A et 2 7 RÉ LR LR LR ER PTE Z DA ERES Re RARE SL BETA re — o U PARC RÉ < 1 TA P 0 É Un Do Les se Le LL PS CS 5 LÉ AA L ÉS CT és ét ne Æ ze TS te LE CAL PS Pas LE RES ë LoCe RES RON es k S RER PSS : RES es 27 k 5 PSE RS Re LP 7 DOC 4e cer, < « ses S ne Dore > Ni, ue ss ue + »2 is se : >, s Ÿ ces té Gs LS & > < > ses » RIRE ces 7e CCM ES < es pr HN Q + >. CS »» éet rire aan te Le) ER SE ER ne F Ps are QC ts D CRAN SOSES D D D D Se 9 DCS dm ae LS 2, Ge ds f: ÿ ï = Due a} a ae po ÿ” RUE 2922 f'E2A Cp 4. FAUNE ORNITHOLOGIQUE ETEINTE ILES MASCAREIGNES ET DE MADAGASCAR PAR M. ALPH. MILNE EDWARDS Professeur de zoologie à l'Ecole supérieure de pharmacie. \ide-naturaliste au Muséum, etc. 00: PARIS G. MASSON ÉDITEUR LIBRAIRE DE L'ACADÉMIE DE MÉDECINE 1866 À 1873 TABLE DES MATIÈRES CONTENUES DANS CE VOLUME PREMIÈRE PARTIE Observations sur les caracteres ostéologiques des principaux groupes de Psitta- cides pour servir à la détermination des affinités naturelles du Psitlacus mau- ritianus, espèce probablement éteinte et dont un fragment a été découvert récemment à l'île Maurice. (PI. 4 à 3.) . . . . . . . . Mémoire sur un Psiltacien fossile de l'ile Rodrigue, (PI. 4 et 5.). . . . . Mémoire sur une espèce éteinte du genre Falica qui habitait autrefois lile MaurtiCeIPIS OMR ER RC Observations sur les affinités zoologiques de l'Aphanapteryx, espèce éteinte qui vivait encore à l'ile Maurice au xvuf siècle. (PL. A1 à 14.) . . . . Nouvelles observations sur les caractères zoologiques el sur les affinités naturelles de l'Æpyornis de Madagascar (publiées en commun avec M. Alfred Gran- didier). {PL 15 à 28. . . 4 . . . + . . . . . Recherches sur la faune ancienne des iles Mascareignes. (PI. 29 à 33.). DEUXIÈME PARTIE Remarques sur les ossements du Dronte (Didus ineptus) récemment recucillis à l'ile Maurice (PI. 43 à 17.) . . PARIS. — IMPRIMERIE DE E. MARTINET, RUE MIGNON, 2 Pages 61 OBSERVATIONS SUR LES CARACTÈRES OSTÉOLOGIQUES DES PRINCIPAUX GROUPES DE PSITTACIDES POUR SERVIR À LA DÉTERMIVATION DES AFFINITES NATURELLES DU PSITTACUS MA URITIANUS, ESPÈCE PROBABLEMENT ÉTEINTE ET DONT UN FRAGMENT A ÉTÉ DÉCOUVERT RÉCEMMENT A L'ÎLE MAURICE. M. Richard Owen à remarqué, parmi les débris de Dronte trouvés à l'île Maurice par M. George Clark, un fragment de mâchoire inférieure (1) qu'il a rapporté à un Oiseau de la famille des Perroquets, distinct de tous les Psittacides décrits jusqu'ici, et qu'il est disposé à considérer comme constituant une espèce particulière éteinte aujourd'hui. L'illustre anatomiste anglais donne à cet ancien habitant de l'île Maurice le nom de Psittacus mauritianus, et il pense que son mode d'organisation devait le rapprocher des Perroquets de l’ancien monde (Afrique et Australie), plus que des espèces de la mème famille qui vivent aujourd’hui dans le nouveau conti nent. Enfin, il termine la note qu'il vient de publier sur ce sujet en témoignant l'espoir que, tôt ou tard, les zoologistes pourront se procurer les pièces nécessaires pour déterminer à quel groupe subgénérique cet Oiseau appartient. L'importance de cette découverte pour l'histoire si intéres- sante mais si peu connue de la faune éteinte des iles Masca = reignes, et les desiderata signalés par M. Owen, dont l'autorité est si grande aux yeux de tous les zoologistes, m'ont déterminé (4) Voy. pl. 1, fig, 4 et 5. A. MILNE EDWARDS. 1 2 CARACTÈRES OSTÉOLOGIQUES à chercher jusqu'à quel point on pourrait pousser la constatation des affinités zoologiques des différents Oiseaux de cette famille naturelle, non pas à l'aide de leur squelette tout entier, tâche pour l’accomplissement de laquelle les observations ostéolo- giques de M. Blanchard seraient d'un puissant secours; mais en ne prenant en considération que le mode de conformation de la moitié antérieure de la mâchoire imférieure, seule portion de la charpente osseuse du Psitlcus mauritianus que l'on puisse actuellement étudier. Cette recherche avait pour moi un double intérêt; j'ai pensé qu'elle me permettrait peut-être d'ajouter, d'une manière indirecte, quelque chose à l'histoire d’une espèce d'oiseau étemte, et qu'elle servirait d’ailleurs à compléter une série d'observations dont je m'étais occupé précédemment lorsque, dans mes études sur la paléontologie ornithologique, j'avais cherché à apprécier le degré de fixité des caractères ostéologiques, non-seulement dans les diverses familles de la classe des Oiseaux, mais aussi dans les petites divisions naturelles dont chacun de ces groupes se compose. Je me suis donc posé la question suivante : abstraction faite de toutes les autres parties du squelette des Psittacides, pour- rait-on, à l'aide de la portion de la mâchoire inférieure corres- pondante à celle trouvée à l'île Maurice, avec les os de Dronte, caractériser les différentes divisions naturelles de cette grande famille ornithologique et arriver même à la distimction des espèces? Pour y répondre, j'ai comparé attentivement le mode de conformation de l'os maxillaire inférieur dans toutes les espèces de Psittacides que j'ai pu me procurer, et J'ai acquis bientôt la conviction que le problème, ainsi posé, serait soluble. Pour le résoudre complétement, il aurait été nécessaire d’exa- miner plus d'espèces que je n’ai pu en observer, et de mieux établir les limites de plus d’une division zoologique adoptée par les ornithologistes; je ne présenterai donc qu'avec beaucoup de réserves les résultats auxquels je suis arrivé, et je ne prétends en rien conclure au delà des faits que j'ai constatés. Mais les conclusions qui en ressortent manifestement me semblent mé- riter confiance. DES PSITTACIDES. D S 2 Ainsi que chacun le sait, un des types secondaires les plus remarquables de la famille des Perroquets nous est offert par les espèces ordinairement de grande taille qui habitent l'Amérique méridionale, et qui sont désignées collectivement sous le nom d'Aras. Chez le Macao, ou Ara (Macrocercus) Aracanga (1), que l'on peut prendre comme type de ce geare, l'os maxillaire infé- rieur est très-robuste et presque aussi large en avant qu'en ar- rière. La région mentonnière, c'est-à-dire la partie de la surface externe de cette mâchoire qui, dans l’état frais, est recouverte par le bec corné, est très-large, peu bombée d’arriére en avant et régulièrement courbée dans le sens transversal, de sorte que sa portion médiane et inférieure se confond avec ses portions latérales et montantes qui se dirigent obliquement en haut et en dehors. I n'y à donc ici aucune arête longitudinale ou ligne saillante limitant latéralement la portion médiane de cette région, qui est bombée transversalement et qui présente à sa partie antérieure des rugosités rombreuses et très-irrégulières, formées par les trous et les sillons vasculaires. Le bord antérieur de la région mentonnière est presque verticalet ne porte pas à sa partie médiane et inférieure un prolongement en forme de galoche, comme nous le verrons chez beaucoupd'aatres Psittaciens. Les bords latéro-postérieurs, marqués par une ligne courbe, dont la convexité est posté rieure, se dirigent très-obliquement en bas et en arrière; l'angle mentonnier supérieur, c'est-à-dire l'angle situé de chaque côté de la mâchoire au point de rencontre de ces bords avec le bord antérieur, est très-avancé. Enfin, le bord mentonnier postérieur est très-long, dirigé transversalement et situé très-près de l'ar- ticulation maxillo-tympanale, de façon qu'une ligne verticale qui passerait par sa partie médiane correspondrait à peu près au milieu de la portion du bord supérieur de la mâchoire comprise entre cette articulation et l'angle mentonnier supérieur. Les (4) Voy. pl. 2, fig. 7, 7a, et pl. 3, fig. 4, 4e. CARACTÈRES OSTÉOLOGIQUES branches de la mâchoire sont très-élevées, en arrière aussi bien qu'en avant, de sorte que la région massétérienne ou portion latérale de la surface externe de cet os, où s'insèrentles fibres du muscle élévateur externe, est très-large et terminée supérieure- ment par un bord presque horizontal. Afin de faciliter les des- criptions en évitant les périphrases, je désigne sous le nom de créle coronoïdienne la portion antérieure de ce bord qui est ordi- naurement plus élevée que le reste, et qui correspond jusqu'à un certain joint à l'apophyse coronoïde de l'os maxillaire mférieur des Mammifères. Chez les Aras, cette crête se termine en arrière par une petite saillie qui se trouve à peu de distance de l'angle mentonnier supérieur, et qui ne s'élève que peu au-dessus de la portion suivante du bord maxillaire. Le cadre sublingual, qui est constitué par le bord inférieur de la mâchoire et qui correspond à la base de la langue ainsi qu'aux muscles sous-jacents, représente une arcade très-surbaissée et se divise en trois parties assez distinctes : un cintre transversal qui est à peine courbé et deux piliers latéraux qui sont épais et un peu inclinés l'un vers l’autre antérieurement. Je ne parle pas ici du mode de conformation de l'angle postérieur de la mà- choire, parce que cette partie de l'os n'existe pas dans le frag- ment du Psitlacus mauritianus décrit par M. Owen. La face supérieure ou interne de los maxillaire inférieur des Aras, présente également des particularités d'organisation dont il faut tenir compte. La surface sus-mentonnière, courbée très- régulièrement dans le sens transversal, mais presque droite dans le sens longitudinal, est divisée en deux portions par une ligne courbe transversale dont la convexité est dirigée en arricre. La portion antérieure, ainsi Girconscrite, correspond à la lame interne de l’étui corné du bec. La portion postérieure présente à sa partie médiane et antérieure une fossette circulaire qui est divisée en deux par une petite arête longitudinale et qui donne insertion aux muscles génio-glosses. Une paire de trous vascu- lires se fait remarquer à la partie antérieure de cette fossette. Enfin, les régions ptérygoidiennes ou portions moyennes de la face interne des branches de los maxillaire, où se fixent les DES PSITTACIDES. 0) muscles élévateurs internes de la mâchoire, sont très-grandes et présentent des empreintes d'insertion extrêmement fortes, ainsi que des orifices pneumatiques. Ces caractères ostéologiques se retrouvent avec quelques légères modifications chez tous les Aras proprement dits dont J'ai pu examiner la mâchoire. Chez l'Ara chloroptera, l'élargis- sement de la région mentonmière et la régularité de sa courbure transversale sont encore plus marqués. Quelquefois la portion médiane de cette région s'avance légèrement et se distingue un peu mieux des parties latérales ; on peut même apercevoir des vestiges de deux arêtes longitudi- nales sur la ligne de rencontre de ces surfaces ; cette disposition se montre chez l'Ara ararauna et un peu chez l'Ara Illigeri, mais elle est si peu marquée qu'elle n'influe pas notablement sur l'aspect général de l'es et n'empêche pas de reconnaitre au premier coup d'œil à quel genre d'Oiseaux la mâchoire doit être rapportée. Chez le Perroquet vert du Brésil ou Ara severa, que le prince Charles Bonaparte place dans une autre division générique sous le nom de Primolius severus, la mâchoire inférieure, tout en présentant quelques particularités spécifiques, est conformée d'après le même plan généralque celle des autres Aras. S 3 Les Perroquets Amazones, qui appartiennent à la même région géographique, mais qui se rangent dans un groupe naturel très- différent auquel les ornithologistes donnent le nom de Chrysotis, peuvent être facilement distingués des Aras par la conformation de leur mâchoire inférieure (4). La région mentonnière, tout en étant courbée régulièrement comme chez ceux-ci, est courte et sa portion médiane s'avance notablement en forme de galoche; ses bords latéro-antérieurs sont très-obliques ; ses bords latéro-postérieurs descendent (L}Moy- pl 3 fs 2 6 CARACTÈRES OSTÉOLOGIQUES presque verticalement, et son bord postérieur, fortement arqué, s'avance au delà du niveau de ses angles latéro-supérieurs. La fossette génio-glosse est superficielle et submarginale. Les branches de la mâchoire sont faibles et peu élevées, en sorte que les régions massétériennes sont peu développées et les empreintes musculaires des régions ptérygoïdiennes mal définies. Enfin, le cadre sublingual, très-élargi en arrière, se rétrécit graduellement en avant et s'y termine par un cintre très-courbe que rien ne sépare nettement des piliers latéraux. Chez le Chrysotis æanthops du Mexique, la mâchoire infé- rieure présente à peu près le même mode de conformation générale; la région mentonnière est convexe transversalement et s’avance en forme de galoche ; le cadre sublingual très-large en arrière est étroit, mais régulièrement arqué en avant, et les régions massétériennes, tout en s'élevant davantage dans la portion interne qui correspond à la crête coronoïdienne, s’abais- sent beaucoup postérieurement. Le cadre sublingual est un peu plus large en avant chez le Chrysotis ochrocephalus, mais les caractères généraux de los sont à peu près les mêmes que dans les deux espèces précé- dentes. S 4 Dans la division qui à reçu le nom générique de Conurus, l'os maxillaire inférieur ressemble davantage à celui des Aras, parce que la région mentonnière, tout en étant plus développée, ne s’avance pas autant. Les branches sont moins divergentes en arrière que chez les Chrysotis dont je viens de parler; mais, de même que chez ces derniers, il se distingue par l'abiussement rapide du bord supérieur de la région massétérienne en arrière et par l'absence presque complète de rugosités sur les régions ptérygoïdiennes, caractères ostéologiques qui indiquent beau- coup de faiblesse relative dans les muscles élévateurs de la mâchoire. Les espèces sur lesquelles j'ai constaté ce mode de conformation sont le Conurus pertinaæ et le C. Murinus (Gmelin). DES PSITTACIDES. 7 Les Psittacules, malgré la petitesse de leur taille, ont la man- dibule inférieure robuste et conformée à peu près comme chez les Conures (1). Les petites Perruches américaines, dont le prince Charles Bonaparte à formé le genre Psittovius, ressemblent davantage aux Chrysotis par la forme de cette partie de la tête osseuse, car le cadre sublingual est plus rétréci en avant, mais les bran- ches mandibulares sont faibles. S 5 La grande région océanique, qui comprend la Nouvelle- Zélande aussi bien que l'Australie et qui se confond vers le nord avec la région malasienne, possède en propre plusieurs groupes de Psittaciens qui sont non moins bien caractérisés par la con- formation de l'os maxillaire inférieur que par la structure des autres parties du squelette. Les Aras du nouveau monde semblent être représentés dans cette partie du globe par les Microglosses, dont la principale espèce habite la Nouvelle-Zélande et se fait remarquer par le grand développement de ses mandibules (2). Aussi l’os maxillaire inférieur des Microglosses ressemble-t-11 à celui des Aras par plusieurs de ses caractères les plus importants, mais il s’en distingue nettement par l'existence d’aréles mentonnières, c'est- à-dire par l'existence d’un bord anguleux au point de rencontre de la portion médiane et des portions latérales de la région mentonnière, mode d'organisation que nous allons retrouver chez la plupart des Psittaciens de cette immense division géo- graphique. Chez les Microglosses, la forme générale de cet os est encore plus ramassée que chez les Aras; les régions massétériennes s'élèvent davantage dans leur partie postérieure aussi bien qu’en avant, et la région mentonnière est non moins développée; son bord antérieur descend aussi presque verticalement; les bords (1) Notamment le Psiftaculus cœlestis et le Psittaculus gregarius. (2) Voy. pl. 2, fig. 8; pl. 3, fig. 6, 8 CARACTÈRES OSTÉOLOGIQUES latéro-postérieurs se dirigent très-obliquement en bas et en arrière, et son bord postérieur, très-large et à peine arqué, est dirigé presque transversalement. Enfin, les régions ptérygoi- diennes sont creusées d’impressions musculaires très-profondes ; mais, ainsi que je l'ai déjà dit, la conformation de la région mentonnière est très-différente de tout ce que nous avons vu chez les Psittaciens américains. Elle est fortement coudée de chaque côté, de façon à être divisée en trois portions bien dis- tinctes : une médiane qui est presque horizontale et deux laté- rales qui sont à peu près verticales etse réunissent à la prennere sous un angle presque droit, De là, les deux arêtes longitudinales dont j'ai parlé ci-dessus. La portion médiane ainsi délimitée est à pee bombée et presque aussi large en avant qu'en arrière; son bord antérieur est garni d'une série linéaire de denticulations qui se prolongent en arrière sous la forme de petites lignes sallantes parallèles et séparées par des sillons superficiels à la base desquels on aper- coit des trous vasculaires; sur la ligne médiane, l'espèce de bordure constituée de la sorte est interrompue par une surface lisse qui représente un triangle dont le sommet est dirigé en avant et dont la base se confond avec la portion suivante de la région mentonnière ; disposition qui ne ressemble en rien à celle de la partie correspondante de la mâchoire des Aras. Les por- tions latérales sont plates, et la ligne courbe qui les sépare des régions massétériennes constitue un petit sillon dont le bord postérieur est saillant; enfin, les trous vasculaires, dont ces par- ties latérales du menton sont percés, sont disposés irrégulière- ment et placés très-loin du bord antérieur de l'os. Par la courbure de la ligne qui, sur la surface sus-menton- nière, limite l’espace correspondant à étui corné du bec et par la forme de la fossette génio-glosse, les Microglosses ne diffè- rent pas notablement des Aras, mais cette dernière dépression est située plus avant. Entin, le cadre sublingual est encore plus surbaissé et plus carré que chez ces derniers Oiseaux; ses bords latéraux très courts sont presque parallèles, etson bord antérieur très-long et DES PSITTACIDES. 9 à peine arqué correspond à une ligne verticale qui passerait par l'angle postérieur de la portion coronoïdienne du bord supérieur de la région massétérienne. 6 Un Les grands Perroquets de l'Australie, que les ornithologistes ont réunis sous le nom générique de Calyptorhynchus, ressem- blent beaucoup aux Microglosses, et leur mâchoire inférieure rappelle celle des Perroquets américains par quelques-uns des caracteres que je viens d'indiquer, mais ils présentent des par- ticularités d'organisation assez variées, et certaines espèces se rapprochent davantage des Aras. Par exemple, le Calyptorhyn- chus Bankst. Chez ce Psittacien (1), la région mentonnière est divisée en trois portions à peu prés comme chez le Microglosse, mais moins distinctement; les arêtes qui limitent latéralement la portion médiane sont mousses et faiblement marquées. Cette dernière surface est moins grande, moins large anté- rieurement et très-bombée d'avant en arritre. Les denticula- tions, les sillons et les trous vasculaires qui ornent son bord antérieur, sont disposés moins régulièrement que chez le Micro glosse, mais différent complétement de ce qui se voit chez les Aras. Les portions latérales de la région mentonniere sont presque verticales, mais un peu bombées; elles sont creusées en arrière d'un sillon submarginal très-large mais superficiel, et la ligne oblique, qui les sépare des régions massétériennes, est presque droite. Ces dernières sont très-élevées dans toute leur longueur. Le cadre sublingual représente une arcade très-sur- baissée, mais plus haute et moins élargie en avant que chez le Microglosse, de façon que ses bords latéraux divergent davan- tage en arrière. La surface sus-mentonnière est plus concave, plus profonde etplusresserrée inférieurement ; la fossette génio-glosse est placée plus près de son bord antérieur que de son bord postérieur, en (1) Voy. pl. 2, fig. 4; pl. 3, fig. 5. A+ MILNE EDWARDS, 1 10 CARACTÈRES OSTÉOLOGIQUES sorte que l’espace correspondant à l'étui corné du bec est très- étroit et que la ligne qui le circonscrit en arrière, au lieu de décrire une courbe régulière, s'infléchit fortement en avant vers le milieu pour passer devant cette dépression. ILest aussi à noter qu'une arète saillante et mousse descend verticalement des angles mentonniers supérieurs et passe der- rière cette même fossette de façon à donner à l'os, près du bord postérieur du menton, une épaisseur très-considérable. La forme bombée de la portion médiane de la région men- tonnière qui est très-marquée chez le Calyptorhynchus Banhsii et qui n'existe jamais chez les Aras, se prononce encore davan- tage chez le Calyptorhynchus Leachü. Cette partie est extrème- ment large et fort arquée transversalement aussi bien que d'avant en arrière. | Les arêtes mentonniéres sont peu marquées postérieurement, mais elles sont bien distinctes en avant, où chacune d'elles se termine par une petite saillie. Le bord antérieur de cette portion médiane est concave et remarquablement épaissi ; enfin les surfaces latérales sont peu étendues et presque verticales; un sillon dirigé en ligne droite de haut en bas et d'avant en arrière les sépare des surfaces mas- sétériennes, qui sont très-grandes et un peu bombées. Enfin, le cadre sublingual à presque la forme d’un quadrilatère allongé et ouvert en arrière ; son bord antérieur étant presque droit et ses bords latéraux subparallèles. Il résulte de toutes ces dispositions qu'au premier abord l'as pect de cette mâchoire paraît fort particulier; mais par l’en- semble de ses caractères, elle se rapproche, en réalité, heaucoup des autres espèces océaniennes dont je viens de parler. Le Perroquet noir de Tasmanie, que M. Gould à décrit sous le nom de Calyptorhynchus œæanthonotus, s'éloigne des espèces précédentes par plusieurs caractères ostéologiques, et devra peut-être prendre place dans une autre division générique. Sa mâchoire inférieure ressemble à celle des autres Calyptorhynques par la position de la fossette génio-glosse, et par l'existence d’une arète transversale mousse sur là partie postérieure de la région DES PSITTACIDES. il sus-mentonniére. Mais la conformation générale de cet os est très-différente, et se rapproche beaucoup de ce que l'on voit dans le genre Cacatoës, dont les représentants sont répandus depuis le sud de l'Australie jusqu'aux îles Philippines. Chez tous les Cacatoës proprement dits que j'ai eu l'occasion d'étudier, savoir : le Cacatua erythrolopha, le €. cristata, le C. ga- lerita, le C. Leadbeateri, le C. sulphurea et le C. minor, Vos maxillaire est caractérisé de la manière la plus nette par le mode de conformation de la région mentonnière (1). Celle-ci brus- quement coudée de chaque côté de la portion médiane pour monter ensuite presque verticalement, se trouve divisée en trois pans, non moins nettement que chez le Microglosse, et présente de chaque côté, sur la ligne de jonction de ces parties, une arête bien dessinée ; mais sa portion médiane se rétrécit beaucoup antérieurement et s'avance de façon à constituer une galoche très-saillante qui est échancrée au milieu. I! résulte aussi de cette disposition que le bord intérieur de la région mentonnière, au lieu de décrire une courbe régulière entre les deux angles supé- rieurs, et de descendre à peu près verticalement comme chez les Microglosses, les Calypthorynques ordinaires et les Aras, est divisé en trois portions, dont la médiane est courte et dirigée transversalement, tandis que les deux latérales sont longues, falciformes et très-obliques, d'arrière en avant et de haut en bas. Les trous vasculaires sont disposés assez régulièrement enligie, à peu de distance de ce bord, sur Les côtés aussi bien que sur le milieu. La ligne qui limite la région mentonnière est à peu près droite, et descend presque verticalement. La région sus-menton= niere est régulièrement arquée transversalement, mais presque plane d'avant en arrière; la fossette génio-glosse, située très- pres du bord postérieur de cette surface, est bien marquée, et accompagnée d'une paire de petites fosses latérales, linéaires, au fond desquelles s'ouvrent les trous vasculaires. Les régions massétériennes sont très-élevées dans leur portion antérieure (ou coronoïde), mais leur bord s'abaisse beaucoup postérieurement. (4) Voy. pl. 2, fig. 2; pl. 3, fig. 9. 12 CARACTÈRES OSTÉOLOGIQUES Les surfaces ptérygoïdiennes sont médiocrement étendues, et les impressions musculaires qui y existent, sont peu développées. Enfin le cadre sublingual, très-élargi en arrière el se rétrécis- sant graduellementen avant, se prolonge notablement au milieu de la région mentonnière, et affecte presque Lt forme d'une arcade ogivale, les deux côtés décrivant des courbes régulières qui se rencontrent en avant, de façon à former un angle. Le bord postérieur de la région mentonnière est par conséquent lrès-concave et très-avancé ; en effet, une ligne verticale, qui correspondrait à sa partie médiane, couperait le bord antéro- postérieur de la région mentonniére assez loin en avant de l'angle mentonnier supérieur. [est aussi à noter que la partie antérieure de ce cadre se recourbe en bas plus que dans Îles genres précédemment étudiés, le menton descendant davantage. Le petit Cacaloës rose, dont le prince Charles Bonaparte forma son genre Eolophus, ressemble aux espèces dont Je viens de parler par la forme générale de los maxillure inférieur, mais s’en distingue par la position de la fossette génio-glosse qui est placée vers le milieu de la région sus-mentonnière. Les arôtes latérales que nous venons de rencontrer chez tous les Psittaciens océaniques dont il vient d'être question, se retrou- vent aussi chez le Callopsite de la Nouvelle-Hollande. Mais la mâchoire inférieure de cette petite espèce se distingue par le faible développement de l'ensemble de la région mentonnière, son peu de longueur, sou abaissement par rapport aux branches de l'os, et l'étroitesse des régions massétériennes. Chez le grand Perroquet brun de la Nouvelle-Zélande, ou Weslor hypopolius (1), la région mentonniere présente aussi trois pans; mais elle diffère de tout ce que nous avons vu jusqu'ici par sa forme comprimée latéralement et par la petitesse des ré- gions massétériennes, dontle bord supéricur ne s'élève que tres- peu, même dans sa portion coronoïdienne. La mandibule inférieure est conformée d'une manière assez semblable chez lÆos semilarvata de Bornéo; cependant la crête (4) "Voy.pl. 2; fps. DES PSITTACIDES. 15 coronoïdienne est plus élevée, la région mentonnière est plus convexe transversalement, et le cadre sublingual est moins ré- tréci en avant. Chez les petites espèces de la famille des Psittacides, dont la mâchoire inférieure est faible, les caractères tirés de cette partie dela tête osseuse semblent avoir perdu de leur valeur, et les formes qui paraissent être propres à certaines régions géographiques, lorsqu'elles existent chez les Perroquets à mandibules robustes, se rencontrent dans des genres dont l'habitat est différent. Il en résulte que les généralisations, qui jusqu'ici ne souffrent aucune exception relativement aux caractères distinctifs de l'os maxil- laire chez les grands Psittaciens du nouveau monde comparés à ceux de la région océanienne, ne peuvent être étendues à la totalité de cette famille ornithologique, et que, pour distinguer individuellement les groupes naturels, il faut prendre en consi- dération des particularités de structure moins faciles à saisir. Ainsi, par sa forme générale, la mâchoire inférieure des Pla- tycerques, qui sont propres à la région océanienne, ne differe que peu de celle des Conures, qui habitent tous le nouveau monde ; mais où peut les en distinguer par l'examen de la fos- sette génio-glosse, qui est profonde chez ces derniers Psittaciens, tandis qu'elle est à peine marquée chez tous les Placyterques que Jai eu l'occasion d'étudier, savoir : le Platycercus Pexnantit, le P. palliceps, le PF. eæimius, le P. hæmatonotus, le P. sea- pularis. est auss: à noter que chez les Conurus les bords latéro- antérieurs de là région mentonnière sont concaves, tandis que chez les Platycerques ils sont arqués en sens contraire dans leur portion supérieure, sinon dans toute leur longueur. La petite Perriche ondulée constitue à elle seule une division particulière désignée sous le nom de Melopsitta, et sa mâchoire inférieure se distingue facilement de celle de toutes les autres espèces de la même famille que j'ai pu étudier sous ce rapport. En effet, on y remarque de chaque côté, à l'extrémité inférieure de la ligne oblique qui limite en arrière la région mentonnière, un épaississement formant un tubercule marginal sur le bord du cadre sublingual ; une ligne saillante remonte obliquement de ce Al CARACTÈRES OSTÉOLOGIQUES L point à l'angle postéro-supérieur de Los près de l'articulation, et limite en dessous la région massétérienne. Il est aussi à noter que la région mentonniere est trèes-large en avant, tronquée verticalement, et régulièrement courbée transversalement; que le cadre sublingual est très-ouvert et terminé en avant par un arc surbaissé, que la fossette génio-glosse n'est pas distincte, et que les branches maxillaires sont étroites dans toute leur lon- gueur, mais surtout en arriere. ST Chez la petite Perruche qui a reçu le nom de Trichoglossa australis (4), la mâchoire inférieure est faible comme chez les précédents, mais remarquablement pointue. La portion médiane de la région mentonnière y est étroite; les bords latéro-anté- rieurs sont très-obliques, et se rencontrent presque sur la ligne médiane ; la fossette génio-glosse est grande et profonde ; enfin la région massétérienne est allongée, et son bord supérieur se porte obliquement en ligne droite de l'angle mentonnier supé- rieur au bord postérieur de l'os, en sorte qu'il n'y a pas de crête coronoïde distincte. La conformation de la mâchoire inférieure est à peu près la mème chez le Trichoglossa mullicolor (2) mâle, mais chez la Te— melle les particularités de structure dont je viens de parler dis- paraissent en majeure partie, et le menton s’arrondit beaucoup. S 8 Si nous passons maintenant à l'examen des groupes géné- riques qui sont propres à la région sud-africaine dans laquelle je comprendrai Madagascar, nous verrons qu'il y existe aussi plusieurs types reconnaissables à la conformation de la mâchoire inférieure, aussi bien qu'à d’autres caractères ostéologiques. Ainsi, chez le grand Perroquet Vasa, de Madagascar, qui est le (4) Ou T, concinna. (2) Où Australasia Novæ-Hollandiæ de Lesson; voy. pl. 2, fig. 6, et pl. 3, fig. 7. DES PSITTACIDES. 15 principal représentant du genre Coracopsis de Wagler, la forme générale de los maxillaire inférieur diffère considérablement de tout ce que nous avons vu jusqu'ici (1) et se rapproche de celle propre à l’Æ£os semilarvata et aux Nestors plus que de celle d'aucune autre espèce de la famille des Psittaciens. La mâchoire est assez robuste, mais très-allongée et très- relevée vers le bout, en sorte que le bord antérieur de la région mentounière est presque sur la même ligne que la crête coro- noïdienne, et que les bords latéraux supérieurs de cette région forment avec cette crête une courbe à peine arquée. La région mentonnière est moins comprimée latéralement que chez les Nestors et ne présente aucune trace d’arêtes ; elle est très-fortement courbée transversalement et un peu arquée d'arrière eu avant; ses bords latéro-postérieurs sont droits et peu obliques ; enfin, son bord postérieur est très-profondément échäancré. La région sus-mentonnière est longue et étroite ; une dépres- sion rugueuse dirigée transversalement y limite en arrière la portion correspondante à l'étui corné du bec et passe à très-peu de distance du bord postérieur ; enfin, les deux petits trous vas- culaires, qui d'ordinaire sont placés au devant ou sur les côtés de le fossette génio-glosse, occupent ce bord, mais cette dernière dépression manque. La forme du cadre sublingual est également caractéristique ; elle est allongée et plus ogivale que dans aucun autre Psit- tacien dont J'ai eu l'occasion d'étudier la tête osseuse. Le Perroquet Mascarin de Madagascar, que plusieurs auteurs rangent aussi dans le genre Coracopsis, mais que le prince Charles Bonaparte et quelques autres ornithologistes considèrent, avec raison, comme devant constituer un genre particulier auquel on a donné le nom de Mascarinus, diffère beaucoup du Vasa par la conformation de la mâchoire inférieure (2) ; sous ce rapport, il ressemble davantage aux Chrysotis d'Amérique et ne s’en distin- (4) Voy.'pl. 2, fig, 5. (2) Voy. pl. 2, fig. 4 ; pl. 3, fig. 8. 16 CARACTÈRES OSTÉOLOGIQUES gue même que par des caractères auxquels on serait disposé à n'attacher que peu d'importance; par exemple, là divergence moins prononcée des branches maxillures et Pabsence presque complète de trous où sillons vasculaires sur là région menton- niere. Le Palæornis torquatus de l'Afrique occidentale ressemble à l'espèce précédente par la forme générale de sa mandibule inférieure ; cependant celle-ci est moins forte, ses branches sont plus étroites et la crête coronoïdienne est moins élevée, en est à peu pres de mème chez le Palæornis ponticerianus de Java et le Palæornis Malaccencis de Bornéo. La mâchoire inférieure du Poiocephalus robustus, qui habite le sud de FAfrique, ressemble beaucoup à celle des Aras de moyenne taille; elle s'en distingue cependant par la concavité plus forte du bord supérieur de la région massétérienne et par quelques autres particularités (1). S 9 Eu résumé, nous voyons donc que chez les espèces nombreuses de Psittaciens, dont j'ai pu étudier la tête osseuse, il existe dans la conformation de l'os maxillaire inférieur des particularités qui peuvent presque toujours nous permettre de reconnaitre les genres où sous-genres naturels auxquels ces oiseaux appar- tennent; pour les petites espèces de Perruches, ces caractères sont moins sûrs peut-être que pour les espèces dont les mà- choires sont fortement organisées, et dans l'application de ces données aux déterminations zoologiques, il faut avoir égard aux différences sexuelles aussi bien qu'aux particularités spécifiques. Mais lorsqu'on à sous les yeux des termes de comparaison en nombre suffisant, on peut, par l'examen de cette partie du squelette et même sans tenir compte des caractères fournis par sa portion articulaire, arriver à des résultats qui me paraissent dignes de confiance. Je suis done porté à croire que tout en ne connaissant le Psitiacus mauritianus que par le fragment de mâchoire décou- (4) Vos. pl. 3, fig. 3 et 32, ÊDES PSITTACIDES. 17 vert par M. Owen, on pourrait faire légitimement quelques con- Jectures au sujet des affinités naturelles de cet Oiseau et de la place qu'il devra occuper dans le système des divisions géné- riques où sous génériques adoptées par les ornithologistes pour le classement des Psittacides. N'avant pas eu l'occasion de voir l'os en question et ne pouvant en juger que d'après les figures et la description que M. Owen en a données, je n’en parlerai qu'avec une graude réserve ; mais le talent d'observation de cet anatomiste illustre est si bien connu, que l'on peut avoir une confiance entière dans tous les documents dont il enrichit Ja science, et, par conséquent, je ne crains pas de me tromper en le prenant ici pour guide, D'ailleurs, c'est avant tout à son juge- ment que je soumets mes remarques au sujet de l'ancien habi- tant de l’île Maurice, dont il nous a révélé l'existence. M. Owen pense que ce fragment de mâchoire a dû appartenir à une espèce de Perroquet, éteinte aujourd'hui, comme l'est le Dronte dont elle était la contemporaine ; cependant, à la sugges- tion de M. G. R. Gray, il signale le Mascarin comme pouvant Y être comparé. Le Muséum d'histoire naturelle de Paris possède un des individus types de cet Oiseau de Madagascar, figuré par Levaillant, ainsi que la tête osseuse de la même espèce, et il m'a suffi de comparer cette pièce anatomique avec la figure du maxillaire inférieur du Psittacus mauritianus pour me convaincre qu'il n’y avait là aucun rapprochement à faire, En effet, tous les caracteres que j'ai indiqués ci-dessus comme pouvant servir à la détermination générique ou spécifique des Psittaciens d'après la considération de cette partie du squelette, sont différents chez ces deux Oiseaux : la forme générale de l'os, la disposition de la région mentonniere, la forme du cadre sublingual, par exemple. Cette dissemblance est si complète qu'on ne saurait l'attribuer à des particularités spécifiques seulement, et qu’on en peut inférer que le Psitacus mauritianus n’appartenait pas à la même divi- sion subgénérique que le Psittacus obscurus de Linnée où Mas- carinus obscurus du prince Charles Bonaparte. Par sa taille, le Psittacus mauritianus se rapproche davantage du Coracopsis Vasa de Madagascar, mais la conformation de la A. MILNE EDWARDS, 3 18 CARACTÈRES OSTÉOLOGIQUES mâchoire est aussi différente que possible de ce qui se voit chez cet Oiseau ; il suffit de jeter les yeux sur les figures que j'en donne pour se convaincre de l'impossibilité de ranger les deux espèces dans le même groupe générique. Il est également facile de constater que le Psittacus mauri- tianus n’est pas un Cacatua. Effectivement, nous avons vu que dans ce groupe naturel, l'arcade constituée par le cadre sub- lingual présente toujours une forme ogivale; chez le Perroquet de l'île Maurice, le bord antérieur de ce cadre est transversal, remarquablement long et à peine arqué. Sous ce dernier rapport, de même qu'à raison de sa grandeur et de sa forme, la mâchoire inférieure de ce Psittacien des îles Mascareignes ressemble beaucoup à celle des grands Aras de l'Amérique méridionale; mais, ainsi que l’a très-judicieusement remarqué M. Owen, chez ceux-ci la région mentonnière est régulièrement courbée suivant la direction transversale, tandis que chez l'espèce dont nous cherchons à déterminer les affinités zoologiques, les parties latérales de cette région se relèvent de facon à former de chaque côté, avec la portion médiane, un angle presque droit. Cette disposition distingue aussi le Psittacus mauritianus du Poiocephalus robustus, espèce africaine dont l'os maxillaire infé- rieur offre, comme nous l'avons vu, beaucoup de ressemblance avec celui des Aras. M. Owen a indiqué la similitude qui existe sous ce rap- port entre son Psitlacus mauritianus et le Microglossum aterri- mum du nord de l'Australie; mais à encore J'apercois des diffé- rences dont il me semble impossible de ne pas tenir grand compte. Ainsi, on voit, par la figure dont M. Owen à accompa- gné sa note, que les arêtes mentonnières, au lieu d’être minces et parallèles comme chez le Microglosse, sont obtuses et très- convergentes; la portion médiane du menton, quoique cassée vers le bout, est plus allongée et paraît être moins plate ; les branches maxillaires sont plus divergentes; enfin, la région sus-mentonnière est plus concave, la portion correspondante à la lame interne de l’étui corné du bec est plus étendue d'avant en DES PSITTACIDES. 