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Professeurs honoraires ÿ DUMAS. (BALARD. /DELAFOSSE, Minéralogie. joe 2 . |. Géométrie supérieure. LE'VMERRIERS 0. Astronomie. P' DESAINS ES EN CC Physique. HIOUVILEBSS. en Te Mécanique rationnelle. PUISEUX. . . Astronomie. HÉSERT. 5.100 RCE Géologie. DOUCHE" PEER Botanique. AMIENS RME EE Physique. PROC e HARSERRET Eten Ur. M ‘Calcul différentiel etintégral. Agrégés- ° Secrétaire. eo eee. Leu H. SAINTE-CLAIRE DEVILLE. PASTEUR. ] DE LACAZE-DUTHIERS . . . BERT. . . HERMITE. BRIOT \ BOUQUET. M ce (BERTRAND RS RE J. VIEILLE lPELIGOT. . te . « PHILIPPON. l Sciences mathématiques. Chimie. Chimie. Anatomie, Physiologie com - parée, Zoologie. Physiologie. Algèbre supérieure. Calcul des probabilités, Phy- sique mathématique. . Mécanique physique et ex- périmentale. Sciences physiques. RECHERCHES SUR LES TUBES DE WEBER ET SUR LE PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX Par le P. LEGOUIS, de la Compagnie de Jésus, S 4<", Je me propose d'établir que, contrairement à l'opinion naguere ia plus autorisée, tous les Poissons osseux ont un pancréas tres- développé, et que le nouveau système vasculaire découvert par Weber en 1827 est simplement le canal excréteur de la glande. Les anomalies de cet appareil me permettront d'expliquer les longues hésitations de la science sur ce point, et Jessayerai ensuite de faire voir que ces anomalies ne sont qu'apparentes. Ces conclusions ressortent de quelques observations nouvelles, et aussi de tous les documents antérieurs plus exactement inter- prétés. | pe UNE Lu HISTORIQUE. d €’ Les questions qui ont trait à l'existence et à la nature du pau- créas des Poissons sont restées jusqu'ici au nombre des plus controversées. Pour que ce sujet soit compris, ainsi que la raison des diseus- sions auxquelles il à donné lieu, il me paraît utile d'appeler d'abord l’aitention sur un des caractères généraux des forces digestives, Elles ont pour objet d'opérer des transformations dont le résultat dernier et essentiel est une dissolution ; il est done de SC NAT. — ART. N° G. I ñ 2 LEGQOUIS, nécessité qu'elles soient exercées par des /iquides. Ceux-ci sont les produits du travail de certains organes de consistance solde, dans le tissu desquels ils s'élaborent. La digestion d’un aliment suppose ainsi trois choses : l’action qui le fluidifie, l'agent liquide de cette transformation, et l'organe solide où se prépare l'agent. Si l'on considère dans son ensemble la digestion d’un animal, on y reconnaît à coup sûr ces trois parties indispensables ; s'il s'agit, au contraire, non plus de la totalité des phénomènes, mais d’une digestion particulière, la digestion pancréatique par exemple, cette série peut y faire défaut totalement ou par- tiellement. On conçoit qu’il puisse se trouver des êtres qui n’aient besoin d'aucun des matériaux empruntés aux aliments par l'organisme à l’aide du sue pancréatique. Une question préalable se présente donc lorsqu'on se propose d'étudier dans un groupe particulier un appareil encore inconnu. YŸ a-t-il lieu d'entreprendre cette recherche? L'absence de l'organe pourrait, chez ces animaux, résulter de l’inutilité d’une fonction à laquelle ailleurs 1l est destiné à concourir. La fonction pancréatique existe-t-elle chez les Poissons? En d’autres termes, parmi les actions physiologiques dont se com- pose le fait complexe de la digestion des Poissons, s'en trouve-t-il qui soient identiques avec celles qu'exercele liquide des pancréas les mieux connus? Tel est le problème fondamental à résoudre avant tout autre. Je serai dispensé de m'y arrêter. L'importance même de la fonction pose en faveur de sogxistence une probabilité que toutes les analogies corroborent ; l’aagord s’est toujours maintenu sur ce point, et enfin M. Bernard, dans son grand travail sur le pancréas, a donné à cette supposition la sanction définitive de l’expérience. Les Poissons possèdent, comme les autres Vertébrés, la fonc- lion pancréatique. L'opinion commune et même générale, parmi les anciens ana- tomistes, allait plus loin, et c’est ce qui donne à l’histoire de ce détail une physionomie qui n’est pas sans intérêt, Convaincus ARTICLE N° 6, DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 3 à priori qu'il existe chez les Poissons un principe de nature pancréatique, tous les auteurs ont pensé qu'il y avait pour pré- parer le liquide véhicule de ce principe un appareil anatomique- ment distinct des parties voisines, comme sont les pancréas de l'Homme et du Chien. Avaient-ils tort? Moins que personne J'aurais le droit de le prétendre ; mais cette supposition fut néan- moins la cause de bien des erreurs. Elle ne tarda pas à paraître peu conciliable avec les faits. On s'évertua à disséquer cet organe, à l'isoler. Quelques suc- cès encouragérent d’abord; toute la tribu des Plagiostomes, con-- formément aux prévisions des observateurs, se trouva posséder le pancréas attendu. Mais les Osseux n'offraient rien de semblable, tout au plus avait-on dans deux espèces (1) quelque chose qui püût être com- paré au pancréas des animaux supérieurs. Au bout de trente ans de travaux (1820-1847) on ne se trou- vait guère plus avancé. Aussi de la lutte entre l’idée préconçue et les résultats étaient nées des hypothèses pour expliquer cette discordance. Mais les affirmations contradictoires, les va-et-vient d'opinion, du même homme souvent, et sur un même fait, dis- créditaient les théories à mesure qu’elles se faisaient jour. La marche de toutes ces recherches est marquée au même carac- ère: d’abord effort pour trouver le pancréas, puis résultat sinon nul, au moins douteux et incomplet. Tel quel, ce résultat deve- nait le point de départ d’interprétations d'ordinaire excessives, tendantes toutes à prouver qu'il existe un appareil spécial four- nissant du suc pancréatique;* En général, ces observations, prises en soi, sont cependant exactes; de même l’idée d'un organe glandulaire distinct est conforme à la réalité. Le lien seul à manqué pour joindre les faits à la théorie, et les anciens travaux n’ont eu que le tort de ne point l'indiquer. Pour l'établir, aujourd'hui qu'il est connu, il ya grand profit à reprendre ces faits signalés depuis longtemps, mais qui manquaient d'explication. J'entrerai en conséquence dans plus de détails. (4) Siurus Glanis (Brandt et Ratzburg), Esox Lucrus (Alessandrini). h LÉGOUIS. En l'absence d’un pancréas ordinaire, on regarda d’abord les appendices pyloriques comme l'organe destiné à en tenir lieu. Cuvier proposa cette manière de voir avec une réserve qui ne fut pas toujours gardée par tous ceux qui l'adoptèrent. La science a longtemps vécu sur cel accommodement entre les idées et les résultats négatifs des dissections. Outre les auteurs des leçons d'anatomie comparée, ce mode d'interprétation compta pour partisans Meckel, Müller, Wagner, Carus, Brandt, Ratzbürg, c’est-à-dire la presque universalité des hommes les plus entendus en ces matières. Leurs adhésions furent acquises à cette doctrine sans doute parce qu’elle satisfaisait à l’idée de la nécessité d’un organe, mais surtout à cause du compte vraiment suffisant qu’elle rend des faits alors connus. On savait que les Plagiostomes ont un pancréas bien développé ; aussi on ne leur trouvait aucun cæcum, tandis que nombre d'espèces d'Osseux avaient des cæcums plus ou moins nombreux, et par contre ne présen- taient aucune trace de pancréas. Vers le temps où cette théorie faisait son apparition, Weber annonçait avoir trouvé le pancréas du Silure et du Brochet ; ces deux espèces manquent d’appendices, et la théorie prit acte de ces deux découvertes. Toutefois, malgré de si imposantes autorités, jamais elle ne régna sans conteste. Steller, anatomiste de Saint-Pétersbourg, avait affirmé depuis longtemps la coexistence des appendices et du pancréas sur beaucoup d'espèces. C'eût été là une difficulté sérieuse, car s'il y à un pancréas êt que des appendices l’accom- pagnent, est-il probable qu'ils aient la même fonction que lui ? Pourquoi deux formes si différentes d'un même organe? pour- quoi une si étrange association d'appareils dissemblables en vue d'obtenir un même résultat? Le débat se trouva ainsi engagé sur les observations de Steller.. Elles paraissaient peu probantes et n’obtinrent qu'une confiance médiocre. Mais quand même on fût venu à bout d’anéantir la contradiction soulevée par cet anatomiste, un fait très-aisé à constater, et reconnu de tous, ne laissait à la doctrine de la sup- ARTICLE N° 8. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. h) pléance par les appendices aucune chance d’un succes durable. Tous les Ésoces, tous les Silures, tous les Cyprins, tous Îles Lophobranches, tous les Apodes, tous les Plectognathes et beau- coup d’autres, manquent absolument d'appendices ; on ne leur trouvait aussi aucune trace de pancréas. Si des Poissons en tel nombre pouvaient se passer de suc pan- créatique, n’était-il pas à croire que la plupart des autres en faisaient autant, et que leurs appendices ne leur servaient point à sen procurer. Que penser dès lors de l'opportunité d’une théorie qui, créée principalement pour expliquer l’absence du pancréas dans les espèces pourvues d’appendices, laisse la difficulté reparaître tout entière dans celles, en si grand nombre, qui mont ni appendices n1 glande. Duvernoy s'est préoccupé de cette objecuion; 1l explique lab- sence simultanée des cæcums et du pancréas par la raison que «l'humeur pancréatique n’est pas aussi nécessaire à la digestion » intestinale des Poissons que dans les autres classes des animaux » vertébrés. » Cette réponse paraît faible ; car, loin de faire com- prendre la convenance de l'hypothèse du remplacement, elle énonce en excellents termes la raison qui doit en faire soup- conner l'inutilité. La critique de cet anatomiste reprend tous ses avantages lors- qu'elle s'exerce sur la valeur des travaux publiés au sujet du pancréas. Il prouve par ses propres recherches qu’on s’est trop häté de décerner ce nom à l'organe mentionné par Weber, soit daus le Silure, soit dans le Brochet. Il y à grande probabilité, suivant lui, que le canal perçant l'intestin à côté du cholédoque (1) n'est qu'un second conduit hépatique. Weber avait pourtant dit vrai; mais 1l devinait la nature de l'organe plus qu'il ne la démontrait, et l’anatomiste français se trouvait avoir raison contre lui, parce que ses assertions trop peu prouvées pouvaient sembler téméraires. La conclusion de cette discussion n’en était pas moins, pour tout Juge impartial, de se 4) Leçons d'anat, comp., t. VV, 2° partie, p. 619. 6 l LEGOUIS. tenir sur la réserve et dans une défiance fondée à l'endroit de la théorie de Duvernoy et des faits allégués par Weber. Les observations de ce naturaliste, quoique tombées en dis- crédit, ne tardèrent point à être vérifiées contrairement au dire de Duvernoy. Alessandrini (1) décrivit avec grand détail une dissection très- attentive des viscères du Brochet, Il en ressortait que cet animal possède un véritable pancréas, comme Weber l'avait entrevu. Plus tard, Brandt et Ratzburg publiaient le résultat de leur travail sur le Silure saluth; 1l se trouvait conforme aux prévi- sions de Weber. Bientôt même un point qui touchait de plus près à la doctrine de la suppléance fut retourné contre elle par suite de nouvelles observations. L La masse des appendices cæcaux de l'Esturgeon représen- tait à Meckel et aux esprits systématiques qui avaient embrassé l'opinion de Cuvier, le principal terme de la transition entre la forme glandulaire parfaite du pancréas des animaux supérieurs et la dissociation extrême et limite des culs-de-sac dans les espèces à cæcums isolés et non ramifiés. Ce fait donnait de la cohésion à la doctrine ; il en était comme le centre. Or, Alessandrini (2), dans la même publication, révélait l'existence, chez l'Esturgeon, d’un pancréas «glandulaire et parenchymateux », semblable, quant au tissu, à tous les pancréas connus, mais aussi fort diffé- rent de cette masse appendicielle sur laquelle s’échafaudait la théorie. C'était là pour elle un dommage plus grand que celui qui eût résulté de la confirmation des idées de Steller ; elle ren- contrait dans cette observation une objection capitale, et elle y perdait un de ses principaux moyens. Duvernoy, 1l est vrai, voyait encore dans ce prétendu pancréas de l’Esturgeon (3) un simple lobe du foie. Mais, au milieu de ce conflit d’observations incomplètes et de dénégations, où s'arrêter, et qui croire? A la (4) Antonii Alessandrini Descript, vert pancreatis…. (Novi Commentaru Acud. scent, Instit., Bonon., 4835, t. Il). (2) Anton. Aless., loc, cit., p, 355-399. t3) Lecons d'anat, comp:, loc. tit.; p. 615. ARTICLE N° 8. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 7 place de la théorie des appendices, rien ne s'élevait pour coor- donner les faits. L’obscurité dès lors va croissant à mesure qu'ils se multiplient. La question se compliquait d’une idée singulière émise par Weber, que cette absence du pancréas parait avoir préoccupé plus que tout autre. Avant l’éclosion de la doctrine de la sup- pléance par les appendices, il avait déjà émis la sienne, celle de la suppléance par le foie. S'il l'eût formulée en disant que chez les Sturioniens et les Osseux, et là généralement où manque le pancréas ordinaire, la bile acquiert quelque chose des pro- priétés du suc pancréatique, en gardant l'essentiel des siennes propres, c’eût été certes déjà une hypothèse hardie ; mais il ne s’en tenait pas à si peu (1). Il voulait que le foie fût en même temps un pancréas, le tissu de nature et pancréatique et hépatique, capable de fournir simultanément ou séparément les deux principes, apte à pourvoir de suc biliaire son canal excréteur et de suc pancréatique un second canal découvert par lui, mais que Duvernoy regarde plus simplement comme un deuxième canal hépatique. Cette conception de la fusion sur une même cellule glandulaire des propriétés pancréatiques et hépa- tiques est difficilement intelligible, et celle de la séparation des voies excrétoires correspondantes ne semble qu'y ajouter une contradiction (2). Aussi paraît-elle avoir eu pour unique consé- quence de mettre en défiance contre le fait à l'occasion duquel elle avait été énoncée. Chose remarquable, ce fait est vrai, mais non dans le sens où le comprenait Weber. Très-importante pour le sujet, cette vérité trouvera plus loin une démonstration com- plète et les développements qu'elle exige. Cette première période (3) de l’histoire de la question, si (1) Texte de Weber : « Folgende Beobachtung wird wahrscheimlich machen dass die » Natur auch zuweilen einem drusigem organe zugleich die stelle eines zweiten vertre- » ten lässt, » (Weber, Archiv. de Meckel, 1827, p. 294.) (2) Voici le texte même de Weber : «...... das die Leber, bei den Cyprinus-arten » zugleich die function des Pancreas habe, weil sie mit doppelten ausfuhrungsgangen... » versehen ist; weil sie auch ihrer Farbe, Form... ünd ihren Entheilüng in kleinere » Läppchen nach, mehr ähnlichkeit mit einem Pancreas, als mit einer Leber hat... » (3) 1828-1839 environ, 8 LEGOUIS. abondante en incertitudes et si pauvre en résultats rigoureux, n'est pas la moins satisfaisante : le sujet traverse vers cette épo- que (4) une phase de confusion plus grande encore, s’il est pos- sible. Tandis que beaucoup d'auteurs s’attardent à poursuivre la démonstration de la théorie appendico-pancréatique, Müller (2) publie sur le pancréas de l’Anguille une note trop peu détaillée pour permettre d'en tenir compte autrement que comme un appel à un nouvel examen (3). Stannius se rapproche de Weber parce qu'il a cru trouver sur quelques espèces (Cyclopterus Lum- pus, Belone longirostris, Trigla Gunardus, Trachinus Draco) (h) le corps auquel ce dernier avait fait allusion; mais comme cet organe manque de canal excréteur, il se rallie plutôt en défi- nitive à l'opinion de Meckel, qui est celle de Cuvier. I arrive même (5) à émettre des doutes sur l'observation d’Alessandrini, relative à l’'Esturgeon. Nous le verrons plus tard se ranger de nouveau parmi les adversaires de cette manière de voir. Wagner (6), dont l’opinion à suivi les mêmes variations, affirme dans la Truite l'existence d’un pancréas avec des appendices pyloriques, mais il ne décrit rien de l'organe; d'autre part MM. Vogt et Agassiz (7), ayant probablement trouvé le même corps, y voient plutôt un tube pylorique. Une observation de Müller, relative à la Lotte, le jette dans les mèmes (8) incerti- tudes. Il finit par rétracter ses premières paroles, et ce qu'ils ont vu, Retzius et lui, ne lui semble plus, tout considéré, qu un analogue des corps de Steller; le prétendu tube abducteur qu'il croyait avoir trouvé n’étail sans doute qu'un lymphatique. Ces corpuscules pourraient même n'être que de simples produits pathologiques (9). (1) 1839-1846. (2) Müller, Lehrbuch der vergleichenden Anatomie der Wirbelthiere, 1845, p. 98. (3) Milne Edwards, Leçons d’anat. et de physiol.. t. VI, p. 513. (4) Stannius, Symbole ad anatomiam Piscium, 1839, p. 36. (5) Stannius, Nouveau Manuel d'anatomie comparée, par de Siebold et Stannius (traduct, Spring et Lacordaire), 14850, t. 11, p. 104, note. (6) Cours d'anat. comp., 1844, p. 267. (7) Agassiz et Vogt, Mémoires de la Société d'histoire naturelle de Neufchätel, 1845. (8) Müller, Archiv, 1840, p. 132. (9) Milne Edwards, Lecons sur la physiol. et l'anat., L. VE, p. 514. à ARTICLE N° 8. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 9 Pas un seul fuit dans tout cet intervalle qui ne paraisse eon- trouvé tôt ou tard ; on assiste à une agitation stérile où tous les efforts s'entre-détruisent. Il en résulte une grande obscurité de laquelle se dégage pour- tant une conclusion à peu près claire. Les observateurs les plus habiles, Cuvier, Davernoy, Weber, Müller, Brandt, Stannins, croyant d'avance à l'existence d'un appareil pancréatique, l'ont cherché, et cela sans succes ; donc cet appareil n’existe pas. Ni l'adresse, ni l’opinitreté n'ont fait défaut; s’il existait, ils l'au- ralent vu. On est heureux d'échapper à cette ère de contradictions par la thèse que M. Brockmann (1) soutenait vers 1846. Elle mérite de faire époque dans l’histoire du sujet, moins à cause de la lumière qu'elle apporte er elle-même que par la précision des faits qu'on y trouve relatés, et par l'importance qu'elle prit en ramenant sur celte question l'attention des naturalistes. Elle renferme les résultats de recherches faites par Stannius et M. Brockmann sur une dizaine d'espèces. Dans le Saumon, le Hareng, la petite Morue, le Chabot de rivière, la Perche, la Plie et le Turbot, l’Aiguillette et la Brème, ces observateurs ont trouvé de petits corps d'apparence glandulaire en rapport avec lintestin par un canalicule. Ils proposent de regarder ces organites comme des pancréas, et quoi qu'il en soit de cette opinion, il faut reconnaitre que l'existence de ces corpuscules est en elle-même un fait inté- ressant. Du reste, dans l'interprétation des résultats trouvés par eux, MM. Stannius et Brockmann sont extrêmement réservés. On sent, sous les formes de la rédaction, qu’une arrière-pensée de- meure quelque part dans l'esprit. L'auteur n’est pas pleinement salisfait de son succès, Ce qu'il avance, il l'a clairement vu, mais tout ce qu'il souhaiterait pouvoir dire, 1} ne le peut avancer, et tout ce qu'il attendait, il ne l'a pas vu. En eflet, il a rencontré peu là où il voulait davantage. Ces À) Brockmann, De pancreate Piscium, dissert, inauguralis. Rostock, 4846. P ul Le] SC. NAT., FÉVRIER 4879. XVII, 12, — ART, N°0 8. 10 LNGŒUS. pancréas, auxquels s'arrête le scalpel de M. Stanmius, sont, pour la plupart, extrèmement petits. Ces rudiments d’organe, comme le dit M. Milne Edwards (t) en les signalant, ne peuvent . fournir que très-peu de liquide. L'idée qu'ils puissent suffire à la digestion des Poissons osseux ne peut subsister dans l'esprit après la lecture (2) du texte où la petitesse de leurs dimensions est consciencieusement notée. Le défaut de proportion entre la fonction à remplir et l'organe qui en est chargé frappe bien plus encore celui qui se donne ia peine de les retrouver par la dissection. Prétendre qu'ils sont le pan- créas des animaux où on les a vus reviendrait à dire que ces êtres manquent de la fonction dévolue à un organe aussi réduit. D'ailleurs, en regard de ces deux espèces, mettons seulement les soixante genres accessibles à l'étude, sans sortir de la faune. française, et la conséquence immédiate sera de nous demander comment pourvoient à leur digestion ces animaux où, vérifica- tion faite, on n'a pas trouvé le moindre granule à interpréter en pancréas. Si des Poissons en grande majorité, ce semble, digérent sans cette glande, l’analogie veut qu'il en soit de même pour les autres, et ce ne seraient point les corpuseules de Brockmana qui empècheraient de pousser à ce point le raisonnement et de s’en tenir à cette conclusion. Même après la publication du travail de ces derniers savants, je dirai plus, surtout après ce mémoire, la conclusion indi- recte des anciennes recherches se trouvait donc encore la plus légitime. Et à la question posée en ses termes les plus généraux : La fonction pancréalique est-elle remplie dans l’ensemble des Poissons osseux par un liquide spécial, produit d'un pancréas comparable à la glande connue sous ce nom? à cette ques- tion, dis-je, la probabilité forçait à répondre négativement, sauf à excepter ensuite deux ou trois espèces (Silure, Brochet, Anguille). | En 1865, lorsque j'entrepris de nouvelles recherches sur ee point, l'aspect du sujet n'avait pas changé. (4) Milne Edwards, op. cét., p. 514. (2) Brockmann, De pancreate Piscium, p. 16 et suiv, ARTICLE N° Ô. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. at En résumé, les tentatives théoriques faites en vue d'accréditer l'idée de l'existence du pancréas devaient être regardées comme illusoires. L'hypothèse de Cuvier et celle de Weber, nées, comme Je le disais en commençant, du besoin d'un organe où l’on n’en trou- vait pas, avaient été renversées par les faits. M. Claude Bernard (1), comprenant bien l'importance de la fonction pancréatique, avait proposé plus récemment d'admettre un pancréas en revêtement laminaire de l'intestin et consommé à chaque digestion. Mais l'éminent physiologiste ne donne cette ingénieuse supposition que comme un pis-aller provisoire, en attendant des éclaircissements nouveaux. Restaient donc les faits seuls avec leur tournure à peu près consiamment négative. Les pancréas trouvés par Brockmann, Stannius et Müller, en prouvant l'habileté anatomique de ces auteurs, semblaient affirmer tout ensemble, et l'impossibilité d’un pancréas eflicace qui les eût eux-mêmes exclus, et, par suite, la nécessité d’une disposition physiologique qui remplit quelque chose de son rôle. C'est dans ce sens que s'exprime le volume des Lecons sur la physiologie et l'anatomie imprimé en 1859, On ylit (2) : «Le » pancréas manque aussi complétement chez beaucoup de Pois- » sons, et chez d’autres animaux de la mème classe il est rudi- » mentaire. » Et plus loin (3): « Le pancréas paraît manquer com- » plétement chez beaucoup de Poissons ; le nombre des espèces » dans lesquelles la présence de cette glande a été constatée est . » restreint, et son volume n'est jamais considérable. » Pourtant la simplicité des raisonnements qui conduisaient à cetle manière de voir n'avait pas conquis tous les esprits. Les opinions sur ce point étaient assez diverses, mais le préjugé de l'existence du pancréas dans la classe entière des Poissons se trouvait encore, je crois, dominant. Il dut, sans doute, d’être aussi vivace à la difficulté des (1) Mémoire sur le pancréas (Supplément aux Compt. rend., 4856, t. 1, p, 540). (2) Milne Edwards, t. VI, p, 503; (3) Op. cît., p. 514. LE LEGOUES. recherches, à l'obscurité des documents publiés sur ce sujet, et à l'instinct qui fait assimiler plus encore des êtres analogues déjà sous d’autres rapports. Mais 1l se maintint surtout par la difficulté apparente de conci- lier l'absence d’un organe avec l’accomplissement de la fonetion. Cependant 1l n'y à là aucune imcompatibilité. De l'acte à l'agent, l'induction sans doute est nécessaire, mais non pas de l'acte à un agent spécial et réservé à cet acte seul. Celui qui a réfléchi sur les lois de la localisation et de la diffusion du travail comprend aisément cette différence. Où gît l'essentiel de la fonction pan- créalique? Ce n'est pas, je le répète, dans la production par une glande ou une cellule spéciale, d'un liquide spécial; c'est dans l'action physiologique du liquide dit pancréatique sur tout ou partie des aliments. Or, ce liquide n’est pas seul. Les fins de la digestion sont atteintes chez l'homme, principalement par cinq humeurs de cet ordre : les sucs salivaire, gastrique, hépatique, pancréatique et intestinal. Cette combinaison de cinq éléments n'a rien de nécessaire à priori. Trois, deux peuvent sulfire ; un seul même. La digestion se fera sans doute avec une déli- catesse, une précision moins exquises; l'étendue, la prompti- tude de l'acte souffriront, les produits seront moindres, et l’assi- milalion sera pourtant préparée d’une manière telle quelle, en rapport avec les besoins d’un organisme moins parfait, et la vie sera entretenue. Les Poissons osseux pourraient n'avoir pas de pancréas, sans . que cependant l'opération dévolue ordinairement au sue pan- créatique manquât à leur digestion; les autres liquides digestifs auraient alors acquis quelque chose des propriétés essentielles de ce suc. En dehors de son mode le plus parfait, la fonction peut s’'accomplir par adaptation d'appareils ou par simple extension d'une fonction similaire. Celte dernière supposition convenait bien au cas actuel; j'aurais pour ma part admis volontiers qu'un suc intestinal plus copieux relativement et plus énergique rem- plaçätle produit du pancréas dans ces tribus ultimes de la famille des Vertébrés. Cette opinion ne parait pas, ce me semble, éloignée de celle ARTICLE N° 8, DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 15 que supposentles paroles suivantes ; je les tire d’un livre déjà cité afin qu’elles communiquent à ma manière de voir une autorité incontestée. Elles viennent à propos de la digestion spéciale des graisses ; mais l’idée qu'elles expriment semble en parfait accord avec ce que je viens d'avancer : « Je rappellerai aussi, dit l’auteur (1), que chez la plupart des Poissons le pancréas n'existe pas, où ne se trouve qu'à l’état rudimentaire, et cepen- dant nous avons tout lieu de croire que ces animaux digèrent et absorbent les matières grasses contenues dans leur proie ; car, en général, on trouve de l’huile en abondance dans quelques- uns de leurs organes. Il est vrai que les fonctions dévolues à un instrument physiologique spécial chez les animaux d’une struc- ture très-perfectionnée peuvent être remplies ailleurs par d’au- tres parties de la machine vivante, etc., etc. » La théorie nouvelle se fondait sur une substitution physio- logique, tandis que les anciennes admettaient une substitution d'organe. Telle était la raison de la supériorité de la premiere, et aussi, 1l faut le dire, tout le progres de la question en qua- rante ans. Encore, si plausible que parût cette théorie d’accommoda- tion fonctionnelle, on s’accordait à croire que la science ne pourrait s’y fixer avec sécurité sans de nouvelles informations. Elle avait le désavantage de s'appuyer sur des résultats négatifs. D'ailleurs, les incertitudes de détail, dans ce sujet singulier, avaient été se multipliant à mesure que les explorations s'étaient étendues. Deux faits, en particulier, demeuraient dénués de toute explication. Le premier par la date et aussi par l'importance, remontait à la découverte de Weber (2). Il avait va un tube, qui n'était point un cholédoque, aller de l'intestin au foie. La théorie qu'il conçut à Ce propos n'oblint jamais d'assentiment sérieux, et M. CL. Bernard (3) en avait mis en lumière l’étrangeté. Mais le fait subsistait ; M. Bernard à retrouvé ce singulier appareil sur (1) Milne Edwards, Leçons sur la physiol. et l'anat.,t. VI, p. 81. (2) Weber, Archives de Meckel, 1827, p. 294. (3) Cl, Bernard, Mémoire sur le pancréas, p, 544, 1% LEGQUES. quelques espèces. Suivant lui, ces tubes ne présentent aucun rapport, aucune analogie qui puisse en faire soupçonner la nature dans l’état actuel de nos connaissances. « C’est là proba- blement un appareil inconnu », tels sont les termes dont se sert l’éminent physiologiste. Ces tubes, que j'appellerai provisoirement tubes de Weber, que sont-ils ? Que signifient aussi les corpuscules d'aspect glandulaire que M. Brockmann a trouvés, sans leur voir aueune connexion avec le duodénum ? Semblables aux pancréas de cet auteur, ne dépendent-ils point de ces organes? S'il n'en est pas ainsi, 1ls feraient plutôt douter de l'assimilation légitime des autres à un pancréas vral. J'ai tenté d’élucider ces deux points, et de résoudre quelques- uns des problèmes partiels que soulevaient les anciennes obser- valions. Si Dieu, de qui viennent tous les succès, même les plus modestes, m’a donné plus que je n’osais espérer, je l’en remer- cie. C’est en effet la synthèse de tout ce qui regarde ce détail de l’organisation des Poissons que je me crois en droit d'exposer, et que je livre, non sans confiance, à l’appréciation des hommes compétents. J'entrepris ce travail en 1865, il se prolonge encore. Mes re- cherches ont porté jusqu'ici sur une quarantaine d'espèces, variées d'habitat, fluviatiles, marines, mixtes, où se trouvent représentées les principales familles naturelles. Les sujets furent tirés de provenances diverses. Commencées à l'École normale, ces études ont été continuées en Normandie, et pour la partie la plus importante à l'aquarium de Concarneau, avec l'obligeant assentiment de MM. Coste et Guillou, puis au Muséum dans les laboratoires de MM. Lacaze-Duthiers et Milne Edwards, et enfin dans plusieurs des maisons de la compagnie de Jésus. Je n'ai pu pousser jusqu'au même point l'examen de tous ces types, mais entre tous les résullats obtenus et ci-dessous résu- nés règne une concordance parfaite, il n'y a pas un seul fait dissonant ; j'ai même eu la satisfaction de voir toutes les obser- vations antérieures, sans exception, depuis Müller jusqu’à Brock- ARTICLE N° 6. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 15 mann ef M. Bernard, si disparates lorsqu'on les rapproche sans commentaire, s'expliquer aujourd’hui sans effort. Elles prennent d’elles-mêmes leur place dans le système que je propose. Elles recoivent de lui leur vrai sens, et lui apportent une confirma- tion à laquelle j'attache le plus grand prix. ep RÉSUMÉ DU SUJET DANS SON ÉTAT ACTUEL. Le nombre des espèces étudiées avant moi et depuis 1865 est considérable ; cependant il en est bien peu dont l'examen n'ait rapporté quelque chose de spécial, et qui ne fournissent leur trait à la physionomie de l'ensemble. Il serait impossible aussi d'en citer une qui, seule où associée à un petit nombre d’autres, donnât de tout ce système anatomique une idée approxi- mativement exacte. Le lien analytique qui réunit tous les faits est partout dispersé. C'est par des comparaisons multipliées, établies pour ainsi dire point par point, qu'on parvient à le saisir. Il est donc nécessaire de le faire connaître avant d'entrer dans le détail des observations. Précédées de l'énoncé et de la dis- cussion sommaire de la loi générale, celles-ci gagneront en clarté et en valeur démonstrative ; d'autre part, l'évidence et la simplicité du résultat final seront mieux senties. La première partie de cet exposé sera consacrée à prendre une vue d'ensemble sur l’état actuel du sujet. Dans une seconde plus volumineuse, mais non plus importante, auront place les résultats immédiats des observations. Les espèces étudiées sy présenteront comme une série de pièces justificatives. Après l'examen et la critique des relations générales auxquels je vais dès maintenant me livrer, cette indication plus particu- lière des procédés et des détails permettra de juger de la solidité et de la concordance du tout. La certitude, j'espère, en sortira complète. L'histoire du sujet montre les questions qui doivent princi- palement fixer l’attention ; ce sont aussi celles qui ont surtout sollicité mes recherches, à savoir : 16 LEGOUIS. , 4° La généralité de l'existence des tubes de Weber et leur fonction. 2° La généralité de l'existence du pancréas, et, s’il existe, la disposition anatomique qui le rend imvisible. 3° L'existence et la nature de la relation du pancréas avec les tubes de Weber. h° Les rapports du pancréas avec les viscères, et particuliè- rement avec le foie. Je parcourrai successivement ces quatre divisions . J'ajouterai dans une cinquième quelques données sur les organes lymphatiques. 4° Des canaux de Weber, J'appelle canaux de Weber un système de vaisseaux, vu en premier lieu par Weber, et qui s'étend en ramification plus ou moins compliquée à la surface des viscères, dans le foie et sur les membranes abdominales. Ils sont communs à tous les Poissons osseux : je les ai ren- contrés toutes les fois que j'ai eu occasion de les chercher sur ces animaux ; mais leur aspect varie. Chez la plupart des espèces, ils ne sont visibles qu'au microscope, comme les Iymphatiques moyens, dont ils ont les dimensions; alors 1ls n'apparaissent dans leur ensemble que si lon réussit à y faire pénétrer un liquide fortement coloré. Au contraire, dans un petit nombre de Poissons, tels que la Carpe, le Turbot, le Maquereau, la Sole, ils prennent partielle- ment, et sous certaines influences spéciales, un vif reflet d'argent. On les suit alors assez aisément à l'œil nu; de là vient que Weber en à immédiatement constaté la présence chez le Cyprinus Carpio, sans les trouver dans les autres espèces qu'il étudiait en même temps. Ces différences expliquent aussi comment M. Stannius, qui travaillait sans doute dans des circonstances désavantageuses à la formation de la teinte nacrée, n’a pas constaté leur existence, ARTICLE N° 8. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. A7 quoiqu'il se soit occupé d'animaux où cette vascularisation est particulièrement étendue ; tandis que M. CI. Bernard, qui les à reconnus sur plusieurs espèces, n’a vu sur chacune d'elles qu’une partie probablement assez minime du système complet. Enfin ils ont échappé à tous les autres ichthyologistes, du moins à ma connaissance. Considérés en eux-mêmes et de prime abord, ces vaisseaux ne paraissent se rattacher à rien de connu. Leur caractère le plus remarquable est leur déversement dans l'intestin, plus ou moins près de l’orilice du cholédoque, souvent par l’intermé- diaire d'un tronc renflé en ampoule. Ce ne sont donc n1 des veines, ni des artères ; la régularité de leur ramification les sépare aussi neltement des Iymphatiques dont ils se rapprochent par leur volume et par la ténuité de leurs parois. Monro, Fohmann et M. Stannius ne les en ont point dis- tingués, sans doute parce que le mercure de leurs injections pénétrait dans les deux ordres de vaisseaux à la fois. J'aurai occasion, à propos du Maquereau et de plusieurs espèces, de discuter plus complétement les différences qui séparent ces vaisseaux de tous les autres systèmes d'irrigation physiologique. Is forment dans quelques espèces (1), dont l'intestin est long et contourné, une arborisation extrêmement étendue et fort élé- gante (2). Il n'est guère de sinus intestinal où ne se glisse quelque ramuscule de ce système; de mème des branches qui en dé- pendent s'engagent entre les appendices pyloriques lorsqu'ils existent (3); leurs principaux troncs suivent souvent le cholé- “oque ou les veines portes, spléniques et mésentériques. Ils pé- nêtrent fréquemment dans le foie (4), jamais dans aucun autre viscère. Logés d'ordinaire dans l'épaisseur des membranes périto- (1) Mugil, Scombres, Cyprinoides, etc. (2) PI XIXS fi PIX XX fige 4, (3) Zeus faber, Scombres, etc. (4) Cyprinoides, Sparus erythrinus, Trigles, Pleuronectes, ete. 18 LEGQUES, néales, ils semblent courir quelquefois à la surface de l'in- testin (1), mais c’est une simple apparence résultant de la chute et de l'application sur la paroi intestinale du repli mésentérique qui les renferme ; ils s’'approchent ordinairement très-près de la rate en suivant la veine splénique, et il est très-commun de les voir s’étaler sur la vésicule du fiel (2). Ils sont très-réduits dans les Anguilles et les Murènes (3); enfin les Sélaciens et lés Sturioniens (4) paraissent en manquer. 20 Pancréas. Je n'ai pas rencontré d'espèce qui ne fût pourvue d’un pan- créas; cette glande est même considérable, malgré la dispersion ordinaire de ses éléments. Mais la disposition qu'elle affecte est si variable entre espèces voisines et entre individus d’une même espece, elle brise si entièrement avec les analogies tirées des animaux des classes supérieures, qu'il n’y à point à s'étonner de l’insuccès des recherches dont elle fut Fobjet. Le plus souvent le tissu se dissimule dans la masse viscérale ; il se perd quelque « fois dans l’intérieur du foie; enfin presque toujours il est caché dans des dépôts graisseux dont il adopte la couleur. Les Plagiostomes seuls possèdent un pancréas semblable à celui des autres Vertébrés (5). Hors des limites de cette famille, la glande à un aspect très-particulier; elle peut être rapportée à un type unique, mais cette figure fondamentale est suscep- tible de modifications secondaires capables de lalterer profon- dément. Les grandes lignes de la loi qui régit ses formes sont (1) CL. Bernard, Mémoire sur le pancréas et Lerons de physiol. expériment., 1855, p. 480. (2) Scomber Scombrus, Gadus Merluchius, Pleuronectes maxünus, PI, Sola, ete., PI. Platessa, PI. Flesus, Gadus Pollachius, ete. (3) Muræna Conger, Muræna Anquilla. (4) Acipenser Sturio, Cart harias (glaucus ?), Rhina (Ange), Raja Batis. (5) Je n'ai point eu occasion de disséquer le Sato salar ni ie Saluth, mais je suis convaincu qu'ils rentrent, quant à leur pancréas, dans la catégorie commune à tous les autres Osseux. ARTICLE %° 8, DU PANCRIÉAS DES POISSONS OSSEUX, 19 constantes, mais elles dépendent de rapports anatomiques qui échappent au premier coup d'œil. J'adopterai donc provisoirement, pour plus de clarté dans la description, la division que M. Stannius (1) à indiquée : un pre- mier groupe où la glande est disséminée, un second pour les pan- créas diffus, et un troisième comprenant les pancréas massifs ordinaires. Pancréas disséminé (2).— Silon examine avec un soin scru- puleux les lames hépatique, splénique et intestinale du péritome, on reconnaît qu'elles sont, surtout dans certaines espèces (3), se- mées de globules glandulaires. Chacun de ces corpuscules est un pancréas ; et, généralisant cet énoncé, on peut dire : Toute glande, le foie excepté, ou toute glandule, nettement distincte, isolée ou engagée, qu'on rencontrera dans les membranes des viscères digestifs abdominaux, quels que soient son aspect, son volume, sa place, est un pancréas. Toujours elle sera reliée au duodénum par un appareil excréteur. La région occupée par ces systèmes de granules paraîl inva- riable pour chaque espèce (4), mais la place de chaque grain, non plus que son volume, n'a aucune fixité en général. Quelques- uns (5), plus importants sans doute, sont plus gros et d'existence plus constante. Ce sont ceux-là qu'ont trouvés MM. Stannius et Brockmann dans le Hareng, la Vive, la petite Morue, etc. Quoique le nombre de ces globulins visibles puisse être consi- dérable (j'en ai compté dix-sept à vingt dans le Bar), 1ls ne forment que la minime partie de l'organe, qui se complète, soit par l’adjonction d’une foule de granulations semblables mais mi- croscopiques, soit par d’autres dépendances dont J'aurai bientôt à parler. Ainsi se trouve écarté le reproche d'insuffisance qui frappait ) Brockmann, thèse inaugurale, p. 24. ) PI. XVII, fig: 2, 3, 4, 5. — PI. XIX, fig. 1. ) Perche, Cyprins, Bar, Cycloptère, Alose, Cobitis, etc. \ / Gadus Merluchius. 20 LEGOUIS. justement les résultats de MM. Stannius et Brockmann. Ces ob- servateurs donnent, pour pancréas entier de la plupart de leurs espèces, ceux seulement de ces globules dont ils ont vérifié la communication avec l'intestin ; tandis que la même fonctior s'étend à d’autres globules de même ordre qu’ils ont vus sans en reconnaitre les connexions, et à d’autres parties encore dont ils ne se sont point occupés. Il faut en effet remarquer que sous cette forme disséminée, certains pancréas atteignent, grâce à leur partie microscopique, . un extrème développement. Les globules visibles sont dus au ren- flement normal ou accidentel de certains points d'un immense système dont on est surpris de trouver des dépendances dans des régions très-éloignées du duodénum et même de ces glo- bules (Maquereau). Pancréas diffus (X). — La seconde forme, plus importante et plus générale, est lamellare et rappelle de loin le pancréas du lapin. C'est, en réalité, une toile glandulaire beaucoup plus légère encore, au point de se confondre souvent avec la mem- brane dans l’épaisseur de laquelle elle s'épand (2). Ailleurs elle se condense, prend un peu de corps avec une couleur laiteuse (3) ou roussâtre (4); souvent elle est nue, parfois revêtue de tissu adipeux. Il est à peu près impossible, dans l'un et l’autre cas, de la distinguer, à moins d'être prévenu de son existence. La ressemblance superficielle avec des traînées graisseuses, sur- tout sur les individus tirés de l’eau depuis déjà deux ou trois heures, est telle, que je n'hésite pas à rapporter à cette cause l'illusion qui à jusqu'ici trompé les observateurs. Tous, J'en suis convaincu, qu'ils le cherchassent ou non spécialement, ont vu le pancréas, au moins en partie, mais 1ls n'ont pu croire leurs yeux ; et, déroutés par toutes les apparences de couleur et de forme, ils ont négligé ce tissu prétendu graisseux, et passé outre. J'ai reconnu, non sans étonnement, que dans les anses du sys- (4) PI. XNIII, fig. 1. (2) Vésicule biliaire du Maquereau ; péritoine de l’A/herina presbyter, ete, ete. (3) Pleuronectes maximus. (4) Gadus Merluchius, Muræna Conger. ARTICLE N° 8. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 24 tème intestino-hépatique des Poissons, ce qui souvent est rare, ce qui fait quelquefois défaut, c'est la graisse, qu'on s’est arrêté À ï voir; ce qui abonde, c’est le parenchyme pancréatique, d on n'a pas vu. L'étude seule des canaux de Weber (1) pouvait conduire à cette distinction fondamentale. En outre, J'ai eu, lorsque mes idées étaient déjà fixées, la bonne fortune de rencontrer une espèce où le tissu graisseux est, vers l'époque du frai, en juin, presque réduit à rien, et où la nature glandulaire de la mem- brane est bien reconnaissable. C'est le Muræna Conger, dont l'étude offre un grand intérêt à divers égards. Il en est de même à un moindre degré dans les ebndih les Merlus et autres ; là encore le péritoine de certains individus rappelle les glandes par la couleur et la vascularisation des espaces intercæcaux, et des anses intestinales. Cette surface de sécrétion s’élargit d'ordinaire d'une façon prodigieuse ; elle s'étale sur les mésentères (2), s'engage jus- qu'au fond des sinus de l'intestin, ou en accompagne seulement les veines, les recouvrant comme d’un enduit (5); remonte dans la courbure stomacale jusqu'à la membrane diaphragmatique, se retrouve tout près du cloaque (4), et occupe les vides entre les appendices (5). Enfin, on peut dire sans exagération, de quelques espèces (6), que les viscères de là masse gastro-intestinale sont plongés dans une sorte de milieu pancréatique. Chez plusieurs, cette nappe paraît se cantonner, au moins pour un temps, dans des limites plus précises (7), sauf pour des individus exceptionnels. Elle se renfle quelquefois, surtout au voisinage du cholédoque (8); et ces points sont autant de foyers (ORPI XVIIE hp 1,2, 3,9. — Pl XIX,, fig. 1. — PI. XX, fig. 1. (2) Belone longirostris, Maquereau, Gadoïdes, (3) Epinoche, Cyprinoides, Pleuronectes, Sparus Pagrus, (4) Muræna Conger. (5) Labrus, Trigla hyra, Chabot de mer et de ruisseau. (6) Caranx, Scombrus. (7) Merluchius, Aiguillette. (8) Merluchius, pl. 1, fig, 1; Pleuronectes maximus, PI, Sola, 22 LRGOURS. à partir desquels elle s’irradie en s'amincissant dans toutes les directions qu’elle trouve ouvertes (1). ’ Au contact d’un obstacle infranchissable, elle s'arrondit en bourrelet ; elle tapisse souvent les veines et la vésicule du fiei, jamais l'intestin ni le foie. En revanche, elle entre parfois dans la substance de ce dernier, autour des troncs du système de la veine porte, soit sous forme de fourreau, soit en franges lamel- laires qui les bordent à droite et à gauche. Pancréas massif. — Enfin, quelques Poissons osseux présen- tent un organe pancréatique semblable à celui des Vertébrés supérieurs, vérilable glande composée, toujours établie sur le duodénum. Cette forme, de beaucoup là plus rare, est celle que les auteurs avaient trouvée très-accusée dans le Silure, moins nette dans le Brochet; c'était aussi la seule qu'on püût recon- naître indépendamment de l'étude des tubes de Weber. À ces deux exemples J'ajoute lAnguille, le Congre, le Pleuronectes mazunus et le Merlus. I ne faut point attribuer au mot #nassif un sens trop étroit, je l'adopte par opposition avec les autres états, dont le carac- tère est une dissociation plus ou moins complète. Ces trois déno- minations peignent les choses d’une manière satisfaisante, mais une seule de ces dispositions se trouve rarement figurer la tota- lité du pancréas d'une espèce. La concomitance des formes est la règle, et je regarde les exceptions comme transitoires, en raison de la variabilité étendue de cet organe dans l'espèce et l'individu. L'idée générale la plus complète et la plus exacte qu’on puisse se faire du type d'un pancréas de Poisson osseux serait done une nappe lamellaire envoyant des expansions en grand nombre daus les replis péritonéaux (forme diffuse). Le parenchyme de cette nappe, constitué en majeure partie par des aciné micros- copiques plus ou moins agglomérés, se condense, ailleurs, en glandules que relient parfois entre elles des portions amineies au point de devenir linéaires (forme disséminée)., — Enfin, en (4) PL. XVIIL fig. 4. ARTICLE N° 8. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 23 certaines régions privilégiées, la même nappe membraneuse s'épaissit jusqu'à prendre quelque chose du volume habituel et de la physionomie des glandes. Tel est l’aspect sous lequel ily a, selon moi, avantage à résumer l'organe et à envisager unité des trois formes, Le Turbot et le Gadus Merluchius sont les meilleurs exemples de l'association des trois états ; le premier se superpose au second dans le Belone longirostris, le Houting et une foule d’autres; enfin, je ne connais point, en dehors des Plagiostomes, de pan- créas massif qui n'ait des prolongements membraneux de deuxième espèce, au moins le long des veines (1). Sur ce point, les travaux de Müller, d'Alessandrini et de M. Leydig, garan- üissent l'exactitude des résultats. I n'y a, quant à la fréquence et aussi quant au degré d’abon- dance, aucune comparaison à établir entre les formes microsco- piques et toutes les autres, C’est exceptionnellement que certaines granulations deviennent visibles, et, parmi ces dernières, les pancréas massifs sont, à leur tour, une minime exception. Dans les individus où le pancréas diffus et laminaire est le plus _ développé, on parvient sûrement, par une recherche assez atten- live, à trouver des glandules visibles de la forme disséminée (2). De même celle-ci, à son état microscopique, s’adjaint presque toujours d'autres glandules plus où moins saisissables à l'œil nu. Un certain nombre de Poissons de pelite taille (3) ne m'ont jamais montré que des glandules disséminées, tandis que d'autres, aussi peu volumineux, ont un pancréas mixte (4). J'expliquerai, en traitant de ces espèces, pourquoi je ne pense pas qu'il faille attacher à celte division en trois formes une grande importance. (4) Anguille, Congre, Brochet, Esturgeon, (2) Maquereau. (3) ( 2! LEGQUIS. 3° Rapports du pancréas avec les tubes de Weber. Les tubes de Weber ne sont autre chose que les conduits excrétoires des deux premières formes pancréatiques. Rien ne le ferait supposer tout d'abord. La première fois qu'on les aperçoit, c'est grâce à leur chatoiement nacré ou au résultat inattendu d’une injection. Dans un cas comme dans l'autre, l'intelligence vraie de cette découverte ne peut se pré- senter à l'esprit tant qu'on ne possède point la connaissance préalable des allures singulières et de l'existence du pancréas mi- croscopique. Si c’est la teinte nacrée qui les fait mcidemment paraitre, on pense aussitôt, comme l’a dit M. CL. Bernard, avoir mis la main sur quelque appareil nouveau, inconnu dans les ani- maux d'une structure plus perfectionnée. L'analogie frappante de leurs couleurs avec les tons argentés des écailles et de cer- taines membranes porterait même plutôt à admettre que ces tubes doivent avoir quelque rapport avec l’origine de ces colo- rations. Si, en second lieu, comme il m'est arrivé, une mjection les manifeste, on ne sait que penser de leur nature. L'arborisation injectée, quoique régulière, présente un aspect sv generis (1) ; en outre, elle s'étend indistinctement à la surface de certains viscères et sur des membranes de parfaite transparence et d'une lénuité extrême. Quelle probabilité y a-t-1l que ce soient là les voies d'excrétion d'une glande hypothétique dont on n’aperçoit aucun vestige? L'étendue des surfaces où s'épanouit ce système, les terminaisons si variées et si distantes des tubes, tout dans les apparences est en opposition avec la station ordinaire d'un appa- reil sécréteur. Jai poursuivi pendant longtemps la recherche simultanée de ces tubes et du pancréas sans oser croire à l’existence d’une relation directe entre ces deux parties, Et il n’est point de ARTICLE N° 8: DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 25 sujet où il soit plus nécessaire de se mettre en garde contre l'effet d'une première impression. De plus, l'incertitude s'accroît à la réflexion. Si l’on re- cherche des faits analogues déjà connus, on n’en trouve que deux : l’un consigné au mémoire deM. CI. Bernard (1), et l'obser- valion relative à la Carpe (2). Stannius et Brockmann, Schmidt, Rathke et les anciens auteurs, n’ont rien vu de pareil. L’anato- miste qui n'aura rencontré lui-même cet appareil que sur deux ou trois espèces, dans un travail d'assez longue durée, sera ainsi conduit à regarder ce système comme spécial à certains Poissons, et par suite comme étranger à la fonction pancréatique qu’on sait commune à tous. D'ailleurs, si ces canaux aboutissent à une glande, il faut admettre que cette glande, dans la Carpe, est confondue avec le foie; association étrange de tissus, qui serait à elle seule une difficulté grave contre l'hypothèse. Enfin l'examen microscopique, lon, dans les commencements, de redresser l'opinion, serait plutôt capable de l’égarer. En effet, du moment que, sur une pièce, les tubes de Weber sont deve- ous visibles par leur reflet nacré où par injection, 1l est à peu près certain que, sur cette mème pièce, les cellules du pancréas laminaire seront alors détruites, ou à tout le moins méconnais- sables. Cela vient de la promptitude avec laquelle ces utricules se flétrissent, tandis que la teinte nacrée ne se développe qu’à la longue et qu'il faut beaucoup de temps pour réussir ces sortes d'injections. Aussi, même apres que la disposition anatomique avantageuse du Maquereau (3) et du Caranx Trachurus w'eut mis sous les yeux la communication d’un rameau wébérien avec un grain glandulaire voisin du duodénum, j'ai longtemps encore balancé à admeltre que cet immense réseau de filets partiellement argentés, dont les mailles allaient entourer les faisceaux des ap- pendices, fût /ouf entier au service d’un appareil pancréatique (1) Leçons de phystol, expériment., p. 480-483. (2) Weber, Archiv. de Meckel, 1827, p, 394. (3) PI. XIX, fig. 4. SC. NAT,, FÉVRIER 1873. XVII. 49. <= ART, N° 8 26 LEGOUES. invisible. Malgré ce que cette hypothèse avait de simple et de plausible, les raisons contraires me semblaient presque prépon- dérantes. L'incertitude n’a cédé que peu à peu devant la netteté et la mulüplicité des preuves. Aujourd'hui ma conviction est entière, et si quelque obser- vateur, ayant rencontré ces mêmes tubes, éprouvait les mêmes doutes, j'ai confiance que la lecture de ce travail le ramènerait à ma manière de voir. Car l'existence du pancréas microscopique et l'ampleur de ses dimensions superficielles ôtent à cette opinion ce qu'elle a de plus invraisemblable à l'abord. Et s'il est souvent difficile, dans un cas donné, de constater la présence du tissu glandulaire, j'affirme qu’en opérant avec méthode, et en se plaçant dans des circonstances favorables, on vériliera la coexistence des acini et des tubes, et même leur dépendance et ieur nature. n’y a point, en effet, de ramuscule de ces canaux qui n'a- boutisse, d’un côté à un noyau visible (1) ou microscopique (2), et ne se relie de l’autre par des communications intermédiaires au duodénum (3). Toute espèce peut servir à la démonstration de ce fait, mais la préparation est plus aisée sur une région pan- créatique disséminée en glandules assez grosses, comme il s’en trouve dans le Labrar Lupus, le Cyprin de Chine, le Zeus faber, ete. Les plus gros troncs du système wébérien se rendent aux globules les plus volumineux, qu'on peut en général dis- tinguer sans secours d'instrament. Quelquefois (Tanche, Bar- beau, Brème (4), Carpe), cerlaius amas pancréatiques sont assez près du duodénum et leur canal excréteur assez ample pour qu’on puisse engager une soie dans toute la longueur du conduit. Dans les cas difficiles (Sardine, Maquereau, Chabot de mer, ete.), il faut d’abord, par injection, ou sinon par une recherche microscopique à de faibles grossissements (50 à (1) PL XVIIL, fig. 2-3. (2) PI XVIII, fig. 5, (3) PL. XVILL fig. 2, 8,5, — PI. XIX et pl. XX, fig. 4: (4) PL XVIIL, fig. 4. ARTICLE N° 8. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. a 150 diamètres), prendre quelque connaissance du régime de ces vaisseaux. On déterminera ainsi certains points de leur trajet qui jouissent d'une fixité remarquable. Ces préliminaires sont pénibles et demandent parfois l'examen d'un grand nombre de sujets. Mais, enfin, lorsqu'on a réussi à poser quelques re- peres invariables sur le trajet des tubes, en portant ces points au microscope, dès l'ouverture d’un animal encore vivant, s'il est possible, on aura chance de voir, d’une manière très- distincte, la glande et la pénétration des ramuscules dans les acinl. Je me suis attaché à atteindre cette pleine évidence dans un assez grand nombre de cas (1); mais je dois réserver le détail des procédés et des résultats pour la description des espèces. Toutes les fois que, en suivant ce manuel opératoire, j'ai eu des insuccès, il m'a été facile d'en reconnaitre la cause dans quelque cir- constance de l'observation, et la démonstration ne peut en être infirmée. Quant à la constatation de la continuité avec le duodénum, elle est beaucoup plus aisée. Même lorsque les différents systèmes vasculaires, sanguin, wébérien, lymphatique, s’entrecroisent en réseaux compliqués (2), les tubes de Weber se distinguent faci- lement des autres, et il suiit, dans tous les cas, de s’astreindre à une étude microscopique assez patiente. À l'appui de cette preuve directe, j’ajouterai que quelques espèces, tres-rares, offrent le double avantage de présenter un pancréas visible et de se prêter à l’injection. Le paneréas n’est alors, 1! est vrai, nettement délimité à l'œil que dans une por- tion plus où moins restreinte de son contour (Gadus Merlu- chius) (5); linjection ne réussit aussi que partiellement, Mais lorsqu'elle se propage jusqu'à la partie bien définie du circuit pancréatique, toujours on la voit S'y arrêter comme devant une (1) Carpe, Brème, Plie, Sardine, Maquercau, Aïguillette, Bar, Cyprinus sinensis, Belec (Atherina presbuter), (2) Barbeau, Brème, Orphie, Alose, (8) PI. XVII, fig. 4. Les lignes noir foncé représentent la pare visible à la surface du pancréas. dans une injection réussie, 28 LARG. barrière infranchissable. Elle s2 rèzie sur la forme des bords et ne les dépasse jamais ; elle les suit comme font les nervures sur le limbe d'une feuille. Cette remarque suffirait, ce me semble, à prouver la dépendance mutuelle des tubes et du pancréas. La rencontre d'une espèce (Pleuronectes maximus) où le reflet ar- genté permet une observation de ce genre leva mes dernières hésitations. Enfin, la comparaison des espèces différentes montre que le système wébérien s’efface de plus en plus à mesure que la masse pancréatique se concentre davantage. M est à peine besoin d'expliquer que les canaux excréteurs deviennent alors intérieurs à la glande et perdent par conséquent, d'une manière plus ou moins Complète, les apparences qui trompaient sur leur nature. C'est la raison pour laquelle la forme massive ne s’accom- pagne Jamais de canaux wébériens proprement dits (Plagio- stomes). Donc, tout vaisseau de Weber conduira à un pancréas, si l'exploration est assez persévérante: et réciproquement, comme j'ai déjà eu occasion de l'annoncer, toutes ies fois que, dans les limites de la masse gastro-intestinale, on rencontrera une glan- dule non hépatique, on la verra se rattacher au duodénum par une suite non interrompue de conduits. Ces conduits feront partie d’un système wébérien, et la glandule sera un pancréas. ho Rapports du pancréas avec les viscéres et en particulier avec le foie. La nature des conduits nacrés une fois connue, on ne peut plus hésiter sur le sens de l'observation originale de Weber. On est contraint d'admettre que dans la Carpe les tissus du foie et du pancréas sont mélés. Et si insolite qne soit une pareille assocta- uou de deux glandes dans une même masse solide, elle ne peut faire de doute du moment qu'on aura démontré l'existence des tubes et leur entrée dans le foie. Ce fait curieux n’est pas absolument isolé, et la réflexion dis- sipe en partie l’étonnement qu'il cause d’abord. Le pancréas des ARTICLE N° 8. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 929 Reptilesest, comme on sait, souvent accolé à la rate (1); sa cou- leur seule l’en distingue. Dans plusieurs Batraciens (2) (la Gre- nouille, par exemple), il adhère si intimement au cholédoque, que ce dernier a pu être pris pour son canal excréteur. Quel- que chose de semblable se rencontre chez certains Rongeurs, et dans le Lophiomys (3) le pancréas s'implante directement sur le conduit efférent de la bile, et répand ses produits dans l'intestin par l'intermédiaire de ce canal. Or, la confusion des tubes de déversement est un acheminement vers l'asso- clalion des tissus, et l’on peut avancer que, si le mélange des humeurs sécrétées s'effectue avant le point où elles doivent entrer en Jeu, la localisation des appareils où elles prennent naissance n'a plus beaucoup de portée physiologique. Puisque c'est un liquide mixte qui doit agir, qu'importe que ses élé- ments se soient réunis plus ou moins haut sur le chemin qu'il parcourt avant d'entrer en activité? La communauté des ori- fices et des conduits d'écoulement est donc, à certains égards, une circonstance plus notable que l'association des parenchymes slandulaires. C'est une des raisons pour lesquelles Cuvier a mentionné, avec un soin si minulieux, le point unique oumultiple d’abouchement du cholédoque et du paneréatique dans l'intestin des Vertébrés supérieurs. D'après son travail (4), les conduits, lorsqu'ils sont distincts, percent la muqueuse en des points généralement rapprochés. Il est donc peu probable que, même dans les organismes les plus parfaits, la séparation des glandes foie et paneréas soit d'une très-grande conséquence. Si nous en venons aux Poissons, parmi tous ceux qui ont été étudiés à ce point de vue par Alessandrimi ou Brockmann et après eux, il n’en est que deux ou trois où l’on ait vu les canaux des deux glandes S'ouvrir à des distances appré- ) Cuvier, Anat. compar., 2° édit., t, IV, p, 600; F. Leydig, édition française, p. 399. (2) Milne Edwards, Lecons de physiol. et d'anat., t. NT, p. 515. (3) Alph. Milne Edwards, Annales du Muséum, 1867. (4) Lecons d'anat. comp., 2° édit, t. IV. p. 581 607 80 LEGOUES. ciables (Acipenser Sturio) (1). Lorsque les bouches des deux conduits ne se trouvent pas en exacte coïncidence, elles sont au moins très-voisines, et dans la plupart des cas c’est par des ma- nœuvres délicates qu’on arrive à mettre en évidence leur sépa- ration (Belone). I n'y à donc pas dans cette classe d'intérêt pour la digestion à ce que l'action de la bile sur l'aliment pré- vienne de loin celle du suc pancréatique, et en fait c'est un liquide mélangé qui réagit. I semble done que lintroduetion des deux glandes sous un seul volume ait peu d'inconvénients. Je rappellerai aussi que, à où Punité et l'homogénéité de la glande hépatique sont des faits admis de tous, cette simplicité n'est qu'apparente. La découverte de la fonction glycogénique, en révélant un nouvel usage du sue produit par le foie, dédouble du même coup la théorie histologique de cet organe. MM. Morel et Küss ont déjà noté des différences sensibles entre les éléments qui le constituent. Le foie est au fond, quoi qu'il y paraisse, un appareil multiple. À ce point de vue, l’adjonction des cellules paneréatiques à celles qui sont propres aux liquides biliaire et glycogène ne serait plus qu'une augmentation légére surajoutée à une complication préexistante. L'observation de Weber ne fait, selon moi, que mettre au jour un terme de la série des dégradations du type glandulaire, terme remarquable, sans qu'il soit étrange. Je ne voudrais pas cependant que, dépassant ma pensée, on allàt jusqu’à regarder l'immixtion du pancréas dans le foie comme chose indifférente. J'y vois un signe manifeste d'infério- rité dans laccomplissement des fonetions correspondantes. Non- seulement les glandes, n'ayant plus leur place à elles, se nuiront dans leur développement, mais surlout il me semble qu'elles dor- vent se disputer les matériaux que leur apportent les capillaires au préjudice de l'intégrité des réactions, de l'abondance et de la richesse des produits. J'attachais une grande importance à justifier par une dé- (1) Alessandrini, Nov. Comment. Acad, Bononiensis, 1835, {. 11, p, 15 et fig. 3. A l’Esturgeon on peut ajouter les Pleuronectes. ARTICLE N° 6. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 31 monstration sans réplique les inductions que je viens de déve- lopper. On verra dans l'histoire des familles combien le résultat décisif s’est fait attendre. Avant de pouvoir la constater chez la Carpe, j'avais saisi cette pénétration sur le fait dans deux espèces (Labrus, Cyprinus sinensis), et dans un assez grand nombre d’autres cas elle se pré- sentait avec une probabilité équivalant à la certitude. Mais je ne me tenais point pour satisfait, et à cause de l'intérêt spécial qu'il y avait à mettre hors de doute cette station anomale, et pour les particularités accessoires que j'attendais de l'observation directe. La vue des choses m'a en effet montré que la diffusion du pancréas s'effectue à l'intérieur du foie aussi facilement que dans les membranes viscérales. Cette propriété n'est, au surplus, qu'une conséquence particulière du mode de distribution de la matière pancréatique. La loi de cette répartition, de haute impor- tance à mon avis, va maintenant m'occuper. En général, la configuration de la partie diffuse parait se régler d’une manière immédiate suivant l’état du péritoine de l'espèce ; mais, au fond, ce sont les veines qui, par leur trajet, décident des limites et des formes de l’envahissement glandu- laire. J'ai pu suivre, avec une netteté parfaite, à travers la substance du foie volumineux de la Carpe, les longues files de cellules paneréatiques La glande plongée s'enfonce dans l’autre comme les racines d’un arbre péuètrent le sol. Elle s’y introduit par de légères bandelettes auxquelles les ramifications des veines portes et mésentériques servent de soutien et qui vont se subdi- visant avec CES Vaisseaux. La pénétration dans le foie n’est qu’un cas particulier des ten- dances générales qui rapprochent le pancréas des veines, et cette situation exceptionnelle confirme avec évidence la règle plus générale de concomitance avec les vaisseaux. J'aurai occasion de revenir plus tard sur les raisons naturelles de ces rapports. Quelle qu’en soit la cause, ils constituent le fait saillant de l’anatomie de l’organe pancréatique. Depuis les Plagiostomes les plus élevés en organisation, jus- 22 LEGOUIS. qu'aux Apodes, la même loi se soutient. Lorsqu'une veme vient à passer dans les environs du duodénum, le pancréas s'établit à sa surface et dans la région voisine, puis 1l la suit indifféremment dans sa marche descendante vers l’intestin, si c'est une mésen- térique, dans son cours ascendant vers le foie, s'il s’agit d’une veine porte. Quand le vaisseau se ramifie, le pancréas d'ordi- naire se ramilie s’il procède par bandes, ou s'étale en largeur s’il forme une nappe. Toutes les veines n'ont pas sur son développe- ment une égale influence ; il S'épanouit de préférence autour de celles qui approchent le plus près du duodénum, et se prolonge le long de ces dernières beaucoup plus lon que sur celles qui restent à distance de l'intestin. Il est aisé de se rendre compte, après cette remarque, de la cause qui détermine les formes générales de la glande. Si, comme dans le Mugil et le Maquereau, le système veineux des viscères est très-riche et occupe beaucoup d'espace, le pancréas sera très- étendu, en général laminaire el microscopique et souvent en acini clair-semés. Lorsque la vascularisation de la masse viscérale se fait par un petit nombre de troncs, comme dans les Pleuro- nectes ou l'Orphie, l'aire occupée par la glande se resserre d'au- tant, sans que son volume y perde, car la toile sécrétante se montre plus continue et quelquefois plus épaisse. Viennent en- suite des espèces où la veine, accompagnée par le pancréas, est unique, mais très-allongée : c'est le cas de l'Esturgeon, du Bro- chet, des Apodes. Alors le tissu file le long de cette voie jusqu'à des distances linéaires étonnantes (Conger); et sice grand déve- loppement en longueur par son extrémité ne lui suffit pas, en même temps 1l s'épaissit à sa tête. Dans ces circonstances se for- ment les gros pancréas massifs (£sox, Acipenser, Auguille, Congre). Quelquefois, comme dans les Plagiostomes pleuro- trèmes, les nécessités de forme extérieure réduisent encore la longueur du grand tronc hépato-mésentérique. Le pancréas se rassemble en proportion et redevient une glande ordinaire par l'accumulation de tous ses lobules sur une étendue restreinte. Pour prévenir des généralisations exagérées, je crois devoir faire dès maintenant remarquer une différence importante entre ARTICLE N° 8, DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 33 le mode d'extension du pancréas des Poissons et la façon dont se comporte celui de certains Vertébrés allantoïdiens, les Rongeurs par exemple. Chez ces derniers, outre que la superficie occupée par l'organe est incomparablement moindre, il ne parait jamais rechercher le voisinage des veines. Toutefois il y à un point commun aux animaux où la dissociation des éléments du paneréas est plus prononcée presque tous appartiennent à des espèces herbivores. Dans les Poissons en particulier, cette coïncidence, aisée à constater, s'explique aussi sans difficulté. Lorsque le régime est essentiel- lement végétal, l'intestin s'allonge, les veines mésentériques se développent, et le pancréas trouve un champ plus vaste offert à son expansion. La disposition générale des viscères exerce aussi, comme l'in- testin dans l'exemple précédent, une influence visible sur la manière d'être du paneréas. Mais ce dernier ne la subit qu'in- directement, et toujours par l'intermédiaire des veines dont la distribution dépend des rapports généraux des viscères et réagit à son tour sur celle de la glande qui les accompagne. A ce sujet se ratlache un fait facile à prévoir, mais que je signale comme important au point de vue de l'organogénie. La forme et l'agencement des gros viscères détermine d'ordinaire la figure superficielle des masses pancréatiques, lorsque celles-ei parviennent à un grand volume. La glande, aux points où elle prend une épaisseur notable, ne se donne pas une forme propre àelle; sa substance remplit simplement les interstices, et sa surface montre l'empreinte très-fidèle des cavités interviscérales (Merlus). Les limites du pancréas sont aussi en relation non moins évidente avec le degré de persistance des lames péritonéales. Cette influence n'est que secondaire, si on la compare à celle des veines. Même dans les animaux où l'arrangement des lacunes et des replis de la séreuse modifie le contour glandulaire de fa manière la plus apparente (G@. Merluchius), on reconnait encore que certains cireuils veineux sont les lignes essentielles du des- sin de l'appareil pancréatique. La conformation des ligaments 3! LRGOUES. péritonéaux n'intervient que pour guider ou arrêter les dévelop- pements de Uissu, dont le point de départ est toujours auprès du vaisseau. Revenons aux espèces chez lesquelles le pancréas pénètre le parenchyme du foie. Beaucoup d’entre elles, la Carpe et la majeure partie des Cyprinoïdes, par exemple, se font remar- quer par les dimensions excessives de la glande hépatique. Elle n'a pas trop pour se loger de tout l’espace laissé libre par les autres organes dans la cavité ventrale. Où se tiendra donc le pancréas ? Il fui faudra se développer au sein de la masse qui a tout envahi, H le fait d'une manière d'autant plus naturelle qu'il doit y trouver ces mêmes veines où il a l'habitude de prendre son point d'appui. Plus on étudie ces espèces, plus se fortifie la conviction que l’immixtion du pancréas dans le foie est une conséquence nécessaire de leur anatomie générale. y a plus. On peut affirmer que l’'incorporation d’une glande à l'autre n'est pour ces êtres qu’un accident sans importance physiologique. Si le pancréas a devant lui, aux environs du duodénum, une aire suffisante et bien pourvue de lignes vei- neuses, 1} occupe cet espace et n’atteint pas le foie. Mais chez les espèces qui ont ce dernier trés-volumineux ou seulement voisin du duodénum, le pancréas ne change en rien pour cela ses allures; il ne s’épaissit pas davantage dans les régions découvertes, mais il s'engage dans la masse avec les veines, absolument comme il les eût suivies sur un espace libre. La preuve de cette indifférence dans le développement du pancréas en dehors ou en dedans du foie, résulte de l'observation com- parée d'un grand nombre d'espèces. Elle se confirme par l’étude spéciale de quelques-unes (1), où l'on trouve, suivant les indi- vidus, et le foie et le pancréas à des degrés de développement ires-variables. À mesure que les deux glandes se présentent dans unétat de progrès plus avancé, elles em piètent plus ou moins, sans qu'il se fasse le moindre changement dans leur physiono- mie générale. À l’appui de cette manière de voir je n’ajouterai (1) Belone, Carpe, Merlus, Cyprinus sinensis. ARTICLE N° 6. DU PFANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 9 qu’un fait : il me semble démonstratif. Si la combinaison des tissus avait une véritable portée fonctionnelle, elle se ferait sinon cellule à cellule, du moins acinus à acinus; or il n’en est pas ainsi, les deux tissus ne sont point, même dans la Carpe, très- intimement mêlés; 1l y a bien plutôt englobement du pancréas par le foie que fusion des deux ensemble. Enfin le caractère dinvariabilité que l’enchevêtrement des deux éléments pan- créatique et hépatique devrait présenter, s'il élait de grande conséquence, fait aussi complétement défaut. On trouve dans le foie non-seulement la forme diffuse du pancréas, mais les deux autres. J'ai isolé du foie d’un Labre une grosse masse pan- créatique très-bien délimitée, et qui ne se confondait en rien avec le milieu circonvoisin. La même chose a lieu pour de petites masseltes reconnaissables dans le foie du Cyprin doré. Ces considérations me semblent péremptoires. On doit regar- der l'association des deux glandes comme un simple acci- dent organographique, dans l'anatomie comparée des Poissons osseux. Il n'est peut-être pas inufile de faire remarquer que cette con- clasion ne détruit en rien ce que j'ai dit plus haut. L'association des deux tissus, même sous la forme moins désavantageuse d’un simple enclavement du pancréas, ne peut être sans mcon- vénient pour les fonctions digestives, et ce que j'en avais avancé à priori subsiste sans restriction. Mais si l'on considère cette dis- position anatomique par rapport aux organismes dont elle fait partie, et non plus eu elle-même, on pourra, saus contradiction, la trouver peu préjudiciable ou même tout à fait indifférente. I sufira que l'altération des types supérieurs soit assez avancée dans le surplus de l'organisation des êtres où l’on constate ce fait, et c’est ce qui à lieu pour les Osseux. La concentration de l'appareil pancréatique ou son éparpille- ment seraient aussi des caractères de valeur insignifiante pour l’appréciation taxinomique du rang des espèces parmi les Pois- sons. Il est certainement remarquable que la forme massive soit commune à tous les Cartilagineux et très-rare chez les autres. Ce fait est trop constant pour ne pas se rattacher à un progrès 56 LEGOUIS. marqué des apttudes physiologiques des premiers en comparai- son de celles des Osseux. Cependant, examinée de près, la diffé- rence est moins tranchée que la formule précédente ne le lais- serait croire. L'Esturgeon offre l'indice manifeste d'un commen- cement de diffusion du pancréas, et sur le Carcharias la mème tendance s’aceuse encore, quoique plus faible. Quelles sont d'ailleurs les espèces d'Osseux qui, au point de vue spécial de l’agglomération, se rapprocheraient le plus des Plagiostomes? Les Silures et les Anguilles, les Esoces, et après eux certains Gadoïdes. Or, les classificateurs sont d'accord pour ne point attribuer à ces familles un rang élevé. Remontons aux principes de la classification. Les caractères fondamentaux se tirent des appareils les plus fixes dans leurs formes et leurs rapports, et au contraire nous n'avons rien vu de plus variable que le pancréas des Poissons osseux. Loin d’im- poser, comme le font les organes majeurs, des conditions de disposition à d’autres appareils moins essentiels, il ne se commu nique à lui-même ni sa forme qu'il emprunte aux interstices, ni sa figure générale qui lui vient des veines. J'ai déjà remarqué que le régime des veines est la conséquence de l’arrangement général des viscères, qui dépend surtout à son tour de la nature des aliments. Pour arriver au pancréas, il faut descendre une série dont tous les degrés auront une influence supérieure à la sienne, et dont il occupe le dernier échelon. Et si l'on ajoute à cela qu'aucun de ces appareils dont il subit la loi n'est lui-même au nombre des systèmes organiques prédominants, on estamené à reconnaitre le défaut d'importance physiologique des formes de cette glande. 9° Rapports du pancréas avec les organes Ilymphatiques. L'étude prolongée de la constitution élémentaire des lames mésentériques m'a fourni quelques renseignements sur lori- gine des globules Iymphatiques des Poissons. Je n'ai pas cru devoir pousser mes recherches dans cette direction; mais sans disperser mes efforts, j'ai pu recueillir un assez grand nombre ARTICLE N° 8. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 3 de faits nouveaux. Peut-être ne les Jugera-1-0n pas indignes de tout Intérêt. Une observation antérieure et inconnue de mot pendant mon travail me décide, en les confirmant, à ne point les passer sous silence. Elle est due à Leydig (4). Je devrai revenir sur la page da Traité d'histologie comparée où l'auteur {décrit ses résultats. J'aurai à discuter, à propos de plusieurs espèces (2), les assertions qu'elle renferme. Faute d'avoir connu les canaux wébériens, M. Leydig a été conduit, comme Îles analomistes d’une époque plus reculée, à une interprétation excessive d'un fait vrai. Il rapporte au système lymphatique ce qui revient surtout au pancréas. Mais la part de ce dernier une fois réservée, lau- torité de l'habile histologiste achève de me donner confiance dans ma propre manière de voir. Je rattache à la production des granules de la Iymphe plusieurs, mais plusieurs seulement, des particularités que nous avons notées l’un et l'autre. Je ne doute pas que M. Leydig n'eût pressenti la convenance ‘de cette distinction, s'il eût pu Comparer, comme j'en ai eu les moyens, un beaucoup plus grand nombre de faits. Je regarde comme démontré aujourd'hut que dans la plupart des Poissons, des globules Iymphatiques prennent naissance sur une grande partie de l'étendue des membranes péritonéales, comme uous l'avons vu pour les cellules du pancréas. Malgré quelques réserves, la parité manifeste d’allures dans ies deux fonctions fait préjuger qu'elles tendront à se réunir. En effet, c'est ce qui a lieu dans la plupart des espèces ; et si je n'étends pas à toutes la même affirmation, c’est seulement pour laisser place à imprévu. Ge fait est le plus considérable au point de vue de l'histoire du pancréas. La constance de cette association et les circonstances dont elle s'entoure quelque- fois (3) sont trop frappantes pour ne dépendre que du hasard. Mais un exposé plus théorique aura son lieu naturel dans les (1) F. Levdig, Histol, comp., p. 478, trad, française. (2) Cobilis fossuis, Trigla lyra, Cottus Scorprius, ete, (3) Merlus, Turbot, Maquereau, pe LEGOUS. explications que nécessiteront certaines familles (1) étudiées à la fois par M. Leydig et par moi. Je désire ne composer ce som maire que de résultats indabitables. Beux questions d'importance majeure pour le sujet me semblent avoir trouvé leur solution définitive ; ce sont les seules que je toucherai ici : L. Comment les tissus pancréatique et lymphatique se distin- guent-ils Fun de l'autre ? IT, Comment se fait leur association ? Ul. J'indiquerai ensuite ce que je sais de plus notable dans le mode de diffusion des aires lymphatiques, comparé à celui du pancréas. La coexistence du pancréas et d'une production organique étrangère se constate sans difficulté. Au milieu des cellules de la sécrétion paneréatique on ren- coutre des endroits où pullulent certains éléments beaucoup plus petits. Ils se montrent dans là plupart des lambeaux ini croscopiques détachés, soit des pancréas agglomérés, soit des lamelles abdominales. Outre leur petitesse, on à pour les reconnaitre des caractères différentiels bien nets. Le plus appa- rent est leur tendance à sorlir des cavités qui les renferment. Se fait-il un courant dans le liquide du porte-objet, aussitôt ces granules se soulèvent en foule, et vont s'accumuler dans les parties moins agilées. Aucune des cellules pancréatiques ne les accompague dans ce mouvement, sauf exception. Elles n'ont aussi ni la même forme, ni la même réfringence; au surplus, je me propose de reprendre ailleurs le détail des traits qui donnent aux globules un aspect très-différent en général de celui des cellules voisines. Ce ne sont pas davantage des granulations d'origine intracel- lulaire. On reconnait au premier coup d'œil que ces corpuscules (4) joues cuirassées, parliculièrement. ARTICLE N° 8. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 39 sont des éléments complets et non des parties séparées d’élé- ments détruits. Est-ce à dire que ces granules n'aient point ailleurs d'ana- logues? Non, sans doute ; mais, en raison de leur tendance à s’isoler, c'est plutôt parmi les éléments libres qu’on pourra trou- ver leurs semblables, Par la forme, la taille et ce que j'ai pu découvrir de leur constitution intérieure, ils rappellent les glo- bules de la lymphe. Cette assimilation se présente de soi. Toute- lois, comme Je n'avais pas eu le temps d'observer les globules des mêmes espèces dans leurs propres vaisseaux lymphatiques, je ne me croyais pas autorisé à la donner pour certaine. Mais de puis que M. Leydig s’est prononcé, cette réserve ne serait-elle pas exagérée ? Ce sont donc des globules lymphatiques, tels qu’en ont les Poissons osseux. D'ailleurs, les caractères essentiels de leur pro- duction conviennent bien à cette manière de voir. Dans les pan- créas diffus (1) et même dans les massifs (2), des surfaces assez vastes quelquefois ne laissent pas apercevoir une seule cellule glandulaire ; ces régions surabondent au contraire de granules blanes, et si, par suite de la mobilité de ces derniers, quelque portion de la trame s’est trouvée dépouillée de son produit, on y observe des aréoles conjonctives d’une régularité remarquable, Ces lacunes n'ont en général que peu de ressemblance avee les cellules pancréatiques. Elles se distinguent plus clairement encore du tissu conjonctüf ordinaire, par leur uniformité et leurs dimensions. En outre, celui-ci est le plus souvent riche en dépôts de graisse; les aréoles, au contraire, ne contiennent pas d’autres substances adipeuses que celles qui peuvent figurer dans la constitution de leurs globules. Faudra-t-1l done chercher dans des tissus de nature non con- jonctive l’analogue de cette disposition des méats interstitiels ? On ne peut y songer. D'ailleurs, avant d'en venir là, nous devons comparer ce réseau lacunaire régulier à une forme très-particu- (1) Congre; Turbot, Anguiile, (2) Sole, Merlus; l0 LARG GUESS. lière de groupement conjoneUf, étudiée récemment. Les affinités du {issu qui nous occupe nous seront ainsi révélées. C'est à un parenchyme aréolaire, composé d'éléments em- pruntés au système conjonetif, que M. Kôlliker et les observa- teurs les plus distingués rapportent la production des corpus- cules lymphatiques dans les Vertébrés, où la division du travail est plus complète. Ce parenchyme, dit substance corticale des ganglions, est sans aucun doute le représentant plus perfec- tionné des aires à pulpe globuleuse des Poissons. Sans qu'il y ail identité parfaite entre les deux tissus, la ressemblance est sensible. Les différences se montrent plutôt dans les caractères secondaires de densité et de régularité. Elles doivent, suivant moi, être comprises en ce sens que les utricules lymphogènes des Osseux sont une forme de dégradation ultime dans la sub- slance ganglionnaire. La nature lymphatique des globules et du tissu qui les engendre étant désormais établie, examinons plus spécialement les rap- ports de cet ensemble avec le pancréas. (ll I existe done une glande (1) lymphatique d’étendue consi- dérable entremêlée avec l'organe pancréatique. L'intimité de cette association est tout autre que celle qui joint le pancréas au foie. Dans les Cyprinoïdes, tels que la Carpe et le Cyprin doré, où la liaison des deux glandes annexes du tube digestif est le plus compliquée, il n°y a jamais continuité véritable de tissu. J'ai pu, çà et là, isoler les lobules pancréatiques sans y pro- duire ni perte de substance, ni déchirement; les parties conti guëés du foie demeuraient de leur côté dans une intégrité par- faite, et si celle séparation n’est pas toujours possible, c'est faute d'instruments assez délicats. Rien de pareil entre les tissus pan- créatique et lymphatique. La même trame conjonctive fonda- mentale se charge ici de cellules pancréatiques adhérentes, et là (1) J'emploie à dessein le mot g/ande dans une accéptioù ün peu large, ARTICLE N° 8, | DU PANCRÉAS DES: POISSONS OSSEUX. l'A s'arrange en réseau arcolaire, destiné à contenir les noyaux lymphatiques hbres. Cette continuité, ou mieux encore cette communauté de tissu n'est pas moins évidente dans les espèces où l'acinus pancréa- tique est nettement dessiné que dans celles où il est diffluent. Dans ces dernières (1), à mesure que la dispersion des élé- ments pancréatiques approche de ses états extrêmes, la ressem- blance des deux parenchymes devient de plus en plus prononcée. Si l'on examine les lames péritonéales, ce sont des degrés insen- sibles qui font passer des foyers à vacuoles Iymphatiques aux acin nettement cellulaires, d'une part, et de l'autre aux amas de gros utricules graisseux. Les trois formations, Iymphatique, pancréatique et adipeuse s’y mêlent aussi profondément que trois espèces végétales voisines croissant sur le fonds commun d’un même sol. Chez certaines espèces (2) à pancréas bien constitué, une disposition exceptionnelle recommande plus spécialement encore l’association des deux fonctions à l'attention des physiologistes. La glande pancréatique, très-développée sur quelques sujets (3), paraît entourée d’une sorte de tunique albuginée, Jusque dans une portion de ses prolougements laminaires. Un exemple re- marquable de cet épaississement périphérique m'a été fourni par le pancréas diffus sur la vésicule de plusieurs Gadoïdes (4). La trame conjonctive de la membrane supervésiculaire est gon- flée sur une partie de la surface. Cette élevure superticielle du tégument forme une plaque unique très-large et de couleur lai- teuse. Elle s'étend sans solution de continuité, et est en relation non interrompue avec les grands centres pancréatiques du duo- dénum. Ces excroissances aplaties sont protégées extérieure- ment par une couche conjonctive de densité supérieure, douée d’une solidité surprenante (Muræna Conger). Or le pancréas n’est pas seul à occuper l’espace ainsi garanti; (1) Scombres, Trigles, Labres, (2) Gadus Merluchius, Turbot. (3) Esoc, Muræna Conger et Anguilla, Pleuronectés maximus, Acipenser Sturio, (4) Merlus et peut-être aussi le Merlan, le Lieu. SC. NAT., FÉVRIER, 1873. XVII. 14, — ART, N°8, h2 ERHGŒOUES. il n'en prend même parfois (vésicule du Merlus) que la momdre partie. Si l'on perce au hasard la pellicule protectrice pour pra- tiquer une coupe microscopique, ce ne sont point des cellules du pancréas qu'on recueiilera d'ordinaire ; mais on verra le champ encombré par des milliers de granules. Les lobules du pancréas diffus, plongés dans celte masse de tissu lymphatique, s'y trou- vent en quantité variable, quelquefois faible relativement. On reconnail souvent à l'extérieur, par leur blanc plus mat et moins transparent, les régions plus riches en cellules pancréa- tiques. Jamais l'association du pancréas au foie ne m'a rien montré de semblable. LT Ce qui me reste à dire sur le mode de diffusion de la fonction génératrice des globules achèvera de mettre en relief les ressem- FRS qui la D bohent du pancréas. La genèse globulaire est à l’état diffus comme la sécrétion pancréatique dans un grand nombre de Poissons osseux, et pro- bablement dans tous. Elle dépasse même cette dernière par le degré de dissociation plus élevé des éléments où elle s'opère. C'est ce qui résulte de l’ensemble des faits Ainsi il à toujours été impossible de limiter d’une maniere quelque peu précise les zones à globules. Cette indécision de leurs contours coexiste chez plusieurs espèces (1), avec un état déjà très-marqué de localisation des parties pancréatiques. Il y a un certain parallélisme dans la marche des deux tissus vers la concentration; mais le retard est toujours du côté des vacuoles interstitielles d’où sortent les noyaux Ilymphatiques. Bien plus, on a reconnu depuis déjà longtemps l'absence, dans les lames viscérales des Poissons, de toute glande Iymphatique massive. L'analogie avec le pancréas ne se soutient done pas jusque-là. Mais J'ai constaté en outre que l'appareil de la lymphe (1) Gadus Meriuchius, Pleuronectes inaximus, Apodes: ARTICLE N° 6. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. in) ne possède, dans cette classe, même à l’état microscopique, au- cune agglomération comparable aux ganglions des organismes plus complexes. Tandis que les pancréas disséminés, invisibles à l'œil nu, sont souvent nombreux, jamais celte forme à cir- conscripuon arrètée n'a été offerte par les régions lympha- tiques. Enfiu j'ai acquis la certitude que, dans les Poissons (4) où la désagrégalion du pancréas est extrême, et où en même temps les signes spécifiques de sa texture glandulare sout le plus amoindris, 1l subsiste cependant sur les mésentères de larges espaces dénués de toute aptitude à produire le suc pancréa- tique. Si grande que soit la diffusion du pancréas, elle à toujours des bornes. En est-il de même pour la sécrétion de la lymphe ? J'incline à le croire, mais par des considérations auxquelles mes observations sont étrangères. En tout cas, si cette délimitation se fait chez tous les Osseux, elle doit, pour quelques-uns, être singulitrement vague et variable. Existe-t-il, par exemple, dans les régions non pancréatiques des mésentères du Maquereau, un seul point incapable de produire des globules? On ne saurait l’affirmer; tel espace qui ne s'en est encore jamais chargé, pourrait, je crois, devenir producteur sous l'influence d’un léger changement biologique. À ces divers égards la sécrétion lymphatique se présente comme moins circonserite et moins centralisée que celle du pan- créas. Il en est de mème, à quelque point de vue qu'on lexa- mine, comme les espèces déjà citées le feront voir. Je n’ajouterai plus qu'un mot quant à Paetivité avec laquelle les mésentères fournissent les eorpuscules. Pour beaucoup de Poissons (2), la majeure proportion de ces organites est due à cette source. La force qui les engendre est inégalement dis- tribuée sur les différentes régions membraneuses ; mais où peut affirmer que les points les plus féconds ne sont pas tou- jours dans la tunique conjonctive externe des vemes, comme Île (1) Scombres, Carangues. (2) Maquereau, Congre, hi LUGOUERS. docteur Schmidt (1) l'admet pour les globules muqueux des Mammifères. J'ai trouvé des centres de formation dans un tissu aréolaire assez distant de ces vaisseaux (2). S De OBSERVATIONS SUR LES SCOMBÉROÏDES. 4° Maquereau (Scomber Scombrus, L.), Un résultat inattendu, qui se présenta dans l'examen du Maquereau, fit soupconner le rapport du pancréas avec les tubes de Weber, et permit de considérer comme moins improbable la généralité de ces derniers. Les viscères de cette espece affectent une disposition facile à saisir. J’en ferai une brève description pour expliquer ce qui va suivre (3). La partie abdominale de l'œsophage forme le bras supérieur, et la branche pylorique de l'estomac avec le duodénum le bras inférieur d'un Y horizontal, dont le grand cul-de-sac stomacal serait le pied. L'angle des bras s'ouvre vers la tête, le pied touche presque à l'anus. Les autres organes dessinent une gout- üère horizontale, dans la cavité de laquelle repose l'ensemble en figure d'Y. I s'y engage si profondément, que le cul-de-sac et l'œsophage émergent à peine au-dessus des bords de la gout- üère, surtout en avant, c’est-à-dire vers la tête. Extérieurement la masse ainsi formée à quelque chose de l'apparence d’un cornet, dont l'ouverture regarde en avant. Elle se moule et s'applique sur les parois de Ja cavité viscérale du poisson, qui renferme en outre le rein et les laitances ou les ovaires. De même la gouttière se trouve remplie par le système en Ÿ. Le tissu conjonctif comble, suivant sa coutume, les inter-- (4) F. Leydig, trad. française, p. 353, ou Schmidt, professeur à Copenhague, Zeit- schrift fur Zoologie, volume XII, 2° livraison, p. 292 et passim. (2) Cobitis, Trigla lyra, Trigla hirundo (Leydig), Dactyloptera volitans (Leydig), Cottus Scorpius, Pleuronectes marimus, PI. Sola, Maquereau, Carangue, Congre, Anguille. (3) PI. XIX, fig. 1; pl. XX, fig. 1 et 2. Les mots ci-dessus, cic., sont rapportés au poisson, ARTICLE N° 8. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. A5 stices entre les organes. Les deux côtés de la goutlière se pro- longent inégalement en arrière, c’est-à-dire vers l'anus. Celui de la droite de l'animal est figuré par le ruban des tubes in- testinaux qui forment des coudes et reviennent eourir paral- lèlement à eux-mêmes les uns auprès des autres. I doit se porter jusqu'à l'anus et dépasse par conséquent la ponte du cul-de-sac stomacal. Celui de gauche, constitué en avant par un bord tranchant du foie, et en arrière par la masse des cæcums, s'arrête environ aux deux tiers du chemin. Au fond de la gout- tière, la queue des appendices pyloriques ne va, guère plus loin ; de là cet aspect de cône légèrement eflilé que présente l'ensemble. La branche pylorique de l'estomac est courbe et n’occupe que le tiers environ du bras inférieur de l'Y; là commence le duo- dénum, dont les faces latérales et le fond sont criblés par les ori- fices cæcaux, mais la face supérieure en est libre. Ces tubes, avec le tissu vasculo-conjonetif qui les unit, composent une couche épaisse qui s'applique sur le fond et sur les bords du duodénum, de la branche et du cul-de-sac de l'estomac; vers le milieu du fond de ce dernier, ce revêtement se termine en pointe. Les tubes pyloriques sont généralement horizontaux, quelques-uns sont en outre bifurqués. Après avoir formé le duodénum, l'intestin, arrivé à l'extrémité de la branche inférieure de l'Y, se replie en arrière, à droite et en haut. Dans sa courbure il donne naissance aux derniers cæcums et prend ensuite le nom d'intestin grèle. Vers le milieu du côté droit du cul-de-sac, il se coude de nouveau, mais cette fois vers le bas et en avant, pour subir une troisième courbure qui le dirige en droite ligne vers l'anus. Ce dernier changement se fait près de l’origine des bras de l'Y, Le tube intestinal, après chaque courbure, se rapproche de la partie précédente, de ma- nière que l’ensemble s'allonge en bande rubanée. Quelques cæcums glissent au- dessous du ruban, entre les tubes et le bord droit du duodénam, d’autres passent en dessus ; la troisième et dernière courbure se trouve ainsi perdue et cachée dans le sys- tème appendiciel. 16 LEGOUIS. Le foie, dont la situation et les rapports sont peut-être moins importants, est d’un aspect plus compliqué, plus difficile à représenter. I figure autour de l'œsophage qui va sortir de la cavité abdominale les deux tiers d’un anneau incomplet ouvert par le haut. Une nappe unique s'étend sur les organes pour les recouvrir; mais fort inégale dans sa longueur, elle descend très-peu à droite et en avant. Elle se borne à cacher lanse antérieure du duodénum qui se loge dans lépaisseur du pa- renchyme creusé en conséquence. Au contraire, à gauche, le bord horizontal postérieur de la goutüère est dû au foie. Son extrémité dépasse le cardia; c’est là le sens de son plus grand développement. Entre ces directions limites, les dimensions sont intermédiaires. Ainsi se trouve complétée l'idée qu'on peut se faire de la surface extérieure du foie. La surface interne se modèle sur les viscères sous-jacents, elle envoie une crête à arête vive entre les bras de FY. La vésicule du fiel est très-considérable. C’est un doigt de gant fort allongé, dont la situation sera facile à comprendre, grâce aux détails précédents. Le canal cholédoque part de l'intestin à une très-petite dis- tance en avant du pylore. Il court à plat sur le duodénum, entre es deux rangées des têtes d’appendices ; reçoit les bihaires, dont e nombre est sans importance. Arrivé à une petite distance de l'extrémité du bras de l'Y, il commence à s’élargir. La vésicule, à partir de là, s’'évase graduellement. Parvenue à la courbure, elle se replie, et reste toujours appliquée au-dessus du duodénum et de l'intestin qui lui fait suite. Elle forme done, aussitôt qu'elle dépasse la partie droite de l'anneau du foie, le bord droit de la gouttière, jusqu'au point où elle se termine, c’est-à-dire à un peu plus que la moitié de la longueur du eul-de-sac. La rate est foliacée ; elle a d’un bistour1 la forme et à peu près la taille ; elle adhère par sa base à la veine splénique, près du point où commence la vésicule, Cet organe s’enroule sur Pœsophage en passant au-dessous, de sorte que sa pointe, orientée en arrière, flotte à droite. I reste caché par la vésicule du fiel et le duodé- ARTICLE N° 8. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 17 num, dans les anses duquel il se trouve. Il en suit la courbure, appliqué contre l’œsophage. Celui-ci ne se relie au foie que par un petit nombre de filets fibro-vasculaires ; si on les coupe et qu'on tire l'organe hépa- tique vers la gauche, on découvre le dessus du duodénum et l'embouchure du cholédoque. Ce canal paraît d’une teinte blane rosé. Il ne commence à passer au vert brun que plus haut, au niveau de l'élargissement vésiculaire. Jamais il ne n'est arrivé d’y constater la présence de la bile ; mais ce qui frappe tout. d’a- bord, c’est sa largeur et son aplatissement ; il offre l'apparence d'un ruban plutôt que celle d’un tube. Dans la plupart des animaux étudiés j'ai trouvé le canal sup- posé pancréatique accolé au conducteur de la bile, ou au moins trés-voisin de lui. Aussi, lorsque j’aborde une espèce nouvelle, est-ce toujours sur cette région que portent mes premières recherches. Sur le Maquereau, comme dans les Salmonés, les deux conduits s’accompagnent ; de là vient la largeur excessive du cholédoque, et peut-être aussi sa couleur pâlie par celle du pancréatique. Celui-ei est à sa droite. Dans la plupart des indi- vidus il suflit d'un coup d'œil attentif pour distinguer les deux canaux et leur séparation. La largeur du pancréatique est aussi considérable que celle de son voisin, mais cette particularité est moins étonnante que la longueur de ce large canal. Habituel- lement on voit le pancréatique, assez volumineux à son pied, se résoudre en plusieurs branches après un parcours extrêmement bref. Il se rétrécit très-brusquement et semble disparaître : ce tronc, comme le dit Brockmann, est plutôt semblable à une ampoule qu'à un canal. Cette disposition, particulière au Maquereau, permit de ten- ter l'injection du système supposé pancréatique, procédé com- mode, mais qu'il ne m'avait été donné d'employer qu’une seule fois. C'était sur le Barbeau de rivière, et j'avais été conduit aussitôt à la découverte d'un de ses pancréas, que je crus alors être le seul. À ce souvenir, je ne faisais nul doute d'obtenir encore par le même procédé le même succès. Quelle fut donc ma surprise quand je vis se dessiner sur les viscères, et jusque NS LEGQUIS. dans l'épaisseur de la masse cæcale, un réseau d’un prodigieux développement (1). Le liquide s'était-il introduit dans une veine, soit par une fausse manœuvre de la canule, soit par l'ouverture adventive d'un pertuis entre deux canaux juxtaposés? Non; car, bien que je connusse la richesse de leurs communications anastomotiques, je ne voyais aucune des veines voisines qui eût reçu l’injec- tion. Les canaux où elle était entrée maintenaient leurs troncs principaux en contact avec les grosses branches veineuses, sans trace d’épanchement dans celles-ci. Cette concomitance absolue de deux troncs veineux très-inégaux d'importance et tout à fait indépendants, sur un long parcours, eût été sans précédent. Et comme ceite région paraissait très-abondamment pourvue de veines d'aspect ordinaire, suffisant à coup sûr au mouvement sanguin, 11 n'était pas à croire que ces singuliers canaux dépen- dissent du système de la veine porte. La supposition que ce püt être une artère n'était pas plus fondée. Je m'arrêtai plus long- temps à l'idée que ce pouvait être le système lymphatique latéral des veines mis par hasard en évidence ; mais il me fallut encore rejeter cette hypothèse, sur cette remarque que le lacis injecté était régulier, les branches plus fines faisant toujours suite à des troncs plus larges, et se divisant à leur tour en cana- lieules plus grêles. En un mot, par sa régularité, le dessin différait totalement de la complication des lymphatiques. Il devenait done probable, par l'élimination successive de ces hypothèses, que je me trouvais devant un système étranger à la circulation générale des humeurs et destiné à un liquide eta une fonction à part. En tout cas, il était dès lors douteux que le but principal de mon essai, la recherche du pancréas, püt être atteint par ce procédé. Ni l’ensemble, nt aucune de ses parties ne ressemblait à un canal excréteur unique ou multiple. Mais s’il me fallait renoncer pourle moment à l'espoir d'arriver au pancréas par celte voie, J'avais peut-être trouvé l’analogue d'un fait jusque-là presque isolé. Il existe en effet dans la Carpe (4) PI XIX, fig. 43 pl. XX, fig. 1. ARTICLE N° 8. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. h9 commune un canal accompagnant le cholédoque à son entrée dans l'intestin, et duquel part un système de vaisseaux ramifiés qui se distribuent au foie. Je vais laisser parler Weber, auquel appartient cette observation. «Dans la Carpe (1), tandis que le pancréas manque, ainsi » que les appendices de la branche pendante de l'intestin grêle » qui, dans la plupart des Poissons, tiennent lieu de pancréas, » le foie est pourvu de deux espèces différentes de conduits » EXCréteurs. » Les premiers sont les biliaires ordinaires, avec leur tronc » commun. Tout contre ce dernier et par derrière, se trouve un » second canal, beaucoup plus grêle, formé de tissu cellulaire, » qui s'ouvre dans l'intestin près du cholédoque. Cette partie » finale est dans sa longueur si étroitement attachée au cholé- » doque, qu'il faut être habile pour l'en séparer complétement » par la préparation. Ce canal ne renferme aucune trace de bile, »iln’est pas coloré en vert. Il se partage en trois conduits » excréteurs extrêmement grèles et brillants comme de l'argent. » En injectant du mercure dans les ramuscules les plus reculés, » on les voit de plusieurs façons se porter en différents endroits » du foie, et même vers les lobes, d’où sortent en mème temps » des tubes biliaires. » Des tubes nacrés en communication avec l'intestin ont aussi été vus dans des Poissons mème pourvus de pancréas, par M. Claude Bernard; mais à la facon brève et sommaire dont cette observation est incidemment rapportée, on ne peut croire qu'elle ait beaucoup arrêté l'attention de l'auteur, qui ne nomme pas les espèces. Devant l'importance des questions dont son esprit était préoccupé, un détail aussi spécial devait en effet disparaitre (2). Le fait signalé par Weber était done le seul qui pât me servir de terme de comparaison. Je ne pouvais toutefois méconnaitre, (4) Weber, Ueber die Leber von Cyprinus Carpio (Archives de Meckel, 1827, p. 296). (2) C1. Bernard, Mémoire sur le pancréas (Suppl, aux Comptes rendus de l'Académie des sciences, 1856, t, 1, p. 544). oÙ RGO. avant de rapprocher ces deux cas, limportante différence qui existe entre eux. Les canaux de la Carpe sortent du foie, tandis que la ramification s'opère à la surface des appendices pyloriques dans le Maquereau. Mais le fait considérable commun aux deux observations, c’est la communication des canaux avec le duodé- num, au même point à peu près et non loin de l'ouverture du cholédoque. Comme je l'avais déjà remarqué dans la Carpe, je trouvai que les orifices se touchent sans se confondre. {ls sont semblablement portés sur une papille. La similitude va peut-être encore plus loin. Jai cru voir l’un, en forme de croissant, em- brasser l’autre dans sa concavité. La dissemblance des régions où ces canaux se subdivisent devait-elle balancer la probabilité résultant d’un accord si com- plet? J’inclinais à ne pas le croire. Si les canaux de Weber n’é- tient point les analogues de ceux qui venaient de m'apparaitre, il découlait de là que la Carpe jouit d'une fonction propre à elle et inconnue dans les classes plus élevées en organisation, et que le Maquereau en possède une aussi, également particulière et autre que celle de la Carpe. Cette multiphcité d'hypothèses répugne trop à l'esprit. La manière dont se déverse le liquide coulant dans ces canaux, l'organe et le point de l'organe où ils le dirigent, paraissent aussi des caractères d’une portée physio- logique prédominante, puisque e’est là où elle devient libre que l'humeur révèle son rôle. Je ne parle pas de la supposition qui en eût fait un système pancréatique; tout semblait se réunir contre elle. Longueur extrême des canaux, étendue prodigieuse de la surface où ils se développent, fréquence des anastomoses, et nullité presque complète de ramification, concomitance absolue avee les vemes, tendance des rares subdivisions à courir parallèlement entre elles et côte à côte, c'étaient là certes des caractères peu ca- pables de rappeler un tube excréteur, D'ailleurs excréteur de quoi? Nulle apparence de glande; on peut dire : rien moins qu'apparence de glande. La plupart des filets injectés allaient, en suivant les veines, se perdre dans les membranes péritonéales des trois anses de l'intestin; quelques-uns des canaux parais- ARTICLE N° 8. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 51 saient mourir sur les appendices et la vésicule. M. CL. Bernard les voyait dans la paroi intestinale du poisson étudié par lui; Weber les avait suivis dans le foie de la Carpe, et J'avais reconnu moi-même sous quelle forme ils y pénètrent. En résumé, ces tubes vont partout. Supposer aussi partout cette glande bizarre, dont il n’y à nulle part atcun vestige, uniquement pour lavan- tage de les en faire dépendre, n’eût-ce pas été le fait d’une imagination bien arbitraire. D'ailleurs je ne possédais alors que deux exemples d’exis- tence de ce système, le Maquereau fournissait le troisième. J'en devais conclure, comme M. CI. Bernard, que cet appareil, mconnu à Brockmann et à tous les anatomistes, était spécial à quelques espèces, et par conséquent étranger à une fonction essentielle. Enfin était-il admissible que MM. Alessandrini et Stannius, qui avaient vu de véritables pancréas, eussent pu passer à côté de cet immense réseau sans en soupconner l'existence, s’il dépen- dait du système paneréatique ? Les glandules rudimentaires, accolées au duodénum, qu'on tenait à cette époque pour les représentants du pancréas absent, et que j'avais retrouvées sur quelques espèces nouvelles, ne pouvaient, ce me semble, avoir rien de commun avec un appareil si disproportionné à leur taille. Je regardai donc ces tubes comme les analogues de ceux de la Carpe, et je les appelai «tubes de Weber ». Ce rapprochement paraissait d'autant plus acceptable qu'on est porté d’abord à considérer ce système de vaisseaux comme une forme exceptionnelle des Iymphatiques. Dans cette hypo- thèse, leur dépendance des veines se trouve expliquée ainsi que leurs anastomoses, leurs dimensions transversales et leur multi- plicité. Quant à l'abouchement intestinal du tronc commun et à la pénétration de plusieurs tubes dans le foie, si ces caractères semblent indiquer un rôle digestif, on peut aussi les comprendre par une action excrémentitielle : or, il n°y aurait à cela rien d’é- trange. Dans des animaux marins, dont la proie renferme une très-grande quantité d’eau, il se pourrait que la lymphe véri- table eût besoin de se débarrasser d’un excès de ce liquide avant 92 LEGOUIS. d'entrer dans le sang. La conséquence de cette nécessité serait une sorte de scission du système lymphatique en deux parts. Une canalisation lymphatique éliminatoire relierait le pourtour des vaisseaux absorbants au canal intestinal. Les faits ne tardèrent pas à modifier cette manière de voir. La première injection dont je viens de discuter le résultat, con- sidérée en elle-même, avait assez mal réussi. J'ai depuis lors renouvelé très- fréquemment Pessai qui, je l'avouerai, ne m'a jamais donné pleine satisfaction. Ce nouvel ordre de conduits se remplit bien moins profondément queles capillaires sanguins. Le défaut de pénétration peut provenir de leur extrème ténuité ; mais je l'altribue plutôt à la fragilité des parois. On finit presque toujours par s'apercevoir que l'mjection s'est terminée par épanchement, sans que le fond d'aucun tube paraisse avoir été atteint. Quoique d'une efficacité restreinte, ces tentatives ne laissent pas que d’avoir été fort utiles. Isolées, elles seraient tout à fait insuffisantes, car le liquide coloré se répartit d'ordinaire très- inégalement. Une des branches apparaît avec détail, tandis que d’autres montrent à peine leurs premiers troncs. Mais, en multiphant les tâtonnements, on arrive à combler peu à peu les lacunes. Or, une injection plus heureuse et renouvelée vint jeter du jour sur les questions pendantes, et même en étendre la portée. Elle avait fait dans un certain canalicule un chemin plus long qu’à l'ordinaire : arrivé à l'endroit où s’arrêtait la ma- tière colorée, je vis le conduit se prolonger encore au delà; il prenait en effet dans cette région l'éclat d'argent indiqué par Weber et remarqué bien souvent aussi par moi dans les vais- seaux duodénaux de la Carpe commune. Il n’y avait là rien de particulier à l'individu. Je ne me souviens pas d’avoir ouvert depuis lors un maquereau où cette teinte nacrée, d'un effet si tranché, n’existât avec plus ou moins d’abondance. Et si jus- qu'alors elle n'avait échappé, c'est que d'ordinaire je n’étudiais ces tubes qu'en decà des limites de l'injection. La matière à laquelle elle est due ne remplit point le canal ARTICLE N° 8. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. D9 d'un bout à l'autre; elle se sépare en tronçons de longueurs variables, dont Péclat cependant n’est pas dû, comme on pour- rait le croire, à un simple jeu de la lumière sur les parties plus favorablement exposées. Car les endroits brillants ne se dé- placent pas lorsque lorientation change. Cette discontinuité montre une nouvelle analogie avec ce qui a lieu dans la Carpe. Ces colonnettes éclatantes ne se déplacent ni en totalité, ni en partie, lorsque, en comprimant le canal, on essaye de les faire progresser à la manière du sang sous l'action de l'artère, ce qui prouve qu'elles ne sont point l'effet d’un liquide contenu dans le vaisseau. Je suis même en droit de supposer qu'elles n’en remplissent pas le canal, car je vois souvent l'injection pénétrer dans des régions qui étaient occupées auparavant par des lignes pacrées; ces taches ne forment donc pomt obstacle. D'ailleurs elles ne fuient pas refoulées par le liquide, on ne les retrouve point accumulées à la tête de la colonne mjectée. Elles demeurent immobiles, mais leur retlet disparaît noyé dans la couleur vive du chromate. On trouve en effet une constance remarquable dans les points où se fixe cette matière. Elle paraît augmenterà mesure que la pièce vieillit ; et si j'étais contraint de donner mon opi- pion sur la nature de cette substance, je dirais que J'y vois le résultat d’un dépôt par précipitation sur les parois du canal. Quoi qu'il en soit, la physionomie de ces taches est si frap- pante et si spéciale, qu'elle assure la vérité des analogies que leur présence suggère naturellement à l'esprit, Ajoutons que Fabondance des tubes nacrés, ou plutôt la longueur des parties argentées de ces tubes est variable. On la trouve souvent tres-réduite dans le Maquereau, sans que Je puisse rien dire des conditions biologiques dont cet effet dépend. Mais la grande majorité des animaux de cette espèce offrent des tronçons nacrés, et après avoir vu une fois cette apparence, en la cherchant attentivement sur le trajet des tubes déter- miué au préalable, on est à peu près certain d'en retrouver des traces. ILest donc établi que les canaux de Weber ont leur analogue daus les capillures à déversement duodénal du Maquereau, Il ol LÉGOUS. est même probable que ces deux systèmes sont complétement équivalents. Devant traiter cette question plus loim (1), il me suilira de prendre acte du résultat : on connait un troisième exemple du canal de Weber. Notons qu'un travail très-pro- longé ne leût peut-être pas révélé, si la possibilité de l'injection par l’ampoule pancréatique ne s'était offerte. Cette circonstance m'a d'autant plus frappé, que Jj'étudiais depuis longtemps le pancréas ou l’appareil pancréatique des Poissons, sans ‘avoir jamais vu ce Canal sur aucune espèce, sauf la Carpe. Je n'ai point donné à l'examen microscopique de la substance nacrée lout le temps que nécessiterait cette étude difficile. Pour la question qui me préoecupe aujourd haï ce travail paraissait superflu; je n'ai pu réussir à séparer des parois du vaisseau les molécules constitutives de cette substance. Il y avait tout intérêt à poursuivre mes recherches dans une direction différente. En effet, j'aurais eu tort, au vu de la pre- mière injection, de considérer celte méthode comme incapable de me conduire au pancréas. L'un des capillaires du réseau vient aboutir à un corpuseule au dela duquel 1l ne se prolonge pas. Ce petit corps à toutes les apparences d'une glande. Il est par- faitement isolé, d’une couleur vineuse qui tranche sur les parties voisines, de texture friable, mais recevant quelque solidité de la lamelle fibreuse qui l'enveloppe. Le canal qui s'y rend est nacré, je l'ai remarqué depuis; mais la teinte est si légère et si fugitive, qu'elle m'avaitéchappé jusqu'au moment de l'injection spéciale de ce conduit. Il pénètre et garde son reflet jusqu’à une profondeur notable au delà de son insertion sur la glandule. J'ai pu distinguer ses premières subdivisions; elles rampent, semble-t-il, à une petite distance de la surface. Parfaitement constant d'ailleurs dans son existence et sa phy- sionomie, ce corpuscule est tres-aplati, ovale, à bords tranchants, et ne dépasse pas 2 millimètres 1/2 dans son plus grand dia- mètre. Il adhère par son bord parallèle au grand axe, au bord interne du canal cholédoque. Sans doute dans l’état normal il (4) Dans la Monographie de l'organe pancréatique de la Carpe, ARTICLE N° 5. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 09 est replié sur ce canal, le long de sa ligne d'attache qui sert de charnière à ce repli; le contact a lieu vers l'endroit où le cho- lédoque se renfle pour commencer la vésicule au-dessous du bras supérieur de l Y et un peu vers la droite. Dès les premiers animaux que J'avais ouverts, ce corps ne m'avait point échappé, mais paraissait si éloigné de l'embou- chure du cholédoque, qu'il semblait téméraire de l’assimiler tout d'abord à un pancréas. I à fallu des injections bien réussies dans ce sens pour mettre en évidence d'une manière irréfragable la communication de cette glaudule avec le duodénum par l’orifice paucréatique. S'il était possible de concevoir des doutes sur la nature glan - dulaire de ce corps, l'examen microscopique suffirait pour tran- cher la question. On y trouve les éléments essentiels de toute glande, savoir, des cellules aptes à la sécrétion, et un tissu ou stroma dans lequel elles sont plongées. Celui-ci résiste à l’action de l'eau pure, et ne m'a paru offrir aucune particularité notable. Jai pu voir quelques cellules avec une très-grande netteté ; une fois s’est présenté de face tout un lambeau de membrane cellulaire : c'était probablement une partie dépliée et développée de paroi sécrétante. Je n'insistai pas alors sur l'étude histologique de cet organite. Reprise plus tard, elle trouvera sa place à propos du pancréas diffus de cette espèce. Ime suffira d’avoir confirmé par le témoi- gnage du microscope les présomptions puissantes qui militent en faveur de la nature glandulaire de la masse. Il y a done là une glandule parfaitement constante dans son existence et dans ses rapports, ce qui, malgré sa petitesse, est une première preuve de son Importance anatomique. En outre, elle se trouve en relation par un canal spécial avec le duodénum ; enfin ce canal affecte vis-à-vis du cholédoque lesallures ordinaires du canal pancréatique : on ne peut se refuser à reconnaitre un des pancréas du Maquereau commun. Au surplus, si l’on contestait cette conclusion, il faudrait rejeter en même temps tous les résultats obtenus par Brockmann et Stannius, dont aucun ne se présente avec plus de netteté, ces observateurs n’ayant 90 EÉGQOUIS. jamais injecté aucun tube ni soumis leurs glandules au mi- Croscope. Je passerai, sans m'en occuper davantage, sur le peu de suc- cès que m'a donné l'application de la méthode chimique à ce corps : les résultats sont demeurés douteux. D'autres espèces (Acipenser et Cyprimoïdes) donneront une meilleure occasion d'expliquer à quoi j'attribue le défaut de netteté des réactions dans le cas des Poissons, et surtout des Osseux. Si cette glanduleest un pancréas, que devait-on penser du système vasculaire dont elle termine une des branches? Faut-il croire que ce soit le canal excréteur multiple d’une glande mul- üiple? L’analogue physiologique veut que le liquide qui tombe dans l'intestin par l’orifice de la papille soit du suc paucréatique. Or, l'humeur qui circule dans le tronc commun terminal des tubes de Weber est un mélange. Elle est due en minime partie au pancréas, et pour le reste au surplüs du système. Si l'on admet que la sécrétion de la petite glande soit du suc pancréatique normal, on pourra supposer que les autres canaux contiennent aussi ce MÊME suc. Séduisante à bien des égards, cette conception n’est cepen- dant pas une conséquence nécessaire des faits, et même après la découverte du petit pancréas, la discussion ne me paraissait pas lui assurer assez clairement l'avantage. Il était douteux que la liqueur circulant dans ce système fût en réalité pancréatique ; car la probabilité voulait que cette vascularisation fût particu- lière à certaines espèces. J'ai dit ailleurs combien peu les appa- rences conviennent à la supposition de l'existence d’une glande. D'autre part, la glandule est-elle bien un pancréas ellicace ? Ne serait-ce pas, Comme les corps de Brockmann, une glande réduite, d'utilité contestable, vestige rudimentaire d'un organe typique de lembranchement, ou simple témoin affirmant la parenté zoologique avec des espèces mieux pourvues? Brockmann paraissait avoir trouvé des corpuscules semblables ou complé- tement isolés, où donnant dans lintestin par un canalicule très-court. N’était-il pas à prévoir que, dans une espèce douée comme le Maquereau d’un appareil wébérien, le corpuscule ARTICLE N° 8. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 57 pancréas, sans cesser d’être rudimentaire et inutile, se grefterait sur un rameau d'emprunt, appartenant à une fonction diffé- rente. Je trouvais aussi dans sa constitution, comme on le verra, d’autres raisons de craindre que ce corps n'eût pas d'usage phy- sologique. En toute hypothèse la direction du travail était imdiquée ; je m'efforçai, à partir de ce moment, de remonter jusqu’à l'extrémité de quelque autre canalicule. Je crus d’abord que, si ces rameaux aboutissaient à une glande, je ne pourrais manquer d'en reconnaître bientôt les éléments; au contraire, 1l se trouvait que les circonstances de celte détermination étaient on ne peut plus désavantageuses, et l'idée de rapporter le système wébérien (out entier à un appareil glandulaire ne put que perdre encore du terrain, sans qu'aucun jour se fit de longtemps sur la desti- nation de cet ensemble. Pour ne point surcharger ce travail, je ne mentionnerai qu'à propos de deux ou trois espèces ce que J'ai recueilli de la distri- bution des tubes de Weber, moins pour donner une idée de leur complication et de leur longueur, qu'en vue d'établir sur quelques descriptions choisies la loi, fort simple, selon moi, de leur tracé. L'intérêt principal des explications dans lesquelles je vais entrer, est d'établir la concomitance des vaisseaux wébériens et des veines; mais l’étude approfondie de cette espèce conduit à reconnaitre la fixité remarquable des grandes divisions de ce système vasculaire etlabondance de ses anastomoses; je m'ar- rêterai surtout aux points qui mettent ces trois propriétés en évidence. A l'époque ou je les étudiais sur le Maquereau, je ne conservais qu'une confiance très-découragée dans l'existence d’un pancréas microscopique, et ne soupçonnais rien de l'influence qui en dirige l’accroissenient. de suivais donc très-péniblement ces tubes dans l'espoir de trouver à l’origine des ramuscules quelque indication sur leur nature. Aucune injection, comme on le comprend, n'a pénétré dans ces conduits déliés jusqu'aux distances relativement prodi- SC. NAT., FÉVRIER 1879. XVII, 10, — ART, N°8, 58 ERGROURS. gieuses où 1ls sont suscepübles d'atteindre ; c'était donc le ni - croscope seul qui me révélait, à force d'essais, la continuité des tubes. il faut ici se reporter à la description des viscères que j'ai dû faire avec quelque précision; l'intelligence de ce qui suit en dépend. Eofin, il est utile de se souvenir que, en relevant le trajet des tubes de Weber, on trace du même coup la figure de son pan- créas diffus. On trouvera la preuve spéciale de ce fait, relative - ment au Maquereau, dans les dernières pages de cette notice. Parmi les tubes de ce réseau, celui du pancréas glandulaire se recommandait à un examen plus approfondi. Au sortr de l'intestin, le tronc commun remonte à droite du cholédoque, qu'il ne cesse pas d'accompagner quand ce der- nier est devenu canal cystique. I court entre lui et une des veines appendicielles du côté droit. Large à son origine, il se rétrécit promptement pour m'être bientôt plus qu'un filet ausst grêle que tous les vaisseaux de même nature. Un peu après la rate, il rencontre le petit pancréas, et là se divise en deux branches: l'une, très-courte, extrêmement déliée, se porte à gauche par rapport à l'animal, c’est-à-dire à droite du courant dont ces canaux sont le siége. Ce rameau latéral, parfois tout à fait in- visible, est l'excréteur de la glandule. La seconde branche fait suite au tronc primitif; elle est quel- quefois aussi volumineuse que lui, souvent beaucoup moins ; elle s’avance sur le eystique pour gagner la vésicule. Le cho- lédoque, appliqué sur l'intestin, est élargi en ruban et tranchant par ses deux bords, qui regardent, l’un en dehors, vers le foie, l’autre en dedans, vers la soudure des bras de l'Y. C’est sur ce dernier qu'est placé le petit pancréas lamellaire, et c'est aussi ce bord que la branche commence par suivre; elle est presque toujours brillante dans cette partie de sa longueur. Plus aisé à suivre, le trajet supervésiculaire, que-je vais indiquer, semble particulièrement instructif, Ces deux bords sont garnis chacun d’une ligne cellulo- graisseuse qui va se confondre avec sa congénère au fond de la ARTICLE N° 8. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 59 vésicule, Il y en à en outre une troisième. La vésicule biliaire s'enfonce dans le prisme triangulaire horizontal, dont le ruban intestinal détermine la face inférieure. La face interne est formée par la zone inférieure du côté du cul-de-sac, l'externe répond à la paroi abdominale, la vésicule ne remplit pas jusqu’à l’arête les angles de ce prisme; mais ce sont des traîinées de graisse qui occupent. Elles convergent au fond du sac, auquel elles donnent l'aspect d’une pointe. La traînée qui part du bord externe du cholédoque suit l’arête externe inférieure du prisme. Celle du bord interne se divise à peu près au point (noté dans la description des viscères) où la vési- cule sort de dessous le foie. Elle envoie une de ses branches à l'arète externe supérieure (bord de la gouttière), et l’autre à l’arête interne inférieure entre l'intestin et le cul-de-sac. La constance du trajet dans cette région est d'autant plus frappante qu’elle porte sur un détail sans importance appréciable. Le canal suit l'arête interne à peu près jusqu'au tiers de sa longueur, où il la quitte pour traverser la face de la vésieule qui s'applique sur le cul-de-sac ; il va ainsi toucher l’arèête supérieure, puis, traversant en sens inverse (à), il retourne à la première pour ne plus s’en séparer. Après chaque concavité postérieure on trouve d’ordi- naire une sorte de dépôt nacré. Avant de s'éloigner de l’arète interne inférieure, le canal envoie à travers la graisse deux rameaux : ce sont les seules ramifications de la partie super- vésiculaire visibles à l'œil nu. Il est toujours coupé vers le fond par une grosse veine plus large et plus superficielle. Les divisions de la veinele rencontrent également plus près de la pointe et se comportent de même à son égard. Une membrane cellulaire à plusieurs nappes part de la pointe vésiculaire el va se porter, par un de ses prolongements, au cul- de-sac stomacal, par un autre à l’anse postérieure de l'intestin, par un troisième au rectum. Il se fait toujours dans cette mem- brane des dépôts graisseux ; les deux plus importants se fixent, (4) PI, XIX, fig. 4, 60 LÉGOUIS l'un à la pointe de la vésicule, l’autre un peu en arrière, dans le plan vertical de la courbure intestinale ; mais entre l'intestin et le cul-de-sac, ces amas adipeux forment le prolongement longi- tudinal des lignes qui divisent en trois régions la surface de la vésicule. On peut constater que le canal dont 1l vient d’être ques- tion quitte la vésicule à sa pointe, court superticiellement sur la masse graisseuse voisine qu'il dépasse, et s'engage dans le liga- ment cellulaire qui résulte de la Jonction des trois nappes pré- citées. J’ai encore retrouvé dans la première partie de ce parcours extra-vésiculaire quelques vestiges de matière nacrée. Il est possible de suivre le canal jusqu’à la deuxième masse de matière adipeuse, qui, du reste, est souvent reliée à la première par un ruban continu et plus ou moims chargé de graisse : mais cette poursuite n’a rien révélé de remarquable. Revenons au tronc d'origine. Avant d'arriver à la courbure du cholédoque, 1l a déjà émis un jet relativement important vers les appendices, en dedans d’abord, puis en dehors de la veine mé- sentérique; un second canal se sépare de lui tout près de là pour s'attacher à une autre veine du système imtestinal. Entre ces deux Jets un filet de communication produit aussitôt une anastomose ; au delà de là courbure et de l’autre côté, se trouve une grosse branche dérivée qui gagne le versant correspondant de la masse appendicielle. Là elle se divise en deux parties, puis en plu- sieurs. La branche compagne de la veine mésentérique (1) continue à la suivre à travers les faisceaux des appendices. La veine se porte vers le troisième coude à convexité antérieure de Pintestin. Un peu en avant de ce point, le canal wébérien donne naissance à plusieurs divisions, en nombre variable, mais partagées entre le groupe d’appendices qui se trouve au-dessus et les mésentères intestinaux ; un des courants marche d'ordinaire vers le coude ; d’autres passent au-dessus et gagnent, en gardant leur distance, le fond de la deuxième courbure ; ils s'y dédoublent souvent en filets qui, parallèles à la branche mère, courent habituellement accolés aux deux côtés d’une même veine. (4) PL XX, fig. 4. ARTICLE N° 8. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. G1 Au delà du coude de l'intestin, la veine mésentérique passe au-dessus, en suivant le dessous de la partie de l'intestin qui se rend droit au rectum ; puis elle la traverse et va se diviser et se subdiviser dans l’anse formée par cette partie et la voisine. Elle est, dans tout ce trajet, accompagnée par la suite de la branche de Weber qui lui reste fixée. Cette branche se subdivise aussi plusieurs fois. Les canalicules marchent parallèlement à la veine, la bordant sur les deux côtés; entre les divisions de cette branche, deux des plus longues côtoient les branches intestinales. J'ai pu les suivre fort loin dans ce sens. On retrouve près d'elles, dans cette région, une des divisions projetées bien plus haut par le tronc latéral à la mésentérique, avant la troisième courbure de l'intestin. Je najouterai que peu de détails sur les autres canaux déjà mentionnés comme issus du tronc principal voisin du cholé- doque ; ils s’étalent en réseau compliqué à travers la masse des appendices reliés entre eux et avec l’origine des précédents par des branches anastomotiques. Il m'a semblé en voir un se diriger vers le foie. J'ai appris, par l'examen comparé d'espèces variées, que les appendices, lorsqu'ils sont nombreux, sont en quelque sorte divisés par groupes. Chaque faisceau de cæcums est entouré par une ceinture péritonéale qui le délimite et le sépare des fais- ceaux voisins. Les lames séreuses qui composent ces enveloppes des groupes ne sont, on le prévoit, jamais complètes; dans le Maquereau on les trouve particulièrement réduites, mais la seg— mentation de la masse appendicielle n’en subsiste pas moins, et les débris de la membrane fibreuse forment autour des groupes et entre eux des lacis ligamenteux qui donnent à l’ensemble de la fixité et de la consistance. Sur ces trabécules fibro-con- jonctives passent les vaisseaux sanguins et aussi les ramifica- tions secondaires des tubes wébériens. Ces derniers, par leurs anastomoses, ferment plus ou moins exactement leurs circuits autour des groupes, à la surface et dans l'épaisseur desquels ils envoient leurs dernières subdivisions. La plus distincte parmi ces réunions de cæcums recouvre la troisième courbure intestinale ; 62 LEGOUIS. elle est séparée du reste des appendices par le plan de cette courbure, dans lequel circule la veine mésentérique inférieure ; c’est aussi dans ce plan que se rend le tronc gastro-imtestinal des tubes wébériens. Ce tronc, avons-nous vu (1), fournit, en passant, à la portion des cæcums située au-dessus de lui et à sa droite; les canalicules auxquels il donne naissance pénètrent dans le faisceau cæcal ; quant à la rangée des appendices qui descend à gauche du duo- dénum, outre la branche que nous avons vue s’y rendre, au niveau du pancréas massif, elle en reçoit une autre plus impor- tante, issue directement du tronc commun. Ce vaisseau court parallèlement au bord gauche du duodénum, et dans son trajet il émet à gauche des dérivations en nombre variable qui descen- dent dans le sillon entre deux cæcums voisins, puis pénètrent dans la masse. ILest rare que, à côté du filet wébérien, on ne rencontre pas un petit vaisseau sanguin ; lorsque cette circonstance fait défaut, on peut presque toujours affirmer que le canal de Weber, qui marche ainsi seul, est un tronçon anastomotique et de très-courte portée. L'existence des troncs que j'ai indiqués, et qui sont tous à peu près au nombre des principaux, est absolument constante; ils se déplacent un peu d'un individu à l’autre, jamais cependant de manière à devenir méconnaissables. Pour constater et vérifier, partie par partie et tronçon par troncon, pour ainsi dire, la distribution des tuyaux wébériens, il fallut examiner un très-grand nombre de sujets (plus de soixante); tant que dura la pêche de ce poisson dans la rade de Concarneau, c'est-à-dire plus de deux mois, Je ne cessai guère de m'occuper de cette espèce. Il semble que des observations quotidiennes et si persévérantes eussent dû m'apprendre non-seulement la disposition, mais aussi l'usage des tubes wébériens. Déterminer cette fonction était le but principal de mon travail. Jespérais parvenir à l’extrémité (1) PI. XIX et XX, fig. 1. ARTICLE N° 8. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 63 d'un de ces canaux dont je connaissais le cours, et trouver là l'élément, glandulaire ou autre, dont le système dépendait. Mais toujours je perdais la trace du conduit avant d'en avoir touché le bout. Les ramifications secondaires latérales des grands troncs ne se prêtaient pas mieux à l'examen, el souvent je n’arrivais même pas à en trouver une seule. J'ai compris depuis la raison de ces insuccès. Si décourageants qu’ils fussent, je revenais cependant de préférence à l’observa- tion du Maquereau, parce que cet animal offre un des rares exemples d’une disposition où l'injection puisse être opérée, Mais, comme on l’a remarqué plus baut, une observation mi- croscopique du système vwébérien effectuée après injection ne réussit pour ainsi dire jamais; le pancréas lamellaire est alors trop décomposé pour que les rapports et la nature des éléments puissent être saisis. D'autres causes accéléraient encore son alté- ralion. Le bain dans lequel plongeaient les viscères, quoique l'eau en eût été salée ou sucrée, altaquait les cellules; cet effet destructeur est plus prononcé encore si, comme Je le faisais dans les commencements, le liquide est chauffé à 20 ou 30 degrés. D'ailleurs le Maquereau se trouveêtre, ainsi que je lai reconnu plus tard, une espèce très-défavorable quant à la détermination du pancréas diffus, indépendamment des difficultés mhérentes à l'injection. Même lorsqu'on procède, sans injecter, à l'obser- valion directe, l'état particulier des lames viscérales et des acini glandulaires de cet animal rend la préparation fort délicate et les ésultais incertains. Il en est surtout ainsi en hiver, à l’époque de la deuxième pêche de ce poisson. Pendant les mois de décembre et de janvier, où je faisais ma première série de recherches, les viscères du Maquereau sont chargés de graisse ; je ne parvins que beaucoup plus tard, lors de la pêche d'été, à me rendre un compte exact de l'anatomie de ce pancréas et des grandes difficultés qui lui sont particulières. Jusque-là cependant mon travail n'avait pas été absolument sans fruit. Outre la masse pancréatique principale qui ne fait jamais défaut, certains sujets m’en avaient montré d’autres. Une 6! LEGOUIS,. fois, je trouvai sur ce tronc wébérien principal, un peu avant sa rencontre avec la masse déjà connue, une massette beau- coup plus petite. Elle était sessile sur le confluent du rameau qui se rend à la partie antérieure gauche des appendices. Deux ou trois fois je vis une glandule plus considérable, quoique variable par la situation et la forme, à l'extrémité du tronc d'origine des tubes de Weber, et placée au concours du cholé- doque et du duodénum. Ces corpuscules, d'existence variable, ne différent en rien, dans leur constitution et leurs rapports essentiels, avec la masse principale; ce sont donc des pancréas disséminés adventifs. Leurs cellules sécrétantes sont peut-être en général un peu plus grandes que celles du corps fixe. De ces faits résulterait une probabilité croissante en faveur de la supposition que tous les tubes de Weber aboutissaient à des acini glandulaires. La certitude de cette relation me fut fournie, comme on verra, par d’autres espèces, et ma conviction était faite lorsque je repris en juillet l'étude du Maquereau, voulant alors surtout reconnaître l'obstacle qui m'avait arrêté. Le pancréas laminaire du Maquereau présente des caractères qui lui donnent une place à part entre les organes de cette forme. C'est aussi de ces singularités de texture que venaient mes premières incertitudes. Si l’on se reporte à la description très-précise qui a été faite du système wébérien, on y pourra remarquer la longueur des troncs directs et la multiplicité de leurs communications anastomo- tiques. On n’est pas moins frappé de la pauvreté des arborisations proprement dites. Les troncs primaires franchissent des distances considérables sans émettre un seul canal latéral, et les rameaux secondaires ne présentent pour ainsi dire pas de branches ; leurs dérivés sont presque exclusivement des canaux d’anastomose. Cette apparence ne tient pas, comme je l'ai cru d’abord, au dé- faut de pénétration des injections. L'étude microscopique fait voir que le long des canaux du premier ordre, ceux du second ordre sont à la fois et très-mullipliés et très-petits pour la plu- part. Un ou deux seulement, sur des centaines, prennent du développement, et la longueur de ces branches exceptionnelles ARTICLE N° 8. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 65 est alors considérable. De même pour les rameaux tertiaires. En général, les canaux du dernier ordre, ceux qui aboutissent au lissu, sont très-courts. Les traînées'adipo-pancréaliques dont J'ai parlé et qui longent la vésicule sont d'une étude très-instructive à cet égard. La brièveté de ces canalicules, sans être tout à fait spéciale à cette espèce, s'y montre plus marquée et comme extrême. Elle est en rapport avec le motif qui fait du pancréas lamellaire le compagnon inséparable des veines, et l'on a pu noter que les petits pancréas en masse se constituent au contact des troncs primaires, avec un pédoncule à peine visible, I faut une étude microscopique minutieuse pour reconvaitre les derniers ramuscules, et de là viennent mes premiers insuccès sur ce point. A ce caractère exceptionnel dans les tubes s'en ajoute dans le tissu un autre inverse et inattendu. Il semble qu'au bout de ces petits conduits on doive rencontrer un simple follicule, ou tout au plus un acinus de dimensions réduites en proportion. Ce canal si exigu suflit cependant à l’excrétion de surfaces glan- dulaires relativement énormes. Les acini, dans cette espèce, sont d’une charpente très-lâche et pour ainsi dire eux-mêmes diffluents, comme le pancréas pris en totalité, Les membranes péritonéales se trouvent envahies sur une assez grande largeur par les élé- ments pancréatiques, sans que les ramifications latérales des grands troncs en prennent plus d'extension. Nous reviendrons plus loin sur ce fait, que je m'explique par une action locale des cellules; qu'il suffise de le constater 1er. Cette imperfection dans la canalisation de la glande est corrélative d’un défaut non moins remarquable de consistance dans la couche conjonctive qui la délimite. En général, aucun pancréas diffus n'a de revêtement membraneux; la substance glandulaire se dépose à travers les mailles du tissu conjonelif, sans prendre rien de comparable à une tunique propre; mais il n’est point d'espèce où cette absence de limitation dans l'appareil de sécrétion spéciale soit plus prononcée. Dans la Carpe, le Cyprinus sinensis, le Merlus etle Corégone houling, etc., l'acinus, quoique dépourvu de membrane enveloppante, se constitue dans un stroma plus compacte que le tissu conjonctif ordinaire. Le Maquereau et aussi, 66 LEGOUIS. comme on le verra, le Caranx Trachurus, n'offrent cette con- densation qu'à un degré beaucoup moindre. Les cellules glandu- laires sont aussi moins serrées dans les limites de cet espace. La concentration du tissu est si faible, qu’elle approche du minimum. Il est toujours impossible à l'œil nu, et souvent difficile avec un grossissement faible, de saisir les contours des folioles glandu- laires, contrairement à ce qui se voit ailleurs. L’acinus ne prend point avec netteté la forme globuleuse à surface framboisée qu'on lui connaît, il dépend beaucoup plus des accidents du tissu con- jonctif général. Si dans une préparation microscopique soumise à un grossissement médiocre se trouve une partie pancréatique, les bords, qui s'accusent par une teinte à peine plus foncée sur le milieu ambiant, suivent des lignes étrangères au dessin ordinaire d’une glande, et l'on ne peut décider s'il s’agit vraiment d'un üssu particulier ou d’un simple épaississement local de la trame conjonelive. Les grossissements supérieurs doivent être employés pour lever les doutes. Ils permettent de reconnaitre la partie essentielle du issu, la cellule sécrétaire. Elle présente une différence constante dans toutes les espèces, suivant qu'on la prend dans le pancréas massif ou dans le diffus. Là même où l'observation histologique du pancréas diffus n'offre aucune difficulté et où se trouvent les éléments le mieux caractérisés, la cellule du diffus est plus grande, plus variable, d’une constitution moins nelte que celle des masses. Dans le Maquercau, en particulier, l'inégalité, l’indécision dans les propriétés de la cellule, sont plus profondes; de tous les types que j'ai examinés particulièrement sous ce rapport, c’est le plus imparfait. Les cellules du pancréas massif sont petites; elles mesurent environ 0"*,009 et restent au-dessous des dimensions ordinaires des épithéliums glandulaires des Mammiferes. Elles sont rondes, égales en volume, peu réfringentes et à contours pâles, colorées d’une légère nuance jaune vert, que l'on retrouve dans tous les üssus de l’animal; quelques-unes présentent un noyau très-appa- rent, dans beaucoup il est malaisé de le découvrir. Enfin, chez ARTICLE N° 8. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 67 la plupart d'entre elles, je n'ai pu réussir à l'apercevoir. Au surplus, les cellules à nucléus et les autres sont indifféremment mêlées dans le parenchyme des petites glandes; sauf cette diffé- rence, l'identité est parfaite. Le pancréas diffus est remarquable par la variabilité de ses éléments sécrétoires. C'est un tissu composé de cellules très- adhérentes à un stroma peu consistant. Elles ont la même teinte, la même faible réfringence que celles qui leur correspondent dans le pancréas localisé ; toutes s’approchent de la forme ronde, mais avec des irrégularités plus ou moins sensibles. La varia- tion à cet égard va jusqu’à rendre oblongues les plus distantes du contour normal, La dissemblance est surtout notable dans les dimensions. Où en trouve sur une même région et côte à côle d'aussi pelites que celles du massif, et d'autres presque six fois plus grandes en surface. Les dimensions extrèmes que j'aie notées sont 0"",011 à 9°",012 de largeur sur 0"",012 à 0"",018 de long; le noyau, toujours très-petit, parait manquer à la plupart. Les circonstances m'ontamené à faire de ces éléments une étude comparative très-prolongée, dont les résultats trouveront ailleurs une place plus opportune. Il convient aussi de renvoyer à un autre temps (1) les détails que m'a fournis l'examen du Maquereau quant à son système lymphatique. Pour éviter des redites trop fréquentes, je grou- perai autour des sujets qui donnent lieu aux remarques les plus intéressantes les faits accessoires obtenus sur les autres espèces. 2° Caranx Trachurus, Val, Parmi toutes les espèces que j'ai vues, le Caranr Trachurus est la plus propre à donner une idée de l’extrème développe- ment que certains pancréas sont susceptibles de prendre. Les explications dans lesquelles j'entrerai auront surtout pour but d'établir ce fait. (1) Étude des Trigles et des Chabots, C8 LEGOUIS, On verra aussi combien les analogies sont quelquefois étroites entre espèces voisines dans la disposition générale de la glande et des organes digestifs. La preuve que fournit de celte aflinité anatomique la comparaison du Scomber Scombrus et du Sc. Tra- churus, me dispensera, à propos des autres familles, d'entrer dans d’aussi grands détails. Ces deux points auxquels seront subordonnées toutes les par- ticularités de la description ne sont pas cependant ceux qui fixérent principalement mon attention lors des recherches sur cetanimal. J'étais alors préoccupé des difficultés spéciales qu'offre sur le Maquereau la détermination microscopique du pancréas diffus. D'autres espèces m'avaient déjà fait acquérir la connais sance certaine des caractères essentiels de la forme diffuse; il semblait étonnant de ne les retrouver dans le Scombrus qu'in- décis et exagérés tout à la fois. La Carangue vint à propos com- bler une acune qui nuisait à l'unité de l'ensemble. et former le trait d'union entre les types généraux et la constitution des lames diffuses du Maquereau. L'état décrit pour ce dernier est une forme limite et en quelque sorte aberrante. Il Analogie étroite entre les pancréas des Scomber Scombrus et Trachurus. Les viscères du Trachurus sont la copie à peu près fidèle de ceux du Scomber. La disposition générale des masses est si exac- tement semblable, qu'au premier coup d'œil on aperçoit une diffé- rence de teinte et rien de plus. Les tons sont plus rougeûtres chez la Carangue, plutôt verts dans le Maquereau. La forme, les rela- tions des organes sont les mêmes ; le régime des veines est con- struit sur un plan presque identique ; le foie, un peu moindre en volume, s’avance un peu moins en arrière. Je n'insiste pas sur d’autres différences d'aussi faible portée, qu’un examen minu- tieux pourrait sans doute relever. On trouve dans les appendices un fait de plus de conséquence sur le degré d’aceumulation du tissu glandulaire. Il n’y à que cinq cæcums, tandis que le duo- dénum du Scomber en porte d'ordinaire plus de cent. Malgré ARTICLE N° 8. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 69 cette grande inégalité, le volume qu’occupent ces cinq digita- tions n’est guère moins considérable que la place prise par la masse cæcale au-dessus des viscères du Maquereau. Et pour se rendre compte du reploiement naturel et des rapports des parties sur le vivant, il est indifférent de se servir d’une espéce ou de l’autre (1). L'étude dont je parle iei m'a paru devoir servir avant tout à éclairer ce qui restait obseur dans l'examen du Maquereau. Pour le reste, je m'en suis tenu à la vérification rapide de l’analogie des caractères. Il n'y a donc lieu d’insister ni sur l'existence, ni sur la dispo- sition du système wébérien ; je ne me suis point astreint à noter les différences très-secondaires que peuvent entraîner de légères - dissemblances dans le réseau veineux viscéral. On prévoit, par l'identité dans l’ensemble de la ramification wébérienne, que le plan général du pancréas doit être le même. Il en est ainsi, et pourtant l'étude de la glande, sans difficulté chez le Caranx, esttrès-laborieuse dans son analogue. D'où vient cette facilité relative ? Ailleurs on a vu que le dessin de l'appareil pancréatique est formé par les circuits veineux, dans ses traits fondamentaux. Plus loin je faisais remarquer que les formes plastiques de la glande dépendaient plutôt d’influences différentes. La compa- raison du Caranx et du Scomber fait saisir la conciliation de ces deux tendances diverses. lei et la les grands troncs wébériens se ressemblent par leur configuration, comme les plexus vel- neux qu'ils accompagnent; les grandes voies de communication à travers la substance glandulaire sont donc les mêmes pour les deux espèces, et aussi par conséquent les lignes essentielles de la figure du pancréas. Mais autour de cette charpente vasculaire (1) PI, XIX, fig. 1 ; pl. XX, fig. À et 2.— Je me suis cru dispensé par cette similitude complète de donner une figure spéciale des viscères du Maquereau 2» statu viventrs. L'exactitude des idées n’y eût rien gagné. On voit, pl. XX, fig. 2, la représentation de la masse viscérale du Caranæx, avant séparation des parties; un dessin relatif au Scom- brus n’en différerait pas sensiblement, sauf par la multiplicité des appendices, Les dé- tails à noter dans la distribution des vaisseaux sont indiqués d'autre part suffisamment pour le Caranx par les figures À des deux planches prises du Scombrus. 70 LEGOUIS. commune les constructions parenchymateuses sont beaucoup plus considérables chez la Carangue, et par suite les tâtonne- ments microscopiques nécessaires pour mettre en évidence le tissu sécrétant sont d'autant moins nombreux. J'aurai souvent à mentionner de pareilles dissimilitudes de développement sur des types wébériens semblables. En même temps, à côté des variations dans l'abondance du tissu, on note un fait anatomique si constant, qu'il ne peut manquer de s’y rattacher, à savoir, une variation inverse dans la multiplicité des cæcums. Je crois pouvoir avancer que : 1° entre pancréas d’égale importance, la dissémination molécu- laire de la glande varie dans le mème sens que le nombre des appendices ; et 2° toutes choses égales d’ailleurs, le volume total du pancréas augmente lorsque la richesse du système appendi- ciel diminue. La coexistence de ces deux mouvements inverses est mani- feste dans la comparaison des espèces dont il est ici question. Le tüsssu pancréatique du Maquereau est visiblement moins aggloméré et moins abondant, On s'explique aisément l'influence du nombre des appendices sur sa densité. Entre des cæcums mullipliés se trouveront des lacunes interstitielles de grande surface. Ces méats sont traversés par des lames péritonéales compliquées où plus ordi- pairement par un riche réseau de fibrilles ligamenteuses. Le pancréas trouve alors au voisinage de son foyer duodéval des issues par lesquelles il se fraye un passage jusqu'au fond de toutes les cavités intercæcales. Avant d'en venir à l'épaississe- ment, il se développera sur ces aires presque indéfinies, de telle sorte que sauf dans les cas d’ampleur excessive du système pan- créatique, le progrès en épaisseur n'aura pas lieu de se produire. La glande sera microscopique et diffuse, comme dans le Maque- reau, ou disséminée et microscopique en partie, comme dans le Zeus faber. Un coup d'œil donné aux masses cæcales si différeutes du Maquereau et du Caranx suffit pour saisir la réalité et la nécessité de l'influence dont 1l s’agit. Il est vrai que chez la Carangue à queue rude, la glande ARTICLE N° 8. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. hu trouve sur les mésentères une compensation de croissance en surface. Nous savons que dans le Maguereau se rencontrent sur- tout à distance des veines de larges régions mésentériques où les cellules du pancréas ne semblent jamais parvenir. Dans la Carangue, à défaut d'espaces intercæcaux, les aires qui demeu- rent libres sur les membranes du Maquereau sont d’abord uti- lisées. Mais cela ne suffit pas encore à la plupart des individus ; aussitôt que la glande achève d'occuper toutes les surfaces péri- tonéales, le progrès se continue de toute nécessité par voie d'épaississement. Dans ce cas, d’après une loi non moins géné- rale, l'accroissement se manifeste surtout à la partie circum- duodénale, entre les appendices, et aussi dans la nappe duo- dévo-hépatique, circonstance qui n'est pas dénuée d'intérêt. La seconde lot ci-dessus énoncée exige que, à parité d'énergie dans les fonctions digestives et de développement intestinal, le volume du pancréas compense la pauvreté du système appen- diciel. Remettons à plus tard l'exposé d'un principe général qu'on pourrait regarder comme embrassant l'énoncé précédent, et qu'il suffise d'enregistrer 1ei les faits suivants. Ces espèces Caranx et Maquereau sout assurément très-voisimes. Les conditions bio- logiques auxquelles répondent les parties accessoires de leur organisation se trouvent communes à l’une et à l'autre. Elles apparaissent ensemble sur les côles, et si les Carangues ne vien- nent pas en masses aussi énormes que les bancs de Maquereaux, elles s'y mêlent, et jamais on ne les rencontre qu'associées à ces poissons. Ces animaux out même régime, même port et mème taille. Les formes et l'armature buccale ne diffèrent pas. Quant à leur analomie interne, les deux espèces sont construites sur un type identique. L'activité vitale et l'intensité des forces digestives ne peuvent donc beaucoup différer. Il se trouve au contraire que les appareils cæcaux y prennent des proportions très-inégales. Le Maquereau porte plus de 150 appendices, quel- quelois près de 200; la Carangue en à presque toujours 5; Je n’en ai jamais compté davantage. La nature offre donc 1c1 d’elle- même les circonstances les plus favorables pour juger de l'in- 72 LÉGOUIS. fluence d’une cause physiologique; on trouve spontanément réa- lisées les conditions que l'expérience s'efforce de produire par des moyens artificiels : identité en tout, sauf sur le point à étudier, et sur ce même point variations aussi étendues que possible. Or, en regard de la disproportion du système cæcal, quetrou- vons-nous? Le pancréas de la Carangue devient en général beaucoup plus volumineux que celui du Maquereau. Sa grosseur, quoique variable, reste toujours supérieure à celle où se fixe la glande de ce dernier. La différence à son avantage est souvent considérable. Il ne lui cède guère en étendue et le surpasse nota- blement de densité et d'épaisseur. La précision en de pareilles mesures serait impraticable, et je n'ai pointtenté d'essai dans ce sens, mais le rapport des masses sécrétantes n’est certainement pas au-dessous de 3/1 et doit s'élever beaucoup plus haut. Cette inégalité corrélative, selon moi, de la différence inverse des surfaces appendicielles est d'autant plus remarquable, que ces deux pancréas sont de toute évidence constitués sur un même modèle. Si l'organe dela Carangue a certains caractères propres, leur tendance commune est de le rendre plus puissant que son analogue ; hors de là nulle différence. I u’y a pas lieu d'insister sur ce point, la similitude fonda- mentale des deux glandes ayant été suffisamment mise en lumière par les explications qui précèdent. L’idenüté pourtant n’est pas absolue. Avant de noter les causes de désaccord et d'en apprécier la portée, j'appellerai l'attention sur une divergence de détail très-digne de la fixer à plusieurs égards, mais dont je n'ai pu recueillir dans d’autres familles que très-peu d'exemples (Mwge/ et Trigle lyre). La comparaison du pancréas diffus avec le globulaire semble indiquer entre ces deux organes une différence dans l’origine et l’évolution. Chez le Maquereau en particulier, et les espèces de même conformation viscérale, le premier ne serait qu’une annexe suraJoutée, un complément adventif, quoique nécessaire; tandis qu'on devrait voir le pancréas anatomiquement vrai dans la pete glandule massive supervésiculaire. Celle-ci constitue- rait à elle seule le représentant légitime des pancréas bien déii- ARTICLE N° 5, DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 75 mités qu'on observe chez les Maminifères ; la glande éparse n'é- tant qu'un appoint exigé par les nécessités physiologiques. D’a- près cette manière de voir, certains Poissons auraient deux genres de pancréas : un premier, glande ordinaire, qui leur viendrait à titre de Vertébrés, par la loi de permanence des formes, et en outre un second devant sa seule raison d’être à l'insuflisance de l’autre, sorte de terme introduit comme par empirisme pour rétablir l'équilibre entre la formule anatomique et les besoins. On ne peut guère refuser d'admettre que la concordance rigou- reuse d'un type déterminé avec les exigences biologiques ne soit exceptionnelle, si même elle à lieu quelque part. C'est sans doute le privilége de quelques organismes perfectionnés. Plus on s’en éloigne pour descendre aux niveaux inférieurs, plus les formes devront s’altérer afin de se mettre mieux en harmonie avec les nécessités nouvelles; et comme leur flexibilité a des limites, on trouvera finalement un degré où l'adaptation ne serait plus réalisable, et la vie deviendrait impossible. Alors la nature ürerait de quelque ressource cachée l'organe nouveau, supplémentaire el vraiment de correction, qui lui permettrait, sans manquer à la loi du type, d’excéder les inites qu'il impose. Comparons les pancréas diffus et massif à la fois dans les deux Scombéroïdes d’une espèce à l’autre. Les masses pancréatiques du Maquereau se retrouvent dans le Trachurus. La glandule fixe du premier est fixe aussi dans le second ; entre ces deux corpuseules la ressemblance est parfaite : identité et invariabilité de situation, similitude de volume, de figure, de rapports, tout montre qu'il s’agit d’un même organe transporté, pour ainsi dire, sans changement d’une espèce dans l’espèce voisine. J'ai été plus étonné encore de retrouver les gra- nules variables du Maquereau, variables aussi chez la Carangue, L'aspect de ces deux petites glandes est trait pour trait celui de leurs analogues déjà connus. Moins réguliers, moins parfaits et moins remplis que la masse fixe, landis que celle-ci éveille l'idée d’un organe complet, quoique petit, les pancréas duodéraux ont quelque chose d'inachevé et d’adventif. Ils paraissent, comme dans le Maquereau, naître un peu au hasard sur une zone très- SC, NAT,, FÉVRIER 1873. XVII, 16. — ART, N° 8. pee 1! LE OUES. étroite, bordant la tèle de ampoule pancréatique, Leur déve- loppement est beaucoup plus fréquent que sur le Maquereau ; phénomène qui se réfère à la densité générale de l'organe, supé- rieure, comine On la vu, chez la Carangue. Il sera plus intéressant encore de comparer, dans chaque espèce, le pancréas en masse au pancréas diffus. La coexistence ordinaire de ces deux formes n’a rien qui étonne, lorsque les masses se présentent comme des épaississements locaux et gra- duels de la membrane ; nous rencontrerons de nombreux exem- ples de pancréas que l'on voit peu à peu s’enfler jusqu'à prendre en certains points l'aspect commun aux lobes des glandes. Les petites masses des Scombéroïdes paraissent quelque chose de fort différent ; elles se montrent tout à fait séparées et distinctes du tissu de la glande diffuse ; autour d'elles les mésentères sont toujours très-pauvres en matière sécrétante : ce sont de petits pancréas isolés, ayant leur place à part et une sorte d’indivi- dualité ; leur Indépendance est d'autant plus saisissante, que ces corpuseules naissent {ous sur la face supérieure du duodénun, région où le pancréas diffus ne se propage jamais que faiblement, si même il l’attemmt quelquefois. Les interstices cæcaux lui offrent au-dessous de cette région un champ plus favorable, On ne peut, d'autre part, appliquer à ces massettes isolées, et surtout à la principale, cette loi qui moule un grand nombre de pancréas volumineux sur l'empreinte exacte des cavités cor- respondantes. Le corpuseule fixe du Maquereau et de la Ca- rangue est certainement, si petit qu'il soit, un organe de forme précise, Invariable, et déterminé par une force indépendante. On en doit dire autant de sa position, qui ne s’interprète par aucune convenance purement géométrique et matérielle. Ajoutons une dernière réflexion : s’il était prouvé que le déve- loppement de la glandule fixe est indépendant de celui du pan- créas diffus, qu'ils diffèrent dans leur mode de formation, 11 serait difficile de se soustraire à celte conséquence que les deux pancréas fussent deux organes typiquement dissemblables, quoi- que réunis dans un même rôle physiologique. Or, 1 est au moins un fait certain : la glandule atteint son maximum de ARTICLE N° &. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX.. 19 développement bien avant que l'organe diffus ait réalisé ses derniers progrès ; les accroissements des deux espèces de pan- créas ne se font point par une marche parallèle, sinon peut-être pendant les premiers temps de leur existence commune. Je n'ai Jamais rencontré la massetie qu'à l’état parfait, tandis que la toile glandulaire mésentérique varie en général d’étendue d’un individu à l’autre. N'est-ce pas aussi un caractère bien démons- tratif que cette communauté chez deux espèces différentes d’un corpuscule identique par la place et les dimensions, mais associé dans lune et l’autre à des annexes diffuses tout autres. On ne peut échapper à quelque surprise en voyant le volume généra de l'organe pancréatique éprouver de très-grandes variations, . une multitude de détails anatomiques se modifier en passant d’un individu à l'autre, bien plus, la caractéristique même de l'espèce se transformer, et cependant le corpuseule demeurer invariable lorsque tout change autour de lui. fait-on appel aux données micrographiques, elles sont loin de contredire les indications de l'anatomie. Le microscope fera voir que les cellules sécrétantes, quoique évidemment semblables, ne sont pourtant pas identiques. Vériliée déja sur le Maquereau, cette différence se maintient daus la nouvelle espèce. Le pancréas en masse est constitué par des éléments plus petits, plus égaux, plus réguliers ; mieux conformés ; l'acinus s'y montre plus dis- tinet, le tissu plus compacte, le stroma moins abondant, quoique plus dense en comparaison. Enfin la glandule fixe possède un véritable revètement, qui, s'il n’a rien de comparable avec une vraie tunique albuginée, ne manque pourtant pas de solidité et de consistance. Le pancréas diffus, au contraire, semble en géné- ral tout à fait nu. Tout au plus lorsqu'il occupe l'intervalle entre deux feuillets séreux, leur emprunte-t-1l, dans quelques espèces, une apparence de membrane propre. Précisons le sens de cet ensemble de faits. N'en peut-on pas conclure que le pancréas fixe et le diffus, physiologiquement semblables, sont organiquement distincts. Les lois de leur for- mation différent quant au temps, au mode, à la place qu'ils occupent. Entre eux, nulle analogie de forme, nulle continuité 76 LUGOUES. de tissu ; la constitution histologique est aussi diverse que le com- porte la similitude des fonctions. N'est-1l pas légitime d'en con- clure que ces organes, avec un rôle physiologique analogue, sont séparés au point de vue de l'anatomie ? Cette manière de voir une fois admise, quelle idée faudra-t-1l se faire de la cause qui donne ainsi aux deux parties d’un même tout des aspects si différents. Avant d'essayer une explication, une remarque est encore nécessaire. La petitesse même de la masse fixe est une raison convaincante de son importance. À côté du pancréas diffus, relativement énorme, du Caranx Trachurus, et en comparaison aussi de celui du Scomber, celte massette est sans utilité physiologique. Le, contingent qu'elle fournit à la sécrétion générale est pour ainsi dire insensible. IT suffirait à la . glande diffuse de s'étendre un peu plus loin sur ces espaces péritonéaux qu'elle parait si aisément s'approprier, pour com- penser l'absence de ce corpuscule, S'il n'existait point. Si donc le pancréas est physiologiquement une superlluité, quel est le bat pour lequel il subsiste? Pourquoi maintient-il d'une maniere si constante son existence distincte sans prolit réel de l'ensemble ? I faut aussi savoir que ce fait n'est pas isolé, et si je n'ai pu l'étu- dier ailleurs avec autant de soin, je l'ai constaté dans la famille des Grondins et des Coflus. Peut-être serait-il permis, à titre provisoire, de se représenter les choses ainsi qu'il suit. Le pancréas d’un animal quelconque est toujours pendant une certaine phase de son développement composé de plusieurs masses. Cela n'est pas hypothèse pure; l'observation ne laisse sur ce point aucun doute dans le cas des poissons: M. Leydig (1) à vérifié le fait, et chez les Mammifères, et surtout chez les Oiseaux. Sur toute l'étendue de l'embranche- ment des Vertébrés, sauf chez les Osseux et quelques animaux exceptionnels dans chaque groupe, quelques-uns ou même unseul de ces corpsglandulaires prend de Paccroissement, les autres res- tent frappés d'arrêt dans leur évolution, elainsi se trouvent formés les pancréas ordinaires. Mais dans les Poissons osseux l'aptitude à (4) Leidig, Histol, comp. ARTICLE N° 8. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 17 se développer n'est pas le partage exclusif d’un petit nombre de ces masses, presque toutes les glandules peuvent au besoin arri- ver à des dimensionsappréciables. Toutefois, entre elles, l'égalité n'est pas complète encore. Quelques-unes, parfois une seule comme chez les Scombres, représentent vraiment les pancréas localisés des animaux supérieurs. Quoique leur grosseur soit très-réduite, elles ont la fixité, la constitution des glandes ordi- naires; comme ces dernières, elles se font leur place et adoptent une forme précise et invariable. Toutefois, à cause de la peti- tesse de son volume, ce pancréas ne suffirait point à la digestion de l'animal; aussi naît-il un autre pancréas par le développe- ment de certaines glandules qui, ailleurs, demeurent station- naires. Nous aurions là quelque chose d’analogue au phénomène qui fait pousser des racines hors rang sur les tiges du Pandanus et des Figuiers. Ce second organe, de nature complémentaire et adventive, n'a plus, on le comprend, que les propriétés essen- tielles du pancréas; ses traits secondaires, ses allures sont toutes différentes. Produit par l'organisme pour suppléer à l'extrême insuffisance du pancréas typique, il subit la loi des autres organes et parvient à son but en suivant des voies plus imparfaites. fl s'établit aux seules places qui n'aient pas de premier oceupant, n'envahit que les parenchymes conjonctifs, respectant ceux d’une importance physiologique majeure. Cette facon de comprendre les faits trouve quelque applica- tion dans presque toutes les espèces. Le langage et l'exposition gagnent en clarté, si l'on se lient toujours à ce point de vue. Il sera commode de l’adopter, sans rien préjuger, d'ailleurs, sur la complète exactitude d’une théorie que j avoue n être pas assez appuyée. [I Abondance du tissu pancréatique. Lorsqu'on ouvre une Carangue fraîche et adulte, l'aspect des viscères abdominaux appelle immédiatement l'attention. Ils forment une masse très-cohérente, tout d’une venue, qui garde 78 LEÉGOUES. sa figure après avoir été extraite et portée dans l’eau. Une sub- stance très-semblable à la graisse, mais d’une nuance jaune brun quelque peu variable d’un endroit et d'un individu à l'autre, comble tous les sillons superficiels correspondant aux interstices des organes. Elle descend jusqu’à l'anus, se retrouve au fond de la deuxième courbure (1) intestinale, et en avant se rattache au tissu du foie dont on à quelque peine à la distinguer. C’est elle encore qui tient les appendices à distance les uns des autres, et qui communique sa solidité dans tout le système vis- céral. La couleur rougeñtre, propre aux entrailles de l'espèce, lui est due, et comme cette teinte se fond avec celle du foie, on croit d'abord qu'il s’agit d’une dépendance hépatique tournant graduellement au tissu graisseux à mesure qu’on marche vers lPar- rière. Pénètre-t-on dans les méats viscéraux profonds, on y voit s’enfoncer cette même matière ; elle est partout, en un mot: les viscères de cette espèce sont, sans exagération et au pied de la lettre, plongés dans cette matière dont le volume, ramassé en un seul bloc, dépasserait certainement celui de la rate. Cette substance n’est autre chose que le pancréas diffus. L'ampleur et la complication de cette glande bizarre sont quel- que chose de vraiment prodigieux. Même après avoir vu les expansions pancréatiques si multiphiées du Congre, et les coulées divergentes de cette glande chezle Merlus, on ne peutse défendre d’une sorte d’étonnement lorsqu'on la rencontre chez l'animal qui nous occupe. À l'épaisseur près, ses lanières ressemblent beaucoup aux trainées hépatiques des Cyprinoïdes. Remarquons en passant l’accord entre cette disposition mter- stitielle de l'organe et ce que nous avons vu des canaux de Weber, semblables à ceux du Maquereau. Du reste, j'ai vérifié au microscope la présence du üssu glandulaire jusqu'au point le plus éloigné du centre duodénal. On peut prendre presque au hasard un point dans cette masse, les caractères des glandes s y montreront avec la plus grande netteté. (1) PL XIX, fig. 2. ARTICLE N° 8. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 79 TT Comparaison des tissus pancréatiques des Scomber Trachurus et Scombrus au point de vue histologique. Autant est difficile Pétude de la cellule diffuse du Maquereau, autant 1l est aisé de la reconnaître sur le Caranx. Ces éléments ont d'assez grandes dimensions, comparables sur ce point à ceux du Merlus. Ovales, ils portent dans le petit sens0"",016 et même plus, avee 0"",02/ sur leur plus grand diamètre. La pression les isole assez aisément du tissu auquel ils adhèrent. Quelques-uns présentent sur un de leurs côtés un noyau très-voisin du bord de la cellule (4), ou même en contact avec le bord. Ce noyau, très-brillant et allongé, occupe en longueur le tiers de la cellule et un peu moins du tiers en largeur. Parmi tous les éléments de la masse règne la ressemblance de forme la plus complète; les dimensions sont plus variables, quoique entre des limites peu distantes. L'uniformité est plus parfaite entre les cellules qui constituent les pancréas massiis. Ces dernières sont aussi moins grosses; le noyau, plus rare, y est moins apparent. L'acinus n'a pas été examiné à fond. Mieux constitué cer- tamement que celui du Maquereau, il est encore bien loin de s’accuser aussi fortement que dans les Turbots, les Congres et même les Bars. Quoi qu'il en soit, rien ne manque à la détermination de la nature du tissu. i/examen comparalif fournit d’ailleurs des résultats identiques avec ceux de l’étude intrinsèque. Aucune confusion ne peut se commettre entre les éléments décrits ci-dessus et les globules du sang de l'espèce. [n’est pas malaisé d'obtenir à la fois les deux éléments dans la même pré- paration. On choisira pour cela quelque pomt de la glande diffuse qui paraisse à l'œil plus rouge et plus vascularisé. Les glo- bules sont jaunes et les cellules très-blanches; moins clairs, (1) PI. XIX, fig. 2. S0 LEGOUIS. plus petits, plus opaques, les premiers ont un noyau central beaucoup moins caractérisé, et relativement plus gros. Leurs bords sont plus entiers, leurs dimensions très-constantes. Enfin ils forment une ellipse sensiblement plus allongée, et sont beau- coup plus petits. Ces derniers caractères feraient par eux seuls remarquer un globule du sang au milieu de milliers d'éléments pancréatiques. On verra plus loin quelles déformations suivent l’action des acides. La différence entre les cellules et les utricules graisseux est encore plus profonde. Les tissus pancréatiques n'ont rien de l’arrangement et de la transparence des masses adipeuses. Les inégalités dans la grandeur des éléments sont bien moins consi- dérables; la réfringence plus faible, la régularité des contours incomparablement plus parfaite. Les utricules adipeux ne se séparent de la trame conjonctive qu'en se déchirant et se vidant, si la température ambiante n'est pas trop basse ; les cellules au contraire se débarrassent ‘aisément de leur gangue et se dépo- sent en nombre sur les bords du lambeau microscopique. D'ail- leurs, tandis que certains éléments du pancréas renferment un noyau très-appareut, je n'ai jamais pu mettre le nucléus en évi- dence sur la paroi d'aucun saceule de graisse. À défaut de ces caractères distinclifs, si nets et si nombreux, il en est un dernier, la grosseur comparative des éléments, qui pourrait les suppléer tous ensemble. Les liquides huileux sont contenus dans des enveloppes où tiendraient aisément quatre et même, pour les plus grandes, six cellules pancréatiques. On à du reste bien rarement l'occasion d'appliquer les remarques précédentes. Je n'ai trouvé sur ces animaux que très-peu de graisse. D'ordinaire les préparations tirées des lamelles péri- tonéales n'offrent cà et là que quelques petites gouttelettes oléa- gineuses, arrondies, très-réfringentes, jaunâtres, et qu'il est, comme on sait, impossible de confondre avec un élément figuré quelconque. Trois à cinq sphérules de ce genre dans une prépa- ration renfermant des multitudes de cellules glandulaires, telle est la proportion où me parait réduit, chez les Caranr pèchés ARTICLE N° 8, DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX, el à la fin de mai, le système adipeux des membranes viscérales, Rappelons que le Maquereau, à cette époque et pendant tout le courant de l'été, ne conserve aussi qu'une portion insignifiante de la graisse, dont les issus se sont changés pendant l'hiver. Il'importe moins encore de s'arrêter aux caractères qui sépa- rent les cellules pancréatiques des aréoles conjonctives et des globules de Iymphe. Jai beaucoup moins étudié ces derniers dans l'espèce qui m'occupe que dans le Maquereau ; ils semblent peu différer d’une espèce à l’autre, et un examen prolongé eût été infructueux après celui des mêmes corps chez l'autre Scom— béroïde. Ils sont moins abondants, les aires qui les produisent plus restreintes; elles n'ont pas semblé plus rares en dedans qu'en dehors des limites du pancréas diffus. I faut reconnaitre cependant que les démarcations terminales de la glande sont en général très-compliquées et difficiles à déterminer par des essais microscopiques. Je pense que la substance glandulaire doit renfermer sur plusieurs points des îlots de trame membra- neuse sans cellules, et pour n'avoir point trouvé d'éléments pancréätiques sur une préparation, on n’a pas le droit d'affir- mer que la glande ne dépasse point le niveau auquel le fragment de membrane fut emprunté. Quoi qu'il en soit, la forme ellip- tique allongée et la grosseur des cellules leur ôtent toute ressem - blance avec les aréoles et les globules blancs. Elles ne tiennent aussique bien peu des cellules du foie. Cepen- dant il n’est pas inutile de mettre en regard quelques notes distinctives fondamentales, parce que chez les sujets les plus abondamment fournis de tissu pancréatique les deux glandes arri- vent au contact. Extérieurement. elles se ressemblent assez dans cetté Zone commune pour qu'on ait quelque peine à les distin- guer. L'examen microscopique ne laisse aucun doute. Il faut l’effectuer autant que possible sur des pièces très-fraiches; les cellules pancréatiques se granulent en s’altérant etse déforment ; d'autre part on doit avoir soin d'éviter l'emploi de l'eau pure, qui parait dissoudre très-vite les enveloppes cellulaires hépa- tiques. Si ces précautions ne sont pas négligées, on trouvera les éléments pancréatiques toujours très-clairs, ceux du foie tou- 52 LUGOULS. jours remplis de granulations d'aspect graisseux. Le noyau des derniers est bien plus apparent, plus général, multiple quelque- fois et tout autre de ‘position. Enfin il suffirait de s’en tenir au caractère de forme; avec les grossissements élevés la cellule pancréatique perd, il est vrai, la netteté de ses lignes limites ; mais, pour celles du foie, l'irrégularité porte non-seulement sur la pureté du dessin, maissur la forme générale elle-même. Leur paroi solide, soumise à des amplifications moyennes (200 diam.), paraît comme bosselée; le contour, plutôt carré que circulaire et assez variable de figure, porte des saillies locales et de larges dépressions. En un mot, il n’y a guère plus de rapport entre les cellules fraiches du foie et du pancréas sur cette espèce qu'entre les mêmes éléments pris dans un Chien. Cette discussion se conclut d'elle-même. Les éléments que nous venons ainsi d'étudier différent de tous ceux qui peuvent se rencontrer sur les lames mésentériques. Ils répondent donc à une fonction spéciale, et constituent un organe qui n’est ni simple amas de graisse modifiée, ni dépendance du foie. Tra- versé dans le sens longitudinal par les grands trones wébériens, dont les rameaux du dernier ordre se perdent dans sa substance, il existe là seulement où se rencontrent des tubes de Weber, et se retrouve partout où pénètrent ces derniers, Ce tissu glandu- laire est donc une dépendance du pancréas. Il n’est pas sans intérêt d'établir ces déduetions avec détail dans le cas du Caranr, à cause des difficultés que présente la détermination des mêmes éléments chez le Maquereau. La pre- mière de ces deux espèces guide dans l'étude de l’autre et con- duit d’une manière aisée et naturelle à l'explication des ano- malies que la seconde paraît offrir. Aussi fut-ce avec grande satisfaction que je rencontra une Carangue, entre autres, sur laquelle, pour des yeux exercés, la nature glandulaire du tissu interstitiel était reconnaissable à Ja première inspection. Cet aspect ordinaire des glandes n’appa- raissait sur le pancréas diffus de l'animal qu'au point où lépais- seur est maximum; entre les appendices, sous forme de bandes rougeätres. La vascularisation sanguine de ces espaces est très- ARTICLE N° 8, DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 89 développée ; ils différent totalement de la graisse froide ou liqué- fiée. Cette dernière se montre, sur les Maquereaux qui en sont pourvus, disposée en longs rubans variables d'épaisseur que logent les cavités interviscérales et que supportent les mem- branes mésentériques. Dans la saison chaude ces traînées offrent à l'ouverture du poisson un aspeet remarquable. Toutes ces membranes font jouer la lumière comme un verre dépôlt ou une mousseline imprégnée d'eau. On voit que la plupart des rayons pénètrent à travers un liquide contenn dans la trame du tissu, tandis que plusieurs, tombant sur des gouttelettes mieux orientées. sont réfléchis totalement et donnent l'impression d'une multitude de points brillants sur le fond translucide, d’un Qris très-léger. La graisse solidifiée n’a besoin d'aucune mention ; elle est, à la teinte près, chez les Scombres, ce qu'on la trouve partout, mais d'une blancheur plus opaque. La substance interposée entre les digitations cæcales est éga- lement éloignée de ces deux apparences. Elle se rapproche davan- tage de l'aspect offert par le pancréas chez les animaux supé- rieurs. Examiaée avec attention, la surface paraît mamelonnée en très-fins lobules; un réseau sanguin abondant, beaucoup plus développé que celui de la graisse, occupe la périphérie des lobes. Ses capillaires sont gorgés de sang. Les détails de l'irrigation sanguine s'aperçoivent d'autant mieux, que, comme on l'a vu, aucune membrane protectrice spéciale ne recouvre le tissu. Il se lient par sa propre cohérence et au moyen des seules fibrilles de la toile conjonctive, où il se développe. La massette fixée sur la vésicule possède, au contraire, un revêtement fibreux qui, bien que beaucoup plus mince, rappelle les gros pancréas de l'Anguille et du Congre. Aussi sa surface est-elle lisse et dépour- vue de vaisseaux. Sans doute il y a bien loin de ces bandelettes intercæecales aux pancréas agelomérés, volumineux et résistants des crands ani- maux, Mais la série des modifications intermédiaires se retrouve assez complète depuis la forme la plus élevée jusqu'à la plus infime, qui est le propre de l'espèce ici étudiée; un degré plus bas encore, le pancréas cesse absolument, d'être visible, et par 51 LEGOUIS. conséquent reconnaissable. C’est ce qui a lieu dans le Maque- reau, Où sur tant d'exemplaires pas un seul n’a présenté un épaississement saisissable à l'œil nu. Le pancréas diffus visible de la Carangue occupait une région plus étendue que l'examen superficiel de la masse viscérale n’eût permis de le croire. Plus ou moins développé entre les quatre interslices cæcaux, 1l plongeait vers les parties profondes, s'en- fonçant jusqu'au niveau de la rate dans le sens de la veine splé- nique descendante, et en amont vers le foie, avec lequel il con- tracte un rapport intime; son épaisseur maximum paraissait être dans les environs de l'insertion du cholédoque, non au-dessus, mais plutôt sur le côté de l'intestin duodénum. I est à croire que le contact des tissus hépatique et paucréa- tique va jusqu'à l'immixtion partielle; mais je ne me suis pas occupé de démontrer le fait sur cette espèce, et lassociation des parenchymes reste à l'état de forte probabilité. Les grada- tions d'aspect sur la région de contact le feraient supposer, et ce qui a lieu dans d’autres cas ne laisse guère de doutes à cet égard. Mais 1l semblait plus important de faire surtout servir l'étude de la Carangue à la vérification d’une tout autre partie du sujet. J'avais dû suspendre l'observation du Maquereau à la fin de la pêche, sans avoir obtenu rien de bien net, quant à la consti- tution de son pancréas diffus. Loin de avancer vers la connais- sance exacte des choses, mon opinion s'en détournait plutôt. II a été dit combien, au premier coup d'œil porté sur le résultat de l’ingestion, l'hypothèse d’une glande latente paraissait 1in- probable. Si l'on ajoute à cette linpression première une longue série de recherches infructueuses, il sera facile de comprendre mes hésitations. Si deux ou trois canaux wébériens m'avaient conduit à des granules pancréatiques visibles, je n'osais à peine croire encore, au bout de mes premières recherches, que les autres aboutissent à des acini microscopiques; j'inclinais de plus eu plus à penser que la majeure partie du système wébérien répondait à une fonction étrangère. D'autres espèces plus favorables à la précision des observa- ARTICLE N° 5. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX, 85 lions (Bar, Sardine, Merlus, etc.) étaient heureusement venues donner un tout autre cours à ces tendances. Il n’était plus dou- teux, lorsque j'ouvris un ‘Caranx pour la première fois, que la plupart des Poissons osseux n’eussent un pancréas microsco- pique. Mais tous élaient-ils doués d’un pareil organe, à défaut de glande visible suffisante ? I fallait encore ajourner la réponse à cette question, puisque certaines espèces très-étudiées, celles du groupe des Cyprinoïdes, et le Maquereau n'avaient rien montré qui pût assurer l'existence du tissusécrétoire. C'était done un très-grand avantage d’avoir dans la Carangue un animal en rapport étroit d'organisation avec le Maquereau, el sur lequel les observations ne rencontraient aucun obstacle. On a vu celte facilité mise à profit pour établir sur des preuves mulupliées l'existence du pancréas diffus dans cette espèce autour d'un système wébérien analogue de tout point à celui du Scom- brus. Une analogie indiscutable force dès lors à conclure que dans ce dernier le même système wébérien dépend d’un pareil tissu pancréalique. Il serait trop étrange et trop inadmissible que sur des organismes tellement semblables, où l'identité se retrouve jusque dans la place et la forme des massettes pancréa- tiques disséminées, un système canaliculaire dévolu dans l'un à la fonction paucréatique, ainsi que dans toute la sous-classe des Osseux, fût attribué dans l'autre à un usage différent. Mais en mème temps qu'elle lève toute incertitude sur ce point capital, la connaissance anatomique du pancréas diffus sur le Trachurus doit conduire à l'explication des particularités qui nuisent à la détermination des éléments histologiques du même organe pour l'autre espèce. Entrons à cet égard dans quelques détails. J'ai signalé l'extrème brièveté des canaux wébériens du der- uier ordre, qui desservent directement les acire. Cela n'étonnera plus lorsqu'on saura qu'il en est de même à des degrés divers chez bon nombre de Poissons où les développements pancréa- tiques ne S'éloignent guère des veines, Dans la Carangue, les canalicules paraissent ausst entrer fort peu avant à l'intérieur de l’acinus. 30 LHGOUES. On sera moins surpris aussi de trouver à l'acinus du Maque- reau une constitution aussi diffluente, si l’on remarque le peu de nelteté des Himites et la faiblesse des liaisons dans celui de l’es- pèce comparée. Dans l’une pas plus que dans l’autre, les expan- sions foliacées du pancréas diffus ne se prêtent à un dessin exact de leurs bords. La simple pression du verre paraît capable d’é- craser l’aciaus et d'en rompre les parois. Là pas plus quiet le cireuit de démareation entre les aires pancréatiques et conjonc- tives n'a pu être saisi par les faibles grossissements Il est certaim pourtant que le lobule se marque dans la Carangue d’une facon plus vigoureuse, puisqu'il est déjà capable d'imprimer à la sur- face libre quelque chose du grené arrondi que portentles glandes ordinaires. Je regarde le cas du Maquereau comme extrème, celui de la Carangue y conduit par transition immédiate. N'est-ce pas un fait intéressant à d’autres égards que de voir sur la Carangue le perfectionnement de la cellule sécrétante devancer d'aussi loin le progrès d'organisation dans la glande même ? La cellule d’un pancréas humain ne semble pas mieux constituée qu'un élément nucléolé pris sur le diffus d’un Caranr ; mais quant à la solidité des parties, la texture de l’ensemble et la séparation des vcèni, je crois la différence extrème. La comparaison des deux espèces, au point de vue de lélé- ment essentiel de toute sécrétion, mérite plus de détails. On à remarqué la grande échelle de variations que descend la cellule du Maquereau, quant à la forme et aux dimensions. Là git une des principales causes d'ambiguïté pour l'interprétation des faits. Les simples méats conjoncüfs, les aréoles lymphatiques, les saccules graisseux et les cellules pancréatiques se fondent chez le Scombrus les uns dans les autres par transitions si bien mé- nagées, qu'elles jettent l'observateur dans uu embarras à peu pres sans issue. En admettant qu'il apporte à cet examen une con- naissance préalable, quant à la nature physiologique des élé- ments et au nombre des fonctions entre lesquelles 1ls se répar- tissent, resterait encore à déterminer sur les préparations quelles sont les limites de chaque tissu spécial, où finissent les aréoles : par exemple, où commencent les régions simplement grais- ARTICLE N° 6. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 87 seuses, et de même pour les autres, et ce serait là une réparti- tion bien délicate à effectuer. Mais celui qui chercherait, comme je l'ai fait trop longtemps, sur ces membranes son premier exemple du tissu pancréatique diffus, courrait grand risque de ne parvenir jamais à une détermination mdubitable. Ces cellules, qui pour la plupart manquent de noyau, jouissent d’une telle variabilité dans les dimensions et les formes, qu'après l’obser- vation la mieux conduite et la mieux réussie, il restera encore douteux si l’objet était une grande cellule pancréatique on seu- lement un très-petit utricule graisseux. Cette cause fonda- mentale d'incertitude se complique d’une foule d’autres : com- munauté de teinte entre tous les éléments, faiblesse de réfrin- gence, surabondance de graisse et difficulté des coupes. I y avait donc absolue nécessité d'étudier une espèce parallèle, afin de sortir de l’indécision. Or, quant aux cellules, voici ce qu'apprend l'observation de la Carangue. La /orme des éléments pancréatiques est toujours reconnaissable et peu susceptible de changement, mais leurs dimensions n’ont pas la même stabilité. Les plus grandes cellules ne sont pas très-loim du volume hnite auquel descendent les alvéoles adipeux les plus réduits. Jamais, il est vrai, on n’a constaté que ces derniers puissent effectivement se restreindre aux dimensions des plus grosses cellules glandulaires; mais Je n'oserais affirmer ou nier l'impossibilité de cette atténuation extrême. L’utricule graisseux m'a paru susceptible chez maints Poissons de changements de volume tels que jamais je n’en avais vu ailleurs dans aucune espèce d'éléments. C'est ce qui rend la réserve nécessaire. Toutefois, chez la Carangue, 11 n°y aura que rarement raison de douter, l’irrégularité absolue de figure élé- mentaire étant propre à toutes les formations graisseuses, tandis que la cellule glandulaire conserve sous les dimensions minima la forme qui sert d'exemplaire aux plus grandes, forme d'ovale régulier, qui porte en soi quelque chose de très-reconnaissable, et ne se prête aucunement à une réalisation accidentelle. Ces observations faites, revenons au Maquereau, et imagi- nous que chez cet animal, à la variation dans la grandeur de la ère) LEGOURS. cellule pancréatique se superpose l'instabilité du dessin des con- tours cellulaires ; alors toute démarcation nette entre les cellules et la graisse pourra disparaitre ou cesser d'être aisément observable : c'est ce qui a lieu dans la réalité. Faut-il done s'étonner si l'on rencontre dans ces faits des difficultés que la théorie permettait de prévoir ? Le même raisonnement explique en quel danger on se trouve sans cesse de confondre les cellules du pancréas avec certaines aréoles cojonctives produisant ou non des corps lymphatiques. Dans la Carangue, la distinction se fait aussitôt, grâce aux carac- tères de la forme cellulaire; sur l'espèce Scombrus, ceux-ci manquant, l'incertitude se produira. Enfin un sujet d'étonnement et de perplexités sans fin venait, dans le travail d'hiver, de £e qu'il n’est pas rare de rencontrer des coupes constituées exclusivement de cellules en nombre immense, petites par rapport aux utricules adipeux. Ces frag- ments ne renferment pas une seule grande cellule à graisse ordi- naire, et ne laissent échapper par écrasement que des gouttes huileuses en quantité insignifiante. Elles ne montrent aussi qu'un très-petit nombre de granules. Parfois granules et graisse paraissaient faire absolument défaut. Je ne pouvais croire que ce fussent là des plaques pancréatiques, tant elles élaient larges et tant elles semblaient s’écarter des dernières ramifications wébériennes. D'autre part, l'arrangement régulier des cloisons était tout différent de celui qu'affectent les fibres du issu con- Jonctif simple. En regard de ces faits, mettons ce qu'on trouve dans le Tra- churus. Ce n'est plus quelquefois, c'est à peu près toujours que le champ se présente couvert d’une espèce cellulaire unique, à l'exclusion presque radicale de la graisse, des globules ou de toute formation étrangère. ler, par bonheur, 1l n°y a point d’em- barras sur la nature des cellules observées, malgré leur nombre et la remarquable expansion des ace. La forme typique est là qui les distingue. Le nucléus, beaucoup plus apparent, achève de caractériser suffisamment quelques-unes d’entre elles, et par celles-là le groupe tout entier. ARTICLE N° 8. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 89 On ne doutera plus, apres cette remarque, que les mêmes apparences dans le Scombrus ne répondent au même organe. En achevant la courte série d'observations qu'exige le Caranx (cinq ou six jours), j'avais le droit de me croire en possession de plusieurs vérités importantes. Analogies intimes de certaines espèces, même dans les caractères si variables d'ordinaire de leurs organes digestifs; étendue immense du développement de quelques pancréas diffus en largeur et en épaisseur; enfin, au point de vue de la méthode, iutérêt particulier d’une étude com- parative de plusieurs espèces voisines, surtout aux environs des dégradations extrèmes. Cette dernière remarque m'a été plusieurs fois d’une grande utilité. Il ne restait plus qu à effectuer, par l'observation directe du Maquereau d'été, une vérification indispensable des conclusions auxquelles mène l’analogie, sans qu'il fût besoin néanmoins, pour le but spécial de ce travail, de parfaire une description his- tologique complète des tissus mésentériques. L'existence et le mode de distribution du pancréas diffus, tels étaient les deux points qu'il suflisait de mettre au-dessus de toute contestation, et la voie la plus simple paraissait de prouver qu'il existe des élé- ments incontestablement glandulaires à proximité des bouches du système wébérien. Dès les premiers animaux que la pèche de juin procure, on reconnait la diminution considérable de l'appareil graisseux. A l'œil et à la loupe de Brücke, les membranes splanchniques ne produisent plus ces jeux de lumière dont les effets ont été décrits plus haut. Cependant, /« plupart des coupes microscopiques contiennent encore assez de gros utricules et de goultelettes graisseuses pour rendre l'observation impossible. Que l’on pro- cède par coupe ou par arrachement, l'inconvénient subsiste avec la même gravité. Après avoir essayé de traiter les coupes par l’éther à la température de 20 à 25 degrés, J'ai été con- tramt d'y renoncer; l’action dissolvante sur la graisse n'était pas achevée que déjà les préparations devenaient méconnais- sables. L'emploi d'acides très-dilués ou de bases étendues n’est SC, NAT., MARS 1875, AVI! 17, — ART: N°6, 90 LEHGOUES. pas d’un meilleur service; tout pâlit; les traits s’atténuent bien- tôt et prennent une tellelégèreté, qu'on ne peut les saisir. Restait, comme ressource dernière, la recherche directe de cellules sé- crétantes à travers ces coupes souvent encombrées de goutte- lettes et surchargées d'éléments qu'on juge toujours graisseux au premier abord. Une précaution, de travail prompt et facile, permet de déblayer les préparations sinon de toutes les gouttes huileuses qui les obscurcisseut, au moins de la plupart. On com- prime légèrement le lambeau egtre les verres jusqu’à rupture des enveloppes graisseuses, puis on le lave pendant une demi-minute dans un courant d'eau très-sucrée pour le replacer ensuite sur le porte-objet. Qn risque ainsi de perdre la plupart des cellules glan- dulaires, mais leur mobilité étant moindre que celle des gouttes d'huile qui tendent à monter à la surface du bain, les préparations gagnent beaucoup en clarté sans être privées de toutes leurs parties essentielles. FL va sans dire que ce procédé s'emploie faute de mieux, et seulement lorsque l'individu étudié surabonde d’élé- ments gras. Trouver des cellules à noyau n’est pas un cas tres-rare: on en constate au pancréas diffus une proportion égale à celle que con- üennent les masses; mais comme ces éléments à nucléus bien apparent sont néanmoins en grande minorité (deux ou trois au plus sur les préparations les plus avantageuses), il convient de se poser quelques objections sur la valeur de cet indice. D'abord, que penser de l'absence, sur tant de cellules, d’un caractère dit essentiel à l'élément glandulaire ? La réponse est aisée. En fait, sur quantité de pancréas incontestables et avérés, on trouve, avec des cellules pourvues de noyau apparent, des cellules toutes pa- reilles, qui semblent absolument dénuées de cette partie réputée constituante. Je cilerai, avec le Caranr, le Merlus, le Congre et l’Anguille, et si je voulais apporter tous les exemples que J'ai recueillis, 1l faudrait rappeler toutes les observations, sans en omettre aucune. I importe, je crois, sur ce sujet, de préciser l'expression. Faflirme simplement que, pour la plupart des cel- lules sécrétoires des osseux, le noyau, s’il existe, est d’une obser- valion très-difficile, au moins dans les circonstances où les poissons ARTICLE N° 8. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 94 arrivent entre les mains du micrographe; je ne prétends rien de plus. L’acide acétique donne un meilleur relief à ceux des noyaux qu'on à déjà constatés, mais il est rare qu'il en fasse ap- paraître, d’une manière indiscutable, dans les éléments qui en sont dépourvus. Lorsqu’elles se détruisent sous l'influence d'une cause quelconque, telle que les acides, les cellules du péritoine commencent d'ordinaire par se remplir de ponetuations granu- leuses au nombre desquelles peut être le noyau ; mais je ne l'y ai pas reconnu sur des signes distinctifs assez nets pour me pou- voir prononcer; l'existence de ces granulations est d’ailleurs passagère, l’action destructive du réactif à promptement tout noyé dans une transparence umforme. Du reste, on a lieu de croire que l’absence de noyau visible résulte d’une disparition de ce petit organe, par résorption physiologique, morbide ou cadavé- rique. Jai toujours trouvé des noyaux en plus grande abondance chez les individus vivants (Turbot, Cyprin, Carpe, ete.). En tout cas, du moment que, sur un seul pancréas, on aurait constaté la coexistence de cellules à noyau et d’autres semblables, mais privées de ce corpuscule, l’objection tirée de la présence des cellules sans noyau contre la nature pancréatique d’un tissu perdrait toute valeur. Or, je l'ai dit, une foule de pancréas, qui méritent cette dénomination à des ütres aussi clairs que ceux de l’homme ou du chien, possèdent à la fois des cellules avec où sans noyau. Moi-même, au commencement de ces recherches, j'attachais à l'existence du noyau dans la cellule, comme signe de son acti- vité physiologique, une importance que Je regarde aujourd’hui comme excessive, au moins lorsqu'il s’agit des êtres qui font l’objet de mes études. C’est sous l'influence d'une telle conviction que je soupconnais le petit pancréas massif du Maquereau, alors que je n’en connaissais pas d'autre, de n'avoir, comme la plu- pañt des organites de Brockmann, aucune valeur fonctionnelle ; j'avais été frappé du petit nombre des celluies à noyau renfer- mées dans ce petit corps. Mais du moins est-il certain qu'il existe dans le Maquereau des cellules possédant vraiment un nuecléus? Comme la plupart des 92 LEGOUES. coupes sont semées de globules Iymphatiques et de gouttelettes graisseuses, 11est bon de vérifier si l'apparence de noyau ne serait point due à une réfraction accidentelle à lravers une cellule vide et un globule superposés, On peut répondre que les noyaux observés sur le Maquereau sont incontestablement des formations intra-cellulaires ; leur netteté est quelquefois parfaite (LE) ; ils sont plus petits que les globules libres et n’ont ni la même forme, ui la même réfringence ; leur position vis-à-vis de la cellule est à peu près constante et ils se déplacent avec elle. Ces mèmes caractères les distinguent des gouttelettes graisseuses. Enfin, la présence constatée d’un noyau suffit-elle pour définir la nature de la cellule? Non, et c'est la raison pour laquelle on invoquera plusieurs autres caractères à l’appui de lopinion qui fait des cellules en question de véritables éléments sécrétoires. Cependant il faut convenir que la présomption résultant de la seule existence du noyau et des particularités dont il est le sujet vaut à peu près certitude. Les auteurs sont, en effet, d'accord sur l'extrême difficulté qu'on éprouve à voir le noyau d’une vésicule graisseuse. Il n’est percepüble que sur certaines cellules, par dès grossissements qui ne s’abaistent pas au-dessous de 300 diamètres; 1l faut, pour le distinguer, que la cellule se présente de côté, et alors un très- peut renflement nucléaire se montre dans Pépaisseur de la paroi latérale. Dans les osseux, des milliers de vésicules adipeuses, que J'ai observées avec de forts grossissements, ne m'ont jamais offert un seul noyau clairement indiqué, tandis que le noyau des cellules dont 11 s’agit ici se distingue, dans les cas avantageux, saus là moindre difficulté; un pouvoir amplfiant de 100 u- mètres commence à le rendre visible. Ce corpuscule est gros par rapport aux dimensions de sa cellule; il n’est point pariétal, mais plutôt voisin du centre. En conséquence, il y a lieu de penser que les cellales à noyau sont de véritables éléments glandulaires. Étudions-les à d’autres points de vue. (1) AISAX, Mig:l3'et 6: &RTICLE N° 8. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 93 Le caractère différentiel le plus frappant tout d'abord, c’est leur volume. La plus grande dimension ne dépasse guère, pour les cellules, 0"",015, tandis que les enveloppes de la graisse se tiennent d'ordinaire au-dessus de 0°",080 dans le sens le plus étroit. I semble, d'après cela, que la distinction des deux genres d'éléments ne devrait pas arrêter un instant. On les mesurerait et leur taille indiquerait leur nature. Par malheur, cette sim plicité n'existe pas dans les faits. D'une part, on ne saurait nier qu'aux cellules à noyau fasse suite une série d’autres cel- lules, sans noyau, mais qui se ratlachent aux premières par toutes les raisons et les analogies supposables de situation, de proximité, de forme ou d'aspect. Or, entre ces dernières, les di- mensious varient plus encore qu'entre les cellules où le noyau est distinct, soit au-dessous, soit au-dessus du volume de celle-ci. D'ailleurs, les utricules graisseux sont des organes de la plus grande, variabilité morphologique. C'est un fait reconnu que leurs dimensions sont susceptibles de tomber au-dessous de la moyenne indiquée plus baut. I n’est pas impossible que les deux suites ne se rejoignent, et, s'il en était ainsi, les distinctions fondées sur la grosseur comparée de- viendraient illusoires. Aussi ne peut-on s'en tenir à ce caractere. Cependant il importe de remarquer qu’une continuité véri- table entre les séries respectivement issues des deux types cellu- laires n’est pas un fait d'observation; le contraire, iudiqué par l’analogie sur le Caranx, où les dimensions limites paraissent ne pas se confondre, résulterait plutôt aussi de l'ensemble des nom- breuses observations dont le Maquereau fut l’objet précisément à cause de l'indécision qu'offre ce caractère. L’embarras tient à des causes multiples dont les effets se retrou- vent chez plusieurs autres espèces. Le Maquereau, cependant, est d’une étude hors de toute comparaison plus délicate. C’est donc iei le lieu d’entrer dans la discussion des procédés, d'autant que ce point, non sans intérêt par lui-même, constitue une des parües les plus difficiles et qui absorbèrent le plus de temps. D'abord, au point de vue d’une constatation de volume, le 94 LEGOUES. mode d'opérer, que la nécessité m'avait imposé, se trouve extrè - mement préjudiciable. La compression fait vider les enveloppes à graisse, dont le contenu est ensuite balayé presque entière- ment par l'eau. Mais les pellicules vides s’affaissent et se plis- sent (1) à peu près comme lorsqu'on soutire le contenu par un dissolvant. Une pareille déformation doit amener un agrandisse- ment latéral de la plupart des cellules, mais 1l peut aussi quel- quefois en résulter un retrait. Dès lors, à chaque cellule de petite dimension qui se présente dans le champ du nucroscope, il faut se demander si la petitesse de l’organite n’est point un ré- sultat des manipulations préliminaires. Ne se pourrait-il pas que des cellules graisseuses, par des plissements convenables, arri- vassent, sous l'influence de leur pression mutuelle, à des formes réduites. Ajoutons que l'éclat réfringent spécial à la graisse ne peut servir à la distinction, puisque l'enveloppe est vidée. En second lieu, lorsque les tissus sont assez déchargés de graisse pour que l'observation immédiate soit réalisable, il faut considérer que le poisson étudié ayant été sans doute, l'hiver précédent, fortement adipeux, l'absence actuelle des matières grasses peut reconnaitre pour cause une émaciation naturelle. Quelques débris des anciennes cellules graisseuses, dont le con- tenu fut résorbé, peuvent avoir subsisté ; ils se trouveront donc parmi les autres éléments. Pour celte raison, un doute irrémé- diable vient frapper toutes les ohservations, si précises et si claires qu’elles soient en elles-mêmes. Enfin, ces conditions fâcheuses se compliquent de l’impossibi- lité à laquelle l'observateur est réduit d'obtenir le Maquereau dans un état satisfaisant de fraîcheur. Poisson de hante mer, qui se prend au large, il ne supporte pas l’exposition à l'air et s’asphyxie aussitôt. El faut un concours de circonstances favo- rables pour que létude ne suive pas la mort de plus de trois heures. On comprend qu’alors bien des cellules glandulaires seront altérées, ponctuées et fripées à la surface, mais surtout déformées. (1) PL XX. fig. 4 et 5. ARTICLE N° 8. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 95 La plupart des préparations utilisables renferment ainsi beau coup de cellules modifiées par l’une de ces trois influences. Rappelons-nous ici que tout revient à s’assurer-de la continuité ou de la discontinuité des séries entre le type à noyau et le type franchement graisseux. Or, il faudra pour cela savoir remonter de la cellule altérée à la cellule vivante, sous peine de ne pou- voir jamais conelure; car, en admettant la discontinuité dans les formes intactes, telles qu'on les voit, il ne serait jamais démontré que la cellule altérée n’est pas celle qui formait jus- tement, à l’état sain, la transition manquante. Il m'était impossible d'aborder de front la triple question de pathologie cellulaire qui se plaçait par incident sur mon che- min. Au surplus, elle n'intéressait pas assez le sujet, puisque j'atteins par d'autres voies une démonstration suffisante. Puis, n'était-il pas permis de craindre qu’elle ne fût pas; dans l’état actuel de la science histologique, susceptible d’une so- lution? J'étais, d’ailleurs, complétement dispensé de cette étude par l'insuccès partiel et le résultat des observations portant sur les coupes non compriméess et ce qu’on dira ici du Scomber regarde aussi le Trachurus. Si l'on arrache un lambeau sur le pourtour d’une plaque graisseuse, il se trouve composé de cellules fort inégales, irrégulièrement disposées, mais dont l'irrégularité n’est pas un complet désordre; celles des bords se montrent très- grosses et très-claires; mais à mesure qu'on s’avance vers les centres adipeux, la limpidité diminue ainsi que le volume des cellules, et il arrive que la préparation devient obscure là même où peuvent se trouver les formes de passage. L'inverse a lieu si l’on choisit un fragment tout près du tube de Weber; ou y voit de très-petites cellules qui, de la veine, vont grandis- sant jusqu’à la partie terminale du lambeau. Entre ces zones extrêmes il y a sur les mésentères une ligne moyenne, mais c’est là aussi que l'investigation devient le plus difficile; presque toutes les cellules sont déchirées, vides et déformées de telle manière qu'on ne peut juger de leur grosseur. Enfin, on voit ces sortes d'observations toujours contrariées par une multitude de JO LEGOUIS. gouttelettes qui se forment et se meuvent sous l'œil de l'obser- vateur pendant toute la durée du travail. Done, les doutes qui résultent dans un cas de la présence d’é- léments altérés reviennent dans l’autre à propos de ces cellules, dont la majeure partie, sur la région intermédiare, n'est pas observable. Du reste, quoi qu'il en soit de ces cellules, s’il existe une lacune entre les deux groupes, elle n'est pas considérable, Il y à peut-être, dans la progression des vo/umes, une légère coupure, mais trop faible en tout cas pour fournir un critérium irrépro- chable. C'est là le résultat positif des observations ; 1l eût donc été illusoire, dans le cas du Maquereau, de chercher, en com- parant les dimensions, une diagnose absolue des différents ordres de cellules. Malgré ces obstacles dont je crois avoir fait sentir toute l'im- portance, on obtient de la seule comparaison des grandeurs une induction légitime en faveur de la séparation des cellules entre deux catégories. On remarque, en effet, surles préparations non écrasées principalement, que parmi les cellules altérées ou non qui se sont détachées du lambeau et ont été s'arrêter au delà des bords, presque toutes sont de petite taille. Or, s'il n'y avait qu’une seule espèce d'éléments différant simplement de volume par des circonstances fortuites de pression mutuelle, on com- prendrait peu qu'elles eussent une tendance inégale à se séparer de leur soma. Au contraire, personne n'ignore que les cellules sécrétoires échappent d'une manière aisée et peut-être normale à la membrane propre de la glande, tandis qu'il est bien rare de rencontrer une vésieule graisseuse isolée. Il faut cependant reconnaître que chez le Maquereau, puis à un degré moindre chez certaines autres espèces osseuses (1), l'indépendance de la cellule, par rapport à ses enveloppes connectives, parait moins prononcée; cependant la probabilité veut que la différence reste dans le même sens pour ces animaux, et chez les espèces voisines du genre Trigle l'observation confirme cette manière de voir, (4) Chabots de mer et de ruisseaux. ARTICLE N° 8. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 97 Ce raisonnement acquiert plus de valeur encore lorsqu'on applique une attention suivie à l'examen des cellules errantes au delà des bords. La grande majorité sont pelites, pas toutes cependant. On en trouve aussi quelques grandes, mais alors ce n'est pas seulement plus grandes, c’est beaucoup plus grandes qu'elles apparaissent d'ordinaire (1). Elles ont, en outre, un précieux caractère (2). La plupart du temps ces grandes cel- lules sont entourées des morceaux déchirés de cellules voisines qu'elles ont transportés avec elles. Les petites n'ont jamais rien de pareil. Il est done à croire que deux espèces de cellules sont en présence, les unes plus petites, les autres plus grandes, les premières sortant par elles-mêmes de leur place, les autres devant être arrachées. Ajoutons que si l’on bornait la compa- raison aux cellules claires et non altérées, les résultats seraient encore plus convaincants; 1l n’est pas très-rare relativement d'en voir de petites claires et isolées, mais pour une seule grande cellule détachée, et néanmoins pleine de graisse, je ne crois pas l'avoir vue. Inutile de dire qu'on doit éliminer de la comparaison précédente tous les débris flottants, gros ou. petits, qui ne renfermeraient point un contour cellulaire complet. Pour être autorisé à conclure, d'après cette espèce de statis- tique, il faut un grand nombre d'observations; heureusement la seconde pêche dure presque autant que celle de l'hiver. Mais pourquoi la différence peu sensible sur les cellules en place s’accuse-t-elle ainsi davantage sur les éléments libres? et pourquoi trouve-t-on plus de profit à étudier les derniers? fl me semble que la différence se prononce parce que dans les observations ainsi conduites deux causes agissent dans le même sens. C'est un point établi sans conteste que les grandes cellules sont fort nombreuses, les petites beaucoup plus encore, mais les moyennes rares, On en pourrait déjà inférer que les deux maxima d'abondance correspondent à des espèces élémentaires distinctes, (4) PI. XX, fig. 4 et 5. (PI. XX, fig. 5. 98 LHGQUIS, Mais allons plus loin, admettons que les cellules moyennes soient adipeuses, ainsi que les grosses, ce qui est conforme à cette notion générale, d'après laquelle l'élément le moins parfait et le moins complexe doit être le plus variable; puis souvenons-nous que l'utricule graisseux fait corps avec le tissu. Nous devrons prévoir alors ces deux conséquences, et que la proportion relative des grandes cellules libres sera faible puisqu'elles sont retenues par des liens plus résistants, et qu’en outre les cellules moyennes isolées feront presque défaut, car à leur infériorité numérique dans la masse s’ajoutera la difficulté de leur déplacement. Enfin, si au lieu de considérer le volume seul des éléments, on tient compte en même temps de la place qu’ils occupent, on obtient un nouvel argument en faveur dela diversité des natures. Car toutes les coupes s'accordent à montrer que les saccules graisseux périphériques sont toujours de la plus grande dimen- sion ; il faut pénétrer dans l'épaisseur des masses de graisse pour trouver les cellules moyennes qui créent de si grandes diffi- cultés. Comment expliquer, d'après cette remarque, qu’en pre- nant un lambeau sur la surface encore des amas d'apparence graisseuse, mais près du tube de Weber, on le trouve presque infailhiblement composé de petites cellules ? Puaisqu'elles provien- nent de la couche superficielle, ces cellules, sielles étaient grais- seuses, devraient appartenir au grand type; et comme, au con- . traire, elles se rapportent toujours au moindre, il est à penser qu'une influence autre que la position préside au degré de leur développement, c’est-à-dire qu’elles sont d’une nature différente, Bien des fois un semblable raisonnement s'était présenté à mon esprit, même avant l’élude du Trachurus ; mais les plaques composées ainsi exclusivement de petites cellulessemblaïent si con- sidérables, que je n'osais imaginer autour du tube de Weber des expansions pancréatiques de cette importance. On sait mainte- nant que le Trachurus et beaucoup d’autres Poissons offrent des exemples de développements glandulaires plus exagérés encore. En résumé, malgré les difficultés pratiques et l’insuffisance des caractères qu'on en peut ürer, l'étude comparative des dimensions élémentaires conduit à admettre deux catégories ARTICLE N° 8. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 99 de cellules : les unes, irès-généralement petites, se détachant aisément et voisines des tubes de Weber; les autres, ordinaire- ment grosses, adhérentes et éloignées des tubes. C'est précisé- ment ce qui aurait lieu s'il existait un tissu pancréatique mêlé aux éléments adipeux. Démontrons l’existence de eette glande par un troisième ordre de preuves. Elles seront décisives si elles établissent que les petites cel- lules ne renferment pas de graisse. Pendant l'hiver, les Maquereaux sont imprégnés de liquide huileux au point que rien ne me fit soupconner une séparation en régions graisseuses et régions dénuées de graisse. Mais, à la pèche de juin, certains individus étaient suffisamment débar- rassés pour se prêter à l'observation immédiate. Or, l'aspect des coupes est fort différent, suivant qu’elles sont composées de grosses où de très-petites cellules. Dans le premier cas, aucun lavage n'ayant été opéré, le champ est couvert d’une foule de gouttelettes de cette graisse qui se maintient fluide à la tempéra- ture ambiante (20° environ). On a déjà remarqué ce fait à pro- pos de laspect général des membranes. Les gouttes continuent à se former avec abondance pendant le courant de l'observation, et si l’on vient à écraser le lambeau, elles se multiplient au delà de toute mesure. S'agit-il, au contraire, d’une coupe à cellules de petite taille, on est frappé tout aussitôt par la clarté de la réparation; quelques bulles graisseuses se montrent encore, mais en nombre incomparablement moindre; on les peut même compter : c’est trois, cinq, douze, que l’on trouve sur la plaque à la fin de l’observation, tandis que les cellules portées par le lambeau sont innombrables. Ea disproportion est si forte entre la graisse produite et la contenance de cette masse cellulaire, qu’on se trouve aussitôt forcé de conclure à l'absence de graisse dans les cellules. Quant aux quelques gouttelettes observées, ilest bien facile de leur assigner une origine en dehors du lambeau, car la graisse va se mêler jusqu'à la sérosité qui baigne les surfaces membraneuses de l'animal. Un moyen très-commode pour s'assurer de cette exhalation 100 LEGOUIS. graisseuse se pratique en versant une ou deux gouttes d’eau sur un des sillons d'interstices superficiels à la masse viscérale; une légère nappe liquide remplit un instant la cavité, et l’on aperçoit à sa surface plusieurs très-petites bulles de graisse qui, parfois, sans doute lorsque l’eau est légèrement alcaline, s'étendent et donnent, avant de disparaître, les colorations des lames minces. D'autre part, en détachant le fragment , il est impossible de ménager toutes les cellules graisseuses, de telle sorte qu'aucune ne lui abandonne son contenu. Une objection plus grave contre la légitimité des conclusions consisterait à dire qu'on doit regarder comme bien naturel de ne pas trouver de graisse dans ces coupes, si ces petites cellules sont simplement des utricules graisseux déjà vides avant l’opé- ration. Il n’est pas de coupe, en effet, comme on l’a vu, qui ne renferme des cellules altérées, et celles-là même, dont la himpidité subsiste, ne se montrent certainement pas dans état normal. Cette prétention, pourtant, ne peut être soutenue. Remar- quons, avant d'apporter une raison plus forte, combien peu l'hypothèse semble probable. D'abord ces petites cellules ne por- tent pas les signes connus de la résorption graisseuse; ce n'est aucunement par plissements, c'est par des ponetuations que la plupart d’entre elles manifestent leur altération. On n'y ren- contre nulle trace de résidu solide; elles ne paraissent pont racornies ; en un mot, jes transformations moléculaires dont elles sont le siége indiquent bien plutôt une tendance à la liqué- faction de l'élément toul entier qu'un résultat d'évacuation du liquide intérieur. D'autre part, s’il y a des cellules altérées, il en est aussi de mieux conservées, dont le nombre est encore trop grand pour qu'une dizaine de globules graisseux puissent en représenter le produit. Dira-t-on que celles-la mêmes sont des vésicules vidées ? Mais tout ce qu’on en voit contrarie cette opinion. Lorsqu'une poche membraneuse vient à perdre son contenu, sans être elle-même aussitôt résorbée, elle ne peut manquer de se flétrir. Je consi- dère comme mutile de m'arrêter à ce point qu'aucun anatomiste ARTICLE N° 8, DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 101 ne voudrait défendre, Mais ce qu'il faut savoir, c’est que les cel- lules claires portent les caractères d'un élément en état d'inté- grité, Je n'irais point jusqu’à prétendre que ces parties n’ont pas souffert, mais les modifications qu'elles peuvent avoir éprouvées n'ont aucun rapport d'intensité avec celles que supposerait une résorplion plus ou moins complèle et de date reculée. Enfin, l'expérience directe dément cette hypothèse, Les petites cellules, non plus que les grosses, ne sont pas vides, mais les substances qui les remplissent participent de natures différentes. A mesure qu'une couche de grandes cellules est plus comprimée, elle se couvre d’un nombre croissant et bientôt immense de bulles graisseuses. Ce qui sort, en pareil cas, des petites est un liquide sur lequel nagent encore parfois quelques gouttes de graisse, mais en grande minorité par rapport au véhicule qui les porte; ce dernier n'est pas une huile, 11 coule comme l’eau dont il partage la fluidité et ne se rassemble pas en sphé- rules. Enfin, il entraine une foule de granules différents des corpuscules lymphatiques et d’origine intracellulaire. Malheu- reusement celte épreuve par compression nest pas souvent applicable, car les préparations absolument dépourvues de eel- lules à grande dimension et pleines de graisse sont assez peu nombreuses. Done, il existe sur les lames viscérales du Maquereau, comme dans la Carangue, deux ordres de cellules : 1° Des cellules pour la plupart beaucoup plus petites, asso- cices entre elles en fort grand nombre, ne renfermant pas de graisse, isolables du stroma, parmi lesquelles certames offrent un noyau plus ou moins apparent. Elles sont voisines des tubes de Weber; les plus petites ne diffèrent pas de celles du pancréas massif. 2° Des utricules, pour la plupart notablement plus grands, renfermant de la graisse, attenants à la trame du tissu, sans noyau perceptible, développés surtout près du contour de démarcation entre les parties purement conjonctives et les parties plus orga- uisées des mésentères, Les premières constituent le parenchyme d’une glande pan 102 LEGOUIS. créatique diffuse ; les autres forment les analogues très-ressem- blants des corps graisseux communs à tous les animaux. Je répète, en finissant, que les forts grossissements (au-dessus de 250 à 300 diamètres) ne m'ont rendu aucun service. Ils font mieux sentir laliération des cellules glandulaires, mais les détails de constitution intime qu'ils révèlent, pour devenir le point de départ d’une différenciation, devraient avoir une importance qu'on n’est guère autorisé à leur attribuer; ils nécessiteraient une étude approfondie, très-longue, hors de proportion avec le but final et peut-être aujourd’hui sans véri- table chance de succes. La couleur et la réfringence propres à la graisse sont aussi, comme on l’a vu plus haut, d'un médiocre secours, parce que c'est un caractère général entre toutes les espèces osseuses et autres, que la cellule pancréatique soit un élément très-limpide, assez fortement réfrngent; quant à la teinte, le Maquereau est tout imprégné d'une matière colorante vert pâle à peine diffé- rente du jaune-vert de la graisse; l'intensité de cette coloration change d’ailleurs d’un sujet au suivant. Les cellules glandulaires offrent à l’altération une résistance beaucoup moins durable que les saccules graisseux. Pour compléter cette étude, 1l faut encore prouver que ce qui ne dépend pas du système adipeux se subdivise en deux classes de tissus: glandulaire ou lymphatique. Tei la démonstration sera facile. Les corpusceules blancs et les cellules n’ont aucun rapport de ressemblance, ce sont deux éléments très-distinets n'ayant que leur mobilité pour point commun, encore est-elle singuliè- rement plus grande dans les corpuseules. Quant aux aréoles lymphatiques, origine des globales, leur fixité les distingue aussitôt des éléments glandulaires. L'existence des deux fonctions ne soulève donc aucun doute. En revanche, il est impossible de délimiter avec certitude Îles régions lymphatiques et les parties glandulaires. Les points fertiles en globules sont constitués par des aréoles conjonetives, d'une réfringence très-faible, formant un réseau bien régulier, mais à mailles inégales. Il n’y aura aucun danger ARTICLE N° 8. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 103 de confondre une pareille disposition (4) avec les cellules pan- créatiques libres et bien plus réfringentes. Mais je ne saurais rien affirmer de définitif quant aux relations entre ces régions lym- phatiques et les acèni du pancréas. Cetle question d histologie reste pendante. J'ai reconnu seulement que les aires, où mieux les espaces lymphatiques sont très-intimement mêlés à la char- pente conjonctive de la glande ; il est bien rare, dans les bonnes préparations, de n'avoir pas à la fois des cellules libres, des glo- bules et des aréoles; quelquefois, cependant, on obtient vi coupes aréolaires dans toute leur étendue ; il est encore moins rare de voir les globules manquer absolument. J'aurais été dispensé d’une partie de ces pénibles travaux si, daus les Scombéroïdes comme chez tant d'autres Poissons, les limites des folioles glandulaires pouvaient clurement s’aperce- voir. N'ayant pu y réussir, j'attribue cet insuceès, avant tout, à l'abondance de la graisse. L’épaisseur du tissu adipeux est si grande dans cette région intermédiaire déjà signalée à propos des cellules moyennes, que les préparations n'y sont jamais satisfaisantes, soit à cause de leur obseurité, si l’on observe en masse par de faibles grossissements (40 à 100 diamètres), soit par la destruction des rapports, la déformation de l’ensemble et l'abondance des gouttelettes graisseuses, si l'on essaye de faire des coupes. De plus, la faiblesse des liens connectifs de l’acénus intervient encore 1ci pour tout confondre ; le poids du verre su- périeur doit suflire pour rompre les surfaces terminales da tissu glandulaire en bien des points; enfin, le commencement de . décomposition des éléments sécrétoires contribue aussi pour sa part à priver l'observation de toute netteté. En cherchant ainsi les bornes du tissu glandulaire, il m'est souvent arrivé de rencontrer l'apparence suivante : au sein des lobules graisseux, lesamplifications faibles, qui permettent les vues d'ensemble, font reconnaitre des plaques, ou plutôt des espaces assez abondamment et très-finement granulés, dont les contours irréguliers tranchent avec nettelé sur les régions voisines, Ces (1) PL XX, fig. 2. 10/ LÉGOUIS. granules sont très-probablement de ceux que j'appelle Iympha- tiques, mais je n'ai pu examiner la constitution de ces plaques avec assez de soin pour en tirer des conelusions certaines. Si l’existence du pancréas diffus du Maquereau ne peut être révoquée en doute, 1l subsiste une grande indétermination dans les limites que cette glande attemt sur les mésentères. Je puis seulement aflirmer que la glande est toujours sous forme lami- naire et microscopique, formant des franges tres-inégales et très-variables sur les côtés du tube excréteur. J'ai acquis la conviction que les Poissons d'été ne portent presque aucune trace de leur développement grasseux corres- pondant à l'hiver précédent: si la graisse à été résorbée, l'en- veloppe à dû l'être aussi; peut-être encore ces animaux sont-ils d'une génération différente, Quoi qu'il en soit, chez plusieurs d’entre eux, le parenchyme pancréatique diffus surpasse en abon- dance la formation graisseuse, contrairement à ce qui semble probable d’après les Poissons pêchés en janvier. Dans le parenchyme des pancréas en massettes, fixes ou non, du Trachurus et du Scombrus, pas une seule cellule graisseuse ne s’est offerte ; au contraire les corpuscules Iymphatiques y sont presque aussi abondants que sur les trainées mésentériques. EXPLICATION DES PLANCHES. N. B. — Dans toutes les descriptions ou légendes, les mots : dessus, dessous, à droite, à gauche, devant, derrière, etc., sont rapportés à l'animal. PLANCHE 18, Dans îes cinq figures de cette planche : m . désigne les pancréas massifs. m désigne les masses disséminées considérables. ml! désigne les masses disséminées visibles. mn" désigne les masses disséminées microscopiques. w désigne les canaux de Weber, w! désigne les troncs primitifs du système wébérien. Fig. 4. Zone duodéno-hépatique d’un pancréas diffus reconnaissable à l'œil nu (Merlus). Le pancréas massif (2) s'appuie sur le duodénum (4) en forme de prisme dont ARTICLE N° 8. DU PANCKÉAS DES POISSONS OSSEUX. 105 l'axe est traversé par le cholédoque (2) et la veine duodénale (4). Une injection poussée par l'orifice intestinal est parvenue en partie jusqu’à la surface où des tronçons wébériens se trouvent remplis et marqués en noir foncé. On voit les ramifications s'étendre dans la masse membraneuse (p), vers le hile du foie (a), en compagnie des biliaires (g et g’), et d'autre part, s'appuyant sur des fibrilles conjonctives, rejoindre les appendices (c) par des arcades multiples (4). La seule région complétement injectée (10 p) du système wébérien s'étend fort loin des limites du pancréas visible et dessert une partie microscopique. Des trainées reconnaissables de substance glandulaire filent le long de la veine porte (0) jusqu'à la veine splénique (#71), et le long du cystique (2) jusqu’au fond de la vésicule où se dépose la masse vésiculaire (#2'). (Un peu plus grand que nature.) Fig. 2, Pancréas disséminé visible en massettes adventives sur l’une des faces de la vésicule d’un Merlu. Une injection pénétra du duodénum jusf'en w!. Fig. 3. Pancréas disséminé en foliations régulières dans la couche membraneuse (e) blanche de la paroi vésiculaire d’un Merlu. Cette plaque, limitée par un contour très- net (2), est en continuité de {issu avec la masse (»/),et par elle avec les centres duo- dénaux. Fig. 4. Massette pancréatique principale ,sessile sur le duodénum, et ampoule de Vater, dans une Brème (Abramis Brama). Fig. 5. Pancréas disséminé microscopique du Bar (Labrax lupus). Le lambeau mésentérique pris au contact du duodénum après injection par l'am- poule de Weber, dont une partie est visible (4), renfermait avec huit tronçons wébériens plus ou moins injeetés et attenant à cette portion de l’ampoule, plu- sieurs masses dont l’une (»1//), tout à fait insaisissable à l'œil nu, avait conservé intactes ses relations avec le duodénum; pour d’autres masseties du même lam- beau, les communications, quoique rompues, étaient reconnaissables. Quelques uns des tronçons injectés se prolongeaient dans des feuillets membraneux diffé- rents. PLANCHE 19. Fig. {. Partie du système wébérien (Maquereau). Celte figure représente l'aspect de la masse viscérale disposée pour l'injection du tronc-ampoule (a) de Weber, adjacent au cholédoque (b). La disposition des viscères, 2 statu viventis, est donnée par la figure 2. On enleve le foie en cou- pant les canaux hépatiques (ec) et la veine porte (d), puis, après avoir séparé la branche montante (e) du cul-de-sac (f) stomacal, sans rompre la veine gastro- æsophagienne (g), on reporte cette branche en (e’). On éloigne ensuite du duo- dénum (4) et de l'estomac la première spire (2) de l'intestin, tandis que la spire anale (7) reste en place. Le plan supérieur du système cæcal (4) se trouve alors découvert avec la veine splénique (2), les masses pancréatiques fixe (M) et ad- ventives (m). La vésicule (7) a été rejetée en dehors, de manière à montrer les veines (p) mésentériques avec leur branche (g) d’anastomose. L'une (p) de ces mésentériques (l'inférieure) passe au-dessous du faisceau (4/) appendiciel prin- cipal. L'injection montre dans ce plan : 4° le canal wébérien (W) du pancréas SC. NAT., MARS 1873. XVII. 18. — ART. N° 8. 106 LEGOUIS. fixe et de la vésicule; 2° l’origine du canal wébérien (w) du plan inférieur au- quel la figure 4 (pl. 20) est consacrée ; 3° une de leurs communications (r) ana- stomotiques. Les branches (W7) dérivées de W fournissent surtout à la partie gauche des cæcums; les branches (w') de w surtout à la partie droite. (Un peu moins du double de la grandeur naturelle.) Fig. 2. Masse viscérale du Caranx trachurus, dans l’état naturel; l'appareil repro- ducteur a été enlevé, Les mêmes lettres correspondent aux mêmes organes que dans la figure À. Le foie (s), les cinq cæcums (4) et la première spire (2) de l'intestin recouvrent le cul-de-sac stomacal, moins long que sur le Maquereau. — Dans les sujets très-riches en tissu pancréatique, la glande est reconnaissable à l’œil nu dans toute la régi@u ({) intercæcale ; elle envoie dans les sillons (x) des dépendances qui parviennent jusqu’en v, même sur des animaux plus pauvres de pancréas. (Grandeur natuelle.) Fig. 3. Cellules du pancréas diffus du Caranx trachurus ;-quelques-unes montrent un noyau latéral plus réfringent que le contour cellulaire. (Grossissement de 200 dia- mètres environ.) Fig, 4. Cellules du pancréas massif. (Même grossissement.) Fig, 5. Globules du sang avec cellules du pancréas massif, (Grossissement un peu plus fort.) PLANCHE 20. Fig. 1. Deuxième partie du système wébérien (Maquereau). Cette figure, où les mêmes lettres correspondent aux mêmes organes que dans la figure 4 de la planche 49, représente une disposition très-voisine de la précé- dente. Pour l'obtenir en partant de celle-ci, il suffit de rejeter sur la gauche le faisceau appendiciel principal (x!) et d’écarter les spires (2) de l'intestin. On dé- couvre alors avec la mésentérique inférieure (p') sa branche wébérienne (w) latérale, dont l’origine seule apparaissait en w sur la planche 19, Cette branche latérale w donne des rameaux appendiciels (w!), d’autres gastriques (w?), et d'autres mésentériques (wŸ), qui, après s'être subdivisées, finissent par border des deux côtés l'extrémité des ramifications (pt) de la veine. Fig. 2. Tissu aréolaire à grandes mailles très-päles, après disparition des globules (Maquereau). (Grossissement de 200 diamètres environ.) Lis. 3. Éléments cellulaires du pancréas massif (Maquereau). Le champ est couvert d'éléments cellulaires pressés les uns contre les autres (a) , dont les dimensions varient (de a à b), la grande majorité est de taille moyenne {c); quelques-uns, petits ou grands indifféremment, ont un noyau (d) si réfrin- gent qu'il parait presque noir, sauf le point focal. Certains espaces de ce paren- chyme abondent en granuüles blancs (2). (Mème grossissement.) gæ . A. Cellules graisseuses déformées et vidées par compression; l’une d'elles, de ARTICLE N° 8. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 107 taille ordinaire, recouvre deux cellules pancréatiques (Maquereau). (Grossissement de 150 diamètres.) Fig. 5. Aspect général des grandes cellules graisseuses après compression, telles qu'on en trouve d'isolées, et qu’elles sont ordinairement dans la trame (Maquereau). Ces cellules à l’état frais ont la figure ordinaire. (Grossissement : moins de 300 dia- mètres.) Fig. 6. Un lambeau non comprimé pris sur le péritoine au contact du tube de Weber (Maquereau), et tel que se présentent beaucoup des préparations ainsi faites, La surface montre un grand nombre de cellules claires et fortement accusées, dont quel- ques-unes sont pourvues d’un noyau très-réfringent, ces cellules plus ou moins alté- rées sont éparses en nombre variable (petit dans l'exemple) sur un fond aréolaire d’où sortent les corpuscules (nombreux dans l'exemple, tous n’ont pas été figurés), (Grossissement de 250 diamètres environ.) L) Fute Ve t É [ ON LE , 1 CU 0 RS RER trié 4 +# Lu 210 (usoerusf) ouiat al avale pere % 7 sir 02 où ain à, DNcpiUe i-afe « 10") st ; APP PEN À Le Que Ed LL 14 Ml tr Su) ul Nat: us wii} | k 1e ER at faune ru à “1h, au LIENS ae ST | J 1h) ob, Rata ut js 2e » ulEr qu: ne LU 4 OT DEL r J is: ai à as ADS eu pq res Su ls. 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Zool, Tome 17, LL. 18 Lageswse De Pancreas des Lloissons. np. À. « Salmon M Veille Lstrapade, 15 Laris LT VIT D ATLUTEES : L PRE PRE LAURE TT OU" Are : ï = 4 vu 1 VE NE … TL A k Me | L | (ES FUN nu T'AR à Me Lt nu " OL TPTOL D D NIUE J: ‘fu L | 1H D: d ‘4 { ECRIRE } DL HD 'CUAR . Der ACT 1 | fu L L ii : : L NL d i 1 1, L " 2 a PA | . vie DCRT RE | À à : (A | À | Mi : [la | VOTRE | t | n ë we ni RE — e ee … . COR UN NY FA ‘ jÙ dre y , AU ARS | ar À : 0 LE RTL LR 7 el, _ . L d L L LA + ï de UE mr " D L PLUS D : er D 2 PUT 4) (AE : D ni De ENT Le HOT DT FO : . 17 ” ét US n . ‘ [ Aus b x} Ty 100 Ju CN LT | NE ) L 4 " ï L AL, role 1 | w 1 LL. a | D | V1 h | | CO Dam: L PE 4 "0 ne D ps" 1. L l LL nl CA È . n Ann. des Science. nat. 5% S'érce: Zoo. Tome 17, PL.:19. Parcreas des l’oisson., Împ À, Saiman,r rille Lstrapade, 18, Paris. Ann.des S'ecnce.nat. 8° J'erte. Tool Tome 27. PF20 lancreas des Pots sons. Imp. A. S'almon,r heille Estrapade,15 Paris. Le UNE : ous nue | . ne ; RECHERCHES SUR LES TUBES DE WEBER ET SUR LE PANCREAS DES POISSONS OSSEUX Par le PP. LEGQOUELS, de la Compagnie de Jésus. DEUXIÈME PARTIE. OBSERVATIONS SUR LES SCOMBÉROÏDES DU GROUPE DES DORÉES. Poule de mer (Zeus faber, L.) Les organes splanchniques (1) du Zeus diffèrent notablement de ceux des Poissons qui font le type de la famille. On trouve les deux orifices des tubes pancréatique et cholé- doque dans l'intestin, séparés sur une papille proéminente de 2 millimètres environ, au milieu du velours formé par ies replis de la membrane interne dépouillée ou non de ses cellules épithéliales. Comme toujours, leur disposition est celle d’un croissant qui entourerait partiellement un point ; le croissant résulte de Pen- roulement du canal pancréatique. Ces deux orifices sont franche- ment séparés à la base de la valvule ; il est moins certain que leur individualité se maintienne Jusqu'au sommet. (1) Dans toutes les descriptions et toutes les légendes, les mots : dessus, dessous à droite, à gauche, ete., sont rapportés au poisson. 