MU PNA A I AMEN LE Le Mi j VA l'A AVE Ce 1% V A g* A NM MANN E LA Li à 7 7 Me ’ » ' “Vi a s RARE 7 sas F0 ep TT 7, 7 : , A7 "27 08 2 Es po ht PPT TEMS Rs SA NS AVMIVYV 2 EVA 1 NM M NU VAR AV! jee VMVV y AVAAM À D £3F À 2. | RAPPORTS SUR LES TRAVAUX DE L’.AC A DE MIE DES SCIENCES , ARTS ET BELLES - LETTRES DE CATY, Pour les années 18:1, 1812, 1813 ; 1814 et 3815, faisant suite au rap- port général imprimé en 1811. PAR P.-F.-T. DELARIVIÈRE, Secrétaire. A CAEN Chez P. CnaroP1x, imprimeur de l'Académie, rue Froide - Rue, É Ss | 1 s. N oTA. Les rapports présentés pour chacune des cinq dernières années n'ayant point été imprimés en entier, et se trouvant seulement mentionnés très- succinctement dansles Notices des Séances publiques , on a cru devoir les réunir pour faire suite au rap- port général de 1811, et former un 2°. volume de mémoires de l'Académie. Ïla paru convenable néan- moins , dans la distribution des matières, de lais- ser subsister la distinction des années auxquelles elles se rapportent, parce qu'il serait difficile , à cause de la diversité des circonstances , de bien se faire une idée de l'intérêt que pouvaient offrir certainssujets,, si l’on n'avait pas égard au temps où ils ont été traités. ' Chacun de ces rapports, conformément au plan du rapport général, est divisé en deux sections, l’une pour la partie scientifique , l’autre pour la partie littéraire, RAPPORT Sur les travaux de l’année 1811. PREMIÈRE SECTION. PARTIE SCIENTIFIQUE. RECHERCHES sur L'ancienne culture du pastel dans la Basse Normandie, par M, de MANGNEVILLE. BTE difficulté de se procurer en France cer- taines productions étrangères, pendant que la guerre oppose des obstacles presque invincibles aux relations commerciales avec les nations qui en disposent , devait naturellement exciter l’industrie Française à chercher dans les qualités productives de notre sol des sup- plémens aux substances qu'il ne peut nous fournir, Malgré le mépris que provoquent tant d'illusions mensongères , tant de grossières, impostures ; qui trouvent plus dé railleurs que de dupes, on aurait tort de mettre sur la même ligne tous les essais qui tendent à ce but vraiment utile, et de vouerindistinctes. ment, au ridicule quelques recherches que ce soit, faites en vue d’accroitre nos richesses indisènes, Ce À (4) k fut toujours en traversant un vaste champ d'erreurs ; qu'il fut possible d’arriver jusqu'à la vérité ; et l'on ne trouve dans les méprises fréquentes , dans les tentatives malheureuses , que les conditions au pux desquelles ilest permis à l’homme de faire quelques nouveaux pas dans les routes de la science, Cepen- dant la prévention qui en résulte , quoique con- fondue par de nombreux succès , se remontre dans toute sa force à chaque nouvelle entreprise. Quand on veut diriger l'industrie vers un objet étranger à ses procédés antérieurs, on éprouve presque toujours que les théories les mieux raisonnées échouent contre la force de l’habitude. Le peuple se laisse difficile- ment séduire pat les promesses les plus brillantes , et il est naturellement porté à regarder comme du char- Jatanisme le zèle ardent des novateurs pour des pra- tiques qui contrarient sa routine. Le moyen le plus efficace pour déterminer les cultivateurs en général à adopter un genre de culture, est sans contredit de leur montrer que ce n’est point une innovation, que l'usage qu’on leur recommande a été suivi par leurs ayeux, et qu’une expérience bien établie est la garantie des avantages qu’on leur promet. C'est cette considération qui a engagé M. de Magneville à recueillir un grand nombre de faits qui prouvent incon- testablement que le pastel a été cultivé très-ancien- nement dans le territoire du département du Calva- dos, Il annonce que, dans ces recherches, il a fait (52 usage de quelques notions puisées dans un mémoire communiqué par M. Delarue à la société d’agri- culture. Son but est d'engager les habitans de nos campagnes à reprendre une culture qui n’a été presque entièrement abandonnée qu’à cause de la préférence donnée à l’imdigo sur le pastel, et qui ne peut manquer de devenir très-profitable , quand l’emploi des mar- chandises coloniales qui ne sont pas absolument né- cessaires, doit être universellement abandonné. M. de Mangneville cite les différens noms de cette plante, appelée Zsatis par les Grecs, Wisrum par les Romains, Guado par les Italiens, Wadda , Waisda et Guaisdiur dans le Glossaire de Ducange , Vouede ou Vaidia dans les anciens titres et les anciennes Chartes de ce pays, enfin Zsatis rinctoria dans les ouvrages des botanistes modernes. Il con- firme par les termes d’une transaction de 12092 , l'étymologie du mot Pasæl, donnée par le Père Hardouin, dans ses notes sur Pline , puisque cet acte montre qu’on réduisait le vouède en pâte, et qu'on en formait des masses, ou gâteaux appelés Pastella. On trouve différentes mesures employées pour la vente de cette denrée, mais sans aucun moyen de les évaluer avec précision. On voit seule- ment qu’en 1382, une cuve de vouède, bonne paste= lure, selon expression du temps , se vendait 10 liv. , somme considérable , puisqu’elle égalait le prix de cent boisseaux de blé, Mais on ne sait ni ce que c'était À 3 (6) qu'une cuve , nice quéreprésentaient 2,000 de vouëde 4,400 ; 5,000 , termes employés dans d’autres actes. On, ne découvre point de traces de la culture du pastel dans ce pays avant le 13€. siècle ; mais elle a été trés-étendue depuis cette époque jusqu’au temps où des relations multipliées avec l'Amérique ont fait prévaloir l'emploi de l'indigo. On ne peut pas con- clure du défaut de preuves positives, que cette branche d'industrie fût inconnue en Normandie dans les temps les plus reculés, non plus qu’on ne serait autorisé à affirmer qu’elle était restreinte dans les communes d’Allemagne, d’'If , de Cormeïl, de Bé- nouville, de May, de Giberville, de Sanerville et de Cagny , parce que ce sont’les seules citées dans les actes dont notre colleghe a pu avoir connaissance. Il est très-probable au contraire que le vouède était par- ticulièrement cultivé sur les bords de la mer, où aucune de ces communes n’est située, puisque cette plante croît naturellement sur les côtes maritimes ; et on a la preuve que cette culture était étendue et florissante dans notre contrée , et qu’elle s’y est maintenue jusqu'à une époque assez rapprochée de nous, soit en considérant l'établissement d’un octroi sur cette marchandise, et l’institution de mesureurs jurés pour sa vente, soit en faisant attention aux nombreux moulms à vouëde dont les actes des ta- bellions font mention dans le 15€ siècle , jusqu’en 1536, et dont plusieurs terrains ont conservé jus+ (9) qu'ici la dénomination. Il faut même ajouter qu’on trouve encore dans les communes de Luc , de Lan-# grune et de Douvres plusieurs champs de vouède disséminés , et que suivant le témoignage de quelques habitans, cette culture était bien plus considérable iln'y a qu’üne soixantaine d'années. Si ce genre de récolte à pu , dans les circonstances les plus défavorables 4 offrir assez d'avantages pour être préférés aux autres, dans dés terrains précieux et du plus grand produit, on peut se faire une idée de ceux qu'il procurerait dans un temps où une censommation prodigieuse ne pourra manquer d'élever fort haut le prix de cette denrée. C’est à cette conséquence que s’arrête surtout M. de Mangneville, sans entrer dans les dé+ tails , soit de la culture , soit de la préparation , objets sur lesquels les instructions sont abondamment ré- pandues. 11 remarque seulement qu’on envoie au- jourd’hui en Picardie la feuille de vouède simple- ment desséchée , tandis qu’autrefois on mettait le. pastel en pélotes, et on le vendait à la rondelle ? espèce de mesure, jaugée comme le boisseau, et dont chaque marchand était pourvu. Quoique la petite quantité de pastel qu’on cultive dans le pays, pût fournir en peu de temps assez de graine pour une exploitation étendue, notre collègue croit préférable de renouveler les semences, en en tirant du Midi. Il à joint à cette observation l’an- nonce d'un envoi considérable de graine fait par le À 4 (8) gouvernement, pour favoriser cette branche d’indus- trie. ; Mémoire sur la manière de dégraisser les laines , par M. NicoLas. C'est encore ladoption d’une branche d’industrie étrangère, qui a donné lieu à ce mémoire, divisé en deux parties, Dans la première partie, M. Nicolas, après avoir exposé le motif qui l’a déterminé à entreprendre un travail sur cette matière, savoir les difficultés qu’é- prouvent les propriétaires des moutons d’Espagne ; vulgairement appelés mérinos , pour le dégraissage de leurs laines, et l'espèce de découragement qui er est la suite , présente quelques réflexions sur la mau- vaise tenue de nos bergeries , et la négligence ou les préjugés fâcheux de la plupart des cultivateurs. Les principaux abus qu’il signale sont 1°. la coutume de laisser les bêtes à laine pendant un temps très- considérable sur la même litière, et de les tenir ren- fermés pendant toute la mauvaise saison , dans la fausse idée qu’on ne peut leur procurer trop de cha- leur; 2°, la mauvaise construction des étables, or- dinairement basses, enfoncées, mal aérées , et consé- quemment humides et mal saines ; 3°. le défaut d'é- coulement des urines, qui séjournent trop long-temps dans les bergeries, et contribuent avec le mauvais air aux maladies des moutons, qui souvent excités par (9) de violentes démangeaisons à se déchirer la peau avec leurs dents, avalent de petites portions de laine, d’où se forment peu à peu ces égagropiles , qui ont été l'objet d’un mémoire adressé il y a deux ans par l’auteur à l'institut national. I] traite aussi du par- cage , en convenant qu’il n’est pas praticable dans tous les pays, et il résume les précautions qu’on peut employer partout pour la prospérité des troupeaux. Dans la seconde partie , l’auteur traite expressément du dégraissage des laines , surtout par rapport aux mérinos. Il rend compte avec la même franchise , et des essais infructueux qu’il a faits d’abord, et du dernier, dont il a obtenu un succès complet et bien attesté par l’échantillon présenté à l’assemblée. Après avoir bien fait battre sur une claie la toison d’un mouton d’Espagne, pour en Ôter la poussière , les pailles et les ordures qui y sont attachées, il l’a divisée en trois portions. Il a traité la première selon un procédé qu’il décrit, et dans lequel il emploie l'urine ; et il n’a pu parvenir à rendre sa laine blanche et douce au toucher, malgré plusieurs expédiens. Il a suivi pour la seconde partie la méthode de M, Boyer , consignée dans le dictionnaire raisonné des sciences, des arts et métiers, article /aize. Enfin voici comment 1l expose lui-même son dernier essai : « La troisième partie de cette taison ayant été mise en macération dans un baquet avec de l’eau derivière, à la seule exposition au soleil, pendant dix à douze (10) heures, a été renfermée dans un sac , et etisiite por< tée à la rivière, pour y être parfaitement lavées Lorsque l’eau en est sortie claire ét limpide, la laine a été mise en macération au soleil, dans un bain composé d’eau de rivière ; tenant en solution une once de savon de Marseille pour chaque livre. Dix à douze heures après , on a bien frotté cétté laine dans l’eau de savon, et on l’a ensuite lavée à la rivière : après quoi, ona délayé du blanc de Troye dans de l’eau, de manière à lui communiquer là consistance d’un fait un peu épais, Les parties les plus grossières s’é- tant précipitées, on a versé dans un vase la liquéur blanche , par inclination , et on ÿ a fait tremper la laine, que l’on a ensuite frottée entre les mains pen dant une demi-heure. Enfin, pour dernier apprèt , la laine retirée de cette eau chargée de craie , a été bien lavée, et ensuite exposée au soleil et à la rosée pendant douze jours , sur une toile étendue et fixée sur des piquets, à deux pieds de terre. » M. Nicolas avertit 1°. que le lavage de la laine ne doit être fait que par petites parties à la fois; 20. Que le déchet, selon sa méthode, n’est que de 30 à 3$ livres sur 100 livres, tandis qu’en suivant les autres procédés , notamment celui de M. Boyer , on perd de $o à $2 livres pour les laines ordinaires, et jusqu'à 70 livres pour les laines fines; 3°. que cette méthode d’une très-facile exécution est en même LC) temps très-peu coûteuse, puisque les frais ne vont pas à plus de deux sous par livre de laine. Noricé sur le petit poisson vulwairement connu à Casr sous le nom de montée, par M. NICOLAS. M. Nicolas a aussi traité un sujet sur lequel l’A- cadémie désirait depuis long-temps obtenir des lumières sûres, et qu’elle avait même compris dans un pro- gramme de questions publiées précédemment. Il a essayé de déterminer la nature de la Montée, qué diverses circonstances de son existence rendent digne d’une attention particulière , et dont la véritable espèce est restée incertaine jusqu'ici, quoiqu'elle se pêche en grande abondance aux portes mêmes de la ville pendant une partie considérable de l’année. L'auteur commence par une description très-détail- lée de ce petit poisson, qui paraît, dit-il, être en- gendré par de plus gros, dont l’espèce n’est pas encore invariablement connue. La prodigieuse quantité des individus qui nagent en société et comme agglutinés les uns aux autres , et l’uniformité dans les propor- tions de leurs corps, qui n’ont communément que deux pouces et demi de longueur, et quatre lignes au plus de circonférence , lui semblent iudiquer une colonie nouvellement éclose d’un frai déposé par cer- tains poissons de mer dans nos rivières. Il conclut des caractères qu’il a marqués, que cette espèce ap- païtient à la classe des apodes , et au genre des (12) murènes où anguilles. Mais à quelle espèce ? est-ce à la murène congre ? est-ce à la murène anguille ? M. Nicolas prétend que la montée n’est point le frai du congre; parce que le congre a deux petits barbil- lons à la mâchoire supérieure ; que sa nageoire dorsale commence beaucoup plus près de la tête que celle de la montée ; que cette nageoire est d’ailleurs bordée de noir, et qu'il porte aussi une ligne latérale ponc- tuée de blanc, que n’a pas la montée. Il pense que c’est l’espèce murena anguilla maritima ; et annonce ainsiles particularités qui motivent son opinion, jointes à quelques autres, qui en sont le développement : » 19, Le poisson dit montée a absolument la même conformation que le murena anguilla. 2°. Comme l’anguille , il se tient le jour dans la vase, et ne voyage que pendant la nuit. 3°. Ce n’est que pendant h nuit, et à l’aide d’un tamis de crin fixé à un long manche, que l’on prend ce poisson, attiré vers les bords de la rivière par la lumière d’un flambeau ou d’une lanterne. 4°. La pêche de ce poisson com- mence vers le milieu de Mars, et finit en Juin. 5°. Elle se fait en opposant le tamis au flux de l’eau, et en le portant contre le courant , soit que la marée monte ou baisse, 6°. Le passage est quelquefois si abondant, et les individus se trouvent réunis en si grande masse, que d’un seul coup de tamis on en prend le contenu d’un demi-litre. 7°. On trouve souvent parmi la montée de petites anguilles de quatre (13) à cinq pouces de longueur. 8°. Ces anguilles , plus colorées que la montée , perdent comme elle leur couleur dans l’alkool, et y deviennent de même fermes et d'un blanc mat. 99. L’une et l’autre espèce se convertissent presque en totalité en gélatine par leur ébullition dans l’eau. ». Après cette solution du problème que présente la nature de la montée, M. Nicolas a rendu compte d'un procédé qu’il a éprouvé pour faire sécher ce poisson , et le conserver long-temps. Il a assuré qu’il en avait mangé qui était desséché depuis environ un mois, et qu'il lui avait trouvé la même saveur qu’à celui qui est frais. Il avait versé environ quatre litres de montée dans une terrine et y avait répandu un peu de vinaigre. Tous les poissons bien vivans sortirent du vase, et se répandirent sur une nappe étendue des- sous. Après quelques heures d'exposition au soleil, ils se trouvèrent bien desséchés , et furent renferimés dans des boîtes que l’on eut soin de tenir dans un lieu sec. Mémoire sur la montée, par M. LAMOUROUX. M. Lamouroux a aussi porté ses recherches et ses observations sur Ja montée, Au commence- ment de son mémoire, qui a été lu dans la même séance que le précédent , et qui ne peut nulle- ment en être regardé comme une réfutation , :l justifie l'intérêt qu’il a mis à cet examen par quelques (24): réflexions générales sur les ouvrages de la nature ; dont l'importance, äux yeux du naturaliste et du philosophe, ne se mesure point sur le volume. Pas- sant ‘ensuite à la montée, qu’il rapporte au genre murène des naturalistes modernes , il pose ces. ques- tions : la montée est-elle le frai du congre ? Est-elle le frai de l’anguille ? est-ce un animal particulier ? il réduit, d’après Lacepède , le genre rrurène à quatre espèces, la murène anguille, la murène ta- chetée , la murène myre, la murène congre. La montée ne peut appartenir ni à la seconde , origi- naire de la mer rouge et de la mer des Indes, ni à la troisième, qui habite la Méditerranée , et dont le museau est terminé en pointe aigue : elle n’offre d'ail- leuts aucuns caractères propres assez essentiels pour constituer une espèce distincte. Il reste donc qu'elle soit du frai d’anguille ou du frai de congre.. | M. Lamouroux ne croit point que la montée soit le frai de l’anguille. L'une et l’autre ont, il est vrai, la mâchoire inférieure plus avancée que la supérieure, les deux mâchoires garnies de dents, visibles dans la montée seulement au microscope, l'ouverture des branchies étroite, en forme de croissant , et fortifiée par plusieurs rayons. Mais à ces points de ressem- blance on peut opposer des différences nombreuses et considérables. D’abord l’anguille est repandue dans les quatre parties du monde, et vit long-temps dans toute sorte d'eaux : suivant Spa//anzani | d'accord (350 | “sur ce pont avec d’autres naturalistes, elle ne peut frayer que dans la. mer ; elle remonte par l’embou- chure des fleuves , et va chercher les eaux douces, où elle reste jusqu'à ce qu’elle ait acquis un certain accroissement , époque où ses efforts constans et opiniâtres pour regagner la mer malgré tous les obstacles, ne peuveut. guères s'expliquer que par le besoin pressant de la reproduction. Les petites an- guilles qui se trouvent souvent mêlées avec la montée, et qu'il est toujours facile d’en distinguer, se pêchent pendant le printems et l'été : si on les met dans un vase , elles vivent inditféremment dans l'eau, de rivière ou de puits, mêlée ou non avec des plantes : leur situation est constamment horizon tale : elles montent et descendent avec une égale rapidité : leur. mouvement est peu. ondulé, et pres- que nul pendant le jour. La montée, au contraire, ne parait que dans les rivières de l'Orne , de la Touque et de la Dive , et seulement cepuis le mois de Mars jusqu’au commencement de Mar, a l'époque des grandes marées : elle remonte avec le flot, et s’en retourne avec lui : celle qui n’a pas été prise, et qui n’& pu regagner la mer, noircit et périt en peu, de temps : mise dans un vase, elle ne vit que deux ou trois jours dans l’eau de puits, un peu plus, si l’on y rnêle des plantes ou de la mie de pain, et ses mouvemens y sont moins vifs que dans l’eau de rivière , où on-peut la conserver jusqu’à » (16) deux mois : elle tombe rapidement au fond du vase ; ou s’y plonge la tête la première, mais elle remonte lentement et péniblement, et toujours la tête plus élevée que le reste du corps : son mouvement dure la nuit comme le jour, mais se rallentit à mesure que le soleil monte sur l'horizon, et augmente à mesure que cet astre descend ; elle reste à peu près tranquille au fond du vase depuis onze heures jus- qu'à trois. En second lieu , la montée est trans- parente , et l’anguille ne l’est jamais, quelque jeune qu’elle soit : la première a la bouche et les yeux beaucoup plus grands proportionnellement à la tête : ka longueur de sa nageoire dorsale est à celle de l’a- nimal comme 26 à 32 ou 33, et elle est dans l’autre comme 26 à 38 ou 40 : la montée a certainement moins de rayons aux nageoirés que l’anguille, quoi- qu’on ne puisse pas en déterminer le nombre au juste, et l'humeur visqueuse y est beaucoup plus abon- dante : enfin le bouillon d’anguille ne vaut rien, et l'on prétend que celui de la montée est bon. Si l’on objecte à l’auteur qu’on a trouvé au bout d’un cer- tain temps de l’anguille dans des pièces d’eau où l’on avait mis de la montée, il en donne pour raison le mélange dont il a déja parlé de plus ou moins de petites anguilles avec la montée. M. Lamouroux pense donc que la montée n'est autre chose que le frai du congre , opinion com- mune parmi les pêcheurs, et adoptée par plusieurs naturalistes. (17) maturalistes. Cette conclusion sort de la comparaison de -ces deux poissons, entre lesquels on ne peut as- signer d’autres différences que la forme de la nageoire pectorale, la grandeur et la couleur. La nageoire pectorale de la montée, moins ar- rondie que celle de l’anguille, l’est plus que celle du congre. Elle est à bords échancrés , à la différence de l’un et de l’autre , et fortifiée seulement de 12 rayons , très-visibles avec la loupe dans les grands individus, tandis que le congre en a de 12 à 19, Panguille de 15 à 20. Cette différence ne paraît point essentielle à l’auteur du mémoire. Le nombre des rayons, qu'on ne peut détermin2r dans les petites montées , où il est peut-être au-dessous de 12 , peut croître avec l’âge, puisqu'il varie dans les individus; et cet accroissement successif, ou bien le frottement, peut faire disparaître les échancrures. La granceur ne peut servir d'indice , puisque la montée ne reste sous nos yeux que quelques heures, et que nous ne voyons le congre que déjà grand, eñsorte que lé passage de son premier état à une croissance avancée nous est inconnu. L'’auteuf, en donnant pour cause de Papparition de la montée sa faiblesse, qui ne lui permet pas de résister au flux, explique par là pourquoi on ne voit ce frai que quand il est nouvellement éclos , et pourquoile congre , croissant depuis cette époque dans le sein des mers, ne reparaît que déjà grand. B (18) Quant à la couleur, on sait qu’elle change avec ‘âge dans beaucoup d’espèces. Si le congre n’est point du tout transparent , la grande montée l’est déja moins que la petite, Celle-ci est tout-à-fait blanche ; l’autre, marquée de points noirs, qui se rapprochant de plus en plus, peuvent bien, pendant le long intervalle qui sépare l’état de montée de l’é- tat de congre, se confondre jusqu’à produire cette couleur noirâtre continue qui distingue le second du premier. Au reste M. Lamouroux apporte beaucoup de faits et d'observations qui ne peuvent entrer dans un extrait. Toutefois l’auteur n’a eu l’intention de présenter son sentiment que comme purement conjectural. C’est ce qu’il a formellement déclaré quelques mois plus tard , en rendant compte de nouvelles observations qu'il avait eu occasion de faire dans quelques voyages sur nos côtes, et de faits importans, qu'il avait été à portée de recueillir, et dont l'effet avait été de le faire revenir sur sa première opinion. La réunion des circonstances qui ont été l’objet de ses dernières recherches , lui ont fait juger définitivement que la montée n’était point le frai du congre, comme il l'avait annoncé d’abord , mais celui du pémperner, qui est une variété de l’anguille. (19) Essai pour servir à l'analyse méthodique des sels , dans lequel on considèreen particulier les combinai- sons des acides minéraux non métalliques avec les bases alcalines er rerreuses , par M. THIERRY fils. Dès qu’une fois on a trouvé la véritable méthode d’une science, on ne peut plus marquer de bornes à ses progrès ; en méditant sur un probléme , on entrevoit la solution d’un autre, et chaque décou- verte en prépare une nouvelle, C'est ce qui est arrivé aux sciences physiques , et particulièrement à la chimie, depuis qu'on a substitué à des théories purement imagimaires l'observation et l'expérience, es qu’on a examiné les effets pour en déduire les causes , au lieu de supposer les causes pour expliquer les effets. C’est d’un aperçu rapide des avantages dus À cette marche si naturelle, et cependant adoptée si tard, que M. Thierry passe à l’exposition du sujet qu'il veut traiter. Le but qu’il annonce est évidem- ment un nouveau pas dans la carrière analytique, et un degré de perfection bien digne d'attirer les regards des savans. Il ne suffit pas, dit-il, d’avoir des pro- cédés pour anaïiyser les produits naturels; il faut encore tâcher de découvrir sûrement, par des moyens faciles et prompts, les corps d’une origine quel- conque , qui se trouvent placés sous nos yeux : et c’est précisement à quoi tend son essai , par rapport B 2 (20) à une classe de corps particulièrement intéressans par la multitude et la variété de leurs usages, savoir les combinaisons des acides minéraux non métalliques avec les bases alcalines et terreuses. Quelque bien connus que soient ces corps , il manque à Ja science une méthode simple et générale pour les analyser , comme on en a déjà pour les substances organiques , les eaux minérales , les pierres, les mines ; et notre confrère en propose une qui a l'avantage de n'’exiger ni connaissances chimiques bien profondes , ni ap-. pareils bien compliqués. D'abord il compte onze genres de sels minéraux non métalliques, les s/fares , les susfires , les ni- rates \ les nairrites | les muriates | les muriates suroxigénes , les phosphates , les phosphires , les fluates , les borates et les carbonates | nombre égal à celui des acides minéraux , moins l’acide muria- tique oxigéné ; ensuite douze bases salifiables , la silice, l'alumine, la glucine , l’ytria, la zircone , la ma- gnésie , la chaux , la baryte, la strontiane , la potasse , la soude, et l'ammoniac , dont les combinaisons avec ces acides constituent les espèces: mais l Auteur s’ar- rête pour le moment aux genres , en observant seu- lement que le nombre des espèces n’est pas , comme il semblerait au premier abord, égal au nombre des acides multiplié par celui des bases, parc: qu'il y a des bases qui ne se combinent pas avec tous les acides, au moins assez parfaitement pour fermer des (2) : sels, et que d’un autre côté, des sels unis entre ‘eux ou à un excès de base, ou à un excès d’acide, peuvent donner naissance à de nouveaux corps salins. Ce qu'il s'agirait de trouver pour parvenir à un procédé très-simple, ce serait un agent qui produisit avec chacun des genres des phénomènes bien dis- tincts ; mais on n’en conmaît aucun qui ait cet avantage, et voici l’expédient que M. Thierry imagine pour y suppléer. À défaut d’un moyen d'arriver immédiatement à la connaissance du genre, on peut, dit-il, former des onze genres un certain nombre de groupes , et l’on résoudra le problème en détail, IL choisit pour cette opération lacide sulfurique , et | justifie la préférence qu'il lui donne , soit sur le ca: lorique , soit sur le charbon, soit sûr tout avtre agent. Les effets que produit l'acide sulfurique sur les onze genres de sels proposés, se réduisent à trois : absence de vapeurs et d’effervescence | marqué par zéro ; effervescence sans vapeurs , vapeurs. De là trois sections , dont la première contient quatre genres, la seconde deux, la troisième cinq. Ainsi, en opé- rant sur un sel dont on cherche à découvrir le genre, on connaîtra par cette première épreuve que c’est un sulfate, un phosphate, un phosphite, ou un borate, s’il appartient à la première section ; un sul- fite ou un carbonate, s’il appartient à la seconde ; et enfin un des cinq autres genres , s’il appartient à la troisième, L'auteur montre ensuite comment on B 3 (2) réduit la solution à un seul genre, soit immédiatement » soit par l'élimination successive des autres. | Ce mode d'analyse présente trop de simplicité et de facilité, pour qu’on ne désire pas que son appli- cation soit étendue aux espèces. UT SNNEEE = “HA NU SAR Essai sur l'influence du tempérament des médecins dans leur.pratique et leurs écrits , par M. TRoUvÉ. L'auteur déclare ne vouloir point discuter la théorie des tempéramens , sur laquelle , il se contente de comparer les principes des anciens avec ceux des modernes , à l'avantage de ces derniers. Il sé borne à en faire l'application qu’annonce le titre de son mé- moire , et à présenter un résultat qu'il croit n'avoir encore été traité par personne, Baglivi lui paraissant ne l'avoir qu’indiqué , sans le développer ni l'appro- fondir. Ses preuves consistent surtout en faits , soit généraux , soit particuliers, dont l'opinion qu'il veut établir, semble être une conséquence , sinon toujours infaillible , au moins toujours très-probable, La pre- mière observation qu’il rapporte, et qu'on peut ré- péter souvent dans les hôpitaux , c'est la diversité frappante, quelquefois même l'opposition absolue dans la pratique de deux médecins également dis- tingués par leurs talens , imbus des mêmes principes, (23) instruits a la même école, vivant dans les mêmes so- ciétés , etexerçant dans des circonstances parfaitemen semblables. Ce n’est , selon lui , que par l'influence du tempérament qu'on peut expliquer ce contraste, qui a exposé la médecine au reproche de n'être qu'une science conjecturale, et qui a provoqué contre elle tant d'attaques, ou sérieuses , ou plaisantes. Et pour confirmer ce raisonnement , il présente, d’après le docteur Pinel, l'histoire critique de deux médecins, dont l’un, d’un tempérament bilieux à l'excès, por- tait dans toutes ses opérations un caractère de préci- pitation et de hardiesse , presque toujours fâcheux pour ses malades , et l’autre , d’une constitu- tion éminemment lymphatique , agissait toujours avèc une lenteur et une timidité qui n'étaient pas moins funestes. Il rapporte, à cette occasion , l'exemple d’une opiniâtreté téméraire du docteur Tronchin, qui après avoir précipité au tombeau une amie qui lui était très-chère, en l’inoculant contre l’avis de tous ses confrères, dans une saison très-dangereuse , suc- comba lui-même , au bout de trois mois, à ses re- grets et à ses remords. Ce n'est pas seulement dans la médecine que ces effets du tempérament personnel du praticien peuvent s’observer ; c’est même dans la chirurgie , quoique sa marche semble assujettie à des règles bien plus cer- taines et plus évidentes : et des faits que M. Trouvé 2 eus sous les yeux ne lui permettent pas de douter B 4 (24) | que , tantôt la pétulance présomptueuse, tantôt la cir= conspection pusillanime d’un chirurgien , soit dans le traitement des plaies, soit dans les accouchemens ne soit souvent meurtrière. | Cette influence se fait sentir principalement dans ces consultations médicales , où l’homme vif, d’un caractère tranchant , surtout s'il est doué du talent de la parole , s’il jouit d’une grande considération , est presque sûr de triompher de la défiance et de la modération deses confrères, quelque éclairés qu’ils soient : et c’est ce qui arriva à Marseille dans l’épi- démie de 1720, où tout céda à l’ascendant de quelques coryphées de la science , excepté le seu Bertrand , qui éloigné de leurs délibérations, osal montrer leurs erreurs avec autant de franchise que de modestie. Notre collègue croit trouver encore dans une dis- position organique la cause de ce qu’il appelle cette manie de quelques médecins de ne traiter que certain genres de maladies. Quant au penchant que plusieurs ont à voir partout celle dont ils sont eux-mêmes affectés , il a été remarqué par Baglivi et. Zimmers mann ,; dont le dernier cite l'exemple du fameux- Bouvard, qui n’ordonnait les antiscorbutiques avec tant de confance et de’ profusion, que parce qu’il croyait voir chez tous ses malades la cachexie dont il était lui-même atteint. Cette circonstance est souvent le principe des réputations exclusives pour la guéri- son de certaines affections ; et c’est à elle qu’un de (25) nos collègues, dont la mort a excité des regrets uni- versels , attribuait l'opinion qu’on avait de son habi- leté dans le traitement des maladies de poitrine. Mais ‘une pareille opinion peut être très-fondée > parce qu'il est présumable qu’un homme qui a éprouvé une in- firmité est plus propre à la reconnaître et'à la guérir dans les autres. L'influence du tempérament dans les écrits paraît peu susceptible d’être contestée ; et plusieurs des exemples qu’en cite M. Trouvé, prouvent qu'il ne la restreint pas aux ouvrages des médecins. Il en est de même, à pe forte raison, des vociférations aussi satyriques qu ’injustes, qu’il reproche à Bouvard contre Bordeu et Tronchin ; et l'on a pu observer de tout temps, que les écrivains, en quelque genre que ce soit, d’un caractère violent et emporté, sont sujets à se laisser dominer par leur passion. Au reste M. Trouvé est loin de croire qu'il y ait _des tempéramens incompatibles avec une sage pratique de l’art médical, Il y a des moyens de détruire, ou au moins d’atténuer extrêmement cette influence de l’organisation , et de faire prévaloir la raison et la science. Il développe ces moyens dans un recueil de préceptes qui termine son mémoire. on At nent l paei Outre les écrits qui ont été lus par leurs auteurs dans les séances académiques , la correspondance des associés et de quelques autres savans a procuré un grand nombre d'ouvrages, dont plusieurs ont été (26) l’objet d’un examen particulier et du rapport d’une commission. On doit distinguer parmi ces produc- tions celles qui traitent quelques-unes des questions énoncées dans la notice de la séance publique de l'année précédente, et sur lesquelles l’académie in- vitait les personnes qu'elles pouvaient intéresser, €t spécialement ses correspondans , à diriger leurs re- cherches. Quelle est la nature du petit poisson connu à Can sous le nom de Montée, qui se pêche dans l'Orne à des époques périodiques ? Tel était l'énoncé du 14°. article du programme lu dans la séance du 18 Mai 1810, et qui était lobjet des deux mémoires de M. Nicolas et de M. Lamouroux , dont il a été rendu compte. Un autre mémoire sur le même sujet a été adressé à l’académie dans la forme usitée pour les concours. IL porte pour épigraphe ce passage de Pline : z2ultum adhuc restat operis , multumque restabir , nec ulli nato post mille sæcula precluditur occas'o aliquid adjiciendi. l'au- teur, après une analyse exacte et méthodique, qui prouve qu’il a de bons principes de théorie, et l'ha- bitude de ce genre d'observations , conclut que la montée appartient au genre mwræna, et propose de la nommer mwræna Cadomensis. Cette conclusion a été jugée insuffisante, comme ne renfermant que la she (CE7) partie la plus facile de la solution. En effet il s’agis- sait moins d'établir que la montée était renfermée dans le genre murène , que de comparer ses caractères avec ceux des autres espèces du même genre , afin de décider si elle avait des différences assez essentiel- les pour constituer une espèce distincte , ou si elle devait être rapportée à une des autres , par exemple à l’anguille ou au congre. Au reste il a été remar- qué que l’auteur du mémoire, étant éloigné de Caen, et n'ayant pu se procurer que des individus morts de l'espèce qu’il s’agissait de déterminer, n’a pas été à portée de faire des observations aussi sûres et aussi complètes que s’il eûtété sur les lieux. Quels sont les effers de le terreur sur l'économie animale à Deux mémoires sont parvenus à l’Académie sur cette question. Le premier porte pour épigraphe, Terrorem spectant tetanus , pallorque virescens, Et tremor, anxietas , vesania , deliquium et mors. L'auteur, pour définir la terreur , dit qu’elle est la plus violente de toutes Les passions de l'âme , er la seule dont on ne puisse éviter les funestes attèintes: la plus violente, parce qu’elle intervertit en un ins- tant l’ordre de toutes nos fonctions , et peut entière- ment nous détruire ; la seule inévitable , parce qu’elle est indépendante de la réflexion , et que naturel- (28) lement tous les hommes frémissent à l’aspect d’un objet affreux , d’un péril imminent. Il tire des poëmes d’Homère et de Virgile, et ensuite des livres saints, un grand nombre d'exemples, en vue de con- firmer ces deux caractères qu’il assigne à la terreur. Mettant néanmoins des restrictions au dernier , il montre par des traits d’un autre genre , que certaines affections morales, surtout celles qui sont exaltées par une inspiration surnaturelle , peuvent rendre l’âme supérieure à l'impression des maux ou des dangers les plus terribles. De ce contraste des hommes qui cèdent à l’empire de l’organisation commune, et de ceux qui s'élèvent au-dessus de la nature même, il passe à celui que présentent ces êtres atroces qui épouvantent l'humanité par leurs fureurs, opposés à ces personnages généreux et bienfaisans , dont la vertu est digne d’admiration. Revenant aux effets qui ont été cités, dit-il, comme attributs de La terreur, l'im- mobilité | le tremblement, la pâleur , l'extrême agilite , l’aphonie, la syncope , le trouble de l'âme , la stupeur , lespèce de pérrification du cœur , etc. , il ajoute même l'extinction totale de la vie ; y voit les suites d’une secousse que donne à tout le corps l'âme épouvantée par un danger réel ou mensonger , le caractère d’une maladie évidemment tonique , évidemment convulsive. Après une courte digression sur l'impossibilité d’expli- quer le moyen de cette action de l’âme sur le corps, et la témérité d’une pareille tentative , il développe par (29) des descriptionset par desexemplesle tableau dont ilavait présenté l’esquisse , et conclut, en se résumant , que la terreur est en effet Z plus redoutable de routes ks affections de l’éme, Tous les détails sont ap- puyés de citations. Des considérations d’un genre tout-à-fait oratoire sur l’'admirable constitution ‘de Phomme, tant au physique qu’au moral, terminent le mémoire. Suivant le rapport d’une commission, dont l’A- cadémie adopta le jugement , ce travail annonce une instruction étendue et un talent remarquable, 1l of- fre une diction élégante et ornée, un ton souvent éloquent , et même pathétique; mais l’auteur s’est trop abandonné à son imagination , comme il en convient assez clairement lui-même en quelques en- droits ; il n’a point suivi cette marche méthodique qui pouvait seule , dans une discussion de cette nature, le conduire à une conclusion rigoureuse. Une partie considérable de son ouvrage se compose d’ornemens tout-ä-fait étrangers au point de la question; les qualités qu'il attribue à la terreur , sous la forme dune définition , présentent quelque chose de vague et d’obscur , et sont susceptibles d’être contestées , puisque, d’une part, la violence des.affections ne tient pas absolument à leur nature spécifique, mais dépend d’une multitude de circonstances , soit inté- rieures , soit extérieures , et que de l’autre on ne voit pas bien en quel sens il pourrait être vrai de dire. (30) que l’on peut se soustraire aux autres impressions qui nous viennent du dehors, et que la terreur seule est inévitable. Quant à ce qu'il y a de plus précis dans cette dissertation, savoir que la terreur produit des effets essentiellement toniques , opère la cohesion des mo- lécules organiques , l'excès de ron des organes , cette opinion a été regardée comme erronée. « La ter- reur, comme le rapporteur de la commission l’a énoncé , porte sa principale action sur le centre phrénique, et de là sur tout le systême nerveux et sur les prin- cipaux organes de l’économie animale ; l’homme qui en est frappé , éprouve un sentiment de froid par tout le corps, il frissonne par tous ses membres, il est saisi d’une anxiété extrême ; il y a constriction spasmodique de tous les capillaires ; la pâleur s’em- pare de lui, ses muscles sont frappés d’atonie , 1l tremble malgré lui; ses sphincters se rélâchent , les urines, les matières fécalesimême , sont expulsées in- volontairement ; quelquefois il tombe sans sentiment et sans parole »; et ces accidens, dont la plupart sont cités par l’auteur lui-même comme les effets les plus ordinaires de la terreur , ne supposent pas un excès de ton des organes. Si l’on a observé quelques phénomènes contraires, ils doivent être attribués à des conditions extraordinaires, ou à une réaction se- condaire , plutôt qu’à un mode d’action immédiat et essentiel. (isa) Le second mémoire sur la même question porte pour épigraphe : Obstupui , steterunt que come , vox faucibus hesie: Ænéid. lb. Il. v. 774. Il a paru rédigé avec netteté , et dans les princies de la saine physiologie; et l’Académie a décerné à sen auteur, M. Guittard, médecin à Bordeaux, une des médailles d'argent annoncées dans le programme. Remontant aux premiers principes de ces modifica- tions si ncmbreuses et si diverses qui changent à chaque instant l’état de nos organes, le plaisir et la douleur , M. Guittard montre l’âme tantôt attirée par les objets qui lui sont agréables , tantôt repoussée par ceux qui lui déplaisent. Dans le premier cas, le systéme ner- veux s’épanouit, tout l'organisme paraît s’élancer au devant de la sensation ; dans le dernier, le système nerveux se resserre , ainsi que les organes qu’il met en jeu : dans l’un et l’autre , les fonctions de l'économie animale se resentent de cet état moral. Mais indépendamment de ces passions que l’auteur appelle primitives et simples , il admet plusieurs af- fections qu’on peut considérer comme mixres , ce qui produit alternativement ou à la fois des effets con- traires , ayant une influence tantôt favorable et tantôt (32) funeste à l'harmonie des fonctions du corps humain ; selon l'intensité de leurs causes, la constitution des individus sur lesquels elles agissent, leur sexe, leur âge , le temps ou les circonstances de leur développe- ment, etc.; et il range dans cette derniere classe la terreur, passion qui nait, dit-il, de l'émorion excitée dans l'âme à la vue d’un grand mal ou d'un grand péril, qui a lieu instantanément , et nous frappe & d'improviste. Après avoir comparé la serreur avec les impres- sions analogues que présentent les mots peur, frayeur » effroi , il expose les phénomènes quelle produit dans P P q P ses divers degrés , développe les désordres qu’elle cause. Il la considère comme portant sa principale action sur le régime épigastrique; et de là sur tout le système nerveux. « C’est par ce méchanisme, dit-il, qu’elle déter- # mine une secousse le plus souvent funeste, mais »# qui pourtant peut être, dans certains cas salutaire, » selon que l’économie animale réagit plus ou moins » puissamment contre elle. » Selon lui, la terreur frappe d’une atonie plus où moins complète l’estomac — et tous les organes digestifs, comme le prouvent le saisissement et l'anxiété qu’on ressent : de là le trouble des digestions, les jaunisses subites, l’ictère noir, etc. ; Elle détermine un spasme général, qui se commu- nique à divers organes , et fait quelquefois affluer le sang en abondance vers certaines parties : de là l’hémoptysie , (3%) lhémoptysie , les hémorragies utérines , l'avortement ; des anévrismes du cœur, des apoplexies prompte- ment mortelles, etc. , etc. Il peut arriver que la vive impression que reçoit le système phrénique se réfléchisse sur le cerveau avec violence : de là l’épi- lepsie , la catalepsie, la paralysie , la folie, la manie , etc. Elle peut aussi débiliter tellement le système lympha- tique , qu’on lui a vu produire des engorgemens glan- duleux qui sont devenus squirreux. Après avoir décrit les effets pernicieux de la ter- reur ; et apporté en preuve des plus considérables , des faits bien avérés, M. Guittard indique quelques circonstances dans lesquelles cette vive affection de Pâme a été salutaire. Il cite, sur l'autorité d’Hil danus , de Salmuth et de Daignan , trois exemples de goutteux guéris par une impression de cette nature; et dans l'explication qu'il donne de ces phénomènes, il énonce l'opinion que la guérison de plusieurs maniaques obtenue en partie par leur immersion dans l'eau de la mer, pourrait bien être due à une per- turbation produite par une frayeur subite et consi- dérable, plutôt qu’à une prétendue spécificité de ces sortes de bains. C’est sans doute une conjecture pa- reille qui dirigea Boerrhave, lorsque s’entourant adroi- tement d’un appareil de terreur, il arrêta dans l’hôpi- tal d'Harlem des convulsions qui semblaient se pro- pager par une espèce de contagion. Au reste, en citant cet exemple et quelques autres semblables , C se) l’auteur réserve au génie seul le privilége d'employer ces moyens toujours dangereux, et qui ne doivent jamais être tentés qu'après l'insuffisance bien cons- tatée des remèdes ordinaires. Le rapporteur de la commission a exprimé du regret de ce que l’auteur du mémoire n’avait pas considéré son sujet sous deux rapports bien dignes d’attention. Le premier est l'intensité qu’acquièrent les effets de la terreur , lorsqu'elle frappe à la fois un grand nombre d'individus. Quelle consternation , dit-il, et quel mal ne produit-elle pas dans les lieux où règnent des maladies pestilentielles ? n’est-ce pas avec la ter- reur seule que le conquérant met quelquefois en dé- route les armées les plus nombreuses , qu’il réduit les cités les plus populeuses, qu'il fait subir le joug à des nations entières ? c’est souvent avec cette arme puissante que les tyrans donnent des fers aux peuples subjugués. L’autre considération est relative aux effets moraux de la terreur, à cet avilissement humiliant auquel elle réduit l’homme, à cette perte de tout courage, de tout sentiment généreux et bienfaisant qui en est la suite ordinaire, à cet oubli des plus saints devoirs, à ces noires trahisons , à ces lâches délations , enfin à toutes les actions honteuses dont elle rend capable. Toutefois | quelqu’intérêt que puissent présenter ces points de vue , il faut avouer qu’ils ne pouvaient entrer que secondairement dans l'examen d'une question qui avait pour objet propre les effets de la terreur sur l’économie animale, . (359 Lil mar nn, Notice sur des matières renfermies dans le sol du Dé: partement du Calvados , qui sont propices pour des manufactures chimiques ; pat M. CHAMBERLAIN, Directeur de l’exploitation des mines à Honfleur, associé-correspondant de l’Académie. Quoique le petit écrit adressé sous ce titre à l’A- eadémie ait quelque rapport avec la IX£. question du programme, il n’a point été regardé comme pièce de concours , parce que son auteur s’est fait con- naître, et que d’ailleurs il n’a point traité formel- lement le sujet proposé. M. Chamberlain, muni d’un privilége du gouver< nement pour l'exploitation des pyrites et terres vitrio= liques , n’a pas cru inutile d'informer l’Académie de la découverte qu'il a faite le long des côtes du Cal- vados, d’une tourbière sulfureuse très-abondante et d’une exploitation facile. En vantant les propriétés de la tourbe qu'il en a tirée , il les déduit de ses principes constitutifs , et explique la formation de l'acide sulfurique qu’elle produit. Il s'étend sur les grands avantages qu'on peut tirer des sels en général dans l’agriculture , et indique un procédé simple pour les employer dans les ensemencemens. Il cite aussi un essai du souffre fait par M. Bréard, et dont le succès a surpassé ses espérances. En reconnaissant les G' 2 C36Y - bons effets du plâtre dans quelques ças, M. Cham- berlain ne dissimule pas l'opinion de ceux qui pré- tendent que les chevaux nourris avec des fourrages auxquels il a servi d'engrais, sont sujets à devenir poussifs et à perdre la vue. En considérant cet in- convénient par rapport au plâtre, et par rapport au souffre, celui d’une importation prodigieuse et d’une grande consommation de combustible , il conclut que Femploi de la tourbe qu’il a découverte serait beau- coup plus avantageuse, et plus économique dans les procédés qu’elle exige. Où il existe une manufacture de soude , il conviendrait , suivant notre corres- pondant , d'établir une fabrique de savon. Il termine sa notice par des considérations sur les résultats beau coup plus profitables qu’on obtiendrait dans la fa- brication de la soude de varec , au moyen d’une ma nipulation mieux entendue. Mémoire sur la cristallisation du basalte, par M, GEOFFROY , associé-correspondant. « La formation du basalte , a dit M. Trouvé ; dans un rapport sur ce mémoire, est une des ques- tions les plus importantes qui aient été agitées par les géologues. On range ceux qui s’en sont occupés en deux classes, suivant qu'ils attribuent son origine au feu ou à l’eau : de Hà les dénominations de Vo/cas (37) nistes et de Neptuniens qu’on leur a données. M. Geoffroy se range ouvertement du parti des premiers, parmi lesquels on compte Buffon , Dolomieu, Des- marets, Faujas et Haui. Bergmann et Valerius sont les chefs du parti opposé, » « M. Geoffioy , continue le rapporteur, après avoir parlé dans son mémoire du spectacle aussi im- posant qu'instructif qu’offre aux regards du géologue , la nature dont les entrailles ouvertes vomissent et jettent à des distances considérables ces produits que lon nomme volcaniques , observe que c’est à seu= lement qu’on peut prendre des idées justes sur la formation de ces matières , et paraît regretter de n'avoir pu jouir d’un pareil avantage. Il ne parle lui-même du basalte que d’après des échantillons recueillis dans l'Auvergne, et qui lui ont été remis par un naturaliste distingué, M. Ramond. » » Un examen attentif fait penser à M. Geoffroy que le basalte n’est point formé de molécules si- milaires, mais au contraire irrégulières et toutes dif- férentes. Comment