19 arrière, la fossette génio-glosse est située plus près du bord postérieur et celui-ci est plus épais. Des traits de ressemblance et des différences du même ordre se font remarquer lorsqu'on compare la mâchoire du Psitlacus maurilianus à celle du Calyptorhynchus Banksü ; chez l'Oiseau de l’île Maurice, la région mentonnière est bien plus développée, plus élargie postérieurement et moins bombée ; la fossette génio- glosse est située plus en arrière, et le renflement, qui corres- - pond au bord postérieur dela surface recouverte par la lame interne de l'étui corné du bec, est beaucoup moins saillant, quoique paraissant être plus marqué que chez les Microglosses et les Aras. Il me semble donc que le Psittacien dont l'étude nous occupe ici, ne peut prendre place dans aucune des petites divisions génériques où sous-génériques, établies par les ornithologistes de nos jours dansla grande famille des Perroquets, mais qu'il représente, dans la région zoologique des îles Mascareignes, le type Ara, de la même manière que ce type essentiellement amé- ricain est représenté dans la région océanienne par les Micro- glosses et les Calyptorhynques. Je suis également disposé à croire que le Psitlacus mauritia- nus se rapprochait plus des formes américaines que des formes australiennes où néo-zélandaises, car la constitution du cadre sublingual me paraît avoir plus d'importance que la courbure plus ou moins brusque des parties latérales de la région men- tonmière sur la position médiane de celle-ci. En effet, nous avons déjà vu que chez le Ara ararauna ces parties de la màchoire, au lieu de former une courbe bien continue comme chez lAra Macao et l'Ara chloroptera, présentent à leur ligne de jonction une arête mousse, mais bien reconnaissable, et que chez l'Ara Llligeri il existe aussi des traces d’arêtes mentonnières. La grande largeur de la partie antérieure du cadre sublingual est un caractère commun à tous ces Psittaciens, et qui les dis- tingue des Cacatoës, sans les différencier nettement entre eux ; mais chez les types océaniques dont il est ici question, la portion médiane de la région mentonnière ne se rétrécit que très-peu 20 CARACTÈRES OSTÉOLOGIQUES en avant et ses bords latéraux se continuent avec ceux du cadre sublingual, qui divergent à peine postérieurement. Nous voyons que chez le Psitaeus maurilianus, au contraire, les branches mandibulaires s'écartent beaucoup entre elles à me- sure qu'elles se prolongent eu arrière, et que la portion médiane de la région mentonnière est aussi beaucoup moins large en avant qu'en arrière; or, ces particularités se rencontrent égale- ment chez les Aras. ILest aussi à noter que sous le rapport du mode de conforma- üon de là mandibule inférieure, 11 y à plus d'analogie entre les types de la région sud-africaine et de l'Amérique méridionale qu'entre ces premiers et les types propres à la région austra- lhenne. I serait prématuré de prétendre introduire, dans le système ornithologique, une nouvelle division de Psittacides pour y placer le Psittacus mauritianus, dont les caractères ostéologiques ne nous sont que si incomplétement connus; mais d’après la conformation du fragment de mâchoire dont l'existence à été signalée par M. Owen, je suis porté à croire : 1° Que l'oiseau de l'île Maurice diffère des autres Psittacides par des caractères ostéologiques de même valeur que ceux à raison desquels on sépare les uns des autres les Aras, les Calyp- torhynques, les Microglosses, etc. ; 2° Que cet Oiseau ressemble aux Aras et aux Microglosses plus qu'à tout autre type secondaire de la même famille, et par conséquent que, dans une classification naturelle, il devra prendre place auprès de ces Psittacides. Jajouterai qu'aucun des Perroquets dont les anciens voya- geurs font mention comme existant aux iles Mascareignes, vers l'époque où vivait le Dronte, ne peut être rapporté à l'espèce que M. Owen vient de faire connaître. Dubois, qui visita ces îles vers 1670 et qui en énumère les Oiseaux (1), parle de plusieurs (1) Les voyages faits par le sieur D. B. aux iles Dauphine ou Madagascar et Bour- bon, ou Mascarennes ces années 1669, 70, 71 et 72, ete. Le passage cité ici a été reproduit dans les Annales des sciences naturelles, ZooL., 5e série, &. VI, p. 42, DES PSITTACIDES. 21 espèces de Perroquets dont la première me semble devoir être le Coracopsis Vasa ; la seconde est probablement le Mascarinus obseurus ; la troisième et la cinquième pourraient bien être le male et la femelle du Palæornis eques ; la sixième et dernière semble se rapporter au Psittaeula Cana; enfin, la quatrième ne ressemble, 1lest vrai, à aucune des espèces connues des ornitho- logistes, mais sa tulle, qui n'excédait pas celle d'un Pigeon, ne permet pas de la rapprocher du Psittacus mauritianus. En effet, ce dernier devait être notablement plus grand, Or, les indica- tions fournies par Dubois sont les seules qui me paraissent sus- ceptibles de jeter quelque lumière sur le sujet dont je viens de m'occuper. EXPLICATION DES FIGURES. PLANCHE 1. Fig. 1. Copie de la gravure de Leguat, représentant le Géant (Gallinula (Leguatia), Gigantea Schlegel). Fig. 2. Le même oiseau, représenté de profil et corrigé d'après la description donnée par Leguat, si Les deux figures sont réduites au vingtième de la grandeur naturelle. Fig. 3. Copie de la gravure de Leguat représentant le Solitaire (Pezophaps solitaria Strickland). Fig. 4. Mächoire inférieure du Psittacus Mauritianus, de grandeur naturelle, vue en dessous, Fig. 5. La même vue en dessus, . PLANCHE 2, Fig. 4. Calytorhynchus Banksi. Màchoire inférieure, vue en dessous, Fig. 2. Cacatua erythrolopha. Fig. Fig. . Nestor hypopolius. . Mascarinus obscurus, Fig. Fig. 3 & Fig. 5. Coracopsis vaza. 6. Platycercus omnicolor. 7. Ara aracanga. Fig. 74, Mächoire inférieure du même, vue de face, Fig. 8. Microglossum aterrimum. 22 CARACTÈRES OSTÉOLOGIQUES DES PSITTACIDES. PLANCHE 3. . À. Psitiacus erithacus. 2, Chrysolis amazonicus, . 3. Poiocephalus robustus. . 3% Mächoire inférieure du même, vue de côté. &. Ara aracanga. Màchoire inférieure, vue en dessus. . la, La même, vue de côté, 5. Calypthorynchus Banksii. Mächoire inférieure, vue de face. . 6. Microglossum aterrimum. Màchoire inférieure, vue de face. . 7. Platycercus omnicolor, Mächoire inférieure, vue de côté. 8. Mascarinus obscurus. Màchoire inférieure, vue de côté. . 9. Cacatua cristata. Màchoire inférieure, vue de côté. MÉMOIRE SUR UN PSITTACIEN FOSSILE DE L'ILE RODRIGUES À une époque peu éloignée de nous, il existait dans plusieurs îles de l'hémisphère sud des oiseaux appartenant à des espèces qui aujourd'hui paraissent être complétement éteintes : tels sont l'Æpyornis de Madagascar, le Dronte de l'île Maurice et le Soli- taire de l'ile Rodrigues. Les découvertes récentes dues à M. Clark ont permis aux naturalistes d'étudier d’une manière approfon- die l'organisation et les caractères zoologiques du Dronte (1). Par l'examen d'une mandibule inférieure trouvée dans le même gisement que ce dernier oiseau, on à pu constater que jadis l’île Maurice était habitée par un Psittacien différent de toutes les espèces de la même famille connues actuellement, et les re- cherches faites l'année derniere dans les cavernes de l’île Ro- drigues ont fourni à M. E. Newton, auditeur général à Maurice, de nombreux ossements du Solitaire (Pexophaps), à l’aide des- quels ce voyageur et son frère M. Alfred Newton, professeur à l’université de Cambridge, nous feront bientôt connaître avec détail presque toutes les parties du squelette de cet Oiseau remarquable. Les débris du Solitaire ne sont pas les seules pièces ostéolo- giques que ces fouilles ont mises au jour, et parmi les os tirés ainsi des terrains meubles de l'ile Rodrigues se trouve un frag- ment de mandibule, que les deux naturalistes dont je viens de citer les noms ont bien voulu mettre à ma disposition, et que j'ai étudié avec beaucoup d'intérêt. En effet, il était facile de reconnaître au premier coup d'œil (4) Voy. Clark, Note sur la découverte de débris du Dodo à l'ile Maurice (Ann. des sc. nat., 5° série, t. VI, p. 17). 2! PSITTACIEN FOSSILE que ce débris, de même que la mandibule inférieure trouvée à Maurice avec les ossements du Dronte, appartient à un Perro- quet, genre d'oiseaux qui paraît ne pas exister à Rodrigues , et j'étais désireux de savoir s'il me serait possible de déterminer le sous-genre où même l'espèce de Psittacien dont il provenait. Cela me semblait fort douteux, car le fragment unique trouvé par M. Newton ne consiste que dans la portion antérieure et moyenne de la mandibule supérieure (D) ; et d'ailleurs, dans l'état actuel de la science, l'anatomie comparée ne nous fournit pas les lumières nécessaires pour juger de la valeur des caractères ostéologiques que ce débris peut présenter. Jai pensé néan- moins que je ne devais pas négliger l'occasion qui m'était offerte par MM. Newton de scruter une question aussi impor- tante pour l’ornithologie ancienne, et je crois être arrivé à des résultats satisfaisants. Dans cette investigation, j'ai suivi la marche que j'avais déjà adoptée pour l'étude de la mandibule mférieure du Psittacus mauritianus(2), c'est-à-dire que j'ai cherché d'abord à me rendre bien compte des particularités de structure que la partie corres- pondante de la tête osseuse offre dans les différentes divisions paturelles de ia famille des Psittaciens; puis j'ai comparé à ces divers types le fragment soumis à mon examen par MM. Newton. La portion antérieure et moyenne de la mandibule supérieure de ces oiseaux fournit moins de caractères que ne m'en avait offert la partie correspondante de leur mâchoire inférieure ; elle peut cependant suflire pour la détermination des principaux types. En effet, chez les Perroquets, cette partie du bec jouit d'une grande mobilité, et peut exécuter des mouvements très- étendus d’élévation et d'abaissement ; il en résulte que l'union des palatins aux maxillaires, au lieu de se faire, soit par une sou- dure complète, soit d'une manière solide et presque immobile, s'effectue au moyen d'une véritable articulation ; Jai con- staté que la disposition de cette articulation présente chez ces (1) Voy. pl. 4, fig. { et 2. (2) Observations sur les caractères osléologiques des principaux groupes de Psitlae cides Ann. des se. nat., 2001., 5° serie, t. VI, p. 91) DE L'ÎLE RODRIGUES. 25 divers types des particularités fort tranchées et fort utiles à noter dans les recherches de cet ordre ; les caractères que l'on en tire ont une grande fixité, et me semblent avoir plus d'importance que tout autre. Dans le groupe naturel des Cacatoës, par exemple, les fossettes qui occupent le bord postérieur de la voûte palatine du rostre, et qui recoivent l'extrémité antérieure des os palatins, sont placées aussi près où même plus près de l'extrémité antérieure de la mandibule osseuse que de ses bords latéro-postérieurs (1). Il en résulte que cette voûte est extrèmement courte, que la por- tion du bord mandibulaire située en arrière de l'articulation palato-maxillaire est très-considérable, et que les os palatins sont profondément enchässés dans la mâchoire. Il est aussi à re- marquer que les trous incisifs sont très-rapprochés de ces cavités articulaires, et que le bord inférieur de celles-ci, à peine sail- lant, se porte obliquement en dehors et en arrière pour se con- tinuer latéralement avec une petite crête horizontale qui occupe la face interne de la portion postérieure de la mandibule, de telle sorte que le bord postérieur de la voûte osseuse de la bouche est de forme ogivale, et que les arrière-narines ne sont pas limitées en avant par une crête transversale. D'autres particularités nous sont offertes par la forme géné- rale de la mâchoire, par la disposition des narines, la courbure du bord mandibulaire (2), etc.; mais l'ensemble des caractères que je viens d'indiquer suffit pour distinguer les Cacatoës de tous les autres Psittaciens. La région palatine du Calyptorhynque de Banks présente quelques-uns de ces caractères (3) ; mais, sous d’autres rapports, elle diffère beaucoup de ce que nous venons de voir chez les Cacatoës, et, indépendamment de la forme générale de la man- dibule, qui est très-particulière, elle suffirait pour la détermina- tion spécifique de ce Perroquet. En effet, les os palatins sont profondément enchâssés dans l’échancrure postérieure de la (4) Voy. pl. 5, fig. 6. (2) Voy. pl. 5, fig. 5. (3) Voy. pl. 5, fig. 3 et 4. A. MILNE EDWARDS. 26 PSITTACIEN FOSSILE maudibule, et la voûte osseuse de la bouche, constituée par les os maxillaires, est très-courte comme chez les Cacatoës; mais le bord inférieur de cette échancrure se prolonge en dessous, de facon à former une crête très-saillante et à chevaucher beau- coup sur l'extrémité antérieure des palatins; cette crête est très-développée, elle s'étend jusqu'à l'angle latéro-postérieur de la mâchoire, et dépasse en dessous la partie correspon- dante du bord mandibulaire ; aussi la voûte du palais est-elle comme encadrée par une bordure lamelleuse, en arrière aussi bien qu'en avant et latéralement ; elle à la forme d'une fosse plutôt que d'une voûte ordinaire, et, sur les côtés, elle se con- tinue postérieurement avec une gouttière linéaire située entre le bord mandibulaire et le bord palatin. La forme du crochet rostral, celle du bord dorsal de la mandibule, la disposition des narines, etc., sont également caractéristiques ; mais, pour le but que je me propose ici, il n’est pas nécessaire de prendre ces parties en considération. Un mode de conformation très-différent nous est offert par le groupe naturel des Macrocerques ou Aras. Ainsi, chez l'Ara Aracanga, par exemple, la voûte buccale est très-grande, fort large en arrière, mais peu élevée, et terminée postérieurement par un bord transversal presque droit, qui est situé à très-peu de distance des angles latéro-postérieurs de la mandibule (1), de facon que les os palatins ne sont que très-peu engagés entre les branches jugales de la mâchoire supérieure, et que les fos- settes articulaires qui les reçoivent sont dirigées transversale- ment ; les trous incisifs en sont très-éloignés, et la ligne rugueuse transversale, située vers le milieu de l’espace compris entre la pointe du rostre et le bord palatin, est très-marquée. Le crochet du bec est fort puissant, et ses bords postérieurs remontent obliquement pour se continuer avec la portion jugale de la man- dibule, sans être séparés de celle-ci par une échancrure pro- fonde comme chez les Cacatoës ; cette portion jugale ne présente pas, comme chez ces derniers Psittaciens, un prolongement (4) Voy. pl, 5, fig. 7 et 8. DE L'ÎLE RODRIGUES. D, descendant, et son bord inférieur remonte graduellement vers l'articulation maxillo-malaire. Les narines sont très-pelites ; enfin le bord dorsal de la mandibule est tres-courbé, et, mesuré depuis le front jusqu'à l'extrémité du rostre, il est plus de deux fois aussi long que l'espace jugal compris entre la por- ton la plus déclive du bord mandibulaire et le sommet du bec, tandis que chez les Cacatoës la mesure verticale de cette partie de la mandibule dépasse de beaucoup la moitié de la longueur du bord dorsal dont je viens de parier. La disposition de la mandibule supérieure est à peu près la même chez les autres Macrocerques; toujours la voûte osseuse comprise entre la pointe du rostre et l'articulation maxillo-palatine est longue et fort élargie en arrière ; son bord postérieur est dirigé presque transversalement, et les angles latéro-postérieurs des maxil- laires ne se prolongent que très-peu en arrière, de facon que les os palatins ne sont que faiblement enchässés entre ces parties. Des différences d'un ordre secondaire permettent la déter- mination spécifique des divers Aras; elles éloignent notable- ment l'Ara d’Iliger de l'Ara Aranga ou de | Ara Rauna , et se prononcent davantage encore chez l'Ara severa, mais elles ne masquent pas les caractères génériques dont je viens de parler. Les Chrysotis, qui appartiennent aussi au nouveau monde, ressemblent beaucoup aux Aras par la forme de la portion palatine de la mandibule (4). Celle-ci est grande et très-élar- gie en arrière ; son bord postérieur est presque droit, et ses angles latéro-postérieurs n’enchâssent que très-peu les os pala- üns. Mais des caractères distinctifs sont fournis par la forme générale du bec, par l'existence d'une échancrure post-rostrale des bords mandibulaires latéraux, par la grandeur des na- rines, etc. La conformation de la région palatine de la mandibule est à peu près la même chez les Loris : l’Eclectus Linnei, par exem- ple (2); mais les os palatins y sont enchässés un peu plus pro- fondément ; le bec est plus allongé, et les narines, au lieu d’être (4) Voy. pl. 5, fig. 9 et 10, (2) Voy. pl. 5, fig. 41 et 12. 28 PSITTACIEN FOSSILE cireulaires comme chez les Chrysotis, où plus longues que hautes, sont ovalaires, et leur grand diamètre est vertical. Les Conurus ont aussi la voûte palatine du bec très-déve- loppée (1), fort large en arrière, et terminée de ce côté par un bord transversal presque droit, qui n’est dépassé que peu par les angles latéro-postérieurs des maxillaires ; mais le bec, considéré dans son ensemble, est beaucoup plus court; le crochet rostral est plus comprimé, et l'échancrure latérale du bord mandibu- laire est placée plus en arrière, de sorte que la portion Jugale de ce bord est moins longue proportionnellement. Un type très-différent nous est offert par le Nestor de la Nou- velle-Zélande (2). Chez ce grand Psittacien, la voûte palatine du rostre est presque aussi allongée que chez les Aras ; mais, au lieu de s'élargir beaucoup en arrière comme dans tous les genres dont je viens de parler, elle est partout remarquablement étroite. Les bords mandibulaires sont à peine saillants, et au lieu de se courber en bas dans la région jugale, ainsi que cela à lieu d’or- divaire, ils se relèvent graduellement vers l'orbite, de sorte que les os palatins, tout en s'engageant assez loin en avant dans la base du bec, ne sont pas enchàssés latéralement. Les cavités articulaires qui reçoivent ces os sont très-étroites, et dirigées verticalement, au lieu d'être transversales comme chez les Aras, ou obliques comme chez les Cacatoës. Enfin la mandibule supé- rieure du Nestor est également reconnaissable par sa forme gé- nérale, le rapprochement brusque de ses faces latérales au niveau des narines, le peu d’obliquité de ces faces, et le développement considérable de 14 partie rostrale du bec comparativement à celui de sa portion jugale. Chez le Wicroglossum alerrimum (3), la mandibule supé- rieure, sans être aussi comprimée latéralement que chez le Nestor, se fait aussi remarquer par le peu de largeur du bord postérieur de la voûte osseuse du palais et par la puissance du rostre. Les os palatins s'avancent presque à la moitié du bord (1) Voy. pl. 4, fig. 7 et 8. (2) Voy. pl. 5, fig. 4 ct 2, (3) Voy. pl. 5, fig. 9 et 10, DE L'ÎLE RODRIGUES. 29 mandibulare latéral, mais ne sont que très-peu enchässés entre les parties jugales de ces bords; celles-c1, sans être aussi obliques que chez le Nestor, ne s'arrondissent que très-faiblement en arrière. Du reste, par sa forme générale, la mandibule supérieure du Microglosse ressemble davantage à celle des grandes espèces du genre Ara ; sa portion basilaire est très-élevée, et les narines sont petites et circulaires, mais elles sont placées plus bas que chez ces Psittaciens, et elles sont réunies entre elles par un sillon courbe, de façon à simuler des lunettes, disposition qui se retrouve chez plusieurs Cacatoës. Les exemples que je viens de passer en revue suffisent, ce me semble, pour montrer que la portion de la tête correspondante au fragment découvert par M. E. Newton dans une caverne de Rodrigues offre, chez les Psittaciens de l'époque actuelle, des différences de conformation assez considérables pour que, dans beaucoup de cas, sinon toujours, ces particularités puissent être employées comme caractères génériques ou spécifiques. Par conséquent, Je ne pousserai pas plus loin cet examen géné- ral de la famille des Perroquets, et je comparerai le débris dont Je cherche la détermination aux principales espèces qui vivent aujourd'hui dans la région géographique qui comprend l'ilot où ce fragment à été trouvé. Le Perroquet de l'île Rodrigues, ou Psittacus Rodericanus (1), n'appartient certainement pas au groupe naturel des Cacatoës, dont les représentants sont nombreux dans la région australa- sienne. En effet, la voûte palatine de la mandibule est très-dé- veloppée, et les fossettes articulaires qui en occupent le bord postérieur paraissent être placées très-près de l'angle postérieur du bord maxillaire, de sorte que les os palatins n'étaient cer- tainement pas enchâssés profondément entre les branches ju- gales de la mâchoire. Je ne puis, il est vrai, déterminer avec précision la longueur de la portion de ce bord qui suivait en dehors les os palatins pour aller rejoindre les os malaires, car l'angle latéro-postérieur de la mâchoire est brisé des deux (1) Le mot Rodericanus à été remplacé par erreur par celui de Rodricanus dans les Annales des sciences naturelles. 30 PSITTACIEN FOSSILE côtés ; mais, d'après la minceur de l'extrémité tronquée, il me paraît indubitable qu'elle ne pouvait se prolonger notablement en arrière de l'articulation palatine. Le Psittacus Rodericanus se distingue des Calyptorhynques par les mêmes caractères, ainsi que par l’absence des crêtes marginales qui donnent au palais de ces derniers oiseaux un aspect tout particulier. Notre Perroquet de l'ile Rodrigues diffère non moins des Nestors et des Microglosses ; en effet, la voûte osseuse du palais est très-élargie postérieurement, de façon à présenter la forme d'un triangle presque équilatéral. Sous ce rapport, ainsi que par l'ensemble de ses particularités ostéologiques, la mandibule du Psittacus Rodericanus ressemble davantage à celle des Chrysotis d'Amérique, qui à leur tour se rapprochent à ce point de vue du Psittacus erythacus de l'Afrique occidentale, du Poiocephalus robustus du cap de Bonne-Espérance, du Mascarinus (1), du Coracopsis vasa (2), propres tous deux à Madagascar, et de l'Eclectus Linnei (3) des îles Philippines. Le Mascarin est à peu près de même taille que le Perroquet de l’île Rodrigues, mais il en diffère nettement par plusieurs caracteres ostéologiques. Chez le Psütacus Rodericanus, la ré- gion palatine s'élargit moins en arrière; l'articulation maxillo- palatine est plus oblique ; les trous incisifs sont situés plus près du bord postérieur de la voûte ; enfin la face dorsale du bec est loin d’être aussi renflée que chez le Mascarin. La mandibule subfossile dont l'étude nous occupe ici se dis- tingue également de celle du Coracopsis vasa par la plupart des caractères que je viens d'indiquer, ainsi que par plusieurs autres particularités de structure: chezle C. vasa, le becesttrès-allongé et peu élevé; la région palatine est très-concave ; le rostre est robuste, et les bords latéraux de la mandibule sont presque ho- rizontaux dans toute la région jugale. Chez le Psittacus Roderi- canus, au contraire, le rostre est médiocrement développé, et se (1) Voy. pl. 4, fig. 5 et 6. (2) Voy. pl. 4, fig. 3 et 4. (3) Voy. pl. 4 fig. 11 et 12. DE L'ÎLE RODRIGUES. 31 trouve séparé de la portion jugale du bord mandibulaire par une partie concave, en arrière de laquelle ce bord s’infléchit brus- quement. Ce dernier caractère, ainsi que la disposition de l'ar- ticulation maxillo-palatine, ne permet pas de confondre la mandibule du Psitacus Rodericanus avec celle du Psittdeus erythacus ; elle y ressemble beaucoup par sa forme générale et par ses dimensions, par la courbure de son bord dorsal, par le degré d'inclinaison de ses faces latérales, et même par la dispo- sition des petits sillons vasculaires qui descendent de la région frontale vers le rostre ; mais on ne saurait confondre spécifique- ment ces deux Perroquets, à raison de la courbure très-diffé- rente des bords latéraux de la mandibule. Sous ce dernier rapport, le Psittacus Rodericanus ressemble davantage au Poiocephalus robustus de Y'Afrique; mais chez celui-ci la région palatine, très-large en arrière, se rétrécit brusquement vers la base du crochet rostral, disposition qui n'existe pas chez le Perroquet subfossile de l’île Rodrigues, et le crochet lui-même est beaucoup plus grêle. J'ai comparé également le Psittacus Rodericanus à beaucoup d’autres espèces, sur les caractères ostéologiques desquelles il me semblerait superflu d'insister ici, et, par voie d'exclusion, Jai acquis la conviction que cet oiseau diffère spécifiquement de tous les membres de la famille des Perroquets connus actuelle- ment. Pour avoir à cet égard une certitude, il m'aurait fallu pousser celte comparaison plus loin que je n'ai pu le faire avec les pièces ostéologiques dont je disposais ; mais J'ai eu sous les yeux tous les principaux types, et les résultats obtenus de la sorte rendent extrêmement probable que le Perroquet de Rodrigues, de même que le Psittacus mauritianus de l'ile Maurice, est une espèce éteinte. Ce dernier n’est connu que par un fragment de sa mâchoire inférieure, et l'on ne possède du Psittacus Rodericanus qu'une portion de la mandibule supérieure. Ces deux espèces n’ont pu, par conséquent, être comparées directe- ment entre elles; mais la première de ces pièces indique un oiseau d’une taille plus considérable que celui auquel appar- tient le bec de l'ile Rodrigues; d’ailleurs l'examen de la mà- LED 32 PSITTACIEN FOSSILE choire inférieure permet de déterminer approximativement quelle devait être la conformation de la mâchoire opposée, et il me semble indubitable que les deux Perroquets, dont les dé- bris ont été trouvés, d'une part, avec les os du Dronte, d'autre part avec les restes du Solitaire, sont des espèces parfaitement distinctes. Le Psittacus Rodericunus me parait se rapprocher beaucoup du petit groupe dont Wagler a formé le genre Æclectus ; 11 doit par conséquent prendre place dans la division des Loris. Si je ue craignais de dépasser les conclusions légitimes que l'on peut tirer de l'examen d’un fragment si minime du squelette, je serais done disposé à inscrire cette espèce éteinte dans nos catalogues ornithologiques sous le nom d'Eclectus Rodericanus ; mais si l'articulation maxillo-palatine, ainsi que je lai déjà dit plus haut, offre beaucoup d’analogie avec celle des Loris, la forme du bord tranchant de Ja mandibule est bien différente : celui-c1, au leu d'être très-faiblement sinueux près de sa base, présente, en arrière de la pointe une échancrure profonde qui rappelle un peu la disposition propre au Cacatoës. Aussi je crois préférable d'employer une désignation moins précise, et, en l'appelant Psiltacus Rodericanus, j'entends indiquer seulement que le Psittacien des cavernes de l'île Rodrigues est une espèce nou- velle voisine des Loris, mais participant cependant à quelques- uns des caractères du groupe des Cacatoës. Rodrigues, comme on le sait, est un petit ilot perdu pour ainsi dire au milieu de l'immense Océan qui sépare Madagascar de l'Australie. Il appartient au groupe des îles Mascareignes; mais, situé à l'est de Maurice et de l’île de la Réunion, 1l est très-éloi- gné de toute autre terre, et, au premier abord, on peut s'éton- ner de voir qu'il ait possédé jadis une faune ornithologique particulière, caractérisée déjà par le Solitaire aussi bien que par le Psittacus Rodericanus, et que cette faune ait disparu (1). (1) A l'époque où Leguat séjourna à Rodrigues, les Perroquets étaient très-abon- dants, comme l'indiquent plusieurs passages de la relation de son voyage, Ainsi, tome premier, page 67, on y lit: « Cet arbre porte un fruit assez semblable à l'olive, et les Perroquets en aiment beaucoup les noyaux, » et page 107: «les Perroquets verds et bleus s'y trouvent en quantité, et surtout de médiocre et d'égale grosseur, Quand DE LÎLE RODRIGUES. 3 A une époque assez rapprochée de nous, environ un siècle et demi, il en était de même pour chacune des autres îles Masca- reignes, et les oiseaux qui habitaient alors ces points du globe si circonscrits et siisolés différaient spéciliquement où même génériquement de ceux de Madagascar et de toutes les autres parties du globe. On ne peut donc supposer que ces animaux y soient venus d'ailleurs; mais lorsqu'on est familiarisé avec le mode de distribution des espèces zoologiques, il parait égale- ment difficile de croire que des îles si petites et en apparence si peu favorables à la prospérité de leurs faunes respectives, aient été, chacune, le berceau primitif de ces espèces si bien caracté- risées et si différentes de tout ce qui existe ailleurs. 1 me semble plus probable que chacun des cônes volcaniques qui constituent le noyau de ces îles éparses dans le grand Océan, au lieu de s'ètre élevé du fond des eaux, préexistait à l’abaissement de terres d’une étendue considérable, et a servi de dernier refuge à la population zoologique de la région circonvoisine aujourd'hui submergée. Des considérations analogues, fondées sur l'étude de la faune carcinologique des îles Gallapagos, avaient conduit M. Milne Edwards à dire, il y à plus de trente ans, que ce petit archipel était probablement les restes de quelque continent, et les obser- vations plus récentes de M. Darwin et de M. Dana sur le mode de formation des récifs de corail semblent indiquer qu'effective- ment la croûte solide du globe s'est affaissée graduellement dans diverses parties de la région occupée aujourd'hui par l'océan Pacifique. Il en résulte que l'étude des débris plus ou moins modernes de la faune de chacune des îles isolées, comme le sont Rodrigues, Maurice, la Réunion, les Gallapagos, me semble offrir un intérêt considérable pour le géologue aussi bien que pour le zoologiste, et je remercie sincérement MM. Alf. et si sont jeunes, leur chair n'est pas moins bonne que des pigeonnaux, » et page 132: « nous en trouvions (un grand plaisir) à instruire des Perroquets dont le nombre, comme je l'ai dit, est fort grand dans cette isle. Nous en portämes un dans l'isle Mau- rice, qui parlait françois et flamand. « ( Voyages et avantures de François Lequat en deux isles désertes des Indes orientales. Amsterdam, 1708.) AL. MILNE EDWARDS. 5 3l PSITTACIEN FOSSILE DE L'ILE RODRIGUES. Ed. Newton d’avoir bien voulu me fournir l’occasion d’ajouter un fait nouveau à l'histoire de l’une de ces faunes. EXPLICATION DES PLANCHES. PLANCHE 4. . Mandibule supérieure du Psittacus Rodericanus, vue de côté. L el e D = . La même, vue par sa face palatine. Fig. 3. Tête osseuse du Coracopsis vasa, vue par sa face inférieure, Fig. 4. La méme, vue de coté. Fig. . Tête osseuse du Mastarinus obscurus, vue de côté. . Région maxillo-palatine de la même espèce. . Tête osseuse du Conurus pertinar, vue de côté. >! & D NY © € Fig . Région maxillo-palatine de la même espèce. Fig. 9. Portion mandibulaire de la tête du Chrysotis æanthops, vue de côté. Fig. 10. Région maxillo-palaline de la méme espece. Fig. 41. Portion mandibulaire de la tète de l'Eclectus Linnei, Vue de côté. A ds = © . Région maxillo-palatine de la mème espèce. PLANCHE D. . Portion mandibulaire de la tèle du Nestor hypopolius, vue de eûté. . Région maxillo-palatine de la même espèce. Le > dm CCR Fig. 3. Portion mandibulaire de la tête du Calyplorhynchus Banks, vue de côté. Fig. 4. Région maxillo-palatine de la même espèce. Fig. 5. Mandibule supérieure du Cacatua erythrolopha, vue de côté. Fig. 6. Région maxillo-palatine de la même espèce. Fig. 7. Mandibule supérieure de l'Ara Aracanga, Vue de côté et un peu réduite. Fig. 8. Région maxillo-palatine de la même espèce. 9. Tête osseuse du Microglossum aterrimum, vue de côté, un peu réduite. 10 3 E a = . Région maxillo-palatine de la même espèce. MÉMOIRE SUR UNE ESPÈCE ÉTEINTE DU GENRE FULICA, QUI HABITAIT AUTREFOIS L'ILE MAURICE. Depuis quelques années, les fouilles entreprises aux îles Maurice et Rodrigues ont permis de lever toutes les incertitudes qui existaient encore relativement à l'histoire zoologique du Dronte et du Solitaire ; elles ont aussi prouvé que ces deux grands oiseaux n'étaient pas les seuls représentants, aujourd'hui dis- parus, de la faune qui jadis appartenait aux îles Mascareignes. Ainsi M. Schlegel a démontré que l'oiseau géant, cité par Leguat comme vivant dans ces îles en 1694, ne pouvait pas être un Flamant comme le croyait M. Strickland, mais devait constituer une espèce éteinte du groupe des Poules d’eau, qu'ila désignée sous le nom de Leguatia gigantea (1). J'ai pu, si je ne me trompe, établir que le Psittacus Mauritia- nus (2) (Owen) et le P. Rodericanus (3), qui, eux aussi, étaient (4) Schlegel, Over eenige uitgestorvene reusachtige vogels van de Mascarenhas- eilanden (Verslagen en mededeelingen der Koninklijke Akademie van Wetenschappen., Deel VIT, p. 116, 1857. Une traduction anglaise de ce mémoire à paru dans {he Ibis, new series, 1866, t. Il, p. 146, et une traduction française dans les Annales des sciences naturelles, ZOoLOGIE, 5° série, 4866, t. VI, p. 25. (2) R. Owen, Evidence of a Species, perhaps extinct, of Large Parrot (Psittacus Mauritianus, Owen), contemporary with the Dodo, in the Island of Mauritius, — The Ibis, new series, {. 11, p. 168, 1866. Ce mémoire a été traduit aussi dans les Annales des sciences naturelles, Zoo1oGie, 5° série, {. VI, p. 88. Voyez aussi, à ce sujet, Alph. Milne Edwards, Observations sur les caractères ostéolo- giques des principaux groupes de Psittacides, pour servir à la détermination des affi- nités naturelles du Psittacus Mauritianus (Ann. des se. nat., Zoo, 5€ série, t, VI, p. 91, 1866). (3) Alph. Milne Edwards, Mémoire sur un Psittacien fossile de l'ile Rodrigues (Ann, des se. nat., Zoo1., 5° série, t, VII, p. 145, pl. 7et 8). 36 MÉMOIRE SUR UNE ESPÈCE ÉTEINTE contemporans du Dronte et du Solitaire, avaient subi le même sort que ces représentants gigantesques du type des Pigeons. Je puis aujourd'hui ajouter une espèce nouvelle à toutes celles que je viens de citer, et celte détermination est basée sur un nombre d'ossements plus que suffisant pour lui donner un carac- tère de précision absolue. ; Je crois qu'il y a un intérêt considérable non-seulement au point de vue zoologique, mais aussi sous le rapport géologique, à étudier à fond ces fossiles des tourbières et des terrains meubles des îles Mascareignes, car ce sont eux seuls qui peuvent nous fournir la preuve que’ces îles se rattachaient jadis à une vaste étendue de terres, et que ces terres, peu à peu et par un abais— sement lent, ont été cachées sous les flots du grand Océan, lais- sant paraître encore quelques-uns de leurs points culmimants, tels que Maurice, Rodrigues, Bourbon, etc. Ces îles étaient évidemment séparées de Madagascar, car lorsque les Européens les visitèrent pour la première fois, 1ls n'y trouvèrent pas de Mammifères, à l'exception de quelques grandes Chauves-Souris. Aucun de ces Quadrumanes, si remar- quables et spéciaux à la faune de Madagascar, n'existait dans les îles Mascareignes ; les autres animaux communs à ces deux faunes appartenaient à des espèces marines, qui pouvaient faci- lement nager de l'une de ces îles à l'autre, où à des espèces aulées, dont le vol rapide leur permettait de franchir la distance consi- dérable qui sépare ces terres éloignées. Plus tard, les Rats, les Tanrecs, les Cochons, les Chèvres, les Cerfs, les Makis et les Singes furent introduits à Maurice et à Bourbon et, depuis cette époque, ils S'y reproduisent et paraissent s'y être naturalisés. Les Mammifères, si abondants dans les autres contrées du globe, semblent avoir été représentés dans ces îles par des oiseaux à formes lourdes, massives, et ne pouvant pas s'élever dans les airs, où du moins ne s'y soutenant pas assez longtemps pour entreprendre des voyages lomtains. L'espèce que je fais connaître était dans ce cas; elle appar- tient à la division des Poules d’eau et au genre Foulque, oiseaux plutôt coureurs et nageurs que voiliers, et qui ne s'éloignent Dü GENRE FULICA. 