2 =: RES SRE Por is UNS " : : RU : set ! " Pr . | or OBSERVATIONS L A PHYSIQUE, SUR L'HISTOIRE NATURELLE EM SUR LES. MRT:S, AVEC. DES PLANCHES.EN TAILLE-DOUCE: DÉDIÉES A M°. LE COMTE D'ARTOIS; Par M. l'Abbé RoziER , de plufeurs Académies ; par M. J. A. Moncez le jeune, Chanoine Reégulier de Sainte Geneviève , des Académies Royales des Sciences de Rouen, de Dijon , de Lyon , &c. &c. & par M. DE LA METHERIE£, Doëteur en Médecine , de lAcademie de Dijon. IUILLET 1766. AN PIARASS AU BUREAU du Journal de Phyfique , rue & hôtel Serpente, MS -DiC:Cr LORS XV. I AVECVWPRIVILEGEDU ROI, AA Ja 76 ane OBSERVATIONS PET MÉMOIRES SUR LA PHYSIQUE, SUR: L'HEISTOIRE NATURELLE, ET SUR LES ARTS ET MÉTIERS. MÉMOIRE SUR LES CAUSES DE LA FERMENTATION VINEUSE), ET SUR LES MOYENS DE PERFECTIONNER LA QUALITÉ DES Vins; Par M. le Marquis DE BULLION. Ex faifant évaporer du moût de raifin, on obtient un fel qui a toutes les apparences du cartre ; fi on le combine avec l'alkali de la foude , il forme le fel de Seignette. Outre ce premier fel, on obtient encore par l'évaporation du jus des raifins , une grande quantité de fucre. Pour le purifier , il faut d'abord extraire le tartre & faire enfuite évaporer le moñt jufqu'à confiftance de Tome XXIX, Part, IT, 1786. JUILLET, À 2 2 nr 4 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, firop épais. On laifle pendant fix mois Le firop à la cave; au bout de ce tems, on trouve le fucre criftallifé confufément. En lavanc ce fucre avec” de l'efprit-de-vin , la partie colorante fe fépare , & il devient très-blanc. Les raifins rendent plus ou moins de fucre , felon leurs qualités & fuivant que les années ont été plus ou moins chaudes, Voulant connoître fe verjus donnoit le même fel que le raifin , j'ai pris du verjus dont j'ai fait évaporer le fuc , & j'ai obtenu du tartre en criftaux beaucoup plus gros & en plus grande quantité que je n’en avois retiré du vin. Le tartre combiné avec l’alkali de la foude , a formé du fel de Seignette; la liqueur qui reftoir avoit une faveur acide. Il paroït que le cartre entre pour beaucoup dans la formation du raifins car lorfque le fruit eft mûr , on obtient moitié moins de tartre, & plus il fournit de fucre , plus le tartre diminue. L'exiftence de ce dernier fel dans le moût me paroîc abfolument néceffaire pour déterminer la fermentation vineufe : l'expérience fuivante me paroit propre à le demontrer. à Après avoir fait évaporer du moût pour en féparer le tartre, j'ai ajouté l'eau que je lui avois enlevée par l'évaporation ; je lai abandonné à lui- même pendant trois mois, à une chaleur de 15 à 16 degrés du Thermo- mètre de Réaumur. Il n'y a point eu d'apparence de fermentation ; mais une pareille quantité de nroût que j'ai traitée de même, & à qui j'ai rendu l’eau (1) & le tartre que je lui avois enlevés, a fermenté dès le lendemain avec autant de force que le moût ordinaire. La fermentation achevée, j'ai diftillé le vin & j'en ai retiré une aflez grande quantité d'eau-de-vie, Voulant favoir fi les acides végétaux produifoiene la fermentation , j'ai ajouté à du moût que j'avois d'abord privé de fon tartre, une quan- tité égale de fel d’ofeille; il ne s’eft point fait de fermentation. J'ai ajouté à ce mêlange le tartre que j'avois enlevé, la fermentation s'eft établie en vingt quatre heures ; & par la diflillation j'ai obtenu beaucoup d’eau-de-vie. Dans une quantité donnée de moûr’, j'ai doublé la dofe du tartre ; la fermentation s’eft établie comme à l’ordinaire , & la diftillation m’a fourni moitié plus d’eau-de-vie que dans la précédente expérience. Pour m'aflurer fi le tartre ordinaire produiroit le même effect fur du moûr, que celui qu’on retire par l’évaporation du jus de raifin , j'ai ajouté à du moû: que j'avois privé de fon tartre , une égale quantité de crême de tartre du commerce ; la fermentation s’eft érablie aflez promptement, & par la difillarion j’ai obtenu les mêmes réfultats: en doublant ainfi la dofe de crème de tartre, j'ai obtenu moitié plus d'eau-de-vie, {:) Il faut faire diffoudre le tartre dans une quantité fufifante de moût qu’on fait bouillie dans un chaudron, SUR L'HIST, NATURELLE ET LES ARTS, f Lorfque j'ai ajouté du fucre & de la crême de tartre à du moût , j'ai obtenu après la fermentation les trois quarts en fus de la quantité d’ef- prit ardent qu'on retire lorfqu'on diftille du vin auquel on n'a ajouté ni fucre ni tartre. J'ai ajouté du fucre à du moût dont j'avois ôté le tartre , il n’a pas fermenté. Le jus de railin LE j'ai analyfé a produit, par pinte, environ quatre ros de fucre & un demi-gros de tartre. J'ai fait fubir la fermentation vineufe à du jus de cerifes, & après l’avoir diftillé , je n’ai obtenu qu'un douzième d'eau-de-vie, En ajoutant à ce jus du fucre & du tartre dans les proportions de deux gros de fucre & d’un gros de tartre par pinte de jus , j’ai obcenu un quart en fus d’eau-de-vie, J'ai mis à fermenter pendant le mois d'Août dernier 120 pintes d'eau, ‘4120 onces de fucre & une livre & demie de crème de tartre; le mélange a reftétrois mois fans apparence de fermentation, J'ai jugé, d’après cerre expérience, qu'il falloit autre chofe que de l'eau, du fucre & du tartre pour obtenir la fermentation vineufe , & que la matière extractive réfineufe étroit abfolument néceflaire. J'ai donc ajouté à un mélange femblable au précédent feize livres de feuilles de vigne pilées, le mélange a fermenté avec force pendant quinze jours ; je lai enfuire diftillé & j’ai obtenu quatre pintes d'eau-de-vie. J'ai mis à fer- menter la même quantité d’eau & de feuilles de vigne , fans fucre & fans tartre , le mélange a fermenté doucement, & je n ai obtenu à la diftilla- tion que de l’eau acidulée. J'ai répété ces expériences en grand , en ajoutant dans la cuve , fur 00 pintes du moût, dix livres de belle caflonnade, & quatre livres de crème de tartre ; la fermentation s’eft bien établie, mais elle a été moins tumulrueufe & elle a duré quarante-huic heures de plus que dans les cu- vées qui ne contenoient que le moût fimple. J'ai remarqué plufeurs fois que lorfque le moût ne contient pas affez de parties fucrées , la fermentation eft extrémement tumultueufe & rapide ; le vin qui en provient eft plat, & ne donne prefque pas d’efprir inflam- mable ; au lieu que lorfque le moût eft gras & onétueux , la fermentation n'eft pas fi tumultueufe & dure plus long-tems : alors le vin eft plus vigoureux , & rend à la diftillation beaucoup plus d’efprit ardent que lorfqu'il contient moins de parties fucrées, Le moût que j'ai mis à fermenter avec la caflonnade & la crème de tartre, m'a donné un vin de bonne qualité, & il m'a rendu par la difil- lation , fur fept pièces , une pièce & die d’efprit ardent à 20 degrés à T'aréomètre de M, Baumé ; au lieu que le vin fait fans fucre & fans crème de tartre , ne m'a produit qu'un douzième d’eau-de-vie , marquant de même à l’aréomètre. ; Je ne fuis pas de l'avis des perfonnes qui penfent qu'il faut attendre 6 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fix où huit mois , & mème plus, pour diftiller les vins que l’on veut convertir en eau-de-vie : les expériences que j'ai faites & que je vais rapporter, m'ont prouvé combien cette pratique étoit fufceptible d'in- conveniens, J'ai diftillé de mois en mois les mêmes vins, & plus j'ai retardé l’opé- ration , moins j'ai obtenu d’efprit ardent, L'époque où il convient de diftiller les vins, n’eft pas lorfque la fer- mentation eft cumultueufe , car le vin n'eft pas encore achevé; mais lorfque la fermentation devient tranquille & que la liqueur s'éclaircit, le vin eft fait alors , & il contient autant d'efprit ardent qu'ilen peut contenir. 11 eft certain que tous les mois on trouve du vide dans les tonneaux ; ce vide me paroït ne devoir être attribué qu'à l'évaporation de l'efprit ardent qui , étant plus fufceptible de fe raréfier que les autres parties conftituantes du vin , doit néceflairement s’évaporer le premier. Pour éviter les pertes qui réfulcent de cette évaporation , il eft aifé de voir , d'après ce qui a été die , qu'il faut diftiller les vins dès l'inftant où ils commencent à s'éclaircir ; c'eft le moment le plus favorable , puifque fi l’on attend plus long-tems , on obtient moins d’efprit ardent. La diflolütion du tartre dans le moûr ef fur-tout très-néceffaire dans les railins qui contiennent beaucoup de fucre ; le tartre fe décompofe & fe change, au moyen de la fermentation , en efprit ardent. Les moûts des raifins faturés de tartre, tels que ceux de Champagne, exigent qu’on y ajoute du fucre pour augmenter l’efprit ardent. Dans les vins qu'on deftine à brûler , il faut, outre le tartre & le fucre, mettre de l’eau pour étendre davantage la diffolution de ces deux ingré- diens ; alors la fermentation eft plus vigoureufe, & l’efprit ardent fe forme en plus grande abondance, Ces vins doivent être diftillés aufli-rôt qu'ils font faits, fi l’on veut en retirer une plus grande quantité d’eau-de-vie. Quant aux vins qu'on garde pour être bus, il faut que la partie fucrée domine dans le moût : nos vins de liqueur {ont dans ce cas, mais il y a excès de fucre. Pour les faire on laiile le raifin fécher fut les ceps ou fur la paille; on en exprime le jus qui fermente peu, &, le vin qui en provient elt doux & fucré : ils ne contiennent prefque pas d'efprit ardenr. J'ajouterai à ce Mémoire quelques obfervations fur différens ufages du marc de raifin, OBSERVATIONS Sur le marc de raïifin donné comme nourriture aux befliaux, & fur les fels qu'on peut en retirer par l'incinération. Dans plufieurs pays, & même dans quelques cantons de la généralité de Paris, on nourrit en automne Les beftiaux avec le marc de railin, Pour € | . ddétittitisidietiiaié SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 3j cet effet , à mefure qu’on le tire du preffoir où il s’eft formé en gros pelo- tons , on le paîle entre les mains pour divifer ces pelotons que l'eau ne fauroit pénétrer facilement ; on le jette enfuite dans des tonneaux défon- cés , dans lefquels on verfe la quantité d'eau néceffaire pour le bien tremper ; on recouvre le tout avec de la terre forte mêlée de paille : on donne ordinairement à cette efpèce d'enduit cinq ou fix pouces d’épaifleur, C'eft lorfque la mauvaife faifon empêche les beftiaux d’aller aux champs, qu’on doit faire ufage de ce marc ; on en détrempe environ cinq ou fix livres dans de l’eau tiéde avec du fon , ou de menue paille , ou des navets, des pommes de terre, ou bien des feuilles de chène ou de vigne qu'on a confervées exprès dans l’eau. Les beftiaux mangent deux fois par jour de ce mêlange ; on leur en fert le matin & le foir dans un petit baquet ; on y ajoute un peu de fel fi l'on peut s'en procurer facilement. Les chevaux s’'accommodent de cette nourriture qui plaît aufli aux va- ches; il en faut cependant donner modérément à ces dernières, parce qu'elle excite le lait à tourner. Les marcs des vins blancs font préférables à ceux des vins rouges, parce qu'ils n’ont pas fermenté comme ceux-ci : on peut cependant employer les uns & les autres. Le marc de cidre , confervé de la même manière que celui de raifin , peut le remplacer pour le même objet. Le marc de raifin qui n’a point fervi à la nourriture des beftiaux , peut être brûlé afin d'en obtenir des cendres propres à divers ufages , & parti- culièrement à faire de la leffive pour laver les grains deftinés à la femence. IA à A : =. A SHOA J . Avant de brûler ce marc il doit être mis à deffécher : la cendre qui en provient contient une très-grande quantité d’alkali fixe. Quatre milliers de marc bien fec fourniffent cinq cens livres de cendres qui, leflivées , donnent après l'évaporation , cent dix livres d’alkali fixe ; quantité bien au-deflus de celle qu'on peut retirer du bois de chêne , qui ne rend pas plus de quinze livres d'alkali fixe, par quatre milliers pefant. : L'incinération du marc de raïfin exige quelques précautions : fi Îe feu eft trop grand il fait pafler le marc à l’état de frite, & alors il n'ya plus d’alkali fixe à obtenir , parce qu’il fe combine avec la terre du marc, & ferme avec elle une demi-vitrification. Cette frite, expofée à un feu de verrerie , fournit fans addition un émail blanc & cellulaire, & fi on con- tinue le feu , on obtient un verre rougeâtre & tranfparent dont on pourroit faire des bouteilles, &c, Il y a beaucoup de cantons où le marc de railin eft rejetté comme inutile; il feroit cependant poffible d'en retirer plus d’un avantage, rs 8 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; MÉMOIRE DEF M VW:ES T R UM.B,*+ SUR L'ACIDE DU SUCRE ET L'ESPRIT-DE-VIN; Traduit du Journal de CRELL, par M. CAviLLiEeRr, Elève de l'Ecole Royale des Mines. M. WIEGLEs, dans le fecond volume du Journal de Phyfique de 1784; avanceune hypothèfe, fur la formation de l'acide du fucre, abfolumentop- pofée à celle de Bergmann ; il prétend que l'acide dufucreeft l'acidenitreux, modifié par les matières inflammables ; tandis que Bergmann penfe que l'acide du fucre eft un acide particulier , abfolument différent de tous les autres , que l’acide nitreux dégage, & qu’il ne produit pas. En comparant les deux hypothèfes fans prévention , plufieurs expériences qui me paroif- ent directes , me fant pencher en faveur de Bergmann. Comme je ne veux entrer ici dans aucune difcuffion avec M. Viegleb ; je lui réponds dans un autre Mémoire qui doit paroître dans peu ; en attendant je vais faire part au public des découvertes que j'ai faites, & des- conféquences que j'en tire. 1°. En diftillant le réfidu de l’éther nirreux avec de l'acide nitreux , & faturant la liqueur obtenue d'alkali végétal , on obtient du falpêrre & du tartre acéteux. Après avoir féparé le tartre acéteux par l’efprit-de-vin , on eut en retirer le vinaigre par les moyens connus. 2°. Si on diftille encore ce réfidu avec une plus grande quantité d’acide pitreux, on obtient toujours du vinaigre , outre l'acide nitreux phlogiftiqué; en répétant cette diftillation avec une nouvelle quantité d’acide nitreux , on obtient moins d’acide du fucre ; on peut même continuër l'opération, jufqu’à ce qu'on ne retrouve plus de cer acide, 3°. Diftillant une partie d'acide du fucre, retiré du fucre , de l’efprit- de-vin ou du tartre, avec 12 ou F4 parties d'acide nitreux, l'acide du fucre difparoîe abfolument ; on trouve dans le récipient ainfñ que dans l'autre expérience de l'acide nitreux phlogifliqué, du vinaigre , de l’air fixe, & de l'air phlogiftiqué, & dans la cornue un peu de terre calcaire. 4°. Une partie d’acide du fucre, diftillé avec 6 parties d'acide vitriolis que , on obtient dans le recipiens du vinaigre, de l'acide vitriolique phlogiftiqué avec de l'air fxe, & dans la cornue de l'acide vitriolique très-pur. M. Bergmann connoifloit la décompoftion de l'acide du fucre, par f'acide nitreux & l'acide vicriolique; mais il e trompoit , en croyant ie Q . pre ed Gt 0m DALGEC 2 Pa fé APS 200 ; ‘ e SUR L’'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 9 fe décomyofe en air fixe & air inflammable. I] fe décomipofe , comme le prouve mon expérience, en vinaigre & matière inAamable , que je regarde comme fes parties confliruantes, Je crains que cette expérience péremp- toire ne puifle fe concilier avec l'hypothèfe de M. Wiegleb, qui croit que l'acide du vinaigre exifte rour formé dans les végétaux. 5°. Si on farure le réfidu de l'éther nitreux , avec de la craie, on obtient un fel cerreux difficile à difloudre. Qu'on raffemble ce fel, & qu'on le traite fuivant le procédé de Réfius , par l'acide vitriolique, on obrient de la félénite. L’acide qui eft féparé eft l'acide du tartre ; il donne de la fumée & produit une odeur empireumatique , en brülant fur les charbons, On -peut conclure que cet acide’n’eft point l'acide du fucre, puilque l'acide vitriolique l'a dégagé de la craie 3 car le fel faccharin à bafe de terre calcaire ne peut être décompofé par l'acide vitriolique. 6°. Si on fait évaporer la liqueur , de laquelle on a féparé le fel calcaire du tartre, il refte une matière noire , légère, qui attire l'humidité de l'athmofphère , & qui a l'odeur du fucre brûlé ( propriété donr jouit l'acide du tartre pur mis fur les charbons ); fi on difille jufqu'a ficcité , on obtient l’acide du rartre empireumatique & un charbon très-léger. 7°. En brûlant à l'air libre ce charbon , il laifle un peu de terre après Ja calcination. Ii réfulte de ces expériences que l’efprit-de-vin eft compofé d'acide de tartre , d'eau & de marière inflammable, & que c’eft un acide naturelle- ment dulcifié. Il s'enfuit que l'acide nitreux rompt ladhéfion de ces fubftances ; en s’emparant de la matière inflammable , qui en ef le lien. C'eft pourquoi , lorfqu’on a employé une quantité modérée d'acide nitreux , on n'obtient que l'acide du tartre ; & cet acide, fon auginenre les proportions d'acide nitreux , fe décompofe de plus en plus, & pro- duit de l'acide du fucre & de la matière inflammable. On voit de plus, pour quelle raifon on n'a pu obtenir jufqu'à préfent l'acide du tartre dulcifié. : 8°. Difillant une partie d'acide du fucre & cinq d'acide nitreux fur une & demie de manganèfe , la manganèfe fe phlogiftique & fe diffoue en grande partie. On trouve dans le récipient l'acide du vinaigre & un peu d'acide nitreux. 9°. Si on diftille l'acide du tartre avec l’acide vitriolique fur la man- ganèfe , une grande partie de la manganèfe fe diflout ; on trouve dans le récipient du vinaigre & de l'acide nitreux phlogiftiqué. 10°. Si on fait digérer l'acide du tartre fur de l'efprit-de-vin , pendant quelques mois, tout fe convertit en vinaigre ; l'air refté dans le vafe et de l'air 6xe & de l'air phlogiftiqué. Î 11°. Faifanc digérer pareillement pendant quelques mois l'acide dut fucre fur de l’efprit-de-vin, toutfe convertit en vinaigre; Pair qui refte dans le vaifleau , eft de l'air fixe. , Tome XXIX, Part. II, 1786. JUILLET, B M, ui is 10 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Puifque dans ces expériences l’acide du rartre & l'acide du fucre fe convertiflent en vinaigre tous les deux , il en réfulre que l'acide du tartre, l'acide du fucre & l'acide du vinaigre font des modifications de l'acide dont nous venons de parler , dont la différence confifte dans le plus ou moins de matière inflammable qu'ils contiennent, On peut en conclure que l'acide du vinaigre eft l'acide végétal le plus pur, & l'acide fonda- mental de ce règne. Il s'enfuit encore que l'acide du tartre , l'acide du fucre & l'acide du vinaigre contiennent moins de matière inflammable , dans l'ordre que je les ai énoncés. 12°, Si on dittille l'efprit-de-vin avec l'acide vitriolique , fur de la man- ganèfe , on peut le décompofer en acide du vinaigre , & matière inflammable, | Peut-anjdonner de plus fortes preuves contre l’hypothèfe de M. Wiegleb? Ne füuit-il pas clairement de mes expériences , que lefprir-de-vin contient un acide, que cet acide peut être retiré fous la forme d'acide du tartre, d'acide du fucre , & enfin d'acide du vinaigre , fuivant le der du Chimifter M. Wiegleb appuie fon hypothèfe de la formation de l’acide du fucre, par la combinaifon de l’acide nitreux avec la matière inflammable ; fur une autre hypothèfe, que l’efprit-de-vin ne contient pas d'acide, parce queM. Weftendorf prétend n'avoir retiré de l'efprit-de-vin , que de l’huile & de l'eau. Je puis cependant certifier avec vérité , que j'ai diftillé 30 fois de fuite le même efprit-de-vin , fans avoir obtenu une goutte d'huile, mais feulément un peu d'eau acidulée , une fubftance en flacons blancs, & le refte étoit de l'efprit-de-vin , qui vraifemblablement reftera inal- térable, 13°. Sion recohobe 20 fois le même efprit-de-vin , fur de l’alkali cauftique, on le convertit totalement en vinaigre & eau. Il n’eft pas néceflaire de plus de preuves , pour démontrer parfaitement les deux hypothèfes que je viens d'établir. J'efpère qu’elles feront démon- trées encore plus amplement , lorfque les chimiftes auxquels j'en foumets l'examen, pourfuivront ces expériences; ils aflureront alors les fondements que j'ai pofés. S'il falloit m’appuyer fur des autorités , je pourrois me fervir du traité des affinités de Bergmann, mais j'aime mieux ne citer pour preuves que mes expériences. La nature décide la caufe en faveur de Bergmann , en nous donnant dans le fel acide de l’alléluya , l'acide du fucre tout formé. M. Schéele l'a faic voir ainfi que je l'ai appris de M. Crell , mais il y a deux ans que j'ai fait la même découverte. On peut s’en aflurer en lifant la dixième partie du traité de mes découvertes, à la page 85, où je dis pofitivement qu'il n’y a pas de différence entre ‘le fe! d'ofeille & l'acide du fucre. 14°. Pour s'en convaincre , qu’on verfe goutte'à goutte du fel de tartre dans une diflolution faturée d’acide du fucre , il fe forme un précipité is à SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. TE blanc ; qu'on le diffolve & faffe criftallifer, on obtient des criftaux ab{o - lument femblables à ceux du fel d’ofeille , tant par la faveur , la forme & la grofleur , que par la manière dont ils fe comportent avec certains corps. ; Je dois donner un confeil à ceux qui voudroient reprendre mes expé- riences. Îl faut avoir foin de ne pas employer d'acide nitreux , contenant de Tacide marin ; autrement on pourroit tomber dans la même erreur où j'ai été pendant long-tems, je croyois que l'acide végétal n'étoit que l'acide marin déguifé ; mais il n’en eft rien. L’acide du tartre n'eft que J'acide du vinaigre | modifié de différentes manières , par la matière inflammable, MÉMOIRE DES MAUR EL AÎPROT H, Sur LE SEL DE PROUST ; AUTREMENT APPELÉ SEL PERLÉ ; Traduit du Journal de CRELL , par M. CAVILLIER, de l'Ecole Royale des Mines. Q UOIQUE de nombreufes découvertes aient enrichi la chimie de nos jours , il nous refte encore beaucoup à faire fur l’analyfe de différents fels. Le fef perlé , par exemple, me parut mériter une analyfe plus exacte ue celle qu’en a faite M. Prouft. Si l’on mer de l'urine dans un endroit frais, en s’évaporant elle prend de la confiftance, & en peu de rems pafle à l’état concret ; on y trouve alors un fel criftalifé, qui ayant été purifié, prend les noms de fel fuñble, de fel effentiel d'urine , ou du fel microcofmique. Ce fel mis fur les char- bons, y fufe & fe change en un globule d’un verre tranfparent , femblable à une perle artificielle; diftillé avec des matières contenant du phlogiftique, il produit du phofphore, En faifant évaporer & paffer une première fois l'urine à l'etat concret, ce fel fe dépofe, & produit une grande quantité de criftaux. On obtient quelquefois , mais pas toujours , différents fels du premier dépôr , tels que le fel fufñble & le fel d'urine , & du deuxième dépôt, le fel perlé & quel- ques autres. Ce dernier fel fufe fur les charbons & fe fond en un verre tranfparent , femblable au précédent, mais qui devient opaque par le refroidiffement. Il ne donne point de phofphore par la diftillation avec des matières inflammables. Tome XXIX, Part. I, 1786. JUILLET. B 2 52 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Le refte de l'urine contient encore d’autres fels | qui fe criftallifent en fe dépofante , tels que le fel commun & le fel digeftif. Le fel qui fe dépofe le premier, ou le fel ricrocofmique , eft un fel neutre , compofé d’acide phofphorique, d’alkali mihéral, & d’alkali volatil ; mais les opinions font partagées fur la nature du fel perlé , produit ar le deuxième dépôt. M. Margraft , qui lui donne le nom de deuxième fel ou de fel fufble , penfoit que c’éroit le fel admirable perlé , & qu'il pouvoir en conclure qu'il ne contenoit point d'acide phofphorique, puifqu'on ne pouvoit en retirer du phofphore. D’autres , avec M. Pott, croient que c’eft une variété du fel de Glauber , parce qu'il fe rapproche beaucoup de ce fel par la forme criftalline , qu'il s'effleurit comme lui à l'air, & que par l’analyfe , il préfente quelquefois du fel de Glauber ; ce . phénomène cependant ne s'offre que rarement. t Ce qui me parüït le plus vraifemblable à ce fujet , c’eft que ce fel ou l’a- cide phofphorique fe trouve fuperfaturé d’aikali minéral, doit être regardé comme un fel neutre, & que dans cet état il n’eft point propre à produire du phofphore. Le {el microcofmique lui-même ne peut en donner qu’a- près le dégagement de fon alkali volatil à l’aide du feu. Le refte , qui eft la plus grande quantité , féparé par la leflive du réfidu charbonneux , produit des criftaux femblables à ceux du fel perlé. < M. Prouft, chimifte françois , prétend avoir découvert dans le fel perlé, une nouvelle fubftance faline analogue au fel fédatif, qu'il y fubflitue à l’acide phofphorique , & fuivant lui exifle dans le fel micros cofmique & dans l'acide phofphorique des os, outre l'acide phofphorique qui y elt effentiellement, Plufieurs chimiftes ont adopté le fentiment de M. Prouft, & entr’autres Bergmann , dans fon traité des affinités, où il lui donne le nom d'acide perlé (acidum perlatum ). Je ne nierai point fon exiftence, dit-il dans fa remarque , jufqu'à ce que des expériences plus exactes nous aient démon- tré auquel des deux acides on doit donner la préférence. Le procédé, pour obtenir cet acide , confifte à faire digérer le fel perlé avec du vinaigre concentré ; alors on laifle le tout crifallifer , on y mêle de l’efprit-de-vin & on filtre, il s’en fépare une liqueur épaiffe , qui étant verfée dans l'eau diftillée donne l’acide perlé. Dans cette opération, il elt bors de doute qu'une portion de l’alkali minéral ne foir enlevée au fel perlé. Dans cet état de faturation imparfaite il doit paroître en mafle fluide, & fi on lui ajoute de l’alkali minéral , il doit fe recriftallifer. L’analyfe & la fynthèfe prouvent également que l’alkali eft uni à l'acide phofphorique, ou. à tout autre acide dans ce fel ; en le foumettant à lanalyfe, it parofc que l'affinité du phlogiftique pour l'acide phofphorique eft trop foible dans cer état, pour qu'il s'y uniffe , puifque dans rous les cas ,il ne le peut que lorfqu'il fe trouve libre. Si l’on veut féparer l’acide phofphorique , ilfaut s'y prendre de la manière fuivante : on fait difloudre SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 13 ce fel dans l’eau avec du nitre ou {el marin ; à bafe de terre calcaire; | l'acide nitreux ou l'acide marin fe porte fur l’alkali minéral , & en dégage l'acide phofphorique qui s’unit aufli-tôc à la terre calcaire. Pendant l'ope- ration il fe produit beaucoup de chaleur, & l’ôn voit l'acide phofphorique combiné avec la terre calcaire , fe précipiter. On peut enfuire en f£parer l'acide phofphorique par l'acide vitriolique. Ce fel-phofphorique calcaire étant fondu fur les charbons, produit une très-belle lueur phofpharique. Si on fature l’alkali minéral enlevé au fel perlé avec l'acide phofpho- rique , on obtient un fel abfolumient femblable au fel perlé ; & fi on veut l'avoir à l'écat d'acide perlé de Prouft , on le fuperfature d'acide phofpho- rique. Je puis démontrer également pour quelle raifon la fubftance de Prouft fe trouve en moindre quantité dans le fel microcofmique , en recombinant ces trois parties conitituantes, favoir : l'acide phofphorique, Valkali minéral & l'alkali volatil , dans des proportions convenable, Il paroît par-là que la différencequi fe trouve entre le fel microcofmi- que & le fel perlé*, tient à la bafe alkaline , & l’on peut à volonté leur faire {ubir le paflage d’un état à un autre. Veut-on changer en fel microcofmique le fel perlé, on lui ajoute un peu d'acide phofphorique & d’alkali volatil. Veut-on au contraire transformer ce dernier en {el perlé, on le fature d’alkali minéral & on lui faic fubir l’action du feu , our en dégager l'alkali volatil. Malgré que je fois convaincu qu'il n'exifte point dans le fel fufble une fubftance différente de l'acide phofphorique , je crois cependant que fon analyfe peut préfenter de très grandes difficultés, puifque Purine des hommes n'eft pas La même dans toutes les circonftances. MÉMOIRE Sur la manière de déterminer l'élévation d'un fol au-deffus du niveau de la mer, conclue des obfervarions _de la hauteur du mercure ; Par M. PAsUMmoT. | bi baromètre eft l'inftrument le plus en ufage pouge déterminer les différences des hauteurs , trop éloignées pour pouvoir étre nivelées facile- ment Ÿ fans les frais immenfes que caufent les opérations des nivelemens lonos & difficiles. * F . \ . , Mais tous les baromètres ne font pas propres aux obfervations nécef- faires pour conclure ces déterminations, Il faut fe fervir de celui de Du. 14 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Toricelli qui eft en même-tems le plus fimple & le meilleur, & il Faut encore avoir égard à la capacité du tube. Cette capacité doit étre d'environ deux lignes au moins, & peut varier en plus fans tirer à conféquence. Si ce tube n'a pas ce diamètre , l'expérience prouve que le mercure s’y tient plus bas que dans les autres. Cet abaiffement augmente d'autant plus, que le tube approche plus du capillaire, & dès-lors l'inftrument elt défectueux (1). D’après ces principes j'ai commencé par conftruire, avec les précautions néceflaires, un baromètre de Toricelli. Le diamètre du tube elt d'environ deux lignes un quart. Dans la fuite j'ai conftruit encore trois autres baro- mètres femblables ; deux avoient deux lignes & demie de diamètre, le troifième en avoit au moins trois. Ces quatre inftrumens fe font toujours accordés dans leur hauteur & leurs variations. On ne peut douter que la fufpenfion du mercure , dans les baromètres ; n'ait pour caufe le contrepoids d'une colonne de l’armofphère , de même diamètre que celle de la capacité intérieure du tube qui lui eft correfpon- dante, & qui eft de même poids que la colonne du mercure, La célèbre expérience du Puy de Dome, & celies qui ont été faites enfuire,ont prouvé qu’à mefure qu'on s'élève ou qu'on s'abaifle , la colonne de mercure varie en hauteur ; elle diminue en raifon de l’élévation & augmente en raifon de la defcente, Certe expérience réuflit par-tout. Il fufñt de mooter au haut de quelques tours ou clochers , ou fur le fommer de queique montagne. En connoiffant la quantité verticale des toifes , qui répond à une ligne de variation du mercure , en hauteur ou en abaiflement , 1l eft facile de connoître l'excès des hauteurs , Les unes au-deflus des autres; mais en confulrant les expériences qui.ont été faites pour acquérir certe connoif- fance, on ne trouve que des réfüulrats fi peu d'accord enfemble , & fi différens les uns des autres , qu'il ne refte que des difhcultés prefque infolubles. On avoit cru pouvoir s'en tenir à l'évaluation de MM. Caffini & Maraldi. Leurs expériences poftérieures à toutes les autres, & d'accord avec un grand nombre de mefures oéodéfiques , ont paru décider que 61 pieds répondent à la variation de ia première ligne du mercure: qu'il faut enfuire 62 pieds pour la variation d'une feconde ligne , puis 63 pieds pour la troifième ligne , & ainfi de fuite en augmentant toujours d’un pied. Cette quantité eft à-peu-près celle qu'avoir déterminée M. Cañini, On a négligé les évaluations de M. la Hire & celle de M. Picart; mais cependant comfne MM. Bouguer & de la Condamine ont trouvé au (1) Depuis deux ans je laïfle en expérience un tube de Toricelli qui n’à qu'une ligne de diamètre. Le mercure s’y tient conftamment environ deux lignes au-deflous de la hauteur de plufñeurs autres tubes d’un diamètre plus grand. Cet abaïflement dépend fans doute de Pattraétion. Il eft inutile d’en difcuter la caufe, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. IS Pérou que ce calcul de MM. Caffini & Maraldi eft infufhifant , on s'eft reftreint à dire qu’on ne devoit l'employer que pour des petites hauteurs ; & il paroît aflez qu’on ne connoîftroit pas encore la quantité verticale de pieds ou toifes correfpondante à une ligne de variation du baromètre, fi M. de Luc, citoyen de Genève. n’eut enfin diflipé toutes les incerti- tudes par une nouvelle & favante méthode, confirmée par plus de 400 expériences faites tant à Genève qu'à Turin & aux environs. Cette méthode favamment expofée dans la connoifflance des mouve- mens céleftes de 176$ , par M. dela Lande, donneune précifion exacte que l'on n'auroit ofé efpérer. Il en réfulte que la quantité verticale de roifes correfpondante à une ligne de variation du mercure , eft variable à raifon de la denfité de l'air, c'eftä-dire au degré de température ; que cependant lorfque le thermomètre de M. de Réaumur eft à 16 degrés 3 quarts au- deflus de zéro , & lorfque le mercure eft à-peu-près à la hauteur de 28 pouces, 78 pieds ou 13 toifes, font la quantité verticale conftante pour faire varier le mercure d’une ligne. Quoique les expériences aient bien prouvé que cette quantité foit conftante , cependant comme il eft difficile de rencontrer la hauteur d'environ 28 pouces de mercure, avec la température de 16 degrés 3 quarts, cette méthode deviendroit prefque inutile, fi M. de Luc r’eût établi une règle plus générale dont on püt faire ufage dans tous les autres cas des variations de hauteur du mercure & de température. Cette règle eft que « la différence des logarithmes de deux hauteurs du baromètre , obfervée » en lignes , donne la différence d’élévation des deux ftations en toifes. > Si les logarithmes n'ont que $ chiffres y compris la caractériftique , 8 » que le thermomètre foit à 16 ° 3 quarts au-deflus de la congélation » dans les autres températures, il faut Ôter de la hauteur trouvée Dre pour æ chaque degré du thermomètre , au-deflus de 16 © 3 quarts. » M. Bouguer avoit remarqué au Pérou que cette différence des loga- rithmes de $ chiffres , donnoir à-peu-près en toifes les hauteurs des mon- tagnes , fi les hauteurs du baromètre étoient exprimées en lignes, Mais comme le degré de température de l'air n’entroit pour rien dans certe obfervation , les hauteurs trouvées avoient befoin d’une corredion pour s'accorder parfaitement avec les mefures géométriques , & M. Bouguer avoit remarqué qu'il falloit les augmenter de -. Aufli faut-il , d’après M. de Luc, ajouter quelque partie , lorfque le thermomètre eft au-deflus de 16° 3 quarts , & cela s'accorde parfaitement avec la remarque de M. Bouguer, parce que la température ordinaire du Pérou excède celle de 16 degrés. " J'ai cru ne devoir pas omettre la remarque de cet accord de la rèple de M. de Luc avec l'obfervation de M. Bouguer , parce qu’elle prouve en Ua de M, de Luc & confirme fes obfervations , ainfi qu'il l'a remarqué ui-même, 16 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Je pourrois encore ajouter que, dans le cas où l’on n’auroit point de rables de logarithmes, M. de Luc donne un moyen pour y fuppléer, en divifant, par les différentes hauteurs du baromètre exprimées en lignes , autant de fois qu’il y a de lignes de variation entre la ftarion la plus baffe & la plus haute, en divifant, dis-je, par ces différentes hauteurs , un nombre de pieds variables fuivant les différents degrés de température, & qu'il a cependant déterminé par fes’ expériences. Mais pour ne pas n'étendre inutilement, j'obferverai feulement que ces différens moyens fe fervent mutuellement de preuves , & que la quantité de 13 toifes déterminée par M. de Luc , eft à-peu-près moyenne proportionnelle entre les quantités déterminées précédemment par MM. Caflini , de la Hire, Picart, Vallerius, Cafini & Maraldi. J'ai penfé qu'il ne feroit pas inutile d’expofer ici ces déterminations, en remarquant qu'il eft très étonnante qu'elles différent fi Fort ies unes des autres. Quantités déterminées , Expériences faites , M: M Cities ets 10 toif, 5 pi.© po. près de Toulon. SENTE AMC) près de Toulon. M. de la Hire père4 12 4 © à Meudon, 12060070 à Paris. Es MPicart et AIN LU au Mont-S.-Michel. NEVERS IT ONE en Suède, MM, Caflini & % en différens endroits Mañaldi à bu 18299 5657 Qu Royaume (1). Puifque la hauteur du mercure varie à mefure que la colonne d'air correfpondante eft plus longue ou plus courte, il a donc fallu avoir un lieu fixe pour déterminer la hauteur du mercure; & comme cette hauteur varie encore à raifon de la variation de l’état de l'armofphére, il a fallu obferver la plus grande hauteur & la plus petite pour fixer une hauteur moyenne qui put être un terme de comparaifon. On a choifi pour cela le bord de la mer où la haureur moyenne du mercure. éft 28 pouces, qui font le terme de comparaifon & qui feront conféquemment le point fixe de la hauteur moyenne pour tous les en- droits qui ne feront ni plus élevés ni plus abaïflés. I faut donc conclure, qu'en déterminant la hautéur moyenne du mer- cufe dans Le lieu qu’on habite, on connoîtra fon élévation au-deflus du (1) J’aurois pu ajouter encore plufeurs autres déterminations ;, mais comme elles p’auroient rien douné de plus précis, celles-ci m'ont paru fufffentes, niveau x SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 17 niveau de la mer, au moins très à-peu-près, en réduflant en toifes la différence entre cette hauteur moyenne & celle de 28 pouces. C'eft ainh qu'après beaucoup#'obfervations on a déterminé la hauteur moyenne du mercure dans la falle de l'Obfervatoire royal de Paris, à 27 pouces 7 lignes 2 tiers , qui felon l’évaluation de MM. Cafini & Maraldi, donnent quarante-fix toifes d’élévation au-deflus du niveau de l'Océan, & 45 au-deflus du niveau de la Méditerranée. Pendant plufieurs années que j'ai habiré Auxerre, mais fur-tout pen- dant 3 ans, j'ai exactement obfervé prefque tous les jours, ( & fouvent plufieurs fois par jour lors des variations moins ordinaires ) la hauteur du mercure , dans mon tube de Toricelli, d'environ 2 lignes 1 quart de diamètre. Parmi environ 1200 obfervations, j’en ai 42 dans lefquelles le mercure a été au-deflus de 28 pouces , & 9 feulemenc dans lefquelles il a été au-deflous de 27. En comparant toutes ces obfervations , j'ai cru pouvoir fixer la hauteut moyenne du mercure à 27 pouces 6 lignes ; je trouve que c’eft le réfulrat moyen de trois principales obfervations faites fur la plus grande & la plus petite hauteur, comparées pendant trois ans, Il y a donc à Auxerre 6 Lignes de moins que la hauteur moyenne du bord de fa mer. Ces 6 lignes à raïfon de 13 voifes pour chaque ligne , donneront 78 toiles ; & comme la température moyenne de mes obfer- vations eft d'environ 10 degrés, & que felon la règle de M, de Luc, il faut dans cette température retrancher 1 fur 32, je dois conclure la dé- termination du fol de la ville d'Auxerre , à 76 toifes au-deflus de la Médi- terranée , & 77 au-deflus de l'Océan, à En retranchant 25 185$ logarithmes de27 pouces6 lignes ,ou 330 lignes de 25263 logarithmes de 336 lignes ou 28 pouces, il refte 78, & en retranchant 2 , à caufe de la rempérature de 10 degrés, Le dernier réfultac eft encore 76 toifes. Par le troifième moyen indiqué par M, de Luc, qui eft de divifer le nombre de 2$27$ pieds par 330, enfuite par 331, 332, 333, 334 & 336, on a le nombre jute, 76 toifes, parce que dans la cempérature de 10 degrés , c'eft ce nombre 25275 pieds qui doit être ainfi divifé. De ces trois calculs je crois pouvoir conclure qu'à la température d'environ 10 à 12 degrés, qui eft aflez ordinaire , 12 toifés 4 pieds font la quantité verticale moyenne, correfpondante à chaque ligne de variation du mercure , & en effec cette quantité étant multipliée par 6, produit exaétement 76 toiles. De toutes les obfervations citées ci-deflus, j'ai conclu la graduation du baromètre pour Auxerre. Je fixe le variable à 27 pouces 6 lignes , le beau à 27 pouces 9 lignes , le srés-beau à 28 pouces , le plus beau à 28 pouces 3 lignes , le #7auvais à 27 pouces 3 lignes , Le crés-mauvais à 27 pouces , & enfin rempéte à 26 pouces 9 lignes. Tone XXIX, Part. II, 1786, JUILLET, C 13 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, E] EP SECONDE'LETTRE DE M.'L'ABBÉ SPALLANZANI, | Profeffeur d'Hifloire - Naurelle dans l'Univerfité de Pavie ; A M: CHAR L.E,9),B O NENMErT, Membre des plus illuftres Académies de l'Europe ; SUR DIVERS OBJETS FOSSILES OU RELATIFS A L'HISTOIRE DES MONTAGNES ; Traduire de Llralien fur l'original imprimé dans les Mémoires de la Societé lralienne, Tome Il, par M.S. D. M. Subflances foffiles olfervées à Porto-Venere & dans [es environs. Phénomène furprenant obfervé dans la rivière du Ponenr. A UTANT l'intérieur du petit bourg de Porto-Venere & les rochers qui l'environnent font à l'abri des tempêtes, autant les parties extérieures font expofées aux coups de mer les plus violens , lorfqu'elles font en proie aux deux terribles vents d'Afrique & à celui du fud-eft. Ce dernier en particulier foulève les flots avec tant de violence & à une telle hauteur contre les écueils qui fervent de défenfe à ce petit terrein, que la mer {emble menacer de l’engloutir. J'ai été le témoin d'un de ces orages, & quoique je fuffe à l'abri dé roue danger , je ne pourrois vous repréfenter l'horreur que me fic éprouver ce fpetacle. J'ai voulu prendre avec exactitude la hauteur moyenne de l'élévation des flots dans les plus violens coups de vent; & quand je vous en parlerai, vous ferez étonné de leur force & de l'étendue de leurs effets. Les rochers qui font à la partie méridionale de Porto-Venere fe rongent & fe détruifent peu-à-peu, de même que les troisîles voilines, T7ro, le perit Tiro & Palmarin. On le remarque fur-tout dans cette dernière : les bords voiflins de la terre ont une pente douce; ils font couverts d'arbres & de plantes, tandis que la partie oppolée eft déferte & inacceflible, couverte de précipices, de ruines & d’horreurs ; les autres parties du rivage font renfermées par la rivière du ponent & par celle du levant, de même que celles qui s’approchent des côres de Provence. Il me paroît que la mer a beaucoup gagné fur là cerre dans ces parages; & pour parler feulemient de Palmarin , la plus “SUR L'HIST. NATURELLE ET LES' ARTS. 19 grande & Ja plus remarquable des trois îles que j'ai nommées, je crois être fuffilammenc fondé pour conclure que la même pente facile & longue qu'on obferve du côté de la terre avoir auf exifté du côté de la mer; mms que cette dérnière avoit été détruire par les orages qui fe font fuccédés pendant le cours des fiècles. La vue réfléchie de éés trois îles me force à les regarder comme ayant été autrefois réunies , & formant une île féule par leur réunion, ou plutôt comme une prefqu'ile attenante à Porto- Venere. É Les Naruraliftes ont fouvent profité des tremblemens de terre, des ravages des torrens pour pénétrer dans les entrailles des montaunes , & découvrirainfi leur nature par cette anatomie naturelle: le choc des vagues a-produic cet effet fur les plus hauts écueils des deux rivières de Gênes; mais fur-tout dans Pile Palmarin au midi & au levant. C'eft-Jà qu'un Phyfcien dans un bateau , lorfque la mer eft calme, peut fatisfaire fes-défirs. Je ne crois pas , dans tous mes voyages, avoir rien vu de plus inftructif fur les couches qu'on @bferve. La difpofition des couches qui forment les plus grands rochers par lefquels Palmarin eft cerminé ,eft remarquable : ces couches font prefque verticales; la différente épaifleur de chacune d'elles, leur figure, leur furface , leur entrelacemenc, leur différente direction à l’horifon , feront J'objer d’un Ouvrage particulier, On y trouve encore de profondes ca- vernes formées dans le roc vif. Elles font propres à fournir des con- noiflances utiles, quand on les étudie avec foin. Ces couches font routes calcaires, & toute l'ile ; qui a utie éirconférence ds trois milles, n’eft qu'une mafle de cette matière couverte par quelques pieds de terre dans la partie qui eft vis-à-yis du golfe ; c’eit-R que croiflent les végéraux qu'on:y trouve ; mais cette malle n’eft pas faite d'une feule pièce : elle eft formée d’une foule dé lits ou couches de pierres filicées les nnes fur les autres , & qui fe recouvrent fi exsctement, qu'on n’apperçoit entr'eux ni fable ni terre; & ce que j'ai dit fur la naturé & la difpofition des piérres de Palmarin, s'obferve dans les écueils des deux autres îles dont j'ai parlé. À une petite diflance du solfe vers le couchant ,on voit s'élever un rocher aflez haut compofé d’uné pierre marneufe dans laquelle l'aroile eft plus abondante, & qui efl' remarquable parce qu’elle a für la furface de très-belles empreintes de dendrites , & parce qu'elle renferme des mar: cañites teflulaires ou cubiques, Le marbre de Porto-Veriere eft célébré en Tralie & ailleurs par le beau poli qu'il reçoir, & les taches dorées qui reffortent fur un fond d'une couleur violette foncée: Quoiqu'on tire ce marbre de deux endroits particuliers de Palmarin , il paroïr qu'on peut le trouver dans plufieuré autres, & que le bourg de Porto-Venere eft bâti fur une mafle qui eft formée de ce marbre: il n'eft pas peut-être par-tout également beau. Le marbre de cette île n’eft point comme ceux-qui forment des montagnes Tome XXIX, Part, Il, 1786, JUILLET, C2 20 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; entières , il n'eft pas au moins comme eux fans mélange; on le trouve avec une pierre calcaire plus dure que lui, d’une couleur cendrée obfcure, & on ne peur l'en féparer qu'avec beaucoup de peine & de dépenfe. J'ai crouvé plufieurs crevafles de ces écueils calcaires remplies de ftalac- tites fpathiques, en partie fans formes & eu partie criftallifées. Les habirans du pays l'ignorent complettement ; cependant l'éclat qu'il reçoit lorfqu'on le polit, la beauté de fes couleurs, l'union de fes parties, le rendent précieux pour divers ouvrages, comme j'ai pu le voir en le faifanc travailler par un bon ouvrier, Ces pierres fe forment dans tous les lieux où les eaux de pluies s'échappent; elles font pleines de matières calcaires qu'elles enlèvent : elles les diflolvent , & en fe dépofant fur les parois des rocs , elles forment ces fpaths ; il feroit poflible que quelque principe d'acide vitriolique concourüt à leur formation. Il étoit curieux de favoir fi la partie des écueils qui font fous la mer eft la même que celle qui eft au-deilus ; mais j'ai trouvé qu’elles étoient une continuation de celle-ci. Malgré mes efforts je n'ai point pu découvrir fi cette chaîne de rochers qui environne le golfe, & qui forme les trois îles, renferme quelque teftacée ou cruftacée foffile ; j'ai obfervé la même ftérilité dans les rochers qui bordent le rivage de la même rivière du levant ; mais la rivière du ponent, dans l’efpace de foixante-dix milles, depuis Fenal jufqu'à Monaco, offre le phénomène oppofe. Toutes les montagnes qui bordent la mer , & même celles qui s’enfoncent dans le continent , font remplies de teftacées ; non-feulement on en trouve qui font entiers, mais fi l’on étudie la pierre avec un microfcope, on trouve qu’elle eft toute compofée de débris de coquilles. On fe fert de cette pierre pour bâtir dans tous les pays, & la quantité de cette pierre qui elt coute compofée de teftacées eft fi grande, que malgré tout ce qu'on peut en avoir enlevé, cet enlevemenc ne paroît cependant pas plus que fi l’on avoit Ôté d'une montagne un grain de fable ; mais ce qui eft plus étonnant encore, c’eft que ces coquillages font tous d’une feule & même efpèce ; favoir, un peigne d’une médiocre grandeur, qui eft entier ou réduit en morceaux plus ou moins gros: malgré mes recherches les plus fcrupuleufes , je n’ai pu découvrir aucun autre coquillage dans cette pierre. Mais comment une feule efpèce de coquillages a-t-elle pu être raflemblée de manière à former un nombre fi prodigieux que la penfée ne peut fe les repréfenter, fur-tout quand l’on fait que cette efpèce de coquilles eft abfolument inconnue aux pêcheurs du pays & même à ceux de Provence? Ce phénomène me femble unique lors même qu'on le confidère avec tous ceux de ce genre que les Naturalifes ont rapportés, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 2 Etonnante Fontaine d’eau douce qui jaïllit au milieu de l'eau falée. Recherches fur fon origine. Cette fontaine eft à foixante-cinq pieds de diftance de la terre & environ à un mille de Spézia ; elle s’élève de quelques pouces au-deflus du niveau de la mer, & forme une efpèce de bouton qui a environ vingt pieds de diamètre. Ce bouton eft plein de jets très-diftinéts quand la mer elt très- calme , & l’eau qui les forme paroît un peu troublée, fur-tout quand il pleut, on peut en juger facilement, L’eau environnante eft très-tranfparente: ces jets ne permettent pas à un petit bateau de s'arrêter au centre de ce beuton , on eft bientôt rejetté à la circonférence. J'ai trouvé Le moyen de me fixer à ma volonté au milieu du jet, ce qui m'a fourni le moyen d'examiner foigneufement l’eau du fond & la furface. L'eau de la furface n’eft pas douce , mais elle eft feulement moins falée que l’eau qui l’environne, La profondeur de la fontaine eft de trente-huit pieds & demi. Lorfque le plomb ef arrivé dans le voifinage du fond, l'on fent trembler la petite corde à laquelle il eft attaché, & comme on n'obferve point ailleurs ce tremblement, il eft clair que l’eau de la fontaine en jailliffant avec force contre le plomb & la corde , lui com- muniqué ce mouvement. Si l’eau de la fontaine étoit moins falée à la furface que l’eau de la mer avec laquelle elle fe mêle, il eft naturel de préfumer qu’elle doit être douce au fond pour s’en aflurer il falloit tirer cette eau du fond fans la mêler avec Ta ARTE mais comment en venir à bout. J'imaginaï une machine qui remplit parfaitement ce but, & je trouvai l'eau que je tirai très-trouble & fangeufe, mais elle écoit douce. Je dois remarquer encore que cetre eau eft très-fraïche en comparaifon de celle de la mer , parce qu’elle vient fous terre, & que la machine de laiton dont je me fervis fut une fois très-froiflée : ce qui ne peut être produit que par le choc violence de d'eau qui s'échappoit du fond, & qui lança la machine avec force contre une pierre. Je crois avoir découvert la fource de cette fontaine. On trouve deux torrens fitués près des flancs d’une montagne éloignée de trois milles de Spézia, qui s'uniflenr & qui f2 précipirent enfemble dans un gouffre äimmenfe, d'où leurs eaux qui bravent dans cette retraite les ardeurs de été, fortent & fourniflent l'aliment à cette fontaine qui jaillit au travers des eaux de la mer, Obfervations faites dans les carrières des marbres de Carrare. On ne parvient pas dans ces fouterrains fans danger ni peine , & l'on srouve peu de guides aflez courageux pour y conduire ; néanmoins avec . 22 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, des cordes pour nous defcendre & du courage pour braver les dangers qui nous environnoient, nous avons fait ce voyage fourerrain ; il étoit nécefluire, car quoique quelques écrivains aient parlé de ces carrières, ils l'ont fait feulement en litrérateurs & jamais en Naruraliftes. Comme je me propofe de publier un ouvrage fur ces matières, je me bornerai ici à rapporter quelques-uns des faits remarquables que j'ai obfervés. Si l'on confidère le pays de Pavie qui commence un peu au-defflus de Carrare , & qui s'etend jufqu'à fa plus haute fommité, où l’on tire le marbre, on ne rencontre que des matières calcaires qui ne forment qu’une feule mafle fans couche terreufe qui la divife ; on le juge d’abord , car la furtace eft abfolument découverte. Cette pierre calcaire n’eft pas d'une même qualité dans toute cette mafle. Une grande partie a {on grain groflier , fa couleur cendrée tirant fur le rouge : celle-ci eft peu propre aux ufages de la fociéré : l’autre au contraire eft d’un grain plus ou moins fin, qui peut être polie jufqu'à recevoir un très-grand éclat. Sa couleur même eft précieufe: c’eft dans cette dernière pierre qu’on trouve les fameux marbres de Carrare, le /latuaire , le blanc ordinaire & le bardglio , dont la couleur eft plus ou moins bleue. On comprend que ces différentes efpèces renferment une foule de-variétés. Cesdivers marbres font quelquefois féparés & quelquefois contigus, de manière que le flatuaire ne fe confond pas avec le blanc ordinaire , quoique la couche qui forme le premier foit en contaét avec celle qui forme le fecond ; mais fouvert aufli ces deux marbres ne forment qu'une feule couche , dans laquelle le premier décénère peu-à-peu dans le fecond, On obferve quelquefois dans les marbres de Carrare ces mélanges de couleurs que le prifme peint d’une manière fi vive; ce qui me fait croire, comme je le prouveraï, que ces trois efpèces de marbre n’en font réellement qu'une feule qui a plufieurs variétés. La pierre groflière & commune dont j'ai parlé renferme aufli fouvent le beau marbre, de forte que pour arriver à une belle veine de ce marbre choifi, il faut faire fauter plufieurs pieds de pierre commune, d'où je me fuis perfuadé que Le noyau de tout ce pays eft de marbre. | Quelques auteurs ont cru que les marbres fe reproduifoient , & que quelques carrières de Carrare qui avoient été autrefois épuifées fe fone remplies de nouveau marbre; & ils prouvent cette idée, parce qu'ils difenc qu'on a trouvé des inftrumens employés par les Romains pour l'exploitation de ces carrières, enfermés dans le marbre, Je ne fus pas content d’avoir interrogé fur ce fait les mineurs & toutes les perfonnes de Carrare qui pouvoient en être informées , quoiqu'elles m'ailuraffent n'avoir jamais rien vu ni ouï direde pareil; mais je me fuis réfolu à vifiter les carrières abandonnées depuis un tems plus ou moins long. On en trouve un grand nombre, & on reconnoît bientôt les plus anciennes qui ont été exploitées par les Romains ; mais quoiqu’elles aient SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 23 été oubliées depuis plufieurs fiècles , il n’y paroîc aucune trace de la réproduction du marbre; on y trouve les petits morceaux des trois efpèces de marbre amoncelés. Je les ai fait remuer pour en examiner quelques- uns; jai remarqué quils n'avoient aucune apparence de matière de marbre qui fe füt reproduite fur eux : on y obferve tous les angles ,toures les formes que doivent leur avoir donné le marteau des mineurs, de forte que je fuis forcé de conclure que Les marbres de Carrare ne fe reproduifenc point comme quelques pierres, Mais j'ai obfervé dans plufeurs carrières un phénomène propre à expliquer comment on a pu trouver dans la pierre des inftrumens deftinés pour fon exploitation; en fuppofant que le fait foit vrai, plufieurs carrières où l’eau entre font couvertes d’une croûte pierreufe & dure, plus où moins épaifle, & dans laquelle on trouve des corps étrangers lorfqu’on la rompre comme des éclats de marbre ou de pierre d'une autre qualité, Quand done cette croûte commencçoit de fe former, s'il y avoit des inftrumens de mineurs là où elle fe formoit , il eft facile d'imaginer qu'ils y ont été emprifonnés, mais on apperçoit bientôt que cette croûte n’eft qu'une flaladite, & n’eft point du marbre. Malgré les recherches les plus exactes & les plus opiniâtres, je n'ai jamais pu découvrir un feul figne de corps marins dans le marbre de Carrare & dans la pierre commune qui en eft voiline; mais j'ai trouvé dans le marbre deux autres corps étrangers fort intéreflans pour les lithologiftes, Le premier eft une pyrite criftallifée ou une marcailire qu'on trouve en rompant le marbre ftatuaire , on ne l’obferve pas dans toutes les carrières; il n°y en a qu'une feule qui en fournifle : elle elt à trois milles de Carrare dans un lieu appelé la Ruzera. Cette marcaflite eft un foufre minéralifé par le fer, d’un jaune clair, faifant feu avec le briquet, rarement à fix faces , mais pour l'ordinaire.elle en a douze ou quatorze, & quelquefois plus. Les plus grands morceaux font de trois lignes & un quart: les autres ont befoin de la lentille pour être obfervés. Entre les plus grands & les plus petits il y a une férie prefqu'infinie de grandeurs différentes , & chacun de ces morceaux petit ou grand eft tellement emboîté dans le marbre , qu'il fe rompt prefque toujours lorfqu’on veut l’arracher. Certe marcaflire ne fe trouve pas dans les parties folides du marbre, mais là où il fe trouve quelques fentes, Si donc l’on apperçoit une de ces petires fentes , & qu'on y plante un cifeau en faifant effort , le marbre fe partage en deux, & les deux faces font couvertes de ces petits criitaux pyrireux ; en obfervant ces faces ouvertes du marbre, on y découvre de petits creux qui fervoient de logettes aux criftaux, & qui font les places où étoient les criftaux reftés fur la face oppofée , comme on s'en apperçoit en replaçant les deux faces dans leur'premier état, La conféquence qu’on en peut tirer, c'eft que les pyrires criftallifées préexiftoient au marbre, que ce marbre a d'abord été fluide ou du moins une pâte fort tendre, . 24 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Les propriétaires de certe carrière m'ont affuré qu'il y a environ vingt ans qu'on commence à découvrir cette pyrite ; & comme ce marbre uni à ces pyrites eft extrêèmement beau, j'en ai fait travailler quelques morceaux, qui font très-remarquables. On trouve encore très-rarement ce minéral dans quelques morceaux du marbre qu'on appelle le bardglio. Le criltal de roche eft l'autre efpèce de corps étrangers obfervés dans les marbres de Carrare, mais ce qu'il y a de remarquable, c’eft que ces criftaux font ordinairement adhérens à une matrice filiceufe ou quartzeufe ; auili on les appelle des criftaux quartzeux, & il eft très-rare de les trouver fur une bafe calcaire ; mais ce qui les rendra encore plus précieux aux Naturaliftes, c'eft qu'ils fonc fupérieurs en beauté aux criftaux Les plus beaux de Hongrie, d'Allemagne & de Suifle, qu'on trouve dans le cabinet impérial de Pavie; aufli je me propofe de les décrire avec plus de foin ailleurs: on trouve feulement ces criftaux comme les pyrites dans le marbre blanc ordinaire d’une feule carrière ; il eft extrêmement rare d’en trouver dans les autres carrières. On n’obferve pas ces criftaux à la furface du marbre, mais toujours dans l'intérieur ; & il s’y trouve conftamment placé d’une manière déterminée, Il eft donc clair que les criftaux n’exiftent pas dans les parties folides , mais feulement dans celles qui font vides, où chaque pièce eft coujours plantée fur la furface de la cavité, & où l’on n'en trouve aucune qui foit détachée ou libre. J'ai appris ces faits, non- feulement des ouvriers, mais par mes propres yeux, ayant fait brifer plufieurs morceaux de ce marbre. J'ai bien vu l’abfurdité de l'opinion des mineurs qui croyent que ces criftaux fonc tendres tant qu’ils font enfermés dans le marbre, & qu'ils s'endurciflent lorfqu'ils font expofés à l'air , mais on ne peut douter que la dureté qu'ils ont quand on les fort de leur prifon, ils l’avoient déjà lorfqu'ils y ont été enfermés ; c'eft au moins tout-à-faig conforme aux loix de la criftallifation, Obëfervations fur les Brouillards extraordinaires & les Tempétes de 1783, obfervés fur les Appennins. Quoique l'obfervation de ce météore n'entrât point dans le plan de mon voyage , & quoiqu'elle foit étrangère à mes occupations, je n'ai pu me difpenfer d'en remarquer les circonftances : le brouillard & les rem- pêtes précédèrent d'un mois mon départ vers la mer. Avant le milieu de juin l'air de la Lombardie étoit fort bruineux, & quoique le brouillard n'éclipsât pas le foleil, il diminuoit beaucoup fon éclat, & le faifoie paroître le matin à fon lever & le foir à fon coucher comme s’il éroit couvert de fang ; il fouffloit alors un petit vent d’oueft qui continua pen- dant les jours fuivans: on efluya pendant ce temsà Pavie & dans les envi- rons plus d’un orage accompagné de pluies, de tonnerres & de foudre, Sa direction SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 2$ direion éroiroccidentale, Après l'orage on obfervoitle brouillard cominie auparavant, & le 23, étant parti de Pavie pour Reggio , & érant refté trois jours fur un bateau en defcendant le P6, j'obfervai que le brouillard couvroit tout le pays que je traverfois , & qu'il reflembloit à celui que j'avois obfervé à Pavie. Le profefleur Toaldo, dans fon Mémoire fur ce fujer , décrit l'étendue de l'orage du 26 juin, & il le montre rempliffant l'efpace de l’une à l'autre mer ; il fait connoître la quantité prodigieufe de foudres qui le füivirenc. Pendant ce jour à Hualtière dans l'Etat de Regoio au bord du P6, le ciel fut feulement nébuleux ; mais on obfervoir toujours dans L’air un brouillard très-épais dont j'ai parlé. A l'entrée de la nuit, ils’éleva un orage terrible qui dura pendant plufieurs heures. 11 fe termina en une fimple pluie qui dura prefque jufqu'au matin. Je n'ai jamais tant entendu de tonnerres que pendant cette nuit :il me fembloic qu'ils fe fuccédoient dans des tems égaux ou prefqu'égaux : je voulus en faire l'épreuve , & j’employai le feul moyen que j’avois dans mon lit & dans Pobfcurité , je veux parler des pulfations du pouls; je m'apperçus que je ne m'étois pas trompé : je comptai cent coups de tonnerre, & entre l'un & l'autre il ne s'écouloit pas moins de dix-neuf pulfations, ni plus de vingt- deux. Il fembloit que ce füt une machine éleétrique qui demandoit pour fe charger un tems déterminé après l'éclat de ces cent tonnerres. Les autres qui fuivirent en très-grand nombre, n’obfervèrent plus la même proportion pour le tems, Le 27, le ciel refta nébuleux , & la pluie de la nuit ne diminua point le brouillard. Pendant la fin de ce mois & la première {emaine de juillet, l'air fut également plein de brouillards dans l'Etat de Reggio & dans le Modénois, & il y eut des orages accompagnés de gréle. Le vent du couchant fouffla conftamment; mais il écoic plus ou moins fort, & quoiqu'il foufflät avec affez de force , le brouillard ne ceffa pas , feulement il commença à fe raréhñer toujours davantage , & le vent du couchant ceffla de fouffler,. Ce brouillard dont une extrémité touchoie la terre, & qui s'élevoit à une hauteur que l'œil ne pouvoir méfurer, étoit fi fec qu'il n’humeétoit ni les habits, ni les plantes , ni les autres corps terreftres, [Il paroïfloit même n’être point compofé de par- ticules aqueufes, comme les brouillards ordinaires. Le profeffeur T'oaldo l'a déjà remarqué, & fi ce brouillard avoit été vaporeux, après un venc fort & une pluie abondante il auroit été diffipé, comme je l'ai fouvent obfervé à Pavie, où les brouillards font très-épais & très-fréquens. Je crois bien que ce brouillard fingulier étoit chargé de fluide électrique, & que c'eft à cette propriété qu’il faut attribuer le nombre fingulier de tonnerres qu'on entendit. J'obfervois avec foin tous les orages qui s’élevèrenc pendant la durée de cé brouillard, Je le trouvai toujours plus plein de feu que d’eau; car pour l'ordinaire la pluie éroit foible & les tonnerres Tome XXIX , Part, Il, 1786. JUILLET, D 26 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, crès-fréquens. Dans deux occafions plulieurs tonnerres fe firent entendre & il ne tomba pas une goutte d'eau. J'épiois avec attention la nuée orageufe quand elle vint au zénith & quand elle le quitta, & je vis clairement qu'elle n'étoit pas pleine d'une grande quantité d’eau, car les nuages orageux qui donnent naiffance à ces grofles averfes font très-gros : ils fe préfentent comme de grofles tours , au lieu que ceux qué je voyois alors étoient fort minces. Une autre différence que je remarquai entre les orages qui s'élevèrent pendant le règne de ce brouillard & les autres, c'eft que ceux qu’on obferve com- munément fe forment lorfque le ciel eft ferein ; ils grofiffent peu-à-peu , s'élargifient (ur l’horifon , verfent un torrent d’eau ou de grêle, & enfuite en fe portant ailleurs ou en fe diflolvant , ils rendent au ciel fa férénité : au contraire, pendant le brouillard dont je parle, un voile nébuleux çouvroit une très-grande étendue de pays, & occalionnoïit tantôt dans un jour tantôt dans un autre les orages les plus bruyans & les plus propres à effrayer ; mais quoiqu'ils finiflent, le ciel refle toujours bruineux, Il m'a paru que les ronnerres & les foudres de cette faifon avoient encore une fingularité qui les diftinguoic des autres. Les premiers ne font pas pour l'ordinaire accompagnés de ce fon aigu & alongé qui les fait reflembler à un ou à plufieurs coups de canon; mais ils reffembloient à la vérité beaucoup plus en grand-au fon-que produit.une canne qui fe brife quand on en veut rapprocher les bouts, ou à celui que produit un violent coup de bâron fur une table, Ces tonnerres que leur bruit obfcur annoncoit pour être fort élevés, n'éroient pas continués, mais interrompus par.de petits efpaces de tems, commeilé profefleur Toaldo l’a aufli obfervé. 3 “où 85 J'ai parlé jufqu'ici du brouillard fec & des phénomènes qui l'accom- pagnèrent, tels que je les ai obfervés dans lés plaines de la Lombardie : je veux parler à préfent de ce brouillard rel que je l'ai vu dans les montagnes quand je traverfai les Apennins pour aller à Porto-Venere, Je fis cetre courfe Le 23 juillet : le brouillard étoit alors la moitié moins denfe qu'en juin: Le ciel éroit ferein , à l'exception de quelques orages que le vent d'Afrique amenoit ; le brouillard étoir.aufli.épais fur la cime des montagnes-qu'à leur piéd. Quand jefus engagé dans la chaîne des montagnes, j'obfervai für-tout fi le brouillard évoit le même dans les gorges & les bas-fonds , & je le rrouvois roujours le même. Je voyois fe former fous mes pieds des ras de,brouillards vaporeux qui me mouilloient aufli-tôe que jy entrois, tandis que l’autre étoit fort fec, mais les premiers étoient plus épais que les autres. Le phénomène Le plus grand que je:vis, fuc celui qui s'ofrit à moi fur la partie la plus.élevée de ces montagnes; j'étois à la diftance d’un mille &: demi de ce fommet:, quand je me trou- vai enveloppé dans une grande quantité de nuages portés par le vent d'Afrique. En avançant \j’entendis un coup de tonnerre qui me parut SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 2? très-proche; en montant toujours au-travers des nuages, la pluie. me furprit avec le vent, & je m'apperçus bientôt par les tonnerres qui rouloient autour de moi & parles éclairs qui s'échappoient de routes parts, que j'érois au milieu d'un orage ; j'encouragezi mon guide efrayé, je montai avec plus d’ardeur, & j'atteignis au bout d’une demi-heure le fommer où je défirois d'arriver. Il s'appelle Cy/à, & c'eft le point de partage entre les Etats de Tofcane & ceux de Parme; La pluie étoit moins forre , mais le vent étoit plus violent & l'air très-froid ; Le chermo- mètre defcendit d’abord à 7 degrés & trois quarts, quoiqu’au pied de la montagne il fût à 25 degrés au-deflus de o. Je commençois à defcendre, quand je fus arrèré par un phénomène inattendu. Je levai les yeux au- deflus du chemin vers le midi, & je vis une clarté au travers du nuage orageux qui me parut produite par les rayons du foleil qui frappoient la fommité d’une montaÿne voifine plus élevée. En fortant du chemin , la Cifa s'élevoit doucement vers ce lieu d'où venoir cette lumière éclatante, & je me dérerminai d'y aller. À melure que je montai , les nuages fe difli- pèrent ; la lumière croifloit, la pluie & le froid diminuoient, & en continuant de monter, je vis le foleil ; je fus hors de l'orage, & je le vis rouler fous mes pieds. Je n’efpère pas revoir un fpe@acle auffi beau. J'écois fur la crête de la montagne, l'orage au-deflous de moi me ’paroifioit comme un lac immenfe nageant dans l'air, éclairé par le foleil , & tourmenté par la tempête: les couches fupérieures des nuages orageux réfléchiflant la lumière, formoient cette illufion. Le vent d'Afrique en foufflant faifoit rouler les nues d'une extrémité à l’autre , & leurs figures bifarres repréfentoient les vagues; mais ces nuages avoient non-feulement ce mouvement progrelif, ils'en avoient encore un autre de rotation qui formoit divers tourbillons. On les voyoit tour-à-tour paroître & difpa- roître, comme dans les eaux courantes des fleuves. La pluie en tombant fur les rochers & les arbres qui‘les couvroïenc, faifoit un bruit confus fans interruption; il étoit augmeéntéipar lé vent qui fecouoit les branches, & par les torrens qui bondifloient & fe-précipitoient au-travers des fentes. | Les tonnerres & les éclairs qui étoient fréquens; fixèrent mon attention : je cherchai fur-touc à découvrir s'il étoit produit par une étincelle élec- trique qui s’'élance d'un nuage plein d'électricité vers un autre qui en eft tivé, comme les Phyficiens modernes le croyent; mais je ne pus rien voir de diftinŒæ, parce que cet amas de vapeurs ne fembloit former qu'un feul nuage ; feulement je voyois s'échapper du fein de ces vapeurs une forte étincelle ou fimple ou divifée en plufieurs rameaux, qui dans un inftant parcouroit un très:grand efpace : pour l'ordinaire cet efpace n'étoit pas en droite ligne, mais il formoit divers angles ou plutôr des zig-zags, ce qui le rendoit femblable aux fortes étincelles d’une bonne machire électrique ; bientôt après j'entendois le bruit du tonnerre, mais ikn'étoic Tome XXIX, Part. II, 1786. JUILLET. DZ 28 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, pas fort. Je fus pendant un quart-d’heure l’admirateur en filence de cette fcène qui finit d’abord , & me rendit la vue de La Cifa & des lieux voifins. Je dois ajouter à tout ceci trois obfervations ; 1°. pendant l'orage le vent fut foible dans les parties baffes de la montagne ; 2°. tandis que le thermomètre éroit à 7 degrés & trois quarts dans le nuage orageux, il monta fur la cîme à 12 degrés, quoiqu'il füt à l'ombre ; 3°. le brouillard fec fur roujours le même, foic fur cetre cime, foit dans cous les lieux où il avoit plu. J’obfervai ce même brouillard à Pontremoli & le jour fuivant à Spezia. Ce golfe & celui de Gènes en étoient couverts ; vers le $ août il s’étoit peu-à-peu, mais entièrement diflipé. Pendant mon féjour à Porto- Venere il reparut deux fois, la première par un vent d'Afrique, l’autre par un vent de ful-eft, mais il dura peu. Voilà les principaux phénomènes relatifs à ce météore extraordinaire dont je me fuis occupé. M. Toaldo croit qu'il eft une fuite des tremble- mens de terre éprouvés en Calabre , parce que d’abord après la terrible cataftrophe de ces provinces il fe forma un brouillard très épais qui fut fans doute produit par une quantité confidérable d’exhaläaifons qui fe dégagèrent des entrailles de la terre, qui remplirent l'armofphère, & que les vents répandirent par-tout : ce qui a rendu cette hypothele probable, c'eft la durée d'un vent propre à nous faire parvenir le brouillard fec en l'enfevant à ces régions défolées , & enfuite l'élévation de ce brouillard qui ne touchoit pasla terre, & qui paroifloit précipité d’en-haut dans notre atmofphère, Je connoiflois cette hypothèfe avant de faire mes obfervations : elle me parut ingénieufe & plaulble &- elle me: paroît encore à préfent digne d’atrention ; mais il, me femble que quelques-unes des circonflances que j'ai obfervées dans ce brouillard, font un peu différentes de celles que M. Toaldo a dépeintes, Ainfi, par exemple, dans la Lombardie Autri- chienne & Modénoife j'ai obfervé un vent conftant d’oueft pendant que je brouillard étoit le plus épais, tandis que M. Toaldo l’a trouvé fud- oueft. Outre cela, le brouillard n’éroit pas fi élevé qu’à Padoue; mais je J'ai vu toucher laterre, & elle étoit auñi épaifle fur Les cîmes de l'Apennin comme dans les précipices les plus profonds. Sur les collines de Regoio, dans les premiers jours de juillet, je fis cette expérience fur ce brouillard tandis qu'il écoit encore fort épais : je fis faire une petite cabane de farment avec une très-petice porte ; elle éroit parfairement fermée par-tout, à l’exception d'un trou rond que j'avois ménagé en haut pour y introduire un rayon folaire qui alloit frapper le fol de la petite cabane. Mon but étoit de voir fi en me renfermant dans ce lieu je pourrois, en fixant le rayon lorfqu'il rafoit la rerre, voir au- travers le brouillard, Je le vis en effet, & mieux encore avec une lentille. Je difinguois les particules qui le compofoient : elles n'étoient point SUR L'HIST. NATURELLE ETLES ARTS. 9 globulaires comme les véficules que M. de Sauflure a fi bien décrites : mais elles avoient une figure irrégulière, femblable à celle des exhalaifons terreftres. Je remarquai que ces particules, au moins plufeurs, s’élevoienc de terre, de forte que fi cette obfervation étoit univerfelle , le brouillard ne feroit pas étranger, mais local : je me garde bien de décider cette queftion. Avant de finir ma lettre, je veux ajouter quelque chofe fur les orages, Quand je me trouvois près de Panie, les jours où il n’y avoit point d'orages étoient rares. Je cherchai plufieurs fois à avoir le fpectacle que j'obfervai fur la Cifa, mais inutilement: quand j'arrivois fur la cîme des montagnes, l'orage étoit fini ou paflé ailleurs; mais j'eus occalon d'obferver la formation des orages au milieu de la matinée, Sur les rocs durs & très-arides, on voyoit paroître de petits amas de vapeurs qui reffembloient à la fumée : quelquefois ils fembloïent toucher la terre, & d'autres fois s'élever en l'air. Ces amas de vapeurs ‘’augmentoient par l'addition de nouvelles qui fe produifoient ; leur mouvement très-lent étoit afcenfionnel ; en montant elles groflifloient, ou bien elles difpa- roifloient peu-à-peu. Lorfque leur volume croifloit , elles s’approchoient & parvenoient à fe toucher ; enfin vers midi elles ne formoient plus qu'un nuage fort grand ; alors le nuage formé de tous les autres dominoit Ja montagnes: les parties dont les figures étoient quarrées fe trouvoiene très-blanches , parce qu'elles étoient fortement éclairées par le foleil, tandis que le relte étoit plus ou moins obfcur, fuivant la privation plus ou moins grande de la lumière ; le nuage s’étendoit & devenoit plus denfe : on y remarquoit des endulations & des mouvemens de tour- billon : alors on commencoit à appercevoir les éclairs & le tonnerre. J'ai conftamment remarqué que lorfque l'orage commencoit , les étincelles électriques éroient très-courtes & les tonnerres très-petits; mais les étincelles s'alongeoïent & les tonnerres devenoient plus bruyans à mefure que l'orage croifloit. Quand une fois il s’étoit accru jufqu'à un certain oint, il verfoit avec abondance l’eau ou la grêle , & il finifloit pour ces déferts où il s’éroir formé , ou bien il étoit porté ailleurs par les vents, Ce vent paroifloit produit par la nuée orageufe; car quoique je n’aie poine pu me trouver fur le Panie pendant l'orage, je me füuis rencontré dans fes bords : le vent y fouffloit avec force, &il paroifloit venir du lieu de la nuée orageufe. J'ai obfervé que le vent finifloit avec la diflolution de la nuée ou lorfqu'elle s'éloignoit ; mais dans une autre occafon je m’étendrai davantage fur ce fujer, & en ceffant d’être hiftorien , je tâcherai de faire connoître mes conjeétures philofophiques. pate 35 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, RUE’ C' H:ETR (CHANESS SUR L'ORIGINE DU NATRUM OU ALKALI MINÉRAL NATIF ; Par M. le Chevalier LoRGNA: Traduit de l'Icalien, par M. CHAMPY, de ! Académie de Dijon. LA Essror dominant du fiècle eft une des caufes principales qui con- courent à accélérer ou retarder plas dans un temps que dans un autre , l'avancement des fciences & des arts. La rendance naturelle des hommes à s'imiter réciproquement maintient ce fecret affentement, qui fait que l'étude du plus grand nombre devient peu à peu celle de tous, & que chacun , fans s’en appercevoir , fe modèle & fe conforme imperceptible- ment à l'exemple, à l’opinion & à l’autorité de fon tems ; de [à vient que les études qui languillent dans un fiècle guerrier , font fuivies avec ardeur dans un autre confucré aux lettres , & que l'attention des hommes changeant continuellement d'objet , fuit les variations fuccellives des inftitutions & des habitudes dominantes. Faut-il donc s'étonner fi d'innombrables objets , auf utiles qu'agréables , font reftés jufqu'à nos jours fans être obfervés , fi dans les temps paflés les connoiffances humaines n’ont pas fait des progrès aufli rapides que dans le nôtre, & fi aujourd’hui des nouveautés naïflent de toutes parts : qui ne voit en cela l'ouvrage d'un fiècle confacré à l’expérience , à faire des obfervations & des tentatives fur coute forte de matières © Il eft vrai que tout ce qui a été fait n’eft pas fans incertitude , que beaucoup de vérités font encore ifolées & fans fuite , qu'un grand nombre de conféquences ne font pas aflez fondées & que plufeurs obfervations femblent fe contredire ; mais on n'en doit conclure autre chofe , fi ce n'eft qu'il nous refte encore beaucoup ( mais beaucoup) à faire. Un édifice n'eft pas ordinairement deftiné pour celui qui ne fait que raffembler Les matériaux néceflaires à fa conftruction ; la poftérité recueillera un peu plus tard ce fruit de nos foins , qui aujourd’hui n'eft pas encore mür , & il doit fuffire aux vivans de jouir du doux preflentiment des éloges qu'en donnera un jour aux hommes bienfaifans dont les noms feront confervés. IL n’eft cependant pas fans exemple que dans ce fiècle on ait fair, dans différentes parties de la phyfique, des obfervations capitales & fécondes , & que prévenant nos defcendans par une heureufe anticipation , nous en ayons tiré nous- mêmes de grands avantages, Je défire que celles que j'expofe ici foient de cette clafle & qu'elles puiflent fervir à répandre la lumière fur un SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 31 très grand nombre de matières qui font partie de la rerre que nous habi- tons & qui font encore enveloppées d’épaiffes ténèbres, I. Norions générales fur le Natrum , ou l'alkali bafe du [el commun, Le ratrum , dont le nom nous vient du mot grec rarper , eft cer alkali fixe, bafe du fel commun , autrement alkali minéral ou muriatique , qui s'obtienc par la leflive des cendres de plantes marines demi-fondues , agglutinées & en quelque forte foudées , d’où il a reçu le nom de /oude. Les ufages très-importans auxquels ce fel eft employé de nos jours, en ont fait un objet intéreflant , & depuis long-tems il eft pour les phyficiens le fujec d'une fuice de recherches. Les anciens le connoifloient comme nous, mais ils n'en avoient pas une idée aflez diftinéte pour ne pas le confondre avec le nitre & avec l’alkali végéral qu'on trouve dans les cendres des plantes rerreftres ; les arts n’exigeoient pas comme aujourd’hui qu'on employät ces fels féparément , ni que l’un fût préféré à l’autre ; ils favoient cependant rendre le zasrum cauftique avec la chaux, adul- ceratur in Egypto calce. Deprehenditur guflu ; féncerum enim refolvitur facile, adulrerasum pungis(Pline cap. X,, lib. XX XT). Ils connoifloienc faction de cet alkali fur la cire, cera punica fit hoc modo ; ventilatur Jub dio Jœpius cera fulva : deinde fervet in aqua marina ex alto petita, addito nitro 6e, ( Plin. kb. XX XL, cap. XIV). J'ajouterai que j'ai cbfervé le premier , dans un petit ouvrage imprimé depuis peu à Vérone, que cette cire , propre à la peinture & à la médecine, décrire par Pline, ne pouvoit être une cire fimplement,.blanchie , qui n’eûr été ni mifcible aux couleurs de la peinture , ni propre à pénétrer dans les premières voies & à s’infinuer dans le corps humain. Comme Pline donne toujours in- différemment le nom de nitre au arrum , démontré tel par fes caraétères très-évidens & bien diftinéts de ceux du nitre proprement dir, on doit ici prendre pour un zatrum , pour un vrai alkali minéral, le nitre em- ployé dans la compolition de la cire punique. Il en réfulte nécéflairement que la cire punique éroit un favon de cire très-propre aux ufages de la peinture & de la médecine ; ce-queimes premières expériences , & celles que d’aurres ont faites depuis, prouvent fufifamment , fans. qu'il foit befoin d'en parler ici. Cependant les anciens favoient auffi compofer des favons, en combinant directement un alkali avec une fubftance huileufe concrète. « Prodefl & fapo ; Gallorum hoc inventum efl rutilandisca- » pillis. Fis ex febo & cinere. Optimus fagino & caprino ; duobus modis, » Jpiflus & liquidus ».( Plin. lib. X XVIII, , cap. XII). s A ë Leratrum fe préfentoit abondamment & fpontanément en efloref- < + 32 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, cence fur les bords des lacs de la baffe Egypte, dans la Nubie, dans les laines de la Perfe, dans l'Inde, au Tranquebar, dans la Syrie , dans l'Aflyrie , dans plufieurs parties de l'Afie mineure , & les anciens le trouvoient quelquefois pur , quelquefois mêlé de fel commun. On en recueille encore aujourd’hui dans ces régions, auprès de Tripoly, ainfi qu'à Ephèle & à Smyrne. Il ÿ en a dans la Hongrie , dans la Sibérie, fur les bords dela mer Cafpienne , & dans plufieurs autres parties de l'empire Rufle. Il ne laifle pas aufli de fe manifefter tous les jours çà & là en Europe, tantôt enveloppé dans des fubftances volcaniques , tantôt en efflorefcence fur des matières calcaires ; enfin il fe trouve fouvent en diflolution dans les eaux minérales. Je ne puis dire fi, outre le zatrum natif produit fpontanément , les anciens ont connu celui que nous retirons des cendres des plantes marines dometiques. IL eft vrai que Pline faic mention ( Zb. XX XI. cap. X) du fel qu'on obtient par la combuftion du chêne, mais ce fel ne peut être qu'un alkali végécal, tel que celui dont il eft parlé ci-deflus pour le favon inventé par les gaulois. La combuftion des plantes marines , à l'effet d’en retirer le zatrum , femble donc être une invention de nos jours, qui au plus a été confufément connue des anciens, Ils ne favoient pas aufli que le fel commun , ce fel précieux , le plus grand des bienfaits dont la terre & la mer abondent fans mefure , eût pour bafe le zatrum com- biné intimément avec un acide particulier dont il eft faturé ; ils favoiene encore moins qu’on püt rompre cette union , décompofer le fel commun , & par cette voie obrenir Le zasrum libre. TTL, Mais cet alkali fi abondamment répandu dans les différens règnes de Ja nacure , foit libre , foit combiné ; d’où peut-il tirer fon origine & fes principes ? il faut croire que le profond filence de tous les phyliciens fur cette queftion ne provient que de ce qu'ils n'ont pas été à portée d'ob- ferver la génération de ce fel, & de furprendre pour ainfi dire le fecret de la nature. Il y en a qui ont foupçonné que dans l’origine il appartenoit au règne végétal ; maïs l'expérience & les faits , comme nous le verrons dans fuite de ce mémoire , ont depuis long-tems convaincu les phyfi- ciens que cet alkali eft totalement étranger aux plantes dont nous le retirons par La combuftion , & n’a jamais été une de leurs parties effentielles comme l’alkali végétal. Nous ne fommes donc pas plus avancés dans la connoïiflance de l'origine de ce fel qui eft encore aufii obfcure que dans les fiècles paflés, c’eft ce qui n’a déterminé à faire les cherches que je préfente ici. Lorfqu'en phyfique nous avons dénoué un nœud capital , nous voyons fe relâcher tous les fils qui nous embarraf- foient. La découverte du lieu natal du zarrum , nous fait voir en même- tems que la magnéfie a Ja même fource, & qu'ils différent l’un de l’autre plus 2 SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 33 plus dans l’état falin que dans leurs fubftances élémentaires. Ces premières connoiflances nous mettent fur la voie d'en acquérir d'autres, & nous font voir fucceflivement que la magnéfie fe trouve communément avec l'alkali minéral, que l’un & l’autre font conftamment combinés avec le même acide dans les fels muriatiques, qu'ils fe logent dans les plantes marines, & qu'ils fe manifeftent dans les différents lits abandonnés par la mer en tant de parties de la terre, En pénétrant plus avant , nous nous éclairerons fur la conftitution de la mer , jufqu’à préfent très-obfcure. La formation &c * Pamas d’une fi grande quantité de fel , dans la mer & fous terre, ne fera plus un myftère , lorfque nous connoîtrons la fource de fes principes pro- chains. On en peut dire autant de la falure de la mer qui tient radicale- ment à ce fel, à fa production & reproduction ; je pourrai m'occuper ailleurs des caufes particulières de la phofphorefcence de la mer & de plufeurs autres phénomènes ; venons au fait, I Va Du Natrum natif. IL arrive fouvent que Les hommes s'occupent long-tems d'un objet ; fans pouvoir le connoître à fond, jufqu’à ce qu’une heureufe obfervation , fouvent due au hafard , déchire le voile qui le couvroit ; c'eft ce qui m'elt arrivé & il n’eft pas inutile d’en faire mention, afin qu'on n'attribue pas indiftinétement au hafard ce qui doit l'être à la réflexion. Paflant en 1782 devant un fouterrein des fortifications de Verone ;, j'obfervai dans les flancs de la voûte une brique fi chargée d’efflorefcence faline , qu’il me prit envie d’en recueillir ; ce que je fis à l'inftant. J'en mis un peu fur la langue , & j’éprouvai avec furprife , indépendamment de la fraîcheur , une âcreté particulière & un arrière-goût urineux, fi défagréable que je la rejettai fur le champ. Je crus reconnoître diftinétement tous les caractères d’un alkali très-pur ; en effet l’ayant éprouvé plufieurs fois chez moi fur des charbons ardens, il ne fit que fe gonfler & bouillir. J'en fis difloudre une autre portion dans l’eau ; la diflolution filtrée & évaporée à ficciré , je verfai fur le fel quelques gouttes d'eau pour en faciliter La criftallifation. Ce fel criftallifé paroifloit en écaille fur les bords du vafe, mais dans le milieu les criftaux affectoient une forme prifma- tique quadrangulaire & la tranfparence de l'eau. Expofé à l'air , il changea de couleur, les criftaux devinrent blancs comme la neige, fpongieux , légers , & fe convertirent enfin en une farine très-fine. Je verfai fur une autre portion un peu de vinaigre diftillé , avec lequel il fitune vive effer- vefcence & fe criftallifa enfuite parfaitement ; mais nous reviendrons à ce fel acéreux. Je conclus de ces eflais, que j'avois en mon pouvoir un : fel alkali que les premières apparences annonçoient être l’alkali fixe mi- néral , par la faveur , la figure des criflaux , leur efflorefcence , la perte de leur eau de criftallifarion , & qu’en fe laiffant attaquer par l'acide 15 Tome XXIX, Part, Il, 1786. JUILLET. 34 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, végétal , il ne paroifloit pas qu'il für combiné avec un autre acide , fi ce n'elt avec l'acide méphitique que l’effervefcence manifeftoit, Voilà ce qui eft dû à. une obfervation accidentelle (1). a V. Depuis ce moment je n’ai pas perdu de'vue ce fouterrein ni ceux qui fe trouvent dans les mêmes fortifications. Je trouvois quelquefois de ces efflorefcences qui contenoient du nitre , mais j’en voyois la caufe pro- chaine dans les excrémens d'animaux qui gifloient au pied des murs, Les émanations volatiles qui s’en élevoient pendant la putréfaction , le gaz de la putréfaction , fi on peut ainfi l’appeller , en s’élaborant dans la chaux des enduits, avoit produit ce nitre, 11 eft à remarquer que la plus grande partie de ce nitre étoit de figure rhomboïdale , & avoit pour bafe l'alkali dominant dans ces efflorefcences. Cependant avant de pouffer plus loin mes recherches, je voulus m’aflurer du caraëtère de cet alkali & le connoître parfaitement, Je le trouvai én abondance , particulièrement dans un fouterrein du châreau de Saint-Félice, froid, humide, & où on ne pouvoit s'introduire qu'avec une lumière; je le recueillis très-pur , amoncelé au pied des murs qui foutiennent la voûte, fous la forme d’une neige extrêmement blanche. Je pafle fous filence les tentatives de pure indication : voici les expériences que j'ai faites fur ce fel, par le moyen des réactifs connus. 1°. J'ai précipité par ce fel la terre de l'alun & le métal de plufieurs fels métalliques. 2°. Après avoir décanté la liqueur reftante après la précipitation de la terre alumineufe, l'avoir filtrée & concentrée par un feu doux, je l’aban- donnai à la criftallifation. J'en retirai un {el en prifmes allongés & firiés , tranfparent , amer , qui s’effleurifloit promprement en perdant fon eau, & qu'il me fut facile de reconnoître pour un vrai vitriol de foude ou fel de Glauber. 3°. J'obtins le même fel par la combinaifon immédiate de l'acide vitriolique libre avec cet alkali, Je le combinai enfuire avec les acides muriatiques & nitreux, & j'en retirai un vrai {el commun & un nitre de foude où quadrangulaire qui déronnoit avec force & vivacité. 4°. Cet alkali ayant été mêlé avec du fable & foumis pendant quatre heures dans un creufer fermé, à un feu très-vif, le mélange fe fondit & fe vitrifia, & le creufec même en fut attaqué dans toute la furface intérieure. 5°. Avec l'huile d'olive j'en fis un ban favon. Comme j'avois ce fel en abondance & que je pouvois en recueillir à volonté, je répétai plu- (x) M. Prouft a également obfervé du natrum effleuri fur les murs des caves d'Angers , & une pierre calcaire de la falpétrière. Journal de Phyfique , rome XIII. ÎNote de M. de la Merherie. . SUR L'HIST. NATUREILE ET LES ARTS. 35 fieurs fois ces expériences & beaucoup d’autres que je ne rappellerai pas. En conféquence je ne doutai plus que ce ne fût un vrai rarrum , l’alkali bafe du fel commun. Il eft bien à remarquer que je n’y ai jamais apperçcu le plus léger indice d'un mêlange de fel commun, ni d'aucun autre {el étranger. $ VE D'où provient un alkali auf pur ? comment peut-il fe trouver en fi grande quantité fur une colline où le mercure s'élève dans le baromètre à 4 lignes au-deflus de fa hauteur , au bord de la mer Adriatique, qui en ligne droite en eft éloignée de 60 milles ? Le vif defir de m'en infiruire me dérermina à poufler mes recherches auñli Loin qu'il me feroit poñlible, La préfence de ce phénomène , fa reproduction fous mes yeux, tout m’an- nonçoit que la caufe n’en étoit pas éloignée & qu’elle devoit sûrement fe découvrir à un obfervateur aufli à portée de le fuivre. Je commençai par examiner la nature du terrein fur lequel la fortereffe eft afife, les matériaux dont fes murs font conftruits & le caractère du fol des fouterreins. Jetrouvai premièrement que la colline éroit compofée d'argile, mais d’une argile impure , mêlée de dépouilles & de débris d'animaux marins ; cette terre & ces débris formoient auffi le fol des fouterreins ; le noyau de la colline éroit d’une pierre tendre, tufacée , de couleur jaune , mêlée de co- quilles marines, & les murs ainfi que les voûtes des fouterreins avoient été en grande partie conftruits avec cette efpèce de tuf. Je ne fus nulle- ment {urpris de trouver en ce lieu des dépouilles très-reconnoiflables d'animaux marins, telles qu'on en rencontre chaque jour en tant d'autres parties de la terre; mais je commençai déjà à foupçonner que le zasrum n'y avoit pas été produit, mais apporté avec les produétions marines qui s'y trouvoient en fi grande abondance. Je pouflai même mes foupçons jufqu'à croire que toute la partie calcaire de cette colline , que celle que l’effervefcence par les acides me montroit tant dans l'argile que dans les concrétions tufacées , ne provenoient que de la deftruétion des cruftacées dont les dépouilles & les reftes s'offroient de toute part à mes yeux. En quel temps & par quelle révolution s’y étoient-ils amaflés ? c’eft ce que je ne chercherai pas à découvrir, mais ce qui peut l'être avec fruit par quelques naturaliftes zélés. NET: J'obfervai avec grand foin & féparément , le terrein , les coquilles & les tufs. La terre leflivée à plufieurs fois ne me fournit aucune lumière décifive, n'y ayant trouvé qu'un peu de zatrum difléminé qui me{laifloic toujours ignorer fan origine. Je le trouvai aufli dans les coquilles pulvé- rifées , en plus grande quantité dans la fubftance des tufs coquillers, & particulièrement dans le ciment qui lioit les pierres des murailles fur lefquelles je le voyois Beurir en abondance, Ayant répété très-artentivement les obfervations fur toutes ces matières prifes en divers endroits de Ja Tome XXIX , Part, II, 1786. JUILLET. EV2 . 36 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, “colline , elles me fuffirent pour me confirmer dans l’idée que le ratrum appartenoit aux débris des corps marins; mais cette route ne put me conduire à la connoiffance entière que je défirois. Comme j'étois per- füadé que cet article étoic très-intéreflant pour la phyfique , & que le moment ne pouvoit être plus favorable pour découvrir origine de cer alkali , après avoir fair ces premiers pas , je revins à étudier l’efflorefcence fpontanée de ce fel fur les fubftances arpilo-calcaires d’où il fortoir immé- diatement ; je choifis à cer effec les rufs, les briques , les cimens calcaires & toutes les fubftances fur lefquelles il s’effleurifloit & fe reproduifoit conftamment. Je ramaflois ce fel avec une plume & le laiflois fe repro- duire , en l’obfervant attentivement chaque jour. Maïs aucun fait ne m'en découvroit clairement l'origine , jufqu'au moment où il me tomba fous la main quelques morceaux d’un tuf particulier mêlé de coquilles marines où je remarquai çà & là de petites parties noires qui me parurent provenir d’une fubftance animale interpofée entre des parties calcaires & d’autres argileufes. En recueillant plus fréquemment des efflorefcences falines fur ces parties , en les y voyant renaître, pour ainfi dire, d’un moment à l’autre, je m’apperçus enfin que ce fel ne forroit décidément ni des coquilles pures , ni des concrétions crayeufes , mais de ces parties diftinétes que je croyois animales, Ce fait m,étant connu, je brifai Les tufs pour en extraire ces différentes parties que je féparai, & fur lefquelles je continuai mes obfervations; elles me confirmèrent de plus en plus que les fimples coquilles ne fournifloient aucun fel, qu'il étoic entiérement produit par les parties animales que j'en avois féparées , & où il reparoifloit conftamment & en peu de jours. J'ai donné à plufieurs perfonnes des portions de ces fingulières concrétions tufacées ; j'en ‘ai aufli envoyé en France , fur lefquelles le zarrum s’effleurifloit & fe repro- duifoit fpontanément fur les parties animales, changées en pierre où en terre, qui s'y trouvoient éparfes & incruftées ; elles auroient fufi fans doute pour mettreen évidence la génération dufel alkali dont cette colline abonde , mais nous en verrons d’autres preuves , lorfque nous nous occu- perons à rechercher fa préfence dans les animaux vivans dans la mer. VAMIATUE Avant de paffer outre, je dois rapporter ici quelques obfervations faites en foumetrant à l’expérience toutes les fubltances marines dont j’ai parlé , obfervations qui me femblent mériter toute l'attention des Phyficiens, Je pulvérifois les pierres , je pulvérifois les coquilles , je les faifois pafler fuccefivement dans de l’eau froide, tiéde & enfin bouillante, afin de n’y laifler aucuns fels: voici les réfultats de ces expériences répétées pendant un an prefque tous les jours. 1°. Je n'ai jamais pu non-feulement obtenir le caraétère , mais même diftinguer aucuns veftiges de fel commun. SUR L'HIST. NATURELIE ET LES ARTS. 37 2°. Au contraire, il n’en eft aucune dans lefquelles , où en employant les diffolutions d'argent & de mercure, je n’aie découvert manifeftemenc des traces fenfibles & continuelles d'un acide muriatique caché, foie dans la terre des coquilles, foit dans le terrein même où tous ces teftacées étoient difféminés. Convaincu de l'importance de ces deux faits, je n'ai ceflé de répéter, de varier & d'en vériñer les preuves, pour n’en pouvoir plus douter ; nous y reviendrons dans un autre lieu. I X. Voyant donc que toutes les obfervations les plus fcrupuleufes me conduifoient à conclure que le zatrum rélidoit en effec dans les animaux marins, que tout celui que j'avois retiré de cette colline & de ces fou- terrains , beau & bien formé , foit en efflorefcence , foit par la lefive, étoit un produit des êtres marins dont les débris y étoient fi vifble- ment & fi abondamment répandus; je formai le projet de diriger mes recherches fur les animaux mêmes que la mer pouvoit me procurer. À cet effet il étoit néceflaire de bien connoître, autant qu'il feroit poflible, fi le natrum logé dans la fubftance des animaux marins y étoit eflentiel ou feulemenr étranger, comme nous l'avons dit de celui des plantes marines ; queftion inféparable du fujer, & qui ne pouvoit mieux s'éclaircir qu’en interrogeant direétement la nature par l'examen de ces êtres vivans avant que leur organifation ne füt détruite. Je me préparai à ces recherches avec beaucoup de défiance & de précautions, l'une defquelles fut de bien connoître quelques-uns des caraétères diftin@tifs du natrum acéteux, Cacète de foude) c’eft-à-dire du zatrum combiné avec l’acide du vinaigre diftillé. Les Phyficiens conviendront qu'il eft très-incertain & dangereux d'employer les acides minéraux pour découvrir un alkali, lorfque dans quelques mélanges on ne cherche pas tant à s’aflurer de fa préfence que de fon état libre ou combiné. Un acide végétal femble plus propre à cet effet, comme incapable de décompofer les fels neutres qui dans ces mélanges auroient une bafe alkaline, & fur lefquels il n’auroit aucune action. En effec, l’objet principal étant de féparer l’alkali des fubftances qui l'enveloppent & de l'obtenir entièrement libre, l'acide végétal, comme nous le verrons, y paroît plus propre que tout autre. Par cétre raifon , les expériences adoptées par M. Wiegleb pour prouver que Palkali végétal exifte libre dans les plantes avant leur combuftion , ayant pour bafe l'effet des acides minéraux fur les matières extractives , font très- incertaines. C’eft pourquoi je me fuis d’abord occupé à préparer l'acéte de foude dont j'ai parlé, pour le bien connoître au befoin ; voici les principales que j'ai faires à ce füjer. : 1°. Lorfqu'on verfe du vinaigre diftillé, fufifamment concentré, fur de F'alkali minéral criftallifé , il fe fait fur le champ une vive effervefcence ; 33 OBSERYATIONS SUR LA PHYSIQUE, mais il faut le verfer peu-à-peu & ne pas ajouter de nouvel acide que l'effervelcence précédente n'ait ceflé. 2°. La liqueur évaporée à ficciré, au foleil ou par un feu doux pour que le fel ne fe décompofe pas, fi on y ajoute quelques gouttes d'eau diftillée , le fel fe criftallife parfaitement en écailles ou lames très-minces comme la terre foliée. Sa criftallifation très-régulière eft compolée de petits faifceaux longs, radiés & prefque comme des filamens foyeux, formant de très-belles ramifications. La figure de ces filamens vus à la loupe eft prifmatique polièdre, & paroic compofée de petits prifmes tétraëdres. 3°. La faveur de l’acète de foude eft fraîche, piquante, moins cepen- dant que celle de l'acète de potaffe ou terre foliée de l’alkali végétal ; on y diftingue parfaitement & en même-tems la faveur de l’acide & la faveur urineufe du zatrum. 4. Il eft entièrement foluble dans l’efprit-de-vin rectifié. 5°. Expofé à l'air fec il ne s’humecte ni ne tombe en déliquefcence , mais il s'efleurit précifément comme le vitriol de foude ou fel de Glauber. 6°. Enfin , en mettant ce fel fur des charbons ardens , l’acide s’évapore & la vapeur a une odeur fenfiblement empireumatique, En fe fervant du vinaigre diftillé pour découvrir un alkali natif dans une fubftance gélatineufe mêlée de fels muriatiques & vitrioliques, outre qu'il n’a point de prife fur ces fels neutres, il eft certain que le fel acéteux ui en rélulte eft enlevé & diffous par l’efprit-de-vin qui n’attaque pas les le neutres ; on obtient par-là féparément le fel acéteux duquel on peut enfuite précipiter facilement l'alkali, X. j Avant de foumettre les animaux marins à mes expériences , je Les dirigeai fur les coquilles des différens teflacées que produit la mer Adriatique, tels que des huîtres, des glands de mer, des cancres & beaucoup d'autres poiflons armés qu'il eft inutile de nommer, J'en faifois venir de frais de tems en tems pour répéter mes expériences, dans lefquelles je n’avois d'autre but que de reconnoître l’exiffence du nasrum , quelque part qu'il fe trouvât dans ces animaux marins, fans m'occuper d’une analyfe étrangère à l'objet que j’avois en vue. Je faifois fécher au foleil une partie de ces coquilles & calciner l’autre après les avoir lavées plufeurs fois dans l'eau chaude. Je dirai pour cela ce que les premières me donnèrent. Après les avoir réduites en poudre, je les faifois digérer dans de l’eau très-pure , je filtrois la leffive & la faifois évaporer à ficcité. Cependant je ne pus jamais obtenir un réfidu véritablement falin ; non- feulement je n’eus point de fel alkali, mais pas même de fel commun que j'étois fondé à croire qui fe feroit diffous dans l’eau, Des fubftances + SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 39 terreufes reftées fur le filtre, je fis l’ufage fuivant. Je les faturai d’abord d’efprit de vinaigre verfé par interruption, ce qui y occafionnoit une effervefcence qui croifloit graduellement ; je fltrai enfüire la liqueur , je la is évaporer à ficcité au foleil, & je fis difioudre dans l’efprit-de-vin le fel defléché. Je filtrai, j'évaporai de nouveau à ficcité ; enfin, baigranc le fel d'un peu d'eau diftillée, je le mis en un lieu frais pour criftallifer. Tel eft le procédé que j'ai conflamment employé & fur les coquilles & fur les matières extractives , pour en retirer le natrum ; je ne le répéterä plus, l'ayant une fois indiqué. La criftallifation d° ce fel fut plus où moins lente & difficile, fuivane les différens caractères de la fubitance conftiturive des coquilles. Celles des huîtres & de tous les reftacées qui n’avoient point de liaifon intime avec l'animal , donnèrent un fel de forme foyeufe femblable à la zéolire qui criftallifoit lentement & difhcilement. Au contraire quand la coquille pulvérifée appartenoit aux fquilles ou autres cancres dont l'enveloppe rendre faifoit prefque partie de l'animal , le fel acéreux fe criftallifoic plus facilement, & il y en avoit fur les capfules qui affectoit une figure prifma- tique rhomboïdale. Mais quoique j’examinaffe avec attention les caractères de ce fel, je ne pus jamais m’aflurer qu'il eût décidément les caractères de l’acère de foude. Cependant en le laiffant fur des charbons ardens, tout l'acide s’élevoit avec une odeur empireumatique , comme fait celui du natrum de lPacète de foude, Maïs les fels acéteux faits avec les coquilles calcinées me donnèrent d’autres réfultats, routes ne montrèrent qu'un acète calcaire , n'ayant confervé aucune des apparences falines que j'avois remarquées dans les enveloppes en partie animalifées avant qu'elles euffent éprouvé l'aétion du feu, Leur terre n’étoit fubftantiellement qu’une vraie chaux. XI. Affuré par plufeurs expériences répétées avec fcrupule que le zarrum ne réfidoir point dans les coquilles des teftacées , avant que de m'occuper des animaux, & pendant que j'avois abondamment de ces matières calcinées & dans leur état naturel, je voulus répéter fur elles les recherches quej'avois précédemment faires fur les coquilles antiquestrouvéesdans notre colline, foit pétrifiées, foit dans l’état terreux , dont j'ai parlé au $. VINS, Mais dans toutes les lixiviations que j'en fis je n’eus, comme dans les autres , aucune trace fenfble de fel commun; au contraire , comme il m'étoit arrivé dans les anciennes , l'acide muriatique fe manifefla toujours dans leur fubftance, mais plus dans celles qui n’avoient pas été calcinées que dans les autres qui avoient été rourmenrées par le feu. Il réfulre de-là qu'on pourroit n'être pas fondé à croire que la terre calcaire appartient aux dépouilles d'animaux marins, & la regarder comme primitive, parce qu'elle ne donne aucun figne d’un acide muriatique lasers (caché), 4o OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, quoiqu’on puifle confidérer cet acide comme en étant inféparable, & il a pu en être chaflé par le feu, comme j'en ai eu un indice manifefte. Il fufñt cependant que nous ayons des preuves fupérieures à routes exceptions de l'exiftence d'un acide muriatique Zatent ( caché), où il n’y a aucune trace de {el commun qui puifle rendre l'obfervation équivoque ; c’eft ce dont nous ferons mention dans une autre fe&ion, j PTT, Nous voici parvenus à la partie la plus importante de la queftion qui fera pleinement décidée fi nous réuMiffons à découvrir le zatrum libre dans les animaux marins, faifant une partie conftituante de leur fubftance, quelles que foient fes fonctions dans l’organifation de ces êtres. J’ai dirigé mes expériences fur deux clafles d'animaux marins, fur les poiflons armés ou teftacées & fur les poiffons proprement dits. Je me bornerai à décrire la méthode que j'ai employée fur ces deux efpèces , il eft eflentiel de la connoîrre pour que chacun puifle la répéter, & j’expo- ferai auffi les réfultats définitifs, fans m'aflujertir à une pénible & minu- tieufe defcription de plus de cinquante expériences faites de la mème manière en deux ans de tems. Je lavois à plufeurs reprifes l'animal dans l'eau chaude, jufqu’à ce qu'elle ne contractät plus aucune faveur ni une couleur différente de celle qui lui étoit naturelle. Après l'avoir fait piler dans un mortier , j'en faifois macérer une partie dans l’eau chaude, & je faifois fécher l’autre au foleil pour la calciner enfuite lentement. 1°. Je faifois pafler la portion macérée en entier par un filtre de toile que je preflois jufqu'à ce que l’eau fe füc chargée de la matière extractive, & j'ajoutois de nouvelle eau fur le filtre. Cela fait , j'évaporois la diflolu- tion à une douce chaleur jufqu’à ficcité 3 je faifois enfuite digérer la fubftance dans du vinaigre diftillé tiède & concentré; j'obfervai que dès le commencement il fe faifoit une effervefcence fenfible. J’évaporois de nouveau à une douce chaleur à ficcité & j'y verfois encore à plufieurs fois un peu de vinaigre bien chaud. Toute effervefcence ayant ceflé , je filtrois enfin la liqueur , & l'ayant réduite à ficcité au foleil, jy verfois quelques gouttes d'eau diftillée en l’abandonnant dans un lieu frais pour criftallifer. Cette criftallifation étoit toujours confufe , partie en lames criftallines, partie en criftaux tranfparens , épars & vifiblement prifmatiques. Alors je mettois le tout à digérer dans de l’efpric-de-vin , je décanrois & répétois l'opération jufqu'à ce que l’efprit reftât dans fon état naturel. Le réfidu mis à part, je faifois évaporer l’efprit-de-vin pour obtenir à fec le fel acéteux dont il s'étoit chargé. Telle eftla méthode conftante dont je me fuis fervi dans des expériences f effentielles. Le SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 4x Le réfultat de tous les eflais faits de cette manière, fut que le fel acé- ceux parut toujours & fans équivoque à bafe de zatrum ou alkali minéral, puifque tantôt en faifanc ciftallifer ce fel deffeché , j'avois l'acète de foude avec fes caractères décrits au S. IX ; tantôt en le décompofant par la chaleur , j'en retirois un zatrum libre bien caractérifé , & en le décom- pofant par l'acide nitreux , j'avois un beau nitre quadrangulaire que je me plaifois à enflammer fur des charbons pour obtenir l’alkali durci, & pour ainfi dire pétrifié par la deftruction de l'acide. 2°. Quant à l’autre portion fechée au foleil , je la calcinois à Pair libre jufqu'à ce qu'elle fût réduite en une cendre brunâtre, fans odeur. Je faifois enfuite bouilligla cendre dans l’eau , je filtrois & failois la leflive à ficcité ; le fel defféché , expofé à l'air, s’y efleurifloit en grande partie, je le traitois avec le vinaigre diftillé , enfuite avec l'efprit-de-vin précifément comme je l'ai dit ci-devant. J'obtins toujours | comme dans les eflais précédens, un zatrum libre, qui combiné avec les acides vitriolique , nitreux & muriatique, me donna du vitriol de foude , du nitre quadtan- gulaire & du fel commun, tous bien cara@érilés. XIII Voilà l’exiftence du zarrum libre dans les animaux marins bien vérifiée; comme les efflorefcences fpontanées , tous les indices & roures les appa- rences concouroient à le manifeftsr dans les obfervations faites fur les dépouilles d'animaux marins dont nous avons parlé dans les paragraphes précédens. Mais, comme nous l’avons demandé au S. IX, cet alkali dont l’exif- tence dans les fubftances animales eft hors de doute après tant depreuves, y eft-il effentiel ou accidentel & étranger? on ne peut déjàplus foupçonner qu'il ait pu s'y loger en état de fel commun, puifqu'indépendamment de ce qu'il feroit ridicule de croire que la calcination des animaux füc fuifante pour décompofer ce fel, nous avons toujours trouvé lalkali libre & pur dans les fubitances animales , en n’employant qu'un fimple acide végétal fans aucune combuftion, Celui que nous avons obtenu à volonté des animaux pris vivans dans la mer , doit ôter tout foupcon que l'aikali minéral qui fe tire des fubftances volcaniques , & celui même que nous avons trouvé fi zbondamment en efflorefcence fur les collines de Verone , proviennent de la décompofition du fel commun , opérée par le feu ou par d’autres caufes inconnues 3 c’eft pourquoi en fuivant cette queftion , tout nous porte à croire que le zasrum libre appartient origi- nairement & 'eflentiellement aux animaux marins, & fait proprement une partie de leur fubftance. Pour qu'il fût étranger & accidentel, il faudroit que dans quélques'circonftances le même animal püc être privé dé cer alkali, fans nuire à fon orgamifation & à fa vie , comme il arrive aux plantes les plus abondantes en zatrum , lorfqu'elles font cultivées loin Tome XXIX, Part. II, 1786. JUILLET. F 42 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, de la mer, ce dont nous parlerons autre part, Nous favons d’ailleurs par l'analyfe que l'eau de la mer ne contient point de #atrum libre, dont les animaux qui y vivent puiffent fe nourrir. Si on veur admettre que le fel commun , en fervant à eur organifation & à leur accroiflemenr, uifle fe décompofer , ce qui eft une chofe difficile à concevoir , en réfléchiffant à l'intime liaifon des parties conftituantes d'un fel neutre auffi parfait, Ja découverte due À nos expériences d’un raum libre privé d'acide, conftamment paflé à l’érat de fubftance animalé, notant- ment dans la matière extractive, doit Le faire regarder comme aufñli propre, au effentiel à cet animal que fon organifarion même & fon accroifle- ment dans la mer. Cependant je ne fuis jamais patwenu à en trouver de traces fenfibles dans les poiffons d’eau douce , nuds ou: à coquilles. À cet effec je foumis en 1783 , aux mêmes expériences ci-devant décrites, différens poiflons de notre lac de la Garde, del Ædige & d'autres rivières du territoire de Verone, C’eft pourquoi, fi l’exiftence conftante de ce fel fixédans les animaux marins vivans , fi celui qu’ils nous donnent par leur deftruction & la converfon de leur fubftance en rerre depuis une longue fuite d'années, comme il paroît dans les efflorefcences que nous avons re- marquées, ne fuffit à toute rigueur pour décider la queftion, il caractérife certainement le ratrum comme naturel & deveru propre à la fubftance des êtres marins , & c’eft tout ce que nous pouvions efpérer de découvrir dans les ténèbres éternelles qui enveloppent lés fecrers de la nature, L’exa- men que nous ferons dans'la fection fuivante de la terre animale y ajoutera quelque lumière. XIV. Entre les différentes connoïflances acquifes par ces expériences , il ef à propos d’en rapporter ici une qui me paroît très-remarquable, c'eft qu’en lavant dans l'efprit-de-vin la matière féchée pour en retirer l’a- cète de foude, je n’ai jamais retiré qu'une aflez petite quantité de fel commun, relativement à la mafle des animaux. Je faifois bouillir Ja matière reftante après l'extraction du fel acéreux , dans de l’eau très-pure qui devoit néceffairement fe charger des fels, ce qui me donnoit deux objets féparés à obferver : la terre reftante fur le filtre dont'je vais parler, & la leflive filtrée. Cette opération réitérée nr'a fait conclure que 40 par- ties de fubftance animale fe réduifoient à 6 parties de cendre , tantôt plus, tantôt moins. La dixième partie de ces cendres étoit faline ; & jen retirois à peine un tiers de fel commun parfaitement criftallifé. En conféquence le fel commun trouvé dans les animaux marins que j'ai pu foumettre à l'expérience , formoit à peine la deux centième partie de leur mafle , ce qui doit paroître peu de chofe dans des animaux qui naiflent, fe nourriflent & vivent continuellement dans la mer. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 43 Nr Mais je ne veux pas taire une autre obfervation que j'ai faire fur la différente quantité d'alkali, obtenu par la voie sèche of la voie humide, dans les expériences précédentes ; je n'ai jamais retiré d’une pareille quantité de fubftance animale , traitée par la macération & la combuf- tion , la même quantité de zatrum. Celle que j'obtenois par la combuftion éroic roujours beaucoup plus petite que celle que je retirois par la macé- ration. Je fuis fondé à croire que l’action du feu en détruifoit une partie & réduifoit l’autre en une terre indifloluble dans l’eau ; mais nous verrons par la fuite quel eft décidément l'effet du feu, X VI. Cependant la découverte importante d'un #atrum inhérent , propre & fe formant dans la fubftance des animaux qui naiflent, vivent, périflent & fe reproduifent continuellement dans le vafte océan , dévoile bien des fecrers & ouvre la voie à beaucoup d’autres connoiflances qui nous aurojenc toujours été cachées , fi je n’avois délié ce nœud capital dont Jai parlé au $. LIL. Telle eft donc la fource du zatrum de tant de régions méridionales que nous avons rappellées , qui étoit connu des anciens, & qu'on trouve encore en fi grande abondance; voilà donc d’où provient le natrum des bords de la mer Cafpienne , de la Sibérie, de la Tartarie & de tant d'autres parties du nord, Voilà comme il a pu s’efleurir & fe reproduire dans les concrétions tufacées, coquillières ; comme il a pu s’'introduire dans les eaux minérales, dans les matières volcaniques , dans les végéraux, comment enfin a-t-il pu fe répandre dans les fubitances des différens règnes de la nature, dans tous les pays que la mer a couverts, & il n'eft prefqu'aucune partie de la terre où fes traces ne foient impri- mées , dans tous les lieux où elle a féjourné ain que fes habitans , ils y ont été décompofés, ou par-une putréfaction naturelle, ou par lation des feux fouterreins ; par-rout leurs dépouilles fe font arrêrées. Faut-il donc s'étonner fi le natrum libre qui faitune fi grande partie de la fübitance des animaux marins s’eft manifefté & fe manifefte encore chaque jour indiftinétement dans toutes les parties du globe. C'eft par hafard au con- traite ( ce qui peut aufli fe rapporter à une origine éloignée) , qu'on indique quelque lieu où cet alkali s'effleuriffe & abonde , Où on ne trouve pas en même-temps des fignes vifibles & manifeftes du féjour récent ou -ancien de la mer, & où il ne fe préfente pas des dépouilles d'animaux marins décompofés. De-là vient l’alkali volatil que des phyfciens ont retiré du zatrum ; de-là viennent les terres qui produifent Le nasrum dans l'Egypte, celles des déferts de la T'artarie qui , fuivant les obfervarions de M. Georgi ( Mer. de L Acad. imp. de Péterfbourg , année 1777) , font toujours crayeufes & préfentent des débris de reftacés. Il n’eft donc Tome XXIX, Part. II, 1786. JUILLET. F 2 #4 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, plus néceflaire de recourir ni à la décompofition fpontanée du fel commun qui eft inexpliquable (1) , ni à celle de ce fel par l’action du feu, ni à l'organifation des plantes qui le fucent pour s'en nourrir , pour rendre raifon de la préfence d’un alkali que peut fournir la décompofition & déforganifation des animaux marins, de quelque manière qu'elle arrive. ni DOVE Si maintenant on obferve avec plus d’attention les efflorefcences fali- nes, quelque part que ce foit, mais principalement dans Les pays mari- times , efllorefcences que le vulgaire nomme toujours nitreufes comme celles du nitre , on diftinguera facilement le zatrum libre ordinaire qui eft plus commun qu'on ne l'a cru jufqu'a ce jour, & on ne pourra le confondre avec Le nitre qui par hafard y feroit mêlé , en faifant auñli attention à une faveur urineufe qui n'eft jamais propre aux fels neutres. La ville de Venife & d’autres lieux fitués fur la mer Adriatique , m'ont fourni pendant les années précédentes de ces efflorefcences falines fpon- tanées, & par les effais fans nombre que j'en ai faits, je me fuis confirmé dans l'opinion que le zatrum peut fe produire par la décompofition des animaux marins, & naître de leur fubltance. La même chofe doit arriver toures les fois que les mêmes circonftances fe rencontreront & que l'alkali ne fe fera pas diflipé & décompofé lui-même, ce qui arrive par des lavages & des deffications répétées comme tout le monde fait. XVIII Je m'étois propofé dès le commencement de vérifier , s'il m'étoic poffible, la quantité d’alkali libre contenu dans les animaux marins , relativement à leur mafle, & j'avois entrepris à cer effer quelques expé- riences appropriées ; mais voyant que les réfulcats varioient infiniment , qu'il me reftoit beaucoup d'incertitude , & que les expériences que je ne pouvois faire que fur un petit nombre d'animaux ne concluroient rien pour d’autres efpèces , je renonçai à ce projer. Les parties huileufes , gé- latineufes , gommeufes, la terre même qui fait une fi grande partie de ces êtres, tout doit fe trouver naturellement en des proportions fi diffé- rentes dans leurs efpèces & leurs genres innombrables , qu'on ne peut compter fur quelques expériences particulières. (x) M. de Morveau démontre depuis plufeurs années dans les cours de l’Académie de Dijon, la décompoftion des muriates de potafle & de foude par la chaux. Voyez la colleétion des Mémoires de Chimie de M. Schéele, imprimée à Dijon, &c, part, 2, page 18. Note du Traduéteur. La fuite au mois prochain, - SUR L'HIST. NATURETLE ET LES ARTS. 45 MÉMOIRE Pour sERVIR A L'HisTorne - NATURELLE DU FIGUIER ; : Par M. BERNARD, des Académies de Marfeille, de Lyon, &c., © N diftingue communément deux fortes de figuiers, ceux qu’on multiplie dans les campagnes, & ceux dont les fruits ne font pas mangeables. Les premiers fonc l'objet du foin du cultivateur; les derniers ne lui offrent que des plantes inutiles. Cette manière de claffer les figuiers a fans doute des avantages. Mais elle ne doit pas difpenfer le Naturalifte d'étudier les fingularités que ces arbres préfentent, & de raflembler les principaux traits qui caractérifent les divers individus de cette famille nombreufe. Tous nos figuiers ont une origine commune, & maloré les différences qu'ils préfentent, on ne doit les regarder que comme des variétés de ces arbres primitifs que l’on reçut de la Grèce & de l'Italie. Le nombre de ces variétés s'eft prodigieufement accru. fl en paroït tous les ans de nouvelles qui naïflent auprès des habitations anciennes, dans les haies & fur les bords des ruifleaux, Chaque variété de figuier a un port qui lui eft propre , que l'habitude fait aifément reconnoître , mais qu'il eft impofñlible de décrire. .… À la vue des graines que renferment la plupart de nos figues, on admire l’extrème fécondité du figuier ; mais cer avantage n’eft qu'individuel. Il y a un grand nombre de variétés qui ne produifent que des feuilles ; d’autres donnent, à la vérité, du fruit, mais leur ftérilité eft aufli réelle, parce que ces fruits tombent toujours fans parvenir à leur maturité. On voit, enfin, une multitude de figuiers dont les graines feroient propres à les reproduire , fans que cette deftination foit prefque jamais remplie, parce que les amandes fervent d’aliment à des infectes particuliers. La ftructure de l'intérieur de la plupart des figues eft aflez difficile à fair, lorfque ces fruits font parvenus à leur maturité. Mais fi on les obferve avant ce tems, on y diftinguera trois fortes de corps. On verra autour de l'œil & fur toute l'épaiffeur de l'enveloppe , des feuilles trian- gulaires , légèrement dentelées & fort preflées. On trouvera, au-deffous de ces feuilles, les fleurs mâles dont la pouffière eft deftinée à la fécondation des graines qui rempliflent le refte du fruit. On n'imagineroit pas que la découverte des fleurs mâles. du fguier fût réfervée à des Naturaliftes de nos provinces feptentrionales,, & qu’elle ait été faite dans les climats mêmes dont le figuier ne peut pas fupporter La 46 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, rigueur, La Provence avoit cependant déja produit le célèbre Botanifte dont elle fe glorifie. Auf, on doit peut-être lui reprocher d’avoir vu avec trop d'indifférence les fruits de nos fiyuiers fauvages. En raflemblant les ouvrages de la nature, on ne fauroit être trop foigneux. Une forme différente dans la même production annonce toujours une merveille nouvelle. En effer, fi Tournefort eût ouvert quelqu'une de ces figues, les éramines qui y font étalées auroient frappé fes yeux, & cette oblervation eûc peut-être contribué à lui faire adopter, fur la génération des plantes, les idées qu'il combattit & rejeita, & qui fonc à préfent fi bien établies & fi généralement reçues. Le même favant en ouvrant les amandes de ces fioues y auroit obfervé les infectes qui s'y développent. Il auroit ainfi fuivi dans fon pays l'hiftoire de la caprification fur laquelle il raflembla des mémoires aflez imparfaits dans le Levant. M. de la Hire a donné le premier dans lés Mémoires de l’Académie de 1712, la defcription des leurs mâles du figuier. En rendant juftice à fa découverte, je ne puis diflimuler que les figures qu'il en a données font mauvaifes. Au refte , il étoit peut-être impoflible que fes obfervations fuflent bien exactes. C'éroir fur des figues cultivées qu'il cheréhoit les fleurs mâles. Des corps aufli délicats que les éramines dans des fruits fondans ne pouvoient avoir ni conferver une forme parfaitement décidée, Les parties effentielles à la génération éroient comme altérées par leur combinaifon avec des chairs trop fucculentes. J'ai fenti moi-même tout l'embarras que dut éprouver M. de la Hire , en répérant fes obfervations fur des figues domeftiques ; & je n’ai diftingué la figure à laquelle je devois m'arrêter, qu'après avoir vu les fleurs mâles dans les figues fau- vages. Ces corps foutenus par des pédicules fecs & parfaitement dérachés fe préfentenct dans leurs différens états fous des formes conftantes qu’il eft impoffible de ne pas faifir. Fig. 1 ,planch. 1. Si on fe repréfente une petite tige blanche cylin- drique de deux lignes de longueur environ, & rerminéé par un calice de même fubftance découpé en trois, quatre, cinq, fix parties d’une ligne de longueur , on aura l'idée des fupports des fleurs males. Files fortent du calice dont je viens de parler portées fur des pédicules féparés, & leur nombre peut s'élever jufqu'à fépt; mais les Heurs à trois, quatre & à cinq éramines font les plus communes. Ces étamines font d’abord couvertes & embraffées par les feuilles du calice. Elles forcent enfuite celles-ci de s’érarter, & elles fe montrent fous une forme approchante d'un demi-fphéroïde. La partie convexe et divifée für fa longueur par trois rainures fymmétriquement difpolées'; “celle du milieu eft plus profonde. Le pédicule répond au milieu de la face applatie, Chaque éramine ne paroî être d’abord qu'un corps unique, Pig. 2; mais, au bout de quelque tems, on voit très-clairement qu'elle SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 47 eft compofée de deux capfules diftinétes dont l'écartement devient même confidérable, Fig. 3. La même étamine et forinée quelquefois de trois capfules. Selon M. de la Hire, il y a au centre des pétioles qui foutiennenc les éramines une éminence fenfible qui porte quelquefois des fleurs femelles très-maigres. Je n'ai pas fait la même obiurvarion, & cer Auteur a pris infailliblement pour le corps qu'il a décrit quelques:pétioles dont l'éra- mine avoit difparu, ou avoit éprouvé quelqu'altération qui la faifoit méconnoitre. L Les figures que je donne des fleurs mâles du figuier ont été copiées avec beaucoup d'attention & d’exactirude. Si on les compare à celles qui font jointes au Mémoire de M. de la Hire, on trouvera qu'elles ne leur reflemblent guère, & on verra de cette manière que celles-ci font peu fidèles. Dans les figues domeftiques , les Aeurs mâles font communément peu nombreufes; elles font, au contraire, extrêmement multipliées dans la plupart des variétés de figues fauvages. Elles rapiflent quelquefois la moitié de l'intérieur de ces fruits, & il s’en élève encore beaucoup parmi les fleurs femelles. Les fleurs femelles coulent quelquefois, & ne fe développent point fans que celaempêche les fleurs males de prendre tout leur accroiflement. Les fleurs mâles les plus élevées fe font jour quelquefois à travers l'œil, & fe montrent au-dehors, En ouvrant des figues fauvages parvenues à leur maturité & en les « fecouant fur du papier blanc , les Aeurs males abandonneront une grande quantité de pouflière jaunâtre. ; La maturité de la plupart des figues fauvages eft aufli réelle que celle des figues cultivées , quoique cet’ état ne fe manifefte pas entièrement par les mêmes apparences. Elles font peu de réfiflance fous le doigt , le fuc laïteux difparoit; elles prennent l’odeur de ceux de ces fruits qui font bons à manger, mais elles ne font pas fucculentes, & lorfqu'on les porte à la bouche ,on ne leur trouve aucun goût. Les pédicüles des fleurs mâles & des fleurs femelles fe defsèchent fans avoir jamais été fondans , & ils prennent fouvent une couleur rouge aflez foncée. Les graines fonc difpofées dans les figues fauvages comme dans celles qu’on cultive. Seulement, le pédicule qui les foutient & le parenchime qui les enveloppe prennent moins de volume. En Provence, comme chaque figuier fauvage eft venu de oraine , on eft afluré qu’il forme une variété diflinéte, Ainfi chaque arbre & fes fruits ont une forme particulière, La couleur de ceux-ci eft quelquefois violette, mais il eft plus ordinaire qu'elle foit jaune ou verte. Les graines de nos figues fauvages fervent conftamment à nourrir des 43 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, infectes du genre des cinips. Ils font noirs: ils ont une ligne de longueur ; leur bouche eft armée de mächoires. Leurs antennes font coudées & préfentent onze articulations, Ils ont quatre aîles, les inférieures fort courtes & encore plus étroites ; les autres ont une ligne de Tlongueur. Le corcelet tient à la rête & au ventre par un filer très-fin. Les femelles ont à l'extrémité du ventre entre deux James un aiguillon très- apparent qui fert à piquer l'endroit où les œufs doivent être dépofés. Cet organe n'exifte pas dans les mâles. La larve de cet infecte eft blanche. Elle fe nourrit de l’amande, & ce qui eft remarquable , c’eft qu’elle fe développe fans y laifler des excrémens. C'eft dans la direction du piftil que fe trouve conftamment l'ouverture par laquelle le cinips fort de chaque graine. Les bourgeons des figuiers fauvages qui fervent à la multiplication des cinips fe couvrent, au printems, de feuilles aux aiflelles defquelles il naïc au moins une figue. Ces fruits ne commencent cependant à {e développer qu'au milieu de juin. Ils grofliflent & müriflenc felon l’ordre de leur naiflance, tant que la. rempérature de l'air le permer. Lorfque l’hiver dépouille l'arbre de fes feuilles , les figues qui avoient acquis une grofleur un peu fenfible tombent prefque toujours. Les plus petites réfiftenc feules au froid & fe développent au printems fuivanr. On les diftingue aifément, parce qu’elles font ifolées fur les tiges fans avoir des feuilles au-deffous d’elles. Lorfque les figues font affez groffes pour que les fleurs femelles foient bien apparentes, des cinips pénètrent dans l'intérieur par l'œil & vont dépofer fur chaque femence les germes qui doivent les reproduire. Je me füis afluré qu'il ne falloir guère plus d’un mois dans cette faifon, pour que les larves des infe@tes parvinffent à leur dernière métamorphofe, Ces figues müriflent fucceflivement , & avant que toutes celles de la sève précédente foient tombées, des cinips peuvent attaquer ceux de ces fruits qui fe trouvent à l’aiflelle des premières feuilles. Il en müûrit un nombre d'autant plus grand que les variétés de figuiers font plus hâtives, & fur-tout que la première récolte eft moins confidérable, J'ai ouvert une mulritude de figues , lorfque les cinips y alloient dépofer leurs œufs. Je n’ai jamais trouvé alors plus de trois de ces infedtes : ce qui paroît prouver qu'ils font fort féconds. M. lecommandeur de Godeheu (Savans étrangers, tom. IT) a obfervé que les cinips avoient des ennemis qu''alloient les attaquer dans l’intérieur même des amandes des figues, Je n'ai pas trouvé les ichneumons dont parle cet auteur, mais j'ai remarqué plufieurs fois que lorfque les cinips aprés avoir fubi leur dernière métamorphofe fortoienr des figues , des fourmis les attendoient à leur paflage & les enlevoient. « Selon M, de Tournefort le caprifiguier donne dans trois tems différens » des fruits nommés fornites , cratirites & orni. Les premiers saine æ ans SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 49 » dans le mois d'août, & ne muüriflent qu’en novembre. Les feconds » paroiffent à la fin de feptembre. Ils reftent fur l'arbre jufqu'au mois » de mai, & renferment les œufs que les moucherons des fornites ÿ ont » laiflés en les piquant. Les troifièmes pouffent dans le mois de mai, & font * >» piqués par les infectes que les cratitires ont fournis », Ces détails peuvent repréfenter avec exadtitude ce qui fe pafle dans le Levant; mais ils ne font pas relatifs à la manière dont fe développent nos figues, ni aux générations fucceflives des cinips. En effer, les figues croiffent & mûriflent les unes après les autres fans interruption; & le développement des cinips fuit le même ordre que le développement des figues. Quant aux cratitires , il eft bien certain qu’en Provence , prefque tous ceux qui pouvoient renfermer des cinips au commencement de l'hiver tombent dans certe faifon , & que ceux de ces fruits qui fe développent au printems ne laiffent pas d’être piqués par des cinips lorfqu’ils font parvenus à une groffeur convenable. Les cinips peuvent donc vivre ailleurs que dans les figues fauvages. Il n’eft pas douteux que nos figuiers fauvages ne foient les arbres connus des Naturaliftes fous le nom de caprifiguiers , & que les infectes qu'ils renferment ne foient précifément ceux qui fervoient autrefois, & fervent encore aujourd'hui dans la Grèce à produire la caprification. Cette opération confifte à employer les infectes qui ont vécu dans les figues fauvages , pour hâter la maturité des figues domeftiques, & même (ainfi qu'on l'a prétendu) pour la produire. On a confervé fur cet objet les idées & les pratiques des anciens. Ils plantoient, en effet, des capri- figuiers du côté des figueries d’où le vent foufloit plus ordinairement ; afin que les infectes fe répandiffent plus aifément fur les figues. D'autres fois on enfiloit des figues fauvages, lorfque les cinips étoient près à fortir , & on les fufpendoit aux branches des figuiers ordinaires : c’eft cette feconde pratique qu'on fuit encore dans le Levanr. On voit aifément pourquoi les figues fauvages parviennent plutôt à leur -maturité, Cer effet eft le même que celui que p éfentent tous les fruits piqués, On conçoit aufli qu’à mefure que la maturité des figues elt plus hâtée, il y a un plus grand nombre de ces fruits qui peuvent parvenir à cet état; mais les cinips font-ils effentiels pour faire mürir les figues domeftiques qu'on caprifie ? C'eft ce qu'on doit étre bien éloigné d’admettre. On.a obfervé que plufeurs des figues des caprifiguiers , ainfi qu'un grand nombre de celles qui naiffent fur des arbres qu’on caprifie,tomboient avant d'acquérir toute leur groffeur. On a vu, en les ouvrant , que les graines avoient avorté, & qu'elles ne renfermoient point d’infectes , tandis que les figues qui n’avoient pas coulé en étoient remplies. On a conclu alors que fans les cinips toutes les figues couleroient. Mais comment jufti- fer cette aflertion ? N’avons-nous pas un très-oerand nombre de figuiers Tome XXIXT, Part, II, 1786. JUILLET. :fo OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, dont la plupart des fruits coulent ordinairement , tandis que ceux qui parviennent à leur maturité ont des graines que les cinips n’attaquent jamais ? l'aut-il afligner des caufes différentes à des effets femblables ? Pourquoi recourir au merveilleux pour expliquer ce qui eft aflujecti à des loix ordinaires & connues? J'ai ouvert des amandes de routes les variétés de figues cultivées que j'ai rencontrées en Provence; & je n’y ai jamais trouvé des larves de cinips, quoique par-tout les fruits.des figuiers fauvages en fuflent remplise Il net peut-être pas difficile de rendre raifon de ce faic. La nature donne aux animaux un inftinct d'autant "plus sûr, qu'elle leur a refufé plus d'intelligence. Elle aflure quelquefois leur exiftence & leur reprodu@tion par des moyens qui fonc au-deflus de notre prévoyance & de notre admiration. Les feuilles qui forment l’œil des figuès ont beau être preflées , le cinips furmonte ces obftacles. Il pénètre dans l’intérieur de ces fruits, & malgré les ténèbres qui y règnent , il va dépofer fur chacune des femences naiflantes le ver qui. doit s'en nourrir. Le fruit &c Finfeite croiffent en même-tems. Mais, dans les figues fauvages, les p“dicules qui foutiennent les graines toujours fecs, n’arrêtent jamais les cinips après leur métamorphofe, Voilà pourquoi les figues fauvages doivent être attaquées de préférence. Nos figues cultivées deviennent très-fuccu- lentes en mürifflanr. Un infe@e foible fe débarrafleroit-il d’une liqueur mielleufe ? Les aîles qui lui ont été données, ne rendroient-elles pas fa retraite plus difficile ? À Des Botaniftes célèbres ont avancé que les figues fauvages portoient feules des fleurs mâles, & que la fécondation des figues domeftiques éroit opérée par les pouflières que les cinips y apportoient & donc ils fe chargeoient en fortant des fruits où ils avoient pris naiffance. Mais ces añertions ne font pas foutenables. Les fioues domeftiques renferment des fleurs mâles qu'on diftingue aifément lorfque les fruits ne font pas parvenus à leur maturité. D'ailleurs, en faifant attention que les fleurs femelles font fécondées de très-bonne heure, que les cinips ne peuvent y vivre qu'autant que cet effer a eu lieu, & qu'enfin les cinips, dans les circonftances les plus favorables , vivent au moins pendant un mois dans les amandes, on concevra fans peine que les infeétes en fubiflant leur dernière métamor- phofe doivent trouver les fleurs mâles defléchées & dépourvues de pouffières fécondantes. à M. le commandeur de Godeheu dit qu'à Malthe où on ne cultive que fept à huit variétés de figuiers domeftiques , la:caprification n’a lieu que pour deux feulement, & encore n’eft-elle pas abfolument néceffaire. La première variété de figuier qui produit les figues deftinées à la caprification porte deux fnis l’année. Celles qui müriflent les premières, c’eft-à-dire , à la fin de juin, font, meilleures, beaucoup plus groffes que celles de France, & d’un goût plus exquis ; elles parviennent fans aucun fecours SUR L'HIST., NATURELLE ET LES ARTS. ST à leur maturité. Les fecondes , au contraire, ont befoin d’être caprifiées , & ne müriffenc que pendant tout le mois d'août. Ces dernières figues font inférieures aux premières par le goût & la grofleur, La feconde variété de fivuier dont les fruits fe caprifient, ne produic qu'une fois l'an. Les figues fonc petites, blanchâtres & fucrées fans beaucoup de gout: La récolte en eft toujours fort abondante, Les branches font fouvent cachées par la quantité des fruits dont elles font chargées. Si les figues cultivées qu’on caprifie à Malthe ne renferment des cinips que lorfqu'on fufpend à leur voifinage des figues fauvages , on pourroit fe Aatter de tromper l’inftinct de ces infectes. Mais ils piquent ces figues d'eux-mêmes , de l'aveu de M. de Godeheu. On ne les rencontre point dans les figues de la première sève qui font très-fucculentes , & celles où ils vivent approchent beaucoup de l’état des figues fauvages par le peu de fuc qu'elles renferment. Quelqu’ancien que foit l'ufage de porter fur des figuiers cultivés les fruits des figuiers fauvages , je ne puis croire que cette opération foit néceffaire. Elle éroit autrefois adoptée en Italie, & elle n'y eft plus pra- tiquée aujourd'hui. Si on difoir que les variétés de figuiers , à qui la capri- fication eft eflentielle, y ont été détruites, on avanceroit une aflertion dénuée de vraifemblance. Les figues dont la maturité eft hâtée par ce moyen , font d’une qualité médiocre. Elles font donc réfervées pour la nourriture du peuple qui ne s’apperçoit pas, en les mangeant , des infectes ue les amandes peuvent renfermer. IL y a des figues, relles que la Barniflote & la Marfeilloife , qui font très-fucculentes, très-fucrées &’d'un gout exquis. IL y a d’autres variétés qui font très-sèches & fans faveur. Ce font-là les qualités extrèmes que les figues peuvent repréfenter. Mais il y a une infinité de variétés inter- médiaires. Îl eft aifé de s’en repréfenter qui s’amolliffent aflez pout être mangeables, fans être aflez fucculentes pour empêcher les cinips d'y vivre & d’en fortir. Ce font fans doute des variétés pareilles que les cultivateurs élèvent encore aujourd’hui dans le Levant. L'influence des cinips fe réduit à hâter la maturité des figues; mais , par ce moyen , la récolte de ces fruits devient plus abondante , & cet eïfet devient très- précieux. Selon M. de Tournefort, les figuiers qu’on caprifie donnent dix fois plus de fruits que des arbres de même groffeur fur lefquels les cinips ne fe reproduifent pas, Si cela n'eft pas exagéré, comme les figues fervent dans les campagnes à la nourriture des beftiaux, & comme, pour cer ufage, on doit avoir plus d'égard à la quantité qu’à la qualité, je penfe qu'il feroit très-avantageux pour la Provence qu'on fît venir du Levant les variétés qu'on caprifie. Celui à qui on les devroit, s’aflureroit , à la fois , la recon- noiflance du Culrivateur & celle du Naturalifte. Tome XXIX, Part. II, 1786. JUILLET, G 2 52 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Dans les livres de Botanique on donne d’abord la defcription du fiouier comme convenant à toutes les variétés. On fait enfuite une énumération plus ou moins longue de celles qu'on cultive ; &. on termine “certe lifte par le caprifiguier qu’on paroît regarder comme une variéré unique. Ce n’eft pas-là le tableau de la famille des figuiers. On ne peut pas, fans doute, le rendre fidèle, puifque chaque variété forme un individu diftin&, & que le nombre de ces variérés elt infini. Mais en confidérant ces arbres du côté de la fructification on peut les réduire à quatre claffes, TI. Figuiers qui ne portent jamais de fruits. IT. Figuiers donc les fruits ne font pas mangeables , & coulent toujours fans qu'on y puifle diftinguer ni fleurs mèles, ni Aeurs femelles. NT, Figuiers dont les fruits renferment des fleurs mâles & des fleurs femelles, & qui, fans être mangeables, parviennent à leur maturité & produifent des graines qui fervent d'alimens à des cinips. IV. Figuiers dont les fruits font bons à manger. EXPLICATION DES FIGURES. Fig. 1. Pédicule foutenant trois éramines. Fig. 2. Caplules de chaque étamine féparées, Fig. 3. Etamire à trois capfules. È Fig. 4. Partie inférieure de chaque étamine devenue courbe à mefure qu'elle a perdu fa pouflière & qu'elle s’eft defféchée, Obfervations relatives à l'annonce d’un Traité fur lOlivier , inférée dans le Journal de Phyfique du mois d’'Aoëût 1785; par M. BERNARD, des Académies de Mar/eille & de Lyon. Meflieurs , Lorfque je lus dans votre Journal l'annonce du Traité fur l'Olivier de M. Amoreux, je fus furpris de trouver dans les extraits que vous aviez publiés, des imputations très-injurieufes dont j'étois l’objet. Je vous adreffai mes réclamations ; il eût été important pour moi que vous les eufliez rendues publiques tout de fuite. Mais j'efpère que vous ne différerez pas davantage de leur donner une place dans votre Journal. M. Amoreux s'imaginant que l’Académie de Marfeille, en adjugeant le prix, avoit couronné un de fes Membres , & raifonnant d’après cette faufle fuppoñtion, s’eft permis beaucoup d’expreffions peu melurées & peu honnètes. Il a ofé écrire encore que l’Académie m'’avoit permis de parer , d'enrichir, corriger, amplifier mon ouvrage dans le cours de huit ou neuf mois ; ce qui avoit été fait avec autant d'art que de défavantage pour les Mémoires des autres concurrens. Je n'ai jamais offenfé M. Amoreux : je refpedte fes talens. En m'occu- pant d’un Traité fur l’Olivier ; je n'ai pu avoir, comme lui , que le défir Lé SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 53 d'être wrile. Le prix promis par l'Académie n’éroit pas proportionné à notre travail, & le laurier qu'elle diftribue n’éroit que la plus foible des récompenfes que nous puflions avoir en vue. Je n'ai été reçu à l’Académie de Marfeille que quatre ou cing mois après l'adjudication du prix. La qualité d'Aflocié , que j'avois lorfque mon Mémoire fut préfenté à cette Compagnie, n'a jamais privé perfonne du droit de concourir. Mon Mémoire fut,remis au Secrétaire long-tems avant celui de M. Amoreux ; & comme il a été imprimé dans l’érat où il avoit été préfenté , il eft clair que je n'ai pas pu le parer, le corri- ger, &c. aux dépens des autres ouvrages, L'Académie ne peut pas me refufer un certificat de ce que j'avance, & je. ne crains pas d'être démenti, Ces détails fufffent fans doute pouñdétruire aux yeux du Public les imputations de M. Amoreux. Mais il me feroit aifé d'établir plus folidement encore ma juftification , & de prouver qu'il m'eüt été abfolument impofible de profiter en aucune manière de fon travail. J'invite les perfonnes inftruires à comparer nos ouvrages dans le recueil de l’Académie. Eiles n’y trou- veront pas cette multitude de fautes d'impreflion que M. Amoreux y annonce; mais elles découvriront dans fon Mémoire un très-grand nombre d'erreurs impardonnables qui ne m'étoient pas échappées. EXTRAIT D'UN MÉMOIRE Lu à l’Académie Royale des Sciences, Contenant la Deferiprion d’un nouveau genre de Plante ; Par M. FouGEroux DE BoNpAROY. EX plante que je décris eft originaire de la Louifiane , aucun auteur botanifte n’en a, je crois , parlé ; elle mérite cependant d'être mulripliée & connue à caufe de la beauté de fa fleur & de la vivacité de fes couleurs tranchées. Cette plante annuelle peut s'élever aifément dans nos climats où elle fleurit & fruétifie ; elle fe garnit de fleurs qui fe fuccèdent depuis Ja mi-juillet jufqu’à la fin d'oétobre & au-delà. Si par la culture on pouvoit l'obtenir double , elle effaceroit la plante fi multipliée dans les jardins , fous le nom de Reine-Marpuerite , & que M. Bernard de Jufieu a procurée par des graines qu'il avoit reçues de la Chine, & qui fait maintenant l’ornement des jardins'& des parterres d’automne. | Cette plante eft dans la clafle des compofées de Tournefort, & rentre dans une des divifions de la fyngénéfie de Linné, qu'il a nommée Syngenefia , polygamia , fruflanea. \ 54 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ol Défcription & caraëère de la Fleur. Cazice. Le calice commun eft formé de deux rangs d'écailles lon- gues , pointues , non dentelées"& de couleur verte. Douze environ dans chaque rang , les unes fe relèvent. & entourent la fleur , d’autres fe rabattent fur le pédicule. Coror.