N. O. , venus des Apalaches ,€ qui donnent la plus parfaite férénité. X]s font fefeins, parce qu’ils defcendent des montagnes ; ils font glaciaux, parce qu'ils fent afpirants & qu’ils ont trouvé dans la forêt qui couvre ce continent , toute l’eau néceflaire à leur faturation & par conféquent à te refroidiffement, Le vent d'hiver efl généralement N. O. en Penfilvanie, foufflant des montagnes glacées & des lacs du Canada: ce vent produit tout le froid de cette Colonie , le grande laroeur de La Delaware ne l'empêche pas de geler de part en parts nos vents froids , dit M. Francklin, font ordinairement N. O., ainfi que nos ouragans d'été. Or, la Penflvarie gît par les latitudes des Ifles Baleares, de Corfe & de Sicile 3 mais les forêts, les lacs, les marais & les rivières fourniffant beaucoup d'eeu à l'avidité des O., cette edu brufquement évaporée rend ce vent glacial , lors même qu’il feroit tempéré fous le pole, & pétrifie la Delawarre. 21: 1! gèle a Quebec d'Oétobre en Avril, dit le Père Cotte ; /e plus grand froid marqué par M. Gautier eff de 32%. 1l eff attribué aux forêts & marais; il ef moindre depuis qu'on a défriche. Or les vents O. que nous avons fup- pofé fi dominants dans toutes ces latitudes , font en Canada , comme en SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 439 Penfilvanie & chez les Patagons, defféchants, & glaciaux ; mais moins froids, à mefure'qu'on détruit ces forérs, dont l’évaporation les refroidir. Le Père Cotte ajoute bientôt après , gu’em Canada le printemps.arrive plutôt & l'hiver plus tard qu’autrefois | changements caufés par les abattis de bois. Le vent N. O., dir M. le Caire à M. l'Abbé Noller, caufe feul les froids du Canada. En Canada , dit'le Père Charlevoix, /e vent OÔ. coupe le vifage 6 donne la férénité ; ce font les deux caractères des vents O. dans ce. pays: ils font glaciaux, parce qu'ils produifent une grande évaporation ; üls produifent une grande A et , parce qu’ils font defléchants; ils fonc defféchants , parce qu’ils defcendent d’une chaîne élevée , & la fubftance de cette évaporation leur eft fournie par la forêt épaifle & les eaux maréca- geufes qui couvrent ce continent: aufli /a violence des vents O,, dit VWilliam{on , augmente-t-elle a mefure que l'air eft plus froid chez Les Colonies Angloifes ; ou plutôt le froid augmente avec cette violence des vents. 22, Ces vents O, feront encore froids en avançant fur l’atlantique. La glace, dit d'Ulloa, couvre Les havres de Terreneuve pendant l'hiver ; le 22 Novembre 174$ , nous fimes environnés d’une glace que le Soleil fondie heureufement, & qui nous avertit de quitter vite le port de Plai[ance pour n'être pas emprifonnes tout l'hiver. ..... Le premier vaiffeau qui arrive étant Amiral des autres Nations dans La pêche de La morue, il fe trouve en Mars des Navires poflés devant certe glace, dont ils attendent la fonte, € par- deffus laquelle les gens de la chaloupe vont à SO lieues dans Pfle dreffer deurs tentes en figne de primauté ; ce qui produit parfois des fcènes fanglantes. Or, Plaifance a la même latitude que Nantes, & de plus elle eft fituée au bout N. d’un golfe profond : les glaces n’y font donc peint pouffées par aucun vent tenant N., ni par des vents fud naturellement fondants; elles naiflent donc dans ce golfe ; la caufe de ces glaces eft donc locale 3 elle eft plus forte à Terreneuve que dans le continent voifin, puifque les vents O. fe font refroïdis encore plus fur la mer voifine , qui s'enfonce jufqu'à Quebec. 23. La froidure n’eft pas aufli forte fur ces parages que fur l’atlanti- que auftrale; car la Cordillière, dans le fud de l'Amérique , eft d'une hauteur fans exemple, & les O. y prennent une féchérefle extraordinaire, qui produir erfuice un refroidiffement unique fur les mers que parcourent ces vents : au lieu que les montagnes de l'Amérique feprentrionale n’ont jamais été dépeintes comme ayant une hauteur digne d'entrer en quelque comparaifon avec la Cordillière, Les O. s’élevant incomparablement moins pour franchir, l'Amérique feptentrionale , prennent incomparablement moins de féchereffe, & refroïdiflenc incomparablement moins les mers des Colonies, 24. Le refroidiffement produit dans l'air par l'évaporation, a rendu célè- bre la baie de Hudfon. Les O.y defcendent après s'être purgés, defféchés dans Le paflage des chaînes qui féparent les berceaux des mers atlantique 449 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, & du fud. Is produifent donc une f$,êe évaporation fur cette baie, & s'y refroidiflent à mefure. Puis, ces mêmes vents s'étant entièrement faoulés fur l'arlantique, ne produifent plus d’évaporation , ne {e refroidiffenc plus ; reprennent en courant la température de leurs latitudes, & la portent en Europe. Halley , pour expliquer le froid de certe baie , lavoic faic venir du pole en inclinant l'axe de la terre: Martin qui rapporte ce paflage , ne peut le digérer. Ellis donne aux glaces que cette baie fournit à l’atlanti- ue, 302toifes d'épaifleur verticale. Mais ce qui contribue le plus au troid Es cette baie , c’elt que tous les vents n’y parviennent qu'après avoir franchi les chaines qui l'entourent , & y avoit pris par conféquent une grande fécherefle. Les vents O S. N. y produifent l’évaporation, & par conféquent le refroidffement, Les vents tenant E, n'y ont eux-mêmes qu'une petite entrée libre ; c’eft le détroit qui joint cette baie à l’aclan- tique. 1 2ç. Le froid eff plus vif fur le Kamschacka que dans la baie de Hudfon. Cerre affertion vague eft rout ce que je trouve fur la température de ce pays, & nous annonce le refroidiflement produit par les Oueft qui def- cendent des chaînes dela Tartarie , fur le golfe de Kamscharka , fe faturenc fur ce golfe, & portent enfuite dans la prefqu'Ifle le froid que cette éva- poration leur communique. Les vents après E, defcendent des chaînes de l'Amérique , fe refroidiflent vivement entraverfanr. le détroit qui fépare les deux continents, & portent la gelée dans le Kamfchatka. Les vents nord y font froids de leur nature, & par conféquent les vents fud font les feuls qui peuvent y réparer la chaleur. ‘ 26. Les vents E. ne peuvent être froids fur les côtes orientales de l'Amérique ; ils y font pluvieux, ils n’y produifent donc point d'évapora- tion. Après avoir examiné la température des vents fur les côres orientales des deux continents, nous allons voir tout le contraire fur Les côtes acci- dentales; car ce font les vents tenant eft qui portent la froidure en Europe ; & toujours par les mêmes raifons:ces vents d’entre le nord & left defcendent de l’épine de l’ancien continent pour courir en Europe , & font defléchants , puifqu'ils defcendent. Aufli le Père Cotte nous dit- il que Les vents N, & N. E. amènent toujours le froid & le fec à Paris ; le dégel ef! toujours accompagné des vents oueft & fud-ouefi. Remarquez comme * les vents fecs amènent toujours le froid, foit en Amérique, foir en Europe: ces vents fecs font O. en Amérique , E. en Europe, par la dif- pofition des montagnes ; & de quelqu'endroir qu'ils viennent, ils feront froids , puifqu'étant fecs ils produilent une évaporation , & que toute évaporation refroidir, 27. Les vents d'E. trouvent en parcourant la Suède , la Ruñie, la Pologne, des mers, des lacs , des marais , des forêts , des rivières ; & par conféquent produifent une évaporation qui les refroidir. La froi- dure de l'Europe étoit jadis fort fupérieure à ce qu'elle eft aujourd'hui , parce SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 441 parce qu'on a décruit une quantitégpdigieufe de bois , parce qu’on a defléché beaucoup de marais, parce que les lacs creufant roujours leur épanchoir , diminuent fans cefle en hauteur , en étendue , en nombre; le vent dE. trouvant moins d’eau, fe refroidit moins. 28. Ces mêmes vents font encore très-foids, quand ils fuccèdent à des pluies. La terre alors , pénétrée d’eau, fournit à ces vents fecs route la {ubitance néceffaire à leur faturation , ce qui les refroidit à mefure; & l’on voit de fortes gelées fuccéder brufquement à des rempératures chaudes. Toujours Le retroidifflement d’un vent fec nous annonce une forte pluie rombée quelque part fur ce rumb, Un vent naturellement pluvieux , que des circonftances rendent ferein, ne nous annonce pas ainfi la pluie qu'il a verfée fur fa route, Ne produifant point d'évaporation , il ne prouve point de refroidiffement. 29. Cette froidure des vents E. n’eft jamais ni plus fubite, ni plus forte, ni plus durable qu'après les neiges. Elles ne s’écoulent point comme les pluies : ces vents fecs rongent précipiramment ces neiges , qui s'évapo- rent fouvent en entier fans fe fondre; & l’on dit alors , fans le favoir autrement , que ces vents ont rencontré beaucoup de neige: c'eft-à-dire que, felon l'expérience, quand le terrein parcouru feroic plus froid que la neige , il ne refroidiroit point ces vents comme les refroidir cette neige ; car ce terrein découvert ne fournit point de matière à l’évapora- tion , & la neige eft elle-même cette matière. 30. Le vent d’E., extrémement froid & G piquant, dit M.Mchlis, ramena la gelée du 23 au 28 Décembre 1728 dans toute [a rigueur. Le vent S.parut alors la faire ceffer ; mais le vent d’E. la ramena , quoique moins forte jufqu’au 29 Mars , avec quelques intervalles, Ce vent foufflant violemment , continuel- lement , Le froid fut rès-violent dans toute l'Europe... ., La neige tomba chez nous en Hollande par orages avant que la gelée eût pénétré La terre ; de forte que la neige conferva la chaleur de la terre. Le vent d’E. qui nous vient de la Baltique , fouffla prefque toujours jufqu’au $ Février. 31. Ce vent d'E. trouvoit donc partout une matière évaporable , mer ou neige , s'en faturoit & fe refroidifloit à mefure. Cette univerfalité de la neige en Europe eft fuppofée par M. Mehlis. Le refroidiffement fut donc général en Europe, où ce vent afpirant & cette neige étoient deux faits fimultanés & généraux. Ce froid dura long-temps, parce que la neige étoit affez épaifle pour fournir long-temps la matière néceffaire à l’évapora- tion que produifoit ce vent naturellement fec. 32. Sur onze relevés que M. l'Abbé Chevalier donne du plus grand froid obfervé à Bruxelles depuis 1763 jufqu'à 1773 , je n’en trouve qu'un fiul par.un vent tenant O. ; c'étoit le N. O. Les dix autres grands froids furent produits par un vent tenant E, Selon D. Mann, les vents d’entre l'E. & le N. qui règnent communément à Nieuport les premiers mois de J'anpée, & qui traverfent un grand continent, amènent prefque toujours Tome XXII, Part. 1, 1783. JUIN. Lil 442 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, la gelée , randis que les vents d'enygxyN. O. & S. ©. font toujours doux & humides, Selon M. Mariotte, /'E. N, E. € l'E amènent ordinairement le beau temps en France; ils font monter le baromètre en . ., .. condenfant l'air. 3. Je ne m'étendrai pas davantage fur la propriété qu'ont les vents d'E, de produire le froid & la férénitéen Europe ; ces deux faits font à ortée d'y être vérifiés tous Les jours par toute forte de perfonnes. Il me fuit de faire obferver qne ces vents ne doivent pas être froids en été , puifqu’ils trouvent en été peu de matière évaporante ; qu'après quelques fe- maines d’une chaleur foutenue , ils peuvent devenir chauds, même en hi- ver, s'ils ont beaucoup defféché la rerre. Ces vents ne feront véritablement froids, qu'après avoir couru fur des pays couverts de neige, & répandront la température ordinaire , lorfqu'ils auront afpiré cette neige. Les eaux plu- viales s'évacuent trop vite pour fournir long-temps à l'évaporation , & les vents d'E, qui leur fuccéderont ne feront pas refroidis pendant long- temps. Ce paragrashe eft fondamental dans cette théorie. 34. Nos vents É, ne font pas autant refroidis que les vents O. du Ca- nada, parce qu'à l’exception des Alpes & des Pyrénées, les montagnes d'Europe font incomparablement plus baffes que les montagnes de l’Amé- rique feptentrionale , & les vents , en defcendant de nos chaînes, font par conféquent moins afpirants qu'en defcendant de celles d'Amérique: d’ailleurs l'Amérique Septentrionale, refroidie par fes O., beaucoup plus fréquents que nos E., a beaucoup plus de neiges que de pluie ; au lieu que l’Europe, moins refroidie par les E., beaucoup plus rares que les O., a beaucoup plus de pluie que de neige , & les neiges permanentes de [PAS mérique refroidiffent conftamment les O. de l'Amérique , au lieu que les neiges toujours paflagères en Europe, refroidiflent rarement les E, en Europe. ‘ 35. Nous fommes donc aflurés que les froids longs & violents des deux Amériques dans les zones moyennes & fur les côtes orientales font produits par les O., ie qu'ils y font fecs, & non parles E. , parce qu'ils y font humides. Le Mémoire fur les Vents pluvieux en a fourni la preuve. Au lieu qu'en Europe le froid eft produit par les E., parce qu'ils y font deffé- chants, & non par les O., parce qu'ils y fonr humides. Airfi, la même caufe qui rend les vents defléchants, les rends froids; & certe caufe , c’elt leur paflage par des chaînes élevées : quant aux vents polaires, ils font froids par-tout. 36. Les vents S. eux-mêmes deviendront refroidiffants , lorfqu'ils def- cendront de chaînes élevées, puifque tout vent eft defféchant lorfqu'il defcend. C’eft ce que nous allons vérifier très faccintement. 37: On asvu, dans le Mémoire fur les Vents pluvieux, fouvent cité ci- deflus , & qui ferc de bafe à cette théorie, que le Languedoc eft divifé en haut & bas parune chaîne, & que le S., très-pluvieux par conféquent . SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 443 dans le bas , eft très-defféchant dans le haut. Ce vent, qui fond toujours brufquement les neiges dans le Narbonnois, c’eft-à-dire, avant de pafler la montagne, eft quelquefois glacial dans le Caftrais , c'eft-à-dire, après lavoir paliée. C'eit ce que le Peuple appelle xa/a d'auto geler par l'autan ÿ car ce vent , montant toujours dans Le Narbonnoïs, y étant toujours hu- mide par conféquent , ne peut y produire d’évaporation, ni fe refroidir par l'évaporation; il conferve jufqu’aux crêtes de la montagne noire la température des climats chauds qu'il vient de parcourir ; il fond Ja neige par cette chaleur & par cette humidité qui le caractérifent dans le Nar- bonnois: mais à peine at-il atteint cette crête, qu'il redefcend brufque- ment pour courir fur le Caftrais, reprend par conféquent fa force afpi- rante ; il pompe les neiges qui couvrent alors le Caftrais ; il fe refroidic à melure; il pétrifie la furface des eaux dans le Caftrais, tandis qu'il vient de porter É le Narbonnoiïs une chaleur érouffante. 38. Cette évaporation eft aflez brufque dans le Caftrais pour faire éva- nouir les neiges , tandis qu'elles ne peuvent fondre; & le Peuple dit alors ue le vent a mangé la neige : puis, lorfque la neige a difparu, ce vent S, répand fa chaleur naturelle , & on le croiroit forti d'une fournaife. 39. Ce vent S., qui, fuivant le Mémoire fur les Vents pluvieux, pén- che’toujours vers l'humidité dans l’hémifphère nord , & devient fec cepen- dant en defcendant de chaînes élevées , porte quelquefois jufqu’à Paris la froïdure que lui communique l’évaporation des neiges qu'il trouveen Au- vergne, en defcendant du Cantal; & M. de la Hirenous apprend que Le plus grand froid de 1700 fut produit à Paris par un vent S., parce que les mon- tagnes d'Auvergne étoient couvertes de neige. Il r’efl pas rare de voir baiffèr le thermomètre par un vent S., qui ne tarde pas de le faire remonter. Il eff quelquefois affez froid par un temps ferein vers le milieu du printemps, parce qu'il trouve alors beaucoup de verdure. Il faut en un mot qu’en defeendant du Cantal & des Cevennes, iltrouve de l’humidité : neige ou verdure, tout eft égals pourvu qu'il trouve de quoi aflouvir fa force afpirante, S'il ne trouve point d'eau, il arrive chaud à Paris ; quand cette eau diminue , il reprend fa chaleur à mefure , & fait remonter le thermomètre à mefure. Or, la verdure exhale plus d’eau qu’une étendue égale de mer , parce que la furface d'une plante eft prodigieufe. Hales nous a déjà dit qu'un tournefol bien arrofé , exhaloit dans les grandes chaleurs une quantité d’eau égale à fon poids. y 40. En Suiffe, dit M. Coze, Le vent S. eff très-froid au printemps pen- dant les premiers jours qu’il fouffle ; puis Les avalanches roulent ; les Jommets le dépouillent de leurs neiges , & ce vent devient fubirement fort chaud. Ce trait eft d'une énergie admirable. Ce refroidiffement fe fait remarquer dans le printemps, parce que la Suifle eft alors entièrement couverte de neige. Le vent S., en defcendant de la grande chaîne des Alpes, qui eft précifement au bord & au nord de la Suifle, trouve donc de la neige par- Tome XXII, Part, Ig 783. JUIN. L11 3 444 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, tout en Suifle; cette neige sévapore donc par -tout en Suifle , le vent S, fe refroidit donc chaque pas qu'il fait alors en Suifle, Ce vent , après avoir paflé la crête de la grande chaîne, ne parvient point d’abord à fon plus grand refroidiffement, parce qu'il ne fe fature que fucceflivement. Les molécules de l'air qui touchent la neige fe faturent les premières; puis cette faturation fe communique à la couche fupérieure contiguë , puis à la couche fupérieure encore : ainfi de fuite, & toujours che- min faifant, Avant que toutes les molécules de cet air foient faturées, il faut un temps pendant lequel le vent franchit la Suifle entière. 