ig Os oe DE L'INSTITUT BOTANIQUE (UNIVERSITÉ DE BRUXELLES) PUBLIÉ PAR EF ERREKA TOME Il AVEC TROIS FIGURES DANS LE TEXTE ET QUATRE PLANCHES ‘CYCLE DE L’AZOTE. NOTES DE TECHNIQUE MICROSCOPIQUE ET BACTERIOLOGIQUE. ALCALOIDES ET MATIERES PROTEIQUES. CED BRUXELLES HENRI LAMERTIN, EDITEUR-LIBRAIRE 20, RUE DU MARCHE AU BOIS, 20 1906 ! AS >> f Î ‘ ee ER ER RECUEBIE DE PUNSEEL DT BerraAaNnIOou kr RECUEIL DE L'INSTITUT BOTANIQUE (UNIVERSITÉ DE BRUXELLES) PUBLIE PAR I ER RE ey TOME Il AVEC TROIS FIGURES DANS LE TEXTE ET QUATRE PLANCHES CYCLE DE L’AZOTE. NOTES DE TECHNIQUE MICROSCOPIQUE ET BACTERIOLOGIQUE. ALCALOIDES ET MATIERES PROTEIQUES. LIBRARY CEQO new YORK GARDEN: BRUXELLES HENRI LAMERTIN, EDITEUR-LIBRAIRE 20, RUE DU MARCHE AU BOIS, 20 1906 PE . [as 4- 1907 Ty tr Py A TABLE DES MATIERES DU TOME II EmitE LAURENT, Recherches sur la valeur comparée des nitrates et des sels ammoniacaux comme aliment de la Levure de bière et de quelques autres plantes (Annales de l'Institut Pasteur, t. III, p. 362, 1880.) Penicillium glaucum . Aspergillus glaucus. Aspergillus niger Ordre Bts" se Mrycolewire 2 5 Se sta EmitE LAURENT, Action comparée des nitrates et des sels GU ORIGECIEN SU 1a LLEVUTE: EN emit ook ee Sl dre (Annales de la Soctété belge de re [Mémoires], t. XIV, 1890.) CONCESSIONS RS ca) fo | OR En AL NS Tunes NU: ay ale EmiteE LAURENT, Expériences sur la production des nodo- silés chez le Pots à la suile d’inoculations (Bulletin de l'Académie royale de Belgique, 3° série, vol. XIX, p. 764, juin 1890.) Explication de la planche ÉmiLE LAURENT, Réduction des nitrates par la lumière solaire . (Bulletin de? Académie royale de Belgique, 3° série, t. XX, n° 8, pp. 303-308, 1890.) EmiteE LAURENT, Sur /a réduction des nitrates par la Levure de bière et par quelques moisissures . . . . . . . . (Bulletin de l'Académie royale de Belgique, 3° série, t. XX, ne 8, pp. 309-317, 1890.) LIBRARY NEW YORK BOTANICAL GARDEN. Pages. mn BR Oo N II 17 19 26 27 33 TOME II, 1906. VI TABLE DES MATIÈRES. ? Pages. EmitE LAURENT, La réduction des nitrates en nitrites par : Pesecratges elles tubercules. . 2: ONE RE (Bulletin de l'Académie royale de Belgique, 3° série, t. XX, n° 11, pp. 478-485, 1890.) Émize LAURENT, Réduction des nitrates par la lumière RENÉE.) 0, Le EAN RL (Bulletin de l'Académie royale de Belzigue, 3¢série, t. XXI, n°3, pp. 337-345, 1891.) EmitE MARCHAL, De l'action des moisissures sur l’albumine. 55 (Bulletin de la Société belge de microscopie, t. XTX, 1893.) ÉmiLEe MARCHAL, Sur la production de l'ammoniaque dans le sol par les microbes . … ÉRIC yh PATI ES CCE (Bulletin de l'Académie royale de Belgique, 3¢série, t. XXV, n° 6, pp 727-771, 1893.) Caractères morphologiques du bacille mycoide . < 2 74 Baciwllas mycoides 0h... Sa eae ee 74 Caractères microscopiques . . NS ee ee ne CAE 74 Caractères macroscopiques. Culture sur plaques de gélatine . . 74 Culture parspiqére sur gélatine. "MR ALORS ONE ee 75 Culture Sur'agar en surface Oo CNRC ETATS 76 CGalere Sur seria i ~...\i5.- ae eee PAS TRUE 76 Culture sur pomme de terre . Le ee M Del ee ee SANS 76 Guitureiea ballons LEE nt AO 76 Dispersion. 7. at bu sf NN RER ER 77 Action du bacille mycoïde sur l’albumine . ; 78 Mecanisme du phénomène OS ONE NE 79 Indluence de la températures. "SF RS oo ee Re 83 Hiente de l'aération, ‘1 ONE e e 85 Infigence de la réaction du milieu RMS ER ee 86 Influence de la concentration des solutions . . . . . . - 89 Action du bacille mycoide sur les différentes substances azotées . . . go substances afbüminoïdes . !. 2 0e ver see et ER ee eo Substances azotées non albuminoides . . . .=:. - - = -» g2 Tome II, 1906. TABLE DES MATIERES. atl Pages. ea cette ia.) Eee ccm UMNUMERIMEX gg Action du bacille mycoïde sur les hydrates de carbone. . . . 95 ISIE oe) i oot Se RER RE es EI ER BEM UT 96 Léo ERRERA, Coloration des noyaux par la nigrosine. . . 99 (Bulletin de la Société belge de microscopie, t. VII, n° 8, 1881.) PEN ERRERA.Sur l'emploi de la canarine <->... . 167 (Bulletin de la Société belge de microscopie, t. X, n° 11, 1884.) Léo ERRERA, Notes de technique microscopique du Labo- ratoire d'anatomie et de physiologie végétales de l’'Univer- sité de Bruxelles. I. — Sur l'emploi de l'encre de Chine en microscopie . . 103 (Bulletin de la Soctété belge de microscopie, t. X, n° 11, 26 juillet 1884.) Il. — Deux questions de terminologie. . . . .°. . . 107 (Bulletin de la Société belge de microscopie, t. X, n° 12, 12 octobre 1884.) III. — Comment l'alcool chasse-t-il les bulles d'air? . . . in (Bulletin de la Soctété belge de microscopie, t. XIII, n° 3, 22 décembre 1886.) G. CLAUTRIAU, Sur la varialion du point de coagulation des , p 8 albuminoides, avec démonstrations expérimentales . . . . 117 (Bulletin de la Société belge de microscopie, t. XVIII, n° 9, 18 juillet 1892.) Emtte MARCHAL, Sur un procédé de stérilisation à cent. DÉGROS ACs SOMHBONS'C ALDRINDNE ane NE ES ET tn dell ETO (Bulletin de l'Académie royale de Belgique, 3° série, t. XXIV, n°° 9-10, pp. 323- 327, 1892.) A. DE WEVRE, Recherches sur la technique microchimique EEE BUGS GS Ee NSIS ee ak OR er Te Ce | K23 (Bulletin de la Société belge de microscopie, t. XX, n° 4, 15 janvier 1894.) DT OSEO RRQ LE a 2, (2) PARLE PLCC AM Eee ta. 2 AOL we. ee able MT, 132 Tome II, 1896. VIII TABLE DES MATIERES. Réactifs OlOrants 5.0 a wl hee tee eee 8. Datura Stramonium . . OneViconane TAPANT is ARE RERO IE ORNE EIRE LOL AP LUI ULOLACEL 5 eee MINE RON ae LT AOL /PEDIOSSIS StnUata SOU DENT EURE 12. Brunfelsia americana. . . . AR Lesalcaloïdes pendant la germination CO 64 el) a abe Topographie générale des alcaloïdes chez les Solanacées . . . GONCLUSIONS <5" Se <5 sc) VEN re Explication des fieures +3." RER RC RC E. DE WILDEMAN, Présence et localisation d'un alcaloïde dans quelques Orchidées: «9: Wee, eee ANA as us (Bulletin de la Société belge de microscopie, t. XVIII, 1892.) 281 285 293 304 304 306 313 314 316 318 323 325 327 328 329 330 331 332 333 Tome II, 1906. TABLE DES MATIERES. XI Pages EmitE DE DROOG, Contribution à l'étude de la localisation microchimique des alcaloïdes dans la famille des Orchidacées. 347 (Mémoires couronnés et autres mémoires, publiés par l’Académie royale de Belgique, t. LV, 1806.) Anatomie des: Mendyolcuie NOEL wih = o> e ~ 348 Localisation, milerochimiques /+ “ie Poo eee wiles 7 0 51 da52 iste, des espaees GkAMIneese, cs: « PER O 2 Me hm id 364 Orchidarcecsaieal OmMeresec AU ee me Ce tae. Lacs Girlie, SEP CLUE ROUE NAN VPN RE Hany bet ae, Vie LT 488 GP2 Dendraniune ATRSDOP RTE NE aay RS hs! ES ee € SEAT 360 er eee tee SENS NT UNE Re, pr gh LES A Le “300 § 4. Catasetum tabulare. — Catasetum Hookeri. — Catasetum macrocarpum. — Catasetum Bungerothii. — Catasetum DISCO LE a as) say Mee eee eee es, eee ba FOR Sah Ao/acrapsrs Luddemannienc) ER ele Fe ne 37 e864 RCRA DAES) AEM Tate LS nent, A ey eerie eee oe dart BOM. Liste des genres d’Orchidacées groupés d’après la classification CGRP EAC Ne ae” hea 5 sk, a ok UN tana DEAN ew Xa, 3077200 Pepireaton Gerla lANCHE. \ 2 D “yeh Pees) eh sei hs ey seo 37S DER AROUUTAME TOOT ERIE he) cto M RS OR Ba ie ota eat) SF NE IGSELR ed CORRE ea oe wey! ce) aE Sees, vie ana S74 GULESELUITA INA ER OGC NUM IN a meee teen EA CR NN 74 PI RUMEE UO NSIS LATEMANNARC EE NN MEME Geet |p ce a ST Léo ERRERA, Bibliographie des alcaloides, glycosides, tan- PEEPS SCIE EN NE RNG, bese” s a A By LA Sart Mele ARRETE TOO Ie Me Le Sus eRe MRM RAT es. CAS TER CA MAIS al. AS re RARE ee oe ree tall. oN Se A875 le Lacciesavsam dans les VésalE re PONTS de, 577 RÉAeHOnS CHIMIQUES PAR NE ER CEE 377 Ill. Signification physiologique. . + …".". + + + + « + 382 IV. Alcaloides dans les divers groupes de Végétaux. . . . . . 388 Champignons, Lichens, Bactéries . . . . . . . . 388 PÉNdQDAYIESS ACTE Te Ne TRS Ne Vs oi s +: 390 ToME II, 1906. TABLE DES MATIÈRES. Graminacées. C'|[ 104. MEME TRE LE ORNE 0 inorales | LL yt ESPION >) +> EEE: Orchidacées 12 cake Tee Ve When (Gs RER Pipéracées. ) J a se eae enue ai ota cee ne Gontortales: 1, VENDRE Oe on Fe ee Borraginacées.- 25. Anca) ERP MRIS pete a Ee Wl TION Solanimeées +... LA pee es ee aa ee wee eens Ruibiales, 7", 100 APE ERNEST ER TE Campanulalés. OR EEE CRC GUVEOSIDES, TANNINS. ETC, «MO RER NP NE cn OR Generalites PG va 15!) SAONE TR MES WocalisatiOn ys)! x). se fs. SEE eee a ee i a | oe ee ET Sienification physiologique : . MINIER ER NEER EU cn Pome PAVE EULATICIRÈRES 1 a Olan ENT Maen ee ee ae RECHERCHES VALEUR COMPAREE DES NITRATES ET DES SELS AMMONECAUX ALIMENT DE LA LEVURE DE BIÈRE By DE QUELQUES: APRES, PLANTES PAR É. LAURENT (:) Parmi les substances qui peuvent concourir à l'alimentation azotée des végétaux, il faut citer en première ligne les nitrates et les sels ammoniacaux. On sait que beaucoup de Champignons assimilent sans difficulté les sels ammoniacaux, et que les plantes vertes prosperent dans des solutions minérales additionnées d'un nitrate. Mais on n’a pas de renseignements précis sur la valeur comparée de ces deux catégories de sels comme aliment des divers groupes végétaux. : Les expériences que l'on aurait pu tenter autrefois dans cette direction, auraient été entachées d'erreur par le fait des microbes, que l'on sait aujourd'hui être la cause de modifications profondes des combinaisons azotées. Il est donc absolument indispensable, (1) Ce mémoire a paru dans les Annales de l’Institut Pasteur, 1889, t. III, p. 362. Nous le reproduisons ici intégralement, sauf le chapitre I, qui a été repris et complété dans le travail suivant de Laurent. Tome II. I TOME II, 1889. 2 É. LAURENT. — VALEUR COMPAREE DES NITRATES dans des travaux de cette nature, d'éviter ces erreurs au moyen de cultures d’une pureté absolue. A ce point de vue, les organismes inférieurs sont sans contredit bien plus commodes que les plantes vasculaires, dont le développement à l'abri des infiniment petits est des plus difficiles a obtenir dans les expériences. Jai fait choix pour ces études de la Levure de bière, d'un certain nombre de moisissures tres communes, et de quelques plantes vasculaires. IL. Parmi les résultats fournis par la culture des moisissures dans des solutions nourricières ammoniacales et nitriques, l'un des plus curieux m'a été donné par le Cladosporium herbarum. Comme je l'ai déjà indiqué dans ces Annales (’), je me borne a le rappeler. La forme typique préfère les nitrates, tandis que les états réduits (Dematium et formes-levures) assimilent mieux le sul- fate d’ammoniaque. Ceux-ci, dans la solution nitrique, produisent presque exclusivement des filaments, des cellules analogues à des Levures dominent dans la solution ammoniacale. J'ai fait remar- quer que ces différences sont bien dues a la nature de l'engrais azoté, car l'addition du sulfate de sodium à 1 °/, ne modifie en rien les résultats. La culture des moisissures qui suivent a été faite dans des matras coniques à fond plat, sur une couche de liquide nutritif peu épaisse. Elle n'a été interrompue qu'après la production complète des appareils conidifères dans les deux essais à comparer pour chaque espèce. Voici les résultats pour 20 centimètres cubes de solution miné- rale avec 2.5 °/, de sucre interverti : Penicillium glaucum. — Au début de ses travaux sur les microbes, M. Pasteur remarqua que cette moisissure, comme la (1) Annales de l'Institut Pasteur, t. II, p. 573. Tome Il, 1889. ET DES SELS AMMONIACAUX. 3 Levure de bière, végète parfaitement dans des solutions minérales auxquelles on ajoute une substance hydrocarbonée et un sel ammoniacal (*). Le même savant s’assura même que ce sel peut être remplacé par un nitrate. Dans mes cultures, la croissance a été d’abord plus rapide dans la solution nitrique, mais plus tard cette différence a disparu. Poids sec de matière vivante produite : Penicillium glaucum. Dans la solution ammoniacale. . . . 0,217 gr. — HHMIQUEIL LP ANR 0,206 — Alternaria tenuis. Dans la solution ammoniacale. . . . 0,1075 gr. = nitriguey L LIENS 0,237 — Botrytis cinerea. Dans la solution ammoniacale. . . . 0,2265 gr. — Hiiquey 20-MIECULE 0,155 — Mucor racemosus. Dans la solution ammoniacale. . . . 0,0435 gr. — HICTIQUE SN een 0,118 — Aspergillus glaucus. Dans la solution ammoniacale. . . . 0,1885 gr. — TIQUE RER 0,2005 — Aspergillus glaucus. — Le mycélium se développe beaucoup plus rapidement dans la solution nitrique; dans la solution ammo- niacale, les filaments sont colorés en jaune, tandis qu'ils sont blan- châtres dans l’autre liquide nutritif. Cette coloration jaune, fré- (1) Annales de chimie et de physique, 3° sér., t. LXIV, p. 107. ‘ToME II, 1880. 4 É. LAURENT. — VALEUR COMPAREE DES NITRATES quente chez le Penicillium glaucum, existait aussi dans les filaments de Mucor racemosus développé a l'intérieur du liquide ammoniacal. Elle est sans doute due a une substance résiduaire de la vie des cellules. Aspergillus niger. — Grâce aux études de M. Raulin, cette espèce convient admirablement aux recherches les plus variées sur la nutrition des Champignons. Ce savant (*) avait remarqué, sans y attacher d'importance, que le tartrate d'ammoniaque s'est montré dans ses cultures un peu plus efficace que les nitrates de potassium et d'ammoniaque, pour des quantités équivalentes en azote. Le rap- port des poids de plante obtenus comparativement dans les deux cas était de 26 à 20. Pour éviter l'emploi du nitrate d'ammoniaque, j'avais modifié comme suit la composition du liquide Raulin : BAU cas ely ue NAME AC Ae 1500 C. C. SaACLhaTOSe eve 0. COOPER PE TA 70,00 gr. Acidetartrique.’ 2,222 CT Ie 4,00 — Phosphate de potassium PTS CRE 0,60 — Carbonatede potassium MERE 0,60 — Garbonate de magnésium ON OG Sultate'de'zinc *. 0 POS aera 0,07 — Sulfate defer =. <3) Fe NON RE 0,07 — Silicatede potassium...) =- is). eee 0,07 — Ce mélange était partagé en deux moitiés : dans l’une j’ai intro- duit 68°07 de nitrate de soude et dans l’autre 48'71 de sulfate d’ammoniaque. Par mesure de précaution, je ne fis l’ensemence- ment qu'avec une très petite quantité de spores. Dans la solution nitrique, la germination et la croissance du mycélium ont été moins rapides que dans la solution ammoniacale, (4) Zhèses, p. 142, 1870. Tome II, 1889. ET DES SELS AMMONIACAUX. 5 ee .—..—————_——————….—…. bien que la température fût très voisine de l’optimum (33 à35). La production des appareils conidifères a été également plus tar- dive. Trois cultures comparatives ont donné ces résultats : Le II. AIT, Dans la solution ammoniacale. . 9,169gr. 9,270gr. 4,311 gr. = nitrique . . . 6,997 — 7209 — 3,375 — Les deux premieres séries (I et II) ont été interrompues au septième jour, lorsque le mycélium nourri avec du nitrate avait donné ses spores, il est vrai, peu nombreuses. Les cultures indi- quées par le chiffre III furent desséchées a la fin du deuxième jour, avant l’apparition des conidies. Dans les deux cas, la différence est à l’avantage de l’aliment ammoniacal. Oidium lactis. — Cultivé dans le mélange nutritif employé pour la Levure, il n’a pas donné une végétation bien vigoureuse. Tou- tefois la préférence de cette Mucédinée pour les sels ammoniacaux est évidente. J'ai constaté aussi une différence provoquée par la nature de l’engrais azoté. Elle est la contre-partie de ce que pré- sente le Demalium de Cladosporium dans les mêmes conditions; tendance a former des filaments dans la solution ammoniacale et des cellules courtes au contact du nitrate de sodium. Mycolevure. — Peu d'organismes manifestent une préférence aussi marquée pour les sels ammoñiacaux. La Mycolevure ne prospère pas dans le mélange employé pour la Levure de bière, mais croit à merveille dans le liquide Raulin, auquel j'avais apporté la modification indiquée au sujet de l’Aspergillus niger. Après quarante-huit heures à 35°, la Mycolevure donnait à la sur- face de la solution ammoniacale un mycoderme très grimpant le long des parois du matras; dans la solution nitrique, il n’y avait que quelques lambeaux de mycoderme. On pourrait supposer qu'un organisme qui se nourrit de préfé- Tome II, 1889. 6 É. LAURENT. — VALEUR COMPAREE DES NITRATES rence d'ammoniaque puisse s’habituer graduellement à l’assimila- tion de l'acide nitrique. Il n'en est pas ainsi, tout au moins pour la Mycolevure. Une culture, dont la semence provenait d’un premier essai dans le mélange avec nitrate, fut faite dans le même milieu. La croissance du microbe fut presque nulle. Quelles modifications les moisissures que nous venons d'étudier sont-elles capables d'apporter à la substance azotée qui leur sert d’aliment? Aucune n'est capable de déterminer la nitrification du sulfate d’ammoniaque. Je m'en suis assuré avec soin. Par contre, plusieurs réduisent les nitrates en nitrites. Tels sont : le Clado- sporium herbarum et ses états polymorphes, le Penicillium glaucum, l'Alternaria tenuis et le Mucor racemosus. Je n’ai observé aucun phenomene de réduction avec les Aspergillus niger et glaucus, ainsi qu’avec le Botrytis cinerea. Comme conclusion des expériences précédentes, il faut admettre que certaines moisissures préferent les nitrates comme source d'azote alimentaire, tandis que d’autres assimilent plus facilement les sels ammoniacaux. Il en est aussi qui utilisent d'une manière sensiblement égale ces matières salines. Dans le genre Aspergillus, l'acide nitrique convient mieux a l'Aspergillus glaucus et l'ammoniaque a |’ Aspergillus niger. Il n'y a là rien qui doive nous étonner outre mesure; la sélection natu- relle nous explique sans peine ces préférences spécifiques. TIT. Des essais identiques a ceux que je viens de rapporter ont été établis pour quelques plantes de grande culture pendant l'été de l'année 1888. Pour les uns, j'employais du sable très pur auquel je mélangeais la plus grande partie des sels alimentaires avant l'ense- mencement; le reste fut distribué plus tard avec les eaux d'arro- sement. Des cultures plus nombreuses furent faites simultanément dans des solutions aqueuses contenant des quantités équivalentes d’azote, Tome II, 1889. ET DES SELS AMMONIACAUX. 7 sous forme de nitrate de sodium ou de sulfate d’ammoniaque. Voici quel était le mélange employé : BEEN oe ER NES PR PET IAE 1000 C. c. Phosphate tricalcique . . . 1 . 0,50 gr. Sulfate de potassium 4.) (2. °. 702) 0: 0,50 — — WASHES ATS) 15), tspER AoA). 0,50 — — Calcium sini! 6. UA ese 0,50 — — FOR NI ar Sai © alae TU Lie Car 0,01 — Nitrate desodiumy 9 22 LOC EN 1,00 — ou sulfate d’ammoniaque. . . . . . 0,77 — Je m’assurais de temps a autre que les liquides de culture n'étaient pas envahis par les Bactéries, qui auraient pu les altérer et nitrifier le sulfate d’ammoniaque. Lorsque cet accident arrive, et il est plus fréquent dans les solutions ammoniacales, les plantes ne tardent pas à s’en ressentir; leurs racines, privées d'air, entrent bientôt en décomposition. Souvent aussi il y a production de nitrates. Bien que les nitrates puissent facilement être mis en évidence dans l'intérieur des racines au moyen de la diphénylamine, je n’en ai point observé de traces ni dans le Maïs ni dans l’Avoine. Ces deux espèces sont donc incapables d'opérer la nitrification; les observations analogues de M. Molisch et de M. B. Frank nous permettent de supposer que cette propriété n'existe pas chez les plantes vasculaires, non plus que parmi les moisissures. Les Pois cultivés dans les deux mélanges ne présentaient pas de différence ; leur croissance fut bien supérieure à celle des Pois de la même variété cultivés dans le mélange minéral dépourvu d'azote combiné. J'ai fait la même remarque pour le Haricot nain, mais cette espèce a mieux assimilé le nitrate que le sulfate d’ammo- niaque. L’Avoine et le Maïsfurent aussi prosperes dans les deux mélanges salins. La seule différence qui m'ait frappé est la ramification fort inégale des racines dans les deux milieux. Elles sont courtes, tres divisées dans la solution ammoniacale; au contraire, dans la solu- Tome II, 1880. 8 É. LAURENT. — VALEUR COMPAREE DES NITRATES tion nitrique, les racines sont beaucoup plus longues et pourvues de moins de ramifications. On pouvait tres facilement distinguer les plantes de chaque catégorie par l'examen des racines (*). I] semble que nous soyons en présence d’un de ces phénomènes d'adaptation, tels que l'allongement démesuré des racines dans l’eau distillée et dans les terres peu fertiles. C'est un fait bien connu - que les nitrates sont facilement entrainés par les eaux dans les couches profondes du sol; les sels ammoniacaux sont, par contre, fixés par la terre et sont plus abondants dans les couches voisines de la surface. La plante serait donc sensible a la distribution de l'aliment azote dans le milieu extérieur. Quant aux cultures dans le sable, elles ont donné des résultats assez différents de ceux que je viens d’exposer. En premier lieu, la germination s’est faite moins bien dans les pots additionnés de sulfate d’ammoniaque, ce que j’attribue à la décomposition de ce sel sous l’action de la chaux mélangée au sable avant ]’ensemencement. Beaucoup de graines, surtout les plus riches en réserves amyla- cées, furent complètement détruites par la pourriture. Plus tard, la croissance a été plus belle dans les pots avec nitrates; les tiges étaient plus robustes, les plantes (Froment et Avoine) ont mieux tallé. Néanmoins, la comparaison des pieds cultivés dans le sable avec sulfate d’ammoniaque avec des pieds cultivés sans engrais azoté, prouvait suffisamment l’assimilation de l'ammoniaque. Des essais avec la diphénylamine et la brucine, faits de temps en temps, m'assuraient que le sable de culture n'avait pas été le siège de phénomènes de nitrification. La maturation a été plus tardive avec le sulfate d’ammoniaque : la différence était de deux semaines à l’avantage des plantes nour- ries avec du nitrate de sodium. (*) HAMPE (Landw. Versuchstationen, t. IX, p. 157, 1867) avait réussi à cultiver le Maïs dans une solution ammoniacale. Au contraire, BIRNER et LUCANUS (Landw. Versuchstationen, t. VIII, p. 148, 1866) n'avaient pas vu l’Avoine pros- pérer dans les mêmes conditions. Tome II, 1880. ET DES SELS AMMONIACAUX, 9 Des cultures de Lolium perenne dans le sable m'ont montré que cette Graminée peut aussi assimiler directement les sels ammonia- caux ; cependant elle croit avec plus de vigueur lorsqu'on lui donne un nitrate. En résumé, ces essais de culture prouvent que les plantes supé- rieures peuvent, à la rigueur, assimiler les sels ammoniacaux. Mais dans la pratique agricole, les nitrates ont une influence plus régu- lière et plus manifeste, parce que les phénomènes de la nutrition azotée des végétaux terrestres se compliquent d’actions multiples qui se passent dans le sol. Les faits précédents peuvent-ils nous conduire a quelque concep- tion générale sur l’assimilation de l'azote chez les végétaux? On ne peut mettre en doute que les combinaisons ammoniacales constituent des aliments assimilables par les plantes les plus diverses, sinon pour tous les végétaux. C'est un fait absolument certain pour les Bactéries (*), les Levures, les moisissures et les plantes vasculaires, dont un grand nombre d’ailleurs, comme les espèces des terrains marécageux et acides, ne trouvent guère de nitrates au voisinage de leurs racines. Les nitrates ne conviennent guère aux Bactéries ni aux Levures; ils sont moins favorables que les sels ammoniacaux a certaines moisissures. Quelques-uns de ces Champignons, le mycélium de l'Agaric comestible, les plantes vasculaires qui croissent dans les terres cultivées, dans les décombres, témoignent une préférence remarquable pour les nitrates. Ces terres sont l’objet d’une nitrifi- cation active, et il est bien probable qu'il n’y a là que des phéno- mènes d'adaptation entre les propriétés physiologiques de l'orga- nisme et ses conditions de vie. Au point de vue de l’économie de la nature, la production des nitrates nous apparaît comme un phénomène superflu, nuisible même, puisque les plantes qui se nourrissent de nitrates doivent (*) Bien souvent j'ai constaté que pour les Bactéries vulgaires, les sels ammo- niacaux sont bien plus utiles que les nitrates comme source d'azote. Tome II, 1889. 10 É. LAURENT. — VALEUR COMPARÉE DES NITRATES, ETC. réduire ces sels afin d’en préparer des combinaisons ammoniacales propres à l'assimilation. Si la nitrification existe et joue un rôle si considérable dans la chimie du sol, elle n’est pas, comme on le croit souvent, un moyen de préparer la nutrition des plantes vasculaires. C'est un phénomène fatal, qui est en grande partie l'œuvre des infiniment petits. Et les plantes commensales des microbes du sol auront dù s’habituer à se nourrir de nitrates, sans perdre leur capacité d’assimilation pour l’ammoniaque. ACTION COMPAREE DES NITRATES ET DES SELS AMMONIACAUX SUR LA LEVURE PAR E. LAURENT (*) D'après M. A. Mayer (*) et M. Nägeli (*), les sels ammoniacaux sont beaucoup plus utiles que les nitrates au développement de la Levure. Cependant, Dubrunfaut (*) avait assuré que l'acide nitrique du nitrate de potassium disparait pendant la fermentation. J'ai institué quelques expériences dans le but de vérifier ces asser- tions contradictoires, siintéressantes pour la physiologie comparée. Car nous n'avons, en réalité, que fort peu de documents certains sur les phénomènes de synthèse des albuminoïdes. Dans ces nouveaux essais, comme dans les études sur l’alimenta- tion hydrocarbonée, j'ai employé la solution minérale suivante : LOT RE ne |S fae.) ) TS EU TT 1,000 C. C. Phosphate dé potassium . 1.1.1 0,75 gr. Sulfate de magnésium. . . . . . . OFF — (!) Ceci constituait le chapitre VIII du travail de Laurent : Recherches physio- logiques sur les Levures. (Voir REC. INST. BOT. UNIV. DE BRUX., t. I, p. 135.) C’était aussi le chapitre Ier du travail précédent de ce tome-ci. (2) Untersuch. über die alkoholische Gährung, 1869. (3) Untersuch. über niedere Pilze, p. 33, 1882. Expérience faite en décem- bre 1877. (4) Comptes rendus, t. LXXIII, p. 263, 1871. Tome II, 1800. 12 É. LAURENT. — ACTION COMPARÉE DES NITRATES J'y ai ajouté 50 grammes de saccharose très pure et l’un des sels azotés que voici : Sulfate d'AMMONAQUE. CADENCE 0 4,71 OS. Phosphate neutre d’ammoniaque . . . 4,71 — Nitrate de potassium UE es ey ee 7,22 — Nitrate déSOiUmu. |. el sete eee 6,07 — Nitrite de)netassitn 7.) ter ee 6,07 — Ces quantités sont équivalentes au point de vue de la quantité d’azote introduite dans les differents mélanges. J'ai mis 50 centimètres cubes de chacune de ces solutions dans des matras de 250 centimètres cubes, de manière à n'avoir qu’une couche liquide d'un centimètre d'épaisseur. Une couche plus pro- fonde eût nui à la croissance à cause de l'aération insuffisante. Dans chaque matras, il y avait 28"5 de saccharose. Celle-ci ren- ferme toujours des traces de matières azotées. Afin de calculer l'influence de celles-ci sur la Levure, j'ai établi une culture sans ajouter de sel azoté au liquide nutritif. Les six matras ont été stérilisés à la vapeur à 100° et inoculés avec une trace de Levure de bière de Bruxelles le 2 mars 1888. Ils furent placés dans une armoire obscure, où règne une température de 12 à 15°. Cette basse température avait pour but de ralentir le développement et de favoriser la vie aérobie. Dans la culture avec nitrite de potassium, rien ne s'est déve- loppé. Le matras avec le sulfate d’ammoniaque a présenté le dépôt le plus important pendant les trois premières semaines. Plus tard, le phosphate d’ammoniaque s’est montré plus avantageux. Enfin, au fond du matras témoin, il n'y avait qu’un dépôt très faible; avec les nitrates, le résultat ne fut guère meilleur. Le 13 mai, l’expérience fut arrêtée, les liquides de culture filtrés, bien lavés et pesés. Voici les poids de Levure constatés : Avec phosphate d’ammoniaque. . . . 0,174 gr. — sulfate d'ammoniaque. . . . . 0,110 — — nitrate de potassium . . . . . O,OIT — — nitrate de Sodium, 0,0174 — — nitritede potassium . . . . . 0,000 — HEMOIN Cree) es ME. ue" | eee OOD gaa Tome II, 1890. ET DES SELS AMMONIACAUX SUR LA LEVURE. 13 a À ns La Levure préfère donc d’une façon manifeste les sels ammonia- caux aux nitrates. Les nitrites ne sont pas assimilés et même paraissent vénéneux, puisque la minime proportion de Levure signaiée dans le matras témoin n'existe pas dans le matras avec nitrite de potassium. Ne serait-il pas possible d'interpréter l’action peu favorable des nitrates en admettant que dans la profondeur des liquides, les cellules de la Levure tendent à transformer les nitrates en nitrites > Pour que cette hypothèse soit admissible, il faut démontrer que la Levure peut réduire les nitrates, propriété qui a été niée par M. Jorissen (*). Il convient de reprocher à l'unique essai fait par ce chimiste d'avoir été entrepris dans des conditions assez imparfaites. En effet, M. Jorissen a employé de la Levure ordinaire, que l'on aurait tort de considérer comme pure de Bactéries. Il a préparé un mélange de sucre et de nitrate de potassium. Dans ces conditions, le dédoublement du sucre était évidemment plus facile pour la Levure que l'enlèvement d’un atome d'oxygène au sel azoté. Comme les Levures ne végètent qu’avec peine dans les solutions qui ne renferment que de l'azote nitrique comme aliment azoté, je ne m'attendais nullement à des résultats bien nets par la culture dans de tels milieux. Plusieurs essais ont confirmé mes prévi- sions : après deux ou trois mois, il n’y avait pas encore trace de réduction des nitrates. [1 en a été de mème pour les liquides additionnés de sucre a 5 et 10 °/, et de nitrate de potassium à 1°}, dans lesquels je cultivais de la Levure pure. Les résultats ont été tout autres dans les expériences suivantes. J'ai préparé une solution minérale avec nitrate de potassium à 6£'07 par litre et seulement 2,5 °/, de saccharose. La liqueur traitée par le chlorure de naphtylamine et l'acide sulfanilique ne donnait aucune trace de nitrite. La solution a été répartie entre des matras coniques remplis jusqu’au voisinage du goulot. Cette précaution rendait l’aération du mout beaucoup moins facile. Après stérilisation, j'ai introduit dans ces matras des dépôts de (!) Bulletin de l'Académie royale de Belgique, 3° sér., t. X, p. 595. TOME II, 1800. 14 É. LAURENT. — ACTION COMPARÉE DES NITRATES Levures récoltés dans des cultures en moûts sucrés et absolument privés de Bactéries. Ces Levures étaient : Levure basse de vin de Champagne. — — de bière de Strasbourg. — haute de bière de Bruxelles. Mycolevure de M. Duclaux. Les matras furent placés à la température de 20 à 22°. Au bout de deux jours, la réaction des nitrites était des plus évidentes dans le matras avec la Mycolevure; elle était moins nette avec les trois autres Levures. Cependant, après huit jours, il n'y avait plus le moindre doute sur le pouvoir réducteur de ces Levures vis-à-vis des nitrates. Les Levures qui avaient servi à ces essais, furent ensemencées dans des moûts sucrés ordinaires; leur vitalité n’était nullement altérée. Les Levures peuvent donc réduire les nitrates, et l'on pourrait dès lors concevoir que si les nitrites sont en réalité toxiques pour elles, elles aient été amenées, par évolution, à préférer les sels ammoniacaux comme source d'azote inorganique. Mais la question de la toxicité des nitrites est en réalité plus complexe qu'elle ne le paraît à première vue. Lorsqu'on fait divers essais de culture de la Levure dans des liquides additionnés de nitrite de potassium, on obtient des résultats assez variables. Pour des doses égales, ce sel, tantôt se montre veneneux et tantôt est sans action nuisible sur la Levure. Cela dépend de la réaction neutre ou acide du milieu de culture; on observe ici des faits du même ordre que ceux qui ont été signalés par MM. Loew et Bokorny (‘) pour l’action des nitrites sur les algues filamenteuses. Ce ne sont pas les nitrites qui sont nuisibles, mais bien l'acide (1) Botan. Zeitung, 1887, p. 855. Tome II, 1890. ET DES SELS AMMONIACAUX SUR LA LEVURE. 15 SS SS PRE US nitreux, et ces sels deviennent vénéneux en présence d'un suc cel- lulaire qui met l’acide en liberté. Cette assertion se trouve complètement vérifiée par l'expérience. Ensemencée dans des liquides sucrés neutres et additionnés de potassium à */s00, */7503 ‘/rooo1 ‘/2000 EtC., la Levure de bière s'y déve- loppe et ne paraît pas se ressentir de la présence du sel. Comme les cellules de Levure sécrètent normalement des substances acides, il est certain que de petites quantités d'acide nitreux sont mises en liberté et doivent a la longue nuire au microbe. J'ai en effet observé que dans des solutions sucrées avec ‘/s, */100 */2009 /250 de nitrite, le développement de la Levure est maladif. Elle prend l'aspect d’amas très rameux; dans les cellules, il y a de grandes vacuoles et des corpuscules graisseux abondants. Des doses aussi élevées semblent nuire directement aux cellules vivantes, exciter la production d'acides par le protoplasme, et provoquer ainsi une accumulation d'acide nitreux dans le liquide de culture. On ne peut invoquer ici des phénomènes de pression osmotique, car la Levure que j'ai étudiée résiste à plus de 4 °/) de chlorure de sodium. Dans les mêmes solutions que précédemment, mais avec addi- tion de 1 ou 2 millièmes d’acide tartrique, le nitrite de potassium paralyse aux doses suivantes : ‘/s, */10009 /2000. Une Solution à ‘/;0000 ralentit le développement, et avec "/rc000 €t */50003 il se produit tar- divement des amas cellulaires floconneux au fond du liquide. J'ai déjà dit que ces amas trahissent un malaise physiologique. Des doses de “/5c000 Et de */,00000 de nitrite n’entravent nullement la crois- sance. A l’état naturel et dans l'industrie, les Levures vivent dans des liquides acides, et l'on peut dire que la présence de nitrites, à doses suffisantes dans le milieu ambiant, est toujours nuisible. Cette étude relative a l'action des nitrites sur la Levure peut jeter quelque lumiere sur une question d’un intérét pratique assez important. L’expérience a appris aux brasseurs que la plupart des eaux qui contiennent des nitrates sont dangereuses pour la prépa- ration de la bière, surtout lorsqu'elles proviennent de puits peu profonds. La Levure s'affaiblit rapidement dans les moûts pré- Tome II, 1890. 16 E. LAURENT. — ACTION COMPAREE DES NITRATES pares avec ces eaux; la conservation de la biére est incertaine. Mes essais sur la réduction des nitrates par les Levures prouvent que si ce phénomène est possible, il est peu probable qu'il puisse se passer dans la cuve a fermentation. Le moût de bière en ébullition peut aussi donner lieu a la for- mation de nitrites, mais en quantité tres faible. [Il semble dès lors que ce ne soient pas les nitrates qui nuisent à la Levure, mais bien les nitrites qui existent presque toujours avec ces sels dans les eaux venant de faibles profondeurs. Ces nitrites seraient décomposés par les acides du moût de bière et mettraient en liberté de l'acide nitreux, nuisible pour la Levure. Telle est mon opinion, mais les propriétés physiologiques des Levures sont assez variables pour que nous puissions supposer que certaines races aient le pouvoir de réduire nettement les nitrates, même pendant la fermentation alcoolique. Puisque les Levures peuvent réduire les nitrates, il est permis de se demander si elles sont capables de décolorer les couleurs qui, comme le carmin d'indigo, ne résistent pas aux agents réducteurs. Divers essais ont été tentés dans les solutions colorées par le carmin d'indigo. Malheureusement, les sucres, surtout dans les solutions colorées avant la stérilisation, détruisent rapidement la matière colorante; la décoloration se fait aussi à froid, mais plus lentement. Dans l’eau distillée, additionnée d’une goutte d’une solution con- centrée de carmin d’indigo, la décoloration n'a pas lieu. Si l’on y verse des dépôts de culture pure de Levures, on ne tarde pas à constater une décoloration lente, mais progressive. C'est ce que j'ai observé avec : Levure de bière de Bruxelles; — — de pale ale; — mm 1 dE ottashoure, — de vin de Champagne; — — de Bourgogne; Mycolevure. 7 La décoloration m’a paru se continuer encore avec des cellules Tome II, 1890. ET DES SELS AMMONIACAUX SUR LA LEVURE, 17 de Levures tuées par la chaleur, de sorte que le phénomène est une propriété des matières organiques, plutôt qu’une propriété physiologique. Pour terminer l'histoire des propriétés réductrices des Levures, je rappellerai les anciennes expériences de M. Schutzemberger (*) sur la réduction de l’oxyhémoglobine par ces organismes. Dans ce cas, la réduction ne paraît pas directe, mais simplement provoquée par une diminution de pression de l'oxygène dans le milieu exté- rieur. CONCLUSIONS. Les Levures assimilent les sels ammoniacaux beaucoup mieux que les nitrates. Les nitrites leur sont nuisibles lorsque de l'acide nitreux est mis en liberté. Les Levures peuvent réduire les nitrates en nitrites, mais cette propriété n'est bien apparente que dans les liquides faiblement sucrés. Travail fait au Laboratoire de physiologie végétale de l’Université de Bruxelles et au Laboratoire de chimie biologique de la Sorbonne, à Paris. (1) SCHUTZEMBERGER, Les fermentations, p. 107, 1875. Tome II. 2 2 ar “a Us an ~~ i Bl eae 4 Bu e alli fi ARE | $ de ‘à i ea à tn EXPÉRIENCES SUR LA PRODUCTION DES NODOSITES CHEZ LE POLS SUITE DINOCULATIONS PAR É. LAURENT (:) La question des nodosités des Légumineuses et de l'origine de l'azote de ces végétaux, continue à passionner les physiologistes et les agronomes. Tandis que certains botanistes estiment encore que les corpuscules bactériformes contenus dans ces nodosités ne sont pas des organismes autonomes, il semble résulter des recher- ches expérimentales de M. Prillieux (*), de M. Frank (°), de MM. Hellriegel et Wilfarth (*), de M. Marshall Ward (°), de M. Praz- (*) Ce travail a paru dans le Bulletin de l’Académie royale de Belgique, juin 1890, 3e sér., vol. XIX, p. 764. (2) Bull. de la Soc. botan. de France, t. XXVI, p. 98, 1870. (3) Botan. Zeitung, 1870, p. 377. (4) Tageblatt der Naturforscher-Versammlung zu Berlin, 1886, et travaux ulté- rieurs. (5) Philosophical Transactions of the Roy. Society of London (B), vol. 178, p. 539, 1887, et Proceedings of the Royal Society, vol. XLVI, p. 431, 1889. Tome II, 1890. 20 E. LAURENT. — EXPERIENCES SUR LA PRODUCTION mowski(?), de M. Beyerinck (?) et de M. Bréal (*), que ces productions sont dues au développement de microbes particuliers (*). Cepen- dant, la culture fort difficile de ces étres n’a pas permis d’obtenir des résultats d’une netteté qui les mette à l’abri de toute critique. On est donc réduit a emporter les convictions par des recherches nombreuses faites sur différentes espèces. C'est ce qui m'a déter- miné à instituer depuis l’année dernière plusieurs séries d’expeé- riences de culture sur la production de nodosités chez le Pois. Après beaucoup d'essais infructueux, je suis enfin arrivé à des résultats qui confirment pleinement la nature microbienne des nodosités de cette plante. Comme M. Marshall Ward et M. Bréal, j'ai eu recours à la méthode des cultures dans l’eau qui s'est montrée si favorable, à la solution de maints problèmes de physiologie végétale. Depuis assez long- temps, on avait observé que les Légumineuses cultivées dans des liquides nourriciers ne donnent pas régulièrement des nodosités radicales. En 1888, j'avais eu l’occasion de constater le mème fait avec le Pois. D'après M. Bréal, le développement de ces petits tubercules est assuré si l'on prend la precaution d’inoculer sous l'épiderme des jeunes racines de Pois une petite portion du con- tenu des nodosités de Luzerne. C’est ce que je viens de vérifier de la façon la plus convaincante. Au commencement de mai, j'avais fait germer des graines de Pois d’une variété très naine sur une étamine tendue au-dessus d'un critallisoir rempli d'eau. Le 15 mai, les plantes avaient développé (1) Botan. Centralbl., XXXVI, nos 7, 8 et 9, d’après une communication faite au Congrès des naturalistes polonais, le 20 juillet 1888. (2) Botan. Zeitung, 1888, n° 46 à 50. (3) Annales agronomiques, t. XIV, p. 481, 1888, et t. XV, p. 529, 1880. (4) Sous le nom de microbes, je désigne l’ensemble des organismes inférieurs; au contraire, beaucoup de biologistes considèrent ce terme comme synonyme de Bactéries. C’est à dessein que je fais ici cette remarque, afin de ne pas laisser supposer que je range dans le groupe des Bactéries les organismes qui causent la production des nodosités chez les Légumineuses. Tome II, 1890. DES NODOSITES CHEZ LE POIS A LA SUITE D’ INOCULATION. 21 des tiges de 4 à 6 centimètres et des racines un peu plus allongées, mais vierges de tout renflement. Quinze de ces Pois furent cultivés dans le mélange nutritif de Sachs privé d'azote combiné et additionné de 0.5 °/,, de sulfate de potassium : Paudistalléess EURE NE LEE! 1,000 cc. Sufate/demañnésiumi) % . 2100) 0,5 gr. ae, GE POHISSIU TE sv wr) te ait va ete 0,5 — = aE CerGalcltimess PET EN eee 0,5 — UE LED carn TRS oi AP 0,01 — Phosphate (ricalcique 227 175 oy secant: 05 — Ghigrure de SOU, 272007 “oye 0,5 — Chaque bocal, en verre, de forme cylindrique, contenait environ 250 centimètres cubes de liquide et était fermé par un bouchon plat coupé en deux moitiés et percé d'une ouverture dans laquelle la plante était fixée. Aussitôt les cultures préparées, j'ai pris un fil de verre terminé en pointe recourbée et je l'ai plongé dans la profondeur des nodo- sités de diverses espèces de Légumineuses. Une petite quantité du contenu cellulaire restait adhérente au fil de verre; je l’introduisais immédiatement sous l’épiderme des jeunes racines à infecter. Après chaque inoculation, la petite pointe de verre était jetée ou passée dans une flamme. Voici les espèces avec lesquelles onze Pois ont été inoculés : 3 Pois avec nodosités de Pois (Pisum sativum) ; 3 — de Féve (faba vulgaris); 2 ng de Trèfle incarnat (Z7rifolium incarnatum); I = de Trèfle élégant (Trifolium elegans); I — de Limaçon (Medicago scutellata) ; I — de Lentille (Zrvum Lens). Quatre Pois ne furent pas inoculés afin de servir de témoins. Les plantes auxquelles j'ai pris la substance à inoculer croissaient TOME II, 1890. 22 É. LAURENT. — EXPÉRIENCES SUR LA PRODUCTION au Jardin botanique. La plupart provenaient de semis faits en pleine terre et les nodosités étaient peu développées. I] convient de remarquer que mes cultures n'étaient pas à l'abri des germes étrangers, qui auraient pu se trouver dans l’eau distillée ou dans les bocaux, ou tomber pendant les manipulations. Des cultures faites et conservées dans des conditions rigoureuses de pureté sont extrèmement difficiles, je voulais d’abord comparer le développement de Pois inoculés et de Pois non inoculés cultivés dans les conditions ordinaires. Huit Pois furent également mis en expérience dans le mélange nutritif de Sachs complet, c’est-à-dire avec 1 °/.. de nitrate de sodium. Ils furent inoculés comme suit : 3 avec nodosités de Pois; a — de Fève; 2 furent conservés comme témoins. Enfin, le même jour, j'ai cultivé dix Pois dans un mélange d’eau, de phosphate de calcium et de chlorure de potassium à 1 °/o0, milieu employé par M. Bréal pour ses cultures. De ces dix plantes : 3 furent inoculées avec nodosités de Pois; 2 22 — de Féve ; 2 — — de Tréfle incarnat ; I = — de Limacon; I — — de Lentille. Deux servirent de témoins. Toutes les cultures furent placées dans une serre afin de hâter la croissance. Des manchons en zinc entouraient les bocaux en verre et mettaient les racines à l'abri des rayons lumineux. Le 25 mai, je constatai que des nodosités commencçaient à poindre sur les racines de plusieurs Pois inoculés et qu'il n’y en avait point sur les Pois témoins. Le 3 juin, les résultats étaient vraiment merveilleux. Tous les Pois de la série avec liquide sans nitrate présentaient Tome II, 1890. DES NODOSITES CHEZ LE POIS A LA SUITE D'INOCULATION. 23 des nodosités. Elles étaient nombreuses et grosses sur les Pois inoculés avec des nodosités de Trefle incarnat, de Féve et surtout de Pois; celles qui provenaient des inoculations faites avec les nodosités de Limacon et de Tréfle élégant étaient moins saillantes. Enfin sur le Pois inoculé avec les nodosités de Lentille, les renfle- ments étaient encore plus petits et moins abondants. Des quatre temoins, trois étaient tout a fait privés de nodosités; sur le quatrième, on voyait de légers soulévements de l’épiderme que j'avais considérés d’abord comme des nodosités en voie de formation. Il n'en était rien, car, apres quelques jours, de petites racines se montraient à l'endroit des soulèvements épidermiques. Les racines des Pois infectés artificiellement étaient plus trapues et moins ramifiées que celles qui n'avaient pas été inoculées. 1] semblait même exister une différence analogue dans les bourgeons. La plupart des tiges des Pois infectés, surtout celles qui corres- pondaient à des racines riches en nodosités volumineuses, étaient un peu moins élevées. La production de nodosités paraît donc nuire à la croissance par une sorte de balancement organique, au moins pendant les premiers temps de la végétation. Dans le mélange nutritif de M. Bréal, les résultats sont entière- ment comparables à ceux que je viens d'exposer; seulement la production des nodosités est moins brillante et les racines sont plus courtes. Même, il n y a guère de nodosités sur les Pois ino- culés avec les renflements de Fève et de Trèfle incarnat. Bref, le milieu convient moins bien que le mélange de Sachs privé de nitrate. Dans ce mélange avec nitrate, les résultats m'ont vivement étonné. La végétation a un aspect plus vigoureux; les tiges sont plus hautes, les feuilles plus larges et d'un vert plus foncé que dans les deux autres'séries de cultures. Les racines sont aussi plus longues et plus ramifiées. Celles qui ont été inoculées avec des nodosités de Pois présentent des nodosités petites et peu nom- breuses. On a de la peine à les découvrir. Sur les trois Pois ino- culés avec des nodosités de Feve, il n’y a que de très rares renfle- ments. En résumé, des vingt-cinq Pois inoculés dans les trois séries de ToME II, 1890. 24 É. LAURENT. — EXPERIENCES SUR LA PRODUCTION cultures, tous ont donné des nodosités plus ou moins abondantes selon la nature du liquide nutritif et des espèces qui ont fourni la substance inoculée. Des huit Pois non inoculés, aucun n’a donné de nodosités. Il est sans doute permis de conclure de ces résultats que les nodosités radicales des Légumineuses renferment des organismes qui peuvent se transmettre par inoculation à des racines intactes. L'infection peut se faire entre plantes d'espèces différentes, ce qui tend à confirmer l'opinion déjà émise, que ces microbes ne sont pas propres à chaque espèce. Le résultat donné par les cultures de Pois dans le liquide addi- tionné de nitrate confirme cette observation faite par M. H. de Vries (*), M. Schindler (*) et M. Vines (*), que dans un milieu riche en matières azotées, l’aptitude à produire des nodosités diminue d’une manière très sensible. Comment interpréter cette influence des engrais azotés? Est-ce une sorte de calcul égoïste de la part des Légumineuses, ou bien est-ce le nitrate qui agit directement sur le microbe producteur des nodosités? De nouvelles expériences m'éclaireront sur ce point. À côté de ces premiers résultats de mes cultures de cette année, je crois intéressant d'indiquer sommairement ceux que j'avais obtenus pendant l'été de 1889 avec des cultures similaires faites à l'Institut Pasteur à Paris. J'avais fait, dans le mélange de Sachs sans azote, un assez grand nombre d'essais de culture de variétés naines de Pois et de Fève, qui, en pleine terre, donnaient des nodosités en abondance. En vain, jinoculais sur les racines de mes plantes le contenu de nodosités de Fèves et de Pois recueillis dans le jardin au moment de la floraison. Je ne vis apparaître aucune trace de renflement sur les racines, ce que je m'explique maintenant par l'âge des () Wachsthumgeschichte des rothen Klees. (LANDWIRTH. JAHRBÜCHER, Berlin, t. VI, 1877.) (2) Botan. Centralbl., t. XVIII, 1884. (3) Annals of Botany, vol. II, 1888-1889, p. 386. Tome II, 1890. DES NODOSITES CHEZ LE POIS A LA SUITE D'INOCULATION. 25 nodosités employées pour l'infection. D'après M. Beyerinck, la vitalité des microbes que renferment les nodosités de Légumi- neuses ne tarde pas, en effet, à diminuer et à disparaître. Quant à la culture de ces microbes, je l'avais essayée en 1889 avec M. le Dt Roux. Il n y eut aucune croissance sur gélatine nutritive. Dans le bouillon, nous observâmes après plusieurs semaines la formation d’un léger dépôt qui contenait des corpu- scules bactériformes très courts et des masses sphériques analogues à des spores. La lenteur de ce développement contraste singulièrement avec la croissance rapide des Bactéries que MM. Petermann et Tour- nay (*) affirment avoir extraites des tubercules de Lupin jaune et qui seraient, disent-ils, analogues a des Bactéries qu’ils ont ren- contrées dans le sol et les eaux de drainage. La facilité avec laquelle M. Bréal (*) a réussi à cultiver les prétendues Bactéries de nodosités me paraît également sujette à caution. Aussi, j'ai repris ces essais de culture en vue d'expliquer les faits contradic- toires et d'établir de nouvelles expériences d’inoculation sur des racines de Légumineuses. Bruxelles, Laboratoire d'anatomie et de physiologie végétales de de l’Université, le 7 juin 1890. (1) Contribution à la question de l'azote. (MÉMOIRES COURONNES ET AUTRES MÉMOIRES DE L’ACAD. ROY. DE BELGIQUE, t. XLIV, p. 18, 1880.) (EMEA ce cr: Tome II, 1890. 26 É. LAURENT. — EXPERIENCES SUR LA PRODUCTION, ETC. EXPLICATION DE LA PLANCHE. I, 2, 3, 4 et 5. Pois cultivés dans le mélange nutritif de Sachs sans nitrate. 1. Inoculation avec nodosités de Fève. Be — — de Tréfle incarnat. 3et4. — a de Pois. 5. Aucune inoculation. 6. Pois cultivé dans le mélange de Sachs avec nitrate et inoculé avec nodosités de Pois. Ë, LAURENT D ve a E -3 LÉ =! = FA = 2 RÉDUCTION DES NITRATES PAR LA LUMIERE SOLAIRE PAR É. LAURENT (') L'influence de la lumière sur les matières organiques a été l’objet d'observations très anciennes. On en doit l'étude méthodique a M. Duclaux (*), qui a soumis a la radiation solaire un grand nombre de substances hydrocarbonées. Ce savant a montré que toutes les réactions que peut produire la.chaleur peuvent aussi être provoquées par la lumière. L'inverse n'est pas vrai, et il ya beaucoup de phénomènes d’oxydation et de réduction que la lumiere semble seule capable de déterminer. Dans ces réactions, qui se résument toutes en une dislocation de la molécule primitive du composé organique, il se produit un cer- tain nombre de corps tels que les acides carbonique, oxalique, formique, acétique, butyrique et valérianique, l'alcool éthylique et les aldéhydes méthylique et éthylique. Coincidence remarquable, qui a été bien comprise par M. Du- claux, tous ces corps résiduaires sont aussi les produits les plus communs de l'action des microbes. Leur formation dans des phé- (*) Ce travail a paru dans le Bulletin de l’Académie royale de Belgique, 3° série, t. XX, n° 8, pp. 303-308, 1890. (2) E. Ducraux, Action de la lumière solaire sur les substances hydrocarbonées. (ANNALES DE L'INSTITUT AGRONOMIQUE DE PARIS, t. X, 1880.) ToME II, 1890. 28 É. LAURENT. — REDUCTION DES NITRATES nomènes aussi différents est donc en relation avec la stabilité de leur molécule, plutôt qu’avec la nature de l’agent qui les produit. Il est intéressant de voir de simples actions chimiques, provo- quées par la lumière, donner lieu à la formation de corps que nous sommes habitués à considérer comme des produits de l’activité des microbes. Ce ne sont pas seulement des substances organiques qui peuvent être décomposées par la radiation solaire. Les acides et les sels inor- ganiques subissent des modifications du même ordre, bien connues des chimistes. C’est ainsi que l'acide nitrique pur se réduit sous l'influence du rayon solaire avec production de peroxyde d'azote, et se colore d'autant plus qu'il était plus concentré. J'ai observé qu'il en était de même pour les nitrates : sous l’in- fluence de la lumière, ils sont réduits en nitrites.Onavait longtemps considéré ce phénomène comme particulier à quelques Bactéries. En 1885, j'ai indiqué que les plantes supérieures (graines en germi- nation et tubercules) jouissent de la même propriété. Depuis lors, j'ai constaté qu'il en est de même pour des moisissures et pour des Levures (*). Nous voici de nouveau en présence d'un phénomène que l'on attribuait exclusivement aux microbes sous l'influence d'un simple préjugé et qui, cependant, est très général dans la nature. La sensibilité des solutions de nitrates vis-à-vis de la lumière est très grande. Au mois d'août 1887, j'avais exposé au soleil, dans une serre, quatre tubes à essais, dont deux contenaient 10 centimètres cubes de nitrate de potassium à 5 °/o, et les deux autres du nitrate de sodium à la même concentration. En même temps, je mettais deux tubes témoins sous une cloche noire. Tous les tubes avaient été au préalable stérilisés afin d'éviter l’action des Bactéries. La radiation solaire était très vive; à l’intérieur des tubes, la température ne fut jamais supérieure a 39°. (t) Voir ma note Sur la réduction des nitrates par les Levures et les moisissures, méme tome (travail suivant). Tome II, 1890. PAR LA LUMIERE SOLAIRE. 29 Apres deux heures d’insolation, je fus surpris de constater dans les tubes insolés une réaction très nette des nitrites, tandis que les tubes à l'obscurité n'en donnaient pas de trace. Les nitrites étaient caractérisés au moyen du réactif de Griess (acide sulfani- lique, acide chlorhydrique et chlorure de naphtylamine). C'est un réactif d’une sensibilité extrème. I] n'est même pas nécessaire de soumettre les solutions nitriques à l'action directe des rayons solaires. Des tubes avec nitrates en solution furent placés sur une fenêtre exposée au nord; ils ne recevaient que de la lumière diffuse. Néanmoins, après six heures, ils donnaient une réaction nitreuse assez marquée. Ces expériences ont été reprises et complétées pendant l'été de l’année 1889, qui, a Paris, a été extrêmement favorable aux essais de cette nature. Le 13 juin, j'exposais au soleil trois tubes à essais; l’un renfer- mait du nitrate de potassium à 1 °/,, un autre du nitrate de sodium, et le troisième du nitrate de calcium à la même concentration. A côté, je plaçais trois tubes avec les mèmes solutions, sauf cette différence que les rayons solaires devaient traverser pour les atteindre une couche de sulfate de quinine de 3 centimètres d’épais- seur. Il y avait aussi trois tubes avec nitrates sous une couche d'eau distillée de mème épaisseur, et trois autres tubes sous une cloche noire. Enfin, un treizième tube bien bouché renfermait I gramme de nitrate de potassium desséché au préalable a 170°. L'expérience avait été commencée a midi, par un soleil radieux et un ciel sans nuage. A 4 heures, les trois tubes exposés directe- tement au soleil et les tubes sous Ja couche d’eau distillée donnaient la réaction des nitrites de la maniére la plus nette. Par contre, les tubes à l’obscurité n’en contenaient point de traces. Quant aux tubes sous le sulfate de quinine, ils ont donné une réaction extré- mement faible, ce que j’attribue a ce que le sulfate de quinine n'intercepte pas complètement les rayons chimiques. Dans ces derniers tubes, laissés en expérience jusqu’au 16 juin, la proportion de nitrite n’a pas augmenté sensiblement, bien que le soleil ait été tres ardent pendant les journées du 14 et du 15. Le nitrate sec, exposé au soleil, avait aussi subi l’action réduc- ToME II, 1890. 