… La fleur ef radiée , compofée & à rayon. Des demi- fleurons neutres forment le bord ou rayon. Le centre de la fleur eft occupé par des fleurons hermaphrodites , fertiles , & des fleurons fe- melles fériles qui forment un difque arrondi de 6 à 9 lignes d’élévarion. Les fleurons hermaphrodites & ceux femelles ont un calice particulier couronnant l'ovaire , perfftant ; compofé de cinq folioles lancéolées très-aioues , fe terminant par un filet. Ce calice recouvre prefque en- tiérement la corolle qui eft un fleuron tubuleux , s'évafant par fon extrémité en entonnoir. Son limbe eft divifé en cinq. ( fg. 10, 11 6 125 pl Il.) f La corolle des fleurons femelles a la même forme, le tube eft feu- lement un peu plus délié. - Dans le fleuron hermaphrodite on voit cinq courts filamens qui portent des antheres & fe terminent par deux pointes comme un fufeau. Ces antheres font réunies en un petit cylindre au travers duquel traverfe le flyle. (fig. 15, 16 & 17) Pisriz. Dans les feurons hermaphrodites le germe eft turbiné, angu- leux, & repréfente en quelque forte un volant. ‘ Le ftyle eft délié & de la longueur de la corolle, Le ftigmate eft divifé en deux parties ouvertes & excède un peu la corolle. ( f9. 13 & 18 ) Dans les fleurons femelles flériles , le germe eft très-petit, on ne voit point de ftyle & point de ftigmate. SEMENCE. Une feule femence aux fleurs hermaphrodites, & placée fous la corolle ; elle eft à quatre angles , pointue par fon extrêmité inférieure , obtufe & applatie par l’autre , furmontée de ÿ ou 6 écailles, terminées en filets qui forment l’aigrette. ( f£g. 19,20,21,22,23) On ne trouve pas la femence dans les fleurs femelles. Les demi - fleurons qui font à la circonférence , font plus longs que le calice commun , & s'étendent en rayons autour de la mafle commune. (fig. 3, 6.6 7, pl. IT) L'extrémité de ces demi-fleurons eft dentée très-profondément , en trois échancrures (fig. 3-) Toute la partie de- puis l’attache des feurons jufqu’aux dentelures , eft colorée en - dedans & en-dehors d’un rouge vif , & depuis la pointe des dentelures, d'un jaune citron. Ces demi-fleurons tombent. RécEPrACLE. Le récéptacle commun eft convexe, chargé de poils roides & féracés. (fo. 4 6 8.) - | SUR L'HIST.. NATURELLE ET LES ARTS. ss Les fleurons hermaphrodites & femelles font polés fur ce réceptacle commun. (fg.4 & 8.) La fleur eft foutenue par un très-long péduncule, Plufeurs réunies forment un rameau. à Te On voit par cette defcriprion que ce genre fe rapproche fur-tout par la difpofition de fon-calice commun, du Rudbeckia de Linné, Okelifco- theca de Vaillant; mais les femences , au lieu d'être plattes & garnies d’une membrane à quatre dentelures comme dans les Rudbeckia, font furmontées d’écailles à filets, comme dans les Helianrhus de Linné, dont la plante s'éloigne par la difpolition de fon caliee : ainfi puifqu’elle differe de l'un & de l’autre delces genres, nous croyons qu’elle doit en former un particulier, Les feuilles de cette plante font fimples, Celles du bas de la tige font dentelées profondément & inégalement , longues. de 3 pouces & demi , & dans leur plus grande largeur de 14 lignes ; tandis que celles des rameaux qui portent les fleurs, font peu ou point dentelées , & feu- lement longues de‘ 11 lignes fur $ lignes de largeur. (f£2. 9. & 1.) La plante porte des feuilles de trois différentes formes & grandeurs, les plus grandes fonc fur la principale tige & denrelées très-profondé- ment; des fecondes dentelées, maïs moins longues, font au-deflus de celles-ci & fur les rameaux ; enfin les plus petites & unies font fur les rameaux qui fupportent les fleurs, Elles font épaifles, un peu velues , & divifées feulement par une nervure lonzitudinale , affez relevée en deflous, profonde en dedans. Le péduncule de la feuille entoure la moitié de la tige & y adhére for- tenent. Les feuilles féminales font allongées & prefque point dentelées. Toûte la plante eft pubefcente , fe foutient & croît à la hauteur d'environ un pied & demi ou deux pieds. Chaque rameau & chaque divifion de rameau eft terminée par un bouton à fleur ; ces boutons fe fuccèdent les uns aux autres, de forte que, ainfi que je lai dit, cette belle plante eft garnie de fleurs depuis la mi-juillet jufqu’au mois d’oétobre ou décembre, fi on la met à l'abri des gelées, La couleur vive & coupée de rouge & de jaune de ces fleurs de 26 à 28 lignes de diamètre , donne un éclat fingulier à toute la plante. Cfg 6€ 7.) Nous devons cette plante à M. le comte d’Effales, chevalier de S. Louis , qui en a rapporté les graines de la Louifiane, Nôus l'avons eue des femences recueillies en France , & que nous mulriplions depuis - deux ans. à Nous la nommerons: Gaillarda , folis alternis lanceolatis femiamplexantibus , floribus amplis fubfolitariis terminalibus purpureo flavis. ( a&. KR. par.) du nom de M. Gaillard de Charentonneau, qui aux devoirs de la Magiftrature “ ÿ6 OBSERVATIONS SUR LA PEYSIQUE ; a fu réunir, comme délaflement, la culture des plantes & l’érude de la Botauique. EXPLICATION DES FIGURES. Planche feconde. Fig. 1. Le bouton vu de profil avant que les écailles fe foient féparées. Elles furmontent le renflement qui fupportera les corolles des fleurs compofées. Fig. 2. Ce même bouton vu dans une autre polition, & les écailles commençant à prendre une différente direction. 3: Pétale ou demi-feuron formant le difque de Ja fleur vu féparément, Fig. 4. Le calice commun vu de face & dépouillé des Aeurons & des demi-fleurons. 5. Le calice avec les demi-fleurons du difque qui commencent à fe colorer. 6, La fleur vue de face. Fig. 7. La fleur vue en deffous avec fon calice. Fig. 8. Monceau de leurons hermaphrodites & de fleurons femelles, Fig. 9. Forme & figure des grandes feuilles d’en-bas. Fig. 10.Fleuron hermaphrodite : au bas eft l'ovaire furmonté d’un calice particulier à cinq découpures profondes , & d'une corolle en tube élargi à fon ouverture, dans l’intérieur de laquelle on voit cinq étamines qui entourent le ftyle furmonté d'un fligmate terminé par deux pointes. / Fig. 11. Méme fleuron dont les divifions du calice particulier fone rabattues pour mieux voir fa corolle. Fig. 12, Même fleuron où l'on voit la corolle à cinq divifions, ainf que les cinq étamines qui environnent le ftyle. Fig. 13. L'ovaire qu’environnent les cinq étamines réunies fur le flyle & le ftigmate divifé en deux. Fig. 14. L'ovaire furmonté de cinq aigrettes. Fig. 15. Etamines réunies. Fig. 16. Etamine feule. Fig. 17. Etamine vue de profil. Fig. 18. L’ovaire avec le ftyle & fon ftigmate. * Fig. 19. L’ovaire feul ; la femence ou graine. Fig. 20. Ovaire feul dont l’amande eft enlevée. Fig. 21. L'amande feule. \ Fig. 22, La femence en maturité, de couleur brune, furmontée de quatre aigrettes rangées fur la graine comme Les plumes, d'un volant, & de couleur blanche, , Fig, 23, La graine feule, LETTRE SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. $7 LETTRE DE M BROLEMANN, A M DE LA METHERIE,; Sur une produëion des fourneaux à manches de Poulliouen. 1, REPARER Vous avez donné au Public dans votre Journal du mois de janvier, l'analyfe faite par MM. Haflenfratz & Giroux, de l'Ecole Royale des Mines, d’une production des fourneaux à manches de Poullaouen en baffe- Bretagne. Le réfulcat qu'ils en donnent eft très-farisfaifanc; mais en nommant cette matière faturnite, on a engagé M. Monnet, Infpeéteur-général des Mines, à faire une réponfe dans le Journal du mois de mars, par laquelle il prétend que ce nom ne lui convient point , parce que la matière qu'il avoit découverte à Pouilaouen, & qui par la fuite a été reconnue en Angleterre, & nommée faturnite par M. KirWan , & après par M. Berg- mana, en Suède, doit avoir des qualités particulières que les mattes de plomb n'ont pas. M. Monnet dit: 1°. Qu'elle eft homogène. 2°. D'une fuñon très facile, mème à la bougie, 3°. Qu'elle eft criftallifée en aiguilles après avoir été fondue. 4. Qu'elle fe difipe à la coupelle avec une prompritude fingulière. 5°. Qu'elle ne fe combine avec le plomb qu’autant qu'elle eft miné- ralifée par le foufre. 6°. Que dès qu'elle eft privée de ce minéralifateur , on la voit couler à côté comme du beurre. : C'eft d'après ces différens caractères que M. Monnet tire fes conclu= fions ; il dit que c’eft une matière particulière & homogène, qui n’a aucun rapport avec la matte analyfée par MM. Giroux & Haflenfrarz. Honoré de la place de Profefleur-pratique de Minéralogie , je croitois manquer à la confiance que le Gouvernement me témoigne, & en même- tems aux progrès utiles de linftitution de l'Ecole Royale des Mines, fi je me démontrois que la matière nouvelle que M. Monnet prétend avoir Tome XXIX, Pare. II, 1786. JUILLET, H 58 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, découverte, & qu'il donne pour une production de la mine de Poullaouen proprement dite, eft-un fait aufli peu fondé que non-exiftant. Le minéral que la mine de Poullaouen a donné depuis qu'elle a été exploitée, n'a éré qu'une pure & fimple-galène à grandes & petites facettes ; & jufqu'à ma nouvelle découverte du filon au midi à cent toifes de diftance des anciens travaux , on n'avoit jamais remarqué une mouche de cuivre mêlé dans ce puñflanc filon ; c’eft de la blende & de la pyrite ferrugineufe qui accompagnent le minéral; fa gangue eft compofée de quartz, de fchifte & d'une pierre fablonneufe grife, qui fert prefque généralement de bafe dominante dans tous les filons qui ptoduifent une galène abondante en plomb &- peu riche en argent. Ce minéral fe traite au réverbère, où on charge vingt-deux quintaux à la fois; on emploie feize heures de tems pour le griller & fondre: à cette première fonte, on obtient les fix- feprièmesde plomb qu'il contient, & l’autre feptième fe trouvé divifé dans environ trois cens livres de crafles blanches qu'on retire à la fin de chaque charge. Ces crafles blanches alors retournent aux fourneaux à manches, où on obtient toute leur teneur en plomb fans qu’il en réfulte aucune autre matière; & les plombs de’ cette mine font fi purs, qu'à Paffinage ils lithargent avec la plus grande facilité, & n'offrent pas la moindre litharge noire. » Voilà, Monfeur , un faitavéré par l'expérience ; & M. Monnet eft mal inftruit quand il avance que je ne faurois définir la faturnite ; difant que depuis que je fuis à Poullaouen , on n'y a pas fondu de minéral de cette mine proprement dite, ou du moins de celui qui contient de cette matière” fingulière, - Les comptes que j'airendus à Mefieurs les propriétaires de cette mine . prouvent que depuis 1781 j'en ai fait tirer & traiter au moins trois millions! pefans ; il me femble que cette quantité a pu fuffire pour faire un effai en règle. Venons maintenant à la matière qui fait l’objet de cette difcuffron. Elle eft une matte de plomb provenant des craffes blanches qui réfultent de Ja fonte du minéral de la mine d'Helgouer, qui eft d'une nature route différente de celle de Poullaouen } par rapport à la richeffe en argent & le cuivre qui accompagne prefque par-tout le minéral: on peut le vérifier fur les lieux, ou par les échantillons qui doivent inceffamment arriver à Paris, pour être dépolés au Cabinet national de l'Ecole Royale des Mines. La bafe de la matière en queftion, eft la combinaifon de la pyrite cuivreufe avec la mine de plomb. S'il éroit poffible de féparer parfaite- ment cette pyrite cuivreufe du minéral d’Helgouer , le traitement de ce plomb feroit le même : on le travailleroit avec la même facilité que celui de Poullaouen ; mais ces mattes étant alliées avec des parties cui- vreufes , elles exigent, à la connoiflance de tout fondeur, des grillages SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 59 dix à douze fois répétés, avant d'en obtenir des produits nets & féparés. Voilà, Monfieur , ce que j'ai cru devoir vous obferver pour prouver l'origine & le réfultat de cette matière. IF ne me refte plus qu'à répondre aux différens caraétères que M. Monnet a donnés à ces mattes, voulant les faire pafler pour une matière nouvelle, Il dir: 1°. Que cette matière eft homogène, Je réponds qu'une matière combinée ne peut l'être. 2°. Qu'elle eft très-fufñble, fondant même à la bougie. Rep. C'eft vrai, & toute matte de ce genre left. 3°. Qu'elle fe criflallife en aiguilles après avoir été fondue, Rép. Sa criftallifation eft variée à raifon de fa teneur plus ou moins rande de l’un ou l’autre métal. 4°. Qu'elle fe diffipe promptement à la coupelle. s Rép. Elle paroîe, il eft vrai, fe diffiper à la coupelle, mais elle ne fait que s’y imbiber en partie, laiffant une croûte noirâtre, Remettant certe coupelle au creufec avec du flux, on en obtient facilement le produit avec très-peu de diminution. l 5°. Qu'elle ne fe combine avec le plomb qu'autant qu’elle eft minéralifée par le foufre. Rép. C'eft dans cet état qu’elle ne fe combine pas avec le plomb , elle furnage fimplement. À 6°. Que dès qu’elle eft privée de ce minéralifateur, elle coule à côté comme du beurre. Rép. C’elt précifément le contraire, car dès qu’elle en eft privée, elle eft parfaitement métal & combinée. Pour que vous puifliez, Monfieur , en juger par vous-même, je vous fais pafler une petite boîte renfermant diflérens échantillons de ces mattes; & quand vous en aurez le réfulrat, je vous prie de vouloir bien convaincre le Public que MM. Haffenfratz & Giroux ont bien analyfé la matière que M. Monnet a citée comme nouvelle, & l'inftruire que le-nom de faturnite ne lui peut convenir qu'après de nouvelles conventions, Je fuis, &c. Au Ponfpean, le 12 juin 1786. 01 LA RER, LM AK... 4 - LU Tome XXIX, Part, Il, 1786. JUILLET. H 2 L.(e] OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, EXAMEN CHIMIQUE De la Pierre ollaire , appelée Craie d'Efpagne , fleatite de Bareith , (Bayrentifchen fpeckftein ); Par M. Wi1EGLEB: Traduit de LP Allemand, par Madame PiCARDET, de Dijon. Cxrrs efpèce de pierre a déjà été examinée par M. Maroraf , & on voit dans fes opufcules (1), qu'en ayant traité une once avec égale quantité d'acide vitriolique , il n’en retira qu'un gros de magnélie & qu'il refta 7 gros de matière infoluble. Mais lorfque je confidérai d'une part combien cette pierre étoit douce au toucher , d'autre côté que des pierres de même efpèce avoient donné une proportion bien plus confidérable de magnéfie , je comrmençai à douter que toute certe terre eut été réellement extraite dans l’opération de M. Margraf. Pour ce qui eft de cette expérience , j'ai déjà obfervé plufieurs fois qu'eile n'étoit pas en général aufli sûre que l'on l’avoit imaginé. Dans le nombre de ces pierres, il y en a dont l’anion naturelle des parties folubles avec les parties infolubles eft fi folide, que les premières ne peuvent être diffoutes par une feule diflillation de l'acide vitriolique , ou du moins qu’elles ne le font pas en totalité. Pour m'en aflurer , je mis dans une corne 480 grains de cette pierre réduire en poudre fine , je verfai deflus 960 grains d'acide vitriolique affoibli de 480 grains d’eau diftillée, & je diftillai à ficcité. Le réfidu fût completement édulcoré & féché de nouveau. Il n'avoit perdu de fon poids que 50 grains , il étroit encore fort doux & favoneux au toucher ; je précipicai de la liqueur pr le moyen de l'alkali, ÿ6 grains de magnélie mêlée de‘chaux de fer. C’en étoit aflez pour confirmer ma conjeéture. Alors je mêlai 480 grains de nouvelle pierre réduite en poudre, avec 720 grains d’alkali fixe très-pur , & je tins ce mélange médio- crement rouge dans un creufet pendant une demi-heure. Après le refroi- diflement je pulvérifai la mafle & j'en rerirai tout l'alkali par l’eau diftillée chaude. Il n’y eut dans cette expérience aucune trace de diflo- lution de terre quartzeuze. La poudre ainfi préparée & féchée fut mife T Tome 2, page 15. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 6t dans une cornue de verre avec 660 grains d'acide vitriolique concentré & 480 grains d’eau , & la diflillation pouffée à ficcité , le réfidu ayant été lavé #z bien édulcoré dans l’eau chaude , enfuite féché , fe trouvæ pefer 280 grains ; il étoit rude au toucher, craquoit fous les dents & n’étoit autre chofe qu'une belle terre quartzeufe blanche. Ayant raflemblé toutes les lefives , je les précipitai d’abord par la liqueur pruffique , & j’eus 22 grains de bleu de Prufle , qui laifsèrent après la calcination 12 grains de terre martiale. Le furplus de la liqueur ainfi purifié de fer donna 200 grains d’une belle magnéfie blanche , mais dont le poids , à caufe de l'humidité qu’elle receloit encore, doit être réduit à 188 grains. Ainfi 480 grains de la pierre dont il s’agit (ftéatite de Cronftedt ) tiennent ...... 280 grains de quartz. 188 de magnélie. 12 de terre martiale, nee À 480 (Ce qui fait au quintal 58,34 de quartz, 39,16 de magnéfie, € 2,5 de terre martiale ), Ce me | OBSERVATIONS MINÉRALOGIQUES Faites dans le Dauphiné, depuis la fource de la Romanche , Jufqu’a la plaine de l'Oifans ; en Août & Septembre 1785 ; Par M. DHELLANCOURT, Ingénieur des Mines. La Romanche prend fa fource à environ deux lieues du Villar-d'A- rêne, village qui fe trouve fur la petite route de Grenoble à Briançon, La diredtion de cetre rivière à fa fource eft du fud-oueft au nord-eft ; mais elle change bientôt & rourne vers l’eft. Elle n’eft à fon origine que l'écoulement des glaciers iminenfes qui enveloppent prefque route la furface élevée des montagnes qui l'environnent. Cette rivière eft déjà volumineufe & rapide au Vilar -d’Arêne, où elle S'eft creufé un Hit profond dans le fchifte argileux qui eft appuyé fur la bafe de la montagne appellée la Sure. MONTAGNE DE LA SURE. Cette montagne s'étend du fud-eft au nord-oueft ; elle eft fort élevée; fa cîme eft toujours couverte de neige. Sa furface eft prefque par-tout aride & très-efcarpée. On n'y rencontre que rarement quelques brins de fapins qui y végètent languiflamment ; 62 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, le genre de pierre qui conftitue la mafle de cette montagne , eft la roche feuilletée primitive quartz & mica par couches minces alterna- tives , Le kneïfs des Saxons. Les couches de cette montagne font très-irrégulieres, On a découvert à [a furface plufieurs filons de cuivre & de plomb. Fizon ve PLoms. L'un d'eux qui eft le plus élevé eft un filon de mine de plomb à l'état de galène ; dans l'efpace de 4 à $ toifes que j'ai pu fuivre ce filon à découvert , fa puiflance m’a paru varier de 3 à 7 & 8 pouces: la pierre de /a gangue ou la matrice du minérais eft le quartz. Sa direction fait à-peu-près un angle de 45°, avec celle de la montagne. Il coupe perpendiculairement les couches du rocher. Quel- ues paylans du Villar-d Arène exploitent ce filon & vont vendre le plomb à Allmont où il eft néceflaire pour fondre le minérais d'argent, de la mine des Chalanches. FiLoN DE Cuivre ET DE PLoms. A quelques toifes plus bas, fur la même face de la montagne, eit un autre filon. Celui-ci a une direc- tion parallèle à celle de la montagne. Il s’incline de 15° au fud-eft. Il fournit de la pyrite cuivreufe, de la chaux de cuivre bleue & verte , & aufli de la mine de plomb à grain d'acier fouvent ftrié. La pierre deminante de la gangue m'a paru être le quartz. J'y ai vu du fpath efant. FiLoN DE CUivRE ET D'ARSENIC, Des payfans du Villar-d'Arène travaillent encore depuis peu à un autre filon qui s’eft crouvé plus bas que le dernier , toujours fur la même face de la montagne ; mais dans un endroit moins efcarpé que les précédents. Ce filon paroît aufh, aurant qu'on en peut juger ä-préfent , avoir la même direction que la montagne & s'incliner de quelques degrés vers le fud-eft. On y trouve de la mine de cuivre jaune , quelquefois chatoyante & approchant pour l'afpet de celle que les allemands appellent paon fchwefel, queue de paon. Ce même filon fournit abondamment une pyrite grife très-chargée d’arfenic. La pierre de la gangue paroît être aufli le quartz ; on y voit en outre une terre ochreufe brune. J'ai vu encore en différents endroits de la furface de cette montagne des indications de filons cuivreux ou au moins pyriteux & quelques tentatives faites par les payfans ; mais les flons que je viens de décrire m'ont paru feuls jufqu’a-préfenc mériter quelqu'attention particulière. MINE DE FER MIGACÉE ATTIRABLE À L'AIMANT. Au pic du bec, l'une des cimes de cette montagne de la Sure , fe trouve une mine de fer micacée. J’en ai vu plufeurs morceaux qui agifloient très-forremenc fur le barreau aimanté. Quelques-uns. même fe font trouvés avoir deux pôles. Le pic du bec étoit couvert de neige lorfque je fus dans le pays SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 63 H pourroît être intéreflant fans doute de connoître mieux intérieur de la montagne de la Sure & d'y renter quelqu'exploitation plus répulière que celles que pratiquent les payfans ; mais de grands obftacles s’oppoferoient à la réuflire de cet établiflement, D'abord la diferre extrême de bois dans tousces environs , où les habitans même ne brülent que de la fiente de beftiaux defféchée , les efcarpements & les précipices qu'on rencontre à chaque inftant permettroient difficilement de faire fur cerre montagne des chemins praticables même pour des hommes à pied. D'ailleurs ce pays manque de débouchés & na que des communications difficiles & très- fouvent interrompues avec les plaines du Dauphiné & le refle du monde, Quelques habitans m'ont die que pendanc l'hiver leurs maifons fon enfévelies fouvent jufqu'aux deux tiers de leurs hauteurs par les neiges. Ces malheureux alors manquant de combuftibles, n'ont d’autres reflources pour fe fouftraire au froid qui les feroit périr , que de fe réunir dans les écuries ou les étables avec les beftiaux qu'ils y nourriflent de fourrages fecs amaflés pendant l'été, La rareré du bois expofe aufli ces habitans à manquer de pain. Ils récolcent , fur quelques pentes les moins rapides des montagnes , du bled farrafin & de l'orge, & certe récolre fuffit pour leur provifion ; mais leur embarras eft de cuire la pâte qu'ils ont formée avec ces grains : auffi quand ils ont pu ramaffer aflez de bois ou de paille pour chauffer le four bannal du village, ils cuifent alors du pain pour plufeurs années. J'ai goûté de leur pain cuit de deux ans , il étoir rrès-compaite & applari à-peu-près comme les bifcuits de mer, on eft obligé de Le caffer avec le marteau & de le laiffer tremper dans un liquide avant de pouvoir le manger. La rive droite de la Romanche oppofée à la montagne de la Sure, eft compofée d’un amas de fchiftes argileux qui approchent de l'étar d'ardoife. Ces fchiftes font pénérrés d’une infinité de petites veines cal- caires. Ils recouvrent en grande partie les montagnes granitiques qui bordent la Romanche de ce côté, comme de l’autre ,en s'étendant fur une direction moyenne du fud-eft au nord-oueft. Il paroït qu'il a exifté à cer endroit un baflin confidérable dont les eaux ont dépofé fuccefivement les bancs fchifteux qu'on y trouve. En examinant cette partie de terrein avec un peu d'attention , on voit bien- tôt que ces dépôts font une fuite néceflaire de la direction des courans qui avoient lieu. Les eaux qui forment la Romanche viennent du fud- oueft. On apperçoit vers le fud-eft une gorge profonde à l’origine de laquelle je n'ai pas remonté , mais dont la dire@ion fait un angle de 70 à 80° avec la gorge plus large & plus profonde encore dans la- quelle la Romanche commence à couler au pied des glaciers. La réful- tante de ces deux diretions , fuppofant les forces égales, devoit tendre au nord nord-eft ; mais les eaux de la Romanche ayant plus de volume, comme on en peut juger par la différente capacité des lits féparés des à 64 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, deux courans , cette rivièré a dû conferver une influence proportionnée à fon impulfon fuccellive & dévier les eaux de la direction nord nord- eft, en les amenant jufqu'à l'eft. La rapidité du courant diminuant à mefure que les parties du fluide divergeoienc & s'éloignoient de la réfultante des deux directions, les eaux devoient arriver vers l’eft &. ne conferver qu'un mouvement circulaire affez foible pour laifler dépofer dans cette partie les matières qu'elles charioient & y former des ater- tiflemens, ce qui eft arrivé en effer. Ces dépôts fe font élevés peu-à-peu au point de former eux-mêmes une digue qui reflerre actuellement les eaux de la Romanche dans un canal érroit & très-creux au pied de la montagne de la Sure. C’eft fur une partie de ces anciens dépôts qu’eft fitué le village du Villar-d'Arène. A environ 200 toifes d'élévation au-deflus de ce village , vers l'Orient, il exifte un lac qui étoit autrefois , dit-on, beaucoup plus confidérable ; les habitans aflurent qu'il décroit d'une manière fenfible. On ne lui voit cependant aucune iflue, mais on eft perfuadé dans le pays qu'il seft formé une efpèce de canal fouterrein par lequel il va fe dégorger dans la Romanche. On croit que ce canal fouterrein pafle vers l'églife du village , parce que depuis quelques années le rerrein s'eft affaiflé dans cette partie d’une manière aflez marquée, & qu'il y a dans cette même direction , fur le bord du lit de la Romanche , une fource profonde qui fournit beaucoup. Les eaux de ce lac font le produit de lécoulement des pluies qui tombent fur les faces des montagnes & des côtés qui l’environnent. Il n’eft entretenu par aucun glacier. En fuivant le cours de la Romanche , après avoir quitté le Villar- d'Arêne, on pañle le long des bancs de fchifte coupés à pic fur une hauteur de plus de 40 toifes, Quelques morceaux fufpendus menacent les voyageurs de fe détacher fur-tout dans les tems humides. On arrive au village de la Grave, fitué fur la rive droite de la Romanche & on fuit des yeux, à la rive gauche, la chaîne de granite qui fe continue depüis la montagne de la Sure, Cette chaine eft profondément fillonnée de diftance en diftance par les torrens qui forment ce que les gens du pays appellent des couloirs ou combes | en tombant des vaftes glaciers qui en couvrent les fommets, En été , lorfqu'un vent chaud vient'augmen- ter fubirement la fonte des glaces , ces torrens entraînent des quartiers énormes de rochers, groffiflent rout-à-coup la Romanche & occalionnent fur fes bords des ravages affreux. ' Le village de la Grave eft encore afis fur des bancs de fchifte; mais dont les pentes font plus douces qu’au Villar-d’Arène, Les terres des environs font cultivées en plus grande partie. Après la Grave on eft obligé de quitter la rive droite de la rivière. On pafle un pont de bois appuyé fur deux énormes blocs de granite. Mis DE PLoms p’Ecxiose. Entre le village de la Grave & : Loche, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 6$ Loche , fur la rive gauche ; fe trouve la mine d'Échilofe qui fournit du plomb à la fonderie d’Allmon. Cette mine eft précifément fous un glacier , ce qui en rend l'accès rrès-difiicile à caufe des avalanches qui ont lieu fréquemment. Le très-mauvais rems qu’il ft pendant mon fé- jour dans ce lieu m'empêcha de viliter cette mine. On croit à la Grave d'après d'anciens papiers qui en font mention , qu'il a eu deux filons fur cette montagne , qui étoient exploités par des proteftans avant l’édit de Nantes, & que l’un de ces filons contenoit de l'or & l’autre du plomb, M. Schrieberg qui a vu cette mine & qui a même penfé y périr m'a dit n'y avoir vu qu'un filon de plomb qui eft un des plus beaux de ce canton. Après être defcendu la montagne d'Echilofe , on paffe à Loche, nom qu'on a donné à une efpèce d’auberge qui eft là ifolée. La Romanche continue de couler fuivant la même direction du fud-eft au nord-oueft dans une gorge appellée la gorge de Maraval, Elle eft bordée de rochers de granite & de kneifs, très-élevés & arides qui donnent à ce fite un afpet des plus fauvages ; la vue s’arrêre de rems en tems avec étonnement & admiration fur des cafcades & des chütes d'eaux , qui, roulant rapidement des fommités plus élevées des mon- tagnes , fe précipitent en napes brillantes aux endroits où le rocher à pic ne laifle plus qu'une furface perpendiculaire. Le lit de la Romanche eft jonché de débris des couches fchifteufes , ce qui donne à fes eaux un coup-d'œil noirâtre. Il y a aufli beaucoup de granites roulés. L'un d’eux m'a paru remarquable par fa beauté. I] eft compofé d’un quartz verdâtre , de petits fchorls noirs & de criftaux de feld- fpath d'un très-joli rofe. Je crois que ce granite vient des montagnes qui confinent la Savoye derrière la Grave , le Villar-d'Arêne, &c. du moins je l’ai remarqué en plus grande quantité dans les couloirs qui amènent les eaux de ce côté, à En avançant dans la gorge de Maraval, je ramaflai une efpèce de kneifs particulière , & dont la nature eft intéreflante. Il eft compoié de couches alrernatives aflez ferrées de mica noir & de fpath calcaire; je n’avois vu jufques-là dans certe gorge que le knei/s ordinaire compolé de mica & quartz. Je ne tardai pas à appercevoir la montagne d'où venoient Îes pierres qui m'occupoient. Elle étoit aufli élevée que les autres montagnes voifines ; fes couches étoient à-peu-près horifontales, & plus rarement ondulées & rourmentées que celles des autres montagnes de kneifs. La direction de ces couches & celle de la montagne étoit la même que celle de la gorge. En quittant cette montagne qui avoit attiré mon attention pendant quelques momens., je commençai à découvrir le mont de Lans ; il femble d'abord une large mafle qui obftrue la gorge fans laifler d'iflue à la rivière ; mais à mefure qu'on approche on découvre avec plus de plaifir Tome XXIX, Part. 11, 1786. JUILLET, 66 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, les détails de cetre montagne. Un peu avant d'arriver au‘pied du mont de Lans, on voit encore des amasfchifteux très-confidérables qui forment un grand baffin. La Romanche reçoit à cet endroit un torrent par lequel s’écoulent les eaux des faces du mont de Lans oppofées au fud-eft & au fud. Ce torrent vient joindre la Romanche À angle droit. C’eft lui fans doute qui a occafonné les atrerriffemens qui font dans cetre partie, & a forcé la Romanche à changer la direction de fon cours ; car ellegcom- mence alors à couler du {ud oueft au nord-eft en entrant dans la gorge très-reflerrée , appellée la bame d'Oris où cette rivière reprend enfuite à-peu-près fa direction du fud-eft au nord-oueft. La balme d'Oris prend fon nom de la montagne qui occupe la rive droite de la Romanche, où eft lewvillage d'Oris qui s'étend dans la mème direction que cette gorge & la domine en partie. Un des fancs du mont de Lans occupe la rive gauche. Je vais d'abord parler de la montagne d'Oris & revenir enfuite au mont de Lans. La pierre conflituante de la montagne d’Oris eft en général le Æneifs ou la roche feuillerée mica & quartz à couches plus ou moins ferrées, quelquefois le fchorl en roche pénétré de fléatite. Les couches varient infiniment quant à leur direction & à leur inclinaifon. Cette montagne eft cultivée & riche dans certains cantons, fur-tout aurour du village d'Oris, mais elle elt très-efcarpée dans beaucoup d’autres. Entre le village d'Oris & celui du Frefney eft une efpèce de combe aflez creufe formée par la chûte des eaux des cîmes fupérieures des rochers. Cette combe offre beaucoup de fchifte dont les couches font ou très-inclinées ou perpen- diculaires. Entre ces couches il s'en eft trouvé de plus noires que les autres & capables de bruler, mais difficilement. Les habitans ont extraire beaucoup de cette matière terreufe, & lui ont donné le nom de charbon de terre. Ils viennent même à bout de la faire brûler , & de s’en fervir l'hiver en la mêlant avec du bois. Ce fchifte noir particulier m'a paru exifter principalement dans les endroits où les eaux fe font infltrées entre les couches perpendiculaires & y ont entraîné diverfes matières, & fur-tout des débris de végétaux que j'y ai encore retrouvés à dei-noirs, pulvérulens & comme dans un état charbonneux ; il me femble que les pyrites qui font aflez communes dans ces montagnes s'étant décompofées à la faveur de l'humidité & de l’infiltration continuelle de ces eaux entre ces couches de fchifte, ont pu charger ces mêmes eaux d’une quantité d'acide vitriolique fufffante pour charbonner les débris de végétaux qu'elles rencontreroient, & que ces parties charbonneufes étant dépofées & enfuite incorporées dans la couche fchifteufe, ont pu produire cette efpèce de charbon terreux. La montagne d'Oris offre beaucoup de chofes intéreffantes pour les cabinets de minéralogie. On a trouvé dans différents endroits de la SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS: 67 balme d’Oris , entre les couches du rocher du fchorl violet rhomboïdal, le même otaèdre ; mais ce dernier eft beaucoup plus rare ; le fchorl vert, en faifceaux d’aiguilles prifmatiques , terminés par des pyramides obrufes tétraèdres. Auprès du village d'Hwes on trouve du fer micacé en feomens de prifme hexagone , attirable à l’aimant , enfin l'efpèce de pierre en macle, d'un blanc laiceux , éclatant & regardé par quelques naturaliftes comme feld-/path & par d'autres comme /chorl blanc. Tous ces différens criftaux fe rrouvent dans des cavités ou fentes des roches & fouvent dans l'argile entre deux couches d’un rocher en fchorl pénétré de ftéacité. On rencontre aufli quelques criftaux de roche contenant de la ftéarite verte ou blanche , des criftaux de fer micacé , des pyrites , du fpath pefant , du fchorl vert ou violet. La montagne d'Oris s'étend jufqu’à la plaine de l’Oifans & la Ro- manche la fuit en confervant la même direction à quelques petites finuofités près. Revenons à la defcription du mont de Lans qui occupe par une de fes faces la rive gauche de cette rivière & fe termine auffi à la plaine d’Oifans, à la jonction dela Vener. La vue fe repofe délicieufement fur le côté de certe montagne , oppolé au fud-eft & à la gorge de Maraval. De beaux bois & des terres culri- vées qui fe préfentent comme en amphithéâtre fur une pente très-érendue, contraftent bien avec les rocs arides & déchirés de la gorge de Maraval. La pierre conftituante de la montagne à fa bafe , de ce côté, eftun kneifs à couches aflez groflières , recouvertes de fchiftes en quelques endroits & inclinées vers la gorge de Maraval. Sa direction eft du fud-eft au nord-oueft au tiers à-peu-près de la hauteur de la montagne fur la face oppofée à la gorge de Maraval. On trouve au-deflus des terres cultivées un beau village qui porte comme la montagne, le nom de Mont-de-Lans. Après avoir traverfé ce village , en continuant demonter, on côtoye un petit ruiffeau dans le lit duquel on remarque des granites roulés, On arrive enfin à une peloufe dont la pente eft aflez douce , & on apperçoit alors à fa gauche vers le fud-oueft une cime granitique qui s'élève à une grande hauteur. Cette cime eft recouverte de bancs cal- caires. À droite vers le nord-eft on voit les couches de la montagne s'élever le long du cours de la Romanche. Elles forment alors dans la balme d'Oris de grands efcarpemens à pic. Si on continue fa marche vers le nord-oueft, on fe trouve dans une vallée aflez vafte , à l’extré- mité de laquelle font conftruites une cinquantaine d'habitations, Elles appartiennent à des pâtres qui y demeurent pendant l'été afin d’être plus à portée de veiller aux troupeaux nombreux qui font entretenus dans les päturages de cette montagne. Ces pâtres ne pourroient pas y refter l'hiver à caufe de la trop grande quantité de neige qui s'amañle fur ce plateau. Auprès de ce hameau eft une efpèce de marais dans lequel on extrait de la tourbe ; on ne voit aucuns veftiges d'arbres autour Tome XXIX, Part. Il, 1786. JUILLET. I 2 ’ - 68 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, de ce marais , ni même fur coute cette partie de la montagne. Cependant la tourbe qu'on extrait contient beaucoup de troncs de bois de 2 à 3 pouces de diamètre, & ces bois ne font que pénétrés d’eau. Ils ont confervé leur couleur. Les payfans que j’ai queftionnés à cer égard n’ont jamais vu de bois fartoute cette plate forme & n'ont jamais entendu dire qu’il en ait exifté ni qu'aucun évènement les ait ainfi enfouis ; peut-être ces bois étoient- ils fur l'une des pentes qui dominent cette vallée au füd-oueft ou au nord-eft , & alors ils ont pu être entraînés par des avalanches & entaflés confufément dans cet endroit. 7 Après avoir traverfé le hameau & cette prairie qu'on a rencontrée avec furprile à cette hauteur , on n’apperçoit plus devant foi que des fommets de montagnes nues & chargées de glaces à leur cime, on a à fes pieds une gorge très-profonde à laquelle on ne voit point d’iflue ; fi on veut vifiter cette gorge, on defcend pendant deux heures à travers de grands bancs de fchifte qui occupent le flanc de la montagne vers le nord nord-eft. Cette partie prend le nom d’Æ/pe de Venofque, à caufe du village de même nom fitué au pied de cette face de montagne en tournant vers l'eft. Au fond de la gorge coule la Veneo. Cette rivière recoit les eaux de la montagne même de #’enofque & encore toutes celles qui viennent des montagnes au nord-oueft & au nord, Au-deflus du village de Venofque & fur toute la partie de la mon- tagne du même nom qui s'étend vers l'eft & le fud-eft, le fchifte a difparu & on retrouve les couches de Ænei/s. J'ai remarqué aufli quelques blocs de granite & quelques morceaux de grès micacé, mais ils paroif- fent y avoir été tranfportés. Les habitans de Venofque exploitent aufi dans cette montagne de prétendus Slons de charbon de terre. La manière d’être ici de ces filons me femble encore venir à l'appui de ce que j'ai déjà dit plus haut fur leur formation. Ils fe trouvent entre des couches perpendiculaires de kneifs. Il y en a plufieurs à peu de diftance les uns des autres. Leurs directions font parallèles, & ces filons qu'on peur fuivre depuis le baut de la montagne jufqu’à fa bafe paroiffenc très-fenfiblement s'être formés * dans les fillons produits par l'écoulement des eaux entre les couches perpendiculaires de Ærezfs. J'ai rapporté quelques morceaux de ces filons , & j'ai trouvé aufli entre les couches beaucoup de végétaux en partie pulvérulents & noirs. Ces filons font tous très-éroits, Le plus large que j'ai vu avoit à peine 10 pouces de puiflance. Ces efpèces de charbonnières avoient été annoncées comme des reflources très-importantes pour le pays d'Oifans & qui mériroient qu’on encourageât leur exploitation. Il eft heureux fans doute que les habirans de Venofque trouvent là une matière utile à leur chaufage en l’employant avec leur bois ; mais je ne crois pas qu’on puifle compter pour la con- fommation du pays d'Oifans, fur le produit de ces filons qui me SUR L'HIST, NATURELLE ET LES ARTS. 69 femblent , par leur propre nature & par celle de la montagne dans la- quelle ils exiftent , ne pas promettre une fuite avantageufe. La Veneo qui coule d’abord du,fud-oueft au nord-eft au bas de cette montagne eft forcée à demi-lieue de Venofque de changer de direc- tion par un torrent qui defcend avec impéruofité des montagnes de glace à l'oueft & au nord , & qui l'oblige à courir du nord-oueft au fud-eft dans une gorge profonde qui porte le nom de gorge de Venofque. Entre les (o) . « fommités des montagnes qui bordent cette gorge , il fe trouve au pied le) des glaciers , plufieurs lacs ; la plupart font en partie glacés eux-mêmes; lun des plus confidérables de ces lacs eft appellé Ze lac Lovetat. Il arrive quelquefois lorfqu'une fonte confidérable de neiges ou de glaces vient groflir tout-à-coup les eaux de ces lacs, que ceux-ci débordent, & rompant une partie des digues qui les retenoient , inondent toute la gorge de Venofque &. vont porter la dévaftation jufque dans la plaine d’'Oifans , où la gorge de Venofque fe termine à la jonction de la Veneo, à la Romanche, à l'endroit nommé Lapis , au pied de la face du mont de Lans oppofée au fud fud-eft, La Romanche fort alors de la balme d'Oris où nous l'avons quittée pour faire le tour du mont de Lans. La face du mont de Lans , au pied de laquelle ces deux rivières fe joignent, offre de grandes couches de la roche de fchorl très-compacte pénétré de fléarite & coupées à pic, C'eft vers ce côté du mont de Lans, à l'entrée de la balme d'Oris que fe trouve le fchorl blanc demi tranfpa- rent & de forme rhomboïdale applatie, en criftaux fouvent empilés les uns fur les autres. Le père Angélique, récoller, qui a bien voulu m'ac- compagner dans mes courfes de montagnes, n'a dit que c’étoit lui qui avoit fait cette découverte, Ces criftaux fe font trouvés entre deux cou- ches d’un fchorl en roche très-dur & très-ferré ; une argile jaunâtre enveloppe ces criftaux. Ils fe trouvent quelquefois entremêlés fur le même morceau avec des fchorls violets , ou d’autres de même forme, mais encroûtés d’une efpèce d'ochre qui les empêche d’être brillans & tranfparens. La Romanche , après avoir reçu la Veneo à l’iffue de la gorge de Venofque, coule dans la plaine d'Oifans en fuivantunedireétion moyenne du nord-oueft au fud-eft. La plaine d'Oifans a dans cette même direction de 3 à 4 lieues de longueur & environ une lieue de largeur. Elle eft cultivée en grande partie & les terres y font aflez fertiles ; mais fouvent le laboureur voit fes moiflons dévaftées & emportées par les débordemens de la Roman- che, au moment où il étoit près de recueillir. La plaine d'Oifans eft terminée au nord-eft & au fud-oueft par une fuite de montagnes rrès-élevées & efcarpées contre lefquelles font adoffées fouvent des couches calcaires. Je n’ai pas eu le rems d'obferver aflez ces montagnes pour entreprendre de les décrire, Celle de la Gar- mo OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, dette & celle des Chalanches qui en font partie & qui me font bien connues ont été décrites d’une manière très-intéreflante par M. Schrei- berg, directeur des mines de Monfieur , à Allmon. SUITE DES EXTRAITS DU PORTE - FEUILLE DE L'ABBÉ DICQUEMARE. CONSIDÉRATIONS ZOOLOGIQUES. C'Esr dans le règne animal que la nature déploye fa plus grande magnificence & qu'elle nous invite particulièrement à la contempler. Elle fe dévoile prefque toujours en proportion de la fagacité avec la- quelle nous l'obfervons , & l'arc des expérience l'oblige quelquefois à nous faire part de fes fecrets. Ceux auxquels ces moyens ne font pas aufli familiers que l'étude des auteurs , croyant qu'elle fe cache obftiné- ment, cherchent à deviner ce qu'ils auroient pu voir, des mébprifes accumulées les font divaguer à l'infini, & ces écarts trop fréquens de l'imagination , pris prefque toujours pour l'eflor d'un génie ardent , font ce qui s'oppofe le plus au progrès des fciences naturelles. Si la fimple infpetion nous a fait plufeurs fois découvrir l’animalité où nous ne foupçonnions pas même l'exiftence , l'expérience nous éclairera beaucoup plus fur la manière d’être de quantité d’animaux qu'on a dédaignés & donc la connoiflance peut conduire à celle de la nature. Suppofer , comme on l’a fait, que fon auteur ait formé des êtres animés qui, pendant tout le temps de leur exiftence , ne différent en rien d’un animal qui dort, c’eft, j'ai lieu de le croire , créer des êtres d'imagination : mais défigner hardiment l'huître comme Le prototype de cette clafle , c'eft certainement prouver une grande ignorance fur les animaux de ce genre & fur beaucoup d'autres , ou faire un étrange abus du favoir. Je ne crains pas de le gépéter ! où a-t-on pu prendre l’idée d’un animal privé de fens ? Ce ne peut être dans l’obfervation , encore moins dans l'expérience, Aucuns des êtres qui m'ont dévoilé l’animalité fous les enveloppes les plus groflières ne l'ont fait que par les organes exté- rieurs de leurs fens ; tous ont non-feulement un tronc, un ou plufeurs diftrits d’organifation dont la réunion forme le centre des fonétions vitales, mais ils ont aufli des extrémités & des membres , ne füt-ce que des lèvres ou quelque chofe d'équivalent , doués d'un fentiment fin qui fe } . SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS "1 manifefte d'autant plus que les corps font plus propres à faire impreffion für tel ou tel de leurs organes , ou que les circonftances fonc plus ou moins favorables. Dans l'huître qu’on a ofé nous repréfenter comme privée d’extrémités & de fens , j'ai vu ( en tentant de belles expériences que je dévoilerai avec de grandes figures ) Le diftriét organique de la fenfibilité fe mani- fefter au contraire par des extrémités très-érendues en comparaifon du tronc , terminées par un grand nomnbre de membres , le tout doué d'une foupleffe dont la plupart des animaux mieux connus font privés. Ce diftrit des fens eft donc dans l'huître beaucoup plus apparent que ceux de la nutrition , de la circulation , de la génération, &c. Elle offre donc à la première infpeétion intérieure tout ce qu'on ne lui foupçonnoit pas, elle n'eft donc point , comme on l'a fuppofé, un demi animal ,( quelle expreffion ! ) borné à une vie végétale , privé de mouvement , d'action , de fentiment. Au contraire , elle furprend agréa- blement le fpectateur par fon activité , fon adrefle , fa perfévérance à l'ouvrage. Elle fembie ne dormir jamais lorfque fa fortereffe eit , par quelqu'accident , ouverte à l’ennemi ou à l’œil avide de l’obfervateur, &c. Dans ces circonflances , elle l’éclaire même, lui apprend que toures les idées qu’on avoit voulu lui inculquer fur les réfultats des différentes organifarions animales éroient des idées faufles, & que la diverfiré qui fe crouve dans l'enveloppe extérieure des animaux , leurs extrémités, leurs membres , qui occafionne des différences notables dans leurs actions, ne doit point faire difparoître cette grande vue générale qui ne fait qu'un tout du règne animal. Voir autrement n'eft-ce pas voir par une vue bornée ? qu'auroïent donc dit ceux qui ont fuggéré l’idée de plu- fieurs natures animales , quoique, par une contradiction fingulière , ils admiflent en même-tems une loi de continuité dans toute la nature ? qu'auroient-ils penfé, dis-je, s'ils euflent fuivi cette même nature dans les détails de fon grand laboratoire ; c'eft-à-dire, à la mer, où fe fonc les opérations les plus nombreufes & les plus variées ? Là je n’ai encore apperçu, ni continuité entre les règnes , ni fection totale dans un même règne. Peurra-t-on regarder maintenant l'huître comme un végétal éveillé, & les végétaux comme des animaux qui dorment? de pareilles idées ne tendent-elles pas à la confufon , prefque aufli directement que celles qui nous aflimiloient à l'huître, à l'oignon , à la machine ? L'organifation & les actions d'aucun être animé , quelqu’extraordinaire que fût fa forme , ne m'ont jamais permis de foupçonner qu'il manquât d'organes pour les fonétions virales & fur-tout de ceux des fens qui lui font néceflaires , relativement à la place qu'il occupe entre les autres êtres : mais ils y font fouvent voilés fous des formes & fous des cou- leurs qui ne permettent guère qu'à l'œil exercé de les diftinguer. 72 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Obfervons donc , tentons des expériences, car fi notre :gnorance fur la nature ne provient que d'inattention , quelle fera notre excufe & quel jugement portera la poftérié fi elle obferve mieux ? EXTRAIT , D'OUNE LETTRE DE M CRELL, AMD ET. AT MENT HOBRRITE, Nec M. Iflman a décrit la manière de faire un arbre d’étain. On diflout J'écain dans l’acide marin , on étend la diffolution de deux à trois parties d’eau diftillée & on y ajoute un petit morceau de zinc qu'il ne faut pas laiffer un quart-d'heure. On le remplace par un tuyau de verre, — M. Hofman a prouvé que le fuc & les criltaux du Berberis vulg. lin. contiennent l'acide faccharin combiné avec l’alkali végétal.—M. Schéele a démontré que l’alkali eft une partie abfolument néceflaire au pirophore (1). Je fuis, &c. : ET — (x) On vient d’apprendre la trifte nouvelle de la mort de ce célèbre Chimifte. Nore des Rédacteurs. EXTRAIT D'UNE LETTRE DE M L'ABBÉ FORTIS, AM D ELA METHERTE. Monwsreur, PAC OOC LL faut qu'il y ait eu bien de l'équivoque pour avoir joint à ma Lettre à M. le Comte de Cafñlini, imprimée dans votre Journal, mars 1786 , le prétendu catalogue des poiflons fofliles du cabinet de M. Bozza, qui décèle la plus grande ignorance dans la perfonne qui l’a FAC MNT J'ofe meflatrer que vous voudrez bien en prévenir vos Lecteurs, & les affurer que je n’y ai aucune part...... Je fuis, &c. Venife, ce 29 mai 1786. Je ? d LETTRE SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 73 E'FMCTORCE DE M BERTHOUT VAN-BERCHEN, Secréraire- Adjoint de la Société des Sciences Phyfiques de Laufanne ; AM DE LA METHERIÏE. Monsieur, Permettez que je vous adrefle quelques remarques au fujet des obferva- tions fur le bouquetin qui ont paru dans votre Journal du mois de mars 1786, page 223. Le bouquetin a été pendant quelque tems l'objet de mes recherches, & j'ai remis le 28 octobre 1785 à la Societé des Sciences Phyfiques de Laufanne , une hiftoire-naturelle de cet animal. Je l'ai vu plufieurs fois vivant, & j'ai pris des informations fur fes mœurs dans le lieu même où l’on trouve les plus habiles chaffeurs. Comme plufieurs des affertions de l’Auteur font contraires à mes propres obfervarions & à des faits connus de tous les Zoologues, je ne crois pas inutile de faire voir en quoi je penfe qu'il s’'eft trompé, & j'ofe me flatter qu'il fera perfuadé que je n’ai d'autre but que le progrès & l’avancement de la fcience. 1°. M. Girtaner avance à tort, ce me femble, qu'il eft le premier qui diftingue l’efpèce du bouquetin , & lui donne fes caraétères fpécifiques ; M. Daubenton a décrit les parties extérieures & donné l'anatomie d'un jeune bouquetin (1). M. Pallas a aufli donné une fort bonne defcription de cet animal dans fes Spicilegia zoologica (2). Il eft vrai que fes mœurs . fonc, jufqu’à préfent, peu connues, mais nous efpérons que le Mémoire que nous annonçons, & qui paroîtra dans le fecond volume de ceux de la Société de Laufanne, les fera mieux connoître, 2°. L’Auteur dit que le bouquetin des Alpes diffère effentiellement des chèvre fauvages qu'on trouve fur les Pyrénées , les montagnes de la Grèce & les îles de Archipel , avec lefquelles on la confondu. Nous remarquerons que l’on trouve dans ces deux derniers endroits & dans l’île de Chypre, le mouflon (3), qui eft la race fauvage des brebis, & que perfonne ne confond avec le bouquetin : que M. Pallas y foupçonne auli l'exiftence de l’ogagre (4), qu'il regarde comme l’origine des chèvres; mais (1) Buffon, Hit. Nat. &c. tom. XIT, page 166, (2) Falc. XII, page s 2. (3) Buffon, tom. XI, Hift. du Mouflon. (a) Spic. Zool. fafc. XII, pag. 47 & 48. Tome XX1IX, Part, 11, 17986. JUILLET. K 74 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ce foupçon , fondé, en partie, fur ce que Bellon dit que l’on trouve dans l'île de Crète deux efpèces de bouquetin, prouve précifément qu'on a diflingué cet animal ; d’ailleurs, l'ogagre n'eft probablement qu'une race dans cette efpèce. Le chamois, qui fe trouve dans les Pyrénées, eft auñli diftingué du bouquetin par les Naturaliftes. Il ne refte donc plus, en fait de chèvres fauvages dans les montagnes défignées ci-deflus, que le bou- quetin lui-même, celui dont il eft queftion dans ces obfervations & qui habire nos Alpes ; non-feulement c’eit l'opinion de M. de Buffon & de M. Pallas, qui dir (1): Îbices itaque parier atque mufimon per omnes zraétus altiffimorum montium temperatiorem Europam & Afiam uni- verfam pervagantes (de Africa enim nondum conflat ) Jpeciem propa- garunt. Notiffimum efl in Pyrencis Helveticifque Alpibus & in Curpathi jugrs fuperef[e ; mais encore il fufñit de voir ce qu'en dit Bellon (2), & de comparer la figure qu'il en donne ( toute mauvaife qu'elle eft ) avec celles que nous avons du bouquetin , pour fe convaincre que fon bouquetin de Crète & de Chypre eft le même que celui de nos Alpes. D'ailleurs, fi cette différence confifte , comme le dit M. G. dans la forme & l'énorme longueur des cornes du bouquetin des Alpes, elle eft nulle, puifque Bellon a vu & tenu dans l'ile de Crète des cornes de cet animal qui avoient quatre coudées, c’eft-à-dire, fix pieds, ce qui eft beaucoup plus confidérable qu'aucune de celles des individus que l’on trouve dans nos Alpes; & ces cornes ant aufli de groffes arrètes tranfver- fales. M. G. auroit donc dû, ce me femble, faire connoître, ce qu'il entend par des houquerins bâtards , & indiquer leur différence avec le bouquetin fuifle, 3°. En difant que M. de Buffon a confondu le bouquetin & Île cha- mois, ce n’eft pas s’exprimer exactement , puifqu'on trouve dans fon Ouvrage la figure & la defcription de ces animaux, & qu'il indique les différences qui fe trouvent entr'eux : mais M. de Buffon , en fuivant une idée plus ingénieufe & brillante que fondée , a voulu démontrer que le bouquetin étoit l’origine des boucs domeftiques , tandis que le chamois étoit celle des chèvres, & que par conféquent ces animaux devoient être de la même efpèce (3). MM. Guldentftodt (4) & Pallas (5) ont combattu fon opinion, & nous ajouterons ailleurs quelques raifons qui nous femblent prouver encore mieux combien elle eft peu fondée. 4°. Ce qui diftingue le chamois de rous les autres animaux n'eft pas, comme le penfe l’Auteur, d’avoir des cornes qui fortent en avant, qui {1 Spic. Zool, fafc. XII, page 33. (2) Obferv. de Bellon, feuillet 14 reéZo fig. feuillet r4 verfo: (3) Buffon, tom. XIT, pag. 137. (4 Schacale hifloria , Mém, de Peterfbourg , tom, 20 , page 449. (s) Spic. Zool. Fafc. XII. SUR L'HIST, NATURELLE ET LES ARTS. 7$ font inclinées en dehors & terminées par un crochet, puifque le nagor & fur-tout le nanguer , ont les mêmes caractères 3 mais ce qui diftingue fes cornes , c’eft qu'elles ont le crocheren arrière, tandis que celles du nagor & du nanguer l'ont en avant. $”. Nous avons auffi obfervé que l'étagne, ou la femelle du bouquetin , n'a que deux mamelles, mais nous ne croyons pas que l’on doive regarder cela comme une différence très-effentielle entre le bouquetin & le chamois qui en a quatre, puifque l’on fait que le nombre des mamelles vagie fouvent dans la même efpèce , comme le rat qui en a dix ou huit, le furet qui en a trois à droite & quatre à gauche, le farigue qui en a cinq ou fept, fans parler des animaux domeitiques où le nombre des marnelles varie beaucoup plus. 6°. IL me paroïit plus naturel de croire que les chamoifeurs ne fe fervent pas des peaux de bouquetins, parce qu’elles font rares & parce qu’elles ne valent rien, & je me fonde fur ce que les chafleurs en font un très- grand cas, & qu'ils les eftiment autant que celles de boucs. 7°. Il eft vrai que le bouquetin: ne produit pas avec le chamois, mais PAuteur fe trompe en aflurant qu’il ne produit pas avec la chèvre domef- tique. On peur voir à Aigle, dans le pays de Vaud , un bouquetin appri- voifé (appartenant à M, de Vatteville, Gouverneur d’Aigle ) qui a produit avec différentes chèvres des petits chevreaux que j'ai vus & décrits. 8°. Les différences qui fe trouvent entre le bouquetin & le bouc ne font pas auf effenrielles que l'Auteur le penfe, puifque lon fait que celles de la taille & des cornes ne font nullement fpécifiques ; les reflemblances entre les femelles font fur-tout très-prandes , aulli j'efpère démontrer ailleurs que le bouquetin eft l'origine primitive de toutes les différentes races de chèvres, 9°. Nous fommes étonnés que M. G. qui a vu chez Pacard une éragne, n'ait pas décrit fes cornes qui font fort différentes de celles du mâle; nous les avons vues auf, & on en trouvera une defcription dans notre Mémoire, 10°. M. G.en décrivant le caractère du bouquetin le dépeint plus vif qu'il ne l’eft véritablement. Il eft, à la vérité, plus grand & plus fort que le chamois, mais il eft plus lent , moins inquiec que lui, & plus facile à furprendre. 11°. En difant que l'unique endroit où l'on trouve le bouquetin eft la vallée d’Aott, l’Aureur fe trompe encore, car il exifte dans d’autres vallées de la Savoie; mais c'eft dans la vallée de Cogne qu'il eft le plus commun, Il n'eft pas douteux qu'il fe trouve aufi dans les Alpes de la Sibérie, le mont Taurus (1), &c. & je fuis informé par une lettre particulière qu'on en a fait venir, il y a peu de tems, de l'île de Chypre pour le mufeum du Roi d'Efpagne. Si l'on fait attention que dans tous ces endroits le bouque- (x) Spic. Zool. fafc. XIT, pag. 31. Ibex Ælpium Sibiricarum. Tome XXIX, Part. Il, 1786. JUILLET. K 2 76 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, tin habite les montagnes les plus froides, les plus âpres & les rochers les plus efcarpés, on conviendra que cette manière de vivre eft plutôt un effet de fa nature que de la néceflité , comme Le penfe M. G. D'ailleurs, il ne fe tient fur les rochers que pendant le jour, & il defcend dans les bois élevés pendant la nuit ; enfin , d’où vient que le chamois, plus chaffé & pourfuivi que le bouquetin, habite cependant des régions moins élevées que lui? Le bouquetin a fans doute été plus répandu qu'il ne left, mais il ne me paroît pas probable qu'il ait jamais habité les montagnes fubalpines, 12°. Le bouquerin ne vit que d'herbes, fuivant M. G. cette affertion eft encore contraire à ce que mont afluré les chaffeurs; fuivant eux, il fe nourrit aufli de jeunes poufles des arbres & de lichen, qui comme l’on fait, eft une nourriture fi fucculente, que l'on doit lui attribuer la prodi- gieufe grofleur du bois du rhenne qui en fait fa principale pâture, Si vous jugez, Monfieur, que ces obfervations puiffent être de quelque utilité, je vous prie de vouloir bien inférer ma Lettre dans un de vos plus prochains Journaux. J'ai l'honneur d’être, &c. La Nuz, près de Laufanne, le 4 Mai 1786, NOUVELLES LITTÉRAIRES. Ma CHINE à barre les Grains ; par M. REY DE PLANAZzU. D Deux hommes fans fe fariguer font autant d'ouvrage avec cetre machine, que foixante-quatre par le procédé ordinaire, dit l’Auteur. Cette machine eft compolée de plufieurs fléaux mus par un cylindre garni d’alluchon. Un homme par le moyen d'une manivelle fait mouvoir le cylindre , tandis qu'un fecond poufle les gerbes fous les fléaux. Confulration Medico-Légale Jur une accufation d'infanticide ; par M. CHaussieR. À Dijon, chez Louis-Nicolas Frantin, Imprimeur du Roi. Marie Maire accufée de recelement de grofleffe & d'infanticide , avoie été condamnée à mort par un premier Jugement de Ja Juftice des lieux. Mais l’affaire portée au Parlement de Dijon, M. Chauffier a difcuté en favant & en critique éclairé le rapport des premiers experts, & a fait voir qu'ils avoient conclu fauflement que l’accufée éroit accouchée depuis peu. En conféquence elle a été renvoyée & mife hors de Cour, par Arrêt, On ne fauroit faire un plus noble emploi de fes talens que l'a fait M. Chauflier dans cette circonftance, Auñi n'en pouvoit-il recevoir une | SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 177 plus belie récompenfe , celle d'avoir fauvé la vie à une innocenre, Mäis combien tant d'exemples multipliés doivent-ils rendre ‘circonfpets em pareilles occafons & les gens de Part & les Magiftrars | PRIX DE:lL'ACADÉMIR DE DiJon. ‘ L'Académie des Sciences | Arts & Belles-Lettres de Dijoh avoit propofé pour fujet du prix qu’elle dévoit diftribuér dans fa féançce publique du mois d'aôüt 1786 , de dérérminer , par leurs 'propriérés refpeétives la différence effentielle du phlog'flique avec la matière de la chaleur. Dans le mois qui a précédé le jour fixé pour l'ouverture du concours , plufieurs auteurs, fans fe faire connoître, lui ont écric pour obtenir un plus long terme & avoir le rems d'achever le travail qu'ils avoient commencé fur ce fujer important ; mais il n’étoit pas au pouvoir de cette Compagnie de préjudicier au droir acquis à ceux des concurrens qui avoient envoyé leurs Mémoires , elle a donc, procédé à lear examen, & elle n'en a trouve aucun qui remplit fes vues : un feal des concurrens a cité le Traité du Feu de M. Schéele ; au farplus il n’a fait, ainfi que les autres, aucune mention des expériences de MM. Black, Wilcke, Crawford , Lavoilier, de la Place, Kirwan, &c: &c.: &c. c'eft-i-dire,, qu'ils n’ont connu ni les faits, ni les opinions qu'il falloit difcurer & qui ont fait naitre cette queftion , dont la folution éft attendue par tous les Savans, comme pouvant feule rendre une bafe: folide à rouces les théories chimiques ébranlées par les nouvelles découvertes. } À L'Académie a arrêté en conféquence de propofer le même problème / pour Le fujet du prix double qu’elle aura à décerner ‘dans fa féance du mois d’août 1789, & pour ehtrér dans les vués des Auteurs ; d’en faire inférer dès à préfent l'annonce dans les Ouvrages périodiques. !-! Les Mémoires écrits en françois oùen latin, conténant dans un biller cacheté ,le nom de l’Auteur , feront remis ou envoyés franc de port à M. de Morveau, Chancelier & Secrétaire-Perpéruel(1), ou à M. Caïller, Secrétaire-adjoint, avant le premier avril 1789 , ce terme elt dé ricueur, MM. les Savans étrangers font invités de prendre les moyèns néteffaires pour faire parvenir leurs Ouvrages francs de port, en les adreflanr à quelque correfpondant ou autrement; les paquets qu'ils expédient par la pofte fans les affranchir jufqu'à Dijon ne font pas retirés.” Le prix fondé par M. le marquis de Terrail & par Madame de Cruffol d'Uzez de Montaufier fon époufe, à préfent Ducheffe dé Caÿlus, confiftera (1) L'Académie de Dijon vient de perdre fon célèbre Secrétaire M. Maret, qui accouru au fecours des habitans de Saint-Mamers en proie à une: épidémie , après avoir arrêté les ravages de cette funefte maladie, y a fuccombé Jui-méme. 1] à été remplacé par le célebre ‘M. de Morveau. " 34 1 £ 1 5h55 73 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, en deux médailles d’or chacune en valeur de 300 Liv. portant d’un côté l'empreinte des armes & du nom de M. Poufher, fondateur de l’Académe, & de l’autre la dévile de cette Société. ; Note envoyée par MM. STRUVE & EXCHAQUET pour leur Mémoire, Journal de Phyfique, Fevrier. Page 117, ligne 11, au-lieu de, nous avons été aflez heureux ; mettez : nous avons réulli à. Page 118, ligne 14, exempte de goûr , mertez : ayant un goût un peu acide, qu'elle a perdu après avoir été lavee. Page 118, ligne 21 & 22, il faut retrancher : furpaflant en poids les À du fel. fédaif employé. Page 118, ligne 23 au lieu de :{elle n’avoit point de goût , mettez : elle ayoit comme la précédente, un goût un peu acide. < Page 120, lignes 21 & 22, il faut retrancher : en aiguilles. Page 120, lignes 35 & 36, au lieu de : n'a point donne de criftaux. Elle refte graffle même au bout de pluñeurs mois, mettez : a donné au bout d'une année de très-petits criftaux qu'on n’a pu leparer de la liqueur graîle, À Page 121, ligne 22, à l'alun , ajoutez après : à certaines proportions. Page 121 ligne 33, après le mor, l'eau, ajoutez : fi on ajoute une certaine quantité de ces rerres à l'acide. Page 122, ligne $, apres indiffolubles , ajoutez : lorfqu'ils font faits avec beaucoup de ces terres. » Page 122, note 1, ligne 9, retranchez le mot beaucoup. Page 123, ligne 6, au lieu de, quil, mettez sil. Page 123 , ligne 9, après Le mot fulon, ajoutez : de plufeurs terres & pierres, mais il refufe de fe combiner avec le quartz, ainfi qu'avec toutes fortes de verres ordinaires ; fi on le fait fondre avec ces matières, il ne s’y mélange point, mais il forme une mafle adhérente & féparée qu'on peut aifément reconnoîrre lorfqu’on le fait fondre avec du verre coloré: Page 126, ligne 7, après borax, mettez : fur-tout lorfqu’on ajoute à ce verre un peu de terre d'alun ou de terre calcaire. Page 126, ligne 15 , retranchez ces mots : nous ignorons le terme final où il ne fe fait plus de changement. L Page 126, ligne 18, retranchez : un peu. Ligne 29 , au lieu de : cette combinaifon peut fervir, mertez , cette combinaifon paroît la plus propre à fervir. : AN DI:D}TNTNTIONNe 10. Un mélange, compofé d’acide phofphorique , que l'on fature à demi avec de l'alkali fixe végétal & auquel on ajoute une certaine SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. . 79 quantité de felenire offèufe , donne , lorfqu'on le fond à une douce chaleur , une mafle d’un verre dur , blanc & tranfparenr, Ce verre , ainfi que ceux de tous les combinés phofphoriques , eft plus pefant que toutes les efpèces de verres ordinaires. Pelé, au moyen de la balance hydroftatique , le verre du mélange que nous venons d'indiquer , pèfe environ 185 liv.?, le pied cube , & le plus dur criftal fadtice ne pèle qu'environ 173 liv.<, le pied cube, 2°. Pour réuffir à faire ce verre en grand, on introduira le mélange dans une cornue de verre que l’on fera rouoir légèrement pendant un certain temps, jufqu’à ce qu'il fe forme une male blanche , fpongieufe & demi-tranfparente. On cafle la cornue & on prend cette matière, qui, le plus fouvent , fe détache d’elle-même ; on la fair enfuite fondre dans un creufet , à un feu de réverbère, plus violent que le précédent ; mais on aura foin de ne la mettre que partie par partie, parce que la matière bouilione un moment. Si on néglige cette précaution, une partie de l'acide phofphorique fe volatilife en s'uniffant à la matière du feu, avant de pouvoir fe combiner à la terre, & l'opération ne réuflic pas. É 3°. Ce verre, dont nous venons d'indiquer la compofition ; paroîc être un des meilleurs.que l’on puifle employer pour fouder les métaux. Il eff même auf bon que le borax. On peut fe fervir de l'alkali minéral, tout comme de l’alkali végétal, & on met dé la terre calcaire ou du gyps au lieu de felenite offeufe 3 ce verre n'eft que peu ou poine diffoluble , en raifon de la plus ou moins grande quantité de ces terres ; ileft très-fufñble , coule bien fur les métaux & ne les corrode pas , tandis que les verres phofphoriques diffolubles, c'eft-à-dire qui ne contiennent que l’alkali & l'acide phofphorique , ou fort peu de rerre , corrodent les méraux , & il faur beaucoup d'habileté dans l'ouvrier pour les'employer. On obfervera que le mélange que nous avons indiqué , doit toujours être en état de verre quand on voudra l’employer pour fouder. DA BNESE Des ARTICLES CONTENUS DANS CE CAHIER, Mu OIRE fur les caufes, de la fermentation vineufe & fur les moyens de perfeélionner la qualité des Vins ; par M. le Marquis DE BULLION, * page 3 Mémoire de M. WESTRUMB , fur l'acide du Sucre & l'Efprit-de-vin ; traduit du Journal de CRELE , par M. CAviLLzierR, Eleve de l'Ecole Royale des Mines, 8 Mémoire de M, KLAPROTH, fur le Sel de Proufl , autrement appelé 8o OBSERVATIONS SUR LA. PHYSIQUE, &e. Sel perlé; traduit du Journal de CRELL , par M. CAVILLIER ; de l'Ecole Royale des Mines, 11 Meérmoire Jur la manière de déterminer l'élévation d'un fol au deffus du niveau de la mer, conclue des obfervations de la hauteur du rnereure ; par M. PASUMOT, 13 Seconde Lertre de M. l'Abbé SPALLANZANT, Profeffeur d'Hifloire- laturelle dans l'Univerfité de Pavie, à M. CHarLes BONNET, Membre des plus ïlluffres Académies de l'Europe, fur divers objets foffiles ou relatifs à l'Hifloire-naturelle des Montagres ; traduite de L'Tralien [ur l'original imprimé .dans les Mémoires de la Societé Italienne, Tome 11, par MS. D. M. 18 Recherches fur l'origine du Natrum ou Alkali minéral natif ; par M. le Chevalier LORGNA : traduit de l'Italien , par M. CHAMPY, de l'Académie de Dijon , 30 Mémoire pour fervir à l'Hifloire-naturelle du Figuier; par M. BERNARD, des Académies de Marfeille, de Lyon, &c. 4S Extrait d'un Mémoire lu à l'Académie Royale des Sciences , contenant la deféription d'un nouveau genre de Plante ; par M. FOUGEROUX DE BONDAROY, 53 Lettre de M, BROLEMANN , à M. DE LA METHERIE, fur une produëion des fourneaux à manche de Poullaouen , 7 Examen chimique de la Pierre ollaire, appelée Craie d'Efpagne, Stéatite de Bareith ( Bayrentifchen fpeckltein); par M. WieGLes: traduit de l'Allemand, par Madame PiCARDET, de Dijon, 60 Objervations minéralogiques fuites dans le Dauphiné, depuis la fource de la Romanehe , jufqu'’à la plaine de l'Oifans , en août & Jeptembre 1786 ; par M. DHFLLANCOURT, Ingenieur des Mines, 61 Suite des extraits du Portefeuille de l'Abbé DICQUEMARE, 70 Exrrait d'une Lettre de M. CrELL, à M. be LA METHERIE, 72 Extrait d'une Lettre de M. P Abbé Fortis à M. DE LA METHERIE, ibid. Lettre de M. BERTHOUT VAN-BERCHEN , Secrétaire-adjoint de la Société des Sciences Phyfiques de Laufanne à M, DE LA METHERIF, ; 73 Nouvelles Lirtéraires , 1 76 A PIPR OR 4 DT OU. Ja I lu , par ordre de Monfeigneur le Garde des Sceaux, un Ouvrage qui a pour titre: Obfervations Jur la Phyjique, fur l'Hifloire Naturelle € fur L5 Arts, Ec. par MM. Rozier, Moncez le jeune & ne 14 Meraerre , Ec:' La Colleétion de Faits impottans qu'il'offrepéfiodiquement à fes Leéteurs "mérite l’âttention des ISa- «vans; en éonféquence ; j'eflimelqu’on peut en;permettre, limpreflion. ‘À Paris, ce 22 Juillet 1786. ; « VALMONT DE BOMARE. +) «ralbt 1766, Jullet 1786, Sellibr Se, Le TS eee tn PER T. T2 = + à “ph Ne TT 7 he am Ir éer L PR Cu Ÿ n4 «if "4 | JOURNAL DE PHYSIQUE. | 3] AOUT 1766. IE AÉSRR ASR— T DE L'INFLUENCE DE LA LUMIÈRE, Mémoire lu à une Séance publique de la Faculté de Médecine , le 1$ Juillet 1786; Par M. BERTHOLLET. Ox a remarqué depuis Jong-tems que la lumière exerçoit une ation particulière fur les plantes ; on fait que lorfqu’elles en font privées , elles prennent un accroiflement prompt ; mais qu'elles manquent de vigueur, & que toutes leurs parties reftent blanches : cet état, qui eft connu fous le nom d’étiolement, a été l'objet des recherches de plufeurs Phylciens. M. Ingen-Houz & M. Prieftley nous ont appris qu'il fe dégageoit de Pair vital des plantes expofées à la lumière ; plufieurs obfervations faites avec beaucoup de foin par M. Sennebier , & dont j'ai répété une partie, prouvent que fi les plantes font privées de la lumière, il ne s’en dégage aucun gaz, & que la chaleur ne peut fuppléer La lumière. L’illuftre Schéele, dont la Chimie doit fentir d'autant plus vivement la perte récente, qu'elle a fuivi de fi près celle de Bergman avoit remarqué que l'acide nitreux blanc & dégazé fe coloroit en jaune, fi, après l'avoir mis dans un flacon qui ne doit être plein qu'en partie, on l'expofoit à la lumière ; mais fi le facon qui contient l'acide nitreux eft plein, il ne s'y produit aucun changement. Enfin , la lune cornée expofée à Ia lumière, noircit très-promprement, Tous ces effets ont été attribués au phlogiftique ; mais les progrès de la Phyfque ayant rendu l'hypothèfe du phloiitique infufñfanre & inutile, je me fuis propofé de dérerminer par des expériences en quoi confiftoient les effets de la lumière, & en quoi ils d'fféroient de ceux de la chaleur. Les circonftances ne me permettent de préfenter dans ce Mémoire qu’une partie des obfervations que j'ai faites fur cet objet. J'ai expolé à la lumière du foleil de l'acide marin déphlog'ftiqué dans un flacon qui en étoit rempli exaétement, & qui communiquoir pat un tube à un appareil pneumato-chimique; bientôt j'ai yu une grande quantité de rrès-petites bulles qui fe dégageoienc de tous les côtés de la hiqueur, & dans l'efpace de quelques jours il s’eft trouvé dans le vaifleau Tome XXIX, Part. II, 1786, AOUT. L 82 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, adapté au tube, une certaine quantité de fluide élaftique qui étoir de l'air vital le plus pur : à mefure que cet air fe dégageoit de la liqueur, elle perdoit fa couleur jaune, & à la fin elle n’avoic plus que l'apparence de l'eau. Je lai examinée dans cet érat ; elle ne détruiloir plus les couleurs bleues végérales , mais elle les rougifloit , elle ne confervoit qu'une très- foible odeur d'acide marin déphlopifliqué , elle faifoir effervefcence avec les alkalis; enfin, Pacide marin déphlogiftiqué avoit repris toutes les propriétés de l'acide marin ordinaire, J'ai déterminé par ce moyen les proportions d'acide marin, d’aix vical & d’eau qui fe trouvent dans l'acide marin déphlogiftiqué, & je crois n'avoir laiflé aucun doute raifonnable fur la compoftion de cette liqueur. 3 A côté du flacon dont je viens de parler , j'en avois placé un autre qui étoit rempli de la même liqueur, mais que j'avois couvert de papier noir ; la liqueur de celui-ci n'a éprouvé aucune altération, il ne s'en eft point dégagé d'air. J'ai expofé un matras rempli d'acide marin déphlo- giftiqué à la chaleur de l’eau que j'ai conduire peu-à-peu au degré de l'ébuilition , l'acide marin a commencé à un certain degré de chaleur à prendre la forme de gaz, mais les bulles qui s'en dégagèrent & qui étoient reçues au moyen d’un tube adapté au matras, dans un flacon plein d’eau froide, fe réforboient bientôt & ne laifloient point d'air ». de forte que c’étoit l'acide marin déphlogiftiqué qui prenoit la forme gazeufe par lation de la chaleur , mais fans éprouver aucune décompo— fion ; & en effet la liqueur qui reftoit dans le matras n’avoit point acquis la propriété de faire effervefcence avec les alkalis fixes. Un autre matras rempli d'acide marin déphlogiftiqué ayant été expofé fur les charbons ardens, Ja plus grande partie de l'acide marin déphlogiftiqué s'eft pareillement réduite en gaz ; mais il s'eft dégagé en même-tems une petite portion d'air vital, & la liqueur du matras faifoir une légère efervefcence avec l’alkali fixe. Cette ‘expérience prouve non-feulement que la lumière agit d'une manière différente que la chaleur , mais qu'elle a la propriété de rendre l’élafticité à l'air vital qui eft dans un état de combinaifon, & que c’eften cela que confifte {on aétion. L'expérience: fuivante va confirmer ce réfulrar. J'ai rempli un facon d'acide nitreux blanc & dégazé ,& je l’ai expofé à la lumière du foleil , en le faifant communiquer par un tube avec um appareil pneumato-chimique; il s’en eft dégagé dans l’efpace de plufieurs jours , une quantité aflez confidérable d’air vital, & il a pris une couleur de plus en plus jaune, Or, l’on fait que fi l’on expofe à l’action de la chaleur , de l'acide nitreux dégazé , il ne s’en échappe que des vapeurs d'acide nitreux qui fe réduifent entièrement en liqueur par le froid & par le contaét de l’eau. Si au contraire on expofe à la chaleur un acide nitreux coloré, il s’en dégage du gaz nitreux. La différence de Paction de la lumière & de la chaleur eft donc bien marquée dans cette expérience : dang un cas la lumière donne l'élafticité à une partie de l'air vital qui entre SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 83 comme principe dans l'acide nitreux , & il fe forme une quantité propor- tionnelle de gaz nicreux qui refte dans la liqueur , parce que la motcre, “autre principe dé l'acide nitreux , devient furabondante ; dans l’autre cas la chaleur tend à dégager le gaz nitreux, & ne peut donner l'élafticiré à l'air vital. L'on voit donc à quelle caufe eft due l’obfervation de Schéele. Si l'on met, comme il a fait, de l’acide nitreux dégazé, dans un flacon qui ne foit pas plein , & qu'on l’expofe à la lumière, il s’en dégage de Tair viral qui ajouté au volume d’air qui étoit contenu au-deflus de l'acide nitreux, augmente la proportion de l'air vital qui s’y trouvoit avant expérience; de forte que cet air fe trouve plus déphlogiftiqué , felon le langage adopté par Schéele : effectivement lorfqu’on débouche ce flacon , il en fort beaucoup d'air qui étoit dans un état de compreflion ; mais lorfque le flacon elt plein d'acide nitreux dégazé, il ne change point de couleur , parce qu'il ne peut s'en dégager d’air vital. Si l'on expofe à la lumière de la lune cornée couverte d’eau, fa furface noircit promptement, & l'on apperçoit une grande quantité de petites bulles qui s’en dégagent ; ces bulles font probablement de l'air vital, arce que celui qui eft combiné dans la chaux d'argent, tient très-peu a ce métal, de façon qu'il peut en être dégagé par l’action de la lumière. Cependant l'argent n’eft pas réduit dans l'état métallique, il retient une petire portion d'air vital, parce que conformément à une loi des affinités qui s'obferve généralement, l’adhérence d’un principe augmente à melure ue fa quantité diminue: c'eft dans cet érat moyen entre la chaux métallique & le métal,que fe précipitent de leurs diflolutions fur les fubftances animales , l'or, argent & le mercure. - On a imprimé dans le dernier volume des Mémoires de l’Académie de Dijon, que M. Angulo avoit obfervé que le phofphore n’avoit poinc d'action fur l'acide marin déphlogiftiqué ; ce qui paroït , au premier coup- d'œil, contraire à la théorie que j’ai donnée, J'ai vérifié l'obfervation de M. Angulo , & j'ai remarqué que la chaleur communiquée par l'eau ou par le bain de fable, dégageoit le gaz de l'acide marin déphlogiftiqué fans qu'il püt être décompofé par le phofphore ; mais on n’a qu'à mettre un morceau de phofphore dans un flacon rempli d'acide marin déphlo- giftiqué, & l'expofer à la lumière : bientôr l'on voit le phofphore devenir blanc, & la liqueur perdre fa couleur; elle perd auf fon odeur , elle rougit le papier bleu ; & fi l'on y verfe de l’eau de chaux , il fe précipite du phofphate calcaire : par le moyen de cette circonftance le phofphore s’eft donc changé en acide phofphorique , en dépouillant d’air viral l'acide marin déphlogiftiqué. Je ne difcuterai point à préfent fi la lumière & la chaleur font dues à un même principe qui fe trouve dans un état différent, & fi on peut expliquer avec Schéele la différence qu'on obferve dans leurs effets , en fuppofant que la chaleur eft le principe de la lumiere fixe & combiné Tome XXIX, Part. II, 1786, AOÛT. L 2 4 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, avec les corps ; pendant que la lumière eft ce même principe libre & -qui jouit d’une élafticité & d’une vélocité extrêmement grandes: je me bornerai à examiner quelques conféquences qu'on peut tirer des expé- riences précédentes , relativement aux effets que la lumière produit fur la végétation. J'ai annoncé dans un Mémoire lu à l'Académie des Sciences au mois d'avril de l’année dernière , que les plantes privées de la lumière perdoient leurs couleurs, parce que l'air vital qui provient de la décompolition de l’eau, s’unit avec leurs parties colorantes, au lieu de s’exhaler fous la forme élaftique, comme il Le fair à la lumière, La faturation des parties colorantes étant achevée, l’eau cefle de fe décompofer. Mais fi les plantes ont toujours été dans l’obfeurité, il ne s’eft pas même produit des parties colorantes, parce que le gaz inflammable de l’eau doit entrer dans la formation de toutes les parties huileufes, pendant que fon air vital fe combine avec la lumière qui le réduit en fluide élaftique. L'eau ne paroît donc point fe décompoler fans l’affinité de la lumière, ow fi d'autres añinités péuvent encore produire fa décompolition , c'eft du moins en beaucoup plus petite quantité, Telle eft l'origine de l'air vital que MM. Ingen-Houfz, Prieftley & Sennebier ont recueilli des plantes expofées à la lumière, & telle eft la caufe de l’étiolement. Si donc la lumière eft néceffaire pour que l’eau fe décompofe en quantité fufifante dans la végétation, plus cette lumière fera pure, plus cer effec doit avoir lieu ; il me paroît que c’eft-là la caufe pour laquelle les arbres croiffent mieux lorfqu'ils font dans une expofition libre, & que ce n'eft poinc de l'air dont ils ont befoin , comme on l’a cru "is femble aufa que c’eft à la pureté de la lumière qu’il faut rapporteftla rapide végé- tation qu'on obferve fur les montagnes ; car on ne trouve ni dans Îa température, ni dans la qualité du fol , ni dans celle de l'air, des caufes de ce phénomène ; enfin,il me paroît probable que c’eft à caufe de la pureté de la lumière , que les montagnes font plus propres aux arbres réfineux, qui contenant beaucoup de principes huileux, doivent avoir befoin de décompofer beaucoup plus d'eau, c’eft aufli pour la même raifon que les plantes qui y croiflent font plus fapides & plus aroma- tiques , & que les plantes étiolées font beaucoup moins combuftibles ainfi que l’a obfervé M. Sennebier. Puifque la lumière a une fi grande influence fur la végétation , ne pourroit- elle pas en avoir fur quelques fonétions animales? N’eft-ce poine à elle que feroient dûs plufieurs effets attribués à l'air, à la chaleur ou à d’autres caufes ? Peut-être , par exemple, eft-ce de-là que dépendent les inconvéniens qu’on remarque dans l'habitude de fubftituer le fommeil du jour à celui de la nuit. ; La beauté du jour , la pureté du ciel ne fervent donc pas feulement à prêter à la nature un charme pour nos yeux, elles concourent encore à la vivifier, La lumière, en favorifant la décompofition de l’eau , faie SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 85 exbaler des plantes le principe propre à entretenir la vie des animaux; pendant que le gaz inflammable fert à compofer le principe aromatique , les huiles, les réfines , auxquels elles doivent principalement leurs pro- priétés ; & le foleil n’agit pas moins fur toute la nature par la lumière qu'il répand , que pat la chaleur qu'il communique. nd OBSERVATIONS SUR LA DÉCOMPOSITION ÉT RECOMPOSITION DES MINÉRAUX EN GÉNÉRAL ; Par M. BEsson: IL fuffit de jetter un éoup-d'œil attentif fur les matières qui entrene dans la compofition du globe , pour reconnoître qu'elles ont été. arran- gées & dépofées au moyen des fluides. Les obfervateurs qui confultent la nature en grand , conviennent que ces matières fe divifent & fe diflolvent journellement pour former de nouveaux corps , & que c'eft un cercle perpétuel de décompofitions & de recompolitions. Les cabi- nets offrent aux curieux & aux amateurs , qui ne font pas à portée de fuivre la nature dans fes laboratoires , des preuves aufli curieufes que multipliées de ces nouveaux produits. Sans entrer ici dans des détails & des defcriptions qui ne leur repréfenteroient que très-foiblement ces phénomènes , & ne les convaincroïient pas comme la vue & l'examen des objets mêmes , on y renvoie les amateurs ; on citera feulemenc quelques effets généraux. M. Romé de l’Ifle a très-bien prouvé dans fon excellent ouvrage ; que les criflaux doivent leurs formations aux fluides. Quand les circonflances néceffaires pour fe criftallifer , c’eft-à-dire , pour prendre une forme caractériftique , par un certain nombre de côtés & d’angles déterminés , ne fe font pas rencontrés , ces matières fluides ont fuivi dans leur arrangement leurs propriétés ordinaires , comme de s’écouler, d'envelopper , de couvrir & de pénétrer les corps fur lefquels elles fe dépofent : telles font entr'autres les ftalactites pierreufes & métalliques , qui ont confervé à leur extérieur la forme d’eau durcie, ou de glaçons, mémes canons cylindriques allongés, & même rondeur aux extrémités. Ces matières ont auffi pris la forme & l'empreinte des corps fur lefquels elles fe {ont dépofées, ou dans lefquels elles fe font infinuées. Dans le genre filiceux, par exemple, les ftalactites de calcédoine & de jafpe, les infiltrations capillaires & papiracées des quartz, quand la matière s’eft ramifée au travers de terres aflez tenaces pour leur fervir de filtres ; ces dépôts minces , parallèles , qui ont commencé par tapiffer 86 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, la fuperficie des cavirés, & ont donné naïflance à la première enveloppe qui forme les géodes d'agare , qui fe font enfuite remplies plus ou moins de criftaux : Ces mêmes matières quartzeufes qui, après s'être dépofées fur des criftaux de fpath fluor , de fpath cabaire ou autres, en ont pris & conférvé exactement les formes & la valeur des angles ; les innombrables vénules , veines & filons de quartz qui traverfenc des roches & des minérais de toutes efpèces , ou qui rempliffent d’autres ca- vités qui renferment fouvent des drufes ou amas de criftaux , font autant d’infilcrations : Des criftaux de quartz enfin , renfermant d'autres criftaux de la même efpèce , ou recouverts par des couches très-diftinétes où il S'eft mêlé des matières héréragènes , différemment colorées , recouvertes enfuite par d’autres couches plus homogènes, plus tranfparentes, au travers defquelles on voit ces différents travaux fucceflifs de filtrations & de dépôts: Les mêmes criftaux de quartz qui enveloppent des criftaux de feld-fparh , de fchorls , des pyrites & des minéraux. Les feuillets de mica, des fibres très-déliées d'amiante, de l'or & de T'argent capillaires, ne font pas rares dans le quartz, l'agate & le jafpe. On ne dira pas que ces matières flexibles , d'un tiflu fi fin & fi caflant, fe font infinuées , ou ont pénétré ces pierres des efpèces les plus dures que nous connoillions. Nous fommes au contraire forcés d'avouer & de convenir qu'il a fallu que ces matières filiceufes faffent dans un état parfait de divifibilité & de fluidité, pour faifir & envelopper ces diffé- sents corps , prendre leurs différentes formes , s’infinuer & pénétrer dans leurs interflices & leurs pores , les pétrifier & être par-tout dans un contact parfait avec eux, au point de ne former enfemble, pour ainfi dire, qu'un feul & même corps. > On remarque dans les ftalactites méralliques , les mêmes formes qu'on a décrites pour les ftalactites filiceufes. Les hématites font cylindri- ques & mamelonées ; on peut fouvent compter les différentes couches qui les compofent. Si elles ne font pas par couches, alors les cylindres font ftriés du centre à la circonférence : l'hématire , quoique variée à l'infini , doit vifiblement la bizarrerie de fes formes au fluide qui tenoit en diflolution la matière ferrugineufe. Ce fluide Æ moule également & prend la forme des fpaths cubiques , des criftaux de quartz & autres ; ces moules font aufli précis, aufli bien prononcés que ceux des matières filiceufes, mais ils font plus rares. La malachite ou flalacite cuivreufe a les mêmes formes & les mêmes mamelons , aufli compofée de couches, dont les premières font en contact immédiat avec la roche ou autre mine fur lefquelles le fluide cuivreux s'eft dépofé, On répète qu'on n'a pas cherché à multiplier ici les preuves dans ce genre; c'eft pourquoi on ne parle pas des décompo- ficions & recompofitions multipliées en tous genres des minéraux , dont les exemples ne font pas plus rares que ceux qu’on a cités; on n'a vouly SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 87 indiquer que les efpèces les plus dures. Il n’y a pas de cabinet formé avec quelqu’intelligence, qui n'offre ces fortes de preuves & beaucoup d'autres à ceux qui favent les y voir. N On regarde le granite comme la roche ancienne & primitive , telle qu'elle et fortie des mains de la nature. C’eft donc dans cette roche qu'il faut chercher les premiers élémens qui compolent les autres corps pierreux. Pour ne pas nous éloigner de cet objet, confidérons ce qui fe pañle dans le granite même, on y voit quelquefois des fentes, des crévafles , des filons qui fe font remplis de quartz purs. Les capacités plus étendues de ces filons font ce qu'on nomme fours ou mines de criftaux de roche, parce que c’eft en effet dans ces fortes de cavités que fe trouve le criftal de roche le plus beau, tant pour la tranfparence que pour la groffeur , & qu'il en tapifle les parois. Ï1 n’y a perfonne qui au moins n'ait vu quelque grouppe , quelques amas de ces criflaux; on _fe difpenfera en conféquence de les décrire : mais tout le monde n’a pas été à portée de voir que dans ces fentes il ya quelquefois des criftaux de feld-fpath & de mica criftallifés & groupés avéc les criftaux de roche, & que le fond de ces cavités eft quelquefois rempli d'une pouflière verte, fine, douce au toucher, qui eft une vraie ftéacite pulvérulente , qui , fe mêlant au fluide qui concourt à former le criflal de roche, trouble fa tranfparence, y occalionne des accidens qu’on a regardés , fans examen , comme des moufles & des herbes renfermées dans les criftaux de roche. Cette pouflière n’eft qu'un mica verd, décompofé par un fluide qui l'a charié & dépofé dans ces cavités, ainf que les élémens propres à former des criftaux de quartz & de feld-fparh. Ces mines de criftaux fe trouvent le plus communément dans les roches de granite qui couronnent les hautes alpes , & ce ne peut étre que ces granites qui ayent pu fournir les matières propres à remplir les fentes de quartz , & à tapifler les cavités plus larges des différentes criftallifations qu'on y yoit quelquétois , parce que ce font ordinairement des criftaux de roche, Mais on ne trouve pas en même proportion le feld-fpath criflallifé ; & il eft rrès-rare, en raifon du criftal de roche, quoique le feld-fpath paroifle en proportion égale, & fouvent plus grande que celle du quartz dans certains granites. D'après ces faits 11 femble qu’on puiffe propofer les queltions fuivantes, Le Auide qui décompofe Ie quartz eft il plus abondant dans la nature que celui qui décompofe le feld-fparh ? quel eft ce fluide, cet agent ? Si c’eft le même, pourquoi a t-il plus d’aétivité fur le quartz, matière plus homogène , que fur Le feld-{path ? comment & pourquoi le mica fe trouve-t-il en pouflière dans ces cavirés des oranires ? y eft-il pañlé dans l’état de fluidité &' de diflolution, comme le quartz & le feld-fparh 3 pourquoi ne le trouve-t-on pas en mafle ou faifant corps ? des favans qui onc le bonheur de tout favoir & la fagacité de tout expliquer 88 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, donneront fans doute quelque jour des réponfes à ces queftions que Îe fujet amène naturellement. O1 a déjà fait des criftaux de quartz ou de roche , à ce qu'on dit, differens favans s’en occupent même encore ; on fera de même aufli des criflaux de feld-fpath & de mica, D'après les réuffites , la folution de ces problèmes fera peu difficile, Enfin, tour annonce, tout prouve que les corps les plus durs du règne minéral font journellement défunis | décompofés & chariés par des fluides , quels qu'ils foient , & que de ces différentes diflolurions , il va fe former quelquefois au loin de nouveaux dépôts analogues , dans des lieux appropriés pour les recevoir. IL paroît également conftant que Ja matière de ces nouvelles formations eft fouvent plus pure, plus élaborée que celles dont elles ont été difloutes, témoins les criflaux de roche, ceux ‘de feld-fpath & de mica, qui ne font que des recompofitions des matières enlevées aux granites : on ne fait pas mention des autres criftaux en tous genres, pour ne pas fortir de l’objet préfent ; ces criftaux ont des formes plus conftantes ; ils font plus tranfparens , ce qui ne peut provenir que de l'homosénéité de leurs parties conftituantes, Un paffage de l'excellent ouvrage de M. de Sauflure, Voyage dans Les Alpes, page $34, me rappelle une obfervation que j'ai faite, elle peut trouver place ici , puifqu'il eft queftion de la décompofirion & recompofition des granites. En 1778 on ouvroit des grandes routes en Limofin ; allant de Cahors à Limoge , le terrein le plus élevé entre les poites de Douzenat & Barriolet diftante de quatre lieues , eft tout compofé d’une terre argileufe jaune. Surpris de voir que tout l’encaiflement du nouveau chemin n'étoit compofé que de quartz, n'en voyant d’ailleurs nuile part, je cherchai d’où on avoit pu tirer une fi immenfe quantité de pierres de la même efpèce, qu’on ne trouve pas en roches continues. Je reconnus qu'ils avoient été foigneufement ramaflés dans les champs , & fortoient des roches fchifteufes, argileufes & ferrugineufes qui compofent tous ces terreins , mais font décompofés à la fuperficie au moyen du fer, & paflés à l'état de terre aroileufe. Ces quarts y formoient d’abondans filons qui traverfoient en tout fens ces roches fchifteules. Plus indef- truétibles à l’air, le temps & le labour avoient infenfiblement amaflé ces quartz fur la fuperficie des terreins, d'où ayant été.tranfportés fur le grand chemin , ils procuroient le double avantage de favorifer Vagriculture & de confolider le chemin dans un mauvais terrein, Forcé d'aller lentement fur un chemin rout couvert de pierres , marchant à pied , j'examinois ce qui n’environnoir, Dans différens endroits efcarpés pour dreffer le chemin , on voyoit à découvert la {trudture intérieure de la roche fchifteufe, fes différens lits & feuillets, & que plus la roche approchoit de la fuperficie, plus elle étoir décompofte & à l'état de terre : les veines & filons de quartz y étoient en place, il y en ‘ SUR L'HIST, NATURELLE ET LES ARTS. 89 en avoit de toutes dimenfions & dans toutes fortes de directions. En avançant je fus bien plus furpris de voir fur la gauche du chemin ;, dans ces roches fchifteufes argileufes , des veines ou des filons prefque perpendiculaires , depuis moins"d’un pouce, jufqu’à plus d'une toife de largeur, remplies & compofées de quartz , de feld-fpath & de micas fort blancs & fort brillans; ces fubftances , quoique mêlangées , étoient en plus grandes maffes, c’eft-à-dire, qu’il y avoit plus de parties quartzeufes, de feld-fpath, & de micas rapprochés à côté les uns des autres, qu'ils ne le font dans le granit ordinaire; il y avoit des micas de la grandeur d'une pièce de vingt-quatre fols & d'un petit écu , & les autres efpèces à pro- portion ; c'étoit un vrai granit à grandes parties. Il eft bon d’obferver que ces filons de granit coupoient & traverfoient différens filons de quartz; qu'il étoit vifible que la roche argileufe , route formée avec fes filons de quartz s'étoit fendue , & que fes fentes fe font remplies enfuite de matières granitiques. Cette obfervation me parut aflez curieufe & rare pour en faire le détail, que je copie de mon journal, & j'en emportai des échantillons. M. le marquis de Cramayel, en connoiffeur , admira ce phénomène comme moi. M. de Sauflure, bon juge dans cette partie, qui a obfervé une chofe prefque pareille dans une roche de corne , regrette que l'exemple qu'il cite foit caché au centre des Alpes dans un lieu ft peu à portée des amateurs de la Lithologie. J'ai cru devoir faire mention de mon obfer- vation, parce qu’elle eft dans un lieu commode, & à portée d'être vue par tous ceux qui paflent fur cette route ; elle concourra avec celle de M. de Sauflure pour démontrer que le granit peur fe décompofer & fe reproduire au moyen d'un fluide qui tranfporte les élémens du granit dans des fentes où ils font dépofes & criftallifenr. L'obfervation faite en Limofin eft d'autant plus curieufe, que les flons fe trouvent dans un fchifte argileux , roche bien moins ancienne que le granit, fur une efpèce de plaine ou de plateau labouré; qu'on ne voit pas aux environs des roches de granit ou granitiques qui aient pu fournir les matières premières propres à remplir ces fentes & ces filons : qu’il doit être arrivé de grands changemens à la fuperfcie de ces terreins, & fait remonter la pofibilité de ces infiltrations à des rems qu'on ne peut eftimer, Il faut voir à la page citée & fuivantes , les conféquences que tire de ce phénomène le favanc Naturalifte de Genève, Avant d’arriver à Barriolet , jai encore trouvé fur le chemin une autre efpèce de granit fort belle, compofée de quartz gros bleuâtre, de feld- fparh rouge & de beaux micas blanc-argentins , le cout en grandes arties ; de jolies dendrires noires, élégamment deffinées , font parfemées fur le feld-fparh: Dans d’autres granits du même canton, des feuillers fort fins de mica font difpofées en dendrites, en ramificarions , & forment uelquefois des grandes gérbes divergentes & brillantes fort agréables à Tome XXIX, Part, II, 1786, AOUT, M 90 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; l'œil. Ces granics font également de nouvelle formation ou des recom- pofitions. On a donc eu raifon de-croire & de dire que les granits en grandes mafles, que ces pics élevés qui furmontent le globe, fe fonc formés dans le fein même des eaux ; puifque de la décompofition de ces mêmes granits nous voyons, pour ainfi dire , fous nos yeux s’en former de nouveaux. Les fentes qui fe font enfuite remplies, ne font pas rares dans Îles granits en grandes mafles, ou primitifs. J'ai tenu un état de ces fortes d'accidens. On les obferve aufli commodément dans des immenfes colonnes de granit d'une feule pièce , reftes de la magnificence des anciens Romains, qu'on voit encore à Rome , dans les énormes caves de la Villa-Medicis, dans différentes flatues de granit oriental ou autres. Ces fentes font remplies quelquefois de quartz pur, ou d'an feld-fpath coloré différemment, & en plus grandes parties que celui répandu d’ailleurs dans le granit. Dans les fphinx qui font au bas de la rampe qui monte au Capitole, ces fentes ont été remplies par des micas. PRÉGIS HISPTORTIOUE D'un coup de foudre tombée fur un Paratonnerre , avec quelques idees fur l'effet des Paratoñnerres ; Par D. BREITINGER, Démonffrateur public en Mathémariques & Hifloire-Naturelle, à Zuric. ÉE phénomène, arrivé le 22 avril de cette année 1786,eft une preuve nouvelle de l’utiliré des paratonnerres, dont on doit l’invention à l'immortel Franklin. Après avoir fait le récit de l'événement , je ferai part de mes idées fur la manière dont le paratonnerre agit. Peut-être je réuflirai à effacer totalement la méfiance de mes compatriotes fur ce fujet, ou du moins de la diminuer. Ledit jour , entre quatre & cinq heures du foir, la foudre tomba fur le paratonnerre de mon voifin , dont la maifon fait exactement face à la mienne. Son paratonnerre confifte en deux pointes de métal féparées l'une de l’autre, mais en communication par des fils de cuivre. Les deux pointes font élevées fur des perches fixées à la partie fupérieure dutoît, l'une du côté d’eft, l’autre vers l'oueft ; de la dernière pointe part le conducteur de fil de cuivre, va jufqu’à la gouttière qui communique avec un toît inférieur au premier, & de-là il reflort de nouveau pour fe joindre avec un réfervoir d’eau dans la cour.-Près de cette maifon fe trouvent encore deux paratonnerres, l’un fur ma maifon , & l’autre fur une qui eft SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. gr du même côté que ceile dont le paratonnerre a été frappé, du côté d’eft. L'orage s’avancoit du nord , à peine omentendoit quelque foible bruit de tonnerre; néanmoins la foudre tomba avec un fracas confidérable fur la pointe du côté d'eft du paratonnerre de mon voifin. Le feul dégât qu’elle produifit fut de fondre rout au plus trois lignes du fommer de cette pointe, qui eft de cuivre limé à trois faces ; de-là elle fuivit le condu@eur, le long du toit & de la maifon entière, fans caufer aucun demmage. Dans la maifon, & aux environs, on croyoit fentir quelqu'odeur comme de foufre ou de poudre à canon. | Mon paratonnerre éloigné tout au plus de foixante pieds de la pointe frappée par la foudre, donna aufli des preuves très-diftinétes qu'une partie de la matière électrique lui avoir été communiquée: il eft ifolé & conftruic pour fervir aux obfervations, J'y ai combiné un éleétromètre un carillon, un réfervoir d'électricité (ou bouteille de Leyde) ; le tout eft réuni dans une lancerne à côté de laquelle font ajuftées deux boules de métal pour former une interruption. À l'approche de l’orage on n'obferva pas feule- ment les apparitions ordinaires, l’écartement de l’éleétromètre, Le fon de mon carillon, lesétincellesenrre Pinterruption des deux boules; mais l'éclat du tonnerre occalionna aufli un fi forr ébranlement dans tout le para- tonnerre, que les vibrations de la pointe élevée dans l’armofphère durèrent fort long-tems. Vifirant tour mon appareil je ne trouvai rien d’endom- magé n1 à la pointe ni autre part, ce qui eft une preuve que la matière électrique ne lui avoit pas été communiquée par une explofion , mais par une fimple infufion dans la pointe. Voilà une expérience, la première dans notre vilie , qui atreite fi évidemment l'utilité des paratonnerres, qu'il paroît impoflible d'en douter davantage. On ne fauroit contefter des faits aulli évidens. Perfonne ne nous difputera que ce paratonnere a été d'une utilité évidente dans le cas préfenr. Mais on demande : la foudre feroit-elle tombée également fur cetre maifon, s'il n'y avoit pas eu de pararonnerre qui pt l'avoir attirée ? Je vais râcher de répondre à cette objection en peu de mots, & de fixer l'idée qu'on doit fe former du paratonnerre, La queftion principale eft de favoir: S2 le paratonnerre attire La foudre de loin ou non? Pour y répondre, il faur bien taire atrention aux ‘circonftances qui pré èdent le coup de ronnerre. Les eilais d'éleétriciré nous apprennent que la matière éleérique ne paffe jamais d'un corps électrique dans un corps non-éledrique, avant que le dernier ait fubi quelque changeme:r, L'expérience nous démontre que chaque corps éleGifé eft entouré d’une certaine armofphère éledrique de même nature que celle du corps qu'elle entoure; cerre atmofphère influe fur les corps adjacens & y repoufle la même marière électrique que celle de certe atmo{phère, Y attire l'électricité oppofé: Par-là ce corps obtient ung Tome XXIX, Part, II, 1786. AOUT, M 2 92 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, électricité oppofée, & devient électrique par /éparation (1). De cette manière le paflage du fluide éle&rique d’un corps dans l’autre et rendu non-feulement poflible , mais facile ; car pour Lors 1l s'enfuit une attraction réelle, vu que les corps chargés d'électricité oppolée agiileut comme les poles inégaux d’un aimant. Si lon veut maintenant faire l'application de ces expériences à l'électri- cité dans l'air, il eft évident qu'un nuage orageux, pour pouvoir fe décharger par la foudre, eft obligé de fe faire un chemin par fon atmof- phère, laquelle influe immédiatement fur l’atmofphère générale, qui étant unzon-conduéleur ,ne donnera pas facilement paflage au Auide électrique. IL faut donc qu'un corps non-électrique ou conducteur foit déjà bien près, pour que le nuage puifle avoir d'influence fur lui. Si le nuage avance contre la terre, il rencontre des corps de différentes forces condutrices, entre lefquels les métaux, fuivant toutes les expériences, font ceux qui en pofsèdent le plus grand degré; par conféquent la matière éle@rique choilira par préférence le métal pour fon paflage, & par cette raifon on dit que le métal attire la foudre; mais on voit d'abord que cetre attraction ne peut pas fe faire à une grande diftance , qu'elle ne peut avoir lieu que lorfque la pointe du paratonnerre entre déjà dans l’atmofphère életrique. Nous avons aflez d'expériences qui prouvent que le métal «n’attire pas l'électricité de bien loin ; nous ne voulons apporter qu'un feul exemple arrivé de même dans notre ville. La foudre tomba fur un petit bâtiment à la diftance de près de cent pas de deux paratonnerres bien élevés, Si les paratonnerres avoient attiré l'orage, la foudre n'auroit pas manqué de s'y porter, car je ne conçois pas qu’un corps attiré par un autre puifle parvenir à un troifième qui ne lui embarrafle pas feulement le che- min. D'ailleurs, c'eft une expérience conftatée , que fi le Auide életrique s'eft emparé une fois du métal, qu'il ne le quitte plus , aufi long-tems qu’il n'y a point d'interruption , & même en ce cas il fait volontiers des détours très-confidérables. Ainf il ne doit plus refter le moindre doute fur la vertu conductrice la plus parfaite du métal. Comment donc la matière attirée (fuppofñrion faite qu'elle le foit de loin) de la pointe du paratonnerre, fera-r-elle amenée à un autre corps où il lui feroit beaucoup plus difficile de paffer ? Le même exemple ci-deflus , confidéré fous un autre point de vue; prouve encore que le métal n’attire pas de loin la matière éléétrique. La foudre tombée fur la petite maifon voifine du paratonnerre , frappa premièrement la cheminée, comme la partie la plus élevée, & après cela elle fuivic le canal de fer-blanc formant la gouttière qui defcend SR ——— —— ——————————————— À (1x) On voit que je fuppofe avec Simmen, Krazenflein, Wilke, Bergman; Karflen, Forften, Lichtenberg , &c. deux matières éle@riques, dont chaçune féparé= ment fait l’être pofitif de Franklin, L SUR L'HIST. NATUREILE ET LES ARTS. 93 jufqu’au pavé. Dans ce cas-là Ja foudre ne pouvoit être attirée par le métal, mais elle lui fervoit feulement de conducteur, ce qui empècha qu’elle re fi: du mal; & fi le métal avoit été prolongé au-deflus de la cheminée, alors le conducteur partait n’auroit pas non plus laiflé endommager la cheminée. On objecte encore que les paratonnerres étant élevés au-deflus des édifices, entrent par-la plutôt dans l'atmofphère du nuage orageux , ou excitent la foudre & la conduifent fur la maiïlon où fans cela elle ne feroit pas tombée. Malgré que nous pourrions parfaitement accorder la poffbilité & même la vraifemblance d’un pareil effet, parce qu’il n’en réfulte pas le moindre danger , il faut pourtant remarquer qu'une fois le nuage s'étant abaiflé au point de toucher le paratonnerre , il fe releveroit fort difficilement. L’abaiflement du nuage eft déjà une preuve qu'il cherche à fe mettre en équilibre avec la terre ou une nuée voifine; il baiflera par conféquent encore davantage, & fi par hafard le mouvement du nuage dirigé par le vent fuit une diretion oblique, il fauc qu'il fe précipite fur la maifon voifine qui fera frappée par la foudre. Puis-je donc par mon para- tonnerre préferver mon voifin du coup de tonnerre, je le ferois avec le plus grand plaifir ; du moins je fuis perfuadé parfaitement que Je ne lui amène pas l'orage par mon conducteur. Outre cela, il ne faut jamais oublier à ce fujet , de remarquer qu’on termine les paratonnerres en pointes, parce que l'expérience nous démontre que le fluide électrique s'infinue beaucoup plus facilement dans les pointes que dans les corps arrondis, & par conféquent que là où le paflage de cette matière ne fe fait pas trop brufquement ni en trop grande quantité, l’équilibre fouvent eft rétablie , fans aucune explofion , mais par une fimple injeétion dans la pointe. Puifle cette obfervation contribuer à la tranquillité de mes com- patriotes, & à l’avancement d’une invention aufli belle & aufli bien faifante de notre fiècle, & mes vœux & mon but feront accomplis. En Amérique on la reconnut d’abord pour un don de la Providence. En Europe elle a éprouvé des difficultés & des contradictions pendant très-long-rems ; mais à préfent , trop juftifiée par l'expérience, on ne peut que la voir bientôt généralement adoptée, 94 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, APPERÇU OU PRÉCIS TOUCHANT LE TRAITEMENT DES BÊTES A LAINE EN MALADIE ; Par M. CARLIER, Cx TTE efquiffe a été annoncée à la page 44 des Remarques de Louis Ydeloc, Berger, (Paris, Guefñer, 1785 )lur l'inftruction de M. Daubenton pour les Bergers. J'entre en matière fans préambule. Les maladies des bêtes à laine fe réduifent aux efpèces fuivantes : 1°. la fievre, (elle les accompagne prelque toures & rarement paroît feule) la courbature. 2°, La colique & les tranchées, la diarrhée & la conftipation. 3°, L’enflure & fes branches. 4°. Le feu ou les maladies inflammatoires, $°. La gale & fes divifions. 6°. La pourriture du foie, le goëtre , l'hydropilie , le rourny. 7°. Le claveau. 8°. Le boîtement, les plaies & Les fractures ; les épidémies font des maladies accidentelles & extraordinaires. : Les maladies proprement dites viennent d'humidité ou de chaleur. Il eft plus facile de les prévenir que de les guérir. Je divife cet écrit en quatre parties: la premiere fur les moyens de prévenir les maladies ordinaires ; la feconde fur les caufes ; la troifième fur les remedes ; la quatrième contiendra des réflexions par forme de séfumés. - $. |. RÉGIME OU TRAITEMENS FRÉSERVATIFS. ._ Le propriétaire doit avant tout procurer au Berger les nourritures & les fecours nécelfaires ; réformer & facrifier les individus de mauvaife complexion ou attaqués de quelque vice épidémique. Je fuppofe un Berger vigilant, inftruic de fes devoirs , ainfi que de la propriété nutritive ou médicinale des herbes & des plantes, L'ufage & Pexpérience dans chaque local, apprennent à diftinguer les qualités des herbages & des fourrages. Le bon état du bétail dépend en grande partie de l'obfervation des rèoles qui fuivenc : S'aflurer de ce qu'un troupeau peut porter de nourritures en herbages ou en fourrages ; lui procurer un ou deux repas chaque jour; cette réfection fe nomme ventrée. Une demi-heure de ventrée le matin & autant le foir dans de oras berbages, comme les regains, les trefles , &c, fufir, même pendant les « ÿ SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. CI longs jours ; le refte du tems conduire fur les côteaux , fur les friches ou dans les plaines arides. Si les paturages font maigres, on ufe de compenfation. Ces deux cas fe décompofent de cent façons : le point dépend de © Pexpérience. Même attention par rapport au tems de faire boire, aux rations de - fourrages à la bergerie ou dans les parcs domeftiques. Il eft prudent de fevrer le bétail pendant la nuit, des alimens fucculens ou fubftantiels, tels que le foin , les dragées, luzernes, rrefles, &e. L'exercice , les nourritures aflorties aux circonftances, la propreté & la falübriré des étables, l'œil du Berger, tels font les moyens, les agens principaux de confervation & de manutention des troupeaux. Voici les cas où la tranfgrefion de ces règles occafionne les maladies, $. IL CAUSES DES MALADIES. 1. Un mouton trop pouflé de nourriture en herbages ou en fourrages, gagne la courbature au point de devenir perciu de fes membres. 2. Un troupeau mal nourri à l'étable, fort affamé. Il trouve dans des pâturages naturels ou artificiels , de quoi aflouvir fa première faim, Il mange avec avidité & fans choix, les nourritures qu'il rencontre. Ces repas précipités font ordinairement fuivis de la colique , des tranchées , de la diarrhée ou de la confÆpation. Les herbes tendres & humides, la fauve, la ravenelle, le coquelicec , les jones & en général routes les fortes d'herbes ou de fourrages qui gonflent ou qui rempliffent trop, produifent le même effer. 3. L’enflure des vents a les mêmes caufes. Celle de férofités donne l'araïgnée , efpèce de fluxion à la tête. Elle vient d'un amas d'humeur jaunâtre entre cuir & chair, 4. Un bétail agité & tourmenté par les chiens pendant les chaleurs ; une marche ou un exercice forcé fur des terreins montueux, arides ou fabloneux ; la privation d’eau, des alimens échauffans, accefloiremene où de leur nature, comme les épis après moiflon, le lentillon, la vefce, les provendes où le grain domine trop, les fourrages auxquels on joint l'ufage du fel , & cent autres caufes territoriales analogues à celles-ci, occalionnent des maladies de feu internes & externes, comme le org de rate , les maladies de poumon , principalement l'échaudure ou adhé- rence de ce mifcère aux côtes, les dyflenteries & flux de jang, &c. l'éréfipèle & autres incommodités du même genre. 5. L'infuffifance ou la mauvaife qualité des alimens , les vapeurs, l'air concentré & la mal-propreté des étables trop étroites ou mal diftribuées, la bale & pouflière des fourrages, la parefle du Berger , font naître Ja gale , le bouquet ou noir mufeau , les pous ; & fort fouvent le chancre & le /corbur, 96 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, * 6. Les herbes ombragées, humides, aquatiques & fpongieufes , fouillées de vafe ou imprégnées de rofée ; les eaux tièdes ou trop douces prifes à contre-tems, immédiatement avant les heures de repos ou la rentrée, foit au parc, foit à l’étable, ou aufi-tôt l’ufage des grains ou légumes farineux , font des germes d’hidarides ou cloches d’eau, de goërre, de pourriture au foie, d'hydropifie , du tourny dans les jeunes bêtes. Les herbes des guerets, des chaumes après moiflon , les prairies artifi- cielles de trefle, vefce, luzerne, fainfoin , &c. livrées à difcrétion , pro- curent une graifle flaique & humide qui dégénère en con/omption. 7. Un Berger qui n’eft pas attentif à éviter la rencontre des troupeaux forains qui voyagent & des troupeaux de Bouchers qui ont été achetés aux #marchés , expole fon maître aux pertes & aux- fuites terribles du claveau. 8. Les foins du Berger peuvent auûi prévenir les épidémies particu- lières de gale, de bouquet & d’araignée ; les boîremens, contufions & fractures , ainfi que les plaies occalionnées par les piqûres, par les morfures des chiens, Le plus grand nombre de ces accidens eft prefque toujours le fruit de fa parefle. La fièvre accompagne ordinairement la plupart de ces maladies , & fur-tout la conftipation. Elle affecte rarement feule les individus. On la prévient donc en écartant les maladies qu'il eft au pouvoir des Bergers d'éviter. 6. III REMÉDES. . | I! y a des années où les contre-tems , l'acabit des fourrages, les intempéries & divers genres d'incidens , mettent toute l'habileté humaine en défaur. [ls occafionnent dans les troupeaux les mieux tenus, des maladies qui obligent de recourir aux trairemens & aux remèdes. Le traitemient des bêtes à laine en maladie fe réduit aux opérations & à l’ufage des ingrédiens qui vont être nommés. 1, Courbature. On la diffipe par l'exercice, les frictions , la diète & les eaux blanches ; les fuppoftoires & les lavemens. 2. Colique & tranchées, diarrhée & conflipation. La colique & les tranchées cèdent ordinairement à ces expédiens : battre avec les mains les flancs & le ventre de l'animal ; arrêter avec la main la refpiration & la rendre par degré : caufer à la bête de petites cofvulfions en laiffant tomber dans les oreilles quelques gouttes d’eau qui lui font fecouer la têre & l'agitent fortemenr. Le mal fe pafle aufi en baïgnant par un tems favorable ou en verfant de l’eau le long du dos. On obtient le même effer en ferrant les bêtes les unes contre les autres à la faveur d’un mur ou d’un bâtiment; fuppofitoires & lavemens d'urine humaine, d'huile , de lait ou d’eau beurrée , lorfque Îes douleurs ne ceffent pas, : [f) - : 4. à £ SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 97 IL faut laiffer un libre cours aux diarrhées; elles ont leurs’ périodes comme la plupart des autres dérangemens : lavemens de vinaigre ou d'oxicrat lorfqu’elles durent trop: fourrages & paturages fecs, abreuver moins fouvent f elles font caufées par l’hunudité ; provende aflortie. Eviter le paffage fubie d’un régime à un autre, La conflipation fe guérit en infinuant du beurre dans l'anus dé l'animal pour amollir la fiente ; la tirer enfuite avec Je doigt, ce qui fe nomme défeenter : fuppoñitoires de favon ; lavemens comm aux tranchées. 3. Enflure. Celle de vents féMtraite comme la colique & les tranchées. Occafonnée par l’eau ou par un fans diflous , c'eft hydropile , goëtre ou hidatides, ; Enflure de la téte ou araignée. Tenir la bête chaudement: pafler dans la boucheun lien de genêt qu’on attache par-deflüs la têre , ou un baillon du füureau pour la faire faliver: incifions,, y verfer la liqueur d’un demi-feptier de vinaigre dans lequel on a délayé une poignée de terre grafle : quelques pincées de fel & poivre au défaut de terre grafle : défienter ; lavemens. 4. Feu, maludies inflammatoires. Internes, à la rate ou au poumon. Flux de füng. Externes , éréfipéle, rougeur à la peau. Herbes & fourrages rafraîchiflans , eau blanchie de fon ou de farine: d'orge : bains fi le cems eft propre & ( la laine r'eft pas longue ; lavement de lait coupé ou d'oxicrat felon les indications : fuppoñtoires & défienter s'il y a obflacle: faigner au bout de la queue. Pour les érefipéles. Bouze de vache appliquée en ropique lorfque lérat de la toifon le permet: liqueur d’une poignée de terre grafle délayée dans une chopine de vinaigre; blafer.ou humeéter avec l'urine de vache dans laquelle on a fait bouillir du genêér. Oindre de beurre roux les boutons après l'éruption. Les poumons fe déchargent naturellement par la voie des nazeaux , des humeurs qui s’y amaflent. On en entretient l'écoulement en débouchane les conduits : on le facilite ou on l’excite en foufflant dans les narines, un peu de fel pilé. La toux la plus opiniâtre n'a des fuites fâcheufes que quand le foie eft attaqué. Les petits vers qui la provoquent fe forment aux poumons & montent jufqu'à la bouche par la trachée artère. L'animal les rejette en touflanr. L'oxicrat eft très-propre à nettoyer les premières voies. L'échaudure où adhérence du poumon aux côtes, eft beauceup plus dangereufe. La faignée eft un foible remède : on a recours avec plus de fuccès aux eaux blanches , aux régimes rafraichiffans & Lumeétans. Elle peut durer dix-huit mois & deux ans. Après quelques femaines de traitemens infructueux , & fouvent dès l'origine, le poumon fe couvre de cloches d'eau qui cèdent rarement aux remèdes recherchés & difpendieux, Aux premiers {ymptômes fâcheux, il fauc tuer la bèce, Tome XXIX, Part. Il, 1786. AOUT, N “ 98 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, $. Gale & bouquet. Pous. Chancre & fcorbue. i Gale. Séparer du troupeau les premières bêtes atraquées, Litière fraiche & propreté des bergeries : fumigation d’affa fætida. Le meilleur traitement eft celui de poufler l'humeur au-dehors par de bonnes nourritures. Provende de feigle ou d'orge & de bale de blé, faupoudré d'un peu de fleur de foufre : éviter tout ce qui peur faire rentrer l'humeur, | Découvrir les parties de la peau où les boutons paroiflent, appliquer la bouze de vache : humeéter avec le réfidu d'une poignée de genêr, autant de réveil-matin bouillis dans deux pintes d'urine de vache ou de rouffi de fumier à confiftance de gelée, chauffé & étendu fur un linge. ka gale naïflante qui afle@te l'épiderme à quelques places feulement, fe diffipe en gratrant ou chiquetant la peau. L’humeur fort: alors on mouille Fendroit avec l’eau ou la falive de tabac. Ce remède eft toujours cauitique, dangereux en tout autre cas, L’humeur rentre, fe dépofe au poumon ,au foie ou à d’autres vifcères: elle dégénère aufli en araignée, bouquet, chancre & fcorbut ou en complication épidémique. Bouquet. Gale épaifle qui couvre le deffus du mufeau : même traite: ment qu'à la gale; amollir les croûtes par une couche de beurre , les enlever avec Le dos du couteau ; eau ou falive de tabac. Pous. On les détruit en humeétant la peau avec la décoction d'une demi-livre de côtes de tabac cuites dans deux pintes de vinaigre. Chancre & grain, fcorbur. Le chancre & le grain fe frotrent avec Pextrémité d’un bâton garni d'un linge trempé dans une irfufon de vinaigre, d’ail & de poivre: enlever les grains ou cloches mûres, avec une pièce de fix liards ; blafer la place comme ci-defus : autre infufon d'une petite poignée de feconde pelure de fureau & d'une demi-once de fel dans une pinte de vinaigre. Les puftules remplies de pus , s'écrafenr avec. un morceau de. genièvre & fe blafent avec une infufion d’une poignée de fauge, autant d’hyflope, demi-once de fel dans une chopine de vinaigre, Le fcorbut eft La fuire d’une enflure d’araignée, d’un noir-mufeau ou de chancre mal guéri : frotter la partie avec l’eau de vitriol, une once dans trois demi-feptiers d'eau. La poudre de vitriol dérache où mange les chairs mortes. 6. Pourriture de foie, hidatides ou cloches d’eau, goëtre, hydropifre : tournL. IL n'y a de remède que dans le principe, lorfqu'on commence à apper- cevoir du jaune ou de la lividité dans le contour des yeux & des genèives. Si la caufe du mal eft l'humidité , il faut nourrir au fec. On tire douce- ment la laine du ventre vis-à-vis le foie. Si elle quitte , c’eft une preuve que le mal eft fans remède. Point de reflource contre lhydropifie. Les bidatides qui en font les avant-coureurs , fe paflent aflez fouvent en changeant les nourritures SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 99 On peut ouvrir le goitre par ure incifon , pour épancher l'eau & e nettoyer avec l'urine humaine, L'expédient, réuflit rarement. La fuppuration prolonge les jours de l'animal , mais au détriment de fa fubftance. Je ne connois qu'un, remède contre le rourni ; vertige ou avertin , lorfqu'il eft caufé par des vers au cerveau : c'eft de: faire tomber quel- qués goutes d’eau-de-vie dans chaque oreille, - 7. Claveau, Onile prévient comme j'ai dit, Les bêtes , fur lefquelles on apperçoic les premiers boutons , doivent être aflommées & enfouies dans un trou profond ; éviter tout contact de la part du berger & des gens qui approchent du troupeau. Mêmes précautions & remèdes que contre la pelte. Fumigation de vinaigre , de genièvre ou d'affa fatida , deux fois le jour dans la bergerie , en laïflant tomber fur une brique rougie au feu , ou fur le brafier d'un réchaud , des gouttes de vinaigre , des particules d'ajla fatidi, des brins ou de la graine de genièvre, Frotter de vinaigre les endroits dégarnis de Jaine. J'ai vu plufieurs troupeaux ainfi préfervés pendanc la grande épidémie de 1769. .… Lorfque le mal a pris le deffus, il faut laifler agir la nature. J'ai été témoin de Pufage infrudtueux desidrogues que j'annonce au traité 8c de quelques autres, [ faut attendre avec réliznation , la révolution des trois Junes , fe cantonner & éviter par-deflus tout les bas-fonds & les gras pâturages. Il y a peu d’épidémies qui fe refflemblent. On remarque dans la plupart , les caractères d’une gale rentrée qui dégénère en pourriture , en échaudure , en niflée purulente, &c. le grain, le fcorbut, le charbon même & les accidens du claveau fe miontrent affez ordinairement dans le cours des épizooties. © Je neconnois point d’autres remèdes que celui contre la peflé: le vinaigre avec une infufñion d'ail ou de gentiane. On en frotte l'intérieur de la bouche & les parties du corps où paroiflent les fymptômes du mal, Lave- mens de la même liqueur ; fumigations ; provendes & fourrages affortis aux indications. Attendre pour le furplus , la fin de la période. 