2 LEGQOUIS. La papille occupe le bord de l’ouverture donnant sur la cavité d'un groupe d’appendices. À la paroi intestinale qui lui fait face on voit des orifices cæcaux plus proches qu'elle du pylore, et, circonstance remarquable, elle est de l’autre côté du pylore par rapport à la bouche appendicielle la plus voisine. Donc, si jamais les cæcums recevaient quelque partie de matière nutri- tive, l'aliment s’y trouverait soustrait à l’action des sues diges- tifs d’une manière à peu près complète. Ce fait vient à l’appui des inductions qui portent à regarder la masse cæcale comme un appareil simplement multiplicateur de la sécrétion intes- tnale. L'orifice pancréatique conduit à une grosse ampoule de Weber, dont la cavité sert de réservoir à un nombre immense de massettes glandulaires. Ces granulations blanches sont distri- buées autour des veines, presque en ligne droite entre Pintestin et l'estomac ; leur série se termine à un corps plus considérable situé au fond de la vésicule. L'injection poussée par l’ampoule n'eut qu'un médiocre succès. Toutefois elle remplit un petit canal qui marchait vers le sommet de l’ampoule le plus éloigné de l'intestin et se sub- divisait en plusieurs branches. Une des ramifications semble se perdre; deux autres marquaient nettement leur tendance à se rapprocher de deux des massettes voisines. Outre le système de masses situé auprès de la vésicule, entre elle et l'intestin, il en est plusieurs autres non moins remar- quables, dont l’un près de la rate. On y distingue cinq masses environ, variables du volume d’une tête de grosse épingle au point à peine visible, et passant en couleur du rouge au violet. Un troisième groupe de massettes plus près de la vésicule peut êlre, avec le premier, considéré comme dépendance du corps vésiculaire. Les masses volumineuses paraissent moins s'astreindre à rester dans le voisinage des vaisseaux que les plus petites. Dans ce poisson, les cæcums sont digités ; ils portent deux, trois et même quatre ou cinq divisions. Chacun d'eux adhère par sa base et par son sommet à un DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. o repli du péritoine qui l'enveloppe comme dans un fourreau ; sauf à la base et au bout, chacun d’eux contracte peu d’adhé- rences. De là résulte que les cæcums forment une masse com- pacte. Malgré cette complication du système appendiciel, on re- trouve sans difficulté la suite du pancréas à travers les inter- stices. [l suffit, comme à l'ordinaire, de suivre les veires mésen- tériques qui percent la masse en lui fournissant des rameaux. On rencontre ainsi dans cet appareil compacte un nombre, Je le répète à dessein, prodigieux de massettes pancréatiques. Elles forment autant de systèmes qu’il y a de veines et de faisceaux appendiciels secondaires, comme on s’en est expliqué à propos du Maquereau. Quoique l’analogie et le succès partiel de l'injection dont j'ai parlé ne laissassent aucun doute sur la nature des masses, elles forment uu ensemble si étendu et si bizarrement groupé, que Je désirais vivement voir une injection plus heureuse corroborer ces Inductions. : C'est ce qui arriva après quelques essais infructueux. Sur un individu plus avantageux, elle montra qu'un canal de Weber se dirigeait, comme on s’y attendait, vers la masse principale, à travers les grains rouges, passant très-près de chacun d’eux et leur envoyant un ramuscule. Le liquide avait pénétré seulement jusqu'au col, en dessous de la vésicule, mais on pouvait suivre sans trop d'incertitude et de peine la trace du faisceau cellulaire accompagnant et for- mant ce Canal à partir du point où l'injection cessait, le long de la vésicule, jusqu'aux masses voisines. Un autre petit canal de Weber s'était aussi trouvé rempli. Il parcourait les appendices. La partie injectée était assez courte, cependant elle conduisait à un corpuscule d'apparence glandu- lire, situé dans la masse appendicielle. A LHGOELES, OBSERVATIONS SUR LES GADOIDES. GROUPE DES MERLUCHES. Merlus (Gadus Merluchius, L.) Lorsqu'on ouvre l'abdomen d’un Merlus (Gadus merluchius,L.) par le côté droit de l'animal, on aperçoit aussitôt la vésicule biliaire ; elle déborde le lobe droit du foie et occupe à peu près le centre de la surface viscérale. À son extrémité arrondie se montre d'ordinaire un organe d'aspect glanduleux, rosé, gros comme la cinquième partie de la vésicule, qui elle-même a le volume d’une amande. Dès que je l’eus observé, je ne doutai pas que cet appendice ne fût une annexe du pancréas, ou le pancréas lui-même. Sans se préoceu- per de la distance au duodénum, la nature glandulaire du tissu élant bien constatée, et la différence avec le foie, la rate, le rein, etc., reconnue, on peut affirmer en général que l'organe est un centre pancréatique, quelque part qu'il se trouve, ec celte supposition s’est vérifiée, comme la suite le montrera. Mais la glandule ne devait point être le pancréas principal, si j'en croyais l’analogie anatomique. Brockmann, en effet, cite le Gadus Callarias (petite Morue) parmi les espèces qui ont fait le sujet de ses observations. IL y à trouvé un pancréas adhérent à l'intestin, entourant le pied du cholédoque. Or il avait vu sur le même animal, au fond de la vésicule du fiel, une masse glandulaire sur laquelle il n'avait que des paroles d'incertitude ; aussi la mentionne-t-il sans être en état de lui donner un nom; et cela pour avoir ignoré l'existence ou négligé l'importance des canaux de Weber. Voici, en effet, ce qu'il donne sur le Gadus Callarias ; je tra- duis littéralement : « Dans ce Gadus, de la surface concave du foie, deux conduits » » DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 5) hépatiques descendent de haut en bas; ils se rendent, l’un prés de Pautre, à un conduit hépatique (1), cholédoque large et épais de parois. Des deux parties de celui-ci, l'une, anté- rieure (2), se porte à la vésicule du fiel; l’autre, postérieure, courant vers l'intestin, entre dans un large duodénum, mais non beaucoup au-dessous des appendices pyloriques. » Près du point où le cholédoque s'engage dans le duodénum est un corps petit, lobulé, glanduleux, en masse consistante et de couleur rougeûtre. Il en sort un conduit excréteur très- court, très-voisin du cholédoque, et qui perfore aussitôt l'in- testin. » Le duodénum étant ouvert, en passant une soie dans le cho- lédoque, on trouve aisément l’orifice de ce conduit, et auprès de lui une ou deux petites dépressions. On s’assurera, en ayant soin d'y introduire des soies très-fines, que ce sont les orifices du canal pancréatique. » Il y a des appendices en très-grand nombre ; la plupart se joignent à d’autres, et à plusieurs reprises, de sorte qu’enfin la masse totale des cæcums pyloriques n'a que sept orifices dans le duodénum. » En outre, j'ai trouvé attaché au fond de la vésicule du fiel de ce Gadus un corps glandulaire séparé, de la nature duquel je reste incertain. Il est de même couleur, blanc rougeûtre, que le corps précédemment décrit. » Je devais donc supposer que l’analogie allait se poursuivre, et qu'après avoir vu la glande super-vésiculaire, je trouverais la parle sessile sur l'intestin, qui, sans doute, serait la masse pan- créatique principale. En effet, soulevant le bord du lobe droit du foie, j'ai aperçu une glande de couleur rosée, comme la pre- mière, constituée comme elle de lobules parfaitement visibles, qui donnent à sa surface l'aspect d’une mûre, à la couleur près. La ressemblance des deux glandes est complète, mais la grosseur est fort différente. Cette seconde masse atteint le triple de la pre- miere, quoique sa forme n'en laisse guère évaluer le volume (1) I y a hepaticum duclum dans le texte, sans doute pour ductum choledocum. (2) C’est l'inverse dans le Merlus. SG. NAT,, JANVIER 1873. XVIIL, 7e — ART, N° 3, LEGOUIS. avec exactitude. Elle repose par son pied sur l'intestin ; de là elle remonte vers le foie, entourant le cholédoque jusqu'aux envi- rons du point où le eystique s’en écarte. Jusque-là son épaisseur transversale a été considérable, comparable même à celle de l'in- testin qui la supporte. À partir du point où le cholédoque ‘com- mence à apparaître, elle s’aplatit et devient laminaire; elle ne forme plus qu'un épaississement entre les deux feuillets du repli péritonéal. Lorsqu'elle atteint son maximum de développement, cette glande offre une forme très-irrégulière et une surface très-acci- dentée. Mais ces modifications se font autour d'un type simple en lui-même, et dont la constance dépend de la forme des la- eunes interviscérales où cette masse est développée. Elle fait naître naturellement l'idée d’une gerbe dont le pied reposerait sur le duodénum, et dont la tête épanouie s’étendrait de préférence dans certaines directions. Le pied seul de la gerbe est rempli par le üssu, tandis que les parties centrales de la tête sont évidées et que la surface se confond et s'étend avec les lames du péritoine. Dans toute cette région, l'apparence noueuse el mamelonnée de la glande est bien reconnaissable. H en est autant sur une masse oblongue, mais de forme un peu variable ainsi que de volume et de situation, qu'on trouve dans un plan membraneux différent, toujours dans le voisinage de la pointe antérieure de la rate et au-dessous de l'embouchure de la vésicule. Cette dernière partie du pancréas est à peu près de la mème impor- tance que la masse terminale de ta vésicule ; elle longe la veme splénique. J'ai aussitôt admis que ces corps devaient être, comme dans toutes les espèces observées jusqu'alors, des parties distinctes d’un système pancréatique unique. Notons en passant ces trois masses : duodénale, vésiculaire, splénique, nous les retrouverons sur une foule d'espèces. Mais, dans cet animal, parallèlement à ces pancréas massifs, il s'en développe un autre, non moins considérable, avec des apparences bien plus remarquables encore. C’est de ce pancréas vraiment ARTICLE N° 5, pa DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 1 diffus, et non pas dissémiué seulement, que je vais maintenant m'occuper. Car si cette espèce est une de celles où la forme massive et agglomérée du pancréas se dessine très-nettement, elle mérite l’attention pour des motifs encore plus importants. Là se trouve, je crois, de toutes les dispositions qui passeront sous nos yeux, celle qui réunit le plus de simplicité relative, avec une diffusion : de la glande déjà suffisante. Elle pourra donner quelque idée de la complication des circuits el des nœuds que le pancréas dessine au milieu des viscères plus contournés sur nombre d’autres poissons. D'ailleurs, il est ici gros et visible à l'œil dans la plupart de ses régions; le passage du type massif au diffus et même au disséminé sy montre évident ; il n'y à géné- ralement pas de graisse. Enfin c'est pendant l'examen de cette espèce que me vint la conception claire et presque définitive des formes diffluentes de cet organe. Je la choisirai donc comme exemple, et l'on verra qu’il n’est guère de question principale ou secondaire sur laquelle l'étude de cet animal, complétée par celle de quelques formes spéci- fiques voisines, ne fournisse un contingent nombreux d’'obser- vations faciles et sûres. La correspondance nécessaire des tubes et du pancréas s'y manifeste ; l'acinus, le lobule de la glande, y sont visibles et bien dessinés; l'illusion sur la nature du tissu est tout à fait impossible. Les circonstances ont permis de revenir deux fois à l’étude de ce poisson. La première série de recherches (Concarneau, mai 1863) avait été si profitable, que J'espérais encore beaucoup de la se- conde. Préoecupé la première fois des vérifications essentielles, j'avais dû passer à d’autres espèces avant d’avoir épuisé les res- sources que celle-ci paraissait offrir. Ampleur et variabilité du volume, pénétration de la glande dans le foie, ses relations avec les mésentères, les veines, les viscères, ses formes sont autant de sujetssur lesquels on pouvait prévoir que le Merlus donnerait des indications précieuses. Que l'intérêt de ces questions pour le sujet principal eût été dévoilé par l'étude de ce poisson lui-même, ou qu'il résultät de faits ultérieurs, la disposition des choses dans L 5 LEGOULS. cet animal promettait une voie commode pour compléter les recherches ou confirmer les analogies. J'ai pu réaliser ce des- sein, à Angers, dans l'hiver de 1869-1870, et parmi les résul- tats que produisit cette seconde étude, deux doivent être signalés à part : l’absence presque complète de tissu graisseux dans Îles animaux d'hiver comme dans ceux du printemps; et l'extrême développement du pancréas diffus visible que portait l’un d'eux (1). L'étude du Merlus serait encore celle par où je recommen- cerais de préférence, si quelque loisir me permettait de pour- suivre l'observation des espaces Iymphatiques ; les premières notions positives sur l’organogénie de la glande pancréatique ou de la formation globulaire devront aussi probablement se tirer des Gadoïdes. Je décrirai done avec quelque soin les viscères de cette espèce très-importante. La masse splanchnique étant sortie de sa cavité et le foie vo- lumineux posé sur sa face convexe, on aura sous les yeux le hile de cet organe. Comme toujours, il est relié au duodénum par le feuillet d’un mésentère très-développé et sans trop de solutions de continuité dans cette espèce; on remontera vers l'ouverture de la panse gastrique cachée sous le duodénum, et, soulevant ce dernier, on verra d’un côté l’œsophage à parois musculeuses, et de l’autre la branche montante de l'estomac, réduite dans ces Gadoïdes à un tronçon qui n’est pas la dixième partie du cul- de-sac. A la suite de l'étranglement pylorique se montre le duo- dénum avec une largeur considérable, et des parois minces et exlensibles. Il fait sur la branche ascendante de l'estomac un coude très-fermé; enfin il se continue lui-même par ur intestin grèle à peme moins large, aussi extensible et aussi vascularisé que lui. Ce tube digestif forme quatre courbures, très-impor- tantes à considérer, surtout la première, pour Pintelligence de la situation du pancréas. Deux appendices pyloriques gros et courts dépendent de la (DPPLM7 ME NA ARTICLE N° 9, DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 9 tôte de ce duodénum; presque toujours l’un des deux avorte plus ou moins, et le plus souvent d’une manière complète. Is sont implantés tout près du sphincter pylorique, et recouverts par la branche stomacale. Pour voir l'intestin dessiner clairement les courbures indiquées ci-dessus, il faut avoir eu soin d’en écarter les spires, car la trac- tion des mésentères les accole naturellement. Or, c’est sur le développement de ces mésentères qu'il me faut maintenant insister ; car le pancréas se glisse dans certains feuilletset parait, pour cette espèce, rarement s'engager dans les autres, au moins dans sa forme visible. Quant à la forme microscopique, elle est par sa nature rort difficile à délimiter, puisque pour l'avoir constatée en un point, on ne peut répondre qu’elle ne fuse pas beaucoup plus loin, et, pour ne l'avoir pas vue, on ne peut assurer qu'elle ne se retrouve pas à une grande-distance en aval du dernier jalon posé et vérifié. Cette forme n’est que la dégradation extrème en épaisseur et en densité de la forme visible, aussi la doit-on soupçonner au- delà des limites de celle-ci toutes les fois qu’on a vu quelque lamelle glandulaire s’amincir de plus en plus. Je crois que dans le Merlus la partie microscopique est plus réduite, quoiqu'elle y soit encore abondante, parce que, grâce sans doute à la dispo- sition des viscères et à la brièveté de l'intestin, le pancréas peut se concentrer, et grandit en épaisseur plutôt qu'en étendue. En tout cas le pancréas invisible est plus important et plus intéres- sant dans d’autres espèces, à propos desquelles j'y reviendrai avec détail ; ici je me propose simplement de faire saisir le mode de diffluence. I serait sans profit de charger, en s’occupant du second état de la glande, une exposition déjà longue. J'ai toujours constaté chez l’un et l'autre de ces tissus pancréa- tiques une prédilection particulière d’adhérence aux veines. Cependant, lorsqu'ils sont en grande abondance, ils s’écartent quelquefois des gros troncs, el envoient alors des prolongements dans certaines directions où ils ne sout point accompagnés et soutenus par un vaisseau de grand volume. La formation des 40 LEGOUIS. oulées pancréatiques est donc réglée par une influence autre que celle des veines, d’un effet plus immédiat et surtout plus apparent. L'origine n’en est pas ailleurs que dans l'agencement des feuillets sur les espèces où les restes du péritoine offrent un certain degré d’étendue. Le système pancréatique se distingue en effet de l'appareil hépatique par les circonstances spéciales de son accolement aux bandes ligatenteuses du péritomne. Le foie des Poissons, comme celui des Mammifères, impose sa forme à la tunique séreuse qui le revêt, et possède en général un mésentère et des ligaments q. lui sont propres, tandis que le pancréas accompagne simple- ment les membranes péritouéales et n’a point de mésentere par- ticulier. Pour lui ne se forme aucun compartiment, aucun en- foncement à part dans le feuillet libre. Ce fait est général. Dans l’homme, par exemple, cette glande emprunte, soit au duodénum, soit à l'estomac, auxquels elle adhère, une partie de la cavité creusée pour eux dans la séreuse. Ses allures sont à cet égard partout les mêmes. Ou le pancréas s'attache à quelque autre viscère et partage la place avec lui dans une même cavité, ou bien il s'engage simplement entre les deux feuillets du mésentère relatif à des organes différents. Cette seconde disposition déjà remarquable dans la majeure partie du pancréas chez le Lapin, est pour la glande diffuse des Poissons osseux à peu près exclusivement adoptée dans la nature. En tout cas, dans cette absence générale de mésentère et de poche mé- sentérique spéciale au pancréas des grands animaux, ainsi que dans la nécessité d'adopter des stations qui ne lut paraissent pas exelusivement destinées, on remarque une ressemblance déjà frappante avec les pancréas diffus interpéritonéaux des espèces qui nous occupent. C'est dans ce caractère particulier que l’ana- logie anatomique semble le mieux se soutenir d'un bout à l’autre de l'échelle des Vertébrés. Dans cette espèce comme dans beaucoup d’autres (1), il est bien facile de voir que le pancréas tend à se développer sur les (4) Gadoïdes, Ménides et Spares, Trigles, ete. ARTICLE N° 8. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 11 membranes et les brides interviscérales. De là plusieurs questions : Se propage-t-il indifféremment sur toutes les lames? En est-il qu'il choisisse de préférence ? Seraient-ce en dernier compte les membranes, et non les veines, qui exerceraient sur son évolution l'influence capitale? J'ai voulu me rendre quelque raison de ces faits que je ne pouvais pas, ce semble, négliger. Le Merluchius offrait un développement très-remarquable des mésentères, et un pancréas visible jusqu’à grande distance des centres ; l’intes- tin peu contourné, mais non rectiligne ; le système veineux facile à suivre, mais non linéaire ; les cæcums existants, mais en petit nombre, telles furent les raisons qui m'amenèrent à instituer spécialement sur cet animal des recherches relatives aux mem- branes. Dès lors il fallait absolument se faire une idée, au moins empirique, quoique assez précise, de la continuité des nappes du péritoine, sans cela on se perd en passant d'un individu au sui- vant et quelquefois d’un vaisseau à l'autre. D'ailleurs que pour- rait-on comprendre, sans cette étude préliminaire, à la diffusion de la glande ? J'ai longtemps cherché, sur l'exemple qui nous occupe, une formule simple pour exprimer ce qui demeure constant au sujet de la configuration du péritoine et des organes splanchniques. Ai-je trouvé la meilleure? Je n'ose l’espérer, mais elle suffit au moins à déceler l'influence de la membrane sur la forme du pancréas. Mais faut-il voir, dans la description qui va suivre, une tentalive de théorie sur la distribution des lacunes périto- néales chez certains Poissons? Loin de moi cette pensée; Îles ligaments de la masse splanchnique se conservent sans doute suivant une loi bien différente; je les trouve aux points où ils sont utiles, voilà tout ce que j’en saurais dire, et ce n’est pas une explication, L'ensemble qu'ilsforment, si variable etsi compliqué, paraît défier tout système, non que la loi n'existe, mais parce qu'on ne connaît ni la cause immédiate des destructions partielles, ni le type général de la disposition qu’adoptent les lames restantes. En fait, le point de vue d’où les choses sont exposées fait counaître fort exactement la masse viscérale du Merlus et des 12 LEGQUIS. Gadoïdes. Je n’ai pas prétendu jeter sur la description uneappa- rence théorique, maisje me suis efforcé de luidouner de l'unité, j'ai surtout profité des connaissances dues à l’'embryogénie. Conformément à ce qu’elle à montré sur les espèces étudiées par Müller et Meckel, j'admets que pour les Merluchius, comme chez tous les Vertébrés, le péritoine de l'embryon forme un repli mésentérique complet dans le fond duquel se trouve le canal digestif ainsi attaché à la paroi dorsale de la cavité : c'est un postulatum, puisque je n'ai pas vérifié ce fait ; mais la simplicité qu'il donne à l'entente des rapports dans l'adulte lui suppose une grande probabilité. En partant de là, il ne sera pas impossible de se représenter l'ensemble des ligaments interintestinaux, qui sont le terrain sur lequel s'établit le pancréas et dont il partage les inégalités. Au premier abord, lorsqu'on essaye de développer la masse vis- cérale du Merlus, on est porté à croire que le péritome est complet. Le foie, la vésicule, les quatre courbures inteslinales et la rate semblent en effet reliés les uns aux autres par une membrane continue. Cependant il existe des lacunes, et l'examen plus attentif fait reconnaitre, en certains points à peu près constants, que la séreuse fait place à un simple système de cordons fibreux plus ou moins légers, laissant entre eux des vides considérables. C'est ce qui a lieu surtout entre le duodénum et le foie; le liga- ment qui les relie, membraneux dans une grande partie de son étendue, se résout en filaments dans une autre région. D'autre part, aux environs de lanus, la séreuse a subi de larges pertes de substance, et la membrane destinée à relier l'intestin à la paroi de l'abdomen manque en grande partie ; enfin, sur la rate, le foie et l'estomac, la trame s’amincit jusqu'à disparaître à peu près complétement. I me faut entrer dans ces explications, parce que je crois pou- voir avancer que l’état de développement de la membrane réagit de plusieurs manières, mais toujours profondément, sur la figure du pancréas diffus. En général, aux parties solides et complètes du péritoine cor- respond un pancréas diffus compris, comme les vaisseaux, dans ARTICLE N° DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. A3 l'épaisseur de la membrane; je ne doute même pas que, dans certaines régions, les lames ligamenteuses n'aient deux nappes accolées comme dans les véritables séreuses des animaux supé- rieurs, Car souvent les grappes glandulaires, se montrent comme chez le Lapin, entre deux feuillets nettement distincts. Alors, quand il se présente une lacune, la matière pancréatique peut dé- border et former de légères digitations flottantes sur le pourtour de l’évidure; mais le progrès de da glande dans ce sens est arrêté bientôt, faute de support. Au contraire, où la membrane continue se prolonge en simples tendons fibreux, le pancréas suit encore ces filaments plus où moins loin; mais 1l est aussi fort aisé de reconnaître alors que le tissu glandulaire se répand à la surface du fil tendineux et ne chemine point à l'intérieur comme dans les membranes. Enfin, s’il se forme quelque repli péritonéal, c’est-à-dire une ligne à partir de laquelle le feuillet se réfléchit en s’accolant à lui-même pour devenir la face montante, après avoir constitué la face descendante ; si même seulement il se soude d’une manière plus intime à la paroi opposée, le pancréas se trouve contenu par cette limite et ne projette de la ligne de suture aucune expan- sion, Si faible qu’elle soit. Trois membranes partent de lintestin duodénum : l’une, allant au sillon du foie, sera dite fewillet hépatique ; une autre monte vers la veine viscérale, c’est une portion de mésentère de la masse intestinale ; la troisième descend vers les autres viscères, joignant les quatre parties de l'intestin, qu’elle relie à la rate, à la panse stomacale, et à la veine mésentérique qu’un de ses bords parait suivre. Jamais je n'ai trouvé de ramification pancréatique notable dans le feuillet mésentérique ou dans l'intestinal du Merlus, tandis que, sur d'autres espèces à grand pancréas diffluent (Congre), 1 remonte Jusqu'à l’æsophage et descend jusqu'à l'anus. Aussi m'occuperai-je surtout de la lame hépatique. Ces trois feuillets ont entre eux des rapports et s’entrecoupent suivant des lignes importantes à connaître. C’est ici qu'intervient l'analyse pour en faire saisir le dessin. Al LEGQOULS Dans l'embryon, la lame de droite du feuillet viscéral descen- dait vers le côté droit du canal digestif, la lame de gauche au côté gauche, et les deux lames, se reliant au-dessous du canal, achevaient le pli dans lequel il repose. Outre cette ligne princi- pale de plissement, on en trouve plusieurs autres dans l’animal développé. Le foie, la panse stomacale et la rate se sont fait leurs gaines séreuses aux dépens de la lame de gauche, tandis que la vésicule l’'emprunte à la lame de droite. Mais les circonstances de l'enveloppement sont très-diverses pour l'estomac et surtout pour la rate (1) ; une simple imvagination s’est opérée, et ces organes, plus ou moins étroitement serrés dans leur fourreau, n’ont pas, à proprement parler, de mésentère autreque celui de la masse vis- cérale prise en totalité ; le foie, au contraire, en possède un consi- dérable, un repli du deuxième ordre se fait pour lui dans la paroi du repli du premier ordre où primitif. C’est une double lamelle qui, partant du hile, va, sans torsion ni changement de plan, se porter jusqu’à la paroi gauche de la cavité du repli primitif sur une largeur très-mégale ; en avant, la tête du foie (2) affleure la surface de la paroi sur une ligne assez étendue; le tronc sus- hépatique très-court circule tout entier dans l'intervalle du repli prinntif, ainsi qu'une veme de fonction douteuse, que je crois une veine porte surnuméraire, tandis qu'au centre du foie son mé- sentère propre alteint près de à centimètres (3). En face et au même niveau, mais dans la paroi opposée, la vésicule s’est construit son logement membraneux. L'enroulement de l'intestin produitdes changements d’un autre ordre ; je m'occuperai de la première spire que le pancréas ne dépasse pas, mais, du reste, les mêmes explications convien- draient ailleurs. Formé par l'angle du duodéouin et l'intestin, ce coude tourne sa convexité vers la droite, en se courbant, non dans le plan du repli primitif, mais dans le plan perpendiculaire. Or les deux parois du repli primitif se retrouvent dans ce dernier plan, formant une bride qui assure la fixité du coude. La paroi (4) Première partie, pl. 18, fig. 1. (2) PI. A7, fig. 1. (3) Première partie, pl. 18, fig. 4. ARTICLE N° 6. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 15 droite arrive au bord droit et convexe de l'intestin, s'y réfléchit comme une courroie sur un tambour, et, passant en dessous du coude, forme la face inférieure de la bride; la paroi gauche va toucher le bord gauche et concave du tube, y prend seulement attache, le dépasse, et par ce prolongement constitue la face supérieure de la bride occupant l’anse; les deux lames inférieure et supérieure se rejoignent après cela suivant la corde de l'arc intestinal. Ces deux lamesdroite et gauche, supposées jusque-là séparées, se soudent dans certaines régions, et ailleurs se retrouvent distinctes chez l'adulte. Elles sont accolées ou forment une mem- brane unique dans toute l'étendue des mésentères hépatiques, dans les brides des circonvolutions, dans le repli æsophagien el celui de l'intestin grêle ; mais sur toute la longueur du duodénum les deux faces du repli primitif restent séparées jusqu'à grande distance du canal, et c’est dans l'intervalle que se développent les principales bandes pancréatiques. Il faut savoir encore comment la charpente vasculaire san- guine correspond à ce grand appareil membraneux. Je me suis trouvé ainsi conduit à étudier avec détail le système des veines viscérales, étude facile, du reste, et dont les résultats conviennent à plusieurs Gadoïdes voisins. La veine porte hépatique principale se forme par le confluent des veines mésentériques, de la splénique, de la stomacale, de la veine duodénale, la plus importante pour ce sujet, enfin d’une veine génitale (1). Elle circule entre les lames accolées du mé- sentère spécial au foie (2); arrivée près du hile, à une distance variable suivant les individus, avant de pénétrer dans le paren- chyme, elle se divise en trois branches (3) qui rampent sur la surface dans des sillons plus ou moius profonds, d'apres l'état de développement de la glande. Mais la veine porte principale n’est pas tout entière dans le (4) Je n’ai pas examiné s’il en est d’autres partant des mêmes organes pour se ren- dre directement à la veine cuve supérieure. (2) Première partie, pl. 48, fig. 1. (3) Ibid. 16 LEGQUIS. plan mésentérique secondaire du foie; elle n'entre dans ce plan, par une déviation légèrement oblique et de double courbure, qu'après avoir coulé sur une très-petite longueur dans le plan du repli primitif, c'est-à-dire du mésentère commun à toute la masse et adhérent au dos de la cavité ventrale. Cette partie originaire de la veine porte forme l'élément moven de la grande ligne veineuse du système viscéral. Lorsqu'on ouvre l'animal par le côté droit, on voit circuler obliquement de haut en bas et d'avant en arrière un long cordon veineux superficiel situé tout enter dans la partie soudée du mésentère primitif dont il est la ligne solide. Ce n’est pas une seule veine, comme on peut le croire d’abord, mais trois, mises bout à bout; au centre le petit tronçon originaire de la vena portarum, au-dessus de lui la génitale descendante, au-dessous le tronc commun ascendant des mésentériques. ; La soudure des deux parois du repli primitif ne se fait jamais dans la région moyenne qui répond au duodénum beaucoup au-dessous de ce grand cordon veineux ; de sorte que, entre le duodénum et la ligne de suture, est un vide considérable, bien plus grand que l’espace de même origine laissé par les mésen- tères en certains endroits de l'intestin des Mammifères et des Reptiles. La face duodénale qui regarde cet espace donne naissance (1) à la veine duodénale qui monte, adossée à la paroi droite du repli primitif non soudé, et aboutit plus ou moins haut sur le tronçon originaire de la veine porte, ou sur cette veine elle-même. Il est nécessaire de remarquer que la duodénale, si grêle qu'elle soit, se présente comme le centre autour duquel se dispo- sent les vaisseaux et les lignes de plicature et de soudure. Non, sans doute, que cette disposition résulte de l'importance individuelle de la veine, mais à cause des avantages de la posi- tion : le duodénum forme la région topographiquement moyenne et physiologiquement prédominante du eanal digestif, la veine porte est le foyer veineux, quoi d'étonnant de trouver une (1) Première partie, pl. 18, fig. 4. ARTICLE N° à. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 17 importance descriptive supérieure à la ligne veineuse qui Joint le premier à la seconde. Quoi qu'il en soit, sur plusieurs individus, cette veine duodé- nale se compose de deux branches: l’une duodénale; l’autre qui vient du foie lui-même, ou plutôt qui s’y rend et doit proba- blement être regardée comme une veine porte surnuméraire. La branche duodénale est accompagnée par le cholédoque, qui adhère aussi à la paroi droite du repli, et envoie dans le mésen- tère du foie deux hépatiques, dont l’un accompagne la seconde veine porte. Le cystique prend naissance à l'entrée de la gaîne particulière de la vésicule, et se dirige par conséquent vers la droite, laissant passer, entre lui et le foie, ie prolongement du cordon veineux et du mésentère général des viscères (1). La veine splénique très-courte, sortant de la tunique séreuse de la rate, du même côté que le foie par rapport au mésentére primitif, se jette aussitôt dans le tronçon d’origine dela veine porte. Toutes ces veines ont, pour la marche du pancréas, une extrème importance. Celle qui suit manifeste la sienne plus rarement, mais nest pas moins intéressante : c’est la veine mésentérique (2) supérieure, Je la nomme ainsi pour rappeler qu'elle se rend à la partie supérieure de l'intestin grêle, car tous les rameaux mésentériques se jettent successivement dans le tronc continu qui forme la partie inférieure du grand cordon veineux. La veine mésentérique supérieure, ou, pour plus d'exactitude, le rameau mésentérique de la première spire intes- tinale, se rend au tronc portal d’origine très-près de l'insertion splénique, mais elle circule dans un repli mésentérique parti- eulier. Rappelons que la première courbure de l'intestin se fait daus un plan à part, perpendiculaire à celui du mésentère pri- mitif. La veine destinée à desservir avec le coude toute la spire qui vient apres, descend du cordon veineux en se dirigeant d’abord, non vers le coude intestinal, mais vers le centre de la (1) Première partie, pl. 18, fig. 4. (2) PL 17, fig. 4. 18 LEGOUIS. bride membraneuse, et là se subdivise dans ce plan pour fournir desramuscules aux spires situées dans le même plan. Orle mésen- tère principal descend, avons-nous vu, du grand cordon veineux vers le coude lui-même; le tronc, non encore subdivisé de la première mésentérique, est done dans l'allernative ou de trouer le mésentère principal pour en sortir à gauche et y rentrer ensuite dans le plan de la courbure, ou de s’envelopper d'un repli spécial : c’est celte seconde disposition que j'ai trouvée sur les animaux les mieux pourvus de pancréas. Il en résulte que le champ d'expansion de ce dernier se trouve en quelque sorte limité vers le bas, le progrès dans la membrane à travers le repli étant plus difficile que dans le sens parallèle au même repli. Les différentes lames dont on a suivi la disposition, ainsi que leurs lignes vasculaires ou de rebroussement, subsistent plus ou moins complétement dans l'animal parvenu à sa croissance. Le grand mésentère général se retrouve au moins par bandes au-dessus du grand cordon veineux, il est beaucoup plus com- plet sur l’autre côté de cette ligne ; le mésentère spécial au foie, appelé feuillet hépatique à la première ligne de cette descrip- tion, celui de la vésicule, le mésentère intestinal à partir du commencement de l'intestin grêle jusqu'au rectum en arrière et jusqu’au grand cordon veineux en haut, sont en parfait état. Enfin, quant à la chambre intra-mésentérique située au-dessus du duodénum, elle reste assez bien indiquée vers sa partie Intesti- pale et postérieure, et toujours d'autant mieux quand le pancréas est plus développé. Mais quant aux mésentères et revêtements splénique et stomacal, il n’en reste que des bandelettes msigni- fiantes ; la capsule du foie est un peu moins conservée. Ce qui paraît constant dans les phénomènes de destruction des mésentères, c’est l'influence qu’exercent les trajets veineux. Au point de vue, non plus de la disposition, mais de la solidité dans l’ensemble viscéral, les parois veineuses jouent le rôle fondamental. Elles sont la forte charpente ; mais sur cette construction vascu- laire s’échafaude tout un système de débris des anciens mésen- tères, tantôt par des membranes, tantôt par des filets tendineux, ARTICLE N° d. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 19 ou par des ligaments larges, qui, grâce à leur multipheité, sont loin d’être sans conséquence, et représentent encore dans les grands Gadoïdes des linéaments assez faciles à suivre du déve- loppement séreux chez l'embryon. ILest done vrai que l'action prépondérante sur le sens du déve- loppement pancréatique appartient aux veines, car, même lorsque le péritoine intervient pour borner ou supporter les rami- ficationsglandulaires, 1l a besoin pour cela de s'appuyer lui-même sur un Circuit veineux qui lui sert en même temps de limite et d'attache. Tout ce qu'on va voir des formes du pancréas montrera clai- rement, selon moi, l'influence double, mais inégale, qu'il subit. Quoique ces formes, dans le Merlus, soient relativement sim- ples, on en donnerait difficilement l’idée sans mettre l'organe même sous les yeux (1). Je serai done contraint de me repor- ter aux dessins; il le faut d'autant plus, qu'on a besoin d’une précision assez grande. La division dans l'étude des coulées pan- créatiques sera donnée par deux figures qui représentent bien l’organe entier. Cette marche rendra l’exposé plus clair et plus simple, sans que la preuve de liaison entre les causes et les effets anatomiques s’en trouve notablement affublie. Presque toute la parlie visible, et souvent aussi sur les indi- vidus pauvres la majeure proportion des dépendances microsco- piques, sont comprises dans la chambre intermésentérique, au sujet de laquelle il me fallut insister pour cette raison. C’est, je le répète, une sorte de prisme triangulaire horizontal reposant sur sa face étroite constituée par la surface supérieure du duodénum ; les deux autres faces sont les parois droite et gauche du repli pri- mitif plus ou moins détruites; l’arète de l'angle dièdre qu’elles formaient originairement devait suivre à peu près la branche d'anastomose entre les deux veines portes, le tronçon d’origine de la grande en dessous jusqu’à l'embouchure de la mésentérique, la petite tout entière en dessus. De ce côté et à l'opposé, ce prisme se termine probablement, non par des bases planes, mais (1) Première partie, pl. 18, fig. 1, et 29 partie, pl, 2, fig. 4. 20 LEGOUIS. par une ligne de suture. Il n’en reste rien du côté de l'estomac ; mais en arriere, vers l'intestin grêle, on retrouve des traces très- significatives de la disposition primordiale. C'est la ligne de suture au pied du repli particulier à la mésentérique supérieure. Maintenant que le dessin des cireuits veineux et l’histoire des développements lamellaires et ligamenteux qui les accompagnent sont connus, nous pouvons entrer dans l'examen des formes du pancréas. On ne sauraitavoir la prétention d'en dresser une repré- sentation minutieuse; quelques détails choisis suffiront pour faire comprendre avec sa complication la tendance dominante à s’atta- cher aux veines, et la loi qui le répand à partir de là, entre les feuillets, le long des brides ou sur les membranes jusqu'aux replis et aux obstacles capables de l'arrêter. C’est principalement à ce triple point de vue qu'il faut nous arrêter dans l'étude des formes. Je parlerai d’abord des masses fixes et des coulées principales qu’elles émettent. Les digitations secondaires et flottantes d’appa- rition bien postérieure auront à leur tour une mention et une théorie. Le dessin principal (1) représente, au premier plan, deux des masses décrites en commençant, l’intestinale et ia splénique. Le corps supervésieulaire doit plutôt être rapporté à la région duodéno-hépatique; on laperçoit vers ja gauche au-dessous des spires intestinales. Quant au pancréas rubané, il est formé, comme on voit, de nombreuses coulées divergeant de la masse intestinale et centrale. La plus importance de celles qui sont visibles et qui appar- tiennent à la zone figurée, relie la masse centrale à la masse splénique. Ayant son pied sur une des faces du duodénum, celle- ci s’enroule en s’élargissant autour du côté que ce canal présente au foie. Arrivée par cet enroulement à la face opposée à celle d’où elle a son pied, elle émet deux digitations. L'une, celle qui nous occupe, adhère au duodénum, puis à l'intestin grèle, après avoir subi la courbure qui les raccorde, gagnant en épaisseur et (A) PL 47, fig. 4. ARTICLE N° 9. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 91 surtout en largeur, elle fournit, à droite et à gauche, des folioles flottantes. Elle descend ainsi jusqu’au niveau de la masse spléni- que à laquelle elle s’unit par une grosse commissure glandulaire. C'est au-dessous de cette partie qu’on verra, dans le dessin, la veine mésentérique supérieure, totalement dépourvue de matière pancréatique. La raison en esl, comme je l'ai dit plus haut, que cette veine est engaînée dans un repli du feuillet gauche de la gouttière péritonéale. Ce repli forme, à travers la gouttière, une sorte de diaphragme, au pied duquel s'arrête la coulée pancréa- tique. I en résulte, pour cette dernière, un changement de direction, et c'est de là, précisément, que part le courant destiné à la porter vers la masse splénique qu’elle rejoint. Avant de passer à l'examen des autres branches, observons que, dans l'état naturel, l'éloignement des parties n’est point celui que la figure indique; d’une part, les deux troncons de la branche pylorique de l'estomac sont rapprochés, ce qui ramène, en repliant sur elle-même la coulée qui vient d’être décrite, sa portion supérieure au contact de la partie inférieure et splé- nique; d'autre part, l'œsophage ne s'interpose point entre le duodénum et le foie, alors la masse splénique se trouve, par sa face cachée sur la figure, en contact avec les bandes pancréa- tiquesde l’autre zone. Il me semble voir, dans cette contiguïté, avec séparation, des régions d’un même organe qui se relient mutuellement par de longs circuits, plutôt que de se joindre au point où elles se tou- chent par une commissure qui serait si courte ; il me semble, dis-je, voir là une induction probable pour l'influence de la trame péritonéale sur le développement de la glande. Un point mérite encore de fixer l'attention. La branche qui vient d'être décrite n’est soutenue par des veines de gros calibre qu'à ses extrémités; dans son cours moyen, elle n’est en rapport qu'avec des vaisseaux de petit diamètre. Cette bande, pour n'être pas la plus compliquée, se trouve cependant l'uve des plus instructives. A l’origine, le pancréas se réduisait, sans doute, à un ensemble de granules microscopiques reliés à l'intestin par des tubes de Weber qui s'appuyaient sur > SC, NAT., AVRIL 1873. XVIIL 8. =— ART. N° 9, 22 LHGOUES, les canaux de la bile et la veine duodénale. Le progrès en crois- sance de l’animal à nécessité l’amplification de la masse glandu- laire ; d’où l'allongement des canaux, l'élargissement des plaques pancréatiques, puis leur épaississement. Remarquons la posi- tion de la souche primitive : elle est, avec les vaisseaux qui la supportent, adossée à la paroi droite de la chambre intramésen-- térique ; rien ne s'oppose à son développement dans le vide de cette cavité; c'est donc là que le travail de croissance va surtout s’opérer. Mais de quelle mamière? Est-ce principalement à sa naissance sur le duodénum? Non ; mais un peu plus haut, à Pen- droit où les conduits, en s’écartant, permettent à la glande de se faire une base plus large. Elle couvrira done, sur la paroi droite des surfaces de plus en plus étendues, parviendra en hauteur jusqu’à la ligne d’attache des deux feuillets, et ne pouvant faci- lement la dépasser, portera, sur la face opposée, ses expansions ultérieures: telle est l’origine de la branche réflexe et descendante qui la ramène au duodénum, mais sur l'autre face. -_ Arrivée ainsi entre la surface latérale gauche de l'intestin et le feuillet gauche, elle suivra le sillon que forment ces deux parties, soit en avant vers l’appendice, soit en arrière vers la mésenté- rique; mais surtout dans ce sens, parce que c’est là que l'inté- grité des membranes se soutient le plus longtemps. Mais le pli du péritoine propre à la mésentérique supérieure l’arrête encore, la fait dévier et remonter une seconde fois jusqu'au sommet de la chambre, où elle trouve les dépendances de la masse splénique et s’y rattache. Passons à la deuxième grande face de la pyramide duodénale ; sa direction générale la fait aboutir au grand lobe du foie, que la figure représente réduit et coupé. Les sillons qu'on y voit ne sont pas le hile lui-même, mais des prolongements dans lesquels circulent les branches ascendantes de la veine porte unique ou double. Cette expansion en forme de nappe, que le dessin donne tordue sur elle-même, se subdivise vers son extrémité hépatique en deux feuillets inégaux, terminés en pointe l’un et l’autre; ils se superposent à leur naissance, puis se séparent : le plus voisin du ARTICLE N° 6. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 25 duodénum, après avoir touché la branche pylorique et l'appen- dice, se porte au hile principal, puis au sillon du bout libre du grand lobe; l’autre, le plus voisin du foie, après avoir engaîné le précédent, s'engage dans le sillon particulier du lobe œso- phagien. L'autre figure (1) représente une des parties de cette même nappe duodéno-hépatique. Prise dans mon premier travail sur un Merlus de pancréas médiocre, elle met en évidence le second et le plus important des feuillets qui viennent d’être décrits. Nous y retrouvons, en continuité de tissu avec le ruban intes- tino-cystique, la nappe qui gagne le foie en partant du bord de notre demi-anneau infra-duodénal. Ce ruban peut être consi- déré comme une émission latérale de la même nappe vers la veine porte et les canaux biliaires. La jonction de la nappe du grand lobe avec le ruban allant à la vésicule se fait par la masse centrale elle-même. Une des arètes de la pyramide se porte vers la vésicule; l’autre, eu s'élargissant et s'aplatissant, con- stitue la nappe qui rejoint le grand lobe. Les sillons du foie, en mème temps qu'ils adhèrent aux lames mésentériques, reçoivent donc avec elles et entre elles, dans la presque totalité de leur étendue, les expansions latérales centrifuges de ces nappes. La force d’envahissement de la glande est si considérable dans cette région, que l’on trouve toujours des fusées pancréatiques rayon- nantsur différentes directions où la trame du mésenière hépatique et du péritoine n’existe plus que par quelques fibres ligamen- teuses, seuls restes de lPexistence originaire ou simplement vir- tuelle de la séreuse. J'ai rarement pu reconnaître dans les autres espèces (sauf le Congre) l'existence de projections pareilles de tissu glandulaire lancées à grande distance sur d'aussi légers fondements. Ainsi se forment en face du rameau descendant, par la pointe de l’appendice vers la zone opposée, des arcades pan- créatiques dont les pilastres reposent sur lappendice encore, mais par l’autre côté. J'ai compté jusqu’à trois arceaux de ce genre sur un poisson bien pourvu de glande et de imésentère, et (4) Première partie, pl: 48, fig. 4. 21 LEGOUES. jamais je n'ai vu ces constructions manquer d'une manière com- plète. Cette dernière membranne glandulaire n’est que l'expansion de la tête du pancréas. Parvenu au sommet de la chambre mésentérique, il remonte en avant la ligne de suture, qu'il n’a pas franchie, appuyé sur la veine porte surnuméraire et sur un biliaire qui circulent dans le repli mésentérique prinntif; les lamelles pancréatiques du grand lobe et du tube de la veine porte normale sont comprises entre les deux faces du mesentère spécial du foie. Beaucoup plus développé dans la première figure (4), ce ruban glandulaire apparait à peine dans lanimal qui fit le sujet de la seconde, autour de la veine porte et de la branche anastomotique. Les lames mésentériques sont sur cette zone duadéno-h épa- tique de la glande fort bien conservées, grâce à l'abondance des vaisseaux ; les ligaments en nombre variable, les uns à droite, les autres à gauche, qui soutiennent sur double rangée les ar- cades pancréatiques de la seconde figure, en sont des débris évidents. Telles sont les bandes principales et primaires pour ainsi dire, issues de la masse duodénale. Avant de faire quelques remarques sur les coulées secondaires et de formation plus récente, parlons des deux autres masses, vésiculaire et splénique, avec leurs dé- pendances. Sur tous les Merlus, et sur la plupart des Gadoïdes que j'ai pu examiner, ces Corps se retrouvent alors même que les bandes dont la description vient d’être faite ne sont qu'à l’état micero- scopique où même n'existent pas encore. Je considère en con- séquence ces trois masses comme des centres de propagation. On ne peut douter qu’à l’époque où la canalisation wébérienne latérale des troncs eystique et cholédoque d’une part, et des veines duodénale, porte et splénique, de l'autre, s'établit pour relier ces masses à l'intestin, 1 n’y ait encore que peu de traces de pancréas diffus. J'ai constaté directement que le tube wébé- (1) Première partie, pl. 48, fig. 4. ARTICLE N° à. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 95 rien de la masse vésiculaire côtoie le cholédoque et le cystique avec la veine duodénale et la veine cystique. La masse splénique joue en effet, comme la masse centrale, un rôle de foyer. De là partent en différents sens des prolonge- ments glandulaires dont le plus notable adhère à la veine gas- trique; je ne l'ai point vu se prolonger jusqu'à l'estomac ; un autre, plus considérable encore en volume, remonte dans une direction perpendiculaire à celle de cette veine; il recouvre l'o- rigine de la veine porte, à laquelle, dans certains cas, il ne s'ac- cole que par sa base, tandis que son extrémité reste libre; aux environs de ce point, la veine porte s'enfonce dans le sac hépa- tique, et là, dans cette zone nouvelle, contracte avec d'autres branches pancréatiques des rapports nouveaux. Î n’y a qu’une traînée glandulaire qui joigne le pancréas massif principal à la masse de la vésieule. C’est une languette, de bords très-irréguliers, mais qui s'appuie invariablement sur la veiue duodénale et sur les vaisseaux biliaires ; elle suit les rameaux de la veine et les troncs des seconds vers la vésicule et vers le foie. Très-épaisse lorsqu'elle se détache du bord de la pyramide qui constitue la masse centrale, elle s'amineit d’une manière graduelle, mais rapide, s'étale, puis se rétrécit, et n’est plus en général, à la racine de la vésicule, qu'une mince et large lamelle, un cordon étroit, où même un système peu abon- dant de filaments parallèles. Elle conserve plus ou moins cet aspect sur la vésicule elle- même, la recouvrant en totalité ou en partie d’un mince revête- ment glandulaire qui, sur les pièces fraïches, tranche vivement par sa couleur blanc rosé sur le vert foncé de la capsule gonflée de fiel. Souvent l'apparence est différente, et] y reviendrai. Mais ce que je dois constater tout d'abord, c'est la certitude de la continuité du tissu jusqu’à la masse du fond de la vésicule. Lorsque la membrane pancréatique atteint sur la vésicule son maximum de ténuité,encore est-il qu’elle se renfle suivant deux directions placées à l’opposite l'une de l’autre dans un même méridien du sac vésiculaire. D'ailleurs on remarque que la masse du sommet présente toujours deux cornes, et embrasse le fond 26 LEG OURS. comme un croissant. Les deux traînées de matière pancréatique aboutissent précisément à ces angles terminaux, de part et d'autre du pôle de la surface eystique. Avant de passer à l’autre partie de la description, que con- clura-t-on de l’ensemble des faits déjà connus? si ce n’est que l'influence essentielle primordiale appartient aux veines, et que la disposition des mésentères prend ensuite sa part dans la di- rection et la Himitation des coulées issues de traînées circum- veineuses primitives. Nous allons voir maintenant se caractériser l'influence des lacunes et des formes interstitielles entre les viscères. Elle apparaît dans les coulées secondaires et sur le dévelop- pement quant à l'épaisseur des masses préexistantes qui en accompagne la formation. Vers l'endroit où le duodénum s’ajuste à l'intestin grêle, la branche primaire recourbée qui Joint les masses centrale et splénique, en se recourbant pour monier vers cette dernière, émet un prolongement latéral qui poursuit la direction qu’elle vient elle-même d'abandonner et marche vers la troisième cour- bure intestinale passant en arrière de la traverse formée sas le repli de la veine mésentérique. Ailleurs le bord de ce demi-anneau qui regarde le rétrécis- sement pylorique s’élargit considérablement et donne naissance à une véritable nappe; en s'enroulant autour du duodénum, cette nappe y accole sa face interne, tandis que sa face opposée et externe se modèle sur les parties voisines ; elle en revêt l’em- preinte plus ou moins exacte, et en général ces saillies carénées que l'organe offre dans ses régions les plus fournies répondent à des sillons dans lesquels 1l se couche et où il peut se déve- lopper. Ce bord peut avoir aussi un prolongement d’autre espèce : c'est une bande destinée à rejoindre les divisions du paneréas qui se sont établies dans l’autre zone, entre les feuillets du sac hépatique du péritoine ; à l'origine de cette lanière se trouvent quelquefois (4) des nodules flottants. (DPI A7, he le ARTICLE N° 9. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 97 Du côté opposé, le bord tranchant du demi-anneau se renfle à l’aisselle du rétrécissement pylorique, pousse perpendiculai- rement à sa direction une branche susceptible de bourgeonner elle-même à droite et à gauche des expansions libres. Ensuite il va se fixer au bout de l’appendice, grimpe sur la surface de cet organe, glisse entre sa base et la jonction du rétrécissement avec le duodénum, fait un demi-tour dans le sillon qui se des- sine à ce niveau, etrevient s'attacher à la branche intestinale un peu en avant du point où elle va remonter vers la masse splé- nique. Les digitations flottantes, les bandelettes latérales que pré- sente ainsi l'organe dans les cas d’extrème développement, sont certainement, pour la plupart, postérieures à la résorption des surfaces péritonéales; les feuilles flottantes sont des appendices que l'exubérance de la glande a poussés au dehors des limites lacunaires; la plupart des bandelettes latérales n’existent que grâce à quelque débris ligamenteux qui leur sert d'appui ; quel- ques-unes enfin, comme celle qui s’enroule autour de la branche montante siomacale, auraient dû trouer ou décoller le mésen- tère pour se faire leur place, s'il n'avait été détruit avant leur apparition. J’admets, en résumé, comme trois degrés ou trois périodes dans la succession des causes qui guident le progrès de la glande pancréatique. 4° Avant tout et à l'origine, les veines et les vaisseaux du foie assurent la solidité des troncs wébériens principaux qui partent de la masse duodénale pour la rattacher, à longue portée, avec les centres vésiculaire et splénique. 2° Les feuillets mésentériques qui, pendant la durée de leur existence, permettent à ces troncs wébériens de s’entourer par deux franges d’un tissu glandulaire latéral, et à certaines bandes primaires importantes de relier les masses, indépendamment des irajels vasculaires, par des circuits compliqués. 9° La formation de lacunes, qui limite les expansions, force les développements de tissu à se propager sur les débris fibreux, et 28 LEGOUIS. certains épaississements locaux à remplir les interstices et à prendre alors l'empreinte des viscères. Il ne nous reste qu'à examiner de plus près les rapports de la glande avec le foie. Ce dernier organe est comme suspendu au fond d'un sac creusé pour lui dans un enfoncement du feuillet gauche de la goultière primitive. Le parenchyme occuperait le fond du sac dont les bords se soudent après l'avoir enveloppé d'un revête- ment très-aminci. De la jonction des bords résulte une mem- brane unique qui vient, dans l’état naturel, se continuer avec le feuillet gauche, au-dessous du grand cordon des veines, dans la partie qui correspond au duodénum. C'est amsi que Je crois avantageux de se représenter le feuillet hépatique où circulent tous les vaisseaux destinés au foie et dont une sorte d’annexe, ou plutôt de pendant, entoure la vésicule. Ce mésentère aboutit donc au sillon médian de la glande. En conséquence de cet état anatomique, la veine porte, après avoir couru quelque peu dans le plafond de la chambre intra-mésentérique, arrivant au niveau de l'ouverture du sac creusé pour le foie, plonge dans ce sac, et le pancréas la suit, ou plutôt il entre dans le mésentère hépa- tique par un nombre de points plus où moins grand, suivant son propre état de développement, mais toujours à la faveur de la fente que laissent entre elles les deux faces du repli auquel il fournit le feuillet inférieur de la gouttière. Je serais étonné que dans son ensemble la conception des dépendances entre les feuillets hépatique et gastro-intestinal ne fût pas exacte, ainsi qu'elle vient d’être proposée, tant elle semble une conséquence nécessaire des rapports des organes entre eux et avec les nappes membraneuses. Il faut aussi savoir que dans les régions où la trame est continue, le mé- sentère hépatique se compose certainement de deux feuilles entre lesquelles le microscope montre les végétations glandu- laires. Mais quelles sont, du côté du foie, les limites de l'invasion pancréatique? Je regrette de ne pouvoir les assigner. On trouve des acini de cette glande assez avant sur les rameaux de la ARTICLE N° 3, DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 29 veine porte qui courent dans les sillons superficiels de la face interne, avant d'entrer dans la masse de l’organe. Des granula- tions pancréatiques y pénètrent-elles avec eux, entre leur tuni- que externe et la substance hépatique ? Sur ce point, soit que les pièces ne fussent pas assez fraîches, ou pour toute autre cause, l'observation ne m'a rien rapporté. Je ne doute pourtant pas de la pénétration. On ne voit aucune raison de croire que les acini pancréatiques dussent éprouver plus de difficulté pour séparer le parenchyme d'avec les gros troncs veineux qu'ils n'en ont à bourgeonner entre les lames ou dans l'épaisseur du péritoine. D'alleursles coulées qui marchent vers le foie et qui engagent leurs pointes daus les déchirures vasculaires de cet organe paraissent se proportionner en épais- seur et en lirgeur au développement du pancréas, de la même manière que le font les digitations qu'il envoie dans les directions différentes. Il est donc probable que ces trainées hépatiques suivent, quant à leur longueur, la même loi que les autres, et qu'elles s’allongent ou se raccourcissent comme elles, suivant que la glande est plus ou moms achevée. St done les oscillations de leur extrémité et leurs dépendances microscopiques n’appa- raissent pas, c'est que, plongées sous la masse, elles ne sont plus reconnaissables. Enfin, j'ai, dans d'autres espèces (Spare, Carpe, Cyprinus sinensis), saisi le fait d’une entrée dans le foie par Îles granulations glandulaires, et même par des masses pancréatiques d'un gros volume; il est donc certain que quelque chose de semblable se passe ici, et que si même le pancréas ne pousse pas dans le parenchyme des rameaux plus volumineux, c’est parce que la distance du duodénum au foie, plus grande dans les Gradus, lasse un champ plus libre au gonflement des gros troncs pancréatiques dont les extrémités seules franchissent cet espace et atteignent le foie. L'extension dans ce sens se fait d'autant moins que la largeur sur laquelle cette nième nappe pancréatique se déploie, est plus notable. Le foie est très-large ; le sac péritonéal qui le contient et l'entrée de ce sac le sont à proportion : cette ouverture linéaire doit être regardée en effet comme étendue au niveau 30 LEGQUIS. du duodénum, des environs du col de la vésieule du fiel jusqu’à l’extrémité de l'appendice. L'étude microscopique de la partie invisible à l'œil de ce pan- créas laminaire ne m'a rien révélé de particulier. Les cellules glandulaires se sont toujours montrées avec une netteté parfaite ; un grand nombre d’entre elles possédaient leur noyau; chez d’autres, également développées, et aussi distinctes, ce noyau n'existait pas; on reconnaît sur les bords de la lame pancréa- tique, lorsqu'on fait usage d’un grossissement médiocre , la disposition framboisée des acini. En général, ces lamelles pan- créatiques ne renferment pas une seule goutte de graisse. La similitude des cellules du pancréas massif avec celles du pancréas laminaire microscopique est complète; c'est surtout dans le voisinage du foie que j'ai poussé mes recherches ; la lame qui au premier coup d'œil paraît simplement fibreuse, montrait, au microscope, sur la presque totalité de son étendue, des rami- fications du pancréas. Du reste on réussit parfois à faire pénétrer une injection dans certaines parties de cet immense appareil glandulaire. L'un des dessins représente le résultat le plus saillant de l’une des injec- tions. J'ai vu la matière colorée entrer dans les réseaux extrême- ment déliés qui correspondent à la partie atténuée et nucro- scopique de l’organe. Elle se montrait encore, entre les lèvres du sillon d'attache du foie, fort loin des bords visibles du pan- créas; plusieurs fois le courant injecté remonta jusqu'à ces régions pré-hépatiques, et même par plusieurs voies. Il est done établi que toutes ces lames et toutes ces masses forment une glande unique, desservie par un système wébérien dont le développement répond à celui de la glande. La forme disséminée par petites masses en discontinuité de tissu, mais reliées par les canaux excréteurs, est plus rare. Dans les Merlus parvenus à l’âge adulte, c’est le moins bien repré- senté des trois états. Pourtant il n’y manque pas toujours d'une manière complète. Ce sujet me conduit à revenir sur la réserve que J'ai faite à propos du revêtement glandulaire de la vésicule. La matière ARTICLE N° 9. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. >) pancréatique envahit d'ordinaire une portion plus ou moins lârge de la surface de cet organe, mais jamais elle ne la recouvre en entier; or il arrive quelquefois que les bords de la bande pancréatique présentent la disposition disséminée. Elle affecte en ce point une figure plus élégante que nulle part ailleurs. D'ordinaire, les glandules sont disséminées sans ordre, et comme jetées au hasard à travers les surfaces membra- neuses ; ici il en est quelquefois tout autrement. Les canaux wé- bériens principaux qui glissent, l’un en dessus, Pautre en des- sous du sac vésiculaire, envoient sur les faces latérales, de petits rameaux. Ceux-ci sont les troncs où viennent se décharger des conduits en nombre variable, mais ressemblant de tout point aux pétiolules d’une feuille composée. Chacun de ces conduits aboutit à une petite glande. Tous ces grains sécrétoires sont de grosseurs égales, portés sur des pédoncules également longs ; de à, pour l’ensemble, un aspect très-régulier. Cet arrangement symétrique fait quelquefois place, au même endroit, à d’autres formations ; on trouve alors des nodules éparpillés sans ordre apparent. Il n'y a point à douter que les sucs produits par une glande si étendue ne viennent toutefois se déverseren un point wnique du canal digestif, De toutes les bandelettes qui composent le pancréas diffus, une seule s’adosse à l'intestin, mais cette bande n’est que le prolongement d’une face de la pyramide duodénale; et d’ail- leurs la dissection met hors de doute le défaut de communication directe au contact. Enfin, on ne trouve sur la paroi interne de l’intestin dans cette longueur aucune trace d'ouverture ou de papille. La con- tüinuité et l'unité de la glande, étant d’ailleurs démontrées par les observations ci-dessus exposées, il résulte de cette dernière que {oute la glande est un seul et même pancréas. C’est par le pied de la pyramide que se font toutes les communications avec le canal intestinal. Une même papille valvulaire, située dans les plis de la muqueuse duodénale, à 3 ou 4 centimètres du pylore, déverse sur l'aliment la majeure partie des liquides hépatique et pancréatique. Je n'ai pu m'assurer de la multiplicité 22 LEGQOUIS. des orifices à la pointe papillaire; quoique cette éminence se distingue par sa rigidité au milieu des valvules flottantes de la muqueuse, ce genre d'observations est très-difficile. D'après les meilleures, les deux canaux déboucheraient au sommet ur mamelon par des orifices séparés. Dans toutes les espèces, quelle que soit la grosseur des canaux, ils se rétrécissent beaucoup à leur embouchure ; celle-ci se réduit à un point qui, en outre, est complétement masqué, lorsque la glande est au repos, par une disposition valvulaire naturelle des membranes terminales. Mais je puis aflirmer que les tubes cholédoque et pancréa- tique principal s'accompagnent jusqu'au sommet de la papille, et que, s'ils se confondent, ce n’est que là même. Des sections faites dans la papille, à toutes les hauteurs, les montrent accolés mais nettement séparés. Cela ne rend que plus remarquables les faits suivants. D'une part, le mamelon papillaire est parcouru, non-seule- ment par ces deux canaux, mais par deux autres au moins sur l'existence desquels certaines coupes bien faites ne laissent aucun doute. Ces canaux sont les analogues de ce système divergent de canaux wébériens observés sur le duodénum par M. Bernard, et dont j'ai décrit un cas très-simple et très-facile à résoudre dans le Bar. Il est à croire que ceux du Merlus se déversent, chacun pour leur compte, dans l'intestin par un orifice spécial; car, les coupes de la papille, de plus en plus voisines du sommet, cessent de montrer ces canaux avant d’avoir manifesté leur rappro- chement du conduit principal; il est donc plus probable qu'ils se Lerminent à part, qu’il ne le serait d'admettre pour ces tubes un rôle d'affluents. Enfin, le dernier fait qui se rattache à ce sujet, plus intéres- sant, selon moi, est dû au hasard. En arrière de la masse prisma- tique, j'ai rencontré un fort gros canal d'apparence élargi, blanc à sa paroi, communiquant avec Pintestin par une ouverture spéciale, située plutôt au pied de la papille qu'au voisinage du sommet, mais à une distance appréciable du cholédoque. C'esthienune ampoulede Weber, car une injection, poussée par ARTICLE N° 3, DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 29 cette ampoule, a pénétré dans un système en réseau de canaux wébériens qui fait immédiatement suite à la partie élargie du canal. La digestion des Poissons, loin d'employer moins de suc pancréatique que celle des Mammifères, paraît donc nécessiter un diverticulum de ce suc; cette ampoule, si constante d’exis- tence, joue un rôle analogue à celui de la vésicule du fiel. Elle accumule les parties de ce liquide qui se produisent alors que leur introduction immédiate dans le tube digestif serait inutile. En tout cas, 1l est certain qu'un organe de peu d'importance, de peu de volume, ne mériterait point une pareille annexe. Cependantil faut remarquer que, dans le Merlus, cette ampoule, probablement plus petite que dans des espèces de taille inférieure, n’y est en rapport qu'avec la moindre partie des tubes de Weber. | Ai-je besoin de dire, en finissant, que je n'ai remarqué aucun rapport entre le développement du pancréas et le degré d'avortement des appendices. Il GROUPE DES MORUES. Petite Morue (Gadus Callarias, L.). L'observation de cette espèce est restée au point où l'avait poussée Brockmann, dont le travail est inséré et traduit à l’article du Merlus (1). III GROUPE DES MERLANS, 4° Lieu (Gadus Pollachius, L.). Le Pollack, que les pêcheurs bretons appelle le Lieu, est plus commun sur leurs côtes que le Merluchius. Mais l'intérêt et la facilité de l'étude sont tout autres dans ce dernier. Le Merlus se présente, en effet, comme le plus avantageux peut-être de tous les Gades, au point de vue qui nous occupe. (4) Brockmann, Loc. cit., p. 18. GJII LEGOUIS. Les Merlans, dont le Lieu forme une espèce, cachent, sous une grande similitude avec les genres voisins, des différences qui réagissent fortement sur la constitution du pancréas. Parmi tous les Gadoïdes auxquels j'étends la comparaison, le Merlus est celui qui joint la plus petite longueur intestinale au système appen- diciel le plus réduit, double condition favorable au dévelop- pement glandulaire; aussi son foie, comme on le remarque au premier COUP d'œil, est-il d’une grandeur démesurée. Cependant la masse viscérale du Lieu, dans ses traits essen- tiels, ressemble beaucoup à celle des Merlus. La disposition relative des viscères est la même, mais les différences secondaires abon- dent, et suffisent pour imprimer au développement pancréa- tique un tout autre caractère. L’estomac, beaucoup plus long et recourbé, communique avec le duodénum par une branche mon- tante plus grêle. Mais ce qui frappe avant tout observateur, c’est l'abondance des cæcums (nombre variable, 25 à 39, ou quel- quefois, sans doute, davantage), beaucoup plus longs en outre que celui du Merlus : l'intestin, très-large dans ce dernier, n’est, sur le Lieu, qu’un étroit canal, compensant, par une longueur plus que double, son infériorité de diamètre; tel qu'il est, cependant, il suit les mêmes courbures, et la disposition générale des lames mésenltériques, COMME le régime des veines, ne sembient pas offrir de modification notable. La veine porte hépatique paraît encore recevoir, sur Ce poisson, une partie au moins du sang de l'organe génital; je n'y ai pas vu ni longtemps cherché la veine porte surnuméraire, sur laquelle j'aurai à revenir. La glande hépatique, trois fois moins volumineuse que chez les Merlus, émet en arrière une languette large très-semblable à celle de quelques Cyprins; la vésicule du fiel et la rate sont au contraire beaucoup plus grandes à proportion; la vésicule a la figure d’un croissant. Peu propre à des recherches primitives, cet animal convenait mieux à une vérification, il la fournit telle qu’on peut l'attendre ; en effet, quoique ses habitudes biologiques soient probablement assez différentes de celles des Merlus, l'égalité des tailles et les grandes similitudes de forme et d'anaiomie générale ne laissent ARTICLE N° 5. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 29 pas douter que ces deux animaux n’aient à peu près les mêmes besoins, et ne soient. comparables dans leur activité digestive. S'il en est ainsi, et que nos remarques soient vraies, quant au balancement entre les volumes pancréatique et intestino-cæcal, on doit trouver iei la glande moins développée (4). Le premier coup d'œil montre en effet qu'il n'y a point de comparaison à établir, la glande diffuse du Lieu est à peine visible, quoique des yeux exercés puissent la distinguer peut-être, dans un certain épaississement des mésentères cireumduo- dénaux; elle paraît se ramasser un peu plus en trois points qui sont très-voisins de ceux où se développent les trois grandes masses du Merlus; la masse centrale étant la plus forte, la masse splénique bien moins reconnaissable. Le cantonnement du pancréas diffus ne me semble pas non plus se faire suivant le même mode; la glande, d'ordinaire microscopique, mais quelquefois presque visible, doit fuser dans la zone mésentérique intestinale plus loin que dans le Merlus ; et ce fait est à rapprocher de la cause qui limite, dans ce sens, les expansions pancréatiques du Merlus, bien autrement considérables cependant. Il est vrai que la longueur intestinale du Pollack donne aux sinuosités, en même nombre que sur l’autre Gade, une plus grande profondeur ; les mésentériques affectent, en consé- quence, une disposition différente, et se trouvent rejetées plus en arrière; enfin, la solidité des soudures, le long des plis mésentériques, est sans doute moins résistantecomme le tissu tout entier du péritoine. Si elle descend ainsi plus loin vers l'anus, la glande remonte moins haut vers le foie ; je ne pourrais cependant pas affirmer que les parois des branches de la veine porte ne soient accompagnées de quelques rubans paneréatiques à leur entrée dans le hile. Les caractères microscopiques du tissu sont aussi nets que sur le Merlus; le Lieu serait même plus avantageux à cet égard, l’animal pouvant être étudié plus frais. (4) Voyez ces raisons à l'article du Scomber Trachurus, L. XNVIL. 36 LÉGOUIS. 20 Colin (Gadus Carbonarius, L.). Ce que je viens de dire du Lieu me dispenserait de parler du Colin, qui diffère moins encore du premier que celui-ei ne s'écarte du Merlus, si cet animal ne donnait l’occasion d’une remarque peut-être importante. Je n’y ai pas vu de veine porte surnuméraire, au moins sem- blable à celle qui, sur le Merlus, se rend de la veine duodénale directement au foie. En réfléchissant sur ce fait, qui aurait besoin d'être vérifié, du reste, sur un plus grand nombre d’indi- vidus, on arrive à douter quant à l'interprétation qu’il convient de donner de ce vaisseau. Est-ce bien une veine porte véritable? Lorsqu'on la voit dans le Merlus se détacher du tronc duodénal pour se porter vers le foie, où elle entre en accompagnant un rameau biliaire, on est aussitôt porté à croire que là, comme chez tant d’autres Poissons, la veine porte est décomposée. Cette conclusion sera même la seule possible pour celui qui ne soup- conne pas l'existence du pancréas diffus. Mais, quand jeus remarqué le cours de cette veine, circulant dans toute sa partie visible à travers le parenchyme pancréatique, se subdivisant dans son épaisseur et s'enfonçant dans le hile avec des dépendances de la même glande, je compris la double idée qu'on pouvait s'en faire. Le pancréas, comme les mésentères où il croît, a besoin en effet de sucs et de vaisseaux nourriciers. Il se sert, en géné- ral, pour cet usage, des veines d'emprunt sur lesquelles se pro- pagent les tubes wébériens, qui lui suffisent lorsque son volume est faible; mais quand il prend, ainsi qu’on le voit sur le Merlus, d'amples dimensions, les capillaires qui lui sont propres pour- raient former, en se réunissant, des canaux comparables à ceux des autres viscères. Notre veine ne serait plus alors qu’un simple conduit de retour portant le sang à la veine porte générale par l'intermédiaire naturel de la duodénale plongée aussi dans le tissu pancréatique. Elle entrerait dans le foie, non en qualité de veine porte chargée d’un revêtement pancréatique adventif, mais d’une manière nécessaire et comme dépendance de ce tissu ARTICLE N° 9, DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 07 qui, pénétrant pour son compte, l’y introduirait en même temps. Si l’on demande quel serait, dans cette manière de voir, le support préalable du pancréas, on en aurait un plus que suffisant dans les biliaires et même dans la seule trame mésentérique. On comprendrait aussi que sur des espèces (Merlan, Pollack, Colin) où le foie, moins développé, s'approche moins au-devant du pancréas, et où ce dernier est en même temps moins étendu, la veine pancréatique n’eût plus raison d’être, ou n'ac- quit pas assez de longueur pour parvenir jusqu'au hile et prendre les apparences d’une veine porte. Quelque chose des mêmes doutes se représente à propos du Belone longirostris. Et, quoique je n’aie pas étudié la Lotte, je ne serais pas étonné si le rameau formant veine porte secon- dare que Rathke y à signalé venait à donner lieu aux mêmes observations. Il pourrait, en général, se faire que, dans plusieurs cas, on eût attribué au système divergent de la veine porte des rameaux faisant en réalité partie du système portal convergent à Utre de veimes nourricières du pancréas. En tout cas, pareille erreur ne serait possible que sur certaines veines de petit calibre, et la multiplicité des veines portes, ainsi que leur résolution en plusieurs troncs avant de percer le foie, n’en demeurent pas moins bien établies, quand même le mode de division devrait subir parfois quelques corrections de détail. Ce point m'a paru trop étranger au sujet principal pour devoir être pris en considération immédiate. 3° Merlan (Gadus Merlangus, L.). Je n’ai presque rien à ajouter au sujet du Merlan, dont je vis quelques individus alors que le système wébérien n'était pas connu, À cette époque, je ne cherchais que les pancréas massifs, les seuls dont l'existence fût soupçonnée; le Merlan présente, comme le Callarias et les autres Gadoïdes, les masses duodénale et vésiculaire reconnaissables sur les pièces bien conservées. Ce serait, du reste, l’espèce qui, par sa petite taille et par l'agencement de son système intestinal, se prèterait le moins SG. NAT. MAI 1879. {XVII 9. — ART. N° 6. 