30 É. LAURENT. — RÉDUCTION DES NITRATES trice : dissous dans l'eau, il donnait une faible réaction nitreuse. Depuis les expériences de Niepce de Saint-Victor, on sait que certaines substances, — l'acide pyrogallique et le papier sont du nombre, — impressionnées par la lumière, permettent la réduction d’un sel d'argent, ajouté ultérieurement dans l'obscurité. Il n'en est pas ainsi pour les nitrates : ils doivent être exposés directement a la lumière. Dans deux tubes secs exposés pendant trois heures à un soleil intense, j'ai introduit quelques centimetres cubes de nitrate de potassium en solution à 1 °/,. Je n'ai constaté par la suite aucune réaction de nitrite. On ne réussit pas mieux si l'on introduit dans les tubes isolés de l'eau distillée ou une substance organique, comme la peptone. Une solution de nitrate que l'on y ajoute après cinq ou six heures d’insolation ne subit aucune modification. La réduction des nitrates par la lumière est indépendante de la présence de l'oxygène. Dans un tube a essai qui contenait une solution de nitrate, j'ai fait le vide avec la pompe à mercure. La production de nitrite a été aussi active qu'au contact de l'air. L'action de la lumière sur les nitrates ne paraît pas s'arrêter à la production des nitrites. Une solution de nitrite de potassium à 1 pour 100,000, exposée à la lumière directe pendant trois heures d'été, donna une réaction visiblement plus faible que la même solution placée a l'obscurité ou sous la solution de sulfate de quinine. Selon les groupements moléculaires sur lesquels elle exerce son action, la lumière est un agent d’oxydation aussi bien qu'un agent de réduction. Ainsi, du papier imprégné d'une solution de gaiac bleuit au soleil, et le même papier, plongé d'abord dans un bain d'eau de chlore et devenu bleu, se décolore après quelques heures d'insolation (°). On pourrait donc supposer que la lumière soit capable de déter- miner la nitrification des sels ammoniacaux. A plusieurs reprises, (1) J. HERSCHEL, Philos. Transact., 1842, et E. BECQUEREL, De la lumière, t. I, p. 98. ToME II, 1890. PAR LA LUMIÈRE SOLAIRE. 31 en 1887 et en 1880, j'ai exposé au soleil des solutions de sulfate et de chlorure d'ammoniaque. Mais jamais, même après dix jours d’insolation intense, il n’y a eu production de traces de nitrate. Les rayons solaires détruisent donc les nitrates, mais ne peuvent provoquer la production de ces sels aux dépens des substances ammoniacales. L'action réductrice du soleil sur les nitrates peut assurément s'exercer sur le nitrate d’ammoniaque produit dans l'atmosphère par les actions électriques et qui s’y trouve en suspension à l'état de particules. D'autre part, les couches superficielles du sol sont celles où la nitrification est la plus active. Dans nos champs cultivés, à l'époque des labours et des semailles, de petites quantités de nitrates doivent être modifiées par les rayons solaires. Enfin, la sève des plantes renferme souvent des nitrates qui parviennent dans les feuilles et s'y trouvent exposés à l'influence de la radiation. Qui sait si ces sels n’y sont pas l’objet de phénomènes réducteurs ? D’après ce que nous savons sur la composition des substances organiques azotées les plus fréquentes dans les végétaux, on peut supposer que les nitrates sont réduits et transformés en combinai- sons ammoniacales avant d'être assimilés par le protoplasme. Chez les Champignons et les Bactéries, la lumière est certainement étrangère à ce phénomène, mais il ne serait pas impossible qu'il en fût tout autrement chez les plantes supérieures à chlorophylle. ge IE awa 4 | RL + ee Ce ces a6 al te LU d'A Lae or iy, [ame fai Meme en ics a TL LA EUR HE RO Gi: Gann DANS IUT tag DLL if Hite sb DANTE | ta homie bs) nae 2 aiid 2 OG pean à Taw abe ii Beet) fhe tee a UT ere FAN mr, | ENB fs NCO » See 24104 ys KR ad SEB it my ; Ae tah oui wali TP © EDS sr Fr By art rE: 5 ae = pone Ae hie Sh | THE poate ais ROUEN one PME € Bite 4 fe Aaa Bi NS TES apa te of . IRON aoe EE à 2164 40903 4 VER DURE rity nage + ; £ es 7. ‘Up Gide + au Ci . ie CALE: à : de ; 7 7 . Bak | Oa : , x : CR sites @ 29 bei i PAIN Et Baers Er pap aad eee ae te 5 | , i 4 i 7 4 = i. 2 & x SUR LA RÉDUCTION DES NITRATES PAR LA LEVURE DE BIÈRE ET PAR QUELQUES MOISISSURES PAR É. LAURENT () Dans une note publiée en 1884 dans le Bulletin de l'Académie, M. Jorissen annoncait que les graines renferment normalement des Bactéries et que ce sont ces microbes qui sécrétent la diastase au moment de la germination. Il contestait, en outre, le pouvoir réducteur des graines vis-a-vis des nitrates. Aucune expérience directe faite par M. Jorissen ne parait avoir servi de base a ces hypotheses. Elles n’ont eu d’autre point de départ que l'observation suivante, due a M. Jorissen : Dans un milieu qui renferme de l'acide cyanhydrique, ni la germination des graines, ni la réduction des nitrates n'ont lieu. L’embryon n'est pas détruit et il peut se développer dés que les conditions de milieu redeviennent favorables. Au lieu de voir dans ce fait un exemple de l'action analogue des substances paralysantes ou toxiques sur des plantes supérieures et sur les microbes, M. Jorissen en a conclu qu'il y avait, dans les (‘) Ce travail a paru dans le Bulletin de l’Académie royale de Belgique, 3° série, t. XX, n° 8, pp. 309-317, 1890. Tome Il. 3 Tome Il, 1890. 34 E. LAURENT. — RÉDUCTION DES NITRATES PAR LA LEVURE graines, des Bactéries chargées de sécréter la diastase. Quant à la réduction des nitrates, ces mémes bactéries n'en devaient pas être capables, car M. Jorissen en niait la possibilité pour les graines soustraites à l’action des microbes extérieurs. Ces diverses assertions m’avaient paru exagérées, et je consacrai une partie de l’hiver de 1884 à les vérifier par l'expérience. Les résultats de mes recherches sur ce sujet furent soumis à l'Académie en juin 1885. Ils étaient absolument opposés à ceux de M. Jorissen : les graines et les tubercules que j'avais étudiés ne renferment pas de Bactéries à l’état normal; les graines d’Orge et de Maïs en ger- mination peuvent réduire les nitrates. Quelque temps après, M. Jorissen (*) émettait l’avis que j'avais tort de ne pas accorder grand crédit aux travaux de M. Béchamp, de M. Marcano et de Wigand sur l'existence des Bactéries intra- cellulaires. I] invoquait (loc. cit., p. 5gt) l'opinion de M. Traube et de M. Pfeffer pour prétendre que les Bactéries sont les seuls orga- nismes qui possèdent le pouvoir de réduire les nitrates dans les liquides de culture. De plus, M. Jorissen a fait deux essais dont j'admets volontiers l'importance. Il a stérilisé cinquante graines d’Orge par l'immer- sion dans le sublimé, les a lavées à l’eau distillée bouillie, puis les a introduites dans un petit ballon stérilisé avec 50 centimetres cubes d'une solution de salpêtre à 1 °/.. Celle-ci avait été au préa- lable bouillie pour la rendre stérile. M. Jorissen fermait ensuite le ballon au moyen d'un tampon d’ouate et exposait le tout a une température de 15 a 18°. Aprés vingt-quatre heures, il a constaté que le liquide était parfaitement limpide, que l’empois d’amidon ioduré ne le colorait pas en bleu après acidulation et qu’il ne jau- nissait pas avec le métadiamidobenzol. Il ne contenait donc pas de i nitrite, et cependant les graines n’avaient pas perdu leur faculté de germer. L'auteur s’abstient de spécifier si les graines d’Orge étaient en germination au moment où il les a mises en expérience. C'est (:) Bull, de ’ Acad. royale de Belgique, 3° série, t. X, p. 583, 1885. ToME Il, 1890. DE BIÈRE ET PAR QUELQUES MOISISSURES. 35 cependant un point très important, puisque l’activité physiologique des graines se manifeste surtout pendant la germination. J'aurais voulu également que M. Jorissen eût répété la recherche de nitrite après deux, trois, quatre ou cinq jours, lorsque précisé- ment la germination des graines est assez avancée. Mais j'ai la conviction que M. Jorissen en aura été empèché par l'apparition des Bactéries dans son ballon en expérience. Il est, en effet, presque impossible de manipuler cinquante graines dans l'air sans les exposer à être contaminées par quelque germe de microbes. J'en sais quelque chose, malgré l'habitude que j'ai aujourd'hui des tra- vaux microbiques. Je suis non seulement incrédule a ce sujet : j'estime qu'une simple ébullition pourrait bien ne pas stériliser une solution de salpétre. L'expérience de M. Jorissen avec la Levure de bière n'est pas non plus bien probante. Du moût de bière, qu'il a préparé avec une solution de nitrate de potassium, a été ensemencé avec I ou 2 grammes de Levure sèche, bien saine. La présence d'acide nitreux n'a pas été observée. Cette expérience est-elle péremptoire ? J'en doute, et voici mes raisons : La Levure sèche, telle qu'on la trouve dans le commerce, n'est pas pure, mais renferme toujours des Bactéries capables de détruire les nitrates. Ce phénomène n’a pas été réalisé à cause de la prédominance de la Levure. Et si celle-ci n’a pas réduit les nitrates à la fin de la fermentation, il est permis de supposer que c'est un effet de la fermentation alcoolique elle-même. En effet, la Levure emprunte son oxygène au sucre avec une si grande facilité qu’il serait étonnant qu'elle réduisit les nitrates aussi longtemps qu’elle a du sucre à sa disposition. Je démontrerai plus loin que cette supposition est parfaitement conforme aux faits. M. Jorissen, a la fin de son mémoire, annonçait qu'il communique- rait bientôt des faits nouveaux à l’Académie. Je les ai attendus depuis quatre ans, car j'aurais préféré discuter en une fois tous les arguments de mon honorable contradicteur. Comme en 1885, j’affirme que les graines de Mais, d’Orge, de Froment, les tubercules de Pomme de terre, de Carotte, de Bette- Tome II, 1890. 36 E. LAURENT. — REDUCTION DES NITRATES PAR LA LEVURE rave, les tiges de Cactées ne renferment pas de Bactéries. Les resul- tats que j'avais obtenus ont été confirmés par des expérimentateurs habitués aux études microbiques. M. Fernbach (°) a fait des centaines d'essais de culture avec des fragments pris à l’intérieur de Tomates. de Navets, de Carottes, de Betteraves et de Pommes de terre. J'ai eu l’occasion d'être témoin de ces expériences exécutées avec les soins les plus minu- tieux. Les morceaux de tissus, enlevés au moyen d’un emporte- pièce stérilisé, étaient introduits dans du bouillon de veau ou dans de l'eau de navet sucrée, milieux très favorables au plus grand nombre de microbes. Sur cing cent cinquante-cing essais faits par M. Fernbach, trente-cinq seulement ont été fertiles. Cent tubes qui renfermaient des morceaux de Pomme de terre sont restés stériles. Les cas d’altération s'expliquent par les chances d'infection qui résultent de la manipulation des vases de culture et par la section au contact de l'air des cylindres pris dans les tubercules. L'auteur suppose que des germes peuvent accidentellement être introduits à l’intérieur des plantes par de petits animaux. M. di Vestea (7) et MM. J. Grancher et E. Deschamps (°) sont arrivés aux mémes résultats en opérant sur des legumes tubercu- leux, des nervures de Laitue et des tiges d’Asperge. Pour augmen- ter les chances d'infection, ces végétaux furent arrosés avec des liquides très riches en microbes. De mon côté, j'ai fait en 1889 quelques nouveaux essais sur des graines de Mais et d’Orge en germination. Elles avaient éte stéri- lisées par un séjour de quinze minutes dans un bain de bichlorure de mercure à 1 °/oo, puis lavées à l’eau stérilisée par le chauffage a 120°. Ces graines furent ensuite introduites avec précaution dans de larges tubes à essai qui contenaient un peu d’eau stérilisée. Lorsque la tigelle eut atteint 1 centimètre, les graines furent cou- pées en deux au moyen d'un scalpel flambé. J'y versai de la gela- (t) Annales de l’Institut Pasteur, t. 1, p. 567, 1888. (2) Zbid., t. IL, p. 670, 1888. (3) Archives de médecine expérim. et d'anatomie pathol., 1° série, t. 1, p. 33, 1889. ToME Il, 1800. DE BIÈRE ET PAR QUELQUES MOISISSURES. 37 tine nutritive ou du bouillon, sans constater par la suite de traces de développement de Bactéries (*). Le seul exemple de microbes non verts (*) en symbiose dans les cellules des plantes supérieures, et qui soit bien démontré, est relatif aux nodosités radicales des Légumineuses (°). Le cas des nodosités des Légumineuses n'est probablement pas isolé parmi les végétaux, mais ce serait une exagération injusti- fiable que de généraliser en cette circonstance, selon l'habitude trop fréquente de certains biologistes. Bien que les graines et les tubercules que j’ai étudiés en 1885 ne renferment pas de Bactéries, ils n’en sont pas moins capables de réduire les nitrates. Il suffit de répéter les essais que j'avais indi- qués, il y a cing ans, pour se rendre à l'évidence. Une douzaine de graines de Maïs, de Pois ou d’Orge, ou des morceaux de Pomme de terre placés au fond d’un tube à essai, sous une couche assez épaisse d’une solution de nitrate de potassium, donnent, après quelques heures, une réaction des nitrites assez marquée. Je me suis servi, pour les caractériser, de la naphtylamine en présence d'acide sul- fanilique et d'une goutte d'acide chlorhydrique. Aujourd'hui, comme en 1885, la réduction des nitrates me paraît être, ainsi que la fermentation alcoolique, une propriété commune à certains microbes et aux cellules de plantes supérieures, lorsque la vie se fait dans un milieu privé d'oxygène. Ce serait une erreur de supposer que les Levures et les moisis- sures soient incapables de réduire les nitrates. Lorsqu'on fait fer- menter des moûts très riches en sucre, additionnés d'un nitrate, on ne trouve jamais de traces de nitrite. Cela s'explique sans dif- ficulté, comme je l’ai dit à la page 35. Il en est tout autrement (*) Voir ma note: Sur l'absence de Bactéries dans les vaisseaux des plantes. (BULL. DE L’ACAD. ROY. DE BELGIQUE, avril 1800.) (2) On connait des Algues inférieures qui vivent dans les tissus de végétaux plus élevés (Cycadées, Gunnera, Axolla, etc.). (3) Voir ma note: Sur les nodosités du Pois (BULL. DE L’ACAD, ROY. DE BEL- GIQUE, juin 1890.). TOME II, 1890. 38 E. LAURENT. — RÉDUCTION DES NITRATES PAR LA LEVURE lorsqu'on oblige le ferment à vivre dans un liquide faiblement sucré et que la semence que l’on y introduit est très abondante. Voici le mélange dans lequel j'ai fait des essais de réduction de nitrate par la Levure : HAN ELES en. CLEAN TE 1,000 C. Cc. Phosphate de potassium . . . . . . 5,75 gr. Sulfate de magnésium ::, S047 Oey EL TRE oI — Nitrate de sodium . - 2, Sates aeiliieee te 6,07 — (1) SAPCRATGSE RE itt” à» ce ties ee ee Dre 2,5 — Ce mélange, traité par l'acide sulfanilique et le chlorure de naphtylamine, ne donnait aucune trace de nitrite après stérilisa- tion à l'autoclave a 120°. Il fut réparti dans des matras coniques remplis jusqu'au voisinage du goulot. Cette précaution rendait l’aération du liquide beaucoup moins facile. Après stérilisation, j'ai introduit dans ces matras des dépôts de Levures récoltés dans des cultures en moûts sucrés et absolument privés de Bactéries. Les dépôts avaient d’ailleurs eu pour point de départ des triages répétés sur gélatine avec moût de bière. J'ai expérimenté sur les traces de Levures suivantes : Levure de bière haute de Bruxelles, = — basse de Strasbourg, — basse de vin de Champagne, Mycolevure de M. Duclaux. Ce dernier organisme est une forme-levure remarquable par la rapidité de sa croissance et par la propriété de donner des myco- dermes qui, apres immersion dans un liquide sucré, provoquent une fermentation alcoolique active. Les matras en expérience ont été placés a la température de 20 a 22°. Apres deux jours, la réaction des nitrites était des plus (1) Cette quantité fractionnaire correspond à 1 gramme d’azote par litre. ToME II, 1890. DE BIÈRE ET PAR QUELQUES MOISISSURES. 30 évidentes dans le matras avec la Mycolevure; elle était moins nette avec les trois autres Levures. Cependant, au bout de huit jours, il n’y avait plus le moindre doute sur le pouvoir réducteur de ces Levures vis-à-vis des nitrates. On vient de le voir, un microbe qui d’habitude n’exerce pas d’action réductrice sur les nitrates, acquiert cette propriété lors- qu’on le place dans des conditions appropriées. Aussi faut-il tou- jours se garder de généralisations prématurées lorsqu'on s'occupe de la physiologie des organismes inférieurs. En dehors de la propriété de faire fermenter les sucres, on sait quelles analogies existent entre la vie des Levures et celle d’un grand nombre de moisissures. Bien que M. Nägeli (*) ait affirmé que ces derniers Champignons ne peuvent pas réduire les nitrates, opinion acceptée par M. Jorissen, je me suis décidé à quelques essais de vérification. J'ai mis en culture à 15-20°, dans la solution nutritive indiquée plus haut : Cladosporium herbarum avec ses états polymorphes de Dematium pullulans et de forme-levure ; Penicillium glaucum, Aspergillus glaucus, — niger, Alternaria tenuis, Botrytis cinerea, Mucor racemosus. Dans les milieux artificiels, ces Champignons végétent avec une vigueur assez inégale. Mais, pour peu que la culture dure, on constate que certaines espèces possèdent a un degré bien marqué le pouvoir de réduire les nitrates en nitrites. Tels sont : Cladosporium herbarum et ses états polymorphes, Penicillium glaucum, Alternaria tenuis, Mucor racemosus. (1) Untersuch. über Niedere Pilze, p. 45, 1882. ToME II, 1890. 40 E. LAURENT. —— RÉDUCTION DES NITRATES PAR LA LEVURE, ETC. Je n'ai pas constaté d’action réductrice avec les deux espèces d’Aspergillus et avec le Botrytis cinerea. D’après l'opinion que j'ai rappelée à la page 37, la réduction des nitrates coincide avec l’état de vie anaérobie. Or, parmi les moisis- sures qui peuvent faire cette réduction, il n’y a que le Mucor race- mosus qui résiste pendant un temps assez long a la privation d'oxygène. Mais il n’est pas nécessaire que toute la plante se trouve dans cet état pour enlever l'oxygène aux nitrates. Il suffit que des portions du mycélium, comme les filaments développés dans la profondeur du liquide, soient soustraits à l’action de l’oxygene pour provoquer des phénomènes de réduction (°). Paris, laboratoire de chimie biologique de la Sorbonne, à l’Institut Pasteur. (:) L'observation suivante concorde parfaitement avec cette opinion. Lorsqu'on cultive comparativement le Penicillium glaucum dans une solution minérale avec du sulfate d’ammoniaque, et dans une autre avec nitrate de sodium, l'aspect du mycélium n’est pas identique dans les deux cultures, bien que le poids de la récolte soit sensiblement le même de part et d'autre. Dans le mélange ammo- niacal, les filaments mycéliens sont serrés à la surface du liquide et forment un tissu très lisse à la face inférieure. Au contraire, dans la solution nitrique, le mycélium envoie de petites masses filamenteuses dans la couche liquide sous- jacente. Une telle inégalité de développement du même organisme ne peut s'expliquer que par l'intervention du nitrate dans les phénomènes respiratoires. (Note ajoutée pendant l'impression.) LA RÉDUCTION DES NITRATES EN NITRITES PAR LES GRAINES ET LES TUBERCULES PAR É. LAURENT (:) Schoénbein (*) avait signalé autrefois la réduction des nitrates en nitrites par les graines. Comme l'a supposé M. Jorissen (°), il est probable que cette observation n'était pas exacte et qu’il y avait eu, dans les expériences faites par le chimiste allemand, inter- vention de Bactéries réductrices des nitrates. Toutefois, rien ne per- mettait de conclure que les plantes supérieures fussent dépourvues de la même propriété physiologique. C’est ce que je faisais remar- quer dans une note présentée a l'Académie en 1885 (*), et je fondais mon opinion sur quelques essais faits avec des graines d’Orge et de Mais plongées, pendant la germination, au sein d’une solution de nitrate de potasse. ; Dans une deuxieme note (*), M. Jorissen assurait que « la trans- (1) Ce travail a paru dans le Bulletin de l’Académie royale de Belgique, 3° série, t. XX, n° 11, pp. 478-485, 1890. (2) Journal fiir praktische Chemie, Bd CV, p. 214, 1868. (3) Bulletin de l'Académie royale de Belgique, 3° série, t. VIII, p. 550, 1884. (4) Zd., 3° série, t. X, p. 38, 1885. (5) Zd., t. X, p. 583. TOME II, 1890. 42 E. LAURENT. — LA RÉDUCTION DES NITRATES formation des nitrates en nitrites, telle qu'elle a été observée jusqu'à présent pendant l'imbibition des graines, n'est pas autre chose qu’un cas particulier de la fermentation putride ». Je n'avais pas le moindre doute relativement à l'absence com- plète de Bactéries dans les solutions de nitrate qui avaient été, sous mes yeux, le siège de phénomènes réducteurs provoqués par des graines en germination. Cependant, je l'avoue, la valeur du réactif iodé que j'avais employé est assez contestable pour carac- tériser les nitrites. Pour ce motif, je me décidai, en mai 1887, à répéter mes essais et à faire usage de réactifs plus parfaits. Des graines de Maïs furent plongées dans l’eau tiède pour en ramollir les téguments. Dans deux larges tubes à essais, stérilisés à 180°, j'introduisis quinze de ces graines et je les immergeai aussitôt dans une solution à 1 °/ de bichlorure de mercure. Au bout de quinze minutes, elles furent lavées à deux reprises avec de l'eau stérilisée par la filtration sur la porcelaine; un peu d'eau fut conservé au fond des tubes pour éviter la dessiccation des graines. Dans chaque tube quelques graines ne germèrent pas; elles avaient été tuées par le sublimé. Lorsque les tigelles avaient 1 à 2 centimètres de longueur, je versai au fond des tubes une solution de nitrate de potassium a 1% Vingt-quatre heures après, je fis l'essai des nitrites au moyen des trois réactifs suivants, préparés d’après les indications données par M. Warington (’) : Le réactif iodé; La métaphényline diamine; Le chlorure de naphtylamine en présence des acides chlorhy- drique et sulfanilique. Ces trois réactifs indiquérent la présence de nitrites dans les liquides que renfermaient les deux tubes avec grains de Mais. Afin de m’assurer de l’absence de Bactéries dans ceux-ci, je mélan- geai quelques gouttes du liquide avec de la gélatine nutritive bien neutre. Elle demeura parfaitement stérile. (!) Chemical News, 23 janvier 1885. ToME II, 1890. EN NITRITES PAR LES GRAINES ET LES TUBERCULES. 43 J'aurais pu communiquer ce résultat à l’Académie beaucoup plus tôt, j'ai cru qu'il valait mieux multiplier les observations, les répéter sur différentes espèces et dans des conditions variées. Car, dans les questions de biologie, l'étude comparée d’un certain nombre d'organismes est singulièrement instructive pour l'expé- rimentateur lui-même. Mes nouvelles recherches sur la réduction des nitrates par les végétaux ont porté sur les graines, les tubercules, les tissus char- nus et les sucs des plantes vasculaires, ainsi que sur un certain nombre de moisissures et de levures. Les résultats fournis par ces Champignons ont été précédemment communiqués à l'Académie. Des réactifs de l'acide nitreux indiqués plus haut, je n'ai plus employé que le troisième, qui est de beaucoup le plus caracté- ristique. Il consiste dans l'addition successive, au liquide à essayer, d’acide sulfanique, d'acide chlorhydrique et de chlorure de naphtylamine. Dans les solutions qui contiennent moins d’un cent-millième d'acide nitreux, une goutte (*/, de centimetre cube) d'acide chlor- hydrique à 10 ‘/, et trois gouttes des deux autres corps dissous a saturation dans l’eau déterminent l'apparition d’une coloration rose plus ou moins foncée et persistante. Dans les solutions plus con- centrées, il convient d'ajouter une quantité d’acide sulfanilique et de chlorure de naphtylamine d'autant plus grande qu’il y a plus d'acide nitreux en présence. Sans cette précaution, la coloration diminue d'intensité ou disparaît après un temps assez court. De l'avis de beaucoup de chimistes, les réactions colorées n'ont qu'une valeur relative, surtout lorsqu'elles se passent dans un milieu aussi complexe que la matière vivante, Pour faire droit à cette objection, dont je suis loin de méconnaitre la portée, J'ai toujours eu soin de faire, à côté des expériences de réduction par les tissus végétaux, des essais avec les mêmes tissus plongeant dans l’eau distillée. Toute différence dans les réactions de la solution nitrique et de l’eau pure ne pouvait provenir que de la présence du nitrate et, dans le cas actuel, je me trouvais en droit de l’attri- buer à la réduction de ce même nitrate. Pendant l'été de 1589, j'ai eu l’occasion de faire un grand TOME II, 1800. 44 É. LAURENT. — LA RÉDUCTION DES NITRATES nombre d'essais de réduction des nitrates par les graines. Celles-ci étaient stérilisées par l'immersion dans une solution de sublime et elles germaient dans de longs tubes à essais, chauffés au préalable à 180°. Lorsque les tigelles avaient atteint 1 à 6 centimetres de lon- gueur, je versais dans les tubes une solution de nitrate de potas- sium, de sodium ou de calcium à 1 °/o, qui ne donnait pas de traces de nitrites (*). Les solutions renfermées dans des matras-pipettes peuvent être aisément introduites dans des tubes contenant les graines, sans y apporter de germes. Lorsqu'il n'en est pas ainsi, la solution ne tarde pas à se troubler par suite du développement des microbes ; ceux-ci se nourrissent de substances organiques que les graines ont laissé diffuser. Le plus souvent, les tubes en expé- riences étaient placés à l’étuve à 30-35°, température favorable, à la fois, à la vie des graines en germination et à celle des Bactéries. Mes essais ont été faits avec des graines de Maïs, d'Orge, de Pois, de Lupin blanc, de Fève et de Haricot. C'est avec le Pois que les phénomènes réducteurs sont le plus actifs. Des graines de cette espèce, en germination, immergées dans la solution de nitrate de potassium à 1 °/,, permettent d'observer la formation de nitrite au bout d’une heure. Ce temps est encore diminué lorsqu'on fait le vide ou lorsqu'on remplace l’air par un gaz inerte. L’hydro- gène convient mieux que l’anhydride carbonique, qui semble ralentir les actions réductrices provoquées par les tissus végétaux. Des plantules de Pois, plongées dans le vide et placées à la tempé- rature de 15°, réduisent les nitrates avec une activité telle que l'on peut constater la présence de nitrite une demi-heure après l'im- mersion. Au contraire, il n'y a pas réduction des nitrates lorsque la solu- tion qui les contient se présente en couche peu épaisse et offre une grande surface d'aération pour un très petit volume de liquide. (1) J'insiste expressément sur ce point. La plupart des eaux distillées et conser vées dans les laboratoires contiennent des quantités notables de nitrates et de nitrites. Il en est de même des nitrates conservés, à l’état solide, dans des bocaux exposés à la lumière. Tome Il, 1800. EN NITRITES PAR LES GRAINES ET LES TUBERCULES. 45 C'est ce que l'on obtient lorsqu'on met des graines dans un vase à fond plat, sous une très faible couche de solution de nitrate. Il me paraît bien difficile d'interpréter ces faits sans admettre que ce sont les graines qui enlèvent au nitrate une partie de l'oxygène nécessaire à leurs phénomènes respiratoires. La quantité d'oxygène ainsi absorbé, sans être excessive, n’est pas négligeable, J'ai vu quarante-cing graines de Pois, germées, plongées dans 30 centimètres cubes de la solution nitrique, donner, après quatre heures, une réaction nitreuse équivalente a celle d’une solution de of'o3 de nitrite de potassium dissous dans 30 centimètres cubes d’eau (I °/oo). Ce chiffre correspond à 000565 d'oxygène absorbé, c’est- a-dire à un volume d'environ 4 centimètres cubes. Je me suis assuré que, pour le Pois, le pouvoir réducteur est, à poids égal, plus accentué dans les cotylédons que dans les jeunes embryons en voie de croissance. Cependant, lorsque les plantules ont atteint une dizaine de centimètres de longueur, les tiges et les racines produisent des nitrites tout aussi activement que les coty- lédons. Le pouvoir réducteur des tubercules n'est pas moins facile à mettre en évidence que celui des graines en germination. Il est ma- nifeste lorsqu'on immerge dans une solution de nitrate, contenue dans un tube à essai, de minces fragments de Pomme de terre ré- cemment récoltée. Une heure suffit pour obtenir la réaction des nitrites. On n'en voit pas de trace si les fragments sont placés dans un cristalloir sous une couche peu épaisse de solution nitrique. J'ai également observé la réduction du nitrate de potassium en nitrite avec les tubercules de Topinambour, de Radis, de Navet, de Chicorée à café, de Betterave, de Chou-rave, de Stachys tuberifera, les pétioles de feuilles de Chou, de Laitue, de Bette, de Céleri et de Raifort, les tiges de Chenopodium Quinoa, d'Impatiens Balsamina Roylez, d'Amarantus melancholicus, les pédoncules du fruit de la Courge, les jeunes fruits de Tomate et de Piment. Comme je l’ai dit précédemment, j'avais soin de faire, pour chaque espèce, un essai de contrôle en plongeant les tissus, mis en expérience, dans l’eau distillée. Dans ces conditions, les tubercules de Pomme de terre et de Radis donnèrent d’une manière assez ToME II, 1890. 46 É. LAURENT. — LA REDUCTION DES NITRATES, ETC. nette la réaction de l'acide nitreux. Ce résultat s'explique par la présence d'une certaine quantité de nitrate dans les tissus de ces deux espèces. Je m'en suis assuré avec la diphénylamine. Enfin, on peut, par un chauffage convenable ou par immersion dans l’alcool ou le chloroforme, tuer les cellules sans en faire disparaître complètement le pouvoir réducteur à l'égard des nitrates. Je me borne aujourd'hui à signaler ce fait; il conduit à supposer qu'il existe dans les tissus végétaux des substances spé- ciales douées de propriétés réductives. C’est une opinion que je compte développer dans un prochain travail. Les expériences résumées dans cette note confirment les conclu- sions auxquelles j'étais arrivé en 1885, à la suite de mes recherches sur le mème sujet : 1° Les graines en germinalion et les tubercules, et je puis main- tenant ajouter, un grand nombre d'autres tissus végétaux, sont capables de réduire les nitrates en nitriles. 2° La réduction des nitrales en nitrites par les végétaux est, comme la fermentation alcoolique, une conséquence de la vie qui se continue dans un milieu privé d'oxygène à l'état libre. Pr RÉDUCTION DES NITRATES PAR LA LUMIÈRE SOLAIRE PAR É. LAURENT (°) M. Stas m'a fait l'honneur de répéter mes essais sur la réduction des nitrates par la lumière solaire (*). L’éminent chimiste veut bien admettre l'exactitude de mes observations, mais il met en doute la légitimité des conclusions que j'en avais déduites. M. Stas est d’avis qu'une solution d’azotate de potassium insolée se conduit comme st elle contenait un azotile. La lecture du rapport si consciencieux fait sur mon travail par M. Stas montre que la divergence de nos opinions résulte a la fois d'essais de vérification entrepris par MM. Stas et Depaire et de la valeur du réactif que j'ai employé pour caractériser les nitrites. Je crois opportun de rappeler que, dans tous mes essais faits en 1887, 1889 et 1800, j'ai toujours vu les soiutions de nitrates stérili- sées soigneusement donner la réaction des nitrates après une insolation de quelques jours. Au contraire, les mêmes solutions conservées pendant des mois à l'obscurité ne se coloraient pas sous l'influence des réactifs de l'acide nitreux. Je ne me suis pas borné a quelques essais, mais j'en ai préparé (r) Ce travail a paru dans le Bulletin de l’Académie royale de Belgique, 3° série, t. XXI, n° 3, pp. 337-345, 1891. (2) Bulletin de l Académie royale de Belgique, 3° série, t. XX, p. 303. ToME II, 1891. 48 _ E, LAURENT. — RÉDUCTION DES NITRATES des dizaines; j'avais toujours soin de mettre, à côté, des essais- témoins avec de l’eau distillée bien pure. Au soleil le plus ardent, celle-ci ne donne jamais la moindre coloration avec l'acide sulfa- nilique et le chlorure de naphtylamine. Il me paraît tout à fait nécessaire d’insister sur la pureté de l'eau distillée employée dans ce genre de recherches. En effet, les eaux distillées que l’on rencontre dans beaucoup de laboratoires où l’on consomme une assez grande quantité de gaz d'éclairage, ren- ferment des combinaisons nitreuses et nitriques. Il y a plus : de l'eau distillée avec soin et complètement privée de nitrite et de nitrate fut exposée en grande surface dans le laboratoire, à une époque où l'atmosphère de celui-ci ne pouvait pas être viciée par des dégagements gazeux quelconques. Après vingt-quatre heures, une légère réaction nitreuse fut constatée; elle était plus marquée trois jours plus tard. Je rappellerai aussi que plusieurs moisissures et des Bactéries sont capables de réduire les nitrates. Grâce aux substances nutri- tives renfermées dans les germes, ces microbes parviennent à se développer dans des solutions en apparence privées de substances organiques, pour peu que l'on néglige les moindres précautions nécessaires. Enfin, je tiens à mettre à l'abri de toute contestation la valeur du chlorure de naphtylamine et de l'acide sulfanilique comme réactifs des nitrites. Car c’est la un point fondamental, non seule- ment pour mes recherches actuelles, mais aussi pour celles sur la réduction des nitrates par les végétaux. Quoi que l'on fasse, de minimes proportions (moins de “/s60 000) de nitrite ne peuvent être mises en évidence que par des réac- tions colorées. M. Stas estime qu'elles ne sont pas suffisantes ; cette opinion est certes bien justifiée toutes les fois que des sub- stances complexes, mal connues, se trouvent en présence du liquide que l’on soupçonne contenir des nitrites. Mais je ne me suis servi que de solutions de nitrates dans l'eau distillée. Le raisonnement ne peut toutefois suffire à emporter les con- victions dans des questions de ce genre : une expérience bien faite est absolument nécessaire, et, seule, elle est décisive. Tome Il, 1897. PAR LA LUMIÈRE SOLAIRE. 49 J'ai cru que, pour démontrer la réduction des nitrates au soleil, le mieux était de recueillir l'oxygène qui provient de la transfor- mation du nitrate en nitrite. Tel est le problème que je me suis proposé de résoudre pendant le séjour que j'ai fait cette année au laboratoire de chimie biologique de la Sorbonne, a l'Institut Pasteur. Après plusieurs essais avec des appareils compliqués, je me suis arrêté à un procédé assez simple pour que chacun puisse répéter l'expérience sans grande difficulté. J'ai choisi six matras à longs cols, que j'ai étirés en pointe cffilée. Dans trois de ces vases, j'ai introduit 200 centimètres cubes d'une solution de nitrate de sodium à 10 °/,; trois autres ont reçu une même quantité de nitrate de potassium à la même concentration. J'avais eu soin de constater l'absence de nitrite dans ces solutions. Tous ces matras ont eté ensuite chauffés à l'ébullition pendant vingt minutes, afin de les purger d'air au moyen de la vapeur d'eau. L’évaporation a réduit le volume a un peu moins de la moitié du volume primitif; une mesure ultérieure a indiqué environ go centimètres cubes dans chacun des matras. Tous ont été ensuite fermés à la lampe et donnaient d’une manière très nette le bruit du marteau d’eau, caractéristique du vide. J'estime que les matras étaient stérilisés par l'ébullition pro- longee à laquelle je les avais soumis. Néanmoins, pour dissiper tout soupçon, je les ai mis à l’autoclave (à 120°) pendant un quart d'heure. Deux des appareils ainsi préparés ont été placés à l'obscurité complète, et les quatre autres ont été suspendus sur une terrasse située dans le jardin de l'Institut et-qui reçoit les rayons solaires durant toute la journée. C'était le 27 juillet 1890. A côté de ceux-ci je plaçai un matras contenant de l'eau distillée soumise à une ébullition de même durée que les solutions de nitrates; le matras avait été fermé à la lampe et stérilisé ; il donnait aussi le bruit du marteau d'eau. Quelle ne fut pas ma satisfaction, à la fin de la première semaine d’insolation, de constater que, dans les ballons avec nitrates insolés, le bruit de l’eau tombant dans le vide était devenu moins prononcé, Tome II. 4 ToME II, 1891. 5o É. LAURENT. — REDUCTION DES NITRATES tandis qu'il avait gardé toute sa netteté dans les matras laissés à l'obscurité et dans celui qui contenait de l'eau distillée! Cette diffé- rence ne fit que s’accentuer par la suite. Et lorsqu'on retournait les ballons avec nitrates au soleil de manière à faire tomber l'eau sur la pointe, on voyait une bulle de gaz qui, emprisonnée d’abord dans le col, remontait vers la surface libre. A la fin du mois d'août, c'est-à-dire apres un mois, les matras insolés avec nitrates ne présentaient plus du tout le bruit du mar- teau d'eau. Toutefois, l'expérience a été continuée jusqu’au 24 septembre; a cette époque, tous les matras furent rapportés au laboratoire et placés à l'obscurité. L'insolation s'était donc prolongée durant à peu près deux mois, pendant lesquels le ciel fut rarement couvert, et le soleil souvent assez ardent. A la fin du mois de septembre dernier, J'ai eu le plaisir de montrer les faits ci-dessus indiqués à M. L. Errera, qui m'a auto- risé à invoquer son témoignage. Il s'agissait d'étudier la nature du gaz qui s'était dégagé dans les quatre matras insolés avec nitrates. Je résolus d'y faire le vide au moyen d'une trompe à mercure de M. Schloesing. Trois de ces matras ont subi des avaries par suite d'accidents survenus pendant les manipulations : les extrémités étirées, des plus fragiles, se brisaient au moindre choc malencontreux. Dans le quatrième matras, qui renfermait du nitrate de sodium, le vide fut fait avec toutes les précautions qu’exige l'extraction de minimes quantités de gaz. Avant de relier le matras à la trompe au moyen de caoutchouc à vide, j'avais tracé avec la lime un trait sur la partie étirée du col. Entre le matras et la trompe se trouvait un petit flacon bien bouché et plongé dans un récipient contenant de l’eau et de la glace. Ce dispositif provoque la condensation de la vapeur d’eau qui pourrait distiller pendant l'opération. Après avoir fait le vide aussi complet que possible dans la trompe et dans l’appareil, j'ai brisé la pointe effilée du matras et j'ai commencé l’aspiration du gaz renfermé dans celui-ci. Enfin, la solution de nitrate a été chauffée avec de l’eau tiède, de façon à en pro- voquer l’ébullition. Le volume du gaz recueilli, ramené à la pression de 760 et Tome II, 18091. PAR LA LUMIERE SOLAIRE. Sr a 0°, mesurait 4°13. Il n'a pas diminué au contact de la potasse, mais a été absorbé par le pyrogallate de potassium, à l’excep- tion d'une petite bulle d’environ un vingtième de centimètre cube. On sait que l’action du pyrogallate sur l'oxygène pur laisse un léger résidu formé d'oxyde de carbone. Peut-être aussi était-il resté dans le matras une trace d'azote provenant d’un peu d'air qui n'avait pas été chassé par l'ébullition. L'un des deux matras conservés à l'obscurité fut traité de la même manière que le matras précédent. Aucune trace de gaz ne put en être extraite. L'autre matras conservé à l'obscurité et celui qui avait été insolé et qui contenait de l’eau distillée, ont eu leurs pointes brisées pendant les manipulations. Au reste, il n’y avait aucun intérét à y faire le vide puisqu'ils donnaient, jusqu'à la fin, le bruit du marteau d’eau. Une vérité incontestable ressort des essais que je viens de rap- porter : Sous l'influence de la radiation solaire, une solution de nitrate dégage de l'oxygène; par conséquent, il y a réduction du nitrate en nitrite. A l’aide du calcul, nous pouvons évaluer la quantité de nitrite qui s’est produite dans le matras insolé et dans lequel j’avais fait le vide. Si l'on admet pour la quantité d'oxygène dégagé le volume de 4%1 (003 représentant le peu d'air qui a pu rester après l'ébul- lition), on a pour le poids du nitrite : 6 1,42976mer. x 4,1 —5,862mgr. x — = 25,28mer I Le volume de la solution de nitrate de sodium insolée était, après ébullition, de 90 centimètres cubes; la proportion de nitrate était donc de ot soit environ */3 600: La solution elle-méme a été soumise a quelques réactions. Elle colorait nettement en bleu le papier neutre de tournesol, ce qui s'explique par l’alcalinité des solutions de nitrites. Avec l’acide sulfanilique et le chlorure de naphtylamine, la colo- ration rouge était aussi rapide et aussi intense que celle d’une solution de */;,,, de nitrite de potassium. Tome II, 1891. 52 E. LAURENT. — REDUCTION DES NITRATES Le dosage de l’acide nitreux a été effectué par la méthode de M. Chabrier. : L’acide nitreux, mis en liberté par une petite quantité d’acide sulfurique, décompose l'iodure de potassium; il se produit de l'iode en quantité proportionnelle à l'iodure décomposé. De l'ami- don introduit dans la liqueur se colore en bleu. Grâce à cette colo- ration, on peut doser l'iode au moyen d'une dissolution titrée d’hyposulfite de soude; celle-ci provoque la reformation d'iodure et la disparition de la coloration bleue. Cette méthode de dosage, appliquée à la solution insolée, a donné 20785 d’acide nitreux, soit 30™s"1 de nitrite de sodium. J'ai vérifié ce chiffre afin de m’assurer de sa constance. Il est supérieur de près de 5 milligrammes au chiffre obtenu en me fondant sur le volume d'oxygène dégagé. Je serais assez porté à croire que cette différence est due à la production d'une certaine quantité d’eau oxygénée dans la solution de nitrate insolée. C'est un point que je me propose d'examiner l'été prochain. Pour aujourd'hui, il me suffit de constater, avec certitude, l'existence de nitrite dans le liquide étudié. Désireux de ne laisser subsister aucun doute sur le phénomène qui fait l’objet de cette note, j'ai eu recours au réactif signalé par M. Stas dans son rapport (Bulletin, 3° série, t. XX, p. 230). Il con- siste dans l'addition d’une solution d’azotate d'argent saturée d'azotate de potassium à la solution à essayer, que l’on a saturée également d’azotate de potassium ou de sodium. J'ai constaté que les solutions de nitrates de potassium et de sodium insolées pendant deux mois, traitées de la manière indi- quée, donnaient un précipité opalescent de nitrate d’argent. Il n'est peut-être pas sans intérét de faire remarquer que les réactions de l'acide nitreux ont été essayées, mais sans le moindre succès, avec les solutions de nitrates conservées à l’obscurité et l'eau distillée exposée au soleil à côté des matras avec nitrates. En présence de ces résultats, je me crois tout à fait fondé à admettre l'action réductrice de la radiation solaire sur les solutions de nitrates. Tome II, 1891. PAR LA LUMIERE SOLAIRE. 53 Je terminerai cette note par les résultats d’essais d’insolation de solutions de nitrate de potassium placées sous des écrans absor- bants. C’étaient des solutions d’alun, de sulfate de cuivre ammo- niacal, de bichromate de potassium et de sulfate de quinine, en couches de 15 millimètres d'épaisseur. A côté, j'avais disposé un témoin sous une couche d'eau de même épaisseur, et un autre exposé directement aux rayons solaires. Six tubes, nettoyés très soigneusement, furent mis en expérience le 30 juillet 1890. Apres neuf heures d’insolation (de 7 heures du matin a 4 heures du soir), les résultats observés furent les suivants : 1° Sous l’eau et sous l’alun, réaction presque aussi marquée que dans le tube exposé à la lumière directe; elle était presque instantanée et très nette; par comparaison avec une série de solutions préparées, j’évalue la proportion de nitrite à !/:00 000. 2° Sous le sulfate de cuivre ammoniacal, réaction un peu moins prononcée que dans les deux essais précédents; elle n'apparaît qu'après trois minutes. 3° Sous le bichromate de potassium, coloration rose très légère après vingt minutes. 4° Sous la quinine, même coloration à partir de la onzième minute. Ce dernier résultat est conforme à ce que j'avais déjà observé en 1889. (Première note, p. 29 de ce volume.) Ces diverses observations ont été vérifiées le 2 août, après deux nouveaux jours d’insolation intense. Sous le bichromate et la quinine, la réaction nitreuse était insignifiante. Il faut conclure de ces résultats que la réduction des nitrates exposés au soleil est due surtout aux rayons les plus réfrangibles du spectre. ! D ANT 1(RL sa Atlin} iV ity 4 Fa a oO i 14 wait) VE aufits EN Tire ii 4 at iy itt “yy P Meera! <2) i aries +2 TOUL PL! Arttese efi TUE ALU LE 7 FPS ay at 14 DE LACTION DES MOISSSURES SUR LALBUMINE PAR Émile MARCHAL (:) INGÉNIEUR AGRICOLE Les recherches de Nägeli (*) ont montré qu’un grand nombre de Champignons sont capables d'enlever à la fois le carbone et l'azote dont ils ont besoin aux substances albuminoïdes. Mais elles n’ont pas indiqué d’une façon précise quelles sont les modifications que subit l’albumine sous l'action de ces microbes. C'est pourquoi il m'a paru intéressant de rechercher si les Champignons, les moisissures notamment, sont susceptibles d’oxyder les substances protéiques, de les transformer en composés minéraux simples : ammoniaque ou acide nitrique. Dans une première série d'expériences, j'ai fait usage de solu- tions à 10 °/, de blanc d'œuf, sans aucune addition de substances nutritives, et stérilisées par le procédé indiqué dans ce même bul- letin (°). Les liquides ainsi obtenus sont très alcalins; le réactif de Nessler montre qu'ils ne renferment aucune trace d'ammoniaque. (*) Cette note a paru dans le Bulletin de la Société belge de Microscopie, t. XIX, 1893. Nous en donnons ici un résumé. (2) NæÆGELt, Untersuchungen über niedere Pilze. (3) Cette note paraît aussi dans le volume du Recueil. TOME II, 1893. 56 É. MARCHAL. — DE L'ACTION Un certain nombre de moisissures ont été ensemencées dans des ballons Pasteur renfermant 15 centimètres cubes de liquide albu- mineux. Ce milieu étant très favorable au développement des Bactéries, il était indispensable de partir d'une semence absolument pure. Dans ce but, bien que les cultures mères fussent déjà sans mélange, on fit des ensemencements sur des plaques de gélatine nutritive (jus de pruneau + 10 °/, de gélatine). La semence fut de cette façon prise dans des colonies tout à fait pures. C'est là un point capital qui a été trop souvent négligé dans les recherches sur la nutrition des Champignons. Les expériences de Nägeli elles-mèmes sont loin d'être, à cet égard, à l'abri de toute critique. Les cultures ont été placées, pendant quinze jours, dans un thermostat, à la température de 20°. Après ce temps, on a recherché, dans les liquides de culture, l'ammoniaque, par le réactif de Nessler; les nitrates, par la diphé- nylamine et l’acide sulfurique. Le tableau suivant indique les résultats obtenus. ESPÈCES. ÉTAT DE LA CULTURE. ESSAIS CHIMIQUES. Acrostalagmus cinnabarinus . | Développement normal. |Ammoniaque sans nitrates. . Aspergillus flavescens . . . Id. Id. — fumigatus. . . Id. Id. platcusio ct. Mycélium faible. Pas d’ammoniaque. — terricola sp. nov.. | Développement normal. |Ammoniaque sans nitrates. Botryotrichum piluliferum . Id. Id. Botrytis cinerea. . . . . Id. Id. Tome Il, 1893. ESPECES. Botrytis Bassiana . Cephalothecium roseum Circinella umbellata Fusoma alba. Fusarium rubrum . Zsaria farinosa . Mucor corymbifer . — Spinosus . — plumbeus — YACEMOSUS Mycogone rosea . Oospora grandiuscula . DES MOISISSURES SUR L’ALBUMINE. ETAT DE LA CULTURE. Développement normal. Id. Formes-levures. Id. Mycélium abondant. Développement normal. Id. Formes-levures. Id. Id. Développement normal. Mycélium faible. ESSAIS CHIMIQUES. Ammoniaque sans nitrates. Id. Id. Id. Id. Id. Id. Id. Id. Id. Id. Pas d’ammoniaque. — spec, Développement normal. |Ammoniaque sans nitrates. Penicillium glaucum . Développement très faible. Pas d’ammoniaque. — cladosporioides Développement normal. |Ammoniaque sans nitrates. Ey ey Ae en Id. Id. — ISERE Ne % Id. Id. Sporotrichum globulifer . . Id. Id. Stachybotrys alternans. . . Id. Id. Stemphylium spec.. . . . Id. Id. Streptothrix Foerster: . F Id. Id. Syncephalastrum elegans . Mycélium faible. Trichoderma viride. Pas d’ammoniaque. | Développement normal. |Ammoniaque sans qe Tome II, 1893. 58 É. MARCHAL. — DE L'ACTION ee nn —————— Des ballons témoins, placés dans les mémes conditions, n’ont - présenté aucune trace d’ammoniaque ni de nitrates. L’examen de ce tableau suggère les conclusions suivantes : 1° La plupart des moisissures sont capables d'utiliser l'albumine et de lui emprunter à la fois le carbone et l'azote dont elles ont besoin. 2° Un grand nombre de moisissures jouissent de la propriété de transformer l’albumine en ammoniaque. Dans quelle mesure les moisissures transforment-elles l’albumine en ammoniaque ? Pour répondre à cette question, j'ai ensemencé dans des ballons renfermant 5o centimètres cubes de solution albumineuse les espèces suivantes : Aspergillus terricola, Botryotrichum piluli- ferum, Cephalothecium roseum, Stemphylium spec., Streptothrix Foerstert. Un dosage d’azote effectue par le procédé Kjeldahl a montré que la solution employée renfermait 12'365 d'azote albuminoïde par litre. Après quinze jours de culture à 18°, les quantités d’ammoniaque produites ont été déterminées dans l'appareil de M. Schloesing. Voici les résultats obtenus : Azote ammon. Azote ammon. dans 5oc. c. par litre. Wsperpallas derricolz LE UNE UE 21,6 milligr. 0,432 gr. Botryotrichum piluliferum . . 16,2 — 0,324 — Cephalothecium roseum . . . . 25,1 — 0,502 — DIEM ASIIUMISPEC- + Las De 3,6 — 0,072 — Streptrothrix Foersteri . . . . 14,1 — 0,282 — On voit donc que certaines espèces, notamment l'Aspergillus et le Cephalothecium, ont converti en ammoniaque plus du tiers de l'azote organique mis à leur disposition. 3° Les moisissures sont incapables d'amener l'azote albuminoïde à l'état d'azote nitrique. Dans aucune des cultures, la diphénylamine n'a révélé la pré- Tome II, 1893. DES MOISISSURES SUR L’ALBUMINE. 59 sence de nitrates; la réaction microchimique faite sur les filaments et les spores n'a également donné aucun résultat. J'ai voulu m'assurer que, cultivées dans des solutions de sels ammoniacaux, ces moisissures ne donnent pas non plus lieu à pro- duction de nitrates. Dans ce but, un certain nombre d'espèces ont été ensemencées dans des ballons Pasteur contenant le liquide nutritif suivant : ES Ed Em ie ERNEST 1000 C. C. Giycoser EL man 2s. RP ARTE 10,0 gr. Sulfate dammomiaque => 0 CAES 1,0 — Phosphate acide de potassium . . . . 1,0 — Chlorure de potassium. ETS 0,5 — sulfate demldenesium 0.) US NON 0,5 — Les espèces essayées : Botryotrichum piluliferum, Aspergillus flavescens, fumigatus, terricola, Cephalothecium roseum, Stemphy- lium spec., se sont développées, mais n’ont présenté de nitrates, ni dans les liquides de culture, ni dans leurs filaments ou leurs spores. Les moisissures sont donc incapables de nitrifier l’ammoniaque. D’après les recherches les plus récentes, cette propriété semble d’ailleurs être localisée chez un groupe très restreint de microbes. Toutes les Bactéries, ferments ammoniacaux, que j'ai isolées du sol, sont dépourvues de propriété nitrifiante. Institut botanique de Bruxelles, janvier 1893. SUTE LA PRODUCTION DE LAMMONAQUE DANS LE SOL PAR LES MICROBES PAR Émile MARCHAL (°), INGENIEUR AGRICOLE. 1. Les recherches de ces dernières années ont montré la part immense qui revient aux microbes dans la nutrition des plantes. Les expériences de Duclaux (*), de Laurent (©) ont fait voir qu'en milieu stérilisé les végétaux supérieurs tirent très difficilement parti des matières organiques qui proviennent des débris végétaux et animaux et constituent l'humus. Grâce aux microbes, ces substances sont dans le sol peu à peu minéralisées, transformées en composés simples, minéraux, facile- ment assimilables pour les plantes. Cette minéralisation porte à la fois sur les trois groupes de substances auxquels on peut rapporter l'immense variété des pro- (*) Ce travail a paru dans le Bulletin de l’Académie royale de Belgique, 3° série, 1893, t. XXV, n° 6, pp. 727-771. (2) DucLaUx, Sur la germination en sol riche en matiére organique mais exempt de microbes. (COMPTES RENDUS, t. C, p. 68.) (3) LAURENT, Les microbes du sol, Recherches expérimentales sur leur utilité pour la croissance des végétaux supérieurs. (BULLETIN DE L’ACADEMIE ROYALE DE BEL- GIQUE, 1886, t. XI, p. 128.) TOME II, 1893. 62 E. MARCHAL. — SUR LA PRODUCTION DE L'AMMONIAQUE ductions organiques en tant qu'elles jouent un rôle physiologique important : les hydrates de carbone, les matières grasses et les substances azotées. Les hydrates de carbone sont rapidement oxydés par les moisis- sures, les levures et les bactéries du sol, en acide carbonique et en eau. Le processus d'oxydation des matières grasses est resté jusqu'ici plus obscur ; d'après Duclaux, elles seraient tout d’abord saponifiées par voie purement chimique et les produits de cette saponification (glycérine, savons) seraient alors comburés par les microbes. 2. Quant aux substances azotées qui, au point de vue agricole, nous intéressent surtout, le retour de leur azote à l’état minéral constitue le phénomène auquel, dans son ensemble, Schloesing et Muntz (*) ont donné le nom de nitrification. Les travaux récents de P. Frankland (*), de Warington (°) et surtout les belles et minutieuses études de Winogradsky (*) ont précisé d’une façon remarquable nos connaissances à ce sujet, et nous savons aujourd'hui que la transformation de l'azote orga- nique en nitrates constitue un phénomène complexe et s’accomplit en plusieurs phases auxquelles président des agents particuliers : 1° La transformation de l’azote organique en ammoniaque ou ammonisation, comme on pourrait l'appeler. 2° L'oxydation de l’ammoniaque en acide nitreux. D'après Wino- gradsky, elle se produit sous l'influence d’organismes incapables de s'attaquer à la matière organique dont ils redoutent même la présence. (7) SCHLOESING et Muntz, Recherches sur la nitrification. (COMPTES RENDUS, t. LXXX et suiv.) (*) P. FRANKLAND, Ueber einige typische Microorganismen im Wasser und im Boden, (ZEITSCHRIFT F. HYGIENE, t. VI, p. 373.) (3) WARINGTON, Fournal of the chemical Society, 1879 et années suiv. (4) WiINOGRADSKY, Recherches sur les organismes de la nitrification, (ANNALES DE L’INST. PASTEUR, 1890 et 1891.) Tome Il, 1893. DANS LE SOL PAR LES MICROBES. 63 Enfin 3° la transformation de l'acide nitreux en acide nitrique, terme final de ce processus de minéralisation. Comme le fait M. le professeur Errera dans son cours, on peut désigner ces deux derniers phénomènes respectivement sous les noms de nttrosation et de nitratation. C'est à l’étude des organismes de l’ammonisation qu'est consacré le présent travail. Il est nécessaire de distinguer dès maintenant la production d’ammoniaque aux dépens de la matière organique de celle qui résulte de l’hydratation de l'urée (fermentation ammoniacale de l'urée) ou de la réduction des nitrates (dénitrification) sous l'influence des microbes étudiés pour la première fois par Gayon et Dupetit. 