LIBRARY OF THE MUSEUM OF COMPARATIVE ZOÜLOGY. see RAS REVUE DES SCIENCES NATURELLES vaidts Ut AU à s nus \ IN REVUE DES SCIENCES NATURELLES PUBLIÉE SOUS LA DIRECTION DE MM. E. DUBRUEIL, Membre de plusieurs Sociétés E. HECKEL, Docteur en médecine, Pharmacien en savantes, chef des hôpitaux de Montpellier, AVEC LA COLLABORATION DE MM. Andouard, — Baillon, — Barthélemy , — Baudelot , — Baudon , — Bavay , — Bleicher , — Boreau, — Boyer , — Cazalis de Fondouce (P.), — Corre (A.), — (Contejean , — Dieulafait, — Doûmet-Adanson, — Drouêt, — Durand, — Duvai-Jouve, — Fabre (G.), — Gervais (P.), — Godron, — Grenier , — Hesse, — Joïiy , — Jordan , — Jourdain, — Leymerie,— Lichtenstein (J.),— Loret,— Magnan,— Marchand, (Léon), — Marès (P.), — Martins, (Ch.), — Masse, — Ma- theron, — Planchon (G.), — Planchon (J.-E.), — Robin, — De Rouville, — Sabatier, — De Saporta, — De Seynes, — Sicard (H.), — Vaillant (1), — Vieillard. — Vézian. ONCE AS NET 1: JUIN 1872. MONTPELLIER BOEHM ET FILS, IMPRIMEURS-ÉDITEURS , PLACE DE L'OBSERVATOIRE PARIS ASSELIN , LIBRAIRE, PLACE DE L ÉCOLE-DE-MÉDECINE. AT LANT | po } M L'importance et l’utilitédes Sciences naturelles n’ont pas besoin d’être démontrées à notre époque, où les recherches qui se mul- tiplient tous les jours ont déjà produit desi grands résultats. Encourager ces recherches en offrant à leurs auteurs un moyen nouveau de publicité, tel a été le premier et puissant mobile qui nous a guidés dans la création de la Revue des Sciences natu- relles. Mais ce mobile n’est pas le seul auquel nous ayons obéi. Non- seulement le nombre des travaux de longue haleine, mais encore celui des faits isolés révélés par le travail de chaque jour, est immense : et pourtant la plupart d’entre eux restent inconnus, faute d'être divulgués. | C’est cette lacune que nous venons essayer de combler parla Chronique scientifique de notre Journal, en tenant le Lecteur, autant que possible, au courant de tout ce qui s’écrit, se dit, et se fait dans le monde savant. Les noms de ceux de nos Collaborateurs qui ont bien voulu se charger de cette seconde partie de notre publication suffit à prouver l’importance que nous attachons à cette œuvre de diffu- sion. Nous disons de diffusion, etnous désirons vivementqu’on I. 1 n’établisse pas d’équivoque entre ce mot et celui de vulgari- sation. Nous ne nous dissimulons pas tout ce qu'offre de chanceux la création, en province, d’une Revue semblable à celle dont le pre- mier numéro voit aujourd'hui le jour. Toutefois, comme tout auteur, nous avons foi en notre œuvre : il est réservé à l'avenir de nous apprendre si notre espérance était fondée. PADueRuEIL NE TECREL REVUE DES SCIENCES NATURELLES MÉMOIRES ORIGINAUX. ÉTUDE SUR LES MÉTAMORPHOSES DES AXOLOTLS DU MEXIQUE. ( SIREDON MEXICANUS, Shaw ) DÉVELOPPEMENT et rotation de leur embryon dans l'œuf; Par M. N. JOLY, Professeur à la Faculté des Sciences de Toulouse. CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES. Métamorphoses des Axolotls du Mexique en Amblystomes. De toutes les classes du règne animal, il n’en est aucune qui ait fourni à la physiologie comparée des données plus importantes que la classe des Batraciens. Les investigations incessantes, les ex- périences multipliées dont ces animaux ont été l’objet, ont éclairé d’un jour aussi nouveau qu'inattendu toutes les fonctions de l'organisme, notamment l’une des plus mystérieuses d’entre elles, celle de la reproduction. Tout le monde connaît les belles observations de l’abbé Spal- lanzani ‘ et les ingénieux travaux de MM. Prévost et Dumas sur la génération et le développement de l'œuf des Batraciens ”, les recher- ches savantes de Rusconi relatives aux amours des Salamandres et 4 Spallanzani; Expériences pour servir à l'histoire de la génération des ani- maux et des plantes, tom. III. Genève, 1787. 2 Prévost et Dumas ; Développement de l'œuf des Batraciens, Ann. des Scienc, natur., tom. II, 1re série. 8 MÉMOIRES ORIGINAUX. des Tritons” , les beaux travaux de Carl Vogt sur l'embryogénie du crapaud accoucheur*, ceux de MM. Prévost et Lebert (de Genève), sur la formation des organes de la circulation et du sang chez les Batraciens*, enfin les intéressantes études entreprises par M. A. Duméril sur la reproduction et les métamorphoses des Axolotls du Mexique * Nous renvoyons à ce consciencieux travail les lecteurs curieux de connaître tous les détails relatifsaux mœurs, aux amours et aux métamorphoses de ces Reptiles singuliers. Supérieurs quant à la taille, mais très-semblables, quant aux formes extérieures, aux têtards de nos grenouilles ou de nos salamandres, les Axolotls avaient été classés par Cuvier lui-même parmi les Batraciens pérennibranches, c'est-à-dire qui conservent pendant toute leur vie les houppes branchiales destinées à leur respiration aquatique. Mais fallait-il considérer les Axolotls comme des larves ou comme des animaux adultes? L’illustre anatomiste dont nous venons de parler, et, avec lui, beaucoup d’autres, restaient à cet égard dans une complète incertitude. Grâce aux études suivies dont ces Reptiles ont été l’objet de la part de M. A" Duméril, doni la science déplore la perte récente au milieu de tant d’autres deuils, on sait aujourd’hui que les Axolotls mexicains sont de véritables larves, c’est-à-dire de simples embryons, capables toutefois de se reproduire sous la forme larvaire. Première exception à la loi, presque universelle, en vertu de laquelle un Vertébré quelconque ne peut donner naissance à d’autres individus de son espèce que lorsqu'il est parvenu à l’âge adulte. Un fait non moins remarquable a été constaté, 1 Rusconi;, Amours des salamandres. 2 Carl Vogt; Untersuchungen über die Entwicklungsgeschichte der Geburts- helferkrôte(alytes obstétricaux), in 40. Salarre, 1841. 3 Prévost et Lebert; Mémoire cité, dans les Ann. des Scienc. natur., tom. I, pav#193 mere 4 Ate Duméril; Le Mémoire ” intitulé: Observations sur les Axolotls du Mexique; Nouvelles Ann. du Muséum, tom. IT, 1866. AXOLOTLS DU MEXIQUE. 