11 fe trouve plus refroidi à Bâle qu'à Soleure, à Soleure qu'à Berne, à Berne qua Fribourg , à Fribourg que fur la crête même de la chaîne. I1 fond donc fur cetre crête plus qu'à Fribourg, à Fribourg plus qu'à Berne , à Berne plus qu’à Soleure, & à Soleure plus qu’à Bâle. La neige s'écoule à mefure dans les rivières ; la terre paroît, s'étend; le vent S. trouve moins de fubf- tance évaporable, conferve mieux fa chaleur , fond davantage, & ne laiffe fubfifter la neige que dans les endroits où elle étoit la plus épaifle. Ce peu de neige occupe un trop petit efpace pour qu’un vent prenne le temps de s’y refroidir, & le vent S, redevient ce qu’il eft naturellement , c'eft-à-dire , - fort chaud. X] eft très-froid quand il a couru fur une grande étendue de neige en Suifle, très-chaud quand prefque toute cette neige eft fondue. » 41. L'été d’'Affracan eff ft ardent , que la chaleur même du mois d'Oëtobre égale celle du mois d'Oülobre à Paris ; Le vent [ud y rafraïchit l'air. N’eft-il pas inconcevable qu’on aille chercher précifément le vent S. pour rafraîchir l'air d'Aftracan ? C'eft que ce venttrouve Aftracan , après avoig parcouru toute la longueur de la Cafpienne , & il trouve la Cafpienne après être defcendu des hautes chaînes du Taurus , où il eft devenu très-afpirant. Il produit donc fur la Cafpienne une évaporation brufque, qui le refroidit brufquement , même en été. 42. On navigue au N. du Spitzberg ; Phips a pañlé le 80° 30/ N.; mais jamais on n’a pu aller au nord de la Zemble, dont le Cap Le plus boréal gît par 78% C'eft que tous les vents d’entre le S, & l'O. vont d'un grand océan au Spitzberg. Ils font par conféquent faturés & humides au NE berg, fuivant le Mémoire fur les vents pluvieux. Ils ne produifent donc point d'évaporation , l'évaporation neles refroidit doncpoint ; au lieu que tous les vents tenant S., n’atteignent la Zemble qu'après être defcendus des hautes chaînes de la Tartarie , après avoir pris par conféquent une grande force afpirante, & s'être fortement refroidis fur les neiges qui cou- vrent les deferts de la Sibérie. Ils font defcendre Le thermomètre à — 75° à Jenifleic ; & l’évaporation qu'ils continuent de produire en courant fur l'océan, les refroidir encore, & ils arrivent dans la Zemble, Or, ces — 75" font le plus grand froid naturel qu’aient obfervé des hommes, d'une part; de l’autre, Jeniffeic eft par $8* 40/ N. , latitude moindre que celle de Péterfbourg & de Stockholm. 43, Certains vents viennent au Spitzberg , après avoir traverfé Le con- SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 445 tinent, il eft vrai ; mais les montagnes d'Europe, fi vousen exceptez les Alpes & les Pyrénées, ne peuvent être comparées aux chaînes de la Tar-. tarie. Ces vents defcendent donc beaucoup moins pour aller au Spitzberg, que pour aller vers la Zemble; ils font donc beaucoup moins afpirants en allant au Spitzberg qu'en allant vers la Zemble, & refroidiffent moins le Spitzberg que la Zemble. 44. Ainfi, les froids célèbres de la Sibérie réfultent d’une caufe bien connue , bien vérifiée. Les S, y font ce que font les O, dans l'Atlantique auftrale ; ce que font tous les vents , qui defcendant de chaînes fort élevées, trouvent de la neige , des forêts , des mers. s. Les S. ne produifent pas toujours direétement les froidures de la Sibérie & de la Zemble, parce qu'ils ne trouvent pas toujours une égale quantité de neige à pomper. Etant ferein , le foleil n’eft jamais affoibli tant qu'ils durent. Il fondra aujourd'hui certaines portions de neige , de main un plus grand nombre, après demain un nombre plus grand en- core. À mefure qu’il fond la neige, les vents S. trouvent moins de {ubf= tance évaporable, fe refroidiflent moins , & prennent enfin la température de leurs latitudes, quand il refte peu de neige dans leur route. 46. Or, cela doit arriver peu en Sibérie; car tous les vents marins y tiennent du nord. Or, tous les vents pluvieux font marins : donc tous les météores aqueux de la Sibérie arrivent par des vents froids, & font prefque toujours de la neige; par conféquent la Sibérie a de la neige nouveile prefque aufli fouvent que nous avons de la pluie. Cette neige refte fur terre comme pour attendre Les vents S,, qui viennent, non la fondre, mais la manger , en la pétrifiant ; & avant qu'ils l'aient fublimée, il arrive un autre venttenant N., pour en jetter de nouvelle , & entretenir ainfi ce fond d’une froidure incroyable & prefque habituelle, ; 47. Dans l'été, ce vent, qui dévore la neige fans la fondre, étant fe condé par le foleil qui la fond, peut trouver de grands pays libres de neige, ne plus produire d'évaporation, redevenir chaud, & donner à la Sibérie un été pres 48. Lerefroidiflement de l’évaporationalieu dansla torridecommeailleurs, L'Abbé de Choifi n'éprouva point de chaleurs vers l’oueft de l'Afrique, en ayant le foleil près du zénith le 29 Mars 168$ par 20° 45’ N.; carles alifés N. E., forts & continuels dans ces parages , defcendent des hautes chaînes de l'Afrique. Ils afpirent l’eau violemment dès l'inffant qu'ils tou- chent la mer ,& cette évaporarion les refroidir, Ces N. E. trouvent très-peu de fubftances évaporables en Afrique, où la fécherefle eft extrême, générale & prefque perpétuelle. Ils prennent au contraire dans les fables embrafés cette chaleur à laquelle réfiftent fi difficilement les hommes du pays. Ee remarquez ce contrafte ; le même vent qui brüle dans le continent eft froid fur la mer voifine , car il ne produit point d'évaporation fur un continent 446 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fee, & produit beaucoup d’évaporation en courant fur la mer con- tiguë. 49. M. de Flacourt, voguant le 18 Juin 1648 par 17° 35’ N. fur les mêmes parages, fut obligé de prendre des habits d'hiver à midi, par ce même alifé N.E., abfolument ferein. Le foleil éroic en quelque forte plus qu'au zénith , où il avoit pañlé depuis peu , car les chaleurs font plus fortes après qu'avant ce paflage. Cependant l’exceflive chaleur qui réfulte ailleurs de ces circonftances, ne pouvoit détruire la froidure produite par l'évapora- tion. Voyez comme tous les caractères fonc ici réunis ; vent defcendant de l'Afrique , vent ferein , vent très-chaud en Afrique, & froid fur la mer - voifine. 59. M. le Gentil a fait, un fiècle après , la même expérience , au même local , dans la même faifon. Allant du Capricorne au Cancer en Mai 1771 , le chermomètre monta progreflivement du 16%, & parvint au 22%, le foleil n'étant qu'à 11% du zénith par 10% N., & redefcendit au 19°, quand on eut mis le foleil au zénith. C’e/? apparemment , ajoute M. le Gentil, que nous eûmes le vent S.E, jufqwa ce 10 N., puislevent N. E. C’étoit en effet la latitude où ces deux alifés concourent en cette faifon, & le rumb S. E. appartient tout entier à la mer jufqu'au pole méridional. Ce vent S. E. ayant roujours couru fur mer , n'étoit pas devenu fec en defcen- dant de chaînes élevées :il ne produifoit donc point d’évaporation , & w'étoit point refroidi par l’évaporation. Le thermomètre montoit donc toujours en approchant du foleil. Mais M. le Gentil fort des limites de ce vent , entre dans les limites du vent alifé N.E. venu d'Afrique , & refroidi par une évaporation violente, qui fit defcendre le thermomètre de 3°, tandis qu'il devoit le faire monter de 231. ÿ1Car tout le monde fait que la côte d'Afrique vers ces latitudes eft lun des pays les plus chauds qu'on connoïfle. M. Adanfon a vu fouvent le thermomètre à 45% dans le Sénégal, & à Co‘ dans le fable. Comment donc le thermomètre peut-il fe trouver à 19% degrés fur ce même rumb où le vent vient de dépofer & de prendre une chaleur de 45? C'eft par une raifon que nous connoiflons , qui fufhroit pour faire preffentir le faic avant de le conneître (1). à (1) J'auroisjoïüt à ce Mémoire les citations des Ouvrages dans lefquels j'ai puifé les faits que je rapporte : mais je me fuis apperçu que ce n’étoit qu’un furcroît de peine pour les Compoñteurs de ce Journal; peine affez inutile pour la plupart de mes Leéteurs. On verra toutes ces autorités dans ma troifième Vue fur la Géographie-Phyfique, dont ce ce Mémoire n’eft qu'un extrait fort abrégé. Ê Je dois ajouter qu’on trouve dans le Journal de Monsieur , Seprembre 1780, le paflage que voici. « C’eff à La feule évaporarion gwon doit attribuer Le froid qui exifle dans routes les parties de La furface de norre globe : oui, les vents Les plus froids © SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 447 Be EURE Det MRaDUE ME O: R'VLE A Ù AUX AUTEURS DU JOURNAL DE PHYSIQUE, Messieurs, M. l'Abbé FONTANA a eu la bonté de m’adreffer , le mois dernier, plu- fieurs morceaux qu'il a publié en Italien dans le Recueil de M, Lorgna, avec des corrections & additions de fa main. Un de mes Confrères de l’A- cadémie de Dijon (M. L. D. B. }, a pris la peine de les traduire , pour les faire connoître à cette Compagnie," & j'ai obtenu de lui la permiflion de vous communiquer fon manulcrit, pour en faire jouir tous les Amateurs de la bonne Chymie. Je vous enverrai fucceflivement tous ces morceäux, bien dignes de la réputation de l'Inventeur, Je commence par celui qui traite de lamatière fi neuve & fi importante , du principe calorifique. Je {uis , &c. A Paris, ce 13 Mai 1783. D EL'TRRT E DE M. L’'Agsé FONTANA À M MURRAY, Profeffeur d'Anatomie à Upfal , du 20 Oétobre 1781; Sur la Phlogiflication de l'Air dans les Poumons. I L m'eft tombé ces jours-ci fous la main un fecond volume des Opufcules Chymiques du Chevalier Bergmann, Je lai lu avec le même tranfport que Les hivers les plus rigoureux font redevables de Leur propriété glaciale à certe caufe puiffante. Nous tâtherons de développer cette vérité dans la Théorie des vents ». Mais je n’ai pas cru devoir employer ce paflage , qui choque mes principes, Un bou= let rouge ne fe refroidit point par évaporation, ce me femble, 448 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, j'avois éprouvé à la lecture des Ouvrages qui compofent le premier volume; il m'a paru également digne de la réputation fi juftement méritée de ce cé- lèbre Chymilte, Prefque tour ce qui fort de la plume de ce grand homme eft original. Le choix des expériences égale la fagacité qu’il apporte à les faire , ainfi que l'exactitude dans les conféquences qu’il en tire. On pour- roit dire de lui pour la Chymie ,-ce que Cicéron difoit de la Latinité de Céfar: Ineptis gratum fortaffe fecit. . . . . Janos quidem homines à fcribendo deterruit ; aufli paroïfloit-il inimitable dans le temps où il étoit original & où il excelloir. Mais parmi les belles vérités que nous enfeigne cet homme illuftre, je trouve principalement trois points à examiner dans le plus grand détail. Le premier concerne la théorie dela chaleur & la formation £ l'air vital ou déphlogiftiqué ; par où il explique la révivification des chaux métalliques ; le fécond , la déphlogiftication du fang par l'air vital ; & le sroifième ; l'air fixe de l'armofphère ou de l'air commun. Il y a plufieurs années que je tra- vaille fur les mêmes matières; mais le temps & mes occupations ne m'ont pas permis jufqu’ici de publier mes expériences, qui font très-nombreufes : je ne fuis pas mème encore en état de les mettre au jour , du moins de quelque temps. - ; Permettez-moi cependant de détacher de mon Ouvrage les obfervations que j'ai faites fur Les trois articles ci-deflus , dans l’efpérance que vous vou- drez bien communiquer franchement mes expériences à l'illuftre Chymifte Suédois , queje juge votre ami, d’après ce qu'il dit dans ce même vo- lume de votre mérite & de votre favoir. Je puis donc vous afflurer que je n'ai autre chofe en vue que d'être éclairé , fi je fuis dans l'erreur, & de voir les nouvelles théories établies fur des raifons folides & inébranlables. J'ai tout lieu de l’efpérer de la franchife & des lumières d’un Philofophe tel que le Chevalier Bergmann. Si mes expériences font capables de faire quel- qe imprefion fur fon efprit, perfonne n’eft aufli en état que lui de nous onner une théorie plus vraie & des principes plus certains pour l'avan- tage deda Chymie & de la Phyfique: ce doit être l'unique objet de qui- conque aime la vérité. s Les nouvelles opinions de l’illuftre Chymifte Suédois font au fond les mêmes que celles du célèbre Scheele , que l’on peut appeller l'inventeur des acides modernes: mais le premier a mieux ordonné le fyftême ; il le le développe davantage, & l’appuie par des raifons nouvelles & des expériences, Ces opinions méritent un examen particulier: il s’agit de l'ufage le plus important du poumon; de l'air, principe fi néceffaire à la vie; enfin, des fonctions les plus effentielles de l'économie animale, g L'autre partie a pour objet les opérations les plus délicates de la Chy- mie moderne, c’eft-à-dire, la nature & la formation des airs qui ne font point abforbés par l'eau, & la revivification des chaux métalliques; ce qui tient à coute la Chymie. Le … “ SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 449 Le nouveau fyftème renverfe coues les idées reçues jufqu'ici; il eft adroi- tement lié avec les faits & avec les expériences les plus féduifantes. Je ne fuis donc point du tout étonné de voir les deux célèbres Chymiftes qui l'ont imaginé, le foutenir dans leurs Ouvrages, ni qu’ils faflent des profélytes , même chez les étrangers. PR EUMILELR EP AVR TRE; M. Bergmann prouve, par différentes expériences & par des raifonne- ments, que la phlogiftication de l'air n’a pas lieu dans le poumon, mais qu'au contraire ce vifcère abforbe le phlogiftique de l'air qui s'y introduit par la refpiration , & qu'après cette fonétion , cet air eft privé de phlo- giflique. Cette opinion eft contraire à celle de tous les Philofophes mo- dernes ; qui penfent que ce principe y eft abondant, Il démontre fa théorie par les raifonnements fuivants, qui méritent un ekamen particulier. IL atrouvé, par des expériences, que l'air refpiré par des animaux en vaifleaux clos, n’étoit point diminué. S'il manque de Pair dans lequel on laifle mourir une fouris, il faut , fuivant lui, l’at- tribuer à la chaleur de l'animal, qui a dû le faire fortir du vafe où il fe trouvoit fur le mercure , lorfque cet animal y a été introduit. On fait que le phlogiftique diminue les airs refpirables; ainfi, dit-il, il n’eft donc pas vrai que le phlogiftique forte du poumon pour s'unirà l'air commun. M. Bergmann, après avoir foutenu qu'il ne fe dégage point de phlooif- tique du poumon par la refpiration, veut prouver que la bonté de l'air dans lequel on laifle éteindre une lumière, n'eft pas fenfiblement altérée , quoiqu'il foic beaucoup diminué par le phlogiftique de la lumière , lequel, en fe mêlant’ avec l'air, & produifant ainfi la chaleur , pafle à travers les pores du verre, en forte que l'air pur fort du vafe ainfi uni au phlogiftique fous la forme & dans l'état de chaleur. C'eft par cette raifon f-ule que l'air du vafe fe trouve diminué : dans cet air, un animal y vit prefque aufli bien qu'auparavant dans l'air commun. Mais il tire encore une preuve plus forte , parce qu'elle eft plus directe, d'une belle expérience qui lui ef particulière , 8: qui mérite toute l’atrention des Philofophes, Cet habile Chymifte a agité du fang dans un vale où il y avoit de l'air commun & piongé dans le mercure, & il a trouvé que l’air n’éroit pas diminué, quoiqu'une chandelle ne pût pas brüler dans cet air. Le phlogiftique, dit il, ne fe dégage donc pas du fang qui l'abforbe plu- tôt, & c'eft pour cela que l'air fe trouve vicié , c’eft-à-dire, privé de phlo- giftique. Enfin , il rapporte une expérience de Scheëèle fur l'air inflammable qu'il a répétée, & fuivant laquelle on peut impunément refpirer vingt fois & plus l'air infammable renfermé dans une veflie; il n’eft plus alors en état de s'enflammer; une lumière n’y brûle pas, ce qui prouve, fuivant ces deux Tome XXII, Part, I, 1783. JUIN. Mmm 4so OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, célèbres Chymiftes, que le poumon l’a dépouillé de fon phlogiftique ne- turel , bien loin de lui en avoir fourni. Au premier argument, je puis oppofer 37 expériences que j'ai faites fur des fouris, 452 fur de petits oifeaux, & 179 fur de petits cochons d'Inde & de très-petits lapins. Le réfulrat des expériences fur Les fouris eft , que toutes ont diminué l'air commun qui étoit dans les vafes fur le mer- cure, & où elles font mortes, & que la diminution a été de - à -— du total. L'air commun dont je me fervois étoit de 12 pouces. Sept oifeaux ont augmenté l'air ; deux ne l'ont ni diminué , ni augmenté; tous les autres x l'ont diminué de + à = environ. Cinq cochons d'Inde, ainfi que trois lapins , ont un peu augmenté l'air ; tous les autres l'ont diminué de > à : environ, J'ai obfervé en général que les airs font d'autant plus diminués , que les animaux les ont refpirés plus long-temps. Dans l'air déphlopiftiqué , la diminution eft bien plus grarde, & peut aller à un quart de l'air pri- mitif & plus loin encore. Je ne parle pas de l'air fixe qui s’eft formé dans ces