37 jamais beaucoup des étangs ou des cours d'eau, sur les bords desquels ils construisent leurs nids, et trouvent facilement leur nourriture. Les ossements qui ont servi à établir cette détermination ont été rapportés de l'île Maurice par M. E. Newton, auditeur géné- ral, et c'est à l'obligeance de ce naturaliste et de M. AIf. Newton. professeur d'anatomie comparée à l'Université de Cambridge, que je dois de pouvoir les étudier. Ces pièces, trouvées dans la formation tourbeuse de Maurice, cousistent en un bassin (1), un tibia (2) et un tarso-métatar- sien (3) parfaitement conservés. Les caractères offerts par un seul de ces ossements, pris en par- ticulier, sufliraient pour faire reconnaître le genre de l'oiseau dont ils proviennent, et les indications qu'ils fournissent se com- plétant mutuellement, ne peuvent laisser dans l'esprit aucune incertitude. Le bassin est l'une des pièces du squelette des oiseaux qui donne les éléments de détermination les plus sûrs et, sous ce rapport, i est bien supérieur au sternum, dont la forme offre beaucoup moins de constance. Dans toute la famille des Rallides, qui com- prend les Poules-Sultanes, les Poules d’eau, les PRâles, les Jaca- nas, les Ocydromes, les Tribonyæ, les Notornis et les Foulques, le pelvis (4) est remarquable par la longueur de toute la portion située en avant de la cavité cotyloïde. Les fosses iliaques externes, dans lesquelles s'insère le muscle moyen fessier, sont très-allon- gées, fortement inclinées en manière de toit et peu élargies ; elles se soudent sur une étendue plus ou moins considérable avec la crête que constituent en dessus les apophyses épineuses du sacrum. La portion post-cotyloïdienne du bassin est courte, resserrée, et les lames 1léo-ischiatiques sont, dans leur portion inférieure, placées presque verticalement, de facon à être en- tièrement cachées par les crêtes saillantes qui limitent latérale (1) Voy. pl, 7, fig. 4. (2) Voy. pl. 7, fig. 13. - (3) Voy. pl. 7, fig. 7. (4) Voy. pl 8, fig. 4 à 5 ; pl. 9, fig. 4 à 6; pl. 40, fig. 1 et 2. 35 MÉMOIRE SUR UNE ESPÈCE ÉTEINTE ment l’écusson pelvien ; il en résulte que le musele pyramidal de Meckel (carré de la cuisse, Cuvier) est logé dans une sorte de fosse, et profondément encaissé en dessus. Le trou sciatique est petit et arrondi. En arrière, l'échancrure, que laissent entre eux les os iliaques, et qui est occupée par les vertebres de là queue, est extrêmement étroite et resserrée postérieurement ; elle se termine en arrière par un angle arrondi, qui se prolonge presque autant que la pointe de l'ischion. Enfin les branches pubiennes sont très-courtes, et se terminent en avant et au-dessous de la cavité cotyloïde par un petit tubercule iléo-pectiné, sur lequel se fixe un muscle fable et très-allongé, que M. Owen a désigné sous le nom de muscle grêle. Les particularités que présente la face inférieure du bassin des Rallides permettent également de déterminer cette pièce avec certitude. Les fosses iliaques internes sont très-étroites, car les lames iliaques ne débordent guère les apophyses transverses; les fosses rénales antérieures sont resserrées, profondes, et sé- parées des postérieures par deux ares-boutants constitués par les apophyses transverses des vertèbres correspondantes; ces traverses osseuses se prolongent jusqu'au-dessus de la cavité colyloïde. Les fosses rénales postérieures s'étendent en partie au-dessus d'une portion de l'iliaque qui s'avance au-dessous des lobes postérieurs des reins, etconstitue un véritable plancher sur lequel ceux-ci reposent. Ce dernier caractère se retrouve chez tous les représentants de la famille des Rallides, et suffirait à lui seul pour distinguer le bassin ; en effet, on ne rencontre de disposition semblable que chez un petit nombre d'oiseaux, par exemple, chez les Grues les Agamis et les Hérons; mais le plancher ainsi foriné est beau- coup moins développé, de manière à cacher à peine l'extrémité des derniers lobes rénaux. Chez les Hérons, les apophyses trans- verses qui séparent les fosses rénales sont beaucoup plus courtes, et n’occupent que la région sacrée du pelvis, au lieu de venir s'appuyer sur les iliaques au-dessus de la cavité cotyloïde. Ce caractère existe chez les Gallinacés, où, de même que dans le groupe des Rallides, les fosses rénales postérieures se prolongent DU GENRE FULICA, 99 au-dessus d'une cloison osseuse. D'ailleurs, chez la plupart des Gallimacés, le bassin est beaucoup plus large en arrière; quel- ques espèces font cependant exception, et les Francolins se rap prochent assez sous ce rapport des Poules-Sultanes ; maisil est facile de disänguer le pelvis de ces oiseaux à l'aide de quelques particularités de structure qu'il présente, et qui lui sont d’ailleurs communes avec les autres représentants de la même famille : Perdrix, Faisans, Colins, etc. En effet, les James iliaques ne se soudent pas dans toute leur longueur à la crête épineuse du sa- crum, et laissent en arrière de chaque côté de cette crête un pertuis largement ouvert ; enfin l'apophyse iléo-pectinée est beaucoup plus saillante que celle des Rallides. Chez tous les autres oiseaux, les fosses rénales ne sont pas mème délimitées en arrière; c’est à peine si chez quelques- uns On aperçoit sur ce point une petite saillie transversale. Mais la forme générale du bassin de ces espèces est tellement diffé- rente de ce que nous connaissons chez les Rallides, qu'il est inu- üle d'insister davantage sur ce sujet. Le bassin fossile de l'ile Maurice (1) appartient évidemment à une espèce du groupe des Rallides, car on y retrouve toutes les particularités que je viens de citer comme caractéristiques de ces oiseaux : longueur de la portion précotyloïdienne, étroitesse et inchnaison des fosses iliaques externes, saillie des crêtes sus ischiatiques, et cloisonnement en arrière d’une portion des fosses rénales. Mais une telle approximation ne sulfit pas, et pour arri- ver à la détermination générique et spécifique de cette pièce, il faut pousser plus loin l'étude des caractères anatomiques qu'elle présente, et chercher auparavant si les différents groupes natu- rels de la famille des Rallides offrent dans la constitution de leur bassin des caractères qui permettent de les distinguerles uns des autres. Un examen, même superficiel, permettrait de répondre affirmativement à cette question ; on reconnait, en effet, trois types principaux, suivant lesquels parait constituée la région pelvienne : (4) Voy. pl. 7, fig. 1, 2 et 3, 0 MÉMOIRE SUR UNE ESPÈCE ÉTEINTE Le premier nous est fourni par les Poules-Sultanes (1), les Gallinules (2), les Râles (3), les Tribonyx et les Ocydromes (4) ; le second, par les Jacanas ; le troisième, par les Foulques (5). Dansle premier type, la portion post-cotyloïdienne est courte ; les crêtes sus-ischiatiques sont extrêmement saillantes, surtout dans leur portion postérieure, où elles surplombent la surface d'insertion du muscle pyramidal de la cuisse (Meckel) située en arrière du trou sciatique ; les lames illaques se soudent intime- ment à la crête épineuse du sacrum ; au-dessus de la cavité co- tyloïde, ces crêtes S'avancent aussi pour fournir au muscle abducteur supérieur de la cuisse des points d'attache plus éten- dus. La face inférieure du bassin, généralement élargie au ni- veau de l'articulation du fémur, se fait remarquer par la forme arrondie de l'ouverture des fosses rénales postérieures. Dans les genres Porphyrio, Gallinula, Rallus, Tribonyx et Ocydromus, le bassin, bien que présentant les mêmes caractères généraux, offre dans chacune de ces subdivisions des particu- larités de détail qui permettent de le distinguer. Chez les Poules-Sultanes, les lames iliaques antérieures sont plus courtes que chez les Gallinules et les Râles ; elles se soudent dans toute leur longueur à la crête du sacrum, tandis que chez ces derniers oiseaux la soudure ne se fait qu'en avant. Chez les Ocydromes, le sacrum est plus étroit et plus enfoncé que dans les genres précédents, et les fosses rénales beaucoup plus encais- sées et plus profondes. Enfin la crête sacrée, à laquelle sont unies les lames iliaques, est fortement arquée en dessus comme chez les Échassiers essentiellement marcheurs, les Agamis et les Rhynochètes par exemple. Le bassin des Jacanas est construit sur un type différent. Les lames iliaques ne se soudent généralement pas à la crête sacrée, de façon à laisser une étroite ouverture au-dessus des gouttières (4) Voy. pl. 9, fig. 4 et 2. (2) Voy. pl. 9, fig. 3 et 4. (3) Voy. pl. 9, fig. 5 et 6. (4). Voy. pl. 10, fig. 4 et 2. (5) Voy. pl. 8, fig. À à 5. DU GENRE FULICA. A vertébrales, Les crêtes sus-ischiatiques sont disposées à peu près comme dans la famille des Ardeïdes, c'est-à-dire qu’elles ne se prolongent pas latéralement à beaucoup près autant que dans les genres précédents. Les pointes de l'ischion s'étendent beaucoup plus loin en arrière que l'angle sus-ischiatique ; l'échancrure postérieure qui est occupée par les vertèbres caudales, au lieu d'être resserrée, S'évase notablement, bien qu'elle soit beaucoup plus étroite que chez les Grues, les Hérons et les autres Échas- SIETS. Le troisième type comprend les Foulques (1). Le bassin de ces oiseaux présente certaines modifications organiques, en rap- port avec leur genre de vie plus aquatique et la facilité avec la- quelle ils nagent. En effet, la portion post-cotyloïdienne du pelvis S'allonge beaucoup, mas offre très-peu de largeur, de façon à augmenter la surface d'insertion du muscle pyramidal de la cuisse. Les crêtes sus-ischiatiques sont moins saillantes que celles des Poules-Sultanes et des Poules d’eau, bien qu'elles présentent les deux prolongements latéraux qui débordent, de chaque côté, le bassin de ces oiseaux. L'échancrure du bord postérieur, qui est limitée latéralement par la pointe des ischions et qui est occupée par les vertèbres du coceyx, est remarquablement étroite ; sa profondeur varie, d’ailleurs, suivant les espèces; ainsi, chez le Fulica cristata (2), elle est moins grande que chez le Fulica atra (5). Le trou sciatique est ovalaire au lieu d’être arrondi. Enfin, à la face inférieure, les fosses rénales posté- rieures sont étroites et tres-allongées. On voit d’après cette des- cripüon qu'il est facile de reconnaitre le bassin des Foulques, soit que l'on ne considère que sa disposition générale, soit que l'on ne puisse en consulter qu'une portion même peu considérable. Le tableau ci-après met en évidence les rapports de propor- üons que présente le bassin des principaux représentants de la famille des Rallides : (4) Voy. pl. 8, fig. 4 à 5. (2) Voy. pl. 8, fig. 4, (3) Voy, pl 8, fig. 2, A. MILNE EDWARDS. ü INTE n] CE ÉTE SUR UNE ESPI MÉMOIRE 12 070‘0 £r0‘0 1500 GG0‘0 8F0‘0 010°0 y£0°Q 0°cy |8€0‘0 0‘001!FL0°0 SUAUI( “VULV VOlTIMA 96 {3 2600°0 0°007 "VNVOYr £00°0 L00‘0 £70‘0 510‘ FF0‘0 GI0 0 LY0‘0 F£0°0 VuuVd 900°0 8000 650‘0 8c0‘0 0500 G10'‘0 G9800 c£0‘0 0‘007| 990‘0 "STIVHLSAV SAROYAAIO g'8 £00°0 Cy00"0 £10°‘0 y10°0 FT0‘0 L900°0 GI0°0 0c0‘0 c£o‘0 *SADIEVAOV SATIVH 0‘07 | Y00‘0 c‘ar | CO0‘0 CT0‘0 CF0‘0 £TTO"T L00‘0 £r0°0 cu‘ 0 0ÿ0‘0 L00‘0 £t0°0 0700 970°0 800‘0 L00‘018°2 9000 LE uoriod ep op anonsuoq Sn AleR ee Pe9INAIT a[Uuol op AnonsuoTt ©" sonbijetosi-sns 97949 s0p OTLADJUL OUTILS UT 0p NUOAIU ne ANOBAIVT Me + “apro] ut ANDSIET AU U9 UISSEG NP ANIHICT -Js0d oa1ces es des Sir semé 0700 -27s04 oSS0J I 67£0°0 60° 0 UT Jp TUDATU -ÂJ0) 97raro DEEE TT 8&0‘0 °(ouuofout ored amor v) Soudo}xo Ssonburt sassoy sop AnosieT ae eee couuoip ANONSUOT £GT0"0 L'oy | #£0‘0 -10J4J09-3S0d uoraod vj ege0 OÙ auuorprophjoopd uoraod ej apanonguot ap 6 06 0‘00710920‘0 UISSPG NP 0120} ANoNBUO'T AND SOTIVU tr (] SAdOHO'THI VIANISIVI "SISNTIHVISVOYOVN OMHAHdUOd DU GENRE FULICA. h3 Le bassin fossile (1) offre exactement les mêmes caractères que celui des Foulques; ainsi la portion précotyloïdienne égale environ là portion post-cotyloïdienne ; la largeur, au niveau des cavités articulaires fémorales, est un peu plus du quart de la longueur totale. Chez le Fulica cristata (2) et chez le Fulica atra (3), on retrouve des rapports de proportions presque sem- blables. De même que chez ces espèces, les lames illaques anté- rieures se soudent à la crète sacrée par leurs extrémités seule- ment, de façon à laisser un espace vide très-étroit au-dessus des gouttières vertébrales. Les crêtes sus-ischiatiques sont relative- ment peu marquées, et offrent en arrière du tronc sciatique une saillie fortement prononcée qui limite en avant l'insertion du muscle pyramidal. La face inférieure du bassin ressemble com- plétement à celle du pelvis des Foulques ; on y remarque l'allon- gement des fosses rénales postérieures, qui sont néanmoins très- profondes, et s'étendent fortloin au-dessus du plancher inférieur constituant les lames iliaques. Le bassin des Foulques présente chez les diverses espèces quelques particularités de détails, qui permettent de les distinguer entre elles. Ainsi chez le Fulica cristala (f), les crêtes sus-ischiatiques se rapprochent beau- coup au niveau de la dernière vertèbre caudale, de façon que le bassin semble très-resserré sur ce point. Chez le Fulica atra (5), cette disposition ne se rencontre pas, et les crètes se continuent régulièrement jusqu'à l'angle qui les termine en arrière. Sous ce rapport, le fossile de l'île Maurice ressemble complétement à l'espèce d'Europe ; mais la taille en est beaucoup plus considérable, puisqu'elle dépasse même celle du bassin du Foulque du Chili; il est surtout plus élargi, plus épais, et semble indiquer un oiseau plus vigoureux. Je donne d’ailleurs ici les dimensions comparées du pelvis chez le Fulica atra, le F. cristata et le F. Newtonii. (4) Voy. pl. 7, fig. 1 à 3. (2) Voy. pl. 8, fig. 4. (3) Voy. pl. 8, fig. 1 et 2, (4) Voy. pl. 8, fig. 4. (5) Voy. pl. 8, fig. 2. ll MÉMOIRE SUR UNE ESPÈCE ÉTEINTE FULICA FULICA FULICA ATRA. CRISTATA. NEWTONII. 2 | — a im. Dim. Dim. Dim. | Dimens, Dim. réelles. | prop. [réelles.| prop. | réelles. | prop. Longueur totale du bassin....,....... 0,0711100,0[0,0851100,010,090 [100,0 Longueur de la portion précotyloidienne.f0,032! 45,0[0,038! 44,7[0,040 44,4 Longueur dela portion post-cotyloidienne.[0,034! 47,8[0,040! 47,0[0,042 46,4 Largeur des fosses iliaques externes à leur partie moyenne.............. 0,010! 14,010,011! 12,910,013 | 14,4 Largeur du bassin en avant........... 0,018| 25,310,021| 24,710,020 | 22,2 Largeur au niveau de la cavité cotyloide. 0,022! 30,910,027| 31,71[0,029 | 32,2 Largeur au niveau de la saillie latérale des erètes sus-ischiatiques.....,.... 0,021 510,020! 23,510,025 5 2 Longueur de la fosse rénale postérieure. .[0,013, 18,3[0,014! 16,4/0,0145! ! Longueur de la portion sacrée post-rénale.[0,010! 14,010,017| 20,010,015 1 Les détails qui précèdent indiquent nettement que ce bassin aurait suffi à lui seul pour faire connaitre le genre et l'espèce de l'oiseau dont il provient, car il est si nettement caractérisé, qu'il ne peut y avoir à cet égard aucune incertitude. Mais d'autres pièces viennent confirmer nos conclusions ; en effet, on a trouvé dans le même gisement, à côté du bassin, les os de la jambe et du pied, qui appartiennent évidemment à la même espèce. Dans mon travail sur les Oiseaux fossiles, j'ai insisté sur les indications précieuses que l’on pouvait tirer du tarso-métatarsien, et J'ai montré par une foule d'exemples qu'il suffisait pour arriver à la détermination des genres et même des espèces. Je suivrai pour l'étude de cet os et du tibia la marche que je viens de suivre dans l'examen du bassin. L'os du pied des Rallides (4) se distingue de celui de tous les autres oiseaux à l'aide d'un certain nombre de caractères faciles à saisir. Sa longueur est relativement plus considérable que chez tous les Palmipèdes. On ne peut le confondre avec le tarso- métatarsien des autres Échassiers, parce que les facettes glénoï- dales de l'extrémité supérieure, au lieu d'être placées à peu près à la même hauteur, sont disposées à des niveaux différents, celle (1) Voy. pl. 8, fig. 6 à 45; pl. 12, fig, 7 à 17. DU GENRE FULICA. 45 du côté interne étant de beaucoup la plus élevée. Les trochlées digitales sont situées sur une ligne transversale, moins arquée que chez les Totanides, et la trochlée imterne est toujours plus élevée que l'externe, ce qui permet de distinguer los canon des Rallides de son analogue chez les Hérons, les Butors et les autres Ardéides. Le tarso-métatarsien des Rallides présente une plus grande analogie de formes avec celui des Gallinacés ; mais 1l est, en général, plus allongé, et les coulisses du talon, dans lesquelles glissent les tendons des muscles fléchisseurs des doigts, sont dis- posées autrement. Chez les Gallinacés, la crête interne fait en arrière une saillie beaucoup plus considérable que celle du côté interne, tandis que le contraire s’observe chez les Poules-Sul- tanes, les Poules d’eau, les Râles, etc. La forme générale de l'os est tellement distincte de ce qui existe chez les Passereaux et les Rapaces, qu'ilest inutile d'insister sur les caractères qui ser- vent à distinguer le tarso-métatarsien de ces oiseaux. L'os du pied des Rallides présente des différences de confor- mation très-notables chez les divers représentants de cette fa- mille, et ces variations, de même que celles qui nous ont été fournies par le pelvis, peuvent se grouper suivant trois types : Le premier comprend les Poules-Sultanes, les Poules d'eau, les Tribonyx et les Ràles; le second, les Jacanas; le troisième, les Foulques. Chez les Poules-Sultanes (1), l'os du pied est très-robuste, et semble avoir subi un léger mouvement de torsion sur son axe. La face antérieure est creusée, dans sa portion supérieure, d'une gouttière large et profonde, dans laquelle s'insère le muscle extenseur propre du pouce qui est très-développé, et le muscle adducteur du doigt externe. Les empreintes d'insertion du ten- don du muscle tibial antérieur sont très-relevées, et l'interne est beaucoup plus grosse que celle du côté opposé. En dedans et au- dessus, on aperçoit la coulisse destinée à loger le tendon du muscle ‘extenseur des doigts; celle-ci est recouverte par un pont osseux bien développé chez les individus adultes, mais qui manque chez (4) Voy. pl. 9, fig. 7 à 40. h6 MÉMOIRE SUR UNE ESPÈCE ÉTEINTE les jeunes oiseaux. En arrière, il existe dans la portion supérieure et interne une dépression large et profondément marquée, dans laquelle s'attache le faisceau musculaire du fléchisseur propre du pouce; aussi, sur ce point, le corps de l'os ne présente qu'une épaisseur très-faible, etest réduit à une véritable lame. On peut facilement se rendre compte de l'utilité de ces larges surfaces d'insertion destinées aux muscles du pouce, par l'étendue et la variété des mouvements dont jouissent les doigts des Poules- Sultaues ; ces oiseaux peuvent, en effet, saisir avec leurs pattes des objets même peu volumineux, et les porter ainsi à portée de leur bec. Les autres Échassiers sont incapables d'exécuter des mouvements de cette nature. L'extrémité articulaire supérieure (4) est peu élargie, et la surface glénoïdale, qui reçoit le condyle interne du tibia, est plus profondément excavée que celle du côté opposé. La tubérosité intercondylienne, à peine saillante, est aplatie à son extrémité ; le talon est étroit, et, ainsi que je l'ai déjà dit, il se distingue avec la plus grande facilité de celui de la plupart des autres oiseaux, par le développement que prend sa crête externe, tandis que sa crête interne est peu saillante et extrêmement courte. Il existe entre elles une gouttière largement ouverte en arrière ; une autre gouttière petite et superficielle se voit en dedans de la crête interne, et deux coulisses très-superficielles sillonnent la face interne de la crête correspondante. L'extrémité inférieure est assez élargie et porte trois tro- chlées destinées à l'articulation des doigts ; l'externe, placée sur le même plan et moins relevée que la médiane, est comprimée latéralement, et se prolonge en arrière par un bord saillant et mince ; l'interne, située au-dessus de la précédente, est peu re- jetée en arrière. Enfin j'ajouterai que la facette d'insertion du doigt postérieur est profonde, ovalaire et grande, et que le per- tuis situé au-dessus des trochlées, et destiné au passage du musele adducteur du doigt externe, est largement ouvert. Chez les Poules d’eau (2), le canon est plus épais que dans les (4) Voy. pl. 9, fig. 10. (2) Voy. pl. 9, fig. 41 et 12. DU GENRE FULICA. h7 geures précédents; sa face postérieure au lieu d'être déprimée est arrondie, de façon que la surface d'attache du muscle flé- chisseur propre du pouce est à peine marquée, ce que l'on pou- vait prévoir, à raison du peu de variété de mouvements dont ce doigt est susceptible. L'extrémité supérieure ressemble beau- coup à celle des Porphyrio, mais les gouttières tendineuses dont est creusé le talon sont beaucoup plus profondes ; il en existe deux, dont l'interne est souvent transformée en un canal tubu- laire par le rapprochement de ses bords postérieurs. L'extrémité inférieure se distingue de celle du genre précédent en ce que la trochlée interne est rejetée beaucoup plus en arrière ; enfin le canal osseux de l'adducteur du doigt externe est étroit. Dans le grand genre Räle, comprenant les genres modernes Rallus, Ortygometra et Aramides, Vos du pied est comparative- ment plus long que chez les Gallinules ; mais ses caractères essentiels sont les mêmes (4). Chez les Jacanas (2), le tarso-métatarsien se reconnait facile- ment de celui des Poules-Sultanes, des Poules d'eau et des Râles, par la conformation de ses extrémités articulaires. Les facettes glénoïdales, qui recoivent les condyles du tibia, sont limitées, surtout en dedans, par un bord cristiforme ; la tubéro- sité intercondylienne est petite, sallante et pointue, au lieu d’être courte et aplatie. La crête externe du talon est peu développée, tandis que la crête interne est au contraire très-proéminente ; il existe à la base de celle-ci une gouttière tubulaire formée par la soudure de la crête médiane avec celle du côté interne. La sur- face postérieure du talon est, en outre, sillonnée par trois cou- lisses. Le corps de l'os présente à peu près les caractères que j'ai signalés chez les Poules-Sultanes, c'est-à-dire que la surface d'insertion du muscle fléchisseur propre du pouce est extrême- ment profonde. Le muscle adducteur du doigt externe est très- développé ; aussi le canal osseux dans lequel il s'engage est-il beaucoup plus largement ouvert que chez tous les autres oiseaux, etil se prolonge sur la face antérieure de l'os par un large sillon (4) Voy. pl. 9, fig. 18 et 19. (2) Voy. pl. 9, fig. 13 à 17. 18 MÉMOIRE SUR UNE ESPÈCE ÉTNINTE Les trochlées digitales ressemblent beaucoup à celles des Poules-Sultanes ; elles sont cependant plus courtes, plus renflées, et celle du doigt interne descend au moins aussi bas que celle du côté opposé. L'os du pied des Foulques (1) diffère beaucoup de celui des autres Rallides ; il est court, très-robuste, et il se rapproche de celui de certains Palmipèdes lamellirostres non-seulement par sa forme générale, mais aussi par la disposition des trochlées digitales. Les modifications que présentent ces dernières mdi- quent que le piedest disposé pour la natation ; elles sont donc en rapport avec les habitudes plus complétement aquatiques de ces oiseaux (2). De même que chez les Poules d’eau, los est arrondi, et ne présente pas en arrière de dépression profonde pour loger le muscle fléchisseur du pouce; en avant, la surface d'attache de l’extenseur de ce mème doigt est peu marquée. Le canal osseux, dans lequel s'engage le tendon de l’'adducteur du doigt externe, est beaucoup plus petit que celui des Jacanas et des Poules- Sultanes, et rappelle davantage ce qui existe chez les Galiinules. Les extrémités articulaires sont très-larges, relativement à la diaphyse. Les coulisses tendineuses du talon sont disposées comme celles des Râles ; mais les trochlées digitales sont beau- coup plus longues que chez aucun des représentants de la même faille, et celle du doigt interne est fortement rejetée en arrière, comme cela se voit chez les Canards. L'os du pied des Tribonyr se rapproche à certains égards de celui des Foulques ; il est, en effet, robuste et assez court rela- tivement à sa grosseur ; mais les caracteres des extrémités arti- culaires indiquent plus de ressemblances avec les Poules d'eau, car on ne retrouve pas entre les deux condyles de l'extrémité supérieure cette inégalité qui rend si facile à reconnaitre l'arti- culation tibio-tarsienne dans le genre Fulica. Cette disposition indique des mouvements de flexion différents. Enfin j'ajouterai que les gouttüères tendineuses du talon des Tribouyx ressem- blent davantage à celles des Râles qu'à celles des Foulques. (1) Voy. pl. 8, fig. 7 à 16. (2) Voy. pl. 8, fig. 8, 9, 12, 13, 46, DU GENRE FULICA. 19 Dimensions proporhionnelles du tarso-métatarsien dans quelques Rallides. À LARGEUR | LARGEUR LONGUEUR de de LARGEUR | ÉPAISSEUR l'extré- | l'extre- otale du corps "0rpS totale mité mite DACOPT du « Ee de l'os. supé- infé- de l'os. | de l'os. rieure, | rieure, Porphyrio { Dimensions réelles. .... 0,090010,0120!0,0123| 0,006 | 0,005 madagascarensis, | Dim. proportionnelles, . [100,0 | 13,3 | 13,6 6,6 5,9 Gallinula { Dimensions réelles... ...! 0,052 [0,0068,0,0073/0,0025| 0,003 chloropus. À Dim, proportionnelles. , | 100,0 | 13,1 14,0 6,7 5,8 Rullus { Dimensions réelles. ....10,0717| 0,008 |0,008810,0037| 0,00 cayennensis . | Dim, proportionnelles. [100,0 | 41,2 | 12,3 5,2 4,2 Dimensions réelles. .... 0,0378| 0,005 |0,0055| 0,002 | 0,002 Rallus crex.....® Dim, proportionnelle. . | 100,0 | 13,2 | 14,6 | 5,3 | 5,3 Dimensions réelles. ....| 0,074 | 0,008 | 0,010 | 0,004 |0,0035 Dim. proportionnelles. .| 100,0 | 10,8 | 13,5 9: 4,7 { Dimensions réelles. .... 0,056 | 0,009 |0,0097/! 0,004 [0,004 ‘j Dim. proportionnelles. . | 100,0 | 46,0 17,9 402 7,1 HOCUTUR ee caRe = Fulica atra.. D —_—_—_—_—_— Si l'on examine maintenant quels sont les caractères que présente le tarso-métatarsien des tourbières de l'île Maurice (1), on peut se convaincre au premier coup d'œilque, bien que pro- venant d'un oiseau de la famille des Rallides, 11 n'a pas appar- tenu à uve Poule-Sultane ; le corps de l'os est épais, et ne porte pas en arrière de dépression profonde pour loger le muscle fléchisseur du pouce ; ilest au contraire arrondi dans cette par- tie. Les Jacanas ressemblent à cet égard aux Porphyrio; par con- séquent, notre fossile n'appartient pas non plus à un oiseau de ce genre. Dans les genres Gallinula et Rallus, la diaphyse est arrondie en arriére, à raison du faible développement des muscles du pouce, et, sous ce rapport, ressemble à celle du fossile ; mais tandis que dans ces deux genres les extrémités articulaires sont étroites, et que le corps de l'os présente la même largeur dans toute son étendue, dans le tarso-métatarsien que nous étudions, la diaphyse est très-robuste, légèrement tordue sur son axe de dehors en dedans, et elle S'élargit beaucoup vers ses extrémités articulaires qui sont fortes et larges. Ces caractères sont ceux que j'ai indiqués comme propres au genre l'ulica, et (4) Voy. pl. 7, fig, 5 à 10. A, MILNE EDWARDS, 2 50 | MÉMOIRE SUR UNE ESPÈCE ÉTEINTE si nous poussons l'examen des particularités de conforma- tion dans leurs plus petits détails, nous trouvons une sinili- tude au moins aussi frappante. Ainsi le talon est peu déve- loppé (4), et creusé de deux coulisses tendineuses parallèles que l'on aperçoit encore très-distinctement, bien que les crêtes qui les encaissent soient brisées. L'empremte d'insertion du muscle tibial antérieur est située très-près du bord interne de l'os, et au-dessus se voit la coulisse du tendon de lextenseur des doigts ; mais celle-ci n'est pas recouverte par un pont osseux analogue à celui des Poules-Sultanes, des Poules d'eau, des Râles et des Jacanas. Chez les Foulques, une bride osseuse analogue se rencontre parfois; mais elle peut aussi manquer, même chez des oiseaux adultes. Ainsi, elle ex'ste sur un tarso-mélalarsien du Fulica chilensis que j'ai sous les veux; je la retrouve sur un os canon du Fulica atra, tandis qu'on n'en voit aucune trace sur plu- sieurs autres de ces os appartenant aux mêmes espèces, et pro- venant de Foulques arrivés à leur complet développement. L'absence de cette bride osseuse ne suffirait donc pas pour mdi- quer que le fossile que je décris iet appartienne à un jeune oiseau. Le canal osseux, destiné à loger le tendon du muscle adduc- teur du doigt externe pendant son trajet articulaire, est large- ment ouvert, et se continue sur la face antérieure de los par une coulisse bien marquée. On voit aussi en avant, vers le tiers inférieur du tarso-métatarsien, une goultière très-superficielle et oblique qui contourne le bord interne de l'os, et qui indique le passage du tendon du musele extenseur propre du pouce ; une semblable disposition ne se rencontre parmi les Rallides que chez les Foulques. Le doigt postérieur devait être très-déve- loppé, autant qu'on peut en juger par la grandeur et la profon- deur de la facette destinée à son articulation. Les trochlées digitales sont très-longues comme dans le genre Foulque, et ce caractère distingue encore notre fossile des genres Porphyrio, Gallinula et Rallus, où les poulies articu- (1) Voy. pl. 7, fig. 9. DU GENRE FULICA. 51 laires des doigts sont au contraire très-courtes. Enfin J'ajouterai que celle du doigt interne se termine à la naissance de la tro chlée médiane et qu’elle est fortement rejetée en arrière : ca- ractére que présentent toutes les espèces vivantes du genre Fulica. I ne peut y avoir la plus légere incertitude sur la détermi- nation de cette pièce, car entre l'os du pied des Foulques et celui des autres Rallides les différences sont nombreuses et beaucoup plus faciles à saisir qu'entre les Gallinules et les Râles, par exemple, La taille du tarso-métatarsien de l'île Maurice est très-considérable ; cet os dépasse de plus d'un tiers celui du Foulque d'Europe (1) et d’un cinquième celui du Fulica cristata (2). Les chiffres suivants indiquent ces rapports de proportions : ————— LARGEUR | LARGEUR LONGUEUR de de LARGEUR | ÉPAISSEUR l'extré- | l'extré- totale “…. [du corps|du cor ol mité mité l coÛps de l'os, | supé- infé- de l'os. | de l'os. rieure. | rieure. Futien Newtoné:, Dimensions réelles... 0,088 | 0,014 | 0,014 [0,0056/0,0050 SRE ONE À Dim. proportionnelles, . | 100,0 | 15,9 15,9 6,5 5,6 le che { Dimensious réelles... 0,056 | 0,009 |0,0097| 0,004 | 0,004 A ON | Dim. proportionnelles. . 100,0 | 16,0 | 47,3 7,4 7 br Dimensions réelles... 0,079 | 0,011 |0,0115/0,0046/0,0046 FORCES» Dim. proportionnelles. | 100,0 | 13,9 | 14,5 | 5,8 | 5,8 Fuliea chitensis.. Dimensions réelles ...*| 0,080 | 0,013 | 0,013 [0,005 [0 0047 RATÉ ELA PENNT TER proportionnelles. . | 400,0 | 16,2 | 16,2 6,2 5,8 Dimensions réelles. .,,1 0,071 | 0,012 | 0,012 0,005 |0,0042 Fulica Stricklandi | Dim, proportionnelles. 4 | 100,0 | 16,9 | 16,9 | 7,0 | 35,9 RS Aïnsi que je l'ai dit plus haut, on a découvert, dans le mème gisement que les os précédents, un tibia parfaitement conservé qui me semble provenir de la même espèce (3). Les indica- tions que fournit cet os sont moins précieuses que celles que l'on peut tirer du bassin ou du tarso-métatarsien. cepen— dant elles ont une valeur véritable et doivent être prises en (4) Voy. pl. 8, fig. 14 et 15. (2) Voy. pl. 8, fig. 40 et 41. (3) Voy. pl. 9, fig. 41 à 45. 92 MÉMOIRE SUR UNE ESPÈCE ÉTEINTE sérieuse considération. En effet, les particularités de confor- mation que présente l'os de la jambe des Rallides permettent non-seulement de le déterminer avec certitude, mais aussi de reconnaître à quel genre d'oiseau il appartient. Par sa longueur, le tibia des Porphyrio (1), Gallinula (2), Rallus (3), etce., ne peut se confondre avec celui d'aucun autre oiseau, si ce m'est les Échassiers, mais il s’en distingue par la formede l'extrémité articulaire inférieure qui, dans la famille dont vous nous occupons, est beaucoup plus étroite ; elle est arrondie en dessous, dans la partie articulaire en rapport avec l'extré- mité tarsienne, au lieu d’être aplatie ou déprimée comme chez la plupart des autres Échassiers. L'os de la jambe des Poules- Sultanes, des Poules d’eau, des Räles et même des Jacanas est construit sur le même type, et il ne présente dans ces divers genres que des particularités différentielles d'une faible impor- tance. Dans le genre Foulque, ses caractères sont mieux tran- chés et se rapprochent un peu de ceux qui se remarquent chez les Palmipèdes lamellivostres. Si nous examinons quelles sont les modifications de formes que cet os revèt dans les différents genres de là famille des Rallides pour ensuite lui comparer le fossile de Maurice, nous verrons que chez les Poules-Sultanes (4) le tibia est robuste et n'offre pas la courbure interne que l'on voit exister chez les Chevaliers, les Maubèches etles autres petits Échassiers de rivage. En avant, il est aplati, surtout dans sa moitié inférieure, et sillonné par des lignes intermusculaires qui indiquent l'espace occupé par les tendons du muscle extenseur des doigts et du tibial antérieur. La coulisse du muscle péronier inférieur est profonde et s'engage sous un pont osseux situé au- dessus du condyle externe. La gouttière de l’extenseur commun des doigts est large et le pont osseux qui la surmonte est robuste et disposé transversalement; la sullie sur laquelle se fixe le ligament oblique destiné à brider le tendon du muscle tibial (4) Voy. pl. 9, fig. 3, 4 ct 5. (2) Vos. pl. 10, fig. 10 et 11: (3) Vos. pl. 40, fig. 12. (4) Voy. pl. 10, fig. 3, 4 et 5. =o DU GENRE FULICA. 53 antérieur est grande et placée longitudinalement de facon à occuper presque toute la largeur du pont sus-tendineux. La crête péronière est saillante et s'étend environ sur un sixième de la longueur totale de l'os. Le péroné, qui est mince et lamelleux. se soude inférieurement au tibia vers le tiers de celui-ci. L'extrémité supérieure de l'os est petite et peu élargie ; la crête tibiale antérieure s'élève à peine au-dessus de la surface articulaire, mais elle s'avance beaucoup en avant. L'extrémité inférieure est étroite et les deux condyles sont trés-inégaux ; celui du côté interne est de beaucoup le plus renflé, l’autre est très-comprimé latéralement, J'ai retrouvé ces caractères sur toutes les espèces de Porphyrio que j'ai pu étudier. c'est-à-dire les P. veterum (Gmelin), P. smaragdinus (Tem- minck), P. madagascariensis (Latham), P. poliocephalus, P. me- lanotus (Latham) et P. martinicus (Linné). L'os principal de la jambe des Gallinules (1) et des Râles (2) ressemble beaucoup à celui des Poules-Sultanes, mais la gorge intercondylenne antérieure est plus étroite. Quelquefois il existe un pont osseux au-dessus de la coulisse du muscle péronier inférieur, mais ce caractère n'est pas constant et manque assez fréquemment. Dans le genre Jacana, le tibia est relativement plus long et plus grêle que dans les genres précédents. La crête péronière est très-courte et la gorge intercondylienne est moins profonde et plus évasée que chez les Gallinules et les Râles. Le tibia des Foulques (3) est robuste et bien caractérisé par la légère courbure interne que présente son extrémité infé- rieure. Une disposition analogue existe chez les Canards et est en rapport avec les habitudes aquatiques de ces oiseaux qui sout aussi celles des Foulques. La gorge intercondylienne est sens blement plus large que dans les genres précédents. La crète péronière est plus longue, et enfin la crête tibiale antérieure s'élève beaucoup au-dessus de la surface articulaire supérieure, (4) Voy. pl. 9, fig. 40 et 11. (2) Voy. pl. 9, fig. 12. (3) Vor. pl. 9, fig. 6 à 9. 9} MÉMOIRE SUR UNE ESPÈCE ÉTEINTE de façon à constituer une véritable crête rotulienne, semblable à celle qui existe chez beaucoup d'oiseaux palmipèdes. Dimensions relatives du tibia chez diverses espèces de la famille des Rallides. Î LONGUEUR LARGEUR HAUTEUR LONGUEUR de de LARGEUR | ÉPAISSEUR de l'extré- la crète totale | la crète du corps|du corps 2 mité ps|d L tibiale de l'os. | péro- | infé- | del'os. | de l'os. | anté- rieure, rieure, nière, Porphyrio { Dim. réelles. 0,433 | 0,020 | 0,014 | 0,006 | 0,005 | 0,011 madagascariensis. { Dim. proport. .| 100,0 | 45,0 8,2 4,5 BE 8,2 Gallinula { Dim. réelles. ..! 0,084 | 0,013 [0,0065! 0,004 |0,0031! 0,010 chloropus. {Dim. proport. .! 100,0 | 45,4 TS 4,7 3,611 141,9 Rallus | Dim, réelles. ..| 0,097 | 0,016 | 0,007 |0,0047| 0,004 | 0,008 cayennensis. | Dim. proport. .| 100,0 | 46,5 752 &,8 h,1 8,2 ({ Dim. réelles. ..| 0,058 | 0,008 |0,0043/0,0028/0,0022! 0,005 *) Dim. proport. .| 400,0 | 13,7 | 7,4 | 4,8 | 3,7 | 8,6 { Dim. réelles. ..| 0,098 | 0,008 | 0,006 |0.003410,0031| 0,007 : j Dim. proport. .|[ 100,0 8,1 6,1 3,46 3,16 454 Fute ar { Dim. réelles. ..] 0,101 | 0,015 | 0,008 0,004410,0036! 0,013 RENE À Dim. proport. .| 100,0 | 14,3 | 7,9 | 4,3 | 3,5 | 12,8 Rallus crex.... Para africana.. RE —— Le tibia fossile (1) offre la mème réunion de caractères que celui des Foulques, il se fait remarquer par la force de l'os et la largeur de l'extrémité articulaire inférieure. La crête péro- nière est longue et très-saillante. La crête tibiale antérieure est lamelleuse, très-avaucée, et s'élève beaucoup au-dessus de la surface articulaire supérieure. La longueur totale de los est beaucoup plus considérable que celle que présente le tibia du Fulica chilensis. Les chiffres suivants indiquent d’ailleurs les proportions relatives de cet os comparées à celles du Foulque d'Europe, du Foulque à crête et de plusieurs autres espèces. (4) Voy. pl. 7, fig, 11 à 15. DU GENRE FULICA. 