8. Maladies d’accidens : boitement , plates & fraëtures. Le repos eft le remède du boirement qui vienc de Jaflirude. Les fabots corrodés endommagés par Les urines , la fente , la vafe des marais, &c. doivent être dérergés & grarrés. On les graiffe de beurre non-lavé , de fain-doux, & on les couvre d’un linge Pefpace d'un jour. 3 On blafe les contufons avec l’eau-de-vie & le favon battus. Les petires plaies, comme les piquures ,‘excoriations & morfures , fe guériflent ordinairement d’elle-mêmes. Pour peu qu'elles commeï- cent à caver, on les nettoye avec l'eau de fel & l’on y verfe quelques gouttes d'huile très-chaude. Dans tous les autres cas, on en accélère la Tome XXIX, Part, II, 1786. AOÛT. N 2 100 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, guérifon par des gouttes de lait, du béurre lavé ; non-lavé'ou roux ; di fain-doux où de la graïfle de bouc. : £ Le meïlleur remède contre la fuppuration , eft un mélange de vin ; de miel & de fleur de farine de froment, L'oignen de la plante äppelée tue-chien ou colchique, commune préfque par-tout dans-les prairies, a la vertu de nettoyer les plaies invé- térées, du pus & des vers qui s’y éngendrent. On écrafe une portion da Foignon pour y appliquer. On le contient par‘ün linge, Les membrés démis fe remboîtent comme aux hommes. On ufe d'écliffes dans les fractures. Élies fonc enfuite recouvertes d’un linge trempé dans le blanc d'œuf battu. $. I Vs RÉSUMÉ ET RÉFLEXIONS, On voir:par ce qui vient d’être dit que la confervarion des troupeaux dépend principalement de l'intelligence, de la vigilance & de l'expérience du Berger, du révime & des nourritures aflorties aux circonftances. L'indication & l’application dés remèdes font naître plufieurs fortes de réflexions, L'habileté. d'un Berger dépend principalement de favoir ufer des alimens ordinaires en provendes, fourrages & pâturages , comme de remèdes en maladie , eu égard à la vertu de chaque forte, humectante ou rafraichiflante, échauffante ou propre à refJuer. C'eft en effet ce qu'exécutent tous les Bergers intelligens dont j'ai fuivi la conduire & les opérations. Ces propriétés varient & different comme: les climats & les températures. De-là naît la diverfité des noms & des effets attribués par les Botaniltes, à une même plante , & le danger des remèdes généraux propofés pour toutes les provinces d’un grand empire. # La pharnracie d’ingrédiens ou médicamens pour les moutons doit fe réduire aux fortes qui fuivent : tabac, foufre , vitriol , affa fætida, fel & poivre. : < Blé £ avoine, feigle & orge en provende , farine ou fon de ces grains pour les eaux blanches, riz & millet où ils croiffent : lentilles & dragées , trèfle, fainfoin & luzerne, Ail, graine, baie ou bois de genièvre , écorce & fleur de fureau. Vinaigre & eau-de-vie: vin , cidre & bière rarement. Lait de vache ou de brebis : beurre lavé, non lavé & roux , Tain-doux vieux-oing ; bouze de vache, eau de roufli. Urine bumaine. Huile d'olive, de cade , de chenevis ou qualités analogues à ces trois fortes : favon , terre grafle , argileufe. La faignée doit être employée feulement dans les cas urgens de ma- ladies inflammatoires | & cela parce que la plupart des maux proviennent SUR L'HIST, NATURELLE ET LES ARTS. 107 \d'indigeftion, La plus falutaire réfide dans l’expédient de tirer du fang du bout de la queue , foit par des incifions ou en retranchant un nœud, foit par une excoriation ; ce qui procure fouvent l'effet falutaire du Aux hémorroïdal. Les meilleurs bergers réprouvent toutes les fortes de portions , les gargarifmes exceprés. Ils eftimenc que les breuvages propres à foulager les individus , doivent être donnés en lavemens. L’urine d'un homme fain & bien conftitué , eft le meilleur des fluides. Ë Is excluent l’ufage du vin, de la bière & du cidre. C'eft cependant une faute fréquente de donner du vin à l'animal dont la fanté commence à fouffrir quelqu’altération. Cette précaution a prefque toujours des fuites funeftes. Une poignée de bled ou d’avoire eft le feul remède , au lieu du vin, de la bière ou du cidre, Toutes ces denrées fe trouvent aux fermes & chez les propriétaires de troupeaux. Les bergers peuvent les modifier par des matières ufuelles & équivalentes relativement au climat & aux productions. Ces réflexions excluent naturellement l'ufage des drogues pro- prement dites, La propofition eft fondée fur des raifons bien fimples. Les médicamens des chirurgiens ou apothicaires de campagne , ont fouvent perdu leur vertu par leur long féjour dans les bouriques : ils rengregent le mal. Les dofes d’ailleurs font difficiles à déterminer , eu égard aux qualités. Le plus grand nombre des fermes it éloigné des bourgades & des villes. Le maître & le berger ont rarement le rems de fe déplacer. D'ailleurs le traitement par les bonnes drogues eft trop difpendieux : le prix d’une bête feroit bientôt abforbé par les premières dépenfes d’une cure en règle. Pour peu que les fymptômes annoncent une maladie Îonoue ou incurable , telle que l’échaudure, la pourriture du foie, l'hydropiñe, &c, une colique ou des tranchées très-aigues , il faut tuer la bête pour en fauver la chair & la peau. Je ne me fuis étendu ni fur les fymptômes ni fur la définition de chaque maladie , parce que cet écrit n'eft qu'un appercu : les nourri- ciers & les bergers, pour l’ufage defquels il a été compofé , les connoif- fenc toutes par Jes termes qui les annoncent, 102 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, NOUVELLE MANIERE DE PRÉPARER LE PHOSPHORE AVEC LES OS; Traduit de l'Allemand, de M. CRELL , par Madame PICARDET, de Dijon. La préparation du phofphore , un des produits les plus curieux de la chimie , a été rendue plus facile & moins difpendieufe par la décou- verte de M. Gahn. On fait diffoudre dans l’acide nitreux de la corne de cerf, calcinée à l'ordinaire; on précipite de la diflolution la terre calcaire par l'acide vitriolique ; la liqueur filtrée, on en fépare l’acide nitreux par la diftillalion ; après cela , l'acide phofphorique reftanc, mêlé avec la pouflière de charbon , donne le phofphore. J'ai répété certe expérience , ainfi que plufieurs autres Chimiltes , & elle a toujours eu le même fuccès. M. Gahn , M. Poulletier & particulièrement M, Nicolas , emploient l'acide vitriolique pour diffoudre les os & dégager lacide phofphorique (1), ce que le premier n'approuve pas ; même dans la dernière méthode , parce que la croûte félénireute empêche ation de l'acide vitriolique: on peut cependant atteindre fon but , & M. Wiegleb regarde mème ce procédé comme le plus avantageux. Ces procédés ne font cependant pas les feuls pour obtenir le phof- phore des os; la chimie offfe plus d’une voie pour remplir le même objet. Je vais en indiquer une qui a aufli fes avantages & qui fournit un nouvel exemple de cette verité répétée dans Les ouvrages des Pbilo- fophes, que chaque pas décide de nouveaux progrès , & qu’une décou- verte en amène toujours plufieurs autres ; quelle que puille être la valeur de la méthode que je propofe, elle tient immédiatement aux nouvelles découverres de M. Schéele. J'ai fait connoître comment M. Schéele étoit parvenu à décompoler la mine de fer limoneufe naturelle { w’af/er Lifen ) ,en la faifanc bouillir avec l’alkali fixe & formant ainfi un phofphate alkalin. Les Chimiftes avoient été détournés de tenter cette décompofition , parce que le phlogiftique n'enlève pas plus l'acide phofphorique aux alkalis fixes qu’aux terres mêmes , & que l'acide phofphorique étant le plus fixe au feu , ne peut être féparé de l'alkali par aucun autre , & décompofe même les vitriols alkalinss Cependant M. Schéele a fait cefler cet obftacle en (x) Je remarquerai en paflant que M. W’eingartners, Apothicaire à Kemnaht , prépare le phofphore en grand, probablement par ce procédé ; qu’il le vend trois forins du Rhin , l'once , & fournit très-promptement tout ce qui lui en ef demandé, —* SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 103 apparence fi infurmontable ; en employant les doubles affinirés &c formant d’abord du phofphate mercuriel par le mêlange du nitre mer- curiel & du fel neutre donc il a été parlé précédemment. De la même manière , on décompoferoit le phofphare de Éude , appellé /e/ prouflique, que l'on retire de l'urine en même tems que les autres fels qui lui fonc propres. Éonfidérane que le phofphate alkalin peut être décompofé par ce fel métallique , & que ce phofphare alkalin fe trouve naturellement dans l'urine ( comme le fel de M. Prouit }, il me vine dans l'idée que d’autres fels métalliques pourroient exercer la même action ; je vis d'un coup-d’œil la raïfon pour laquelle l'illuftre Margraf, cet obfervateur fi exact , ajoutoit du muriate de plomb ou du muriate d'argent à l'urine réduite en confiftance d'extrait, & aflüuroit que par-là il avoit toujours obtenu plus de phofphore que lorfqu'il n'employoit point de muriate de plomb ; quoiqu'il avouât franchement qu'il ne favoit pas comment cette addition étroit utile, D'après une femblable analogie , l’acide muria- tique ne devoit-il pas s'unir à l'alkali minéral, & l’acide phofphorique au plomb ? mais aufli-tôt que le phlogiftique de la pouflière de charbon commençoit d’agir fur ce fel métallique, le plomb fe révivificit , & l’acide s'uniffant en même-tems avec le phlogiftique, s'élevoit à la diftiliation. Dans mes précédentes expériences fur lacide phofphorique desos , il étoir tout naturel de penfer à en faire un phofphate alkalin, & eafuite À le décompofer ; il étoit vraifemblable que l’on devoir réuflir | leur compofition étant analogue 3 celle de la félénite. Je calcinai en conféquence des os jufqw’à ce que roure la partie huileufe en füc détruite, & cependant de manière qu'ils fuflent encore noirs. Je les pulvérifai , j'en méêlai deux parties avec trois parties d’a/kali du tartre. Ce mélange exigea un degré de feu affez confidérable avant de prendre une fluidité convenable, pourtant toujours un peu épaifle, Je verfai la mafle noire fondue & la laiflai repofer vingt- quatre heures ; environ douze heures après , elle commença à attirer un peu d'humidité, cependant pas autant , à beaucoup près , qu'une pareille mafle alkaline, > Je fis diffoudre cette matière dans l’eau diftillée à l’aide de l’ébul- lition , & je filtrai la liqueur; il refta fur le papier une terre noirâtre qui fit une vive effervefcenre avec les acides, & quand elle fut com- plerrement difloute , la liqueur n’avoit plus de faveur acide & verdifloit Je firop de violerte, au lieu de le rougir ; c’étoit donc une terre calcaire & non une terre animale, : » La diflolution de la mafle alkaline dans l’eau fut encore faturée d'acide nitreux , jufqu’à faire rougir légèrement le papier bleu; J'y verfai enfuite goutte à goutte de la diffolution nitreufe mercurielte faturée jufqu'à ce qu'elle n'occafionnât plus de précipité, Ce précipité édulcoré fur ao4 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; mêlé avec la pouflière de charbon & féché ; il pafla d'abord à fa. diftillation du mercure coulant, & le feu ayant été augmenté, il vine du phofphgre. NS I n’y a que la méthode de la féparation par l'acide vitriolique qui puiffe difputer avec celle-ci pour la célérité & l’économie, mais la première ne. donne point de fels phofphoriques purs , ils font au contraire toujours mêlés de beaucoup de parties étrangères. Rouellé (1) avoit déjà remarqué que la matière faïine phofphorique des os ne donnoit pas autant de phof- phore que l'acide phofphorique retiré du phofphore même, ou que le fel reftant après la difillation de l'urine ; ce qui pouvoit venir de la félénice qui y étoit encore mêlée. M. de Morveau (2) y a aufli trouvé un peu de gypfe ou de terre calcaire. M. Prouft (3) a prouvé que l’acide concret, retiré des os par le procédé le plus avantageux , recéloit néan- moins toujours une très-grande quantité de terre calcaire , &de ce qu'il appelloit fel perlé ; c'eft pourquoi il avertit de ne pas conclure de fes propriétés, les propriétés du vrai & pur acide phofphorique. Toutes les parties étrangères mélées, font entièrement fépatées & ne peuvent plus nuire lorfqu'on décompofe le phofphate alkalin par le nitre mercuriel ; & même , lorfqu'on emploie le dernier par excès ( ce qu'il eft facile d'éviter), il ne peut en réfulrer aucun inconvénient, foit parce qu'il eft emporté par les lavages , foit parce que l'acide & le mercure s'élèvent également à la diflillation. On peur ajouter que l'acide pholphorique , par fon union avec la terre métallique , eft divifé en parties très-fubriles & difpofé par-là à recevoir le phlogiftique dans tous les points, ce qui ne peut avoir lieu dans la palvérifation méchanique du fel phofphorique , à quelque degré qu’elle foir portée, parce que, de cette manière , l’acide n’elt jamais réduit à fes élémens acides, Pour ce qui regarde l'économie , les os & Palkali ne font pas forts: chers , il.n'y a que le nitre mercuriel , mais il n'eft pas entièrement perdu , puifque jai retrouvé le métal dans le récipienr, On ne doit donc faire érat que de l'acide nitreux, & même il n'eft pas abfolument en pure: perte , car fi on travailloit en grand, on pourroit encore tirer parti de Ja liqueur qui furnage le précipité mercuriel, & en retirer le nitre par l'évaporation, ! Il eft vrai qu'on eft obligé de préparer foi-même le nitre mercuriel , parce qu'il n’eft pas dans le commerce , & cela me donna l’idée d’eflayer le muriate mercuriel corrofif pour cette opération , en y changeane quelques circonftances : je pris en conféquence la leffive donc il a été pa:lé précédemment ; ( c’eft-à-dire la diflolution des os pulvérifés , (1) Journal de Méd. O&obre 1777. (2) Elémens de Chimie, &c. tom:,3 , page 117. {3) Journ. Phyf Février 1781, page 145. coulés SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 10 coulés dans le creufet avec l’alkali), & après l'avoir filtrée, je faturai l’alkali furabondant avec l'acide muriatique , jufqu'à ce que le mélange rougit un peu le papier bleu. J'y verfai pour lors la diffolution de muriate mercuriel corrofif , dans l'eau diftillée. Au premier inftant , il ne parut aucun changement , mais bientôt le mélange fe troubla, IL devint de plus en plus laireux & il fe forma un précipité, ce qui arriva plus promptemient , lorfqu'on fit digérer le mélange & évaporer ua peu de la liqueur. Le précipité reflembloit abfolument à celui obtenu par le nitre mercuriel ; feulemenc il ne fe forma pas fi promptement que le dernier. £ Tout n’eft pas encore épuifé fur la meilleure préparation du phofphore & la moins difpendieufe ; je publierai dans la fuite mes idées fur ce fujer, avec plus de détail. REMARQUES pu TRADUCTEUR. Les auteurs des élémens de Chimie , de l’Académie de Dijon , avoient déjà eflayé de décompofer les os en les pouffant à la fufon avec l'alkali, & ils avoient obfervé , non-feulement que la leflive tenoit du phofphate alkalin , mais que la terre reftée fur le filtre failoit effervef= cence avec les acides, commeune pure terre calcaire (zome LIT, p, 120 & 127 ). Le procédé de M. Crell a été répété à la féance du cours public de l'Académie de Dijon, le ÿ Mai dernier ; M. de Morveau, en l’annonçant , fit voir que les phofphates de potafle & de foude étoiene fur le champ décompolés par l’eau de chaux , & qu'ainfi Bergman avoit eu railon de placer le calce avant les alkalis fixes dans la colonne des afñnirés de l'acide phofphorique ; il avertit cependant qu'on ne devoit pas fe prefler d'en tirer des conféquences contre le procédé de M. Crell, parce que la décompofition des os pouvoit fe faire , comme celle du fpath-fluor, par affinité double , lorfqu'on employoit un alkali faturé d'acide méphitique. En effet, quoique M. Crell ne s'explique pas à ce füjer , il eft aifé de juger que fon alkali n'étoit pas cauftique , puifque dans fon opération , a terte reftée fur le filtre ft efférvefcence avec les acides. C’eft donc une condition , & une condition effentielle, à ajouter à fon procédé, ; Les os calcinés au noir ayart été fondus au creufet avec le méphite de potafle, la leflive du réfidu fe trouva effectivement tenir du phofphate alkalin , puifque l’eau de chaux la rendit fur le champ laiteufe , quoi- qu'on eut eu la précaution de faturer d'avance tout l’alkali furabondanc par le vinaigre diftillé. D'un autre côté, la terre reftée fur le filtre ; bien édulcorée , fie Tome XXIX , Part. II, 1786, AOUT, Q 106 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, effervefcence avec l'acide nitreux ; ce qui démontroit qu'il y avoit eu décompofition & que la terre bafe des o$ avoit repris & confervé l'acide mépbhitique de l’alkali. Cependant une autre expérience prouva que la dé- compofition n’avoit pas été complette, car la diflolution nitreufe de certe terre fût auffi-tôt troublée par l’addition de l’eau de chaux. Il y reftoit donc de l'acide phofphorique qui n’avoit pü être enlevé par l'eau bouillante, ou pour mieux dire, qui n'avoic été rendu libre que par l'action de l'acide nitreux. M. Crell ayant écrit à M. de Morveau , depuis la publication de ce mémoire , que l'on pouvoit décompofer le phofphate alkalin auffi bien par le vitriol de zinc que par Le nitre mercuriel , & plus économique- ment , l'expérience en fut faire à la féance fuivante fàr quatre livres d'os calcinés fondusavec l’alkali, & le précipité de phofphate de zinc traité dans la cornue avec la pouflière de charbon ; il fe révivifia une très- grande quantité de zinc qui s'éleva d'abord au col de la cornue, & qui tomba enfuite en grenailles jufques dans l’eau du récipient ; mais à peine trouva-t-on quelques grains de phofphore. Cela peut faire penfer que lacide vitriolique ; devenu libre par la réduction du zinc, s'eft Oppofé à la combinaifon de l'acide phofphorique avec le phlogiftique, ou qu'il a pu décompolfer le phofphore à mefure qu'il fe formoit ; dans l'un & l'autre cas , les vitriols métalliques ne doivent pas être employés dans cette opération, & pour tirer parti de la méthode de M. Crell, il faut revenir au nitre mercuriel. On pourroit encore eflayer , pour la décompofition de la leflive, les muriates métalliques | & particulière- ment le muriate de plomb, le moins cher de tous, & que l’on ‘fait d'avance, par les expériences de Maroraf, n'être nullement contraire à la production du phofphore, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS; 107 NOTIONS PRÉLIMINAIRES, Sur quelques effais concernant la Leffive de [ang & l'acide de la matière colorante ; Par M. WESTRUMB, L À leffive du fang eft fans doute le moyen le plus inceftain , dont Îés Chimiftes peuvent fe fervir pour dérerminer la quantité de fer ou de métal . quelconque dans les corps qu'ils veulent analyfer ; du moins la leffive de fang la plus purifiée n’eit jamais dépouillée de toute partie ferrugineufe. J'ai éprouvé quinze différentes fortes de cette leflive, & j'ai trouvé dans toutes une plus ou moins grande quantité de fer. Aucune n'eft parfaite- ment pure. La quantité de fer va de trois parties jufqu'à 35 fur 100. Les différentes efpèces de leflive de fang que j’ai éprouvées font les fyivan- tes: la commune , celle de Macquer , celle de M, de Morveau , celles de Baumé, de Bergman , Gioanetti , MM. Scopoli, Bragnatelli, Scheele, MM. Klaprothk, Struve, Fourcroy , & celle que j'ai trouvée moi-même, comme celle qui eft préparée avec l’alkali volatil, Parmi celles-là, celles de MM. Klaproth, Struve, & la commune, font les plus pures. Je ne réferve de publier bientôt comment & par quels moyens je me fuis affuré de ce que je viens d’avancer, Suppofons même qu’on parvint à obtenir une leffive de fang parfaitement pure, nous ne ferions pas plus avancés. On ne peut déterminer la quantité de fer qu’elle précipite, que par le calcul, ou en faifant attention au poids du précipité , ou pour plus d'exactitude par la chaux du précipité bleu. D'après Bergman il s'y trouve 1 fur $ + (Opufcul. vol. 2, dé præcipitatis metallicis ) d'après les effais les plus nouveaux de M. Gmelin (anal. 2, vol. 1785) 1 fur 4; & après M. Wieoleb ( ma col. de fes Mémoires chimiq.); & moi ( dans mes additions aux anal, ï p.) toujours 1 fur 2 parties du précipité coloré, D'ailleurs , calcinanc ce précipité, l’acide de la matière colorante fe mêle fi intimément avec le fer , qu’il ne peut en être féparé que très-dificilement , & par cette raifon on ne fauroit dérerminer fa viaie quantité de fer précipité. Cependant on pourroit y parvenir en précipitant avec beaucoup de précaution une quantité de fer dont Le poids fera connu , comme a faic M. Kirwan ( Elémens de minéralog.) & tenant compte de la quantité de lefive de fang nécefaire pour cette précipitation, afin, de pouvois galculer après cela dans les expériences fuivantes, 1. XXIX, Part. II, 1786. AOUT. OP 108 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; Néanmoins ce moyen n’eft pas sûr, & peut plus facilement induire en er eur que l’autre; il faut un tel degré d’exactitude, & des balances & poids fi juftes, qu'il eft comme impofñlible de réunir l’un & l’autre. L’acide de la leffive de fang que j'ai dit ci-deflus fe combiner intimé- ment avec les chaux des méraux , eft l'acide phofphorique. Cependant M. Schéele a démontré dans le fecond volume des plus nouvelles Décou- vertes , que la matièie colorante de la lefive de fang conffte en un acide, une matière inflammable, & de l’alkali volatil. M. Bergman a accordé à cet acide une place dans fon excellent Mémoire fur les Affinités d'éledion, & lui donne le nom d’un acide particulier ( Acidum Cerulei Berolinenfis ), Mais ce corps que MM. Schéele & Bergman regardent pour le vrai acide de la leflive, n’eft pas la même fubitance : c'eft un compofé d'acide, d'alkali volatil, & de phlogiftique. Si M. Schéele avoit examiné la chofe un peu davantege, il auroit trouvé ce que M. Sage _a avancé il y a long-tems, & ce que je viens de dire, que l'acide de la leMive & du précipité produit par elle, efl l'acide phofphorique. On a trouvé en France & ailleurs , l'idée de M. Sage peu fondée; mais j'efpère la porter jufqu’à l'évidence par les faits, ce que je dirai par la fuite. Je ne ferai cependant pas paroître mes expériences néceffaires, pour fe convaincre que tout ce que je vais dire foit plus qu’une fimple hypo- thèfe. Elles oncencore befoin d'être répétées. Néanmoins on jugera d'après Ja clarté avec laquelle je les décrirai, que ce ne fonc pas des chofes hafardées. Le Lecteur fentira la raifon lui-même pourquoi je les publie comme on les voit ici. Du refte je me réferve, pourvu que la Providence me donne de la fanté & du loifir, de répéter ces expériences & de publier leurs réfulrats plus détaillés. [y a plufieurs moyens pour fe convaincre de l’exiftence de l'acide phofphorique dans la matière colorante, Les voici: 1°. qu'on prépare fans aucune purification de la leflive de fang faturée de Macquer , qu'on la’ fafle évaporer jufqu’à ficcité, qu’on ajoute à 2 onces de cette leflive autant d'acide vitriolique concentré, mais bien pur, & 8 onces d’eau , & qu'on diftille le tour ; ce qui paflera à un feu doux, eft l'acide de la leffive de fang de M. Schéele, qui n’eft point du rout un acide pur ; c’eft un mêlange d'acide phofphorique , d'alkali volatil & de phlogiftique, comme on le prouve en le faifant pafler fur de la chaux cauftique. La mafle diftillée doit être à-peu près de 6 onces. On leflive le réfidu qui eft demeuré dans la cornue ; & on précipite avec peu d’alkali la diflolution jaune. On obrient une poudre grife rougeâtre. On diffout celle-là dans l'acide de fel marin : On fait évaporer jufqu’à ficcité, pour chaffer-la quantité fuperflue de l'acide ; on jette le refte dans une grande quantité d’eau. Le fer diflous dans Pacide du fel fe difloudra, & le réfidu fera une poudre blanche qui fé comporte comme le /ÿderum , une combinaifon de fer & d'acide SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 109 -phofphorique. La matière verte qui refte encore du rélidu de la diftilla- tion, peut êrre diffoure de nouveau dans l'acide vitriolique, & on obtiendra plus de /yderum. 2°, Qu'on prenne la même quantité de leffive de Macquer, qu'on la fafle diftiller plufeurs fois avec de l'acide de nitre, jufqu'a ce que toute la matière colorantefoit évanouie , (de quoi on s’aflure par une difolution de chaux de fer, dans l'acide du fel marin, mais pas de métal de fer ), Il ne faut jamais diftiller cet acide jufqu’à ficcité, car on rifque dans ce cas, que tout s’enflamme avec explofon, & que la cornue & le matras foient brifés. Si le fel eft privé totalement de fon inflammabilité, on verfera fa diflolution dans une diflolurion bien foible de vitriol de mars, ou de chaux de fer dans l'acide de fel, on obtiendra de même du /yderum bleuâtre, par le vitriol de mars, & dans le fecond cas du /yderum Henc. 3°. On verfe fur 2 onces de bleu de Berlin le plus pur, 12 onces d’eau & 2 onces d'acide vitriolique, & on fait diftiller 3 onces du plus volatil; on obtient dans le matras ou récipient l'acide de la lcflive de fang de M. Schéele. On filtre le réfidu, & on le précipite par de l’alkali. Le pré- cipité eft enfuite diflous dans de l'acide de fel marin ou de vitriol , & au refle on opère comme au N°. 1. On obtiendra pareillement du Jyderum. 4°. On difille de l'acide de nitre fur du bleu bien pur , jufqu’à ce que Ja couleur foir détruite, (une once de bleu demande 8 onces d’acide nitreux fumant; cette opération demande encore plus de précaution que la feconde) après cela on fdiflous le réfidu demeuré dans la cornue, dans l'acide de vitriol, & on agir comme au N°. 1. On obtient du /yderum ÇO grains fur une once de bleu. 5°. On brüle une once de bleu : le réfidu fe rediffout dans un acide, & on agit au refte comme au No, 1, & on obtient encore du /yderum. 6°. On fond ce /yderum avec de la pouflière de charbon & du borax : on obtient un régule aigre, blanc d’argenr, 7°. On fait bouillir la poudre des N°5, 1,2,3,4, 5, avec de l’alkali qui s'empare alors de l'acide phofphorique ; on précipite l'alkali avec une diffolution de mercure où de plomb. On mêle ces précipités, après les avoir édulcorés & fair fécher , avec de la pouffière de charbon, & on les met dans la cornue pour procéder à la diftillation ; avec le premier précipité on verra encore le mercure, & avec le fecond on appercevra d’abord le phofphore, ou. du moins quelqu'apparence. 8°. On fature de la chaux cauftique avec de la matière colorante : on diftille fouvent de l'acide nitreux pur fur cette chaux: ce qu'on répète jufqu'à ce qu'elle ait perdu totalement la vertu colorante; on diflout de nouveau le réfidu dans de l’acide ; on affoiblit la diffolution avec de l’eau : 110 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, on précipite le fer & le /yderum avec de l’alkali volatil cauftique de Ia lefive de fang, & on opère fur ce fluide filtré, comme avec la diflolution de la chaux combinée avec de l’acide phofphorique. On obriendra de l'acide phofphorique, comme l'ont fait voir MM, Gahn, Crell & Wiegleb ; ou on précipice d'abord par la diffolution du mercure dans l’acide nitreux cette diflolution, & on traite ce précipité comme au N°. 1. 9°. Ou on précipite quelques onces de diffolution de mercure de l’acide de nitre par une quantité à peine fufffante de lefive de Macquer, (en prenant trop de cette lefive le précipité fe diflout de nouveau ) on édulcore le précipité quon mêle avec de la pouflière de charbon. On met le mêlange dans une cornue luttée; on déphlegme & diftille. Le mercure pafle d’abord : après cela on augmente le feu , on voit bientôt le phof phore ; ou s'il y avoit peu de précipité, on appercevroit du moins des vapeurs phofphoriques dans le récipient. 10°. Cette opération réuflit mieux en faifant le précipité de mercure, No. 9, avec de la lefive privée de principe inflammable , Nos 2 & 0. Celui qui fera lui-même ces expériences fe convaincra de l’exiftence de Pacide phofphorique dans la lefive de fang, dans la matière colorante & le bleu de Berlin. Il verra aufi, d’après les effais des autres & les miens, (Nouv. Découv. vol. 12, pag. 137) que les huiles effenielles, les huiles grafles , les huiles animales, les huiles des plantes, la partie luifante de la fuie, le charbon , (Nouv. Découv. vol. 11, page 9$ ) principalement les derniers, donnent une bonne leflive de fang., quand on leur ajoute de l’alkali volatil , ou en les brûlant avec du fel de leflive. Il fera étonné, ainfi que moi, que l'acide phofphorique fe trouve fi généralement, & il fera convaincu qu’il joue un rôle plus qu'ordinaire dans les phénomènes phyfiques les plus importans du feu, de la lumière, de l'inflammation & de la combuftion, "1 SE NCG'ONIDIE LC EST RE DE M L'ABBÉ FONTAN A, A M INGEN-HOUZ, Médecin de Sa Majeflé Tmpériale, Monsieur, ; ï Vous êtes difficile à contenter. Accoutumé comme vous êtes à examiner la nature avec ces vues qui vous font propres, & qui vous font tane SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, ‘11 d'honneur, vous auriez défiré que dans ma première Lettre fur la décom- pofition de l’eau , j'eufle cherché à déterminer les effets d’une chaleur conftante, & qui eut été celle deil’eau bouillante. Puifque vous le fouhaitez, je le ferai bien volontiers ; mais ne vous attendez pas d’avoir à ce degré de chaleur des réfulrats bien nouveaux & bien brillans, & qui puiflent fixer l'attention d'un Philofophe comme vous, | Il eft comme impollble d'entretenir ls même degré de chaleur dans un tube de métal pofé fur des charbons ardens. 11 eft encore très-difficile d’y parvenir lorfqu'on fe fert d’un bain de fable, comme j'ai fait dans ma première expérience. Vous en fentez aflez la raifon. J'ai donc été nécellité à avoir recours à l'eau , ou à quelqu'autre fluide capable d’éprouver un plus grand degré de chaleur au degré de l'ébulli- tion, fi je voulois employer plus de 80 degrés de chaleur; mais craignant de perdre mon tems & de vous faire perdre le vôtre en me lifanc , fi je tenois mon tube à une chaleur au-deflus de celle de l’eau bouillante, je me fuis reftreine à l’objet de votre demande, Voici mon procédé: J'ai fait fouder un petit vafe de laiton, long de quatorze pouces, large de dix, de la hauteur de huit, à la moitié de mon tube de fer, de manière que le tube qui pafloit par ce petit vale y éroit plongé dans l'eau au moins de trois pouces deflus & deflous. J'appliquai le feu fous ce vale, après m'être afluré que mon appareil ne pouvoit donner aucun paflage à l'air extérieur. L'eau du grand vafe éroit au niveau de celle du tube recourbé du refrigérent qui condenfoit la vapeur ; & ce tube plongeoit plus de fix pouces dans l'eau du grand vafe. A peine la chaleur fe fut-elle communiquée à l’eau du petit vafe , que l'eau s'abaiffa au-deffous de fon niveau dans le fiphon, & continua de defcendre jufqu'à ce que la chaleur étant de 63°, il fortit du tube environ un quart de pouce d'air qui fut reçu dans le récipient. La Table fuivante marque les degrés de chaleur de l’eau , les intervalles de tems, l'ai forti, & la quantité d’eau qu'on laiffoit comber dans le tube, D Tems. Tire 63 800 68 35 70 40 74 46 77 so 80 60 80 30 80 40 80 $0 80 60 80 10 8 80 13 80 18 80 23 8a 28 so 35 80 40 180 45 8a so 80 55 80 6a 80 II 9 80 30 80 40 80 47 80 2 80 $7 81 12 6 81 15 82 25 82 37 82 43 Air He le wls His wlm O +ix wi= o o O ju ++ oi ol © ul oj+ © O ju pin. © ol4 cols Sim o ve olm of om o Gouttes Heur. Min.| pefant.| d'eau. o ” La quantité d'air forti de l’appareil par la feule a@ion de la chaleur , eft environ de deux pouces & demi. Voyant qu’en faifant tomber peu d’eau, il ne fortoit point d’air, je me déterminai à en faire pañler un gros à chaque fois , comme on le voit ci-deflous. Je m'apperçus que l’eau qui fortoit, correfpondoit à-peu-près à l’eau qui entroit, & pour m'en aflurer, je ne laïl- fois pafler que feize gouttes d’eau. En effet il ne fortit plus d’air, mais il fe tint plus bas qu’à lordinaire, dans le tube recourbé. 11 fortit peu d’air, mais il étoit très- bas dans le fiphon recourbé, L'air du fiphon étoit toujours au-deffous du niveau, & faifoit des ofcillations, J'ouvris alors le robinet du condenfa- teur & fis tomber l’eau goutte à goutte, fans qu'il entrât d'air extérieur; }'obfer- vai que toute l’eau qui tomboit, pafloit dans le tube & diflilloit comme à l’ordi- naire, Je mélai du fel à l’eau bouillante , & la chaleur monta à 81 & 82 degrés, mais les réfultats furent toujours les mêmes, comme on le-voit dans la table. ES De SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 113 De toutes ces expériences faites avec la plus grande exactitude , on peut conclure que la chaleur étant de 80 , 81 ou 82°, il ne fort pas des tubes une quantité fenfible d'air, lorfqu'on y laifle comber feulement 8 à 10 gouttes d’eau chaque fois, & qu'on ne l'y laiffe pas accumuler, quoique l'eau fe trouve au-deffous du niveau dans le fiphon ; mais lorfqu'on fait tomber une plus grande quantité d'eau, de manière qu'elle occupe un plus grand volume que celui de l’eau du fiphon, alors il fort de l'air en raifon de la différence de ces efpaces. Si on fait pafler par le tube une plus grande quantité d'eau , comme deux gros chaque tois, alors il fort plus ou moins d’air, mais non pas toujours en même quantité, parce qu'il faut que cette eau introduite ait un rapport certain avec celle du fiphon qui baigne dans l’eau du grand vafe, pour pouvoir chaffer l'air. Vous devez donc regarder comme certain qu’en ne faifant paffer que quelques gouttes d’eau dans le tube, elles ne peuvent chafler une quantité fenfble d’air,& qu'en en faifant pañler beaucoup, elles chaîleront de l'air en raïfon de leur volume. Ainfi il eft sûr qu’à la chaleur de l’eau bouillante on n’obtient que quelques pouces d'air qui eft l'air atmofphé- rique contenu dans les tubes , lequel dans notre expérience n’a été qu'a 3 pouces ; & après avoir fait pafler plus de 16 onces d’eau dans le tube ; on a obtenu 9 autres pouces d'air, qui eft à-peu-près le volume d'eau employé, Regardez encore comme certain que par cette méthode on ne décom- pofera jamais l’eau , & qu’on n’obriendra point d'air, excepté une très- petite quantité de celui qui eft contenu dans le tube. On ne réuilira pas mieux à décompofer l’eau en fe fervant de vailleaux de porcelaine, de cuivre, d’étain, ou de toute autre matière. J'ai répété en dernier lieu l'expérience avec une recorte de porcelaine dont le bec étoit recourbé. À fa partie fupérieure il y avoit un robinet pour y faire tomber de l’eau à volonté. J'ai obfervé maintefois qu’à la chaleur de l’eau bouiliante , ou même fupérieure , il ne fort pas une plus grande quantité d'eau des vafes de porcelaine que des tubes de fer ; que l'air qui fort eft toujours celui des vaiffeaux, qu'après qu’eft forti tout celui qui eft chaflé par la chaleur , il en fort quelquefois encore une portion par l'action de l'eau réduite en vapeurs ; mais à linftant que finit l'expérience, & que la retorte cefle d'être échauffée , l’eau y entre avec d’autant plus de force, que la chaleur a été plus grande. Ces expériences faites dans des vafes de porcelaine où il n'y a ni luts ni foudures , font plus faciles & plus sûres que les autres, parce qu’on ne craint aucune communication avec l'air extérieur. L'eau qu’on introduit dans le tube & qu'on ramafle dans le réfrigérent , doit néceflairement chaffer un volume d'air égal au fien. Ainfi une livre d’eau qui eft égale à environ 16 pouces cubiques, chaflera 16 pouces Tome XXIX, Part, II, 1786, AOÛT, PB 114 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, cubiques d'air. Si on remet dix fois cette même eau dans le tube en délutant chaque fois, on retirera 160 pouces cubes d'air, lequel fera toujours l'air extérieur. Si ces réfultats auxquels vous vous atrendiez , ne nous apprennent rien de nouveau, ce n'eft pas ma faute: vous avez voulu les connoître, Il ne faut pas en accufer la nature, qui n'eft jamais ftérile lorfqu'on la confulte bien, Ce degré de chaleur ne fait rien autre que ce qui fe pafle journelle- ment dans nos cuifines. L'eau fe réduit en vapeurs , & les vapeurs en eau, C'eft-là toute la phyfique du cuifinier , & vous feul avez pu me rendre cuilinier pour cette fois. MÉMOIRE SUR UN BALANCIER DE PENDULE A SECONDES; Par M. GRENIER. M. GRENIER , Horloger à Rouen , a toujours défiré & efpéré de parvenir à donrer aux pendules une jufteffe parfaite ; parmi le grand nombre de tentatives qui ont été faites , la conftruction-du balancier inventé par Jean Ellicot, horlozer anglois, doit être diftinguée comme étant très-bien conçue. Néanmoins l'oubli où elle femble tombée., eft un puiflant préjugé contre fa bonté. M. Grenier.en:a inventé & effayé plufieurs nouvelles , fans fuccès fatisfaifants. Ces travaux & les dépenfes qu’ils ont occalionnées , n’ont pas été en. pure, perte ;. ils lui,ont valu des connoiffances ; fans lefquelles on ne pourroit atteindre à la perfection. Ces connoiflances lui révélèrent les vices des conftructions qu’il avoit étudiées. Il fe crut afluré de trouver une conftruétion aflez fimple & excel- lente, en fe rapprochant de celle d'Ellicot, Son plan fut bientôt fait 5 l'exécution fuivit de près. | . Le nouveau balancier étoit prefque fini , lorfque M. G, eut connoif- fance de l'annonce qui fut faite dans un Journal , d’une pendule donc la juftefle étoit atteftée par M. Mayer , aftronome de Manheim , dans une lettre de ce’Savant , imprimée en langue allemande. . C’étoic la feule pendule que, M. G. eut. jamais entendu citer comme parfaite. Il fc chercher la lettre.allemande , dont à force de recherches , long- temps infruétueufes , il obtint enfin un, exemplaire. ,, La lettre fut traduite. Elle apprenoit que M. Chriftian Mayer avoit examiné la marche de cette pendule avec coute l'attention & la fagacité LEEDS SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 115 poñibles, Il donne les réfultats de fes obfervations, dit peu de chofe de la conftruction de cette pendule & de fon balancier; mais ce peu fufñc pour ne pas laifler de doute que ce balancier ne foir précifé- ment celui d’Ellicor. M. Mayer, qui n'avoit pas de connoiïflance de la conftruétion d'Ellicot , paroît attribuer l’invention du balancier de fa pendule , à horloger qui l’a faite. Le célèbre M. Maskeline s’étoic bien voulu charger de la faire exécuter 3 il avoit choïfi pour cet effet M. Arnold , horloger anglois , dont ce choix fait un grand éloge. L’échappement eft celui de Graham ; les palettes de l'anchre font formées de diamans taillés en table ; les pivots des roues tournent dans des trous percés dans des rubis durs ; ainfi l'huile n’eft point employée dans cette pendule , digne du Souverain , qui veut fournir fon Obferva- toire de Manheim d’inftrumens exquis. Cerce pendule eft d’une grande juftefle. Les-obfervations qu'en a faites M. Mayer, depuis le 1 feptembre 1779 , jufqu’au 10 janvier 1780 ; prouvent que fa plus grande variation journaliere a été d’une feconde, & que les limites des variations ont été une feconde en retard , & -environ üunätiers de feconde en avance; que durant cet intervalle, le thermomètre de Réaumur a varié de 15 degrés & 1 quart. Ces petites variations de la pendule ne paroiffent pas avoir fuivi proportionnelle- ment celles du thermomètre. La lettre de M. Mayer n’a ‘pas découragé M. G. Il a achevé fon balancier , & l’a adapté à une pendule appartenante à un fa- vant Aftronome , qu'il ne peut nommer ni défigner fans fa per- million. Cet Aftronome a obfervé cette pendule pendant plus de quinze mois. La variation journalière n’a pas pañlé huit dixièmes de feconde. Elle a donc été moindre que celle de la pendule de M, Mayer, Cette variation de 0,8 fecondes , deviendra encore moindre, & peut-être nulle, au moyen d’une correction dont la néceflité a été récemmert xeconnue, $ } On défire , fans doute, favoir quelles font ces connoïffances fi im- . portantes ; acquifes, par M. G. Mis si Première connoïf[ance ‘effentielle:- La première eft que la fimple approche ( fans aucun contaét ) de deux pièces de métal , dérange l'ordre de leur dilatation. En 1780 , M. G. a tait voir à MM. les Commiflaires que l’Académie de Rouen avoit nommés pour l'examen d’un balancier ‘de pendule de fon, inyen- tion, que la lentille’ de ce balancier , rendue immobile à épreuve de l'étuve , ceffoic de l'être lorfqu'on fufpendoit une barre de fer à deux Tome XXIX, Part. II, 1786. AOUT.,. Fe 16 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, lignes de diftance de la verge du balancier , & reprenoit fon immobi- lité lorfqu'on retiroit cette barre. On pourroit, en répérant & variant beaucoup cette expérience ; apprendre à quelle diftance une pièce de métal cefleroit d'influer fur la dilatation de fa voifine , & la caufe de cet effet. M. G. ne peut fe livrer à ces recherches ; il a feulement conclu de cet effet bien conf- taté , qu'il feroic bien d’écarter les unes des autres , autant qu'il feroit poñlible , les diverfes pièces de métal dont eft compolé le balancier. Il tient les, poids même de la pendule éloignés du balancier ; quelqu'un lui a dit avoir remarqué que l'approche du poids d'un pendule de [a verge de fon balancier , altéroit la jufteffe de cette pendule, Seconde connoiflance effentielle. La feconde connoiffance néceffaire à avoir, eft que pour qu'un ba- lancier donne la jufteffe à une pendule , il ne fufñt pas que le centre de la lentille foit immobile , & conferve invariablement fa diftance du point de fufpenfion , malgré les changemens de température, M. G. fait cela depuis long-temps 3 ce qu'il ne fait que depuis peu eft le moyen de reconnoître de quelle quantité la lentille d’un balancier doit s'élever felon la variation de la température , & de produire précifé- ment cette élévation , qui n’eft pas la même pour des balanciers différens. Néceffité de l'épreuve de l'étuve, Il eft indifpenfable de faire fubir au balancier l'épreuve de Pétuve ; dans laquelle on tend à rendre le centre de la lentille immobile, Cette épreuve fert à s’aflurer de la jufte proportion de groffeur , entre les barres de fer & celle de cuivre, de la verge du balancier. Plus une barre eft grofle , plus elle eft lente à fe pénétrer de chaleur; & à fe dilater. Dans un balancier , la dilatation du cuivre fert à corriger l'effet de celle du fer : de-là fuit que ces deux dilatations doivent fe faire bien enfemble. La dilatation du fer feroit baifler le centre de la lentille , fi La dilata= tion du cuivre ne.le relevoit. Si donc le cuivre eft trop gros pour fe dilater aufi promprement que le fer, le fer agiffant le premier , la lentille commencera par defcendre ; ‘& au contraire, fi le cuivre eft trop menu. On faura donc d’abord fi les barres de cuivre font trop grofles, trop menues , ou telles qu'elles doivent être. Conftruétion du balancier. La fufpenfion à couteau eft connue ; c’eft la meilleure, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 117 À la pièce de fufpenfion font attachées les barres de fer À A. ( Y. plan- che I, fig. 1). Ces barres defcendent parallèlement jufqu’à environ un pouce au-deflous du diamètre horizontal de la lentille. La barre B eft de cuivre, fon extrémité fupérieure eft un peu arrondie en boule , & ne fait que pofer contre le fond d’une petite cavité , prati- quée au milieu de la face inférieure de la pièce de fufpenfion Le bout inférieur de cette barre eft garni d’une femelle d’acier trempé. Cerre femelle eft à fleur du centre de la lentille. Les leviers CE font d'acier trempé , larges de $ ou 6 lignes , fendus dans toute leur longueur jufqu'à 3 ou 4 lignes de leurs extrémités, comme les jumelles d’un tour. La raifon pour laquelle on fait cette fente de toute la longueur du levier , eft que cela facilite le paflage de la chaleur lors de l'épreuve de l’étuve , & que cela diminue la pefanteur du levier. La largeur de cette fente doit être relle, que les barres de fer puiflent y patler librement. En G, font réfervées deux joues , defti- nées à recevoir les goupilles qui attachent les leviers aux barres de fer , & fur lefquelles les leviers fe meuvent librement. En C , on réferve . un crochet à poiate moufle , qui porte contre la femelle de Ia barre de cuivre. En D, eit une autre pointe moufle mobile fur les leviers, comme une poupée de tour. La queue de cette poupée traverfe la fenre des leviers, & y reçoit une vis de rappel , qui fert à mener la pointe D, Ces pointes C & D, & le point G , centre du mouvement des leviers, doivent être fur une même ligne droite , parallèle à la face fupérieure des leviers. Au furplus , on peut faire les leviers différemment. M. G. en a déjà fait d'une autre forme, mais celle-ci eft la plus propre à expli- quer l'effet qu'ils doivent produire. La pièce E F eft d'acier trempé, & forme entre les deux démi-Jentilles, un pont perpendiculaire à leurs faces intérieurés & à Aeur de leur diamètre horifontal. Ces pièces E F ont un repli à angle droit , par lequel on les attache à la demi-lentille poftérieure. C’eft fous ces ponts que les pointes mobiles appuient , portent & foulèvent la lentille. La lentille eft compofée de deux plaques de cuivre circulaires, de huit ou neuf pouces de diamètre , aflemblées à-peu-près comme la cage d’un mouvement , à un pouce au moins de diftance l’une de l’autre. I eft aifé d'imaginer les moyens de maintenir la barre de cuivre dans le diamètre vertical de la lentille, & les barres de fer dans le milieu de l'intervalle des deux demi-lentilles. On voit que l'extrémité C de ts barre de cuivre venant à s’abaifler ( par la dilatation) plus bas queïne s’abaifferont les points G des barres de fer , elle fera baïfler les pointes C des leviers, & élever les pointes D, & conféquemment la lentille. Il eft bon que la lentillé foit légère ; les lentilles lourdes altèrent promptement la fufpenfon & la juftefle de la pendule. Trois livres de = S T# s } ’ 18 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, pefanteur ; pour chaque demi-lentille, fuffit. On les tirera d’une planche de cuivre d'environ une ligne & demie d'épaifleur ; on les amincira en bifeau vers leur circonférence. si Quelques lignes au-deflus des points G,C, G, fe place une traverfe percée de trois trous, dans lefquels paffent librement les barres de la verge; elle fert à maintenir le parallélifme des barres; on La fixe aux barres de fer par des vis de preflion. On fixe de même une autre traverfe pareille, à la moitié de la diftance de la première, à la pièce de fufpenfion. Ces deux traverfes doivent être du même métal que la pièce de fufpenfion. Le balancier ainfi préparé, fera éprouvé à l’étuve: On obfervera qu'il eft bon que le marbre auquel on fufpend le balañcier, foit hors de l’étuve, & même à quelque diftance, comme d’un pouce où deux , car le marbre fe dilateroit, s’il fe fentoit de la chaleur de l’étuve. M. Grenier a aufh expérimenté qu'il ne faut incerpofer rien entre le brafier qu'on met dans l'étuve, & le balancier dont la lentille doit être plus élevée d'environ deux pieds que le brafier. L'épreuve en eft plus prompte & plus régulière. Le but de cette épreuve eft de reconnoître à quelle diftance des points G doit être la pointe D, pour rendre immobile le centre de la lentille, & fi la barre de cuivre & les barres de fer font dans le rapport de grofleur convenable. Le centre de la lentille rendu immobile à l’épreuve de l’étuve, fi l’on adapte le balancier à une pendule , elle avancera encore par le froid , & retardéra par le chaud. La raifon de ceci, elt que ce n’eft pas le centre de la lentille qu'il faut rendre immobile, mais le centre d'ofcillation. La longueur d’un pendule fimple, qui bat les fecondes, eft, à Paris, de 3 pieds 8,69 lignes. Plus long ou plus court , le balancier ne bättroit pas les fecondes. C'eft donc là, à 3 pieds 8 ligues de ligne du point de fafpenfion , que doit être le centre d'ofcillarion, Si donc le centre de la lentille ayant été rendu immobile, d’autres parties pefantes du balancier fe trouvent abaiffées, Le centre d’ofcillation fera aufli abaïfé, & la pendule retardera. Le moyen d'y remédier, eft de faire élever la lentille à proportion de l’'abaiflement du centre d’ofcillation. Ce feroic un problème difficile à réfoudre par calcul, que de déter= miner cette quantité d'élévation que doit avoir la lentille, mais l'expérience y peut fuppléer. On fait que fi la lentille écoit fufpendue à une fimple verge de fer, une augmentation de chaleur de 39°, au thermomètre de Réaumur , feroic alonger cette barre de la cinquième partie d’une ligne, ou de = de lignes, ce qui produiroit 20 fecondes par jour de retard de la pendule, par l'abaiflement de la lentille de cette même quantité de 0,20 lignes. “ SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 110 Confidérant que c'eft ce qui feroit arrivé, fi l'on eût fufpendu la lentille aux points G G, mais qu’en la faifant fupportér aux points D, déterminés de façon que le bras CG des leviers foit au bras G D , à-peu-près comme 11 et à18 , on la rend immobile; il ne refte qu'a appliquer le balancier en cetétat à une pendule, & obferver de combien elle retardera par une augmentation quelconque dé chaleur, Si ; par exemple, on obferve (1) qu'une augmentation de chaleur de 6° fait recarder la pendule de 3// par jour, on en conclura qu'une augmenta- tion de chaleur de 30° la feroit retarder de 15"; qu’ainfi il faut faire élever la lentille de = de lignes, pour 30° d'augmentation de chaleur, pour compenfer ce retard. Or, puifque les 18 parties qu'on a données au bras du levier G D ont déjà compenfé 20”, il n’y a qu'à alonger ce levier d'environ 1 $ autres parties, pour compenfer les 15 autres fecondes , & la pendule fera réglée. Cette méthode eft indifpenfable à fuivre, pour le premier balancier qu'on conftruira ; mais on peut s'épargner le travail des épreuves de l’étuve & des obfervations, pour les balanciers qu’on conftruira par la fuite. Il fufira de saflujectir à faire rigoureufement toutes les pièces de ces balanciers, des mêmes poids & des mêmes dimenfions que celles du premier. EXTRAIT D'UN MÉMOIRE Lu à l’Académie des Sciences, Sur la nature & la formation des Fers fpéculaires de Volyic , du Puy-de-Dome , du Mont-d'Or, Etc. Par M DELARBRE, Docteur em Médecine. EL, Es Naturaliftes qui ont vifité la province d'Auvergne, l’ont reconnue, depuis aflez de rems, pour un pays anciennement volcanifé. M. Guettard a donné à ce fujet plufeurs Mémoires. M. Defmarets a réuni fur ce point toutes les preuves dont il eft poffible d’étayer les afflertions en phyfque. Les criftaux de fer fpéculaire étant fitués fur des roches brülées , l'abfence du travail de l'eau étant très-manifefte dans les lieux où je les ai trouvés , il eft donc naturel de penfer qu'ils font des produits des (1) Ces obfervations font difficiles ; il fautles faire par les étoiles , au moyen d’une lunette à fils, fcellée à un mur, ou au moins par des hauteurs correfpondantes du foleil, très-exaétes & très-répétées, 120 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, feux fouterrains. Je conçois que ces mêmes feux ont pu: volatilifer fe fer à la manière des fels ammoniacaux, du foufre , de l’arfenic, du mêlange de ces deux derniers, dont il eft réfulté quelquefois de petits criftaux rouges , connus fous le nom de rubine d’arfenic, qu'on fait fe rencontrer, ainfi que les autres fubftances dont je viens de parler , dans la partie fupérieure des crevafles des cheminées des volcans, & même dans des gerçures des courans épais ou confidérables de quelques laves. Mais ce n'eft point aflez de préfenter une aflertion en hiftoire-naturelle, il faut l’appuyer de preuves, & les multiplier aflez pour les porter, s’il eft ofMible, à la démonftration complette. J'ofe aflurer qu'on n'auroir pas befoin de ces preuves, en examinanc fur le lieu même le fer de Volvic, du Puy-de-Dôme & du Mont-d'Or; la nature y eft, pour ainfi dire, prife fur le fair. Une defcriprion , quelqu’exacte qu’elle foit, ne porte point avec elle cette conviction dans laquelle l'infpection entraîne; ce n'eft donc qu'en faifant connoître toutes les circonftances acceiloires, en infftant fur la place, la forme, l’altération , les variétés des échantillons , que l’on peut perfuader fur leur nature & fur leur formation. J'ai donc cru devoir décrire avec foin le fer fpéculaire des différens lieux de l'Auvergne, le comparer avec ceux des autres pays auxquels il a de analogie, & fur-tout indiquer fon fite avec aflez de détail & d'exaditude pour éclairer fur fa nature & fur fa formation. Les criftaux de fer fpéculaire de Volvic , du Puy-de-Dôme, du Mont- d'Or, font des fegmens d’otaëdre aluminiforme, femblables à ceux qu’on obtiendroit en coupant un de ces octaëdres parallèlement à l’une de fes faces : j'ai rencontré quelquefois des oétaëdres complets implantés fur les lames ou fegmens d’oétaëdre dont je viens de parler. C’eft au Mont-d’Or que la fublimation du fer paroît s être opérée plus en grand & plus diftinc- tement. Quant à la forme des criftaux , on les a connus jufqu'à ce jour fous la dénomination infuffifante de fer fpéculaire , mica de fer; on les a comparés aux criftaux de fer octaëdre des ferpentines ou pierres ollaires de l’île de Corfe , aux mines de fer criftallifé de l’île d'Elbe; mais les différentes minéralifations de fer ayant beaucoup de propriétés cominunes, comme l'éclat, la fragilité, la couleur, la pefanteur, lation fur le barreau aimanté, la tranfmiflion de la commotion éleétrique , la non- diffolubilité à froid dans les acides fans production d’ai”infammable, doivent être cependant diftinguées les unes des autres , s'il eft prouvé que la nature a deux moyens de faire prendre cet état au fer, tantôt par la voie humide, tantôt par la voie sèche; ce dernier cas eft celui des fubli- mations de fer criftallifé, qu'il faudra ranger parmi les produits volca- niques. J'ai été fortifié dans ma manière de voir par M. Beflon, doht fa collection minéralogique eft une des plus belles par le choix des morceaux & SUR L'HIST, NATURELLE ET LES ARTS. - ro1 & l’une des plus intéreffantes par rapport à la gradation fuivie des morceaux d'étude qu'elle préfente aux yeux des connoifleurs. Ce favant Naturalifte m'a fourni la comparaifon à faire d'une fublimatien de fer criftallité , qu'il a détaché lui-même d’une des dernières coulées dé lave du Véfuve, avec les mêmes fublimations de ce métal des volcans éteints de l’Au- vergne. Les criftaux de fer du Véfuve font très-petits, très-minces, mais reconnoiflables. M. Faujas de Saint-Fond n’a pas balancé de fe ranger du même avis;il a cité d'après M. Beflon cette nouveauté, & j'ai le plaifir de me rencontrer avec ces habiles obfervateurs , dans le rappro- chement que je préfente de l'identité de production de différens endroits volcanifés de l'Auvergne. J'ai reconnu que les fers criftallifés du Mont-d'Or, du Puy-de-Dôme, de Volvic, ont une matrice commune. Toutes les laves attirables à l’aimant, récèlent plus ou moins de fer ; dans les laves pefantes cellulaires ou pleines, dans les bafalts, le fer mélangé par la fufion eft comme en diflolution très-étendue avec les matériaux conftituans de la lave (1). On ne le reconnoît point à l'œil , même avec le fecours de la loupe, mais il devient vifible dans la plupart des laves poreufes; dans celle de Volvic, par exemple, chaque férie cellulaire a fait office ou de cornue ou de vaifleau fublimatoire , au moyen defquels a pu s’opérer la criftallifation du fer. C’eft fur-rout dans les cheminées occafionnées par les retraits ou gerçures des grands courans des laves cellulaires ponceufes (2), que s’eft = —— (x) Cette combinaifon de fer étendu par le feu avec les matériaux des laves, me paroit être une forte de minérai de fer. Ne pourroit-on pas attribuer à la préfence de ce même fer, la pefanteur, la couleur, la folidité, la qualité fonore des laves noires, pefantes , compaétes , en tables ou en prifmes bafaltiques. Je n’ai point encore trouvé le fer fublimé dans les retraites & l’intérieur des laves pefantes , dont quelques-unes font cependant cellulaires. Je juge que les proportions s’étant trouvées convenables entre le fer & les matériaux de ces mêmes laves, il a pu en réfulter un alliage de terre &-de métal difpofé par fon degré de calcination à produire une efpèce de matte de fer que j'ai ci-deffus appellée forte de minérai. Je crois que la quantité de fer qui entre dans la compoftion de ces laves, provient principalement de la fonte des fchorls en mafle ou pierre de corne . ainfi que l’a obfervé M. de Sauflure, page 122 de fes Voyages dans les Alpes, tome premier, à l’article Digreffion fur la matière première des lav:s. Je remarque que les fchorls régulièrement criftallifés femblent avoir réfifté davantage à la füufon ; ce qui paroit dépendre de leur compofñtion & criftallifation plus pure, plus quartzeufe. . (2) J’appelle laves cellulaires ponceufes celles qui me paroïffent tenir plus ou moins du cara@tère de fufon, & des qualités particulières à la ponce ; je les crois être le réfultat de la fufon des granits , contenant beaucoup de feld-fpath & peu on prefque © point de fchorls; je renvoie à l’article Mont-d’Or des détails à ce fujet. J'ajoute ici à ce qui concerne les laves cellulaires légères, que la flru@ure , la couleur, la fria- bilité, la légèreté de la pierre ou lave de Volvic m'ont décidé à la confidérer comme étant dans l’état moyen entre les laves pefantes, poreufes, compaétes, & celles que j'appelle légères , cellulaires & ponceufes; & je comprends qu’en raifon de ce que Tome XXIX, Part, H, 1786. AOUT. 222 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, faite diftinétement la fublimation du fer fur les parois des laves ; de manière qu'on voit fur les lieux & au moyen des échantillons que j'ai portés à l'Académie , une gradation d'effet de cette même fublimarion, depuis le lieu où elle eft criftallifée régulièrement, jufqu’au terme où l'on ne diftingue plus que des impreffions fuligineufes de fuie métallique. Pour me faire une forte de théorie de cette fublimation, je concois que Je fer a été mêlé uniformément dans la lave encore contenue dans fes fourneaux , que ce qui s’exhaloit alors de vapeurs ou fuies métalliques , fe dépofoit dans les foufllures des fcories amoncelées formant le crater (1); mais la lave, celle de Volvic que je prends encore pour exemple, venant à s'écouler des foyers du volcan dans un vallon où elle s’elt accumulée de la hauteur de trente, quarante , cinquante pieds, s’eft entretenue quelque tems en fufion fous la croûte qu'on fait fe former à la fuperficie des coulées de lave; puis elle a pris des retraits approchans de ceux des bafalts, mais encore plus irréguliers & très en grand. C'eft de ce moment où la lave s’eft confolidée en mafles partielles qui ont continué d’être long-tems incandefcentes, que toutes les cellules de cette lave encore pâteufe , font devenues autant de laboratoires où le fer contenu dans cette même lave a été comme par une efpèce de refluage , foumis à l’aétion fecondaire du feu. Le réfroidiflement lent a favorifé fa criltallifation ; la communication des porofités de la lave, a facilité Le tranfport plus confidérable des mêmes fublimations de fer dans les fentes ou cheminées auxquelles aboutifloient le plus grand nombre des foupiraux profonds & ramifés qui fe communiquent. La continuité de la chaleur des émanations acides ont plus ou moins altéré la furface de ces mêmes cheminées, fur-tout dans la partie fupérieure des retraits de la lave formant la couverture, au point qu’elle eft devenue plus blanche, plus légère , plus friable, dépourvue du fer qui étoit peut-être la caufe de fon liant, de fa folidité ; elle eft rapprochée de l'état des laves ou roches volcaniques du Puy-de-Dôme & du Mont-d'Or: elle n’eft plus qu’acci- dentellement revêtue de fublimation de fer. J'ai choifi trois variérés & accidens de ces fublimations à différentes fa compoñtion tient de l’une & de l’autre ,ila pu arriver que le fer y foit contenw partie dans l’état de matte de fer, & partie fublimé tant dans l'intérieur qu'en l'extérieur de cette même lave; de manière que j'afigne toujours le fite des fers criftallifés par fublimation, dans les feules laves cellulaires ponceufes. {1), J'ai trouvé des criflaux de fer ifolés ou grouppés dans l’intérieur des fcories cellulaires ponceufes, faifant partie du revers du grand crater du Puy-de-Pariore , appelé vulgairement le grand Nid de la Poule, à la droite du Puy-de-Dôme, en allant par Clermont. Ces fcories font décolorées., friables en raifon de la continuité de la chaleur & des. exhalaifons acides auxquelles elles ont été expolées. M. Sage nous apprend qu’on peut à volonté altérer, décolorer les layes, les dépouiller de leur fer, au, moyen de l'acide marin, PE SO SE en et . SUR LHIST. MATURELLE ET LES ARTS, 123 hauteurs ; elles viennent toutes à l'appui de ce que j'ai dit plus haut; l'un’ de ces morceaux m'a paru mériter une defcription particulière. C’eft un éclat pris à la profondeur d'environ quinze pieds, dans l’un des retraits’ de la lave de Volvic : en plaçant ce morceau dans fa pofition naturelle, on voit qu’il eft revêtu par bas de fublimation de fer criftallifé, qu'au-deflus, à-peu-près au milieu , il s'eft formé une obitruétion d'une ligne & demie ou deux lignes d’épaifleur du même fer irrégulièrement criftallifé, & comme fondu pour fouder l’un à l'autre les deux parois de la fente ; il n'y a plus eu de paffage qu'à de légères & fuperfcielles fuliginofités mécal- liques , dont les impreflions ont irifé la plus grande partie du furplus de la pierre, Une fuite de cet accident très-remarquable encore, c'eft qu’en partant du point où s’eft faite l'obftrution métallique , on voit par la tranche de la pierre qu'elle eft altérée en raifon du coup de feu qui eft devenu réver- béré , & s’eft reporté avec plus d’aétivité fur la furface inférieure de cer éclat : on diftingue dans fon épaifleur la nuance différente de la lave devenue dans cet endroit blanchätre, friable, & terminée par une zone ou ligne de démarcation , des fuliginofités métalliques que le feu a chaflées de plus en plus avant dans l’intérieur de la pierre : obfervation qui doit commencer du point de l’obftruction qui fe trouve être zéro pour la pénétration de la chaux métallique qui trouvoit une iflue dans la partie fupérieure au point d’ensorgement, Aù Puy-de-Dôme. C’eft prefqu'au fommet de la montagne que font firuées de même dans les retraits d’une roche volcanique , des fublimations de fer en criftaux un peu plus épais que ceux de Volvic ; leur point d'appui m'a paru être une lave ponceufe frittée (1). Lors du retrait du froiflement dé ces roches (1) J’avoue qu'il eft difficile de prononcer : je m’étaye de plufeurs obfervations, n admettant avec M. Defmarets l’exiftence de lave au fommet du Puy-de-Dôme, il domine de beaucoup au-deflus des craters au milieu defquels il eft prefqu'ifolé ; mais n’y a-t-il point eu de crater à fon fommet? Le tems n’en a:t-il point effacé les marques difinétes> Ce qui doit déterminer à regarder comme une lave la roche friable légère du Puy-de-Dôme, c’eft que dans la plupart de fes fraêtures on diftingue dans la pâte le mélange de très-peu de fchorl & de mica & la demi- fufon des feld - fpaths que je foupconne -être précifément les matériaux principaux des layes vitriformes ponceufes; je voudrois avoir la comparaifon à faire de celles dont M. Dolomieu donne la defcription fous la dénomination de courans de ponce folide , dans fon Voyage des îles de Lipari. Je crois avoir raflemblé des produits analogues , dans Ja colleétion que j’ai faite des paffages des altérations par le feu, de 1a roche du Puy-de-Dôme, depuis fon état ordinaire de lave blanchâtre, poreufe, paffablement confiftante, jufqu’en celui de frite légère & friable tout - à - fait rapproché du caraëtère de la ponce. » M. Defmarets, page 626 d’un Mémoire qu’il a donné à l'Açadémie en 1773, Tome XXIX , Part, Il, 1786. AOUT. Q 2 124 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, : volcaniques à travers lefquelles s’exhaloit le fer, plufieurs fragmens de la même roche fe font engagés dans la fente, j’ai remarqué que c’eft alors par leur furface inférieure qu'ils ont été revètus ; je n’ai vu dans la fratture de certe roche que peu ou prefque point de fer : celle qui n’eft pas crès- voifine des cheminées fur les patois defquelles s’eft dépofé ce métal fublimé, m'a paru ne contenir de fer dans aucun des deux états dont j'ai parlé, favoir, de matte de fer ou de fer criftallifé ; aufli ne fait-elle agir le barreau aimanté, que lorfqu’elle eft revêtue ou pénétrée de ce métal. Plufeurs de ces morceaux attirent par un bout & repouflent par l’autre le même pôle du barreau. J'ai donné dans mon Mémoire le détail hiftorique de ma découverte des fers fpéculaires du Puy-de-Dôme. J'ai cité parmi les amateurs d'Hiftoire-Naturelle de ma province , ceux auxquels j'ai en partie l'obligation de mon éducation & de mon goût pour certe fcience, mon parent, M. Delarbre , Curé de la Cathédrale de Clermont, (Profefleur de Botanique au Jardin Royal des Plantes, dont mes conrpatriotes lui doivent l'établiflement : il l’a follicité & obtenu des foins du zèle éclairé de M. de Chazerat, Intendant de la province d'Auvergne ). M. Mouflier, Apothicaire de la même ville, diftingué par fes con- noiflances pratiques de Chimie, fait aufli fes délices de l'étude de l’Hiftoire- Naturelle. Au Mont-d'Or il m'a fallu à plufieurs reprifes farmonter des difficultés : incroyables pour nr procurer fur leur gangug des fers fpéculaires. M. le Marquis de Laïzer, M. Beffon & moi, nous nous fommes gliffés tour-à- tour dans l'une des déchirures de la partie fupérieure des roches volca- niques d’où fe précipite une cafcade qui a donné fon nom au ravin qu’elle a formé ; c'eit dans cette déchirure que nous avons obfervé que l'écartement ou retrait des roches volcaniques s’eft rempli d’un detritus. volcanique très-fin , devenu une forte de tripoli jaunâtre; c’eft dans cette efpèce de filon de tranfport , dû à des alluvions anciennes, que fe trouvent être entaflées & brifées pêle mêle, puis liées avec la terre que j'appelle limon volcanique, la quantité delames de fer que les dégradations récentes des eaux pluviales, des fontes de neige , l'alternative fur-tout de la gelée & du dégel, déblaient & entraînent aifément. . Ces fers ne font point-là dans leur terre matrice, puifqu’ils font la plus grande partie brifés; à l’aide de nos marteaux & cifeaux nous ne pûmes arra- PU. Cu M MANOU Tia OL D EMEOO IS nORNET CRT fur les différentes efpèces de bafalt, dit que certains granits qui ont été expofés à une: chaleur foible, laiffent voir à côté des points quartzeux , le feld-fpath à peine recon- noïflable ; il eft terni , exfolié, friable , & dans un état voifin de la ponce: Ce paflage eft l’une des preuves d’antériorité de la plupart des obfervations de ce favant fur ma de MM, Dolomieu, Faujas de Saint-Fend & plufeurs aurres Naturalifies célébres. Ace SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 125 A | cher que de petits éclats de laxoche, fur les parois de laquelie nous avons reconnu , après l'avoir bien nettoyé du limon volcanique, des fublima- tions dé ter comparables à celles du Puy-de-Dôme, excepté qu’eiles font plus épaifles : elles fe font taires de même dans les retraits, cheminées où foupiraux de la lave graniteufe ponceule de la cafcade (1). Ma curiofité n'étant qu'en partie fatisfaite, je rerournai là faifon luivante au Mont- d'Or avec M. Dulin, ( Docteur en Médecine } (2). Muni certe fois d’une ce ’ (1) J’appelle la lave de la cafcade, graniteufe ponceufe , parce que les maté des granits y font encore très-reconnoifiables , principalement la quantité des feld- fpaths à demi-vitrifiés ; le {chorl paroït avoir été le moins abondant, le quartz & le mica s’être frittés, avoir , à l’aide du feu, produit une lave qui repréfente encore le granit fi bien, que c’eft à s’y tromper au premier coup-d'œil, dans le cas où la lave devenue compacte a lié &enveloppé les feld-fpaths , précifément comme ils le font par une pâte de jafpe dé différente couleur dans les vrais porphires. M. Dolo- mieu , dans la defcription qu’il a donnée d’une coulée de lave qui a traverfé Catane , dit que les matériaux des granits y font très-apparens , qu'ils ont éprouvé une fufion tellement particulière qu’il faut s'expliquer , qw'ils ont dû glffer les uns [ur les autres fans fe mêler & fe confondre. Je crois pouvoir faire la feconde application des defcriptions de ce favant Naturalifle dans la comparaifon que je préfente de la coulée de lave de la cafcade du Mont-d’Or. Cette énorme mafle de cent pieds d’épaifleur s’éboule àpic, parce que les eaux en pourriffent la bafe qui dans beau- coûp d’endroits porte à faux fur un lit de cendres & de déje@tions volcaniques, que ces mêmes eaux qui filtrent des crevafles fupérieures des laves , détruifent encore avec plus de facilité. C’eft dans cette couche qu’on trouve des criffaux de feld-{path bien confervés, quant à la forme ; ils font prefque toujours maclés; ils font trèsilégers & très-fragiles à raifon de leur état fritté. La coulée de laye dont je viens de parler couronne le fommet de la haute vallée d’où fe précipite la cafcade , elle e prolonge avec d’autres montagnes partielles vers le point le plus élevé du Mont-d'Or, d’où iont defcendues vraifemblablement plufieurs coulées de lave ; les fragmens des roches que jai pris au fommet du puy de Sancy m’ont paru avoir le même caraûère vitriforme ponceux de la lave de la cafcade. Le Mont-d’Or eft teilement ruiné , que fes déchiremens ont été nommés les enfers, vu leur difpoñtion effrayante; le fite des craters eff difficile à reconnoitre, maïs on n’en a pas Befoin pour juger que c’eft de leur effort réuni qu'il eft réfulté l’entaffement & les débris tour-à-tour de ces coloffes volcaniques produits des mouvemens convulfifs ce la terre ; cette contrée dans les lieux où elle n’eft ombragée que par les forêts trifles de fapins, où le bœuf mugit comme le tonnerre , où la corneille croafle, où le hibou femble fans cefle appeler la nuit, loifeau de proie être toujours prêt à donner la mort ; cette contrée , dis-je, femble encore en deuil. (2) M. Dulin, mon refpeëtable ami, quoique d’un certain âge , & fujet aux maux de tête, a voulu fe foumettre à l’eflai, il s’eft reconnu dans l'air élaftique avoir plus de reflort lui-même ; il vint à bout de gravir la montagne dans un endroit prefque inacceflible ; après avoir fait fes preuves de courage ; qu’il nous donne en latin Fa deftription de fon voyage, le réfumé de fes judicieufes obfervations , lorfque parvenu fur le fommet des monts, il a oublié fes fatigues pour jeter un coup-d’eæif rapide autour de lui, & voir au loin Ja terre s’arrondir fous l’horifon ; tel eff le srône 126 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, corde nouée & des outils que j'avois cru néceflaires à ma nouvelle exploi- tation : à l’aide d'un levier je vins à bout de dégager les roches qui couvroient en partie la minière des fers, je me procurai deux beaux. grouppes de criftaux en grandes lames adhérentes à leur gangue ; je vis encore plus diftinétement cette fois, la cheminée où s’éroit faite cette belle fublimation ; je diftinguai profondément dans un endroit qui ne ss : 1 A 4 SRE. s’étoit pas rempli des dépôts amenés par les eaux, d'autres grouppes. de fer fpéculaire. Je travaillai vainement jufqu'à la fin du jour à faire éclater Les bords de la roche pour parvenir à les extraire; j'y perdis auffi ma peine le jour fuivant : enfin, je projettai d’en venir à bout au moyen de la poudre à canon. Cette dernière opération. ayant été jugée impra- ticable par les gens du pays à qui je la propofai , fut remife jufqu'au jour où j'eus l’occalion d'accompagner M. Beflon au Mont-d’Or ; je lui fis part de la réfolution que j'avois prife d'aller faire jouer la mine dans la roche aux fers fpéculaires ; il applaudit à mon zèle, il me reconnut intrépide comme M. de Sauflure qui gravit les Alpes avec des crochets de fon invention. IL m'a fallu guider un mineur prefque maloré lui dans la déchirure des roches de la cafcade ;la mine étant chargée , le mineur ayant déjà couru les rifques de fe précipiter, fe mic à calculer les précautions & le tems qu’il lui faudroit employer à s'éloigner ; il ne put fe réfoudre à mettre le feu à la mine. Mes intérêts étant rous différens des fiens ‘prenant fur moi d'être intrépide ou téméraire, j'ai troublé le repos de ces laves antiques éteintes depuis tant defiècles, j'ai à plufeurs reprifes fair fauter.en éclat partie de cette roche: je n’ai point vu qu'elle fût pénétrée de fer, fi ce n'eft dans le voifinage de la cheminée dont je cherchois à aggrandir l'ouverture ; plufieurs fragmens de la même roche s'étant trouvés engagés au moment du retrait de la lave, accident que j'ai déjà dit être arrivé au Puy-de-Dôme, ils ont été revêtus de fublimations de fer qui fe font dépofées de même en raifon du coup de feu & des points d'appui qui ont favorifé fa criftallifation , depuis le cas où elle eft régulière jufqu’à celui où elle a paffé par degrés à l'état de fuie métallique , qui n’a fait qu'enfumer les parois de la cheminée : dans les endroits où la chaleur a agi avec plus d'activité , où il s'exhaloit des vapeurs acides , la lave s’eft décolorée, eft devenue friable & lécère. Les plus grandes lames ou criftallifations de fer que j'ai trouvées, ontun ouce & demi de largeur fur un peu plus de dimenfion en longueur ; leur plus grande épaiffeur eft d'une ligne & demie, deux lignes ; les faces de — figuré du Créateur, fe dit alors le Philo{phe aflis fur un point du globe; le voilà prefque dans l’efpace ; mais bientôt la tête lui tourne, la grande lumière l’offufque , il aime à redefcendre dans fon atmofphère, atteste id SUR L'HIST: NATURELLE ET LES ARTS. 127 tes lames bien netroyées paroiflent à la vue fimple être très-unies, mais au moyen de la loupe on diftingue des ftries , des décroiffances contour- nées qui décèlent la juxta-pofition de plus petites lames. J'ai fai voir à PAcadémie, Les deux variétés de criftallifations en grandes lames & en petits odtaëdres détérminés , grouppés fur un même éclat de la roche ou lave graniteufe ponceufe , qui leur fert de gangue ou de point d'appui; ce même échantillon eft celui dont les propriétés magnétiques font les plus fortes. Je conclus de la difpoftion uniforme de ces différentes fublimations de criftaux de fer fpéculaires toujours obfervés fur les parois des retraits des Javes cellulaires ponceufes , qu'elles ne peuvent étre que l'ouvrage du feu. Les criftallifations fpathiques calcaires faites par l'eau, fe trouvent être réléguées dans les porofités des laves que je crois avoir été fous-marines, elles occupent une région bien inférieure à la hauteur où fe trouvent les fers fublimés. Eh! quel concours de circonftances ne faudroit-il pas imaginer pour concevoir que l’eau ait pu dans différens lieux dépofer des criftallifations métalliques adhérentes füperficiellement à des points d'appui qu'on ne fauroit regarder comme une vraie gangue, & cela fans jamais déterminer un filon. M: Romé de Lille, à qui j'ai communiqué ma defcription, a bien voulu me confier ün Mémoire qu'il vient de donner à l’Académie des Sciences de Mayence fur les rapports qui paroiffent exifler entre les criftaux d’étain & les criftaux de fer oétaëdre; ma defcription des fublimartions de fer qu'il a en partie annoncée, fe trouve comprife dans la collection de faits qu'il a recueillis, & qu'il m'a permis de citer : ne pouvant renvoyer au Mémoire de M. de Lille, qui n’eft point encore imprimé, J'ai pris le parti de tranfcrire ici ce qui a rapport à mon objet. M. de la Tourette, Secrétaire perpétuel de l'Académie de Lyon, a envoyé à M. de Lille de petits criftaux de fer oëtaëdre rrès-réguliers folitaires ou grouppés ; ils fe font formés par fublimarion dans le grillage d'une grande mafle de pyrites aüx fondéries de Sainr-Bel , près de Lyon; ces criftaux, dont les plus gros n’excèdent pas une ligne de diamètre, font noirâtres, fragiles , attirables à aimant. M. le Duc d’Ayen , en traîtant le fer avec l’acide marin, a produit de petirs criftaux de fer attirable, qui, examinés au microfcope , dit Macquer dans fon Dictionnaire de Chimie , fe montroient comme aütant de petits corps réguliers fort opaques, figurés la plupart très-exactement comme des tranches plattes de prifmes hexagonaux ; ces criffaux de fer, ajoute le même Chimifte, dont les fâcés ont la couleur & le brillant de l’acier le mieux poli, ne paroiflent point être dans l'écar falin : c’eft le fer même qui apparemment s'eft füblimé de Ja forte par l'ation du feu & des dernicres portions de l’atidë marin, 128 OBSERVATIONS SUR LAMHPSIQUE, M. Faujas de Saint-Fond , page 232 dans fa Minéralogie des volcans, parle du fer fublimé en criftaux noirâtres oétaëdres bien diltinéts dans des fcories qui proviennent des rafineries d'acier de Rive en Dauphiné. M. Pañinge, amateur d'Hiftoire-Naturelle, de Rouane, a obfervé une femblable criftallifation de fer dans les gerçures d’un grand creufet de verrerie qui avoit éprouvé l’action d'un feu long & foutenu. M. Pelletier a obtenu de femblables criftaux en traitant de la limaille de fer avec du fel ammoniac. Enfin , les expériences de MM. Fontana , Lavoifier, la Folie, Meyer de Stelin, Sage, Maret, &c. coincident toutes & prouvent que par des moyens chimiques on peut à volonté fublimer à l'aide du feu le fer dans ce commencement de calcination, ou l'obtenir en poudre noire abfolument de la même nature par la voie humide; les batticures de fer fe trouvent être dans un état à-peu-près femblable à celui de l’xthiops martial précipité par l’eau ; ce dernier fe diffout avec un peu plus de facilité dans les acides, L'efpèce de fer connu fous le nom de fer micacé e//enman , me paroït être aufh dans un état de combinaifon femblable. Il en eft de même du fer de l’île d'Elbe , à cela près d’un tant foit peu de foufre que M. Pelletier m'a afluré y avoir décelé. M. Lavoilier ayant expofé à l’action de l'eau en vapeurs dans un canon de fufil bien rouge des lames de fer, elles fonc devenues noires, brillantes, fpéculaires, caflantes, criftallines ; dans cer état les lames métalliques réduites en poudre donnent un véritable æchiops qui fe diflout fans effervefcence dans les acides ; elles paroïflent donc être comme les fers fpéculaires criftallifés par le feu des volcans, une chaux de fer qui n’a encore abforbé que la plus petite quantité poflible de bafe de l'air, Cette théorie fur l'état -du fer noir, due à M. Lavoiñer, differe de celle de M. Sage, en ce que cet autre habile Chimifie regarde comme un acide particulier , qu’il défigne fous le nôm d'acide igné - phlopiftique , le principe que M. Lavoilier appelle bafe de l'air ou oxygine. On ne fauroit fe défendre de comparer des faits aufli analogues. Chacune de ces obfervations s’éclaire mutuellement , explique en petie l'opération de la nature que je viens d’obferver plus en grand, dans la defcription que j'ai donnée de la manière d’être des fers fpéculaires criftallifés des anciens volcans éteints de l'Auvergne. Extrait d'un fupplément au même Mémoire. M. Pelletier vient d’ajouter plus récemment au nombre des faits chimiques , une fublimation de fer qu'il a obtenue en traitant de La limaille de fer avec du fublimé corrofif. Il a encore produit d’autres fublimations de fer criftallifé, en appliquane un bon coup de feu à un mêlange de fel marin & de vitriol de mars : il eft u SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 129 eft refté au fond des vaifleaux une mafle fondue d'une pièce, une fcorie faline n'attirant point fenfiblement l'humidité de l'air ; elle eft revêtue fur toute fa furface de fer criftallifé, elle en contient dans toutes fes foufflures intérieures. M. Pelletier ayant caflé ce morceau pour que nous puifions l’examiner plus à l'aife, m'a fait le plaifir de m’offrir la moitié de cette précieufe production de l'art ; après l'avoir admirée, j'ai cherché à la rapprocher {ur tous les points de vue, des fublimations de fer opérées par la nature dans les fcories volcaniques. J'ai découvert que le fer fublimé dans la fcorie faline , attire auffi d’un côté & repoulle de l’autre le même pole du barreau aimanté : voilà donc de laimanc créé par l'art du Chimifte. Cec apperçu abfolument neuf mérite d'être fuivi , & peut conduire à l’éclairciflement de la théorie du magnétifme, qui paroît être dans ce cas-ci une modification pure & fimple de la matière de la chaleur à laquelle il femble qu'on doit attribuer la puiflance, la qualité, ou direétion du fluide magnétique communiqué à travers la cornue, au fer révivifié de la fcorie faline dont j'ai parlé. En attendant que je puifle répéter cette expérience , j’ai tâché dans mon Mémoire de réduire ce fait (qui m’a d’abord paru un phénomène ) à des données phyfiques au moyen defquelles on a expliqué jufqu’ici la qualité magnétique des fers qui fe trouvent être accidentel- fement aimantés par l'électricité, le frottement , le choc réitéré, &c. Je me fuis, dans le même Mémoire , réfervé de m'expliquer plus particu- lièrement fur la théorie que j’ai conçue du magnétifme des fublimations de fer par le feu. D'après , dis-je, de nouvelles expériences, je me propofe de concourir avec des Phyficiens & des Chimiftes d’un mérite reconnu, pour eflayer de répandre du jour fur ce point important de Phyfque, de Chimie & d’Hiftoire-Naturelle, MÉMOIRE Sur une nouvelle Machine à éle&rifer , qu'on peut regarder comme une véritable Pompe à feu éleétrique : certe Machine étant conftruite de manière que fon effet confifte uniquement à tirer le fluide eleétrique des corps , & a les éledrifer par-là négativement , ou par raréfa@tion ; Par M. ze Roy. J "AI déjà expofé tant de fois à l’Académie, la théorie des deux éleéri- cités pofitive & négative, ou par condenfation & par raréfaëtion ; j'ai fait voir en tant d’occafons , avec quel fuccès elles rendent compte des Tome XXIX, Part, II, 1786. AOÛT. 130 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, rincipaux phénomènes éle@riques , que je crois qu'il feroit abfolument Éperflu de revenir {ur cette matière: je me contenterai feulement de faire remarquer à la Compagnie , qu'il y a déjà près de trente ans que j'ai dit & fait voir que fi l'on avoit commencé par faire de l'éleéricité poficive , ou de celle que donnent les machines ordinaires, c’étoit par un pur effet du hafard, & qu'on auroit pu également produire d’abord de l'éleéricité négative, fi, tout reftant d'ailleurs de même, on avoit ifolé le couflin , au lieu d’ifoler le conduéteur; ou qu'on eût comme Orto Guerick , fait de l'électricité en frottant des globes de foutre : j'ajourai à cette obferva- tion, que ce qu'on avoit prétendu en avançant que les phénomènes de l'életricité négative ne tenoient qu'a une éledricité plus foible, étoit non feulement fans aucun fondement, mais encore abfolument contraire aux phénomènes. En effer, je fis voir alors, ainfi que je lai fouvent montré depuis , que certe électricité étoit tout aufli forte que l'autre, c'eft-à-dire , que les érincelles des corps éleétrifés régarivement, font tout aufli vives & partent d’une auffi grande diflance que celles des corps électrifés pofitivement. Cependant, conime les, machines avec lefquelles j'avois fait ces expériences, n’avoient pas été difpofées pour faire de J'elericité negative uniquement, j'ai penfé depuis, qu'il feroit utile & intéreflant d'en conftruire une de façon qu’elle ne produisit que de cette efpèce d’éledrité, comme les machines ordinaires ne donnent que de Véläricité politive ; jai cru que par-là on pourroit en rendre les effets plus confidérables, & en faire plufieurs applications utiles qu'on ne Gonnoifloir pas encore , fur-tout par rapport à l'électricité médicale, Cela me paroifloit d'autant plus néceflaire , que toutes les machines, ou du moins celles qui étoient venues à ma connoiffance, & avec lefquelles on avoit prétendu faire de l’éleétricité négative pour électrifer des malades, étoient, il faut le dire ,trop mal conftruites, pour en donner qui eût quelque degré de force, & qui fût propre par-là à nous faire connoître ce qu'on pouvoit attendre de cette électricité appliquée au corps humain. Une autre raifon importante me déterminoit encore en faveur de la machine que je méditois, c'eft qu'il ne devoit y avoir, par la nature de fon effet , aucune électricité de perdue pour le conduüéteur ; au lieu -que dans fes machines ordinaires if y en a toujours , parce que ce conduéteur ne reçoit pas toute celle que le corps frotté enlève aux couflins; mais ceci demande une explication. Lorfqu'on éledrife à la manière ordinaire, foit avec un globe ,comme on le faifoit autrefois ; foic avec un cylindre, comme les Anglois le font aujourd'hui, foit enfin avec un plateau, comme nous le pratiquons atuellement , il faut, quand cette opération fe fait avec le globe ou le cylindre, qu'ils aient fait l'un & l'autre une demi-révolution ; ou à-peu- près, pour, que la partie du verre frortée par le couflin oupar la perfonne qui en fait la fonction, arrive au conducteur & Jui communique l'éleétris PR ” SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 131 cité dont elle eft chargée : or , fi ce globe ou ce cylindre eft d'un certain diamètre , ou fe meut avec trop de lenteur, il arrivera, pour peu que l'air ne foit pas bien fec , que la partie frottée de leur circonférence perdra une certaine quantité de fon fluide électrique , avant qu'elle foit parvenue au conducteur , & par conféquent que ce fera autant de moins qu'il en recevra ; cela eft fi évident ; qu'il eft prefqu'inutile de s'arrêter à le prouver : cependant je ne puis m'empêcher d'ajouter, pour montrer la certitude de cet effet , que dès que l'air eft un peu humide, on ne peut faire avec-ma machine {1) aux éle@ricités pof£rive & négative, l'extinction de ces deux éledricités l’une par l’autre; car le plateau ayant perdu, avant d'arriver au conducteur de l'éleéricité pofitive, par cette humidité de l'air , une partie du fluide électrique qu’il avoit pompé de celui de l'électricité négative (au moyen des couflins) , il fe trouve par-là , que ce plateau ne pouvant en communiquer autant au premier, qu'il en a enlevé au fecond, l'équilibre ne peut être rétabli entre ces deux con- duéteurs , & par conféquent qu’on ne peut produire l'extinction des deux éleétricités dont je viens de parler: c'eft ce que je ferai voir à l'Académie dans un moment, fur cette machine, fi le tems elt favorable ; j'y ai fait faire une petite addition (2) par laquelle on prévient facilement cet effee qui empêche la démonftration de ce phénomène, Au refte, dans toutes les machines ordinaires , à globe & à cylindre, avec lefquelles on'fait de V'éledricité pofitive, l'inconvénient dont je viens de parler eft fans remède ; & plus ces globes & ces cylindres font grands , plus cet incon- vénient augmente, Et fi les grandes machines ou celles qui ont de grands globes ou de grands cylindres, n'ont pas toujours des effets qui répondent à leurs dimenfions, c'eft en grande partie par cette railon ; car s'ils ne fe meuvent pas fort vite, ce qui eft le cas de tous ceux qu'on tourne à la main , les parties frottées perdent de leur électricité d’une manière aflez s (r) Cette machine à éle&trifer que j'ai imaginée en 1771 , & donc je lus la defcription à la rentrée de Pâques de l’année 1772 , eft décrite dans le volume de nos Mémoires de cette année ; l’ancienneté de cette date fait que je ne puis m’em- pécher d’obferver ici qu’il vient de paroïtre une machine de M. Naïrne, habile artifle de Londres, propre à produire de même les deux éle@ricités , & qui eft conitruite en général de la même manière ; elle n’en differe réellement qu’en ce qu’elle a un cylindre , au lieu de plateau qui eft dans la mienne : il me paroït en conféquence qu’on a eu tort de donner à cette machine le nom de machine à eleérifer de M. Nairne, puifque, comme on vient de le voir , cette machine eft toute femblable à celle que j'ai imaginée , fait exécuter , & rendue publique plus de dix ans auparavant. (2) Cette addition confftoit dans un fil de laiton qui s’attachoit fur le conduéteur de l'électricité pofirive , & qui s’avançant circulairement du côté des couffins, alloit prendre léle&ricité du plateau , avant qu’il eût fait fa démi-révolution , & lorfqu’il avoit feulement décrit un arc où je n’avois pas à craïndre qu’il eût déjà perdu une partie du fluide éleétrique dont il s’étoit chargé dans le frottement des couffins, To me XXIX, Part. II, 1786, AOUT, R 2 132 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fenfible avant d'arriver aux conduéteurs: il y a plus, c’eft que fouvent il eft impofñible de remédier à ce défaut , parce que dans plufeurs cas ou pour certaines efpèces de verre, quand on les fait tourner avec trop de viteffe, leur électricité diminue, parce qu’ils s’échauffent trop. En vain croiroit-on remédier à l'inconvénient dont il eft queflion, en faifant approcher davantage le conducteur du couflin, parce que dans ce cas if perdroit de fon électricité par fa trop grande proximité de ce couffin, ainfi que je l'ai prouvé dans mon Mémoire de 1753. Dans les machines à plareau, difpofées à la manière ordinaire , une partie de cet inconvénient n'exifte pas, parce que dans ces machines la partie frottée du plateau, ne faic qu'un quart de révolution avant d'arriver au conduéteur; mais auffi on retrouve ici ce qui arrive aux conducteurs, des globes ou des cylindres, qu'on approche trop près des couffins, il y a de Pélectriciré qui fe perd par leur voilinage (1). Or, la machine à plateau que j'ai l'honneur de préfenter à l'Académie, & qui eft fous fes yeux, et, par fa conftruction, entièrement exempte de cet inconvénient des machines à globe, à cylindre, &c. car au premier inftant où le frottement commence, à ce premier inftant l’éleétricité commence aufli, ou fe manifefte dans le conducteur , c’eft-à-dire , que quelque petit que foit larc qu’on fait par- courir au plateau, il fufft pour que les couflins & le conduéteur qui communique bien exaétement avec eux , Soient éleétrifés: par-là il eft évident que l'humidité de l'air ne peut fe faire fentir dans cette machine qu'autant que cette humidité peut avoir action fur le verre pour le rendre moins fufceptible d'électricité , ou fur le conduéteur pour la lui dérober plus promptement ; or, en cela elle n’éprouve rien qui lui foit particu- lier, & que n'éprouvent toures les autres. Mais il faut en venir à la defcription de cette machine que j'ai imaginée il y a déjà plufeurs années, mais qui n’a été faire que l’année paflée pour le Cabinet de Phyfque du Roi à Pafy. À Elle eft compofée d’une roue de près de cinq pieds de diamètre qui fait tourner une poulie de fx pouces de rayon ou à-peu-près , qui eft montée fur le même arbre que le plateau, & qui en eft aflez éloignée pour ne lui dérober que le moins d'électricité poflible ; ce plateau a trois pieds de diamètre , il eft porté, ou plutôt fon arbre eft foutenu par des colonnes de verre auxquelles font acolées deux autres colonnes en arc-boutans, afin de leur donner plus de force pour rélifter aux ébran- Jemens caufés par la rotation du plateau. Les couflins deftinés à le frotter à ne (x) Je dois obferver cependant , relativement à ce que je viens dé méthode qui s’efl introduite , de mettre un tafletas ciré qui part du cor :n K's’étend à une certaine diflance fur le plateau ou für le cylindre , prévient uiré Satie de la perte du fluide éle@trique dont je viens de parler; mais cet inconvénient n’en eft pas moins un inhérent à cette manière de produire l’éledtricité pofitive avec le verre, ire, que Ja . SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 133 font placés à l'extrémité de fon diamètre horifontal , & à l'oppofice de la roue qui le fait tourner ; ces couflins font portés par une forte colonne de verre , afin qu'ils foient bien ifolés ; ils font mobiles autour de leur centre, fi cela fe peut dire, afin qu’on puille les changer de polition par rapport au fens dans lequel Le plateau tourne , & par-là redonner une nouvelle force à l'électricité , quand la machine a été en aétion un certain tems , ainfi que je l'ai fufifamment expliqué dans mon Mémoire de 1772. L'inftanc où la partie frottée du plateau fort de deflous les couflins, étant l'inftant le plus critique, fi cela fe peut dire , ou le plus eflentiel pour qu'elle foit électrifée avec le plus d'avantage, ou qu’elle en forte le plus chargée qu'il eft poflible d'éledricité, & l’action du plateau tendant toujours à les faire bâiller, il y a au bord fupérieur de chaque couflin deux vis, pour qu’en les ferrant on les fafle bien appuyer dans cette partie fur ce plateau. De l’autre côté des couflins, & fur le même diamètre , on voit une pièce en forme de oriffle qui s’avance horifontalement en embraffant les deux faces du plateau , mais fans les toucher ; cette pièce porte des fils de laiton , on en verra l'ufage dans un moment; elle eft outenue par une colonne de verre , qui n'eft-là uniquement que pour le cas où on voudroit faire de l'électricité pofttive ; mais comme la machine’ ne peut donner la plus grande électricité négative, qu'en faifant cefler cet ifolement , il y a une chaïne de cuivre qu'on attache à la griffe, pour tranfmettre inceffamment au plancher toute l'électricité qu'apporte le plateau ; afin de rendre même cet effet plus afluré, la chaîne elt chargée en-bas d’un petit poids ; il eft prefqu’inutile d'ajouter que pour empêcher que cette machine ne perde de l’électricité , la corde qui la fait mouvoir eft de foie, & que tout ce qui eft en verre eft recouvert de cire d'Efpagne. J'ai fait tourner le plateau au moyen d’une roue, parcs que j'ai conftamment remarqué que-quand on les fait tourner à }: mai, non- feulement on ne leur communique pas aflez de vitefls ,; mais encor qu'on ne peut jamais les faire mouvoir aufli également ou snforméme: que quand on les fait tourner par une grande roue : je me ‘5 fervi d’un plateau, mais cet parce que je n'ai pu avoir de cylindre bies fai. d'u diamètre aflez confidérable , car je l’aurois certainement préféré, non n2° parce que les Anglois fe fervent de cylindre aujourd’hui, mais par ce cette forme eft fans contredit la meilleure de toutes; on en fentira la raifon dans un moment. Toutes les expériences nous ont £ppris que pour: tirer d'un certain verre donné , le maximum d’éledtriciré qu’il peut fournir , il faut qu'il tourne ou qu'il foit frotté avec une certaine viteffe: or , il eft évident que dans les globes & dans les plateaux, $: y a une partie qui fe meuve avec la viteffe néceflaire pour qu’elle do 2 le plus d'électricité poffible, il n'y aura que celle-là, par la forme de -:5 globes & de ces plateaux, qui jouira de cet avantage ; au lieu que dans les 134 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, cylindres, fi une fois vous avez trouvé la vicefle propre aux verres dont ils font formés, vous êtes sûr que cette witelle conviendra à toutes les parties qui feront frottées , puifqu'elles feront toutes à la même diflance de l'axe; mais en voilà aflez {ur La conftrudion de cette machine, il faut maintenant en expliquer l'effet : on le concevra fans peine. La roue faifant tourner le plateau au moyen de la poulie , les couflins qui le frotrent l'éleétrifent; mais ils ne peuvent le faire qu'en lui four- niflant une partie du fluide électrique qu’ils contiennent, ils en perdent donc à chaque initant ; or, puifqu'ils en perdent , ils en ont donc moins qu'ils n’en avoient auparavant , ou celle qui leur refte eit donc plus raré- fiée , ils feront donc éle@trifés par raréfaélion ou négativement ; mais les parties du plateau revenant après une révolution , rapportéroient aux couflins l'électricité dont elles avoient été chargées précédemment , excepté celle qu'elles pourroient avoir perdue en traverfant l'air, comme je l'ai obfervé plus haut; or, en rendant par-là aux couflins à-peu-près ce qu'elles leur avoient enlevé, ils fe retrouveroient prefque comme s'ils n’avoient pas été électrifés. La griffe dont j'ai parlé, fert à prévenir cet effet, parce que communiquant avec Le plancher, au moyen de la chaîne & du petit poids, &c. elle enlève inceflamment aux parties du plateau qui arrivent à elle en tournant , le fluide électrique dont elles éroient chargées; par-là elles reviennent aux couilins, toujours dépouillées de celui qu’elles leur avoient enlevé, & par-là font propres à leur en enlever de nouveau, & de cette manière les couflins étant fortement électrifés négativement ou par raréfaétion , font par-là dans le cas de tirer ou de pomper le fluide électrique du conducteur ou de tous les corps qui en approchent ; ainfi cette machine eft par-là, comme je l'ai avancé, une véritable pompe à feu électrique ; & il réfulte évidemment de fa conftruction, qu’au premier inflant où on fait mouvoir le plateau , à ce premier inftant, ainfi que je l'ai dit, les couflins deviennent électriques ; d’où il fuir que le conducteur avec lequel ils communiquent, eft élecrifé de même fur le champ & fans qu'il y ait la moindre éledricité de perdue, comine cela arrive néceflairement dans les machines ordinaires: or , il eft important d’obferver que ceci prouve non-feulement ce que j'ai avancé, en difanc que l'éleéricité négative n'eft pas plus foible que l'éledricité pofirive, mais encore qu’elle doit être plus forte par la manière dont on l'obtient avec le verre, puifque dans l'opération qui la produit , il n’y en a pas de perdue. L'Académie va voir quel eft le degré de force de cette machine, j'en ai obtenu fouvent, quand le tems étoit favorable , des étincelles de plus de fix pouces de long , quoique le centre du plateau & fes environs ne foient, pas garnis de cire d'Efpagne , pour empêcher le fuide électrique de fe porter de l'arbre vers les couflins, & que je n'aie pas encore employé plufieurs autres petits moyens propres à en augmenter les effets, TE OS ON SUR L'HIST., NATURELLE ,ET LES, ARTS, 137$ Je pourrois ajouter beaucoup de chofes fur cette nouvelle machine, & fur la néceflité d'adopter généralement certe. difpoftion- pour- faire de léleétricité, parce qu'il n’y en a & ne peut jamais y en avoir de perdue : mais je crois en avoir aflez dir pour faire fentir les avantages de fa conftruétion, & l'utilité dont elle peut êtré, 1°. pour électrifer des malades négativement, ce qui n’a pas encore été fait, ainfi que je lai obfervé , avec une'éléctriciré aflez forte ; 29, pour fairetmieux connoître les phénomènes des corps qui n'acquièrent l'électricité que par la diminution du fluide électrique qu'ils contenoient. EXPLICATION DE LA PLANCHE IF Cette Planche repréfente toute la machine vue-en perfpedtive, P P eft le plateau de verre. € C font les couflins avec leur reflort, C D ef le conducteur. G G lagriffe qui fert à enlever conftamment au plateau le fluide électrique qu'il a pompé des couflins ; elle eft armée de légers fils de laiton qui repofent ou flottenc fur ce plateau, pour le toucher dans un-grand nombre. de points. ) c A eft la chaîne métallique qui y eft attachée pour faire ceffer l'ifolemenrt produir par la colonne ou le fupport de verre fa S,5,5,5,5,5,5, font les fupports de verre. R R, grande roue qui, au moyen de Ja corde, fair tourner le plateau. M M, manivelles fervant à faire tourner la roue & placées fur fon arbre, non à l’oppofite l’une de l’autre , comme cela fe pratique fouvenr, mais de manière qu’elles forment entrelles un angle droit, r r, poulie fur laquelle pafle la corde, & qui eft montée fur le même arbre que le plateau; elle eft cenfée vue à travers ce plateau. L Z, levier ou mécanique qui fert à tenir la corde toujours tendue au même degré : cet effet s’opère au moyen du poids pp, qui, entraînant le levier en en-bas , fait que Je large rouleau qu'il porte, appuie de même conftam- ment fur la corde qui paffe au-deffous, & par-là la tend toujours de la même façon; fi elle fe relâche en augmen- tant le poids, on reproduit encore la même tenfon, #36 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; RE © PE LD D DT DENT, a Ÿ LE TITRE DE M GIRTANNER, Doë&eur en Médecine ; A M DE LA METHERIE: SUR LE BOUQUETIN, Mowsreur, M. Van-Berchen me reproche, à ce que vous me marquez, de m'être trompé en plufieurs endroits de mon Mémuire. La vallée d’Aoft n'eft pas, à ce qu'il dit , le lieu où le bouquetin eft le plus abondant dans les Alpes; c’eft la vallée de Cogne. Le bouquetin n’eit abondant nulle part dans les Alpes, comme je crois l'avoir prouvé , & comme on peut fe convaincre en faifanc le voyage de toute la chaîne de ces montagnes, Si j’ai dit que c’eft la vallée d'Aoft qui eft l'unique endroit où il fe trouve, & que je n'ai pas nommé Ja vallée de Cogne, c’eft que je me fuis fié en cela fur le témoignage unanime de tous les chaffeurs , dont aucun ne m'a nommé la vallée de Cogne , qui d’ailleurs vraifemblablement ne fair qu’une petite partie de la grande vallée d'Aoft; mais quelle que foir de ces deux vallées qu'habite le bouquetin, tous les faits que j'ai mis fous les yeux des Lecteurs de votre Journal ne font pas moins vrais. Selon Pallas, conti- nue M, Van-Berchen, le bouquerin fe trouve aufi en Sibérie au mont Taurus. Voilà une obje&tion à laquelle je ne me ferois pas atendu, après m'être donné tant de peine à diftinguer l'efpèce de bouquetin que j'ai décrit de toutes celles avec lefquelles on l’a gonfondue jufqu’à préfenr, M. Van-Berchen , en comparant la defcription de Pallas avec Ja mienne, & fur-rout en çomparant la figure des cornes du bouquetin afiatique avec la figure des cornes du bouquetin européen , que j'ai donnée, auroit trouvé combien la différence eft grande entre les deux efpèces, Les cornes du bouquetin afiatique ( qui fe trouve en Sibérie, fur les montagnes des îles de l'Archipel & de la Grèce) reflemblent beaucoup à celles du bouc ordinaire, Elles font arrondies , applaties & ont des afpérirés très-irrégu- lières, pendant que celles du bouquetin des Alpes ont deux arrètes longitudinales & plufieurs arrères tranfverfales fur la face antérieure , formée par ces deux arrètes longitudinales, Ces arrètes longitudinales diftinguent les ae cmt nd: CÉRMSS SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 37 * Jes-cornes du bouquetin des cornes de tous Les autres animaux connus. On peut voir les cornes de ces deux efpèces d'animaux dans le cabinet d'Hiftoire-Naturelle de la bibliothèque de Sainte-Geneviève à Paris, où M. l'Abbé Mongez, de l’Académie des Infcriptions, & Garde du cabinet de l'Abbaye de Sainte-Geneviève, a eu La complaifance de me permettre de les examiner & de les comparer entrelles, planche r , fig. 2. J'ai trouvé aufliici, au Mufèeum Briranicum , les cornes des deux efpèces de bouque- tin , & en les examinant avec foin je me fuis convaincu de nouveau que le bouquetin afiatique differe de l'européen autant & peut-être plus que le bouc ordinaire differe du chamois. M. Van-Berchen dit qu'il eft informé par une Lettre particulière , qu'on a fait venir de l’île de Chypre des bou- quetins pour le Roi d'Efpagne. Je pourrois me difpenfer de répondre à certe objection, parce qu'un fait raconté d'une manière aufi vague n’eft d'aucun poids en Hiftoire-Naturelle; mais comme la vérité une fois décou- verte fe confirme de plus en plus , je trouve dans cette objection de M. Van- Berchen une des preuves les plus fortes que le bouquetin afatique eft entièrement différent de celui de l'Europe. IL y a ici au Mufeum Britanicum une paire de cornes de bouquetin venue de File de Chypre ui reffemblent parfaitement aux cornes du bouquetin de Sibérie, décrites par M.Pallas, & different très-effentiellement des cornes du bouquetin des Alpes, en ce qu’elles n’ont ni les arrètes longitudinales ni Les arcètes tranfverfales. Le bouquetin de Pile de Chypre n'eft donc pas de la «même efpèce que celui que j’ai décrit , & par conféquent les objections même de M. Van-Berchen ne fon que confirmer ce que j'ai dit du bouquetin. Je fouhaiterois que tous ceux qui ont des doutes fur l'exactitude de mesobfervations, me les communiquailent par la voie de votre Journal; car, n'ayant point d'autre intérêt que celui de la vérité, je ferai le premier à avouer publiquement que je me fuis trompé , aufli-tôc que j'en ferai convaincu. J'ai l'honneur d’être, &c. Londres, 18 Juillee 1786. à (Tome XXIX , Part, Il, 1786. AOUT. 138 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, L EF TIRE D'EVMAIB'E R D'AOÏTDIE EL, A M DE LA" ME THME RTE; SUR LA DÉCOMPOSITION DE L'EAU. Nhonsisves J'ai l'honneur de vous adreffer quelques obfervations au fujet des réflexions que vous avez inférées dans votre Journal de juin dernier, page 442. l 1°. Le gaz inflammable que MM. Lavoifier & Meufnier ont retiré peloit onze fois moins que l'air atmofphérique : donc il étoit très-pur ,. donc l'air atmofphérique n'avoir point pénétré par le tube de fer, quelles que puiffent être les expériences de M. PAbbé Fontana. 2°. IL s’eft trouvé dans les produits un petit deficit, qui, à part les petites incertitudes de poids, qu'il eft impofhble d'éviter , ne pouvoir être dû qu’à du gaz inflammable, & à de l’eau en vapeur : les variations dans les réfultats qui pouvoient dépendre de la quantité de l’une de ces deux fubftances, ou de leurs différentes proportions ,ont été calculées avec rigueur , de façon que les modifications du réfultat général qui peuvenc dépendre de cer accident, ont été dérerminées, fans laifler aucun doute à: ceux qui ont fuivi certe expérience avec foin. 3°. L'air vital qu'on retire du précipité rouge contient toujours une: portion de mofere , ainfi que le remarque M. Adet , parce que le préci- pité rouge retient une portion d'acide nitreux , qui fe décompole , & que: la mofete entre pour plus d'un cinquième dans la compofñition de cec acide, comme il a été bien prouvé. Il n'y a donc pas befoin d'avoir recours à une introduction d'air atmofphérique , qui d’ailleurs n’a pu: avoir lieu, comme Îles produits de l'expérience le démontrent. - 4°. M. Lavoifier s’eû afluré que fi l’on tenoit long-tems de la limaille: de fer dans de l’eau diftillée , il s’en dégageoit du gaz inflammable. II n’a pas fait bouillir cette eau, parce qu'il favoit que la très-petite quantité: d'air qui fe trouve dans l’eau diftillée, ne peut qu'être contraire au: dégagement du gaz inflammable. D'ailleurs, quand le fer ne pourroit décompofer l’eau fans le fecours de la chaleur, ou de quelqu’autre affinité: auxiliaire , il n’en réfulteroit rien contre la théorie que vous rejerez. 5° M. l'Abbé Fontana a prouvé , ( Recherch. phyfiq. fur l'air nitraux ) que lesqu'on mêle du gaz nitreux & de l'air vical fur du mercure fc, * SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 139 La diminution ou l'abforption de l'air efl tres-petite ou nulle. M. Prieftley & M.Kirwan ont fair la même obfervation, ( Kirwan’s remark, on M. Cavendish’s experiments on air) ur fup. M. Monge qui a fait cette expérience depuis long-tems & fur des quantités confidérables, a obfervé qu'il ne fe dépofoit qu'une très-petite quantité de liqueur, & que lorfque Le mélange éroit fait dans de juftes proportions, il prenoit une rougeur per- manente, mais qu'il perdoit cette couleur dès qu’on ajoutoit une partie furabondante d'air vital ou de gaz nitreux, 6°. Lorfqu'on recompofe l'acide nitreux par le mêlange de l'air vital & du gaz nitreux, & qu'on fait cette expérience avec les foins convenables, on ne peut découvrir qu'il fe forme de l'air fixe. C’eft un fait fur lequel les expériences des célèbres MM. Cavendish & KirWan ne laiflent aucun doure. (KirwWan, 414. ) 7°. Ces Meffieurs dont vous combattez l'opinion , ont été conduits Z admettre du charbon dans quelques fubftances métalliques tout fimple- ment en raifonnant de certe manière : Il eft prouvé par les expériences de M. Lavoilier ( Mém. de l’Acad. 1781 ) , que l'air fixe eft dû à la combi- naifon du charbon avec l'air vital privé d’une partie du principe de la lumière. Donc toutes les fois qu'on retire de l’air fixe par la combinaifon de l'air vital , il faut admettre du charbon dans la fubftance qui a fervi à certe production. Donc ceux des métaux qui en fe combinant avec l'air vital forment de l’air fixe, contiennent du charbon ; & effectivement l’on a retiré par d'autres moyens du charbon de ces méraux. Ces Meffieurs difent encore : L’acide phofphorique eft décompofé par le charbon , & le phofphore ne produit pas de gaz inflammable avec l'eau ; donc le hofphore a moins d’affinité avec l’air vital que le charbon & les autres fubftances qui peuvent décompofer l’eau ; mais fi on le fait bouillir avec de l’alkali, alors il peut décompofer ce fluide, à caufe de laffinité que l'alkali a avec l'acide phofphorique, comme le fer décompofe l'eau beaucoup plus facilement par le moyen de l’acide vitriolique & de l'acide marin. Si au contraire on mêle à l'eau une fubftance qui a beau- coup d’affinité avec elle, elle pourra s'oppofer à {a décompofition : ainfi la chaux pourra empêcher le fer d’opérer cette décompofition. Enfin, i/s penfent que l'eau ne déronne pas à l'état d'incandefcence , par la même raifon que l’acide vitriolique n’eft plus combuftible, J’al l'honneur d’être, &c. 17 Juillet 1786. Tome XXIX, Part, II, 1786, AOUT, $ 2 ! \ 240 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, RU DIE RON S Sur la Lettre précédente de M. BERTHOLLET, au fyef de la décompofition de l'Eau ; Par M DE LA METHERIE Movsreur; Je n'inffterai point davantage fur la dernière expérience de MM. La voifier & Meufnier faire en 1785, & j'attendrai qu’elle paroifle avec tous fes détails; mais vous conviendrez que pour déduire une conféquence télle que celle de la décompolition de l’eau , on ne fauroit s’appuyer fur une opération dans laquelle les vaiffeaux ont été brifés, où par conféquent il y a eu des pertes, & où on convient que les fubftances employées , favoir, l'air retiré du précipité, n'étoit point pur; car vous voyez, Mon- fieur , que dans ce moment on eft bien difficile, & avec raifon, fur les: expériences. Les différentes opinions qui partagent aujourd'hui les: Phylciens ont engagé aux recherches les plus exactes, & on voit fans - cefle en contradiction celies des Savans les plus diftingués. 1°. On avoit toujours vu, par exemple, de l'air fixe ou acide dans le réfidu de la combinaifon de l'air nitreax & de l'air pur. MM. Kirwan & Cavendish difent le contraire. Quel parti prendre? recourir à l’expérience ;. mais peut-on fe flatter d’avoir de meilleurs yeux que de tels obfervareurs ? Je conviens qu'ayant répété cette expérience avec tout le foin poffible, ayant lavé ces airs dans l'eau de chaux, &c. ils m'ont néanmoins toujours: fourni de l'air fixe après leur combinaifon, ALES 2°, Il eft hors de doute que l'acide nitreux eft formé d’air nitreux & d'air pur, que cet acide, quoique pouvant être réduit à l'état aëtiforme, ne fe foutient jamais en érat de vapeur permanente, & qu’il fe condenfe en: liqueur. L'expérience de M. Fontana, dont vous parlez, & qui fe trouve (page 235) tient à des circonftances particulières: aufli, ajoute-t-il (pag. 136 & 237) « ayant rempli d’air nitreux un flacon plein de mercure chaud & > très-fec, j'ai trouvé que les parois intérieures du facon fe couvroient de x à ë à « : £ 0 >, petites gouttes ou d’une vapeur humide dés que j’avois expofe le flacon » À la glace... . Si on unit dans un tube plein de mercure l’air nitreux 1 ! » avec l'air commun , on obferve que pendant l’effervefcence une vapeur’ > humide ou un nombre infini de petites gouttes d’eau fe jettent contre: SUR L'HIST, NATURELLE ET LES ARTS. idt 5 es parois intérieures du tube. . . . .11 y a donc naturellement de l’eau æ dans l'air nitreux & dans l'acide nitreux ». Cette expérience m’a donné conftamment le même réfültat; mais l'acide qui s’elt formé a attaqué le mercure: il'seft produit de nouvel air nitreux qui n’a point été abforbé , parce qu'il n’y avoit point aflez d'air pur ; mais qui Feft fi on introduit de nouvel air pur. C’eft pour éviter certe action de l’acide fur le mercure, que d:ns mon expérience (Jour. Phyfq. Janv. 1785 ) j'ai fait le méange de l'air pur & de l'air nitreux dans un grand ballon bien fec, Aïnfi la conclafion que j'en ai tirée fublifte dans toute fa force. .3°. Si l'eau diflillée dépouillée de tout air par l’ébullition ou d'air fixe par la chaux , & mêlée avec le fer ne donne plus d’air inflammable, cé n'eftdonc point par l’intermède de l’eau elle-même que fe dégage cet air ; car elle n'a pas changé de nature. Elle eft toujours eau. Le dégage. met de l'air inflammable dans ce caseft donc du à quelqu'autre fubitance difloute dans l’eau, à l’air 6xe qu’elle contient, 4°. Le fer expolé à l'air pur n’eft point attaqué. Le phofphore expofé à ce méme air-l'attire & brûle avec lui: Donc le phofphore a plus d'affinité avec l'air pur , que n'en a le fer. Cependant le phofphore mis dans l'eau ne la décompcfe point pour s'emparer de fon air pur, & il n'y a point de dégagement d'air inflammable, L'alkali cauftique, la chaux, &c. ajoutés à cette même eau, même à froid , il y a dégagement d'air inflammable, & on a des fels phofphoriques. Il ÿ a donc eu de J'acide phofphorique dégagé & combiné avec l’alkali, &c. Ce même alkali mis dans l'eau pute, il n'y a point de dégagement d’air inflam- mable. H paroît donc que dans le premier cas ce fonc l’aikali & le hofphore qui ont réasi l’un fur l’autre. L’alkali ayant plus d’affinité avec l’acide phofphorique que n’en a l'air inflammable, celui-ci devienc libre. IT ne vient donc point de l'eau, & cette expérience ne fauroit prouver la décompoftion de l'eau. 4 $°: On fait que la combeftion du charbon eft accompagnée d’une grande quantité d'air fixe ou acide. On ne peut en conclure que cet air contient du, charbon & de l'air pur, privé de fa chaleur fpécifique où de la lumière, comme vous vous exprime, c'ef-à-dire, le principe oxygine; mais feulement que dans cetre combuftion le charbon en fe décompofanr laïfle dégager un principe, qui uni à l'air pur forme de l’air acide ; car autrement il faudra reconnoître du charbon par-tout où il y a produétion d’air acide ,par exemple , dans le fer, le zinc , dans les chaux métalliques, dans la poitrine dés animaux, &c. Examinons d’ailleurs la nature du charbon. + F Il eft le réfidu d'une combuftion imparfaite (qui peut fe faire dans des vaiffeaux clos ) des matières animales &.végérales, C’eft même ordi- pairement de ce dernier donc il s'agit, Or, ‘celui-ci: contient, 1°, de La x42 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, terre calcaire, 2°. de la magnélie , 3° du fer, 4°. fouvent ou toujours de Tor, 5°. de la manganèfe, fuivant Schéele, 6°, de l’alkali fixe, 7°. diffé rens fels neutres. Enfin ,on en retire encore de l'eau, de l’air acide, & del'air inflammable, Telles font à-peu-près Les fubftances que Les Chimiltes ont reconnues jufqu'ici dans le charbon. Mais dans l'opinion nouvelle la fubftance charbonneufe eft entièrement différente. On la confidère comme dépouillée de terres , de-méraux , de fels, &c. L'eau lui eft même accidentelle, ainfi que l'air acide. L'air inflammable qu'on en retire vient de la décompofñtion de l'eau; & le charbon dépouillé de tous ces produits, il refte encore une fubftance; dit-on , & qu'on appelle fubftance charbonneufe, Que fera donc cette fubftance charbonneufe ? Elle eft un produit de la végétation. Ainfi elle ne fauroit être regardée comme un être fimple, mais comme une combinaifon de différens prin- cipes formée par les forces vitales. Il feroit bien fingulier que dans lg combuftion , cette combinaifon s’unit en entier avec l'air pur, qu’elle réliftât à l’action du feu, & qu’elle ne fût point détruite, ainfi que le font tous les autres produits du règne organique. C'eft ce qui n’eft pas vraifemblable, & qui ne peut être admis que fur des preuves incon- teftables. Il me paroît donc plus probable, je dirois prefque il me paroîe certain phyfiquement , que le charbon dans fa combuftion fe décom- pole, & qu'il s'en dégage, 1°. de l'air acide, 2°. de l'air inflammable, qui en brûlant avec une portion d’air pur , fournit 3°. de l’eau; 4°. qu'il y a produétion du principe de la chaleur , lequel en s'uniffant avec une partie d’air pur, forme une nouvelle portion d’air acide ; $°. que toutes les autres fubflances que nous avons vu faire partie du charbon font également dégagées. Enfin, l'air fxe étant un véritable acide, doit contenir le principe de la chaleur comme tous les autres acides; & c'eit ce principe de la chaleur ou cauflicum qu'on doic regarder comme le véritable principe acidifiant, le véritable oxygine , celui qui donne aux acides leur énergie, leur activité, parce que ce cauflicum n'elt que la matière du feu combinée, Ce fera cerre même matière du feu combinée ( vraifemblablement avec Pair pur ) qui fe trouvera dans les chaux calcaires , les chaux métalliques ; les acides, la poitrine des animaux, &c. & non point la fubftance charbonneufe qui , prife dans l'acception où on la prend, doit être regardée comme une fuppoftion. l'elles font les réflexions que j'ai l'honneur de vous communiquer. Je ne recherche que la vérité ainfi que vous. Peut-être routes ces diicuflions parviendront-elles à nous la faire entrevoir dans ces matières difficiles, J'ai l'honneur d'être, &c. NOUVELLES EXPÉRIENCES SUR ANCIENS IP PAMECACIMONURE" Par M. SCHÉELE : (Traduit de L Allemand , par M. GIRTANNER, Doë&eur en Médecine, M. ACHARD a décrit, dans le Journal de M. Crell de l’année 1985, fes obfervations fur le mêlange de différentes terres avec l’alkali fixe végétal expofé au feu. Je fuis bien éloigné de vouloir critiquer le travail d’un homme aufli célèbre ; cependant je ne faurois m'empêcher , pour Famour de la vérité, de publier mes propres obfervations fur le même fujet, quoique contraires aux fiennes, Je n’examinerai des expériences de M. Achard que celles qui regardent le fpath fluor , parce que j'ai faic depuis long-tems beaucoup de recherches fur ce genre de pierre, & que ‘d’ailleurs je me vois obligé de me défendre, M. Achard m ayant atraqué publiquement dans un Mémoire qu’il a fait inférer dans le Journal de Phyfque (1). Dans ce Mémoire il avance contre moi les propofñtions fuivantes : 3 1°. « Les acides dégagent du fpath Auor une terre particulière qu'ils >» volatilifent. 2°. » Cette terre volatilifée fe fépare des acides en Îes faturant par » l'alkali fixe végétal. Cette même terre bien lavée & féchéeeft Ja terre > volatile du fpath fluor. Lorfque l’on s’eft fervi d’acide vitriolique pour la » précipitation , on obtient , après avoir filtré la leffive , un tartre vitriolé, » & dans d’autres cas, d’autres fels, différens felon l’acide dont on s’eft > fervi pour la précipiration. 3°. » Cette terre fpathique n’a rien de falin; car elle n’a point de » goût & n’eft point difloluble dans l'eau, 4°. » Expofée au feu elle fe fond & forme une maffe affez refflemblante » à la porcelaine. 5°. » Elle ne fait point effervefcence avec les acides ni ne s’unit aux » alkalis; elle eft donc de nature alkaline, Elle n’attaque point les métaux » au feu, excepté le fer ; nouvelle preuve qu’elle eft de naturealkaline. Elle >» n'eft donc pas un acide , comme je l’ai avancé (à ce que dit M. Achard). » Il trouve la fource de mon erreur en ce que je n’ai pas examiné avec » affez d’attention le produit de la diftillation >. 3 ——————— — ———————— — —————""" ——— ——— — (x) Journal de Phyfque, vol, XXIII , mois de Juiller, 144 OBSERFATIONS SUR LA PAYSIQUE, Examinons en détail ces obfervations de M, Achard contraires à toutes’ mes expériences. Les acides, dit-il, dégagent du fpath fluor une terre particulière qu'ils volatilifenr. Si M. Achard connoît les belles expériences de M. Meyer , il eft impoñble qu'il puifle douter encore de lexiftence d’un acide particulier dans le fpath Auor , fans le moindre mélange de terre. Cependant pour me convaincre entièrement de cette vérité, je fis l'expérience fuivante: je pilai dans un mortier de métal du fpath fluor très-pur , je mis la poudre dans une cornue d’étain, & j'y verfai de Vacide vitriolique. J’y appliquai alors un récipient, dont j’avois enduit auparavant toute la furface intérieure avec une couche de cire blanche en le chauffant, Dans ce récipient je verfai un peu d’eau difillée. Alors je mis la cornue dans le bain de fable, &-en difillane je fis bien attention que Ja cire ne fe fondît point pendant l'opération , & que l'acide ne put pas attaquer le verre. Après avoir continué la difillation pendant une heure entière, je trouvai l’eau dans le récipient très-acide & fumanre, mais fans la moindre pellicule quartzeufe. Je faturai une partie de cet acide avec du {el de tartre, & il ne fe précipita point de terre, Il ne s’en précipitoit point non plus avec l’alkali volatil. Je conclus donc de ces expériences, que l’exiftence de l'acide fpathique fans le moindre mélange de terre eft prouvée. Je donnerai par la fuite à l'acide fpathique préparé de cette manière le nom d’acide fpathique pur. Peu de tems après je répétai la même expérience, avec cette différence feulement, que j’ajoutai au mêlange de fpath fluor & d'acide vitriolique un peu de criftal de roche en poudre. Après une heure de diftillation je trouvai l’eau qui étoit dans le récipient tout-à-fait épaiflie par le quartz qui avoit pañlé dans la difillation. Je filtrai cet acide, & après lavoir faturé de fel de tartre, il prit la confiftance d'une gelée. Pourroit-on demander une expérience plus convaincante pour prouver que la terre n'eft qu’accidentelle dans l’acide fpathique ordinaire, & qu'elle n’eft dûe qu'a la terre quartzeufe contenue dans la cornue de verre. On peut féparer de nouveau cette terre, continue M. Achard , par le moyen de l’alkali fixe végétal, & lon obtient un tartre vitriolé, lorfgu’on s'efl Jervi d'acide vitriolique pour la diflillation. C’eft donc dans des vailleaux de verre que M. Achard a diftillé fon acide fpathique. Je préparai une certaine quantité de cette terre fpathique volatile (ainfi qu'il l'appelle). Je la lavai avec beaucoup d’eau. Je faturai alors l'acide de fel de tartre & je l’évaporai. Selon M. Achard j'aurois dû obtenir un tartre vitriolé , mais j’obtins un fel tout-à-fait différent; & certainement fi Von n'a pas pris trop d'acide vitriolique, on ne trouvera pas la , moindre particule de cet acide dans le récipient, & par conféquent l’on n’obtiendra point de tartre vitriolé. J'ai dégagé l’acide fpathique du fpath fluor par le moyen de l'acide phofphorique & de l'acide arfenical, & en rectifianc SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 145 redifiant mon acide fpathique je n’ai jamais pu découvrir la moindre pardicule d'aucun acide étranger. Je décrirai mème plus bas une méthode que j'ai trouvée dernièrement, pour obtenir l'acide fparhique fans fe fervir d'aucun autre acide pour le dégager. La quantité de fel que j’obtins après avoir faturé l'acide fpathique , étoit très-perite, car de cinq gros & demi de fe! de tartre je n'obrins qu'un gros de fel; lorfqu’au contraire je faturois l'acide & que je précipitois la terre avec de l'acide volatil, j'obtins de la même quantité d'acide près d’une demi-once de fel. Le fel reutre obtenu par le moyen de l'alkali fixe, ne criftallifoit point , mais fe diflolvoit à l'air ; ce n'étoit donc pas un tartre vitriolé. Le poids de la terre précipitée obtenue par ces deux différens procédés différoic’ auffi tiès-fenfiblement. La terre précipitée par l'alkali fixe pèfe plus que le double de celle précipitée par l’alkali volatil. Les deux précipités reflemblent à une gelée; mais après les avoir fait fécher, la terre précipitée par l'alkali fixe eft beaucoup plus blanche que l’autre. Les deux précipités different donc eflentiellement entr’eux. 1 , La terre fpathique volatile , continue M. Achard (en parlant de celle qui a été précipirée par l’alkali fixe) n'a rien de falin, & ef? infoluble dans l'eau. Ici il n’a certainement pas bien examiné les circonftances. Je pris une demi-once de la terre fpathique de M. Achard, que j'avois aupa- favanc bien lavée ayec beaucoup d'eau, je la mêlois avec dix onces d’eau que je fis bouillir pendant un quart-d'heure. Alors je filtrois l’eau qui avoit un goût acide & rougifloit la teinture de tournefol, ce qui me furprie d'autant plus que j’avois pris une plüs grande quantité d'alkali pour la précipitation qu'il n’en falloit pour faturer l'acide, Je verfois de nouveau dix onces d’eau fur la terre qui étoic reflée, & je fis bouillir l’eau pen- dant un quart-d'heure; cette eau étoit acide comme l’autre. Je répétois la même opération encore trois fois , & l’eau que j'obtins dans la dernière éroit auffi acide que celle de la première, Après avoir été féché ce qui reftoit ne pefoir plus qu'un -gros & demi, & avoit encore en tour les mê es propriétés qu'il avoit avant que d'avoir été bouilli avec l’eau: . Cette terre a donc des particules falines, L'eau acide en fe réfroidiffane avoit dépofé une partie de la terre difloute , &en l’évaporant entièrement jobtins le refte. La poudre bien féchée peloit unedeni-once. Cette terre, ou plutôt ce fel, différe de celui qu'on obtient par le moyen de l’alkalt volatil, en re qu'après avoir été féchée, elle efl fous la forme d’une poudre blanche , pendant que l’autre faie toujours une mafle & a'toutes les pro- priérés de la terre quartzeufe. : : tif Expofée au feu, die M. Achard , elle" fe fond & forme une maffe aj]ez reffemblante à la porcelaine. Il eft vrai qu'au commencement elle forme une mafle telle que M. Achard 'a décrit, mais en continuant l'opération cetre mafle perd fa blancheur & fe change en _un werre tran/parenr. Ce verre eft alkalin, attire l’eau de l'armofphère; fait una Tome XXIX, Part. 11, 1786. AOUT, 146 OBSERFATIONS SUR LA PHYSIQUE,. gelée avec les acidess, &c. L’acide fpathique adhérent eft donc probable. ment la caufe de laicouleur blanche de certe mafe, & la couleur fe perd aufi-tôt, qu'on chafle le refte de l'acide par un degré de feu plus fort. Elle ne fait point effervefcence avec\les acides, ni ne s’unit aux alkalis j elle efl donc une terre alkaline. Cette terre ne peut pas faire effervefcencé avec les acides, parce qu'elle eft elle-même de nature acide, comme jelviens de, le prouver, M. Achard a fait fondre une partie de certe terre layec quatre, parriés d'alkali fixe végétal, En répérant l'expérience j'ai-obeenu un réfulrar entièrement ;diflérent de celui. qu'il décrit (1). Seroit-ce parce qu'il s'eft fervi d'un creufec de fer? Mais ce qui eft pour” moi un phénomène abfolument inconcevable, c’eft le bleu de Prufle qui s'eft dépofé dans les leffives alkalines toures les fois qu'il a fondu les terres avec de l’alkäli; car tout le monde fait que la leffive alkaline Ôre la couleur au. bleu de Prufle. Je reviens de cette digreffion. La terre de. M, Atchard fair eflervefcence 4vec les alkalis; & par conféquent elle ne peut pas être de nature alkaline. Lorfqu'on en jerte un peu dans une fülution d'alkali fixe non cauftique ; elle rombe d’abord au fond du vafe, mais peu après il fe forme une écume très-vilible, & la terre fe changeenuneefpèce de gelée. En faifant chauffer le mélangetout fediflour, mais, en réfroïdiflant, la gelée fe fépare de nouveau, & en lavant cette gelée avec de l’eau chaude on trouve que ce n’eft qu'une terre quartzeufe très-pure. En mêlant de cette terre préparée par lalkali fixe avec de V'alkali volatil non cauftique , il y a une effervefcence, mais la rerre ne fe diffout pas comme l’autre en la faifant chauffer; car on fait que la terre quartzeule ne fe diflout pas dans l’alkali volatil. Si Pon mêle cette terre avec de l’eau de chaux, elle fépare la térre calcaire de l’eau , & tombe en même-tems au fond du vafe fous, la forme d’une poudre blanchître ; de forte que l'eau refte toute pure, & le précipité eft compofé d’alkali, de terre calcäiré ; d’acide fpathique & de quartz. Ce précipité eft infoluble dans l'eau, fediflout dans les acides en formant une gelée, dégage l'afkali . volatil du fel ammoniac par la voie sèche , & fait un petit grain blan- châtre lorfqu'il eft fondu au chalumeau. Lorfque lon diflille la terre de M. Achard avec de l’acide nitreux , l’acide fpathique fe dégage, & ce qui refte dans la cornue fe fond très-facilemens au feu , & fe diflour en partie dans l’eau, On obtient de-cetre folution en l'évaporant un nitre prifma- tique, & ce qui ef refté) au fond eft de la terre quartzeufe. Je ‘rends compte de-toutes ces expériences pour démontrer la vraie nature dé cetre: terre, que M. Achard regarde comme une terre particulière. L'affinité de la terre quartzeufe diffoute dan$ l'acide fpathique avec l’alkali fixe eft très grande. En mêlant une folution de fel de Glauber avec l'acide fpathique —————— ) Journal-chimique de M, Crell , année 1785 , page 146+ | SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 147 (obtenu par le procédé ordinaire dans des vaifleaux de verre) la terre de M. Achard fe fépare au moment même. Alors en filtrant le mélange & én! diftitlanc la liqueur, l'acide vitrioliqué pafle dans le récipient. La mêmg affinité fe montre lorfqu'on mêle l'acide fpachique ordinaire avéc du tartre vitriolé, du nitré ou du fel commun. Excepté le fer elle n'attaque point les métaux au feu , cel'qui prouve encore qu'elle efl une terre alkaline. M. Achard décrit dans le’ même cahier du Journal de Phyfique (1) fes expériences fur le fel fédatif & les métaux. Ce fel', qui très-certainement eft un acide, tout comme { terre fpathique, n'atraque aucun métal; excepté le fer; perfonné ne croira} pour cette raifon , que le fel fédarif eft de nature a!kaline, | Enfin, M. Achard aflure , que je rai pris cette terre pour ‘un acide , que parce que je n'ai pas bien examiné le produit de la diflillution. Je mai jamais dit, dans aucun de mes écrits, que ce fel , compofé de terre quartzeufe, d'acide fpathique & d’alkali fixe , étoir un acide, & M. Bergman,comme moi ; met la terre précipitée de l'acide fparhique par l'alkali fixe, dans la clafle des fels neutres compofés, avec excès d’acide, Je vais décrire maintenant la méthode que j'ai trouvée pour obtenir l'acide fpathique fans fe fervir d'aucun autre acide, Je fis fondre dans un creufec deux onces de fpath fluor en poudre avec quatre onces de fel de tartre. Après que la mafle fut réfroidie, je la pilois & je lavois [a poudre dans une quantité d'eau aflez grande pour en tirer tout l'alkali; alors je féparois la poudre qui reftoït au fond fans fe difloudee. Certe poudre, une des parties iconftituantes du {path flüor, fe diffour dans les acides avec effervefcence & forme une félénite avec l’aide’ vitriolique. J'expolois la letlive au feu & je fis évaporer l'eau entièrement. Je verfois de l'acide vitriolique fur une partie de la poudre alkaline que j'obtins par ce procédé, & je diftillois le mélange , après avoir mis un peu d'eau dans le récipient. Cette eau fe couvrit! d'une pellicule, avant même que Ja cornue fût bien chauffée. Je ne pouvois donc: plus déuter que l'acide fpathique ne fe für joint à Palkali. Quand mème M.'Achard ; felon fes principes , voudroir expliquer certe expérience , ‘en fuppofant que l'alkali s’eft combiné avec la terre volatile du fpath fluor , il ne peut pas nier au moins que fa térre eft de nature acide, parce que l’alkali la dégage de la terre calcaire. Je fis diffoudre le refte de la poudre alkaline dans de l’eau & jy ajoutois de l'acide vitriolique très-pur’ pour faturer l'excès de Valkali. Je fis chauffer une partie de certe folution pour en chafler rouc Vacide aërien, & alors je la verfoïs dans de lea de chaux; j'obtins an pré: cipité blanc qui étoit un fpath fluor révénéré. Je fis difloudre de la chaux (x) Journal de Phyfique . ., .:.4.,4 ) | Tome XXIX, Part. II, 1786. AOUT, T 2 48 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE: de plomb dans du vinaigre, & je continuai de verfer de cette folution dans la leffive faturée d’acide nitreux jufqu’à ce qu'il ne s'en précipirât plus rien, Par ce moyen je dégageois Pacide fpathique de Palkali, pour le. combiner avec la chaux de plomb. Je lavois le précipité avec de l'eau froide , je le fis fécher, & alors jen pris une partie fur laquellé je verfois quelques gouttes d'acide vitriolique; les vapeurs-de l'acide fparhique fe dégagèrent aufli-tôt. Mais peut-être la terre fpathique volatile fe com- bine-t-elle dans ce procédé avec l'acide vitrioliqué , & change cer acide , très-fixe d’ailleurs , en air acide. M. Prieftley femble Le foupçonner. Pour m'aflurer de la vérité, j'ai tâché de féparer l'acide de la chaux de plomb par la chaleur feule. J'ai mis, pour, cer effet, un peu de ce fel dans une petité cornue à laquelle j'ai adapté un -récipientavec de l'eau. Le fel fe- fondit , mais je ne pus pas obferver la moindre marque d’acide. Le fond de la cornue fut entièrement diflous, de forte que tout. couloit dans le feu ; la chaleur feule ne fépare donc point cer acide de la chaux de plomb, Je mêlois ce qui me reftoir de ma chaux de plomb combinée avec l'acide fpathique, avec autant de poudre de charbon ;.& je difillois le mélanges Aulfi-rôr que la chaux de plomb commença à prendre fa forme métal- lique; le col-de la cornue fut couvert d’un fublimé ‘blanc, & la pellicule commençoit à fe former fur l’eau que j'avois mife dans le récipient. Le fublimé étroit acide, parce que la terre quartzeufe eft mêlée d'acide fpathique ; & l’eau acide dans le récipient dépofoie la terre quartzeufe aufli-tôt que j'y fis tomber quelques gouttes. d’alkali volatil. Je regarde cette expérience comme décifive , & je crois que les propo- frions fuivantes , toutes fondées {ur des obfervations très-exactes , ne fon : plus fujettes à aucun doute. 1°. Le fpath fluor eft.compofé de terre calcaire & d’un acide particulier, 2°, Les acides vitriolique, nitreux, marin , arfenical & phofphorique ont une affinité plus grande avec la terre calcaire , & dégagent par cette: raifon l'acide fpathique. 3°. Si cet acide en fe dégageant rencontre la terre quartzeufe, il fe combine avec elle, & pafle avec elle dans le récipient fous la forme d'air, 4°. L'affinité de l'acide fpathique avec la terre quartzeufe diminue fenfiblement fi cet acide trouve de l'eau dans le récipient ; il perd alors fon élafticité, & dépofe, une partie de la terre fur la furface de l’eau: s°. Si l’on fe fert d’une cornue d’étain pour la difüillation, &:qu'on enduife la furface intérieure du récipient de cire , on obtient un acide fpathique très-pur , & lorfqu'on ajoute .du quartz au mélange l'acide le: volatilife, & le fait paffer dans le récipient. 6°. On peut dégager auffi l'acide du fpath fluor en faifant fondre un: mélange de fpath fluor en poudre avec le l’alkali fixe non cauftique ; la. SÛR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. * 149 terre calcaire fe combine avec l'acide aërien & l'aikali avec l'acide fpathique. Si l'on, fait pailer cet acide de l’alkali à la chaux de plomb, & qu'on réduife la chaux avec de ia poudre de charbon dans ung cornue, l'acide fpathique pafle dans le récipient. 7”. L'acide fpathique verfé dans de l’eau de chaux forme un fpath Aior régénéré; faturé d’alkali fixe végeral il forme un fel neutre qui attire fortement l'humidité de lPatmofphère. é 8°. En précipitant l'acide fpathique ordinaire, diftillé dans des vaiffeaux de verre, par l'alkali volatil , il fe forme une gelée, & l’on obtient une terre quartzeufe très-pure. C'eft certe même terre qui forme aufli le fublimé dans le col de la cornue & dans le récipient. 9°. Lorfqued'on farure au contraire l'acide fharhique avec de Palkali -fixe, l'on obtient un précipité qui après avoir été féché , eft blanc. 10°. Ce précipité péfe le double du précipité (8), & eft un fel reutre avec excès d'acide: par conféquent difloluble dans l’eau, quoique diff- cilement; il eft compofé de quartz, d’alkali fixe & d'acide fpathique. J1 . fe fond très-aifément , & en continuant l'opération l’on obtient un veire alkalin. IL eft donc prouvé maintenant (en comparant ce que je viens de dire avec ce que j'ai dir dans les Mémoires de l'Académie de Steckolm en 1771 } que l'acide fpathique eft un acide minéral particulier & différene de cout autre acide connu. L’hypothèfe de quelques Chimiftes, qu'il n’eft peut-être qu'une modification de l'acide virriolique ou marin, n’eft pas fondée, parce que jufqu'a préfent nous ne connoiflons pas les moyens pour changer ces acides en acide fpathique. Ce feroit certainement une découverte des plus intéreflantes, mais que vraifemblablement nous atrendrons en vain encore bien long-tems. : EXTRAIT,D'UNE LETTRE ; Ecrite par M. Descamps, COMME IL'AB BE RO ZLER Monxsreur:; Comme rien n’eft indifférent au Philofophe, au Naturalifte, per mertez-moi de vous faire connoître un fait qui me paroîtroit impollble, f je n’en äavois éré le témoin oculaire: Le premier mai je fs metre les fcellés dans une maïfon de campagne à fept lieues de Lyon; par mégarde on ferma une petite chienne ( baflez 1$o - OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, bâtard ) dans un cabinet placé dans l’intérieur du bâtiment: elle y eft reftée jufqu’au 8 juin, trente-neuf jours, fans qu’on.ait pu lui donner aucuns alimens. Le 8 juin elle a été trouvée vivante : on lui préfenta d'abord üne écuellée de lait, une heure après une feconde, qui furent altées avec voracité, trois heures après une loupe, tant fur fi bien procédé que le lendemain la chienne crut devoir fe venger de fa captivitécontre un chien de la grange. Elle fe porte très-bien, J'ai l'honneur d’être, &c. EX TR ATIT D'UN VOYAGE 4:U'°PTC D'ENTIENEIR 1F: Par MM. DE LAMANON & MonGEz, le 4 Août 1785: Et de quelques Expériences chimiques faites fur le haut de ce Pic, avec la defcription de nouvelles variétés de Schorls volcaniques. LR TES LE cratère du Pic eft une vraie foufrière qui a la plus grande analogie avec celles d'Italie; il a environ cinquante toifes’ de Jonoueur fur quarante de large, & s'élève rapidement de l’ouelt à l’eft, Sur les bords du cratère, & fur-rour vers la partie la plus baffle, font plufieurs foupiraux où cherninées , d'où s’exhalent des vapeurs aqueules & acides fulfureufes, dont la chaleur ft‘mbnter le thermomètre de 9 degrés juiqu'à 34 L'intérieur du cratère elt couvert d'une argile jaune , rouge & blanche, & de blocs de laves décompofées en partie. Sous ces blocs. on trouve des criftaux de foafre fuperbes ; ce font des criftaux de la forme octaëdre rhomboïdale, dont quelques-uns ont près d'un pouce de hau- teur ; je crois que ce font les plus beaux criftaux de foufre volcanique que l'on ait encore trouvés. L'eau qui s’exhaloit des foupiraux étoit parfaitement pure & nullemene acide , comme je m'en fuis afluré au goût & par quelques expériences. ....-. L'élévarion du Pic au-deflus du niveau de la mer de près de dix-neuf cens toifes m'engagea à y faire plufieurs expériences de chimie, pour les comparer avec ce qui fe paffe dans nos laboratoires. J'en donne ici fimplement les réfultats, les détails feroient trop longs pour une Lettre. La volatilifation des liqueurs & Îe réfroidiffement qu'elle produit furent très-confidérables, Une demi-minute fuffic pour la volatilifation d'une affez forte dofe d’éther, — : ® u LE v SUR L'HIST: NATURELLE (ET LES. ARTS. :‘rçx _ L'action des acides fur les métaux , les rerres & les alkalis., fut-lénre } & les bulles qui s'échappoient durant l’effervefcence. étoient beaucoup . plus grofles qu'à l'ordinaire, La production des vitriols offrit des phé- nomènes finguliers. Celui de fer prit tout-d'un-coup une belle couleur violette, & celui de cuivre fe précipita fubitement d’une couleur bleue très-vive. se. « « J’examinai l'humidité de l'air au môyen de l'hygromètre, de Yalkali pur & de l'acide vitriolique , & j'en conelus qu'hors la direction des vapeurs aqueufes, l'air étoic très-fec; car aw-bout de trois herres l'acide virriolique n'avoir prefque pas changé de couleur ni de pefanteur ; Yalkali fixe étoit refté fec , excepré vers les bords de la capfule , où il étoit un peu humide , & l'hygromètre de Sauflure marquoit 64 degrés , autant que le vent impétueux que nous éprouvions püt nous pérmiettre de le juger. ..... .Lodeur & la force des liqueurs nous parurent n’avoir prefque rien perdu à cette hauteur , cé qui contredit toutes les merveilles que l’on avoit racontées jufqu'à préfent. L'alkali volatil, l'érher, l'efprit-de-vin , avoient la même force ; la liqueur fumante de Boyle eftla feule qui éür perdu très-fenfiblement de fon énergie. Son évaporation n’en fut pas moins très- prompte, & en trente fecondes une certaine quantité que J’avois verfée dans une capfule fut toute volatilifée;; il n’y refta plus que du foufre qui rougifloic les bords & le fond. En verfant dans cette liqueur de l'acide vitriolique, elle déronna avec beaucoup d’énesgie, & les. vapeurs qui s’élevèrent avoient un degré de chaleur, très-fenfible. +... «+. J’eflayai de former de l’alkali volatil en décompofant le fef ammoniac avec de lalkali fixe; mais la production fur lente: & peu fenfible , tandis qu’au niveau de la mer cette production par la même dofe me parut prompte & très-abondante. +... - Curieux de connoître la nature des vapeurs qui s’exhalent à travers le cratère, & s'il y en avoit d’air inflammable, d’air fixe & d'acide marin , je fis les expériences fuivantes: J’expofai au bord d’un “oupirail, dans une capfule, de la diffolution nitreufe d'argent; elle y refta plus d’une heure au milieu des vapeurs qui s’exhaloient continue!: lement, fans altération fenfible; ce qui annonce bien qu’il ne-s’exhaloit aucune vapeur d'acide marin, J'y verfois alors quelques gouttés d’acide marin, il y eut fur Je champ précipiration d’argent corné ; mais au lieu d’être blanc. comme à l'ordinaire , il fut d’un beau violet noir, qui devine bientôc gris & fous forme de petits criftaux écailieux, fenfibles à l'œil & encore plus à la loupe, tels que M. Saze les a obfervés, (Voy. Mix. docim.) Je crois avoir droit d'attribuer aux vapeurs d'air inflammable l’altération de la couleur , d’après quelques expériences que j'ai faires fur la précipi- tation de l'argent corné dans l’air inflammable. De l’eau de chaux expolte péndant trois heures {ur Le bord du cratère & dans le voifinage d'un 152 OBSERVATIONS-SUR LA PHYSIQUE, foupirail, ne fe couvrit d'aucune pellicule calcaire; à peine y appercevoit- on quelques filets, ce qui prouve, je crois, que non-feulement il ne s’exbale point de vapeurs d’air fixe par le cratère, mais encore que l'air atmofphérique qui repofe deflus en contient infiniment peu, & que les vapeurs inflammables & acides fulfureufes font Les feules confidérables & fenfibles. C ..2. .L'éleéricité atmofphérique éroit affez confidérable , puifque l’éleétromètre de M. de Sauflure tenu à la main’ à la hauteur d’environ cing pieds ,indiquoit trois degrés, tandis qu’à terre il n’en marquoit qu’un & demi. Cette éle@ricité étoit pofitive, # +...» La violence du vent m’empêcha de faire fur le cratère même l'expérience de l’eau bouillante ; mais redefcendus à la fontaine glacée, elle fe fourint bouillante , le thermomètre plongé dedans indiquant 71 degrés de Réaumur ; le mercure dans le baromètre étoir à cet endroit à 19 pouces une ligne. -..... J'ai trouvé de nouvelles variétés de fchorls volcaniques , eutr'autres, N°. 1. une macle triple qui appartienc à la clafle des prifmes oétaëdres inéquilatéraux. N°. 