9 en 1868, par le savant professeur du Muséum d'histoire naturelle de Paris: c’est la métamorphose des larves dont il s’agit, ou du moins de quelques-unes d’entre elles, en des animaux d’un genre que l’on croyait n’avoir aucun rapport avec les Axolotls, et que les naturalistes désignent sous le nom d'Amblystome. Accueilli d’abord avec doute, malgré les preuves dont M. Du- méril l'avait entouré, le fait signalé pour la première fois par ce professeur a été observé depuis par d’autres naturalistes, notam- ment par M. Panceri'; enfin, l’an dernier, nous avons eu nous- même l’heureuse chance de pouvoir confirmer de la manière la plus certaine tout ce que M. Duméril a écrit relativement à ce phénomène étrange et jusqu'à présent assez énigmatique *. Il est donc aujourd’hui bien avéré que les Axolotis, en passant à l’état d’Amblystomes, c’est-à-dire à l’état adulte, perdent peu à peu leurs branchies, deux des arcs osseux qui les supportent, enfin les crêtes qui garnissent la queue et la ligne médiane de la région dorsale. Quelque temps avant la métamorphose, la peau de l’animal, jusqu'alors d’une teinte vert-noirâtre, ou gris-cendré chez quelques individus, se parsème de taches blanc-jaunûtres qui peu à peu vont se multipliant. Les dents vomériennes se dé- placent, pour formerau-delà des orifices internes des fosses nasales une rangée presque transversale, « disposition qui, avec l'absence des dents palatines, se rencontre uniquement chez les Tritons de l'Amérique septentrionale dits Amblystomes, dont les Axolotls semblent être par conséquent (ou plutôt sont réellement) les tétards*. » Dans le genre Amblystome, si semblable à nos Tritons aqua- t Voir la note du Dr Panceri (de Naples), insérée au Bolletino dell'associazione dei naturalisti e medici per la mutua istruzione, du mois de janvier 1870. 2 C'est dans le bel aquarium de M. Guy (de Toulouse), et sur l’un desindivi- dus nés chez lui en 1870, que j'ai eu la satisfaction, pour moi bien vive, de pou- voir constater la métamorphose si bien décrite par M. Duméril. L'Amblystome en question provenait lui-même d'un couple d'Axolotls que j'avais confiés à M. Guy; les frères de mon animal mexicain ne sont pas encore transformés. 3 Ate Duméril; Nouvelles observations sur les Axolotls; voir Bulletin de la Société zoologique d'acclimatation, pag. 3. 1867. 10 MÉMOIRES ORIGINAUX. tiques et encore plus aux Tritons alpestres', il y a donc deux sortes de femelles et deux sortes de mâles. Les mâles et les femelles de la première catégorie, c’est-à-dire à l’état de tétards, sont féconds ; les adultes ou Amblystomes sont restés jusqu’à présent stériles dans nos aquariums. Parmi les létards, pourquoi les uns (et c’est le grand nombre) conservent-ils indéfiniment l’état larvaire, tandis que les autres se transforment en Amblystomes*, bien que provenant d’mdi- vidus élevés en apparence dans des conditions tout à fait iden- tiques à celles où ont vécu les premiers °? Enfin, particularité très-remarquable, mais non pas sans exem- ple dans le règne animal, nous voyons ici un fait évident de dimorphisme spécifique, qui, de même que tous ceux qui sont déjà connus, vient compliquer la notion déjà si obscure de l'espèce organique, et doit modifier singulièrement l’idée que s’en fai- saient et la définition qu'en donnaient Cuvier et ses prédéces- seurs immédiats. Mais ce n’est pas ici le lieu d’insister sur ce fait capital, qui doit donner beaucoup à réfléchir aux partisans quand même de l’invariabilité de l’Espèce en histoire naturelle. Description et développement de l'œuf. En cheminant dans l’oviducte, l’œuf des Axolotls, comme celui des grenouilles et des crapauds, s’enveloppe d’une masse glai- reuse, d’une sorte de mucus albumineux et transparent. Comme 4 De Philippi paraît avoir observé, chez les Tritons alpestres du lac Majeur, des faits exactement parallèles à ceux que nous avons constatée chez les Axolotls. 2 Le nombre des individus métamorphosés en Amblystomes est relativement très- faible : 29 ou 30 sur plusieurs milliers d'œufs. 3 La découverte de ces métamorphoses entraîne comme conséquence nécessaire la disparition du genre Siredon, créé par Shaw pour désigner l'Axolotl des Mexicains. Quant au genre Amblystoma, il contient cinq espèces assez mal connues et assez mal déterminées pour que M. Ate Duméril ait cru devoir ne rapporter qu'avec doute à l'espèce lichenoïdes les Axolotls élevés au Muséum d'histoire naturelle de Paris. Il donne le nom de luridum à l'espèce d’'Amblystoma provenant de leur métamorphose. (Am. luridum, Hallowel). AXOLOTLS DU MEXIQUE. Il chez ces Amphibiens encore, la vésicule germinative disparaît après la fécondation et ne remplit plus aucun rôle direct dans la formation du jeune individu. Au moment de la ponte, l'œuf des Axolotis s'offre donc sous l’aspect d’une sphère creuse et transparente, dont la partie cen- irale serait occupée par une sphère plus petite, pleine, opaque, de couleur noire ou d’un noirâtre foncé. Examiné au microscope, le contenu de cette sphère parait com- posé d'éléments divers, parmi lesquels nous avons cru reconnaitre tous ceux qu'indiquent MM. Prévost et Lebert dans leur savant Mémoire sur la formation des organes de la circulation et du sang dans les Batraciens *. En effet, outre les granulations moléculaires, les globules gra- nuleux et les plaques stéariques signalées par ces auteurs dans les œufs de grenouille, nous avons vu, dans ceux des Axolotls, les grands globules vitellins ou nutritifs qui, plus tard, constitueront l'intestin; enfin, les globules formateurs ou organoplastiques, composés d’une membrane d’enveloppe et d’un noyau transpa- rent, entre lesquels sont logés des globules et des granules pri- milfs que l’on n'observe jamais dans le nucleus. Ces globules organoplastiques donneront naissance aux pre- miers rudiments de l'embryon, notamment à sa partie animale, à celle qui correspond au feuillet séreux de l'oiseau, de même que le vitellus nutritif en représente le feuillet végétatif ou muqueux *. 1 Anv. des Scien. natur., tom. I, pag. 193, 3me série. 3 Ni Sharpey, article Ovum de la Cyclopedia of Anatomy, ni MM. Prévost et Dumas, dans leur Mémoire sur le développement de la grenouille, ne parlent de la présence de l’albumen dans l'œuf de ces animaux. Nul doute pour moi qu'il n'y existe, en petite quantité d'abord, en quantité plus notable ensuite, et proportion- nellement à l'accroissement de l'embryon. Du reste, Swammerdam et plus tard Spallanzani ont très-bien vu ce liquide albumineux et l'ont désigné sous le nom de liquide amniotique, prenant à tort la membrane vitelline pour l'amnios. L'auteur de la Biblia naturæ s'exprime à cet égard de la manière la plus explicite en disant : «Id habeo exploratissimum , quod Ranunculus tunica distincte conspicua ambiatur, atque, intra hanc, limpidissimo in liquore, haud aliter ac Pullus 12 MÉMOIRES ORIGINAUX. Peu de temps après la fécondation, les globules vitellins se séparent des globules organoplastiques, et une partie de ceux-ci forme d’abord, comme disent MM. Prévost et Lebert, « une espèce de couche corticale qui se condense ensuite en membrane d’en- veloppe, dont la structure offre un aspect pavimenteux par la com- pression, l’aplatissement et le rapprochement de ces globules, conséquences nécessaires de l'expansion uniforme de l’œuf qui se développe ‘ ». Même avant la formation de cette membrane d’enveloppe, l'œuf des A xolotls subit des