expériences , & dont la quantité furpafle celle de l'air diminué , fur- tout dans l'air déphlogiftiqué. Il ne doit pas paroître étonnant que. dans quelques cas particuliers, l'air fe trouve plutôt augmenté que diminué , parce que l'animal a de l'air dans le poumon lorfqu’on l’enferme. Il eft pollible qu'on le couvre au moment de l'infpiration, d'où réfulte l'augmentation. Cet air du poumon peut d’ailleurs , en différentes circonftances, fortir plus ou moins de ce vif- cère de l'animal, lorfqu'il eft-mort ; & fe mêlant à l'air du vafe, fuppléer à la‘diminution de l'air occalionnée par le phlogiftique qui provient du poumon , & par-là il peut paroître augmenté. [Il faut encore faire état de l'air qui s'attache aux poils des animaux, aux plumes des oifeaux , & qu'on ne parvient pas toujours à en détacher entièrement , même lorf- qu'on les introduit dans les vafes, en les paflant au travers du mercure, fuivant la méthode que j'obferve. Ce défaut d'attention pourroit bien avoir induit en erreur les Philofophes Suédois qui n’ont pas employé ce procédé, du moins autant qu’on en peut juger par leurs Ouvrages. Mais fi l’on fait les expériences fur l’eau ; au lieu de les faire fur le mercure , la diminu- tion paroît encore bien plus grande, à raifon de ce que l'air fixe eft alors abforbé par l'eau. Ilne paroït donc pas poffible de douter, d’après les nom- breufes expériences que j'ai faites fur les airs refpirables dans lefquels on laife mourir les animaux , qu’il n’y ait une véritable diminution , & que par conféquent le phlogiftique ne fe dégage du poumon. C’eft la réponfe à la première difficulté. / - Je trouve dans mes notes un grand nombre d’expériences relatives à l'air commun dane lequel on laiffe éteindre une lumière; & de routes ces ex- périences, il fufhra d'en rapporter une qui me paroïît décifive , en ufant des précautions que j'emploie. Cette feule expérience offre le réfultat moyen de toutes les autres, qui n'en différent en aucune manière, SUR L'HIST,. NATURELLE ET LES ARTS, 451 Elles ferviront de réponfe à la feconde.difficulté. J'ai fait percer un petit trou à l'extrémité fermée d’un cylindre de cryftal long de 8 pouces fur 2 de largeur; j'ai lié fortement à cette extrémité où étoit le trou , une veflie , de manière qu’en foufflant par le côté oppoté & ouvert du cylindre, il pouvoic entrer dans la véflie de 8 à 10 pouces d'air: une très-perite bougie furnageoit fur une grande cuvette de mercure ; la petite bougie n'éroit compofée que de cinq fils très fins , l’un defquels étoit un peu éloigné des autres, afin que la flamme füc à peine fenfible dès le commencement , & ne fe communiquât point aux autres. J'ai ailumé ce fil avec un autre fi délié , qu'à peine la Aamme étoit-elle fenfible, & je l'ai fait avec promptitude. Au même inftant, j'ai couvert la bougie avec le cylindre , que j'ai enfoncé de quelques pouces dans le mercure : on voyoit alors enfler la veflie, qui d'abord étoit vuide & comprimée fur le trou du cylindre ; la bougié s’allumoit enfuite entièrement, & il n’eft point foiti d'air du cylindre aufli long-temps qu’elle a brülé. Après avoir laiflé refroidir l'appareil , j'ai mefuré l'air du cylindre, & je lai trouvé di- minué d'un peu moins de +. Cet air agité avec l’eau, a diminué encore de + : éprouvé avec l'air nitreux, il donnoit 13$, quand l'air commun donnoit 110. J'ai mis un pinfon dans 8 pouces cubiques de cet air, & il a vécu $ minutes +. J'ai mis un oifeau pareil dans le même volume d’air commun pour comparaifon; il y a vécu 7 minutes. Quand on voÿdroit fuppofer que , par l’action du feu , il doit fe perdre un peu d'air , tandis que l'on couvre la bougie , peut-être faudroit:l (ce que je ne penfe pas ) diminuer un peu Le trentième & le réduire à # ou un peu moins ; mais dans toutes les hypothèfes qu’on pourra imaginer , il fera toujours vrai que la diminution eft très-peu confidérable. Ainf, l'on ne doit pas être étonné que l'air foit fi peu vicié , & qu'en cet état les ani- maux puiflent encote le refpirer. Le peu d'air fixe qui s'eft formé nous fournit une nouvelle preuve qu'il fe dégage un peu de phlogiftique de la bougie, & que par conféquent l'air enfermé doitencore être un peu dé- térioré. Cette expérience me démontre , ainfi que toutes les autres, que l'air eft altéré en proportion de ce qu'ileft diminué. | IL eft vrai qu'une lumière s'y éteint, & qu’un animal continue d'y vivre; mais fi je ne me trompe , cela ne prouve autre chofe, finon qu’une lumière pe peut brüler dans l'air où un animal peut vivre, & qu'un air infecté eft plus nuifible à la flamme qu'à la vie animale. Aiafi , je penfe que tout ce qu'on en peut conclure, e’eft qué La vie animale n'eft pas une famme,, ni une bougie allumée | & que la vie eft plus tenace que la flamme, IL eft très- probable que les Chymiftes Suédois n’ont pas employécomme moi La méthode de la veflie , ni aucun autre procédé analogue, mais qu'ils ont couvert une bougie probablement beaucoup plus grande que la mienne, & déjà très-allumée. Dans ce cas , la diminution eft d'autant plus grande, que l'air eft plus raréfié d'avance par la chaleur; & il en fort d'autant plus Tome X XII, Part. I, 1783. JUIN, Mmm 2 42 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, par les bords, qu'on en emploie de plus petits récipiens; car la diminution peut aller jufqu'à +. Je n'ai pas lieu de craindre aucune erreur dans mon ex- périence, fuivant la manière dont je l'ai faite, & par laquelle j'écarte toutes Les difficultés qui pourroient la rendre équivoque: d'ailleurs elle eft con- forme à beaucoup d’autres que j'ai faites dans les mêmes circonf- tances. k Pour répondre à la troifième difficulté de laquelle il réfulte que le fang ne diminue pas les airs fains, je me contenterai de rapporter ici en quel- ques lignes les réfultats de quatre expériences , qui me paroiflent fans ré- plique. J'ai introduit quatre pouces d'air déphlogiftiqué dans un vafe de vérre rempli de mercure , à travers le mercure même ‘À la cuverte fur la- quelle le vafe étoit renverfé. Le mercure & le vafe avoient d’abord été échauffés au degré de chaleur du fang humain, J'ai rempliun bocal échaufté, dont la capacité étoit d’une livre d’eau ,avec du fang chaud qui forvoit à torrents des carotides d’un mouton. Après l'avoir ainfi rempli & couvert avec le doigt de manière qu'on ne vovoit aucune bulle d'air, ni dans le bocal, ni dans le fang , je l'ai introduit fur-le-champ à travers le mercure dans le vafe où étoit l'air déphlogiftiqué. J'ai agité le vafe fur Le mercure pendant trois minutes, & l’ayanc mis fur l’eau , j'ai fait fortir du vafe tout l'air en très-petites bulles, qui ne fe réunifloient qu'avec peine. Après qu'elles ont difparu, j'ai mefuré l'air , qui étoit exactement diminué de ?, J'ai examiné, fuivant ma méthode, la bonté d: cet air avec mon eudio- mètre (1), & j'ai trouvé qu'il donnoit avec l'air nitreux nouvellement tiré du mercure, 70. 32. 66. 166; & avant de l'agiter avec le fang , il avoit donné 70..33. 23. 123: il étoit donc fenfiblement vicié & en même temps diminué, J'ai répété certe expérience avec les mêmes circonftances; mais au lieu d'agiter le vafe, J'ai misle fang en contact avec l'air pendant trois minutes. Ayant enfuite retiré l'air comme ci-deflus, j'ai trouvé qu'il n'étoit pas fenfiblement diminué : il donnoit avec l'air nitreux 70. 32. 40. 120. Il étoit doncun peu gâté , quoique très-peu diminué; mais il étoit beaucoup meilleur que celui de la. première expérience dans laquelle je l'avois agité avec Le fang. J'ai voulu faire deux autres expériences dans les mêmes cir- conftances , mais avec l’air commun, Dans la première, j'ai agité l'air commun avec Le fang pendant trois minutes; j'ai trouvé que l'air étoit di- minué de +, & qu'avec l'air nitreux il donnoit 126, tandis qu'il ne don- noit que 111 avant d'être agité avec le fang. Cet air étoit donc diminué, & en même temps détérioré, Dans la feconde expérience , j'ai laiflé pendant trois minutes le fang (1) Cetinftrument & la manière de s’en fervir font décrits dans un Ouvrage de mon ami M, Ingenhouze, intitulé: Expériences & Obfervarions fur Les Végéraux E EC Re ue OP SUR L'HIST, NATURELLE ET LES ARTS. 453 en contaét avec l'air , mais fans l’agiter ; je l’ai retiré, & n’ai pas trouvé qu'il fût diminué : au contraire, il étoit un peu auginenté peut-être d’une bulle ou deux. Avec l'air nitreux, il donnoit 111, Cet air n’étoit donc ni diminué , ni dérérioré. Ces quatre expériences démontrent clairement , fi je ne me trompe, que le fang peut diminuer & détériorer les airs refpirables. [1 eft vrai que dans la quatrième expérience , il n'a produit aucun de ces effets: mais il fauc obferver que l'air n’eft refté que trois minutes en conraét avec le fang ; que les deux Auides n’ont pas été agités enfemble, & qu’ainfi ils ne fe touchoient que par deux couches légères. En effec, lorfque dans la troifième expérience ils ont été agités, l'air a été diminué & détérioré, ce qui forme une dé- monftration complete. On ne doit pas trouver fingulier fi, dans la fe- conde expérience , l'air déphlogiftiqué a été gâté, fans être fenfiblemene diminué , parce que l'échelle dont j'ai fait ufage pour mefurer avec mon inftrument la bonté de l'air eft bien plus fenfible qu'aucune méthode que je puille employer pour mefurer la dE de l'air occafionnée par le phlogiftique. Lorfque l'on agite enfemble le fang & l'air déphlogiftiqué, celui-ci Le trouve bien plus diminué & vicié; effet naturel & conféquent de Ja combinaifon parfaite du phlogiftique avec leSairs refpirables & l'air très-pur, Je ne fache pas d'expériences plus analogues que celles-ci à l’état du fang qui pafle par le poumon de l’animal vivant, Le pañlage du fang à travers le mercure s’opéroit en deux fetondes ou un peu plus ; il confer- voit fa chaleur naturelle pendant les trois minutes. Quand on l'agite , fes points de contact avec l'air font plus nombreux, précifément comme il arrive dans le poumon ; & l’on ne peut pas imaginer que, dans le court efpace de trois minutes, il puiffe perdre aucune de fes qualités primitives. L'on objectera peut-être que, dans la refpiration , Fair n’eft en contaŒ avec les véficules pulmonaires que pendant 4 ou $ fecondes , efpace vingt ou trente fois moindre que dans mes expériences ; qu'ainfi on ne doit pas être étonné fi, dans celles que j'ai faites, l'air fe trouve confidérablement diminué & vicié. Mais il faut obferver qu'une portion de l'air qui fort du poumon dans l'expiration provient des infpirations précédentes, En fe- cond lieu , & c’eft je crois la principale raïfon, le fang dans le poumon eft divifé & fubdivifé dans une infinité de vaifleaux plus petits Les uns que les autres; il préfente par conféquent une furface immenfe à l'air APPTÉ : qui fe divife également & fe répand dans un nombre infini de véficules pulmonaires. Ainfi, les points de contact du fang & de l'air dans le pou- mon font infiniment plus nombreux que ceux du fang & de Pair qu’on agite enfemble dans un vafe fur le mercure. Si l'on ajeute à tout cela que le fang pafle dans le poumon avec une grande vélocité, on trouvera en- core par cette raifon que les effets du fang du poumon fur l'air infpiré, doivent être très-confidérables, IL ne doit donc pas paroître étrange que l'air expiré fe trouve fenfiblement diminué & vicié, | \ 454 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, I! refte encore une recherche très-intéreflante à faire , même après les quatre expériences fur Le fang & fur l'air, que nous avons rapportées ; re- cherche qui peut avoir la plus grande influence dans l’économie animale, & qui peut indiquer le véritable ufage du poumon, vifcère fi néceflaire à la vie : elle conblée à favoir s'il y a quelques nouvelles produétions d'air ou accroiflement de fluide élaftique, quand l'air eft en contaë avec le fang. Dans les quatre expériences ci deflus, j'ai mefuré l'air dans l’eau , & je ly ai agité pour en féparer l'air fixe, s'il y en avoit : mais pour procéder avec méthode, j'ai cru devoir commencer par laifler repofer dans les vafes Le fang & l'air, afin d'obferver l'effet du fang fur l'air par le conta@ feul; en même temps, j'ai cherché à mefurer l'air fur le mercure & non fur l'eau, comme j'avois fait d'abord. Je me fuis fervi d'air déphlogiftiqué, pour que les réfultars fuffert plus confidérables & moins équivoques. Ces expériences exigent de l’obfervateur beaucoup d'habitude & de dextérité; le fang fe coagule peu après fon introduction dans le vafe fur le mercure, quoiqu'il foit chaud , en forte qu’il devient difficile d’en retirer l'air, comme il convient pour le mefurer; le fang coagulé fortiroit avec l'air , fi on ne le divifoit pour faire fortir l'air feul. Il fort toujours un peu de fang avec l'air, ou de férofité rougeätre encore liquide. A près les trois minutes que dure l'expérience , j'ai coutume d'adapter une toile de fi d: fer au fond du vafe où eft Le fang, pour empêcher la fortie des parties coagulées, & je reçois l'air dans un vafe rempli de mercure, & plongé dans la cuvette où eft le vafe qui contiencle fang & l'air; enfuite je pafle fousle mercure des papiers minces, & qui puiflent s’imbiber. Je fais en forte d'en dégager le peu d'air qui pourroit adhérer en petites bulles fur la furface , ce qu'o= pèrent aifément le poids du mercure & une légere agitation de ces pa- piers ; je fais pafler alors ces papiers dans le verre ; tout le fang & la fé- vofité rougeatre font abforbés à*l'inftant. Après avoir retiré ces papiers du verre avec la main , l'air refte fec & en état d’être mefuré. J'ai introduit dans un vafe rempli de mercure 6 pouces cubiques d'air déphlogiftiqué , dont la bonté étoit 74. 45. 35. 125. Le mercure & le vafe étoient au degré de chaleur du fang. Après avoir échauffé le bocal ordinaire , je l’ai rempli du fang qui cou- loit de l'animal, & je l'ai fait paffer à l'inftant à travers le mercure dans le vafè où éroit l'air. Je lai tenu dans cet état pendant trois minutes ; je l'ai retiré de la manière que j'ai détaillée, & je l'ai mefuré exactement. L'air étoit augmenté de plus de <. Je l'ai fait pafler fur l’eau avec laquelle je l'ai agité, pour le dépouiller d’air fixe; il a diminué non-feulement du cin- quième dont il étoit augmenté , mais encore de + de fa première quantité; fa qualité éroir de 78. 55. 125. 255, c'eft-à-dire, très-alrérée. Certe ex- érience démontre que non-feulement le fang alrère la bonté de l’air par le Poule contact, & le difpofe à diminuer fur l'eau , comme on l'a déjà vu Satin als D ee nt on 7 | SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 4$5$ par les autres expériences ci-deflus, mais encore qu'il accroît le volume de l'air primitifau moins de © d'air fixe étranger , outre un autre feptième de la quantité primitive qui fe trouve être encore de l'air fixe. Ces réfulrats nouveaux & inattendus ont à la vérité de quoi furprendre le Phyficien ; mais ils font entièrement conformes à beaucoup d’autres que j'ai découverts fur l’air fixe que produifent les animaux enfermés dans des vafes remplis d'air déphlogiftiqué & pofés fur les mercure. J'ai fair ces expériences à Londres en 1775 & 1779. Je les avois faites à Paris, & c'eft d'après cela que j'ai dit à M. Ingenhouze, ce grand Philofophe, qu'il fe dévageoit de l'air fixe du poumon. Mon opinion fur cet objet, ainfi que fur beaucoup d'autres , a été attaquée par de fimples raifonnements , mais non pas, comme il le falloit, avec des expériences directes, Quoique ce ne foit pas ici le lieu d'entrer dans les détails de mes expé- riences fur cette matière, parce que je les réferve pour un Traité particulier Jur la refpiration des animaux , cependant on me permettra d'inférer ici un réfultat général, par lequel on pourra juger fur quel fondement j'ai per- mis à un de mes amis, dans fes Ouvrages, d'avancer ma propoltion, & combien elle eft conforme aux conféquences que l'on doit déduire des expé- riences fur le fang dont je viens de parler. C'eft Le réfultat de plus de cent ex- périences ; & il tend à démontrer'qu'’une partie de l'air fixe qui fe trouve dans les récipients où on laifle mourir les animaux , doit être attribuée au poumon, & non pas au feul phlogiftique pulmonaire , comme on l'avoit cru jufqu'à préfent. Le Chevalier Landriani , célèbre Profeffeur de Phyfique ex- périmentale à Milan , a attaqué mon opinion fur l'air fixe qui fort des pou- mons & s’unit à l'air infpiré par l:s animaux. J’examinerai en paflant, puif- qu'il m'y invite , les raifons particulières dont il s’eft fervi. Mais qu'on me permerte de rapporter fes propres paroles, pour conferver toute leur force aux difficultés qu'il propole à la page 76 de fon Ouvrage intitulé : Opuf- cules Phyfico-Chymiques , Milan, 1781. [1 s'exprime ainf: « Dans mes re- » cherches phÿfques fur la falubrité de l'air, j'ai fair obferver que l'air, » après avoir paflé par les pen , trouble l'eau de chaux, rougit la » teinture de tournefol; enfin , préfente tous le Eiomenes de Pair fixe. » J'en ai conclu que cet air fixe eft engendré dans la refpiration par le » phlogiftique, qui étant expiré des poumons, s'unir à l'air atrmof héri- » que, & le change en air fixe, de la même manière dont fe change l'air » atmofphérique par tous les autres procédés phlogiftiques. Mais