8. L’ammonisation est donc le phénomène primaire à la faveur duquel l'azote des substances organiques retourne progressivement a l'état minéral. Les ferments ammoniacaux préparent le terrain aux ferments nitreux et nitriques. De plus, dans certaines conditions où, par suite de l'acidité du milieu, la production de nitrates est rendue impossible (dans l'humus des foréts, le sol des landes, etc.), la minéralisation de l'azote organique s'arrête au stade ammoniaque. Les produits de l’activité des microbes ammonisants peuvent servir directement comme source d’azote à la nutrition des plantes, les recherches de Muntz (*), de Laurent (*), de Griffiths (*) ayant montré que, même en sol stérilisé, les sels ammoniacaux sont assimilables par les végétaux. ; On a souvent, mais a tort, ramené la production d’ammoniaque (*) Muniz, Sur le rôle de l'ammoniaque dans la nutrition des végétaux. (COMPTES RENDUS, t. CIX, p. 646.) (7) LAURENT, Recherches sur la valeur comparée des nitrates et des sels ammo- niacaux comme aliments de la levure de bière et de quelques autres végélaux, (ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR, 1889, p. 362.) (3) GRIFFITHS, Chemical News, 1891, t. LXIV, p. 147. Tome II, 1893. 64 É. MARCHAL. — SUR LA PRODUCTION DE L’ AMMONIAQUE dans le sol à la seule hydratation de l’urée. Mais, comme l’a dit Duclaux (°), toutes les fermentations ammoniacales du sol ne sont pas des fermentations de l'urée; on peut même ajouter que, dans les conditions de culture habituelles, l’urée des déjections animales arrive au sol complètement hydratée, cette décomposition com- mençant déjà à l'étable pour s'achever dans le tas de fumier ou la citerne à purin. Le Micrococcus ureae ou, d'une manière plus générale, les uro- bactéries de Miquel (*) sont done loin de constituer les agents essentiels de la production de l'ammoniaque dans le sol. 4. Une première question se pose ici. La production d’ammo- niaque dans la terre arable doit-elle être exclusivement attribuée à des microbes ? Ne peut-elle s’accomplir sous l'influence de facteurs purement chimiques ? Des expériences récentes de Muntz et Coudon (°) ont démontré qu'un sol stérilisé, enrichi à l'aide de sang desséché, par exemple, ne présente aucune formation d'ammoniaque, tandis que la même terre, pourvue de microbes, en produit abondamment. Des essais similaires m'ont conduit aux mémes résultats. Voici les conditions expérimentales dans lesquelles je me suis placé. Dans deux ballons contenant 250 grammes d'une terre ne renfer- mant que des traces d’ammoniaque, il était ajouté 25 centimètres cubes de la solution albumineuse incoagulable dont il sera parle plus loin. Les récipients de culture ainsi préparés étaient stérilisés à l’autoclave, pendant une heure, à 115°. Après refroidissement, l'un d’eux était ensemencé avec quelques gouttes du liquide trouble (:) Duccaux, Les microbes du sol. Revue critique. (ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR, 1887, p. 246.) (3) MIQUEL, Etudes sur la fermentation ammoniacale et sur les ferments de l'urée. (ANNALES DE MICROGRAPHIE, 1890, 1891, 1892.) (7) Munrz et Coupon, La fermentation ammoniacale de la terre. (COMPTES RENDUS, février 1893.) Tome II, 1893. DANS LE SOL PAR LES MICROBES. 65 obtenu en délayant un peu de terre de jardin dans de l'eau stéri- lisée, l’autre ne recevait aucun germe. Après vingt jours de séjour dans la chambre thermostatique chauffée a 30°, j'ai dosé l’ammoniaque par distillation sur la magnésie dans l'extrait chlorhydrique des deux terres. Les chiffres suivants furent obtenus : 1. Ballon stérile . . . . . . . traces d’ammoniaque. 2. Ballon avec microbes du sol . . 34,2 milligr. La nécessité de l’action des microbes apparaît nettement ici. 5. Quelles sont, parmi les nombreuses espèces microbiennes qui peuplent les couches superficielles du sol, celles qui interviennent d'une façon prépondérante dans l’ammonisation ? Sont-ce des moi- sissures, des formes bourgeonnantes ou des bactéries ? I] s'agissait pour résoudre ces questions : 1° D'isoler du sol les espèces microbiennes (moisissures, formes- levures, bactéries) qui y sont les plus fréquentes; 2° De rechercher celles d’entre elles qui sont susceptibles de transformer les substances azotées en ammoniaque. Pour l'isolation des microbes du sol, j'aieu recours à la méthode de séparation de Koch sur gélatine, en cristallisoirs de Petri. De chaque échantillon de terre, il était fait au moins deux cultures, l’une en gélatine alcaline avec bouillon et peptone, l’autre en gélatine et jus de pruneaux légèrement acide, pour la recherche des moisissures et des levures. Ces essais ont porté sur les terres les plus diverses : terres arables, fumées ou non fumées, sablonneuses, humeuses ou cal- caires, terres de landes, de forêts, ainsi que sur différents terreaux. composts, fumiers et purins provenant des environs de Bruxelles. Ces très nombreuses cultures sur plaque m'ont fourni plus de trente espèces bactériennes et une vingtaine de moisissures et de formes-levures. Au nombre des bactéries les plus fréquentes dans la terre arable, je citerai : Bacillus mycoides Flügge, fluorescens liquefaciens Flügge, Tome Il. 5 Tome Il, 1893. 66 É. MARCHAL. — SUR LA PRODUCTION DE L'AMMONIAQUE fluorescens putidus Flügge, janthinus Zopf, mesentericus vulgatus Flügge, mesentericus ruber Globig, termo Dujardin, Proteus vul- garis Hauser, une Sarcine très analogue à la Sarcina lutea Schroter, et quelques Micrococcus : Micrococcus roseus Flügge, luteus Schro- ter, flavus Flügge, candicans Flügge. Moins constantes sont les formes suivantes : Bacillus arborescens Frankland; un Bacille à colonies formées de filaments droits ou élégamment spiralés que je rapporte au Bac. figurans décrit par Crookshank (*), le Bac. subtilis, moins fréquent qu’on pourrait le supposer dans le sol, un Bacille court, analogue au Micrococcus prodigiosus, produisant à 30° dans les solutions albumineuses une matière colorante rouge d’une rare intensité: une forme du Bac. coli communis, Bac. brunneus Schrôter, cremoides Zimmermann; quelques Micrococcus parmi lesquels le Micrococcus ureae Van Tie- ghem; enfin, un assez grand nombre de formes que je ne suis pas parvenu jusqu'ici à identifier avec des types décrits, et que je ferai connaître dans un mémoire ultérieur. Au nombre des moisissures se trouvaient notamment : Penicil- lium glaucum, cladosporioïdes, Mucor Mucedo, racemosus, Botrytis cinerea, vulgaris, divers Stemphylium, Cladosporium et états poly- morphes Alternaria tenuis, des Aspergillus, dont une espèce nouvelle intéressante que j'ai appelée Aspergillus terricola (’); nombre de formes bourgeonnantes, formes Torula, Monilia, etc., le Streptothrix Foerstert. 6. Ces espèces microbiennes étant isolées, il s'agissait de déter- miner celles qui prennent part à la fermentation ammoniacale. Dans ce but, j'ai pris comme point de départ l’albumine de l'œuf. Les matières albuminoïdes constituent, en effet, de tous les maté- _ riaux azotés du sol, ceux qui s’y trouvent en plus grande quantité, (1) CROOKSHANK, Manuel pratique de bactériologie, p. 199. (2) MaRCHAL, Sur une espèce nouvelle du genre Aspergillus. (REVUE MYCOLO- GIQUE, 1893, n° 3.) Tome II, 1893. DANS LE SOL PAR LES MICROBES. 67 qu'ils proviennent de débris végétaux ou animaux, d'engrais divers, sang desséché, déchets de laine, etc. Je pensais, d'autre part, que les microbes susceptibles de trans- former l’albumine en ammoniaque pourraient a fortiori oxyder les autres substances azotées, amines, amides, acides amidés, qui constituent déjà une étape plus avancée dans la voie de la minéra- lisation. Comme on le verra plus loin, cette hypothèse s'est en grande partie vérifiée. J'ai donc fait usage de solutions de blanc d'œuf à 10 °/., renfer- mant environ 2 grammes par litre d'azote albuminoide. I] était désirable, pour se rapprocher des conditions naturelles, d'employer des solutions albumineuses diluées, la matière orga- nique azotée ne se trouvant dans le sol arable qu’en quantités relativement faibles (o#2 a 3 grammes d'azote organique par kilo- gramme de terre). Ces liquides ont été stérilisés par le procédé que j'ai décrit précé- demment (*) et qui consiste à ajouter, par litre de bouillon albu- mineux, 10 centimètres cubes d’une solution au */,,.. de sulfate ferreux. La présence de ce sel entravant la coagulation de l’albumine, on peut sans inconvénient stériliser à haute température. Les liquides ainsi obtenus ne présentent pas trace d’ammo- niaque ; le réactif de Nessler n’y donne lieu à aucune coloration. Les bactéries du sol, à l’état de cultures absolument pures, ont été ensemencées dans des ballons Pasteur renfermant une dizaine de centimètres cubes de solution albumineuse. Ces cultures ont été placées à la chambre thermostatique à 30° pendant quinze jours. Après ce temps, on a recherché si les liquides de culture renfer- maient de l’ammoniaque. Dans une partie de la liqueur, on essayait la réaction de Nessler ; une autre portion était chauffée avec de la magnésie calcinée et (7) MARCHAL, Bulletin de ! Académie royale de Belgique, 1892,t XXIV, p. 323. Tome II, ‘1893. 68 É. MARCHAL. — SUR LA PRODUCTION DE L’AMMONIAQUE l'on recherchait l’alcali volatil dans les vapeurs par le papier de tournesol. Ces deux essais se sont toujours montrés concordants dans leurs résultats. La simple coloration en jaune du liquide, ou la formation d'un précipité par le réactif de Nessler, indiquait si la quantité d'ammo- niaque produite était insignifiante ou notable. Les espèces suivantes m'ont présenté une réaction ammoniacale très intense : Bacillus arborescens. Bacillus janthinus. — coli communis var. — spec. 1. — figurans. — spec. 2. — fluorescens putidus. — spec. 3. — fluorescens liquefaciens. — spec. 4e — mesentericus vulgatus. Micrococcus albicans. — mycoides. Proteus vulgaris. — subtilis. Sarcina lutea. — Lermo. Chez la plupart des autres espèces, la réaction, bien que très nette, présentait beaucoup moins d'intensité. Enfin, il en est quelques-unes qui n'en ont pas produit de trace ; de ce nombre est un Proteus non liquéfiant, a colonies sur gélatine envahissantes et caractéristiques (Proteus Zenckerz de Hauser ?) et un long Bacille liquéfiant la gelée et donnant uneculture jaune sur pomme de terre. Il est à remarquer que l’absence d’ammoniaque correspondait toujours à un développement très faible de l'espèce considérée dans le milieu albumineux, développement qui s’est très proba- blement effectué aux dépens des petites quantités de principes carbonés et azotés non albuminoïdes que renferme le blanc d'œuf. On peut donc dire que les bactéries capables d’attaquer la molé- cule albuminoide la désorganisent, en brülent le côté carbone, laissant comme résidu l’ammoniaque. Nous verrons qu'il en est de même pour les moisissures. La production d’ammoniaque aux dépens d’albumine, par les bactéries, ne constitue donc pas une fonction propre à quelques Tome II, 1893. DANS LE SOL PAR LES MICROBES. 69 organismes, comme le sont la nitrosation et la nitratation ; elle est l’apanage d’un grand nombre de microbes. Il y a quelques années déjà, Duclaux (*) a montré que, dans la maturation des fromages, la caséine est transformée en composés ammoniacaux sous l'influence de microbes particuliers; plus récemment, Perdrix (*) a signalé la production d’ammoniaque dans les cultures de bactéridie charbonneuse ; enfin Bienstock (°) a isolé des fèces plusieurs organismes présentant à un haut degré cette propriété. En dehors des bactéries du sol, je l'ai observée chez un certain nombre d’espèces tant saprophytes que pathogènes, notamment : Bacillus anthracis, diphteriae, cholerae suum, tuberculosis avium, typhosus, megaterium, chez le Bacille rouge de Kiel, le Vzbrio Metschnikovi, le Micrococcus prodigiosus. Au contraire, le Bacillus pyocyaneus, qui se développe très chétivement dans les solutions albumineuses, n’y produit pas d’ammoniaque. 7. J'ai cherché ensuite à déterminer quel était le pouvoir ammo- nisant particulier de quelques-unes des especes les plus éner- giques. Ces dernières ont été ensemencées dans des ballons renfermant 25 centimètres cubes d’une solution albumineuse dosant par litre 18'365 d'azote organique (moyenne de trois dosages concordants effectués par le procédé Kjeldahl). Les ballons ensemencés ont été placés, pendant vingt jours, a 30°, dans la chambre thermostatique. Après ce temps, on y a dosé l'ammoniaque produite. Dans ce but, le liquide de culture est introduit avec une pin- cée (*) de magnésie calcinée dans le ballon de l'appareil dis- () Duczaux, Le Lait, p. 213. (2) PERDRIX, Sur la transformation des matières azotées dans les cultures de bacté- ridie charbonneuse. (ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR, 1886, p. 354.) (3) Brenstock, Ueber die Bacterien der Faces. (ZEITSCHRIFT F. KLINISCHE MEDECIN, XIIL.) (4) L’ammoniaque se trouvant dans les cultures à l’état de carbonate ammo- nique, il suffit d’une quantité très faible d’alcali pour la dégager. Tome II, 1893. 70 É. MARCHAL. — SUR LA PRODUCTION DE L’AMMONIAQUE tillatoire de Schloesing. Le tableau ci-aprés présente les chiffres obtenus. Dans ce tableau, la seconde colonne indique les nombres obtenus directement par l'analyse des 25 centimètres cubes de culture, la troisième donne les mêmes chiffres rapportés au litre, c'est-à-dire multipliés par 40. ESPÈCES BACTÉRIENNES. AZOTE POUR-CENT Le] Le] iva} N n = iss) TD d'azote organique transformé. AMMONIACAL par litre MILLIGR. | GRAMMES, Bacillus arborescens . . . . . 6,7 0,268 19 NY me F577 7 ON ENS 8,0 | 0,320 23 — fluorescens putidus . . . 755 | 0,300 22 — fluorescens liquefaciens. . 5,6 le Jo;22H: 16 — mesentericusvulgatus . . 10,1 | 0,404 29 INDE EME). ie 16,0 | 0,640 46 SAIS RE 8e LUI 8,1 0,324 23 NI IIO EU: Phe | Le 10 RE 6,3 | 0,252 19 A TILLUS SO LMI 7,9 | 0,316 23 SR STD Be. ct ts 8 T 13,5 | 0,540 39 == beeSpECe2slpa ee TETE. € 727 | 0,308 22 SS Sees ee cet So à 9,0 0,360 1129 Sa SAS LOC 5,5 | 0,220 16 Prous oulaupes Ne ER NT EN NT 12,1 | 0,484 36 SUP LING UULCL ee 5 NOM 9,5 | 0,380 27 On voit que, de toutes les Bactéries isolées du sol, le Bacillus mycoides est celle qui a le plus énergiquement transformé l'aibu- «4 ToME II, 1893. DANS LE SOL PAR LES MICROBES. 71 mine en ammoniaque; en vingt jours, près de la moitié de l'azote organique mis à sa disposition est passé à l'état d’alcali volatil. C'est ce microbe que j'ai choisi pour en étudier d’une façon plus approfondie l’action sur les matières albuminoides. 8. Je n’ai parlé jusqu'ici que des Bactéries. Comme je l'ai signalé récemment (*), la plupart des moisissures jouissent à un haut degré de la propriété de transformer en ammoniaque les substances albu- minoides, et peuvent, dans certaines conditions, jouer un rôle con- sidérable dans l’ammonisation. Une trentaine de moisissures et deformes bourgeonnantes, ense- mencées dans la solution albumineuse à 10 °/., ont donné les résultats consignés dans le tableau suivant : ESPECES. ETAT DE LA CULTURE. REACTION DE NESSLER. Acrostalagmus cinnabarinus (*). Développement normal. Ammoniaque. Aspergillus flavescens. . . . Id. Id. — fumigatus . . . Id. Id. — SRMEES =e NT Mycélium faible. Pas d’ammoniaque — FORELEU Bren Développement normal. Ammoniaque. Botryotrichum piluliferum . . Id. Id. Botrytis cinerea . . . . . Id. Id. — PBassiana. À PRE à Id. Id. Cephalothecium roseum . . . Id. Id. (7) MarCHAL, De l'action des moisissures sur l’albumine. (BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ BELGE DE MICROSCOPIE, 1893, t. XIX, p. 65. (7) La nomenclature adoptée pour les moisissures dans ce travail est celle du Sylloge Fungorum de Saccardo. Tome II, 1803. 72 É. MARCHAL. — SUR LA PRODUCTION DE L'AMMONIAQUE ESPÈCES. Circinella umbellata . Fusoma alba Zsaria farinosa. Mucor corymbifer . — Spinosus — plumbeus . — YACEMOSUS . Mycogone rosea Oospora grandiuscula. — spec. . Penicillium glaucum. — cladosporioides . spec. I — spec.2 Saccharomyces cerevisiae . — glutinis Sporotrichum globulifer . Stachybotrys alternans . Stemphylium spec. Sterigmatocystis dubia a niger Streptothrix Foerster. Syncephalastrum elegans . Trichoderma viride. . ETAT DE LA CULTURE. Formes-levures. Id. Développement normal. Id. _Formes-levures. Id. Id. Développement normal. Mycélium faible. Développement normal. | Développement très faible. | Développement normal. Id. Id. Id. Id. Id. Id. Id. Développement faible. Id. Développement normal. Mycélium faible. Développement normal. RÉACTION DE NESSLER. Ammoniaque. Pas d’ammoniaque. Ammoniaque. Pas d’ammoniaque. Ammoniaque. Id. Id. Id. Id. Id. Id. Id. Pas d’ammoniaque. Id. Ammoniaque. Pas d’ammoniaque. Ammoniaque. Tome II, 1803. DANS LE SOL PAR LES MICROBES. 73 Il résulte de ce tableau que toutes les moisissures qui ont pré- senté dans la solution albumineuse un développement normal, ont donné lieu à la production d’ammoniaque. Les chiffres suivants, obtenus apres quinze jours de culture a la température de 18°, dans une solution albumineuse dosant 18°365 d’azote organique par litre, donnent une idée du pouvoir ammoni- sant de quelques-unes des espèces citées plus haut. AZOTE AMMONIACAL | AZOTE AMMONIACAL ESPÈCES. dans 50 c. c. par litre. MILLIGRAMMES. GRAMMES. Aspergillus terricola . . . . 21,6 0,432 Botryotrichum piluliferum . . 16,2 0,324 Cephalothectum roseum . . . DEUX 0,502 Stemphylium Spec.. . . . . 3,6 0,072 Strepiothrix Foerstert. . . . 14, I 0,282 On peut se demander quels sont, des moisissures ou des bacté- ries, les agents essentiels de l'’ammonisation. Dans la terre arable livrée à une culture intensive, les moisis- sures n'existent qu'en quantités relativement faibles, grâce à la réaction alcaline du milieu et a absence de matière organique en grande quantité. L'action des bactéries y est prédominante. Dans les sols humeux, acides, au contraire, riches en matières organiques, dans l’humus des forêts, certains terreaux, j'ai rencon- tré des mycéliums nombreux de moisissures, et il n'est pas dou- teux qu'elles interviennent activement dans la minéralisation de l'azote organique. Tome II, 1893. 74 É. MARCHAL. — SUR LA PRODUCTION DE L'AMMONIAQUE Caractères morphologiques du bacille mycoïde. 9. Le Bacillus mycoïdes, Bacille de la terre (Erde-Bacillus des auteurs allemands), décrit pour la première fois par Flügge (*), a été signalé depuis par Frankel (*), qui en a donné également une description sous le nom de Wurzelbacillus. C'est cette espèce que Hueppe et Wood (°*) ont rencontrée dans le sol, et qui, d’après leurs recherches, confère au lapin l'immu- nité contre l'injection de cultures virulentes de bactéridie char- bonneuse. CARACTÈRES MICROSCOPIQUES. — Cette intéressante bactériacée se présente sous l’aspect de bâtonnets ordinairement une fois et demie aussi longs que larges, à extrémités nettes et un peu arrondies, rarement isolés, le plus fréquemment réunis en longs pseudo-fila- ments dont les articles paraissent nettement séparés par un espace clair. Le Bacille mycoïde produit aisément des spores grosses, ovales, réfringentes, qui occupent la partie médiane des articles. Les pseudo-filaments sont immobiles, de même que les bâton- nets libres; cependant, dans certaines cultures, j’en ai observé qui étaient animés d’un mouvement pendulaire tres lent. CARACTÈRES MACROSCOPIQUES. — Culture sur plaques de gélatine. — Le développement des colonies sur plaques de gélatine est a la fois des plus remarquables et des plus caractéristiques. Pour bien l’observer, on coule dans une boîte de Petri le con- (1) FLdGGE, Die Mikroorganismen. (7) FRENKEL, Grundriss der Bakterienkunde, p. 241. (3) Huepre et Woon, Parasitism und Saprophytism. 2 2 Tome II, 1803. DANS LE SOL PAR LES MICROBES. 75 tenu d'un tube de gélatine ensemencé a l’aide d’une dilution très faible de culture, de manière à n’obtenir sur la plaque qu’une ou deux colonies. Après vingt-quatre heures, à la température de 18° à 20°, la boîte retournée, examinée à l’aide d'un grossissement d’environ 100 dia- mètres, laisse voir de petites colonies rondes, foncées, granuleuses, à contour très net. Apres quelques heures, le contour perd de sa netteté, il s'en détache dans tous les sens des filaments qui forment bientôt, par leur enchevêtrement, un feutrage dense dans lequel a disparu la petite colonie primitive. A cestade, ces colonies, examinées à l'œil nu, apparaissent comme un léger nuage blanc sur la gélatine; celle-ci ne présente encore aucune trace de liquéfaction. Le mode d'extension de ces colonies sur la gelée est très curieux. La colonie primitive émet, dans plusieurs directions, des faisceaux de filaments droits ou contournés en spirales souvent très régu- lières. Après quelque temps de croissance dans un sens, ces fila- ments se pelotonnent sur eux-mêmes, donnant naissarce à des colonies secondaires; celles-ci, à leur tour, lancent en tous sens des trainées filamenteuses qui vont, par la fondation de colonies nou- velles, exploiter des surfaces gélatineuses encore vierges. Une seule colonie peut, de cette façon, recouvrir toute une plaque d'un réseau inextricable de filaments entrecroisés. Mais, en même temps que cette extension se manifeste, la gélatine se liquéfie; c’est tout d’abord le centre de la colonie mère qui se ramollit, s’affaisse et tombe en déliquescence. Cette liquéfaction s'étend circulaire- ment, atteint bientôt les colonies secondaires pour se propager, enfin, le long des trainées filamenteuses, a toute la plaque. Ce résultat n'est atteint qu’apres six à sept jours de culture. Culture par piqûre sur gélatine. — Si l’on inocule un tube de gélatine, par piqüre, avec le Bacille mycoide, on observe les faits suivants : apres deux jours apparaît, dans le canal de la piqüre, un léger enduit blanchatre, tandis qu'à la surface s’est développée une colonie déjà assez étendue. Bientôt du canal se développent, per- Tome II, 1893. 76 É. MARCHAL. — SUR LA PRODUCTION DE L’AMMONIAQUE pendiculairement et en tous sens, de fins filaments droits qui finissent par atteindre les parois du tube. L’ensemble rappelle alors une jeune radicelle munie de ses poils absorbants. En méme temps, la liquéfaction s'opère a la surface, qui se creuse en une cupule remplie d’un liquide limpide dans lequel flotte un flocon duveteux. Cette liquéfaction gagne en profondeur, les étages de filaments s’affaissent de plus en plus, et, apres dix a quinze jours, il reste au fond du tube des flocons blancs que surnage la gélatine limpide et liquéfiée. Culture sur agar en surface. — Sur agar nutritif, le développe- ment est trés rapide et caractéristique. Du trait d'inoculation superficielle partent des trainées filamen- teuses constituant des arborescences irrégulières qui s'étendent rapidement à toute la surface de la gelée. L’agar n'est pas liquéfié. Culture sur sérum. — Sur sérum solide, en plan incliné, le développement est identique à la culture sur agar, si ce n'est que le sérum est peu à peu liquéfié. Culture sur pomme de terre. — Cette culture ne présente rien de bien caractéristique et s’est montrée très variable dans ses aspects. Le plus souvent la pomme de terre se couvre rapidement d'un enduit blanchâtre, peu épais, qui ne se plisse pas par la dessic- cation. D'autres formes du Bacille mycoïde ont présenté une coloration tantôt jaunâtre, tantôt rosée. Cette dernière variété est peut-être identique au Bacillus mycoides roseus de Holschewnikoff (*). Culture en bouillon. — Le développement en bouillon est en tous points identique a celui de la bactéridie charbonneuse. (*) HoLsCHEWNIKOFF, Fortschritte der Medicin, Bd WIT, S246: Tome II, 1893. DANS LE SOL PAR LES MICROBES. 77 Déjà huit à dix heures après l'ensemencement a 30°, on voit se produire de légers flocons; ces flocons augmentent en nombre et en dimensions, ils nagent dans un liquide resté limpide; agitée, la culture ne devient pas laiteuse. Après quelques jours, les flocons se désagrègent et il se forme au fond du vase de culture un dépôt pulvérulent. Si l'on agite, ce sédiment se répand dans toute la masse du liquide, qui devient trouble et laiteux. L'examen microscopique montre que les flocons sont constitués par la Bactérie en longs filaments. Plus tard, ces filaments se résolvent en spores qui tombent au fond des récipients de culture constituant le dépôt que l'on y observe. Dans les solutions de blanc d'œuf, de même que dans le sérum dilué, le développement est identique à ce qui vient d'être décrit. Tels sont les caractères de culture du Bacille mycoïde tels qu'ils se sont présentés le plus généralement. Cependant, des différentes formes de ce microbe que j’ai isolées, il s’en est trouvé chez lesquelles ces caractères étaient quelque peu modifiés. Sans parler des cultures sur pomme de terre, sur les modifica- tions desquelles j'ai déjà insisté plus haut, le développement sur plaques de gélatine peut varier par le mode d'extension et la liqué- faction plus ou moins rapide de la gélatine. Certaines cultures en piqûre ne présentaient que des filaments rudimentaires; enfin la rapidité de dissolution du sérum s'est montrée également tres variable. En somme, on voit que le Bacillus mycoides jouit d’une certaine variabilité dans ses caractères morphologiques. Dispersion. — Le Bacille mycoide est extrémement répandu dans la nature; sa présence est constante dans les couches supérieures du sol cultivé. Indépendamment des terres de toutes natures que j'ai étudiées, j'ai isolé cette Bactérie fréquemment du fumier, du terreau, de composts et de l’humus des forêts. On la rencontre également dans l'air et dans les eaux naturelles. TOME II, 1893. 78 É. MARCHAL. — SUR LA PRODUCTION DE L’AMMONIAQUE 10. ACTION DU BACILLE MYCOÏDE SUR L’ALBUMINE. — La propriété physiologique essentielle du Bacille mycoïde est de transformer, par voie d’oxydation, les substances azotées en ammoniaque. Si cette fonction est constante chez ce microbe, elle n'en est pas moins susceptible de varier dans des limites assez étendues, et les diverses cultures que j'ai eues à ma disposition ont montré des aptitudes notablement différentes. Pour le démontrer, j'ai ensemencé dans une solution albumi- neuse faible (18365 d’azote organique par litre) ces différentes variétés, dont voici la provenance : . Terre de jardin (Institut botanique). . Fumier décomposé (Woluwe-Saint-Lambert). . Terreau gras (Crainhem). . Terre de champ fumée (Roodebeke). . Humus de forêt (forêt de Soignes). . Terre sableuse (Watermael). . Compost de feuilles (Wesembeek). . Culture provenant de l’Institut Pasteur. OI OM BR WH ND = Après vingt jours de culture a 30°, les quantités suivantes d’am- moniaque étaient observées : AMMONIAQUE AMMONIAQUE VARI LES. dans 50 c. c. par litre. | MILLIGRAMMES. GRAMMES. I 24,0 0,480 2 14,2 0,284 3 21,6 0,432 4 39,6 0,792 5 34,8 0,696 6 19,8 0,396 7 20,4 0,408 8 17,5 0,350 Tome II, 1893. DANS LE SOL PAR LES MICROBES. 79 On voit donc que, d'une forme à l’autre, les quantités d’ammo- niaque produites ont, abstraction faite de l'individualité des cul- tures, varié presque du simple au double. C'est la variété 4, la plus énergique, qui a été prise comme point de départ des expériences dans lesquelles j’ai cherché à déterminer l'équation du phénomène et l'action qu’exercent les agents exté- rieurs sur son intensité. 11. Mécanisme du phénomène. — Pour établir l'équation du phé- nomène, je me suis basé sur les considérations suivantes : A. Lorsqu'on ensemence du Bacille mycoïde dans une solution albumineuse neutralisée, on constate qu'après quelque temps la réaction devient fortement alcaline : cette alcalinité est due à la présence de carbonate d’ammoniaque dans le liquide de culture. La simple ébullition de ce dernier fait dégager la plus grande partie de l’alcali volatil; après ce traitement, il donne encore un précipité avec le réactif de Nessler, dû a de petites quantités d’am- moniaque unie à des acides gras. L’addition d’une très petite quantité de magnésie calcinée provoque, à l’ébullition, le départ de la totalité de l'ammoniaque. En même temps que de l’ammoniaque s'est formée, une grande quantité d’albumine a disparu. L’azote de l’albumine disparue correspond sensiblement à celui de l’alcali formé. B. Si l’on analyse l'atmosphère mise en rapport avec la culture, on constate à la fin de l’expérience : 1° Une absorption considérable d'oxygène ; 2° L'émission concomitante d'acide carbonique. Le volume d'acide carbonique émis est notablement inférieur à celui de l'oxygène absorbé, une portion notable du premier res- tant fixée dans la liqueur sous forme de carbonate d’ammoniaque. 3° L'absence complète d'hydrogène et d'azote dans les produits gazeux de la fermentation. Dans ces recherches, en atmosphère confinée, j'ai fait usage, entre autres dispositifs, de l'appareil suivant, analogue à celui ToME II, 1893. 80 É. MARCHAL. — SUR LA PRODUCTION DE L'AMMONIAQUE que Roth (?) a préconisé depuis pour la culture des anacrobies. C'est un ballon A contenant la solution albumineuse, fermé par un tampon d’ouate traversé par un tube de verre a, portant a sa partie supérieure un bout de caoutchouc et une pince. Le tout est stérilisé a l’autoclave a 115°. Apres refroidissement, on ensemence de la façon ordinaire, en soulevant le tampon d’ouate que l'on replace rapidement en ayant soin de l’enfoncer jusqu'en b, de manière a laisser au-dessus un espace libre. Par le tube a, on fait venir un courant d'oxygène pur dans le cas présent, d’hydro- gène ou de gaz d’éclairage quand il s'agit de cultures anaérobies. On laisse passer le gaz pendant longtemps afin de purger complètement l'appareil de lair qu'il renfermait; lorsque ce résultat est atteint, on ferme la pince et on coule, dans l'espace laissé libre au-dessus du tampon d’ouate, de la paraffine fondue qui, en se figeant, produit une fer- meture hermétique. L’atmosphère du ballon est ainsi constituée d'oxygène pur; après culture, on fait passer les gaz dans l'eudiomètre pour rechercher les modifications qu'ils ont subies. C. Lorsqu'on dose simultanément l’acide carbonique et l'ammo- niaque produits par la respiration du microbe, on constate que ces corps se dégagent dans une proportion qui se rapproche beaucoup de celle qui correspond à la combustion complète de l’albumine. Pour effectuer ces dosages, j'ai eu recours au dispositif suivant : Un ballon d’un demi-litre A, contenant 50 centimetres cubes d’une solution albumineuse faible, est fermé a l'aide d'un bouchon GC) ROTH, Ueber ein einfaches Verfahren der Anaërobenzüchtung. (CENTRALBL. F. BAKTERIOLOGIE, Bd XIII, 1893, n° 7.) Tome II, 1893. DANS LE SOL PAR LES MICROBES. 81 PE ET PE Ae SE CE Re PE en caoutchouc percé de deux trous livrant passage à des tubes de verre fermés par un tampon de coton; l’un d'eux est muni d’une pince à sa partie supérieure. Après stérilisation et ensemencement, le tube b est réuni à un tube à boules B contenant ro centimètres cubes d'acide sulfurique titré, et celui-ci au flacon C renfermant de l’eau de baryte. Le tube à boules D a potasse protège l'appareil contre l'acide carbonique extérieur. Le microbe se développe, produit de l'ammoniaque et de l'acide carbonique; ce dernier sature tout d’abord l’alcali formé et l’excé- dent est absorbé par la baryte. De temps en temps, on renouvelle l'atmosphère de la culture; dans ce but, D est réuni à une trombe. Pour débarrasser d’acide carbonique l’air aspiré en a, on le fait passer dans un tube d’absorp- tion à potasse. Après quinze jours de culture à 30°, on provoque dans l'appareil Tome IL. 6 Tome II, 1893. 82 É. MARCHAL. — SUR LA PRODUCTION DE L’AMMONIAQUE une circulation lente et prolongée d’air pour chasser en C l'acide carbonique produit. Par le tube a, on introduit quelques gouttes d'acide sulfurique, afin de décomposer le carbonate d’ammoniaque formé, et on plonge le ballon A dans un bain d'eau a 40° pour faci- liter le dégagement de l’acide carbonique. Apres avoir fait passer de l'air pendant un temps suffisant, on dose l’ammoniaque dans le ballon A et dans le tube à boules B, qui a pu retenir des vapeurs ammoniacales, et acide carbonique dans le flacon C. Jai obtenu les chiffres suivants : Milligrammes. AMMODIAQUER 5 5 6 5 = 8,0 ANGE Crm oomapie ~ 4 3 ~« 71,6 Rapport entre ces deux corps : 1: 8,9. Or, le rapport théorique entre l’ammoniaque et l’acide carbo- nique produits par la combustion complete de l’albumine est, en poids, de 1: 10,35 (en prenant comme point de départ la formule de Zinoffski). Le déficit en acide carbonique est du, sans doute, a la fixation d'une partie du carbone dans le liquide de culture a l'état d’acide eras. D. En dehors de l'acide carbonique et de ’ammoniaque, l’analyse décèle la présence, en petites quantités, dans les liquides fermentés, des corps suivants : peptones, leucine, tyrosine, acides gras (acides formique, butyrique et propionique). Les peptones ont été caractérisées dans le liquide débarrassé des albuminoïdes par la réaction du biuret; la leucine et la tyrosine, dans l'extrait glycérique, par leurs formes cristallines. Pour la recherche des acides gras, j'ai distillé 500 centimètres cubes de culture additionnés d’acide sulfurique. Dans le distillat, l'acide formique a été mis en évidence par un sel d’argent; les acides butyrique et propionique, par le procédé de Duclaux (°). 1) DucLaux, Annales de chimie et de physique, série V, t. III, 1874. PAyS1q 7 TOME II, 1893. DANS LE SOL PAR LES MICROBES. 83 E. Le soufre de l’albumine se retrouve à l’état d'acide sulfu- rique. De ces différents faits, on peut déduire la conclusion suivante : Sous l'influence du Bacille mycoïde, l'oxygène se porte sur les éléments de l’albumine, le carbone est transformé en acide carbo- nique, le soufre en acide sulfurique, une partie de l'hydrogène en eau, et l'ammoniaque se dégage en quelque sorte comme résidu. La production d’ammoniaque apparaît ici comme le corollaire d'un phénomène respiratoire. Envisagé de la sorte, le dégagement d’ammoniaque, aux dépens de l’albumine, peut être rapproché de la production de soufre aux dépens d'hydrogène sulfuré, telle que Winogradsky l’a indiquée pour les sulfobactéries (). Dans les deux cas, une partie de la molécule est oxydée, fournis- sant au microbe une certaine quantité d'énergie, et l'ammoniaque, comme le soufre, constitue le résidu de la réaction. L'analogie ressort nettement de la comparaison des deux équa- tions. Sulfobactéries : H2S + O — H20 +S. Microbes ammonisants : C72H1:72A218S072 + 770? = 29H20 + 72CO? + SO3 + 18AzH3 (carbonate et sulfate ammonique). Cette combustion complète de l’albumine par le microbe est influencée par divers facteurs : température, aération, reaction et concentration du milieu. 12. Influence de la température. — La température active, d'une façon remarquable, les phénoménes d’oxydation qui s'accom- plissent dans le sol. (*) WiINOGRADSKY, Recherches sur les sulfobactéries. (ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR, t. III, 1889.) Tome II, 1893. 84 É. MARCHAL. — SUR LA PRODUCTION DE L’AMMONIAQUE Schloesing et Muntz ont montré que c’est vers 35° que la nitrifi- cation atteint son maximum d'intensité. J'ai cherché à déterminer quelle est, pour VPammonisation, la température optima. Dans ce but, j’ai ensemencé du Bacille mycoïde dans des ballons renfermant 25 centimètres cubes d’une solution diluée de blanc d'œuf dosant 12°365 d’azote organique par litre. Les 30 ballons ensemencés ont été partagés en séries de 5, qui furent placés simultanément aux températures suivantes : 0° à 5°, 10°, 20°, 30°, 37°, 42°. Après trente jours de culture, j'ai obtenu les quantités suivantes d’ammoniaque : TEMPERATURE. | BALLONS 1. | BALLONS 2. | BALLONS 3. | BALLONS 4. | BALLONS 5. | MOYENNES. EEE SR en) o° à 5° Traces. Traces. Traces. Traces. Traces. | Traces. Milligr. Milligr. Milligr. Milligr. Milligr. Milligr. 10 1,5 3,0 2.6 1,8 — (1) 2,2 20 8,1 9,8 10,1 11,5 8,3 9,6 30 16,8 18,0 14,1 5,1 15,3 15,8 37 9,3 13,2 12,1 10,2 — (©) 11,2 42 0,0 0,0 0,0 0,0 0,0 0,0 Les résultats moyens indiqués dans la dernière colonne de ce tableau montrent que de o° à 5° il n’y a eu que des traces dammo- niaque dans les liquides de culture; le réactif de Nessler n'y déter- minait qu'une coloration jaune peu intense; le microbe s'est cependant développé abondamment à cette température ; toutefois, () Ces dosages n’ont pu être effectués a cause d'accidents survenus aux cultures. = A wv , Tome II, 1893. DANS LE SOL PAR LES MICROBES. 85 le stade floconneux a persisté jusqu’a la fin, les filaments ne se résolvant pas en spores. A 10°, la production d’ammoniaque est encore faible; elle ne devient notable qu’à 20°, pour atteindre son maximum vers 30°. A 37°, le phénomène a perdu de son intensité, le développement du microbe est moins luxuriant, il cesse complètement a 42°. Le Bacille mycoide ne compte donc pas parmi les nombreuses especes thermophiles que M. Globig (*) parait avoir isolées du sol. I] n’en est pas de même pour un bacille désigné plus haut sous la dénomination de Bac. spec. 3, très intéressant, qui, même à 60°, se développe d'une façon luxuriante et sporule abondamment. Je reviendrai prochainement sur ce curieux organisme. 13. Influence de l’aération. — En l'absence de nitrate (7), le Bacille mycoïde est essentiellement aérobie; il est incapable de se développer dans le vide de même que dans une atmosphère d’hy- drogène ou d'acide carbonique. L'oxydation de l’albumine étant intimement liée à la respiration du microbe, elle s’accomplit mieux lorsque l’oxygene se trouve en grande quantite dans le milieu ambiant. C'est ce qu’une expérience très simple montre de la façon la plus évidente. On ensemence du Bacille dans les divers récipients suivants, qui reçoivent chacun 35 centimetres cubes de solution albumineuse : 1. Ballon dans lequel on fait ultérieurement le vide. 2. Tube long et étroit, où la profondeur du liquide est de 12 centimètres. 3. Ballon ordinaire — — 5 = 4. Ballon trés large — == 2.5 oo Les quatre cultures sont abandonnées pendant quinze jours () GLoBiG, Ueber Bacterien- Wachsthum bis 50°-70°, (ZEITSCHRIFT F. HYGIENE, _ t. I.) (?) On verra plus loin que cette restriction est nécessaire, Tome II, 1893. 86 É. MARCHAL. — SUR LA PRODUCTION DE L’AMMONIAQUE a 30°. Après ce temps, on y dose l’ammoniaque. Voici les résultats obtenus : AMMONIAQUE | AMMONIAQUE CULTURE. dans 25 c.c. par litre. Milligrammes. 0,0 4,2 8,5 4 12,5 0,500 Dans le vide, il n’y a eu aucun développement et aucune pro- duction d’ammoniaque, et l'on voit qu'en présence d’air, les quan- tités d’alcali formées sont d’autant plus fortes que l'épaisseur de la couche liquide est moins grande, autrement dit que la surface exposée au contact de l’air est plus considérable. Mais quelle que soit l'étendue de ces surfaces, les conditions d'aération réalisées dans ces expériences sont de bien loin infé- rieures à celles que présente le sol. La terre est. en effet, constituée de fines particules enveloppées d’une mince couche d’eau, plongeant dans l'atmosphère du sol et dans laquelle végètent les microbes. Ces derniers se trouvent donc en contact intime avec les gaz du sol, atmosphère qui, tout au moins dans les couches superficielles, est presque aussi riche que lair en oxygène (°). Les résultats obtenus dans les cultures artificielles ne doivent donc être considérés que comme des minima. 14. Influence de la réaction du milieu. — La réaction du milieu est, plus qu’on ne le pense généralement, un facteur important dans la chimie du sol; elle influe d'une façon remarquable sur les procès qui s’y accomplissent. () TH. SCHLOESING fils, Sur l'atmosphère contenue dans le sol. (COMPTES REN- pus, t. CIX, p. 673.) Tome II, 1893. DANS LE SOL PAR LES MICROBES. 87 En sol acide, la décomposition des matières organiques est très lente; si, par l’application de chaux, de marne, d’un phosphate très basique, on vient modifier cette réaction, la minéralisation des substances organiques s'accomplit rapidement, ce qui se tra- duit naturellement par une vigueur toute particulière de la végé- tation. C'est que les agents par excellence de l'oxydation des matières organiques — les bactéries — se développent de préférence dans un milieu alcalin. Winogradsky a montré que le ferment nitreux ne peut se déve- lopper que s'il existe dans le milieu une base, un carbonate de magnesie, de chaux, etc. Si donc la réaction est acide, la nitrosation est entravée. Il était intéressant de rechercher la sensibilité du ferment ammo- nisant aux variations de réaction du milieu. J'ai ensemencé du Bacille mycoïde dans du bouillon neutra- lisé (7), additionné de quantités croissantes d'acide sulfurique. Voici les résultats obtenus : ACIDE SULFURIQUE : CULTURE. À ÉTAT DE LA CULTURE. par litre. Grammes. 0,1 Développement. Id. Id. Pas de développement. () L'emploi de la solution albumineuse m'était interdit dans cette expérience, l'acide employé précipitant l'albumine. TOME II, 1893. 88 É. MARCHAL. — SUR LA PRODUCTION DE L'AMMONIAQUE Comme on le voit, des quantités de o'r à o8"5 d’acide par litre n'ont pas entravé le développement du microbe; dans ces trois cul- tures, la réaction est devenue, apres quelque temps, fortement alcaline. Après quinze jours de séjour à la chambre thermostatique à 30°, l’alcalinité de la culture 3 correspondait à 08"525 de potasse caus- tique par litre. On suit facilement les variations de réaction dans ces expériences en ajoutant à la culture quelques gouttes de teinture de tournesol, dont on voit se modifier la coloration. Le ferment ammonisant supporte donc un certain degré d’acidité. Ce fait explique sa présence dans l’humus des bois, dans certains terrains où je l’ai rencontré. Indépendamment de l’action des moisissures, l’ammonisation peut donc s’accomplir dans des sols acidés, où la production des nitrates est impossible. POTASSE CAUSTIQUE CULTURE. ÉTAT DE LA CULTURE. par litre. Grammes. 0,1 Developpement. Id. Id. Id. Id. Pas de développement. Id. Id. Id. Id. Tome II, 1893. DANS LE SOL PAR LES MICROBES. 89 Des nombreuses analyses de terres diverses effectuées par Peter- mann (°), il résulte que les composés ammoniacaux se rencontrent normalement dans les sols de prairies, de sapinières, de landes et de bruyères, qui tous présentent généralement une certaine acidité. Si le Bacille mycoïde résiste à une faible acidité, le milieu alcalin n'en est pas moins celui qui favorise le plus son développement; il résiste à l'addition aux solutions nutritives de quantités relative- ment considérables de potasse caustique. L’alcalinité des cultures est encore, par suite de la production d'ammoniaque, peu a peu augmentée. 15. Influence de la concentration des solutions. — Perdrix (°) a fait voir que plus un bouillon est riche en matière azotée, plus est faible la proportion de cette matière transformée en ammoniaque par la bactéridie charbonneuse. J'ai recherché s'il en était de même avec le Bacille mycoide. J'ai donc cultivé le microbe dans des solutions de moins en moins riches en azote albuminoïde. Les résultats obtenus ont été les suivants : AZOTE ALBUMINOÏDE | AZOTE AMMONIACAL POUR-CENT SOLUTION. au début à la fin d'azote organique dans 25 cm3. dans 25 cm3. transformé. Milligrammes. Milligrammes. I 80,0 (3) 3453 42,9 2 64,0 29,5 46,1 3 48,0 22,7 473 4 32,0 18,0 56,2 5 16,0 1188 86,2 6 6,4 6,3 98,4 7 3,2 353 100,0 8 1,6 1,4 100,0 (1) PETERMANN, Recherches de chimie et de physiologie appliquées à l'agriculture. Bruxelles, 1886, p. 560. (?) PERDRIX, oc. cit. (3) Solution à 20 °/, environ de blanc d’ceuf dans laquelle l’azote a été dosé par le procédé Kjeldahl; elle a été rendue incoagulable par l'addition de 15 c. c. de solution au ‘/100 de sulfate de fer par litre. Les autres solutions en dérivent par dilution. Tome II, 1803. go É. MARCHAL. — SUR LA PRODUCTION DE L’AMMONIAQUE Dans les solutions très diluées, l'azote organique a été complète- ment transformé en ammoniaque; c'est ce qui a eu lieu dans les ' trois dernières solutions (la différence de o™™g2 entre l’azote albu- minoide et l'azote ammoniacal de la dernière solution rentrant dans les limites d’erreur des dosages). Ensuite, a mesure que Ja concentration augmente, la proportion d’ammoniagne diminue. En méme temps on constate que les pro- -duits résiduels de l’activité du microbe, les acides odorants, appa- raissent en quantités beaucoup plus considérables. Les cultures en solutions étendues ne dégagent aucune odeur; les liquides concentrés, au contraire, présentent une odeur très intense à la fois butyrique et ammoniacale. Action du bacille mycoïde sur les différentes substances azotées. 16. Substances albuminoïdes. — Je n’ai parle jusqu'ici que de l'action du Bacille mycoïde sur l’albumine de l'œuf, mais j'ai tenu à m'assurer aussi que son action est identique sur les autres sub- stances albuminoides et sur les peptones. J'ai opéré de la façon suivante : Dans des ballons contenant 25 centimètres cubes de la solution minérale que voici : AUS SA" cc (1 CR ER ET TO00 C. C. Phosphate bipotassique "Us 1,0 gr. Chlorurede sodium= 2 = BL: 0,5 — Sulfate de magnesium: © 7. > = 0.8) - 0,9 — j'ai ajouté respectivement les substances suivantes :caséine, fibrine, gélatine, gluten, légumine, myosine, peptone. Deux ballons sont ainsi pourvus des mêmes composés albumi- noïdes:; après stérilisation, l’un d'eux est ensemencé de Bacille mycoide, l'autre est laissé stérile et servira de témoin. RL Tome II, 1803. DANS LE SOL PAR LES MICROBES. OI Après vingt jours de culture à 30°, j'ai obtenu les résultats con- signés dans le tableau qui suit. DOSES AMMONIAQUE AMMONIAQUE SUBSTANCES. dans 25 cm3 dans dans de liquide minéral.| le ballon témoin (1). | les cultures. Grammes. Milligrammes. Caséine . Phe 0,2 Traces. 10 Milligrammes. Fibrine . sus 0,0 11,6 GÉMERE te. 0,0 18,5 Gluten LES 0,0 4,5 Éesumine :) +... Traces. 12,4 Myosine . : 2,4 8,3 Fepioneut 0.4, % Traces. 22,0 Ces diverses substances, et particulièrement les peptones, ont donc été énergiquement transformées en ammoniaque. Il en est de même de la sérine du sang. Du sérum, dilué au quart, contenait, après quinze jours de culture a 30°, 1623 d’ammoniaque dans 25 centimètres cubes. On vient de voir que la caséine est comburée par le microbe; sa destruction est bien plus complète encore lorsqu'on prend comme milieu de culture du lait normal stérilisé. Dans ces conditions, le Bacille se développe avec beaucoup d'énergie, le lait change bientôt d’aspect, la creme se sépare et vient occuper la surface du liquide, tandis que le sérum sous-jacent se colore peu a peu en jaune, puis en jaune brun qui se fonce de plus en plus. Aprés un mois de (?) Provenant d’impureteés. TOME II, 1893. 92 É. MARCHAL. — SUR LA PRODUCTION DE L’AMMONIAQUE culture, j'ai observé, dans des laits différents, les quantités sui- vantes d’ammoniaque : 45,8 milligrammes dans 25 centimétres cubes, 3953 TE 7 arta. Late ce qui fait respectivement 1#832 et 12572 d’ammoniaque produite par litre. Malgré ces grandes quantités d’ammoniaque, le lait ne présentait pas, après culture, une forte réaction alcaline. Ce fait est di à la production, aux dépens de la lactose, d'acides qui ont neutralisé l’ammoniaque au fur et à mesure de sa pro- duction. 17. Substances azotées non albuminoïdes. — J'ai dit que la leucine et la tyrosine sont des produits résiduels de l'activité du microbe; ces substances peuvent-clies, a leur tour, être transformées en ammoniaque ? En est-il de mème de la créatine, de l'asparagine, de Puree? Pour répondre à ces questions, il a été fait des cultures du Bacille mycoide dans la liqueur minérale de tantôt, additionnée de 5 grammes par litre de saccharose et des corps azotés à étudier. Voici les résultats obtenus après dix-huit jours de culture a 30° : SUBSTANCES. Leucine Tyrosine . Créatine . Asparagine QUANTITÉS dans 25 cm3 de liquide minéral. Grammes. 0,1 0,1 0,1 0,25 () Provenant d’impuretés. AMMONIAQUE dans les témoins ('). Milligrammes. 1,5 1,0 Traces. Traces. AMMONIAQUE dans les cultures. Milligrammes, 5,8 6,7 354 22,0 Tome II, 1893. DANS LE SOL PAR LES MICROBES. 93 L’asparagine, la leucine, la tyrosine, et a un moindre degré la créatine, ont donc été transformées en ammoniaque. I] n’en est pas de même de l’urée. Ce corps se dédoublant facile- ment en carbonate d’ammoniaque, j'ai préparé les solutions par le procédé indiqué par Leube (*) et qui consiste a stériliser à part Purée solide et bien desséchée, qui supporte alors sans danger une température de 100°. L'urée était disposée dans de petites ampoules de verre que l'on mettait quelques heures à l'étuve à air chaud et qu'on laissait tomber ensuite dans les ballons renfermant la solution minérale sucrée stérilisée. Comme des contaminations auraient pu se produire pendant ces manipulations, les récipients de culture étaient mis deux jours à la chambre thermostatique et l'on n’ensemengait que ceux où ne se manifestait aucun trouble bactérien. Dans ces solutions, le Bacille mycoïde n'a présenté aucun déve- loppement. L’urée ne constitue donc pas un aliment azoté pour ce microbe. Le nitrate d’urée et les sels ammoniacaux sont dans le même cas. A plusieurs reprises, j'ai essayé de cultiver le bacille dans une solu- tion minérale sucrée, additionnée de 2 grammes par litre de sulfate d’ammoniaque; jamais je n'ai observé le moindre trouble dans la liqueur. 18. Nitrates. — La culture avec nitrates comme source d’azote est des plus intéressantes et montre combien les aptitudes physio- logiques du microbe varient avec le milieu. Si l’on ensemence du Bacille mycoïde dans la solution minérale sucrée de tout à l’heure, additionnée de 2 grammes par litre de nitrate de soude, on constate que, durant les premiers jours, le développement est extrèmement lent. Après deux ou trois jours cependant apparaissent dans le liquide des flocons denses et nom- breux. (t) LEUBE, Ueber der ammoniakalische Hamgährung. (ViRCHOW’s ARCHIV, t. C, Pp. 540.) Tome II, 1893. 94 É. MARCHAL. — SUR LA PRODUCTION DE L’AMMONIAQUE Si l'on traite une portion du liquide de culture par le réactif de Griess (') et une autre partie par le réactif de Nessler, on constate la présence simultanée de nitrites et d’ammoniaque; ce dernier se trouve en grande quantité. Ce processus de réduction, déjà signalé chez ce microbe par de Blasi et Russo Travali (*), présente une énergie telle, qu'après dix à quinze jours tout l'azote nitrique est transformé en ammoniaque, et le liquide de culture ne donne plus de réaction avec la diphényl- amine suliurique. Il est curieux de voir le mème microbe agir tantôt en oxydant, vis-a-vis de l’albumine, tantôt en réducteur, en présence de nitrates. Les phénomènes d'oxydation et ceux de réduction ne sont donc pas nécessairement l'apanage d'organismes distincts : tous deux sont intimement liés à la respiration des microbes, respiration normale dans le cas de l'oxydation, respiration intramoléculaire lorsqu'il s'agit de réduction. Le Bacille mycoïde, se développant en aérobie dans les solutions de blanc d'œuf, brûle l'albumine à l’aide de l'oxygène de l'air, tandis que dans les solutions de nitrates additionnées de sucre, il brûle ce dernier en enlevant l'oxygène nécessaire a cette combus- tion aux nitrates, corps oxygénés et tres facilement réductibles. Les recherches de Laurent (*) ont montré, en effet, que les nitrates sont aisément réduits, non seulement sous l'influence d’agents organisés (bactéries, levures, moisissures), mais encore de facteurs purement physiques (lumière solaire). S'il en est ainsi, si le bacille peut emprunter l'oxygène nécessaire à sa respiration aux nitrates, il doit pouvoir, en présence de ces sels, vivre en l'absence d'oxygène libre, vivre en anaérobie. C'est ce que l'expérience a prouvé. (t) Acide sulfanilique, acide chlorhydrique, chlorure de naphtylamine. (2) DE Bzasr et Russo TRAVALI, Gaszetta chimica italiana, 1889, p. 440. (3) LAURENT, Wotes sur la réduction des nitrates par les plantes et par la lumière solaire. (BULLETIN DE L’ ACADEMIE ROYALE DE BELGIQUE, 1890 et 1891.) al ee PT Tome II, 1893. DANS LE SOL PAR LES MICROBES. 95 Le Bacille mycoide ensemencé dans une solution sucrée addi- tionnée de nitrates, en atmosphère d’hydrogéne ou d’acide carbo- nique, s’est développé aussi bien que dans un ballon témoin où l'air avait accès. Ici encore il y a eu réduction des nitrates en nitrites et en ammoniaque, et combustion du sucre en acide car- bonique et en eau. Les deux phases de fermentation anaérobie peuvent être représentées par les équations suivantes, dans lesquelles (CH’O) représente l'hydrate de carbone en présence. 1. 2AZO3H + (CH20) — 2AzN2H + H?O + CO}. 2. 2AzO?H + 3(CH°0)—2AzH3 + 3CO2 + H20. Comme le sucre, l'albumine peut, en l'absence d'oxygène mais en présence de nitrates, être oxydée par le microbe, tandis que lorsqu'il n'existe pas dans le milieu de substance facilement réduc- tible, la production d’ammoniaque aux dépens de l'albumine nécessite le concours de l’oxygène libre. Un fait analogue a été signalé récemment par Giltay et Aberson(’). Ils ont isolé du sol un organisme qui, en l'absence d'oxygène dans les solutions de nitrates additionnées d’asparagine, transforme ce corps en ammoniaque en empruntant l'oxygène nécessaire aux nitrates qu'il réduit. 19. Action du Bacille mycoide sur les hydrates de carbone. — L'étude de la nutrition carbonée du Bacille mycoide présente cer- taines difficultés spéciales provenant de ce fait, que ce microbe se développe tres mal dans les solutions dépourvues de matiéres organiques azotées. J'ai donc dû me borner à ajouter a des solutions de blanc d'œuf différents hydrates de carbone. Dans ces conditions, la culture prend un aspect tout particulier ; dès le second jour, la liqueur se trouble : la réaction est devenue acide et l’albumine s’est précipitée. (*) GILTAY et ABERSON, Recherches sur un mode de dénitrification et sur le schi- zomycète qui la produit, (ARCHIVES NÉERLANDAISES, t. XXV, p. 341.) Tome II, 1893. 96 É. MARCHAL. — SUR LA PRODUCTION DE L’AMMONIAQUE Cette production d’acide s’observe avec la glycose, la saccharose, la lactose, la dextrine et l'amidon; elle est très faible avec l’inuline et nulle avec les gommes. Cette réaction acide n'est cependant pas définitive; sous l’in- fluence d’une zymase sécrétée par le microbe (°), les flocons d’albu- mine précipitée se dissolvent peu à peu, et, par la production d’ammoniaque, la réaction devient neutre et puis enfin franche- ment alcaline. Ceci montre combien est peu fondée la distinction qu'ont établie certains auteurs entre les bactéries acidifiantes et les bactéries alcalinisantes. Ces variations de réaction dépendent essen- tiellement de la nature du milieu. CONCLUSIONS. 1. L’oxydation graduelle dans le sol de l’azote des matières organiques en nitrates ou nztrification s’accomplit en trois phases principales : A. Liammonisation ou transformation de l’azote organique en ammoniaque ; B. La nitrosation ou transformation de l’ammoniaque en nitrites; C. La nitralation ou transformation des nitrites en nitrates. 2. L'ammonisation s’accomplit essentiellement sous l'influence des microbes divers (bactéries, levures, moisissures) qui pullulent dans les couches supérieures du sol. Dans la terre arable, l'action des bactéries est prédominante; dans les terres humeuses, acides, les moisissures interviennent pour une part importante dans le phénomène. 3. Parmi les bactéries du sol arable, le Bacillus mycoides ou bacille de la terre (Erde Bacillus des auteurs allemands) est a la fois un des plus répandus et celui dont l’action sur les matières azotees est la plus énergique. 4. Sous l'influence de ce microbe, l'oxygène se porte sur les élé- (") Cette zymase est très probablement du groupe des trypsines; elle peut, en effet, agir en milieu alcalin et donne naissance, à côté de peptones, à de la leucine, tyrosine, etc. Tome II, 1893. DANS LE SOL PAR LES MICROBES. 97 ments de l’albumine : le carbone est transformé en acide carbo- nique, le soufre en acide sulfurique, l'hydrogène partiellement en eau, laissant l'ammoniaque comme résidu de cette oxydation. Il y a également production, en petites quantités, de peptones, leucine, tyrosine et d'acides gras odorants. 