59 LONGUEUR LARGEUR HAUTEUR LONGUEUR de de LARGEUR |ÉPAISSEUR de totale | la erète | eXTÉ- Lu corps|du corps re de l'os. | péro- | infé- | de l'os. | de l'os, | anté- BTE ricure. rieure, i réelles ; 24 7 5 c Fubca Newton: { Dim. réelles. .! 0,144 0,024 0,0125 0,007 | 0,005 0,020 | Dim. proport. , | 100,0 | 16,6 8,7 4,8 3,4 13,8 = ; Dim. réelles, ..| 0,104 | 0,045 0,008 |0,004410,0036| 0,013 Fulica atra.…. (Dim. proport. .| 100,0 | 14,8 | 7,9 | 4,3 | 3,5 | 12,8 RAC in ta Dim. réelles. ..| 0,125 | 0,024 | 0,011 0,0053! 0,004 | 0,016 Fi © (Dim. proport.. .| 100,0 | 46,8 8,8 4,2 3,2 | 12,8 Pulicabehitenets | Dim. réelles. ..| 0,435 | 0,024 | 0,012 0,0065| 0,005 | 0,045 ie À Dim. proport.. | 100,0 | 17,7 | ‘8,8 | ‘48 | ‘3.7 11,1 Te 4 Dim, réelles, ..| 0,122 | 0,022 | 0,011 | 0,006 | 0,005 | 0.016 PbeaStriklandi) Din proport. | 100,0 | 18,0 | ‘9,0 | 4,9 | 41 13,1 Nous voyons done, par cette étude détaillée des caractères ostéologiques du bassin, du tarso-métatarsien et du tibia trouvés à l'île Maurice, que ces pièces proviennent évidemment d’une espèce du genre Fulica, et, qu'à cet égard, il ne peut y avoir au- cune incertitude. Ce Foulque, que je désignerai sous le nom de Fulica Newtonii, dépasse par sa taille tous ceux qui aujourd'hui habitent les mêmes régions, et, sous ce rapport, 1l se rapproche du Fulica gigantea. Les ossements que je viens d'examiner n’ont évidemment pas appartenu au même individu. L'os du pied présente une teinte presque noire, tandis que les autres pièces sont brunes, et sem- blables en cela aux nombreux débris de Dronte exhumés de la mare aux Songes (1). Le gisement n’était donc pas exactement le même, et les conditions d'enfouissement étaient différentes. J'ajouterai que la nature du tissu osseux tend à prouver que le larso-mélatarsien provenait d'un oiseau plus jeune que celu auquel appartenait le tibia. On ne peut done tirer aucune con- clusion de l'examen des dimensions relatives de ces os. ILest intéressant de rechercher si les voyageurs qui ont visité les îles Mascareignes à l’époque où le Dronte existait encore, ont eu connaissance du Fulica Newtonii. Les renseignements les plus (4) George Clark, Account of the late discovery of Dodo’s remains in the Island of Mauritius (Ibis, new series, 1866, t. IT, p. 141), Cet article a été traduit dans les Annales des'sciences naturelles, Z00LOG1E, 5€ série, 1866, t, V1, p. 19. 56 MÉMOIRE SUR UNE ESPÈCE ÉTEINTE précis que nous ayons sur la faune de ces îles nous ont été trans- mis par Dubois. qui visita ces régions de 1669 à 1672 (1). Cet auteur, dans la description des Oiseaux de rivière de l'ile Bourbon, parle de « Pouces D'EAU qui sont grosses comme des Poulles; elles sont toutes noires, et ont une grosse creste blanche sur la teste. » Ces caractères ne peuvent s'appliquer au Foulque que lon rencontre aujourd'hui dans les mêmes parages, c'est-à-dire au Fulica eristata (Gmelin) (2), car cette espèce est non-seulement plus petite qu'une Poule ordinaire, mais se fait remarquer par la plaque du front qui est d’un rouge foncé, tandis que, chez l'oiseau dont parle Dubois, la plaque rostrale était entièrement blanche. D'après l'examen des os de la patte du Fulica Newtonii, on peut juger de la grandeur de l'animal tout entier ; il devait être à peu prés de la taille d'une grosse Poule. Ces indications per meitent de supposer que le Fulica Newtonit pourrait bien être l'espèce décrite par Dubois, et qui, au lieu d'être localisée à l’île Bourbon, aurait aussi habité Maurice (3). On ne trouve dans l'ouvrage de Leguat aucun passage qui puisse s'appliquer avec certitude à cet oiseau, car lorsqu'il dit : «L'ile (Maurice) était autrefois toute remplie d'Oyes et de Canards sauvages, de Poures D'EAU, de Gélinottes, de Tortues de mer et de terre, mais lout cela est devenu fort rare (h)»; rien ne prouve que ces Poules d’eau fussent des Foulques ; et si elles appartenaient à ce genre, on serait autorisé à penser qu'il s’agit ici du Fulica cristata. Ou s'explique assez bien la disparition de notre oiseau fossile ; en eflet, si les Foulques nagent et plongent avec une grande faei- (1) Les voyages faits par le sieur D. B, (Dubois) aux iles Dauphine où Madagascar et Bourbon ou Mascarenne, es années 4669, 70, 71 et 72, etc. Paris, chez Claude Bar- bin, au Palais. 4 vol. in-12, 14674. — Le passage où il est fquestion des Oiseaux de l'île Bourbon, se trouve reproduit textuellement dans les Annales des sciences natu- relles, ZO0LOGIE, 5° série, 1866, t. VI, p. 42. (2) Voy. pl. 6, fig. 3. (3) Voy. pl. 6, fig. 4 et 2. (4) Voyages et avantures de François Lequat, 1708. Loudres, 2 vol, in-12, DU GENRE FULICA. 97 lité, ils volent peu ; les grandes espèces de l'Amérique méridio- nale paraissent même presque incapables de s'élever dans les airs. Ainsi d'Azara nous donne quelques détails sur les habitudes de ces oiseaux : «J'ai eu, ditAl, trois individus vivants, de cette espèce, au Paraguay; je les ai lâchés dans une cour où ils ont paru tranquilles, stupides et paresseux. Jamais ils ne faisaient usage de leurs ailes, même quand on les tourmentait, et ils pa- raissaient privés de la faculté de voler » (4). Le Fulica Newtonii, dont les dimensions devaient se rappro- cher beaucoup de celles du Foulque géant du Chili, était, sui- ant toute probabilité, un oiseau de formes lourdes et massives, tres-bon nageur, comme semblent l'indiquer la force des os de la patte et l'étendue des surfaces d'insertion des muscles qui mettent les doigts en mouvement, mais sinon incapable, du moins peu capable de s'élever de terre. Les oiseaux qui, par un vol rapide, ne peuvent se soustraire aux poursuites de l'Homme et des Mammifères carnassiers, sont destinés à disparaître tôt tard de la surface du globe, et nous n'avons déjà que trop d'exemples de ce genre à enregistrer : les Dinornis de la Nou- velle-Zélande, l'Epyornis de Madagascar, le Dronte de Maurice, le Solitaire de Rodrigues, ne sont plus connus que par les débris de leur squelette enfouis dans les terrains meubles. Le grand Pingouin, malgré la rapidité avec laquelle il nageait et le mau- vais goût de sa chair, a été entièrement détruit. L'Apteryr de la Nouvelle-Zélande, le Rhinochetus de la Nouvelle-Calédonie deviennent de jour en jour plus rares ; et si les Casoars et les Autruches sont encore assez communs, il faut l'attribuer à l'immensité des plaines désertes au milieu desquelles ils habitent. Les îles Mascareignes ont une étendue si peu considérable, qu'elles n'ont pu servir longtemps de refuge aux oiseaux à formes massives qui y vivaient en grand nombre, à l'époque où l'Homme n'y avait pas encore pénétré. Le Foulque de Newton faisait partie de celte faune ancienne si remarquable, qui comptait aussi parmi ses représentants les (1) Voyages dans l'Amérique méridionale par don Félix de Azara depuis 1781 Jusqu'en 1801 (publiés par Walckenaer). Paris, 4809, t. II, p. 361. A. MILNE EDWARDS, 8 58 MÉMOIRE SUR UNE ESPÈCE ÉTEINTE Drontes de Maurice et de Bourbon, le Solitaire, le Géant (Legua- tia gigantea), Oiseau bleu, que M. Schlegel rapporte avec doute au genre ÂVotornis et deux espèces éteintes de Perroquets. Plu- sieurs de ces oiseaux n'ont été qu'entrevus, et ne sont connus les uns que par un fragment de squelette, les autres par une courte description où un dessin imparfait ; il y a donc encore là bien des découvertes à faire, et les résultats auxquels on est arrivé depuis quelques années sont de nature à éveiller l'atten- tion de tous les zoologistes, et doivent les engager à unir leurs efforts pour soulever le voile qui nous cache encore la plupart de ces formes si curieuses d’une population aujourd'hui disparue. DU GENRE FULICA. 59 EXPLICATION DES FIGURES. PLANCHE 6. 1. Fudica Newtonii (A. Edw.), restitué d’après les os de la patte et le bassin, Fig. 2. Fulica Newtoni, restitué d'après la description de Dubois, Fig. 3. Fulica cristata d'Afrique. Fig. 4. Fulica atra d'Europe. Toutes ces figures sont réduites dansles mêmes proportions. PLANCHE 7. OSTÉOLOGIE DU FULICA NEWTONIT (NOV. SP.) DES TOURBIÈRES DE L'ÎLE MAURICE. Fig. 1. Bassin, vu de côté, de grandeur naturelle, ainsi que les figures suivantes. 2. Face supérieure du même os. Fig. 3, Face inférieure du même os. Fig. 4. Bassin, vu en avant pour montrer les gouttières vertébrales. Fig. 5. Tarso-mélatarsien, vu par sa face antérieure, Fig. 6. Face postérieure du même os, Fig. 7. Le même, vu par sa face externe. Fig. 8. Portion inférieure du mème os, vue en dedans. Fig. 9. Extrémité articulaire supérieure, vue en dessus, Fig. 10. Extrémité articulaire inférieure, vue en dessous. Fig. 11. Tibia, vu par sa face antérieure, Flg. 12. Face postérieure du même os, Fig. 13. Face externe du même os. Fig. 14. Portion supérieure, vue en dedans. Fig. 15. Extrémité articulaire inférieure, vue en dessous. PLANCHE 8, Fig. 1. Bassin du Foulque d'Europe (Fuliea atra), vu de côté, de grandeu naturelle, ainsi que les figures suivantes, Fig. 2. Le même os, vu par sa face supérieure. Fig. 3. Bassin du Fulica cristata d'Afrique, vu de côté. Fig. 4. Face supérieure du même os. Fig. 5. Face inférieure du même, Fig. 6. Tarso-métatarsien du Foulque du Chili (Fulica chilensis), vu par sa face anté- rieure. Fig. 7. Face interne du même os. Fig. 8. Extrémité articulaire supérieure, vue en dessus, Fig. 9, Extrémité articulaire inférieure, vue en dessons. Fig. 10. Tarso-métatarsion du Fulica cristata, Vu par sa face antérieure, Fig. 11. Face interne du même os. G0 MÉMOIRE SUR UNE ESPÈCE ÉTEINTE DU GENRE FULICA. Fig. 12, Extrémité articulaire supérieure, vue en dessus. Fig. 13. Extrémité articulaire inférieure, vue en dessous. Fig. 44, Tarso-métatarsion du Fulica atra d'Europe, vu par sa face antérieure, Fig. 15. Facc interne du même os, Fig, 16. Extrémité ariliculaire supérieure, vue en dessus. PLANCHE 9. Fig. 1. Bassinde la Poule-sultane de Madagascar (Porphyrio Madagascariensis), vu en dessous, de grandeur naturelle. Fig. 2. Le méme os, vu de côté, Fig. 3. Bassin dela Poule d'eau commune (Gallinula chloropus), vu en dessus. Fig. 4. Le mème os, vu de côté. Fig. 5. Bassin du Ràle des Genêts (Rallus crex), vu en dessus. Fig. 6. Le mème os, vu de côté. Fig. 7. Tarso-métatarsien du Porphyrio madagascariensis, Vu par sa face antérieure. Fig. 8. Face interne du méme os. Fis. 9. Face externe de l'extrémité supérieure du même. 10. Extrémité articulaire supérieure, vue en dessus. 104, Extrémité articulaire inférieure, vue en dessous, 41. Tarso-mélalarsien de Gallinula chloropus, vu par sa face antérieure, 12. Extrémité articulaire supérieure, vue en dessus et grossie. 13. Tarso-métatarsien du Metopidius africanus, Vu par sa face antérieure. 44, Face interne du même os. 15. Face externe du même. 16. Extrémité articulaire supérieure, vue en dessus et grossie. 18. Tarso-métalarsien du Rallus crex, vu par sa face antérieure. 19. Extrémité articulaire supérieure, fue en dessus et grossie. PLANCHE 10. Fig. 1. B: que les figures suivantes. in de l'Ocydromus australis, vu en dessus, de grandeur naturelle, ainsi Fig. 2. Le même, vu de côté, Fig. 5. Tibia du Porphyrio Madagascariensis, vu par sa face antérieure. Fig. 4. Face interne du même os. Fig, 5. Extrémitlé articulaire inférieure, vue en dessous. Fig. 6. Tibia de Fulica cristata, vu par sa face antérieure. Fig. 7. Face interne du même os, Fig. 8 Extrémité articulaire inférieure, vue en dessous. Fig. 9. Portion supérieure du tibia du Fulica atra, vue par sa face interne, Fig, 10. Tibia de Gallinula chloropus, Vu par sa face antérieure, Fig, 11. Face interne du même os. Fig. 42. Tibia du Rallus crex, vu par sa face interne. Paris. — Imprimerie de E. Manrier, rue Mignon, 2. OBSERVATIONS SUR LES AFFINITÉS ZOOLOGIQUES DE L'4 PHANAPTERYX ESPÈCE ÉTEINTE QUI VIVAIT ENCORE A L'ILE MAURICE AU XVIL SIÈCLE. Parmi les ossements qui ont été recueillis à l'ile Maurice dans la mare aux Songes, à côté des débris du Dronte, et que MM. Alf. et Ed. Newton ont bien voulu soumettre à mon examen, se trouvaient quelques os de patte qui m'avaient paru des plus intéressants, en ce qu'ils indiquaient l'existence d’un type nou- veau voisin de l'Ocydromus, mais plus coureur que ce dernier. J'avais aussi remarqué une mandibule inférieure, longue et courbée, qui semblait provenir d’un oiseau présentant certaines ressemblances avec les Rallides, où d'un Échassier de rivage entièrement inconnu ; mais j'hésitais beaucoup à la rapporter à l'oiseau auquel appartenaient les os de la jambe et du pied, lorsque des faits d'un autre ordre, constatés récemment à Vienne par M. de Frauenfeld, me permirent de résoudre affirmativement cette question, et d'arriver ainsi à des résultats profitables pour lormthologie paléontologique. Cette mandibule inférieure est presque complète ; il ne manque que l’une des extrémités articulaires (1). Dans toute la portion correspondant à l'os dentaire, elle est faiblement cour- bée en bas d'une manière très-régulière, de facon que son bord inférieur représente presque exactement l'arc d'un cercle de O1 de rayon. Chez les Courlis (2) et les Ibis (3), la courbure (4) Voyez pl. 12, fig. 4, 2,3 ot 4. 2.75 (2) Voyez pl. 43, fig. 1, 2, 3 et 4. (3) Voyez pl. 13, fig. 5, 6 et 7. A. MILNE EDWARDS, ie) 62 AFFINITÉS ZOOLOGIQUES DE L'APHANAPTERYX. du bec est moins régulière, et s'accuse surtout dans sa portion terminale ; chez l'Apteryæ (1), la mandibule est beaucoup plus droite. Les deux branches, peu écartées l'une de l'autre dans leur portion articulaire, se réunissent à une grande distance de leur extrémité ; elles se soudent intimement, de facon à donner à toute la portion terminale du bec une grande solidité. La face inférieure ne décèle aucune trace de la séparation primitive des os dentaires ; elle est arrondie, et ne présente pas de sillon sem- blable à celui qui occupe la ligne médiane chez les Ibis, et dont on aperçoit encore des traces chez l'Apteryx. Le tissu osseux est, dans celte portion, extrêmement serré et résistant ; il n’est percé que par quelques rares pertuis, et ne présente rien de comparable à la structure pour ainsi dire spongieuse de l'extré- mité du bec des Barges, des Bécasses, des Courlis, des Ibis, des Apleryx, ele., structure en rapport avec la quantité de nerfs et de vaisseaux qui se rendent dans cette partie, et auxquels les oiseaux doivent l'exquise sensibilité tactile qui leur permet d'aller chercher dans la terre et dans la vase les Vers qui y sont cachés. Le bec fossile trouvé à l'île Maurice n’était évidemment pas con- formé pour servir à un régime semblable ; il se termine, au con- traire, par une pointe aiguë et forte. En arrière des branches postérieures de l'os dentaire, il existe un hiatus étroit, mais assez long, indiquant la séparation pri- mordiale de l'os dentaire, de l'angulaire et du sus-angulaire. La disposition de ce hiatus, dirigé obliquement de haut en bas et d'avant en arrière, peut nous fournir quelques caractères assez importants ; en effet, celte fissure, que j'ai nommée pertuis ou fissure postdentaire, manque dans certaines familles, telles que celles des oiseaux de proie diurnes. Chez les Passereaux propre- ment dits (2), elle existe, mais offre une forme particulière et bien distincte de celle dont je viens de parler ; elle ressemble, en effet, à une fenêtre ovalaire, tandis que dans notre fossile, c’est une vériiable fente laissée entre les différents os dont j'ai cité (1) Voyez pl. 13, fig, 17 et 18. (2) Voyez pi. 13, fig. 42 et 43. AFFINITÉS ZOOLOGIQUES DE L'APHANAPTERYX. 63 plus haut les noms. Les Passereaux, dont le bec est fortement Courbé come les Promerops, les Xiphorhynchus, les Falculies, les Picucules, reproduisent exactement les mêmes caractères que les Passereaux à bec droit. Chez les Gallinacés (D), on remarque, sous ce rapport, des variations assez grandes ; ainsi, tandis que chez les Paons le pertuis postdentaire est presque entièrement effacé, il est énorme chez les Tétras, et particulierement chez le l'etrao urogallus, où il est placé en avant à une très-grande dis- tance de là surface articulaire. Chez les Totanides (2), la fente postdentaire ressemble davantage à celle de notre fossile ; mais elle est disposée moins obliquement, et pour trouver une simi- ltude plus complète, il faut comparer ce dernier au bec de certains représentants de la famille des Rallides, et plus particu- liérement des Ocydromes (3). Chez ces oiseaux. la portion mas- sétérienne est plus étroite, ce qui se lie d'ailleurs à la brièveté plus grande du bec qui nécessite pour ses mouvements des muscles moins puissants, et par conséquent des surfaces d'insertion moins étendues. Le bord supérieur de cette surface, correspon- dant à l'os surangulaire, et sur lequel S'attachent les fibres du muscle temporal, est très-élevé: il ne parait cependant pas y avoir eu sur ce point des tendons ossifiés semblables à ceux des Poules-Sultanes. En arrière de la surface massétérienne et au devant de l'articulation, il existe un trou vasculaire, arrondi et assez largemerit ouvert. La surface artieulaire est large, mais peu élevée ; elle se com- pose come d'ordinaire de deux facettes ; l'une, externe, desti- née à S'appliquer sur l'extrémité jugale de l'os tympanique, est disposée obliquement de dehors en dedans ; elle est comparati- vement beaucoup plus développée que celle des Courlis (4), des Ibis (5) et de la plupart des Echassiers. et, sous ce rapport, se rapproche de celle des Porphyrions et des Ocydromes (6). La 1) Voyez pl. 13, fig. 15 et 16. 2) Voyez pl. 13, fig 1,52; 8'et 4. 3) Voyez pl. 13, fig. 8, 9, 40 et 11. 4) Voyez pl. 13, fig. 9 ct 3. (5) Voyez pl. 13. fig. 5 et 7. 6) Voyez pl. 13, fig, 9 et 11, 6h AFFINITÉS ZOOLOGIQUES DE L'APHANAPTERYX. facette interne, qui s'articule avec la portion ptérygoïdienne de l'os tympanique, est subquadrilatère, et très-élargie d'avant en arrière ; chez les Totanides, elle est étroite, et se dirige vers l'apophyse articulaire interne. La forme de ces facettes est assez importante à considérer, car elle peut donner une idée exacte de celle de l'os tympanique dont l'importance ne saurait être contestée. L'apophyse postarticulaire est forte, médiocrement sallante, et dirigée en dehors; elle se continue inférieurement avec une crête très-mince qui la relie à une autre apophyse articulaire inférieure. Enfin on voit un prolongement articulure interne, robuste, mais peu avancé ; une semblable disposition ne se re- marque chez aucun autre oiseau. Dans le grand groupe des Passereaux (1), il existe une apophyse postarticulaire; mais elle est courte, et ressemble à un tubercule ; Fapophyse interne est au contraire très longue; mais il n'existe pas de prolongement osseux inférieur correspondant à l'angle de la machoire, de telie sorte que l'extrémité articulaire estextrèmement surbaissée. On pourrait en dire autant des Gallinacés (2), que l'on reconnait aussi au développement que prennent les apophyses articulaires internes et postérieures. Ces dernières, chez le Tetrao-urogal- lus, remontent à une très-grande hauteur en arrière du crâne. Dans le genrelbis (3), il n’y a pas de saillie osseuse inférieure, et d'ailleurs la surface postérieure est profondément déprimée, ce qui lui donne une apparence très-particulière. Les Courlis sont également dépourvus d'apophyse articulaire inférieure. La disposition de leusemble du système apophysure de notre fossile rappelle beaucoup celui qui est propre aux Rallides, et qui, dans cette famille, est porté à son maximum de développe- ment chez les Ocydromes (4) : on peut dire avec certitude que, de tous les représentants de la classe des oiseaux, c'est celui dont la portion articulaire de la mandibule inférieure se rapproche (1) Voyez pl, 13, fig. 12. (2) Voyez pl. 13, fig. 15 et 16, (3) Voyez pl. 13, fig. 5 et 6. (a) Voyez pl. 13, fig. 8,9 ct 11. AFFINITÉS ZOOLOGIQUES DE L'APHANAPTERYX. 69 le plus de celle si remarquable du bee recueilli à l'ile Maurice ; on y retrouve une apophyse postérieure dirigée en dehors, une apophyse interne, forte et courte, qui se prolonge en une crête jusqu'à la saillie osseuse inférieure ; celle-ct est nettement mar- quée, bien qu'un peu plus faible que celle du fossile, Chez les Foulques, l'articulation est disposée à peu de chose près de la même manière ; chez les Gallinules, les Tribonyx et les Porphy- rions, l'apophyse inférieure est moins sullante. Sous ce rapport, les Aptéryx différent beaucoup de notre fossile (1, car, chez ces oiseaux, l’apophyse postarticulaire est rudimentaire, et l'angle inférieur est arrondi. Si, d'après la structure du bee, nous cherchons à nous rendre compte des habitudes et du régime de l'oiseau auquel 1 apparte- nait, nous verrons que l'absence, ou du moins le peu de déve- loppement des trous et des canalicules destinés au passage des perfs et des vaisseaux, ne permettent pas de lui attribuer les mœurs des Fbis, des Courlis, des Barges ou des Bécasses. Ce bec, pointu et d'un tissu très-serré, ressemble un peu à celui des Poules-Sultanes et des Ocydromes, et rappelle davantage encore la conformation des mandibules des Huitriers ; il semble par- faitement disposé pour briser les coquillages et les enveloppes résistantes des animaux, dont probablement se nourrissait cette espece, I suffit de jeter un coup d'œil sur l'os du pied trouvé dans le même gisement pour se convaincre qu'il provient d’un oiseau admirablement conformé pour la marche; il est parfaitement équilibré : sans être trop massif, il est très-robuste (2). La dia- phise est presque aussi épaisse que large; les angles en sont ariondis, et la gouttière métatarsienne antérieure est peu mar- quée dans sa position supérieure, et s'efface complétement en bas; on ne voit aucune des lignes saillantes destinées à limiter les surfaces d'insertion du muscle extenseur propre du pouce, de l'abducteur du doigt mterne et de l'adducteur du doigt externe, (4) Voyez pl. 13, fig. 17 et 18. (2) Voyez pl. 12, fig. 5 à 40. 66 AFFINITÉS ZOOLOGIQUES DE L'APHANAPTERYX. Les empreintes tibiales sont inégales ; l’interne est plus élevée et beaucoup plus forte que l'externe ; elles sont surmontées par une dépression peu profonde, au fond de laquelle s'ouvrent les pertuis supérieurs, dont l'externe est situé beaucoup plus bas que l'interne. En dedans, on voit une gouttière limitée par deux petites crêtes, destinées à loger le tendon du musele extenseur commun des doigts. La face postérieure de l'os du pied est arron- die, et traversée longitudinalement par des lignes intermuscu- laires uetlement dessinées. La surface d'attache du muscle flé- chisseur propre du pouce est peu marquée. L'extrémité articulaire supérieure est assez étroite (1); les facettes glénoïdales sont situées à des niveaux différents, celle du côté interne étant plus haute que celle du côté opposé ; elles sont séparées par une forte tubérosité intercondyhenne, à la base de laquelle se voit en dehors une dépression assez grosse sur la- quelle s'attache le ligament semilunaire. Le talon est en partie brisé ; cependant on peut voir qu'il était peu saillant, et qu'il n’était sillonné en dedans que par des gout- tères très-superficielles. Les trochlées digitales sont fortes, et disposées à des niveaux différents (2). La médiane est de toutes la plus longue ; elle est large, tres-arquée, et creusée d’une gorge profonde ; une échan- crure tres-ouverte la sépare de la trochlée externe, qui est beau- coup plus courte et très-élargie. La trochlée interne est la plus petite, et se termine à la hauteur de la base de celle du doigt médian ; elle est fortement rejetée en arrière. La profondeur des dépressions creusées sur les faces latérales des trochlées indique que les doigts devaient être tres-solidement attachés à l'os du pied. La facette articulaire du doigt postérieur est grande, et déprinée ; enfin le pertuis inférieur, dans lequel s'engage le ten- don du muscle adducteur du doigt externe, est grand; maisil ne se continue sur le corps de l'os que par une gouttière à peine visible. (4) Voyez pl. 12, fig. 9. (2) Voyez pl. 12, fig. 6 et 40. AFFINITÉS ZOOLOGIQUES DE L'APHANAPTERYX, 67 Les caractères que je viens d'exposer indiquent de la manière la plus nette que los en question ne peut provenir mi d'un oiseau de proie, ni d'un Passereau, ni d'un Palmipède. H à appartenu à un oiseau marcheur, et, par sa forme générale ainsi que par plusieurs de ses caractères, il se rapproche de celui des Galli- nacés ; cependant 1l est impossible de le rattacher à ce groupe. En effet, chez tous les Gallinacés, sans exception, le muscle fléchisseur propre du pouce s'insère sur une surface profondé- meut creusée sur la face postérieure et en dedans du talon ; elle est limitée par des crêtes très-saillantes. Ce caractère, comme je l'ai déjà dit, manque sur le tarso-métatarsien extrait de la mare aux Songes. Les trochlées digitales des Gallinacés sont toujours beaucoup plus courtes, et celle du doigt interne se prolonge un peu plus bas que chez ce dernier; enfin, j'ajouterai que chez presque tous les oiseaux de ce groupe, même chez eeux qui sont dé- pourvus d'éperons, il existe une crête ou une bride osseuse qui réunit le bord postéro-interne de l'os au talon. Si l’on compare le métatarse fossile à celui des Échassiers, on remarque que ses proportions relatives, aussi bien que ses parti- cularités anatomiques, l'éloignent de celui des Ciconides, des Gruides, des Ardéides, des Totanides et des Outardes; mais on lui trouve de grandes analogies avec l'os du pied de certains re- présentants de la famille des Rallides, bien qu'il diffère beau- coup de la forme typique propre à ce groupe. Chez ces oiseaux, en effet, les trochlées digitales sont très-serrées les unes contre les autres, et l'extrémité inférieure est en conséquence étroite. Chez notre fossile, on observe la disposition contraire. Le pied des Poules-Sultanes se distingue non-seulement par ce carac- tère, mais aussi par la profondeur de la gouttière métatar- sienne antérieure et de la surface d'insertion du muscle fléchis- seur propre du pouce. Cette particularité ne se retrouve pas chez les Râles, les Poules d’eau, les Jacanas et les Tribonyx ; mais l'os tarso-métatarsien se reconnait toujours au peu d’in- tervalle qui sépare la trochlée du doigt médian de celle du doigt externe; Gn remarque cependant que cet intervalle grandit, à 68 AFFINITÉS ZOOLOGIQUES DE L'APHANAPTERYX. mesure que les oiseaux sont mieux conformés pour la marche et pour la course. Ainsi l'échancrure interdigitale est plus large chez les Ràâles que chez les Foulques ; elle s'évase davantage dans le genre Tribonyx, et surtout dans le genre Ocydrome. En suivant peu à peu ces modifications, on passe insensiblement de la forme type qui nous est offerte par le tarso-métatarsien des Râles à une forme qui pourrait au premier abord sembler toute différente, et qui est pour ainsi dire plus marcheuse. Le fossile que nous étudions nous en présente en quelque sorte l'exagéra- tion, car il est évidemment mieux approprié à la marche que celui de l'Ocydrome ; il offre même quelques rapports avec l'os du pied de l'Aptéryx. Chez l'Ocydrome (1), la gouttière méta- tarsienne antérieure est plus profonde que chez notre fossile ; le tendon de l’extenseur commun des doigts passe sous un pont osseux ; le talon est creusé en dedans de deux coulisses tendi- neuses assez profondes (2) ; mais le plan général est le même, et l'on conçoit que si les modifications que nous venons de suivre agissent toujours dans le même sens, elles conduisent à la forme que nous présente l'os trouvé à l'île Maurice. Il y a encore entre le fossile que nous étudions ici et le tarso- métatarsien de l'Aptéryx une différence énorme; mais on peut cependant le considérer comme une transition entre ce dernier et le type Rallide : car quelles sont les modifications anatomiques que nous présente cet os chez l'Aptéryx? On voit là diaphyse se raccourcir et s'élargir beaucoup (3) ; les lignes inter- musculaires s’effacent ; les trochlées digitales disposées à peu près sur le même plan, et séparées par des échancrures très- larges, sont robustes et arrondies ; le talon est peu saillant, et ne présente aucun canal tubulaire ; il'est creusé de deux larges gout- tières, entre lesquelles est une crête épaisse et peu saillante (4). Ces particularités sont de l’ordre de celles qu'offrait notre fossile comparé au tarso-métatarsien de lOcydrome, ou ce dernier ) Voyez pl. 44, fig. 1. ) Voyez pl. 14, fig. 3 et 4. ) Voyez pl. 14, fig. 6 4) Voyez pl. 44, fig. AFFINITÉS ZOOLOGIQUES DE L'APHANAPTERYX. 69 comparé à son homologue chez les Ràâles ou les Poules d’eau. L'examen des caractères ostéologiques conduit à penser que l'oiseau auquel appartient le fossile en question présentait avec les Rallides de grandes analogies, mais qu'il était organisé pour une existence plus terrestre que les représentants les plus marcheurs de cette famille, et que, considéré à ce point de vue, il semble se rattacher aux Brévipennes, et particulièrement aux Aptéryx. On à trouvé dans le même gisement que cette mandibule inférieure et que ce tarso-métaltarsien, plusieurs tibias (1), qui semblent devoir se rapporter au même oiseau : car l'étude des particularités qu'ils présentent conduit au même résultat que l'examen que je viens de faire des caractères anatomiques de l'os de la patte. Le tibia fossile est remarquable par le peu de grosseur de la diaphyse comparée aux extrémités articulaires ; le corps de l'os est, en effet, presque cylindrique, plus grêle en dessous de la crête péronière qu'à son extrémité inférieure, et il présente une légère courbure à concavité interne. La crète péronière est assez forte, et se prolonge jusqu'au tiers supérieur de l'os ; le péroné devait se terminer un peu au-dessous du tiers inférieur, ainsi que lindiquent les rugosités qui existent sur ce point. L'extré- mité supérieure est grosse et arrondie ; la crête tibiale antérieure savance beaucoup, et se courbe en dehors, mais elle s'élève tres-peu au-dessus de la surface articulaire; la crête rotulienne est peu marquée, et la crête tibiale externe se prolonge en de- hors en se recourbant au devant de la tête du péroné. L'extrémité inférieure est massive ; les deux condyles sont trés-inégaux : celui du côté interne est étroit et avancé, celui du côté externe est épais et arrondi ; la gorge qui les sépare pré- sente une assez grande largeur ; en dehors, il n'existe pas de fosseties destinées à loger le rebord postérieur des facettes glé- noïdales du métatarse, ainsi que cela se remarque chez beau- coup d'Échassiers; la coulisse du muscle tibial antérieur s'en- gage sous un pont osseux bien constitué ; la coulisse du muscle court péronier est à peine indiquée. (1) Voyez pl. 12, fig. 11 à 15. A. MILNE EDWARDS. 10 70 AFFINITÉS ZOOLOGIQUES DE L'APHANAPTERYX. Les Ocydromes seuls, parmi les Rallides, offrent dans la con- stitution de los de la jambe des particularités analogues, et en cela ils différent notablement des autres genres de la même fa- mille, car chez ceux-ci le tibia est relativement beaucoup plus allongé ; ses extrémités articulaires sont plus en rapport avec la grosseur de la diaphyse, et les crêtes tibiales sont beaucoup plus saillantes et plus hautes ; il y a, à cet égard, entre l'os de la jambe des Rallides types et celui de lOcydrome, beaucoup plus de différence qu'il n’en existe entre ce dernier et notre fossile. Nous remarquons, en effet, que le tibia de l'Ocydrome (1) est comparativement.très-trapu, et que ses extrémités, surtout la superieure, sont plus renflées que d'ordinaire, sans cependant l'être à beaucoup près autant que chez notre fossile. Les parti- cularités ostéologiques de l'extrémité inférieure sont les mêmes, mas la diaphyse, chez l'Ocydrome, est moins arquée. Le Ubia de l'Aptéryx (2) diffère beaucoup de celui de l'oiseau de Maurice; la direction de l'articulation tarsienne est diffé- rente ; la grosseur relative des condyles n’est pas la même, la gouttière du muscle tibial antérieur ne s'engage pas sous un pont osseux, et reste à découvert ; la crête tbiale antérieure est beaucoup moins sallante, ete.; cependant il y à dans l'aspect général el les proportions relatives de los quelque chose qui appelle celui du fossile, indiquant aussi que, tout en appartenant à uu oiseau d'un groupe zoologique différent, 11 présente quel- ques traits de ressemblance avec ce genre singulier de Brévi- peunes. Les rapportsde longueur des os du pied et de la jambe ne sont pas les mêmes que chez FOcydrome ou l'Aptéryx; le tarso-méta- tarsien est notablement plus grand, 1l égale les deux tiers de la longueur du tibia ; ainsi, si l'on représente par 100 la longueur du tibia, celle du métatarse serait de 67, tandis que chez l'Ocy- drome elle serait seulement de 57 et demi, etchez lAptérvyx elle serait de 54. D'ailleurs, dans la famille des Rallides, ces propor- (L) Voyez plT 4, Mis. 9 a144, (2) Voyez pl. 14; fig. 12 à 14. AFFINITÉS ZOOLOGIQUES DE L'APHANAPTERYX. 71 tions varient dans des limites très-étendues, sans qu'on puisse attacher une très-grande importance à ces différences ; on peut s'en convaincre en jetant les veux sur les chiffres suivants, qui indiquent le rapport du tarso-métatarsien au tibia, la longueur de celui-ci étant considérée comme 100, Métatarse fossile. .......,, 67 Porphyrio madaguscariensis. 68 Ocydromus australis.. 57 Rallus crex.... ......... 61 Tribonyx Mortierr. 64 Rallus aquaticus........,. 64 Aramides CHYONNENSES. à... 72 Gallinula chloropus . Dre AT Metopidius africanus.… 74 FUNCU UNE sc aare.. 097 Ainsi, chez notre oiseau fossile, les proportions de la jambe et du pied seraient à peu près les mêmes que chez les Poules- Sultanes, les Fribonyx et les Pâles. Je m'occupais de la description de ces divers fossiles, quand M. le comte Marschall m'informa d'une découverte très-inté- ressante que M, Georg Pitter von Frauenfeld venait. de faire dans la collection des peintures sur vélin de la bibliotheque par- ticulière fondée par l'empereur d'Autriche Francois F", et, avec son obligeance si connue de tous les hommes de science, il m'en- voya un extrait du travail de M. de Frauenfeld, puis le mémoire lui-même. Je reconnus immédiatement que les ossements dont je venais de faire l'étude appartenaient tous à l'une des espèces représentées dans ces peintures, et j'acquis la certitude que le bec si singulier etles os de la patte provenaient du même animal. M. de Frauenfeld a fait connaitre deux figures d'oiseaux prove- nant de la collection de peinturessur vélin dont je viens de parler. Le premier de ces oiseaux est un Dronte, dont tout le corps est uniformément teinté en gris brunâtre, mélangé de quelques reflets bleus. est beaucoup moins gros que le Dronte représenté dans les tableaux des deux peintres Saverv et de Adrien Veen (D), et son bec, comparé à la tête, est beaucoup moins robuste, ce qui me porterait à penser que celte peinture à été faite d'après un jeune animal, La seconde figure représente un Oiseau qui est aujourd'hui (4) M. Millies vient de publier une figure du Dronte faite par Adrian Veen, d'après un individu qui vivait à Amsterdam en 1626 (Over eene nieuw ontdekte afbeelding van den Dodo. Koninklijke Akademie van wetenschappen, t. X1,1868). 12 AFFINITÉS ZOOLOGIQUES DE L'APHANAPTERYX. complétement inconnu des zoologistes, et qui est remarquable par son bec long, pointu et légèrement courbé en bas, par son plumage d'une couleur rougeätre uniforme, et d'un aspect soyeux analogue à celui de l'Apteryx; par l'absence presque complète d'ailes, et par ses pattes robustes pourvues de quatre doigts, dont le postérieur est bien développé, et s'appuie largement sur le sol (1). Cette figure porte le n° 92 du deuxième volume de la collec- tion des vélins ; elle est immédiatement précédée de celle du Dronte, de celle d’un Casoar à casque, et suivie de celle d'un Flamant. | La seule date que lon trouve dans ce recueil est celle de l'année 1610, et le Casoar qui y est représenté avait été rapporté de Java par les Hollandais en 1597, et offert à l'empereur Ro- dolphe I par l'archevèque électeur de Cologne. IEY à donc tout lieu de croire que ces oiseaux vivaient ensemble à la ménagerie impériale, que cet empereur et son père Maximilien IFentrete- naient, de 1545 à AGIS, aux environs du château d'Ebersdorf, à une lieue environ à l'est de Vienne. Le Dronte qui a été figuré sur les vélins était peut-être celui qui, d'apres de Brv, aurait été amené de l'ile Maurice en Europe par les Hollandais en 1599. Parmi les explorateurs qui ont visité les îles Mascareignes vers cette époque, 11 en est quelques-uns qui parlent de certains oiseaux dont aujourd'hui nous n'avons aucune connaissance : ainsi Pieter van den Broecke (2), dans la relation de son voyage à Maurice, qui date de 1617, figure à côté du Dronte un autre oiseau à corps arrondi, privé d'ailes, et pourvu d'un bec long, pointu et courbé en bas. Aucune description ne se rapporte à cette figure, que M. Strickland à reproduite en se bornant à signaler la ressemblance qu'elle offre avec l'A pteryæ. 4) Voyez pl, 11. (2) Van den Broecke, XX Jaarige reyse-beschryving naer Africa en Oost-Indien. 