M. » L'Abbé Fontana (du moins comme me l'annonce mon ami M. Ingen- » houze ) croit que cet air fixe, dont l'air atmofphérique fe trouve chargé, » après avoir paflé par les poumons , ne provient point du phlogiftique » qui fe dégage des poumons, & qui suniffant à l'air Per IARE fe » change en air fixe. Il incline plutôt à peufer qu'il s’engendre dans nos » corps une grande quantité d’air fixe qui fort par les poumons dans la » refpiration, L'opinion d'un auffi excellent Phyfologifte eft d’une trop " 456 OBSERVATIONS SUR. La PHYSIQUE, » grande autorité pour ne pas m'infpirer des doutes relativement à mon >» fentiment fur cet air fixe provenant du poumon, Mais avant de foufcrire » à fon opinion, il faut faîre réflexion que dans les fluides animaux , & » notamment dans le fang , il n’y a pas une grande quantité de cet acide » méphitique que l’on fuppofe s'exhaler des poumons ; d’ailleurs on ne » comprend pas comment cet air fixe pourroit être dépofé par les pou- > mons dans l'air atmofphérique , puifque, à fuppofer même qu'il exiftat » dans le fang , il paroïîtroit toujours étrange qu'il l'abandonnäât pour s'unir » à l'air atmofphérique avec lequel il a très-peu d’affinité; de plus, dès » qu'il s'engendre toujours beaucoup d'air fixe, lorfque l'air atmofphé- » rique fe phlogiftique , il paroitroit plus naturel d'attribuer cet air fixe » pulmonaire à la phlogiftication occafionnée par larefpiration, qu'à route » autre caufe , d'autant que le volume de l'air refpiré devroit fe trouver » augmenté au lieu d’être diminué comme il l’eft par l'addition de l'air » fixe qu'on fuppofe émaner continuellement des poumons. Mais M. :# l'Abbé Fontana répondra complettement à ces objections, & j'efpère » de lui leséclairciflemients convenables fur cet article important de Phy- =» fiologie ». M. Landriani établit ces difficultés fur ce paflage qu’il tire de l'Ouvrage de M. Ingenhouze. M. l'Abbe Fontana a trouvé qu'un animal qui refpire dans l'air commun ou déphlogifliqué , rend cet air peu propre pour La rejpira- tion, parce qu'il lui communique une portion con/fiderable d'air fixe qui eft en- gendre dans nos corps, © rejetté hors des poumons comrie excrémentitiel. J'étois à Londres en 1779, lorfque je communiquai à mon refpectable ami M. Ingenhouze le réfulrat de mes diverfes expériences fur la refpira- tion des animaux ; réfultat qu'il inféra dans fon bel Ouvrage , intitulé: Expériences & Obfervations fur lès Végétaux. , Le réfultar de mes expériences fe réduifoit à prouver que tout l'air fixe qui fe trouve dans l'air expiré par les animaux , n’eft pas uniquement l'effet du phlogiftique du poumon, mais qu'une partie de cet air fixe provient du vifcère mème, Je nai jamais dit à M. Ingenhouze en aucun temps, en aucun lieu, que dans mes expériences, dont je lui ai fait part, il ne fe formät point d'air fixe par le moyen du‘phlogiftique du poumon; mais j'ai dit quil fort inrmédiatement du poumon même, & en quantité, fans déterminer fi c'eft le quart, le huitième plus ou moins. Le paflage de mon ami, qua cité M. Landriani, ne dit pas autre chofe. Je ne fache pas avoir jamais dit ou écrit que l'air fixe qui fort des poumons , s’engendre dans le corps; H peut très-bien fe trouver dans les aliments & dans le chyle. - Le Profeffeur de Milan m'objecte encore qu'il ne fe trouve pas dans le fang une orande quantité d'air fixe : mais quand des expériences füres dé- montreroient, ce quil me paroit qu'onfh'a pu faire encore, quil ne fe touve que très-peu d'air fixe dans le fang , ou pour mieux dire dans le poumon , » SUR L'HIST. NATURELLE .ET LES ARTS. 457 poumon, le peu qu'on accorde pourroit fuffire dans ce cas-ci , pujfque, dans les expériences que j'ai faites , l'animal ne mouroïit pas d'abord, mais après un temps confidérable ; & l’on fait que Le fang & les autres hu- meurs traverfent le poumon avec une grande vélocité , &, par le moyen du tiflu véliculaire, préfentent à l'air une furface immenfe. L'illuftre Profeffeur m'objecte encore , qu'il paroïîc fingulier que l'air fixe abandonne le fang pour s'unir à l'air de l’atmofphère, avec lequel il n'a que très-peu d’affinité, Cette difficulté fuppole, fi je ne me trompe, que l'air fixe ne peut pas être dégagé des corps en vertu de fes propres qua- lités & par fes propres forces, mais par une force étrangère. C'eft ce que fuppofe notre Proteffeur ; mais il n’en donne aucune preuve. L'air fixe fe dégage des fluides dans mille cas, fans qu'il foit befoin d'au- cune affinité, comme toutes les expériences Le démontrent. Si les aliments, fi le chyle introduifent dans la malle des humeurs une plus #rande quan- tité d'air fixe qu'ils n’en peuvent retenir, l'air fixe fortira fans qu'il foit befoin d’afhnité , lorfque ces fluides auront pailé par le poumon. Une autre objection eft qu'il s'engendre de l'air fixe, lorfque le phlogiftique s’'unit à l'air commun, & de-là l’on veut inférer que c’eft au phlooiftique pul- monaire & non à d’autres qu'il faut attribuer cet air fixe. Cette réflexion , que fait très-à-propossnotre illuftre Auteur , eft très-raifonnable ; mais ce qui paroît Le plus raifonnable n’eft pas toujours le plus vrai. Mes expé- riences renverfent tout-à-fait cette difficulté , qui n’a que de la vraifem- blance ; elle porteroit d’ailleurs à faux , fi l'on m'imputoit d’avoit foutenu que tour l'air fixe dérive du poumon, & qu'il n’y en a point de produit par le phlooiftique. Ce Profeileur m'objeéte que le volume de L'air refpiré par lés animaux devroit être augmenté , au lieu d'étre.diminué, par l'addition de l'air fixe que l'on fuppofe fortir continuellement du poumon ; mais que , fuivant les obfervations, il fe trouve diminué, J'ai toujours cru que quand deux principes tendent, l’un à diminuer une quantité , l’autre à l'augmenter, trois cas différents peuvent avoir lieu , & non pas un feul, comme le fuppofe l'illuftre Profeffeur. Si, par exemple, une fontaine reçoit continuellement de l'eau & en perd auf continuelle- ment, l'eau de la cuvette peut ou augmenter ou diminuer, ou bien n'aug- menter nine diminuer. Je ne vois donc pas qu'il foit contradictoire que l'air fixe émane conti- nuellement du poumon, & cependant que l'air infpiré fe trouve dimi- nué par le phlogiftique du poumon. Ainfi , je ne vois pas pourquoi il fe pourroit émaner continuellement de l'air fixe des poumons, &, malgré cela , l'air in{piré fe trouver diminué par le phlogiftique des poumons. Je finis par remarquer que l’hypothèfe M de par l'illuftre Chevalièr Landriani fur la précipitation de l'air fixe , de l'air commun , n'’eft appuyée Tome XXII, Part. I, 1783. JUIN. Nan 458 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, que d'expériences douteufes, peu concluantes, & que l'autre hypothèfe qu'il a adoptée fur le phlogiftique qui fort du poumon, ne commence à être foutenable que depuis les expériences que j'ai oppofées à la théorie de MM. Scheèle & Bergmann; expériences que M. Landriani ne connoif- foit fürement pas, lorfqu’il a adopté ces deux hypothèfes comme des vérités de fait, & comme fi elles euflent été démontrées, foit par lui, foit par d’autres. IL paroît que , depuis quelque temps, le favant Profeffeur de Milan s’ap- Plique férieufement à l'étude de la Phyfologie, & nous lui en faifons fin- cèrement compliment, La Phyfique doit efpérer beaucoup de fes talents, & de l’efprit de recherche & d’analyfe qu’il porte fur ces objets. Je n’aurois jamais fongé à répondre à fes objections, sil ne my avoit lui-même invité de la manière la plus honnète ; d’ailleurs il fe plaît fouvent, dans les Ouvrages qu'il publie , à honorer de fes objections mes opinions particulières , & je lui en ai de véritables obligations, parce qu'il me donnera lieu, dès que j'aurai quelque loifir , d'entreprendre un nouvel examen de ce que j'ai publié & de ce qu'il a pu combattre , de rejerter ce qui feroit faux, ou de confirmer ce qui eft véritable par de nouveaux ar- guments & des expériences nouvelles. De cette manière , la vérité & la fcienqe en retireront des avantages réels, & le Public nous faura gré de nos recherches communes & de la diverfité de nos opinions, * Maïs revenons à l’aétion du poumon fur l'air, ou, pour parler plus exactement, aux effets du fang fur les airs refpirables. On a vu, ànen pouvoir douter , que le fimple contact du fang avec l'air déphlogiftiqué fufft pour le détériorer, même en quelques minutes, & que le fang fournit une grande quantité d’air fixe à l'air déphlogiftiqué : on fait d’ail- leurs que le phlogiftique en général diminue tous les airs refpirables, & les diminue d’autant plus, qu'ils font meilleurs, c'eft-à-dire qu'il s'y trouve enfuite d’autant plus d’air fixe, qu'ils écoient d'abord meilleurs. Je ne doute donc point , dans le cas dont il eft queftion, que le phlo: giftique du fang n'ait fenfiblement diminué l'air déphlogiftiqué. Mais comme la quantité diminuée par le phlogiftique refte inconnue, il n’eft pas poffible de déterminer avec précifion celle de l'air fixe que fournit le fang, "& qui fe mêle avec l'air de l’atmofphère dans mes expériences. Nous avons trouvé que l'air introduit fur le mercure avoit augmenté de =: ainf , l’on peut dire que l'air fixe forti du fang dans l’efpace de trois minutes, étoit de + au moins. Ces expériences fur le fang, quelque certaines qu’elles me paruffent , ne fufffoient cependant pas pour me tranquillifer: d'un côté, il y en avoit trop peu ; d’un autre , il reftoic encore à favoir fi les autres airs étoient augmentés ou non fur le mercure, non-feulement par le feul contact , mais encore en les agitant avec le fang. Il me paroifloit aufli très-im- SURL'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 49 portant pour la Phyfique, de connoître les altérations que pouvoient fubir avec Le fang l'air phlogiftiqué & l'air inflammable, J'ai donc pris Le parti de faire les expériences fuivantes. : La première a été faire fur l'air déphlogiftiqué; Les dofes d'air & de fang étoient les mêmes que ci-deflus. L'air déphlogiftiqué dont je me fuis fervi, donnoit avec l'air nitreux 75. 4$. 35. L35. J'ai agité pendant trois mi- nutes les deux fluides fur le mercure , & j'ai trouvé que l'air y étoit aug- menté de 14 à 15 parties = : agité avec l'eau , il a diminué de + de fa première quantité , & l'air nitreux a donné 80. 67. 175. Ii eft fingulier que cet air, agité avec le fang , ait moins augmenté que par le fimple contact. Il faut aufli faire attention qu'en l'agitant avec l'eau , il a moins diminué que dans les expériences précédentes, quoi- qu'en même temps il ait été bien plus vicié. Mais ce qu'il y a de certain , c'eft que le fang augmente la mafle de Pair déphlogiftiqué avec lequel il eft en contact, foit qu'on l’agire ou non; que certe augmentation eff de l'air fixe, & qu'il y a une véritable diminu- tion de l'air primitif, comme on l'obferve, après l'avoir dégagé de l'eau qu'on dépouille de l'air fixe, ; L'air commun, par le feul contact avec le fang, augmente toujours er trois minutes fur Le mercure de 14 à 17 parties +. Après l'avoir agité avec l’eau , ce qui reftoir étoit encore de + plus confidérable que la quan- cité primitive, Avec l'air nitreux, il a donné 116, tandis que l'air, pris pour comparaifon , donnoit 111. : . J'ai répété l'expérience en agitant le fang avec l'air commun; mais une circonftance m'a empêché d’obferver s’il étoit augmenté fur le mercure. Je l'ai enfuite agité avec l’eau ; il a diminué d’environ :. Avec l'air nitreux, il donnoit 135 :il étoit donc beaucoup plus altéré que dans l'expérience précédente. Mais dans l’une & l’autre , il y a une production confidérable d'air fixe. J'ai éprouvé l'air inflammable , qui n’étoit point diminué par l'air nitreux, .& je lai laiffé en contatt avectle fang pendant trois minutes. Il a aug- menté fur le mercure d'environ —. Agité avec l’eau , il s’eft réduit à un peu moins d’un vingtième du premier volume : il s’eft allumé avec ex- plofion. Avec l'air nitreux , il a donné 184. J'ai répété l'expérience , en agitant le fang ; l'air a augmenté de 14 à 18 parties +. Agité enfuite avec l’eau, il s’eft réduit à 14; il a fait explofon en l’allumant ; & avec l’air nitreux , il a donné 165. Pour répondre à la quatrième difficulté concernant l'air inflammable que l’on refpire impunément, & qui perd fon inflammabilité par la ref- piration, je puis commencer par ee à l'appui d’un nombre infini d'expériences , que l’air inflammable n’eft point dangereux à si LE non plus que l'air phlogiftiqué , à la différence de l'air fixe, qu’on doit regar- der comme un poifon, comme un fluide mal-faifant, capable d’altérez Tome XXII, Part. 1, 1783. JUIN, Nnn 2 460 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Péconomie animale , quoiqu'il foit uni à beaucoup d’air commun, même à une grande quantité de l'air déphlogiftiqué le plus pur, quoique le poumon puifle librement fe dégager de tout fon phlogiftique. Toutes ces vérités nouvelles & beaucoup d’autres analogues font étayées d’une quantité infinie d'expériences que J'ai faites à Paris fur la refpiration des animaux , & que j'y ai communiquées à mes amis, ainfi qu'à Londres, ñotamment à MM. Cavallo, Ingerhouze & Kirwan, fans parler de M. Fabroni , qui a voulu y aflifter , & les a vues de fes propres yeux. L'air inflammable doit donc être confidéré comme n’étant pas de l’air , relative- ment aux ufages ordinaires du poumon; en forte que ch après l'expiration, il ne reftoit dans le poumon que 100 pouces cubiques d'air commun, on pourroit le refpirer enfermé dans une veflie, & il ferviroit pendant quel- que temps aux fonétions ordinaires, quoiqu’un peu dérérioré, L'air inflam- “mable, qui de fa nature n’eft point nuilible , ne peut nuire à l’air animal , ne peut empècher le poumon d’exercer fes fonétions ordinaires , quelles qu’elles foient ; il peut même en quelque manière être utile à l’animal, puifqu’en diftribuant dans toutes les bronches & dans toutes les véficules pulmonaires l'air commun, dont, fuivant notre hypothèle, il y avoit ‘100 pouces cubiques, & duquel le poumon ne fe vuide jamais rout-à- fait, il peut fervir à dilater & étendre les véficules comme auparavant, ce que l'air commun feul auroit fait moins bien au détriment de l'écono- mie animale; car on fait que lorfque les véficules pulmonaires font flafques & affaiflées, le fang eft au moins en partie arrêté , & la circulation dans. le plus grand rare! D'ailleurs , il eft certain qu'après une expiration très-forte, on ne refpire l'air inammable que pendant peu de temps, comme je l'ai fait voir dans un Mémoire que j'ai publié dans les Tranfaétions philofophiques , auquel on peut avoir recours, Je dois cependant avertir que quand je fis à Lon- dres cette expérience, dans laquelle je ne pus infpirer que trois fois feule_ ment l'air inflammable, je dus probablement mettre beaucoup de temps à faire cette violente expiration; & peut-être encore ne fis-je les trois infe pirations qu'avec lenteur, puifqu'en répétant expérience, j'ai trouvé des différences fenfbles , & que j'ai pu refpirer l’air inflammable jufqu'à fix ou fept fois. Mais tout cela me perfuade toujours davantage que l'air inflammable n’eft pas nuifible de fa nature , & qu'on peut ne pas le confi- dérer comme air. J'ai fait les mêmes expériences en refpirant l'air phlo- giftiqué, & les réfulrats ont été à-peu-près les mêmes, Ces réfulrats & beaucoup d’autres faits fur les animaux qu'on enferme fous des vafes dans l'air refpirable pur, où mêlé en différentes proportions avec l'air inflammable , phlogiftiqué & fixe , démontrent l’abfurdité de beaucoup d’hypothèfes imaginées par des Phyficiens de nos jours , fur la mort des animaux dans les airs refpirable ou non refpirable. Il faut encore faire réflexion que vingt refpirations fe font en moins cata; —_— SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 461 de deux minutes: ainfi je ne trouve point extraordinaire que l'air inAam- mable puifle fe refpirer vingt fois impunément, puifqu'on peut à toute force retenir {a refpiration pendant environ deux minutes, même après l'expiration naturelle, J’ai fait différentes expériences fur ma propre refpi- ration dans les différents états du poumon , & je fuis parvenu à détermi- ner les réfultats fuivans , qui font beaucoup pour le fujet que nous traitons. I. Je puis fufpendre ma refpiration pendant foixante fecondes & plus , après que le poumon a fait fon infpiration naturelle, IL. Je puis la retenir pendant 48 fecondes & plus, après quele poumon a fait fon expiration naturelle. IT. Je puis La retenir pendant ‘37 fecondes & plus , aprèsune expira- tion violentes . IV. Je puis la retenir pendant 6$ fecondes & plus, file poumon a fait une violente infpiration, On doit favoir qu’en une minute on refpire 16 ou 18 fois ; que la plus légère inquiétude, peut accélérer la refpiration jufqu’à 2$ ou 30 fois par minute, & d’autres fois au contraire la retarder ; que les temps ci- deffus indiqués varient fuivant les différens états de notre machine, & que les refpirations fe font plus lentement vers la fin. Si dans les quatre expériences rapportées ci-deflus, on fait pafler dans une veflie l'air qu’on expire, & que l’on continue à le refpirer ainfi, les temps que j'ai fixés changent fenfiblement , & l’on refpire pendant plus de temps. CA Dans la