expliquer , d’après cela, les prismes trièdes assez réguliers du basalte, qui semblent devoir être le résultat d’une vraie cristallisation ? c’est |à le probléme de géologie que M. Geoffroy se propose de résoudre, Suivant lui, ce serait grossièrement se méprendre de juger que les prismes de basalte se sont formés au milieu d’un fluide par une attraction mu- tuelle de molécules qui seraient attirées réciproque- C 3 (38) ment dans le sens de leurs faces. Si la nature, pour produire des corps réguliers, est souvent lente dans ses combinaisons, on la voit aussi les former comme d’un jet, lors même qu’elle semble observer les lois de la plus sévère géométrie. » L'auteur du mémoire entreprenant d’expliquer la cristallisation du basalte, avertit de ne pas perdre de vue qu’en sortant des volcans cette matière est d’abord fluide, et qu’en se répandant en nappe sur un plan à peu près horizontal , où elle se refroidit , elle consti- tue le basalte en table , dont on a vu, dit M. Faujas Sr. Fond, des pièces ayant jusqu’à 36 pieds de largeur. Quant au basalte en masse, objet prin- cipal de son attention, cette matière fluidifiée par le feu sonterrain lui paraît différer essentiellement de la lave, en ce que devenue solide elle est compacte et sans soufflure. Elle se précipite du sommet des volcans, et acquiert de la consistance par le refroi- dissement : les substances hétérogènes qu’elle avait saisies en s’échappant ont été rompues à la suite du retrait que ce refroidissement lui fait subir, Telle est l'opinion de M. Geoffroy , qu'il fonde sur le seul examen des échantillons de basalte qu'il possède. M. Trouvé après avoir cité ses raisonnemens , s'étonne qu'il n’ait pas envoyé au moins un ou deux de ces échantillons à l’appui d’un fait nouveau et inconnu aux géologues. Suivant le sentiment exposé par le rapporteur , la (39) formation des prismes de basalte, dont on voit un exemple si extraordinaire dans les nombreuses co- lonnes qui constituent dans le comté d’Antrim en Irlande ce groupe fameux connu sous le nom de chaussées des péans , ne peut être assimilée à ces belles cristallisations que présentent les entrailles de la terre. Une preuve frappante que les prismes basaltiques ne résultent pas des mêmes lois, ce sont ces différences bien prononcées entre ceux qui proviennent du même endroit. La mesure des angles n’est pas la même; le degré d’inclinaison des pans varie. Dès lors plus d’é- galité d'incidence des parties situées également : carac- tère qui distingue si éminemment les cristaux pier- reux et métalliques. Au reste, si la théorie de M. Geoffroy n’a pas présenté à la commission ce caractère entraînant de vérité qu’un esprit exact aime à voir dans tous les objets qui l’intéressent, elle ne l’a pas trouvée dépourvue de vraissmblance, et elle a pensé qu’on devait savoir gré à l’auteur d’avoir cherché à ajouter aux travaux de M. Desmarets, qui a émis avant lui la théorie du retrait. Malgré cet hommage rendu au zèle et aux connaissances géologiques de notre correspondant , le rapporteur a déclaré qu’ilétait encore difficile de fixer son opinion , et de prendre parti pour les yolcanists ou les neptuniens. Ne serait-il point plus sage, dit-il en finissant , ainsi que l’observe le savant Haui, d'attendre qu’une étude plus approfon- C4 ( 45) die des faits fasse jaillir un trait de lumière auquel personne ne puisse fermer les yeux ? Lente) Sur Les agates , par le même associé-correspondant. M. Geoffroy a aussi envoyé a l’Académie un mé- moire sur les agates, qui a été l’objet d’un rapport de M. Lamouroux. L'auteur s’estattaché, dit-il , à étudier divers échan- tillons d’agate qu’il possède , il les a comparés tant entre eux , qu'avec d’autres pierres qui présentent des caractères analogues. Cet examen attentif, qui lui a paru nécessaire pour acquérir quelques lumières sur la nature dés agates et les causes de certaines parti- cularités qu’elles présentent, l’a conduit à juger qu’elles sont composées, ou plutôt que leur matière propre ne sert guères que de ciment pour unir les diverses substances que l’on y découvre. Il cherche à expliquer quelques-uns des accidens qu'il a rémarqués dans cette espèce de pierre, et cite les opinions de divers naturalistes. Pour vérifier celle qui y reconnaît la cal- cédoine , la sardoine, la cornaline , l’opale, l’onix, ila eu, dit-il, recours à l'observation, qui lui a appris que beaucoup d’agates n’offrent aucun indice propre à faire soupçonner quelqu’une de ces substances. Quant aux taches et aux veines qu’on y remarque, ses explications précédentes lui paraissent en fendre suffisamment raison. (41) Suivant le rapoorteur, les observations dont M: Geoffroy donne le détail ne fournissent aucun résultat qui ne fût déjà connu des naturalistes , et il aurait pu s'étendre beaucoup d’avantage sur la composition et sur les innombrables variétés des agates sans rien dire qui ne soit contenu dans leurs ouvrages. Il n’en faut pas moins féliciter cet observateur aussi exact que zélé, quien découvrant par ses propres recherches des points de théorie déjà consignés dans les livres, montre par là même qu'il est sur la voie de nouvelles découvertes; et on doit l’engager à poursuivre un genre d'étude très-important , dans lequel 1l assurera ses succès en comparant le résultat de ses travaux avec la doctrine des maîtres les plus recomman- dables. Projet d'un appareil propre à faciliter le séjour des hommes au fond des eaux , par M. DELAVILLE, associé-correspondant. Ce qui distingue ce projet de beaucoup d’autres conçus dans les mêmes vues , c’est l'application des réservoirs d’air comprimé, tels que celui du fusil à vent. L'auteur donne la description dmbateau pour lequel il propose ce nouveau moyen de fournir plus ou moins long-temps à la respiration , sans commu nication avec l'air extérieur. Il a même joint à son (4) mémoire un plan qui facilite l'intelligence de son exposé. La capacité du bateau est divisée en une calle, qui en forme le fond, et un entrepont au= dessus, destiné au séjour de l'équipage. Ces deux compartimens sont hermétiquement fermés , et leplan- cher intermédiaire quiles partage , ainsi que le plan- cher inférieur de la calle, et le plancher supérieur de l'entrepont , ont chacun unseul trou , qui s'ouvre et se ferme à volonté par des soupapes. Il y a dans lentrepont un certain nombre de boîtes remplies d’air comprimé, qu’on en laisse échapper au besoin par le moyen d’un robinet. Faire descendre le bateau sous l'eau , le faire remonter , renouveller l’air lorsqu'il a cessé d’être suffisamment respirable : telles sont les trois opérations auxquelles M. Delaville prétend pourvoir par son mécanisme. Pour la premiere, il ouvre les soupapes des trois planchers. L’eau qui s’introduit par le trou du fond , chasse une partie de l'air de la calle dans l’entrepont , d’où il en sort une égale quantité par l’ouverture d’enhaut , jusqu’à ce que le surcroît de pesanteur submerge le bateau: alors il ferme toutes les soupapes. Veut-il remonter ? lais- sant la soupape d’enhaut fermée, il ouvre les deux autres, et lâche autant d'air comprimé qu’ii en faut pour forcer igau de la calle à sortir , jusqu’à ce que le bateau soit sufhisamment allégé. Enfin pour re- nouveler Pair , ouvrant ses trois soupapes, il fait entrer dans l'entrepont celui qui reste dans la calle; et (43) en cas d'insuffisance , 1l ferme seulement la soupape supérieure, puis laisse échapper de ses boîtes ce qu’il veut d'air comprimé. Une commission, dont M. Prudhomme a été rap- porteur , a reconnu tout le mérite de l’idée ingénieuse qui sert de base au projet de M. Delaville ; mais élle a regretté qu'il se füt borné à un exposé très- succinct de son mécanisme, sans entrer dans aucun développement , sans prévenir aucune des difficultés d'exécution , et sans appuyer d'aucun raisonnement ni d'aucun calcul les résultats qu’il suppose. IL n’a pas dit quelle forme et quelle dimension il donnerait à l'ouverture du plancher supérieur pour s’assurer que l'eau qui le couvrirait n’entrerait pas par une partie de cette ouverture, en même temps que l'air s’échap- perait par l’autre. Il n’a point parlé non plus des manœuvres qu'il pourrait être nécessaire d'exécuter à lextérieur. On ne peut qu’inviter l’auteur à examiner avec soin toutes les parties de son projet, et à ne pas abandonner les grands avantages que laisse au moins entrevoir un moyen très-précieux , soit qu'il lait conçu le premier , soit que d’autres, à son insu , laient déja employé pour produire des effets sem- blables à ceux qu’il se propose, L'Académie a reçu un nouveau manuel métrique et des sables de conversions des livres reurnois en (44) francs et des francs en livres , suivies des tarifs pour Ls anciennes monnoies d'or et d'argent, par M. PE- RIAUX de Rouen ; un discours prononcé par M. DESGENETTES à l'ouverture des écoles de médecine, et un article sur Les parotides dans les maladies aigues ; un glossaire de botanique de M. DE THÉIS ; un mémoire de M. MOLLET sur deux faits nouveaux , l'inflam- mation des matières combustibles et l'apparition d’une vive lumière obtenues par la seule compression de l'air ; un coup d'œil sur le réranos, par M. VALENTIN; un ouvrage de MM. CUVIER et BRONGUIARD sur la géognosie ou minéralogie géographique des environs de Paris, dont M. LAMOUROUX a présenté une analyse. SRE BR VE ES DT RE RE PET ASE SRE PERRET . SECONDE SECTION PARTIE LITTÉRAIRE. LU a To Ve a To ns Dissertation eur l'épigramme , par M. de BAUDRE: L: nom d’épigramme ne signifie qu’une inscription , ainsi que l’entendaient les Grecs, qui en avaient pris l’u- sage des Egyptiens. Les inscriptions , dit M. de Baudre, furent mises d’abord dans la prose la plus simple, et souvent même elles se réduisaient au monogramme, (45 ) On en faisait Sur toute sorte desujets; mais la langue Grecque avait le nom dépiraphe | pour distinguer celles qui étaient mises sur les tombeaux. Le sens général du mot épigramme a été restreint par un usage postérieur à désigner un petit poëme remarquable par une pensée piquante et maligne. C'est de cette épigramme, qu'il appelle satyrique ;, que M. de Baudre donne ici une sorte de poétique. Il n’en détermine pas l'étendue avec précision; mais il croit que les plus longues ne doivent pas excéder quinze ou seize vers. Dans la comparaison qu’il fait des épigrammes de Catulle et de celles de Martial, il remarque dans le premier de ces poëtes du naturel, de l’aménité , une finesse et une délicatesse continues , sans rien de saillant à la fin de la pièce ; dans l’autre au contraire, un trait piquant qui termine l’épigramme, et pour lequel tout le reste semble fait : ce qui donne l’idée de deux différentes espèces. L’épigramme admet des vers de toutes mesures : c’est surtout le sujet qui doit en déterminer le choix, selon qu'il est noble et sérieux, ou simple et badin. En faisant remarquer les divers caractères des épigrammes , qui plaisent chacune à leur manière , M. de Baudre a soin de citer des exemples qui expliquent et appuient ses distinctions, et dont quelques-uns sont de sa composition. À la suite de ses observations sur ceux de nos poëtes chez qui l’on trouve plus particulièrement des traits de cet esprit fin et épigrammatique qui car actérise surtout (46) les poëtes Français, et que Voltaire , Qui le possédait à un degré éminent , faisait entrer dans toutes ses compositions , il regrette que la licence et lobscé- nité gâtent presque toujours un genre de poésie qui amuserait sans nuire aux mœurs, et souvent même en les servant, s’il se renfermait dans les bornes d’une gaîté décente et d’une malice agréable, sans aigreur et sans méchanceté. Notices sur Segrais, par M. LAIR: M. Laïr plein de zèle pour la mémoire de tous les hommes qui ont contribué à la gloire de sa ville natale , a voulu entretenir ses collègues d’un écrivain qui a des droits particuliers à leur estime et même à leur reconnaissance , puisqu'il accueillit leurs pré- décesseurs dans sa maison avec une extrême bien- weïllance , lorsque la mort de M. de Matignon eut fait perdre à l’Académie des Belles-Lettres de cette Ville un zèlé protecteur. En rappellant une partie des faits consionés dans les auteurs de biographie , il y a ajouté quelques particularités moins connues. Jean Regnault de Segrais, né à Caen le 22 Août 1624, y mourut le 2$ Mars 1702. M. le Comte de Fresque , charmé de ses talens, l’emmena , encore fort jeune à Paris, où il entra chez Mademoiselle (47) de Montpensier en qualité de gentilhomme ordinaire de sa chambre. Mais malgré les agrémens de son esprit, et son succès dans les poésies légères et galantes, qui ctaient alors en vogue , sa franchise naturelle, peu convenable à la Cour, et surtout le courage qu’il eut de blâmer le mariage de la Princesse avec le Duc de Lauzun , le firent disgracier. Il ne profita que peu de temps de l'asile qu’il avait trouve chez Mademoiselle de la Fayette, et, dégoûté peut-être du grand monde , il se retira dans sa patrie , qui était alors le séjour des Bochard, des Halle, des Morin , des Huer et d’autres hommes distingués par leur mérite. Nommé Echevin de Caen, il posa eri cette qualité la première pierre de l'Église des Jésuites, chez lesquels il avait fait ses études. Madame de Fontevrauls et Madame de Maintenon V’en- gagèrent vainement à revenir à la cour , où elles voulaient le placer auprès du jeune Duc du Maine: il opposa son âge déjà avancé et un commencement de surdité. Madame de Fonteyvrault eut beau lui représenter qu'il ne s’agissait pas d'écouter le Prince, mais de lui parler ; il savait par expérience, disait-il, que dans un pays comme celui-là , il fallait de bons yeux et de bonnes oreilles. Il passa le reste de sa vie entre les soins de l'administration et la culture des let- tres. Sa maison était le rendez-vous de toutes les per- sonnes de distinction et de mérite. Ona peine à con- cevoir qu’une vive discussion avec Huet sur un pas- (48) sage des géorgiques de Virgile ait été capable de di= viser pour toujours deux hommes aussi recomman- dables. M. Lair, en citant les productions qui ont fondé la réputation littéraire de Segrais , loue avec une justice impartiale et sans aucune exagération le goût qui s’y trouve, bien plus que la grâce et la correction, et il avoue même que Boileau lui paraît avoir traité ce poëte avec trop d'indulgence dans son art poétique. La traduction des égloques de Virgile, à laquelle s’applique le jugement de ce critique , Or- dinairement si sévère, est quoi qu’on en ait dit, fort au-dessous de l'original. Segraistraduisit aussi les géor= giques et l’énéide du même poëte. Il avait débuté de très-bonne heure dans la carrière poétique par une tragédie sur la mort d’Hippolite et par divers morceaux qui annonçaient du talent, Son poëme pastoral d’Arhis , composé en l’honneur de son pays offre une invention piquante , des fictions agréables , quelquefois la belle simplicité des anciens ; mais l'au= teur a placé le théâtre des aventures qu’il décrit dans des lieux trop obscurs et trop peu connus pour in- téresser beaucoup de lecteurs. M. Lair n’a point négligé dans sa notice quelques- uns de ces traits ordinairement si propres à faire bien connaître les hommes. Ce que M. de Matignon disait de Segrais, qu’il n’y avait qu’à le montrer et le laisser aller ensuite, donne une idée de l’abondance et de la (49) la facilité de sa conversation , qui ne finissait pas. aisément , quand elle était commencée , mais qui charmait toujours par sa grâce et par les anecdotes qu’il y faisait entrer à propos. Mademoiselle de Mont- pensier faisait allusion à cet accent natal qu'il avait toujours conservé , lorsqu'elle disait à un gentilhomme qui allait faire avec lui le voyage de Normandie, qu'il avait là un fort bon guide , qui savait parfaite- ment la langue du pays. Segrais, marié fort tard , est mort sans postérité, et sa famille est éteinte. | Mémoire de M. BISSON , associé-correspondant , sur cette question proposée dans un programme de l’Académie : quels changemens la mer a-t-elle opéres sur le littoral des Départemens du Calvados er de la Manche ? L'auteur de ce mémoire , auquel il a été décerné une médaille d'encouragement , a pris pour épigraphe ces paroles de Jérémie , posui arenam terminum mari. Intumescent fluctus ejus et non transibunt. Il com- mence par déterminer le mode d’examen qui peut seul convenir à l’homme , quand il s’agit des ouvrages du créateur , et dont le but n’est point de remonter à une origine impénétrable, mais seulement d’obser- D (50) ver des effets sensibles et d'en considérer les causes prochaines. En parcourant successivement tous Îles points remarquables d’un développement de côtes de plus de cent lieues, depuis Honfleur, où com- mence le Département du Calvados , jusqu’à Pontor- son, où finit celui de la Manche, il fait sur chacun les observations qui ont le plus de rapport à la ques- tion, ou du moins au point de vue sous lequel il l’a envisagée. En citant dans le littoral du Calvados, Honfleur, Touques, Dives, Bernières , Courseule y ‘Aromanche , le rocher du Calvados, Port en Bessin, iVierville, Grand camp et Isigny , il fait connaître avec exactitude l’état actuel de ces lieux , il donne les étymologies de la plupart de leurs noms, et s’aide souvent des conjectures qu’elles fournissent pour ap- puyer son opinion sur leur ancien état. Sa conclu- sion générale , qui n’est que le résumé de celles qu'il a tirées de ses examens particuliers , est que la mer n’a opéré sur cette partie de la côte que des chan- gemens fort peu considérables , et dont l'effet a plutôt été d'augmenter que de diminuer le territoire. Si quelques endroits sont devenus moins impertans qu'ils n’ont été autrefois, M. Bisson en trouve souvent la raison dans les atterrissemens formés par les dépôts que charient les rivières, ou dans la grandeur actuelle des vaisseaux , qui ne leur permet plus de remonter des cours d’eau suffisans pour les anciens navires. Comme le sentiment de l’auteur sur la situation à _— (51) peu près invariable de notre littoral contredit quelques opiniens plus ou moins accréditées , il est conduit à réfuter plusieurs raisonnemens qu'on pourrait lui op- poser. Par exemple il ne voit aucun fondement à la supposition que la vallée d’Auge ait été autre- fois une baie , comme plusieurs l’ont conjecturé. Loin qu’on trouve quelque trace ou quelque mention de ce changement, les anciennes chroniques et les * chartres appelent la vallée d’Auge Salrus Algiæ, ce qui désigne une forêt, et non une baie, « Il y avait autrefois , dit M. Bisson, un petit havre à Bernières, formé par un bras de la Seule , qui se divisait tout près de son embouchure ; mais un traitant qui avait mis en parti le commerce des huîtres, le détruisit, en bouchant ce bras. Cepen- dant en 1735, un ouragan qui dura deux jours, les 9 et 10 Janvier, poussa la mer avec tant de force et en si grande abondance dans les terres, que les eaux se rassemblant dans le canal bouché, rouvrirent en s ’écoulant le havre de Bernières. Au reste , comme leur couts ne s’est point entretenu , le ob se re- ferma bientôt, et dura si peu de temps, qu’on s’en souvient à peine dans le lieu même. Au surplus , ajoute-t-il, c’est ici un changement léger , et de trop peu de conséquence pour entrer en considération dans un aperçu général. » L'auteur du mémoire reconnaît qu’au de là, dans une anse médiocrement enfoncée, la mer tait quelques (52) progrès , en minant par le pied et en faisant ébou- ler de temps en temps une certaine quantité d’une pierre tendre et peu compacte , qui tombée dans l'eau s’y durcit très-promptement ; mais :l est per- suadé qu’on a prodigieusement exagéré ces empiéte= mens, et que les calculs qu’on a faits B-dessus ne sont fondés sur aucune donnée précise. Quant au rocher du Calvados, qu’on a prétendu avoir été il y a quelques siècles contigu à la côte, dont il est maintenant éloigné d’environ une lieue, et avoir été le siége d’un bourg appelé comme lui Calvados , ceux qui lont visité pendant les grandes marées, où il se découvre, n’ont pu y trouver aucun indice d’habitation. On a vanté des actes passés de- vant les tabellions de ce lieu, et conservés dans les chartriers de quelques seigneurs voisins ; mais on n’a jamais cité ces chartriers, ni indiqué aucun moyen de trouver ces actes. Dailleurs le laps de temps néces- saire pour opérer une pareille séparation , selon le calcul même de ceux qui l’'admettent , est tel, qu'il a’existe point de titres d’une si haute antiquité. Le nom de Calvados , qui ne paraît pouvoir appartenir qu’à la langue Espagnole , est probablement dû au naufrage de quelque navigateur de cette nation. La dénomi- nation de fosse d Espagne , donnée au mouillage qui se trouve entre la terre et le rocher , confirme cette conjecture ; et la dispersion de la flotte considérable que Philippe IT, Roi d’Espagne, avait dans la Manche (53) en 1588, et dont une partie poussée sur nos côtes par une violente tempête, y fut détruite , est en- core un fait authentique qui vient à l’appui de la même supposition. Le résultat des observations que M. Bisson pré- sente sur les différens points du littoral du Dépar- tement de la Manche, lui parait également favo- rable à lopinion qu'il veut établir. La petite baie que forment les Jeys s'éleve successivement, et le terrain de Brevant , qui s’avance au milieu, s’ac- croit de jour en jour par les laisses de la mer, que les secours de Part peuvent rendre très-impor-! tantes, Carentan , déja enfoncé dans les terres , est cité par les anciens géographes comme port de mer. Les îles Sainr-Marcou et la pointe de la Æoupue n’offrent les indices d’aucun changement notable. Quoique tous ces endroits soient bien exposés à la fureur des flots, rien n’annonce qu’ils aient éprouvé de grandes pertes, et leurs noms celtiques, qui désignent leur ancienne position , conviennent toujours à leur posi- tion actuelle. De là jusqu'à Barffeur , une côte de granite paraît plutôt défier la mer que la craindre. Un banc formé à l’entrée du port de cette ville en rend l'entrée difficile , et empêche que son petit commerce de pêche et de cabotage ne devienne intéressant. Il n’y a aucun changement naturel à observer à Cher- bourg, qui doit son importance à sa position, et sur tout aux travaux prodigieux qui y ont été exécutés. D 4 (54) On n’en remarque point non plus , au moins de con- sidérables, ni au cap de la Hague, ni sur la côte occidentale , quelque exposée qu'elle soit au vent de l’ouest et du sud-ouest. Il est vrai que des auteurs prétendent que la petite île d’Aurigny , à l’ouest du Raz Blanchard , s’est appelée autrefois Æ/dernay , ou Ardennay , qui signifie foréts, et qu’elle tenait à la Hague, dont le nom a la même signification ; mais si la séparation de cette île était réellement due à la mer , 1l faudrait la regarder comme très-ancienne , et l'imputer à une cause qui cesse d’agir. M. Bisson ne dissimule pas les autorités qu’on peut lui opposer, mais 1l les réfute. Telle est l’asser- tion de M. l’Abbe Belley, qui dans un mémoire de PAcadémie des inscriptions et Belles-Lettres, sou- tient qu'il a existé près de Carterey un port qu'il nomme Ælauna , et qu’il suppose comblé par le volage de la mer ; tandis que l’ancienne Alone, dont les vestiges ont été découverts en 169$ par M. Fou- cault , intendant de Caen , était située sur une hauteur voisine de la Ville actuelle de Valogne. Suivant une vieille tradition , la vaste Baie de Saint-Michel n'aurait été jadis qu’une forêt qui s’a- vançait bien loin dans le Cotentin, et qui même unissait au Continent toutes les îles actuelles, qui en étaient seulement séparées par une rivière qu’on pou- vait passer sur une planche, L'auteur du mémoire ©ppose l’aroument général tiré de ce que de pareils (55 ) changemens ne s’opèrent plus depuis qu’on écrit des histoires authentiques, et en outre deux faits bien constans, l’un qu’à la fin du septième siècle, Saint Aubert, Evêque d’Avranches , se retirait de temps en temps sur le mont Saint-Michel, qui était comme aujourd’hui zx periculo maris ; l'autre, que dans le sixième siècle, Saint Marcoul était obligé de s’embar- quer pour aller dans l’île de Gerzey visiter son dis- ciple Saint Hélier. 11 répond aussi à l'objection que fournissent les troncs d'arbres ensablés qu’on trouve en assez grande quantité sur les bords de la mer. Comme on en trouve aussi dans des terrains qui en sont éloignés , il ne voit là que les effets de la grande ca- tastrophe qui a bouleversé la terre, ou de quelques débordemens violens des rivières. Au reste , on voit dans tout le cours du mémoire que son auteur a traité la question proposée, comme s'il eût supposé qu'il y a quelque témérité dans les recherches de ce genre, et que. les changemens suc- cessifs dont il s'agissait de vérifier l'existence, pour- raient paraître moins conformes , soit à la bonté, soit à la sagesse du créateur, que des révolutions bien plus considérables , dont il reconnaît les preuves dans les grands amas de coquillages et de pétrifica tions marines qui se trouvent au milieu des terres. Mais l’Académie, en proposant ce sujet, a été fort éloignée d'y rien apercevoir qui pût altérer l'idée d’une providence toujours adorable et incompréhen- D 4 ( 6} sible, soit dans la permanence invariable des êtres créés, soit dans des successions d’état lentes ou ra- pides , qui sembleraient même devoir ajouter à l’ad- miration , en montrant d’une manière plus sensible l'action perpétuelle de la puissance suprème. La commission chargée de l’examen de ce mémoire ; en y reconnaissant un mérite d’exactitude et d’éru- dition que l’Académie a jugé digne d’une distinction honorable, n’y a point trouvé la solution précise du problême proposé, et a témoigné le désir que Pauteur complétät son ouvrage. L’objet de la ques- tion n’était pas la statistique actuelle de la côte, ni même des imductions purement conjecturales sur son état ancien. Il s’agissait de discuter un certain nombre de faits particuliers, à l’aide des preuves physiques que les observations géologiques peuvent fournir , ou des monumens historiques qui sont relatifs à ces faits, ES Eat td | f ° L Le partage des biens communaux a-t-il été avanta- « geux , ou non, à l'agriculture dans les Départe- mens de la ci-devant Normandie à Il a été adressé deux mémoires à l’Académie sur cette question. Le premier, portant cette épigraphe, tirée de Voltaire, rien n'est plus périlleux que de si ei ins af te use (#71) quitter le bien pour étre mieux, defend le parti de la négative, et prouve les inconvéniens du partage dont il s’agit par un certain nombre de faits détermi- nés avec assez de précision. Mais quoique ce mémoire ait paru bien écrit et bien raisonné suivant l’opinion de l’auteur, on n’a point trouvé qu'il eût traité la question dans sa généralité et sous son vrai point de vue. Les observations partielles et les faits très-cir- conscrits qu'il renferme, prouvent bien que dans quelques localités , et surtout à l'égard de certains individus , le défrichement a été préjudiciable, ce qui ne pouvait guères être matière de doute; mais ils ne donnent pas les moyens de décider si, en somme, il est résulté de cette mesure des avantages, non pré- cisément pour les particuliers qu’elle concerne, mais en général pour l’agriculture de nos Départemens. Le second mémoire, qui a pour épigraphe , 6 fortunatos nimidm , sua si bona nôrint, agricolas ! Virg. Georg. Il, offre au contraire des considéra- tions générales qui conduisent l’auteur à défendre la cause du partage des communaux. On a reconnu dans ce travail de grandes vues et des aperçus tiés- judicieux ; mais les raisonnemens n’y sont point ap- puyés par des faits positifs , et quelques éloges que mérite la théorie de l’auteur, elle a plutôt paru offrir des conjectures probables sur un essai qu’il s'agirait de tenter, que les résultats formels d’une expérience (53) réellement faite, qui étaient le véritable point du probléme à résoudre. Dans les envois de ses associés-correspondans ; l’Académie a remarqué des mémoires biographiques de M. Le Carpentier , professeur de l’Académie de dessin et de peinture de Rouen , qui continue de travailler avec une persévérance bien digne d’éloges au monument qu’il a entrepris d'élever à la gloire des artistes les plus distingués, sous le titre de Gazerie des peintres célèbres. I] a envoyé cette année, outre une Norice nécrologique sur feu M. Masquelier , gra- veur & Paris, mort le 26 Mai 1811, trois autres notices , la 127€, sur Claude Gelée, dit le Lorrain ; la 2€. sur Marie Van-Ostermich ; la 3°. sur Michel= Ange Amerigi, dir le Caravage. M. Guilbert, aussi de Rouen, a publié le pros- pectus d’un Mécrologe , ou mémoires biographiques et littéraires par ordre alphabétique , sur les hommes qui se sont fait remarquer dans le Département de la Seine-Inférieure , par leurs écrits , leurs actions , leurs talens , leurs vertus etc. M. le Tertre, licencié en droit, a composé un Précis historique sur l'origine et les changemens du droit romain , et sur son introduction en France. 11 a été lu dans les séances Académiques un grand (59) nombre de compositions poétiques , et d’autres y ont été seulement annoncées. On y a entendu entre autres, une traduction de la XIE, satyre de Juvénal, et un morceau de poésie légère, par M. MÉCHIN ; une pièce de vers de M. le PRÊTRE, intitulée, Le dévouement héroïque de Léopold, Duc de Brunsvwik, deux romances , La jouissance maternelle , et La jouis- sance paternelle ; une ballade prise du Vicaire de Wake- field de Goldsmith; troisfables, L'aigle er les oisons, L’oi- seau reconnaissant , L’orageet le zéphyr, et deuxcontes, La liberté de la presse et Le Gascon démonté , du même membre; une traduction en versde la 3€. satyre de Per- se, de M. de BAUDRE, ainsique six contes, intitulés, Le petit Vicaire, Le Médecin malade , Les Revenans , Le jugement de Sancho, Le droit du Seigneur, Le perir Panier d'œufs-frais ; un apologue et un conte de M. BRÉMONTIER , ayant pour titre, l’un Le mer/- leur des impôts , autre Les convenancese M. ARNAULT, associé-correspondant, a fait pré- senter à l’Académie une scène d’une tragédie iné» dite , précédemment lue à la classe de la langue et de la littérature française de l'institut, quelques cantates composées pour des fêtes publiques, et un discours prononcé aux funérailles de M. Chénier. M.BAILLY , aussi associé-correspondant ,aenvoyé deux fables inédites, intitulées , l’une Les deux Cirons, l’autre L'ami du Jour ; M. P.-A VIEILLARD, une (60) cantate intitulée Le retour d’Astrée, M. VIGÉE , une Épitre en vers & Jean-François Ducis , sur Les avan- tages de la médiocrité , avec cette épigraphe, Auream guisquis mediocritatem... Hor. Od. 10 lib, Il; Parmi les autres ouvrages présentés à l’Académie ; Je citerai une Norice de M. LAIR sur la troisième expo- sition publique des productions des arts du Dépar- cement du Calvados ; une Notice sur la vie de M M.- A. Petit, de Lyon, par M. le Baron DESGENETTES; des Mémoires Académiques, par M. de SAINT-AMANS, de l'Académie d'Agen ; un rapport de M. François de NEUFCHATEAU, intitulé Coup d'œil sur lin= fluence que la socièté d'agriculture du Département de la Seine a exercée sur l'amélioration de l'agriculture x plusieurs productions poétiques de M. Malingre, dont une intitulée ? Anglererreen miniature , ou précis des révolutions Anglaises jusqu'a nos jours , en vers, avec des notes historiques. L'académie doit à la correspondance qu’elle entre- tient avec plusieurs sociétés savantes , outre des pro- grammes de prix de l’Académie de Mâcon, de celle de Marseille , de celle des jeux floraux de Toulouse, avec une notice de la séance publique de cette der- nière du 13 Janvier, et un précis de celle du 3 Mai et un recueil de pièces, un précis analytique des travaux de l Académie des Sciences , Belles-Lertres et Arts de Rouen , pendant l'année 1810. D Rd Sn DA LED) EC Sur les travaux de l’année 1812. PREMIÈRE SECTION. PARTIE SCIENTIFIQUE. (OBSERVATIONS sur Les météores et les maladies , par M. GODEFROY. M. GODEFROY a présenté deux tableaux des observations qu’il a faites sur les météores et les ma- ladies , l’un pour le mois de Janvier 1812 , l’autre pour le dernier trimestre de 1811, Le premier de ces ta- bleaux est divisé en deux parties, et porte en tête la définition de ce qu’onappelle l’année médicale , d'après le dictionnaire encyclopédique. La partie supérieure, qui a pour objet les météores, comprend cinq co- lonnes , dont la première marque 1° le jour du mois où a été observée la plus grande élévation du baro- mètre, le matin , à midi, et le soir; 2°. le jour où a été observée la moindre; 3°. l'élévation moyenne entre ces deux extrêmes. La seconde colonne présente des observations pareilles sur l’élévation du thermo- (&) mètre, et la troisième sur celle de l’hygromètre. La : quatrième indique le nombre de fois qu’a soufflé le vent de chacun des points de l’horison rapportés aux huit principaux, et au-dessous, le nombre des jours où l'on a éprouvé chacune des différentes températures. La cinquième est un résumé de la quatrième , et donne les vents dominans et la température la plus fréquente pendant le mois. La seconde partie du tableau présente les maladies observées pendant le même mois, et classées selon la méthode du docteur Pinel. Au centre de cette divi- sion se trouvent les affections prédominantes , qui établissent la constitution parhosique , laquelle réunie avec la constitution zzéthéorique par une accolade, compose le mois médical, d’après la définition don- née pour l’année médicale. Dans une colonne d’ob- servations se trouve ce qu’il y a eu de plus marquant dans l'atmosphère , et ce que les maladies ont-pré- senté de particulier relativement aux complications et au traitement. On y voit aussi quels médicamens ont eu le plus de succès, non seulement pour les af- fections primitives | mais encore -pour les complica- tions. Le rabl:au synoptique des observations faites pen- dant le dernier trimestre de 1811, est dressé dans la même forme. Les indications relatives à chacun des trois mois d'Octobre, Novembre et Décembre sont résumées pour former le trimestre médical. (63) M. Godefroy a fait remarquer que pour expri- - mer l’état des météores et des maladies, il s’était servi des mots méréorique et pathosique | au lieu de mé- téorolegique et pathologique , parce qu’une consti- tution n'était point un traité, mais seulement un résultat de faits observés. Il a justifié aussi l'emploi du terme décompliquer , qui lui a paru le seul propre à rendre avec précision l'effet qu’on produit sur une maladie en détruisant les accidens qui la compliquent, et en la réduisant à un état simple. Comme on dis- tingue les maladies compliquées des maladies com- posées , il lui a semblé que le mot décomposer ne pouvait pas se dire pour les unes et pour les autres, parce que ce qui décompose ne décomplique pas. M. DE ROUSSEL a présenté à l’Académie un Précis des moyens Les plus importans aux progrès de l'hygrométrie. I a été conduit à adopter les opinions exposées dans son mémoire , surtout par rapport à l'évaporation spontanée de l’eau , par une suite d’ob- servations et d'expériences qu'il a décrites avec soin, et dont il a exprimé les résultats avec précision. Mais il a pensé que des faits de cette nature , pour opérer une pleine conviction dans l'esprit de ceux à qui ils sont transmis , ont besoin d’être examinés par plu- sieurs observateurs , pour qu’il ne reste aucune crainte d'erreur ou d’illusion. C’est pourquoi il a été nom- mé, sur sa demande, une commission chargée d’as- sister aux expériences qu’il doit recommencer , et d’en rendre compte. (64) Exposition des effets météorologiques de l'air par M. PRUDHOMME. Ce Mémoire n’a été composé par M. Prudhomme que pour servir en quelque sorte d'introduction à un travail beaucoup plus étendu ; et commencé depuis long-temps , sur /a cause des vents. Il a pensé qu’une courte théorie sur l’ascension de l’eau dans Patmosphère, et sa précipitation sous la forme de brouillards, de pluies, de grêle, etc. , pourrait être très-utile pour l'intelligence des phénomènes dont il avait principalement en vue l’explication , et avec les- quels ceux-là sont étroitement liés. En convenant que les physiciens se sont occupés depuis long-temps de rassembler les différens phéno- mènes météorologiques, et en ont fait un corps de doctrine , notre confrère croit qu’ils ont avancé quel- ques principes dont la vérité n’est point suffisamment démontrée , et qu’ils en ont oublié d’autres pro- pres à jeter du jour sur la matière. Il excepte ce- pendant M. Ze Roy , médecin de Montpellier , sur les découvertes et les expériences duquel il base la théorie qu’il présente, et qui n’est qu’un développe- ment de quatre principes reconnus par ce savant , et résumés sous forme d’axiomes à la fin du mémoire. Suivant (6) Suivant le premier de ces principes ; l'air est un dissolvant de l’eau, c’est-à-dire que les couches in- férieures de ce fluide pressées par la masse atmosphé- rique sur les pièces d’eau ou les lieux humides , sol- licitent les molécules aqueuses à se combiner avec elles, ce qui suppose que ces molécules ont moins d’affinité entre elles qu'avec le fluide aérien. M. Prudhomme assimile cette combinaison de l’eau avec l'air, que l’on connaît sous le nom d’évaporation, aux solutions ordinaires, telle que celle du.sel dans l’eau , et il lui donne pour caractère de ne point altérer la transparence de l'air | qui reste toujours la même, jusqu’à ce que la combinaison soit troublée , c’est-à- dire , qu'il y ait précipitation et condensation des molécules. Cette vertu dissolvante que l'air exerce sur l’eau n’est point illimitée. Il vient un instant où. il en est saturé au point de n’en pouvoir plus dis- soudre ; et l’on conçoit que l’évaporation, à laquelle est dû le desséchement quelquefois si prompt des sur- faces humides ne produrait que des effets à peine sensibles , si la couche d’air en contact avec l’eau restait dans le même état et dans la même situation. Il faut donc , ou que les molécules aqueuses com- binées d’abord avec cette couche inférieure , passent dans les supérieures , pour être remplacées par de nouvelles, ou que le mouvement du fluide atmosphé- rique fasse varier sans cesse la partie de ce fluide qui presse sur l’eau. L'auteur du mémoire donne l’une et E (66) l'autre explication. De plus cette même vertu disi solvante n’est point uniforme et invariable. Elle dépend de la température, non pour son existence absolue ( car elle a lieu sous toutes les températures, et sur la glace et la neige , comme sur l’eau ) mais quant à son degré ; ensorte qu’un air chaud dissout plus d’eau avant d’en être saturé, qu’un air froid, et que par conséquent, si un air entièrement saturé à une température basse , vient à être échauffé par une cause quelconque , il devient capable de dissoudre de nouvelle eau; de même que celui qui est saturé à une température élevée , s’il vient à se refroidir, se trouve supersaturé et forcé d'abandonner une partie de l’eau qu’il tient en dissolution : et c’est surtout à ce der- nier effet que sont dus beaucoup de phénomènes mé- téorologiques, dont M. Prudhomme expose les prin- cipaux. Telles sont les vapeurs qui s'élèvent sur les rivières , qui sortent des caves, ou qui se mêlent à l’haleine des animaux, et qui paraissent comme une fumée, en passant dans un air froid. Telles sont ces rosées et ces brumes , où l’on ne doit voir que le produit d’un air supersaturé, qui s’est refroidi par l'éloignement du soleil. Telles sont les pluies , dont les gouttes se forment par le rapprochement des molécules précipitées , dû à un mouvement plus ou moins violent de l'air et se grossissent en s’unissant à d’autres dans leur chute : ce qui fait qu’elles sont plus grosses quand elles tombent de nuages plus élevés, comme il arrive (67) erdinairement en été, que quand les nuages sont bas ; excepté toutefois dans le cas d'orage, où l’explosion électrique doit agiter fortement le nuage, et favo- riser le rapprochement des molécules par cette agita- tion même, et peut-être aussi en les dépouillant de leur électricité, qui les faisait se repousser mutuelle ment. Telles sont encore les différentes qualités que nous attribuons aux vents qui soufflent du sud et du sud-ouest, et à ceux qui viennent du nord, du nord- est , et même de l’est, dont les premiers saturés d’eau, en abandonnent une partie en traversant nos contrées plus froides , tandis que les derniers ont la propriété d'en dissoudre, et d'amener par conséquent de la sécheresse. La même cause explique aussi ces vapeurs dont se couvre une bouteille qui contient de l’eau rafraichie avec la glace, et en général tout vase placé dans un air plus chaud qu'il n’est lui-même. L'air mis en contact avec ses parois extérieurs perd en s’y refroidissant une partie de sa force dissolvante, et y dépose des molécules d’eau qui s’y condensent. I en est de même de ces gouttelettes que l'on voit le matin sur les vitres, en dedans des appartemens, lorsque c’est l’air du dehors qui est le plus froid ; et en dehors, lorsque c’est celui du dedans. Dans ces deux cas, ainsi que dans le précédent, les vapeurs dé- posées sur une des surfaces du verre pourront même se congeler , si l’autre surface est exposée à une tem- pérature assez basse, Ex (68) Le degré de la force dissolvante de l'air n’a point pour unique cause sa température ; il dépend encore de sa condensation ou de sa raréfaction , et c’est lors- qu'il est le plus comprimé qu'il peut dissoudre le plus d'eau pour arriver au point de saturation. C’est le second principe établi dans le mémoire , et confirmé pas deux expériences inverses l’une de l’autre. La première consiste à soutirer graduellement de l'air comprimé sous le récipient d’une machine pneuma- tique et saturé d’eau. À mesure que sa densité di- minue, on voit sa transparence se troubler , et la précipitation de l’eau devenir sensible, d’abord par une espèce de brouillard , et ensuite par des gouttelettes qui coulent le long des parois. La seconde consiste à in- troduire de l'air sous un récipient où l’on a fait le vide. Le même phénomène se remarque tant que l'air introduit est en assez petite quantité pour être extrêmement dilaté et perdre ainsi de son pouvoir dis- solvant : l’effet diminue comme sa raréfaction, et cesse quand il a repris sa densité. Les observations barométriques confirment ce principe , dans lequel elles trouvent leur explication. En effet, lorsqu’après plusieurs beaux jours, la colonne de Mercure ren- fermée dans un tube où l’on a fait le vide, vient à baisser, c’est parce que Pair qui pèse sur la surface quiest à découvert , est moins dense, puisqu'il exerce une moindre pression : il ne doit donc plus être ca- pable de retenir toute l’eau qu’il avait dissoute, et il ( 69 ) faut qu'il en abandonne. une partie , sous la forme de nuages, de brouillards , ou de brume. Au contraire , si après plusieurs jours pluvieux, la co- lonne de Mercure s'élève, elle indique que les couches inférieures de l'atmosphère deviennent plus compri- mées , et acquièrent conséquemment une plus grande vertu dissolvante qui doit procurer de la séche- resse, Ces deux premiers principes concourent l’un et l’autre à rendre raison des vapeurs continuelles qui se déposent sur les montagnes. Les couches inférieures de l'atmosphère poussées contre ces grandes masses sont obligées de refluer en haut, où elles éprouvent à la fois, et une moindre compression , par la dimi- nution de hauteur des colonnes aériennes , et un abaissement de température , qui est toujours propor- tionnel à l'élévation, double raison pour qu’elles se trouvent supersaturées d’eau , et forcées d’en aban- donner. Cette eau précipitée sous forme de rosée , s’infiltrant dans les fentes et les’ cavités, devient l’a- ment des sources , conjointement avec les nuages que les vents poussent contre les hauts sommets, et qui se résolvent en pluie par l’effet de ce choc, ou restent accumulés autour des montagnes par la force attractive qu'elles exercent sur tous les corps environnans. Les deux derniers principes qui peuvent, selon M. Prudhomme, compléter l'explication de tous les E 3 (70 ) météores aqueux , et qu’il se contente d'exposer , Ont que la température de l’air hausse ou baisse , selon qu'il précipite de l'eau, ou qu'il en dissout ; et que plus l'air tiént d’eau en dissolution , moins il a de pesanteur spécifique , quoique chaque colonne exerce plus de pression à cause de la plus grande hauteur qu’elle a acquise. Notre collègue termine son mémoire par la solution d’une difficulté tirée de ce qu’à une certaine hauteur la transparence de l'atmosphère n’est jamais troublée par des nuages, ce qui semble contredire la vertu dissolvante attribuée à l’air. Il répond que la quantité d’eau que l'air peut dissoudre diminuant , et dans un rapport assez rapide , à mesure que l'élévation augmente, il est un point où elle est très-peu con- sidérable, et qu’à cette hauteur, où l'on n’observe plus ni nuages , ni végétation , le froid constam- ment excessif n’est point , non plus que la densite ; susceptible de variations qui puissent déterminer une précipitation sensible. Notice sur Les jardins de M. Dumont de Courser, sioués aux environs de Boulogne Sur mer, Par M. LAIR. M. Lair a présenté cette description comme extraite de son voyage de Paris & Calais, fait en Octobre (7x) et Novembre 1811. Un homme qui comme M. Du- mont de Courset consacre son temps et une partie de sa fortune à étendre et perfectionner la culture des plantes , mérite bien que ceux qui ont pu admirer de près ses travaux , répètent partout son nom , et le proposent à l'estime de tous les amis des sciences et de la prospérité commune, C'est de Boulogne que M. Lair alla visiter les jar« dins de Courset, en passant, à quatre lieues de là, par Desvres autrefois Desurènes, dont la singularité la plus remarquable est d’avoir dans M. Dezoteux, comme Paris dans M. le François , un cordonnier auteur d’un recueil de poésies. Cette petite Ville, où l'on fabrique de grosses étoffes de laine , est située au pied d’une côte , qui fait partie de la chaine circu- laire de montagnes interposée entre le haut et le bas Bourbonnais , et dont le sommet offre la vue la plus intéressante. Le parc de Courset, à deux lieues de Desvres, commence sur le revers de la montagne, et se prolonge jusqu’au fond d’un vallon où est à mi-côte le château , dont il est séparé par une prairie. En parcourant avec notre voyageur, conduit par le maître lui même , tous les principaux détails de ‘ce beau domaine, on ne sait qu’admirer davantage de la multitude de plantes , soit indigènes , soit étrangères, qu’il renferme, ou de la rare intelligence qui a présidé à leur distribution , et qui offre à la fois, E 4 (72) au savant un ordre systématique ; assujetti à la mé- thode de Jussieu , à l'amateur et à l'artiste, les com- binaisons les plus variées et les aspects les plus agréa- bles. Une large allée qui traverse tout le parc, sé- pare les jardins potagers et deux grands vergers, qui se trouvent à droite en sortant du château , des jar- dins de botanique, qui sont à gauche. M. Lair s’ar- réta peu aux premiers, ainsi qu’au parc, dans lequel il aperçut des prés et des terresen labour , une pépinière considérable , un plant de quatre à cinq cents arbres résineux , un quinconce de cent mélèzes , et enfin un bois de haute futaie, qui sert d’abri contre les vents du nord et de l’ouest. Les jardins de botanique sont exposés au midi, et beaucoup plus étendus en longueur qu’en largeur. Outre les bois du parc, des allées de tilleuls , d'ormes et de chênes très-élevés , et en quelques endroits des palissades en épine et en charmille , garantissent les plantes en raison de leur délicatesse , soit des grands froids, soit des chaleurs excessives. Ces jardins sont en même temps consacrés à des essais de culture, à la multiplication des arbres fruitiers et forestiers , même à la propagation des végétaux de simple agré- ment, M. de Courset s’est particulièrement occupé d’acclimater les plantes exotiques, et il est parvenu, À force de soin, et en tirant tout le parti possible de la disposition de son terrain en pente , à en na- turaliser plusieurs, Ici des allées droites sont bordées de (73) différens genres classés par ordre, et dont chacun réunit ses espèces; la les individus de la même fa- mille, confondant leurs feuilles et leurs fleurs, pro- duisent par ce mélange les tableaux les plus pitto- resques. Pour rendre l’esquisse déja très-succincte que notre confrère nous a présentée de cette riche col- lection, il faudrait à peu près copier son mémoire. Je me bornerai à indiquer quelques-uns des objets les plus frappans : par exemple, un bosquet toujours vert de rhododendrons , de kalmies, d’alaternes, de filaria, d’azareros , d’aucubes , au milieu duquel est un beau cèdre du Liban entouré d’une épaisse haie de chaïmille ; dans une autre enceinte triangulaire , un mélèze d’une hauteur considérable, des chassis de 120 pieds de longueur , des serres de plus de 160, contenant 6 à 7000 pots et 120 caisses, et où se trouvent les plantes les plus rares et les plus nouvel- lement apportées en France ; un amphithéatre où sont rangées les plantes grasses dans la belle saison ; une réunion de plantes alpines ; des plates-bandes pour les semis en pleine terre; des bassins entourés d’ar- brisseaux de terre de bruyère, qu’on trouve dans le voisinage ; parmi trois rangs d’arbres résineux , des pins du lord Weymouth de plus de soixante pieds de haut; un bosquet du printemps, couronné par douze tulipiers ; un bosquet de l'hiver, qui contient plus de deux cents arbres résineux , et entr’autres des sapins argentés qui ont au moins quarante pieds de G1à haut et cinq de circonférense , quoïqu’ils n'aient été plantés qu’en 1790, ce qui semble justifier la pré- férence que M. Dumont donne aux arbres verts, sous le rapport de l’utilité, Les orangers et les citronniers ne sont pas les arbres qui abondent le plus dans ce jardin , sans doute parce que ce ne sont pas ceux dont la culture a le plus besoin d’être encouragée. On y voit un grand nombre d’espèces de rosiers, pour lesquels on a préféré les positions où le soleil ne donne que la moitié du jour, On ne trouve point là de ces ornemens de pure vanité ou de caprice, auxquels la raison ne saurait assigner de but, comme des montagnes fac- tices, des ponts sans eau, des chaumières sans ha- bitans. Il n’y a point non plus de murs, et la vue n’aperçoit de tous côtés pour clôture que des haies et des charmilles, On reconnaît partout que l’utilité a été le principal , et l’agrément l’accessoire., Un vaste parterre, au bas du jardin , contient neuf cents plantes étrangeres herbacées, Près de là, le genre des érables d’un côté, de l’autre celui des frênes; plus loin les peupliers et les cornouillers ; un quinconce formé des genres sulipier, platane , tilleul, aune et bouleau. Une prairie assez vaste contient aussi différens genres qui y sont disséminés par groupes , et d’autres qui la bordent, Cet admirable jardin, cité comme un modèle dans tous les ouvrages nouveaux sur l’agriculture et Le jar- (75) dinage, et qui mériterait bien les honneurs d’une des< cription méthodique et raisonnée , contient plus de dix arpents , et le parc en contient davantage. On y cultive, sans les plantes annuelles, plus de 3600 espèces étrangères , vivaces et ligneuses, de toute température, dont la plupart sont très-multi- pliées. Le propriétaire , qui l’a formé lui-même, en l'augmentant successivement depuis 1784 jusqu’en 1792, est un ancien Capitaine de cavalerie, Baron de Courset , aussi intéressant par ses qualités morales que par l'étendue et la justesse de ses connaissances. Il a inséré des observations georgico-méteorologiques dans les mémoires, pour 1786 , 87 et 88 , de l’an- cienne société Royale d'agriculture , dont il était membre. Il a aussi des mémoires dans les annales de l'agriculture française de MM. Tessier et Bosq, et dans le tome XXXVII des réponses a des questions difficiles proposées par le ministre en 1799. Mais son ouvrage le plus important , qui est le fruit de trente ans d'observations et d’expériences, et qu’on regarde comme le meilleur en ce genre qui ait été publié en France, est son Boraniste cultivateur , dont une nouvelle édition en 6 volumes in-8°. contient la description de 1400 genres et de 8700 espèces. Membre correspondant de l’institut de France et de la société d'agriculture du Département de la Seine , M. de Courset ne s'occupe pas seulement de jardinage mais il cultive encore les lettres, le dessin , et même (76) la musique, et il jouit en outre de tous les charmes dont les tendres soins et les hommages d’une famille aimable et chérie peuvent embellir son existence. Tout en lui rappellait à M, Lair le caractère , les manières et les goûts de M. Moisson Devaux, en qui l’A- cadémie , et même notre pays a perdu le cultiva- teur botaniste le plus recommandable, tant par les talens et les grâces de son esprit, que par la mul- titude et la variété de ses connaissances. M. Lair a aussi composé et publié une znstrucrion sur l’usiliré de la culture des fèves et des pommes de terre dans le Département du Calvados. Essai sur les thalassiophytes non articulees , par M. LAMOUROUXx. L'auteur avertit d’abord que pour exprimer par un seul mot les plantes marines , il emploie le terme de thalassiophytes , dont les deux racines Grecques présentent la mêmefignification. Toutes ces plantes peuvent être diviséesen deux classes, l’une des tha- lassiophytes articulées , l’autre des thalassiophytes non articulées. C’est seulement de cette dernière qu’il traite dans son essai, en remarquant qu’il est persuadé que les divisions qu'il adopte, pourraient s'appliquer à la première. Après avoir prouvé dans un mémoire. lu (9779 à la société philomatique, que la tige du fucus digi- zatus était formée de quatre parties bien distinctes , analogues à l’épiderme, à l’Ecorce, au bois et à la moelle des plantes dicoryledones , 1 a été conduit par une suite d'observations et de réflexions, à fon- der sur ces quatre sortes de rapports la distinction de quatre familles de plantes marines, qui comprennent toutes les espèces classées par Linné dans les genres fucus et ulva. I] en a ajouté deux qui semblent réu- nir les thalassiophytes aux polypiers par le facies , mais qui en diffèrent par tous les autres caractères, Ce n’est qu'avec une certaine défiance que M. Lamouroux propose un système tout-à-fait nouveau , qui tend à mettre de la clarté et de la précision dans une partie de l’histoire naturelle trop peu étudiée jusqu’à ce jour, et d’autant plus difficile à bien con- naître, qu'il est certain que, dans le règne végétal, comme dans le règne animal, les espèces qui ap- partiennent à l’empire des eaux, ont des caractères bien moins tranchans que les productions terrestres , ét pourraient, à deur égard , ,ne paraître que de simples ébauches. Les six familles de thalassiophytes non articulées dont M. Lamouroux présente les traits caractéristiques , sont les fzcacées , les floridées , les dicryolées , les ul- vacees , les alcyonophytes , les spongophytes. La pre- mière , à organisation ligneuse , couleurs olivâtres , comprend les six genres fucus , laminaria , osmunda- (78) cea, furcellaria, acanthicum, chorda. La seconde, à or= ganisation corolloide, couleurs rougéatres , comprend en tout onze genres , dont trois à feuilles planes , la c/au- dea , la delesseria | le chondrus ; huit sans feuilles planes, savoir cinq à tiges et rameaux sans contrac- tions ni cloisons, le ge/idium , la laurencia , l’'hypnoi- dea , l'acanthophora , La fistularia ; et trois à tiges et rameaux contractés ou cloisonés, soit en partie , soit en totalité, la gigartina , la plocamia , la mertensia. La troisième classe, à organisation réticulée et folia- cée, couleurs verdâtres, a les quatre genres amansia , dictyopteris , diceyola., flabellum. La quatrième, à organisation herbacée , couleurs vertes, a les quatre genres asperococcus , ulva , bryopsis, caulerpa. La cin- quième , à organisation gélatineuse couleurs terreuses et la sixième, à organisation spongieuse, couleurs vertes très-foncées , n’ont chacune qu’un genre , l’une le genre alcynophytum , l'autre le genre spongophytum. Tous ces genres sont divisés dans le mémoire en plus ou moins d'espèces. Plusieurs des noms que M. La- mouroux a composés , tant pour des genres que pour des espèces , sont destinés à consacrer la mémoire de quelque savant recommandable , ou de quelque ami digne de reconnaissance. Un entr'autres , celui de la claudea est lhommage d’un fils respectueux en- vers un père chéri. (79) Rapports faits à la première classe de l'institut de France sur des mémoires de M. LAMOUROUX. L’académie a eu communication de deux rapports faits à la première classe de l'institut , l’un dans la séance du 19 Octobre 1812, au nom d’une com- mission composée de MM. Cuvier et Bosc ; l'autre dans celle du 26 Octobre , au nom a’une commis- sion composée de MM. Olivier , Lacépède et Bosc. Dans le premier, le rapporteur commence par rap- peler un mémoire de M. Lamouroux sur la monrée , où il la regardait comme le frai du congre , et un rapport sur ce premier mémoire , où la commission ne partageant pas son avis, jugeait que la montée était plutôt le frai d’une des espèces d’anguilles encore imparfaitement connues ( telles que le pinperneau ), Jl cite ensuite le second travail de M. Lamouroux, où prenant pour guide cette opinion de la com- mission, il prouve par de nouvelles observations , et par les dessins qu’il y a joints, que la montée est effectivement le frai de l’anguille pinperneau. La classe adopte l’avis de sa commission , d’engager M. Lamouroux à publier ce fait, et à suivre ses recher- ches sur les espèces du genre anguille (murena de Lin.) Le second rapport a pour objet le travail de M. (8) Lamouroux sur les polypiers coralligènes non entiè- rement pierreux. Le rapporteur , avant d'annoncer ce travail, présente une courte esquisse des progrès de cette étude, et cite lesnaturalistes quis’en sont particulièrement occupés. Il fait remarquer la position peu favorable de notre collègue , qui n’ayant point voyagé, n’a point été à portée d'observer sur le vivant, quoique la difficulté de réussir dans cette observation en rende le défaut moins fâcheux ; et après avoir donné des éloges à son discours préliminaire , pour mettre la classe à portée de juger du mérite des genres qu’il propose , 1l les compare successivement avec ceux de Linnæus et de M. de la Marck. Ces rapprochemens donnent lieu à plusieurs réflexions favorables à l’au- teur de la nouvelle classification , et à quelques-unes qui contredisent son système. Le rapporteur termine ainsi : « » Tel est l’aperçu des améliorations que M. La= mouroux propose d'introduire dans la classe des po- lypiers non entièrement pierreux. La collection qu’il possède , et qu'il a mise sous les yeux de votre com- mission, est fort nombreuse, tant en espèces connues qu’en espèces inconnues. Tous l2s genres ont été établis sur la nature, et tous ont été vérifiés par elle. La classe peut juger, par le petit nombre de remar- ques critiques auxquelles le travail de ce naturaliste a donné lieu, qu'il a rempli son but aussi parfaite- ment que la nature du sujet et la position où il se trouve (81) trouve l’ont permis. Au reste , ce qu’il a soumis à son’ Jugement n’est que la première partie d’un ouvrage qu'il se propose de rédiger , dont il nous a même déjà fait voir quelques parties entièrement rédigées ; Ouvrage qui doit contenir le résumé de tout ce qui a été écrit sur chaque genre et sur chaque espèce, ainsi que la description de plusieurs centaines d’es- pèces , dont beaucoup sont très-remarquables. Toutes les espèces qui n’ont pas encore été figurées, le se- ront; et si les gravures répondent à l'exactitude et à la perfection de quelques dessins qui sont déja faits, on peut croire que l’étude des polypiers co- ralligènes non pierreux deviendra très-facile à nos neveux. Votre commission est d’avis que M. Lamouroux mérite à un haut degré les encouragemens de la classe, et que son mémoire est dans le cas d’être imprimé, au moins par extrait, dans les mémoires des savans étrangers. » La classe a approuvé le rapport , et en a adopté les conclusions. Rapport fait a M. Le Baron Méchin, Prefet du Calvados , sur la maladie épidémique qui a désolé la commune de Bernières sur mer, pendant lété et l'automne de 1811, par M. RaAISiN. Ce travail intéressant, non seulement par l'im- F (82) portance de son objet, mais encore par l'exposition claire et méthodique qu’il offre, et par les résultats qu'il présente, est divisé en cinq paragraphes, dont le premier traite de la marche et du caractère de l’épidérnie , divisée en trois périodes. Les détails dans lesquels notre confrère entre à cet égard ne sont pas susceptibles d’extrait, non plus que ceux qu'il donne sur le traitement , dans le dernier pa- ragraphe. On doit seulement citer deux observa- tions générales. La première , que la maladie a sou- vent cédé à la fin du second septénaire et a ra- rement passé le troisième , chez les malades trai- tés à temps, et selon une sage méthode; tandis que sa durée a beaucoup varié chez ceux qui ont été mal dirigés, ou privés dans le principe des secours de l'art, et que chez tous la convalescence a été longue , et les rechutes fréquentes ; ce que M. Raisin attribue ailleurs, relativement au plus grand nombre , à la misère qui a été la suite inévitable de la maladie : la seconde, que le nombre des morts n’a pas été à beaucoup près proportionné à celui des malades, puisqu'il n’a été que de quarante-neuf sur environ neuf cents, que plusieurs, dans ce nombre, ont succombé à des causes étrangères à l'épidémie, et que la mortalité n’a frappé que des enfans et des vieillards , à l'exception de dix individus âgés de plus de sept ans et de moins de cinquante. Dans le second paragraphe , sur la topographie de (83) Bernières, on voit que cette commune située à quatre lieues N.+ N-O. de la ville de Caen , dans une campagne plate et presque entièrement découverte, est composée principalement de deux lignes d’habita- tions, l’une dans la direction du Sud au Nord, et l'autre dans celle de l'Est à l'Ouest, de manière à former un angle saillant vers le Nord-Ouest , d’environ 90 degrés. Cette dernière ligne , presque parallèle au rivage de la mer, n’en est séparée que par des ma- rais formés par l’ancien lit de la Seule, et situés en partie au Nord, en partie au Nord-Ouest , et en par- tie au Nord-Est. La première est avoisinée à l'Ouest par un terran rempli de sources, nommé %s perirs marais. Au rapport des habitans du lieu , les proprié- taires de la portion des marais située au Nord:Ouest, élevèrent , il y a environ trente-six ans, sur le travers du lit de la rivière, entre Courseule et Bernières , une digue, pour mettre leurs prairies à couvert des inondations, et une autre en deçà de la première, il y a une dixaine d’années; ce qui a causé la sta- gnation des eaux, faute d’écoulement du côté de Courseule , et a rendu le desséchement impossible au- trement que par l’évaporation due aux chaleurs de l'été. Le troisième paragraphe offre un résumé , mois par mois, de la température de l'atmosphère , de la station des vents , et de l’état du ciel, pendant le cours de 1811. Le résultat général de ce tableau est F 2 (84) que 1°, Le mois de Janvier a été froid et humide ;" celui de Février , tempéré et humide; Mars sec et tempéré; Avril, Mai, Juin, Juillet, Août et Sep- tembre, chauds et secs; Octobre, chaud et humide; Novembre, humide et tempéré ; Décembre, froid et humide ; 2°. que les vents dominans ont été ceux de l'Ouest et du Sud-Ouest pendant les cinq premiers mois et pendant le dernier ; et ceux du Nordet du Nord-Est pendant les mois de Juin, Juillet, Aoûtet Septembre; 30. que les vents du Nord et du Nord-Est ont été faibles : 40. que dans les mois de Mai, Juin, Juil- let, Août et Septembre il y a eu un assez grand nombre de jours orageux : 5° que le ciel a été sou- vent couvert OU nuageux. Le but des observations contenues dans ces trois premiers paragraphes est de s’en aider pour parvenir à connaître la véritable cause de l'épidémie , et cette cause est l’objet du quatrième. L'auteur n'hésite point à l’assigner à l'influence délétère des gaz hydro- gène sulfuré, phosphoré, ammoniacal, etc. , dégagés , à la faveur d’une haute température, des vases qui se trouvaient à découvert dans les marais dont il a été parlé; et il appuie ‘son opinion sur des preuves qui paraissent très-solides. Elles sont tirées de la coin- cidence de l'invasion de l’épidémie avec l’époque de la chaleur, et de l'accroissement simultané de l’une et de l’autre ; de la direction des vents dominans pendant toute l’année , qui a été telle, qu'ils arri- (8) vaient à la commune de Bernières après avoir passé sur les marais, dont ils pouvaient ainsi lui apporter les miasmes ; du peu de violence de ces vents , qui ne souffaient point avec assez d’impétuo- sité, pour éparpiller et pousser au loin les gaz dont ils étaient chargés, et les laissaient se déposer sur les habitations qu’ils rencontraient; enfin des observations analogues de M. Godefroy , qui ayant eu occasion de voir beaucoup de malades pendant cette épidé- mie, a manifesté le même sentiment, et de M. le Boucher , qui ayant été envoyé à Bernières il y a dix ans par l'autorité administrative , dans une cir- constance semblable, n’imputa pas ce fléau à d’autres causes. L’influence qu’on a voulu attribuer aux rou- toirs est réfutée, et par leur éloignement , et par le temps du rouissage, postérieur au commencement de l'épidémie. Quant aux fumiers entassés devant les ha- bitations , M. Raisin convient qu'ils ont contribué à rendre la maladie plus grave et plus dangereuse , et il en cite des exemples ; mais en condamnant un usage pernicieux ; et qu’une bonne police devrait réprimer , il refuse d’y voir la cause principale du mal dont il s’agit. Ses preuves sont que le même abus existe dans les communes voisines, sans que le même effet y ait lieu ; que des habitations propres et vastes , éloignées de pareils dépôts , environnées même de plantations, et très-favorablement situées , n'ont pas été plus épargnées que les autres ; enfin F3 (36) qu'on n'avait point observé d'épidémies à Bernières avant que l’écoulement des eaux fût arrêté par la chaussée élevée il y a dix ans, quoiqu'il y eût alors des fumiers comme aujourd’hui, et qu'il y en a eu trois depuis cette époque. Si l’on demande pourquoi le même effet n’est pas produit tous les ans par la même cause, la réponse est qu’il exige deux condi- tions essentielles, qui le plus souvent ne concourent pas. La première est une chaleur assez forte et assez ‘continue pour l’évaporation des eaux et le dégage- ment des miasmes ; la seconde , une direction cons- tante du vent depuis le Nord-Est jusqu’au Sud-Ouest , en passant par le Nord. Le cinquième et dernier paragraphe est intitulé ; craitement et prophilactique. Après y avoir rendu compte des moyens curatifs employés aux diverses époques de la maladie, M. Raisin propose comme le seul moyen préservatif l'ouverture de canaux d’é- coulement, qui en conduisant les eaux à la mer, procurent le dessèchement des marais ; mais il manifeste en même temps la crainte que les habitans, en gé- néral peu fortunés, et la plupart appauvris par le fléau qui les a affligés , ne soient hors d’état de sub- venir par eux-mêmes aux frais de cette opération; et que cette commune très-populeuse, et précieuse pour la marine, ne restât encore long-temps exposée au retour de la même calamité , si le gouvernement 1. ( 87) ne prennait pas soin de lui rendre la salubrité dont elle jouissait autrefois. L'auteur du mémoire le termine en faisant l’éloge du bureau de bienfaisance, et nommément de M. Aubert, l’un de ses membres , et desservant de la com- mune , ainsi que de M. Lénault , son vicaire , qui ont montré le dévouement le plus courageux ; et en ren- dant le meilleur témoignage du zèle et de l’activité de MM. Luard et Violard, officiers de santé, qu’il avait été autorisé à requérir pour le seconder. Il re- connaît que sans les secours en médicamens et ali- mens dus à la sollicitude bienfaisante de M. le Pré- fet , la maladie aurait .été beaucoup plus meur- trière, Aperçus physiologiques et pathologiques sur les fonc- tions de l'appareil hépatique , par M. DESBOR: DEAUX. M. Desbordeaux , auteur de deux ouvrages qu'il avait précédemment présentés à l’Académie , l'un imprimé en 180$ , ayant pour titre, Nouvelle ortho- pédie , ou précis sur Les difformités que l’on peur pré- venir ou corriger dans les enfans ; autre intitulé Dis- sertation sur la cause directe des fièvres, traite dans ce nouveau mémoire un objet qui n’est pas moins intés F 4 (88) tessant. En partant du principe que l’art médical ne peut être basé solidement que sur des connais- sances physiologiques bien établies | et que des notions obscures ou inexactes sur les viscères, mènent inévitablement à des erreurs plus ou moins funestes dans le traitement de leurs maladies , il pose en fat que l'appareil hépatique et ses fonc- tions sont jusqu'ici mal connus ; et c'est à en redreser et à en développer la théorie que tend sa dissertation. Non seulement les anciens lui paraissent n'avoir eu aucune notion exacte sur cette partie de notre organisation , et il confirme ce jugement par la série de leurs opinions plus ou moins fausses et souvent bizarres ; mais même depuis que les progrès de la physiologie ont fait abandonner la théorie des quatre humeurs , il trouve dans les systèmes plus ré- cens du vague et de l'incertitude, et surtout de l’in- suffisance. Le sentiment unanime des modernes est que l'unique fonction du foie se réduire à la séparation de la bile au moyen des capillaires de la veine porte, ee que la rate ne fait que contribuer à la préparation de cette humeur ; et si quelques-uns ont paru supposer à cet appareil d’autres propriétés, ils n’ont du moins rien exposé sur ce sujet de clair et de précis. M. Des- bordeaux attaque cette doctrine, et entreprend de montrer que les viscères dont il s’agit ont d’autres fonctions que celles qu’on leur assigne. Comme dans toute recherche des objets situés hors la poïtée des sens , (3) la méthode d’analogie ese , dit-il, Ze moyen L plus shr et Le plus direct de découvrir La vérité, il me devient indispensable de comparer l’organisation de l'appareil hépatique du fatus avec celle de ce méme ap- pareil chez l'enfant nouvellement né. 1 présente en effet une description du foie et de la rate à ces deux époques , en indiquant leur usage, et surtout en fai- sant remarquer le volume considérable du foie , le peu d’étendue de la veine porte jusqu’aux derniers temps de la gestation, et son inaction avant que les capillaires artériformes remplacent ceux de la veine ombilicale ; et comme dans ses explications, le foie, avant la naissance , sert de second filtre élaborateur au sang que la veine ombilicale puise dans le tissu spon- gieux du placenta, et lui tient lieu de système diges- tif, et qu’il sépare l'humeur adypeuse, même avant d'offrir la moindre apparence de bile , 1l se croit au- torisé à lui assigner des fonctions analogues, après la naissance , surtout en considérant que sa texture albumino-adypeuse annonce qu’il se répare avec les produits de la défécation de la matière crémeuse du chyle , qu'ilne change point de conformation , et qu’il continue d’avoir une veine artériforme dans la veine porte, et un placenta permanent dans la rate, La conclusion de M. Desbordeaux est donc que le foie ne sert pas seulement à sécréter la bile, fonc- tion qu’il ne trouve nullement proportionnée à son volume ; maïs qu’il sécrète encore la graisse , et outre ( 90 ) le raisonnement d’analogie tiré de létat de ce viscère dans le fœtus , il confirme cetk opinion par différentes considérations sur la saveur du paren- chyme du foie, sur le rapport de son état avec l’embonpoint , et sur des opérations dont le détail est peu susceptible d’entrer dans un simple extrait ; et il la présente comme propre à jetter un grand jour sur plusieurs phénomènes mal expliqués jusqu’à pré- sent, et sur un grand nombre de lésions, dont il offre la série en indiquant leurs symptômes , leurs effets sur le physique et sur le moral, et quelques moyens de réparer ces désordres ou d’en arrêter les progrès. Ce simple exposé suffit pour faire voir que l’objet du mémoire de M. Desbordeaux est d’une très-grande importance , puisqu'il tend à substituer des notions claires et satisfaisantes à des opinions in- complètes et incertaines ; mais que d’un autre côté, la solidité de sa théorie ne peut être appréciée que par des hommes en état de juger de l’exacti- tude des descriptions, des faits et des explications dont il s’appuie, et en même temps de la justesse de ses conséquences, c’est-à-dire , que par des méde- cins qui joignent à une profonde étude de la physio- logie les connaissances que procure une longue pratique dans l’art de guérir. La lecture de ce mémoire a donné lieu à quelques observations qui n’ont pu être sufhisamment appro: fondies, . * Co1) (Observations sur la jalousie des enfans , par M. TROUVÉ. f L'étude des causes morales dans l'examen des ma= fadies a toujours été une partie essentielle de l’art de la médecine; mais on ne pense pas assez à rechercher une influence de ce genre dans le traitement des en- fans ; et la jalousie surtout, très-commune parmi eux , est rarement soupçonnée d’être la cause de ces dé- sordres inexplicables qui mettent en défaut toute la sagacité de beaucoup d’habiles praticiens. Le docteur Corvisard dit littéralement que la jalousie est une ma- ladie non décrite, peu connue , et pourtant qui existe réellement. M. Trouvé , sans prétendre remplir cette lacune dans la science médicale, annonce l'in- tention de provoquer du moins par quelques observa- tions lesrecherches dont cette matière peut être l’objet. Il remarque, sans chercher à l'expliquer, le contraste qu’offrent la mobilité de volition et l’inconstance or- dinaire des enfans , due à la mollesse de leur tissu , avec cette disposition opinjâtre qui peut seule ame- ner les suites funestes de la jalousie. Il explique la nature et les caractères de cette passion , que n’exclut point l’âge le plus tendre , et dont on voit des exemples dans des enfans encore à la mammelle, et (92) il appuie sa théorie sur deux faits ; dont il expose toutes les circonstances importantes. Le premier con- cerne un enfant de 8 à 9 ans, fils unique jusqu’à cet âge , pour qui la naissance d’une sœur devint une cause de jalousie , qui le conduisit par degrés au tombeau, du moins autant qu’il est possiblé d’en juger par les différens symptômes et les progrès du mal, qui paraissent ne pas laisser lieu au moindre doute à cet égard. Le second fait montre aussi le même effet de la jalousie dans un enfant de six ans, dont la mère, devenue veuve, se remaria et eut un autre enfant qu’elle allaita, sans que sa tendresse pour le premier en souffrit en rien, L’impression de ce sentiment jaloux fut si forte, que toutes les pré- cautions et tous les remèdes échouèrent, et qu’il fut impossible de sauver le malade. En exposant les causes les plus ordinaires de la jalousie , sa marche , ses progrès et ses résultats, avec quelques réflexions sur les faits rapportés, M. Trouvé n’a rempli qu’une partie de la tâche qu'il s'était imposée. Il entrait encore dans son plan de présenter des vues sur le traitement de cette mala- die; et c’est là qu’il fait profession de cette noble indépendance qui éleve le médecin digne de sa profes- sion au-dessus de cette foiblesse timide, de ces con- descendances pussillanimes qui compromettent l’hon- neur de l’art. On pense bien que dans une maladie toute mo- tale dans son principe, on doit, dès qu’on est parvenu (93) à en découvrir la cause , agir principalement sur le moral , et chercher à détruire ce fonds de tristesse et de langueur qui fournit les premiers symptômes. Mais il est souvent besoin d’une grande sagacité pour re- monter à la vraie source , et pour se garantir de toute méprise, La précaution que l’auteur conseille comme la plus efficace, et même prescrit comme indispen- sable dans les cas graves, c’est d’éloigner l’objet de la jalousie. Il ne se dissimule pas les obstacles qui peuvent s'opposer à cette mesure; mais le médecin, dont l’unique but est le salut de son malade, ne doit céder à aucune considération. Il doit suivre l’exemple d’un des plus célèbres praticiens de l’Europe déjà cité, le docteur Corvisard , qui appelé auprès d’une petite fille de trois ans, et ayant découvert qu’elle était ja-’ louse d’un jeune frère nouvellement arrivé de la campagne, prescrivit le prompt éloignement de ce rival, et sauva, comme il l’avait prédit, la malade menacée d’une mort prochaine. Parmi les autres moyens de guérison , il en est de relatifs à diverses mala- dies, dont la jalousie peut se compliquer , et qui ne doivent point faire perdre de vue l’affection princi- pale. Il ne suffit pas, dit en terminant M. Trouvé, de faire connaître une maladie , il faut encore selon un de nos meilleurs nosologistes, indiquer quel est le rang qu’elle doit occuper dans un cadre nosographi- que. Celle dont il s’agit ici paraît à notre confrère avoir la plus plus grande affinité avec cette mala- (94) die très-commune aux Suisses qui ont quitté leur patrie, et qu’on nomme la nostalgie. Il trouve que les causes, la marche, les résultats, la base du trai- tement sont les mêmes dans l’une et dans l’autre , et qu'elles doivent être regardées comme deux espèces du même genre. / Recherches sur la sécrétion et sur l'apsorption dès gaz dans Les corps organiques ,| par M. THILLAYE, associé-corespondant. L'auteur à traité cette question en deux mémoires dont le second est la suite du premier. Celui-ci est divisé en deux chapitres, l’un sur les sécrétions ga- zeuses dans les végétaux, l’autre sur les sécré- tions gazeuses dans les animaux. Ce dernier cha- pitre contient quatre Paragraphes, dont le premier intitulé , sécrétions par Ls organes respiratoires , traite en cinq articles des poumons, des branchies, des trachées aériennes , destrachées aquifères , et de la res- piration des animaux privés d'organes spéciaux; le second a pour titre sécrétions gazeuses par les organes digestifs ; le 3°. sécrétions gazeuses par Les organes de la transpiration ; et le 4°. sécrétions gazeuses dans Ls animaux pour aider à la natation. Tous les dé- veloppemens sont accompagnés de notes nombreuses, dont ia plupart servent à indiquer les autorités sur (95) lesquelles l’auteur s'appuie. Il présente ainsi le résu* mé de son mémoire. » Il résulte de l'exposé précédent que les végé- taux et les animaux sécrètent des gaz ou fluides élas- tiques aériformes ; que les gaz reconnus jusqu'alors sont l'oxigène, l'azote, l’hydrogêne , et l'acide carbonique; que dans les végétaux c'est le gaz oxigène qui est le plus abondamment produit ; que le parenchyme vert, par l’action de la lumière et de la chaleur solaire , opère cette sécrétion; que les autres gaz ne sont produits qu’en petite quantité ; que dans les animaux c’est l’a- cide carbonique qui est le plus généralement produit; que l’existence animale tient à cette formation gazeuse; que l'azote superflu de l’animalisation dans l’homme est rejetté par la peau ; que certains organes des végétaux et des animaux déposent dans leur intérieur des gaz de nature différente ; que dans les poissons. la vessie natatoire sécrète abondamment des gaz oxi-- gène et azote; que le premier de ces gaz est en quantité d’autant plus considérable, que l’habitation ordinaire de l’animal a lieu dans les endroits les plus profonds et réciproquement. Le second mémoire est divisé de même en deux chapitres , en suivant la distinction des végétaux et des animaux. Après avoir considéré les phénomènes que présentent la sécrétion et l’absortion des gaz dans les circonstances les plus ordinaires , c’est-à-dire dans j'état de santé", l’auteur se propose , comme il « ( 96 ) enprévient dans un avant-propos , d'étendre lesmêmes observations aux différens états d’altération des organes. Trapporte à trois circonstances l’état pathologique des végétaux, l’éiotement, la panachure , et L1 colora= tion qui précède la chute des feuilles ; et c’est la ma- tière de trois sections, qui font la division du 1er. chapitre. Le dernier est divisé en quatre, dont la première a pour objet les altérations causées dans les animaux par le tissu muqueux, examiné dans les dif- férens organes ; la 2€, les sécrétions gazeuses opérées par les membranes séreuses ; la 3°., les sécrétions gazeuses opérées par le tissu cellulaire ; et la 49. les gaz qui se trouvent dans le système circulatoire sanguin. Les couclusions de l’auteur sont » que les différens or- ganes des végétaux et des animaux éprouvent dans la sécrétion des gaz, des changements qui constituent autant d'états pathologiques dépendans de l’augmen- tation , de la suppression , ou des changemens de na- ture de ces corps élastiques ; que dans l’état d’étio- lement des végétaux , et de coloration de leur pa- renchyme , lorsque naturellzment il est vert , le gaz oxigène n’est plus sécrété; que dans les animaux les fonctions respiratoires sont changées par la sécrétion des nerfs pneumogastriques , que les poumons ne donnent plus de gaz acide carbonique , que le gaz oxigène n’est absorbé qu’en petite quantité , que l’es- pèce de paralysie qui atteint ces organes est la cause is b première de ces changemens ; que des effets sem- blables ( 97 ) blables s’observent après l’extirpation de la vessie nata- toire des poissons, et la section de la moelle épinière dans la partie supérieure chez les jeunes animaux ; que les organes digestifs sont susceptibles d’être dis- tendus par des gaz dont la nature n’est pas toujours connue ; que la vésicule du fiel, la vessie urinaire, les organes génitaux, les membranes séreuses du cœur, des poumons , de la cavité abdominale, la syroviale du genou , le tissu cellulaire, contiennent accidentel- lement des gaz qui génent leurs fonctions ; que les systèmes séreux, synovial, cellulaire , qui ne con- tiennent point de gaz ordinairement, peuvent donner lieu à leur formation par un état pathologique parti- culier, qui change la nature de la sécrétion ; que dans le plus grand nombre des circonstances, les gaz développés ne sont pas connus. » | Un tableau généfal placé à la fin de ce travail pré- sente, dans un petit espace , toutes les formations de gaz suivant la division des deux mémoires. Le même associé-correspondant a aussi adressé à l’A- cadémie un mémoire intitulé Essai d’une nouvelle théo- rie de la vision à distances variables dans l’homme et les animaux ; mais ce travail qui a été lu dans une de nos séances, ayant paru mériter un examen approfondi , pour être bien apprécié, a été renvoyé à l'examen d’une commission , dont le rapport ap- partiendra aux travaux de l’année prochaine. G C8) Remarques sur la direction , l’obliquiré et le parallé- lisme de certains climats comparés avec les pro- ductions végétales et minérales, pat M. GROULT , associé-correspondant. Dans ce petit écrit, qui n'est qu’une simple note, M. Groult rappelle un mémoire qu’il composa à l’occasion de celui qui fut publié en 1767 par M. Le Vallois sur la disposition intérieure des montagnes. IL n’embrassa pas une sphère aussi vaste que le marin, qui offrait le fruit des observations faites pendant piu- sieurs voyages dans les quatre parties du monde : il ne citait que des faits observés par lui-même aux environs de Cherbourg, et d’autant plus faciles à vé- rifier. Le résultat qu'il avait obtenu était que la di- rection des pierres schisteuses , ardoisines , lamelleuses, quartzeuses , graniteuses et autres pierres réfractaires ; était du Sud-Ouest au Nord-Est, et qu’il avait eu oc- casion de remarquer que cette direction se continuait dans toute la presqu’ile du Cotentin, et même de s'assurer par le témoignage d’un savant de ses amis, qu’elle se retrouvait dans l’île de Jersey. Mais une singularité qui la frappé davantage, c’est que les dif- férens genres de productions végétales suivent cette même direction du Sud-Ouest au Nord-Est , au lieu de répondre au parallélisme de l'équateur , et il cite (99) en preuve différentes contrées de la France , telles que la Normandie et la Lorraine, la Bréragne et la Champagne, où la culture des vignes n’est point en rapport avec le climat. Une petite carte de la Presqu lg du Cotentin présente quelques couches minérales di- rigées selon la théorie adoptée par l’auteur. Essai sur la formation des charbons de terre, on ré- ponse au WITIE. Programme de L Académie de Caen. Ce mémoire, envoyé comme réponse à une des questions du programme publié par l'Académie , a pour épigraphe : l'amour du vrai est la disposition da plus favorable de le trouver. ( Helvétius,.de l'hom- me ) La commission chargée de l’examiner, et dont M. Nicolas a été le rapporteur , a reconnu d’abord qu'il ne remplissait pas les vues énoncées dans le pro- gramme , et exprimées en ces termes : guels sont Les points du Département, outre le territoire de Lirry , qui réunissent au plus haur degré Les caracières géolo- giques propres à indiquer l'existence du charbon de serre ? Quoique assez étendu, il ne traite cependant que des seules mines de charbon de terre de Litry , dont il donne une description fort détaillée. Néan- moins il a paru aux commissaires que les connaissances géologiques dont cet ouvrage offre la preuve, et surtout le tableau qui s’y trouve des différens bancs G 2 ( 100 ) de matières pénétrés par la fouille du puits de re“ cherche ouvert à Goville, fournissaient des données précieuses pour arriver à la solution directe du pro- blème proposé ; et ils ont ouvert l’avis, qui a été adopté , de décerner à l’auteur une médaille d'encou- ragement, en linvitant à donner suite à son travail, pour répondre d’une manière plus satisfaisante à la question de l’Académie. Il a été reconnu que ce mé- moire avait été composé par M. Gabriël Aimé NOEL, ingénieur démissionaire des ponts et chaussées, des Académies de Caen et de Cherbourg. Ouvrages présentés & l'Académie. ges P L'Académie a reçu un Annuaire de la socièté d'a- griculture et de commerce de Caen pour l'année 1812; un écrit imprimé , de M. Guittard , médecin de Bordeaux , intitulé, Des passions dans leurs rapports avec la médecine ; un autre du même auteur , ayant pour titre, Mémoire qui a remporte le prix, au ju- gement de l’Académie des sciences, Arts et Bells- Lettres de Caen , dans sa séance publique du 3 Juiller 1811, sur la question proposée en ces termes : Quels sont les effets de la terreur sur l’économie animale ? des Observations relatives à la ligature du cordon. ombilical , par M. Gèrard, docteur médecin de Lyon; une description des opérations employées par M M. Benjamin Pavie et Gresset, manufacturiers à Cros Rouen, pour l'extraction de l’indigo indigène, dont ils ont envoyé un très-bel échantillon à l'Académie ; un Bulletin des sciences médicales , par les membres ‘du comité central de la société de médecine du Dépar- tement de l'Eure, adressé par M. Delarue, Secré- taire de cette société et du comité central. Cette précieuse association , formée dès 180$, publie deux sortes de recueils, l’un sous le titre de Bulletin , au commencement de chaque trimestre; l’autre, chaque année , sous le titre d’ Annuaire. Dans le premier , le comité rend compte , par l'organe de son Secrétaire, de la constitution médicale du trimestre précédent , des observations qui lui ont été envoyées , et des ouvrages nouveaux relatifs à la médecine. Le second contient la liste des membres , celle des associés , et celle des correspondans , le résumé des constitutions mé- dicalés de l’année précédente , les rapports et les observations lus dans la dernière séance publique. L'Académie, depuis le premier envoi, a reçu deux nouveaux bulletins. TSF RELEASES OU AUS SECONDE SECTION PARTIE LITTÉRAIRE. LV a Ts a ns ee a ee 7 Mémoire sur Le livre de Job, par M. CAILLY. Crtre dissertation a été présentée par notre collègue comme destinée à entrer dans la collection des preuves que peuvent fournir , soit les monumens de la nature ét de l’art, soit les écrits les plus anciens, pour faire remonter l’origine de notre globe au delà de l'é- poque qu'on lui assigne communément. M. Caiïlly avance d’abord que le livre de Job à tous les caractères d’une haute antiquité. Il commence par rapporter à l'appui de cette opinion une thèse soutenue en Sorbonne en 176$ par M. l'abbé Cons- tant dela Molette, vicaire-général de Vienne, quiprétend que ce livre est bien antérieur à tous les livres, tant sacrés que profanes , qui existent, sans même en excepter le Pentateuque. L'auteur de cette thèse tire ses raisons du silence absolu que garde le livre de Job sur les prodiges les plus frappans, tels que le passage de la Mer Rouge et du Jourdain, la manne, etc., dont tous les livres sacrés écrits parMoyse ou depuis lui font mention; en second lieu de différens passages et surtout des discours des amis de Job, (103 ) Sophas et Eliphaz, qui prouvent qu’on ne connois- soit pas encore l’idolâtrie terrestre, si manifestement établie au temps de Moyse, mais seulement l'idoltrie céleste, bien antérieure à l’autre ; ensuite de la longue vie de Job, qui ne peut pas d’après les faits avoir été de moins de 190 ans, longévité inconnue depuis les patriarches ; en outre d’une pièce de monnoie appellée gesitha, qui paraît n’avoir pas encore été en usage au temps d'Abraham ; et de plus, des caractères attribués aux constellations de Kiel et de Kesil, quine peu- vent être que les Pléiades et le Scorpion ,.et qui sont citées comme signes, l’une du printemps et l’autre de l’hiver , quoique l’époque où elles répon= daïent à ces deux saisons, remonte suivant les cal- culs astronomiques à 2136 ans ayant J. C., ce qui toutefois n’empêche pas, suivant M. l’abbé Constant, qu’elles n’aient pu être citées sous le même rapport trois ou quatre cens ans plus:tard; enfin des usages et des mœurs tout-a-fait patriarchales de ce temps, où l’on ne connoissoit d’autres sacrifices que des ho- locaustes , où le chef de famille en était en même temps le prêtre et le sacrificateur , où toutes les ri- chesses, consistaient en troupeaux. M. Cailly, en adoptant les moyens de preuve de M. l'abbé de la Molette, en étend beaucoup les con- séquences, et croit qu'il y a de la contradiction, après tant de caractères d’antiquité découverts dans le livre de Job, d’en supposer l’auteur contemporain G 4 (104) des fils de Jacob. Pour lui, il n’hésite pas à le croire de beaucoup antérieur même à Abraham , dontil ne parle nulle part, malgré la grande célébrité de ce patriarche et de sa postérité. I juge même que l'Égypte, déjà si florissante quand Abraham s'établit dans les pays voisins de l’Idumée , n’existait pas encore et était sous les eaux au temps de Job , ce qui lui paraît pouvoir seul expliquer son silence sur cette contrée. Quant à l'opinion qui lui fait regarder l'existence de l'Egypte comme postérieure à celle des autres pays et comme due aux atterrissemens du Nil, en sorte que dans un temps la Méditerrannée ait communiqué avec la Mer Rouge, il cite l'autorité d’Hérodote , celle d'Homère, suivant lequel l’île du Phare , aujour- d’hui contigué à Alexandrie , était située à une journée de navigation de l'Egypte, et qui fait naviguer Mé- nélas jusque chez les Ethiopiens et les Sidoniens, éta- blis d’abord sur les côtes de la mer rouge. Il trouve aussi dans les mo numentsobservés par Bruce à Axum, la preuve que l'Ethiopie est antérieure à l'Egypte , et que c’est elle qui lui a transmis l'écriture hiérogly- phique. L'auteur du mémoire , après avoir fait valoir tous les raisonnemens qui peuvent donner de la force à son opinion sur la haute antiquité du livre de Job, ajoute qu'il n’a pu être composé que dans un temps où les sociétés humaines étaient elles-mêmes déjà très-ana ciennes , pour conclure ultérieurement que le déluge Cros) | universel remonte beaucoup au delà du terme où le fixent la plupart des chronologistes. C’est par le texte même de l'ouvrage qu’il prétend établir cette se- conde proposition; et il voit dans de nombreux pas- sages, dont il a rapporté plusieurs fragmens , la preuve incontestable que les peuples de l'Arabie, dès le temps de Job, connoissaient depuis long-temps lé- criture en lettres, qui n’a dû suivre que de bien loin l'écriture hiérologlyphique ; que les astres étaient connus et distingués par des noms propres, et qu’il existait un système d’astronomie, qui ne paraît sus- ceptible d’être établi que sur l’observation de révolu- tions longues et nombreuses ; que l’agriculture et les arts qui y tiennent, étaient parvenus à un degré de perfection qu’on ne peut supposer chez un peuple nouveau ; que les mines étaient découvertes et exploi- tées , que les arts du luxe étaient en vigueur; que les relations commerciales étaient très-étendues ; qu'en fin tous les vices avaient fait des progrès , il y avait eu des etats bouleversés | des trônes renversés, et un grand nombre de ces vicissitudes politiques qui n’en- trent que dans l’histoire des peuples vieilliss et la manière même dont’ Job s'exprime dans un endroit qui paraît faire allusion au déluge, semble signifier qu’il s'était écoulé bien des siècles depuis cette grande catastrophe. M. Cailly termine par quelques considérations littéraires sur le livre de Job, et cite cet éloge qu'en ( 196 ) fait Madame Victorine de Chastenai dans son excellent ouvrage du génie des peuples anciens. | « On voitbriller dans ce poëme les plus fortes affec- tions de l’âme , les mouvemens les plus rapides de la douleur , de la colère et de l’indignation. Il:est semé d’une grande variété de penseés et d'images. On y voit une belle peinture des mœurs : les figures, des métamorphoses hardies y sontmultipliées; on y.trouve des descriptions élégantes et appropriées aux choses. .… ÆEnfin le poëme de Job lemporte sur les autres poëmes des Hébreux par la disposition du sujet, et ne le cède à aucun'par l'élégance, la sublumité , la richesse de l’expression. » Observations sur Le livre de Job, par M. BELLENGER. Le but de cette dissertation, comme l’auteur l’an- monce dès le commencement, est de répondre à quelques objections contenues dans le mémoire de M. Cailly sur le même sujet. » Job est-il un person- nage réel, ou n’est-il qu’un personnage fictif ? à quelle époque a-t-il existé ? faut-il le placer dans l’âge des patriarches ? est-il ante-diluvien ? remonte-t-il jusqu’à Adam ? le devance-t-il même ? et de quels traits in- sérés dans le livre qui porte son nom, peut-on con= (107 ) clure que le monde a une origine bieh plus ancienne que celle qu'on est en possession de lui attribuer >» Telles sont les questions que M. Bellenger croit devoir examiner succinctement, pour éclaircir un point de critique qui lui paraît avoir un autre objet que ce- lui de la curiosité; comme tenant à un ensemble ‘de faits qui sert de base à l’histoire et à la religion: Voici le résultat sommaire de cet examen. 