modifications indiquant le travail génésique dont il va être le siége jusqu'au moment de l’éclosion. En effet, vingt-quatre où quarante-huit heures après la ponte, sur la partie médiane de la sphère vilelline, du côté où se trouve Le pôle dorsal, c'est-à-dire du côté où se développera la partie supérieure du corps du jeune individu, on voit apparaître un léger sillon qui, lorsqu'il s’est étendu vers le côté ventral, occupe la sphère vitel- line à la maniere de nos degrés de longitude (fig. ?). L’œuf semble alors partagé à sa surface en deux moitiés laté- cales. Mais bientôt un autre sillon superficiel vient croiser transver- salement le premier dans son milieu et s’étend, comme lui, à la manière d’un équateur, sur tout Le pourtour de la sphère vitelline. L'œuf se compose alors de quatre segments égaux ( fig. 3) qui peu à peu se fractionnent à leur tour en suivant une progres- sion telle, que le vitellus paraît successivement divisé en 4, 8, 16, 32 segments plus ou moins réguliers et plus ou moins égaux. C’est là ce que l’on nomme, en embryogénie, la segmentation ou le fractionnement du vitellus. Cette sorte de division de la masse vitelline va se continuant jusqu’à ce qu'il devienne impossible de compter les parties, de plus en plus petites, dont le vitellus se Gallinaceus in suo colliquamento, fluctuet, sese moveat ac verset. » (Swammer- dam, Biblia naturæ, tom. Il, pag. 814. Édition de Leyde, 1738, in-folio.) Sans la présence de l’albumen en quantité assez considérable, on ne pourrait comprendre la rotation de l'embryon dans l'œuf. 1 Prévost et Lebert ; Mém. cité, pag. 199. AXOLOTLS DU MEXIQUE. 15 compose, et qui lui donnent l’aspect d’une müre ou d’une fram- boise (fig. 5). Ce premier travail terminé, un autre commence à s’accom- plir : la surface de la sphère vitelline devient plus lisse, et toute trace de segmentation disparait. A l’endroit même où s'est creusé le sillon primitif ou longitudinal, il en paraît un autre moins étendu, mais plus profond (ligne primitive des embryogénistes), qui indique la place que doivent occuper plus tard la moelle épiuière et le canal vertébral. En avant et sur les côtés de cette ligne, on ne tarde pas à voir se dessiner une sorte d’écusson ovalaire ou plutôt en forme de mandoline (fig. 9) (bandelette primitive), dont le rebord serait entouré d’une espèce de bour- relet ou de crête à dentelures peu prononcées, faisant saillie au-dessus du rebord de la mandoline (fig. 10). Ce sont les /ames dorsales primitives. Peu à peu le sillon médian se ferme, les crêtes dentelées s’effacent en unissant leurs dentelures, le blas- toderme s'étend de plus en plus à la surface du vitellus, en en- vahit plus de la moitié, à la manière d’une coiffe ouverte vers le côté ventral, et, dès ce moment, on voit l'embryon se dessi- ner sous la forme d’une masse opaque et brunâtre, recourbé sur lui-même à la manière d’une voûte élargie dans son milieu et dont une des extrémités représenterait la tête, l’autre la queue de l'embryon, la convexité de la voûte répondant à la région dorsale, et la concavité à la région ventrale de l’être en voie de formation" (fig. 12). 1 MM. Prévost et Dumas ont décrit d'unemauière heureuseet vraie la prise de possession de l'œuf par l'embryon de la grenouille à une époque de son développe- ment correspondant à celle qui nous occupe en ce moment chez l'Axolot]. «Le fœtus, qui paraissait d'abord ne posséder qu'une existence limitée à cette ligne elle-même (la ligne primitive), qui plus tard avait étendu son influence aux parties voisines par une espèce de rayonnement progressif, se trouve enfin avoir conquis l'œuf tout entier. La matière informe que celui-ci renferme devient sa pro- priété, se prête docilement à ses besoins et se modifie au gré d'une puissance in- connue, pour avancer l’évolution des divers appareils nécessaires au nouvel être. Ce n'est plus un œuf que nous avons sous les yeux ; c'est un animal dans lequel il n'existe aucune molécule isolée du système général. » (Prévost et Dumas; ouv. cité, pag. 117.) 14 MÉMOIRES ORIGINAUX. La courbure du corps augmentant sans cesse, à raison de l’acroissement en longueur du sujet, et la capacité de l'œuf n’aug- mentant pas en proportion, là queue de l’embryon tend à se rapprocher de la tête, sans cependant la toucher et encore moins la recouvrir jamais, comme on l’observe chez l'embryon de cer- tains crustacés décapodes macroures (la Caridina Desmarestii) , et de certains insectes (la Palingenia virgo) par exemple, dont nous avons décrit ailleurs les singulières métamorphoses. Il arrive donc un moment où le futur Awolotl ressemble à une barque retournée, dont la carène convexe représenterait le dos du sujet, le pont sa face ventrale. Lorsqu'il apparaît sous cette forme, ni la tête ni le corps ne présente aucun organe bien distinct. Mais, au bout de peu de jours, on voit se dessiner laté- ralement et en arrière de la masse céphalique deux tubercules d'où naîtront bientôt trois petits mamelons contigus et adhérents entre eux, puis séparés et libres à mesure qu'ils grandissent, enfin devenant coniques et digitiformes, puis se ramifiant par l'apparition de nouveaux tubercules qui grandissent et se rami- fient à leur tour, pour former les houppes branchiales de l’adulte Cia. 17 8et 40); Les yeux, ou plutôt les taches oculaires, la fente buccale et l'anus, ne se voient distinctement que très-tard, c’est-à-dire peu de temps avant l’éclosion. Mais au moment où le jeune animal sort de l’œuf et de la glaire qui l’entoure, les organes dont nous venons de parler ne fonctionnent pas encore, et il se nourrit lui- même aux dépens de la portion du vitellus englobé déjà depuis longtemps par ses parois abdominales. L'apparition du cœur est aussi passablement tardive*. Il est 1 N. Joly; Études sur les mœurs, le développement et les mélamorphoses de la Caridina Desmarestii, dans Ann. des Scienc. natur. tom., XIX, pag. 34, 2me série, et dans les Mémoires de l'Académie des Sciences, Inscriptions et Belles-Lettres de Toulouse, tom. IT, pag. 379, Te série. Voir aussi notreïtravail intitulé: Sur l'hyper- métamorphose de la Palingenia virgo à l’élat de larve. Même recueil, 1871. 2 C'est l'inverse de ce qui a lieu chez le Poulet, où l’on voit le cœur apparaitre dès le second jour d’incubation. AXOLOTLS DU MEXIQUE. 