CORPS LÉGISLATIF, ========^^ CONSEIL DES ANCIENS. O ? I N I O N D E ïl I V Ô A L L A N ( des Côtes-du-Nord ) ^ SVB. la résolution du quatrième jour complémentaire , concernant la levée de quarante mille chevaux pour U ^ervice des armées^ Séance du 4 vendémiaire an 8v ■\ ËPUESENTANS DU PEtJPLE , ^ Je ne viens point à cette tribune m'opposer a radoption a une niesure dont on fait dépendre une partie essentielle de la force de nos armées et la conservaticrn de la Répu- ^ îhenwbsrrï a ÎISRAKlf V blique j )e serois désavoué par ces paisibles cuîtivatelifS qui ne calculent point les nombreux sacrifices qu’ils réitèrent chaque jour à l’espoir d’une paix glorieuse , seul objet de leurs vœux , et base unique de leur bonheur 1 Ils me diroient d’une voix unanime : Nous avons tout sacrifié à la liberté : depuis huit ans nous donnons nos grains, nos fourrages, nos bestiaux, nos chevaux , nos charrettes , notre argent , nos corps , et , ce que nous avons de bien plus cher encore ^ nous donnons nos enfans à la patrie ; et vous pourriez douter que nous lui refuserions qnelc]Lies chevaux dont elle a besoin en ce moment l.Nous les lui offrons j qu’elle choisisse. Ainsi raisonnera sans doute cette classe précieuse qui sait aussi que le poids du travail le plus dur et le plus pénible n’est rien en comparaison du joug de la servitude et de l’esclavage. Mais , reptésentans du peuple , ce généreux dévoue- ment tant de fois éprouvé devoir , ce me semble , dispenser le Directoire exécutif d’employer dans le message qui a provoqué la résolution soumise à votre sanction, l’expression alarmante de réquisition. Elle rappelle dans nos départemens le cruel souvenir de ces extorsions révolutionnaires qui ont si fortement découragé l’agriculture , qu’elle a besoin ^ pour se re- lever , de tout l’appui du pacte social , qui garantit tin-- yiolahilité de toutes les propriétés ^ ou la juste indemnité de ■celles dont la nécessité publique^ légalement constatée ^ exi- .geroLt le sacrifice. Cette disposition devoir être placée dans le message du Directoire, à côté de la proposition qu’il fait d’une levée extraordinaire de quarante mille chevaux par yole de réquisition. Cette faute, que je relève ici parle désir qu’elle ne soit plus commise , a jeté l’alarme parmi tous les proprié- 3 taîres de chevaux ; leur défiance , que le triste son-' venir des réquisitions semble légitimer , produit les: effets suivans , aussi mauvais les uns que les autres : 1^. de faire baisser le prix des chevaux, qui déjà étoient à vil prix ; eie forcer les fermiers à s'ei> défaire à tel prix telle vente, dans la crainte de ifeii être pas payés par feifet de la réquisition , et de ne pouvoir en ce cas acquitter le prix de leurs lermages au terme prochain j 3^’. de ficilirer aux courtiers des brigands royaux dans les départemens de TOuest la remonte dont ils s'occupent activement;, 4°. d’aioiiter encore aux bénéfices scandaleux de la compagnie des. fournisseurs , qui ne manqueront pas de profiter de cette, circonstance pour compléter leurs fournitures (t). ^ Ainsi , représentans du peuple , ainsi aura, tourné au* profit de nos ennemis l’annonce d’une levée extraordi- nuire par voie de réquisition : tandis qu’une levée de qua^ rante mille chevaux pou voit si efficacemeiiî tourner, à la prospérité et à Fencouragement de cette riche, partie de notre économie rurale. Oui, douze millions, qui seroient plus que siiffisans pour payer les quarante mille chevaux que réclame îa gloire de nos armées *, douze millions versés de suite dans les mains de quarante, mille agriculteurs nous assureroient en peu le double d’une pareille re- monte , qui deviendroit impossible , si la levée actuelle ne se payoit pas au comptant. Le remboursemént' effectif des quarante mille clie-^' vaux dont la République a besoin , est le meilleur encouragement qu’elle puisse donner à la propaga- tion et à l’éducation de ces chevaux forts et robustes (i), Lç'; commi.S5:îCî3naires des fo’drnisscii.rs de la Pi-épublique ont souvent été les fournisseurs de l'arrnée rovale ; çr , tandis que eelle-ci a. l’élite des cbfvaiïx , la Pvépublique n’a que les rebuts des foiresd A a 4 qu’iî faut pour les transports , pour la cavalerie et Tartillerie. Ce paiement effectif raviveroit cette partie inté- ressante du commerce agricole ; il accéléreroit et le paiement des fermages et la rentrée des contributions > il seroit une puissante prime d’encouragement , et plus utile , n’en doutons pas , que ces dispendieux établissement de haras de Rosières, du Pin, de Pom- padour et autres , formés ou projetés plus pour les personnes que pour les choses. Je regrette que la résolution qui nous est soumise n’ait pas pourvu à ce paiement effectif d’une manière plus précise , et plus propre à inspirer de la confiance à qette classe d’hommes méfians par caractère , et plus encore par l’habitude d’être trompés. Au lieu de cette disposition de l’article XV : « Il 35 sera délivré par l’administration centrale au pro- « priétaire du cheval requis un mandat de la valeur 35 de son cheval , conrormément au procès-verbal >5 d’estimation ; ce mandat , expédié par le receveur 55 du département , devra tire compté par lui pour être M payé dans Je délai de trente jours fixes 55 , pourquoi n’avoir pas dit que tous les propriétaires de chevaux verseroient dans une décade aux mains des percep- teurs des communes, la moitié de leurs contributions directes de l’an 8 , et que sur ce produit les proprié- taires des chevaux requis et estimés pour la Répu- ' blique recevroient le prix de l’estimation , sur des mandats des administrations centrales remis par les administrations municipales (i) 5 (1) Il est peu de communes où la moitié des contributions deè propriétaires de chevaux ne seroit pas suffisante pour payer Is contingent à la levée. 