19, L'existence de Job ne peut être révoquée en doute. Il est tellement caractérisé dans le livre qui porte son nom; son pays, ses domaines , la nature et la quantité de ses bestiaux ; ses voisins et leurs possessions, le nombre de ses:enfans et:les divers ac- cidens qu’ils éprouvent , y sont tellement circonstan- ciés, qu’on ne peut rapporter des détails si précis à un personnage purement allésorique. D'ailleurs des textes formels de l’écriture, par exemple de Tobie, qui se le propose comme un modèle de patience , d’Ezéchiel, qui le compare à Noé:et a: Daniel pour sa justice, de Saint-Jacques même, qui dans son épitre assure que Dieu pour le récompenser lui rendit plus qu'il n'avait perdu par ses malheurs , sont autant -de nouvelles preuves :de :son existence, qui n’a ja- mais été contestée ni par les Rabbins ni par les pères de PEglise, 20, Job est communément regardé comme contemporain de Moyse. Il se trouve comme lui éloigné d'Abraham de quatre générations, en ap- pliquant à Job le nom de Jobad, cité au premier ( 108 } chapitre du 1er. livre des Paralipomènes. On objecte le silence qu’il garde sur les livres du Pentateuque et sur les grands événemens qui y sont décrits, pour en conclure avec M. l'abbé Constant de la Mo- lette, qu’il est antérieur à Moyse. On prouverait de même , en retournant l’argument , que non-seulement les cinq livres du Pentateuque , mais encore ceux de Josué, des Juges etc., sont antérieurs à celui de Job, puisqu'ils n’en font aucune mention; en admettant même la conséquence de l'abbé de la Molette, il s’en suivrait uniquement que l’auteur du livre de Job aurait écrit avant Moyse, ou au moins vers le même- - temps, et nullement qu'il fallüt rapporter le héros de ce livre à une antiquité bien plus reculée, ainsi qu’on prétend le faire dans le mémoire réfuté, et placer son existence à une époque antérieure à celle qu’on fixe pour le déluge, ou même pour la création; puisque depuis Adam jusqu’au déluge on compte ‘2,656 ans , et depuis le déluge jusqu’à Moyse $ 13 anse Mais le raisonnement lui-même peut être rejetté. Job , quoiqu’adorateur du vrai Dieu, ne vivait point sous la loi de Môoyse. Qu’importait à un Arabe une collection de livres qui lui étaient entièrement étran- gers ? Cependant ce prétendu silence sur les faits ra- contés par Moyse peut être contesté. La création, le déluge , l’'embrâsement de Sodôme y sont clairement énoncés, selon de savans interprètes ; et même Va- table et Dom Calmet ont prétendu trouver dans le ( 109 } 12€. verset du chapitre 26 une allusion au passage de la mer rouge. La difficulté tirée du mot kesicha attribué à une pièce de monnoie, disparaîtra si l’on admet que ce mot peut signifier également une bre- bis , puisque ce sens peut se lier aussi bien que l’autre avec le contexte. Or la Vulgate le traduit par ovis , et Vatable avoue que cette traduction est exacte, quoi- que lui-même ait rendu ce mot par Pecunia. Les textes appliqués aux deux constellations des Pléiades et d'Orion présentent une difhculté plus grave. M. Bellenger se borne à dire que Job n’a voulu par là que prouver la puissance de Dieu , et il remarque que cette difficulté est absolument insoluble dans le système qui reporte l'existence de Job à des temps inconnus , puisque le raisonnement tiré de ces cons- tellations conduirait à une époque déterminée. Ici se termine la première partie du mémoire. Dans la seconde, l’auteur continue de réfuter les preuves ou les inductions qui font supposer l’existence de Job bien antérieure au temps même d'Abraham. L'ouvrage , a-t-on dit, ne pourrait manquer de faire mention de ce patriarche si célèbre dans le voisinage de lIdumée, s’il lui était postérieur, et il y serait infailliblement parlé de l'Egypte déjà si florissante à cette époque. Il faut donc admettre qu’au temps où le livre de Job a été composé, non-seulement Abraham n’avait pas encore existé, mais l'Egypte même était encore sous les eaux, au moins quant à ( 110 ) sa partie basse, qu'on prétend avoir été formée des alluvions du Nil. M. Bellenger ne se borne pas à dire que ce ne sont là que des argumens négatifs, aux- quels on pourrait se dispenser de répondre ; il en- treprend encore de les réfuter directement, Selon lui, tout ce que Job aurait pu dire d'Abraham avait si peu de rapport avec le triste sujet de son poëme ; que l’on ne voit pas comment il aurait fait entrer dans le récit. de ses douleurs des détails relatifs à ce personnage opulent et célèbre , qui lui était entière- ment étranger, Quant à l'Egypte, toute la force de l’objection repose sur le sentiment qui fait regarder la se Egypte comme une alluvion du Nil, et il s’en faut beaucoup que ce sentiment soit solidement établi. Il est refuté ici d’abord par l'autorité de Freret , qui dans une dissertation lue à l’Académie des inscrip- tions le 15 Novembre 1742, examine l’apinion com- muniquée à Hérodote par les prêtres de Memphis , sur l'élévation progressive du sol de l'Egypte , et montre que suivant leur supposition il autoit dû s'é- lever depuis Hérodote de 22 coudées, ou environ 30 pieds ; ensuite par un raisonnement tiré de l'effet ordi- naire et naturel des débordemens, qui ne portent pas sur les terres inondées le dépôt limoneux qui forme les atterrissemens, mais en déposent la partie la plus grossière dans le canal du fleuve ou du tor- C'xrei) rent débordé , dont le fond s'élève d'année en année , et nécessite l’exhaussement successif de ses bords. Le passage de l’Iliade d’Homère , qui place à une jour née de navigation de l'Egypte, l’île du Phare , au- jourd’hui contigué à Alexandrie , est aussi discuté par M. Freret, qui montre que l'ile du Phare et le port d'Alexandrie sont éloignés de plus de trente lieues du bras Canopique , et qu'avant qu’Alexandre eût fait bâtir la Ville de son nom, il n’y avait aucun canal qui portât les eaux du Nil de ce côté-là. Il faut ajouter qu’une partie de la côte entre l’île du Phare et le Nil, forme un Cap assez élevé, rempli de ro- chers qui ne peuveut être un produit du limon dé- posé par le fleuve. Mais une solution plus péremptoire, est celle que fournit le savant Paulmier, en dé- montrant que dans l’endroit d’Homère dont il s’agit, le nom d'Egypte, Airrnros, ne s'entend pas du continent de l'Egypte, mais du fleuve du Nil. Les dernières inductions tirées du livre même de Job, ne tendent pas directement à établir l’antiquité de ce livre, mais celle du monde, au temps où il a été composé. La mention qu'il fait des objets qui tiennent au luxe et aux progrès des arts, surtout de l'agriculture , des observations astronomiques , des relations commerciales , des révolutions politiques, indique des sociétés déjà vieillies ; et s’il était reconnu que Job est de beaucoup antérieur à l'époque qu’on Jui assigne, il deviendrait nécessaire de reculer celle (112) des premières sociétés, et par conséquent celle du déluge qui les a précédées. Le fond de la réponse qu’on fait à toutes ces objections consiste à détruire la seule supposition qui puisse leur servir de fonde- ment. On a imaginé une interruption absolue entre les connaissances qui ont précédé le déluge et celles qui l’ont suivi, et l’on a assimilé le monde réparé par la famille de Noé à un monde formé de nou- veau. Mais si l’on considère que les progrès dans l'agriculture et dans tous les arts ont dû être très- rapides dans les premiers temps , que la longévité des hommes, en facilitait extrêmement la propaga- tion, et que Noé et ses fils ont pu verser dans les nouvelles générations humaines ce riche dépôt des connaissances acquises dans l’état le plus privilégié , il ne sera plus permis d’argumenter de la lenteur avec laquelle l’état social se perfectionne chez un peuple nouveau et entièrement abandonné à lui même : C’est par cette réflexion que M. Bellenger termine son mémoire. Notice sur M. Le Clerc de Beauberon, par M. LAIR. M. Lair a communiqué à l’Académie une notice historique qu’il a composée sur feu M. François- Nicolas Le Clerc, professeur de théologie de l’an- cienne C:13) ‘cienne université de Caen, et qui est destinée à entrer dans une nouvelle édition qu’il prépare d’un ouvrage appartenant à l’histoire de cette ville. On voit dans cette exquisse un contraste peut-être plus remarquable que le mérite même de celui qui en est le sujet , et qui paraît avoir surtout frappé M. Lair. M. Le Clerc offrit dès sa première jeunesse l’exemple d’un phénomène qui sans être inoui , est du moins fort extraordinaire ; c’est le passage d’une extrême inaptitude pour tout ce qui dépend des facultés de lesprit et surtout de la mémoire , aux dispositions intellectuelles les plus heureuses, à la suite d’un violent coup de marteau sur la tête, dont il pensa mourir. De brillantes études , une chaire de théologie à l’Université, qu’il obtint en sortant de dessus les bancs, remplie avec une grande distinction pendant 49 ans , une vaste érudition dans les matières qui étaient l’objet de ses . études , le talent de discuter et celui d'écrire, sur- tout en latin , prouvé par des harangues de divers genres , et principalement par son traité en deux vo- lumes in-80. De homine lapso et reparato , qui lui valut les éloges de quelques journalistes et celui même du Pape; un caractère de sagesse et de modération dans la discussion , une grande simplicité de mœurs , une vie régulière, une âme bienfaisante , les dignités académiques et des places honorables dans l’église : voilà les fondemens de la considération dont il est certain que M. Le Clerc n’a cessé de jouir jusqu’à H ( 114 la fin de sa vie. L'auteur de la notice oppose à ces titres d'estime, une ignorance presque abselue sur tout ce qui était étranger à la théologie, et qu'il faisait principalement remarquer par une crédulité vraiment étrange dans un homme renommé pour ses lumières dans une science de l’ordre le plus re- levé ; une vanité puérile , dont il convenait lui- même, et qu'il se reprochait sans pouvoir la vain- cre, ni s'empêcher de repousser quelquefois les at- teintes qu’elle recevait, par des épigrammes dont la malice contrastait avec sa bonhomie habituelle ; une manie de faire des mariages , qui l'aveuglait sou= vent sur les convenances , et dont les suites ne ré- pondaient pas toujours à ses bonnes intentions. Au reste tout homme sage refusera d’ajouter foi à une foule d’añecdotes et de traits de' naïveté tout-à-faif ridicules , que des gens frivoles se sont plu à répé- ter sur M. Le Clerc, et qui ne s’accordent nullement avec lestime générale dont jouissait ce fameux théo- logien. Mémoire sur l'origine de la langue française, pa M. LABBEY DELAROQUE. M. Delaroque pose en principe que le celtique et le slavon peuvent être regardés comme les langues (us) mères de toutes celles qui sont usitées aujourd’hui en Europe, et dans lesquelles ces deux idiomes se trou- vent diversement mêlés avec le grec et le latin..« Le russe, dit-il, est le slavon, combiné avec le celti- que et le grec moderne : dans le polonais , il est mêlé de celtique et de latin. Les langues de l'Espagne tiennent beaucoup du slavon , dont la langue des. Gots était un dialecte ; il y reste aussi des traces de celtique : cependant le fond en est le latin, mêlé de mots arabes , auxquels elle doit surtout sa majesté. L'anglais n’a point de caractère distinctif, parce qu'il les a tous; et lorsque l’expression lui manque, il choisit librement dans les autres langues le mot qui lui paraît rendre le mieux sa pensée. L’italien a pris _de tous les anciens idiomes ce qu'ils avaient de plus harmonieux ; et cet heureux choix a produit la langue la plus sonore, la plus flexible, la plus douce, la plusriche, la plus énergique, la mieux cadencée, et la plus pittoresque peut-être de tout l'Univers , Arabe excepté. » L'auteur admet que la langue celtique était come mune à tous les peuples Gaulois, et que si César les di- vise en trois grandes portions différentes pour le lan- gage, ( ki omnes lingué différuns ) À ne faut l’entendre que d’une différence de dialecte, suivant Strabon qui dit formellement : eddem non ‘usquèquaque lingu& utuntur omnes , sed paululim variati. Cette opinion est confirmée par l’état politique de ces peuples, qui H 2 ( 116 ) formaient une espèce de fédération , et tenaient des assemblées générales pour y discuter les intérêts com- muns , ainsi que par la réunion des Druides, une fois l’année , auprès de Chartres, pour y rendre la justice à tous ceux de la nation qui s’adressaient à eux : ce qui suppose un langage uniforme , ou au moins peu différent. Elle l’est encore par la conformité de terminaison des noms propres dans toute l'étendue des Gaules. M. Delaroque cite aussi quelques faits fa- vorables au sentiment de l’'illustre Bochart et de plu- sieurs érudits , qui regardent le patois Bas-Bréton comme un dialecte de l’ancien celtique. Comment cette langue des anciens habitans de notre pays a-t-elle été remplacée par la langue francaise ? M. Delaroque n’entreprend pas de suivre dans tous leurs détails les vicissitudes qui ont amené un pareil ré« sultat ; mais il en marque les points principaux. La domination des Romains une fois affermie dans les Gaules, leur langue s’introduisit bientôt dans les tri bunaux , dans les armées , dans la chaire , et fut adop- tée par la partie la plus considérable de la nation: le, Celtique ne fut plus parlé que par le peuple. La conquête des Francs , au Ve. siècle, ne produisit pas une révolution aussi complete dans le langage. Il se forma du mélange de leur langue germanique ou tu- desque , avec le latin, généralement répandu , etbeau- coup de mots et de tournures celtiques, un nouvel idiome , que dès Je commencement du cinquième ( H9) siècle Sulpice Severe désignait par le mot gallicà, lors- qu’il écrivait à Postumien : #4 verd celricè , vel si navis , loquere gallicè. Ce qui caractérise particuliè- rement cet idiome, c’est le retranchement des ter- minaisons latines établies pour la distinction des genres et des cas; mais la corruption alla beaucoup plus loin dans le 7€. siècle, comme le prouvent les formules recueillies par Marculfe. Ce mauvais latin passa du langage vulgaire dans les actes, les chartes, aiplô- mes, testamens , requêtes et autres pièces qui furent écrites sur la fin de la première race de nos Rois; et c’est à sa barbarie tout-à-fait choquante que M. Detaroque attribue la résolution prise par Charlemagne d'établir des écoles dans les cathédrales et dans les principaux monastères, pour conserver la pure latix nité. La langue tudesque conservée à la cour, s’y maintint encore pendant plus de cent ans; mais en- fin elle céda à ce mauvais latin du peuple que l’on nomuhait la Romane rustique, et qui a produit la Romane Française. C’est dans le dixième siècle, et vers le commencement de l’onzième, que M. De- laroque place le changement le plus notable de ce langage, et l’époque où prennant les terminaisons, les articles et les tournures de notre langue actuelle, ila pu être appelé du français, tandis qu’il n’était au- paravant que du latin corrompu. Pour justifier cette fixation , 1l cite le serment réciproque fait par Charles le Chauve, Roi de France, et par Louis son frère, H 3 ( m8) roi de Germänie, pour consacrer leur traité d’ai- liance de 842, et rapporte les mêmes pièces en ro- man du 12€ siècle, en remarquant qu’il est peu dif- férent de celui de l’onzième. Voici le serment de Louis ( d’après le Nithard, manuscrit du Vatican ) adressé aux français en langue romane : 5 3} s+ 3? » 5 » & Pro deo amur, et pro christian poplo, et nos- tro commun salvament, dist di en avant , in quant Deus savir et prodir me dunat, si salvara jéo cist meon fradre Karlo , et in adjudha, et in cadhu- na Ccosa, si cum om per dreit son fradra salvar dist, in o quid il ni altre si fazet, et ab ludher nul plaid numquam prindrai, qui meon vol cist meon frandre karle in damno sit. » Le méme acte en français du 12°. siècle. » Por dex amor , et por christian pople , et nostre commun salvament , de cest jor‘in avant, en quant Deus saveir et prooir me done, si salverai jeo cist meon frere Karle, et en ajudhe seroï en cascune cose, .si cum um per dreit sun freire saïvert dist en o kiil me altresi faset, et a Lothaire nul plaid n’onques prindrai, qui par mon voil à cist meun frere Karle en damne seit, » Traduction en français du 16€ siècle, » Pour l’amour de Dieu et pour le peuple chré- [2 (Cr) » tien et notre commun salut, de ce jour en avant, » autant que Dieu m’en donne le savoir et le pou- » voir, je défendrai mon frère Charles ici présenit ; » et l’aiderai en toute chose ainsi qu’un homme » par droit de justice doit défendre son frère, en » tout ce qu'il ferait de la même manière pour moi: » et je ne ferai jamais avec Lothaire aucun accord , » qui par ma volonté porterait dommage à mon # frère Charles que voici. » » Ainsi conclut M. Delaroque, le siècle le. plus décrié par son ignorance, qui ne fut cependant ni si profonde, ni si générale qu’on le croit communément , le dixième siècle a donné naissance à une des langues les plus polies de l'Europe. » La connaissance du bon latin était rare ; le latin vulgaire tombait dans le mé- pris, et aurait entièremtnt disparu , s'il n'avait pas été la langue de la religion. Le roman en profita ; ils’introduisit à la Cour , et fut employé par les évêques dans les Conciles. Son perfectionnement successif se- rait l’objet de longues recherches que l’auteur du mé- moire ne s'était pas proposées. EE rene er nennsennnes) Du madrigal | par M. DEBAUDRE. Cette dissertation fait suite à une autre du même membre , sur l’épigramme, dont il a été rendu compte dans le rapport de l’année précédente. H 4 ( 10 ) Melin de Saint Gelais, Poëte du commencement du XVI siècle , a intitulé Madrigale une seule de ses pièces, qu'on regarde comme la première qui ait reçu ce nom en français; jusques-là les Madrigaux n’étaient point distingués des épigrammes, d’où suit Pobservation énoncée en tête du mémoire , que les épigrammes de l’anthologie st en général des Poëtes Grecs, plusieurs parmi celles de Catulle et même de Martial, sont véritablement des Madrigaux. Après avoir rapporté deux éthymologies de Ménage , éga- lement incertaines , mais qui autorisent l’une et l’autre à regarder le Madrigal comme un poëme galant at- tribué dans l’origine aux bergers amoureux, M. De Baudre le définit : wne pensée qui respire le senti- ment; un trait que l’on aiguise avec une délicatesse remplie de grace, dans un style doux , harmonieux , ec précis. Il confirme sa définition par ces deux vers de l'Art Poétique : Le Madrigal est simple et noble dans son tour , Respirant la douceur, la tendresse et l'amour. Et il ajoute peu après, comme une observation qui peut-être n’a jamaisété faite , parce qu’on n’a point ap- profondi ce genre , que le Madrigal n’est pas seu- lement l'expression de l’amour , mais l’expression du sentiment. En admettant que sa pointe ne doit pas être aigüe comme celle de l’épigramme , il trouve trop rigoureux le précepte de le Batteux , adopté par l'Encyclopédie , qui n’y admet de piquant que ce qu’il ( 122 ) lui en faut pour n'être pas fade. Ce n'est pas seu< lement dans les pièces qui en portent le nom, ou au moins qui sont présentées sous le titre d’épigram- mes dans plusieurs Poëêtes, comme Marot, que M. De Baudre trouve des madrigaux : selon lui, ce genre admis dans la bonne compagnie , embelli des atours d’une élégante poésie , et qui n’exclut pas même l’admiration, est monté sur le théâtre, et se distingue dans le dialogue et dans les ariettes de nos galans faiseurs de tragédies et de comédies lyriques ; sans affirmer qu’il doive toujours être confondu avec le compliment de société , 1l paraît croire que celui- ci est un Madrigal , lorsqu'il ne renferme qu’une pensée. Il en est de même des épitaphes et des vers faits pour être mis au bas des portraits ; et ce poëme moins enjoué que sérieux, peut s'étendre aux mord- | lités et même aux reproches , qui ont le sentiment pour objet. Quant à la longueur du Madrigal, Pau- teur du mémoire regarde dix ou douze vers comme le terme qu’on ne doit pas excéder , quoique quel- ques-uns aillent jusqu’à seize ou dix-sept. Pour les Madrigaux en prose, ils ne jouissent pas, dit-il , d’une grande faveur, et annoncent des complimens d’une fade galanterie. Il cite parmi nos Poëtes dis- üngués dans le genre du Madrigal, Marot, Jean Berthaud de Caen, devenu Evêque de Sées, Ben- serade y M. de la Sablière, Madame et Mademoi- selle Deshoulières, et outre un assez grand mombre a ( 122) d’autres , Ferrand , Rousseau et surtout Voltaire. Entre plusieurs auteurs vivans, il ne nomme que M. de Boufflers. Le mémoire au reste est rempli d’une quan- tité de citations, dont chacune a du rapport avec le précepte exposé, ou devient l’objet de quelques remarques ; et il est terminé par un Madrigal de M. De Baudre lui même, qui en a composé beaucoup d’autres. » J'ai peint, dit-il, le ruisseau qui m'a vu # naître, J'ai chanté le petit bois où j'allais souvent » goûter le charme de l'étude et fuir les atteintes de » la persécution. C’est un souvenir mélancolique , » une opposition gracieuse, une sensation délicate ; # et ces pensées n’appartiennent pas moins au Ma- # drigal que les complimens de galanterie, puisque # l’on range dans la classe des madrigaux toutes les # petites pièces qui se terminent par un trait de # louange ou de sentiment. » . Le genre du madrigal et celui de lépigramme ne sont pas les seuls dont M. Debaudre ait parti- culièrement étudié la nature et les règles : il s’est surtout adonné aux contes en vers; et il en a un recueil assez considérable | dont une partie a déjà été communiqué à l’Académie dans plusieurs séances. Il a aussi composé un grand nombre de fables, et d’autres pièces-de vers de différentes espèces. nn (123) Sur quelques bons et vrais philosophes ; par M: TousTAIN de RICHEBOURG. Avec ces trois épigraphes : Philosophia catechismus ad fidem. St CYR Melior est profectd humilis rusticus qui Deo servir, quam Superbus philosophus qui , se neglecto , cur- sum cœli considerat. Amitat. Lib. 1 C. 2. Initium sapientiæ timor. Domini. Ps. 110: M. de Toustain annonce en commençant le des- sein de concilier les principes de la philosophie avec les maximes de la religion, de montrer aw’on peut estimer la première sans offenser la seconde , et être entièrement soumis à la seconde sans condamner la première ; et que c’est en les entendant mal, qu’on les juge opposées. Pour ne laisser aucun doute sur l'esprit dans lequel il prétend établir cet accord, il fait la profession de foi la plus formelle | et déclare sans ambiguité qu’il ne reconnait point de vraie phi- losophie hors de l’orthodoxie chrétienne, et que la sagesse des payens lui paraît n’avoir de bon que ce qui la rapproche de la foi, et être nécessairement imparfaite, faute d’être appuyée sur cette base, (124) C’est principalement , et presque exclusivement ; sur Pythagore et Platon que roule l’apologie entre- prise par l’auteur. Il a soin, comme pour s’autori- ser à faire leur éloge, d'appliquer à leurs prosé- lytes les reproches que quelques saints personnages peuvent avoir faits à leur doctrine , tels que ceux que le grand Bassuet adresse à la philosophie Platonicien- ne, et qui ne regardent réellement que les Plotin ; les Porphyre, les Hiéroclès et les autres qui l'ont défigurée. Il fortifie cette justification par un grand nombre de témoignages cités dans le cours du mé- moire ; et 1l oppose à l’inconcevable oubli du nom de Platon dans le vaste répertoire alphabétique de Bayle , l'honorable mention que font de lui le père Paulian , qui consacre également à Pythagore un ar- ticle dans son dictionnaire de physique , le marquis de Saint Aubin, dans sen traité de l’opinion, Tho- mas , dans son essai sur les éloges, et surtout Laharpe dans le 3°, tome de son cours de littérature , sans parler des hommages que lui rendent Fénélon, Bos- suet et Rollin, tout en déplorant les taches inhé- rentes au paganisme. Les ouvrages dont il rapporte les passages , sont particulièrement le Génie du chris- tianisme , le Traité des études de Rollin , les Carac- tères de la Bruyère , le Petit carême de Massillon , et le 8°, Livre de la cité de Dieu de Saint Augus- tin, dont un extrait, pris dans le 3°. tome de la bibliothèque ecclésiaftique de Dupin, lui paraît le plus LG URS illustre de tous les témoignages à la gloire du philo- sophe Grec. Pythagore et Platon sont, au jugement de M. de Richebourg , les deux philosophes qui ont fait le plus d'honneur à la raison humaine privée des lumières de l’évangile, et dont les connaissances approchent le plus de celles qu’on ne peut devoir qu’à la révéla- tion. Les rapports qu’il trouve entre leur doctrine et celle de nos plus illustres docteurs sur plusieurs points essentiels ne lui paraissent pas même dus à la seule force de leur génie ; et il adopte comme l'explication la plus plausible de leur prééminence en métaphysique et en morale sur tous les philosophes profanes , la communication que Dacier et plusieurs autres ont supposé qu'ils avaient eue de quelques parties de l’é- criture sainte, Suivant les conséquences de son sys- tème, le quartenaire de Pythagore et les attributs , allégories et symboles qu’il y a joints , sont tirés des quatre lettres qui forment en Hébreu le nom de je- hovah , ou plus régulièrement eco , d’après la gram- maire de l’Advocat ; et il remarque comme une sin- gularité bien favorable à cette conjecture , qu’il entre également quatre lettres dans les mots Grecs @xox et ZEUZ, dans le latin Deus, le français Dieu, dans les mots altérés Jafé, Jobe, Jove et deux cas du nom Jupiter. « N’est-il pas vraisemblable , ajoute-t- » il, que la vue de cet adorable nom inscrit par les » juifs au milieu d’un triangle, ait suggéré l’emblêrge (21269). triangulaire que Platon , grand imitateur et par- » tisan de Pythagore, donne à la divinité, em- # blême publiquement adopté depuis long - temps » par une association non moins connue que ré- » pandue, malgré le secret et le mystère de ses » travaux et de ses cérémonies ? » Cette supposi- tion au reste ne tend nullement à contredire l’abbé. Molleville , quant aux preuves qu'il apporte, pour établir que ce ternaire, inconnu des premiers chré- tiens, n’a nullement influé sur la manière dont l’é- glise entend le mystère de la sainte Trinité. L'auteur du mémoire est loin de se laisser aveu gler par la prévention en faveur des deux grands génies dont il établit le mérite. S’il reproche à M. Fortia d’avoir inculpé Platon pour défendre Xeno- phon, il n’excuse pas davantage M. Dacier d’avoir sacrifié la gloire de celui-ci à la défense du premier, persuadé d’ailleurs que la mésintelligence entre ces deux disciples de Socrate ne tenait qu'à un mal entendu, et que c'était moins à eux qw'à qui que cesoit qu'il convenait d'appliquer un système d’apologie toujours blâmable. Il avoue de Platon ce qu'Horace a dit d'Homère , qu'il a quelquefois sommeillé, et qu'il a pu adopter quelques rêveries de Pythagore ; mais il avertit en même-temps qu’on doit bien se donner de garde, pour l’un comme pour l’autre, de prendre au pied de la lettre toutes les opinions qu’on leur a imputées, Par exemple, il est persuadé que le système # w (127) de la métempsycose, tel que le concevait réellement le philosophe de Samos, se réduit à cette transmi- gration partielle, successive , continuelle et réciproque de la matière que reconnaît la physique , et qu’on l'a défiguré par-des sophismes , et en confondant des opinions qu’il ne faisait qu’exposer , avec celles qu'il professait. Quant à la fameuse hécatombe de cent bœufs, qui s'accorde si mal avec la modéra- tion et le peu de fortune de Pythagore, et surtout avec son horreur pour l’effusion du sang , il adopte l'explication donnée par M. Gosseaume dans un mémoire lu à l’Académie de Rouen, et qui réduit l'objet de ce sacrifice à une valeur de cent pièces de monnoie qui avaient le nom de #œuf, comme nous avons eu au 14°. siècle nos mourons et nos agnelets d'or. Il faut également modifier les projets politiques de Platon par les restrictions qu’il a lui-même exprimées ou indiquées, et qui repous- sent la plupart des applications qu’on pourrait en faire. Son Atlandide est selon notre correspon- dant, une fiction, comme le Paradis terrestre est une réalité. Ses idées sur la communauté des femmes et les préservatifs d’une trop grande fé- : condité , sont le produit d’une saillie ou d’une folie | passagère, dont il s’est désisté lui-même, qu'il a plutôt exposé qu’adopté, que sen disciple Aristote a rigoureueusement combattu , et sur lequel M. Groult, son dernier traducteur, a donné un excel- ( 128 } lente notice corrective. La connaissance ou au moins une connaissance plus complète des livres saints l’eût préservé des réveries de la métempsycose , de la pré- existence des âmes , et de son espèce de manichéisme , suite naturelle du Polythéisme et d’une tradition al- térée de la chute de nos premiers parens. On peut opposer à ces erreurs les argumens les plus forts er faveur de la providence. Le reproche qui lui a été fait d’avoir été parasite de Denys, tyran de Syracuse, est réfuté dans le mémoire , ainsi que les observations injurieuses contenues dans le dictionnaire philosophi- que de Voltaire. Au reste, ce qui est directement relatif aux deux phi- losophes ce l'antiquité qui sont présentés comme su jet de l'ouvrage, n’en fait qu’une partie assez mé- diocre. Chacune des réflexions qui les concernent , amène des digressions plus ou moins longues, des * citations, des anecdotes sur des écrivains modernes, dont plusieurs sont encore vivans; et semble n'être présentée que comme une occasion d'établir l’insuf- fisance de la raison naturelle pour conduire l’homme à la vérité, et la supériorité de la foi sur toutes les doctrines humaines, et de plaindre ou de comdam- ner tant d'écrivains téméraires , qui n’ont pas su profiter du don précieux qui leur avait été fait ; en- sorte qu’il est très-vaisemblable que le véritable but de l’auteur a été de rendre un hommage formel à la religion dans laquelle il se felicite d’être né et d’avoir ( 129 ) d’avoir vécu, et de défendre contre les entreprises du philosophisme, cette pure morale qui vient du ciel, et qui peut seule fonder sur la terre un bonlieur pur et durable. Ce qui n’est pas une simple conjecture , c’est que M. Toustain de Richebourg possède une vaste érudition puisée dans les sources de la plus saine littérature. Cette thèse , à laquelle il revient très-souvent , que le plus bel éloge de la philosophie , est d’être l’avant-courrière, la compagne de la reli- gion , il déclare lavoir prouvée plus au long dans un discours sur les avantages. de la philosophie, lu à Académie de Rouen en 1767, et qu’il a retouché avec le plus grand soin. Diverses conjonctures l’ont empêché jusqu'ici de faire imprimer ce mémoire , ainsi que de faire réimprimer plusieurs autres ouvrages qu'il a corrigés et étendus, entr'autres un Essai sur l'histoire de Normandie, et la Réalit des figures de da bible. I expose et développe dans ce dernier une doctrine qu’il croit irrépréhensible, et qu’il prétend d’ailleurs justifier suffisamment par deux passages tirés, le premier de la préface que l'Evêque Amiot a mise en tête des morales du Plutarque ; le second, de celle que M. l’abbé Groult a composée pour la traduction des lois de Platon. La citation de ces deux morceaux termine le mémoire, M. Toustain de Richebourg a aussi envoyé à PAcadémie un précis des réflexions que lui a sug- gerées la lecture du Rapport Général sur les travaux I (130) de cette société. Après quelques questions relatives à différens membres, qu'il croit connaître directe- ment ou indirectement , il passe en revue les mé- moires et autres ouvrages mentionnés dans le rapport, en donnant à chacun des auteurs un suffrage plus où moins formel et plus ou moins étendu , et en y joi- gnant quelquefois des observations sur l'objet traité. ee RER REED SRE 27 CSCRRERE Tables alphabétiques manuscrits | générales , perpé- suelles et comparatives de la législation mantime de l'Europe, par M. GROULT, associé-corres- pondant. Ce n’est qu’une feuille manuscrite, à laquelle en est jointe une autreimprimée sous lemême titre. M. Groult annnonce que le prospectus de ces tables, imprimé en 178$, n’a jamais été distribué; et il en donne les raisons , qui tiennent surtout à la réimpression de deux mémoires sur la législation de la marine, qui avaient reçu l'approbation de l’Académie Royale de Marine le 19 Décembre 1782, et aux soins qu'il prit de recueillir de nouveaux matériaux pour le perfection- nement d’un travail que le gouvernement encoura= gea par la confiance la plus flatteuse. L'auteur n’a point perdu de vue cette entreprise interrompue par les divers évènemens politiques , et connue du gou- vernement actuel; et il en fonde l’importance sur la prodigieuse multitude des ouvrages, lois et décisions (131) relatifs à la marine qu'il fait monter à 40, ou 50 mille , dans un recueil même incomplet , et qui doivent entrer dans ses tables. La seule lettre A, imprimée én 1786, contient environ 10,000 citations, mais l’auteur fait voir comment un même article peut se trouver , non seulement sous différentes lettres , mais encore plusieurs fois sous la même. L'avantage qui recommande particulièrement ces tables, que M. Groult regarde comme indispensablement nécessaires . à tous les agens du gouvernement employés dans la marine , est la facilité d’ajouter à la main , sous chaque titre, les nouveaux articles que l’on vient à décou- vrir, OU qui seraient relatifs, à des lois ou des dé- cisions nouvelles, Poësres. L'Académie a entendu dans ses séances , une tra= duction en vers de la quatrième satyre de Juvenal , par M. Méchin; un extrait, aussi en vers français, du poëme de Thompson, intitulé L’orage , avec l’é- pisode d'Amélie et de Céladon , et quatre fables intitulées, Le serpenc ec le lézard , La guépe et Le pa- pillon, Le Normand et Le Gascon , Le duel terminé, par M. Le Prêtre ; un conte de M. de Baudre, intitulé Le procès ; des Srances sur la gloire, par M. Le Tertre ;une fable intitulée La chenille, er Le limaçon, par M. Chan- tepie; un Voyage en Silésie, ef une Épétre en vers F2 (132) d'un grenadier de la garnison d'Ereinbresthein au congrès de Rastad, par M. Moisson ; deux pièces de vers de M. Vieillard ; et trois de M. d’Ornay , tous deux associés-correspondants : les deux premières sont une ode intitulée La comète de 1811, et une Épirre en vers à M. Vieillard de Boismartin , qui proposait à l’auteur de se faire inscrire sur le tableau des avocats de Saint Lo ; les dernières ont pour titres, Quasre- vingts ans, songe, La mémoire et l'oubli. Ouvrages envoyés à l’Académie. Il a été envoyé en outre à l’Académie plusieurs autres ouvrages , en prose et en vers. Je citerai un Abrégé des géoponiques , extrait d’un ouvrage grec ; par M. Cafarelli, associé-correspondant ; deux no- tices de M. Le Carpentier , aussi associé-correspondant s faisant suite à sa Galerie des peintures célèbres, l'une sur Salyator Rosa, né à Renelle, à deux milles de Naples en 160$ , mort à Rome en 1673; l'autre sur Antonio de Allegris , ou le Corrége; un éloge historique de Charles-Nicolas-Sigisberg Sonni- ni de Manoncourt, membre d’un grand nombre de sociétés académiques, et entr'autres de l’ancienne Académie de Caen, par M. Arsenne Thiébault de Berneaud , associé-correspondant ; un prospectus d’une Histoire littéraire de la France, par M. Le Prévost d’Iray , autre associé correspondant ; quatre ouvrages (133) de M. Le Pileur, le premier en 3 volumes in-80. intitulé , Mélanges d'histoire, de Littérature, de géo- graphie, de morale, erc., le second, en un volume aussi in-80, intitulé Élémens de la langue Hollandaise ou méthode analytique et neuve , le troisième , même format, contenant plusieurs morceaux de prose en cette langue, et quelques-uns de poésie | avec une version interlinéaire en français, le quatrième intitulé Tableaux synoptiques de mots similaires qui se rrou= vent dans les, langues Persane, Sanscrite | Grecque , Latine , Moœsogothique, Islandaise, Suéogothique , Suédoise , Danoise , Anglo-Saxonne , Celto-Brétonne Armorique ; Anglaise , Alémanique ou Francique , Haut-Allemande et Bas-Allemande , précédés de l'abrégé d'une grammaire analytique du persan , de comparaisons des parties constitutives de ces langues , et d’un essai sur lanalogie des mots persans entr'eux et avec ceux de plusieurs idiomes ; un prospectus de Lertres aca- démiques sur la langue française ; La profession de foi des poëres à la mode, par M. Mus ; une Notice de la séance publique de la société libre d’émulation de Rouen du 9 Juin 1812 ; un procès-verbal de séance publique et deux programmes de prix de la société de littérature, sciences et arts de Rochefort ; un programme des prix proposés par la société d’en- couragement pour l’industrie nationale ; un recueil des travaux de l’Académie des jeux floraux de Tou- Jouse pour 1812, avec un programme pour le con< E3 (134) cours de 18133 une notice des ouvrages lus aux séances tant publiques que particulières de la société académique de Cherbourg, depuis le 7 Jum 1810 jusqu’au 14 Novembre 1811 ; une notice de la séance publique de l’Académie du Gard du 21 Dé- cembre 1811 ; des procès-verbaux et mémoires de la société académique de Poitiers ; un programme de prix de l'Académie de Marseille. FA D cou 2 Q ARE Sur Les travaux de l’année 1813. PREMIÈRE SECTION. PARTIE SCIENTIFIQUE. EE Nouvel essai sur les causes générales des vents; pat M. PRUDHOMME, avec cette épigraphe : Magna , nec ingeniis investigata priorum ; Quaæque dit latuere. Ovid. Métam. IT. Prudhomme avait présenté le mémoire qu'il lut l’année dernieré , sous le titre d’Exposiion des effers météorologiques de l'air, comme préliminaire à un travail beaucoup plus étendu sur la cause des vents, qu'il à communiqué cette année à l’Acadé- mie, et qui a fourni la matière de plusieurs lectures, Avant d'en venir directement à son objet , il expose. dans une introduction les divers points de vue sous lesquels les vents peuvent être envisagés, et les théo- ries proposées jusqu'ici par les savans pour en expli- quer les causes. Son but est d’ajouter quelques expli- (126) cations et quelques développemens à leurs découverà tes. Après avoir montré en quoi diffèrent , relati- vement à cette recherche, les deux méthodes d’a- nalyse et de synthèse, il annonce qu’il suivra la der- nière ; et distinguant aussi deux manières différentes d’écrire sur les Sciences , l’une proprement élémentaire et convenable à ceux qui n’ont aucune connaissance préliminaire , l’autre plus académique , et appropriée à des hommes instruits , il prévient que devant em- ployer celle-ci, il s’abstiendra de tout détail minu- tieux, et ne développera que les considérations qui lui paraissent neuves, ou des expériences peu con- nues. Cet Essai est divisé en quatre parties. La pre- mière contient sur l’air et plusieurs de ses phéno- mènes et sur la nature du vent, des principes gé- néraux, qui pourraient paraître un peu éloignés de l’objet direct du mémoire, mais que M. Prudhomme à cru devoir mettre en avant , pour faire connaître la doctrine dont il est imbu, et qu’il appliquera dans la suite de son travail. De tout ce qu'il a dit dans cette première partie ; il conclut ; 1°. que l’athmos- phère contient de l’eau en dissolution ; 2°. qu’elle en dissout d’autant plus qu’elle est plus dense ; 3°. que toutes les fois qu'il arrive quelque raréfaction dans sa masse, l’eau dissoute est abandonnée; 4°. . que lorsqu’elle dissout de l’eau , sa température doit s’abaisser ; 5°, enfin que lorsqu'elle précipite l’eau dissoute , sa température s'élève. (137) La seconde partie a pour objet de développer les causes des vents. M. Prudhomme en distingue de trois sortes : des causes constantes , et il compte pour telles la rotation de la terre, l'attraction de . da lune, et la dilatation de l’air par la chaleur du sol; des causes inconstantes, comme l’éruption des volcans , les gaz ou vents qui sortent des cavités souterraines , les effluves spontanées de l'électricité de la terre, la formation des nuages, et beaucoup d’autres ; enfin des causes secondes, qui supposent l’action antérieure de quelque cause directe : tel est l'obstacle qu’une chaîne de montagnes oppose au cours du vent , dont la réflexion produit un nouveau vent dans une autre direction. M. Prudhomme n'entre dans aucune preuve di- recte sur l’existence du vent par le mouvement de rotation de la terre. Il adopte celles que Dan. Ber- nouilli a développées dans sa réfutation du mémoire de Dalembert contre cette théorie, et admet comme un point bien établi, que la rotation de la terre pro- duit un vent d’Est, faible à la vérité, mais réel, mais constant sur toute la surface de la terre, quoique presque nul aux pôles, qu’on appele vers alisé. L’attraction de la lune est une autre eause, dont Dalembert a démontré la réalité. Elle produit à l’é- quateur un vent d'Est , qui fortifie les vents alisés, mais qui varie et pour la force et pour la direc- tion selon les différentes latitudes des lieux, et selon (138) la position de la terre par rapport à l'Equateur. L’ac- tion de cet astre sur l'atmosphère paraît incontesta- ble pour quiconque admet celle qu'il exerce sur l’O- céan, et il faut y ajouter la réaction du sphéroide aqueux. M. Prudhomme indique les différens vents qui résultent de la combinaison de ces causes pour lun et l’autre hémisphère. Pour bien concevoir le vent produit par la cha- leur du sol, il faut supposer la surface de la sphère homogène , telle qu’elle l’est en grande partie dans les vastes mers; car la diversité des matières qui re- couvrent le globe , en apporte dans ce vent. Le point le plus échauffé de tous par les rayons solaires dilatant Pair qui lui est contigu , détermine de toutes parts des courans qui y viennent aboutir ; mais s’il se meurt umformément sur un cercle, les courans qui partent des deux points de ce cercle également éloignés du point le plus échauffé, venant à la ren- contre l’un de l’autre , se détruisent mutuellement. Âu reste ce point le plus échauffé n’est pas celui sur lequel les rayons du soleil tombent perpendiculaire- ment , parce que le point qui a été échauffé de cette manière , s’échauffe encore lorsque la direction est devenue oblique; ensorte que le Maximum de chaleur est assez généralement entre 2 et 3 heures dans les jours de 12 heures, et entre $ et 6, dans ceux de 16 à 18. Cette troisième cause des vents constans produit un vent d’Est dans l'hémisphère (139) où est le soleil après son passage par lEqua- teur, et un vent d'Ouest dans l’hémisphère opposé , et dans chacun un vent de Nord pour l’hémisphère septentrional , et de Sud pour l’hémisphère méridio- nal. Lorsque le soleil est dans l'Équateur , le vent d’Est où d'Ouest est nul, et 1iln’y en a point aux pôles. Par la combinaison de ces vents avec ceux qui sont dus à l'attraction de la lune , 1l doit exister du côté du Nord des vents Est, Est-Nord-Est, Nord-Est, et du coté du Sud, des vents Est, Est- Sud-Est , Sud-Est, . C’est ici que M. Prudhomme traite des causes se- condaires, qui en arrétant le cours de l’air, donnent naissance à un vent réfléchi, tandis que les tranches supérieures à l’obstacle continuent de suivre leur di- rection. Il explique ensuite trois des causes inconstan- tes qu’il a indiquées , savoir : les éruptions volcaniques, la formation des nuages, les cavités souterraines. Les matières rejettées avec force du sein embrasé d’un volcan, la plupart avec une quantité plus on moins grande d’eau vaporisée, soulèvent et écartent la masse d’air qui est au-dessus du cratère , et par cette répulsion produisent des courans en tous sens, Comme ces matières élevées à une très-haute tem- pérature se condensent bientôt en se refroidissant , l'air doit revenir se précipiter dans le vide qui en résulte ; mais l'équilibre qui tend à se rétablir, est de nouveau troublé par les secousses qui se succèdent ; (140) et cette suite d’actions er de réactions ne peut man quer de produire un trouble considérable. Voici sur quel raisonnement M. Prudhomme ad- met la formation des nuages comme une cause du vent. Les nuages se forment , ou parceque l'air aban- donne la chaleur nécessaire à la dissolution de l’eau, ou par une raréfaction subite d’une espace donné d’air. Dans l’un et l’autre cas, il doit se former un vide dans toute l’étendue où le nuage prend nais- sance , et l'air environnant venant s’y précipiter pour rétablir l’équilibre, forme divers courants. Quelque- fois c’est le vent lui-même qui cause la raréfaction qui détermine la formation du nuage, et c’est alors qu’il est le plus violent. L’auteur se contente de pro- poser aux physiciens comme un sujet digne de leurs méditations ces bruyantes agitations de l’air, qui ac- compagnent la chute d’une grande pluie d’orage. Quant aux cavités souterraines , dont l’existence est bien établie, et dont plusieurs ont été décrites, il en sort avec plus ou moins de violence un air échauffé par les feux qu’elles renferment , et dont les effets varient d'intensité, en raison du volume de cet air, de la compression qu’il éprouvait, et de plusieurs circonstances qui ne sauraient être déter- minées avec précision. Dans la 3°. partie de son ouvrage , M. Prud- homme présente une nouvelle division qui lui per- met de considérer les vents sous un rapport essen= (141) tiel à son objet. Il distingue des causes supérieures ; qui sont au-dessus de l’atmosphère , et des causes in- férieures , qui résident sur la surface du globe, et par conséquent des vents supérieurs et des vents inférieurs. L'action simultanée de ces deux espèces de causes , soit qu’elles agissent dans une même direction, ou dans des directions opposées avec des forces égales ou inégales, donne des résultats qui sont autant de conséquences des lois générales du mouvement, dont quelques-unes sont rapportées dans le mémoire. Par exemple , si les causes supérieures étant en opposition avec les causes inférieures, sont plus puissantes , elles feront parcourir à l’air leurs propres directions , et il n’y aura qu’une seule cause de vent. Si la puis- sance est égale, il y aura calme. Mais il arrive sou- vent que les causes supérieures agissant moins puis- samment sur la partie basse de l’air exercent seules leurs forces sur la portion élevée qui est hors de la sphère d'activité des causes inférieures ; et alors il y a deux courans opposés , l’un supérieur , l’autre inférieur. M. Prudhomme pose en principe 1°. que, si une masse d’air se meut d’un mouvement uniforme dans toute son étendue , l’ordre des tranches, leur densité et leur pesanteur réciproque resteront les mêmes; 2° que si cette masse obéit à deux forces égales et opposée qui se détruisent dans une des tranches horizontales , les pressions réciproques (19) seront toujours les mêmes qu'avant le mouvement ; et que la forme inclinée, à laquelle arrivera cette masse, dans un certain temps , aura la même sur- face. Il ajoute, sous le titre de théorème , que tout corps, pesant en l’état de repos en raison de sa masse sur une surface plane, ne se meut qu’en perdant une partie de sa pesanteur, et que la diminution de sa pression est proportionnelle à la vitesse du mou- vement. Appliquant ce théorème à deux colonnes d’air superposées l’une à l’autre, et agitées en sens contraire , il conclut qu’il y aura une raréfaction , croissante en raison directe de la vitesse du mouve- ment, jusqu’au moment où les deux tranches se- ront en équilibre ; qu’il y aura conséquemment pré- cipitation de l’eau dissoute dans l'air, production de chaleur, et élévation de température; mais que si toute la masse vient à prendre un mouvement uniforme , les densités des tranches se rétabliront , l'air redevien- dra capable de dissoudre de l’eau, les nuages se ré- soudront, et l'air reprendra sa limpidité. La seule ob- servation de deux courans opposés, indiqués par la marche des nuages, suffit pour reconnaître ces effets. Cette théorie explique les variations du baromètre, et les présages qu’on en tire pour un temps pluvieux ou serein; puisqu'il doit descendre, lorsque la pres- sion atmosphérique diminue , c’est-à-dire lorsque l’op- position, de deux vents raréfie l'air, en précipite l’eau sous forme de nuages, et prépare la pluie, et qu'il (143) doit monter dans les circonstances contraires. En ar- gumentant de ces principes, rapprochés de ceux qui ont été exposés dans les premières parties ,| on trou- vera que dans nos climats voisins du 50e. degré, le temps devra être sec, le Ciel clair, et la tem- pérature plus basse, lorsque le vent inférieur souf- fiera du Nord à l'Est, parce que l’attractoin de la lune produit par nos parallèlles un vent de Nord- Est, ainsi qu'il a été établi, et qu'il n’y a point Opposition entre ces deux vents ; qu’au contraire un vent du Sud à l’Est étant opposé au vent supérieur trouble- blera le ciel, élèvéra la température et amenera de la pluie : et c’est ce que l'expérience confirme. Les mêmes raisonnemens sont applicables à l’autre kémis- phère et à toutes les latitudes. M. Prudhomme réfute une opinion très-accréditée sur la raison du froid ou de la chaleur attribués à certains vents, et qui se tire de la température des régions que ces vents ont parcourues. Trois ou quatre degrés de différence en latitude n’en donnent pas deux en température, dans l'été d’un hémisphère : or il faudrait au vent, par un mouvement moyen plus de 26 heures pour parcourir trois degrés du méridien, On ne devrait donc avoir, 26 heures après un changement de vent, que deux degrés de différence dans la température, et l’on éprouve que les changemens sont bien plus prompts et plus con- sidérables, Quand la vitesse de 4 mètres par seconde , (144) attribuée ici au vent moyen, paraïtrait devoir être augmentée de beaucoup , la conséquence n’en serait pas moins bien établie. En étendant ses explications à la zone torride 3 et en montrant leur généralité , l’auteur rencontre une objection , qu'il détruit sans peine. Un vent Nord-Est dans la presqu’île en de-çà du Gange, où le vent supérieur est Est-Nord-Est donne , ainsi qu’il doit arriver, un temps clair et sec dans la partie oc- cidentale de cette presqu'île; mais en même temps, il pleut abondamment dans la partie orientale, Une chaine de montagnes, nommée 4s Gas, qui di- vise ces deux parties dans toute leur longueur pres- que dans la direction du Nord au Sud , explique ce phénomène; puisque le vent direct rencontrant cet obstacle du côté Est, produit un nouveau courant op- posé, ce qui n’arrive pas de l’autre côté. L’ile de Cayenne présente des effets analogues. Le vent qui soufle de l’Est, rencontrant à l'Ouest des côtes beaucoup plus élevées que l’intérieur, re- flue par un contre-courant, et occasionne des pluies abondantes pendant six mois; au lieu que, soufflant du Nord-Nord-Est pendant les six autres mois, et ne trouvant plus un semblable obstacle, il balaie toutes les vapeurs , et procure un Ciel clair et un temps sec. C’est par cette observation qu’est terminée: la 3° partie du mémoire, La (145) La 4€. traite du tonnerre, des trombes ; des mouse sons, et des brises de mer et de terre, M. Prudhomme montre que la foudre , qui cause souvent la variation des vents, en est aussi un effet. Une masse d’eau a comme tout autre corps, sa por- tion d’électricité naturelle. Ce n’est pas seulement en lui Ôtant ou en lui ajoutant du fluide électrique, qu’on peut changer son état sous ce rapport; c’est encore en faisant varier son volume, Conséquemment cette masse, en se vaporisant ; devient considérablement moins électrique, puisqu'elle devient 12 ou 13,000 fois pius volumineuse ; et elle tend fortement à sou- tirer l'électricité des corps environnans. Mais lorsque l'air abandonne l’eau qu'il avait dissoute , les nuages, qui sont le résultat de cette précipitation, doivent contenir du fluide électrique, dont la quantité dé- pend de leur forme et de leur étendue, comme l’a prouvé M. Achard, de Berlin; ce qui explique comment un nuage peut soutirer des étincelles d’un autre nuage, ou en donner lui-même, lancer la foudre par l'effet du raccourcissement et de l’allongement de ses dimensions , circonstances que l'on peut rappor- ter a l’action des vents. Cet article contient une ci- tation du P. Beccaria, et une explication du fameux nuage noir du Cap-de-Bonne-Espérance , appellé Œil-de-Bœuf par les navigateurs. Notre collègue s’est convaincu par lui-même de la réalité des trombes, que M, de Lacoudrave K ( 146 ) est tenté de révoquer en doute : il en a observé une aux environs de Bordeaux, dont il nous a lu une description. Il expose deux manières d'expliquer ces phénomènes : l’éruption de gaz ou de feux sou- terrains, qui soulève les eaux, souvent jusqu’à une hauteur considérable ; et la rencontre de plusieurs vents opposés, dont le frottement à leur contact for- mant un tourbillon rapide, produit un vide , ou une grande dilatation dans son intérieur, et facilite l’élé- vation des matières légères ou très-mobiles. Les moussons fournissent encore à M. Prudhomme un argument en faveur de sa théorie. Cette espèce de vent soufle pendant six mois du Nord-Est dans. toute la partie septentrionale de la zone torride, et du Sud-Est dans la partie méridionale de cette zone; et pendant les six autres mois du Sud-Ouest dans la première, et du Nord-Ouest dans la deuxième. Lors- que le soleil a passé dans l'hémisphère boréal, il commence à échauffer la surface de l’Arabie, de lIndoustan et de Siam; et cette chaleur augmente à mesure qu'it approche du