2.Schorl noir en prifmes oétaëdres inéquilatéraux terminés par des fommers triédres oppofés , dont les plans font deux grands eptaëdres irréguliers & un petit fcalène produit par la troncature de l'angle fupérieur. . N°, 3. — Prifmes hexaëdres comprimés, deux faces plus larges oppofées , terminés d'une part par une pyramide tétraëdre obtufe à plans trapézoïdaux , & de l’autre, par une pyramide hexaëdre compofée de fx plans trapézoïdaux, donc deux très-petirs font des bizeaux formés fur les arrètes des deux côtés fupérieurs du large hexagone du prifme. N°. 4. — Terminé d'une part comme le fommer du criftal précédent, & de l'autre, par une pyramide diëdre, dont toutes les arrètes font rabattues en Pifeau. N°. $.— Terminé d’une part par un fommet tétraëdre, & de l’autre, pa ue taëdre compofé d'un pentagone irrégulier au centre de cinq ns fur fes côtés, plus un fixième fur un de fes angles. N°. 6. — Terminé d'une part par un fommet pentaëdre , compofé de quatre pentagones & d’un rhombe au milieu ; c'eft l’angle formé par la réunion des quatre trapézoïdes qui fe trouve tronqué ; & de l’autre, par un fommet pentaëdre, qui ne différe du premier, que parce qu'il fe trouve une troncature.triangulaire fur l'arrète des deux trapézoïdes, N°. 7, Schorl noir à /prifme hexaëdre, terminé d’yne part par un fommet eptaëdre compofé de deux hexagones irréguliers ; de deux pen- agones irréguliers & de trois trapézoïdes ; ce font les deux faces diédres tronquées fur fix côrés & fur l’arrète du milieu ; de l’autre part, par un fommet tétraëdre , dont les tronçatures forment, 1°, deux grands tra- pézoïdes SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, x53 pézoïdes & un rhomboïde, qui n’eft que la troncature d’un arrête d’un trapézoïde ; 2°. deux petits trapézoïdes réguliers &entre les grands & Les trapézoïdes trois troncatures, la première hexagone, la feconde penta- gone & la troifième fcalène. La feconde eft la troncature de l'angle du fommer qui feroit un rhombe fans la troncature hexagone qui lui donne un quarré de plus. Noté au Mémoire de M. GRENIER, page 114 de ce Journal. T1 a été reconnu par expérience , qu’il fuffit que les barres de fer & celles de cuivre foient d’égale groffeur, c'eft-a-dire , paflées à la même filière, pour que leurs dilataions foiem fimultanées : cela difpenfe des épreuves de l’étuve. des 2224 = =— NOUVELLES LITTÉRAIRES. N OUrEAUX Mémoires de l'Académie de Dijon pour La partie des Sciences & Arts ; premier [émeftre, 178$. À Dijon, chez Cauile, Imprimeur-Libraire de l’Académie des Sciences, Place Saint-Etienne ; & à Paris, chez Didot le jeune & Barrois le jeune, quai des Auguftins. Ce volume contient , 1°. la feconde partie du Mémoire fur l’épaiffeur si l’on doit donner aux murs de foutennement pour réfifter à la pouflée es terres; par M. Gauthey. 2°, Effai fur la queftion de favoir comment s'opère naturellement la diflolution du quartz; par M. de Morveau. 3°. Addition au Mémoire précédent; par le même. Ce Chimifte a mis dans un flacon de l’eau chargée deyaz acide méphitique , neuf fragmens de criftal de roche & un lingot de fer, de cinq pouces de longueur , de trois lignes & demie de toute face. Le flacon bien bouché fut renverfé & ouvert au bout de neuf mois. Les fragmens de criftal avoient perdu quelque chofe de leur poids. Le lingot de fer avoit été fenfiblement attaqué, & à un de fes angles on apperçut un petit point vitreux qui paroît formé de plans réguliers qui fe terminent en pyramides, Ce qui fait foupçonner que c’eft un petit criftal de roche. 4°. Mémoire fur Le tremblement de terre qui s’eft fait fentir à Bourg- en-Brefle, le 15 oëtobre 1784; par M. R'houff. 5°. Effai fur la queftion de favoir fi le fucre entre tout entier dans {a compofition de l'acide faccharin ; par M. de Morveau. 6. Obfervation fur une dent fofile trouvée à Trevoux ; par le même, Tome XXIX, Part, II, 1786. AOUT, Y. #4 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Cette dent paroït de la même nature que celles trouvées fur les bords de l'Ohio & de la rivière de Popayan dans l'Amérique. 7°. Réflexion fur les effets des commotions électriques; par M. Carmoy. 8°. Mémoire fur la folle Avoine; par M. Baron. 9°. Mémoire dans lequel on examine fi la mine d’antimoine, les æthiops antimoniaux & les mercuriels pris intérieurement , peuvent être dangereux par leur décompofition dans les premières voies; par M. Marer. 10°. Mémoire fur l’ufage d'enfevelir les morts ; par M. Durande. Cet Académicien démontre par beaucoup de faits combien eft dangereufe la méthode ufitée d’enfevelir trop tôt. à 11°. Hiftoire météorologique, nozoligique & économique de 178$ : première partie ; par MM. Mare: & Picardet-Prieur. 12°.Miftoire zoolooique botanique, &e. par M. Picardet-Prieur. M. d’Arceau , Confeiller au Parlement de Dijon, a donné à M. de Morveau des pierres criflallifées en prifmes hexagones , d'un blanc jaunâtre, opaques, de trois à quatre lignes d’épaifleur , fans pyramides où tronquées net , trouvées dans la Bourgogne, entre Serrigny & Cham- pouflaud. Ces criftaux font plus durs & plus réfractaires que le feld- fpath. La plupart des Naturaliftes qui jes ont vus les regardent à caufe: de leur criftallifation comme étant de la vraie nature des éméraudes du Pérou. M. de Morveau fe propofe d’en faire l’aualyfe à la manière de MM. Bergman & Achard. Manuel où Vocabulaire des Moulins à Pot, orné de quatre figures er taille-douce : prix, 36 Jols broché. A Amfterdam , & fe trouve à Paris, chez Lejay , Libraire, rue Neuve des Petits-Champs , près celle de Richelieu. Effai fur le Mouvement ; par J. B. CxAmgorssier , Doëeur er Médecine de la Faculté de Montpellier , de La Société Royale des Sciences, Arts & Belles-Lerrres de Clermont-Ferrand, Ignoto motu, ignotà pariter & natura. Ariflos, À Londres, & fe trouve à Paris, chez Jombert jeune, Libraire ; & Ë Lyon, chez Grabit, Libraire , rue Merciere. Cet Ouvrage mérite l'attention du Leëteur. L'Art de tenir les Livres en parties doubles, ou le Science de faire Ecriture de toutes les Négociations de Banque ou de Commerce : Ovrage divifé en deux parties , dont la première contient un Traité raiforné qui exfeigne la manière de tenir L2s Ecritures avec ordre. La feconde contient le Calsul des fraëious rendu facile & à la portée de tout le monde, & enfin une Inffruë&ion Jur la méthode de PPT US SUR L'HIST. NATURELLE ETLES ARTS. 155 faire les Ecritures concernant l'Economèe rurale, &c. par JEAN- Jacques ImHooF D'ARAU. À Genève, chez Barde, Manger & Compagnie, Imprimeurs-Libraires; & à Paris, chez Buiflon, Libraire, hôtel de Mefgrigny , rue des Poitevins, N°. 13. Galerie univer/elle, hiflorique ; par M. DE P...prix, 3 dev. x2 fols: sroifième & quatrième livraifon , contenant chacune huit Portraits, À Paris, chez Mérigot le jeune, quai des Auguftins ; à Valenciennes, chez Giard, & chez les principaux Libraires des villes du Royaume & de l’Europe. Différtation fur le Cachou, fur larbre d'où or le tire & fur fes proprictés pour La Médecine & pour la T'einture,Mimofacatechu. Linné, Differtation fur un nouveau genre de plante qui a fleuri dans les jardins de Trianon, qui approche beaucoup du Rudbeck , Breteuillia Tria- nerlis, Buch'oz. Differtation fur le Guflave- Augufle , un des plus beaux arbres qui exiflent , Guftavia Augufta. Linné. Differtation fur le Fraifier, fes différentes races, fa culture, fes propriétés & préparations -alimentaires & médicinales, Le Feune François , ou Traité hiflorique de tous les Animaux qui habitent la France, Differtation fur la Bandure , Plante des plus rares & des plus curieufes : un des miracles de La nature, qui diflille continuellement de l'eau” dans un réfervoir placé à l'extrémité de fes feuilles , pour appaifer la Joif des voyageurs. Tous ces Ouvrages font de M. Buch'oz , dont on connoît le zèle & lacivité. L'art de prolonger la vie & de conferver ln fanté, ou Traité d'Hygiene ; par M. PREssAViIN, Gradué de l'Univerfité de Paris | Membre du Collège de Chirurgie de Lyon, 6 ancien Démonftrateur en matière Medivo-Chirurgicale. À Lyon, chez J..S. Grabit , Libraire , rue Mercière; & à Paris, chez Cuche:, rue & hôtel Serpente , un vol i1-8°. M. Preffavin eft déjà connu par plufeurs Ouvrages eftimés. Celui-ci ne peut qu'ajouter à fa réputation, Obfervations pratiques fur les Bétes à laine dans la Province du Tome XXIX, Part. II, 1786. AOUT, V 2 556 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Berry ; par M le Chevalier DE LA MERVILLE, Adjoint de l'admi- niflration provinciale du Berry. Hic labor, hinc laudem fortes, fperate, coloni. Georg. Virg. O vous , heureux Bergers, veillez à leurs befoins , Leur toifon & leur lait vous païront de vos foins. sraduéz. par M. l'Abbé de Lille: A Paris, chez Buiflon, Libraire, hôtel de Mefgrigni , rue des Poitevins, N°. 13. un vol. #7-8°. La France qui, fi elle vouloit , cueilleroit des foies, des chanvres & des lins plus qu'il ne lui en faudroit pour fa confommation , pourroit encore avoir des plus belles laines, fi on y donnoit les foins néceflaires Ces richeffesterritoriales ferant roujours les vraies auxquellesune adminiftration fage s’attachera par préférence. La richefle de l'Angleterre confifte plutôt dans fes laines que dans fes vaiffeaux. C’eft donc un véritable fervice que rend à fa Patrie M. de là Merville d'éclairer fur un objet aufñfi important. I1 ne confeille pas de parquer les moutons toute l’année. Cependant cette méthode fi ancienne, confirmée en France par les expériences de: M. Daubenton , paroît réunir de grands avantages. Elèmens de Chimie docimaflique à lufage des Orfevres , Effayeurs & Affineurs ,ou Théorie chimique de toutes les opérations ufirées dans lOrfévrerie , Part des Effais & l'Affinage , pour canffater le titre de TOr & de l’Argent, & purifier ces deux Métaux de l'alliage des autres fubflances métalliques , avec ur Abrégé des principales propriétés qui caraétérifent les matières métalliques en général » une Explication des principaux termes de P Arr; & un Précis fur l'Hifloire-naturelle de routes les fubflances qui font employées dans. toutes ces diverfes opérations > par M. DE RisaucousT , Mañtre. en Pharmacie. À Paris, chez Buiflon, Libraire, rue des Poitevins ;, hôtel de Meforigni , N°. 13, un vol. z7-8°. L'Auteur, dans cet Ouvrage intéreflane , a cherché à porter les lumières: de la Chimie dans la théorie de l'art de l’affinage, des-effais, &c, Les. Arts gagnent beaucoup lorfqu'on enéclaire la pratique par la théorie, & les Sciences elles-mêmes ne peuvent que retirer un grand profit d'une foule d'expériences que-leur offrent fans cefle les Arts.- Examen fait par ordre de M. le Maréchal DE CASTRIE, Miniflre &- Sécrétaire d'Etat de la Marine , de deux Cartes de la Mer Baltique. ; ques préfentées par M. re CLERC, ou Expofition des erreurs en tous genres qui ont été reconnues dans deux Cartes marines gravées fans nom d'Auteur ; la première ayant pour titre : Carte réduite de la mer- Baltique, 178$ ; avec un plan particulier du Sund fur une écheile SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 157 double ; un plan du port de Darmuzick, & un plan de la ville de Gothenbourg , en deux feuilles réunies. La Jeconde ayant pour titre : Carte hydrographique du golte d@ Finlande, 1785, pareillement en deux feuilles réunies. À Paris, de l'imprimerie Royale. « Nous fommes perfuadés , difent les Commiffaires qui ont examiné ces Carres, » que M. le Clerc eft trop jaloux de la réputation qu'il s’eft > acquife dans une autre carrière’, qu'il elt trop bon citoyen , trop ami de » l'humanité pour, qu'éclairé fur les erreurs de tous genres dont ces Cartes > font infectées, il ne s'empreffe pas de les condamner à l'oubli. On peut » publier des Cartes géographiques imparfaites fans compromettre la vie » des hommes; mais publier des Cartes marines défectueufes , c’eit tendre >» des pièges fur un grand chemin ». NOUrTEELE MANIÈRE DE COUVRIR LES BATIMENS. Le lieur de la Rue, demeurant à Alençon, vient de compofer une ‘nouvelle forme de tuiles pour couvrir les bätimens à Fralienne, prefqu'aufli à plat que des terraffes. Cette tuile s'applique fur les planchersen charpente fans qu'il foir befoin de voûte, & forme entrevoux par deffous. Elle fe pofe à fec, fi l’on veut, fans mortier ni plâtre. La première épreuve de cette tuile a été faite par le fieur de la Rue, en préfence de M. l’Intendant de la Généralité d'Alençon , le 24 juin dernier, & elle conftate que l’eau lancée à contre-tuile par une pompe à incendie n’a pu pénétrer ces tuiles jointes enfemble fans l'aide d'aucun mortier. Une fétonde expérience a été faire en préfence des Maire & Echevins de fa ville d'Alençon & autres perfonnes : elle conftate également, fuivanc J'atreftation qui en a été donnée audit fieur de la Rue, que l'eau jerée à force de bras à l'encontre de cette tuile, & l’eau feringuée dans les joints n’a pu pénétrer au travers de cette couverture. Enfin, l'inventeur a répéré certe expérience en préfence de l'Ingénieur du Roi en Chef des Ponts & Chauffées de la Généralité d’Alençon, dont l’atteftation prouveégalemenc Timpénétrabilité de cette couverture à l’eau. Poids de cette Couverture: Pour rendre un compte fenfible dela pefanteur de cette couverture, om a pris deux ruiles de certe nouvelle forme, & deux autres fabriquées dans le pays ( tuile du petit moule }, on a eu foin de prendre une des plus forses & une des plus légères de chaque efpèce afin d'en faire un poids réduit, Les nouvelles tuiles, d’un pied de longueur fur 7 pouces : de large, ont donné un poids de . . . . . . . . . . 4 ib 8 onces. Les tuiles du pays de 10 pouces = de long fur 6 pouces de large ont donné un poids de , : . . . . 4 15 @ onces 158 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Le tout attefté par l’homme prépolé au poids du Roi de ladite ville d'Alençon. Chaque tuile de la nouvelle forme pèfe donc une once de plus que ce!le au petit moule fabriquée dans Le pays ; mais cer excédent de poids difparoit par le calcul fuivanr. ; Il entrera par toife quarrée de cette nouvelle couverture cent quatre- vingt-trois tuiles, qui donneront enfemble un poids de . 411 Ïb à I faut deux cens quatre-vingr-huit tuiles du petit moule par toife quarrée de couverture ordinaire, ce qui donne un poids de 630 Ïb Il réfulre donc que la couverture du fieur de la Rue fera, par toife quarrée, plus léoère que celle du pays, de . . 2185: Economie que produit cette Couverture. D’après le calcul Le plus économique , & en füivant les prix du pays, un comble à deux égouts fans croupe , couvert en tuiles, de foixante-quatre pieds & trente-un pieds hors-œuvre, les fermes efpacées de douze pieds, terminé par deux pignons, reviendroit à la fomme de 188$ liv.non-compris la plus valeur des hauteurs des quilles des cheminées que l’on pourroir diftribuer dans cette longueur. Suivant le procédé du fieur de la Rue, la füperficie de ce bâtiment couvert ne coùteroit qu'une fomme de 450 livres. D'après cet apperçu , il eft facile. de juger du bénéfice que l’on feroit fi le comble éroit compofé de fix fermes efpacées de neuf pieds, comme il eft d'ufage de faire dans les bonnes conftruétions. Si l’on y ajoute des croupes , des quilles de cheminées ifolées , fi l'on couvre en ardoife,,8& qu'on enfaïte en plomb, on trouvera bientôt une économie de cinq fixièmes & même plus fur le montant de la dépenfe. Mais quelle épargne ne feroic-on pas fur les bâtimens doubles qui entraînent une charpente difpendieufe, dont le coût s’augmente par la néceflité d’y employer du plomb & du gros fer. Dans la couverture propofée, on évireroit ces doubles combles , vu que l’on pourroit faire des dans-æœuvres jufqu'a cent quatre-vingt-douze pieds en deux feuls rampans qui n’auroient encore au poinçon ou à l’enfaitage que dix à onze pieds de hauteur. Utilité de cette Couverture. L'utilité de cette couverture ef prife, 1°. de l'économie qui en réfulte; 2°, cette nouvelle forme aëre davantage les bâtimens ; 39. elle met à l'abri de la communication des incendies des bâtimens voifins, & procure l'avantage d’éteindre avec la plus grande facilité le feu des cheminées, vu qu'elles ne s'élèvent qu’à trois pieds au-deffus de ces planchers ; 4°. elle met à l'abri de la chûte des tuiles en grand vent, cha dé SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 159 Agrément de la nouvelle forme de cette Couverture. On fe procure par cette méthode des promenoirs fans plomb le long des murs de face, lefquels on peut décorer de différentes manières ; & l'on conviendra fans peine que le coup-d'œil d'une rue dont les bâtimens feroient ainfi couverts, offriroit l'afpe& le plus rianr. Les perfonnes qui défireront avoir des détails particuliers fur cetre efpèce de couverture , fur la difpoñrion des planchers, depuis un bâtimenc de douze pieds jufqu'aux plus grands hors-d'œuvres, fur les différentes conftructions des égouts , & paflages des cheminées au travers defdits combles , fur la dépenfe & le placement, pourront s’adreffer au fieur de Ja Rue, Architecte à Alençon, qui enverra des modèles fi on les lui demande. : - On affranchira les lettres. Mifs Herfchel , fœur du célèbre Aftronome de ce nom, a découvert le premier août une petite comète entre la chevelure de Bérénice & la dernière partie de la grande ourfe, à174 degrés d'afcenfion droite & 31 degrés de déclinailon boréale. : F4 B L'E Des ARTICLES CONTENUS DANS CE CAHIER; D E l'influence de la Lumière, Mémoire lu à une Séance publique de la Faculté de Médecine, le 15 quille: 1786 ; par M. BERTHOLLET, page 81 Cbfervations fur la décompoftrion & recompofition des Minéraux en général ; par M. Bessow, 85 Précis hiflorique d'un coup de foudre tombée fur un Paratonnerre , avec quelques idées fur l'effet des Paratonnerres ; par D. Bret- TINGER , Démonfrateur public en Mathématiques € Hifloire- Naturelle, à Zuric, 90 ZApperçgu ou précis touchant le traitement des Bétes à laine em maladie ; par M. CARLIER , s4 Nouvelle manière de préparer le Phofphore avec les os, traduit de l'Allemand, de M. CRELL, par Modame PiCARDET , de Dijon, 102: Votions préliminaires fur quelques effais concernant la Leffive du fans € l'acide de la matière colorante ; par M. Westruwe. 197 160 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, €. Lerre de M. l'Abbé FoNTANA à M. INGEN-Houz , Médecin de Sa Majeflé Impériale , 110 Mémoire fur un Balancier de Pendule à fecondes ; par M. GRENIIR, 114 Extrait d'un Memoire lu à l Académie des Sciences, fur La nature, € la formation des Fers fpéculaires de Volvic, du Puy-de-Dôme, du Mont d'Or, &c. par M. DeLarere, Doëeur en Médecine, 119 Mémoire fur une nouvelle Muchine à éle&rifer , qu'on peut regarder comme une véritable Pompe à feu électrique: certe Machine étant conflruite de manière que fon effet confifle uniquement à tirer le fluide électrique des corps , & à les éleétrifer par-là négativement, ou par raréfaction ; par M. LE Rox, 129 Lettre de M. GIRTANER, Doëeur en Médecine, à M. DE LA METHERIE, fur le Bouquetin, 136 Lettre de M. BERTHOLLET, à M. DE LA METHERIE, /ur La décompofition de l’eau , 138 Réflexion Jur la Lettre précédente de M. BERTHOLLET , au fujet de la décompofition de l'Eau ; par M. DE LA METHERE , 140 Nouvelles Expériences [ur Acide fpathique ; par M. SCHÈLE; traduit de l'Allemand, par M. GIRTANER, Doëeur en Médecine , 143 Extrait d'une Lertre écrite par M. DescHamps , à M. l'Abbé Rozier, 149 Extrait d'un Voyage au Pic du Tenerif; par MM. DE AR & MonGEz, le 24 Août 178$: & de quelques Expériences chimiques faites fur le haut de ce Pic, avec lg defcription de nouvelles variétés de Schorls volcaniques , _150 Nouvelles Liréraires , 153 “ASP! PER OSB YA TION, Jai lu ,par ordre de Monfeigneur le Garde des Sceaux, un Ouvrage qui a pour titre: Obfervarions fur la Phyfique, fur ? Hifloire Naturelle & fur Les Ares, &c. par MM.Rozier, Moncez le jeune & ne LA MeraErie, &c. La Colleëétion de faits importans qu’il offre périodiquement à fes Leéteurs , mérite l’attention des Sa< vans ; en conféquence , j’eflige qu’on peut en permettre l’impreflion. À Paris, ce 22 Août 1786. VALMONT DE BOMARE, ë) ce" À , ph | À DIR VIN À I Lam Aoust 1786. LA À Dre manques médéem lenn n 18 | Re des $ te L de y sn smolæ nes mené + $ LT s. ri PR it es SE etre mr mere EE ” . Ans ‘ ee : ae ds + neo tiens» ntm ne — N à - 1 - *! S \ < » Me ? \ A La " … De * LS n ï $ t Ge ! À : St Gi , AE Le Ê 3 ge TELE = # } | : i \ NOR sl “ es 4 L 7 SU Mens e , : F à 1 0 À . ? LA î . » À 4 > & & : RE SO "Ag Le SPA | LT TT = id # r, FE” ; L VERT. o APE HUM AR U TT te nu "3 Le AE LPPVETS ET 2 2 Lof: à à A à ] At) 4: 21188 110: initl ! Ni LETETIM ! & ; 4 Paie de: 29: sac et sperme ta DYRR EE! : “4 ; N r: L 4 4 + ” 4 É L } (. # 12 SANS RENTT ANNEES À HE d UE up) x2 Les) | PFOURNAEL DECREYSIQUE. | & 3 SEPTEMBRE 1786. RQ He eu au mL AS RS ra SUITE DES-RECHERCHES SUR L'ORIGINE DE L'ALKALI MINÉRAL NATIF, Par M. LorGNA: Traduit de Plralien, par M. CHAMPY (1) XIX. De la Magnéfie. x, A magnéfie a tant de caractères particuliers & qui lui font propres, que ce n’elt pas fans fondement qu'elle eft diftinguée de routes les autres terres ; elle fut connue dès le commencement de ce fiècle, mais plus par {es ufages en médecine , que par fes propriétés particulières ; ce ne fut que vers le milieu de ce même fiècle qu’on put en avoir des notions plus claires : l'examen qu’en a fait M. Black n’ayant paru qu'en 175$, & celui de M. Margraff en 1759, plufieurs autres Chimiftes ont écrit fur cette matière ; elle a fur-tout été traitée {1 favamment par M. Bergman , que je me crois difpenfé de parler d’un objet dont tout Phyficien eft déformais pleinement initruit. J'expoferai feulement ici ce .que mes recherches précédentes fur le natrum m'ont donné lieu degpenfer & de tenter con- cernant l’origin- jufqu’à préfent inconnue de cette terre, Si nous devons confulter l'expérience & nous arrêter à ce qu'elle enfeigne, il paroîr que de même que le namwum, cette terre fait une partie eflentielle de la fubftance des animaux marins, & qu'elle doit être diflinguée des autres terres calcaires & alumineufes : diflinétion admife par les célèbres Margraff & Bergman , qui dans leurs Ouvrages l'ont appuyée de raifons très-puiffantes; ce dernier veut même que cette terre foit placée au nombre des fubflances primitives jufqu'à ce qu'on ait découvert fen © {1) Voyez le Cahier du mois de Juillet, page 30. Tome XXIX, Part, II, 1786, SEPTEMBRE, X 1£2 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, origine, lur laquelle ce que nous verrons ci-après pourra répandre - mn quelques lurierès, res KART En lifant le Mémoire de M. Georoi, ci-devant cité, je remarquai au $. V, que l'alkali du tartre précipitoit du natrum impur de Ruflie une rantité de magnéfie plus granae que celle qu’on retire de l’eau-mère x fel commun. Je foupçonnai dès: lors que la magnéfie précipitée de l'eau-imère du fel par ün alKali fixe ou volatil, pouvoit avoir lamêmeorigine que le natrum, & le mème ufage dans l’orÿanifation des añimiaux marins, Je m'affermis dans cette idée en confidérant qu'un grand nombre de caractères propres en mème-tems au natrumi & à la magnéfie, rapprochoit tellement ces deux fubftances , qu’elles paroifloienr ne différer entr'elles que dans leur manière d’être comme fel. En effer, 1°. le vitrio! de foude ou fel de Glauber exige 15 parties de foude fur 27 d’acide vitriolique, & le vitriol de magnélie 15 parties de magnélie fur 26 + d'acide vitriolique, ( Bergman , Opufc. to. 1; page 148-150.) 2°. Pour diffoudre quantité égale de ces deux fels il faut à-peu-près fa même quantité d'eau bouillante; le vitriol de foude en exige + de fon poids, & celui de magnéfie près de 3”. Le vitriol de foude & celui de magnéfie prennent à-peu-près la même quantité d’eau pour leur criflallifation , & les figures des criftaux ne different pas fenfiblement entr'eux. 4°. Ces deux fels criftallifent par réfroidiffement , tous deux ont une faveur fraîche & un arrière-goût amer, tous deux expofés à l'air fec erdent leur eau de criftallifation , leur tranfparence, & fe réduifent en une farine très-blanche. Ces rapports, & d’autres que je pafle fous filence, ne me parurent pas totalement accidentels, quelques légères modifications du principe de ces fubftances!, en Je fuppofant commun, pouvant donner lieu aux différences qui paroïffent diftinguertke natrum de la magnéfie, en éloignant peut-être celle-ci plus que l’autre de l’état de fel alkalin. XUXNE # Mais ne voulant pas m'en tenir aux apparences, je revius à l’expérience, en profitant de l’occafion que j'avois de traiter beaucoup de fübfances animales pour les obfervations précédentes." Voici quel fur mon premier effai : ayant pris la matière animale d'un grand nombre d'huîtres fraîches, je la is piler dans un mortier, & macérer dans l’eau pendant rrois jours, je fs enfuite évaporer & fécher l'extrait au foleil, & fur une portion de Ja matière sèche, je verfai de l'acide vitriolique en la laiflant en digeftion fur un feu modéré. Cette diflolution évaporée de nouveau, la matière * + : , : SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 163 sèche fur difluute dans de l eau, filtrée & enfuice réduite à un certain .dégré de concentration. Trois diffolurions d’alkali végétal, d'alkali volatil & de chaux vive ayant été préparées fuccellivement, filtrées & concentrées féparément , je verfai dans chacune une quantité égale de cette diflolurion du fel vitrio- lique ; les trois diflolurions donnèrent un précipité abondant. Ayant décanté les liqueurs, j'edulcorai les précipités peu-à-peu avec de l’eau très-pure, pour les purger de tout mélange de fels neutres , & je trouvai dans tous une terre très-fine, légère, blanche & infipide. Je choifis la portion qui avoit été précipitée par l’alkali volatil , j'en combinai une partie avec l'acide vitriolique , & par les procédés connus j'obtins un fel amer qui fe diffolvoit dans un peu moins de fon poids d'eau bouillante, & s’effleurifloit à l’air, comme le vitriol de magnélie. XXII. Sur l'autre portion d’extrait animal fec, je verfai de l'acide muria- tique, & la combinaifon étant achevée, je fs fucceflivement fécher & difloudre, dans l’eau le fel qui en provint, filtrer & évaporer à un certain point la leffive faline; &, comme dans l'expérience précédente, je verfai de certe leffive dans les trois diflolutions alkaliñes ci-devant décrites , j'en obtins des précipités terreux abondans. Ayant choili celui fait par l'alkali volatil, jen combinai une portion avec l’acide vitrio- liqe, qui me donna un fel amer femblable en tout au précédent & avec les mêmes caraétères du vitriol de magnéfie, XXIII Ayant confervé la terre qui me reftoit de l’expérience précédente, ainfi que les précipités par la chaux & par l’alkali végétal , comme objets de comparaifon, je précipitai d'une livre d'eau-mère de fel commun, par l'alkali volaril , une demi-once de magnéfie. J'en combinai une partie avec lacide vitriolique,'& je confervai l’autre pour d'autres eflais. Le vitriol de magnéfie que j’en obtins fur femblable à celui des opérations des 5s. XXI & XXIL, je le trouvai de même nature & avec les mêmes caratères dans routes les épreuves que j'en fis. Je m'occupai enfuire à comparer la terre animale obtenue par les précipitations précédentes ayec celle de la leflive du fel commun : dans tous les eflais que j'en fs avec foin je ne pus appercevoir aucune diffé- rence ; or, fi la terre précipitée du fel commun eft une vraie magnéfie, ne doit-on pas regarder comme telle celle que j'ai retirée des fubftances animales par les procédés ci devant décrirs? Elles avoient même ténuité, même blancheur , pareille légéreré & infpidité : toutes deux fortement calcinées n’éroient pas cauftiques , ne fe diffolvoient pas dans l'eau, ny occafonnoient aucune chaleur, & éroient attaquées par les acides fans Tome XXIX, Part. H, 1786. SEPTEMBRE. + X 2 164 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, effervefcence; l’une & l'autre produifirent dans la diffolution de nitre d'argent un précipité noir, & un précipité rouge dans celle du muriate mercuriel corrofit. L'une & l’autre mêlées en quantité égale avec la terre vitrifiable, & foumifes à un grand feu dans des creufets féparés, ne donnèrent aucun figne de fufñon. Toutes deux enfin mêlées avec la terre d’alun & expofées féparément au feu, ne firent que s’y durcir. D'après ces preuves, laïflant à part quelques autres eflais, je crus pouvoir conclure avec fondement que les terres retirées des animaux marins par les procédés ci-deflus étoient décidément les mêmes que celle précipitée de l’eau-mèrse du fel commun. XXIV. Après ces premiers pas, je fis quelques expériences für [a matière animale calcinée dont j'avois mis à pare plus de fix onces renfermées dans un vafe bien clos pour qu'elle ne püc attirer le gaz acide méphitique. Je fis diffoudre deux onces de ces cendres dans l’eau bouillante, & la diflo- lution étant filtrée ,-je pris pour mes effais la terre indifloluble dans l’eau reftée fur le filtre. Cette terre ne fit aucune effervefcence fenfible avec l'acide vitriolique, mais bien avec l’acide nitreux fumant ; combinée avec cet acide elle devint zélatineufe , & traitée convenablement, elle donna des criftaux ; mais bientôt ce fel s’humeéta & tomba en déliquefcence. Je me bornai enfuite à faire ufage de l’acide vitriolique , & je reconnus. que la combinaifon étant aflez lente, il éroit néceffaire de verfer l’acide- à différentes fois, d’agiter le mélange avec une fpatule de verre, & à la fin de le dépouiller de l'acide furabondant avec de bon efprit-de-vin très-chaud. Cela fait je jerai cetre terre fur un filtre fur lequel je verfai peu-à-peu de l’eau très-chaude, en continuant ainfi jufqu'à ce qu’elle er fortit infipide. Ayant mis à part la première eau qui étoit amère, je Iæ fis évaporer & criflallifer, j'obtins du vitriol de magnéfie auf parfaic que les précédens. La matière reftée fur le filtre étoit infipide , & ne fe: diflolvoit pas dans l’eau; cependant l'ayant mife dans une capfule de porcelaine avec quelques gouttes d'eau diflillée, & l'ayant abandonnée à la criftallifation fpontanée , je reconnus quelque tems après qu'il s'y étoie formé de la félénite bien caractérifée. Je pris du vitriol de magnéfie ci-deflus qui déjà s’étoit eMeuri, & je le fis dificudre dans un peu d'eau bouillante :ÿfen concentrai la diffolurion, je verfai un peu d’eau de chaux dans une portion de cette diflolution ,. il s’y formaun précipité abondant. En verfant dans la portion reftanre un. peu d’aikali volaril, le précipité fut aufli confidérable. La terre de ces précipités comparée avec la magnéfie qu'on retire de l’eau-mèêre du fel commun , avoit exactement les mêmes caractères. RER nc AEere 7 ten Ke Le SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 165 S X X V. Voilà donc trois fubftances diftinctes, dont Îa préfence dans les animaux marins eft prouvée ; favoir , le natrum ou alkali minéral , la magnéfie & la terre calcaire : article très-important & digne de l'attention des Phyfciens. Il eft à propos d'ajouter ici que ces réfultats donnent toujours plus de force à notre première opinion fur l’exiftence effentielle & non-actidentelle du natrum dans les fubftances animales, On doit maintenant porter le même jugement fur la magnélie, autrement l: terre calcaire leur feroit aufli étrangère, & en ôtant fucceflivement ainf aux animaux une fubftance après l’autre, comme ne leur étant pas effentielle , que feroit enfin l'animal ? Il paroît donc que c’eft dans les êtres vivans dans la mer que réfide le grand réfervoir & du natrum & de la magnélie, fans parler de la terre calcaire dont perfonne n’a jamais douté, XEXCVIE Mais nous allons voir ici un autre phénomène très-important, J'ai dit, $. XX, que les caractères du natrum & de la magnéfie montroient tant de rapports que je foupçonnois qu'ils différoient moins dans leur fubftance effentielle qu'en ce que l’état falin étoir plus décidé dans l’un que dans l’autre. Voiei comment je m'y fuis pris pour le vérifier. 1°. Je combinai avec l'acide vitriolique quatre gros de natrum ( alkali minéral) criftallifé très-pur , & ayant bien lavé le fel de Glauber ou vitriol de foude avec l'efprit-de-vin pour enlever tout acide furabondanc, je le fis diffoudre dans l’eau; cette diffolution ayant été filtrée & con- centrée, jy verfai deux gros d'alkali volatil, & j’obfervai avec plaifir qu'il fe faïfoic un précipité abondant ; je décantai la liqueur , je lavai plufieurs fois le précipité avec de l'eau très-pure, & je trouvai rrois fcrupules quinze grains d'une vraie magnéfie qui accompagnoit l’aikali minéral, & qui érant unie à l’acide vitriolique avoit pu, comme on Le voit, en être féparée par un alkali. Ce fait prouve la vérité de l’obfervation de M. Georoi fur le natrum natif de Ruflie, dont j'ai fait mention ,6, XX. Je m'occupai enfuite de quelques expériences de comparaifon. Tout Le monde fait que par des diflolutions & defications répétées les alkalis fxes fe dénaturent & fe convertiflent en quelque façon en terre. Je me propofai de reconnoître ce qui arriveroit en traitant l’alkali minéral de cette manière, s’il s'approcheroit de plus en plus de l’état terreux , ce qui réfulreroit de certe dégradation , & fi j’en retirerois plus de magnéñe que par l'expérience précédente. 2°. Je pris donc quatre gros de natrumt où foude criffallifée diffoure dans l’eau, je filtrai deux fois par du papier non-collé, & fs évaporer la &iflolution à ficcité. Le {el defléché fut diffous de nouveau, & {a dif» 166 OBSERVATIONS SUR'‘'LA PHYSIQUE, lution encore évaporée à ficciré. Je répérai certe opération fucceflivement jufqu'à fix fois, Après cela je combimai cet alkali, comme je l'avois fait. précédemment avec l'acide vitriolique , je lavai le vitriol de foude avec de l’efprit-de-vin, je le fs difloudre dans l'eau. La diflolution filtrée & concenrrée, j'y verfai deux gros du même alkali volatil, & après avoir décanté , lavé plufeurs fois & féché la terre précipitée , je La trouvai du poids de près de fix fcrupules. Je voulus n'allurer de la nature de cette terre ; à cer effect je La combinai avec l'acide vitriolique, & j'en obrins un vrai vitriol de magnéfe qui s’effleurifloit à l'air, & fe diflolvoit en entier dans une petite quantité d'eau bouillante. : 3°. N'étant pas encore farisfait de cétte épreuve , je crus, pour plus de sûreté, devoir répéter mes expériences ; en conféquence je fis diffoudre dans l'eau quatre autres gros du même narrum , certe diflolution, comme la première, fut filtrée deux fois pour enlever toutes parties terreufes , & évaporée dans le même vaifleau , qui étoit de verre; la matière féchée, je la faifois diffoudre dans de nouvelle eau; & je répétai cette opération avec patience jufqu’à huit fois. [l eft à remarquer qu'après la fixième fois, la fubftance alkaline fe diflolvoit avec peine & nageoit dans l’eau en floccons tels que ceux que la neize forme dans Pair; je combinai avec l'acide vitriolique la matière reftante après la huitième deflication : je lavai avec l'efprir-de-vin le fel qui en provint , & l’ayant fait difloudre dans de l’eau diftillée, j'y verfai, comme ci-devent , deux gros d’alkali volatil : la terre qui fe précipita promptement , ayant été lavée & féchée, pefa près de fept fcrupules ‘elle éroit légère, inhpide , & par fon union à l'acide vitriolique, elle donna encore un {el amer, un vrai vitriol de magnélie. XXVIT On doit fans doute être réfervé ‘dans les indu@tions qu’on tire de quelques expériences particulières: mais il eft des faits d’une telle narure que les conféquences auxquelles ils donnent lieu font au-deflus de toures exceptions. Il nous femble donc que d’après ce que nous venons de voir, il peut être permis d'avancer que de même .que le natrum ou aikali minéral, la magnéfie eft une partie conftituante de la fubftance des animaux marins, que l’un & l’autre contiennent une même terre principe, & qu'elles ne different entr’elles que dans fa condition de fel alkalin ; Pun & l’autre peuvent fe tirer directement des êtres orgarifés qui vivent dans la mer, fans aucune action du feu auquel on voulait les attribuer ; enfin, on peut regarder la magnéfie comme tenant le milieu entre la terre pure & l'alkali marin. De-là viennent & les propriérés communes dont nous avons fair mention au $, XX, & la découverte du beau phénomène obfervé par M. Bergman, & rapporté au troifième volume des nouveaux Adtes de la Société Royale d'Upfal (pages 128 & 129 ), où cet illuftre D éd he SUR L'HIST. NATUREËELE ET LES ARTS, 167 Auteur reconnoft que la magnéfie fe combine avec le foufre, & forme un hépar. Voilà donc pourquoi la magnéfie fe trouve rarement féparée du natrum ou alkali minéral natif ; comment elle s’eft mêlée à tant de matières dans les entrailles de la terre où la mer a féjourné avec fes habirans, dans les argiles , les ftéatites, l’afbefte , les fchiftes, dans les fchorls , quelques fpaths, les ampelites , &c. Voilà pourquoi elle abonde dans Les fontaines falées,où elle eft combinée avec l'acide muriatique ; pourquoi elle fe trouve combinée en fi grande quantité dans le vaite océan dont élle rend l’eau d'une amertume fi rebutante ; pourquoi elle adhère fi fortement au fel commun; pourquoi elle fe trouve difléminée en parties très-fines dans les pierres calcaires qui ont été couvertes par les eaux de la mer. Enfin, voilà comment l'acide vitriolique produire par l’efflorefcence des matières pyriteufes; en fe combinant avec les terres calcaires, forme la féiénire, & avec la magnélie qu'elles contiennent le fel amer , le vitriol de magnéfie, que nous trouvons tantôr dans les fources fouterraines, tantôr en beaux fels fofliles, rel que celui découvert de nos jours dans la Carnie Vénirienne par M. Tavelli, dont j'ai envoy'é récem- - ment à l'illuftre Lavoilier de Paris un effai qui m’avoit été procuré par M. Arduini , illuftre & favant Naturalifte de cette Société, Cependant il ne faut pas fe preffer de conclure, ce dont je fuis très-éloigné, que toute la magnéfie provient de la deftruction des animaux marins ou de la décompofirion du muriate de magnélie, comme s'il répugnoit d'en trouver dans la nature qui ne foit pas entré dans l’économie animale ou das la compoftion des fels marins, une telle opinion feroit prématurée & mal-fondée. EXON TRUE ‘ Du Sel commun & de la Salure de la Mer. Si ce fiècle éroit celui des fyflèmes, ce qui n’eft pas, les vérités lümineufes que nous avons eu le bonheur de découvrir pourroient fervir de bafes & de principes à plus d'une théorie; mais toutes les conje@ures des hommes ne fervent pas à l'avancement réel de la fcience, &'elles en retardent plucôt les progrès; je n'ai en vue que l'avantage de la Phyfique en expofanr ici quelques conféquences immédiates qui m'ont paru fondées, Si je me permets d’y ajouter quelques réflexions, je n'aurai d'autre büt que de découvrir aux autres la vue du nouvel horifon que j'ai apperçu , & par-Jà de donner peur-être lieu à de nouvelles découvertes. C'eft un phénomène digne d’être obfervé que ces veftiges de vrai acide mMuriatiqueé que nous .nommons larent , qui fe trouvent dans tous les corps marins fans aucune trace de fel commun , acide qui s’y manifefte éncore ap'ès tant de fècles qu'ils font pétrifiés ou convertis en terre, D'où peut venir cet acide ? Si on veut qu’il foic le produit du fel commun 168 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, décompofé fpontanément en tant d'années, décompolition que je ne puis admettre fans connoître les intermèdes qui peuvent lavoir opérée », pourquoi fe trouve-t-il dans les coquilles tirées fraîchement de la mer où cependant il n’y a aucun indice de fel commun, $s. VilI- XI, ni aucune ‘apparence de fa décompofition? L'eau de la mer ne préfente aucune trace d'acide muriatique libre, il y eft toujours combiné avec le patrum ou alkali minéral, avec la magnéfie & avec la terre calcaire. Cet acide eft-il donc natif & propre aux coquilles ? ou s'écoule-t-il de l'animal comme un fuc nourriflant deftiné à leur porter le principe de leur vie , de leur accroiffement & de leur configuration à Si nous obfer- vons que-leur vie cefle avec celle de l'animal , qu'après lui la coquille n'eft plus qu'une fimple mafle de terre calcaire figurée dans laquelle on ne trouve rien d'étranger que cet acide, qui y'eft intimement uni., nous feront portés à croire, non-feulement qu'il eft provenu de l'animal, mais encore que pendant fa vie il fervit à porter , à répandre & à maintenir le principe actif & vivifiant, Il paroït donc certain que l'acide muriatique réfide dans les animaux. Mais fi nous n’admettons pas la décompofition continuelle des fels enlevés à la mer par les animaux qui y vivent & s'y nourriflenc , décompofition toujours myftérieufe , nous ferons forcés de ranger originairement cet acide dans la clafle des acides natifs comme Jui. Cet acide des animaux marins -prélente un très-beau fujet de recherches abfolument neuves qui, autant qu'aucun autre, méritera toujours d'occuper l'attention des Phyliciens. Îl eft vrai que fi les fels diflous dans l’eau où vivent ces êtres organifés entrent dans leur eflence, les muriates calcaires & de magnéfie peuvent céder & y dépofer rout ou partie de leur acide en fe décompofant de quelque manière que ce foit; mais la décompofition du fel à bafe d’alkali fxe, qui eft le plus abondanr, ne peut s'admettre fi légèrement par ceux qui connoiffent bien fes garactères & l’incime liafon de fes principes, AIS Si on confidère ici avec attention l'acide dont M. Bergman , enfuite M. de Morveau ( Opuf chim. tom. 1, page 7), & fucceflivement d’autres illuftres Phyfciens ont reconnu la préfence dans les rérres calcaires ,on verra qu'il eft le même dont nous avons parlé, & que j'ai trouvé dire“ement dans les animaux marins vivans. Il-y a donc tout lieu de croire que les craies & en général toutes Les terres calcaires qui contiennent cet efprit acide larenr ,ne font que des dépouilles d'animaux marins décompofés & changés en terre ; mais que faudroit-il penfer d’une terre calcaire qui feroit dépourvue de cet acide ? ou qu'elle peut en avoir été dépouillée par quelque inrermède pujffant, tel “que le feu, S. x ou qu'elle peut n'avoir jamais fait partie de ces animaux. En effec, il ne doit répugner en aucune manière de croire qu’il fe trouve dans la nature une tèrre NP OOPTT NT PO IST le NP RE cu = _ pe UT nn UT lu LU rs . SUR L'HIST. NATUREILE ET LES ARTS. : 169 terre première, & pour ainfi direwzerge ;qui.jim + n eftentréé ; non- feulement dans lanimalifation des êtres marin: , mais méme : dans l'économie d'aucun autre corps ôrganifé, X XX. NÉE 2 4 s. Cependant laïffant à part ces queltions, & nous tenant aux faits, nous reconnoiflons un acide muriatique répandu dans les animaux de la mer., de la préfence duquel il n’elt pas permis de douter, indépendamment de celui qui eft combiné dans les fels neutres & moyens qui y font diflous , & fe trouvent aufli difféminésen petite quantité dans ces mêmes febftances organiques, $. XIV. Nous favons en outre que dans l'immenfe quancité de ces ècres vivans, & particulièrement. dans leur | fubftance animale, f trouvent natifs le natrum ou alkali minéfal , la magnéfñe ainfi que la terre calcaire, terre privilégiée, & que la nature a deftinée par excellence à être mêlée par-rout & dans tous fes règnes. IL eft auñi très certain Que tout être qui vit doit mourir & donner lieu à d’autres de naître & fe reproduire fuccelivement ; de-là cette perpétuelle révolution d'animaux vivans dans l'océan où ils naïflent, périflent & fe reproduifent continuellement. Cependant après la décompofition de ces corps les principes dont ils éroient compofés reftent néceflairement en liberté & en état d'entrer dans de nouvelles combinaifons. Ces faits que maintenant on ne peut nier, nous approchent tellement du laboratoire de la nature, que nous pouvons connoître d'où proviennent la production & la repro= duction perpétuelle de tous les fels dont abonde la mer, qui en aban- donnant la terre les a laiflés épars & enfevelis dans fes entrailles où leurs principes fe trouvent mis en liberté par la décompolition, des animaux marins, En effec, l’analyfe que l'iluftre Bergman a faite de l'eau de la mer prife à foixante brafles de profondeur , à la hauteur des îles Canaries, & à une grande diftance des côtes, confirment admirablement certe conféquence, & fait voir que la mer a en propre un certain fonds de fels diftinéts de ceux qui peuvent lui être apporrés d'ailleurs, & que ces fels appartenans à la mer ont l'acide muriatique pour principe acide, Cs Phyficien très-exact a trouvé (Opufc. tom. 1, page 194), que chaque kaune fuédoife de cerre eau ; qui répond à un peu,plus de 131 pouces cubes de Paris, contient : Sel commun ou muriate de foude ...".., 2 oncet 433 grains Muriate de magnéfie ........+2:.4410% © Qi 2311380 Sélénite + nue à deteie nes ohoe eve ce Qiisnlss 45e D'où il réfulre que les principes falis’ de la mér les plus abondans & qui lui font propres Aone kes”deux fels-muriatiqués à bafe‘de natrum & de magnélie fc’eft-i-dire, une eombinaifon -de Pacide muriatique avec Tome XXIX, Part. II, 1786. SEPTEMBRE. Y ‘æ7o ‘OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ces mêmes fuliftances alkalines dont nous avons démontré l’exiftence dans: les animaux marins. XXXI. Si la mer contient en elle-même & dans fes nombreux habitans les principes des fels qui lui font propres, la falure conftante & perpétuelle qui rélulte de ce fonds inépuifable cefle d'être un myftère, Cette pro- priété caractériftique de l’eau de mer a toujours embarraflé les Phyficiens ; il en eft qui croient qu'elle augmente continuellement, & que par des eflais faits en différens tems, on pourroit connoître l’âge du monde ( Halley , Tranf. Philo[. ann. v715"). Quelques-uns penfent qu'il exifte dans le fond de la mer des mines de fel qui fe diflolvant uniformément renouvelle fa falure : d'autres croient qu’elle eft entretenue par des fources falées qui vientent des terres ; d’autres enfin attribuent à d’autres caufes ce phénomène admirable, Quoi qu'il en foit de ces opinions , ce feroit perdre fon tems que de les combattremaintenant , puifque par des faits nous fommes arrivés au point de connoître que l'océan renferme dans fon fein les mêmes fubftances qui entrent dans la compofition des fels muriatiques , & que ces fels, pouvant s’y reproduire perpétuellement fans aucun fecours étranger, maintiennent par eux-mêmes la falure de fes eaux. Cependant c’eft fans fondement qu'on avance que la falure de la mer eft uniforme dans toute fa male, avec la feule diflérence d’une plus grande intenfité dans les parties méridionales que dans celles du fepten- “trion; on n’a pas plus de raïfon de croire qu'elle augmente régulièrement ; & que par-là on puifle connoître l'âge du monde. Cette uniformité n’a pas lieu, puifque les obfervations prouvent que 100 livres de cette eau ‘ne contiennent prefque jamais 4 livres de fel, & que pouvant en diffoudre juiqu'à 25 livres, il eft évident qu'elle auroït pu en prendre davantage & dans des proportions variables à l'infini. Laiflant encore à part les fels propres à la mer dont la quantité ne peut jamais être conftante, elle reçoit tant d’eaux chargées des fels qu’elles diflolvent fur la furface & dans l’intérieur des terres, tant de différentes fubftances font englou- ties dans le vafte baflin qui la contient , qu'on ne peut jamais prélumer que ces fels fe trouvent répandus également dans routes fes parties, Mais fi la raifon n’admet pas une telle uniformité , l'expérience la rejette auffi. Voyons l'analyfe faite par l'illuftre Lavoifier (Mém. de l Acad. des Scienc. pour 1772). Dans 40 livres d'eau prifes fur les côtes de Dieppe à quatre lieues en mer, il a trouvé: Terre calcaire ....,,........4.%. 0 once 4 gros 36 grains Sel commun ou muriate de foude ..... 8 Gr Vitriol de foude & vitriol de magnéfie .. o 4 26: Muriate de magnéfie ............. I o a Muriate calcaire mêlé au muriatedemagnélie x s 10 SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 170, Quelle différence entre ces réfulrats & ceux de l’analyfe précédente ! Sion répétoit ces expériences avec foin en divers lieux &diverfes profondeurs de la mer, je crois qu'on trouveroit toujours différens produits & en diverfes proportions. Il eft poflible que la falure de Ia mer augmente dans quelqu'une de fes parties, fuivant l'opinion de M. Halley, & que cette augmentation foit régulière; mais aufi elle éprouve dans d’autres parties une diminution également régulière. Il fera donc toujours vrai que dans tous les cas ces gradations manquent de principes , & que l'accroïiffement , la diminution & cette régularité done- nous convenons étant accidentelles , partielles & dépendantes de cir= conftances particulières , ne peuvent jamais avoir aucun rapport avec le cours uniforme & naturel de l’âge du monde, Ë XXXII. I! doit nous fufñre d’être parvenu à: nous aflurer qu'il exifte dans Îa mer même une fource intime & intérieure de fa falure, indépendante du concours de tous fels étrangers, qui fufit pour conferver le fonds permanent des fels muriatiques natifs, mais qui eft fufceptible de variations dans différens lieux de l'océan. En effet , La mafle des animaux qui naïflent, périflent & fe renouvellent continuellement, doit autant qu'aucune autre production de la nature, varier dans différens climats, vu toutes Les révolutions qu'éprouve chaque jour cetimmenfe réfervoir d'eaux qui occupe une fi grande partie du globe que nous habitons. Il n'eft plus permis de douter que le nitre ne s'engendre fur la furface de la terre pendant la décompofition des.êtres organifés, dont les principes pro- chains, c’eft-à-dire, l'acide nitreux & la bafe alkaline , fe font préparés & élaborés fucceflivement par la fermentation des matières préexiftantes dans ces êtres 3 ainfi il n’eft pas étonnant que le fel commun fe forme par la décompofition des animaux marins : fes principes prochains que nous ayons-reconnus comme parties conftiruantes matérielles de leurs fubfances , fe préparent & s’élahorent par leur décompofition , comme il arrive aux principes du nitre pendant la fermentation putride ; mais il nous refte encore beaucoup à faire avant d’établir par des fairs certains les moyens qu'emploie la nature, moyens qui jufqu’à préfent n’avoient pas même été foupçonnés, & dont nous n'avons encore que les premiers a PPPETÇUSe La fuite au mois prochain. Tome XXIX , Part, IT, 1786. SEPTEMBRE. Ye 152° OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; DESCRIPTION DU GAZIFÉÈÉRE, oU NOUVEL APPAREIL Pour FAIRE DU GAZ INFLAMMABLE PUR ET ENTIÈREMEN? DÉGAGÉ D’AIR ATMOSPHÉRIQUE ; Par M BouLARD;,Archieëde, Voyer-Infpeteur de Lyon. D EPU1S que la Phyfique expérimentale s’eft enrichie par des expériences auffi utiles qu'étonnantes & ingénieufes , fur les différentes efpèces de gaz qu'elle a extraïtes des corps, on a'défiré de fe procurer des gaz qui fuflent abfolument purs , autant pour la précifion des expériences, que pour la folidité des fyftèmes formés fur la nature & propriétés des différens gaz. Pour en obtenir, on a donnépour moyen le foin de laifler perdre le gaz qui fe dégageau commencement de l’effervefcence , parce qu'il fe charge de l'air athmrofphériQue contenu dans le vaiffeau. La feule expofition de cette méthode fufñt pour démontrer combien elle eft inexacte , n’y ayant point de moyen pour reconnoître le moment où J’air armofphérique eft entièrement diffipé, Auffi n'eft-on poine d'accord fur la vraie pefanteur fpécifique des gaz retirés d'une même fubftance. Celui qu'on tire du zinc ef ‘eftimé différemment par divers Auteurs : M. Cavendish le croit dans le rapport avec l'air commun, a-pet-prés comme F7 0 LOIRE PT Ans 22008 EYD2 MyFontans remet AIRE SUITE MMSPrietlén ie Kirvran tu MESSE STATION M FA as RE Ne eee HND IE Ces différentes eftimations viennent fans doute de ce que Fair atmof: phérique n'écoit pas entièrement dégagé des vaifleaux d’où lon tiroit le gaz inflammable. Ayant à remplir des ballons de gaz inflammable, j'ai voulu Ie retirer pur, afin qu'il füc plus léger, & que n'étant point mêlé avec de l'air at- mofphérique, il ne fût fujet ni à détonner ni à s’enflammer: La pureté lui procure ces deux avantages qui font inappréciables pour les ballons. Pour que le gaz inflammable ne puifle fe mêler avec l’air atmofphé- rique contenu dans le vafe, il faut en expulfer ce dernier , ce qui peut fe faire en rempliffant entièrement le vafe d’eau & d'acide ; mais en en ufane ain, l’effervefcence feroit bientôt pafler l'eau ; l'acide, & même le fes nat 4 SUR L'HIST. NATURELLE ET LESSARTS. 173 pat le fiphon , & alors tout feroit gâté & perdu. Cet inconvénient m’a paru trop grand, pour que je ne cherchaffe pas à le détruire; ce que je crois avoir fait par le moyen où appareil dont je vais rendre compte, DESCRIPTION DU GAZIFÉÈRE. ‘A une bouteille de verre À, dont le col eft fort & droit, on lute(1) une garniture en cuivre B ayant un rebord en C. À cette garniture s'adapte à vis une efpèce de couvercle D, dont Le rebord vient porter fur celui de la partie inférieure ; entre ces deux rebords on place un difque ou couronne en cuir E. Le couvercle D eft furmonté d'un tuyau F de deux à trois pouces de hauteur, aufli de cuivre & faifant partie du couvercle, Ce tuyau F eft aflez gros pour recevoir trois tubes de verre GHI, qui font folidement lutés ; le premier G defcend jufqu’aux deux tiers de la bouteille, & eft recoudé à environ trois pouces au-deflus du tuyau de cuivre F. Le fecond H formé en entonnoir à fa partie fupérieure, & fur- montant le premier de quelques pouces, defcend enfuite à environ un pouce près du fond de la bouteille. Le troifième I, prenant naiflance à Ja partie fupérieure du couvercle, eft bientôt recoudé dans une entaille faire exprès au tuyau de cuivre F, pour donner plus de folidité à ce tube I, &c Fempêcher de tourner, Ce dernier eft prolongé horifontalement de quelques pouces ; fon extrémité eft garnie de filaffe pour recevoir le tubeK auf de verre, lequel diminue de grofleur pour s'unir au fiphon M, au moyen d’un tube ou manchon L de gomme élaftique fortement attaché fur les deux tubes par deux ficelles, La fig. 2 repréfente un appareil moins difperdieux : à la garniture en cuivre ci-devant décrite, on a fubftitué un bouchon de bois percé à jour longitudinalement pour recevoir les trois tubes lurés comme deflus. Ce bouchon fera garni de filaffe pour boucher très-exactement la bouteille, I! faut que le col de la boureille foit évafé pour que l’on puiffe y mettre premièrement un bourler de cire molle, enfuite de l’eau pour entretenir la cire fraiche, & s'appercevoir fi l'air s'échappe entre le bouchon & le col. . 3 On peut, fur le même principe, conftruire un tonneau pour faire de Vair en grande quantité, f£g. 3. ‘ USAGE DE L'APPAREIT. On ôte le bouchon D, & l’on verfe dans la bouteille de la limaille ou des copeaux de fer , ou toute autre matière qu'on a deflein d'employer; après quoi on la rebouche, ayant foin de l'incliner conlidérablement pour que la matière qu’on y aura mife n'empêche pas aux tubes d'y entrer, On LA HT RP SIERRA" SEEN CPE PEER NRA NT RENE er (x) Ce luteft compof£ de glaire d'œuf, & de chaux vive en poudre, 174 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, place le vafe près de la cuve où l'on veut recevoir l'air, & en difpofer 3: cela fait on verfe de l’eau par l'entonnoir du tube H, quand le vaiffeau eft plein , l’eau fort par le tube M, que l’on ferme avec un petit bouchon N. Alors l'eau monte & fort par le tube G, & arrive à la même hauteur dans le tube H. Par ce moyen l'on eft sûr que l'air atmofphérique eft entièrement remplacé par l'eau, foit dans le vafe, foit dans les tubes. On verfe l'acide vitriolique par le tube H, il fe précipite au fond de la boureille , & fait fortir par le tuyau G, autant d’eau qu'il eft néceffaire pour que l’équilibre foit rétabli. PPADENRE LT L’effervefcence dégagera le gaz inflammable qui montera de fuite au fommet de la bouteille, & contre le bouchon. Ce gaz comprimera l’eau, & la fera jaillir par le tube G, Quand la partie fupérieure du vafe fera dégagée de l'eau qu'elle contenoit, & que le tube G ne trempera plus dans l’eau que d'environ cinq à fix lignes, on débouchera l'extrémité du fiphon M, & on employera le gaz ainfi qu’on en aura befoin, Jufqu’à ce moment on ne verfera l'acide vitriolique qu’en petite quantité & prefque goutte à goutte, pour épargner l'acide qui fe mêle avec l’eau ; & dont une partie fort par le tube G, fans avoir produit tour fon effet. On pourra enfuite précipiter l’effervefcence en verfant plus promptement l'acide. ais) ; Lorfque les matières mifes en effervefcence ne donneront plus de gaz; & que l’on voudra fe fervir de celui qui fera refté dans la capacité fupérieure du vaifleau , on verfera de l’eau par l'entonnoir du tube H, Cette eau par fon volume preffera le gaz & le fera fortir en entier ; & fi le vaifleau eft infuffifant pour produire en une fois la quantité de gaz dont on aura befoin , on recommencera le procédé autant de fois qu'il fera néceflaire, & de la même manière qu'il vient d'être indiqué ; ce qui fe fera avec un fuccès égal, & fans que l'air atmofphérique puille s’y introduire, On aura foin de faire pafler ce gaz au travers de l'eau de chaux, comme à l'ordinaire, pour le purger de l'air fixe qui! pourroit contenir, Quoique je n'aie parlé que du gaz inflammable, cet appareil peut fervir à faire toutes fortes de gaz. Lorfqu’on y fera du gaz acide méphitique , ce gaz aura plus de poids, parce qu'il fera moins mêlé d’air commun, CONCIUVUSION. Le gaz ainfi dégagé eft très-pur & inflammable, J'en ai rempli le piftolet de Volta, & je n'ai pu le faire détonner, quoique j'y aie faic pañfer du fluide électrique avec abondance. SUR L’HIST, NATURELLE ET LES ARTS. 17$ ee me EXTRAIT D'UN MÉMOIRE SUR L'ANALYSE DE L’ALKALI VOLATIL, Lu à P Académie des Sciences le 11 Juin 1785; . Par M. BERTHOLLET. M sssirurs Prieftley & Van-Marum ont réduit le gaz alkalin en gaz inflamimable par le moyen de électricité ; d’un autre côté MM. Schéele & Bergman ont obfervé que l’alkali volatil étoir décompofé par la chaux d'or, celle de mercure & de manganèfe, & ils en ont retiré par le moyen de cette décompofition un air phloogiftiqué, fans déterminer s’il étoic fimplement dégagé de l’alkali volatil, ou bien s’il écoit un produit de fa décompolfition ; mais ils penfent que toutes les fois qu’un corps attire le pblogiftique, qui eft une des parties conftituantes de Palkali volatil, on obtient cette efpèce degaz. M. Kirwan dit pareillement dans fes notes far le Traité de l'Air & du Feu , de Schéele , que la chaux d’or enlève le phlogiftique à l'alkali volatil, & qu’il Je forme fubitement une forte d'air qui en vertu de ces propriétés découvertes par Schéele , efl un air Phlogifliqué. J'ai tâché de déterminer avec plus d’exaétitude Îes principes de l'alkali volatil, & de répandre du jour fur plufieurs opérations de la nature dans lefquelles cet alkalife forme ou fe détruir. 1°. Je me füis afluré que lorfqu’on diftilloit du nitre ammoniacal, une portion de ce fel écoit décompofée, que la partie alkaline en étoit détruite , & qu'il fe formoit de l'eau, I s'eft décompofé dans l'expérience dont je donne les détails dans mon Mémoire , une once deux gros quarante grains de nitre ammoniacal , & il en eft réfulté trois gros foixante-cinq grains d'eau, j’en ai conclu que le gaz inflammable de l’eau eft une partie conftituante de l’alkali volatil; & comme les expériences importantes qu'on a faites fur la for- mation de l’eau ont prouvé qu’elle éroit compofée d'environ fix parties en poids d’air vital & d’une partie de gaz inflammable, il faut que l’alkali volatil ait donné dans l'expérience environ quarante grains de 5az inflam- mable , pour former l’eau avec une portion de l'air vital de lPacide pitreux. 2°. Lorfqu'on verfe de l'alkali volatil cauftique fur l'acide marie déphlogiftiqué , il fe fair une effervefcence qui eff dûe à un dégagement de mofere, l’alkali volatil eft décompofé, & l'acide marin eft ramené à for état natutel; l’air vital qui s’y trouvoit combiné s’eft donc uni avec Le - + 176 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, gaz inflammable de l'alkali volatil pour former de l’eau comme dans l'expérience précédente; le principe aëriforme qui s’eft dégagé, n'arien pu recevoir de l'acide marin dephlogiftiqué ; il exifloit donc dans l’alkali volatil, & 1l s'en dégage toutes les fois que le gaz inflammable de l'aikali volatil lui eft enlevé par une affinité fupérieure. Je me fuis affuré que ce principe étoit de la mofere, non-feulement par les qualités négatives par lefquelles on la reconnoît, mais encore par l’épreuve de l'électricité ; conformément aux belles expériences que M. Cavendish a faires fur la production de lacide nitreux, C'eft cette décompofition de l’alkali volatil que j'ai indiquée dans mon Mémoire lu au mois d’avril de l’année dernière ( Voy. Journ. de Phyfq. Mai 1785 , page 324 ): elle explique quelques obfervarions de M. Schéele, . 3°. Il fuivoic des expériences précédentés que lorfque l’alkali volatil révivifie une chaux métallique, fon gaz inflammable fe combine avec” lair vital de cette chaux & forme de l’eau. On doit donc trouver de l’eau dans cette révivification, & il doir s’en dégager la mofete de l'alkali volatil ; c’eft ce que j'ai conftaté en révivifiant dans un tube de verre de la chaux de cuivre, que j'avois combinée avec l'alkali volatil , & que j'avois fair fécher avec foin ; j'ai déduic de-là ce que MM. Bergman & Schéele avoient laiflé à éclaircir fur la théorie de l'or fulminant, dans lequel l'or fe trouve combiné avec de L'air viral & avec de l’alkali volatil. À un certain degré de chaleur l’air vital fe combine plus intimé- ment avec le gaz inflammable de l’alkali volatil pour former de l’eau, & la mofete de l’alkali volatil eft dégagée : c'eft-là l'origine de cette efpèce d'air phlogifliqué que MM. Beroman & Schéele ont retiré de cette opération ; mais j’attribue principalement les effets de la détonnation de l'or fulminant à l’eag qui vient de fe former, &qui eft fubirement mife en expanfion par la chaleur qui fe dégage en même-tems ; car l'air vital qui eft dans [a chaux d’or , y étant uni par une foible affinité; doit avoir retenu une partie du principe de la lumière, qui lui donne lélaficité dans fon état naturel, & il doit l'abandonner dès qu'il forme une combinaifon plus intime. $ 4°. Je métois fervi des proportions de air vital qui fe trouve dans la chaux d’or; & de l’alkali volatil qui entre dans l'or fulminanc , pour déterminer , par la quantité d’eau qui a dû fe former dans la détonnation, les rapports du gaz inflammable à la mofece dans l’alkali volail. C'eft par ce moÿen d’approximation que j'avois cru reconnoître que l'alkali volatil contient les deux tiers de gaz inflammable en volume ( Journ. de Phyfq, Avril 1786, pag. 273 ); mais depuis lors je me füuis fervi d’un moyen plus direct & plus exact: j'ai décompofé lalkali voiatil par le moyen de l'étincelle électrique ; 1,7 ponce cube de gaz alkalin a donné 3,3 pouce cube de gaz réfultant dela décompofition de l'alkali volatil cette quantité, que j'ai décerminée avec tout le foin pollible & en employant SUR L'HIST, NATURELLE. ET LES ARTS. 177 employant les corrections néceflaires, eft à-peu-près du tiers plus petite que celle qu'a donnée M. Prieftley , & elle eft un peu plus grande que celle de M. Van-Marum. J'ai fait détonner quatre mefures de ce gaz avec , une quantité furabondante d’air vital dans l’eudiomètre de M. Volta, & il eft réfulté de cette expérience que ce gaz contenoit 2,9 de gaz inflam- mable de l’eau |; & 1,1 de mofete; je me fuis fervi dans cette évaluation des proportions de gaz inflammable & d'air vital qui entrent dans la compolition de l'eau , telles qu’elles font établies dans le Mémoire de M. Monge (Mém. de l'Acad. 1785, page 78), c'eft-à-dire, de 145 mefures de gaz inflammable contre 74 d'air vital. Si l'on fuppofe que le poids de la mofete foit au poids du gaz inflammable : : 11:71, le poids de la mofets contenue dans l’alkali volatil doit être à celui du gaz inflammable :: 121 : 29. J'ai déterminé dans un autre Mémoire l’origine de, l’alkali volatil , & d'où vient que certaines fubftances font propres à (M riébration fpiri- tueufe, pendant que d’autres produifent de l’alkali volatil, foi par l'action de la chaleur, foit par la putréfaction, M. Prieftley a conclu de plufeurs expériences qui font répandues dans fes Ouvrages, fur la fin d’un volume qui vient de paroître , que lalkali volatil étoit compolé de gaz inflammable & d'air phlogiftiqué ou mofere ; quoique les théories adoptées dans ce même volume, paroiffent éloigner de cette conféquence fimple ; peut-être cet illuftre Phyficien auroit-il pu citer mon analyfe que j'avois annoncée dans le Mémoire imprimé dans le Journal de Phyfque au mois de mai de l’année dernière, & que j'avois communiquée plus particulièrement à des Savans de la Société Royale, même avant d'avoir lu mon Mémoire à l'Académie des Sciences le 11 juin 1785. EXTRAIT D’UNE DISSERTATION SUR LE FEU NATUREL DE PIrETRA-MaALA; Par le Comte G. DE RAzOUMOwsKY , Correfpondant de l'Académie Royale des ‘Sciences de Turin, Affocié Etranger Libre de la Société Agraire de la même Ville; des Sociètés Phyfico-Médicale & Phyfique de Bâle & de Luric, & de celle des Sciences Phyfiques de Laufanne. C'Esr à deux milles d'Italie des Filicayes, troilième ftation de pofte entre Bologne & Florence , à un mille de l’auberge de Pietra- Mula , & à une trentaine de milles environ de Bologne, que fe trouve Tome XXIX , Part, Il, 1786. SEPTEMBRE, f8 378 OBSERFATIONS SUR LA PHYSIQUE, le fingulier feu de Pierra-Mala , nommé ici fort improprement volcans. puifque l'on n’y voit rien qui reflemble à un volcan proprement dit. Depuis le grand chemin , il faut prefque toujours defcendre pour arriver à l'endroit où il brûle continuellement & naturellement, fans aucun aliment fenfble & eroflier; il fe trouve-là , dans un champ peu fpacieux , dans un fond environné de montagnes de tous côtés, & qui, comme tous les lieux fitués & enceints de cette manière ,. eft humide & un peu marécageux en divers endroits. Toute la partie de ce champ, qui environne le circuit qui renferme le: foyer de cet embrafement naturel, eft recouverte d’une verdure qui forme un excellent pâturage, où l'on mène paître les moutons des environs ;. mais on n'obferve pas un feul brin d'herbe fur toute la fuperficie du fol que s'eft approprié le feu , mais feulement de grands amas de pierres, fragmens des rc avoifinans , & fur lefquels nous fixerons plus loin: Fatrention di leétéur. Le terrein hrilé, comme tout Îe fol adjacent dont nous venons de faire mention, n'eft qu'une serre de marais , noire, qui fourniroit fans doute à l’analyfe chimique à-peu-près les mêmes principes que toutes les: terres de ce genre (x). La flamme naturelle de Pietra-Mala occupoir lorfque nous la vimes, & occupe communément un efpace peu confidérable , & qui peut avoir un pied ,un pied & demi tout au plus de circonférence ; mais l'efpace- qu'elle embrafe quelquefois, fur-tout lors des changemens de tems, lorfque le rems eft à la pluie ou à l'orage, eft bien plus confidérable , & forme un circuit de plus de quatre-vinots pieds, que nous avons méfurés nous-mêmes. L'infpetion attentive , les veftiges & les traces des effets du feu , qui y font par-tout les mêmes que dans le petie efpace occupé aétuel- lement par le feu , prouvent qu'il y a eu un tems où la flamme a /ejourné conftamment fur tout ce errei brélé, & l'a embrafé pendant un certain tems fans difcontinuer , comme elle le fait à l'égard du petit morceau du. fol qu'elle occupe encore préfentement. De l’obfervation que nous venons de rapporter ; il nous paroît naturel, EE (1) M. le Baron de Dietrich n’a pu obtenir de l’huïle de la diftillation de cette: terre ; il n’a eu que de l’eau, ou un phlegme pur ayant l’odeur de fel marin. ( Voyez Ja note de la page 481 de fa traduétion des Lettres de M: Ferber.) M. Volta a obtenu les principes fuivans de Ja diftillation d’une terre d’un autre terrein ardent femblable à celui de Pietra-Mala ; 1°. un phlegme limpide , qui avoit l'odeur de l’acide marin ; 2°, une eau ou phlegme pareil ,‘avec une foible odeur d’empyreume ; ni l’un ni l’autre de ces produits n’étoient effervefcens avec les acides ; 3°. un phlegme jaunûâtre, d’une odeur empyreumatique plus forte que le précédent, effervefcent avec les acides ; 4°, un efprit volatil fluor empyreumatique , plus effervefcent encore avec les acides : le caput mortuum de la diflllation étoit une terre noire, brûlée, foluble en partie dans l’eau forte. (Memorie della Socierg Laliana , rom, II , page 904.) Ts Tor os rue © SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 179 & mème néceflaire de conclure, que l'aliment de la flamme naturelle de Pietra- Mala s'épuife & diminue continuellement & peu-à-peu, & que le feu fingulier qui fait l'objet de cette Diflertation, tend lui-même à difparoître & à s’éreindre peut-être entièrement à la lonoue (1). La chaleur que ceterrein brûlé conferve encore, diminue fenfiblement à mefure qu'il s'éloigne de la flamme, Le fol du fond & au-deflus duquel s'élève le feu de Pietra-Mala , eft une efpèce de terrein tourbeux , une vraie terre de marais; c'eft-à-dire, une efpèce de terre végétale , compofée d'argile, combinée avec des prin- cipes huileux ou phlogiftiques, falins, & martiaux, par conféquent un compofé très-fufceptible d'éprouver une altération plus ou moins grande de la part du feu ; cependant ce fol en a éprouvé très-peu, & l’on eft fort étonné de voir, lorfqu'on en détache un morceau , qu'il n’a fouffert qu'un léger durciflement, & que fes parties fe font feulement un peu pelotonnées & grummelées ; on voit même avec furprife à la partie inférieure de cette croûte, que les petits fragmens de végétaux qu'elle renferme fouvent encore, n'ont éprouvé d'autre changement que celui qui s’obferve dans toute fubftance végétale enfouie pendant long-tems dans Les fonds marécageux ou tourbeux. PIE Cet effec fi peu marqué du feu fur ce fol embrafé , eft d'autant plus frappant , que nous allons voir qu’il n’a pas épargné de même des corps plus durs, plus denfes & plus réfractaires par leur nature que cette terre. Nous ne croyons devoir attribuer certe différence fi fingulière & fi peu préfumable , qu'à ce que le feu agit plus immédiatement fur les pierres qué fur Le fol, qui eft entièrement recouvert & comme enfeveli par celles-ci. Tous les fragmens des pierres qui recouvrent ce terrein brûlé , font des débris des rochers de cette partie des Appenins; ce terrein avec le fol adjacent forme un champ enceint & environné de toutes parts par des rochers qui forment des fommités élevées d'environ vingt à trente roifes au-deflus du niveau de celui-ci, efcarpés fur une partie de leur hauteur, & recouverts par leurs propres éboulemens & un peu de verdure vers leurs bafes, & compolés : r°. De couches d’une pierre marneufe ou calcaire blanche ou 00000 (r) Tel eff encore fans doute le ces d’un autre terrein ardent voifin de celui dont nous parlons, & où la flamme ef déjà prefqu’éteinte, « En remontant. un peu la # montagne ét für la même pente ( dit M: Ferber), on voit-un autre foyer de » petrole brillant, plus grand & plus étendu que.le précédent; mais les flammes » en (ont fi foibles, qu’on les voit à peine de jour », ( Lessres fur La minéralog, de Loulie , page 4:3+) lome XXIX, Part. 1, 1786. SEPTEMBRE, Z 2 LS P: 130 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, blanchâtre, qui fe calcine & donne à la vérité de la bonne chaux blanche, mais qui laiffe roujours un réfidu aroileux , non-calcinable , qui rougit au feu. Ces produits de l’art, la nature Îles obtient abfolument femblables, quoique plus lentement & en moindre abondance; nous en avons vu au milieu de la flamme , & nous en avons retiré plufieurs fragmens de cette efpèce, qui en partie s’éroient réduits en une vraie chaux parfai- tement blanche, & en partie avoient pris la couleur de l’ochre rouge & falifloient même les doiots. D'autres morceaux montrent des traces encore plus évidentes & plus marquées de l’action du feu; ils offrent des parties vitreufes en plufeurs endroits; leur mafle eft noire, elle eft prefque par-tout remplie de bour- foufflures & de porofités ; quelques-uns de ces morceaux ont une analogie très - marquée avec les laves des volcans, par leur action fur l'aiguille aimantée qu'ils font mouvoir d'une manière très-fenfible. 2°, Ces couches marneufes & calcaires font entrecoupées de lits d’un rès micacé , gris ou coloré en rouge ou en brun, argileux ou plus ow moins calcaire ( Quadrum de Wallerius , mais qui ne fe rompt point en: cubes ) qui rougit ou noircit au feu. \ Les fragmens de ce grès que nous avons retirés de la famme de : Pietra-Mala, montrent des veftiges d’altérations moins confidérables que les pierres dont nous venons de faire mention fous-le numéro précédent; mais qu'on ne peut pas plus méconnoître, Quelques-uns fe font ageluti- nés & ont éprouvé un léger degré de fufon ; d’autres font couverts d'un enduit vitreux. 3°. La partie inférieure de ces rochers, prefqu’au même niveau que le: terrein brûlé , eft formée de gros bancs des mêmes pierres marneufes & grèfeufes dont on vient de faire mention , qui dégénèrent quelquefois en lamelles fort minces, plus ou moins horifontales, ou inclinées vers le fud , ou même verticales. 4°. Dans des ravins creufés par les eaux , on voit des bancs qui fervent - de bafes à routes les couches précédentes, épais d'environ deux pouces , & quelquefois fe divifant en lamelles fort minces, d’une pierre marneufe, compacte, verte , traverfée de veines de fpath calcairé blanc , & quelque- fois aufli tellement mêlée de grains fparhiques & quartzeux, qu'elle forme une efpèce de grès. Les furfaces par lefquelles ces bancs fe touchent & s'appuient, font fort fouvent grafles , onêtueufes & rortueufes comme celles de la ftéatire. Cette pierre eft tendre & fragile dans le roc, & fe durcit à l'air; elle eft remplie de fentes & de félures régulières , qui fouvent donnent à fes feuillets la forme d’un amas de cubes entaflés les uns fur les autres, & fa fra@ure eft ordinairement angu- leufe. Ces pierres éprouvent de la part du feu de Pietra-Mala ä-peu-près les x ÉD fol re Agine Le ST SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 181 mêmes altérations que celles dont nous avons fait mention fous le N°, r. H eft digne de remarque , qu'il n'y a que ces dernières qui acquièrent dans cette flamme naturelle la propriété d'agir fur l'aiguille aimantée , preuve que le principe martial que toutes ces efpèces contiennent ett plus abondant dans celles-ci que dans les autres ; mais toutes , fans exception, font devenues plus dures & plus pefantes que dans leur état naturel , ce qu'il faut attribuer au principe aroileux dont toutes participent plus ou moins, D'après les faits & les obfervations que nous venons de rapporter, on fera fans doure porté à croire que le feu de Pietra-Mala agit fur les corps foumis à fon ation , avec la même violence & la même activité que celui de nos fourneaux ou de nos laboratoires. Il eft cependant certain que, non-feulement cette aétivité n’eft pas aufli grande, mais que même le degré de chaleur que tranfmer cette flamme naturelle aux corps , eft à-peu-près de moitié moindre que celle communiquée par un des plus foibles de nos feux artificiels , tel qu’un feu de cheminée ordinaire , puifqu'il eft conftant par nombre d'expériences que nous avons été à même de réitérer mainte & mainte fois & en diverfes occafions, que des fragmens de pierres à-peu-près de même narure & même groffeur que ceux qui fe trouvent à Pierra-Mala , expofés feule ment pendant plufieurs heures au foyer de notre cheminée , exigent pour leur parfait réfroidiffement environ le double du rems néceflaire aw réfroidiflement des fragmens pierreux retirés de notre flamme na- turelle (1). | Il réfulte donc des obfervations & des conféquences rapportées ci-deflus. que’ quoique le feu de Pietra-Mala & le lieu où il brûle, ne portent qu'improprement le nom de volcan , puifque l’on ne voit ici ni cratère, ni vraies laves, ni véritables irruptions volcaniques, cette flamme produit cependant à la longue les mêmes effets que le feu des volcans fur les fabftances foumifes à fon action ; il s'enfuit donc encore, à ce qu’il nous femble, que le feu des volcans n’a pas befoin d’être aufli a&tif & aufi violent que l'ont cru quelques Auteurs, pour produire des effets aufi puiflans que ceux qu’ils produifent, & qu'il n’agit de même que lente- ment, & pour ainfi dire gradetivement ; de forte , que l'on peut même actuellement pofer en principe, qu'un feu pas aflez violent pour faire rougir les pierres , mais long-tems continué, peut produire à la longue tous les effets connus de la calcination, fufñon, &c. | H eft difficile même de douter maintenant qu'il y ait d'autre différence réelle entre le feu de Pietra-Mala & [es feux volcaniques ou fouterrains ,. (r) Les flammes font très-vives , fort volatiles, donnent peu de chaleur, dit M. le- Baron de Dietrick, page 419 , note (4) de (a traduction. 182 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, qu'en ce que le premier, brûlant dans un air libre & ouvert de tou côtés , eft plus divifé, a moins de chaleur , & eft par conféquent moins puiflant que ces derniers , qui, renfermés à une grande profondeur dans l'épaiffeur des couches terreltres, font plus condenfés, & font doués d'une chaleur exceflive , qui fans doute eft l’agent tranquille, mais prin- cipal des- plus grands & des plus étonnans phénomènes volca- niques. Cette propoftion nous paroît amenée jufqu'à l'évidence , par la comparailon des phénomènes volcaniques, rapportés par plufieurs bons obfervateurs, & ceux quenous venons de faire connoître, L'efpace, fouvenc très-confidérable, de tems qui s'écoule d’une irruption à une autre, & pendant lequel on ne peut fuppofyr que le feu fouterrain foit dans une inaction parfaite , & la chaleur que les courans de laves confervent fouvent pendant plufieurs années , tout concourt à mettre cette hypothèfe prefqu’au rang des vérités phyfiques les mieux établies. Quant aux matières primitives des laves , on ne peut fe refufer non plus à penfer qu’elles ont une grande analogie avec Les matières pier- reufes, travaillées & élaborées par notre feu de Pierra-Mala, & l’on ne peut guère douter d’après les faits rapportés ci-deflus , que plulieurs de celles-ci feroient devenues de vraies laves, qui auroient eu une reflem- blance parfaire avec les produits des volcans, fi elles avoient éprouvé un plus grand degré de cuiflon ; il y a auf lieu de préfamer que la couleus obfcure & foncée de la plupart des laves, le développement du principe martial qui leur donne la faculté d’agir fur l'aiguille aimantée, & qui étoit déjà contenu dans les fubftances auxquelles elles doivent leur origine, ne font dûs originairement qu'au phlogiftique ou au principe inflammable des fubfances végétales ou animales, décompofées & unies aux pierres ou aux rerres, fur lequel le feu agifloic, tout comme les mèmés cffers fonc évidemment dûs dans le feu de Pietra-Mala, au phlogiftique dégagé par la chaleur, du bumus , au-deflus duquel celui-ci brûle, & combiné peu-a-peu avec ce principe martial des fragmens pierreux, avec lequels il fe trouve en contaét à mefure qu'il fe dégage Îl nous refte préfenrement à jeter un coup-d’œil fur la nature du feu de Pietra-Mala, & à examiner les caufes qui l’ont produit & qui J'entretiennent. Plufeurs Auteurs ont avancé diverfes opinions fur les caufes & la nature du feu .de Pietra-Mala, & M. de Volta les a recueillies & rapportées avec beaucoup de foin dans les Mémoires cités au com- mencement de cet écrit. Nous confidérerons les objets dont nous avons à nous occuper dans get article, fous deux points ou chefs d’obfervations : dans le premier, TT LE SUR L'HIST, NATURELLE ET LES ARTS. 183 #ous dirons un mot de la nature du feu de Pierra-Mala ; fous le fecond, nous rechercherons les vraies caufes de ce phénomène. L’importante découverte des gaz ou fubftances aériformes, a jeté un grand jour fur les phénomènes de l’ignition , & combuftion en général , & fur les phénomènes du genre de celui qui fait Pobjet de ce Mémoire en particulier. Quand les expériences Les plus ingénieufes ne prouveroient pas que cette flamme naturelle eft due à de l’air inflammable en combultion, la fimple infpeétion attentive & l’obfervation de celle-ci , fufhiroient pour faire foupçonner celui-ci, par l'analogie que l’on remarque dans la manière de brûler de cette flamme avec celle de l'air inflammable des marais ( Voyez les Lettres fur l'air inflamniable des Marais, de M. de Volta, traduites en françois ), & par une obfervation très-intéreffante,. que nous avons faite, & qu’il convient de rapporter ici. Comme il règne prefque toujours un vent plus où moins fort dans le vallon où brûle le feu de Pietra-Mala (x) , fi l’on fe met derrière la Aamme du côté oppofé à celui contre lequel fouffle ce vent, on voit avec furprife s'élever très-haut, au-deflus de celle-ci, comme une vapeur légère , aériforme , très-cranfparente, & qui n’eft reconnoiflable que par le mouvement de vacillation qu'elle fait éprouver aux rayons vifuels, de: manière qu’il femble que les montagnes que l’oû voit aw travers , danfent & s'agirent du bas en haut ; & cette efpèce de vapeur n’eft fans doute que l'air inflammable qui fe dégage continuellement du foyer de l’embrafe- ment, agité par le vent & l'aéte même de la combuftion (2). Une autre: es (1) Nous avons obfervé deux fortes de vents ou courans d'air ; Pun , qui agite toute la mafle de l’atmufphère fufpendu au-deflus de ce vallon , efttrès-fenfble ; l’avtre, ne fe fait remarquer que par fon aétion fur la flamme ; on voit fouvent celle-ci fe jeter toute entiere , tantôt d’un côté , tantôt d’un autre , & cela avec tant de rapidité , qu’en moins de quelques minutes, les différentes direétions fur lefquelles elle fe porte ont parcouru toute la circonférence décrite par les divers shumbs de la bouflole; alors fi l’on fe trouve devant le jet de la flamme & à une petite diftance de celle-ci, & que Von (e baiffle un moment, on fent au vifage une efpèce de vent fi chaud , qu’il fuffo- queroit fon le refpiroit pendant quelques inftans. Il y a apparence que ce fingulier phénomène, qui n’a point encore été obfervé, que nous fachions, provient de quelques petits courans d’air qui s’échappent de terre dans le voifinage même de la flamme. Comme tous les points de la circonférencé du foyer aétuel de celle-ci , ne font pas abfclument à une égale diflance les uns des autres, il en doit réfulter auf des dilatations inégales des couches inférieures de l’atmofphère les plus voifines de cette flamme , qui doivent foiliciter des courans des colonnes de air plus denfes qui touchent celles-ci, qui s’échauffent confidérablement en paflant au travers du feu. (2) L'on pourroit peut-être reconnoïtre le terme extrême d'élvaron fenfible de cette vapeur au-deffus de la flamme , au moyen d’un petit ballon de papier de foie ; nous difons , Ze serme de fon élévation fenfible, parce qu’il eft fans doute une 184 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, obfervation vient encore à l’appui de celle-ci ; c’eft l'odeur qui s’exhale de ce foyer embrafé , qui eft exaétement celle de l’air inflammable (1), & que lon avoit déjà comparée avant nous, & avant que l’on connût la théorie des gaz, à celle qui fe dégage d’une diffolution de fer par l'acide vitriolique (2). : Mais à ces obfervations, qui feules furoient pour indiquer la vérité, fe joignent les expériences les plus confirmatives & les plus convain- cantes de M. J’olta; en 1780, foupçonnant qué ces flammes étoient entretenues par de Vair inflammable , il jetta fur le terrain des pailles & d’autres corps légers , qui furent foulevés & agités comme par un foufile léger. Pour lors il fic creufer un peu la terre dans le lieu même d'où fortoit la flamme, & ayant fait venir de l’eau dans ce petit foifé, la flamme difparut , mais il vit fortir du fond de l'eau des petites bulles d'air. I agita pour lors la vafe avec un bâton, il s’en dégagea affez d'air pour qu'il püt le recueillir.à la manière ordinaire , & layant éprouvé à fon auberge, il reconnut que c’étoit de l’air inflammable femblable à celui des marais. Dans un fecond Mémoire de M, F’o/za fur le même objet, qui fe trouve dans le même volume de l'Ouvrage cité, cet Auteur dit , que la flamme de ce terrein ardent paroît bleue ou azurée la nuit , mais qu'elle lui fembla rougetre quand il la vie, & il en donne pour raifon , que cet effet étoit produit par l'éclat de la lumière du foleil qui donnoit deflus. Lorfque nous obfervimes cette Aamme , elle avoit la couleur jaune de la flamme ordinaire d’un brafer, mais plus vive & plus claire (3). Cependant, comme c'étoit environ entre les neuf & dix heures du matin, l'on com- prend que le foleil éçant encore fort éloigné du point le plus élevé de fa révolution diurne, fon influence étoit encore prefque nulle dans ce moment, dans des lieux auf enfoncés que celui où fe trouve ce feu naturel ; on n'attribuera pas fans doute non plus cette couleur à la fimple influence du jour, car tous ceux qui ont enflammé de l’air inflammable en quantité aflez confidérable pendant le jour , favent bien que cet air conferve fa couleur bleue ou azurée tout comme la nuit,avec la feule hauteur où cet air raréfié e mêle réellement à l'air atmofphérique , qu’on ne pourroit le reconnoitre par l'expérience du ballon aéroffatique. (x) Nous fommes obligés d’avouer, pour ne point manquer à la fcrupuleufe exactitude que nous nous fommestoujours prefcrite, que nousravons pu juger par nous- mêmes de cette odeur, érant prefqu’entièrement privés du fens de l’odorar ; mais nous avons un témoignage non fufpeët de notre aflertion , dans la perfonne d’un villageois fimple & ingénu , notre domeftique , qui nous accompagnoit , qui, fans connoiffances, étoit auffi fans fyflêmes , & n’avoit à cet égard d'autre expérience pardevers lui, que d’avoir vu faire de l’air inflammable , & de l’avoir fenti. (2) M. de Martigni, cité par M. Guertard , avoit fait cette comparaifon. (3) « Ces flammes font très-füubtiles, claires & d’un jaune blanc , comme celles w d'une huile enflammée », dit M. Ferberz, Lestres fur L'Italie, page 422. différence ; | SUR LHIST. NATURELLE ET LES ARTS. 135$ différence, peut-être, qu'elle eft un peu plus marquée & a un peu plus d'intenfité la nuit que le jour. Quelle eft donc la vraie caufe de cette couleur de la flamme jaune & rougeatre de Pietra-Mala , qui n'efl pas, comme nous venons de le dire, celle que produit Pair inflammable pur? Cette caufe eft, on n’en peut douter , la même qui colore nosfeux artificiels , tels que la flamme d'une chandelle ou d'une bougie, celle du bois, &c. Certe couleur eft le produit de la combinaifon de l'air inflammable & des matières huileufes & phlo- giftiques, que la chaleur dégage des corps en combuftion ;-cette aflertion it confirmée d’une manière évidente par l'obfervation que nous avons faite, & qu'ont faite avant nous M. Fo/ra & tous ceux qui ont vilité le feu de Pietra-Mala, de la fuie qui enveloppe toutes les pierres qui recouvrent tout ce rerrein brülé. Si l'on fe rappelle ce que nous avons dit plus haut fur la nature du fof de ce rerrein, on n'aura pas de peine à concevoir ici la produétion de cette fuie & l'altérarion de la couleur de la flamme par elle ; il eft donc offible que la flamme de Pietra-Mala ait, pendant la nuit , une teinte légèrement bleuâtre; mais nous ne pouvens nous empècher de croire qu'un obfervateur vigilant & attentif n'y verra jamais de bleu pur & clair, parce que certe couleur n'appartient qu'à la flamme de l’air inflammable le plus pur, ce qui, nous Le répétons , n’a point & ne peut avoir lieu ici. Nous venons de voir que la nature du feu de Pietra-Mala eft aujourd’huf très-bien connue & démontrée par des expériences & des faits incon- téftables ; mais il n’en eft pas de même de la caufe première de l’ignition de ce rerrein ardent. Tout ce que l'on a dit là-deflus jufqu’à préfent fe réduit à de fimples conjeétures ; nous ne prétendons pas îci lever toutes les difficultés, & décider la queftion; ce feroit une entreprife que nous regardons encore comme impofible, & qui reftera peut-être toujours telle: notre but eft donc uniquement de difcuter les opinions des Aureurs fur cer objet, & de râcher de faire quelques pas de plus vers la vérité ; en nous guidant fur les loix connues des analogies , qui nous paroiflent le feul fl propre à nous tirer de l'obfcuriré & du labyrinthe, dans les #aits incertains & doureux & dans les myftères cachés de la nature. Il femble que M. le Baron de Dietrich , dans fa traduétion des Lettres de M. Ferber , eft porté à artribuer cet effer à l'embrafement de quelque matière bitumineufe, lorfqu’il die qu'il croit que les eaux de Pierra -Mala font bitumineufes, page 42, note (c). M. de Volsa dit que l'air inflam- mable qui entrerient le feu de Pierra-Mala, pourroit bien lui être fourni par quelque mine de charbon ; mais il penche encore plus volontiers à croire , que le rerrein ardent de Pierra-Mala étoit autrefois un marais enfeveli accidentellement par la fuire des tems fous les pierraiiles qui recouvrent ce terrein Tome XXIX, Part. II, 1786. SEPTEMBRE. Aa 186 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Cette opinion de M. F’olia, toute naturelle qu'elle paroîr, ef démentie ar les faits 2x l’obférvation ; fi ce terrein avoit été autrefois un marais enfèveli par la fuite des tems , il eft clair qu'il devoit être beaucoup plus bas que le niveau actuel de fon fol, & celui-ci ne devroit préfenter à l'œil que les matières qui ont contribué à l'exhaufler, que l’on fuppole être ici les pierrailles & les débris détachés des montagnes. Mais nous avons fait voir plus haut, que ces débris pierreux ne forment que des amas fuperfciels, & la moindre partie de ce fol , dont le fond , comme nous l'avons dit, eft une terre de marais de même nature que tout le fol adjacent, recouvert de verdure & au même niveau que lui, Ainfi donc , loin que l'on puifle inférer ; que fous le terrein actuel ait exifté jadis un marais enfeveli par les éboulemens des rochers , il nous paroît au contraire évident, que ce terrein lui-même n'étoit qu'un marais, où plutôt un marécaye peu fpacieux, defféché par la chaleur du feu de Pietra-Mala. : IL refte donc toujours à favoir quelle a été la caufe véritable & primitive de l’embrafement des vapeurs de ce marais, qui aflurémenc n'a pu fournir feul & aufli long-tems à cetre inflammation. Il y a plus, c'eft que l'expérience nous prouve ( & perfonne ne le fait-mieux que M. Volta, qui, dans fes Lettres fur l'air inflammable des marais , 4 fourni nombre de faits en confirmation de certe vérité), que l'air inflammable des lieux qui en font le plus richement pourvus, & defquels il le dégage Le plus abondamment, ne fauroit s'enflammer fans un fecours étranger, & ne brûle que quelques inftans, parce qu'il ne fe dégage dans ces endroits des matières putrefcibles qui le produifent, qu'en petite quantité à la fois. IL faut donc chercher la caufe de la production de la flamme naturelle de Pietra-Mala, dans Les fubftances fufcepribles de s’enflammer naturelle- ment & d’elles-mêmes par l’aéte fimple de la décompoftion ; felon ce principe, l'autre conjecture de M. Volta, que nous avons rapportée ci-deflus, & qui attribue le phénomène en queftion à la décompofition de quelque mine de charbon, feroit mieux fondée, fi l’on trouvoit ici des mines de ce bitume ; non-feulement nous n’en avons trouvé aucun veftige, mais nous ne croyons pas même qu'on en trouve le moindre (du moins en quantité aflez confidérable pour produire une inflammation continuée ) dans toute cette partie des Appenins comprife entre Bologne & Florence; il faut donc recourir à des caufes encore plus vraifemblables par l'accord des effers & des obfervations. L fe trouve un grand nombre de matières, ou plutôt de mêlanges fufceptibles de déronner ou de s’enflammer par elles-mêmes & fans aucun fecours étranger; telle eft certe fingulière détonnation du nitre cuivreux avec l’érain , obfervée & décrite par M. Higgins ( Tranfa&. philofophig. vol, 413, part. 1 , art, 16) ; le phénomène du volcan J 1 PP À eu IR cn OR ose DL ' t “SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 197 artificiel, découvert par Lémer: ( Mém. de l’Acad. Roy. des Sciene. ann. 1700 ); l'inflammation fi connue du foin en ta:; cel e des herbes avec des matières grafles ( Journ. de Phyf. tom. XX. part. II, Juiller 1772, pape 3,6 Novembre 1784), &c. Nous n'avons choifi que les exemples qui paroiflent les plus appro- priés au cas dont nous nous occupons, puilque les fublitances falines & métalliques & les fels compofés qui peuvent réfulter de leurs décompo- fiions & nouvelles combinaifons , peuvent fe trouver dans les entrailles de la terre; mais il paroîc qu'il n’exifte rien de pareil ici. Les matières végétales pourroient peut-être aufli fe trouver mélangées avec des matières grafles ou huileufes, foi dans la terre, foir à fa fuperñcie ; mais fi elles exiftent à Pietra-Mala , il paroît qu'elles ny font ni aflez abondantes pour être fenfibles, ni affez humectées pour s’échauffer , & par conféquent pour s'enflammer (1). Si l'on fe rappelle donc que nous avons démontré ci-devant que tous les rochers & les pierres de ces cantons contiennent du fer, fi l’on réfléchit que le fer pur eft rarement abondant dans les rochers de cette nature, & fe trouve plus communément uni aux matières pyriteufes , fi l’on fait que la décompofition des pyrites martiales produit non-feulement de la chaleur , mais une inflammation réelle, peut-être ne répugnera-t-on pas à penfzr, comme nous le faifons, que c’eft à la décompofiti:n des pyrites fulfureufes, répandues en très-perites particules dans les couches de ces rochers, qui, comme on l’a vu, s'étendent fous le fol ardent , qu'eft dû le dégagement lent, mais continuel de l'air inflammable, & fon inflam- mation au moyen de l'humidité néceflaire à ia décompofition des pyrires, qui peut pénétrer de l'extérieur à l’intérieur par quelques fentes dans la terre, ou être fans cefle entretenue par un ruilleau que l'on obferve aux environs de ce rerrein ardent dans un ravin dont le niveau eft au-deflous, de celui de ce terrein. La vapeur inflammable qui fe dégage de ces rochers , eft obligée de s'ouvrir un paflage au travers du fol tourbeux de ce terrein , & y acquiert fans doute les propriétés de l'air inflammable des marais impur ou mêlé de parties fuligineufes & phlogifliques, ainft que nous l'avons prouvé ci- deffus. Cette conjecture que nous ne prétendons donner que pour ce qu'elle eft, nous paroit d'autant plus vraifemblable, que c'eft principalement dans la partie inférieure de ces rochers & fur-tour dans les couches qui reffortent du fol au même niveau que le terrein ardent , que l’on apperçoit le plus évidemment, les traces de la décompolirion du fer, celles-ci no (x) L'agent de toutes les infammations naturelles connues ‘ufqu’à préfent ef Phumidité ; partant où cele-ci manquera; ou partant où il n’ex'le-a point de combinaifon fufcentible , de décempofition par humidité, l’inAam nation naturelle & fpontanée ne fauroit avor l'eu. Tome XXIX, Pan. Il, 1786. SEPTEMBRE, Aa2 188 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, étant pour l'ordinaire d’un jaune où d’un rouge d'ochre martial ; le fer pur dans les matières rerreufes ou pierreufes auxquelles il eft uni, les pénètre & les colore routes plus ou moins également & uniformément ; ici, quoique le principe martial fe montre abondamment dans toute la malle de ces couches , c’eft inégalement , & il eft des parties ( qui fonc rares à la vérité}, qui ne paroiffent point en contenir; c'eft ainfi que j'ai vu une couche de grès , décrite ci-devant, dont le principe martial qui la coloroit, s’offroit dans la pierre fous la forme d’une zône concen- trique d’un jaune brun, fort épaifle, tandis que la partie qu'elle enceignoit étoit grife & ne paroifloit point martiale. Pour que notre conjecture acquière le degré de l’évidence , il auroie fallu trouver dans les rochers dont nous parlons, des particules pyriteufes non encore décompofées ; mais nous n'avons pas eu le tems de faire les recherches néceflaires fur les lieux (1). Se ————— (1) Depuis que ceci a été écrit, nous avons reçu une Lettre de M. Bersrand, Miné= ralogiit: eflimable, qui confirme notre opinion ,& dans laquelle M. B. s'exprime de la manière füuivante : « Dans les premiers jours de Septembre 1767, j’ai aufli examiné » le feu de Pietra-Mala , vers les fx heures du foir. Le feu étoit plus apparent & » occupoit une plus grande étendue que celle que vous défignez ; le tems étoit » couvert, & il avoit plu dans la matinée. On me dit que quand le tems avoit été » humide, la flamme toit plus apparente de loin dans la nuit. Sans avoir , comme » vous, Monfieur, examiné les environs du lieu, j’apperçus très-bien l’odeur forte » de la vapeur qui s’élevoit. J’attribuai, comme vous aufli , cette inflammation à la » décompofirion des pyrites par l'eau..... Et ce qui me fit naître für le champ cette » idée , c’eft qu’un habitant des lieux noffrit à acheter des pyrites globuleufes & des » marcaflites cubiques , qu'il me dit avoir trouvées dans un ravin peu éloigné , où > coule un petit ruilleau dans les tems de pluie , » &Gç. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 189 OBSERVATIONS Faites à Laon d'heure en heure fur la Bouffole de variation de M. CouLoms , de l’Académie Royale des Sciences & fur celle de déclinaifon de BrANDER , pendant les années 1784 6 1785 ; Par le P.CoTTE, Prétre de l'Oratoire , Correfpoñdant de l'Académie Royale des Sciences, &c. Bouffole de variation de M. C'êuLoME. L'acanémrr Royale des Sciences propofa pour fujert du prix qu’elle devoir donner en 1775, cette queltion: Quelle ef! La meilleure conflruétion des bouffoles de déclinaifon , & quelles font les loix de la variation diurne de l'aiguille aimantée ? Ce prix ne fut diftribue qu'en 1777, & il fut partagé entre M. Wan-Siinden, alors Profeffeur de Philofophie à Francker en Frife , & aujourd'hui Profeffeur de Phyfique, de Mathématiques & d'Aftronomie à Amfterdam,.& M. Coulomb Capitaine au Corps Royal du Génie, & aétuellement de l’Académie Royale des Sciences. Le Mémoire de M. Van-Swinden occupe le: Tome VIII des Savans Etrangers prefqu'en entier. Celui de M. Coulomb fe trouve dans le Tome 1X, page 167. L'Académie a fait conftruire plufeurs bouffoles d'après les principes: de M. Coulomb, & elle m'en a confié une en 1783; je l’ai établie fur une pierre de taille au rez-de-chaufée, L’aiouillea dix-huit pouces de longueur: j'ai fixé à fon extrémité ane petite aiguille très- fine qui excède certe’ Jongueur d'un pouce. Sa plus grande largeur eft de fix lignes trois quarts, & {a moindre largeur de deux lignes un quart: elle a uneligne d'épaiffeur ,. & elle pèle avec fon lefte de cuivre quatre onces deux gros onze grains. J'ai vérifié avec de la limaille de fer qu'elle n’a que deux pôles , dont le centre eft à onze pouces fix lignes du pôle boréal, & fon ceritre de graviré eft à douze pouces huir lignes trois quarts du même pôle : ainfi: ces deux centres d fferent d’un pouce deux lignes trois quarts. Le point de fufpenfion eft à quatorze pouces du pôle boréal. La foie qui fufpend' Paiguille a dix huit pouces de longueur : elle eft tirée d’un écheveau de foie te:le que les vers la donnent : les fils n’en font point tors, ils font feulemer t réunis avec de la gomme, & frottés avec du fuif, pour que Fbumidité ne s’y attache pas 150 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Je ne dois pas diffimuler que la grande mobilité de cetce aiguille ef caufe qu’elle a de la peine à fe fixer. Sa fenfibilité eft telle qu'elle eft prefque toujours en mouvement, malyré les précautions que j'ai prifes pour intercepter le paflage de l'air. Les aiguilles de M, de Caffrni ne fonc pas aufli fenfibles, Gus date parce qu'elles font établies dans les cabinets de l'Obfervatoire bais fur le roc, & à l'abri par leur éloigné- ment des rues, du mouvement que les voitures impriment au terrein, M. de Caffini a remarqué, & j'ai remarqué aufli, que l'approche de l'obfervateur même dépouillé de route efpèce d'ufteñfile de fer, agite l'aiguille, de manière qu'il faut faire l'obfervation le plus promptement qu'il eft poffible, Ne pourroit-on pas attribuer cet effet , & en général les mouvemens fréquens d’ofcillation que j'obferve, foit à la dilatation de l'air occafionnée par l’acmofphère du corps de l’obfervateur , foit aux variations de la température RIDE aux changemens qui furviennent dans le poids de l'air, & qui produifent alors fur l’aiguille le même effer que l'on remarque dans le baromètre, où l'air agit fur la mafle de mercure enfermé dans la cuvette, même lorfqu’elle eft fermée avec de la peau, du bois ou du métal ? ; Quoi qu'il en foit, cette grande fenfibilité fait qu'il eft très-dificile de faiär la vraie direétion de Paiguille. Comme je l’obferve prefqu'à chaque heure du jour, lorfque je la trouve ainfi en mouvement, j'écris dans mon journal , agitée, & ne pouvant afligner alors fa véritable direction , ces obfervations ne peuvent entrer comme élémens dans les réfulrats. J'ai placé mon aiguille dans le mois d'août 1783 , 8 après l'avoir laiflé repofer pendant plufieurs jours, j'ai déterminé à 5° 12' oueft Le zéro d'où je pars pour mes obfervarions., M. de Caffini les a annoncées dans fon Mémoire fur les Mouvemens diurnes de l'aiouille aimantée , publié en 1784 dans le Journ. de Phyfique , rome X XIV, page 257. Je pourrois réfenter ici les réfulrats de chaque mois d’obfervations depuis le mois d'août 1783, jufqu'au mois de décembre 178$ ; mais pour abréger , je ne donnerai que les réfulrats des années 1784 & 178$, avec le rélultac général de toutes les obfervations pour chaque heure. On verra donc, 3°. la variation moyenne conclus du nombre des obfervations faites à chaque heure; 2°, le nombre de ces obfervations ; 3°, le nombre de fois que aiguille a été agitée à chaque heure, SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 191 Éleures 1784, 1785« Réiüultat général. de VU EU fo .% |Fariar.|Ne. des Ne. des Var:ar.| Ne. des N°. dés | Variar, | N°. des\Ne, des jour. moyenn.| Oferv.agitar.||moyenn. \Obferv. agirat.||moyenn. Obferv. agitat. matin, |[o * ” re CHENMT: V, ]1.:17.48.| 90 40e mt oilrére Gs |fte45.242, 2$1, 10. VI. |r.rs.3o) 33. 4 2, 9.37.| 192: 4 1.412,33.) 185. 8. VII. |1:31.22.] 260. | 29. 212.23. 202. 31. 1.25.28.| 488. 67. VIII. |1.36.47.| 194. | 69. m$5-59.| 1754 | 52 flre2æ.ss.l 419, | 142. EX. |1:36.53.| 168. | 41. [lrssas 5] 124. | 36. {lr22.so. 346. | 97. X, 13734] 135. | 48, [lr.sé.ro.l 116, 10. 1.27.44.| 294, 71e XI. |t47.20.| 177. | 37. [213,454] 172. 24. 1.40.20.| 394, 65. XII, 1:57. 8] 191, | 45. |2.22.46.| 179. 18. 137. 0. az. 69, foir. I: 2. O. 7.| 132. 19. 2.30.26.| 109. 8. 1,52.51.| 277. 29, TE lies él re NL22, 2.29. 9.| 103. 7. 1-50.33.| 379. 31. III. -|2. 0.59.| 92. | 28. {||z.2o.35.| 53. 10. 1.48.31.) 176. 40. IV. |n52.20.| 104. | 17. |l2.14.43.| 66. 6. 1.41:27.| 105. 16. V. |1:38.37.| 140. | 36. [|1.59.41| 86, 0 1.13.16.| 271. 44. VI. |1.31:31.) r6r. |: 47. 2e O.29.| 114. 16. 1.26. 4.| 319. 70. VII. |1:36. o.! 161, | 45. ||1.19.14) 108, | 17. 1:24:45.| 327. 68. VIII. |1.34. 3. 215. | 69. 2. 1.29.| 194. 46. 1.25.29,]/ 470, | 124. 2796 |634 2329. | 359. s8871. | 1112 du [73746 mn | 2e 72 mm || 132,56) jour 3430 2688. 6993 Plus gr. variat. 4°, 25". le 2 Nov.|| 4°, 20'. le 22 Mars, 4°. 14! lez Nov. 178: à XI h, ‘ à V h. matin. à XITh Moindre variat. 2°. 24!.le1$ Nov.|| o, 4. le 11 Août, 2°,24!lers Nov. 1784 à VIH. s'. avec Aur. Bor. à X b. foir. à VIh. s'.avec Aur. Bor. 192 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, On voit que malsré les fréquentes agitations de l’aiguille , elle a ew un mouvement diurne périodique qui differe peu de celui qui réfulte du grand nombre d'obfervations faites les années précédentes par M. Fan sSwinden & par moi, & donr les réfultats fe trouvent dans le Mémoire de ce Savant, cité plus haut, & dans le tome III de fon Recueil de Mém. 4 l'analogie de l'Eleäricité & du Magnétifine , publié en 1784. En ‘efler , la variation occidentale va toujours en augmentant depuis fept heures du matin jufqu’à une heure du foir, &'en diminant depuis une ‘heure du foir jufqu’à dix heures du foir. J'en excepte quelques anomalies qui ont eu lieu à cinq & fix heures du foir. Je continue ces obfervations , sont je rendrai compte au commencement de l'année prochaine. Bouffole de déclinaifor de BRANDER. J'ai prié un de mes amis (M. de Cambroune) , de fuivre trois fois par jour la bouflole de Brander, qui n'a été donnée par S. A. S. E, l'Electeur Palatin. L'aiguille a fept pouces de longeur , elle pèfe trois gros, & elle eft garnie d’un onnius ; elle eft placée à demeure fur une ‘bonne méridienne horifontalè. Voici Les réfulats de toutes les obfervations faites avec cette aiguille. Em Te ET ON NII SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 193 © Mois. Plus grande| Moindre Déclinaifon REONENRRES mr ER + déclinaif \déclinaif.| Marin. | Midi. Soir. | Jours. 1784. Janvier. E 21.2415e|21:2435. Février. . |21:25.11.[21.25426. Mars. ; M2A 02: . .2$ Avril. Mai. Juin. Juillet. Janvier. : : : [2121.45 Février. . : e .|21.22.16./21.23.25.| 21.23.13" Mars, Avril. Mai, Juin. 21.26.55, Juillet, VE . 21.24. & Août. : 21,23.35.[21.23.40. Septembre. : 21.22:20.[21:22.30.|21.22.18, O&obre. : 21.19.92./21.19,93.|21.19.49.|21,19.51. Novembre. 21e18.4$./21.194 9.121.18.55.121.18.50. Décembre, o 21.20,16.121.20,12.|21,20.16./21,20,15. Réfultat. 21.22.45.121.23, 1.[21.22, 9.[21,22.18, Tome XXIX, Part. II, 1786. SEPTEMBRE. Bb 194 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Lo nen mien, qe RER A QUE ED me ECS DUO D Ce dame eme | RÉFLEXIONS SUR L'EFFET DES COMMOTIONS ÉLECTRIQUES RELATIVEMENT AU GENRE - HUMAIN ; Par M, CARMotr. Ox regarde comme dangereufes les commotions , & particulière- ment celles qui paffenc par le cerveau ; on cite plus d'un exemple de ceux qu’on dit en avoir été la viétime. On ne peut nier qu'il n'y ait du danger , & que cette façon d’éleétrifer ne demande de la prudence ; mais faut-il admettre tous les malheurs dont on l'accufe ? eft-elle bien caufe de toutes les morts qu'en lui reproche ? ne voit-on pas tous les jours des perfonnes frappées d'apoplexie foudroyante , & de fyncopes mortelles ? ces accidens ne peuvent-ils pas arriver au moment de l'életrifation fans en dépendre ? J’ai vu une femme que j'électrifois par bain , éprouver une foibleffe , qui m'effraya d’au- tant plus que J'ignorois quelle y für fujette. Si elle fût morte dans ce moment, n’en auroit-on pas accufé l'électricité ? Ce n'eft pas que je prérende que les commotions ne puiffent faire du mal, l'éleétrifarion même par bain n'eft point indifférente. J'ai vu un foldat du régiment de Beaujolois , qui avoit eu une forte contu- fion à la cuifle, fouffrir , dans le moment de l'opération éleétrique , un accroiflement de douleur intolérable. L’étincelle commouvante eft en état de tuer. Les expériences qu'on en fait tous les jours fur les animaux , le démontrent ; mais elles prouvent en même-tems que , pour donner la mort , il faut que les chocs foient très-violens , & rels qu'un médecin fage ne les donnât jamais , fur-tout en les dirigeant à travers la tête principalement, L’appareil dont je me fers eft petit. Le plateau-à quinze pouces de diamètre , & le bocal d'un verre épais & vert, a un pied de hau- teur fur quatre pouces de large , garni intérieurement & extérieure- ment d’une lame d'érain , à la manière accoutumée. js L'électromètre de M. Lane me fert pour mefurer la charge : il et vrai cependant que cet inftrument eit peu exact, quand léle&ri- cité eft foible & que le bocal fe charge lenrement ; le bouron de Péletromètre ne tire point à des diftances un peu notables, ou au moins très-diffcilement , l’étincelle du conducteur , & néanmoins le bocal fe charge plus ou moins ; en forte qu'au rapport de l'inftru- 1 4 SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS 195$ ment , on jugeroit l'étincelle fulminante au-deffous de la charge défi- rée , tandis qu'elle fe trouve quelquefois fort au-deflus. Ï1 faut exciter la déronnation au moment même que l'étincelle part du conducteur à l’éleétromètre , fans quoi ce dernier continue de tirer fans empêcher le bocal d'accroître fa charge, Les hirondelles à travers la rêce defquelles j'ai fait pafler la com- motion au deyré d’une ligne , à la mefure de l'éleétromètre donc je viens de parler , n’ont eu aucun mal. La charge à trois , quatre & cinq lignes les a tuées fur le champ , ou elles ont langui pendant quelques heures, & font mortes. J'en ai cependant vu une qui eut fix commotions à cinq lignes fans éprouver d'accident ; je lui donnai la liberré , elle s’envola, & je la reconnus dix jours après, à un ruban que lui avois attaché au pied, Des pigeons de force égale n’ont pas également fapporté les mê- mes chocs ; les uns ont été tués d’une charge que d’autres ont très- bien fourenue. J'ai donné à un vieux chapon cent vingt commotions en onze féances , l’éleétromètre étant à dix & onze lignes : les trois ou quatre premières le renversèrent , il entra en convulfon , fa refpiration devint fréquente , fibileufe ; le bec refta ouvert , & il en fortit une falive écumeufe ; il fe remit cependant en affez peu de tems ; mais quand il put fe foutenir , il parut être affedté de la plus grande frayeur , il marcha à reculons , la tête haute , le col renverfé en arrière , & comme voulant éviter un objet qu'il craignoit, quoiqu'il n'eûc rien devant lui qui pût lui infpirer de l’effroi. J'ai obfervé ces apparences de frayeur dans plufieurs des oifeaux que j'ai électrifés par commotion. Le chapon dont je viens de parler , fembloit très-bien connoître que c'étoit par le moyen de l'excirateur qu'il recevoit le choc éleëtrique ; toutes les fois qu'on lui prélen- toit cet inffrument , il lui lançoit de vigoureux coups de bec , ce qu'il ne faifoit pas quand on lui offroit la main ou toute autre chofe. Pour donner la commotion d’une façon plus énergique , j'avois dé- plumé la cête fur laquelle j’appuyois une des branches de l'excitateur , dont l’autre qui touchoit au conducteur apportoit l'étincelle fulminan- te, qui , paflant tout à travers le cerveau , fortoir par le bec qui étoit en communication avec la furface externe du bocal. Ce chapon a fupporté inégalement la même force & le même nombre de commotions. Dans la dernière féance , quatre chocs le renversèrent , il entra en convulfion , il fut aux abois après en avoir recu une douzaine , à peine lui reftoit-il quelques mouvemens dans la refpiration qui ne fe faifoic que de tems en rems & par foubre- fauts. Après un quart-d’heure il fe remit un peu , il put fe relever ; Tome XXIX , Part. I, 1786. SEPTEMBRE. Bb 2 196 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, mais il tomboit quand il vouloit marcher , la refpiration éroit très- fréquente , & fe faifoit avec un grand fifflement. Le bec étoit très- ouvert ; & il en découloit beaucoup de falive. Je lui donnai dans cet état trente-cinq commotions , de la même force & très-rappro- chées, non-feulement il ne fut point renverfé ; mais il fe foutenoit mieux qu'auparavant; il crioit beaucoup chaque fois qu'il recevoit le choc , & aucun des accidens qu'il avoit éprouvés en commençant la féance n'eut lieu. Quand on lui donnoit la liberté , il fe fauvoit d'un pas ferme & précipité. La rêre étoit fort enflée, ainfi que le deflous de la gorge. La peau étoit rouge , meurtrie , noirâtre dans plufieurs erdroits, J'ai obférvé , non-feulement fur ce chapon , mais encore fur prelque tous les oifeaux que j'ai fourmis aux commotions , une chofe qui mérite d'être notée. À la première commotion il fe vuidoit , les excrémens étoient de confiflance ordinaire ; à la fuite des autres chocs , ils devenoient moins liés , & finifloient par être tout-à-fait liquides. Il ne m'a pas paru qu'il arrivât rien de pareil au corps humain, L'eflec dont je viens de parler , n'eft jamais plus fenfible que dans les premières féances électriques ; car les animaux , en sy accoutu- mant , fe vuidenc plus rarement , & les matières font à-peu-près naturelles. La refpiration , quoique fréquente à la fuite des commotions , n'eft cependant pas toujours ftercoreufe 3 il m'a paru qu’elle n’étoit telle que lorfque la gorge éroit enfiée. Un jeune pigeon fuyard reçut foixante-fix commotions en quatre féances , dans un feul jour , l’éleétromètre marquant deux lignes ; il n'en réfulta aucun effet fenfible, Douze autres à trois lignes ont rendu la refpiration un peu plus fréquente ; quatre tout de fuite , à quatre lignes , ont augmenté la gêne ; le bec s'eft rempli de falive ; la refpiration eft devenue fibileufe ; le cœur palpitoit ; les plumes fe font reflerrées ; le deflous de la gorge étroit très-tuméfé:, & toute la tête enflée, & particulièrement l'endroit où appuyoit l’excitareur. Le lendemain , dix-huit commotions , à trois lignes & demie , très-rap- prochées les unes des autres, n’ont produit rien de remarquable. Six autres tout de fuite, l'életromêtre à cinq lignes , n'ont point ren- verfé le pigeon ; mais il étoit moins ferme fur fes jambes ; fa refpi- ration eft devenue très-laborieufe ; une feptième l'a culburé , mais un inftant après il s'eft relevé. Le lendemain l'éleétromètre à fix lignes , trois commotions ont renverfé le pigeon ; trois autres , après qu'il a été remis des dernières , l’ont prefque afphixié ; tandis que , le lendemain , l’éleétromètre étant à 7 lignes, trois commotions n'ont produit que de la flupeur. Six autres , dirigées de la tête aux SUR L'HIST. NATURELLE ET ILES ARTS. 197 pieds, n'ont eu aucun effèr, ainfi que douze que l’oifeau avoit reçues la veille, l'éleétromètre étant feulemenc à fix ligres. Ce pigeon , comme on le voit, fembloit être parvenu par degrés à fupporter de plus vives commotions ; en commençant , il efluyoit des accidens graves à trois & quatre lignes , & à la fin il en {up- porta de fept , fans être notablement incommodé. : J’ai recommencé l'épreuve fur un autre de plus groffe efpèce ( un patu ); deux commotions , l’éleétromètre étant à 7 lignes , l’onc renverfé ; il eft entré en convulfion, & a éprouvé tous les accidens qu'ont eu les autres. À la feconde féance , qui n'eut lieu qu'un mois après , quatre commotions, l'électromètre étant à 8 lignes , ont été fans effet, mais la cinquième les a routes rappellées ; la refpiration fur-tout étoit très-gênée , & accompagnée de beaucoup de fiflemens ; la tête étoit fort enflée , & particulièrement le deflous de la gorge. à Huit jours après , léletromètre étant toujours à 8 lignes, une feule commorion renverfa le pigeon , il entra en convulfion , mais il fe remit un inftant après ; 1l en reçut alors deux autres à dix li- gnes ; la première fut fans effet, mais la feconde er eut beaucoup ; da refpiration fut on ne peur pas plus laborieufe , le fiflemtent étoit pro- digieux , le deflous de la gorge fort enflé, Cinq autres de la rête aux pieds ont été bien moins fenfibles que celles qui ont palé uniquement par la tête. : Le lendemain , le même pigeon reçut trois commotions à dix lignes ; il n'en réfulta rien de remarquable. Nul effet de deux autres à onze lignes, qui ont, comme les premières , traverfé la tête. Une fixième à douze lignes produifit dela difficulté à refpirer | & du fiffle- ment ; une féptième ajouta de la ftupeur; une huitième à treize lignes l’étourdit encore plus ; mais , mis en liberté , il fe fauva & alla fe donner la tête contre le mur. Une neuvième au même degré eut le même effer. Une dixième à quatorze lignes n'en eut pas. Une on- zième enfin ne fut fuivie que de fiflemens , & de quelques mouve- mens convulffs qui durèrenc peu. Toutes ces commotions furent très- rapprochées , & mwavoient d'intervalle que ce qu'il en falloit pour charger le bocal , qui l'étoit promptement , parce que l'électricité évoic bonne, Le jour fuivant le pigeon fe portoit parfaitement bien ; remis à l'épreuve 21 fupporta moins que la veille. La première , a fept lignes , lui donna quelques mouvemens convullifs de peu de durée; quatre autres ne produifirent rien , ainfi que deux à dix lignes ; une ‘troifième , à ce dernier térme, fut fu vie de mouvemens convulfifs ; une quatrième rendit la refpiration ftertoreufe ; l’oifeau mis en liberté s - 598 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, alloit fe donner la têre contre le mur. Une dernière ne produifir que de la flupeur & de la gêne dans la refpiration. Six jours après ; deux commotions à douze lignes one éré fans effet ; une troifième a caufé des érourdiflémens & des mouvemens convulffs ; une quatrième a produit le même effet ; une cinquième , à 15 lignes, n’a fait naître aucun accident: enfuite quelques commo- tions données de la têre aux pieds , one plus agité & caufé de plus grands accidens que celles qui ont paffé uniquement par la tête ; ce qui contrarie non-feulement les expériences rapportées plus haut , mais encore beaucoup d’autres que j'ai omifes. Quelques jours après, dans une dernière féance, le même pigeon ne put fupporter une commorion au terme de fept lignes ; il éprouva tous les accidens ordinaires qu'il avoir efluyés les- jours précédens , malgré que la charge für crès-au-dellous de celle qu'il avoir plufeurs fois fupportée impunémenr. En paffanc du fommet de la têre au bec , l'étincelle eft forte , blanche & bruyante; celle au contraire qui paffe de la rêre à la poi- trine, au ventre, pour fortir par les pieds , eft petite , rouge , & fait peu de bruit. Les animaux paroiffent moins affectés des chocs électriques en pro- portion de leur grandeur, de leur force & de leur âge. J'ai donné à un vieux lapin de très-fortes commotions qui ne lui ficent aucune forte d'impreflion fenfible. Un jeune canard ayant néan- moins atteint toute fa groffeur , fut renverfé ; convulfé , &c. d'une feule commotion de dix lignes ; tandis qu'un individu de la même efpèce , mais vieux, en reçut vingt tout de fuite , de onze, douze, treize , quatorze & quinze, & les trois dernières de feize lignes & demie, fans la plus légère altération 3 l'animal refta feulement pen- dant vingt-quatre heures fans manger ; il paroifloic eftrayé , & fe cachoir. Les commotions opèrent des effets bien différens dans les mêmes animaux. Tels ont été renverfés par une étincelle fulminante d’une force médiocre , qui en avoient fupporté auparavant de bien plus vives : néanmoins les premières , toutes chofes égales d'ailleurs , fonc communément plus fenfibies , & affectent davantage les animaux à qui on les adminiftre. J'avois cru d’après cela que l’ufage pouvoit accoutumer les animaux à en recevoir impunément de beaucoup plus fortes ; mais la fuite m'a prouvé que cetre règle , qui eft vraie jufqu'à un certain point , eft reftreinte dans des bornes étroites , foit que l'inffrument qui fert de mefure à la force du choc, induife en erreur, foit que la difpofition actuelle du fujet ne foit pas toujours la même ; 1 SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 199 ou enfin , & principalement , foit que le paflage de l’étincelle fulmi- nante par tels endroits du cerveau plutôt que tels autres , foit caufe des variations qu'on obferve à chaque inflanr. Ÿ Qu'il y ait dans le cerveau certaines parties plus fenfibles & plus fufcepribles d'impreflion que d'autres , cela elt indubitable. J'ai enfoncé dans la tête d'un chardonneret une aiguille dans trois endroits diffé- rens , l'oifeau ne donna aucune marque de fenfbilité. J'ai percé une quatrième fois avec la même aiguille , dans un autre endroit, à l'inftant le chardonneret fic un cri, baifla la rêre jufqu'à terre , & la tourna de côté. [1 garda cette fituation jufqu'au furlendemain qu'il mourur. Je fis l'ouverture de fa tête, j'y reconnus les quatre trous que l'aiguille y avoit faits ; ils pénétroient tous jufqu'à la bafe du crâne , & contenoient un peu de fang noir & caillé. IL eft à croire que l’érincelle fulminante , quoique forte , eût paflé tout aufli impunément par les trois premiers endroits , & que par le quatrième elle eüc fait naître des accidens. Il feroit bien intéreflant de connoître les diverfes parties de la tête qui pourroient , fans danger , recevoir l’étincelle fulminante. IL eft vrai néanmoins qu'on ne feroit point encore en fureté quand même on ferëit parvenu à les bien déterminer dans l’homme , puifqu’on ne péut pas être maître de faire pafler les commotions dé- rerminément & précifément dans le lieu où l’on defireroit les diriger. J'ai éprouvé fi je parviendrois à percer un carton par le moyen d’un choc éleétrique à l’endroit fixe où j'appuyois la pointe d'un compas qui me fervoit d'excirareur. Cetre étincelle ne fuivoit pas roujours la poinre fixée dans le carton, elle fe portoir fouvent aux côtés , & perçoit le carton affez loin de la branche du compas. La mort que donne fi aifément aux petits oifeaux le choc électrique, en paflant par leur rête, arrive également & même plus invariable- ment , quoique cela foit moins fubril lorfqu’il a lieu à travers le bas- ventre. Un chardonneret ne put foutenir cinq commotions à cinq lignes. Un autre qui en reçut même nombre & de même force à travers le bas-ventre , furvécut à peine un demi-quart d'heure ; dès la première, il fut fans mouvement, fes jambes s'étendirent, devinrent roides & inflexibles , la refpiration fut extrêmement fréquente , & le bec très- ouvert. Une feule commotion à travers le ventre d’un troifième , & au même degré , produifit le même effet , néanmoins il furvécut jufqu'au furlendemain ; tandis qu'un quatrième reçur , dans le même tems & à la même charge , une commortion à travers le cerveau , il en fut afphixié , mais peu À peu il fe remit & fe rétablit parfaitement. D'autres petits oifeaux ont auf recu , les uns des commorions à tra- vers le ventre, & d’autres par la tête, en même nombre & même 200 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, force ; les premiers fonc tous morts , lorfque les commotions ont été au nombre de trois , tandis que les feconds revenoient peu à peu à la vie. Le pigeon patu dont il a été queltion ci-devant , aiofñ qu'un jeune canard, ont eu également, à l’occafion des commotions qui pafloient par le ventre , des arreintes de cette roideur & de cette inflexibilité des jambes, mais à un degré léger, & qui fe diflipoit bientôt, tandis que de très-petits poulers bien au-deffous en force & en groffeur , n’en éprouvèrert abfolument rien, quoique les mêmes fuflent très-affectés des commotions à travers la tête. La refpiration a été conflamment très-altérée, & eft devenue fufto- quante toutes Les fois que j'ai répété l'épreuve & fait paifer les commo- tions par le bas-ventre ; les jambes fe font pareillement roidies, tandis que rien de femblable n’eft arrivé quand je les ai fait pafler par la poitri- ne, quoique néanmoins elles aient tué tout de. mème. Je n’ai obfervé dans ce dernier cas, nulle roideur , nul mouvement convulfif dans les membres , la refpiration éteit rare, & ne revenoit que par foubrefauts. J'ai difféqué la plupart des animaux que j'ai tués par l'électricité. Le chapon à qui j'ai donné tant & de fi fortes commotions , avoit l’exté- rieur de la rèêre, & particulièrement l'endroit où avoir appuyé l'excita- teur, très-enflé, meurtri & noirâtre ; les deux yeux égoient crevés & les humeurs écoulées. Je fs une incifion à la peau, il en fortit une eau fanguinolente ; l'os étoit parfairement entier , mais fi dur , que je ne pus l'enlever fans endommager la fubftance du cerveau. Ce que je n'ai pas vu dans le chapon , j'ai eu occalion de l’obferver dans plufieurs oifeaux , & notamment dans de jeunes pigeons, chez des hirondelles, &c. il en étoit de l’extérieur de leurs têtes comme de celle du chapon, il y avoit des échimofes , des extravafations dans le piflu cellulaire ; mais l’intérieur de la tête n’avoit aucun mal, on n'appercevoit ni déchirure , ni change- ment de couleur; les vaiffeaux n'étoient gorgés nulle part, il n'y avoit aucune extravafation ; les os étoient pareillement dans l’écat naturel ; je ne les ai cependant pas toujours trouvés tels. J’ai vu une fracture dans un pigeon que deux.commotions avoient tué , & dans un jeune poulet & une hirondelle. Après avoir enlevé la peau de la tête, on appercevoit un point rouge qui alloit en s'élargiflant dans l'intérieur de l'os, mais n’en outrepafloit, pas la table interne : tout, excepté cela , éroit dans l’état naturel. Cette intégrité de l'intérieur du cerveau, que j'ai conftamment trouvée dans tous les animaux tués par le choc électrique , fe rapporte à ce qu'apprennent les diffections des perfonnes foudroyées, Morgazni , & d’autres ne font mention que de défordres extérieurs, Cependant comment concevoir que l'étincelle commouvante produife à l’extérieur des corps animés , des déchirures, &c, & que fon effer méchanique fe borne-là , tandis que cette même érincelle, en pafant à travers un Carton , agit non-feulement fur les furfaces qu'elle brûle & déchire, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 20r déchire, mais encore le perce de part en part. Il faut donc que cette étincelle trouve dans l'étendue des pores des corps animés , dans la foupletfe & dans l'exrenfibilité de leurs parties, aflez de facilité pour les traverler , fans y caufer les effets qu’elle opère dans le carton, & dans les corps qui ne peuvent pas prêter & s'étendre. Plus les fibres animales font fortes & ferrées, plus l'effet électrique fur la peau eft confidérable. Ur homme adulte , d'une forte conftitution , à qui j'ai donné grand nombre de commotions , étoit meurtri, brûlé dans les endroits par où entroit & fortoit l’étincelle commouvante , tandis que des perfonnes du fexe, foibles & dont les fibres éroient lâches, n'avoient que quelques rougeurs , de l’enflure, des boutons aux mêmes endroits. Les différentes diffections des animaux tués par la commotion de la force de celle dont j'ai parlé , démontrent que la mort qui en a éré l'effet, n'’éroit due, ni aux déchirures , ni aux brülures, ou autres caufes mé- chaniques. Comment d’ailleurs concevroit-on que ceux des animaux à qui j'ai donné de fi vives commotions, & dont ils ont été fi fort affec- tés , euflent pu fe rétablir fi promptement , fi à chaque fois l'écincelle eût faic un trou dans le cerveau ? J'ai éle@rifé une fille dont j'ai fait le commencement de l'hiftoire dans mon premier mémoire fur l'électri- cité médicale ; je lui ai donné en fix-mois plus de quarante mille commotions ; elles ne traverfoient pas le cerveau à la vérité , mais elles pafloient à travers les vertèbres du col , traverfoient la poitrine, & fortoient par l’hypocondre gauche. D'autres fois elles entroient par lhypocondre droit pour aller à l'oppofé , & conféquemment elles paf- foient à travers le foie. Comment fe pourroit-il que cette fille eût reçu une fi grande multitude de plaies , toutes à travers des parties de la plus grande importance ? fi chaque commotion eût fair un trou & la plus légère déchirure, comment n'auroit-elle pas été criblée , anéantie, loin d'en avoir retiré un foulagement étonnant ? Les fecoufles électri- ques éroienc ordinairement & au moins de trois lignes à la mefure de Pélectromètre. IL eft donc bien à préfumer que les commotions bor- nant leur effet méchanique aux furfaces ou peu au-delà, la mort ou les accidens qu’elles caufent, font dus à la matière électrique agiffante dans ce cas à la manière des gaz méphitiques qui interceprent , détruifent plus ou moins promptement les fonctions vitales. Plufieurs fubftances délétères ne deviennent préjudiciables au corps humain que par leur abondance ou le défaut d'habitude d'en ufer. Combien y en a-t-il qui fourniflent à la médecine les plus puiffans fecours , lorfqu'on ne les emploie pas à de trop fortes dofes , & que l’ufage a accoutumé le corps & l'a rendu capable d’en fupporter de plus confidérables. Il en eft de même de l'électricité. Portée trop haut ou trop précipitamment, elle peut donner la mort: adminiftrée avec précaution, & à un degré Tome XXIX , Part. II, 1786, SEPTEMBRE, Ce 202 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, convenable , elle opè:e des cures que tout autre moyen n’avoit pu obtenir. Si la force doit être réglée avec fagefle , il ne feroit pas moins utile de déterminer les vifcères & le lieu particulier où lon peut le plus fürement & fans crainte d’accidens , adminiftrer les chocs éle&ri- ques. On a vu que la tête n’éroit pas le vifcère feul que l’on dûr mé- nager. Les fecoufles peuvent également faire du mal & donner la mort en paflant par d’autres organes. N'y auroit-il donc dans le corps aucune partie peu ou point eflentielle à la vie , qui réfervant pour elle tout le danger de la commotion , ne laifleroit pas de tranfmettre aux parties néceflaires, aux fonctions vitales, &c. ces influences falutaires & cura- tives? Je n’ai garde de répondre affirmativement. Un fair unique prouve peu en médecine ; cependant je crois que celui que je vais rapporter eft de nature à être diftingué, & à favorifer la conjecture que je mets en avant. Le fait dont il s’agit eft tiré de l'obfervation dont j'ai donné l'annonce dans le mémoire que j'ai eu l’honneur de préfenter à l'Aca- démie de Dijon fur électricité médicale. Je vais la reprendre & en donner la fuite. Ertiennette Liver; de la paroifle de Ligny en Mäconnois, âgée de 20 à 22 ans , à la fuite d’une fièvre intermittente qu'elle a eue pen- dant 11 ou 12 mois ; éprouvoit depuis 4 ans dés borborygmes, dont l'ordre & le retour périodique étoient aufli étonnans qu'ils caufoient de fouffrances à la malade. Le bruit qu'ils produifoient , s'entendoit quelquefois de cinquante pas ; il partoit de l'hypocondre gauche , fe portoit tranfverfalement à l’autre , retournoit de ce dernier au premier avec la plus grande régularité & la plus exacte précifion. Ce bruir, toujours accompazné du gonflement & de l’affaifflement fucceflif du bas-ventre , n’éroit pas perpétuellement uniforme ; le flux revenoit de tems en tems par bouffée ; il étoir plusfort, plus brufque que le reflux; cet état n'avoit aucune correfpondance avec le jeu ae la refpiration ; il parcouroit ces tems & fuivoit fa marche indifféremment, foit que la malade infpirât , ou qu'elle’ éxpirât, ou retînt fa refpiration. Le public étoit perfuadé , d’après une ‘aflez forte reflemblance‘au grognement que ce bruit imitoir , que la fille dont il's’agit avoit un cochon dans le ventre. On pouvoit s'aflurer par la vue & le ta, que la fcène fe pafloit dans le colon ; on voyoit le gonflement fucceflif de cette partie ; l'air étoit vifiblement chaflé de gauche à droite, & de cette dernière partie à l’autre par un mouvement non interrompu , depuis les huie heures du matin jufqu'au foir. L'accès annoncçoit par un trouble au cerveau , & fnifloit par un fourmillement au bout des- doigts ; un relâchement fuivoit alors, les vents circonfcrits s’érendoient & occupoient tout Le trajet inteftinal , fans que toutefois la malade en rendit ni par SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS 203 le haut ni par le bas. Tant que l'accès duroit , elle ne pouvoit ni s’afleoir, ni fe coucher ; elle étoit debout, appuyée fur un bâton, & le corps penché en avant; fon ventre gros en tout tems, étoit prodi- gieux pendant le paroxifme. Les fouffrances dans le ventre, & en particulier dans la partie dé- fignée, les reins, la tête, les extrèmités tant fupérieures qu’inférieures , écoient énormes. Les bruits dont il s'agit étant finis, la malade pouvoit s'afleoir & fe coucher , il ne lui refloit plus de douleur , excepté une courbature, & une fatioue bien conféquente à l'excès & à la longueur de fes fouflrances, Depuis quatre ans ces accidens CNT conftamment tous les jours après Le lever du foleil pour finir à fon coucher. Je n'ai ce- pendant pas fuivi cette fingulière correfpondance ; je n’ai vu la malade qu'à la fin de Décembre 1783 , pendant le mois de Janvier. Ce rap- port étoit aflez exact, mais l'électrifation qui furvint, troubla bientôt cet ordre ; je n'ai cependant aucune raifon de douter de la vérité du fait , il nr'a été généralement confirmé pdr les perfonnes qui ont fuivi la malade. La régularité des accès, la fèvre intermittente qui les avoit précédés, me firent foupçonner!qu’ils pourroient ètre dus à un levain fébril ; je traitai le mal en conféquence , mais fans aucun fuccès , quoique j'eufle employé plus de quatre onces de quina en douze jours. Je me retournai du côté des antifpafmodiques , & en particulier de Popium. J'obtins ar ce dernier moyen une interruption de vingt-quatre heures ; mais elle fut fupplée par tant d’angoifles , tant de défaillances, que je n'ofai pas retourner davantage à ce moyen. Je me déterminai pour lors à employer l'électricité par bain & enfuite par érincelle. Je plaçai la malade fur un ifoloire , une chaîne attachée à un conduéteur defcendoit à quelques lignes de la tête , il en partoit continuellement des étin- celles. Aux pieds de la malade étroit une tige de fer pointue qui com- muniquoit au plancher}, & établifloit un courant plus rapide d’électricité, “ce qui fe manifeftoit aifément par la fréquence des érincelles comparées à leur rareté lorfqu'on toit la tige , ou qu'on la préfentoit par fon bout arrondi, L'électrifation commença Le 3 Février 1784. Après quelques minutes, les bruits fe ralentirent & ceflèrent pendant demi-heure ; ils revinrent après pour cefler de nouveau , mais moins long-tems , & feulement pendant une ou deux minutes. Mais fans entrer dans le journal de cette longue opération ,-je dirai en général que chaque jour , jufqu’à la fin d'Avril 1784, les bruits ne revenoienc plus que vers les fix ou fept heures du (ir ; j'ai éprouvé de jour en jour une diminution graduelle ; j'obtenois plus promprement la ceffation des accidens , & leur interruption devenoit de plus en plus longue 3: en forre que la Tome XXIX, Pare, IT, 1786. SEPTEMBRE. (Ce \ s04 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, malade , au lieu de fouffrir pendant huïc à neuf heures, avoit à peine fon accès l’efpace de deux. La durée de Pélectrifation étoit de cinq à fix heures par jour. Je fubftituai en mai les commotions à l'électrifation par bain & par étincelle. J'obtins alors l'effet defiré bien plus promp- tement ; il falloit néanmoins quinze commotions dans ces premiers tems, mais par degré un moindre nombré fufic , & à la fin du même mois, une feule, quelque légère qu'elle füt, faifoit cefler à l'inftant tous les'accidens ; il arrivoit même aflez fréquemment qu'ils cefloient pareillement après quelques tours de roue, pourvu que la malade fûc en communication avec la fu extérieure du bocal , & fans qu'il füt befoin de donner aucune co. L’étincelle commouvante , comme je l'ai déjà dit, pañloic des vertèbres du col à l'hypocondre gauche ; je voulus éprouver fi la ceffation des bruits pourroit sobtenir en ne faifant point pañler le choc à travers le fiége du mal; j'arrangeai en conféquence l'appareil pour que la mein gauche la reçüt route feule : la ceffation fut toute aufi prompte , & toute aufli entière que fi la fecoufle électrique eût parcouru la chaîne ordinaire, Je répétai lPexpé- rience, & le réfulrat fut le même. Après m'être afluré , par de nom- breufes épreuves , que le fait étoir conant , j’eflayai s'il auroit lieu en dirigeant l'éincelle par d’autres parties. Il fallut deux commotions au lieu d'une , lorfque je donnai le choc du côté droit , foit au pied ou à la main. Le pied gauche n’éroit pas même aufhi favorable que la main du même côté, quoiqu’une feule commotion fuffit 3 car la ceffation des borborygmes n’étoit point aufli fubite , on entendoit encore un inftanc après un léger murmure ; au lieu que , donné à la main , les mouvemens en queftion ne duroïent pas au-delà de la com- motion même. L’étincelle tirée du plateau métallique de l’éleGrophore opéroit de même la ceffation des bruits ; mais il falloit , pour l'obtenir , en tirer une quinzaine, : ; Ces expériences ont été fi fouvent réitérées , & le réfultat fi uniforme , que je ne crois pas qu'il puifle refter la moindre équivoque, Comme dans ces derniers tems les accidens ne revenoient poinc tous les jours, & que j'en avois cependant befoin pour conftater les faits dont je viens de parler , je n'électrifois la malade que dans le rems des accès, & qu'autant qu'il en falloit pour les faire cefler. La guérifon de la malade peut en avoir été retardée; mais le phénomène étoit trop intéreflant pour ne pas l'approfondir ; après quoi je me fuis borné à ne donner pat la fuite qu'à la main gauche les commotions ‘que je multi- pliois alors. D’après ce que je viens de rapporter, il n’eft point parfairement in- différent de faire pafler par une partie quelconque l’écincelle fulminante, puifque dans le cas donc il s’agit, le côté gauche & la main de pré- Se SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS: ‘295 férence opéroient plus vire ou plus compiettement la ceffation des bruits convullüfs ; mais il n’en.eft pas moins vrai cependant qu'on l'obtenoit certainement, quelqu'autre part qu'on fit pañler la commotion. I] n’eft donc pas indifpenfablement néceffaire qu'elle traverfe le fiége même du mal, Si ce phénomène n’eft point dû à quelques circonftances particulières , il ne feroit donc pas abfolument néceflaire de commouvoir , par exem- ple , le cerveau , lorfque le mal réfide dans ce vifcère. On feroit donc délivré des dangers ou au moins des inquiétudes que donne l'opération lorfqu’on la dirige dans cette partie ; on pourroit fans conféquence appliquer à toutes les maladies l'électricité ; on ne rifqueroit jamais que fes peines & le dégoût de ne pas réuflir aufli fouvent qu'on défi- reroit. À force de multiplier des recherches, peut-être feroit-on d’utiles découvertes : qui fait fi par la fuire on ne feroit pas avantageufement dédommagé d'avoir marché quelque tems à tâtons , & fi à la fn on ne découvriroit pas une route éclairée. Les nerfs font les reflors qui font mouvoir la machine humaine ; un grand nombre de maladies dépendent de leur dérangement ; la dépravation des humeurs qu'on accufe fi fouvent, tient peut-être un rang bien inférieur. Tous les jours on voit le fang vicié notablement , fans qu'il en réfulte de grands accidens. Croira-t-on que dans le fcorbut , les écrouelles | &c. le fang ne foit pas éloigné de fa qualité naturelle ? Cependant il n'arrive fouvent que quelques fymprômes locaux. La fuppuration intérieure altère certainement la maffe des humeurs, & à peine s'enfuit-il une petite fièvre lente, tandis qu'une légère piquure de nerf jette dans l’état le plus fouffrant & le plus dangereux. Les obfervations médicales prouvent que l'éle&ricité agit puifflam- ment fur les nerfs : fes plus grands fuccès font dans leurs maladies , les paralyfes , les rhumatifmes, les convulfions , la folie , font fou- mifes à fon empire ; qui fait fi l’hydrophobie ne feroit point auffi de fon reflort, Si quelques malheureufes viétimes de ce fléau indomtable s’of- froient à moi, je ne manquerois pas d'employer l'électricité ; je ne né- gligerois point le traitement prophilaétique reçu , mais j’uferois dans le paroxifme de ce nouveau moyen. Je préférerois les commotions à toute autre façon d’éle@rifer ; je n'épargneroïis aucune partie, quoique l’ob- fe:verion que j'ai rapportée plus haut , prouve que le choc électrique ait fon efet , quelque part qu’on l’adminiftre; on a vu en même tems qu'il éroit , ou plus prompt , ou plus complet, en pañlant par certaines par- ties déterminées. Dans le cas préfent , en n’en néoligeant aucune, peut- être eu trouveroit-on une favorable. Au refte , quel qu’en fût le fuccès, pourroir-on être blâmé de chercher ün remède qui de tout temps a fait le vœu de la médecine, & qu'on defire encore. Mais pour revenir à mon objet , comment fe peut-il que la commo- tion donnée à la main gauche opère aufli fubitement , aufü complette- : 06 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ment la ceflation des accidens , que fi elle pafloit à travers le fiége même du mal? eft-ce que l’étincelle commouvante fair le même effet en touchant une portion de nerfs, que fi elle en parcouroit tout le fyftême , femblable à une étincelle de feu ordinaire , qui , appliquée fur un feul point, allume une traînée entière de poudre ? Comment fe peut-il faire que l’étincelle foudroyante , fi elle pañle toute entière & par le chemin le plus coure, pour fe rendre à la furface du bocal électrifée négativement, opère dans la circonftance la ceflation des bruits en queftion , puifque, dans cette fuppofition , elle ne peut point en attein- dre la caufe. Au refte , cette double afertion paroît être évidemment fauffe ; [a matière commouvante ne palle, ni toute entière , ni par le chemin le plus court, pour fe rendre à la furface éledrifée négati- \ement, Si on fe fert d’un excitateur armé d’un bâton de cire d'Efpagne , par. le moyen duquel on le tient ifolé , pour opérerla détonnation du tableau magique, ce méme excitareur confervera , après la décharge , une aflez forte dofe d'électricité reconnue pofitive. Toute la matière qui fort dune furface ne fe porte donc pas à l’autre, puifqu'il en refte dans l’excitateur qui eft un corps intermédiaire, Elle ne pafle pas mieux par le chemin le plus court. Qu'on réuniffe dans un point commun l'extrémité de plulieurs chaînes de métal , pareilles en grofleur, mais inégales en longueur ; que l’autre extrémité de ces différentes chaînes aille communiquer à la furface externe du bocal ; .... qu'on applique une des branches de l’excitateur fur le poinc commun de réunion , & l’autre fur le conducteur, pour opérer la décharge du bocal en queftion , on verra l’étincelle fulminante fe diftribuer dans toutes les chaînes , en proportion inverfe ( à la vérité ) de leur longueur; la plus courte en a la plus grofle portion , pourvu néanmoins qu’elle n'ait point de folution de continuité, auquel cas elle ne reçoit rien. D'après ces faits , il eft donc naturel de croire que l'étincelle com- mouvante, en paflant feulement à travers la main gauche de la malade dont il a été queftion , s’eft diflribuée dans tout fon corps, d'après la pro- portion aflignée. En entrant dans le corps , elle commence à diverger & fe diftribuer proportionnellement & relativement aux parties plus ou moins différentes, & plus ou moins éloignées du chemin direct ; après quoi cette même matière ainfi divifée , converge de nouveau au point de fa fortie ; aufi l'effort , l’aétion qu'elle exerce, doit être bien plus fenfble dans ces deux points de réunion , & fur-tout à celui de l'entrée; car la quantité de matière eft plus grande à ce point qu'à celui de la fortie , à raifon de la portion qui refte dans le corps , & qui ne retourne as à la furface électrifée négativement , ainfi que l’expérience rapportée ci-deflus le prouve. Il n'eft donc pas étonnant que ce foit à l'entrée & à la fortie qu'on obferve principalement des effets manifeltes d'une pot D enr SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 507 caufe vraiment méchanique. C'eft-à que la matière électrique produit une vive fecoufle , qu'elle meten jeu les parties ignées, qui , conjoin- tement avec lé concours de l’air & peut-être d’autres agens , opère les phénomènes ordinaires. Mais comment peut-on concevoir que la ma- tière électrique , qui peut refter dans le corps à la fuite d’une commo- tion, foit capable de produire de fi grands accidens, tandis que l’on fait que l'électrifation par bain introduit dans le corps une bien plus grande quantité .de matière fans danger ? À Les différentes parties de notre corps s'électrifent fans doute ; mais fait-on jufqu’à quel point & comment ? Peut-être que telles ne peuvenc en être furchargées que par un choc brufque , ainfi que le fait la com- motion. On a beau éleétrifer de l'efprit-de-vin , il ne s'enflamme que par une étincelle, : Quoi qu'il en foirt , & de quelque façon que la chofe s'opère , il n'en eft pas moins certain que les difleétions anatomiques n'annonçant aucun dérangement intérieur, il eft nécellaire d’accufer la matière même électrique qui agit en afphixiant à la manière des gaz méphi- tiques. u La maladie dont je viens de faire le récit , n’eft pas encore terminée, quoique Les accidens n'aient plus rien de comparable à ce qu'ils étoient anciennement , foic pour l'ordre , la durée & l’intenfité : ils ne laiflent pas cependant de revenir de tems en tems; il y a quelquefois huic, dix, douze jours d'intervalle entr'eux. Leur durée, quand même on n'élec- triferoit pas, ne fe prolonge ordinairement point au-delà d’un quart- d'heure , & fouvent moins. L'approche des règles, leur tems & leur fn , font communément plus orageux , quoïqu'infiniment plus modérés qu'avant l'opération électrique. Les douleurs qui ont coutume de les accompagner , ceflent également par lès chocs électriques. L’évacuation dont il s’agit eft aflez irrépulière & modique. La malade a le genre ner- veux très-fenfible , & les fibres fi irritables , que les caufes les plus légères les excitent. Un verre de vin rappelle les bruits dont il s'agit. J'ai fait cette épreuve à deflein de rendre rémoins de l'empire électrique fur cètte malade, les perfonnes qui ne lavoient pas vu. Le foulagement qu’on eft en état de donner fur le champ , excufe ces fortes d'expériences, & confirme Ja vérité de l'expofé. La cure enfin fera-t-elle radicale ? Le tems l’apprendra ; jufqu’à préfent on s’eft abftenu d'aflocier aucune autre efpèce de moyen à l'éledricité. Le concours auroit ietté des nuages, & il éroit trop inréreffant d'établir fans difficulté ce que pouvoit l'éledricité. Elle a trop fait dans cette circonftance pour ne pas efpérer plus encore, Peut-êrre auroir-on pu abréger la longueur du trairement en employant quelques autres remèdes fubfidiaires ; mais j'avoue que j'aime à efpé- rer que l'électricité triomphera feule & fans fecours étranger, Il eft fi peu 208 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, d'oblervations fur lefquelles le fcepricilme ne foit en état d'objecter des difficultés, qu'on ne fauroit mettre dans un trop grand jour les faits qui conftarent fans réplique la vérité qu’on veut prouver. J'ai pris un foin particulier de rendre public le fuccès de l'opération électrique fur la fille donc il vient d’être queftion. Un Médecin , voué par fon état au bien de l’humanité , eft au-deflus du oupçon de mauvaife foi, mais il neft pas à l'abri de l'illufion, Le pyrrhonifme auroit pu former cette dernière accufation , fi la multitude de perfonnes éclairées qui ont été témoins de tout ce que j'en ai rapporté, lui laifloient ce fubrerfuge. S'il et utile à la médecine de publier les fuccès heureux , il nel’eft pas moins de faire part des accidens qui peuvent arriver dans l’adminif- tration des remèdes qu'on emploie : aufi- n’ai-je garde de taire celui qu'a eu la malade en queftion, depuis que j'ai écrit ce qu’on en vient de lire. Le 2 octobre 1784, l'électricité étant à un très-haut degré , l'électro- mètre marquant feize lignes & demie, la malade fut éleétrifée en mon abfence ; on avoit oublié de remettre l'éleftromètre au terme accoutumé, on charge le bocal complétement , & la déconation fut fi forte, que la main à travers laquelle elle pafla, perdit tour-à-coup le fentiment : cec érat a duré plufieurs jours, il s'eft diflipé par degré , & après une quinzaine il n'en éroit plus queftion. Que feroit-il arrivé fi la commotion eût pailé à travers les vifcères , & particulièrement par la tête ? il eft à croire qu’elle eût fait bien des ravages. Cet évènement, capable de fournir des traits aux adverfaires de l'électricité, ne prouve cependant rien autre chofe, finon qu’on ne fauroit apporter trop de prudence dans l’adminiftration d’un moyen également capable de faire Le bien , & de produire le plus grand des malheurs. L'éleétricité n’eft pas la feule à fournir à la médecine des armes utiles & meurtrières : la plupart des moyens dont fe fert l’art de guérir, font de ce genre ; ils éprouvent des fuccès divers , felon que la témérité ou la fageile les emploient. IL réfulte de tout ce que j'ai expofé dans ce mémoire , qu'il faut de fortes commotions pour tuer même des oifeaux de médiocre grofleur , & cependant que , malgré l’analogie & plufeurs expériences directes , il feroit réméraire d’écablir la règle d’en donner de pareilles, quand même on les borneroit aux membres , à plus forte raifon s’il s’agit de les donner à la crête. Que les commotions altèrent ordinairement la fonion de la: ref- piration, : Que les commotions font en état de donner la mort, non-feule- ment en paflant par le cerveau , mais encore à travers la poitrine & le bas-ventre, Qu'il N Ÿ SUR L'HIST, NATURELLE ET LES: ARTS... 209 - Qu'il eft difficile d’afligner au jufte la force dela commotion ;: pailé laquelle le choc feroit dangereux, lorfqu'on le dirige à travers la tête & les autres vifcères. J'en ai donné fans accident au terme de trois lignes; il eft vrai que Ç'a toujours été par mégarde. Je ne voudrois pas me per- mettre d'en donner au cerveau au-delà d’une demi-ligne, j'aimerois mieux les raultiplier que d'en porter trop haut le dégré ; ja prudence feroit même encore-néceflaire dans ce-dernier.cas..J’ai.wu xéfulter,des douleurs de tête, des bourdonnemens & des tintemens d'oreilles, à l’occalon de fimples étincelles très-multipliées que l’ontiroic de la tête. Que la façon Ja plus puiflante d’électrifer eft par commotion. Qu'il n'eft pas néceflaire (- au moins toujours ), de ,\comprendre la partie malade dans la chaîne de communication pour en obrenir la guérifon, nt k, (AUOT Lean HUE OCT Que l'étincelle fulminante n’eft point bornée aux feules parties comprifes dans la chaîne la plus courte decommuniçation; que cette même éti celle fe diftribue, quoiqu’inégalement , à toutes les parties du corps qui font différentes, AE Qu'on jugeroit mal de leffer intérieur des chocs électriques par ceux qui fe manifeftent aux furfaces , & qu'il eft probable que-la matiére com- mouvante agit à la manière des gaz méphiriques. I feroit à defirer qu'on pûc trouver, -un! moyen ,propre à, énerver ou enlever la matière électrique trop abondante, ou, pouifée avec trop de mouvement dans certaines parties qu’elles furchargent par ce moyen. J'ai employé à cet effet l’alkali volatil , il ne m'a pas: paru avoir, beaucoup d’effer. J'ai eflayé l'eau comme bon conducteur & capable. de foutirer la matière où elle eft accumulée ( dans plufieurs circonftances la refticurion de l'équilibre ne fe fait pas cout-d'un-coup ); il m'a paru,que des canards que des chocs avoient jertés dans de fortes convulfons , fe, font rérablis plus vite lorfque je les ai jettés dans une:cuve, d’eau. Le feu ranima fur le champ des hannetons que j'avois afphixiés entièrement par une com- motion électrique ; il eft vrai que ce foulagement ne fut pas de durée ; ils périrent tous peu après, malgré que je continuaffe le même moyen. La flamme pourroit être plus utile ; elle foutire le moyen électrique de bien plus loin que des charbôns ardens: Une fimple petite bougie ,;l’é- leétromètre marquant neuf lignes , tranfmic l'électricité, à une tige de fer ifolée à quatre pieds de diftance du conduëteurs tandis qu'un réchaud, aufli ifolé & plein de charbons embrafés, ne le fait qu'a deux pieds & demi, & fans aucun intermède , l'électricité ne peur s'y porter qu'à un pied trois pouces de diftance. Du IeEDEUTON 191476 Quoiqu'il m'ait femblé que ces divers moyens h’aient pas éré inutiles:à plufeurs oifeaux que j'avois iafphixiés, je n'oferois cependant Idonner cés faits comme prouvant quelque :chofe, Ces expériences doivent être plus Terme XXIX, Parr. Il, 1786. SEPTEMBRE. Dd r 310 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, répétées que je're l'ait fait, pour ôfer aflurer que l'apparence du foula- gement qui en a réfulté, foit dûaux moyens employés; & en outre , quand il leur’ feroit dû ; il refléroit encore à déterminer s'ils ont agi comme irritans , ou comme abforbans & conducteurs de l'é- lectricité. Aa pa ne DETTE .