première expérience on peut refpirer l'air 60 fecondes & plus; dans les feconde & troifième expériences, on refpire aulli plus long- temps, Dans la quatrième on peut Le refpirer Mare 120 fecondes & plus. Cette diférence de temps paroît provenir du renouvellement de l'air qui fe fait dans le poumon à chaque refpiration. A chaque Li passe l'air moins infecté de la trachée & des bronches fe porte encore dans les véfi- cules pulmonaires, em forte que fans veflie, & le poumon étant tran- ne , le même air plus infecté qu’il n’étoit dans la véficule, fe détériore e plus en plus, parce qu’il n’eft pas renouvellé. Joignez à cela que la chaleur de l'air, qui eft plus grande dans le premier cas que dans le fecond , fatigue le poumon comme nous le verrons par la fuite, Si dans la quatrième expérience on peut refpirer l'air un peu au-delà de 65 fecondes , c’eft à raifon de l’état de violence & de la diftenfion occafñonnée dans toùt le poumon par une trop grande maffe d'air ; mais il eft évident qu’en cet état on refpirera plus long-temps fi l'on fait ufage d'une veflie, parçe que la quantité d’air eft beaucoup ‘plus confidérable que dans les autres expériences, & qu'il ne s’en porte aux poumons que Ja quantité ordinaire, mais toujours renouvellée, 462 OBSERVATIONS SUR'LA PHYSIQUE, Je fais encore réflexion que la tranfpiration infenfible ne phlogiftique pas fenfiblement l'air commun fuivant toutes mes expériences , quoiqu'on ait écrit le contraire, peut-être pour avoir fait ufage 4 mauvais eudiomè- tres ,ou pour avoir ignoré la méthode que je fuis. IL eft vrai que dans les autres fecrérions plus groflières , ily a du phlo- giftique, mais elles n'ont lieu qu'à de grands intervalles ; dans quelques cas, dans quelques animaux , elles peuvent être fufpendues des jours entiers fans qu'ils en foient du tout incommodés. Il paroit donc que le poumon eft la feule voie par où puifle fe dégager l'excédant de phlogifti- que , qui provient de la nourriture & s’'unit à la mafle des humeurs circu- Jantes; & l’on fait que la partie rouge du fang eft très-abondante en phlo- giftique. ” Quant à cette autre partie de la difficulté, favoir que l'air inflammable cefle de s'enflammer après la refpiration, je ne fais fil’on ne pourroit pas oppofer expérience à expérience : je n’ai pas encore réufli à le dépouiller tout-à-fait de fon inammabilité, lorfque je le refpirois dans des veflies à la manière des Philofophes Suédois ; moins encore quand je l'ai refpiré fur l'eau dont j'ai cru devoir faire ufage pour cette expérience , les vellies me paroifflanc fufpeétes par bien des raifons dont je ne parlerai pas en ce moment, Mais il n'ya pas d'expérience plus décifive, que de faire refpirer aux animaux fur le mercure l'air inflammable mêlé avec une égale quan- cité d'air commun, J'ai pris pour cela de petits cochons d'Inde, qui ont vécu dans cet air fept, huit ou neuf minutes. La quantité d'air que j'em- ployois étoit de 12 pouces cubiques, Dans toutes les expériences que j'ai faites , j'ai trouvé que l'air s’enflammoït après avoir été refpiré par ces animaux pendant autant de temps & même, jufqu'à les y laifler mourir. Je n'en vois pas de plus fimple & de moins équivoque, Je fais encore réflexion qu'il pourroit arriver qu’une lumière s'éteignit lorfqu'on l'introduit dans un tube d'air commun & d'air inflammable, qui auroit été long-temps refpiré. Si dans le poumon l'air commun eft devenu air fixe ou phlogiftiqué en certaine Fo une lumière n'y brülera pas, quoiqu'il y ait de l'air inflammable dans le tube, fur-tout s'il eft long & étroit. On fait que l'air inflammable ne brüle pas fans air commun, & que l'air fixe & l'air phlogiftiqué éteignent les lumières, Mais accordons cependant aux deux célèbres Philofophes Suédois , que l'air inflammable ceffe de l'être, après avoir été refpiré, qu'il perd fon phlogiftique & le communique aux poumons ; il ne s’enfuivra pas néceflairement que le pou- mon abforbe le phlogiftique de l'air commun , de l'air déphlosiftiqué. L'air inflammable, qui abonde certainement en phlogiitique , fe trouve obligé pendant long-temps de gliffer fur un nombre infini des plus petits vaifleaux fanguins du poumon, Mais je ne crois pas impoflible que , fi l'ai commun reçoit du phlogiftique d’une fubftance. qui en a davantage, comme eft le fang par rapport à l'air commun, l'air inflammable neu *UR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 463 puiffe donner au contraire au fang , qui peut en avoir moins. L'air com- mun peut donc fe charger du phlogiftique du poumon , & l'air inflamma- ble y en perdre , fans qu'on doive croire que le poumon abforbe le phlo- giftique de l’air atmofphérique, quand bien même il abforberoit celui de l'air inflammable. Telles font les remarques que j'ai eru pouvoir faire, re- lativement aux belles expériences des deux fameux Chymiftes Suédois fur la déphlogiftication de Pair dans le poumon. On pourroit ici m'oppofer une expérience de lilluftre Chevalier Lan- driani , fuivant laquelle il a trouvé que l'air phlogiftiqué tue Les animaux par le feul contaét extérieur, même fans qu'ils le refpirent. Il affure avoir éprouvé qu’en enfermant dans une veflie pleine d'air déphlogiftiqué une poule, dont la tête étoit hors du col.de la veflie , elle mourut aflez promp- tement. J’avois mis divers animaux fous des récipiens, de manière que leurs tères fe trouvdient dans des airs encore plus nuilibles que l’air phlo- giftiqué, par exemple dans l'air fixe, &c.; mais ils ne m'avoient point paru y fouffrir , & je l’äi obfervé plufieurs fois de même dans Pair in- fammable. [1 pourroit d’ailleurs paroître fingulier qu'il y eût un Auide aëriforme permanent fur l'eau , capable de tuer aufh promptement les ani- maux par le feul conta@ de la peau. Mais toutes ces difcultés n’ont au- cune force contre une expérience directe. J'érois donc curieux de voir par Mmes yeux une expérience aufli furprenante & aufli nouvelle. Je réfolus de la faire , & je l'ai faite bien des fois , en obfervant rigoureufe- ment le procédé de M. Landriani , avec toutes les précautions qu'il pref- crit; mais aucune poule n'eft morte : aucune même n'a paru fouffrir danstoutes mes expériences , que J'ai cependant répétées très fouvent, Je les ai faites encore fur des lapins , des cochons d'Inde, des pigeons; au- cun n'eft mort, aucun n’a paru fouffrir dans cet air. La vefle reftoit plus ou moins gonflée pendant tout le temps de l'expérience, quoiqu'elle di- minuât continuellement , mais peu-à-peu, & d’une manière infenfible. J'ai voulu répéter les mêmes expériences d’une façon encore plus déci- five. Je defirois que la veflie fût également pleine d'air phlogiftiqué pen- dant tout le temps de l'expérience. Pour cela, je me fuis fervi d'un réci- ient de cryftal , qui contenoit 1000 pouces cubiques d'air, & qui avoit à l'extrémité fupérieure une ouverture d'environ 1 pouce, & une autre à fa bafe de 6 pouces & au-delà. y J'ai attaché une grande veflie à l'ouverture fubérieure, & après avoir fait une incifion dans la partie oppofée de la veflie , j’y ai introduit l’a- nimal, de manière que fa têce für tout-à-fair dehors, J'ai fait fortir enfuite Pair commun de la veflie , en tenant le récipient plongé dans l’eau. Lorf. que l’eau étoit fur le point d’entrer dans la veflie, j'introduifois fucceffi- vement dans le récipient plus de 1000 pouces d'air phlogiftiqué, & je laiflois fortir l'air par degrés , en élargiffant un peu la vellie autour du col de l'animal, à mefure que l'air entroit. Lorfque l'air du récipient devoit 464 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, être uniquement réduit à de l'air phlogiftiqué, je fermois la’ veñie par une prellion douce & égale, de manière que l'air n'en fortit plus, du -moins fenfiblement ; & je plongeois Le récipient dans l’eau de quelques pouces de plus, pour quela vefhe füt toujours remplie d’air phlogiftiqué. J'ai fait mes expériences fur des poules, des pigeons, des lapins, des cochons d'Inde; & aucun n’eft mort , aucun n’a paru fouffrir. Le procédé que j'ai employé eft fimple, mes expériences font nombreufes ; je ne puis donc pas craindre de nvêtre trompé. Je laiflois les animaux dans l'air phlogittiqué pendant deux à trois heures. Le Profeffeur de Milan penfe que l'air phlogiftiqué tue les animaux par le feul contact extérieur , parce que, dit-il, cet air empêche la tranfpi- ration du phlogiftique à travers La peau. Mais avant tout , il faudroit prouver , 1°. que cette tranfpiration cutanée du phlogiftique dans les ani- maux a véritablement lieu; 2°, que l’obltacle qu’elle éprouveroit dans les poules eft capable de les tuer en peu de temps. De ces deux articles, le premier nous paroît mal fondé, du moins dans l'application qu'en veut faire ici notre Auteur , autant que l’indiquent nos expériences , dont nous parlerons dans un autre temps. Le fecond article eft rout-à-fait fans vrai- femblance , n’eft étayé d’aucun fait, fe trouve contredit par les expériences que j'ai faites fur la refpiration des animaux, & que je publierai dans peu, Je ne puis donc pas être d’accord avec l'illuftre Profeffeur de Milan , ni fur Les faits dont il rend compte , ni fur les effets qu'il attribue à l'air phlo- giftiqué, ni fur les expériences qu'il a faices. Je le prierai donc de les ré- Es une feconde fois, parce qu'elles méritent la plus grande attention. ous ceux qui aiment les vérités phyfiques & l'exactitude dans les faits, Jui fauront gré de la peine qu'il voudra bien prendre. Nous ferons les premiers à convenir que nous nous fommes trompés, & nous n'aurons pas honte de l'avouer , quand il nous aura donné les détails néceflaires pour que ces expériences réufliflent en d’autres mains que les fiennes. Tous ceux di font des expériences peuvent fe tromper ; mais on doit tout ef- pérer de la franchife bien connue & de l'amour de la vérité de ce digne Profeffeur, La fin au Cahier prochain. EXTRAIT s sh SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 465 4 RENE RATE D'une Lettre de M MAGELLAN à M. le Chevalier DE Bory, de l'Académie des Sciences, 6 Mai 1783; Sur la converfion de l'Eau en Air par Prieflley , fur l'étoile Algol, & fur ‘un nouvel Echappement libre. Mo CHER CHEVALIER ET TRÉS-CHER AMI; “''I. Je vais vous communiquer une découverte fingulière du célèbre Docteur Prieftley, qui vient de prendre pour ainfi dire la Nature fur le fait. Ce font des expériences qui prouvent que l’eau peut fe convertir en air élaf- tique & permanent. Les plus incrédules s’y font rendus en les voyant ; & pour que vous puifliez en juger par vous-même, voici deux de ces expé- riences. AB, fig. 1 , Planc. IT, eft une cornue où l’on met de l’eau ou de l'argile avec de l'eau. CD eft un tuyau de pipe bien cimenté ou luté au bec dela cornue, &en D, avec un tube recourbé DE. Ce tube entre dans la bouteille N remplie d'eau, & renverfée fur la planche de la machine pneumato-chymique. Chauffez la cornue A, & pofez un fourneau F Arte du tuyau de pipe, de façon qu'il foit placé au milieu de charbons très-ardents. L'eau, en s’élevant de la cornue , fe convertira en air dans fon paflage par le tuyau de pipe, & on ramafñlera une très- grande quantité d’air dans la bouteille N. Mon ami M. Kirwan, qui a ré- pété cette expérience pendant douze heures continuelles, c’eft-à-dire , de- puis deux heures après-midi jufqu'à deux heures du matin , a trouvé que trois onces d’eau avoient produit au-delà de 1900 mefures d’onces d'air; ce qui eft à-peu-près la proportion du poids fpécifique entre l’eau & l'air. Si, au lieu d’eau , on met de l'efprit-de-vin en A, l'air fera inflammable ; fi l'on y met de l'efprit ou de l'acide nitreux, cet air fera déphlosiftiqué. Jugez à préfent fi l’on peut fe refufer à l'évidence, Voici la feconde expérience. Qu'une retorte de grès À M, fig. 2, foit renfermée dams un tuyau de métal ZSB, aflez long pour que la vapeur puifle être condenfée en de- dans. À l'extrémité M dé la retorte, ajuftez & cimentez le tube de com- munication BCE, qui entre dans la bouteille N : au-deflous du bord F du tuyau de métal, placez un vafe D'avec un entonnoir P.Sil'on fait du Tome XXII , Part, 1, 1783. JUIN. Ooo 466 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, feu en Z, il tranffudera de la vapeur À travers [a retorteide grès, qui, con- denfée dans le tuyau de métal, retombera par F dans l’enronnoir & dans le vafe D, & dans le même temps il y aura une grande quantité d’air élaf- tique ramaflé dans le flacon N. Le poids de cet air & celui de leau trouvés en D , feront égaux avec l’eau qui avoit été mife en A. D'après ces expériences , tous ceux qui en avoient été témoins étoient perfuadés de la converfion de l'eau en air élaftique ; mais M. Prieftley ayant encore quelques doutes là-deffus , vint de Burmingham, fa demeure or- dinaire ,à Londres, & fe {ervit du verre ardent fait par M. Parker, qui, fans avoir un diamètre au-delà de 3 pieds Anglois, eft d’une matière fi pure & d’une forme fi avantageufe , qu'il produit des effets bien fupé- xieurs à ceux des autres verres ardents qu’on connoît en Europe, comme on en pourra juger par les expériences qui ont été communiquées en abrégé à la Sociéré Royale de Londres, & qui feront publiées dans les Tranfations Philofophiques. M. Prieftley plaça une retorte de grès A, fig. 3, ou plutôt de porcelaine de la Fabrique de M. Wedgewood, au- dedans de la cloche de verre FG M, qui plongeoit elle-même dans du mercure tenfermé dans la foucoupe HL. Après avoir bien luté l'orifice de la cloche N à la retorte , il adapta à fon orifice B le tube de communi- cation CE, & le facon D; il fit approcher enfuite cet appareil à peu de diftance du foyer de la lentille de M. Parker. Aufitôt que la chaleur a. agien À, une grande quantité d’air pafle en D; mais à mefure que cet air s'y portoit, l'air au-dedans de M diminuoit de plus en plus, & le mer- cure montoit fous la cloche jufqu’à coucher le fond de la retorte. Voilà donc un fait nouveau, qu'on ne pouvoit deviner auparavant (1); car qui auroit pu croire que l'air monteroit du vaiffeau M , pour pénétrer par la rerorte jufqu’en D , & que la prefion de l’atmofphère fur le mer- cure en H, ne feroit pas égaleà celle dans le vaiffleau E, &c. ? Ce phénomène m'en rappelle un que j'ai vu dans mon enfance, & qui a un grand rapport avec ces expériences. Voyant travailler un de ces Ita- liens qui font des th:rmomètres & des baromètres , il me fit des éolipyles minces de verre. Leur effet de fouffler avec le feu, m’amufoit beaucoup. Je voulus découvrir quelle en pouvoit être la caufe ; je râchai de voir com- ment fe produifoit cette vapeur que je confondois avec l'air , & quien effet en contient beaucoup. Pour cela, je plaçai léolipyle fur la Aamme, & je vis avec étonnement que les bulles d’air ou vapeurs fe formoient & for- toient toujours du même point. Il eft donc certain, d’après cette obferva- tion , que l'on peut vérifier, 1°. que le feu s'ouvre un paflage dans les pores des corpsür lefquels il agit pour y pañler ; 2°. que le feu eft une (1) Ce fait n’eft pas nouveau, & les expériences de M. Ducoudray & du Duc de Ja Rochefoucauld avoient appris que les cornues de grès font très-perméables à l'air, lorf- qu'elles font échauffées dau rouge blanc. Voyez Journal de Phyfique, 1775, Tome V, p: 277 ; Tome VI, p. 327; & 1776, Tome VII, p. 154. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 467 fubftance ou un corps matériel, & non pasfune qualité accidentelle des corps, comme Defcartes & même M, Macquer le fuppolent ; 3°. qu'il fe combine avec l'air, lorfqu'il agit avec une certaine force, ou dans une quantité affez condenfée , puifqu’il fait paffer l’air du vaifleau M à travers les pores de la retorte À ; 4°. que ces pores font capables de laiffer échap- per de l’eau. En effet, dans la troifième expérience , on a trouvé de l'eau au-dedans du vaiflzau M fur la furface intérieure du mercure, &c. J'ai rencontré Le Docteur Crawford, auquel j'ai communiqué ce que je viens d'annoncer. Ces expériences ont beaucoup de rapport avec fon fyftème du Feu Elémentaire , dont il prépare la feconde édition, qui fera enrichie d’un grand nombre d'expériences recherchées & curieufes. J'en ai vu plufieurs avec la plus grande fatisfaction. IT. J'ai appris avec plus d’exactitude les particularités fuivantes fur l'é- toile Æ/go/ qui change périodiquement de magnitude. 1°. C'elt l'étoile Algol, marquée B par Bayer, felon M. de Lalande , au n°. 809 de fon Aftronomie, & qui eft dans la tête de Médufe. M. Montanari avoit ob- fervé fa variation , mais fans reconnoître fa vraie période. 2°. C'eft M. Goodvick, Gentilhomme Anglois, d’une naïflance diftinguée & d'une rande fortune , qui a découvert fa période: il demeure à Yorck. Ayant eu le malheur de naître muet & fourd, on eft parvenu , à Edimbourg , à lui apprendre à articuler & à prononcer des mots; en un mot, à parler; mais {a furdité eft fans remède. Il a pris du soût pour l’Aftronomie, qui lui a été enfeignée par M. Pigott le jeune fon ami, & il fe livre à cette Science avec paflion, 3°. M. Goodvick a trouvé que cette période étoit de deux jours & vingt-une heures , ou foixante-neuf heures, & cela avec une régularité conftante, M. Herfchel l'ayant obfervée le 3 de ce mois de Mai, à neuf heures du foir, il eft aifé de contater ce calcul. 