5 Cette mesure auroit , sur celle proposée par îx résolution , Tavantage d’une prompte rentrée d’una partie des contributions de Tan 8 -, celle de dissiper les craintes des propriétaires des chevaux requis , sur la rentrée de leur prix qu’ils verroient ainsi assurée sous leurs yeux , qu’ils recevroient , pour ainsi dire , dans leurs foyers , sans avoir besoin d’abandonner leurs travaux pour aller de dix à douze lieues , au chef-lieu du département , chercher leur paiement ,, y faire même plusieurs voyages , et se voir peut-être encore forcés d’escompter leurs mandats pour en finir par un sacrifice (i). Il ne sera déjà que trop vivement senti par ceux dont les attelages et les harnois décomposés par cette réquisition ne pourront continuer leurs travaux agri- coles , ou leurs entreprises de voiturages ou de trans-. ports ^ sans remplacer les chevaux qui leur auront été pris pour le service des armée's. Ce rempiaGenient cependant ne pourra s’effectuer tandis que les propriétaires des chevaux requis ne seront pas payés de leur valeur. Puisse cette considération mériter l’attention de nos collègues des Cinq-Cents , et les déterminer à substituer au plutôt un mode plus sûr et plus célère de paiement des chevaux , mules et mulets frappés de la réquisition. A ces réflexions que je soumets à la sagesse du Conseil, j’ajouterai de courtes observations sur les ar- ticles I3 II, IV et IX de la résolution. Le premier- article d’une pareille loi auroit dû prescrire d’exiger des départemens et des cantons qui n’a voient pas fourni leur contingent à la levée du (1) L’agiotage qui dévore la République, exerce son infâme trafic pai'ticulièrement auprès des caisses publiques. / 6 trentième de Tan 4 ? remplir d'abord ce contin- gent , et en sus de la réquisition actuelle. Il est plus que temps enfin que le Corps législatif d’une nation qui professe l’égalité cTe droits et de devoirs , éta- blisse de fait l’égalité du fardeau public entre tous les ci- toyens ; il est temps de faire cesser le scandaleux spectacle qui nous .présente presque toujours comme, dupe de son exactitude et de sa loyauté, l’homme de bien franchement et religieusement observateur des lois , tandis que celui qui ose les enfreindre ou sait les éluder par ruse ou par àdresse, usurpe la même considération et jouit des mêmes avantages. Jn, II, En le lisant, j’ai été surpris que la com- mission du Conseil des Cinq - Cents ait fait adopter qull pourroit être pris des chevaux de- neuf ans; car c’est s’exposer à en recevoir de quatorze et de quinze ans , puisque les - vétérinaires conviennent qu’on ne peut bien connoître l’âge d’un cheval après qu’il a passé huit ans. An, ÎV. J’observe que la disposition qui porte qu’on prendra d’abord et par préférence les chevaux qui sont employés à tout autre usage qu’à celui de l’agricul- ture , aura l’inconvénient de démonter de suite tous ces marchands, tous ces porteurs de balles, tous ces voituriers, tons ces loueurs de chevaux, tous ces rou- ,liers dont l’existence sera compromise, si la loi leur est littéralement appliquée. Je sais que le Directoire , chargé de l’exécution de la loi, pourra la modifier; mais cette modification , lors même qu’elle est une justice est un empiétement sur le pouvoir législatif , et par conséquent une violation de la garantie sociale, qui ne peut exister là où les pouvoirs sortent de leurs limites. Art, IX, Dans cet article se trouve cette phrase, épistolaire qui n’a point le caractère de loi ? Le prly: des chevaux devant être acquitte en numéraire et sans délai le Corps législatif attend du patriotisme tt de la moralité des experts que la valeur desdits chevaux ne sera pas portée au-delà du prix ordinaire des localités. J’observe au Conseil que si Tintention du législateur €st de faire estimer les chevaux d’après le bas prix où ils se trouveront nécessairement pendant le cours de la réquisition , on grèvera le propriétaire , qui ne recevra , par exemple , que 2.00 fr. pour un cheval qui lui coûtera au moins 3oo francs à remplacer aussitôt c}Lie la réquisition aura cessé. Malgré toutes ces imperfections , et dans l’espoir que nos collègues des Cinq- Cents vous proposeront un mode de paiement plus prompt , plus sûr , plus facile' et plus commode que celui proposé par l’article XV de la résolution, je vote pour son adoption. A PARIS, DE L’IMPRIMERIE NATIONALE, Vendémiaire an 8. /-^VŸ/^rî5ï> ‘i?r' , ; .%'.K' :U.^^\ ■ ■ «^2' ■'■ ' W' '■* ■ ,1 , *-'■'• Jlrr