+A,M. DE LA METHERTIE, Doëeur en Médecine, Auteur du Journal de Phyfique ; Par M. HASSENFRATZ, Profeffleur de Phyfique de l'Ecole Royale des Mines. Monsieur, Je m’emprefle de remplit la promefle que je vous ai faite en partant de Päaris , de vous envoyer l'extrait du Mémoire que MM. Monge, Vandermonde & Berthollet ont lu à l’Académie Royale des Sciences, en avril 1786 , fur les quatre états métalliques du fer coulé, du fer forgé, d'acier & d'acier trop cémenté. Malgré les nombreufes expériences de MM. Reaumur, Rinmann & Bergmann fur ces objets, la caufe de ces quatre états étoit encore hypothétique ; on ne fabriquoit ce métal qu’en fuivant une routine fouvent éloignée de remplir Je but que l’on fe propofoit. Les Chimiftes françois viennent enfin de déterminer ce travail. Ce feroit donc faire un tort réel aux Savans étrangers qui lifenc votre Ouvrage, que de tarder plus long-tems à le leur communiquer, J'ai l'honneur d’être, &c.! ! - 3 f TOI 1 3 £ + ExTRrAIT du Mémoire) de: MM. MonGE:, -VANDERMONDE, G& BERTHOLLET , de l’Acudémie Royale des Sciences : fur la Fonte, le Fer & L'Acièr. Le fer peut être divifé en fix états: 1°, fer coulé, 2°. fer forgé dudtil, 3°. fer forgé caflant à froid, 4°. fer forgé caffanc à chaud, 5°.acier, & 6°. acier trop:cémenté., De cès fix-érats les Académiciens françois n'examinent que le fer coulé, le fer forgé. ductil, l’acier:& l’acier trop cémenté ; les deux autres érats, le fer forgé caffant à froid; eft le réfultat du mélange d'un fel phofphorique martial, apperçu par M, Bergmann; déterminé par M. Meyer, ne pe NE pe “SUR L'HIST. NATURELLE ÆT. LES. ARTS. 211 & le fer forgé caffant à chaud, reftera indéterminé, jufqu’à ce que quelques Chimiftes ou Métalluroiftes puiffent en découvrir la caufe. … Le Mémoire de MM. Monge, Vandermonde & Berthollet, eft divifé en cinq parties; la première, développe les opérations que l'on fait fubir au fer, ou le travail du fer confidéré fous fes trois rapports; la feconde, préfente un extrait des recherches des Chimiftes & Mérallurgiftes qui les ont précédés ; la rroifième, eft un expofé de leurs propres recherches ; la quatrième , une explication des opérations par lefquelles on donne au fer fes différens états métalliques; & la cinquième a pour objet Le char- bon confidéré dans fon état de combinaifon avec le fer, & l’état où il cit au fortir de cerre combinaifon. La première opération que l’on fait fubir au fer, eft la fonte de fa mine ; la feconde, l’affinage du fer coulé; & la troilième., la gémentation du fer forgé, Il eft inutile d'entrer ici dans le détail des opérations que l'on fait fubir à la mine pour la convertir en fer coulé, Les perfonnes qui défireronc prendre des connoïflances fur ces manipulations, peuvent confulter les Ouvrages de MM. Swedémborg, Rinmann, Jars & Duhamel, & la partie des forges, par MM. de Courtivron & Bouchu, dans l’immenfe collection des Arts & Métiers, publiée par l'Académie Royale des Sciences. Nous, obferverons feulement avec MM, M. V. & B,. que, quelle que foit la mine employée, on obtient trois efpèces de fer @oulé: 1°. blanc, 2°. gris, &, 3°. noir; que la fonte blanche eft plus caffante & plus fragile que les autres; la grife eft plus flexible que la précédente , & fe laifle plus facilement entamer, & la noire eft compofée de molécules moins adhé- rentes & qui s'émiettent avec plus de facilité. Së dans la fufion de la mine on.emploie le moins de charbon qu'il efl poffible, la fonte eft blanche ; elle devient grife lorfque dans La charge du fourneau on a Jufffamment augmenté Les dofes de charbon ; enfin , elle efl noire lorjqu'on force l'emploi de ce combuflible. Ainfr le charbon eff la feule caufe de la couleur que préfente La caffure de la fonte, & il contribue pour beaucoup à la duéilité imparfaite dont elle jouir & à la facilité plus ou moins grande avec laquelle elle fe laifle entamer. Ces trois caractères principaux du fer coulé, n’ont aucun rapport avec l’érat du fer forgé qui en réfulre. Le fer forgé ductil peut , s’il n’a pas le défaut d’être caffant à chaud ou à froid , être rendu plus doux, plus malléable en raifon du nombre de chaudes qu'il a efluyées & du nombre de fois qu'il a été forgé & replié fur lui-même. Tous les Mérallurgiftes favent que, pour amener le fer coulé à l’écar de fer forgé, il fau lui faire fubir une ou plufieurs fufons, felon la qualité du fer coulé, & la routine que l'on fuic dans chaque force, enfuire lui laiffer prendre un état pâreux à la dernière fufion, & le Tome XXIX, Part. II, 1786. SEPTEMBRE, Dd 2 7 OBSERPATIONS SUR LA PHYSIQUE, porter” fous lé marteau pour l’érendrèe , & pour en exprimer la fonte trop liquide & les fCories mélangées dans Ja®mafle. HAT Toutes des fois que l'on refond, dans des fourneaux de reverbére, de là fonte qar d'abord étoit grile, non-feulement elle devient blanche ais encore elle approche davüntage de la nature du fer) foré. : * L'acier fe divife en acier poulé, acier forgé , acier trop cémerité, acier fôndu & acier naturel, ; F Pour obtenir de l’acier du fer forgé, on le ftratifie dans des fourneaux avec différens mêlanges dont le charbon eft la bafe. On ferme le tout, & lon fait fubir à l'enfemble une chaleur plus ou moins forte. Les barres de fer paroiflent, en fortant du fourneau, avoir changé de natures leur füurface eft remplie de bulles; elles ont augmenté de poids, & leurs propriétés fomt changées : c’eft de l'acier poule. Les barres cémentées ,rougies & paflées fous le marteau, forment l'acier forgé ; locfqu'elles ont reflé trop long-rems dans le cément, qu'elles y ont efluyé une grande chaleur, on a de l'acier intraitable, qui ne peut plus fe forger, qui s’émiette fous le marteau : c'eft de l'acier trop cémenté. “ La trempe, cette opération par laquelle on donne’à l'acier différens degrés de dureté, ne change rien à fa nature, feulement elle fait varier l’arrangement dés molécules. Enfin, Pacier chauffé à plufieurs fois, forgé & replié fur lui-même, perd peu-à-peu de fes caraétères, Î redevient fer duétil. Je me fuis afluré qu'en expofant üne barre d’acier dans un fourneau de reverbère pendant un certain tèms {tems qui dépend de la nature de l’acier & de la chaleur du fourneau), l’acier avoit perdu tous fes caractères , & ce qui me reftoie étoir un fer très-doux & très-malléable, La fragilité & la dureté de l'acier, cette dudilité, cette malléabilité & ce caractère ferreux qu'il acquiert en le chauffant; enfin, fa fufbilité plus ou moins grande en raifon de fon degré de cémentation , font autant de caradtères qui patoiffent rapprocher l'acier de la fonte; mais nous verrons pat la fuite, d’après les expériences des Académiciens françois, la différence entre ces deux états. De tous les Chimiites & Mérallurgiftes qui ont cherché à établir la diftinétion entre le fer coulé, le fer: forgé & l'acier, il en eft peu qui aient fait des expériences auffi nombreufes , aufli directes, & qui aient plus approché de la vérité que MM. Reaumur & Beromann. Ces favans ont fuivi deux manières abfolument différentes pour parvenir au même réfultar. M. de Reaumur a cherché quelle étoit la manière de cémenter le fer forgé , d'aloucir le fer fondu, & quelles matières étoienr propres à cha- cune de ces opérations. Ces expériences lui firent connoître que les charbons de bois de terre & de favates brülées , la fuie, la corne & la fente de pigeon étoient les feules matières qui puiflenc cémenter fans SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 213 addition. Que toute autre matière ajoutée étoit inutile ou nuifible , excepté les fels marin & ammoniac , dont il crut appercevoir de bons effets ; il avoit remarqué en outre l'augmentation de poids de l'acier cémenté &c les bulles qui fe forment à la furface, qui probablement l'auroit conduit à La découverte des compofirions du fer dans fes différens états , fr alors la théorie des effervefcenses avoit été connue. Mais ces réfultats le portèrent à conclure que , LE CÉMENT TRANSMETTOIT LES SELS ET LES SOUFRES AU MÉTAL POUR LE CHANGER EN ACIER : conclufion peut-être déjà trés-belle pour fon tems , mais trop vague aujourd'hui. IL reconnut aufli que l'argile, la chaux vive ou éteinte, la craie, le verre pilé & la poudre d'os rendoient l'acier doux , malléable & le rame- noient à l'état de fer forgé; d’où il conclut que, CES SUBSTANCES RÉABSORBOIENT LES SELS ET LES SOUFRES DONT L'’ACIER ÉIOIT PÉNÉTRÉ, Tous les rapprochemens de l’acier à la fonte, la propriété de la fonte de s’adoucir dans les matières qui font pafler l'acier cémenté à l’état de fer fcrgé, & fur-tout cette obfervation capitaie que , fi l'on plonge une barre de fer forgé dans un bain de fonte grife, elle fe convertit aufli-rôt en acier, le porta à cette dernière conclufon que, L’ACIER EST UN ÉTAT INTERMÉDIAIRE ENTRE LE FER ET LA FONTE , ET QUE LA FONTE N’EST QU'UN ACIER TROP CÉMENTÉ. M.Bergmann a cherché à découvrir la différence entre le fer coulé, le fer forgé & l'acier, d’après la nature & les proportions de leurs compofans. I! a analyfé ces trois différens fers par les acides vitriolique , marin & nitreux ; les deux premiers lui ont donné des réfulrats analogues, le dernier paroît ne pouvoir rien établir de conftant, ce qui tient à la nature de l'acide nitreux qui n’éroit pas encore affez connue, lorfque ce célèbre Chimifte a fair fes expériences. Le Profefleur d’'Upfal a cherché enfin à découvrir les rapports de phlogiftique d’après les quantités d’argent difloutes dans l'acide vitrio- lique, précipité par différens fersÿmais n'ayant fait que quatre expériences, il n'a pas connu les variations qu'une plus grande fuite lui auroic préfentées. M. Bergmann a déterminé dans fes analyfes, 1°. lés proportions d’air inflammable, 2°. de plombagine, 3°. de manganèfe , 4°. de terre filiceufe, 5°. de fer pur, & 6°. de chaleur. Comme les quantités de chaleur qui réfultent de ces expériences dépendent de la dureté des fers & des aciers, & que la trempe, fans rien changer à leur nature , fait varier la dureté, il s'enfuit que l'on ne peut rien conclure des quantités de chaleur. Les proportions d'air inflammable ont été déterminées en mefure par le favanc Suédois, & les autres matières au poids. Ses réfultats moyens font: 214 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Aiintammable it epleeesbescess Plombagines mate en eee ter Manrantle Rte eee eiesee es Terreflicée. rss aleipisesceta sise ce Il réfulre de ces expériences, 1°. que Le fer coulé a produit moins d'air inflammable que l'acier , & l'acier moins que le fer ; 2°. qu'il y a plus de plombagine dans la fonte que dans l'acier, & dans l'acier que dans le fer; 3°. que la manganèfe étant en égale quantité ne change rien à la nature du fer; 4°. qu'il y a plus de terre filiceufe dans la fonte que dans Facier, & dans l'acier que dans le fer ; & 5°. qu'il y a moins de fer dans la fonte que dans l'acier , & dans l'acier que dans le fer forgé. Ce qui érablit toujours la conclufion de M. de Reaumur , que L’ACIER EST UN ÉTAT MOYEN ENTRE LE FER COULÉ ET LE FER FORGÉ, M. Bergmann néglige la terre filiceufe des trois écats du fer, comme devant y avoir peu d'influence, & ne prend en confidération que l'air inflammable , la plombagine & la chaleur ; mais nous croyons ne devoir point parlér de cette dernière fubftance. À Comme les compofans des trois efpèces de fer font les mêmes, & qu'il ne différent que par leurs proportions; il fuit des réfulrats obtenus que, pour faire de l'acier avec de la fonte, il faut y ajouter de l'air inflam- mable, & retirer de la plombagine, & que pour faire de l’acier avec du fer foroé, il faut retirer de l'air inflammable & ajouter de la plombagine. M. Bergmann fuppofe que l'air inflammable eft compofé de phlo- giftique, & que la plombagine eft du phlogiflique faturé d'air fixe. D'après cela, en faifant de l'acier avec de la fonte , on décompofe une portion de la plombagine; l'air fixe fe dégage, & le phlogiftique plus à nud , conftitue de l'air inflammable qui s’unit au métal ; & en cémentant du fer doux, l'air fixe dégagé du charbon s’unit avec le phlogiftique de l'air inflammable & reforme la plombagine. Tel étoit l'état des connoiffances fur la nature du fer confidéré dans fes différens états métalliques, lorfque MM. M VF. & B. entreprirent le travail dont nous allons faire l'extrait. \t SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 215 Extrait des recherches de MM. Monge, Vandermonde & Bertholler. Les expériences de M. Bergmann établiffent les rapports de l'air inflammable obtenus dans les trois états du fer ; fer coulé , acier & fer forgé : : 40 : 48: so, c'elt-à-dire, que la fonte a produit + moins que le fer coulé & l’acier +. Mais ces réfultats ayant été obtenus fans avoir épard aux variations de l'atmofphère, MM.M. V. & B. ont cru devoir les répéter. Les proportions moyennes d'air inflammable réfultant de la diflolution des fers coulés , acier & fer forgé , des forges de Guerigny dans de l'acide vitriolique étendu d’eau , obtenus par les Chimiftes françois , & réduits à une même température & une même preflion, étoit :: 54:74:76, c'elt-à-dire , que la fonte a produit d'air inflammable moins que le fer forgé, & l'acier —. Une autre expérience a établi la différence de l'acier au fer de Suède —. Il fuit des expériences des trois favans Académiciens ; que leur acier a proportionnellement produir plus d'air inflammable , & leur fonte moins que les deux mêmes efpèces de fer, analyfées par M. Bergmann. » Les nouvelles expériences fur la calcination des métaux, celles de la décompofition & recompolition de l'eau , nous ayant appris que l'air inflammable qui fe dégage des diffojuitions métalliques n'eft pas partie conftituante des métaux, & qu'il eft toujours le réfultat de la décom- pofition de l'eau; les conféquences que M. Bergmann a tirées de fes expériences , doivent être énoncées en d’autres termes. En effet , en fe diffolvanr, les métaux éprouvent un commencement de calcination occa- fionnée parla bafe de l'air déphlogiftiqué qui leur fert d’incermède, Cer air eft toujours enlevé des matières avec lefquelles ilale moins d'affinité ; aiob, lorfque l'on mêle de l'acide nitreux avec les autres acides minéraux , où qu'il eft employé comme diflolvant, l'air déphlogiftiqué eft'pris de l’acide nitreux, & l’air nitreux qui lui étoit uni fe dégage: quand au contraire on fe fert de l’eau pour ce mêlange, l'air déphlogiftiqué eft pris de:ce liquide, & l'air inflammable qui y étoit intimement lié fe dévage : il fe | dégage d'autant plus abondamment, UE" a plus d’eau de décompofée ; & qu'il s’unit plus d'air déphlogiftiqué métal. Ainfi, comme il {e dégage moins d’air inflammable de la diflolution de l'acier que-de-celle du fer forgé , & moins encore du fer coulé que de l'acier, on croiroit que le fer forgé Sempare de plus d'air déphlogiftiqué que l'acier , & l'acier plus que le fer coulé : d'où l’on feroit porté à conclure que l’acier con- -tiendroit déjà plus d'air déphlostftiqué que Le fer forgé, & le fer coulé que l'acier. i : ë _Si l'acier contenoit plus d’air déphloviftiqué que le fer forgé, il faudroit ue l'opération de la cémentation ajoutat de nouvel air déphlogiftiquéau ce mais d'après les expériences de M. de Reaumur ; le: charbon feul 216 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fufñc pour cémenter le fer forgé, & le charbon a plus d’affinité avec l'air déphlogiftiqué que le fer. Cependant afin qu'il ne reflt aucun doute fur ce qu'il ne s’unit pas d'air déphlogiftiqué au fer pendant la cémentation, MM. M. V. & B. cémentèrent plulieurs morceaux de fer forgé des forges de Guerigny , avec de la pouflière de charbon dans différens états. Ils employèrent du charbon fortement calciné & parfaitement dégazé, qui conféquemment ne contenoit plus d'eau. Ils mirent en comparaifon du même fer avec du charbon ordinaire , du charbon humide & du charbon imbibé d’alkali fixe. [ls eurent conftamment les mêmes réfultats; toujours le fer éroit d'autant plus cémenté ; il avoit d'autant plus augmenté de poids, qu'il avoit fubi une plus grande chaleur avec le cément : d’où il fui de cette opération, que dans la tranfmutarion du fer en acier, il n’y a aucune matière qui puifle produite de l'air déphlogiftiqué à l'acier ; donc fes propriétés en font indépendantes. Après s'être aflurés que l'opération de Ja cémentation n’ajoutoit pas de nouvel air déphlooiftiqué, ils cherchèrent fi les bulles que l’on apperçoit à la furface de l’acier poule , ne venoient pas d’un dévagement d’air fixe produit par l’union de la matière char- bonneufe avec l'air déphlogiitiqué que le fer pouvoit encore contenir. Pour cela, ils cémentèrent à la fois dans Le même creufer un morceau de fer de Suède & trois morceaux de tôle du même pays ; ces morceaux de tôle étoient repliés fur eux-mêmes , de manière que les furfaces calcinées étoient en-dedans ; donc elles devoient contenir plus d’air déphlogiftiqué que le fer. Poids des barres 4 De Rapport Efpeces de barreaux. avant la RE AO de l'augmentation cementation. ARE au Poids total. Fer de Suéde.............| s 640 Tôle de Suéde............ Neeesleeeneese eee es) TT 4 oO + Un js Win Love 4 7 3e...| 207 Le morceau de fer fe trouva augmenté de =, tandis que les trois morceaux de tôle n'étoient augmentés , quantité moyenne , que de —; moindre augmentation qui ne pouvoit venir que de la plus grande quantité d'air déphlogiftiqué dégagé de l’intérieur. Hs firent encore une autre expérience , ils cémentèrent plufieurs morceaux d'une barre de fer forgé des forges de Guerigny , & les cémentèrent au point néceflaire pour obrenir de bon acier. L'augmentation moyenne étoit de —, tandis qu'un morceau du même fer trop cémenté par parties , augmeénta de —. L'augmentation tn] es SUR L'HIST. NATUREËLE ET LES ARTS. 217 L’augmentation de poids du fer en fe cémentant dans la pouflière de charbon , la propriété exclufive de cémenter que pofsède le charbon ou les matières qui en contiennent, la décompofition de l’acier en le forgeanc à plufeurs fois, les étincelles que lance l'acier rougi , la couleur que l'acier prend en le recuifant après l'avoir poli, cette tache noire que M. Rinmann a obfervé que les acides laïfloient fur l'acier ; enfin, la plombagine de M. Bergmann qui, comme nous le verrons plus loin, n’eft qu'un mélange de charbon & de fer ; tous ces objets difcutés avec foin prouvent que la cémentation eft une opération par laquelle le charbon pénètre & s’unit avec le fer, ainfi que l'acier ne differe du fer que parce qu'il contient plus de charbon, : Mais pourquoi obtient-on + d’air inflammable de moins par la diffo- lution de l’acier dans l'acide vicriolique étendu d’eau , que par la diflo- lurion du fer forgé, fur-tout lorfque la cémentation ne combine que 7 de matière étrangère, & que les bulles de l’acier poule prouvent que l'acier contient moins d'air déphlogiftiqué que le fer. Ces Chimiites ont d’abord obfervé que, quelle que foit la manière dont on fafle difloudre l'acier dans l'acide vicriolique , il y a toujours plus de plombagine appa- rente au milieu qu’à la fin dela diflolution , & que même elle difparoît entièrement lorfque la diffolution fe fait à un degré de chaleur médiocre, Comme la plombagine ne fe diflout point dans l'acide vitriolique, elle ne peut difparoître qu’en s’uniflant avec l'air inflammable. Effe&tivement M. Monge a obfervé dans fa belle expérience de la compofition de l'eau, que l'air inflammable retiré de l'acier produifoit de l'air fixe dans fa com- buftion avec l'air déphlogiftiqué, ce que M. dela Metherieavoit aufli obfervé, & M. Berthollet s’eft afluré d’ailleurs que l'air inflammable en diflolvanc du charbon, fe contractoit fur lui-même beaucoup plus même que l'air dé- phlogiftiqué. On voit encore bien clairement le réfultat d’une pareille con- traction , lorfqu’on défunit par le moyen de l’érincelle électrique lair in- flammable & la mofere qui forme le gaz alkalin, & dont le volume double prefque par la décompofition ; & ceci explique pourquoi l'air inflammable pur, celui, par exemple, que l'on retire de l'extinétion du fer dans l’eau eft plus léger que celui que l'on retire de la diffolution de l'acier. IL fuit de ceci que l'acier eft du fer forgé uni au charbon, & l'acier trop cémenté du fer forgé uni à une plus grande quantité de charbon. Une obfervation fimple fit diftinguer aux favans François la différence de la fonte à l’acier. Le fer coulé contient du charbon comme l'acier , puifqu’il lance des étincelles en le chauffant, que l’acide y laifle une rache noire, que par fon analyfe on obtient de la plombagine, & que fon air inflammable produit de l'air fixe : mais la fonte feule dans un creufet bien fermé paffe à l'état de fer, tandis que l'acier n’y change pas de nature. Il faut donc que la fonte ait , indépendamment du charbon , une autre matière qui puiffe s'unir avec lui pour l'en dégager, & cette matière elt Tome XXIX, Par, II, 1786, SEPTEMBRE, Ee 218 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, de l'air déphlogiftiqué, De-là la grande différence de © d'air inflammable produit par la diflolution du fer coulé dans l'acide vitriolique étendu d’eau , à celui de la diffolution du fer. Il fuit de ces expériences que le fer forgé dudtil eft l’état le: plus fimple de ce métal ; que cependant il fe trouve encore mélangé d'uné-rrès-petire quantité d'air déphlogiftiqué & de charbon, que l’on peut difficilement lui ôter entièrement en le forgeant ; que l'acier eft le fer forgé mélangé de charbon & dégagé d’une portion de l’air déphlogiftiqué qu'il retenoit ; que l'acier trop cémenté elt le fer forgé mélangé d’une trop grande quantité de charbon, ce qui le rend intraitable : & qu’enfin la fonte eft un mêlange de fer, de charbon & d'air déphlogiftiqué. Il et inutile de faire mention ici de la manganèfe & de la terre filicée trouvée par M. B:rgmann. Puifque ces deux matières paroiffent n'établir aucune différence dans les quatre efpèces de fer, ils appliquent enfemble ces réfultars à l'explication des opérations par lefquelles on donne au fer fes différens états métalliques. Les mines de fer font en’ général des mélanges de fer, d'air déphlo- gifliqué & de différentes matières étrangères. Fondre ces mines, c’eft les débarrafler de ces mêlanges; pour opérer cette féparation on les jerte dans des hauts fourneaux avec différentes proportions de charbon. Elles s’échauffent enfemble jufqu'à ce qu'elles foieut arrivées à la voñte; là le mélange fe détache, tombe, éprouve un violent coup de feu, entre en fufon & fe précipite dans le bain. Dans cette fufñon inflantanée, le charbon qui a quelqu’affinité avec le fer & avec la bafe de l’air déphlo- gifliqué, s'unit avec ces deux matières, fe dégage avec la dernière fous Pétat d'air fixe, & fe mêlange dans le bain avec le fer. Les matières étrangères qui diftinguent la mine, s’en féparent, & fondues elles fur- agent le bain métallique. Suivant les quantités proportionnelles de fer, d'air déphlogiftiqué , de matières étrangères dans les mines de charbon qu'on emploie, d’air lancé par le fouffler, on peut obtenir trois réfulrats de fontes différentes: 1°. fonre blanche, qui contient rrès-veu de char- bon; 2°. fonte grife qui en contient davantage; & 3°. fonte noire qui en contient encore plus. De-là la différence des fontés que l’on peut varier en employant plus ou moins de charbon , & en faifant aller les foufflets plus ou moins vire. Ces trois efpèces de fontes peuvent encore varier en raifon de l'air déphlogiftiqué qu'elles contiennent; mais ces caractères. font diffciles à reconnoître à la wue, lorfque la mine en fe fondant a laiflé dévager peu de fon air déphlogiftiqué , que la fonte en contient encore beaucoup dans fon bain, & qu'il y a affez de charbon pour s'unir avec lui ; on court le danger, en lui donnant trop de chaleur, que l'air déphlogiftiqué & le charbon n’abandonnent le fer , ne forment enfemble de l'air fixe, qui, fe dégageant impétueufement , bouche la tuyère, que la fonte fe-raffine , pafle à l’état pâteux, & oblige d'arrêter le feu. * SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 219 Ces dangers pour les hauts fourneaux n’exiftent pas dans les endroits où l’on fond & raffine le fer à la fois, ainfi que l'on failoit autrefois dans les petits fourneaux de Styrie, tel qu’on le pratique encore dans quelques parties de la Hongrie; dans le Comté de Foix, &c, La mine étant fondue, on donneun grand coup de feu, elle s’épure, on fort la loupe, on la pale fous le marteau ,on la forge & on obtient du fer ou de l’acier en raifon de la conduite du feu, de la quantité d’air lancé par la tuyère & de la quantité de charbon employé. Dans beaucoup de forges, & particulièrement en France , on coule la fonte des hauts fourneaux en barres de quinze cens, dix-huit cens, deux mille livres, & mème plus, & les coulées fe font toutes les dix, douzé heures: dans d’autres on coule toutes les trois, quatre heures, & les coulées ne font que de trois, quatre , cinq quintaux. Ces fontes different peu ; feulement ilme paroît y avoir plus de bénéfice dans la confommarion du charbon par le dernier procé“é , que par le premier. Enfin , il eft d’autres endroits où l’on coule la fonreen bietres , c’eft-à-dire, en plaques très-minces , ce qui eft infiniment plus avantageux pour le rafinage, & économife prefque la moitié du charbon. uelle que foit la fonte que l’on emploie au raffinage, on a pour but de lui faire dégager l'air déphlogiftiqué qu’elle retient , & tout fon charbon fi l’on veut obtenir du fer doux , ou feulement une portion dé fon charbon fi l’on veut avoir de l’acier pour réfultat. La fonte, avant d'être raffinée, fe rencontre dans trois états, 1°. contenir beaucoup de charbon & peu d'air déphlogiftiqué ; 2°. ayant une proportion de fes matières propres à s'unir & fe dégager mutuellement, & 3°. beaucoup d’air déphlogiftiqué & peu de charbon. Pour en obtenir du fer ; dans le premier cas fonremue la fonte à mefure qu'elle coule, on la pañle devant la bufe afin que le vent du foufflet enlève rout ce qui pourroit s’y être mêlé ; la fonte rafinée, on porte la loupe fous le marteau, & les coups - qu'elle reçoit finiffent d'exprimer le fer qui eft trop à Pétat de fonte , ou trop à l'érat d'acier. Dans le fecond cas, on fond la gueufe à plu- fieurs fois, on la laifle épurer dans le bain ; l'air déphlooiftiqué s’unit au charbon, fe dégage par effervefcence, & la fonte raffinée fe porte de même fous le marteau ; enfin dans le troifième, on laiffe furnager - très-peu de fCories fur le bain , on fait aller les foufflets moins vire, & on mélange beaucoup de charbon avec le métal, La fonte s’épure & fe porte fous le marteau. Il eft des forges , dans le Bourbonnois , le Berry , où l’on cémente cetre efpèce de fonte; c’eft-à-dire , qu'après Favoir refondue & coulée en plaque, on la ftratifie avec du charbon, & on la refond enfuite. Pour avoir de l'acier naturel, on fait fubir à la première fonte , l'opération que l’on fair fubir à la feconde pour avoir du fer. Si ce- pendant elle eft trop charbonneufe, on la fait paffer par partie devant Tome XXIX , Part. Il, 1786. SEPTEMBRE, Ee 2 » 220 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, la tuyère , & l’on fait fubir à la feconde l'opération de la troifième. La fonte charbonneufe en blette , fe travaille bien plus facilement & d'une manière bien plus propre à éclaircir la théorie. Pour en obtenir du fer, on fair fubir aux blettes un long grillage , où l’on a foin de renouveller l'air par deux foufflets; dans cet état, lorfque le charbon eft diffipé, on les porte à l’affinerie, où elles entrent aufli-tôt dans un état pâteux, & font portées fous le marteau. Pour avoir de l’acier , on les fait fondre fans avoir efluyé de grillage, & on les préferve du contaét de l'air pendant la fufon , par une couche de laitier très-épaife, de manière qu'elles confervent tout le charbon en excès ; ainfi , la nature du fer plus ou moins aciéreux , obrenu à l’afinerie , dépend de deux chofes, de la qualité de la fonte , & du procédé. Il refte peu de chofe à dire fur la cémentation que M. de Reaumur a trop bien décrire & que l’on peut toujours confulter. La feule efpèce d'a- cier, dont M. Reaumur a peu parlé, eft l'acier trop cémenté. Ce méral paroît fingulièrement approcher de l'acier fondu des anglois ; mais il refte encore quelques expériences à faire avant de prononcer. Il fuic de tout ce que nous avons dit , 1°. que la fonte ou le fer coulé, eft un mêlange de fer, charbon, & de la bafe de l'air déphlo- giftiqué ; 20, que les fontes font blanches, grifes ou noires en raifon de la quantité de charbon qui s’y trouve mêlangé ; 3°. que l'acier de cémentation n’eft qu'un mêlange de fer & de charbon; 4°. que l'acier trop cémenté n’eft qu'un fer où il y a plus de charbon; & $°. que le fer parfaitement doux, feroit un régule dans le plus grand état de pu- reté, mais qu'il fe rencontre toujours, dans le commerce , mélangé d’un peu de charbon & de la bafe de l'air déphlogiftiqué, Du charbon conffdéré dans fon état de combinaifon*avec le fer & dans l'état où il eff au fortir de cette combinaifon. Les expériences que nous avons citées fur la cémentätion , l’analyfe de la fonte & de l'acier , tour prouve que le charbon fe mêle avec le fer en différentes proportions ; ces proportions dépendent des températures , & varient dans le travail du fer , depuis le fer forgé jufqu'à l'acier trop cémenté. Cependant toutes les expériences de M. Bergmann , fur le réfidu noir de la fonte & de l’acier , prouvent que c'eft de la plombagine. Les expériences que MM. Schéele , Bergmann , Hyelm & Pelletier ont faites fur la plombagine , 1°. le réfidu de chaux martiale après la calci- nation fous la moufle; 2°. le fédiment ferrugineux après la déronation avec le nitre ; 3°. les Aeurs martiales obtenues dans la fublimation avec le fel ammoniac ; 4°. le bleu de Pruffe par le mêlange de l'acide marin digéré {ur la plombagine avec la liqueur pruffique 30 5°. l'air inflammable dégagé par cette digeftion , prouvent que cette fubflance D SUR L'HIST. NATURELLE FT LES ARTS. 221 contient du fer. Les autres expériences, 1°. la litarge & l'acide arfénical révivifiés avec la plombagine en produifant de l'air fixe; 2°. le foufre formé par fa combinaifon avec l'acide vitriolique ; 3°. le gaz acide fulfureux avec le fhème acide vitriolique ; 4°. le phofphore avec l'acide phofphorique ; $°. l’effervefcence rendue aux alkalis cauftiques ; 6°. la décompofition de l’acide nitreux , & la propriété effervefcente qu’acquiert l’alkali volatil dans la détonation de la plombagine avec le nitre amimno- niacal , prouvent qu’elle contient du charbon. Cependant les auteurs de ces expériences ont non-feulement regardé le fer comme une chofe accidentelle; MM. Schéele & Bergmann avoient regardé l'air fixe qu’on en obtient dans plufieurs expériences , comme entrant dans fa compolition , mais MM, M. V. & B. prouvent que la plombagine eft une combinaifon de fer & de charbon , & qu'elle ne produit de l’air fixe qu'à la manière du charbon (1) qui fe forme dans les différentes opérations; je regrette de ne pouvoir extraire ce paflage , qu'il faut abfolument lire dans l'ouvrage , & je me conten- terai de décrire cette nouvelle expérience. Ils ont fondu de la plombagine dans l'air déphlosiftiqué au foyer d'une lentille, ils ont eu pour réfulrar, de l’air fixe & quelques perits régules qui n’éroient -pas attirables à l'aimant, mais qui diffous dans l'acide marin lui ont abandonné une grande quantité de fer & ont laiflé un fédiment noir femblable à celui que laiffent la fonte & l'acier dans les mêmes circonftances. IL paroïe que le fer n’eft pas le feul métal qui contienne du charbon ; M. Berthallet avoit déjà remarqué que la détonation du zinc rend les alkalis effervefcents. M. de Laflone avoir obrenu de l'air inflammable avec de l’alkali cauftique qui devient effervefcent ; J'avois obtenu de la plombagine & de l'air inflammable charbonneux, en diflolvant du zinc dans de l’a- cide vitriolique étendu d'eau ; enfin ces meflieurs ont obtenu de la plorbapine , d'ane diflolution de zinc dans l'alkali volatil, c’eft-à-dire, un mêlange de fer & de charbon; il ne s'agit plus maintenant que de dérerminer f£ le charbon peut fe diffoudre dans le zinc & dans quel- qu'autres métaux fans l’interméde du fer , ou bien s’il faur qu'il joir uni au fer & fous forme de plombagine pour fe combiner avec ces fubflances. Dans le premier cas , il ef? probuble qu'en fortant de chaque combinaifon , ce charbon entraïneroit une certaine portion du métal, ce qui conflitueroit autant de plombagines differentes , qu'il y aureit de métaux avec lefquels il pourroit fe combiner , mais c’efl à l'expérience à vérifier cette conjeéture. (x) Le mois prochain , nous donnerons les preuves de cette affertion, 222 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, æe— —. RÉFLEXIONS Sur la Subflance charbonneufe & le Phlogiftique ; Par M. DE LA METHERTE. | Be favans Phyficiens & Chimiftes dont nous venons de voir le travail, font néceflités d'admettre le charbon dans la fonte, le fer & l'acier, parce qu'on en retire toujours de l'air fixe ou acide, & que dans la théorie qu’ils ont embraflée, l’air acide réfulte de la combinaifon de l’air pur & de la fubftance charbonneufe. Par la même raifon ils concluent que la plombagine contient du charbon, parce qu'elle donne toujours un aïr inflammable mêlé d'air acide. Ils font aufli forcés de reconnoître Île charbon dans le zinc, comme je l'ai dit dans ma réponfe à M. Ader, (Journal de Phyfique , 1786, mois de juin, page 446 ) puifque M. de Laflone a fait voir il y a long -tems que l’air inflammable que l'on retire du zinc contient de l’air acide. M. Berthollet a eu les mêmes réfultats. ; Je crois qu'on peut prouver que dans ces mêmes principes Ja plupart des fubftances métalliques doivent contenir du charbon, & je me fervirai des mêmes expériences. I. J'ai projeré de la limaille d’étain très-pur & du nitre dans un creufer bien chauffé. Il y a eu une vive détonation, comme l’on fait: l'étain a été réduit en chaux, & le nitre alkalifé. J'ai verfé fur une portion de ce réfidu de l'acide marin, qui a excité de l’effervefcence , & l'air qui s'efl dégagé, reçu dans l’eau de chaux, l’a précipitée. L’acide vitriolique verfé fur une autre portion de ce réfidu, produit une effer- vefcence encore plus vive, parce qu'il dégage une portion d'acide nitreux, & d'air nitreux. Ce même réfidu mis dans l’eau de chaux, y occafionne également un précipité fort abondant. Il eft vrai que de l'eau diftillée dans laquelle j'ai jeré une portion de la même fubftance eft devenue un eu laiteufe. Une portion de la chaux d’étain s'y trouve fufpendue , parce qu’elle adhéroit à l’alkali qui eft diflous ; mais ce précipité eft facile à diftinguer de celui qui eft produit dans l'eau de chaux. IT. Un mélange de limaille de plomb & de nitre projeté dans un creufet chauffé, a déroné foiblement, J’ai eu une chaux de plomb d’un très-beau jaune. De l'acide marin verfé fur ce réfidu en a dégagé avec effervefcence un air qui a précipité légèrement l'eau de chaux. On fait d'ailleurs que Le méinium & les autres chaux de plomb contiennent beaucoup d'air acide. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 233 IT. J'ai projeté avec les mêmes précautions de la limaille de cuivre dans un creufer. La détonation n’a pas été fenlible. Cependant la furface de la limaille a été réduire en une chaux noirâire, & fous cette croûte on retrouvoit le cuivre avec fa couleur naturelle, Les acides verfés fur le réfidu ont ‘produit une effervefcence; mais il ne s'eft dégagé que de l'acide nitreux, de l'air nitreux & peu d'air acide ; au moins l'eau de chaux n'a pas été fenfiblement altérée. À IV. La détonation du bifmuth eft foible. IL eft réduit en une chaux jaune. J'ai trouvé au fond du creufet une portion du bifmuth fondue & criftallifée. De lacide marin verfé fur lé réfidu dépouillé de toutes les parties métalliques qui ne font pas-calcinées , y produit une effervefcence aflez vive, Cependant l’eau de chaux en eft peu altérée. V. La détonarion de l’antimoine a été affez vive, & il a été réduit en chaux blanche. De l'acide marin verfé fur le réfidu n'a produit qu'une légère effervefcence; & l'eau de chaux n'en paroît pas altérée fenfible- ment. . VI. Le régule d’arfenic a déroné avec une belle flamme blanche accompagnée d’une fumée abondante. La matière s’eft beaucoup bour- fouflée, & eft devenue d’un beau blanc. L’acide marin verfé fur le réfidu, il y a eu effervefcence accompagnée de beaucoup de chaleur. L'air dégagé n'a pas caufé un précipité fenfible dans l'eau de chaux. Mais ayant fait déroner la chaux blanche d’arfenic avec le nitre, & ayant faic pañler l'air qui s’eft dégagé dans l’eau de chaux, il y a eu un précipité abondant. VII. La détonation du cobalt avec le nitre eft foible. Le mélange s’eft beaucoup bourfoufflé & a pris une couleur noirâcre. Comme le cobalt contient le plus fouvent de Parfenic, je ne fais fi c'eft lui qui a caufé ce bourfoufflement. L’acide marin verfé fur ce réfidu en a dégagé un air qui a précipité l'eau de chaux, VIII. Le mercure ne détone pas avec le nitre, parce qu'il ne peut fapporter la chaleur néceflaire fans être réduit en vapeurs ; mais on fait que l'air pur qu'on retire des chaux de mercure, par exemple, du précipité rouge, contient une portion d'air fixe , & trouble l’eau de chaux. IX. La chaux d'argent contient aufli de l'air acide. J’ai mis dans une Ccornue de verre 1e de la diflolurion d’argent dans l’acide nitreux, & l’ai placée dans. un fourneau. Lorfque l'acide a été évaporé, -jai reçu dans l'eau de chaux l'air qui s’eft dégagé, C'éroit de l'air pur, mêlé d'air acide ; car l’eau de chaux a été croublée. La cornue caffée, j'ai trouvé l'argent revivifié. Il y en avoit mème d’adhérent au haut de la cornue ; mais je n'ofe croire qu'il ait été fublimé. Ce fera une portion qu’aura laïffé dépofer l’acide qui, en agitant la cornue , en aura touché certe partie. Nous pouvons réfumer de ces expériences que le fer, le zinc , l’étain, 224 OBSERFATIONS SUR LA PHYSIQUE, le plomb , le cobalt, donnent dans leur combuftion un air qui précipite l'eau de chaux d'une manière non-équivoque. Ce précipiré eft moins fenfible avec le cuivre, l’antimoine & le bifmuth. Quant à l’arfenic, je n'en ai point obfervé, mais il eft très-abondant dans la détonation de fa chaux. Ainfi dans la détoration des fubftances métalliques par lenitre, une portion de l’alkali {e trouve aérée ou combinée avec l'air acide , & l’autre à l'état de caufticité. Or, dans la nouvelle théorie cet air acide n’a pu être produit que par le charbon contenu dans la fubftance métallique, & l'air pur qui fe dégage du nitre. Ainfi il faut donc que ces favans reconnoiflent le charbon, non-feulement 1°, dans le fer, la fonte & l'acier, 2°. dans le zinc, mais 3°. dans-l'étain, 4°. dans le plomb, 5°. dans le mercure, 6°. dans l’argent, 7°. dans le cobalt, 8°. dans la chaux d’arfenic, Ils ne fauroient non plus guère le nier dans le cuivre, dans l’antimoine, dans le bifmuth, & fans doute dans toutes les autres fubftances métalliques. Or, le charbon eft une fubftance inflammable, Ainf voilà enfin avouée l’exiftence d’une matière inflammable dans les métaux. On ne peut pas dire que ce foit la plombagine , puifque, fuivant ces Savans , la plom- bagine contient du fer, & que le fer ne fe trouve point dans l’étain, le plomb , &c. & d’ailleurs, quand ce feroit la plombagine, ils conviennent que la plombagine contient du charbon. Cette fubftance inflammable fera le pklogiflon , que ces mêmes Savans feront obligés de reconnoïtre encore, dans routes les fubftances animales & végétales, dans l'alkali phlogiftiqué , &c. puifque l'air inflammable que l’on en retire contient toujours de l'air acide. Ainfi, fuivant eux, le charbon , la fubflance charbonneufe où phlogiflon , fe trouvera, 1°. dans la plupart des fubftances métalliques , 2°. dans les fubftances végétales , 3°. dans les fubftances animales, 4°. dans l'air inflammable, puifque dans fa combinaifon il donne toujours de l'air acide, $°. dans l’alkali phlogiftiqué , 6°. dans la plombagine, &c. &c. Ce font toutes les fubftances où on reconnoït ordinairement le phlogifton, I] n’y aura donc que le foufre & le phofphore, où dans leurs principes, on ne puifle pas encore prouver l’exiflence de la /ubflance charbonneufe ; mais il ne me paroît guère qu'ils y puiffent nier l’exifence d’un air inflammable, d’après ce que j'ai dit dans les Cahiers précédens : ils pourroienc dire que cet air vient d'une décompofition antérieure de l’eau ls admettent bien de l'air inflammable dans les huiles, dans les réfines ,&c. Ils reviennent donc au pAlogiflon d’une autre manière. Dans leur théorie le-phlogiflon fera la fubflance charbonneufe, & le charbon ordinaire fera compofé de cette fubftance particulière , plus de rerres , de métaux, de fels, &c. &c. Il refte maintenant à ces Savans à nous faire connoître ce qu'ils entendent par la fubffance charbonneufe contenue dans le charbon ordinaire, mais qui neft point le charbon; car jufqu’ici ils n'en ont donné aucune idée, Ils rejettent le phlogiftique ; parce que fes partifans n’en sed SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 225 men ont point donné de notions claires, Ne peut-on pas leur faire le . même reproche au fujet de la fubftance charbonneufe ? & n’eft-ce pas fubitituer à une fubftance peu connue une autre qui ne l’eft pas davantage? Sthal, il eft vrai , ne s’écoit point expliqué fur la nature de fon phlo- gifton, qu'il reconnoît feulement comme le principe de l’inflammabilité ; & en cela il a été fuivi par le plus grand nombre des Chimiftes. Quant à moi, il me paroïc que les propriétes connues de l'air inflammable fatis- font à tout ce que les phénomènes nous font voir du principe de l’inflam- mabiliré ou phlogiflon. L'air fixe obtenu dans la détonation des métaux, provient de la combuftion de leur air inflammable, comme celui qui eft produit dans la combuftion de l'air inflammable des fubftances animales & végétales. On m'a obijecté que les méraux étant calcinés dans un laboratoire , if m’étoit pas furprenant que quelques portions de charbon ne fe combi- naflent avec la chaux mérallique. Mais la calcinarion opérée avec un verre ardent dans des vaifleaux fermés, & fur un bain de mercure , il y a également production d'air fixe, comme s’en eft afluré M. Lavoifier à l'égard du plomb (dans fes Opufcules, page 291). Ici il n’y a pu avoir introduétion de matière charbonneufe, ni de charbon. Il y a cependant une obfervation effentielle à faire fur l’air fixe ou acide qu'on retire des fubftances métalliques, des matières animales & végétales , de l’a!kali phlozitiqué , de la plombagine , &c. Dans la théorie nouvelle la fubftance charbonneufe brûlant avec de l'air pur, donne de l'air acide, en forte que cet air eft le produit de la combuftion du charbon & de l'air pur. Mais dans routes les opérations dont nous venons de parler, nous avons de l'air acide fans qu’il y ait de combuftion. En diftillant, par exemple, dans des vaiffeaux clos les matières animales & végétales, l’alkali phlogiftiqué , la plombagine , le fer , le zinc , &c. on a de l'air inflammable mêlé d'air acide: & cependant il n'y a point eu accès de l'air pur, par conféquent il n'a pu y avoir combuftion de la fubftance charbonneufe, Il paroïîtroit donc que cet air fixe n’a pas été produit dans l'opération , & exiftoit auparavant. Tome XXIX, Part, 1, 1786, SEPTEMBRE, Ff 226 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, LETTRE NnoDE. M IGARANGCGEOT, A M'DE LA METHERIE, SUR LE GONIOMÈTRE. NES eur J'ai donné, au mois de mars 1783, dans le Journal de Phyfique, que: vous favez rendre aujourd'hui fi intéreffant, la defcription d'un inftrument devenu néceflaire pour mefurer les angles dans les criftaux des différentes. fubftances, J'ai appris depuis avec plaifir, que des Lapidaires même étrangers, l'avoient adopté pour la taille des pierres précieufes , & dérer- miner géométriquement les facettes néceflaires pour en tirer rout le jeu; & le brillant donc elles font fufceptibles ; mais dans l'ufage journalier que j'en ai fait, jy ai découvert un défaut eflentiel , qui, bien des fois, ma arrêté dans mes opérations , & m'a porté à chercher tous les moyens d'y remédier. En effec, il éroie très-aife de mefurer les criftaux foliraires, même ceux qui étant grouppés fe trouvoient ou aflez élevés au-deflus des autres, ou aflez ifolés : mais cette melure devenoit impoñble , toutes les fois que le grouppe étoic large ou applati, ou que les criftaux peu faillans étoient ferrés les uns contre les autres: alors, le demi-cercle gradué de l'infframenc empèchoit par fon étendue l’introduétion des pointes du Goniometre, & ne laïfloit que le regret de ne pouvoir s’en fervir. Je viens de corriger cerre imperfection par le fecours de M. Ferat , jeune artifte très-adroit & très-intelligent , le même qui s’étoit appliqué: feul à l'exécution de cet inftrument, chez M. Vinçard , fous le nom de qui il fe vendoit. Il avoir déjà ajouté à l’ancien (1) une feconde barerte pour foutenir le demi-cercle vers le quarante-cinquième degré : il a rendu la première mobile fur le centre, & eft parvenu à brifer ce demi cercle au quatre-vingt-dixième degré , par le moyen d’une charnière, de forte qu’une moitié fe replie fur l’autre, & laifle les pointes du goniomètre- abfolument ifolées. Comme il eft effentiel cependant de conferver à la partie pliante, lorfqu'elle eft étendue , la jufteile & la folidité néceflaires pour éviter les erreurs dans le rapport des angles, il a ajouté , vers le oo (x) Voyez la figure au Journal cités. SUR L’'HIST, NATURELLE ET LES ARTS, 2357 cent quarante-cinquième degré, une vis à tête molettée dans la tige de laquelle engraine une échancrure pratiquée au haut de la barette mobile, de manière qu’en ferrant cette vis , la barette fe rrouve fixée, & fupporte cette portion de cercle. 6 Cette correction indifpenfable pour mefurer les criftaux grouppés , eft inutile aux Lapidaires, qui pourront économifer près de moitié fur l'achat de l'inftrument, en fe fervant de l’ancien , dont le prix, en cuivre, eft de 21 Liv. & de 36 Liv. en argent. Quant au nouveau qui eft beaucoup plus compliqué, cet artifte l'a fixé à 36 Liv. en cuivre, & à 54 liv. en argent. J'ai l'honneur d’être, &c. TS CS | ANALYSE % DU CARTON-PIERRE; Par M. D’ANTIC DE SERVIN. Î L y a déjà quelque tems que les Journaux annoncèrent la découverte du carton-pierre ou carton-lythophite , du Docteur Faxe, Médecin de PAmirauté de Carlfcrona, en Suède, qui jouit de la double propriété de ne brûler que très-dificilement, & d’être parfaitement indifloluble dans l'eau, qui , au contraire , augmente fa dureté, Les avantages précieux que cette découverte prometroit, les nombreufes expériences auxquelles on Pavoit foumis en Suède, me rendirent curieux de connoître plus particu- lièrement certe fingulière produdtion de l’art. J’ai profité de la bien- veillance de quelques compatriotes du Doéteur Faxe, avec lefquels je fuis lié d'amitié, pour avoir les renfeignemens néceflaires & me procurer des échantillons de ce carton que j'ai foumis à l’analyfe (1). Comme cet objet peut intéreller les perfonnes qui défireroient s'occuper de la fabrication du carton-pierre en France , & leur éviter des tâtonnemens & des dépenfes inutiles , je crois devoir entrer dans quelques détails {ur fes propriétés, qui ont été trop laconiquement racontées dans les divers Journaux. Le Doéteur Faxe annonça à l'Académie Royale des Sciences de Srockolm, le 31 juillet 1785, qu'il avoit fait la découverte d'une efpèce de (1) Je lai faite dans le laboratoire & fous les yeux d’un Chimifte diftingué de la Capitale ; au zèle & à l'amitié duquel je dois beaucoup , & en préfence de M. le Baron de Servières, qui s’interefle beaucoup à tout ce qui a rapport aux arts utiles, & qui cultive les fciences avec fuccès. Tome XXIX , Part. II, 1786, SEPTEMBRE, Ff2 228 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, papier qui ne brüloit point au feu, & durcifloit fous l'eau ; qu'il le croyoit propre, 1°. à couvrir les maifons , étant léger, folide & ne s’alrérant point à l'air; 2°. pour les doubler intérieurement & extérieure- ment pour les garantir du feu & de l’humidité ; 3°. pour aflujectir le plâtre aux plafonds; 4°. pour orner les maions, ce carton ayant la facilité de fe mouler ; $°. pour conferver la poudre dans les arfenaux & dans la fainte-barbe des vaifleaux . 6°. pour doubler les navires & bois de conftruétion dans les ports, pour les défendre de la piquüre des vers ; 7°. pour faire des entre-deux de femelles aux fouliers des foldats obligés de fe mettre en marche par un tems humide & pluvieux. L'Académie lui nomma des Commiflaires qui, le 26 octobre de la même année, firent leur rapport. Voici les certificats produits par le Docteur Faxe, qui conftatent les avantages & les propriétés de fa découverte, Le premier , figné de M. Nordenskold , Chevalier & Lieurenant- Colenël , porte que plufieurs feuilles de ce papier ont féjourné deux mois dans l'eau, & que , fans s’y ê re altérées , elles y ont durci ; qu'elles fe font :égalemenr durcies dans des diflolutions de vitriol de cuivre ou de fer. Ïl porte que des feuilles de ce papier goudronné ou peint, ont pañlé une partie de l'hiver , expofées aux injures du tems, & ont été fufpendues dans un puits, fans avoir éprouvé aucune alté- ration; ce ceruficat porte en outre que Ja chaux s’unit très-bien au carton-pierre & qu'il fe charbonne lentement au feu fans donner de flamme. Le fecond , de M. Frédéric Brafth , apothicaire de l’Amirauté , porte que le papier-pierre ne fe diflout, ni dans l’eau bouillante où il en a tenu pendant huit heures, ni dans les alkalis, ni dans différentes fau- mures ; qu'il ne s'altère point à l'air, fur-rour lorfqu'il eft peint ow trempé dans des diffolutions de vitriol ; que , bouilli dans l’huile, il devient fi ployant qu’on peut le rouler. Le troifième , de MM. Nordenskold & Sredingn, Lieutenans-géné- raux , porte qu'ayant fait conftruire une maifonnerre en planches , l'ayant revêrue intérieurement & extérieurement de deux feuilles de papier-pierre, partie collées, parrie clouées , l’ayant remplie de copeaux fecs & élevés autour & par - deflus un bûcher de bois blanc , auquel on mit le feu ; le papier fe charbonna & le bois n'éprouva aucun dommage. Le quatrième , eft de MM. Cofwa , capitaine du génie, & Lidfirom, Lieutenant du génie. Ï porte qu'on en a revêtu au mois de juin 178$, une maifon de plaifance à Carlfcrona , & qu'au mois d’odtobre 1ls l'avoient examinée fans qu'ils euflent pu s'appercevoir que, ni le toit, ni les plaques qui revérifloient les murs , euflent éprouvé aucuns dommages. Le cinquième , de M, Cofwa, conftate que des feuilles de ce papier ; SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 229 clouées & expofées pendant fix femaines à la chüte des eaux de la digue de Liskebi , n’ont éprouvé aucune diflolution. Enfin M. Lilza, capitaine de vaifleaux de roi, certifie qu'il a fait attacher , à chacun des flancs extérieurs du fond de cale de fon navire, plulieurs feuilles de ce papier , & qu'après quatre voyages de chacun quatre mois , il les avoit trouvées durcies & point endommagées. La commiffion nommée par la clafle chimique de l’Académie, qui a examiné les feuilles de papier-pierre qui lui avoient été rennfes à cec effet, en a rendu le compte le plus favorable, & a confirmé l’authen- ticité des certificats qu'on vient de lire. L'Académie , pour en témoigner au docteur Faxe fa farisfation , lui a accordé une fomme d'argent à titre d'encouragement , pour former ces premiers établiflemens. Les frais d’apprêt pour une feuille de ce carton , d’une aune quarrée, qui eft de deux pieds, revient , fuivant le docteur Faxe, à quatre ou fix fols de notre monnoie. Suivant ce que j'ai lu dans un journal économique qui paroît à Stockolm tous les mois, il femble que ce carton fubit diverfes préparations ; que celui qui eft battu ne laifle point filtrer l’eau, puifque M. de Nordenfkold en a confervé , dans des cilyndres traits de ce carton , pendant plus de trois femaines, & que celui qui n'a pas fubi certe préparation , brûle plus difficilement. Il paroît que celui fur lequel j'ai opéré n’avoit pas été bactu, car il a laiflé filcrer l’eau comme on va le voir. Analyfe du Carton-pierre. Les échantillons de carton-pierre que je me fuis procurés , font de différenres couleurs & épaifleurs ; pour plus de clarté , je les défignerai par leur couleur : le premier eft rouge-brun , le fecond jaune , le troi- fième blanc. L Ces trois efpèces de carton fe laiflent difficilement entamer par l'ongle , fe caflent plurôt qu'ils ne fe déchirent , fe laiffent pénétrer par l'eau, mais ne sy diflolvent pas; j'en ai tenu dans l'eau bouillante , pendant plus de rois heures , fans qu’ils s'y foient détrempés, Expériences fur le Carton-pierre rouge-brun. Tous les acides ont fur ce carton une ation marquée, & particu- lièrement l'acide nitreux qui réagit fur lui avec effervefcence , & en détruit l’aggrégarion ; la liqueur filtrée après une léoère ébullition , on obrienr une diflolution de nitre calcaire , chargée d'un peu de fer. J’ai négligé le réfidu infoluble , les expériences ultérieures m'ayant fait fufilamment connoître {a nature, J'ai de même traité cent grains de ce carton avec l'alkali canftique, il a prirs une forme gélatineufe, J'ai étendu la diflolution d'eau diftillée , 530 OBSERVATIONS SUR LA PHFSIQUE, & l'ayant filtrée, j'y ai verfé un acide qui a décompofé la liqueur & a fait furnager l'huile: à J'ai mis dans un creufet cent grains du même carton , chauffé au feu de forge, il a pris feu & brülé avec flamme, J'ai continué la calcination & j'ai obtenu un réfidu d’un gris fale , du poids de cin- quante-fix grains. J'en ai trituré une partie dans un mortier de marbre avec le fel ammoniac, il s'eft dégagé de l'atkali volaril. L'autre partie a été traitée avec l'acide marin, & l’alkali phlopiftiqué y a occalionné un précipité bleu très-abondant. ù J'ai fourmis à la diftillation , dans une cornue de verre , fept gros douze grains de carton-pierre. Pendant la diftillation il s'eft dégagé beaucoup de gaz inflammable & d'acide craieux, il a pañlé dans le ballon une huile épaifle , fétide , & de l’alkali volatil ; ces deux produits pefoient cent deux grains. La matière charbonneufe , reftante dans la cornue, ne pefoit plus que quatre gros cinquante grains ; en réuniflant ces deux produits , on ne retrouvé que quatre cens quarante grains, tandis que j'ai employé fept gros douze grains, ou cinq cens feize grains. La perte eft donc de foixante-feize orains, & elle doit être attribuée à l'acide crayeux, au gaz inflammable & à la légère portion d'huile qui, s'eft attachée au col de la cornue. J’ai calciné la matière RENTRER da poids de quatre gros cinquante grains, ou trois cens qüarante-huit grains, fur un têr à rotir, & j'ai obtenu une cendre grife , pefant deux cens quarante grains. Dans cette feconde opération, on trouve qu'il s’eft détruit cent foixante-huit grains; cette perte eft fans doute occalionnée par une portion d’huile non décompofée pendant la diftillation ; & par les matières végétales qui fervene à la fabrication de ce papier-carton, Lorfqu’on traite ce réfidu avec les acides nirreux où marin ; il ne s’en diflout que la troifième partie; ce qui refte infoluble eft un fable ferrugineux ÿ c'eft ce fable calcaire ferrugineux qui donne à ce carton fa couleur rouge-brune. Il réfulre de ces expériences que le carton, rouge-brun, du doéteur Faxe, eft préparé 1°. avec terre martiale !, environ deux parties 5 huile animale ; une partie (1), empâtée avec deux parties de matière végétale, préparée pour le carton ordinaire. ; J'ai foumis aux mêmes expériences les cartons blancs & jaunes, & j'ai obfervé qu'ils ne différoient que par la terre qui ; dans tous les deux , eft une terre calcaire blanche. Traité à la diftillation , il m'a donné de même pour produir de l'huile fétide & de l’alkali volatil. Le réfidu charbonneux ayant été calciné , a laïflé une cendre blanche , RRQ re PER eng LE ne eg € (x) Il paroit que c’eft de l'huile de harengs qu’on prépare en grande quantité dans le port de Carlfcrona , & qui conféquemmnt doit y être à bas prix. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. o31 foluble prefqu’en totalité dans l'acide nicreux. Jai pris une partie de cette diffolution , & l'acide vitriolique y a occafionné un précipité abondant de félenire, j'ai traité l’autre avec l’alkali phlopiftiqué qui y a occañonné un léger précipité bleu. Le carton jaune m'a paru n'être autre chofe que le carton blanc bouilli dans une diffolurion de vitriol de fer : car en le coupant, quoiqu'il foit le plus mince, on apperçoit un trait blanc qui le partage dans fon épaifleur , dans les endroits où cette diflolution na pu pénétrer. Je n’infifterai point davantage fur toutes les autres expériences auxquelles j'ai foumis ces trois efpèces de carton, celles-ci mayant paru fufffantes pour mettre fur la voie ceux qui defireroient en préparer, & pour éclairer les phyficiens fur fa nature. Je n’ajouterai rien à ces détails, j’avertirai feulement les perfonnes qui voudront s'occuper de cette importante matière , de chercher à donner à leur carton plus de tenacité que n’en a celui de Suède, qui cependant a une certaine folidité. On y parviendra facilement en va- riant les dofes de la bafe terreufe qu'on y introduit. Je crois qu’il feroic plus avantageux d'en faire un carton de collage qu’un carton de moulage, al jouiroit par-là de cette étonnante ténacité qui fait le grand mérite de ces efpèces de carton & de tous les avantages de celui de Suède ; cetre main-d'œuvre ne feroit ni longue ni difpendieufe dans un établiffemenc en grand, & on fe procureroir par ce moyen , des couvertures folides . légères , durables, & qui ne furchargeroïent point les bâtimens par leur poids énorme , comme le font les toitures actuelles. OBSER VATION DE M. SCHÉELE, Sur l'Air qui fe dégage de l’Acide nitreux expofe au foleil. J'AI pris un Bacon un peu alongé que j'ai rempli aux trois-quarts d'acide nitreux blanc & concentré ; je l'ai renverfé dans un verre à confiture, dans lequel fe trouve aufli de Pacide nitreux concentré, Le verre de conf- ture doit être conftruit de manière que le flacon bouche prefque fon ouverture pour empêcher la grande évaporation de l'acide. Si l'on expofe cet appareil au foleil , on verra tous les jours s’abaifler un peu l’acide con- - tenu dans le facon: & après quelques femaines , Le facon fe trouvera parfairement vide; l'air qui s'eft produit eft de l'air vital bien pur, & Facide nitrêux eft devenu rouge par le phlogifton dufoleil. Je crois très-fort que la lumière el compofée en partie d'air vital & de phlogifton.,. ainfi que la chaleur ne confifte qu’en une petite partie du principe: inflammable. RSS — 7, NOUVELLES:ELTTTERAPRES Vo YAGE dans les Alpes, précédé d'un Effui fur l'Hifloire- Naturelle des environs de Genève ; par HorACE- BÉNÉDICT DE SAUSSURE , Profeffeur Emérite de Philofophie, des Académies Royales des Sciences de Siockolm & de Lyon, de la Société Royale de Médecine de Paris , de l'Académie de l'Inflitut des Sciences de Bologne , des Académies Royales des Sciences & 'Belles-Lettres de Naples & de Dijon , de l Académie Eleëtorale de Manheim, de La Société Parriotique de Milan , de celle des Antiquaires de Caffel, & des Curieux de la Nature de Berlin : tome II, in-4°. & LI, IF. in-8°. A Genève, chez Barde, Manger & compagnie ; & à Paris, chez Buiflon , hôtel de Metgrigny, rue des Poitevins. Prix de l’ir-4°. 12 liv. 10 fols broch. & 14 liv. par la pofte ; & l’27-8°. prix, 8 liv. 10 fols & 9 liv. 10 fols par la pote. « Le defir de rendre cet ouvrage moins imparfait, a rerardé la pu- » blication de ce volume », dit M. de Sauflure, bien différent d'un grand nombre de voyageurs qui font de gros volumes fur des pays qu'ils ont traverfés en chaife de pofte. Notre célèbre auteur n'a rien voulu dire qu'il ne l'ait vu & revu plufeurs fois, Cependant on fait qu'il a dédommagé le public de la privation que lui caufoir le retard de la publication de ce voyage , par celle de fon excellent traité fur l'hygrométrie. Ce volume contient les voyages de l’Auteur fur les plus hautes montagnes des Alpes ; favoir : le Mont-blanc, élevé de 2426 toifes au-deflus de la mer, & toutes les montagnes adjacentes qui font aufli d’une très-grande élévation. Les defcriptions qu’il donne de toutes ces contrées , font très-exactes , & je les ai lues avec d'autant plus de plaifir, que j'ai parcouru une partie des mêmes pays. M. de Sauflure partant d’abord du prieuré de la vallée de Chamouni, eft allé au Montauvert , pour pouvoir gagner enfuite les aiguilles , c’eft-à-dire de hautes pics qui bordent cette vallée au fud-eft & vont finir au Mont-blanc. On fuit l'Auteur à travers ces mers de glaces , les précipices , les débris de rochers , & on partage fes dangers avec le plus grand intérêt. « [l faut confidérer , dit-il , que les montagnes qui » bordent , au fud-eft, la vallée de Chamouni , font compofées de » deux parties diftinétes. L'une , eft le maflif non-interrompu qui s’é- » lève jufqu'à 7 à 800 toiles au-deflus de la vallée , ( laquelle eft élevée au-deflus SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 233 # au-deflus de la mer, de f24toifes ). L'autre, les pyramides ou > aiguilles détachées qui dominent ce maflif. La maile inférieure eft » compofée de roches feuillerées de différens genres , mais le plus » fouvent quartzeufes & micacées. Ces roches font difpofées par cou- » ches crès-régulières, qui courent, comme la vallée, du nord-eft au » fud-oueft. Elles font peu inclinées vers le bas de la montagne; mais » elles fe relèvent graduellement contre les vallées jufqu'au haut, où » elles font verticales. Ces mêmes couches s’approchent de la nature æ du granit, à mefure qu'elles s’approchent du haur de la montagne ; » 1à elles deviennent des granites veinés ou même des granites en æ male, Les pyramides qui dominent ce mafif, font de granit en »” mafle. Elles fonc Aanquées & même compofces exrérieurement de » feuillets pyramidaux , qui fonc fubdivifés ei couches paralèles au # plan même des feuiliers ». Plus bas dans la vallée, on retrouve des males calcaires & du gvpfe. Ces couches verticales font très fréquentesdans 1:s Alpes. M. de Sauure croit que cette direction n’a pas été primitive, mais qu'elle eft la fuire du bouleverfement des montagnes; & 11 confirme fon opinion par de grandes mafles fchifteufes, remplies de cailloux roulés, c’eft-à-dire , formant des poudingues, dont il à trouvé des couches verticales dans la Valorfine. Cerrainement, dit-il, ces poudingues n’ont pu être formés dans cerre pofition perpendiculaire. Il croit égilement que certaines fifures qu'on voit fréquemment couper à angle droit ces couches verticales, ont été primitivement elles-mêmes verticales, & ne fe trouvent aujourd'hui horifontales que par la mème caufe qui a rendu les couches verticales. M. de Sauflure , de rerour à Chamouni ,a cherché à voir les bafes du ‘Mont-Blanc d'un autre côté. [Il pénétra dans l’allée blanche du côté de Courmayeur, defcendit dans la vallée d’Aofte jufqu'à Cavaglia, & revint par le Saint-Bernard. Nous regrerrons de ne pouvoir le fuivre dans routes fes courfes. Par-rout il décrit les objets qui fe préfenrent à fa vue, Il s'attache fur-rour à la partie minéralogique , & cherche à faire connoître toures les efpèces de pierres qu'‘lrencontre. Du côté du glacier de Mitage il a trouvé beaucoup de pierres vertes qui font, dit il , des pierres de corne, non pas pures, mais mélangées de fparh calcaire, & il fait à cer égard une excellente obfervarion. La nature offre rarement des fubitances homogènes dans ces hautes montagnes. Le Naruralifte qui fait un cabinet daus les villes , cherche des morceaux bien caractérifés ; mais ils n’exiftenc point dans les Alpes. Tour y eft mêlangé. Une grande partie de cés montagnes eft de nature fchifleufe ; mais ce fchifte contient beancoup de quartz & de mica. Aulli fouvent ne donne-t-il point de nom aux pierres qu'il décrit. M. de Sauffure a vu auprès de Courmayeur de ces fchiftes micacés quarrzeux (ou gneis des Saxons), fuperpofés far des ichiftes, argileux. Tome XXIX, Part. Il, 1786. SEPTEMBRE. g 234 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, æ Voilà donc, dit-il, des couches de roches regardées comme primitives, » qui repofent fur un genre de pierre unanimement regardé comme » fecondaire, Ces dénominations de primitives & de fecondaires font-elles » fautives , ou bien cette fuperpofition monftrueufe des roches primitives » fur les fecondaires feroit-elle l'effet d’un bouleverfement? c'elt ce que >» je n'oferois point encore décider ». ] Il a trouvé aux environs de Saint-Maurice le petro-filex en grande mafle d’un côté de la vallée, & de l'autre côté le feld-fpath et très- abondant. Il dit à cet égard: « Je regarde le petro-filex & le feld-fpath » de la même nature. Leur dureté eit à très-peu-près la même, leur » denfité la même, leur fufibilité la même. L’analyfe chimique démontre » dans l’un & dans l’autre les mêmes principes, la terre filiceufe, la cerre » argileufe & le fer, & à-peu-près dans les mêmes proportions ». M. de Sauflure fait par-tout rendre fa marche intéreffante & variée par des obfervations intéreffantes. Par exemple, les habitans des régions élevées , où les neiges fondant très-tard, & retombant de bonne heure ne denneroient pas le tems aux récolres de mürir , ont l’adreffe d'accélérer la fonte des neiges de plus de trois femaines. Leur moyen eft bien fimples Ils avoient obfervé que la neige fondoit plutôt fur les terreins noirs : leurs femmes ramaflent beaucoup de cette terre, & la sèment fur les terreins couverts de neige qu’ils veulent enfemencer, ce que l’on appelle dans le pays erraffer. L’obfervation a conduit aux mêmes réfulrats le célèbre Franklin, qui en plaçant fur de la neige des morceaux d'étoffes différemment colorés , a vu la neige fe fondre plus ou moins vire fous ces morceaux , fuivant qu'ils abforboient plus ou moins de lumière. M. de Sauflure eflaya au mois de feprembre 178$, accompagné de MM. Bourrit père & fils, de monter fur le Mont-Blanc du côté de l'aiguille du Gouté; mais ils ne purent arriver qu’à environ dix-neuf cens toiles de hauteur au-deflus du niveau de la mer. Nous avons annoncé que Pannée précédente M. Bourrit ayant fait la même tentative, deux de fes guides gravirent prefqu'au fommet. « Pendant une heure que nous pafsämes >» à la hauteur de dix-neuf cens toifes, dit M. de Sauflure, le foleil nous >» incommodait au point de nous paroître infupportable. . . . Cependant >» ces rayons infupportables à nos corps ne faifoienr fur la boule du >» thermomètre qu'un effet équivalent à 2 degrés :, Cec inftrument mar- >» quoit à l'ombre 2,5 & au foleil 4,7. Les guides, payfans vigoureux » qui fupportent facilement le foleil dans la plaine, en étoient également » incommodés à cette hauteur. . . . On ne peut pas dire que ce foir la > réverbération des neiges ; car nous étions {ur une arrère parfaitement » aérée ». M. de Sauflure effaie d'expliquer ce fingulier phénomène par la raréfaction de l'air. On croit communément que l'air dés hautes montagnes eft plus pur que celui de la plaine. M, de Sauflure étant fur le mole à La hauteur SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 235$ d'environ fept cens toifes, remplit des ballons d’air; cet air, eflayé à Genève par M. Senebier, fut trouvé moins pur que celui de la ville ; ce qui confirme les obfervations de M. de Volta. L'air pur ou vital contenu dans l'armofphère étant plus pefant que l'air phlogiftiqué & l'air inflammable, doit fe trouver en plus grande quantité que ceux-ci dans la portion inférieure de l’atmofphère. On doit fe rappeller que M. Fontana ayant effayé l'air de Paris auprès de l'Hôtel-Dieu , l'a trouvé à-peu-près aufli pur que celui des campagnes voifines. M. de Sauffure fait par-rout obferver l’altération continuelle des mon- tagnes. Les hauts pics fonc fans cefle dégradés par Les frimats, & leurs débris entraînés dans Les vallées, On retrouve même ces débris à de très- grandes hauteurs. M. de Sauflure a vu des cailloux roulés à la cîme d'une montagne élevée de treize cens quatre-vingt-feize toiles, qu’il a appellée Cime des Fours, « Je me croyois au bord de notre lac , & je me repré- » fentois alors, dit-il, avec une extrème vivacité, les eaux rempliffant > toutes ces profondeurs & venant battre & arrondir à mes pieds ces » cailloux fur lefquels je marchois, tandis que les hautes aiguilles æ formoient feules des îles au-deflus de cette mer immenfe. ...Et ailleurs il ajoute: « Cette confidération fe réunit avec plufieurs autres >» pour prouver ce que j'ai déjà infinué ailleurs , que fi les montagnes, les > primitives fur-tout, paroiflent être d’une antiquité qui effraie l'imagi- » nation, l’état adtuel de la furface de notre terre, fa population, fa » culture , font en comparaifon d'une date prefque nouvelle ». M. de Sauflure a fait des obfervations très-curieufes fur l'électricité de Patmofphère. Il l’a prefque toujours trouvée plus confidérable fur les montagnes que dans la plaine. « Elle eft en général , dit-il, plus forte dans » les lieux les plus élevés & les plus ifolés, nulle dans les maifons, fous » les arbres, dans les rues, dans les cours, & eri général dans les lieux » renfermés de toutes parts. Elle eft cependant fenfible même dans les > villes, au milieu des grandes places , & principalement fur les ponts, » Où je l'ai trouvée plus forte qu’en rafe campagne ». Dans les tems d'orage ou couverts elle elt très-irrégulière ; mais dans les tems fereins elle paroît füivre quelques règles. « Elle eft fujette comme la mer à un flux & reflux >» qui la fait croître & décroître deux fois dans l'efpace de vingt-quatre >» heures. Les momens de fa plus grande force fuivent de quelques heures » le lever du foleil & fon coucher, & ceux de fa plus grande foibleffe » font ceux qui précèdent le lever & le coucher de cet aftre. . . . Quant >» à La qualité de cetre élericité , elle eft invariablement pofitive , tant en » hiver qu’en été, de jour, dé nuit , au foleil , à la rofée , toutes les fois » qu'il'n'y a point de nuages dans le ciel. I] paroît donc impoflible de ne = pas croire avec M. de Volra que l'électricité atmofphérique eft eflen- > tiellement poltive , & que celle que l’on voit négative ne vient que des » nuées qui ayant été expofées à la preffion du fluide éleétrique contenu Tome XXIX , Part. 11, 1786, SEPTEMBRE. Gg2 236 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, » dans le haut de l’atmofphère ou des nuages plus élevés , ont déchargé >» une partie de leur fluide contre la terre, ou contre d’autres nuages, & » font demeurés ainfi électrifés en moitié », Cette électricité de l'air ferein eft plus forte en hiver qu’en été, L’Auteur a enfuire fait des expériences fur léledricité de l'eau ré- duite en vapeurs. Il ifole le corps qu'il met en expérience en le plaçant fur un fupport de brique qui lui-même l’eft fur un vaifleau de verre, & il fait communiquer ce corps par un fil de fer avec fon éle&tro- mètre. Il a obfervé : ‘ 1°. Que l’eau qu'on fait bouillir dans une cafetière ifolée donne une éledricité négative, comme l'avoic vu M. de Volta. 2°. Que de l'eau jetée dans un creufet de fer rouge donne une élericité pofitive ; cependant lorfquelle fer eft d’un rouge vif, l'électricité eft nulle. 3°. Dans un creufet de cuivre l'éleétricité a toujours été poltive. 4. Dans un creufet d’argent elle a prefque toujours été négative, & on peut foupçonner que lorfqu'elle ne l'a pas été ceci eft dû à des portions de cuivre qui étoient contenues dans l'argent. 5°. Dans une tafle de porcelaine elle a été négative. 6°. De l'efprit-de-vin jeté dans un creufet d’argent chauffé au rouge prefque blanc , a donné une électricité négative , & fouvent n’en a point donné. 7°. De l'éther employé au lieu d’efprit-de-vin , a donné les mêmes réfulcats. 8°. De l'eau réduite en vapeurs fans ébullition, ne donne point d'électricité. 9°. La combuftion de différens corps n’a point donné d'élericité, De tous ces faits M. de Sauflure n’ofe rien conclure d’afirmatif. « []me » femble pourtant, dit-il, que puifque la porcelaine a toujours donné une » électricité négative, que l'argent l’a prefque toujours donné telle, tandis » que le fer & le cuivre l'ont donnée beaucoup plus fouvent pofitive, on >» pourroit en conclure que l'electricité eft pofitive avec Les corps capables » de décompofer l’eau, ou de fe décompofer eux-mêmes par leur contact » avec elle (1), & négarive avec ceux qui ne caufent ni ne fouffrent » aucune altération. Je ferois donc porté à regarder le fluide électrique » comme le réfulrat de l'union de l'élément du feu avec quelqu'autre » principe qui ne nous eft pas encore connu. Ce feroit un fluide analogue » à lait inflammable, mais beaucoup plus fubtil ». Cependant les vapeurs qui s'élèvent pour former les nuages, n'ont point éprouvé la chaleur de l’ébullition , & les nuages font éleétriques. Ce LD qe G) M, de Sauflure eft encore indécis à cet égard. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 337 qui fait foupçonner à M. de Sauflure que les vapeurs conduifent toujours l'électricité de la terre dans l’atmofphère , quoique fes expériences femblent répandre de l'incertitude fur ce fyftème. N'ayant pas encore eu occalon de faire connoître à nos Lecteurs l'éleétromètre de M. de Sauflure , nous allons en donner Ja defcription , Planche II. , BC eft une cloche de verre de deux à trois pouces de diamètre, percée à fon fommet pour laifler pafler une tige de métal D, qui eft terminée par un crochet À , & portant deux fils déliés d'argent Fg, Eg, auxquels fonc attachées des petires boules de moëlle de fureau, dont la divergence indique l'électricité. Le fond BC eft de métal cimenté aux bords de la cloche, & 4 À 2 font des feuilles d'étain appliquées au-dehors & au-dedans de la cloche pour fervir à la dépouiller d'éle&ricité qui lui demeure quelquefois adhérente après les expériences. On mefure la quantité de divergence des petires boules par Les divifions qui font fur la plaque de métal. R eft une boucle entrouverte à laquelle eft attaché un fil de métal qui tient à la balle métallique M. Cette balle lancée en l'air à la diftance de cinquante à foixante pieds, fe charge de lélectricité de l'atmofphère qu’elle communique à l’éledro - mètre qu'on tient à la main, la boucle s’en détache, & l’éleétromètre fe trouvant ifolé, indique quelle eft lélectricité de l’atmofphère. On peut fubftituer au crochet À un petit conducteur ou verge métallique de deux pieds de longueur, & ce conducteur donne le plus fouvent des marques d’éleétricité, en élevant l’életromètre feulement de quelques pieds au-deflus de rerre. M. de Sauffure le tient élevé de cinq pieds. Dans les rems de pluie on couvre l'appareil d’une feuille métallique faite en forme de parapluie F 11. Ce que nous venons de dire fait affez voir combien cet Ouvrage eft digne d la réputation de fon célèbre Auteur. Il a été accompagné dans une grande partie de fes voyages par MM, Trembley & Pictet , Savans dfftingués , qui l'ont fecondé dans fes tsavaux , fur-tout pour la mefure de la hauteur des montagnes. Ce volume eft terminé par un Mémoire fur cet objet par M. Trembley (1). Memoria fopra il Bolide , &c. ou Mémoire fur le Globe enflammé du 11 Septembre 1784, & Jur les Globes de feu en général ; par M, l'Abbé ANTONEMARIA VAssALt, Proféfleur de Philofophie au (1) M. Pi@et, favant Profefleur de Philofophie à Genève, vient d'écrire que M. Paccard , Dofteur en Médecine , qui demeure à Chamouni , eft enfin parvenu au haut du Mont-Blanc , le 8 Août dernier , accompagné de Jacques Balma. On les a fuivis avec des lunettes , & on les a vu planterà ce fommet un bâton avec un 2 mouchoir. . 238 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Collège de Tortone, Membre de la Société Agraire de Turin. À Turin, de l'Imprimerie Royale. L’Auteur de cette favante Differtation regarde ces météores comme des effets de l'électricité. De l'Eleëtricité du corps humain dans l'état de fanté & de maladie : Ouvrage couronné par l'Académie de Lyon, dans lequel on traite de l'Eledricité de l'atmofphère, de fon influence & de Jes effets fur léconomie animale, des vertus médicales de l'Ele&ricué, des découvertes modernes, & des differentes méthodes d'éleétrifation , avec un grand nombre de Figures en taille-douce ; par M, l Abbé BERTHOLLON , Profeffeur de Phyfique expérimentale des Etats- Généraux du Languedoc , des Académies Royäles des Sciences de Montpellier, de Lyon, Bordeaux, Dijon, Beziers, Muarfeille, Nifmes , Rouen , Touloufe, Walence, Madrid, Rome, Heffe- Hombourg , Laufanne , &e, 2 vol. in-80. À Paris, chez Didot le one quai des Augufins ; & à Lyon, chez Bernufet , rue Mercière, 1786. Cet Ouvrage eft connu avantageufement en Phyfique, & les Savans en ont porté leur jugement. Nous dirons donc feulement que l’Auteur dans cette feconde édition a donné beaucoup plus d’érendue à fes idées. Il confi- dère d'abord l'électricité du corps humain dans l’état de fanté. Il fair voir l'influence qu'a fur lui l’éle@ricité de l’atmofphère, & que cette électricité étant tantôt forte, tantôt foible , tantôt pofitive, tantôt négative , fes eflets doivent également varier. Il pafle à l’état de maladie du corps, & eu füuivant la diftribution nofologique du célèbre Sauvages , il indique les effets que produit l'électricité dans chaque clafle de maladies. Il parle de toutes les différentes manières d’électrifer les malades , ce qui lui donne lieu de faire connoître toutes les méthodes, tous les procédés qu’on a employés , & les expériences faites par la plupart des Phyficiens. L’Auteur développe enfuite quelques vues nouvelles qu’il a fur le fluide électrique. « Une fuite d'expériences curieufes que je publierai, dit-il, dans une >» autre occafon , m'a appris qu'il y avoit une éleé?ricité larente , comme »ily aun feu fixe,un feu principe, une chaleur latente, qu'il faut » diftinguer du feu dans un état de liberté , état dans lequel il produit » des effets fenfibles. La lumière , le feu, l’air fixe, &c. fe combinent avec » les corps, ou font dans un état de liberté ; de même le feu électrique > eft dans les corps en un état de fixité ; de compofition intime qui ne lui » permet pas de fe manifefter au-dehors, ce qui n'arrive que lorfque , >» fortant de l’état de combinaifon, il recouvre fa liberté & paroît fous >» fes apparences ordinaires ». Nous renvoyons à l'Ouvrage même, pour voir tout ce qu'il contient d'intéreflant. s EE — SUR L’'HIST, NATURELLE ET LES ARTS. 239 Mémoire & Inftru&ion fur la culture, l'ufage & les avantages de la racine de Diferte, in-8°. Prix , 24 fols, franc de port par la pofle. À Paris, chez Buiflon , rue des Poitevins , hôtel de Mefyrigny. L’Aureur de cette Brochure, M. l’Abbé de Commerell, dit qu'en Lorraine cette racine eft d’un grand ufage, qu'elle vient d’une grofleur prodigieufe, y en ayant qui pèle plus de dix à douze livres : on en nourrit les beftiaux, ainfi qu’on le fait en Brefle & ailleurs avec les racines de raves; ce qui en rend la culture précieufe. La plante eft du genre des bettes-raves: on en trouve de la graine chez M. de la Planche, Apothicaire, rue du Roule, à Paris. Differtario Botanica, &c. c’efl-à-dire, Differtation Botanique, contenant la difpofition générique des Plantes de Jena , rangées Jelon Linné & les familles naturelles ; par M. AUGUSrE-JEAN-GrORGES-CHARLES BaTscH de Jena, Doëteur en Philofophie & en Médecine. À Jena, chez Hellerian ; & à Strafbourg , chez Koenig, 1786, in-4e. de 6$ pages. 7 Nous avons déjà de M. Batfch deux importans Ouvrages nouveaux fur les champignons. La Diflerration qui fait le fujet de cette notice, offre une explication fort claire du fyftème fexuel du Chevalier de Linné, & donne une clef artificielle pour apprendre à connoître les ordres & familles naturelles des plantes, par le moyen des fleurs. Neuf claffes fufffent pour Ja difpoftion de la méthode de M. Barfch. Les quatre premières renferment les fleurs régulières, qui font les rofacées, ordinairement à cinq pétales ; les craciferes à quatre pétales ; les tripérales & les liliacées, qui ont fix pétales, ou bien la corolle eft fendue en fix. Les cinq autres clafles con- tiennent les fleurs irregulières ; favoir , les grimacières, ( rérgentes )les monopérales, les compofées , les incompletres & les cryprogames. Quant aux familles natureiles de M. Barfch , eiles fonc au nombre de foixante- dix-fepr. L'ASIE Des ARTICLES CONTENUS DANS CE CAHIER, Sur TE des Recherches fur l'origine de P Alkali minéral natif; par M. LorGNA , traduit de l'Iialien, par M. CHaMPY, page 161 efeription du Gaxifere, ou nouvel appareil pour faire du Gaz inflammable pur & entièrement degage d'air atmofphérique ; par M. BouLarD, Archieëte, Voyer-Injpeäeur de Lyvr, 172 mt : à 2430 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; 6c. Extrait d'un Memoire Jur Panaly|e de L Alkalivolaril : lu à L Académie des Sciences Le.11 Juin 1785; par M. BERTHOLLET, 175 Extrait d'une Differcation fur Le feu naturel de Pietra-Mala ; par le Comte G. De RaZOUMOWSKY, Corre/pondant de l Académie Royale des Sciences de Turin, Affocié E:ranger Libre de la Société Agraire de la même Ville ; des Sociérés Phyfico-Médicale & Phyfique de Büle & de Zuric, 6 de celle des Sciences Phyfiques de Laufannè , 1 Obfervations faites à Laon d'heure en heure fur la Bouffole 2 variation de M. CouLoms , de l’Académie Royale des Sciences, & Jur celle de déclinaifon de BRANDER, pendant les années 1784 & 1785 ; parle P.. CoTre;, Prétre de l'Oratoire, Correfpondant de l'Académie Royale des Sciences, &c. 189 Réflexions fur l'effes des commotions éledriques relativement au genre- humain ; par M. CARMOI, 194 Lertre à M. DE LA MEïHtRIE, Doëeur en Médecine, Auteur du Journal de Phyfique ; par M. HasseNFra1z, Profeffleur de Phyfique de l'École Royale des Mines, 210 Extrait dun Mérnoire de MM. Vundermonde , Monge & Bertholler, Jur la fonte, le fèr & L'acter, ibid. Rflexions Jur La Subflance charbonneufe & le Phlogi/lique ; par M. pe LA METHFRIE, 222 Lettre de M. CarANGEOoT à M. DE LA MëiTHERIE, fur Le Goniomètre , 226 Analyfe du Carton-Pierre ; par M. D'ANTIC DE SERVIN, 227 Obférvation de M. ScHÉELE Jur l'uir qut Je dégage de l'acide nitreux expoJé au foleil , 231 Nouvelles Lirréraires , 232 ASPNP/RNO BAT L ON. Ja lu , par ordre de Monfeigneur le Garde des Sceaux, un Ouvrage qui a pour titre: Obfervarions fur la Phyfique , fur l'Hifloire Naturelle & fur les Ares, Ëc. par MM. Rozier, MoNGez le jeune & DE za MeTueriE, év. La Collection de faits importans qu’il offre périodiquement à {es Leëteurs, mérite l’atrention des Sa- vans ; en conféquence , j’eflime qu’on peut en permettre l’impreffion. À Paris; ce 26 Août 1786. ” \ VALMONT DE BOMARE.,. ‘ mé mt L FRS Les OCTOBRE 1786. IE MÉMOIRE SUR MER OUISS AGE DUMP C'HALNNEÈRIE: Par M. PROZzET, Maître en Pharmacie, Intendant du Jardin des Plantes , de la Société Royale de Phyfique, d'Hifloire-Naturelle & des Arts d'Orléans, Ha théorie des procédés mis en ufage dans les différens arts, fuppofe néceflairement Ja connoiflance des principes confituans des corps qui y font foumis & des agens que l’on y emploie. Pour pouvoir bien difcerner ce qui fe pafle dans le rouiffage du chanvre, il eft donc néceflaire de diftinguer la nature de la fubftance qui unit entr'elles les fibres corticales de ce végétal. Une routine aveugle a toujours conduit cette opération ; & ce qui prouve combien l'art eft encore peu avancé à cer égard , c'elt que l'on ne trouve dans les Auteurs qui ont traité du chanvre, aucune définition exacte du rouiffage, Le plus grand nombre ne le regarde que comme un fimple moyen de faciliter la féparation de l’écorce de deflus la partie ligneule : nul n’exprime l'efpèce d’altération qui opère cet effet. Cette obfervation n’a point échappé à la fagacité de M. Marcandier : auffi dans fon excellent Traité du Chanvre , page 58, définic-il le rouiflage, une diffolution proportionnée de certaine quantité de la gomme qui lie toutes lesfibres du chanvre entr'elles,@ de celles qui les attachent & la paille. Mais il eft aifé de fentir que le rouiflage n’eft point feulement une fimple diflolation , ou fi l’on veut, une pure extraction de la partie Vgommeufe du chanvre, puifque dans celui que l’on pratique à fec & en plein air, la féparation des fibres corticales a également lieu, quoique cependant il n'y ait aucune extraction de la partie gommeufe. M. l'Abbé Rozier , que fes lumières en phylique & les fervices qu'il a rendus aux fciences rendront à jamais célèbre, en admettant l'exiftence & la diffolution d’une fubftance gommeufe produite par l'eau de la végétation , attribue la féparation de l'écorce de la chenevotte à /a fermentation de la partie mucilagineule qui détruit l’adhefion & la Tome XXIX , Part, IT, 1786. OCTOBRE. Hh lu 244 24 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, cohérence du gluten (1). Cette altération , ou pour mieux dire, cette deftruction des parties de la gomme que les connoiffances chimiques de M. l'Abbé Rozier lui ont fait préfumer , je lai démontrée. Mais le gluten du chanvre n’eft-il réellement qu’une fubftance gommeufe ? Il me femble que la pouflière qui s'élève pendant le battage du chanvre, & qui incom- mode fi fort les ouvriers, auroit dû convaincre il y a long-tems du contraire ; mais la théorie du rouiflage eft entièrement inconnue. Pour la traiter d'une manière plus complette, je diviferai mon Mémoire en différens paragraphes. PREMIÈRE QUESTION. Quelle efl la vraie théorie du rouiffage du Chanvre? Une théorie ne peut être lumineufe qu’autant qu'elle eft appuyée des expériences claires & précifes. Je tâcherai donc d'établir la nature de la matière qui unit les fibres de l'écorce du chanvre, avant de propofer mon fentiment fur ce qui fe pafle dans le rouiffage de ce végétal. Le eluten du chanvre n’eft point une pure gomme; l’eau dans ce cas, feroit fuffifante pour l’enlever entièrement. Un fimple lavage dans une eau courante , fans aucune macération préalable, l’extrairoit facilement , fur-tout, fi pour aider l’action diffolvante d’un Auide, on fouloit le chanvre avec les pieds. Le rouiflage à l’air dans les cantons où les ruiffeaux & les étangs manquent , feroit alors une opération ridicule, puifqu'il fuffroic d’avoir un puits & d’en tirer l'eau qui difloudroic promptement la partie gommeufe, On ne peut douter que ces moyens n'ayent été tentés , & leur infuffifance en aura prouvé l'inutilité. Cette matière glutineufe r’eft pas non plus une réfine ; l’efprit-de-vin qui diffout les réfines n’opère point la féparation des fibres de l'écorce du chanvre. Afin denc de pouvoir prononcer für ce qui fe paffe dans le rouiflage, j'ai commencé par faire les expériences fuivantes. Première expérience. J'ai fait bouillir trois onces d’écorce de chanvre non roui dans de l’eau diftillée ; j'ai pafñlé la liqueur par un linge, & j'ai réitéré les décoctions jufqu’à ce que le chanvre ne communiquat plus aucune couleur à Peau. Jai réuni toutes ces déco@ions, je les ai évaporées au bain-marie jufqu’à ficcité, & par ce moyen j'ai obtenu un extrait brun qui pefoit trois gros; Payant mis dans un flacon de criftal , j'ai verfé deflus une once d’éther vitriolique, dans l’inftant il s’eft légèrement coloré en jaune, & la couleur a été plus intenfe au bout de quelques jours. PR ER HD RP OA LE D D D OR ARE tm nie). DURS ee 0e (1) Voyez le Ditionnaire d'Agriculture , tom. III, page 8. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 243 Seconde Expérience, Le chanvre qui avoit fervi à cette décoction étant fec , a été auf mfs dans de l'éther vitriolique pendanc quelques jours, & lui a fourni une légère teinture jaune. a La diflolubilité dans l’eau de la matière contenue dans l'écorce du chanvre, prouve fans doute fa nature gommeufe ; mais aufli la teinture fournie à l'écher vitriolique dénote l'exiltence d’une partie réfineufe. Troifiéme Expérience. Voulant déterminer dans quelle proportion Ja réfine s'y trouvoit avec Ja partie gommeufe, j'ai mis dans un matras deux onces d'écorce de chanvre; j'ai verfé deflus une fufhfante quantité d’efprit-de-vin bien rectifié, pour que le chanvre füe entièrement couvert; j’ai fait digérer le . tout à une douce chaleur pendant vingt-quatre heures, l’efprit-de-vin s’eft légèrement coloré; j'ai procédé comme dans l'expérience première, c'eit- à-dire, que j'ai féparé l’efprit-de-vin coloré & que j'en ai verfé de nouveau fur le chanvre jufqu'à ce qu'il n’en ait extrait aucune teinture. Alors ayant réuni & filtré routes ces teintures, j'ai retiré tout l’efprit-de-vin par la diftillation dans un alambic de verre, & j'ai trouvé au fond de la cucurbite une réfine qui avoit une odeur de chanvre fi forte qu’elle en étoir nauféabonde ; elle pefoir quarante-huit grains. Cette réfine fe diflout très-bien dans l’éther vitriolique & lui communique une très-belle couleur jaune, Quatrième Expérience. Le chanvre dont j'avois extrait la réfine par l’efprit-de-vin ayarit été foumis à différentes décotions dans l’eau diftillée ; comme dans l’expé- rience première, a fourni par l'évaporation au bain-marie quatre-vingt-fix grains d'extrait gommeux fec & de couleur brune, J'ai verfé fur cet extrait de lécher vitriolique, & il s’eft légèrement coloré en jaune : preuve certaine que l’efprit-de-vin n’avoit pas extrait toute la réfine, foit que les parties gommeufes & les parties réfineufes adhèrent trop fortement les unes aux autres, foic que lorfqu'une portion de la réfine eft extraite, les parties gommeufes , devenant furabondantes , couvrent le peu de réfine qui refte & empêchent fon contact avec le fluide diffolvanr. J'obferverai , relativement à ces expériences, que les ayant répétées différentes fois, j'ai toujours retiré les mêmes produits, fi ce n’eft cependant que les quantités relatives de fa 2omme & de la réfine ont varié fuivane que le chanvre étoit plus ou moins bien nourri. En effer , le climat, le terrein & les intempéries des faifons influent fur la conftitution de ce végétal, comme fur celle de toutes les planres. Au refle, je ne rapporte ici que les expériences qui m'ont fourni un produit moyen ; d'ailleurs, Tome XXIX, Part, II, 1786. OCTOBRE. Hh 2 ‘#8 244 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, il me fufbr de pouvoir bien dérerminer par l'expérience la nature des fucs contenus dans les fbres du chanvresor, il me paroît démontré , d’après l'aralyfe que je préfente, que la matière qu’elle renferme eft une vraie gomme réfine. 1 D'après cette connoiffance & celle que nous avons déjà des altérations dont la gomme réline eft fufceptiblle , je penfe qu'il ef très-aifé d'expli- quer ce qui fe pafle dans le rouiffage du chanvre. En effet, l'eau dans laquelle on le met macérer doit d'abord s'introduire dans les vaifleaux qui contiennent [a 20mmèé réline, ou entre les bres qu'elle unit ; alors la partie gommeufe délayée prend le mouvement de fermentation qui lui eft propre. Ce mouvement inteftin l'atténue & le décompofe ; la fbre qu'elle unifloit doit donc être rendue libre, &, pour ainfi dire, à elle-même x on peut donc la féparer d’une autre fibre; mais la réfine, qui unie au corps muqueux forme la fubflance sommo-réfineufe du chanvre, n'étant pas fufceptible du même mouvement fermentatif, refte intacte, & elt dépofée fur ces fibres qu’elle colore & auxquelles elle adhère fortémenr. Pour fe convaincre que les chofes fe paffent ainfi que je viens de le dire,on n’a qu'à fe tranfporter dans un lieu où on a mis rouir du chanvre; on verra que peu de jours après qu'il aura été entaflé dans l’eau, il s’en élève une infinité de bulles d'air qui crèvent à fa furface. Ces bulles s’augmentent de plus-en plus & entraînent avec elles, foit quelques parties rélineufes , foit de la vafe du fond , qui forment à la furface de l’eau une pellicule aflez épaifle. Or, on ne peut douter que ces bulles ne foient des émanations gazeufes qui fe dégagent du chanvre par le mouve- ment inteftin qui agite les parties dont il et compofé. Afin de ne laifler fubfiftér aucun doute fur une théorie aufli intéreflante, & dont l'évidence nr'étoit démontrée par une obfervation conftante, j'ai fait l'expérience fuivante, 2 Cinquième Expérience. J'ai coupé des brins de chanvre non rouis par petits morceaux ; j'en ci fait entrer le plus poflible dans une bouteille de quatre pintes. Je l'ai remplie enfuite entièrement d'eau diftillée, jy ai mis un bouchon de liège auquel j'avois ajufté un tube de verre communiquant fous une cloche pleine d’eau &:placée fur la tablette de la cuve de l'appareil hydro- pneumatique ; au bout de quelques, jours, l’abforption de l'eau contenue dans la bouteille , fut d'un douzième, elle fe colora enfuite, &: à mefure que l'intenfité de la couleur augmencoir, la liqueur fe gonfloit & reprenoit tout l'efpace que l'abforption lui avoit fait perdre ; lorfque l'intumefcence fat à fon comble, une écume grisitre & épaifle couvroit la fürface de l’eau; un nombre infini de bulles d'air partoient continuellement du fond & crevoient à certe furface. T'out ce mouvement qui dura plufieurs jours ,; ne pouvoit être fans doute que l'eflec de la fermentation , & je SUR L'HIST:, NATURALLE ET LES ARTS. 245 tattendois à voir paffer le fluide élaftique qui fe produifoit dans la cloche fous laquelle éroit plongée Pextrémité du fiphon ; mais mon attente fut vaine : réfléchiffanc alors fur cette circonftance, je concus que la quantité de l’eau que j'avois employée érant très-confidérable relarive- ment à celle du chanvre, la plus grande portion-de ce fluide avoir été furabondante à la diflolution de la partie gommeufe , & qu’alors cette eau excédente fe combinoir, ou, pour mieux dire, diffolvoit le gaz à mefure qu'il fe produifoir, L'expérience confirma mes conjedures ; car lorfque le mouvement fermentatit fur ceflé & que la liqueur eut baiflé de l’efpace qu'elle avoit perdu avanc qu'il commencâr, je débouchai la bouteille, & en ayant retiré la liqueur, j’en remplis une cornue que je mis dans un bain de fable; & dont le bec recourbé fur placé fous la cloche de l'appareil hydro-pneumatique ; ayant enfuice chauffé le bain de fable, il'pafla dans la cloche une grande quantité de fluide élaftique. J'examinai enfuite la nature du gaz que j'avois obtenu, & je vis qu'il - rougifloir fégèrement la teinture de tourrefol, qu'il rendoit l'eau de (°] É : GE “ PT c \ chaux laiteufe & qu’il la précipitoit; quil nétoit point propre à la combuftion , püifqu'il éteignoit une bougie allumée qu'on y plongeoit; -en un mot, c'étoit du gaz acide, craïeux ou air fixe. Or, d’après cetre expérience, il eft clair que la diminution du fluide n’a été que l'effet de l'abforption qu'en ont faite la gomme & les fibres corticales & ligneufes du chanvre, & que l’intumefcence, qui a fuivi, ne peut avoir été produite, ainfi que le gaz, par le mouvement ivreftin de fermentation qui s'eft excité dans les parties conftituantes de la gomme. Quant à ce que j'ai dir que la réfine du chanvre n’étant point fufceprible du mouvement fermentatif, avoit été prefqu'entièrement dépofée fur les fibres de ce végétal, l'expérience eft encore venue à l’appui de cetre affertion. Sixième Expérience, En effet, ayant fait évaporer jufqu’à ficcité la liqueur de l'expérience précédente & qui provenoit du rouiflage du chanvre, elle m'a fourni un extrait brun & d'une odeur putride très-défagreable. Cer extrait mis dans un facon dans lequel étoit de l’éther vitriolique , lui'a communiqué très- pee de couleur: preuve certaine de la très-petire quantité de réfine qu'il contenoit. £: Septième Expérience, D'ailleurs ayant mis digérer du chanvre roui dans de l’efprit-de-vin, jai obtenu une teinture qui verlée dans l’eau en troubloit la tranfparence & la rendoit laireufe, & par l’évaporation de Pefprit-de-vin j’en ai retiréune réfine femblable en tout à celle de l’expérience rroifième; c’eft une portio de cetre réfine qui mêlée & répandue dans Pair avec la pouflière qui provient du dééritus de Pépiderme , eft portée avec cet élément dans les 246 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, véfcules pulmonaires par la trachée-artère , où elle excite ces oppreflions fuffocatoires, ces toux convulfives, en un mot, tous les accidens fâcheux qu'éprouvent les ouvriers occupés à teiller le chanvre. Mais la diffolution & l’altération de la partie gommeufe ne font pas Jes feules conditions néceflaires pour opérer la féparation entière des fibres du chanvre, il faut encore que le tiflu cellulaire foic détruit. En effer, on fait que les couches corticales des végétaux ne font formées que par des faifceaux de fibres longitudinales , qui dans leur entrelacement laiflent des cavités ou efpèces d’aréoles qui font affez larges du côté de l'épiderme & fort étroites du côté du bois; que ces aréoles font remplies par les utricules qui conftituent vraiment le tiflu cellulaire, dont la con- tinuité depuis le bois jufqu’à l'épiderme joint & unit enfemble toutes les couches corticales. Ces utricules ne font qu’une expanfion des véf- cules médullaires , qui fe prolongent par des rayons divergens , du centre à la circonférence , & doivent être regardés comme l'organe digeftif des végétaux : c'eft dans ces petites véficules que le principe vitalde la plante élabore, ou, pour mieux dire, combine à fa manière, l’eau que les vaifleaux lymphatiques reçoivent de la terre, par le moyen des pores abforbans des racines , avec l'air & la matière inflammable que les trachées pompent dans latmofphère; c’eft-Jlà que la sève fe tranfimue en un fuc propre, qui porté enfuite dans toutes les parties du végétal , par la voie des vaifleaux propres, lui donne le goût, l'odeur, & en un mot, les: différentes propriétés qui diftinguent toutes les plantes les unes des autres, Puifque la réunion des couches s'opère par la preffion qu’exercent fur elles les véficules du tiffu cellulaire, l'extraction fimple ou la deftruétion des fucs que ces utricules contiennent, n'opéreroit point l'entière fépa- ration des fibres, fi en même-tems on ne détruifoit le tiflu fin des vaifleaux qui confliruent la membrane mince de ces efpèces de facs ou veflies. Or, le mouvement fermentatif qui s’excire & commence dans le tiflu cellulaire, eft feul propre à produire cet effet ; car par l'expanfon du fluide élaftique qui fe produit & fe dégase, il doir diftendre & dilacérer entièrement les vélicules : par conféquent chaque couche ou faifceau de fibres longicudi- nales eft dévagé des entraves, ou, fi l’on veut, du point d'attache du lieu qui l’unifloir à une autre couche ou faifceau de fibres. Ainfi dans le rouiflage , non-feulement la partie gommeufe eft extraite & alrérée , mais encore les véficules du tiffu cellulaire font détruites par l’expanfion qui s'ercite dans le mouvement fermentatif qui opère la defiruction des parties mucides, 14 à , à SUR L'HIST. NATURELLE ETILES ARTS, 247 SECONDE QUESTION, Quels font les moyens de perfeëlionner la pratique du rouiflege, foie que opération Je faf]e à l’eau , foir qu'elle Je faffe en plein air ? D’après les connoiffances que l’analyfe nous a fournies fur la nature des parties confticuantes du chanvre, il elt clair que l’on peur en perfectionner la pratique par l'emploi d'un agent qui, en détruifant le corps muqueux & les réfeaux fins du tiflu cellulaire , puifle encore extraire la réfine du chanvre, Ce moyen, pour être mis en pratique, doit être économique & facile, & on ne peur remplir ces deux objets qu’en ajoutant à l’eau qui eft le feul diffolvant de la gomme, ce qui lui manque pour agir fur la réline, Il eft éconnznt que l'on aic méconnu, pour ainfi dire, ou du moins négligé de joindre à l’eau dans laquelle on fait rouie le chanvre, ce fupplément que l’on emploie en pour blanchir, foie le fil, foic la toile que lon en prépare, En effer, il eft cout naturel de penfer que l’ufage de l’aikali fixe dans le rouiflage procureroit un avantage réel. Il agit fur la réline en la décompofant , ou en fe combinant avec elle; il forme une efpèce de favon qui devient foluble dans Peau, & par conféquent il peut fervir à en enlever cette partie ténace, qui en adhérant fortement au chanvre, le falit & le colore. L'expérience vient ici à l’appui de ce que j’avance : M. Home (1) ayant mis rouir égale quantité de lin, dans trois efpèces d’eau différente, de l'eau dure , de l’eau adoucie avec de l’alkali, & de l’eau douce, trouva au bout de fix jours que l’eau dure & l’eau douce étoienc pâles, mais l’eau dure qu’il avoit adoucie étoit d’une couleur vive; il n’y euc que le lin de l’eau adoucie dont l'écorce fut huileufe au toucher. Il ft fécher une partie de chaque paquet; celui que lon avoit tiré de l’eau adoucie étoic d'une couleur plus vive que les deux autres & paroifloit un peu trop roui ; celui de l’eau douce ne l’étoie pas fufifamment, & ne le fur que trois jours après; enfin, celui de l’eau dure fe trouvoic dans Je même état où on Pavoit mis: il fallut plus de fept jours encore pour que le rouiflage dé ce dernier füt parfait, & le lin qui en provint n’eut jamais le moëlleux des deux autres paquets. M. Home rayant faic fes expériences que fur le lin , je les ai répétées à diverfes reprifes fur le chanvre, & toujours avec ie même fuccès, avec cette feule diffécence, que le chanvre écoic roui en bien moins de rems que M. Home ne l'indique pour fon lin: foit que cela provienne de la différente nature des deux fubltances, foit que la température de la faifon dans laquelle j’ai fait mes expériences fût plus chaude que celle a nm ; (1) Effai fur le blanchiment des Toiles, page 368. # } ae Lip Fa 1 L> 248 (OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, dans laquelle ce favant Anglois a fait Les fiennes. P’alkali fixe accélère donc le rouiffage, & en diflolvant la réfine, il rend le chanvre & plus doux & plus fin. ! On ne doir point douter que la divifion extrême dans laquelle fe trouve la partie réfineufe par fon union avec la gomme , ne foit la caufe de cette prompte diflolution. On pourroit encore augmenter cette action en rendant l’alkali fixe cauftique par le moÿen de la chaux vive. Huitième Expérience. J'airempli de brins de chanvre un grand bocal de verre, de manière que Les brins y éroient très-preffés ; j'ai verfe deflus deux pintes d'eau difillée, dans lefquelles j'avois fait difloudre un: gros de pierre à cautère!, l’eau recouvroic bien le chanvre, Dès le même jour ce fluide a été coloré, le lendemain la couleur étoit plus vive, le troifième jour elle fut d'un jaune-brun, le chanvre paroifloie'alors affez roui ; le quatrième jour je verfai l’eau , je le lavai bien dans de l’eau pure, je !e fis fécher; & ayant féparé la chenevotte., je mis le chanvre dans de l’efprit-de-vin, qui n'en fut point coloré; preuve certaine que la réfine avoir été enlevée par l'alkali cauftique en même rems que la gomme & le tiflu cellulaire avoient été détruits, J'obferverai cependant qu'ayant une foisemployé pour cette expérience un chanvre très-gros & donc l’écorce étroit verte, parce qu'il avoir été cueilli ayant fa parfaire maturité , l’efprit-de-vin en tira après le rouiflage une teinture très-verte; mais cette teinture verfée dans de l’eau n’en altéra poinc la tranfparence & s'y mêloit parfaitement, Je fis évaporer l'efprit-de-vin, & le réfidu fe trouva entièrement foluble dans l'eau, & la colora en verd, La réfine du chanvre, & fur-routcelle qui conftirue la partie colorante verte des végétaux ,eft donc altérée & rendue à l'état favonneux par l’alkali caufique. La méthode du Prince de Saint-Sevère, pour rendre le chanvre aufli beau &: aufli fn que celui de Perfe (1), eft encore un furcroît de preuves pour l'utilité de l'emploi de l'alkali cauftique-dans le rouiflage. Cerre méthode qui confilte à faire macérer le chanvre roui dans une leflive de foude rendue cauftique par la chaux, démontre d'une manière évidente que fi la réfine n’eft pas le plus puiffanc moyen que la nature ait employé pour unir les fibres corticales du chanvre , elle met cependant un obflacle à leur entière féparation , lorfqu’elle a été dépofée fur elles, Je fens bien que l’on oppofera contre le moyen que jè propofe, la dificulré de faire macérer une grande quantité de chanvre, & fur-tout limpoñibité de le pratiquer dans une eau courante ; mais qui eft-ce qui nee EEE ton (1) Journal de Phyfique, introd, tom. ' IT ; page 584. empêcheroie SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 249 empécheroit de faire des fofles ou routoirs {1} dans lelquelles on éon- duiroit l’eau que l'on rendroic alkaline, par le moyen d’une [effive de cendres & de chaux vive ; une grande cuve de bois pourrait également fervir à cer ufage : d'ailleurs, le peu de tems qu'il faudroit laifler macérer le chanvre pour le rouir, feroit une facilité pour y en foumettre une plus grande quantité dans le même efpace de tems que l’on emploie par la méthode ordinaire. Ce chanvre ainfi macéré pourroit être porté tout de fuite, ou au bout de quelques jours, dans une eau propre ou courante pour y'être lavé & par-là entrainer toutes les matières qui auroient pailé à l'étac favonneux. Outre l'avantage du moindre emploi du tems & de Ja qualité fupérieure du chanvre, on auroit encore celui de pouvoir pratiquec cette mérhode dans les endroits dénués d’eau, celle des puits remplaceroit avec la même efficacité l’eau des ruifleaux. Dans le cas où la facilité d’une eau courante difluaderoit de la.conftruction d’un rouroir, on pourtoit poac accélérer le rouiflage tremper chaque paquet de chanvre dans une:eau chargée d’une dofe plus forte d'alkali cauftique, mettre le chanvre en tas pendant un ou deux jours, & enfuite le porter à l’eau pour achever de le rouir. Cet entaffement donneroic le tems à l'eau alkalifée de pénétrer l'écorce du chanvre & d'en altérer le tiffu des véficules & la gomme-réfine, au point de détruire l’un & l’autre, en les rendant entière- ment felubles dans l’eau. On m'objectera fans doute encore la dépenfe énorme qu’entraîne- roit une grande quantité de chanvre; mais outre que les frais feroient bien compenfés par l'économie fur le tems, & plus encore par le prix du chanvre qui feroit d’une qualité fupérieure, il eft aifé de démontrer que cette dépenfe feroit en elle-méme très-peu de chofe. En -effer, l'expé- rience huitième prouve qu'il faut très-peu d’alkali pour.rendre l’eau très- propre à remplir l'objet que l’on fe propofe, Une livre de potañle & une livre de chaux feroient fufantes pour un poinçon d’eau qui contient deux cens pintes; on pourroit encore économifer en fe fervant des cendres qui proviennent du chauffage. Six livres de cendres calcinées, ou, comme on dit, bien cuites, & une livre ou une livre & demie de chaux vive, donneroient à un poinçon d’eau qui les Leffiveroit la faculté de produire l'effet déliré, D'ailleurs, fi cerre mince dépenfe étoit encore un obftacle, on auroit la facilité pour plus grande économie de garder . Nr) Jene décrirai point la forme que doivent avoir ces routoirs, ni Ia manière de és conftruire. On ent qu’elles doivent varier fuivant les lieux ou les pays , puifqu’il en exifte où il (roit impoffble d2 les conffruire en pierres, par la rareté des matériaux : au refte , uñe foffe quarrée bien propre , bien battue, & glaif£e pour qu’elle ne perde as l’eau , eft feule fufilante , & n’exige pas une forte dépenfe. Je voudrois feulement v’elle fût un peu en pente vers une de es extrémités , afin de donner l’écoulement à l’eau & faciliter fon renouvellement lorfqu'il (eroit néceffaire, … Tome XXIX, Part. II, 1786. OCIOBRE, Ii % L 2 'HICTR î : + | TO LA ne 9 + 250 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, les lellives des différens blanchiflages qui fe feroient dans: l’année , en les évaporant & les rapprochant afin que leur volume ne devint pas embarraflant. Alors il n’y auroit qu'à les verfer fur de la chaux vive en quantité fuffifante pour que, non-feulement elle dépouiliât l’alkali de l'acide crayeux ou air fixe, mais encore qu’elle détruisir les matières mucides & grafles dont il fetoit furchargé par le blanchiflage du linge; au refte, pour achever de détruire toutes les objeétions & ne laifler rien à défirer fur les avantages qui doivent réfulter de certe méthode de rouir ls chanvre, j'ajouterai que M. le Prince de Saint-Sevère ayant caleulé la dépenfe avec le produit du chanvre préparé à fa manière, a trouvé un bénéfice de cinquante pour cent. TROISIÈME QUESTION. Quels font les cas où le rouiffage à l'air ou à l'eau eft préférable à l’autre, Lerouiffage à l'air ne peut dans aucun autre cas que celui d'impoffibilité, être préféré au rouiffage à l'eau. En effer, l'humidité que l'air ou la rolée fourniflent, agit lentement fur la partie gommeufe du chanvre ; par con- féquent elle ne peut être délayée affez promptement & fuRifamment pour recevoir le mouvement fermentatif qui doit la détruire , ainfi que le réfeau véficulaire qui la contient. Ce mouvement ne peut y être que lent, alternatif & partiel, peut-être même qu'il ne s’y établit jamais, & que la deftrution de certe gomme n'eft que l’effec des diflolutions & des defliccations fuc- ceflives qu’elle éprouve. Cette alternative d’humidité & de féchereffe me paroît un moyen infufilanc pour détruire entièrement le’ corps muqueux. Une partie doir être mife à couvert par la réunion des parties réfineufess d’ailleurs , ces dernières doivent s’amonceler par la cetruction lente & partielle de la gomme 3 d’où il fuit que les fibres corticales doivent con- ferver entrelles une certaine adhérence, ce qui eft prouvé par l’expérience qui démontre que dans le rouiffage à l'air on n'obtient jamais un chanvre au beau & aufli aifé à blanchir que par le rouiflage à l’eau, Si l’on veut donner à ce chanvre les qualités qu’il auroit acquifes par le rouiflage à l'eau, il eft indifpenfable alors d'avoir recours à l’'excellenre pratique que M. Marcandier a indiquée pour perfcétionner le chanvre roui (1), on le rendroit encore plus parfait fi la macération qu’il preferic fe faifoit dans une eau alkalifée, fuivant la méthode que j'ai propofée, Mais dans le rouiflage à l'eau, que je préfere , il faut encore diftinguer celui qui fe fait dans les eaux courantes, de celui qui a lieu dans ceïles qui font flagnantes. [Il eft certain que dans ces dernières la chaleur qui s’excire (1) Voyez le Traité du Chanvre, pag. 20 & fuir. — | és 1 4 SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 5x dans le tas par la fermentation de la partie gommeufe, peut altérer la conftitution .des fibres corticales elles-mêmes. On fait en effec que les végétaux ne font en entier qu'une matière mucide qui a acquis plus.ou moins de dureré ou de fécherefle, D'ailleurs, comme je l'ai déjà obfervé, la partie réfineufe non altérée relle unie au chanvre. Dans le rouiflage à Feau courante rout fe pafle différemment; la fermentation eft moins de parce qu'à mefure qu'elle s'excire par la diflolution de la gomme ;üne nouvelle eau qui afllue fans ceffe, entraîne néceflairemenc toures les parties muqueufes altérées ou détruités, cette lotion fuccédant rapidement, pour ainfi dire inflantanément au mouvement fermentatif üi s’alrère, une portion de la réline eft entraînée à raifon de fon extrême divifion:& de fon union avec la gomme. Le chanvre roui dans une eau courante aura donc l'avantage fur celui qui eft roui dans une eau ftagnante , d’être plus blanc, plus beau, & d'autant plus fort que fes fibres n'ont point été endommagées par la chaleur que le raflement & la fermentation excitent dans une eau ftagnanre, cette chaleur ne pouvant exlfter dans un chanvre qu'une eau courante délave & rafraïchic fans ceffe. IL eft vrai que cette chaleur accélère le-rouiffage ; maïs les avantages qui réfultent de celui qui fe fait dans une eau courante, doivent bien compenfer la perte de tems que l'on y éprouve. J’en conçois tellement P'utilité, que je voudrois même, dans la méthode que j'ai propofée, qu'après deux ou trois jours de macération dans l’eau alkalifée , on changeñt l'eau s'il étoit poñible, Le chanvre que l’on obtiendroit feroit de la plus grande blancheur. Il y a encore un défavantage très-grand à roüir le chanvre dans les eaux ftagnantes, elles font ordinairement très-bourbeufes ; or, le mouvement fermentatif qui s'excite dans Je chanvre produifnt de la chaleur , il - s'enfuit un dégagement très-grand de l'air inflammable contenu dans cetre vale, Les bulles de cet air ,en s’élevant du fond à la furface, entraînent néceffairement les parties les plus léoères de la bourbe , qui, long-tems fufpendues dans l'eau fe dépofent enfin fur le chanvre & le faliffent ; je connois un canton de la province que j'habite dans lequel le chanvre eft prefque noir, parce que les payfans le font rouir dans un ruifleau très-vafeux, & dont les eaux n'ont point de mouvenfent. Un particulier a cependant trouvé le moyen de parer à cet inconvénient ,en commençant par faire un très-bon lit de paille fur lequel il place fon chanvre & qu'il entre-mêle couche fur couche avec de la paille. Par ce rocédé très-fimple ;‘il eft parvenu à aNôir du chanvre blanc; il eft vifble qu'en multipliant les furfaces , il a paré à l'accumulation de la vale fur fon chanvre, peut-être même aufli une partie de la réfine du chanvre lui-même s’eft-elle portée fur la paille, Tome X XIX , Part. 11, 1786, OCTOBRE, LUE 252 ‘OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, von QUATRIÈME QUESTION. Y'auroit-il quelque manière de prévenir l'odeur défagréable & les effèrs nuiftbles du rouiflage à l'eau ?. ù L’odeur qu'exhale le chanvre qui rouit provient des gaz acides crayeux & inflammables qui fe dégagent de toute matière végétale ou M: en fermentation ; d'où il füir qu'il eft impoffible d'empêcher ces émänations, dès que l’on foumettra une certäine quantité de chanvre au rouiflage dans des eaux fagnantes ; les vapeurs qui s'élèvent de la vafe de ces eaux ne peuvent que fe multiplier toutes Les fois que l’on y portera de nouveaux germes de putréfaction. On peur à la vérité les diminuer en ayant bien foin d'effeuiller le chanvre, mais on ne peut les corriger. Le meilleur moyen d'éviter ces exhalaifons , feroit de faire rouir le chanvre dans l'eau aiguifée par l’alkali cauflique , ainf que je l'ai indiqué. La diflolution prompte de la fubflänce gommo-refineufe-du chanvre, qu'elle opéreroit, eft fans contredit le plus sûr préfervatif. D'ailleurs , Palkali comme anti-fceptique oppofe un obflacle infurmontable à la fermentation ; j'ai eu la preuve de ce que j'avance ici dans mon expé- rience huitième; quelqu’attention que j'aie apportée à ce qui s’y pafloit , je n'ai vu aucun mouvement dans la liqueur ; la diffolution s'eft faire fass dégagement d'aucin fluide élaftique, & l'eau du rouifflage qui a été très-prompt , n'exhaloit aucune mauvaife odeur. Le rouiflage à l’eau courante , me paroît encore un moyen infaillible contre les inconvéniens que l'on cherche à prévenir. La fubftance gom- meufe entraïnée dans l’inftant même qu’elle s’alrère, ne’ peut pafler à Ja putréfation & fournir par fa décompolition entière des miafmes putrides qui infectent l'annofiie. . CIO NC LUS TON: L'expérience étant le feul guidaque j'ai fuivi, je penfe avoir démontré par elle, 1°. que le rouiflase n’elt autre chofe qu'une opération par laquelle on détruit Padhéfon des fibres corticales entr'elles, en fe fervanc de l'eau pour excirer dans la gomme un mouvement fermentatif qui la décompefe , tandis que l’expanfion qui en eft l'effec déchire & détruit les vélicules du tiflu cellulaire, dans lefquelles cette gomme eft contenue, 2°. Que le chanvre conterantune matière réfineufe intimement unie à. la partie gommeufe , le meilnoyen d'en perfetionner le rouiffage féroit d’aiguifer l’action de l’eau par celle de Palkali cauftique, qui sempliffant toutes Jes conditions néceffaires au rouiflage procureroic encore un plus grand avantage par la difflolution entière de la réline, & par une fuire néceflaire plus de blencheur & de fineffe au chanvre, mt ne ÉÉEe s SUR L'HIST. NATURELLE ‘ET LES ARTS. , 253 © 3°. Que dans la pratique ordinaire Le rouiffage à l’eau courante eft préférable à celui qui fe pratique à l'air ou dans une eau ftagnante, parce qu'en réuniflant tous les avantages des deux autres, il n’eft fujer à aucun de leurs inconvéniens. 4°. Enfin, que l'emploi de l'eau aiguifée par l’alkali cauftique, joint encore aux avantages que j'ai fait connoître celui de prévenir l'odeur défagréable, & les effets nuilibles du rouiflage à l’eau pure & ffagnante, Em MÉMOIRE ) SUR L'ACIDE PHOSPHORIQUE, Confidéré comme partie compofante du Bleu de Berlin : Par M. WEsTRUM3s, LINE qu'on eñt de la peine à répéter mes expériences pour obtenir le fiderum du bleu de Prufle, je me fuis cru obligé d'indiquer les moyens les plus fimples. (1) On verfe fur une once de bleu de Prufle que l'on a préparé foi-même, quatre onces d'huile de vitriol rectifiée, Au moment d’attcuchement de ces deux corps, il s'excire un bouillonnement très-confidérable accompagné de chaleur & d’un nuage extraordinaire de vapeurs, dont l'odeur eft fort défagréable. Le bleu : devient gris à fa furface: verfant enfuire de l'eau fur ce mêlange, le 5 Le, tout devient d’un bleu fuperbe. On expofe le vaiileau fur ane coupelle de fable , pour chaffer l'acide vicriolique faperflu par un feu gradué. Pendant ce rems on remue Ja matière avec un tuyau de verre, pour ue Ja bleu foic couché dans toutes fes parties par l'acide vittiolique, & qu'il foit déphlogiftiqué. L’acide s’en fépare en partie fous forme d'acide vitriolique pur, en partie fous forme d'acide fulfureux ; le bleu prend d’abord une couleur noirâtre, puis celle d’un pris-blanc, & à ja fia devient entièrement blanc ; on verfe un peu d'eau diltillés deffus & tour fe diffour ; excepté un peu de poudre grisâtre; on filtre la diffolution * qui eft bien brune, & on la verfe dans dix à quinze chopines d’eau diftillée; il fe précipite pour lors du f£derim bien beau & bien blanc. J'ai indiqué ailleurs la manière de retirer l'acide phofphorique du f£derum, Je me fuis fervi une fois du bleu de Pruffe de M. Schéele, préparé avec le fel alkalin , le charbon de bois, le fel ammoniac & le vitriol de mars. Ce qui m'apprit qu'il faut maintenant aufi chercher peut-être l'acide phofphorique dans le charbon & le fel alkali. Outre cela nous voyons ici que le bleu de Berlin artificiel ne diflere pas du naturel, en ce vi 4 a” Na 2 ET CT OL] A We Lo MIT 11 LT Qi 254, OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, 8 que le: premier contient. l'acide phofphorique , & le dernier l'acide de bleu de,Prufle , comme M, Schéele le dit quelque part, maïs parce que " le bleu de Berlin artificiel eft plus riche en phlozifton, &-par-là plus indiffoluble que le naturel, (2) On brûle une once de bleu de Berlin bien our dans un creufer neuf ; il s'en dégage une très-grande quantité de {el alkali volatil : lorfque la couleur bleue eft difparue & que la, chaux elt devenue entièrement rouge , on Ôte le creufer, la chaux pefera pour lors une demi-once. On la jette dans un mélange de deux dragmes d'huile de vitriol bien forte, & d’une demi-once d’eau diftillée ; tour fe difloudra en une liqueur brunätre, laquelle filtrée, & verfée dans une grande maffe d'eau diftillée, laiflera précipiter le /zderum. Si dans l'un ou l'autre procédé le fderum ne fe féparoït pas tout-à-fait, on peut ajouter un peu d'alkalf minéral aéré jufqu'à ce’qu'il paroiffe une chaux jaunâtre, à Du zinc & du fer précipitent aufi le f£derum , mais le premier fous forme d’une chaux blanc-jaunâtre, & le fecond comme une chaux rouge, où font formés des feuillets noirs qui font prefque métalliques. Le phlo- giftique qui fe fépare des métaux, monte en forme de très-petites globules * d'air à travers ka liqueur, J'ai dit que l'acide du bleu de Berlin de M. Schéele contient de l'acide phofphorique, de Palkali volatil & du phlogifton ; de plus j'ai dit que l’on peut s’en aflurer en le diftillant fur la chaux cauftique ou fur de Palkali cauftique bien pur. Du refte on peut donner par cet acide trois à quatre différentes couleurs au fer. (1) On mêle avec quelques onces de cer acide, la diffolution de vitriol de mars bien pur, le mélange deviene brun, fans aucune précipitation ; l'alkali végétal en précipite le fer coloré en bleu. (2) On ajoute au même acide, la diflolution de la chaux de fer par l'acide nitreux , le mélange devient moins brun ;"l’alkali volatil cauftique précipite le fer coloré en verd.