4°. Le temps de la variation en grandeur de cette étoile eft d'environ fept heures , de façon qu’elle commence à diminuer de fa grandeur de fecond ordre , jufqu'a ce do ne paroifle que comme une étoile de la quatrième grandeur , pen- ant trois heures 30/; enfuite elle commence à augmenter, jufquà re- prendre fa première grandeur pendant autant de temps. $°. Si ce phéno- mène vient d’une planète qui tourne autour du foleil Ago!, il faur qu'il en foit beaucoup plus près que Mercure ne l’eft de notre fuleil, & qu'elle foit beaucoup plus grande, car fon mouvement eft prefque trente fois plus rapide que celui de Mercure; & qu'elle nous éclipfe une û grande quantité de fa lumière, à moias que nous ne voulions fuppofer qu 4/0 n'ait une tache femblable à celles de notre foleil, mais d’une grandeur énorme à proportion de fon dique , *& que la vélocité de la rotation de cet aftre foit infiniment plus grande que celle de notre foleil , qui fait fon tour en vingt-fept jours & demi fur fon axe, TI. Je vais vous parler d’un nouvel échappement libre ou détaché que je viens d'inventer pour les pendules aftronomiques, & que M. Vulliami , Horloger Tome XXII, Pare, I, 1783. JUIN. O002 468 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, du Roi ici, m’exécute actuellement. Cet échappement eft tel, que le touage n’a pas de connexion avec le mouvement du pendule ; car celui-ci reçoit la force reftaurante à chaque vibration , par la chüûte d’un petit poids , qui eft remonté par le rouage , tandis que le pendule en eft parfai- tement libre. Ain, c’eft par une force conftante & inaltérable que la force maintenante eft appliquée à la confervation des vibrations : mais ce qu'il y a de particulier & de plus avantageux , c’eft que cette force ad- ditionnelle pour chaque vibration eft appliquée dans le moment du plus grand momentum de la vibration ; en forte que le dégagement de la dé- tente qui laifle tomber les petits poids en queftion fe fait lorfque la vibra- tion eft fort près du point de fa plus grande vélocité. Ainfi, chaque vi- bration n'a rien À perdre, ni dans le commencement , ni dans la fz de fon action; dans d’autres mots, l’aéion conflante de la pefanteur qui anime uni- formément le mouvement du pendule , m’eft point interrompue , & ne re- çoit pas le moindre déchet ou interruption pour ouvrir la détente , avant que ‘le momentum de fa force foit prefque le plus grand, & c'eft par-là que mon échappemerit nouveau furpafle tous les autres: car, par exemple , celui de M. Cummings, qui le premier montra au Public un échappement détaché , où la force maintenante étoit conftante; cet échappement, dis-je, a le défavantage d'ouvrir les dérentes à la fin de chaque vibration. Or, il eft évident que fi, par exemple , nous divifons chaque vibration en huit parties, elles feront en vélocité (qui eft comme les efpaces ) comme les nombres impairs; favoir 1,3,5,7,7,5»3;,1. Aiofi, le mème obftacle ou dérangement qui rroublera les deux premières & les deux dernières’ parties (égales à8, favoir 1434341), doit être trois fois plus grand (= 24= $ + 74 7 + 5), pour caufer le même dérangement , lorfqu’il agita dans les quatre temps intermédiaires. Ajou- tez à cela que le mécanifme de mon nouvel échappement eft fort fimple & très-aifé dans la conftruttion, Ileft bon d’avertir que l'échappement libre que j'ai communiqué à l’Académie il y a deux ans , & qui fe trouve inféré , quoiqu'avec quelques errata , dans le Journal de Phyfique, peut être dif- pofé de manière à avoir la même qualité (en frappant des demi-fecon- des ) dont je viens de parler, & de même l’échappement libre que M, le Roy employa dans fa montre marine : mais ni l'un, ni l’autre n’ont point le grand avantage de n'avoir pas la moindre dépendance du rouage, & ne pofsèdent pas comme le mien une force conftante, qui maintient les vibrations, & qui leur rend ce qu'on a perdu à chacune, sk 0 SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 4°9 DCE EU Æ DES EXTRAITS DU PORTE-FEUILLE DE M, LABBÉ DICQUEMARE. Sur l'Enfant de 21 ans (1). UOIQUE Richard-Martin Poupel, enfant de 21 ans, dont j'ai fait la defcription & donné la figure le 6 Mars 1783 , ne jouit pas alors d'une fanté parfaire ; que fa refpiration fût gênée , fon pouls très-foible , &c. , je vrévoyois fi peu qu'il dût terminer fa carrière le 31 du même mois, que Je promis de communiquer les développements qui pourroient s’opérer dans cet individu extraordinaire. Sa longueur égaloit 2 pieds ç pouces $ lignes, c'eft-à-dire, 1 pouce 2 lignes plus que je ne lui avois trouvé vivant & debout vingt-cinq jours auparavant. Les os du crâne étoient très-durs, & il paroîr que dans rouit le fquelerte l'oflification étoit parfaite, excepté la fontanelle, qui n’étoic pas offifiée; & peu de temps avant ma première obfervation , elle étoit très rendre , comme il arrive affez fouvent aux rachitiques. Cependant notre fujet, fi on en excepte la colonne vertébrale , n'avoit aucun os courbé; les vifcères éroient en général, & à quelques exceptions près, proportionnés aux parties extérieures. Le cerveau m’a paru un peu féreux & mollaffe ; par-tout où elle fe trouve ordinairement, la matière gélatineufe éroit très-abondante, J'ai dir, dans la defcription, qu’à l’âge de dix ans, la fanté de cet enfant s'étoit affermie ; qu'à plus de 21 ans, lors de mon @bfervation , fa voix étoit plus mâle que celle d’un petit enfant ; que la barbe lui pouffoit (c'en étoit vraiment) : l'examen que j'ai fait des didymes , qui vraifem- blablement étoient deicendues depuis long-remps, &c. , toutes ces chofes combinées me portent à croire que le commencement de la révolution qui s'opère dans les autres à 14ans ,a pu être dans celui-ci, à plus de 20, la caufe de l’alrération de fa fanté. Il avoit, avant de mourir , une petite diarrhée, & on a trouvé une très léuère inflammation aux inteftins, Je n'arrête parce qu'infenfiblement j'entrerois dans lechamp des Miniftres de la fanté, & j'ai roujours cru devoir m'en abftenir. (x) Voyez Journ. de Phyf. 1780. 470 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, E NXLPIÉ\R ILEUN:G ES Faites pour trouver des Compofirions qui imirent les Pierres fines ; 2 Par M. MARGGRAF. = LR PQ em mme Do Lues , le 20 Mars 1780 , à l’Acadèmie Royale des Sciences & Belles-Ecttres de Pruffe. LD AN S les premiers effais que je fs pour trouver des compoftions qui imitaffent les pierres fines , je me fervis du caillou; & comme le caillou feul ne peut être réduit, par quelque feu que ce foit , en un corps tranfpa- tent & vitreux, à moins qu'on n’y ajoute, dans-une proportion convena- ble, de la chaux de plomb ou quelque fel alkali , mêlange que j'avois des raifons de ne pas employer, j’eus recours au borax, qui comme le fel de tartre & la chaux de plomb fait fondre le caillou & le transforme en une mafle femblable à celle des pierres fines, fur-tout quand on y ajoute quel- ques efpèces de terres. IL. Je mélai deux drachmes de caillou pulvérifé , une drachme de borax calciné , une demi-drachme d’albâtre , & deux grains de précipité de cui- vre , que j'avois eu foin de bien édulcorer: j'expofai le tout àun feu vio- lent, & retirai une mafle aflez femblable à la turquoife. III. La même quantité de caillou & de borax, mêlée avec une demi- drachme de cräie & deux grains de chaux de cuivre , produifirent une mafle bleue marbrée de différentes couleurs. IV. Deux drachmes de caillou , une drachme de borax calciné, ure demi-drachme d’albâtre , douze grains d’os bien calcinés, & deux grains de précipité de cuivre, donnèrent une mafle femblable à la précédente , mais plus belle. Je teignis enfuite cette mafle, & lui donnai la couleur du Japis lazuli au moyen de la mine calcinée du bifmuth, V. Après avoir fait d'autres effais femblables, je fs un mélange com- pofé de huit onces de caillou, de deux onces d’albâtre , le tout bien pulvé- rifé, de trois drachmes & douze grains d’une craie bien pure, & de quatre onces de borax calciné: à ce mélange, qui pefoit quinze onzes trois AUS tan à SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 471 drachmes & douze grains, j’ajoutaiune drachme & huit grains de chaux de cuivre, Le tout ayant été bien mélé , futsexpofé à un des feux Les plus ardents des fourneaux de porcelaine. J'en retirai une mafle bleue tirant fur le verd : c'eft le n°. 1 de la grande boîte (1). VI. Douze onces de caillou , trois d’albâtre , cinq drachmes de craie bien lavée , vingt-quatre à vingt-cinq grairf du bleu de cobalt, & fix onces de borax calciné, donnèrent une male très-femblable au lapis lazuli: n°. 2. Cette compofition, ainfi que la précédente , put être taillée & prit un fort beau poli. VIT, Trente-deux onces , trois .drachmes & demie de çe même mê- lange , auquel j’ajoutai encore deux fcrupules & cinq grains de bleu de cobalt , donnèrent , après la fufion au feu de porcelaine , une mafle d'un beau bleu, à moitié tranfparente , qui fe laïffa tailler & prit un beau poli: NEO VIIT. Huit onces de caillou , deux de glacies Mariæ , ou fi l’on veut d'albâtre, ce qui gft la même chofe (2), trois drachmes & douze grains de craie, foixante & dix grains de cuivre précipité d’une folution dans l’eau forte au moyen d’un alkali précipité que j'eus foin de bien édulcorer, une demi-once & une drachme & demie de craie d'Efpagne bien lavée, enfin quatre onces de borax calciné, me donnèrent un mélange que je défi- gnerai par À, & que j'employai à différents effais, comme on va le voir. Je fisun femblable mêlange , qui ne différa du premier qu’en ce que je n'y mis point de cuivre précipité ; je défigne ce mélange par B: enfin jen fis un troifième défigné par €, & qui diffère des deux précédents, en ce qu'il n'a ni cuivre précipité ni craie d'Efpagne. IX. Je pris du mélange 4 & du mélange B, &. VIII, de l'un & de l'autre une once & cinq drachmes & demie ; j'y ajoutai une demi-drachme de lune cornée, & retirai une belle mañle blanchatre avec des veines d’un rouge brun & des veines bleues: n°, 4. X. Les pierres n°. 5 & 6 , ont été compofées de la mixtion des mé- langes 4, B & C, à laquelle j’avois ajouté quelque peu de bleugge co- balt. - - XI. Ayant ajouté à une once du mélange À dix à douze grains de la Magnefia vitriariorum , j'obtins au feu de porcelaine une mafle blan- châtre avec des veines bleues & d'un rouge brun, qu'on tailla fans peine : c'eft Le n°, 7 XII. Une once & demie du mélange À avec trois grains du bleu de cobalt, donna une mafle d’un beau bleu avec des veines d’un rouge bru- nâtre : c'eft le n°. 8. XIIT. Une once & demie de ce même mélange À avec vingt grains (1) Cette fuite de numéros fe rapporte à l’arrangement des pierres dans les deux boîtes qui furent préfentées à l’Académie. (2) Ou plutôt du gypfe. 472 CBSERPATIONS SUR LA PHYSIQUE de craîe d'Efpagne, produifit une mafle verdâtre avec des veines bleues & d'un rouge brurâtre: c’eft le n°. 9. XIV. Deux onces du mélange BZ avec dix grains de chaux de cuivre , donnèrent une maffe d'un bleu verdâtre : c'eft le N°. 10. XV. Trente grains du précipité du fublimé du fpath fufble , une once du mêlange indiqué dans la note(1), une drachme d’un précipité d'os cal- cinés ( précipité qui avoit été retiré d’une folution dans lefprit de nitre , au moyen d'une folution de fel de tartre), & huit grains du bleu de cobalt, produifirent une maffe d’un rouge jaunâtre : c'eftle N°. 11. XVI. Quelque peu du mêlange À fans addition quelconque, donna une mafle verdâtre tirant fur l’opale: n°. 12. ‘XVII. Deux drachmes de caillou , une drachme de borax calciné , une demi-drachme d’albâtre, douze grains d'os calcinés, & deux grains du précipité de cuivre, donnèrent une mafle aflez approchante de la tur- quoife françoife: n°. 1 3: ; XVII. Toutes ces pierres, hors le n°. 11, font très-dures , & ne le cèdent pas à cet égard aux pierres fuivantes. Ces dernières font des com- politions faites de différentes terres , & principalement d'après les direc- tions indiquées par feu M. Pott , dans fa Lithogéognofie. J’ai mêlé le caillou avec différentes terres , fans qu’il entrât dans ce méêlange le moin- dre foupçon de fels. IL faut remarquer que les verres indiquées par M. Port, quelque pures & dégagées de parties hétérogènes qu'elles foient, ne fe fondent jamais feules, quel que foit le feu qu'on leur donne; mais mélées enfemble, elles fe fondent aifément. Voici Les effais que je fis. XIX. Je pris trois parties d'argile , autant de caillou , une partie du fpath fufble tranfparent 5j expofai Le tout à un grand degré du feu de por- celaine, & retirai une mafle d’un blanc de lait rayée par-ci parà: n°16. Le même mélange , expofé à un fewencore plus violent, produifit une mafle plus claire, tranfparente, & reffemblante à une algue-marine pâle. XX, Deux drachmes d'argile, autant de caillou, autant de fpath, avec une i-drachme de la terre du fel amer , expofées au feu le plus vio- lent, dognèrent une pierre très-femblable au chryfolite oriental : n°. 12. Le même mélange , avec deux drachmes de la terre du fel amer , expofé au même feu, donna une pierre femblable à la chalcédoine:n°. 18. XXI. Trois drachmes d'argile, autant de fpath fufble, deux drachmes & deux fcrupules de caillou ou de fable, & un fcrupule de grenat de Bohème bien pulvérifée, produilirent au feu de porgelaine une pierre fem- blable à la chalcédoine, ayant plufeurs couleurs , mais donnant fur-tout dans le verd: n°, 19. (1) Prenez cette terre qui eft la bafe du fel amer; mélez-la avec un précipité de craie bien lavé, & tiré d’une folution dans l’efprit de nitre au moyen d’une folution de fl de rartre ; ajoutez-y du caillou & de l'argile, parties égales , de chaque ingrédient ; 4] y 8 P 8 x fcrupule , & quatre grains du précipité du fublimé du fpath fufible. XXII. Une ] LS SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 473 XXII. Une once & demie d'argile, autant de fable, & une demi- once du fpath fufble, ayant été mêlées enfemble , j'en pris la moitié, & y ajoutai due fcrupules de borax calciné & un grain du bleu de cobalt, Le tout fondu au feu de porcelaine, donna une mafle tranfparente emlfquelques “endroits , d’un beau bleu, & femblable à la calcédoine bleue qui joue plu- fieurs couleurs: c'eft le n° 20. Le même mélange fans borax donna le n°. 21, plus opaque que le précédent , & en y mettant deux grains du bleu de cobalt au lieu d’un, je retirai une belle turquoife bleue, n°. 22. XXIIT, Le mélange rapporté dans la note du $. XV , auquel j'ajoutai deux grains de cobalt & un fcrupule d'os calcinés, produifit une mafle femblable au lapis lazuli, n°. 23. La même mixture , mais avec deux fcru- pules d'os calcinés , donna la pierre, n°. 48 , & fans addition d'os calci- nés , le n°. 24. XXIV. Le même mêlange $. XXII, avec deux grains du bleu de co- balt, donna un beau faphir foncé, n°. 25. En y ajoutant un peu plus d'os calcinés , & en y mettant moins de bleu de cobalt, je retirai ue pierre femblable à une turquoife bleue, n°.26. XXV. Une once du mélange rapporté au $. XXIT, mais fans borax & fans bleu de cobalt, produifit, après la fufion , une pierre tranfparente , donnant quelque peu dans une couleur d’un blanc jaunatre , n°. 37. Même quantité de ce mélange avec 15 grains d'os calcinés , donna une pierre - femblable à l’opale, n°. 35. Urie demi-once de ce même mélange avec dix grains de lune cornée , donna une pierre tranfparente, d’un verd jau- nâtre; il ne fe fic ici aucune réduétion de l'argent: c'eft le n°. 36. Ayant doublé la dofe de lune cornée, je retirai une pierre rouge , ayant à la fur- face des raies jaunes, & qui, vue à travers le jour, reffembloit à la gre- nade : n°. 45. Ce dernier mélange expofé au feu plus long-temps que le précédent, donna une pierre tranfparente, d’un rouge pâle; au fond de la male je trouvai quelque peu d'argent réduic : c’eft le n°. 46. Enfin ce mélange avec une demi-drachme de lune cornée, produifit à un feu mo- déré une pierre femblable à un jafpe de différentes couleurs, n°. 30. Les n®. 32, 33 & 34, font des pierres qui appartiennent à la clafle des ver- res fort durs; elles reffemblent aux rubis, & ont été compofées avec les changemens convenables , d’après la méthode de Kunckel, ainf que je l'ai détaillé dans un Mémoire lu dans cette Aflemblée à la fin de l'anriée dernière. . XXVE Deux drachmes du mélange $. XXV , cinq grains de chaux d’étain faite du plus fin étain d'Angleterre , & fix grains de chaux de cuivre, donnèrent une pierre opaque qui reflemble au jafpe verd de Bohème : n°. 47. XXVIE. Ayant pris une once du mêlange rapporté dans la note du 6. XV, à laquelle j'avois ajouté une drachme d’os calcinés , je mélai Le tout & en pris deux drachmes, auxquelles je mêlai deux grains de chaux Tome XXI, Part. I, 1783. JUIN. Ppp 474 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, de cuivre & un-grain de minium: j'en retirai une belle pierre verte , qui reflemble à ta malachite, n°. 44. Les pierres, n®°, 43 & 37 ; font faites du même inélange , feulement avec plus ou moins de chaux de cuivre. Deux drachni@ide ce mélange mélées avec cinq grains du erocus Martis , calciné “fuivant la méthode de Kunckel pendant quatre mois dans un fourneau de Verrerie, donnèrent une pierré verte femblable à la tourmaline, n°, 28. Le n°. 