Tropique. Mais ces terres réfléchissent plus fortement les rayons solaires, que les mers qu'elles ont à leur Sud; et dilatant davan- tage les colonnes d’air qu’elles soutiennent , elles dé- terminent un courant de Nord-Ouest ou une mous- son d'été, sujette à de grandes variations, depuis environ le 15 Avril jusque vers le 15 Octobre. Les effets sant réciproques dans l’autre partie de l’année, ( 147 ) et dans l’autre hémisphère. La situation et la hau« teur de certaines terres donnent les moyens de con- cilier cette théorie des moussons avec celle des vents alisés, et les difhcultés sont résolues par les détails des différentes localités. Le dernier article de cette 4°, partie a pour objet les vents périodiques nommés brises de mer es brises de rerre. Ces vents ne sont guères connus que des navigateurs, qui les rencontrent aux envi- rons des grandes îles, le long des côtes de l’Amé- rique méridionale, et en général auprès de toutes les côtes et des îles des zones brülantes. Chaque jour, le soleil, en se levant , excite à la surface de ces terres une chaleur qui croît jusqu'à deux ou trois heures après midi, et diminue ensuite jusqu’au coucher : de là un vent demer, ou rise de large, qui fraîchit de plus en plus, jusqu’au maximum de la chaleur, et mollit ensuite. Après un moment de calme, la par- tie supérieure de l’air se refroidissant par l’absence du soleil , et se condensant , refoule la partie infé- rieure et la pousse vers la mer : de là un vent, ou. une brise de terre, qui dure toute la nuit, sauf quelques variations et quelques exceptions. M. Prudhomme sollicite en finissant les obser- vations et les -conseils de ses collègues sur un essai, dont il déclare qu'il s'occupe depuis plus de vingt ans avec un grand zèle, et pour lequel il a recueilli tous les faits, tous les témoignages et toutes les ins- Ke (148) tructions qui pouvaient aider la solution d’un pro- blème intéressant par son objet et par les difficultés qu'il présente, Conyectures sur la possibilité que Le sokil, les planètes, Les satellites | ec méme les comètes soient constituées de manière a admettre des habitans de même na- sure que ceux de notre terre, par M. WHEAT- CROFT. ( La connaissance des véritables dimensions et de la nature de ces grands corps qui circulent dans Vespace , et qui composent notre système solaire , devait naturellement conduire à les supposer habi- tables. Une fois convaincu que ces globes, loin de n'être que des ornemens accessoires du nôtre, sont la plupart beaucoup plus considérables , on n’a plus de raison de croire que la terre soit l’objet prinçi- pal et le centre de la création; et que , quand les moindres portions de sa masse solide , l’eau qui couvre en grande partie sa surface, l'air qui l’en- veloppe , fourinillent d’habitans de toute espèce , les autres corps célestes n’aient aucun but d'utilité pro- portionné à leur importance, et soient condammés à un état éternel de mort et de stérilité. L’idée que tout nous donne de la sagesse divine semble répu- Éc (149 ) gner à cette supposition. Cependant, dit M. Wheat- croft , tous nos physiciens et astronomes du dernier ” siècle ont jugé que les planètes , et à plus forte raison : les comètes, sont trop près ou trop Join du soleil pour jouir d’un degré de lumière et de chaleur qui püût les rendre habitables. C’est cette opinion qu’il veut combattre, en établissant qu'il n’est aucun corps dans notre système solaire qui ne pût être habité par des êtres constitués comme les êtres terrestres. La première objection qui se présente , se tire de la chaleur, qui serait insupportable à un distance du soleil telle que celle où se trouvent Mercure et Vénus, tandis qu’elle serait si faible dans Jupiter , dans Saturne, et dans les autres corps plus éloignés, que tout y serait perpétuellement dans un état de glace. Pour détruire cette objection, notre collègue pose en principe que c’est par un préjugé faux qu’on regarde les rayons du soleil comme la cause unique et entière de la chaleur , et la distance de cet astre comime la vraie mesure de la température. Il faut, selon lui, aux rayons solaires, ce qu’il appelle un aliment propre, c’est-à-dire un milieu sur lequel ils puissent agir; et ce milieu est l'atmosphère , qui est plus ou moins échauffée selon qu’elle est plus dense ou plus rare. Les faits confirment cette théorie. A mesure qu'on s'élève au-dessus du niveau de.la mer, soir sur des montagnes, soit avec des aérostats , on trouve un air plus rare et en même-temps plus froid; (C150) ensorte qu’au même iustant où, sous l'équateur les plaines sont brülées par des ardeurs excessives, les hautes montagnes y sont couvertes de glaces et de neiges éternelles. Il est donc évident que la conden- sation ou la raréfaction de l’atmosphère suffisent pour procurer à chaque planète la température qui lui convient. Si l'on considère de plus qu’à toutes les profondeurs où l'on a pu pénétrer dans l’intérieur de la terre, on a toujours trouvé une température cons- tante et modérée, il sera difficile d’attriuer toute la chaleur du globe à l’action des rayons solaires , et de ne pas admettre une chaleur centrale ou propre à la masse terrestre , quelle qu’en soit la cause. Cette hypothèse est un nouveau moyen de concevoir toutes les planètes convenablement échauffées, en suppo- sant que chacune a reçu dans le principe une cha- leur centrale d’autant plus forte qu’elle était plus loin du soleil. M. Wheatcroft applique les résultats de sa théorie à chaque planète en particulier, et l’étend aux comètes, qu'il ne croit point exposées à ces extrêmes {variations de température qu’on a jugées être l’effet nécessaire du prodigieux allongement de leur orbite. Newton suppose que la comète de 1680 a éprouvé dans son périhélie un degré de chaleur deux mille fois plus considérable que celui d’un fer rouge. Nous ne connaissons point de corps qui püût résister à une telle chaleur : cependant la comète a passé et a continué sa route dans le Ciel jusqu’à la (151) distance de 11 billions de milles. Si l’on admet avec l’auteur du mémoire que ces immenses trainées de lumière appelées queues, qui ont coutume d’accom- pagner les comètes, sont leurs atmosphères, qui se condensent à mesure qu’elles s’éloignent du soleil , et dont elles se dégagent en grande partie dans leur plus grande proximité de cet astre, on trouvera qu’elles peuvent-être toujours maintenues dans un état à peu près uniforme, Quant à la lumière, l'expérience prouve que nos yeux peuvent au moyen du resserrement ou de la dilatation de la pupille, s’accommoder du plus grand degré comme du plus petit. Il y a une différence prodigieuse dans la manière dont nous sommes éclairés par un beau soleil ou par un ciel nébuleux, et à peine y faisons-nous attention. On a trouvé que le soleil nous donnait 300,000 fois plus de lumière que la pleine lune , à la même hauteur. Amsi, quand une comète serait assez éloignée pour ne recevoir que la millième partie de la lumière solaire que nous recevons, elle serait encore 300 fois plus éclairée que nous ne le sommes par la pleine lune. M. Wheatcroft prévient une objection tirée du danger de fréquentes inondations par les marées , auquel il semble que la lune et les satellites des autres planètes seraient sujets , s'ils étaient, comme notre terre en partie couverts d’eau, ainsi qu'il faut l’ad- mettre dans un système qui les suppose habi'ables, I K 4 (151) montre comment if suffit pour éviter ce danger, que ces corps fassent leur rotation sur eux-mêmes en même-temps que leur révolution autour de_ leur planète principale , et en lui présentant toujours le même côté, que d’ailleurs leur surface ait de grandes irrégularités, et que leur forme soit loin d’être par- faitement sphérique, et qu’en cas d'insuffisance de ces causes, ils n'aient pas dé grandes mers, les seules qui soient exposées à des marées directes. Notre collègue n'excepte point de sa théorie le soleil, qu’on est accoutumé à concevoir comme un océan de feu liquide; et il cite à ce sujet les idées exposées par Herschell dans des mémoires publiés des puis quelques années. Suivant ce célèbre astronome, le soleil serait un corps opaque, comme la terre et lesautres planètes, enveloppé à la distance de plusieurs milliers de milles, d’une brillante atmosphère ; qui servirait à l’échauffer , à l’éclaiter lui-même, ainsi que tout le reste du système. Les taches qu’on aperçoit sur son disque, et qui lorsqu'elles sont sur les bords, paraissent rentrer de plusieurs milliers de milles , ne seraient que des parties de sa surface , rendues vi- sibles par quelque dérangement dans son atmosphère. Quelle sublime idée, s’écrie M. Wheatcroft ! un monde un million de fois plus grand que le nôtre jouissant d’un jour et d’un été éternels ! (153) Réflexions sur le. mémoire précédent , par M; THIERRY fils. M. Thierry pose en principe que quelqu’ingénieuse que soit une théorie, elle ne peut être admise au nombre de celles que la vraie science. peut fournir, et on doit la faire rentrer dans le/domaine de l1- magination , toutes les fois qu’elle ne concorde pas avec les faits : or les conjectures de M. Wheatcroft lui paraissent être dans ce cas. En effet, pour prouver que toutes les planètes pourraient jouir d’un degré de chaleur qui les rendît susceptibles d’être habitées par des êtres de même nature que ceux de la terre, rejettant comme un préjugé faux l'opinion qui re- garde la distance du soleil comme l’unique cause de la température de notre globe, 1l lui en assigne en- core deux autres, d’abord la densité de l’atmosphère qui l’enveloppe , et ensuite un feu central propre et indépendant de l’action du soleil ; et comme l’auteur de la nature a pu donner à chaque corps de rotre système solaire une atmosphère d’autant plus dense ou plus rare, et une chaleur centrale d’autant plus forte ou plus faible, qu’il se trouvait placé plus loin ou plus près du soleil, ilen conclut qu’il n’y a point de position où l’on ne pût jouir d’une température (154) ; semblable à celle dont nous jouissons. L'argument de M. Wheatcroft, par rapport aux eflets qu’il at- tribue au plus ou moins de densité de l'air, est tiré de la différence de chaleur que l’on observe dans le même temps et à la même latitude, entre les vallées ou les plaines et les montagnes, et en général entre les lieux où l’air est le plus condensé et ceux ou il est plus raréfié. Parmi les diverses hypothèses par lesquelles on pourrait tenter d'expliquer ce phéno- mène reconnu , M. Wheatcroft choisit la combinai- son des rayons solaires avec l’air atmosphérique ; en- sorte que dans son système, on sent plus de cha- leur là où l'air est plus dense, parce qu’il absorbe plus de rayons solaires. Mais si l’on établit que le calorique rayonnant traverse l'air sans en recevoir au- cune entrave dans sa marche , et sans l’échauffer sen- siblement, on détruira l'hypothèse de M. Wheatcroft : or c’est un fait généralement reconnu par tous les physiciens qui ont fait une étude particulière de cet objet , et principalement par Schéele ; et l'on doit re- garder comme un principe qui fait partie de la science , que les rayons solaires n’échauffent les corps ni en les traversant, comme il leur arrive à l'égard de l’air, ni en touchant seulement leur surface, pour être réfléchis, mais seulement lorsqu'ils sont absorbés par eux ; et puisque le globe terrestre comme tout autre corps solide peut absorber , et absorbe réel- lement des rayons solaires, le même principe con- (155) tredit ce qu’ajoute M. Wheatcroft, que si la terre était dépouillée de son atmosphère , elle ne pourrait plus être échauffée par le soleil. Tel est le raison- nement de M. Thierry. Quant au feu central, qui n’est ni prouvé selon l’idée qu’en ont donnée ceux qui ont avancé son exis- tence , ni nécessaire pour expliquer la chaleur de notre globe, il est insuffisant sans l’autre hypothèse pour appuyer le système de M. Wheatcroft. Quoi qu'on puisse penser de cette chaleur supposée in- hérente au globe, on voit que dans son mode d’ac- tion, elle n’empêche pas beaucoup de contrées d’être glacées , et notamment les pôles , quoique par leur applatissement ils se trouvent plus rapprochés du centre de la terre que ses autres parties. J1 serait indispen- sable pour réfuter directement l'influence qu’on lui attribue, de savoir quelle idée s’en forme l’auteur du mémoire que M. Thierry combat. Il est probable qu’une discussion plus approfondie fournira les moyens de prononcer avec confiance sur k mérite de l'hypothèse avancée par M. Wheatcroft et réfutée par M. Thierry. Mémoire sur Le blé lammas, par M. LAMOUROUx. M. Lamouroux , ayant fait à la société d’agricul- ture et de commerce de cette Ville un rapport sur (156) une nouvelle variété de blé nommé 44 lammas , a communiqué à l’Académie les principaux faits et les vues les plus importantes contenus dans ce rapport. C'est à M. Wheatcroft , l’un de nos collègues, qu'est due l'introduction du blé lammas en Norman- die. Ayant reçu d'Angleterre une variété de froment nommée b/ carré, il trouva dans le champ où il l'avait semé, deux épis de Zamrmas, qu’il connais- sait depuis long-temps ; il en recueillit avec soin tous les grains, et les sema dans son jardin à Ardennes en 1797. Telle est l'origine de cette culture, que M. Lamouroux expose, après avoir donné la syno- nymie de ce blé, et les raisons qui lui font préférer la dénomination de Zammas. Les autres objets dont il traite sous autant de titres, sont es caractères de cette variété, a préparation de la terre | l'époque de l’en- semencement , la quantité et le choix des semences , Le blé en herbe, la récole, la paille, le battage, Les maladies du blé, le produit du terrain en gerbes et en grain, les qualités du grain , celles de la farine et celles du pain, Le prix. du lammas, l'étendue du pays où le lammas est culiivé en 1813, enfin l'a- nalyse chimique. Le rapport est terminé par cette récapitulation générale des avantages er des désavan- sages que présente Le lammas. 10. Ce blé est désavantageux à cause des précau- tions qu'il faut prendre pour avoir une semence exempte de tout mélange. (157) 29, Il est avantagenx par la facilité qu’il offre de pouvoir être semé presqu’en tous temps avec la cer- titude de le voir parvenir à une maturité parfaite. Il n’en est pas de même du franc blé ou des gros blés. 3°. [résiste plus que les autres aux variations de l'atmosphère et aux météores destructeurs de nos ré- coltes, 4°. On peut le moissonner presque à la même époque que le seigle, c’est-à-dire 15 ou 20 jours avant les autres; avantage inappréciable dans les pays sujets à la grêle et aux orages , ainsi que dans les années de disette. | 5°. Il a le désavantage dé s’égrainer facilement, si l’on attend une maturité parfaite peur en faire la récolte. Cet inconvénient disparaît en grande partie, si, comme l'indique l’expérience, on a soin de le moissonner 8 à 10 jours avant qu'il soit parfaite- ment mûr, et si l’on emploie la faucille au lieu de la faux. 6°. La paille du /ammas n'est pas aussi bonne que celle du franc blé ou des gros blés , pour la nour- riture des chevaux. Cet inconvénient peut être com- pensé par la préférence que lui donnent les bœufs et les vaches, à cause des herbes qui s’y trouvent méêlées. 7°. Le chaume du /4mmas est le meilleur de tous (158) pour la couverture des maisons. Il se conserve deux ou trois ans de plus que les autres. 80, Le lammas est beaucoup plus facile à battre. Un ouvrier ordinaire en travaille un cinquième de plus dans le même espace de temps. 9°. Il est moins -sujet que les autres blés aux ma- ladies qui attaquent les plantes céréales. 100, Il produit autant que le franc blé dans les bonnes terres, et davantage dans les terrains mé- diocres. 11°. Seul il prospère dans les terres à seigle. 120. Il donne plus de farine et plus de pain que le franc blé ou les gros blés. 13°. La farine et le pain sont inférieurs à ceux des autres variétés. | 140. Le son ne vaut pas celui des autres blés. 15°. Le prix est égal à celui du franc blé et ne paraît devoir être jamais au-dessous. 169. Il entre pour environ un quart dans la quan- tité totale de toutes les variétés de blé que l’on cultive dans l’arrondissement de Caen; et cette pro- portion augmente tous les jours. 170. Enfin son analyse chimique indique qu’il est plus riche en fécule amilacée , et moins en gluten que le franc blé. M. Lamouroux conclut de tous ces résultats que la culture du blé /ammas est avantageuse et, doit être encouragée. (159) Mémoire sur la nécessité d’alrerner Les récoltes, par M. de MANGNEVILLE. L'expérience a démontré depuis long-temps , dit M. de Mangneville , que la terre ne pouvait pro- duire constamment les mêmes récoltes, sans perdre sa fécondité. Un terrain inculte ne produit que les plantes qu’il peut nourrir; et l’on voit que ces plantes varient , et sont rarement dans une année toutes les mêmes qu'on y avait vu croître les an- nées précédentes. Quelques voyageurs assurent que, lorsqu'on abat des arbres dans les forêts de l’Amé- rique , l’espace vide se trouve bientôt couvert de bois d’une espèce différente. Le cultivateur ne fait donc que suivre l'indication de la nature, en adop- tant cette succession de récoltes , qu’on appelle as- solemenr, L'auteur regarde comme inutile de prouver la nécesssité généralement reconnue des assolemens ; mais il lui semble important de rechercher les causes de cette influence salutaire du changement de ré- coltes. | La sève, dit-il, d’après M. Sennebier et M. Fourcroy , est le suc nourricier des plantes, et elle renferme les élémens de la nourriture végétale. Ce sucest ensuite modifié par l’acte de la végétation , pour ( 160 ) former les différens matériaux immédiats des plantes ; tels que les acides , la fécule, les huiles, les résines, et généralement toutes les substances que l’on trouve dans les végétaux, et dont la production est due à la nature des vaisseaux par lesquels la sève a été élaborée. Il cite à l’appui de cette théorie l’exemple de la greffe; et entre plusieurs faits l'expérience rapportée par M. Duhamel, d’un jeune citron gros comme un pois, qui ayant été greffé par sa queue sur une branche d’oranger , y grossit, y müûrit, et conserva sa qualité de citron, sans participer en rien de l'orange. Tous les faits de cette sorte con- firment que les divers matériaux immédiats des végé- taux sont formés dans leurs organes. Les chimistes nous ont appris d’ailleurs qu’ils proviennent des mêmes principes, et que la cause de la variété est dans la seule différence des proportions. M. de Mangneville examinant ensuite si les végé- taux tirent de la terre des substances différentes pour former leur sève, rapporte plusieurs expériences qui prouvent qu'avec de l’air et de l’eau pure on peut faire croître des plantes de nature très - diverse, et que l’hydrogène et l’oxigène contenus dans l'eau, avec l’acide carbonique absorbé de Pair, sont les trois principaux élémens de toutes les susbtances végétales. Quant à la nourriture plus abondante qu’elles tirent de la terre, et des engrais, et qui leur est nécessaire pour un accroissement complet , il ( 161) il montre qu’elle fournit également les mêmes prin- cipes aux différentes plantes. Mais si la même nourriture , ajoute-t-il, convient également à toutes les plantes, comment expliquer la nécessité des assolemens ? la différence de direc- tion des racines lui fournit la réponse à cette question. Si on fait succéder une plante pivotante à une autre qui prend sa nourriture dans la couche supérieure de la terre, la couche inférieure se reposera , et absor- bant de nouveaux principes , redeviendra propre à une nouvelle production; et l'effet sera le même dans une succession inverse. L'expérience vient à lappui de cette explication. On ne voit jamais le blé réus- sir sur un terrain qui a produit de l’orge ou de l’a- voine. De même pour les arbres, un orme n’aura qu'un faible accroissement , si ce n’est dans un ter- rain extraordinairement riche, s’1 remplace un autre orme. Cette influence se fait même sentir par le seul voisinage des arbres de même espèce. Le mémoire est terminé par une observation que tout le monde peut faire. Si l’on parcourt un champ de blé situé le long d’un haie garnie de frênes , d’ormes et de chênes, on remarquera que le blé est plus vi- goureux proche de ce dernier arbre qu’aux environs des ormes, et que ce sera le frêne qui aura le plus détérioré la récolte. En examinant les racines de chacun , on reconnaitra que le frêne étend :les siennes à la surface de la terre , et qu’elles ont un L (:262\) chevelu qui se confond avec celles du blé, et qui absorbe sa nourriture. Les racines de l’orme qui s’é- tendent pareillement , ayant moins de chevelu, sont moins nuisibles. Mais celles du chêne s’enfonçant pro- fondément, ne font aucun tort à la récolte , et cet arbre ne peut être préjudiciable que par son ombrage et par l'obstacle qu’il met à la circulation de Pair. Rapport de M. de MANGNEVILLE sur plusieurs ouvrages de M. THIÉBAUD de BERNEAUD , as- socié-correspondant. Le premier de ces ouvrages, qui avaient été ren- voyés à l’examen d’une commission dont M. de Man- gneville a été le rapporteur , a pour titre Mémoire sur le cactus opuntia, que l’auteur recommande de multiplier en France, ainsi que l’insecte qui fournit la cochenille. Après une distinction entre le cacrus opun- tia et Le cactus coccinellifer , indiqué par M. Four- croy dans son système des connnaisances chimiques, la commission en reconnaissant la possibilité d’éléver dans les départemens méridionaux la cochenille, qui y est déjà acclimatée depuis long-temps , pense que c’est à l’expérience à confirmer s'il est avantageux pour la France de s'approprier encore cette produc- tion du nouveau Continent. < (163) Le second Ouvrage est un Mémoire sur La culture des dalhies et sur leurs usages comme ornemens des Jardins et comme plantes économiques. Le rappor- teur remarquesur plusieurs des avantages attribués aux dalhies, qu'ils sont communs au sarrasin, au colzat et à beaucoup d’autres plantes. Le troisième ouvrage , qui n’est point encore ter- . 4 . . CE , ! mine , a pour titre : Essai Critique Sur Les prèjuges et les erreurs populaires en agriculture. Les commis- saires reconnaissent l'utilité de ce travail; mais par- mi les préjugés dont il est fait mention dans les feuilles déjà imprimées , ils en distinguent quine sont point gé- néralement accrédités, comme la transformation du blé en ivraïe et en seigle, et du seigle en orge ; d’autres, comme le tort que la fauchaison des prés fait aux blés , qu'il ne faut pas rejetter, sans examiner s'ils ne doivent point leur origine à quelque vérité dont on aura tiré de fausses conséquences. L'article 4 tend à prouver l’innocuité de l’épine-vinette par rapport aux blés et aux autres vécétaux environnans. La commission ne trouve point les développemens suffisans, ni la preuve complette. Elle termine son rapport par des observa- tions sur le 14€, article de cet ouvrage; et en ad- mettant avec l’auteur que le voisinage des arbres est salutaire à l'homme , pourvu qu'ils ninterceptent point la lumière et la libre circulation dé l'air , et qu'ils n’eñtfetiennent point dans son habitation une humidité constante , elle réfute comme uni très-grande L 2 (164) erreur l’opinion où il est que les arbres ne nuisent point aux végétaux qui croissent sous leur ombre , et en faveur de laquelle il cite entr’auttes le Départe- ment du Calvados, quoiqu'il soit incontestable que labondance de ses récoltes est due à la bonne qua- lité du sol, et qu’elle est toujours beaucoup diminuée par l'ombre des arbres dans les terres où il y en a. Quelques considérations sur Les Albinos, par M. Le SAUVAGE. M. Le Sauvage commence par exposer des idées générales sur la singularité qu’exprime cette dénomi- nation, et il passe ensuite à deux observations qui lui sont personnelles : la première sur un individu âgé de trois ans, nommé Louis-Camille-Pierre Martin , demeurant à Paris; la deuxième sur Pierre Groult, âgé de 19 ans, né à Caen, et résidant maintenant dans l'hôpital de Lisieux. Il donne une descrip- tion exacte de toutes les particularités remarquables dans l’un et dans l’autre, et cite sur le dernier une circonstance qui lui a été attestée par feu M. le Curé de Saint-Etienne. Sa mère s'était, dit-on , fortement attachée à un lapin blanc femelle, qu’elle considé- rait continuellement dans le temps qu’elle était en ceinte, Son mari qui craïgnit les suites de cette fan NE, VE (165) taisie, menaça plusieurs fois de tuer l'animal, et le tua en effet; et c’est à la forte impression que cet évènement avait fait sur cette femme, qu’on s’ac- corda généralement à attribuer la conformation par- ticulière de son enfant. M. Le Sauvage, sans adopter formellement la croyance vulgaire sur ce genre d’in- fluence, rejetté par les savans, quelquefois avec, dé- rision , parce qu'il n’a pas encore été expliqué, croit qu'on ne doit point dédaigner de joindre les faits de cette nature, qui se présentent de nouveau, à la masse de ceux qui ont été précédemment observés, ni regarder la question comme définitivement dé- cidée. | Au reste, 1l réduit ses observations à quelques ré- sultats précis. Les Albinos ont pour principaux ca- ractères les cheveux et les poils du corps très-blancs , les yeux un peu saillans , myopes , très-irritables par l'effet de la lumière solaire , et doués d’une grande et rapide mobilité , ce qui trouble leur vision pen- dant le jour, sans qu'ils aient pour cela la faculté de voir la nuit plutôt que les autres; la pupille d’une couleur rouge plus ou moins foncée, qui s’altère lé- gèrement sur l'iris ; la peau d’une couleur blafarde , le tissu cellulaire peu consistant , et une faiblesse par- ticulière, qui paraît dépendre en grande partie de la prédominance du système Jymphatique, doué d’une très-grande énergie. Des trois circonstançes dans lesquelles on peut L 3 ( 166 ) renfermer ces caractères, savoir le défaut de colora- tion de la peau et des poils, la coloration en rouge de la membrane choroïde ; et la faiblesse du tissu cel- lulaire ; qui influe sur celle de toute l’économie, on peut concevoir la première comme une conséquence de la dernière; mais le rapport de la seconde avec les deux autres ne peut s'expliquer dans l’état actuel de la science. Il serait curieux de connaître si les animaux qui changent accidentellement de pelage éprouvent ce changement dans la couleur de la cho- roïde. Il paraît bien établi que l’organisation particulière des albinos est le résultat d’une altération morbide congénitale , et ne forme point une race distincte de l'espèce humaine , ni un caractère transmissible par la génération, et commun aux individus d’unemême fa- mille. Cette modificationse remarque même dans plu- sieurs classes d'animaux , surtout chez les mammifères, les oiseaux et les poissons ; et l’on doit la regarder dans chaque race primitive de l’homme , comme une nuance extrême , que des nuances intermédiaires rapprochent de celle qui lui est la plus opposée, ( 167 ) Rapport de M. Le SAUVAGE sur un mémoire de M. THILLAYE, associé-correspondant , intirulé : Essai sur une nouvelle théorie de la vision à dis- tances variables dans l’homme et les animaüx. Pour expliquer la faculté merveilleuse que l’homme et la plupart des animaux ont d’apercevoir les objets à des distances très-différentes, on en a cherché les causes dans des variations correspondantes de la forme de la cornée, de la position et de la figure du cristal- lin , dela sclérotique , enfin de l'iris plus contracté ou plus dilaté. M. Thillaye adopte la première, et réfute successivement les autres ; mais en attribuant les va- riétés de la vision aux différentes formes de la cornée , il rejette toutes les explications données à celles-ci, et prétend les faire dépendre des diverses modifications de la choroïde , déterminées elles-mêmes par une affluence du sang dans les nombreux vaisseaux de cette membrane, dont la cause immédiate résiderait dans les diverses impressions de la lumière sur la rétine. Le rapporteur partage le sentiment de l’auteur sur l'influence attribuée au cristallin on à la sclérotique, et assez peu fondée pour dispenser d’une réfutation détaillée. Il admet aussi une partie de ses objec- L3 ( 168 ) tions contre quelques-unes des hypothèses relatives à la cornée ; mais d’autres lui paraissent plus spécieuses que solides , et il les discute avec quelque détail. Quant à la contraction et à la dilatation de l'iris, dont M. Thillaye combat l'influence contre le sen- timent qui se soutient encore avec le plus d'avantage, M. Le Sauvage n’est pas de son avis; et il com- mence par détruire une supposition de fat, qui a pour elle à la vérité la plupart des physiologistes mo- dernes , mais qui est contredite par les expériences de maître Jean. Elle consiste à admettre le resserrement de la pupille dans la vision à petite distance , et sa dilatation dans la vision au loin. Ce point fondamental méritait sans doute d’être vérifié : il l’a été par la commission. M, le Sauvage a rendu compte des expériences qui ont été tentées d’a- bord sur quelques élèves du Lycée , et continuées en- suite avec la plus grande attention sur une douzaine des militaires casernés au château, et placés dans un jour convenable , à portée de voir successivement la batte de Caumont, située à plus de six lieues de distance, les clochers de Samt Etienne, éloignés de plusieurs centaines de toises , et un disque opaque de trois pouces de diamètre tenu à quelques pieds de l'œil. On a constamment remarqué , et sans au- cune exception , que la pupille se resserrait à me- sure que la vue se portait de l’objet le plus proche sur le plus éloigné, et qu’elle se dilatait sensiblement ( 169 ) quand la vue revenait de l’objet le plus éloigné au plus proche. La théorie de M. Thillaye est principalement fondée sur une sympathie entre la rétine et la choroïde, en vertu de laquelle cette dernière membrane, gonflée par l’afluence du sang en raison des distances de la vision, aurait la faculté de comprimer les hu- meurs de l’œil , et de les porter vers la cornée avec assez d'énergie, pour qu’elles pussent étendre et faire saillir en avant cette membrane, ce qui produirait des variations dans l’étendue du diamètre antéropostérieur de Pœil. Cette érectilité de la choroïde est déduite de ses prétendues analogies avec l'Iris, dans lequel tous les physiologistes modernes, et parmi eux M. Mannoir , reconnaissent cette faculté à un haut degré; mais le même M. Mannoir s’est convaincu par ume expérience faite sur l'œil d’un homme récemment décapité, et exposée dans le rapport, que les mou- vemens de l'Iris peuvent être excités indépendamment du gonflement de la choroïide; et de plus les ob- servations de maître Jean, confirmées par celles de la commission, ayant démontré que la dilatation de la pupille est d'autant plus grande, que l’objet de la vision est plus proche, tandis que dans le système de M. Thillaye elie devrait être d’autant moindre, à cause de l'allongement de l'œil , il s'ensuit que l'analyse mise en avant ne peut être soutenue. Au reste le rapporteur , en déclarant, non pas (170) que la théorie de M. Thillaye soit inadmissible , puis- que même M. Mannoir paraît disposé à reconnaitre l’action de la membrane choroiïde dans le phéno- mène dont il s’agit, mais du moins que les preuves dont il l’appuie sont insuffisantes , reconnaît que les difficultés jusqu'ici insurmontables, que présente ce sujet , rendraient son erreur très-excusable , et qu'on ne doit pas moins lui savoir gré de ses efforts et de ses laborieuses recherches , et il donne des éloges à l’ordre qu’il a su mettre dans les nombreux maté- riaux dont il s’est servi. M. Le Sauvage, avant de discuter le système de M. Thillaye, avait insisté sur une distinction essen- tielle entre Îes parties constitutives de l'œil. Il:y re- vient à la fin de son mémoire, qu’il termine ainsi : » L'idée principale par laquelle M. Thillaye s'est laissé séduire était ingénieuse sans doute ; mais elle a dû le conduire à des résultatsinexacts ; et en cela il a par- tagé le sort de la plupart de ses devanciers. On a trop oublié, dans l’étude des phénomènes de la vision , que l'œil était un organe .vivant. À la vérité, quelques particularités de son organisation le placent sous l’empire des lois physiques ; mais elles ne peuvent le soustraire à l'influence des lois physiologiques : et c'est ce que paraissent avoir trop souvent ignoré, et les physiciens, qui se sont exclusivement emparés de cet organe , et les physiologistes , qui se sont con- tentés de leurs explications. Il ont considéré œil (171) comme une machine de dioptrique ,; de même que les chimistes pneumatistes comparaient le poumon à leurs vases inertes, lorsqu'ils voulaient donner un théo- rie de la respiration. Les uns et les autres auraient dû ne jamais perdre de vue cette grande vérité, qu’il existe, comme l’a dit Bichat, deux classes d'êtres , deux classes de propriétés ; deux classes de sciences; et que l’application des lois physiques pour étudier les phénomènes physiologiques, doit donner des ré- sultats aussi fautifs |, que le serait l'emploi des lois physiologiques dans l’étude de la physique. » Rapport de M. Le SAUVAGE sur un mémoire de M. GEOFFROY ayant pour titre : Sur les diffé- rens états des coquillages au sein de la terre. Le rappporteur réduit les idées longuement déve- loppées dans une bonne partie du mémoire , aux quatre propositions suivantes, 1°. Dans les coquilles composées d’une partie nacrée, et d’une partie colorée, quelquefois la première est intacte, la seconde seule a été altérée. 29. La partie colorante. semble résider plus parti- culièrement dans la partie gélatineuse de la coquille , d’où 1l résulte que la destruction de la dernière en- traine toujours celle de la première. (172) 3°. Quelques coquilles fossiles sont uniformément colorées ; et alors elles ont emprunté leur couleur $ qui n’est jamais brillante , aux substances minérales avec lesquelles elles s'étaient trouvées en contact. 4°. Les coquilles pétrifiées ne seraient que des moules , auxquelles la coquillé aurait donné la forme avant de disparaître par l’effet de sa destruction ; et on croit en trouver la preuve dans la disposition de ces fossiles, qui offrent à leur surface les empreintes des saillies au enfoncemens qui existaient à l’intérieur de la coquille. Les trois premières propositions paraissent au rap- porteur n’énoncer que des observations peu impor tantes ; et que l’on peut faire à l’aide de l’examen le plus superficiel des coquilles fossiles. Quant à la quatrième , il la croit inadmissible dans sa généralité. Un rencontre en effet, des pétrifications dont la sur- face indique qu’elles ont été moulées dans des co- quilles ; mais on en trouve aussi qui représentent l'extérieur même de la coquille, et la difficulté d’expli- quer cette étonnante conversion ne saurait la faire re- jetter. Soit qu’on adopte le système du professeur Haui, ou celui de M. Patrin, on ne peut nier qu’il y ait combinaison d’une substance nouvelle avec la partie calcaire de la coquille, et conséquemment-pé- trification. Dans le reste de son memoire, M. Geoffroy s'étend avec beaucoup de complaisance sur les avan= (33) tages qu’on peut tirer de l’érude des coquilles fos< siles, soit pour la détermination de l’âge et des ré- volutions du globe, soit pour le perfectionnement des méthodes conchyliologiques. 11 réfute l’opinion des na- turalistes qui ont prétendu que les espèces de coquilles dont on ne trouve plus les analogues vivantes n’ont point péri, mais que des changemens successifs dans leur forme extérieure les rend méconnaissables, Le rapporteur qui combat aussi cette hypothèse, qu’on a voulu appliquer à tous les êtres organisés , cite contre elle les cadavres d’animaux embaumés depuis deux ou trois mille ans, que M. Geoffroy St.- Hilaire a rapportés d'Egypte, et qui ressemblent parfaitement dans toutes leurs parties aux animaux de même espèce qui existent maintenant. Suivant le rapport, le mémoire de M. Geoffroy annonce un amateur ardent, même enthousiaste de l'histoire naturelle, au moins quant à quelques par- ties ; il est écrit avec correction et exactitude ; et suppose de longues études et des connaissances éten- dues : il faut avouer cependant que l’auteur est loin d’avoir embrassé les considérations les plus relevées et les plus importantes que présentait son objet. (174) Mémoire sur un canal de dérivation de quatre mille soixante-un mètres de longueur & construire dans la plaine de Poses , avec une écluse à Sas, er un pont pour Les communications vicinales , afin d'éviter les difficultés er faire cesser L:s dangers qu'éprouve la navigation de la Seine au pertuis de Poses , par M. LESCAILLE, ingénieur ef chef du Département de l'Eure, associé correspondant. M. Lescaille , aprèsavoir montré succinctement l’im- portance de la navigation dont il s’agit, «en indiquant les nombreuses communications qu’elle facilite , dé- veloppe , d’après les reconnaissances , nivellemens , sondes , et autres opérations faites sur le terrain, les différens travaux qu’il est absolument indispensable d'exécuter pour éviter le passage difficile..et dange- reux du pertuis de Poses. Cette nécessité résulte des retards considérables, de la dépense énorme et des dangers très-graves qu'entraîne l’état actuel de cette navigation, Suivant les détails très-circonstanciés que contient le mémoire, 1l faut ordinairement à un bateau pour monter le pertuis de Poses , depuis vingt- quatre jusqu’à quarante-six chevaux , en raison de ses dimensions , indépendamment de la fourniture des cordages pour le haler , et du salaire des hommes employés à cette opération ; ensorte que d’après des évaluations très-fondées , le prix réduit du pas- £ C175) sage pour un bateau montant s'élève à cent quatre- vingt-serze francs, et pour un bateau descendant à quarante francs, en ne comprenant pas les che- vaux du halage , mais seulement les frais extraordi- naires ; et comme on estime qu’en temps de paix il ne passe pas moins de 36$ bateaux montans, et autant de bateaux descendans , la dépense annuelle monte à 82,490 francs. Si l’on ajoute à la suppression de cette dépense la célérité et la süreté que procurera à la navigation l'établissement proposé, on y trou- vera une ample compensation du prix des travaux qu'il exige , et qui sont évalués à 1,369253 francs, y compris les indemnités à payer aux propriétaires de fonds. Au reste M. Lescaille répond aux objec- tions tirées de quelques intérêts particuliers et de quel- ques considérations locales. À ce mémoire, qui avait été lu dans la séance pu- blique de la Société d'Agriculture, Sciences et Arts du Département de l'Eure, du 16 Mai 1813, était joint le Procès-verbal imprimé, relatif au passage du premier bateau dans la grande écluse du Pont-de- l'Arche sur La rivière de Seine , dans le bras de de- rivation du fossé, daté du 14 Août 1813: Un discours adressé par M. Lescaille à M. Le Comte de Miramon, Préfet du Département de l'Eure, en présence ‘des autorités publiques réunies pour être témoins de ce passage, expose les motifs qui ont fait ordonner l'établissement de cette écluse , les dif- ficultés et toutes les circonstances de son exécution. " RE ST EG EE a SECONDE SECTION. PARTIE LITTÉRAIRE. a" à "| à Sn 7 Essai ou recherches sur Les vrais Élémens de l'histoire ancienne du globe terrestre ,| par M. CaiLLy. L'ivreur présente dans une introduction quel- ques considérations générales sur la multitude et la variété des systèmes de géologie et de cosmogonie, nés de cette curiosité avide et toujours insatiable qui voudrait tout connaître, accommodés aux préjugés des différens peuples, et à l’ambitieuse prétention de chacun d’eux d’être la première souche du genre humain , et le plus souvent confirmés et en quelque sorte consacrés par leur liaison avec les doctrines reli- gieuses. Le progrès deslumières, l’accroissement de tous les moyensd’étendre nos connaissances lui semblent des motifs suffisans pour abandonner tant de vaines théo- ries enfantées par l'imagination et accueillies par la crédulité, et pour chercher dans des études sagement dirigées, des notions plus sûres et mieux fondées sur l'état des anciens habitans de notre terre. Son but n’est point d’assigner une époque à l'existence du globe terrestre, ce qui serait selon lui une folle pré- tention C177) tention et une sotte vanité; mais il prétend établir qu'on ne peut lui refuser une prodigieuse antiquité, et appuyer son opinion sur des preuves avec les- quelles ne pourraient se concilier les systèmes de chronologie les plus suivis, dont il attribue le crédit à l'autorité des Grecset des Romains sur nos jugemens historiques, et à l’empire des principes religieux qui ont été mis dans une sorte de dépendance de ces systèmes. M. Cailly indique quatre sources où l’on peut puiser des lumières satisfaisantes sur le sujet qu’il traite: 1°. la géologie, ou la connaissance du globe ter- restre ; 2°, les monumens épars sur sa surface ; 3°: la tradition des connaissances astronomiques , celle des faits et de ces longs souvenirs perpétués par des usages qui, quoique dénaturés, conservent un reste de leur primitive empreinte ; 4°. enfin la comparaison de quelques faits transmis par les historiens. Il en fait la matière d’autant de chapitres, dont le premier, qui est seul l’objet de ce mémoire , est intitulé : Preuves de la haute antiquité du globe tirées de la géologie. La première de ces preuvesest prise de ces immenses chaïnes de montagnes quartzeuses et granitiques vraï- semblablement antérieures à l'existence de la nature organisée , dont elles ne contiennent aucune trace , et regardées avec raison comme les ossemens ou la charpente primitive du glôbe, Si l’on regarde comme M (178 ) bien établi que ces énormes masses de granit , qui renferment de vastes blocs de quartz ne sont que des crystalhisations ; ou plutôt des aggrégations de crystaux, qui ne sont eux-mêmes qu’une supeérpo- sition successive de lames extrêmement minces, et que leur formation assujettie à une admirable régu- larité, ne peut s’opérer qu'avec une extrême len- teur, combien de siècles a-t-il fallu pour produire ces immenses aggrégations ? Après la formation des roches primitives , dit l’au- teur du mémoire, on découvre les masses schis- teuses ou hétérogènes , qui semblent accolées aux montagnes mères. C’est là que se sont principale- ment formés les minéraux; et ces montagnes secon- daires ont éprouvé plus de bouleversemens et de se- cousses, parce qu'elles renferment plus de matière propre à alimenter ce feu souterrain qui produit les volcans. Untroisième objet que M. Cailly présente commeune preuve bien puissante de son opinion , c’est cette pro- digieuse quantité de terre calcaire dont les couches horizontales recouvrent une partie considérable du globe , tantôt en forme de montagnes, tantôt en forme de plaines. En admettant avec les naturalistes que ces terres proviennent de corps organisés , quel que soit le mode de leur décomposition; en considérant que si la plupart contiennent encore quelques-uns de ces corps en nature, beaucoup de bancs n’en offrent (179) plus aucuns vestiges, et attestent par conséquent uné décompositiorf complète ; en supposant de plus que ces couches alternativesde terre calcaire et de terre vé- gétale, que l’on a trouvées dans plusieurs fouilles, sont dues à des invasions successives de la mer, qui aura recouvert plusieurs fois le sol qu’elle avait plusieurs fois abandonné ; à juger du temps nécessaire à ces grands résultats par celui des changemens presque insensibles dont nous pouvons être témoins , quelle durée prodigieuse ne serait-on pas forcé d'accorder même à la nature vivante ? Ces mers de sable, qui offrent un aspect si effrayant dans le continent de l'Afrique, et dont le temps seul ne semble pas expliquer suffisamment la production ; ces volcans éteints qui n'ont dû leur existence qu’à leur voisinage de la mer, et qui se trouvent dans des lieux qui en sont aujour- d'hui fort éloignés, et qui l’étaient même, tel que le centre de la France, dans les temps les plus re- culés dont l’histoire fasse mention , sont encore des moyens de preuve que M. Caiïlly apporte à l'appui de son système. A loccasion des volcans, l’auteur cite une re- marque intéressante de M. Goux de Faix sur l’Indous- tan. Cet immense pays ne fournit aucune trace ré- elle ou traditionnelle de ces foyers de destruction re- trouvés plus ou moins fréquemment par les voyageurs dans les quatre parties du monde, à l'exception du M 2 Le ( 180 ) seul volcan placé à l'extrémité méridionale de la Presqu'île. Si l’on ajoute à cette singularité la nature: q j 8 et la forme des montagnes , généralement formées de granit bleu ou rouge , en couches toujours pa- rallèlles à Fhorizon et à peu près égales entr’elles , la profondeur de la terre végétale, qui n’a pas moins de dix à douze pieds d’épaisseur , l’absence de piertes calcaires, de silex, de pyrites, de mines à charbon de terre et de métaux ou demi-métaux, enfin de tout indice de bouleversemens, on sera porté à croire que ce pays a été le plus anciennement habité, ainsi que le conclut M. Cailly, qui a donné, au reste, d’amples développemens à tous les moyens de preuve qui n’ont pu qu'être indiqués ici, et qui a confirmé ses explications théoriques par de nombreuses et longues citations de Saussure , de Pallas, de Faujas de Saint-Font, de Humbolt, et par l’autorité de plusieurs autres savans, Il lui restait à répondre aux ebjections de plusieurs hommes instruits contre les conséquences qu’il adopte relativement à l’ancienneté du globe. M. André, qui a visité la chaîne des Alpes , et qui l’a observée avec une exactitude qui n’est point révoquée en doute, y a remarqué une dégradation continuelle et rapide, qui ne permet point d'attribuer à ces montagnes une existence fort ancienne , parce que dans ce cas, elles devraient déjà être totalement détruites. Les attérissemens successifs et assez prompts (18r) | formés par les fleuves lui paraissent aussi repousser l'hypothèse d’une haute antiquité , et il voit dans une grande débâcle la cause des désordres et des irrégularités qu’on voudrait rapporter à une action lente et continue des agens de la nature. M. de Leu méconnaît les invasions de la mer et la dégra- dation successive de ses côtes. Sur ce dernier point, M. Cailly en appelle à des faits notoires observés sur les côtes de la Normandie, et à des changemens no tables consignés dans les chartes encore subsistantes. Il cite à ce sujet , une trentaine de vers d’un voyage de M. de Nesle, qui prouvent que ces effets étaient reconnus. Quant à la supposition d’une débâcle gé- nérale, il la juge insoutenable et contredite par tant de dépôts réguliers, qu’elle n'aurait pu manquer de troubler. Les dégradations observées dans les Alpes et ailleurs ne sont, à son avis, que des accidens par- tiels, qui ne peuvent pas faire juger de l’ensemble. exempt de toute altération considérable, comme le prouvent les deux chaînes des Gates dans l’Indous- tan; et l’on ne saurait attribuer un progrès bien ra- pide aux attérissemens des fleuves, si l’on en juge par ceux du Nil, puisqu'on ne voit pas que depuis Hérodote, c’est-à-dire depuis plus de 22 siècles , ils aient beaucoup aggrandi le sol du Delta Egyptien. Cette première partie du travail de M. Cailly est terminée par la citation d’un passage qui est comme le résumé des propositions qu’elle renferme, et qui a été extrait du Mercure, n°, 436. M 3 (182) ji Description de l'ouverture de l'avant-port de Cher- bourg qui a eu lieu le 27 Août 1813 , et détails sur ce qui s’est passé à cette occasion, par M. LAIR. Il y avait déjà plusieurs jours que M. Lair visi- tait les travaux maritimes de Cherbourg avec l’admi- , ration d’un amateur zélé et l'intérêt d’un citoyen rempli de l'amour de la patrie, lorsque l’on con- somma la confection du nouveau bassin, en lui ou- vrant une communication avec la mer ; et l’âme toute pleine de ce grand spectacle et des sentimens qu'il avait excités en lui, il voulut faire partager à ses col- Jègues , autant qu'il était possible , les jouissances qu'il avait éprouvées, en leur faisant un récit exact et dé- taillé, non seulement de ce qu'ilavait vu, mais même de ce qu'il avait senti et pensé. La rade de Cherbourg, qui s'étend au Nord de la Ville jusqu'à environ une lieue en mer , sur une étendue bien plus considérable de l'Est à l'Ouest, est fermée par des forts, dont la batterie Napoléon complète la ligne, en partageant en deux une passe beaucoup trop large , eten ne laissant à chaque extré- mité de la nouvelle digue qu’une entrée peu spacieuse, qui ne pourrait être franchie de vive-force. Dans la ’ (185) partie occidentale de cette rade, et tout près de la terre, la nature offrait un espace resserré et profond entre deux rochers , dont on concut le projet de faire l'entrée d’un port, où les plus grands vaisseaux pussent accéder non-seulement dans toutes les hautes mers, mais encore une heure environ avant ou après les basses marées. Une pareille entreprise , en promettant des avantages immenses à notre navigation , présen- tait des difficultés effrayantes. La plus grande, sans doute, était d’élever dans l’ouverture formée natu- rellement, une digue qui fût assez solide pour sou- tenir le poids des eaux , et surtout les efforts des plus violentes tempêtes pendant un assez grand nombre d’années , nécessaire pour creuser un port derrière cette digue, et qui fût, d’un autre côté , assez mobile pour pouvoir être enlevée complète- ment et facilement