15 d’abord intestiniforme, situé sous la gorge, et m'a semblé se composer alors d'un ventricule unique, d’une oreillette et d'un bulbe artériel comme celui des poissons. Mais la petitesse de cet organe et la mollesse des tissus ne m'ont pas permis d'isoler complètement cette partie essentielle de l'appareil circulatoire. J'ai éprouvé les mêmes difficultés quand j'ai voulu étudier la bouche et surtout le canal digestif. Je me suis convaincu néan- moins qu'ils existent avant le moment de l’éclosion. Notons en passant qu'après avoir brisé les enveloppes de l'œuf, le jeune têtard de l’Axolotl séjourne encore pendant quelque temps dans le mucus gélatineux qui enveloppe ce dernier, et qu'il s y agite parfois en frétillant pour en sortir. Ge mucus sert-il à la nourri- ture du jeune animal, qui s’y tient renfermé pendant quelques jours encore après l’éclosion ? Je le crois, puisque la quantité de ce mucus m'a paru diminuer beaucoup durant cet intervalle; d’ailleurs le fait est admis en ce qui concerne le têtard des gre- nouilles. J’ignore aussi la signification d’une fente ou d’une sorte de double valvule que j'ai cru apercevoir parfois, en arrière de la tête et en dessous, à l’endroit même où l’on voit battre le cœur (fig. 29). Cette espèce de boutonnière m'a paru s'ouvrir et se fermer à la manière de deux lèvres transversales qu’on éloignerait et rapprocherait alternativement l’une de l’autre. Je pense avoir eu sous les yeux une fente branchiale, ou simplement peut-être des mouvements de diastole et systole de l'oreillette cardiaque. Ce qu'il y a de certain, c’est que ces mouvements s’accompagnaient d'une circulation bien visible du sang dans les branchies. Au moment où ils sortent du mucus albumineux qui les enve- loppait, c'est-à-dire 30 à 35 jours après la ponte (en avril) *, les 1 MM. Prévost et Lebert (Mém. cilé, pag. 215) précisent plus que je ne le puis ici la place du cœur chez le têtard de la grenouille. «Il occupe, disent-ils, la place où la partie animale et la partie végétative de l'embryon se touchent, entre la partie antérieure du vitellus et la base de la partie céphalique de la larve, et entre les deux branchies.» Cette délimitation me paraît convenir aussi parfaitemement à celle du cœur de l’Axolotl. ? Au Muséum d'histoire naturelle de Paris, la même femelle d’Axolotl a pondu 16 MÉMOIRES ORIGINAUX. jeunes tétards d’Axolotls sont dépourvus de membres propres à la locomotion. L'office de ces derniers est rempli par une large et mince membrane natatoire qui, partant de l’anus, s'étend le long de la partie médiane et inférieure de la queue jusqu’à son extré- mité, pour gagner la partie supérieure du même organe et s’é- tendre de là sur le dos, jusqu’au bord postérieur de la tête. Des taches pigmentaires noires apparaissent de bonne heure sur cette membrane, comme sur la peau du corps, et même sur les bran- chies. Ces taches sont constituées par des cellules à noyau, d’où partent, comme autant de rayons, des lignes sinueuses et rami- fiées d’inégale longueur. Sous le rapport de la forme, elles offrent donc une certaine ressemblance avec les ostéoplastes ou corpuscules osseux, étoilés et ramifiés comme elles. D'après les observations de M. A. Duméril, l'apparition des pattes a lieu dans le même ordre que chez les Salamandres, c'est-à-dire que les antérieures se montrent d’abord sous la forme de moignons, longtemps avant les pattes postérieures. Sur les individus élevés au Muséum, les indices des premières ontapparu environ dix jours après l’éclosion, tandis que les postérieures se sont montrées seulement à la fin du quatrième mois. Je regrette que les individus nés dans mon laboratoire n'aient pas assez long- temps vécu pour me permettre de suivre le développement de leurs membres jusqu’à leur parfaite évolution. J'aurais pu remplir ainsi une lacune que M. Duméril a laissée, probablement bien malgré lui, dans son travail. Si j'avais été prévenu à temps, j'’au- rais pu combler la lacune dont il s'agit : car quelques-uns (5 ou 6) des jeunes individus élevés par M. Guy dans son aquarium, mais dont la naissance est d’une date incertaine, sont aujourd’hui quatre fois dans la même année, savoir: le 4 janvier, le 19 février, le 16 avril, le 16 juin. La ponte a duré 4 ou 5 jours. L'éclosion a eu lieu ordinairement 30 ou 35 jours après la ponte, mais quelquefois beaucoup plus tôt. En été surtout, 14 et même 1? jours ont sufi pour le développement du jeune individu dans l'œuf. Toutefois cette rapidité dans le travail organogénésique le cède encore à celle que Swammerdam, et après lui MM. Prévost et Dumas, ont constatée dans l'œuf de la grenouilie commune. Il est à noter que tous les œufs d'Axolotls attachés à la même grappe n'éclosent pas le même jour. AXOLOTLS DU MEXIQUE. 17 pourvus de tous leurs membreset ont acquis une taille de 7 à 8 centimètres. Or, les têtards de nos reptiles Mexicains n'ont en naissant pas plus de 0%,015 à 0,016 de longueur. Les individus éclos au Muséum avaient, les uns au bout de cinq, les autres après sept mois, 0,21: ils avaient donc grandi de près de 0",20 durant cet intervalle. Je ne terminerai pas ce chapitre sans dire un mot de la circu- lation du sang chez nos têtards. Elle commence avec les premiers battements du cœur, c'est-à-dire 12 à 15 jours après que l’œuf a été fécondé. Rien de plus intéressant, de plus émouvant même, que le spec- tacle qui s'offre aux yeux de l'observateur lorsqu'il examine la membrane natatoire ou les branchies des jeunes Axolotis. Il voit ces dernières, tant qu'elles ne sont point encore ramifiées, par- courues latéralement par deux courants en sens inverse, l’un artériel, l’autre veineux, se continuant manifestement l’un avec l’autre à l'extrémité libre de la branchie. Dès que celle-ci se ramifie, on aperçoit des courants secondaires qui se dirigent aussi en sens inverse, et viennent rejoindre les courants principaux ‘. Si on laisse l'animal languir quelque temps sur le porte-objet du microscope, la circulation devient visiblement saccadée, comme doit l'être, en effet, le jet de la pompe foulante que représente le cœur (fig. 31). Deux gros vaisseaux, l’un efférent, l’autre afférent, s'étendent le long de la partie inférieure du corps, en donnant naissance à des arcades vasculaires qui l'entourent de toutes parts; d’autres arca- des s'étendent dans l'épaisseur des crêtes dorsale et caudale, et s’y a ——————————————————_—_—_____ 1 D'après ce qui vient d'être dit au sujet du développement des vaisseaux san- guins , attentivement suivi par nous sur les branchies et la membrane caudale de l'embryon des Axolotls, nous sommes surpris de trouver dans l'Anatomie générale de Béclard un passage tel que celui qui suit: «Les vaisseaux se développent simultanément sur tous les points de leur parcours: Ils ne poussent pas d'un point vers un autre, à la manière d'un végétal qui déve- lopperait successivement une tige, des branches et des rameaux». (J. Béclard ; Our. cité, pag. 360, 4e édition. Paris, 1865.) 