(3) Si l'on ajoute au mélange (1 & 2) quelques ances d'acide nitreux pur, le mélange devient rouge de fang , & Le fer fe précipite par les deux alkalis , en verd. (4) Expofe-t-on le mélange (3) au foleil, il devient tout-a-fait blanc, & le fer fera précipité par l’alkali fixe , fous la couleur brune. (5) Si lon expofe ce mêlange dans une coupelle de fable , & qu'on chaffe par la chaleur l'acide nitreux, & avec lui en partie le phlogiftique, le fer peut être précipité par l'äkali végétal fous couleur blanc-jaunâtre, De tous ces précipités on retire le fiderum. 3 On mêle fix à huit onces de l'acide de-bleu de Berlin de M, Schéele avec demi-once d’alkali minéral & quatre onces d'acide nitreux; on faie évaporer par l’ébullition l’acideg& le phlogiftique, on précipite par du mercure diffous ‘dans l’acide nitreux, on lave le précipité, on le sèche, on le mêle avec de la pouffière de charbon , & on le diftille, & l'on aura la meilleure preuve de ce que j'ai avancé, que le bleu de Berlin contiene de l'acide phofphorique. à MOV Mo MER EMI L LÉ” nai 2": BRUN : = 21 BA - ; OT, là js X « ALIAS sai ÿ 2 ..SUÜR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 255 | il Il eft très-extraordinaire, que l'acide phofphorique, d’ailleurs très- fixe, fe volatilife dans la combinaifon avec du fel alkali volaril & du S phlosifton. Je pouvois encore ajuuter quelques remarques, mais je les réferve pour un Mémoire plus confidérabie. Du refte , je fouhairerois que Yon fîc plus d'attention à un acide aufli généralement répandu ; car je fujs sûr que beaucoup de prétentions, beaucoup de nouveaux acides , beaucoup de nouveaux métaux difparoîtront, fi nous fommes une fois à même de pouvoir décompofer tous ces nouveaux corps. Er fi ce n'éroit pas trop hardi, je dirois ici que l'on peut tirer l'acide phofphorique du charbon végétal par fà combultion avec de l’alkali, - ‘ Qur SE RENCONTRE DANS PLUSIEURS VÉGÉTAUX; : Parmi CAN. SCHÉEEE: - ; # 2 . À J'ai prouvé dans les Mémoires de l’Académie Royale des Sciences | du premier trimeftre de l’année paflée;.que la racme de rhubarbe contient ; | toujours un fel infoluble dans l'eau, que j'ai appelé serre de rhubarbe, & qui eft une combinaifon de l'acide oxalin &de ia chaux. J'efaminai | enfuire plulieurs racines oficinales-& différentes écorces, & je trouvai que quelques-unes d'elles contiennent la même” efpèce. terre. Mais -- comme la plus grande partie n’en tiennent pas en fi grande quantité que la rhubarbe , je me fuis fervi d’une autre méthode peur en féparer la terre. Je les coupe & les écrafe chacune féparément ; je verfe deflus de l'acide marin érendu d’eau , & je les laifle quelques heures en digeftion. Je filtre la diflolution & la fature d’alkali volatil caufique. Si le végéral tient de certe terreelle eft difloure par l'acide &. précipitée par l'alkali. Les facines & les écorces fous-menrionnées font celles que j'ai traitées de certe manière : celles qui fonr précédées.de la marque +, contiennenc de la terre de rhubarbe, les autres n’en contiennent pas. ” Racines. De guimauve, + d'orcanerte, d’angelique , d’anthore , + d’ache, d’afum, d’ariftoloche ronde, de cabaret, de hardanne, de la grande biftorte d'Angleterre, du rofeau aromatique, + de la carline, de la benoire, de la dtande Ne , de la fquine; de la chicorée , de le) Fe . $ la grande confoude, du contrayéfva, - du cufcuma, du cinogloife, n de fouchet long & rond ,-+ de diétame blanc , de doronique, d'aulnée, NO d'éfule, de fougère, + de fenouil, de galanga, de gentianne blanche, | = de sentianne rouge, de gramen , d'ellébore blanc, d'ellébore noir, 4 + d'alclepias , de jalap , d'impératoire , d'ipécacuhana, 4 de patience | Pb P £ > d 2 à ph] v 4 ” * ur. : 256 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fauvage , de livêche, + de réglifle, + de mandragore , de rhubarbe blanche ou mechoacan , +- d’arrêre-bœuf épineux , d'herbe aux tele neux » de perfil , de pinprenelle, de pivoine; de polypode, + diris de Florence , + d'iris du pays, de pirêtre , + de rhubarbe de Suède, de bois de Rhode, + de faponnaire , de falfepareille , + de fcilie, de fcorçonaire , de la grande {crophulaire , de poligala , de viperine, + du fceau de Salomon, du piflenlit, + de la tormentiile, du tullilage, + de la valeriane, de la victorial, de la reine des prés , de la zedoaire , + du gingembre. . Ecorces. + De berberis,: + de la cafle, + de la canelle blanche, + de la cafcarille , + du gérofle, + de la fquine , + de la cannelle, ordinaire , + de culilayva, -+ du frangula , + du frefne, + de grenade, de garou, + de caflia, de chêne, de faule , + de fureau, + de fimarouba, de gayac, de faflafras, + d’ormeau. Obfervation. L'écorce de gayac & celle de frefne contiennent à leur furface de la chaux farurée d'air fixe, de manière qu'elle fait effervefcence lorfqu'on la traite avec les acides. ne LÉES EF RRERON DE DODUN,;, v Infpeëleur des Ponts & Chauffées de La Province de Languedoc, au Département de Caflelnaudary ; AM. DELA M EUTVHREMRNINE L Moxwsreur, ...ù.Si après l'abfervation füuivie & répétée dont je vais vous’ rapporter les faits,.il eft encore des Naturalftes aflez incrédules pour refufer de voir avec le favanc Profefleur de Genève dans le granit une roche compofée de différens criftaux aglurinés.par la feule attraction de leur molécule, qu'ils viennent obferver le fommet de la montagne Noire: c’elt-là que je leur ferai toucher les roches primitives & agrégées , dont la criftallifation eft fi diftinéte ; je Les Ferai DMler par des gradations prefqu'infenfibles des granits de far tion première à des granits fecon- daires en raifon inverfe des haureurs & des diflances; je leur montrerai dans ces roches mêlangées à grandes parties qui forment le fommet, les quartz criflallifés d'une manière à être toujours reconnus unis aux griftaux de feld-fpath , de fchorl & de mica ; & fi jufqu’à préfenc on ne les SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 257 les a point apperçus, c’eft que fans doute on les a cherchés dans des granits de formation fecondaire. J'appelle ainfi les roches agrégées compofées des mêmes parties intégrantes en petits grains, qui doivent leur naiffance à des granits plus élevés, dont les eaux en charriant les fables auront atténué les parties, & conféquemment brifé les formes premières. Il eft donc très-difficile de diftinguer dans ces débris des premiers granits des caractères nets d'une vraie criftallifation: nous ofons cependant avancer qu'avec de attention , la loupe à la main, & les différentes figures des criftaux de quartz bien préfentes, on auroit fouvent affez reconnu les diverfes fections pour pouvoir prononcer fur leur forme; l'on auroit ainfi vu qu'une grande partie des quartz dont font compofés les granits avoient appartenu à des criftaux réguliers , ou du moins dont la figure criftalline eft évidente. Les granits qui forment le fommer de la montagne Noire, font compolés de quartz , de feld-fpath, de mica, & de fchorl noir prifma- tique, le plus fouvent à grandes mafles, On peut nommer ainfi des roches agréoées dont les criftaux de feld-fpath d’un beau blanc de lait , ont jufqu’à quatre, cinq & fix pouces de longueur, trois à quatre de largeur, un pouce & demi d'épaifleur. Nos quartz avec lefquels ils font fouvenc à égales parties, font vitreux, tantôt d’un oris bleuâtre, tantôt rougeâtres, quelquefois colorés par la chaux de fer, Si on obferve avec attention la fubftance quartzeuze des criftaux que ces mafles renferment fous diffé- rentes grofleurs , on la trouvera de la même homogénéité que la gangue : & alors on reconnoîtra aifément que lorfque le calme des élémens permit l'union des parties intégrantes , il duc fe former des criftaux dont la fubftance dut être la même. J'ai rencontré ces criflaux fous différentes figures, mais le plus fouvent à une feule pyramide, la feconde étant ordinairement engagée; quelquefois aufli le prifme intermédiaire eft fenfible ; mais en général les uns & les autres fonc très remarquables, en ce qu'ils font chargés de ftries horifontales fous la forme de petits trapèzes linéaires qui les embraflent jufqu’au fommet. Ces ftries fonc l'ouvrage du feld-fpath dans lequel ces criftaux font toujours enchäflés & avec lefquels ils ne font qu'un même corps. jo n'y-a ici aucune cavité, aucune géode, qui puiflent faire foupconner que ces criftaux quartzeux aient pu fe former à la manière des ftalaéies; tous les granits en font farcis, les criftaux de feld - fpath en contiennent fouvent des petits. La date de leur formation doit remonter à l’époque où un fluide immenfe tenoit en diflolution les différens principes falins qui ont dû former le granit: les molécules lamelleufes du feld-fpath vinrent criftallifer enfuite, & s'appliquant fur les criftaux de quartz dont la confiflance étoic encore très-tendre , fe mouler fur le criftal quartzeux , recevoir à la fois l'empreinte de fes molécules fimilaires & lui donner fon efgie. J'ai dans mon cabinet un échantillon de granit fur lequel on Tome XXIX, Part, 11, 178@ OCTOBRE, Kk 258 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; i voit les criftaux de quartz. J’en ai defliné un hors de fa gangue; on y remarque les ftries qui le ceignent de la bafe au fommet ; ces ftries font l'effet de gradins dont les arrètes feroient adoucies'; on voit le moule creux ou l'empreinte que le feld-fpath a reçue, fur lequel Le plus léger trait eft fenfible, Je trouve fouvent ces criftaux grouppés, fouvent aufl ifolés dans leur matrice, & ne compofant jamais qu’un même corps avec la crittalli- fation du refte de la mafle, femblable en cela aux porphires avec lefquels fans doute on ne les afimilera point: on peut en général les dégager de leur moule de feld-fpath, ou par le choc, ou par un feu gradué; ce dernier moyen eft le plus sûr, quoiqu'il ne réufifle pas toujours. J’ai des mor- ceaux où on diftingue un criftal de feld-fpath brifé , des criftaux de fchorl noir prifmatiques , Les uns brifés , les autres entiers ; enfin , le mica blanc criftallifé en feuillets rhomboïdaux réguliers (1). Dans ces tems de mort où les eaux couvroient toute la terre, & où les premiers élémens de notre globe étoieng balottés l’un fur l’autre & boule- verfés avec fureur & violence, il fallut fans doute bien du tems à la nature pour arriver aux premières formes. Ce ne fut peut-être que lorfque le calme vint infenfiblement fuccéder à l'orage affreux, que s'opéra la criftallifation. Deux caufes me femblent être les raifons qui font qu'on ne trouve point le granit généralement criftallifé dans toutes fes parties. La première, c’eft que la fuperficie du fluide dont la criftallifation fut la dernière , comme étant le jouet des élémens furieux, n’a pu jouir d'un repos aflez tranquille pour laifler prendre aux différens fels dont elle étoit faturée la forme qui leur étoit particulière , & conféquemment que forcés de fe réunir en vertu des loix réciproques de leur afhnité , toujours troublés dans leur opération , ils n’ont pu créer que des mafles irrégulières. La feconde caufe , c'eft que dans ces tems d’horreur, origine de la nature vivante, ces criftaux ou réguliers ou informes, ayant éprouvé de nouveau par des révolutions fucceflives des chocs , des ébranlemens dont on auroit peine à fe faire une idée , ont été attaqués, fapés, & leurs débris balayés au loin , & fouvent remaniés par les eaux , ont formé de nouvelles roches agrégées qui, comme on voit, ne peuvent plus offrir, ou très-rarement, dans les granits fecondaires à petites parties, leur première figure dans la fubftance quartzeufe dont les criftaux éroient peut-être très-gros, & dont nous ne voyons plus que les débris; j'opine d'autant plus fur cette opinion, que les criftaux du quartz font entièrement de la même homogénéité que (x) Il n’eft pas rare de trouver dans des mafles de pranit le feld-fpath criftallifé avec le quartz ou criftal de roche & le mica. J’en ai fouvent trouvé dans nos montagnes du Beaujeolois & du Miconois. J'en ai même quelques morceaux ; & il n’elt pus de Naturalifles aujourd’hui qui doutent que le granit n’ait criftaliifé dans Le fein des eaux, Note de M, de la Merherie. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 325$ fagangue quartzeufe. C'eftun quartz demi-diaphane d'une caflure vitreufe, gras & onétueux au toucher , dont la criftallifation , dans la fubftance quartzeufe ou dans le feld-fpath , n’eft jamais bien régulière ; les formes en font toujours altérées , l'opération criftalline femble avoir été gènée par le flux des matières hétérogènes environnantes : au lieu que les molécules du feld-fpath, du mica & du fchorl étant plus alongées, moins volumineufes, moins denfes, moins caflantes, & conféquemment moins expofées à la violence des élémens, durent fe conferver plus long-tems, &c fe reproduire avec bien plus de facilité & beaucoup plus fouvenr fous leur première forme criftalline. Chacune d'elles s’arrangea felon fa pefanteur fpécifique. Mais craignons qu'on ne nous accule de vouloir donner trop de poids à un fentiment peut-être trop prématuré, en infiftant davantage fur nos moyens; attendons que les Naturaliftes aient vérifié par-rout la vérité de cetteobfervation pour prononcer fur le fyftème. Difons feulemenc qu'il ne nous paroît y avoir aucune ratfon de croire que nos granits foient plus privilégiés que ceux des autres lieux, & que nous penfons qu'on trouvera les mêmes effets dans tous les granits de première formation agrégés à grandes parties, & que ce feroit avec peine qu'on ns les cherche- roit que dans les fecondaires qui ne font que les dérritus des premiers réunis par le premier agent de la nature, l’eau, & aglutinés par la feule attraction de leurs molécules. En général, les granits de feconde formation nous paroiflent être aux primitifs ce que les roches mixtes compofées de grandes parties font aux pierres compofées de leur fable donc les eaux en les charriant fe font faturées des mêmes fels qu’elles y ont dépolés, & en ont ainfi tormé le gluten qui les a réunis. La nature employant par tout les mêmes moyens, c'eft dans les effers qu'elle opère fous nos yeux, que nous pouvons découvrir ceux qu'elle a mis en ufage dans ces tems éloignés où nos idées fe noient. Je finirai certe Lettre, qui eft peut-être déjà trop longue, en vous faifanc part, Monfieur, d’une nouvelle criftallifation du feld-fparh que j’ai rrouvé parmi nos granits, & dont M. Romé de Lifle na point parlé. Le morceau repréfenté » ge 1, planch.T , eft le feul qui me foit tombé fous la main aflez confervé; mais je préfume en rencontrer d'autres, puifque J'ai trouvé plufieurs fragmens de Ja même variété; & je le défire d'autant plus,que l'échantillon dontje vous offre le deffin eft brifé au point de ne pouvoir prononcer avec affurance fur fa figure. Je conjeéture cependant que c’eft un prifme exaëdre de feld-fpath engagé dans la moitié de fon épaifleur. Sa couleur eft d'un beau blanc de lair, ainfi que le font généralement toutes nos roches de ce genre. Sa plus grande lonoueur eft de deux pouces & demi, & fa largeur d’un pouce & demi, & fon épaifleur de cinq lignes ; il eft defliné comme nature, & l'échantillon du granit left aufli fous les mêmes proportions. Toutes les faces du prifme font adoucies & Tome XXIX , Part, Il, 1786. OCTOBRE, Kk 2 250 OBSERFATIONS SUR LA PHYSIQUE, taillées en bifeau : fur chacune d’elles il y a nombre de trapèzes linéaires d’inégales largeurs, mais toujours parallèles à chacune des faces. Ces trapèzes fe furmontent réciproquement, & forment des efpèces de gradins qui, en divifant un peu les arrètes du prifme , augmentent en largeur en approchant du deflus, Cette criftallifation me paroît renit de près à la première variété de la première efpèce de M. Romé de Lifle, ( Criftallog. tom. II, pag. 461 ) dont les trapèzes linéaires répètent ici la figure; mais elles en different en ce que ces mèmes trapèzes linéaires en font un criftal charmant, où l’art paroît au premier coup-d'œil avoir eu plus de part que la nature, & dont le deflin a d4 la peine à bien rendre la délicatefle. Peut- être bien n’eft-ce qu'une modification intermédiaire de la première efpèce de M. de Lifle. On trouve au refte ici routes les variétés dont ce très- favant Naturalifte fait mention. J’en ai rarement rencontré de folitaires : bien confervés; ils adhèrent toujours à leur gangue. Je dois ceux que je pofsède aux moyens que j'emploie pour les dégager des quartz avec lefquels ils font unis ; & je me füis ainfi procuré des criftaux de feld-fpatt depuis un pouce jufqu'à cinq & fix pouces de longueur. Nos roches pri- mitives contiennent aufli du fchorl fous forme prifmatique noir ; nos micas y font criftallifés en feuillets exagones fouvent flriés ; il y en a de blancs , de roux & de noirs: jen ai qui ont reçu l'empreinte des criftaux de quartz, comme le feld-fpath défigné ci-devant , & qui lui a également appofé le fceau de fes molécules lamelleufes; mais plus fouvent j'ai trouvé nos micas criftallifés en feuillets ma ffés rhomboïdaux de la forme la plus régulière. M. de Lifle ne dic rien de cette dernière figure du mica: elle me paroît être cependant la primitive comme étant la plus fimple, & l'exagone n'en eft peut-être qu'un dérivé qui doit fa forme à la troncature des angles aigus du lofange, & alors cette figure feroit ou accidentelle où une variété de la forme rhomboïdale. J'ai l'honneur d'être, &c. A Caflelnaudary , ce 14 Juillet 1786. SUR L’'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 261 D) RE EXPÉRIENCES SUR LA CONVERSION DE L'EAU EN AIR; Traduites de l'Allemand de M. WESTRUMB, par Madame PICARDET (x). IL réfulte des obfervations des plus grands Phyficiens que l'air le plus pur n'elt que de l’eau intimement unie au feu fpécifique, & qui par certe union participe de toutes les propriétés qui diftinguent l'ai: des autres fluides. Je conçus il y a quelque tems cette idée, d’après les expériences des autres & les miennes propres, & j’ellayai de convertir l’eau en air, J'ai fuivi pour cela le procédé employé par M. Prieftley pour changer Pacide nitreux en air vital, & l’efprit-de-vin en gaz inflammable, efpéranc que la vapeur de l’eau fe changeroit en air vital en paflant par un long tuyau de terre incandefcent. L'opération réuflit très-bien; car , quoiqu'il s’échappât une aflez grande quantité de vapeurs aqueufes à travers le luc & dans un endroit du tuyau qui n'étoit pas rouge, cependant j’obtins , de deux onces d'eau pure, une quantité d'air qui furpañloit au moins huit fois le volume de l'eau; mais contre mon attente, ce n’étoit ni de l’air vital, ni du gaz inflamntable , ni du gaz acide méphitique, mais de l'air nuifible. Au commencement je ne pouvois me rendre raifon de cet effet ; mais ayant confidéré que la craie & l'argile phlogiftiquent toujours l'air le plus pur , & que le luc qui réunifloic le tuyau à la cornue , & ce ruyau lui-même par lequel je forçois les vapeurs de pafler, étoient compofés de ces deux corps, il ne me fut pas difficile d’en trouver l'explication. Quoique le réfultat-de l'expérience n'ait pas été comme je l’attendois, elle prouve néanmoins, à ce que je crois, 1°. que l’eau en s’uniflant au feu fpécifique, peut fort bien être convertie en air ; 2°, que l’air entraîne toujours avec lui quelque chofe des vaiffeaux & des fubftances dont on le fépare, d’où proviennent les différentes propriétés qui diftinguent les diverfes efpèces d'air; 3°. cela indique aufli la raifon pour laquelle M. Lavoifier obtint du gaz inflammable lorfqu'il fit paffer la vapeur aqueufe par un tuyau de fer incandefcenr. Ce gaz venoit du tuyau de fer calciné , & étoit produit en partie par l’incandefcence du tuyau , en partie par l'air formé de l’eau , en fuppofant que l’eau puifle fe changer en air. Car je ne‘puis abfolument penfer que les parties conftituantes de l’eau (1) Crell, Chemifche annalen ; 1785 , pare. 12, 262 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; foient le gaz inflammable & l’air vital. Je crois au contraire que le feu fpécifique qui modifioit l'eau en air pur, eft employé dans la combuftion d'un mélange d'air pur & de gaz inflammable, à la féparation & décom- pofition des parties conftituanres qui avec l’air vital formoient le gaz inflammable ; enfin, que Île feu fpécifique fe perd avec eux à travers les pores des vaifleaux, comme matière de la chaleur ( quelqu'idée que l’on veuille prendre de ce fluide) & qu'ainfi l'eau refte dégagée des deux efpèces d'air. Il me parut que le fluide aériforme produit par l’eau étoit au furplus permanent ; il traverfa l'eau : s'il n’avoit pas été permanent, il fe feroit condenfé en gouttes , puifque je fis l'expérience au plus grand froid, & je n'aurois point obtenu de fluide élaftique, du moius fur la fin de l'opération , ni même dès que les vaiffeaux ont été certainement vides d'air. Je fais bien que M. Prieftley a faic en préfence de M. Kirwan uns expérience qui prouve que l’air qui environne le vaifleau peut pafler pat fes pores lorfqu'’ils font dilatés par la chaleur, & je foupçonnai que l'air que je regardois comme produit par l’eau, pouvoic être entré de la même manière dans ma cornue de verre. Cependant je crois devoir publier cette expérience, parce que l’on ne voit pas dans le Mémoire de M. Kirwan fi M. Prieftley a employé dans la fienne une cornue de verre. J’aurois volontiers répété cette expérience, en-employant des vaiffeaux plongés dans le mercure ; mais ma fituation ne m'a permis que rarement l’ufage de cet appareil. J'invite les Phyficiens qui en fonc en poffeffion à la répéter , s’ils jugent qu’elle mérite attention. Je confeille encore de faire pafler la vapeur aqueufe par un tuyau fait d'un métal parfait, parce qu'il altéreroit moins l'air, ee DE LA PRODUCTION DU GAZ INFLAMMABLE PAR LA VAPEUR DE L'EAU ET LE FER,ET DES DOUTES ÉLEVÉS A CE SUJET ; Traduit de l Allemand de M, KLAPROTH(1), par Madame PiCARDET de Dijon. Lr Journal de Phyfque de M. Rozier (2) a publié un extrait des remarques de MM. Giorgi & Cioni, Médecins à Florence, fur ce que MM. Lavoifier & Meufnier ont appellé l'analy/fe de l’eau. Les premiers (x) Crell, Chemifche annal. 1786 , part, 3. (z) Juillet 1785. re =: SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 263 nient qu’il y ait production de gaz inflammable lorfqu'on fait pañler la do de l’eau par un tuyau de fer incandefcent, & fe propofent de publier fur ce fujer un Ouvrage, parce qu'ils prétendent n'avoir jamais obrenu qu'une efpèce de fluide aériforme qui n’étoit pas inflammable, mais un air moyen eatre l'air commun & l'air vital; mais ces Phyliciens n'ont sûrement pas bien opéré , car j'ai vérifié, ainfi que bien d'autres , par mes propres eflais, l’exactitude de l'expérience de M. Lavoilier , quoique je fois bien éloigné d’adopter fa théorie, & de croire qu’il y ait décompolition de l'eau. Îl y a long-tems que j'ai regardé le gaz inflam- mable , qui fe forme ici, de la même manière que tour autre , comme de pur phlogiftique uni par l'intermède de la chaleur à la vapeur de l’eau dans un état d'expanfion extraordinaire. Maintenant, fi on fait pafler de l'eau par un tuyau de fer incandefcent ou par un tuyau de verre ou d'argile, rempli de lames de fer rougies ou de charbons ardens, alors la vapeur de l’eau échauffée fe raréfie avec le phlogiitique que l'incandefcence difpofe à fe dégager du fer , des charbons, &c. & en forme une efpèce d'air permanent , qui eft le gaz inflammable ; au contraire la vapeur aqueule pure échauffée perd la raréfaction aériforme aufli-tôt qu'un corps froid lui reprend les parties de feu. Mais fi la vapeur aqueufe eft pareillement faturée par de pures parties de feu, ce qui arrive quand on fait pañler l’eau par un corps incandefcent de qui elle ne peut recevoir du phlogiftique , alors il ne fe forme pas de gaz inflammable, mais une efpèce moyenne d'air vital. MM. Giorgi & Cioni ont manqué en ce qu'ils n'ont pas fair rougir exactement leur tuyau ; conféquemment le phlo- giftique n'a pu fe dégager en afféz grande quantité, & cela devoic d'aurant plus arriver, qu'ils n’ont fait pafler la vapeur de l’eau que par un tuyau de verre ou d'argile échaufté. Dans mes expériences , pour mettre enfemble l'eau & le gaz inflani- mable du phlogiftique , je me fuis fervi d’un canon de fufl ordinaire , je mis dans le milieu une poignée de petits clous, & je les arrêtai des deux côtés par des paquets de fils de fer. Dans le gros bout du canon je luttai le col d'une petite cornue de verre qui contenoit quelques onces d’eau, que je fis enfuite chaufter jufqu’à ébullirion fur un bain de fable; je fixai à l’autre bout un tuyau de verre recourbé à la manière ordinaire, deftiné à porter l'air dans un récipient rempli d'eau. Le canon fut placé horifon- talement dans un fourneau qui tiroit bien, au milieu des charbons. Chaque once d’eau.me donna un quart de bouteille ( quart flafche ) & plus de très-bon air inflammable qui trois mois après fe trouva encore auffi bon que le premier jour. Il eft remarquable que les clous, les paquets de fil de fer, ne paroifloient pas rouillés après l’opération , mais feulement couverts d’une croûte métallique écailleufe qui vue à la loupe reflembloit beaucoup à ce que l’on nomme eifemnan, 264 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, MÉMOIRE CHIMIQUE ET ÉCONOMIQUE Sur les principes & la génération du Salpétre. Ouvrage qui a remporte le Prix Royal au Jugemens de l'Académie des Sciences ; Par M TnouvenEeLz, Doëeur en Médecine, Affocié Regnicole de la Societé Royale de Médecine, & M THOUVENEL, CommifJaire des Poudre & Salpétre au Département de Nancy. EYXITIR ACEIT, M TurGor,ce Miniftre éclairé & honnête, qui méconnoifloit l'intérêt perfonnel , & dont toutes les vues rendoient au bien public , frappé de la gêne qu'entrainoient la recherche , la fouille & l’extraction du falpêtre chez les particuliers, propofa en 177$ , un prix extraordinaire fur la formation du nitre & l'écabliflement des nitrières. L'Académie Royale des Sciences qui en fut chargée, reçut trente-huit Mémoires fur ce füujer intéreflant ; mais aucun ne lui parut fatisfaifant. En conféquence le prix qui devoir être diftribué à la Séance publique de Pâques 1778; fut renvoyé à celle de la Saint-Martin 1782. Elle reçut dans cet intervalle vingr-huit Mémoires. Celui de MM. Thouvenel fut couronné. Elle adjugea enfuite comme fecond prix une fomme de 1200 liv. à chacun des Aureurs de deux autres Mémoires ; l'un eft de M, Lorgna, le fecond eft de M. Chevrand, Infpecteur des Poudres en Franche-Comté & de M. Gaviner, Commiflaire des poudres à Befançon. Enfin , deux autres Mémoires dont l’un eft de M. de Beunie, Médecin à Anvers, & l’autre de M. le Comte Thomafin de Saint-Omer, ont mérité des acceffir. L’Aca- démie a encore fair des mentions honorables des Mémoires de M. Foreltier de Vereux, de M. Rome, & de plufieurs autres (x). Tous ces Mémoires jettent un srand jour fur la formation du falpètre, quoiqu’ils laiflent encore beaucoup à défirer. Je vais râcher de faire con- noîrre ce qu'ils contiennent de plus iatéreflanc, fur-tout celui de MM. Thouvenel. L'expérience avoit appris qu'on retiroit de certaines terres, parun fimple lavage, une grande quantité de différens fels, fur-tout des fels nitreux & (1) L'Académie à fait imprimer une partie de ces Mémoires, & donné une analyfe de tous les autres, ; marin, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 965 marin. Ces terres bien épuifées de tous#fels, expofces de nouveau à l'air, fe retrouvoient après un certain tems imprégnées des mêmes fels, Il s'agifloit de favoir ce qui fe paloit dans certe opération. Beccher, Sthal & toute leur école admetroient un acide uhiverfel, l'acide vitriolique, qu'ils croyoient répandu dans Pair, & ils penfoient que cet acide pouvoir fe convertir en tous les autres. Mais, 1°. on a prouvé que l'acide vitriolique n'exifte pas ordinairement dans l’atmofphère, Des lingeS imbibés de leflive Ikaline & expotés à l'air, n'ont donné enfuite qu’un alkali aéré, & point de tartre vitriolé. Ce qui prouve que Pacide vitriolique, ni les autres acides , excepté peut-être l'air acide, n’exiftent dans l’atmofphère. Cependant un des concurrens a prétendu qu'il exiftoit du nitre dans Pair, parce qu'il en a trouvé fouvent fur les tuiles à la partie du crochet. Mais ce nitre peut avoir été formé en place, obfervent Meflieurs les Commiflaires (1). Secondemenr, MM. Thouvenel, Lorgna, Chevrant, Gavinet, de Beunie & la plupart des concurrens ont eflayé fi en arrofant avec des fels vitrioliques des terres qui fe nitrifient, on obtiendroit une plus grande quantité.de nitre & de fel marin; & ils ont trouvé que non-feulement on n'en obtenoïit pas davantage, mais fouvent on en obtenoit moins. La même expérience faite avec l’acide marin n’a pas eu plus de fuccès, Ainfi cetre prétendue tranfmutation des fels les uns dans les autres ne paroiît nullement établie, Une autre hypothèfe attribue exclufivement à la végétation la formation de l'acide nitreux, & la production des fels nitreux au pur développement qu’amène la décompolition putréfactive des végéraux & des animaux. On a cherché à s’en aflurer par l'expérience. Nous avons vu , difenc MM. T'houvenel , qu'une plante élevée dans un terrein impregné de tel ou tel fel, n’en fournifloir point dans fon analyfe, tandis qu'une autre plante venue fur une autre terre exempte de fels en donnoit de plufeurs efpèces. Meffieurs les Régiffeurs des poudres, MM. Nadal, Gomand & autres, ont fait la même expérience, & difent avoir eu d’autres réfultats. Ils ont femé des plantes qui donnent beaucoup de nitre , telles que le tournefol en pleine terre, & fix autres dans des pots. Trois de ces derniers ont été arrofés avec une eau légèrement nitreufe , & les autres avec l’eau de fontaine. Ces derniers n’ont point donné de nitre, & les autres en ont donné ; mais ceux arrofés d'eau nitreufe une plus grande quantité : d'où ils ont conclu que le nitre qui fe trouve dans les plantes ne s’y forme point, mais y eft porté avec la sève, (x) Cependant on ne fauroit guère douter qu’il ne fe forme dans certaines circonftances des fels nitreux & marin dans l'air. M. Margraf ayant ramaflé avec beaucoup de foin de l’eau de pluie, en retira des {els nitreux & marins terreux. IVore de M. de la Metherie. Tome XXIX, Par, II, 1786, OCTOBRE, 11 266 OBSERFATIONS SUR LA PHYSIQUE, Quoi qu'il en foit de ces expériences contradictoires, on ne peut pag s'empêcher de reconnoître que la plus grande partie des fels qu’on retire des nitrières ne foit de nouvelle formation. Il s’agifloit de favoir quels font les agens qu'emploie la nature dans cette production nouvelle. C’eft fur quoi le Mémoire de MM. Thouvenel a répandu de grandes lumières, Ils onc pris, 1°. la terre calcaire, la magnéfie , la terre alumineufe , bien pures & biéh lavées, 2°, Ces mêmes terres foumifes à l’action du feu & calcinéess 3°. Les deux alkalis fixes, cauftiques & non cauftiques. 4°. Ces mêmes alkalis phlogiftiqués. 5°. Divers foies de foufre alkalin & terreux. 6°, La terre animale calculeufe & offeufe. 7°. Différens fels neutres, vitrioliques, matins, acéteux , tartareux 8 phofphoriques , à bafes alkalines, terreufes & métalliques. Toutes ces fubftances ont été expofées avec les précautions convenables pour la nitrification. Celles des Nos. 3,4, $ & 7; n'ont donné aucun veftige de falpètre, ce qui confirme l'immutabilité de toutes ces fubftances falines. . A La chaux vive n’a fourni de l’acide nitreux que dans quelques expé- riences, & en très-pétite quantité. N’auroit-elle pas befoin pour redevenit propre à la nitrification de repaffer à fon premier état de terre calcaire 3 ce qu’elle fair jufqu’à un certain point avec le tems? La terre fedliztienne ou magnéfie & la'rerre alumineufe ont encore donné plus rarement de l’acide nitreux que les précédentes, Ce produic a été encore moindre lorfqu’elles ont été calcinées. Les épreuves où elles en ont le plus donné, c’eft lorfqu’elles fe font couvertes de moififlure. Cerre efpèce de végétation née de la putréfadion eft devenue alors, ainfi que cette dernière, une caufe génératrice de l'acide nitreux, - La véritable cra'e ou la terre calcaire pure eft celle qui a le plus conftam= ment réufli pour la formation de l'acide nitreux. Le nitre s'y forme, foit en plein air, mais plus encore dans les lieux couverts & habités, où l'aix extérieur elt à-peu-près ftagnanr. Enfin , la terre animale retirée des os fe nitrifie difficilement, Mais une chofe digne de remarque dans la comparaifon des trois efpèces de nitre terreux provenant de nos expériences, difenr MM. Thou= venel , c'eft que ceux qui ont pour bafe les trois terres non calcinées éprouvent fur les charbons ardens une demi-déflagration ou plutôt une forte de fcintillation plus ou moins. marquée, laquelle n’a pas lieu avec ceux à bafes terreufes calcinées. La calcination opère donc fur ces terres un changement qui paroîtroit les éloigner de la nature alkaline, & les rend moins propres à la nitrification. Ce qu'il y a de certain, c’eft que quoique les quatre efpèces de terres défignées femblent fufceptibles de-fe prêter à la génération des deux CRE à Lu SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 267 parties confticuantes du falpêtre, l’acide nitreux & l’alkali, cependant La terre animale paroît plus propre à la formation de l’alkali, & la terre calcaire pure à celle de l’acide, Peut-être cela vient-il de ce que celle-là contient plus d'acide phofphorique , & celle-ci plus d'acide gazeux. La manière la plus ordinaire dont les Auteurs emploient ces différentes fubflances qu'ils cherchent à nitrifier , eft de les mettre dans de grands vafes de grès ou de verre avec de l’eau & fans eau, de mettre dans d'autres vafes à côté les matières en putréfaétion, & de condsire par des tuyaux de communication les vapeurs de ces feconds vafes dans les premiers. La nitrification fe commence & s'achève durant la décompeftion fpontanée putréfaétive des fubftances animales & végétales, & {on double produit réfulte, comme dans la végération, de tous les matériaux défunis de ces fubftances, lefquels fe recombinent de nouveau entr'eux & avec des matières terreufes appropriées. Il paroît que l'acide nitreux fe forme le premier, en fe combinant à mefure avec une bafe terreufe, & que ce n'eft qu’au dernier tems de la décompofition putréfaétive que s’engendre J'alkali deftiné enfuite à précipiter le nitre rerreux. De même que dans toute putréfaction il y a une première époque d'accefcence & une autre d’alkalefcence , de même aufli dans la décompofition radicale des fubflances putrefcibles, il y a une époque pour la formation de l'acide nitreux, & une autre pour celle de fa bafe alkaline, L’acide nitreux n’eft pas le feul acide qui réfulte de la décompofition des corps organiques. Il s'y engendre auffi de l’acide marin. Par-rout où il fe forme du falpêtre on y trouve aufli du fel marin en des proportions bien différentes. Mais il n°’eft pas vrai que par-tout où il fe forme du fel marin il s’y engendre aufli du nitre. L’acide marin paroît {e former plus volontiers dans la terre fedlitzienne, quoiqu'il s’en forme aufli dans la terre calcaire, & l'acide nitreux fe produit plus volontiers dans la verre calcaire, Enfin, dans chacune de ces trois terres expofées long-tems à l'air putride, & notamment fur la fin de la putréfaction dans des vaifleaux où il n'entroit d'air atmofphérique que celui qu’on y introduifo t de rems en tems, on y a aufli rencontré quelques veftiges d’acide vitriolique, Aiufi les trois acides minéraux fe trouvent formés dans cette opération de la nature, Toutes les époques de la putréfa@ion ne donnent pas également un air propre à la nitrification , & l’époque favorable n'eft pas la même pour toutes les fubftanñces putrefcibles, ÎL paroît que les matières animales parenchimateufes valent mieux dans les commencemens , & les marières excrémenteufes , fur-tout l’urine, dans les derniers temsde la putréf.éion. Le fang eft de toutes celle qui fournit le plus abondamment & le plus long-tems. Ces différences ne tiennent-elles pas principalement à la quantité d'air inflammable ou d'air phlogiftiqué ou d'air fixe que donnent ges matières ? Car il eftbien certain, d'après les expériences & d'après Tome XXIX, Part. II, 1786. OCTOBRE. LI 2 258 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE: Fobfervation de ce qui fe palle en grand dans les nitrières naturelles & artificielles, que c’eft l'air, comme tel , foit dégagé des corps putrefcibles, foit pris de la mafle armofphérique , mais toujours impregné d’un principe igné fpécifique qui fert à la confection de l'acide nitreux. Quoiqu'il ne puifle refler aucun doute fur ce fait , cependant pour le mettre dans tout fon jour , pour en connoître toutes les circonftances, enfin, pour favoir plus particulièrement quelles font les efpèces d'air les plus propres à la nitrification , nous avons cherché, difent MM. Thou- venel , à confirmer les réfultats de nos expériences faites en petit ou dans des appareils de vaifleaux fermés, par d’autres épreuves comparatives difpofées dans des mafles d’air beaucoup plus confidérables, & fenfi- blement différentes les unes des autres. Nous avons donc expofé nos fubftances abforbantes préparées : 1°. À L'air atmofphérique des plaines cultivées, & à celui des lieux très- élevés , incultes & inhabités. 2°, À l'air des profondes excavations faites dans les mines, à celui de fimples foffes fuperfcielles pratiquées dans les terres végétales, & recou- vertes, ainfi que dans les rerreins marécageux. 3°. A l'air des étables, des caves, des larrines, des cachots , des hôpitaux. 4°. Enfin , à l'air des cuves en fermentation vineufe, & à celui des foyers fans cefle allumés avec du charbon. Dans toutes ces expériences qui ont duré fept à huit mois à chaque reprife, étant abrirés du foleil, de la pluie , des filtrations, nous avons obrenu des réfultars fort différens. La nitrificarion a été plus marquée dans l’air des plaines, à la furface de la terre, que fur les endroits élevés, Elle a fait encore de plus grands progrès daus les foffes de terres végétales ; mais elle n’a nulle part été plus fenfible & plus abondante que dan les lieux où l'air peu renouvellé, eft fans cefle impregné d’exhalaifons ani- males, & notamment dans les étables, les latrines , les cachots, &c. Par- tout ailleurs nous n'avons pas, ou pr.fque pas, retiré de vefliges de nitre ; c’elt-à-dire, dans les excavations des mines , dans les foffes des marais, dans les caves très-profond:s ,.exemptes de toutes filtrations & émanations corruptives , dans les fouterrains des fortifications , & enfin dans l'atmofphère des cuves à bière fermentante, & dans celle des foyers à charbons toujours brülans. Il eft donc bien démontré par toutes ces expériences que l’air atmofe phérique & l'air émané des corps purrefcibles, ont tout ce qu'il faut pour fervir à la nitrification, pourvu qu'ils trouvent des matières capables d'en abforber les matériaux, & des circonftances propres à en favorifer Ja combinaifon. L’acide nitreux, ni l'acide marin ne fé forment pas dans l'armofphère , & par telle ou relle conftirution d'air indépendamment de la préfence de telle ou telle matière abforbante, En effet , dans toutes nog ._ SUR L'HIST, NATURELLE ET LES ARTS. 269 épreuves les matières alkalines n’ont jamais été facurées que d'acide aéré plus ou moins chargé du principe inflammable ; au lieu que les vraies matières terreufes l'ont été d'acides nitreux & marins en plus ou moins grande quantité. Une autre preuve encore de cette affertion , c’eft que ces deux acides volatils, lors même qu'ils font lancés dans l’atimofphère, n'y reftent pas en nature d’acides ; puifque dans un laboratoire où nous avions fouvent tenu en évaporation l'un & l’autre acide pendant trois ou quatre mois, ces abforbans alkalins & terreux qui n’étoient placés qu’à douze ou quinze pieds du foyer de l’évaporation , tant fur le pavé qu’au plafond de ceïre pièce ne s’en font pas trouvés fenfiblement imprégnés, Il faut donc que ces acides difparoiflent dans l'air , foit en fe détruifanc , comme tous les corps fubtils portés à une extrême divifon, foit en fe combinant de neuveau ou avec la terre toujours exiftante & peut-être engendrée dans l'atmofphère, ou bien avec la matière du feu , celle de la lumière, &c. On ne peut cependant pas douter qu’il ne fe forme de l’acide nitreux dans l’atmofphère , particulièrement dans les couches inférieures, qui font toujours plus chargées des éanations réfulrantes de la décompofition des corps de la furface de la terre & dans lefquelles fe trouvent auf plus abondamment les matériaux inflammables & rerreux propres à la nitri- fication. Une obfervation effentiellé, eft qu'il ne faut point que l'air de l'armofphère foit-apporté avec rapidité, [l vaut mieux qu'il foit à-peu-près ftagnant , pour que la combinaifon ait le tems de fe faire. Une douce chaleur eft aufli néceflaire; car le froid nuit à la nitrification, {ans doute en arrètant la putréfaction, Pour qu'il ne reflât aucun doute fur les réfultats des opérations que l'on vient de voir, pour prouver de plus en plus que l'air méphitique dégagé des corps par la putréfadtion & l'air armofphérique impregné de ce gaz putride ou altéré par fon union avec le principe inflammable réfultant des corps pourriflans, font à l'exclufon de tout autre air méphitique ou dégénéré propres à la génération des fels nitreux, pour conftater que ceux-ci font réellement des produits nouveaux, qu'ils ne préexiftent pas, non plus que leurs matériaux immédiats , dans les fub{- tances employées à leur confection , & que les abforbans rerreux, chacun foivant leur degré d'aptitude, fourniflent, ainfi que les airs indiqués , leur contingent à cette confection, on a cru encore devoir ajouter les expériences fuivantes, Dans des appareils de ballons enflés jufqu’au nombre de cinq à fix, on a introduit les divers abforbans terreux & alkalins ci-deflus, chacun dans un ballon féparé, On a adapté ces files de ballons à de grandes coïnues tubulées contenant des matières ou en putréfaction, ouen diftil- lation, ou en effervefcence. On a eu foin de lutter parfairement ces appareils, & pour que l’air püt circuler fux toutes les matières abforbantes, 270 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, on a adapté à une des tubulures du dernier ballon un tube ds verre secourbé & plongé dans une jarre toujours pleine d’eau. On a d'autres fois employé dés ballons à trois ou quatre rubulures & autant de cornues afin d'introduire ou à la fois ou fucceflivement plufieurs efpèces d'air pris de différens corps. On a mis en effervefcence avec l'acide vitriolique la craie & la limaille de fer. On a diftillé pour fubftances minérales de la mine de fer fpathique, du marbre & de la houille déjà préparée; pour fubftances animales du fang & de la corne de cerf; pour fubftances végétales, du tartre, du bled & du charbon de bois. On a pris pour mélange de purréfaétion éminente & éminemment aéré, celui de fang , d'urine, de viande hachée & de farine. On a confervé ces appareils ainfi difpolés autant de tems qu'on l’a jugé convenable ( depuis trois jufqu’à fept mois ) en ajoutant par intervalles aux mêlarges efferveftens ; en donnant aufli par intervalles des coups de feu aux matières en diftillation ; enfin , en aidant par une chaleur habituelle le dégagement d’air dans les matières en purrefaction. + Ces derniers feuls à l'examen ont donné des produits nitreux. La terre calcaire pure n'a jamais manqué d'en donner depuis deux jufqu'à cinq grains par once. La magnélie ne s'eft nitrifiée que quelquefois , & plus foiblement que la craie. Les autres terres qui dans plufieurs des épreuves précédentes oncamontré “nant à la nitrification, y ont été réfractaires dans celle-ci, Les alkalis ne fe font point non plus nitrifiés, mais feulement aérés. _ + Il n'ya donc que l'air méphitique putride qui foit propre à la nitri- fication, Il nous refte à découvrir quelle eft celle de fes parties confti- tuantes qui fournit à cette opération ; car il contient de l'air fixe, de l'air phlooiftiqué , de l'air inflammable, & une portion d'air peu diffé- rente de l’air atmofphérique : on a fait l’expérience füuivante. Avant d'introduire cet air méphitique putride dans les ballons on l'a fait pafler à travers, 1°. de l’eau de chaux, 2°. de l’alkali cauftique, & 3°. de l’eau difullée, Dans les deux premiers cas il n’y a pas eu un veftise de fel nitreux après un tems fuRfant de putréfaétion. Dans le troilième cas il y en a eu un peu, mais moins que dans les épreuves avec l’air méphitique non filtré par le moyen de l’eau. Il paroît donc, d’après ces expériences , que l'air fixe eft néceffaire à la génération du nitre: qu’elle a conftamment lieu lorfque l'action diflolvanre de cet acide s'exerce fur certains abforbans terreux. Mais on ne peut encore en conclure que l'autre portion d’air altéré & rendu méphitique , inflammable ; ou phlogiftiqué , ne contribue aufli pour quelque chole à cette génération nitreufe. Il s'avifloit encore de favoir fi l'accès de l'air extérieur étoie néceffaire À la nitrification. Pour cela on a fait les expériences fuivantes. On a pris des crüches de grès à larges ouvertures & de grands bocaux SUR L'HIST, NATURELLE ET LES ARTS. 271 de verre qu'on a remplis de matières en pleine purrefcence. On les a couverts de chapiteaux les uns lutés, les, autres non lutés. On a far communiquer ces vaifleaux par le moyen de tubes de verre dans des flacons contenant de la craie, & des lefives alkalines avec les précau- tions ordinaires. Il n’y avoit de différence que Paccès de l'air extérieur qui n'étoit pas totalement intercepté dans les uns , puifque le chapiteau n'étoit pas luté, & que dans les autres il Péroit entièrement, Ces derniers n'ont donné qu'une très-petite quantité de nitre, quelques-uns même n'en ont point donné, tandis que ceux où l’accès de l'air n'étoit point intercepté , en ont donné beaucoup, MM. Chevrand & Gavinet ont mis également dans des ballons bien fermés des matières putrefcentes avec de la craie, & n’ont point eu de nitre. L'air inflammable ne paroît pas moins néceffaire à la formation du nitre que l’air atmofphérique, C’eft ce que prouvent des expériences faites avec beaucoup de foin par M. Lorgna. Il a pris de la terre des marais qu'il a divifée en trois parties : la première, il l’a expofée à l’air avec les précau- tions ordinaires, & il en a obtenu du nitre. Il a fait fubir une chaleur de quarante degrés à la feconde, & en a retiré beaucoup d’airinflammable, Quard elle ne lui en a plus donné, il l’a expofée comme la feconde; mais elle ne lui a point fourni de nitre. 11 lefiva la troifième partie pour s’aflurer que certe terre dans fon état naturel ne contenoit point de nitre, Ces expériences ne paroiflent laïffer aucun doute que l’air inflammable ne foit néceflaire à la nitrification. On avoit ctu jufqu’ici que le nitre cubique ou à bafe de natron ne pouvoit pas fervir à faire de la poudre à canon.; mais M, Lorona seit afluré du conttaire: il a fait avec ce nitre de la poudre, qui, éprouvée, eft aufli bonne que celle faite avec le nitre ordinaire, MM. Thouvenel paflent enfuite à l'établiffement des nitrières. Sars défepprouver les moyens ufités ils en propofent de nouveaux. Ils ont fait conftruire une nitrière-bergerie ; c'eft-à-dire, que fous un hangard de cent pieds de long fur foixante de large , ils ont fait mettre un pied & demi desterre végétale , ayant eu foïn de placer par-deflous de la glaife battue pour réfifler aux filrations : le terrein a été divifé en deux par un petit mur. Dans une moitié ils ont fait parquer trois ou quatre cens moutons pendant quatre mois, ont fait retourner la terre, qu’on a rechargée de neuf pouces de nouvelle terre. Quatre mois après la terre a encore été retournée & chargée de neuf autres pouces. Au bout de l’année on a fait pafler les moutons dans l’autre moitié, qui a été traitée de même. L'année révolue on les a fait pafler dans un troifième enclos. Les térres-du premier enclos ont été remuées & arrofées tous les quinze jours pendant deux mois. Ces terres enfuite leflivées à la manière ordinaire ont donné beaucoup de nitre, # 272 . OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, MAT. Thouvenel difent qu'on pourroit faire des aitriéres-cavaleries , c'efl-è-dire , mertre dans des enclos avec les mêmes précautions les chevaux de la cavalerie. Mellieurs les Commiffaires ont trouvé que les engrais fournis par les beftiaux font trop précieux relativement à la culture, pour que ces nitrières- bergeries & cavaleries puiffent avoir lieu, RÉFLEXIONS DE M. DE LA METHERI£. ] ; ; ; N OUS allons réfumer en peu de mots les conféquences qu’on peut tirer de toutes les expériences que nous venons de rapporter. I. La converfion de l'acide vitriolique en acide nitreux & marin, non plus que celle de l'acide marin en acide nitreux , n’a point lieu. IT. Dans les nitrières il fe produic , 1°. de l’acide nitreux, 2°. de l'acide marin , 3°. même de l'acide vicriolique , 4°. de l’alkali végétal ; s°. du patron, III. Les alkalis foit cauftiques, foit aérés, phlogiftiqués ou non phlogiftiqués , les hépars , les différens fels neutres à bafe alkaline ou métallique , ne peuvent pas fervir de hafe à la nitrification. IV. La terre calcaire, telle que la craie, la terre vépétale, &c. eft le meilleure bafe pour la ritrification. La magnéfie & la terre alumineufe n'ont donné que très-rarement du nitre , ce qui peut faire douter qu'elles foient propres pour les nitrières ; d’où MM, Thouvenel ont cru pouvoir conclure que Ja craie ou quelques-uns de fes principes entrent comme principe conftituant de l'acide nitreux, À V. Cetté même terre calcaire calcinée, ou à l’état de chaux vive, la magnélie & la terre alumineufe également calcinées ,ne font plus propres à la nicrification, VI. Le feul air putride paroît propre à la nitrification ; car on n’obtient point de nitre en introduifant avec les précautions ordinaires dans des appareils convenables, 1°. de l'air fixe ou acide dégagé de la craie par l'acide vitriolique, 2°. de l'air inflammable dégagé du fer par l’acide vitriolique, 3°. de l'air dégagé par le feu , du maïbre, de la mine de fer fpathique , de la houille déjà préparée , du fang , dè la corne de cerf, du tartre, du bled, & du charbon de bois. VIT. Cet air putride lavé dans Peau de chaux & dans les alkalis cauftiques , cefle d'être propre à la nitrification : lavé feulement dans l'eau difhilée, il n'y contribue plus que très-peu; ce qui paroîtroit faire croire que l'air acide eft néceflaire à cette opération. C’eft auf l’opniow de M. Cornette, VIT. L'air acide ou fixe feul n’eft pas propre à la pitrification , puifque 3 SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 293 : de l'air qui fe dégage d'une cuve de bière , ou du charbon en combuftion, ne peut fervir à produire du nitre. IX. L'air de l'atmofphère eft néceffaire à Ja nitrification ; car dans des vafes remplis d'air putride & fans communication avec l'air extérieur’, il n'y a point eu de nitrification. ÿ : X. B'air atmofphérique pur ne peut opérer la nitrification , puifque dans des lieux élevés, où l'air eft le plus pur, la nitrification ef prefque nulle, Celle qui s'opère dans les craies, comme l’a obfervé M. lé Duc de la Rochefoucauld à la Rocheguion, eft donc due à une petite portion d'air putride contenue dans les parties baffes de l'atmofphère : & ce qui le confirme, c’elt que ce favant a obfervé en même-tems que la nitrifica- tion éroit plus abondante dans les lieux voifins des habitations des hommes ou des animaux. € XI. La nitrification ne peut avoir lieu fans le concours de l'air “inflammable, fuivanr les expériences de M. Lorgna. XII. Cec air putride & l’air acmofphérique contiennent beaucoup d'air phlogiitiqué. Voici différentes données du grand problème, réfolues par le beau travail de MM. Thouvenel , Lorgna & des autres concurrens; mais il en refle encore qui ne le font pas. | 2 L'air putride eftcompofé, 1°. d'air acide ou fixe, 2°. d'air inlimmable, 3°. d'air phlogiftiqué, 4°. il s’y trouve toujours une portion d'air à-peu- près aufli pur que l'air atmofphérique. Il s'agit de favoir , 1°. fi cous ces aifs entrent dans la production de ces feis, ou sil n°7 en entre qu'une partie; 2°. s'il y entre d’autres principes. [1 fauc éclaircir ces quéflions par nos autres connoiflances acquifes. L'acide nitreux eft compofé à-peu-près d'une partie d'air pur & de deux d'air nitreux. Cec air pur ne fe trouvant qu’en très-perite quantité dans l'air putride, eft fourni par l'air atmofphérique. Mais quille eft la nature de l'air nicreux ? &;qu'ell-ce qui en fournit les principes ? Plufeurs Chimites regardenc l'ait nicreux. comme l'acide nitreux furchargé de phlosiftique. … M: Cavendish ayant produit de l'acide nitreux en faifant pafer l'étincelle électrique dans un mêlange de fepr parties d'air pur & de trois parties d’air impur ou phlogiftiqué , regarde l'acide nitreux comme compofé feulement d'air pur & d'air impur ou phlogiftiqué. J'ai dit (Journal de Phyfique, janvier 1782, page 19 ) d'après un grand nombre d'expériences qui prouvent qu'on ne retire de l'air nitreux ? que des corps qui donnent de Fair inflammable , tels que les méraux, le charbon, les huiles, le fücre, &c.-que l'air nitreux n'étoir que l'air inflammable modifié par l'air pur ou déphlogifliqué ; que cet air inflammable étoit fourni dans les nirières par l'air putride qui en contient toujours, - . .Que mes expériences pouvoient concourir aux Tome XXIX , Purr, IT, 1786. OCTOBRE, Mu 274 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ‘ vues du Gouvérnement [ur La formation de l'acide nitreux & - l'établiffement des nürières ; qu'il fuffifoit de produire l'air inflammable , ce que fait la putréfaition des matières animales 6 végétales, & de favorifer dans ces nitrières la circulation de Pair commun pour y porter l'air dérhlogifliqué. Toutes Les expériences de Meflieurs les concurrens , fur-tout celles de M. Lorgna, qui wa pu obtenir de nitre d'un terrein marécageux épuifé d’air inflammable & expofé à l'air atmofphérique , tandis qu’un pareil terrein contenant de l'air inflammable & dans les mêmes circonftances , avoit donné beaucoup de nitre', ne paroiffent-elles pas confirmer ma théorie ? D'ailleurs, fi l'acide nitreux étoit formé feulément d'air pur & d'air phlo- giftiqué , l'air armofphérique, qui eft compofé de ces deux airs, fufhroit feul pour fa production, Or, nous avons vu le contraire. Il faut de l'air inflammable qui fe retrouve dans l'air putride: & cer air inflammable dans l'expérience de M. Cavendish eft fourni par le Auide électrique, que je regarde comme une efpèce d’air inflammable. Secondement , l’eau paroît encore eflentielle à l’acide nitreux: car il n'eft jamais que fous forme liquide; & s'il fe trouve quelquefois à l’état aériforme , il fe réfout en liqueur dés que la chaleur l’abandonne. Troifièmement, contient-il un principe terreux , comme MM. Thou- venel femblenc foupçonner que la craïe peut lui fournir quelque chofe ? IL paroît que la craie fert feulement de bafe pour favorifer la combinaifon des différens principes qui entrent dans la compofition de cet acide, comme je l'ai dit ailleurs. Enfin , il me femble que le principe de la chaleur fe retrouve dans cet acide, comme dans tous les autres. [1 fe dégage des matières en putré- faction , & entre dans la nouvelle combinaifon. Mais l'air acide, qui fe trouve dans l'air putride, fe combine-t-il , & devient-il un des principes conflituans de l'acide nitreux ? C’eft ce que paroitroient prouver les expériences de MM. Thouvenel. On fait auffi qu'en mêlant l'air nitreux & l'air pur pour faire l'acide nitreux, on a une petite portion d'air acide précipitant l'eau de chaux. En diftillant le nitre dans une cornue de grès, j'ai obrenu, 1°. une petite portion de nirre fublimée ; 2°. il a paffé une liqueur ; 3°. enfin , beaucoup d'air qui ctoit de Pair pur mêlé d'air phlogiftiqué & d'air acide ou fxe, M. Fontana a auffi obtenu de l'air fixe, ainfi que M. Bertholler, Ces expériences he feroient point contraires à celle de M. Cavendish; car il paroir affez conftant par celles de M. Prieftley & d'un grand nombre de Phyfciens , que l'étincelle électrique tirée dans l’air atmof- phérique produit de l'air acide. Or, cet air acide, en continuant l'électri- cité, fe combine avec le fluide électrique ou air inflammable, & change de nature, Il peur donc fe faire, dans la belle expérience de M. Cavendish, que l'air acide fe combine également avec le fluide élafique, l'air pur, SUR l'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 275$ Pair phlogifiqué, l'eau & le principe de chaleur’, pour former l'acide nitreux. C'eft à des expériences ultérieures à décider cetre queftion. L'acide marin eft aufi produit en grande quantité dans les nitrières, Son analyfe eft moins avancée que celle de l'acide nitreux. Ainfi nous fommes encore moins à même d'expliquer ce qui fe pafle dans fa forma- tion. Cependant nous pouvons prefqu'aflurer qu'il contient égalemenc une grande quantité d’air pur & d'air inflammable; car l'acide marin déphlogiftiqué que M. Schéele a obrenu par le moyen de la magnéfie ,eft furchargé d'air pur. Cet acide abforbe l'air inflammable, & fe combine avec lui; j'ai fait pafler dans cet acide de l'air inflammable, l'acide a perdu fes propriétés d'acide maria déphlogiftiqué, pour devenir acide marin ordinaire : & il y a eu abforption d'air. Ainfi ce dernier acide contient donc, 1°. de l'air pur, 2°. de l'air inflammable, 32, on ne peut aufli y méconnoître le principe de la chaleur, 4°, une portion d’eau. Mais n'y entre-t-il pas quelqu’autre fubftance , par exemple, de l'air acide, de l'air phlosiftiqué, &c. c'eft ce que nous ne favons pas encore , & ce que l'expérience nous apprendra par la fuite. L'opération de la nitrification produit auffi les deux alkalis fixes. Il partoït qu'ils ne font formés que poftérieurement aux acides. Nos connoiflances font encore plus bornées fur la nature des alkalis que fur celle des acides, & nous ne pouvons entrevoir la marche de la nature dans leur formation. Nous favons par lesobfervations de MM, Prout & Lorgna que l'aikali minéral fe reproduit fans cefle dans certaines pierres coquillières. Ce doit être fans doute par le même procédé que dans les nitrières. Mais il faut attendre que l’analyfé nous ait donné des notions plus approfondies de ces fubftances, EXTRAIT D'UN MÉMOIRE Lu à l'Académie des Sciences de Paris, le 2 Septembre 1786; Sur l'effet des étincelles éle&riques excitées dans l'air fixe ; Par M MoNGE, de la méme Académie. Ex excitantune fuite d’étincelles électriques dans de l'air fixe, M. Prieftley avoit obfervé, 1°. que par cette opération, le fuide élaftique augmente du trentième , & même quelquefois du vingtième de fon volume ; 2°. que l'air fixe ainfi dilaté, femble avoir changé de nature, du moins en partie, puifqu'il n’eft plus fufceptible de fe combiner entièrement aveg l'eau, & qu'en le laifflanc féjourner fur ce liquide, le quart du Tome XXIX, Part. LI, 1786. OCTOBRE. Mm 2 L: : ” Mol L44 La 236 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fluide élaftique réfifte à l'abforprion; 3°. que le refidu ne rurile pas avec l'air nitreux , & par conféquent qu'il n’eft pas de l'air déphlogitiqué, M. Van-Marum avoit eu à-peu-près les mêmes réfulrats en faifant l'opération plus en grand avec la machine qu'il a fait exécurer au Mufée de leyler. : Il eft important de répéter les expériences des deux Phyfciens que nous venons de citer; d’abord pour déterminer la nature du fluide élafti- que qui fe trouve dans l'air fixe, lorfque le dernier fluide a été di- laré par l’étincelle électrique, & qu'il refufe de fe combiner avec l’eau, & enluite pour découvrir, s'il étoit poflible, quelle eft l’efpèce d'al- tération que l'air fixe éprouve par cette opération, Dans certe vue, nous avons fait un grand nombre d'expériences avec M. le Préfident de Saron, & plufieurs de mes Confrères ; nous allons rapporter les principales, & nous expoferons enfuite notre opinion fur l'effet que l’étincelle électrique produit dans l'air fixe. è Dans la fuite d'expériences que nous avons faites, nous avons opéré fur de l'air fixe obtenu par différens procédés; mais celui qui a fervi à l'expérience que nous allons rapporter, avoit été recueilli fur l'appareil au mercure, & il avoit été dévagé du marbre par l'acide vitriolique affoibli; & pour que ce luide ne fût pas altéré par quelques portions d’air atmofphérique, nous avions rempli d'acide lé matras dans l2quel devoit fe faire l'effervefcence, avant que d’y jetter les morceaux de marbre ; aufli cer air fixe étoic très-pur, l& il étoit entièrement abforbé par l'alkali cauftique, &c il ne laifloit aucun réfidu fenfible, Nous avons diftribué de ce fluide dans huit bocaux de cinq lignes de diamètre , & renverfés fur du mercure dans des cuvetres fépaiées. Nous avions placé dans l'intérieur de chaque bocal, & ‘dans l’efpace que devoit occuper l'air fixe, un excitateur de fer, au moyen duquel nous pouvions produire des érincelles dans le gaz, & tous les excirateurs communiquoient entr'eux , de manière qu’on excitoit en même-tems des étincelles dans tous les bocaux. La hauteur & l'efpace que l'air fixe occupoit dans.chaque bocal ; étoit à-peu-près de quatre pouces ou de quatre pouces & demi, & la fomme de ces efpaces formoit une colonne cylindrique d'environ trente-quatre.pouces de longueur. *! En produifant des étincelles multipliées, nous n'avons pas tardé à bous appercevoir que le volume de l'air fixeaugmentoit d’üne manière fenfible; mais dans les interruptions que nous avons été obligés de mettre à cette opération, qui eft très longue, & qui ne peut pas être achevée dans une féance, nous avons eu occafon de remarquer que Faccroiflement du volume de Fair fixe ne fe faifoit pas fubitement, & que cet accroiffement continuoit encore fes progrès, long-temsaprès que nous avions inrerrompu la produdtion des étincelles; enfin nous n'avons ceflé d'éledtrifer qu'après avoir bien reconnu que l'électricité Be. Lt 1 I Le Æ1 , Liu #4 , | SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 277 ne produifoit plus aucun changement ; alors le volume de Pair fixe étoic inégalement avgmenté dans les différens bocaux, & fon augmentation totale étoit à-peu-près du vingt-quatrième de fon volume primitif, - Nous avons encore remarqué dans cette opération, 1°. que la fur- face du mercure dans l’intérieur de chaque bocal, fe couvroit d’une pou- ‘dre noire, qui s’attachoit au verre & qui le noircifloit près du mercure ; 2°. que les excitateurs de fer, placés dans l’air fixe * fe calcinoient au point que dans la plupart des bocaux il s’éroit formé de la chaux martiale qui éroir tombée fur le mercure; du moins fous avons pris pour de la chaux de fer, une poudre couleur d'ocre, dont une partie adhéroït aux excirateurs, à l'endroit où l’érincelle éroir excirée. Le gaz qui avoit été dilaté par l'opération précédente, a été mis en contaét avec de l’alkali cauftique qui en a abforbé rapidement une partie, mais qui en a laiflé une colonne de quarorze pouces, fur laquelle il n’a- voit plus d'action; en forte que le rapport du volume de l'air fixe di- laté à celui du Auide qui n'étoit pas capable de fe combiner avec l'alkali cauftique, étoit à-peu-près celui de 21, $,à 14, ou de SEM En expofant fur du foie de foufre, un produit analooue que nous avions obtenu de quelques expériences antérieures, nous nous étions affurés que ce réfidu n'évoit pas de l'air déphlogiftiqué , ce qui s’accordoit avec les réflrats de M. Prieftley; nous avons cru néceflaire de re- chercher d’abord fi ce rélidu étoit de la mofete armofphérique ; pour cela nous l'avons mêlé avec de l’air déphlogiftiqué, dans le rapport de 3à 7, & nous l'avons mis fur du mercure dans trois bocaux ren- verfés & garnis dans l’intérieur d’excicateurs, afin de reconnoître fi par le moyen de l'étincelle éleétrique , ce mélange produiroit de l'acide ni- treux: ce qui devoir arriver, fi le réfidu éroit de la mofere, comme M. Cavendish l’avoit découvert peu auparavanr. Nous omettons plufieurs précautions que nous avons cru dans le tems devoir prendre, & que par la fuiré nous avons reconnues inutiles ; parexem- ple nous avions introduit dans chaque bocal für le mercure, quelques gouttes d’aikali cauftique pour abforber l'acide, à mefure qu'il fe for- meroir; &dans la crainte que cet acide, en attaquant la fubftance métallique des excirareurs, n'échappät à nos recherches, nous avions faic faire’ les inftrumens avec des fils d’or. Dès la première étincelle, il s’eft fair dans le premier tube une explofñon femblable à celle qui auroit eu lieu dans un mélange d’air inflammable & ‘d'air déphlopiftiqué; & le volume du mélange qui étoit auparavant dans ce bocal de 3,55 pouces, a été réduit par-[à à 2,2, pouces. En excirant des étincelles dans les’ autres bocaux, nous avons produit de femblables explofions; mais les vales fe fone brifés par la violence des déronnations, & le fluide élaftique s'éranc 273 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, échappé, nous n'avons pu juger de la diminution que fon volume a dû rouver. IL réfulte de certe expérience, 1°. qu'en excitant des étincelles multipliées dans l'air fixe dépouillé de tout gaz étranger, on augmen- te fon volume ; 2°. quefcette augmentation graduelle fait encore des progrès, lors même que l'on fufpend pour quelque tems l'électrifa- tion ; 3°. quelle cefle enfin completement , quoiqu'on continue d'exciter des étincelles, & qu’alors elle eft à-peu-près du = du volume primitit du fluide éleftique; 4’. que pendant cetre opération l'excicateur de fer fe calcine , & qu'il fe répand fur le mercure une poudre noire qui ter- nit fa furface & qui sattache au verre; $°. que l'air fixe dilaté pat les étincelles eft un mélange de deux fluides, dont l'un eft mifcible avec l'eau & avec les alkalis cauftiques, & dont l’autre refufe de fe combiner avec ces fubftances , & que le rapport des volumes des deux fluides qui compofent ce mêlange, eft à-peu-près de 3 à 2; 6°. enfin que celui de ces fluides qui ne fe combine pas avec l’eau eft un air inflammable, qui détonne avec l'air déphlogiitiqué , au moyen de l’é- tincelle électrique. Actuellement, pour rendre raifon de ces phénomenes , nous remar- querons que l'air fixe, celui même que l’on obtient de la terre cal- caire par la calcination, tient de l'eau en diflolution & qu'il eft fa- turé de ce liquide; car, dans le dernier cas , il eft chargé d’une par- tie de l’eau qui entre dans la compolition de la terre caicaire, & qui eft dégagée de fa combinaifon par la violence du feu; c'eft à une portion de cetre eau, tenue d’abord en diflolution par l'air fixe incandefcent, & abandonnée enfuite en vertu du refroidiflement, qu'il faut attribuer la forme de petits nuages que prennent les bulles d'air fixe, lorfqu'elles fortent de la cornue, pour fe répandre dans le bocal qui les reçoit; & ces nuages qui font le produit d'une véritable précipitation , prou- vent que l'air fixe reite faruré d’eau. Or l’eau ne peut pas fe difloudre dans le fluide élaftique, fans aug- menter leurs volumes ; parce qu’alors elle quitre l'état liquide, & qu'elle prend une denfité qui appproche davantage de celle du fluide diflolvant. M. de Sauflure a prouvé que cela a lieu lorfque l’eau fe diflout dans l'air atmofphérique; & il eft inconteftable que la même chofe doie arriver lorfque l'eau fe diflout dans l'air fixe. Seulement, à quantités égales d’eau diffoute dans ces deux fluides, l'augmentation produire dans le volume de l’air fixe doit être moindre, parce que la denfité de ce dernier gaz eft plus grande que celle de l'air armofphérique; mais la quantité d’eau néceflaire à la faturation de l'air fixe, eft beaucoup plus grande que celle que l'air atmofphérique peut diffoudre dans les mêmes circonftances; & jufqu'à ce qu'on ait faic fur cer objet des expé- giences précifes, on peut croire qu'il ya au moins compenfation, Ainfi SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS... : 279 le volume de l'air fixe n’eft pas entièrement rempli par la fubftance même de ce fluide, & une portion affez confidérable de ce volume doit être regardée comme occupée par l'eau que l'air fixe tient en diffolu- tion; en forte que fi par quelque moyen on le privoit de cette eau, fans attaquer fa fubftance , on diminueroit fon volume d’une manière fenfible, Lors donc que l'on produit des étincelles éle&triques dans l’air fixe, au moyen d'un excitateur de fer, ces étincelles difpofent le métal à la calcinations & parce qu'il n’y a pas d'air déphlogiftiqué libre qui puiffe concourir à cette opération , le métal décompole l’eau que l’air fixe tient en diflolution , il s'empare de [a bafe de l'air dephlooiftiqué, & il abandonne l'air inflammable, qui , reprenant l’état élaftique, occupe un volume plus grand que n'étoit celui de l'eau avant fa recompoli- tion, mème confidérée dans fon étar de diflolurion. La calcination du métal produit donc ici deux effers qui font oppofés & dont on n’apper- çoit que la différence; 1°. en privant d'eau l’air fixe, elle diminue le volume de ce gaz; 2°. en reftiruant de l'air inflammable dont l'expan- fion eft plus confidérable, ‘elle augmente le volume du fluide élaftique d'une plus grande quantité, & c'eft cet excès feul que l'on apperçoir. Ainfi à mefure que l’on excite de nouvelles étincelles"& que l'on con- tinue de favorifer la calcination de l’excirateur, l'augmentation du vo- lume du fluide élaftique faic de nouveaux progrès, jufqu'à ce que l'air fixe für entièrement dépouillé de l’eau qu'il tienc en diflolution, ou du moins de celle qu’il peut abandonner à l'action du métal; alors cette augmentation cefle, & le fluide élaftique eft un mélange d’air fixe privé d'eau, (& donr le volume eft diminué) & d'air inflimmable, Si l'on expofe ce mêlange fur de l’alkali cauftique , l'air fixe eft ab- forbé, & ce qui refte eft de l'air inflammable, altéré par quelques lé- gères portions d'air fixe qu'il fouftrait lui-même à l'action de l'alkali. Enfin fi l’on fait deronner ce gaz inflammable avec une dofe conve- nable d'air déphlogiftiqué , le produit de l'inflammation n’eft que de l'eau, & il ne fe trouve d'autre réfidu que la petite portion d'air fixe que l'air inflammable avoit retenue. En effet dans le bocal où nous avons mis le mêlange d'air, infam- mable & d'air déphlogiftiqué pour opérer la détonnation , le volume total de ce mêlange avant l’explofion, étoir de 3,55 pouces; les deux fluides avoient été mêlés dans le rapport de 3 à 7; ainfi le volume occupé par l'air déphlogiftiqué éroit de ......... 2,48 pouc, Celui de l'air inflammable étoit de ..,....... 1,07 pouc. Total 3,55 pouc. L'air inflammable a dû confommer à-peu-prés la moitié de fon volume d’air déphlosiftiqué, c'eft-à-dire, à-peu-près 0,53 pour. _ : 2890 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Ainfi lexplofion a dû confommer 1,6 pouces de fluide élaftique ; & retranchant cetre fomme du volume prinitif, le volume du réfidu a dû être, dans notre hypothèfe, de 1,-5$ pouces, & nous avons rrou- vé que le réfidu etoir réellement de 2,2 pouces; çe qui s’accorde prefque parfaitement avec le réfulrat du calcul; fur-cour fi l’on re- marque que les mefurés actuelles’ n’ont pas pu être prifes avec une exactitude rigoureufe, & qu'il a dû reiter dans l'air inflammable une petite quantité d’air fixe, ce qui doit augmenter nos réfulrats, par deux caufes, 1°. parce qu'il y avoir moins d'air inflammable que nous ne l'avons fuppolé, & quil y avoit moins d'air confommé par l'explofon; 2°. parce que le rélidu eft augmenté par l'air fixe. Pour fimplifier l'expofé de notre hyporhèfe, nous n'ayons attribué jufqu'ici la dilatation de Pair fixe, par l'éuncelle éleétrique, qu'à la calcination du métal feul de l’excirateur; mais lorfqu'on fait certe opération fur du mercure, le même phénomène a encore lieu, lors même que l'excirateur n’elt pas fufcepuible de fe calciner; c'eft ce que M. le Préfidenr de Saron a vériné, en répétant l'expérience dont if Sagir avec des excitateurs de platine, Or il faur remarquer que le mer- cure a, comme l’eau, la faculté de fe diffoudre dans les fluides élaf- tiques; il s'en difout donc dans l'air fixe une portion qui augménre le volume du fluide élaftique , la partie de ce mercure diffous qui fe trouve dans le voifinage de l'étincelle fe calcine, & c'elt Te rélulrac de certe calcination qui forme la poudre noire que l’on apperçoit fur la furface du mercure, dans l’intérieur du bocal où fe fait l’opération. A mefure que par-là l'air fixe fe dépouille & du mercure & de l’eau qu'il tient en diflolurion , il devient en état de diffoudre du nouveau mercure; cette diflolution poftérieure auomente encore fon volume, & c’elt cette diflolution qui ne peut pas fe faire fubitement, qui eft la caufe du progrès que fuit la dilatation du fluide élaftique, quelque-tems après que l’on a fufpendu léleétrifation, On voit donc que l’on peut rendre raifon de la dilatation que l'é- tincelie éleërique produit dans le volume de l’air fixe, fans fuppofer que ce uide foi altéré dans fa compofñition ; & l'on explique d’une manière raifonnable routes les circonitanses de ce phénomène, en fup- pofanc qu'il réfulte de la calcination, de la fubftance même de l’exci= tateur & du mercure tenu en diflolution dans l'air fixe, & en autri- buant certe calcination à la décompofition de l’eau difloute dans le mème fluide élaftique; ce qui n’a rien de contraire aux connoiflances que nous ayons actuellement en Chimie. : SUITE M5 à nee ht ED Dec 1 SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 281 D 20 SUITE DE L'EXTRAIT DU MÉMOIRE DE MM. VANDERMONDE, MONGÉ ET BERTHOLLET, Sur la Fonte, le Fer, l'Acier & la Plombagine ; Par M. HASSENFRATZ,. Du Charbon confidéré dans fon état de combinaifon avec le Fer, & dans l’état où 11 ef? au fortir de cette combinaifon. Ne avons vu, difent ces favans Academiciens, que le char- bon a la faculté de fe combiner avec le fer (1), & que le réfultat de cette combinaifon doit être regardé comme une véritable diflolu- tion, parce que ces deux fubftances fe diftribuent uniformément dans l'intérieur de la mafle, malgré la différence de leur pefanteur fpéci- fique, ce qui eft le propre des diflolutions, & parce que la fonte & l'acier en fufon tranfmettent du charbon au fer doux qu’on y plonge. Cette afhiniré du charbon avec le fer eft évidemment variable fuivanc les températures ; car 1°. par les températures ordinaires, ces deux matières n’exercent aucune action l’une fur l’autre, & il faut qu'elles foient chaufiées routes deux jufqu'à un certain point, pour que la dif- folution puifle avoir lieu. 2°. À mefure que l'on élève davañtage la température, la diflolution devient d'autant plus abondante, ce qui eft prouvé par l’excès de charbon que prend le fer, quand la chaleur eft pouflée trop loin dans la cémentation, & par celui que prend la fonte dans les hauts fourneaux lorfqu'en employant trop de charbon dans la charge, on excite une trop haute température dans les four- neaux. Ainf le fer eft fufceptible d’être faturé de charbon, & la quantité de cette dernière fubitance nécefléire à la faturation varie felon la température, Il fuic delà, que fi la fonte & l'acier fondu font faturés de matière charbonneule par une température beaucoup plus haute que celle qui eft néceflaire à la fufñon, & qu'on les laifle refroidir, le métal, à caufe de la diminution de l’afinité, doit devenir fuperfaturé & abandon- ner du'charbon , c’eft-à-dire fe troubler. Mais l’état du mêlange doit être £ différent felon le régime du réfroidiffemenr. ——————““————— ——————— ————— <——"——— (1) En traitant de la cémentation. Tome XXIX, Part U, 1786, OCTOBRE. Nn ) 1 x 7 “ 282 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Si ce réfroidiflemenr eft conduit d’une manière très-lente, le mé- tal doit s’épurer par une efpèce de précipitation, & Je charbon aban- donné, doit s'élever à la furtace. C’eft à cette dépuration comme nous allons le voir dans un moment, qu’il faut attribuer la plombagine que l'on trouve à la furface de la fonte grife coulée en groffe mafle , & celle qui tapiffe ordinairement les cuillers avec lefquelles on jetre cette matièreen (à moule. Mais fi le refroidiffement eft fubit, ce qui arrive Le plus ordinai- rement, le charbon abandonné eft furpris dans le métal avant qu’il aïc pu s'en dégager, & il fe trouve difféminé dans l’intérieur & non coin- biné. Or les affinités de deux fubftances étant toujours réciproques , & le fer ayant la faculté de diffoudre du charbon, le charbon doit être re- gardé comme capable à fon tour, de retenir du fer ; de plus routes les fois qu’une précipitation fe fait fans inrermède, la fub{tance abandonnée cft toujours faturée du diflolvant ; c’eft ainfi que l'air abandonné par L'eau en vertu d'une élévation de température ou d’une diminution de prefion , eft roujours faturé d’eau ; donc le charbon qui avoit été te- nu en diflolution dans du fer coulé & qui a été abandonné en vertu d'un refroidiffement, doit être faturé de fer. Ce n’elt pas du charbon pur, c'eft de la plombagine, c’elt-à-dire la même fubitance que celle dont on fait les crayons d'Angleterre. En effer toutes les expériences que M, Bergmann a faites fur le ré- fidu noir des diffolurions de la fonte & de l'acier dans les acides, prouvent que le réfidu eft la même matière que la plombagine, & toutes celles que MM, Schèele, Hielm & Pelletier ont faites fur la plombagine , prouvent que cette fubftance n’eft autre chofe que du char- bon combiné avec une certaine portion de fer. Nous nous contenterons de rapporter les principales. ÿ + 1°. La plombagine eft inaltérable au plus grand feu dans les vaifleaux clos; & lorfqu'on la calcine fous la moufñle, elle perd les + de fon poids, & le réfidu eft une chaux martiale. 2°, Lorfqu'oni la fait détonner avec le nitre,elle produit de l'air fixe & eile donnemn fédiment ferrugineux. . 3°. Lorfqu’on la diftille avec du fel ammoniac, ce fel fe fublime en fleurs martiales, c’eft-à-dire, en fleurs de fel ammoniac chargé de fer. 4°. Nous avons fait digérer de l'acide marin très-pur fur de la plombagine, pendant la digeftion il s’eft dégagé un peu d'air inflam- mable. Il s'eft diffous les 3 [de la matière employée, & la partie dif- foure, étoit du fer que nous avons précipité en bleu de Pruffe avec l’eau de chaux prufienne préparée à la manière de M. de Fourcroy. L'air inflammable qu'on obtient dans cette opération eft produit par la diffolution du fer dans l'acide. & SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 283 Toutes ces expériences prouvent que la plombasine contient du fer ; les fuivantes prouvent qu’elle contient du charbon. 1°. Elle revivifie la litharge & l’acide arfenical, & dans ces deux opérations, il y a de l'air fixe produit, 2°. Diftilée avec des fels vitrioliques, elle produit du foufre. 3°. Avec l'acide phofphorique, elle donne du phofphore. 4°. Avec les alkalis cauftiques humides, elle les rend effervefcens. 5°. Enfin, avec le nitre ammoniacal , elle décompofe l'acide , & en- fuite l’alkali volaril dégagé fair effervefcence avec les acides, Nous avons répeté & vérifié le plus grand nombre de ces expériences , & nous en avons fait une autre dont nous croyons devoir rendre compre. Nous avons placé de la plombagine en poudre fur une petite foucoupe dans de l'air déphlogiftiqué contenu fur un appareil de Prieftley, par un bocal de verre renverfé, & nous l'avons expofée à la lentille de Tchirnauls, qui appartient à l'Académie. La plombagine s’y bräloit très-lenrement , & la combuftion donnoit lieu à de petires défagrations qui difperfoienr une partie de la matière. Sur,la fin de lexpérienc, & lorfque le fluide élaftique contenu dans le bocal étoit devenu beaucoup moins propre à entretenir la combuftion, la plombagine fe convertifloit à la fur- faceen petits globules qui étoient dans une véritable fufñon; en incli- nant la foucoupe, nous faifions joindre deux de ces globules , qui dès qu'ils fe rouchoient, fe réunifloient comme auroient fait deux pareilles mafles de mercure. Nous fommes parvenus de cette manière à former des globules qui avoient plus d’une ligne de diamètre. Enfin nous avons ceflé l'opération lorfque la combuftion a refufé de continuer, faute d'air déphlogiftiqué. Huit jours après, nous avons trouvé que les ? du fluide avoient été abforbés par l’eau de l'appareil, c’écoir de l’air fixe quiré- fultoit de la combufñtion de la partie charbonneufe de la} plombagine ; l'autre fxième éroit inflammable comme le gaz qui fe dégage lorfqu’on diftille du charbon humide, occafionné fur la fin par la combuftion du fer & du charbon lorfque l'air déphlogiftiqué étoit épuifé ou qu'il n'é- toit plus en aflez grande quantité pour entretenir cette opération. Quant aux globules , nous avons trouvé qu'ils étoienr beaucoup plus durs que la plombaoine; leurs furfaces étoient vitreufes; ils ne laifloient point de traces fur le papier; ils n'étoient pas attirables à l’aimant. Par la digeftion dans l'acide marin ils ont abandonné une grande quantité de fer, & ils ont laiflé un fédiment noir , femblable à celui que laiffene Ja fonte & l'acier dans les mêmes circonftances, Ces globules n'étoient donc que le rélidu ferrugineux ; qui avoit été calciné, puis vitrifié par la chaleur du foyer, & qui avoit rerenu une portion de la plombagi- ne non bruülée avec laquelle il avoit éré en contact. Il réfulre donc de toute ces expériences que ce n’eft pas par acci- Tome XXIX , Part. 11, 1786. OCTOBRE. _Nn2 294 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, dent comme l'ont cru quelques Auteurs, que Ja P ombag: ne dont on fait les crayons d'Angleterre, contient peu-à-peu + de ter, & que fans ce métal Ja plombagine ne Harcie autre. choie que de la matière char- bonneufe pure, On doit donc regarder cette fubftance comme du charbon faturé de fer. D'ailleurs il eft certain que le fer abforbe du charbon dans le haut fourneau pour produire la fonte, & dans la caifle de cémenration pour produire de l'acier. 11 eft certain que la fonte grife , en fe réfroidiflant, abandonne une fubflance qui a abfolument tous les caractères de la plombagine , & à laquelle il ne manque que d'être adhérente pour fai- re des crayons. Cette fubftance a la couleur de la plombagine, elle eft douce au roucher, elle laifle des-taches fur le PAP & dans l'a- nalyfe, elle ne donne d’autres produits que du fer & du charbon. Nous croyons être en état de conclure, 1°, que la plombagine eft uve fubflance que nous pouvons compofer & qui fe compofe en effec tous les jours dans les hauts fourneaux où l’on coule de la fonte grife, vient nager à la furface du métal en fufion, lorfque ce métal en fe refroidi flanc ; abandonne l'excès de charbon qu'il tenoit en diflolurion. Dans cette elpèce d'épuration, le charbon entraîne tout le fer qu'il peut retenir à fon tour, & la plomibagine eft formée. 294 Que dans Ja fonte & l'acier refroidi, il y a du charbon com- biné, mais qu'il y en a auf une grande quantité qui étant abandonnée par É refroidiflement eft difféeinee dans la mafle, & non combinée. Ce n'eft pas du charbon pur, c'eft de la plombagine à laquelle la prenne tude du refroidiflemenr & l'état pâreux du métal n'a pas permis de fe raflembler à la furface. La tache noire que l’acide nitreux laifle fur l'acier & la fonte, felon l'obfervation de Rinman, eft due à la plombagine que Facide met à decouvert en diflolvant le métal. Ainfi la fonte orife & l'acier, fur-rout celui qui eft trop cémenté,, ne peuvent pas être regardés comme des fubftances homogènes. Jis font l'en & l’autre le rélultar de diflolurions qui fe font troublées par un premier réfroidiflement, & qui fe fonc durcies enfuire par un réfroi- diflemenc plus grand. L'adhérence qu'ont l’un pour l'autre le fer & le chaiben, qui en- trent dans la compofition de la plombagine, empêche que cerre fubf trance ne foit aufli combuftible que le charbon; libre de toutes com= binaifons, elle exige une plus haute remnérature pour brûler, & il faut pour la faire detonner, une plus gran de quantité de nitre que pour un pareil poids de done ; non comme Je penfe M. Schéele ; que la plombagine contienne plus de phlogiftique que le charbon; mais parce que Ja combuflion de certe fubfancerérant très-difhcile ,- les parties qui, dans la déronnation ne font pas placées dans des circonftances très- favorables, ne fe brülent point. Auffi d'après l'obfervation de M. Schéele SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 285 lui-même, le Auile élaftique dégagé par la déronnation de 1à plom- bagine, n’eft pas de l’air fixe pur, 1l contient encore une grande quan- tité d'air déphlogiftiqué qui n'a pas été employé. EE EE SEE IE MERE EI TPE NEC EE LPC EME ESA J'EN PERD EE PT CREME OBS'E'R'V A'TTIO NS Sur le Bouquetin des Alves de Savoie, & fur celui 4 de Siberie ; Par M. BEerrHoup VAN-BERCHEM. JE ne connois le bouquerin de Sibérie, que par la defcription qu'en a donnée M. Pallas ( fp. zool. fafe. X1. p. 52) ; mais j'ai vu plufieurs cornes du bouquetin des Alpes de Savoie, & j'ai examiré plu-. fieurs fois un bouquetin vivant, qui fe trouve à Aigle, chez M. le Gouverneur de Vatteville. En comparant la defcriprion de M. Pallas avec celle que M. Daubenton a donnée du bouquetin européen (1) & l'in- dividu que j'ai vu, il me paroît que la différence la plus apparente, gic dans les cornes. M. Pallas décrit (2. c. p. 53 ) ain les cornes du bouquetin de’Sibérie. Cornua grifeo-nigricantia, baft æqualiter truncata, retrorfum falcata, æqualiter divergentia, extremo apice paululum .introrfum declinato, compreff[a , magis Jubtus ; dorfo craf- Jiore ; planiufculo, nodis tranfverfis prominentiffimis, convexis quai articulata, cæterum obfolete rugofu, longitudinalirer flriata ; latere exte- riore planiora, extremitate compreffiora , læsivraque. Les cornes de notre bouquetin leur reflemblent beaucoup. Elles font aufi courbées en bas & un peu recourbées en dedans, elles ont des firies longitudi- nales, le côté extérieur plane, l'extrémité unie, la couleur noiratre; elles font plus comprimiées deffous 8: ont une face antérieure, mais cetre face eft plus applatie & plus difinéte dans notre bouquerin que dans celui de Sibérie, & elle eft marquée par deux arrêes longirudinales dont linterieure eft beaucoup plus fenfble que l’extérieure. On rrou- ve dans les cornes de ces deux animaux des nœuds cranfverfaux &'pro- éminens., mais dans celui des Alres ces nœuds font étendus en forme d’arrêtes tranfverfales, & la partie qui fe termine à l’arrére longitudinale interne y forme un tubercule faillant. On voit donc que ce font dans les arrêres longitudinales, l’applatiflement de la face antérieure & la forme H°t . Nat, tom. XII, page 166. 286 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, , des arêtes tranfverfales , que confiltent les principales différences qui fe trouvent entre les cornes de ces animaux. Mais on fait qu'il n'y a pas de caractères plus variables que ceux des cornes dans”les animaux fau- vages comme dans les domeltiques. Non-feulèment ils varient dans les individus de la même efpèce, mais encore dans le même individu à différent âge. Par exemple, dans les cornes de bouquetin décrit par M: Daubenton ( 7. XII, p. 166 ) les tubercules éroient très-petits fur la partie inférieure des cornes, & beaucoup plus gros fur le refte de leur étendue, tandis que dans le bouquetin d’Aigle ces tubercules étoient plus gros fur la partie inférieure. De plus ce bouquetin d’Aigle, dont j'ai fuivi l’accroiflement, n’avoit pas à l’âge de deux ans l’arrête lon- gicudinale extérieure, fenfble, & les arrêtes tranfverfales n’écoient que des nœuds proéminens; ce n'eft qu'à l'âge de trois ans que les carac- tres qui diflinguent ces cornes, font devenus apparens. Ces arrêtes longitudinales, qui ne dépendent peut-être que de l’applariflement plus ou moins orand de la face fupérieure , & les autres différences ‘que l'âge de l'animal fait varier, ne forment donc pas des caraétères fpécifiques. Le climat & la nourriture font les caufes qui influent le plus fur les cornes des animaux: ainfi il n’eft pas étonnant qu'il y ait quelques différences entre les cornes du bouquetin de nos Alpes & celles da bouquetin de Sibérie, Je crois donc, puifque leurs diffé rences fonc des caractères variables, & que d’ailleurs leut manière de vivre & le refte de leur figure ont le plus grand rapport, qu'on doit les regarder comme de la même efpèce, Et ce qui confirme encore mon opinion, c'eft que M. Pallas , bon juge en cette matière, ne fépare pas ces animaux. La defcriprion de la corne repréfentée pl. 7, fie. 2 du Journal de Phyfique pour le mois d'Août de certe année, eft fi peu détaillée qu'il eft difficile de juger à quel animal elle appartient. Mais en la compa- rant avec les cornes du bouquetin de Sibérie, repréfentées (p£. 5, fée. 4, Jp. zool. fafe. 11) & celles du capra ægagres repréfentées dans la mème planche ; fig. 2, on trouvera, ce me femble , qu'elles ont plus de rapport avec celles de l'œgagre qu'avec celles du bouquetin, ce qui me feroit penfer que c'eft en effet une corne d'œgagre, d’aurant qu'il eft dir dans le Journal, qu'elle a beaucoup de rapport à celles du bouc. Or l'on fait que la plupart des Naturaliftes regardent atuellement l'œgagre comme l'origine fauvage des chevres domeftiques , & que fes cernes reflenrblent à celles du bouc. Il eft dit dans la lettre fur le bouquetin (Journal d'Août, pag. 136) - que tous les faits annoncés par fon Auteur au fujet de cer animal fonc vrais. Mais un de ces faitseft, que le bouquetin ne produit pas avec la chevre; or j'ai dit & je dois le répéter ici, que j'ai vu des métis provenants de l’union du bouquetin d'Aigle avec plufeurs che- ns 4 (| 4 RAS hérs re — 4 Le = Eh SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 287 vres, & je puis appeler en témoignage de la vérité de ce fait M, le Gouverneur de Vatreville & tous les habirans du bourg d’Aigle qui ont vu & font à même de voir tous les jours ces métis. SL — —, ÉPREUVES RELATIVES À L'ADHÉSION; Bar MMA" FR 0 ART CEE PUR ENM ILE Re Ox a fufpendu en équilibre à un trébuchet une bouteille cylindrique de 21 lignes'de diamètre dans fa partie inférieure, & terminée en haut par un aflez long col de 2 lignes & demie de diamètre, clos avec un bouchon de cire molle. Le fond de cette bouteille avoit été enlevé en l’ufant avec du fablon. L'épaifleur de la tranche de fon contour inférieur, à découvert, n'éroit que de demi-ligne. Elle pefoit ainfi bouchée 4 : gros & 14 < grains. Au- deflous étoit placé une cuvette , dont le bord fupérieur éroit plus élevé que le bord inférieur de la bouteille. On y verfa de l’eau jufqu'à ce qu’elle atteignit précifément le bora de la bouteille , dont on furchargea enfuice le contrepoids jufqu’à ce que fon adhéfion à la furface de l’eau für fur- montée. [1 y fur employé en tout 163 © grains. Le dernier demi-grain détacha la bouteille de la mafe d’eau. ne feconde expérience fut faite avec la même bouteille, dont le bouchon de cire avoir été ôté & appliqué aux parois extérieures de Ja bouteille, afin qu’elle ne cefsât pas de pefer autant que dans la première expérience. Dans celie-ci 42 3 grains fufirenc pour l'enlever de deffus Ja furface de l'eau. La d'férence des réfiflances à la féparation d’avec l’eau dans ces deux expériences fut de 120 + grains — 163 — 42: L'intenfité de l'attraétion qu'on fuppoferoit y avoir infué feroit la même dans les deux , parce que les plans de contact y font les mêmes, & par certe raifon il a dû en être de même par rapport à l’aétion de l'afinité. Il n'y a que l’aétion de la prefion de l’atmofphère qui ait pu varier dans ces circonftances ; & on en découvre les rapports dans lune & l'autre, qui doit être en raifon des érendues des furfaces contigues & égales qui y font en prife à cette preflion verticale. L'égalité d'intenfité de l'action, {oit de attraction, foit de l’afhaité dans chacune des deux expériences, aurorife affez à mettre fur le compte de la preflion atmofphérique là différence des réfultats, A l'égard de Ja °°8 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, bouteiile clofe, la prefion verticale de l'armofphère s'exerce fur toute l'étendue de l'aire horifontale qu'embraffent la furface de la maffe d’eau enclavée, & la coupe des parois de la bouteille , qui la terminent, dans le plan qui corréfpond au niveau de l'eau contenue dans la cuvette, A l'évard de la bouteille non bouchée au haut, la preflion verticale de l'atmofphère ne peut s'exercer efficacement que fur l'épaifleur de la tranche circulaire des parois verticales, qui fe trouve feule en contact avec la fnrface de [a maffle d’eau. Ainfi dans les deux circonftances, le rapport des preflions atmofphé- riques doit être celui de 330 : lignes quarrées ( aire de l’efpace embraflé par la furface extérieure du bas de la bouteille fur la mafle d'eau ) à 33 lignes quarrées ( aire dét la coupe de fes parois verticales} , puifque la circonférence extérieure doit être de 66 lignes , 7: 22 : : 21 : 66 lignes, qui, fur une épaifeur d'une demi-ligne ,ne donnent que 33 lipnes quarrées; enfin, 66 lignes de circonférence , multipliées par $ < lignes, quart du diamètre, donnent pour l'aire du bas de la bouteille (l'épaifleur de fes parois y comprife), 346 < lignes quarrées, Etendue de l'aire complette de la bouteille occupée fur la furface de MÉMORISER AO In io 06 nt lClE Etendue de celle relative à la coupe de fes parois verticales 33 nn. | Différence .,... 313 Rapport des deux étendues, 346 ? à 33. Et ce rapport 346 2 à 33 elt dès-lors celui des prefions verticales de Patmofphère fur la bouteille dans les deux cas fpécifiés. Il eft bien différent de celui 163 + à 42 des forces néceflaires pour détacher de l'eau la bouteille dans ces deux mêmes cas, parce que l'intenfité de l’action de l'attractian ou afinité qui y interviene, y elt égale dans les deux cas, étant toujours uniquement relative à l'aire de la tranche horifontale de fes parois verticales appliquée fur la furface de l'eau, & que les forces employées ont à furmonter en même-tems & la preflion de l'atmofphère & certe afhinité ou attraction. : Au refte, il exifte un moyen de démêéler à quel point l'une & l'autre de ces caufes, la preflion de l'air & l'afaité où attraction , concourent chacune de leur part & interviennent dans les phénomènes dont il ef ici queftion, L'expérience nous a fait reconnoître les valeurs des réGflances que, dans ces diverfes circonftances, la bouteille oppofe à fe laiffer déracher de l’eau fur laquelle elle eft appliquée; il ne s'agir plus que d'apprécier les valeurs réelles & refpectives de l’action de l’affiniré & des preffions de l'air qui ont dû s'exercer dans ces mêmes circonftances, & qui, déduites des incenfités des réfiftances refpectives à la féparation d'avec le fluide, PRE Re « _ SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 299 Auide, donneront les expreffions des influences de l’autre caufe ou action qui s’y combine. ÿ Selon Les réfultats de nos expériences , le rapport des réfiftances oppoées par la bouteille clofe & par la bouteille ouverte au haut , eft celui de 163 à 42, Sur quoi il y a à remarquer que ce rapport a été conftaté par des épreuves faires à cer égard par M. B... .être conftamment le même, foit que le goulot de la bouteille fût totalement ouvert, foit qu'il ne le fût qu'à demi , ou que clos avec un bouchon de cire, percé enfuite avec une épingle, la communication de l'air intérieur avec celui de l'atmof- phère ne püt avoir lieu que par un paffage très-rerrécis ; ce qui indique que la preffion de l’atmofphère fur la bouteille ouverte eft évidemment mefurée par la feule étendue de la coupe où épaifleur de fes parois verticales au niveau de l’eau , & que le reftant de la voûte de verre fupé- rieure & Le bouchon percé n'efluient ici de fa part aucune preflion qui devienne fenfble. L'étendue de la furface horifontale ou coupe d&fes parois verticales, elt de 33 lignes quarrées , tandis que l’étendue horifontale de l'aire de la bouteille clofe toute en prife à la preflion de l'armofphère eft de 346 =: lignes quarrées, comme il a été dit ci-devant. Or, ce rapport de 33 à 346 : eit bien différent de celui des réfiftances à la féparation qui eft de 163 grains à 42; & cela conftare que la preflion atmofphérique ne centribue pas feule à la rélftance oppofée à la féparation d’avec l'eau, & qu'une autre caufe doit y concourir , foit l’afänité, foit l'attraction, foie toutes les deux enfemble. Pour déterminer l'intenfité de l’action de cette caufe fecondaire dans les deux circonftances précédentes, il y avoit à confidérer que les forces, qui yont été employées, ont eu à vaincre la prefion de l’armofphère, qui dans ces deux circonftances de la bouteille clofe & de la boureille ouverte en-haut, eft dans la raifon de 346 + à 33, & en même-tems de plus V'action de l'affinité ou attraction , qui eft la même dans l’une que dans l'autre de ces circonftances, puifqu'elle s'y exerce également entre la tranche du contour inférieur de la même bouteille, & la maffe d’eau fur laquelle elle eft appliquée, ÿ 4 È Le rapport combiné de la preflion de l’atmofphère avec l’aétion de l'attraction ou affinité, doit néceffairement être égal aux rapports des contre- poids refpectifs 163 & 42 grains employés dans les deux circonftances de notre expérience; l'équilibre ayant eu lieu‘ alors dans toutes les deux, la moindre addition à l'un des contrepoids devoir détacher la bouteille d'avec la male d'eau. Or, il étoir facile, en faifant aux deux termes 346 2 & 33 (qui expriment le rapport des réfftances oppofées de la part de la prefion - atmofphérique ) des additions confécutives de petits nombres toujours égaux de part & d'autre, de parvenir à fe procurer un nouveau rapport Tome XXIX, Part, Il, 1786. OCTOBRE, Oo ra Re. 2 260 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, égal à celui de 163 à 42, qui a été celui des réliflances à la féparation de la bouteille d'avec la mafle d'eau; & en effer, par ce fimple procédé j'ai trouvé qu'en ajoutant le même nombre 7@aux deux rermes 346 ! & 33 du rapport des réfiflances de la part des preflions de l’armofphère , on avoir les deux rermes 422 = & 109 d'un rapport qui differe extrêmement peu de celui de 163 à 42 qui eft celui des réliftances à la féparation. Er Lu Er ? différence 22, ” 422:.X 42 — 17745 On peut fe rapprocher encore plus par la même voie d’une exactitude completre, j ; Ce nombre 76 eft l'éxpreffion de l’action de l’afinité ou attraction dans chacune des deux circonftances de l'épreuve qui vient d’être détaillée, comme ceux 163 & 42 font les expreflions des réfiftances oppolées à la féparation dans ces circonftances refpedtives, & ceux 346 : & 33 les expreffions des preffionside l'arnofphère auffi bien que des étendues des furfaces de la bouteille fucceflivement en prife à fa preflion, & enfin ceux 109 & 422: les expreflions des réfiflances complettes exercées de la part de l’ation combinée de la preMion de l'atmofphère conjointement avec l’action de l’affinité ou attraction. 1603: 42 :: 422 #00. L'afinité ou l’attradtion eft ici le fupplément à la preffion de Patmofphère pour former la réfiftance totale, & tout y eft diflingué & apprécié. La fuite au mois prochain. Faute effentielle à corriger dans un Mémoire fur L Adhéfion , Journ. de Phyfiq. Février 1782, Tome XIX. On trouve, au bas de la page 147, le commencement d’une note qui eft bien diftincte du rexte du Mémoire par le caractère des lettres employées pour la note qui eff gn caractère bien plus menu que celui employé pour le texte, Mais à la page fuivante 148, où fe trouve la fuire de la même note au- déflous du texte, on a employé égaleinent de gros caractères. & pour la note & pour le texte; en même-tems l’'Imprimeur a oublié de placer une barre nuire entre le texte & la note, comme à la Page 147, de manière qu'il eftimpoñfible au Lecteur de ne les confondre pis enfemble, Le rexte du Mémoire finit à la ligne 25 de cette page, par les mots : circonférence extérieure de la bouteille. Le reftant de la note, qui contient encore 14 ligues, commence par ces mots: & dans cet article-ci, &c. à JABL » ; Q # FA SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. apr Et Xe TRAIT DES REGISTRES DE L’ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES : Du $ Août 1786. M. BÉsILE, Prètre de l’Oraroire, ayant envoyé l’année pañlée à l'Académie la relation de la marche & des effets du tonnerre dans la Collégiale de Riom en Auvergne, fur laquelle il étoit tombé pendant un violent orage, la Compagnie nous nomma , M, l'Abbé Boflur & moi, pour l’examiner. Le 10 de Mai 178$ , dans l'après-midi, un ourazan effrayant, qui venoit du fud , parut au-deffus de la ville de Riom. Il étoir accompagné de coups de ronnerre-très-fréquéns, qui, répétés par les échos des environs, "produifoient ces roulemens que les provinces voifines appellent le zambour d'Auvergne : ce font des termes de la relation que nous avons voula conferver. Mais vérs les fix heures & demie du foir , on entezdir un coup beaucoup plus fort que les autres ; des perfonnes du voifinage aflurèrent toutes de la manière la plus pofitive qu’elles avôlenc vu la foudre fortir d'un nuage & s’élancer fur le coq du clocher. D'un autre côté, d’autres perlonnes qui étoient dans l'églife au même inftant, aflurèrent évalemenc avoir vu très-diftinétement l'explofon dergière de la foudre dans la nef, qui fe fit fans fracas , & comme celle d’une fufée qui finit de fe confumer. D fig. IT, planch. 1. Ces deux points extrêmes étant reconnus, l’objet effentiel de la relation eft de bien déterminer actuellement comment la matière fulmi- = nantea parcouru l'efpace intermédiaire, qui et de près de cinq cens pieds, & comment elle eft arrivée jufqu'au-delà du milieu de la nef. Comme il eft néceflaire, pour ÿ parvenir, de donner auparavant une idée de la conftruétion du clocher, fe. 11, planch. 1,( les traits bb marquent le pafage de la foudre ) qui eft en pierres, & de fes parties intérieures , ainfi que de celles de l'églife, M. Béfile a rempli cet objet par fa relation & par fes deflins. Voyez planch. I. Le coq, la croix, la boule, qui furmontent le clocher , font de métal ; ainfi la foudre étant tombée deflus, il ne peut y avoir de doute qu’elle les aura traverfés : mais la tige de fer qui tient à la boule étant maftiquée dans les pierres du clocher avec des fubftances d'ufage dans le pays, & qui ne tranfmettent pas facilement le fluide électrique ou la matière fulmi- nante, & les pierres étant de même mauvais conduéteurs de cette matière, il y a tout à croire , comme le dit l’Auteur , que trouvant-là un obftacle Tome XXIX , Par. Il, 1786. OCTOBRE, Co2 jt 292 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, h à fon pañlace , elle a fait une explofion & s’il jetée enfdehors. Cela eft d'autant plus vraifemblable, que les pierres du clocher ont été éclarées dans cet endroit, De-là ; elle s’eit répandueen l'air, en formant une forté - de zig-zag en defcendanr & fe reportant fur le clocher. Cette route réfulre de l'apparence qu'il a préfentée à l'inftanc de l’éclair; car il a paru à plufieurs perfonnes être tout en feu dans cette partie, Les pierres éclatées au-deffous, celles de l'angle ou face du clocher, qui eft oétogone, & qui ont été écornées , toujoursæn defcendant, annoncent aflez que la foudre a fuivi cette direction. [1 eft à remarquer qu’une de ces pierres éclatées, dont nous avons parlé , l’a été dans fa longueur , étant placée de champ, & que quoiqu'il y eût de l’autre côté dans le dedans du clocher un crampon de fer, il femble que la foudre n’a point fauté à ce crampon pour pafler dans l'intérieur, & a continué fa route en-dehors jufqu'aux environs de dix pieds au-deffous ; car elle y eft marquée par les pierres qui ont été écornées, comme nous l’avons dir. Paflé cet endroit, on ne trouve aucune marque ni impreflion de la foudre ; mais on y trouve deux pierres où le mortier manque , & qui font féparées par une diflance de, trois lignes. M. Béfile coniecture que c’eft par cet endroit que la foudre a pénétré dans l’intérieur du clocher. Ce qu'il fa de certain , c’eft que vingt-fix pieds plus bas , ou à-peu-près, & du même côté , il y a dans ce clocher une efpèce degcorniche ou d'avance , dont on a trouvé les pierres fautées & les débris fur le plancher au-deflous. Or, il réfulre de-là, felon l’Auteur, que la foudre a certainement defcendu de ce côté ; & ce qui paroît juftifier fa conjecture, c’eft que routes les pierres, qui dans cette partie forment le ciocher, foft retenues enfemble par des crampons de fer qui ne fe touchent pas, à la vérité, immédiatement, mais qui ne font pas aflez diflans pour n'avoir pas pu fervir de conducteurs jufqu’à la corniche dant les pierres font faurées. Mais arrivé-là, on ne trouve de ce point jufqu'au béfroi, qui eft à fbixante-dix pieds au-deffous ou à-peu- près, aucune trace ou veftige de la foudre, ni aucunes parties métalliques qui aient pu fervir à la tranfmettre. Cependant il eft conftant qu'elle eft entrée par le haut de ce béfroi, ce qui donne lieu de croire qu'elle aura paffé fucceflivement par les trapes qui fonr aux différens planchers , en filant le long des échelles , ou en defcendant & fautant diagonalemenc d'une de ces trapes à l’autre, les planchers n'étant endommagés en aucune façon. Cette route paroït d’autant plus certaine, que felon la potion refpe&ive des trapes, la foudre a dû pañler d’un côté du clocher « au côté oppofé; & c'eft précifément ce qui eft arrivé relativement à l'endroit par où elle eft entrée dans le béfroi. Nous venons de dire qu'il éroit conftant que la foudre éroir entrée par le haut du béfroi, c'eft ce qui fuit de la déclaration d'un jeune- homme qui par hafard s'y trouvoit dans ce moment-là. Il a afluré pofitivement qu'il l’avoit vue pafler par cer endroit , defcendre le long % A SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 294 ‘d'une des cloches & enfuite faire un zig-z29 , après lequel il l'avoir perdue ‘de vue. Il eft difcile de fe perfuader qu'il l'ait vue defcendre LU de ‘cette cloche, les métaux tranfimerrant immédiatement, fur-rout and ils ont un pareil volume, la matière éleétrique où fulminante. Mais l'inflane de fon entrée dans cette cloche & celui de fa fortié auronc été fi près l’un de l’autre, qu’il aura cru voir la foudre pañler le long de la cloche, Quoi quil en foit, il femble que lorfqu'elle difparut aux yeux de ce jeune- homme , elle fe jeta fur une corde, qui étoit alors mouillée à caufe de la pluie qui fouetoit par les hautes fenêtres de certe partie du clocher, Cette çorde defcendoit dans un endroit fitüé au-deffous appclé la grorte, où il y avoit deux hommes, Ce qu'il y a de sûr, c'eft que la foudre fie éclater un carreau qui fe trouvoir immédiatement au-deffous à une diftance de dix-huit lignes, & que de‘là s’érant jeté fur le talon gauche d'un des hommes a, dont on vient dé parler, & qui dans ce moment-là éroit'accoudé fur appui d’une fenêtre donnant dans le chœur de l’églife, & laquelle il regardoir , elle a pallé tout au travers de fon corps, & et ie par farère & l’a tué roide, Les marques qu’elle a laiffées fur le corps de cet homme font erès-fingulières ; mais pour ne pas interrompre la defcription de la route qu’elle a fuivie, nous mettrons à en parler après. : è La foudre étant fortie par fa têre au coin de l'oreille gauche, pafla de-là dans le chœur , alla endommager la corniche de l’entablement des colonnes , fe jeta fur une baluttrade en fer, & pafla de-là à celle du chœur. M. Béfile remarque encore que dans cette route de la foudre , on ne trouve point de parties métalliques, ou propres à attirer & tranfmettre Ja matière fulminante ; mais fouvent il fufhr de la plus petite parcelle de métal, ou de fubftance électrifable par communication, pour déterminer fa direction. On en voit la preuve dans la fuite de la route de la fouüre ; car étant fortie de la porte de la baluftrade du chœur qui étoir ouverte, elle fe répandit dans la nef & traça différens contours en füivant des gouttes d'eau difléminées fur le pavé de l'églife, & donton l’avoit arrofé quelque tems auparavant. Enfin , elle fe difipæ, comme nous l'avons dir au commencement de ce rapport, d'après des témoins oculaires, fans faire aucun fracas & d’autre effer que celui d’une explofon de fufée qui finit f. Cettemanière dont ellearerminé fes effecs eft vraiment remarquable : dans la grore elle avoit encore aflez de force pour faire éclater un carreau, our foudroyer un homme & le tuer fur le champ. Cependant dans le trajer de-là jufqu'en-bas dans la nef, elle la perd tellement qu'elle fe diffipe en uelque façon fans aucune explofon , aumoins fans une explofion con- fidérable. Cetre obfervation paroît avoir beaucoup de rapports avec d’autres cùÿlfemble que la foudre eut perdu toute fa force , & fi on avoie eillir, on acquerroit des connoïflances fut la marche de , dont nous ayous grand befoin pour expliquer nombre de ce météore d'o 294 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, phénomènes dont nous ne favons pas encore rendre railon. Mais il. faur revenirgaux marqués fingulières qu'elle a faites fur le corps de l’homme foudr ans la grorte : on Les voit dans la planche 11, qui en donne une idé® affez impartaice. Elles fonc véritablement, on ne peut pas plus extraordinaires. [l paroît que dans fon paflage ayant forcé le fang dans tous les vaifleaux de la peau , elle a rendu fenfible au- dehors toutes les ramifications de ces vaifleaux: tout extraordinaire que ce fait paroifle , il n’eft pas nouveau. Le P. Beccaria en rapporte un du même genre. M. Franklin a plufieurs fois répété à l’un de nous, M. Leroy, qu'un homme, il y a environ quarante ans, fe tenant fur le pas d’une porte dans un orage, vit la foudre tomber fur un arbre vis-à-vis de lui, & que par une efpèce de prodiye , on vit enfuite la contre-épreuve de cet arbre fur la poitrine de cet homme. M, Franklia ajoutoit que cela #oic fait grand bruit dans le rems en Amérique. M. Béfile ne balance pas, avec jufte raifon , à attribuer cet effet à la caufe à laquelle nous l'avons rapporté, d'après lui, c’eft-à-dire, à l'irruption du fang dans les vx de la peau, & qui dans cet inftant forme un effet tout femblable ätelui d'une injection. Aux endroits où la foudreeft entrés au talon & eft fortie par l'oreille, on voyoit quelques petits boutons affez femblables à ceux d'un éréfipèle. M. Béfile obferve judicieufement que la foudre étant tombée cing fois fur ce clocher’ dans l'intervalle de quatre-vingts ans, ce feroit le cas de Parmer d'un paratonnerre. Ce parti nous paroît conforme aux connoif- fances acquifes dans ce fiètle, & nous croyons qu'il feroit très-intéreflant de fuivre fes vues à cet évard. Il réfulre de tout ce que nous venons d'expofer, que la relation de M. Béfile, de la marche de la foudre dans l'églife collégiale de Riom, eft très-intéreffante & très-curieule, & que Te faic particulier de l'homme qu’elle tua dans fon paflage elt vraiment remarquable, & nous croyons en conféquence qu’elle mérite d'être imprimée dans le Recueil des Savans Etrangers, en faifant graver en même-tems les deflins qui fervent à donner l'intelligence de la route que la matière fulminante a fuivie dans ce coup de ronnerre (1). Fait dans l’Académie des Sciences, ce $ août 1786. Signé, Bossur & Leroy. Je certifie le préfent extrait conforme à fon original & au jugement de l Académie. À Paris, ce 16 août 1786. Signé, le Marquis DE CONDORCET. a f (1) Nous ne faifons graver ici que deux Planches , mais il s’en e fix dans la relation de M, Béfile, L | - SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 293 SECONDE SUITE DES RECHERCHES SUR L’ALKALI MINÉRAL NATIF; Par M. LoRGNA: PA Traduites par M. CHaAmpy (1) "XXXIIL De la lumiere noéturne de la Mer. Qx croyoit précédemment que la (aveur amère & dégoûftante de l’eau de mer éroic néceflairément due à 14 grande quanrité de bitumefielle contenoit & qu'on regardoit comme en étant inféparable; pourquoi donc les analyfes de cette eau ci-devant rapportées ne préfentent-elles aucuns fignes de cette fubitance ? L’examensparticulier qu'ena fait l'illuftre Mac- quer, ne lui er a offert aucun indice, L'eau même du lac falé afphalti- que ou mer morte, quoiqu’elle dût être plus bitumineufe qu'aucune autre, n’a donné aucune trace dé birume à MM. Lavoilier, Sage & Macquer qui: en ont fait l’analyfe. Il n’eft pas douteux qu'indépendam- ment du vicriol de foude & du vitriol de magnéfe que la mer peut recevoir des terres qui l’environnent , quand même fes eaux ne contien- droient que les fels natifs qui leur font propres, elles feroient toujours _ défagréablement amères : le muriate de magnélie qui s'y trouve étane très-amer par fa nature, fuffroit pour leur communiquer cette faveur , fans qu'il fût néceflaire de recourir à aucun principe bitumineux ; mais outre fon amertume, l’eau de la mer a une faveur nauféabonde & mucide, qui jointe à fa couleur nébuieufe & à une certaine onctuofité qui l'accompagne, a peut-être donné lieu de lui attribuer un caractère bitu- mineux. Il eft facile de juger que certe faveur vient des matières extraétives des animaux qui y périflent continuellement, auxquelles il me femble qu'on doit aufli attribuer les apparences dont nous venons de parler. En effer, fi on fait difloudre tous les fels obrenus par une analyfe exacte , de cent livres d'eau-de mer, dans cent livres d’eau diftiflée, cette eau pro- duite par la fynchèfe, n'aura jamais la faveur, la couleur & lon&uofré qu'avoit la première. En confidérant que ces caractères fonc inféparables (1) Voyez le cahier de juillet, page 30 , le cahier de feptembre , page 161, 296 OBSERLATIONS SUR LA PHYSIQUE, de l'eau de la mer, qu'ils ne différent que du plus au moins, & ne font pas particuliers à fa furface, on en tire cette première conféquence, que ces matières atimales font néceflairement répandues dans toute la mafle de fes eaux, & ne fe trouvent pas feulement à la fuperficie. Mais comment sy font-elles difféminées? Comment font-elles devenues mifcibles & diflolubles dans l’eau. Certe queftion fuifamment difeutée & bien réfolue , doit nous ouvrir le chemin pour découvrir les caufes de plufieurs phénomènes très - importans 3 jetm'y préparerai par une expérience "appropriée. Au mois de mat 1784, ayant fait piler une certaine quantité d'animaux teftacés fraîchement tirés de leurs coquilles, j'en laiflai une partie fe putréfier à l'air libre, pour une obfervation dont je parlerai en fon lieu, "& je mis l’autre dans un grand vafe de verre aves de l'eau douce que je remplacai à mefure qu'elle s'évaporoir. Après quelque tems, il fe forma fur cette dernière üne croûre blanche à la fuperficie, dont peu après il fortit une grande quantité de vers ; ils difparurent enfuite, & peu-à-peu la matière fe précipita au fond. La refta toujours jaunâtre & mucilagi- neufel& quand apiès avoir remis de l’eau pour remplacer celle évaporée, j'agitois la matière , la fubitance gélatineufe fe diflolvoit, & toute l’eau du vafe en reftoic conftamiment chargée. Onze mois après, je décantai dans un verre le poids d’une dragme*de cet extrait, & l'ayant étendu de deux livres d’eau diftillée , j'y fs diffoudre une once de fel commun brut, & tel qu'il provient de l’évaporation de l’eau de la mer dans les falines d'Iftrie. Je couvris le vafe & laïffai ce mêlange en repos pendant fix jours, après lefquels je décantai la liqueur avec foin , & l'ayant filtrée deux fois, je la mis dans-une caraffe où je la confervai jufqu'au mois de feptembre 1785 , fans qu'il sy fit aucun précipité. Sa couleur fombre , fa faveur falée, amère & nauféabonde rapprochoient tellement cetre eau de mer artificielle de celle de Venife que je m'étois procurée, qu'on ne pouvoit les diftinguer l’une dé l’autre. Dans Je même tems je fis diffoudre dans deux livres d’eau diflillée une once de ce fel commun d’Iftrie, ce qui excède un peu Ja quantité contenue dans deux Livres d’eau de mer natu- relle, & je filcraida diffolurion. Cette eau falée artificielle n’avoit ni - Fapparence, ni le goûr de l’eau de mer, ni de celle dont je viens de parler, qui, outre la même dofe de fel, ne contenoit qu'une petire quantité d'extrait animal. On eft donc fondé à croire que les parties grafles & huileufes des animaux qui périflent tous les jours dans la mer, fe com- binent par Fagitation continuelle de fes eaux avec les fels qui lui fone propres & ceux qui y font difléminés. Ce compofé , conime le démontre l'expérience, devient nuifble à l'eau en prenant un caractère favoneux, d'autant mieux décidé & plus foluble, que l’agitation des matières falines & animales a été plus longue & leur mélange plus intime. Les fels effentiels des animaux femblent déjà difpofés par eux-mêmes à fe combiner SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 297 combiner avec l’eau, dans leur état naturel; des parties huileufes intimement unies à des parties fälines , entrent, pour ainfi dire, néceflai- rement dans leur compofition ; de manière qu'on peut les regarder comme des fayons natifs naturellement folubles dans l’eau de la mer fans aucune agitation étranoère. J'employai à une autre expérience la matière animale qui me reftoit, & que j’avois confervée dans un vafe de verre; jy verfai de l'eau diftillée, & pendant plufieurs jours , j'agitai & je mélai cinq à fix fois par jour la liqueur & la fubftance gélatineufe. Cette agitation long- tems continuée, combina la matière grafle avec les fels, de manière que j'obtins une nouvelle liqueur favoneufe propre à faire une eau de mer artificielle. Je fus par-là pleinement convaincu que la mer par fon mouvement continuel , où même par fon flux & reflux périodique, indé- pendamment d’une agitation plus violente , fe chargeoït d'une fuffifante quantité de la fubftance gélatineufe des animaux qui y périflent , de manière qu'elle devient foluble & mifcible à l’eau dans l'écat favoneux. XXXI V. Mais pour m'éclairer de plus en plus fur cette caufe de la diffolution des parties grafles des animaux dans la mafle de l’eau de la mer, je fis cette nouvelle expérience: me trouvant à Venife, je pris un peu d'eau de mer dans un de fes canaux que je fis évaporer fur le feu, dans un pot vernis, jufqu’à ce qu’elle füt réduite au quart ; enfuite j'y fis difloudre peu-à-peu de l'alkali minéral précédemment rendu cauftique par un peu de chaux ; j’agitai ce mélange continuellement avec une fpatule, jufqu’à ce que la plus grande partie de l’eau fût évaporée, & qu'il eût pris la confiftance d’un baume de couleur brune. Je reconnus facilement & avec grand plaifir, que ce compofé étoit onctueux , favoneux & parfaj- tement foluble dans l'eau; il n’auroit pas eu ces propriétés, fi l’eau de mer n’avoit pas tenu en diflolution une matière huileufe à laquelle l'alkali s'éroit uni, & cette matière par fa nature n'auroit pu devenir mifcible à l’eau , fi précédemment par fon union avec quelques fels, elle n’avoit pris au moins imparfaitement un caractère favoneux. Je conviens qu’il eft difficile que la mer en général tienne en diflolution autant de matières animales que l’eau des canaux de Venife, ville grande & très-peuplée ; mais cela ne varie que du plus au moins, le réfultat eft le même, & ne peut être révoqué en doute. Voilà donc encore une preuve certaine , qu'après la décompofition journalière & perpétuelle des animaux marins, il refte un compofé animal néceflairement favoneux , qui , diflous dans l'eau de mer , la diftingue d’une eau fimple qui ne contiendroit que des {els neutres ou moyens, = XXX V. ” Cela étant aïnf , il n’eft plus fi difficile d’indiquer l’origine & la raifon Tome XXIX, Part, Il, 1786 OCTOBRE, Pp 298 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, de l’inflammation naturelle de la mer, l’un des phénomènes les plus admirables de la nature. Les Phyfciens ne fonc point d'accord fur la caufe ; les uns, l’attribuent à une matière phofphorique répandue dans la mer; d’autres, à la matière éledrique, & le plus grand nombre à des animalcules phofphoriques. L'importance de cette matière fembleroic exiger une difcuflion approfondie des opinions de ces favans refpectables à tous égards; mais j'expoferai tout de fuite ce que je penfe, d’après mes expériences ci-devant décrites ; je me laïifferai guider par l'obfervation & la raifon, perfuadé que la peine qu'on prend à détruire eft mieux employée à bâtir de nouveau fur des fondemens folides. L'impatience des hommes les porte à rechercher la caufe de plufieurs phénomènes de la nature qui ne font pas encore bien connus; avant que les circonftances de cette phofphorefcence de la mer euffent été examinées , avant que fon intenfité & fes caractères dans divers lieux , à fa furface, à différentes profondeurs, fuffent connus, la plupart avoient adopté le fyftéme des petits animaux marins phofphoriques. En effet, après avoir été décou- verts; la première fois que je fache, dans les lagunes de Venife par M. Wianelli, qui les obferva avec foin , ils ont été retrouvés par d’autres & dans d’autres mers, comme on peut le voir dans Ja Relation du fecond voyage de M. Forfler avec M. Cook ; plufeurs efpèces inconnues ont été dernièrement découvertes dans la mer de Gênes par l’ingénieux Natura- lifte M. Spallanzani (1), de manière qu’on ne peut plus douter de leur exiftence , ni de leur propriété phofphorique. Mais cette lumière phofpho- rique n'eft pas la feule qu'on remarque fur la mer, & ne doit pas être confondue avec certe lumière vive & fcintillante qu’elle tranfmet très- fouvent pendant la nuit en diverfes circonftances ; plufieurs Auteurs en ont donné récemment des defcriptions exactes, entre lefquelles eft la favante obfervation faire en 1781, par M. le Comte de Razoumowski fur la phofphorefcence de la mer Baltique (2). M. Canton, obfervateur Anglois, ayant mis quelques poiffons dans l'eau de mer, oblerva que lorfqu'ils commencèrent à fe corrompre , la furface de l'eau prit une certaine lueur qu’elle n'avoit pas auparavant. En s'appuyant fur cette obfervation & fur la propriété qu'ont plufieurs fubitances organifées de devenir phofphoriques par la putréfation, il n'héfita pas d'attribuer la lumière phofphorique de la mer à celle qui s’y introduit par la décompofition du nombre prodigieux d'animaux qui y périflent, Cette opinion étant différente des autres, ainfi que ceile de M. Forfter, qui, dans certain cas , attribue la phofphorefcence de la mer mt (7) Mém. de la Société Italienne, tom. II, part. 2, Joyez Journ. de Phyfqe tome XXVIII, page 188. (2) Journ, de Phyfiq. tome XXIV , page 56. LÉ SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 299 * , à à Pr Eux 5 É à l'acide phofphorique des mêmes animaux putréfiés , j'ai cru devoir faire une mention particulière de l’une & de l’autre, pour qu'elles ne fuffent pas confondues avec celles que j'expoferai ci-après. Il eft certain que dans le commencement, les animaux qui périffent dans la mer, fe gonflent & s'élèvent à fa furface, c'eft le moment de leur phofphorefcence; on a obfervé depuis long-tems, que les autres fubftances éprouvoienr le même effet dans les premiers mouvemens d’une fermentation qui s'y excire & précède le dernier degré de la putréfaction; qu'après cela leurs parties fe ramollifloient & perdant peu-à-peu leur cohé- fion fe défunifloient enfin. La phofphorefcence de la mer dans cette circonftance , attribuée par M. Canton à la lumière que répandent fes animaux , n’a donc lieu qu’à la furface & dépend du premier degré de la fermentation putride qui peut sy opérer. Cela bien entendu, on conviendra dans l'hypothèfe même de M, Canton, que la fubftance animale entièrement difloute fe répand dans toute la mafle des eaux de la mer, depuis fa fuperficie jufques au fond, ce qui fuppofe que cesanimaux entrent dans de nouvelles combinaifons pour devenir folubles dans l’eau, comme il eft bien connu à tous Phyficiens. XXX VI. Cette phofphorefcence ayant différens degrés, la lumière que la mer préfente en diverfes circonftances étant de nature différente & accom- pagnée de divers caractères , je crois qu'on peut diftinguer effentielle- ment les unes des autres ces diverfes lueures phofphoriques, qui pen- dant la nuit paroiflent fur la mer. C’eft pourquoi diverfes caufes phof- phorefcentes , celles des animalcules, celle de M. Canton & autres femblables , peuvent avoir lieu en différens cas, & les faits ne per- mettent pas de leur donner la même origine. Il fe peut auffi qu'elles foienc dues à une grande quantité de molufques ou d’autres productions marines , qui quelquefois couvrent tout-d’un-coup la mer d'une fubftance mucilagineufe pleine d'êtres vivans; il en eft fair mention dans le troi- fième voyage de Cook fur la mer pacifique (1), ainfi que dans le fecond voyage de M. Forfter ci-devant cité. Mais il faut bien diftin- guer, comme l'obferve le même M. Forfter , la lueur de la mer tranquille , des efpèces de flammes qu'elle donne lorfqu'elle eft agitée par de vio- lentes fecoufles ; celle-ci ne paroït pas avoir la même origine que Pautre. Pour ne les pas confondre , il eft effentiel d’obferver dans quel efpace & à quelle profondeur de la mer s’érendent ces dernières, & quelle intenfiré de lumière elles tranfmerttent., Il faut fur-tout s'ap- pliquer à failir diftinétement le phénomène qui les accompagne & QG) Tome V, liv. 3 , chap. 13 de l’édit. françoife. Tome XXIX, Part. II, 1786. OCTOBRE. Pp 2 300 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, "A qui montre une matière inhérente, non à la feule furface de la mer … ou peu au-deflous, mais à toute fa malle, qui brufquement & forte- ment frappée repand au - dehors, non une foible lumière, mais une efpèce de flamme ou efprit de feu mis en liberté. Cette inflammation fe manifefte particulièrement de nuit dans les grandes ondulations de la mer, quand les flots fe brifent, plus fouvent encore fes lames s’enflam- ment & jettent du feu en fe choquant pour remplir le vuide des fillons profonds que forment les vaiffeaux dans leur courfe. Quelquefois dans les grandes tempêtes on voit les Aots former par leur choc comme des ruifleaux de feu, & l’écume qui eft alors très-abondante,. paroît tota- lement enflammée. M. Spallanzani en parlant de cette inflammation , la regarde comme une propriété inféparable de l'eau de la mer. Nous verrons ci-après que cette idée approche de la vérité ; mais j'avoue que je n'ai encore que des conjédures fur l’origine d’un f grand phénomè- ne. Je delirs'que les expériences qu'il fe propofe, confirment ce que j'a vance ici fur cet objet, ce , XXXVII Cependant laïffant à part les phofphorefcences accidentelles & parti culières qui dépendent tantôt d'un amas de petits ahimaux nodtiluques, tantôt des molufques ou d’autres caufes adoptées par les Phyficiens, nous nous occuperons particulièrement de celle qui eft due à un prin- cipe plus caché. On ne peut nier que généralement tout ce qui vit dans la mer y périt & s’y décompofe. La quantité d'êtres organifés qui s’y produifent, & fe détruifent, & fe reproduifent pour périr de nouveau ar une fuite de cette circulation continuelle que nous admirons dans Le autres clafles des végétaux & des animaux de notre globe , dépofe en mourant dans l’océan & lui reftitue dans un état de divifon, une partie des principes de leur organifation ; l’autre partie en reçoit une nouvelle qui les rend à la vie. Un autre fait qu’on ne peut nier, c'eft que l'océan eft un vafte dépôt de principes femblables, les uns en activité combinés dans l’organifation des êtres vivans, les autres oififs, tels qu'on les reconnoît fur la terre & dans l’atmofphère qui nous environne, pour peu qu'on y réflechifle. Et en effer, les expérien- ces que nous avons rapportées aux S$, 33 & 34, en démontrant avec évidence que les principes gélatineux des animaux deviennent avec le tems dans l'eau un compofé favoneux , découvrent clairement le caracière que prennent ces principes, que nous avons dit être oiffs dans l'océan, & qui cependant ne le font pas, comme nous le verrons. Des parties conftituantes des animaux marins fe trouvant défunies, celles purement terreufes, qui ne font combinées avec aucun autre principe, fe précipitent néceflairement au fond; les autres, falines ou huileufes, fe diflolvent de nouveau dans l'eau de la mer, & s'y maintiennent , C2 SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 301 non par une voie purement mécanique, mais bien par l’intermède des principes falins qui les rendent mifcibles à l’eau. C'eft ainfi que les huiles qui ne font pas proprement combinées avec d’autres principes animaux fous forme de graifle, que ceux qui généralement font enve- loppés dans les fubftances gélatineufes, ainfi que beaucoup d’autres, trouvant de rous côtés des principes falins qui ont aétion fur eux, fe combinent tôt ou tard avec eux, forment des compofés favoneux & deviennent par ce moyen parfaitement folubles dans l’eau. En ad- mettant, comme on ne peut s'en difpenfer, que ces fubitances favo- neufes fe forment néceffairement dans la mer, après la deftruction des corps organifés qui y périflent & s’y décompofent tous les jours, nous concevrons facilement là production de cette écume fi abondante dans la mer agitée, & l’origine de certe faveur défagréable & nauféabonde qui l'accompagne, non-feulement à {a fuperfcie , mais dans toute la mafle de fes eaux. Tout cela difparoît dans les analyfes dont les produits n'offrent que des fels ; cependant il n’eft pas moins vrai que ce carac- tère favoneux eft une propriéte diftinctive de l'eau de la mer; de-là vient cetre apparence birumineufe que leur amertume fait attribuër à ces eaux. Que font les bitumes? des compofés d’une fubftance huileu- fes & d’une matière faline. Leur propriété caraétériftique eft de com- mencer par une matière favoneufe, qui avec le tems devient bitume. Ainfi ces bitumes ne font , à mon avis, que desfavons vieillis; ce prin- cipe, ce germe, fi on peut ainfi l'appeler , exifte dans toutes les eaux de la mer où vivent les animaux, éprouvent par la fuite des tems une certaine préparation bitumineufe qui n’eft encore qu'ébauchée ; aufli je ne fuis pas éloigné de croire, qu'une grande partie des bitumes fofli- lesgire particulièrement fon origine des dépôts des fubftances organi- ques faits par la mer & qui à la longue font devenus bitumeux. On pourroit même le prouver par plufieurs faits, fi cela ne nous écartoit pas de notre fujet ( 1). XXXVIII. Mais , fi comme on n’en peut douter, cette fubftance favoneufe des animaux doit être inconteftablement inhérente dans toute la mafle des eaux de la mer; fi une fi grande partie des êtres vivans dans l'océan, fe réfour & finit par augmenter vous les jours la matière en diflolution , comment , après tant de fiècles, & la décompofition d’une quantité fi immenfe d'animaux qui y font péris néceffairement, ne selt-il point encore faturéê comment eft-il encore fi loin de l'être ? cette queftion (1) La préfence bien démontrée de l’alkali volatil dans le charbon de pierre, a déjà fait adopter cette opinion à plufeurs Naturalifles. More du Traduéleur, \ 302 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, qu'on peut faire avec raifon , feroit difficile à réfoudre fi on n’avoit pas recours à cette économie admirable avec laquelle la nature pour- voit à la fubfiftance de tous les êtres qui ont befoin d’une nourriture & d'un aliment continuels, Cependant, occupons-nous à confidérer atten- tivement ce qui fe pafle fous nos yeux. En même-tems que tant d’a- nimaux & de végétaux, périflent & fe détruifent fur la terre que nous habitons, d’autres êtres renaiflent, fe nourriflent & rentreñt dans le cercle de la vie. Les dépouilles, les principes défunis de ceux qui font détruits forment les enveloppes, les principes agrégés & conftitutifs des êtres vivans ; cette circulation admirable difoenfe de nouvelles créations , & emploie fous différentes formes à la confervation des êtres, la quantité déterminée de matière qui conftitue le fyftème terreftre, Tel eft l’art caché qui maintient un certain équilibre dans l’océan , en employant les êtres détruits, pour a nourriture & l’accroiffement de ceux qui renaiflent ; de manière que leur fubftance n'eft point oifive , ne peut s'accroître à un certain point , & rentre fucceflivement dans le cercle de celles qui font employées & néceflaires à la conftirution vitale des autres êtres. Ainfi la queftion fe trouve réfolue, & on peut comprendre pourquoi la mer eft fi loin d’être faturée par les dépouilles de fes habitans détruits, & comment les fubftances huileufes combinées qu'elle tient en diflolution ne s'y trouvent pas avec excès. XXXIX. Nous fommes parvenus au point de pouvoir découvrir d'une manière qui me paroît très-claire les caufes de l’inflammation de la mer dans certaines circonftances. Dès que nous fommes convaincus par la raïfon & par les faits de la préfence de ces fubftances difloutes , répandues & inhérentes dans toute la mafle des eaux de la mer, dès que nous ne pouvons douter qu'elles contiennent un feu très-abondant & qui leur eft propre & naturel , la lumière que répand la mer violemment agitée, provient néceflairement de ce feu combiné mis en ation & en liberté. C'eft pourquoi il fe manifefte d'autant plus vivement, que les parties huileufes où il réfide font plus fortement battues & qu'elles éprouvent un plus grand frottement ; alors la mafle des eaux éprouve fans-doute un mouvement inteltin réfultant des ofcillations & vibrations de toutes fes parties, & d'autant plus fort que la percuflion a été plus vive. Elle eft néceffairemerit fuivie d’une chaleur qui doit avoir lieu dans l'eau comme dans tout autre corps folide dans les mêmes circonftances. En effer As M. Phips trouva que le mercure d'un thermomètre qui peu auparavant dans la mer tranquille étoit à fo degrés, monta à 62 degrés lorfqu’elle fut agitée & orageufe. Au refte , il n’étoit pas befoin de vérifier ce qui chaque jour eft pleinement confirmé par les faits en raifon de l'inrenfité de cette chaleur, de la dilatation fucceflive de certe fubftance favoneufe SUR L'HIST, NATURELLE ET LES ARTS. 303 inhérente à l'eau de mer ; le feu qu'elle renferme s'échappe , rompt fes liens, devient plus ou moins libre, plus ou moins actif, & fe manifefte au-dehors de l'eau. L'air vital que lui fournit l'eau même , celui qui fait partie de l’atmofphère qui l'environne, font enlevés & mis en action dans le moment de l'éclair par le principe inflammable des corps qui le contiennent. Que les Phyficiens attribuent ou non la lumière de toutes les fubftances phofphoriques à la combuflion lente & aufli foible qu'on voudra d'une certaine quantité du phlogiftique qui y eft contenu , la lumière de la mer ne doit pas moins être diflinguée de celle des corps phofphoriques où le principe inflammable peut être étranger. Ainfi les fubftances auxquelles nous attribuons le feu qui fe manifefte fur la mer, fonc des matières réellement combuftibles & inflammables, où la matière du feu entre comme principe conftituant ; de-la vient qu'étant porté , comme nous l’avons dit, par la percuflion à un depré de chaleur qui va jufqu'à l’incandefcence , elles produifent tous les phénomènes du feu en action , comme font les fubftances combuftibles. Nous voyons fe vérifier ici ce qui arrive de toutes parts aux fubftances végétales & animales décompofées, dans les débris defquelles le feu refte caché; mis enfuite en liberté , il brille en s'échappant de différentes manières , des fumiers , des cimetières, des cloaques , & une légère agitation fufhit pour le dégager fous forme de gaz inflammable des marais, des foflés, des eaux ftagnantes, comme la fi bien reconnu & rapporté le célèbre Alexandre Volta. Le feu qui fort de la mer eft de même nature, provient des mêmes caufes, & a la même origine que celui des fubftances organiques décompofées, inhérentes, & répandues par-tout, & princi- palement de celles qui le cachent fous un état huileux: De cetre manière, cette qualité propre à la mer qui la rend lumineufe pendant la nuit, différente de celle qu’elle doit aux autres caufes accidentelles rapportées par les Phyficiens, ne s'étend pas feulement à fa furface , mais dans toute fa profondeur , & eft inféparable de fes eaux. On doir entendre comment & dans quel {ens, une telle lumière fe nomme phofphorique , attendu qu'elle provient de la vraie combuftion d’une certaine quantité de phlo- giftique contenu dans, les matières organiques, La quantité.des matières diffoutes dépendant de celle des corps organifés qui fe décompofent , doit être plus grande dans quelques parties de la:mer que dans d’autres, fuivanc qu'elle eft plus ou moins peuplée de ces êtres; ainfi la quantité de feu propre à fe mettre en liberté, doit être plus abondante dans certaines parties de l'océan. Mais fon ation, & par conféquent l'inflammation de la mer dépendra aufli, à quantité égale , du degré convenable d’atté- nuation de la matière , de la vibration ou ofcillation plus ou moins forte qui lui fera imprimée par la percuflion ; ainfi la fenfation plus ou moins forte qu’en diverfes circonftances elle fait fous nos yeux , dépend 403 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; des faifons, de la température , de l'humidité ou de la féchereffe de l’atmofphère , des vents qui foufflent, & d'autres pareilles circonftances accidentelles, Telles font les caufes des variations auxquelles ce beau phénomène eft aflujetti; de-là vient que dans quelques occafions iln’eft pas fenfible, & que dans beaucoup d’autres ilfe montre dans de grands efpaces, que fon intenfité varie dans différentes mers & dans divers lieux de la même mer. Je ne dois pas omettre une confidération qui me paroît importante , c’eft que pour que ces inflammations aient lieu, il eft indifpenfable que ces fubflances organiques difloutes dans l’eau de mer, qui contiennent le principe inflammable , foient parvenues au dernier degré de putréfaction, de manière que comme celles des marais & autres amas putréfiés , elles foient difpofées à donner iflue à un gaz inflammable & au feu libre , après l'incandefcence caufée par la collifion & l'agitation plus vive (1): cetre condition eft tellement néceffaire, que fans elle le concours de toutes les autres circonftances favorables à la production d’un tel phénomène deviendroit inutile ; c'eft ce qui arrive tous les jours dans les expériences qui fe font fur les matières animales & végérales, qui ne produifent de gaz inflammable qu’autant qu’elles ont été décompofées, ou par la nature, ou par le fecours de quelqu'inrermède étranger. (1) Il fera toujours très-difficile de concevoir que ce gaz inflammable puifle s’allumer par l’agitation , quelle qu’elle foit , d’un fluide ; on connoit préfentement une fubftance , qui par la propriété de s’enflammer fpontanément dès qu’elle eit en contaët avec l'air , pourroit fuppléer ce qui manque à cette explication : c’eft le gaz phofphorique qui a été démontré cette année au cours public de l’Acatémie de Dijon, d’après les expériences de M. Gengembre. L’alkali volatil qui fe dégage fi abondamment pendant la putréfa@tion des animaux marins , fourniroit naturellement la bafe néceflaire à la production de ce gaz, c’eft-à-dire , d’un hépar phofphorique ammoniacal , aériforme. Il eft encore très-probable que les feux légers des cimetières m'ont pas d’autre origine. Note du Traduéteur (1), . (1) J’ai déjà eu la même idée. Woyez ma note à la fuice du Mémoire de M. Gengembre, Jourtw de Phyfique , 1785, cahier d’oétobre , page 281. Note de M. de la Metherie. ( La quatrième & dernière partie pour le Journal prochain, Ro CS LETTRE SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 3o$ LETTRE DE M..