27 eft une prodüétion du même mélange , auquel j'avois ajouté dù crocus Martis & du crocus Veneris. Dans la compofition du n°. 29, je mis plus de chaux de cuivre que de chaux de fer, moitié moins : c’eft une pierre d’un beau verd foncé. Une autre proportion de ces mêmes chaux métalliques produifit une pierre verte très-foncée, n°. 42. Le n°, 4x eft la produétion de la compofñtion qui ‘avoit fervi au n°. 23, feulement avec moins de crocus Veneris : C'eftune aflez belle émeraude. - XXVIIL. Je pris une demi-once & feize grains du mêlange rapporte dans la note du &. XV ; j'y ajoutai un-grain d’un præeparatum du vitriel de magnéfie. Un grain de ce nouveau mélange avec deux drachmes du mélange indiqué dans la note du $. XV, me donna la piérre , n°, 38, très-peu colorée. La proportion ayant été changée, & ayant pris fur deux drachmes, trois grains du præparatumci-deflus indiqué , je retirai une pierre un peu jaunâtre, & donnant dans l'opale, n°. 39. Le n°. 40 éft une pro- duction de deux drachmes de même mélange avec trois grains du præ- paratum du vitriol de magnéfie : c'eft une efpèce de copaze. XXIX. Un grain de chaux de bifmuth, & deux drachmes du mélange rapporté dans la note du &. XV, donnèrent une pierre fort tranfparente d’un jaune fort pâle: c’eft le n°. 14. Je fis un nouveau mélange des quatre terres dont il a été quef- tion ci- deffus, $. XXIII, favoir de cette terre qui eft Ja bafe du fel amer, de fable, d'argile & de craie; je pris de chacune = de livre , & y joignis fix drachmes & demie d’un précipité du fpath fufble bien édul- coré. Pour avoir ce précipité, j’avois mêlé avec le fpath de lhuile de vi- triol ; j'avois diftribué le tout ; puis j'avois employé pour la précipitation de Phuile de rartre. Je pris deux onces de ce mélange, & y ajoutai trente gouttes de l’a- cide de phofphore , que j’avois retiré par une liquéfaétion dans un endroit froid. & humide. Ce mêlange ayant été bien trituré, fut féché au fourneau. N°. 1. J'en mélai 2 drachmes à dix grains d'un précipité de cuivre; précipité que je retirai d’une folution dé cuivre dans l'efprit de nitre au ©'moyen du liquor filièum, que j'avois enfuire édulcoré & féché au mieux, Le tout mis en fufon , je retirai une mafle reflemblant quelque peu à la chryfoprafe , mais tirant cependant principalement fur le bleu. N°. 2. Deux drachmes du mélange n°. 1, avec cinq grains d’un pré- cipité de la magnefia vitriariorum , me donnèrent une mafle d'une couleur SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 475 d'olive foncée. J'ai dit ailleurs que ce précipité étoit tiré du vitriol de la magnefta vitriariorum au moyen d'une longue calcination. N° 3. La mème expérience , faite avec un feul grain du précipité de la magneffa vitriariorum ,produifit une mafle d’une couleur d'olive plas claire donnant fur le bleu. : N°. 4: Un quart de grain de ce même précipité ; trois grains de chaux de cuivre, & deux drachmes du mélange n°. 1 , donnèrent une mafle vers dâtre tirant fur le bleu. N°. 5. Deux drachmes du mélange n°. 1, une goutte de l’acide de phofphore, un quart de grain de précipité de la magnefia vitriariorum ÿ & trois grains de chaux de cuivre rendirent la mafle plus verdätre. :2N°.:6: Deut drachmes du mélange n°. 1 , avec deux gouttes d'acide de phofphore!, un demi-stain de précipité de, la manganèle ; & crois grains dercuivre.de chaux, donnèrent une maffe d’un: verd ‘peu égal tirant fur le bleu. N°.7- Deux drachmes du mêlange n°. 1, avec une goutte de l'acide de phofphore , & un demi-grain de pourpre doré fait avec de l'étain, produifirent une mafle approchantide la couleur de éhair ; 8& donnant dans l'opale. | N°. 8: Vingt grains de platina , deux drachmes du mélange n°. 1, - ie à un grain d'acide de phôfphore , produilirent une iopale tirant fur le leu. * 1 N°. 9. Deux drachnies du mêlange n°,1, avec une goutte de l'acide de phofphore ; une: demi-drachme de leurs de zinc, me donnèrent une miaifé à moitié tranf{parente donnant fur le verd. Lorfque l’on fait diffoudre de l'argent fin dans de l’eau forte, & qu’om le précipite enfuits avec une folution du fel fufñble d'urine de la première cryftallifation , on retire après l’édulcoration un précipité jaune. N°:10.Je pris deux drachmes du mêlange n°. 1 avec une goutte d’acide de phofphore, & y joignis trois grains du précipité jaune dont Lo de. parler; j'en retirai une mafle qui approche d’une chryfolire âle: hi FE N°. 11. La même expérience avec fix jufqu’à huit grains de ce préci- pité jaune, ainfi qu'une autre avec dix grains, ne me donnèrent, à mon grand étonnement , qu'une mafle femblable au n°. 10 , feulement un peu plus foncée : d’ailleurs il n’y eut aucune apparence d'une réduction d'argent. à cuN?, 22. Deux drachmes du mélange n°.1, fix grains du précipité jaune citdeffüs ,1& un demi-grain de chaux de cuivre ,:donnèrent une maflé qui reflemble à l'éricraude. jh. « 33 N°. 13. Deux drachmes du mêlange n°r$ huit grains du précipité jaune; quatre graids ide, Ja chauxt de’ :cuivre, un démi-grain du précipité de la Yome XXI, Part: 1, 1783.J VIN: - OUR 2 476 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, magnefia viriariorum , produifirent une mafle femblable au n°, 12 , mais plus foncée. Ayant prisune folution d'argent fin dans de l’eau forte , & en ayant re- tiré, par-le moyen d'une folution de fel commun , une lune cornée , je fis difloudre cette lune cornée dans lefprit de fel ammoniac aqueux, à& fis évaporer le tout pour en retirer des cryftaux, dont je voulus faire ufage. Ÿ . N°. 14. Je pris dix grains de ces cryftaux , cinq grains de chaux de cuivre , un demi-grain de la magnefia vitriariorum , & deux drachmes du mélange n° 1; j'en retirai une mafle femblable à une émeraude d’un beau vert. N°. 15. Dix grains de chaux d’argent , chaux qui avoit été précipitée d’une folution d'eau forte avec de l'huile de tartre , & que j'avois bien édul- corée, mêlés à deux drachmes du mêlange n°. 1, auquel j’avois ajouté une goutte d'acide de phofphore, produifirent une mafle femblable à l'opale, N°. 16. Dix grains de mine d'argent rouge tranfparente de Joachims- thal & deux drachmes du mêlange n°, 1, imprégné d'une goutte d'acide de phofphore. N°. 17. Cinq grains de lune cornée , dix grains de mine d'argent rouge, une drachme du mélange n°. 1 , fans acide de phofphore, & une drachme de ce même mélange avec une goutte d’acide de phofphore , donnèrent une mafle d'un rouge foncé tirant fur le verd. a N°. 18. Un demi-grain de cobalt préparé , autant de la manganèfe pré- parée, un grain du précipité d'argent avec de l’huile de tartre, une demi- once du mélange n°. 1, imprégné d’acide de phofphore, N°. 19. Une demi-drachme de cette terre qui fe rrouve fous le roc où l’on trouve la chryfoprafe , mêlée à demi-once du mélange n°. 1 , donna une mafle d’un vert foncé tirant fur l’'olive , & ttanfparente en quelques endroits. N°. 20. Une demi-once du mêlange n°. 1, un huitième de’ grain de cobalt préparé , & un fcrupule de talc crud, donnèrent une maffe tirant fur Popale , mais bleuatre. N°. 21. Un huitième de grain de la manganèfe préparée , cinq grains de talc préparé, un huitième de grain de cobalt préparé , deux drachmes du mélange n°. 1, donnèrent une mafle d’un bleu clair tirant fur le vert. N°. 22. Un huitième de grain de la manganèfe préparée, quatre grains de chaux de cuivre, deux drachmes du mêlange n°. 1 , imprégné d'acide de phofphore , & un fcrupule de talc préparé , donnèrent une maffe tranf- parente tirant fur le vert bleuârre. N°. 23. Une demi-once du mêlange, n°. 1 , imprégné d’une goutte d'acide de phofphore, quatre grains de chaux de cuivre, un ‘huitième , SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 477 de grain de manganèfe préparée, &un demi-fcrupule de talc préparé, produilirent une mafle femblable à une éineraude: d’un vert foncé. N°. 24. Cinq grains de grenat de Bohème, un feizième de grain de cobalt préparé, & une demi-once du mélange n°. 1 , imprégné d'acide de phofphore , donnèrent une mafle d'un beau vert tirant fur le bleu. oo) NA" G'ANSHE NT AL PE OU DRE PRÉSERVÉ DU TONNERRE PAR UN CONDUCTEUR ÉLECTRIQUE, à Glogauen Siléfe, le 8 Mai 1782. Wars les huit heures du foir, un orage venant du couchant s’approcha du magafin à poudre, n°. ç , établi fur ce qu’on nomme le Galgnuburg. IL parut enfuite un grand éclair fuivi d’un coup de tonnerre fi violent , que la Sentinelle de ce magafin en fut étourdie , & perdit connoiflance pen- dant quelque temps. Le Factionnaire du magalin, n°. 4, courut à fon camarade pour l’exhorter à fe retirer au plus vite, puifque tout l'échafau- dage étoit en feu; mais lorfqu’il fut plus près du magafn, il vit qu'il s'éroit trompé, & que l'échafaudage étoitintaét , ce qui fait préfumer que la foudre eft defcendue le long de la barre du conducteur , & s'eft enfuite plongée dans le puitsqui eft deffous. Ce puits du n°. $ a vingt- cinq pieds de profondeur fous l'horizon , & quatre de diamètre ; il y avoit dans ce moment cinq pieds d’eau. Après d’exactes recherches que des Officiers de l’Artillerie ont été chargés de faire , il s’eft trouvé que ni la barre, ni l’échafaudage n’ont rien fouffert. Ce qui prouve cependant que le rapport de la Sentinelle, n°.4, a été jufte, c'eft que des Ouvriers em- ployés aux travaux ‘de la forterefle & éloignés d’environ 250 pas du ma- gafn, n°. 5 , s'accordent tous à dire qu'ils ont vu fortir la foudre du nuage & frapperla pointe du conducteur, & qu'il leur a fi bien paru que tout l’échafaudage étoit allumé , qu'ils ont crié au feu. La place qu'occu- poient ces gens , qui s’étoient'refugiés fur la porte d'une auberge qui donne précifément du côté de la barre du conducteur , prouve encore qu’ils ont très-bien pu voir ce qu'ils difenc avoir vu. be 478 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, O: BIS EU RENAUT TO" N Sur un Homme qui a Jept doigts à la main ; L2 Par M, le Baron DE DIETRICH. H ENRY Beny, natif de Griesbach, Baïlliage de Niederbronn en Bafle- Alface ; àgé: de 20 ans, jouiffant d’une bonne fanté, d'une jolie figure ;. né de parens fains & fans difformité , nous offre une fingulariré de la nature, [left en état de pourvoir lui-même à fa fubfftance. Toutes fes for- ces font réunies dans le bras droit, avec lequel il élève des poids plus confidérables que tout autre homme; fi je voulois defliner le bras d’un jeune Hercule , je ne trouveroïs pas de meilleur modèle, tant il eft nerveux. ” Lebras gauche eft d'une conftruction très-fingulière. “+ On fent premièrement à l'articulation de la clavicule avec Pacromion de l’omoplate, que la clavicule qui a trois pouces + de longueur, fe, plie du hauten bas avec fon extrémité numérale, qu'elle eft plus longue que de coutume , & qu'elle décrit un cercle avec l'extrémité de l'acromion ,, qui. ef, aufli plus long, plus étroit & plus bas que de coutume; la ère de. l'os du bras elt contenue dans la cavité glenoïde. $ L'apophyfe coracoïde n’eft pas non plus à fa place ordinaire ; ‘elle ne dérobe point la cavité glénoïde, mais elle prend à la partie interné fon, origine du col de l'omoplate, & avance vers le thorax , là où le petit pectoral s'y attache avec fa partie pointue. C’eft ce qui fait qu'en peut fentir la] tête de l'os du bras au haut, & dans l'intérieur du cercle que; É ’os du bras en haut, on la clavicule décrit avec l'acromion. Si on poufle 1 fa fent, plus diftindéement, Le mouvement de rotation de ce bras elt géné. à É * On voit par-là que c’eft le vicé de [a conformation dans es apophy£es de l'omoplate, qui eft caufe de ce défaut de l'extrémité fupérisure du bras, lomoplate inclinée en avant. Au premier afpet on ne voit point, la partie voûtée. de l'énaule, ce qui provient de la mauvaife conformation de la clavicule de l’omoplaté. Sa fubftance charnue, formée en plus grande partie du mufcle brachial & du biceps , fe convertit enfin ‘vers la partie tendineufe totalement en une fubftance offeufe , de forte que le tendon qu'on fent ordinairement très-diftinctement dans Le plis du bras, fe crouve fous la forme d’ün os extraordinaire, qui a environ trois doigts d'épaifleur & deux pouces de SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. #79 longueur. Cer os empêche que le bras fe plie au-delà de moitié, & met ôbitacle à ce qu'il foit entièrement tendu. La main eft courbe ; l’extré- mmité de l'avant bras au carpeelt creufe , quoiqu’en examinant les jointures , onne fente aucun défaut dans les os. Mais lorfqu'on fait effort pour étendre la main , les réndons du mufcle radial & du cubital interne s'étendent prodigieufement , & réliftent à cet effort parce qu'ils paroïflent trop courts, Cette main a fept doigts ; le pouce manque, mais il y a trois doigs fur- numéraires à fa place; les quatre autres doigts n’ont rien d’extraordinaire, maisil y a autant d'os du métacarpe que de doigts , & chaque doigt a fes trois phalanges. Le premier des doigts furnuméraires , en comptant de l'os du rayon à Jos du coude ,.eft audi le plus petit; fa longueur n’eft pas de deux pouces entiers : il. ne peut ni le plier ni l'écendre ; il paroît vraifemblablement - -qu'il n'a point de mufcle à lui, & même qu'il ne participe à un mufcle communque par une petite bride tendineufe, Le doigt fuivant a deux pouces & demi; il fe meut régulièrement, & à un tendon provenant du mufcle extenfeur commun. Le troifième de ces doigts a au-delà de trois pouces, & a de mêmeun tendon, provenant du mufcle extenfeur commun. LES EE —> —— NOUVELLES LITTÉRAIRES. M, L'ABBÉ DIiCQUEMARE ayant defliné au Havre, d'après nature , fur demi-feuille de papier grand aigle, un grouppe, que nous avons vu, compofé de routes les efpèces &.des principales variétés des anémones de mer, où l’on voitau moins trente de ces animaux finguliers , a permis à M: Buc’hoz de le faire graver en noir feulement , afin que les Naturaliftes & les Amateurs puiffent placer cette gravure dans leurs cabinets , où il n'eft pas poflible de conferver ces animaux. Ce même grouppe defliné de nouveau, & de plus colorié par M. Dicquemare, fera néanmoins partie de fon portefeuille dont il a été tiré, lorfque cet Ouvrage, orné d’un très-prand nombre de planches in-folio & céloriées, paroîtra. 480 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Fundarmentum Hiflorie Naturalis muifcorum frondoforum , &c. Fondement de PHifloire Naturelle des Mouffes Feuillues , où l’on démontre leurs fleurs, leurs fruits @ la manière de les propager par femences ; avec un arrangement méthodique des genres , partie [°*, par M. JEAN HeDwiG. A Lépfck, chez Crufus; à Strafbourg ,chez la veuve Kænig, Libraire. 1782; in-4°. de 112 pages, fans les préliminaires , avec 10 planches fuperbes & enluminées (1). Depuis que la France a fon Pline , l'Hiftoire Naturelle eft culrivée avec autant d'ardeur que les antiquités l’étoient il y a environ un fiècle. Ce n'’eft pas exclufivement en France que le goût de l’étude de la Nature a perce ; car le Nord , l'Iralie , coute l'Europe renferment aujourd'hui des Savans diftingués dans cette fcience. De ce concours d'application , il en réfulte de temps en temps des produétions qui, indépendamment des lu- mières qu'elles répandent, fontinfiniment d'honneur à leurs Auteurs. L'Ou- vrage que nous allons analyfer eft vraiment de ce genre , & fera époque dans l'Hiftoire Naturelle. Il paroît que M. Hedwig a arraché à la Nature un de fes fecrets , qui tourmentoit depuis long-temps les Botaniftes. On çonnoît Les recherches infructueufes de Dillen, de Micheli, de Linné, &c., fur les parties de la fructification des moufles. Ils parvinrent fi peu à les découvrir , que M. de Necker, premier Botaniite de l'Electeur Palatin, nia entièrement l'exiftence des organes fexuels.