5. Les conditions optima pour l'activité du microbe ammonisant sont les suivantes : A. Une température élevée, voisine de 30°; B. Une aération complete ; C. Une légère alcalinité de milieu ; D. Une faible concentration des solutions albumineuses. 6. Le Bacille mycoïde s'est montré apte à transformer en ammo- niaque non seulement l’albumine de l’œuf, mais encore la caséine, la fibrine, la legumine, le gluten, la myosine, la sérine et les peptones. La créatine, la leucine, la tyrosine et l’asparagine subissent les mémes modifications; au contraire, l’urée, le nitrate d’urée ainsi que les sels ammoniacaux ne sont pas attaqués par le microbe, pour lequel ils ne constituent pas un aliment. 7. Le Bacille mycoide, ammonisant et aérobie en présence de matières organiques azotées, devient dénitrifiant et anaérobie quand il existe dans le milieu des corps facilement réductibles (nitrates). En l'absence de tout oxygène libre dans des solutions renfermant une matière organique (sucre, albumine), il réduit les nitrates en nitrites et en ammoniaque. Il est donc capable de dégager de l’ammoniaque par deux pro- cessus tout à fait opposés : par oxydation dans un cas, par réduc- tion dans l’autre, Le présent travail a été exécuté a l'Institut botanique de Bru- xelles; c’est pour moi un devoir bien agréable de remercier ici publiquement M. le professeur Errera, ainsi que ses assistants, MM. les docteurs Clautriau et Massart, pour les précieux conseils qu'ils m'ont prodigués dans le cours de mes recherches. Institut botanique de Bruxelles, avril 1893. . TOME II. 7 COLORATION DES NOYAUX PAR LA NIGROSINE PAR L. ERRERA (’) M. Errera signale la nigrosine (*) comme un excellent réactif colorant pour les noyaux. Il présente des coupes végétales teintes au moyen de cette substance : les noyaux seuls y ont pris une coloration bleue, très foncée, qui les fait nettement ressortir et révèle leurs détails de structure. Tout le reste de la cellule demeure sensiblement incolore. La nigrosine est un des innombrables dérivés du goudron; elle se rattache à la classe des indulines ; sa constitution est d’ailleurs encore assez mal connue. Elle est soluble dans l’eau, insoluble dans l'alcool et l'éther. Voici comment M. Errera l'emploie : la prépara- tion microscopique, colorée par un court séjour dans une solution de nigrosine, est lavée à l'eau distillée jusqu’à ce qu'elle ne cède plus aucune matière colorante au liquide. On peut alors, soit monter dans la glycérine (ou la gélatine glycérinée), soit passer à l'alcool, éclaircir au moyen de l'essence de girofle et monter dans le baume ou le dammar. La’ première méthode est préférable s'il importe d'étudier le protoplasme et la partie de la figure nucléaire formée par l'achromatine de Flemming; la seconde devra être employée si l’on s'attache surtout à l'examen de la chromaline (= nucléine), (!) Extrait du procès-verbal de la séance du 25 juin 1881, de la Société belge de microscopie, t. VII, n° 8. (2) De la fabrique de C. A. F. Kahlbaum, à Berlin. Tome II, 1881. 100 L. ERRERA. — COLORATION DES NOYAUX, ETC. ou s’il s'agit de rendre invisibles des grains d’amidon qui géneraient l'observation. En somme, on voit que l'emploi de la nigrosine se rattache directement à la méthode de coloration des noyaux imaginée par Hermann et récemment préconisée par Flemming (°). Cette substance mérite d'être mise sur la mème ligne que la safranine, le vert de mcéthyle et les autres réactifs colorants le plus justement estimés. (*) FLEMMING, Arch. /. mikr. Anat., Bd XIX, 1881. SUR L'EMPLOI DE LA CANARINE PAR L. ERRERA (:) M. Errera présente ensuite une série de coupes de tiges colorées par la canarine, matière colorante nouvelle dérivée du sulfocya- nate de potassium. Ces préparations ont été faites au Laboratoire d'anatomie et de physiologie végétales de Bruxelles, par M. Clau- triau, qui s'occupe actuellement de l'étude de la canarine au point de vue de la technique microscopique. La nouvelle substance exerce son action colorante en présence de la potasse caustique, ce qui la rendra sans doute précieuse pour diverses recherches d'anatomie végétale. () Extrait du procès-verbal de la séance du.26 juillet 1884, de la Société belge de microscopie, t. X, n° 11. NOTES DE TECHNIQUE MICROSCOPIQUE DU LABORATOIRE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE VÉGÉTALES DE L'UNIVERSITÉ DE BRUXELLES SUR L'EMPLOI DE L'ENCRE DE CHINE EN MICROSCOPIE PAR L. ERRERA () Un objet se voit d'autant mieux au microscope que son indice de réfraction et sa couleur different davantage de l'indice de réfrac- tion et de la couleur du milieu ambiant. La plupart de nos procé- dés de préparation reposent sur ce principe élémentaire. Tantôt, en effet, pour rendre plus apparents des détails délicats de struc- ture, nous plaçons les objets dans des milieux très réfringents, tantôt nous leur faisons absorber des matières colorantes appro- priées, afin que leurs différentes parties se distinguent mieux les unes des autres par leurs nuances et se détachent plus nettement sur le champ du microscope. On sait que les méthodes de colora- tion se sont multipliées dans les dernières années d’une manière exubérante, à ce point qu'en visitant les laboratoires des micro- (») Cette note a paru dans le Bulletin de la Société belge de microscopie, t. X, n° 11 (26 juillet 1884). Tome II, 1884. 104 L. ERRERA. — SUR L'EMPLOI DE L'ENCRE graphes, on pourrait souvent se croire dans des ateliers de teintu- rerie. , Pourtant certains objets se laissent difficilement pénétrer par les réactifs colorants; d’autres s’y refusent même tout à fait; d’autres encore permettent bien au réactif de les traverser, mais ne retiennent point la matière colorante. Dans des cas semblables, on peut recourir au procédé inverse de celui qu'on emploie d’habi- tude : colorer le milieu ambiant au lieu de colorer l'objet. C'est ainsi que Hofmeister (*) a conseillé d'observer certaines substances gélatineuses dans de l’alcool coloré, et Seiler (*} propose de monter les grains d’amidor dans un liquide glycérique coloré par le bleu d’aniline. La coloration de l’objet aussi bien que la coloration du milieu telle qu’on la pratique ordinairement ne s'appliquent pas aux organismes vivants. Ceux-ci se refusent, en effet, à absorber les solutions colorantes. Les exceptions que Brandt et Certes (*) ont indiquées à cette règle ne sont qu'apparentes. D'après Brandt, on peut teindre le noyau des Protozoaires vivants en violet pâle par une solution diluée d’hématoxyline, et les globules graisseux de ces êtres en brun au moyen de brun de Bismarck; Certes a retrouvé cette dernière action chez la cyanine ou bleu de quino- léine. Mais, dans toutes ces expériences, le protoplasme proprement dit demeure incolore et — ce qu’il importe surtout de faire ressor- tir ici — la solution colorée exerce toujours une action nuisible sur la vitalité des organismes : elle n'est tolérée qu'à un état de grande dilution et pendant peu de temps. Si, au contraire, on s'adresse à l'autre méthode et qu'on se con- tente de placer les éléments vivants dans une solution colorée quelque peu intense, sans chercher à les colorer eux-mêmes, on (1) Ber. d. sachs. Ges. zu Leipzig, t. X, 1858, p. 21. (2) Cité dans BEHRENS, 7/fsbuch, 1883, p. 185. (3) K. BRANDT, Verhand/. d. physiol. Ges., Berlin, 1878, p. 35, et Biolog. Cen- tralblatt, t. 1, 1881, n° 7. — CERTES, Comptes rendus, t. XCII, n° 8, et Zool. Anz., 1881, n°5 81 et 84. Tome II, 1884. DE CHINE EN MICROSCOPIE. 105 s’expose aussi à amener leur mort, soit par exosmose, soit même le plus souvent par un empoisonnement véritable. Il peut donc étre utile, dans bien des cas, de posséder un liquide fortement coloré qui ne soit pas toxique et n’exerce pas d’action osmotique sensible sur les êtres microscopiques que l'on y place. Pour satisfaire a ces conditions, il suffit de substituer aux solutions colorées, de l'eau tenant en suspension des poudres colorées inso- lubles. C’est a ce point de vue que je voudrais appeler l'attention sur l'emploi de l’encre de Chine. Son innocuité et sa coloration intense la rendent très propre a l'usage dont je parle. L’encre de Chine consiste, comme on sait, en noir de fumée et en matière gommeuse très légèrement aromatisée avec du musc ou du camphre. En la délayant dans l’eau, on obtient un liquide du plus beau noir, grâce aux fines particules de charbon qu'il tient en sus- pension; mais ce liquide n’améne point la plasmolyse des cellules et les organismes continuent à y vivre parfaitement. Voici comment on procède. On délaie un peu d'encre de Chine de bonne qualité, mais pas trop parfumée, dans un de ces godets de porcelaine qui servent à l’aquarelle. Il importe de triturer soi- gneusement : le liquide doit présenter au microscope des granules égaux et excessivement petits, animés d'un vif mouvement brownien; il doit avoir, en couche très mince, une teinte d’un gris foncé, mais non pas d'un noir opaque. On place une goutte de ce liquide sur un porte-objet; on dépose sur un couvre-objetles orga- nismes à étudier et on l'applique sur la goutte de liquide noir, avec la face où se trouvent les organismes tournée vers le bas. De cette manière, on évite qu'il y ait des pärticules noires entre le verre couvreur et les objets à étudier. Ceux-ci apparaissent remarquable- ment éclairés sur le fond gris noir, de sorte que leurs détails s'aper- çoivent avec netteté. La matière charbonneuse ne semble nulle- ment incommoder les organismes microscopiques : ils s'y portent très bien, et j ai pu conserver ainsi des Spirogyres, des Vauchéries, des Infusoires, etc., etc., vivants, pendant plusieurs jours. Pour des observations prolongées, il convient naturellement de se servir d'une chambre humide ou d'empêcher l’évaporation en plaçant la préparation dans une atmosphère saturée de vapeur Tome II, 1884. 106 L. ERRERA. — SUR L EMPLOI DE L’ENCRE DE CHINE, ETC. d'eau. J’emploie d’ordinaire la chambre humide de Strasburger, qui se compose d’un morceau de carton humide, posé sur un porte- objet et percé en son centre d'une ouverture circulaire sur laquelle on applique un verre couvreur. Celui-ci porte à sa face inférieure les organismes dans une goutte du liquide noir. On peut aussi faire dans l’encre de Chine des préparations durables. Pour cela, on remplace peu à peu, sous le couvre-objet, l'encre de Chine délayée dans l'eau par de l’encre de Chine délayée dans la glycerine. Il faut toujours faire en sorte que le liquide noir ne dépasse pas les bords du cover, sans quoi il s’y produirait des courants par suite de l’évaporation, et les particules noires ne seraient plus uniformément réparties. C'est surtout pour mettre en évidence les gaines gélatineuses, si fréquentes chez les étres inférieurs, et les couches gelifiées des membranes des plantes supérieures, que l'encre de Chine me paraît appelée a rendre des services. Les enveloppes gélatineuses de beau- coup d'algues filamenteuses, des Gleeocapsa, des colonies de Zooglæa, etc., se distinguent à peine de l’eau, et il est, en général, difficile de les bien voir et d'en déterminer les contours; rien n'est, au contraire, si aisé, quand on observe dans l'eau chargée d’encre de Chine. Cette méthode pourra probablement aussi s'appliquer avec quel- que avantage à l'étude de la digestion des Infusoires, du mouve- ment des Diatomees et des organismes ciliés, etc. IT DEUX QUESTIONS DE TERMINOLOGTE PAR L. ERRERA (:) 1. Tous ceux qui ont eu à rédiger des travaux de micrographie ont dû remarquer combien les termes de porte-objet et de couvre-objet sont incommodes et combien ils manquent d'élégance. Quoi de plus désagréable — et de plus fréquent — que les phrases dans le genre de celle-ci : « l'objet, déposé sur le porte-objet, est recouvert ensuite du couvre-objet ». Ces mots composés sont si contraires au génie de notre langue et ils alourdissent la phrase à ce point, que beaucoup d'auteurs préfèrent employer les équivalents allemands ou anglais. On parle couramment d’un slide, d'un cover ou d’un deck-glas. Ce remède ne me paraît cependant pas beaucoup meil- leur que le mal. | La langue française serait-elle hors d'état de tirer de son propre fonds deux termes appropriés? Il est difficile de l’admettre, et, sans avoir recours à aucun néologisme, je pense que « lame » et « lamelle » conviendraient parfaitement. Ce sont des mots courts, commodes, euphoniques et tres français. Il suffirait que les micro- graphes s'entendissent pour appeler toujours le porte-objet la lame, et le couvre-objet la /amelle, comme Ranvier l'a fait, par (*) Cette note a paru dans le Bulletin de la Société belge de microscopie, À. X, n° 12 (12 octobre 1884). TOME II, 1884. 108 L, ERRERA. — DEUX QUESTIONS exemple, dans son Traité technique d'histologie (*). En vain répon- drait-on qu’il faut pour cela attacher a ces termes généraux une signification trop spéciale. N'est-ce pas ce que l'on a fait pour oculaire, objectif, platine et tant d'autres mots? Et de même que l'on a dit pendant quelque temps la lentille objective ou le verre objectif, avant de parler de l'objectif tout court, on pourrait pré- parer l'innovation proposée en se servant d'abord des expressions de lame porte-objet et de lamelle couvre-objet. Ce serait une transi- tion toute naturelle, et c’est du reste ce que font déjà quelques auteurs. 2. L'emploi du millième de millimetre (= p) comme unité de mesure micrographique devient de plus en plus général, et il faut s’en féliciter. On appelle indifféremment cette unité un micromilli- mètre ou un micron. Je pense que de ces deux noms le dernier seul devrait être conservé et que micromillimètre pourrait être utile- ment rayé du dictionnaire. Voici pourquoi : D'abord micron a sur micromillimètre des avantages de concision et d'élégance évidents. Mais ce n'est pas tout. On sait que dans le code de mesures élaboré par la British Association, qui a servi de base à toute la nomenclature moderne des unités électriques, le préfixe micro désigne toujours la millionième partie. Un microvolt, un microhm, une microdyne sont la millionième partie d'un volt, d’un ohm ou d’une dyne. Le « micromillimètre » ferait seul excep- tion à cette règle générale, puisqu'il représente la millième et non la millionième partie du millimètre. Pour suivre la règle, le mil- lième de millimètre, qui est le millionième du metre, devrait être appelé un micromètre, comme l'ont proposé quelques auteurs (’). (C) (Ch Loc et. pp 45; (2) Fourn. roy. micr. Soc., 1880, p. 327. — C’est aussi ce que font NENCKI et GUILLAUME, Fev. Sc., 25 janvier 1890, p. 116 (Beitr. 3. Biol. d. Spaltpilze, 1880, p. 13 du tiré et passim; et Journ. f. prakt. Chem., XIX, XX. Nencki dit : Mikro- meter pour 1/r009 2%). — RUCKER (Vature, 888, XXXVII, p. 388) rejette micro- millimètre pour les mêmes raisons que moi; il propose mzcromeétre; mais CHENEY, ibid., p. 438, appuie mzzcron. D > ? Tome II, 1884. DE TERMINOLOGIE. 109 Mais ce mot a déjà un emploi déterminé et il n'y a aucun motif pour le distraire de sa signification usuelle. Dans ces conditions, il est tout indiqué, semble-t-il, d'adopter le mot micron à l'exclu- sion de tout autre. On l'avait créé comme abréviation de micro- millimètre, pourtant rien n'empêche d’y voir tout aussi bien l’abréviation de micromètre, qui serait le terme correct mais qui doit rester inusité dans ce sens. J’ajouterai — et ce n'est pas le moindre de mes arguments — que le terme de micron et l'abrévia- tion p ont été adoptés par le Comité international des poids et mesures (7). Si la Société de microscopie se rallie aux idées que je viens d’avoir l'honneur de lui exposer, il serait désirable qu'elle les sanc- tionnat par un vote afin de leur donner plus d'autorité. Voici mon projet de résolution : « La Société belge de microscopie émet le vœu : 1° De voir remplacer, dans le langage scientifique, les mots porte-objet et couvre-objet respectivement par lame et lamelle; 2° De voir désigner le millième de millimetre par micron(pluriel : des microns) a l'exclusion du mot micromillimètre, qui doit être rejeté » (*). (*) Procès-verbaux des séances de ce Comité en 1879, cité dans /’Annuaire de L'Observatoire royal de Bruxelles, 1881, p. 335. (2) Cette proposition fut acceptée ultérieurement par la Société belge de microscopie. ; III COMMENT L'ALCOOL CHANSE-T-IL LES BULLES DAI? PAR L. ERRERA (:) Les micrographes savent avec quelle ténacité des bulles d'air © très petites adhèrent souvent aux coupes de tissus et combien on a de peine à les en chasser. Si les moyens à employer sont générale- ment énumérés dans les traités, on paraît s'être moins occupé des principes de physique sur lesquels ces artifices de préparation reposent. Il est vrai que pour Ja plupart des procédés, l'explication se pré- sente presque d'elle-même. Tantôt on chauffe la coupe microsco- pique, tantôt on la place sous le récipient de la machine pneuma- tique, ou bien on la plonge pendant quelque temps dans de l'eau fraîchement bouillie et refroidie. Ici, c'est la solubilité de l’air dans l’eau qui intervient ; la, il suffit de se rappeler que les bulles d'air, à l'intérieur du tissu, sont emprisonnées dans de minces lames d'eau, par l'effet des forces moléculaires. On comprend ainsi que la chaleur ou la diminution de pression extérieure permettent à l’air de s'échapper de sa prison, a la fois parce que l’expansibilité de l'air augmente et parce que les lames d’eau, approchant de leur point d'ébullition, se brisent plus aisément. Mais il est une autre méthode, recommandée d’abord par Schacht et très fréquemment employée, dont 1l est moins facile de rendre (1) Cette note a paru dans le Bulletin de la Société belge de microscopie, t. XIII, n° 3 (22 décembre 1886). ToME II, 1886. 112 L. ERRERA. — COMMENT L'ALCOOL raison. Elle consiste a immerger la coupe dans de l'alcool absolu. On voit alors les bulles d’air se dégager rapidement et venir crever à la surface de l'alcool. L'alcool, dans cette opération, se substitue partout à l'eau qui imbibait le tissu. Les deux liquides sont, en effet, parfaitement miscibles, et c'est la une première condition qui intervient dans le phénomène. Pour l'interpréter d'une façon complete, il faut, je pense, faire encore entrer en ligne de compte la tension et la vis- cosité superficielles. Les physiciens ont établi, comme on sait, que la couche superfi- cielle d’un liquide est dans un état particulier, différent des couches profondes : comparable à une membrane tendue également dans tous les sens, cette couche est le siège d’une force contractile ou tension super ficielle. La tension varie d’un liquide à un autre. Celle de l’eau distillée, par exemple, équivaut à la traction d'un poids de 7™8"5 par milli- mètre de longueur; elle est trois fois plus forte que celle de l'alcool absolu (285), quatre fois plus forte que celle de l'éther ordinaire (1™gt88), etc. Si donc, en un point d’une surface mouillée par de l'eau, _ on dépose une goutte d'alcool, on diminue notablement la tension superficielle en ce point, et les parties environnantes, qui ont con- servé leur tension primitive, vont tirer à elles les portions mélan- gées d’alcool. Il en résultera, à l'endroit alcoolisé, une dépression, un mouvement centrifuge, comme si l’alcool chassait violemment l’eau devant lui. Quand la couche primitive d'eau est peu épaisse, l’objet mouillé par l’eau pourra être mis à nu à la place où l'alcool avait été déposé (*). C’est précisément ce qui arrive pour nos préparations microsco- piques. L'eau, qui couvrait d'une mince couche tous les replis du tissu, fuit, en quelque sorte, devant l'alcool et est partout remplacée par celui-ci. (‘) J. THomson, Phil. Mag., 1855, 4° série, X, p. 330. Cf. VAN DER MENSBRUGGHE, Sur la tension superficielle des liquides. (MEM. DE L’ ACAD, ROY. DE BELGIQUE, t. XXXIV, 1869, §§ 34-35). Tome II, 1886. CHASSE-T-IL LES BULLES D'AIR? 113 La substitution de l’alcool à l’eau s'étend aussi, naturellement, aux minces lames liquides qui limitent les bulles d’air emprison- nées dans le tissu. Ici un troisième facteur intervient : c'est le peu de persistance des lames d’alcool. Si l'on remplit à moitié d'alcool un de ces flacons a deux tubes connus dans les laboratoires sous le nom de pisselles, et qu'on souffle modérément par celui des tubes qui plonge dans le liquide, les bulles d’air ainsi produites, en atteignant la surface de l'alcool, donnent naissance, comme chacun sait, à des calottes liquides creuses. Et l’on s'aperçoit bientôt que ces calottes n'ont qu'une durée très éphémère : elles se brisent presque immédiatement. Lorsqu'on fait la même expérience avec une pissette d’eau distillée, on voit que les calottes, quoique très fugaces, sont un peu plus persistantes. Enfin, avec de l'eau de savon ou une solution aqueuse d’albumine, les calottes sont très durables et forment une véritable mousse. Or, le liquide qui imbibe les tissus organiques et qui y empri- sonne les bulles d’air n’est pas de l’eau pure. C'est de l'eau qui a dissous et enlevé au tissu des matières organiques, parmi lesquelles notamment des substances albuminoïdes. On comprend ainsi pourquoi les bulles d’air, adhérentes aux tissus, persistent si obsti- nément. Et elles le font d’autant mieux qu'elles sont microsco- piques, car les lames liquides ont en général d'autant plus de per- sistance qu’elles sont moins grandes (*). Aussitôt l’eau remplacée par l'alcool, les bulles d’air sont mises en liberté, comme dans l'expérience de la pissette, par la rupture des lames d’alcool qui les limitent. A quoi tient cette persistance inégale des calottes d’alcool, d'eau distillée et d'eau albuminée? Ou, ce qui revient au mème, pourquoi certains liquides donnent-ils une mousse durable et d'autres pas? Notre compatriote J. Plateau a élucidé cette question avec sa sagacité habituelle, et, sans entrer dans des détails qui appartien- (*) J. PLATEAU, Slatique expérimentale et théorique des liquides soumis aux seules Jorces moléculaires, 1873, t. Il, $ 311. Tome II. 8 Tome II, 1886. 114 L. ERRERA. — COMMENT L'ALCOOL nent a la physique moléculaire, nous pouvons, du moins, resumer les résultats auxquels il est parvenu. Plateau etablit que la couche superficielle des liquides, outre sa tension caractéristique, possède une viscosité propre, indépendante, ou à peu près, de la viscosité intérieure (7). Tantôt cette viscosité superficielle est plus grande que la viscosité intérieure (eau, glycérine, solutions de carbonate de soude, d’azotate de potasse, de chlorure de calcium; eau de savon, solution d’albumine, etc.) ; tantôt elle est plus petite (alcool, éther, essence de térébenthine, sulfure de carbone, etc.). Plateau le démontre par une expérience aussi simple qu'élégante : Quand on écarte de sa position d'équilibre l'aiguille d’une boussole, elle y revient d'autant plus vite qu'elle se meut dans un milieu moins résistant, moins visqueux. Si l'on réalise cette expérience, d'abord en plongeant l’aiguillc aimantée sous l'eau et ensuite en lui faisant exactement affleurer la surface du liquide, on constate que pour regagner sa position d'équilibre elle met presque deux fois plus de temps à la surface qu'à l'intérieur de l’eau. Avec l'alcool, au contraire, la durée à la surface n’est que la moitié environ de la durée à l'intérieur. De ces expériences convenablement discutées, Plateau conclut que la viscosité superficielle de l'eau est plus grande que la viscosité intérieure; celle de lalcool, plus petite. Ce point reconnu, Plateau arrive, par des considérations ingé- nieuses, à la théorie suivante (je cite presque textuellement) : Pour qu’un liquide donne des bulles grandes et persistantes, ainsi qu’une mousse volumineuse et durable, il faut que la viscosité propre des couches superficielles de ses lames soit forte, afin que l’amincisse- ment s'opère avec lenteur; il faut, en outre, que la tension super- ficielle de ce liquide soit relativement faible, afin qu'elle ne puisse vaincre la résistance opposée au déchirement par la viscosité super- ficielle. Les liquides qui n’ont qu’une faible viscosité superficielle ne donnent ni bulles, ni mousse, parce que leurs lames atteignent en trop peu de temps une ténuité extréme etqu'alors elles se brisent (1) PLATEAU, Op. cit., IL, § 282. «TOME II, 1886. CHASSE-T-IL LES BULLES D'AIR ? 115 par les petits ébranlements venus de l'extérieur ou par d’autres causes étrangères (’). Tel est précisément le cas de l'alcool. Résumons nos remarques. Ce qui rend les bulles d'air si persis- tantes dans une coupe de tissu organique, c’est d’abord leur extrème petitesse ; c'est, ensuite, que les minces laines d'eau qui leur servent de prison tiennent toujours en dissolution une certaine quantité de matières organiques : de là, une augmentation de la viscosité superficielle et une diminution de la tension, favorables à la persis- tance des lames. Les bulles d'air doivent, en revanche, disparaître promptement, si l'on substitue à l’eau un autre liquide qui jouisse de ces trois propriétés : 1° D’étre parfaitement miscible à l’eau; 2° D’avoir une tension superficielle faible, de sorte qu'il aille remplacer l'eau jusque dans les moindres replis du tissu : 3° D’avoir une viscosité superficielle faible, de telle sorte que ses calottes, autour des bulles d'air, se brisent tout de suite. Essayons de déterminer théoriquement quels liquides convien- dront, d’après cela, à l'expulsion des bulles d'air. Plateau a indiqué une série de liquides qui, au point de vue de l'absence de mousse et de la faible persistance des bulles, forment avec l'alcool une mème catégorie (*). Tous ont probablement une viscosité superficielle faible et moindre que la viscosité inté- rieure. Ce sont : l'alcool, l'éther, l'acide acétique cristallisable, l'acide lactique; puis les huiles grasses, l'essence de térébenthine, la benzine, le chloroforme, le sulfure de carbone, la liqueur des Hollandais (chlorure d’éthylene). Ces derniers, étant peu ou point solubles dans l’eau, ne satisfont pas à l’une des conditions énoncées plus haut. Les quatre premiers liquides nous intéressent donc seuls ici. (r) PLATEAU, Op. cit., I, $ 259. Voir aussi §§ 292 et suiv. (2) Ipem., zbed., II, §§ 245 et 274. Tome II, 1886, 116 L. ERRERA. — COMMENT L’ALCOOL, ETC. . La seconde condition est que la tension superficielle soit faible — notablement plus faible que celle de l’eau a laquelle il s'agit de substituer le liquide. L’eau distillée a pour tension 7,5; mais nous savons que, dans les tissus, il s’agit d’eau plus ou moins chargée d’albuminoides, etc. Cette eau a, par conséquent, une tension voisine de 5,7, chiffre qui correspond à une solution d’albumine (°). Ceci nous amène à cxclure encore, à cause de leur tension relati- vement élevée, l'acide lactique dont la tension égale 4,2 (*) et l'acide acétique cristallisable qui doit avoir sans doute une tension ana- logue. Restent l'alcool et l'éther, dont les tensions sont respective- ment 2,5 et 1,88. Si notre explication est exacte, l'éther doit donc, comme l'alcool, chasser rapidement les bulles d'air des préparations. Il le doit d'autant mieux que En ce qui concerne les alcaloides surtout, la question est loin d'être élucidée. Elle présente cependant un intérêt considérable, car le nombre de ces corps déjà connus actuellement est très grand, et il augmentera certainement encore de beaucoup, lorsque l'on aura examiné d'une manière complete la grande quantité de plantes qui n'ont été jusqu’à présent l’objet d'aucune recherche chimique, ou qui ont été analysées trop sommairement. Pourquoi tant de plantes forment-elles des alcaloïdes? Sont-ils des produits transitoires nécessaires pour la synthèse de combi- naisons plus complexes, comme quelques auteurs sont portés à l'admettre? Ou bien, ne sont-ils que des déchets, que la plante peut utiliser ensuite comme moyen de protection contre la voracité des animaux ? ù Mais avant de pouvoir tirer des conclusions générales à cet égard, il est nécessaire de connaître d'une manière exacte la façon dont se comportent les alcaloïdes chez les diverses plantes qui en forment, et de déterminer les conditions qui modifient leur pro- duction. Car de grandes différences sobservent dans la façon d'être des alcaloides, selon les plantes. Tantôt l’alcaloïde existe dans la graine et tantôt celle-ci n'en renferme point. Parfois la plante en contient beaucoup, parfois il n’apparaît qu'au cours de la végétation; et si, dans certains cas, on le retrouve intact dans les tissus morts, dans d’autres, au contraire, il disparaît pour la plus grande partie dès la maturité de la plante. La quantité en est très variable. Parmi les plantes les plus riches en alcaloïdes, on peut citer en première ligne le Pavot, Papaver somniferum, chez lequel j'ai pu déterminer microchimiquement, Tome Il, 1892. DANS LES CAPSULES DE PAVOT. 255 outre la localisation, la marche des alcaloïdes (*). Les graines mûres n'en contiennent pas, et il ne s'en forme ni pendant la ger- mination, ni même pendant la première période de la végétation. I] faut que la plante ait acquis un certain développement, atteigne une hauteur d'environ 10 centimètres, pour que l'on puisse constater leur présence. A partir de ce moment, la richesse en alcaloïdes va en croissant jusqu'à ce que la capsule arrive à son entier développement. Alors, durant toute la maturation des graines, les alcaloïdes diminuent petit à petit, et lorsque la plante, ayant muri ses semences, se dessèche, tous les alcaloides ont presque complètement disparu. Ici, les alcaloïdes sont donc liés à toute la vie de la plante adulte, et le fait de leur disparition lors de la maturité des graines permet de supposer à priori qu’il pourrait exister une certaine relation entre eux et la maturation des semences. Les alcaloïdes ne serviraient-ils pas à la formation des matières albuminoïdes des graines ? Il était intéressant de vérifier expérimentalement cette suppo- sition. Dans ce but, il s'agissait de voir ce que devenaient les alcaloïdes dans des capsules séparées de la plante, coupées peu de temps après la fécondation des ovules. L’azote des alcaloïdes ne deviendra-t-il pas de l'azote albuminoide? La capsule peut parfai- tement bien murir ses graines, ainsi détachée de la plante, et ce fait est connu depuis assez longtemps (*). En opérant de cette manière, on supprimait toutes les causes d'erreur pouvant pro- venir d’un apport plus ou moins grand de matériaux azotés, assi- milables ou non, des feuilles à la capsule. Celle-ci seule devait donc fournir aux graines tout l’aliment nécessaire à leur développement complet, et comme elle renferme de l’azote sous ses formes albu- minoide, nitrique et alcaloidique, des analyses chimiques spéciales pour chacune de ces formes devaient permettre de constater les (1) Recherches microchimiques sur la localisation des alcaloides dans le Papaver somniferum. (MEM. DE LA SOC. BELGE DE MICROSC., t. XII, 1888.) (?) PFEIFFER, Jahrbiicher fiir wissenschaftliche Botanik, Band VILL, p. 510, 182. Tome II, 1892. 256 G. CLAUTRIAU. — L'AZOTE différences survenues dans leurs quantités respectives, au cours de la maturation. En se basant sur ces considérations, les expériences ont été établies de la façon suivante : Dix-huit capsules de Papaver somniferum album, provenant d’une même culture de plantes vigoureuses et aussi semblables que possible, ont été cueillies peu après la chute des pétales. Chaque pédoncule a été coupé sous l'eau à 5 centimètres envi- ron de la capsule, et toutes les capsules ainsi traitées sont restées quelque temps baignant dans l'eau afin de laisser écouler l'excès de latex. Quand cet écoulement eut cessé, toutes les surfaces de section furent débarrassées du latex coagulé qui pouvait encore y être adhérent, et l'on partagea les capsules en trois lots identiques de six, devant servir à trois séries d'expériences. La première série, après avoir été pesée, a été immédiatement soumise à l'analyse chimique d’après le procédé indiqué plus loin. La deuxième série, pesée, a été abandonnée à l'air, en laissant la dessiccation s'opérer lentement, ce qui permettait, pendant un jour ou deux, la continuation de certains échanges intimes, et durant toute la dessiccation, l’action de la lumière et de l'oxygène de l'air. La troisième série enfin, pesée également, a été placée dans des conditions lui permettant de continuer a vivre et a murir ses graines. Pour cela, les capsules reposaient sur une mousseline tendue au-dessus d’un cristallisoir contenant de l'eau distillée, dans laquelle plongeait lextrémité des pédoncules. Le tout était recouvert d'une grande cloche de verre pour maintenir l'atmo- sphère humide. L'expérience, commencée le 9 juillet, a été arrêtée le 28 du même mois. Les capsules avaient pris une teinte grise, et leur volume avait diminué. De plus, par suite d’une trop grande humidité de l'atmosphère, des mycéliums commençaient à se développer sur les pédoncules et formaient quelques taches sur certaines capsules. L'analyse chimique de ces trois séries a été faite de la même maniere. D'abord on commençait par séparer complètement les graines des capsules. Cette opération présentait quelques difii- cultés pour la première série : les graines, très jeunes, étaient très Tome II, 1892, DANS LES CAPSULES DE PAVOT. 297% adhérentes aux placentas, et en les détachant, on emportait parfois de petits fragments des tissus placentaires, un peu imprégnés de latex. La séparation des graines terminée, les capsules étaient découpées en petits morceaux et mises en macération dans de l'alcool absolu contenant 2 °/,, d’acide tartrique. Ce traitement par l'alcool tartrique était répété a plusieurs reprises, à froid d’abord, puis à chaud, jusqu'à ce que l'alcool passant incolore à la filtration ne laissät plus de résidu à l'évaporation. Les liqueurs alcooliques ont alors été évaporées au bain-marie pour chasser tout l'alcool, et le résidu a été repris par de l’eau distillée pour séparer surtout la chlorophylle. Après filtration, le liquide aqueux fut de nouveau évaporé au bain-marie jusqu’à consistance de sirop épais, qui fut épuisé ensuite par de l'alcool absolu à chaud, pour dissoudre les tartrates d’alcaloides et les nitrates. La séparation de ces corps a été obtenue en filtrant et évaporant la liqueur alcoolique, repre- nant le résidu de l'évaporation par de l’eau distillée acidulée par de l’acide chlorhydrique, et précipitant ensuite les alcaloides par un excès d’acide phosphomolybdique. Le précipité des phospho- molybdates d’alcaloides a été recueilli sur un petit filtre taré, lavé à l’eau acidulée, puis à l’eau pure, desséché et pesé. Dans la liqueur débarrassée des alcaloides et à laquelle on a ajouté les eaux de lavage du précipité de phosphomolybdates, les nitrates ont été dosés sous forme de bioxyde d’azote, par le procédé de Schloesing. Le dosage des matières albuminoides a été fait par le procédé de Will et Varrentrapp, en opérant sur le résidu séché et pulvérisé du traitement par l'alcool tartrique, lequel ne dissout pas les substances protéiques. | Les semences, de leur côté, ont été soumises aux mêmes traite- ments et à des dosages analogues par les mêmes procédés; et pour les trois séries en expérience le mode opératoire a été absolument identique. L’eau distillée dans laquelle baignaient les pédoncules des capsules de la 3° série a été évaporée, et le faible résidu, recueilli avec soin, a été ajouté aux capsules. Le dosage de l’azote des alcaloïdes n’a pu être fait par suite des faibles quantités de matière, et les chiffres donnés dans le tableau Tome II. 17 ToME II, 1892. 258 G. CLAUTRIAU. — L’AZOTE ci-après représentent la quantité d’alcaloides, calculée en morphine d’après le poids des précipités de phosphomolybdates. Il y a de ce chef une légère erreur, car le précipité obtenu par l’acide phospho- molybdique ne renferme pas uniquement le sel de morphine, mais bien le mélange des sels des divers alcaloides du Pavot. Tou- tefois, cette erreur ne peut étre considérable, d’abord parce que la majeure partie des alcaloïdes doit être effectivement ici de la mor- phine, et ensuite parce que les poids d'une molécule de phospho- molybdate de morphine, de codéine, de papaverine, etc., sont assez voisins. Divers essais préliminaires ont été faits avec de la morphine pure pour vérifier le poids du phosphomolybdate; et en outre, dans des expériences ultérieures, le dosage par l’acide phosphomolyb- dique a été également contrôlé par un dosage au moyen de l’iodure double de mercure et de potassium. En ce qui concerne les nitrates, on pourrait objecter que l'alcool absolu ne dissout pas le nitrate de potassium et que, par suite, il aurait fallu surtout les doser dans les résidus du traitement par l'alcool tartrique. Mais, ainsi que des essais préliminaires l'ont démontré, tous ces résidus ne renfermaient plus de nitrates, et il faut admettre que la grande quantité d’alcool employé, eu égard aux faibles proportions de nitrates en présence, a donc entraîné en solution la totalité de ces sels. Les chiffres obtenus dans ces différents dosages sont indiqués dans le tableau suivant : ITe SÉRIE. | 2° SÉRIE. | 3° SÉRIE. POIDS FRAIS. 172 grammes. 175 grammes. | 179 grammes. Semences. | Capsules. À Semences. | Capsules. { Semences Capsules. Poids SECC RENE 187006 138721 281072 148750 45707 II8TIO Azote albuminoïde. | 0,1155 | 0,2840 | 0,0795 | 0,2565 | 0,1069 | 0,2070 Azote nitrique . . | 0,0076 | 0,1087 | o,0021 | 0,0181 | 0,0021 | 0,0129 Alcaloides . . +. | 0,0039 | 0,0817 fo) 0,0787 | traces? | 0,0130 Tome II, 1892. DANS LES CAPSULES DE PAVOT. 259 On peut constater, d’après ces résultats, que la quantité d’alca- loides dans la capsule, qui est de 0,0817 dans la 1" série, tombe a 0,0787 dans la 2° série ou la vie a pu se prolonger quelques jours, et qu'elle n’est plus que de 0,0130 dans la 3° série où les phénomènes vitaux ont pu continuer ase manifester assez longtemps. On peut affirmer aussi que les alcaloides n’existent pas dans les graines. Dans la 1 série on trouve, il est vrai, 0,0039 d’alcaloides, mais ceux-ci proviennent de la capsule lors de la séparation des graines, ainsi qu'il a été dit plus haut. La capsule étant complètement sèche dans la 2° serie lors de la séparation des graines, celle-ci a pu se faire d'une façon complete et facile. Aussi n’a-t-on pas retrouvé ici la moindre trace d’alcaloide. Dans la 3° série, on a obtenu un très leger trouble qui, recueilli sur un filtre taré, n’a pas donné de difference de poids appréciable — a peine un dix-milligramme. Ce trouble était dû probablement à des produits sécrétés par les mycéliums déja mentionnés, et dont l'apparition a fait interrompre l'expérience, qui était toutefois, dès ce moment, concluante. Car les graines avaient muri. Leur poids avait plus que doublé et elles contenaient une proportion d'huile normale, tandis que dans la 1'e série il n'y avait aucune trace de matière grasse. L'azote nitrique, ainsi que l'on devait s'y attendre, diminue rapi- dement. Tout ce qui peut encore être assimilé, l'est immédiatement. Aussi voyons-nous que les quantités restant dans les deux der- nières séries sont sensiblement les mêmes; ce qui permet de sup- poser, ou que ce reste était dû à des nitrates situés en dehors des endroits ou se fait l’assimilation, ou qu’il est constitué par d’autres combinaisons oxygénées de l'azote, que la plante ne peut ou ne pouvait assimiler dans les conditions de notre expérience. Quant aux matières albuminoïdes des capsules, on voit qu elles vont en diminuant de la 1"° a la 3° série; et il n’y a pas eu d’accrois- sement de la quantité des albuminoïdes dans le graines. On peut se rendre compte, d'après ce tableau, que si la proportion d’alcaloïde va en diminuant, la perte en azote qui provient de cette disparition n'est pas compensée par un accroissement correspon- dant d’azote albuminoïde, et la quantité totale d'azote combiné que Tome II, 1892. 260 G. CLAUTRIAU. — L'AZOTE renferment les capsules décroît à la fin de la végétation, ainsi que le montrent les chiffres suivants : hears | Semences . . 0,1155 Azote albuminoïde . 4 th | Capsules. . . 0,2840 1° série. \ Ts | Semences . . 0,0076 Azote nitrique . As |. Gapsules. =) 2. @,1087 TOTAL. 5 =) 2O;5055 Alcaloides 0,0856, renfermant 4.90 °/, environ d’azote. ae Semences 9-- = 0;0795 Azote albuminoide. . sos | Capsules. . . 0,2565 2e serie . re sin Semences . 0,0021 Azote nitrique . : À 4 | Capsules. . . 0,018! TOTAL. L. 0,256? Alcaloïdes 0,0787, renfermant 4.90 °, environ d'azote. Azote albuminoïde | Semences . . 0,1069 Ane ( Gapsules. ~: . ~0,2070 PISÉTICRE Azote nitrique | Semences . . 0,0021 Ke Capsules 93, 20,0129 HOTAT- 8002280 Alcaloïdes 0,0130, renfermant 4.00 °/ environ d'azote. D'après ces chiffres, la faible quantité d'azote des alcaloïdes ne paraît être d'aucune nécessité pour la formation des matières pro- téiques des graines. Mais une autre conclusion s'impose, en consultant ces chiffres, qui constituent en somme le bilan de l’azote dans la capsule. On constate que ce bilan clôture par un déficit assez considérable. Ce déficit est peut-être même un peu trop considérable; car il y a lieu de faire remarquer que dans la 3° série, une partie de la perte en azote peut être attribuée aux mycéliums qui, vers la fin de l’expé- ToME II, 1892. DANS LES CAPSULES DE PAVOT,. 261 rience, commençaient à envahir les capsules, ainsi que cela a été signalé plus haut. Peut-être aussi le chiffre trouvé pour l’azote albuminoide des semences de la 1° série est-il trop fort. Je suis porté à croire qu'il y a là une légère erreur d'analyse, mais la véri- fication n’a pu être faite, par suite de la trop petite quantité de substance. Pour vérifier les résultats obtenus et s'assurer que les mycéliums n'étaient pas l'unique cause de la perte d’azote, ces expériences ont été reprises avec un nouveau lot de capsules plus fortes, plus agées que celles des expériences précédentes (la Saison s'avançant), mais qui toutefois n'avaient pas encore terminé leur croissance. Dix-huit capsules traitées de la même manière que dans les recherches précédentes, mais en laissant des pédoncules plus longs, de 127/, centimètres environ, ont été réparties en deux séries seule- ment de neuf capsules, la 1° série correspondant à la 1'° série des autres expériences, et la 2° série correspondant à la 3° série précé- dente. Cette 2° série a été disposée de façon à éviter tout dévelop- pement de mycéliums. Les capsules, non recouvertes d’une cloche de verre, ont été plus espacées, et les pédoncules étant beaucoup plus longs et ne plongeant que tres peu dans l’eau distillée, l'air pouvait circuler très librement, empêchant ainsi les capsules de devenir humides. L'expérience, commencée le 7 août, a été arrêtée dans les premiers jours de septembre. Dans les recherches précédentes, les dosages avaient été faits par la méthode de Willet Varrentrapp, et par le procédé de Schloesing. Mais on peut objecter avec raison que ces deux méthodes, même combinées, ne permettent pas de doser tous les composés azotés. Il en est, et de ceux qui existent dans les végétaux, dont on ne peut déterminer de la sorte la teneur en azote. Aussi, pour plus de garantie, est-il nécessaire de doser l'azote total par la seule méthode certaine connue : la méthode de Dumas. Car le fait que la chaux sodée met en liberté une quantité d’armmoniaque plus faible à la fin de la végétation, n’implique pas nécessairement une disparition d'azote, et l'on pourrait l'expliquer en admettant qu'une partie des corps protéiques s’est transformée en composés inaptes à dégager de l'ammoniaque sous l’action de la chaux sodée. Tome II, 1802. 262 G. CLAUTRIAU. — L’AZOTE Donc, avant de traiter les tissus des capsules et les graines, dans les deux séries, par l'alcool tartrique, on a prélevé quelques grammes de matière pour y doser l'azote total par le procédé de Dumas. Puis les albuminoïdes ont été soumis au procédé par la chaux sodée et des alcaloïdes ont été précipités par l’iodure double de mercure et de potassium. Les nitrates n'ont pas été dosés. Le tableau suivant indique les chiffres obtenus dans ces divers dosages : | 17° SERIE. | 2° SERIE. POIDS FRAIS. | 265 grammes. | 268 grammes. Semences. Capsules. Semences. Capsules. Poids SEC ERE). oF pn re 98"80 26860 108797 228r40 ATOteROtAl EE lain ; 0,4782 0,8875 0,6165 0,5869 Azote albuminoide . . . 0,3714 0,4461 0,4305 0,3522 ANGAIOITES RME ys = ae fe) 0,2415 fe) 0,1124 Si nous additionnons dans chaque série les quantités trouvées pour les semences et les capsules, nous constatons que le poids sec, qui était dans la 1° série de 9,80 + 26,60 = 36840, tombe apres la maturation, dans la 2° série, à 10,97 + 22,40 = 33237, soit une diminution de 3,03 ou 8.3 °/o. L’azote total dans la 1° série est de 0,8875 + 0,4782 = 18°3657, et dans la 2° série il est de 0,6165 + 0,5869 = 182034; par conséquent, une perte de 08'1623 d'azote a eu lieu, ce qui fait 11.8 °/o. L’azote albuminoïde diminue également et tombe de 0,8175 a 0,7827. Les alcaloides, outre leur absence complete dans les graines, ont subi une diminution de plus de moitié. Cette diminution a été plus considérable dans la premiére expérience ; mais il faut tenir compte Tome II, 1892. DANS LES CAPSULES DE PAVOT. 263 qu'ici les capsules étaient plus âgées et renfermaient par consé- quent beaucoup plus d’alcaloides. En outre, comme elles étaient moins éloignées de leur maturité, la durée des phénomènes vitaux a été plus breve et elles s'étaient desséchées avant la fin de l’expé- rience. Enfin, comme la maturation s'est faite dans l'air sec, les cellules épidermiques ont pu se dessécher plus tôt, abolissant ainsi leurs phénomènes vitaux et leurs transformations intimes; et nous savons par l'examen microchimique que l’alcaloïde est surtout accumulé dans les cellules épidermiques des capsules du Pavot. Les principales conclusions que l'on peut déduire des expériences exposées plus haut sont les suivantes : I. — Il n'y a pas lieu de considérer les alcaloïdes comme devant servir à la formation des matériaux azotés de la graine chez le Pavot. IT. — A la fin de la végétation, une partie de l'azote organique de la plante disparaît. Cet azote doit évidemment se dégager dans l'atmosphère, mais sous quelle forme? Ce point reste à résoudre, et je me propose de continuer l’étude de la question. Bruxelles, Institut botanique. + es FT len eee ae “ Der ie le “ui 4 L , DR. ; ‘ a : ee a gat” Fae cae ae ee si SENS ie x AE ; ON Ay ant {A it ¢ ” Sait TT UE LEA Ni A LE AL NE is OA L te ui" ; i (ur rh LOCALISATION ET SIGNIFICATION DES ALCALOÏDES DANS QUELQUES GRAINES PAR G. CLAUTRIAU (') ASSISTANT A L'INSTITUT BOTANIQUE UNIVERSITÉ DE BRUXELLES, Parmi les plantes à alcaloïdes, il en est, comme le Papaver som- niferum et le Nicotiana Tabacum, dont les graines sont complete- ment privées de principe actif. Après avoir traité des coupes de ces graines par les divers réactifs généraux et spéciaux, après avoir eu soin, surtout, de faire des recherches microchimiques comparati- vement sur des coupes traitées par l'alcool tartrique à 5 °/, d'après la méthode indiquée par Errera (*), on doit conclure à l’absence complète de tout alcaloïde dans les semences de Pavot ou de Tabac. A plusieurs reprises, des analyses chimiques de ces graines ont été faites, donnant des résultats contradictoires. Quelques auteurs (*) Ce travail a été publié dans les Annales de la Société belge de microscopie, t. XVIII, p. 35, 1894. (2) L. ERRERA, Sur la distinction microchimique des alcaloides et des matières protéiques. (MEM. DE LA SOC. BELGE DE MICROSC., t. XIII, 2° fasc., 1889.) TOME II, 1894. 266 G. CLAUTRIAU. — LOCALISATION ET SIGNIFICATION n’ont pas trouvé d’alcaloïde, tandis que d’autres affirment l'exis- tence d’une quantité minime il est vrai, mais très appréciable, de morphine ou de nicotine. Quelle est la cause de cette discordance? Elle est due à ce qu'il existe parfois, à la surface de certaines graines de Pavot, de petites quantités de latex riche en principe actif, transsudation des latici- fères du placenta ou de la capsule venue accidentellement se concré- ter sur les semences. En outre, on peut également voir au micro- scope, adhérents aux graines de Pavot et de Tabac ou mélangés à celles-ci, de menus débris du fruit, débris renfermant des alca- loïdes. La morphine ou la nicotine que l'on avait cru extraire de ces graines, provenaient uniquement d'impuretés. Mais beaucoup d’autres plantes ont des graines qui renferment des alcaloïdes. Chez quelques espèces, comme par exemple le Datura Stramonium, le Conium maculatum, le Strychnos Nux vomica, etc., c'est même la graine qui, proportionnellement, est la partie la plus riche en base organique. Néanmoins, on s'est peu occupé jusqu'à présent d'y déterminer exactement la localisation du principe actif. On s’est borné généralement à signaler sa pré- sence, comme si l’alcaloide se trouvait uniformément répandu dans toutes les parties. Il n'en est cependant pas ainsi : il existe de véritables localisations dans les graines, et ces localisations ne suivent pas un type uni- forme chez toutes les semences. Les différences sont très grandes d’une espèce à l'autre, et, comme nous le verrons, on peut dire que c’est dans les graines que la localisation du principe actif est le plus variable. Atropa Belladona. — Datura Stramonium. Hyoscyamus niger. Chez ces trois espèces, la localisation de l’alcaloïde dans la graine se fait suivant le même type, avec cette seule différence que la couche renfermant l’alcaloïde est plus ou moins développée. De ces trois plantes, la Belladone seule a été étudiée avec soin TOME II, 1894. DES ALCALOIDES DANS QUELQUES GRAINES. 267 microchimiquement par De Wevre (*) en 1887, et par Anema (°) en 1892. Le premier auteur, dans son travail, ne mentionne pas de recherche microchimique dans la graine. Anema a vérifié et con- firmé les résultats de De Wèvre. En plus, il a examiné la semence; mais il n'a pu y déceler d’alcaloïde, et il dit à la page 54 de son travail : Zaad. In het zaad werd geen alkaloïde gevonden. Cette con- clusion ne peut être admise, et contrairement a opinion d’Anema, Valcaloide existe dans la graine de Belladone, comme il se trouve également dans les semences de Stramoine et de Jusquiame qui servent depuis longtemps à l’extraction de l'atropine. L’erreur est due vraisemblablement à ce que l’auteur a recherché l’alcaloïde dans l’albumen et dans l'embryon, où il ne se trouve jamais. En effet, l'alcaloïde existe uniquement dans une couche sous-tégumentaire située entre l'albumen et le tegument proprement dit de la graine. A la maturité, cette couche est très réduite, surtout chez lAtropa et l'Hyoscyamus. Mais au cours du développement de la: graine, elle joue un rôle très considérable. Si l'on examine une coupe d’un ovule de Datura en voie de développement, quelque temps après la fécondation, on remarque un embryon de petite dimension placé excentriquement, entouré d’une étroite couche de cellules qui constitue l'albumen. Autour de cet albumen rudimentaire se trouve une assise très développée formée de nombreuses cellules riches en contenu, et que limitent les cellules du tégument, réduit à une seule couche périphé- rique. C'est dans cette assise que se localise complètement tout l’alcaloïde, et a aucun stade du’ développement ni l'embryon ni l'albumen n’en renferment. Cette assise à alcaloïde est l'assise nourricière de l’embryon et (*) A. DE WÈvRE, Localisation de l’atropine. (BULI. DES SÉANCES DE LA SOC. BELGE DE MICROSC., octobre 1887.) (2) P. Anema, De setel der alkaloiden bij enkele narkotische planten. Utrecht, J. G. Van Terveen en zoon, 1892. TOME II, 1894. 268 G. CLAUTRIAU. — LOCALISATION ET SIGNIFICATION de l’albumen. Dans ses cellules s’accumulent une grande quantité d’amidon, bleuissant par l’iode, et de matières albuminoides qui donnent une réaction intense par le réactif de Millon. A mesure que l'albumen s'accroît, l'amidon disparaît de cette assise ainsi que les substances albuminoïdes, tandis que l'alcaloïde y persiste; et peu à peu, toutes les cellules se vident, se dessèchent et meurent, ne conservant que le principe actif qui ne semble pas diminuer en quantité. En même temps, l'accroissement considé- rable de l’albumen refoule cette assise et comprime ses cellules contre le tégument, de sorte que, à la maturité, ces cellules forte- ment comprimées semblent constituer une sorte de membrane dans laquelle se trouve inclus l’alcaloide à l’état de sel facilement soluble dans l’eau. L’alcaloide semble être combiné, au moins par- tiellement, à un acide organique qui se colore en jaune sous lin- fluence des alcalis. Beaucoup de graines, d'ailleurs, surtout celles à alcaloïdes, renferment de ces acides organiques colorables en jaune par les alcalis, dont l'étude chimique et physiologique est encore à faire. Si l'on veut vérifier, sous le microscope, la localisation de l’alca- loide dans une graine mûre de Datura Stramonium, il faut opérer de la façon suivante : On choisit une coupe dont le tégument est bien adhérent à l’albumen et on la place à sec sous ie microscope. Puis, tout en examinant, on fait arriver lentement de l'iodure de potassium iodé. En opérant avec précaution, on voit l’assise sous- tégumentaire à alcaloïde se gonfler et se remplir d'un abondant précipité brun foncé, qui parfois peut devenir cristallin, comme dans les cellules riches en alcaloïde de la tige de Belladone. Sous l'action du réactif iodé, il n’y a pas de précipité caractéristique dans le tégument : l’albumen et l'embryon deviennent brun opaque, réaction due aux matières protéiques de réserve et non à un alcaloïde, ainsi que l’on peut s'en assurer par le traitement a Yalcool tartrique. Si, au lieu d’opérer avec soin sous le microscope, on commence par passer à l’eau distillée la coupe de graine, ou si on la plonge directement dans une certaine quantité de réactif, on n’observe plus de localisation nette. Le simple lavage à l’eau distillée suffit Tome II, 1894. DES ALCALOIDES DANS QUELQUES GRAINES. 269 pour débarrasser presque completement la coupe de tout son alca- loide — contenu à l’état de sel très soluble dans des cellules mortes, désorganisées. De même, en plongeant la coupe dans le réactif, le fin précipité qui se forme se mélange immédiatement au liquide, en même temps que s'émulsionnent dans celui-ci les corps gras provenant des cellules entamées par le rasoir. Ces gouttelettes grasses absorbent de l'iode et se colorent plus ou moins. Dans les graines müres de Stramoine, cette assise à alcaloïde est formée de cinq à six couches de cellules. Chez la Belladone et la Jusquiame, elle en renferme moins, ce qui la rend peu visible, mais cependant on peut, chez ces deux espèces, constater également la présence de l’alcaloide dans cette assise et uniquement dans celle-ci. Les réactifs a employer sont : l’iodure de potassium iodé, l'iodure double de mercure et de potassium, et l'acide phosphomo- lybdique. Conium maculatum. La coniine existe en grande quantité dans le fruit du Conium maculatum, et l’on peut employer, pour la caractériser microchi- miquement, l'iodure de potassium iodé, l’iodure double de mer- cure et de potassium, l'acide phosphomolybdique. On doit opérer avec précaution et suivre sous le microscope l'action du réactif. Le précipité qui se produit avec l’iodure de potassium iodé et l’iodure double de mercure et de potassium se présente sous forme de gouttelettes qui se redissolvent dans le réactif au bout d’un certain temps. Lorsque le réactif pénètre dans les cellules contenant des alcaloides, les premieres portions tuent le protoplasme : immédia- tement la plus grande partie du principe actif diffuse au dehors, et l’on n'obtient généralement, à l'intérieur de la cellule, qu’un trouble plus ou moins manifeste. L’acide phosphomolybdique donne de bons résultats, et si l’on veut rendre plus visible le très fin précipité obtenu par ce réactif, on ajoute un peu d’iodure de potassium iodé. L’iode s’unit au pré- cipité produit par l’acide phosphomolybdique, qui devient brun. Il Tome II, 1894. 