1e LÉGOUIS. à l'observation. Je crois très-malaisé, dans les plus convenables à l'étude, d'y suivre à l'œil les dépendances des masses prinei- pales ; je ne l'ai pas tenté et je ne verrais aucun intérêt à revenir maintenant sur ce point. La figure générale de la masse des viscères est à peu près telle que nous l'avons trouvée chez le Pollack ; les lames péritonéales sont peut-être encore moins complètes et plus faibles : ce qui té- moignerait d'une plusgrande diffusion du pancréas. Rapporté au même volume, le système viscéral du Merlan me semble constitué plus encore que dans les deux autres espèces du même groupe, à l'avantage des tubes et au désavantage des tissus glandulaires. L'intestin, dont les grandes sinuosités ont la même figure que chez le Carbonarius, en admet d’autres secondaires, c’est-à-dire qu'il paraît suivre, en serpentant, les lignes directement parcou- rues chez les espèces du même genre ; le sac stomacal, très-long, doit se contourner, pour trouver sa place; enfin, un système très-abondant de petits cæœcums ramifiés et grêles concourt aussi à la dispersion de la glande diffuse; un foie à lobes tres-inégaux recouvre le tout, il a pour réservoir une vésicule grande, mince et recourbée comme celle du Lieu : il en résulte que la distance linéaire du fond de cette vésicule aux centres paucréatiques duodénaux est considérable ; aussi, lorsque le tissu glandulaire y arrive, sa force d'évolution est-elle épuisée. IV GROUPE DES LOTTES. Loite (Gadus Lota, Cuv.). Si je cite à ce propos l’observation incomplète de Müller (4), suivie de tant d’hésitations, ce n'est pas seulement pour mémoire; le corpuscule qu'il rencontra sous son scalpel, était un pancréas adventif, et l’on comprend bien qu'ayant aperçu quelque chose du canal excréteur, mais non le système wébérien entier, et ne (4) Mülier, Arch, de Meckel, 1840, p. 133. ARTICLE N° de DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 09 retrouvant sur d’autres sujets aucune glandule au même point, il jugeât que le corps était une formation morbide et le caual un lymphatique. y RÉSUMÉ DE LA FAMILLE DES GADOÏDES. Les espèces observées en sont très-nombreuses. Müller étudia, en 1840, le pancréas de la Lotie. Siannius vit, en 1846, deux des masses de celui des Gadus Callarias ; les pages précédentes renferment ce que l’on sait à cet égard sur le Merlan, le Lieu, le Colin et le Merlus. ? Quatre genres ont été étudiés : les Morues par une espèce, les Mérlans par trois, les Merlus par une, les Loites par une. Il ne sera pas inutile de rapprocner les uit comparés. La petite Morue a des appendices nombreux ; le Carbonarius, le Merlan, le Pollachius, en ont de 25 à 30, ou même plus pour les Merlans, à cause d’une ramification plus avancée ; les Lottes portent de 24 à 80 cæcums ; seul, le Merlus n’en a qu’un petit nombre, un d'ordinaire, deux quelquefois, très-courts, coniques, avec arrêt certain de développement : or, de ces six espèces, une seule aussi présente un pancréas diffus visible; et c’est justement le Merlus, dont le système cæcal est insignifiant. La loi de com- pensation se manifeste donc aussi nettement qu'entre les Scom- béroiïdes. Quant aux masses, leur importance relative se prononce aussi dans cette famille, quoique l'indépendance et l’antériorité de leur développement relativement à la partie diffuse soient mar- quées à des caractères moins frappants que chez les Scombres. Le Merlus les à toujours tres-grosses, quel que soit le degré d’avan- cement des coulées diffuses; le genre Merlan paraît les offrir plus ou moins accusées, tandis que la partie diffuse ne se montre presque pas; sur le Callarias, elles ont seules été vues par M. Brockmann, ce qui prouve au moins que le diffus était loin d’avoir l'importance qu'on lui trouve chez les Merlus les moins riches de tissu glandulaire ; enfin, il est aisé de se convaincre, à la 0 LEGOUIS, lecture de la note de Müller, que la glande trouvée par lui, c’est encore la masse centrale de la Lotte. Mais, négligeons le fait concordant fourni par cette dernière espèce moins connue et dont l'organisation s’écarte peut-êtredavantage du type commun, il nous restera encore un phénomène curieux qu'on pourra peut- être formuler ainsi: Dans la même espèce (Merlus) et dans les espèces voisines (Morues, Merlans), certaines masses, très-élot- guées quelquefois du duodénum (masse vésiculaire), préviennent de loin la formation du pancréas diffus, et paraissent avoir une existence indépendante de la sienne. Cependant la continuité des tissus massif et diffus est aussi évidente chez les Gadoïdes qu’elle était clairement brisée chez les Scombres. Par l'aspect de leurs glandes abdominales, les Gades semble- raient se rapprocher des Cyprinoïdes, mais cette ressemblance des organes glandulaires est, je crois, tout à fait superficielle ; elle reconnaît, dans les deux groupes, des causes fort dissem- blables dont la nature s’accuse ici par l'abondance, là par la nullité du système appendiciel. La comparaison de ces deux groupes me parait donc plutôt une preuve du peu de liaison entre la forme du pancréas et les aptitudes générales de lorga- nisation. OBSERVATIONS SUR LES ÉPINOCHES. Epinochettes lisses (Gasterosteus lœvis). C'est par les circonstances, plutôt qu’en vertu d’un dessein déterminé, que j'en vins à examiner ces intéressants petits animaux. La Sardine, le Belec, m'avaient montré la forme micro- scopique et disséminée que le pancréas affecte d'ordinaire dans les espèces de moindre volume; et les difficultés de la recherche sont telles, en pareil cas, qu'il me semblait mal à propos de surcharger mon travail et de consumer tant de jours dans une étude superflue. Il se trouve, contrairement à toute prévision, que sur certains ARTICLE N° 5. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. BA Gastérostées le pancréas est très-volumineux, très-visible, avec une disposition curieuse et exceptionnelle. Il semble, dans ces petits êtres, que la veine porte soit double, celui des deux troncs quiest le plus voisin du duodénum est prin- cipalement formé des veines de estomac et de la tête duodénale. Lorsque le foie dentelé, unilobé et considérable aura été écarté, on apercevra le vaisseau, mais les parois n’ont pas, en général, la couleur ordinaire aux veines. Elles portent des incrustations parfois très-abondantes d’une matière grise ou brune. Dans cer- tainis échantillons de cette espèce, l’envahissement de la substance circumveineuse est si avancé, qu'elle recouvre entièrement les ramuscules issus de la paroi stomacale; la panse semble alors enserrée dans une sorte de griffe à digitations épaisses. Ce tissu se prolonge sans discontinuité vers le foie sur le tronc de la veine porte, et descend, d'autre part, jusqu’au duodénum, par une courte et large languette qui, se dilatant brusquement à son arrivée sur l'intestin, y forme un gros pancréas massif desituation, du reste, un peu variable. Ici encore la trame pancréatique s'engage dans le foie, tout à fait à la facon de ce qu’on trouve chez les Cyprinoïdes, surtout dans les plus petites espèces. Il n’est besoin d'aucune précaution pour apercevoir ce tissu ; quant à sa constitution, 11 faut avoir recours au microscope. C'est encore une glande lymphatique et pancréatique absolu- ment semblable à celles du Merlus et des Pleuronectes. L'intérêt qu'on doit, ce me semble, attacher spécialement à cette observation dérive de la petitesse du poisson. Il devient en effet probable, d’après cela, que la forme microscopique disséminée qu'on trouve presque toujours chez les petits animaux n'arien de bien caractéristique: dans lesÉpinochettes, la distance du foie à l'intestin sur le trajet veineux décrit ici n’a qu’une longueur incomparablement plus petite que la portée des mêmes vaisseaux sur les A/herina presbyter, les Sardmes ou les Cypri- nopsis. De plus, les Gastérostées paraissent tout à fait dépourvus de mésenteres; telles sont, sans aucun doute, les causes fort simples d’une accumulation de matière en masse plus compacte. 42 LEGOUES. Le progrès lout à fait insolite du pancréas sur le réseau veineux stomacal résulte aussi de la même influence, accrue de la proxi- mité par rapport aux centres duodénaux, de la division de la veine porte. Famille des MUGILOIDES. 40 Mulet (Mugil Capito, Guv. et Val.). . La famille des Mugiloïdes n'avait jamais été examinée, quant aux glandes abdominales, aussi l’ai-je travaillée avec quelque soin. Elle fournit un grand nombre de particularités importantes pour le sujet. . L'estomac attire tout d’abord l'attention. L’anatomie de ce viscère est en rapport avec le régime herbivore de l’espèce. L'intestin des différents spécimens que j'ai pu me procurer se trouvait rempli, d’une extrémité à l'autre, par des détritus végé- taux. L'esiomac, en conséquence, se divise en deux parties fort distinctes. Un premier réservoir triturant, véritable gésier mus- culo-cartilagineux, se reconnait à ses parois épaisses de 2 cen- timêtres environ ; la face interne, tapissée d’épithélium dur et corné, se plisse en lames résistantes et rugueuses. A l'extérieur, cet appareil à la forme et la grosseur d’un oignon, à la suite duquel un rétrécissement brusque marque le pylore. Cette dimi- pution de diamètre ne porte que sur l'épaisseur des couches pariétales, la lumière du conduit ne s’en trouve point intéressée. L'autre partie de l'estomac est membraneuse, extensible. C'est un ventricule à parois d'épaisseur normale, qui fait suite au gésier et se termine en pointe. Des réactions digestives impor- tantes se font-elles dans cette poche? Malgré quelques apparences üurées de la forme de l’organe et de la constitution des mu- queuses, 1l y aurait lieu d’en douter. L’œsophage aboutit entre la partie musculeuse et le cornet membraneux, et la continuité du canal est tellement disposée, qu'obligé de traverser le gésier, l'aliment peut s'engager de là directement dans l'intestin; il se peut donc que le cornet fût, avant tout, une panse ou diver- üuculum alimentaire. ARTICLE N° 9, DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. h3 Les appendices pyloriques, au nombre de sept, varient beau- coup quant à leur taille, Même sur desanimaux paraissant porter tous les caractères de l’état adulte, ces appendices se trouvent fort inégaux. Ils tracent, sur le duodénum, une ligne courbe, mais le dernier d’entre eux n’estguère qu'un simple renflement du tube. L'intestin, égal et gros, gonflé de matières vertes, donne dans l'estomac par un pylore dirigé en haut et en avant, qu’entoure lacouronne des appendices. Il n’est pas indifférent, pour la clarté de ce qui va suivre, de signaler la complication vraiment inimaginable de l’enroulement. L’étonnement qu'elle me causa me conduisit à l'étudier, et j'ai pu, après bien des essais, trouver le fil de ce labyrinthe: la Carpe, si remarquable à cet égard, n’a rien qui soit comparable à un pareil mouvement de lignes viscérales. Un plan sécant perpendi- culaire à la colonne vertébrale rencontrerait une seule fois le duodénum au sortir de l'estomac. Mais, imaginons qu'il se meuve d'avant en arrière, il coupera le tube digestif trois fois, cinq un peu plus loin, puis sept, neuf, treize, onze fois, puis de nou- veau, treize, onze, neuf, onze, puis encore treize, à cause de nou- velles courbures; puis, celles-ci s’éteignant une à une, onze fois, neuf, sept, cinq, trois, puis une seule à l’anus. La vésicule du fiel, de grosseur médiocre, ainsi que le foie, se présente par son fond lorsqu'on ouvre l'animal à droite; elle adhère au foie, qui ne projette qu'un très-petit nombre (2 ou 3 au plus) de conduits biliaires excessivement courts. L'un des individus offrait, dans ses organes hépatiques, une particularité unique et presque étrange. Entre le réservoir vési- culaire, de grandeur ordinaire, et le foie, l’espace était rempli par un second sac analogue à la vésicule, d'une capacité trois fois moindre, à parois épaisses et perforées, du côté de la vésicule normale, par un orifice étroit de communication; le pertuis donne aux environs de l’origine du cholédoque. Le sac surnuméraire reçoit un des biliaires, mais non le second, qui, dans ce poisson, longeait le cholédoque, daus lequel il se jetait. Le confluent se fait à l'entrée de ce dernier dans hh LEGOUIS. l'intestin, presque dans l'épaisseur de la parot. D'autres individus n'avaient rien de cette disposition ; leur vésicule unique, et leurs biliaires, donnant dans le cystique assez loin de l'intestin, lesrap- prochaient de la conformation commune aux espèces connues. J'obtins, sur cette espèce, la plus belle injection du système pancréatique qu’il m'ait été possible de réussir. La préparation avait été faite en ouvrant la masse intestinale par une fente naturelle résultant du mode d’enroulement des spires ; l'estomac musculeux fut d'abord détruit en ayant soin de ne couper aucun vaisseau ; puis l'injection introduite par l’orifice des wébériens dans l'intestin. Ce point, voisin de la papille biliaire, s'en éloigne plus cependant que sur la plupart des poissons décrits. Il est à 2 millimètres environ sur le rang des bouches cæcales, très-voisin de l’une des extrémités de la couronne incomplète que forment ces dernières. L'orifice pancréatique est beaucoup plus grand que celui de la bile. Comme dans le Maquereau, cet orifice donne, non dans une ampoule, mais dans un canal, large à son embouchure et qui se rétrécit graduellement; aussi l'injection réussit-elle toujours. Avant d'en faire connaitre le résultat, parlons du pancréas visible : Variable un peu suivant les individus, 1l consiste toujours en un nombre considérable de masseites situées au voisinage des gros troncs veineux, principalement aux points de confluence. J'ai trouvé sur un individu, à l’angle de la veine porte avec le tronc commun des mésentériques réunies, un gros corps relié à cinq autres graduellement moins volamineux, situés à tous les confluents de veines et veinules voisines. Quant au pancréas microscopique, il est extrêmement étendu et formé d'innombrables glandules. On en jugera par les consé - quences de l'injection. Les mésentères sont à peu près intacis et complets entre les spires intestinales, condition anatomique certainement néces- saire à la vie de l'espèce; car si la fixité de tant de circonvolu- tions n’était garantie, des nœuds et des torsions se produiraient à coup sûr, et causeraient la mort de la plupart des individus. ARTICLE N° 8. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 5 On peut dès lors imaginer combien la membrane mésentérique commune forme de sinus, d’anses et de replis pour aboutir à toutes les parties d'un intestin si contourné. Chacun de ses pro- longements lamellaires est parcouru par une veine, et J'ai vu l'injection apparaître à côté de la plupart de ces vaisseaux. Dans ce poisson, la canalisation wébérienne ne sembla point remonter vers le foie; mais il ne faut pas s'en étonner, l'espace que trouve le pancréas sur les surfaces mésentériques étant plus que suffisant à son épanouissement. Les gros troncs se sont maintenus absolument fixes dans qua- tre injections très-satisfaisantes ; les ramuscules sont un peu plus variables et paraissent du reste indépendants des grosses veines, tandis que le tube principal suit le côté de la mésentérique en général. Leur variation s'accorde avec celle des veinules voisi- nes. On sait que la concomitance n’a rien de rigoureusement nécessaire, et certaines veines peuvent manquer de compagnon pancréatique. Que si dans cette espèce certains canalicules pan - créatiques paraissent ne pas s'attacher à des veines, il ne faut pas s’en étonner, c'est le résultat d’une injection plus pénétrante. Les canaux lobulaires et acineux se trouvent remplis çà et là ; or, jamais ces ramuscules terminaux ne sont, on le comprend, soudés aux veines. Le système vasculaire wébérien gonflé par l'injection se compose, à sa partie périphérique, de filets incom- parablement plus grêles que les réseaux vasculaires sanguins. Ces lignes tubulaires injectées, répandues sur {out le pourtour des longs circuits de l'intestin, paraissent d'abord, en mille en- droits, percer la paroi, et faire communiquer directement les anses mésentériques avec la circonvolution intestinale qu’elles soutiennent ; mais, en examinant avec plus de soin, on reconnait qu'il n'existe rien de semblable. Les ramifications multiples de cet immense arbre wébérien se rattachent à deux troncs qui finissent par se confondre avant d'aboutir à l'intestin. Dans une des injections, ces canaux semblaient plus ramifiés ; le liquide avait pénétré plus finement, mais aussi d’une manière moins générale. N'est-il pas remarquable aussi que les troncs un peu importants se dirigent ordinairement vers les masses LG LEGQUIS,. visibles grosses ou petites ? [n’est guère de glandule appréciable vers laquelle on n'ait vu se diriger un canal, mais le plus sou- vent le gros rameau la dépasse après avoir glissé très-près d'elle. L'étude microscopique a fait trouver dans le voisinage de ces canaux de nombreuses petites massettes qui fussent restées igno- rées à défaut de ce travail. Ine paraît pas qu'il y en ait ailleurs que dans leur voisinage, mais les rapports directs entre les ca- paux et ces massettes n'ont pu être déterminés très-sûrement dans cet animal, desideratum qui ne tarda pas d’être obtenu sur une espèce voisine. Les tubes brillent d’un reflet particulier d'argent. Moins éclatante que dans le Maquereau, l'intensité de la teinte ne serait point assez forte pour les faire suivre sans injection. Les artères aussi renvoient un certain reflet, mais différent, moms métallique et plus régulier ; elles paraissent plutôt rubanées, les tubes wébériens plutôt miroitants. 20 Belec (Afherina presbyter, Cuv.). Pour compléter la connaissance du paneréas des Mugiloïdes, il suffisait, après les observations générales qu’a fournies le Muge, d'étudier avec détail quelques parties du pancréas microscopi- que. L’Athérine blanche convient très-bien à ce propos. Je prendrai de la description qui lui est particulière occasion d'exposer la marche suivie dans la recherche de tous les pancréas disséminés microscopiques. L'intestin, d’une longueur notable sans être extrème, forme un coude superficiel à l'ensemble viscéral, sur la droite du poisson. Ses courbures lui font décrire un cercle, après quoi, reprenant sa direction de l'œæsophage, il marche droit vers l'anus (1). Un lobe du foie recouvre la vésicule ; enfin cette espèce n’a pas d’appendices pyloriques. Dès ma première observation J'a- pereus une petite masse de la grosseur d’une tête d'épingle, paraissant glandulaire, rouge brun, aplatie entre la portion (4) La vessie natatoire se prolonge assez loin vers la queue, au delà de la cavité viscérale. — L’ovaire de quelques femelles était enveloppé dans une membrane d’un noir parfaitement pur. ARTICLE N° de DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. A7 antérieure de la vésicule et la veine splénique descendant à la veine porte. D'abord les préparations mieroscopiques n’ont pas montré la communication avec l'intestin, au moins dans une pleine évidence; enfin il s’en fit trois décisives. L'une d'elles faisait voir un canalicule grêle se dirigeant vers la masse sup- posée pancréalique et s'y attachant. par une de ses branches. Ce ramuscule, large au dixième de la veine porte, est très-facile à distinguer, mais au commencement de ces recherches un doute restait encore possible sur son entrée dans le pancréas et sur la jonction de l’autre bout avec le pied du cholédoque. I est croisé et recouvert par la veine, et de ces supérpositions de lignes résulte une complication qui pourrait faire prendre le change. D'ailleurs, à l'entrée même du pancréas, un vaisseau qui s’ac- cole à la glande passe au-dessus du point et augmente la con- fusion. | Outre cette masse principale, de nombreuses autres petites glandules sont distribuées le long de ce tube, et à son pied. Elles paraissent en dépendre par leur proximité, mais plus encore par certains canalicules linéaires qui, se détachant en clair sur le fond plus obscur de la préparation, se portent visi- blement de la masselte au tube. Toutefois un excès d’exigence faisait souhaiter de nouvelles preuves. Les communications de canaux sont malaisées à constater. Etait-il certain que les cana- licules secondaires observés allassent se terminer au canal pan- créatique. Peut-être pouvaient-ils s'arrêter à la veine? En tout cas quelques-uns paraissaient diriger leur contenu directement vers l'intestin. Pour éclaircir ce dernier point, il fallut une der- nière observation. Un lambeau intestinal fut détaché de la région où s’abouche le canal biliaire, On reconnut aussitôt le canal pancréatique ; à son extrémité de droite, il paraît se bifurquer en deux grosses branches. Plusieurs massettes microscopiques se trouvaient dans Île champ; quelques-unes si près de l’ampoule wébérienne, que la communication devait être directe. Sur quatre qui, plus voisines du tronc principal, furent tres- L8 LEGOUIS. attentivement observées, le canal secondaire était douteux pour deux; le pédoncule de la troisième était déjà très-net; enfin, pour une quatrième, je vis très-distinctement, par un grossisse- ment de 420 diamètres, une bifurcation se faire au tronc; il en naissait un ramusCule facile à suivre, qui par son autre extrémité plongeait dans la massette. Je remarquai dans l’un des animaux l'absence de la masse centrale ; Je conelus par analogie qu'elle devait se retrouver, mais à l’état microscopique. En effet, l'emploi de l'instrument la fit voir à sa place normale. Au point où le pédoncule entre dans la massette, on le voit assez nettement se ramifier, pour peu que la glandule soit consi- dérable; pareille disposition avait été vue dans le Bar. Pour obtenir de semblables préparations, l'animal doit être parfaitement frais ; l’alcoo! coagule les tissus et les rend obscurs, la soude détruit les tubes, etle vinaigre leur donne trop de trans- parence; l’éther peut être d’un meilleur service. I faut isoler la région tout entière avec des ciseaux, sans dilater n1 disséquer, car alors les tubes seraient infailhiblement brisés. On met ensuite sous le microscope, et l'on comprime progressivement la prépa- ration hépatique venant du foie. Un petit élargissement ampulliforme au pied du pancréatique sur l'intestin représente ici la vésicule de Weber. En coupant le groupe des canaux qui se rendent à l'intestin au ras de sa surface extérieure, on aperçoit assez nettement une double ouverture ; l’une d'elles est pancréatique, l’autre biliaire. Le premier des hépatiques se jette dans le cholédoque, tout prêt de l'intestin, et même dans l'épaisseur de ses parois on voit en même temps par transparence la valvule mtra-imtestinale. OBSERVATIONS SUR LES PERCOIDES. 40 Bar (Labrax Lupus, Lacép.). L'æsophage et l'estomac se continuent, dans celte espèce, presque sans différence de diamètre; lestomac se prolonge en cornet, comme on voit dans beaucoup de Poissons, et donne ARTICLE N° à DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 19 naissance vers sa base à un canal relativement étroit qui forme la branche montante. Il se rétrécit encore au pylore ; au delà se fait sentir une dilatation par laquelle commence l'intestin proprement dit. À très-pelite distance du pylore se trouve, au milieu des replis valvulaires qui garnissent intérieurement la paroi, la papille, assez proéminente et très-flasque. À son soMm- met on aperçoit aisément deux orifices, quelquefois peu nette- ment, quelquefois très-bien circonscrits; elle est à la mème distance du pylore que les orifices des cæcums pyloriques, en arrière cependant de l’un d'eux. L'orifice le plus voisin du pylore est celui du cholédoque, mais il y a presque parallélisme. Trés-étroits en haut de la papille, à peu de distance de l’extré— mité ces canaux deviennent au contraire assez larges. Les appendices pyloriques sont au nombre de quatre. La vésicule est logée dans une dépression du bord du foie; son canal reçoit plusieurs hépatiques très-cour!ts. La simple dissection à la loupe permet de reconnaitre Îles canaux de Weber; mais il faut se débarrasser d’abord avec le plus grand soin d'un lacis vasculaire compliqué qui recouvre l'in- sertion intestinale du cholédoque. Ce dernier est volumineux ; en examinant son pourtour, on voit des canaux blancs, très- grèles et très-minces de paroi, presque aussi transparents que le tissu cellulaire voisin. Le faisceau qu'ils composent est fort serré, et part du pied du cholédoque. Le premier Bar en avait quatre, dont l’un, qui s’écarte beaucoup du cholédoque, était bien aisément visible. Il se dirige vers les viscères de l'animal, ce qui me rappela les canaux que j'avais injectés dans le Maquereau ; j'essayai donc de suivre ce tube, et je le vis presque aussitôt s en- foncer dans une masse adipeuse. En la retournant, je vis le tube mourir à l'endroit où il la touchait, apres Y avoir formé une sorte de dilatation, et en ce point se trouvait, noyé dans la graisse, Mais très-reconnaissable à sa couleur rosée, un petit acinus glandulaire placé à l'entrée de la masse graisseuse au point où le tube Y entrait, C'était le premier exemple de dissé- mination que J'eusse reconnu. L'idée d’un système de glandules ainsi disséminées partout devait se présenter, el je me nus à 90 LEGQUES. chercher aux extrémités des autres tubes. Je trouvai bientôt que ces tubes étaient très-courts, et qu’ils venaient aboutir à une masse glandulaire de même couleur rose et de même aspect que la petite, mais dix fois plus grosse; tous les tubes paraissaient s’y rendre, sauf celui de la petite masse qui lui était absolument propre. Cette masse pancréatique principale occupe l’anse formée par le cholédoque, s’abouchant au duodénum. Elle est un peu elipsoïdale, irrégulière, embarrassée dans la graisse, et de la grosseur d'un pois, rosée de couleur et d’un tissu glandulaire identique avec celui de la plus petite; moins compacte que le foie. Depuis j'ai reconnu sous la vésicule un ou deux corps glan- duleux de même apparence, qui sont aussi des masses dissémi- nées de pancréas. La masse principale affecte parfois la forme d’une aggloméra- tion de masses distinctes ayant chacune leur pelit canal. L'une de ces masses était sur un sujet dix fois aussi grosse que les autres. Outre celle-là, j'en ai distingué nettement trois petites; mais il y en avait d’autres encore. Le nombre des tubes wébé- riens directs varie en raison de ceite dissociation des parties. Les canaux pancréatiques arrivent donc séparés jusqu’au pied du cholédoque. Sur le point d'opérer sa fusion avec l’autre, ce dernier devient blanchâtre ; à l’aide d’un fil très-fin on peut con- stater en ce point lexistence d’une petite ampoule qui vient s'ouvrir dans l'intestin. Les parois de cette ampoule sont très- minces, comme celles des tubes pancréatiques ; elle a la largeur du cholédoque qu’elle recouvre tout entier. Au niveau de son sommet, sa plus grande dimension n'a point encore une sec- tion aussi étendue que celle du eholédoque, autour duquel elle dessine un trait mince en forme de fer à cheval. Je n'ai jamais rencontré de branche du canal pancréatique aboutissant au trone principal au-dessous de l'ampoule. La papille renferme à tous les niveaux deux conduits, et rien que deux. Le canal qui se renfle en ampoule est aussi le seul, aucune partie du pancréas ne parait avoir de déversement spécial dans le tube digestif. ARTICLE N° 4, DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 51 Une injection dirigée avec beaucoup de soin par l’oritice intes- tinal de l’ampoule fit apparaître un certain nombre de tubes nouveaux formant un ensemble différent de ceux qui avaient été aperçus jusque-là. Ces tubes marchent non-seulement vers la masse pancréatique principale et le nodule pancréatique isolé, mais ils tendent vers les viscères et certains se prolongent fort loin ; ce sont en un mot les analogues parfaits des tubes injectés sur le Maquereau, divers seulement quant à leur direction ; ils accompagnent encore les vaisseaux, mais Comme ceux-Ci n'ont plus les mêmes rapports, surtout à cause de l’absence de la masse appendicielle ; l'aspect des vaisseaux pancréatiques nouveaux se trouve être aussi tout à fait différent. La graisse dont l'animal était surchargé rendait fort difficile a poursuite des canaux, même injectés. Mais il arriva qu’en examinant une des masses graisseuses, J'en pus dégager un globule glandulaire de la grosseur d’un grain de millet, analogue à celui qui s'était trouvé isolé dans la pièce précédente. S'il était vrai que ce corpuscule appartint au pancréas, dont il avait l'aspect rosé et la texture glandulaire, il devait y avoir un tube, injecté ou non, se dirigeant vers ce point; or 1l s'en rencontra un qui pénétrait en effet dans la masse graisseuse, et qui la traversait avec son injection. Bientôt après un second globule, puis un troi- sième, tous situés dans la même masse graisseuse, mais parfai- tement distincts, et séparés se montrèrent reliés au tube injecté par des ramuscules extraordinairement fins dans lesquels l’in- jection n'avait pas pénétré. Le tube injecté se prolongeait encore au delà, et l’on trouva en effet aue plus loin il y avait d’autres globules glandulaires. La plupart des tubes injectés aboutissaient à des systèmes ana - logues ; mais l’un d'eux, courant en partie à la surface de la vé- sicule, se rendait à la masse voisine, la seconde en importance. L'injection, du reste, n'avait pas pénétré dans tous les tubes; afin de découvrir à travers l’ampoule de Weber la pointe de la canule pour en assurer le jeu, on avait enlevé quelques-uns des vaisseaux qui embarrassent la région. Il ne faut jamais pratiquer 02 LEGOUIS. cette dissection préliminaire, car alors on déchire, soit des glo- bules invisibles, ou la paroi de certains canalicules wébériens, et la pénétration de l'injection se trouve partout compromise. Cependant, même dans les cas où elle se limite très-près du pylore et de l'ampoule, la matière colorée fait apparaître des tubes wébériens d'ordre inférieur à ceux dont on a parlé jusqu'ici. Un affluent de celui qui avait donné ces derniers résultats, très-court et bifurqué lui-même à son extrémité, se trouvait rempli par l'injection ; l’une des branches entrait directement dans une masse graisseuse, je l'ai suivie à travers la graisse. L'autre branche a été prise ensuite. Cette masse graisseuse, portée sous le microscope éclairé à la lumière réfléchie, a fait voir aussitôt que le tube traverse pour se prolonger au delà ; l'injection se retrouvait encore par petits amas granuleux discontinus tout du long de ce tube jusqu'à sa sortie ; mais, en outre, il présentait de nouvelles ramifications d'ordre én/érieur dans l’intérieur de la masse. La poursuite de ces ramuscules du troisième ordre exige l’em- ploi de la lumière transmise ; aussi doit-on porter sa préparation dans l’éther à 20 degrés, où la graisse se dissout assez prompte- ment. Alors l'attention se fixa sur des taches jaunâtres à contour assez bien délimité, qui paraissaient de préférence dans la région parcourue par ces tubes pancréatiques. Elles ont la forme exté- rieure et la disposition intime des glaudes; ce sont des cellules juxtaposées et séparées par un léger stroma de matière conjonc- tive. Je les considérai done aussitôt comme faisant partie du pan- créas. D'ailleurs ce ne pouvait être des globules de sang formant un caillot. Il ne circulait dans cette région aucun capillaire; des amas se présentaient multiples, à contours réguliers, semblables entre eux, affectant, par rapport aux vaisseaux pancréatiques, une dépendance évidente. Ces différents caractères étaient abso- lument inexplicables si l’on y eût voulu voir des épanchements de sang, qui eussent dû laisser, en outre, des traces de la lésion des tissus pour leur passage. Les taches n'avaient de commun avec le caillot qu'une assez lointaine similitude de teinte. La distribution intérieure des parties ARTICLE N° d, a DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 99 dans un amas de globuies est d'apparence fort différente ; l'ine- galité des dimensions du globule et la dissinilitude des modes de groupement y introduisent une irrégularité fort reconnaissable, que la déformation en étoiles granulées des éléments qui se cor- rompent, vient encore, au bout de quelques heures, rendre plus distincte de la régularité persistante des glandes. Ce n'étaient point davantage des cellules de graisse; elles se montraient beaucoup trop petites. Quelques-unes de ces glan- dules, comme si elles étaient sessiles sur le tube du troisième ordre, paraissent s'appliquer contre sa surface. J'ai retrouvé sur d’autres espèces, notamment dans le Trigle, la mème disposition plus nette encore. Ces taches étaient au nombre de quatre où cinq autour du tube principal et de son affluent ; leur communication avec ces tubes se trouva définitivement mise hors de doute, quand j'eus reconnu sur l’une d'elles un conduit excréteur allant au tube. Outre le pancréas compacte et les massettes disséminées, il existe donc un pancréas formé de taches microscopiques, et tous ces canalicules, auxquels ne répond point une masse visible, desser- vent une glandule de cette espèce. La plus grande dimension de ces taches approchait de la limite de visibilité pour l'œil nu. 29 Perche (Perca fluviatilis, L.). Les détails dans lesquels je suis entré à propos du Bar me dis- penseront d'étendre autant l’article qui concerne la Perche de rivière, dont l'examen m'a cependant vivement intéressé. Moindre que dans le Bar, la complication des viscères est encore telle, qu’elle aéfie toute description, stelle ne s’appuie d’un dessin. Mais pour le but qu'on se propose, 1! suffit de savoir qu'un œsophage, relativement ‘large, se continue en un gros cul-de-sac stomacal placé horizontalement tout en bas de la masse viscérale, et dont le foud atteint de droite à gauche le milieu de celte masse, Cet estomac émet en haut une branche pylorique, moitié aussi longue que le eul-de-sac ; elle remonte SC. NAT. MAI 1875. XVIII. 10. — ART. N° d. o{ LEHGQUES. parallèlement à l’æsophage pour aboutir à la moitié de la hau- teur des viscères sur un duodénum porteur de trois appen- dices longs et gros : l’un, vers la droite, va croiser en X avec l'œsophage ; les deux autres se portent horizontalement vers la gauche. Ce duodénum, parvenu en remontant à la croupe de la masse viscérale, se recourbe, puis redescend en arrière. L'intestin forme une $ renversée très-aplatie, oblique de droite à gauche et de haut en bas, dont la branche inférieure s’ajuste au duodé- num, et la branche supérieure aboutit à l'anus. Le foie, caréné en bas, et très-petit par rapport au volume des autres viscères, recouvre en avant et par-dessus l’X appendico- œsophagienne; la vésicule du fiel se tient en haut entre le foie et la courbure duodénale; la rate file le long de la courbure in- férieure de VS renversée. Le premier échantillon soumis aux recherches était entière - ment chargé de graisse et de petite taille; en vain, avec un soin minutieux, Je visitai toutes les bandes graisseuses; elles ne contenaient aucun granule ayant laspect ordinaire aux corps pancréatiques disséminés. La préparation commençait à se dé- composer ; il me fallut m'en tenir provisoirement au corps m- diqué par Brockmann ; Je le trouvai sis peine entre la veine porte et l’origine du tube duodénal ; cette masse paraissait mal délimitée. J'ai reconnu depuis la raison de cet insuccës ; je m'attendais à revoir sur le poisson type de la famille ce que j'avais trouvé si manifeste dans le Bar, tandis que la disposition est toute diffé reute, et les tendances de ce pancréas semblent avoir quelque chose de singulier, presque d’anormal. L'organe se rapporte toujours à l’une des formes générales, la plus commune même, la forme diffuse ; mais le choix qu'il fait entre les veines pour les accompagner est contraire à sa façon d'agir habituelle. C'est d'ordinaire aux environs de la veine splénique qu'il faut chercher les plus gros prolongements : ici cette veine est à peu près comp'étement dénuée de matière pancréatique; mais en compensation, les veines appendicielles sont bordées par des ARTICLE N° 9. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 59 franges glandulaires épaisses. Chacun des trois appendices est ainsi pourvu d'un ruban glandulaire au moins; ces coulées sont très-fortes relativement au diamètre des veines qu’elles accom- pagnent; on voit, s'il est permis de s'exprimer ainsi, l'organe reconnaître trop tard qu'il avait pris des tuteurs insuffisants. La longueur des appendices est pourtant considérable par rapport au duodéoum ; ces trois cæcums, ajoutés bout à bout, égalent à peu près en longueur le grand diamètre de la masse viscérale. Mais pour se donner plus d'extension, plus de carrière, le pan- créas forme des festons, soit à gauche, soit à droite de la ligne suivie par la veine qui, pour prolonger son parcours, se con- tourne et devient presque variqueuse. Ces trainées glandulaires s'appliquent d'autre part d’une manière si étroite à la surface des appendices, qu’un examen attenlif est nécessaire pour s'as- surer qu'elles ne font point corps avec eux. Les rubans communiquent avec le corps central de Brock- mann par une continuité visible de Ussu; c’est la raison pour aquelle ce corps semble de circonscription indécise, lorsqu'on lobserve seul après destruction de ses dépendances, moins épaisses et moins résistantes. La veine de l'appendice moyen a quelques-unes de ses ra- cines sur l'estomac ; le pancréas la suit dans ce sens. La veine porte se subdivise avant de pénélrer dans le foie, dont le progres vers le tronc de cette veine est empêché par la disposition des appendices. Je n'ai trouvé de matière pancréatique, quelque peu aboridante, que sur une seule des divisions de la veine. L'appen- dice qui croise l’œsophage est couché le long d'une empreinte, qu'il forme dans l'épaisseur du foie ; la veine de cet appendice se reud à la veine porte, aux environs du point où se détache la division de cette veine allant au lobe correspondant du foie ; c'esi aussi dans l’aisselle de la jointure, entre cet appendice et le duodénum, que se forme le pancréas principal relevé par Brockmanp, et deux languettes partent de cette masse centrale pour accompagner à àroite et à gauche le rameau veineux dont il vient d'être question. Je vis encore une veine de ce même cæcum, entourée de son liséré pancréatique, se porter au foie 96 LEGOQUIS. d’un mouvement direct, sans avoir rejoint le tronc commun de la veine porte. Les pointes pancréatiques pénètrent avec leurs veines assez avant dans la glande hépatique. Le développement le plus considérable de la partie diffuse se fait entre les deux appendices longitudinaux ; ces deux tubes sont très-voisins, mais une lame péritonéale, de disposition com- pliquée, multiplie entre eux des retournements par ses inser- tions à leur face et sur l'estomac. C'est dans cette membrane que passe la veine gastrique, autour des divisions de laquelle le pan- créas se contourne, comme 1l le fait partout dans cette espèce. La veine porte recouvre le corps pancréatique principal. Il faut, pour le voir dans son intégrité, soulever avec soin, et dissé- quer la veine. Sur une pièce qui aurait suffisamment macéré dans l'alcool, on pourrait désagréger ce petit corps par la tritu- ration, sans détruire les principaux troncs des tubes de Weber ; ils traversent ce corps en assez grand nombre, et peuvent être suivis aisément jusque dans la direction des trainées pancréa- tiques les plus épaisses. Comme dans le Merlus, une de ces traînées forme un collier autour de l’étranglement pylorique. J'ai trouvé la tunique fibreuse de l'intestin traversée par plusieurs perforations dans l'étendue occupée par le pancréas ; ce résuitat est conforme à ce qu'annonce M. Stannius sur la sé- paration des orifices biliaire et pancréatique dans cette espèce ; toutefois je n'ai pu pousser l'examen de ce détail aussi loin qu'il le faudrait. 30 Vive (Trachinus Draco, L.). Je ne me suis point assujetti à reprendre à fond l'examen de ce Poisson ; l’ensemble des autres observations, et spécialement celles dont la Perche et le Bar viennent d’être l'objet, sont plus que suffisantes pour remettre eu valeur le résultat mentionné par M. Staunius dans la thèse de Brockmann. La masse centrale est souvent, comme on l’a vu, chez les Per- coïdes, plus distante qu'à l'ordinaire du duodénum. Que cet éloignement s’exagère encore, et l’on devra prévoir l’impuissan ce ARTICLE N° à. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 57 d’une épreuve conduite par le procédé de M. Stannius pour ma- nifester les communications wébériennes. Cela suffit à faire comprendre les lacunes et les variations de l'opinion de ce savant au sujet de l'espèce qui nous occupe. Je n’en tiendrai donc pas compte, etil me sera permis d’affir- mer, sur la foi de ses propres dissections, que la Vive porte un appareil pancréatique assez ample, disséminé en globules isolés, comme chez le Bar. Famille des MULLES. Mulle (Mullus Surmuletus, Guv.). La forme disséminée parait être commune dans les poissons voisins de la famille des Perches. Le Mullus Surmuletus, dont les viscères sont tout autrement disposés que ceux du Bar, la pré- sente, non pas seule, bien probablement, mais associée au pan- créas en trainées linéaires. Les masses principales, dans ce cas, sont, l’une au fond de la vésicule du fiel, qui est très-longue et très-étroite, l’autre au coude du canal cystique. Celle-ci est notablement plus volumineuse que toutes les autres. Elle se res- serre dans la concavité du coude, et ne peut guère dépasser le volume d'un pois. Outre ces deux pancréas, on trouve quatre ou cinq petites massettes, disséminées autour de l’entrée du cholédoque dans l'intestin. Avec ces parties visibles, il en est d’autres composant un or- gane microscopique, mais dont je ne saurais assigner la dispo- sition ni l'étendue. OBSERVATIONS SUR LES PLEURONECTES. I PLIES, 1° Plie (Pleuronectes Platessa, L.). J'ai recherché d’abord et retrouvé les deux corps indiqués par Brockmann, l’un placé sur la vésicule du fiel, l’autre voisin du 5S LEGQUIS. canal cholédoque, qui, comme l’indique cet anatomiste, débou- che dans l’intérieur et vis-à-vis du rudiment d’appendice, un peu au delà de l’étranglement qui marque le pylore. Ce canal est ici bien pluslong que dans les Cyprinoïdes ; la vésicule du fiel repose sur la partie cardiaque de l'estomac ; ce dernier forme une courbure dont la concavité est tournée vers la droite. C’est ainsi le coude formé par ce repli que franchit le canal cholé- doque accompagné d'un lacis de vaisseaux qui en masquent tout d'abord la direction. Pour arriver jusqu’à lui, il faut aussi dé- truire la rate. Ce canal repose sur le lobe du foie dans les fentes duquel il envoie des rameaux. Un petit corps d'un blanc légèrement rose était, comme le dit Brockmann, accolé à l’ampoule qui accompagne le canal cholédoque et débouche dans l'intestin par un orifice spécial. L'aspect de ce petit corps était celui d’une glandule. I était parfaitement isolé de tout ce qui l'entoure, sauf du côté de l'am- poule. Toutefoisil est peu probable qu'il ÿeût communication entre le corps et la cavité. Car celle-ci, ayant été ouverte, on-n'a pu apercevoir aucune trace d’orifice; au contraire, ce.corps paraissait envoyer deux racines canaliculées le long de la paroi de cette ampoule ; lune d'elles, après avoir gagné la cloison de séparation entre l’ampoule et le cholédoque, descendait jusqu'à l'intestin. Le petit corps supervésiculire de Brockmann s’est aussi re- trouvé. Il paraissait muni d’un canalicule excréteur argenté. Ces corpuscules de pancréas, visibles à l'œil nu, sont suscep- tibles de se former en tous les points où s'irradient les canalicules de Weber; et leur apparition ne paraît être réglée que par le degré de développement de l'organe, et aussi par la place que leur laissent les viscères voisins. Ainsi, dans la Plie, le nodule pancréatique ampullaire n'est pas seul toujours ; il m'est arrivé d'en rencontrer trois collés à l'ampoule : l’un était le nedule or- dipaire ; les deux autres élaient de chaque côté à une assez grande distance, l’un du côté du canal cystique, l'autre à l'op- posé ; tous les trois de dimensions à peu près semblables, le no- ARTICLE N° 9, DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 59 dule ordinaire un peu plus réduit que de coutume, mais un peu plus gros que ses deux compagnons. Cette masse n'est jamais absente non plus dans les Pleuro- nectes. M. CI. Bernard l’a vue sur le Turbot, mais sans oser la rapporter à l’appareil pancréatique. Grâce à l'excellent état d’un sujet étudié au sortir de l'aquarium, je l'ai retrouvée en conti- nuilé de tissu avec le pancréas par une nappe blanchâtre qui recouvrait l'une des faces de la vésicule, et dans laquelle ve- naient se ramifier les vaisseaux de Weber. Dans la Plie, elle forme la masse principale du paneréas visible ; son canal paraît y suivre le cyslique pour aboutir à la dilatation ampullaire : j'ai lieu de croire qu'il se ramifie sur la vésicule, et envoie des cana- licules au hile du foie. L'ampoule prend quelquefois des dimensions très-considé- rables. J'ai été frappé de sa grosseur dans l'espèce qui m'occupe; il m'est arrivé de l’y voir atteignant un volume presque moitié de celui que présente la vésicule du fiel distendue. Brockmann cite également Pampoule de la Plie, mais il ne parait point avoir fait attention à ses dimensions; elles eussent cependant dû l'étonner. Ce renflement joue en effet, à n'en point douter, un rôle semblable à celui de la vésicule hépatique, considérée comme réservoir, Or il existe une disproportion si énorme entre la capacité de cette poche et la petitesse du globule accolé à ses parois, qu'il devait douter de les voir répondre à une même fonction. Si ce grain, qui est réellement pancréatique, compo- sait à lui seul toute la glande, 1l serait un pancréas qui pourrait six à huit fois dans l'espace destiné à emmagasiner seulement l'excès de son produit. N'est-ce pas là une véritable contradic- tion anatomique ? Je n'oserais même pas affirmer qu'il y ait communication directe du corpuscule avec la poche; on peut, dans un certain nombre de cas, distinguer sur les parois de cette dilatation mem- braneuse le trajet d’un conduit spécial descendant à l'intestin. Les parties du pancréas très-voisines de l’intestin ont souvent avec lui leur communication directe par des tubes qui s'abou- chent près de l'orifice du pancréatique principal, si même ils 60 LEGQOUES. pe se joignent pas à celui-ci dans le voisinage de son pied. Le gros tronc se rend toujours aux parties glandulaires éloignées, dont il centralise les produits. Ce dernier, lorsqu'il ne se renfle pas en ampoule, s’élargit toutefois souvent près de sa base à la facon d’un cornet allongé ; c'est ce qui permet l'injection, comme dans le Maquereau, le Mugil, Xe Merlus. Je n'ai pu m'assurer si l’'ampoule est, dans tous les cas, sur le prolongement de l'axe du tube, comme dans la Carpe commune ; ou si elle ne forme pas quelquefois un diverticulum à la façon de la vésicule fellique. 20 Flet (Pleuronectes Flesus). La vésicule du fiel est, comme dans la Plie, rejetée à la partie antérieure de l'estomac, sur lequel elle s'appuie; elle envoie un long conduit à l'intestin, un peu au-dessus du rétrécissement pylorique. Ce cholédoque passe au-dessous de la rate, et s'élargit à partir d’une distance de 4 à 5 millimètres de son insertion sur le duodénum. En cet endroit, il se trouve enchevêtré au milieu d’un lacis de fibres et de vaisseaux; et la dissection, faite avec grand soin avec la loupe de Brucke, a mis en évidence un pett corps gros comme la pointe d’une aiguille, qui paraissait indépendant des parlies voisines, de manière à former dans le réseau vasculaire une substance et un organe à part. À cette même hauteur sem- blaient partir du tronc cholédoque de petits vaisseaux, de part et d'autre du canal. Ce point blanc, à surface lisse, se trouvait encore, comme sur la Plie, dans l’anse intérieure du tube cho- lédoque. La papille terminale de ce dernier dans le duodénum ayant été coupée au ras de la paroi, on ne vit d’abord qu'un seul ori- fice, entouré d’une sorte d’épanouissement du üssu dont sont formées les valvules voisines. faut beaucoup plus de soin pour découvrir un second orifice que le bourrelet charnu tient naturellement fermé. Ces deux ARTICLE N° 3. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. GL ouvertures correspondent à deux tubes qui ont été retrouvés sur toute la longueur du cholédoque, jusqu'au point où, commen- cant à se rétrécir, il reçoit les vaisseaux, dont il à déjà été ques- tion à propos du petit pancréas. Des deux tubes que l’on a pu reconnaître sur le trajet du cho- lédoque, l’un était tout revêtu de tissu pancréatique, et situé, comme toujours, en dedans de la courbure; au-dessus du point où commence la contraction du cholédoque, il cessait d'exister. I n’a pu être démontré que par des sections faites à différentes hauteurs sur la tranche du canal. Quand la section vient d'être opérée à quelque niveau, aueun orifice ne se montre d’abord; mais en comprimant en sens inverse de la pression, on fait apparaître un des canaux; puis, en étirant avec précaution en différents sens la portion de la paroi de ce canal qui paraît la plus épaisse, on fait apparaître le second. La vésicule du fiel, plutôt rose que verte, portait en outre un petit corps ovoïde glandulaire. L'analogie dans les allures des expansions pancréatiques diffuses se soutient donc entre le Ma- quereau et les espèces qui nous occupent ICI. J'ai noté deux rudiments d’appendices, l’un au-dessous, l’autre au-dessus de l'intestin. II TURBOTS. 1° Turbot (Pleuronectes maximus),. Le travail auquel cette espèce a donné lieu fut le plus rapide et le plus productif de toute la durée de mes recherches. Un seul exemplaire suflit à faire connaître la partie importante de l’or- ganisation ayant trait au pancréas. L'animal pesait huit à dix livres ; tiré le matin de l'aquarium, il était encore vivant, tandis que j'observais. La partie la plus intéressante à noter dans la disposition viscé- rale consiste en trois veines mésentériques supérieures, qui se rendent directement par plusieurs rameaux à la région gauche C2 LEGQUIS. inférieure du foie. Elles y entrent par le fond de l'excavation que se fait le bord duodénal postérieur, à la place du sillon de la face inférieure, tel qu'on le voit chez l'Homme. L'une, après avoir réuni en un seul tronc les différents ramus- cules qui partent de l'intestin, divise ensuite ce tronc en deux vaisseaux Inégaux : l'un, très-petit, qui redescend vers la partie inférieure du foie, où il pénètre avec l’autre dans une même scissure ; et un second, plus considérable, qui remonte le long du cholédoque, caché par le pancréas, puis par le foie. Arrivé sous le lobe antérieur, 11 s’unit à d’autres veines mésentériques nées dans cette région de l'intestin pour pénétrer le foie avec elles. Mais ce qui frappe tout d’abord lorsqu'on aperçoit ces veines, c'est qu’elles sont recouvertes d’un enduit blanc, qu'on incline- rait à prendre pour de la graisse. Examiné au microscope, il n'en montre pas une parcelle, pas une seule cellule; l'absence de graisse est absolue. Cet enduit blanc n’est autre qu’un prolongement du pancréas diffus. Il est constitué par une quantité prodigieuse de noyaux lymphatiques très-petits et de grosseur variable, mesurant environ 0"",0001 à 0%°,0005, irréguliers de forme, tantôt ronds, tantôt oblongs ; ces derniers sont les plus volumineux. Quelquefois plus ou moins anguleux, ils rappellent à tous égards les noyaux du pancréas massif chez le Congre ; on en trouve aù milieu de la masse quel- ques-uns qui se distinguent par leur volume, 0"",0009. Tous ces organites sont noyés dans un stroma, que leur abondance rend obscur pour peu que l'épaisseur soit considérable. Lors- qu'on presse la préparation, ces ponctualions deviennent libres en partie, quoique quelques-unes restent encore engagées dans les lambeaux qui se forment. Enfin, de place en place, dans la trame, on rencontre des acini de cellules parfaitement caracté- risées, Ces éléments ont environ 0°",0012 au plus petit dia- mètre. Un peu plus longues que larges, les cellules sont du reste à contours fort réguliers. Leur station, le mode d’aggloméra- tion, la couleur, la réfringence et l'éclat les distinguent des glo- bules du sang. En outre, tandis que les noyaux des hématies sont ARTICLE N° 3. b] DU PANCRIÉAS DES POISSONS OSSEUX, 63 très-gros, ils sont ici le plus souvent tout à fait invisibles; quel- quefois ils se présentent sous l'aspect d’un point un peu plus bril- lant entouré d'une frange légère. D'ailleurs on trouve cà et là, même à l'œil nu, dans l'enduit général blanchâtre, de petites taches dont la couleur est d'un blanc plus mat. Assez peu nombreux aux extrémités des vais- sceaux, ces amas le deviennent de plus en plus, à mesure qu'on remonte plus haut; ils se multiplient extraordinairement vers une région sur laquelle il me faudra revenir. On vérilie sans difficulté que chacune de ces taches.est constituée en véritable petite glande, comme le font les nodules blanchâtres extra- hépatiques de la Carpe. Il existe à l'intérieur, par grandes quantités, des cellules iden- tiques avec celles qui furent déjà mentionnées. Réunies en vési- eules glandulaires, elles forment des amas qui, dans cette espèce, au lieu d’être nus, restent comme engagés dans l'enduit blanc. Ces glandules cellulaires, plongées dans le sein du tissu pro ducteur des noyaux lymphaliques, en renferment eux-mêmes un fort grand nombre. Une couche très-minee de matière blanche, qui n'est autre chose que du tissu lymphatique, recouvre la vésicule. Des tubes de Weber y courent en foule; ils divergent à partir d'un point où se trouve une petite masse cellulaire de blane mat. Ces tubes sont argentés, et aboutissent à des folioles extrèmement nom- breuses, de nature pancréatique. Les différents lobes du foie semblent autant d’expansions folia- cées épaisses à leur base, tranchantes à leur bord, imbriquées, et se superposant en partie les unes aux autres. La surface, presque plane, qu’elles forment par leur ensemble, s'applique sur la paroi viscérale qui offre la forme d’un disque. Entre les feuillets de ces expansions sort un groupe de vais- seaux qui se divisent aussitôt après leur émergence en plusieurs branches. L'une descend verticalement pour fournir ses quatre veines à la dilatation rectale ; une seconde gagne le sillon longi- tudinal antérieur du foie où elle s'engage. Un peu plus loin, cette veine se subdivise, et forme un faisceau vasculaire. Les 6h LEGOUIS. divisions qui en naissent rejoignent, à l'entrée du sillon hépa- tique, les rameaux de la branche supérieure du système déjà décrit à propos de l’autre face du foie. On voit ainsi que la même veine pénètre quelquefois dans le tissu hépatique, gràce aux anastomoses à la fois par plusieurs points différents. Toutes les veines qu'on vient d'énumérer sont recouvertes de l’enduit pancréatique, qui pénètre avec elles au moins jusque dans l'épaisseur des couches superficielles. Une autre veme qui entre dans le foie par le même orifice, et dépend du même tronc que la précédente, est une partie de la mésentérique inférieure. En un troisième point beaucoup plus central par rapport au foie, pénètrent d’autres veines également enduites de pancréas ; elles correspondent par une branche anastomotique avec une de celles du premier groupe. Près du point d’anastomose, cette dernière veine envoie à l’in- testin une série de rameaux noyés dans une grosse masse pan- créatique. Au-dessous de l'intestin grêle se trouvent, cachées par cette partie du tube intestinal, d’autres veines qui aboutissent à la face profonde de cette branche, également recouverte de l’enduit pancréatique; elles forment un système assez compliqué qui paraît être un système gastro-intestinal. Avec ses rameaux in- testinaux el ses rameaux gastriques, il constitue un tronc qui remonte vers la vésicule du fiel, contourne le foie pour y entrer par le sillon antérieur creusé par le duodénum dans la masse hépatique. Quelques veines aussi pénètrent dans le foie directe- ment. Chose remarquable, la veine gastro-hépatique supérieure, qui descend de l’œæsophage vers le sillon, ne paraît pas recou- verte d’enduit au moins dans la partie supérieure, même à son croisement avec les nombreuses veines enduites dont mention a été faite. n’y à point dans ce poisson de veine porte unique concen- trée en un seul tronc avant de pénétrer dans le parenchyme ; le tronc unique ne se constitue pas davantage à l’intérieur, mais ARTICLE N° à. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 65 chacune des veimes qui entre isolément s'éparpille ensuite en un réseau spécial. Le pancréas visible ne pénètre pas très-profondément dans le foie; 1l s'arrête à courte distance, à À ou 2 centimètres environ de l'entrée; il reste toujours adhérent aux veines; il paraît avoir cessé d'exister avant qu'elles aient opéré leur division en réseau capillaire, et s’amoindrit de plus en plus avant de se terminer. Tant qu'il reste reconnaissable à l'œil par sa couleur blanchâtre, la substance du foie ne s’y accole jamais; aux points où la soudure a lieu entre la paroi vasculaire et le tissu hépatique, je n'ai pu constater son existence, mais j'ai la conviction qu'il se retrouve cependant en couche mince, imperceptible à l'œil nu, et, par conséquent, fort difficile à distinguer du tissu du foie. Sur toutes ces parties, l’enduit des veines offre la constitution qu'on lui à reconnue plus haut, à la fois formé d’acini pancréa- tiques et de lacunes Ilymphatiques. Dans la substance blanche qui entoure la plupart des vaisseaux au delà de leur entrée à l'in- térieur des cavités dont la surface du foie est percée pour les recevoir, se trouve une immense quantité de globules blancs libres, et au milieu d’eux des nodules cellulaires ou massettes opaques et mates, avec leurs canaux de Weber nacrés parfaite- ment visibles à l'œil nu. Cette netteté d’apparences se montre surtout aux vaisseaux du plexus vasculaire décrit en premier heu lorsqu'ils arrivent au moment de percer le foie. La masse pancréatique principale offre, comme dans le Merlus, la forme d'une lame épaisse composée de nodosités blanches, cellulaires et de couleur franche. De pareils nodules remplissent dans cette région tout le tissu, serrés les uns contre les autres à la manière des lobules d'une glande ordinaire. Le pancréas massif offre sa plus grande épaisseur au point où le cholédoque entre dans l'intestin ; à partir de ce foyer, il va s’'amincissant dans toutes les directions et se prolonge en tous sens assez loin du noyau central. Il se trouve ainsiconstituer une membrane qui s'appuie par les bords sur toutes les veines précé- demment déerites, le long desquelles une nappe pancréatique envoie des prolongements, 66 LEHGQUIS. Cette couche se maintient très-distincte de la paroi stomacale et intestinale, dont elle se sépare sans dissection ; elle n’est accolée à cette paroi que sur le pourtour de l'insertion cholédoque, d'où elle se prolonge vers la tête duodénale et l'insertion des appen- dices pyloriques, pour venir former autour d'elles une sorte de garniture glandulaire. Dans toute cette partie, elle adhère à la paroi intestinale, sans que ce soit de facon à pouvoir être con- fondue avec elle. Jamais il n’y à pénétration des parois intes- tinales par la substance du pancréas; lorsqu'elle accompagne les veines qui desservent l'intestin, elle finit brusquement en bour- relet au point où la veine devient pénétrante; la soudure s'établit par du tissu conjonctif, mais aucun des éléments pancréatiques ne plonge au-dessous de l'enveloppe fibreuse extérieure au canal digestif. Si la surface pancréatique s'étend le long des veines, c'est que, sans doute, elles lui servent d'appui, le mésentère n’existant sur ce poisson que d'une manière trés-incomplète et discontinue. Le cholédoque circule au-dessous de l'intestin, dans le sillon du foie; il reçoit quelques hépatiques brillants, d'un nacré d'autant plus intense qu'on s'approche davantage du point où ces tubes se partagent dans le foie en rameaux grèles. Tout d’abord ce canal traverse le pancréas en sortantde l'intestin pour luidevenir adhérent plus loin, et supporter dès lors, comme les veines, une couche de tissu pa:créalique. Celle lamelle, très-importante, riche de cellules, large à la base et de plus en plus étroite à son extrémité, reste fixée au cystique jusqu'à la vésicule, à la sur- face de laquelle son prolongement s'épanouit en une couche surtout lymphatique, comme dans le Merlus, mais qui renferme aussi beaucoup d’acini cellulaires. Un canal de Weber nacré, brillant comme ceux du Maquereau, sort du pourtour du cholédoque à son insertion intestinale, et remonte le long de ce canal, envoyant des branches aux appen- dices pancréatiques circumveineux qu'il rencontre, el Jusque dans le foie; il va fournir à la vésicule du fiel un réseau très- apparent. Qu'il me soit permis d’invoquer, en finissant, à l'appui des ARTICLE N° 5. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 67 observations qui précèdent, les paroles suivantes de M. CI. Ber- nard (1) : « Sur le Turbot, où le pancréas est bien distinct en masse » agglomérée sur le côté de lintestin, un conduit nacré qui » pénètre dans l'intestin a semblé n'être d’abord autre chose » qu'un canal cholédoque double. Toutefois il n’a jamais été » trouvé renfermant de la bile, lorsque l’autre en était souvent » rempli; de plus, de l'insertion de ce canal partaient une mal- » litude de ramifications nacrées, très-déliées, communiquant » avec un cloaque à l’orifice du canal pancréatique dans l’intes- » tin, et se répandant dans Pintestin et le foie comme des lym- » phatiques dont la disposition serait incompréhensible dans » l’état actuel de nos connaissances. C'est probablement un appa- » reil inconnu existant d’ailleurs dans des poissons d'espèces » différentes. » Personne ne doutera que ces canaux ne fussent des parties de l'appareil wébérien allant vers le foie; Je n'ai cependant pas vu de canal de Weber brillant, autre que celui dont J'ai parlé. Il en existe partout où se trouve la matière blanche paucréatique ; 1ls pe sont pas tous nacrés, et pour quelques-uns 1l est nécessaire d'employer le microscope. Sur l'animal disséqué par M. Bernard, la majeure partie de l'appareil pancréatique élant sans doute détruite par résorption cadavérique, c’est là ee qui empêcha l'illustre physiologiste de reconnaitre la fonction des canaux argentés. 2 29 Barbue (Pleuronectes Rhombus, L.), Quoique je n’aie pas examiné la Barbue, je crois devoir rap- peler ici que M. CL. Bernard à reconnu l'existence de son pan- créas (2). L'auteur ne donne point de détails, mais analogie ne laisse aucun doute sur la disposition du pancréas dans les (1) Leçons de physiol. expérim., Collége de France. (2) Mémoire sur le pancréas, supplément aux Comptes rendus, 1856, tableau des pancréas connus chez les Poissons, 68 LEGQUIS. Barbues, les Flétans, etc. Ce que je vais dire de la Sole confir- mera encore cette Induction. 111 SÛLES. Sole (Pleuronectes Solea, L.). Je n’ouvre un chapitre spécial à cette espèce que pour men- tionner deux faits de nature à éclairer ce qui précède. Pour le surplus, je renverrai aux descriptions qui concernent les animaux de la même famille. Si l’on se reporte à la relation de Brockmann (1) au sujet du Pleur. marimus, on est surpris d’y trouver un point de désac- cord avec l'observation de M. CI. Bernard. Ce dernier place le pancréas du Turbot vers le pied d'un gros canal perçant l'intestin et allant droit au foie. Brockmann, qui n'a pas non plus reconnu le pancréas dans tout son développement, donne à la masse dont il a eu connaissance la même situation, mais sans parler du gros canal. Dans l'observation que j'ai pu faire du même animal, aussi bien que dans le rapport auquel elle vient de donner leu, ce second canal à toujours été pris pour un deuxième tube cholé- doque ; et, provisoirement, cela me paraît être l'opinion la plus prudente. Cependant M. Bernard y a remarqué l'absence de bile. Ce même conduit n'existait pas dans le sujet disséqué par Stannius, et Duvernoy, qui à étudié avec attention la canalisation biliaire des Pleuronectes, n’en parle pas davantage. Ilest vrai qu'on n'aurait pas beaucoup à s'étonner de voir avorter quelquefois un canal cholédoque redoublé. Cependant remarquons le caractère singulier dece canai qui ne communiquerail point avec la vésicule. Voici, d’ailleurs, ce que j'ai recueilli dans l'examen de la Sole, (1) Brockmann, De puncréate Piscium. Rostock, 1840, p. 16. ARTICLE N° à DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 69 J'avais étudié en Normandie la variété de taille médiocre que l’on pêche sur les fonds de sable à l'entrée de la Seine. Le foie de ces animaux est petit, le pancréas aussi peu consi- dérable, et la loi du parallélisme dans le développement des glandes digestives se soutient dans ce groupe. Le pancréas visible se trouve en conséquence réduit à ses parties centrales et essentielles. I se constitue alors, comme dans le P7, mazrimus, autour d’un point situé, ainsi que le dit Brockmann, entre l'insertion du cholédoque et la tète de l'intestin duodénum; ce sont, en général, de petites masses, en nombre variable, qui se groupent dans cette région, et adhèrent à des tubes de Weber formant un faisceau divergent. Mais tout ce sys- tème s'appuie en général sur un tronc plus considérable qui, parfois, atteint la glande hépatique et quelquefois aussi semble manquer. Quoique mes observations n'aient pas sur ce point un degré de netteté suflisant, Je suis disposé à croire que cette variété d’aspects dépend simplement du progrès de la glande. Est-elle volumineuse, elle atteint l'extrémité du plus long des canaux de Weber et la recouvre; des lors ce der- nier, paraissant se porter du foie à lPintestin, est réputé canal cholédoque surnuméraire; tandis que, si le foie n’est pas encore arrivé à la même période d’accroissement, 1l n’em- piète point sur le canal, ou s'appuie seulement sur là partie invisible : on dirait nécessairement, dans l'hypothèse d'un second canal cholédoque, que ce canal manque dans ce der- Dier Cas. On peut se procurer, en Bretagne, des individus beaucoup plus grands. J'y ai toujours trouvé le foie très-volumineux et le tube intestino-hépatique. D'après cela, je ne serais pas étonné que le gros canal du Turbot et des Soles, considéré jusqu'ici par M. CI. Bernard et moi-même comme uncholédoque, ne füt le principal conduit wébérien servant au déversement des produits du pancréas intra-hépatique. On surprend, dans la Sole, le fait du passage entre le pancréas disséminé et le massif. Dans la variété de la Manche, ie pancréas SC. NAT., MAI 1878, XVIII. 41, — ART. N°3. 70 LEGOUIS. est en massettes disséminées; dans celle de l'Océan, on trouve, au même point, une masse compacte. Le système lymphatique, pour n'être pas aussi abondant en globules sur la Sole que dans le P/. mazünus, s'y trouve encore très-développé. Les aréoles de la trame génératrice des globules, beaucoup plus petites que celles du Maquereau, se montrent avec une régularité plus frappante encore. OBSERVATIONS SUR LA FAMILLE DES SALMONES. I SAUMONS. 19 Truite {Trutta Fario, Siebold). Les viscères abdominaux de la Truite ont une disposition très-simple. Le canal digestif, qui doit servir de cadre à la description, ressemble à une S majuscule écrasée. Il a donc deux courbures et forme deux anses : l’une supérieure, entre une branche horizontale supérieure et une branche moyenne ; l'autre inférieure, entre la branche horizontale moyenne et la branche inférieure. Celle-ei représente l'intestin grêle, elle se prolonge en arrière de l'S en un renflement rectal. La première courbure est due à l’estomac peu dilaté par rap- port à l’œsophage, qui constitue la branche horizontale supérieure de la figure. L’organe stomacal se prolonge jusqu'au milieu de la branche moyenne où, se rétrécissant brusquement, il se raccorde avec un duodénum chargé, dans toute sa longueur, d'appendices nombreux. Cette partie duodénale de l'intestin ne s'arrète qu'au bas de la deuxième courbure. La totalité de l’anse inférieure et la moitié du sinus supérieur sont occupées par la masse des cæcums. La région, à droite de Panse supérieure, renferme le foié, petit et triangulaire, parce qu'ilse moule sur les parties voisines. La vésicule du fiel occupe l’espace entre le foie et la branche moyenne. La rate a la forme d'un fer de flèche dont R pointe ARTICLE N° 3. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. TA est à l’anus et l’échancrure de la base repose sur la courbure stomacale. Le péritoine, représenté çà et là par quelques vestiges membra- neux, serait d'une description aussi malaisée qu'inutile. Bien loin que ce soit lui qui limite l'expansion pancréatique, dans cette espèce il paraît ne se développer guère qu'à Fusage de la graisse et du tissu glandulaire en forme d’épiploons ou de petites franges. Il réunit tous les appendices en une masse très-cohé- rente. Le pancréas, sur des individus d'origines très-diverses, ne se reconnaissait point au premier coup d'œil. Une couche épaisse de tissu adipeux comblait tous les interstices envelop- pant les massettes. Mais quand on a soin de faire macérer la pièce, pendant une heure environ, dans l'alcool à 40 degrés, l’aspect glandulaire tend à se manifester. Certaines régions où l’on ne voyait d'abord que des dépôts graisseux, par le double effet de coagulation et de dissolution qu’exerce l'alcool, se dis- tinguent des traces adipeuses voisines; une teinte rougeûtre y attire plus encore l'attention ; enfin, regardant de plus près, on ne tarde pas à reconnaître les grains pancréatiques, quelques- uns assez volumineux, d’autres plus petits. Ces derniers sont extrêmement multipliés dans certaines régions ; ils y produisent sur l'œil nu quelque chose de l'effet des gouttelettes d'huile dans une émulsion très-fine. On constate immédiatement que, jusqu’à distance à peu près constante d’un centre voisin du pylore, la graisse est parsemée, pénétrée dans toutes ses parties de granu- lations semblables. Leur abondance, s’ajoutant à la vascularisa- tion plus prononcée, lui communique cette teinte qui frappe d'abord le regard. Les tubes de Weber s’aperçoivent aussi par transparence, surtout ceux qui aboutissent aux masses plus importantes ; on les voit se ramifier, se bifurquer dans l'épaisseur des mem- branes. La portion de glande directement reconnaissable par ce pro- cédé est très-étendue. Elle forme un ruban aussi large que le duodénum, qu'il recouvre en marchant versla gauche. Son point 72 LEGOUIS. de départ est, comme toujours, le système des canaux cystique et cholédoque qui circulent dans son épaisseur. Comme toujours aussi, il remonte en s’amincissant jusqu’à la rate et paraît se limiter à la base de cet organe. Dans son parcours sur la surface duodénale, ce ruban rencontre sur ses deux bords les appen- dices pyloriques, et, presque à chacun des intervalles qu’ils laissent entre eux, il envoie une expansion se prolonger plus ou moins loin dass le sillon. La plupart de ces digitations con- tournent le eul-de-sac du cæcum, et l’entourent en se réunis- sant à leur congénère du sillon voisin. Le pancréas arrive ainsi à construire un réseau superficiel dans les mailles duquel sont logés les appendices. Cette configuration est plus frappante sur la masse cæcale de l’anse inférieure. Dans certains sujets, une autre expansion remonte vers le foie ; elle est nécessairement très-courte, les canaux hépatiques n'ayant ici qu'une longueur très-réduite, mais elle est assez épaisse. La vésicule du fiel offre des connexions telles, que je ne les at vues nulle part ailleurs. Une petite bande mésentérique court sur toute la longueur du sac vésiculaire; adhérente au sac par son bord, cette bande accompagne le cholédoque à gauche, à droite elle s'enfonce dans le hile du foie, à peu de distance du point où la veine porte pénètre dans cet organe. Un jet de ma- tière pancréatique s’adosse à cette bande, et cesse d’être visible en arrivant sur la panse de Ja vésicule. La loi générale qui conduit le pancréas à s'appuyer sur les gros troncs veineux n'est pas moins évidente sur cette espèce que sur la plupart des autres. Mais ce qui porterait à croire qu'il ne va demander à la veine rien autre chose qu’un support, c’est que souvent, lorsqu'un filet fibreux, faisant office de ligament, se trouve à sa portée, 1l sy attache aussi. Les appendices pan- créatiques de ce dernier ordre sont ordinairement très-grêles et trèes-courts à cause de la ténuité du fil qui les soutient. La dissection, quelque peu difficile, fait reconnaître que les canaux biliaires font uu long trajet à travers la substance du pancréas; car ils se déversent dans l'intestin avec les conduits a ARTICLE N° 0. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 73 pancréatiques entre les pieds des deux premiers cæcums. Il leur faut, en conséquence, descendre de droite à gauche sur toute la longueur de la demi-branche horizontale. La présence des ori- fices appendiciels rend la recherche de l'insertion de ces canaux très-laborieuse. La difficulté est d'autant plus grande, que l'abou- chement se fait très-près de la valvule pylorique ; l'injection du système wébérien est impossible, et je n’ai pas vu trace de l'am- poule signalée par Brockmann dans le Sa/no Salar. Outre l'orifice principal d'écoulement voisin du cholédoque, je n'en ai pu reconnaitre d’autres, et je pense même que tous les tubes se réunissent en un seul tronc; s'ils ont plusieurs bouches, elles ne peuvent d’ailleurs être que très-voisines de la plus importante, car, sauf sur un très-petit espace autour de ce point, il n’y a pas d'adhérence entre le pancréas et le duodénum, et la dissection prouve bien l'absence de toute voie pour la com- munication. Les rapports du foie avec le pancréas se retrouvent 1c1 tels qu'ils existent en général; mais, tandis que l'introduction dans le foie ne s'effectue ordinairement que par l'extrémité de quel- ques traînées circumveineuses des lames, ici la nappe pan- créatique affleure d’un bout à l’autre du sillon hépatique ; au moins en est-il ainsi chez quelques individus. Cette frange s’avance dans le foie, mais je n'ai pu l'y suivre d'assez près pour en assigner les limites. Les appendices, fort nombreux, se disposent en différentes couches entre lesquelles le pancréas descend ; ces parties pro- fondes de l’organe se relient au pancréas duodénal par une ou plusieurs commissures, dont les plus importantes sont toujours en avant de l'insertion duodénale des canaux pancréatique et cholédoque. Je n'ai pas cru qu'il fût utule de poursuivre, à tra- vers le lacis fibro-cellulaire qui joint entre eux les appendices, les prolongements de ces nombreuses dilatations pancréatiques. Mais un examen microscopique sur les trainées graisseuses, à parlir des extrémités du pancréas visible, dans la direction de la rate, m'a montré, comme l'examen d’autres espèces le faisait présager, l'existence d’une longue dépendance de l’organe, qui 7h LEGQUIS,. fuse aussi dans ce sens. Ce n’est point à la base de la rate qu'il s'arrête, comme la première inspection l'avait fait croire, il va beaucoup plus loin; je l'ai retrouvé tout du long de la rate, si longue elle-même, que par sa pointe elle rase l’anus. J'ai acquis la conviction qu'arrivé lui-même au niveau de la pointe splé- nique, il se réfléchit, et quitte la rate pour revenir de gauche à droite en longeant l'intestin. Ce canal est garni en dedans d’un bandeau graisseux, dans lequel j'ai vu sur le bord des trajets artérlo-veineux certaines grappes microscopiques qui ne pou- vaient être que des corpuscules glandulaires. Mais la pièce était alors un peu altérée, et pour de si grandes distances des centres il est fort difficile d'établir la continuité des tubes excrétoires. Un petit vaisseau, sans doute adventif, descend quelquefois de la courbure stomacale à la veine splénique, sur laquelle s’ap- puie le plus long ruban du pancréas. Il n’est point environné de graisse, mais il supporte des masses pancréatiques, au nombre desquelles s’en trouve une, parfaitement libre et isolée, comme une glande ordinaire et la plus volumineuse de toutes celles que présente cette espèce ; la forme en est lenticulaire et la grosseur celle d’un grain de sésame. Cette petite masse paraît figurer la masse splénique des Gadoïdes. Entre la base de la rate et l'estomac, glisse un lambeau de tissu cellulaire, qui probablement aussi est imprégné de matière pan- créatique. Quelque chose de cet immense organe pancréatique avait été vu jadis par Wagner, mais il passe si brièvement sur ses résultats, que l'autorité de son nom ne suffit pas, dans cette question si con- fuse, pour entrainer l’assentiment de ses contemporains. J'ai plus de peine à m'expliquer l'observation rapportée par MM. Vogt et Âgassiz. Au commencement de mes recherches, j'ai trouvé parfois comme eux, mais dans d’autres espèces, de pa- reilles cavités en forme de sac adhérentes à l'intestin et commu- niquant probablement avec lui; je n’en comprenais pas alors la pature, aujourd'hui j'ai lieu de croire que ce sont des enveloppes fibreuses de certaines massettes pancréatiques voisines du cho- lédoque et du gros tronc wébérien : pareille opinion est d’au- ARTICLE N° 3. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 79 {ant plus vraisemblable, que ces pochettes n’ont jamais apparu qu'après un assez long séjour de la préparation dans l'eau. Mais alors ces poches sont tout à fait vides, et aucune cellule ne serait plus reconnaissable à l'examen microscopique de leurs parois. Tel n’est donc pas l’objet que signalent les anatomistes précités. Serait-ce ampoule de Weber que je n'aurais pas su isoler à mon tour ? Je ne le puis croire, car l’adhérence au cholédoque eût infailliblement appelé l'attention des auteurs. Ce ne peut être non plus le kyste déchiré d’une Hydatide. Jimclinerais donc, en définitive, à me ranger à leur opinion, et à voir dans cet appendice un rudiment de tube pylorique. Quoi qu'il en soit, Je n'ai retrouvé rien de semblable. 