à la fin des travaux ; et c’est ce que l’Art a exécuté, Après la construction de deux môles en granit, qui réduisaient le passage à une largeur de 196 pieds 8 pouces, on a mis à flot le 3 Septembre 1807 un vaste batardeau construit à peu de distance de là, et on l’a enfoncé dans l’es- pace que laissait les deux môles. Ce batardeau n’é- tait pas d’une seule construction. Sa partie princi- pale consistait en une espèce de grand bateau de 142 pieds de long , sur 84 pieds de largeur à la base, 44 au sommet, et 40 pieds de hauteur ver ticale. Les deux, intervalles qui restaient jusqu'aux M 4 | (184) môles, et qui formaient ensemble une longueur de 54 pieds , furent remplis par des pièces additionnelles et d’une construction analogue au système principal. Cest à l'abri de cette digue factice, ouvrage de M. Guillaume, à laquelle on avait donné une soli- dité à toute épreuve, en l’emplissant de sable et de terre glaise, et par tous les autres moyens de l'Art, qu'on a creusé un chenal , qui va en s’élargissant depuis 196 pieds qu'il a entre les môles , jusqu’à 308, sur une longueur de 247, et à la suite de ce che nal,un bassin formant un parallélogramme de 900 pieds de long , sur 720 de large, et $$ de profon- deur. Le chenal est moins profond d’environ $ pieds. Le tout a été creusé dans un schiste généralement quartzeux , dont la dureté augmentait à mesure qu’on allait plus avant. La partie supérieure de cette enceinte est revêtue d’un mur de granit solidement construit; mais depuis le fond jusqu’à environ 24 pieds de hau- teur , le talus, incliné de 4$ degrés à la verticale , est formé du roc même, qui est continu sans aucune interruption , et qui a été taillé avec le même soin que des pierres de maçonnerie, Dans cette enceinte ont été pratiquées deux embrâsures , dont l’une du côté du fort Homet, c’est-à-dire vers le Nord,momentané- ment fermée par un bateau-porte , doit faire la com- munication du bassin déjà creusé, et qui n’est des- üné qu’à servir d’avant-port , avec le bassin des ara memens, qui est déjà fort avancéghet qui doit être C185) terminé dans deux ans. Dans le côté opposé , la seconde ouverture présente une belle forme en granit, taillée avec une perfection étonnante, dans laquelle les vaisseaux de la plus grande dimension pourront être construits ou radoubés. Il avait été creusé au fond du bassin deux fosses , l’une en avant de la forme dont on vient de parler, l’autre en face de la passe, dans chacune desquelles on déposa le 23 Août, en présence du ministre de la Marine, une plaque en platine , où était gravée la date de la construction du port, avec ses principales circons- tances, et une boîte en bois de chêne recouverte d’une feuille de plomb, contenant toutes les pièces de monnaie Française en circulation, et 80 médailles en bronze du règne de l'Empereur. Une filtration d’eau appellée Renard, qu'aucun moyen n'avait pu arrêter pendant toute la durée des travaux , avait nécessité l'établissement de trois pompes à feu, pour maintenir à sec le fond du bassin. L’enceinte du port se trouvait fermée par des retranchemens garnis de canons , surtout près de la passe. Sur l’un des deux môles on doit élever un phare , et sur l’autre un sémaphore. M. Lair a ajouté aux mesures linéaires que nous avons données les superficies et les volumes, qu'il est facile d’en déduire, à l’aide du calcul. | Ce fut le Vendredi 27 Août que le bassin fut ouvert aux eaux de la mer. On avait employé beau- coup d'ouvriers , d’abord à faire des ouvertures dans ( 186') lebatardeau, et à le décharger d’une partie du sable et de la terre glaise qu'il contenait, et ensuite à en sapper les appuis. Sur les cinq heures un quart du soir , la marée étant parvenue à une certaine hauteur , l'eau commença à entrer par trois ouvertures , en aug- mentant toujours de volume, et présentant un spectacle de plus en plus intéressant. M. Lair en détaille avec le plus grand soin toutes les particularités, Il nomme beaucoup de personnes distinguées par leur mérite , qui se trouvèrent parmi la foule des curieux, et il n'oublie pas de payer un juste tribut de louanges à M. Cachin, directeur de ces importans travaux. Notre confrère méritait bien par son empressement et sa persévérance, de ne rien perdre d’un événement si remarquable. Il était resté avec un très-petit nombre de spectateurs , lorsqu'à neuf heures du soir , un craquement épouvantable et une secousse violente an- noncèrent la rupture du batardeau du côté du bassin. Des pièces de la charpente se détachèrent à plu- sieurs reprises , et la mer se précipitant avec impé- tuosité eut rempli en une demi-heure la vaste ca- pacité de l’avant-port. C'est avec un véritable en- thousiasme que M. Lair décrit cette scène ma- gnifique , dont les effets étaient agréablement variés par les reflets des lampions et des pots à feu rangés dans le batardeau et le long du bassin. Ce serait af- fablir l'idée du tableau qu’il en a tracé que de vouloir en offrir une esquisse, et il paraît suffire au but de (187) cet extrait d’avoir recueilli les faits principaux aux- quels peuvent tenir des résultats éminemment utiles. LA Notice sur M. Foucault, intendant de la généralité de Caen, par M. Lair. É F M. Foucault joignait aux qualités ES précieuses de l’hemme public, l'amour actif des lettres et des sciences. Cet administrateur n’a pas seulement le mérite d’avoir obtenu en 170$ à la ville de Caen l'établissement d'une Académie Royale de Belles- Lettres, dont Louis XIV: le nomma protecteur; il se livrait particulièrement à l'étude des antiquités. On lui doit la découverte de l’ouvrage , attribué à Lac- tance, et publié par Baluze, de Mortibus persecuto- rum ; des fouilles considérables faites à Vieux par ses ordres , et continuées avec zèle jusqu’à l’époque où il fut appellé à Paris, pour y remplir les fonctions de Conseiller d'État , et de chef du Conseil de Madame ; D'autres fouilles en différens endroits de son Département , et entr’autes celles à 4/Laume proche la butte du Monr-Cätre, aux environs de Valognes , consignées dans les mémoires de Caylus, et rappelées dans le rapport général sur les travaux de l’Académie de Caen imprimé en 1811. Ses obser- vations sont insérées dans les mémoires de l’Académie des inscriptions et Belles-Lettres de Paris, dont il était (188) membre honoraire. Il composa sous le titre de San- martiniana , Un recueil des traitsles pluspiquans de la vie singulière de l'abbé de Saint Martin. En parlant des nombreux objets d’antiquités recueillis par ses soins, M. Laiïr regrette qu’au lieu d’être rassemblés à Caen dans un dépôt public, ils soient dispersés au loin, et à-peu-près perdus pour la Ville qui avait le plus d'intérêt et de droit à les conserver. Mémoire sur les Trouvères Normands et Anglo-Nor- mands , par M. DELARUE. Ce mémoire n’est qu’un extrait d’un ouvrage plus étendu ayant pour titre : Histoire des Trouvères Nor- mands. L’auteur ne l’ayant point déposé, il ne peut en être rendu compte dans ce rapport. Notice sur une partie de la Moscovie , sur Moscou et le Kremlin, par M. CAILLY fils, associé-corres- pondant. L’invasion de l’ancienne Moscovie par une armée composée de Français, d’Italiens , d'Espagnols, de Portugais et des peuples de la confédération du ( 189 ) Rhin, sera, comme le dit en commençant M. Cailly; un évènement mémorable et un phénomène politique. Elle fournissait à un observateur instruit et attentif une belle occasion pourrectifier des relations inexactes , ou faire connaître les changemens et les amélio- rations qui se sont opérés dans ce pays; et c’est dans cet esprit qu'a été rédigée la notice. L'auteur, en suivant la route que l’armée a parcourue , parle d’abord de la ville de Smolensk , dont il donne l’historique et la description. Elle avait, dit-on, 1500 maisons et 12000 habitans; mais elle était en partie incendiée et entièrement déserte. Sa position sur le penchant d’une colline à la droite du Borystène , et au milieu d’une campagne bien cultivée et semée de bouquéts de différens arbres, lui donnait un as- pect très-pittoresque. Cest dans la plaine en avant de Smolensk que se donna la bataille du 17 Août- 1812. ‘Au retour de l’armée, les fortifications de cette Ville ont été détruites. Pour aller de Smolensk à Moscou, on ne trouve point, comme on le prétendait, une forêt de 50 lieues, mais une belle route, large et garnie de fossés , sur laquelle on rencontre , à la distance de 21 lieues, Dorogobou; , ville très-importante dès le 11°. siècle ; puis, 15 lieues plus loin, Viazma, et ensuite Phjat et|Porodino , gros bourg en avant de Mojaisk , petite ville à 24 lieues de Moscou. C’est à trois lieues en deçà de Mojaisk que se donna le 7 Sep- L __ (190) tembre la fameuse bataille de la Moscoua. M. Caïlly donne sur la position, l'importance et le commerce deices différens endroits des détails intéressans, des- quels on peut conclure avec lui que la Moscovié était depuis long-temps civilisée. | Moscou est l’objet que l'auteur de la notice pa- raît avoir eu principalement en vue, et sur lequel il s'étend davantage, Il considère cette ancienne ca- pitale sous tous les rapports dignes d’observation ; et l’idée qu’il donne de son étendue , de ses riches- ses et de sa magnificence, ne peut qu’exciter l’m- dignation contre l’entreprise ambitieuse qui porta son gouvernement à l’affreuse résolution de faire de cette Ville la proie des flammes , et de causer à ses peuples une perte évaluée à plus de deux milliards et demi. Le Kremlin occupe une place considérable dans la rela- tion de M. Cailly. C’est la partie la plus petite et la plus ancienne de cette grandeVille, dont l’origine ne remonte pas fort haut , et qui avait pris des accroissemens suc- cessifs ,. distingués par les dénominations de ses quatre quartiers ou villes, savoir outre le Kremlin, lé Karaïgorod, ou ville Chinoise, occupé non par des Chinois, mais par des étrangers et des mar- chands; Biclogorod, ou ville Blanche , et Zembia- noigorod , ou la ville de Terre, qui enveloppe les trois autres. Ces quatre villes sont entourées de plus de trente vastes faubourgs. Le Kremlin ne forme pas , comme l’a dit l’auteur du tableau dela Russie, (rot) un triangle parfait ; mais c’est un vrai trapézoide. Il contient un grand nombre d’édifices publics, entr’au- tres un ancien palais des Czars, qu'Ivan Vasilic- “witch fit achever et augmenter vers la fin du 15°. siècle ; plusieurs Églises, dont deux principales , ap- pelées de la Mort de la Vierge et de ! Archange Mr- chel, étaient consacrées, l’une au sacre des Czars, l’autre à renfermer leurs tombeaux, et toutes deux richement décorées. On voyait dans la première un lustre d'argent massif, d’une dimension extraordi- naire , donne à Boris-Gondenow par la République de Venise. À côté de la Métropole s'élevait la tour d’I- van , qui contenait la fameuse cloche du poids de 480,000 liv. Elle est maintenant enfoncée en terre; mais un large fossé pratiqué tout au tour permet d'entrer dans l’intérieur par une échancrure qui s’est faite lors de sa chute. M. Cailly estime son diamè- tre de 30 pieds et sa hauteur de 25. On remar- quait aussi dans le Kremlin le palais du Sénat et celui où les Empereurs donnoient leurs audiences, deux édifices d’une architecture moderne et élégante , distribués et décorés avec goût. Moscou , dont une bonne partie avait été renouvel- lée depuis 15 à 16 ans, offrait le contraste de beau- coup de monumens de nos arts perfectionnés, avec ces masses colossales et surchargées d’ornemens, où lon trouvait le caractère de l’ancienne architecture des Russes; et le beau était mêlé avec le bizarre. ‘(in) On pourrait remarquer une opposition analogue en< tre la civilisation de plusieurs seigneurs Russes d’un esprit cultivé et orné, et la grossièreté barbare de la multitude , surtout dans les contrées éloignées de Pétersbourg. Il est à regretter que M. Cailly n’ait pas été à portée de considérer avec détail les mœurs d’un peuple, qui fait encore la guerre comme dans le 11€. et le 12€. siècle, s'enfuit après avoir ra- vagé et incendié son pays, au lieu de le défendre, pour ne laisser à l'ennemi que des cendres et des ruines. Sans doute il nous aurait fait connaître le caractère, les vices et les vertus, les préjugés et les sentimens de cette nation, aussi exactement qu’il nous a fait connaître la situation , les agrémens , les commodités et les défauts de leurs cités et de leurs constructions. TE Nouce sur Les ruines de Juliobona , capitale des Caletes ox Caleti, par M. REVER; associé cor- respondant,. M. Rever ne se propose point de discuter dans cette notice l'emplacement de l’ancienne ville de Ju- liobona , ni de réfuter les erreurs commises à ce sujet , parce qu'il regarde comme hors de doute qu'elle existait où est la ville actuelle de Lille- bonne ; (193) bonne ; mais le résumé de ses recherches a pour but de prouver que c’est mal-àä-propos qu’on prend ce qui reste du châteaü pour les débris d’une construc- tion Romaine , tandis qu’il ne remonte pas au delà du 13°. ou du 12€. siècle, et que par rapport à l'ancien théâtre, qui suffit pour constater l’impor- tance de la ville, la description qu’on en a faite n’est pas exempte d’exagération. Sur le premier point, notre collègue , qui a tout examiné avec un soin scru- puleux , tire ses preuves de la forme des croisées, dont une subsiste encore en assez grande partie pour qu’on ÿ reconnaisse le caractère d’une construction gothi- que; des ruines d’une tour ‘octogone, dent il ne reste plus que trois pans, et qui portent visiblement le même caractère, n'ayant ni petit carré dans les pa- remens de moëllon, ni chaînes de brique entre les assises de pierre, et étant surchargées d’un attirail d'architecture qui ne saurait appartenir aux Romains ; mais surtout de la voûte du troisième et dernier étage , dont la clef présente un écusson que M. Rever aperçut facilement dans tous ses détails, à la faveur d’une large brèche faite pendant la révo- lution , et qui éclaire parfaitement cette partie, au- paravant obscure , et au moyen d’un échafaud qu'il fit suspendre aux arrêtes de cette voûte en ruine pour voir de plus près ces armoiries, et même en prendre un creux en plâtre, Commeil s’est bien assuré que cet écusson est du temps même où la tour a N (194) été construite, et qu’il n'y a aucun changement fait q y 8 à la clef ou à la sculpture dont elle est ornée, il a acquis une entière conviction de Porigine gothique de ce château. Quant au théâtre, les déblais accidentels de l’an- née dernière, dont M. Rever a tiré un grand parti pour ses recherches , au moyen de quelques sacrifices pécuniaires, l’ont mis à portée d’en lever le plan d’une manière exacte ; et de découvrir plusieurs par- ticularités remarquables , qu’il a consignées dans le rapport de ses mesures. Une singularité dont il n'a pu s'expliquer la cause, c’est que la plus grande partie des murs ne se joignent que par approche, et ne sont pas liaisonnés entr'eux. Entre les objets trouvés dans ces ruines, et la plupart insignifians notre collègue en distingue trois, qu’il décrit. Le premier n’est qu’un fragment de vase de verre. C’est une portion de fond, sur laquelle des lettres en relief, qui font partie du nom de la fabrique ou de l’ou- vrier, prouvent que le verre amolli fut pressé dans un moule où des caractères étaient gravés en creux. Mais ce qu’il trouve plus curieux , c’est un reste d’at- tache appellée Ponty par les ouvriers, située au fond du vase , et très-rare dans les vases antiques. Cette attache indique que ce vase, quoique grand, fut tenu suspendu au bout de la canne sur le fourneau, et non avec une pince à ressort, selon l'usage gé- néral des Romains, Le second objet est un cachet (195) d’oculiste , pareil à ceux qu'a publiés M. de Caylus , et qui se trouve aujourd’hui le 12°. de son genre. C’est un carré de pierre verdätre , dont chaque tranche porte deux lignes de lettres en creux , et dans un ordre renversé, destinés à être appliqués sur des collyres secs, ou peut-être sur des phioles de col- lyres liquides , recouvertes à cette fin d’une couche de cire. La première partie de ces inscriptions com- mune aux quatre faces, et composée des lettres TIBIULCLARI, est interprétée par M. Rever TI- Berii IVLii CLARI, prénoms et nom de l'ocu- liste. La seconde partie est, sur la première tranche, DIALEPIDADASPR , interprété DIALEPIDium AD ASPRiütudinem , collyre à la Cardamine contre l’as- pritudo où aspretudo des anciens , c’est-à-dire, le gonflement et linduration squameuse des paupières ; sur la seconde, DIALIBANVADIM , interprété DIA4= LIBANUM, AD IMpetum , collyre à l’encens con- tre l’ophtalmie; sur la troisième DIARODONPIM, ( DIARODON POst 1Mpetum , ) collyre à la rose contre les suites de l’ophtalmie; et sur la qua- trième , DIAMISADUC , interprété DIAMISY ou DIAMISios AD ULcus coërcendum , collyre mi- néral pour la guérison des ulcères. Au reste ces interprétations sont développées et appuyées. Le 3°. objet est une tête d’enfant en bronze, qui ser- vait de poids à une balance. Un autre qui mérite encore d’être cité, est un fragment de tablette dé N 2 ( 196 ) marbre , portant des traces d'inscription des deux côtés. M. Rever juge que c’est une tablette retour- née , dont on se sera servi pour un nouvel usage, et que les deux inscriptions ne sont point du même- temps , conjecture confirmée par la différence de leurs caractères , et la position renversée de l’une par rapport à l’autre. Ce qu'il y a de frappant dans ces fouilles, c’est la disparate des objets qu’elles ren- ferment, et leur peu de rapport avec la destination d’un théâtre. Notre collègue a dessiné et fait graver les parties de construction sur lesquelles il a établi ses raisonnemens , ainsi que le cachet-étiqueté, deux petits vases en bronze, et une urne cinéraire , etila ajouté quelques notes, dont une entr'autres con- tient une observation importante. N’ayant pu bien faire prendre le plâtre dont il se servait pour avoir l'empreinte de l’écusson , il reconnut, conformément au soupçon du couvreur qui lavait fourni, que cela venait de l’eau de puits avec laquelle on l'avait gâché ; et un nouvel essai qu’il fit, en employant l'eau de rivière , eut un succès complet. ( 197) Description des autels de l’ancienne chapelle du Mont- Dol, canton de Dol, Arrondissement de Saint- Malo, Département d'Ille-er-Villaine , par M. REVER , associé-correspondant. Ce second mémoire de M. Rever, aussi enrichi de notes,et de gravures, commence par une courte dissertation sur les sacrifices appelés Touroboles , qu’il ne fait pas remonter au delà du second siècle de l'Ëre Chrétienne , et pour lesquels, selon un pas- sage cité du poëte Prudence, on se servait d’une fosse recouverte d’ais mal joints et percés pour donner passage au sang du taureau qu’on immolait sur cette espèce de planche. Le Grand-Prêtre, revêtu de ses ornemens pontificaux , descendait dans la fosse, pour y recevoir ce sang sur son corps, et sur ses vête- mens, qu’il étendait à cette fin. Notre collègue ra- conte ensuite la découverte et donne une descrip- tion exacte de deux autels trouvés dans une an- cienne chapelle , bâtie sur la pointe orientale du Mont-Dol, au Département d’Ille-et-Vilaine, dé- pendante de l’abbaye de Saint Michel, et entretenue sous l’invocation du même Saint, jusqu’à sa sup- pression vers le milieu du siècle dernier , dont il a recueilli exactement , et fait constater par l’adminis- N 3 (198 ) tration municipale de Dol la forme, les dimensions et les particularités. Il paraît certain que les tauro- boles et quelques autres sortes de purifications ou de consécrations analogues, inconnues avant l’éta- blissement du christianisme , n’avaient été instituées que pour être mises en opposition avec le baptême des chrétiens, et qu’on eut d'autant plus de zèle à en détruire toutes les traces , lorsque le paganisme succomba entièrement ; en sorte qu’on doit regarder comme un phénomène la conservation au moins partielle de deux tables d’autel qui en rappellent l'idée , et qui n’ont pu échapper à la destruction que par la nouvelle destination à laquelle on les a appropriées , en les faisant servir au culte nouveau, ainsi que la chapelle où ils étaient. Pour ne perdre rien d’essentiel des descriptions de M. Rever , il faudrait les copier en entier. On se fera cependant une idée de ce monument , si l’on conçoit un corps de bâtiment long à l’intérieur d’environ 16 mètres et large de $ au plus, dont un bon tiers à l’opposite de la porte d’entrée, forme une espèce de chapelle , qui communique avec le reste par une large porte. Une autre chapelle un peu moins grande, a été cons- truite à côté de cette première à droite, ensorte que tout l'édifice a la forme d’une clef ou d’une hache. La seconde chapelle a une porte de com- munication avec la première , et en outre une porte extérieure, plus grande même que celle du bâtiment ( 199 ) principal ; et tournée comme elle vers l'Occident. Chaque chapelle avait en face de l'entrée un autel adossé contre le pignon oriental. La pièce principale de cet autel et la plus remarquable, était une table de pierre d'environ 6 pieds et demi, dans la plus grande des deux chapelles, et cinq pieds dans l’autre, . percée de trois rangs de trémies carrées, ayant six à sept pouces de large à l’entrée, et rétrécies de ma- nière à n’avoir plus qu’un pouce et demi au fond, Chaque rang contenait neuf trémies, dans la plus grande table , et seulement sept dans la plus petite. Ces deux autels avaient quelques autres différences de dimensions. On avait pratiqué derrière chacun d’eux une petite porte dans le pignon, qui répondait au- dessous de l’autel, vis-à-vis le plus grand. intervalle que laissaient ses supports. . M. Rever est persuadé que Prudence , voulant faire sentir la honte et le ridicule des tauroboles , a par une exagération poétique , réuni toutes les cir- constances les plus propres à remplir son but, mais qu’on ne doit pas croire pour cela qu’on ne se servit que de fosses pour ces sacrifices. Le luxe que les Romains mettaient dans leur culte religieux, ne per- met pas de douter qu’ils ne les fissent comme les autres dans des temples et sur des autels , hors cer- tains cas de nécessité , comme dans un temps de persécution, où l’on pouvait y suppléer par une fosse. Mais les fortes raisons qu'il a de juger que N 4 ( 200 ) les autels trouvés sur le Mont-Dol, étaient destinés à cet usage , se trouvent combattus par des circons- tances embarassantes. Ni l'étendue des autels , ni l'espace qui les entourait , ne permettent de sup- poser qu’on y püt étendre un taureau vivant pour l'y égorger. De plus le peu d’ouverture des petites portes ou fenêtres, à peine hautes de 22 pouces et larges de 14, pratiquées dans un mur de deux pieds d'épaisseur, ne pouvaient donner un passage suffi- sant pour pénétrer sous l’autel, où il n’y avait pas d’ailleurs assez d’espace pour qu’un homme , même d’une petite stature , püt se tenir ou se mouvoir sans une gêne extrême. M. Rever ne peut opposer à ces difficultés que des conjectures , mais qui ne sont pas dénuées de vraisemblance. Comme il devoit s’agir dans ces sacrifices de recevoir une ablution de sang, ainsi que les chrétiens , dans leur bâptême , en re- cevaient une d’eau , il devait suffire que celui qui voulait être purifié pût avancer sa tête jusque sous une partie des trous ou trémies dont l'autel était percé ; et si, commeil est probable, les enfans étaient admis à cette purification , ils pouvaient facilement aller tout-à-fait jusque dans l’intérieur. Cette dernière supposition sert même à expliquer pourquoi il y avait deux autels , parce que l’affluence pouvait être assez grande pour qu’un seul ne pût sufhre, soit qu’alors ce point füt le centre d’une nombreuse population, soit qu'étant isolé et d’un difficile accès , 1l présentât (201) par cela même un attrait de plus à la dévotion; dont le caractère est souvent de braver les obstacles. Quant aux victimes , rien n’empêche de penser qu’au lieu de forts taureaux, on immolât de jeunes veaux ; ou bien des béliers, et même des chèvres; car les payens attribuaient aussi une vertu sanctifiante au criobole et à l'ægibole ou æœgobok; et les autels du Mont-Dol étaient suffisans pour ces sacrifices. Ces explications sont d’autant plus admissibles ,| que les dispositions de ces autels sont entièrement opposées aux usages chrétiens, que leur établissement porte le sceau d’une construction Romaine , et que les payens n’avaient nulle autre espèce de sacrifice à laquelle ils pussent convenir. Recherches sur un camp Romain qui existe dans Le Cotentin , par M. LEHÉRICIER de GER- VILLE, de Valognes. M. de Gerville se propose de prouver qu’un lieu situé sur la partie orientale de la montagne connue aujourd’hui sous le nom de Monr-Castre, à peu près à égale distance de Valognes et de Coutances, et à une demi-lieue de la route d’Alleaume à Rennes, est le véritable emplacement d’un camp Romain établi par Sabinus lan de Rome 696, et mentionné ( 202 ) en plusieurs endroïts des commentaires de César. L'auteur montre d’abord par des citations très-for- melles , que ce camp de Sabinus était situé dans le pays des Unelli, qui d’après l'opinion de Nicolas Sanson , adoptée par Danville et par tous les savans, ne peut se chercher ailleurs que dans le Cotentin; qu'il était placé dans un lieu élevé , et qu'il pré- sentait toutes les commodités ; qu’il contenait trois légions ; que Viridorix , Général des Unelli , auxquels s'étaient joints les Aulerci-Eburovices et les Lexovz , campait à deux milles de distance ; que le terrain qui terminait le camp, Romain du côté des enne- mis était en pente douce sur une longueur d’environ mille pas. Or toutes ces circonstances se retrouvent avec la plus grande précision dans le Mont-Castre. Le terrain est élevé et domine toute la plaine en- vironnante , principalement le camp des Gaulois ; il fournit de l’eau en abondauce, même dans les étés les plus secs; son étendue est d'environ quatre- vingts arpens , espace nécessaire pour le GApANEnE de trois légions , d'après Polybe, qui évalue à 25 ou 26 arpens l’emplacement de chaque légion ; ensorte qu’on peut lui appliquer ce que Tacite dit du camp de Varus, que ses dimensions le faisaient facilement reconnaître pour avoir contenu trois légions. Au reste, la solidité des travaux, la largeur et la pro- fondeur des fossés | qui varient suivant la disposition du sol, l’enceinte du prétoire, connue dans le pays (203 ) sous le nom de Donjon, ainsi que le point nommé par Rosier Lorica castrorum ; appellé aujourd’hui sangle du Donjon, la distribution des portes, entre lesquelles on distingue particulièrement celle qui devait être la décumane , et enfin une foule d’autres parti- cularités faciles à retrouver, malgré le bois dont cet emplacement est couvert , ne permettent pas de mécon- naître les restes d’un camp Romain. Mais une circons- tance unique et décisive, c’est qu’à deux milles de ce camp se trouve un lieu nommé les Casrillons ( nom qui comme celui de mont castre rappelle son ancien usage ) qui ne peut être que l’ancien camp de Viride- tix , situé effectivement à deux milles de celui des Ro- mains , suivant le récit de César. Il est aussi sur une hauteur dans la lande de Lanne, et présente une imitation, mais très-imparfaite de la castramé- tation Romaine , dont les Gaulois avaient acquis quelques notions par des prisonniers. Malgré les tra- vaux qui ont défiguré cet emplacement, on y aper- çoit encore très-bien des carrés assez réguliers ; mais on y distingue trois enceintes séparées, et trois pré- toires , dont un, qui est le plus grand de tous domine toute la lande. Ce dernier, dit l’auteur, désigne- rait-il le quartier de Viridorix lui-même, chef des Unelli et des peuples voisins ? et les deux autres étaient-ils pour les chefs des deux peuples confédérés ? c’est une conjecture assez vraisemblable. M. de Gerville répond à l'objection qu’on pourrait ( 104) tirer de la forme du camp qu'il a observé, et dont il a levé le périmètre. Il s’en faut beaucoup que cette forme présente un carré, quoique Polybe, Rosin, Juste - Lipse et Rollin s'accordent à représenter les camps Romains carrés. Outre que la raison seule 5m que la préférence donnée à cette forme, était subordonnée aux localités , l’auteur du mémoire prouve par des passages de Varron et d’Ammien Marcellin, qu’il y avait en effet de fréquentes exceptions, et il ajoute que de tous les camps Romains qu’ila vus dans le Cotentin pas un seul n’a une enceinte carrée. Eu citant une opinion de M. le Franc , qui plaçait le camp de Sabinus dans un lieu nommé le Champre- pus , fondé principalement , et peut-être uniquement , sur une prétendue analogie entre le nom de 7%ri- dorix et celui du Fief de Vierville, où ce lieu était situé, il croit inutile de la discuter à fond. Le plan seul, qu'il a vu, a suffi pour le convaincre que ce camp , si c'en était un, loin d’avoir pu convenir au campement de trois légions, est d’une telle étendue, que les Romains n’ont jamais eu d’armée assez con- sidérable pour un tel emplacement , puisqu'il contient plus de 700 hectares, au lieu de 40 environ que devait avoir le camp de Sabinus, D'ailleurs on ne trouve à la distance indiquée par César aucune lo- calité qui présente la moindre trace du camp des Gaulois, (205 ) Recherches sur le pays des Unelli, et sur Les Villes qui y ont existé sous la domination Romaine, par M. le HERICIER de GERVILLE. M. de Gerville commence par réunir les preuves qui ne permettent pas de douter que le pays des Unelli ne soit situé dansle Cotentin. Mais à la suite de cette opinion , sur laquelle l'accord des savans est à peu près unanime, il s’en présente d’autres bien plus embarassantes sur l’emplacement des Villes qui ont existé dans ce pays du temps des Romains. Les principaux systèmes sur cet objet sont présentés successivement et discutés avec une critique très-ju- dicieuse. Un précis qui termine le mémoire contient le résultat de ces discussions , suivant lequel , l’opi- nion de Sanson , adoptée généralement pendant plus d’un siècle, et qui place Coriallum à Cherbourg , Cosedia à Coutances , ainsi que Constantia , qui est un nom postérieur, Æ/auna à Alleaume, et Crocia- sonum à Carentan , est de beaucoup la mieux éta- blie , parce que toutes les positions qu’il indique offrent des antiquités Romaines, et que leurs dis- tances respectives s’accordent avec la table Théodo- sienne et l'itinéraire d’Antonin, à l'exception pour- tant de celle d’Alleaume à Carentan, qu’on ne pour- (206 ) | rait faire cadrer avec celle que la table de Pentinger indique entre. A/auna et Crociatonum : les autres systèmes sont encore plus embarassans à cet égard. Celui de M. Danville, adopté servilement par de bons géographes, est déclaré le moins probable ; et cet exemple amène quelques réflexions judicieuses sur l'inconvénient des grandes réputations , qui paraissent à beaucoup d'écrivains des titres suffisans pour faire adopter sans examen l'opinion d’un auteur, sur tous les points, parce qu'il a eu raison sur plusieurs. Sur un pavé en mosaïque trouvé a Vieux. Je fis connaître à l’Académie, vers le commen- cement de cette année, qu’en creusant un fossé entre deux champs , dont l’un appartenait à M. Rousselin, on avait trouvé un pavé en mosaique , qui n'était recouvert d’un côté que de trois ou quatre pieds de terre, et de l’autre de quelques pieds de plus. M. Vautier, professeur de rhétorique, en m'informant de ce fait, qu'il avait vérifié avec M. Rousselin fils, n’avait remis quelques échantillons ;” et un plan linéaire en raccourci de la partie qui avait été mise à découvert, et dont la longueur n’était pas de plus de quatre pieds et demi, sur environ quinze pouces de largeur, parce que le dégel sur- (207) ventf à la suite d’une forte gelée n’avait pas permis d'enlever la terre au-delà sans endommager le pavé. Cette portion de mosaique , qui n’était terminée d'aucun côté, présentait deux carrés presque entiers et le commencement d’un troisième , disposés sur la même ligne, dont les côtés étaient de six à sept pouces , et qui étaient séparés par des intervalles de même largeur. Ces carrés étaient remplis de petits dés en pierre noire, de cinq à six lignes, et les inter- valles, ainsi qu’une bordure qui en entourait un nombre inconnu, et qui n'avait pas plus de deux pouces de largeur, étaient remplis d’autres dés en marbre blanc, un peu plus petits. que les précédens. Une enceinte qui enveloppait le tout , et dont l'étendue n'avait pu être déterminée , était formée de dés en terre rougeâtre , les plus grands de tous. Ce payé était posé sur une couche de mortier de plusieurs pouces d'épaisseur. On trouve dans les champs Voisins une grande quantité de fragmens d’une espèce de brique à rebord , composée de terre rouge, dont un échantillon a été mis sous les yeux des meinbres, ainsi que des dés des trois espèces mentionnées. Des commissaires furent chargés de se transporter sur les lieux , et de faire les recherches et les fouilles nécessaires pour découvrir la nature et l’usage de l’é- difice qui a existé dans cet emplacement. Ils n’ont point encore fait leur rapport à l’Académie ; mais M. Vautier , qui avait donné les premières notions | (208) sur cette découverte, et qui se trouva à leur visite ; m'a remis un plan du local, avec quelques notes , dont le contenu se trouvera avec plus de dévelop- pement dans le compte que la Commission rendra de ses recherches. Poësies lues à L’Academie, M. le Prêtre a lu un fragment de sa traduction en vers du poëme des Saisons de Thompson intitulé La pêche. | M. Letertre a lu des Stances sur la mort de De- lille. L'Académie a aussi entendu une pièce de vers de M. Ange Vieillard , intitulée La mine de Bonjon ; un conte de M. Chanvalon, intitulé La curiosité ; une pièce de vers de Raoul Tortaire, moine de Fleury , dont une copie manuscrite a été présentée par M. Moysant , avec quelques notes sur l’auteur. Ouvrages reçus. L’Académie a reçu un Traité de statistique , par M. J.- B. Labey, associé-correspondant; un Discours prononcé part (209 ) par M. le chevalier Delaville | aussi associé- cor: respondant, en faisant hommage au corps législatif de plusieurs ouvrages de M. Groult sur le droit maritime ; un ouvrage, de M. Dubuisson , sur la manie; cinq mémoires imprimés de M. Magen- die, docteur en médecine de Paris, intitulés, le premier , Examen de l'action de quelques vévéraux sur la moëlle épiniere , le second, Mémoire sur les organes de l'absorption chez les mammifères, le troi- sième, Expériences pour servir à l’histoire de la trans- piration pulmonaire, le quatrième, Mémoire sur Le vomissement , le cinquième , Mémoire sur l'usage de d'épiglotte dans la déoluition ; la Notice des travaux de la classe des Beaux-Arts de l'Institut de France pour l'année 18x13 ; un Rapport fait à la société d'encouragement pour l’industrie nationale sur la ceruse de Clichy ; deux bulletins des Sciences médi- cales de la société d’Évreux, avec une circulaire de M. Delarue , secrétaire ; Le Recueil des travaux de l'Acadèmie des Jeux Floraux de Toulouse pour 1813, et le programme pour le concours de 1814; une Norice des lectures de la séance publique de l'A- cadémie de Marseille, du Dimanche 22 Août 1813, avec un programme de prix; un Compte rendu des travaux de la socièté d'Agriculture , Sciences er Arts du Département du Nord, par M. Boinvilliers, se- crétaire général ; run Programme de la société des Sciences, Belles-Lertres er Arts de Bordeaux , séance O 1 (210) publique du 30 Août 1813, avec un Prospectus des ruines de Pompeï, plusieurs autres ouvrages d’au- teurs étrangers à l’Académie, et qui lui sont parve- nus par des voies indirectes. RAP ECO Fait à l’Académie à la fin de 1814. ee ME#ssiEURS, Les Travaux présentés à l’Académie ont été moins nombreux dans le cours de cette année, que dans les années précédentes. Je ne puis faire cette remarque, sans indiquer la principale cause de cêtte différence, Loin d’accuser votre zèle, elle honore plutôt votre patriotisme, puisqu'elle tient à cet intérêt du bon- heur public, qui: dans le danger de la patrie suspend les goûts les plus honnêtes, et même les plus utiles. Je ne dois pas craindre d’ailleurs d’appeler la pensée sur des évènemens dont l'issue, en mettant fin à nos calamités et à nos frayeurs, nous a montré dans un règne équitable et pacifique le prix de si longues et ÿ terribles épreuves. Revenus des funestes égaremens n ( a12,9 où nous avait jetés l'ivresse de la liberté , déjà, à l'époque du rétablissement de cette Académie, nous avions espéré cultiver en paix la sagesse, et vivre à l'abri des troubles et des excès. Ilnous restait encore à être victimes de l'ambition, età épuiser tous les fléaux qu’elle peut accumuler sur un peuple condamné à en être l'instrument. Les nations, comme les indi- vidus , profitent rarement d’une expérience étrangère. On a toujours vu les projets trop vastes devenir tôt ou tard désastreux : et cependant nous nous sommes encore laissé séduire -par l’éclat d’une gloire trompeuse. Nous avons oublié les anathèmes lancés tant de fois par la raison et par l’humanité contre l'esprit de con- quête. L'empire de la force a méconnu les maximes les plus respectées, triomphé des droits les plus sacrés. Nous nous sommes crus grands, pour être devenus terribles. L’orgueil de nos succès nous a fait penser que le genre humain n’avait rien qui nous fût com- parable, comme si la misère et la dévastation des contrées étrangères eussent pu faire la prospérité de notre pays; comme si les trophées de nos victoires eussent pu couvrir les vastes tombeaux qui regor- geaient chaque jour de nouvelles victimes , et les chants d'’allégresse des vainqueurs étouffer les gémise semens et les sanglots de tant de familles sacrifiées à de chimériques prétentions. Beaucoup d’esprits sages n'ont vu qu'avec effroi , et même qu'avec horreur les progrès d’une audace téméraire, qui en Qrea ( 212 ) . nous élevant au-dessus d’un abyme, nous préparait dans notre élévation même une chute plus terrible. Mais les voix de la flatterie se sont seules fait en- tendre ; les éloges ont retenti de toutes parts. C’est ainsi qu'on a toujours vu les hommes extraordinaires encensés comme des Dieux bienfaisans , quand leurs déplorables exploits ne faisaient qu’accroitre et mul- tiplier sans cesse les maux de l'espèce humaine, Au reste, je ne prétends pas confondre avec cette cou- pable adulation qui loue le mal comme le bien, et qui encourage la tyrannie, cette soumission respec- tueuse , ces hommages publics, qui sont partout l’a- panage de l’autorité, dont le tribut est indépendant du jugement que portent les peuples de ceux qui les gouvernent , et dont le refus serait souvent un signal de rebellion , propre à provoquer une oppression encore plus insupportable, ou même les horreurs de a guerre civile. Il est des circonstances où l’on ne peut raisonnablement attendre un changement dans Vétat des choses que de quelqu'un de ces grands évènemens qui excèdent communément les calculs de la prudence humaine, et dont il est juste de rap- porter la disposition à une puissance supérieure. Croyons qu'il ne nous appartenait point d’abréger cette pé- nible épreuve qui nous a fourni des leçons si impor- tantes, et jouissons de notre retour à un règne de paix et de modération comme d’un bienfait de la Providence. Nous regretterons moins les sacrifices (2030) auxquels nous avons été condamnés, si nous savons apprécier tous les biens que nous promet le gouver- nement d’un monarque éclairé, bienfaisant , religieux et sage, qui veut à l'exemple de la divinité, que la bonté soit le premier de ses attributs. Les amis des lettres et de toutes les connaissances qui tendent au bonheur social , sont assurés de trouver en lui un protecteur sincère, Nous n’aurons point à craindre sous son règne de voir se renouveler ces crises alarmantes qui ont si long-temps troublé nos paisibles médi- tations. Toutefois, Messieurs , si les désastres publics ne nous Ont pas permis de nous livrer aussi constam- ment aux travaux académiques, ils n’ont pas inter- rompu nos réunions. Des conférences instructives sur des objets d'histoire naturelle, de physique , de lit- térature et de morale ont remplacé des compositions écrites. Plusieurs séances ont même été remplies par des productions littéraires de différens genres, dont je vais vous rendre un compte succinct, en suivant le même ordre que dans mes rapports précédens. PRET SEC EEE ETES PP ES EE SEXE PREMIÈRE SECTION. PARTIE SCIENTIFIQUE. RSR NV SU Mémoire sur le corail, par M. LAMOUROUX. Cr article sur le corail est extrait d’un ouvrage que M. Lamouroux se propose de publier sur les plantes marines. L’auteur donne d’abord une des- cription méthodique de la substance qui en est l’objet. Dans divers mémoires présentés à l’Institut, il en avait fait le dixième et dernier ordre de ses Polypiers coralligènes flexibles ; mais éclairé depuis par de nou- velles observations, et n’ayant trouvé sur ce polypier d'autre caractère distinctif que celui d’un axe pierreux, il n'a pas cru ce caractère assez essentiel pour cons= tituer un ordre , et il a préféré ne faire du corail qu'un genre de l’ordre des gorgonices. En convenant que le corail rouge, seule espèce du genre Corallium , était connu dès la plus haute antiquité , M. Lamouroux ajoute que les nombreux auteurs qui ont écrit sur cette belle production en ont ignoré long-temps la véritable nature. Les Grecs, dans le nom qu’ils luiavaient donné, ne le présentaient que comme une substance marine qui sert à l’orne- | (215) ment. C’est sous ce point de vue qu'il est considéré par Théophraste , qui le cite comme une pierre pré- cieuse ; par Pline, qui en indiquant les lieux d’où les pêcheurs le tiraient , fait aussi mention des diverses pro- priétés médicinales qu’on lui supposait, L'usage qu’en faisaient les Romains prouve qu’on lui attribuait une sorte de vertu magique. L'étude du corail fut abandonnée durant l’état de barbarie dans lequel l’Europe fut plongée pendant plusieurs siècles. Guysonius, écrivain du XVE, siècle, est le premier auteur du moyen âge qui en fasse mention : il le classa parmi les substances minérales. Boccone, qui avait d’abord adopté la même opinion , attribua dans la suite la production du corail à desani- maux analogues à ceux des Gorgones, Tournefort le’ figura dans ses institutions comme une plante de là mer. Marsilli, imbu de ses principes, décrivit les polypes du corail comme dés fleurs, dont la coralle composée de huit pétales ciliés s’épanouissait sur des branches’ dépourvues de feuilles ; et son ouvrage rapidement répandu dans le monde savant fit ranger décidément le corail dans le règne végétal. Mais l’heureuse découverte des polypes marins par Peyson- nel , celle des polypes d'eau douce par Trembley, ayant ouvert une nouvelle carrière aux naturalistes , l'erreur de Marsil fut reconnue ; dès lors le corail fut regardé comme le produit et l'habitation d’une foule de petits animaux , réunis ensemble par O 4 ( 216 ) leurs parties latérales, et ayant tout à la fois une vie commune à tous, et une vie particulière à chacun d’eux. M. Lamoureux suit les progrès dus dans cette étude à Réaumur, à Bernard de Jussieu, à Donati, à Ellis, enfin à Linné; puis les opinions de Pallas, de Solander et de Gmelin, et en dernier lieu de M. de Lamarck, qui a fait du corail un genre particulier, sous le nom de corallium , adopté par tous les zoologistes modernes. On trouve le corail, dit M. Lamouroux , dans dif- férentes parties de la Méditerrannée et dans la mer rouge. C’est par erreur que quelques auteurs ont cru qu'il ne s’attachait jamais qu'aux voûtes des grottes sous-marines, et que ses extrémités étaient toujours tournées vers le centre du globe. Il s’attache à des roches dures de toute nature, et croît dans une di- rection perpendiçulaire au plan sur lequel il a pris naissance. Un le trouve quelquefois fixé sur des corps mobiles , et flottant sur les eaux, ce qui empêche son accroissement, toujours plus lént au reste , même dans la position la plus favorable, et imcomparable- ment plus borné que celui des polypiers madrépo- riques de la mer des Indes ou de i’immense Océan oriental, auxquels peu d’années suffisent pour fermer l’entrée des parts, et élever à la surface des eaux des rescifs contre lesquels viennent échouer les na- vigateurs. Le corail, qui ne croît que pendant une dixaine d'années , ne dépasse pas deux ou trois dé- (217) cimètres de hauteur. Parvenu à ce degré d’accrois“ sement, il grossit , mais très-lentement , et il est bientôt percé en tous sens par des vers rongeurs. Sa tige, détachée et jettée sur le rivage, perd son éclat, ou même se. réduit en poussière par le frottement. M. Lamouroux entre dans des détailssur les endroits où se pêche le corail, sur les positions qui lui sont les plus .favorables , sur les différentes profondeurs où on le trouve , sur les diverses nuances de sa couleur relatives à la hauteur de l’eau qui le couvre; et qui lui fait ressentir plus ou moins l'influence de la lumière , enfin sur les procédés employés jusqu’à ce jour pour le pêcher. Son mémoire est terminé par une énumération des objets auxquels il sert d’or- nement chez différens peuples , et des moyens que la mode a su en tirer , depuis que la médecine l’a aban- donné. Observations sur une chute d'aérolithes dans ‘ le Département de Lot-er- Garonne , par M. Lamouroux. M. Lamouroux , avant d’entrer dans des détails par- ticuliers sur le phénomène qui est l’objet de cet ar- ticle, a communiqué à l’Académie deux écrits im- primés ; dont le premier est intitulé, Rapport fait ( 218 ) & La société d’ Agriculture, Sciences et Arts d Agen ; dans la Séance du 14 Septembre x814, sur Les pierres tombées du Ciel dans quelques communes du département de Lot-er-Garonne , par M. de Saint- Amans. Secrétaire perpétuel de la Société ; Vautre, Lettre de M. J. Lamouroux , ex-pharmacien des ar- mées , & M.. le Comte de Villeneuve ; Préfet du dé- partement de Lot-et-Garonne , sur le même sujet. Les auteurs de ces deux écrits. rapportent égale- ment que le $ Septembre 1814, on aperçut dans le département de Lot-et-Garonne et dans ceux qui l’avoisinent , un peu avant midi ; un nuage très-élevé , et d’une couleur blanchâtre , au milieu d’un ciel très-serein ; et que ce nuage’ paraissant se précipiter vers la terre, en tournant sur lui- même , on entendit quatre ou cinq détonations suc- cessives , que l’on a comparées à autant de coups de canon, suivies d’un roulement terrible ; que le nuage ayant-paru se diviser en quatre ou cinq parties, il tomba des pierres de différentes grosseurs , dont deux de neuf kilogrammes chaque, L’auteur de la lettre évalue la totalité à vingt-cinq ou trente kilo- grammes, et l’espace danslequel elles furent dispersées , à une circonférence d’une lieue de rayon. Il diffère, au reste, de l’auteur du rapport en deux points principaux. Le premier suppose que le phénomène a été produit à une élévation d’au moins trente lieues , et le second n’estime pas cette hauteur à plus de (219) deux lieues. Celui-ci dit positivement que les pierres étaient très-chaudes; et selon M. de Saint-Amand , il paraît qu’elles n’ont point été trouvées chaudes. Dans les détails circonstanciés que M. Lamouroux a ajoutés à ces rapports , il a assuré que les maires des communes où le phénomène avait eu lieu, avaient, attesté que les pierres avaient été trouvées chaudes après leur chute. Ses observations ont provoqué une discussion intéressante sur les. diverses hypothèses imaginées jusqu’à présent relativement à l’origine de ces pierres appelées ÆAérolithes , et par quelques-uns Uranolithes ; et quelques membres ont fait espérer des développemens plus approfondis sur la nature de ce phénomène merveilleux. SECONDE SECTION. PARTIE LITTÉRAIRE. Observations sur Les invasions de la mer et son action sur le littoral du Calyados et de la Manche, par M. CAILLY. Ur: question proposée il y a quelques années par l’Académie sur les. changemens que la mer a apportés au littoral du Calvados et de la Manche, avait procuré quelques mémoires, dont un seul , ouvrage de M. Bisson , associé-correspondant , fut jugé digne d’attention , et obtint une distinction ho- norable , quoiqu'il fût reconnu qu'il ne remplissait pas complètement l’objet du programme , et que l’auteur devait être invité à tirer un plus grand parti des connaissances qu’il paraissait avoir sur la matière. M. Cailly , qui fut particulièrement frappé de l'insuffisance de ce travail, a entrepris de traiter le même sujet. Il reproche à M. Bisson d’avoir fait dans son memoire une sorte de critique de la question proposée , en la regardant comme téméraire , et prétend que, s’il a bien connu et observé avec sqin (221) les changemens arrivés sur nos côtes, il aurait dû les juger dignes d’un examen approfondi. Cette as- sertion est appuyée sur une suite de faits précédés de quelques observations générales sur le gisement de notre côte, qui présente un grand enfoncement dans les terres depuis Barfleur jusqu'au delà de Dieppe ; sur l’action des vents d'Ouest, Nord-Ouest et Nord, et les tempêtes qui rendent la navigation de la Manche si périlleuse ; sur les vastes forêts souterraines découvertes dans les parties correspon- dantes de l'Angleterre et de la Normandie; sur la conformité des productions de la nature , et d’autres circonstances favorables à l’ancienne tradition qui sup- posait la Grande Brétagne détachée de la France par un de ces cataclysmes qui ont bouleversé plus d’une fois des portions du globe. En entrant dans l’examen particulier du littoral de notre Département , M. Cailly distingue une première espèce de changemens, qui tend à aggrandir le sol par des attérissemens. Il suit cet effet à l’em- bouchure de nos différentes rivières, où les dépôts successifs de limon et d’autres matières solides , fixés par le refoulement du flux de la mer, forment avec le temps des masses qui obstruent les ports, et finissent quelquefois par les combler, si l’art ne prévient ces désastres. La Seine, la Touques, la Dives fournissent à cet égard des faits importans dé- taillés dans le mémoire, Quant à l'Orne, l’auteur ( 22% ) renvoie à l’excellent mémoire de M. Cachin et aux cartes qui l'accompagnent, et se contente de citer un extrait du rapport relatif aux affouillemens très- inquiétans que produit au-delà de la Pointe du Siége, le courant de la rivière réfléchi de la rive de l'Ouest sur celle de l'Est, où son action contre cette dernière plage estaugmentée par la mer montante. Une seconde citation se rapporte à la fosse de Colleville. Un point particulièrement intéressant est Courseule et Berniè- res. Des recherches faites par M. Delarue dans une affaire particulière et rapportées par M. Cailly, prouvent qu'il y avait autrefois un port à Bernières; qu'en 1613 la mer franchit les dunes et renversa tous les magasins ; que l’année suivarite ; une seconde tempête rompit les dunes entre Grais et Courseule, et mina tellement le terrain jusqu’à la Seulles, que cette rivière prit un autre cours par cette ouverture, ét alla former l'embouchure actuelle entre ces deux communes, Une nouvelle tempête en 1638 menaça Bernières d’une submersion totale. Ses suites sont exposées dans le mémoire. Depuis Courseule jusqu’à Porten Bessin, la Fosse d’Espagne entre la côte et le rocher du Calvados qui la défend, offe a M. Cailly une preuve du remous considérale occasionné par les eaux poussées par les vents et repoussées d’une part par les dunes et de l’autre par le rocher. Il a trouvé à Port, qu'il a visité, des effets incontestables de Penvahissement de la mer, dont les traces s’ob- (223) servent jusqu'à Grand-Camp. Il passe delà aux Veys; où les attérissemens qui aggrandissent le sol , s’expli- quent par l’affluent des trois rivières qui y débou- chent. En traitant du littoral de la Manche, M. Cailly, sans s'arrêter à la preuve que les îles de Saint- Marcouf et de Quettehou fourniraient d’une grande catastrophe , parce que ces bouleversemens, heureu- sement rares, ne sont point son objet , se borne à quel- ques points de vue généraux. Il explique pourquoi le côté de la presqu'île, qui est à l'Est, n’a pas éprouvé de grands changemens ; comment les vents agissent sur la partie du Nord, dont un enfoncement con- sidérable comprend la rade de Cherbourg. Quant à la partie occcidentale , les nombreuses îles qui parais- sent détachées du Continent , et les rescifs ou bancs de rochers qui rendent la navigation si difficile et si périlleuse dans ces parages , proviennent , selon l'auteur , de l’action violente des vents d'Ouest. Les invasions de la mer sur cette côte sont bien établies par une foule d'observations, et notamment par les recherches de l’abbé le Franc, grand-vicaire de M. l'Evêque de Coutances. Des citations précises à cet égard et des témoignages irrécusables ne permettent pas de douter qu’il ne se soit opéré des change- mens prodigieux dans cette contrée. M. Cailly s'attache dans la dernière partie de son mémoire à combattre les idées de l’auteur qu'il (2241) combat; par rapport aux grandes révolutions que le globe aurait pu subir. Il réfute les argumens tirés de la puissance de Dieu, qui n’a pas besoin dere- courir aux moyens qu’on lui suppose ; de sa sagesse , qui ayant créé une quantité d’eau proportionelle aux besoins de notre globe, doit toujours la main- tenir la même; enfin du témoignage d’Hérodote , qu’il tourne contre lui. En discutant ce dernier point, il entre dans des développemens curieux sur le Delta d'Egypte, et cite des observations récentes du Gé- néral Andréossi très-propres à rectifier les idées à cet égard. Essai sur l'existence de la noblesse en. France et en Normandie dans les temps les plus anciens , par M. LABBEY DE LA ROQUE. Le but de cette dissertation est de reéfuter le sen- timent le plus communément adopté, qui attribue la première noblesse en France à la possession des fiefs au Xe. siècle, et même celui qui en fait re- monter l’origine aux Seigneuries patrimoniales , et aux bénéfices rendus héréditaires dans le VIIS. Elle est divisée en plusieurs titres, dont le premier est : Noblesse dans les Gaules avant les Romains. César , a son entrée dans les Gaules, dit M. De la Roque , C225) y trouva une noblesse nombreuse et puissante, Le peuple , sans être précisément esclave, était compté pour rien. La considération , l'autorité n'étaient que pour les prêtres et les nobles. Ceux-ci ne s’occu- paient que de la chasse, de la guerre, du gouver- nement de leurs cités, Il rapporte ce passage des commentaires de César : on juge de la naissance er de la puissance d'un homme par son cortége. Il n'a d'autre marque de grandeur que le nombre de chiens qui l'entourent; et il en indique beaucoup d’autres, pour prouver par leur ensemble l’existence au temps de César, d’une noblesse qui sans doute subsistait depuis long-temps : et du système suivi par les Ro- mains de laisser aux peuples vaincus leurs usages et leurs institutions , il conclut que cette distinction exista jusqu’à l'invasion des Francs; non que les sénats des Gaules, modifiés sur celui de Rome, et composés des plus nobles, se fussent maintenus jus- qu’alors, mais parce que la noblesse de ceux qui en avaient fait partie s'était propagée dans leur pos- térité, Le second article est intitulé, Noblesse dans Les Gaules sous Les rois François Mérovingiens. L'au- teur avance comme un principe confirmé par cent passages des auteurs contemporains , Grégoire de Tours, Venance Fortunat , Frédegaire et plusieurs autres, que les Francs, conquérans des Gaules, en traitèrent les habitans comme avaient fait les Ro- P { 226) mains , et laissèrent chacun dans sa condition. La conséquence qu’il en tire, est que les nobles con- servèrent la considération attachée à leur naissance , et dans la distribution des grâces et des emplois, la préférence qui en est l’effet ; maïs il convient que la noblesse Gauloise paraît n'avoir eu sous les Francs aucun privilége réel. Au reste, ce ne sont pas seu lement les Gaulois qu’il prétend avoir eu une noblesse; mais les Francs eux-mêmes ; et pour prouver cette assertion contre l'autorité de Velly, Dubos, Hé- naut , Mably, il argumente de plusieurs phrases de Tacite, qui lui semblent exprimer que les Ger- mains avaient des nobles, et qui doivent s’appliquer à tous les peuples de cette nation, parce qu’elles se, trouvent dans les caractères que l’historien déclare être communs à tous les Germains. Les Bataves avaient une noblesse , dit-il, et les Bataves étaient des Francs, parce qu'ilsétaient des Cattes, et que les Cattes étaient une des tribus de la nation des Francs , suivant Sidenius, Apollinaris et Avitus. A largument tiré du silence des lois Saliques et Ripuaires, et quin’est que négatif, il répond que, si ces lois ne font pas mention de noblesse dans cette nation , ce n'est pas qu'il ny eût des personnes nobles et honorées par des distinctions, mais c’est que les nobles n’y for- maient pas comme dans la plupart des nations ger- maniques, un ordre séparé du peuple , et que tous les Francs sous les rois Mérovingiens , étaient dis- (227 ) tribués en deux ordres, les. clercs et les laïques ; comme on le voit dans Adrien de Valois, l’homme, selon l’auteur, qui après Ducange, a le mieux connu nos antiquités ; et qui seula eu de la noblesse de ces premiers temps une juste idée, La conclusion de cet article, est que « la noblesse fut chez les Francs ou Français jusqu’à la féoda- lité, ce qu’elle a été primitivement chez presque tous les peuples, et ce qu’elle était encore en 1789 dans plusieurs républiques en Europe , une classe dis- tinguée dans l’estime générale , sans tenir dans l’ordre politique aucun rang ; occupant ordinairement les pre- miers emplois, parce qu’une éducation plussoignée, des aieux à imiter , le désir de s’en montrer digne , lui donnent plus d'énergie , surtout plus de crainte du dés- honneur, qu'aux hommes nouveaux ; mais cependant n’excluant ceux-ci d’aucunes places, lorsque de grands talensles y appellent , leur commandant ou leur ebéis- sant suivant les circonstances , opinant indistinctement avec eux dans les assemblées générales , n’étant enfin queles premiers entre les laïques , et ne jouissant au- dessus des autres que de la considération inséparable d’une naissance illustre, ou seulement distinguée. » J'ai voulu MM. vous citer en entier ce passage du mémoire, parce qu'il m'a paru propre à vous donner une juste idée de cette noblesse dont M. de la Roque fait remonter l'existence au temps des rois Mérovingiens , età vous présenter son système comme : P'a (228 ) moins opposé au sentiment des historiens ; que l’é« noncé ne pourrait le faire juger. Car sil ne s’agit que d’une distinction purement morale, que chacun pût de soi-même acquérir avecle temps, sans qu’elle supposât aucune inauguration solemnelle, et aucun titre authentique, ni qu’elle conférât aucun privilége social , ce ne sera pas précisement la même noblesse que celle dont lorigine est fixée au X£. siècle et au plutôt au VII. Noblesse en Normandie avant Clovis. Pour prouver le fait énoncé sous ce titre , M. de la Roque se con- tente de considérer le grand nombre de Saxons établis en Normandie, lorsqu’en 497 les provinces Armo- riques se donnèrent à Clovis, et qui faisaient ap- peler tout ce pays le rivage Saxon , outre tous ceux qui y passèrent d'Angleterre depuis 497 jusques vers Pan $$o. Puisqu’on voit dans les lois des Saxons qu'ils, avaient par leurs constitutions un ordre de no- blesse, l’auteur en tire la conséquence que la pro- vince appelée aujourd’hui Normandie avait des nobles , lorsqu'elle passa sous la domination des Francs. Il renvoie au reste aux mémoires historiques sur Alençon par M. Odolsnt-Desnos, et à une dissertation de M. Delarue. Le paragraphe suivant est intitulé Nobksse en France sous les deux premières races. Ici notre col- lègue , après avoir nommé les autorités contempo- raines où il puise ses preuves, Grégoire de Tours, (229) Frédegaire et ses continuateurs, Fortunat de Poitiers; les Gestes des Francs, plusieurs des histoires et des pièces de la collection de Dom Bouquet, et enfin les Acta sancrorum des Bollandistes, prévient l’ob- jection qu’on pourrait tirer surtout contre ce dernier recueil, du défaut de critique ou même de véracité de quelques-uns des agiographes qui y sont cités. IL avance avec raison que la force de leur témoignage par rapport à l’existence de la noblesse est indépendante de l'exactitude de leurs récits ; car quand même ils tromperaient en qualifiant de nobles les personnages dont ils parlent, on est forcé de convenir qu’il fallait bien que cette qualification existât au temps où ils écrivaient. Quant aux citations qui viennent à la suite de cette observation, on sent bien que les termes de nobzes et de noblesse, qui n’ont par eux- mêmes qu’un sens très-vague, seraient des preuves insuffisantes, si les circonstances n’en déterminaient pas l’acception ; et c’est aussi sur de pareilles cir- constances qu’on prétend les faire valoir. Mais pour se convaincre directement que les faits ont été exac- tement interprétés, 1l faudrait chercher dans les ou- vrages mêmes des développemens que M. de la Roque na pu qu'indiquer succinctement. Il a réfuté un des principaux argumens apportés par Dubos pour établir légalité de condition des Français au VIII. siècle. Il est tiré d’un capitulaire fait en 797 dans une assemblée générale des Saxons, qui Pr3 (230) porte que partout où les Francs paieront 12 sols ; les Saxons qui sont nobles paieront aussi 12 sols ,: ceux qui sont hibres, 8, et les serfs 4. De ce qu'ici tous les Francs se trouvent confondus dans une seule classe , tandis que les Saxons sont divisés en trois , il semble naturel de conclure que les premiers n'avaient point de nobles. Mais c’est mal entendre ce texte, qui se trouverait ainsi en opposition avec d’autres plus clairs et plus formels. La parité qu’on remarque entre tous les Francs et les Saxons nobles seulement , vient de ce qu’alors il n’y avait chez ce dernier peuple nouvellement conquis , et d’une fidélité justement suspecte à Charlemagne, d’autres Francs que les Comtes, Centeniers et autres off- ciers envoyés pour les gouverner, et qui étaient tous nobles , soit par leur extraction , soit par leurs places, qui donnaient la noblesse. De toutes les citations qui confirment cette ré- ponse, je ne rappellerai que l’art. des capitulaires de 8o$, où se trouve énoncée parmi les peines de certains délits, la perte des bénéfices , du rang et de la noblesse; et un passage où Thégan répro- chant à Ebbon, Archevêque de Rheims, son ingra- titude envers l'Empereur Louis le pieux , lui dit qu'il la fait libre , non noble, ce qui était impos- sible après l'esclavage ; d’où l’on peut inférer qu’alors nos Rois anoblissaient, et qu’ils croyaient ne pou (231) voir honorer de cette grâce que des hommes nés libres. Les deux derniers titres du mémoire sont : L'état de la noblesse en Normandie aux Xe. et XIe. siècles, et Sur la Chevalerie en Normandie. Sous le premier, l’auteur réunit un grand nombre de témoignages , il insiste particulièrement sur une cita- tion de Dudon, pour montrer que les Normands ou Danois avaient leurs nobles , et que la noblesse exis- tant déjà en Normandie, Rollon devenu maître de cette province, n’aura pas pu y abolir cette insti- tution, qu'il aurait plutôt établie, s’il ne Peût pas trouvée. À la suite de quelques développemens , vient une discussion sur le mot Prince, pour établir qu’il désignait comme formant une classe particulière de nobles, ceux qui tenaient leurs terres immédiate- ment du Duc, comme aleu dérivant du premier partage. Quant à la Chevalerie, M. de la Roque rapporte à l’onzième siècle sa naissance en Normandie, ou au moins l’établissement des formes sous lesquelles elle devint si célèbre. Il cite pour exemple de Nor- mands armés chevaliers, deux fils de Géroye, fils d'Arnaud le Gros, un Robert II, un Guillaume Géroye, un Robert de Bellème, en ajoutant qu'il lui serait facile de multiplier de pareilles citations. Il termine par une réflexion sur linconvénient de s’en rapporter plutôt à l'autorité des écrivains qu’à la P 4 C232) nature de leurs témoignages , et de rejetter tous ceux qui n’ont pas une grande réputation. | Essai sur Homere, par M. CAILLY. La première réflexion que présente à M. Cailly le génie sublime de ce poëte , dont la gloire a tra- versé tant de siècles sans recevoir aucune atteinte, et continuera sans doute de braver les efforts du temps, tombe sur le haut degré de perfection auquel la raison humaine était déja parvenue, à une époque qu'on devrait regarder comme son enfance , puis- qu’elle est antérieure à notre ère d’environ mille ans , et qu’elle n’est éloignée du déluge que de treize siècles à peu près. Les faits dont il appuie cette ré- flexion, sont la profonde connaissance qu’Homère avait ‘du cœur humain ; les maximes pleines de sagesse qu’il sème dans ses ouvrages ; des détails exacts et judi- cieux qui attestent un esprit versé dans la théogonie, dans l'astronomie , la géographie, et parfaitement instruit du caractère et des mœurs d’une multitude de nations déjà très-dignes d’être observées. Si l’on joint à ces preuves d’un mérite éminent , la con- ception du plan, et la beauté de l'exécution, on ne s’'étonnera point qu'Homère ait toujours été regardé comme le plus excellent modèle en poésie. M, Caiïlly (233) s’arrète particulièrementau caractère si parfait , si bien soutenu que ce grand écrivain donne au héros de son Îliade ; et il cite en faveur de cette sensibilité tou- Chante qui rend Achille si intéressant , le discours plein d’une tendre humanité, qu’il adresse à Aga- memnon dans le 24°. livre, lersque sa douleur un peu calmée fui permet d’épancher son âme géné- reuse. L’autéur du mémoire fait encore quelques autres citations qui confirment ses opinions sur Homère. Eclaïrcissemens historiques sur Malherbe | par M. HÉBERT. L'Académie avait manifesté depuis long-temps l’in= tention d’honorer la mémoire du poëte Malherbe, dont la ville de Caen est justement orgueilleuse d’avoir été le berceau. En attendant que les circons- tances permissent de lui ériger quelque monument digne de sa célébrité, il avait été résolu d'indiquer par une inscription la maison où 1l reçut le jour, et il avait été fait des démarches auprès des proprié- taires actuels de cette maison, pour obtenir leur con- sentement. Mais il était nécessaire d’éclaircir certains points qui présentaient des difficultés assez embarras- santes. Le premier regarde le temps de la naissance de Malherbe, que le plus grand nombre des écrivains (234) s'accorde à placer en 155$, tandis que quelques autres la retardent jusqu’à 1556, sans qu’on ait à cet égard aucun document authentique. On trouve cette dernière date sur un de ses portraits gravés. Mais ces deux opinions peuvent se concilier par la double manière de compter les années , en partant de Pâques, comme on faisait alors, ou en partant du premier Janvier, comme on l’a fait dans la suite. Quoi qu'il en soit, on a des autorités suffisantes pour admettre que l’année où nâquit ce poëte, doit être désignée par le nombre 1554. Une autre difficulté est relative à la maison de Mal- herbe. Celle que lon suppose généralement lui avoir appartenu , est située au bas de la rue. de lOdon, ayant sa façade sur la rue Notre-Dame, vers la place de la Belle-Croix , appelée aujourd’hui Place Malherbe. Deux frontons qui s’aperçoivent au-dessus des fenêtres du grenier portent chacun une inscrip- tion Latine. L'une, à droite , est, Civiratis ornamento Lariumque avitorum memoriæ ; l’autre à gauche, Franciscus Malherbeus has-ce ædes exstrui curavit 1582. La tradition bien établie était que le François. Mal- herbe auteur de cette reconstruction, était le poëte Malherbe. Le résultat des premieres recherches de M. Hébert fut, sinon de détruire entièrement cette opinion , du moins de Paffaiblir assez pour que l’A- cadémie ne pût s’en faire une autorité. En effet, il prouva que notre poëte avait accompagné Henri, Duc À y f 4 | à à (235 ). d'Angoulême, dansson voyage de Provence en 1574; qu'il l'y avait suivi en, 1579 , lorsque ce Prince en devint gouverneur, qu'il s’y était marié, et que le seul fils qui lui était resté, y avait été tué en duel, lorsqu'il était sur le point d’être reçu conseiller au parlement de cette province, Ces faits et plusieurs autres cités par M. Hébert ne permettent pas de croire que Malherbe ait fait bâtir la maison dont il s'agit en 1582, ni qu'il ait même jamais pensé à revenir se fixer à Caen. Il est remarquable d’ailleurs que Huet ne fait aucune mention de cette maison, et que de Bras, dont les recherches vont jusqu’en 1588, n’en parle pas davantage, quoiqu'il cite trois: belles maisons sur cette même Place de la Belle- Croix. Il était difficile d’un autre côte de croire qu'un frère de Malherbe eût comme lui le prénom de: François, et il restait de l'incertitude sur le véritable propriétaire de la maison reconstruite. Cette incerti- tude a été entièrement dissipée par M. Hébert. Il a prouvé par des faits positifs que le poëte Mal- herbe était fils de François Malherbe , Sieur de Digny , Conseiller , qui avait fait reconstruire la maison de ses ancêtres en 1582, et que par consé- quent il était né dans cette maison 27 ans avant sa reconstruction. (236) Réponse a une question de M. Jouyneau-Desloges, associé-correspondant sur l'institution de la che- valerie en France, par M. DELARUE. M. Jouyneau-Desloges avait adressé à l’Académie un mémoire intitulé, Recherches et observaions sur une assertion de lhistorien Velly concernant Le prernier ordre de Chevalerie en France; et il la con- sultait sur la question de savoir si le Roi Jean est le premier auteur d’une institution de ce genre, et si celle qu'on appelle l’ordre de l'étoile, est la pre- mière qu'on trouve dans nos annales. L’historien Velly se prononce formellement pour l’afirmative. M. Jouyneau-Desloges combat son opinion, et pré- tend que l’ordre de l'étoile fut primitivement institué par le Roi Robert en 1022 , et que le Roi Jean n’en fut que le restaurateur. M. Delarue , à qui cette question fut renvoyée a pensé que ne pouvant connaître les raisons qui ont déterminé Velly, on ne peut condamner l’o- pinion de cet historien généralement estimé, qu’au reste le fait de la première institution ou d’un simple ré- tablissement de l’ordre de l'étoile par le Roi Jean, doit résulter de la teneur même des lettres-patentes de ce Roï, données en 1351, et consignées dans (237) le Xe, volume du Specilegium de Dom d’Achery ; puisqu'on ne peut rejetter un témoignage aussi au thentique , sans livrer tous les faits à l’incertitude. Quant aux mémoires de Jean Delahaye , qui font le principal moyen de M. Jouyneau, M. Dela- rue est loin de les regarder comme une preuve suf- fisante, parce que c’est un auteur du seizième siècle qui atteste un fait arrivé dans l’onzième , et que d’ailleurs les manuscrits sur lesquels on établit ce té- moignage n'existent plus dans les bibliothèques pu- bliques. Mais si l’opinion de M. Jouyneau n’est pas prou- vée par des moyens directs, il existe plusieurs faits qui l’appuient indirectement , en montrant que la chevalerie avait plusieurs ordres particuliers établis bien avant le Roi Jean. D'abord, on ne peut méconnaître que l’onzieme et le douzième siècles ont été proprement les siècles de la chevalerie, que les historiens Normands font même remonter jusqu’au dixième. Bénoît de Saint- Maure, qui écrivait en vers l’histoire de notre pro- vince, dans le XIIe. siècle, ne dit pas seulement que Hugues le Grand , père de Hugues Capet, avait reçu chevalier à Paris le Duc de Normandie, Richard premier ; 1l raconte même toutes les circons- tances de cette cérémonie. Les mêmes historiens disent que dans l’onzième siècle, Saint-Lanfranc , Arche- vêque de Cantorbéry , reçut chevälier Guillaume le (238) Roux, second fils du conquérant , avant de le cou- ronner Roi d'Angleterre. En second lieu, malgré les récits merveiileux con- tenus dans nos romans de l’onzième et du douzième siècles, et surtout dans ceux de la table ronde , ils supposent nécessairement l'existence d’une cheva- lerie, sans quoi leurs détails auraient été imintelli- gibles. L’authenticité de ce fait principal est tout-à- fait indépendante des fictions qui l’accompagnent, et qu’on attribuait aux Brétons insulaires et armo- ricains, comme le déclare Robert Wace : Fist Roi Arthur la ronde table Dont Brétons Dient mainte fable. Un passage de Rapin Thoïras, cité dans la réponse ; confirme cette distinction, en présentant comme un fait positif l'institution d’un ordre de chevalerie ap- pelé La: table ronde , par le Roi Arthur, que les récits fabuleux des romanciers ne doivent pas em- pêcher de regarder comme un Prince d’un mérite extraordinaire , dont la vie méritait d’être écrite par les historiens les plus graves et les plus sensés. Enfin on voit dans le dictionnaire de A. T. Gaigne, que Garica VI, Roi de Navarre, avait ins- titué un ordre du lys dès l’an 1048. (239) Essai sur Anaximandre et sur la philosophie. Dans cet écrit, lu par M. Cailly , à qui il avait été remis par M. Gabriel Chaulieu , l’auteur a pour but de recueillir ce qu’il y a , sinon de plus certain du moins de plus probable sur la doctrine d’Anaxi= mandre , qu'il appelle l’un des ornemens de l’école ionique , et que Laërce met à la tête de cette école, sans doute parce qu'il produisit au grand jour la doc- trine qu'il avait puisée dans ses entretiens familiers avec Thalés, etque celui-ciavait tenus secrets, quoiqué l'usage d’enseigner la philosophie dans un lieu public à un grand nombre d’auditeurs existât depuis plus d’un siècle dans la Grèce proprement dite. Les té- moignages nombreux sur lesquels le mémoire est ap- puyé dans toutes ses parties ne s’accordent pas toujours, et laissent des doutes sur plusieurs opinions d’Anaxi- mandre. On voit que, ne trouvant pas l'eau, ou l’é- lément humide, un principe assez délié pour lui at- tribuer , à l’exemple de son maître, l’origine de toutes les choses, il lui substitua /’zrfin:, ou selon Cicéron l’infinité des choses ; mais rien n'indique clairement quelle idée il attachait à cet infini. Il paraît avoir ajouté à la force mouvante, ou à l’âme admise par Thaïès, le froid et la chaleur. Selon Diogène de (24) Laërce, il reconnaissait à la terre une figure sphé- rique ; et Théon de Smyrne enseigne, d’après Eu- dème, qu’il la regardait comme suspendue dans les airs, et tournant autour du centre du monde : mais ces autorités sont balancées par d’autres. Il regardait les astres comme des Dieux, sans qu’on puisse dire en quoi consistait leur divinité. Ses idées sur la gran- deur et la place du soleil , ainsi que des autres astres , participaient à l’imperfection des connaissances astro- nomiques de son temps, quoiqu'on lui attribue, sur quelques points , des aperçus remarquables. Les objets relevés qui étaient le principal objet de ses médi- tations , ne l’empêchaient pas d’étudier la nature dans des phénomènes plus accessibles à nos recherches ; mais ses systèmes en physique n’offrent rien qui püt être pour nous d’un grand intérêt. On lui a dû in- contestablement quelques découvertes en géométrie ; et il paraît certain qu’il donna le premier dans la Grèce l’utile et intéressant exemple de tracer sur une surface les contours de la terre et des mers. On lui faitencore honneur , avec plus ou moins de vraisemblance , de diverses autres inventions , que rapporte l’auteur du mémoire. Poësies (241) Poësies lues à l’Académie. M. le Prêtre a lu, en différentes séances, 19°, un distique latin Sur Le rerour de l’auguste famille des Bourbons rendue au trône et aux vœux empressés de la France , avec la traduction en vers français; 2° un quatrain latin, aussi traduit en vers français x sur le même sujet; 3°. une ode intitulée, Homme: légitime rendu a la mémoire de Louis XVI. Une ode sur la véritable grandeur, une autre Contre Les combats ; 4°. un hymne tiré du poëme dessaisons de Thompson; 5°. des vers sur Alexandre le Grand ; 6°, deux fables intitulées, l’une , Le moineau et Les hirondelles , l'autre L’orage et Le z2phyr ; et six autres ayant pour titres, La poule d'Inde et la fourmi ; le taureau er Le mâtin; Le chien, Le berger er le loup ; La jeure fille ec la naïade ; La imarte, le renard et le loup ; L'allouette et la perdrix. Ces six fables sont imitées, Jes trois premières de Gay , la quatrième du père Dubillon, ewles deux dernières de Hagerdon. M. de Baudre a lu, 1°. des vers sur l’arriyce du Roi Louis XVIII ; huitcontesintitulés , Le Grand Seigneur et le Capucin, Le perit-maître er Le Capucin, Le Capucin dévalisé , Le marchand de chasuble Le friand Bailly , M. Gousseau , Le petit Saint . rome , Le voleur et Le petir père ; 39. trois épigram- TR 1... e- (242 ) mes , ayant pour titres : Le président a l'élection, Sur la ville de Domfront, L'esprit; 4°. L’épitaphe d'un plaideur, et une autre épitaphe. M. Méchin a lu une traduction en vers français de la 13°. satyre de Juvenal. L’académie a encore entendu une fable de M, Bremontier , imitée de Gay, intitulée, Le renard à l'article de La mort; des Stances allègoriques sur le danger de la flatterie , par M. le Tertre, associé-corres- pondant, qui a aussi communiqué à la compagnie le prospectus d’un Choix des poësies de Malherbe, avec des remarques, précédé d'un éloge littéraire de l'auteur ; des Fragmens d’un voyage au centre de l'Italie; opuscule en prose et en vers, par M. Du- bois, aussi associé-correspondant ; une Épirre à Picard sur son roman intitulé , les aventures d'Eugène de Senneville et Guillaume de Lorme, par un Normand, ( M. Vieillard de St. Lo; ) deux allégories de M, Vigné de Rouen, autre associé-correspondant, ayant pour titres: l’une, Le rocher et les oiseaux de passage, l’autre, La rose et le lys (24) peninmetnntantensg Ouvrages reçus. L'Académie a reçu la Description des jardins de Courset , par M. Pierre-Aimé Lair ; plusieurs opuscules de M. Dubois, savoir une Notics sur Les bains de Bagnoles, une Dissertation sur le camp du Cha- cellier, vuloairement appelé camp de César | sirue dans la commune de Mont-Merë, près Aroentan ; l'avenue des chärelers | élégie ; un mémoire manuscrit ayant pour titre, De l'inventeur du Vaudeville es d'une nouvelle édition des Vaux de Wire d'Olivier Basselin, notice lirtéraire ; une notice sur M. Houel, peintre, et une autre sur Rembrandt-Van-Ryn , faisant suite à la galerie des peintres célèbres, par M. le Carpentier, de Rouen; une Nosice sur l'his= roire géognostique du Cotentin, extrait du Journal des mines , n°. 206, Février 1814 , par Alexandre Brongniard , ingénieur des mines ; un mémoire ma- nuscrit de M. Geoffroy, de Valognes, Sur la com- position du granit , renvoyé a l'examen d’une com- mission ; un ouvrage intitulé , Repertoire de méde- cine, ou recueil d'extraits et d'indications de differens ouvrages, Anglais, Français , Italiens er Latins , par M. Balme , docteur en médecine , également renvoyé à une commission, selon le désir manifesté par l’au= Q 2 (244) teur ; deux bulletins\de la Société des sciences mé dicales de l’Eure ; le Prècis analytique des travaux de l'Académie des Sciences , des Belles-Letrres et des Arts de Rowen pour 1812; un autre Précis ana- lyrique des travaux de la même Académie, depuis sa fondation en 1744, jusqu’à l’époque de sa res- tauration le 29 Juin 1803 ; une notice de Séance pu- blique de la Société d'émulation de la même ville, du Oo Juin 18143 un Programme de l Académie des Jeux Floraux de Toulouse pour le concours de 1815; un Programme de l’Académie Royale des Sciences, Belles-Lertres et Arts de Bordeaux, séance publique du 2$ Août 1814; un Programme de ques- tions proposées par La société d’encosragement pour L'industrie nationale | dans sa séance générale du 6 Octobre 1813 ; un Précis analytique des travaux de la société Académique des Sciences, Lettres, Arts et Agriculture de Nancy ; un Bulleun de correspon- dance de la Société d'agriculture et de commerce du Département de la Vienne, séance du 15 Messidor an 13; un compte rendu des travaux de la Société d'Agriculture, Sciences et Arts du Département du Nord, pendant les années 1812 et 1813. H'ASPPO'RT Sur Les travaux de l’année 1815. PREMIÈRE SECTION. PARTIE SCIENTIFIQUE. Considérations sur Les caractères distinctifs de l'oxi- gène et ses rapports généraux avec Les autres ma= tières réputées simples , pat M. THIERRY fils. — M. Thierry , avant d'entrer en matière, présente quelques réflexions sur de nouvelles vues de M. Davy. Ce savant chimiste Anglais a cru devoir associer à l'oxigène le chlore et ensuite liôde comme corps simples et comburans, et dépouiller ainsi la première de ces trois substances d’un caractère qui lui était assigné exclusivement, et qui avait fait définir la combustion la combinaison de l’oxigène avec Les corps combustibles. En discutant les faits qui ont motivé cette innovation, M. Thierry ne trouve point qu’ils établissent une analogie assez prononcée du chlore et de liode avec l’oxigène, pour en faire les espèces Q 3 (246) d'un même genre, puisqu'ils ne se comportent de la même manière que dans un-petit nombre de ren- contres, et que les phénomènes qu’ils offrent peuvent s’observer dans d’autres corps combustibles. Il lui a donc semblé, et il a vu depuis que c’était aussi l’o- pinion de M. Thénard, qu’en associant l’iode au chlore , il convenait de les séparer de l’oxigène, pour les admettre l’un et l’autre au nombre des matières combustibles. ._ Quant à l’objet même du mémoire, après avoir posé les principes de la chimie moderne par rapport à l’oxigène, M. Thierry le considère relativement aux trois grandes propriétés qui le font regarder comme j’âme de la théorie pneumatique, savoir son pouvoir acidifiant, la nécessité de son entremise dans la combustion, et sa fonction dans Pacte de la res- piration. Le nom doxigène est fondé sur la supposition que la substance qu’il désigne est le principe de tous les acides; maïs l’auteur du mémoire montre qu’elle ne jouit pas exclusivement de cette propriété, et il cite l'hydrogène sulfuté, l'acide muriatique , autre- ment acide hydrochlorique , et l’acide hydriodi- que , qui sont Le ‘résultat de la combinaison de hydrogène avec le soufre , le chlore et l’iode. Il remarque aussi que lhydrogène , qui par- tage avec l’oxigène le pouvoir acidifiant , est le seul des corps combustibles que celui-ci ne puisse (247) acidifier, ne s’unissant avec lui que dans une seule proportion pour former l’eau, Il ajoute que l’oxigène, produisant par sa combinaison avec certains métaux les alcalis fixes, les terres alcalmes, et très-probable- ment toutes les matières terreuses, pourrait aussi bien être appellé a/caligène. Il déduit de cette double ob- servation l’imperfection inévitable d’une nomencla- ture destinée à représenter les propriétés caractéris- tiques des corps, tant que les progrès de la science peuvent faire varier les rapports de ces propriétés. La part qu’a l’oxigène dans la combustion n’offre pas à l’auteur du mémoire un caractère plus absolu. Car si l’on se borne à dire que la combustion est la combinaison de l’oxigène avec un corps combustible, suivant la définition adoptée, ce n’est plus à l’oxi- gène, mais bien à l’acte de la combustion que l’on assigne un caractère , puisqu'on ne reconnait plus celle-là que par la présence de celui-ci. Mais si l’on veut considérer cet acte en lui-même et indépen- damment des agens qui concourent à sa production, de quelque manière qu’on le conçoive , on ne pourra plus affirmer que l’oxigène en est la cause nécessaire, parce qu’il y aura toujours quelques-uns de ses effets qui pourront exister sans cette cause; et d’ailleurs il n’est pas possible dans l’état actuel de la science de déterminer d’une manière précise ce qui constitue la combustion , abstraction faite de la présence de lexigène, Q 4 (248 ) M. Thierry voit dans la respiration , acte nécessaire à la vie, et manifesté par des signes toujours recon- naissables, la seule propriété caractéristique de l’oxi- gène, puisqu'il est certain qu’en aucun cas la respi- ration ne peut avoir lieu sans la présence de ce gaz. Un nom qui rappelerait cette propriété , serait donc, suivant lui , plus convenable que celui d’oxigène. Tel serait, par exemple, celui de Zoarque | opposé à Ayore, mais qui aurait l’inconvénient de présenter comme principe de la vie l’agent nécessaire d’un acte qui en est seulement dépendant et inséparable. 11 désirerait un mot qui exprimât ce caractère, et qui réunissant la briéveté à harmonie propre à notre idiome, fût encore susceptible de se modifier de manière à remplacer les mots oxide, oxider, oxigène, oxigénation , etc., Au surplus il déclare être loin de vouloir prendre l'initiative sur un changement de nom qui ne serait avantageux qu'autant qu'il aurait été provoqué par le vœu général des chimistes. Un dernier article du mémoire traite des rapports généraux de l’oxigène avec les autres corps. Quoique M. Thierry se trouve obligé d’enlever à cette subs-- tance quelques prérogatives, il n’en reconnaît pas moins que la puissance et l'étendue de ses affinités, la distinguent de tous les corps. Les terribles de-. tonations de la poudre à canon et des composés analogues dus à l’oxigène, les brillans phénomènes de chaleur et de lumière causés par son passage d’une, (249) combinaison à une autre, en un mot le rôle qu’il joue dans presque toutes les opérations de la nature , lui paraissent justifier la grande idée qu’en avaient conçues les illustres fondateurs de la doctrine Fran- çaise , et que confirme le soin qu'a pris la providence de faire de l'atmosphère un immense réservoir de ce fluide , et d’en réparer les absorptions continuelles par les efuves abondantes des végétaux frappés de la lumière. Lui donner le titre de corps com- burant, c'était exprimer implicitement ses affinités énergiques ; et quoiqu'a la rigueur la distinction de corps comburant et de corps combustible ne soit que théorique , parce que dans la combustion les deux subs- tances qui se combinent exercent une action réci- proque , cependant le corps qui était seul connu propre à produire ce phénomène avec chacun. des autres , semblait mériter une dénomination qui lui attribuait une rôle actif.‘ Aujourd’hui que de nou- velles découvertes ont fait reconnaître une propriété ana- logue dans d’autres corps, il pourrait être nécessaire de faire quelques changemens dans lathéorie ; mais M. Thierry pense qu’on ne doit les tenter qu'avec beau- coup de précaution .et de réserve , surtout quand il ne s’agit pas d’une réforme partielle, mais d’une innovation qui intéresse l’ensembie de la science. Voici comment il résume en finissant les caractères géné- raux de l'oxigène. « L'oxigène est le seul corps qui dans unecon- (250) dition appropriée puisse entretenir la respiration des animaux. Par sa combinaison avec le calorique , il forme un gaz permanent. Ce gaz est incolore, ino- dore, insipide , peu soluble dans l’eau. Son poids spécifique , à zéro de température , et à la pression de 28 pouces, égale 1,10359 , le poids spécifi- que de l'air dans les mêmes circonstances étant représenté par l'unité. C’est sa présence dans l’air atmosphérique quirend celui-ci propre à la combustion ét à la respiration. Il sert à la combustion jusqu’à sa dernière molécule. L’oxigène peut acidifier tous les corps combustibles simples non métalliques, excepté hydrogène. Il peut acidfer quelques métaux. IL transforme également plusieurs métaux en alcalis. Les métaux ne peuvent s’unir aux acides, s’il ne s’y com- bine avec eux. » Exposé d'un projet présenté en 1812, pour l'ame- lioration du port de Caen, par M. PATTU. M. Pattu commence par exposer les avantages de la navigation intérieure , qui ajoute tant aux com- modités des grandes routes, et qui peut les suppléer d’une manière si économique. Il développe en par- ticulier l’utilité du port de Caen, et passe ensuite aux obstacles qui empêchent d’être la source d’une (251) plus grande prospérité, et aux travaux exécutés ou conçus pour son amélioration. Le projet le plus impor- tant qui ait été pris en considération avant celui dont il s'agit ici, et que M. Pattu lui-même regarde comme ayantpu naturellement produire ce dernier, est celui de M. Cachin, qui dans un mémoire imprimé en l'an VII , propose d'abandonner la navigation du lt de l'Orne, et d'ouvrir un canal depuis Caen jus- qu’à la fosse de Colleville, avec des portes et des jettées à l'extrémité. L’exécution de ce projet fut or- donnée par décret du 25 Mai 18w13 mais le devis des travaux ayant montré que cette entreprise exigeait . une dépense de 4,700,000 fr. , au lieu de 700,006 fr. seulement, qui avaient été accordés , il fallut y renoncer. Le projet qui est substitué à celui de M. Cachin , consiste en un barrage dans le lit même de l'Orne , au-dessous de Bénouville, avant le: haut fonds des cerisiers, par une écluse à portes d’èbe , qui arrêterait en cet endroit la mer montante, avec les matières qu’elle entraine jusqu’à Caen, et la remplacerait par les eaux douces élevées à la même hauteur, M. Pattu a discuté les effets de cet éta- blissement de manière à montrer qu’il remédierait cons- tamment aux obstacles qui entravent la navigation de l'Orne , outre qu’il contribuerait à l'agrément et à la salubrité de la ville, en maintenant les eaux de la rivière à une grande hauteur dans un cours de deux lieues et demie, (252) Plus on est frappé de la simplicité de ce projet, qui attache à une opération prompte, et peu dis- pendieuse , au moins comparativement , les avantages d’une entreprise effrayante par la longueur du temps et les frais qu’elle exigerait , plus 1l est naturel de craindre qu’il n’y ait quelque incertitude dans les résultats qu'on se promet de ce nouveau moyen; mais il sufht de connaitre la circonspection et les lu- mières de M. Pattu, pour être assuré que ses cal- culs sont appuyés sur des données bien exactes; et d’ailleurs l'admission de son projet par le conseil des ponts et chaussées , après un mür examen, est propre a dissiper tous les doutes que l'on pourrait conce- voir sur le succès. Précis historique sur la navigation de la rivière d'Orne , par M. LANGE. Le mémoire précédent a été l’occasion des recherches faites sur le même sujet par M. Lange , qui s’est occupé dans tous les temps avec un intérêt par- ticulier des moyens d'améliorer la navigation de l'Orne. Il déclare en commençant qu’il ne se propose point de présenter des choses absolument nouvelles, puisque les faits ne se créent pas; et que son travail s’est borné à recueillir et à réunir en un faisceau des (253) notions éparses dans beaucoup d’écrits, et dont l’en- semble lui a paru propre à confirmer lés espérances con- _ çues en divers temps sur l'amélioration de la navi- _gation de l'Orne, et peut-être à éclairer les opéra tions qui tendent à ce but. M. de Bras est le plus ancien écrivain qui parle des projets exécutés ou con- çus sur cette rivière; et depuis lui il ne reste d’autres sources d'instruction, que des mémoires de d'férens ingénieurs, assez difficiles à rassembler. Notre col- lègue s’est aussi aidé de quelques écrits lus dans nos séances , et il prévient que l’on reconnaîtra facile- ment certains détails qu'il a puisés dans le rapport général sur les travaux de l’Académie. M. Lange remonte au plus ancien état de la na- vigation de Caen, sous les premiers Ducs de Nor- mandie. L’Odon , après avoir passé sous le pont de Darnetal, aujourd’hui le pont Saint-Pierre, allait se jetter dans l'Orne au delà de l’emplacement de l’hô- pital actuel , en longeant une chausssée que remplace la rue Saint Jean; et cette partie de son lit for- mait alors le port. Le Duc Robert, fils aîné de Guillaume le con- quérant, tira de l'Orne, en 1104,à une centaine ae toises du pont de Vaucelles, un canal qui vient se rendre à celui de Saint Pierre, en passant sous ceux de l'hôpital Saint-Louis et de Saint-Jacques. D'un autre côté il recula le cours dé l'Ocon , de (254) manière à former une île presque ronde , partagée à peu près en deux parties égales par la chaussée. En 1531, on redressa l'Orne dans une partie de son cours, en ouvrant dans la prairie au-dessus du Hameau de Longueval un canal de 640 toises de lon- gueur et de 15 pieds de profondeur , au mépris d’un préjugé qui faisait craindre des inondations dans les grandes marées. Quant à l'Orne supérieure , ou s’est contenté d’y ouvrir successivement plusieurs chaussées ; etes projets de navigation souvent reproduits, sont toujours restés sans effet, par des causes tout-à-fait indépendantes de leur utilité et de la possibilité de leur exécution, On fit de nouveaux redressemens dans le cours de l'Orne inférieure , en vertu des lettres patentes de Louis XIV du 6 Mai 1679 , sur un plan de Vauban pour létablissement d’un port d’asile dans la rade de Colleville; et sans la mort de Colbert , les ou- vrages auraient été continues et prolongés jusqu'à Argentan en remontant la rivière. Ce ne fut qu’en 1740, que plusieurs citoyens re- commandables firent de nouvelles tentatives pour l'exécution du projet de Vauban, et que M. Lalonde, en particulier, membre de l’Académie Royale des Belles-Lettres de cette ville , redigea un mémoire qui fut favorablement accueilli , mais dont la guerre arrêta l'effet. IL en présenta un nouveau à la paix, et après une visite exacte des lieux et la vérification des faits, C255 ) dl fournit avec ses généreux associés à la dépense des plans et devis dont les villes de Caen et d’Argen- tan n'étaient guères en état de faire les frais, et dont la remise au conseil pouvait influer sur la décision, Ce travail reçut es plus grands éloges de M. Gouwr- don de l'Églizière, Lieutenant-général des armées du Roi, Directeur général des fortifications. Un mé- moire devenu assez rare , développait au public les avantages de ce projet, dont une compagnie offrait d'entreprendre l'exécution, moyennant certains droits à percevoir sur les objets de la navigation, Dansun sommaire de ce mémoire, M. Lange fait connaître les rivières qui se jettent dans l'Orne depuis sa source, les travaux à‘exécuter pour la rendre navigable , toutes les espèces de denrées et de marchandises au transport desquelles elle pourrait servir, soit en montant, soit en descendant , et enfin les divers établissemens qu’elle pourrait favoriser. Ensuite , après avoir manifesté l’es- poir que l’état consolidé sur ses antiques fondemens est propre à faire naître relativement à tous les genres d'améliorations , il passe aux vues de M. Vialet, in- génieur en chef de la généralité de Caen, qui outre les redressemens de la rivière aux abords de la ville, parait avoir médité les moyens d’en reporter l’em- bouchure vers le havre d'Oystreham ; aux travaux de M. le Febvre, dont il donne la description ; et au projet de M. Cachin, dont il expose les dé- tails, d’après le mémoire publié par cet ingénieur, C256) æt qui consistait principalement à aggrandir le bassin actuel, dit bassin de Saint Pierre , et à ouvrir un canal depuis le milieu de ce bassin jusqu’à la fosse de Colleville. Les grandes dépenses qu’auraient exigé ces travaux, en ont empèché l'exécution. Néan- moins ce projet fut reproduit dans une circonstance qui parut très-favorable ; et un décret du 15 Mai 1811, en ordonnant qu'il serait étudié et porté à la délibération du conseil des ponts et chaussées dans le mois de Décembre suivant , et de plus que es quais de cette ville seraient achevés , affectait à toutes ces dépenses une somme 700,000 francs. Il ne fallait pas un examen bien approfondi pour re- connaître l'insuffisance de cette somme. M. le Jeune, ingénieur en chef du département , en redu sant toutes les parties du plan autant qu’il était possible, ne put pas en évaluer la dépense au-dessous de 4,700,000 fr.; ce qui fit encore renoncer à l’entreprise, et af- fecter à la continuation des murs de quais la tota- lité des 700,000 francs obtenus. C'est dans ces circonstances que M. Pattu, ingé- nieur ‘actuel, proposa en 1812 le projet de Barrage développé dans le mémoire lu à l'Académie. M. Lange fait ressortir les avantages de ce nouveau projet ; et après avoir fait mention d’un décret du 3 Février 1813, qui assigne pour ces travaux 500,000 fr. sur les 7 accordées, mais dont les événements ont sus- pendu leffet, il cite un arrêté pris par le conseil général (257) général du département dans sa session du mois d'Octobre 1814, relativement au projet de M. Pattu , dont l'exécution a paru à l’administration des ponts et chaussées d’une nécessité si urgente , qu’elle a formé la demande d’une somme de 60,000 fr. pour commencer les travaux. M. Lange, pour détruire toute crainte que malgré le barrage ii ne se forme de nouveaux attérrissemens, apporte des faits bien avérés, et qui prouvent com- plètement que les vases qui encombrent le lit de l'Orne viennent uniquement de son embouchure. Il termine son mémoire en proposant avec la réserve la plus modeste, une idée qui mérite l'examen des hommes de l’Art, auxquels il la soumet, et qui sans nécessiter des dépenses énormes , et sans contrarier aucun plan d’amélioration, procurerait un des prin- cipaux avantages du projet de M. Cachin. Voici comment il le présente : « Entre Bénouville et Oystreham l'Orne se par- tage eu deux branches, dont la droite qui est la plus forte, passe devant Sallenelles et le moulin de Mau- pertuis. Un peu plus bas que ce moulin, cette branche se divise aussi en deux bras inégaux. Le plus petit tourne la pointe de Merville , et se porte vers la côte de l'Est; l’autre se dirige par la pointe du Siège vers le Nord-Ouest, et forme la véritable embouchure, La seconde branche , après avoir longé la côte: R (258) d'Oystreham vient aussi se rendre à la pointe du Siége , où elle }{e confond avec la première. Je pro- poserais de P'élargir dans une longueur de 709 toises à partir de la bifurcation, ensuite d’en continuer le cours presque en ligne droite vers la mer , près la redoute d'Oystreham, qui resterait à 200 toises en« viron sur la gauche. Ce nouveau lit de 900 toises de longueur , pro- curerait une embouchure commode et peu sujette aux attérissemens. Les vents dominans dans la Manche sont ceux d'Ouest et d’Ouest-Nord-Ouest. Les flots qu'ils poussent avec violence sur la côte de l'Est, en détachent continuellement des terres, que l’action combinée de ces vents et du remous de la côte pré- cipite entre les deux pointes, pour aller encombrer les différens canaux de l'Orne. Or la nouvelle embouchure, éloignée de goo toises à peu près de la pointe de Merville , et d’en- viron 2500 de la côte ne pourrait en recevoir immé- diatement les débris, comme le fait l’embouchure ac« tuelle. | Au reste , si ce canal éprouvait quelques dépôts de vases, on conçoit quelle chasse énergique exerce- raïent dans toute sa longueur les eaux de l’immense bassin de M. Pattu, et combien sa direction à peu- près droite serait favorable à cette chasse. Du moment que la rivière y serait introduite , et qu’on aurait barré la branche principale actuelle (259) à l'endroit de la bifurcation , tout le terrain com: pris entre cet endroit et les deux pointes serait bien- tôt exhaussé par les alluvions