270 G. CLAUTRIAU. — LOCALISATION ET SIGNIFICATION faut avoir soin de faire des essais comparatifs avec des coupes trai- tées par l’alcool tartrique. Dans un travail publié en 1878, M. Moynier de Villepoix (*) décrit avec quelques détails la structure du fruit du Contum macu- latum. Il distingue, de dedans en dehors, d'abord l'albumen, puis deux zones de cellules caractéristiques limitant extérieurement cet albumen, et enfin le péricarpe proprement dit, composé de divers éléments. Les deux zones de cellules qui entourent l’albumen nous inté- ressent particulièrement. Elles sont colorées en brun. L’assise la plus interne est formée de cellules tabulaires à parois minces, tandis que l'assise externe se compose de grandes cellules très caractéristiques et spéciales que l'on appelle les « cellules cubiques de la Cigué ». Ces cellules cubiques ont été désignées comme con- tenant de la coniine, et l’auteur a pu le vérifier microchimiquement au moyen du chlorure d’or et du nitrate d'argent. Au bout d'un certain temps, il a obtenu une réduction intense de ces deux réactifs dans les cellules cubiques. Il ajoute ensuite : « Il demeure donc parfaitement avéré pour nous que le plus grand emmagasinement de coniine a lieu dans les cellules cubiques, mais nous sommes loin de penser qu'il ne puisse s'en trouver dans les autres parties du fruit ». L’examen microchimique du fruit de Cigué permet de constater en effet une forte accumulation d’alcaloide dans l’assise des cellules cubiques. Les réactions obtenues sont extrèmement intenses. L'assise sous-jacente à cellules tabulaires renferme également de la coniine. L’albumen ainsi que l'embryon peuvent être considérés comme privés d'alcaloïde. L’embryon n’en renferme jamais. Toutefois on obtient fréquemment dans les cellules les plus périphériques de lalbumen, mais pas dans toutes, des réactions nettes par les (*) MoyNIER DE VILLEPOIX, Recherches sur les canaux sécréteurs du fruit des Ombellifères. (ANN. SC. NAT. BOTANIQUE, 68 sér., t. V, pp. 352-353.) Fr Tome II, 1894. DES ALCALOIDES DANS QUELQUES GRAINES. 271 réactifs. Cet alcaloide provient par diffusion des cellules cubiques, car les semences tres fraiches ne présentent pas, ou trés peu, ces réactions dans les cellules périphériques de l’albumen. Le péricarpe renferme également de l’alcaloïde et la proportion sera variable suivant l’état de maturité du fruit au moment de sa récolte. Les réactions sont surtout caractéristiques au voisinage des faisceaux et dans les cellules épidermiques. En résumé, l’alcaloide chez la Ciguë existe en grande quantité dans les cellules entourant l’albumen, et en plus petite quantité dans le péricarpe. Il y a une distinction a faire entre l'alcaloïde du péricarpe et celui des cellules cubiques. Ce dernier est l'alcaloïde de la graine propre- ment dite, déchet de l’activité des cellules de l’ovule, résultant de sa croissance, et s'accumulant, comme chez l'Aéropa, vers la péri- phérie, sans être utilisé ou détruit. Dans le péricarpe, au contraire, Valcaloide présente la même localisation que dans la plante verte, et son évolution est la même. Il disparaît à la mort des cellules, sans que sa disparition semble présenter une utilité immédiate pour la plante. J'ai signalé antérieurement (*) que dans la capsule de Pavot l'alcaloïde disparaît en grande partie a la maturité, et qu'il n’y a pas lieu de faire intervenir cette disparition des alcaloïdes pour expliquer l'augmentation des substances protéiques dans les graines. Le même fait se présente chez le Conium. Les cellules du péri- carpe, en dépérissant, détruisent leurs alcaloïdes, et ceci nous explique pourquoi les fruits verts, non mûrs, sont beaucoup plus actifs que les fruits desséchés et murs 1°). il n'y a pas lieu de voir dans cette diminution de l'alcaloïde à la maturité, une utilisation du principe actif pour la formation des albuminoïdes de la graine. (t) G. CLAUTRIAU, Z’azote dans les capsules de Pavot. (BULL. DE LA SOC. BELGE DE MICROSC., t. XVIII.) (2) A. JorissEN, Les phénomènes chimiques de la germination. (MEM. COUR. DE L’ACAD, ROY. DE BELGIQUE, t. XXXVIII, p. 66.) Tome II, 1894. 272 G. CLAUTRIAU. — LOCALISATION ET SIGNIFICATION Aconitum Napellus. — Delphinium Staphisagria. Dans les graines de ces deux Renonculacées, la localisation du principe actif se fait uniquement dans l’albumen, mais d’une façon différente. Tandis que l'alcaloïde dans la semence de Staphisaigre se trouve uniformément répandu dans toutes les cellules de l'albu- men, il montre, dans la graine d’Aconit, une tendance tres marquée à s’accumuler vers la périphérie. Non pas, cependant, que les cellules centrales en soient dépourvues, mais les réactions qu'elles donnent sont bien moins intenses que celles obtenues dans les cel- lules périphériques. Parfois mème, chez l'Aconit, les cellules en contactavec le tégument sont fortement comprimées, et leurs parois appliquées les unes contre les autres semblent, par leur réunion, constituer une membrane unique, épaisse, entourant l’albumen, et qui donne d’intenses réactions d’alcaloide. Celui-ci, toutefois, ne se trouve pas dans la membrane; il est emprisonné entre les parois des cellules aplaties. Pour localiser l’alcaloide dans les cellules de l’albumen, le meil- leur réactif est l'iodure de potassium iodé, en opérant comparati- vement avec des coupes traitées par l'alcool tartrique. Les diffé- rences de teintes sont très nettes et ne laissent aucun doute sur la présence de l'alcaloïde. A cause du contenu très abondant et très granuleux de ces cellules, riches en albuminoïdes, il n’est guère possible de distinguer le précipité d’alcaloide du précipité produit par les matières protéiques, lorsque tous deux existent à la fois dans la même cellule. Dans ce cas, il est préférable d'employer l’iodure de potassium iodé apres addition de carbonate d’ammonium. La réaction est beaucoup plus nette et plus caractéristique, car, en présence de l'alcali, ni les substances albuminoides ni les peptones ne sont pre- cipitées par le réactif iodé; elles se colorent en jaune, tandis que l'alcaloide continue à se précipiter en brun foncé. L’iodure double de mercure et de potassium ainsi que l'acide phosphomolybdique peuvent être également employés; mais comme les précipités qu'ils forment sont peu colorés, et comme ils Tome II, 1804. DES ALCALOIDES DANS QUELQUES GRAINES. 273 agissent aussi sur les matières protéiques, ils peuvent, s’il y a peu d’alcaloide, donner des résultats incertains. Ainsi qu'il a été dit plus haut, l'albumen très développé est le siège du principe actif qui, chez l’Aconit, tend à s’accumuler vers la périphérie. Ni le tegument de ces deux graines, ni l'embryon très petit, entouré par les cellules de l’albumen, n’ont fourni de caractère net de la présence d’un alcaloïde. Strychnos Nux vomica. Différents auteurs (*) se sont occupés de la localisation des alcaloïdes dans la noix vomique. Otto Lindt les localise dans la membrane. Rosoll, au contraire, obtient les réactions dans les cel- lules de l’albumen. Plus récemment, Gerock et Skippari (*) ont repris cette étude, et le résultat de leurs recherches confirme les conclusions de Rosoll. Je n'ai pu trouver le travail détaillé de ces auteurs. Ils ont employé comme réactif l'iodure double de mercure et de potassium, dans lequel ils faisaient macérer les coupes. Après lavage, le précipité était mis en évidence au moyen de l'hydrogène sulfuré. Ce procédé n'est pas très rigoureux. J'ignore si les auteurs se sont servis d’autres réactifs, et s'ils ont déterminé la localisation dans les diffé- rentes parties de la graine. Toutes les cellules de l'albumen du Sérychnos contiennent de l’alcaloïde, et il ne m'a pas été possible, sur les matériaux assez vieux que j'avais à ma disposition, de constater un emmagasine- () Voir à ce sujet ERRERA, MAISTRIAU et CLAUTRIAU, Premières recherches sur la localisation ct ta signification des alcaloides dans les plantes, p. 25. (JOURN. DE MED. DE BRUXELLES, 1887, et ANN. DE LA SOC. BELGE DE MICROSC., t. XII, Mémoires.) (?) GzRocK et Sxippari, Ueber den Sitz der Alkaloide in Strychnossamen. (ARCHIV DER PHARMACIE. Refer. in BERICHTE DER DEUTSCH. CHEM. GESELLSCH., Berlin, 1893, p. 248.) Tome II. 18 Tome II, 1894. 274 G. CLAUTRIAU. — LOCALISATION ET SIGNIFICATION ment plus ou moins considérable dans les diverses parties de cet albumen. Comme l’a signalé Rosoll, les alcaloides existent bien dans le contenu cellulaire. Pour les déceler, le mieux est d’employer l’iodure de potassium iodé et le même réactif en présence de carbo- nate d'ammonium, en n’omettant pas l'emploi de l’alcool tartrique comme moyen de contrôle. On peut ensuite distinguer l’un de l’autre les alcaloides strychnine et brucine au moyen des réactifs spéciaux. Les teintes obtenues sont généralement peu intenses, a cause surtout du fort gonflement des membranes, mais elles per- mettent d’affirmer la présence simultanée des deux principes azotes. Outre l’albumen, ’embryon, qui est assez volumineux et fait saillie au dehors, renferme également des alcaloides dans toutes ses cellules, toutefois en proportion un peu moindre que dans les cel- lules de ’albumen. Les poils caractéristiques en forme de cornue qui recouvrent la noix vomique d’un épais duvet, ne contiennent pas d’alcaloïde. Lupinus albus. L'examen microchimique de la graine de Lupin blanc a donné peu de résultats. Par suite de sa richesse en matériaux azotés divers, les résultats obtenus avec les réactifs généraux des alca- loides sont peu caractéristiques. Il semble y avoir de l’alcaloïde surtout dans les cotylédons, très volumineux. La plumule en ren- fermerait également. Quant au tégument, il en est dépourvu. Fe rl Le Tome II, 1894. DES ALCALOIDES DANS QUELQUES GRAINES. 275 IT La théorie la plus probable au sujet de la signification des alca- loïdes dans les plantes, est certainement celle qui les considère comme des déchets (*), provenant de la destruction des matières albuminoïdes ; déchets que la plante a pu utiliser ensuite, par sélec- tion, pour se protéger contre certains ennemis. On a souvent objecté à cette théorie la présence de grandes quantités d’alcaloide dans les graines. Partant de l'idée que tout ce qui se trouve dans la semence doit servir au développement de l'embryon, on s'est refusé à ne voir que des déchets dans les alcaloïdes. D'autant plus que certaines expériences de germination semblaient être favo- rables à la théorie adverse, qui envisage les principes actifs comme des produits transitoires, servant à la formation des matières albu- minoïdes et constituant, lorsqu'ils s'accumulent, de véritables matériaux de réserve. Jorissen (*) admet l’utilisation des alcaloïdes dans la germination. E. Heckel (*), dans une note très sommaire publiée en 1891, conclut dans le même sens. Ses expériences ont porté sur le Sterculia acuminata, le Strychnos Nux vomica, le Phy- sostigma venenosum et le Datura Stramonium, et il a constaté que les graines de ces plantes ont perdu la plus grande partie de leur principe au cours de la germination. L'auteur en déduit immédia- tement que ce qui a disparu a été transformé en substances plus assimilables, et cela sous l'influence de l'embryon : car, dit-il, (:) Sacus, Vorlesungen über Pflansenphysiologie, 1882, p. 396. ERRERA, MAISTRIAU et CLAUTRIAU, Premières recherches sur la localisation et la signification des alcaloides dans les plantes, 1887, p. 27. (?) A. Jorissen, Les phénomènes chimiques de la germination. (MEM. COUR. DE L’ ACAD. ROY. DE. BELGIQUE, t. XX XVIII, p. 73.) (3) E. HECKEL, Sur /’utilisation et les transformations de quelques alcaloides dans la graine pendant la germination. (COMPTES RENDUS DE L'ACAD. DES SCIENCES, Paris, janvier 1891.) TOME II, 1894. 276 G. CLAUTRIAU. — LOCALISATION ET SIGNIFICATION = privées au préalable de leur germe, les mêmes graines enfouies dans la terre humide conservent longtemps les alcaloïdes sans transformation. Malheureusement, Heckel ne donne aucun détail sur ses expé- riences, et je ne pense pas qu'il ait publié ultérieurement un travail plus complet sur cette question. Des plantes qu'il a examinées, je n'avais a ma disposition que le Datura Stramonium, chez lequel précisément il admet une utili- sation complete de l’alcaloïde comme aliment. Si l’on considère la localisation du principe actif dans la semence de Stramoine, que nous avons décrite dans la première partie de ce travail, il est difficile d'admettre a priori la théorie d’Heckel. Pourquoi, en effet, si l’alcaloïde est une réserve nutritive, ne dis- paraît-il pas de l’assise nourricière, alors que celle-ci, au cours du développement de la graine, se vide de l’amidon et des substances albuminoides qu'elle contenait? La graine ne l'utilise pas pendant sa formation : le ferait-elle lors de sa germination ¢ La solution directe de cette question n’est guere possible expéri- mentalement, car le fait de la disparition de l’alcaloide n’est pas suffisant pour affirmer qu'il a servi d’aliment. Tout ce qui disparaît d'une cellule végétale n’a pas été nécessairement utilisé par elle. La cellule végétale ne pourrait-elle pas modifier ou détruire la molécule alcaloïdique, comme sait le faire la cellule animale ? Et au lieu d'utilisation, ne peut-on, avec autant de raison, parler de destruction ? Mais, auparavant, il est préférable de s'assurer si l'alcaloïde de la graine est nécessaire au développement normal de l'embryon et de la plantule. Cette expérience est réalisable, et elle montre que la germination se fait tout aussi bien après l'enlèvement des alca- loïdes. Il est très aisé de priver la semence de Stramoine de tout son principe actif. Pour cela, il suffit d'enlever le tegument, opé- ration qui ne demande qu'un peu de patience. Comme la couche à alcaloïde adhère à celui-ci, elle s'enlève en même temps, pour la plus grande partie. Ce qui reste accolé a l'albumen est facilement débarrassé de tout principe actif par quelques lavages à l'eau distillée. Tome II, 1894. DES ALCALOIDES DANS QUELQUES GRAINES. 277 On pele donc un certain nombre de semences de Datura Stra- monium, et on les traite par de l’eau distillée jusqu’à ce que celle-ci ne donne plus aucun trouble par les réactifs des alcaloïdes. Les graines sont alors complètement privées de principe actif: je m’en suis assuré à deux reprises, en broyant chaque fois une cinquan- taine de ces graines pelées et lavées, et les épuisant plusieurs fois par de l'alcool! absolu acidulé. L'alcool a été évaporé au bain-marie, le résidu repris par l'eau, et cette solution aqueuse filtrée a été réduite à un petit volume et essayée par l’iodure de potassium iodé et l'iodure double de mercure et de potassium. Il ne s'est pro- duit aucun précipité, tandis qu’une seule graine non pelée donne déjà un précipité abondant par le mème traitement. Ces graines privées d’alcaloide, mises en terre humide ou sur une étamine en atmosphère saturée de vapeur d’eau, germent rapide- ment, plus rapidement que les graines non pelées, et donnent des plantules qui ne diffèrent en rien des plantules normales de Datura. On peut également faire la mème expérience avec le Conium maculatum. Elle est toutefois un peu moins probante, car il n’est pas possible d'enlever complètement l’alcaloïde. Les semences de Ciguë sont placées dans l'eau un certain temps, jusqu'à ce que l'enveloppe du fruit soit suffisamment imbibée. Elle se détache alors facilement. Avec l’ongle, on gratte ensuite soigneusement toute la surface de la graine, de façon à enlever les couches péri- phériques à alcaloïde, et on la soumet à un lavage répété à l’eau distillée. On parvient à obtenir ainsi des graines qui ne renferment plus que la très petite quantité de coniine qui se trouve dans les cellules de l’'albumen. Un essai chimique d’un certain nombre de ces graines m'a permis de constater qu'il ne restait qu'une très faible quantité dalcaloide. : La germination de ces semences s’est produite normalement, et comme chez la Stramoine, elles ont donné naissance à de jeunes plantes identiques à celles provenant de graines intactes. L'examen microchimique de ces plantules, issues de graines pelées de Stramoine et de Ciguë, permet de déceler la présence d'une grande quantité d’alcaloïde, principalement au point végé- TOME II, 1894. 278 G. C! AUTRIAU. — LOCALISATION ET SIGNIFICATION tatif (*). L'iodure de potassium iodé, l'iodure double de mercure et de potassium, l'acide phosphomolybdique produisent un abondant précipité au point végétatif. Apres traitement par l'alcool tartrique, le précipité ne se forme plus. On constate également un peu d’alca- loïde autour du faisceau central de la jeune racine. Microchimi- quement, ces plantules ne diffèrent pas des plantules normales. Il résulte de ces expériences que l'alcaloïde n'est pas nécessaire à la germination, et que, de plus, fait important, il y a production, pendant celle-ci, d'une certaine quantité de principe actif. Dans le développement de l'embryon comme dans celui de lovule, une activité protoplasmique considérable se manifeste; dans les deux cas, une grande quantité de matières protéiques est mélabolisée, et il en résulte une production et une accumulation d’alcaloide (°), que l’on ne peut considérer que comme un déchet. Cette production d’alcaloide au cours de la germination n'est pas uniquement propre à la Stramoine ou à la Cigue On peut également la constater chez des plantes dont la graine est dépour- vue de principe actif. Chez le Tabac, par exemple, la nicotine apparaît pendant la germination, et des plantules dont les cotylé- dons sont à peine étalés, donnent une réaction nette d’alcaloide au point végétatif. Chez le Pavot (*), la morphine n'apparaît pas au début du développement de la plante. Elle semble être précédée d'un autre alcaloide, à réactions peu nettes, que je n’ai pu jusqu'à présent identifier, au microscope, avec aucun des principes azotés extraits de l'opium. ' Le principe actif des graines d’Aconit, de Staphisaigre, de noix vomique, etc., est-il également inutile a la germination? On ne peut donner une réponse certaine à cette question. Il n'y a pas (1) ERRERA, op. cit. (°?) Puisque la graine, dès qu’elle germe, .produit de l’alcaloïde, il est permis de douter de l’exactitude du résultat obtenu par Heckel en ce qui concerne le Datura Stramonium. T1 n’a plus trouvé d’alcaloïde dans les semences en germi- nation, et cependant il devait y en avoir. (3) CLAUTRIAU, Recherches microchimiques sur la localisation des alcaloïdes dans le Papaver somniferum. (MEM. DE LA SOC. BELGE DE MICROSC., t. XII.) TOME II, 1894. DES ALCALOIDES DANS QUELQUES GRAINES. 27 xO moyen, en effet, de répéter avec ces semences les expériences faites avec celles de Datura et de Conium. Toutefois, durant le développement de l’ovule, la signification de l'alcaloïde paraît être la même que chez la Stramoine. Il semble également être le résultat de l’activité protoplasmique, sans utilité directe pour la graine en voie de formation. Il est probable que cette analogie avec le Daturase continue au cours de la germination, car les plantules d’Aconit et de Staphisaigre présentent au point végétatif de la racine une accumulation d’alcaloïde, et celui-ci résulte, selon toute probabilité, du métabolisme des matériaux protéiques de réserve, comme chez le Tabac. Si telle n'était pas l'origine de l’alcaloïde de ces plantules, il faudrait admettre que le principe actif a émigré de la graine vers le point végétatif où il s’accumule, et d'où il ne disparaît plus, ce qui tendrait à prouver également qu'il ne représente dans la graine ni une réserve ni une substance alimentaire. Il est possible, effec- tivement, qu’une partie des alcaloides de la graine en germination passe sans modification dans la plantule et augmente sa richesse en principe actif, lui procurant de ce fait une protection plus effi- cace. Mais il reste établi, par les expériences citées plus haut sur le Datura, le Conium, le Nicotiana et le Papaver, que la graine qui germe produit des alcaloides. Par suite de ce qui précède, la fonction essentielle que rem- plissent les alcaloides dans les graines comme dans les plantes doit être une fonction de protection La localisation, si variable ici, s'interprète de la façon la plus naturelle en partant de ce rôle. Les graines très petites sont privées d’alcaloides (Tabac, Pavot). Elles sont généralement produites en quantité considérable, et ce grand nombre assure d'une manière efficace la continuation de l'espèce. L'avantage d’une protection par une quantité d’alcaloïdes forcement très minime, n’est guère manifeste. Lorsque les graines acquièrent un certain volume, la plante en produit un nombre plus restreint, et l'utilité des alcaloides comme moyen de protection devient évidente. Dans chacune s’accumule une certaine quantité de principe actif. Cette accumulation, ainsi que nous l'avons vu dans la première partie de ce travail, est très TOME II, 1894. 280 G. CLAUTRIAU. — LOCALISATION ET SIGNIFICATION, ETC. variable. Elle se fait sous le tegument, dans les graines relative- ment petites des Solanées a atropine et de la Cigué. Quand l’albu- men est mieux développé, c'est dans ses cellules que l’on retrouvera le principe actif, comme cela se voit chez l’Aconit ou la Staphisaigre. L’embryon, s'il est petit, enfoui dans l’albumen, pourra n'en pas contenir ou n'en renfermer que très peu; tandis qu’un embryon bien développé et surtout faisant saillie au dehors, comme celui du Strychnos, sera riche en alcaloïde. Lorsque, comme chez le Lupin, les cotylédons prennent un déve- loppement considérable, ce sont eux qui emmagasinent l'alcaloïde en mème temps que les matériaux nutritifs. Nous voyons donc que les alcaloïdes se localisent toujours de façon à assurer une protec- tion efficace. CONCLUSIONS 1° La localisation des alcaloïdes dans les graines varie considé- rablement suivant les espèces. 2° Des que l'ovule se développe, l'alcaloïde apparaît comme résultat de l’activité protoplasmique. 3° L’alcaloide ne sert pas à l'élaboration des matières protéiques de réserve de la graine. Il s'accumule dans celle-ci sans se modifier au cours de la maturation. 4° L’alcaloide de la graine n’est pas nécessaire à la germination. 5° Lorsque la graine germe, il y a une formation abondante d’alcaloide résultant de la transformation et de l'utilisation, par ia cellule vivante, des matières protéiques de réserve. Il s’'accumule priacipalement au point végétatif de la racine. 6° Le rôle essentiel des alcaloïdes dans les graines est un rôle de protection. Institut botanique, Université de Bruxelles, février 1894. RECHERCHES DE MICROCHIMIE COMPARÉE SUR LA LOCALISATION DES ALCALOIDES DANS LES SOLANACEES PAR Ph. MOLLE (:) Docteur en sciences naturelles, a Jodoigne LES ALCALOIDES DES SOLANACEES. Apres que Posselt et Reimann (*) eurent extrait la nicotine du Tabac, de nombreux chimistes, qu’un premier succès avait stimu- lés, s’efforcèrent de retirer de diverses plantes vénéneuses les prin- cipes nocifs qui leur avaient acquis depuis longtemps une triste célébrité. Dans la famille des Solanacées, la plupart de nos espèces indigenes soumises a ces investigations fournirent des corps toxiques qui parurent différer notablement les uns des autres, et la liste des bases retirées de ces végétaux ne tarda pas à s'enrichir encore d’alcaloïdes fournis par des espèces exotiques. Cependant, des recherches ultérieures, conduites d'après des méthodes, qui allèrent bientôt se perfectionnant, firent naître peu à peu des (t) Ce travail a paru dans les Mémoires couronnés et autres mémoires publiés par l’Académie royale de Belgique, t. LIII, 1895. (7) PossELT et REIMANN, Magaz. f. Pharm., XXIV, p. 138. TOME Il, 1895. 282 PH. MOLLE. — RECHERCHES DE MICROCHIMIE COMPAREE doutes sur la valeur définitive de ces prétendus alcaloides, et l’étude attentive de leurs composés a établi, en effet, que plusieurs d’entre eux n'étaient que des mélanges. Ladenburg et ses collaborateurs ont surtout contribué à ce travail d'épuration du vocabulaire toxicologique. Reprenant l'étude des principes de la Jusquiame (’), de la Stramoine (*) et de Duboisia myoporoides (°), ils découvrirent que l'hyoscyamine du commerce est un mélange de deux bases isomères de I’atropine : l’une solide, à laquelle ils conservèrent le nom d’hyoscyamine, bien qu'elle ne soit pas prédominante dans les tissus d'Hyoscyamus niger, et l'autre liquide, qu'ils appelèrent hyoscine; la daturine fut reconnue être un mélange d’atropine et d’hyoscyamine; enfin, dans les diverses expériences auxquelles ils la soumirent, la duboisine (*) s'étant comportée identiquement comme l'hyoscyamine, ils proposerent d’en faire disparaitre le nom de la nomenclature des alcaloides. D'un autre côté, Henschke (°) a établi que la scopoloine et la rotoine, signalées par Langgaard dans Scopolia japonica, sont une association d’atropine, d’hyoscyamine et d’hyoscine. Petit (°) tient pour identique a la nicotine la piturine que Ger- rard a extraite de Duboisia Hopwoodii, une Solanacée originaire de l'Australie méridionale où les indigènes en usent comme de tabac. Les réactions de la piturine indiquées par Liversidge (’) ne con- (1) LADENBURG, Ueber das Hyoscyamin. (BERICHTE DER DEUTSCH. CHEM. GESELLSCH., 1881, S. 254.) (*?) LADENBURG und MEYER, Ueber das Hyoscin. (BERICHTE DER DEUTSCH. CHEM. GESELLSCH., 1880, S. 1549.) (3) Ip., Ueber das Daturin, (BERICHTE DER DEUTSCH. CHEM. GESELLSCH., 1880, S. 380.) (4) Ip., Ueber das Duboisin. (BERICHTE DER DEUTSCH. CHEM. GESELLSCH., 1880, S. 257.) (5) HENSCHKE, Untersuch, über die Bestandtheilen der fap. Bellad. (ZEJTSCHR. F. NatTurw., Bd XL, 1887, S. 103-143.) (6) Perit, Sur l'alcaloide du Pituri. (JOURN. DE PHARM. ET DE CHIM., 4° sér., t. XXIX, p. 338.) (7) LiversipGE, Zhe Alkaloid from Piturie. (Tue cHEM. News, vol. XLIII, pp. 124 et 138.) TOME II, 1895. SUR LA LOCALISATION DES ALCALOIDES DANS LES SOLANACEES. 283 firment pas complètement l'opinion de Petit, de sorte qu'il faut con- sidérer Je corps en question comme une espéce chimique incertaine, dont l'étude approfondie est encore a faire. Chastaing, qui a résumé dans l'Encyclopédie de Frémy les prin- cipaux travaux relatifs aux bases végétales, ne l'admet pas au nombre de ces dernières, et il limite à cinq les alcaloïdes bien définis que l’on a retirés des Solanacées en quantité notable : Patro- pine, l'hyoscyamine (atropine $, atropidine), l’hyoscine, la nicotine et la solanine. Eminemment toxique et douée de fonctions alcaloidiques bien caractérisées, la solanine s’écarte cependant des bases végétales par plusieurs réactions, et il est préférable de la rapporter aux glycosides en raison de la propriété qu'elle possède de se scinder a chaud en glycose et solanidine sous l'influence des acides miné- raux dilués et meme de l'acide oxalique. D'autres alcaloïdes, notamment la choline ou bilineurine (°) et la bétaïne (’), ont été signalés dans les tissus des Solanacées, mais le plus souvent en quantité si minime qu'ils ne peuvent y avoir qu'une importance restreinte et qu'il ne sera pas facile d’ailleurs de les déceler directement dans lé suc cellulaire. Mais le groupe des Solanacées compte plus de 1,250 espèces, et les neuf dixièmes au moins restent à étudier relativement à la nature des principes qu'elles élaborent. Il ne manque pas de plantes vénéneuses parmi ces végétaux dont le plus grand nombre appartiennent à la flore tropicale, et il serait intéressant d'en extraire les principes toxiques pour les identifier avec ceux que nous possédons déjà, ou en accroître le nombre, et pour établir ensuite les liens de parenté qui rattachent les unes aux autres les molécules de ces corps appelés, semble-t-il, par l'évolution à jouer () H. Kunz, Ueber den Alkaloidgehalt des Extractums Belladonae Pharm. Germ. IT, (ARCH. DER PHARM., 1885, Bd CCXXIII, pp. 701, 709.) (?) HusEMANN und MARME, fust’s botan. JFahresbericht, 1875, n° 844. — W. SCHÜTTE, So/anaceen Alkaloide. (ARCH. DER PHARM., 1891, Bd CCXXIX, Heft 7, p. 492.) Tome II, 1895. 284 PH. MOLLE. — RECHERCHES DE MICROCHIMIE COMPAREE chez diverses espèces d’une même famille des rôles correspondants. Il est regrettable que les investigations chimiques aient subi un temps d’arrét dans cette voie sans doute féconde en découvertes, mais il faut bien reconnaître qu’elles manquaient un peu de base, car toutes les Solanacées n'ont pu acquérir, comme la Belladone et la Jusquiame, une notoriété qui les eût imposées à l’attention des savants; c'est inaperçues, parfois au milieu des solitudes, que nombre d’entre elles ont dû exercer sur leurs agresseurs une ven- geance posthume. Actuellement, c’est à la microchimie (*) qu'il appartient d’indi- quer les végétaux alcaloïdifères et de pousser en quelque sorte une première reconnaissance dans ces régions inexplorées de la chimie : il ne manquera sans doute pas ensuite de chimistes désireux de combler une lacune redoutable au point de vue criminel, et embar- rassante au point de vue des progrès de la physiologie végétale. Parmi ces Solanacées qui n'ont pas été soumises à l'analyse élé- mentaire, toutes celles que nous avons étudiées renferment des alcaloïdes, mais nous n’avons pu en examiner encore qu'un nombre fort restreint. Dans le présent travail, nous nous sommes borné à rechercher comment les alcaloïdes se répartissent entre les éléments histolo- giques d'individus assez peu nombreux, mais appartenant aux genres les plus variés, et comment ils se comportent tandis que la plante évolue de l'état embryonnaire à l’état adulte. Il s'en faut que le sujet soit absolument neuf. Maistriau (*) a localisé la nicotine dans Nicotiana macrophylla ; De Wèvre (°), l'atropine dans Atropa Belladona ; Schaarschmidt (4), () L. ERRERA, MAISTRIAU et CLAUTRIAU, Premières recherches sur la locali- sation et la signification des alcaloides, 1887, p. 19. (?) IDEu, zdzd., pp. 12 et 14. (3) DE Weévre, Localisation de l’atropine. (BULL. DES SEANCES DE LA SOC. BELGE DE MICROSC., octobre 1887.) (4) SCHAARSCHMIDT, Ueber d. mikrochem. Reaction des Solanins. (ZEYTSCHR. F. Wiss. MIKROSK., I, 1884, pp. 61 et 62.) Tome II, 1895. SUR LA LOCALISATION DES ALCALOIDES DANS LES SOLANACEES. 285 et après lui Theorin (*) et Wothschall (°), ont fourni des indications assez détaillées sur la répartition de la solanine dans Solanum tuberosum; et ce dernier a étudié en outre le produit connu en pharmacie sous le nom de Sfipites Dulcamarae ; mais ce sont là des travaux visant des végétaux isolés, tandis que nous avons en vue la microchimie comparée de la famille. Pour exposer clairement le résultat de telles recherches, il nous faudra les mettre en rapport avec l'anatomie comparée du groupe; c'est pourquoi nous ferons d’abord connaître la structure des organes d'un type : il sera facile d'y rattacher les autres, car, au point de vue anatomique comme au point de vue morphologique, la plupart des espèces de cette famille ont entre elles de profondes affinités; à mesure que l’occasion s'en présentera, nous indiquerons les particularités histologiques qui intéressent notre sujet. ANATOMIE DE SOLANUM TUBEROSUM. Tige. — Le Solanum tuberosum présente, comme on sait, des tiges typiques aériennes et des tiges souterraines le plus souvent renflées et à feuilles réduites (tubercules). Une coupe transversale de la tige aérienne pratiquée au bas d’un entre-noeud (fig. 1) a la forme d'un triangle curviligne dont deux côtés sont convexes et le troisième concave, celui-ci correspondant à la feuille qui vient de quitter la tige ; les trois côtés sont convexes vers le sommet de l'entre-nœud. Les cellules épidermiques (ep) ont des parois externes épaissies et fortement chagrinées. Elles supportent des poils de deux sortes : les uns (pa) articulés, pointus, à membranes externes épaissies, cutinisées et chagrinées, chevauchant parfois sur deux cellules; les () THEORIN, P. G. E., Nagra växtmikrokemiska Antecknigar. (OEFV. VET. AKAD., Stockholm, 1885, p. 20.) (?) WoTHSCHALL, Ueber d. mikrochem. Reaction des Solanins. (ZEITSCHR. F, wiss. MIKROSK., 1889, pp. 19-38, 182-195.) TOME II, 1895. 286 PH. MOLLE. — RECHERCHES DE MICROCHIMIE COMPAREE autres (pg) terminés par une téte ellipsoidale et dont les parois externes ne se cutinisent pas. Sous l’épiderme, on trouve le long des côtés du triangle une seule rangée de cellules parenchymateuses à parois minces, et aux som- mets, de petits massifs de mème nature formant des proéminences qui ne sont autres que les décurrences sur la tige de limbes foliaires. Sous ces éléments souvent remplis d’un suc cellulaire bleu, on rencontre une couche de collenchyme (co/) dont l'épaisseur atteint de deux à cinq rangées de cellules, puis des éléments arrondis à grand lumen (pc), que des granules d’oxalate de calcium obstruent çà et la (co) complètement; enfin un endoderme à parois radiales plissées et souvent riche en amidon (end). L’assise périphérique du corps ligneux ou péricycle se compose de deux sortes d'éléments : les uns (p) à membranes minces, fré- quemment rhizogénes; les autres (s) arrondis, a lumen plus étroit, à parois stratifiées et très peu ou point lignifiées, isolés ou le plus souvent par groupes de deux à quatre. Contre cette assise et généralement en face des éléments à parois épaissies, on rencontre des ilots libériens (/e), formés de quelques tubes criblés avec cellules annexes. Il s’en trouve entre les faisceaux ligneux; mais habituellement, ils sont plus puissants et plus nom- breux en face de ces derniers. Les faisceaux ligneux, assez peu distincts, sont au nombre de cing, dont trois plus gros vers les sommets du triangle et deux plus petits sur ses côtés convexes. Des coupes pratiquées dans une région où commence à se manifester un développement secondaire, font voir que l’anneau cambial est formé dans les faisceaux par des éléments parenchymateux compris entre le bois et les îlots libé- riens et, dans les régions extrafasciculaires, par les cellules de la moelle situées immédiatement sous le liber ou sous les éléments péricycliques. Au sein de la moelle, à deux ou trois épaisseurs de cellule du protoxylème ou du cambium extrafasciculaire, on rencontre de nouveau des îlots libériens (/), le plus souvent accompagnés vers l'intérieur d’élements à parois épaisses (s), identiques à ceux que nous avons signalés dans l’assise péricyclique. Tome II, 1895. SUR LA LOCALISATION DES ALCALOÏDES DANS LES SOLANACEES. 287 Au centre méme de la tige, les cellules médullaires sont le plus souvent détruites et l’espace lysigène ainsi formé peut s'étendre jusqu’au liber médullaire. L'étude d’une coupe tangentielle de la tige permet de constater que les cellules à oxalate de calcium de la moelle et du parenchyme cortical sont habituellement superposées en longues files inter- rompues çà et la par des cellules dépourvues de cristaux. Les éléments à parois épaisses qui accompagnent les libers sont très longs et terminés en pointes obtuses (fig. 3, s). L'observation en est trés facile sur des coupes tangentielles pratiquées sur les confins du corps ligneux. [ls constituent de petits faisceaux courant parallèlement sous l'endoderme, le long desquels grimpent quel- ques tubes criblés avec leurs cellules annexes : ce sont des sté- réides (*), que Lecomte (*) a désignées sous le nom de fibres extra- libériennes, sans vouloir rien décider relativement a leur origine, péricyclique pour les uns et libérienne pour les autres. Les cordons libériens (fig. 3) ont une course assez capricieuse, quittant parfois leur support pour se diriger vers un autre ou se divisant pour envoyer a droite et a gauche des rameaux sinueux, obliques ou horizontaux (al), qui vont s’anastomoser avec les voisins. Le liber médullaire se conduit absolument de même, et il paraît n'être associé que très faiblement avec les faisceaux ligneux. Cette disposition libérienne explique comment, dans une série de coupes transversales, on voit varier sensiblement la position relative ainsi que le nombre des ilots libériens. Lamounette (*) a constaté dans Solanum nigrum, où le liber se comporte comme nous venons de l'exposer, que le nombre des groupes libériens de la moelle varie d'un point à l’autre, et il l’ex- plique par le recloisonnement ultérieur de cellules médullaires (:) SCHWENDENER, Das mechan. Princip im anat. Bau der Monocotyten. Leipzig, 1874. (?) LECOMTE, Liber des Angiospermes. (ANN. SC. NAT., 7° Sér., t. X.) (3) LAMOUNETTE, ÆXccherches sur l'origine du liber interne. (ANN. SC. NAT., 7° sér., t. XI, p. 214.) ToME Il, 1895. 288 PH. MOLLE. — RECHERCHES DE MICROCHIMIE COMPARÉE séparant deux groupes libériens et ayant pour effet de réunir ces groupes en un seul. Les tubes criblés et leurs cellules annexes qui constituent les anastomoses proviennent, en effet, comme l'indique la figure 3, de la division de cellules parenchymateuses intermé- diaires entre les cordons libériens, mais le recloisonnement qui leur donne naissance n’affecte qu’un petit nombre de cellules situées sur une ligne allant d'un cordon a l’autre, de sorte que ceux-ci sont mis en communication, mais ne sont pas réunis. Wilhelm a signalé aussi des anastomoses libériennes à travers les rayons médullaires de la Vigne; Russow en a observé chez Quercus pedunculata et Lecomte chez les Rubus. J.-B. de Toni (‘), qui a fait l'anatomie de Nicotiana Tabacum, n’en fait pas mention chez cette plante; cependant nous en avons observé dans d'autres Solanacées, telles que Afropa Belladona, Datura Stramonium (fig. 4), Petunia violacea, etc. Entre les deux libers, la course des faisceaux ligneux peut être représentée par la figure schématique 2. Une feuille F; naît sur l'une des faces de la tige et son faisceau se réunit aux deux faisceaux voisins, à la hauteur de l'insertion du pétiole par des rameaux obliques, tandis qu’un troisième rameau médian parcourt la tige sur un espace de deux entre-nœuds pour venir se rattacher au faisceau de gauche à la hauteur de la feuille F,. Sur des coupes tangentielles faites dans le bois secondaire, on observe des rayons médullaires d’une seule couche de ceilules et celles-ci forment de longues séries à éléments extrèmes terminés en pointe. Chez d'autres Solanacées, les rayons medullaires peuvent présenter une épaisseur plus considérable; cette épaisseur ne dé- passe cependant pas quatre couches de cellules. Tant que les rameaux souterrains conservent un faible diamètre, leur structure n'est modifiée que par la réduction du xylème. Mais après un allongement tres faible, ils se renflent le plus souvent a leur extrémité pour constituer un tubercule. Chez celui-ci, les yeux (1) J.-B. pE Toni und Jutius PAOLETTI, Beitrag sur Kenntn. d. anat. Baues v. Nicot. Tabac., 1891. Tome II, 1895. SUR LA LOCALISATION DES ALCALOIDES DANS LES SOLANACEES. 28y sont comme des rameaux invaginés dont les feuilles axillaires, quoique des plus réduites, renseignent très bien sur la polarité de l'organe. D’autres feuilles, étagées sur les bords de l’enfoncement, atteignent une longueur maxima de 1-2 millimètres et portent à leur base des bourgeons excessivement réduits : le point végétatif terminal se trouve au fond de la cavité. A mesure que l’on se rapproche de l'extrémité antérieure du tubercule, les entre-nœuds se raccourcissent et, les yeux devenant de moins en moins profonds, le bourgeon extrême affleure à la surface. Une coupe transversale du tubercule (fig. 5) laisse voir une orga- nisation analogue à celle que nous venons de décrire ; seulement le parenchyme cortical et le parenchyme médullaire y sont très développés. Dans le jeune âge, on y trouve un anneau cambial complet; plus tard, on n’observe plus de cambium qu’en face des faisceaux ligneux. La disposition de la plupart de ces derniers accuse d’ailleurs nettement leur origine secondaire, mais entre les groupes ligneux il est souvent difficile de reconstituer les séries radiales primitives du parenchyme. Les groupes du xylème sont accompagnés, du côté externe et du côté interne, de faisceaux libériens qui se prolongent en s’anastomosant dans le parenchyme cortical] et jusqu’au centre de la moelle. En coupe tangentielle, le liber apparait comme un réseau com- posé de tubes criblés et de cellules annexes généralement courts, dont la plupart semblent s'être formés par recloisonnement des cellules parenchymateuses avoisinantes. Très jeune encore, l'épiderme se recloisonne pour former du liège percé de nombreuses lenticelles. Feuilles. — Le faisceau des pétioles foliaires est en forme de crois- sant et les deux libers que l'on y rencontre sont accompagnés de stéréides comme dans la tige. Racine. — La racine présente une structure normale. Le cylindre central est à cinq pôles, et ceux-ci se trouvent situés sous le péri- cycle. On ne remarque pas de différenciation entre les éléments constitutifs de ce dernier, mais auprès des tubes criblés on ren- Tome Il. | 19 TOME lI, 1895. 290 PH. MOLLE. — RECHERCHES DE MICROCHIMIE COMPAREE contre des éléments a parois fortement épaissies qui rappellent les steréides de la tige. C'est le péricycle qui se transforme plus tard en phellogène, et nous avons constaté qu'il en est de même dans Solanum nigrum et dans Atropa Belladona; mais dans Solanum Dulcamara, il pro- vient, comme dans Clusza (*), du recloisonnement des cellules corticales de la troisième couche a partir de l'assise pilifere (fig. 14, phg). Quant a l'origine des tissus, l'examen du point végétatif de l'embryon fait voir que l’assise pilifère, le périblème et le plérome y ont des initiales distinctes, tandis que la coiffe est le produit des divisions périclines du dermatogène. Appareil reproducteur. — Le calice, la corolle et l’androcée sont actinomorphes et pentamères. Leur organisation anatomique nous a paru normale. Le gynécée est composé de deux carpelles clos, concrescents en un ovaire à deux loges dans l'angle interne desquelles se trouvent insérés, sur un gros placenta saillant, un grand nombre d’ovules anatropes. Par suite du développement du parenchyme des placentas, les graines finissent par être pressées contre les parois externes de l'ovaire et les loges par s’obstruer, de sorte que l'ovaire se trans- forme en baie. La graine (fig. 6) renferme un albumen charnu et un embryon incolore, à cotylédons étroits, de longueurs quelque peu inégales, enroulé dans l’albumen. Les enveloppes séminales sont au nombre de deux. L’externe est composée d’une seule couche de cellules dont les parois se sont fortement épaissies dans leur moitié inférieure, tandis que la moitié supérieure s'est gélifiée, a l'exception de filaments placés de distance en distance. Vu de face, ce tégument apparaît comme (1) VAN TIEGHEM, Zyaité de botanique, 1° édit., 1884, p. 519. ToME II, 1895. SUR LA LOCALISATION DES ALCALOIDES DANS LES SOLANACEES, 291 RE eee un réseau de crêtes ondulées limitant des alvéoles assez peu pro- fondes. L’enveloppe interne est formé: de tissus morts, à membranes brunes, subérifiées, provenant des tissus de l'ovule, écrasés par suite du développement de l’albumen et de l'embryon. On peut facilement constater que les parois externes des cellules de l'albumen en contact avec les téguments se sont beaucoup plus épaissies que les autres et leur servent en quelque sorte d’enveloppe protectrice. : ; Construits tous d’après le plan général que nous venons d’expo- ser, les organes de la fructification des Solanacées présentent toutefois de légères variations affectant : 1° L'embryon, qui peut être à peine courbé, comme dans Nico- liana Tabacum ; 2° Le nombre des loges de l'ovaire, qui peut être porté de 2à5 par le développement de cloisons divisant les placentas; 3° Le nombre des étamines, souvent réduit à 4 par avortement dans la tribu des Salpiglossidées, comme dans la famille des Scro- phularinées, vers laquelle elle sert de transition. Ce sont ces variations qui ont servi de base à la division des Solanacées en tribus. Nous indiquons, d'après Wettstein (’), le tableau de cette répartition avec indication des espèces que nous avons étudiées, et que nous avons prises autant que possible à tous les groupes. (t) ENGLER und PRANTL, Die natürl. Pflansenfamilien, t. IN, 3° part. Tome II, 1895. ROCHIMIE COMPAREE = , PH. MOLLE. — RECHERCHES DE MIC 292 "TY VUVIUIULD VIS/A/UNAT "AB 19 ZINA 2/PnU1S sissozsrdjvS [PUL] 22207010 vIUNIag "UO, wnavgVvVT VUV11092 NT TAPIS VANIVG SAHANLV( “TTI "T Du 2271 a CU UnUD0S TT 24NSO429n7 \ "TT 20 U942Y/F SYVSAY “TT Aa ru SnuvA2SON TT "LUIXPIN 221u0dv/ vi70d026 | *"T puoppyjagy Vdo4 7 *u}180) (J) saprojpsdyd vapuvainr ‘SHHIGNLA SHOHASH *$991U292 1904) * : * SHHAISSOTOId'IVS ‘A SPOUDUJOILAT * SHAWLSAD ‘AI "SIOULAJSID *so}UdL9J -JIp sinonsuoy op sinofno} ‘sapta0J 18) Ÿ-z Juotuopnos *210199-I19p un sed juioyje,u o1nqino9 PL ‘9q1n09 JUOUWOIQIE] no J}IOIP UOÂIQUA ‘7 *sojinoo snjd ¢-1 no so[eda soynoy ‘so[ioj sourweyo S ‘soyedo soried o1jenb uo seyuooerd SO JUESIAIP 911BAO 9p SiO1ed so] ‘soso, + v Una | : ‘ £ % s SIOUUVIOS rt + * "SagunuvAISOÂTT pe ARES ONS Sie AD ROM > 2 SRHAONNV SIN ‘SHADVNVIOS "$o] UOT -ayip nod no snon3 -UOJ OUQU op ‘Sor} -I9} Sourtue}o buis so *SHANV'IOS ‘II *sodO] z B JInJY *2[0199-IU9P UN,p snjd sinofnoy quioye 9Inqino9 ve, :94qIn09 JUOWOIIEIO UOÂIQUA * ‘SIOI[NÉQJIT xnvoq -LUUB[ Ud S}Uo9e[d SO] JUESIAIP sod -O[ sop stored soy ‘sado] S-£ v o1IeAG TOME Il, 1895. SUR LA LOCALISATION DES ALCALOIDES DANS LES SOLANACEES. 293 METHODE DE LOCALISATION. Les alcaloides possèdent un certain nombre de réactifs com- muns, parmi lesquels il faut citer l’iodure de potassium iodé, l'acide phosphomolybdique, l'iodure double de potassium et de mercure, l’acide picrique, le tanin, le chlorure mercurique, le tétrachlorure de platine et le trichlorure d’or. Dans des solutions aqueuses plus ou moins diluées de sels d’al- caloides, chacun de ces réactifs donne le plus souvent des précipités assez caractéristiques avec lesquels l'œil se familiarise bientôt. Si l'on effectue les réactions sur le porte-objet du microscope, on jugera de la couleur des précipités par transparence et non par réflexion, comme quand on les examine dans les tubes à essai; on acquerra, en outre, une idée plus intime et plus nette des diverses phases du phénomène et l’on établira des points de repère auxquels onrapportera aisément les modifications provoquées par les mêmes réactifs dans le suc cellulaire. La méthode à suivre dans la recherche microchimique des aica- loïdes a été exposée par Errera, Clautriau et Maistriau. Ils font agir sur des tranches minces de tissus vivants les réactifs que nous venons de rappeler : dès qu'ils se trouvent en contact avec le suc cellulaire, ces réactifs y décclent la présence des bases végétales par les colorations et les précipitations auxquelles leur arrivée donne naissance. Mais pour agir sur le contenu de la vacuole, il faut d'abord qu'ils traversent le cytoplasme, et comme celui-ci, tant qu'il est vivant, résiste à leur diffusion, il faudra, comme l’a fait De Vries (*), soumettre les préparations à une chaleur capable de tuer les cellules si les réactifs employés ne suffisent pas à déter- miner la mort rapide des tonoplastes. Lorsque les précipités formés ont, comme ceux que détermine (1) DE VRIES, Plasmolytische Studien über die Wand der Vacuolen. (JAHRB. F. wiss. Bor., XVI, 1885, p. 575.) ToME II, 1895. 294 PH. MOLLE. — RECHERCHES DE MICROCHIMIE COMPARÉE ee EEE l'iodure de potassium iodé, une coloration qui tranche nettement sur la teinte du suc cellulaire, ils sont toujours facilement obser- vables à l'intérieur de la cellule; mais quand il n'en est pas ainsi, l'observation microscopique peut, dans les conditions ordinaires, laisser quelque doute sur la formation de ce précipité. Klercker (’) nous a fourni le moyen de faire disparaitre toute cause d’erreur en donnant une méthode pour séparer les cellules de leur membrane cellulosique. On plonge les coupes a examiner dans une solution suffisam- ment concentrée d’azotate de potassium, et quand les cellules se sont plasmolysées, on déchire les tissus au moyen d'aiguilles : les protoplastes dont l'enveloppe a été lacérée tombent dans le liquide ambiant. Dans des cellules ainsi isolées, les effets des réactifs ne sauraient plus guère paraître douteux. Toutefois, doit-on attribuer à la présence d’alcaloïdes les pré- cipitations observées dans certaines cellules lorsque l'on fait agir sur les tissus l'iodure de potassium iodé, l'acide phosphomolyb- dique, etc.? A la vérité, aucune de ces réactions prise isolément n'appartient d'une manière exclusive aux alcaloïdes; mais en est-il encore de même de la série tout entière? En d'autres termes, les réactifs dont nous avons parlé sont-ils bien, dans leur ensemble, caractéristiques d’alcaloïdes ? Dans une note relative à cette question, Errera (*) fait remarquer que les effets de la plupart de ces réactifs sur les matières pro- téiques présentent de telles analogies avec ceux qu'ils exercent sur les alcaloides, qu’il y a lieu de craindre une confusion, et il applique, afin de l'éviter, la méthode de Stas à la recherche microscopique des alcaloïdes. Quand des cellules ont donné les réactions générales des alca- (1) J.-Ar. KLERCKER, Une méthode pour isoler les protoplastes vivants. (Traduit par De Wildeman, BULL. DE LA SOC. BELGE DE MICROSC., t. XIX, 1893,p 105.) (2) L. ERRERA, Sur la distinction microchimique des alcaloides et des matières protéiques. (MEM. DE LA SOC. BELGE DE MICROSC., t. XIII, 2° fasc., 1889.) Tome II, 1895. SUR LA LOCALISATION DES ALCALOIDES DANS LES SOLANACEES. 295 loïdes et des matières protéiques, on les plonge dans « l'alcool tartrique » (1 g. ac. tart. crist. dans 20 c. c. alc. abs.) ; au bout d’un temps d'immersion qui peut varier de quinze minutes à vingt- quatre heures suivant la nature des tissus, on fait agir les mêmes réactifs sur les mêmes coupes : si les cellules en question renfer- maient un alcaloïde, il aura disparu, enlevé par l'alcool tartrique, et les réactifs indiqueront cette disparition; si, au contraire, ces réactifs agissent alors comme avant l’action du dissolvant, c'est que l'on se trouve en présence de matières protéiques. Il sera, du reste, facile de contrôler l'existence de ces dernières par des réactions qui leur sont propres et entre autres par celles de Piotrowski et de Millon. C'est cette méthode que nous avons suivie dans l'étude de quelques Solanacées dont les chimistes ne s'étaient pas occupés jusqu'ici, et elle nous a permis de déceler la présence d’alcaloides dans Nicandra physaloïdes, Physalis Alkekengi, Petunia violacea, Salpiglossis sinuata et Brunfelsia americana. Errera a déjà contrôlé les indications fournies par les procédés microchimiques en isolant l’alcaloïde qu'ils lui avaient permis de découvrir dans Narcissus Pseudo-Narcissus. Clautriau en a fait autant pour un alcaloïde que les méthodes microchimiques avaient révélé dans quelques Orchidées (’). Sans le vouloir, nous avons procédé à une vérification analogue. Ayant soumis des organes de Caltha palustris à l'action des réactifs dont nous avons parlé plus haut, nous y avons découvert et loca- lisé un alcaloïde assez abondant : or, des recherches bibliogra- phiques faites à ce sujet nous ont appris qu'une base végétale volatile comme la nicotine a été extraite de cette plante par Johanson (°;. Lorsque la nature des alcaloïdes extraits d'un végétal a été bien définie, il semblerait que le physiologiste pût demander à la (*) DE WILDEMAN, Présence et localisation d'un alcaloide dans quelques Orchidées. (BULL. DE LA SOC. BELGE DE MICROSC., t. XVIII, 1892.) (?) HUSEMANN, Die Pflanzenstoffe, 1, p. 606. TOME II, 1895. 296 PH. MOLLE. — RECHERCHES DE MICROCHIMIE COMPAREE microchimie de lui fournir des indications précises sur le siège de chacune des bases diverses qu'il renferme. Mais il ne peut en être ainsi qu’à condition que ces alcaloïdes jouissent de réactions carac- téristiques observables au microscope. Et en ce qui concerne Patropine, l’hyoscyamine et l'hyoscine, ces réactions nous ont fait complètement défaut. Le rapide parallèle que nous allons établir entre ces alcaloïdes permettra de se faire une idée de la difficulté du problème. L’atropine se présente en cristaux qui fondent vers 113°5. Son chloraurate est formé de cristaux assez confus, à aspect terne, fusibles a 135°. C'est un corps optiquement inactif. Obtenue aussi à l’état cristallisé, l'hyoscyamine fond a ro8°. Avec le chlorure d'or, elle donne un sel formé de belles lames brillantes à facettes rectangulaires et fusibles à 159°. Elle dévie à droite le plan de polarisation. L’hyoscine est amorphe, incolore, demi-fluide. Son chloraurate est formé de beaux prismes jaunes, assez larges et modérément brillants. Leur point de fusion est encore plus élevé que celui du chloraurate d’hyoscyamine. L’hyoscine dévie à gauche le plan de polarisation. Les alcaloides ne se rencontrant dans le suc cellulaire que com- binés à des acides organiques, l'état et l’aspect de ces corps a l’état libre ne peuvent guère être utilisés en microchimie. Nous espérions tirer quelque parti de la forme et de l'éclat des cristaux que l'on obtient par l’action du chlorure d'or, déjà choisi par Ladenburg et Regnauld comme réactif caractéristique ; mais à l'intérieur des cellules, nous n’avons pas observé de cristallisation après que nous l’avions fait agir, ce qui tient sans doute a la présence d’autres corps en dissolution dans le suc cellulaire. L'action de l’iodure de potassium iodé ne nous a pas fourni non plus de résultat décisif. Lorsque l’on dépose une goutte de sulfate d’atropine en disso- lution dans l'eau sur le porte-objet du microscope et qu'on y fait arriver le réactif iodé, il se forme instantanément une foule de sphérules liquides, brunes, qui, en se fusionnant, donnent nais- sance à des sphérules plus volumineuses. Au bout de quelques Tome II, 1895. SUR LA LOCALISATION DES ALCALOIDES DANS LES SOLANACEES. 297 minutes, des cristaux, le plus souvent en croix, prennent naissance ca et la, et les sphérules voisines diminuent rapidement pour disparaître enfin, laissant une aréole libre de précipité autour du cristal qui s'accroît rapidement. Si l’on remplace le sulfate d’atropine par l'hyoscyamine du com- merce, qui est, selon Ladenburg, un mélange d’hyoscyamine et d’hyoscine, la première phase du phénomène est analogue, mais les sphérules, moins fluides, sont souvent déformées et s’agrégent de différentes façons : quelques cristaux se produisent ensuite. L’hyoscine donne, avec l'iode, un précipité noir, huileux, de periodure d’hyoscine : les sphérules qui le constituent ne donnent naissance a aucun cristal. Dans le suc cellulaire, on n’observe habituellement que la pre- miere phase du phénomène. Quand l’action du réactif est assez rapide, des sphérules, parfois assez volumineuses, prennent nais- sance au sein de la vacuole et quand, au bout de quelque temps, elles disparaissent, le précipité vient se reformer contre les parois de l’utricule cytoplasmique et en quelque sorte s’y incruster. L'acide phosphomolybdique, Viodure double de potassium et de mercure et le chlorure d'or agissent sensiblement de même sur chacun de ces trois alcaloïdes. Le premier de ces réactifs donne un précipité jaunâtre que l'ammoniaque dissout en le colorant en bleu, les deux autres pro- duisent des précipitations grisâtres plus ou moins foncées. Les réactions de Vitali et d’Arnold ne sont pas plus caracté- ristiques que les précédentes : elles conviennent aux trois alca- loïdes. : Entre ces corps, la ressemblance est poussée plus loin. Schmidt ('), en maintenant l’hyoscyamine a une température un peu plus élevée que le point de fusion de l’atropine (115°-120°), l’a transformée en cette dernière base. Will et Schering ont réalisé la mème métamorphose. (*) SCHMIDT, Ber. d. Chem., 5, S. 1888, VIII, 1717. TOME II, 1895. 