8° Lewarden 1771: «Begin ende voortgangh der Verecn, Nederl, Gcoctr. Oostind. Compagnie », & 1, n° XVI, p. 102, pl. 7. Voyez aussi Thevenol, Relations de divers voyages curieux, t. 1, Voyage de Bontekoe. AFFINITÉS ZOOLOGIQUES DE L'AFHANAPTERYX. 73 En 162$, François Cauche (1) nous apprend qu'il y avait à l'ile Maurice des « Poules rouges au bec de Bécasse; pour les » prendre, il ne faut que leur présenter une pièce de drap » rouge ; elles suivent el se laissent prendre à la main ; elles » sont de la grosseur de nos Poules, excelleutes à manger. » Jean Chrétien Hoffmann, qui séjourna à l'ile Maurice en qua- lité de prédicateur, du 13 février 1673 au 17 mars 1675, raconte «qu'il y existait encore des oiseaux rouges singuliérement con- » formés, de la taille d'un Poulet ordinaire, nommés T'odaerses. » Ces oiseaux, bien que privés de la faculté de voler, courent » tres-vite ; aussi use-t-on d'un procédé risible pour s'en empa- » rer : on prend une baguette dans la main droite, et on enve- » loppe la main gauche d'un morceau d'étoffe rouge, qu'on » montre ainsi à Ces oiseaux communément rassemblés en » troupes nombreuses; soit que la couleur rouge terrifie ces stu- »_pides oiseaux, soit qu'elle les attire, ils s'approchent presque » sans crainte du chasseur, qui, lorsqu'ils sont à une distance » convenable, en abat et saisit un. Les cris que pousse le captif » altirent ses compagnons qui cherchent à le délivrer, et de- » viennent ainsi tous la proie du chasseur (2).» Iest évident que ce passage se rapporte aux Poules rouges à bec de Bécasse de Cauche ; Hoffmann les désigne, à tort, sous le nom de Todaerses, qui a été souventappliqué aux Drontes ; mais il est probable qu'en 1673 ces derniers avaient déjà disparu de l'ile Maurice ou y étaient devenus si rares, que l’auteur dont je viens de citer le nom n'en avait jamais vu. Il est impossible de ne pas reconnaitre les similitudes qui existent entre les Poules rouges privées de la faculté de voler dont parlent Cauche et Hoffinaun, et l'oiseau dont on à retrouvé une figure dans la col- lection des vélins de la bibliothèque particulière de l'empereur d'Autriche. Ces peintures proviennent pour la plupart du mème artiste ; quelques-unes ont été évidemment faites d'après des individus vivants, d'autres d’après des animaux empaillés ; enfin Cauche, Relations véritables et curieuses de l'ile de Madacçascar,in-# Paris, 1651, ( ( (2) Voyez journal Leopoldinn, mars 1868, p. 52. / 74 AFFINITÉS ZOOLOGIQUES DE L'APHANAPTERYX. il en est qui. parait-il, sont le fruit de l'imagination du peintre. On pense qu'elles sont dues au pinceau du célèbre mimiaturiste hollandais G. Hoefnagel, né à Amsterdam en 1545 où 15/6, mort entre 1608 et 1617, et attaché pendant sa vie à la cour de Rodolphe 1, en qualité de peintre du cabinet, Ea pose de Voi- seau dont il est ici question est tellement naturelle, qu'il est permis de supposer qu'il a été représenté de son vivant, bien que les plumes correspondant à la base de l'aile semblent un peu en désordre. Cet oiseau reproduit les caractères essentiels assignés par Cauche à ses Poules rouges ; 11 présente la même coloration, la même forme du bee, et l'on y retrouve aussi la nature des pluies signalée par Hoffinann. M. de Frauenfeld n'hésite pas à établir ce rapprochement, et il donne pour titre à son mémoire : Veu aufgefundene abbillung des Dronte und eines zweilen Kurzflüge- ligen vogels, wahrscheinlich des Poule rouge au bec de Bécasse der Maskarenen. Cet oiseau est tellement remarquable et pré- sente des caractères si particuliers, qu'il est facile de le distin- guer à l'aide d’une description mème très-sucemcte. La pein- ture que l'on possède aujourd'hui, et qui à été très-habilement reproduite en chromolithographie, aux frais de la Société z00logico-botanique de Vienne, nous fait connaitre la plupart des caractères extérieurs du nouvel oiseau de Maurice, et je crois utile d'en reproduire ici une réduction (D). Le bec est noir, très-aigu et régulièrement arqué en bas; il est à peu près deux fois plus long que le crâne. La mandibule supé- rieure est arrondie en dessus, et l'on voit auprès de sa base l'ou- verture des narines qui est petite ettrès-étroite. L'œil, dont l'iris est jaunâtre, est situé très en avant; en arriere et plus bas, on aperçoit la trace du trou auditif. Le plumage, d'une teinte rou- geàtre uniforme, ne présente aucune consistance ; les plumes, de même que celles de l’Apteryæ, ontune tige simple, mais les barbes et les barbules sont longues, molles et sans adhérence les unes avec les autres ; celles de la partie postérieure des fianes sont les (1) Voyez pl. 44, AFFINITÉS ZOOLOGIQUES DE L'APHANAPTERYX. 75 plus développées. Le cou est assez long, et il est garni sur la nuque de plumes qui dépassent les autres, et semblent consti- tuer une sorte de crête cervicale ; on ne remarque aucune mdi- cation d'ailes. La queue est radimentaire, et constituée par des plumes courtes, molles et retombantes. Les pattes sont peu éle- vées ; elles présentent beaucoup de force. Les plumes des jambes s'arrêtent à une certaine distance au-dessus du talon, de facon que l'extrémité inférieure des tibias est nue. Le pied est couvert de larges scutelles. Les doigts, au nombre de quatre. sont cylin- driques, et dépourvus de membrane interdigitale, même à leur base ; le pouce est bien développé, et s'appuie largement sur le sol; le doigt médian est un peu plus court que le tarse. La place zoologique que cet oiseau devait occuper était des plus difficiles à établir, et M. de Frauenfeld, après avoir com- paré ce type aux Brévipennes, aux Gallinacés et aux Rallides, arrive à cette conclusion, qu'il réunit le plumage et les ailes imparfaites de l'Apteryæ au port et au bec des Râles, et aux pieds des Gallinacés. Il est évident que, par l'inspection seule d’un dessin colorié, on ne pouvait arriver à établir avec plus de précision la position systématique de la Poule rouge à bec de Bécasse, et cette question aurait été l'objet des mêmes discussions qui se sont élevées jusque dans ces dernières années sur les relations zoologiques du Dronte, si les circonstances particulières, dont j'ai parlé dans la première partie de ce mémoire, ne me permettaient de com- pléter l'histoire de la découverte si inattendue de M. de Frauen- feld, et de rétablir la place que la Poule rouge à bec de Bécasse des anciens voyageurs doit occuper dans les cadres ornitholo- giques. Effectivement les ossements subfossiles dont je viens d’exa- miner les caractères appartiennent indubitablement à l'oiseau que M. de Frauenfeld vient de faire figurer, et les particularités anatomiques offertes par ces os suffisent pour bien faire con- naitre la position systématique de ce dernier. La Poule rouge à bec de Bécasse fait évidemment partie de la famille des Rallides. car il y a moins de différence entre elle et l'Ocydrome qu'entre 76 AFFINITÉS ZOOLOGIQUES DE L'APHANAPTERYX. celui-crel les Râles. Cette espèce étemte constitue dans ce groupe une de ces formes de transition si remarquables dans le règne ani- mal, et lon doit là considérer comme un Rallide dont l'organisa- tion se serait adaptée à une existence essentiellement terrestre, Les plumes sont trop légères et trop peu résistantes pour avoir pu servir au vol, et d'ailleurs les ailes sont rudimentaires; les pattes, au contraire, offrent une force considérable, maiselles sont peu élevées et les doigts sont moins allongés que d'ordinaire dans cette famille; ceci porterait à penser que cette espèce avait des habi- tudes moins aquatiques que la plupart des Rallides ; cependant, le doigtest très-long, comme chez les oiseaux quifréquentent les endroits vaseux où le sol a peu de consistance, tandis que chez les véritables coureurs il disparait plus où moins complétement afin de diminuer le poids de l'extrémité du bras du levier consti- tué par la patte. D'après la nature des plumes, on voit que la Poule rouge au bec de Bécasse était encore plus brévipenne que le Notornis; aussi est-il probable que le sternum était encore moins caréné que celui de ce dernier oiseau (1), et que los furculaire n'existait pas ou était réduit à l’état de stylet. I est possible que de nou- velles recherches nous fassent connaître quelques-unes de ces pièces qu'il serait si intéressant de pouvoir étudier. M. de Frauenfeld à proposé de considérer l'oiseau dont nous fusors 1c1 l'histoire, comme le type d'une nouvelle division géné- rique, et il lui a donné le nom d'Aphanapteryx imperialis. Déjà plusieurs auteurs avaient tenté d'interpréter zoologique ment les descriptions et les figures imparfaites laissées par les voyageurs qui, vers la fin du xvr siècle et au xvn°, visitérent les îles Mascareignes, et chacun des oiseaux, dont on avait pu soupconner l'existence, avait recu un nom particulier, lors même que ses rapports zoologiques étaient complétement incon- nus. Ainsi, M. de Sélys-Longchamps à réuni toutes ces espèces dans une même division générique qu'il à désignée sous le nom d'A pterornis. (1) M. Owen à donné une figure de cette piece dans son ouvrage sur l'Aratomie des Vertébrés,t. Il, p. 24, fig. 15, AFFINITÉS ZOOLOGIQUES DE L'APHANAPTERYX. 71 L'oiseau figuré par van den Broecke est évidemment celui que Cauche appelait la Poule rouge à bec de Bécusse, et on peut les identifier avec une certitude presque entière avec l {phanapteryæ de M. de Frauenfeld. Mais doit-on pour cela remplacer cette dé- nomination par celle d'Apterornis(Sélys-Longehamps)? Je ne le pense pas, car M. de Sélys-Longehamps à formé ce dernier genre au moyen d'éléments très-hétérogènes, et les caractères extrôme- ment vagues qu'il lui assigne pourraient être appliqués à des oi- seaux appartenant à des groupes zoologiques très-différents; c’est en effet ce qui a lieu. Le genre Apterornis, dit cet auteur, « dif- » fère notablement des deux précédents (Didus et Pezophaps) » par son bec long ressemblant un peu à celui des Bécasses, » maus plus gros. Ce bec rappelait en apparence celui de l'Apté- » TYX; Ces Oiseaux étaient haut montés, couraient vite et s’éloi- » gnaient davantage des Pigeons que le Dronte et le Pezophaps, » auxquels ils ressemblaient d'ailleurs par leurs ailes impropres » au vol, par leur queue nulle ou rudimentaire et par le nombre » et la disposition des doigts des pieds. » Comme type du genre Apterornis, M. de Sélys-Longchamps cite l’Apterornis solitarius, c'est-à-dire le Solitaire de l'île de la Réunion, dontil ne reste aucun débris et que nous ne connaissons que par les récits de quelques voyageurs. Ainsi Carré, qui résida à la Réunion en 160$, parle «d'une sorte d'oiseau... que les habitants ont nommé Oiseau solitaire parce que effectivement il aime la solitude et ne se plait que dans les endroits les plus écartés... [ne ressemblerait pas mal à un Coq d'Inde s'il n'avait point les jambes plus hautes. La beauté de son plumage fait plaisir à voir, c’est une couleur changeante qui tire sur le jaune (1).» Dubois, dans son ouvrage imprimé en 1674, donne sur ce Solitaire les détails suivants : «Ils sont gros comme une grosse Oie et ont le plumage noir à l'extrémité des ailes et de la queue. A la queue, il y a des plumes approchantes de celles de l'Au- (1) Voyages aux Indes Orientales, par M. Carré, 2 vol. in-12,t, 1, p.12; et Prévost, Histoire générale des voyages, t, IX, p. 3. A. MILNE EDWARDS. 11 78 AFFINITÉS ZOOLOGIQUES DE L'APHANAPTERYX. truche ; ila le col long et le bec fait comme celui des Bécasses. mais plus gros. la jambe et pieds comme poulets d'Inde. » Cet oiseau, à plumage blanc ou teinté de jaune, est peut-être celui qui est représenté sur les deux tableaux découverts en 1866 et 1867 et présentés à la Société zoologique de Londres, par MM. Tegetmeyer et A. Newton; dans tous les cas, 1l serait cer- tainement bien différent de la Poule rouge à bec de Bécasse. La seconde espèce d’'Apterornis de M. de Sélys-Longehamps, qu'il nomme Aplerornis cœrulescens, n'est autre chose que l'Üi- seau bleu, sur lequel Dubois nous à transmis quelques détails que je reproduis ici. « Oiseaux bleus, gros comme les Solitures, ont le plumage tout bleu, le bec et les pieds rouges, faits comme pieds de Poules ; ils ne volent pas, mais ils courent tellement vite qu'un Chien à peine d'en attraper à la course ; 1s sont tres-bons. » La couleur bleue du plumage, la teinte du pied et du bec, la rapidité de la course, semblent bien indiquer un oiseau du groupe des Poules-Sulianes. M. Strickland_ avait parfaitement saisi ce rapprochement lorsqu'il disait: «J'aurais été disposé à rapporter Oiseau bleu au genre Porphyrio,si lon ne nous assu- rait qu'il ait eu la taille du Solitaire, c'est-à-dire d'une grosse Oie, que ses pieds ressemblaient à ceux d'une Poule et qu'il état incapable de voler, » Lorsque M. Strickland écrivait ces lignes, on ne connaissait pas encore le Motornis découvert en 1850, oiseau chez Île- quel presque tous ces caractères se retrouvent; aussi, lorsque M. Schlegel chercha à déterminer zoologiquement les anciens oiseaux des iles Mascareignes, il rangea cette espèce dans Île groupe des Poules-Sulianes et dans le genre Notornis. me semble, en effet, que l'Oiseau bleu ne peutappartenir à une autre division qu'à celle des Porphyrions, mais ilme parait bien diffi- cile d'établir des genreset des espèces en se basant seulement sur le dire de voyageurs qui, n’attachant qu'une importance très- secondaire aux questions relatives à l'histoire naturelle, peuvent n'avoir pas observé trés-atientivement les caractères spécifiques et en avoir rendu compte d'une manière approximalive. Ainsi, AFFINITÉS ZOOLOGIQUES DE L'APHANAPTERYX. 79 toutes les discussions qui se sont élevées sur les rapports z00lo- giques de l'Oiseau bleu avaient pour base la description donnée par Dubois et que j'ai reproduite plus haut. Mais cette descrip- tion est-elle bien exacte? On peut en douter, car dans une lettre écrite par de Brown, missionnaire jésuite et publiée en 1724 dans les Lettres édifiantes, on remarque le passage suivant : « Vers l'est de cette île, il y a une petite plaine au haut d’une montagne, qu'on appelle laplaine des Cafres, où l’on trouve un gros Oiseau bleu, dont la couleur est fort éclatante. H ressemble à un Pigeon ramier ; il vole rarement et toujours en rasant la terre, mais il marche avec une vitesse surprenante. Les habi- tauts ne lut ont encore donné d'autre nom que celui d'Oiseau bleu ; sa chair est assez bonne et se conserve longtemps. » D'apres cet aveu, l'Oiseau bleu pourrait donc s'élever de terre, et il ressemblerait non plus à une grosse Oie, mais à un Pigeon ramier. Il est difficile de distinguer quels sont les ren- selgnemenis auxquels on peut accorder le plus de confiance. Ceci moutre la réserve que l'on doit garder lorsqu'il s'agit de se servir, pour l'étude des espèces, des descriptions suecinctes données par les voyageurs. Mais que l'Oiseau bleu soit un Porphyrio où un Notornis, peu importe à la question que nous traitons ici. Il est, en tous cas, évident qu'il appartient à un tout autre genre que le Solitaire, et que si on laisse ce dernier comme type des Ap/erornis, on doit en distinguer | 4. cœrulescens. L'A{plerornis Bonasia, qui constitue le troisième représentant des Apterornis de M. de Selys-Longchamps, est encore plus difficile à déterminer exactement, car, sous un seul nom, plu- sieurs espèces se trouvent réunies. Ainsi le savant naturaliste belge comprend sous la même dénomination : 1° Les Poules (Hen), dont sir Th. Herbert a laissé une figure tres-imparfaite, chez lesquelles le bec est long, droit et pointu, au lieu d'être courbé comme celui de l'Aphanapteryæ ; 1 n'y a aucun vestige de queue, mais il semble y avoir eu des ailes d'une extrême brièveté. C'est à cet oiseau que M. Schleget a assigné le nom de Didus Herberti. 80 AFFINITÉS ZOOLOGIQUES DE L'APHANAPTERYX. 2° Les Poules rouges à bec de Bécasse de Cauche. 3" Les Gelinottes qui habituent l'ile Rodrigues à l'époque où Leguat y séjourna, et sur lesquelles cet auteur nous a laissé les renseignements suivants : «Nos Gélinottes sont grasses pendant toute l’année et d'un » goût très-délicat ; elles sont toutes d'un gris clair, n'ayant que » très-peu de différence de plumage entre les deux sexes... » Elles ont un bourrelet rouge autour de l'œil, et leur bec, qui est » droit el pointu, est rouge aussi, long d'environ deux pouces. » Elles ne sauraient guères voler, la graisse les rendant trop pe- » santes. Si on leur présente quelque chose de rouge, cela les » irrite si fort, qu'elles viennent l'attaquer pour tâcher de l'em- » porter. » Cet oiseau se distingue bien nettement du précédent par sa coloration et par la forme du bec. Enfin M. de Selys-Long- champs termine le passage relatif à l'A pterornis Bonasia en citant la figure donnée dans le voyage de Van den Broecke. L'Apterornis Bonasia comprend donc au moins trois espèces distinctes, au nombre desquelles se trouve l'Aphanapteryx de M. de Frauenfeld ; mais on ne peut pas adopter pour cet oiseau la dénomination spécifique de Bonasia, parce qu'elle doit s'ap- pliquer à la première des espèces dont parle M, de Selys-Long- champs, c'est-à-dire à celle dont sir Th. Herbert à laissé un dessin grossier, et qui à pour caractère principal un bec droit et pointu. Par conséquent, si on laisse dans le genre Apterornis le Solitaire de Bourbon et le Didus Herberti (Schlegel), on doit en séparer l'Oiseau bleu aussi bien que la Poule rouge au bec de Bécasse, et le nom générique d'Aphanapteryx, proposé par M. de Fauenfeld, doit être conservé pour cette dernière espèce ; mais, d’un autre côté, il est évident que l'A phanapteryæ impe- rialis n'est autre chose que l'Oiseau figuré dans le voyage de Van den Broecke, auquel M. Schlegel à appliqué le nom de Didus Broeckei ; cela ne peut donner lieu à aucune contestation, puisque Je savant directeur du Musée de Leyde à distingué cette espèce de celles dont le bec est droit au lieu d'être courbe, de telle sorte que là dénomination spécifique qu'il à proposee doit, sui- AFFINITÉS ZOOLOGIQUES DE L'APHANAPTERYX. si vant la loi de priorité, remplacer celle qui a été donnée depuis. Par conséquent, l'Aphanapteryx imperialis doit porter le nom d'Aphanapteryx Broeckei. En résumé, nous voyons donc que le genre Aphanapteryæ doit être maintenu dans nos cadres ornithologiques, et qu'il tient, à côté des Ocydromes, une place correspondante à celle que ces derniers occupent à côté des Râles; enfin, que ses relations sont du même ordre que celles qui existent entre les Poules- Sultanes et les Notornis. A l'aide de ces documents nouveaux découverts par M. de Frauenfeld dans la bibliothèque particulière de l'empereur d'Autriche, et des ossements subfossiles que MM. Alfred et Edward Newton out bien voulu me confier, nous arrivons donc à reconstituer l'une des espèces éteintes les plus remarquables de cette faune si singulière des îles Mascareignes qui, jusque dans ces derniers temps, était encore si incomplétement connue, EXPLICATION DES PLANCHES . PLANCHE 11 Dessin représentant la Poule rouge à bee de Bécasse de Cauche (Aphanapteryx Brœckei) retrouvé par M, de Frauenfeld dans la bibliothèque particulière de l’empe- reur d'Autriche (très-réduit). PLANCHE 12. Ostéologie de l'Aphanapteryx Bræckei. Fig. 4. Bec inférieur, vu de côté, de grandeur naturelle, ainsi que les figures suivantes. Fig. 2, Le même, vu en dessus. Fig. 3, Le même, vu en dessous. Fig. 4. Extrémité articulaire, vue par sa face postérieure, Fig. 5. Tarso-métatarsien, vu par sa face interne. Fig, 6. Face antcricure du même os, Fig, 7. Face postérieure du mème. Fig. 8. Face externe du même. Fig. 9, Extrémité articulaire supérieure, vue en dessus. Fig. 40. Extrémité articulaire inférieure, vue en dessous. Fig. 41. Tibia, vu par sa face interne. Fig. 12, Face antérieure du même os, Fig. 13. Face postérieure du mème, Fig. 44, Extrémité articulaire supérieure, vue en dessus. Fig. 145, Extrémité articulaire inférieure, vue en dessous, PLANCHE 17, Fig. 4. Mandibule inférieure du Courlis (Numenius arcualus), vue de côté, un peu réduite. Fig. 2, Face supérieure du même os. Fig. 3. Portion articulaire, vue en dessus, un peu grossie. Fig. 4. Portion articulaire, vue en arrière, un peu grossie. Fig, 5. Mandibule de l'bis rose (Jbis rubra), vue par sa face supérieure, un peu réduite. Fig. 6. Extrémilé postérieure, vue en arrière, un peu grossie. Fig, 7. Portion articulaire, vue en dessus et un peu grossie. Fig. 8. Mandibule de l'Ocydrome (Ocydromus australis), vue de côté, naturelle, Fig. 9. Face supérieure du même os. Fig. 10. Extrémité postérieure, vue en arrière et un peu grossie. Fig. 11. Porlion articulaire, vue en dessus et un peu grossie, Fig. 42, Mandibule de Coracias (Fregilus graculus, Lin.), vue de côté, naturelle. de grandeur de grandeur AFFINITÉS ZOOLOGIQUES DE L'APHANAPTERYX. 83 Fig. 43. Extrémité postérieure, vue en arrière et un peu grossie, Fig, 44. Mandibule de Faisan à collier (Phasianus lorquatus), vue de côté, de gran= deur naturelle, Fig, 15. Face supérieure du même os, Fig, 16. Portion postérieure, vue en arrière. Fig. 17. Mandibule d'Apteryx, vue en dessus et un peu réduite. Fig. 48. Portion articulaire, vue en dessus et grossie. PLANCHE 18, Fig. 1. Tarso-métatarsien de l'Ocydrome (Ocydromus australis), vu par sa face anté- rieure, de grandeur naturelle, ainsi que les figures suivantes, Fig. 2. Face interne du mémeos, Fig. 8. Face postérieure du même. Fig. 4. Extrémité articulaire supérieure, vue en dessus. Fig, 5, Extrémité articulaire inférieure, vue en dessous. Fig. 6. Tarso-métatarsien de l'Apteryx (Apferyx australis), vu par sa face antérieure. Fig. 7. Extrémité articulaire supérieure, vue en dessus, Fig. 8, Extrémité articulaire inférieure, vue en dessous, Fig. 9. Tibia de l'Ocydrome, vue en avant. Fig. 10, Face interne du même os. Fig. 11. Extrémité articulaire inférieure, vue en dessous. Fig. 12. Tibia de l'Apteryx, vu en avant, Fig. 43. Face interne du même os. Fig. 14. Extrémité articulaire inférieure, vue en dessous. PARIS, — IMPRIMERIE DE E, MARTINET RUE MIGNON, 2, NOUVELLES OBSERVATIONS SUR LES CARACTÈRES ZOOLOGIQUES ET LES AFFINITÉS NATURELLES DE L’ÆPYORNIS DE MADAGASCAR, PAR MM. AHEHRONSE BEILMNE KEY ARHDS, ET AIT. GER AM EDAEDSEER. Un = Tous les naturalistes se souviennent de l'intérêt qu'excita une communication faite à l’Académie, le 27 janvier 1851, par M, Isidore Geoffroy Saint-Hilaire, relativement à des œufs énor- mes trouvés à Madagascar par M. Abadie, capitaine d'un navire marchand (1). Ces œufs, dont M. Gcoffroy Saint-Hilaire placa plusieurs exemplaires sous les yeux de l'Académie, dépassaient de beaucoup, par leurs dimensions, ceux des plus grands Oi- seaux connus, Leur capacité était de plus de 8 litres et leur volume correspondait à celui de six œufs d'Autruche où de cent quarante-huit œufs de Poule. Ils ne pouvaient être attribués à aucune des espèces vivant actuellement, soit à Madagascar, soit sur d'autres points de la surface du globe; mais d'après quelques fragments d'os trouvés dans le même gisement, le savant dont nous venons de citer le nom pensa qu'ils devaient appartenir à un (1) Note sur des ossements et des œufs trouvés à Madagascar dans des alluvions modernes et provenant d'un oiseau gigantesque, par M. Isidore Geoffroy Saint-Hilaire (Comptes rendus hebdomadaires des séances de l'Académie des sciences, 1851, t. XXXIT, p. 401). Voyez aussi Ann, des se, nat., Zoo, 3° série, t. XIV, p. 206, et note addi- tionnelle, op. cit., p. 213. A. MILNE EDWARDS, 12 56 SUR L'ÆPYORNIS DE MADAGASCAR. oiseau gigantesque tridactyle, et il donna à cette espèce inconnue le nom d'Æpyornis maximus (1). Avant la découverte que nous venons de rappeler, quelques renseignements plus où moins vagues pouvaient faire soupconner l'existence d'oiseaux de grande taille dans l'île de Madagascar. En effet, vers 1834, Goudot avait recucilli dans cette île quel- ques débris de coquilles d'œufs, dont M. P. Gervais fit mention comme paraissant avoir dû élre du volume de ceux des Au- truches (2). Plus anciennement encore, M. F. Verreaux, pendant son sé- jour au cap de Bonne-Espérance, reçut de M. Sganzin, qui était resté quelque temps à Madagascar, le dessin d'un œuf gigan- tesque représenté au trait, de grandeur naturelle. Ce deraier voyageur racontait qu'il avait vu plusieurs œufs semblables dont un était scié en deux portions, e£ dont un autre était traversé, suivant son grand axe, par un bâton, afin de pouvoir servir à écraser du riz. Ce dessin et ces notes furent perdus dans le naufrage qui engloutit les collections accumulées pendant de longues années dans VAfrique australe par M. Jules Ver- reaux. Enfin, en 1848, un commerçant français, M. Dumarèle, vit à Port-Leven, sur la côte nord-ouest de Madagascar, un œuf dont les habitants se servaient en guise de vase, dont la coquille avait l'épaisseur d'un dollar d'Espagne et dont la capacité était égale à celle de treize bouteilles ordinaires, c’est-à-dire de huit à neuf litres environ (3). Plus récemment, divers voyageurs ont rappporté en Europe au moins douze exemplaires de ces œufs gigantesques, et lun de nous (4) en a pu recueillir de nombreux fragments dans les (1) De airbs, élevé, ctépurs, oiseau. (2) P. Gervais, article AurrucRE du Dictionnaire des sciences naturelles, supplé- ment,t, 1, p. 524, 1841. (3) Strickland, Supplementary notices regarding the Dodo and'its Kindred (Annals and Magazine of natural history, 2 série, 1849, t. IV, p. 335). (4) Alfred Grandidier, Observations sur le gisement des œufs de l'Epyornis (Comptes rendus hebdomadaires des séances de l'Académie des sciences, séance du 9 septembre 1867,t. LXV, p. 476). SUR L'ÆPYORNIS DE MADAGASCAR. 87 sables du cap Sainte-Marie (4); mais jusqu'ici on ne pouvait for- mer que des conjectures très-vagues sur les caractères zoologi- ques, et les affinités naturelles de l'Æpyornis, car l'examen des œufs indiquait seulement que l'Oiseau qui les avait produits de- vait être de très-grande taille, et les fragments d'os recueillis en 1850, par M. Abadie, et en 1854, par M. Coquerel (2), étaient trop incomplels pour donner la solution de ces questions diffi- ciles ; aussi les auteurs les plus récents sont-ils partagés d'opi- nion au sujet de la nature de l'Oiseau dont les œufs sont si remarquables. Isidore Geoffroy Saint-Hilaire pensait que l'Æ- pyornis était un Brévipenne ; c'est aussi là conclusion à laquelle l'un de nous est arrivé par l'étude des mêmes pièces ostéologi- ques (3); mais M. Valenciennes regardait cette espèce comme devant être rapprochée des Pingouins et des Mauchots (4). Enfin M. le professeur Bianconi, qui a publié sur ce sujet un travail très-étendu, soutient, au contraire, que l'Æpyornis était un Oiseau de proie, voisin des Vautours, et était probablement le Roc où Rue mentionné par Marco Polo (5). La découverte d’autres ossements de cet Oiseau était donc fort désirable, et, l'année dernière, lorsque les auteurs de ce Mémoire se réunirent pour étudier en commun et pour publier la des- cription des animaux recueillis par lun d'eux pendant un pre- mier voyage à Madagascar, il fut convenu qu'ils ne négligeraient (1) M. George Dawson Rowley, qui a examiné ces fragments, pense qu'ils appar- tiennent à une espèce différente de l'Æpyornis matimus, et il l'a désignée sous le nom d'Æpyornis Grandidierti (On the egg of Æpyornis, the Colossal bird of Madagascar ; Proceedings of the Zoological Society of London, 1867, p. 892). (2) Isidore Geoffroy Saint-Hilaire, Comptes rendus des séances de l'Académie des sciences, 1854, t. XXXIX, p. 833. (3) Alpb. Milne Edwards, article OISEAUX Fossiles du Dictionnaire universel d'his- toire naturelle, 2° édition, 1869. (4) Valenciennes, Comptes rendus des séances de l'Académie des sciences, 1854, t. XXXIX, p. 837. {5) Bianconi, Del! Epyornis maximus menzionato da Marco-Polo e da Fra-Mauro. Bologna, 1862; Memorie della Academia delle Science, t. NII. — Degli scritti di Marco-Polo e dell uccello Ruc du lui menzionato. Bologna, 1862, op. cit., 2° série, t I — Studi sul Tarso-Metatarso degli uccelh ed in particolare su quello deil Epyornis matimus, op. eit., 23 avril 1863 et 12 janvier 1865. 55 SUR L'ÆPYORNIS DE MADAGASCAR. rien, soit pour obtenir de nouveaux débris de PÆpyornis, soit pour faire de ces pièces une étude attentive. Les désidérata que nous venons de signaler sout aujourd'hui en parlie comblés, et l'Académie sait que, tout dernièrement, l’un de nous, en faisant fouiller un terram marécageux à Am- boulitsate, sur la côte ouest de Madagascar, y à découvert des ossements parfaitement conservés qui appartiennent évidem- ment à l'Oiseau gigantesque dont M. Isidore Geoffroy Sant- Hilaire a fait connaitre les œufs (4). Ces pièces sont arrivées en France à la fin du mois de mars, et ce sont les observations auxquelles elles ont donné lieu que nous venous soumettre au jugement de l'Académie. Les parties de squelette qui ont été trouvées dans ces fouilles récentes, sont : 1° Un tibia complet (2) et diverses portions du même os; 2° Un fémur presque complet (3); 3" Deux vertèbres isolées (4); k° Un fémur presque entier (5) etdes fragments du même os, appartenant à des Æpyornis de plus petite taille ; o° Un fémur très-incomplet, provenant d'un Æpyornis de taille encore plus petite. 74 t Le tibia de l'Æpyorris est énorme et présente un aspect tout particulier qui est dù principalement à l'élargissement excep- tionnel de ses extrémités articulaires (6). En effet, sa longueur est de 6h centimètres, là circonférence de l'extrémité supérieure mesure 45 centimètres, celle de l'extrémité mférieure 38, tan- dis que le corps de l'es n'a, dans sa partie la plus resserrée, que (1) Milne Edwards, Sur les découvertes faites récemment à Madagascar, par M. Alfred Grandidier (Comptes rendus hebdomadaires des séances de l'Académie des sciences, 14 décembre 1868. — Voyez aussi Ann. des se. nat, Zoon., 5° série, t. X, p. 375, 1868. (2) Voyez pl. 17 et pl. 18, fig. 1, pl. 19 ct pl. 20, (3) Voy. pl. 21, 22 et 28. (4) Voyez pl. 26, 27 et 28. (5) Voyez pl. 24 et 25. (6) Voyez pl. 17 et pl. 18, fig. 1. SUR L'ÆPYORNIS DE MADAGASCAR. 59 15 centimètres et demi. I est fortement comprimé d'avant en arrière et est bien loin de revètir la forme presque cylin- drique que l’on remarque chez les Autruches et les autres Stru- thionides ; enfin, il présente une légère courbure à concavité interne. La face antérieure devient très-large au-dessus de l'ar- üeulation tarsienne où elle est aplatie et même légèrement dé- primée, On n’y voit aucune trace du canal osseux dans lequel s'engage, chez presque tous les Oiseaux, le tendon du muscle extenseur commun des doigts. Ce canal est remplacé par une gouttiére superficielle, en dedans de laquelle existent des empreintes profondes marquant l'insertion de la bride tendi- neuse qui, chez cet Oiseau, devait tenir Ja place du pont osseux que l'on observe d'ordinaire ; l'empreinte opposée se voit de l'autre côté de la gouttière, mais elle est moins bien marquée et située beaucoup plus bas, immédiatement au-dessus de la sur- face articulaire. Au même niveau, mais du côté externe, s'ouvre un trou assez grand qui se prolonge dans l'intérieur de los et qui parait correspondre à des cellules aériennes, Cette face antérieure du tibia est obliquement traversée dans toute sa lon- gueur par une ligne intermusculaire très-forte, qui part de la crête tibiale antérieure et qui gagne ensuite le bord interne de l'os, où elle disparait au-dessus de l'empreinte du ligament des- tiné à brider le tendon de l'extenseur des doigts. La position de cette ligne intermusculaire est très-singulière, car généralement elle Suit presque parallèlement le bord interne de l'os, tandis que chez l'Æpyornis elle remonte en se dirigeant en dehors. de façon que dans le tiers supérieur de l'os elle divise la face anté- rieure en deux parties presque égales : l’une externe, dans la- quelle devaient se fixer les fibres du muscle extenseur com mun des doigts et du tibial antérieur ou extenseur du pied, l'autre interne destinée à l'insertion de la portion correspondante du gastro-cnémien indiquant ainsi pour ce muscle un développe ment relativement énorme, Le bord externe de l'os est épais et couvert de rugosités sur lesquelles se fixait le péroné (1); on les voit commencer presque (4) Voyez pl. 19, fig. {. 90 SUR L'ÆPYORNIS DE MADAGASCAR. immédiatement au-dessous de l'articulation supérieure, où elles constituent une surface large et aplatie; puis elles sont inter- rompues un peu au-dessus de la portion moyenne de l'os par une gouttière lisse et oblique de haut en bas et d'arrière en avant qui correspond aû trajet de l'artère tibiale antérieure et de ses veines satellites. D'après la largeur de cetie gouttière on peut se former une idée de l'importance des vaisseaux qui y sont logés, et, par conséquent aussi, des parties auxquelles ceux-ci se distribuent. On sait que chez les Oiseaux l’arière tibiale antérieure ne fournit à Ja jambe que des branches d'un faible calibre; elle s'engage sous la bride figamenteuse qui re- couvre le muscle fléchisseur du pied et, dans ce point, envoie quelques rameaux à l'articulation, mais c’est surtout sur la face antérieure de l'os tarso-métatarsien qu'elle fournit des branches qui se rendent aux muscles des doigts. Ces muscles, chez l'Æpyornis, avaient, suivant toutes probabilités, une très- grande puissance. Au-dessous du canal de l'artère tibiale antérieure, on remar- que d'autres rugosités moins accusées et qui n’éluent pas, comme les précédentes, recouvertes par des ligaments robustes. Elles se prolongent presque jusqu'à l'extrémité de l'os de la jambe, où elles se terminent par une surface aplatie et élargie, qui correspond probablement au point où s’arrêtait le péroné. Cet os aurait été plus long que chez les autres Brévipennes au- jourd'hui vivants. On peut aussi constater, par l'étendue et la forme des surfaces osseuses destinées à l'insertion des muscles péroniers, que ceux-ci étaient tres-robustes, et que le péronier inférieur devait s'étendre sur la portion de la face antérieure de l'os qui, ainsi qu'il a déjà été dit, s'élargit beaucoup imférieure- ment. En arrière, le corps de l'os est arrondi et presque entière- ment dépourvu de lignes intermusculaires ; cependant on voit, au-dessous de l'extrémité supérieure, quelques rugosités mar- quant la surface d'insertion du muscle fléchisseur profond des doigts. Vers la partie moyenne, 1l existe quelques boursouflures qui paraissent résulter d'un état pathologique du tissu osseux, analogue à ce quise voit quelquefois chez l'Autruche et les autres grands Oiseaux actuels. Au-dessus des rugosités du muscle SUR L'ÆPYORNIS DE MADAGASCAR. 91 fléchisseur profond des doigts et au-dessous du rebord arti- culare s'ouvre, au fond d’une dépression, un large orifice; le trou nourricier de l'os est, comme d'ordinaire, placé en arrière des rugosités de la crête péronière immédiatement au- dessus de la gouttière dont j'ai déjà signalé l'existence et dans laquelle s'engage l'artère tibiale antérieure. L'extrémité supé- rieure est extrêmement élargie et remarquable par son peu d'épaisseur (1), elle paraît avoir subi un mouvement de torsion, en vertu duquel la crête tibiale antérieure et la crête tibiale ex- terne sont fortement rejetées en dehors. Ces crètes sont d’ailleurs très-peu saillantes et se prolongent à peine au-dessus de l’artieu- lation fémorale. La surface glénoïdale interne est aplatie et semi- circulaire. Le condyle péronier est, au contraire, arrondi et comparativement extrèmement développé; il est séparé de la crête tibiale externe par une gouttière large et profonde. L’ex- trémité articulaire inférieure est très-comprimée d’avant en arriere, très-élargie latéralement et légèrement déjetée en de- dans (2) ; la gorge interarticulaire est à peine creusée en avant et reproduit assez exactement une forme cylindrique; le condyle interne est plus avancé que celui du côté opposé ; il se développe aussi beaucoup plus en arrière et porte en dehors une dépres- sion large et profonde destinée à l'insertion du ligament latéral de l'articulation. Une dépression analogue mais beaucoup plus creuse se remarque sur le condyle externe, au-dessous d’une tubérosité mousse et élargie. Lorsqu'on examine par sa face inférieure cette surface articulaire, on voit qu’elle est plus épaisse en dedans qu’en dehors et présente de ce même côté une échan crure superficielle, mais étendue, qui entame le bord du con- dyle; du côté opposé on n’observe aucune trace semblable. Un simple coup d'œil jeté sur ce tibia prouve de la manière la plus évidente qu'il provient d’un Oiseau du groupe des Brévi- pennes, mais ce groupe comprend lui-même un grand nombre de types tels que les Autruches, les Nandous, les Dromées, les Casoars, les Apteryx et les Dinornis. Chez tous ces Oiseaux, à (1) Voyez pl. 20, fig. 2. (2) Voyez pl. 20, fig. 1. 