18 MÉMOIRES ORIGINAUX. multiplient en raison même des progrès du développement de l'embryon. J'ai vu très-distinctement les corpuscules sanguins, rares d’a- bord, plus nombreux à mesure que l'animal s’accroit, parcourir à la file les uns des autres, et quelquefois séparés entre eux parun assez long intervalle, les vaisseaux dans lesquels ils sont contenus. Comme ceux de tous les Reptiles, ces corpuscules, parvenus à leur développement complet, ont une forme elliptique etune grosseur considérable. D’après les données micrométriques fournies par M. Milne-Edwards, ils n’ont pas moins de 1/25 de millimètre dans le sens de leur grand diamètre, et 1/45 de millimètre dans le sens transversal. Mes propres observations confirment celles de l’il- lustre Doyen de la Faculté des Sciences de Paris. Formation des globules sanguins. À l'exemple de Carl Vogt et de MM. Prévost et Lebert, nous avons voulu nous rendre compte de la formation des globules sanguins. Le premier de ces naturalistes (Vogt) « regarde le globule sanguin comme un développement du noyau de la cellule embryonnaire, et le noyau du globule sanguin comme une formation nouvelle * ». De Jeur côté, MM. Prévost et Lebert envisagent les corpuscules du sang comme des globules organoplastiques transformés, c’est- à-dire ayant perdu petit à petit, et par voie d’exosmose, toute la partie contenue dans la membrane d’enveloppe, sauf le noyau qui devient le noyau du globule sanguin. Mes observations per- sonnelles concordent parfaitement sur ce point avec celles des auteurs du Mémoire sur la formation des organes de la circulation et du sang chez les Batraciens; mais je ne saurais me ranger à leur manière de voir en ce qui touche à la formation des vaisseaux de l'appareil circulatoire. Ces Messieurs prétendent que ces vaisseaux prennent naissance 1 Vogt; Quelques observations sur l’'Embryogénie des Batraciens. Ann. des Scienc. natur., tom, II, pag, 48, 3me série, AXOLOTLS DU MEXIQUE. 19 par suite de l’écartement des globules organoplastiques encore existants dans la partie (queue ou branchies) où l’on observe ces canaux sanguins. «La première circulation ne les creuse pas, disent-ils ; elle peut leur donner une forme plus régulière, mais les voies lui sont préparées d'avance .» Nous croyons, au contraire, que ce sont les corpuscules sanguins qui se frayent eux-mêmes un chemin à travers les tissus et creusent les canaux où on les voit plus tard circuler. Ce que nous pouvons affirmer, c'est d'avoir vu plus d’une fois des globules pénétrer dans des espèces de culs-de-sac, d’abord très-courts, rebondir contre leur partie terminale, revenir ensuite la frapper à la manière d’un projectile, tournoyer souvent sur eux-mêmes avant de reprendre leur cours rétrograde, et, à force de Coups et de mouvements répétés, transformer le court cæcum primitif, où ils s’agitaient, en une longue arcade ou vaisseau où les cor- puscules sanguins s’engageaient en marchant comme à la file, et quelquefois à une grande distance les uns des autres. Enfin, et surtout dans les panaches branchiaux, nous avons vu les veines se continuer avec les artères sans l’interposition d’un système capillaire bien réellement caractérisé. Comme on pouvait s'y attendre, l’embryogénie des Axolotis offre de frappantes analogies avec celle des grenouilles et des salamandres. Elle nous a révélé, en outre, un fait assez fréquent chez les [nvertébrés, surtout chez les Mollusques, très-rare au contraire et même regardé longtemps comme étranger à l’em- branchement des Vertébrés. Je veux parler dela rotation de l'embryon, phénomène resté, je crois, inaperçu jusqu à ce jour dans l’œuf des Axolotls mexi- cains, et dont nous allons maintenant nous occuper. Mouvement giratoire de l'embryon dans l'œuf. Un des spectacles les plus étranges et les plus ravissants que puisse nous offrir la Nature vivante, est sans contredit la rotation ! Mém, cité, pag. 219. 20 MÉMOIRES ORIGINAUX. de l'embryon dans l'œuf de certains animaux appartenant surtout à l’embranchement des Mollusques et à celui des Ray onnés. Aperçu pour la première fois par Swammerdam ‘ chez la Palu- dina vivipara et, quelques années plus tard (1° octobre 1695), par Leuwenhoek chez une mulette ou moule d'eau douce voisine de l’Unio tumida, le mouvement giratoire de l'embryon avait causé à l'habile observateur de Leyde une telle admiration, un plaisir si voisin de l'enthousiasme, que, désireux de faire partager à d’autres la joie qu’il éprouvait, il s’empressa d'appeler sa fille et son dessinateur, pour les rendre témoins d’un spectacle qui, par son agrément, dépassait, disait-il, de beaucoup tous les autres : « Amænitate sud omnia alia longè superabat. » Quelque intéressant qu'il fût pour l’'embryogénie, ce phénomène resta presque entièrement inconnu aux naturalistes postérieurs à Leuwenhoek, jusqu'au moment où il fut aperçu de nouveau par Stiebel (1815) sur le Lymnæus stagnalis, et par sir Evrard Home et Frantz Bauer chez une Muletie d’eau douce, que les auteurs de cette observation se contentent d'indiquer sous le nom de The large fresch-water muscle. Témoin de la giration de l'embryon de cet animal et ne pou- vant en croire ses yeux, le professeur Frantz Bauer eut recours à ceux de sa servante. Er rief, dit Carus, ein junges Diensimædchen herein, richtete ihre Augen auf den Gegenstand, und fragte sie was 4 Dans deux endroits de la Biblia naturæ (Leyde, 1737, IX, pag. 42 et 179) Swammerdam a parlé de la rotation de l'embryon des Mollusques dans l'œuf. Il dit, pag. 42, dans le chap. XI, qu'il consacre à l'examen des muscles du corps et à la structure de la coquille du Golimaçon : « In aliis cochleis nudis sæpè latentem adhuc in ovo Limaculum per éxterius ovi putamen eleganter admodum sese moventem vidi , antequam ex ovo prodiret : quod aliquoties Viro Illustrissimo D. van Benningen, legato aique consuli, ad oculum demonstravi .» Et, pag. 179, en parlant des embryons de la Paludina vivipara, il s'exprime ainsi qu'il suit :« Quum deinde easdem (Cochleas) in loco obscuro candelæ lumini obversas contemplarer, videbam ipsas satis velociter atque elegantissimè sese in humore amnii gyrare atque contorquere» . AXOLOTLS DU MEXIQUE. 