298 PH. MOLLE. — RECHERCHES DE MICROCHIMIE COMPAREE Ladenburg a démontré que l'une et l'autre se dédoublent en tropine et acide tropique, tandis que l’hyoscine, dans les mémes conditions, fournit de l'isotropine et de l'acide tropique. Toutes trois exercent sur la pupille et sur les fibres musculaires la méme action physiologique. Dans les végétaux où l'on a signalé l’existence simultanée de deux ou trois de ces bases, nous ne nous sommes occupé que de déterminer par les indications de l’iode, de l’acide phosphomo- lybdique, de l'iodure double de potassium et de mercure, les éléments ou se forment les précipités attribuables à l’un ou a l’autre des trois alcaloides mydriatiques, sans pouvoir fixer la part qui revient à chacun d'eux dans la production des phénomènes observés. En étudiant Atropa Belladona, De Wevre (*) a admis que ce végétal ne renfermait que de l'atropine, ce qui n’est pas conforme aux conclusions de Ladenburg et de Schütte relatives à ce point. Les réactifs employés n'étant pas caractéristiques de l’atropine, ses localisations ne doivent être envisagées que comme localisations d’alcaloides mydriatiques. Un seul alcaloïde a été signalé dans les diverses espèces du genre Nicotiana : c'est la nicotine. Quand on la traite en solution acétique par l'iodure de potas- sium iodé, il y a d’abord production de sphérules liquides à reflet bleuâtre; elles se décolorent très vite sans donner naissance à aucun cristal. L'iodure double de mercure et de potassium détermine, même dans des solutions très diluées, un précipité gris jaunâtre granu- leux. Des sphérules d'un beau jaune prennent naissance dans ces mémes solutions, sous l'influence de l'acide picrique, tandis que le chlorure d'or provoque un précipité abondant de sphérules jau- nâtres assez peu fluides qui sagglutinent de différentes façons. L’acide phosphomolybiique précipite aussi les solutions de nico- (*) DE WÈvRE, Localisation de atropine. (BULL. DES SEANCES DE LA SOC. BELGE DE MICROSC., octobre 1887.) Tome II, 1895. SUR LA LOCALISATION DES ALCALOIDES DANS LES SOLANACÉES. 299 ee Q eee tine en jaune : le précipité ne se dissout pas en bleu dans l’ammo- niaque. A froid, l'acide sulfurique colore la nicotine en rouge vineux, mais cette coloration est assez difficilement observable quand les solutions sont très diluées. A chaud, l'acide chlorhydrique la colore en rose pâle: cette teinte se change en une belle coloration violette par addition d'acide azotique. La première phase de cette réaction n’est pas très prononcée, et nous n'avons même pas toujours pu l’observer; mais la seconde est très nette. Elle permettrait de déceler Ja présence de la nicotine dans certains tissus riches en substances protéiques, comme l'albumen et l'embryon, où il est très difficile de suivre l'action des réactifs précipitants. Si, dans ces tissus, l’action de l'acide chlorhydrique peut encore paraître douteuse, puisqu'à chaud il colore en violet certaines substances albuminoïdes, l’action ultérieure de l'acide azotique est décisive, car elle aurait pour effet de colorer ces dernières en jaune. Parmi les réactifs de la nicotine et des alcaloïdes mydriatiques, les tanins méritent de nous occuper un instant d'une manière spéciale. Ils produisent dans les solutions neutres de ces bases un précipité blanchatre qui se redissout par l'addition d'une faible quantité d'acide acétique. La solution précipite de nouveau si on la neutralise, mais elle s’éclaircit dès qu'elle acquiert une réaction franchement alcaline. Il n'y a donc pas lieu de s'étonner si le suc cellulaire acide de certains éléments donne à la fois les réactions des alcaloïdes et des tanins : c'est ce qui arrive fréquemment dans les cellules épider- miques. Une solution alcaline très diluée provoque dans ces éléments une précipitation de sphérules incolores analogues à celles que Loewe et Bokorny (*) ont obtenues au moyen de solutions de caféine et de carbonate d’ammonium, notamment dans les cellules épidermiques d'Echeveria. (7) TH. Boxorny, Ueber Aggregation. (JAHRB. F. wiss. Bor., t. XX, 1880.) TOME II, 1895. 300 PH. MOLLE. — RECHERCHES DE MICROCHIMIE COMPAREE A l’état naturel même, il n'est pas rare de rencontrer dans les mêmes cellules des sphérules brillantes et parfois assez volumi- neuses, qui donnent les réactions des tanins et des alcaloïdes et condensent les matières colorantes que le suc cellulaire tient parfois en dissolution. Ces sphérules ne se présentent pas dans une cellule isolée, mais dans toutes ou presque toutes les cellules avoisinantes, et il faut sans doute les attribuer aux modifications que subit le liquide de la vacuole, par suite des réactions chimiques dont la cellule est le siège. Si l’on fait agir lentement sur ces cellules l’iodure de potassium iodé, on voit encore se former dans le suc cellulaire des spherules incolores qui brunissent ensuite sous l'influence de l'iode (fig. 7). Il est assez vraisemblable que le cytoplasme tué lentement par le réactif laisse écouler dans le suc cellulaire du phosphate alcalin qui, en le neutralisant, produit un précipité de tannate d’alca- loïde, précipité que l’iode ne colore que plus tard. L'action rapide de l’iode donne immédiatement un précipité brun. Bien que la solanine ne soit pas un alcaloïde proprement dit, nous l'avons comprise dans le cadre de nos recherches, à cause de ses fonctions alcaloïdiques et de la facilité avec laquelle elle donne naissance, par voie de dédoublement, à la solanidine, alcaloïde que Jorissen (*) a signalé en mélange avec elle dans les jeunes pousses de Solanum tuberosum. En solution dans l’eau additionnée d’une goutte d'acide acétique, la solanine est précipitée en jaune pâle par l’acide phosphomolyb- dique et colorée par l'iodure de potassium iode en rouge brun ou en jaune rougeâtre, d’après le degré de concentration du liquide. | Ni les tanins, ni l'acide picrique, ni le chlorure d'or, ni l'iodure double de mercure et de potassium ne précipitent les solutions’ pures; mais dans des solutions de tannate de solanine, nous avons (1) JorissEN, Les phénomènes chimiques de la germination. (MEM. COUR. DE L’ACAD. ROY. DE BELGIQUE, t. XXXVIII.) Tome II, 1895. SUR LA LOCALISATION DES ALCALOIDES DANS LES SOLANACEES. 301 obtenu avec l’iodure de potassium iodé un précipité brun jaunatre ; avec l’acide picrique, un précipité jaune, et avec le chlorure d'or, un précipité jaune pâle. Le réactif de Mandelin (solution a */,.. de vanadate d’ammo- nium dans l’acide sulfurique) colore la solanine en jaune-orange d'abord, en rouge ensuite et enfin en violet. Comme l’a observé Wothschall (*), la substitution de l’acide sulfurique trihydraté a l'acide sulfurique concentré ne nuit pas à la sensibilité du réactif, et sous cette forme, que nous avons adoptée, il acquiert en micro- chimie une valeur beaucoup plus grande. Une solution de séléniate de sodium dans l'acide sulfurique dilué (réactif de Brandt), chauffée avec de la solanine, prend une colo- ration rouge-framboise qui pâlit bientôt pour prendre une teinte brune. Enfin, l’acide sulfurique colore la solanine en orangé, puis en rouge et ensuite en violet. Concentré, ce dernier a été employé par Theorin (oc. cit.) pour localiser la solanine dans Solanum tuberosum ; et légèrement addi- tionné d’eau, il a servi à Schaarschmidt pour étudier microchi- miquement la répartition de ce corps dans Solanum tuberosum, Solanum nigrum, Solanum Dulcamara, Capsicum annuum, Lyco- persicum esculentum et Mandragora officinalis. En se bornant aux indications d'un seul réactif, dont l’action sur la solanine est d’ailleurs loin d'être caractéristique, l’un et l'autre se sont maintes fois trompés. Wothschall, qui a fait une étude détaillée des réactifs de la solanine, considère les trois réactifs que nous avons mentionnés en dernier lieu comme seuls applicables à la microchimie et comme pouvant fournir des indications probantes sur la localisation de ce glycoside. © Cependant, quand on les fait agir sur des coupes de graines, ils donnent naissance a une production plus ou moins abondante de (1) WoTHSCHALL, Ueber d. mikrochemischen Reactionen des Solanins. (ZEITSCHR. FUR WISS. MIKROSKOPIE, 1889, pp. 19-38, 182-195 ) TOME Il, 1895. 302 PH. MOLLE. — RECHERCHES DE MICROCHIMIE COMPAREE furfurol, et la substitution de l'acide sulfurique trihydraté à l'acide sulfurique concentré dans le réactif de Mandelin ne suffit pas à supprimer cette cause d’erreur, bien qu’elle l’atténue nota- blement. En extrayant la solanine de ces coupes au moyen d'alcool amy- lique à chaud ou d'alcool ordinaire additionné d’acide tartrique, nous avons pu déterminer les colorations dues au furfurol. Mais les trois réactifs que Wothschall considère comme caractéristiques de la solanine réagissent de même avec la solanidine, et il reste à déterminer auquel de ces deux corps sont dues les colorations observées. Or, la solanidine donne avec l’iode un précipité jaune brun; avec l'acide picrique, un précipité jaune tres soluble dans l'acide acétique; avec le chlorure d'or, de même qu'avec l'iodure double de potassium et de mercure, un précipité jaune pale; avec le tanin, un précipité blanc peu soluble dans l'acide acétique. Dans les cellules qui ne renferment pas de tanin, l'action de . ces derniers réactifs indiquera si l'on se trouve en présence du glycoside ou de l'alcaloïde qui en dérive. L'existence de solanidine dans les pousses étiolées de pommes de terre faisait prévoir la possibilité de la présence simultanée de ces deux corps dans le suc cellulaire. Pour élucider cette question, nous avons mélangé des solutions de solanine et de solanidine. Dans ce liquide, l’iodure de potas- sium iodé a produit un précipité rouge brun, à apparence de gelée, assez difficile à distinguer d’un liquide sur le porte-objet, tellement les granulations en sont fines, mais présentant le plus souvent des plissements qui rendent le doute impossible (fig. 8, a). Lorsque la solanine est fort prédominante, le précipité, facile à observer à l’arrivée du réactif, ne se distingue plus que tres diffici- lement ensuite du liquide brun produit par l’action de l'iode sur la solanine. L’iode est, d’ailleurs, le seul réactif qui ne se soit pas comporté avec ce mélange comme avec la solanidine pure, mais son action est topique, et en étudiant les pousses étiolées de pomme de terre, nous avons vu se produire à l'intérieur des cellules les différentes Tome II, 1895. SUR LA LOCALISATION DES ALCALOIDES DANS LES SOLANACEES. 303 phases de ce phénomène, d’autant mieux marquées que le réactif diffuse lentement au travers du cytoplasme. Il se produit d’abord contre les parois de ce dernier des granules jaunâtres, parfois assez volumineux, irréguliers, mais a angles arrondis (fig. 8, b) : c'est le précipité qui naît en différents points. Bientot ces îlots se réunissent vers l’intérieur de la vacuole; puis, prenant la teinte brunatre du milieu ambiant, ils semblent s’y redissoudre (c). Cependant, plus tard, par suite des modifications de forme que prend la masse précipitée et devenue gélatineuse, on parvient à la distinguer de nouveau avec facilité (4). Il est du reste possible d'enlever au suc cellulaire la solanidine qu'il renferme, en laissant séjourner quelques-unes des coupes à étudier dans le chloroforme : celui-ci n’enléve pas la solanine de ses solutions alcalines ou acides, tandis qu'il en extrait la solani- dine. Dans des coupes ainsi traitées, la réaction de Mandelin diminue notablement d'intensité et l'iodure de potassium iodé ne donne plus qu'une coloration jaune, comme celle que le réactif produit dans une solution diluée de solanine. En résumé, pour localiser la solanine, les trois réactifs dont s’est servi Wothschall ne sont pas suffisants, et il est nécessaire d'en contrôler les indications. D'autre part, ces réactifs ont encore le grave défaut de ne localiser qu'avec peu de précision, car en pré- sence de solutions diluées, les colorations qu'ils provoquent ne se produisent pas vite, tandis que l’utricule cytoplasmique, que leur contact tue immédiatement, laisse écouler le suc cellulaire avec la solanine qui s'y trouve dissoute. C’est ainsi que Wothschall a signalé la présence de solanine dans les membranes cellulaires où il n’en existe pas dans les tissus vivants. Avec les autres réactifs, au contraire, les éléments à glycoside demeurés intacts se dessinent nettement dans les coupes étudiées, et il serait impossible, sans y avoir recours, de rien décider relati- vement aux questions de détail, comme la présence de glycoside dans un suc cellulaire coloré et son siège précis dans la cellule, questions qui ont cependant leur importance au point de vue physiologique. Tome II, 1895. 304 PH. MOLLE. — RECHERCHES DE MICROCHIMIE COMPAREE LOCALISATION DES ALCALOIDES. 1. Nicandra physaloïdes. A. Historique. — Nous. n'avons trouvé dans la littérature aucune communication relative à l’alcaloide contenu dans cette plante. B. ACTION DES RÉACTIFS. — On obtient dans les tissus, par l’iodure de potassium iodé, un précipité brun à reflet bleuâtre; par le chlorure d'or, un précipité jaune sale; par l'acide picrique, un précipité jaune. Ni l'acide phosphomolybdique, ni l’iodure double de mercure et de potassium, ni le tanin ne donnent de précipité bien obser- vable dans les cellules. C. LocaLisATION. — Tige. — Les cellules initiales du cône végé- tatif et celles qui en sont récemment issues, y compris les plus jeunes ébauches foliaires, ne renferment que peu ou point d’alca- loïde. A partir de la, si l’on en juge par l'abondance des précipité, les divers éléments nor encore différenciés de la tige en acquièrent des quantités de plus en plus grandes jusque vers l'insertion des feuilles qui recouvrent comme un capuchon le point végétatif. A mesure que les tissus se différencient, l'alcaloïde se retire de l'anneau procambial pour se localiser dans la moelle et l'écorce, mais surtout pres des libers. Enfin, il abandonne a peu prés com- plètement tous les autres tissus pour se coniiner dans les stéréides, ou il se maintient en grande abondance sur toute la longueur de la tige. Vers le bas de celle-ci, il y en a sensiblement plus dans les stéréides qui accompagnent le liber interne. Feuilles. — Comme nous l'avons déjà dit, les plus jeunes ébauches foliaires ne renferment que très peu d’alcaloide. A mesure qu'elles se développent, elles en accumulent de plus en plus dans Tome II, 1895. SUR LA LOCALISATION DES ALCALOIDES DANS LES SOLANACEES. 305 tous leurs éléments; mais avec la différenciation des tissus coincide l'émigration de la base vers les épidermes .et vers les libers où elle saccumule dans les stéréides extra-libériennes. La feuille n’a pas encore atteint son complet développement, que ces derniers élé- ments sont les seuls où les réactifs décèlent encore la présence d’un alcaloide. Poils. — Les poils articulés encore jeunes donnent dans le voi- sinage des parois un précipité d’alcaloide; dans la suite, la base en disparait tout a fait. Racine. — Les cellules de la coiffe, de même que celles de l’assise pilifere, sur une étendue de quelques centimetres a partir du sommet, et les cellules du péribleme et de l'écorce jeune sont très riches en alcaloide. Nous n’en avons pas observé dans les parties adultes protégées seulement par la couche épidermoïdale, que la destruction de lassise pilifere avait mise a nu. Mais avec le recloisonnement de ces cellules pour donner naissance a du liege protecteur coincide tou- jours la réapparition de l’alcaloïde. Il occupe habituellement les deux éléments les plus internes des séries radiales. Chez les racines de Nicandra physaloïdes, la production du liege est d’ailleurs assez limitée et fort irrégulière, et il faut sans doute la considérer comme un moyen de protection contre l'attaque des parasites. Organes de la fructificalion. — Dans le calice et la corolle, l’alca- loïde se comporte comme dans les feuilles végétatives, c'est-à-dire qu'après avoir rempli tous les tissus, il se retire près des faisceaux et dans les épidermes, puis disparaît enfin à peu près complète- ment. Le même fait se produit chez les étamines où l’alcaloïde séjourne encore en dernier lieu autour du faisceau qui parcourt le filet et le connectif. Dans le fruit, le contenu alcaloïdique diminue avec la matura- TOME II. 20 Tome II, 1895. 306 PH. MOLLE. — RECHERCHES DE MICROCHIMIE COMPAREE tion. Il s'y conserve le plus longtemps dans les épidermes du peri- carpe et dans les ovules. L’assise extérieure des ovules en renferme d'abord une quantité notable, de même que les cellules les plus proches du sac embryon- naire où l’albumen est en voie de formation. Mais l’alcaloïde dimi- nue peu a peu avec les modifications que subissent les parois des cellules externes et l’écrasement des cellules sous-jacentes. La graine n’en contient plus. Bien que les parties les plus jeunes du point végétatif brunissent fortement par l’iode, de mème que les têtes des poils sur les organes adultes, on ne peut en attribuer la cause à un alcaloïde : cela résulte à l'évidence des réactions obtenues après une longue immersion dans l'alcool tartrique. Il résulte de la comparaison de nombreux points végétatifs que la topographie de l'alcaloïde au point végétatif varie et semble dépendre de l’activité de la végétation. 2. Atropa Belladona. A. Historique. — En 1831, Mein a extrait de la Belladone un alcaloide auquel il a donné le nom d'atropine (*). En 1880, Laden- burg (*) y signala en outre l’hyoscyamine. Une note du Laboratoire chimico-pharmaceutique de Berlin affirme que la racine de Belladone ne contient que de l'hyos- cyamine. Schmidt et Will ayant observé la facile métamorphose de l'hyos- cyamine en atropine, Schütte (*) s'assura que les procédés employés jusque-là pour extraire l’'atropine pouvaient avoir opéré la méta- morphose. Il résulte, en effet, de ses recherches, faites avec les précautions voulues pour éviter toute métamorphose, que dans les racines de (1) Husemann und HILGER, Die Pflanzenstoffe. Atropin, p. 1182. (?) LADENBURG, Die Alkaloide aus Belladona, Datura, Hyoscyamus und Duboisia. (BER. DER DEUT. CHEM. GES., 1880, p. 909.) (3) SCHÜTTE, oc. cit. Tome II, 1895. SUR LA LOCALISATION DES ALCALOÏDES DANS LES SOLANACEES. 307 plantes de un a deux ans, il ne préexiste que de l’hyoscyamine, tandis que dans les racines de Belladone plus âgées, il se trouve un peu d'atropine, à côté d'une quantité plus considérable d’hyoscya- mine. Dans le jeune fruit, il n'a trouvé que de l'hyoscyamine, et dans les fruits murs, seulement de l’atropine chez les plantes sauvages, et un mélange des deux bases chez les plantes cultivées, de sorte que la transformation que l'on peut opérer artificiellement s’accom- plit aussi sous l'influence de causes naturelles. D’après Kratter (*), l'action nocive des feuilles de Belladone est beaucoup plus élevée que ne le serait la dose d’alcaloïde que l’ana- lyse y indique, et l'action qu'elles produisent sur l'organisme est très différente de celle des alcaloides mydriatiques isolés. D'ou il semble résulter que la plante doit encore contenir d’autres corps vénéneux. En effet, H. Kunz (*) en a extrait, en 1886, une petite quantité de bilineurine ou choline. En même temps, il en a retiré la substance fluorescente que les recherches toxicologiques avaient toujours fait observer a côté de l’atropine dans les cas d’empoisonnement par les organes mêmes de la plante. Cette substance, qu’il a désignée sous le nom d'acide chrysatropique, avait déja fait l’objet des recherches de Paschkis (*), qui la considère comme identique à la scopolétine signalée par Eykmann dans Scopolia japonica. Les réactions que Paschkis attribue à l'acide chrysatropique indiquent qu’il est assez analogue aux tanins : en solution aqueuse, il est précipité en vert par le chlorure ferrique, et en bleu par le chlorure d’or; de plus, dans les cellules qui nous ont donné ces reactions, nous avons obtenu une coloration brun rouge par le bichromate de potassium, et un précipité blanc par le carbonate d’ammonium. Quelque lien de parenté unit-ii cette substance fluorescente aux (1) KRATTER, Archives de l'anthropologie criminelle (cité par FLORENCE, /oc. cit., P- 98). (7) Kunz, Ueber einige neue Bestundtheile der Atropa Belladona. (ARCH. PHARM., (3), 23, 721-735.) (3) Pascukis, Refer. in Fust’s botan. Fahresbericht, 1886, p. 229. TOME II, 1895. 308 PH. MOLLE. — RECHERCHES DE MICROCHIMIE COMPAREE alcaloïdes mydriatiques, comme semble l'indiquer la dénomination de Kunz? Un fait à noter, c’est qu'on la rencontre en même temps qu’eux dans Afropa Belladona, Hyoscyamus niger et Scopolia japo- nica, comme l'ont constaté Kunz et Paschkis. Il est fort probable qu’elle ne manque pas non plus dans Datura Stramonium, quoique Dragendorff ne l'y ait pas observée, car il existe a côté de l'alca- loide, dans l’épiderme du fruit et les teguments de la graine, une substance qui se comporte comme elle avec les réactifs dont nous avons parle plus haut. Les autres Solanacées renferment d'ailleurs aussi, mais en quan- tités trés variables, des substances analogues, qui se localisent a peu prés comme elles et auxquelles nous donnerons provisoirement le nom de tanins, en l’absence de dénominations plus précises. Relativement à la quantité totale des alcaloïdes contenus dans la | plante, on se trouve en présence des résultats les plus contradic- toires, ce qui porte à penser que des causes multiples tendent continuellement à en modifier la teneur. Lefort (*), qui a recherché comment l’alcaloide varie avec les diverses périodes de la végétation, conclut que c’est entre la floraison et la maturité du fruit que le rendement en alcaloïde de la Bella- done est le plus élevé. Günther (°) a trouvé que les fruits non murs renferment 0.955 °/o d'alcaloïde, et les fruits mûrs seulement 0.805 °/>. Des analyses de Schütte (lec. cit.), il résulte que le contenu alca- loidique des racines d’Atropa Belladona s'élève du printemps à l'été, diminue en automne pour s’abaisser encore pendant l'hiver, la production de l’alcaloïde est donc intimement liée à l'activité de la végétation. Impossible de tirer de ces recherches des conclusions plus précises au point de vue de la physiologie. En soumettant à l'analyse toutes les racines de plantes ayant atteint un même âge, on opère en réalité sur des organes qui se trouvent dans des phases de végétation fort différentes et l'on arrive a des moyennes qui (1) LEFORT, Journal de pharmacie, XV, 1872, p. 417. (?) GinTHER, Véertelj. Pharm., XIV, p. 598. Tome II, 1895. SUR LA LOCALISATION DES ALCALOIDES DANS LES SOLANACEES. 309 n’apprennent rien ou fort peu de chose relativement à l'évolution de l’alcaloide dans les tissus de ces mêmes organes. En ce qui concerne la différence qui existerait, d’après Gerrard (°), dans la teneur en alcaloïde des Belladones sauvages et des Bella- dones cultivées, n’y aurait-il pas lieu de ne pas s’en tenir à des variations aussi vagues et de rechercher l'influence de certains agents bien déterminés, tels que le milieu nutritif, la lumière, la chaleur, etc. ? B. ACTION DES REACTIFS. — L’iodure de potassium iodé produit dans les cellules à alcaloide d’Atropa Belladona un précipité de spherules brunes a reflet bleuâtre qui sont bientôt remplacées par des incrustations amorphes de l’utricule protoplasmique. Si Pon fait agir le réactif sur des coupes non lavées, on observe de nombreux cristaux dans la préparation et surtout dans les stéréides entamées par le rasoir. Nous n'en avons pas vu dans les éléments encore en vie à l’arrivée du réactif, Dans certaines cellules, et notamment dans les cellules épider- miques, le précipité revét un autre aspect : il prend la forme de Sphérules qui naissent incolores, sont agitées d’un vif mouvement brownien et se fusionnent en sphères plus volumineuses. Il est probable que ces éléments renferment, en même temps qu'un alca- loïde, une certaine quantité d’acide chrysatropique, car ils four- nissent aussi les réactions des tanins. L’acide phosphomolybdique produit dans les cellules à alcaloïde de la Belladone un précipité jaune, facilement observable, que l’'ammoniaque redissout. Le chlorure d'or y produit un Areca jaune beaucoup plus pale. Dans les cellules qui renferment de l'acide chrysatropique, ce pré- cipité, rapidement réduit, communique au suc cellulaire une colo- ration bleue. (*) A.-W. GERRARD, On the alkaloidal value of cultivated and wild Belladona plants. (YEARBOOK OF PHARMACY, 1881, p. 482.) TOME II, 1895. 310 PH. MOLLE. — RECHERCHES DE MICROCHIMIE COMPAREE C. LocaLisATION. — Tige. — Les cellules les plus jeunes du point végétatif ne renferment que peu d’alcaloide. Elles en acquièrent de plus en plus à mesure que de nouvelles formations les éloignent des cellules initiales. Le maximum de concentration de l’alcaloïde est atteint à une faible distance du sommet. Quand les tissus commencent à se différencier, la base s’accumule vers l’épiderme et vers les libers, sans pourtant abandonner com- plètement l'écorce ni la moelle. Les vaisseaux, les tubes criblés et les cellules annexes sont, à cet endroit, les seuls éléments qui n’en renferment point. Dans la région plus éloignée du point végétatif, où la tige a reçu un développement secondaire, l’aicaloïde a aban- donné tout à fait le parenchyme médullaire et le parenchyme cor- tical pour se confiner dans le parenchyme voisin des tubes criblés (notamment dans les stéréides) et dans la partie des rayons médul- laires contigué aux libers. Lorsque le liege a pris naissance, les deux ou trois cellules les plus internes des rangées radiales qui le constituent sont riches en alcaloïde. Feuilles. — L’aicaloide, d’abord absent des ébauches foliaires, en remplit ensuite les tissus. Chez les feuilles adultes, on le retrouve encore dans la plupart des éléments vivants, mais d’une manière prépondérante dans les cellules épidermiques (surtout dans celles qui recouvrent les nervures), auprès des faisceaux (principalement dans les stéréides et les cellules parenchymateuses allongées voi- sines des cordons libériens) et dans les plans médullaires. Poils. — Les poils jeunes donnent, pres des parois transverses, un abondant précipité. Cela tient à ce que le réactif pénètre par ces cloisons, ne pouvant que très difficilement franchir les mem- branes externes cutinisées. Les têtes des poils glanduleux ne renferment jamais d'alcaloïde. Racine. — L’alcaloïde est abondant dans la coiffe et le périblème. Il se maintient chez l'organe adulte dans toute l'écorce, y compris l’'endoderme. Le cylindre central en est complètement dépourvu, Tome II, 1895. SUR LA LOCALISATION DES ALCALOIDES DANS LES SOLANACEES. 311 tant que le cambium n’a pas fonctionné; plus tard, on en observe, mais en quantité minime, dans le parenchyme ligneux secondaire (fig. 9). Ce parenchyme est prédominant dans les racines d’un certain âge. On n'y rencontre qu’assez peu de vaisseaux lignifiés, et ils constituent souvent des faisceaux isolés au milieu de la masse parenchymateuse. Des cordons libériens évidemment issus du recloisonnement des cellules avoisinantes accompagnent le xylème secondaire. Weiss (*) a déjà signalé cette curieuse organisation dans les racines charnues de Scopolia atropoides et de Datura Stramonium, et il en désigne le liber anormal sous le nom de « xylemständiges Phloem ». Auprès de ce liber intraxylaire, nous n’avons pas observé que Valcaloide fût plus abondant que dans le reste du parenchyme. Organes de la fructification. — Dans le calice et la corolle, l’alca- loide se répartit comme dans les feuilles; il diminue rapidement dans la corolle à l'époque où elle va se faner. Le faisceau qui traverse le filet des étamines est du type concen- trique amphicribral; le liber y est constitué par des tubes criblés ressemblant quelque peu a des hyphes et par des cellules paren- chymateuses allongées : aucun de ces éléments ne renferme d’alca- loïde. On en trouve, au contraire, dans les cellules allongées qui constituent au faisceau une sorte de gaine, de même que dans l’épiderme de l’anthère et dans l'assise nourricière du pollen. Dans le pistil, on rencontre l'alcaloïde : autour des deux fais- ceaux du style; dans tous les éléments du carpelle, à l'exception des quatre faisceaux (autour desquels il est plus abondant que dans les régions voisines); dans les jeunes ovules et particulièrement dans leur assise superficielle. (») Weiss, Marksténdiges Gefassbundelsystem und Blattspuren. (BOTANISCHE CENTRALBLATT, 1883, p. 410.) -TOME II, 1895. 312 PH, MOLLE. — RECHERCHES DE MICROCHIMIE COMPAREE La graine étant encore jeune, les cellules de cette assise, qui ont déjà épaissi leurs demi-parois internes, en contiennent encore notablement, de méme que les cellules sous-jacentes et surtout celles qui sont contigués à l’albumen en voie de formation. L’alcaloide diminue dans la graine avec la maturation (°); cependant la graine mûre en a conservé dans les tissus écrasés qui constituent son tegument interne. A l'époque où l’albumen achève d’accumuler les réserves de lovule, la baie bleuit, par suite de l'apparition d’une matière colo- rante dans le suc cellulaire, et l’alcaloide commence à y diminuer. Quand les tissus du péricarpe se sont ramollis, ils n’en contiennent plus. C'est sans doute à une période antérieure que Günther a dosé l'alcaloïde, car il ne note qu’une faible diminution. Ni l’albumen ni l'embryon ne renferment d’alcaloïde, mais ils tiennent en réserve beaucoup de matières protéiques et de sucre. La liqueur de Fehling, la réaction de Trommer et le réactif de Molish indiquent une grande abondance de matières sucrées autour du cylindre central du membre hypocotylé de l'embryon, de même que dans ses deux points végétatifs et près des ébauches de faisceau des cotylédons. Les matières albuminoides de l’ovule et de l’albumen donnent les réactions de Millon et de Piotrowski. En chauffant des coupes de la graine avec l'acide chlorhydrique, l'albumen seul prend une belle coloration violette. De Wèvre (’) n’a obtenu cette réaction avec aucune substance albuminoïde; en présence du sucre, l'acide chlorhydrique colore ces coupes en rose. D'après Wiesner (*), cette réaction devrait être attribuée aux zymases. (1) Cf. CLAUTRIAU, Localisation et signification des alcaloïdes dans quelques graines. (ANN. DE LA SOC. BELGE DE MICROSC, (Mémoires), t. XVIII, 18 :4, P- 37.) (?) De WÈèvrE, Recherches sur la technique microchimique des albuminoides. (BULL. DE LA SOC. BELGE DE MICROSC., t. XX, 1804, p. 108.) (3) WIEsNER, Sitzungsber. Ak. Wiss. Wien, Bd XCII, I, 1885, p. 41. TOME II, 1895. SUR LA LOCALISATION DES ALCALOIDES DANS LES SOLANACEES, 313 3. Scopolia japonica. A. Historique. — En 1879, Martins (°) signalait dans cette plante de la solanine. Selon Langgaard (*), Scopolia japonica contient dans ses racines deux alcaloïdes mydriatiques : la scopoloïne et la rotoine, mais il n’en fait pas connaître les propriétés distinctives. Eykman (*) déduit de ses recherches que Scopolia japonica renferme un alcaloïde, la scopoloine, et un glycoside (scopoline) décomposable, par les acides dilués à chaud, en sucre et scopoléline. D'après lui, la rotoïne de Langgaard et la solanine de Martins sont de la scopolétine. En 1887, Henschke (*) trouva que la racine de Scopolia japonica ne renferme pas d’alcaloïde propre, mais un mélange des trois alcaloïdes mydriatiques isomères bien connus; la rotoïne est un mélange de sels de sodium et d'acides riches en carbone, et la scopolétine d’Eykman n’est autre chose que l'acide chrysatropique signalé aussi par Kunz dans Atropa (°). Schiitte (°) a trouvé dans les extraits de Scopolia de l'hyoscyamine en quantité prépondérante et un peu d’atropine. B. ACTION DES RÉACTIFS. — Nous avons obtenu avec Scopolia japonica les mêmes réactions qu'avec A {ropa. Tige. — Les points végétatifs ne paraissent pas renfermer autant d’alcaloïde que ceux de la tige d’Atropa Belladona. Au sommet de racines charnues, nous en avons observé dont toutes les cellules renfermaient uniformément l’alcaloïde; mais ces points végétatifs étaient à l’état de repos. () Martins, Arch. der Pharm., Bd CCXIIL, S. 336, 1870. (2) LANGGAARD, The American Fournal of Pharm., vol. LII, 1880, p. 256. (3) EyKMAN, Adhand/. des Tokio Daigaku, n° 10, S, 17-25 (analysé dans Just’s JAHRESB., 1883). (4) HENSCHKE, /oc. cit. (5) Kunz, Joc, cit. (6) SCHUTTE, oc. cit. ToME II, 1895. 314 PH. MOLLE. — RECHERCHES DE MICROCHIMIE COMPAREE Sur des coupes pratiquées dans la partie adulte de la tige, on reconnaît que l’alcaloïde se localise auprès des libers, notamment. dans les éléments parenchymateux allongés au milieu desquels courent les cordons libériens, et dans les stéréides. Enfin on ne l'observe plus que dans ces dernières lorsque l’on étudie des régions plus âgées. Avec l'iodure de potassium iodé, nous y avons obtenu des cristaux analogues a ceux que fournissent les sels d’atropine. Feuilles. — L'alcaloïde est très abondant sur les deux faces des faisceaux et il s'y localise comme auprès des faisceaux de la tige. Nous n'en avons pas observé dans les autres éléments du méso- phylle. Les cellules épidermiques sont assez riches en alcaloïde. Poils. — L’alcaloide s'y comporte comme chez Atropa. Racine. — Au point végétatif, la localisation est la même chez tous les types étudiés. Dans une racine qui n’a pas encore de tissus secondaires, l’alca- loïde se trouve limité à l'écorce. Chez une racine dont le cambium et le phellogéne sont en activité, l’alcaloïde se rencontre en outre dans le parenchyme libérien, le parenchyme ligneux, sans s'accu- muler auprés du liber intraxylaire, dans la partie des rayons médullaires voisine du liber et de la région cambiale, et dans les deux ou trois couches les plus internes du liége. Organes de la fructification. — L’alcaloïde s'y localise comme chez Atropa; toutefois, nous n'avons pu observer que la fleur et le jeune fruit; nous ignorons si la graine renferme des alcaloides à sa maturité. 4. Hyoscyamus niger. A. Historique (*). — Peschier, en 1821, et Payen, en 1824, signa- lérent comme vraisemblable la présence d’un alcaloïde dans la Jusquiame. Dès 1821, von Brandes retira des semences de cette () Husemanx und HILGER, Die Pflantenstoffe. Hyoscyamin. Tome II, 1895. SUR LA LOCALISATION DES ALCALOÏDES DANS LES SOLANACEES. : 315 plante un liquide qu'il prit a tort pour leur principe actif et qu'il appela hyoscyamine. Geiger et Hesse parvinrent à opérer cette extraction en 1833. En 1881, Ladenburg retira de l’hyoscyamine liquide du com- merce, l’hyoscyamine pure cristallisée et un nouvel alcaloïde mydriatique liquide qu'il appela Ayoscine et que Buchheim avait déjà signalé sous le nom de sikeranine (?). Regnauld a fait remarquer la grande prédominance de l’hyos- cine sur l’hyoscyamine dans le suc cellulaire de la Jusquiame, et l’inconséquence qu'il y avait à attacher le nom de cette plante a un alcaloïde qui n’y figure qu'en très faible proportion, tandis qu'il constitue à peu pres les deux tiers de l’atropine officinale : pour faire disparaître cette antinomie, il a proposé d'employer désormais, pour désigner l'hyoscyamine de Ladenburg, les termes d'atropine 8 ou d’atropidine. B. ACTION DES REACTIFS. — Les réactifs des alcaloides mydria- tiques agissent sensiblement de même sur les tissus de cette plante et sur ceux d’Atropa Belladona. C, LocaLisaTION. — Tige. — L’alcaloide abonde dans les cellules des points végétatifs. Dans la région de la tige dont les tissus sont récemment différenciés, on le rencontre assez peu concentré dans l'épiderme, abondamment dans le parenchyme voisin des libers et dans toute l’étendue des rayons médullaires. Les stéréides: n’en renferment pas d’une manière prépondérante. Lorsque l’on fait agir l’iode sur les cellules de l’épiderme, il y naît a l’arrivée du réactif des sphérules jaunâtres qui se fusionnent en sphérules plus volumineuses et brunissent ensuite. Elles mani- festent les réactions des tanins, comme leurs analogues de la Belladone (*). On peut d’ailleurs constater directement dans ces cellules la présence d’une assez grande quantité de tanin. (') BucHHEIM, Arch, f. experim. Path., 1876, p. 472. (2) KLERCKER, Studien über die Gerbstoffvakuolen, p. 7. TOME II, 1895. 316 PH. MOLLE. — RECHERCHES DE MICROCHIMIE COMPAREE Feuilles. — Les feuilles ont un parenchyme lacuneux assez serré, dont les éléments, allongés perpendiculairement a la surface de l'épiderme, le font ressembler au tissu palissadiforme supérieur; il en résulte une assez grande épaisseur du limbe. Très jeunes, elles renferment assez bien d'alcaloïde; quand elles ont atteint l'âge adulte, on n’y retrouve que fort peu d’alcaloïde dans les épidermes; ils en sont parfois complètement dépourvus. Auprès des faisceaux et dans leur intérieur, l’alcaloïde se localise comme dans la tige. Racine. — Chez les parties jeunes de cet organe, l’alcaloïde ne se rencontre que dans l'écorce. Plus tard, on en observe aussi dans le parenchyme libérien. Les vieilles racines sont composées de cordons ligneux, d'origine secondaire, entourés de parenchyme qui forme autour d'eux comme une gaine amylifère. Entre ces faisceaux, les tissus sont morts. Le liber présente aussi des stratifications d'éléments morts et d'éléments vivants. De tous ces éléments, le parenchyme libérien seul renferme un peu d'alcaloïde. Au contraire, les éléments internes du liège en contiennent notablement. Poils. — Les poils sont très longs et très abondants sur tous les organes aériens. Jeunes, ils renferment une certaine quantité d'alcaloïde; plus âgés, ils en sont complètement dépourvus. La tête des poils sécréteurs n'en contient jamais. Organes de la fructification. — On y constate la même série de phénomènes que dans les organes analogues d'Afropa Belladona. La graine mûre renferme encore de j'alcaloïde, mais très peu, dans son tegument interne; plus du tout dans l'autre. 5. Physalis Alkekengi. A. HISTORIQUE ('). — En 1852, Dessaignes et Chautard ont extrait des feuilles de cette plante un alcaloide pulvérulent, amorphe, (1) HuseMann und HILGER, Die Pfansenstofe. Physalin. Tome II, 1895. SUR LA LOCALISATION DES ALCALOÏDES DANS LES SOLANACEES. 317 faiblement jaunatre, auquel ils ont donné le nom de physaline, sans en faire connaître d’ailleurs les réactions caractéristiques. B. ACTION DES RÉACTIFS. — Parmi les réactifs généraux des alca- loïdes, ceux qui sont le plus favorables aux recherches microsco- piques sont, dans le cas actuel : l’iodure de potassium iodé, qui produit un précipité jaune brun pâlissant assez vite; le chlorure d'or, qui précipite en jaune pâle, et l'acide phosphomolybdique, qui donne un précipité d'un gris jaunatre. C. LocaLisATION. — Tige. — L’alcaloide se distribue au point végétatif comme dans les végétaux précédents, puis il ne se retrouve plus que dans l'épiderme, dans les stéréides et dans les éléments parenchymateux allongés voisins des libers. Auprès des bourgeons, ii se maintient cependant dans quelques cellules cor- ticales. Les rameaux inférieurs des tiges se transforment en rhizomes à deux faisceaux. L'alcaloïde s'y distribue comme dans les tiges aériennes, mais il se maintient plus longtemps dans l'écorce et la moelle. Feuilles. — Chez des feuilles encore très jeunes, l'alcaloïde est déjà localisé dans l’endoderme amylifere qui accompagne la face inférieure du faisceau, dans les stéréides et les éléments voisins et dans les épidermes. Ceux-ci n’en contiennent plus quand la feuille a terminé sa croissance. Poils. — Les poils situés à la base des étamines contiennent de Palcaloide, mais nous n’en avons pas observé dans ceux qui se développent sur la tige et les feuilles. Organes de la fructification. — L'alcaloïde y est peu abondant ; mais il se localise comme dans les végétaux précédents. Dans le parenchyme des carpelles, les réactifs n’ont décelé sa présence qu’autour des faisceaux. Les ovules ne renferment que peu d’alcaloïde et la graine n’en contient pas à sa maturité. TOME II, 1895. 318 PH. MOLLE. — RECHERCHES DE MICROCHIMIE COMPAREE 6. Solanum tuberosum. A. HISTORIQUE (*). — Baumann signala, le premier, dans les tubercules de Solanum tuberosum la presence de la solanine, glycoside découvert, en 1820, par Desfosses dans les baies de Solanum nigrum. Cette découverte fut confirmée par de nom- breux travaux. Von Heumann en trouva dans les fruits verts et Otto dans “les tiges. D’après les analyses de Wolff, les pousses étiolées en renferment plus que le tubercule; chez celui-ci, selon Bach, c'est dans l’écorce que le glycoside se localise et il n'y en aurait que vers la base des jets. | Renteln et Hant ont extrait de la solanine des pommes de terre pelées. Les pousses, affirment Zwenger et Kindt, sont plus riches en solanine quand elles sont plus courtes, et d’après Berchtold la quantité de base qu'elles renferment diminue jusqu'à s’annihiler avec l’accroissement. Ebermayer croit que le verdissement augmente la teneur en solanine de la Pomme de terre; Berchtold affirme le contraire. Selon Otto, la quantité de solanine contenue dans le tubercule dépend des variétés étudiées et des conditions de la végétation. Selon Jorissen, les jets de Pommes de terre renfermeraient en outre de la solanidine. Il en a retiré cette base en les traitant par l’éther éthylique, qui enlève l'alcaloïde et non le glycoside. Les recherches de l’auteur ne se sont pas étendues à d’autres organes de la plante. Schütte a observé que l'ingestion des feuilles de Solanum tube- rosum a pour effet de dilater la pupille; il n’a pas réussi cependant à en extraire un alcaloïde mydriatique, mais il en a retiré de la bétaïne. (y HUSEMANN und HILGER, /oc. cit. — WOTHSCHALL, loc. cit. TOME II, 1895. SUR LA LOCALISATION DES ALCALOIDES DANS LES SOLANACEES. 319 B. ACTION DES REACTIFS. — La plupart des cellules de la Pomme de terre ou les réactifs décélent de la solanine, renferment aussi de. la solanidine, car non seulement il s’y forme un précipité à l'arrivée de Viode, mais le chlorure d'or, l’acide picrique et l’iodure double de mercure et de potassium y font naître des précipités que la solanine ne produit qu'en présence du tanin. Or, l'absence de celui-ci peut être facilement constatée par ses réactifs propres. Que ce soit la solanidine qui provoque les précipitations déter- minées par l'action des réactifs, il est facile de s'en assurer par l'action dissolvante de l'éther ou du chloroforme. Après une immersion prolongée du matériel à étudier dans ces liquides, l'action du réactif de Mandelin est notablement atténuée et l’iode ne provoque plus de précipité, tandis que, comme l’a constaté Jorissen, le corps enlevé par le dissolvant donne les réactions de la solanidine. | C. LocaLisaTION. — Le rapport entre les quantités de glycoside et d’alcaloide contenues dans une même cellule nous a paru assez variable de région à région, et la solanine semble surtout prédo- minante vers les points végétatifs; mais nous ne pouvons dès maintenant traiter cette question d'une manière suffisamment explicite et nous nous bornerons pour le moment à faire connaître la topographie de la solanine, en faisant remarquer que c'est aussi celle de la solanidine. Tiges aériennes. — A l'époque de la germination du tubercule, les pousses étiolées sont excessivement riches en glycoside, tant qu'elles ne dépassent pas 2 à 3 centimètres de longueur; elles vont d'abord en s'appauvrissant à mesure qu'elles s’allongent, et si elles restent à l'obscurité, c'est à peine si leurs points végétatifs en contiennent encore quand elles ont atteint une longueur de 30 à 40 centimètres. Quand, exposées à la lumière, elles se déve- loppent normalement, le glycoside se maintient en quantité notable au point végétatif. Il s’y localise, comme les alcaloïdes dans les végétaux étudiés antérieurement, et à quelques centi- metres du sommet il se retire vers l’épiderme et vers les libers, Tome Il, 1895. 320 PH. MOLLE. — RECHERCHES DE MICROCHIMIE COMPAREE surtout dans les stéréides, o on le retrouve parfois encore a une grande distance du point végétatif terminal. Les parties âgées de la tige ne contiennent de solanine que dans les ébauches des organes en voie de formation. Feuilles. — Tres jeunes encore, les feuilles renferment unifor- mément de la solanine dans tous leurs éléments parenchymateux. Cependant, quand on fait agir sur ces organes l'iodure de potas- sium iodé, on observe que les cellules stomatiques et leurs annexes réagissent fortement, de même que celles de la base de l'organe, quand celui-ci a été séparé de la tige, tandis que les autres demeu- rent incolores. Il ne faut voir en ceci que l'effet de la diffusion inégale du réactif. lente au travers des parois externes des cellules épidermiques, rapide au travers des parois minces des cellules qui limitent la chambre stomatique ou la déchirure de l'hypopode. Il suffit de laisser l'iode agir pendant un temps suffisant pour constater l'uni- formité de ses effets. A mesure que la feuille se développe, son contenu en solanine diminue, et quand elle a terminé sa croissance, ni son épiderme ni la plupart des cellules du mésophylle n’en contiennent encore : mais on l’y observe toujours dans les stéréides et quelques éléments allongés situés des deux côtés du faisceau. Poils. — Nous avons parfois observé des précipités d’alcaloide dans les poils articulés situés près des points végétatifs, mais en général ils ne renferment pas de solanine, ainsi que l’a déja indiqué Wothschall. Tiges souterraines. — La solanine s'y localise comme dans les rameaux aériens; seulement elle s'y conserve dans l'écorce et la moelle a une plus grande distance du point végetatif. Tubercules. — Pendant leur développement, les tubercules se comportent d'abord comme des tiges étiolées, c'est-à-dire que, très Jeunes, ils renferment dans l’épiderme, de même que dans toutes TOME IT, 1895. SUR LA LOCALISATION DES ALCALOÏDES DANS LES SOLANACEES. 321 les cellules de la moelle et de l'écorce, une grande quantité de solanine. Mais dans la suite, elle se localise dans l'épiderme ou les cellules les plus internes du liège qui en provient, tant que celles-ci ne sont pas subérifiées, et de moins en moins dans quelques (1-5) cellules sous-jacentes. On en trouve encore assez abondamment dans les cellules arron- dies des lenticelles. Au voisinage des yeux, la solanine se comporte comme aux points végétatifs, remplissant les ébauches foliaires et s’'accumulant dans le parenchyme médullaire situé sous les cellules méristématiques. Toutes les cellules de ce méristème en repos renferment de la solanine. Ce sont ces cellules qui ont sans doute fourni à Renteln et Hant la solanine extraite par eux des pommes de terre pelées. On trouve fréquemment dans les tissus de la Pomme de terre des cellules mortes enkystées en quelque sorte par du liège. Là encore la solanine abonde dans les cellules de liège les plus jeunes, quelle que soit d’ailleurs la situation, profonde ou superficielle, des éléments ainsi isolés (°). Si l'on coupe un tubercule, les cellules qui se recloisonnent bientôt pour développer le liège protecteur et les cellules sous- jacentes deviennent riches en solanine, sans que les éléments où l'on en avait constaté antérieurement paraissent en perdre. Comme dans le phénomène de la germination, il y a sans aucun doute augmentation de la quantité totale de solanine, et le glycoside formé résulte de la transformation des matières de réserve au moment où celles-ci doivent être utilisées pour l'édification de tissus nouveaux. En exposant des tubercules à la lumière, nous n’avons pu observer, lors du verdissement, une modification sensible de leur contenu en solanine. (:) C’est à un phénomène de même ordre, sans doute, qu’il faut attribuer l'accumulation de solanine que Wothschall observe auprès des sucoirs de Cuscuta Europaea, parasite sur Solanum Dulcamara. Tome II. 21 Tome II, 1895. 322 PH. MOLLE. — RECHERCHES DE MICROCHIMIE COMPAREE Racines. — Les matériaux nécessaires à l’étude de leur dévelop- pement sont fournis en abondance par les tiges étiolées qui ont une tendance bien caractérisée a en produire auprès des bourgeons. Au moment où les cellules péricycliques commencent à se dédoubler pour produire la jeune racine, on peut constater que toutes les cellules de la plaque méristématique formée (fig. 11) renferment de la solanine en abondance. En même temps elle réapparaît en quantité assez faible dans le parenchyme cortical avoisinant. ~-A un stade plus avancé, le glycoside se localise dans la coiffe et le périblème. Ces assises renferment l'une et l’autre beaucoup de tanin, mais dans le périblème, les cellules tannifères forment des groupes constitués par le recloisonnement d'un même élément à une certaine distance des cellules initiales, et ces groupes alter- nent avec d’autres qui sont tout à fait dépourvus de tanin. La coiffe et le périblème de l'embryon sont déjà riches en tanin : nous n'avons trouvé cette substance dans l'embryon d’au- cune autre espèce. La racine adulte ne donne pas de réaction de solanine. Organes de la fructification. — Bien que peu abondante dans ces organes, la solanine s'y trouve en quantité plus considérable que dans les autres parties aériennes. Theorin, qui ne la signale posi- tivement ni dans la tige ni dans les feuilles, l’a observée dans le fruit. Elle s'y localise surtout dans les épidermes. On en observe dans le tegument externe de l'ovule et l’assise nourricière de l’al- bumen. Le glycoside y diminue avec la maturation; cependant les réactifs en décelent encore des traces dans les téguments de la graine. La solanine s'y trouve retenue au milieu de tissus morts par des déchets provenant des cellules à l'intérieur desquelles elle était d’abord dissoute. On constate souvent aussi, dans les cellules appartenant au liège des tubercules, des granules solides (fig. 12, g) renfermant beaucoup de solanine : ils s’y sont formés par un pro- cessus analogue. Pendant la vie de la cellule, la solanine est tou- jours dissoute dans le suc de la vacuole, et les affirmations con- traires de Theorin et de Wothschall ne peuvent s'expliquer que par l'insuffisance de leurs réactifs. TOME II, 1895. SUR LA LOCALISATION DES ALCALOIDES DANS LES SOLANACEES, 323 7. Solanum Dulcamara. A. Historique. — En 1821, Desfosses signala dans cette plante la présence de la solanine; Legrip, Wackenrôder et Clarus confir- mérent successivement cette découverte. Cependant Moitessier a obtenu pour l'alcaloïde de Solanum Dulcamara une formule différente de celle de la solanine et Kletzinsky est arrivé au même résultat. Hilger, en se basant sur de nouvelles analyses, pense cependant que ces chimistes ont pris pour de la solanine pure un mélange de solanine et de solanidine. B. ACTION DES RÉACTIFS. — Le principe contenu dans Solanum Dulcamara donne, avec le réactif de Mandelin et l’acide sulfurique concentré, les mèmes colorations que la solanine et la solanidine. Mais l’iodure de potassium iodé détermine, dans le suc cellulaire où il est dissous, la formation de sphérules assez fluides rappelant celles que fournissent la nicotine et les alcaloïdes mydriatiques; seulement elles naissent jaunâtres et prennent ensuite une teinte plus ou moins brune. Comme dans les solutions de solanidine, l'acide picrique donne un précipité de granules jaunes, solubles dans l'acide acétique, et le chlorure d'or, un précipité gris jaunâtre assez abondant. Nous avons traité à chaud des fragments de tige de Douce-amère par l'eau acidulée d’acide acétique, et l'extrait ainsi préparé nous a fourni les réactions déjà observées dans les tissus. Agité avec l'éther ou le chloroforme, cet extrait n’abandonne qu'une faible quantité d’alcaloide. L'action du réactif de Mandelin sur des coupes qui ont séjourné longtemps dans ces liquides, n’est que faiblement atténuée. Quelle est au juste la composition de cet extrait qui reproduit les réactions du suc cellulaire? Est-ce un mélange de solanine et de solanidine >? L’iode ne semble pas l'indiquer. Mais il pourrait bien renfermer d'une maniere prédominante un glycoside spécial que Wettstein a retiré de la plante et quil a Tome II, 1895. 324 PH. MOLLE. — RECHERCHES DE MICROCHIMIE COMPAREE appelé dulcamarine, parce que, selon lui, c'est ce glycoside qui donne a la Douce-amère sa saveur caractéristique. Geissler a étudié ce corps en 1875. Il est insoluble dans l'eau, l'éther et le chloroforme, mais très soluble dans l'acide acétique. L’acide sulfurique le colore en jaune rougeâtre devenant rouge- cerise. Ne se comporterait-il pas aussi comme la solanine avec le réactif de Mandelin? Quoi qu'il en soit, en attendant que de nouvelles études aient élucidé cette question, nous appliquerons la dénomination de dulcamarine a la substance dissoute dans le suc cellulaire de Solanum Dulcamara et donnant les réactions que nous avons indi- quées plus haut. C. LocaLisaTion. Tiges. — La dulcamarine se localise, avec une concentration qui ne varie qu'aux points végétatifs (où elle atteint un maximum), sur toute la longueur des tiges, dans l'épi- derme ou les éléments non encore subérifiés du liège, dans le parenchyme cortical et le parenchyme medullaire entourant le liber interne, la seule partie de la moelle qui soit demeurée vivante. Chez les tiges d’un certain age, les stéréides fortement épaissies n’en renferment plus, mais l'écorce et la moelle en ren- ferment une grande quantité. Feuilles. — Le principe actif se rencontre principalement dans les cellules épidermiques et surtout dans celles, plus allongées, qui recouvrent les nervures. Le mésophylle n’en contient que fort peu. Poils. — Nous n'y avons pas vu de dulcamarine. Racines. — La dulcamarine se rencontre dans le liège et l'écorce. Appareil reproducteur. — La topographie de la dulcamarine est conforme au schéma que nous avons donné jusqu'ici de la réparti- tion des alcaloides. Elle est particulièrement abondante dans l’assise nourricière du pollen, autour des faisceaux du péricarpe et des placentas et dans l’assise externe de l’ovule qui devient le premier tégument de la graine et qui, même à l'époque de la maturité, renferme encore beaucoup de dulcamarine. Tome II, 1895. SUR LA LOCALISATION DES ALCALOÏDES DANS LES SOLANACÉES. 