92 SUR L'ÆPYORNIS DE MADAGASCAR. l'exception des Dinornis, le Ubia est dépourvu d'un pont osseux au-dessus de la coulisse du muscle extenseur des doigts. L’Æ- pyornis, sous ce rapport, se range à côté d'eux, mais d'autre part, les proportions générales de l'os de la jambe sont complé- tement différentes, et les particularités anatomiques qui le carac- térisent ne présentent avec celles des autres Brévipennes que de lointaines analogies. Chez aucun de ces Oiseaux, le tibia n'est aussi massif surtout dans ses parties articulaires. Les genres Dinornis et Palaptleryx renferment des espèces chez lesquelles los de la jambe est beau- coup plus long; ainsi, chez le Dinornis giganteus 11 mesure SS ceutimetres, chez le Palapteryx robustus 82 centimètres, chez le Dinornis ingens 73 centimètres, mais les extrémités articulaires sont comparativement étroites. Ainsi le diamètre transversal de l'extrémité supérieure est de 19 centimètres chez l'Æpyornis, tandis qu'il n’est aussi que de 19,7 chez le Dinornis giganteus, de 19,3 chez le Palapteryr robustus et de 15,3 chez le Dinornis ingens. Les différences dans les dimensions de l'extrémité inférieure sont du mème ordre, ainsi que Pindiquent les chiffres suivants : Chez l'Æpyornis, la largeur de cette partie est de 13 centi- metres et demi. Chez le Dinornis giganteus, de 10 centimètres. Chez le Palapteryx robustus, de 14 centimètres. Chez le Dinornis ingens, de 9 centimètres. La patte du Dinornis elephantopus est généralement citée par les anatomistes comme l'exemple des formes les plus massives aux- quelles peuvent atteindre les oiseaux; mais sous ce rapport le Dinornis elephantopus est dépassé de beaucoup par F'Æpyornis. Dans les genres Struthio (4), Rhea (2) et Dromaius le corps de l'os est presque exlindrique et les extrémités sont étroites; dans les genres Casuarius (3) et Apteryr, le tibia est plus mas- siF, plus élargi, mais il est loin cependant de pouvoir se rappro- 1) Voyez pl. 18, fig. 2. 2) Voyez pl. 18, fig. 3) V 4) V ) CES oyez pl. 17, fig. ( ( oyez pl. 17, fig. 3. SUR L'ÆPYORNIS DE MADAGASCAR. 95 cher de celui de FÆpyorris: il y a d'ailleurs dans la forme des extrémités articulaires des caractères extrêmement distinets, ainsi chez l'A pleryæ les condyles de l'articulation tarsienne sont situés à des niveaux {rès-différents, et la gorge qui les sépare est relativement profonde. Chez les Casoars, là poulie articulure, bien que peu excavée, est étroite et épaisse : enfin les crêtes tibiales supérieures sont très-avancées et s'élèvent beaucoup au-dessus de l'articulation. Lorsque M. Bianconi a publié son Mémoire sur l'Æpyornis, il n'avait malheureusement à sa disposition qu'un fragment d'os tarso-métatarsien qui a pu linduire en erreur sur les affinités et la place zoologique de l'Oiseau de Madagascar, et il est évident que s'il avait pu en étudier le tibia, il aurait reconnu que le plan d'organisation de cet os était complétement différent de celui de tous les Oiseaux de proie et des Sarcoramphes en par- ticulier. En effet, chez ces animaux l'os de la jambe est presque cylindrique ; la crête tibiale antérieure est située tres-près du bord interne de los, ne laissant pas en avant une large surface pour l'insertion des muscles extenseurs du pied; la gouttière de l'extenseur commun des doigts est profonde et s'engage sous un pont osseux trèssolide; l'extrémité articulaire inférieure est étroite et constituée par deux condyles très-suillants qui laissent entre eux une gorge extrèmement creuse; enfin sur les faces la- térales 11 n'y à pas de fossette pour l'insertion des ligaments arti- culaires. Ces caractères qui existent chez tous les Rapaces mon— trent les différences profondes qui séparent ces Oiseaux de celui dont l'étude nous occupe ici. Dimensions du tibia de l’Æpxorxis MAxIMUS comparé à celui des espèces voisines. Longueur Largeur Largeur Circonférence totale de l'extrémité de l'extrémité du corps de l'os. supérieure. inférieure. de l'os, Æpyornis Maxinus.,,,.., 64,0 19,0 15,9 15,5 Dinornis giganteus....,.. 88,3 19,0 10,0 16,5 Palapteryx robustus. ,,... 82,0 19,0 11,0 17,0 Dinoïrnisingens.......... - 73,9 15,3 9,0 13,2 Dinornis elephantopus. ... 54,4 16,0 10,4 16,2 Struthio camelus. ........ 49,0 7,5 6,6 10,0 Rhea americana,..,,.,,.. 39,0 4,5 4,0 7,0 Casuarius galeatus, ...... 38,0 5,2 4,5 8,0 Dromaius Novæ-Hollandiæe. 45,0 6,0 5,0 9,0 Apteryx australis.....,.,. 13,4 2,0 4,7 2,4 A, MILNE EDWARDS, 13 94 SUR L'ÆPYORNIS DE MADAGASCAR. Afin de mieux faire ressorür les différences de proportion qui existent entre ces os, nous placons ici un tableau où toutes les dimensions sont rapportées à la longueur totale du tibia prise comme unité de mesure et représentée par 400. Largeur Largeur Circonférence de l'extrémité de l'extrémité du corps supérieure. inférieure. de l'os. Æpyornis maximus........,..... 29,7 21,0 24,2 Dinornis giganteus. ....,... sr... 21,9 1353 18,7 Palapteryx robustus. ...,,.,..,.:. 23,2 13,4 20,7 Dinornis INSgens, -4. 5. es sas. 20,8 42,2 17,9 Dinornis elephantopus. ..,.., sess: 200 49,1 29,8 Struthio camelus. .... #1 en meurs 15,3 13,4 24,0 Rhea americana................. 12,7 41,4 20,0 Casuarius galeatus.,.,.... Danse date 13,6 11,9 21,0 Dromaius Novæ-Hollandiæ........ 13,3 11,1 20,0 ADTECTYX AUSTANS se 08 3. tete core ce 14,9 12,6 178 ES Plusieurs fémurs ont été trouvés dans la mare d'Amboulitsate; l’un d'eux est notablement plus grand que les autres (4), et nous nous occuperons d'abord de son examen, parce que ses surfaces articulaires paraissent correspondre par leurs dimensions à celles du tibia dont il vient d'être question. I n'est pas un Oiseau chez lequel le fémur présente des pro- portions aussi singulières; en effet, sa grosseur est extraordi- naire. Sa longueur est, au contraire, très-faible, et n'équivaut pas même à une fois et demie la largeur de son extrémité infé- rieure. La tète fémorale est incomplète, cependant on peut voir qu'elle était portée sur un col très-court et très-massif. Le trochanter est brisé; on n’en voit que la base, de façon qu'il est impossible de savoir s'il existait dans ce point des orifices pneu- matiques et quelle était leur forme. L'écartement entre le col du fémur et le trochanter est très-considérable et constitue une surface légerement déprimée. Le corps de los est très-gros et un peu aplati sur les faces antérieure el postérieure ; il s'élargit graduellement en s'appro- chant de l'extrémité inférieure et présente en avant une ligne rugueuse oblique qui indique l'insertion de la portion moyenne (1) Voyez pl. 21, 22 et 23. SUR L'ÆPYORNIS DE MADAGASCAR. 95 du muscle triceps (4). En arrière, la ligne âpre suit le bord ex- terne de l'os et lon voit, dans la portion movenne, l'ouverture du trou nourricier. Iuférieurement, il existe une fosse énorme au fond de laquelle s'ouvrent de grands orifices pneumati- ques (2). Chez aucun autre Oiseau coureur on n’observe des ouvertures de cette nature aussi considérables, et chez FA pteryæ aussi bien que chez les Dinornis, il n’en existe aucune trace, l'air ne pénétrant pas dans l'os de la cuisse. Cette fosse, que l'on pourrait appeler poplitée, affecte une forme irrégulière ment triangulaire, là pointe du triangle étant dirigée en haut et la base reposant sur le condyle interne. Ses bords sont abrupts, excepté en dedans et en bas, où ils ont une pente plus douce. L'ouverture pneumatique la plus considérable occupe la partie supérieure et s'enfonce directement dans les cellules osseuses qui occupent l'intérieur de l'os. Entre cette fosse et le bord in- terne du fémur, on remarque une surface presque ovalaire, très-large et très-rugueuse, sur laquelle devaient s'insérer les fibres de la portion interne des muscles gastro-cnémiens qui devaient avoir une très-grande force. L'extrémité articulaire inférieure est remarquablement élar- gie (3), et cependant, sur l’'exemplaire que nous avons entre les mans, le revêtement osseux superficiel manque presque entière- ment. La gorge rotulienne est {rès-peu profonde et très-large, les condyles paraissent s'avancer à peine, celui du côté externe descend un peu plus bas que celui du côté opposé; mais, par contre, ce dernier est plus élargi. En arrière, la poulie inter condylienne est très-étendue et peu déprimée ; la crête péronéo- tibiale, qui correspond à l'intervalle séparant les deux os de la jambe, est peu saillante et très-rapprochée du bord externe du condyle. En dehors, ce condyle est profondément marqué de rugosités sur lesquelles se fixait le ligament articulaire externe du genou. Ces empreintes sont beaucoup moins accusées du côté opposé. Les Dinornis les plus trapus sont loin d’avoir l'os de la cuisse (4) Voyez pl. 24. (2) Voyez pl. 22. (3) Voyez pl. 23, fig. 2. 96 SUR L'ÆPYORNIS DE MADAGASCAR. conformé sur un plan aussi massif que celui que nous venons de décrire. Chez le Dinornis giganteus, où la longueur de cet os attemt 40 centimètres, la circonférence de la diaphyse, mesurée au point le plus étroit, n'est que de 19 centimètres et demi, et la largeur de l'extrémité inférieure dépasse à peme 45 centimètres ; au contraire, pour l'Æpyornis, la longueur to- tale de l'os étant de 32 centimètres, la circonférence de la dia- physe est de 27 centimètres, là largeur de l'extrémité tibiale de 19 centimètres et la circonférence de cette même extrémité de 51 centimètres. Le tableau ci-dessous indique d'ailleurs d'une manière exacte les différences qui existent sous ce rapport entre l'Oiseau de Ma- dagascar et ceux de là Nouvelle-Zélande, ainsi qu'entre les Bré- vipennes qui vivent encore aujourd'hui, et 1l montre aussi que le Dinornis elephantopus, qui jusqu’à présent pouvait être cité comme présentant les formes du fémur les plus ramassées, est de beaucoup surpassé à cet égard par l'Æpyornis. En effet, la longueur de los de la cuisse est la même chez ces deux espèces, tandis que la circonférence de la diaphyse présente chez l'Æ- pyornis près de 8 centimètres de plus. et l'extrémité articulaire inférieure est environ de 5 centimétres plus large. J'ajouterai que chez les Dinornis, le trochanter est toujours beaucoup plus saillant en avant; les condvles inférieurs sont plus avancés, et par conséquent la gorge rotulienne est plus profonde. Enfin, les énormes pertuis aériferes de l'extrémité inférieure achèvent de donner au fémur de FÆpyornis une physionomie toute spé- ciale. Dimensions du fémur de l'Æpyornis MAxINUS comparées à celui des espèces voisines, Longueur Largeur Larzew Circonférence totale de l'extrémité de l'extrémité du corps de l'os. supérieure. inférieure. de l'os, Æpyornis Maximus. ..,... 32,0 17,0 19,0 27,0 Dinornis giganteus, ..,... 40,0 15,0 15,7 49,5 Palapteryx robustus..,..... 35,7 15,0 15,0 20,0 Dinornis ingens.......... 34,9 13,7 14,5 18,0 Dinornis elephantopus..... 32,5 14,7 14,9 19,9 Struthio camelus. ..,.... 30,3 10,0 10,0 12,0 Rhea americana....... .,. 23,0 6,0 6,1 7,5 Casuarius galeatus........ 29,0 5,1 6,0 9,5 Dromaiuis Novæ-Hollandiæ. 23,0 6.1 752 10,0 Apteryx australis ..,...... 9,5 2,0 2,4 3,9 SUR L'ÆPYORNIS DE MADAGASCAR. 97 Dimensions des mêmes os rapportées à la longueur du fémur prise comme unité de mesure et représentée par 100. Largeur Largeur Circonférence de l’extrémnite de l'extrémité du corps supérieure, inférieure. de l'os. Æpyornis MAXIMUS............e 53,1 59,4 84,4 Dinornis giganteus.............. 37,9 39,2 48,7 Palapteryx robustus..... ........ 42,0 42,0 56,0 Dinornis ingens..........,.. se 39,7 42,0 52,2 Dinornis elephantopus... ........ 45,2 45,8 61,2 Struthio camelus..... ares Se dues 33,3 33,3 40,0 Rhea americana......,........... 26,0 26,0 26,5 Casuarius galeatus.. ............ 2351 27,0 43,1 Dromaius Novæ-Hollandiæ........ 26,0 32,0 43,5 ADICEYX AUSITANSS eee secs... 21,0 25,2 35,0 Su Il nous parait difficile de rapporter à la même espèce les os- sements dont il vient d'être question, et les fémurs, de beaucoup plus petite taille, qui ont été trouvés ensemble (1). Ces derniers présentent des caractères généraux identiques et proviennent évidemment d'un Æpyornis, mais d’une espèce probablement différente (2). Ainst nous ferons remarquer que ces fémurs ne se distinguent pas seulement par leurs dimensions plus réduites, mais aussi par la largeur moindre de la face externe de l'os; il en résulte que toute la portion située entre le trochanter et Ia nais- sance du col fémoral est beaucoup moins déprimée. La ligne intermusculaire qui, en avant, marque la surface d'insertion de la portion profonde du triceps crural, est ici à peine mdiquée, tan- dis qu'elle est très-saillante sur le fémur de grande taille. La face postérieure (3) est aussi plus arrondie, et la distance qui sépare la fosse poplitée de l'extrémité supérieure est plus grande; la forme de cette fosse profonde est d'ailleurs la même que celle décrite plus haut; les empreintes d'insertion qui la surmontent offrent bien quelques différences, mais on sait que ces carac- tères sont susceptibles de certaines modifications, et l'on doit se garder de leur attribuer une valeur trop considérable. (1) Voyez pl, 24 et 25. (2) Nous la désignerons provisoirement sous le nom d’Æpyornis medius. (3) Voyez pl, 25, ° 98 SUR L ÆPYORNIS DE MADAGASCAR. Nous ne pouvons donner ici toutes les dimensions de ces fé murs, cr ils sont incomplets, les extrémités articulaires étant plus où moins entamées. Mas on peut se rendre bien compte des différences qui les distinguent de celui de l'Æpyornis maximus en comparant les figures qui accompagnent ce Mémoire et en consultant les nombres suivants : Fémur Fémur de petite tulle, de grande taille. Circonférence du corps de l'os.........,.. dense 21,5 27,0 Longueur mesurée obliquement du trou nourricier à la base de la fosse poplitée.......,..., Fresnes: 11,5 12,3 Longueur mesurée de lPextrémité supérieure à la base de IT ÉOSSB POPIITÉBS. +1 des ea se ee. esse 25,5 30,0 Largeur de la face externe mesurée au point le plus étroit. 5,0 5,8 Largeur de la face antérieure... .......,...... “ie. 7,6 9,0 Largeur de la face postérieure mesurée du bord interne à la ligne pre, . 0... RO Prin bee era 733 8,8 Parmi les fragments osseux que M. Isidore Geoffroy Saint- Hilaire présenta à l'Académie en 18514, se trouvait la partie su- périeure d'un péroné dont les dimensions ne s'accordent pas avec celles des tibias trouvés à Amboulitsate ; il provient d’un Oiseau de taille moins considérable, et peut-être doit-on le rap- porter aux Æpyornis auxquels appartiennent les petits fémurs dont nous venons de donner la description. 79: Nous avons remarqué, au milieu des débris retirés de la mare d'Amboulitsate, un fragment d'os d'Oiseau qui nous paraît pro- venir du fémur d’un Æpyornis de taille plus petite encore que les précédents (1), car la circonférence de la diaphyse n’est que de 12 centimètres, tandis que celle des autres fémurs est de 24,5 centimètres. Il est à regretter que ce fossile soit très-incomplet; en effet, les deux têtes articulaires sont entièrement brisées, et le corps de l'os lui-même est dans un état de conservation qui laisse beaucoup à désirer. Cependant on peut encore reconnaitre celte forme trapue et élargie qui caractérise Fos de la cuisse dans le genre Æpyornis. La direction des faces latérales indique (4) Nous désignerons provisoirement cette espèce sous le nom d'Æpyornis modestus. SUR L'ÆPYORNIS DE MADAGASCAR. 99 que l'extrémité inférieure offrait aussi un développement consi- dérable, mais on ne peut rien préjuger des caractères que pré- sentait la fosse poplitée. En arrière, la ligne àpre est peu saillante et le trou nourricier peu marqué; l'intérieur du cylindre osseux est en partie vide et présente, le long de ses parois, des cellules pneumatiques larges et irrégulières. La longueur totale de ce fémur devait être de 18 centimètres environ. Un 6. Les particularités anatomiques fournies par les vertèbres de l'Æpyornis s'accordent complétement avec celles que présen- tent les autres pièces du squelette, et indiquent que le corps de l'Oiseau de Madagascar était comparativement beaucoup plus volumineux que celui des Dinornis. Ainsi M. Owen a fait repré- senter, dans les belles planches qui accompagnent son Mémoire sur les Oiseaux de la Nouvelle-Zélande, quelques-unes des ver- tébres du Dinornis giganteus et en les comparant à celles que nous donnons ici, il est facile de voir qu'elles sont de beaucoup plus petite taille, bien que les pattes du Dinornis giganteus soient beaucoup plus longues. Notre examen n'a pu porter que sur deux des vertèbres. L'une d'elles appartient à la région cervicale (2), elle est remarquable- ment robuste et devait être assez rapprochée de celles de la ré gion dorsale. Si on la compare aux osselets de la colonne verté- brale de l'Autruche, on est frappé de la différence qui l'en sépare; au lieu d'être grèle et allongée comme dans ce dernier Oiseau, elle est élargie, courte et épaisse. La surface articulaire supérieure du corps de l'os est très-étendue transversalement et à peine creusée sur la ligne médiane (2); la surface articulaire inférieure se prolonge beaucoup latéralement en formant des sortes d'ailes séparées sur la ligne médiane et en avant par une échancrure (3). En dessous, le corps de l'os est large et aplati (4) Voyez pl. 26. (2) Voyez pl. 26, fig. 2, (3) Voyez pl. 26, fig. 3. 100 SUR L'ÆPYORNIS DE MADAGASCAR. dans sa portion inférieure (1), malheureusement l'état de con- servation de la vertèbre ne permet pas de voir s'il existait sur ce point une gouttière profonde; de chaque côté s'ouvre un trou aérifère grand et ovalaire (2). Les apophyses articulaires supé- rieures sont brisées, mais les inférieures qui sont entières sont très-rapprochées l’une de l’autre, séparées sur la ligne médiane par une échancrure peu profonde et dirigées en avant et en de- hors; l'espace qu'elles occupent est notablement moindre que celui de la surface articulaire inférieure du corps vertébral qui, en dessous, déborde de chaque côté, tandis que le contraire à lieu chez la plupart des Brévipennes actuels et chez les Dinornis. L'apophyse épineuse est très-peu marquée, elle se bifurque in- férieurement pour limiter la fossette dans laquelle s’insère le ligament intervertébral. Il est à regretter que cette portion de l'os soit fortement endommagée et qu'il soit impossible de se rendre compte de la profondeur de cette fossette (3). La seconde vertèbre que nous avons entre les mains fait partie des premières de la région dorsale (4). Elle est énorme et montre quelles devaient être les dimensions de la charpente thoracique de l'Oiseau de Madagascar. Le trou vertébral destiné au passage de la moelle épinière y est cependant extrêmement étroit; c’est à peine s'il est possible d'y introduire le petit doigt (5). Le corps vertébral est très-sur- baissé, très-élargt, et porte en dessous une large apophyse épi neuse sur la longueur de laquelle nous n'avons aucune indica- tion, car elle se trouve brisée près de sa base. En avant, il s'élargit notablement et fournit ainsi une surface fort étendue, entièrement occupée par l'articulation. Celle-ciest large, épaisse et peu déprimée, ses bords latéraux sont tellement usés que l'on ne peut apercevoir les fossettes articulaires costales. La surface articulaire inférieure est beaucoup plus petite, concave d'avant (4) Voyez pl. 26, fig. 5. (2) Voyez pl. 26, fig. 4 (3) Voyez pl. 26, fig. 5 (4) Voyez lig. 27 et 28. (5) Voyez pl. 28. SUR L'ÆPYORNIS DE MADAGASCAR. 101 en arrière où plutôt de hauten bas et convexe transversalement. Sur ses côtés, en avant, on voit une petite dépression destinée à loger le prolongement articulaire latéral de la vertèbre qui vient ensuite. Les lames, au-dessous de lapophyse transverse, sont creusées d'une vaste ouverture aérifère. Les apophyses arti- culaires antérieures sont massives, courtes et portent une facette arrondie et dirigée en haut et en dedans. Be chaque côté, on voit en arrière une fosse étroite et très-profonde, limitée posté- rieurement par l’apophyse épineuse dans laquelle s'attachait le ligament intervertébral. Ces deux fosses sont séparées par une cloison osseuse. L'apophyse épineuse supérieure dont il n'existe que la partie basilaire est très-renflée; elle circonscrit en arrière une dépression profonde qui s'étend aussi entre les apophyses articulaires postérieures et dans laquelle S'insère un ligament intervertébral. 87. L'os du pied fourmt d'ordinaire d'excellents caractères pour la détermination des oiseaux, aussi est-on en droit de s'étonner que l'étude des fragments de cet os que l'on possède n'ait pas conduit pour l'Æpyornis à des résultats plus positifs et surtout plus concordants que ceux auxquels sont arrivés les divers natu- ralistes qui se sont occupés de cette question. Nous avors déjà eu l’occasion de dire que Isidore Geoffroy Saint-Hilaire considé- rait l'oiseau de Madagascar comme un Brévipenne, mais que Valenciennes croyait, au contraire, qu'il se rattachait au groupe des Pingouins et des Manchots, tandis que M. Bianconi le rangeait parmi les Rapaces à côté des Condors. C'est surtout sur la con- stitution de l'os de la patte que se fondaient pour justifier leur opinion les deux derniers auteurs dont nous venons de citer les noms. Les fragments du tarso-métatarsien qu'ils avaient sont très-incomplets. L'os est brisé un peu au-dessus de la naissance des trochlées articulaires destinées à supporter les doigts; on ne peut, par conséquent, ni se faire une idée com plète de ses proportions générales, n1 profiter des indications si utiles que présente son extrémité supérieure. C'est ainsi que A. MILNE EDWARDS. 14 102 SUR L'ÆPYORNIS DE MADAGASCAR. l'on peut s'expliquer les divergences d'opinions que nous ve- nons de rapporter. Depuis époque où ces ossements ont été cédés au Muséum d'histoire naturelle par M. Abadie et en- suite répandus dans toute l'Europe à l'état de moulages, le Muséum à reçu, de M. Liénard, communication d'un morceau beaucoup plus complet que l'on s'est empressé de faire mouler et qui nous permettra d'ajouter quelques faits à ceux déjà con- nus. Cet os est non-seulement plus complet que ceux que l’on possédait, mais ses dimensions sont aussi un peu plus considéra- bles (4). Le caractère le plus saillant de ce métatarsien réside surtout dans son élargissement combiné avec un aplatissement très-notable dans le sens antéro-postérieur; ainsi la largeur de la diaphyse, mesurée au point le plus étroit, est de S centimètres, tandis que son épaisseur n'est pas de 4 centimètres. Lorsque l'on n'avait pour guide que la partie inférieure de ce métatarse, on devait naturellement penser qu'il appartenait à un oiseau de taille énorme, car si où lui compare son analogue chez le Dinor- nis giganteus, on voit que la diaphyse de l'os du pied de cette espèce gigantesque ne mesure que o centimètres et demi de lar- geur, c’est-à-dire plus d'un tiers de moins; or la taille totale de ce dernier oiseau devait être de 3 mètres, ce qui d'après ces calculs aurait donné à l'Æpyornis au moins 3",60 de hauteur. L étude que nous venons de faire des autres os de la patte montre combien on se trompait en prenant ces mesures comme base pour le calcul de la hauteur de l'animal. L'extrémité mférieure du tarso-métatarsien se compose de trois trochlées extrêmement fortes et assez écartées les unes des autres. La médiane dépasse de beaucoup les autres, non-seulement en grosseur mais aussi en longueur ; elle porte sur ses deux faces laté- rales une dépression profonde et surtout extrèmement étendue destinée à l'insertion des ligaments de la phalange digitale corres- pondante. La gorge de la poulie, limitée par des bords épaiset peu saillants, est irès-oblique par rapporta l'axe de l’oset se tourne en bas et en dehors. L'échancrure interdigitale externe est très-large et se prolonge beaucoup en haut où elle se continue avec le canal (1) Voyez pl. 15 et 16. SUR L'ÆPYORNIS DE MADAGASCAR. 103 dans lequel passe le tendon du musele adducteur du doigt externe qui, chez l'Æpyornis, de même que chez le Casoar à casque, n’est pas recouvert par une bride osseuse. La trochlée externe se pro- longe un peu moins que la précédente ; elle est légèrementdirigée en dehors et creusée d'une gorge à peine marquée, si ce n'est à sa base. Sur tous les exemplaires jusqu'ici connus du métatarse de l'Æpyornis, la trochlée interne est incomplète : on peut cepen- dant voir qu'elle est plus petite que celle du côté opposé; elle se dirige en dehors et se prolonge un peu plus que la précédente. Sur la face postérieure de l'os on ne remarque aucune trace de la fossette dans laquelle s'attache d'ordinaire le métatarsien du pouce (1),d'où l’on peut conclure que ce doigt n'existait pas ou qu'il était extrèmement réduit, et par ce caractère l Æpyornis se rapproche des Dinornis et s'éloigne des Palapteryæ. A une faible distance au-dessus de l'extrémité digitale, la face antérieure de l'os se creuse d'une large gouttière longitudinale au fond de laquelle on voit en haut la trace des deux sillons qui de- vaient prolonger inférieurement les pertuis indiquant la sépara- tion primordiale des trois éléments du métatarse (2). La présence de ces sillons a une très-grande importance, car elle montre que l'os est presque entier, et elle permet de mesurer très-approxi- mativement quelle devait en être la longueur. En effet, les pertuis dontilestquestion sont toujours placés immédiatementau -dessous de l'extrémité tarsienne. On voit aussi l'os s'élargir dans ce point pour constituer la tête articulaire supérieure. On peut d’après la position de ces sillons se convaincre que l'os du pied de l Æpyor- nis ne devait pas avoir plus de 37 ou 38 centimètres. Enfin, pour terminer ce qui est relatif aux caractères anatomiques du tarso-métatarsien nous ajouterons que la face postérieure de l'os est légérement renflée dans sa portion médiane correspondante au métatarsien du milieu, tandis que les bords latéraux sont extrèmement amincis (3). Le nombre des articulations qui terminent le métatarse sépare (4) Voyez pl. 16, fig. 4. (2) Voyez pl. 15, fig. 1. (3) Voyez pl. 15 et 16, fig. 2. 10! SUR L'ÆPYORNIS DE MADAGASCAR. nettement l'Æpyornis des Struthis, où 1 n'y à que deux doigts, L'oiseau de Madagascar se distingue aussi nettement des Rhea, des Dromaius et des Apteryæ par l'absence d'un canal tubu- laire pour le passage du tendon du muscle addueteur du doigt externe; ils en sépare également par la forme aplatie d'avant en arrière du corps de l'os. Dans le genre Casuarius, le tendon de ladducteur du doigt externe passe dans une simple gouttière comme chez | Æpyornis, et ce qui augmente encore les analogies qui existent entre ces oiseaux, c’est que la face antérieure de la diaphyse est creusée d'une gouttière profonde qui est aussi marquée chez le Casoar de Bennett que chez le Casoar à casque, mais les trochlées digt- tales de ces derniers sont beaucoup plus resserrées; celle du côté interne est plus petite, et enfin l'os est notablement plus épais. Le métatarsien des Dinornis et des Palapteryx est dépourvu du canal tubulaire inférieur, et il ressemble aussi beaucoup à celui de F'Æpyornis par la disposition générale et relative des poulies articulaires; mais chez ces oiseaux de la Nouvelle-Zé- lande les trochlées latérales sont plus fortes, celle du côté interne descend davantage, la saillie formée sur la face postérieure par le métatarsien médian est moins marquée et les lignes intermus- culares qui s'en détachent inférieurement sont à peme indi- quées, tandis qu'elles existent très-nettement chez l'Æpyornis. Par la comparaison des os du pied, on trouve que l'Æpyornis présente beaucoup plus de ressemblance avec les Dinornis qu'a- vec toute autre espèce, mais qu'ilen diffère cependant dans des limites qui ne permettent pas de le considérer comme apparte- nant au mème genre. M. Bianconi n'a pas reconnu ces analo- gies, et dans le mémoire tres-étendu que nous avons déjà cité, il s'est aitaché à démontrer que le metatarse de l'Æpyornis est celui d'un oiseau de proie. Si l'on étudie la constitution de cette partie du squelette chez les Rapaces diurnes, on y reconnait des modifications inportantes qui correspondent à deux sous-famil- les parfaitement naturelles, la première comprend les Aigles, les Faucons, les Vautours, elc.: la seconde ne se compose que des Sarcoramphes. Chez les oiseaux de proie de la première de ces SUR L'ÆPYORNIS DE MADAGASCAR. 105 divisions, l'os du pied porte trois trochlées extrêmement vigou- reuses, toutes situées à peu près à la mème hauteur, toutes courtes et trapues. Celle qui supporte le doigt interne est beau- coup plus large que les autres et se prolonge beaucoup en de- hors; celle du côté externe se prolonge notablement en arrière, de facon que l'extrémité articulaire inférieure considérée dans son ensemble parait disposée sur une ligne fortement arquée. Chez les Sarcoramphes, cette courbe est beaucoup moins mdi- quée, et l'os est manifestement comprimé d'avant en arrière ; sa face antérieure se creuse même d'une gouttière longitudinale qui, au voisinage de l'articulation tarsienne, devient très-profonde. Il en résulte qu'à première vue cette partie semble offrir quel- que ressemblance avec son analogue chez l'Æpyornis, mais 11 y a d'autre part des caractères fondamentaux indiquant qu'il existe des différences considérables entre ces oiseaux. Il en est une qui frappe tout d'abord, c'est la présence d'une fossette profonde creusée sur le bord interne de l'os et destinée à recevoir le métatarsien basilaire du pouce si développé chez tous les oiseaux organisés pour déchirer les lambeaux des chairs dont ils font leur nourriture. Cette fossette manque chez l'Æ- pyornis ; cet oiseau n'élait pourvu que de trois doigts antérieurs. Comment accorder ce mode d'organisation avee les faits rappor- tés par Marco Polo? Comment peut-on se figurer qu'un oiseau dépourvu de pouce ait été capable d'enlever des proies volumi- peuses pour les transporter dans son repaire ? Nous voyons donc que le caractère essentiel aux Rapaces manque complétement. Nous pourrions signaler encore de nombreuses différences. Ainsi chez aucun Rapace nous ne voyons manquer le canal osseux dans lequel s'engage le tendon du muscle adducteur du doigt externe; ce Canal se prolonge même en une gouttière sur la face antérieure de los, indiquant par ses proportions la force du muscle qui le remplit. Chez les Sarcoramphes la gorge de la trochlée médiane est placée dans l'axe de l'os et ne présente pas l'obliquité si prononcée que l'on remarque chez l'Æpyornis et qui n'aurait pas été compatible avec les mouvements des serres d'un Rapace. La trochlée interne est arrondie en avant et plus élargie © 106 SUR L ÆPYORNIS DE MADAGASCAR. que l’externe, car elle donne attache à un doigt puissant, tandis que chez l'Æpyornis le doigt interne devait être relativement faible, la poulie sur laquelle il s'articule étant étroite et courte. I est facile de se convaincre que ce n’est que par des particularités d'une valeur tout à fait secondaire que le métatarsien de l'Æ- pyornis ressemble à celui des Sarcoramphes, tandis qu’au con- traire il en diffère par tous ses caractères fondamentaux. I ne nous paraît pas utile de discuter longuement les relations qui existent ou plutôt qui n'existent pas entre l'os du pied de l'oiseau de Madagascar et celui des Apténodytes et des Sphé- nisques. En effet, chez ces oiseaux, les éléments primordiaux du mé- tatarse sont nettement séparés par des sillons profonds, les trochlées digitales sont tres-courtes et celle du côté interne se dirige fortement en dedans. Il en résulte une conformation complétement différente de celle de l'oiseau de Madagascar. Dimensions du tarso-métatarsien de l'ÆryonRNIS MAxINUS comparé à celui des espèces voisines. Longueur Largeur Circonfé- Largeur Largeur de de l'extrémité rence du corps ‘ delatrochlée l'os. inférieure, de l'os. de l'os, médiane. Æpyornis maximus (1).......... 37,07 14,5 20,0 8,0 5,2 Dinornis giganteus. ..........., 46,5 13,9 15,8 5,6 4,5 Palapteryx robustus........,.... 39,5 13,3 13,3 5,0 5,5 Dinornis elephantopus.. ........, 23,2 13,5 16,4 6,1 5,3 Struthio camelus..,........... . 42,0 6,0 9,5 2,7 3,6 Rhea americana. 4... Je... 54,0 4,2 6,0 1,8 457 Casuarius galeatus.............. 28,5 5,5 8,0 2,2 2,2 Dromaius Novæ-Hollandiæ...,... 40,0 5,9 9,0 2,4 2,4 Apteryx australis. ..,4.22%..: 0.4.2. 7,2 2,1 2,4 0,8 0,8 $S 8 Les parties du squelette que nous venons d'étudier nous per- iettent maintenant d'établir avec précision quelles sont les affi- nités naturelles de 'Æpyornis de Madagascar et de rétablir en partie ses formes extérieures. I ne peut plus être aujourd'hui question de rapprocher l'Æ- (1) Cette mesure de 37 centimètres pour le tarso-métatarsien de l'Æpyornis marimus n'est donnée que comme probable. SUR L'ÆPYORNIS DE MADAGASCAR. 107 pyornis des Rapaces; évidemment il appartient au groupe des Brévipennes, mais il doit constituer parmi eux un type parfai- tement caractérisé par ses formes massives, par ses pattes d’une grosseur dont on à peine à se former une idée. Ces caractères l’éloignent à la fois des Autruches, des Nandous, des Casoars et des Emeus pour le rapprocher davantage des Dinornis et des Apteryæ. Cependant il y a entre lui et ces deux genres des diffé- rences fondamentales qui ressortent de l'examen que nous avons fait des particularités anatomiques fournies par chacun des os considéré isolément. Par l'existence d’un pont osseux qui bride le tendon du muscle tibial antérieur, les Dinornis s'éloignent de tous les autres Brévipennes. Ils ont, par cela même, un caractère plus gallide, mais, de même que chez l'Apteryæ, l'air ne pénètre pas dans le fémur; tandis que nous y avons trouvé chez l Æpyor- nis des orifices pneumatiques tres-développés, ce qui indique des différences profondes dans l'organisation intérieure, L'oiseau de Madagascar ne pouvait présenter de diaphragme complet ana logue à celui de l'Apteryæ, et les réservoirs aériens devaient être chez lui au moins aussi développés que ceux de l'Autruche ou des Casoars. L'Æpyornis se rattache donc à une forme ornithologique bien distincte de celle qui comprend, soit les Dinornis, soit les Apte- ryæ, Soit les autres Struthioniens. Ce genre doit même consti- tuer une fanille spéciale qui comptait plusieurs représentants, car d'après les ossements trouvés à Amboulitsate, il paraitrait y avoir eu là trois espèces bien distinctes : l'Æpyornis maæimus, l'Æpyornis medius et l Æpyornis modestus. Cette dernière n’au- rait guère dépassé la taille de la grande Outarde. Isidore Geoffroy Saint-Hilaire, en se basant sur les rapports qui existent chez les Brévipennes actuels entre la grosseur de l'œufet les dimensions de l'oiseau, pensait que la hauteur totale de l'Æpyornis devait être d'environ 3",60, et par conséquent su- périeure à celle du Dinornis giganteus, qui, d'après M. R. Owen, serait au-dessous de 3 mètres. Cette évaluation ne reposait pas sur des bases assez certaines pour donner des résultats exacts, car on sait que les dimensions des œufs varient dans des limites 105 SUR L'ÆPYORNIS DE MADAGASCAR. qui ne sont pas en rapport avec le volume des oiseaux qui les ont produits, et l'on peut citer l'A pteryx comme le meilleur exemple d'un animal de petite tulle pondant un œuf énorme. Aujourd'hui que nous avons, dans un état de conservation qui laisse peu à désirer, presque toutes les pièces du squelette de la palle, nous pouvons arriver à en déduire approximativement la taille de l'Æpyornis. Ces os sont tous beaucoup plus courts que ceux du Dinornis giganteus ; ainsi nous rappellerons que chez l'oiseau de Madagascar, ‘le tarso-métatarsien ne devait guère dépasser 37 à 38 centimètres. Le tibia mesure 64 centimètres et le fémur 32, ce qui donne une longueur totale de 1,33 pour lous ces os placés dans une extension forcée. Chez l'espèce co lossale de la Nouvelle-Zélande le métatarse atteint 46 centimè- tres, le tibia 8$ et le fémur 40. Ces pièces placées bout à bout mesurent 1°,74. I existe donc une bien grande différence de taille en faveur de cette derniére. Pendant la station normale des oiseaux, la cuisse n’est jamais complétement étendue sur la jambe ; elle forme, au contraire, avec elle, un angle variable, mais peu ouvert, et le tibia est 1é- gérement fléchi sur le métatarse, de façon que si l'on veut con- naître la hauteur véelle de l'articulation coxale du bassin, on ne peut y arriver en additionnant les longueurs des différents os dont se compose la patte, mais l'expérience nous à montré que l'on arrive à un résultat approximativement exact, en ajoutant aux longueurs totales du métatarse et du tibia les deux tiers de celle du fémur. D'après ce calcul, l'articulation coxo-émorale de l'Æpyornis macimus ne se trouverait qu'à 1,24 du sol; celle du Dinornis giganteus à 1,65. Chez la plupart des oiseaux brévipennes, le corps est très-peu oblique et d'ordinaire aflecte une position presque horizontale ; il suffit done, pour connaitre la hauteur du dos de l'animal, d'a- jouter aux nombres, ainst obtenus, là hauteur de la partie du bassin, située au-dessus des cavités cotyloides, hauteur peu con- sidérable et qui, chez l'Æpyornis ne devait pas dépasser 10 ou A1 centimètres. En appliquant ces principes, on trouve que la SUR L'ÆPYORNIS DE MADAGASCAR. 