-H.AS S-E.N.-F R.AT.Z, Sous-Infpeëeur des Mines de France, Profeffeur de Phyfique de l'Ecole Royale des Mines, OMS D'E* EL A?-M°EST HE R'I'E; SUR LA CALCINATION DES MÉTAUX DANS L'AIR PUR, ET LA DÉCOMPOSITION DE L'EAU, Monsieur: Ce n’eft pas pour reprendre la difcuflion fur la décompoftion & recompofition de l’eau , que jai l'honneur de vous écrire. Je crois cette ee trop bien terminée par les Savans qui l'ont traitée , pour qu’il oic néceflaire d'y revenir. Certe Lettre a pour object quelques expériences que j'ai eu l'honneur de lire à l'Académie Royale des Sciences dans les mois de juin ou juillet de 1785 : expériences qui paroiffent contredire un fait que vous avancez dans votre réponfe à la Lettre de M. Bertholler. Le fer, dites-vous , expofé à L'air pur n’eft point attaqué, Voici mes expériences : j'ai fufpendu des lames de zinc, de fer, de cuivre, de lomb, &c. dans des vafes pleins d'air déphlogiftiqué bien pur. J’ai bouché Bien hermétiquement ces vafes, & je les ai abandonnés dans un coin de mon laboratoire , afin qu’ils y fubiflent toutes les variations de tempéra - ture. Au bout d’un aflez long tems , rems dont je n’ai pas renu compte , les furfaces de mes lames métalliques avoient perdu leur éclat, elles s'éroient calcinées, Ce que ces expériences préfentent de particulier, c’eft qu’au lieu de fuivre les loix d’affinité de calcination indiquées par Bergmann, zinc, manganèfe, fer, plomb, étain, cuivre, mercure, argent, &c, j'ai remarqué que l'air déphlogiftiqué feul calcinoit plus ou moins vite les métaux dans l'ordre qui fuit: zinc, fer, cuivre, plomb , mercure, étain, argent, &c. Ces différences viennent de ce que l'air déphlogiftiqué agit feul dans ces expériences, au lieu que dans celles de Bergmann , les précipitations métalliques , le précipirant a deux affinités à détruire, celle de l'air déphlogiftiqué , & celle du diflolvant. Dans les expériences que M. le Préfident de Saron , & plufieurs autres Membres de l’Académie, ont faites pour reconnoître l’effet de l'érincelle éle&trique fur l'air fixe, on a eu plufeurs fois occafon de laïfler des Tome XXIX , Part, II, 1786. OCTOBRE. Q q 306 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE ; excitateurs de fer dans de l’air déphlogiftiqué, & on a toujours obfervé que le fer fe calcinoit d’une manière très-fenfible ; l'air déphlogiftiqué étoit diminué , & il y avoit une quantité notable de chaux de fer roduite. J'ai l'honneur d’être, &c. REP P'ONN SE A LA LETTRE PRÉCÉDENTE DE M. HASSENFRATZ ; Par M. DE LA METHERIE. Moxsreur, : L'air que vous avez employé dans vos expériences, certainement n’étoit poine pur. C’eft ce qu’une fimple réflexion vous prouvera facilement. L'air atmofphérique contient une aflez grande quantité d'air pur. Or, vous favez que chez les bijoutiers & autres négocians, en mettant tous leurs ouvrages d’or, d'argent, d'acier, de cuivre, de fimilor, &c. fous des vafes pleins d’air atmofphérique bien fec , Ces ouvrages ne s’altèrent point. Ainfi cette preuve eft décilive; & je n’aurai pas befoin de vous en apporter d’autres. Je puis néanmoins vous citer une autorité refpectable, M. Prieftley, ( Expériences Phyfiques, tradudion françoife, tome 3, page 190), ayant tenu renfermés par le mercure des clous de fer dans une fiole remplie d'air déphlooiftiqué, depuis le 13 avril 1778 juiqu’au 20 juillet 1780, trouva que les clous étoient très-nets & [ans rouille. Quoique je fuffe convaincu de l'exactitude de cette expérience, ai cependant voulu la répéter, J'ai tenu de l’acier poli pendant quelques Lies dans de l'air pur retiré du précipité rouge, PT par le mercure, il ne s’'eft point rouillé. J'avois bien lavé mon air dans l’eau de chaux. Au refte, quand même votre expérience feroit vraie , elle n'affoibliroit point ce que j'ai voulu prouver. Le phofphore, ai-je dit , brûle aufli-tôt qu'il eft expofé à l'air atmofphérique , & le fer ne s’y alrère point, Donc le phofphore a plus d'affinité avec l'air pur contenu dans l'air atmofphé- rique, que n'en a le fer. Donc le phofphore devroit plutôt décompofer l'eau , que ne le feroit le fer. Cependant le phofphore étant dans l’ea , il n’y a point de décompofition. Donc l’eau n’eft également pas déconipofée par le fer 3,& l'air inflammable qu'on obrient du fer expofé dans l'eau , ne vient pas de cette eau, &c. &c. Vous favez que j'ai prouvé .que la limaille d'acier mife dans l'eau de chaux ou dans de l’eau diftillée, &,dépouillée. par une longue ébullition de la plus grande partie de L'air qu'elle contient ordinairement, ne laifle = SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 307 point dégager d'air inflammable , quoiqu’elle en donn: lorfqu'el'e ef dans l’eau ordinaire ; d'où j'ai conclu que cet air ne pouvoit"venir de la décompofition de l’eau. J'ai voulu eflayer ce que produiroit cette mème eau de chaux, ainfi que l'eau diftillée & qui auroit bouilli long-tems, en les faifant pafler par un tuyau de fer incandefcent. J'ai préparé trois canons de fer très - propres, & dans lefquels j'ai introduit du fil de fer tourné en fpirale. Ce fil de fer avoit + ligne de diamètre. Chaque canon placé dans un fourneau dont on animoit le feu par un gros fouffler, j'ai fait pafler ( avec l'appareil ordinaire) dans l’un de l'eau diftillée depuis quelque tems, dans l'autre de l’eau de chaux, & dans le troifième de l’eau diftillée qui bouilloit depuis long-tems, & qu'on introduifoit ainfi toute bouillante. Dans les trois cas Fexpérience a eu le même fuccès, & il s’eft dégagé une grande quantité d'ait inflammable. Cer air brûloit avec une flamme bleue tirant un peu fur le rouge, & il détonoit. J'en ai fait pafler à travers l’eau de chaux qui a toujours été troublée, Mais celui retiré par Le moyen de l'eau de chaux occafionnoit un précipité beaucoup plus abondant , que celui obrenu par les deux autres procédés. En brülant ces airs fur l'eau de chaux, ce précipité éroit beaucoup plus confidérable. J’ai introduit plufieurs pintes de ces airs dans des veflies, garnies de robinets auxquels étoient ajuités de longs tubes, & j'ai fait brüler ces airs dans un grand ballon bien fec: le ballon a été rempli d'humidité ; de l’eau de chaux que j'y ai fait pafler a été précipitée, Toures ces expériences ne permettent: pas de douter, 1°, que ces airs ne continffent une très-petire portion d'air fixe, laquelle étoit plus abondante dans celui obtenu par le moyen de l’eau de chaux: cet air fixe peut venir de la plombagine contenue dans le fer ; 2°, qu'il n’y ait encore une plus grande quantité d’air fixe produite après la combuftion. L'appareil déluté, j'ai retiré le fl de fer, qui étoit caffant comme du verre , & dont le diamètre avoit augmenté de plus d’un tiers. Dans les endroits où Les fils fe croifoient, ils étoient adhérëns, Le canon fcié, j'ai vu qu'une partie du fil de fer y étoit adhérente. Le fil de fer examiné à la loupe & au microfcope paroît fondu : ce que prouve fon adhérence. Sa furface eft grenue, & préfente différentes facettes. La portion du canon fcié fair mieux voir ces criftaux. On y apperçoit des facettes triangulaires & de petites pyramides , ce qui doit faire préfumer que ce font des portions d'octaëdres femblables aux criftaux de fer oétaëdre qu’on rencontre dans les fchiftes & ailleurs , d’autant plus que ce fer a toutes les qualités de ce fer octaëdre , enfin eft dans un véritable état d’éthiops. [left actirable à l'aimanr. Il ne fe diffout prefque pas dans les acides. J’en ai mis dans lesærois Tome XXIX, Part. II, OCTOBRE. 1786. Qq 2 308 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, acides minéraux. Il ne s’en eft diflous qu'une très-légère portion comme il arrive à léchiops & au fer otaëdre, fans doute celle qui n’eft pas encore à l’état d'éthiops. J'y ai verfé de la liqueur teignante qui a donné du bleu de Prufle. L’alkali fixe aéré a donné un précipité blanchâtre , l'alkali volatil cauflique un précipité d’un beau jaune. j Puifqu'il ne fe dégage point d’air inflammable d'un mélange à froid de limaille d'acier, & d’eau de chaux , ou d’eau diftillée bien bouillie, & qu'il s’en dégage lorfque le fer eft à l’état d'incandefcence , ne paroît-il pas que cet air ne vient point de l’eau , mais feulement du fer, & que l’eau n’eft ici qu'un moyen pour faciliter ce dégagement ? Cet air eft le principe inflammable du fer ou fon phlogiftique; par conféquent le phlogiftique eft l'air inflammable , qui en fe combinant perd fon état aériforme, Dans cette combinaifon ii laifle dégager une partie de la matière du feu ou de la chaleur qui le tient fous forme d'air, laquelle il reprend dès qu’il ceile d'être combiné. Ainfi le phlogiftique fera donc la baie de l'air inflammable, fi on aime mieux s'exprimer ainfi. J'ai l'honneur d’être, &c. RER — . - SEE CRETE BOMEE 2 AS CN MEME NID ET PSE MEET TE NE VC SURFER CE" CSI ESNEN << LE TITRE D'E M DE MORV EAU, AR MER DIE SRIMP SOS CFE Sur la théorie de la converfion du Fer en Acier & fur la Pilombagine. Monsizvr os Je viens de lire dansle Journal de Phyfique du mois dernier Pextrait des expériences que vous avez faites avec MM. Monge & Vandermonde pour déterminer les différens états de la fonte , du fer & de l’acier ; j'y ai bien retrouvé ‘cette méthode analytique, claire & sûre qui caractérife vos productions , ainfi que celles de vos illuftres confrères. J’étois fur-rout empreflé de connoître l'opinion que vous aviez adoptée fur les principes coufticutifs de l'acier ; ayant été obligé de prendre mon parti fur cette théorie, lors de la rédaction de mon article Acier dans le Dictionnaire de Chimie de l'Encyclopédie méthodique , & ne me difimulant pas qu'elle préfentoit une des queftions les plus importantes dans l'état actuel - desnos connoiflances , je me félicite bien fincèrement, Monfieur , de PRE SO SUN GNE AU 20 NT TE DE Re mnre x RÉrESCES SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 309 voir que nous fommes bien peu éloignés, ou pour mieux dire, d'accord fur les points effentiels. Vous pouvez déjà en juger par un Mémoire que l'Académie de Dijon vient de publier dans fon recueil ( /econd femeftre , 178$ , page 406), quoiqu'il ne contienne que la partie des expériences fur la fonte , mais vous en jugerez encore mieux par la phrafe fuivante qui termine mon article. ce Concluons donc que lacier , de quelque manière qu'il foit formé, » n'eft que du fer qui s approche de la nature du fer duétile , parce que la > terre martiale y eft plus exempte de parties hétérogènes , & finon plus >» parfaitement, du moins plus complètement métallilé que dans la fonte, >» qui s’en éloigne, parce qu'il admer dans fa compofition une quantité > fenfible de plombagine; que lPacier s'approche de la fonte, même » encore plus que du fer duétile, à caufe de_la préfence de ce foufre > méphitique ; qu'il ne differe guère de la fonte grife ,qu’en ce que ce » foufre eft beaucoup plus abondant dans celle-ci ; qu'il s'éloigne » davantage de la fonte blanche, parce que celle-là recèle des parties >» terreufes, non métallifées ou même étrangères, qui peuvent en être > féparées par une feconde fufion tranquille, en vaiffeaux clos & fans >» addition; que le paflage de la fonte à l’état d'acier , fe fait ainfi, dans >» tous les cas, par dépuration du fer & fouftraction de l'excès de plom- >» bagine ; que la converfion du fer en acier s'opère principalement parce » qu'il sy forme ou qu'il reçoit une quantité fenfible de plombagine ; >» que la chaleur n'influe d’abord dans ces changemens qu'en produifane » & entrerenant la Auidité, fans laquelle il ne fe fait point de combinai- >» fons; que la compofition qui conftirue l'acier, peut très-bien, par fon >» affinité propre, fixer une plus grande quantité de la matière de la >» chaleur ; en un mot, que les propriétés générales ded’acier dépendent > d’une jufte dofe de ces principes, comme les différentes qualités des » aciers dépendent des accidens qui en varient les proportions ». ( Page 450). Vous voyez, Monfieur , que j'attribue à la plombagine ce que vousattri- buezau charbon ; mais il eft préfentement avoué que ces fubftances fonc , finon identiques, du moins congénères ; vous remarquerez probablement que j'admets la pofñbilité que la plombagine /e forme dans le fer qui paffe à l’état d'acier: ce n’eft pas feulement par la difiiculté de concevoir que cette matière toute formée puifle pénétrer jufques dans l’intérieur des barres. de fer, mais parce que je n’ai trouvé d'autre moyen d’expliquer plufieurs expériences du célèbre Rinman qui prouvent que le fer enfermé dans un creufet bien luté, foit feul, foit dans des cémens inerts ou maigres, fe convertit en acier, quand le creufet eft environné de char- bon; ce qui n'arrive pas quand le fer eft enfermé dans du verre, quoi- qu'épalement environné de pouflière de charbon. J'ai regret que vos belles expériences ne m'aient pas été connues à 310 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, tems pour en profiter avant l’impreflion de cet article ; maïs je rerrouverai. Poccalion d'en faire ufage à l'article Fer, & pour lors j'aurai probable- mept votre Mémoire même au lieu de l'extrait. Dans le même tems que vous vous occupiez de certe matière , M. Prieflley avoit pris de fon côté -pour fujet de fes recherches, des phénomènes qui y touchent de près , rels-que le charbon des métaux, chareoal of metals, la fonte cémerr- tée, annealed, &c. Le fvolume où il les a publiées m'eft arrivé au moment que je corrigeois l'épreuve du dernier paragraphe, & j'ai eu la fatisfaction de pouvoir recueillir encore quelques-unes des preuves qu'il m'offroit que la plombagine pouvoit s'allier aux métaux, & qu'elle exiftoit dans la fonre & dans l'acier : voici la note que j'ai ajoutée, « Eu examinant comparativement, foit avant, foit après la cémenta- »tion, les clous ou chevilles de fer crud que l'on cémenre à Bir- » mingham, dans le charbon, pour leur donner une forte de dud&i- > lité, & qui portent alors lenomdeclous de fer crudengraiflé (annealed), »ce grand Phyficien a obfervé que 1000 grains de ce fer crud » ainfi perfectionné, laiffoient après leur diffolution dans l'acide vi- » triolique délayé, 68 , 7$ grains de poudre noire infoluble; que la » diffolution fe faifant très-lentement, il fe fépare des paillettes noi- » res qui confervent la forme des morceaux ( 7'avois également vu & >» décrit ce phénomène); que lacier en général donne beaucoup plus >» de réfidu noir que le fer, ce qui pourroit le faire nommer fer mal- » léable engraiffé ; que ce réfidu noir n'eft pas foluble dans l'acide » muriatique; que fi on expofe au foyer de la lentille 10 grains an- » glois de ce réfñidu ( 8, 119 grains de France), ils fourniflent » 1 + pouce cubique françois de gaz méphitique, & 12,889 de » gas inflammable détonnant, quoiqu'il fe diflipe une grande partie » de cette pouflière léoère; que ce réfidu s’eft réduit à Æ de fon poids, sw lorfqu'il a été fondu par la lentille à Pair libre, & qu'il refflembloit » alors à une fcorie; en un mot qu'il fe comporte comme la plomba- >» gine, & fe rélout, comme elle, prefqu’entièrément en gas acide mé- >» phitique & en gas inflammable. » En prenant le terme moyen de fes expériences, on voit que 98, = 38 grains françors de fer crud, avant la cémentation, donnent 14$ » pouces cubiques françois de gaz inflammable; que pareille quantité » du même fer crud cémenté en donne 169 = pouces cubiques ; qu'une » pareille quantité d'acier, en donne 155$ pouces cubiques, & que » 97,15 grains du fer dont l’un des aciers avoit été préparé, en ont » fourni ISS$ L c » C’eft l'opinion de ceux qui fabriquent l’acier (dit encore M. Prieftley), » que le fer ne diminue, ni n’augmente de poids dans l'opération , & » ceux qüi cémentent la fonte, aflurent qu'elle perd beaucoup; mais » £s propres obfervations fent plus conformes à celles que j'ai rap- SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 311 > portées fur ce fujet: il a vu 72 grains de fer , prendre à la » cémentation une augmentation de 3 grains, elle a été de 6 pour » 1440 de fonte. >» Quelques réfultats des expériences de M. Prieftley, femblent indi- » quer que le fer crud auquel on fait fubir cette cémentation à Bir- >» mingham, eft de la nature des fontes qu'on appelle blanches , ou du » moins d’un gris clair; car les fontes d'un gris noir ont par elles- » mêmes la propriété de fe laïfler limer, forer, & même refouler à »un certain point; elles fourniflent aufli une bien plus grande quan- > tité de plombagine ; elles ne feroient donc füfceptibles ni de la même >» amélioration, ni d'une égale augmentation de poids», ( More de la page 449.) Les obfervations de M. Prieftley fur ce qu'il appelle chareoal vous confirmeront , Monfieur , dans l’idée qui termine votre Mémoire , que plufieurs métaux peuvent avoir leur plombagine; car ce charbon qu'il tire des métaux en faifant pafler deflus de l'efprit-de-vin lorfqu’ils fonc rouges , a toujours uné bafe métallique qu’il eftime en faire le vingtième ; il l'a obtenu en quantité du cuivre , il en a recueilli du plomb, même de l'argent; on n’eft pas étonné que l'or ne lui en ait point donné , mais le fer lui-même en a très-peu fourni, ce qui paroît tenir à une autre caufe. IL eft remarquable que ce charbon fe fond fans s’enflammer par le foyer de la lentille à l'air libre, ce qui a lieu pour celui de la fonte, comme pour celui du cuivre ; ceci femble établir une différence entre le charbon de bois & ce charbon métallique, qui rapproche cé dernier de la vraie plombagine , &.qui peut procéder uniquement de la différence de la bafe. Au refte, le charbon lui-même prend auñli le caraëtère de plombagine, lorfqu’il eft fortement chauffé en vaifleau fermé, le charbon minéral devient même à la fin tout-à-fait incombufible , comme celui dont j'ai fait mention dans mes obfervations /ur les proprietés de quelques matières paflées à l’état de plombagine , inférées dans le recueil de l'Académie de Dijon (premier femeflre, 1783 ) où j'ai fait mention d’une vraie plemba- gine retirée de l’alliage de M. d’Arcet ; tous les charbons qui fe refufenc à l'incinération ne me paroiflent encore différer de la plombagine ordi : naire que par la bafe. Tout cela ne prouveroit-il pas que le charbon de bois lui-même ne peut s'unir au métal qu'après qu’il elt devenu plombagine , ou pour mieux dire, qu’il n’y a que les principes gazeux du charbon qui, entrant dans cette combinaifon nouvelle, forment la plombagine? D'autre part les expériences de M. de la Metherie nous ramenant à confidérer feulemenc dans les métaux le gaz inflammable comme remplaçant abfolument le phlogiftique de Stahlf, on eft forcé d’avouer que, malgré tant de belles découvertes, il nous manque encore un petit chaînon pour en relier défi- nitivement toutes les conféquences ; mais des recherches fi perfévérantes , 312 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, dirigées avec tant de fagacité, nous promettent que nous ne tarderons pas à l'obtenir. J'ai l'honneur d’être, &c. A Dijon, ce 7 Odobre 1786. NOUVELLES LITTÉRAIRES. E LÉMENS d'Hifloire-Naturelle & de Chimie. Seconde édition des Leçons élémentaires Jur ces deux Sciences , publiées en 1782, par M. DE FourcroY , Do&eur en Médecine de la Faculté de Paris, de l’Academie Royale des Sciences, de la Société Royale de Médecine, de la Société Royale d'Agricukure, Profeffeur de Chimie au Jardin du Roi & à l'Ecole Royale Vétérinaire , Cenfeur Royal , &c. À Paris, chez Cuchet, Libraire, rue & hôtel Serpente, 4 vol, in 8°, æ Ce n’eft pas feulement par le nombre des volumes & par une » répartition plus égale des matières , dit lAuteur, que cette feconde » édition differe de la première. Le changement total d'un grand nombre » d'articles, dés additions multipliées à ceux dont on a laiflé fubfifter le » fond , & des. détails beaucoup plus étendus fur plufieurs objets, en >» font un Ouvrage abfolument différent ». Ne pouvant faire connoître tout ce que cet Ouvrage renferme d’intéreflant , nous allons nous contenter de préfenter le tableau qu'il contient de la divifion méthodique ou de la claffification des fluides élaftiques permanens. | Première clafle. Fluides élafliques qui fervent à la combuflion & à la refpiraion. à I" efpèce. Air vital. II° Air atmofphérique. Seconde clafle. Fluides élafliques qui ne peuvent fervir ni à la combuflion ni à la refpiration , & qui wont point de caraëäères falins. IIIe efpèce. Mofere. IV° Gaz nitreux, V° Gaz muriatique aéré , ou gaz acide marin déphlogiftiqué. Troifième clafle. Fluides élaffiques qui ne peuvent fervir ni à la combuflion ni à la refpiration , & qui font de nature faline. VI efpèce. Gaz acide craieux ou air fixe. He à VOf FE SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. * 31; VIF efpèce Gaz acide fulfureux, VIII Gaz acide fluorique ou gaz fpathique, IX° Gaz acide muriatique. at X° Gaz alkalin, | L Er Quatrième claffe. Fluides élafliques qui ne peuvent fervir ni à le combuflion ni à la refpiration , & qui font inflammables. XL° efpèce. Gaz inflammable aqueux ou gaz inflammable pur, XII° Gaz hépatique. XIII Gaz phofphorique. XIV° Gaz inflammable mofétifé. DOVE Gaz inflammable craieux. XVI Gaz inflammable charbonneux. : L’Auteur! appelle ‘gaz inflammable mofétifé, l'air inflammable qui contient de la moferte ou air phlogiftiqué; gaz inflammable craieux celui qui contient de l’acide craieux ou air fixe; & gaz inflammable char- bonneux celui qui contient du charbon, Recherches fur les moyens de prévenir La petite Vérole naturelle, & Procédés d’une Société établie à Chefler pour cet objet & pour rendre L'Inoculation générale ; traduite de L Anplois de MHAYGARTH, D. M. par M. pe LA RocHe, Médecin de Monfeigneur le Duc d'Orléans € du Régiment des Gardes-Suif]es, Membre du Collège des Médecins de Genève , 6 de.la Societé, Royale. de Médecine d' Edimbourg. A Paris, chez Buiflon , Libraire; rue des Poitevins, hôtel de Mefgrigny, un vol. #-8°, Prix, 2 liv. 10 fols broché & 2 liv. 15 fols franc de port -par la pote. À J : Cet Ouvrage eft intéreffant par le texte & par les notes favantes du Traducteur, Galerie Hiflorique Univerfelle ; par M. DE P. Cinquième livraifon. Differtation fur l'Abricotier fes différentes efpèces, Ja culture & fes * propriétés pour da Médecine ;les alimens & les arts ; par M, Bucn'oz, Prix, 6 li, 5 : Lifle chronologique des Ouvrages publiés par M. BucK'oz. Nous ne pouvons qu'annoncer Je nombre des volumes qui confiltent ; en in-fol. $4, in-4°.7, in-8°. $6 , in-12. 129 ,inr18. 14 Togal 260 vol, Recherches fur la Wie & les -Ouvrages de PrErRRE RICHER DE BELLEVAL, Fondateur di Jardinboranique donné par Hènrr IV à la Faulté de Médecine. de Montpellier, en 1593; pour fervir à Rr Tome AXIX, Part Il, 1786, OCTOBRE. . % 314 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, l'Hifloire de cette Faculté, & à celle de la Botanique, avec cette épigraphe : Erexit monumentum ære perennius. Brochure in-8°. de 78 pages, caraëlére cicéro, & 8 pages d’ Avertiffe- ment , 1786. À Avignon; & fe trouve à Montpellier, chez Bafcou, Libraire. Prix, 1 liv. 10 fols. Société Royale de Médecine. La Société Royale de Médecine a tenu, le 29 août 1786 , fa féance publique au Louvre, dans l'ordre fuivant, Le Secrétaire-Perpétuel a dir: La Société Royale de Médecine avoit annoncé dans un Programme , publié le 26 août 1783 , qu’elle diftribueroit dans une des féances de Pannée 1786 , des prix de différente valeur aux Auteurs des meilleurs Mémoires qui lui auroient été envoyés fur la defcription & le traitement des maladies épidémiques, & fur la conftitution médicale des faifons ; la fomme deftinée à ce concours eft de 2400 liv. Elle a été diftribuée en prix de diférens ordres, Ceux du premier ordre font au nombre de fix, & la valeur de chacun de ces prix eft une médaille d'or de 200 liv. Ceux du fecond ordre font en mème nombre, & leur valeur eft une médaille d’or de 100 liv. Les prix du troifième ordre font au nombre de douze , & ils confiftent en une médaille d’or , ayant la même forme que le jeton d'argent que l’on diftribue dans les féances ordinaires de la Société Royalé de Médecine. En adjugeant ces prix , la Compagnie a eu fpécialement en vue le mérite & le nombre des Mémoires & des Obfervations envoyés par chacun de ceux qui coopèrent à fes travaux ; elle a aufli eu égard , comme elle l'avoit annoncé, au zèle & à l'exactitude de la correfpondance. Les premiers prix, confiftanc chacun én une médaille d'or de la valeur de 200 liv. ont.été adjugés à MM. Dufour , Docteur en Médecine, & Affocié Régnicole, à Noyon, Bouffey, Docteur en Médecine, Affocié Régnicole,à Argentan. Baraillon , Docteur en Médecine, Médecin en chef dés épidémies de la Généralitéde Moulins, & Aflocié Régnicole de la Société. Gallot, Docteur en Médecine , employé pour le traitement des épidémies , & Aflocié Régnicole de la Société, à Saint-Maurice- le-Girard , en Bas-Poitou. Gaftellier , Doéteur en Médecine ; employé pour le traitement des épidémies, Affocié Régnicole,à Montargis. Le Pecq de la Cloture , Docteur en Médecine, Médecin en chef des épidémies , Aflocié Régnicole, à Rouen. cu » SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 31$ Les fix médailles d’or, de la valeur de 100 liv. ont été diftribuées à MM. Razouz, Doéteur en Médecine, & Aflocié Régnicole, à Nifmes. Bridault, Docteur en Médecine , à la Rochelle, Baumes , Dodteur en Médecine, & Aflocié Régnicole , à Nifmes. Companyo, Docteur en Médecine , & Correfpondant, à Cérec en Rouffillon. Bouefnel , Docteur en Médecine, & Correfpondant, à Avalon. Bagor, Docteur en Médecine, & Aflocié Régnicole, àSaint-Brieux , en Bretagne. Les prix, de la valeur d’un jeton d'or, ont été décernés à MM. de la Mazière, Profeffeur en Médecine, & Correfpondanr, à Poitiers. Dufau, Docteur en Médecine , & Affocié Régnicole , à Dax. Poma, Doéteur en Médecine, Correfpondant de la Société, à Saint-Diez , en Lorraine. Pujol , Docteur en Médecine, & Correfpondant, à Caftres. Souquer, Docteur en Médecine, & Correfpondant, à Boulogne-fur- Mer. . * Bougourd, Docteur en Médecine, & Correfpondant, à Saint-Malo, Keller, Docteur en Médecine, & Correfpondant, à Haguenau. Cofta de Seradel, Docteur en Médecine, & Correfpondant, à Perpignan. £ © Ayrault, Docteur en Médecine, & Correfpondant, à Mirebeau , " en Poitou. Balme , Docteur en Médecine, au Puy-en-Velay. _Goguelin | Doéteur en Médecine, & Correfpondant, à Moncon- tour , en Bretagne, Guyeran , Docteur en Médecine , & Correfpondant , à Lons-le- Saunier. La Société regrette de n'avoir pas un nombre plus confidérable de prix à diftribuer, tant eft grand le zèle de ceux qui la fecondent dans fes rechérches. j Le traitement & a defcription des maladies épidémiques, & l’hiftoire de la conftirution médicale de chaque année, écant le but principal de notre infticution , & l’objet dont nous nous fommes fe plus conflamment occupés, nous invirons les gens delart à nous informer des différentes épidémies ou épizooties régnantes , & à nous envoyer des obfervations {ur la conftiurion médicale des faifons. La Société continuera de-diftribuer des prix d'encouragement aux Auteurs des meilleurs Mémoires ou obfer- varions qui lui feront énvoyés fur ces différers fujers, dont la connoiflance lui eft fpécialement attribuée par l'Arrêr du Conféil de 1776, par les Éetrres-parentes de 1778, & par un nouvel Arrètidu Confeil de 1786, Tome XXIX, Part, II, 1786. OCTOBRE, Re? \ 316 OBSERFATIONS SUR LA PHYSIQUE, La Sociéré invite aufli les Médecins, Les Chirurgiens, & en général les Phyfciens à lui adrefler des Mémoires für.la topographie, médicale des lieux qu’ils habitenr. Les intentions du Roi ,'norifiées. à la Société Royale de Médecine , dans une Lettre en date du 14 feprembre 178$, font, que la Société Royale fuive avec la plus grande activité des recherches déjà rrès-avancées, de la rédaction delquelles il réfultera un Traité fur la topographie médicale du Royaume. La Compagnie diftribuera des prix aux Aureurs des meilleurs Mémoires envoyés fur cette matière, La Société avoit propofé dans fa féance tenue au Louvre le.11 mars 1783, pour fujer du prix de la valeur de 600 liv. fondé par le Roi, la queftion fuivante : Déterminer quels font les rapports qui exiflent entre l'état du foie & Les maladies de la peau ; dans quels cas les vices de ‘la bile, qui acéomp aghent ces maladies , en font la caufè où l’effer ; so aber er méme-tems, les Jignes propres à. faire connoître l'influence des uns Jar les. autres, & le traitement particulier que cette influence exige. Ce prix devoit être décerné dans la féance publique que la Société Royale de Médecine a tenue au Louvre le:31 août 1784; mais aucun des Mémoires, envoyés alors n'ayant rempli fes vues , elle fut forcée d'en différer la diftributin. Parmi les Mérnoires que la Société a recus depuis ce, tems, elle en a diftingué deux , entre les Auteurs defquels elle a partagé le pris, mme il fuir: Elle a décerné, 1°.:une médaille d’or de la valeur de fe div. à M. Pujol, Docteur en Médecine, & Correfpondane de la Société , à Caltres. 2°, Une médaille d’or de la valeur de 200 Fous M. Ramel le fils, Docteur en Médecine ; & Correfpondant de La Société, à Aubagne. L’acceffit a été eode. avec une médaille d’or de la valeur de 100 liv. à M. Bouté, Médecin , &Affocié Régnicole, à Coutances. La Sociéesavoit propolé dans fa féance publique du 1,5 février 1785 pour fujet du prix de 600 liv. fondé par le Roi , la queftion fuivante: Déterminer par Fexamen, comparé. des propriétés, phyfiques. & HE re la natuxe des Laits de femme , de RE de chévre ; d'äneffe; de brébis & de REF, # & Ce prix devoir être décerné dans, la: FRE que # Sortie Royale tient aujourd'hui; mais aucun des Mémoires envoyésau concours n “ayant rempli fes vues, elle eft forcée d’en différer la diftriburions 4 re aositin En conféquence ; elle propofe de nouvéau la même-queftion pour fujet d’un prix double; c'eft-à-dire;,.de la valeur dé 1200 live qui fera diflribué dans.la féance publique du Carême 1788. vd] | . La Société déclare qu sb n'exige poine que le même Auteur lui envoie À + MA { k Los SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 317 l’analyfe de tous les laits ci-deflus énoncés , mais elle demande que le lai de femme ne foit pas oublié. Les Mémoires deftinés à ce concours feront remis avant le premier : janvier 1788 ; ce terme eft de rigueur. Ts feront adreffés francs de port, à M. Vicq-d'Azyr , Secrétaire perpétuel de la Socièté , € feul chargé de Ja correfpondance , ruedes Petits- Auguflins , N°,2 , avec des billets cachetés , contenant le nom, de, l'Auteur, & la même épigraphe que le Mémoire. ; | Ordre des le&tures qui ont été faites dans la féance publique de la Societé Royale de Médecine, tenue aw.Louvre le 29 aoûr 1786. Après la ledure de la diftribution & annonce des prix faire par le Secrétaire à M. Doublet a lu un Mémoïîre fur la fièvre puerpérale. M, Vicq-d’Azyÿr a fait la léétüre des éloges de MM, Bonaämi , Doyen de la Faculré dé Médecine de Nantes, Hecquer, Doyen du Collèce de Médecine d’Abbeville, Marrigues, Chirurgien en chef de YInfirmerie Royale de Verfailles, & L'Obftein , Profeffeur d’Anatomie & de Chirurgie dans la Faculté de Médecine de Strafbourg, Affociés & Correfpondans de la Société. M. Hällé à lu un Mémoire fur la fièvre fecondaire de la petite vérole. M. de Fourcroy a lu un Mémoire fur lefel marin calcaire, & fur fon ufage en Médecire. La féance a été terminée par la lecture que M. Vicq-d’Azyr a faite de l'éloge de feu M. Wateler, Affocié libre de la Société. Programme de la Société Hollandoife-des Sciences, établie à Haerlem , HONTE 2h pour l’année 1786. La Société s'étant aflemblée le 22 Mai de cette année, commença fes délibérations fur les divers Mémoires reçus en réponfe aux queftions fuivantes : . Quelles font Les véritables differentes efpèces de fluides aériens , aux- quels on a donné le nom d'air fixe, air déphlogiftiqué , air inflammable, air nitreux , air acide , air alkalin, &c. L'Académie ent faïfanc une men- tion honorable de deux Mémoires très-bien: écrits , qu’elle avoit reçus l’année dernière, défira que les Auteurs y fiffentc des améliorations. En effet il eft parvenu depuis à la Société un nouveau Mémoire, de l’'Au- teur de cette devife : Quam pulerum eft, in principiis & origine re- zum defixifle oculos & nobile mentis acumen ; pervolat huc fapiens. Ce Mémoire étant marqué d'une L, on en fit l'examen , conformé- mént à la réfolution des 22 Mai 1780, & 51 Mai 1794; & il fuc jugé digne d'etre couronné. À l'ouverture du billet on vir-que les Auteurs étoient MM À, Paets van Trooftwir, Membre de la Société , 0 2 1 ] L 313 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; Hollandoife, de celles de Rotterdam & d'Utrecht ; & J. Rudolph Deiman|, Doëeur en Médecine , des Académies de Hüarlem , de Fleffingue, d'Utrecht, &c. tous deux réfidens à Armflerdam. Comme le prix devoir être d’une double médaille d’or, on decida qu'il fe- roit partagé , & qu’on donneroit à chacun, une /£mple médaille d’or. Sur la folution demandée relativement à /a zhéorie du Doë&ewr Crawford (1), fur le feu & la chaleur, l’Académie n’a reçu aucuns Mémoires aflez fatisfaifans, & propofe de nouveau cette queftion de la manière fuivante: Julqwà quel point peut-on déduire une théorie fur la nature du Jeu & Jur la cauje de la chaleur, après les expériences bien confla- tées & bien décifives , qu’on a faites jufqw’à préfent ; & qu'efl-ce qu’on doit encore remarquer comme indécis à ce fujer ? La Société delire, que celui qui veut afpirer au prix , répète les expériences que les autres ont faites en faveur de la théorie, qu’il cher- che à vérifier, au cas que ces expériences alléguées ne foient pas aflez conftatées par des effais réitérés. , À l'égard de la queftion fur le Condenfateur de M. Volta, l’Aca- démie a couronné le Mémoire de M. Jacob van Breda, Doëeur en Médecine , Confeiller & Echevin régent à Delft, &c. ayant pour devi- fe: Multum adhuc reflat operis, multumque reflabit, nec ulli nato poft mille fecula præcludetur occafio aliquid adhuc adyjiciendi. La réponfe à la queftion, tendant à déterminer la vitefe des eaux des rivières , ayant pleinement rempli les défirs de l’Académie, elle ouvrit le billet qui l'accompagnoit ayant pour devife: De curfu rapido de montibus alis , dant fonitum fpumoft amnes & in æquoracurrunt , quifque fuum populatus iter, Vireilus. En conféquence de la réfolution prife les 22 Mai 1780, & 21 Mai 1784, pour les Mémoires marqués d’une Z,la Medaille d'or a été décernée à l’Aureur de ce Mémoire, M. Chrétien Brunings , In/peéteur général des rivières de Hollande & de Wefffrieflande, &c. Ec. Le concours pour la queftion fuivante fera ouvert jufqu'au premier Novembre 1787. - Comment les Plantes prennent-elles leur nourriture ? Qu'efl-ce qui leur eff à cet égard favorable ou nuifible? Er quelle direétion peut- on tirer de ce qué ef? connu. à cet égard tant par rapport à lagri= culture en particulier , que par rapport à la culture, des plantes en général? | (1) Voyez Experimenteand obferations on animal hour andithe inflammation of. combuftible hodies by A.:Crawford, Lond. 1779. Effai fur la nouvelle théorte du Feu élémencaire ; par J. H. de Magellan, Lond 1780. An Exemyration of Dr. Crawfords Theory by William Morgan, London 1785, + 3; SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 319 Prix propofé par la Société Royale d'Agriculture de Laon , pour l'année 1787, dans [a féance publique du 22 Août 1786. La Société, pour répondre aux vues de M. le Duc de Charoft, qui lui a offert de faire les fonds d’un prix de 600 liv. fur le defféche- ment des marais du Laonois, propofe les deux queftions fuivantes, pour le fujet du prix qu’elle diftribuera dans fa féance publique du mois d’Août 1787. : 1°. Quels font les avantages qui réfulreroient du defféchement des Marais du Laonois ? 2°. Quels font Les grains, les plantes & les arbres Les plus propres à étre cultivés dans les terreëns qui feront defféches ? La Société délire que, dans la réponfe à la feconde queftion, on s'appuie {ur des expériences faites, ou par les Auteurs, ou pat d’autres perfonnes que l’on citera , dans des terreins ci-devant deflé- chés. Les favants & les cultivateurs font invités à concourir à ce prix, même les aflociés non-réfidens à Laon. Les feuls membres & aflociés rélidens en font exclus. Les Ouvrages deftinés pour le Concours feront adrellés à Laon, francs de port , au fecrétaire perpétuel de la Société; & fi c’eft par la pofte, avec une double enveloppe , à l’adreffe de M, l'Intendanit de la Géné- ralité de Soiffons , à Soiflens, TA B L'E DEs ARTICLES CONTENUS DANS CE CAHIER, Mo rEe Jur le rouiffage du Chanvre; par M. PROZET, Maître en Pharmacie, Intendant du Jardin des Plantes, de la Société Royale de Phyfique, d'Hifloire-Naturelle & des Arts d'Orléans , page 241 Mémoire fur Acide phofphorique , confidéré comme partie compofante du bleu de Berlin ; par M. WESTRUMB, 253 De la terre de la Rhubarbe qui fe rencontre dans plufieurs végétaux ; par C. V. SCHÉELE, 255 Lettre de M. Dobun, lufpeëleur des Ponts & Chauffees de la Province de Languedoc, au Département de Caflelnaudery , à M. ve LA METHERIE , 256 Expériences fur la converfion de l'Eau en Air, traduites de P Allemand de M. Westrrums, par Madame PICARDET, 261 320 OBSERVATIONS SUR LA PHPVIQUE, 6e: De la produëtion du Gaz inflammable par la vapeur de l'Eau € le Fer,& des doutes élevés à ce Jujet ; traduit de l'Allemand de M. KLAPROTH , par Madame PiCARDET de Dijon, 262 Mémoire chimique & économique fur les principes 6 la. génération: du Salpétre. Ouvrage qui a remporté le Prix Royal au jugement de l'Académie des Sciences ; par M. THOUVENEL | Doéteur en Médecine, Affocié Regnicole de la Société Royale de Médecine, & M. THOUVENEL, Commiflaire des Poudre & Salpérre au Département de Nancy , SM} 264 Réflexions de M. DE LA METHERIE, 272 Extrait d'un Mémoire lu à l'Académie des Sciences de Paris, le 2 Septembre 1786, fur l'effec des étincelles éleétriques excitées dans Pair fixe ; par M. MoGe , de la méme |: Académie, 275 Suite de l'extrait du Mémoire de MM. VANDERMoNDE, MONGE & BERTHOLLET , fur la Fonte, le Fer, l’ Acier &:la Plombagine ; par M. HASSENFRATZ , 281 Obfervations fur le Bouquetin des Alpes de Savoie, & fur celui de Sibérie ; par M. BERrHOUD VAN-BERCHEM, 28$ Epreuves relatives à l'adhéfion ; par M.... 287 Extran des Regifires de | Académie Royale des Sciences, du $ avûr 1786, 291 Seconde fuite des recherches fur [ Alkali minéral natif ; par M. LoRGNA, traduites par M. CHAMPY, 29$ Lettre de M. HAsseNFRATZ , Sous-Tnfpeéteur des Mines de France, Profefleur de Phyfique de l'Ecole Royale des Mines, à ME LA METHERIE , fur La calcination des Métaux dans l'Air pur, & La décompofition de L'Eau \ 305 Réponfe à la Lettre précédente de M. HAssENFRATZ ; par M. DE LA METHERIE ,) EET 306 Lettre de M.DE MoRveAU, à M. BERTHOLLET , fur la théorie de La converfion du Fer en Acier, & fur la Plombagine, rt 308 Nouvelles Littéraires,, . 312 APPROBATION. Ju lu , par ordre de Monfeigneur le Garde des Sceaux, un Ouvrage qui a pour titre: Obfervarions fur La Phyfique, fur l'Hifloire Narurelle € fur les Arts, C7 par MM. Rozier, Moncez le jeune & ne La Meruerte, &c. La Colleëtion de faits importans qu'il offre périodiquement à fes Leéteurs, mérite l'attention des Sa- vans ; en conféquence , j’eflime qu'on peut en permettre l’impreflion. À Paris, ce 24 Oâ&tobre 1786. VALMONT DE BOMARE. + ER 0 Fig 2, ex III Petebre 1786! FL 4 RE D = mme de de me D à à dan an nemu nd 8 SE ni vu en Ge ES SSSR SEEN Octobre 178. 6, - on * D —— 0 ne ŸQ | JOURNAL DE PHYSIQUE. | 3 M RE 1786. JE À —— A Ÿ RECHERCHES SUR LES SAUTERELLES ET SUR LES MOYENS DE LES DÉTRUIRE ; Par M. BARON, Confeiller en La Cour des Comptes, Aides & Finances de Morupellier, des Académies de Dijon, Touloufe, Nifmes , &c. Homo fum ; humani nihil à me alienum puto. Terenr. Comæd. Er RE nourri & vêtu, voilà l’unique néceffaire de l'homme. Tou- tes les richefles, de quelque nature qu’elles puiflent être, ne font rien, & fe réduifent à rien, fi l'on en excepte les dons de la terre; ce fonc eux qui en fe reproduifant aflurent à un état def revenus fixes; ce font eux qui fatistont les befoins phyfiques auxquels les hommes fonc aflujettis, & ceux que la commodité a inventés. Mais pourquoi faut-il que ces dons de la terre foient en proie à mille ennemis deftruéteurs ? pourquoi faut-il que l'homme fe voie pri- vé par des infectes du fruit de fes labeurs. La fauterelle eft un des plus à craindre pour lui. On a vu ce petit animal rayager des provin- ces entières, s. I. A peine les fauterelles commencent-elles de naître, qu'elles fon- gent à fe reproduire. Ces infectes, foie qu’un inflin& naturel , foit que l'effervefcence des efprits animaux & de leurs humeurs les y forcent, fe cherchent dès le moment qu'ils peuvent fe fervir de leurs ailes. Le mâle accroche avec les dents la femelle pardeflus le cou la tenant aflujettie avec fes deux pattes de devant, il pafle fa queue fous fon ventre, & il introduit fa verge faire en forme de faux dans le va- gin (1) 4 Ep (x) Ces infe&es font f fortement joints dans l’accouplement , que les prenant avec Ja main, ils ne { féparent point. Ils reftent ainfi dans la même fituation plufeurs heures, les jours & les nuits entières ; fi vous tentez de les féparer, vous fentez qu'ils Tome XXIX , Part, Il, 1786. NOVEMBRE, St — 322 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Les œufs ainff fécondés , la femelle n’attend point qu'ils aient ac- quis leur degré de maturité. Sur la fin de l'été, ou dès le commen- cement de l’auromne, elle fait un trou dans la terre & les ÿ dépole; celles qui ont des queues, ou pour mieux dire , des appendices à la queue, s’en fervent comme dune tartière pour préparer la demeure de léur piogéniture; celles qui n'ont point d’appendices à la queue font en- rer l’extrémité de leur ventre dans la terre, & parviennent awmème but. Certe opération demande un terrein léger , fablonneux ; aufli eft-ce celui qu'elles choififfent de préférence ; elles fuient la plaine , les terres hu- mides, compactes, celles qui font cultivées. » Quand bien-même, dit un Auteur Efpagnol ( & ), il tomberoit des » millions dé fauterelleés fur an champ cultivé, on ne doit pas ap- >» préhender qu'aucune y dépofe fes œuts;. & sil y a dans cet endroit »un morceau de terre inculte, fi petit qu'il foit, elles iront toutes les » y dépofer ». Cette préférence fi néceflaire pour la confervation de l’efpèce , eft indiquée à la fauterelle par Podorar. L'ouvrage de la propagation de ces infectes dure rarement plus de fix ou fept femaines. Lorfqu'il eft fini & que les femelles ont dépolé leurs œufs, les fauterelles des deux fexes s’accrochent les unes aux autres, ou contre les rameaux des arbres qui font à leur bienféance, ou mê- me fur la terre qu’elles jonchént par milliers. Là elles reftent immo- biles & comme demi-mortes, & elles périffent au bout de quelque tems épuifées , defléchées par le manque de ñourriture, où par üñe elpèce de confomprion qui les attaque. Le froid achève enfin de détruire ce ue Ja maladie avoir éparvné. On trouve leurs œufs renfermiés dans des efpèces de poches ou de facs, formés par une membrañe tiflie de pe- tits filets blancs afgentins, qui font fans-doute une continuation des artères & des véines de l’ovaire (2 3 La foffe où ils ont été dépolés et capable couc au plus dé recevoir le petit doigr, ils ÿ reftent en- font réhflance , & ce ne peut être qu'avec effürt-que vous en venez à bout. Dans ce moment il découle , foit du vagin , foit des parties génitales du mâle, une petite goutte blanche comme du fait’, c’eft/leut vraie liqueur (petniatique ; pour lors 1e mâle ne peut poiñt renférmer dans! (lpäitéifon afshillon, ni la’ femelle téflerrer: fes cuïfles écartées , & il fait attendre que-l’agiration &,l’effervefcence des hameurs foit calmée.! Cette liqueur fpermatique ne produit point fans doute, d’autre. effet que d’échaufer,, d'emprégner de fon efprit prolifique les œufs cohtenus dans l’ovaire, & de les rendre féconds. FORTE (+) Bowle. + (1) Swamrherdam s’exprifié anfi für ce fuiér:: Je cohférvé des œuft de fauterelle qui font oblomgs, & une ovaire entière parfemée de filamens d’un blanc argenté, qui font fans doute des ramifications de la trachée-artère , & entre lefquels paroïflent des vaifleaux fanguins, veineux & artériels. Les œufs ont prefque la confiflance de Ja corne , Jaiçouleur ëñ eft brune ; maïs leurs prérnières ébäuchés, dont j'ai aufli des échäntillons, font blänchés & jaunes, & leur enveloppe efttrès-déliée, Biliantnræ, pagé 134, k : , SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 323 fouis pendant tout l'hiver, & n’éclofent que lorfque la chaleur du prin- tems a échauflé la terre. Pour lors il en naît des vers quine font pas plus gros qu'une puce , d’abord blanchâtres, puis noirâtres , enfuire rouf- fätres. Ils fubiflenc plufeurs autres métamorphofes ( 1 ), & deviennent chacun animal parfait de fon efpèce. Recherchons les caufes qui fa- vorifeot leur reproduction ; j'en reconnois trois : la chaleur , la fécherefle du climat & le terrein léger & fablonneux. LE La chaleur contribue à la production des fauterelles, Perfonne n'ignore les effets de la chaleur fur les œufs fécondés, & combien elle eft néceflaire pour faire éclore l'animal qui y eft contenu. Nous n’a- vons pu fuivre dans les œufs des fauterelles ce développement occa- fionné par la chaleur; mais nous fommes intimement perfuadés que ce qui arrive aux œufs de tous les animaux ovipares arrive dans ceux- ci, & que la même caufe produit en eux le même efler. Ce qui elt confirmé par ce que rapporte l’Auteur Efpagnol que nous avons déjà ci- té, [1 aflure que le tems d'éclore varie felon la chaleur de l’endroit où fe trouvent les œufs. En général ceux qui font dans un pays haut & montagneux tardent plus que ceux qui font en plaine. «J’en ai vu, » dit-il, à Almeria fauter des millions au mois de Février, parce que cer endroit eft fi précoce, que les petits pois y étoient prefque pañlés a # cette époque, > Dans la Sierra-Nevæda ils fortoient de leur nid en Avril, & j'ai » obfervé dans la Manche qu'ils n'étoient pas tous éclos au commer.- (1) Un’y a plus aucun doute aujourd’hui fur les métamorphofes des fauterelles ; c’eft le même animal qui fort de Pœuf fous la-forme d’un ver , qui pafle enfüite dans lPétat de nymphe , & qui eft connu fous le nom de nymphe-ver. Il fubit enfin une troifième méramorphofe ; en quittant fa peau, & devenant un animal parfait de fon efpéce , mâle ou femelle, en état de produire fon femblable . par les œufs fécondés que dépofe la femelle. Les fauterelles ne reftent dans l’état de nymphe que vingt-quatre ou vingt-cinq jours, plus ou moins , fuivant que la faifon leur eft plus ou moins favorable. Pour. lors ayant acquis tout {on accroiffement, cet animal cefle pendant quelques jours de manger; cherchant un endroit commode & propre à Le favorifer dans fon changement d'état. C’eft ordinairement une épine, un chardon , ou un buiffon qu’il choifie. Il y accroche, il agite & gonfle fa tête & fon cou , jufqu’à ce que la peau fe crève au- deffüs du cou; la tête fort la première par cette ouverture, non fans quelque dificuité, enfuite la nymphe faifant toujours de nouveaux efforts, & fe gonflant de plus en plus fort toute entière, avec fes.fix jambes, & (es quatre aîles , en laïffant (a dépouille, à l'épine , ou au buïffon auquel elle fe tenoit attachée , & qui lui a fervi de point fixe. La fauterelle après un pareil travail tombe par terre épuifée de fatigues & des efforts qu’elle a été obligée de faire. Elle fe remet en prenant un peu de repos ; fes ailes alors fe déploient dans toute leur étendue: elles furpaffent: la longueur de fes jambes poftérieures; peu de tems après elle les eflaie en fe foutenant en l'air, & elle com- mence à voler. Le corps de cet infecte ef dans le tems de cette tranfmutation mal éomme de la cire. Tome XXIX, Part. IJ,1786. NOVEMBRE. _ Sf2a 324 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, » cement de Mai, où on ne trouvoit pas encore de petits pois am » marché de San Elémente ». La fauterelle eft donc un thermomè- tre vivant qui indique la chaleur refpeétive des différents endroits où elle fe trouve; c’eft de leur différente température que dépend la diffé- rence du tems où l’on voit éclore les fauterelles. C’eft de leur diffé- rente température que dépend Jeur plus ou moins grande quantité. Si la chaleur eft convenable & au point qui leur eft néceflaire, tous les œufs de ces infectes éclorront, Si la chaleur eft peu confidérable, & qu’elle vienne à leur manquer, Pinfette renfermé dans l'œuf ne pour- ra point éclore, & on fe verra delivré de cet animal vorace & def- tructeur. 2°. J'ai dir en fecond lieu que la féchereffe facilitoit la produc- tion des faurerelles. Cer infecte dépofe fes œufs dans la terre; on les trouve renfermés dans un fac, & ce fac eft enduit d’une mucofté blanche & écumeufe. On comprend combien il eft effentiel pour eux que le tems foir fec. Si la faifon vient à être pluvieufe , la cerre matri- ce de ces œufs fe détrempe, le fac dans lequel ils font contenus fe ramolit, la glu ou la vifcofité qui les entoure fe détache, le fac & les œufs tombent en pourriture, & la génération future eft totalement per- due ; j'ai donc eu raifon de dire que la fécherefle éroit extrêmement favorable à la propagation des fauterelles. C'eft le fentiment de-tous les Naturaliftes ( 1). Swammerdam aflure que l'humidité du tems Leur eft beaucoup moins favorable que la féchereile, fur-cout lorfque celle- ci eft accompagnée d’ane forte chaleur (2). Si nous parcourons les annales de l'hiftoire, nous verrons que l'E- gypte, la Syrie, Méfoporamie, la Judée, le Portugal, lEfpagne, l1- tale, la France, en un mot les contrées méridionales qui réuviffene la chaleur & la féchereffe du climat, ont été le plus fouvenr le théâtre des incurfions de ces infectes; s'ils ont quelquefois exer- cé leurs ravages dans les pays du nord, les climats froids, on peut croire que les fauterelles dont on s’eft plaint avoient pris naïflance du eôté du midi & qu'à l'aide du vent elles avoient été tranfportées de leur pays natal dans ces climats qui leur font totalement étrangers. Une pareille émigration n’eft pas {urprenante ; ‘car s'il faut croire les RP QAE 5r N n E ra : {1) Locuflas non ram humidiori quâm ficciori remporis conffitutione generar: autumo , maxime fi calor immodicus fefe conjunxerir. Meminére item hiflorici nefandæ fivciratis per annos fere quinque quäm locuffarum ingens exercius eft fecutus anno 1153. Hanc graphivein fuis obfervationibus pinxit F, V'aleriola. UIyff. Aldov. page 419. 2) Paulus Diaconus refert circa decimum annum Mauritii Tmperaroris maximam fuiffe & januario ufque ad feprembrem , ficciratem ; hancque in- audicam locuflærum mulritudinem ef fubfecuram $ En, biennio longe: lareque fègetibus gravifimam Jraliæ intulére famem. UIyff. Aldov, page 410, SUR L'HIST. NATURELLE ETLES ARIS. 325 Auteurs, ces animaux franchiffent dans certaines occalions les édifices les plus élevés, les montagnes les plus hautes; rien ne les arrête, ils traverfent les rivières, les Heuves, & même certains bras de mer. S'il falloit expliquer comment ces infectes peuvent s'élever à des hau- teurs fi confidérables, nous obferverions avec Swammerdam , que les fauterelles s'élèvent par leur faut à une hauteur deux cenc fois plus rande que la hauteur de leurs corps , & nous remarquerions avec Mi de A que dans les pattes des fauterelles qui produifent le faur, les cuifles font articulées vers le milieu du corps, dont elles foutiennent le centre de gravité; & les jambes font comme des pieux fort élevés , entre lefquels le corps de l’infeéte fufpendu eft d’abord balancé, pour être jetté avec plus de force par l’action des mufcles extenfeurs. ne fois que les faurerelles font élevées à une certaine hauteur, elles étendent leurs aîles & fe laiflent aller au gré d1 vent. Sont-elles ra- maflées plufeurs enfemble, elles ont encore plus d'avantage, parce qu'en fe ferrant les unes contre les autres, leurs aîles fe touchent & forment comme une voile que le vent gonfle & qui fait mouvoir toute la troupe. Ces infectes en volant , font tellement ferrés les uns contre les autres que lorfqu'ils paflent devant le foleil , ils obfcurciflent cet aftre, interceptent fes rayons lumineux, forment une éclipfe & plon- gent prefque le point de la terre on donne leur embre dans d'épaifles ténebres (I }). 3°. J'ai indiqué une troilième caufe qui contribuoit à la production des fauterelles ; les cerreins fecs, légers & fablonneux. Ces terreins font ; fuivant moi, ceux qu’elles fréquentent le plus, ceux enfin ‘où leur efpèce fe perpétue. Jetons un coup-d'œil fur ce que j'ai dit relativement à la généra- tion de ces infeétes. Le moment de ja ponte atrivé, la femelle creufe un trou dans la terre & y dépofe fes œufs. Si le terrein où elle aura logé fa progéniture, eft dur, compacte, la fauterelle, fur-tout celle qui n'a point de tarrière(2), n'aura point pu pondre fes œufs bien avant dans la terre; elle les aura dépofés prefqu'à fa fuperficie, & les oifeaux , & les injures de l'air, en détruiront une grande quantité. Sage effec, dit M. Lyonnet, de la divine providence, qui empêche QG) L’Hifiorien de Charles XIT, Roi de Suède, rapporte que cet infortuné Prince fut très-incommodé dans la Beffarabie par une horrible quantité de fauterelles qui s’élevoient fur le midi du côté de la mer, d’abord à petits flots , enfuite par grands nuages, qui en éclipfanr le foleil , rendoient l’air fombre. | (2) Il y a plufeurs efpèces de fauterelles ; les unes ont une appendice à la queue, qui leur fert comme de tarrière pour percer la terre ; lbs autres en font privées & n’ont qu’une queue très-courte, Le eomte Zinnani, grand obfervateur , qui a donné un journal ex2@ des expériences qu’il a faites fur les fauterelles, a très-bien diflingué celles qui font avec un aiguillon & celles qui n’ont point d’aiguillon, 326 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, par ce moyen , la trop grande multiplication d’un animal fi nuifible. St le rerrein au contraire, eft léger , fablonneux , la faurerelle aura dépofé bien avant fes œufs dans la terre, ils ne feront expofés à aucun dan- ger, & ces infectes fe multiplieront à l'infini. Nous l’éprouvons du côté du Languedoc & de la Provence; il y a certaines contrées, dans lefquelles on peut dire que les fauterelles fonc indigènes : telles fout les terres qu'on appelle dans ce pays, Sylvaréal, la Commande- rie de Capette, du plan de la Peyne, la Vernede, le Mas d'Olivier, &ce Dans ces divers cantons, on trouve des fauterelles toute Pannée. C’eft de-là, que par le concours des circonftances, ces infectes ayant acquis des forces, & s'étant prodigieufement mulripliés, fe répandent enfuite dans les terres voifines, & de proche en proche gagnent tellement du terrein, qu'ils s'acheminent de la manière dont je l'ai dit, jufqu'à des pays très éloignés. Au relte ces terres dont nous venons de parler font perfque tou- res en paturages; je croirois que cela ne contribue pas peu encore à favorifer la production des fauterelles : outre qu’elles trouvent aifément de quoi pâturer, elles ne font point inquiétées par les travaux des agri- culteurs. Ces terres deftinées pour prairies ne font fujettes à aucune culture, & la progéniture de ces infeétes ne court point rifque d’être détruite par les labours qu'on eft obligé de donner aux terres qu'on cultive. Les caufes qui concourent à la produétion des fauterelles une fois connues, quels font les moyens de les détruire? c’eft le point eflen- tiel, le feul néceflaire , c’eft celui aufñi que nous allons traiter. SMS Connoître fes ennemis , c’eft le premier pas; le moyen de les écar- ter ou de les détruire , c’eft Le dernier. Puiflions-nous l’atteindre. I! faut premièrement tâcher de découvrir les œufs de ces infetes. On a vu dans le paragraphe premier de quelle manière ils faifoient leur ponte, où ils la dépofoient ; on a vu que leurs œufs étoient contenus dans une efpèce de poche faite en forme de gaine ou de cure-dent; en le détruifant vous ferez périr deux ou trois cens fauterelles, la génération future fera totalement éteinte, vous empècherez que cette race maudite & deftruétrice ne multiplie & ne fe perpétue. Cette recherche eft donc la chofe la plus effentielle , le point le plus intéreflant, celui fur lequel on ne fauroit trop infifter. Il y a plufeurs moyens de faire cette recherche. On laboure d'a- bord, en Septembre & en Oftobre, les terres où l'on croir que les fauterelles ont dépofé leurs œufs; on fair en forte de les découvrir, on les ramafle, & on les brûle avec foin. Au mois de Mars fuivant, on fouille avec la pioche, ces mêmes terres, foupçonnées de cacher SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 327 encore les femences de cet infeéte deftructeur , lon y conduit poue lors des troupeaux de cochons. Cet animal extrémement friand des œufs des fauterelles, ne manque pas de foulever avec fon grouin la terre , & de la retourner de tous côtés, pour trouver une proie qui eft de fon goùûr. Ce moyen a parfaitement réufli en 1765. Les mémoires de l'Académie Royale des Sciences en font foi, Mais fi malgré toutes les précautions qu'on aura prifes, fi maloré tous les foins qu'on fe fera donnés , les œufs de cet infeéte échappent à vos recherches , & viengent à éclore, pour lors, il faut employer d’autres moyens, il faut lui donner la chafle, Cette chaffe doit être faire dès que les faurerelles commencent à paroîire , lorfqu'elles font en chryfalides , qu'elles n'ont point encore leurs aîles déployées , & avant qu’elles aient pris leur parfait accroiflement, Pour lors elles ne peuvent voler, & on les a plus fürement & plus facilement. On leur donne la chafle de plufeurs façons. On allume des tas de paille dans les différens endroits qui en font infe@tés, & on les cbli- ge de fe jetrer par troupes dans ces brafiers. Cette méthode me pa- roît moins füre que celle dont on s’eft fervi de tout tems dans notre pays, le Languedoc; elle conffte à ceinturer de foflés tout le rerrein que les fauterelles ont envahi; on creufe dans ces foflés des puits , de la pro- fondeur d’une toife, & puis on bat de droite & de gauche routes les terres comprifes dans cette enceinte ; on force ces infectes à aller dans les foffés, & les pourfuivant toujours avec des branches d arbre, on les fait romber dans les puits, d’où ils ne peuvent fe relever, & qu'on com- ble avec la terre qu'on avoit dépofée fur les bords. D'autres font enco- re mieux, ils mettent au bout d'une perche un cerceau de ceux dont on fe fert pour relier les tonneaux; ils attachent ‘autour un gros drap au milieu duquel eft un trou pour y adapter un fac de toile. Un homme pole cette machine par terre, & plufeurs autres avec des rameaux d'arbres pourfuivent les fauterelles , qui vont donner contre le drap attaché au cerceau ; elles fe ramaflent en peloton au milieu , & Fhomme qui tienc la perche , en la relevant, les fait enfiler le fac; on les prend de cette manière par milliers. On vide le fac dans des foilés qu'on comble tout de fuite, on les écrafe , ou on les brûle , ou on les noye; en un mot, on s’en défait de la manière la plus convenable. Il faur faire attention feulement de détruire ces infeétes , de manière qu'ils ne puiflent pas être nuifibles après leur mort. L’infection que répandent leurs cadavres'enm pourriffant , eft infoutenable, Surius & Cornelius Gemma faifant mention l'un & l’autre d’une incurfion prodigieufe de fauterelles qui eut lieu dans l'été de 1542, rapportent qu'après leur mort, elles infectoienr l'air d’une puanteur infoutenable , au point que les corbeaux, les corneilles , & les autres oifeaux de proie, quoiqu’affamés , n’appro- choient pas de leurs cadavres, Nous, avons éprouvé nous-mêmés, il y a 328 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; deux ans, la vérité de ce fait; on ne pouvoit pas pafler auprès des puitss où on les avoit enterrées vingt-quatre heures après qu'on les avoir comblés. D’après cela il ne faut pas s'étonner fi les hiftoriens rapportent fi fouvent des maladies contagieufes furvenues dans les pays ravagés par les fau- terelles, IL faut donc avoir grand foin , je ne cefferai de le répéter, de les enterrer profondément, de les brüler , ou de les précipiter dans le fond de la mer ou des fleuves, afin que leurs reftes Aottans ne viennent point fe dépofer fur les rivages, & nuire aux habitans par les mauvaifee exhalaifons qui s’élèveroient dans l'atmofphère, & qui fomenteroient aujourd’hui comme autrefois (1) des maladies peftilentielles, On ne doit pas omettre une chofe très-effentielle, c’eft de ne faire, autant qu'on le pourra, la chaffe aux fauterelles que le matin, le foir, ou lorfque le tems eft couvert. Cet infecte pour lors n'y voit pas fi bien ; il vole moins haut & fe laiffe approcher de plus près. « Les faurerelles , dit M. Gleditfch , » montent plus vite & s'élèvent plus haut par un tems » Chaud , ferein & fec ; mais lorfque le ciel eft chargé de vapeurs & de > pluie, ou qu'il fait un peu froid, au lever & au coucher du foleil , » elles ont plus de lenteur & de roideur ; elles remuent plus difficilement > leurs aîles , & il eft plus aifé de les détruire ». Cela ne nous paroît pas furprenant , & nous en trouvons la raifon dans la configuration particu- lière de leurs yeux. Ces infectes les ont faillans & durs, les membranes en font épaifles, & ils n'ont point de paupières. On conçoit donc que lorfqu'il y a moins de rayons lumineux répandus dans l’atmofphère, leurs yeux reçoivent moins de lumière ; & leur vue doit être plus obrufe que lorfque le foleil Init & remplit l'univers de fa clarté: peut-être, & ce n’eftici qu’une conjecture que nous propofons, peut-être leurs yeux font-ils difpofés de façon que les rayons de lumière s’y raflemblent comme dans Le foyer d’un miroir, & par cette organifation ils doivent y voir infiniment (1) Au commencement de l'été de l’année 852 , l’hiftoire rapporte que les faute- relles qui parurent pour lors étoient beaucoup plus groffes que de coutume, puifqu’elles égaloient le pouce d’un homme. On prétend qu’elles obfervoient un ordre régulier dans leur marche & leur efpèce de campement. Elles avoient des chefs qui s’avançoient avec quelques-unes de la troupe une journée avant le corps d’armée, comme pour reconnoître les endroits qui leur feroient les plus favorables pour s’y arrêter ; le len- demain , & à la même heure où l’avant-garde étoit arrivée , toute la troupe fe renduit & faifoit halte au lieu indiqué. Leur marche ne commençoit que lofque le foleil étoit fur l’horifon ; avant le lever de cet aftre , elles ne quittoient pas leur camp, & elles partoient en fuivant chaeune leurs divifions. Ce fut Allemagne qui efluya ce fléau; un vent impétueux les fubmergea toutes dans l'océan Belgique ; maïs elles causèrent après leur mort des maux encore plus grands que pendant leur vie. Le flux de l'océan les rejeta fur les terres : les côtes en furent couvertes, & la peite parut bientôt par linfeétion qu’elles occafionnèrent dans l'air en fe pourriflant, & par les miafmes vénéneux qu’elles exhalèrent, A/dov. de Anim. infeël, lib. 7. plus SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 329 plus clair dans les tenis fereins que dans les tems nébuleux, 1 eft inutile de s'arrêter plus long-tems pour rechercher la caufe d'un fait que perfonne ne révoque & n’a jamais révoqué en doute (1). sus La faurerelle eft linfeéte le plus à craindre pour l’agriculteur (2) , c’eft le plus dangereux que je connoile , c’eft celui dont les ravages ont les fuites les plus cruelles (3) ; il attaque & deiruit nos feules, nos véritables tichefles | & prive dans un moment le laboureur du fruit de fes peines & de fes labeurs. Il faut donc ne rien oublier pour s'en préferver ; il faut s'oppofer à fa multiplication , faire la recherche la plus exacte de fes œufs, les empêcher d'éclore , & fi malheureufement cet infecte vient à paroître, lui donner la chafle, le mettre à prix d'argent. C’eft le parti que la communauté de Saint-Gilles en Languedoc prit il y a deux ans; on donnoit un fou de la livre des fauterelles, & par le relevé du compte du tréforier pour cet objet, on en fit périr onze ou douze cens quintaux. Ce moyen le plus sûr, le plus efficace, doir être mis en uface, ainfi que je l’ai dit, & que je ne cefferai de le répéter, dès que ces infeétes com- mencent à paroître. Mais malheureufemenc une {ordide avarice, une économie mal entendue s'oppofent fouvent à ces dépenfes ; on laiffe confumer, détruire, dévorer la fubfftance du peuple par les ennemis cruels qui s’en emparent. Dans des cas pareils où les confeils, les avis, ls exhortations ne fuffent pas, il faut contraindre les hommes à faire malgré eux ce qui eft de leur plus grand intérêt; il faut que ceux qui tiennent les rênes du Gouvernement ordonnent ces dépenfes & veillent à leur exécution. C’eft ce qu’on faifoit dans l’île de Lemnos & dans la (1) Quod vifum artiner, dit Aldrovande , fpra diélum eff non carere oculis locuflas , fed vifu effe heberiori : unde medicus (fenex) apud Plautum rogar Menechmum : dic mihi hoc eriam , folent cibi unquam oculi duri freri ?.… Refpondit ille...quid! tu me locuflam cenfes, homo ignaviffime ? ubi Lambinus hoc addidit JScholiolum , locuflæ palpebris carent, idcirco duriffimis fun oculis ; quod enim aliis animantibus præfiant palpebræ , id & infe&is € cruflaris præflat durities, ut docet Arifloreles , lib. 2, de partibus animalium , cap. 13. Addamus quæ Jcribie Plinius , lib. 11, cap. 17, locuflis fquillifque magna ex parte , fub eodem munimento oculi præclari eminent. FR £ x (2) Les bêtes à cornes, les bêtes de labour refufent d’entrer dans les pâturages où ont été les fauterelles ; il femble que ces animaux ont horreur de brourer l'herbe que ces infeétes ont {lie par leurs attouchemens, par leur bave, ou par les émanations de leurs corps. Au refle, c’eft un inftinét que la nature donne à ces animaux , s’il ef vrai ce que difent les Auteurs, que ceux qui broutent les herbes qu'ont infe&té les fauterelles, meurent bientôt après. (3) Georges Cedrenus rapporte que Ja fixième année de l'empire de Romain III, " di ; rem , les fauterelles ravagèrent les provinces orientales de l’Empire de Conftantinople, au point que les habitans de ces contrées furent obligés de vendre leurs enfans pour efclaves & de fe retirer dans la Thrace. L'Empereur leur ordonna de retourner dans leurs maifons , & leur fit donner à chacun trois pièces d'argent, Tome XXIX, Part, II, 1786. NOVEMBRE, FE 339 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Cirenaïque (1). C'eft ce qu’on fit en 1781 dans la Pologne autrichienne; il fues enjoint à tous les payfans de ramaflér les faucerelles, dès quelles paroïtroient ; il leur fut donné pour récompenfe quinze creutzers pour chaque demi-boifleau de ces infectes : celui des Baillis qui les failoic détruire avec le plus d'activité & de fuccès, recevoir une gratification de cinquante ducats. i Ne doit-on pas fe atter que dans cette province où les adminiftrateurs } comme de vrais pères de la patrie, ne fongent qu'à conferver les propriétés des individus, & à augmenter , autant qu'il eft en leur pouvoir, le bien- ètre des peuples ; ne doit-on pas fe flarter qu'ils prendronten confidération les moyens que nous propofons pour délivrer nos campagnes de ces ennemis dañvereux. > (1) Pline nous apprend que dans la Cirenaique il y avoit une loi exprefle qui ordonnoit à tous les hommes de donner la chafle aux fauterelles trois fois par an. La première fois, c’étoit pour découvrir leurs œufs & pour les écrafer. La {econde fois, dès que le fœtus de ces inféêtes commençoit à fortir de l’œuf ou à éclore, & enfin, lorque les fauterelles avoient acquis une certaine groffeur , & qu’elles étoient devenues adultes. On punifloit ceux qui ne s’acquittoient pas de ce devoir de la même peine portée contre les déferteurs de l’armée, OBSERVATIONS DE M. SCHÉELE, Pour prouver la vérité de fon opinion fur. la nature du Pyrophore (1). M. GoETLING a employé toutes les reffources de Ja chimie pour renverfer ma fhéorie fur le pyrophore. Car aux preuves que j'ai données dans mon Mémoire fur l'air & le feu, qu'on ne peut obrenir du pyrophore de l’alun privé d’alkali, & que je n’ai jamais pu en tirer d'un pareil alun , M. Goetling objecte: 1°. M. Wiegleb n’a point retiré de pyrophore du tartre vitriolé & du charbon , ce qui efl contraire à ce que jai avancé. La même expérience n’a pas réufli non plus à M. Goerling ; de-là il tire la conféquence que j'ai été induit en erreur. Il confirme fa première expérience par celle-ci: qu'on prenne de l’alun privé entièrement d’alkali, qu'on le traire avec de la poufñlière de charbon, & on obtiendra un beau pyrophore ; & afin qu'on ne puifle croire que les charbons avoient fourni de l’alkali, il a recours à un procédé fort ingénieux ; au lieu de charbon , il prend le réfidu noir huileux de La préparation d'éther vitriolique, & il RSS PERS SEE STE TESTER EURE Te MEN CRD (1) Extrait des Annales chimiques. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 331 obtient le même réfulrat; favoir, du pyrophore: d'où il conclut que ma théorie ne fauroit fubfifter. Qu’eft-ce qui s'enfuit ? que je n’ai pasbien opéré, puifqu'on peutretirer du pyrophore d’un alun qui ne contient point d’alkali. [1 faut que M. Wieoleb n'ait pas affez long-rems calciné le mélange du tartre vitriolifé & du charbon, car fans cela l'opération lui auroit réufli comme à moi, qui ai préparé ce pyrophore plus de trente fois , & toujours avec le même fuccès, Je prends une cuiller pleine de tartre vitriolé mis en poudre bien fine, & trois cuillers pleines de poudre de charbon très-fine, & je mêle bien le tout , & l’expofe dans un verre placé dans un-creufet plein de fable, je calcine à un grand feu pendant deux à trois heures ; après cela je ferme le vafe, & je laifle réfroidir le tout. Je crois que M. Goerling a feulement répété ce qu'avoic dit M. Wiegleb ; car cette opération n’auroit sûrement pu lui manquer , puifqu’elle réuflit aux Chimiftes les moins exercés. Mais quant à la feconde expérience de M. Goerling il faut néceffairement qu'il ne l'ait pas faite lui-même; car je regarde comme faux qu'il aic retiré du pyrophore de l'alun privé d’alkali. Quoique j'en fus sûr, j'ai néanmoins répété l'opération encore une fois; mais je regrette maintenant le rems que j'y ai employé. Je préparai de l’alun comme M. Goetling. Je précipitai la terre avec du fel-alkali, La leflivai avec de l’eau bouillante, la féchai & la diffolvai de nouveau dans l'acide vitriolique affoibli. Je la fis évaporer, & la mêlai avec de la pouflière de charbon; j'en mis la moitié dans un matras, l’autre moitié je l'humectai avec de la leflive alkaline , la mis dans un autre matras, & j'expofai au feu les deux vafes dans un creufer plein de fable. Je calcinai à la manière ordinaire : le réfulcat fut que dans le vafe qui ne contenoit point d’alkali, je ne trouvai rien moins que du pyro- phore, & la matière ne s’échauffoit même pas ; l’autre verre au contraire conrénoit de très-bon pyrophore. On peut compter fur l'exactitude de cette expérience: d'où on doit conclure que M. Goerling s’eft trompé (parce qu’il n’a pas penfé à l'alkali néceflaire pourlacriftallifation de l'alun), & par conféquent ma théorie n'eft nullement ébranlée. Elle eft fondée fur la propriété & la nature de l'acide vitriolique de pouvoir attirer par l’inter- mède de l’alkali plus de phlogifton du feu qu'il eft néceflaire pour devenir foufre. S'il furvient de l'humidité, l'acide vitriolique ne peur plus attirer ce fuperflu de phlogifton, parce que l'alkali a plus d'afñinité avec les parties aqueufes ; mais fi en même-temsil fe trouve de l'air déphlogiftiqué, cet air fe combine avec le fuperflu du phlogifton , qui eft devenu libre : de-là la chaleur & l’inflammation du pyrophore; car j'ai démontré bien clairement qu'aucun pyrophore ne peut s’enflammer dans un air bien fec, il faut toujours qu'il y ait de l'humidité, Le) Tome XXIX, Pan, 11, 1786. NOVEMBRE. Tr 332 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, EXPÉRIENCES Sur lArfenic, la Chaux de plomb & l'Acide vitrioliqué fumant ; Par M. SCHÉELE, à Koping. DA PRÈS M. Wenzel (de l'affinité des corps, page 379) je diftillai de l'aikali volatil fur de l'arfenic pour le rendre fixe; mais je ne pus obtenir aucun effet ; & l'arfenic refta aufli volatil qu'avant l'opération. La chofe me paroïfloit incroyable , en ce que l’arfenic peut devenir fixe par foi-mème fimplement par la privation de fon phlogifton : cependant M. Wenzel prétend l'avoir fondu en une maffe blanche avec le‘thalumeau après la fufdite préparation. J'ai trouvé que la chaux de plomb fe diflouc dans l'eau : qu’on triture de la litharge en poudre fine , que l’on verfe de l’eau diftillée deffus, qu’on en remplifle un verre, qu'on le bouche exactement avec du liège & qu'on l’agite fouvent ; après que tout cela a refté une couple de jours & s’eft bien repofé, on verfe l'eau claire, on foufile un peu dans le réfidu, où lon en mêle un peu d'eau imprégnée d'air fixe, on verra devenir l'eau blanchätre, & il fe précipitera de la litharge. £ Quant à l'acide vitriolique fumant, j'avois toujours cru qu’il n’y avoit point d'autre différence entre Jui & le commun qui ne fume pas, qu’une concentration plus où moins forte, & que le plus fort étoit fumant : qu'il eft obligé d’attirer de l'humidité pour devenir liquide , & qu'il perd alors tout de fuite fa nature élaftique. Les expériences faites fur cet objer par M. Dollfufs ( Annal, chim. ) montrent évidemment que le phlogifton ne peut pas être la caufe de cette qualité de l’acide, & que l'acide fumanc n’a pas plus de pefanteur fpécifique que le non-fumant, ce qui prouve que mon idée eft plus qu’une hypothèfe, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 233 LETTRE DE NM SCALRIRE T\T ES QUE IE R, Maître en Pharmacie à Lille, AUCR'É D AC TE ÜU RTD'U:J'OUÙ R'N AT; Movsieve, Je ne connois point la Matière dont s’eft fervi le R. P. Bernardin dans l'expérience que les papiers publics rapportent. On dit qu'il a eu l'honneur de préfenter à l’affemblée une boîre d’étain d’un pied & demi environ d'érendue, qui d’abord étoit froide, mais qu'ayant eu la permiflion de fe retirer en particulier, deux minutes après il préfenta la même boîte, qui pour lors étoit échauffée à ne pouvoir plus la toucher, &c. &c. Sans vouloir prétendre à la découverte de l’Auteur, dont j'ignore les moyens, voici ce que je propofe pour obtenir à peu de frais de la chaleur pendant un certain tems. Je fais entrer dans une boîte d’érain quelques morceaux de chaux vive, immédiatement après que je les ai plongés dans l’eau ; je referme la boîte, qui en moins de deux minutes fe trouve échauffée, au point de ne plus pouvoir la toucher : cette chaleur eft toujours en raïfon de la qualité de la chaux, & elle fe conferve plus ou moins de tems, felon que la faifon eft plus ou moins froide, J'ai l'honneur d’être, &c. Lille, ce premier Septembre 1786. HD -EL1S CR: I PTE ON D'une produdlion végétale analogue aux ÆConferves, du Peji-orange ; ‘ Par M. REYNIER. OK ignore encore quelles font les bornes de l’organifation végétale, & quelles fonc les productions les plus fimples qu’elle nous offre, La fim- ple juxta - polition de la matière organifée produit des formes, & combien ces formes peuvent varier, 334 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, 1 Pendant plufieurs années, j'ai obfervé une production , qui porte tous les caractères des végétaux, excepté la ‘forme régulière; ce qui la voile en quelque forte à nos yeux: elle eft rare, du moins mes re- cherches ont éré infructueufes jufques à prefent, excepté dans le lieu où d’abord je l’avois découverte. Comme tons les faits nouveaux, ou peu communs , qui frappent l'obfervareur, font naturels, mais produits par une combinaifün de caufes difficiles à rencontrer; j'ai cherché à énérrer celles qui peuvent être réunies dans cette circonftance. Cette production (1) reflemble à une gelée de couleur blanchâtre, quel- quefois tirant fur le fauve; on peut la comparer au frai de grenouille pour la denfité & la réfiftance élaftique. À l'œil nud, elle ne pré- fente aucune trace d'organifation , excepté quelques traits d'une teinte plus foncés, & des vélcules plus clairs. Cerre matière eft également facile à féparer dans tous les fens, & ces traits foncés ne préfentent aucune réfftance. Vue au microfcope, elle paroît par tout à-peu-près également tranfparente , & tout ce qu'on voyoit à l'œil nud, paroît plus diftinéiement, mais aufi peu organifé. Eile a cette forme au prin- tems, & au commencement de l'été; mais pendant [es faifons plus feches , l’eau furabondante, & en général les matières évaporables s'é- chappent, & cette plante prend une apparence différente. À mefure que le liquide fe difipe , les fibres paroiflent davantage, & acquièrent de la denfité. Enfin la plante parfaiement defléchée;" eft d'un blanc éclatant, formée de fibres aflez coriaces qui font entrelacées : elle ref- femble à une efpèce de papier , mais d’un tiflu lâche, les fibres étant en- tières & moins mêlées. En prenant cette forme elle diminue de volu- me, au point que l'épaiffeur de trois ou quatre pouces fe réduit à une ligne ou deux. Ce végétal a beaucoup de réffemblance avec les conferves; comnre elles, fon enfemble eft formé de fibres entrelacées, liées par une fub[- tance gélatineufe ; comme elles, elle habite les eaux; comme elles, en fe defféchant, fes fibres paroiflent davantage. Mais ici ces proprié- tés font extrêmes ; la gélatinofité eft fi grande, que les fibres font pref que invifbles , & la diminution de volume dans la déffication plus con- (1) C’eft de cette même fubftance que M, le Comte de Razoumowski parle en ces termes : « Non loin de ce roc coule un ruiffeau, au bord duquel on trouve une peau » femblable à celle dont parle M. Pallas ( Extrait des découvertes faites par divers » favans Voyageurs , tom. 2 ; pag. 390 & fuiv.) & qu’il obferva dans le Tchernoje » ozero (Lac noir ). La fubftance que l’on trouve ici eff jaunâtre , demi-tranfparente, » filamenteufe , fe defféchant facilement lorfqw’on la déchire , & qu’on la met en un » lieu un peu chaud, & devenant alors informe. Expofée à la flamme d’unechandelle,, » elle brûle comme.une fubftance animale ou végétale ,en exhalant cependant une » odeur végétale; çe qui fit que je la pris pour une efpèce particulière de conferve ». Mémoires de la Société des Sciences Phyfiques de Laufanne , rom. I, page 80. \ | | 1 ! ah... SUR L’'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 335$ fidérable. Si les defcriptions des Boraniftes étoient plus complettes, je croirois reconnoître cette plante defléchée, au n°. 2120 de l'Hiftoire des plantes fuifles de M. de Haller ; mais il eft dificile de s’en affu- rer (1). Cette production végétale, ou conferve, puifque fon air l'en rapproche, croît dans un feul endroit où je l'ai vue: c'eft à deux pe- tites lieues au-deflus de Vevey , près d’un village. nommé Brent; le lieu même fe nomme le Sex que pliau, Ze rocher qui pleut. Les idées que je compte propofer fur fa formation , exigent une defcription du lieu où je l'ai recueillie. C’eft au-deffous d’une grotte formée dans le tuf, & fur la pente d'une roche de mème nature qu'elle croît. L'eau qui découle continuellement de la voûte, forme de petits réfervoirs qui S'épanchent fur cette roche, & y forment différens ruiffeaux. On peut obferver que cette eau dépole une matière calcaire trèsabondante, & forme des incruftations de moufles très-belles, La grotte eftfur le pen- chant d’une montagne médiocrement haute, mais très-marécageufe dans cette partie, & à peu de diftance de-là on connoiït des fources fou- frées. Je dois remarquer aufli que les grottes dans leruf, & les in-, cruftations font crès-communes dans tour ce quartier, mais que je n'ai vu cetté conferve que dans ce feul.endroit : il eft vrai que dans aucune je n'ai retrouvé cette pente adoucie & nue qui vraifemblablement facilire fa formation. Ailleurs l’eau tomboit par chûte, ou fe raflembloit en nappe, quelquefois fe diflipoit dans les terres marécageufes qui formoient la bafe. = Il eft difficile de concevoir une produétion d’une organifarion plus fimple, & s’il exiftoit une chaîne des êtres, certainement ici feroit un des derniers chaînons. Cette grande unité d’organifation, nous offre quelques idées fur la manière dont elle eft formée, Cette plante & en général les conferves paroiflent produites par la juxta-polirion de la matière organifée., fans intus-fufception, fans dilatation de germes, fans fécondation même. On apperçoit facilement les loix de certe for- mation dans notre conferve ; elle paroït compofée de couches paral- lèles au courant de l’eau, & d'autant plus épaifles, que l’eau par la na- ture de fon mouvement permettoit le dépôt des matières. Ce dépot infenfible fuit dans fes formes la mème règle : qu'on fe repréfenre un ruiffeau qui coule fur un rocher raboteux, & dont l'eau commence à geler ; l'enduit de glace s'épaillit, mais inégalement , fuivanc l'inégal ———_—————/s“—————————…———————— (r) Un défaut inévitable des claffifications , c’eft d’expofer à prendre deux afpeëts de la même plante , pour deux plantes différentes. Le Baron de Haller nous en ofire un exemple, & M. Adan{n, dans fes familles, un plus frappant : il divife les plantes de cette famille en conferves, dont la fubflance eft charnue & fibreufe , & apona , dont la fubffance eft gélatineufe, Ainf cette plante eft apona au printems , & conferve en automne. 336 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, mouvement de l’eau, & cette couche fuit dans fôn enfemble la forme du rocher primitif. Cette conferve imite parfaitement le tableau que je préfente ; & vraifemblablement doit à la même caufe cette refflemblance. On a déjà pu entrevoir que j’attribue la formation de certe plante à une dépofition des eaux, auffi lente qu’infenfible ; en effet, cette forme paroïc ’annoncer. La mafle entière de cette conferve refleimble au frai de gre- nouilles ; elle en a le vifqueux, l’élafticité, rous caractères qui annoncent la préfence du mucilage prefque pur, & délayé dans une mafle d'eau confidérable. Sa décoloration paroît confirmer cette idée. Le mucilage , fuivant toutes les apparences , eft Le fondement de l'organifation ; il eft le germe de la reproduction, & celui de la nourriture. Dans cette plante il eft prefque pur , & uniquement compofé de la matière primitivement organifée ; il y apporte cette tendance à fe lier qui forme fon eflence, & qu'il fuit dès que l’eau accumulée dans fes interftices fe diffipe. A mefure que l'évaporation s'exécute, les mailles fe reflerrent, & les fibres en devenant vifbles fe canfolident. Cette tendance du mucilage à prendre une apparence fibreufe, paroît clairement dans le defféchement foit naturel, foit artificiel, des végétaux & des animaux, fur-tout dans celui qui fuccède à la vétufté. Le mucilage perd le volume de liquide qui Îe péné- troit , & prend la texture fibreufe : fouvent elle paroît d'elle-même , mais toujours une fracture nous la fair appercevoir. Dans un végétal , le liquide ne parvient qu'infenfiblement, & peut être diflipé en grande partie à Hefues aûffi, excepté quelques plantes des pays chauds , elles ne con- fervent qu'une quantité de liquide très-médiocre, mais fuffifante pour s’oppofer à une trop grande adhéfion qui nuiroit à la circulation de la sève. Dans les plantes ligneufes les poufles de l'année ont cette fragilité, mais elles la perdent à mefure que le rapprochement s’opère. Je dois remarquer que non-feulement c’eft le defféchement , mais aufli l'inter- poftion de nouvelles molécules qui durcit cette efpèce de végétaux. Dans les plantes fugitives , dues à une aggrégation momentanée , comme les biflus, conferves , champignons, moififfures , &c. fur-tout dans lefpèce dont je traite ici, ce dégazement n’a pu s’opérer aufli rapidement, & ces plantes confervent plus ou moins la confiftance molle & vifqueufe du mucilage délayé. Plufeurs obfervations paroiflent venir à l'appui de cette idée. Cette plante defléchée rapidement prend une teinte brunâtre; expofée à l’action du feu, elle fe bourfoufle, répand une fumée neire , & une odeur d'huile brûlée ; avant de s'enflammer , elle prend une apparence char- bonneufe. Confervée dans l’efprit-de-vin , elle y diminue de poids & de volume, parce qu’elle perd l’eau qu'elle contient ; maisen même temselle y prend une confiftance plus grande. Dans les différens morceaux que j’y ai plongés, j'ai reconnu une différence de diminution , d'autant moindre, que j'avois plus exprimé le liquide. Il étoit aufli facile de faifir la pp x orce SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 337 force de l’efprit-de-vin, fuivant la dofe du liquide qui s’y étoit mêlé. De toutes ces obfervations j'ai pu conclure que l'efprit-de-vin n'a aucüne action fur cette plante, comme fur tout ce qui eft mucilage (1). IL eit naturel d'expliquer d'où provenoit cette quantité de mucilage dans un feul lieu, & quelles circonftances favorifoient fon aggrégation en forme régulière. Nous avons vu dans la defcriprion que j’ai donnée de cette grotte, que les incruftations de moufles y font très-abondantes, En effet , leur accroiffement rapide pourroit étonner un homme peu accou- tumé à voir la nature. Ces moufles en fe couvrant d’un enduit pierreux ;, fe. détruifent, & l'eau qui les arrofe continuellement, fe charge des molécules qui s'en détachent. Son cours étant fort rallenti fur le rocher où la conferve fe forme, y dépofe les matières qu'elle contient, & leur tendance à fe lier les rapproche. J'obferverai en paflant qu’une année (1782 ), où l'été avoir été fort pluvieux , où par conféquent ces conferves ne s’éroienc pas defléchées , une partie écoit incruftée , ou plutôt coute leur fubitance étoit pénétrée d’un dépôt calcaire ; quelques parties étoient déjà du tuf. J'ai cru devoir en avertir, afin que ceux qui voudront analyfer cette plante obfervent qu'elle contient toujours plus ou moins de terre calcaire. On ne peut difconvenir que les molécules d’un corps puiffent fe combiner dans fa diflolucion ; & former un nouvel être ; plus fimple à la vérité , mais qui porte les caractères de l’organifme. Différens exemples donnés par les obfervateurs modernes, fans parler des Auteurs anciens donc notre fuperbe ignorance fe moquoit, Le prouvent (2). Mais il eft difficile de concevoir que ces produétions qui n'ont pas dû leur être à un germe fécondé, & dont la forme eft aufli fimple qu'uniforme dans fes parties, puiflent fe former autrement que par aggrégation , & s’augmenter d'une autre manière, L’exiftence des êtres organifés, étant déterminée au tems oùles mailles de la charpente primitive du germe font remplies, doit être infiniment plus courte dans ceux où chaque molécule eft ori- ginairement dans la place qu’elle doit occuper. Aufli voyons-nous, qu'excepté une ou deux efpèces de champignons, toutes ces plantes n’ont qu'une exiftence fugitive. Ces champignons vivaces font en quelque forte les arbres de leur famille, puifqu'ils acquièrent avec l’âge la confiftance Egneufe; & c'eft à cette faculté qu'on doit attribuer leur durée, (1) Cette plante paroît fe rapprocher, non par la figure , mais par la formation & l’analyfe, de celle décrite par Vaillant, Botan. Parif. pag. 41,18, f. 1. (2) Quoiqu’on foit revenu de l'ambition de circonfcrire la nature, il n’eff pas inutile de remarquer ici combien la règle donnée pour diftinguer les êtres organifés , de ceux du règne minéral , eft fautive. En effet , on difoit que les premiers prenoient leur accroïffement par intus-fufception , & les derniers par juxta-pofition. Cette règle bonne pour les êtres les plus compofés, eft fujette à des exceptions , fi o adopte pour les produétions les plus fimples. Tome XXIX, Part, Il, 178G NOFEMBRE, NES 338 OBSERFATIONS SUR LA PHYSIQUE, Le hafard m'a procuré l'occafñon de redifier quelques-unes de mes idées fur le pefi-orangé dont j'ai parlé ( Journal de Phyfique février 1786). Sans décider entièrement qu’elle differe du noftoch de Vaillant, PZ. XI/, fig. 4, je les féparai, & de nouvelles obfervations m’engagent à les regarder comme deux états de la même plante. Pendant que j'examinois une jongermanne fur un vieux chêne, j'apperçus dans les crevafles de l'écorce quelques globules un peu plus gros que des lentilles, gélatineux , ridés à leur furface , & d’une couleur trèsanalogue à celle du pefi- pourpre. Je foupconnai d’abord que peut-être ils éoient des pefis & les fuivis dans tout leur développement. Ces glébules groflirent aflez vite ; & acquirent le volume environ d'une noifette ; leur furface fe fillonna toujours plus, & leurs rides, d’abord fuperficielles , {e changèrent en plis aflez femblables à ceux du nofloch méfentériforme. C’eft alors que fur quelques individus feulement com= mencèrent à fe développer ces lames recourbées qui caractérifent les pefis. D'abord c'étoient des plis un peu faillans ; mais à mefure qu'ils fe déve- loppèrent , ils acquirent plus de convexité, & reflemblèrent enfin au peñ 2221 de Haller, que j'avois plus d’une fois obfervé en Suiffe. La feule différence que j'aie pu remarquer, c'eft que ceux de Suiffe n'avoient pas cerre mafle charnue qui fert de bafe aux lames, ou du moins qu'elle étoit plus petite, puifque je ne l’avois jamais obfervée. Ïl paroît par conféquent que les noftochs méfentériformes font, ou des jeunes individus, ou des plantes non développées de pefis, & que ces deux genres font des divifions abfolument arbitraires & {yftématiques. Ec comme le pefi-orangé reflemble beaucoup au pourpre, & le no‘toch- orangé au pourpre, je crois pouvoir conclure que ces quatre plantes n'en forment réellement que deux; favoir, le pefi-orangé, auquel je fubordonne le noftoch de cette couleur, & le pefi-pourpre , que j'ai vu naître fous la forme de noftoch. Nos connoiffances fur les champignons, & autres plantes congénères ; fon fi fuperficielles , qu'il eft très-probable que le grand nombre des efpèces reçues comme telles, ne font que des variétés, ou plurôt des états différens d’une même plante; & que le nombre des efpèces réelles eft très-perit. Peut-être même n’exifte-t-il point d’efpèce dans certe famille, puifque, fuivant toutes les apparences, elles n'ont aucune génération , & font produites par l’aggrégation de la matière organifée, Fautes d'impreffion à corriger dans mon Mémoire de Février 1786. Page 136, ligne 3, de cette hauteur, Zifez : de cet Auteur. ligne 25 , eft réellement, Z/ez : & réellement. Page 137, ligne 13 , orangé , Ziféz : orangée. + 4e SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 339 SULITE °IDE.S) É PÉREU V ES RELATIVES A L’ADHÉSION; Par M. M.... ARTICLES IN (tr) LIRE RES de l’affinité dans les expériences précédentes, fe manifefte aflez, & femble fe diftinguer de l'attraction , & fe caractérifer nettement, en ce que la bouteille fufpendue en équilibré au-deflus du vafe où on verfe de l’eau à petites dofes, & à la fin, goutte-à-goutre, s'y plonge jufqu'à un certain point à l'inftant où l’eau eft parvenue à la toucher fimplement ; car n'y a-fil pas lieu de préfumer que cela ne fe faic ainf, que parce que l’eau & la fubftance du verre font fufceptibles, lors du conta@ mutuel, de n’occuper qu’un efpace un peu moindre qu: la fomme ou étendue de ceux qu’elles occupoient féparément. Or, en admettant que c'eft en cela que confifte l'afnicé , on ne fauroit la . confondre avec l'attraction, dont la fonction eft de rapprocher les uns des autres des corps féparés par des diftances plus ou moins grandes, & cela fans opérer par elle-même leur copénétration ; ce dernier effet ne peut réfulter que des difpoftions refpectives de ces corps , qui peuvent favo= rifer leur engrenement mutuel, & nous défignons ces difpofitions parle terme d’affinité. L'attraétion , en opérant le contact, pourroit donner lieu à ce que cet engrenement s’effectuât : mais il peut très-bien , fans l'intervention de l'attraction , être effectué par la preffion de l’atmofphère ; & c’eft ce qui eft confirmé par le réfulrat de l'expérience fuivante. La bouteille cylindrique , employée dans l’expérience rapportée au précédent article, a été de nouveau fufpendue en équilibre au trébuchet; & on avoit cette fois-ci pris la précaution de placer fous le plateau, qui contenoit Le contrepoids de la bouteille , une foucoupe de fer remplie de fable fec rrès-fin , fur lequel ce plateau fut laïffé appliqué, après qu'on l'y eut bien comprimé, afin que le contact ne füt nullement interrompu entre fa furface inférieure & le fable: en cet état la bouteille pouvoic faire de petices ofcillations, fans que le plateau fe dérangeät aucunement de fa pofition. EE (x) Voyez l'Article premier, Journ. de Phyfq.oëtobre , pag. 187, 1786. Tome XXIX, Part. Il, 1786. NOVEMBRE. Vv 2 340 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, On verfa alors de l’eau par petites portions , & fur la fin goutte à goutte dans la cuvette placée fous la bouteille jufqu'à ce qu’elle eûc atteinc la tranche du contour inférieur; & il fut obfervé , que précifément dans cec inftant elle s’eft enfoncée dans la mafle d'eau à environ une ligne de profondeur, & qu'en même-tems le plateau oppofé qui contenoit le * contrepoids, fut détaché de la mafle de fable fur laquelle il étoit appliqué, & qu'il fur foulevé d'autant. Ces réfultars peuvent être regardés comme bien conftarés. M. B***, aufli exact manipulateur qu’il eft éclairé phyficien , a bien voulu exécuter cette expérience & en rédiger les détails, que nous avions confidérés enfemble avec la plus grande attention. Ici d’un côté la bouteille étoit en prife à l'attraction de Ja part de l’eau, & le plateau oppofé de la balance en prife à l'attraction de la part du fible, L'affinité a pu feule décider de l’immerfion , & elle ne pouvoit s'exercer qu'entre l'eau & la bouteille, L'application de Peau à la bouteille, ou fuperficielle , ou bien intime à un certain poinc à caufe des pores qui en criblent la furface, doit plus ou moins augmenter la pefanteur, con- formément au fenriment qui, a été"ädopté, Lorfque ces obfervations ont'été faites, on a ‘omis d'examiner fi en dedans de la bouteille le niveau de l’eau étoit, comme en dehors ,au-dsffous du plan de la tranche du contour inférieur de la bouteille , & s'il ne l’étoit pas moins dans la circonftance où elle étroit clofe, que dans celle où elle avoit été laiflée ouverte au haut: dans la première, l'air auroit pu en dedans être un peu plus comprimé. On a cru auili pouvoir fe difpenfer d'éprouver , en terminant chacune d&ces expériences , s’il ne faudroit pas employer une force plus puiflante pour furmonter la réfiflance de l’affnité en détachant la bouteille de la furface de l’eau dans la première expérience que dans la feconde , où l'air contenu dans la bouteille eft un peu comprimé, & a pu contribuer par un furcroît d'élafticité à opérer avec plus de force la féparation. M. B*** a préfumé qu’il pourroit être avantageux , pour fe procurer ges notions plus complètes, de varier à quelques égards l'expérience précédente: il a fubftitué à la boureille une couronne de buis, de 8 lignes d’épaiffeur, dont fe diamètre extérieur étoit de 22 lignes, & celui du vide qu’elle embrafloir, de 11 lignes, & par conféquent la largeur de la couronne étoit par-tout de $ : lignes:ilavoir collé fur la furface fupérieure de cette couronne une lame circulaire de verre de même diarnêtre ; après l'avoir fufpendue en équilibre à unstrébuchet, il l’appliqua par l'autre face, fur une mafle d’eau qu’elle rafoit. Or ; felon qu'il a été calculé, cette dernière furface en contact avec l'eau embrafloirune étendue de 285$ lignes quarrées, tandis que l’étendue embraffée par l’autre étroit de 320 lignes quarrées , ce qui donne à très-peu-près le rapport de 3 à 4. Les forces employées erfuite pour détacher de la furface de l’eau la couronne SUR L'HIST, NATURELLE ET LES ARTS. 343 appliquée fuccellivement par l’une & l'autre face, ont été de 154 ! grains pour la premicre, & de 196 pour la feconde, & ce rapport efl bien éloigné d'être tel que celui de 3 à 4. Il a fallu, pour acquérir ici un rapport des réfiflances , égal à celui des forces employées , avoir recours au même procédé qui a fervi pour la première expérience exécutée avec la bouteille & rapportée à l’article précédent ; c'eft-à-dire, ajouter de part & d’autre, à chaque terme du rapport 285 à 380 , des nombres égaux , Jufqu’à ce qu'il devint, par ces accroiffemens refpeétifs, conforme à celui de 154 à 189. On y eft parvenu par une addition commune du même rombre 6$ , qui exprime dès-lors l'intenfité de l’affinité , qui concouroit avec la preflion verticale de l'air, à tenir dans l’une & l’autre circonftance la couronne appliquée fur la furface de Peau. 285 +65 . 380 +65 250 À 445 Pour confirmer encore davantage les conféquences que nous avons tirées de cette dernière expérience , je l'ai répétée, en donnant des dimenfions différentes aux circonférences extérieure & intérieure d’une autre couronne de buis que j'ai employée dans celle-ci. Le rapport des étendues des furfaces en prife à la preflion de l’atmofphère , c’eft-à-dire de la couronne couverte & de la couronne non couverte, étoir celui de 346 à 170, & le rapport des forces employées pour enlever la couronne fucceflivement couverte & non découverte étroit celui de 115 à 73. Le nombre 136 s'eft trouvé convenable pour exprimer la valeur de l’afinité, en forte qu'en l’ajoutant à chacun des deux termes du rapport 346 à 170, les fommes fe font trouvées dans le rapport des forces employées. 346 + 136 (— 482) : 170 + 136 (— 306) :: 115: 73. La conformité des réfultats des trois expériences précédentes, ne conftate-t-elle pas aflez évidemment , que dans l’évaluarion de la réfiftance oppofée ici à la féparation des folides d'avec l’eau , il faut admettre néceffairement avec la preflion de l'atmofphère le concours d’une autre caufe que j’ai préfumée être l’afinité, qui y eft en raifon des furfaces appliquées fur l'eau. :: 154: 196, qui eft celui de 3 à 4. AYRUTUr CENT INE Influence de la prefflion de l'atmofphère, fans l'adhérence de l'eau ou du mercure à certains folides polis. Un difque de buis dd a été fufpendu à un trébuchet, & appliqué fur la furface d’une mafle d’eau; il étoit tenu en équilibre par un contrepoids de 112 grains : on l’a placé fur la platine d'une machine pneumatique ; LT 342 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, & après avoir retiré 19 grains du contrepoids ( ce qui fit enfoncer un peu plus le difque dans le fluide), on couvrit l'appareil avec un récipient d'une amplitude convenable, Dès le premier coup de pifton le difque fut détaché de la maffe d'eau , & foulevé par le contrepoids, quoique réduit à 93 grains : enfüire après en avoir retranché encore 13 grains & l’avoir réduit à 80, on donna cinq coups de pifton , fans que le difque ; qui avoit été de nouveau appliqué fur l'eau, cefsât de fe venir appliqué fur la furface de l’eau : un fixième coup de pifton l'en fépara. Une troifième fouftraétion de 8 grains ayant enfin réduit Le contrepoids à 72 grains, treize coups de pifton furent donnés fucceffivement , & ce ne fut que le dernier qui opéra la féparation du difque d'avec la mafle d'eau. Au refte, dans l’exécution de cette expérience, la machine pneumatique n'étant pas aflez parfaitement aflujectie, effuya quelques fecouffes, plus ou moins légères ; ces fecoufles fervent à établir que l'influence des caufes, qui contribuent à retenir le difque appliqué fur l'eau, étoit fupérieure jufqu'à un certain point à celle du contrepoids. À la fin de l'expérience, le récipient tenoit fortement à la platine. La hauteur du mercure dans la branche extérieure d'indication de l'éprouvette, au-deffus du niveau de celui de fa capfule logée en dedans du récipient , éroit d'environ $ = lignes. Et cela conftate qu'on n'avoit raréfé l'air contenu dans le récipient, qu'a un degré tel que celui qui correfpond à la raréfaction exprimée par la hauteur de $ : lignes de mercure dans l'éprouvette. Quand en premier lieu on plaçoit l'appareil fur la platine de la machine pneumatique , & avant de l’avoir couvert avec le récipient, on a retiré 19 grains du contrepoids du difque, on a diminué d’autant la force , qui tend à féparer le difque d'avec l’eau. Cependant après le premier coup de pifton fuivant, le difque fut détaché & enlevé par fon contre- poids réduit de 112 grains à 93 ; l'intenfité , foit de l'attraction , foit de l'affinité, n’étoit cependant pas devenue moindre qu'auparavant, mais au contraire elle étoit devenue plus forte, parce que celle de l’affinité doit s’accroître en raifon de l’étendue des furfaces de contiguiré, & que par la fouttraétion des 19 grains les furfaces de contiguité s’éroient étendues ici en conféquence de l'immerfion du difque rendue par-là plus profonde. IL faut donc qu’il intervienne ici avec l’affinité ou l'attraction , l'ation d'une autre caufe pour completter la réfiftance à la féparation , laquelle caufe fe combinant avec l'attraction ou l'affnité, doit être cenfée fufceptible par elle-même de perdre alors de fon intenfité, & même bien plus que les deux autres n'en confenvent de la leur, ou ont pu en acquérir de furcroit , puifque, tout compenfé après ce premier coup de pifton, les deux différentes forces combinées ont eu moins d’intenfité qu’elles n’en SUR L’'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 343 avoient auparavant; & par la même raifon, cela n’a pu manquer d'avoir lieu fucceflivement après les autres reprifes de coups de pifton jufqu'au dernier de chacune , lequel opéroit la féparation du difque , comme on l'a énoncé plus haut, N°, 1. Or, on conçoit que cette caufe bien indiquée ici ne peut être autre que le fluide aérien , dont l’élafticiré le difpofe à comprimer le difque appliqué fur l'eau , mais dont l'aétion ne peut manquer de perdre de fon énergie à mefure que cet air vient à être raréfié de plus en plus dans le récipienr. Cette intervention de la preflion atmofphérique nous fournit l’expli- cation des phénomènes de la réfiftance à la féparation du difque d'avec l’eau. Elle ne peut manquer d’avoir une grande influence dans les rétulrats dont je viens de faire mention. En effet, on a éprouvé ici, qu’à mefure que des réductions de plus en plus confidérables ont éré faites conféçutivement au contrepoids du difque appliqué für l'eau, il a fallu multiplier de plus en plus aufli les coups de -pifton, c'eft-à-dire, diminuer de plus en plus la denfité de l'air contenu dans le récipient pour obtenir la fé} aration du difque d’avec l'eau. Ceci nous indique d'une manière évidente que l'adhérence ou affinité qui a lieu entre l'eau & le difque, ne contribue pas feule à retenir le difque appliqué fur l’eau, & que dès-lors la preflion de l'air doit réeflement y contribuer en plus où en moins. La néceflité de multiplier fucceflivement les coups de piflon dans les circonftances précédentes, où les réfftances à la fépararion du difque d'avec l’eau étoient augmentées par l’accroiffement des fouftractions faites à fon contrepoids, démontre ici l'influence de la preflion atmofphérique. Cette influence , celle de l'afinité , dont l'intenfité y eft toujours égale , & le contrepoids , font comme trois élémens d'après lefquels on peut déterminer la mefure des degrés de raréfaction fucceflivement procurés dans les circonftances énoncées au N°. 1 , à l'air contenu dans le récipient; & par des expériences bien conduites on parviendroit peut-être à en afligner les valeurs, & à déméler dans quelle proportion Padhérence d'une part, & l'élafticité de l'air de l’autre, y-contribuent dans ces trois circonftances. : Puifqu'on parvient à faciliter la féparation du difque d’avec, l'eau en multipliant les coups de pifton ,en ce que J'air qui, par fa denfité & fon élafticité, contribue avec l’affinité de l’eau & du verre à y mettre obftacle, en eft de plus en plus raréfié, on ne peut manquer de reconnoirre que le procédé de faire des fouftractions aux contrepoids qu'on me propofa d'employer pour démèler quelle part peut ici avoir la preflion de l'air, ma conduit à en cônftater l'influence de la manière la plus évidente, & même, ce femble, à en évaluer l’intenfité. Le difque de buis 4 fufpendu en équilibre au trébuchet par un contre- poids convenable , & appliqué fur la furface d'une mafle d’eau , après 4 344 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, avoir réfifté en plein air à une addition de 127 grains dans le plateau oppofé, a été déraché par Le 128° grain. Alors , après qu'il eut été Buñraie 12 grains du plateau, en forte qu'il n'y en refta que 116, Le difque, quand l'appareil eut été mis fous Le récipient de la machine pneumatique, fut enlevé après le premier-coup de pifton. F Dans une nouvelle épreuve , après qu'il en eut été fouftrait encore 24 grains du contrepoids réduit alors à 92 grains, ce ne fut qu'après huic coups de pifton que le difque fut détaché. Dans ces deux épreuves la réfiftance oppofée à La féparation du difque fut bien moindre dans le vide que dans l'air libre. Quoique les réfulrats de ces expériences foient bien différens de ceux de la fameufe expérience faite par M. de Morveau fur le mercure, & femblent d’abord y être en quelque façon oppofés (1), ils ne s'en con- cilient pas moins avec ceux-ci. Pour s'en convaincre il fuffit de comparer les molécules fphériques de l’eau à celles du mercure qui font prodigpieu- fement plus menues que les premières ; c'eft dans le rapport inverfe de leurs groffeurs refpectives qu'eft celui de la quantité des molécules fphé- riques de l’un & de l'autre Auide qui font appliquées à la furface du difque dans les deux expériences que je compare ; & c’eft dans ce rapport inverfe que fonc les points de contiguité des deux fluides à certe furface dans les expériences dont il s'agir. C’eft donc dans le même rapport que font les intenfités refpedives des affinités & des réfiftances oppolées de ce chef à la féparation ; celle oppofée de la part du mercure a dû être bien plus grande, même toutes chofes égales d’ailleurs ; qu’elle n’a pu l'être de la part de l’eau dans nos dernières expériences ; de forte qu'il devient très- évident que , pour concourir avec l'afñinité à contenir le difque appliqué {ur Le Auide dans la première expérience, il a fallu un air bien moins denfe ue celui employé pour opérer cet effet par rapport au difque appliqué ee l'eau. IL n’a donc pas été néceffaire , pour en effectuer la féparation, de raréfier autant l'air ia le récipient lorfqu'il y éroit appliqué für l’eau, que s’il l'avoit été fur le mercure, comme dans l'expérience de M. de Morveau. La preflion de l'air eft un fupplément à l'affuité pour réfifter aux forces employées à opérer la féparation ; ce fupplément a pu être d’autant moindre que l'intenfité de l'affinité s'eft trouvée plus confidé- rable : difons mieux , l’affinité entre le difque de M. de Morveau & Le mercure n’avoit pas befoin du fupplément de la preflion de l’atmofphère pour l'emporter fur le contrepoids ( puifque , felon M. de Morveau , la colonne de mercure fufpendue dans la jauge étoit eñtièrement defcendue), tandis que d’un autre part l'affinité qui avoit lieu entre Le difque & l’eau, avoit befoin du concours de la preflion complète dé l'atmofphère pour oo (2) Journ, de Phyfq. 1773, Mai rélifter k . SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS 345 pour réfifter àl'action d'un contrepoids, par exemple , de 92 grains dans ma feconde expérience (N°. 9.) Cet accord entre mon expérience & celle du favant Phyfcien qui m'en a fourni l'idée, ne me laiffle aucun doute fur l'exactitude de la mienne. Ainfi on peut regarder les réfultats des deux expériences com me des obfervations qui, loin d'être oppolées, fe confirment récipro- quement. Voici d'autres faits qui m'ont paru propres à fournir quelques nou: veaux points de vue à cet égard. 1°. Un petit, difque de glace de 10 lignes de diamètre, pefane $7 = grains, placé en équilibre au trébuchec fur du mercure, n’a pu en être détaché que par un effort de 124 grains, ce qui donne 66 : grains por l'exprefion de l’'intenfité de l’adhérence de ce difque au mercure; Car 66 : + 57: — 124. 2°. On a employé , à la place de ce difque, une cloche de verre blanc & mince, tirée d'un verre à boire, dont on avoit détaché le pied & ufé les bords fur une pierre de grès. Le diamètre de leur con- tour étoit de 24 lignes. Mife en équilibre au trébuchet fur la fur- face d'une mafle de mercure qui fut verfée par parties, elle en fuc détachée par une furcharge de 9 ou 10 grains, ajoutée X'fon contre- poids. Le vafe où fur verfé le mercure, étoit un gobelet de verre aîlez étroit relativement à l'aire du difque, & il ne reltoic guère qu'un intervalle de :2 + lignes entre les parois du vafe & la circonférence du difque; de forte que cette circonférence coincidoit prefque fur le plan incliné de la gouttière formée par la mafle du mercure tout au- tour des parois du vafe qu'elle joignoit. 3°. On a varié cette expérience en employant avec la même cloche de verre fufpendue aufi en équilibre au trébuchet, une foucoupe de parcelaine affez grande pour que les bords de la cloche, appliqués fur le mercure, le fuffent par-tout fur un plan parfaitement horifon- tal avant l’application. ” Le poids de la cloche étoit contre-balancé par x onc. 36 < er. Il fallut pour le détacher en ajouter ..... 38 Poids accumulés fur le plateau oppofé lors Fa la féparation de la cloche PR LEE ME SE à 75 Dans le cours de l'expérience, à mefure qu'on faifoit au contre- poids de la cloche de rouvelles additions de grains, elle fe dérachoie par intervalles de la mafle du mercure. Mais comme je m'appercus que jufqu'à la dernière addition, il fufiloic de la replonger un peu dans le mercure, pour qu'elle continuât à y adhérer d'elle-même (ce qui arriva fix à fept fois ) , je continua toujours à furcharger 5 rain par grain, le contrepnids, jufqu'à ce qu'enfin j'éprouvafle que : Tome XXIX , Part, I, 1786. NOVEMBRE. X x 346 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE ; je tentois en vain de renouveller l'adhérence de la cloclte au mercure en l'y replongeant. J'ai penfé que dans ces renouvellemens fucceffifs d’adhérence , la cloche étoit retenue en vertu de l'application latérale du mercure dans Jequet je l’enfonçois aflez avant à chaque fois & de plus en plus. Ainfi il n’eût fallu compter pour évaluer l’'intenfité de l’adhérence du mer- cure, au plan horifontal du bord circulaire de la cloche, que le nombre de grains employés précédemment à la première féparation. Pour y remédier j'ai recommencé lexpérience, & en ne furchargeant que grain à grain le contrepoids de la cloche, j'ai trouvé qu'un der- nier demi-orain avoit enlevé la cloche & que lation de l'adhérence mavoit été, ( celui-ci non-compris), que de 9 = grains accumulés fans effet. Ce réfulrat fert à établir que dans l'expérience du n°. 13, faite avec la même cloche, j'avois mal-à-propos préfumé que les difpofitions du vafe retréci avoient rendu l’adhérence moins forte qu'elle n’auroit dû lPêtre. ; L ET T'R'E AT M SDS E SL ÉAONT ÉURMANE RIRES Contenant la deferiprion d'un nouveau Baromètre portatif, plus jimple , plus parfait & moins fufceptible d'accidens , que tous les autres faits précedemment ; Par M. J. H. HURTER, Peintre de LL. MM. Britanniques ; Agent de S. A, S. Monfeigneur le Murgrave de Bade, &c. &c. &c. en Angleterre, & Propriétaire d’une Manufaëure d’inflrumens de Mathématiques , Phyfiques , Optiques & Aflronomiques, à Londres. É À grande utilité des baromètres, & les accidens qui arrivent fré- quemment aux obfervateurs, avec ceux que l’on a fairs jufqu’à ce jour ont engagé les plus célèbres Mécaniciens à chercher à les perfectionner. Les progrès de la phyfique expérimentale , fur-tout la météorologie ren- dent aujourd'hui un bon baromètre portatif, un inftrument indifpen- fable. Plufeurs artiftes renommés ont déployé beaucoup de génie pour la conftruction de cet inftrument , & ont réufli jufqu'à un certain point; mais ils ne font pas parvenus encore à cette perfe@tion fi defi- rable. MM. de Luc &: Ramfden s’y font particulièrement diftingués ; le SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 347 3 baromètre de M. de Luc eft inconteftablement le plus parfait: sl étoit moins compliqué, il eût été d’une utilité plus générale; mais cette difficulté a été un obftacle à fon exécution, & les ouvriers ont été rebutés. M. Ramfden a conftruit le fien d’une manière différente : celui de M. de Luc eft fait en fyphon; l’autre eft avec un réfervoir dans lequel eft plongée la partie ouverte inférieure du tube. Par le, moyen d’une vis au-deffous du réfervoir, on fait monter le mercure au haut du tube, lorfqu'on veut tranfporter le baromètre; mais cette précaution n'eft pas fufifante, la grande mafle de mercure contenue dans le ré- fervoir, occafionne de fi grandes ofcillations dans le tube, que fi par la moindre inadvertance, on lui donne la plus petite fecoufle pendant qu’on le tient & que la partie fupérieure eft en haut, elles manquent rarement d'emporter le haut du tube; mais ce n’eft pas le feul défaut de ce baromètre , il en a un fecond pas moins confidérable , c’eft quand on a fermé le baromètre fur le haut de la montagne, où il fait ordi- nairement plus froid que dans la plaine, le mercure fe trouve condenfé, & lorfqu’on defcend dans la plaine, le mercure fe di- late & ne trouvant rien qui cède vers fon embouchure , il fe fait jour par le haat en caffanr le tube. Toutes ces imperfections” jointes à bien d'autres connués à tous ceux qui en ont fait ufage, & les invitations d'un grand nombre de Phyficiens refpectables m'ont déterminé à en- treprendre l'exécution de celui dont jevais donner la defcription. M. Cavallo croyoit avoir trouvé un moyen d’en couftruire un fur les principes de celui de M. de Luc, mais beaucoup plus fimple & plus léger; j'en entrepris l'exécution & j'en fis plufieurs qui à la fin nonc été d'aucun fervice, & après bien des peines & beaucoup de frais, il fallut les mettre au rebut & fonger à une autre invention plus pratica- ble, , Planche première. AAA. Le baromètre fans fon pied, BBB les trois jambes, C un quarré avec quatre vis qui fervent à mettre le baromètre dans une poftion verticale, aa les échelles françoifes, bb les échelles angloifes ; les pouces françois font divifés en 12 lignes, 9 de ces lignes transformées en dix parties, forment le nonius & fubdivifent les pou- ces en 120. Les pouces anglois font divifés en 20 & 24; de ces 30 transformés fur le nonius en 2$ , fubdivifenc le pouce en 500 parties effedtives ; mais l’on compte chaque divifion du nonius anglois dou- ble , ainfi on fait le calcul par millièmes de pouces au lieu de cinq- centièmes, Au-deflus du nonius fe trouve une tête de vistdegappel 2, qu’on tourne horifontalement pour monter ou defcendre le nonius , & l’ajufter avec la plus grande exactitude; a eft un poids qui fert à indiquer quand le baro- mètre eft dans fa parfaite polirion verticale où perpendiculaire ; il ef Tome XXIX, Part. II, NOVEMBRE. 