325 Le réactif de Mandelin donne assez nettement cette localisation dans la graine; mais si l'on essaie de la contrôler par l'acide sulfu- rique, on obtient dans les deux points végétatifs de l'embryon, dans son épiderme, dans la région endodermique de l'hypocotyle et près des faisceaux des cotylédons, une belle coloration rouge, puis violette. Un peu plus tard, toute la coupe, y compris l'albu- men, se trouve colorée en rouge violet. Nous avons reconnu que cette réaction est due, non à la dulca- marine, mais à la production de furfurol aux dépens de la saccha- rose. La liqueur de Fehling et la réaction de Trommer accusent enfin la présence de matière sucrée dans l'embryon et aussi, mais en quantité plus faible, dans l’albumen, de sorte que tous les éléments nécessaires à la réaction de Raspail se trouvent en présence. En faisant agir sur le porte-objet de l'acide sulfurique sur un mélange de peptone et de saccharose, nous avons obtenu identi- quement les mêmes résultats. Par l'action du réactif de Brandt, la dulcamarine, qui n'est pas retenue à l'intérieur des cellules mortes du tégument, se délaie rapidement et ne donne naissance à aucune coloration sensible. Mais l'embryon prend encore une teinte grenat, tandis que l’albu- men se colore fortement en violet. Une belle coloration violette se développe encore dans l'albumen sous l'influence de l'acide chlorhydrique à chaud, non seulement dans la graine mûre, mais pendant que l’albumen se développe aux dépens des réserves de l'ovule. 8. Datura Stramonium. A. HISTORIQUE. En 1880, Ladenburg établit que l'alcaloïde extrait de Datura Stramonium est un mélange d’atropine et d’hyos- cyamine dans lequel cette dernière base est prédominante. B. Action DES REACTIFS. — Nous avons obtenu dans les celluies de cette plante les réactions décrites plus haut en étudiant Alropa Belladona. TOME II, 1805. 326 PH. MOLLE. — RECHERCHES DE MICROCHIMIE COMPARÉE C. LocarisaTion. Tige. — L’alcaloide y est très abondant. C’est du collenchyme sous-épidermique qu'il disparaît d’abord. A une certaine distance du point végétatif, on n'en trouve plus que dans les longues stéréides extralibériennes. Par l'action de l’iode sur des coupes qui n'ont pas été lavées, on obtient de beaux cristaux analogues à ceux que donne le même réactif dans une solution de sulfate d'atropine. Dans les parties les plus âgées des tiges, le jeune liège seul con- tient encore de l’alcaloide. Feuilles. — I] y a beaucoup d'alcaloïde dans l’épiderme foliaire supérieur, peu dans l’inférieur, abondamment le long des faisceaux, peu ou point dans le reste du mésophylle. Poils.— Jeunes, ils renferment assez bien d’alcaloide : le précipité se fait surtout dans les deux articles inférieurs. Racine. — Dans les racines encore jeunes, on observe beaucoup d’alcaloide dans le liège et un peu dans l'écorce. La racine est con- sidérablement dilatée vers le collet de la plante. A cet endroit, l'alcaloïde pénètre dans le parenchyme libérien et dans la partie externe des rayons médullaires. En résumé, la racine renferme peu d’alcaloide. Appareil reproducteur. — On trouve beaucoup d’alcaloide dans les ébauches des organes floraux; il diminue assez vite dans la corolle et les étamines, mais il se maintient en quantité très consi- dérable dans l'ovaire, et notamment dans les épidermes, ici très étendus, à cause des aiguillons qu'ils recouvrent. Dans l’ovule, il y a aussi beaucoup d’alcaloide. La graine mûre en renferme assez bien dans son tégument interne. Le péricarpe mûr n'en contient plus. TOME II, 1805. SUR LA LOCALISATION DES ALCALOIDES DANS LES SOLANACÉES. 327 9. Nicotiana Tabacum. A. HISTORIQUE. — La nicotine est la seule base signalée dans les tabacs. Des nombreuses analyses faites par Schlésing, Wettstein, Kosu- tany, il résulte que la teneur des tabacs en alcaloïdes est extrême- ment variable. Les diverses variétés cultivées sont plus ou moins riches en nicotine, mais pour une même variété les quantités extraites changent considérablement avec les terrains et sans doute avec d’autres causes à déterminer. B. Reactirs. — Nous avons déjà indiqué les réactions utilisées pour localiser cette base : ce sont les mêmes qui ont servi à Maistriau pour la localiser dans Nicotiana macrophylla. Tige. — Dans les parties rapprochées du point végétatif, on trouve de la nicotine dans l’épiderme, dans le collenchyme, les stéréides extralibériennes, le parenchyme libérien, le parenchyme ligneux, les rayons médullaires et le parenchyme médullaire. Dans les regions plus âgées, l’alcaloïde se rencontre encore dans l'épi- derme. La quantité contenue dans le parenchyme cortical est assez faible. On en trouve un peu dans le parenchyme libérien externe. C'est surtout dans le parenchyme médullaire que s’accumule l'alcaloide. Dans des tiges de 2 centimètres de diamètre et portant encore dans toute leur longueur des feuilles en activité, tout ce parenchyme renferme beaucoup d’alcaloide. Feuilles. — Dans les feuilles complètement développées, on observe beaucoup d’alcaloïde auprès des libers et parfois aussi dans le parenchyme du mésophylle. Poils. — On observe de la nicotine dans les cellules qui consti- tuent les articles inférieurs de ces organes, rarement dans leurs cellules terminales, jamais dans la tête des poils glanduleux. Racine. — La nicotine s’observe dans l'écorce, dans le parenchyme ToME II, 1895. 328 PH. MOLLE. — RECHERCHES DE MICROCHIMIE COMPAREE libérien et la partie périphérique des rayons médullaires ainsi que dans les jeunes éléments du liège. Appareil reproducleur. — Toutes les cellules parenchymateuses des organes floraux renferment de la nicotine; il y a accumulation de cette base dans les épidermes. Toutefois, dans l'ovaire, c’est le tissu très lacuneux des placentas qui paraît en contenir le plus. Le tégument externe des ovules et les cellules qui entourent le sac embryonnaire renferment assez bien d’alcaloïde, mais la nico- tine disparaît peu a peu de l’assise nourricière, et le tegument externe, désorganisé dans la graine müûre, n’en contient plus que des quantités très faibles, enclavées dans quelques débris proto- plasmiques provenant de cette couche et demeurés adhérents à la graine. 10. Petunia violacea. A. Historique. — Nous n'avons trouvé dans la littérature aucune communication relative aux alcaloïdes de cette plante. B. ACTION DES RÉACTIFS. — Ceux des réactifs généraux qui donnent les meilleurs résultats quand on les fait agir sur les tissus de ce végétal, sont : 1° L'iodure de potassium iodé, qui donne un précipité brun a reflet bleuâtre, qui palit et disparaît vite; 2° L’acide phosphomolybdique, avec lequel il se forme un pré- cipité jaune; 3° L’acide picrique, dont l’action est assez analogue au réactif précédent; ; 4° Le chlorure d'or, qui provoque la formation d'un précipité jaune sale rapidement réduit. C. Locauisation. Tige. — L'alcaloïde s’y localise dans l'épi- derme, l’endoderme, les stéréides, que l’on ne rencontre ici que dans la couche péricyclique, le parenchyme libérien et le paren- chyme médullaire avoisinant le liber interne. ToME II, 1895. SUR LA LOCALISATION DES ALCALOIDES DANS LES SOLANACEES. 329 Feuilles. — On y rencontre l’alcaloïde en quantité assez considé- rable dans les épidermes; il en existe aussi, quoique très peu, dans les cellules en palissade. Dans le pétiole des feuilles, les faisceaux appartiennent au type concentrique amphicribral, anomalie qui s'explique facilement par la jonction des deux libers normaux. L'alcaloïde s’accumule dans les cellules disposées autour de ces faisceaux. Poils. — Il y a un peu d’alcaloide dans les articles voisins de l’'épiderme. Les poils glanduleux n’en renferment pas. Racine. — L'alcaloïde s’y localise comme dans le même organe de Nicotiana Tabacum. Appareil reproducteur. — Les ébauches florales renferment peu d’alcaloïde. Dans les sépales et les pétales adultes, il est localisé comme dans les feuilles. Il disparaît assez vite de la corolle. Les étamines en contiennent autour du faisceau et dans l'assise nourricière du pollen; le style, autour de ses deux faisceaux: le péricarpe, dans l’épiderme et dans la couche cellulaire qui tapisse la cavité ovarienne. Il y a beaucoup d’alcaloide dans le tégument externe de l'ovule, moins dans l’assise nourriciére de l’albumen. Cet alcaloïde réagit comme la nicotine avec l'acide sulfurique et avec le mélange d'acide chlorhydrique et d'acide azotique. 11. Salpiglossis sinuata. A. Historique. — Cette plante n’a pas encore été signalée comme renfermant un alcaloïde. B. Action DES RÉACTIFS. — L’iodure de potassium iodé donne un précipité brun-kermès assez persistant; le chlorure d’or, un préci- pité jaunatre, et l’iodure double de mercure et de potassium, un précipité jaune brun. Traitées d'abord par l'acide tartrique, les Tome II, 1805. 330 PH. MOLLE. — RECHERCHES DE MICROCHIMIE COMPAREE coupes a étudier se comportent tout autrement; plus aucune pré- cipitation ne se produit quand on fait agir les réactifs généraux des alcaloides. C. LocaLisATION. Tige. — Il n’y a que fort peu d’alcaloide dans l'épiderme jeune, et plus du tout dans l'épiderme adulte. Les cellules palissadiformes sous-jacentes n’en contiennent pas non plus, mais il est fort abondant auprès des libers. . Feuilles. — Ces organes renferment un peu d’alcaloide dans les épidermes et aupres des faisceaux. Poils. — Ils ne contiennent pas d’alcaloide. Racines. — Nous avons obtenu les réactions mentionnées plus haut dans le parenchyme cortical et dans la région externe des rayons médullaires. Appareil reproducleur. — Il se trouve beaucoup d’alcaloïde dans le péricarpe. Les ovules en renferment surtout dans leur tégument externe. Dans l’assise nourricière, il ne tarde pas à disparaître et il n’y en a plus dans la graine, car il ne reste du tegument externe que les parois inférieures et épaissies de ces cellules. L’embryon n'est pas faiblement courbé, contrairement à ce que dit Wettstein, mais enroulé en hélice. Il se distingue de ceux des végétaux précédents par sa coloration violette, due à des grains d'aleurone colorés contenus dans les cellules épidermiques. Ce n’est qu'après la germination que la matière colorante violette apparaît chez les autres types étudiés, mais à l’égard des alcaloïdes cet embryon ne se comporte pas différemment des autres : les réactifs n’y indiquent la présence d’aucune base végétale. 12. Brunfelsia americana. A. HISTORIQUE. — Aucun alcaloïde n’a encore été signalé dans ce végétal. TOME II, 1895. SUR LA LOCALISATION DES ALCALOÏDES DANS LES SOLANACEES, 331 B. ACTION DES REACTIFS. — L’iodure de potassium iodé donne un précipité brun a reflet bleuâtre; l’acide phosphomolybdique, un précipité jaune, et le chlorure d’or, un précipité jaune pâle. C. LocaLisaTION. Tige. — A quelque distance du point végétatif (ou l’alcaloïde se répartit comme dans tous les végétaux étudiés, on observe que la base est très abondante dans les cellules épider- miques ou dans le phellogène et les éléments non encore subérifiés qui en dérivent, de même que dans les éléments collenchymateux sous-jacents. Les deux ou trois couches les plus internes de l'écorce, les élé- ments parenchymateux du péricycle, les stéréides voisines et les rayons médullaires en contiennent aussi des quantités considérables. De même que dans Petunia violacea, il n’y a pas de stéréides auprès des libers, mais dans la moelle on observe des îlots de cellules pierreuses qui ne contiennent pas d'alcaloïde, tandis que le suc cellulaire de toutes les autres en renferme notablement. Dans le parenchyme cortical, on rencontre aussi, quoique plus rarement, des cellules semblables toujours dépourvues d’alcaloide. Feuilles. — Les feuilles de ce végétal sont assez épaisses et l'épi- derime en est fortement cutinisé. Nous n’y avons observé d’alcaloide qu'au voisinage des faisceaux, mais surtout auprés du liber interne et dans les rayons médullaires. N'ayant pu disposer que d’un rameau de ce végétal, nous n'avons pu localiser l’alcaloide dans sa racine ni dans son appareil repro- ducteur, mais il est certain qu'au point de vue de la richesse en base végétale, il peut être comparé à la Belladone et à la Stramoine. LES ALCALOÏDES PENDANT LA GERMINATION. Nous avons étudié pendant qu'elles germaient des graines d’Atropa Belladona et de Datura Stramonium, et les phénomènes observés ont été absolument concordants. Nous avons deja fait remarquer que ces graines ne renferment TOME II, 1895. 332 PH. MOLLE. — RECHERCHES DE MICROCHIMIE COMPAREE d’alcaloide ni dans l’albumen ni dans l’embryon, mais seulement dans les tissus morts écrasés entre l'albumen et le testa. L’alcaloide apparaît dans la plantule quand les cellules des méristèmes recommencent à se cloisonner, et il se répartit, comme dans la plante mème, dans les points végétatifs, dans l'épiderme et auprès des faisceaux en voie de différenciation de l'hypocotyle et des cotylédons. Y aurait-il absorption de l'alcaloïde des teguments ? L'examen de la graine dont l’albumen s'est protégé extérieure- ment par d’épaisses membranes, rend déjà cette hypothèse assez peu vraisemblable. Mais avec des graines volumineuses, on peut même, comme l'a fait Clautriau (loc. cit.), exclure complètement l'hypothèse de l'utilisation possible des alcaloïdes des téguments par la plantule en faisant germer des graines pelées et soumises a des lavages répétés dans l'eau distillée. Chez ces dernières, l'alcaloïde naît et se répartit comme chez les autres, d’où il résulte qu’il se forme pendant la germination aux dépens des réserves accumulées dans la graine. TOPOGRAPHIE GENERALE DES ALCALOIDES CHEZ LES SOLANACÉES. En général, chez les Solanacées, nous avons décelé des alcaloïdes dans tous les points végétatifs aériens. Les réactions indiquent, par leur intensité, des quantités de base augmentant d'abord, à mesure qu'on s'éloigne des cellules initiales, et atteignant un maximum de concentration à une assez faible distance du sommet. La différenciation des tissus de la tige est accompagnée de la localisation de l’alcaloïde suivant trois surfaces concentriques dont la plus extérieure comprend l'épiderme et les deux autres consti- tuent une double gaine qui limite de part et d'autre l’anneau fibro- vasculaire. Cette localisation toutefois n’est pas absolue, et l’on passe par une transition insensible des régions où l'alcaloïde est accumulé à celles qui en sont totalement dépourvues. Tome II, 1895. SUR LA LOCALISATION DES ALCALOIDES DANS LES SOLANACÉES. 333 Souvent aussi (Solanum Dulcamara fait exception) l’alcaloïde disparait de ses divers si¢ges a une distance plus ou moins grande des points végétatifs. Il ne se maintient dans la zone périphérique que grâce au liège, le phellogène ayant, comme l’épiderme, la faculté d’accumuler l’alcaloïde. C'est encore dans l'épiderme et non loin des tubes criblés que les alcaloides se localisent dans les feuilles. A l’autre pôle du végétal, les alcaloïdes abondent dans la coiffe et à une faible distance des cellules initiales dans l’assise pilifère et les rangées externes du périblème. Quand la racine est devenue adulte, c’est dans le parenchyme de l'écorce et les jeunes éléments du périderme que l'on retrouve les alcaloïdes. Les organes floraux se comportent comme les feuilles végétatives au point de vue de la topographie des alcaloïdes, mais les carpelles et les ovules les accumulent souvent davantage et en conservent pendant toute l’évolution du fruit. La maturation est accompagnée d'une perte partielle de l’alcaloïde contenu dans le péricarpe et dans la graine. Parmi les graines mûres, il y en a qui contiennent une certaine quantité d’alcaloide dans leurs téguments; l’albumen et l'embryon n’en renferment à aucune phase de leur développement. CONCLUSIONS. 1. Les divers alcaloïdes des Solanacées se localisent sensiblement de la même manière dans les espèces qui les élaborent : ils se con- duisent comme s'ils étaient des équivalents physiologiques. 2. La solanine se localise comme un véritable alcaloïde. 3. Les alcaloïdes et le tanin coexistent assez souvent dans le suc TOME II, 1805. 334 PH. MOLLE. — RECHERCHES DE MICROCHIMIE COMPARÉE cellulaire des Solanacées, à cause de la solubilité de leurs combi- naisons en milieu acide. 4. En présence des tanins, certaines réactions de la solanine sont sensiblement modifiées. 5. Éliminés complétement de l’ovule avant la maturation de la graine ou relégués dans ses téguments, les alcaloides ne font jamais partie des réserves de la graine des Solanacées, et ils n'apparaissent dans l'embryon que lors de l’utilisation de ces réserves. 6. Ils figurent toujours à côté des réserves hydrocarbonées des racines charnues et des tubercules, mais ils augmentent en quantité lorsque ces réservés sont utilisées à la production de nouveaux tissus. 7. Ils ne se disposent pas de mêine auprès de tous les méristemes, car tandis qu'ils abondent dans les points végétatifs qui donnent naissance aux membres exogènes ou endogènes, de même que dans le phellogène, on ne les rencontre qu'à une certaine distance du cambium et de la plantule en voie de développement dans le sac embryonnaire. 8. La situation superficielle qu’ils occupent leur permet de pro- téger contre les animaux herbivores les organes les plus délicats et les plus importants de la plante, et à ce point de vue leur présence constante dans le liège au moyen duquel elle cicatrise ses blessures mérite d’être remarquée. 9. En somme, nos observations viennent corroborer les idées émises par M. L. Errera relativement à la topographie des alca- loïdes et à leur rôle physiologique. C’est d’ailleurs aux lumières de ce maître dévoué que nous devons d'avoir pu mener à bien notre modeste travail, et nous aimons à le remercier de nouveau ici de son accueil toujours bienveillant et de ses judicieux conseils, TOME II, 1895. SUR LA LOCALISATION DES ALCALOÏDES DANS LES SOLANACEES. 335 EXPLICATION DES FIGURES Dans toutes ces figures, la coloration brun rouge indique la présence d'un alcaloide Fia. ou d’un glycoside. . Segment de la coupe transversale d’une tige de Solanum tuberosum : ep, epiderme; pa, poil articulé; pg, poil glanduleux; c, collenchyme ; pe, parenchyme cortical; co, cellules à oxalate de calcium; end, endo- derme; s, stéréides; /e, liber externe; Z, liber interne; v, vaisseaux. . Schéma de la course des faisceaux dans la même tige. . Coupe tangentielle de la méme tige au niveau du liber externe : al, anastomose libérienne; ¢c, tube criblé; ca, cellule annexe. - Coupe tangentielle de la tige de Datura Stramonium, pratiquée au méme endroit. . Coupe transversale du tubercule de la Pomme de terre : ph, liège; le, liber externe; x, xylène; /, liber interne. 6. Coupe de la graine suivant le plan de ses deux plus grands diamètres : al, albumen; a», éléments écrasés de l’assise nourriciére de l’albu- men; fe, tegument externe. 7. Trois cellules épidermiques d’Atropa Belladona sur lesquelles agit l’iodure de potassium iodé : sc, sphérules déjà colorées par le réactif; si, sphérules encore incolores. 8. ‘Action de l’iodure de potassium iodé : a, sur un mélange de solanineet de solanidine; 6, c, d, sur des cellules épidermiques de jeunes tiges de Solanum tuberosum; b, première phase, précipité formé à l’arrivée du réactif; c, deuxième coloration uniforme; d, troisième phase, la masse précipitée se plisse et modifie sa forme. TOME Il, 1895. 336 PH. MOLLE. — RECHERCHES DE MICROCHIMIE COMPARÉE Fic. 9. Partie de la coupe transversale de la racine d’Atropa Belladona : 42, xylène secondaire; /,, liber intraxylaire; £2, parenchyme ligneux secondaire. 10. Coupe tangentielle de la tige de Scopo/ia japonica pratiquée dans la région péricyclique : s, stéréides; end, endoderme; p, cellules péricycliques. 11. Coupe longitudinale d’une jeune racine de So/anum tuberosum à l'endroit où une radicelle prend naissance : p, cellules péricycliques ; end, cel- lules endodermiques; pc, cellules du parenchyme cortical. — 12. Partie périphérique de la coupe transversale d’un tubercule de Pomme de terre : g, granules situés dans des cellules mortes et renfermant de la solanine; pi, cellules les plus internes du liège; pc, cellules les plus internes du parenchyme cortical. — 13. Coupe tangentielle au travers de l’écorce de So/anum Dulcamara sur laquelle a agi l’iodure de potassium iodé : 4, deux protoplastes isolés traités par le même réactif. — 14. Portion d’une coupe transversale de la racine de Solinum Dulcamara : ap, reste de l’assise pilifère ; pg, phellogène ; pc, parenchyme cortical ; end, endoderme; p, péricycle; /, liber. wt Sh. ofloller ad nat del. Le Housses Inge 64 WBucha Lth PRÉSENCE ET LOCALISATION D UN ALCALOÏDE DANS QUELQUES ORCHIDÉES PAR E. DE WILDEMAN (‘) (’) Au mois de décembre dernier, en faisant agir une solution d’io- dure de potassium iodé sur des coupes de racines aériennes d’Or- chidées, j'ai observé dans les cellules un précipité rappelant ceux que l’on obtient avec les alcaloïdes. Deux espèces du genre Den- drobium, le Dendrobium nobile et le Dendrobium Ainsworthii, ont présenté dans toutes les parties de la plante, depuis les racines aériennes jusqu'aux fleurs, cette même réaction. Chez les Pha- laenopsis Luddemanniana, le mème précipité se forme dans les cellules de la racine. C'est par la voie microchimique que je me suis tout d’abord assuré de la présence d’un alcaloïde. Pour cette recherche, je me suis sur- tout basé sur la propriété que possèdent les alcaloïdes, d'être enlevés des tissus qui les contiennent par I’ « alcool tartrique ». M. Errera a prouvé par ses recherches sur la distinction microchimique des (") Ce travail a été publié dans le Bulletin de la Société belge de microscopie, t. XVIII, p. 101, 1892. (7) M. G, CLAUTRIAU a bien voulu se charger de la partie macrochimique de cette étude, Tome II. 22 Tome Il, 1892. 338 E. DE WILDEMAN. — PRÉSENCE ET LOCALISATION alcaloïdes et des matières protéiques (*), que ces dernières (qui peuvent présenter des réactions communes avec les premiers) sont insolubles dans l'alcool tartrique. Elles donnent par conséquent, même après un séjour prolongé dans cette solution, les mémes réactions qu'avant leur immersion dans ce liquide. Une difficulté se présentait cependant, à première vue, dans l'application de cette méthode aux Orchidées. Dans ces derniers temps, MM. Molisch, Mikosch, Chmielewsky (*) ont décrit des corps cristallins que l’on rencontre dans certaines cellules végétales, et ‘qui présentent les réactions des substances protéiques. C'est dans l'Epiphyllum truncatum (Cactées) que ces cristalloïdes ont été d'abord découverts par Molisch; ils ont été ensuite trouvés dans l'épiderme des feuilles d'Oncidium (Orchidées). Ces cristalloïdes sont solubles dans l'alcool d’après Molisch, so- lubles en partie d’après Mikosch, insolubles d’après Chmielewsky. Plus récemment encore, Wakker (*) a décrit un corps également insoluble dans l'alcool et qui a beaucoup d’analogie avec les cristal- loïdes des Epiphyllum. La question qui se posait donc était de savoir si ces corps sont réellement solubles, si le procédé microchimique proposé par M. Errera était ici en défaut. Quelques réactions que j'ai pu faire sur l’épiderme de la tige de l’Epiphyllum m'ont convaincu de l'insolubilité de ces cristalloides dans l'alcool. Si les auteurs ont cru (1) L. ERRERA, Sur la distinction microchimique des alcaloides et des matières protéiques. (ANN. DE LA SOC. BELGE DE MICROSC., 1889, t. XIII.) (2) MortscH, Ueber merkwiirdig geformte Proteinkôrper in den Zweigen von Epiphyllum. (BER. D. DEUTSCH. BOT. GEs., 1885, Heft 6.) Mixoscu, Ueber cin neues Vorkommen geformten Eiweisses, (BER. D. DEUTSCH. BOT. GES., 1890, Bd VIII, p. 33.) CHMIELEWSKY, Line Bemerkung über die von Molisch beschriebenen Proteinkorper in den Zweigen von Epiphyllum. (Bor. CENTRALBLATT, 1887, II.) (3) WakKER, Zin neuer Inhaltskirper der Pflansenzelle. (PRINGSHEIM JAHRB., Bd XXIII, 1801, p. 1.) Voyez aussi R. E. Fry, Aggregations of Proteid in the cells of Euphorbia splen- dens, (ANN. OF Bor., vol. V, n° XX, 1891.) ToME II, 1802. D'UN ALCALOÏDE DANS QUELQUES ORCHIDÉES. 339 les voir disparaître, c'est que l'observation n’a pas été suivie assez minutieusement. Le corps protéique primitivement massif, et qui présente une belle coloration par le réactif de Millon, change de forme au bout de quelque temps lorsqu'on plonge l’épiderme ou la tige complète dans l'alcool. 11 devient fibrillaire, et se présente sous l'aspect d'une botte de fibrilles très ténues, qui se colorent encore nettement par le réactif de Millon. Si l’on observe un frag- ment d'épiderme déposé vivant dans le réactif de Millon, on peut voir des transformations très diverses de la masse qui, de fusi- forme qu'elle était d’abord, devient sphéroïdale et finit par dispa- raitre. Ces cristalloïdes ne font donc pas exception, et nous pouvons invoquer la solubilité dans l'alcool comme un caractère distinctif des sels d’alcaloides. Les réactifs que j’ai employés pour caractériser l’alcaloide sont les suivants : l’iodure de potassium iodé, l’iodure de potassium iodé additionné de carbonate d’ammoniaque (Clautriau), l'acide phosphomolybdique, l’iodure de bismuth et de potassium, l’acide sulfurique, le réactif de Frôühde. Le premier de ces réactifs est le plus sensible ; les deux premiers donnent en présence de l'alcaloïde un précipité brun-acajou très prononcé. L’acide phosphomolybdique fournit un précipité jaunâtre moins abondant; il se forme mieux lorsqu'on ajoute un peu d'acide nitrique. De même pour l'iodure double de mercure, auquel il faut ajouter de l'acide chlorhydrique. Le réactif de Frôühde est très variable dans ses effets. En général, il communique aux cellules qui renferment beaucoup d’alcaloide une coloration jaune verdatre. L’acide sulfurique donne également une teinte jaunâtre a la vacuole des cellules qui renferment de Valcaloide, mais cette réaction est souvent difficile à obtenir d’une facon nette. Afin de vérifier la présence d'un alcaloïde, M. G. Clautriau l’a recherché dans les tissus de Dendrobium, par la voie macrochi- mique. Voici les résultats qu’il m'a communiqués. Trois tiges fraîches de Dendrobium nobile pesant ensemble 54882 représentant 6#81 de matière sèche, ont été traitées d’après la méthode de Stas. La solution éthérée a laissé à l'évaporation un Tome II, 1892. 340 E. DE WILDEMAN. — PRESENCE ET LOCALISATION faible résidu, légèrement jaunâtre, présentant les reactions des alcaloïdes. Ce résidu, placé quelques jours dans un exsiccateur, n’a pas présenté de traces de cristallisation. Il s’est ensuite facilement dissous dans l’eau distillée et dans l'eau acidulée par l'acide chlor- hydrique, donnant une solution qui, évaporée lentement, a aban- donné un résidu renfermant de fines aiguilles cristallines. En ajou- tant à cette solution chlorhydrique de la baryte caustique, puis de l'acide sulfurique jusqu’à réaction nettement acide, et neutralisant la liqueur par du carbonate de baryum, on a obtenu une solution suifurique de Valcaloide. Celle-ci, évaporée lentement à siccité en présence de carbonate de baryum, a fourni un résidu qui a été épuisé par l'alcool absolu à plusieurs reprises, et l'évaporation de cet alcool n’a laissé que des cristaux de sulfate de l’alcaloide. Ce sont ces cristaux dissous dans l'eau distillée qui ont servi aux réactions suivantes, permettant d'affirmer que le Dendrobium nobile renferme un alcaloide. La solution aqueuse précipite en brun-kermès par l'iodure de potassium iodé, et par ce même réactif contenant du carbonate d’ammoniaque. L’iodure double de mercure et de potassium donne un précipité blanc jaunûtre. L’iodure double de cadmium et de potassium ainsi que l'iodure double de bismuth et de potassium précipitent, le premier en blanc légèrement jaunatre, et le second en rouge-orange. L’acide phosphomolybdique forme un précipité blanc jaunatre. L’acide picrique précipite en jaune. Le chlorure d'or donne un précipité blanc jaunatre. Il ne s'est pas produit de précipité avec les réactifs suivants : tanin. chlorure de platine, chlorure de palladium, chlorure d'iridium, bichromate de potassium et bichlorure de mercure. Le réactif de Frôhde donne une coloration verte intense, peu persistante. L’acide sulfurique, en tres faible quantité et a une légère cha- leur, produit une coloration rose violacé. Il ne s’est produit aucune réaction caractéristique par l’acide chlorhydrique, l'acide azotique ordinaire et l'acide azotique Tome II, 1892. D'UN ALCALOIDE DANS QUELQUES ORCHIDEES. 341 fumant, de même que par le réactif d’Erdmann et les solutions sulfuriques d’acide titanique, d’acide vanadique, d’acide sélénieux, de sulfate de cérium et de bichromate de potassium. C'est, à ma connaissance, la première fois que l'on signale un alcaloide dans cette famille. I] est fort probable que des recherches entreprises actuellement fourniront l'occasion d'étudier à ce point de vue les différents genres de ce groupe intéressant. Voici les localisations que j'ai pu obtenir par la voie microchi- mique dans les différentes parties du Dendrobium nobile. RACINES AÉRIENNES. — Dans une coupe longitudinale de racine aérienne, comprenant le point végétatif, on observe à la partie externe et vers la pointe, des cellules petites, à protoplasme com- pact, qui deviendront les cellules du voile. Sous cette assise, nous trouvons une zone de cellules à parois plus résistantes, qui forme une gaine de protection; puis une zone parenchymateuse. Plus vers le centre, une nouvelle couche de cellules à membranes épais- sies, et enfin, à l’intérieur de cette gaine, le faisceau central de la racine. Ce faisceau est formé de plusieurs lames ligneuses ayant entre elles de petits massifs libériens. Vers le sommet végétatif, toutes les cellules présentent une réaction très évidente d’alcaloïde: les cellules jeunes du voile en contiennent également dans une forte proportion (7). En remontant le long de la racine, vers les parties adultes, on voit le précipité diminuer dans les cellules du voile jusqu à ce que, dans les cellules qui ont acquis leur déve- loppement complet, on ne trouve plus qu'une coloration jaune du protoplasme. Dans ces mêmes cellules, dont la paroi s’est considé- rablement épaissie, on observe souvent une coloration rouge brun assez foncé, qui siège dans la membrane et non dans le con- () Le point végétatif et surtout la coiffe des jeunes racines de Colchicum autumnale donnent également une réaction très nette de colchicine. (L. ERRERA, observ. inéd.) TOME II. 1802. 342 E. DE WILDEMAN. — PRÉSENCE ET LOCALISATION tenu cellulaire. Elle ne peut être rapportée à la présence d’un alcaloïde, car elle persiste encore après l'action de l'alcool tar- trique. Dans la premièré des gaines, de même que dans celle qui entoure immédiatement le faisceau, on ne trouve, à l'état adulte, pas de trace de précipité. Mais ici également, comme pour les cellules du faisceau, nous voyons les membranes prendre une coloration rouge brun trés marquée, et trancher ainsi nettement sur le reste du tissu. . Les couches intermédiaires entre les deux gaines sont les seules qui présentent une réaction bien nette d'alcaloïde ; presque toutes les cellules du parenchyme en renferment. Il n’est pas impossible que dans la région libérienne il existe quelques cellules qui contiennent de l'alcaloïde, mais les tubes criblés et leurs cellules annexes sont très petits et leur contenu est très difficile à observer. Si nous faisons une coupe transversale assez en arrière de la pointe de la racine, pour que le voile soit complètement développé, nous la trouvons formée par cinq cylindres principaux emboîtés les uns dans les autres (*)}, Le premier en partant du centre est formé par le faisceau et la moelle ; le second, par une gaine que nous avons vue formée de cellules à membranes fortement épaissies ; il est interrompu de distance en distance. Le troisième cylindre est constitué par des cellules lachement réunies et renfermant des gra- nulations chlorophylliennes. Un quatrième cylindre, à cellules éga- lement épaissies, se trouve aussi interrompu de distance en distance par des cellules spéciales qui mettent la zone parenchy- mateuse en contact avec le voile. Enfin nous trouvons extérieure- ment le voile. C’est dans la troisième zone seule que, sur une coupe transver- sale, on peut déceler la présence d'un alcaloïde. On ne peut naturellement pas en observer dans le liber, car les cellules longues (1) Voyez la figure in STRASBURGER, Das Botanische Practicum, 2° édit., p. 191. Tome II, 1892. D'UN ALCALOIDE DANS QUELQUES ORCHIDEES. 343 de ce tissu ont été infailliblement entamées par le rasoir, et leur contenu enlevé par le lavage à l’eau que l’on doit toujours faire subir aux coupes afin d’obtenir une réaction nette. Tice. — Dans la coupe transversale de tige adulte, nous trouvons a l'extérieur un épiderme composé de cellules petites, à paroi externe fortement cuticularisée et colorée en brun. Vers le centre, des faisceaux épars dans un parenchyme à cellules assez grandes. L’alcaloide se localise dans les cellules du parenchyme, surtout dans celles qui entourent les faisceaux. Mais cette localisation ne doit pas nous induire en erreur, car si l'on fait une coupe longitu- dinale, on voit que l’alcaloïde ne se trouve pas spécialement dans les environs du faisceau, mais que cette localisation est due au fait que ces cellules sont en général de beaucoup plus petite taille que leurs voisines. Elles ont par conséquent beaucoup moins de chances d'être entamées par le rasoir, et de perdre ainsi leur con- tenu. En faisant une coupe tangentielle, on trouve les cellules à alcaloïde disposées dans le tissu à la façon des vaisseaux laticifères articulés. Dans le parenchyme se trouvent certaines cellules spéciales, de même grandeur environ que leurs voisines, mais qui s’en distin- guent par la présence de paquets de raphides. Ces derniers sont entourés d’une matière mucilagineuse. Les réactifs cités plus haut ne m'ont rien fourni lorsque je les ai fait agir sur ces cellules, du moins dans la tige. Le parenchyme contient des grains d’amidon et de la chloro- phylle, et cela même dans les cellules qui renferment l'alcaloïde. FEUILLE. — Chez cette espèce de Dendrobium, la feuille est engainante à la base. Les tissus qui composent cette gaine renfer- ment de l’alcaloïde, mais comme à l’état adulte de la feuille ces tissus sont peu vivants, la quantité d’alcaloïde qu'on y trouve est très minime. Dans le limbe, la quantité d’alcaloide est très variable suivant l'âge de la feuille que l’on considère. La couche épidermique inférieure et la supérieure, constituées TOME II, 1892. 344 E. DE WILDEMAN. — PRESENCE ET LOCALISATION par des cellules polygonales, d'aspect a peu près identique, donnent une réaction assez abondante. On peut y voir, surtout par l'ivdure de potassium iodé, le précipité localisé très nettement dans la vacuole contractée. Dans le parenchyme chlorophyllien qui se trouve logé entre les deux épidermes, on trouve des cellules dont les unes donnent un précipité et les autres pas. Le parenchyme en palissade fait complètement défaut dans cette Orchidée : tout le tissu est composé de cellules arrondies. Lorsque le précipité se présente assez abondamment, on voit la couche qu'il forme sur la paroi interne du sac protoplasmique interrompue aux endroits où sè trouvent des grains de chlorophylle. M. Errera a observé le même fait dans les Lupins (’). Dans le parenchyme foliaire, on rencontre, disposées dans le sens longitudinal de la feuille, de grandes cellules à raphides. Elles ont souvent plus de dix fois la longueur des cellules du paren- chyme ordinaire, et contiennent un mucilage qui prend par l’io- dure de potassium une coloration brun rouge. On pourrait peut- ètre supposer que cette coloration est due à une autre substance, car les autres réactifs n’ont fourni aucun résultat, mais elle ne se produit plus après que l'on a fait agir de l'alcool tartrique. Toutes les cellules à raphides que l’on rencontre dans une coupe ne se colorent cependant pas. Dans des cellules analogues du Narcissus, M. Errera a cependant trouvé un précipité très net. FLeur. — Le tissu du pédoncule présente aussi des réactions d'alcaloïde. L’épiderme, formé de cellules allongées, montre une réaction nette et en général assez abondante; le parenchyme sous- épidermique en renferme également, quoique en quantité moindre. Quant au faisceau, il est très difficile de s'assurer s'il contient oui ou non de l'alcaloïde. Dans la fleur, les deux épidermes et le tissu intermédiaire offrent dans leurs cellules un précipité très net par l'iodure de potassium iodé. C'est peut-être dans les fleurs qu'il se rencontre le plus abon- (*) L. ERRERA, /oc. cit. (ANN. DE LA SOC. BELGE DE MICROSC., t. XIII, p. 114.) TOME II, 1892. D'UN ALCALOÏDE DANS QUELQUES ‘ORCHIDEES. 345 damment. Presque toutes les cellules des pétales possédent de l’alcaloïde, On peut voir très nettement la localisation du précipité dans la vacuole centrale plasmolysée, comme le montre le croquis ci-joint. Fragment de l’épiderme supérieur d’un pétale de Dendrobium nobile, traité par l’iodure de potassium iodé. Ceci confirme les observations de M. Errera (*) sur la localisation des alcaloides dans le suc cellulaire des cellules vivantes. Dans les poils pluricellulaires qui couvrent le labelle à sa face inférieure, l'iodure de potassium iodé décèle également la présence d’un alcaloïde. Ces poils, de même que les cellules des pétales, contien- nent du suc cellulaire coloré en rouge, qui n'empêche pas la réac- tion de se produire. OVAIRE ET POLLINIES. — Dans tous les tissus de l'ovaire, depuis son épiderme, l’alcaloide se présente en assez grande quantité. Des réactions nettes n’ont pas été obtenues dans les cellules mères des grains de pollen, ni dans ceux-ci. (:) L. ERRERA, /oc. cit., p. 83. TomE II, 1892. 346 E. DE WILDEMAN. — PRESENCE ET LOCALISATION, ETC. Dans le Dendrobium Ainsworthit, j'ai observé les mêmes locali- sations dans les feuilles et dans la fleur, que j'ai seules pu étudier. Dans le Phalaenopsis, je n'ai pu étudier que quelques fragments de racines aériennes. Les observations que j'ai exposées plus haut, relativement à la localisation de l’alcaloïde, confirment dans leur ensemble les résultats qui ont été obtenus par MM. Errera, Clautriau et Maistriau (*), dans un premier travail sur la localisation des alca- Joïdes. Nous avons en effet trouvé l'alcaloïde surtout abondant dans les tissus jeunes, dans les cellules en voie active de division du point végétatif de la tige, des feuilles et des racines, dans l’épiderme et les poils. Il paraît aussi se localiser, dans certains cas, dans les cel- lules à raphides. Bruxelles, Institut botanique. Mars 1892. (*) Premières recherches sur la localisation et la signification des alcaloides. (ANN. DE LA SOC. BELGE DE MICROSC., t. XII.) CONTRIBUTION A L'ÉTUDE LOCALISATION MICROCHIMIQUE DES ALCALOLDES LA FAMILLE ae ORCHIDACEES Emile DE DROOG (’) DOCTEUR EN SCIENCES NATURELLES v Le caractère essentiel de la microchimie consiste, non dans la recherche de petites quantités (des substances), mais dans leur localisation. » LÉO ERRERA. PRESENCE D'ALCALOÏDE. Par leurs fleurs aux couleurs si délicates, aux formes si gracieuses et parfois si étranges, comme aussi par leurs « bulbes », les Orchi- dacées ont surtout intéressé les morphologistes; certaines particu- larités histologiques les ont bien désignées à l’attention des anato- mistes et a celle de quelques physiologistes (*), mais l'étude du (*) Ce travail a paru dans les Mémoires couronnés et autres mémoires publiés par l’Académie royale de Belgique, t. LV, 1896. (2) Citons : CHATIN, Anatomie des plantes aériennes de l'ordre des Orchidées. (MEM. DE LA SOC. IMP. DES SCIENCES DE CHERBOURG, 1856 et 1857.) LEITGEB, Die Luftwurzeln der Orchideen. (DENKSCHRIFTEN DER K. AKADEMIE DER WISSENSCHAFTEN. Wien, vol. XXIV, 1865.) J. CoSTANTIN, Recherches sur l'influence qu’exerce le milieu sur la structure des racines. (ANN. DES SCIENCES NAT., 7° série, t. I, p. 135, 1885.) E. DE JANCZEWSKI, Organisation dorsiventrale dans les racines des Orchidées. (ANN. DES SCIENCES NAT., 7° série, t. Il, p. 55, 1885.) M. Môgius, Ucber der anatomischen Bau der Orchideenblätter und dessen Bedeu- TOME II, 1896. 348 É. DE DROOG. — ÉTUDE DE LA LOCALISATION MICROCHIMIQUE contenu cellulaire n'a guère provoqué de recherches, et ce n’est qu'en 1892 que la présence d’un alcaloïde fut signalée dans cette importante famille (°). Le groupe des Orchidacées comprend plus de 5,000 espèces, réparties dans toutes les contrées chaudes et tempérées du globe, et nous avons cru qu'il ne serait pas sans intérêt : 1° de rechercher quelles sont, dans cette nombreuse famille, les espèces alcaloïdi- fères, et 2° de voir comment, dans les divers tissus de celles-ci, se distribue le principe actif qu'elles élaborent. | ~ Ce dernier point de vue nous conduit à l'étude microchimique comparée des Orchidacées, et il importe des lors, pour se faire une idée plus exacte de la topographie générale des alcaloïdes que l’on pourrait découvrir, de rapporter les résultats acquis à l'anatomie comparée de la famille. Vu les affinités histologiques profondes qui existent entre les Orchidacées, nous nous bornerons à exposer l'anatomie de Dendrobium nobile, où une base végétale fut d'abord observée, et nous consignerons, en l'occurrence, les particularités de structure que pourraient présenter certaines espèces. ANATOMIE DE Dendrobium nobile. A. Tige. — Si nous pratiquons une coupe transversale dans un entre-nœud d'une tige adulte, nous remarquons que celle-ci est constituée, en allant de la périphérie vers le centre de l'organe, comme suit : 1° Un épiderme (fig. 1, ep.) formé par une seule assise de petites tung fiir das System dieser Familie. (JAHRB. F. Wiss. BOTANIK, vol. XVIII, Pp. 530, 1887.) Groom, The velamen of Orchids. (ANN. OF Bor. Londres, 1893.) Mac DouGat, Poisonous influence of various species of Cypripedium. (MINNESOTA BOT. STUDIES, 1895.) (‘) E. DE Wirpeman, Présence et localisation d'un alcaloide dans quelques Orchidées. (BULL. DE LA SOC. BELGE DE MICROSC., t. XVIII, 1892.) Ce travail a été reimprime dans ce volume du Æecueil, Tome II, 1896. DES ALCALOÏDES DANS LA FAMILLE DES ORCHIDACÉES. 349 cellules, à section irrégulièrement pentagonale, intimement unies entre elles latéralement, ainsi qu'aux éléments du tissu sous- jacent avec lesquels elles alternent avec une assez grande régularité. Les parois cellulaires sont assez épaisses, ce qui semble être de règle chez les Orchidacées épidendres; les externes, arquées, sont partiellement subérisées et apparaissent comme recouvertes d'une cuticule brunatre (c). 2° Une zone sclérenchymateuse (sc), appareil de soutien, située immédiatement sous l'épiderme et qui n’a guère, en certains endroits, plus de quatre éléments d'épaisseur, Les cellules scléren- chymateuses sont polygonales; les plus petites, à parois épaisses, alternent avec celles de l’épiderme; les autres, à mesure que l’on se rapproche de la région centrale, perdent en épaisseur, gagnent en diamètre et finissent par se confondre avec les éléments du parenchyme. 3° Un parenchyme (pc) lacuneux, à cellules arrondies, dont les parois sont souvent pourvues de ponctuations plus ou moins elliptiques (cp). Certains éléments sont remarquables par leur grande dimension ect par une lignification partielle des parois (cl); d’autres encore renferment des raphides d'oxalate de chaux (fig. 2, co), réunies en bottes qu’entoure une matière mucilagineuse. Enfin, contre les faisceaux fibro-vasculaires, on observe de petits élé- ments (si) à parois très épaisses et contenant chacun une concrétion étoilée, relativement considérable et de nature siliceuse. 4 Des faisceaux fibro-vasculaires (fig. 2, /x) : la simple observa- tion macroscopique de la coupe révèle leur disposition éparse et caractéristique. Sous le microscope, il n'est pas rare de voir des faisceaux soudés deux par deux, de manière à simuler le type bicollatéral des Cucurbitacées. Les faisceaux ne présentent rien de bien particulier; citons toutefois l’arc scléreux (cf) surmontant le liber (/) et formé d’élé- ments pressés les uns contre les autres, dont les plus externes ont des parois si considérables que le lumen est presque oblitéré. Dans la région du xylème (x), ces fibres de sclérenchyme sont, contrai- rement à ce que nous venons de voir, le plus souvent isolées, peu nombreuses, à parois plus minces et a lumen très grand (cf”). Les TOME II, 1896. 350 É. DE DROOG. — ETUDE DE LA LOCALISATION MICROCHIMIQUE cellules entourant les faisceaux sont riches en amidon et constituent pour chacun d'eux une sorte de gaine amylifère. B. Racine (*). — Une coupe transversale, faite en arrière de la pointe de la racine, nous porte à considérer cinq régions bien distinctes et concentriques, ordonnées comme suit : 1° Un voile (fig. 3. v) formé d'un grand nombre d'assises de cel- lules dépourvues de tout contenu organisé, irrégulières et allongées d'une manière prépondérante dans le sens du rayon; les cellules les plus internes se distinguent par leur petitesse. Les éléments du voile présentent entre eux un certain caractère d’alternance; leurs épaississements spiralés sont tantôt dirigés tous dans le même sens, tantôt ils s’entre-croisent. 2° Un exoderme (exd) constitué par une seule assise cellulaire, dont les éléments sont polygonaux, allongés suivant le rayon, intimement unis entre eux ainsi qu'aux cellules du voile et aux cellules parenchymateuses avec lesquelles ils alternent. Toutes les cellules exodermiques ont les parois fortement épaissies; toutefois, on observe de distance en distance des cellules spéciales, à parois minces, dites « cellules de passage » (cp) (« Durchgangszellen » de Leitgeb), plus courtes que leurs voisines et mettant en communi- cation la zone parenchymateuse et le voile. Une coupe longitudi- nale montre que les cellules exodermiques ordinaires sont cinq ou six fois plus longues que les éléments de passage. 3° Un parenchyme (pa) à cellules riches en chlorophylle, lache- ment unies, arrondies ou déformées, souvent pourvues de ponc- tuations; les cellules externes et les internes sont les plus petites; elles alternent, celles-ci avec les éléments endodermiques, celles-la avec les cellules exodermiques; les cellules de parenchyme les plus grandes occupent la région moyenne. 4° Un endoderme (end) dont les caractères sont analogues à ceux de l’exoderme, mais ici les cellules de passage (cp) ne sont plus (1) Cf. STRASBURGER, Das Botanische Practicum, 2° édition, 1887, p. 191 fig. 83. Tome II, 1896. DES ALCALOIDES DANS LA FAMILLE DES ORCHIDACEES. 351 solidaires, elles sont associées de telle manière que l’anneau endo- dermique est formé de portions alternativement larges et étroites (cp), celles-ci opposées aux coins ligneux, celles-la aux massifs libériens. 5° Un cylindre central, dont l'axe est occupé par une moelle a cellules quelquefois ponctuées ou réticulées. C. Feuille. — Nous observons sur une coupe transversale du limbe : 1° Un épiderme supérieur (fig. 4, ep) à cellules allongées perpen- diculairement au limbe, a parois latérales d’aspect chiffonné et a parois externes revétues d’une cuticule lisse (c). Cet épiderme est dépourvu de stomates, mais très caractéristique par le fait qu’en certains endroits on voit des cellules épidermiques se modifier, s'invaginer en quelque sorte, pour limiter latéralement des produc- tions curieuses qui apparaissent comme des « poils immergés » (fig. 5, pi). Ces productions furent considérées par Meyen (°), qui, le premier, les observa chez Pleurothallis ruscifolia, et par Chatin (*) comme des stomates, et plus exactement, croyons-nous, par Schleiden et par Môbius (*) comme des poils profonds, analogues à ceux des Nymphéacées et du Platycerium alcicorne. Dans la coupe tangentielle, ces poils présentent une section cir- culaire et les cellules épidermiques adjacentes, modifiées, ont des replis cuticulaires très apparents. En coupe transversale, ces cellules affectent la forme de cônes tronqués, à base étroite renflée en tête et dirigée vers l’intérieur, et à grande base convexe et orientée vers l'extérieur; les parois sont cutinisées, sauf dans la région d'étranglement. Nous avons rencontré ces productions sur les deux épidermes de (1) MEYEN, Neues System der Pflanzen-P hysiologie, t. 1, p. 264. Berlin, 1837. (2) CHATIN, Loc. cit., t. V, p. 53, 1857. (3) Môgius, Ueber der anatomischen Bau der Orchideenblätter und dessen Bedeu- tung für das System dieser Familie, (JAHRB. F. Wiss. BoT., 1887.) TOME II, 1896. 352 É. DE DROOG. — ETUDE DE LA LOCALISATION MICROCHIMIQUE la feuille, et bien que généralement solitaires on observe parfois plusieurs poils associés (fig. 6). 2° Un parenchyme ou mésophylle (fig. 4, pa) à cellules irrégu- lières, laissant entre elles d'énormes méats. De même que dans la tige, il existe dans la feuille des cellules silicifères et des cellules oxalifères; ces dernières, en coupe longi- tudinale, apparaissent une dizaine de fois plus longues que leurs voisines. 3° Des faisceaux fibro-vasculaires qui se présentent avec les caractères que nous leur connaissons dans la tige. Il y a toutefois lieu de remarquer que la zone de fibres sclérenchymateuses, réduite à quelques éléments dans la région xylaire de la tige, est ici très puissante et entoure complètement le bois (fig. 4, scl), Parmi les éléments à parois épaisses et brillantes qui séparent le liber du xyleme, il en est qui présentent des ponctuations arrondies (cp) et dont la signification physiologique est encore mal connue. 4° Un épiderme inférieur (fig. 4, ep’), se différenciant par une épaisseur moindre et par une cuticule plus puissante et plus acci- dentée. Les stomates (fig. 7, s/) sont nombreux et formés par deux cellules de bordure sans cellule annexe, les chambres respiratoires chr) sont représentées par de grands méats. Les ceilules stoma- tiques sont surmontées de deux replis cuticulaires saillants, et souvent on voit la cuticule se prolonger sous les cellules d'une chambre respiratoire a l’autre (c). LOCALISATION MICROCHIMIQUE Actuellement on ne connaît aucune réaction propre aux bases végétales découvertes dans la famille des Orchidacées, et pour les localiser on doit s'en tenir aux réactifs généraux des alcaloïdes. Parmi ceux-ci, le meilleur est généralement la solution aqueuse diodure de potassium iodé (par abréviation IKI), qui, tuant rapide- ment la cellule, annihile l'imperméabilité du cytoplasme, vient agir sur la vacuole et y décèle la présence d’alcaloïde par la production Tome II, 1806. DES ALCALOÏDES DANS LA FAMILLE DES ORCHIDACÉES. 353 d'un précipité rouge brun très prononcé, dont l'aspect est si carac- téristique qu'il indique, d'une manière fort probable, la présence d’alcaloide dans un tissu où on n’en soupconnait nullement l’exis- tence. C'est même de la sorte que fut découvert l’alcaloïde dans Dendrobium nobile. Citons aussi l'acide phosphomolybdique, auquel il convient souvent d'ajouter de l'acide azotique pour obtenir une réaction nette; l’iodure double de mercure et de potassium, additionné parfois d’acide chlorhydrique; les iodures doubles de bismuth et de potassium, de cadmium et de potassium; l’acide sulfurique seul ou avec un cristal de bichromate de potassium ; le réactif de Frohde (molybdate de soude, 1 gr.; acide sulfurique concentré, 100 gr.); le bichlorure de mercure; l’acide picrique; le tétrachlorure de platine; le tanin; l’acide osmique; le trichlorure d'or. Dans nos recherches, nous avons suivi la marche employée dans les recherches microchimiques en général et nous avons contrôlé les résultats obtenus d’après la méthode d’Errera (:), c'est-à-dire en nous basant sur ce fait que « l'alcool tartrique » (1 gr. acide tartrique crist. dans 20 c. c. alcool abs.) enlève des tissus les alca- loïdes qu'ils contiennent et respecte les matières protéiques incluses dans la cellule. De plus, nous n'avons considéré que des tissus vivants, car, mortes, les cellules laissent échapper leur contenu soluble, et celui-ci, se répandant dans l'organisme par diffusion, rend toute localisation précise impossible. C'est en opérant de la sorte, d’ailleurs, que M. E. De Wildeman (°) a décelé la présence d’alcaloide dans : Dendrobium nobiie, D. Ains- worthii et dans les cellules de la racine de Phalaenopsis Luddeman- niana; de la même manière nous en avons découvert dans: Eria stellata, Catasetum tabulare, C. Hookert, C. macrocarpum, C. Bun- gerothit et C. discolor. (‘) L. Errera, Sur la distinction microchimique des alcaloides et des matières protéiques. (MEM. DE LA SOC. BELGE DE MICROSC., 1889, t. XIII.) (?) DE WiLDEMAN, /oc. cit. Tome II. 23 Tome II, 1896. 354 É. DE DROOG. — ETUDE DE LA LOCALISATION MICROCHIMIQUE EEE a a Liste des espèces examinées (’). Tribus (2). a Cypripedilum Calceolus L. (T. F. R.). 2. CYPRIPEDILINAE . . - — spectabile SW. (T. F. R.). Selenipedilum caudatum Rchb. f. (F.). 3. OPHRYDINAE....- - | Orchis maculata L. (T. F. F1.). Vanilla aromatica Sw. (T. F.). Epipactis palustris Crtz. (T. F. R. F1.). 4. NEOTTINAE . . 55. % = — latifolia All. (T. F.). Macodes Petola Bl. (F.). Goodyera discolor Ker. (F.). Thunia alba Rchb. f. (T. F. F1.). ps NE ESTONIE Trichosma suavis Ldl. (T. F.). | Coelogyne elegans Ldl. (T. F. R.). COELOGYNINAE Pleione lagenaria Ldl. (T. F. R.). is anata aa La Pholidota imbricata Ldl. (T. F. R.). ) Sturmia Wageneri Rchb. f. (T. F.). Galeandra D’ Escragnoleana Rchb. f. (T.). Polystachya galeata Rchb. f. (T. F. R.). Ansellia congoensis Rodig. (T. F.). 9. POLYSTACHYINAE. . . ——_" Masdevallia Mooreana Rchb. f. (T. F. F1.). Stelis braccata Rchb. f. et Warscz. (T. F. F1.). 12. PLEUROTHALLIDINAE. . | Restrepia antennifera H. B. K. (T. F.). Pleurothallis Grobyi Ldl. (T. F.). Octomeria diaphana Ldl, (T. F.). (*) Nous avons dressé cette liste d’après la classification établie par PFITZER dans : Die naturlichen Pflanzenfamilien, de ENGLER und: PRANZL. Leipzig, 1888, II. Teil, 6. Abteilung, p. 52. Les noms des espèces alcaloïdifères et les dénominations des groupes auxquels elles appartiennent sont imprimés en caractères gras. Les organes examinés sont représentés par les initiales : T (tige), R (rage) F (feuille), F1 (fleur), placées entre parenthèses. (2) Tribus dont aucun représentant n’a pu être examiné : 1. Apostasiinae, 6. Collabiinae, 8. Liparidinae, 10. Podochilinae, 11. ÉD 23. T'helasinae, 25. Z'hecostelinae, 26. Steniinae, 30. Dichaeinae. ToME II, 1896. DES ALCALOÏDES DANS LA FAMILLE DES ORCHIDACEES. 355 —_—_ ee er — — — — Tribus. Tetragamestus modestus Rchb. f, (T. F. R.). Scaphyglottis violacea Ldl. (T. F. R.). Ponera modesta Rchb. f. (T. F. R.). Coelia macrostachya Ldl. (T. F.). Amblostoma tridactylum Rchb. f. (T. F.). + =A. cernuum Scheidw. Arpophyllum spicatum LI. et Lex. (T. F.). Epidendrum xanthinum Ldl. (T. F. R.). Cattleya Acklandiae Ldl. (T. F.). Laelia crispa Ldl. (T. F. R.). Schomburgkia rosea Lind, (T.). Brassavola nodosa Hook. (T. F.). Sophronitis cernua Ldl. (F.). Leptotes bicolor Ldl. (F.). 13 UAEBIINAE . . « . . , FA SDBRALIINAE 21... : | Sobralia macrantha Ldl. (T. F.). Phajus grandifolius Lour. (T. F.). P : Calanthe Regnieri Rchb. f. (F.). DRE are ee 1 Chysis Limminghei Lind. et Rchb. f. (F.). Bletia speciosa H. B. K. (F.). 16. CYRTOPODIINAE . . . . | Lulophia maculata Rchb. f. (T.). Mormodes Cogniauxii L. Lind. (T. F.). Cataseium tabulare Ldl. (ir. F.). — Mookeri Lind. (T. F ). 17. CATASETINAE . . . . . == macrocarpum Rich. (I. F.). Catasetum saccatum Ldl. (T. F. R.). Catasetum Bungerothii N. E. Br. (T. F.). = discoto» Lind. (T. F.). | Lycaste gigantea Ldl. (T. F.). Anguloa Ruckeri Ldl. (F.). ea coe a Xylobium Hyacinthina Hort. (F.). Bifrenaria aureofulva Lal. (F.). CCAR At Stanhopea Wardii Lodd. (F.). Peper ee Gongora speciosa LA. (F.). Tae NAT Colax jugosus Ldl. (T.). i ah la tk Zygopetalum crinitum Lodd. (T. F. R.). TOME II, 1896. 356 É. DE DROOG. — ÉTUDE DE LA LOCALISATION MICROCHIMIQUE Tribus. 21. DENDROBIINAE .... 22. BOLBOPHYLLINAE . . 24. CYMBIDIINAE Goi. 2. 27. MAXILLARIINAE . . . . 28. 