21 sie sahe ? Sie anwortete : ein kleines weisses Ding, das sich rund herum dreht' ». Carus lui-irèême, observant pour la premiére fois, il y a juste quarante-huit ans, la rotation de l'embryon dans l’œuf de plusieurs Mollusques terrestres et d’eau douce (Colimacons, Mulettes, Ano- dontes, Paludines, etc.), ne put se défendre d’un cri de joie et d'enthousiasme, semblable à ceux qu'avaient laissé échapper Leuwenhoek et Bauer. De plus, 1l rendit témoins du phénomène qui se présentait à sa vue le grand-duc de Toscane, l’illustre Al. de Humboldt et le professeur Savi (de Pise), et il ajoute qu'il n'a jamais revu la rotation embryonnaire sans une vive admira- tion. Aujourd'hui, il n’est pas un seul naturaliste un peu habitué au maniement du microscope qui n'ait pu contempler ce mouve- ment giratoire, non-seulement dans l’œuf des Mollusques marins ou d’eau douce, mais encore dans celui de beaucoup d’autres Invertébrés. Quant à ce qui concerne les Vertébrés, le phénomène dont il s’agit n’a été vu jusqu'à présent ni chez les Oiseaux, ni chezles Mam- mifères. S'il fauten croire Burdach, Cavolini l’aurait aperçu chez un poisson (l’Alherina hepsetus ), et pourtant, dans son Embryo- génie du Brochet, le regrettable Lereboullet ne fait nulle mention du mouvement giratoire de l'embryon dans l'œuf de cette espèce, dont il a si bien étudié l’évolution. Personne, que je sache, n’a vu la rotation embryonnaire chez les Reptiles proprement dits. Quant à ce qui concerne les Batraciens, leur giration dans l'œuf, quoique vue et brièvement décrite par Swammerdam * el 1 Neue Untersuchungen über die Entwickelungsgeschichte unserer Flussmus- schel. Bonn, 1832, in-40, pag. 41. Je donne ici la traduction de ce passage, presque comique par sa naïveté: « Il appela une jeune servante, lui fit braquer les yeux sur l’objet, et lui demanda ce qu’elle voyait. Elle répondit : une petite chose blanche qui tourne (sic !). 2 Il y a tout lieu de s'étonner qu'un fait si bien constaté par l'auteur du Biblia naluræ soit resté si longtemps inconnu à ses successeurs. Rien de plus précis pourtant que la description qu'il en donne : «Adimodum vero mirabile erat visu, quam eleganter quinto hocce die, Fœætus in Amnio semet circumnageret, et versa- rel perpetuo fere in motu constitutus». (Oper. cit., pag. 816.) de 2 22 MÉMOIRES ORIGINAUX. par Spallanzani", paraît avoir échappé à l'attention de tous les naturalistes qui après eux se sont livrés à des études relatives aux premiers développements de ces Vertébrés; MM. Prévost et Dumas n'en disent pas un seul mot dans leurs recherches, d’ail- leurs si exactes, sur l’embryogénie dela grenouille commune’. Dix où onze ans plus tard, la giration de l'embryon dans l’œuf des Batraciens fut apercue par Purkinje et Valentin ; mais Sharpey lui-même avoue n'avoir pu voir ce phénomène. Personne, à ma connaissance, ne l’a constaté jusqu'à présent dans les œufs d’Axolotis. Je ne chercherai donc point à dissimuler le vif senti- ment de joie que ] ai éprouvé lorsque, le ? avril de l’année 1870, j'ai pu être témom des mouvements giratoires de l’embryon dans l’œuf des animaux qui font l’objet de ce Mémoire. Averti par M. Guy que deux femelles d’Axolotis que jelui avais remises avaient pondu dans son aquarium, l’une vers la fin de février, l’autre le 24 mars 1870, je le priai de me donner un certain nombre d'œufs. Naturellement l’évolation de ceux de la première ponte était déjà très-avancée au moment où j'en pris possession (le 27 mars). Aussi, en les soumettant au microscope, je ne pus apercevoir aucun mouvement de giration; mais, en sui- vant jour par jour le développement des œufs pondus le 24 mars, jé vis très-distinctement l'embryon exécuter autour de l'œuf un mouvement de rotation lent, mais de la réalité duquel je ne pouvais douter. Au moment où la giration commence, c’est-à dire dix ou douze jours après la ponte, l'embryon, replié sur lui-même en forme de Cependant MM. Prévost et Dumas n'en parlent point. Il en est de même de MM. Prévostet Lebert, et je crois aussi de M. Carl Vost. 1 Dans son étude sur la génération de la grenouille des arbres, Spallanzani décrit ainsi qu'il suit le phénomène qui nous occupe: « Quand le têtard s'est allongé, une de ses extrémités grossit et l'autre devient plus mince: il arrive alors que, pendant l'observation suivie du changement de cet œuf, l'observateur voit l'œuf lui- même commencer à se mouvoir, tournant lentement sur lui-même comme un dévidoir, et peu à peu se contournant au point de faire toucher ses deux extrémités, les éloignant ensuite l’une de l’autre pour revenir à sa première position». (Ouv. cité, tom. INT, pag. 25.) AXOLOTLS DU MEXIQUE. 23 croissant, ne présente encore qu’une masse informe où l'on dis- tingue à peine une tête, un tronc et une queue grossièrement ébauchés. Cette rotation, d’ailleurs assez lente, ai-je dit, s'opère ordinairement, mais pas toujours, de gauche à droite et dans un plan horizontal ‘. Quelquefois même il m'a semblé que l’embryon se meut en exécutant un mouvement de culbute dans l’intérieur de la coque membraneuse et délicate qui l'entoure. Déjà vu chez les Mollusques et autres animaux invertébrés, le premier de ces mouvements, celui de rotation sur place, a été comparé, non sans raison, par Leuwenhoek, à celui d’une sphère tournant sur son axe vertical, et par Spallanzani à celui d’un dévidoir. Quelquefoisl'embryon, tout en tournant sur lui-même, déerit en même temps, à la manière des Lymnées, une ellipse le long des parois de l’œuf, dans lequel il se meut alors sur un axe fictif. Ce mouvement a été comparé par Lund et Dumortier à celui des corps célestes, à celui des planètes autour de leur orbite. Au fur et à mesure que l’animal s’accroit, la rotation devient de moins en moins rapide, et elle cesse entièrement lorsque les tubercules latéraux qui représentent les branchies futures com- mencent à prendre l'aspect digitiforme. Quant à la cause de cet arrêt du mouvement, ne pourrait-on pas la trouver dans la masse embryonnaire elle-même, devenue trop considérable pour être mue par les eils vibratiles dont sa surface est alors pourvue? Ou bien ne pourrait-on pas expliquer la cessation du mouvement giratoire par le seul fait de l’agrandisse- ment de l'embryon, dont la tête et la queue viennent buter contre la coque de l'œuf? | Quoi qu’il en soit, le ? avril 1870, un tour complet s’exécutait en 4 ou 5 minutes, et même en ? ou 3. Le 6 du mème mois, 8, 10 ou 11 minutes étaient nécessaires pour parcourir le même espace. La rotation est donc ici bien plus lente que chez l'embryon 4 Le sens de la rotation circulaire sur l’axe vertical dépend évidemment de la position dans laquelle se trouve placé l'embryon au moment ou l'on observe l'œuf. ‘ 24 MÉMOIRE ORIGINAUX. des Mollusques, car, d’après Carus, celui des Unio ou Mulettes exécute un tour complet dans 18 ou 20 secondes au plus. D’après Jacquemin, chez le Planorbe corné, chaque tour exige 40 ou 50 secondes quand il est le plus lent, et de 15 à 10 quand il est le plus rapide". Avant les importants travaux de Grant, de Sharpey, et surtout de Purkinje et de Valentin, relatifs aux cils vibratiles et au mou- vement ciliaire, la giration de l’embryon dans l’œuf était fort difficile à expliquer, et l'imagination, celle des Allemands surtout, se donnant libre carrière, assimilait la rotation dont ils’agit à celle des