109 région dorsale de l'oiseau dont l'étude nous occupe ici ne devait être élevée que de 1°,40 à 1°,45, tandis que celle du PDinornis giganteus atteignait 1°,75 à 1,80. La longueur du cou des oiseaux est d'ordinaire proportionnée à celle des pattes, excepté chez certains Palmipèdes qui, devant aller, pendant qu'ils nagent à la surface de l’eau, chercher au fond leurs aliments, opt le cou beaucoup plus long que ne paraissent le comporter leurs pattes très-courtes. I faut aussi noter que, chez les oiseaux terrestres et marcheurs, la longueur du bec supplée à la brièveté du cou, ainsi que cela se voit chez les Ibis, les Cigognes, les Courlis, les Barges, les Apteryx, de telle sorte qu'il est impossible d'établir d'une manière absolue les dimensions du cou d'après celles des pattes. De plus, la por- tion cervicale de la colonne vertébrale ne s'étend pas en ligne droite, elle offre plusieurs courbures qui diminuent notablement sa longueur; ainsi elle affecte la forme d'un S dont les courbures s’effacent plus ou moins suivant les besoins de l'animal. Chez l'Autruche, le cou est notablement plus long que chez le Casoar à casque, el comme nous savons que c'est surtout de ce dernier oiseau que se rapproche l'Æpyornis, nous devons penser que les proportions devaient avoir quelques rapports chez ces deux espèces. En calculant ainsi, nous arrivons à penser que la hau- teur totale de l'oiseau de Madagascar ne devait guère dépasser 2 mètres, c'est-à-dire la taille d’une grande Autruche ; tandis que celle du Dinornis giganteus devait varier entre 2°,50 et3 mètres. On peut voir d’après cela que nous sommes bien loin des dimen- sions que M. Isidore Geoffroy Saint-Hilaire attribuait à l'oiseau de Madagascar. Mais si l'Æpyornis n'était pas le plus grand de tous les oiseaux, c'était évidemment le plus gros et le plus mas- sif, le plus éléphant, si nous pouvons nous exprimer ainsi. S 9: A l'époque où l'on découvrit les œufs de l'Æpyornis, on pou- vait penser que l'oiseau qui les avait produits vivait encore dans les parties les plus inaccessibles de l'ile de Madagascar; mais au- jourd’hui que cette terre a été mieux explorée,1l n’est plus pos- A. MILNE EDWARDS. 15 110 SUR L' ÆPYORNIS DE MADAGASCAR. sible d'espérer que nous connaîtrons jamais complétement ce type ornithologique st intéressant, et l'un de nous à pu s'assurer que sur la côte sud-ouest, où lon rencontre fréquemment des frag- ments d'œufs, les habitants les plus âgés non-seulement n’ont Jamais entendu parler de l'Æpyornis, mais qu'il n'existe parmi eux aucune légende, aucune tradition pouvant se rapporter à cet oiseau. Iest permis de se demander si c’est à l Æpyornis que doivent s'appliquer quelques lignes que Flacourt, dans son histoire de Madagascar, consacre à un oiseau de grande taille. Nous repro- duisons ce passage : OYSEAUX QUI HANTENT LES BOIS. «€ Vouron patra.— C'est un grand oyseau qui hante les Am patres et fit des œufs comme l’Autruche; c’est une espèce d'Autruche. Ceux desdits lieux ne le peuvent prendre, il cherche les lieux les plus déserts (4). » D'après les débris osseux trouvés récemment à Amboulitsate, il ya lieu de croire qu'il existait plusieurs espèces d'Æpyornis de tailles différentes, savoir : l'Æpyornis maximus, Ÿ Æpyornis medius et l'Æpyornis modestus. Les plus petites ont dû persister plus longtemps que ces géants de la création ornithologique et c'est peut-être à l’une d'elles que fait allusion Flacourt. Ce sont peut-être aussi les œufs du Fouron Patra dont Goudot avait re- cueilli des fragments. L'étude du squelette nous montre que l'Æpyornis n'était pas un oiseau de proie, par conséquent on ne peut le reconnaitre dans la description que Marco-Polo nous a laissée du Roc ou du Rue, si toutefois cette description est exacte et si le Roc était effective ment un Rapace grand voilier; mais le célèbre navigateur ne parle de cetie espèce que par ouï-dire et non pas d’après ses propres observations, aussi est-il probable qu'il s'est fait sim- plement l'interprète des traditions relatives à un oiseau colos- (1) De Flacourt, Histoire de la grande ile de Madagascar. Paris, in-4°, 1658, p.165. SUR L'ÆPYORNIS DE MADAGASCAR. 111 sal qui aurait vécu longtemps auparavant à Madagascar, tra- ditions qui se seraient perpétuées jusqu'à l’époque de son voyage (1). On trouve dans un ouvrage publié en 1696, sous le nom de Furteriana, ou les bons mots et les remarques de M. Fure- tières, une lettre envoyée de Sansaco en l’isle de Madagascar à “« Monsieur l'abbé de "**, par M. l'abbé de **, sur son voyage. Cette prétendue lettre n'est d'un bout à l’autre qu'un tissu de fables et d’absurdités au milieu desquelles sont noyées quelques vérités et où l’on retrouve encore ce souvenir d’un oiseau gigan- tesque, et c’est à ce point de vue que nous reproduisons ce pas sage (2) malgré les contes et les faussetés évidentes qu'il contient, (4) «Sunt et aliæ insulæ ultra Madagascar versus meridiem...... et in illis certo » anno tempore apparet mirabilis species avis, quæ Ruc appellatur, aquilæ quidem » habens effigiem, sed immensæ est magnitudinis. Ajunat qui illas viderunt aves, pleras- » que alarum pennas in longitudinem continere duodecim passus, spissitudinem vero » ejus proportionem tenere longitudinis, et totum avis corpus pennis in proportionem » respondere ; avis vero ipsa tantæ fortitudinis, ut sola sine aliquo adminiculo E/ephan- » tem capiat, et in sublime sustollat, atque rursum ad terram cadere sinal quo carnibus » ejus vesci possit. Ego Marcus cum primum hæc de illa ave audissem, putabam esse » Gryphonem, qui inter quadrupedia dicitur esse pennatus, Leoni ex omni parte » similis, nisi quod faciem Aquilæ habet similem : Sed ht qui aves illas viderant » constanter asserebant, nihil illis commune esse cum ulla bestia, et quod duobus » ut reliquæ aves incederent pedibus. (4) Entre ces oiseaux, il s’en trouvait d'une espèce dont la grandeur étonne les étran- gers qui n'en ont jamais vu de semblablés. Ils sont beaucoup plus grands que les Autruches, leur plumage est bleu et de couleur de pourpre, ressemblant à celui de ces grands Perroquets qu'on nomme en France Papoques ; perchent et font leurs nids dans des baricotiers, qu'ils composent de pièces de bois aussi bien assemblées que la char- pente d’une maison; ces nids ont au moins vingt pieds de diamètre; il est presque impossible de les détacher, parce que les plus petites branches des Baricotiers sont plus grosses que les plus grosses poutres et couvertes de piquants gros comme le petit doigt et longs de huit pouces. Les insulaires s’en servent pour armer leurs flèches quand ils sont en guerre. Ges oiseaux sont si forts qu'ils enlèvent les Moutons, quelque grands qu'ils puissent être, et n’épargnent pas même les hommes quand ils les trouvent seuls et que la faim les presse, ce qui oblige les habitants voisins des forèts où ils se retirent d'aller presque toujours accompagnés d'un Tigre apprivoisé pour les défendre au besoin, car ils craignent extrèmement les Tigres et les Panthères, quoiqu'ils fassent fuir les Lions, épouvantés, à ce que l'on dit, de leurs cris semblables à celui de nos Coqs, mais cent fois plus forts, on les entend de dix lieues pendant la nuit, Ce qui est étonnant, c’est que quelque grands que soient ces oiseaux, leurs œufs ne sont pas plus gros que ceux d'une Oie, ce qui fait dire aux Portugais la même chose qu'on dit par 112 SUR L' ÆPYORNIS DE MADAGASCAR. et qui ne peuvent donner qu'une faible idée de l'invraisemblance de tout le reste du chapitre. Si les écrits des anciens voyageurs ne peuvent nous éclairer sur l’époque où F'Æpyornis a cessé d'exister, nous trouvons sur les ossements quelques indications plus précises qui nous prou- vent que celte espèce avait été, à Madagascar, contemporaine de l'homme, Effectivement, sur le bia le mieux conservé qui a été recueilli à Amboulitsate, on voit à l'extrémité supérieure des empreintes profondes pratiquées à l'aide d'un instrument tran- chant; il semble évident que ces incisions ont été faites en cou pant les ligaments du genou pour séparer l'os de la jambe de celui de la cuisse, et élles décélent la main de l'homme. Sur un des fragments du métatarse que M. Isidore Geoffroy Saint-Hi- lire avait eu entre les mains, on voit aussi quelques ineisions, mais beaucoup plus superficielles et très-semblables à celles qui existent sur certains ossements des cavernes et que l'on est au- Jourd'hui d'accord pour considérer comme le résultat du travail de l'homme. Il ressort donc clairement de ces faits que l'Æpyornis à vécu à une époque où l'homme habitait déja Madagascar, mais que, dépourvu de moyens de défense et probablement aussi d'intelli- gence,il a été rapidement détruit, et que les voyageurs des xvr' et xvH° siècles n'ont pu que recueillir sur son compte les souvenirs déjà anciens et, par conséquent, mêlés de merveilleux que les tribus sauvages se transmetiaient de génération en génération. Nous ferons aussi remarquer que l'existence à Madagascar d'une population de grands oiseaux, dont lx conformation se rapproche de celle des Dinornis, des A pteryæ et des Casuarius semble établir de nouveaux liens entre la Nouvelle-Zélande et les îles Mascareignes qui, au premier abord, paraissent si éloi- admiration du Crocodile, Se crescit ab ovo. Le gouverneur en a un privé que l'on z dressé à porter un homme en l'air qui le conduit avec une petite corde passée dans son bec. On dit que cet oiseau sous cette charge pourrait faire vingt lieues en une heure, si l'on voulait courir la poste sur une monture aussi bizarre. Il porte un homme avee autant de facilitée qu'un Faucon enlève un Pigeon, J'ai été témoin oculaire de ce pro- dige, ete'est à mon avis la chose la plus merveilleuse qui soil ici. SUR L'ÆPYORNIS DE MADAGASCAR. 115 gnées, mais qui probablement se rattachaient à une vaste éten- due de terres dont il ne reste plus aujourd’hui que quelques par- ties émergées. EXPLICATION DES PLANCHES. PLANCHE 15. Fig. 4. Tarso-métatarsien de l'Æpyornis maztnus dont la partie articulaire supé- rieure manque, vu par sa face antérieure, de grandeur naturelle. Fig, 2. Face interne du même os. PLANCIIE 16. Fig, 4. Le même os, vu par sa face postérieure, Fig, 2. Le même, vu par sa face externe. PLANCHE 17. Fig. 4. Tibia de l'Æpyornis mazimus, VU par sa face antérieure, de grandeur natu- relle ainsi que les figures suivantes. Fig. 2. Tibia du Casoar de la Nouvelle-Hollande (Dromaius Novæ-Hotlandiæ). Fig. 3. Tibia du Casoar à casque (Casuarius galeatus). PLANCHE 18. Fig. 1. Face postérieure du tibia de l'Æpyornis mazimus. Fig. 2, Tibia de l'Autruche d'Afrique (Séruthio camelus). Fig. 3. Tibia du Nandou (Rhea americana). PLANCHE 19. Fig 14, Face externe du tibia de l'Æpyornis matimus. Fig. 2. Le mème os, vu par sa face interne. PLANCHE 20. Fig. 4. Extrémité articulaire inférieure du tibia de l'Æpyornis marimus, vue en dessous. Fig, 2. Extrémité articulaire supérieure du même os, vue en dessus, et montrant des incisions faites probablement de main d'homme, PLANCHE 21, Fémur de l'Æpyornis maximus, vu par sa face antérieure, PLANCHE 22, Fémur de lÆpyornis maximus, vu par sa face postérieure, ail SUR L'ÆPYORNIS DE MADAGASCAR. PLANCHE 23. Fig. 4. Fémur de l'Æpyornis maximus, vu par sa face externe. Fig. 2. Extrémité articulaire inférieure du même os, vue en dessous. PLANCHE 24. Fémur de l'Æpyornis medius, vu par sa face antérieure, de grandeur naturelle. PLANCHE 25. Fémur de l'Æpyornis medius, vu par sa face postérieure. PLANCHE 26. Fig. 1. Vertèbre cervicale de l'Æpyornis maximus, vue de côté. 2. Face supérieure du même os. Fig. 3. Face inférieure. &. Face antérieure, Fig, 5, Face postérieure. PLANCHE 27. Fig. 1. Vertèbre dorsale de l'Æpyorris marimus, vue de côté. Fig. 2. Face inférieure du même os. PLANCHE 28. Vertèbre dorsale de l'Æpyornis maimus, vue par sa face articulaire antérieure. Paris, — Imprimerie de E. MARTINET, rue Mignon, 2. RECHERCHES LA FAUNE ANCIENNE DEN ILES MANGAREIGNEN Par M. ALIPEI MILNE ED ARDS. 8 47. FAUNE DE L'ÎLE RODRIGUE. Jusque dans ces derniers temps la petite île Rodrigue, située dans l’océan Indien vers le 19° degré de latitude sud, à environ 300 milles marins à l’est-nord-est de Maurice, n'avait attiré que peu l'attention des naturalistes. Sir Thomas Herbert y toucha en 1627 (1), et vers la fin du xvu° siècle un voyageur français, Leguat, y séjourna pendant deux années. Il en donna une des- cription fort étendue (2); mais tout ce qu'il en disait s’accordait si mal avec les indications fournies plus récemment par d'autres navigateurs, que son livre n'inspira que peu de confiance. En effet, l'île Rodrigue, encore inhabitée à l'époque où Leguat y aborda, semblait, d’après les récits de ce voyageur, avoir une riche végétation et une faune variée, tandis qu'aujourd'hui les animaux y font presque entièrement défaut, et ses produits sufli- sent à peine aux besoins d’un petit nombre de nègres que les négociants de Maurice y entretiennent pour le service de leurs pêcheries. Un changement si complet effectué en moins de deux siècles paraissait improbable, et la véracité de Leguat fut mise (1) Some years travels into divers parts of Asia and Africa. London, 1838. (2) Voyage et avantures de François Leguat et de ses compagnons en deux isles désertes des Indes orientales, 1708, A. MILNE EDWARDS. 16 118 OISEAUX DES ÎLES MASCAREIGNES. en doute. Cependant les asserlions de ce naturaliste méritaient d'être accueillies avec confiance; car les débris appartenant à des espèces éteintes, et découverts depuis quelques années dans les terrains meubles de l'île Rodrigue, doivent être considérés comme autant de témoins irréeusables de l'exactitude de ses observations. Les intéressantes recherches de MM. Strickland et Melville (4), puis de MM. Newton (2), sur l'oiseau que Leguat appelait le Soliture, commencèrent la réhabilitation scientifique de ce voya- geur, et, dans un mémoire publié 11 y a quelques années, j'ai montré que conformément à ses assertions, il y avait jadis à Ro- drigue de grands Perroquets dont l'espèce n'existe plus aujour- d'hui ni dans cette île, ni sur aucun autre point du globe. Les ossements dont l'étude m'a fourni ces résultats ne sont pas les seuls fossiles qui prouvent l'existence d’une faune ornitho- logique étemte récemment sur cette terre isolée. Les fouilles pra- tiquées sous la direction de M. Édouard Newton ont ramené au Jour beaucoup d’autres débris analogues, et les pièces recueillies de la sorte ayant été généreusement mises à ma disposition par le frère de ce naturaliste, M. Alf. Newton, professeur d’anato- mie comparée à l’université de Cambridge, j'ai pu constater qu'a côté des Solitaires et des grands Psitlaciens dont je viens de parler vivaient autrefois plusieurs autres oiseaux se rapportant à des types zoologiques que Leguat avait observés à Rodrigue en 1691, mais qui n'y existent plus de nos jours. Parmi les ossements recueillis dans les cavernes à côté des débris de Pezophaps où Solitaire, j'ai remarqué d'abord un sternum (3), un fragment de crâne (4) et un tarso -métatar- sien (5) ou os du pied, qui provenaient évidemment d'un (1) The Dodo and its Kindred, 1848, p. 46. (2) On the Osteology of the Solitaire or Didine Bird of the island of Rodriquez (Pro- ceedings of the Royal Society, 1868, p. 428, et Philosophical Transactions, 1869, p. 327). (3) Voyez pl. 30, fig, 4. (4) Voy. pl. 30, fig. 3. (5) Voy. pl. 29, fig, 1. OISEAUX DES ÎLES MASCAREIGNES. 119 oiseau de la taille d'une petite Poule, mais ressemblant beau- coup à l'Ocydrome de la Nouvelle-Zélande, et, comme celui-ci, incapable de voler. L'os du pied est un peu plus petit que celui de l'Ocydrome ; illest aussi plus élargi vers son extrémité inférieure, mais ses caractères essentiels sont les mêmes. Je ne m'étendrai pas sur les particularités anatomiques qu'il présente, car dans un travail précédent j'ai établi avec soin les traits distinctifs des différentes espèces de Rallides fournis par la conformation de cette partie du squelette. Je ferai remarquer seulement que ce métatarsien ressemble à celui d'un des anciens oiseaux de l'île Maurice, l'Aphanapteryr, par l'absence du pont osseux qui bride le tendon du muscle extenseur commun des doigts : caractère qui éloigne notre oiseau fossile de l'Ocydrome austral. La poulie digitale externe est aussi plus écartée de la poulie médiane que chez ce dernier. Or, j'ai fait remarquer que l'écartement de ces poulies est d'autant plus grand dans cette famille, que le mode de locomotion de l'oiseau est plus terrestre. Ainsi chez les Foul- ques cet espace interdigital est très-étroit, chez les Râles il est plus considérable, chez les Tribonyx il augmente encore ; enfin chez les Ocydromes et les Aphanapteryx 1 atteint son maxi- mum. Le métatarsien du Rallide dont l'étude nous occupe ici appartient donc à un oiseau coureur, et l'on peut inférer aussi, de la conformation de cet os, que cet oiseau était incapable de percher sur les branches des arbres, car les surfaces d'insertion des muscles propres des doigts sont trop peu indiquées et les poulies digitales sont placées sur des plans très-différents, dis- positions qui ne se rencontrent pas d'ordinaire chez les espèces arboricoles. Notre Rallide fossile se tenait donc continuellement à terre. Le sternum trouvé à Rodrigue montre aussi, par sa confor- mation, que cet oiseaudevait être sinon complétement apténien, du moins incapable d’un vol soutenu (1). Par ses caractères généraux cet os ne diffère pas du sternum de l'Ocydrome, et (1) Voys. pl. 30, fig. 4. 120 OISEAUX DES ÎLES MASCAREIGNES. les muscles pectoraux qui S'y insèrent ne peuvent avoir que lres- jeu de force ; il présente d'ailleurs différentes particularités de structure qui le distinguent de celui de tous les Rallides connus. Chez l'Ocydrome, le bouclier sternal est très étroit dans sa por- lion moyenne, où 1l paraît étranglé; 1 s'élargit beaucoup en avant, et se termine en arrière et latéralement par deux bran- ches grèles légèrement divergentes et dépassant le bord latéral ; enfin la carène médiane est faible et peu saillante. Ces parlicularités se retrouvent chez l'oiseau de Rodrigue. mais elles y sont moins franchement accusées, et rappellent un peu ce qui existe chez les Trihonyr : Vos est moins étranglé et ses bords latéraux sont plus droits et plus parallèles; ils portent une facette costale de plus: le brechet est un peu plus fort, plus arqué en dessous ; les échancrures latérales du bord postérieur sont plus larges, plus profondes ; enfin, les stylets qui les limi- tent en dehors sont presque droits. L'examen de cet os montre bien que les muscles de l'aile devaient présenter bien peu de force ; et que notre Rallide de- vait être sinon complétement terrestre comme l'Ocydrome, du moins presque incapable de s'élever dans les airs. Je ferai aussi remarquer que si l'os du pied est un peu plus petit que son analogue chez l'espèce néo-zélandaise, le sternuumn est presque aussi développé; ce qui indique encore une prédominance des organes du vol chez loiseau de Rodrigue, comparé à l'Ocydrome. Aujourd'hui 11 n'existe à Rodrigues aucun oiseau ayant la moindre ressemblance avec les Ocydromes ou les autres espèces de la même famille ; mais tous les caractères ostéologiques que je viens de signaler s'accordent très-bien avec l'idée qu'on peut se former de certains oiseaux qui habitaient en grand nombre cetteile, il y a deux siècles, et que Leguat signale sous le nom de (relinotes (1). Ceux-ci étaient évidemment pas des gelinottes, (4, « Nos Gelinottes sont grasses pendant toute l'année et d’un gout délicat. Elles sont toutes d'un gris clair, n’y ayant que très-peu de différence de plumage entre les deux sexes, Elles cachent si bien leurs nids, que nous n'avons pu découvrir, ni par conséquent goûter de leurs œufs. Elles ont un ourlet rouge autour de l'œil, et leur OISEAUX DES ÎLES MASCAREIGNES. 121 et ils ne pouvaient appartenir à ce groupe zoologique, car ils avaient, au dire de Leguat, le bec long, droit et pointu à peu près comme celui des Ocydromes, et de mème que ces Rallides ils ne volaient presque pas; particularité qui ue S'observe chez aucun autre oiseau dont le bec est conformé de la sorte. Hs ressemblaient aussi aux Ocydromes par une singularité physio - logique, l'antipathie pour la couleur rouge : «Si on leur pré- » sente quelque chose de rouge, dit Leguat, cela les irrite si » fort, qu'elles viennent l'attaquer pour tàcher de l'emporter. » si bien que dans l’ardeur du combat on à occasion de les » prendre facilement. » Or, j'ai observé le même instinct chez les Ocydromes de la ménagerie du Muséum d'histoire naturelle, et un voyageur anglais qui à habité longtemps la Nouvelle- Zélande, M. Strange, nous apprend que la meilleure manière de faire la chasse de ces Rallides est de se placer à portée de leur vue en tenant à la main un morceau d'étoffe rouge; car aussitôt qu'ils l’aperçoivent, ils se précipitent dessus et se laissent tuer plutôt que de se détourner de l'objet qui excite ainsi leur colère (1). J'ajouterai que cet instinct a été constaté et utilisé de la même manière chez l'Aphanapteryx, oiseau qui vers le xvi' siècle vivait à l’île Maurice, mais dont l'espèce est aujour - d'hui disparue. Il me paraît donc très-probable que le Rallide dont les os se trouvent encore à Rodrigue est le même oiseau que celui que Leguat désignait sous le nom de Gelinote ; el comme ses carac- tères anatomiques ne permettent de le ranger dans aucun des genres précédemment établis, je le désignerai sous le nom d'Erythromaque, afin de rappeler l'une des particularités de ses mœæurs indiquée par ce voyageur. La description que donne Leguat nous apprend aussi que l'Erythromaque avait un plu- y bec, qui est droit et pointu, est rouge aussi, long d'environ deux pouces, Elles ne sauraient guère voler, la graisse les rendant trop pesantes. Si on leur présente quel- que chose de rouge, cela les irrite si fort qu'elles viennent l’attaquer pour tâcher de l'emporter ; si bien que dans l’ardeur du combat on a occasion de les prendre facile- ment. » (Leguat, t. I, p. 403.) (1) Voy. Ibis, 1869, 1. V, p. 463. 122 OISEAUX DES ÎLES MASCAREIGNES. mage gris dans les deux sexes et un ourlet rouge autour de l'œil. Les différents os que nous avons pu étudier nous indiquent les proportions relatives des parties principales du corps, et grâce à la description de Leguat, nous pouvons combler les lacunes que examen paléontologique seul laisserait subsister, et caractériser ainsi l'oiseau de Rodrigue : Famizze pes OCYDROMIDES. Genre ERYTHROMACHUS. EYTHROMACHUS LEGUATI, Pattes fortes, disposées pour la course et d'un quart à un vin- quième plus courtes que chez l'Ocydrome ; les trois doigts anté- rieurs bien développés, le quatrième très-petit. Corps moins massif que chez ce dernier, à ailes un peu plus développées, mais ne pouvant pas servir au vol. Tête petite ; bec rouge, droit, pointu ot d'environ 0°,06. — Un ourlet rouge autour de l'œil ; plumage d'un gris clair. Cet oiseau devait se nourrir de vers, d'insectes et de mol- lusques, La forme du bec de cet oiseau ne permet pas de le placer dans le même genre que l'Aphanapteryr, qui d'ailleurs devait avoir un aspect très-différent, dû non-seulement à la forme de ce dernier organe, mais aussi à des pattes plus hautes. Doit-on l'identifier avec l'oiseau dont parle Sir Th. Herbert, qu'il appelle « Æen, et dont il donne une figure grossière dans la relation de son voyage entrepris en 1626. Mais cet oiseau fait partie de la faune de Maurice; car Sir Th. Herbert ne s'est pas arrêté à Rodrigue, et, ainsi que l'a fait remarquer avec beaucoup de raison Strickland, c'est probablement celui dont parle Leguat sous le nom de Gelinote de Maurice (1). Jai exposé dans un travail précédent, publié sur le même (4) Leguat, t. IT, p. 71. OISEAUX DES ÎLES MASCAREIGNES. 125 sujet, les raisons qui m'empèchent d'adopter le genre Ap/ornis de M. de Sélys-Longchamps. Je n'y reviendrai donc pas 1ct; 1 me suflira de dire que la caractéristique des Aprornis est op vague et qu'elle peut s'appliquer indifféremment à plusieurs genres; qu'elle comprend des Colombides et plusieurs espèces de la famille des Rallides, très-différentes les unes des autres. Ce sont ces considérations qui m'ont déterminé à inscrire l'oiseau de Rodrigue dans nos catalogues zoologiques sous le nom d'£rythromachus Lequat. DIMENSIONS DU TARSO-MÉTATARSIEN ET DU STERNUM DE L'ERYTHROYWACUUS LEGUATI. Longueur du tarso-métatarsien.. ......... es ce 0,050 Largeur de son extrémité supérieure.,................ 0,010 Largeur de son extrémité inférieure. ..,............... 0,011 Longueur maximum du sternum............... = cote 0040 Larpeur'eNAVANL.- 6... see cent ses 0,025 Longueur de la branche latéro-postérieure......... 1 Q;020 Largeur de l'os en arrière des facettes costales. ...... . 06,011 Les débris fossiles soumis à mon examen par M. le professeur Newton m'ont permis de constater aussi que la famille des Hérons, aujourd'hui inconnue à Rodrigue, était représentée jadis par une espèce particulière à tête grosse, à bec robuste et à pattes courtes; J'ai pu reconstituer presque en entier le squelette de cet Échassier, et je ne doute pas que ce ne soit l'oiseau dont Leguat a parlé sous le nom de Butor. « Nous avions, dit-il, des Butors aussi gros et aussi bons que » des Chapons. Ils sout plus familiers et plus aisés à prendre que » les Gélinotes. » Et ailleurs ilajoute : «Ils (les Lézards) servent » souvent de proie aux oiseaux, surtout aux Butors. Quand nous » les faisions tomber des arbres avec une perche, les oiseaux » accouraient et venaient les engloutir devant nous, quoi que » nous puissions faire pour les en empêcher; et lorsque nous en » faisions seulement le semblant, ils venaient de la même ma- » mière et nous suivaient toujours. » Cet oiseau n’est pas un véritable Butor; mais sa tête est si volumineuse et ses pattes si courtes, que l’on comprend que 124 OISEAUX DES ÎLES MASCAREIGNES. Legual lait rapporté à cette espèce. J'ai fait représenter dans les planches placés à la suite de ce mémoire la plus grande partie du squelette de l’un de ces oiseaux. La tête osseuse est remarquable par ses formes massives et robustes (1;; le crâne est remarquablement élargi en arrière, et les fosses temporales sont limitées par des crêtes très-saillantes, surtout celles de la région occipitale. La face supérieure du crâne est peu bombée, et l’espace interorbitaire est large, mais faiblement déprimé sur la ligne médiane. Le bec est robuste, presque droit, élargi à sa base et arrondi en dessous; les narines sont grandes et précédées d'un large sillon s'étendant assez loin en avant. Il est impossible de confondre ce crâne avec celui des Bultors, chez lesquels le bec, relativement grêle, dépasse à peine la lon- sueur de la portion cränienne de la tête, et chez lesquels cette dernière partie est très-resserrée dans la région temporale. Chez les Bihoreaux, les caractères de la tète sont aussi bien différents, car la face supérieure, ce que l’on appellerait le chanfrein chez les Mammifères, au lieu d'être aplatie et de suivre une ligne presque droite, est fortement arquée en dessus et déprimée dans la région frontale. Les orbites sont très- profondément échancrées en dessus ; l'espace occupé par les os lacrymaux est très-petit, et le bec, au lieu d’être droit, est légè- rement courbé. Le crâne fossile de Rodrigue présente douce bien les caractères des Hérons, mais il se distingue, par son apparence massive, de toutes les espèces connues. Chez les Hérons cendré, pourpré, Goliath et chez les Aigrettes, la tête est plus étroite, plusallongée, le bec moins conique et moins fort. Chez le Héron à cou noir (Ardea atricollis\, espèce qui habite aujourd’hui Madagascar, le bec ressemble beaucoup à celui de notre espèce fossile, mais ilest plus long et moins élargi à sa base; l'espace interorbitaire est beaucoup plus large, tandis qu'au contraire la portion posté rieure du crâne est plus étroite et plus allongée, ce qui donne (4) Voy. pl. 32, fig. 1 ct 2, OISEAUX DES ÎLES MASCAREIGNES. 125 à la tête osseuse un tout autre aspect. Certaines espèces de l'Amérique, le Héron honoré entre autres, l'Ardea lineata, res- semblent un peu à l'espèce de Rodrigue par la forme robuste de la tête. Mais jamais cependant on n’y retrouve le même déve- loppement dans la région crânienne. Les pattes, relativement à la tête, sont extrêmement courtes, et Je crois que sous ce rapport il n'y a pas un seul Héron qui puisse être comparé à celui de Rodrigue. Cependant l'os tarso-méta - tarsien (1) présente tous les caractères des A7dea, et s'éloigne des Butaurus par l'égalité relative qui existe entre les poulies digitales, tandis que chez les Butors la trochlée interne est déjetée en dedans. Le tibia (2) est gros et court ; il dépasse le tarso-métatarsien d’un tiers environ, comme cela à d’ailleurs lieu d'ordinaire chez les Hérons; mais le fémur est au contraire très-développé (3), ilest aussi grand que celui du Héron cendré : ce qui nous montre que le corps de l'animal était volumineux et que le raccoureis- sement des pattes ne porte que sur leur extrémité. Nous trouvons d'ailleurs des rapports semblables chez les espèces de cette famille dont les pattes sont courtes. Ainsi le fémur du Butor ordinaire est au moins aussi grand que celui du Héron cendré et du Héron pourpré; chez les Bihoreaux, l'os de la cuisse est aussi très-développé. Le sternum est faible et petit relativement à la taille de l’ani- mal (4); il n’appartenait évidemment pas à un oiseau à ailes puissantes comme le Héron cendré, le Héron pourpré ou les Aigrettes; il est beaucoup moins allongé que chezle Butor, mais les coracoïdiens sont très-longs et grêles. Aussi les ailes sont- elles courtes et assez faibles ; l’humérus (5) est à peine plus grand que celui du Bihoreau à manteau, il est notablement plus O grèle et plus court que chez le Butor; le corps de l'os est légère- (4) Voy. pl. 32, fig. 3 à 6. (2) Voy. pl. 32, fig. 7 et 8. (3) Voy. pl. 32, fig. 9, 10 et 11. ! (4) Voy. pl. 32, fig. 14. (5) Voy. pl. 32, fig. 12. A, MILNE EDWARDS, 17 126 OISEAUX DES ÎLES MASCAREIGNES. ment arqué en dehors, comme chez le Savacou, et l'extrémité arliculaire inférieure est large et aplatie. Je n’ai pu observer aucun des os de l’avant-bras ; mais le mélacarpien donne pour l'aile exactement les mêmes indica- tions que l'humérus (1), il dépasse à peine celui du Bihoreau à manteau. Ce Héron diffère trop de tons ceux que nous connaissons pour qu'il nous soit permis d'hésiter à le rapporter à une espèce disparue. À Madagascar et dans les îles Mascareignes on à signalé un certain nombre de grandes espèces d'Ardéidés : on y a Lué le Héron cendré, le Héron pourpré, l'Aigrette ; on comprend aussi que le Héron Goliath d'Afrique puisse y être transporté par les vents. L’Ardea atricollis S'y rencontre souvent aussi, de même que le Bihoreau à manteau. Mais ce sont les seuls qui, par leurs dimensions, peuvent être comparés à notre espèce nouvelle que j'appellerai V4. megacephala, et nous venons de voir qu'ils s'en distinguent par des particularités très-importantes. Quant aux autres espèces, elles sont toutes de taille imférieure ou de formes très-grèles qui les exeluent aussitôt de toute comparaison. Ilest étonnant qu'une espèce de Héron ait ainsi disparu à une époque très-rapprochée de nous, qu'elle ait été localisée dans ue Île aussi petite que Rodrigue, et qu'elle n'ait pu traverser les bras de mer qui séparent cette dernière des autres Mascarei- gnes ou de Madagascar pour aller de là gagner l'Afrique. Cepen- dant nous savons que si certaines espèces de ce groupe sont pour ainsi dire cosmopolites, il en est d’autres qui ne s’écartent jamais beaucoup de leur lieu d’origine, et Fon comprend que l'A. megacephala, dont la tête, extrêmement lourde et grosse, et les ailes courtes, étaient une entrave pour le vol, n'ait pu entre- prendre des voyages aussi lointains et n’ait pu échapper aux causes de destruction qui le menaçaient. (4) Voy. pl. 32, fig. 13. OISEAUX DES ÎLES MASCAREIGNES. DIMENSIONS DES PRINCIPAUX OS DE L'ARDEA MEGACEPHALA. Téle osseuse. Longueur totale... ,.4.484 uso soso 0,154 Longueur de la mandibule supérieure. ...... 0,094 Largeur de la mandibule supérieure à sa base. 0,022 Largeur de l’espace interorbitaire .......... 0,022 Largeur du crâne au niveau des apophyses post- OFDIRAI POS ES eee moe cs a opces cut 0,040 Écartement des apophyses mastoïdes......... 0,040 Longueur de la mächoire inférieure, ......... 0,147 Lonpueuritotale.. 0. esse. 0,095 Largeur de l'extrémité supérieure, .......... 0,014 Largeur de l’extrémité inférieure... ....,.... 0,0135 L'argéur du corps de L'05.:..:::2...00,. 0,006 Tibia Ponpneur totale, 50... 0,140 Largeur de l'extrémité inférieure......... .. 0,013 Largeur de l’extrémité supérieure. ....,..... 0,014 Largeur diucorps delos "5472... 0,006 Fémur. Poneneunioinless, Ne erreretneree-ce 0,090 Largeur de l'extrémité inférieure. .......... 0,015 Largeur de l'extrémité supérieure. ....... ... 0,014 Largeur du corps de l'os.,..,....,....,,..,.. 0,0062 Sternum. LOngUEUR (OAI Sterne es sers re diese 0,064 Largeur en avant...... seed 0,035 Largeur en arrière des facettes costales....., 0,026 Largeur au bord postérieur:. ............, 0,027 Coracoïdien. Longueuritotales 2". TARA TAR UE 0,059 Largeur de l'extrémité inférieure. .....,.... 0,017 Humérus. ÉONPUCLEALOAIO mener Nommer 0,118 Largeur de l'extrémité supérieure .......... 0,020 Largeur de l'extrémité inférieure....,.....,.. 0,0165 LargéUP AUICONPS A6 l'OS... 0,007 0,162 0,044 0,044 0,006 0,210 0,012 0,013 0,0065 0,092 0,046 0,046 0,007 0,088 0,048 0,036 0,035 0,067 0,018 1,180 0,027 0,024 0,014 128 OISEAUX DES ÎLES MASCAREIGNES. Métacarpe. LONFUCUR LOPAIBE en sesece-eccccue 0,062 0,098 Largeur de l'extrémité supérieure. ......... 0,042 0,017 Largeur de l'extrémité inférieure. .......... 0,007 0,011 Une nouvelle preuve de la véracité de Leguat et des change- ments considérables survenus dans la faune ornithologique de l'île Rodrigue depuis deux siècles seulement, m'a été fournie par les os des oiseaux de nuit dont j'ai constaté l'existence. Aujour- d'hui on ne connaît dans cette localité aucun oiseau de proie ; mais, lorsque Leguat y séjournait, les Rapaces nocturnes étaient en assez grand nombre pour aider activement à la destruction des Rats dont l'île était infestée. « Pour les détruire, dit-il, nous n'avions que le secours des » Hiboux et de nos trébuchets, Avec cela nous les bannimes en » assez peu de temps de notre quartier : mais, 1l est vrai, qu’il » en revenait quelquefois des peuplades qui nous occupaient de » NOUVEAU. » M. E. Newton a retrouvé dans les cavernes de Rodrigue quel- ques os à l'aide desquels nous pouvons nous rendre compte de la taille et des affinités decesStrigides. Ces ossements se rapportent à deux espèces. L'une d'elles, dont je n’ai sous les yeux qu'un Ubia (1) et un tarso -métatarsien (2), est assez nettement caracté- risée ; elle me paraît appartenir au genre Chevêche ou Afhene. L'os du pied est à peu près de la taille de celui du Hibou bra- chyote, mais plus élargi et moins excavé sur sa face antérieure ; en cela et par la compression de la trochlée digitale externe, 11 se rapproche des Chevèches. D'ailleurs les proportions relatives de l'os du pied et de ceux de la jambe sont les mêmes que chez ces oiseaux ; le tibia est court et robuste : il ne dépasse guère que d'un tiers le tarso-métatarsien, à peu près comme chez les Che- vêches. La crète sur laquelle s'articule le péroné est forte et s'étend fort loin sur le bord externe de los. La diaphyse est large (4) Voy. pl. 29, fig. 2 et 2a. (2) Voy. pl 29, fig. 2b à 2e. OISEAUX DES ÎLES MASCAREIGNES. 129 et presque droite ; l'extrémité inférieure porte deux condyles symétriques et séparés par une gorge profonde. J'avais pensé que peut-être ces os se rapportaient à l'A/kene superciliaris de Vieillot, qui se trouve à Madagascar, où il a aussi été décrit par M. Schlegel sous le nom d'A. Po/leni ; mais les tarses de cette espèce sont beaucoup plus courts, de même que ceux du Minor madagascariensis, Bonap. Il est donc probable que cette Chevèche constitue une espèce nouvelle ; peut-être vit-elle encore aujourd'hui à Rodrigue? Je proposerai de lui donner le nom de Sfr (Athene) murivora. L'autre espèce est moins bien caractérisée, Je n'ai pu en étu- dier jusqu'à présent que le tibia (4), qui est à peu près de la lon- gueur de celui du brachyote, mais s’en distingue par sa forte cour- bure interne et par le développement en largeur de son extrémité inférieure, qui paraît se dévier en dedans, rappelant beaucoup par ces deux caractères la disposition que présente l'os de la jambe des grand Ducs, dont il semble être en quelque sorte la croit La crête péronéale est moins saillante el moins pro- longée que celle de l'Afhene murivora, et elle rappelle davantage ce qui existe chez les Bubo Je serais donc assez disposé à consi- dérer ce Hibou comme devant se rapprocher des grands Ducs ; mais n’ayanteu, pour établir cette détermination, qu'un seulos, je crois prudert, avant de donner un nom spécifique à cet oiseau, d'attendre que de nouvelles recherches nous aient fait connaître quelques autres pièces de son squelette. J'ai comparé ce tibia à celui du Bubo madagascariensis, mais ce dernier en est bien différent par sa grandeur et par sa force. DIMENSIONS DU TIBIA. Athene Otus muivsora. Strix sp. brachyotus. Longueuritüfalen. 20e. secte 0,071 0,077 0,077 Longueur mesurée de l'extrémité supérieure au bout de la crête péronière...... 0 05025 0,025 0,030 Largeur de l’ex'rémité inférieure. ....... 0,010 0,0105 0,008 Largeur de l’extrémité supérieure. ....... 0,009 0,009 0,007 Largeur du corps de l'os. ............. 0,004 0,0037 0,004 (4) Voy. pl. 29, fig. 3. 1350 OISEAUX DES ÎLES MASCAREIGNES. DIMENSIONS DU TARSO-MÉTATARSIEN. Athene Otus murivora, Strir sp brachyotus. Longueur totale de l'os................ 0,046 sets 0,044 Longueur de l'extrémité supérieure, ...... 0,010 RE 0,008 Largeur de l'extrémité inférieure. ........ 