& des femences dans ces petites plantes. M. Hedwig, avec l’aide d’excellens microfcopes, vient de lever le voile qui les cachoit , & a la gloire d’être pour cet objet l'Apôtre de la vérité, par la démonftration évidente qu'il établit ici des expériences invariables. , IL faut cependant avouer que Micheli, grand Obfervateur de la Nature, vit avec fes microfcopes les anthères de plufieurs efpèces de moufles ; mais il n'en connut pas bien l’ufage , ce qui fit que l’on ne profita que très-peu de fa découvette, Tout récemment M. Kælreurer a publié en Allemand un livre fort intéreffant , qu'il a intitulé : Le Myflère de la Cryptogamie découvert ; on y trouve beaucoup d'expériences curieufes fur toutes les plantes cryptogames. A l'article des moufles, l'Auteur prétend démontrer que leur organe male eft la coiffe qui couvre Les capfules, M. Kœælreurer, qui mérite nos éloges à tant d'égards , s'eft trompé : M. Hedwig met fes propres découvertes dans un trop grand jour ; pour qu'on ne lui rende pas routéjla juftice qu'il mérite ; c'eft lui qui a véritable- ment trouvé les fleurs & les fruits des moufles , ainfi que la manière dont elles fe propagent par femences. Notre habile Mufcographe offre dans cette première partie la défini- tion des moufles, des inftrumens néceffaires pour obferver les plus petites (1) Extrait de M. Wizzemer , Botaniite à Nancy. parties PE SUR L'HIST, NATURELLE ET LES ARTS. 481 parties de leurs racines, tiges & feuilles, & fpécialement de leurs divers organes fexuels. Les définitions que plufieurs Auteurs ont données des moufles, font toutes, comme il l'expofe , faufles & incomplettes. Il projette de leur en fubftituer une plus exacte, quand il aura démontré clairement lewrs orga- nes les plus cachés. En attendant il indique les caractères qui doivent les diftinguer des autres végétaux ; c’eft particulièrement la coiffe qui fe trouve dans toutes leurs efpèces, qui les différencie ; elle s'oblerve mème dans le Sphagnum. Si l’on ne connoît pas fon exiftence dans la Porella, c'eft fans doute parce que jufqu’à préfent on n’a pas eu occafion d'exami- _ner à fond certe plante rare. M. Hedwig exclut par la même raifon le genre des lycopodes de la famille des moufles. Les inftrumens néceffaires pour répéter fes obfervations , font d’excel- Jens microfcopes & quelques aiguilles ; il faut fur-tout beaucoup d’arten- tion & de dextérité. On mettra dans une goutte d'eau les petites parties qu'on voudra examiner; fans cette précaution , elles fe deffécheroient & ie crifperoienc fur-le- champ. M. Hedwig traite dans des chapitres particuliers , des racines des moufles, de leurs tiges & de leurs feuilles 3 mais quoiqu'en général il donne des détails neufs & intéreffans , nous paflerons pardeflus ces objets , pour ne nous occuper que des parties de la fructifi- cation. L'opinion la plus univerfellement répandue aujourd’hui , mais qu'il faut abandonner, d’après les nouvelles découvertes de M. Hedwig, eft celle du Chevalier de Linné,& de M. Adanfon: felon eux , les mouffes ont ordinairement des fleurs mâles & des fleurs femelles , féparées les unes des autres , tantôt fur le même pied, tantôt fur deux pieds diffé- rens ; la fleur mâle confifte en une anthère , fouvent pédunculée, de forme conique, ovale, fphérique ou quadrangulaire , creufée & remplie de pouñlère au-dedans , fermée par un opercule , & recouverte d'une coïffe, La fleur femelle eft quelquefois unie petite étoile ou rofe feuillue , qui contient une pouflière fine , quelquefois un réceptacle fphérique , pédunculé , couvert de pêtits grains très-menus. Cette poullière, ces graines font les femences; le pyftil & le fruit n'en font point diftingués. Tel eft ce qu’on penfe communément de la fruétification des moufles. « Mais d’après Les découvertes de M. Hedwig, il faut renoncer à ce [en timent, & reconnoître , à l’aide de bons microfcopes, ce qu'il a’ vu lui- même. Les moufles ont, comme les plantes mieux connues , les organes néceffaires à la génération , des anthères & des pyltils. Elles onc le plus fouvent des fleurs mâles & des fleurs femelles féparées , comme onf'avoic entrevu; mais celles qu'on prenoit pour femelles, font précifément les mâles, & les prétendues anthères font des capfules remplies de femences. Dans les politrics, les mnions & le bryons de Linné, les rofettes feuil Tome XXII, Part. 1,1783.JU1N. Qqq 482 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, lues defquelles nous avons déjà parlé, & dans les hypnons de petits bout- geons coniques aflez remarquables en certain temps, {ont les fleurs mâles contenant de véritables anthères. Ces anthères font des corpufcules cylin- driques , oblongs, briévement pédunculés , lançant la pouflière féminale , cachés entre les feuilles les plus intérieures de l'étoile ou du bourgeon. Quelquefois ces anthères font rafflemblées fur de petits récepracles fphéri- ques , nuds & pédunculés , comme on peut le confidérer dans quelques mnions de Linné, & notamment dans l'ardrogynum. Les fleurs femelles font, comme les males’, formées par la réunion de plufieurs feuilles qui renferment le pyftil. C’eft à ces feuilles bien vifbles dans beaucoup'd’hyynons, que Linné à donné le nom de pezilhatium. Si l'on defire voir le pyftil formé comme dans les autres végétaux, du germe , duftyle & du ftigmate , il ne faut pas attendre que lon apper- çoive la capfule ou la coîffe: aufli-tôt que le germe a été fécondé, il s'accroît & devient une capfule bien fenfible à la vue fimple. - Ainfi que dans les autres plantes, on rencontre fouvent , avec les éta- mines & les pyftils, des parties moins connues auxquelles on a donné fe nom de nectaires. Il fe trouve dans les moufles deux efpèces d'organes , différens de ceux qui font effentiels à la génération. Les uns font des cor-" pufcules articulés, cylindriques ou en maflue, que M. Hedwig nomme filers fucculens; on les voit en grand nombre dans les fleurs mâles & femelles, & notre Botanifte ne peut décider au jufte leur véritable office. Les autres ne fe trouvent que dans les fleurs femelles, ont beaucoup de reflemblance au pyftil qu'ils accompagnent; ils ne fe changent point en capfules , & plufeurs raifons empêchent le favanr M. Hedwio deles re- connoître pour de véritables pyftils; il foupçonne feulement qu'ils peuvent concourir à recevoir la pouflière fécondante des mâles pour l’ufage du vrai germe, que conféquentiment on pourroit les nommer. adduéteurs ou opi- tulateurs, “ Ce font-là toutes les parties de la fru&tification des moufles. Il eft inutile d'avertir qu'elles font extrèmement petites, ordinairement invifibles à la vue fimple. M. Hedwig les décrit & les démontre d'une manière propre à lever tous les doutes. Il a joint à ce volume dix planches joliment en- luminées , qui jettent Le plus grand jour fur fes heureufes décou- vertes. La feconde partie qu'il nous promer, expofera les expériences qui prouvent la propagation des moufles par femences, & difpofera les genres d’une manière nouvelle & méthodique. Nous engageons les Botaniftes François à répéter fes expériences & à confirmer fes obfervations. Nous avons déjà examiné au microfcope la rofette mâle du politric commun , & nous y avons reconnu les étamines & les f£lers fucculents , rels que l’Auteur les décrit & les dépeint, Ce curieux Ecrit eft dédié à Frédéric-Augulte, Duc de Saxe, &c. RTE TE NE re état -n ni rt SUR L'HIST, NATURELLE ET LES ARTS, 48; Rhazges de Variolis & Morbillis latinè, annexis quibufdam aliis argumentis ejufdem , interprete & curante quondam Joanne Channing. Edidir, J. C. Rin- gebroig , Med. & Chirurg. Doëtor. Rhayès , de la Perire-Vérole &° de la Rougeole , traduit en Latin par Jean Channing: nouvelle édition , foignée par M. J.C. Ringebroig, Doëleur en Médecine & en Chirurgie. À Got- tingue , chez Bofliegel ; à Strafboure, chez la veuve Kænig, Libraire, 1781, in-8. de 130 pages, fans la Préface, Le Traité de la variole par Rhazès, au fu de tous les Médecins, fait très-bien connoître cette maladie; aufli eft-il fort eftimé. L'édition que Jean Channing en a donnée à Londres, en Arabe & en Latin, n'étant rien moins ue commune en Allemagne, M. Ringebroig a cru qu'il feroit à propos de faire réimprimer la traduction Latine. Il y a joint les notes de Chan- ning , parce qu’elles font propres à éclaircir le fens , & à mieux développer Ja penfée de l'Auteur. Quant à celles qui ne concernoient que le texte Arabe , ou la verfion Grecque imprimée par Robert Etienne , il les a re- tranchées, À la fin de ce petit volume , M. Ringebroig a ajouté quelques fragments fur la petite-vérole , extraits des autres Ouvrages de Rhazès, & qui fe trouvent aufli dans l'édition de Channing. Georgii Fred. Chrif. FucHsir, Med. Doëloris & Civ. Phyfic. Commentatio Hiflorico-Medica de Dracunculo Perfarum, five Ven medinenfi Ara- bum. "Memoire Hiflorico-Médicinal fur le Dragonneau des Perfes . ap- pellé Veine de Médecine par Les Arabes ; par M. George-Frédéric-Chré- tien FEUCHS, Doëeur em Médeeine, € Médecin de la Ville. À Jera, chez la veuve Croecker; & à Strafbourg , chez la veuve Kænig, Libraire, 1781 ; in-4°. de 40 pages, _— He, La maladie qui occupe M. Feuchs eft fort rare en Europe. Les anciens Grecs & Arabes n’étoient point d'accord fur fon origine; les uns foute- noient qu’elle étoir produite par un ver, & les autres croyoient qu'elle dépendoit d’une veine viciée. Aujourd’hui les Médecins reconnoiffent que ce mal eft dû à un ver, que plufieurs Infectologiftes ont décrit très-en détail. ri Analefla correétionum græci Codicis Galeni ,impreffi Bafileæ, 1538. C'eft la veuve Bufchel qui fait impæimer à Léipfick cer Ouvrage, quiet de Gafpard Hoffman, Docteur & Profeffeur en Médecine à Alfdorff, IL fera en trois volumes in-8°. Les Amateurs de la Littérature Grecque, de la Philologie & dela Médecine, y trouveront amplement de quoi farisfaire leur goût. Les manufcrits ont été confervés dans la Bibliothèque Tho- Tome XXII, Part. 1,1733. JUIN. Qgqggq2 f x 484 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, 6c. mafienne de Nuremberg. Chaque volume coûtera 8 gros d'Allemagne, qu'il faudra payer avant la livraifon. Le premier tome paroîtra, fans faute, à la Saint Jean de cette année , le fecond à la Saint-Michel, & le troifième à Noël. Il faut faire parvenir les lettres & l'argent, francs de port à cette veuve , qui fe charge de faire les frais de l'envoi des volumes. Elle fera im- primer au commencement de ces Analeëles le nom des Soufcripteurs. Cette entreprife Typographique fera exécutée fur de beau papier , en beaux ca- raétères, & avec toute la correction pofible, Ce fera M. Godefroi Grunner, qui enfeigne la Médecine avec gloire dans l’Univerfité de Jena, qui veil- Lera à l'édition, & qui'a compofé la Préface. Les perfonnes qui foufcrironc pour neufexemplaires, en recevront un dixième gratis; celles qui n'en prendront que cinq , auront moitié, Le temps de la Soufcription écoulé, le prix de chaque volume fera de deux florins. TABLE Des ARTICLES CONTENUS DANS CE CAHIER. . M ÉMOIRE Hiflorique & Phyfique fur le Cimetière des Innocents ; par M. CADET DE VAUX. 09 Réflexions fur le but de la Nature dans la conformation des Os du Crâne : par M. THOURET. RE EL Défcriprion des Mines d'Or de Sibérie ; par M. PALLAS. 425$ Des Vents refroidis par l'évaporation ;par M. DU CARLA, , 432 Lettres de M, DE MoRVEAU € de M. P Abbé FONTANA, fur la Phlogifii. cation de L Air dans les Poumons. 447 Extrait d'une Lettre de M. MAGELLAN , fur la converfion de Ÿ Eau en Air. 46$ Suite des Extrairs du Porte-Feuille de M. l'Abbé DiCQUEMARE , fur l'Enfant de 21 ans. 469 Expériences faires pour trouver Les Compofitions qui imirent les Pierres fines ; par M. MARGGRAF. 470 Maga/in à Poudre , préfervé du Tonnerre par un Conduëteur éledrique. 477 Obfervation fur ur Homme qui a Jept dorgts a la main. . 478 Nouvelles Littéraire. 479 : APP RSOMB'AUT/TIONN. J' lu , par ordre de Monfeigneur le Garde des Sceaux , un Ouvrage qui a pour titre: Obfervarions fur La Phyfique, fur l'Hiftoire Naturelle & fur les Aris, Éc.; par MM. Rozier & MoNcEz le jeune, &e. La Colleétion de faits importans qu'iloffre périodi- quement à fes Leéteurs , mérite l’accueil des Savans; en conféquence, j’eftime qu'on peut en permettre l’impreffion, À Paris , ce 25 Juin 1783. VALMONT DE BOMARE. TABLE GÉNÉRALE DOS A RITIRCEMES CONTENUS DANS CE VOLUME. PHYSIQUE. ] RÉCIS d'un Mémoire fur e lieu & Les autres circonflances de la for- mation des Glaçons fpongieux que les rivières charrient ; par M. DESMA- RETS, Page so Objérvations fur la Glace qui fe forme à la fuperficie de la terre végétale dans les pays de granits ; par M. DESMARETS. 16$ Wues pour la Géographie-Phyfique ; par M. Du CARLA. 10$ Lettre de M. FERRIS, fur deux exemples de Foudre afcemdante. 197 Lesrre de M. le Prince DE GALLITZIN , fur la forme des Conduiteurs éleétriques. 199 Mémoire [ur les grands avantages d'une efpèce d'Ifolement très-imparfait ; par M. DE VOLTA : raduit de l'Italien par M. * **, 325$ Mémoire fur l'analogie qui fe trouve entre la produétion & Les effets de PE- leétricite, par M. ACHARD. 245 Lettre de M. Carnus, Profeffeur de Philofophie à Rhodez : Jar les Eudio- mètres & les PARTIE Var « 223 Lertre de M. le Prince DE GALIITZIN , où il rapporte quelques Expé- riences nouvelles de M. ACHARD. 205$ Mémoire Hiflorique & Phyfique [ur le Cimetière des Innocents ; par M, CaDer DE VAUX. . 409 Des Vents refroidis par l'Evaporation ; par M. pu CARLA. 432 - Magafin a Poudre préfervé du Tonnerre par un Conduëteur éleétrique. ; 477 °CHYMIE. Manorrs fur la Calcination de la Pierre calcaire, © [ur fa vi- » zrification, par M. DARCET. Page 19 486 MRE AB LÉ. CE IN'É RAI E Théorie des Détonnations Chymiques , par M. CHAPTAL. 61 Mémoire fur le Lair € fur fon Acide, par M. SCHEELE. 170 Mémoire fur l Acide du Sucre de Lait , par M. SCHEELE. 67 Recherches Chymiques fur la Couleur Bleue retirée des Os de diffèrens Ani- maux , par GUILLAUME - HENRI-SÉBASTIEN BUCHOLTZ. 8$ Mémoire fur Les changements qu'eprouvent les Terres mélées avec les Chaux des Métaux imparfaits & des demi-Métaux, lorfqwon les expofe au feu de fufion; par M. ACHARD. 179 Differtation Chymique fur les diverfes proportions dans lefquelles Les Métaux contiennent le phlogiflique ; foutenue par M. NicoLas TurN8oRG , M. ToBErN BERGMANN , Préfident ; traduit par M. MARCHA1IS. 109 Mémoire fur les parties conflicuantes de la Tungflène ou Pierre pefante, par M. SCHEELE ; traduit du Suédois par Madame P *** de Dijon. 124 Remarques fur le Spath-Fluor ; traduit du Suédois de M, SCHEELE , par Madame P *** de Dijon. 264 Expériences & Obfervations fur l'abforption opérée par le Charbon ardent dans P Air atmofphérique ; par M. le Comte MOROZZ0O. 294 Expériences fur la vitrification de la Terre végétale & animale, mélée en diffe- rentes proportions avec les Chaux métalliques ; par M. ACHARD. 300. Déftription de l'Etain [ulfureux de Sibérie, ou Or muffif natif ; traduit dhSué- dois de M. BERGMANN , par Madame P * ** de Dijon. 367 Leitres de M. DE MORVEAU © de M.l Abbé FONTANA , fur la phlogifli- F cation de l’ Air dans les Poumons. 447 Extrait d'une Lertre de M. MAGELLAN fur la converfion del E UE Âir, MS LOIRE NATURELLE Hire de M. le Chevalier DE LAMANON à M. l'Abbé MoncGez, relative aux Offémens foffiles qui ont appartenu à de grands Animaux. 3$ Suite des Extraits du Porte-Feuille de M. l'Abbé DICQUEMARE. Infectes def- tructeurs des Bois. | . 121 Mémoire fir la Génération fingulière d'une efpèce de Grillon , qui découvreun fait de plus de l'analogie qui exifle entre les Règnes re & yévéral ; par M, le Comte DE FRAULA 1 ;d DE, SVEANRPAOI NC: LUENS. 437 Obfervarions fur les Infe&tes polypiers qui forment Le tartre des dents ; par M. MAGELLAN, de Londres, 178 Appendix pour l’analyfe chymique de la Pierre de Saint+ Ambroix. 207 Fragment d'un Mémoire de M. l'Abbé "DICQUEMARE , fur Les premiers & Les derniers termes apperçus de l'Animalité. 226 Déféription des couches fuperpofées de laves du Volcan de Boürarsfe en Au- vergne ; par M. l'Abbé SOULAVIE. 289 FRS de Météorologie 6 de Botanique, fur quelques Montagnes du Dauphiné; par M. ViLLaRs, Médecin de l'Hôpital Militaire de Grenoble. 269 Lettre de M. le Chevalier DE LAMANON à M. l'Absé@MonNGEZz, relative à POrnitholithe de Montmartre. 30 Lettre du Baron DE DiETRICH, fur La Mine d’Allemont en Dauphiné. 3 13 Obférvations fur une Montagne brélante en Perfégpar M. PALLASs, 316 Conje&lures Phyfico-Hifloriques fur l'origine des Cailloux quartzeux répandus & amoncelés dans les environs de N°RE ; par M. le B. DE SERVIÈRES. 370 Suite des Extraits du Porte- Feuille de M. ? Abbé DicquemaARE. L'AGif, 386 Defcription des Mines d'or de Sibérie , par M: PALLAS. " 42ÿ MÉDECINE. D nouer Pris roues far le Ténia ; par M. Cusson fs, Doc- teur en Médecine dans l'Univerfité de Montpellier. 1Y7138 Extrait de la Séance publique de l Académie des Sciences, Arts G Belles— Leres de Dijon, tenuele 18 Août 1782, fur différens objets de Médecine, 209 Mémoire fur le Méphitifme des Puits ; par M. CADET DE VAUX. 229 Obférvation fur Martin Poupel , par M. l'Abbé DiCQUEMARE. 306 Extrait d’une Lettre de M. le Baron DE DIETRICH fur un Monfîre. 315$ Réflexions fur le but de la Nature dans la conformation des Os du Cräne; par M. THOURET. 417 Suite des Extraits du Porte-Feuille de M. l'Abbé DiCQUEMARE , fur l'Enfant de 21 ans. 469 Expériences faites pour trouver des Compofitions qui imutent Les Pierres fines 3 par M. MARGGRAF, 479 2 433 TABLE GÉNÉRALE DES ARTICLES. Obfervation fur ur Homme qui a fept doigts à la main; par M. le Baron DY DiETRICH. 478 BOTANIQUE. JP Se de M. Caqué, Doyen de la Faculté de Médecine, fur une Saxi- frage dofée. 176 ASTRONOMTIE. O BSERV ATIONSS ur les Nébuleufes d'Orion. 34 NAVIGATION, MACHINES ET ARTS. Hs prononcé à la Séance publique de l'Académie des Sciences , Belles:Lettres € Arts d'AmienSihle 25 Août 1782; par M. le Come D'AGAY, fur les Canaux navigables. 36 Suite. 93 Obfervations fur la Durance ; par M. BERNARD. ae Suite. : 350 Baromètres à Appendices, qui onË un niveai conftant , ‘mefurent La pefan- eur de l'air dans les profondeurs inacceffibles , &c. &c. &c.; par M. CHAN-" GEUX. 387 Lettre à M. BERTHOILON , de Lyon. Réfultats des Expériences faites & Thierny , près Laon , avec l’'Œnomètre, pendant la vendange de 1782. 89 Déftription de l'Auxomètre inventé par M. ADAMS de Londres. 6$ Defcription du Chrorhyomètre, ou d’une nouvelle Machine pour mefurer la durée de la pluies par M. L'ANDRIANI. 280 Goniomètre , ou Mefure- Angle; par M. CARANGEOT. 193 Extrait des Repiffres de Académie Royale des Sciences, du 4 Septembre 1782 , fur des Mèches économiques. è 4 62 Eloge de M. Navier , par M. Vico-D'Azyr. à 3 RE Littéraires. 7 173 97—236—319—479. De l’Imprimerie de DEMONVILLE, Dr cadémie Françoife, rue Chriftine. P ; \ ç Ca TE Jélhèr Jeugp 5 PTE FOR 1 UN FR DFE LS DS L ” L [PS : « { st : nu ALT a) L L : & L RS RER bu à Ni PL TS RÉ LEZ