planètes, et y voyait un mouvement cosmique (eine kosmische Bewegung). Se jetant dans un extrême opposé, sir Everard Home et Frantz Bauer (1827) attribuaient le mouvement giratoire de l'embryon, non pas à la gravitation universelle, mais bien à l’in- troduction, dans l’œuf, d'un parasite, d’une espèce de ver qui, selon eux, dévorait petit à petit le jeune animal et, s’accrochant à lui, déterminait la rotation: Carus, au contraire, qui, dans le cours de ses nombreuses recherches sur les Mollusques d'eau douce, n’a jamais aperçu les eils vibratiles, Carus prétendait expliquer la giration au moyen d'attractions et de répulsions exercées sur le liquide ambiant par un mouvement ondulatoire et superficiel de la substance de l’animai, notamment aux endroits où devaient se former plus tard les organes de la respiration. Le célèbre anatomisie de Berlin était bien près du vrai, mais il lui manquait les éléments nécessaires pour le mettre dans tout son jour. Nous ne ferons qu'indiquer en passant la bizarre explica- tion de Rusconi, admettant, sans sourciller, que la rotation de l'embryon de la grenouille, lorsqu'on le met dans l’eau, est due à l'entrée et à la sortie alternatives du liquide à travers les pores de la peau du jeune individu. Or, notez bien que le mouvement rotatoire de l'embryon a lieu bien avant que la peau de l'embryon soit entièrement formée. 1 Moquin-Tandon; /istoire des Mollusques terrestres et fluviatiles de France. pag. 152. Paris, 1855. AXOLOTLS DU MEXIQUE. 29 Au D' Grant revient sans contreditl'honneur d’avoir découvert, dans la présence des cils vibratiles à la surface du corps de l’em- bryon, la véritable cause de ses mouvements giratoires au sein de l'œuf. Les beaux travaux de Purkinje et Valentin, publiés quel- ques années plus tard, ont donné à l'explication dusavant anglais, aujourd'hui généralement admise, une éclatante confirmation. Nos propres observations sur l'embryon des Axolotis sont en parfait accord avec celles de ces éminents naturalistes. À l’aide d’un excellent microscope de Nachet, et en plongeant dans une goutte d’eau l'embryon extrait par nous de l'œuf, nous avons très-bien vu et fait voir à d’autres, non-seulement Ie mou- vement airatoire, mais encore les cils ou prolongements filiformes et vibratiles qui l’exécutent. Nous avons vu les cils dont il s’agit s’abaisser et se relever alternativement, en donnant naissance à ces ondulations si justement comparées à celles des tiges d’un champ de blé agité par le vent; enfin, nous avons aperçu très- distinctement les espèces de tourbillons, Îles attractions et répul- sions occasionnées au sein du liquide par les mouvements des cils, et, à cet égard, nous n’avons absolumentrien à changer à la note que nous adressions à l’Institut, le 18 avril 1870. Nous nous bornons donc à en transcrire le passage qui suit: « Extrait avec précaution de l’œuf, et placé sur le porte-objet du microscope, l'embryon des Axolotls nous a fait voir, d'une manière très-dis- tincte , les cils vibratiles implantés à la surface de son corps et les mouvements qu’ils exécatent. Ces mouvements déterminent, dans la goutte d'eau déposée sur le porte-objet des courants qui entrainent avec eux les petits corps étrangers qui s'y trouvent et qui, venant parfois frapper les cils, sont relancés par ces der- niers avec une grande énergie à une certaine distance ; ou bien, s'ils ont un certain volume, comme les globules vitellins, par exemple, tournoient sur eux-mêmes et sans presque changer de place, rappelant ainsi le mouvement giratoire des petits frag- ments de camphre placés à la surface de l’eau ou du mercure.» 1 N. Joly; Sur la rotation d2 l'embryon dans l'œuf des Axolotls du Mexique , (Comptes-rendus de l'Institut, 8 avril 1870, pag.872.) (S)] 6 MÉMOIRES ORIGINAUX. Nous ne terminerons pas ce qui a trait au développement de l'œuf des Awolotis du Mexique sans consigner ici une idée sin- gulière et tout à fait erronée de Spallanzani, à propos des œufs des Batraciens de nos climats. Selon lui, ceux de la grenouille commune, par exemple, sont de vrais fœtus, «des tétards sous le masque », qui préexistent dans l'ovaire de la femelle bien long- temps avant la fécondation. C’est aussi par erreur qu’il leur donne un amnios et un cordon ombilical ‘. Il ne s’est pas moins singu- liérement trompé en regardant comme spontanés les mouvements giratoires de ces prétendus œufs-fœætus. Or, les erreurs du génie n'en sont pas moins des erreurs qu'une science plus avancée et sans cesse progressive doit s’empresser de corriger. RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS. Des faits et des observations qui précèdent, il résulte que : 19 Les Axolotis du Mexique (Siredon Mexicanus, Shaw) subis- sent des métamorphoses et ont un mode de reproduction jusqu’à présent sans exemple dans l’embranchement des Vertébrés; 20 L’Axolotl est un têtard, l’état larvaire d’un À mblystome ; 30 Le genre Siredon, créé par Shaw pour désigner cette larve, doit être effacé de nos catalogues ; 4° Par une exception unique, ou à peu près, dans l’embranche- ment des Vertébrés ? la larve est féconde, l’Amblysiome ne l’est pas, ou du moins il ne s’est pas encore reproduit dans nos aqua- TÜUMS ; 90 Ces animaux présentent donc un cas de dimorphisme spéci- fique des plus nettement caractérisés, et ne méritent nullement le uom de pérennibranches, puisque cette dénomination désigne un caractère purement transitoire, au moins chez les individus que l’on a vus se métamorphoser en Amblysiomes ; 6° L’embryogénie des Axolotls offre de grandes analogies avec 1 Spallanzani ; Ouv. cit., tom. III, pag. 19. 2? Sauf le Triton alpestre du lac Majeur, d’après Filippi. AXOLOTLS DU MEXIQUE. 27 celle des Batraciens de nos climats. Elle nous à révélé un fait très- rare chez les Vertébrés: la rotation de l'embryon dans l'œuf ; 7° Ce phénomène est dû, ainsi que Sharpey, Purkinje et Valentin l'avaient tres-bien constaté, aux mouvements ondulatoires des cils vibratiles qui garnissent la surface entière du corps des em- bryons ; 8° L'étude attentive des élémants histologiques nous a dé- montré que les corpuscules sanguins ne sont rien autre chose que des globules organoplastiques transformés ; 9° Ce sont eux qui, sous l'impulsion du cœur, dont l’appari- tion est d’ailleurs relativement très-lardive, creusent les canaux où le sang doit circuler. EXPLICATION DES PLANCHES. Fic. 1. OEuf examiné quelques heures après la ponte ; s. v., sphère vitelline ; mn. v., membrane vitelline ; 4, enveloppe glaireuse ou albumineuse. Fra. 2. Le sillon longitudinal s s'est formé à la surface du vitellus. Fire. 3. Le même, avec ses deux sillons longitudinal s et transver- sal s”. Fi&. 