1ONCIDIINAR Eee Lt eos Dendrobium Dearii Rchb. f. (T. F. R. FL). = Brymerianum Rchb. f. (T. F. R. F1.). — aggregatum Roxb. (T. F.). = Dalhousianum Roxb. (T. F. R.). — densifiorum Wall. (T. F. R.). — clavatum Ldl. (T. F.). — Wardianum Warn. (T. F.). Dendrobium Atnsworthti T.Moore(T.F.R.Fl.). Dendrobium nobile Ldl, (T. F. R. F1.). Dendrobium chrysotoxum Ldl. (F1.). Eria stetlata Ldl. (T. F. R.). Eria ornata Ldl. (T. F. R.). \ Cirrhopetalum Thouarsi Ldl. (T. F. R.). Bolbophyllum refractum Rchb. f. (T. F. R.). Dendrochilum glumaceum Ldl. (T. F. F1.). Rare ce Measuresianum Rchb. f.(T. F.). eburneum Ldl. (T. F. R.). crabes eburneum Lal. (T. F.). Grobya galcata Ldl, (T. F.). | Maxillaria leontoglossa Rchb. f. (T. F.). | Scuticaria Hadwenii Benth. (F.). | Ada aurantiaca Ldl. (F.). Rodriguezia laxiflora Lal. (T. F. F1.}. = Gomeza chrysostoma Hottmsgg. Mesospinidium vulcanicum Rchb. f. (T. F. FL). Trichopilia Galeottiana A. Rich. (F.). Aspasia lunata Ldl. (T. F.). Cochlioda rosea Benth. (F.). Odontoglossum pulchellum Batem. (T. F.). — ciyrhosum Ldl. (T. F.). — crispum Ldl. (T. F. F1.). = triumphans Rchb. f. (T. F.). Palumbina candida Rchb f. (T. F.). Miltonia Moreliana Warn. (F.). — anceps Ldl. (F.). — spectabilis Ldl. (F.). — flavescens Hook. (F.). | Oncidium flexuosum Sims (F.). ToME II, 1806. DES ALCALOÏDES DANS LA FAMILLE DES ORCHIDACÉES. 357 Tribus. 29. HUNTLEYINAE. Warscewiczella discolor Rchb. f. (F.). Huntleya Meleagris LAl. (F.). Phalaenopsis Luddemanniana Rchb.f. (T.R.). Cleisostoma crassifolium Ldl. (F.). Saccolabium guttatum Lal. (F.). Vanda suavis Ldl. (T. F. R.). — tricolor Rchb. f. (F.) (#). Angrecum superbum Thou. (F.). Aerides odoratum Lour. (F.). — Fieldingit F. Moore (F.). 31, SARCANTHINAE . Nous devons à |’extréme obligeance de M. Lubbers, chef de cul- ture au Jardin botanique de l’État, à Bruxelles, et à M. Linden, directeur de l'établissement « L’horticulture internationale », à Bruxelles, d’avoir pu examiner ces Orchidacées. Nous nous faisons un plaisir d’adresser ici tous nos remerciements à ces messieurs. (1) Des observations communiquées à Léo Errera par M. Ph. Molle démon- trent la présence d’un alcaloïde chez Vanda tricolor. Voici la note de M. Molle: « Dans les premiers jours du mois de mai de 1902, je fis quelques recherches microchimiques sur les Orchidacées : elles m’amenérent à conclure entre autres que, contrairement aux observations de M. De Droog, Vanda tricolor est alca- loïdifère. » Parmi les réactifs généraux des Alcaloïdes dont j’essayai l’action sur les tissus de cette plante, c’est l’iodure de potassium iodé qui me fournit les indica- tions les plus nettes. Il détermina dans les vacuoles de certaines cellules la formation d’un précipité brun à reflet bleuâtre, qui s’évanouissait à peine formé; mais une seconde addition de réactif ramenait le même phénomène dans les éléments où la première précipitation avait été particulièrement abondante. » Par l’iodure double de potassium et de bismuth, les mêmes cellules se remplirent d’un précipité rouge-brique encore bien observable, quoique se déta- chant moins clairement du reste de la préparation. » En faisant agir soit de l'acide phosphomolybdique, soit de l’iodure double de potassium et de mercure sur des coupes transversales non lavées des mêmes elements, je pus très bien observer la formation de précipités d’alcaloide en dehors des cellules : mais à l’intérieur des éléments encore intacts, l'observation de ces précipités ne fut possible qu’en suivant la diffusion des réactifs dans les tissus, même elle ne fut suffisamment nette que dans les vacuoles d’une certaine étendue. » Ilen fut de même d’autres réactifs généraux, tels que ie chlorure mercurique, TOME II, 1896. 358 &. DE DROOG. — ETUDE DE LA LOCALISATION MICROCHIMIQUE ORCHIDACEES ALCALOIDIFERES. § 1. DENDROBIUM NOBILE. A. Action des réactifs. — Les réactifs généraux qui ont servi a caractériser l’alcaloide contenu dans les tissus de cette plante (°), sont : 1 L'iodure de potassium iodé, qui donne un précipité brun- kermés très prononcé et persistant. Ce précipité disparaît sous l'influence de la chaleur sans toutefois réapparaitre lors du refroi- le chlorure de platine, etc., qui ne furent utilisés que comme moyens de contrôle. » Quand j’examinai la première fois les organes de Vanda tricolor, je me bornai à y reconnaître la présence d’un alcaloïde et à en expérimenter quelques reac- tions sans chercher à en préciser le siège. C’est ainsi que j'en décelai dans les racines aériennes à quelques millimètres du sommet, dans les jeunes feuilles dont je n’examinai que des coupes transversales, et dans les fleurs dont le pédon- cule et le gynostème surtout en contenaient notablement. » Mais deux mois plus tard, quand je voulus compléter mes observations, l’alcaloïde avait disparu des feuilles et des fleurs, il n’en restait qu’auprés du point végétatif des racines. » Il s’y trouvait dans les éléments parenchymateux du centre de la stèle, a 2-3 millimètres du méristème et sur une longueur de 10-15 millimètres. » Au dela, les éléments de cette région avaient lignifié leur membrane et s’étaient débarrassés de leur alcaloide. » Je ne vis réapparaitre ce corps qu’au voisinage des méristèmes qui donnent naissance aux racines adventives : 1a, il avait envahi les cellules de la région péricyclique de la racine mère ainsi que les éléments de l’écorce voisins des | cellules en voie de recloisonnement. » J’ai tenu à insister sur les variations de la teneur en alcaloide des sucs de Vanda tricolor, parce qu’elles expliquent en grande partie comment un observa- teur attentif et doué d’une excellente méthode de recherche est arrivé au sujet de cette plante à des conclusions erronées. » [Note ajoutée lors de la réim- pression. | (1) L’alcaloïde découvert dans Dendrobium nobile a été, de la part de M. G. Clautriau, assistant à l'Institut botanique de l'Université de Bruxelles, l’objet d’une étude macrochimique; consulter à ce sujet : DE WILDEMAN, /oc. cit., P. 104. Tome II, 1806. DES ALCALOIDES DANS LA FAMILLE DES ORCHIDACEES. 359 dissement, ce qui distingue encore ce précipité de la coloration produite par l’iode sur le glycogène et sur les matières hydrocar- bonées ; 2° L'iodure double de potassium et de bismuth, dont l’action est assez analogue a celle du réactif précédent; 3° L'iodure de mercure et de potassium additionné d’HCl, avec lequel il se forme un précipité jaunatre; 4° L’acide phosphomolybdique, qui provoque la formation d’un précipité jaunâtre, peu abondant; une goutte d’acide azotique rend la réaction plus sensible; 5° L’acide sulfurique, lequel communique aux cellules a alca- loide une teinte jaunatre peu nette; 6° Le réactif de Frdhde (molybdate de soude, I gr.; acide sul- furique concentré, 100 gr.), dont les effets sont très variables et qui détermine, en général, dans les cellules riches en alcaloide, une coloration jaune verdatre. B. Localisation. — Tige. — L'alcaloïde y est abondant. Toutes les cellules du point végétatif en renferment et il en est de même des premières ébauches foliaires; l’alcaloïde fait toutefois défaut dans les cellules à raphides. Dans l’organe arrivé à l’état adulte, l'alcaloïde se localise dans les cellules parenchymateuses et surtout dans celles qui entourent les faisceaux; on trouve la base même dans les cellules qui contiennent des grains d’amidon et de la chlo- rophylle. On n'observe aucun précipité dans les cellules à raphides ni dans les éléments lignifiés que nous avons signalés en exposant l'anatomie de la tige. Racines aériennes. — Au point végétatif, toutes les cellules, y compris celles qui donneront naïssance au voile, sont riches en alcaloide; mais, au fur et à mesure que les tissus se différencient, on voit l'alcaloide émigrer des parties périphériques vers la zone parenchymateuse, où 1l se maintient exclusivement et en grande abondance, surtout dans les petites cellules adossées à l’exoderme d’une part, à l'endoderme d'autre part. L'iodure de potassium iodé détermine encore dans la paroi des cellules du voile et dans celle des éléments exodermiques et endo- TOME II, 1896. 360 É. DE DROOG. — ETUDE DE LA LOCALISATION MICROCHIMIQUE dermiques une coloration rouge brun, mais celle-ci ne peut être attribuée à la présence d’alcaloide, car elle persiste après l’action de l'alcool tartrique. Feuilles. — Nous avons dit que les premières ébauches foliaires contenaient de l’alcaloïde ; dans la feuille qui a atteint son complet développement, on remarque une réaction très abondante dans les deux épidermes et dans le parenchyme chlorophyllien. Les poils immergés renferment de l’alcaloïde, et M. De Wildeman ena observé dans quelques cellules à raphides. Dans la partie engai- nante de la feuille adulte, ou les tissus sont peu vivants, la quantité de base est relativement peu importante. Appareil reproducteur. — Dans les enveloppes florales, l’alca- loide se comporte comme dans les feuilles végétatives, mais la réaction est plus abondante que chez ces dernières. La face infé- rieure du labelle est recouverte de poils pluricellulaires à alcaloïde et l’on décèle cette substance dans le style,-le stigmate, les papilles stigmatiques et les étamines; enfin, tous les tissus de l’ovaire sont riches en alcaloïde. L’épiderme du pédoncule de la fleur contient aussi de l’alcaloide et en quantité plus notable que le parenchyme qu'il limite. § 2. DENDROBIUM AINSWORTHII. Cette Orchidacée présente, dans toutes ses parties, une struc- ture semblable à celle de Dendrobium nobile. M. De Wildeman a observé les mêmes localisations d’alcaloide que précédemment dans les feuilles et dans l'appareil reproduc- teur. Nous ajouterons que dans la tige et dans la racine aérienne, l'action des réactifs cités plus haut et la topographie de la base végétale se manifestent avec les caractères que nous leur connais- sons dans Dendrobium nobile. § 3. ERIA STELLATA. A. Action des réactifs. — L’iodure de potassium iodé provoque un précipité de sphérules brunes à reflet bleuâtre qui sont agitées . Tome II, 1896. DES ALCALOIDES DANS LA FAMILLE DES ORCHIDACEES. 361 d’un vif mouvement brownien; l’acide phosphomolybdique pré- cipite en jaune sale; l’iodure double de mercure et de potassium donne naissance à des sphérules incolores qui se fusionnent en sphérules plus volumineuses; l’iodure de potassium et de bismuth se comporte d’une manière assez semblable à celle de l'iodure de potassium iodé ; le réactif de Fréhde colore en jaune verdatre les cellules alcaloïdifères. B. Localisation. — Tige bulbeuse. — Sous l'épiderme, formé de cellules rectangulaires à forte cuticule, se trouve un parenchyme, riche en amidon et en chlorophylle, différencié en petites et en grandes cellules. Les parois à épaississements de ces dernières sont tapissées de dépôts se colorant par IKI en brun rouge, mais il faut probablement considérer ceux-ci comme étant de nature hydrocarbonée. Au sein de ce parenchyme se trouvent noyés les faisceaux. Comme nous l'avons vu antérieurement, toutes les cellules du point végétatif contiennent de l'alcaloïde, sauf celles à raphides; dans l'organe ayant atteint son complet développement, on n observe plus la base que dans les petites cellules parenchyma- teuses signalées plus haut. Nous avons pu déceler l’alcaloide dans la région criblée (cellules annexes) des faisceaux. Racines aériennes. — Le voile se réduit à 3-4 assises de cellules dont certaines, de la périphérie, se prolongent en poils. Abondant au point végétatif, l'alcaloïde se Jocalise dans l'organe adulte : dans la zone parenchymateuse, surtout dans les cellules plus petites adossées à l’exoderme et a l'endoderme, et dans quelques cellules de l'étui médullaire. Feuilles. — Elles présentent une structure assez semblable a celles de Dendrobium nobile; toutefois, ici, les poils font défaut et la couche de fibres sclérenchymateuses entourant les faisceaux est, de beaucoup, plus puissante. Nous avons retrouvé l’alcaloïde : dans les deux épidermes, dans les cellules mésophylliennes, surtout dans celles situées contre les épidermes et dans celles qui entourent les faisceaux, ainsi que dans les cellules annexes des tubes criblés. Tome Il, 1896. 362 É. DE DROOG. — ETUDE DE LA LOCALISATION MICROCHIMIQUE Il ne nous a pas été donné d’étudier l'appareil reproducteur de ce végétal qui appartient a un genre voisin du genre Den- drobium. § 4. CATASETUM TABULARE. — (CATASETUM HOOKERI. — CATASE- TUM MACROCARPUM. — CATASETUM BUNGEROTHI. — CATASETUM DISCOLOR. Nous n’avons eu l'occasion d'examiner que la tige bulbeuse et les feuilles de ces Catasetum alcaloïdifères. Ils se ressemblent tous au point de vue anatomique, se comportent de même avec les réactifs des alcaloïdes, et emmagasinent la base dans les mêmes éléments histologiques. A. Action des réactifs. — Les réactifs généraux qui servent le mieux à caractériser l’alcaloïde que contiennent ces plantes, sont : 1° L'iodure de potassium iodé, qui donne un précipité brun-ker- mes à reflet bleuâtre, peu abondant, formé de sphérules très petites, et très fugitif; 2° L'acide phosphomolybdique, qui fournit un précipité jaune verdâtre finement granuleux ; 3° L'iodure de mercure et de potassium, avec lequel il se forme un abondant précipité grisatre et fugitif, au sein de la vacuole ratatinée ; 4° Le bichlorure de mercure, qui provoque la formation de petites sphérules incolores; 5° L’iodure double de bismuth et de potassium, dont l’action est ici plus caractéristique que celle de IKI. Il y a production d’un pré- cipité granuleux brun rouge, très abondant, très persistant : il prend naissance en différents points et paraît ainsi formé d’flots qui se réunissent vers l'intérieur de la vacuole (fig. 8); 6° Le trichlorure d'or, avec lequel il se produit des sphérules incolores ; 7° Le réactif de Fréhde, qui colore en jaune verdatre les cellules a alcaloide. Il ne s'est produit rien de caractéristique par l’iodure double Tome II, 1806. DES ALCALOIDES DANS LA FAMILLE DES ORCHIDACEES. 363 de potassium et de cadmium, l'acide picrique, le tétrachlorure de platine, l'acide tannique, ni par le perchlorure de fer. B. Localisation. — La tige est a cellules épidermiques fortement épaissies, auxquelles fait suite un parenchyme dont la plupart des éléments sont de grande dimension et pourvus d’épaississements spiralés. Dans ce parenchyme sont distribués les faisceaux entourés de petites cellules riches en amidon. Quand on fait agir l'iodure de potassium iodé sur une coupe de la tige, il se produit dans les cellules du parenchyme cortical une coloration brun rouge très intense, qui disparaît par la chaleur et réapparaît par refroidissement. Cette coloration doit être due à la présence de matières hydrocarbonées et ne peut être rapportée à un alcaloïde, car elle se manifeste après l’action de l'alcool tar- trique. La tige ne présente de trace d'alcaloïde dans aucun de ses tissus. Feuilles (fig. 9). — La coupe transversale d’une feuille nous montre qu'elle est constituée par : 1° une couche de cellules épi- dermiques (ep) rectangulaires, surmontée d'une cuticule assez épaisse; 2° un mésophylle à cellules arrondies (pa) dont les plus externes alternent avec les éléments épidermiques, les plus petites entourant les faisceaux; 3° des faisceaux fibro-vasculaires, ceints chacun d’une gaine sclérenchymateuse (sc/) qui s'interrompt par- fois a la jonction du xyleme et du liber; le faisceau qui constitue la nervure médiane acquiert un développement considérable et s'étend presque d'un épiderme à l’autre; le liber est peu déve- loppé; 4° des massifs de sclérenchyme (m. scl), situés dans le voisi- nage des deux épidermes, et 5° un épiderme (ep’) inférieur qui ne diffère de l'épiderme supérieur que par la dimension plus petite de ses éléments constitutifs. Nous avons toujours observé l’alcaloide dans les deux épidermes et dans les cellules du mésophylle, surtout dans celles voisines des épidermes ou qui entourent les faisceaux. TOME II, 1896. 364 É. DE DROOG. — ETUDE DE LA LOCALISATION MICROCHIMIQUE § 5. PHALAENOPSIS LUDDEMANNIANA. A. Action des réactifs. — On obtient, dans les cellules à alca- loïde de ce végétal, les réactions décrites en étudiant Dendrobium nobile. B. Localisation. — De cette plante, très rare dans les collections, nous n'avons pu étudier qu'un fragment de tige florale et la racine aérienne dans laquelle seulement on peut déceler la présence d’alcaloide. Racines aériennes (fig. 10). — Anatomiquement, la racine de Phalaenopsis Luddemanniana differe de notre racine typique par : 1° un voile réduit a deux assises de cellules à épaississements spi- ralés et dont certaines, externes, se prolongent sous forme de poils; 2° un exoderme mal défini, et 3° un endoderme dont les cellules de passage sont très étroites et à parois très minces. Dans ce végétal encore, on observe au sommet végétatif une grande abondance d’alcaloide dans toutes les cellules, et la diffé- renciation en tissus est accompagnée d'une localisation de l'alca- loide qui s’accumule chez la racine adulte dans les cellules du parenchyme, surtout dans celles adossées à l'exoderme et a l’endo- derme. RÉSULTATS GENERAUX. Sur les 104 espèces d’Orchidacées qu'il a été possible d'examiner et qui appartiennent à 78 genres, 9 espèces se rapportant aux genres Dendrobium, Eria, Catasetum et Phalaenopsis doivent être considérées comme alcaloidiferes : les unes dans toutes leurs par- ties (Dendrobium nobile, D. Ainsworthii et probablement Eria stel- lata), les autres partiellement. Nous ne pouvons nous prononcer définitivement sur la fre- quence ou la rareté des alcaloïdes dans cette famille, car le nombre Tomer II, 1896. DES ALCALOÏDES DANS LA FAMILLE DES ORCHIDACÉES. 365 d’Orchidacées connues est si considérable qu'il impose de justes réserves ; mais nous pourrons être plus affirmatif quant à la topo- graphie des alcaloides dans ce groupe. Les réactifs, en effet, par l'intensité de leur action, indiquent que la fonction alcaloidique se manifeste d'une manière assez sensible dans les tissus actifs (points végétatifs de la tige et de la racine, appareil reproducteur) et qu’au fur et à mesure que les tissus se différencient, à cette différenciation correspond une émigration de la base vers des régions (épiderme, poils, parenchyme surtout autour des faisceaux) où elle semble le mieux localisée pour servir à la plante d'arme défensive. Et, si tel est l’un des rôles dévolus aux alcaloides, rien ne paraît mieux rendre compte de ce rôle que cette accumulation de principe dans les feuilles, dans les racines aériennes qui explorent si facilement le milieu ambiant et dont le point végétatif, très exposé, est gorgé d’alcaloide, et enfin cette abondance dans les fleurs, dont le labelle voyant a besoin d'être protégé contre la voracité des animaux. Les résultats auxquels nous sommes arrivé confirment d’ailleurs, une fois de plus, les idées qu’exprimait M. Léo Errera (*), sous la direction duquel ce travail a été entrepris : « Les alcaloïdes sont produits essentiellement dans les tissus actifs où les matières albu- minoides sont soumises à des décompositions et à des transforma- tions perpétuelles. Formés ainsi dans les tissus actifs, les alcaloïdes sont transportés vers la périphérie, de manière à s'oxyder plus facilement et à y servir en même temps à la protection de la plante contre les atteintes des animaux. » Institut botanique de l'Université de Bruxelles. Janvier 1896. (r) ERRERA, CLAUTRIAU et MAISTRIAU, Premières recherches sur la localisation et la signification des alcaloides, p. 28. (JOURN. DE LA SOC. ROY. DES SCIENCES MED. ET NAT. Bruxelles, 1887.) Tome II, 1806. 366 É. DE DROOG. — ETUDE DE LA LOCALISATION MICROCHIMIQUE Liste des genres d'Orchidacées, groupés d’aprés la classification de Pfitzer. I. — APOSTASIINAE. 1. ÂVeuwicdia. 2. Apostasia. Il, — CYPRIPEDILINAE. 3.(1)* Cypripedilum. 4. *“Selenipedilum. 5. Paphiopedilum. Ill. — OPHRYDINAE. a. SERAPIADEAE. 6. Ophrys. 7. Comperia. 8. “Orchis. 9. Serapias. 10. Aceras. 11. Himantoglossum. 12. Anacamptis. 6. GYMNADENIEAE. 13. Chamacorchis. 14. Herminium. 15. Coeloglossum. 16. Nigritella. 17. Gymnadenia. 18. Ponerorchis. 19. Stenoglottis. 20. Holothrix. P21. Aynottia. 22. Platanthera. 23. Bicornella. 24. Scopularia. Fluttonaea. Bartholina. Derimeria. Perularia. C. HABENARIEAE, Neotinea. Diplomeris. Cynosorchis. Flabenaria. Montolivaea. Bar laca. Roeperocharis. d. SATYRIEAE. Pachites. Forficaria. Brachycorythis. Satyrium. Schizochilus. Platycoryne. Schizodium. Brownleea. Disa. Ferschelia. Monadenia. €. CORYCIEAE. Disperis. Pterygodium. Ceratandra. Corycium. (*) Les noms des genres ayant fait l'objet de nos recherches sont précédés d’un astérisque. TOME II, 1896. ST. 52, DES ALCALOÏDES DANS LA FAMILLE DES ORCHIDACÉES. 367 IV. — NEOTTIINAE. a. THELYMITREAE. Thelymitra Epiblema. 46. DIURIDEAE. Diuris. Orthoceras. Microtis. Prasophyllum. €. PTEROSTYLIDEAE. Caleana. Drakaea. Pterostylis. d. CALADENIEAE. Acianthus. Cyrtostylis. Calochilus. ÆEriochilus. Lyperanthus. Burnettia, Caladeniu. Chiloglottis. Glossodia. Adenochilus. €. CHLORAEEAE, Chloraea. Bieneria. Bipinnula. jf. POGONIEAE. Corysanthes. Pogonia. Cleistes. Triphora. Codonorchis. Nervilia. Chlorosa. Cryptostylis. Stercosandra. Lecanorchis. Arethusa. Galera. g. VANILLEAE. Epistephium. Galeola. Eriaxis. Cyrtosia. . * Vanilla. hh, CEPHALANTHEREAE. Cephalanthera. . *Æpipactis. Limodorum. Æpipogon. Aphyllorchis. Zz. GASTRODIEAE. Gastrodia. Leucorchis. k. SPIRANTHEAE. Pelexia. Baskervillea. Spiranthes. Sarcoglottis. Sauroglossum. Stenorrhynchus. Listera. Neottia, /. PHYSUREAE, Vrydagzynea. Cystorchis. Physurus. Tome II, 1806. 368 E. DE DROOG. — ETUDE DE LA LOCALISATION MICROCHIMIQUE 108. Queteletia, VI. — COLLABIINAE. 109. Anoectochilus. ton ONE 110. Herpysma. é eR 146. Collabium. D, 147. Chrysoglossum. dre, 148. Deglyphosa. 114. Moerenhoutia. VII. — CŒLOGYNINAE. 115. Lepidogyne. 116. Hetaeria. ?149. fosepha. 117. Odontochilus. 150. *Coelogyne. 118. Myrmechis. 151 *Pleione. _ 119. Dossinia. £52. Neog ry ne. 120. *Macodes. 153. Otochilus. 121. Haemaria. 154. *Pholidota. 122. Hylophita. 155. Platyclinis. 123. Salacistis. 2156. *Sturmea. 124. Platylepis. 125. Æucosia. Vill. — LIPARIDINAE. 126. Gymnochilus. ae D arc THON Malaxes. AN 7 157. Microstylis. 158 Orestia. Ht CR AICTE aE: 159. Lphippianthus. 129. Wullschlägelia. 160. Léparis. 130. Pseudocentrum. 161. Cestichis. 131. A/tensteinia. 162. Oberonia. 132g leEvzcRes. 163. Calypso. 133. Cranichis. 164. Coralliorrhiza. 134. Gomphichis. 135. Stenoptera. IX. — POLYSTACHYINAE. 136. Prescottia. = 2137. Manniella. 2165. Zipularia. 138. Ponthicva. 166 Acrolophia. 167. *Galeandra. 2. TROPIDIEAE. 2168. Oreorchis. 139. Zropidia. 169. *Polystachya. 140. Corymbis. 170. *Ansellia. V. — THUNIINAE. ?171. Bromheadia. 141. *Thunia. X. — PODOCHILINAE. ?142. Ayrundina. 143. Bletilla. 172. Podochilus. 144. *Zrichosma. 173. Appendicula. Tome II, 1896. DES ALCALOIDES DANS LA FAMILLE DES ORCHIDACEES. 36g XI. — GLOMERINAE. 174. Larina. 175. Glomera. 176. Agrostophyllum. 177. Callostylis. 178. Ceratostylis. 2179. Cryptochilus. XII. — PLEUROTHALLIDINAE. 180. PAysosiphon. 181. *Masdevallia. 182. Cryplophoranthus. 183. *Srelis. 184. Scaphosepalum. 185. *Restrepia. 186. *Pleurothallis. 187. Lepanthes. 188. *Octomeria. 189. Brachionidium. XIII — LAELIINAE. ‘2, PONEREAE. 190. Zsochilus. 191. *Zetragamestus. 192. *Scaphyglottis. 193. *Ponera. 194. Hexadesmia. 195. Octadesmia. 196. *Coelia. 197. Hexisea, 198. *Amblostoma. 199. Seraphyta. 200. Diothonaca. 201. *Arpophyllum. 202. Hartwegia. b. LAELIINAE. 203. *Epidendrum. 204. Diacrium. 205. *Cattleya. Tome II. 206. 207. 208. 209. 210: 211. *Laelia. *Schomburgkia. * Brassavola. *Sophronitis. Meiracyllium. * Leptotes. XIV. — SOBRALIINAE. BE HER 214. ae 216. F204) 218. 219. 220. 201. 292 220 224. 2208 226. Ban 228. 229. 230. PEN 1e De Elleanthus. Sertifera. * Sobralia. Fregea. Calopogon. Hexalectris. XV. — PHAJINAE. *Phajus. * Calanthe, Preptanthe. Limatodes. Calanthidium. Tainia. *Chysis, Ipsea. Plocoglottis. *Bletia. Spathoglottis. Aplectrum. Acanthephippium. Anthogonium. Pachystoma. XVI. — CYRTOPODIINAE. PA 234. 225% 236. 237. 238. 239. 240. 241 . Geodorum. Lissochilus. *Eulophia. Cremastra. Dactylostalix. Pteroglossaspis. Cyrtopodium. Govenia. Warrea. 24 Tome II, 1896. 370 É. DE DROOG. — ETUDE DE LA LOCALISATION MICROCHIMIQUE EEE ———————e oS XVII. — CATASETINAE. XXI. — DENDROBIINAE. 242. *Mormodes. 275. Latourea. 243. *Catasetum. 276. *Dendrobium. 244. Cycnoches. 277. Aporum. 278. *Eria. XVIII. — LYCASTINAE. 279. Porpax. 280. Phreatia. 245. *Anguloa. 246. *Lycaste. XXII. — BOLBOPHYLLINAE. 247. Paphinia. ~ 248. *Xylobium. 281. Drymoda. 249. Batemania. 282. Monomeria. 250. *Bifrenaria. 283. Sunipia. 284. Lone. XIX. — GONGORINAE. 285. *Cirrhopetalum. 286. *Bolbophyllum. 251. Lacaena. 287. Bolbophyllaria. 252. Peristeria. 288. Megaclinium. 253. Acineta. 289. Tyias. 254. Coeliopsis. 290. Æpicranthes. 255. Sievekingia. 291. *Dendrochilum. 256. ZLycomormium. 292. Osyricera. 257. Coryanthes. 293. Acrochaene. 258. Paradisanthus. ?294 Panisea. 259. Aganisia. 260. *Stanhopea. XXII. — THELASINAE. 261. Stanhopeastrum. 262. Chrysocycnis. 263. Polycyenis. 264. Houlletia. 265. Kegelia. 295. Thelasis. 2296. Acriopsis. XXIV. — CYMBIDIINAE. 266. Schlimia. 297. *Grammatophyllum. 267. *Gongora. 298. Wazlesia. 268. Cirrhaea. 299. Dipodium. 300. Æulophiopsis. XX. — ZYGOPETALINAE. 301. Cyperorchis. 302. *Cymbidium. 303. Grammangis. 2304. *Grobya. 269. Kéllensteinia. 270. *Colax. 271. *Zygopetalum. 272. Lygosepalum. XXV. — THECOSTELINA. 2273. Galeottia. 274. Æriopsis. 305. Zhecostele. Tome II, 1896. DES ALCALOIDES DANS LA FAMILLE DES ORCHIDACEES. 37% XXVI. — STENIINAE. 306. Stenia, XXVII — MAXILLARIINAF. 307. Mormolyce. 308. *Maxillaria. 309. *Scuticaria, 310. Camaridium. 311. Ovnithidium. 312. Zrigonidium. 313. Æulophidium. XXVIII. — ONCIDIINAE. a. NOTYLIEAE. 314. Zelipogon. 315. Zrichoccros. 316. Macradenia. 317. Warmingia. 318. Notylia. 6, IONOPSIDEAE. 319. Zrichocentrum. 320. Pappéritzia 321. *Rodriguesia. 322. Zonopsis. 323. Scelochilus. 324. Comparettia. 325. Plectrophora. 326. Diadenium. 327. Chacnanthe. 328. Saundersia. 329. Brachtia. C. ADEAE. 330. * Ada. 331. *Mesospinidium. 332. Neodryas. 333. Sutrina. 334. Trizeuxis. 335. Quchettia. 336. Cohniella. 337- 338. 339. 340. 341. 342. 343. 344. 2345 346. 347- 348. 349. 350. ACT. 352. 353: 354- 355- 356. 357- d. TRICHOPILIEAE. ° * Trichopilia. Helcia. €. ASPASIEAE. * A spasia. Dignathe. * Cochlioda. J. ODONTOGLOSSEAE. Zygostates. Hofmeisterella. Ornithocephalus. Plymatidium. * Odontoglossum. A6ola. Gomeza. * Palumbina, Brassia, * Wiltonia. *Oncidium. Lockhartia, Cryptarrhena. Sigmatostalix. Solenidium. Chytroglossa. XXIX. — HUNTLEYINAE. 358. 359- 360. 361. 362 363. 364. 365. 366. 367. 368. Promenaea. Kefersteinia. Chondrorrhyncha. Cheiradenia. * Warscewiczella. Pescatorea. Bollea. *Huntleya. Chaubardia. XXX. — DICHAEINAE. Dichaea, Dichaeopsis. 372 XXXI. — SARCANTHINAE. 369. Pachyphyllum. 370. Nasonia. 371. Centropetalum. 6, AERIDEAE. 372. Diplocentrum. ~373. Æenanthera. 374. Esmeralda. 375. Vandopsis. 376. Luzsia. 377. Cottonia. 378. Stauropsts. 379. Polychilos. 380. *Phalaenopsis. 381. Doritis. 382. Sarcanthus. 383. *Cleisostoma. 384. Lchioglossum. 385. Microsaccus. 386. Schünorchis. É. DE DROOG. — ETUDE DE LA LOCALISATION MICROCHIMIQUE a. PACHYPHYLLEAE. TOME II, 1896. 387. *Saccolabium. 388. Ceratochilus. 389. Acampe. 390. Uncifera. 391. * Vanda. 392. *Angrecum. 393. Aerangis. 394. Macroplectrum. 395. Polyrrhiza. 396. Campylocentrum. 397. Oeonia. 398. Zéstrostachys. 399. Mystacidium. 400. Cryptopus. 401. Dendrophylax. 402. Taeniophyllum. 403. Chiloschista. 404. *Aerides. 405. Grosourdya. 406. Sarcochilus. 407. Camarotis. 408. Rhynchostylis. 409. Aeranthus. 410. Zrichoglottis. ToME II, 1805. DES ALCALOÏDÉS DANS LA FAMILLE DES ORCHIDACEES. 373 EXPLICATION DE LA PLANCHE La coloration brun rouge indique la localisation de l'alcaloide. — Grossissement : 245 diamètres. Dendrobium nobile. Fic. 1. — Segment de la coupe transversale de la tige : c, cuticule; ep, épi- derme; sc/, zone sclérenchymateuse; pc, parenchyme cortical; cp, cellules à ponctuations elliptiques; c/, cellules à paroi lignifiée. Fig. 2. — Portion de la coupe précédente montrant la structure d’un faisceau fibro-vasculaire : co, cellule oxalifére; si, cellule silicifère; cf, cf”, cellules circumfasciculaires; /, liber; x, xyléme; cp, cellule ponctuée. Fic. 3. — Portion de la racine aérienne circonscrite au cylindre central, coupe transversale : 7, voile; exd, exoderme; cp, cellule de passage (« Durchgangszellen » de Leitgeb); pa, parenchyme; end, endo- derme. Fic. 4. — Coupe transversale de la feuille : c, cuticule; ep, épiderme supérieur; pa, parenchyme ou mésophylle; sc/, sclérenchyme; +, xyléme; 1, liber; cp, élément ponctué; ep’, épiderme inférieur. Fic. 5. — Poil immergé en coupe transversale : pz, poil; ep, pa, c, comme plus haut. F1G. 6. — Trois poils immergés associés. Fic. 7. — Épiderme inférieur montrant la cuticule allant d’une chambre respi- ratoire à l’autre : sf, stomate; chr, chambre sous-stomatique ou respiratoire; c, cuticule; pa, ep’, comme précédemment. TOME II, 1896. 374 É. DE DROOG. — ÉTUDE DE LA LOCALISATION, ETC. Catasetum Hookeri. Fic. 8 — Trois cellules épidermiques de la feuille montrant les différentes phases (a, B, y) de l’action de l’iodure de bismuth et de mercure. Catasetum macrocarpum. Fic. 9. — Coupe transversale de la feuille : c, ep, ep’, pa, scl, x, 4, comme plus = haut ; 7. sc/, massif de fibres sclerenchymateuses. Phalaenopsis Luddemanniana. Fic. 10, — Portion de la coupe transversale de la racine aérienne. Lo. [#4 7" # —) 4 pet { be ° . à | À ‘ f Li ANL À: à 5 { FA) a À ue" y — os mT ; «Ne MG) WE: CI 1 PE oe EDe Diveg Ms feted! et ; : eee Arche LR BIBLIOGRAPHIE DES ALCALOIDES, GLYCOSIDES, TANNINS, ETC. REUNIE PAR L. ERRERA ALCALOIDES I. — GENERAUPEES BRÜHL (J.-W.), in Gemeinschaft mit E. HJELT et O. Ascuan, Die Pflanzenalkaloïde. Braunschweig, Vieweg und Sohn, 1900. CorNEviN (C.), Des plantes vénéneuses et des empoisonnements qu'elles déterminent. Paris, Didot et Cie, 1887. De Vries (H.), Ueber einige Nebenproducte des pflanzlichen Stoff- wechsels. (Landwirthschaftliche Jahrbticher, 10, 687 [1881].) DRAGENDORF (G.), Die Heilpflanzen der verschiedenen Vülker und Zeiten, ihre Anwendung, wesentlichen Bestandtheile und Ge- schichte. Stuttgart, F. Enke, 1808. TOME II, 1906. 376 L. ERRERA. — BIBLIOGRAPHIE Durour (J.), Notices microchimiques sur le tissu épidermique des végétaux. (Bull. 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Husemann (A. et Tu.) et HivGer (A.), Die Pflanzenstoffe in chemi-. scher, physiologischer, pharmakologischer und toxikologischer Hinsicht. Berlin, Springer, 1884. LIEBERMANN (L.), Beitrag zur forensischen Untersuchung auf Alka- loide. (Ber. deutsch. chem. Ges., 9, 151 [1876].) Magquenne (L.) et Puitippe (L.), Recherches sur la ricinine. (Comptes. rendus de l’Acad. des Sc. Paris, 188, 506 [1904].) La ricinine serait un dérive pyridique. MaTTiROLO (O.) et Buscationi (L.), Ricerche anatomo-fisiologiche sui tegumenti seminali delle Papilionacee. (Mem. del. Accaï. del. Sc. di Torino, [2], 42 [1892].) TOME II, 1906. DES ALCALOÏDES, GLYCOSIDES, TANNINS, ETC. 377 Pictet(A.), Die Pflanzenalkaloïde und ihre chemische Konstitution. -Deutsche Bearbeitung. Berlin, 1801. RaDLKOFER (L.), Ueber fischvergiftende Pflanzen. (Sb. bayer. Akad. Math.-phys. Kl., 1886, p. 405.) Ritsema (I. C.) et Sack (J.), Index phytochemicus. Amsterdam, de Bussy, 1905. ROCHEBRUNE (A. DE), Toxicologie africaine. 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ERRERA. — BIBLIOGRAPHIE Barty (H.), Studien über den mikrochemischen Nachweis von Alkaloiden in pharmaceutisch verwendeten Drogen. (Bot. Cen- tralbl., '75, 225 [1808].) L’auteur conteste les conclusions de Clautriau sur Datura et a refait les expériences avec Conium, Aconitum, Datura. Il a étudié microchimiquement diverses drogues : Conium, Solanacées, Colchicum, Aconitum, Sabadilla, Areca, Physostigma, Strychnos (strych- nine et brucine). Les alcaloïdes existent dans l'enveloppe du fruit ou de la graine; dans l’assise nourricière, dans l’endosperme et dans l’embryon, ou dans l'embryon seul. Leur fonction est variable : protection, réserve azotee. BEHRENS (W.), Hilfsbuch zur Ausführung mikroskopischer Unter- suchungen im botanischen Laboratorium. Braunschweig, 1883. BERTRAND (G.), L’acide silico-tungstique comme réactif des alca- loïdes. (Comptes rendus de l’Acad. des sc. Paris, 128, 742 [1899].) « On a déjà proposé un assez grand nombre de réactifs généraux des alcaloides : l’acide silico-tungstique, dont je viens d’étudier l’emploi à ce point de vue, me paraît supérieur à tous » : il donne des sels définis, sa sensibilité est la plus grande de tous, etc. L’acide silico-tungstique 12WO3.SiO?.2H?O s'obtient aisément en suivant les indications de Wyronboff (Bull. Soc. minéralogie, t. XIX, 1896). On l’emploie en solution à 5 °/, environ. Ce réactif donne dans les solutions suffisamment concentrées et froides des sels d’alcaloïdes, des précipités ordinairement floconneux, blancs ou pales (jaune, chamois, saumon), presque insolubles dans l’eau froide, même dans des acides assez concentrés, un peu plus solubles dans l’eau bouillante. Ce sont des silico-tungstates neutres. Le précipité de morphine est saumon; celui de strychnine, chamois. En chauffant le précipité, il perd de l’eau et le nouveau précipité est pulvérulent et, avec divers alcaloïdes, il est plus visible que le précipité obtenu à froid. Le précipité est Roue par les alcalis étendus et l’alcaloïde est régénéré. Voici les limites de sensibilité en opérant sur 5 c. c. de solution addi- tionnée de 1 à 2 gouttes de silico-tungstate de Na et autant d’acide chlor- hydrique au dixième. Le premier groupe comprend les alcaloïdes dont les deux hydrates sont également perceptibles; le second, ceux dont le ToME II, 1906. DES ALCALOÏDES, GLYCOSIDES, TANNINS, ETC. 379 EEE — silico-tungstate devient beaucoup plus visible par chauffage à l’ébullition et refroidissement. Premier groupe. Deuxième groupe. = Le I ÉTÉ. I Conicine . Aconitine . — 8 oco * 80 000 . I 3 7 I Morphine. ; Vératrine . 10 000 13c 000 7 The br mi _ é I CROIRE AA Brucine. 150 000 . . I Nicotine . ; aoe Strychnine ; À re I \ SS Narcéine . 4 ( REC Y- 30 000 Narcotine ) AO E00 ee I Codéine we 40 000 Quinine Atropine j ale : Quinidine ; Caféine 50 000 | Cinchonine Core I Cocame = =. = : ‘ee 200 000 Cinchonidine Borscow (E.), Beiträge zur Histochemie der Pflanzen. (Bot. Zeitschr., 32, 38 [1874].) Cuatin (J.), Du siège des substances actives dans les plantes médi- cinales. Thése doctorale, Paris, 1876. CrBrer (P.), Nouvelle méthode d’examen quantitatif ou qualitatif des albuminoïdes, diastases, alcaloïdes, leucomaïnes ou toxines, notamment ceux des urines. (Comptes rendus de l Acad. des sc. Paris, 128, 431 [1899].) En perfectionnant ce qu’il a indiqué en 1886, l'auteur est parvenu à établir une méthode qui permet de déceler dans l’eau ou dans l’urine toute une série de corps azotés, sans agir ni sur l’urée ni sur l'acide urique ou les urates. On prend un tube à réactif soigneusement frotté et lavé à la potasse, I de chlorhydrate 2 00 COO . de cocaine, on laisse tomber 3 gouttes d’AzO3H, on agite, on laisse tomber 3 gouttes du réactif iodé dont voici la formule : lode : 47 gr., KI : 58, eau distillée : 60. En éclairant alors le tube convenablement, on voit qu’il présente une uis à l’eau: on y verse 2 c. c. d’une solution à 3 8 TOME II, 1906, 380 L. ERRERA. — BIBLIOGRAPHIE opalescence qu’il n’avait pas. Il nomme ce trouble opalescence étalon. On obtient la méme opalescence avec : Albumine de l’œuf et peptones. . . . = 20 000 . wh. I Greatinine AR MANETTES 1000 5 I Xanthine“. tee TR RE MERE ee 5 000 ° I PEpsine |) ER NEUTRE 50000 os I ‘Alcaloides, la nicoteine; 2° Un alcaloïde solide, CroHsN;, la nicotelline, et 3° Un alcaloide gazeux, CroH14N2, la nicotinine, isomère avec la nicotine. Pinner (A.), Ueber Nicotin. (Ber. deutsch. chem. Ges., 24, 61, 1373 [1891]; 25, 1428, 2807 [1892]; 26, 292 [1893].) Prunet (A.), Sur la constitution physiologique des tubercules de Pomme de terre dans ses rapports avec le développement des bourgeons. (Comptes rendus de l'Acad. des sc. Paris, 114, n° 19 [.892].) Raciporskt (M.), Ueber die Keimung der Tabakssamen. (Bull. Inst. bot. Buitenzorg, n° 6 [igoo].) Rank (AcB.), Beitrag zum Bau der Solanaceenblatter. (Mitth. aus dem Lab. f. Waarenk. a. d. Wiener Handels-Akad., 1883, p. 186. SCHAARSCHMIDT (].), Ueber die mikrochemische Reaktion des Sola- nin. (Zeitschr f. wiss. Mikrosk. und mikrosk. Technik, 1, 61 [1884].) Scumipt, Das Atropin, das Daturin und das Hyoscyamin. (Ber. uber d. Sitz. d. naturforsch. Ges. zu Halle, 1880.) Scuürre (W.), Beiträge zur Kenntniss der Solanaceenalkaloïde. (Arch. d. Pharm., 229, 492 [1891].) Süm-JENSEN (J.), Beitrage zur botanischen und pharmakognos- tischen Kenntniss von Hyoscyamus niger. (Bibliotheca Botanica, - Heft 51 [1901].) TOME II, 1 906. 406 L. ERRERA. — BIBLIOGRAPHIE THomann (J.), Ueber die Bedeutung des Atropins in Datura-Samen. (Bot. Centralbl., 80, 461 [1899].) Wet (R.), Die Entstehung des Solanins in den Kartoffeln als Pro- duct bacterieller Einwirkung. (Archiv für Hygiene, 38, 227 [1900].) Il y a de véritables épidémies de pommes de terre toxiques. La solanine se produit par action microbienne. Étude de treize espèces microbiennes de pommes de terre dont deux surtout engendrent la solanine. On peut le prouver en les cultivant sur des pommes de terre stérilisées. La solanine est décelée par l’action de l’acide sulfurique. Les microbes produisent la solanine aux dépens de la pomme de terre; en bouillon de Lôfer, ils ne la produisent pas. Les épidémies toxiques sont donc dues à des maladies microbiennes de la pomme de terre. Rubiales. Beurens (H.), Sur l'examen microchimique de la quinine. (Ann. Ecole polytechnique Delft, 8, 72 [1894].) Brunner (H.) et Leins (H.), Zur quantitativen Trennung von Theo- bromin und Coffein. (Schweiz. Wochenschrift für Chemie und Pharm., Marz 1803.) Key (P.), Examen microchimique du thé et quelques observations sur la caféine. (Recueil des travaux chimiques des Pays-Bas et de la Belgique [2], 5, 344 [1901].) Meyer (G.), Beitrage zur Anatomie der auf Java cultivirten Cin- chonen. (Zeitschr. ftir Naturwiss., 72, 64, 409 [1900].) L’auteur donne l’anatomie de diverses écorces de Circhona et fournit quelques données chimiques (p. 439). Ruspy (H.), Production of Cinchona-bark and quinine in the East Indies. (Journ. of the New York Bot. Gard., 1902, p. 51.) Tome II, 1906. DES ALCALOIDES, GLYCOSIDES, TANNINS, ETC. 407 Sanctis (G. pe), Sull’esistenza della coniina nel Sambucus nigra. (Gaz. chim. italiana, 1895, p. 49.) SCHIMPER (A. F.W.), Anleitung zur mikroskopischen Untersuchung der Nahrungs- und Genussmittel. Jena, Gustav Fischer, 1886. L’auteur dit : « Der mikroskopische Nachweis des Coffeins in der Kaffeebohne ist nicht méglich » (p. 33). STRASBURGER (E.), Das botanische Praktikum, 3° édition. L'auteur traite de l’alcaloïde des Quinquinas (p. 666). Van Gorkom (K. W.), Kina (publication du Musée colonial). Haarlem, 1806. L'histoire, la culture et la composition des Quinquinas y sont traitées. Il y a des publications semblables du Musée colonial d’Haarlem sur : le Café, le Thé, le Cacao, la Vanille, le Tabac, les Epices, le Caoutchouc et la Gutta-Percha. | Campanulales. GRESHOFF (M.), Echinopsine, eene nieuwe kristallyne plantenbasis. (Versl. Kon. Akad. v. Wetensch., 1900, p. 688.) Voir dans Annexe II la localisation de l’échinopsine, par E. Ver- schaffelt. Lurz (L.j, Localisation des principes actifs dans les Seneçons. (Bull. Soc. bot. France, 42, 486, 618 [1895].) ScHAER, Ueber glykosid- und alkaloïdartige Reactionen bei gewis- sen relativ indifferenten Drogen (Herba Cardui benedicti und Pasta guarana). (Arch. de Pharm., 1890, n° 6.) ZANDER (R.), Die Milchsafthaare der Cichoriaceen. Eine anato- misch-physiologische Studie. (Bzbliotheca botanica, Heft 37 [1896].) TOME II, 1906. 408 L. ERRERA. — BIBLIOGRAPHIE GLYCOSIDES, TANNINS, ETC. GENERALITES. Baccarint (P.), Contributo alla conoscenza dell’ apparecchio albumi- noso-tannico delle Leguminose. (Walpighia, 7, 255, 325, 537 [1892].) Bay (J. C.), Material for a monograph on the tannoids, with special reference to vegetable physiology. (Missouri Botanical Garden Report, 5, 61 [1894].) BRAEMER (L.), Les tannoides, introduction critique a l'histoire phy- siologique des tannins et des principes immédiats végétaux qui . leur sont chimiquement alliés. Toulouse, 1891. Busse (W.), Beitrage zur Kenntniss der Morphologie und Jahres- periode der Weisstanne (Abies alba Mill.). (Flora, 47, 113 [1893].) L’auteur (p. 174) conclut : (Es treten im Vegetationskegel (A dzes alba) drei, vorlaufig als « Gerbstoffe » bezeichnete Kôrper auf, welche mit Ausnahme gewisser gemeinsamer chemischer Reactionen ein durchaus verschiedenes Verhalten zeigen ». Kunz-Krause, Ueber ein natürliches System der Tannoide. (Schweiz. Wochenschrift {. Chemie u. Pharm., 1808.) Ryn (J. J. L. van), Die Glykoside. Berlin, Borntraeger, 1900. SCHAER (E.), Ueber neuere Saponin-Stoffe. (Vierteljahrsschrift d. Naturf. Ges. Zürich, 46, 1 [1901].) Il y a dans beaucoup de plantes diverses saponines inégalement toxiques, souvent employees par les sauvages pour empoisonner les poissons. Leur formule générale est C#H2x-8Oro. L’auteur indique les propriétés et réactions de ces saponines et des sapogénines. On ne connaît ni le mode de formation de ces substances dans les plantes, ni leur rôle. TOME II, 1906. DES ALCALOÏDES, GLYCOSIDES, TANNINS, ETC. 409 SPATZIER (W.), Ueber das Auftreten und die physiologische Bedeu- tung des Myrosins in der Pflanze. (Jahrb. f. wiss. Bot., 25, 39 [1893].) LOCALISATION. BRAEMER (L.), Sur la localisation des principes actifs dans les Cucurbitacées. (Comptes rendus de l'Acad. des sc. Paris, 117, 753 [1893].) L’auteur localise la bryonine, la colocynthine et l’élatérine dans de longs éléments, intermédiaires entre les tubes cribles et les laticifères articulés. CHEMINEAU (R.), Recherches microchimiques sur quelques gluco- sides. Tours, 1004. L’auteur s'occupe de Æubia (p. 33), Fuglans (pp. 57, 61) et de l’arbu- tine (p. 89). Il y a un aperçu historique assez détaillé. [1 recommande l’emploi de plasmolysants (pp. 28, 61, 95) pour concentrer les sucs dans les cellules avant l’action des réactifs. | Dunsran, The nature and origin of the poison of Lotus arabicus. (Chem. News, 81, 301 [1900], et Proceed. Roy. Society, 6'7, n° 437.) Ce poison est un glucoside; un enzyme dédoublant l’accompagne. Faust (E.), Ueber das Acocantherin. (Arch. f. exper. Path. und Pharm., 48.) Acocanthera abyssinia contient un glycoside C32H:0012. GoLpSCHMIEDT (G.) et MoziscH (H.), Ueber das Scutellarin, einen neuen Kôrper bei Scutellaria und anderen Labiaten. (Szizber. d. Akad. d. Wiss. Wien, 110 [1901].) Les Scutellaria et d’autres Labiées renferment dans leurs tissus un corps cristallisable, jaune, C:1:H200:2, qui se dédouble par SO,H2 en scutellaréine C,;H,.O¢ et en un corps non sucré. TOME II, 1906. 410 L. ERRERA. — BIBLIOGRAPHIE Goris (A.), Recherches microchimiques sur quelques glucosidés et quelques tannins végétaux. Paris, Joanin et Ci, 1903. L’auteur commence par l’histoire assez complète des localisations d’alcaloïdes, glucosides et tannins. Il s'occupe de l’esculine et de l’acide esculitanique (Aesculus hippocastanum et Pavia rubra), de la fustine (Rhus cotinus), de la fraxine (Fraxinus excelsior), de la daphnine (Daphne alpina), de la salicine (Salix alba) et de la caféine (Thea, Cola). Il insiste sur ce que les glucosides et les alcaloides seraient souvent combinés aux tannins. L’esculine se trouve surtout dans l’épiderme, l’endoderme et la péri- phérie de la moelle de la tige, dans les poils, etc.; dans l’écorce : dans = l’endoderme, le péricycle et le parenchyme libérien de la racine (pp. 123-124). L’auteur ne pense pas que l’esculine et les autres corps qu’il a étudiés puissent être des réserves (pp. 124, 130); mais il n’ose se prononcer ag en faveur de la théorie des déchets. GuiGnaRD (L.), Sur la localisation dans les amandes et le Laurier- Cerise des principes qui fournissent l'acide cyanhy dag, (Journ. de pharm. et de chimie, 1800.) L’auteur conclut comme suit (p. 22): « Dans le cylindre central de la partie axile d’une amande, l’émulsine se trouve contenue dans le péricycle; dans les faisceaux des cotylédons, il en est de méme, avec cette différence qu’on en trouve aussi une petite quantité dans l’endoderme: dans le Laurier-Cerise, le péricycle étant presque entièrement sclérifié, elle est localisée pour ainsi dire uniquement dans la gaine endodermique. » Jouannsen, Sur la localisation de l’émulsine dans les amandes. (Ann. sc. nat. [7], 6, 118 [1887].) L'auteur a fait des recherches macrochimiques soigneuses et conclut (p- 126) : « L’amygdaline et l’émulsine sont localisées dans des tissus différents. L’amygdaline (qu’on trouve seulement chez les amandes amères) est localisée dans le parenchyme des cotylédons et l’émulsine (qu'on trouve dans toutes les amandes) est localisée dans les parties axiles de l'embryon et dans les faisceaux libéro-ligneux des cotylédons. » Konpakow ,(I.) et Scuatz (N.), Untersuchung der Bestandtheile von Flores Kusso. (Arch. d. Pharm., 237, 481 [18g9].) Tome II, 1906. DES ALCALOIDES, GLYCOSIDES, TANNINS, ETC, 4IT Mayoux (M: A.), Recherches sur la production et la localisation du tannin chez les fruits comestibles fournis par la famille des Pomacées. (Ann. de l'Univ. de Lyon, 6, 4 [1894].) La partie qui borde les loges et la pelure semble renfermer à elle seule plus de tannin que les autres parties du fruit (p. 38). RaciBorski (\\.), Ueber die Inhaltskôrper der Myriophyllumtri- chome. (Ber. deutsch. bot. Ges., 11, 348 [1803].) RITTHAUSEN (H.), Vicin ein Glycosid. (Ber. deutsch. Chem. Ges., 29, 2108 [1896].) TanreT (Cu.), De la vincétoxine. (Comptes rendus de l'Acad. des sc. Paris, 100, 277 [1885].) La vincétoxine est un glucoside extrait du Véncetoxicum. Elle est pré- cipitée, de même que les alcaloides, par le HgI., 2KI et IKI, mais seule- ment en présence d’un acide minéral ou de l’acide oxalique. RussezL (W.), | ssai sur la localisation de la daphnine chez le Daphne Laureola. (Rev gén. de bot., 14, 420 [1902].) L’auteur localise cette substance au moyen de IKI, qui colore les cellules 4 daphnine en orange et rouge carmin: il obtient également la localisation à l’aide de Fe,Cls, de SO,Fe, de l’acide phosphomolybdique, de KHO, de SO,H;, etc. Il conclut (p. 426) : « La daphnine, dans les organes adultes, est localisée dans l’épiderme, les libers et les rayons ligneux des tiges et des feuilles; elle se montre en faible quantité dans les racines. La daphnine est toujours accompagnée de matières oléa- gineuses. » THomE (QO. W.), Ueber das Vorkommen des Amygdalins und des Emulsins in den bittern Mandeln. (Bot. Zeil., 23, 240 [1865]. ZopF (W.), Ueber die Gerbstoff- und Anthocyanbehälter der Fumariaceen und einiger anderer Pflanzen. (Bibliotheca botanica, 1880.) L’auteur indique (p. 13) dans le rhizome du Corydalis cava des idio- blastes contenant une substance jaune qui donne par IKI « einen äuss- erst reichen rothbraunen, getrocknet sepiafarbenen Niederschlag; das TOME II, 1906. 412 L. ERRERA. — BIBLIOGRAPHIE > Filtrat ist dunkelweinrot ». Il considère le précipité comme dû à du tanin; la matière rouge en décoloration, comme dérivant de la matière colorante. ; Il ne donne aucune preuve que le précipité soit réellement du tannin et semble ignorer qu’il existe un alcaloide, la corydaline, précisément dans le rhizome du C. cava. Cet alcaloide précipite en brun IKI, se colore en jaune par l’acide nitrique, etc. SIGNIFICATION PHYSIOLOGIQUE. ALBO (G.), L’azione del tannino sulla germinazione e sullo sviluppo del Solanum tuberosum. (Nuovo Giorn. bot. ital., 11, 521 [1904].) L’auteur coupe des Pommes de terre en fragments et les place dans des récipients contenant une solution aqueuse de tannin (1/,-21/, %/o). La germination se fait lentement et mal; les tiges ont l’aspect de tiges étiolées. Par l'examen microchimique, il trouve peu de tannin dans les tissus. Il conclut (p.113) que le tannin a été utilisé comme aliment et transformé ultérieurement en amidon. BRuNSTEIN (A.), Ueber Spaltungen von Glycosiden durch Schim- melpilze. (Beth. z. bot. Centralbl., 10, 1 [1901].) Selon l’auteur, les moisissures dédoublent les glycosides, hors de leurs cellules (par des oxydases!’), utilisent seulement le sucre et oxydent le résidu, sans jamais le manger, le transformant ordinairement en acides (par exemple acide salicylique) qui tuent bientôt l’organisme. Seul le cyanure de benzoyle provenant de l’amygdaline n’est pas toxique. FISCHER (A.), Glycose als Reservestoïff der Laubhôlzer. (Bot. Zezt., 46, 405 [1888].) L’auteur indique dans beaucoup de membranes lignifiées et autres des substances qui réduisent CuO et qu’il croit être glycose ou glycosides. KÜsSTENMACHER (M.), Beiträge zur Kenntniss der Gallenbildungen mit Berücksichtigung des Gerbstoffs. (Jahrb. f. viss. Bot., 26, 82 [1894].) JorissEN (A.), Recherches sur la germination des graines de Lin et des amandes douces. (Bull. Acad. roy. Belg. [3], 7, n° 6 [1884].) Tome II, 1906. DES ALCALOIDES, GLYCOSIDES, TANNINS, ETC. 413 Krauss (G.), Grundlinien zu einer Physiologie des Gerbstoffs. Leipzig, 1880. PurtewitscH (K.), Ueber die Spaltung der Glycoside durch die Schimmelpilze. (Ber. deutsch. bot. Ges., 16, 368 [1898].) Salicine, arbutine, hespéridine, etc., nourrissent bien Aspergillus niger, mais celui-ci ne supporte pas les produits de dédoublement de l’hélicine (aldehyde salicylique). L’auteur s’occupe surtout des réactions de salicine, arbutine et hélicine. SPATZIER (W.), Ueber das Auftreten und die physiologische Bedeu- tung des Myrosins in der Pflanze. (Jahrb. f. wiss. Bot., 25, 39 - [1893]-) SPERLICH (A.), Beitrage zur Kenntniss der [nhaltsstoffe in den Saug- organen der grunen Rhinanthaceen. (Bezh. z. Bot. Centralbl., 11, 437 [1902].) D'après Volkart (p. 463), le glycoside rhinanthine (C:9H::00) est une substance jaune d’or, soluble dans l'alcool, colorable par SO,H, ou HCl en vert-bleu (— la chromogène de Molisch extraite des racines de Pedi- cularis). Sperlich obtient la même substance dans les racines de Lathraea. Cette rhinanthine se dédouble par les acides en glycose et rhinanthogénine. Il en est de même pour les racines de Me/ampyrum et de Tozzia (p. 468). Waace (Tu.), Ueber das Vorkommen und die Rolle des Phloro- glucins in der Pfanze. (Ber. deutsch. bot. Ges., 8, 250[1890].) LATEX ET LATICIFERES. De Bary (A.), Vergleichende Anatomie der Vegetationsorgane der Phanerogamen und Farne. Leipzig, 1877. Les laticiféres dans les organes sécrétoires se remplacent mutuelle- ment (pp. 143, 208, 209). ToME II, 1906. 414 L. ERRERA. — BIBLIOGRAPHIE Cox (A.), Sur l'existence de laticifères à contenu spécial dans les Fusains. (Comptes rendus de l'Acad. des sc. Paris, 132, 1354 [1901].) Ces cellules spéciales se trouvent dans le liber des Ævonymus. Le contenu renferme une substance élastique qui se rapproche du caout- chouc et de la gutta-percha. Le contenu éclaire le champ noir entre nicols croisés; il s’agit bien du contenu et non de la membrane. Il s’agit donc de latex. Cuauveaub (G.), Recherches embryogéniques sur l'appareil latici- fere des Euphorbiacées, Urticacées, Apocynées et Asclépiadées. - (Ann. sc. nat.[7], 14, 1 [1891].) GaucHER (M.-L.), Du rôle des laticiféres. (Ann. sc. nat. [8], 12, 241 [1900].) GaucHER (L.), Recherches anatomiques sur les Euphorbiacées. (Ann. sc. nat. [5], 15, 161 [1902].) Dans ce travail, il est question (p. 245) du latex constitué en majeure partie par du tannin. L’auteur indique aussi la présence de sphérocristaux de malate neutre de chaux, et considére (p. 249) le latex comme nutritif. Il s’occupe également de l’anatomie et décrit des tanniféres et laticiféres. HEINRICHER (E.), Die Eiweissschläuche der Cruciferen und ver- wandte Elemente in der Rhoeadinen-Reihe. (Witth. a. d. bot. Inst. zu Graz, 1, 1, 213 [1886].) HEINRICHER (E.), Vorlaufige Mittheilung über die Schlauchzellen der Fumariaceen. (Ber. deutsch. bot. Ges., 5, 233 [ 1887].) HEINRICHER (E.), Nochmals über die Schlauchzellen der Fuma- riaceen. (Ber. deutsch. bot. Ges., 9, 184 [1891].) LÉGER (L.-J.), Sur la présence de laticifères chez les Fumariacées. (Comptes rendus de l Acad. des sc. Paris, 111, 843 [1890].) Mont (H.), Ueber den Milchsaft und seine Bewegung. (Bot. Zeit., 1, 553 [1843].) Moriscx (H.), Studien über den Milchsaft und Schleimsaft der Pflanzen. Jena, Fischer, 1901. Tome II, 1906. DES ALCALOIDES, GLYCOSIDES, TANNINS, ETC. 415 ParkIN (J.), Some observations bearing on the function of latex. (Anna!s of Botany, 13, 620 [1899].) L'auteur a étudié à Ceylan surtout Hevea brasiliensis et Castilloa elastica, Var. Les latex de Hevea coagulent par de petites quantités d’acide, par HgCl?; donc il s’agit du passage d’un albuminoïde de l’état soluble à l’état insoluble. Lés latex contiennent généralement du sucre en propor- tions variables. Dans le latex du tronc de Hevea, il y a toujours de la saccharose, mais peut-être le sucre provient-il en partie des tissus blessés, ambiants. Les bâtonnets d’amidon des laticifères d’Zuphordia et genres voisins persistent dans les feuilles tombées. Il ne semble donc pas que les latici- fères fonctionnent comme des conducteurs d’amidon dans les plantes. Chez Hevea, les incisions subséquentes fournissent plus de latex lorsque l'écorce a été blessée. ParKIN (J.), Observations on latex and its functions. (Annals of Botany, 15, 193 [1900].) RENDLE (A. B.), On the vesicular vessels of the Onion. (Annals of Botany, 3, 169 [1889].) SCHWENDENER (S. von), Einige Beobachtungen an Milchsaftgefässen. (Sitzsber. d. kgl. preuss. Ak. d. Wiss. Berlin, 14, 8 [1885].) L’auteur décrit les corpuscules de formes variées renfermés dans le latex des Euphorbes. VocL(A.), Beiträge zur Kenntniss der Milchsaftorgane der Pflanzen. (Jahrb. f. miss. Bot., 5, 3 [1866].) Warsow (G.), Systematisch-anatomische Untersuchungen der Blatter bei der Gattung Acer, mit besonderer Berücksichtigung der Milchsaftelemente. (Beth. z. Bot. Centralbl., 15, 493 [1903].) Le latex renfermé dans les idioblastes est réfringent, colorable en jaune canari par l’iodure de potasse iodé. ZANDER (R.), Die Milchsafthaare der Cichoriaceen. Eine anato- misch-physiologische Studie. (Bibliotheca botanica, 1896.) hips i -_ , "2 LA AURE À, ‘ % 8 t q | Wy ai teat Sy Se eur at de CA OT pote ns ue oe LH RC 2, (CAR US a biiye “ep are Dans Fur pede ‘nee Ne: + Que Aa | Aa, NUS \ re CUS PL «ui Ua à QT abat 0 ANDRE ANYE CRM ‘ct ae Piha is Poet aed Le iv anu te an MES + ith WE Cries cus nf RHPIRASQNU, ATED RE hj re aD ee - pas Tae 4 1 enh oel Sear PPS Llp 2 ee GE MMS Tc CARRE aOR 4 PAM a: i di ee LU Aine IA Ty Meret APs 1S pels if, PTS Pa, | Ft Fade: AP ETS a ya pe be a ‘ | + # d P vit ' Oped ae j ; À + MIA é AR SR ieee JP Wey ét para ee er ( ji LONT ME Ciel: , | si ; ARTE" LMI Be Bie OL ! : 3 ' g : Ve tite 7 Cu ers ‘3 Fest en 1 pet £ pial righ i NA ri x hi Mel Tae TOR UT AE LL ET Er Breet Be Oy by ak = | esr Aa S pe i ) ty i= 1 ‘f 1 . f A +: 4! + é L r LOS = a à. ra | « tr é v B44) 47 ¢ hl ute, Se : i À iy ' £3 ' fovd © ae ; i ‘ » sf 4 . ‘ wa Wilk! wo xe lec? t ie t tte . U \ 4 re iad Ge + . y aA an EL MNT 141 LE ( ' LA : juin ee > , à . i . : t- + ‘ L = - Gh all Gah i. 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