29 Saumon (Salmo Salar, L.). M. Brockmann ayant étudié cette espèce, j'ai cru inutile d’y revenir ; l’analogie est trop parfaite dans la disposition des vis- cères, entre le Sa/mo Salar et les autres formes du groupe, pour qu’on puisse douter que les pancréas ne soient constitués aussi sur le même modèle. Il faut noter la grande probabilité que le résultat obtenu par M. Stannius donne encore à cette supposition. Sans doute, le Salmo dont il a fait l’étude n’était plus dans un état de conserva- tion assez parfait; et l’auteur ne pouvait suivre à l'œil les dégra- dations progressives de la glande, à partir des masses principales, et les dépendances que mes études antérieures m'ont permis de retrouver. Comme toutes celles qui ont précédé la connaissance des canaux de Weber, Pobservation de l’habile anatomiste est exacte, mais incomplète. IT CORÉGONES. Corégone houting (Coregonus oxyrhynchus, Val.). Dans le Corégone houting, la disposition du tube digestif, aussi simple que dans la Truite, est un peu différente. Au lieu de 76 LEGQOUIS. représenter une S, 1l est contourné comme une trompette, dont l'embouchure serait à l’œsophage et le pavillon à l'anus. Ia, par suite, encore deux courbures; mais la seconde à pour effet de relever l'intestin et de faire croiser l'œsophage par le duodé- num, auquel fait suite, à peu près à partir da point de recoupe- ment, un intestin grêle rectiligne et étroit. Des appendices très-nombreux forment une masse considé - rable autour du canal inférieur de l'anneau; ils sont plongés dans la graisse qui abonde dans l'animal (juin). Leurs Insertions occu- pent toute la longueur du duodénum, et forment encore deux rangées latérales sur la branche supérieure de ce même anneau, jusqu’au point où il rencontre l'æsophage. Tout le cercle central de la trompe se trouve ainsi rempli par la masse appendicielle, qui déborde en outre les faces de ce disque central par deux bourrelets latéraux, dont l’un fait saillie à gauche, l’autre à droite. La rate, allongée, part du niveau de la courburestomacale pour fuir vers l'anus ; elle atteint à peu près au milieu de la branche rectale. Le foie, petit, n’a que la moilié du volume formé par les cæcums pris ensemble. Presque tout entier à gauche, il fait une légère saillie en avant de la deuxième cour- bure duodénale, reçoit l'œsophage en un sillon tracé sur son bord supérieur, et ne s'avance pas en arrière plus lom que le quart du diamètre longitudinal de l'anneau de lintestin ; le bourrelet postérieur de la masse appendicielle lui fait suite à partir de là. La portion dilatée de l'æsophage qui paraît le mieux repré- senter l'estomac, se trouve à la suite de la première courbure ; elle occupe à peu près les deux tiers de la branche inférieure de l'anneau, le duodénum lui fait suite. De là part, comme dans les autres Salmones, une nappe pan- créatique qui adopte aussitôt la forme diffuse. Contratrement à ce qui arrive d'ordinaire, c’est vers l'æsophage qu'elle prend le volume le plus apparent. Une large membrane cellulaire fait office de lien entre la première zone de l’œsophage après son entrée dans la cavité splanchnique, et la première zone du duo- dénum après le rétrécissement du pylore. Cette membrane ren- ARTICLE N° 3, DU PANCRIAS DES POISSONS OSSEUX. 77 ferme les gros troncs des artères et des veines œsophagiennes et gastriques ; mais entre ces vaisseaux, et de part et d'autre, la membrane est sur une gratide largeur épaissie de tissu pan- créatique. Cette nappe s'étend, gardant son aspect membraneux de haut en bas jusqu'à lœsophage, sur la surface inférieure duquel elle forme une masse glandulaire prismatique, accolée longitudinalement au tube Imtestinal. Sa longueur est à peu près égale à la membrane prise en largeur ; son épaisseur est celle d'un appendice. C’est l'unique exemple d’une massette œæsopha- gienne. La nappe se rétrécit très-brusquement après avoir fourni cette masse, et n'est plus, à partir de là, qu'un mince filet accompagnant à courte distance une veine œæsophagienne ou hépatique. Mais la membrane pancréatique duodénale possède encore d’autres dépendances intéressantes ; signalons les rubans qu’elle envoie vers la gauche de part et d'autre à la veme gastrique. Quand celle-ci est séparée en deux rameaux, chacun d’eux recoit sa division du ruban glandulaire, et ces deux filets demeurent visibles assez avant dans les masses graisseuses, où les deux veines s'engagent avant d'aller plonger dans les tissus qu'elles doivent vasculariser. Une autre expansion plus importante du centre pancréatique s'étale entre la veine gastrique dont je viens de m'occuper et la splénique; mais elle s'arrête bientôt, et n’est plus suivie que d’un pancréas diffus microscopique. Enfin, du côté du foie, on retrouve d’autres prolongements de cette nappe centrale. Entre les appendices s'offrent plusieurs plans veineux dont je viens de parler ; il n'est pas rare de voir certains filets pan- créatiques s'engager à leur suite. Contrairement au cas ordinaire, la nappe pancréatique ne s'attache au duodénum que par son bord; elle renferme le sys- tème des bilaires et la veine porte. Elle est avec l'ensemble de ces vaisseaux couchée sur le duodénum. Les vaisseaux de Weber et le cholédoque entrent très-près les uns des autres dans la paroi intestinale. Il n’y a qu'une veine porte, dont la ramification a lieu dans 78 LEGQOUIS, l'intérieur de l'organe. Comme chez la Truite, la vésicule du fiel, incrustée dans le foie, est rattachée à ce viscère par un ligament qui part du fond du sac vasculaire. Le tissu pancréatique se re- trouve Jusque sur le col de ce sac, et paraît même se répandre sur toute la surface, comme sur la veine porte, qui ne quitte le cholédoque que pour s’enfoncer aussitôt dans le foie. La veine duodénale, qui se détache elle-même de ce point pour se rendre à la courbure du duodénum, possède aussi, vers son origine, sa petite annexe pancréatique. Les parois du cholédoque sont très-épaisses, et comme entou- rées d'une double enveloppe que remplit le tissu pancréatique. En suivant la direction du cholédoque, on arrive, au point où il se déverse dans l'intestin sur une région dela nappe pancréatiqueoù celle-ci prend une épaisseur relativement considérable; ce n’est point sur la ligne de son bord duodénal, mais un peu plus baut ; enserrée entre les appendiees, elle ne peut guère s'épaissir, mais elle compense ce défaut en envahissant jusqu’à certaine distance tous les ligaments, toutes les lamelles cellulaires qui relient les appendices, les empêchant sans doute de se nouer. Lorsqu'on coupe la masse appendicielle perpendiculairement à la longueur des cæcums, ils apparaissent tous par leur tranche, et comme enveloppés dans les alvéoles d'un rayon de cire : ces alvéoles sont du tissu cellulaire épais, et rendu continu par des dépôts pan- créatiques. Il en est ainsi, du moins, dans toute la partie de la masse cæcale qui avoisine les ceutres pancréatiques ; la partie postérieure du système appendiciel, à cause de la direction géné- rale qu'y affectent les cæcums, ne présente pas la même parti- cularité. Quelque incertitude qu’on trouve à évaluer le volume d’un pancréas ainsi divisé, il est certainement supérieur à cinq fois celui de la masse œsophagienne. C’est par sa face externe et supérieure que la nappe principale s’épaissit le plus; l’autre face ne présente de renflement que tout auprès de l'intestin. Cette dilatation sert d'enveloppe à une large ampoule de Weber, qui, située entre le cholédoque et l'intestin, est appliquée sur le premier, qu’elle entoure à la manière d'un ARTICLE N° 3. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 79 croissant ; le sommet de cette ampoule donne issue à des tubes de Weber en grand nombre que je n'ai pu injecter. L'am- poule et le cholédoque débouchent ensemble dans l’intesüin, ou plutôt à l'entrée de l’un des appendices. Les orifices du système appendico-pancréatique n'apparaissent point en effet sur la paroi interne du duodénum ; il faut les chercher sur le pourtour de l'orifice d’un cæcum ; c’est le seul exemple aussi net d’un pareil rapport. Une particularité non moins exceptionnelle se trouve dans le point du conduit duodénal où les sécrétions vont se déverser. Ily a loin du rétrécissement pylorique au cæcum qui reçoit les sucs des deux glandes; le confluent des tubes avec l'intestin se fait vers le centre des Insertions appendicielles. On ne trouvera peut-être pas sans intérêt de remarquer que cette disposition est cependant moins étrange qu'on ne serait tout d’abord enclin à le croire; elle se montre en rapport avec la position relative des viscères. Le duodénum, occupant la deuxième moitié du canal inférieur, se trouve done en dessous de la masse appendicielle; en particulier, lappendice où débou- chent les tubes a une situation ascendante; la pesanteur aura donc pour effet naturel de ramener les sucs digestifs vers le duo- dénum ; c’est aussi par leur propre poids que ces liquides re- monteront jusqu'au pylore, dont le niveau affleure encore plus bas que l’orifice du cæcum où ils arrivent. L'appendice s'ouvre d’ailleurs, comme on le doit penser, au bord supérieur du tube duodénal. Les ouvertures des deux canaux sont très-voisines, mais distinctes ; quoique l’ampoule soit beaucoup plus large que le cholédoque, son orifice paraît bien plus étroit ; 1l est suscep- tible de se dilater aux dépens de son voisin : 1lest donc peu probable que les deux liquides se déversent à la fois en égale abondance. a0 LEGOUIS. ITI ÉPERLANS. Éperlan (Osmerus Eperlanus, Yarrell). La ressemblance des viscères digestifs est très-prononcée dans tous les Salmones; en particulier, P'Éperlan se rapproche trop, à cet égard, des deux espèces précédentes, pour qu'il soit utile de lui assigner une description spéciale. L'avantage que présentent ces espèces de petite taille, c’est de permettre des comparaisons multipliées entre individus. Le système pancréatique offre les mêmes formes générales que dans les grands Salmones; je ne l'ai jamais vu s’enfoncer dans le tissu de la rate, si près qu'il semble en approcher. FAMILLE DES CLUPES. GROUPE DES HARENGS. 1° Hareng (C/upea Harengus, L.). Je n’ai pas eu de Hareng en assez bon état pour pouvoir en faire le sujet d’une observation utile; je n'avais donc, au mo- ment d'aborder les autres espèces de la famille des Clupes, que l'indication fournie par Brockmann (1). Stannius et lui avaient reconnu surle duodénum, non pas au pied du cholédoque, mais à quelque distance, entre l'ouverture de ce canal et la tête duodénale, une petite masse pancréatique communiquant avec l'intestin. (4) Brockmann, Loc. cit., p. 20. ARTICLE N° à DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 81 2° Sardine (CZupea Sardina, Cuv.). Il est aisé de se rendre compte de la disposition splanchnique chez cet animal. A droite, on trouve deux tubes accolés : l’un, supérieur, part du diaphrame pour aller droit à l'anus ; l’autre, au contraire, remonte vers la tête, et, après s'être replié au contact du diaphragme partiel, 1l donne naissance au premier. Ces deux tubes sont donc le prolongement de l’autre ; ils courent du reste parallèlement, mais, nous venons de le voir, de sens inverse. En arrivant au diaphragme et un peu avant de se joindre, ils s'infléchissent à la fois tous les deux de bas en haut, et dans cette région 1ls sont presque complétement recouverts par le foie et la masse des appendices pyloriques. | On commencera par détacher avec grand soin ces deux bran- ches intestinales des masses sous-jacentes, foie et appendices, pour les rejeter en bas; cela fait, on verra la branche montante de l'estomac apparaître en rouge au-dessous des appendices plus blancs ; et c'est alors qu'écartant avec précaution ces derniers du foie, on saisit l’ensemble de la conformation viscérale. La vésicule du fiel se trouve en dessous du prolongement hépa- tique qui remonte sous la gorge du poisson; elle n’est séparée de la cavité péricardienne que par l'épaisseur de ce lobe adhérent à l'æsophage ; elle correspond avec le duodénum par un conduit assez long. Elle doit être en contact par le bas avec les extrémi- tés des appendices pyloriques qui remontent vers le cou, à peu près à la hauteur de la double anse intestinale déjà décrite. La paroi interne du duodénum est percée d’une multitude d’orifices donnant sur les cæcums. Il s'ouvre des appendices jusque dans la cupule du cholédoque. L'ouverture du canal et celle du pancréatique se trouvent non parmi les bouches cæcales, mais sur le bord et en dehors de l'espace que couvrent ces der- mères, et très-près des plus rapprochées du pylore. Ce qui frappe avant tout, c'est un renflement basilaire du con- duit cholédoque ; quand ce renflement, comme tous les canaux, fut devenu transparent par l’action du bain, au centre on trouva 82 LEGQUIS. un petit corps d’une grande blancheur et d'une opacité très- nette. J'ai souvent revu ce corps, qui est un petit pancréas; sur cer- taines préparations il se montre non comme un simple renfle- ment du cholédoque, mais comme un appendice en forme d’ex- croissance. J'ai constaté que cette masse est glandulaire en la soumettant au microscope. L'animal était pêché de la nuit; cependant j'ai vu une masse de cellules de forme très-régulière, arrondies, un peu ovales, blanches, dont le diamètre est environ de 0"*,008, caractère qui les sépare nettement des utricules graisseux ; d’ail- leurs il n’y avait aucune goutte de graisse dans la masse, quoique la température approchât de 28 à 30 degrés. Ces cellules étaient un peu altérées, déformées et pointillées. On observe aussi une seconde variété d'éléments : ce sont des corpuseules en ovale parfait, plus petits encore, en général ; les plus gros, de fort petit nombre, ont la tulle des cellules ordi- paires. Ils réfractent plus fortement les rayons, mais ce n’est point de la graisse; Car, outre qu'ils sont quatre fois plus petits que les cellules adipeuses, ils sont réguliers, ce qui n’a jamais lieu pour celles-là. De plus, ils ont pour la plupart, dans leur masse transparente, un point nucléaire obscur et très-fin. Ces cellules ne sont point réparties dans la masse compacte des autres, mais séparées en général à quelque distance de cette masse, isolées quelquefois, le plus souvent par groupes de sept où huit. Des apparences analogues m'ont été offertes par tous les poissons étudiés après quelques heures de leur sortie de l'eau ; elles répondent à un commencement de dégénérescence grais- seuse des cellules. On trouve une seconde masse principale au fond de la vésicule; elle n’est point reconnaissable ; à l'œil nu, on serait porté à croire que c’est un petit globule graisseux. Sa disposition peut varier dans les détails, mais on la pourra trou- ver en regardant avec une bonne loupe le fond de la vésicule aussitôt après l'ouverture de l'animal par la droite. On y recon- naîtra des cellules glandulaires, régulières, ovaies, mais du reste de dimensions variables ; 1l y en aura toujours un assez grand ARTICLE N° de DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. O8 nombre d'irrégulières; de plus, une foule de petites se rappor- tent par leur taille et leur forme à celles du pancréas voisin de l'insertion intestinale du cholédoque. Daus toute la bande cellulaire passant derrière la vésicule, je ne trouvai que quelques cellules de graisse, aucune dans la région occupée par les cellules glandulaires. Ces dernières, prises dans celte région, ne peuvent être confondues avec la graisse, elles ont un très-petit noyau (0"",0005), s’isolent par la pression dans leur intégrité, et sont blanches et régulières. Même aux endroits où l’on rencontre des masses entières de ces éléments, la régu- larité de leur forme sans bosselure, leur teinte absolument blanche et leur agencement, sont des caractères certains de dis- tinction. Dans une des préparations se rencontrait un vaisseau plein de globules du sang que leur teinte plus foncée et l'irrégularité de l'ensemble font aussitôt séparer. Je profitai de cette circonstance pour faire une étude comparative. Dans la Sardine, les globules sont ovales, à contours très- réguliers et toujours purs, avec un gros noyau difficilement vi- sible, de 0"",0009 sur 0"",00145 environ, qui ne s’aceuse que par une ombre peu intense d'un eôté, un clair pâle de l’autre. Celui des cellules, lorsqu'il existe, est beaucoup plus petit, mais aussi plus dessiné et réfractant bien plus les rayons transmis. Les globules, au contraire, réfractent peu, l’intérieur est à peine plus clair que le pourtour, et le tout fait tache sur le fond, tandis que les cellules ont le centre plus clair que le fond, les contours beaucoup plus noirs, mais moins que la graisse. Les globules s'altèrent beaucoup plus rapidement dans l’eau fortement sucrée; on ne voit plus, après vingt minutes, que des noyaux à la place des globules épars dans le liquide ambiant, tandis que certaines cellules sont encore parfaitement intactes avec leur noyau visible. Ces caractères mieroscopiques s'étendent à d’autres masses dont il me reste à parler. Ces dernières sont absolument invisibles à l'œil nu; elles for- ment un système compliqué, trés-riche, et divergeant à partir. 81 LEGOUIS. d’une petite ampoule de Weber dont l'orifice intestinal est à quelque distance de celui du cholédoque. Dans un seul lambeau mésentérique appartenant au mésentère intestinal, j'ai constaté l'existence de onze aeini : tous avaient leur canal wébérien ; trois de ces ranaux étaient encore adhérents à l’ampoule wéhérienne. Il GROUPE DES ALOSES. Alose (Alausa vulgaris, Guv. et Val.\. Dans cet animal, le foie s'avance fort loin en avant ; il pénètre à peu près sous l’opercule, et la vésicule du fiel elle-même se trouve près de l'épaule : il faut, par conséquent, pour isoler la masse viscérale, soulever l'os de la nageoire antérieure avec les côtes; une partie de l'opercule devra être enlevée en même temps. Ce n'est pas la seule difficulté, ni la plus grande ; les appen- dices, très-nombreux, au nombre de 60 à 70 environ, suivant les sujets, tandis que le Æarenqus n’en porte qu’une quinzaine, gônent plus encore la dissection. Toutefois, dès l'ouverture et au prenuer coup d'œil, on aper- coit, dans le voisinage de la vésicule du fiel, suspendu à des vaisseaux sanguins, un Corps très-distinct du foie dans une exca- vation duquel il paraît reposer, et d'aspect nettement glandulaire. L'examen microscopique confirme cette supposition. Enfin, par une recherche très-attentive, on reconnait que ce corpuscule communique avec l'intestin. À une petite distance, sur la gauche du point où tombe le canal cholédoque, on voit adhérer à l'intestin une petite masse blanche, de la partie extérieure de laquelle paraissent sortir trois canaux, qui, d'abord marchant d'avant en arrière, se courbent un peu plus haut à gauche, comme s'ils étaient destinés à rejoindre le corps dontil vient d’être question. C’est, en effet, ce qui a lieu pour le tube moyen, ainsi qu'une dissection soigneuse Pa fait voir. Cette glandule, pour être la plus grosse de celles que lon ARTICLE N° 3. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 89 trouve en ce point, n'est cependant pas la seule. D'autres gra- nules de même aspect et plus petitsse montrent plus haut, accolés comme elle à la veine qui touche la vésicule du fiel; c’est à ces petits corps que se rendaient les autres canaux observés. La dissection de ces parties est extrèmement dificile. Outre la ténuité des parois, ces canaux circulent dans un lacis de veines et d’artérioles dont l’une croise le cholédoque à l’origine de la vésicule et vient passer sur la petite masse blanche intestinale, semblant toucher l'intestin comme pour se ménager un orifice en ce point, ce qui pourtant n’a pas lieu. Cette petite masse blanchâtre, analogue à celle du Hareng, reposant sur le tube digestif, méritait d’être étudiée, On chercha, en ouvrant le duodénum, la communication mutuelle. La tunique, une fois débarrassée de ses replis valvulaires en cellules d'abeille, montra sur la surface dénudée des éminences blanchâtres qui justement correspondaient à l'insertion sur la face extérieure de la même membrane, du canal cholédoque pour l’une, et pour l’autre de la masse blanche. La tache indicatrice de cette der- mère était de beaucoup la plus grande. Quoique la rupture des canaux m'ait empêché de poursuivre cette observation, je rap- porte l’une de ces marques à l'orifice du cholédoque; l'autre serait, à mOn avis, la réunion, sur une même surface, de plu- sieurs bouches wébériennes voisines. On est gêné dans ce travail par la proximité des appendices, rejetant continuellement sur les points explorés la mucosité filante qui les remplit. Outre la masselte vésiculaire et la duodénale dont je viens de parler, ilexiste encore ailleurs un centre pancréatique de quelque importance. Le foie contourne la masse des appendices en les recouvrant complétement; il vient s'étendre ensuite sur la face droite du système en un lobe épais, qui, après avoir été soulevé, laissera voir un corps isolé et volumineux. Ce corps présente un aspect glandulaire frappant ; il n’a point la couleur du foie, n la teinte de la graisse; quoiqu'il soit entouré de lobules hépatiques, tous restent séparés de lui ce- pendant et reliés à la masse principale, tandis qu'il est tout SC. NAT., JUIN 1875. XVIUL 13, — ART. N° 9. S6 LEGOUS. à fait indépendant et contenu dans une membrane spéciale. À ce corpuscule fait suite, dans le même repli péritonéal, une traînée blanchâtre qui est son annexe, et rappelle la forme allongée des trainées pancréatiques dans l’Esturgeon et tant d’autres espèces. L’attention se porte ensuite sur un certain nombre de petits corpuscules analogues répandus sur les bords des vaisseaux de cette région, mais on ne peui leur trouver, à l'œil nu, de canal excréteur. L'examen, au microscope, fait voir autour de ces corpuscules deux ordres de vaisseaux : les uns à reflets blanchâtres larges et qui sont des vaisseaux sanguins; les autres, beaucoup plus grêles, verdäires comme certaines parties des corpuscules, se divisant, au contact de ces derniers et sur différents autres points, en filaments très-déliés : ce sont les vaisseaux de Weber ayant un peu l'aspect qu'on leur à trouvé sur le Bar. Comme ce fait d’une distinction dans les orifices biliaire et pancréatique est presque spécial à cette famille, dont 1l constitue la particularité intéressante, c’est aussi vers ce point qu’on a fait porter ensuite les recherches les plus suivies. Elles furent extrêmement pénibles. Parlons d’abord de l'orifice pancréatique. Après avoir fait une entaille à droite dans la masse blanche extra-intestinale, un fil fin a pu pénétrer dans une sorte de cavité située à gauche, et qui se prolongeait, a-t-1l semblé, vers la gauche encore, en une sorte de doigt de gant au fond duquel on a reconnu des traces de structure glandulaire. Quand on eut achevé de détacher la masse blanche de l'intestin, on vit qu'elle recouvrait un orifice permeltant d'entrer de dehors en dedans. Cette masse blanchâtre extra-intestinale est donc, où bien une ampoule attenant à un pancréas, comme dans la Tanche ei dans la Plie, ou bien une ampoule de Weber. I y à doncséparation d’abouchements ; mais l'étude prolongée et approfondie de linsertion du cholédoque a fait voir une com- plication plus grande encore. En dirigeant un courant d’eau sur la surface interne de l’in- ARTICLE N° 3, Ve DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 87 testin duodénum pour la débarrasser des impuretés qu'y versent sans cesse les orifices ouverts des cæcums pyloriques, ou qui refluent de l'intestin, je vis, dans un endroit très-voisin de l’ex- trémité duodénale, sur un bourrelet blanc, s'ouvrir plusieurs petits trous qui se refermaient, leurs lèvresse rapprochant, lors- que le courant d’eau cessait; J'aperçus nettement deux orifices de ce genre, très-voisins, sur une ligne transversale, au bord des ouvertures cæcales. En examinant ensuite à la loupe composée, j'ai constaté défi- mtivement l’existence de ces deux orifices. Il m'a semblé aussi en voir deux autres toujours sur le même bourrelet, plus petits encore, apparaissant lorsqu'on dirigeait un courant d’eau sur le prolongement de la ligne des deux premiers. Ces orifices allaient croissant de grandeur d'avant en arrière. Je m'assurai que le premier était celui du canal cholédoque, car, en comprimant la vésicule, la bile sortait par cette voie ; mais, quant au second, je ne trouvai aucune canule assez fine pour y pousser une injection, et Je ne pus rien découvrir des canaux auxquels les trois derniers pouvaient donner accès. Dès lors, sur tous les sujets que je pus me procurer, je m'’atta- chai surtout à l'étude microscopique des orifices intestinaux. Pour les rendre plus aisément perméables à la lumière, je coupai, à petite distance de la membrane intestinale, le faisceau tubu- laire et la membrane dans l'épaisseur de laquelle devaient se trouver les canaux cherchés. Je trouvais d'ordinaire trois trous disposés en ligne droite ; le plus grand donnait dans le conduit biliaire, ainsi qu’il me fut facile de le vérifier avec un fil roide sur d’autres pièces. Mais, ayant répété cette opération, je ne tardai pas à m'apercevoir que si le fil entrait toujours par le même orifice, il n'en était pas ainsi à la sortie; et que cet orifice unique com- muviquait en réalité avec deux canaux bien séparés, dont l’un, plus petit, se tenait en haut et en arrière par rapport à l’autre plus gros, qui est le biliaire. Ces observations m'expliquèrent comment, lors de mes pre- mières et anciennes recherches, j'avais pu voir deux plaques plutôt que deux papilles sur la paroi imterne de lintestin, aux re) LÉGOUIS. points correspondant à la massette duodénale et à l'insertion du cholédoque. Il n’est pas douteux que ce dernier soit accompagné, aux en- virons du point de déversement, de plusieurs autres canaux qui viennent s’'aboucher près de lui. On ne peut espérer un instant d’eflectuer l'injection par ces orifices microscopiques; d’ailleurs la complication vasculaire m'a mis dans l'impossibilité de suivre avec sûreté ces canaux à quelque distance. Je ne doute pas, sans l'affirmer pourtant, qu'il n’y ait un faisceau wébérien secondaire correspondant à ces orifices ; car ils ne peuvent guère dépendre que du pancréas ou du foie : or les biliaires ne sont pas micro- scopiques ; on les suit sans trop de peine, et aucun ne parait se rendre à l'intestin directement. Je considère done comme très-probable l'existence de deux systèmes wébériens chez cette espèce, l’un aboutissant isolément à l’intestin, entre la papille du cholédoque et les appendices ; l'autre, bien plus réduit et dénué d’ampoule, composé seulement de quelques tubes, sans doute assez courts, accompagnant le cholédoque, comme le fait le tube principal chez les autres Poissons. Cette disposition rappelle quelque chose de ce qui a lieu sur certains Pleuronectes. L'intervalle entre les deux régions de déversement est trop petit pour que leur séparation puisse entraîner aucune consé- quence dans l'action des liquides sur l'aliment. OBSERVATIONS SUR LES CYPRINOIDES DU GROUPE DES CARPES. 4° Carpe (Cyprinus Carpio, L.) C'est par cette espèce que mes études commençaient en 1864, et c’est aussi par là qu’elles ont fini. Il me fallut abandonner les Cyprinoïdes après de longs efforts presque inutiles. J'avais con- staté existence d’un pancréas plus où moins réduit sur un point variable de la région circumvésiculaire, et engagé dans les lames membraneuses protectrices de la vésicule ou des lobes voisins du ARTICLE N° 8. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 89 foie. Mais, quant aux tubes de Weber, après les avoir reconnus, je n'avais pu en assigner la nature. D'ailleurs, la masse pancréa- tique que j'avais trouvée eût élé tout à fait insuffisante pour contribuer d’une manière appréciable à la digestion; sa petitesse la mettait hors de proportion avec le volume de l’ampoule de Weber à laquelle elle est quelquefois adhérente, et dont l’am- pleur suppose un écoulement de liquide en quantité copieuse. J'ai déjà rencontré l’occasion de dire quelles espèces m'ame- nèrent à soupconner d'abord la généralité de lexistence des tubes wébériens, puis me firent comprendre leur fonction, et arriver alors à la connaissance du pancréas disséminé, du diffus, et de quelques-unes des lois de sa diffusion. Toutefois, malgré la légitimité des inductions que l’on en pou- vait tirer quant à la disposition du pancréas sur la grande Carpe, je ne pus encore les vérifier, lorsque deux ans plus tard je revins à l'examen de cette espèce. Je réussis à m'assurer de la pénétration du pancréas granuleux dans la partie périphérique du foie, mais je ne pus aller plus loin, et c’est en septembre der- nier que je devins maître de eette partie dusujet, à la suite d’une observation sur une Carpe tirée des bassins du château d’Athis. On comprend aisément la raison d’insuccès si maltipliés. Dans tous les Cyprins le foie est énorme, et chez le Carpio spéciale- ment il occupe tous les interstices entre les viscères abdominaux. Donc, si la Carpe à un pancréas volumineux, comme l’analogie me le faisait prévoir, il fallait nécessairement qu'il fût logé dans la substance du foie, puisqu'il ne trouverait ailleurs aucune place libre. I v est en effet, mais sans former de masse unique ; en général même il ne s’y rassemble guère par agglomérations mul- tiples assez imporlantes pour être distinguées à l'œil nu d'avec les parties ambiantes du parenchyme. Je prévoyais d’ailleurs qu'il en devait être ainsi, puisque la forme diffuse est de beaucoup la plus ordinaire, la plus abon- dante, surtout en l'absence de masses considérables, et la plus naturelle dans ce cas de compénétration des deux glandes. Les deux tissus étant intimement mêlés, il s'agissait de cons!a- ter ce mélange et d'en saisir la loi. Le réactif gras éthéré ne 90 EHGOUES,. peut être ici d'aucun secours, car son action au contact du pan- créas des poissons osseux, toujours très-lente, est souvent bien incertaine et à peine saisissable. Devait-on espérer qu'il mani- festät clairement au microscope les propriétés différentielles de tissus associés dans une même préparation ? Restait done l'étude simplement microscopique : mais la plupart des coupes faites dans le foie, même encore vivant, s’écrasent sur le porte-objet ; les liqueurs qui dureissent les tissus les altèrent en même temps et rendent la structure méconnaissable. Ce procédé n'offre aucune chance de produire des résultats concluants. J'étais soutenu cependant par l'espoir de rencontrer quelque jour un sujet pourvu de quelque particularité histologique ou anatomique avantageuse, et surtout par la certitude de l'existence de l'organe. Sur ce point 1 ne pouvait y avoir d'hésitation. Weber, comme je lai dit ailleurs, avait dès 1827 deviné la présence d’un pan- créas dans le foie de la Carpe. Son opinion se formulait en ces termes (1) : « L'observation suivante rendra vraisemblable cette » loi d’après laquelle la nature laisse quelquefois un organe en » représenter en outre un second. » Le foie de la Carpe se distingue de celui des autres animaux » par la manière dont 1l est entremêlé avec l'intestin. Il se par- » tage en un grand nombre de lobes qui occupent les interstices » entre les circonvolutions multiples de Pintestin. Il s'attache au » faux diaphragme, renferme dans un de ses lobes la vésicule » du fiel et la rate entre plusieurs lobes. » Les bords du foie sont eux-mêmes, à la manière du pan- » créas, partagés en lobules nombreux, variés de forme, non » point arrondis, mais anguleux, agglomérés en masse unique » entre les vaisseaux et la paroi abdominale. Leur coaleur, d'un » jaune-brun pâle, devient blanchâtre à la cuisson ; leur saveur » ne ressemble point à celle d’un foie ; d’où vient que, même » dans la vie commune, cet organe n’est pas considéré comme » un foie. » CA A 2 S 4 A (1) Weber, Archiv. de Meckel, 1827, p. 240. 9 ARTICLE N° 9, DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 91 Aux lignes suivantes l’auteur annonce la découverte d’un second système de canaux issus du foie, et qui ne sont pourtant pas des biliaires. Ces vaisseaux argentés furent le premier exemple connu de l'appareil auquel je crus devoir donner, au début de mon travail, le nom de #vbes de Weber (1). «J'ai injecté, ajoute-t-1l, trois fois ce conduit au mercure » dans la Carpe et aussi dans un autre Cyprin que je prends » pour un Jeses..…. s Jamais je n’ai retrouvé depuis une disposition semblable à » celle que j'ai décrite dans la Carpe. Les faits me conduisent à » en déduire la proposition suivante : que le foie, chez les Cypri- » noïdes, jouit tout ensemble de la fonction du pancréas. » Il résulte très-clairement de ces paroles que celui qui les écri- vait n’a pas vu l'organe lui-même, et qu’en outre, comme le fait remarquer M. Claude Bernard, il se faisait de la relation entre la fonction et le tissu une idée qui aujourd’hui paraît étrange. Mais il m'était impossible, à la fin de mes recherches sur les espèces marines, de ne point adopter, en la corrigeant, l'opinion que l’anatomiste de Leipsick avait formulée. Si les canaux argentés de Weber avaient été d’abord, pour moi comme pour M. CL. Bernard, grâce à la singularité de leur disposition et de leur couleur, un appareil inconnu, particulier à quelques pois- sons, j'étais arrivé à reconnaître leur relation constante avec le pancréas. D'ailleurs, l'immersion partielle de la glande dans le tissu hépatique ne m'élonnait plus, puisque je l'avais déjà trouvée en gros blocs dans le foie d’un Spare, et que j'avais suivi le pro- orès de développement qui la fait s’avaneer dans celuide plusieurs autres osseux. Enfin cette manière de voir avait d'avance pour elle l'autorité des Lecons sur la physiologie et l'anatomie comparée (2), où elle est expliquée avec détail. Mais encore est-il que cette conviction raisonnée ne me pouvait suflire. Je désirais vivement obtenir le dernier complément (1) Le texte, très-important, est traduit à l’article du Maquereau. (2) Milne Edwards, t. VI, p. 517, note sur Weber. 92 LEGOUS . d’une longue série de recherches, elvoir, au bout de monscalpel, ce pancréas intra-hépatique. I me promettait une confirmation décisive des hypothèses que j'avais admises sur la nature et la configuration de la glande diffuse, en même temps qu'il devait faire sortir l'existence du pancréas chez les Cyprins de l’état toujours fâcheux de certitude spéculative, et la poser en fait démontré à tout jamais. Ces vérifications se sont, pour ainsi dire, offertes d’elles-mêmes sur l'animal dont j'ai parlé; il ne fallait pas moins que l'excellent état de fraicheur du sujet joint à l'abondance extrème de son tissu pancréatique pour qu'il fût possible de les réaliser. Alors j'ai reconnu, non sans surprise, le prodigieux développement et la configuration curieuse de l'appareil. Le sujet n'avait pourtant de spécial que le grand volume de son organe ; quant à la disposition, ainsi que les rapports avec le foie, je les retrouvais les mêmes, il y a quelques jours, sur une Carpe femelle pleine, circonstance toujours fort désavan- tageuse. Après quelques essaisinfructueux, mon attention se fixa sur un léger enduit que semblaient porter certains vaisseaux superficiels du foie. Ce revêtement est le pancréas, et dès lors j'obtins en quelques heures ce dont plusieurs mois passés autrefois à l'étude des Cyprinoïdes ne m'avaient rien appris. L'intestin de la Carpe se replie d'ordinaire (il y à parfois exception chez les femelles pleines) six fois sur lui-même, de telle sorte qu’en coupant la masse des viscères transversalement à sa partie moyenne, on rencontrerait sept fois le tube intestinal. La complication qui en résulte s’accroit encore par celte circon- stance que les coudes ne se font pas dans le même plan. Les spires se disposent comme pour former une sorte de cage, circonserivant plus ou moins bien entre elles un espace central où se trouvent la glande biliaire, là vésicule et la rate. Mais l'énorme foie de ces êtres ne se contente pas de l'intervalle Hbre au centre de la masse viscérale, il émet dans tous les sens des prolongements, d'abord du dedans de la cage intestinale vers le dehors, à travers toutes les ouvertures laissées entre les spires de ARTICLE N° 9. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX, 93 l'intestin. Arrivé ainsi au niveau de la surface des viscères et au contact de la parot abdominale, il ne s'arrête pasencore. Il produit des bandelettes superficielles passant en dehors de la cage intes- tinale, et qui rejoignent souvent les lobes entre eux par leur surface. C'est ainsi que les trois courbures antérieures de l'intestin sont toujours cachées par le développement excessif des parties superficielles du lobe antérieur. I y a du reste des degrés dans l'abondance et le volume de ces expansions hépatiques, mais leur progrès se règle toujours comme il vient d'être dit. Cette disposition est évidemment en rapport avec la particu- larité que présente le système vasculaire de lanimal. Il n’y a, pour ainsi dire, point de veine porte, ou plutôtil s'en trouve une multitude. Les racines des veines mésentériques, au sortir de l'intestin, s’enfoncent dans le foie, le traversent et se retrouvent à l’autre face sous un volume presque aussi pelit qu'à l'entrée. Les veines, à partir de là, se réunissent en trois conduits prinei- paux auxquels je donnerai le nom de veines mésentériques, parce que cette dénomination rappelle beaucoup mieux leur forme et leur situation dans l'animal, quoiqu'elles répondent peut-être plus exactement aux veines sus-hépatiques de lana- iomie humaine. {l'est remarquable de voir le pancréas s'organiser sur ces vemes efférentes du foie, tandis que, dans les autres groupes des osseux, il s'attache encore souvent aux mésentériques, mais qui sont alors des vaisseaux afférents, de véritables mésentériques con- stituant une ou plusieurs veines portes. Quoi qu'ilen soit, on prévoit quelles conséquences doivent sortir de lPabsence d’une veine porte. Toute veinule mésentérique qui ne rencontrerait pas dans le voisinage de son origine un lambeau de la substance du foie, échapperait à son action, comme le paraissent faire du reste certains vaisseaux, la veine splénique et la veine séminale, par exemple. il en résulte aussi que les veines mésentériques, ayant leurs racines plongées dans les lobes du foie, se divisent en général en branches de la même façon que ce viscère en lobes; c’est SA LEGOUES. | donc plutôt encore la forme du foie que l'enroulement de l'intestin qui règle, dans cette espèce, la configuration des veines viscérales. Elles forment, par leur jonction, un gros canal vei- neux, la veine viscérale; mais elles ne se réunissent pas toutes les trois ensemble au même niveau, quoique leurs confluents se trouvent toujours dans l'épaisseur de lobe antérieur du foie, un peu au-dessus de l’æsophage. La première, eelle qui abandonne le tronc commun avant les deux autres, d'avant en arrière, répond à la majeure partie des lobes de droite. Elle consiste d'abord en un canal unique qui traverse, d'avant en arrière, le lobe antérieur du foie, puis elle se distribue au tissu du lobe qui renferme la vésicule et à toutes les bandes hépatiques qui lui font suite. La principale de ces languettes court en arrière jusqu’à l'anus, restant toujours au-dessus des circonvolutions imtestinales, qui se montrent d'abord si l’on ouvre le poisson par la droite de la cavité digestive. Mais, dans l'anneau que ces circonvolutions dessinent en s’en- roulant, se trouve en bas une autre expansion hépatique, où le pancréas s'est montré à moi pour la première fois. Cette expansion n'était point vascularisée par la veine dont je viens de décrire le parcours, mais par une des deux autres. Ces autres veines, assez inégales, se portent à la partie gauche et à la partie inférieure du foie, La plus importante, que j’appel- lerai deuxième veine mésentérique, est le prolongement du tronc viscéral primitif, Elle longe, en descendant d'avant en arrière, l’œæsophage-estomac, puis l'intestin, et va se répandre dans les lobes de la région supérieure gauche et de la région postérieure. Elle reçoit, chemin faisant, d’abord en avant la veine splénique, et plus loin la veine séminale. Mais il importe de remarquer surtout que cette veine, tant qu'elle forme un tronc important, chemine, non pas comme la précédente dans l'épaisseur du foie, mais dans une membrane mésentérique, prolongement de celle qui retient la laitance. Cette membrane, il est vrai, demeure comprise et comme enserrée entre les côtés gauche et droit de la glande, qui l’envahit même quelquefois en partie, remontant avec elle en avant jusque vers la laitance par des expansions ARTICLE N° 5. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 95 lamellaires ; mais la partie postérieure, dans laquelle cireule le gros tronc de la veine, est absolument dénuée de matière hépa- tique. Cette veine, avant de recevoir la veine splénique, passe sur la vésicule, à laquelle elle adhère très-fortement. C’est en ce point qu’elle donne naissance à la roisième veine mésentérique, qui, pour son compte, est aussi très-intimement unie à la vésicule dans toute la partie où elle est à son contact. Les lobes inférieurs latéraux à droite et surtout à gauche du foie lui sont réservés. Dans la première partie de son cours, et même quelque temps après s'être subdivisée, cette veine circule, non dans le foie, mais dans la membrane péritonéale qui soutient déjà, comme je l’ai dit, la précédente. Ces deux dernières veines sont en rapport direct avec le développement du pancréas. Or, on remarque, sur les lamelles hépatiques superficielles à l’ensemble viscéral, une disposition vasculaire surprenante au premier abord, mais qui n’est au fond qu'uue suite de l'éparpil- lement de la veine porte. Ces lamelles reposent sur l'intestin par leur face profonde qui reçoit les veinules sortant du canal; ces petits vaisseaux entrent donc dans la lamelle hépatique par son revers qui touche le tube digestif; eteomme l'épaisseur de ces lobes foliacés est très- minime, les radicules vasculaires les traversent de part en part et ressortent droit devant eux par l’autre face qui est l’extérieure. Mais, comme les gros troncs veineux sont au contraire tous intérieurs, il faut, pour les rejoindre, que les veinules rétrogra- dent vers le centre; elles le font en contournant les bords des lobules hépatiques après avoir rampé sur leur surface libre. On voit ainsi, sur l’animal très-frais, chaque vaisseau se creuser à la surface des bandes une empreinte qui se ramifie avec lui. C'est là que, pour la première fois, j'ai trouvé le pancréas diffus, et c'est aussi là qu'on doit le chercher lorsque le déve- loppement de la glande est assez considérable pour l'avoir fait parvenir à Ce point, en conséquence des conditions biologiques ou se trouve l'animal. L'état de choses dont je vais parler était surtout apparent, lors de ma première observation, aux lobes inférieurs, en particulier vers la droite. 96 ELRGQUIS. Les ramifications superficielles s’y trouvent, dans les cas favo- rables, colorées en blanc mat par un enduit pancréatique extré- mement mince, qui doit avoir passé bien des fois sous les veux sans attirer le regard. J'ai fait, avec le plus grand soin, l'étude de ce tissu pour le comparer au foie. Îl porte avec évidence tous les caractères des glandes. Les cellulessont bien formées, et pourvues, pour la plu- part, d’un noyau qu'on aperçoit sans même se servir de forts grossissements (200 diametres environ). Ces éléments se trouvent maintenus en situation par un stroma fibro-conjonctif très- fourni, surtout à la périphérie. À des grossissements faibles. on distingue, sans la moindre difficulté, les acini, ainsi que leur disposition qui représente bien les contours d’une framboise. Enfin, outre la veine qui supporte le tissu, on y voit, avec des amplifications modérées, circuler des vaisseaux de calibre beau- coup plus étroit, qui courent parallèlement à la veme, la croi- sent souvent, mais ne s y abouchent jamais. Ces vaisseaux, d’un aspect sw2 generis, mamelonnés et variqueux, peu ramifiés, n’ont jamais, pour ainsi dire, occasion de s’anastomoser. Ce ne sont ni des capillaires sanguims, dont ils n’ont pas le diamètre, ni la dispo- sition en réseau ; ils diffèrent aussi des lymphatiques par leur régularité : d'ailleurs ils suivent évidemment dans leur marche le tissu glandulaire dont il s’agit ici; lorsqu'ils se divisent, c’est que celui-ci devient plus abondant, et leurs subdivisions se portent vers les régions les plus riches en matière sécrétoire. Si grand que soit le nombre des parties que l’on explore, on rencontre toujours ces mêmes vaisseaux, el jamais on ne les voit se prolonger au delà des surfaces terminales du tissu de cellules : ce sont donc les tubes abducteurs de ce parenchyme ; et si la concomitance persistante du tissu et des Lubes explique leur fonction, la dépen- dance de ces deux parties achève de fixer l'opinion sur la nature même du tissu. L'ensemble de ces acini de cellules et des tubes montre une glande parfaitement constituée. On peut affirmer avec Ja même certitude que cette glande est différente du foie. Je me suis imposé l'obligation de ne laisser place à aucun doute sur ce point. Autres sont d’abord Îles ARTICLE N° 9. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 9? éléments fondamentaux de chacun des deux viscères. Les cellules hépatiques, de grosseur comparable à celles dont je m'occupe, quoique un peu plus grandes (beaucoup daus certains sujets), sont, pour la plupart, remplies de graisse; ce qui leur donne une teinte jaune prononcée, et surtout un éclat réfringent très- remarquable. Avec les verres très-grossissants, elles paraissent fiuement pointillées et granuleuses; les autres sont absolument incolores, très-claires, et ne produisent aucun effet optique par- üieulier ; leurs bords, plus fius, apparaissent avec une netteté supérieure. Jamais les cellules hépatiques, st che que soit le tissu, n’atteignent à la régularité des autres; celles-ci forment souvent une ellipse exacte, celles du foie sont toujours plus ou moins anguleuses ou équarries. La différence est aussi profonde entre les noyaux. Ceux du tissu circumveineux recouvrent en moyenne un dixième de la cellule; ceux du parenchyme englo- bant, environ quatre fois plus petits en surface, n'arrivent jamais par la limite extrême de leur grosseur à celle des autres. Pour peu qu’une préparation du foie soit comprimée, des particules intracellulaires flottent en nombre immense dans le liquide de la préparation ; les autres résistent mieux, il ne se détache du tissu que fort peu de granules. Enfin, à défaut de ces caractères diffé- renüels multipliés, certaines cellules du tissu circumveineux sufliraient par elles seules à le faire distinguer du milieu hépa- tique. Ce sont des éléments très-réguliers dars leur forme ellip- üque extérieure, en tout comparables aux autres, mais qui ren ferment deux noyaux réunis près d’un de leurs sommets. Avec l'objectif n°1 (Nachet), l'aspect des tissus, pris tous les deux à la fois dans leur ensemble, manifeste déjà leur différence intrinsèque. Celui du foie se déchire, s'écrase, se détruit avec une facilité si grande, qu'on ne parvient guère, sans un durcis- sement artificiel, à voir les acini ; tandis qu’il est rare de n’en pas rencontrer de bien nets sur le premier lambeau pris au hasard dans la substance circumveineuse. On trouve toujours sur les bords quelques lobules glandulaires bien formés et intacts. Rien aussi n’est plus aisé que de constater la discontinuité des parenchymes entre les deux glandes. Elle s’accuse constamment 96 LEGQUES. au microscope par la netteté des bords du tissu circumvaseulaire qui ne laisse place à aucune crainte d'illusion optique. Il y a plus, toutes les préparations, presque sans en excepler une, laissent voir un intervalle vide entre le parenchyme du foie et les bords de l’autre tissu. A la surface des lobes imférieurs, dans des pots avantageux, cet intervalle peut même devenir visible à la loupe. Il acquiert enfin, autour de certains réseaux superficiels, des dimensions assez considérables pour permettre une tentative de séparation mécanique, une dissection, qui m'a réussi quelquefois. La substance de la glande filiforme, adhérente à la veine, est beaucoup plus solide que celle du foie; si Pon parvient à la reconnaitre et à la saisir, elle se détache avec la veine, comme un métal de la lingotière, sans rien entrainer de la substance du foie, laissant en creux son empreinte très-nelte à la surface du lobe qui, uon-seulement n'offre aucune trace de déchirure, mais conserve encore, au fond de ces petites dépressions ramifiées, quelque chose du poli réfléchissant propre aux membranes fraiches. Un caractère de distinction, non moins décisif, consiste dans la présence et la disposition des tubes abducteurs. Si ce fourreau glandulaire des veines était une dépendance des tissus hépatiques coutigus, la relation s’aceuserait par la communauté des canaux d’excrétion. Or, jamais il n’y a passage d’un canal de la partie cireumveineuse à l’autre, ou inversement. Toujours dans la pre- mière on voit circuler les conduits que j'ai décrits, tandis qu'on ne rencontre jamais, dans la région limitrophe du tissu hépa- tique, aucune espèce de vaisseau, et l’on comprend que, cette région étant tout à fait superticielle par rapport aux lobes du foie, les canaux hépatiques n'y sont pas encore constitués en trones visibles. Enfin, la direction des tubes abducteurs wébériens se maintient sans exception dans le parallélisme avec la veme, et toujours très-près de celle-ci; de telle sorte que, sans aucun doute, ils appartiennent exclusivement au tissu circumveineux. L'ensemble de ces faits me semble concluant, et je regarde l’hétérogénéité des tissus comme démontrée. La nature du parenchyme immmergé se trouve du même ARTICLE N° 0. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 39 coup mise en lumière. L’histologie du pancréas est [a seule, avec celle les glandes salivaires, qui admette de pareils éléments ainsi disposés. On se demande aussi, même imdépendamment des détails de sa constitution intime, ce que pourrait être cette glande si elle n’était un pancréas. Je n’ai cependant pas cru devoir me contenter de cette certitude encore indirecte, et j'ai cherché une preuve indiscutable dans la continuité de ce tissu et de ses tubes abducteurs jusqu’au duodénum. Jai pu, sans même trop de peine, y réussir. il en résulte que les conclusions déjà posées en faveur de la nature glandulure et de la fonction séparée du tissu s’en trouvent confirmées d’une manière, à mon sens, définilive. On ne peut se refuser à la conclusion qui en fait un pancréas, sans s’obliger à retirer ce nom du même coup à tous les organes qui l'ont reçu Jusqu'ici. La facilité relative de cette partie du travail vient de la con- stance avec laquelle le tissu et le tube abducteur qu'il renferme accompagnent l’un et l’autre la. veine. Celle-ci, presque toujours, est visible, aisément isolable même par la dissection. Or, du moment qu'on l’a trouvée en un point recouverte de cet enduit, sur tout point situé en amont du premier, le même revète- ment et les mêmes tubes abducteurs se montreront infalli- blement. Je prévois ici une exception théorique qui ne s’est pas présentée dans mes recherches, en cas d’anastomose entre deux conduits veineux parallèles ; il est à croire que l’un des deux pourrait quelquefois être dénué de l’étut pancréatique. Notons qu'il n’y a de difficulté véritable à suivre la trace de ces fines trainées glandulaires que sur la région où les veines plongent dans le foie. À partir de leur émergence, il suffit d’exa- miner attentivement leur surface avec un pouvoir amplifiant de 40 à 50 pour y reconnaitre les aeini avec les tubes excréteurs. Dans l'épaisseur, cette recherche se complique d’une dissection dans laquelle le revètement pancréatique court risque d’être entamé. Cependant la résistance de ce tissu comparativement à celui du foie est telle, que je n'ai dû enregistrer aucun résultat négatif. L'œil suffit même, lorsqu'il s’y est exercé, à constater la présence indiscontinue du tissu remontant certaines veines pri- 100 LEGQUIS. vilégiées sur lesquelles, dans l'animal que J'étudiais, un dépôt plus considérable communiquait au vaisseau une coloration blanchâtre sensible. En conséquence, après ces observations générales, j'ai choisi, pour le suivre en particulier, un rarneau veineux perforant pro- fondément le lobe le plus épais du foie, qui est le lobe antérieur. Ce rameau dépendait de la deuxième veine mésentérique dont il peut être regardé comme une ramification primaire ; 1l traverse le lobe antérieur à peu près de part en part; mais, comme j'avais en vue de constater seulement la continuité du tissu en remontant vers la veine, je ne me suis point attaché à poursuivre les divi- sions que le vaisseau émet en descendant vers les courbures intestinales contenues dans le lobe où il circule. Je me suis con- tenté de faire, dans l'épaisseur du lobe, une série de coupes parallèles de plus en plusprofondes, assez voisines pour permettre de suivre l'identité du rameau de l’une à la suivante. Après chaque coupe je portais au microscope la zone entourant la lu- mière du vaisseau, et sans manquer Jamais d’y constater la matière spéciale avec ses caractères tranchés et ses canaux par- ticuliers. Presque constamment même la séparation des tissus s’effectuait dans le courant de la manœuvre opératoire, et le microscope ne montrait que le tissu cireumveineux isolé, distinct, à bords bien conservés, sans trace de cellules hépatiques. Ces coupes conséeutives offraient aussi invariablement la suite du canal excréteur, que l’écrasement suflit à faire apercevoir lorsque l'épaisseur du lambeau le dissimule en partie. Si aisées qu’elles fussent. ces études microscopiques ont absorbé trop de temps pour permettre d'essayer l'injection de ces canaux sur le même animal; travail superflu, du reste, puisqu'il fut mené à bonne fin par Weber, et lui donna dès 1826 les résul- tats d’où sortit sa découverte (1). Un point cependant mérite attention: on ne trouve pas, dans la description de cet anatomisle, ni dans la planche qui l'accom- pagne, la concomitance du nouveau système avec les veines (1) Archives de Meckel, 4827, pl. 42, > ARTICLE N° 0. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. AOL indiquée d’une manière aussi explicite que mon observation semblerait le faire souhaiter. Si l’on voulait attacher quelque importance à ce fat, y voir un désaccord entre ses paroles et les miennes, j'aurais une explication très-naturelle dans le pro- cédé qu’il paraît avoir employé. Il mjectait au mercure, et s'assu- rait de la pénétration du métal dans le foie par le suintement sur les coupes : c’est, du moins, ce qui semble ressortir de la lecture. L'opérateur s’astreignait-il à rechercher si les points d’où tom- bait le liquide étaient au contact des sections vemeuses? Il est permis d’en douter ; etcomme, pour lui, foie etpancréas n'étaient qu'un même organe, aucune raison ne le devait pousser à une tentative de localisation des tubes. J'avais fait, dès ma première série de recherches, d'assez nombreuses injections colorées, et si aucune d'elles n’avait été assez heureuse pour remonter nettement jusqu'au foie, elles avaient au moins fait apparaître avec évidence une grande partie du système wébérien préhépatique. La nécessité d’injecter résulte de l'absence fréquente de cette coloration argentée que l’anatomiste de Leipsick paraît avoir loujours rencontrée. Cette couleur, lorsqu'elle existe, ou l'injection, lorsqu'elle fait défaut, achèvent de dévoiler la manière dont la communication se trouve établie entre le duodénum et les parties pancréatiques très-éloignées, qui semblent perdues dans le foie. Comme Weber l’a remarqué et figuré, on trouve Joint au cholédeque très-court et assez gros un second canal encore plus bref, et tellement vonflé, qu'il est impossible de ne pas lui atiribuer aussitôt les fonctions de réservoir : c’est l’ampoule de Weber. Placée à gauche et au-dessous du cholédoque, cette dilatation est l’aboutis- sement commun d'un fort grand nombre de tubes wébériens très-inégaux de longueur. Les uns, allant directement au lobe antérieur du foie, n'ont à parcourir, avant d'entrer dans la masse, qu'un trajet à peine appréciable; d’autres, destinés aux lobes postérieurs ou latéraux, sont visibles sur une grande longueur avant leur immersion. Ces derniers circulent sur la surface où dans Pépaisseur du seul mésentère que l’on trouve subsistant, et qui paraît être SC. NAT., JUIN 4875. XVIII. 44. — ART, N° 9. 102 LEGQUIS. propre au foie, De plus, Paecouplement avec les vemes s'établit d’une manière moins immédiate et plus lointaine que dans la plupart des espèces déjà connues, sans qu'on puisse voir dans cette particularité une exception à la loi, mais plutôt une con- séquence nécessaire de la disposition anatomique. Toutefois le fait fondamental, et qui doit nous occuper d’abord, c’est que l'association ne se fait pas avec le même sys- tème veineux. Sur les autres poissons, le mouvement des troncs wébériens est conduit par celui des vaisseaux qui constituent la veine porte et de ceux qui en naissent. Le tronc de déversement, unique ou multiple, commence tou- jours par marcher vers la veine porte, soutenu par les biliaires et par une des veines afférentes, gastrique ou mésentérique, plus souvent duodénale, sinon par plusieurs ou par toutes à la fois. Ar- rivé à la veine porte, les divisions ascendantes et descendantes lui servent de support, et le pancréas se propage vers le foie et vers l'anus, se répartissant entre ces deux zones suivant des propor- tions que nous avons vues dépendre de l'individu et de l'espèce. Chez la Carpe, la diffusion de la veine impose aux tubes de Weber un tout autre régime. Établis, non sur une veine porte, mais sur un système sus-hépatique convergent, et, pour ainsi dire, de l’autre côté du foie, ils n’ont qu'une seule voie pour se ramifier, et un seul système de canaux à suivre. Dans les autres Poissons, le pancréas se dirige vers lintestin par certaines voies, et par d’autres vers le hile hépatique ; ici les mêmes veines le portent à la fois et du même mouvement vers la glande que ces veines traversent, et vers l'intestin qu'elles gagnent sous un autre nom (veine porte partielle), après avoir franchi l'épaisseur de la glande. Cette remarque montre à quel point l’analogie et les dispositions organiques de la Carpe font à son pancréas une véritable nécessité de se développer dans le sens du foie. Venons maintenant aux différences avec son mode ordinaire d'association aux veines. Comme ailleurs les parties importantes, et sans doute primitives de la glande, se forment aux environs de l'intestin duodénum ; mas, pour passer de cette région à celle des grands circuits veineux, le pancréas n’a point ici une veine ARTICLE N° 5, D PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 103 duodénale où s'attacher; car cette veineduodénale {si quelque vais- seau, dans le nombre, mérite de préférence ce nom) marche, ainsi que toutes les autres, directement au foie, et non vers les troncs qui sont convergents, et dans lesquels le courant sanguin part au contraire de la glande hépatique. Il faut donc que les vaisseaux wébériens, avant d'arriver aux troncs plus volumineux qui sont leur support naturel, s’attachent quelque temps aux racines grêles des vaisseaux efférents de l'intestin, puis quittent ce sys- tème pour adhérer à l’autre. Jusque-là leur trajet sera différent du cours des grosses veines; et si l’on n'avait vu ailleurs la con- comitance permanente des deux ordres de vaisseaux, ce qui s’en retrouve iei sous des apparences exceptionnelles ne pourrait guère être reconnu. Lorsqu'on observe un animal injecté naturellement ou par artfice, on voit en effet les filets colorés se rendre au foie par des chemins qui semblent leur être tout à fait propres. J'attribue à ces causes l'illusion qui fit passer Weber à côté de la loi d'association sans la reconnaître ; on ne peut douter que, s’il l’eût aperçue, elle ne l'eût conduit tôt ou tard à la dis- tinction des parenchymes intrahépatiques, et, de là, aux géné- ralisations qui font tout l'objet de ce travail. J'ai été vivement frappé, durant les observations microscopi- ques auxquelles la grande Carpe a donné sujet, de voir les glan- dules très-distinetes, plongées avec leur canal wébérien dans le tissu de la glande diffuse. La quasi-indépendance entre les deux formations me paraît une suite d'autant plus claire de ces faits, que la nappe diffuse, souvent bien moins épaisse, ne fait que baigner pour ainsi dire le pied des massettes isolées. L’envahis- sement pancréatique diffus arrivé à ces masses a d’abord envi- ronné le point par lequel elles reposent sur les lames péritonéales, puis il à monté autour d'elles pour garder son niveau général, mais 1l est loin encore de les avoir submergées. Je crois que par- fois dans les Gadoïdes, les Murènes, et en général chez les Pois- sons qui développent amplement leur pancréas diffus, il se fait une semblable immersion des parties disséminées typiques dans les coulées diffuses. 494 LEGOUIS. 20 Cyprin doré (Cyprinus auratus, L.), La distribution des veines entre les spires intestinales se fait dans le Cyprin doré d’après un plan différent de celui que nous venons de voir sur la Carpe. Il y à toutefois ceci de commun entre les deux formes viscérales, que le pancréas s'organise du même côté du foie. C’est encore ici sur le système veineux convergent représen- tant les sus-hépatiques des autres Poissons qu'on trouve les amas glandulaires les plus considérables. La pénétration dans le foie sur eet animal est loin de se dissi- muler aussi complétement que dans la grande espèce. Je la re- connus dès le premier moment, ei les circonstances en sont telles qu’elle ne saurait échapper à un œil un peu attentif. Bien que les canaux de Weber ne m’aient paru dans aucun cas même partiellement nacrés, on ne trouve aucun obstacle à remonter le cours des plus importants. Comme chez la Carpe commune, le pancréas visible est disséminé en masses plus con- sidérables que la taille du poisson ne le ferait sans doute suppo- ser. Mais si quelques-unes de ces masses atteignent un volume inattendu qui frappe au premier abord, un examen plus pro- longé en fait découvrir une foule d’autres plus petites, et de plus en plus petites. En tenant compte de ces dernières, l'arran- gement de l’ensemble qui, à ne considérer que les grosses, eût pu sembler un pur effet de hasard, se révèle comme ordonné suivant plusieurs lignes à peu près droites, divergeant de l’inser- tion du cholédoque et de lampouie de Weber vers le foie. On comprend que ces tracés sont ceux des tubes wébériens, et la première observation microscopique suffit à manifester le tube invisible à l'œil. Les massettes glandulaires forment ainsi auprès de leur conduit excréteur comme un système de jalons ou de re- pères naturels. Mais quand on examine de près ce système, on voit qu'il ne se termine pas aux limites de la toile très-fine qui sert de mésentère particulier au foie volumineux de l'espèce. La ligne des massettes plonge évidemment dans la masse hépatique, ARTICLE N° 6. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 105 et l’on ne peut concevoir aucun doute sur la continuité des trai- nées de ponctuations cachées par le parenchyme de la glande. La vérification, pour être moins simple que l’examen du pan- créas libre, n'offre pourtant pas de difficulté sérieuse. On peut procéder de deux manières. Si la pièce est fraiche, que les con- statations préliminaires se soient aisément faites, et que, à leur enirée dans le foie, les lignes de glandules paraissent encore assez fournies de grains bien visibles, le mieux sera d'ouvrir le foie au hasard, et d'achever promptement une dissection som-— maire de toutes les zones périphériques de l'organe. On devra commencer par la région voisine de l'espèce de hile d'où sortent les vaisseaux, et cette méthode aura d'autant plus de chances de succès, que la teinte variable du foie sera moins pâle dans la partie à explorer. On ne tardera guère, dans les circonstances favorables, à voir quelque granule dont la couleur blanc rosé tranche sur les tons rougeûtres du milieu. On détachera avec grand soin, non le granule seul, à moins qu'il ne soit très-volumineux, mais tout un lambeau du parenchyme hépatique découpé alentour; on por- tera le tout dans l'alcool à 60 degrés, qui contracte les tissus et du même coup les sépare. IE n'y aura plus ensuite qu’à mettre au microscope sous des grossissements d’abord faibles, puis graduellement croissants. Il est alors exirèmement facile de reconnaître que la petite glande forme un tout distinct, en- clavé, mais sans la moindre trace de continuité avec les tissus où elle est plongée. Après décollement, la surface est nelte, sans trace de déchirure; il n’y a pas de liquide épanché n1 de mem branes qui pendent en lambeaux. Le canalicule wébérien est plus difficile à reconnaitre parce que la dissection préalable la souvent endommagé ; mais l'ana- lyse microscopique du tissu donne des points de comparaison si nombreux avec le foie, et d'autre part avec les glandules pancréa- tiques de la région libre, et les résultats en sont si concordants, que dès la première observation aucun doute ne subsista dans mon esprit. En poursuivant la dissection, on trouverait d’autres globules, 106 LEGOUIS. mais toujours en petit nombre, deux ou trois au plus. Ce n'est pas sans doute qu'il n'y en ait une foule d'autres, mais étant eux-mêmes microscopiques, ils ne peuvent en rien guider les recherches. En revanche il n’est pas rare, lorsqu'on porte un globule visible au microscope, d’en trouver dans le champ quel- ques petits plus ou moins déchirés ; mais dans le parenchyme du foie l’observation de la glande mucroscopique ne n'ayant pas réussi, je n’ai pas insisté sur ce point. Il n’est pas inutile de faire remarquer que les trajets veineux v’offrent ici aucun secours; ils sont eux-mêmes dans ces petites espèces trop faiblement accusés, pour être suivis dans l'épaisseur d'une glande. Lorsque les viseères de l'animal ne présentent pas l’ensemble des conditions favorables qu'exige l'emploi de cette méthode, il n'y a pas de raison pour sacrifier la régularité à la promptitude de l'opération. Dans les cas très-avantageux, par une destruc- tion du tissu, rapide et toutefois soigneuse, avant que les colo- rations soient altérées, on a des chances de reconnaitre d’emblée quelques grains pancréatiques plus volumineux; mais lorsque les couleurs sont peu tranchées ou les granules trop petits, cette marche au hasard ne conduirait à rien. On avancera donc avec plus de précaution sur le prolongement des lignes granulées du mésentère ; sauf à trouver, en raison de la lenteur du travail, la constitution histologique des massettes plus ou moins modifiée. C’est un pis-aller qui permet encore quelquefois de démontrer l'indépendance de quelques granules pancréatiques par rapport au foie, de découvrir leur tube excréteur, et même d'y retrouver quelquefois des cellules suffisamment saines pour fournir des caractères microscopiques distinctifs. On ouvre alors le foie par écartèlement, suivant le fond irrégulier du sillon d’où sortent les rameaux de la sus-hépatique. Cette petite espèce avait ainsi donné la deuxième preuve d'une pénétration effective du foie par le pancréas. Mais si elle se prè- tait bien à la constatation du fait, la recherche des lois et des circonstances accessoires y eût été fort difficile. Pour cela les di- mensions exiguës de l’animal sont un inconvénient que rien ne ARTICLE N° 5, DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. . 407 pouvait racheter ; elles m'avaient détourné de l'étude de ce pois- son lors de mes premiers travaux ; et quand les circonstances m'amenèrent à l’entreprendre, j'avais vu quantité d'exemples de l'influence des veines. C’étaient elles qui devaient entraîner le pancréas dans le foie, et comme 1l eût fallu les mjecter pour les retrouver dans le parenchyme de la glande d’un si petit animal, je dus reporter mes vues sur des formes organiques plus amples. On ne peut passer ici sous silence les résultats excellents que fournirent au microscope les glandules libres disséminées du mésentère hépatique. J'ai réservé jusqu'à présent la mention des faits de cet ordre, pensant qu'il serait plus utile de les ras- sembler dans la notice relative à une espèce facile à se procurer, où tous les observateurs curieux de ces questions en trouve- raient une vérification plus aisée. Ce n’est pas que beaucoup d'espèces marines ne fournissent quelque chose d'aussi net ; tou- tefois, même au bord de la mer, il faut plus de précautions pour les avoir aussi fraiches. On choisit donc le Cyprin doré le plus gros, on l’ouvre vivant par le côté droit, comme toujours. On voit la masse viscérale, en haut le foie, en avant le lobe antérieur avec la vésicule au centre. Des restes du mésentère général, qui ne diffère pas, je crois, dans les Cyprins, du mésentère spécial au foie, descendent, plus complets qu’on ne le supposerait à Pabord, de la vessie na- tatoire ; ce plan nembraneux sépare le foie en deux parties iné- gales, l’une à droite, autre opposée. On rabaitra vers le bas la première détachée avec soin de la seconde, comme si l'on avait à suivre dans l'épaisseur du foie les prolongements du mésen- tère. La membrane tient en effet assez étroitement au tissu ; elle y fait adhérer les grains pancréatiques. On verra les mas- seties dont j'ai parlé, apparentes surtout au voisinage de la vési- cule et du cholédoque ; et si Fanimal n’a pas trop de graisse, on pourra procéder directement à l'observation microscopique des membranes. Je découpais simplement de petits lambeaux au voi- sinage des masses trop grosses, sur les lignes jalonnées par elles. Avee de faibles grossissements, sur une section membraneuse de grande superficie, on peut suivre un ou plusieurs canaux 108 EEGOUIS. wébériens jusqu’à ampoule, comme lPindique la figure donnée à propos du Bar; toutefois le Cyprin ne m'a pas montré l'équiva- lent des remarquables anastomoses entre les troncs primitifs du système. Mais les tubes wébériens secondaires, leur entrée dans les glandules, la constitution de ces glandules, se voient avec une netteté qui ne laisse rien à désirer. D'un canal de Weber prin- cipal un peu tortueux dans son cours, ce qui paraît être un ca- ractère constant chez ces tubes, se détachent des deux côtés des canalicules notablement plus grêles, dont le diamètre ne dépasse pas de beaucoup le tiers de celui des vaisseaux primaires. Plus ou moinslongs, ou, pour parler exactement, plus ou moins courts, ces ramuscules aboutissent tous au globule. C'est là un fait au- quel je ne me souviens pas d’avoir trouvé d'exception dans cet animal. La glande microscopique se compose ainsi d'un nombre prodigieux de granules, car il n’est guère de préparation tirée du pourtour des gros troncs, qui ne renferme deux ou trois glandules. Quant à celles-ci, on en trouve de toutes les grosseurs, depuis les masselies déjà volumineuses qui arrivent aux limites de la vision distincte jusqu'à de très-pelites agglomérations de cellules, réduction extrême de glande, constituée par un seul acinus. Cette étude fait en quelques heures passer ainsi sous les yeux une série de formes qui ne peuvent êlre éloignées de celles qu'adoptent les masses plus considérables aux différentes phases de leur développement; et si la science histologique élémentaire des glandes en grappe était moins avancée, on aurait là, suivant moi, tout ce qu'il faut pour la constituer. Sans en rechercher l'occasion, et seulement lorsque les circon- stances en offraient d’elles-mèmes la facilité, J'ai poussé un peu plus avant l'analyse microscopique. Quelques points se sont ainsi trouvés éclaireis, et d’autres confirmés. Par les grossissements de 300’à 350, on commence à voir l’acinus, ses rapports à l'égard du tube excréteur, et sa construc- tion avec les élément cellulaires. L'observation acquiert une neltelé supérieure lorsqu'elle porte sur les granules les plus pe- tits. L’acinus, très-simple alors, consiste en un seul cul-de-sac de sécrétion. Le tube ramusculaire se continue avec l’acinus; ils ARTICLE N° 9. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 109 forment un seul tout, un seul organe ; l’acinus est un prolonge- ment renflé en bouteille, dont le tube lui-même serait le goulot ; l’acinus présente en son centre une cavité qui m'a semblé peu profonde, dont les parois sont incrustées de cellules formant une couche unique, Pour les grains plus volumineux, je ne pourrais assurer avec certitude qu'ils soient tous composés de plusieurs acini. Le con- traire me parait plus probable dans la plupart d’entre eux ; l’en- semble de mes observations me conduirait à supposer l’acinus de ces espèces susceptible de variations dans un intervalle de 4 à 2, ou un peu moins en surface, ce qui impliquerait une variation sur les volumes de près de 1 à 3. Mais l'étude de ces glandules est déjà beaucoup plus délicate, et je dois iei garder une grande réserve. Quant aux cellules mêmes de la paroi sécrétante, elles se montrent là telles qu'on les voit partout; le noyau de beaucoup d'entre elles est parfaitement conformé ; elles sont claires, fort peu granuleuses, à contour régulier, presque arrondi, finement dessiné et d’une réfringence médiocre. Le noyau agissant plus fortement sur la lumière est à peu près central; ses contours à lignes moins pures semblent indiquer des matériaux plutôt sim- plement amassés que modelés d'après une figure propre. L’his- toire de ces éléments se fait donc en un seul mot : ce sont des cellules très-franchement glandulaires, et ce qu’on pourrait ajouter après cela de leur description particulière n'aurait qu’un trop faible intérêt. Je préfère passer à l’examen des cellules constitutives de la parot du tube wébérien. Pour cette observation les grossissements plus puissants doivent êlre employés. Avee des jeux donnant de 100 à 500, on aperçoit les fines démarcations de ces éléments. Hs se rattachent indubitablement au type cylindrique, mais les meilleures observations que j'en aie pu faire les on! toujours pré- sentées de côté, de telle sorte que leur forme ne m'est pas connue avec la même certitude dans tous les plans. Leur profil repré- sente de grands carrés à bords extrèmement déliés, occupant toute l'épaisseur de la paroi tubulaire, recouverts extérieure- 110 LEGQUES. ment, mais non, je crois, à l’intérieur, par un revêtement léger de nature différente, et trois fois plus épais que la paroi cellu- laire elle-même. Les noyaux de ce système épithélial sont plus intéressants que les cellules elles-mêmes. Lorsque par lemplor du carmin on achève de les mettre en pleine évidence, on les voit former le long du tube un cordon imterrompu. Chacun d'eux est un gros corps irrégulier, bosselé et déchiré de toutes façons, de dimensions toujours très-imégales, mais dont le grand axe est constamment dirigé suivant la longueur du tube. Leur volume varie généralement en proportion de celui des cellules, et d'ordi- naire est considérable par rapport aux dimensions de celles-cer. Le canalicule de la ramification qui se porte au lobule est constitué de la même façon, à cela près que les éléments sont plus petits. Ces rangées de cellules arrivent jusqu'à l'entrée de l'acmus, et là s'arrêtent brusquement; 1l n’en existe pas une seule dans l’acinus lui-même; sur ce point on peut atteindre promptement une certitude complète, car 11 n’y a aucune ressem- blance entre la cellule sécrétante et la cellule épithéliale de la paroi. On ne saurait rien imaginer de plus différent que ces deux éléments. Forme et transparence, grosseur et mode de soudure, volume, place, orientation du noyau, tout est marqué dans Fun et dans l’autre de caractères si éloignés, qu'ils rendent non-seu- lement l'erreur impossible, mais la comparaison même superflue. IT CYPRINOIDES DU GENRE GOUJON. Goujon (Gobio fluviatilis, Val.). Le Goujon réunit toutes les difficultés qu’on rencontre d’or- dinaire séparées ; celles qui tiennent à la petitesse de la taille, et celles qui résultent de la disposition de viscères spéciale à cette famille. D'un autre côté, l'étude de ce petit Cyprinoïde a quel- que chose d’avaniageux dans l'absence presque complète de graisse. Il est vrai que le foie en tient lieu, et que le tissu grais- ARTICLE N° 3. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. A11 seux, si nuisible qu'il soit, peut au moins se dissoudre dans l'alcool, tandis que le foie du Cyprin se coagule comme le pan- créas, prend avec lui une couleur commune, ou plutôt lui donne la sienne, ou se détruit avec lui. La séparation des deux tissus est extrêmement difficile. En effet, qu'on se reporte au dessin qui représente le pancréas disséminé du Bar, et qu'ou imagine un pancréas formé unique - ment de globules microscopiques perdus avec leurs tubes dans l'épaisseur du foie, et l’on aura quelque idée des soins qu'exige la recherche de l'organe. On ne peut même ici se fier au cours des veines pour retrouver les canaux wébériens, parce que les veines sont {rop ténues pour être suivies bien loin. Ajoutons que jamais l'éclat nacré ne se développe sur les tubes de Weber de ce petit animal, Son étude m'a pourtant fourni quelques faits que je crois dignes d’une mention spéciale. Il acheva de me convaincre du progrès que fait le foie en volume, même chez l'adulte; dans les très-nombreux sujets qu’on pourra ouvrir en même temps, on verra des différences notables quant au développement de cette glande. Chez quelques-uns, l’envahissement de tous les imterstices était achevé ; chez d'autres, la vésicule toute couverte déjà de lames hépatiques; dans un grand nombre, l’enveloppement n’était que commencé; un sujet avait la vésicule encore en- tièrement libre. D'ailleurs j'ai rencontré sur un de ces animaux la répétition du fait qui m'avait vivement frappé dans le Spare violacé. Con- trairement à l'ordinaire, chez les Cyprins, un des globules du pancréas intérieur au foie avait pris, sous une influence que Je n'ai pu réussir à m'expliquer, un volume relativement énorme. C'était une grosse tête d'épingle bien distincte des tissus géné- raux hépatiques ambiants, ronde, affleurant la surface du lobe où se trouvait ce granule; par la macération dans l'alcool, la diffé- rence des tissus s'exagéra, et cette pratique serait excellente pour déceler les pancréas disséminés dans le foie, st leur petitesse ex- trème ne les rendait absolument invisibles, même à la loupe. Mais du moins une conséquence ressortait évidemment des situa- 112 LEGOUIS. tions relatives du foie et du globule. Celui-ci avait été englobé sur place, et 1l y avait peu de temps que cetenvahissement s’était opéré, car la tête du lobe l'avait à peine dépassé, et les faces du prisme hépatique où 1l se trouvait ne l'avaient point encore dé- bordé. La tête de ce lobe, en marche rétrograde vers la vésicule, était non en biseau, mais épaisse et mamelonnée. C’est donc sous une forte épaisseur, et non par pointes et par lames, que se fait le progrès du foie. Dans cette région, le foie, qui contournait un sinus intestinal, revenait vers son centre, près de l'intestin duo- dénum ; d’ailleurs dans celte même zone le progrès du pancréas avait été direct, c'est-à-dire centrifuge, ce qui explique l'absence de toute relation entre la direction des vaisseaux biliaires et celle des tubes wébériens. Il y a, comme dans la généralité des Cyprins, une ampoule de Weber, mais elle est si petite, qu'il faut pour la mettre en évi- dence une préparation microscopique heureuse. III GENRE TANCIE. Tanche commune (Tinca vulgaris, Cuv.). L'étude de la région circumduodénale m'a réussi dans la Tanche mieux que sur aucun autre Cyprinoïde. L’envahissement hépatique rend les recherches au pourtour de l'intestin plus labo - rieuses daus cette famille que partout ailleurs. Voici les faits qu'une disposition anatomique sans doute plus avantageuse m'a permis de vérifier, et qui, moins sasissables avec d’autres espèces, ont pourtant, ce semble, une existence générale dans le groupe. La disposition des viscères ressemble beaucoup à ce qu’elle est dans la Carpe. L’intestin se contourne moins, et le foie, par suite, est moins compliqué; la vésicule du fiel est souvent recou - verte par le lobe principal qui se trouve superposé à l'intestin et à l'estomac. De cette masse centrale partent trois lobes prinei- ARTICLE N° 6. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 118 paux : l’un qui se prolonge parallèlement à la première circon- volution intestinale, qu'il cache presque jusqu’à la courbure; un second qui va se loger dans la première anse et qui s'étend sur la partie antérieure de la première eirconvolution; enfin un troisième, simple élargissement du précédent, expansion lamellaire qu’il envoie au-dessous de la première spire de l'intestin. Ce lobe apparaît dans le fond de la cavité iaissée par l’ovaire lorsqu'il a été enlevé, et reste en rapport de contact avec la rate et la vessie natatoire. Enfin, après avoir contourné l’in- testin, il remonte en arrière et vient joindre son bord à celui du lobe central. C'est entre ces deux bords ainsi conjoints que l'on porte le scalpel pour les séparer et mettre à nu lPintestin et la vésicule biliaire. On reconnait alors l'existence de cinq canaux biliaires se ren- dant au cystique, qui les reçoit dans une sorte de dilatation dis- posée à cet effet. Le calibre de ces vaisseaux m'a paru très-faible; le plus court, qui est aussi le plus grêle, se rendait au lobe cen- tral, ou plutôt à la portion droite œæsophagienne de ce lobe. Le premier lobe reçoit deux biliaires, dont l’un eôtoie son bord su- périeur, et le second coule plus bas ; le second lobe n’en a qu’un seul: ces quatre canaux débouchent sur le même plan. lorsque les préliminaires de la préparation furent conduits comme il a été dit; au contraire, le cinquième, plus gros, qui provient du lobe intérieur, arrive au cystique par un chemin plus profond. Le canal cystique est d’un médiocre volume, plus étroit que sur la Carpe, recouvert par un lacis de vaisseaux sanguins qui rendent la dissection des biliaires presque impraticable. Enfin le dessous du cholédoque montre creusé dans l'épaisseur de ses parois un large et même très-large conduit en forme d’am- poule, entre le canal et l'intestin : c’est le tronc des vaisseaux de Weber. Il ne paraît pas communiquer avec le canal cholédoque, car une sonde introduite à l’intérieur suit un chemin. distinct ; il est impossible de la faire pénétrer dans le cholédoque ; d’ailleurs le deuxième conduit est complétement dépourvu de bile, tandis que par la pression de la vésicule on oblige ce liquide à s’écouler par le canal eystique. Ce dernier étant plein, sa couleur permet 114 LEGOUES. de le suivre jusqu’à sa chute dans Pintestin; le tube voisin reste pendant toute cette opération d'une blancheur parfaite. D'autre part, un liquide poussé vers l'intestin par le second canal sortait par l'æsophage; il est done en rapport avec le tube intestinal. Enfin j'ai constaté par injection d'air l'absence d'ouverture entre les deux tubes. L'air poussé dans lun sortait par un orifice qui avait été fait au canal eystique en arrachant l'un des canaux hépatiques ; injecté dans l’autre, il sortait, soit par les déchirures faites à l’un des pancréas, soit en un autre point situé plus en arrière, appartenant encore au système paneréatique. Mais jamais l'air insufflé par un des canaux n'arrivail à l'orifice d'où l'on voyait les bulles s'échapper lorsqu'it était projeté par l'autre voie. Ce pancréatique est en dedans du cholédoque plus éloigné que lui de l’œæsophage. L'injection peut être aussi poussée par l'intestin; ce tube présente une longue papille à 2 centimètres environ vers la gauche de l’étranglement æsophagien. Toute sa surface est gar- nie d’une membrane envoyant à l'intérieur des replis très-minces, mais solidement fixés sur la muqueuse. Ces valvules, fort longues (2 millim.), se suivent les unes les autres sans discontinuité, for- mant un véritable réseau. Elles laissent à leur base, quand on les arrache, une trace de dessin élégant. La muqueuse semble alors recouverte d’un filet à mailles très-étroites et de fils très-fins. La papille, qu'on a souvent du mal à distinguer au milieu de ces prolongements, est deux fois perforée. L’orifice particulier au biliaire a paru se tenir au sommet qui brunissait lorsque la vési- cule était pressée. Je n'ai pu reconnaitre, après un long examen, l’abouchement du conduit latéral ; mais, en coupant la papille à sa base, on distingue bien la lumière spéciale de chacun de ces deux canaux, à tel point qu'avec une canule fine, l'injection a pu être opérée par l’orifice du plus inférieur. I s’est trouvé commu- niquer avec l’ampoule de Weber. De plus, dans là portion de la papille ainsi séparée, on a pu enfoncer deux soies par les orifices distincts que présentait ia section ; ces deux soies sont venues sortir par le même point, au- ARTICLE N° 94 DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 415 tant qu'on a pu croire; il y aurait donc deux canaux : l’un bi- lire, l’autre pancréatique, aboutissant à une sorte de dépres- sion Commune située au sommet d’une mème papille. Le pan- créatique se renfle en ampoule à 2 ou à millimètres de son insertion intestinale. A cette hauteur, on trouve un gros corps blanc, aplati entre les lobes du foie. Cet amas graisseux renferme, comme chez tous les Cyprins, quelques-unes des plus grosses granulations pan- créatiques, distinctes de la graisse par leur couleur rosée, leur consistance ferme et leur aspect glanduleux. La principale est adhérente à l’ampoule latérale à la facon de celle de la Plie. L'injection au chromate de plomb lancée par le canal pénétra jusque dans ce corps ; une sorte de bassinet qu'il présente à son insertion sur le canal fut également remplie, de telle manière qu'on apercevait deux petits canaux injectés se prolongeant dans la substance et sous la tunique blanchâtre qui recouvre là glan- dule. Un second granule de quelque importance se trouve non lom de là, au voisinage immédiat de la vésicule. Cet organe est blanc, rosé sur les bords, d’une forme un peu irrégulière, lobulé comme les glandes, quoique plus massif que ne l’est le pancréas de beaucoup d'espèces. H remplit tout l'espace compris entre la vésicule et le cholédoque, auxquels il adhère; sa grosseur est celle d'un pois. IV GENRE BARBEAU. Barbeau ( Barbus fluviatilis, Nal.). H serait inutile d’insister sur les différences insigmifiantes pour le sujet qui distinguent les viscères du Barbeau de ceux de la Tanche, des Goujons et des Carpes. Aussi le pancréas extra-hé- patique existe-t-il comme dans ces espèces. Les tubes de Weber n'y Sont pas nacrés. 116 LEG@UIS. Le foie, très-volumineux et fort compliqué, paraît avoir, comme dans plusieurs autres Cyprins, une tendance à se lamel- lifier. Ou trouve, chez certains individus de ces espèces, de minces expansions hépatiques engagées entre les feuillets de certains mésentères, plus souvent dans celui qui monte vers les reins. C’est une ressemblance de plus avec le pancréas; mais au- cune confusion n'est possible entre les deux glandes; les lamelles hépatiques n'ayant aucune foliation marginale et portant une coloration fort différente. L'examen microscopique d’ailleurs, à défaut de caractères saillants, suffit pour faire rapporter à chaque glande ce qui lui revient; enfin ces expansions lamellaires sont rares, même chez les Barbeaux et les Cyprins à gros foie. Le pancréas extra-hépatique granuleux suit encore de préfé- rence les vaisseaux, mais l'extension qu'il peut atteindre semble plus petite que chez la Carpe. Y CYPRINOIDES VOISINS DES GARDONS. 1° Gardon (Leuciscus rulilus, Val.). Il est aisé de reconnaitre la masse vésiculaire du pancréas. On doit, pour ménager lorgane, diriger d’abord les recherches vers cette masse ; elle servira ensuite de points de repère à la dissec- tion du surplus. Dans cet animal, comme chez tous les Cyprins, le foie est extrèmement développé; 1! occupe chez l'adulte à peu près tout l'espace que laissent entre eux les autres viscères ; la vésieule du fiel, que l’on voit affleurer à la surface lorsqu'on ouvre l’abdo- men par le flane droit, est entourée par le parenchyme hépa- tique comme d'un anneau. Elle est en contact avec l'intestin sur une assez large surface, et communique avec lui par un canal cholédoque extrêmement court, débouchant sur une papille perdue dans les villosités de la muqueuse. L’intestin, de son côté, est enveloppé dans une tunique membraneuse d'une trame très - ARTICLE N° 5. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 117 légère, souvent chargée de graisse, et qui se prolonge jusqu'à l’anus. Cette tunique forme un bourrelet autour de la vésicule, sur le pourtour de la région par laquelle elle touche l'intestin. On trouve dans ce bourrelet la masse principale dont j'ai parlé. C'est sur un animal de 10 centimètres, un noyau de la grosseur d'une tête d'épingle logé exactement dans l’espace entre la vési- cule et l'intestin. En regardant avec soin la trame adipeuse dans le voisinage, on y observe un assez grand nombre de petits glo- bules arrondis, distinets par leur opacité des gouttelettes bril- lantes de graisse dont le tissu paraît rempli. Ces globules sont autant de petits grains glandulaires se rapportant à la masse vésiculare du pancréas. Une troisième massette notablement plus petite pourrait être considérée comme se rattachant à la masse splénique. Enfin, dans le bourrelet vésiculaire, mais à l'opposé des précédentes, on rencontre une autre glandule dépendant aussi de la splénique. Cette dernière, quoiqu’elle soit une des plus importantes de l'animal, est déjà difficile à distinguer ; elle se loge entre la rate, l'intestin et le foie, près du lacis vasculo-fibreux dans lequel circulent les canaux hépatiques. La masse splénique elle-même, double des précédentes, est du côté gauche de la vésicule en contact avec la rate et sa veine; en dessous elle s'appuie sur l'intestin; sa forme s'allonge en con- séquence de la situation qu’elle occupe. Ses rapports intimes de continuité ne se font pas avec la veine splénique, mais, suivant l'habitude, avec le tronc portal. Toutefois je n’oserais affirmer qu'elle ne parvienne jamais par un prolongement postérieur Jus- qu'auprès de la rate. La distinction des tissus ne peut se faire alors qu’à l'aide du microscope; elle offre de grandes difficultés, et Je n'ai pas cru utile d’insister sur ce point, n'ayant jamais vu sur les autres espèces d'exemple du mélange de ces deux paren- chymes. Chacune des masses dont il vient d'être question est comme un centre de rayonnement pour le tissu pancréatique ; il existe un pancréas diffus très-étendu, dont les lamelles, reconnaissables seulement au microscope, forment cependant autour de certains SC. NAT,, JUIN 1873. XVII, 15, — ART, N° 3, 118 LEHGQUIS. vaisseaux de la tunique graisseuse un enduit visible à Pœil. Du bord de ces lamelles partent, comme c’est l'ordinaire, d’autres coulées plus grêles encore, qui paraissent en général se r'entler à leur extrémité pour constituer une petite glandule arrondie. J'ai regardé comme superflu d'étudier la disposition de ce pan- créas laminaire, me bornant à constater sa continuité et son extension jusque dans la région anale. Les masses principales communiquent avec l'intestin par un système de larges canaux plongés dans la matière glandulaire, qui paraît les accompagner en tapissant leurs parois, et émettant à droite et à gauche des expansions jusqu’à leur attache sur l’in- testin. La communication se fait, comme dans tous les Cyprins, par une ampoule volumineuse adossée au cholédoque. Ces ca- naux pancréatiques ne sont peut-être pas les seuls, car 1l m'a semblé voir plusieurs orifices sur la papille; en tout cas ce sont les plus importants. Je ne doute pas que dans cette espèce, comme dans la Carpe, une partie du pancréas ne soit perdue dans le tissu du foie; ce- pendant je n'ai pas eu d’annnal assez frais pour lever toute difi- culté. 20 Véron (Phoxinus lœvis, Agassiz). Je rattache au Cyprin doré une observation incomplète du Véron, non poursuivie comme diflicile et superflue. Quant à la disposition de l'intestin, ce petit animal se rapproche de la Loche ; quant à celle du foie, 11 ressemble peut-être plutôt à la Carpe. Son pancréas extra-hépatique paraît être tout entier microsco- pique, et Je n'ai trouvé dans le foie aucun grain de la grosseur de ceux que présente le Cyprin doré. Les dimensions du foie y sont plus variables que dans ce dernier. 3° Chevaine (Squalius cephalus? Val.). Quoique j'aie disséqué presque toujours dans l'alcool et avec grand soin six animaux de cette espèce, je n’ai su recueillir ARTICLE N° 5. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 119 qu’assez peu de détails sur la disposition de leur système pan- créatique. La région voisine de la vésicule a du reste, avec celle qui lui correspond dans la Carpe, des analogies si marquées qu'une description suppléera l’autre sans inconvénient grave. La vésicule avec les parties adhérentes forme une masse en- gagée dans l'épaisseur du lobe hépatique principal, mais qui se sépare plus aisément de l'intestin, auquel elle n’est rattachée que par des filets conjonctifs. Lorsque, dépouillée des tissus voisins, elle ne tient plus à l'intestin que par le cholédoque, elle présente sur ce canal une dépendance importante. La portion du conduit perpendiculaire à l'intestin soutient de chaque côté une mem- brane chargée de graisse allant au côté voisin de la vésicule; ces deux plans membraneux forment donc au-dessous de la cour- bure du cholédoque et de la vésicule une sorte de carène ou d'angle dièdre. Entre l’arête et la vésicule, se trouve un corps assurément glandulaire, différent d'aspect avec le foie, dont il est, du reste, séparé par une discontinuité de tissu. Rose blanchâtre, irrégulier, de la grosseur d’une forte tête d’épingle, 1l occupe exactement la place habituelle au principal nodule pancréatique de la Carpe. Comme dans cet animal, une série d’autres corps de même nature, mais de dimensions varia- bles et inégales, fait suite à ce premier pancréas. Mais l’étendue de la membrane étant moindre, le pancréas doit plonger plutôt dans le foie. Eu coupant le canal eholédoque à une petite distance de l’in- testin, on a reconnu dans la section la lumière de deux tubes : l'un, plus largement ouvert, situé du côté de l'œsophage, et qui paraissait répondre à la portion du canal cholédoque; fautre dont l’orifice était plus étroit, à gauche du précédent, et par conséquent correspondant à un canal situé, lorsque les organes sont en place, à l'intérieur de la courbure du canal cholédoque. En dedans de l'intestin ce conduit pancréatique aboutit à la papille ordinaire, sur la section de laquelle on a retrouvé les deux ouvertures correspondantes. D'autre part, J'ai pu mettre en évidence les relations de ce tube avec le noyau glandulaire principal. 120 LÉGOQOUIS. Je n'ai pas essayé de compléter cette observation, qui remonte à l’époque où j'ignorais l'étendue des systèmes wébériens. Le Meunier m'a paru faire en quelque sorte exception à la règle d’après laquelle, chez les Poissons, une ampoule sert de diver- ticulum aux sucs du pancréas; la dilatation terminale du tronc wébérien semble très-peu prononcée; moins encore à propor- tion que chez les Scombres. VI GENRE BRÈME, Brème (Abramis Brama, Val.). Si considérable que soit le pancréas hépatique de la Carpe, il y aurait pourtant exagération à dire que la pare plongée de l'organe soit prédominante dans tous les Cyprinoïdes. La Brème donne peut-être le meilleur exemple d'une disposition contraire. L'entrée dans le foie n’est jamais totale, et dans ce poisson on retrouve toujours de grandes surfaces pancréatiques en dehors du foie. Ce pancréas et les vaisseaux wébériens n’y ont point exacte- ment la forme connue chez la Carpe, mais le type est le même, et les différences, très-appréciables dans l'aspect, n’ont rien de fondamental. On a done ici un pancréas moitié disséminé, moitié diffus ; outre le corpuscule signalé par Brockmann au confluent du cholédoque avec le duodénum, il en est d’autres également visibles. Dès mes premières recherches (1), je retrouvai ce corps adhérent à l'intestin et dédoublé, Il me parut alors être le seul représentant chez cet animal du pancréas extra-hépatique. De- puis lors J'ai reconnu qu'il n’est qu'un point dans un système nombreux de corps semblables par la forme et la constitution identique. Il existe une ampoule de grosseur médiocre à la terminaison (4) Première partie, pl. 48, fig.4. ARTICLE N° % DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX, 491 du canal pancréatique ; comme dans la Carpe et tant d’autres, l’un des systèmes wébériens qui font suite ne se répand point dans le foie. Il occupe une lamelle péritonéale située entre la vésicule et la rate. Des granulations glandulaires, les unes visi- bles à l'œil nu, les autres en nombre incomparablement plus grand et microscopiques, sont suspendues aux branches de ces canaux. J'ai compté ainsi trois globules visibles, outre celui de Brockmann ; ce nombre par lui-même est sans intérêt, et je ne parlerais point de ces rares et insignifiantes traces d’une forme mieux développée ailleurs, si ces points ne paraissaient rappe- ler par leur position les trois grosses masses des Gadoïdes. Jamais les canaux de Weber de ce poisson n’ont offert un seul trait à couleur argentée. Le canalcholédoque semble, à l'image du pancréatique, s’élar- gir en ampoule à son point d'entrée dans la paroi duodénale. VI OBSERVATIONS SUR LES CYPRINOIDES DU GENRE LOCHE, 49 Loche franche (Cobitis barbatula, L.), Malgré sa pelitesse de taille, cette espèce a donné des résul- tats certains et qui ne semblent pas dénués d'intérêt. On doit en effet ménager au groupe des Cobitis une place à part dans la famille des Cyprinoïdes, quant aux caractères four- nis par l’ensemble du système digestif. Si l’on se borne à consi- dérer la masse viscérale, elle est toute différente de celle d’un Cyprin où d'un Leuciscus. Le tube digestif ne forme que deux courbures ; 1l décrit à son entrée dans la cavité abdominale une $ dont les anses sont peu profondes, puis, partant de là, il court droit à l’anus. L'estomac est distinct, plus large que lœsophage, et séparé en arrière du conduit duodénal par un rétrécissement pylorique bien accusé. Cette panse stomacale est redoublée sur elle-même par la pre- mière des courbures dont on a parlé, de telle sorte que le duo- 122 LEGOURS, dénum revient en avant s'appliquer sur l’œsophage. Il n’y a pas d’appendice pylorique nettement constitué, mais un renflement initial en forme de bosselure proéminente en tient certainement lieu à la tête de l'intestin. Le foie, qui n’a de son côté ni la dis- position, ni les rapports, ni le volume d’un foie de Cyprin, res- semble plutôt à ceux des petits Gadoïdes par son mode de par- tage en lobes. Il entoure toutefois d’une garniture plus ou moins incomplète et fermée en anneau les courbures déjà décrites, la vésicule et les centres pancréatiques. Un caractère plus curieux et de plus grande importance par rapport au pancréas, tient à la disposition du système veineux. Il y à une veine porte, probablement unique ; cependant je n'ose affirmer que les parties du foie en contact avec la seconde portée de la spire intestinale n'en reçoivent pas, comme dans les Cyprins à foie diffus, des veinules distinctes ; en tout cas, le système füt-1l mixte, intermédiaire entre la disposition connue chez les Mer- lans et celle dont l'extrême développement se voit dans la Carpe, l'existence générale d’une veine porte de volume majeur me semble devoir rester acquise. Le pancréas reprend en conséquence sa position ordinaire. Au lieu de s'établir, comme chez la Carpe et dans les Cyprins à foie volumineux, sur les veines efférentes, entre le foie etle cœur, il s'attache aux veines portes, entre l'intestin et le foie. C'est là que j'ai trouvé les masses principales : lune, plus petite, au pied du cholédoque, en rapport comme toujours avec la veine duodénale ; l’autre, plus grosse, à une distance relative- ment assez grande, entre l’œsophage et le lobe gauche du foie, probablement sur une seconde veine porte. Le pancréas est sus- ceptible de s'étendre fort lon dans ce sens. Cet animal m'a fourni une préparation microscopique très- claire de l'entrée commune aux canaux pancréatique et cholé- doque dans l'intestin ; les vaisseaux wébériens aboutissent encore à une poche ampullaire dont le diamètre surpasse d’un quart au moins celui du cholédoque. Ne doit-on pas regarder la constance de ce réservoir, jusque chez des poissons d'aussi petite taille, comme un signe de l'importance physiologique et anatomique ARTICLE N° 6. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 123 du pancréas. J'ai retrouvé dans l'intestin la papille qui renferme les terminaisons des deux canaux abducteurs hépatique et pan- créatique, 29 Loche d’étang (Cobitis fossilis, L.). . Quoique je n’aie vu aucun exemplaire de cette espèce, elle fournit aux faits ici résumés une confirmation trop précieuse pour que je la passe sous silence. M. Leydig (1) y a trouvé « les vaisseaux sanguins situés entre » l'estomac et le foie entourés par des masses de glandes /ym- » phatiques qui pénètrent même dans le foie avec les veines, et » d’où résulte pour cet organe un aspect particulier. » Le mot /ymphatiques est le seul qui mette une discordance entre cette remarquable observation et celles que les autres Cyprins ont provoquées. J’expliquerai, à propos du Cottus, ce que je crois défectueux ou plutôt mcomplet dans l'interprétation du célèbre histologiste. Il m'est impossible, sachant ce qui a lieu dans les Cyprins en général, et même dans l'espèce très-voisine, Cobrtis barbatula, de ne pas voir dans la glande circumveineuse et pénétrante du Cobitis major les dépendances du pancréas remontant depuis l'estomac jusqu'à la veine porte, puis de là se subdivisant avec elle pour l'accompagner dans le foie. Ce serait exactement ce que j'ai constaté sur la Carpe, sauf que dans celle-ci le système veineux qui sert de support est effé- rent par rapport à la glande hépatique. VIII GENRE CHONDROSTOME. (Chondrostoma Nasus, Val.). Je regretle de n'avoir pu me procurer qu'un seul Chondro- stome ; car le pancréas extra-hépatique paraît fort développé sur {4) Anatomie comparée, traduct. française, p. 479. 12/ LEGQUIS. cet animal, qui serait sans doute, pour celte raison et en vertu d’autres particularités avantageuses, un sujet d'introduction na- turelle à l'étude plus difficile des autres Cyprinoïdes. La masse viscérale, plus allongée que chez la Carpe, présente dans*ses parties une disposition semblable et mêmes rapports; mais la forme du foie a changé. Toute la masse viscérale est en- tourée d’une sorte de péritoine adhérent aux côtes, très-brillant, comme dans tous les Cyprinoïdes, du côté costal, mais d’un noir pur à la face qui regarde les viscères. Le conduit aérien de la vessie natatoire longe les canaux du foie et le bord postérieur de cet organe. L'intestin décrit un grand nombre de circonvolutions qui pa- raissent suivre le trajet'ordinare. Quant au foie, il ne forme à la face superficielle des viscères qu'un seul lobe qui court sur la première branche de l'intestin (le duodénum). Depuis son msertion sur la droite de l’œsophage jusqu'à des limites fort reculées vers l'anus, ce lobe n’est qu'une bande étroite, sauf à sa partie de droite, qui s'élargit modérément au-dessus de l'entrée de l'intestin et du pylore; et de plus ce foie n'envoie point de Icbule entre les circonvolutions intestimales, il n'occupe point les courbures de ce canal, Il recouvre incomplétement une très-grande vésicule du fiel, beaucoup plus longue et plus volumineuse que dans les plus grosses Carpes. Je constatai tout d’abord l'existence indépendante d’un cholé- doque et d’un tube de Weber. Ces canaux sont bien séparés jus- qu’à leur insertion respective sur Pintestin. Le tronc wébérien, muni d'un orifice à part, forme une ampoule accolée au cholé- doque, en connexion intime avec deux corps dont il est question plus loin, et dont les rapports avec le cholédoque sont semblables, à ceux de la Carpe. Les orifices duodénaux, quoique bien distincts, n'étaient sé- parés que par une lamelle valvulaire semblable à celles qui pen- dent de toute la muqueuse. Je n'ai trouvé ni papille ni valvule, mais ces dépendances devaient être détruites et tombées, car Je n'en fis la recherche qu'à la fin de l’observation ; et quatre heures ARTICLE N° 5. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 125 suffisent presque en été pour décomposer tout le revêtement muqueux à l'intérieur de Pintestin. Je ne reconnus aussi que des restes du pancréas; mais l'état un peu avancé d'altération de cet organe servit du moins à ma- nifester une disposition exceptionnelle chez les Cyprins. La glande possède ici desenveloppes membraneuses assez complètes. La partie la plus importante de ce système pancréatique semble se développer au-dessous de la vésicule en un endroit voisin de la station ordinaire aux massettes principales de la Tanche, du Barbeau et de la Carpe. Mais, dans l’espèce qui m'occupe ici, la masse glandulaire est enveloppée d'ane gaine péritonéale par la- quelle l'adhérence s'établit avec la vésicule d’une manière aussi intime que dans la Carpe commune. A cette sorte d’ampoule renfermant des nodules pancréati- ques volumineux fait suite une courte série de pochettes de même nature et aussi de même usage; l’une d'elles mérite une mention à part, comme analogue à ce qu’on trouve dans l’in- térieur du foie du Cyprinus Carpio et du Cobitis fossilis (Leydig). Elle dessine en effet une gaine assez ample autour du prin- cipal tronc veineux postérieur du grand lobe. J'attribue les mêmes fonctions à une chambre plus vaste. dé- pendante des précédentes, accolée à l’intestin et au cholédo- que, mais dans laquelie la substance glandulaire était trop pro fondément modifiée pour permettre une affirmation sans réserve. Dans les environs, j'ai rencontré un globule séparé, de nature pancréatique indubitable. C'est un corps de couleur rose .blan- châtre, petit et d'apparence glandulaire, enchevètré d’une façon compliquée dans les vaisseaux et les ligaments de cette région. Quoique le temps m'ait manqué pour l'étude des canaux de Weber, qui étaient incolorés, je puis affirmer que le pancréas intra-hépatique n’a, dans ce poisson, qu'une médiocre impor- tance. Au point de vue de l'anatomie des organes digestifs, le Chon - drostome ne manque pas d’analogie avec un Salmone que j'eus aussi entre les mains, le Houting (Coregonus Houting, Val.) (+). (1) Voyez l’article concernant les Salmones, 126 LEGQUIS. RÉSUMÉ SUR LES CYPRINOIDES. Douze espèces de Cyprinoïdes apportent donc leur contin- gent de faits à l'appui des conclusions que les autres familles avaient indiquées. | Le caractère saillant que celle-ci paraît offrir à un degré plus prononcé, c’est la pénétration dans le foie; constatée et entourée dans quatre espèces surtout de preuves décisives, elle se présente encore chez toutes les autres, quoique à des degrés divers, avec une force de probabilité capable, même imdépen- damment de l’analogie, d'exelure toute hésitation. Il en résulte une conséquence importante au point de vue du développement de la glande, et surtout de la portée phy- siologique de l'association entre les deux tissus. Chez plusieurs espèces, celles en général où le foie est le plus gros, notamment la Carpe, la Tanche, le Véron, les di- mensions de ce viscère varient beaucoup d’un individu à l’autre. Des animaux de même espèce, de même taille, de même va- riété, si l’on peut s'exprimer ainsi pour indiquer une exacte res- semblance dans certains caractères qui peuvent changer sans compromettre le type spécifique; des individus, en un mot, aussi identiques qu'on peut l’attendre chez des êtres distincts, sont munis d'appareils hépatiques fort inégaux. Leurs pancréas sont aussi à des degrés de développement plus ou moins avancés. fl semble donc déjà que l’importance des glandes abdominales ne soit pas en corrélation directe et nécessaire avec l'ensemble des fonctions. La variation de l'organe ne paraît pas liée à une variation de même ordre ni de même sens dans le développe- ment de l'animal. Il y a plus : on remarque d'ordinaire que le pancréas s'accroît lorsque le foie se développe davantage. Cette tendance est assu- rément générale, malgré des exceptions particulières, et avec une disproportion constante dans la marche des deux appareils, le foie conservant toujours une avance considérable sur l’autre glande. ARTICLE N° 8. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 197 Or, cette croissance parallèle et simultanée amène dans les Cyprins les deux tissus à la rencontre l’un de l’autre, parce que l'aire membraneuse étendue de l'intestin au foie y est toujours plus ou moins restreinte, Que lindividu ne paraisse nullement en souffrir, ce n’est pas un fait très-démonstratif, mais on a quelques meilleures preuves du peu de conséquence qu’entraîne la pénétration des glandes. Les caractères microscopiques, l'aspect extérieur, la couleur, la fraîcheur du tissu pancréatique englobé, sont les mêmes que dans les glandes libres. La grosseur des grains immergés est com- parable à celle des autres situés à la même distance du centre duodénal. Admettons même que le tissu pancréatique, saisi par le pro- grès du foie, eût une aptitude moindre au développement et se trouvât contrarié dans son activité physiologique. Il n’en résul- terait encore pour les fonctions générales qu'un trouble inap- préciable, car cette glande réparerait par son progrès dans une autre région ce qu'elle aurait perdu de vigueur dans l'invasion de son terrain par le foie. Nous savons en effet, et je me suis par- ticulièrement attaché à mettre en relief la généralité de ce fait, qu'outre le pancréas plongé, il en est un autre qui trouve vers l'æsophage, vers la vessie nataioire et les ovaires, des voies ou- vertes, en compensation de l'arrêt qu’il subissait dans le sens de l'intestin. En même temps qu'il se propage dans le foie, le pancréas de tous les Cyprins gagne, sous la forme granuleuse, des régions où je ne l'ai point rencontré dans les autres familles. La grande Carpe, la Tanche, sont de bons exemples de la particularité dont 1l s’agit. D'une part, 1l remonte vers la veine cave jusqu'aux environs de l'ouverture œsophagienne; de l’autre, il profite quelquefois, mais rarement, du confluent de la veine rénale et des vaisseaux de la veine natatoire, pour se porter d’abord en haut, puis en arrière, Jusqu'à de grandes distances. L'abondance des glandules, que je trouvais dans ces régions avant d’avoir étudié à fond le système wébérien, me jetait dans 128 LEGOUIS. de grandes incertitudes : si les masses voisines du duodénam et de communication vérifiée avec le tube digestif étaient, comme il le fallait bien croire, des pancréas, des analogies indéniables me pressaient de donner le même nom aux organites répandus au loin; et, si ces derniers élaient {rop distants pour faire par- venir leur contenu jusqu'à l'intestin, que fallait-il penser des autres ? Comparons maintenant, non des individus empruntés d’une seule espèce, mais les espèces entre elles : soit la Brème et la Carpe, dont les ressemblances biologiques sont probablement très- étendues ; ou mieux encore les trois petites espèces qui habitent ensemble tous nos ruisseaux, le Véron, la Loche et le Goujon. Que ces trois animaux vivent de la même vie, c’est un fait connu de tous. Ils atteignent à peu près le même volume; la longueur de l'intestin n’admet que des variations relativement faibles ; tandis que, par suite de la différence des types, l’espace circum- duodénal de la Loche est plus étendu, son foie notablement moins rapproché de l'intestin, et, par suite, la plus grande partie du pancréas est extra-hépatique. I semble ainsi qu’on suit auto- risé à conclure que, toutes choses égales d’ailleurs, le dévelop- pement du pancréas peut se faire indifféremment en dedans ou en dehors du foie, sans qu’il en résulte aucune modification sen- sible pour les forces ou les aptitudes des individus appartenant à ces familles d'Osseux. Les particularités qu’affecte dans cette famille la concomi- tance avec les veines lui donnent aussi, peut-être, un plus grand intérêt, puisqu'elle tend à s'effectuer malgré les difficultés que la dissémination de là veine porte lui offre d'abord, et qu'elle se fait avec des troncs efférents, tandis que, chez les autres Osseux, le pancréas occupe le système afférent au foie. ARTICLE N° 3. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 129 OBSERVATIONS SUR LES ÉSOCES. I ORPHIES. Aiguillette ou Orphie (Belone longirostris, L.). J'ai donné à l'étude de cette espèce beaucoup de soin et beau- coup de temps. L'intérêt qu’elle présente en elle-même n’était cependant que la moindre raison de m'y arrêter d’une manière spéciale. Ilme semblait nécessaire d'établir, par un travail compa- ratif, la concordance rigoureuse des faits mentionnés par Brock- mann, avec les résultats que me fournissaient les procédés d'injection et d'examen microscopique. Choisir une des espèces les mieux décrites par les deux anatomistes allemands, lui consa- crer à mon tour un lravail approfondi, n'était-ce pas le seul moyen prompt et légitime pour faire profiter le sujet, sans plus d'enquête, de tous les autres faits découverts par eux. On verra, sur cet exemple, combien sont exactes leurs observations ; pas un seul des résultats ne se trouve infirmé; et, s'ils sont mcomplets, la description du pancréas du Belone indique la voie par laquelle on pourrait achever, d’après les indications de ces anatomistes, l'histoire du pancréas de chacune des espèces qu’on n’a pas revues depuis. Chez l'Aiguillette, MM. Brockmann et Stannius ont acquis une connaissance plus complète de l'appareil pancréatique que dans la plupart de leurs autres études. Is ont vu l’ampoule wébérienne, son insertion intestinale, quelques-uns des canalicules qui en dérivent etles plus voisins des corpuscules qui s’y rattachent. Quoiqu'ils ue paraissent pas s'être assurés autrement que par une recherche à la loupe de la communication des granules avec les canaux (1), ils ont eu là l'exemple d’une disposition qui dut ne leur laisser aucun doute sur le nom qui convient à l'organe figuré par ce système de granulations. . (4) Brockmann, loc, cit., p. 24. 150 LEGQUIS, Mais, à quelque distance, ils trouvèrent, comme chez tant d'autres espèces, un corps ayant le même aspect que les pre- miers ; 1ls ne réussirent point à Jui voir de canal abducteur: il eût fallu, en effet, imaginer que les canalicules observés par eux, pour l'excrétion des grains duodénaux, fussent susceptibles d'acquérir une portée Imcomparablement plus longue. Rien n’au- torisait cette hypothèse; car on ne pouvait soupçonner alors la multiplicité d’anastomoses du système wébérien, et, d'autre part, il est évident qu'un tube ne dépassant pas le calibre d’un lym- phatique ne pourrait servir par lui seul, et d’une manière utile, à l'écoulement des produits d'un corps glandulaire de pareil volume. Le but particulier que j’avais en vue ine conduisait à suivre, d'après cela, une marche tracée d'avance. Retrouver les parties découvertes par les auteurs, rattacher les plus voisines du duo- dénum au pancréas par les moyens nouvellementemployés ; puis, montrer qu'il en est de même pour les corps éloignés que les anciens procédés ne pouvaient faire rentrer dans le système pan- créatique; enfin, établir que ces parües ne sont que les points saillants d’un vaste ensemble rayonnant à de grandes distances sur les viscères. Sur un animal très-frais, pêché de la nuit précédente, Je trouvai la papille qui reste invisible tant que le velouté intestinal subsiste. Elle se termine par une longue valvule dont le bord est relevé de manière à figurer une mâchoire inférieure garnie de dents. Je n'ai pu compter le nombre des ouvertures au sommet de la papille ; mais, à sa base, on voit très-distinctement äeux orifices séparés vers l'endroit où s’insère le cholédoque; tous deux en boutonmières inégales. Le plus grand n'est qu'un en- foncement ampullare. Il m'a semblé voir au fond les bouches, non pas d’un seul, mais de deux au moins, probablement de trois et peut-être même d'un plus grand nombre de canaux. Sur d'autres sujets, j'ai retrouvé ce même orifice donnant sur une ampoule de Weber mieux conformée., Le canal biliaire se recourbe brusquement en s'élargissant avant de se jeter dans l'intestin. Autour de ce pelotonnement aplati s'enroule un corps annulaire » ARTICLE N° 9, DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. CL qui semble n'être qu'un dépôt de graisse, mais qui dépend en réalité, de la glande pancréatique. Chez les individus de plein développement glandulaire, ce cor- puscule est le résultat d’une agglomération en masse unique portant sur plusieurs granules de Brockmann, et par une soudure analogue à celle qu’on trouve dans la Sole. Les tubes de déversement appartenant aux masseites voisines, rapportées jadis au pancréas, se voient bien au microscope ; quelques-uns partent des ponctuations reconnues au fond de l’'ampoule ; l’un d’entre eux, correspondant à la massette la plus voisine, pouvait se suivre à l’œil nu. Il ne restait donc plus, en ce qui concerne cette région, qu’à procéder à l'examen microscopique des tissus. Il fournit un double résultat comme chez le Turbot et tant d'autres. La fonction globulaire, dans cette espèce, côtoie les espaces pancréatiques. Je visitai d’abord une masse voisine de l'embouchure du cholédoque, probablement au nombre de celles qu’indique Brockmann. Les cellules en sont très-distinctes ; on en trouve d’isolées, d’autres se présentent en amas. Elles sont exac— tement rondes, tandis que la plupart des autres espèces les offrent d'un contour plutôt ovale. Elles réfractent fortement, sont en général légèrement pomtillées, et affectent de grandes dimen- sions qui vont jusqu à 0°*,003. Une seconde variété d'éléments représente la production globu- laire. Ce sont des globules d'aspect analogue, mais n’atteignant guère que le quart de la taille des précédents. Une deuxième massette, prise sur la même région, offre encore les mêmes cellules, mais la variété des plus petites s'y voit en beaucoup plus grande proportion; les unes et les autres sont un peu altérées et ponctuées, quoique toujours rondes. Cependant, sur un des bords de la préparation, quelques éléments paraissent porter comme une pointe; ces cellules appartiennent à la grande variété. Certaines réglonssont occupées par des masses de grosses cellules, d’autres par des amas de petites; leur nombre se balance à peu près en dermier résultat. Que ces éléments pussent être des globules hématiques, c’est 132 LEGOUIS. une supposition qu’on n’a même pas Heu d'examiner. Is n’ont rien du globule, ni la couleur, ni le noyau; le leur est difficilement visible lorsqu'il existe; les différences de taille seraient d’ailleurs suffisantes par elles seules pour la distinction des deux sortes de cellules. I ne manque done, aux corpuscules de MM. Stannius et Brockmann, aucun des caractères qui conviennent à la glande pancréatique. Après avoir ainsi confirmé les résultats de ces auteurs, essayons de les généraliser. Une parcelle enlevée à la grosse masse laiteuse, sur laquelle ils expriment leurs doutes, offre des cellules de grosse espèce, identiques avec celles du pancréas central; mais, 101, les petites sont dominantes ; beaucoup sont altérées, pontillées et déformées. Étudions maintenant le pancréas diffus. Entre les diverses massettes de Brockmann, s'étend, sur la plupart des sujets, une membrane épaissie de tissu glandulaire. Un lambeau de cette trame est arraché dans la région entre l'intestin et la rate. Dans cette lame blanehâtre circulent plusieurs vaisseaux, en par- ticulier la veine splénique. Ce sont encore de ces grandes cellules caractéristiques; Île lambeau ne renferme, ni une goutte de graisse, n1 un seul globule sanguin. Mais, quoique les grandes cellules y soient en immense majorité, les petits noyaux libres, très-réfringents, s’y rencon- trent aussi. Cette préparation rappelie exactement celles du Merlus, quant à leur aspect général. Enfin, un tube de Weber la traverse de part en part. Passons à d’autres régions. Les vaisseaux qui se rendent au foie se creusent dans la substance de cet organe, avant de s’y plonger, des sillons superficiels formant un réseau de disposition frappante. Autour de tous ces canaux, on retrouve, si la pièce est assez fraîche, cet enduit bien connu qui dut être considéré jusqu'ici comme de la graisse. L’essai microscopique en est fait, et sur plusieurs coupes 1l ne se trouve pas un utricule, et pas une seule goutte graisseuse ; mais toujours le mélange de grosses o ARTICLE N° 0. 0] DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 1353 cellules glandulares et de petits éléments clairs, mobiles et réfringents ; la proportion de ces deux parties constitutives va- riant d’un point à l’autre, mais toujours supérieure du côté des globules lymphatiques. Souvent dans ces observations multipliées, des capillairesavec leur contenu épanché se montreront concurremment aux cellules ; et Jamais on n'hésitera à rapporter aux deux systèmes sanguin ou glandulaire les parties qui leur reviennent. Les globules sont Jaunes, ovales, flottants ; les grandes cellules, deux fois aussi volu- mineuses, sont blanches, réfringentes et fixes ; les autres, incom= parablement plus éclatantes et plus petites. La comparaison s'offre souvent aussi entre les capillaires san guins et des tubes de Weber ; elle est moinssüre, mais le défaut d’anastomoses de ces derniers les distingue parfois du système sanguin dont les rameaux, plus larges, forment des réseaux compliqués. Quant à la graisse, on n’en voit pas trace. Qu'il suflise maintenant, pour ne point charger cette description de détails inutiles, de dire que le même travail, suivi des mêmes résultats, fut porté sur une foule de points de la membrane blanche; en particulier, j'examinai le prolongement qu’elle envoie le long de l'intestin jusqu'aux environs de l'anus. Il s'y trouvait des points d’un blane mat, rappelant ceux du Turbot et du Merlus, que le microscope fit reconnaître en effet pour des glandules noyées dans un parenchyme plutôt lymphatique où surabondait la petite espèce de cellules. En résumé, la plupart des individus sont extrêmement peu graisseux, bien que, sur une première inspection, je les eusse jugés abondamment pourvus de graisse. La ressemblance super- ficielle avec la graisse n'est même point véritable; quand on compare ces surfaces avec des membranes réellement adipeuses, on constate des différences bien apparentes; mais, au premier abord, pour celui qui ne soupçonnerait point l'existence d’un tissu pancréato-lymphatique, il n’y a que la graisse dont la cou- leur et la consistance aient quelque rapport à ce qu'il voit, et l'assimilation s’établira dans l'esprit, faute de mieux, très-natu- SC, NAT,» JUIN 1873. XVIII, 10, — ART. N° 3. 154 LÉGOUES. rellement, et par exclusion de toute autre hypothèse aussi pro- bable. Voilà donc une espèce dont les pancréas centraux avaient été découverts ; les explications plus détaillées dans lesquelles je suis entré me permettront, à propos de plusieurs autres dont l'exa- men aussi approfondi n'a pas été possible, de conclure par une analogie qui s'impose. Ici, pour quelques massettes existant et découvertes auprès du duodénum, un examen plus prolongé a mis en évidence la diffu- sion de la glande jusqu’à l'extrême limite des membranes, dans le hile du foie, le long de l'intestin jusqu'à petite distance de l'anus, pres de la rate, sur les vaisseaux biliaires, les veines et vers la vésicule. Les membranes étaient épaissies de ce tissu gra- nuleux lymphatique pénétré des acini de la glande avec leurs canaux. L'épaississement, considérable au centre, va s’atténuant d'une manière graduelle vers les régions périphériques des mésen- tères ; en certaines régions privilégiées apparaissent normalement des tubercules charnus de même substance, tels que le gros corps vu par Slannius, au sujet desquels on pourrait répéter l'observa- tion à laqueiïle donne lieu le pancréas massif du Caranx par rap- port au tissu diffus. Tout cet appareil, immense et compliqué, n'est cependant qu'un pancréas avec interstices interlobulaires comblés par le stroma producteur des globules lymphatiques de Leydig. La netteté et la simplicité de ces formes est en partie la con- séquence de l'absence d’appendices. Les tubes de Weber sont souvent nacrés dans ces espèces; Île reflet s'étend quelquefois aux membranes tout entières, surtout à la vésicule. I semblerait que, dans ce poisson, les globules de lymphe fussent en relation avec la cause de ces teintes argentées. Je profiterai souvent, pour éviter les redites, des détails dans lesquels je viens d'entrer. ARTICLE N° 3. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 135 Il BROCIETS. Brochet (Esox Lucrius, L.). Je ne n''arrêterai point à la description du pancréas de cet animal, très-complétement donnée dans ses parties visibles par Alessandrini (4), et déjà vu par Weber (2). Mais je ne puis passer sous un complet silence des observations qui confirment si exactement ce que je puis apporter de nouveau dans d’autres espèces, et des faits en accord si parfait avec la manière dont on doit, selon moi, concevoir la disposition de l'organe. L'intestin rectiligne du Brochet, comme celui de l’Anguille, est accompagné d’un système veineux mésentérique presque dénué de dépendances membraneuses. Le pancréas rencontre le trajet vasculaire auprès du duodénum, s’y attache, et le suit vers les parties inférieures de l'intestin ; mais, comme tout dévelop- pement en largeur lui est interdit par l'absence de mésentère et la pauvrelé du système vasculaire sanguin, 1l s’accumule en masse auprès du sommet de l'intestin. C'est grâce à cette cir- constance qu'il fut eonnu plus tôt dans ces espèces dépourvues de cæcums et de circuits intestinaux. fi FAMILLE DES SILURES. Silurus Glanis, L. Weber, puis Brandt et Ratzburg (3), ont décrit le pancréas du Silure, que je n’ai pas eu occasion de rechercher. Cette vérifi- cation n'offrait aucun intérêt : on comprend que les Silures, voisins des Ésoces ayant l'intestin sur une ligne à peu près {4) Alessandrini, Novi Comment. Instit. Bonon., 1835. (2) Weber, Meckel's Arch. für Anat. und Physiol., 1827. (3) Voy. Introd. histor., p. 7. 136 LEGOUIS. droite, le phénomène ordinaire dans ce cas, commun au Bro- chet, à l'Orphie, à l’Anguille, au Congre, devait se produire, et l'accumulation du pancréas s'effectuer à la tête de l'intestin. FAMILLE DES CYCLOPTÈRES. Lumph (Cyclopterus Lumpus, L.). Je n’ai recueilli sur ces animaux singuliers que des renseigne- ments très-incomplets. Deux exemplaires sont venus à ma dispo- sition en assez bon état, mais tous les deux très-petits, le plus grand de 12 centimètres, l’autre à peine de 8, dans la plus grande longueur. Ils m'ont suffi cependant pour m'’assurer de l'existence d’un pancréas. Pour en trouver la masse principale, la recherche n’est ni longue ni difficile. En ouvrant l'animal par le côté droit, on voit aussitôt le duo- dénum et les premières parties du tube intestinal qui cireule à la surface de la masse des viscères. Si l’on détache avec soin cette anse pour la rabattre, on découvre au-dessous d'elle, et un peu en arrière du bord hépatique, un petit corps glandulaire qui semble isolé. C'est la grosse masse pancréatique de cette espèce ; mais je m'étonne peu que Stannius, après l'avoir vue, n’en ait pu soup- conner la nature, car elle est fort éloignée du duodénum. Il ne semble pas qu'il y ait d’autres masses visibles au voisinage de l'intestin ; de telle sorte que, pour celui qui ne connait ni l'éten- due que ces pancréas disséminés microscopiques peuvent recou- vrir, ni l'ampleur du système vasculaire wébérien, il sera diffi- cile de rattacher ce corpuscule à ses véritables fonctions, Il faut reconnaître aussi que, pour un pancréas principal, pa- reille station a quelque chose d’insolite; on le trouve à l'angle de la veine mésentérique avec la veine porte, également loin du duodénum, de la rate et de la vésicule (1). Dans cette espèce, (1) Les deux animaux étudiés étaient pourvus d’une vésicule très-distincte et non ARTICLE N° 3. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 137 comme chez les Gadoïdes, une veine génitale se rendant à la veine porte hépatique constitue avec la mésentérique un grand cordon veineux à droite de l’ensemble viscéral. Mais, tandis que sur le Merlus ce cordon servait plutôt de limite que d'appui au tissu du pancréas, la masse du Cycloptère vient s'attacher en un de ses points. Du reste, le travail en ce point exige beaucoup de précau- tions ; toutes les parties de la masse des viscères sont jointes entre elles par des ligaments très-nombreux et fort denses qui forment à travers le tout un lacis inextricable. Les appendices pyloriques, digités exactement comme un gant, forment une touffe épaisse au-dessus et à côté du pylore; et les brides tendi- neuses qui les relient achèvent de rendre très-laborieuse la sépa- ration des vaisseaux. J'attribue à ces difficultés l’insuecès que j'ai éprouvé à suivre les canaux de Weber. J'ai vu celui de la masse la quitter pour se diriger vers le duodénum, mais je n'ai pu le conduire jusqu’à l'intestin. Comme il n’y a point ici de mésentère en lame con- tinue, à chaque coup de scalpel pour séparer les viscères, on doit craindre de rompre la fibrille qui donne appui au vaisseau wébé- rien et à la veinule. D'ailleurs il est aussi impraticable d'observer au microscope ces écheveaux de fibres pris en masse que de les décomposer pour en examiner séparément tous les filets. Je ne puis croire que ce desideratum jette quelque diserédit sur mon affirmation quant à la nature de l’organite. Au surplus, je ve douterais pas d'arriver un jour à une démonstration com- plète, car la nacre est susceptible d’apparaître quelquefois sur ce poisson : elle s’étendait chez un des échantillons non-seulement au tube excréteur de la masse, mais à la masse elle-même, qui paraissait argentée sur une portion de sa surface (1). accolée au foie, contrairement à ce que je crois avoir lu quelque part dans l’Arnatomie comparée. (Voyez pl. 16, fig. 4.) (1) Quoique cela ne dépende point du sujet, je ne puis quitter cette espèce sans mentionner l'extrême épaisseur des parois æsophagiennes, et les rideaux fibreux qui descendent des deux côtés de la colonne vertébrale jusqu’au pourtour de l’œsophage , laissant entre eux une cavité. 138 LEG@OUES. OBSERVATIONS SUR LES ATODES. 1° Congre (Muræna Conger, L.), 1! suffira d'ouvrir un poisson de cette espèce pour apercevoir le pancréas. Mais, outre ce qu’on reconnaitra comme tel du pre- mier coup d'œil, un examen plus approfondi fera confondre avec le même organe beaucoup de dépendances inattendues. L'intervalle entre la vésicule et l'estomac contient un corps de couleur rose qui, après avoir tapissé la partie inférieure de la vésicule, se divise en trois bandelettes, dont la plus importante se dirige vers le pli intestino-stomacal, puis accompagne la veine stomacale qu'une disposition particulière des parties confond avec la veine mésentérique. La rate est garnie d’une membrane fibreuse qu'elle ne pos- sède nulle part ailleurs. Le pancréas forme de sa portion massive la tèle de la bande- lette de matière rosée, Entre la rate et l'intestin, il offre une tête volumineuse émettant de part et d'autre des lobules très-décou- pés ; puis il s'attache à la mésentérique, et descend avec elle en s'amincissant. Cette veine arrivée au niveau du bout de l’estomac s'écarte un peu de l’intestin sans que le pancréas cesse pour cela de la suivre; mais de place en place il envoie jusqu’à l'in- testin des sortes de digitations. Il est difficile de voir jusqu'où il va sous celte forme. Un pancréas diffus accompagne le précédent sur tout son par- cours ; les relations entre eux sont aisées à saisir, La membrane du pancréas en masse forme çà et là des replis ressemblant assez à de petits épiploons. L'intervalle entre les deux lames membra- puuses est rempli par le pancréas diffus; 1l est donc encore ici tel que déjà des recherches antérieures l'avaient fait supposer. Il conserve celte apparence membraneuse dans la région anté- rieure du tube digestif; mais plus loin il forme seulement deux filets, deux trainées continues de part et d'autre de la veine, et par conséquent aussi de part et d'autre de la queue du pancréas ARTICLE N° 3. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 139 massif. De la grosseur d’un fil, subissant des dérivations vers les veines latérales, ces trainées se prolongent plus ou moins loin ; en général plus lom que le massif avec lequel le tissu finit par se confondre. Revenons maintenant aux bandeleltes d’origine. La deuxième communique avec la masse principale à peu près comme le fait la précédente. Elle commence sur une assez large étendue ; tou- Jours lamellaire au début, elle devient aussi plus tard un sys- ième de deux filets accompagnant la mésentérique inférieure. Elle descend jusqu'à l'anus, où j'ai trouvé un amas de cellules pancréatiques. Elle s'épaissit par endroits en masses rognonnées que présentent de préférence certains Imdividus. Entin elle émet souvent un renflement considérable dans l'angle du bras montant de l'estomac avec l’æsophage. La troisième bandelette est linéaire; elle suit encore le trajet du tronc veineux principal. Dans cette espèce une paroi fibreuse épaisse, renfermant la rate et la vésicule du fiel, remonte vers la vessie natatoire. C’est dans cette toile fibreuse que se trouvent les vaisseaux allant au foie ; le filet pancréatique se tient en dehors. Du reste, la ligne qui suit cette veine n'est pas la seule; une autre descend vers le pli de la branche montante stomacale ; enfin une division de ce filet suit les veines le long du hile du foie, mais 1l n'y entre pas avec elles. Cela se passe sur la face droite et supérieure de la membrane fibreuse ; sur la face opposée, se trouve un cordon de même na- ture qui est une dépendance de la première bande. Ce cordon suit aussi la veine et par le dehors de la membrane. Il court le long du hile, mais, plus compliqué que le précédent, il émet des digitations à droite et à gauche parallèlement à des veinules, mais toujours en dehors de la membrane; quelques-unes de ces digitations marchent avec le faisceau cellulaire qui les contient vers les lobes du foie. Sous la face inférieure de ce viscère, en contact avec l’æso- phase, se trouve dans certains sujets un gros amas lenticulaire de substance diffuse : c’est un centre d’où partent quelques cou- lées dont la plus notable vas’attacher au diaphragme. 110 LEGOUIS. Les orifices intestinaux des conduits de déversement sont aisés à voir. À 2 centimètres environ du pylore qui se prolonge au dedans de l'intestin sous forme d'anneau membraneux, sont trois papilles perforées. Ce système répond, sur l’autre face de la paroi stomacale, un peu au-dessus du centre du pancréas massif. Le cholédoque arrive à l’une de ces ouvertures, non point à tra- vers le pancréas, mais rampant dans l'épaisseur de la paror. Les trois papilles, quelquefois un peu différemment dispo- sées, sont le plus souvent en série linéaire et sur une ligne trans- versale. La première à gauche, la plus grosse, offre une ouverture unique pour le passage de la bile. Près d’elle on aperçoit la seconde, divisée par une épaisse cloi- sou en deux compartiments. Deux ouvertures sont pratiquées dans l’un, quatre dans l’autre; 1l y en à peut-être encore plus, mais Ja loupe ne permet pas d’en saisir davantage. La troisième papille est beaucoup plus petite, cependant elle est aussi subdivisée en deux régions recevant, la plus antérieure au moins deux canaux wébériens, la postérieure trois. Hors de ces trois papilles, aucun canal ne débouche dans l’in- testin. J'ai fait à cet égard de patientes recherches dont le ré- sultat fut toujours négatif et certain. I n'existe sur la muqueuse aucun point, sauf ceux où s'implantent les trois éminences pré- citées, qui se distingue en quelque manière du surplus de la membrane, soit sur une pièce fraiche, soit après la chute des villosités et valvules. Une dissection attentive et scrupuleuse de la glande en masse porte aux mêmes conclusions, Partout elle se laisse aisément sé- parer de l'intestin, sauf aux trois points, et aussi sur les bords lobulés. Mais le long de cette ligne terminale du contact l’adhé- rence est due non au tissu de la glande, mais à la continuité de la trame conjonctive épaisse, qui, chez ce poisson, enveloppe certains viscères. Ici le pancréas est encore logé avec lintestin dans la même cavité péritonéale. La ligne médiane de la surface des contacts où devraient plutôt se trouver les bouches de canaux surnuméraires est précisément celle où l'adhérence est le moins ARTICLE N° 9. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. LA prononcée ; elle va diminuant vers la pointe, ce qui dispense de prolonger cette dissection laborieuse jusqu'au bout du pan- créas en masse. Le cholédoque ne perce le pancréas que sur une petite épais- seur, et la glande peut être considérée comme divisée en quatre parties : la tête, à partir de la ligne des orifices jusqu’à la termi- naison supérieure de la masse en contact de la vésicule du fiel; le corps, qui se subdivise au scalpel en deux parties, une de droite par rapport au poisson, et celle de gauche : celle-ci, beaucoup plus courte et bien plus mince, ne consiste guère qu'en une bande qui s'amineit pour recouvrir partiellement le dos de la partie droite. Cette division en parties inégales de droite et de gauche, très-visible dans le corps, se retrouve aussi dans la tête; elle est vraiment naturelle et se trouve en rapport avec les orifices. La deuxième donne un gros tronc qui se subdivise à mésure qu'il S'avance dans tout le corps droit; et un autre très-séparé du premier, qui marche vers la tête. Le troisième en fait autant. Les trones du corps partent du dessous de la cloison épaisse. Ceux de la tête partent du dessus. En réalité 1l y a là quatre troncs formés de canalicules ac- colés, et ces quatre trones sont groupés deux par deux, mais seulement à la sortie. Ces canalicules sont très-blanes et rappellent un peu ceux du Belone, ou l'éclat de la glande dans la Sole et dans le Gycloptère, ce qui les rend faciles à suivre. Leur séparation à la base des papilles n’a rien qui doive étonner, car on les voit diverger en différents sens dès leur entrée dans la substance de la glande. Ils vont se divisant et se subdivisant à l'infini, mais 1ls con- servent toujours leur couleur, que l’on retrouve jusque dans le diffus. J'ai cru voir que l’une des communications principales de ce dernier se fait par deux coulées émises par le massif, avec la traînée n° 1, au-dessus de l'insertion de la branche mon- tante sur l'estomac; ces traînées ressemblent à des veines gon- flées. 142 LEGOUIS. La continuité des tissus et le passage des vaisseaux de Weber entre le massif central et la première bandelette S'établissent encore par une autre voie. C’est une longue ligne de suture, à peu près médiane, sur le dos du massif, et qui cesse à la hauteur des papilles intestinales, parce que les wébériens du diffus tra- versent le massif à ce niveau. Les bandelettes n° 2 et n° 3, reliées entre elles sur une ligne fort étendue, communiquent avec la masse duodénale par une petite bande dans laquelle se trouvent plusieurs vaisseaux ; cette bandelette va mourir dans le pancréas en masse, et très-près de la saillie que forme sur le dos la papille biliaire, mais à droite. Ilest donc probable que le long de ces vaisseaux se trouve un vaisseau de Weber se rendant aux deux bandeleltes; car pour- quoi la bande de communication viendrait-elle se fixer de pré- férence si près des papilles ? et si tous les vaisseaux étaient des veines, pourquoi viendraient-elles de la veine qui traverse le pan- créas, quand la bandelette n° 2 est traversée elle-même dans toute sa longueur par une veine issue d’un autre rameau de la veine porte ? Pour ce qui regarde l'examen microscopique, je me borne à transcrire en partie mon carnet d'observations. Dans la bandelette imtestino-stomacale le premier lambeau offre des cellules glandulaires. Elles sont beaucoup plus petites que celles du Belone, inférieures même aux plus petites de ce dernier ; mais elles s’en distinguent surtout en ce qu'elles parais- sent beaucoup plus pâles. Elles sont absolument incolores et ré- fractent la lumière moins fortement que celles du Belone. Enfin elles offrent un noyau de 0"",002 à 0"",004 environ; les cel- lules les plus ordinaires sont de 0°",010 à 0*",012 environ. Ilexiste une seconde variété de cellules plus grosses, mais bien moins grosses que les rondes du Belone (au plus 0"",03 en lon- gueur, et 0"”,02 en largeur); un peu irrégulières et beaucoup moins nombreuses. Les petites ont été vues en place et roulées sur les bords. Ces cellules ne peuvent être les utricules de graisse. Elles sont trop petites, trop régulières en elles-mêmes, trop égales ARTICLE N° 6. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 113 entre elles ; l'aspect de l’ensemble qu’elles forment est trop régu- lier; on leur trouve trop peu de réfringence avec un noyau central ; elles roulent hors du stroma sans se détériorer; elles sont rondes; enfin la préparation comprimée ne renferme pas une goutte de graisse. Ces éléments ne sont pas davantage du sang : car la couleur en est pâle et non jaune; ils sont ronds et non ovales; le noyau, beaucoup trop petit, est aussi trop réfringent; les cellules sont trop petites; leurs contours ne sont pas aussi entiers, n1 aussi fins que ceux des globules; leur grosseur est variable; enfin, elles sont bien trop limpides. Je fis ainsi neuf observations sur cette même bande, et celle dont le résullat vient d’être rapporté fut encore surpassée de netteté par plusieurs autres. Enfin les points les plus dignes d'attention sur les deux autres bandelettes, soumis aux mêmes essais, amencrent des constata- tions aussi faciles et non moins démoustratives. Le pancréas massif est constitué des mêmes éléments; mais 1l renferme en outre une immense quantité de granulations lym- phatiques ; le diffus en produit beaucoup moins. Une dissolution étendue de soude caustique commence par rendre les cellules plus visibles, mais elles pâlissent bientôt, per- dent de plus en plus leur réfringence, puis s’effacent comme tout le reste, sans que les noyaux aient apparu. Si la dissolution était concentrée, ce dernier résultat s’obtien- drait presque immédiatement. L'acide acétique attaque aussi les cellules, mais d’une manière toute différente. Elles restent visibles, perdent une partie de leur éclat, se fripent à la surface, se déforment comme si, par effet de ramollissement, elles tendaient à revenir aux formes simples du cercle et de l’ellipse; en même temps, sur un grand nombre, le gros noyau linéaire, c’est-à-dire allongé, se fait voir au centre. 2° Anguille (Muræna Anguilla, L.). L'étude assez complète du Congre eût pu dispenser d’un tra- vail spécial sur l’Anguille. Aussi n’ai-je prolongé ces nouvelles 1h LEGOUIS. recherches, reprises comme plusieurs autres à deux fois en Nor- mandie et au Muséum, que jusqu’au point suffisant pour démon- trer l’entière analogie. Le pancréas massif oceupe la même place, adopte la même forme et contracte à peu près les mêmes rapports. Sa liaison avec la veine, déjà mdiquée semble-t-il par Müller (1), est aussi intime que dans l’Anguille de mer; le tissu se propage encore de proche en proche d’après la même lot et suivant la même voie, mais les annexes diffuses sont beaucoup moins développées. On ne trouve, ni sur les petits sujets, n1 sur les grands, ces longues coulées parallèles à la ligne moyenne du principal pancréas qui doublent le volume de la glande dans les Congres. Mais quant à la constitution de la masse principale, elle semble identique avec celle de l’espèce voisine : un grand nombre de cellules et une infinité de granulations Iymphatiques. Contrairement à ce qui m'a paru ordmaire à beaucoup d’es- pèces, ce sont ici les cellules nucléées productrices du suc pan- créatique qui ont la plus grande taille ; l'inverse paraît avoir lieu dans le Congre, les grands éléments irréguliers y répondent aux aréoles de la lymphe, qui manquent de noyau. Les cellules glandulaires de Anguille présentent une régula- rité si remarquable, et se construisent sur un type si voisin de celui que l’on connaît aux cellules sécrétoires des Mammifères, que j'en ai poussé assez loin l'étude microscopique. Un peu plus grandes peut-être, plus ovales et plus régulières que celles du pancréas humain, elles ont pour la plupart un noyau voisin du centre, unique et médiocre, mais très-réfringent (2). Je n'y ai rien saisi qui puisse passer pour une note caractéris- tique; mais cette similitude même avec des éléments tirés de pancréas dont le rôle en a été vérifié, me semble en indiquer une aussi grande dans les fonctions. (1) Müller, Meckel’s Archiv., 1842, p. 491. (2) PI. 48, fig. 3. ARTICLE N° 4. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 145 OBSERVATIONS SUR LES SPAROIDES (1). I GROUPE DES PAGRES. Spare (Sparus erythrinus, L.). Ce qu'on remarque d’abord en ouvrant un Pagel violacé, c’est que les veines mésentériques circulent entre les circonvolutions intestinales tapissées d’un certain enduit glutineux, ponctué de rouge, qui rappelle exactement celui du Congre. Examiné au microscope, il se trouve formé de cellules qui ne peuvent être graisseuses, car elles sont trop petites, plus en- core que celles du Congre : les plus grosses mesurent 0"*,013, leur taille s'arrête à 0"",01. Elles forment un tissu très-régu- lier, ressemblant à celui trouvé dans le Glazen, de cellules serrées, pressées et comme polyédriques ; elles ne sont pas jaunes, mais parfaitement blanches ; quoique très-réfringentes, elles ne le sont pas à la manière de la graisse ; très-limpides, elles donnent un bord assez noir, mais dont le trait esl moins gros que celui des bulles de graisse; enfin on n’a pas une goutte d'huile sur toute la préparation, quoiqu'il s’y trouve des milliers de cellules, le thermomètre étant au-dessus de 18 degrés. Il s’en faut plus (1) Je regrette de ne pouvoir donner avec plus d’assurance le nom des espèces, Les caractères tirés de l’armature dentaire m'ont paru sûrs, mais ils ne définissent que des groupes, Pour bases de mes déterminations, j'avais l’{chthyologie de M. Desvaux, d'Angers, avec l’Iconographie coloriée du Règne animal; je devais à l’obligeance de M. Guillou, directeur de l’Aquarium, les Péches de Duhamel; mais ces ressources m'ont été insuffisantes. Du reste, les pécheurs eux-mêmes semblent incertains sur l'identification des espèces. Ils donnent le même nom à des animaux différents et des noms différents à des individus semblables ; la confusion augmente par l'emploi parallèle de noms français et bretons. . Cette incertitude n’a pas un grand inconvénient pour le sujet; car, entre tous les Spares, les variations du système viscéral ne sont guère plus étendues dans les limites du groupe que dans l'individu ; en conséquence, j'ai réuni les observations par gen- res, adoptant le titre spécifique qui m'a paru le plus probable pour la majorité des individus qui s'y rapportent. 116 LÉGOUIS. encore qu'elles ressemblent aux hématies. Elles sont blanches et non jaunes, irrégulières des bords, bien plus claires et réfrin- gentes, et plus transparentes; enfin elles forment tout le tissu. On voit d'ailleurs les vaisseaux gorgés de sang traverser ces masses de cellules et s’y résoudre en capillaires sans aucune trace de lésion n1 d’épanchement des globules. Mais si l’ensemble formé par ces éléments est distinct à tous égards des membranes adipeuses, est-il pour cela pancréatique ? Comme dans le Maquereau, le Merlus, le Congre, le Turbot et tant d’autres, 1l l’est, mais non tout entier. Avec quelque som on arrive assez vile à reconnaître, dans la formation qui vient d'être décrite, une deuxième sorte d'élé- ments. Ce sont des cellules plus grosses, plus arrondies, à bord plus régulier, portant pour la plupart un noyau considérable, 0"",006 dans les plus grandes, qui s'isolent sans difficulté et se retrouvent ensuite inaltérées sur les bords, et qu'on voit rouler avec des granulations dans les courants du porte-objet. Tous ces caractères les séparent nettement des éléments cellulaires polyédriques constitutifs du stroma qui n’ont pas de noyau, et ne se peuvent séparer de la trame, puisque la trame n’est autre chose que ces éléments eux-mêmes. Comme j'ai eu l’occasion de le répéter plusieurs fois, à propos d’autres espèces, les aréoles polygonales fines sont en rapport avec la formation globulaire de la lymphe; les cellules plus libres et à noyau appartiennent spécialement à l'organe pan- créatique (1). Il y a des régions où la trame lymphatique semble exister seule ou associée à la graisse. Enfin, les mêmes résultats s'obtiennent par l'examen de l’enduit en d’autres points. Sur un Ruel (2), j'étudiai quelques coupes prises de la masse graisseuse qui suit le fond de la vési- (4) Voyez, pour la discussion plus complète de ce qui touche la production des cor- puscules lymphatiques, l’article sur le Cottus. (2) Nom en langue bretonne d’un poisson sinon identique, au moins très-voisin et de même conformation viscérale (Rue! signifierail rougeûtre en français). ARTICLE N° DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 147 cule. On y trouve des utricules de graisse en trés-grand nombre, mais aussi une autre catégorie de cellules très-différentes qui sont, à n'en point douter, des éléments lymphatico-pancréatiques. Parfaitement semblables à celles des autres régions, elles sont très-reconnaissables des vésicules graisseuses, comme beau- coup plus petites (0"",01 en moyenne) et moins réfringentes ; elles forment des tapis où il n'y à pas une seule cellule de graisse, très-régulières, mais non pas rondes comme le se- raient de simples globules huileux. Les gouttelettes fines de graisse s’ajustent en masses, non en lames ; si elles ne sont très-nombreuses, elles se séparent plus ou moins les unes des autres, au moins par groupes; elles sont plus réfringentes, plus inégales, toujours rondes, jamais com- primées ; tandis que nos cellules glandulaires, plus ou moins déformées par pression, ont à leur surface de petits endroits clairs avec d’autres plus foncés. Enfin, si les gouttelettes fines, aussi bien que les cellules, peuvent se trouver isolées des masses voisines, quelquefois la remarque suivante suffit pour les séparer ; les gouttelettes d'huile plus légères montent au contact du verre mince, les cellules plus lourdes que le liquide ambiant restent au fond, et le microscope ne donne les unes et les autres que si l’on change le foyer. Le tissu lymphatique diffus existe donc derrière la vésicule du fiel, il est dans cette région environné de graisse ; Je l'ai retrouvé avec le même caractère auprès d’une des veines qui parcourent la région voisine de l'anus, perpendi- culairement à la direction du rectum. Si concluants que fussent les faits obtenus par l'examen mi- croscopique, la disposition des orifices laissant quelque espoir de faire pénétrer une injection au moins en partie, j'entrepris ce nouveau travail. Il n’a réussi que chez deux sujets (4). Avant d'en indiquer le cours, entrons dans quelques détails, par rapport à l'anatomie des organes splanchniques. Je citerai, chemin faisant, les masses pancréatiques visibles. (1) Tous les deux, selon moi, de l'espèce Pagel (Sp. erythrinus). 118 LEGQOUIS. La vésicule, très-longue et très-étroite, offre un étranglement vers son milieu ; entre elle et la rate est la masse pancréatique principale de la grosseur d’un pois; la veine porte double en- voie un de ses troncs passer près de ce corps glandulaire prin- cipal, pour en rencontrer ensuite un autre plus petit. L'autre veine porte se distribue au gros lobe du foie ; elle rencontre le cholédoque, et près de là se développent cinq ou six massettes glandulaires. Les deux veines mésentériques répondant aux deux veines portes sont, ainsi que leurs divisions, bordées de franges du tissu elandulaire mixte, où l’on aperçoit quelques reflets nacrés de parties wébériennes. Le cholédoque, formant un circuit insolite, aboutit sur le pre- mier appendice pylorique ; les deux autres cæcums avortent normalement en partie; le troisième n’est qu’une bosselure de la surface duodénale. La papille au milieu des valvules muqueuses est perforée par deux canaux aboutissant à de très-petits orifices. Le plus voisin du pylore appartient au pancréas. Il donne dans une fort petite ampoule si courte, que l'injection est très-diflicile. Lorsqu'elle m'a réussi, j'ai vu se remplir jusqu'à 2 centimètres du point de départ un réseau compliqué de tubes très-fins, vari- queux, dont plusieurs allaient aux grosses masses, un autre au foie. Point de veine d’ailleurs qui n'ait son associé wébérien ; l'apparence de l'injection rappelle exactement celle obtenue sur le Bar. L’injection établit donc, comme l'emploi du microscope, que les veines, en même temps qu’elles se couvrent de l’enduit bril- lant formé d'un tissu d’aréole avec parties cellulaires, supportent une canalisation wébérienne latérale, qui dessert les pancréas massifs et microscopiques. L'un de ces Spares si féconds en résultats me fournit aussi le premier exemple visible d’enclavement du pancréas dans le foie. Suivant les échantillons, le massif pancréatique principal, gar- dant les mêmes rapports vasculaires, semble tantôt plus près, ARTICLE N° 9, DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 149 tantôt plus lom de la surface du lobe hépatique qui le recouvre. Mais sur un animal dans lequel cette masse paraissait plus éloignée du foie, on remarquait, à la face inférieure précisément du même lobe, deux tubercules arrondis, se touchant presque, du volume d'un gros pois, n’ayant ni la teinte, ni le grené du foie, où ils sont enfoncés, mais qui ne les recouvre pas encore. Leur couleur est rose, leurs capillaires gorgés de sang. Nul doute que ces corps n'aient été envahis par un progrès du foie postérieur à leur propre développement ; ils sont sur le trajet de la première veine porte devenue intra-hépatique. Enfin, chose extrèmement remarquable, du pancréas massif principal extérieur au foie, à l’une de ces glandules, passe un filet isolé qui se maintient hors du foie. Ce fait, dont l’analogue ne s’est Jamais rencontré ni depuis, ni avant cette date, me semble dé- montrer d’une manière saisissante la communication des masses jusqu'aux centres par les tubes wébériens. L'échantillon avait séjourné un Jour entier dans l'alcool quand Jai pu examiner les cellules de ce pancréas intra-hépatique ; c'étaient bien encore celles du pancréas glandulare, petites, claires, la comparaison en fut faite directement. La constitution de cette tumeur était, du reste, différente de celle du foie ; elle ne renfermait que cette espèce de cellules, les échantillons ürés du foie au contraire offraient de larges cel- lules, encore pour la plupart très-distinctes, qu'on ne peut con- fondre avec rien. Ces lambeaux du foie montraient en outre des débris provenant des grandes cellules, tandis que les coupes faites sur la tumeur ne renfermaient aucune grosse cellule hé- patique. Cinq lambeaux furent étudiés de part et d'autre. II GROUPE DES DAURADES. Chrysophris Aurata, Guv. et Val Leur foie, peu volumineux, communique par un seul hépa- SC. NAT. JUILLET 1875. XVIII. 