1786. Xx 2 348 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; arrêté intérieurement par une efpèce de fourche qui communique avec la tête de vis, e pour l'empêcher de balotter quand on tranfporte l'inftru- ment d'unendroit à l'autre; pour le dégager il faut tirer en bas ladite tête de vis dd : ff'eft le thermomètre avec les échelles de Farenheit & de Réaumur. ge fonc des crochets de laiton qui joignent le quarré e au trépied BBB. Deux crochets font fixés à la jambe de derrière pour répondre aux deux autres, & également arrêtés audit quarré. D ef Le réfervoir, #xé par fa partie inférieure à un cylindre à pas de vis, qui fe vifle dans un autre cylindre À au-deflous pour monter ou defcendre à volonté le réfervoir ; la partie intérieure du cylindre à vis eft occupée par un reflort fpiral, dont un petit boue fort par la fente indiquée, & qui fert pour comprimer le reflort par le moyen du dernier cercle cordonné qui fe viffe en bas & fe fépare des trois autres appartenans au réfervoir ; au-deflus du reflort eft attachée une peau qui ferme le réfer- voir, mais qui eft aflez lâche pour fe prêter au mouvement du mercure ou du reffort ; à la partie inférieure du tube eft fixé un cylindre de bois, qui répond exactement à l'ouverture au fond du réfervoir couvert de la peau; le réfervoir étant viflé contre l’ouverture dudit cylindre, & par conféquent contre le tube de verre, empêche la communication avec l'air extérieur. JN. B. Je parle toujours du baromètre dans fon état d'inaétion , car le réfervoir n’a point de mercure, il fe trouve dans une boîte de buis féparée, & on ne le vide dans le réfervoir qu’au moment qu'on veut fe fervir du baromètre. C'eft-là le grand avantage de ce baromètre : aucune fecoufle ne le peut déranger ; la quantité de mercure dans le tube de verre étant fi petite, qu’elle eft incapable d'aucun effort dangereux , parce que fi le mercure reçoit quelques impreflions, foit par un choc, foit par fa dilatation, le reflort fe prête fufifamment à tout. Si Von veut fe fervir du baromètre, on commence par vider le mercure de la petite boîte dans le réfervoir de buis: on le déviffe enfuite, & on verra defcendre le mercure dans le tube; quand il eft defcendu à-peu-près à fon point , c'eft ce que l’on verra par l'échelle , alors on l’ajufte en le reviflant en haut, c’eft ce qui fait monter la fottille d'ivoire qui fert à indiquer la hauteur convenable par fes extrémités qui doivent toucher au cercle noir qui eft au bout du cylindre de bois; dans cet état il eft prêt à être mis en expérience : c'eft à-peu-près les mêmes opérations dont on fe fert pour le vider , excepté qu'on penche le baromètre pour faire rentrer le mercure prefqu'en haut du tube. [l faut feulement prendre garde de ne le pas trop pencher, afin que { partie inférieure refte rou- jours plongée dans le mercure: pour cet effet il faut un peu monter le réfervoir , & quand le gube ‘eft plein on le ferme tout-à-fair. Alors le mercure peut être vidé hors du réfervoir dans la petite boîte, Pour fermer tout-à-fait le baromètre , il faut après avoir ôté le crochet 2 z du quarré e & mis à leurs places dans le dedans des jambes B BB, tourner lefdites Te Te Ty ae É SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 349 jambes du bas en haut : ils tournent fur leurs axes circulairement , & fe joignenc contre le corps du baromètre au haut par le moyen d’une pointe qui entre dans un trou fait pour les recevoir ; deux autres morceaux de bois font également placés l’un contre le thermomètre pour l'en garantir, & l’autre à fon côté oppofé pour le recevoir; moyennant ces prégaurions le baromètre eft en parfaite sûreté : on Ôre alors le quarré avec les quatre vis qu'on peut mettre dans la poche. Indépendamment de la fupériorité de ce baromètre fur les autres de fon efpèce, il a encore ce grand avantage d’être confidérablement plus léver & moins volumineux. Il ne pèfe que trois livres & demie , tandis que les autres les plus légers en pélent au moins huit, OBSERVATIONS Sur cromins a boyau de ver-a-foie', de Dom Casgois ; Par M. CAZALET, de Bordeaux. Dés Casrors, Bénédictin, eft le prémier qui ait fait connoître ue les fils retirés des boyaux de ver-à-foie étoient très-fenfbles à l'humidité, & qu'ils ont la propriété de s’allonger en raifon de la quantité d’eau qui les pénètre. [l a également obfervé que quelque tems qu'on laifle ces fils dans l’eau, ils n'y fubiffent aucune altération , & qu'ils n'y prennent qu'une quantité d’eau au-delà de laquelle leur féjour le plus long dans ce liquide ne peut rien ajouter, Le point où ces fils ceflent de s’allonger étant plongés dans l’eau , a été nommé par Dom Cafbois , point de fatu- ration. Il dit encore que tous les fils de boyaux de vers-à-foie, pris au hafard , à compter du terme de leur plus long allongement qui eft celui où ils font parfaitement pénétrés d’eau, fe raccourciflent tous dans Île même rapport en paflant par le même degré de féchereffe. Ce raccour- ciffement a été eflimé par dom Cafbois d'un centième de la longueur du fil faturé d’eau. C'eft d'après les propriétés & les obfervations rapportées fur les fils de boyaux de ver-à-foie , que Dom Cafbois a conftruit des hygromètres donc je vais rendre compte. Pour conftruiredes hygromèrres toujours comparables, il faut partir de deux points fixes ; Dom Cafbois a pris pour le premier terme le point où les fils de boyaux de ver-à-foie érant plongés dans l'eau , ceffent de s’allonger; & pour le fecond , le degré de contraction de ces fils opéré par la fécherefle. Comme Dom Cafbois pofe pour principe que tous les fils pris au hafard , d’égale longueur, fuivent Ja même marche, & qu'il dix 350 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, avoir obfervé que depuis la plus grande fécherefle jufqu’à l'entière fatu- ration du fil avec l’eau, les fils s’allongent d’un centième; il mefure alors les fils faturés d’eau, prend la centième partie de leur longueur, & cette centième partie forme fon échelle, qu'il fubdivife enfuite en cent parties. Dom Cafbois conftruit des hygromètres de deux efpèces , mais toujours fur le même principe. Le premier & le plus fimple, font pluleurs fils noués bout à bout, qui pendent le long d'une muraille : après avoir faturé d’eau ces fils ainfi noués, ils fe trouvent tendus par un poids d'une demi-onte , terminé par une aiguille horifontale qui monte ou defcend fur fon échelle, fuivant les allongemens ou raccourciffemens du fil. Pour qu’un hygromètre conftruit de la forte puifle donner des réfultats fenfibles, il faut que le fil ait au moins dix pieds de long. È Le fecond hygromètre de Dom Cafbois , eft un fil feul de boyaux de ver-à-foie appliqué à un mécanifme peu différent de celui de l'hygromètre à cheveu de M. Sauflure. M. Richer, très-habile Mécanicien , qui a été chargé par Dontif@afbois de la conftruction de plufieurs hygromètres à cadran, divifés d'après les principes ci-deflus, n’a pas tardé à s'appercevoir, que quelque précifion qu'il ait apportée à la conitruction de ces inftrumens, ils ne fe fuivoient pas dans leur marche. Il en a cherché la caufe, & il s’eft apperçu par nombre d'expériences , que le vice de ces inftrumens venoit du degré d’allonge- ment des fils, Tous ne fuivent pas la même marche, comme Dom Cafbois le dic: les plus gros font ceux qui s'allongent le plus, & la différence qu'il a obfervée dans l'allongement du plus gros au plus finidans des cordes de 205 lignes de longueur, eft de de ligne ; on fenc combien une telle différence doit mettre de l’incertitude dans les variations de ces initru- mens, c'eft ce qui a obligé M. Richer à conftruire ces hygromètres en prenant pour premier terme le point de faturation de l’eau, & pour fecond la comparaifon d’un hygromètre de Dom Cafbois, c’eft-à-dire , qu'après avoir pris le premier terme, qui eft celui de faturation, M. Richer laïfloit mettre en équilibre cet inftrument à côté d’un autre; & après deux jours fi l'étalon fe trouvoic, je fuppofe, à 40 degrés, il marquoit 40 degrés à l'endroit où l'aiguille de Pinftrument à divifer fe trouvoit , & il divifoit enfuite l'efpace entre ces deux points en 40 degrés; par ce moyen M. Richer a conftruit plufieurs inftrumens qui fuivent exaétement la même marche. M. Richer voyant que fes hygromètres une fois dérangés, il n’étoic plus poflible de compter fur un nouveau fil de ver-à-foie de même longueur que le premier , avoit imaginé de réduire cous les fils à la même groffeur par le moyen d’une filière. Cela auroit remédié à une partie des incon- véniens; mais comme il eft probable que la matière de tous les fils ne jouit pas également des mêmes propriétés , on auroit eu néceflairemenc des différences dans les réfultats, Quelques-unes des difficultés qui fe SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 3ÿr préfentent m'ont engagé à chercher un fecond terme aufli sûr que le premier déjà trouvé par Dom Cafbois. J'ai fait les expériences relatives à ce fujer, & voici le réfulat. Après avoir fait conftruire par M. Richer un hygromètre à cadran, compofé de deux fils rendus par un reflort en fpirale, dont la forceipeut être évaluée à demi-once, j'ai placé tout l'appareil dans le bain-marie d'un alambic qui étoit plongé dans fa cucurbite conrenant la quantité d’eau bouillante néceflaire, l’eau a toujours bouilli dans la cucurbite jufqu'à ce que les fils de boyau de ver-à-foie aient ceflé de fe contracter ; après une heure d’une parfaite ftation , j’ai marqué fur le cadran le point où l'aiguille éroit fixée ; pendant trois heures qu’a duré l'expérience, le thermomètre plongé dans le bain-marie indiquoir 73 degrés, divilion de Réaumur, tout l'appareil retiré & refroidi a été plongé dans l’eau , les fils ont ceflé dess'allonger au bout de deux heures; mais pour plus grande sûreté ils ont refté dans l’eau quarante-huit heures; le point où l'aiguille s’eft fixée fur le cadran a été marqué pour fecond terme, & comme l’efpace compris entre les deux termes occupe les ? d’un cercle de 4 pouces de diamètre , j'ai fait divifer cet efpace en 200 parties; la marche depuis la plus grande féchereffe de l’atmofphère, jufqu’à la plus grande humidité eft à-peu-près de cent degrés, & occupe le milieu des deux termes. Comme mon hygromètre eft conftruit fur deux données sûres, je place o au premier terme pris dans la cucurbite chauffée, & 200 au terme donné ar Le fil faturé d’eau. Cet inftrument eft aufli fenfble que ceux que j’ai vus chez M. Richer , là longue chaleur qu'ont éprouvée les fils, n’a produit aucun changement à leur qualité. Je m'occupe depuis bien des années des moyens de reconnoître combien d’eau contient un pied cube d’air , lorfqu’une demi-once d’alkali fixe en poudre occupant une furface de neuf pouces quarrés augmente d’un poids dérerminé dans un tems donné; j'ai fur cet objet quelques données sûres, & dans peu j'efpère pouvoir apprécier avec mon hygromètre la quantité d'eau contenue dans une quantité donnée d'air, lorfque l’hygromètre indique tel ou tel degré d'humidité, A l'hygromètre que M. Richer vient de me conftruire, j'ai fait ajouter un baromètre & un thermomètre ; comme le tout forme un inftrument d'une forme agréable, on ne fera pas fâché d’en trouver ici la defcription. Sur une tablette d’un pied de long & fept pouces de large , eft pofé un focle de quatre pouces d'élévation. Les deux extrémités du focle font furmontées de deux colonnes de vingt-un pouces d’élévation jointes à leur chapiteau par une frife architravée; dans l’intérieur d’une des colonnes pañle un tube de baromètre dont la cuvette eft pofée dans l'intérieur du focle, le tube du baromètre eft coudé & pañle dans l’intérieur de la frife 352 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, pour fortir au milieu, De chaque côté du tube eft une glace aflujettie dans la frife , c’eft fur ces glaces qu’eft la divifion du baromètre. Entre le tube & la glace eft une cremailliére pour faire defcendre ou monter un nonius de glace qui fert à apprécier la hauteur du mercure jufqu’à + de ligne, l’enfemble de l'inftrument eft d'ordre dorique un peu fwelte , terminé par un obélifque qui eft formé d'une portion du tube du baromètre & des glaces où eft la divifon. Entre les deux colonnes eft une glace de vingt-un pouces & demi de haut fur fix pouces de largeur, qui tourne fur deux pivots ; cette glace fans aucun chaflis porte un thermomètre à mercure incruflé dans la glace, & dont la boule fe trouve ifolée dans fon épaiffeur. C'eft fur cette glace que font gravées les divifions du thermomètre & de l'hygromètre ; le mécanifme qui reçoit l’impulfion de l'allongement, ou de la contraétion des fils de-boyaux de ver-à-foie, eft compofé d’un pignon fur l’axe duquel eft montée l'aiguille; à ce pignon s’engrennent deux rateaux en fens contraire, l’un de ces rateaux recoit l’impreflion des fils, l'autre n’eft que pour fervir de contrepoids au moyen d’un reffort en fpiale qui fait toujours tendre les fils de boyaux de ver-à-foie avec une force de demi-once: ce mécanifme de même que l'aiguille font mis à l'abri de la poufière & de l'humidité par des boîtes de criftal dont les bords s'appliquent fur [a glace. Les deux fils font tendus à une diftance égale de chaque côté du tube du thermomètre 3 leurs bouts inférieurs font aflujettis à une petite bafcule qui fe trouve à trois lignes au-deffus de la boule du thermomètre , & qui en même-tems fert de bride pour aflujettir le thermomètre; l'un des bouts du fil eft fixé à une petite pince qui peut changer de place pour allonger ou raccourcir les fils de boyaux de ver-à-foie; précaution néceflaire pour faire fervir la même divilion de l'hygromètre avec de nouvelles cordes, Les trois principales mefures des qualités phyfiques de l'atmofphère fe trouvent réunies dans l’inftrument que j'ai fait conftruire, il eft en même-tems portatif : il peut être pofé dans tous les fens , fans qu'il fe dérange, HISTOIRE HG RL ET | LORS De 0-28 ANT 7 SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 353 HS: TO: TE Rob D'U-::S: CH AC A L; Par M GüLDENSTÆDT (1): Traduire par J.P. BERTHOU*T VAN-BERCHEM. j ES premiers hommes en petit nombre, vivoient probablement tous dars des cavernes, & poffédant à peine quelques meubles & uftenfiles ils n’avoient befoin ni du chameau, ni de l'âne, ni du cheval , animaux que leurs defcendans fubjuguèrent enfuite pour faire les voyages inévitables que la population du genre humain exigeoir. Pareillement ces premiers hommes mepantune vie errante & vivant des fruits des arbres & des arbrifleaux, des racines & des feuilles des plantes, purent fe pafler pendant plufieurs fiècles du hœuf & du buffle (2) qui accompagnent les travaux & l’agriculture. [1 eft de même très-évident qu'ils eurent encore moins befoin du cochon; mais leurs defcendans beaucoup plus gourmands & peu contens de la dière végétale, le réuñirent long-rems après au nombre des animaux domef- tiques, L'homme ne foumit le chat que lorfqu'il eut appris à faire des provifions de toutes efpèces ; il fentit alors la néceflité de fe garantir des” dégärs des fouris , & il reçut dans fes maifons leur plus grand ennemi. Mais les brebis & les chèvres qu'il employoir pour fes vêtemens[ & donc le laic lui fervoit enfuite de nourriture ], les chiens, qui pouvoient le défendre lui &: fes troupeaux, furent plus anciennement & les premiers de tous Les animaux que les hommes cherchèrent à apprivoifer. Le genre de vie & la manière d'être de nos pères le montrent évidemment , & l’on peut encore le conclure de la diverfité de forme qui fe trouve aujourd’hui dans ces animaux ; car il eft dans la narure que le nombre des variétés foie proportionnel à la durée de la domeficité. Si cependant le ghien varie plus que la chèvre & la brebis, c’eft parce que les chiens produifent plus fouvent & un plas grand nombre d'individus qu'eux , ce qui augmente le nombre des générations defcendantes : d’ailleurs, ce compagnon infépa- [(r) Mid. Nov Commentarii Acad. Scint. Imp. Petro Pol. tom. 210, p.449, an. 1775. Nous avons joint à la traduétion de cet excellent Mémoire ce que nous avons cru propre à compléter l'hifloire du fchacal , & de nouvelles obfervations fur l'origine des chèvres domefliques. Toutes nos additions font comprifes entre deux crochets faits ainfi [ ], & imprimées dans un caraëtère plus petit. ] [ (z\ Güldenfæd® appelle le büuffle bubalus, mais M. de Buffon a fait voir que Je bubalus des anciens devoit plutôt être rapporté à une g2zelle ,(Ænrilope bubalus), V, B. tom. XI, pag. 184, fup. tom. VI, pag. s1.] Tome XXIX, Part. II, 1786. NOV EMBRE. Yy 354 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, rable de l'homme, l'ayant fuivi dans tous les climats de la terre, a éprouvé les effers de leurs influences; au lieu #que les chèvres & les brebis ne peuvent pas ainfi fublifter par-tout. Ajoutez encore à cela que la nourriture du chien varie plus que la leur, & enfin que l'homme loigne & dirige arbitrairement la copulation des chiens, arrête leur accroiflement, mutile plufeurs de leurs parties (comme la queue, les oreilles , &c.) , propage leurs difformités, ce qu'il ne peut faire avec les chèvres & les brebis. - De-là, fans doute, la diverfité des formes que l’on voir aujourd hui parmi les chiens (1). Qn doit néceflairement penfer que les animaux les plus anciennement domeftiques ont été indigènes & fauvages dans les régions de notre globe que les hommes ont habitées les premières. Or, l'Hiftoire facrée & profane nous montre que l’Afie mineure & les pays voifins font au nombre des contrées les plus anciennement peuplées; elles doivent donc être la patrie des animaux les plus anciennement domeftiques, c’eft ain que la nature a afligné pour la demeure des autres quadrujèdes les limites de quelques provinces. De plus, comme il eft très-probable que les premiers hommes n’ont pas demeuré dans des plaines, mais dans des contrées montagneufes , foir dans des cavernes naturelles , foit dans des domiciles commodes qu’ils pouvoient y conftruire plus facilement ; il s'enfuir que les animaux qu'ils ont rendu domeftiques les premiers ont été ceux qui préféroient plutôr d'habiter les montagnes que les plaines, & qui par-là même éroient plus à leur portée. Nous devons donc chercher les races originaires des nambreufes variétés des brebis, des chèvres & des chiens, dans les endroits montagneux de l’Afie mineure. M. de Buffon a prouvé (2) avec cette fagacité qui le diftingue., que Ja brebis, dans l’état naturel, étoit cet animal ( des endroits montagneux peu élevés de l’Afie mineure & des contrées voilines qui jouiflent du même climat } que les anciens appeloient mufmon où mufimon, & que les françois nomment aujourd'hui mouflon : cela me paroît hors de doure ar la comparaifon des cornes des os de la tête, quoique le chevalier Rés qui donne à cet'animal le nom de capra ammor , foit d'un avis différent. Le Pline françois a été moins heureux dans la détermination de la chèvre fauvage. IL penfe(3) que le bouquetin & le chamois font de la même efpèce ; que le premier eft l’origine des chèvres mâles, le fecond celle des chèvres femelles, & enfin que c’eft à leur union que nous devons cet animal domeftique : quoique le bouquetin & le chamois habitent, comme le mouflon, les montagnes d’Afie, cependant ce fentiment me [ (x) On peut voir ces caufés des différentes variétés du chien beaucoup plus dévelorpées dans l’article Chien de l'Hiftoire-Naturelle de M, de Buffon. ] (2) Hifi. Nat. tom. XI, art. du Mouflon. (3) Idem, tom. XII, art, du Bouquerin. | | ut SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 35; paroït dgrué de tour fondement; car il n’exifte aucune raifon fufhfanre pour que ces'animaux , habitans tous les deux les Alpes , vivant fous un même climat & dans un même pays, aient dégénéré au point de préfenter d'aufli grandes différencês extérieures dans leur forme que celles qu’ilsnous offrenr, non-feulement maintenant, mais encore depuis pluleurs fiècles, On peut d’ailleurs conclure avec beaucoup de vraifemblance du différent genre de vie du bouquetin & du chamoïs, fans parler de différences bien plus confidérables, que ces efpèces ont été de toute ancienneté diftinctes, qu’elles refteront toujours féparées, & refuferonc route union réciproque, [ Nous penfons , comme M. Güldenfiædt, que le chamois & le bouquetin font deux efpèces différentes, mais nous croyons devoir examiner les raifons que M. de Buffon donne de fon opinion. Il trouve (1) que le bouquetin mâle & le chamois different à la vérité par la taille &les cornes , mais il dit que les cornes des femelles de ces animaux font petites &2{Tez reemblantes. Maintenant que les cornesde la femelle du bouquetin font bien connues (2), nous pouvons affurer qu’elles font très-diffèrentes de celles du chamois; elles font petites en efler, mais elles refemblent beaucoup à celles de la chèvre , & ont comme elles une arrète longitudinale. Les rapports que M. de Buffon tire enfuite de la reflemblance dans les inœurs & da figure , ne nous paroïflent pas fufifans; car quoiqu'ils aient plufeurs rapports dans la figure du corps, les trous derrière les cornes qui {& trouvent dans la grande race du chamois (3), les efpèces de larmiers (4), la peau qui joint les fabots des pieds {5}, les broffes au-deffous des genoux de devant, & d’autres différences moins confidérables les diftinguent affez ; & quant aux mœurs, n’eft-il pas naturel que des animaux à pieds fourchus & ruminans, qui habitent les mêmes montagnes & {e nourriflent de la même manière, aient, jufqu’à un certain point , des habitudes & des mœur: femblables, (ans que pour cela ils oient dela même efpèce > D'ailleurs, ces mœurs font affez diférentes, comme on peut le vo:r dans notre Mémoire cité ci-deflus, Le bouquetin & le chamois paient quelquefois à peu de diflance des chèvres & des moutons qui s'élèvent fouvent ju(qu’aux régions habitées par ces arimaux; ( c’eft un fait que je puis affürer d’après des informations sfres }, m2is on n’a jamais ob(ervé que les bouquerins & les chamois æituraflent enfemble, ni qu'il y eùt aucune union entr'eux; cependant la copulation dans l’état de nature eft une des plus fortes preuyes de l'identité d’efpèce (6), Enfin, Îe chamaïs entre en chaleur en novembre & décembre, & letbouquetin en janvier (7). Cette différence dans le tems du rut eft une des d'fférences fpécifiques de ces animaux, & la raifon pourquoi ils ne (e mélent pas dans Pétat dé nature : if nous paroït donc bien démontré que le buuquetin & le chamois forment deux efpèces différentes , mais yoifines. Si l’on confdère maintenant les cara&tères de reffemblances qui lient le chamois à . {1) Hüit Nat. tom. XI, pag: 137. L (2) Püid. notre Mémoire fur l’hif nat. du Bouquetin, dans le fecond volume du recueil de la Soc. des Scienc. Phyfq. de Laufanne, qui eft fous preffe. ] [ (3) Mém. cité. ] [ (4) Pallas, {p. zool. fa(c. I, pag. 8.] Ë x [ () Jdem. Fafc. XI, pag. 42, où l’on voit auffi d’autres différences. ] E (6) Poyez les Œuvres de M.de Buoin, & notre Mémoire fur la diftinétion des efpèces, &:. tom. II du recueil de la Société de Laufanne. ] £ (7) Mém. fur le Bouquetin. ] Tome XXIX, Par. Il, 1786. NOVEMBRE, Yy 2 . + = 356 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, la gazelle, foit par fes broffes aux genoux ; foit par fes cofnes qui ont desgnneaux & des ftries longitudinales , foit par fes e‘pèces de larmiers & par {on menlnberLe. ainfi que par fon organifation ; fi d’un autre côté on voit fes rapports aux chèvres per la fo:me du corps & des jambes, on conviendra avec moi qu'il doit faire la nuance entre les chèvres & les gazelles , quoiqu'il ne puifle pas être rangé permi lespazelles, comme l’a fait M. Pallas (1). Quant à l’idée de M. de Buffon , que le bouquetin , le bouc domefique & le chamois font d’une même efpèce dans laquelle les femelles font d’une nature conftante & femblables entr'elles, tandis que les mâles varient (2); quoiqu’elle foit très ingénieule, nous ne croyons pas qu’elle puifle fe fourenir quand on l’examine avec foin; puifque non-feulement on doit féparer le bouquetin du chamois , d’après ce que nous venons de dire , mais encore, les raifons que M. de Buffon donne de fon opinion nous femblent fujetres à beaucoup d’obje&'ons. I] dit que l’on peut prouver par expérience qu’il y a des efpèces dans la naturé dort ta femelle peut également fervir à deux mâles différens stelle eft la brebis qui produit avec le bouc & le belier. Mais ces animaux étant domeltiques, ne peuvent fervir ici d'exemple, parce que, comme nous l'avons prouvé ailleurs, Ja domeflicité rapprochant les elpèces , il peut fe faire dans cet état des accouplemens qui n’auroient point lieu dans l’état de nature , & nous ne croyons pas que l’on puifle citer parmi les animaux fauvages un feul exemple pareil à celui là. D'ailleurs, pourquoi foppofer que Les mâles n'aient que des femelles foibles , & les femelles que des mâles forts, Ce cas ne peut avoir lieu que dans les an:maux efclaves & non dans les fauvages, (ur-tout parmi les bouquetins, dont les mâles ont affaire à plufeurs femelles, & les femelles à plufeurs mâles. ] Je n'héfiterai pas à regarder avec M. Pennant (3) le bouquetin comme lé père & l'origine des variérés de nos chèvres domeltiques , fi je n’avois pas trouvé dans les montagnes baffes entre la mer Cafpienne & la mer Noire, ainfi que dans route l’Afie mineure, un autre animal fauvage, qui dans fon Aabus & dans toure fa ftruéture, a beaucoup plus de rapports que le bouquetin à la chèvre domeftique. Le pazen ou capricerva, dont parleKæmpfer ( Amænit. exot. pag. 398); & que Linnée appelle chèvre bézoardique, eft l'animal que nous regardons comme la chèvre fauvace , quoique MM. de Buffon & Pennant foient d'un fentimenr fort différent. Îls rapportent cet arimal de Kæimpfer au genre des gazelles ou antilope, mais la figure de Kæmpfer qui porte le titre de pazen, confirme notre idée, & quoiqu'elle foit mauvaife , on voit cependant qu'elle ne convient pas à la gazelle, mais à la chèvre, par la forme. de fon corps, par fa barbe au meriton, par fes cornes allongées , recourbées , tuberculées, ou, fuivanc Kæmpfer, marquées de gros anneaux qui n'embraflent pas tout le tour de la corne , «mais qui s'élèvent feulement fur le devant, comme la figure le montre; ainf 2 ———————— "——————""— "— — ————— — "— ———————————————““c" [ (1) Sp. zool, fafc. I, pag. 7.1 CE (2) Buffon, tom. XII, pag. r42.] (3) Vid. Pennant finop. of quad. pag: 13.1 M. Pennant dans fon hiftoire des quad. regarde avec M, Gulderflædt le payer comme l’origine des chèvres. ] sur tes SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 357 ces cornes different beaucoup de celles que M.de Buffon a fait repréfenter fous le nom de Pazan , (Tom. XII, pl. 35 )(x). Enfin, la nature même du bouquetin & du pazen de Kæmpfer peut fournir une nouvelle preuve de ce que la chèvre domeltique ne dérive pas du premier de ces animaux , mais du fecond. Le bouquetin paroît propre aux endroits inhabités ; il vit fur les fommets les plus élevés des Alpes, dans des rochers couverts de neiges é-ernelles : il y trouve pour fa nourri- ture des plantes qui ne croiflent pas ailleurs, & routes ces chofes lui font fi néceflaires , qu'il paroït tout aufli impoflible de le rendre domeftique fous les divers climats de notre globe ( dont plufieurs font fi différens de fon climat primitif) que l’éléphant ou le rhinocéros, Le pazen, au contraire , fuit les hautes Alpes, 11 recherche les endroits montagneux de l'Afie mineure , qui en hiver font couverts & refroidis par la neige, & qui en été font brülés par l'ardeur du foleil, qui fonc quelquefois defléchés par la chaleur, & d’autres fois inondés par les pluies, où croiffent beau- coup de plantes que l’on trouve aufli par-tout ailleurs ; il peut donc, ainfi que le mouflon , fupporter tous les climats, & comme lui fe répandre & mulriplier par-tour. Ce que nous avons dit jufqu'ici fufñr, nous par- lerons plus au long dans la fuite d’un autre animal , inconnu jufqu'à préfene, qui tient le milieu entre le mouflon & le bouquerin & qui habire les Alpes du Caucafe. £ Si nous dexons convenir avec M. Güldenftædt que le pazen de Kæmpfer eff une des origines fauvages de nos chèvres domeffiques , nous ne pouvons pas penfer comme Jui que le bouquetin foir d’une efpèce différente, nous croyons au contraire avec M. de Buffon , que cet le type primitif, puifqu’il eft le plus grand, le plus fort, & en un mot , l’efpèce principale. Voici les raifons de notre opinion. . Le bouquetin & le bouc fe reffemblent beaucoup par là figure; leur plus grande différence conflle dans la groffeur , l’étendue & la figure des cornes ; celles du bou quetin font très-grandes & grofles, avec deux arrètes long'tudinales, plufeurs tran{ver{ales & de gros nœuds proéminens ; tandis que celles du bouc n’ont qu’une arrête longitud'nale , font beaucoup plus petites, & n’ont que des rugofités au lieu de nœuds proéminens. Mais ne fait-on pas qu'il n’y a point de cara@ères plus variables que celui des cornes ,même dans les animaux libres, & à plus forte raifon dans ceux qui [ont foumis à la caue puiflante & touiours agiffante de la domefticié? !1 ne feroit pas impoflible non plus que cette différence dans les cornes du bouc fütun effer.de fa foiblefe occafñonnée par une longue fervitude, puifque l’éragne , ou la fenelle du bouquetin , qui eft plus perire & plus fo'ble que (on mile, a des cornes prefqu’entièrement femblables à celle de ia chèvre & du bouc; ce qui paroît encore favorifer cette opinion , c’eft que le bouquetin jeune ,& quand il eftencore dans un état de foibleffe , n’a pas l’arrète longitudinale extér'eure bien marquée /2),& cela donne à fes cornes plus de refflemblances avec celles du bouc. l8a domefticité peut — £ (1) M. Pallas, / Sp. zool. fafc. XII, pag. 43 ) aopelle cette chèvre capra ægag us. & prouve auffi que c’eft le pazen de Kæmpfer.] [ (2) Mém, cité fur le bouquetin, ] d'A L nn à AY T? 358 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, donc rendre facilement raifon des différences qui {& trouvent entre le bouc & le bouquetin, fur-rout fi l’on obierve, comme l’a trés - judicieufement remarqué M. Zimmerman (1), que cet animal en defcendant des hautes Alpes pour habiter les plaines & les vallées, a quitté une nourriture fine & aromatique pour une noyr- riture plus grofière ,& un air pur pour un air chargé de vapeurs. Enfin, la très- grande reflemblaoce qui fe trouve entre l’éragne & la chèvre domeftique , doit, ce me femble, prouver en faveur de Pidentité de leur efpèce. Le bouquetin que nous avons vu à Aigle (2), & que l’on y voit encore, qui a été nourri par une chèvre , & élevé dans une vallée chaude, prouve que M. Güldenftædt s’eft trompé en avançant que cet animal ne pouvoit pas devenir domeftique dans d’autres climats que le fien propre. Si l’on examine enfuite les mœurs du bouquetin , tout nous indique fes reffemblances avec les chèvres ; fa fociabilité & {a douceur (3) font qu’il a pu facilenient devenir domeftique , il a la gravité du bouc & la curiofité inquiète de la chèvre. Il ne refteroit donc plus aucun doute fur l'identité d’efpèce de ces animaux, s’il étoit prouvé qu'ils produilent enfemble quand le bouquetin eft dans Vétat de nature ; mais quoique j'aie de fortes raifons de le croire, j'avoue cependant que je n'ai pu jufqu’à préfent m’en procurer des preuves certaines, & ce qui rendra toujours ces accouplemens rares dans les montagnes, c’eft que dans le temssoù le bouquetin entre en chaleur (c’efl-à-dire , au mois de janvier), les chèvres font déji defcendues dans les plaines & les vallées, Mais il eft du moins certain, que le bou- quetin produit très-facilement avec les chèvres lorfqu’il eft privé ; celui d’Aigle , dont j'ai déjà parlé, a produit avec plufeurs chèvres, & cela dans un état de liberté, puilque c’étoit en pâturant dans les montagnes voifines avec un troupeau de ces animaux, J’ai vu deux petits chevreaux que la chèvre fa nourrice avoit eus de lui, & un troifième provenant d’une autre chèvre (4) qu’on lui avoit préfentée Jorfqu’il alloit au pâturage, & qu’il avoit couverte tout de fuite. La différence dans le tems du rut du bouquetin & du bouc n’eft pas effent.elle entre ces animaux , parce que Ton fait que ce tems varié par la domeffitité, & que d’ailleurs il dépend, dans la plupart des efpèces à pieds fourchus , de leur nourriture plus ou moins abondante + en forte que le bouquetin d’Aigle a produit plutôt que le bouquetin fauvage , & que les animaux libres entrent plus tard en chaleur que c:ux qui ont racheté la perte de leur liberté par le mince avantage d’avoir une päture plus ample & plus fucculente. Tout femble donc concourir à nous prouver que le bouquetin eft la fouche originaire des chèvres domeftiques. > — (x) Specim. zool, geograf, pag. 117. ] @) Mém, cité fur le bouquetin. ] (3) Mém. cité fur le bouquetin. ] L (4) Vai vu ce troifième chevréau à âge d'un an; fa mère étoit blanche, elle avoitété tenue renfermée jufqu’à ce que le bouquetin la couvrit au mois de noyembre 1783, & elle le fut depuis jufqu’à ce qu’elle mit bas en avril 1784. Ce chevreau eft male, rc{femblant au bouquetin par fa figure & (es coleurs; il avoit comme lui le chanfrein un peu convexe, le front fort élevé, une rai: noire le lonz de l’épine du dos, une tran{vetfale fur le garot, & une bande au bas das flancs ; un duvet Jaineux & des grands poils plus roïdes fauves & mélés de brun , le ventre blanc , & en général toutes les couleurs dé fôn père. Il étoit plus fort , plus lee & plus vigou- reux qu'un chevreau de cet âge ne l’eft ordinairement , mais fes cornes fe rappro- choient beaucoup plus de celles du bouc que de celles du bouquetin ; elles n’avoient qu’une arrète longitud:nale , un nœud°à [a bafe & des rugoftés, mais elles font plus grandes & plus groffes, fur-tout à la bafe , que celles du bouc ne le font à cet âge. 1 [ (e (n SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 359 Examinons maintesant k pazen de Kæmpfer : c’eft le même animal que Gmelin Je jeune a depuis mieux fait connoitre, & que M. Pallas nomme capra œgagrus. en donne une defcription (1), & l’on voir qu'il reffemble beaucoup au bouquetin par la figure , mais que la principale différence (e trouve danses cornes , ce quine nous paroit pas aflez eflentiel (2) pour en faire des efpèces féparées. Pourquoi ne pourroit-on pas penfer que l’agagre , qui habite les mêmes montagnes que le bou- quetin , eft une variété ou une race conitante dans cette efpèce ? L'exemple des deux races de chamois qui fubfiftént dans les mêmes montagnes (3) rend cette idée aflez probable, D'ailleurs, la femelle de l’egagre n’eft p2s bien connue, puifque , füivant Gmelin , elle n’a point de cornes, & que fuivant Kæmpfer , elle en a de petites , en forte que Pon pourroir imaginer que l’xgagre eft une race provenue du mélange du bouquetin avec nos chèvres domefliques , & ce qui nous femble donner quelque crédit à cette opinion , c’eft qu’autrefois les bouquetins étoient beaucoup plus communs, & qu’il n’eft pas impoffible que nos boucs ( animaux très-lafcifs ) aient couvert des eragnes , qui reflemblent infiniment aux chèvrés , ou que des bouquetins mâles aient couvert des chèvres domefliques ; enfin, le jeune chevreau , dont j'ai parlé ci-deflus, avoit des cornes qui paroïfloient devoir fe rapprocher de celles de Pægagre , mais comme je ne les ai pas vues dans leur état de perfection, je ne puis affurer fi elles leur reflemblent en effet. Quoi qu’il en foit, il eft probable que cet ægagre pro- duiroït facilément avec nos chèvres, & je pénfe que, vu fes reffemblancés avec elles, on doit le confidérer comme une de leur racé originaire. Üné troifième efpèce de chèvre fauvage, que M. de Buffon appelle capricorne (4), & qui pourroit bien être celle dont M. Güldenfiædt a parié ci-déflus, & qu'il a trouvée dans les monts Caucafes , nous femble encore une variété ou uné râce dans Vefpèce primitve du bouquetin. I! paroît donc que des quatre chèvres fauvages connues, le bouquetin , l’ægagre, le capricorne & le chamois , celui-ci forme une efpèce voifine qui le 1-s chèvres aux gazelles, mais que les trois premières font d’une feule & même efpèce ; qu’elles font [ (x) Sp. zool. fafc. XT, pag. 45, 46. Nous tranfcrirons ici la defcription des cornes, afm qué l’on puifle les comparer à celles du bouquetin. Cornuæ fufro- cinerafcentia.,..fitu reclinata funt, æqualirer arcuata , parüm divergentia , apicibus introrfum declinata ; formä admodum compreff@ , anterius carinaté , Zatere imreriore planiufculo , exteriore convexo , at fecundüm carinam, à bafi ad medium Tongitudinaliter \cavato , unde carina prodie angutiffima, ad bafin angulo in frontem procurrens , dehinc tuberibus prominentiffimis circiter quaternis , craffiufculis nodofa , totaque hiulca & fublacera ; contra margo cornuum qui dorfo refpicir rotundatus , terfus , præter rugas crebras obfoletas , quæ cornu (præter extremitatem convexo comprefflam lævigatam) totum flexuofo traëtu cingunt, quarumque fingulæ tuberibus carinæ refpondentes, magis præruptæ, annotinas quafi vaginas interflinguunt. ] £ (2) Nous ne voulons pas dire par cela qu’il n’exifte pas de différences effentielles entre les cornes des animaux fauvages, quand elles font liffes au lieu d’être chargées d’anneaux ou d’arrètes; quand elles font dirigées en avant au lieu de l'être en arrière ; quand Ja contexture ef différente , alors ces diflemblances nous paroïflent “ffentielles & fpécifiques ; mais nous les regardons comme très - peu conféquentes quand elles ne confiftent que dans le plus eu le moins de grandeur , ou d’écartement des cornes, le nombre & la groffeur des anneaux ou des arrètes, les rugofités, &c. ] [ (3) Mém. cité (ur le Bouquetin. ] LE (4) Buffon, tom. XII, pag. 195, On ne çonnoït du capricorne que le fquelette & les cornes, ] 360 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, les origines libres de nos chèvres domefliques ; & comme M. de Buffon dit pofitivement que le chamoiïs s’accouple avec les chèvres (1), nous penfons , d’après tout ce que nous venons de dire, que ces quatre animaux rapprochés par les chaînes de l'efclavage , fe font mélés & ont formé avec les autres caufes qui agiffent fur les animaux domeltiques, les différentes variétés de nos chèvres (2). Mais ce qui me fait cependant douter du mélange de lefpèce du chamois, c’eft que l’on ne trouve dans aucune des variétés de nos chèvres des cornes qui reflemblent aux fiennes. ] Nous venons au troifième animal anciennement domeftique , Le chien ; nous avons prouvé ci-devant qu'on devoit le chercher fauvage, ainfi que la brebis & la chèvre dans l’Afie mineure & les pays limitrophes. Mais on trouve dans ces contrées quatre animaux fauvages plus ou moins femblables au chien; l’hyene , le loup , le renard & le loup doré de Kæmpfer ou fchacal des Turcs & des François. llufieurs ‘auteurs ont pris l'un ou l’autre de ces animaux pour le chien fauvage ; nous efpérons prouver .que ce n’eft ni l'hyene, ni le loup, ni le renard, mais le {chacal. [ Avant d'entrer dans cette difeuflion nous expoferons d’abord les principales opinions des Naturalifles au fujet des animaux qui refflemblent plus ou moins au chien. Suivant M. de Buffon, le loup, le chien, le fchacal, l’adive , lifatis & le renard , font des efpèces fi voifines, qu’elles ne forment qu’une feule famille. Le fchacal , fuivant lui, ef un animal mitoyen entre le loup & le chien. L’ifatis fait la nuance du chien au renard , mais il penche à croire que l’adive & le fchacal font deux efpèces différentes (3). I1 ne croit point que le loup (it la race originaire du chien, M. Zimmerman penfe au contraire que ladive & le fchacal font de la même efpèce, & que les chiens font des loups devenus domeftiques (4). Enfin , M. Pallas croit bien, comme M. Guüldenfiædt, que nos chiens dérivent principalement du fchacal , mais il penfe que fon union avec le loup , le renard & l’hyene en a formé les différentes races ($).] Par la defcription de l'hyene (tom. IX de l'Hift. Nat. de B.5 il paroîe de la manière la plus évidente que cet animal differe beaucoup du chien PRES q Pad par la forme de l’inteftin cxcum , par celle des glandes de l'anus , par la verge & les dents ; il en differe encore effentiellement par le nombre des doigts, en force qu'il eft tout-à-fait impoflible que les variétés des chiens puiffent provenir de l’hyene. Le loup reffemble au chien’ par fa forme , par le nombre de fes sarties & par plufeurs de fes mœurs; ce qui fait qu'il eft aflez diffñcile d'afigner des differences caraëtériftiques entre ces animaux. Cependant plufieurs raifons s'oppofent à ce qu'on regarde le loup comme le chien Gt À LE A MER À RP un he ee Et ee Ç (x) Sup. tom. VI , pag. 45 & 49. Hifi. Nat.] [ (2) M, Pallas penfe auñfi ( (p. zool. fafc. XI) , que ces animaux fauvages ont formé par leurs mélanges les différentes chèvres domeftiques, ] t (3) Buñon, tom. XIV.] L (4) Spec. zool. geog. pag. 83 , 361.1 c (s) Obfervation fur la forme des Montagnes, note dela page 320, Sp. zool. fafc, XI, pag. 3, note*.] fauvage, SUR L'HIST, NATURELLE ET LES ARTS. 36% fauvage. Sa patrie n’eft pas celle où l’on doit rechercher un animal anciennement domeftique ; il paroït propre aux pays froids, à peine en trouve-t-on dans l'Afie mineure , & il manque entièrement dans les pays méridionaux, Sa taille forme encore une objection contre cette opinion; car il eft probable que l'animal auquel les variétés des chiens doivent leur origine, eft d’une grandeur moyenne entre celle des plus grands & des plus petits chiens; or , les plus grands chiens font tout au plus de la taille du loup , & certainement on n'en trouve jamais qui foient le double plus grands que lui, au lieu que les chiens qui font quatre fois plus petits, fonc fort communs. Le loup differe eflentiellement du chien par la forme du cæcum (1), ainfi que par les proportions des inteftins ; la longueur de l'ileum du loup eft à celle de fon corps, prife depuis l'extrémité du mufeau à l’origine de la queue: : 4: 1, & chez le chien de berger :: 4<:1. La longueur da cæcum du loup eft à celle de fon ileum : : 1: 16 =; tandis que dans le chien de berger elle eft :: 1: 20. La longueur du colon & du re‘äum du loup eft à celle de fon ileum:: 1 : 7 :, & dans le chien :: 1:5$ i. L'expérience tentée par M. de Buffon vient encore à l’appui de mon opinion. Elle montre, que non-feulement le loup refufe de s'unir avec le chien , mais encore qu'il lui témoigne une grande antipathie. Ceci n'eft cependant pas fans exception , puifque le célèbre Pennant affirme qu'il a vu un métis provenant d’un loup & d’une chienne (2) ; on doit regretter qu'il ne nous ait pas appris fi ce métis étoit ftérile ou non, [ On a eu depuis ce tems-là plufeurs autres exemples d’accouplemens prolifiques entre le chien & le loup (3); maïs, comme nous l’avons prouvé ailleurs (4), ils n'indiquent point ici une identité d’efpèce , puifque c’eft un effet de la domefticité, de l’occafon & du befoin , mais non pas du rapprochement de leur nature, Une des différences les plus effentielles qui fe trouve entre le loup & le chien , c’eft celle de leur naturel ; les exemples rapportés par MM. de Buffon & Bomare (5), prouvent que fi les loups femiblent perdre dans leur jeuneffe une partie de leur férocité, ils la reprennent en vieilliffant. Le chien craint , frifonne à fon approche, & le combat s’il eft le plus fort, fur-tout le chien de berger. Les loups ne vont jamais en troupes comme les chiens devenus fauvages, à moins qu'ils ne foient affamés , & c’eft alors plutôt un attroupement de guerre qu’une liaifon de paix, Le chien devenu fauvage eff, à la vérité, cruel: il vit de rapine & de vol; mais il s’apprivoife aifément (6), tandis que le loup n’eft point fufceptible d'éducation: il eft vrai que M. Zimmerman dit, que dans l'Amérique feptentrionale on les emploie pour la garde au lieu des chiens (7); mais nous fommes obligés d’avouer que ce fait nous E (1) Pid. la figure du cæcum du loup , Hift. Nat. tom. VII, pl. 2.1 EL (z) 7id. Pennant, Sinop. of quad. pag. 144.1] » [ (3) Zimmerman, 1. c. pag. 84. Buffon, tom. III, fup.] E (4) Mém. cité fur la diftinétion des efpèces. ] [ (s) Hit. Nat. du Loup, tom. VIT, Di&. de Bomare, art. Loup.] £ (6) Hiff. Nat. tom V , pag. 191.] [ (7) Spec. geog. pag. 87.1 Tome XXIX, Part, II, 1786, NOPEMBRE, FA 362 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, paroit très-douteux ; il n’eft appuyé fur aucune autorité , & cependant il eft aflez important pour mérier d’être confirmé par plufeurs témoignages. Auf jufqu'à ce que M. Zimmerman en donne des preuves convaincantes , nous fommes forcés de croire qu’il a été induit en erreur. Peut-être a-t-1l confondu les loups avec les chiens devenus fauvages qui s’appri- vo fent en effet fort aifément. Les loups dreflés dont parle Chardin , & que l’on voit en Perle, ne font pas non plus une preuve que ces animaux peuvent devenir domeftiques , comme le penfe cet Auteur, puilque ce n’eft qu’à force de peines & de foins qu'on parvient à leur donner cette forte d'éducation. D'ailleurs, on peut voir par le paflage füuivant de M. de Buffon ce que c’eft que cette éducation, « En » Orient, dit-il , & fur-tout en Perfe, on fait fervir le loup à des fpettacles pour le » peuple, on les exerce de jeunefle à la danfe, ou plutôt à une efpèce de lutte » contre un grand nombre d'hommes, On achette, dit Chardin , jufqu’à cinq cene » écus un loup bien dreffé à la danfe. Il nous femble que cette fomme même prouve » la difficulté de cette éducation, ] Plufeurs caractères feroient plutôt prendre le renard pour un chier fauvage que le loup; fa patrie eft telle qu'il auroit pu être beaucoup plutôt connu des premiers hommes & devenir domeflique ; fa taille eft moyenne entre celle des plus grandes & des plus petites variétés des chiens ; êlles auroient donc pu en dériver. Cependant le renard diffère encore plus eflentiellement du chien que le loup par plufeurs caraétères. Le poil du renard eft infiniment plus doux que celui des chiens, fi l'on en excepte un petit nombre de races , en forte qu'il ne paroît nullement vraifemblable que le chien lui doive fon origine , puifqu'un des effets de l'état de domefticité, doic être d'adoucir les poils & non pas de les rendre lus rudes ; le raifonnement nous l'indique, mais l'exemple de la chèvre, de la brebis, & plufieurs autres , nous le prouvent fuffifamment. Si l’on imagine la figure d'un chien fauvage, on conviendra avec moi qu'elle doit être telle que fon mufeau tienne le milieu entre les plus pointus & les plus obtus de ceux des chiens domeftiques ; mais celui du renard ne tient du tout point ce milieu, & il eft au nombre des plus pointus ; ainfi ce caractère feul devroit empêcher de le regarder comme l'origine des chiens. Le renard diffère encore plus du chien que le loup par la forme de l'inteftin cæcum , ainfi que le montre la planche 5° du tome VII de lHifoire-Narurelle de M. de Buffon, & il s'en éloigne aufli par les proportions inteftinales; car par les obfervations de M, Daubenton la lon- gueur de l'ileum eft à celle du corps, prife depuis l'extrémité du mufeau jufqu’à l'origine de la queue, dans le renard : : 32: 1 ; dans le chien ::42: 71, & la longueur du colon & du rectum eft à celle de l'ileum , dans le renard :: 1:6; dans le chien :: 1: Si. Enfin, les dents incifives, qui dans le loup & le chien font entièrement femblables , different beaucoup dans le renard ; les fupérieures ne font pas trilobées ni les inférieures bzlobees ; maïs elles font toutes entières, fans être creufées par aucun fillon, Quoique l'ouvrage de M. de Buffon garde cmd SUR L'HIST, NATURELLE ET LES ARTS. 363 le filence fur ce caractère du renard , je l'ai cependant obfervé conftamment dans tous les individus que j'ai vus. Si le renard paroît au premier coup d'œil très-femblable au chien , il n'eft cependant perfonne qui puifle le regarder comme le chien fauvage, après les différences que nous venons d'expoler, Les expériences entre- prifes par l’illuftre Comte de Buffon fur la copulation du renard, rapportées , rome VIT, dans l’article du renard, & tome V , dans celui du chien , doivent encore faire renoncer à regarder ces animaux comme de la même efpèce. € Il eff vrai que l’on eff parvenu dans le Duché de Meklenbouto à faite produiré une chienne avec un renard mâle (1); maïs cet accouplement, ainfi que celui du loup, n’eft autre chofe qu’un effet de l’occafon & du befoin , & ne prouvé rien en faveur de l'identité d’efpèce. ] Après avoir expofé les différences fpécifiques qui fe trouvent entre Îe loup , le renard & le chien , il nous refte à démontrer qu'il n’exifte aucune de ces différences fpécifiques entre le fchacal & le chien, & que tout concourt au contraire à le faire regarder comme l'origine des chiens. La patrie du fchacal , qui eft proprement l’Afie mineuré & les pays limitrophes, eft celle des animaux les plus anciennement domeftiques , & telle que les premiers hommes ont pu facilement le connoître. D'ailleurs, Fiaftin& da fchacal lé porte à fe tenir plutôt dans les endroits mon-. tagneux que dans ceux qui font bas & champêtres ; ainfi il eft probable que nos pères , qui habitoient aufli lés montagnes , l'auront plutôt foumis que le renard qui préfere les endroits champêtrés aux endroits mon- tagneux. La hardieffe du fchacal eft telle , qu'il va non-feulément dans les lieux habités, comme le loup & le rénard ,'mais cé que ceux-ci ne font pas, il s'approche des voyageurs , foit pendant Le jour , foit lorfqu’ils repofent pendant la nuit fous des tentes, il les accompagne même affez long-tems; c’eft ce que je puis aflurer par mon propre témoignage & par celui de tous les voyageurs ; en forte que cet animal elt entré dans la fociété des hommes, potir airifi dire, malgré eux, & dans la fuite il a fuivi parun inffinét naturel lés peuples nomades. Il paroît donc beaucoup plus probable que le fchacal foit le chien fauvaze que le loup ou le renard. Le fchacal eft d’une grandeur moyenne entre les plus grandes & les plus petites variétés des chiens ; fon poil eft plus roide que ne l'eft ordi- pairement celui de ces-animaux , & il n’eft ni aufli long , ni aufli court que celui des divérfes râces du chien ; enfin, fon mufeau tient encore le milieu entre les plus obrus & les plus pointus: quatre attributs qui femblent encore nous prouver qu'il eft plutôt l’origine des chiens que le renard & le loup, [ (r) Zimmerman , fpec. zool. geog. pag. 473.1] Tome X XIX , Part. 1], 1786. NOVEMBRE. Zz2 364 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Le fchacal fe rapproche encore du chien par la forine des dentsincifives, qui n’eft pas la même dans le renard, & par celle de l’inteftin cæcum dans laquelle le chien s'éloigne du loup & du renard, Enfin , cette plus grande rellemblance, du chien au fchacal qu'au loup. & au renard, fe faic encore remarquer dans les proportions inteflinales. L'ileum comparé à toute la longueur du corps, eft plus long dans le loup que dans le renard, mais dans le chien de berger il eft encore plus long que dans le loup, & celui du fchacal a les mêmes dimenfions que celui du chien , il eft même quelquefois plus long , car il eft à la longueur du corps:: $:1; le cæcum eft à l’ileum :: 1 : 31, & le colon eft aureétum::1:5$ = E De tous les chiens celui qui reffemble le plus au fchacal , c’eft le-chien de berger, d’après le témoignage de M. :Pallas (1). Or, le chien de berger eft celui qui fe rapproche le plus de l’efpèce fauvage & primitive, comme l’a très-bien prouvé M. de Bufton; la figure & les caractères extérieurs viennent donc fe réunir aux. intérieurs pour prouver l'identité de ces efpèces. ] Le fchacal eft encore plus femblable au chien par fes mœurs que par fa figure ; pris jeune il s’apprivoife facilement , & devient très-careflant quand il elt à diète; il voit ies hommes avec plailir ;, il remue fa queue pour exprimer fon contentement ; il rampe comme le chien ; {e roule fu foÿ dos avec un murmure de plaifr ; il reconnoît perfaicement fon maître, & il eft attentif au nom qu'on lui a donné; faute fur une table quand on l'y invite ; dort en rond , boit en lappant; urine de côté ; fes excrémens font durs. Il vit en paix avec le chien, & ils fe fentent à l'anus ; l'odeur qu'il exhale par les glandes de l'anus n’eft ni aufli mauvaife que Dumont le dit, ni approchante de celle du mufc, comme d’autres le penfent ; elle et moins forte que celle du renard, & elle n’eft pas de beaucoup plus forte que celle que le chien répand perdant un orage. t Ce que dit ici M. Güldenftædt eft encore confirmé par le témoignage de M. Pallas, qui a vu à Londres un fchacal qu’on avoit amené de Perfe. Il dit qu’il s’apprivoife facilement, & ne donne point, comme le loup & le renard , des fignes d’infidélité & de-cruauté ; il recherche les chiens & badine avec eux : il fait comme eux des careffes avec la queue ; & il aime qu’on le frotte fur le dos avec la main. Enfin, M.Pallas ne doute pas que fi on tentoit de l’accoupler avec le chien, ils ne produififfant enfemble (2). Au fujet de l'odeur que répandent les glandes anulaires (x) Vidi illum vivum Londini,& nuper & Perfica adlarum à non folum Rabitu & forma tora , canibus villaticis gracilioribus & proceris , quales calnuci vuloo alunt, fimillimum , fed & inclinarionibus atque moribus cani familiars Jimilimum effe non fine admiratione.obfervavi. Spec. zool, fafe. XI.:] (2) Homini esiam facillime adfuefcit ,nunquam, ut: lupus 6 vulpes cicurati, infidi animi figna edenslufufve cruentans ; canes non fugir, fed ardenter adpetit, cum üfque colludit, ue plane nullum fit dubium cum itfdem generaturum fr sentetur experimentum. Pocem defiderii caninæ fimillimam habet ; homini cauda codem modo abblandirur & in dorfum provolvi atque manibus demuleeri amaïs Spec, zool, fafc. XI, pag. 3, note *. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 365 du chien, je remarquerai qu’elle me paroit être la caufe de l’ufage où ils Gt de fe flairer au derrière. On fait qu’elle eft plus forte dans le tems du rut, & peut-être celle des femelles eft-elle différente de celle des mâles. ] La tentative que j'ai faite pour unir un fchacal mâle avec une chienne Da pas réufi, parce que le fchacal, trop fatigué du long voyage d’'Aftracan à Pérerfbourg & tourmenté par une inflammation dans les inteftins (occafionnée, peut-être, par la fuppreflion de la tranfpiration infenfible dans un climat trop froid ) périt avant que l’un & l’autre de ces animaux fuflent parvenus à l’état de puberté & au tems du rut. Cependant plufieurs témoignages prouvent que le fchacal produit facilement avec le chien, & M. de Buffon l’afirme dans fon chapitre fur la dégénération des animaux (tom. XIV.) Les fchacals entrent en chaleur pendant les mois d'hiver, rarement dans Les autres; ils courent alors la nuit par bandes, & pouflent des cris Jlamentables. Leurs hurlemens ne reflemblent pas, à la vérité, à l’abboye- ment du chien: mais on ne peut douter que labboyement du chien re foit un effer de la domeficité, puifqu’il n’abboie que par affection pour fon maître, & pour l’avertir d'un danger prochain. Or, comme ces caufes de la modification de la voix manquent au fchacal , l’abboyement lui manque auffi. Les petits qui font toujours avec l’homme, jappent beaucoup plus que les gros qui y vivent moins. Enfin , les rapports des vOyageurs nous prouvent que les chiens de la zone torride & ceux de la zone boréale, (parce qu'ils vivent peu avec l’homme) font taciturnes & n'abboient pas, mais ils hurlent , feulement qaand ils font excités par la faim ou par Pamour. L’abboyement ne doit donc pas empêcher de regarder le fchacal comme le chien fauvage. [ D’ailleurs, le chien de berger qui eff celui qui reffemble le plus au fchacal , et auffi celui qui abboïe le moins, Et ce qui prouve encore combien la domefticité influe fur la voix de ces animaux , c’eft que les hurlemens du fchacat apprivoifé ,.que M. Pallas a vu à Londres, reflembloient à l’abboyement du chien. Ip/ quoque ejulatus ejus, cum latratu canum ejulabundo magnam habet analogiam (1). Enfin , j’ai remarqué que les chiens hurlent comme le fchacal dans le tems du rut, ce qui eft encore une analogie de plus entre ces animaux, ] Le fchacal eft beaucoup moins dangereux que le loup pour les hommes & les troupeaux; il ne l’eft guère plus que le renard , & j'ai reconnu qu'il eft beaucoup moins féroce que M. de Buffon ne le dir. Il eft, à la vérité, carnafler , il tue les petits animaux mangeurs de végétaux, dévore les cadavres, & même ceux des hommes, avale avidement les chofës coriaces; il aime les raifins comme le chien; on en a nourris dans la captivité, pendant un an & plus, prefqu'entièrement de farineux & de pain. Mais (1) Spec. zool. XI, pag. 4, note. 366 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, s'il eft moins vorace que le loup & le renard , c’eft probablement à caufe de la plus grande étendue de fes inteftins. [ Cette explication eft fondée fur ce que l’on a obfervé que les animaux carnafliers, plus voraces que les frugivores , avoient les intettins beaucoup plus courts, & elle nous fournit la remarque intéreffanté que parmi les animaux carnafliers ceux qui ont les inteflins les plus longs, font aufli les moins voraces. La facilité avec laquelle le chien prend du goût pour Ia charogne & le plaifr qu’il reffent à fe frotter contre la plante appelée patte-d’oie fétide (Lamark, p.244 ) (chenopodium vulvaria, L.) & dont l’odeur eft en effet très-infe“te , ne décéle- roient-ils pas auili fon ancienne origine ? Nous ajouterons ici ce que l’Auteur de l’Hifloire des découvertes ( tom. 2, p.242) dit des mœurs du fchacal, d’après M. Gmelin le jeune. « Le fchacal eft un animal » carnaflier, il aime cependant aufli les fruits comme le renard, aufli devient-il » fort gras en automne. Les fchacals fe tiennent pendant le jour dans les bois qui » font dans la proximité des montagnes ; à la nuit rombante ils quittent leur retraite » & viennent vifiter les bourgs, les villes ; les villages & les férmes du voifinage. » Ils ne paroiffent jamais qu’en compagnie de quelques-uns de leurs camarades : » lorfqu'ils vont à la picorée , ils prennent l’alure d’un animal rampant , allongeant » la tête en avant pour mieux épier l’objet qui latte leur appétit, Au moment qu’ils » font à la pifte de quelque chofe , ils courent extraordinairement vite & furpailent » le loup en vélocité. Dans les fermes toute la volaille eft en proye à leur naturel » rapace. Rencontrent-ils une porte ouverte , ou l'entrée d’une tente, ils font aflez » imprudens pour enlever en pareille occafon , des bottes, des fouliers , tout ce qu'ils » trouvent, mème en habillement , du pain , du fromage , &c. & de le traîner avec » eux. Les cris qu'ils pouffent pendant la nuit font horribles, infupportables, & » reffemblent à d’affreux hurlemens , qu’ils entrecoupent par des abboyemens pareils » à ceux du chien. Il y a toute apparence que Kæmpfer dit vrai. lorfqu’il prétend » que fi l’un d’entr’eux fe met à hurler, tous ceux qui font à portée d'entendre fa » voix, font chorus avec lui ; au moins il eft certain que l’on en entend toujours » hurler un grand nombre à la fois Du refle, il n’exifte aucun exemple dans toute » cette contrée ( Sallian en Perfe ) qu’ils aient jamais attaqué aucun homme, foit jeune, » foit vieux ». On reconnoît ici les mœuts des chiens devenus fauvages en Amérique. ] La faculté de recoquiller fa queue ne me paroît pas être un caractère effentiel au chien , & je penfe que c’eft un effet de fon état de domelticité. Il ne porte fa queue relevée que quand il eft gai & content; lorfqw'il a quelque fujet de crainte, il la tient entre fes jambes, Toutes les variétés du chien ne la relèvent pas également, & routes celles qui, comme le chien de berger (1) , ont les oreilles droites , portent la queue étendue, & non courbée comme le fchacal (2). D'ailleurs, il n’eft aucune partie qui varie autanc que la queue dans les animaux domeftiques , ainfi que la brebis & le chien le montrent. Cette différence entre Le fchacal & le chien ne me paroît donc pas fpécifique. (1) Buffon , tom. V, pl. 28. t (2) Cela n’eft pas généralement vrai; car on remarque au contraire que tous les chens loups & renards , qui ont les oreilles droites , ont aufli habituellement la queue relevée. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 367 Je ne trouve donc aucune différence elfentielle entre ces animaux , quoique M. de Buffon penfe qu'il en exifte (1). La proportion & la ftruéture de toutes les parties, tant extérieures qu’intérieures, ainfi que lexiftence des caractères qui doivent néceffairement appartenir à un chien fauvage , perfuadent, & même prouvent que le fchacal eft le chien fauvage, & qu'il a donné naiffance à toutes les différentes variétés de ces animaux. ct M. Pallas penfe aufli que le fchacal ef l’origine des chiens ; mais, comme nous l'avons dit, il croit que le mélange du loup, du renard, de l’hyene & du fchacal, a formé nos différentes races domeltiques ; nous avouons que celæ ne nous paroït pas auffi probable que le mélange des différentes chèvres fauvages dont nous avons parlé ci-deflus , puifque ces animaux ne peuvent pas s’apprivoiler, qu’on ne connoît aucun pays où ils foient domeftiques , & que la longueur de la fervitude, le mélange des races & l'influence des divers climats que les chiens habitent, font des caufes que sous croyons plus que fuffifantes pour expliquer le grand nombre de leurs variétés, ] Que le sos d’Ariftote foit le même animal que notre fchacal, je penfe avec M. de Buffon que cela eft très-vraifemblable, puifque, felon Pline ( liv. 8 , chap. 34), Thoës, luporum genus procerius longitudine, brevitate crurum diffemile , velox faltu , venatu vivens, innocuum homini, Mais que le panthère d’Ariftote foit le fynonime de thois ou le nom d’une variété du fchacal, je ne puis le déterminer; je n’ofe pas non plus affirmer que l’adive ou adil de l'Arabie, deab de Barbarie, jaqueparel du Bengale, zenlie ou kenlie du cap de Bonne-Efpérance , mebbio d'Ethiopie, & nort de Madure, indiquent , comme le penfe M. de Buffon, le même animai que notre fchacal. Ce qu'Ariftote & les différens voyageurs nous ont appris des animaux qui portent ces divers noms , ft trop court & trop indéterminé pour qu'on en puille conclure quelque chofe de certain ; mais ce que je puis aflurer, c’eft que le nom de sulki que M. de Buffon (qui fe fie à Olearius}) place parmi les fynonimes du fchacal (2), eft impofé dans la Turquie afiatique au renard & non pas au fchacal, ce qui eft prouvé même par la defcription d'Olearius , puifqu'il donne à cet animal des oreilles noires, caraétère qui elt par-tout celui du renard, tandis que le fchacal a toujours les oreilles brunes. Enfin, il n’eft pas doureux que le aka vu en Guinée par Bofman , & que M, de Buffon avoit auffi rapporté au fchacal, eft un animal très-différent , que M. Pennant a fait connoïître, qu'il a décrire, & nommé Ayene tachetée (3). £ Suivant MM. Zimmerman (4), Schreber (5) & Erxleber (6) , l’adive eft une (1) Buffon, article du Chien , & tom. IX , pag. 77+ (2) Idem. Hit. Nat. tom. XIII. (3) Pen. fyn. of quad. pag. 162. E (4) Spec. zool. geog. pag. 361:] E (s) Saugthière, [II , 365.1 L (6) Hift. Reg. Anim, pag. 57191 % 368 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; variété du fchacal. Pour le zenlie ou*kenlie, c’eft une autre efpèce connue fous le nom de canis mefomelas , & dont on trouve une figure dans Schreber (1). ] Les voyageurs fe trompent facilement lorfqu’ils manquent de con- noiffances en Zoologie, ou qu'ils ne font pas doués de cette patience néceffaire à l'examen des animaux, Des voyageurs qui fe contenteroient des noms donnés par les habitans, affureroient, par exemple , que dans FUÜkraine polonoife & la ruffe, en-deçà & en-delà du Dynapim, on trouve dés fchacals, parce que l'animal auquel les habitans ont donné le nom de tchacal, y eft de même fort commun. Mais celui qui examine avec foin, verra que ce tchacal de l'Ukraine eft le même animal qui dans le refte de la Ruflie & de la Pologne porte le nom efclavon de welk, & que c’eit le loup ordinaire, L Perfonne n’ignore combien les fattffes relations & les faux rapports des voyageurs ont obfeurci l’hiftoire de la plupart des animaux , & quelle peine ils ont donnée aux Naturaliftes éclairés qui ont voulu déméler la vérité au milieu de ce fatras de contes abfurdes, IL feroit donc à (ouhaiter que l’on pât les mettre en état d’être utiles à la Zoologie , fans qu’ils euffent befoin d’études préliminaires approfondies , cela ferviroit aux progres de la fcience, & faciliteroit les travaux des Naturaliftes. C’eft en partie dans cette vue que nous avons fait une analyfe des animaux quadrupèdes , d’après les principes de M. de Lamark , expofés dans fa Flore Francoile, à laquelle nous avons joint des defcriptions fuccin@es de ces animaux, rangées fuivant l’ordre de leurs reffemblances, & de très-bennes figures. En forte que par le moyen de cet ouvrage, les voyageurs pourront, 1°. reconnoître un animal quelconque , ou s’affurer s’il eff inconnu ; 2°. favoir quelles font fes mœurs, & jufqu’à quel point il eft connu des Naturaliftes ; 3°. quelle eft la place qu’il occupe dans l’ordre des reffemblances, c’eft-à-dire , quels font fes rapports & fes différences avec les autres quadrupèdes. On fent par ce fimple expofé qu'il fera facile À un obfervateur intelligent de faire de nouvelles obfervations fur les mœurs & la figure de plufieurs animaux, & d’éclaircir bien des doutes fur leurs efpèces. Cet Ouvrage, qui contiendra beaucoup plus d’animaux que M, de Buffon n’en a décrit, fera livré dans peu de tems à l’imprefion. 1 Il ef crès-certain que fans compter le loup & le renard , il y a d’autres animaux qui ont plus ou moins de rapports avec le fchacal , comme par exemple, l'i/atis, animal indigène de la Sibérie , dont la defcription fe trouve dans les Nov. Com. de Péterfbourg , tom. V , & dans le rom, XIII dé l'Hift. Nat. de Buffon, & le corfac , animal commun dans les cam- pagnes à l'orient de la mer Cafpienne , & dont on trouve une notice dans la douzième édition du Syft. Nat. de Linnée, Il faudroit favoir fi les noms indiqués ci-deflus appartiennent à un de ces animaux, ou s'ils défignent des efpèces différentes. La même queftion peut fe faire au fujec des animaux d'Amérique, le go/chis ou gofque & l'alco. Mais on ne peut rien répondre de certain avant que les Zoologues aient bien comparé ces animaux entr'eux. c (r) Saugthière, HIT, pag. 370, pl. 90.] 2 Tour SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 369 … Tout ce que nous pouvons aflurer après un examen approfondi, c’eft que cet animal , qui forme la race fauvage de nos chiens, eft indigène dans toute la Perfe & la Turquie afiatique, qu’on le trouve rarement dans les plaines, mais qu’il eft confmun dan$ les endroits montagneux ; enfin, qu'il ne fe trouve pas vers le nord au-delà de la cîme du Caucafle, Les Tartares , les Turcs, les Perfes, & les Rufles du Gouvernement d’Aftra- can, l'appellent communément du nom de /chacal, en changeant de la voyelle a en : & en e, & prononçant l’initiale ou d'une manière plus douce, ou d'une manière plus rude, comme le /&4 ou l’S latin, ou auf comme l'J françois ; mais jamais, que nous fachions, comme l’ aile- sand ; ainfi dans la traduction allemande de l'Hiftoire-Naturelle de M, de Buffon , on a mal appelé cet animal aca/, qui en françois avoit été très-bien nommé par l'Auteur jacal , ou chacal. Nous lui confervons ce nom qui eft plus commun , plus vrai, & qui d'ailleurs eft plus dérerminé que celui de loup doré ou chryfe ; car ni le chien, ni le chacal ne peuvent être pris pour un loup dégénéré par le climat. Le fchacal , le loup & le renard font tous les trois fort communs en Géorgie, & cependant les caractères diftin@ifs de ces efpèces fe font toujours confervés, & il eft très-connu chez les Géorgiens que l’on appelle le fchacal purca , le loup gmeli, & le rehard mela. - Après avoir fait précéder les difcuflions critiques au fujet du fchacal , examiné ce que Kæmpfer nous en a laiflé (1), & ce qu'en a dit notre collègue Gmelin (2), fi nous omettons ce qu'on a d’ailleurs de peu exact fur cet animal fi célébré par les voyageurs, il eft certain que le fchacal n’a point été bien cohnu. Nous donnons donc ici une defcription exacte & détaillée de cet animal, que les Zoologues, & particulièrement MM. Linnée (2) & Pennant (4), défiroient ardemment. Je l'ai fouvenc vu en Géorgie , & je l'ai difléqué. Les Naturaliftes peuvent juger d'après ma defcription des différences ou des reflemblances qu’il a avec les animaux. voifins , & ils pourront, fans fe tromper, le reconnoître fous quel nom qu'on le leur préfente. Defcription du Schacal, La taille du fchacal furpañle à peine celle du renard ; quant au refte de l'habitude de fon corps & fa phyfionomie , il tient le milieu entre le loup & le renard. Je n'ai jamais vu d'individu de la longueur detrois pieds & (1) Amaænit, extot. pag. 413. (2) Itins tom. 3, pag. 80. (3) Zid. Ei. Syft. nat. edit, 12, tom. I, p4g- 60. Defcriprio, inquit , genuina déficit. en V'id. Ei. Sinop. of quad. pag. 159. Je is flrange , 1hur! an animal focommon inthe levant, should never have, been brought oyer 10 be defcribed by any modern. Naturalift. The defcriprions yet remain very obfcure. Tome XXIX, Part. IL, 1786, NOV EMBRE. Aa3 3170 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, demi, comme l'indique Gmielin (l.c.), cependant je ne veux pas infirmer fon obfervation. La longueur de tous ceux que j'ai eu occafon de voir, mefurée en ligne droite depuis l'extrémité du mufeau jufqu'à l'origine de la queue, a varié de 26 à 28 pouces mefure de Paris. t La figure deJJa planche première eft tirée de Ouvrage allemand de M. Schreber ( Saugthière ); elle m’a paru beaucoup meilleure que celle qui accompagne le Mémoire de M, Güldenftædt. j La réte eft beaucoup plus courte, le mufeau plus obus, la gueule moins renflée, le fronc plus convexe & plus faillant en arrête, que dans le renard ; l’éris brun-jaunâtre ; le rez dépaflant un tant foit peu la lèvre fupérieure, nud, noir , un peu humide ; les zarines recourbées en dehors; les lèvres noires & un peu lâches; la Zangue douce. Les mouftaches font rangées en fix ordres fur la lèvre fupérieure; celles de deffus font plus éloignées, plus courtes & recourbées ; les autres font horifontales : fur la lèvre inférieure les rangées font moins régulières ; elles fe rencontrent fur les bords des côtés de cette lèvre ; la longueur des mouftaches varie, mais n’excède pas 3 pouces. Il y a fept verrues fur la face , une fur chaque orbite dans le milieu de fa paupière fupérieure, avec trois poils ; une au-deflous de chaque œil oppofée à la fupérieure, & dans la même ligne que la comiflure des lèvres, ayant trois poils; une à chaque glande parotide, fituée dans le milieu de la diftance entre l'angle de la bouche & l'ouverture des oreilles, ayant deux poils; enfin , une impaire à la gorge ayant beaucoup de poils rongés ; les foies de ces verrues font à-peu-près égales à celles des mouftaches & de la même couleur, toutes noires, elles font roides & prefque de la confiftance de la corne; mais dans la verrue feule il y a trois foies plus ou moins roides, rongées comme au loup & au renard. Les oreilles droites, femblables à celles du renard , mais plus courtes ; toutes velues, intérieurement blanches, extérieurement brunes, légèrement noirâtres, mais jamais noires comme celles du renard. Le cou & le corps femblables à ceux du renard, cependant le corps plus efilé, car le plus grand diamètre du tronc, pris perpendiculairement ; eft de 7 pouces, & tranfverfalement $ pouces. Les pieds femblables à ceux du renard , fi ce n’eft plus élevés; les doigts entièrement velus , en forte que les ongles paroiffent à peine ; mais il y a fous chaque pied cinq tubercules nuds & noirs, fur lefquels l'animal marche, dont quatre répondent à l'extrémité des doigts ; mais le cinquième eft pofé entr'eux , il eft rapproché & plus grand. On trouve aufñfi dans la jointure du carpe une verrue conique petite & noire. Quatre doigts aux pieds dont Les deux du milieu font un peu plus longs que ceux de chaque côté ; tous ont des demi-membranés entr'eux. Le pouce manque dans les pieds de derrière; il eft élevé , plus court que les autres doigts, & placé fur le côté intérieur du métacarpe dans les pieds de SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 3 devant. Les ongles de tous les doigrs & des pouces font égaux noirs, comprimés , courbés en deflous, un peu pointus, courts & fixes, [c'ett-à-dire, non-retractibles. ] La queue renflée au milieu, mince à l'extrémité , toute velue, defcendant à peine jufqu'au talon, fort femblable à celle du loup, maïs pas autant à celle du renard ; quand l'animal court , il la porte étendue , fans cela elle eft pendante. : Le périnée large d’un pouce & demi, poileux ; les lèvres de la vulve ferrées, gelues , le clitoris conique & qu’elles couvrent fur la longueur de trois lignes ; le vagin a trois pouces & demi de long; le /crotum & le Prépuce ferrés, un peu velus, femblables en tout à celui du chien, Les mamelles ne font pas vifibles dans les mâles, & difficiles à découvrir dans les femelles qui n’abairent-pas; j'en ai compté quatre ou cinq plus ou moins diftinétes de chaque côté, Les poils beaucoup plus roïdes que ceux du renard , mais à peine plus forts que ceux du loup; ils font très-courts fur le müfeau, un peu plus longs fur le refte de la tête & far les pieds; beaucoup plus longs fur l'abdomen ; encore plusdongs far le dos , où ils ont plus de trois pouces; extrèmement longs à l’éktrémité de la queue, où ils ont quatre pouces. Les crétes longues & rondes’, [ formées par la rencontre des poils en fens contraire | & qui dans le chien font aflez évidemment compofées de poils courts, le font aufli dans le fchacal ; elles font effacées & on les diftingue à peine. Le duvet ou fecond poil, eft gris-cendré fur le corps; il eft la moitié plus court queles autres poils. Je ne trouve pas la couleur auffi belle que les Auteurs l'ont dépeinte , & je n’y vois certainement pas l'éclat de Por ; tout lé deflus de l’aninsal eft jaune-fale ; plas noir fur le dos, moins ombré fur les côtés , deffous jaune-blanchätre. Les pieds d'une feule couleur , qui eft brune-fauve ; le plus fouvent, mais pas toujours, la jointure du catpe eft marquée fur la partie antérieure, d’une tache noirâtre effacée. La queue eft de la même couleur que le dos , noire à la pointe, Chaque poil du dos eft marqué de quatre bandes , ils font blancs à la bafe , puis noirs, enfuite fauve & la’ pointe eft encore noire ; les deux premiérs anneaux occupent les deux tiers de la longueur de chaque poil ; mais les poils de la queue font feulement blancs à la bafe, le refte noir. Je donnerai les dimenfions des parties externes qui font les plus effentielles dans un animal qui ne differe de plufieurs efpèces voifines que par la proportion des parties, & je me conformerai au célèbre Daubenton, qui a dontié dans le tom: VII de l’'Hift. Nar. les dimenfions du loup & du renard, Mesmefures font demême , en pouces & lignes de Paris. Longueur de Panimal depuis l'extrémité du mufeau jufqu’à l'origine de la queue , . . . . 27 p. 91 Hauteur du train de devant . .… . . . . 17 6 Tone XXIX, Part. II, NOVEMBRE. 1786. Aaa 2 372 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Hauteur du train de derrière . . . 1. … : 18 p. o k Longueur de la tête depuis le bout du mufeau jufqu’à FOCCEUEER 6 0 AE ENTRE Circonférence du bout du mufeau . . . . a Histo —————— mufeau prile vers les yeux . 6 3 Contour de l'ouverture de la bouche . . 4 . 6 Diflance entre les nafeaux , . . . . . .:! 4 Diflance entre le bout du mufeau & l'angle antérieur de Fœil +8 ee mreaie| 20616 —————— l'angle poftérieur de l'œil à l'oreille 2 Z Longueur de l’œil d’un angle à l'autre . . ; 9 Diflance entre les angles antérieurs des yeux mefurés en fuivant la courbure du chanfrein . . . I 7 La même diftance en ligne droite. « , .:. I 3 Circonférence de la cête prife entre les yeux & les PEERIES ta a Dre es 2 RS A Aer ATOUT Lonsueur.des oreilles ss at fer. ma 9 Diftance entre les deux oreilles prife dans as 2 4 Longueur, du. cou {.,! 5 si .oiie AC Circonférence du cou SC EEE EEE 9 a — corps prife derrière les jambesde devant 14 —————— à l'endroit le plus gros! + . . 131$ 4 | en —— devant les jambes de derrière . . 13 4 | Longueur du tronçon de la queue .. , . . 10 Circonférence de la queue à l’origine . . . ,. € Longueur de lavant-bras depuis le coude jufqu'au RODUERR EC TE EME RATE ne RSR E Sr (o Circonférence du poignet 4. . + + +. + 3 6 ——— MÉTACA PE teint ral > dep 10 Longueur depuis le poignet jufqu’au bout desongles 4 3 ——— de la jambe depuis le genou jufqu'au talon 6 Circonférence du elon. 2 seu aire Matos 4 ee — ri mÉtata nr haie alete 7 Longueur depuis le talon jufqu’au bout des ongles . $ 6 Longueur des plus grands ongles .1. : . 8 Par la comparaifon de cette defcriprion & de ces dimenfions avec celles que le célèbre Daubenton a données (tom. V de l’Hift, Nat.) des variétés des chiens, il eft évident que c’eft le chien de berger (tom. V, pl. 28), qui a le plus de rapport au fchacal. Cependant il ne, faut pas .diffimuler qu'il. y a des chiens qui ont encore une plus grande reffemblance avec le fchacal ; jai vu en Rufie des chiens ordinaires qui avoient une robe, brun-jaunitre, d'un poil peu long, les oreilles droites & le mufeau pointu, très-femblables par la grandeur & par d’autres caractères au fchacal, Es SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 373 Les parties molles intérieures du chien, du loup & du renard , fuivant les obfervations. de M. Daubenton , ne different entr'elles que par la forme & les proportions de l'inteftin cæcum ; mais en cela le fchacal ne différe pas tout-à-fait du chien. Les courbures de l'inteftin cæcum du fchacal , repréfenté dans la pl. 2 , font doubles ( a & b), par le premier appendice (c) , il s'approche de l’inteftin grêle (4), par le fecond (e) il revient vers le colon (f), cous les deux font fortement liés par le uiflu cellulaire ; par le troïfième appendice (g), qui eft urf peu libre , fouvent plus étroit que les autres, le fond (4) du cæcum étant proéminent, il S’approche derechef de l’inteftin grêle. Si on compare la figure de la même partie du chien, qui fe trouve dans la pl. 46 , tom. V de l’'Hift. Nar. il paroît qu'il n'y a nulle différence, fi ce n eft dans la manière de repréfenter ces objets. | SUITE DES RECHERCHES SUR L’ALKALI MINÉRAL NATIF; Par M. LoRGNA: Traduites par M. CHAMPY,de l'Académie de Dijon (1). X L. De la décompofition du Sel commun. 9 EPATRE nous ayons acquis précédemment quelques lumières fur le fel commun & fes principes prochains dont nous avons reconnu l'exiftence dans les animaux vivans dans l’océan; quoique, trouvant dans ces mêmes animaux la magnéfe jointe au natrum ou alkali mi- pétal libre, il paroifle clairement que funion conftante des fels mu- riatiques à bafe de natrum & de magnéfie m’eft pas accidentelle ; ce- pendant nous ignorons encore quels moyens emploie la nature pour décompofer ces fels (fi elle les décompofe ), particulièrement le pre- mier qui eft parfaitement neutre. On peut donc toujours demander , comme nous l'avons fait ailleurs, fi ces principes libres dans les ani- maux y font dans un état de féparation originelle, ou s'ils provien- (1) Voyez le cahier de juillet , page 30, celui de feptembre, page 161 , & celui d'oftobre , page 1295. 374 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, nent des fels marins décompofés, Ce que nous avons dit $. XXIX ; de la terre calcaire relativement aux êtres organifés peut s'appliquer pareïllement au natrum & à la magnéfie; il eft poffible que leur exiftence dans la nature foit indépendante du fel marin, cependant il paroït à propos de faire quelques recherches particulières fur fa décompoftion , elles feront très-utiles en elles-mêmes & nous feront connoître à quels puiffans agens il eft befoin de recourir pour obtenir cette décompofirion, X LI, Il n’eft aucun fel dans Ja nature qui puifle fe décompofer, fi ce n’eft par l'intermède d’un agent étranger, qui, exerçant une affinité fupérieure fur Pun de fes principes , laïfle l’autre ifolé, & le met en liberté. En parcourant les différens procédés qu’emploie la chimie fur les fels, toutes fes tranfmutations & fes précipités, on ne trouvera jamais aucune décompofition qui ne foic due à tel ou tel intermède qui l’a opérée. D'après cela, la queftion fur la décompoltion du fel commun fe réduit à trouver un agent qui ayant plus d’afhnité avec l'acide muriatique laiffe l’alkali ifolé, ou qui par une plus grande affini- té avec l’alkali rende l’acide libre. Comme dans ces, deux cas, un feul des deux principes fe trouve libre & l'autre combiné de nouveau, quoique le fel foit décompofé, il eft néceflaire pour obtenir ce fecond principe de détruire fa nouvelle combinaifon & de Le rendre libre & ifolé comme l’autre, Nous voilà au point de chercher à dégager les deux principes confti- tutifs du fel commun; mais, laiffant à part les procédés néceflaires pour dégager l'acide muriatique , qui. font communs & très - connus, nous nous occuperons ici de ce qui eft le plus important ; c’eft-à-dire, d'obrenir la foude ou l’alkali minéral libre, quel que foit le nouvel état de la partie acide dont on l'aura dégagé. Il y a deux voies pour parvenir à ce but, l'une directe, l’autre indire@te, dont nous avons ci-devant fait mention; l’une en s’emparant de l'acide par quelque fubftance qui laifle l’alkali libre, l’autre en enlevant l’alkali à l'acide muriatique par un intermède que l'on puifle dégager plus facilement que cet acide, Pour réuflir par la première de ces deux voies , il fe- roit néceflaire que la fubftance dont on feroit ufage, fût fixe & eûc avec l'acide muriatique plus d’afhnité que la foude, pour s'emparer de l'acide & mettre l’alkali en liberté ; mais toutes les expériences & les tentatives faites jufqu'à ce jour, n'ont pu nous faire trouver dans les différens règnes de la nature, de fubftance qui dégage complette- ment l’alkali du fel commun & le rende totalement libre & pur. Les’ différentes décompofitions de ce fel qu'on attribue à l’art font très-équi- voques & ne doivent pas être confondues avec celles où l’alkali eft en 1 | SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 37g tièrement dégagé de l'acide muriatique & rendu libre par une afi- nité fimple. Le procédé de l’illuftre Bergman dont nous ferons men- tion à la fin de ce mémoire, s’il avoit reçu cette fanction univerfelle qu'exigent les faits capitaux dans la phylique, pourroit être repardé comme Ja caufe de cette véritable décompofition dont nous parlons, Quant à celui où:on emploie la litharge , il feroit dejà connu li la dé- compofition qui en réfulre étoit complette & totale, & sl avoit ces caractères qu'on exige pour être employé en grand , promptement & avec économie. Il eft prouvé par routes les expériences qu'ont faites & répétées les plus favans Phyficiens, que le feu, cet agent le plus puif- fant & le plus fixé de tous ceux qu'emploie la nature & auquel rien ne peut rélifter, ne peut dégager l'acide muriatique de fa bafe aika- line. On doit en conclure que cet acide n'eft pas difpofé à fe com- biner avec le feu, & que cet agent n'eft pas propre à décompofer le fel commun; c'eft ce qui doit nous faire comprendre que dégager immédiatement & complettement l'alkali des liens qui l’uniffent à l’a- cide muriatique, n’eft pas une opération commune qu'on puifle attri- buer légèrement, ou à l’atténuation fans bornes du fel commun de- venu partie conftituante des animaux (ce qui n'eft qu'une divifion méchanique & jamais une vraie décompofition }, ni au feu même le plus violent qui ne faic que le fublimer & le volatilifer fans pouvoir le décompofer véritablement; jufqu'à ce que nos connoiffances foienc plus avancées & que nous ayons découvert dans quelques fubitances non encore éprouvées une nouvelle affinité plus puiffante qui dévage l'alkali parfaitement & dans toute fa pureté, il eft à propos de nous appliquer à l’autre voie dont nous avons parlé; cer objet eft d'autant plus important qu’on n’a certainement pas encore mis en ufage tous les moyens propres à obtenir l'alkali pur que nous cherchons à nous procu- rer par deux opérations fucceflives. XLIT. Si on a en vue le bénéfice d’un travail en grand, & qu’on ne fe borne pas à des eflais de laboratoire, il n’y a que les deux acides vi- triolique & nitreux qui foient affez communs & abondans pour être employés dans la première opération à chaffer l'acide dn fel commun pur & à fe préparer dans la feconde le moyen facile & très-connu de la combuftion. Mais ni l'abondance de l'acide nitreux libre, ni fon prix, ni moins encore la quantité de nitre natif ne peuvent promet- tre en grand un fuccès qui foit préférable à celui qui réfulteroir de Fufage des fels neutres vitrioliques dont regorgent les entrailles de la terre. L'illuftre naturallifte M. Fortis a trouvé une nitrière naturelle à Molfeta dans le Royaume de Naples, & fa découverte eft aufñi utile au Gouvernement qu'elle eft honorable pour lui, par fa fingularité & 376 OBSERVATIONS SÛR LA PHYSIQUE, la richefle de fes produits; mais quand même on parviendroit'ou à trouver en plufieurs lieux & en quantité, du nitre naturel, où à en produire en abondance artificiellement , ce fel eft par lui-même trop précieux dans les arts pour qu’on püt l'émployer à d’autres ufages &c particulièrement à la décompofition du fel commun. Il eft donc re- connu, fans qu'il foit befoin d'autres preuves , que dans les opérations en grand, l'acide vitriolique eft le feul dont on doive fe fervir pour décompofer le fel commun, parce que, comme nous l'avons dir, ‘ik fe tbuve abondammept & à vil prix, foit à bafe terreufe, foit à bafe métallique. IL eft connu qu'en mêlant du fel commun avec un fel vitriolique à bafe cerreufe ou métallique , & foumettant enfuite ce mélange à un feu vif, il arrive que l'acide vitriolique chafle l'acide muriatique & s'empare de fa bafe alkaline avec laquelle il forme du vitriol de foudes On fait aufi que par le phlogiftique on parvient dans une feconde opération à dégager l'acide vitriolique & à mettre l'alkali minéral en pleine liberté. Sans rapporter ici les autres procédés connus & ufités dans plufeurs fabriques , je me bornerai à expofer la découverte’ qui m'a réufli pour la première opération ou la formation du: vi< triol de foude , & je dirai enfuite ce que j'ai effayé pour la feconde opération, : ». BY LS CIE Si nous examinions attentivement une infinité de phénomènes qui fe préfentenc chaque jour dans les trois règnes , ‘par les opérations: fpontanées de la nature, il'n'eft peut-être pas de moment où nous ne puifions la furprendre travaillant à des converfions & ‘des tranf mutations merveilleufes. Elles font ordinairement dues aux affinités qui mifes en action, s’exercent en filence & graduellement par le con- ta& des fubftances tendantes à s'unir, & avec l’aide de quelques inter- mèdes fubfdiaires tels que la chaleur, l'air, l'eau ou autres agens, Quelques-uns d'entr'eux deviennent , parties intégrantes des nouvelles productions, & d’autres ne font que les véhicules des tranflations &c permutations de principes qui fe fuccèdenc infenfiblement. La: feule production du vitriol de mars & de l’alun par la décompoftion fpon- tanée des pyrites martiales eft un exemple familier & aufli lumineux: qu'aucun autre. Îl ne manque aux hommes que la patience. Avides de tout voir dans ce moment, ils ne font pas réflexion que le plus grand nombre des opérations de la nature, ne fe fait qu'avec lenteur & avec l’atention de préparer fon laboratoire & de mettre les fubftan- : ces opérantes dans des circonftances favorables. di Croiroit-on qu'un peu plus de deux parties de vitriol de mars ; mélées avec une partie de fel commun, étant agitées de tems en + ' tems SUR L'HIST: NATURELLE ET LES ARTS. 377 tems & entrerenues un peu humides, ne préfente après 40 ou fo jours aucuns veftiges de fel commun ni de vitriol de mars, mais un vrai vitriol de foude qui remplace ces deux autres fels? Ce beau phénomène eft le produit d'une double décompofition opérée en filence par la nature. J'ai répété cette expérience plufieurs fois, elle l’a auili été par un de mes amis fans autre humidité que l'eau de criftallifation des deux fels, & il en eft toujours rélulté un vitriol de foude bien carac- térifé. Au refte il paroit tellementguni à la terre martiale que les fil- trations ne peuvent l'en féparer entiérement. L'expédient le plus prompt que j'aie trouvé pour achever cett@féparation eft de le calciner for- tement pendant quelques minutes, ce qui me fait conclure que ce n’eft pas une pure ochre martiale que cette fubftance qui eft fi adhérente _au vitriol de foude, qui fe diffout avec lui dans l'eau & pafle à tra- vers les filtres, mais, en grande partie du muriate martial ; ce qui prouve qu'il fe fait deux nouvelles combinaifons, l’une dé l’acide vitriolique avec l’alkali minéral, l’autre de l'acide muriatique avec le fer, & celle- ci peut enfuice fe détruire par la calcination. C’eft ainfi que par une première décompofition , on obtient le précieux fel de Glauber, fans autre dépenfe que celle du fel° commun & du vitriol, qui peut être très-petite en n'employant en grand que des matières communes, par- ticulièrement celle du fel commun qui eft à très-bas prix dans les pays maritimes. Ce procédé n'exige aufli d’autre manipulation que le mé- lange du vitriol & du fel, après lequel on abandonne l'opération-à la nature. J'avois éprouvé autrefois, & je m'étois afluté par des expériences inconteftables , que le fel commun fe décompofoit par le nitre à bafe terreufe en les mêlant enfemble fans autre opération fublidiaire que de tenir ces deux fels un peu humides. D’après cela, je rentai la mê- me décompofition en mettant le fel en contaét avec le vitriol de mars, & j'y réuflis parfaitement. Ce procédé n’étoit pas encore connu, je men fuis afluré en parcourant les traités de chimie les meilleurs & les plus renommés, afin de rendre juftice à celui qui m'auroit préve- nu dans cette utile découverte. J’en trouve encore une preuve indi- recte dans le prix auquel fe vend dans toute Europe le vitriol de foude, trop cher pour qu'on, puiffe jamais le fubftiruer au fel d’epfom & autres analogues, quoiqu'il foir fans contredit préférable à tous les fels carhartiques connus; au lieu que la compofition en eft maintenant fi facile & fi peu difpendieufe, que l'ufage en eût été établi quel- ue part, fi mon procédé avoit été découvert par quelqu'un. Si on confidère que 100 liv. de fel de Glauber ou vitriol de foude criftallifé, contiennent, fuivant Bergman, 15 liv. de natrum ou foude, 27 liv. d’acide vitriolique & $8 liv. d’eau de criftallifation ; ue 100 liv. de fel commun criftallifé en contiennent 42 de foude, Tome XXIX, Part, II, 1786. NOVEMBRE, Bbb ‘378 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, 52 d'acide, & 6 d'eau; & quenfin 100 liv. de vitriol de mars criftallifé en contiennent 23 de fer, 39 d'acide vitriolique & 38 d'eau; en trouvera par un calcul facile, qu'en mêlant 2 # de fel commun avec 4 5 de vitriol martial, on peut obtenir 6 = de fel de Glauber ou vitriol de foude criftallifée. On voit ici la grande utilité de cette découverte en comparant le peu de valeur des fels employés avec la quantité de vitriol de foude qui en réfulte; la calcination néceflaire pour décompofer, comme il a été dit, le muriate martial & en féparer lochre, ne méritant pas rs en fafle étar. Le tems d’en- viron fo jours prefcrit pour la décéhpofition mutuelle des fels vitrioli- que & muriatique, s'abrège beaucoup lorfque ces fels font purs & qu'aucune matière étrangère ne dérange leur contact. Nous voilà donc parvenus à enlever l’alkali minéral à l'acide muriatique , & à Pobtenir dans le vitriol de foude combiné avec un nouvel acide, fur lequel, comme on le fait, le feu a plus d'action qu'il n’en a lui-même fur l’alkali minéral auquel il eft uni. XLIV. La feconde opération néceflaire pour rompre par Îe feu les nou veaux liens de l’alkali minéral avec l'acide vitriolique, & obtenir la foude dans cet érat de pureté que nous cherchons, étant familière & très-connue, je m'occupai d’une expérience, qui, à ma connoiflance, n’avoit pas encore été faite. Je tentai d'obtenir une vitrification com- plere en mêlant avec du fable le vitriol de foude de Ia première opération ( Macquer, Didion. de Chymie, deuxième édition , tom. IT, page 463). Dans cette expérience , à raifon de la grande affinité de Tacide vitriolique avec le phlogifique , on devoir voir fucceffivement un vrai foufre fe former , fe détruire en brûlant, enfuite l’alkali rendu libre devenir le fondant immédiat du fable, & la vitrification s'achever peu-à-peu. Pour mieux obferver ce qui fe pañloit dans cette opération, je la fis fur des charbons allumés, à la lampe, avec un chalumeau & le fecours d’une perfonne accoutumée à fe fervir de cet inftru- ment. Je pris 12 parties de vitriol de foude en efflorefcence & 8 par- ties d'un fable très-fin, qu'on emploie dans la fabrique de Murafco : les ayant mêlées enfemble, je les foumis à la fufion fur un gros mor- ceau de charbon que j'avois creufé, & à l’aide de quelques autres char- bons j'y formai une efpèce de fourneau de réverbère. Dans le princi- pe, le fel fe liquéfa, il fe rapprocha enfuite & la mafle fe durcit, peu après elle commença à devenir pâteufe & à bouillir avec bruit, il parut enfuite quelques taches à la fuperficie, quien s'ouvrant jettoient une flamme d'un jaune pâle, qui fucceflivement fe fonça de plus en plus. L'odeur qui en fortoit étoit celle du foufre, & peu-après on le SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS: - 379 - vit clairement brûler de toutes parts, il fe formoir & fe détruifoit - fucceflivement par la combuftion, particulièrement dans la place où j'avais foulevé avec un fer la matière en fufon. On fufpendit le tra- vail, la matière réfroidie étoit d’un rouge obfcur & avoit une odeur fétide infupportable. J'y reconnus manifeftemenc l'hépar ou foie de foufre, ce qui prouve ‘qu'il y avoit de‘l'alkali combiné avec du foufre, qui n’étoit pas encore brülé. Peu après, je continuai l'opéra- tion fur ce foyer de foufre, la matière par l’action du feu commença à diminuer à la fin & les flammes cefsèrent de parof- tre. La matière fe mit à filer comme du verre u & le travail étant ceflé & la matière refroidie, j'eus un vrai verte tranfparent. Le tout n'exigea* qu’un peu plus de $o minutés (1), AE Ve Si nous voulons nous en rapporter aux faits, il n’y a pas de doute que nous ne puiflions retirer plufieurs avantages de cette expérience. Premièrement il eft certain que par le procédé le plus facile & le moins difpendieux qu'on puifle imaginer, nous pourrons à l'avenir nous procurer le vitriol de foude; ce fel par lui-même eft aufi pré- cieux qu'aucun autre; quand même on ne lé confidéreroit que du côté de la médecine en qualité de fel cathartique, it feroit incom- parablement préférable aux fels terreux qui font en ufage, tels que ceux d'Epfom , de Sedlitz, de Modéène & autres femñblables à bafe de magnéfie. Il fera bannir des boutiques ce prétendu fel d'Angleterre qui provient de l’eau-mère des falines de Lorraine, dont le ba prix feul peut rendre tolérables les qualités irritantes & nauféabondes dues au muriate terreux qui y domine. En fécond lieu nous apprendrons à n’employer d'autre intermède que le feu continué pour retirer l’alkali du foie de foufre (2), & nous pourrons nous promettre , en foutenant la combuftion du foufre, d’ob- tenir le natrum ou la foude dans le plus grand état de pureté; nous reconnoïtrons en outre que pour l'art de la verrerie, il n'eft pas befoin de décompofer précédemment le fel de Glauber ou vitriol de foude, (G:) L’abondance des vitriols alkalins dans ce que l’on nomme /8Z de verre, prouve que leur décompofition ne fe fait pas aufli facilement dans les creufets de verrerie que fur un charbon ; on eft même obligé de les enlever , parce qu'ils retardent confidéra- blement l’affinage du verre. Nore du Tradwéfeur. / à (2) La dcompofition de l’hépar alkalin par le feu n°’eft qu’une combuñtion lente, comme M. de Morveau La fait voir ( Digref. acad. pag.256 ); auf la plus grande partie du réfidu eft-il du vitriol alkalin, parce que l'air vital régénère l'acide, Cet Académicien a éprouvé que la décompofition étoit bien plus complète en employant Pacide méphitique pour prendre la foude , & la limaïlle de fer pour s'emparer du foufre. Nore du Traduéeur, Tome XXIX , Part, Il, 1786 NOVEMBRE, Bbb2 «380 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ‘le feu achevant par lui-même toutes les opérations fuccellives de décompofer ce fel, de difliper le foufre & enfin de convertir en fon- dant l’alkali mis en liberté. À DS La gi EE De la manière de recueillir en quantité l’alkali bafe du [el commun. Nous reviendrons ici fur nos pas pour recueillir le fruit des dif- cuflions précédentes & mettre à profit les moyens les plus propres à accroître de la maïière la plus utile aux arts la production de l'al- Kali minéral, dont la nature doit maintenant nous être mieux connue qu'elle ne l’éroit ci-devant. Cependant nous laiflerons à part celui dont nous avons traité ci-devant particwlièrement, qui conffte à re- tirer l'alkali direétement par'la décompofition du fel marin; moyen praticable en. grand avec peu de dépenfe & avantageux fur-tout pour Varc de la verrerie, comme, nous avons vu, par la facilité. que: procure notre découverte d’employer le vitriol de foude ou feL de Glauber. 4 Parlons d’abord ;de la foude :-c'eft, comme tout le monde fait: & comme nous l'avons dit .$. 1, la cendre demi-fondue du kali vulgairement appellé en. Italie ri/colo. ou ro/cano., plante dont on re- tire par la leflive ce fel fixe bafe du fel commun que l’on nomme natrum ou foude, Il s’agit de favoir fi cet alkali trouvé ainfi dans le règne végétal, y eft originel & propre ou étranger, & sil exifte avant la combuftion. J'ai) été dans le cas, ces années paflées, de faire un très-grand nombre d'expériences fur Les plantes marines & maritimes, ainfi que fur les fonds mêmes où elles croiflent ; je les mis au jour eh 1781 dans un écrit particulier cité par le. célèbre Scopoli , dans une note au mot /oda du. Dictionnaire de Chimie de M. Macquer , dont il a donné une édition en italien, & qui eft dans les mains de tout le monde. Ces expériences m'ont fourni l’occafion d'approfondir la queftion & d'acquérir beaucoup de lumières, d’après lefquelles, je fuis fondé à croire que cer alkali eft &ranger & acci- dentel aux plantes. C'eft pourquoi, fans rapporter en détail ( ce qui deviendroit long ) toutes Îes particularités de cet écrit, je dirai feule- ment que jé recueillis exprès dans les lagunes de Venife, une très- grande quantité d'algue & de plufeurs autres plantes du genre des fucus, qui toutes étoient crues & avoient vécu fous l’eau; je les fs fecher & brüler promptement à l'air libre dans un vafe de fer, je les trouvai pleines de pur fel commun ; mais ce ne fur qu'avec beau- coup de patience &,de difficultés que je pus y découvrir des traces d'alkali minéral libre/Ïl en ef ainfi , comme nous l'apprend M. Macquer, des cendres du V’arec de Normandie, autrement dit:Goëmon & Sar SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 381 en Bretagne. Au contraire dès que les plantes qui vivent fous l’eau , ou proprement marines, en font retirées & croiffenc fur des fonds mari- times découverts, leur produit change, & on trouve dans leurs cen- dres une quantité d’alkali minéral libre, mêlé avec d’autres fels. II eft à remarquer que ce n’eft pas dans le kali feul, mais dans cent autres plantes nourries dans les nièmes fonds & qu'il eft inutile de nommer ; j'ai toujours trouvé cer alkali dans la clefle des chardons ; L’artichaut particulièrement ( dont je brülois les tiges V& les feuilles), lorfqu'il eft cultivé dans des rerreins falés , eft aufli riche en foude, comme je m'en fuis afluré plufeurs fois, que le kali même qui femble être la plante privilégiée. J'ai conftamment obfervé que pour être riche en foude, les plantes exigeoient un rerrein abandonné par la mer & qui ne püt en être couvert; la quantité de fel commun s'augmen- toit de plus en plus & la foude diminuoit dans la lefive de leur cendre, à mefure que la plante étoit expofée à être baignée plus fré- emment par la mer, de manière que graduellement il ne reftoit prefqu'aucunes traces d’alkali, dès qu'elle étoic du nombre de celles qui font continuellement couvertes par la mer; obfervation qui .eft très-importante. Lorfque les rerreins maritimes séloignoient trop de -la mer, qu'ils appartenoient à quelqu'un de fes lits abandonnés de- puis trop long-tems , ou qui avoient fervi à l'agriculture, les plantes rentroient dans l'ordre des plantes terreftres, & on ne rétiroit qu'un alkali purement végétal de ces mêmes plantes qui. ayant pris racine dans un terrein falé ne manquoient jamais de fournir de l'alkali mi- néral. Pour m'en affurer d'une manièfe fimple & très-facile, je combiuois toujours Ja partie faline extraite des cendres, avec du vinaigre diftillé, -qui fe chargeoit de tout l'alkali libre qui pouvoit y être mêlé; ainf la différence notable de l’acète de potafle (terre foliée) avec l’acète de foude, & la figure des criftaux de nitre que j’obtenois en décompo- fant ces fels acéreux par l’acide nitreux libre, me donnoient des ré- fulrats certains. Ceci confirme admirablement les obfervations faites avant moi fur le kali, par MM. Duhamel & Cadet ( Mémoire de£ A- cadémie des Sciences, pour 1767 & 1774) 3 en tranfplantant, çe vé- -gétal d'un fol maritime dans l'intérieur des terres, après un certain tems, il devint terreftre & perdit peu-à-peu la faculté de fournir de Valkali minéral par la combuftion. Cependant les plantes marines qui vivent fous la mer, manquant d'alkali lorfqu'elles regorgent de fel commun, prouvent clairement que l’un n’eft pas un produit de F décompofition de l’autre, comme nous l'avons foutenu ailleurs. Il e aufli évidemment démontré que l'alkali minéral n'eft poinc effentiel & ipropre aux plantes qui en fourniflent, puifque la même plante fe trouve tantôt riche, tantôt privée de cet alkali, quand.elle croît ou fur un fonds falé, ou dans un terrein ordinaire. Puifque nous fa- ss 382 OBSERFATIONS SUR LA PHYSIQUE, vons maintenant que cet alkali réfide dans les animaux marins & eft propre à leur fubftance, puifqu'il eft produit fpontanément par la deftruction de ces animaux, & que nous le trouvons libre dans tous les terreins falés ; rout cela nous porte à conclure qu'il eft étranger au règne végétal & qu'il n'entre dans l’économie des plantes que parce qu'elles le tirent de la terre où elles ont pris racine & où elles fonc environnées des reftes & des dépouilles d'animaux marins décompofés. Quant à l'autre queftion relative à l’exiftence de l’alkali dans les plantes avant leur combuftion , quoiqu'il réfulte de ce que nous ve- nons de dire qu'il y eft abforbé dans leurs fucs nutritifs, & que de favans Auteurs nous aflurentc l’y avoir reconnu avant de les brûler, je crois devoir rapporter quelques expériences que j'ai faites pour m'é- clairer moi-même fur un objet fi important. 1°. J'ai pris un gros faifceau du grand Kali tiré fraîchement d’un terrein maritime où il avoit crû fponranément. Une moitié fut pilée & mife à macérer dans l'eau, où elle refta plufeurs jours, & après avoir filtré la liqueur, je la fis évaporer à Pie. je verfai enfuite, fur la matière feche, du vinaigre diftillé dont j'aidai l'action par une douce chaleur. Le fel étant fec fut diffous dans l'efprit de vin très- concentré. Ayant décanté l’efprit de vin, je le fis évaporer à ficcité, enfuire par un feu modére: j: décompofai le fel acéreux en déplaçant l'acide végétal, & j'eus 473 grains d’alkali minéral très-bien caracté- rifé. Je fis fécher au foleil l'autre moitié du kali, que je brûlai à l'air libre dans un vafe de fer, & ayant calciné Îa cendre par un feu lent, elle fe trouva du poids de 21 dragmes, Par ce procédé ci-deflus , avec le vinaigre diftillé & l’efprit de vin, j’obtins de ces cendres 436 grains d’alkali pur. Je m'aflurai par-là d’une manière non équivoque que l'alkali minéral exifte libre dans le kali avant fa combultion. Cette expérience me fit naître le der de vérifier auffi fi la préexiftence de l'alkali végétal a lieu dans les plantes communes, En conféquence je choifis une plante de colline"& particulièrement le za- marifque dont on prétend que les cendres contiennent à peine des tra- ces d'alkali végétal, J ; 2°. Men étant procuré un faifceau de monfelice, je les fis piler , ma- cérer long-tems & bouillir pendant quelques minutes dans la même eau. La liqueur réfroidie & filtrée, je la fis évaporer à ficcité, comme ci-devant. La matière combinée avec le vinaigre diftillé, & le fel s’é- Prant criftallifé, quelle fut ma furprife de voir fur la capfule du vrai acète de potafle ou terre foliée. L'ayant extrait par moyen de l’efprit de vin & fait deffécher de nouveau, je verfai de l'efprit de nitre pour décompofer le fel acéteux, & j'obtins un nitre très-parfait, criftallifé en aiguilles prifmatiques, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 383 XLVEE La queftion que nous venons de traiter n’eft pas purement fpécula- tive, nous y avons gagné beaucoup de connoifflances très-utiles. D'abord nous avons appris à bien connoître la nature des terrains fur lefquels nous pouvons mettre en culture le kali & les autres plantes plus avides de ce fel fixe dont il a été parlé, avec un profit plus grand qu'on ne pouvoit l'obtenir d'une végétation fpontanée, & nous n’efpérerons jamais de recueillir l'alkali marin fur les terres com- munes , dépourvues de dépouilles marines. Secondement nous fommes certains qu'il eft utile d'ouvrir le terrein & de le remuer dans une grande profondeur pour accélérer la décompofition de la fubftance des animaux, mais qui n’eft jamais complette par défaut d'air , d’humi- dité, de chaleur & autres agens néceflaires à la putréfaction. M'étant procuré des terres de nos lagunes maritimes & d’autres fonds abandon- nés par la mer, prifes à la furface & dans la profondeur , je voulus les lefliver pour connoître la nature du fel qu'elles pouvoient contenir. J'obfervai que ces terres falées contiennent un cent-cinquantième d’un fel roufsâtre, dont le fel commun fait la plus grande partie, & l'ayant éprouvé dans nos verreries , je m’aflurai qu'il étoit plus propre à la vi- trification que le fel commun qu'on titre des foudes de Normandie , ce qui peut devenir un objet eflentiel pour qui faura l'apprécier. En effet, eft-il étonnant que de pareils terreins falés contiennent des ref. tes d'êtres marins détruits & par conféquent du natrum ou foude, puifque celui que nous trouvons en efflorefcence en tant d'endroits de l'Europe & de l’Afie provient toujours de pareils terreins, qui dans un tems fervirent de lics à la mer. XLVIIT. En réfléchiffant à la première expérience du $. XLVI, je reconnus que la combuftion étoit plus nuifible quon ne le croit à la récolte de l’alkali des foudes, ce fel fe volatilifant ou fe changeant en terre ou éprouvant par la violence du feu une vitrification imparfaire. En effet cette expérience nous ayant prouvé qu’on retire plus d’alkali de la matière extractive du kali non rourmenté par le feu que des cen- dres d’une pareille quantité de la mème plante qui a été brülée, j'en fs une autre: comme j'avois réduit en cendres, par un feu modéré, ce kali qui n’avoit pointété cultivé, mais qui éroit venu fpontané- ment fur nos rivages, je voulus comparer fon produit avec celui des meilleures foudes d'Efpagne. Je pris 27 dragmes de ces foudes & les ayant leffivées, je filtrai & fis évaporer à ficcité; enfuite j'en retirai V’alkali par le vinaigre, de la manière accoutumée. J'en obtins à pei- ne 400 grains de bien caractérifé, C'eft pourquoi fans renoncer à l’a- = 884 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE: fage de brûler le Kkali qui peut s'améliorer beaucoup en modérant la calcination, d’après mes réflexions fur les êtres organifés où cet alkali réfide comme partie conflituante, & fur les plantes mêmes qui s’en chargent fi abondamment, je crois devoir confeiller de recourir à leur décompoñtion naturelle & ouvrir une nouvelle voie pour.en retirer l'alkali fans combuftion, On congoït les grands avantages que procurent les nitrières artifi- cielles qui fe préparent en mêlant avec des verres légères & friables toutes fortes de matières putrefcibles, pour accélérer la décompofition de ces fubftances organiques & par conféquenr la génération du nitre, Il eft bien naturel de croire qu'on pourra maintenant fe procurer la génération de la foude ou natrum par le moyen de foudières artifi- cielles appropriées, Toute efpèce d'animaux marins capables d'une pu- tréfaction complette, peut devenir l'ingrédient capital, la matière eflen- tielle de ces établiffemens. Je crois devoir confeiller de piler les ani- maux marins, de les divifer en les mêlant avec les terres, & d'y ajou- ter beaucoup de végétaux de toute efpèce pourvu qu'ils aient crû dans des terreins falés, en ayant comme dans les nitrières l'attention de re- muer de tems en tems les matières pour les expofer fucceflivement au contact de l'air & de l’eau, & en les arrofant fréquemment on facilitera la production de la foude. Au mois d'Avril 1784 (comme je l'ai rapporté $. XXXIIT) j'ex- pofai à l'air libre pour fe putréfier une certaine quantité d'animaux cruftacés fraîchement tirés de leurs coquilles & qui avoient été bien pilés ; j'eus foin de remuer la matière de tems en tems & de remet- tre de l’eau à mefure qu’elle s’évaporoit. Au mois d’Août 1785, voyant qu'elle.étoit devenue terreufe & {ans odeur fenfble, j’en eflayai une portion en Ja leflivant avec de l’eau diftillée, je ne croyois pas qu'une telle putréfa&ion dût produire du nitre. Cependant outre l’alkali mi- néral que j'en retirai, j'apperçus dans la criftallifation quelques traces d'un nitre quadranoulaire très-parfait ou nitre de foude, ce qui peut mériter attention. Mais ne fortant pas de notre fujet, nous pouvons en conclure que la production de l’alkali minéral libre par le moyen des foudières eft très-certaine, le peu de nitre qui pourra s’y trouver, n’apportant aucun défavantage. D'ailleurs en fe fervant de cruflacés & employant les animaux écrafés & broyés avec leurs coquilles, la fubltance rerreufe de celle-ci tiendroit en partie lieu de terre calcaire dans la foudière, comme il eft facile de le comprendre, Les térreins voifins des lacs falés du nord & du midi dont il a été parlé, dans lefquels fe trouve l'alkali minéral en abondance , manifeftenc avoir fervi jadis de lit à la mer comme nous l'avons dit, & par les dépouilles d'animaux marins décompofés qui y font vifibles & répandues de toutes parts, ils peuvent être regardés comme autant de foudières à naturelles ; : SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ‘ARTS, 385 naturelles; cel eft juftement l'ouvrage de la nature que nous nous propofons ici d'imiter. À cet effet, raffemblons des fubftances organi- ques pour fe putréfier, & fecondant notre impatience & nos befoins fans attendre les procédés trop lents de la nature, employons les moyens & les fecours convenables pour en exciter la fermentation & les conduire au dernier degré de putréfaction. XLIX, Enfin lalkali minéral préfente un objet de recherchés qui peut être de quelqu'utilité, puifque nous véyons, comme nous l'avons dit au commencement, ce fel s’effleurir fur les collines de Vérone & fortir des débris d'animaux marins que le tems devroit avoir dénaturés & confommés. Il eft à croire que ces collines ne font pas feules privilé- giées pour la production de la foude native, puifqu’eiles ne font pas le feul dépôt de pareilles dépouilles organiques abandonnées par la mer dont nous trouvons de routes parts des dépôts immenfes & très-abon- dans, dans les montagnes , dans les plaines, & dans les entrailles les plus profondes de la terre. Il eft très-probable que dans l’état de féche- refle où elles fe trouvent, privées d’air & de la chaleur néceffaire pour établir un mouvement inteftin, l’alkali ne peut fe développer & naître de ces dépouilles, ce qu'il feroit fi elles fe trouvoient dans des circonftances plus favorables. Si les Phyficiens vouloient obferver dans cette vue nouvelle & importante, les différentes fubftances abandon- nées par la mer, il eft certain qu'ils en retireroïent beaucoup de fruit en formant des murailles, des voûtes, des amas, comme on fait pour les nitrières, dans une partie de l’Europe, & employant alter- nativement & à propos l'humidité & l'air fur ces matières. Il n’eft pas impoffible que ces efflorefcences d’alkalt libre, qui fur nos collines for- tent fpontanément de pareils amas, ne paroïffent aufli fur ceux faits par l'art, comme le prouve l'exemple qui eft fous nos yeux & qui ne fouffre point d’exceptions. 1 Quoique j'aie fait connoître daus plufieurs parties de ce mémoire combien je fuis peu difpofé à attribuer facilement à une décompoli- tion naturelle (1) du fel commun, lalkali minéral libre & pur, que nous trouvons logé en tant de fubftances & en efflorefcence à la furface de tant de parties de la terre; ce feroit mal connoître la (r) Voyez ci-devant , page 44, la note du traduéteur fur le Ç. XVI , au fujet de . Ja décompofition du fel commun par la méthode que M. de Morveau appelle naturelle. Tome XXIX, Part, II, 1786. NOVEMBRE, Ccc 386 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, nature, fes forces & fes règles, que de vouloir le faire dériver en en- tier des feuls corps marins décompofés, fans en attribuer aucune partie à la décompoficion du fel commun. Etant certain d'une pañr, que cet alkali eft une partie conftituante des animaux marins, d'au- tre part qu'il ne fe trouve jamais libre & en quelque quantité, qu'on ne rencontre en même temps des traces de ces animaux , fans parler des tranfports accidentels dûs aux révolutions fans nombre qui font arrivées, il eft fürement plus raifonnable & plus naturel de l'attri- buer à la décompofition de ces animaux, qu’à celle du fel commun qui a befoin d'un agent encore inconnu pour s'effectuer complette- ment: mais pour cela il ne faut pas conclure que tout l’alkali miné- ral qui fe trouve fur la terre, provient immédiatement des animaux marins. Comme on admet fon exiftence (8. XL) dans un état li- bre, indépendant du fel marin, on ne doit pas auñi répugner à croire qu'il s'en trouve qui ne provient pas des animaux de la mer. Il en eft ainfi de la terre calcaire ; on peut dire qu’il en exifte qui eft indépendante des êtres organilés, où nous la trouvons en grande quantité & comme partie eflentielle, ainfi que tout le monde fait. Je crois cependant l'exiftence d’un alkali minéral originairement in- dépendant des animaux marins, moins probable, qué celle de la terre calcaire qu’on eft fondé à admettre. Cependant fi, comme l'aflure M. Bergman (1), le fel commun peut fe décompofer par le fer, l'akali fe montrant en liberté fous forme de gelée, ce qui eft aflez fingulier, & ne doit s’admettre qu'après un grand nombre d’expérien- ces ($. XLT); fi cette décompofition , quoique imparfaite, peut avoir lieu, de quelque manière que ce foit par la litharge; fi comme le prouvent mes expériences ( S. XLIII) les vitriols terreux & métalliques peuvent décompofer ce fel fans le fecours du feu, fans autres inter- mèdes, & par le fimple contatt; s’il n’eft pas impoflible que le vitriol de foude ou fel de Glauber puifle naturellement fe décompofer par J'aétion foutenue & continuée d'une chaleur moins forte que celle de nos charbons allumés ($. XLIV ); moyen avec lequel la nature opère tant de chofes en filence, le dégagement de l’alkali bafe du fel commun , indépendant de la décompofition des animaux de la mer, n'eft point une opération qui ne puiile s'effectuer de diverfes manières dans ces laboratoires que la nature cache à nos yeux. Mais nous en avons affez dit fur cette queftion importante , & il fuffit d'avoir dé- couvert , que cet alkali eft propre & eflentiel aux animaux qui vi- vent dans la mer, comme l'alkali végétal eft originel & propre aux plantes , ce qui depuis long-tems eft reconnu. (1) C’eft plutôt Schéele, Voyez le fecond volume de fes Mém, éditefranç. pag. 13. Nore du Traduëteur. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 387 E X#TUR AIT, DÉUNE LETTRE # DIE UM CR EE L: A M..DE; L:AMÉTHERITE, Sur des procédés pour rendre le Charbon foluble, & pour dephlegmer l'Efprit-de-vin. POUCES e O N vient de découvrir un procédé pour rendre le charbon foluble. On diftille une partie du charbon avec quatre parties d’eau fortes & une d’efprit de nitre fumant. Cette opération répétée fix fois, on obferve, 1°. qu'à chaque fois qu'en verfe de l'acide fur le charbon , il sen dégage de légères bulles d'air; 2°. que les vapeurs nitreules di- minuent chaque fois, & que l'acide devient limpide comme de l'eau; 3°. qu'au lieu d’air nitreux on voit des vapeurs blanches; 4°. qu'après la neuvième diftillation, la poudre des charbons s'étoit réunie en une mafle femblable à de la fuie fpongieufe. La faveur de cette mafle étoit amère & acide. Elle étoit glutineufe & fembloit fe re- foudre fur la langue. En la faifant bouillir avec de l'eau diftillée, elle s’eft prefqu’entièrement difloute & reffembloit pour lors à la fo- lution d’un extrait végétal d’une couleur fombre, Filtrée à travers un papier blanc, elle pafla avec la même couleur, & même les parties folides fe diflolvoient en entier. La liqueur ne put criftallifer, On la deflécha enfuite fans qu’elle donnât aucune odeur d’eau forte. Elle étoit pour-lors folide, friable, de faveur acide-amère , avoit l'odeur empireumatique & pouvoit fe difloudre de nouveau. Elle éroit encore combuftible. L'opération fut répétée plufieurs fois avec une nouvelle quantité de poudre de charbon, & toujours avec les mêmes fuccès, La première difillation ne lui communiquoit point la qualité de fe difloudre. Mais après la fixième le charbon avoit la faveur acide. On en pouvoit extraire la partie foluble, L'eau forte mêlée avec un quart d'acide nitreux fumant étoit alors fi affoiblie, qu’elle ne refflem- bloit même pas au vinaigre le plus foible. Qu'eft devenu l'acide ? il n’a pu fe fixer ni dans l’alkali, ni à ce qu’il paroît, dans la terre des charbons; il y en a trop peu. Le charbon auroit-il attiré le phlogif- tique de l'acide nitreux, & ainfi décompofé cet acide, de façon qu’il n’en reftât que de l’eau ? mais alors qu'eft-ce qui auroit rendu le char- bon foluble2 l'acide ne s’eft pas volatilifé comme acide; car tout le laboratoire eût été rempli de vapeurs dont on n’a rien fenti du Tome XXIX, Part. II, 1786. NOVEMBRE. Gcc 2 388 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, tout. Le charbon étoit devenu plus noir, luifant & compact. Il fe diffolvoit fur le champ par l'acide marin déphogiftiqué, qui acquéroit une couleur brune. L’eau en avoit diffous une grande partie qui pe- foit 8 fcrupules lorfqu'on eut évaporé l’eau. Si on mec ce réfidu dans une ret@rte qu'on placera dons un bain de fable, & qu'on y adapte un appareil pneumato-chimique ; on ne remarque aucun veftige de va- peurs nitreufes. Ii fe dégage beaucoup d'air femblable à Pair armof- phérique. Le charbon avoit perdu de fa noirceur & de fon brillant, le récipient contenoit un Auide brun comme Le fublimé de fuie, qui avoit le’poûc & l'odeur empyreumatiques, & ne contenoit rien de falin. H n'y avoit qu'un peu d'huile empyreumatique épaifle attachée au col de la retorte. Le réfidu étoit bien changé, Il n’étoir plus friable, ni doux < toucher; mais compaét & dur comme du gravier. Il ne fe diflol- Voit plus en entier. Son goût éroit falin, ftiptique; ce qui fembloic provenir d’un alkali. Il avoit perdu 2 = fcrupules. Il femble donc que la folubilité dépende d’une furcharge de phlogiftique que le char- bon avoir enlevé À l'eau forte, & dont on le dépouilloit par la force du feu. Ce charbon qui ne pefoit plus que $ + gros, leflivé dans de Peau, donnoit 3$ grains d'alkali végétal, qui contenoit à ce qu'on foupconnoir, un peu de tartre vitriolé, mais point d'acide nitreux. Un gros de ce charbon leffivé fut diftillé avec une once d’eau forte & une once d'acide marin fumant, A louvertute des vaifleaux on n’apperçut point de vapeurs rouges, mais feulement des vapeurs blanches. Le charbon avoit repris fa couleur noire, & toutes les qualités qu'il avoit avant la calcination, ainfi que la folubhilité dans l’eau. Ainfi il avoic enlevé à l’acide une partie de fon phlosiftique, ce qui lui avoit rendu da folubilité , tandis que l'acide étoit devenu déphlosiftiqué. Il paroic que la rerre des charbons en s’emparant du phlogiftique eft la caufe de ce phénomène, On a fouvent de la difficulté d'obtenir de l'efprit-de-vin qui foit aflez pur pour que la poudre à canon fur lequel on l'a brûlé, foie enfuire capable de s’enflammer. On a effaié de mêler de l’eau de chaux avec du bon efprit de vin, on obtint un alcokol qui enflamma très- bien la poudre. L'eau de chaux devint tronble & brunâtre. Le fédiment fit effervefcence avec les acides. Si on diflout ce fédiment ; & qu'on y ajoute des acides, la diffolurion devient trouble, & donne l'odeur de l'eau-de-vie diftillée du bled. D’après ces expériences on ajouta de la chaux vive à de l’eau-de-vie ordinaire avec un quart d’efprit-de-vin. La chaux en devint comme de la bouillie. On diftilla, & on obtint une partie con- fidérable d’alcokol qui d’abord enflamma la poudre. Le refte étoit plus aqueux, mais ne contenoit point de ce phlegme trouble qu’on obtint à la rectification fans chaux. La chaux vive a donc la propriété de dépouiller l'eau-de-vie non-feulement d’une quantité d’eau confidérable, s F L 2 SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 389 mais de cet acide faccharin qui la rend fi défagréable. On obtient ainfi par une feule opération non-feulement de l’alcokol, mais aufli plus d’ef- prit-de vin rectifié qu'à l'ordinaire. M. le docteur Reufs a trouvé à Witfchitz en Bohême, près du fleuve Eger un fel amer ( fal catharticum amarum), (vitriol de magnéfie), natif dans de l'argile, &c. Je fuis, &c. EXTRAIT D'UN MÉMOIRE Qui a ete préfenté à l'Académie en Décembre 178$ , & qui a pour titre : Suite des Recherches fur la nature des fubftances animales & fur leur rapport avec les fubftances végétales ; Par M, BERTHOLLET. Jar prouvé dans le Mémoire dont celui-ci eft la fuite (Mém. de lAcad. 1780 ) que lorfqu’on traitoir les fubftances animales par l’acide nitreux , elles donnoient une quantité plus ou moins confidérable d'acide faccharin & d'une huile particulière, & qu'après cela elles laïfloient un réfidu fur la nature duquel je ne me füuis point expliqué alors: j'ai remar- qué dans ce Mémoire que l’alkali volatil qu’on retire des fubftances animales fe forme par lation de la chaleur ou par la putréfa&ion ; puifque , s’il exiftoit dans ces fubftances , on en retireroït un fel ammo- niacal par le moyen de l'acide nitreux avec lequel on les décompofe. Depuis lors M, Schéele a fait voir qu'il fe formoit auñli dans cette opération de l'acide malufien, & que l’on retrouvoit dans le récipient un peu d'acide acéteux ; mais il paroiït que la différence de ces acides ne dépend que de quelques proportions dans leur principe. J'avois conclu de mes expériences que les fubftances animales conte- noient une matière analogue au fucre; mais M. de Morveau a fait voir que c’eft la partie huileufe du fucre & des autres fubftances, foit végétales, {oit animales, qui fert très-probablement de bafe à l'acide faccharin. Les recherches que j'ai faites fur la nature de Palkali volatil, & done on peut voir un précis dans le Journal de Phyfique du mois de feptembre, m'ont engagé à remonter à {a formation, & à déterminer quelle pouvoic être l’origine des principes qui le compofent. M. Prieftley a remarqué que les fubftances animales donnoienr, lorfqu’on les traite avec l'acide nicreux , une grande quantité d’un gaz 399 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, femblable à l'air phlogiflique , tantôt pur , tantôt mêlé à du gaz nitreux ou à du gaz inflammable, & toujours à un peu d'air fixe ; mais ce célèbre Phyfcien a négligé d'obferver les époqués de ces différens produits; il me paroît qu'il a quelquefois employé une chaleur capable de décompofer l'acide faccharin dont il ne fait pas mention, & même les fubftances animales qu'il a miles en expérience, qu'il n’a point diftingué la partie gazeufe qui pouvoit être dégagée des fubftances animales, de celle qui pouvoit être due à l'acide nitreux , & qu'il n’a point foupçonné que la moffete püt exifter dans les fubftances animales, avant qu'elles euflent éprouvé l’action de l'acide nitreux. ÿ J'ai mis une once de foie avec fix onces d’acide nitreux concentré & dégazé , le thermomètre étant + 18 degrés; il s’en eft dégagé fans feu près de cent vingt mefures de gaz, dont une très- petite partie éroit de l'air fixe, tout le refte écoit de la moffete, ainfi que je m'en fuis afluré en foumettant à l'électricité un mêlange de ce gaz & d'air vital dans les proportions indiquées par M. Cavendish. Il n’y a point encore à cette époque d'acide faccharin de formé-dans la liqueur, quoique la diflolutien de la [vie foit complète, excepté une partie grafle qui fe fépare. Si on expofe cette diflolutien à une petite chaleur, il s’en dégage autant de gaz nitreux que fi l'acide agifloit fur une fubftance végétale telle que le fucre , & c’eft alors que l'acide faccharin fe forme. Différentes fubftances animales m'ont préfenté les mêmes phénomènes; mais j’entends par fubftances animales toutes celles qui donnent de l'alkali volatil à la diftillation. Ainfi j'ai retiré la moflete de la partie glutineufe du froment, de la femence du fénapis nigra de Linnée, & de la fécule verte qu’on retire par l'ébullition des fucs de plantes, & dont j'avois féparé la plus grade portion de la partie colorante par le moyen -de l’efprit-de-vin. M. de Fourcroy a obfervé que la partie fibreufe du fang donnoit plus de moffete que les autres fubftances animales , & qu'on n'en retiroit plus des fubftances qui avoient fubi la putréfaction , ( Elém. de Chym. 10, Difc. prélim. ) Mais les fubftances végétales traitées avec l'acide nitreux commencent toujours par donner du gaz nitreux mêlé à une portion plus ou moins grande d’air fixe, & même elles ne donnent que ces deux efpèces de gaz, fi on emploie un foible degré de chaleur. La moffete qu'on retire des fubftances animales ne peut provenir de l’acide nitreux , puifque la décompofition de l'acide nitreux ne commence qu'après le dégagement de la moffere, & qu'on en retire autant de gaz nitreux que s'il agifloit fur-une fubftance végétale, pendant que fon aie vital forme de acide faccharin & de l’acide malufen en fe combinantavec un principe huileux; mais fi la moffete provenoit de la décompofition de Facide nitreux, on ne retireroit plus de gaz nitreux , ou du moins on n'en ” ” + , mn a: À SUR L'HIST, NATURELLE ET LES ARTS. 307 pourroit plus retirer qu'une quantité très - petite, ce qui demande quelques éclairciflemens. Lorfqu'on décompofe l'acide nitreux par le moyen d’une fubftance, qui a une forte affinité avec l'air viral, telle que le zinc & lé- tain, cette fubflance s’unit à tout l'air vital qui entre dans la com- poñtion de l'acide nitreux, & alors il ne s’en dégage que de la mof- fete ou du moins très-peu de gaz nitreux mêlé à la mofferte. La mème chofe a lieu plus ou moins avec les autres métaux, fur-tout avec le fer & même avec les fubftances animales & vésétales; lorf- qu'on favorife par une chaleur trop forte, la décompolition de l'a- cide nitreux. On entend par-là d'où viennent les inégalités quon a remarquées dans le gaz nitreux, & l'on voit quelle eft la fource de quelques erreurs eudiométriques, Le gaz nitreux peut être lui-même décompofé par les fubftances qui peuvent lui ôter l'air viral, & alors il ne refte que de la moñlerce; c'eft ainfi que le foie de foufre & l'électricité ont décompolé le gaz nitreux dans les expériences de MM. Prieftley & Van-Marum; cet ainfi que lorfqu'on fait détonner le nitre avec des fubftances métalli- ques qui ont beaucoup d'affinité avec l'air vital, on n'obtient que de la moffetre ( mém. de l'Acad. 1781). J'ai expliqué par de femblables principes quelques obfervations de MM. Prieftley & Cavendish , pourquoi par exemple le méê- lange de limaille de fer & de foutre abforbe Pair de l’armofphère s'il eften contact avec lui; & pourquoi il donne du gaz inflammable s'il ne fe trouve en contact qu'avec l’eau; cet qu'il fe combiné avec l'air vital, s'il y en a, comme dans le premier cas, & non parce qu'il abforbe le phlogiflique dans fon état naiflant, & que dans le fecond cas, il décompofe l'eau. Le nitre phlogifliqué décompofe la diflolu- tion d’argent, parce qu'il enlève à la chaux d'argent, une portion de l'air vital qui eft néceflaire à fa diffolution, & avec laquelle cependant elle a très-peu d'affinité. Les fubffänces animales, ou plutôt les fubftances qui font pro- pres à donner de l’alkali volatil, contiennent donc beaucoup de moffette, puifque celle qu'on en retire ne peut être due à une décompofition de l'acide nitreux: mais j'ai prouvé que l’alkali volatil n’exiftoit point dans les fubftances animales, & quil fe formoit par l'action de la chaleur & par la putréfaction. Si donc on ne retrouve pas la moffette dans les autres produits de la diftillation, il faut qu'elle ait fervi à former l’alkali volatil. Si l’on excepte l’alkali volatil , il n’y a dans les produits de la dif- tillation des fubftances animales que la partie gazeufe où l'on puifle foupçonner que la moffette foit paflée. J'ai donc cherché à déterminer par des expériences , la nature des gaz inflammables qu’on retire par DE 23 ” MT td 392 OBSERVATIONS SUR 4 PHYSIQUE; la 'diftillation des fubftances animales & des fubftances végétales; je les ai comparés entr'eux & avec le gaz inflammable des marais, ainfi qu'avec celui qu'on retire du charbon qui n'eft pas très-fec : j'ai dif. cuté les opinions de MM. Volta, Bucquet, de Fourcroy, Chaufler, Barbier de Tinian & Sennebier. Les bornes d’un extrait ne me per- mettent que d'indiquer la méthode que j'ai fuivie & les principaux ré- fultats auxquels je fuis parvenu. ; J'ai déterminé les quantités d'air vital que détruifent dans leur com- buftion les différentes efpèces de gaz que j'ai examinés , ainfi que les quantités d'air fixe qu’elles produifent: j'ai varié les proportions de manière à obtenir le plus petit réfidu, & par-là, ce réfidu a été fi peu de chofe, qu'il ne n'a paru provenir que d'un peu de moffette qui fe trouve mélée avec Pair vital retiré du précipité rouge & au défaut d'une proportion très-jufte, entre le gaz inflammable & l'air vital: je n'en excepte que le gaz des marais, dont la moffette forme une partie confidérable. ê J'ai enfuite déduit les proportions de chaque efpèce de gaz inflam- mable, qu'il falloit pour 100 mefures d'air vital; enfin j'ai détermi- né la quantité de principe charbonneux qui entre dans la compo- fition de chaque efpèce de gaz inflammable, par la quantité d'air fixe qui s'eft formé dans la détonnation de 100 mefures de chacun de ces gaz inflammables, & par les proportions établies par M. La- voilier, entre les principes conilitutifs de l'air fixe. Tous ces gaz retirés, dans différentes opérations, ont été prefque rigoureufement uni- formes , fi ce n’eft celui du charbon, qui, obtenu à différentes épo- ques de la diftillation, a exigé des quantités aflez différentes d'air vi- tal. J'ai, dreffé des tables de tous ces réfulrats. Mais le charbon qui exifte dans le gaz charbonneux & qui eft tenu en diflolution par le gaz inflammable de l’eau, n'eft pas la feule caufe qui augmente la gravité de ce gaz, relativement à celle du gaz inflammable de l’eau; ce que je prouve ainfi: 100 pouces cubiques d’air vital ont formé avec le gaz charbonneux qui a fervi à certe expérience, 43, 1 pouces cubiques d’air fixe, & comme il n'entre qu'environ un volume égal d’air vital dans l'air fixe, qui doit prinoïpalement fon excès de gra- vité fpécifique au charbon, il refteroit environ $6 pouces cubiques d’air vital, lefquels doivent former de l’eau avec le gaz inflammable aqueux qui entre dans la compofition de 72, 4 pouces cubiques de gaz inflammable charbonneux , qui ont été détruits dans la déronna- tion avec l’air vital: or, 56 pouces d'air vital, exigent prefqu'un volume double de gaz inflammable aqueux (mém. de PAcad. 1783). IL faut donc que le gaz inflammable de l’eau fe concentre en diflol- vant le charbon, réfultat qui s'accorde avec ceux que nous avons obtenus , MM. Vandermonde, Monge & moi, dans les expériences par SP dé 4 je SUR L'HIST: NATURELLE ET LES ARTS. 39 par lefquelles nous avons déterminé les rapports du fer, de l'acier & de la fonte; car la différence de la quantité de gaz inflammable qu'on retire du fer & de l'acier, dépend principalement de ce que le gaz inflammable, obtenu de l'acier, a perdu de fon volume en diffolvant une partie du charbon de fà plombagine. ( Journal de Phyfique, Septembre & Otobre 1786.) Comme dans les expériences dont je viens de parler, le gaz retiré des fubftances animales ne m’a pas donné plus de réfidu que celui qui eft reciré des fubftances végétales, j'en conclus que la moffète des premières eft entrée dans la compofition de l’alkali volatil. C’eft donc à la moffere que les fubftances animales contiennent , qu’elles doivent la propriété diftinctive de donner de l’alkali volatil ; & celui qu’on re- tire en plus ou moins grande quantité de la diftillation de la plupart des fubftances végétales eft dû, ou à la partie glutineufe , ou à une partie analogue qui fe trouve prefque coujours confondue avec la partie végétale, Toutes les fois donc qu’on obient de l’alkali volatil d’une fubftance, on peut en conclure qu’elle contenoit de la moffete, & toutes les fois qu'une fubftance donne de la moffète, on peut la regarder comme propre à former de l’alkali volatil dans les circonftances conve- nables. Mais pour que la moffete forme de l'alkali volatil, il faut qu’elle fe combine avec le gaz inflammable, ce gaz peut être fourni par l'huile qui fe trouve toujours en quantité confidérable dans les fubftances animales, ou bien il peut venir de la décompoñition de l'eau. La moffete fert encore à expliquer pourquoi les fubftances animales font fujettes à la putréfaétion & forment de l’alkali volatil, pendant que les fübftances végétales produifent de l’efprit ardent, lorfqu'elles fe trouvent dans des circonftances favorables; dans Les premières, le gaz inflammable fe combine avec la moffeté, & dans les dernières il fe combine!avec la partie fucrée & une huile végétale, ainfi que je cro's l'avoir prouvé dans un autre mémoire préfenté à l’Academie en 1785. D’autres expériences m'ont prouvé que toutes les fubftances d’une nature animale, excepté peut-être une feule, dont J'aurai occa- fion de parler bientôt , contiennent de l'acide phofphorique qu'on retrouve combiné avec de la terre calcaire dans les charbons de ces fubftances. On trouve auffi l'acide phofphorique combiné avec une portion de terre calcaire dans le réfidu de la diffolution des fubftances animales par l'acide nitreux. Le charbon des fubftances animales eft une fubftance rrès-compo- Tome XXIX , Part, II, 1786. NOVEMBRE. D d d Fe ds 4? F4 - 394 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fée; il retient encore de la moffere & il contient un peu de foufre, de la fidérite & quelques fels outre le phofphate calcaire; de-là vient la difficulté qu'on a de Le calciner, c’eft-à-dire de brûlez fa partie char- bonneufe, Il n’y a point de charbon pur, comme il n’y a point d'eau pure dans la nature; mais les fels & la terre qui fe trouvent dans le char- bon des végétaux, fort manifeftement des fubftances étrangères, puif- qu'elles varient dans chaque efpèce de charbon par leurs proportions ou par leurs qualités, comme les fubftances falines varient dans les eaux; & lorfque nous avons parlé de parties charbonneufes, nous avons voulu indiquer Le charbon pur & féparé des parties qui lui font étran- gères. En diftinguant le charbon des fubftances vésétales de celui des fubftances animales , j'obferve qu'il fe trouve toujours une petite portion du der- nier qui eft mêlé avec le premier, parce que les fubftances végétales dont on fe fert pour la combuftion, contiennent routes un peu de fubftances animales, On retrouve des parties charbonneufes dans la plupart des fubitan- tes métalliques qu'on n’a pu révivifier qu'en fe fervant du charbon; ce- pendant ii faut en excepter le réguie d’antimoine dont M. Schéele n’a point retiré d'air fixe en le faifant détonner avec le nitre, L’é- tain n'en donne que des indices bien foibles; il eft mème poili- ble que des parties de fa chaux en impofent en pañlant dans le récipient ; car il fe difperfe avec impétuofité dans la détonnation ( Mém, de lAcad. 1781). Il me paroit probable que lorfque M. de la Métherie a traité la chaux d’arfenic avec le nitre , une portion du fel arfenical a paflé dans le récipient; ce fel décompofe l'eau de chaux qui forme de larfeniate de chaux qui fe précipire & qui peut en impofer. On fair que le minium fe combine avec l'air fixe de l’at- mofphère. , Pour le mercure, il n’a donné avec l’acide nitreux aucun indice d'air fixe à M. Monge, lorfqu'il a retiré par le moyen de ce métal plus de $ onces d’air vital deftiné à fes belles expériences fur la décompol- ion de l’eau. Une très- petite quantité de charbon donne des quantités remar- quables d’air fixe, parce qu'il n'en faut à-peu-près qu'une partie en poids pour en faire $ d'air fixe; ainfi un demi-grain de charbon fufic pour former à-peu-près $ pouces d’air fixe dont il faut une très-petite quantité pour troubler l’eau de chaux. - M. de la Métherie penfe (Journ. de Phyfique, Septembre , p, 224) que nous fommes forcés d'admettre le charbon dans les fubftances métalliques : l’expreflion feroit plus jufte s'il eut dit que nous avons e SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 539$ prouvé qu'il fe trouve dans quelques métaux du charbon qui y eft mêlé ou même combiné. Ainfr, dit-il, voilà enfin avouée l’exiflence d'un e matière inflammable dans les métaux. 1°.Le charbon eftune matière étrangère aux métaux & qui en modifie les propriétés lorfqu’elle fe trouve mêlée, & principalèment lorfqu'elle eft combinée avec eux. 2°. Bien loin de nier qu'il y ait quelque chofe d'inflammable dans les métaux, nous les regardons eux-mêmes, & principalement le fer & le zinc, me entièrement inflammables, c’eft-à-dire, comme propres à chafler fa lumière de l'air vital, en fe combinant ‘avec fa bafe. M. de la Métherie nie à M. Haffenfratz ( Journ. d'Octobre) que le fer puifle fe calciner dans l'air pur; mais ne brûle-t-il pas dans cet air & par-là ne fe réduit-il pas en chaux? il eft vrai que dans la rouille, la chaux de fer eft combinée avec de l’air fixe. Le phofphore brüle, dit-il, aufli-tôt qu’il eft expofé à l'air atmof- pbérique; donc le phofphore a plus d'aflinité avec l'air pur contenu dans l'air atmofphérique que n’en a le fer. Il juge par conféquent du degré de l’affinité par la facilité de la combinaifon. Il dira donc que l'argile calcinée & fur-tout l'argile & la terre calcaire contenues dans les pierres gemmes, n'ont plus d'affinité avec les acides, parce qu'on ne peut les difloudre fans avoir rompu leur aggrégation même par des moyens chimiques : il dira que l'acier trempé qui comme nous l'avons obfervé, fe diffout beaucoup plus difficilement que l'acier poule ou l'acier fimplement forgé, a beaucoup moins d'afinité avec les acides, que lorfqu'il eft dans ce dernier état. Une circonftance qui contribue particulièrement à la facile inflammation du phofphore & du foufre, eft, felon la remarque de M. Monge, que ces fubltances fe diffolvent dans l'air à une température peu élevée. M. de la Métherie vient encore de répéter une partie des obferva- tions de MM. Lavoifier & Meufnier fur la décompofirion de l'eau pat le fer;il feroit à defirer qu’il n'eût nébligé ni le poids qu'acquiert le fer dans cette occalion, ni celui de l'eau qui difparoît, ni celui du gaz inflammable qui fe dégage; il faudroit encore qu'il répérâc avec foin les expériences defquelles nous avons conclu la compofition de l'eau, & alors fes objections auroient encore plus de force qu’elles n’en ont à préfent. Faures effentielles à corriger dans La fuite de l'Exvrait du Mémoire de MM. Van- dermonde, Monge & Bertholler. Page 281, ligne pénuliième , c’eft-à-dire , {e troubler, Z;/ez : c’efl-à-dire , que la diffolution doit fe troubler, jiis-24 Page 282, ligne 244leirélidu , Zifez :.ce réfidu. Page 184, Ligne 2 ,peu-à-peu, 1/67; à-peu-pres, Ligne 15 , qui fe compole, Zifez : qui fe compofant. Ligne 19 , cette efpète d'épuration, Zifez : de dépurafon. Tome XXIX , Part. II, 1786, NOVEMBRE. D dd 2 396 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, SUITE DES RÉFLEXIONS SUR LA SUBSTANCE CHARBONNEUSE; Par M. DE LA MÉTHERIE JE répondräifuccintement aux obfervations de M, Berthôer, à caufe du peu d'efpace qui me refte. 1°. Dans l'hypothèfe de MM. Vandermonde, Monge & Berthollet, Le charbon doit être eflentiel à l'acier , ce qui m’avoit fait croire qu’ils le regardoient également comme eflentiel aux autresméraux; & effectivement n file fer, le zinc, &c. contiennent toujours de l'air fixe, il me femble que dès-lors l'air fixe & la fubftance charbonneufe par conféquent ne peuvent leur être étrangers. Je dis Aypothèfe, parce qu'il me paroît que leurs expériences n’ont prouvé autre chofe que l'exiftence de Ja plombagine, de l'air inflammable & de l'air fixe dans le fer & l'acier. k 2°. Mais, difene MM, V. M. & B. la plombagine eft une combinaifon de fer & de charbon; ainfi La plombagine fe trouvant dans lefer & l'acier, par conféquent le charbon s’y trouve aufli: & ils s'appuient fur les expériences de MM. Schéele, Hielm & Pelletier, pour dire que la plombagine contient du charbon. Cependant ces derniers n’y recon- noiflent que de l'air fixe & de l'air inflammable, ainfi que MM. Bergman & de Morveau. Ceci revient donc à la grande queftion de favoir fi l'air fixe contient du charbon ; & de cette Lypurhefe on en a veulu établir un fair. Nous favions déjà que dans la nouvelle théorie, il faut "fuppofer la fubftance charbonneufe par-tout où on a de l'air fixe, comme dans la craie , le marbre & toutes les terres & pierres calcaires, dans les alkalis phlogiftiqués", &c. Mais on demandera toujours quel eft ce charbon, qui {e trouvant dans la poitrine des animaux, traverfe le tiflu des bronches pour venir fe combiner avec l'air pur qui efl dans les ramifications de la rrachée-artère ? Certainement cetre fubftance , telle qu’elle foit , paroïc bien ‘éloiguée de la nature du charbon ordinaire. 3°. À l'expérience de M. Monse j’oppoferai celle de M. Lavoifier, qui ayant fait difloudre du mercure par l'acide nitreux dans des vaifleaux fermés, l'ayant réduit enfuite en précipité rouge, puis diftillé toujours dans les vaifleaux fermés , en a obtenu une portion d'air fixe ( Mém. de l’Acad. 1782, page 498.) sk 4°. Je n'ai pas nié ni n'ai pu nier que le fer ni les autres métaux fe calcinaffent dans l'air pur lorfqu'il y a une fufifante quantité de chaleur ; mais j'ai nié qu’à la température ordinaire de l’atmofphère cette calcination eût lieu quand l'air étoit parfaitement pur, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 397 5°. Le phofphore brûlant dans l'air pur à une température où le fer ne fe calcine pas (j'ai expofé du phofphore à l’air, le thermomètre érant plufieurs deorés au-deffous de ©, & il a brûlé }, il me femble que dans la nouvelle théorie il devroit plutôc décompoler l'eau que le fer. Mais voici encore une autre expérience qui prouve l’exiftence de l'air inflammable dans le foufre, c’eft celle de M. Bayen. J'ai mêlé un gros de précipité de nitre mercuriel par la chaux avec douze grains de fleurs de foufre. Chauffés dans une cuiller de fer ils ont détoné, Cette détonation ne peut venir que de l’air pur retiré de la chaux mercurielle & de l'air inflammable du foutre, dans lequel on n’admer point d’eau. 6°. La flamme ne peut venir de la lumière de l’air pur chaffée de fa bafe lorfqu'il fe combine ; car dans fa combinaifon avec l'air nitreux, par exemple, cette même lumière devroit être chaîlée. Il y a grande chaleur, mais point de flamme. La flamme ne paroît jamais que lorfque l'air pur fe combine avec l’air inflammable. Elle vient donc de la matière de la chaleur libre ou de la lumière qui fe trouve encore en bien plus grande quantité dans l'air inflammable que dans l'air pur, &.qui eft caule de fa grande lécèreté. Je ne nie cependant pas que la matière de la chaleur contenue dans l'air pur n'y puifle contribuer aufli. L'inflammation des métaux eft donc une nouvelle preuve qu'ils contiennent de l'air inflammable. 7°. Il ya long-tems que jai fait l'expérience de faire paffer l’eau dans le rube de fer incandefcenc , puifque même ces expériences ne font qu'une füire de celles que j'ai publiées dans ce Journal 1781 feptembre) (1), je n'ai fait mention de ces dernières, que parce que j'ai employé l’eau de chaux & l'eau diftillée privée de tout air. 8°. Je fuis le premier qui en brûlant l’air inflammable ai obfervé avec attention l'humidité qui s’en dégage ; car Macquer n’en a parlé qu'en paflanr. Si je n'ai pas parlé du poids, c'eft qu’il me paroît difficile d’avoir de la précifion. Le tube de fer de quelque manière qu'on le garantifle à l'extérieur eft toujours calciné jufqu’à un certain point, Sa furface extérieure eft couverte d’une couche d'éthiops, par conféquent a acquis du poids. J'avois enveloppé les miens d’abord d'un fil de fer, enfuire d’un lut compofé d'argile & de bourre. Le lur a été vitrifié en bien des endroits; néanmoins le fil de fer a été calciné, ainfi que la furface extérieure du canon. Il faut donc déduire ce poids acquis à l'extérieur de celui acquis à l'intérieur : par conféquent tout fe réduit à des approximations. (1) Poyex la note de M. Meufnier dans fon Mémoire , Journal de Phyfique , mai 1784 ee 393 OBSERFATIONS SUR LA PHYSIQUE, LEE Y Re ee NOUVELLES LITTÉRAIRES. M. JEAN - JÉROME SCHROELER , Grand - Bailli de Sa Majefté Britannique à Bremen , vient de nous envoyer un Mémoire fur plufeurs taches nouvelles noires & rondes qu'il a obfervées dans jupiter, & il conclud de ces obfervations que la rotation diurne de cette planète eft à-peu-près de 6 heures $6 minutes. Nous publierons fon Mémoire le plutôt qu'il nous fera poflible, Effai fur l'Hifloire-naturelle des Roches, précédé d’un expofé [yfléma- sique des Terres & des Pierres : Ouvrage auquel l'Académie Impériale des Sciences de Péterfbourg a adjugé le premier acceflic, enfuite de la queflion qu'elle avoit propofée en 1783; par M. DE LAUNAY , Secrétaire de Sa Mujeflé Impériale & Royale Apoflolique, Membre de l’Académie Impériale & Royale des Sciences & Belles- Lettres de Bruxelles. À Bruxelles, chez Lemaire, Imprimeur-Libraire, rue de l’Impératrice ; & fe trouve à Paris, chez Cuchet, Libraire, rue & hôtel Serpente, un vol. ë7-12. Le jugement de la Compagnie favante qui a accordé l’acceffis à cet Ouvrage, doit prévenir en fa faveur. Galerie Hiflorique Univerfelle ; par M. DE P. fixième livraifon. On foufcric, pour cet Ouvrage intéreffant à Paris, chez Mérigot le jeune, Libraire , quai des Auguftins, à Valenciennes, chez Giard, & chez les principaux Libraires des Villes du Royaume & de l'Europe. Papillons d'Europe , peints , gravés, & coloriés d’après nature, qua- zorzième & quinzièmecahiers. À Paris, chez Delaguerte, Imprimeur- Libraire, rue de la Vieille-Draperie, & chez Bazan , Marchand d'Eftampes, rue & hôtel Serpente. Ces deux cahiers forment, l’un, la fin du tome IV, & l’autre, le commencement du tome V de cette précieufe collection. Ils contiennent la defcriprion & l'hiftoire de trente-une efpèces, dont plufieurs rares & peu connues, & d’autres qui n’ont pointencore été décrires. M. Carangeor qui ne néglige rien pour rendre cet Ouvrage de plus en plus intéreffant, réclame pour quelques-unes, les obfervations des Naturaliftes : il proñrera avec reconnoi{fance de leurs expériences & de leurs remarques, cant fur les efpèces qui lui reftent à décrire , que pour celles comprifes aux précédens volumes, s’ils veulent bien les lui adreffér Place Vendôme, N°, 11 ,à Paris. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 399 Zoologie Univerfelle & portative , ou Notions élémentaires du Règne animal : Ouvrage dans lequel on a joint les méthodes zoolopiques Les moins imparfaites à une deféription exacte & précile de tous Les Animaux, 6 à une concordance des s qui leur ont été donnés er notre Langue par les différens Auteursiile tout difpofé felon l'ordre alphabétique rapporté à l'ordre méthodique ; par M. l'Abbé Ray, Garde des Cabinets de Phyfique & de Chimie du Lycée. Cet Ouvrage, qui fera fous la forme de Ditionnaire, & dans lequel on a raflemblé d'une manière élémentaire routes les connoiffances acquifes jufqu’à ce jour fur les animaux , n'attend qué le moment où il occupera la prefle. IL fera borné à un feul volume 7-49. de fept à huit cens pages, beau papier, caractère de philofophie, en deux colonnes. L’Aureur pour ne s’expofer ni au regret d'en avoir fai tirer trop peu d'exemplaires s'il arrivoit qu'il füt auffi recherché qu'il ofe l'efpérer , ni au défagrément de les avoir trop multipliés fi le goût actuel du Public prouvoit la faufleté de fon calcul , ne le livrera à l'impreffion que dans quelques mois, Ce rems fera employé à recevoir le nom des perfonnes qui fe feront infcrire chez MM. Belin , rue Saint-Jacques, près de Saint-Yves; Royez, quai des Auguftins, près du Pont-neuf; & dans les provinces & pays étrangers, chez les Libraires des villes les plus prochaines , qui pourront faire parvenir directement ou indireétement l'engagement en fon nom à un des deux Libraires ci-defflus nommés, pourvu qu'il lui arrive franc de port. Les perfonnes qui fréquentent le Lycée font prévenues que le Libraire qui s'y trouve eft autorifé à les infcrire, Le prix de l'Ouvrage broché fera de 10 liv. qu'on payera en le recevant. F'ARBIECE Des ARTICLES CONTENUS DANS CE CAHIER. . Re CHERCHES fur les Sauterelles & [ur les moyens de les détruire 3 par M. BARON, Confeiller en la Cour des Comptes, Aides & Finances de Montpellier, des Académies de Dijon, Touloufe, Nifmes, &c. page 321 Obfervarions de M. ScHÉELE , pour prouver la vérité de fon opinion fur la nature du Pyrophore , 330 Expériences fur l’Arfenic , la Chaux de plomb & l’Acide virriolique fumant ; par M. ScRÉELE, à Koping , 332 Lerrre de M. CARRETTE-SOHIER, Maître en Pharmacie à Lille, au Rédaëteur du Journal, 333 400 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, &c: Déefcription d'une produétion végétale analogue aux Confèrves , & du Pefi-orangé ; par M. REYNIER , 333 Suite des Epreuves relatiues à ladhéfion ; par M. M... 339 Lerrre à M. pe LA MéTH me , contenant la defcriptien d'un nouveau Baromètre portatif, plu$" frmple & plus parfait & moins fufceptible d'accidens , que tous les autres faits précédemment ; par M. J. H. HuRTER , Peintre de LL. MM. Britanniques, Agent de S. 4.5. Monfeigneur le Murgrave de Bade ,&c. &c. &c. en Angleterre, & Propriétaire d'une Manufaëture d’inflrumens de Mathématiques , Phyfiques, Opriques & Aflronomiques, à Londres , 346 Objérvations fur l'Hygromitre à boyau de ver-à-foie, de Dom Casgois ; par M. CazaALET, de Bordeaux, 349 Hifloire du Schacal ; par M. GüLDENSTÆDT : traduite par J.P. BERTHOUT VAN-BERCHEM, 353 Suite des Recherches fur L'Alkali minéral natif ; par M. LoRGNA : traduites par M. CHAMPY , de l Académie de Dijon, 373 Extrait d’une Lettre de M. CrerL, à M. DE LA MÉTHERIE, fur des procédés pour rendre le Charbon foluble, & pour déphlegmer PEfprit-de-vin, 387 Extrait d'un Mémoire qui a été préfenté à l'Académie en Décembre 1785, & qui a pour titre : Suite des Recherches fur la nature des fubftances animales, & fur leur rapport avec les fubftances végétales ; par M. BERTHOLLET , 389 Suite des Réflexions fur la fubflance charbonneufe ; par M. DE LA MÉTHERIE, 396 Nouvelles Litréraires ; ; 308 . 4) P PHRONB' A TT ON. Jai lu , par ordre de Monfeigneur le Garde des Sceaux, un Ouvrage qui a pour titre: Obfervations fur La Phyfique, fur l'Hifloire Naturelle & fur les Arts, Ec. par MM. Rozier, Moncez Lejeune & De 14 Meraerie, Gc. La Colle&tion de faits importans qu’il offre périodiquement à fes Leëteurs, mérite l’attention des Sa- vans ; en conféquence , j’eftime qu’on peut en permettre l’impreflion. A Paris, ce 22 Novembre 1786. VALMONT DE BOMARE. Novembre 166 E DOPRT EN ERTS ne fe en A > * Phare x PAT MEET É à Novembre Jelher Se ul RECOURS ee UE WIES Ut LS OR DRE 5 Lt de à 20 SL TE Ne 4 À 0 SCT. NS . Ê - è . + = SSSR