0,045 ss... 0,009 Largeur du corps de l’as............... 0,005 + 0,004 Les autres oiseaux terrestres dont Leguat fait mention comme vivant à Rodrigue, sont des Pigeons, des Perroquets et une es- pèce unique du groupe des Passereaux. Si les Pigeons n’ont pas entièrement disparu de cette Île, ils y sont devenus extrêmement rares, car M. E. Newton, malgré ses recherches, n’a pu eu voir un seul individu ; mais leur existence passée est démontrée par les ossements qui ont été trouvés associés à ceux du Solitaire, de l’Erythromaque, des Hérons et des Hiboux dont je viens de parler. Ces débris m'out permis de constater que jadis il y avait là deux espèces de Colombes. L'une, dont j'ai pu étudier l'os du pied (1), est évidemment le Turtur picturatus, qui habite actuellement Madagascar et l'île Maurice, et c'est probablement à elle que se rapporte le passage de Leguat où ce voyageur dit : « Les Pigeons » sont un peu plus petits que les nôtres ; tous de couleur gris- » ardoise ; toujours fort gras et fort bons ; ils perchent et nichent » sur les arbres et on les prend très-aisément. Ils sont si peu fa. » rouches, qu'il y en avait toujours une cinquantaine autour de » nous, quand nous étions à table, parce qu'ils avaient pris goût » à la graine de nos melons. On les prenait quand on voulait, » et nous leur attachions quelquefois aux jambes de petits » morceaux d'étoffe de diverses couleurs, afin de les reconnai- » tre. Is ne manquaient pas de venir à tous nos repas : nous » les appelions nos poules. Is ne nichent jamais dans l'isle, » mais dans les islots qui en sont proches. Nous avons jugé que » C'était pour éviter la persécution des rats, dont le nombre est » très-grand dans l'isle, comme je le dirai dans la suite, mais » qui ne passent jamais dans les islots. » (4) Voy. pl. 30, fig. 2. CISEAUX DES ÎLES MASCAREIGNES. 131 La seconde espèce de Colombe n’a pas été signalée par Leguat. Je n'ai pu en étudier qu'un sternum (1) en très-bon état et très- différent, non-seulement de celui des Turtur, mais aussi des Ve- nago et des Erythræna. W appartient à une espèce de petite taille à peine plus grande que le C. fympanistria, mais évidemment beaucoup mieux conformée pour le vol. En effet, le caractère le plus saillant de ce sternum consiste dans la largeur du bouclier, dans l'étendue des échanerures latérales, et dans la forme du brechet, dont l'angle antérieur se prolonge très peu en avant. Les rainures coracoïdiennes sont grandes et peu obliques. Les branches latérales se détachent de l'os en arrière des facettes cos- tales ; elles sont très-divergentes et se portent plus directement en dehors.que cela n’a lieu chez les autres représentants de la même famille ; il résulte de leur position que les échancrures qu'elles limitent en avant sont très-étendues. Les branches latéro-infé - rieures sont également très-divergentes et la lame médiane du bord postérieur est remarquable par son élargissement, Le bre- chet est médiocrement saillant ; son angle antérieur est très- artondi et re s’avance pas au niveau de l’apophyse épisternale, ainsi que cela a lieu d'ordinaire chez les Colombes. Par toutes ces particularités, auxquelles doit s'ajouter l'aplatissement géné- ral de los, qui, en effet, n’est presque pas incliné en forme de toit, on voit que la Colombe de Rodrigue s'éloigne non-seule- ment des £rythræena et des Turtur, mais aussi des Virago. Par sa forme générale, par le peu de saillie et la direction du brechet. il présente certaines analogies avec les Pigeons essentiellement arboricoles, tels que les Carpophages ; mais chez ces derniers, l’espace réservé sur les bords latéraux du sternum aux facettes costales est toujours beaucoup plus étendu, les branches latéro- supérieures sont plus fortes et elles naissent plus en arrière, de façon que les échancrures latérales sont plus petites. Jusqu'à présent je ne connais aucun genre de la famille des Colombides dont le sternum puisse être rapproché de celui trouvé récemment à Rodrigue, et, suivant toutes probabilités, ce débris (1) Voy. pl. 30, fig. 1. 132 OISEAUX DES ÎLES MASCAREIGNES. fossile indique encore là une espèce perdue que je désignerai sous le nom de Columba rodericana. Longueur totale du sternum.:.....,..44.,.4..4.,. 0,043 Écartement des cornes hyosternales. .... ani Eae 0,019 Distance entre la corne hyosternale et l'échancrure posté- MOUTON an ensure rer 0,030 Largeur minimum du corps de l'os au milieu des échan- CrUrESIATOTAIS se cesse ss doses vestes 0,013 Largeur minimum de la lame médiane postérieure. ..... 0,010 Les Perroquels observés par Leguat étaient de médiocre gros- seur ; leur plumage était vert et bleu. Is étaient très-abondants, el la chair des jeunes avait un goût agréable. J'ai pu voir, d'après les manuscrits de Pingré conservés à la bibliothèque Sainte-Ge- neviève et qui m'ont été très-obligeamment communiqués par M. Ferdinand Denis, qu'en 1761, époque à laquelle cet astro- nome visita l'ile Rodrigue pour y observer le passage de Vénus, ces oiseaux commencaient à devenir rares. Cependant ils ne pa- raissent pas avoir entièrement disparu, car dernièrement M.New- ton est parvenu à se procurer un Perroquet qui, suivant toutes probabilités, est un représentant de l'espèce observée par Leguat, car plusieurs ossements trouvés dans les cavernes de l’île s’y rap- portent évidemment (1). Cet oiseau, bien distinct de tous les Psittaciens actuels, a été décrit par M. Newton sous le nom de Palwornis ersul, Le même ornithologiste a constaté que l'Agapornis cana, petite Perruche commune à Madagascar et à Maurice, habite actuellement Rodrigue ; mais les colons assurent qu'elle est d'origine étrangère et ajoutent qu’elle a été apportée par un navire américain venant de Madagascar. Quant au grand Perroquet fossile de Rodrigue, que j'ai déjà fait connaître pré- cédemment sous le nom de Psitacus rodericanus, 1 ne peut être rapporté n1 à l'Agapornis cana, ni au Palwornis exsul, et fournit une preuve de plus des changements survenus dans la faune de cette île. En 1867, lorsque j'ai donné la description d'une portion de (4) Voy. pl. 31, fig. 4 à 4e. 29 OISEAUX DES ÎLES MASCAREIGNES. 155 la mandibule supérieure du Psittacus rodericanus, je résumais de la manière suivante mon opinion sur les affinités zoologiques de cet oiseau : «Si je ne craignais de dépasser les conclusions » légitimes que l’on peut tirer de l'examen d’un fragment si mi- » nime du squelette, je serais donc disposé à inscrire cette espèce » éteinte, dans nos catalogues ornithologiques, sous le nom » d'Eclectus rodericanus ; mais si l'articulation maxillo-palatine, » offre beaucoup d’analogie avec celle des Loris, la forme du » bord tranchant de la mandibule est bien différente, Celui-ci, » au lieu d'être très-faiblement sinueux près de sa base, présente » en arrière de la pointe une échancrure profonde qui rappelle » un peu la disposition propre des Kakatoës, Aussi je crois pré- » férable d'employer une désignation moins précise, et, en l'ap- » pelant Psiflacus rodericanus, Y entends indiquer seulement que » le Psittacien des cavernes de l'île Rodrigue est une espèce nou- » velle voisine des Loris, mais participant cependant à quelques- » uns des caractères du groupe des Kakatoës. » Les réserves que je faisais relativement à la place zoologique que doit oceuper cet oiseau se sont trouvées justifiées par la découverte de nouvelles pèces du squelette. J'ai reçu dernièrement de MM. Newton une mandibule supérieure complète (1) et un bec inférieur (2) qui proviennent évidemment du Psittacus rodericanus, et dont l'état de conservation laisse peu à désirer. Le becsupérieur, sur lequel l'articulation maxillo-frontale est complétement intacte, bien que présentant une certaine analogie de formes avec ce qui existe chez les Loris, s'en distingue par sa brièveté, par le développement du bord préhensile et par l'étendue des trous ineisifs. Il offre quel- ques caractères qui le rapprochent des Paleornis. Ainsi, lorsqu'on le compare au bec du Palæornis Alexandrie, on voitque la voûte buccale a presque la même forme, mais que l'articulation palatine est plus profonde, le septun nasale es plus large; cependant, s’il n'y a pas une complète analogie, 1l y à au moins beaucoup de ressemblance de formes. Il en est de (1) Voy. pl. 31, fig. 2, 2a, 2b. (2) Voy. pl. 31, fig. 2e, 24, 2e. A. MILNE EDWARDS 1S 15/4 OISEAUX DES ÎLES MASCAREIGNE:. mème pour la mandibule inférieure. La région mentonnière, qui, à l'état frais, est recouverte par l'étui corné du bec, est plus étendue, plus avancée et plus large que chezles Palwornis ; une arèle longitudinale mousse sépare en dessous sa portion médiane de ses parties latérales. Les branches maxillaires sont extrêmement élevées au niveau du sillon limitant en arrière le bec corné, puis elles s'abaissent graduellement vers la portion articulaire ; la surface glénoïdale, destinée à recevoir l'os tympa- nique, est moins oblique que chez les Æclectus et les Palwornis ; enfin, l'angle postérieur en est plus développé transversalement. Le cadre sublingual est beaucoup plus élargi en avant que chez les Loris, et se rapproche davantage de la forme que lon remarque chez les Palæornis. Je ne n'étendrai pas davantage sur les particularités que présente ce bec, car j'ai déja insisté longuement sur les différences de conformation qu'il offre dans les divers groupes naturels de la famille des Psittacides, et Je me bornerai à renvoyer le lecteur à ce mémoire. Les deux mandibules du Perroquet de Rodrigue suffisent parfaitement pour indiquer les affinités de cette espèce, et nous montrent que, bien que se rapprochant des Lorinæe, cet oiseau avait, avec les Palwornis, d'incontestables affinités. Aussi je proposerat d'établir pour lui, à côté de ces derniers, un petit groupe générique portant le nom de Necropsittacus. Longueur totale de la mandibule supérieure... ......,.. 0,045 Largeur de l'articulation fronto-maxillaire.. ..,........ 0,025 Hauteur de la mandibule (au niveau de l'articulation pa- ANUS ERA RER RU 0,922 Larecur au niveau de l'articulation palatine. .......... 0,020 Longueur totale de la mandibule inférieure. .......... 0,056 Largeur au niveau de l'articulation. ................. 0,046 Longueur de la surface mentonnière..........,....... 0,022 I est diflicile de savoir si les petits oiseaux que Leguat com- pare aux Serius vivent encore à Rodrigue. M. Ed. Newton n'a rencontré dans cette île que deux Passe- reaux qui, bien que ressemblant beaucoup à des espèces mal- gaches, en different assez pour être inscrits dans nos catalogues OISEAUX DES ÎLES MASCAREIGNES. 155 sous des noms particuliers. L'une de ces esp'ces où races parti- culières est un Foudia (1), l'autre un Drymoica (2), et ils se font tous deux remarquer par un chant fort agréable. Or, Leguat dit positivement que les petits oiseaux de son île ne chantaïent pas. I me paraît donc probable que ce n'était ni le Foudia fla- vicans, bile Drymoica rodericana. L'introduction de ces oiseaux peut être de date récente, et j'incline à penser que les Passereaux observés par Leguat ont subi le mème sort que les Solitaires et les Érythromaques. Les Pintades n'existaient pas à Rodrigue à l'époque où Leguai nous à fait connaître avec tant d'exactitude les productions de cette île ; mais depuis, ces oiseaux y ont été introduits, et main- tenant ils y vivent à l'état sauvage. Ainsi, le colonel Dawkins rapporte qu'on n'y trouve que des Perroquets et une Pintade (3). Mais on ignorait l'espèce à laquelle appartenait ce dernier oiseau. Les ossements que M. Newton a découverts me permettent de résoudre cette question: J'ai pu examiner presque toutes les pièces du squelette à l'exception de la tête, et je suis disposé à croire que c’est le Nurnida mitrata de Y Afrique centrale, et non le N. tiarata, qui maintenant vit dans l’île Rodrigue. C'est en effet une espèce de très-grande taille, à pattes longues et fortes, à sternum très-développé et dont la trachée ne se replie pas dans los furculaire, comme cela a lieu chez le Mronida cristata, chez le N. Verreaurü et chez le N. Pucheran. Longueur du tarso-métatarsien de la Pintade.......... 0,083 _ (TUE rrdeR ee M n O 0,125 — GUESS PERRET 0 à 0,092 — AUADASSIN Re ere ce ra ce 0,107 Largeur du bassin au niveau des cavités cotyloides...... 0,042 Don UeURAU SIENUM. ee memes seen 0,124 — Hé RDMENUS. Sum ver. sbesrehh-cce 0,087 Enfin, pour terminer ce qui est relatif aux animaux terrestres (4) Foudia flavicans (Ibis, 1865, p. 148). (2) Drymoica rodericana (Ibis, 1865, p. 150). (3) Voy. Proceed. Zool. Soc., part. 4, p. 31. — Voyez aussi d'Heguerty, Soc. des se. et belles-lettres de Nancy, 1751, — Slrickland, Ann. and Mag. nf nat, Hist., 1849, €. Il, p. 138. — Ed. Newton, Jbis, 1865, p. 153. 156 OISEAUX DES ÎLES MASCAREIGNES. dont on a trouvé des débris dans les cavernes de Rodrigue, je dois citer quelques ossements de Mammifères. J'y ai reconnu le Chat domestique, un très-Jeune Porc, un Rat, non pas le Sur- mulot, mais le Mus alerandrinus, et de nombreuses Roussettes. Leguatnous parle de ces dernières dans les termes suivants : «Les Chauves Souris volent de jour comme les autres o1- » seaux ; elles sont de la grosseur d’un bon poulet, et ont chaque » aile longue de près de deux pieds. Elles ne perchent pas, mais » s’'accrochent par les pieds aux branches des arbres, la tête » pendant en bas, el comme leurs ailes sont aussi fournies de » plusieurs crochets, elles ne tombent pas aisément quand on les » a frappces, elles demeurent toujours attachées par quelque » crochet, Quand on les voit d'un peu loin pendantes et enve- » loppées de leurs ailes, on les prend plutôt pour des fruits que » pour des oiseaux. Les Hollandais que j'ai connus à Pile Mau - » rice en faisaient un mets précieux et les préféraient au gibier » le plus délicat. Chacun a son goût ; pour nous, nous trouvions » dans celui-ci je ne sais quoi qui ne nous accommodait pas, et » COnmME nous avions beaucoup de choses que nous trouvions » meilleures, nous ne mangions pas de ces vilaines bêtes. Elles » portent leurs petits avec elles et ne les abandonnent que lors- » qu'ils peuvent voler. Nous avons remarqué qu'elles en avaient » toujours deux. » Pingré qui toucha à Rodrigue, en 1761, lors de son voyage pour l'observation du passage de Vénus, nous donne aussi quel- ques détails sur les Roussettes. Jai pu consulter son manuscrit à la bibliothèque Sainte Geneviève. À la page 185 on y lit : « Les Chauves-Souris sont mises par les naturalistes au nom- » bre des Quadrupèdes; celles que j'ai vues à Rodrigue étaient » «le la grosseur d’un Pigeon, mais plus longues. La tête ressem- » ble assez à celle d’un Renard. Le poil est roux, plus foncé sur » la tête et sur le cou que sur le reste du corps; les ailes sont » dune couleur de gris foncé ; étendues ou déployées, elles peu- » vent avoir chacune un pied où un pied et demi d'envergure. » Ces Chauves Souris ressemblent d’ailleurs à nos Chauves- » Souris europécunes; elles sont fort grosses. » OISEAUX DES ÎLES MASCAREIGNES. 137 Ces animaux vivent encore, à ce que l'on m'a assuré, à Rodri- gue, mais]e n'ai pu avoir aucune indication sur l'espèce à laquelle ils appartiennent. Ce ne peut être le Pteropus Edivardsii de Ma- dagascar, qui est beaucoup plus grand ; ce n'est pas le Preropus vulgaris de l'île Maurice, dont on retrouve de nombreux osse- ments enfouis pèle-mêle avec ceux du Dronte et dout la taille est aussi beaucoup plus élevée. La Roussette de Rodrigue est d'une petite taille, et je suis disposé à croire que c'estle P. w- bricollis, car ses os ont exactement les mêmes dimensions. Roussette Roussette de de l'ile Rodrigue. l'ile Maurice, Longueur de la màchoire inférieure... ..... 1... 0,098 — dé l'RUMEPUS. 6... 0,085 0,108 — JUTATIUS 0, : sr osesesescee ss: 0,115 9,147 — AUTOUR ESS en eee ne chine 0,016 — AUDIDIA Re cer ccm era 0 054 Je ne parlerai que peu des oiseaux de mer qui fréquentent les côtes de Rodrigue, car ce sont toujours les mêmes espèces qui vivent aujourd'hui et qui y vivaient il y a deux siècles. On y voit, comme du temps de Leguat, des Frégates, des Fous, des Phaë- tons, des Pétrels. La collection de M. E. Newton comprend un nombre très-considérable de débris du Paille-en-queue (Gygis candida), à Vaide desquels on pourrait reconstituer, à peu près complétement, une dizaine de squelettes; nous savons que ces oiseaux sont encore très-abondants dans les mêmes parages, et Leguat nous les décrit avec beaucoup d'exactitude dans le pas- sage suivant : «Le Paille-en-queue, de la grosseur d'un Pigeon, est tout » blanc et a le bec court et fort. Il a une plume de la queue » longue d'un pied et demi, d’où il a pris son nom. » Ces oiseaux nous faisaient une plaisante guerre, ou plutôt ils » faisaient là guerre à nos bonnets. Ils nous surprenaient par » derrière, et nous les enlevaient de dessus la tête ; et cela était » Si fréquent etsi importun, que nous étions obligez d'avoir tou- » jours des bâtons pour nous défendre d'eux. Nous les préve- » nions quelquefois, lorsque nous apercevions devant nous leur 158 OISEAUX DES ÎLES MASCARFIGNES. » ombre, au moment qu'ils étaient prêts à faire leur coup. » Nous n'avons jamais pu savoir de quel usage leur pouvaient » être des bonnets, ni ce qu'ils ont fait de ceux qu'ils nous ont » alttrapez. » A ces ossements de Phaëtons sont mélangés de nombreux dé- bris d'un Procellaria que je n'ai encore pu identifier, faute de matériaux de comparaison suffisants, et quelques os d’un Puflin, qui n'est probablement pas différent du Puffinus aterrimus. Je n'ai reconnu parmi la masse d’ossemeuts fossiles de Rodri- gue qu'un seul fragment d'humérus de Frézate el un os tarso- la métatarsien du Fou pècheur (Swla piscator) (W). Ces oiseaux abondent cependant dans ces mers, et Leguat nous dit : « Les Fous, les Frégates et les Paille-en-queue, et peut-être » quelques autres oiseaux de mer qui ne vivent que de poisson, » font pourtant leurs nids sur les arbres . . .. Les Fous viennent » se reposer la nuit dans l’île, et les Frégates, qui sont plus » grands et qu'on appelle ainsi parce qu'ils sont légers et admira- » blement bons voiliers, les attendent tous les soirs au guet, sur » la cime des arbres ; ils s'élèvent fort haut et fondent sur eux » comme le Faucon sur sa proye, non pour les tuer, mais pour » leur faire rendre gorge. Le Fou, frappé de cette manière par » le Frégate, est obligé de rendre le poisson qu'il à dans le jabot, » et le Frégate ne manque pas d'attraper ce poisson en l'air. Le » Fou crie et fait souvent difficulté d'abandonner sa proye, mais » le Frégate, plus hardi et plus vigoureux, se moque de ses cris, » s'élève et s'élance de nouveau, jusqu'à ce qu'il l'ait contraint » d'obéir. » Le Frégate est noirâtre, de la grosseur d’un Canard; les » ailes extraordinairement étendues. C’est une espèce d'oiseau » de proye, puisqu'il en a les griffes, et que son bec long d’un » demi-pied est un peu crochu par le bout. Les vieux mâles ont » une espèce de chair rouge comme une crête sous la gorge, » comme en ont nos Coqs. » Les Fous ont été nommés ainsi, parce qu'ils viennent se (4) Voy. pl. 29, fig. 5. OISEAUX DES ÎLES MASCAREIGNES. 139 » jeter inconsidérément sur les vaisseaux, et qu'ils s'y laissent » prendre innocemment. Leur simplicité est si grande, qu'ils » jugent d'autrui par eux-mêmes, et qu'ils ne prennent par les » hommes pour des animaux malfaisans. !s ont le dos châtain, » etle ventre blanchâtre ; le bec pointu, long de quatre pouces, » fort gros vers la tête et un peu dentelez sur les côtez, les » jambes courtes, les pieds à peu près en pieds de Canard et » d'un jaune pâle. » C'est en comparant la faune sédentaire telle qu'elle est aujour- d'hui aux espèces que révèlent les ossenents extraits du sol des cavernes, et que Leguat avait observés, qu'il est possible de constater qu'en moins de deux siècles des changements trè - considérables se sont accomplis dans là composition de cette faune riche jadis, et aujourd'hui remarquablement pauvre. La végétation y a changé aussi le caractère, car les beaux arbres dont parle Leguat ont pour là plupart fait place à des broussailles. Mais ces modifications ne sont dues ni à une catastrophe géolo- gique, ni à des phénomènes météorologiques particuliers, car le climat n'a pas varié. Les traditions locales attribuent la destruc- tion des bois à de grands incendies allumés par l’homme, et c’est aussi l'influence soit directe, soit indirecte de celui-ci, qui me paraît avoir déterminé l'extinction des espèces animales dont je viens de parler. Leguat fut un des premiers qui abordèrent à Rodrigue ; les animaux aborigènes s'y multipliaient en paix ; ils n'avaient encore pour ennemis que les Rats, dont l'introduction, due aux navigateurs, était prosablement récente, et les oiseaux étaient si peu crainlifs, que souvent ils se laissaient prendre à la main. Aussi les matelots des navires en relàche à Rodrigues ne manquèrent jamais de leur faire une chasse active. Enfin l'œuvre de destruction commencée par les marins et par les Rongeurs que nos navires ont transportés partout, s'acheva, sans doute, lorsque les Européens eurent établi à Rodrigue une petile co- louie d'esclaves nègres maigrement entretenus. Le climat de Rodrigue n’est pas devenu contraire à la propagation des espèces animales, puisque des oiseaux de basse-cour, des Pintades intro- 110 OISEAUX DES ÎLES MASCAREIGNES duites par les colons, s’v reproduisent bien, et vivent même à l'état sauvage. La perturbation due à la présence de l'homme semble avoir suffi pour faire disparaître de la surface du globe la plupart des oiseaux sédentaires dont Rodrigue était probablement le der- nier refuge. D'ailleurs l'homme a été la cause directe et indirecte de beaucoup d'autres phénomènes du même ordre, et l'influence qu'il a exercée sur la distribution géographique des espèces ani- males est plus considérable qu'on ne le suppose généralement. 8 2. FAUNE DE L'ÎLE MAURICE. Dans des mémoires précédents, j'ai fait connaître quelques oiseaux de l’île Maurice qui appartiennent à des espèces éteintes, mais qui ont pu être restitués presque complétement, grâce aux découvertes faites il y a quelques années dans la mare aux Son- ges, devenue célèbre par le nombre des ossements du Dronte que lon en a retirés. Depuis la publication de mes recherches sur la Foulque et l'Aphanapteryr, M. Newton à bien voulu me faire parvenir d'autres pièces ostéologiques provenant du même gisement, et ajoutant à ce que nous savions de la faune ancienne de cette île. Ces pièces appartiennent à quatre espèces différentes, dont deux n’ont plus aujourd'hui de représentants, tandis que les deux autres vivent encore dans la même région. Les premières sont : 1° Le Perroquet déjà désigné sous le nom de Psittacus mau- ritianus : 2° Un oiseau de proie jusqu'ici inconnu. Les seconds sont : 1° Un Flamant; 2° Un Héron garzette (Ardea Garzetta). Le bec du Perroquet de Maurice (Psitt. mauritianus, Owen), sur lequel j'ai déjà appelé d’une manière toute spéciale l'atten- OISEAUX DES ÎLES MASCAREIGNES. 141 tion des naturalistes, indiquait un oiseau d'une taille considé- rable. Ces indications se trouvent confirmées par l'examen d’un Ubia qui m'a été récemment envoyé par MM. Newton (1). Cet os est très-remarquable par sa taille; 11 dépasse en longueur celui des grandes espèces de Kakatoës, telles que le Cacatua galerita et le C. erythrolophus ; il est plus grèle que chez ces derniers; il s’en distingue aussi par l'égalité relative des deux condyles inférieurs, qui ne s'observe pas dans les Perroquets que je viens de citer, où le condyle interne est plus large et rejeté en dedans. Chez les Aras, l'os de la jambe est plus court et plus massif que chez les Kakatoës, ce qui lui donne un aspect très- différent de celui que présente notre os fossile. Ces Perroquets de grande taille auraient évidemment frappé l'attention des voyageurs; cependant aucun n'en parle. Ainsi Dubois, qui énumère les représentants de ce groupe qui vivaient à Maurice au xvin° siècle, attribue aux plus grands une taille un peu supérieure à celle d’un Pigeon, tandis que le Psitacus mauritianus devait se rapprocher par ses dimensions du Microglosse. Le seul os que j'ai pu observer du Rapace de l'île Maurice est un tarso-métatarsien parfaitement conservé, qui me parait pro- venir d’un Autour (2). Je l'ai comparé avec son analogue chez toutes les espèces de Madagascar et des Mascareignes, el Je n'en ai trouvé aucun avec lequel il pût être identifié. Sa lon gueur et ses formes grêles, aussi bien que ses dimensions abso- lues, l’éloignent de tous les Faucons (Falco minor, Bouap., Hypotriorchis Eleonore, Genë, H. concolor, Temm., Dissodectes coniventris, Peters, Tinnunculus Nervtoni, Gurney, T. prnctalus, Temm.), et des Accipiter aussi bien que des Spizaetus (Spizaetus occidentalis, Daudin, Accipiter Franciscæ, A. Smith, À. madu- gascariensis, Verreaux, À. Lantzü, Verreaux, A. Moreli, Pollen, A. Brutus, Pollen). I ne peut apparteniràal Æalicætus vociferoides, qui est beaucoup plus grand et plus robuste. Chez le Buteo bra- clypterus, Vos du pied, bien qu’assez allongé, est plus trapu, (4) Voy. pl. 33, fig. 4, 48, 4b. (2) Voy. pl. 33, fig. 2. A, MILNE EDWARDS, 19 142 OISEAUX DES ÎLES MASCAREIGNES. et surtout plus large dans sa partie supérieure; au contraire, dans le Busard (Circus macroscelis, Newton, C. Maillardi, Ner- reaux), les tarses sont beaucoup plus longs et plus grêles. Notre os fossile ressemble beaucoup en plus grand à celui de l'As#ur palumbartus, À semble provenir d’un oiseau de ce genre, et je regrette de n'avoir pas pu le comparer à celui de l'Astu melano- leucus du cap de Bonne-Espérance, qui semble s’en rapprocher par ses dimensions: de façon que, jusqu'à ce que cette compa- raison ait pu être faite, je dois hésiter à considérer ce tarso- mélatarsien comme nous indiquant une espèce d'oiseau de proie inconnue aujourd'hui dans cette partie du globe. Les anciens voyageurs nous parlent bien des Rapaces de Mau- rice, mais souvent il est très-difficile de savoir à quelle espèce se rapportent ces descriptions incomplètes. Ainsi, en 1602, William van West-Zanen cite, dans son Journal de voyage, le Faucon (Va/ken) (1) ; Dubois nous parle de «Pappangues gros » comme des Chapons, faits au surplus comme desAigles, empor- » tantles petits des Cochons et des Cabris » ; et plus loin il signale les « Pieds jaunes, de la taille et de la forme des Faucons, et les » Émerillons, qui, quoique petits, emportent les Poullets ». Ces Pappangues peuvent être le Cèrcus Maillardi, ou l'oiseau dont Je viens de décrire l'os du pied. Longueur du tarso-métatarsien...................... 0,080 Largeur de l'extrémité supérieure ................... 0,011 Largeur de l'extrémité inférieure.....,............... 0,013 Largeur minimum du corps de l'os.............,,... 0,006 Le Flamant ne visite plus que rarement l’île Maurice, et ce- pendant il y était autrefois très-commun, d’après le dire des voyageurs. Les fouilles de M. Clark ont fourni un assez bon nombre d'ossements proveuant de ces oiseaux. M. Newton a pu aussi s'en procurer quelques-uns qu'il m'a communiqués, et je les ai comparés à ceux des diverses espèces du même genre. Ces débris appartiennent à une espèce plus grande que le PAwnico- pterus minor, Geoffroy. Cette dernière se trouve dans le sud de (1) Strickland, The Dodo and its Kindred, p. 14. OISEAUX DES ÎLES MASCAREIGNES. 15 l'Afrique, à Madagascar, et s’abat parfois à Maurice, ainsi qu'on a pu le constater en 1870, où uue bande d’une quinzaine d’in - dividus a séjourné pendant quelques jours dans cette île. Jai pu examiner, grâce à l’obligeance de M, J. Verreaux, l'un de ces Flamants, et reconnaître que c'était bien un P. minor, et qu'il différait sensiblement par sa taille de celui dont on à trouvé les restes fossiles. Je suis disposé à les rapporter, ainsi que l'a déjà fait Coquerel, au PAænicopterus erythrœus, qui vient aussi de l'Afrique australe; mais la détermination des diverses espèces de Phœnicoptères de l’ancien contineut présente tant de difficultés, surtout quand on ne peut se servir des caractères que fournit le bec, que je ne puis présenter cette détermination qu'avec beau- coup de réserves. Parmi ces fossiles, se trouve un tarso-méta- tarsien bien complet, ayant exactement les dimensions d'un os analogue provenant du Phænicopterus erythrœus ; mais d'autres métatarsiens sont beaucoup plus développés ; je n’en ai malheu- reusement que l'extrémité inférieure, qui est au moins égale à celle des plus grands Flarmants ordinaires (Phænicoplerus anti- quorum, Temminck) : aussi il est peut-être possible que ces deux espèces aient vécu ensemble, ou bien ne doit-on les considérer que comme des races d’un seul et même type spécifique. Nous savons déjà que la taille de l'espèce commune varie beaucoup ; peut-être le bec peut-il aussi subir certaines modifications. Longueur d'un tarso-métatarsien fossile de Maurice. .... 0,26 Largeur de l'extrémité supérieure................... 0,018 Larpeuride l'extrémité InIErIEUrÉ.. 2. 0,019 Largeur de l'extrémité inférieure d’un autre métatarse,. 0,021 Largeur de l'extrémité inférieure d'un autre métatarse... 0,022 8 3. J'ai déja eu l'occasion de dire que les îles Maurice, de la Réunion et Rodrigue, à l’époque où nos navigateurs y abor- dérent pour la première fois, étaient en possession d'une faune spéciale très-remarquable par de grands oiseaux apténiens in- connus sur le reste du globe, des Tortues gigantesques, des Sauriens et beaucoup d’autres animaux terrestres qui ne pou- 14h OISEAUX DES ÎLES MASCAREIGNES: vaient y être arrivés par mer et y vivaient en grand nombre. Cette population zoologique si riche, si variée, ne semble pas avoir pu naître sur des terres d'une étendue si restreinte, et des considérations sur lesquelles j'ai déjà insisté dans plusieurs cir- constances m'ont déjà conduit à penser que ces îles doivent être considérées comme les restes d’un continent dont les habitants, avant de disparaître complétement de la surface du globe, au- raient trouvé, sur les points culminants abaissés presque au niveau de la mer, un dernier refuge. Or, d'après le caractère général de la faune aborigéene des iles Mascareigues, on peut être assuré que ces terres présumées ne reliaient aucune de ces stations, soit avec Madagascar ou l'Afrique, soil avec l'Inde ou l'Australie, car on n'y voit aucun des animaux dépourvus d'ailes qui caractérisent les populations animales de ces contrées. La faune malgache est toute spéciale, mais elle avait cependant avec la faune néo-zélandaise et celle des autres parties de la région antarctique des points de ressem- blance tels, qu'on ne peut hésiter à la classer parmi les faunes australes. [est donc possible que jadis elle se soit étendue davan- lage au sud, et vous nous trouvons amenés à l'idée d’une grande terre existant jadis dans la partie de l'océan Antarctique, occupée aujourd'hui par les immenses bancs de plantes marines que l'on désigne sous le nom vulgaire de Æe/p. Dans l'état actuel de nos connaissances, on ne peut former que des conjectures très-vagues relativement à l'ensemble de la faune, dont la population animale des iles Mascareignes nous à offert un échantillon ; mais il est à espérer que, lorsque les voyageurs naturalistes auront exploré les marécages, les cavernes et les terrains meubles des îles Crozet, de Kerguelen, des îles Saint-Paul, et aussi de quelques autres points de la même -région, ils y découvriront des débris fossiles analogues à ceux trouvés à l'ile Rodrigue où à Maurice, et qu'à l’aide de ces restes on pourra reconslituer plus complétement la population éteinte de celte région, et apprécier ses relations avec la faune néo- zélandaise, dont elle n’était peut-être qu'une branche. OISEAUX DES ILES MASCAREIGNES. 145 EXPLICATION DES FIGURES. PLANCHE 29, Fig. 4. Tarso-métatarsien de l'Erythromachus Lequati, vu par sa face antérieure et représenté de grandeur naturelle, ainsi que les figures suivantes. Fig. 42, Le mème, vu par sa face interne. Fig. 4b, Face externe du mème. Fig. 4°. Face postérieure du même. Fig. 4d. Extrémité articulaire inférieure. Fig. 4e. Extrémité articulaire inférieure. Fig. 2. Tibia du Sbrix murivora, vu par sa face antérieure. Fig. 2a. Extrémité articulaire inférieure. Fig. 2b. Tarso-métatarsien de la même espece, Fig. 2c. Face postérieure du même. Fig. 24. Extrémité articulaire inférieure. Fir. 2e. Extrémilé articulaire supérieure. Fig. 3. Tibia d’une autre espèce de Hibou. Fig. 32, Un autre libia de la mème espèce. Fig. 3b. Extrémité articulaire inférieure vue en dessous. Fig. 4. Métacarpien provenant de la même espèce. Fig. 5. Tarso-métatarsien d’un Fou (Su/a piscator ?), vu par sa face antérieure, Fig. 54. Face postérieure du même os. Fig. 5b, Face interne du mème os. Fig. 5°. Extrémité articulaire inféricure. PLANCHE 30. Fig. 4. Sternum du Columba rodericana, vu de côté et représenté de grandeur na turelle. Fig. 44. Le même os vu par sa face supérieure, Fig. 4b. Face inférieure du même os. Fig. 4€. Portion antérieure du sternum moutrant les rainures articulaires coracoi- diennes. Fig. 2. Tarso-métatarsien du Turtur picturalus, vu par sa face antérieure et repre- senté de grandeur naturelle. Fig, 2a., Le mème os grossi. Fig. 2b, Le même os vu par sa face postérieure et de grandeur naturelle. 146 OISEAUX DES ÎLES MASCAREIGNES. Fig. 20. Le même, grossi. Fix, 24, Face interne du même os. Fig. 2e, Extrémité articulaire supérieure. Fig. 9!, Extrémité articulaire inférieure, Fig. 3. Portion du crane de l'Erythromachus Lequati, vu par sa face postérieure et vu de grandeur naturelle, Fig. 3%, Portion cranienne vue de côté. Fig. 3b. La même, vue en dessous. Fig. 4. Sternum de l'Erythromachus Lequati, Vu par sa face inférieure et représenté de grandeur naturelle. Fig. 4%, Le même os vu de côté. Fig. 4b, Face supérieure du même os. Fig. 4e, Portion articulaire antérieure montrant la disposition des rainures coracoi- diennes. PLANCHE 51. Fig. 4. Sternum du Palæornis exsul, A. Newton, vu de côté et représenté de gran- deur naturelle, ainsi que les figures suivantes. Fig. 4%, Face inférieure du mème os. Fig. 1b, Face supérieure du même os. Fig. 40. Mandibule inférieure de la même espèce. Fig. 2. Mandibule supérieure du Necropsiltacus rodericanus vue de côté. Fig. 24, La méme, montrant sa face supérieure. Fig. 2b, La même, vue en dessous, Fig. 2e. Mandibule inférieure de la même espèce, vue de côté. Fig. 29, La même, vue en dessous. Fig. 2°. La même, vue en dessus. PLANCHE 92. Fig. 1. Tèle osseuse de l'Ardea megacephala, représentée de grandeur naturelle, ainsi que les figures suivantes, Fig. 2. Tète vue par sa face supérieure. . Tarso-métatarsien vu par sa face antérieure, . Face postérieure du même. 3 n Fig. 5. Extrémité articulaire supérieure. 6. Extrémité articulaire inférieure. 7 . Tibia vu par sa face antérieure. OISEAUX DES ÎLES MASCAREIGNES. 147 Fig. 8. Extrémité articulaire inférieure. Fig. 9. Fémur vu par sa face antérieure. Fig. 10. Extrémité articulaire inférieure. Fig. 44. Extrémité articulaire supérieure, Fig. 12. Humérus vu par sa face antérieure. Fig. 13. Métacarpien vu par sa face antérieure, Fig. 14. Sternum et coracoidiens vus par leur face inférieure. PLANCHE 39. Fig. 1. Tibia du Psiftacus mauritianus, vu par sa face antérieure el représenté de grandeur naturelle, ainsi que les figures suivantes. Fig. fa. Le même os montrant sa face postérieure. Fig. 4b. Extrémité articulaire inférieure. Fig. 2. Tarso-métatarsien d'un Asfur dont l'espèce semble avoir aujourd'hui dis- paru. (Cet os est vu par sa face antérieure.) Fig. 24, Face postérieure du même os. Fig. 2P, Face interne du même os. Fig 2e, Face externe du mème os. Fig. 24, Extrémité articulaire supérieure. Fig. 22. Extrémité articulaire inférieure. Fig. 3. Tibia du Héron garzette (Ardea Garzetta, Linn.), vu par sa face antérieure, Fig. 3a. Face postérieure du même os. Fig. 3b. Extrémité articulaire inférieure, PARIS, = IMPRIMENRIE DE E. MARTINET, RUE MIGNON, ? AU «à AN NES NAS NS SSS N Callinule Lequaltit, Cigare. S Le Soliliere / É 4. 9. Pillacts meurs ilinntes he Louveau lit é {mp Becquet Facis Machoire inférieure des Psittaciens. e PR Ÿ S à L eure des ÿ er inf Machoire Paris . Jmp.Becquet, Louveau Dh Si allide ù L e des E ñ | eologl gl Ost 13 se As pr orne PERRET F Se a é XII un. en Imp. Becquet, Paris Louveau hth arret 2 — =" nec rt TP 5 RE enmaonaec sure er) ù = Imp.Becquet, Paris. Louveau th. PI°14 g a pe! = Li Ë 5 o J H Inp Becquet Paris. Mellling, LR 1277 Mettlng, Lth C du pied de l'Æpyorns ’ DUAL LIT. Ji L JUS MAXUTNUS y Tibia de l: Zjpyornus 7 Zibia du Dromaires 7200 /Le Martaie 3 Zibra du Casuarius gate CUS PLIS. RTE PREAREEER S 1 Libia ae L'Æpyorne marmite. PL. 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Û À 1 L ‘ : L h | | “ ; , x : ï ‘ L si | + Ê . ’ ’ : L un : ’ L # ‘ | : | | cm i — ï n E3 el “ : L L 1 : 1: , . * L : v ï : 0 - n E 4 " n 4 ‘ L \ ï , 0 : ? n 1 ' : ' U = : L L | : * : À : nn à ' - L 0 ' L | ' 1 4 So v 1 ‘ : : A ac: L . : A G ” n = L L L ï | DL " © , 1 me L = Û ‘ L : | : : ‘ = ï Û h | n L : È Le : | | | en Ê n . | LL | TE : = : . L : * . | = à L x : L L | wa : h | a Phi : | … ‘ + ù mn : : É . : ï : | ° : : | L ï s à où ' L ‘ û , x [l . . b . : . + ' L L , à : a | ï , D ‘ : \ : : ï LU Le M À : x _ 0 g * % A n Ÿ ' : UE Lu + 0 . D - ' - r a ; à à Qi L . ; ) ’ | L : L L | : : : : ES . FU L : a : ï : L : h : : | : L : . ' SL L \ «1 0 CS : . A : à | | ue : ET Ip Becquet Laris DRE /HEAITLS DPUOTTUS # Noël th Lrp Becquet, Paris lértebres de lÆpyorres JA UT US À Noel, lfh Lrp Pecquet, laris Fertébres de 22 Forms PCUTETUULS ÿ. 9 Zt PA lat Æ Noël LA ELLE LE N imp Becquet, Paris Oiseaux de l'ile Rodrigues. ,ouveau Jith quet, Paris Louveau th LELS PO qi Pe SHPY yenbs2g du] gi] nweanoT G£ Td Louveau lith Emp Becquet, Paris Oiseaux de l'ile Maurice ' Fr F LC i * '. 0 g he : L . ; Lo e : 2 Lx . 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