de la marée, de ma- nière à permettre d'établir d’une pointe à l’autre une digue d'environ 300 toises dont la base serait traver- sée par des auges ou canaux à clapets pour l’écou- lement des eaux du pays. La concession de ce riche terrain de plus de 30000 perches de superficie, seulement au prix modique de 10 fr., donnerait un capital de 300,000, qui cou- vrirait peut-être , et même au-delà , toute la dépense d’une entreprise qui n’exigerait aucuns ouvrages d'Art, et ne consisterait qu’en pilotis , clayonnages, terrasses et épis en pierres brutes , que fournissent abondam- ment les carrières des environs. Si ce projet était admissible , le gouvernement pour- rait, dans un court espace de temps, et sans qu'il lui en coutât un centime , faire exécuter des travaux si manifestement proftables à l’agriculture, au com- merce et à la salubrité de la contrée ». Rapport sur un mémoire de M. Geoffroy de Valognes , associé- correspondant, par M. LAMOUROUX. M. Lamouroux expose d’abord l'opinion négative P 8 de M. Geoffroy sur la question qui sert de titre à ya { 260 ) son mémoire : Le tubipore musique est-il un polypier ? Il présente ensuite les idées de l’auteur par rapport au nom de subipore, qu'il croit devoir changer, et au lieu duquel il propose d’abord celui de subulaire , et ensuire celui d’oroue , en considérant que celui de tubulaire est appliqué à un genre de polypier connu depuis long-temps. Le rapporteur , sans entrer là-dessus en aucune discussion , en vient à l’objet prin- cipal du mémoire, qui est la proposition faite par M. Geoffroy de joindre les tubipores aux vers qu'il appelle vers subicules, En blâmant cette dénomina- tion, comme appartenant à des êtres d’une nature très-différente, M. Lamouroux appuie sa critique sur des autorités et sur des raisonnemens qui tendent à prouver que , Si Panimal du tubipore musique est un polype, son habitatation ne saurait être celle d’une annélide , ce qui suivrait du système de M. Geoffroy. Le rapport est terminé par une citation intéressante de M. Péron , qui en confirme les con- clusions. Rapport sur l'ouvrage de M. Balme, par M. le SAUVAGE. L'ouvrage de M. Balme intitulé , Répertoire de Médecine , ou recueil d'extraits et d'indications de dif- ( 261 ) ferensouvrages, Anglais, Français , Iraliens er Latins x a été conçu dans l’intention d'épargner aux médecins des recherches longues et pénibles pour trouver des moyens de solution dans les cas embarrassans qui peuvent entraver leur pratique. L’avantage de con- naître en peu d’instans quels auteurs ont traité cha- cune des questions qui se présentent, et sous quels points de vue, ne peut manquer, du moins au pre- mier coup d’œil, de paraître très-précieux , puis- qu'il semble attacher au moyen le plus simple l’ins- truction la plus complète. Mais il faut convenir que l'exécution , dans les ouvrages de ce genre , est tou- jours la partié la plus difficile, et qu’elle répond ra- rement à l’idée que l’auteur s’est formée de sa mé- thode. M. Balme ne s’est point fait illusion sur cet inconvénient , et il a provoqué lui-même , avec une modestie qui doit bien faire présumer de son jugement , l'examen attentif et sévère de l’essai qu’il a donné au public. M. le Sauvage a pleinement rendu justice à l’auteur sous ce rapport, et a reconnu tout le mérite qu'on peut trouver dans son ouvrage; mais obligé de. s’expliquer complètement dans les intérêts de la science ,1la présenté les différens rapports sous lesquels les hommes de l’Art ne pourraient pas accorder un suft- frage absolu à son entreprise. Ses conclusions ont été que le travail de M. Balme, en présentant de laborieuses recherches d’un médecin instruit, ne peut offrir le degré d'utilité dont il la cru susceptible , R 3 (264) parce qu'on n’# voit qu’un recueil de citations e de notes indicatives puisées dans un nombre déter- miné d'ouvrages, et accumulées sans aucune espèce de critique; ensorte qu'il y a à la fois abondance et disette , à cause de la multitude des indications inu- tiles et du silence gardé sur les meilleures autoritése La seule omission des ouvrages d’anatomie patholo- gique paraît au rapporteur offrir une lacune immense ; et il lui semble que l’entreprise de M. Balme aurait offert un tout autre intérêt, etaurait été dans le cas de rendre à la Science des services importans, s’il se fût contenté de présenter une collection bien choisie des faits qui ont servi de base aux principes qui forment la saine doctrine , et qu’il eût écarté une foule d’ob- servations insignifiantes ou incomplètes , et surtout de théories repoussées par un saine critique. Loin que le mauvais complète la collection de ce qui est bon, il ne fait que la gâter. Noc sur de saumon, par M. PRUDHOMME. M. Prudhomme a cru devoir entretenir l’Acadé- mie d’un fait qui lui a paru intéressant. Il a vu des saumons déposés dans un vivier depuis trois ans, et qu s’y étaient conservés jusqu'alors en bon état, Cette expérience qu'il désirerait voir répéter et (263) étendre , lui a fait concevoir la possibilité de natu- raliser le saumon dans l’intérieur de la France, en choisissant des eaux qui lui convinssent. Il a exposé ses idées sur la manière dont cet essai pourrait être tenté, et a cité à cette occasion les tentatives faites il y a plus de vingt ans par M. Noël de Rouen, pour naturaliser des harengs dans des étangs. Aux États- Unis, ajoute-tl, ou a fait éclore des œufs de ha- rengs et d’autres poissons dans des fleuves que ces animaux n'avaient jamais fréquentés. Les individus éclos de ces œufs ont contracté l’habitude de reve- nir chaque année , en en ramenant sans doute avec eux un grand nombre d’autres. M. Prudhomme pré- sume qu'on pourrait avec succès déposer dans des étangs des saumons femelles avec des mâles, pour y faire leur ponte, sans que le frai qui en naïtrait pût retourner dans les mers vers Pautomne, temps où il descend les Fleuves , à partir même d’une très= grande distance de leur embouchure. LE TT A te NE ©] SECONDE SECTION. PARTIE LITTÉRAIRE. ES Recherches sur les ouvrages des Bardes Armoricains dans le moyen äge, par M. DELARUE. Taureur traite son sujet comme neuf, puisque non-seulement les historiens Brétonset les anciens écri- vains Français ne contiennent rien de positif sur la poésie Armoricaine , mais que même Dom le Pelletier , dans la préface de son dictionnaire Bas-Bréton , après avoir dit: Nous ne voyons pas que nos an- ciens Brérons aient cultivé la poésie, va: jusqu’à ajouter ; es La langue teilé qu'ils la parlent ne paraît pas pouvoir se prêter a la mesure, a la douceur ec a l'harmonie des vers. | Pour réfuter ce dernier paradoxe , et établir l’exis- tence d’une poésie Armoricane , M. Delarue remon- tant du XVe. siècle au XIIE. rapporte pour chacun de ces quatre siècles des témoignages plus ou moins nombreux d'écrivains Français et Anglo-Normands, qui vantent les Lais Brétons ou Armoricains et qui en font des citations , et il conclut de toutes ces autorités, 1°, que les Brétons Armoricains avaient (265) très-anciennement dans leur langue des pièces de vers que nos premièrs poëtes appelèrent des Lais, sans qu’on sache quel nom ils leur donnèrent eux-mêmes, et qu’il ne faut point confondre avec les Lais de nos trouverres , mais regarder comme des poëmes con- tenant le récit d’un évènement intéressant , d’une longueur modérée , à la différence des romans, sur un sujet grave et ordinairement Armoricain ou Gal- lois, et toujours en vers de huit pieds, du moins dans les traductions Françaises et Anglaises qui sont parvenues jusqu’à nous ; 2°. que les Lais Brétons furent tellement estimés dès le commencement du 12°. siècle, qu’on entraduisit un grand nombre, soit en Latin, soit en prose Française , et qu’à la demande des Ducs de Normandie et des Barons de cette pro- vince, on composa d’après ces traductions plusieurs de nos romans de la table ronde, en prose Latine cu Française ; 3°. que dans le 12°. siècle les trou- verres mirent en vers Français plusieurs romans de la table ronde, soit d’après les traductions La- tines ou Françaises des Lais Brétons, soit d’après les romans en prose qui en étaient déjà le produit, et qu'il est impossible de croire que les trouverres en ‘imposent , quand ils déclarent que leurs romans sont composés d’après les ouvrages Brétons, et quand ils nomment les différens Princes qui leur en fournirent des traductions; 4°. enfin , que dansle 13°. siècle les trouverres Français et Anglo-Normands traduisirent ( 266 ) encore en vers plusieurs des Lais Brétons, et que ces traductions ne furent mises en vers Anglais que dans le siècle suivant. En examinant les rapports qui pourtaient exister entre les Lais Brétons et l’ancienne poésie Gauloise, l’auteur du mémoire établit d’après Posidonius d’A- pamée, qui vivait avant l'ère vulgaire , et le poëte Fortunat , écrivain du 6€. siècle, que les Lais Brétons écrits et chantés dans le genre des poésies Gau- loises ont dû leur succéder ; que si les poëtes Ar- moricains ont mêlé quelquefois des aventures Ro- manesques et imaginaires à des peintures historiques, comme dans l’histoire d'Arthur, à la différence des Gaulois toujours historiens, cette innovation ne se trouve que dans les traductions des Lais Armori- cains ou dans les ouvrages d’écrivains obscurs et mer- cenaires qui, pour déguiser leurs plagiats, altéraient ainsi les productions des anciens Bardes. Cependant d’après les témoignages de plusieurs historiens Brétons et Gallois, il paraïîtrait que les poëtes Armoricains auraient aussi chargé l’histoire d'Arthur et de ses che- valiers de faits merveilleux et controuvés, auxqueis les jongleurs qui leur succedèrent auraïent- ajouté de nouvelles fictions. Mais , se demande l’auteur, où les Brétons avaient-ils puisé ce merveilleux épique ? Est- _ par M. HÉRON de LATHUILERIE. M. de Lathuillerie, chargé de l’enseignement de la premiere partie de l’histoire moderne , qui s’étend depuis Auguste jusqu’à Charlemagne , a lu à l’Aca- démie l’introduction dont il a fait précéder son cours. Il commence par tracer rapidement une esquisse des grands évènemens qui remplissent l’espace de neuf siècles qu’il doit parcourir. La tyrannie succédant à l'anarchie ; cette fameuse république Romaine long- temps victorieuse de toutes les nations, vaincue elle- même par le luxe et les vices qu’il enfante, et finissant par chérir et admirer le règne d’Auguste , après avoir détesté ses fureurs ; le christianisme opérant une ré- volution bien plus importante parmi les nations qu’il soumet à ses dogmes et à sa sainte morale ; le siége impérial transféré par Constantin de Rome à Bizance, et l'empire divisé en deux; les Barbares du Nord répandus dans l'Italie, et successivement dans les dif- Pt Re DT (275) férentes parties de la domination Romaine; la mo- narchie Française établie dans les Gaules par Phara- mond ; les rois de la première race souillés par toute sortes de cruautés, et ensuite livrés à la mollesse et à l’indolence , qui finissent par fairetomber le sceptre de leurs mains ; Pepin , premier Roi de la seconde race, fils d’un héros , héros lui-même, laissant sur le trône où, il s'était placé, un homme extraordinaire dont le “sublimes qualités et les brillans exploits devaien éclipser la gloire de son père et de son aïeul : tels sont les principaux traits de ce vaste tableau que le pro- fesseur doit offrir à l'examen et aux méditations de ses élèves. Avant d’entrer dans son sujet | il leur présente avec autant de précision que de clarté les notions préliminaires qui peuvent leur faciliter l’intel- ligence des faits historiques. Mais la partie la plus considérable de son introduction est un récit abrégé, et pourtant d’une assez grande étendue, des évène- mens relatifs au peuple Romain et antérieurs à ceux qui doivent être l’objet direct de ses leçons. Il a in- titulé ce morceau , Coup-d’œil sur l'histoire Romaine depuis la fondation de Rome jusqu'a Auguste. (276) Notice sur les Cyiganys. L'Académie a entendu dans une de ses séances la lecture d’une notice remise à un de ss membres par M. Boisard, étudiant en droit, sur ces peuples er- rans qu’on appelle C?iganys , qu'il a eu de fré- quentes occasions d’observer, pendant qu’il était pri- sonnier en Hongrie, où ils forment une population d'environ 30,000 âmes. Le résultat de ces observa- tions , faites avec beaucoup de soin et de discerne- ment, sur une classe d'hommes peu connue en France , et défigurée par les historiens, ne pouvait manquer d'offrir un intérêt particulier, surtout lorsque la correction et l’élégance du style se t'ouvaient jointes dans le récit à des réflexions judicieuses , et quelquefois profondes. Une circonstance singulière de l'existence des Cziganys, c'est que depuis quatre siècles ils ont continué de vivre au milieu d’une nation franche et hospitalière, tels à peu près qu'ils y avaient ap- paru sous le règne de Sigismond, Roi de Honprie , c’est-à-dire presque nus, sans lois, sans arts perfec- tionnés , sans moyens avoués de subsistance , et con- servant un langage aussi inconnu que, leur origine, sans que rien ait pu leur inspirer le goût d’une vie | 1 _ (277) laborieuse et sédentaire. La description qu’en fait l'au< teur de la notice est propre à exciter l'horreur, tant sous le rapport de leur malpropreté qu’à raison de leurs vices : car ils passent pour être voleurs et men- teurs, comme sont les hommes lâches et avilis. Un horrible excès de cruauté, dont ils ont été convain- cus et punis sous le règne de Joseph Il, et qui ne s’est pas renouvelé, les a même fait passer pour as- sassins, [ls ont'une teinture grossière de quelques arts. Il a fallu en exterminer une grande partie pour amener le reste à se faire chrétiens. Leur conversion au christianisme n’empêche par le désordre de leurs unions, dans lesquelles ils ne respectent rien , pas même les plus proches degrès de parenté. Si le moyen de les civiliser qu’employa Marie - Thérèse , en leur accordant des terres, des bestiaux et des us- tensiles, fut aussi sans succès, M. Boisard en donne pour raison que le soin de l’agriculture ‘est trop rebu- tant pour des hommes vagabonds et sans prévoyance. Il pense qu’on aurait mieux réussi en leur ouvrant des ateliers, qui leur auraient presenté l’appas d’un gain présent. Au reste, ils sont robustes et sains et vivent fort souvent vieux. Les Cziganys sont tristes et taciturnes, Il ont des musiciens, qui font danser les paysans dans les au- berges. Leur air favori , quoique fort lugubre , est celui qu’ils ont fait en mémoire du massacre de Nagy Ida. Tout ce qu’on sait de leur histoire , c’est qu’ils S 3 A (278) éurent autrefois des chefs appelés Vaidas. Les opi- nions sont partagées sur leur origine. Katous les fait venir de l’Indoustan. Tout porte à croire qu'ils sont une des nations dispersées par Tamerlan. D'un autre côté, leur constitution physique indique des Asia- tiques méridionaux. Ils ressemblent à la caste des Parias pour le moral, et par différens usages, no- tamment par celui de se nourrir de la chair des ani- Maux morts naturellement. Mémoire pour servir à l’histoire des Jeux Floraux: M. Poitevin Peitavi, secrétaire perpétuel de l’A- cadémie des Jeux Floraux de Toulouse , en adressant à l'académie de Caen le mémoire qu'il avait rédigé pour sa compagnie , avait témoigné le désir de connaître le jugement qui serait porté de son tra- vail, et c'est ce qui m'a engagé à en présenter un extrait d’une certaine étendue. Cet ouvrage sort de la classe commune de ceux du même genre, qui ont pour but de retracer l’ori- gine et les progrès d’une société littéraire , et dont Pintérêt ne s'étend guères hors de la contrée par- ticulière où s’est formé un tel établissement. Les Jeux Floraux de Toulouse ayant eu dès les pre- mières années du XIVe, siècle une constitution bien ( 279 ) | établie, et peut-être déjà bien ancienne, la grande considération et les priviléges singuliers dont ils étaient en possession dans des temps si reculés, forment un titre dont toute la république des lettres doit récla- mer l’honneur. Quoique l’auteur n’ait point prétendu écrire une histoire proprement dite , qui se serait, dit-il, trop ressentie de l’affaiblissement de ses forces , et qu'il n’ait voulu rédiger qu’un simple mémoire; son travail contient néanmoims tous les faits et tous les raisonnemens qui peuvent lui faire atteindre le but le plus essentiel d’une véritable histoire. Il est divisé en deux volumes , le premier contenant l’his- toire générale du collège de la Gaie science , de l’ins- titution de Clémence Isaure, et des Jeux Floraux avant et depuis leur érection en Académie , le deuxième intitulé Biographie Académique. On trouve au commencement du premier vo- lume une liste des mainteneurs des Jeux Floraux , et une des maîtres ès Jeux Fioraux. En tête de la première est Le Roi, prorcteur, et ensuite Monsei- gneur le Chancelier. Dans une introduction, précédée d’une lettre dédicatoire au Roi, M. Poitevin expose les différens noms qui ont successivement désigné l’institution qu’il veut faire connaître, et explique le sens de diflérens termes, qui n’ont pas conservé leur ancienne signification. Îl n’y a guères plus de cent ans que les Jeux Floraux ont été érigés en Acadé- mie des Belles-Lettres, La dénomination même de S 4 ( 280 ) Jeux Floraux ne remonte pas aux premiers actes de la fondation de Clémence Isaure , faite à la fin du XVe. siècle. Dans les temps antérieurs , c'était un collège de Ga savoir ou de Gaie science , et c'était la poésie qui était désignée par ces mots. Elle portait encore le nom d’ÆAmors , et ses règles, celui de Lois d’Amors, ou de Fleurs du Gai savoir. Les exercices poétiques s’apellaient Arc joyeux de faire des vers ; La violette donnée en prix, La joie de La violer, ce qui n'exprime ici, comme le mot Amors que la finesse du goût dans les matières de littérature, L'histoire des Jeux Floraux se partage en trois époques, dont la première, relative à l'institution ‘du IGai consistoire et de la Gaie science , comprend six chapitres ; la deuxième traite en deux chapitres de la fondation de Clémence Isaure , et la première partie de la troisième comprend en trois chapitres , : l'érection des Jeux Floraux en Académie de Belles- Lettres. La biographie contenue dans le 2°. volume, forme la deuxième partie de cette dernière époque. Elle se compose de notices plus ou moins étendues sur plus de 140 mainteneurs décédés, terminées par un éloge de Louis XVI et de Louis XVII, Rois de France , protecteurs de l’Académie , prononcé par M. Pinaud, l’un des mainteneurs , dans la séance publique du 19 Janvier 1815. Une circonstance qui rendait plus difficile la tâche ( 281 ) entreprise par M. Poitevin , doit en même tempsinspirer une plus grande confiance dans l'exactitude de son récit et dans l’authenticité des faits dont il l'appuie. L'origine des Jeux Floraux n’était pas seulement cou- verte d’épaisses ténèbres; tout ce qui donne le plus d'importance à cette institution avait encore été l'objet des contradictions les plus vives et les plus opi- niâtres. De longues et fréquentes discussions avec les Capitouls de Toulouse | et depuis , avec le corps municipal, avaient suscité à l’Académie des anta- gonistes passionnés, qui s'étaient attachés à répandre du doute sur les actes les plus incontestables de cette Académie. [ls étaient même allés jusqu’à traiter la fondation de Clémence Isaure de Fable, et la fondatrice elle-même de personnage chimérique. Il fallait des preuves bien solides pour détruire ces fâcheuses préventions, et produire la conviction qui était le but de l’auteur. Les plus anciens monumens dont il s’appuie, sont deux registres en vélin, con- servés dans les archives de l’hôtel-de-ville de Tou- louse; et un autre registre ou recueil en papier , d’une écriture également ancienne, où se trouve la pièce qui fut couronnée en 1324, et quelques autres des concours suivans. Un préliminaire historique qui se trouve en tête du premier registre, contient le programme d’un concours poétique adressé en 1323 , aux poëtes de la langue d'Oc. C’est une lettre en vers qui prouve incontestablement qu’à cette époque ( 282 ) il y avait à Toulouse une compagnie littéraire , com- posée de sept poëtes , ayant un établissement fixe, des exercices réguliers, un sceau commun, un lieu d’assemblée qu’ils tenaient de leurs devanciers, ainsi que la règle de leurs exercices. Quelques expres- sions, sans indiquer l'origine de cette institution , ne permettent pas de douter qu’elle füt déjà an- cienne. Ce premier registre est divisé en trais sections , dont la premiere détermine à quelle partie de la phi- losophie appartient la poésie , considérée comme une dépendance de la rhétorique ; la deuxième des règles de la versification rimée , et de petits poëmes qui ne sont plus en usage; la troisième est une gram- maire. Le second registre contient , outre le déve- loppement de ces mêmes objets, un traité et une explication fort ample des figures de rhétorique, que d'Académie des Jeux Floraux doit bientôt publier, avec une traduction. Le second chapitre de la première époque expose dans quatre articles les ordonnances des sept main- teneurs de la Gaie science : C'est ainsi qu'ils appellent leurs statuts. Le troisième chapitre est re- latif à la rédaction de la poétique du Gaï savoir ; le quatrième à la publication; le cinquième à l’état du collége de la Gaie science, depuis 1356 jusqu’à la fin du XIVe. siècle, et le sixième à l’état de ce collége depuis la fin du XIVe. siècle jusqu’en 1484. L (283 ) Le point essentiel de la deuxième époque était la fondation de Clémence Jsaure, dont l'existence n’a- vait été révoquée en doute que par une interprétas tion erronée du titre de Fondarrice du collége de la Gaie science que lui avaient fait donner ses grandes libéralités envers ce collège déjà fort ancien, qui lui dut une nouvelle vie et une considération tout-à-fait indépendante de l'autorité administrative. Les détracteurs des Jeux Floraux , qui savaient que la première fondation de cette Académie ne pouvait être postérieure au XIIIe, où même au XIIe. siècle , n'ayant trouvé dans l’histoire de ce temps aucuné trace de Clémence Isaure , en avaient conclu qu’elle n'avait jamais existé, Le secrétaire perpétuel détruit victorieusement cette erreur par des témoignages et des monumens de la plus grande authenticité ; et quoi- qu’on ignore en quelle année Clémence fit la pre- mière distribution de ses fleurs , parce que le recueil cité n’est pas eritier, il demeure du moins bien établi qu’elle en fitune en 1496. Le chapitre qui con- tient les preuves de sa fondation, est divisé en sept articles, et se termine par cette conclusion : la fondation de Clémence Isaure est prouvée par sa présence aux fêtes du 3 Mai, par le temoignage des auteurs contemporains , par les monumens du Capitole et les aveux des Capitouls. Le second cha- pitre traite de la composition et du régime de la Gaie science pendant la deuxième époque. (284) Ce fut par lettres patentes données à Fontaine- bleau au mois de Septembre 1694 que les Jeux Floraux de Toulouse furent érigés en Académie des Belles-Lettres ; et c’est à cette érection que com- mence la troisième époque de l’histoire composée par M. Poitevin. Il donne le texte de ces lettres patentes, dont plusieurs dispositions ont été réfor- mées ou modifiées par un édit de 1773 , et il emploie un chapitre aux détails qui concernent les élections, les installations, les destitutions et les démissions, le modérateur et le sous-modérateur , le secrétaire des assemblées particulières et le travail de ces as- semblées , les censeurs etles recueils académiques , le dispensateur et le secrétaire perpétuel; un autre, à ce qu’il appelle le corps des Jeux Floraux , c’est-à- dire, au concours et aux fêtes des fleurs , et un troisième aux prérogatives de l’Académie. L'Académie proprement dite ne se compose que du chancelier et des mainteneurs, dont le nombre fixé à 35 par les lettres patentes de 1694, fut porté à 40, y compris le chancelier, par d’autres de 1725. Nul aspirant ne peut être proposé pour une place, s’il n’en a fait directement la demande au modérateur. Dans l’assemblée qui suit la mort d’un mainteneur , sa place est déclarée vacante, une dé- libération est prise pour lui faire un service, et trois semaines après on lit son éloge, et on lui nomme un successeur à la majorité de tous les suffrages. ( 285 ) L’élu ne prend rang sur la liste Académique que par l'installation , et après que ses lettres de main- teneur lui ont été expédiées. Il est obligé de lire un re- merciment communiqué d'avance au modérateur , qui en rend compte dans une séance particulière, où il lit la réponse qu'il deit faire luimême dans la séance publique de réception. Les lettres patentes de 1694 établissaient un grand nombre d'officiers, dont une bonne partie fut sup- primée par l’édit de 1773. Il n’a été conservé qu’un modérateur et un sous-modérateur , qui sont tirés au sort pour 3 mois , et dont les noms ne peuvent être remis dans l’urne qu'après un intervalle de six mois ; un secrétaire perpétuel ; un secrétaire des assem- blées , élu pour trois ans , et rééligible ; deux censeurs, qu'on renouvelle tous les ans , mais que l’on peut continuer , s'ils y consentent ; et un dispensateur ou trésorier , qui après une année de gestion rend ses comptes , et est nécessairement changé. Il reçoit len- tière dotation de l’Académie, dont il fait l’emplot sur les mandats du secrétaire perpétuel : ils ont chacun une clef du coffre à deux serrures. L’académie s’assemble tous les Vendredis pendant les huit premiers mois de l’année, Suivant les statuts de 1694 , elle ne devait s'occuper que de la lecture et de l'étude des originaux Grecs et Latins, des poëtes et des orateurs qui ont excellé dans notre langue ; mais cet exercice devenant moins intéressant à mesure (286 ) que la critique littéraire faisait plus de progrès ; quelques membres se permirent des traductions ou même @es imitations , soit en prose , soit en vers; et ces contraventions devenues inévitables amenèrent la délibération du 17 Janvier 175$ , confirmée par V’édit de 1773, qui permet aux membres de lire les ouvrages qu'ils ont composés sur un sujet de leur choix. On ne se borne pas à une simple lecture , rien ne se lit qu’il ne soit soumis à un sérieux exa- men. Ce que l’auteur appelle Ze corps des Jeux Floraux et qu’il distingue de l’Académie proprement dite , se compose des mainteneurs et des zraîtres ès Jeux Floraux , qui représentent les anciens Docæeurs en Gaie science. On ne peut solliciter des lettres de maître qu'après avoir obtenu trois prix de poésie » dont un au moins doit être celui de l’ode, et parmi lesquels n’est point compris celui de hymne à la Vierge; ou bien après avoir remporté trois fois le prix du discours. Les maîtres ès Jeux Floraux ne prennent part qu'aux opérations relatives au con- cours. Les ouvrages sont reçus jusqu’au 15 Février de chaque année. Il en doit être remis trois exem- plaires au secrétariat de l’Académie par un habitant de Toulouse , qui en reçoit un récépisé. Les main- teneurs et les maîtres se partagent en trois bureaux pour en faire le premier examen et le premier clas- (287) sement , et ensuite en bureau général pour détermi- ner ceux qui doivent être mis définitivement dans la première classe, Il est nommé un rapporteur pour chacun des ouvrages admis à la concurrence. Après qu'ils ont été discutés et comparés deux à deux, le jugement de préférence est porté successivement jusqu’au dernier, par la voie du scrutin. Les prix sont une amaranthe d’or de la valeur de 400 fr. destinée à une ode; une violette d’ar- gent, de 250 fr., pour un poëme, ou une épître en vers; ( La violette était originairement le pre- mier prix. ) Un souci d'argent, de 200 fr., pour une égloque ou une idylle; un lys d’argent, de 6o fr. pour un sonnet ou une hymne en l’honneur de la Vierge ; enfin une églantine d’or, attribuée par les lettres patentes de 1694 à un discours en prose, au lieu d’une pièce en vers, et portée par la do- nation d’un mainteneur, de la valeur de 250 fr. à celle de 450 fr. Ces prix sont distribués le 3 Mai, jour appellé la fête des fleurs , avec une pompe dont M. Poitevin donne tous les détails. Après un éloge de Clémence Isaure , qui n’est plus pour l’or- dinaire qu’une épisode dans un discours sur un sujet littéraire ou philosophique , quatre commissaires des Jeux Floraux, accompagnés d’une musique et d’une escorte militaire vont chercher les fleurs déposées le matin sur le maître autel de l’église de la Daurade , et qui leur sont remises avec cérémonie, et après (288 ) un discours analogue à l’objet, par le Curé de cette église ou un autre prêtre délégué par lui. Pendant leur absence ; le secrétaire perpétuel fait un rapport sur le concours, et le reste du temps jusqu'au retour des commissaires est rempli par d’autres lectures. Après la distribution des prix et la lecture de chaque ou- vrage couronné , faite par l’auteur ou par un des mainteneurs ou des maîtres, le secrétaire général an- nonce le sujet de discours pour l’année suivante , et la séance finit par la distribution du programme. Poésies lues a l’Académie. M. le Prêtre a lu une romance intitulée La royale orpheline; une pièce de vers ayant pourtitre, L'hommage d'un cœur reconnaissant a S. M. Louis XWIIT, pour la décoration du lys donnée à l’au- teur ; une élépie , intitulée Le deuil de Trianon ; deux fables, la première , ?’Ane et la lyre, imitée de la quatrième des Nouveaux apologues de Phèdre, La seconde, Le cochon gras , imitée du Père du Billon ; et deux contes, La réponse énergique , et le villageois allant au sermon de la Passion. M. de Baudre a lu deux contes, intitulés , l’un Pélisson, Vautre La table d'hôre ; trois épigrammes , La bonne fontaine , Le bon latinist , Les deux orateurs (289 ) erateurs ; Un madrigal intitulé Le négligé, et une pièce de vers ayant pour titre Le compérage. L'Académie a encore entendu la traduction en vers de deux odes d'Horace ; la troisième et la dixième du troisième livre , et une épigramme intitu= le La critique inverse, par M. Delogss ; une épître en vers, Sur le port de Caen, par M. Pattu ; une pièce de vers de M. Héron de Lathuillerie , inti= tulée La soupe aux choux verts ; une pièce de vers imfitulée Le 21 Janvier, avec des notes, une ro- mance intitulée Le s6mbeau de Louis XVI et de Marie- Antoinette au cimetière de l1 Madeleine , détæ diées à M. Descloseaux, et un Chant guerrier sur la cérémonie de la distribution ec bénédiction des drapeaux de la garde nationale de Paris , au champ de Mars, le 7 Septembre 1814 , exécuté sur Le théâtre de l'Académie royale de musique le 9 Sep- tembre , musique de M. de Persuis , par M. P-A. Vieillard , associé-correspondant ; un discours en vers Sur La littérature et Les littérateurs | par M. Fayolle : aussi associé-correspondant, qui lut dans la même séance le sixième chant d’un poëme inédit de Mar- montel, ayant pour titre Polymnie. C290 ) ne JR : \ Ouvrages reçus. L'Académie a reçu un écrit de M. Pattu, intitulé description d'une vis d’'Archimède, a double effet , destinée aux irrigations et aux épuisemens , et plusieurs ouvrages de ses associés-correspondans ; savoir un second volume de fables de M. le Bailly ; une notice sur Antoine Watteau , par M.le Carpentier de Rouen; sun volumeintitulé De l'emploi des conjonctions suivies des modes conjonctifs dans la langue Grecque ; par M. Séguier; un prospectus d’une Histoire générale des pêches anciennes et modernes , dans les mers et les fleuves des deux continens | par M. S-B-J. Noël de la Morinière ; une traduction en prose de l'Enéide de Virgile, avec les élégies de Tibulle traduites en vers, par M. Mollevaut ; un discours sur les travaux de la société de médecine de Paris pendant 1814, par M. le Baron Desgenettes ; une Letrre sur l'exé- cution juridique de deux taureaux. Paris le premier Juin 1814. ÆArsenne Thiébaut de Berneaud & Mylord S.. a Londres S. D ; deux petits écrits de M. Michel Berr, intitulés , lun Larrérature Alle- mande et Orientale | Vautre , Sur la liberté des cultes, et sur le projet de décret relatif a l’observance des fêtes et dimanches. Il a encore été présenté de | | | (291) | la part de M. Drieu , capitaine au Corps Royal d'artillerie , an mémoire sur les ponts militaires, in- titulé Le guide du pontonnier ; et de la part de M. D-B. Warden, consul général des États-Unis d’A- mérique à Paris, un ouvrage Anglais Sur l'origine, La nature, les progrès et l'influence des établisse- mens consulaires. M, Wheatcroft , chargé d’exami- ner cet ouvrage, en a présenté un sommaire, avec quelques réflexions, dont le résultat est que l’auteur a traité son sujet d’une manière très-instructive , et d'autant plus intéressante, qu’il est le premier qui ait écrit Ex professo sur la matiere qui est l’objet” de son livre ; que néanmoins on pourrait lui repro- cher d’y avoir étalé une érudition qui paraît plus ambitieuse qu’utile ; que, sous le rapport du style, il n’a pas toujours été fidèle aux règles de sa langue, et que la longue habitude de parler et d’écrire en Français lui a fait introduire dans sa diction beau- coup de gallicismes. La correspondance des sociétés savantes à pro- curé à l'Académie un Précis analytique des travaux de l’Académie des sciences , des Relles-Lerrres er Arts de Rouen pour l'année 1814; la notice de la séance publique de la société d’émulation de la même ville, tenue le 9 Juin 181$ ; deux notices des travaux de l’Académie de Marseille, l’une pour 1812 et l’autre pour 1814 ; deux bulletins des sciences médicales de la Société de médecine du département de T3 (292) l'Eure. Elle a aussi reçu des Rapports sur différens mémoires lus & La première classe de l'institut ; une Indication sommaire des mémoires présentés à la même classe par A-L. Cauchy, ingénieur des ponts et chaus- sées ;une Analyse des travaux de la classe des sciences mathématiques et physiques de l'institut Royal de France, pendant l'année 1814, partie mathèma- tique, par M. le Cher. Delambre, secrétaire perpé= tuel, et uneautre, pour la Partie physique, par M. le Cher Cuvier , secrétaire perpétuel ; une Moice des travaux de la classe des Beaux-Arts de l’ins- tic Royal de France pour l'année 1814, par Joachim le Breton, Secrétaire perpétuel de la classe ; deux MNorices historiques | aussi de M. Joachim le Breton, l’une, sur la vie er Les ouvrages d’Andre- Ernes Grétry , l'autre Sur La vie et Les ouvrages de Joseph Haydn ; un discours prononcé au lieu de la sépulture de M. de Parny le 7 Décembre 1814, par M. Etienne, président de la classe de la langue et de la littérature Française; un autre discours pro- noncé aux funérailles de M. le Marquis de Bou- flers le 23 Janvier 1815, par M. Ségur , membre de la même classe ; deux, rapports faits à la pre- mière classe de l'institut. au nom de MM. Bosc , Latreille et de Lamaték, le premier dans la séance du 9 Octobre 181$, sur l’ouvrage de M. Lamou- roux relatif aux polypiers coralligènes flexibles ; le der- nier, dans celle du 30 du même mois, sur un écrit ( 293 ) du même auteur intitulé, Mémoire sur la Lucernaire campanulée. Le rapporteur, malgré plusieurs obser- vations de détail, rend un compte avantageux de ces productions , et présente l’auteur comme recomman- dable , tant par son zèle actif, que par ses connais- sances étendues et ses recherches nouvelles dans la partie de l’histoire naturelle qu’il cultive particulière- ment , etcomme digne des encouragemens de la classe. FIN. (294 ) ETSANE Des membres résidans de l’Acadèmie Royale des Sciences , Arts et Belles-Lettres de la ville de Caen , au premier Août 1816. ( Nora. Dans le rapport général de 1811, page 339, ligne $, au lieu de fn de 1809 , lisez fin de 1799.) SSSSSSSSS S MM. BouIssET , professeur de littérature latine de lA- cadémie de Caen. THIERRY ; pharmacien. DELARIVIÈRE , professeur au Coillége Royal de Caen. | Le PRÊTRE le jeune, Homme de Lettres. Le Grp , chef de Divison à la Préfecture. Le MENUET , premier Président de la cour Royale. CaïLLy, Président à la cour Royale. DELOGES le jeune. DE MANGNEVILLE. LaiR , Conseiller de Préfecture. (295) GODEFROY , Professeur de niédecine. CHANTEREYNE , premier Avocat-Général à la cour Royale. Le HieuLze, Conseiller à la Cour Royale. Le BoucHER, Médecin. LANGE. REGNAUT , Conseiller à la cour Royale. DELARUE, professeur d'Histoire de l’Académie de Caen. SIMON , Avocat. PRUDHOMME, professeur de Navigation. HÉBERT , Bibliothécaire de la ville. DucHEMIN, professeur de mathématiques de l’A- cadémie de Caen. WHEATCROFT , homme de Lettres. BELLENGER , professeur de [Littérature Française de l’Académie de Caen. TIRARD-DESLONCHAMPS, professeur de Philoso- phie de l’Académie de Caen. ALEXANDRE, Recteur de l’Académie et Conssiller a la cour Royale. THIERRY fils, professeur de Physique et de Chimie de l'Académie de Caen. DE BAUDRE, homme de Lettres. LE MENUET fils, Avocat. TROUVÉ, Médecin. GoupriL-PREFELN , Procureur Général près la cour Royale, T 4 (296) LAMOUROUX ; professeur d'Histoire Naturelle de l’Académie de Caen. CHÈNE DOLLÉ , inspecteur de l’Académie de Caen. LE Comte Ferdinand de BERTIER , Préfet du dé- partement du Calvados. LABBEY DE LA ROQUE, chevalier de St.-Louis. PATTU , Ingénieur en chef du département. LE SAUVAGE, médecin. SSD SDS SSD IS) ASSOCIÉS domiciliés a Caen. MM. DoMIiNEL, professeur de Médecine, Dan-DELAVAUTERIE, Médecin. RaisiN, Médecin. Le FOLLET, Président à la cour Royale. CHANTEPIE, inspecteur de l’Académie. DESsBORDEAUX , Médecin. HÉRON DE LA THUILEERIE, professeur Agrégé de l’Académie de Caen. DE MALHERBE, Maire de Mouën. SOULLIÉ , professeur au Collège Royal. ( 297 ) ESS DS IIS SI D SSD ASSOCIÉS CORRESPONDANS: MM. Vauquelin, de l’Académie des Sciences à Paris. Surirary, Médecin au Havre. Chamberlain, Directeur des Manufactures de Sulfate de fer et d'acide sulphurique à Honfleur. Lechevalier , Bibliothécaire à Ste.-Geneviève à Parise Ripault. Lalouette, à Bayeux. Asselin, à Cherbourg. Fremin-Beaumont, de Coutances. Poupart, Médecin à Pont-l’Éveque. Poupart, Avocat, à idem. Adjutor Tilly , à Villers-Bocage. Lair, Ingénieur en chef des constructions maritimes a Brest. Delaville, Médecin à Cherbours. Fleury , Chirurgien en chef de la Marine à Toulon, Goullet-Rugy , à Metz. Picot-Lapeyrouse, naturaliste à Toulouse. Langlois | Médecin à Valognes. Dughevreuil, à Cherbourg. ( 298 ) / Gayant , Inspecteur divisionnaire des Ponts-et- Chaussées, à Paris. Taillefer, Proviseur du Collège Royal de Louis le Grand. Brognard, Directeur de la manufacture de Sèvres. Guérin, Médecin à Avranches. Collet-Descotils, à Paris. Descotils, à Valognes. Bouillon la Grange, professeur de Chimie à Paris, Le Gagneur, à St.-Aubin d’Arquenay. David. De France , à Sèvre. De Guerle, censeur des études au Collége Royal de Louis le Grand. Dubois, à Châtillon-sur-Seine, Rever , à Condeville département de l'Eure. Noël, homme de Lettres à Paris. Bouffey , Médecin à Argentan. Auber , Médecin à Rouen. Boufay , Pharmacien à Paris. Pecquet, Maire de Saint-Loup-de-Fribois. Chorron , homme de Lettres à Paris. Bisson , à Bayeux. Girard, Ingénieur en chef des travaux hydrauliques a Paris. Valentin , Médecin à Marseille, Mollevaut, ( L. Ch. ) homme de Lettres à Paris. Le Français-Lalande, Adjoint au bureau des longi- ( 299 ) tudes , de l’Académie des Sciences. D'ornay , à Rouen. Labbey , professeur de Mathématiques à Paris. Burckard, Membre du bureau des longitudes , de P'Académie des Sciences. Surblé-Desmoulins , à Vire. Gilbert , médecin des Armées à Paris. Lescaille | Ingénieur en chef du département de l'Eure. Auguste Delabouisse, hemme de Lettres. Made. Eléonore Delabouisse, Le Bailly, homme de Lettres, à Paris, Guilbert, à Rouen. Pérignon , Avocat au Conseil du Roi. Le Comte Laplace, Pair de France. Melle. Hélène-Maria Williams, à Paris. Desétables, fabricant de Papier à Vire. Combes-Dounous , à Montauban. Stone , à Paris. Vitalis, Secrétaire de l’Académie des Sciences de Rouen. Chanvalon, Maire de Carentan. Jubé. Geoffroy, Naturaliste à Valognes. Lasnon-Renaudière , Président du Tribunal Civil à Vire. Toustain-de-Richebourg , à Saint-Martin-du-Manoir , près Montivilliers, C300) Lacépède, de l’Académie des Sciences. Vigné, Médecin à Rouen. | Brébisson , à Falaise. Desgenettes , professeur dela faculté de médecine à Paris. Binet, Dessinateur au ministère de la Marine. Fayolle, homme de Lettres, à Paris. Regnault-de-Beaucarron , à Nogent-sur-Seine. Cachin , Inspecteur des Ponts-et-Chaussées. Le Carpentier, professeur de Dessin à Rouen. Quenault , Chirugien en chef de l’hospice à Cou- tance. Jaquelin Dubisson , à Paris, Noël, à Cherbourg. Costaz, à Paris. De Rosny, à Paris. Darcet , Hôtel des Monnayes à Paris. Arsène Thiébaut-de-Berneaud, à Paris. Hernandez, Médecin à Toulon. Lepère , Inspecteur - Divisionnaire des Ponts-et- Chaussées. Chabot-de-l’Allier , conseiller à la cour de Cassa- tion. | Vastel, à Cherbourg. Demoy. Caffarelli, au Falga près Carcassonne. Lautour-du-Châtel, à Argentan. (301) Lescalier, consul aux États-Unis d'Amérique. Turpin, peintre d'Histoire Naturelle, à Paris ; Cattean, à Paris. De Théis, à Laon., Brault, Evêque de Bayeux. Marron , Président du Consistoire de la Seine, De Maimieux, à Paris. Saint-Amans, Naturaliste à Agen. Periaux , Imprimeur-Libraire à Rouen. Guitard , médecin à Bordeaux. : Jouyneau-Desloges , homme de Lettres à Poitiers; Robert de Saint-Victor , idem à Rouen, Moisson, Curé de Chicheboville. Prévost d’Iray , à Paris. Le Pileur, homme de Lettres à Paris. Delarue, Pharmacien à Evreux. Cailly fils, Capitaine au corps Royal d’Artillerie à Metz. Marie-Dumesnil , à Paris, De Roquefort, à Paris. Boinvilliers, à Paris. Méchin , à Paris. Manoury d’Ectot , à Argentan. Pelletier, Pharmacien , à Paris. Bremontier , à Paris. Sabonadiere, à Guernesey. Séguier , à Beauvais. Douce , à Londres. ( 302 ) Le Héricier de Gerville, à Valognes. Michel Berr, à Paris. Membres résidans morts depuis le premier Août 1811. MM. De Roussel , professeur d'Histoire Naturelle. Gervais-Delaprise , homme de Lettres. Moysant , bibliothécaire de la Ville, Boisard , ancien pharmacien des Armées, Nicolas, professeur de Chimie. LDC E DES MATIÈRES. RP PORT Sur Les travaux de l’année 1811. PREMIÈRE SECTION. PARTIE SCIENTIFIQUE. de sur l’ancienne culture du Pastel dans la Basse-Normandie , par M. de Mangne- villes Pe 3 Mémoire sur la manière de dégraisser les laines , par M. Nicolas. 8 Notice sur le petit poisson Fete con- nu à Caen sous le nom de montée, par M. Nicolas. 11 Mémoire sur la montée, per M. Lamouroux , 13 LT AS ÉT: Essai pour servir à l'analyse méthodique des sels, par M. Thierry Fils. P- Essai sur l’influence du tempérament des mé- decins dans leur pratique et leurs écrits, par M. Trouvé. Quelle est la nature du petit poisson connu à Caen sous le nom de montée, qui se pêche dans l'Orne à des époques périodiques. Quels sont les effets de la terreur sur l’éco- nomie animale ? Second mémoire sur la même question. Notice sur des matières renfermées dans le sol du département du Calvados, qui sont propices pour des manufactures chimiques , par M. Chamberlain , Mémoire sur la cristallisation du Basalte, par M. Geoffroy. Sur les agathes, par le même. Projet d’un appareil propre à faciliter le séjour des hommes au fond des eaux, par M. De- laville. Ouvrages reçus par l’Académie, 7 22 AI 43 seconde SECONDE SECTION. PARTIE LITTÉRAIRE. — Dissenrarios sur l’épigramme, par M. de Baudre. P- Notice sur Segtais , par M. Lair. Quels changemens la mer a-t-elle opérés sur le littoral des départemens du Calvados et de la Manche, par M. Bisson. Le partage des biens communaux a-t-ilété avan- tageux, ou non, à l’agriculture dans les dé- partemens de la ci-devant Normandie ? Ouvrages d’associés-correspondans, Poésies de MM. le Prêtre, de Baudre, Brémon- tier, Arnault, Bailly , Vieillard, et Vigée, Annonces d’autres ouvrages, 44 46 49 R:'AOB PI OR Sur Les travaux de l’année 1812. PREMIÈRE SECTION. PARTIE SCIENTIFIQUE. Ossenvarioxs sur les mitéores et les mala- dies , par M. Godefroy. fit Précis des moyens les plus importans aux pro= grès de l’hygrométrie, par M. de Rousse 63 Exposition des effets météorologiques de l’air , par M. Prudhomme. 64 Notice sur les jardins de M. Dumont de Coursel, par M. Lar, 70 Essai sur les thalassiophytes non articulées, par M. Lamouroux. 76 … Rapports faits à la première classe de l'institut sur des mémoires de M. Lamouroux. 79 Rapport sur l'épidémie de Bernières, par M. Raisin. 81 Aperçus physiologiques et pathologiques sur les fonctions de l'appareil hépatique , par M. Desbordeaux. 87 F A B-È-E. Observations sur la jalousie des enfans, par M. Trouvé, 91 Recherches sur la sécrétion et sur l'absorption des gaz dans les corps organiques, par M. Tillaye, 94 Essai sur la formation des charbons de terre. 99 Ouvrages présentés à l’Académie. 109 É SSI II PSSIS SECONDE SECTION. PARTIE LETTÉR. AIRE. Mivorrs sur le livre de Job , par M. Cailly. Observations sur le livre de Job, par M. Bel. | lenger. Notice sur#M. le Clerc de Bauberon, par M. Lair. Mémoire sur l’origine de la langue française, par M. Labbey de la Roque. Du madrigal, par M. de Baudre. Sur quelques bons et vrais phiosophes, par M. Toustain de Richebourp. Tables alphabétiques et de législation maritime de l’Europe , par M. Groui. Poésies. Ouvrages envoyés à l’Académie, FSSPSSSISSE 102 106 112 114 119 123 130 131 132 RAPPORT Sur Les travaux de l’année 1813. e : PREMIÈRE SECTION. PARTIE SCIENTIFIQUE: + ESSIPSSI SIA Nov essai sur les causes générales des vents, par M. Prudhomme. 135 Conjectures sur la possibilité que le soleil, les planètes , les satellites, et même les comètes soient. constituées de manière à admettre des habitans de même nature que ceux de notre Terre, par M. Whearcroft. 148 Réflexions sur le mémoire précédent , par M. Thierry fils. 153 Mémoire sur le blé lammas , par M. Lamouroux. 155 Mémoire sur la nécessité d’alterner les récoltes, par M. de Mangneville. 159 Rapport de M. de Mangnevillesur plusieurs ouvrages de M. Thiébaut de Berneaud. 162 Quelques considérations sur les albinos , par M. le Sauvage, 164 TABLE. Rapport de M. le Sauvage sur un mémoire de M. Thillaye intitulé, Essai sur une nouvelle théorie de la vision. p. Rapport de M. le Sauvage sur un mémoire de M. Geoffroy ayant pour titre sur Ls diffé- rens états des coquillages au sein de la terre. Mémoire sur un canal de dérivation, etc., ‘par M. Lescaille, 175 174 SECONDE SECTION. PARTIE LITTÉRAIRE. FPS CSSEFSSA Essar ou recherches sur les vrais élémens de l'histoire ancienne du globe terrestre, par M. Cailly. p. 176 Description de l'ouverture de l’avant-port de Cherbourg, par M. Lair. 182 Notice sur M. Foucault, intendant de Caen, par M. Lair. 187 Mémoire sur les trouvères Normands et Anglo- Normands, par M. Delarue. 188 Notice sur une partie de la Moscovie, sur Moscou et le Kremlin, par M. Caïilly fils. ibid Notice sur les ruines de Juliobona , par M. Rever. 192 . Description des autels de l’ancienne chapelle du Mont-Dol par L: même. 197 Recherches sur un camp Romain, par M.Le He- ricier de Gerville. 201 Recherches sur le pays des Unell, et sur les villes qui y ont existé sous la domination Ro- maine, par le méme. 20$ Sur un pavé en Mosaïque trouvé à Vieux, 206 Poésies lues à l’Académie. 208 Ouvrages rEçUSe , fhid, RAMEORTE Fait à l’Académie à la fin de 1814. p.210 PREMIÈRE SECTION. PARTIE SCIENTIFIQUE. SSII D ISSI D Mimorms sur le corail, par M. Lamou- roux. ps 214 Observations sur une chute d’aérolithes dans le département de Lot-et-Garonne , par Le même. 4 FSSPSSPIFSSS SECONDE RS SECONDE SECTION. PARTIE LITTÉRAIRE. FSÉSSEFSSIÈS PSS CE varions sur les invasions de la mer et son action sur le littoral du Calvados et de la Manche par M. Cuilly. p. 210 Essai sur l’existence de la noblesse en France et en Normandie dans les temps les plus anciens , par M. Labbey de la Roque 224 Essai sur Homère par M. Cail!y. 232 Eclaircissemens historiques sur Malherbe , par M. Hébert. 233 Réponse à une question de M. Jouyneau Des- loges sur l'institution de la Chevalerie en France, par M. Delarue. 236 Essai sur Anaximandre et sur sa philosophie. 239 Poésies lues à l’Académie. 241 Ouvrages reçus, 243 FH ANRBGE ORNE" Sur Les travaux de l’année 1815. PREMIÈRE SECTION. PARTIE SCIENTIFIQUE. Coxsinérarions sur les caractères distinc- tifs de l’oxigène et ses rapports généraux avec les autres matières réputées simples, par M. Thierry fils. P- Exposé d’un projet présenté en 1812, pour l'amélioration du port de Caen, par M. Pari. Précis historique sur la navigation de la rivière d'Orne, par M. Lange. Rapport sur un mémoire de M. Geoffroy , par M. Lamouroux. Rapport sur l’ouvrage de M. Balme, par M. de Sauvage. Note sur le saumon, par M. Prudhomme. 245 259 252 269 260 262 SECONDE SECTION. PARTIE LITTÉRAIRE. FL PPSÉSSS Rscuercues sur les ouvrages des Bardes Armoricains dans le moyen âge , par M. De- larue, P. Essai sur les moyens par lesquels on a pu jus- qu'au XVI. siècle s’anoblir soi-même en France, par M. Labbey de la Roque. Introduction à un cours d’histoire moderne , par M. Héron la Thuillerie. Notice sur les Cziganys. Mémoire pour servir à l’histoire des Jeux Floraux. Poésies lues à l’Académie. Ouvrages reçus. Liste des membres et des associés de l’Académie. FIN DE LA TABLE. 264 168 274 276 278 288 290 294 die AA ei Riu patte A UC De fe Laon à SAUME se % 12 RE wi Mon ne ju n MS At MR A Ee OUUNSS | ee Lo CE AA PIE ni 4 et ren den qu Ye HE a” k 24 ren des FAR LAN si PT 4 sn 1 au 1 Li Ne È Se OA { K° «1 =. - \ p: ’ - # 2 Û NAN ARE ae SP AGREE y PURE 2 _ Ps a: A A : À, 5 # + D ; re 7 ÿ} INA A An A