16. — ART. N° 3. 150 LEGQUIS. tique avec le tube de déversement d’une vésicule très-bizarre- ment contournée. Les appendices sont au nombre de quatre. Les deux mésentériques, et même en général tous les canaux constituants de la veime porte, qu’ils viennent du rectum, de l’in- testin ou de l'estomac, ont leur garniture de tissu mixte Iympha- tique et glandulaire. La principale et peut-être la seule masse importante est encore voisine de la vésicule du fiel. Elle est formée de cellules parfaitement distinctes, plus petites que celles du Merlus, rondes ou polygonales, ressemblant assez à celles du Trigla lyra. Il y à aussi un autre pancréas répandu dans l'intervalle des tubes intestinaux. J'y ai reconnu l'existence de cellules tout à fait différentes des cellules graisseuses ordinaires, mélangées de quelques utricules graisseux. Au premier coup d'œil, Paspect de la matière interposée aux tubes de l'intestin pouvait déjà faire conjecturer que cette matière renfermait des éléments glandu- laires; elle possède une couleur différente de la graisse, plus rosée, plus vascularisée. Elle parait moins homogène, plutôt répartie en granulations formant des groupes à contours moins arrondis. Toutefois les cellules ainsi mélangées à la graisse que les premières observations m'avaient fait apercevoir devaient appartenir à la variété aréolaire lymphatique. Je fus confirmé ultérieurement dans celte opinion par la rencontre sur ces mêmes régions d'autres éléments aussi différents de la graisse, mais bien plus grands, plus mobiles, et se rapprochant jusqu'à l'identité de ceux du paneréas massif vésiculaire. FAMILLE DES MÉNIDES. Glazen (Mœna). Après avoir déterminé sommairement le pancréas massif de celte espèce, je me trouvai conduit à la choisir comme type d’une étude très-importante. Les cellules des acini pancréatiques répandues à travers les urfaces péritonéales n’ont, avec les globules sanguins, que des ARTICLE N° d. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 151 rapports trop éloignés pour qu’une confusion fût jamais possible ; toutefois, dans certaines espèces, entre les hématies et les aréoles lymphatiques, on trouve une communauté de dimensions et de formes qui me jeta souvent dans l'incertitude au commencement de mon travail. Ces doutes se présenterent dans le courant des recherches dont les Hæna et les Spares furent l’objet, en même temps qu’une occasion favorable de pousser jusqu'au bout la comparaison raisonnée des deux éléments. La notice relative au Glazen sera principalement consacrée à résumer cette discussion. La grosse masse pancréatique est au-dessous de la vésicule qui adhère au foie dans une partie de son étendue. Elle est formée de cellules régulières, oblongues, avec noyau indistinet, de matière assez réfringente, plus arrondies que celles du Merlus. Mais, comme on l’a dit, l'intérêt de cette étude particulière est ailleurs. En observant un lambeau pris au contact d’une veine, je trouvai, comme d'habitude, tout le champ pavé de cellules. Comme d'ordinaire encore, la différence de ces organites avec la graisse se marquait à des caractères évidents : couleur blanche, contour polygonal bien dessiné, ensemble en figure de pavage très-élégant, petitesse incomparable relativement, enfin absence totale de liquides graisseux épanchés. L'analogie de ce tissu n’était pas plus diflicile à découvrir ; il faisait aussitôt songer aux cellules aréoles du Trigle, de l'Aiguil- lette, des Spares, de la Sole et de tant d’autres. Ces cellules étaient frées dans la membrane qui les supporte, aucune d'elles n'avait été arrachée de sa place pour être portée en dehors du lambeau. Elles paraissaient serrées les unes contre les autres, petites, en polygone régulier, parfaitement comparables à celles du Trigle, mais moins nettes à cause de plus d'épaisseur et d'un jour moins favorable. Je reconnus qu’elles formaient une seule couche, recouvrant une assez grande étendue, irrégulièrement délimitée, équivalant à deux ou trois fois le champ du micros- cope : on pouvait se demander si ce n'étaient point des globules du sang? Ces derniers se rencontrent assez souvent hors des 152 LEGOUIS limites de la préparation, disséminés dans le hquide ambiant avec d’autres cellules encore plus régulièrement ovales que les cellules de la glande en masse, moins réfringentes, à contour s’accusant par un trait plus mince, et d’ailleurs pourvues d’un noyau central immédiatement visible. Cependant les petites cellules dont je m'oceupe ne pouvaient être des globules, car elles étaient en masse, n’offraient aucune coloration ; d’ailleurs, elles recouvraient un espace considérable, serrées les unes contre les autres dans toute son étendue; mais, à partir des limites de cet espace, il ne s’en trouvait, ai-je dit, pas une seule isolée: or, si l’on eût eu affaire à quelque amas de globules sanguins écrasé, surtout après compression par frottement, 1l se fût necessaire- ment isolé quelques globules. Ces globules, à la rigueur, pou- vaient être renfermés dans un vaisseau hors des limites duquel ilsn’auraient pu sortir; mais, d'après l'étendue occupée par ces cellules, ce vaisseau eût été prodigieusement gros, au delà de toute supposition raisonnable ; d'ailleurs le microscope ne mon- trait rien de ce vaisseau hypothétique. En outre, on sat que si des globules se réunissent en masse, ils ne peuvent se disposer tous de la même manière : les uns se montrent de face, les autres de champ, la plupart dans des situa- tions intermédiaires; ce qui prête à la masse une grande irré- gularité de lignes. Is ne pourraient se poser tous de face que s'ils avaient marge de s'étendre librement sans tomber les uns sur les autres. Alors même leur viscosité les accolerait par petits groupes, pour peu qu'ils fussent nombreux. Or, l'aspect du feuillet cellulaire aperçu était parfaitement régulier : toutes les cellules se présentaient de même, comme cela se produirait dans un ensemble de particules rondes ou du moins à peu près polyé- driques régulières, tel qu'une pile de boulets, qui se ressemble toujours à elle-même de quelque côté qu'on la regarde. Enfin, j'ai comparé les cellules aux globules recueillis ailleurs ; elles étaient plus petites, à contours polygonaux plus accusés, tandis que les globules ont des contours en ovale parfait, dont Je trait est excessivement fin. Les hématies ont un noyau d’au- tant plus apparent, que le globule est plus altéré par son séjour ARTICLE N° d. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 153 dans l’eau; les aréoles cellulaires n’ont, au contraire, aucune trace de noyau. Ajoutons qu’à travers la masse couraent des vaisseaux de divers ordres. Pour ne parler que de ceux d’un très-petit dia- mètre, il en était d'incolores, légerement variqueux et sans anastomoses : c’étaient les lymphatiques wébériens ; d’autres, remplis de sang rouge, ne pouvaient différer des capillaires ; on les voyait fort bien dessinés. Cela posé, est-il croyable que, à côté de globules encore teintés de jaune contenus dans le réseau vasculaire sanguin, il y en eût d’autres, 62 couche membraneuse, s'étendant régulièrement sur les vaisseaux, sans aucune trace de déchirure ou d’épanchement, et jusqu'à de grandes distances? Quelle cause encore assigner à leur changement de tete que les premiers n’eussent pas subie ? Enfin, cette vascularisation si naturelle dans un tissu glandu- laire ou quasi glandulaire, ne se comprendrait plus si l’on vou- lait que les cellules fussent des hématies en nappe dans un vaisseau écrasé, Les veinules, les artérioles et les vaisseaux de Weber circulent effectivement dans la masse des cellules, car, en mettant au point les cellules voisines, la paroi du capillaire se trouvait elle- même au point. | Donc, en résumé, les aréoles cellulaires du pancréas diffus sont un élément sui generis, différent à tous égards du globule SAD£UIN. OBSERVATIONS SUR LES LABRES. 19 Labrus Vetula, Cuv. et Val. La disposition des viscères, la même à peu près que dans l'espèce précédente, est remarquable par la grandeur du foie qui enveloppe les deux tiers antérieurs de la masse viscérale. On voit sortir au-dessous du lobe antérieur et courir sur le lobe médian la vésicule fellique (1) ; très-mince et très-longue, elle (4) Voy. Duvernoy, Anat, comp,, t, IT, 2e partie, 154 LEGOULS. se rétrécit à sa région moyenne en conduit linéaire, et vers ce point elle est recourbée dans l'animal, et change de direction. Le principal pancréas est assis, non point auprès du duodénum, comme chez les Gadoïdes, mais sur la veine mésentérique ou la veine porte; de là les troncs wébériens marchent par un chemin spécial et allant au plus court vers une grosse ampoule adhérente au cholédoque, près de son insertion duodénale et en dessous. Les wébériens ne semblent point, dans cette région, s’assujettir à suivre les veines, et quelques instants d’explora- tion attentive en font toucher la raison. Tout le mésentère, assez complet entre la première longueur de la vésicule, la fente du foie et le duodénum, est encroûté, à peu près à la manière signalée dans le Turbot, de matière pancréatique et lympha- tique ; il est donc indifférent à la veine duodénale de s’accom- pagner d’un canal wébérien particulier, puisqu'elle circule dans l'épaisseur du parenchyme glandulaire. 29 Vieille (Labrus Baïllonit, Cu.) La Vieille à raies vertes, dont les viscères paraissent semblable- meut disposés, offre à première vue un pancréas glandulaire au- dessus de la vésicule du fiel et en dedans du lobe hépatique droit. Il a Ja forme d’une pastille et la couleur blanc rosé, tandis que le foie est rouge-vin. Aussitôt après cette observation, sur un animal de 40 centi- mètres de long, on à pris un lambeau entre la rate et le pan- créas glandulaire, dans un repli mésentérique qui faisait à l'œil l'effet d’un épiploon fortement coloré par des vaisseaux ; on y trouva de grosses cellules de graisse formant la masse, et au milieu d'elles, principalement sur les vaisseaux gorgés de sang, et aux alentours de ces vaisseaux, des groupes de cellules pancréatiques d’une forme encore inconnue : elles étaient plutôt carrées que rondes, même lorsqu'elles semblaient n'avoir point été gènées dans leur développement, et plutôt encore trapézoïdes que carrées. Les plus grosses portaient environ 0"",011; mais la parti- ARTICLE N° 3. j DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 155 cularité remarquable avant tout, c’était l'existence, chez l’uni- versalité des cellules qu'on voyait nettement, d’un fort gros noyau mesurant jusqu'à 0"°,067, carré comme la cellule et fort bril- lant; central parfois, souvent marginal. Je m'astreignis à faire l'étude complète d’une surface périto- néale dépassant 4 centimètres carrés, et je trouvai les cellules dont il vient d'être question disséminées par groupes tout à tra- vers, le surplus étant graisseux ou simplement conjonctif. Rapprochant cette apparence des faits donnés par les mésen- tères du Caranx et du Maquereau, on ne peut s'empêcher de voir dans cette forme une sorte de transition du tissu aréolaire lymphatique aux acini paneréatiques bien conformés, qu'on y trouve associés dans des espèces sans doute plus élevées d’orga- nisalion. L'examen de ce poisson ne m'a pas procuré d’autre fait qui mérite d’être noté apres la description détaillée qui vient d’être exposée du pancréas des Spares. Comme dans ceux-ci, 11 y a pancréas en masse et pancréas diffus, mais ce dernier est ici bien plus chargé de graisse. FAMILLE DES GORIOIDES. Gobius niger. «Dans un Gobius niger, l'appareil lymphatique, formant étui » autour d’un vaisseau sanguin, était rempli d’une masse fine- » ment granulée. » (Trad. de Leydig.) OBSERVATIONS SUR LA FAMILLE DES TRIGLIDÉS. I GRONDIKS, 40 Triqla Gurnardus. M. Stannius a vu l’une des masses pancréatiques de cette espèce, sans pouvoir la rattacher à l'intestin. C’est peut-être aussi à quelque Grondin que se rapporte une 156 LÉGOUIS. figure donnée par M. CI. Bernard (1) dans ses leçons du Collége de France. On y voit un canal allant d’une massette à la partie moyenne de l’appendice voisin. L'observation fut exacte ; mais le wébérien, au lieu de percer la paroi appendicielle, comme l'expérimentateur paraît l'avoir supposé, se continuait sans doute appuyé sur quelque veine latérale. 2° Grondin rouge (Trigla Lyra, L.). L'importance que Brockmann et Leydig attachent aux espèces de ce genre m'engage à donner avec plus de détail les résultats que ce poisson m'a fourmis. Je ne signalerai pourtant ici que les parties de la description spécialement propres à cette espèce, renvoyant pour les autres aux monographies déjà développées des Spares, du Turbot, du Merlus et des Scombres, avec lesquels le pancréas de l'animal qui m'occupe offre les analogies les plus détaillées. Un foie divisé en quatre lobes principaux recouvre, avec l’in- testin qui forme trois courbures, un système de onze appendices, cinq à droite, six à gauche. La vésicule cachée par le foie, l’es- tomac et les masses appendicielles sont reliés par un système assez complet de ligaments et de vaisseaux ; mais 1l faut couper tous ces filets tendineux ou vasculaires, si l'on veut parvenir à la partie considérable de la glande visible. C'est un système de massettes, ordinairement au nombre de trois, dont une plus grosse située au centre de la masse des cæcums, entre le faisceau de ces derniers à droite, celui de gauche, et l'intestin. Un corps pancréatique plus volumineux, représentant un véritable pan - créas massif, et analogue sans doute à celui dont parle Stannius, se montre encore, à l'ouverture de l'animal, dans les environs du confluent portal. Les cellules de ces différentes masses sont bien caractérisées, mais quelques-unes paraissent à l’une de leurs extrémités terminées en pointe mousse. Les orifices intestinaux correspondent au point où la veine porte passe sur le duodénum pour entrer dans le foie. (4) CI. Bernard, Leçons de physiol., 1855, p. 480. ARTICLE N° à, DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 157 En coupant le système du cholédoque à son sortir de l'intestin, on a trouvé, à côté de l'ouverture biliaire, une ou deux autres perforations beaucoup plus petites, appartenant à des canaux de Weber. Ces orifices, situés à côté du foie par rapport au cholédoque, donnent plutôt dans le pied d’un des appen- dices de gauche que dans l'intestin lui-même; la bile se répand au même point. Ces ponctuations, servant de bouche, étant beaucoup trop délicates pour l'essai d'injection, Je procédai à l'exploration microscopique de la région membraneuse voisine de l'entrée du cholédoque. Et sur quelques préparations trempées à l'alcool, qui exagère les ombres, je reconnus que les wébériens sortent direc- tement de l'intestin, en nombre assez grand, se ramifiant aussitôt d'une manière compliquée, pour se distribuer ensuite aux diffé- rentes directions. Mais l'attention ne pouvait manquer de se porter ailleurs; car sur cet animal, comme dans la Carangue, et bien mieux encore, les imterstices cæcaux étaient occupés par un tissu dans lequel l'observateur le moins exercé eût aussitôt reconnu les caractères d’une glande, surtout auprès de la jonction des appendices avec l'intestin. L'examen microscopique fit voir, dans toutes les coulées, avec une admirable netteté, les deux genres de cellules, régulières et ogivales, dont le pancréas en masse était coustitué. Quant aux canaux de Weber, les différentes coupes opérées dansces régions, soit à droite, soit à gauche, renfermaient plusieurs tubes iden- tiques avec ceux que le microscope avait découverts sortant de l'intestin ; ais cette partie de la constatation fut la moins pro- bante, tant cette glande était vascularisée par le système sanguin. Le pancréas de cette espèce se diffuse donc dans tous les sens, et sa complication me paraît presque aussi extrême que dans le Caranr. J'aurais ici à répéter la plupart des remarques aux- quelles ce dernier donna lieu. Mais je préfère appeler le regard sur un caractère que le Trigle possède à un plus haut degré. Chez la Carangue, le pan- 158 LEGQOUIS. créas étouffe, si l’on peut ainsi parler, la végétation lym- phatique ; soit dans les masses, soit dans les mésentères, les préparations microscopiques surabondent de cellules glandu- laires, et la trame d’où ces éléments sont tirés en devient diffi- cile à entrevoir. Au contraire, dans les Spares, les Labres, d'étude si instructive cependant, et même dans l’Aiguillette, la probabilité veut que, si l’on fait, à quelque distance des centres, une coupe mésentérique circumvemmeuse, elle ne ren- ferme guère que de la trame aréolaire, sans graisse, 1l est vrai, mais aussi la plupart du temps sans cellules de nature glandu- laire bien démontrée. Dans les membranes du Grondin, les trois éléments adipeux, lymphatique etpancréatique, sont bien plus entremêlés ; presque toujours on aperçoit dans le champ quelque lobule de graisse, puis une plaque lamellaire d’aréoles polygonales et quelques cel- lules oblongues, plus grandes, de la deuxième variété, arrondies d'un côté, effilées de l’autre, qui proviennent d’une région pancréatique voisme. En d’autres termes, comme chez les Scom- bres, les trois formations se disputent le terrain des mésentères, surtout au voisinage des veines, mais la variabilité des vacuoles conjonctives où, suivant M. Leydig et moi, se forment les glo- bules de lymphe, se restreignant dans cette espèce entre des limites très-peu écartées, la distinction des trois éléments se fait au premier coup d'œil. Dans les Scombres, ces aréoles relient, on l’a vu, par une série à peu près continue de dégradations, les formes des utricules graisseux à celles des cellules glandulaires, et c’est là, pour le cas du Maquereau, un empêchement presque insurmontable à la certitude des observations. Ailleurs la difficulté provient d’une origine différente : chez les Cyprins, l’immixtion dans le foie apporte une nouvelle comn- plication ; chez les Ésoces et les Gadoïdes, la graisse manque presque complétement, et l’un des termes de comparaison fait défaut ; chez les Labres et les Vieilles, le tissu circumveineux est trop lymphatique et trop peu glandulaire ; tandis que, dans l'exemple dont on traite ici, les productions se balancent à peu près, et, tout en se pressant les unes auprès des autres, conservent ARTICLE N° 3. DU PFANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 459 dans leurs éléments des caractères parfaitement tranchés qui laissent peu de place à l’hésitation. 30 Trigla Hirundo. Cette espèce, que je n'ai point étudiée, ne peut différer beau- coup du Trigla Lyra. M. Leydig (1) y a fait l’observation suivante : « On remarque, sur ce poisson, des faits qui ne sont pas sans valeur, relativement aux rapports des lymphatiques avec les vaisseaux sanguins. Si l'on examine ceux du mésentere, on s'assure aisément à l'œil libre qu'ils sont engagés dans une sorte de fourreau de matière grisätre. Sur un morceau découpé du mésentère, l'examen avec les faibles grossissements indique que l'enveloppe grisâtre n’est pas une simple formation de paroi tubulaire, mais qu'elle a la constitution /o/iculaire des glandes. On peut obtenir une connaissance exacte de ce tissu par l’em- ploi d’un grossissement plus fort. On voit alors que la trame, appelée tunica adventitia, formée du tissu conjonctif, a pris toute la structure d’une glande lymphatique par la production à l’intérieur d’une toile à mailles régulières contenant dans ses aréoles des éléments celluleux. Si l’on amène le foyer à la surface du revêtement vasculaire, on y trouve la disposition propre aux follicules; des vésicules arrondies, diverses de grosseur, mutuellement comprimées, composent tout le four- reau veineux. La paroi du follicule n’est autre chose que l’en- semble des feuillets et des poutrelles du tissu connectif de cette tunica adventitia. S'enfonçant à l'intérieur, 1ls se relient les uns aux autres de manière à former enfin des espaces follicu- laires. Ces aires, cependant, ne sont pas fermées l’une par rapport à l’autre, mais communiquent entre elles : c’est ce qui résulte de recherches ultérieures. Pour ce qui regarde le contenu, il est formé, sur la périphérie des chambres foilicu- laires, de petites cellules claires, gui garnissent la paroi en (1) Archives de Müller, 1854, p. 323, et pl. XIL, fig. 4,5, 6. 160 LEGOUIS. » quelque sorte à la manière d'un épnthéluun, et jouent le rôle » de cellules de sécrétion, car, dans la lumière des aréoles, se » montrent des amas pressés de granulations claires, à contours » assez neltement tranchés, ef ressemblant aux globules de la » sécrélion pancréatique. Les acides et les alcalis changent le » contenu des aréoles en une masse pâle finement granulée. » IT DACTYLOPTÈRES. Dactyloptera volitans. «Les vaisseaux du mésentère ont, avec les vaisseaux de la » lymphe, les mêmes rapports décrits plus haut à propos du » Trigla Hirundo ; ils sont aussi revêtus, sur toute leur longueur, » par les glandes lymphatiques formant comme un fourreau. » (Trad. de Leydig.) IT CHABOTS. A ce que donne Brockmann sur le Cotlus Scorpius, dont je n'ai ouvert qu'un seul exemplaire, j'ajouterai seulement que cette espèce, comme le Coftus Gobio dont je me suis aussi occupé par hasard, faute d'espèces plus avantageuses, est susceptible de pro- duire, outre les masses pancréatiques prineipales dont lanato- miste de Rostock eut connaissance, tout un système diffus. Quoique je n'aie pasassez prolongé mon travail pour affirmer que les coulées pancréatiques laminaires renferment aussi des parties lymphatiques qui leur soient associées, je n’en fais point de doute, à cause des analogies qui me paraissent rapprocher ces animaux des Trigles d’une part, et des Épinoches de l’autre. Le Chabot de rivière serait peut-être l’espèce qui se prêterait le mieux à la vérification des idées de M. Leydig en ce qu'elles ont de probable, et à l'étude de la fonction Iymphogène. On peut >» ARTICLE N° 9. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 161 se procurer à la fois un très-grand nombre d'animaux frais, double condition indispensable ; d’ailleurs, le pancréas extra- hépatique est beaucoup plus développé que celui des Cyprins, et | la dissection moins difficile que sur les Gastérostées ; l'exploration sommaire des lames péritonéales de chaque individu pourrait, à cause de leur moindre étendue, s'achever avant que la décom- position rendit les éléments méconnaissables. Enfin si, comme il ma paru, la graisse n'abonde pas, et que la tendance du pan- créas à la diffusion soit plus grande que dans les autres petites espèces (Bélec, Sardines, etc.), on aurait sans doute des chances plus fortes de rencontrer, sur ces aires plus restreintes, les sources certaines de la Iymphe et ses véritables canaux. Aussi la discussion des faits relatifs à l'organe lymphatique, que j'ai dû remettre jusqu'ici pour profiter de toutes les obser- vations disséminées chez les différentes espèces, y paraîtra sans doute naturellement placée. J'éviterai de répéter ce qui fut dit ailleurs, sur ce sujet, dans l'exposé général qui précéda les descriptions. Il suffira d'inscrire ici les faits et de les discuter. Parlons d’abord des globules. Ils surabondent dans les pancréas laminaires bien développés du Turbot, dans les centres et les dépendances immédiates de la glande des Murènes ; leur nombre y est si énorme, que le champ du microscope s’en trouve obscurci; ils créent la seule difficulté, souvent considérable pourtant, dans l'observation de ces parties. Les Scombéroides, et surtout le Maquereau, en montrent de grandes quantités, tant à l’intérieur de leurs massettes que sur les espaces lamellaires ; le tégament solide et épaissi sur la vési- cule du Merlus, et de quelques autres Gadoïdes, le fourreau eir- cumvasculaire argenté de l’Orphie et ses expansions latérales, er recouvrent des agglomérations ; les digitations adhérentes à l’es- tomac des Gastérostées en sont largement pourvues; les Grondins et les genres voisins en produisent, non-seulement autour de leurs veines, mais à distance de ces vaisseaux ; les Spares et les Labres paraissent doués de la même aplitude, quoique à un moiudre degré ; enfin M. Leydig semble les avoir reconnus dans 162 LEGOUIS. les mailles de l’enduit des veines pénétrantes du foie sur un grand Cobitis fossiles. La production des éléments granulaires n'est donc point un phénomène isolé. Est-ce à dire qu’elle soit une dépendance tellement nécessaire de la fonction pancréatique, qu’on ne puisse imaginer celle-ci comme séparée? Faut-ilcroire, ainsi qu'une phrase de M. Leydig (1) paraît l'insinuer, que ces globules soient une sorte de produit secondaire du tissu pancréatique ? Je ne puis croire qu'on doive trouver cette opinion sous les paroles de l'éminent anatomiste. Sans doute il partage l'avis commun de tous les physiologistes, qui fait du suc sécrété par les cellules pancréatiques une humeur homogène, ne servant, dans les circonstances ordinaires, de vésicule à aucun corps solide. D’après Külliker (2), « le suc pancréatique est complétement liquide à l’état normal, ce n’est que par hasard qu'on y trouve des éléments solides ». Cet habile Mstologiste ne paraît avoir jamais rencontré, dans ses dissections du pancréas humain, les globules dont il s'agit ici. Leur absence sur quelques Mammi- fères (Lapin, Souris) se trouve aussi démontrée par ce qu'il rapporte de ces animaux. Si l'on consulte l'ouvrage même de M. Leydig (3), on voitqu'il n’a trouvé des amas de granulalions chez la Taupe qu’en certains endroits spéciaux de l'organe pancréatique ; l'indication, un peu vague, laisse du reste prise à plus d’un doute. Qu'il y eût lieu de restreindre aux pancréas des Poissons cette activité qui n’existe pas chez les Mammifères, c’est ce que l’obser- vation ne me permet pas d'admettre. S'ilest vrai qu'on observe une curieuse concomitance entre les deux fonctions, il est aussi certain que cette association n'a rien d’un parallélisme parfait. Si les globules naissaient du pan- créas, qui accomplivait ainsi quelque partie de son rôle, partout (4) Trad; fr:, p: 478; / (2) Élém, d'histol. hum., trad. franc., p. 490. (3) Histol. comp., trad. franç., p, 3994 ARTICLE N° 6, DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 163 où serait le pancréas, les globules devraient le suivre. Or, dans bien des cas, cette coexistence est déjà douteuse, par exemple sur les glandules du Bar, de l'Athérine bélec, de la Sardine, de la Truite, du Mullus Surmuletus, etgénéralement partout où prévaut la forme disséminée en massettes bien circonserites ; il est même quelques circonstances où les globules n’existent certainement point dans la trame pancréatique: c’est le casoffert par les acini microscopiques du Doré de la Chine, dont j'ai poursuivi l’étude intime dans des conditions qui rendirent l'observation facile et les résultats indubitables, Il est plus étonnant de ne voir encore aucun granule de cette nature daus les expansions diffuses et plongeantes du tissu de la Carpe commune. L'analogie semble vouloir que ce revêtement qui représente la partie de la glande occupant le mésentère des autres espèces fût producteur au même titre. On se demande d’ailleurs où, si ce n'est là, prennent naissance les globules lym- phatiques du poisson. Ne serait-il pas étrange que la localisation pour cette fonction fût plus grande chez une espèce où tout paraît au contraire tendre à se mêler et à se confondre? Enfin, l’obser- vation qui fit reconnaître à M. Leydig la nature lymphatique du tissu circumveineux immergé au foie de la Loche d'étang, me meltait en doute quant à la sûreté des résultats obtenus lors d'une première étude sur ce parenchyme de la Carpe. Je l'ai donc reprise à nouveau, el mes premières conclusions se sont manifestées avec une évidence qui exclut toute hésitation. Développons encore les conséquences. Si les globules sont for- més par la glande agissant en qualité de pancréas, ils doivent dériver des cellules glandulaires par une évolution qu'il n’est pas besoin de préciser pour le but que je me propose. Sur un même animal, la proportion entre le nombre des cellules d'une région et celle des globules au même point, ne pourra, en con- séquence, varier dans des limites fort étendues. Or, j'ai fait remarquer, à propos du Murwna Conger, l'extrème abondance des globules dans la masse intestinale, ainsi que leur absence à peu près complète dans les glandules molles de la périphérie. On trouvera sans doute aussi qu'il y aurait dans les conceptions 164 LEGOUIS. de l’auteur quelque chose d'inégal et comme contradictoire, si, attribuant ces globules au pancréas des Poissons comme un de ses produits naturels, il ne songeait même point à faire dépendre de la même glande les tissus que l'observation positive lui mon- trerait être les générateurs de ces organites. Or, on à vu dans la note sur le Trigla Hirundo comment le mot pancréas y figure. Il vient pour rappeler l’analogie, mais l’auteur ne semble pas avoir songé un seul instant à proposer une assimilation plus complète et plus essentielle. Je regarde donc l'expression «semblables aux globules con- » tenus dans la sécrétion du pancréas» comme signalant seule- ment un fait de concomitance, mais non une liaison aussi intime que des termes un peu trop généraux paraitraient l'indiquer. Je n'ai pas considéré comme inutile de soulever une discussion à cet égard, à propos d’une interprétation qui peut paraître une simple équivoque ; parce que, sur cette question assez neuve et encore plus diflicile de la genèse lymphatique dans les Anallan- toïdiens, je crois important de déblayer le terrain des contradic- tions qu'une grande autorité mal comprise pourrait susciter. Un point capital est acquis par cette distinction. Du moment que la fonction génératrice des globules blancs n’est plus attribuée au tissu essentiellement pancréatique, mais seulement associée à la glande, tout paraît se systématiser d'une manière aisée et satisfaisante. Qu'on me permette cependant de réserver l’expli- cation pour un moment plus opportun. Car on se demandera peut-être si les globules ne sont point une forme divergente de cellule glandulaire. Remarquons d'abord que, sur ce point, la concordance est entière entre M. Leydig et mes propres travaux. J'ajoute qu'il n’en pouvait être autrement ; et l’idée d’assimiler, de si loin que ce soit, ces globulins aux cellules ne peut se présenter qu'à celui qui n'aurait vu ni l'un ni l’autre élément. Pour ne pas insister hors de propos, et éviter la répétition de ce qui fut ailleurs exposé (1), je me borne à dire que jamais, sur aucun des lambeaux arrachés en si (4) Voyez page 48 de ce travail, 17€ partie, ARTICLE N° 9. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 165 grand nombre aux viscères de tant d'espèces, la moindre ressem- blance n’a rapproché les deux formes. La cellule, tantôt grande, lantôt moindre, ici oblongue, ailleurs ronde ou elliptique, varie de dimension, de forme, de réfringence, de teinte, mais nulle part elle ne s’atténue jusqu’à prendrel'aspect d’un globule. n’en est même pas ainsi chez les espèces où l'élément paraît le plus incertain dans ses formes, telles que le Maquereau, l’Aiguillette, les Pagres ou les Grondins. Quoique les deux formations y soient en présence sous l'œil de l’observateur, on ne trouve aucune trace d'un passage gradué de lune à l’autre, et pareille transition ne se pourrait même concevoir. On aura du reste plus loin des éléments directs et multiples de comparaison. Mais que sont ces granules? À quoi rattacher leur origine ? Quelle fonction leur est destinée ? Je les ai pris quelque temps pour des noyaux isolés de cellules détruites. Mais cette opinion ne pouvait subsister. Que seraient donc ceséléments détruits? Des cellules pancréatiques, ou sinon des globules du sang? Or, bien souvent (Carpe, Maquereau, Tanche, Turbot, Cyprin, Gastérostée, Congre, Anguille) j'ai pu ouvrir le Poisson vivantencore ; sur beaucoup j'aiaussitôtapercules globules blancs avant qu’un seul élément histologique fût même ponclué. D'ailleurs, les noyaux de cellules sont en général plus petits, par exemple dans le Maquerean ; et, pour répondre à la quantité de globules libres dont le champ est obscurer, il faudrait imaginer dix fois plus de cellules détruites (Congre et une foule d’autres) que le même champ n’en contient de conservées, alors que pas une seule n'offre de traces de corruption : J'abandonne ce point en vérité lrop insoutenable. L'hypothèse précédente étant écartée, on ne peut guère com- parer ces éléments doués de figure qu'aux globules Iymphatiques. Ils ressemblent à ceux de l'Homme, mais il est vrai de recon- paître que, dans des corpuscules aussi minimes, la similitude pourrait résulter moins de la communauté que de l'absence de caractères bien constatés. Toutelois, ces corps sont généralement arrondis, peut-être même à peu près sphériques, car ils parais- ent rouler avec la plus grande facilité, ne s’arrêtant guère et SC. NAT., JUILLET 1873. XVIII. 17. — ART, N°, 3. 166 LEGOUES. toujours prêts à courir dans le sens où le plus faible mouvement les sollicitera. Leurs bords ont plus de régularité qu'on n’en attendrait d’une masse aussi faible ; je n’ai vu nulle part de noyau nettement dessiné, quoique leur réfringence toujours forte et leur limpidité favorisent la vision du contenu. S'ils paraissent plus petits que les globules du sang dite les mêmes espèces, il faut se souvenir que ces derniers, dans la plu- part des Poissons, atteignent des dimensions supérieures à celles des mêmes éléments chez les Mammifères. Ainsi, chez le Turbot, quoique ces globules aient parfois plus de 0**,005, ils sembleront cependant petits auprès des hématies dont le grand axe approche de 0"",01 ; les cellules paneréatiques sont d’ailleurs, comme on l’a vu dans cette espèce, de dimensions exceptionnellement faibles. Je m'en tenais à cette induction, car il ne me paraissait pas utile de faire rentrer l’étude de ces corpuseules dans une démonstration que je devais limiter à l'existence du pancréas et à l'explication de l’usage des tubes wébériens. Aussi n’ai-je point cherché, dans l'examen du contenu des vaisseaux lymphatiques connus sur les mêmes espèces, une vérification plus naturelle et plus directe. Cette lacune se trouve comblée par l'observation de Leydig, qui paraît s'être beaucoup préoccupé de rechercher les Iympha- tiques chez les animaux de cette classe. La lecture de ce passage m'a vivement intéressé. Le célèbre histologiste, qui connaît à fond tous ces éléments si longtemps et si habilement étudiés par lui, n’hésite pas à rapporter au système lymphatique les aires circumveineuses qui fournissent ces globules. Ce ne peut donc être autre chose que des globules lymphatiques. Ce n’est encore là, cependant, qu’une première raison; l'existence d’un tissu aréolaire n’est pas, à mon avis, un argu- ment de moindre valeur. On aura remarqué, en lisant les descriptions et les procès- verbaux de dissection, que, ne songeant nullement aux Iympha- tiques dans les premiers temps de mon travail, j'étais amené cependant à reconnaitre partout deux espèces de cellules, aussi ARTICLE N° 3 DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 163 distinctes l'une que l’autre des utricules graisseux ; j'ai dit ailleurs, en traitant des Scombéroïdes, comment on différencie entre eux ces deux ordres d'éléments. Les uns sont les vraies cellules glandulaires, sur lesquelles je n'ai pas à revenir ; la dé- nomination de cellules ne parait pas convenir aussi bien aux autres, quoique M. Leydig semble l’'employer. Quoi qu’il en soit, dans une foule d’espèces, on trouve sur les veines principalement, mais aussi quelquelois à des distances considérables de toute ligne vasculaire, des surfaces couvertes de mailles régulières comme une dentelle fine. D'abord je confon- dais ces apparences avec celle de l'intérieur des glandes ; mais l'absence de noyau, la multiplicité des globules, la forme poly- gonale anguleuse des méats, l’adhérence ou la fusion avec le stroma, devinrent plustard, comme je l'ai déjà dit, des caractères aussi nels que faciles en général à constater. Ces alvéoles com- posent donc un tissu différent. Quant à leurs analogies, quoique l'essentiel en ait été résumé plus haut, quelques nouveaux détails ne seront pas superflus. La délicatesse des parois et l’homogénéité de l’ensemble élèvent ce tissu à un degré d'organisation bien supérieur à celui du tissu conjonctif ordinaire ; il serait sans intérêt d’insister sur la démonstration de ce fait manifeste au premier coup d'œil. Il est pourtant assez facile de reconnaître que ces vacuoles ne différent pas, au fond, du tissu conjonctif; mais elles sont une forme singulière, modifiée et régularisée de ce tsssu. Ne seraient-ce point des aréoles Ilymphogènes (1) correspon- dant aux globules ? Pour qui a soupçonné la nature de ceux-ci, pareille hypothèse ne peut manquer de se produire à l'esprit. On rencontre, en effet, les régions aréolaires couvertes comme chez le Maquereau, par des masses compactes de granules ; et, pour apercevoir la structure de la membrane, il faut même ba- (4) L'usage de cette expression empruntée à la théorie qui fait de la substance cor- ticale un centre de production globulaire, et en général ladoption des idées qui s’y rapportent, n’est point ici proposée comme définitive. L'expression est commode, et la théorie s'adapte bien à mes observations; aussi je m'en sers, mais sans vien préju- ger sur le fond de la question. 163 LEGQUIS. layer les globules par un lavage de la surface ; j'élais presque constamment obligé d’user de cette précaution. De son côté, M. Leydig a vu très-nettement dans le Trigle Hirondelle les globules pressés dans l'ouverture des aréoles. Il faut pourtant reconnaitre, entre ces plaques résillées des Poissons et les aréoles Iymphatiques de l'Homme, des différences notables dans la constitution. J'ai le regret de ne pouvoir apporter à celte heure sur la structure de la couche corticale des ganglions dans l'Homme ou dans les Mammifères, aucune observation nouvelle. L'unité, de- venue déjà si vaste, du sujet principal, eût souffert d’une extension illimitée. Mais, à défaut d’une connaissance plus personnelle, j'ai pu tirer des ouvrages si réputés de MM. Kôlliker et Leydig quelques notions précises sur ce sujet. Je reproduirai celle de M. Kôlliker (1), la plus détaillée et la plus facile à suivre : « La substance corticale se voit sur. . . . . la surface de la » glande. . . . . Sa surface extérieure et quelquefois aussi des » coupes présentent un aspect granuleux, vésiculaire. . . . . » Cet aspect rappelle celui d’une plaque de Peyer disséquée » par sa face externe ; on y remarque, en effet, une multitude » de corpuscules arrondis, de couleur grisàtre, entourés d’un » liséré blanchâtre et analogues à des follicules. Si l’on appro- » fondit davantage la structure de la substance corticale, on » reconnait facilement que les prétendus follicules ne sont » nullement des orgaves indépendants comme les éléments » d’une plaque de Peyer ou d’une tonsille, et qu'ils ne peuvent, » dans aucune circonstance, être considérés comme isolés les » uns des autres; qu'ils sont simplement des portions spéciales » de la substance corticale, contenues dans les cavités d’un » système d'alvéoles assez régulier. Ces alvéoles sont constitués » de la manière suivante : de la face interne de la membrane » d'enveloppe partent une foule de lames plus ou moins épaisses » (0,009 à 0°*,05 d'épaisseur et plus), qui s'unissent entre » elles d’une manière si régulière, qu’il en résulte un réseau (1) Kolliker, Héstol. kum., trad, franc., p. 629. ARTICLE N° 38. DU PANCRIAS DES POISSONS OSSEUX. 169 » délicat qui occupe toute l'épaisseur de la substance corticale. » Les cavités de ce réseau, que j'appellerai a/véoles des glandes » lymphatiques, sont irrégulièrement polygonales et ont 0"",25 » à 0"°,90 de diamètre. Chez l'Homme, les alvéoles les plus » réguliers se trouvent dans les couches externes de la substance »_corticale ; 1ls y sont aussi séparés les uns des autres, en grande » partie, si ce n’est d'une manière complète. . . . . Plus en » dedans les eloisons de séparation deviennent plus incomplètes, » plus minces, les alvéoles sont de plus en plus petits et moins » distincts les uns des autres; d’où il résulte que la substance » corlicale prend un aspect plus homogène. » Le contenu de la substance corticale est une pulpe grisâtre » à réaction alcaline. . . . ., traversée par un réseau capil- » laire très-riche. . . . . Chaque alvéole est traversé par un » grand nombre de trabécules, de fibrilles, et de lamelles » extrèmement fines, qui, en s'anastomosant fréquemment » entre celles, figurent un vrai tissu spongieux. . . . . La » texture nucroscopique de ce tissu spongieux est des plus DÉS ANIES MEME» Remarquons, avant d'aborder une comparaison plus minu- tieuse, la particularité fondamentale de l'action physiologique décrite aux lignes précédentes. La disposition des choses n’est qu'accessoire ; mais ce qu'il faut dégager avec soin de cette page remarquable, e’est la production des granules, ou leur accumu- lation au moins, pour s’en tenir au fait, dans des espaces circon- scrits par les mailles d’un réseau saus revêtement épithélial, M. Leydig, qui parait avoir étendu ses recherches aux ganglions de quelques Mammifères, est sur ce point en concordance for- melle d'opinion avec le professeur de Wuartzbourg. On sait, d'ailleurs, quelles considérations théoriques très-natureïles vien- uent étayer ce fait. Revenons à la morphologie de l'appareil. Si lon considère la place des Poissons dans le groupe vertébré, et si l’on se reporte à l'histoire connue de leur foie et de leur pancréas, on n'aura plus beaucoup à s'étonner de quelques simplifications dans la structure, 470 LEG@UES. Dans la glande humaine il y a deux degrés de construetion ; uue charpente solide de grandes aréoles, en dedans desquelles s’édifient de légères et délicates cellules incomplètes, et commu- niquant à la manière des conduits dans une éponge fine, Sur la plupart des Osseux, dont, chez quelques-unes des espèces, j'ai soigneusement exploré les surfaces péritonéales, je n'ai pas rencontré cette gradation. Dans les Spares, qui me sem- blent un bon type, la diffusion est telle que jamais les moindres mailles ne m'ont paru renforcées d’un réseau plus puissant, ren- fermant un certain nombre de ces petites vacuoles dans le circuit plus étendu de ses propres parois plus épaisses. Quant à l'élégance du dessin, elle subsiste avec moins de finesse dans les traits. L'appareil serait ici réduit à sa partie essentielle, c’est-à-dire à l’aréole intérieure, constituée de simples fibrilles chez le Mam- mifère, mais devenue plus forte de parois dans le Poisson, parce qu’elle doit pourvoir elle-même à sa solidité résistante. C’est ainsi que je me trouve amené, par la dégradation anatomique, à restreindre aux moindres parties ce norn d’aréoles appliqué par M, Külliker, surtout aux méats de degré supérieur et englobants. Mais il faut dire que toutes les transitions existent. D'une part, si dans les Trigles et peut-être les Chabots la diffusion sur certaines lames péritonéales paraît se faire sans soutien d'aucun réseau plus consistant, dans la fvnica adventitian du Sparus crythrinus, le lacis vasculaire sanquin des capillaires lui tient lieu de formation cousolidante, comme déjà les veines servent d'appui aux digitations paneréatiques. Dans plusieurs autres cas réalisés à côté des précédents sur les membranes de quelques Aiguillettes, ce sont les parties épaisses du pancréas qui offriront un soutien aux trabéeules lymphatiques, et la même chose a lieu plus ou moins distinctement sur nombre d’autres espèces. Enfin, dans les pancréas massifs, la solidité même du paren- chyme profite aux interstices lymphatiques que la glande comprend. Mais ici, distinguons encore deux termes dans la localisation et la complication des textures. On a vu que les petites glandes massives des Muges, des petits Salmones, des Scombres, etc., ARTICLE N° 3. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX, 471 n'ont de paroi propre que le léger revêtement connectif de l’aci- nus; mais On sait aussi que les grandes masses Iympho-pancréa- tiques des Murènes, des Gades, des Esoces, des Gastérostées, etc., s’entourent d’un épaississement très-notable du tissu conjonctif : la consistance de la glande commune est donc ici assurée par la consolidation de la surface. Je n’ai pas fait, d’ailleurs, une étude assez fine du parenchyme de ces grosses masses, pour affirmer qu’on n'y rencontrerait pas les deux systèmes d’aréolesau moins indiqués. Je suis plus étonné de ne pas les avoir distingués dans l’adven- htia du Sparus. Car M. Leydig les décrit très-exactement dans celle de son Trigle, et j'ai fait sur le Spare violacé une obser- vation identique, à cette différence près, toutefois. J'ai vu aussi l'adventiha du Grondin rouge, mais elle n’était pas traversée par un réseau capillaire sanguin, et la disposition des aréoles s’en trouvait simplifiée. En résumé, si, d’une part, sur les mésentères des animaux d'organisation perfectionnée, on trouveles globules lymphatiques groupés dans les méats conjonctifs de certains espaces ; et que, d'autre part, on voie, dans des méats conjonctifs très-analogues, des globules semblables se presser en certaines régions périto- néales des Osseux, pourra-t-on se refuser à reconnaître, dans ces globules, après M. Leydig et avec moi, les corpuscules Iympha- tiques de ces espèces ? Je ne le puis croire, et regarde la spécifi- cation fonctionnelle des parties correspondantes comme suffi- samment établie. Reste d’ailleurs encore, je l’avoue, bien des points à éclaircir. Que l'histologiste de Berlin considère cette conclusion comme indiscutable sur des preuves pourtant beaucoup moins complètes, c'est ce qui résulte des expressions de son livre (1). Je les citerai pour plusieurs motifs. En parlant des glandes non douteuses, \ dit : «Dans quelques Poissons osseux, les vaisseaux sanguins » du mésentère sont enveloppés, sur tout leur parcours, (1) Histol. comp., trad. franç., p. 477. \ 172 EHGQUIS. » par des glandes lymphatiques formant une sorte de gaîne » autour d'eux. La tunique adventitielle de ces vaisseaux se » transforme en alvéoles que remplissent, mêlées à des granules » peu colorés et situés au milieu des follicules, de petites cellules » claires, semblables aux globules contenus dans la sécrétion du » pancréas... J'ai décrit cette disposition dans le Trigla » Hirundo et le Dactyloptera volitans ; et dans un Cobrtis fossiles » de grande dimension j'ai reconnu aussi que les vaisseaux san- » guins, situés entre l'estomac et le foie, sont entourés par des » masses de glandes lymphatiques qui pénètrent même dans le » foie avec les veines... » Si la fonction Iymphatique du tissu aréolaire est, dans ces lignes, proclamée à plusieurs reprises, la présence du pancréas y semble méconnue. Je crois pourtant avoir le droit de regarder ce texte, ainsi que la page du Trigla Hirundo, comme une confir- mation éclatante des résultats relatifs à cet organe. Sans connaître les tubes wébériens, et par suite indépendamment de toute suppo- sition que le pancréas püi arriver à de pareilles distances du centre duodénal, par les seules forces de l'observation microsco- pique, M. Levdig en vient à comparer le tissu qu’il avait sous les yeux à celui du pancréas; l’analogie l'amène à en prononcer deux fois le nom. On ne doutera même pas, à la lecture de l’ar- ticle sur le Trigla Hirundo, que l'auteur n'ait eu de vérnables cellules pancréatiques sous les yeux ; la deseription qu'il donne, dans laquelle il est bien près de qualifier ces éléments d’épithé- laux (1), et la figure dont il l'accompagne (2), donnent plutôt l’idée d'une vraie glande que d’un tissu lacunaire plus ou moins organisé. Si l’on entend de simples aires lymphatiques ce que dit l’anatomiste, on se trouve obligé de conclure qu’elles offrent, dans lesOsseux, non-seulement autant, mais plus de complication que dans l'Homme, où ni follicules, ni cellules adhérentes et de forme épithéliale, ne furent jamais signalés. Je ne suis même pas éloigné de croire que, si l’auteur n’insiste pas plus qu'il ne fait quant au Cobitis, c’est qu'apparemment le (1) Epitelartig Gewissermaassen. (2) Archiv. de Meckel, 1854, pl. XII, fig. 5. . ARTICLE N° 8. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 173 fourreau veineux de ce Cyprinoïde ressemble à celui de la Carpe ; tandis que ce dernier, ne renfermant souvent, comme j'ai eu soin de le constater, que des cellules pancréaliques, avec exclusion totale du développement lymphatique, s'éloigne par conséquent beaucoup du type aréolaire, et manque de granules. Après ces observations, je ne ferai que rappeler les preuves directes, car, pour les énoncer, il faudrait tout reprendre. On se souvient que le nucroscope, lorsqu'il révèle des aréoles et des globules, constate toujours à côté un élément cellulaire, en général bien mieux constitué, en abondance quelquefois supérieure, ailleurs plus faible, souvent comparable. J'ajouterai que le Trigle rouget a montré sur le bord d’une veine, non pas seulement les deux tissus, mais, par un médiocre grossissement (150 à 200), les deux tissus en place, sur le mème lambeau ; il est vrai que la pièce, vieille de quelques heures, commençait à se corrompre ; et les cellules de l’ilot pancréatique, isolé dans un large espace aréolaire, étaient altérées ; mais la distinction des deux éléments n'en était pas moins sensible. Bien plus, il n’est même pas besoin de microscope, sur maintes espèces, Turbot, Congre, Anguille, Merlus ; l'œil suit la continuité du pancréas, il en dis- tingue les parties détachées par leur teinte plus franche sur le fond grisätre, ou au contraire argenté, des régions seulement lymphatiques. Je le répète en finissant, si M. Leydig eût connu les vaisseaux de Weber, il eût trouvé du même coup, et le pancréas, et les glandes lymphatiques des Poissons. La découverte de ces tubes résolvait le nœud de la question des lymphatiques en même temps que celle du pancréas, et la discussion sur ce point peut, je crois, être fermée. OBSERVATIONS SUPPLÉMENTAIRES SUR LES PLAGIOSTOMES ET LES GANOIDES. 49 Rlina Squatina, Rafin. Je ne pouvais avoir d'autre but, en disséquant le pancréas d'une énorme Squatine, que de vérifier l'absence de toute trace 174 LEGQUES. d'un système wébérien. Sténon avait déja (1), en 1664, reconnu l'organe ; et les principaux points de la disposition anatomique sont indiqués par Duvernoy dans la deuxième édition de l’Anatomie comparée (2). Dans les Squatines, comme dans les Raies, l'intestin est très- court, et la masse viscérale étroitement ramassée; le pancréas ne manifeste aucune tendance à l'allongement, et encore moins à la diffusion. Aussi le système wébérien fait-il défaut d’une manière absolue. 29 Carcharias (glaucus ?). Sur un jeune Carcharias j'ai trouvé un premier indice de divergence dans les lobes de la glande pancréatique. Le progrès, le long des tissus veineux, est déjà sensible. Mais les mésenté- riques, ne tardant pas à s'attacher aux parois de l'intestin, dans l'épaisseur desquelles se creuse pour elles un sillon, le chemin se trouve coupé devant le pancréas, dont les expansions sont forcées de se limiter. J'ai fait plusieurs prises de tissu aux environs du cholédoque et des veines, et sur les principaux gisements familiers au diffus des Osseux; nulle part je n’ai vu de cellules glandulaires. Celles du pancréas en masse étaient bien conformées, mêlées d’une immense quantité de granules Iymphatiques. 3° Travant (Raja Batis, L.). J'ai vérifié sur une grande Raïe l'absence complète de pancréas diffus. Il n’y a point de rameau partant du canal pancréatique principal et allant aux viscères; pas davantage de pancréatique accompagnant le cholédoque; la papille du cholédoque est à 10 centimètres de celle du pancréatique. Mes recherches pour trouver une troisième papille ou du moins quelque embouchure différente, sont restées Infructueuses. Je visitai tous les ligaments (1) CI. Bernard, Mémoire sur-le pancréas, 1856, p. 545 et suiv. (2) Id., t. VI, Canaux pancréat. et appendices. ARTICLE N° 8. DU PANCRIAS DES POISSONS OSSEUX. 4175 allant de l'intestin au muscle circumpaneréatique décrit par M. Claude Bernard, aucun ne renfermait de tubes de Weber. Ï n’y a donc point de diffus; le gros et le petit lobe du pancréas massif sont desservis par un seul conduit rampant sur une grande étendue entre la couche musculeuse et la couche muqueuse de l'intestin. A° Esturgeon (Acipenser Sturio, L.). Alessandrini (4) fait remarquer que le paneréas de l'Esturgeon, fort bien décrit par lui, s'allonge parallèlement à l'estomac; dans les Sturioniens la loi de diffusion s’aceentue déjà d'une façon beaucoup plus marquée par rapport à ce qu'on voit sur les Car- chariens. D'autre part, M. Leydig (2) constate au microscope une diffu- sion de la même glande en étui autour des canaux hépatiques. Nous avons donc par cette espèce une véritable transition aux Poissons osseux. Les parois de l’estomac sont musculeuses; elles se renflent encore en approchant du pylore et s’adjoignent en dedans des côtes longitudinales charnues. Ces bourrelets viennent concourir au pylore très-petit et très-musculeux. C’est sous le rebord de la saillie que forme cette espèce de sphincter que l'on trouve la papille du canal cholédoque; un peu plus bas et un peu à gauche de la même verticale, s'en montre une autre plus petite, au milieu du réseau formé à la surface de la muqueuse par les membranes valvulaires; le canal débouche au sommet par un seul orifice. Le pancréas se voit immédiatement; je n’a rien à donner sur ses rapports qui ne se trouve au mémoire de l’anatomiste bolo- nais; je rappellerai seulement, pour mettre en évidence une loi importante, que l'organe est traversé par une veine à la fois porte et mésentérique, sur laquelle il se développe vers le foie et vers l'intestin. (1) Novi Comment. Acad. Bonon., t. I, 1835. (2) Histol. comp., trad. franç., p. 400. 176 LEGQOUES. L'Acipenser et lesCyprins me servirent à faire sur les Poissons l'épreuve de la méthode chimique; mais je me trouve dispensé d’en indiquer le succès par l'incertitude où son emploi me laissa. La réaction s'opère et le bain de tournesol rougit, mais le déve- loppement de la teinte exige trop de temps, il est à craindre que dans un si long intervalle des actions secondaires n’interviennent surtout sous l'influence de la décomposition du tissu; d’ailleurs, par un séjour assez prolongé au contact de la graisse neutre, une matière organique quelconque finit toujours par l’acidifier; au moins c’est le résultat que j'obtins avec des lambeaux tirés du foie, de la rate, des mésentères, etc. Peut-être la rapidité des transformations est-elle à l'avantage du pancréas. Cependant je ne me suis pas arrèté à le vérifier, car l’appréciation de pareilles différences est délicate et sujette à bien des causes d'erreur. Réfléchissant en outre à la nécessité qui me serait faite dès lors de recommencer l'essai préalable de Ja méthode sur chaque espèce avant de lui en faire l’applicalion, j'y renonçai provisoire- ment, et je n’ai pas eu lieu d'y recourir depuis; le résultat final me parut atteint par une autre voie. Je ne serais pas étonné de voir très-réduite chez les Poissons l'efficacité différentielle d’une méthode fondée sur les propriétés physiologiques du pancréas. Sur quantité d'espèces, en effet, l'organe est dans un état de diffusion telle qu’on a de grandes chances, sur une petite portion quelconque tirée des organes abdo- minaux, d'avoir quelques débris de tissu pancréatique qui suffi- ront pour faire virer au moins jusqu'aux tentes pâles du rouge. Mais il y a plus encore, et si l'on réfléchit sur l'association des tissus lymphatique et pancréatique, on arrive à conclure que la différence entre ces deux fonctions doit être dans beaucoup de poissons moins tranchée que sur les animaux de haute organi- sation. S'il en était ainsi et que la lymphe participât chez ces êlres, à quelque degré, des qualités chimiques de la pancréatine, une méthode par réactifs ne pourrait servir à séparer les tissus qu'à condition d'atteindre une extrème précision. J'ajoute, en terminant, un détail qui me parait avoir échappé aux travaux d'Alessandrint. L'un au moins des deux Esturgeons ARTICLE N° 3. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 177 que je disséquai avait deux canaux pancréatiques, l’un aboutis- sant à l’intestin par une ouverture spéciale, l’autre partageant avec le cholédoque son insertion et la papille commune. De plus, les deux canaux communiquent entre eux dans l'épaisseur de l'organe; car une injection poussée par l'orifice pancréatique isolé rentre dans l'intestin par le canal parallèle au cholédoque. On se rappelle que pareille division du eanal excréteur, avec aboutissement en des points séparés, se rencontre chez quelques Clupes, dans le Congre et probablement sur les Pleuronectes. Devant ces faits, je me crois en droit d'affirmer que tous les Poissons osseux ont un pancréas, non point rudimentaire, et seulement vestige d’un organe constant chez les Vertébrés, mais considérable, quoique généralement épars et d’une importance fondamentale pour la digestion. Les Poissons rentrent donc ainsi dans le type général, non-seulement sous le rapport de l’ana- tomie, mais quant à la répartition des actes physiologiques. La dissociation profonde que la glande présente dans ces espè- ces, connue déjà dans beaucoup de Batraciens et même dans quelques formes isolées des groupes plus relevés, est d’accord avec une loi générale bien connue. C’est une marque de l'infériorité du rang zoologique, avec cela de particulier qu'elle est empreinte sur un appareil de la vie vé- gétative. Elle doit être en rapport avec des imperfections fonc- tionnelles de même ordre. Je conserve done, à la fin de ces recher- ches, quelque chose de l'opinion que je croyais seule plausible au début. Non-seulement la digestion des Poissons n’a ni la pré- cision n1 l'ampleur de celle d’un Mammifère ; mais, proporhon- nellement même, le suc pancréatique du Poisson joue un rôle physiologique inférieur dans cette digestion imparfaite ; le con- tingent d'action digestive dévolu à la liqueur produite par l'or- gane localisé et spécial est diminué dans ces représentants limites du type vertébré ; au contraire, la partie de l'acte digestif accom- plie par le liquide dit suc intestinal, qui, provenant de glandules 178 LHGQUES. non agglomérées et sans lien mutuel, représente la sécrétion non localisée, devient sans doute prépondérante chez les mêmes espèces. À mon avis, 1l est donc nécessaire d’avoir deux réponses à l’une des questions qui se posaient en commencant ce travail : La fonction pancréatique est-elle remplie par un liquide spécial produit d’une glande spéciale? Oui, dirai-je, si l'on comprend par fonction pancréatique la fonction du liquide fourni par la glande analogue du pancréas des Mammifères. Mais si l’on ap- pelle fonction pancréatique la somme proportionnelle des actes physiologiques opérés dans la digestion des Mammifères par leur suc pancréatique, je dirai que l'humeur du pancréas chez les Osseux n’accomplit que partiellement cet ensemble d’actes, et qu'il trouve un suppléant pour le reste dans le suc intestinal. Enfin, je ne crois pas qu'il faille aller chercher bien loin des motifs naturels pour cette dispersion de la glande pancréatique. Remarquons seulement que peut-être la question de finalité physiologique serait ici mal posée. La diffusion de lorgane c’est, dans un certain sens, son état naturel, élémentaire et primitif. Qu'en passant du Poisson à l'Homme, il se concentre, c'est là le fait dont on devra donner l'explication ; mais qu'il se dissémine en descendant des organismes plus parfaits aux moins développés, c’est une sorte de fait négatif auquel ne convient peut-être nulle raison positive. Je n’en saurais dire beaucoup plus de l’adhérence aux vemes; outre la raison évidente de solidité, faut-il en chercher une plus profonde? Je ne le pense pas. Cependant je suis bien près de croire que dans bon nombre d'animaux cette proximité des vaisseaux absorbants et du tissu pancréatique doit avoir une utilité, du moins secondaire et d'ordre différent. Si l’on admettait qu'une partie du liquide absorbé dans la digestion fût, par endosmose ou autrement, versée dans les tissus voisins des tubes qui le recueillent, le pancréas devrait agir sur ces matières et les renvoyer plus ou moins transformées vers l'intestin. En particulier, 1l serait alors certainement élimi- nateur d'un excès de graisse, qui ne servirait point dès lors à la ARTICLE N° 6. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 179 combustion respiratoire. Il semble bien difficile qu'il n’en soit pas ainsi, dans quelque proportion, sur ces nombreuses espèces (Spares, Ménides, Trigles, Cottes, Loches, Scombres) où le tissu pancréatique est traversé par un riche réseau vasculaire en rap- port avec les veines voisines. Et l’on aurait peut-être en cela l’une des raisons qui portent les veines de certaines espèces à se résoudre en reta morabilia dans des points dont on ne pourrait d’ailleurs comprendre le choix. Le Thon, si voisin des Maque- reaux, présente cette tendance fort prononcée, et je ne puis douter que son pancréas diffusé, comme celui du Scombrus, ne rende quelque service de cette nature. On comprendrait alors l’absence presque complète de graisse sur la majeure partie des mésentères de tant d'espèces. I n’y aurait pas à s'étonner beaucoup de voir le foie déjà suppléé, comme on sait, partiellement par le rein dans son rôle d'éliminateur des graisses, s’aider encore quelquefois de la troi- sième grosse glande de l’économie. Remarquons aussi que le pancréas s'établit autour des veines, non pas seul, mais dans le tissu lymphatique diffus avec lui. L'hypothèse précédente prendrait un caractère de probabilité plus imposant si, comme on peut le penser, ce système lympha- tique faisait lui-même partie de l'appareil absorbant, Je crois voir là le point de départ d’une série d’études qui ne seraient peut-être pas sans intérêt. Mais on ne trouve point qu'il puisse y avoir à la diffusion du pancréas une autre raison tenant de plus près à la physiologie de l’organe. Il n’est pas le seul, en effet, qui possède cette ten- dant à remplir les lacunes. Le foie, lorsqu'il acquiert un grand développement, l’opère aussi, comme on sait, par les mêmes voies. Le motif tiré des propriétés physiologiques devrait convenir aux deux glandes; et l’on ne trouve dans leurs aptitudes communes rien qui soit capable d'expliquer ce rapprochement, cette simi- litude dans les allures extérieures. Il est notoire, en particulier, que malgré les contacts multi- pliés qu'il affecte avec l'intestin, même dans les cas de volume le plus exagéré, le foie n’a jamais qu’un seul orifice de déverse- 150 LEGOUS. ment, et, pour le pancréas, s'il offre souvent plusieurs conduits, jamais je ne les ai vus s’aboucher ailleurs que dans le duodénum. La diffusion des deux glandes n’a donc point pour objet de porter leurs produits sur plusieurs points à la fois du canal alimentaire. Qu'il me soit permis d'ajouter ici, en finissant, que le courant du travail a soulevé plusieurs questions accessoires. Je citerai les plus importantes, ou du moins les plus capables d'intérêt. D'où vient la substance nacrée ? et que signifie -t-elle ? Les Cyclostomes, dont j'ai seulement commencé l'étude, n'offrent-ils point, à l'égard de leur glande, certaines parti- cularités exceptionnelles ? Enfin, de quelle manière les espaces lymphogènes sont-ils reliés à l'intestin et aux Iymphatiques généraux ? Les follicules de Peyer manquent sur les tuniques intestinales des Poissons, n’ont-ils point daus ces plaques Iymphatiques leurs analogues éloignés ? Je laisse à l'avenir le soin de dissiper ces obscurités et de com- bler ces lacunes; mais quant aux deux problèmes principaux, à savoir : 1° la généralité el l'efficacité du pancréas dans Îles Osseux ; 2° la nature des tubes de Weber, je les considère comme épuisés. Les Poissons osseux se rapprochent des groupes supérieurs, et les liens de l'unité de l'embranchement des Vertébrés sont resserrés ; d'autre part, ces tubes de Weber cessent de faire désaccord. Non-seulement 1ls sont désormais connus et compris, mais ils disparaissent du même coup dans une notion déjà an- cienne. Le nœud des deux problèmes était dans leur connexion. En même temps la fatigante confusion qu'engendrait la lecture de la bibliographie du sujet se fond dans la plus extrême simplicité, La remarquable exactitude des observations qui ont précédé ce travail se trouve justifiée et vérifiée ; leur divergence pe surpreud plus. Cuvier était dans le vrai en voulant aux Osseux un pancréas volumineux. Je suis même disposé à croire que les appendices fournissent un excédant de suc intestinal, et suppléent, quoi- que de loin et d’une manière indirecte, le pancréas, qui, comme ARTICLE N° 9. DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 181 certaines familles semblent le montrer, diminue lorsqu'ils se multiplient, Mais, quant au passage gradué d’une forme à l’autre, c'est une vue qu'on doit, je crois, rejeter. L'affirmation de Weber blessait par ce qu'elle avait de vague et de téméraire ; ie1 précisée, commentée et étayée d’analogies mattendues, elle reparaît comme une première indication d'une vérité démontrée depuis. I ne manquait que la preuve aux assertions de Wagner et de Steller; elle leur vient, quoique bien autre, vraisemblablement, qu'ils ne l'avaient attendue ; car aucun d'eux ne soupçonnait les tubes de Weber. L'élonnement qu'inspiraient les retours d'opinion de Müller et de Stannius disparaît devant la variabilité des choses, et leur indécision se comprend par le désavantage du point de vue auquel ils se trouvaient placés. L'incertitude que laissait à l'esprit la lecture de Brockmann tenait à plusieurs causes. Il signalait lui-même avec une sin- cérité parfaite plusieurs faits Incompris alors, el ramenés main- tenant au rang de ceux qu'il avait expliqués. En outre ses résultats metlaient, par leur insuffisance, dans la nécessité de les compléter par une vue théorique, à moins, pourtant, qu'il n'eût vu que la minime partie des choses. C’est préci- sément ce qu'on reconnait aujourd'hui, l’auteur est complété, mais non contredit. Enfin, M. CI. Bernard, en faisant appel à de nouveaux cher- cheurs, leur prédit le résultat auquel ils devront être conduits. Je suis heureux d’avoir trouvé ses observations aussi exactes que ses prévisions élaient Justes. Les pancréas du Silure et de l'Æsor (Brandt et Ratzbourg, Weber, Wagner et Alessandrini) suscitaient de nouvelles ques- tions et de nouvelles incertitudes parce qu'ils étaient seuls et semblaient exceptionnels, ils ne le sont plus. Il ne reste donc pas, ce me semble, de toutes les diflicultés soulevées par les travaux antérieurs, un seul point que l'esprit ne puisse quitter avec le sentiment de la possession du vrai. De même pour ce qui ressort de l'historique des tubes de Weber, si court et néanmoins si obscur. Cet anatomiste devine SC. NAT., JUILLET 1875. XVII. 19. — ART. N° 9. 152 LEGQUIS. la fonction à la vue du tube qu'il découvre; mais il est si mal- heureux dans sa manière de concevoir et d'expliquer, qu'il rend du même coup son opinion inaeceptable, Dégagée main- tenant et débarrassée de ses visées théoriques, son observation et son idée reprennent la valeur à laquelle elles ont droit. On sait aujourd'hui et pourquoi aucun ichthyologiste, même de ceux qui ont étudié les Iymphatiques, n’a parlé de ces tubes, et comment ils ont échappé aux savantes recherches de MM. Stannius et Brockmann ; enfin, on touche la cause de l'impossibilité où fut M. CI. Bernard de s’en faire une idée ca- pable de le satisfaire. Non-seulement on aperçoit ce qui man- qua aux découvertes de ceux qui ont ouvert cette voie, mais on comprend même la nécessité de leur Insuccès. J'espère ainsi, par le secours du Deus scientiarum Dominus, aussi nécessaire aux plus humbles travaux que pour les plus grandes choses, avoir fait passer dans le domaine de la certitude un détail mince en lui-même, mais qui touche à la généralité d'une grande loi physiologique. Je croirais le but atteint, si désormais on s’accordait à conclure la synthèse du sujet par ces deux lignes : Les Poissons osseux, comme tous les Vertébrés, ont un pancréas en rapport avec leur mode d'organisation. EXPLICATION DES PLANCHES. PLANCHE 1. Fig. 4. Masses visibles d’un pancréas disséminé (Bar). L'ampoule de Weber; de volume médiocre, recouverte par la dilatation (a) du cholédoque, reçoit un grand nombre de tubes, Les uns, très-courts, formant un faiscean visible à l'œil nu, se rendent individuellement à chacune des massettes dont l'agglomération compose le principal pancréas (P). D'autres, plus longs, passent dans un plan membraneux différent, soit pour suivre la veine duodéno-mésenté- rique (b) et gagner les masses (c) qui en dépendent, soit en pénétrant à un niveau plus profond pour s'engager daus la grande lame mésentérique (/) et y marcher auprès de la veine vésiculaire jusqu'aux masses (dd), où parallèlement au grand DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 183 tronc (e) qui dessert le plexus gastro-mésentérique (/). Les granules et massettes visibles sont surtout nombreux aux environs (g, g, g...) de ce dernier vaisseau. Le foie (A), peu volumineux, reçoit, outre la principale, deux veines portes (7, à) secondaires. Le duodénum (%), dont l'artère (m), après s'être associée un rameau hépatique, croise le cholédoque au niveau de l’ampoule de Weber et du pancréas massif, porte quatre appendices (n). Fig. 2. Anastomoses des vaisseaux de Weber (Bar). Une injection poussée par l’ampoule de Weber (a) pénétra dans plusieurs vaisseaux situés dans des plans différents, et dont six sont représentés avee un grossissement de 40 à 50 diamètres, Les tubes ponctués n'avaient reçu que quelques parcelles de matière, les autres étaient complétement remplis ; la pièce n'étant plus fraiche, les acini étaient détruits et les canaux qui y aboutissent se trouvaient béants (b, b). J’attribue la même cause aux perforations (4”) que l’un des canaux semblait porter. Les débris d’une des glandules (c) étaient encore très-reconnaissables. Fig. 3. Tubes de Weber avec leurs communications glandulaires et intestinale (Bar). Cette figure fait suite à la précédente. Il en est de même pour un dessin relatif au Bar contenu dans la planche 17 (première partie). Ge sont deux lambeaux mem- braneux portant une partie du pancréas invisible ; l’amplification est de 12 à 45 en longueur, et les massettes sont élargies par aplatissement. Dans ces sortes de prépa- rations, beaucoup de tubes se brisent toujours, quelque soin qu’on prenne pour les préserver ; mais ici le plus intéressant (a) de ces canaux en continuité avec quelques globules pancréatiques, se reliait par les méandres wébériens (2) aux tronçons figurés précédemment, et par eux à l’ampoule. Une vésicule (c) lui sert de support jusqu’à ce qu’il ait rejoint le gros tronc de la veine porte. Fig. 4. Pancréas disséminé d’une petite Sole. Le foie avait été détruit partiellement pour y rechercher la terminaison des canaux wébériens et des biliaires qui se rendent directement à la dilatation du cholédoque (ampoule de Vater). Fig. 5. Le même pancréas duodénal de la Sole, devenu massif dans un individu grand et vigoureux. Il repose sur la base d’un conduit (a) qui atteint le foie, ce qui n'avait pas lieu dans les animaux de petite taille (fig. 4). La vésicule rabattue laisse voir une massette qui quelquefois lui est tout à fait adhérente. L'ampoule de Vater est très- grosse. PLANCHE 2. Kig. 4. Principales coulées du pancréas diffus chez un Merlus. Le duodénum (a) est relevé apres scetion de la branche stomacale montante (h) pour laisser voir sur sa face inférieure la bande glandulaire (c) qui s’y adosse. La face (d) de la pyramide centrale, après avoir monté vers le sommet de la chambre 15/4 LEGQUIS. intra-mésentérique, se recourbe en demi-cercle et revient par le ruban (e) vers le plancher de la chambre, fournit la bande (c), puis, arrêtée par la soudure périto- néale protectrice de la mésentérique (f), remonte encore une fois pour se rattacher ainsi à la masse splénique (g) dont les wébériens suivent un trajet tout différent. Le foie coupé, puis réduit d’un tiers, reçoit dans une dépendance (A) du hile principal l'extrémité de la nappe glandulaire. Fig. 2. Masse viscérale du Merlus réduite au quart, vue du côté droit pour montrer le grand cordon veineux (a) et la masse vésiculaire (b). Fig. 3. Masse viscérale du Merlus réduite au sixième, côté gauche. Fig. 4. Viscères du Cycloptère lumph avec son grand cordon (a) veineux et la masse pancréatique principale (b). Fig. 5. Disposition théorique de la chambre intramésentérique. Le duodénum (a) forme la base, le cordon veineux (4) l’arête opposée du prisme. Fig. 6. Schéma du trajet de la première mésentérique (a) vers la bride péritonéale (4) maintenant le coude de la première courbure {c) intestinale, PLANCHE 3. Fig. 1. Principales massettes extra-hépatiques du Cyprin de la Chine, disposées en sé- ries linéaires (a) le long des rameaux constituants de la veine hépatique (4), ou en grosses masses (c) près de la vésicule (v) et de l’ampoule wébérienne (4). —f, foie. — r, rates multiples. — ?, intestin-duodénum. Fig. 2. Un canal de Weber avec trois vésicules glandulaires du Cyprin de la Chine. —n, noyaux des grandes cellules de la paroi du tube. — Grossissement de moins de 300 diamètres. Fig. 3. Cellules sécrétoires de l’Anguille. — Plus de 400 diamètres. Fig. 4. Masses pancréatiques (a) du Spare violacé partiellement cachées dans le foie (/); leur wébérien (w) est demeuré extérieur à la glande. Fig, 5. (a), cellules du foie; — (b), cellules de la masse (a). Fig. 6. Cellules de graisse du Congre, — Grossissement de 180 diamètres environ. Fig. 7. Deux des glandules en rognons isolés du Congre, avec acini nettement indi qués. (a), massette prise sur le trajet moyen de la mésentérique. (b}, massette trouvée très-près de l'anus. — Fort grossissement. Kig. 8. Réseau capillaire dans un espace lymphatique du Spare violacé (Sp. erythri- nus). — Même grossissement, Fig. 9. Veinule extraite d'un sillon superficiel au lobe inférieur du foie (Cyprénus Carpio) avec ses deux wébériens latéraux. Le tissu pancréatique qui contient ces vaisseaux n’est pas représenté. — Grossissement de 130 diamètres environ. Fig. 10, Une racine de veinule porte prise à son émergence du foie, avec son revête- ment paucréatique dont les lobules se dessinent à la surface. Un wébérien traverse la préparation (Carpio Cyprinus)., — Grossissement plus considérable. ARTICLE N° 8, | ” 4 Pal : Ta Pal Ton r ASS DU PANCRÉAS DES POISSONS OSSEUX. 159 Fig. 11. Plaque de mailles polygonales sur une veine du Trigle Iyre. Les aréoles for- ment une seule couche; sur le bord du vaisseau on voit quelques cellules de seconde espèce altérées et détachées de la masse plus importante fà laquelle ces éléments appartenaient. — 150 diamètres. Fig. 42. Utricules graisseux et aréoles du Trigle Lvre sur un même lambeau de l'or- gane intercæcal. Vu et approuvé, le 3 mai 1873. Le Doyen de la Faculté des sciences. MILNE EDWARDS. Permis d'imprimer, le 5 mai 4873. Le Vice-recteur de l’Académie de Paris, A. MOURIER. DEUXIÈME THÈSE PROPOSITIONS DONNÉES PAR LA FACULTÉ BorTaniQue. — Structure et développement de la tige chez les Monocotylédonées. GéoLoGie. — Caractères généraux des phénomènes de la période quaternaire. Vu et approuvé, le 3 mai 1873. Le Doyen de la Faculté des sciences, MILNE EDWARDS. Permis d'imprimer, le à mai 1873. Le Vice-recteur de l Académie de Paris, A. MOURIER. ERRATA PREMIÈRE PARTIE. — Pages 19, 21, 33, au lieu de G. Merluchius, lisez G. Merlucius. Page 31, ligne 5, au lieu de Labrus, lisez Sparus. DEUXIÈME PARTIE. — Page 62, supprimer le premier zéro à tous les nombres déci- maux. Page 83. même correction. Paris. — Imprimerie de E. Manrixer, rue Mignon, 2 4 » LL ex : a } 7 PU à Ur ” 4 P | nu 2 GET 2 y u, . HACXIENE THE Un ; : : É | . 1 « 4 À Îe "à > h h 1 SL _—. Le nd h > Cu | + : U = + ki Tr Le à : A Aout 4 " Le La il LÉ U TT. 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Parts, ET Ann.des Sezene.nat. 5° Serre. Tool, Tome 160060 17 Pan CT CAS des Po LPSONS. on 0 , PR Rp almen tulle Lstrapade.15, L'at'us r & I EE 1 RATE RAR Gus Te (RASE Li AEer LROOOEOTA ON pi RACE re : \r Au RE au ÿ ñ A Llancreas des l’oissons. Paris. ’ Û Împ. A Salmon r Meile Estrapade. 12 Et AA 0 TRE RS ou on QU TAN l . Lou h ® L ( à | À 1 Le NOR À a nu r LE L L ; 0 : | FU A ue sl à L Varie "| L nt : À l »; “i Me | LU à DU " D” L” \ 9 ON UUUMER : a | j " } } Î Dr: i ' 1 = D" res AA tte k rt EN | {os ; a CE e k } : rat . | | ÿ # CRE | : ; - "ET Un Ü N ee | dl D RIT CORTE UE NN © LUN | © “LA = SKK © | >] FN = WW 27% = Q 2 Gaÿ > = AS > 46 = 4 > DST 2 an Frs n Ce FA JIUVu g11 LIBRARIES SMITHSONIAN INSTITUTION NOIINILILSNI NVINOSHILIN = n — un _ > fi 2 NS Z RUE un .0 _ KA 2 . 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