4. OEuf où la segmentation est déjà très-avancée. Fig. 5, 6, 7, 8. Le même où le fractionnement du vitellus est de plus en plus marqué. Fra. 9. OEuf où l'on aperçoit la ligne / et la bandelette b primitives. Fi&. 10. On voit ici en / la ligne primitive, en b la bandelette primi- tive entourée de son bourrelet dentelé b’ sur les bords. Le vitellus v sest rétréci à la partie postérieure de l'œuf. Fire. 11. Les deux moitiés du bourrelet se sont unies sur la ligne mé- diane. L'embryon e occupe une grande partie de la face dorsale de l'œuf. . Fig. 12. Embryon vu de profil dans l'œuf. Fic. 15,14. Embryons qui ont conquis la plus grande partie de l'œuf, et qui paraissent englober la portion du vitellus qui va bientôt donner naissance à l'intestin. La rotation a commencé depuis quel- ques heures. Fic. 15. Embryon plus âgé d'un jour que les deux précédents. Fig. 16. Le même, vu dans une autre position. — Dans les cinq fi- 28 MÉMOIRES ORIGINAUX. cures qui précèdent, les flèches indiquent le sens dans lequel se fait la rotation. Dans les mêmes figures, { — la tête; q, la queue; v vitellus ou région abdominale de l'embryon ; « albumen ou liquide amniotique de Spallanzani. Fig. 17. Embryon encore un peu plus avancé. On voit se dessiner les tubercules branchiaux t. b. Fi. 18. Embryon âgé de 15 jours, extrait de l'œuf. La circulation n'existe pas encore ; la rotation n'existe plus. b, tubercules bran- chiaux : {, tête ; m. c., membrane caudale. : Fic. 19. Jeune têtard encore dans l'œuf, âgé de 20 jours. La circula- tion a commencé dans les branchies b. b. Fig. 20. Le même, extrait de l’œufet un peu plus grossi ; b. b., bran- chies ; c. d., corde dorsale ; mn. n., membrane natatoire. FiG. 21. Têtard éclos naturellement depuis 3 ou 4 jours. Les bran- chies b. b. se sont allongées, et leurs tubercules digitiformes sont devenus plus nombreux. On voit en 1» la membrane dorso-caudale; y, YEUX. > Fic. 22. Contenu de l'œuf fécondé. — 9, fines granulations et petits globules; p. s., globules ou plutôt plaques stéariques semblables à celles qu'on trouve dans l'œuf de la grenouille.—g. g., globules vi- tellins granuleux. — g. v., gros globules vitellins ; v, leur vésicule transparente. — g. 0., globules organoplastiques avec leur vési- cule v. FiG. 23. Globules vitellins fortement grossis, dont l'un «a n’a pas de vésicule, tandis que l’autre, b, en est pourvu; v, cette vésicule. Fi. 24. Globules organoplastiques avec leur vésicule transparente v, fortement grossis. Fra. 25. Globules organoplastiques en voie de se transformer en corpuscules sanguins. Fic. 26. Corpuscules sanguins. Les uns, @. a, sont ronds et globuleux (c'est leur forme primitive), les autres sont elliptiques et aplatis, b. b. (cest leur forme définitive); quelques-uns sont pointus, c, surtout à l'une de leurs extrémités et ont la forme de grains d'avoine. Fig. 27. Cœur encore intestiniforme, et vu par transparence : 0, oreillette ; v, ventricule ; b, bulbe artériel. Fic. 28. Le même chez un embryon plus âgé. Les mêmes lettres in- diquent les mêmes parties que dans la figure précédente ; c, courant veineux qui aboutit à l'oreillette. Fig. 29. f. fente valvulaire? vue sous la gorge d’un embryon près d'éclore. à æ pi £R Lih Brel # is Mons. Gt des Sciences Naturelles. ai Tnt plIl Lit Pen LA: Mono! # le. EUR " LE l | ain à NE Tom L. pl. LA Revue des Sciences Naturelles tete. Fi6. 8 Cr POST TT | i ee Le re | ss Den meme Gone É | fe Z D" “a K ne . NN | UN / | K\ eo 4 } Boeoor Tee ROSE k Le) ceci à a rue = FA A RES ÈS w = = … € SF . Ndoly.del. po Fi. l: Coquille, vue de face. F6. Q. Les Valves entrouvertes. Fig. 3. Portiontrès grossie pour montrer les Stries rayonnanies. queue. Fi$. 4, Dimension naturelle. Baudon, del. Zi Byln # LE Mkller } j (fe) AXOLOTLS DU MEXIQUE. 29 Fra. 30. Un vaisseau sanguin de l'extrémité libre d'une branchie, vu chez un individu récemment éclos ; € s., corpuscules sanguins. Fig. 31. Branchies avec leurs digitations et leurs courants sanguins. Fic. 32. Bout libre d'une branchie avec son vaisseau principal a, et ses subdivisions capillaires , d. c. Fic. 33. Extrémité branchiale chez un embryon, vue au moment où la rotation dans l'œuf a commencé. La circulation n'existe pas en- core; c. ., Cils vibratiles. Fig. 34. Autre extrémité libre d'une branchie vue chez un individu plus âgé ( près d'éclore ). On y voit les courants déterminés dans l'eau ambiante par le mouvement des cils vibratiles, c. v. En « deux globules vitellins qui tournoient sur eux-mêmes sous l'impulsion des courants produits par ces mêmes cils. Fie. 35. Figure schématique indiquant le cours du sang dans les ar- cades de la membrane caudale { portion dorsale) d'un têtard âgé de 9 où 6 jours. Fire. 36. Figure schématique indiquant le cours du sang dans la queue d'untêtard éclos depuis 4 jours. c. s. v., courants sous-ventraux, réunis en @. &. c., arcades entourant le corps. — «. d., arcades for- mées dans la membrane caudale { partie dorsale ). — a. v., arca- des formées dans la membrane caudale {partie ventrale ). FiG. 37. Figure indiquant le cours du sang dans la membrane cau- dale (portion dorsale ) du même individu âgé de 15 jours. Ces ar- cades sont devenues plus sinueuses, plus nombreuses, etse rappro- chent de plus en plus du bord libre de la membrane. Fic. 38. Portion dorsale de la membrane caudale d'un embryon ré- cemment éclos. — Cette figure est destinée à donner une idée de la forme et de la distribution des taches pigmentaires, £. {. Fi. 39. Cellules pigmentaires à divers degrés de développement.— a. a., cellules pigmentaires non ramifiées.—b. »., cellules pigmen- taires étoilées. — c. c., cellules pigmentaires ramifiées — d. d., cellules pigmentaires dont les ramifications tubulaires communi- niquent entre elles en formant un réseau analogue à celui des ostéoplastes du tissu osseux. 30 TRAVAUX ORIGINAUX. RE ——_—_ Description d'une nouvelle espèce de PISIDIR FRANÇAISE: P. Dubrueili, Nob, Par le D' BAUDON. Depuis la publication de l’Essai monographique sur les Pisidies françaises . les ma‘acolosistes qui s'occupent de notre faune indi- sène n'ont pas signalé d'espèce nouvelle, sauf M. le D' Paladilhe qui décrivit une forme appendicalée (P. Mortessierianum. Nou- velles misc. malac., 1er fasc., 1866, pag. 29 et suiv.; pl. 1, fig. 12-17). L'étude de ces petites bivalves est difficile et parfois découra- geante à cause de leur protéisme. L'on continue, après un examen superficiel, afin de sortir d'embarras, de désioner sous le nom de P. fontinale toutes celles qui paraissent indéterminables; et cepen- dant, avec une observation plus minutieuse, je pense que l’on arri- verait à faire connaître de bonnes espèces ou des variétés inté- ressantes. Une certaine quantité d'individus doit être soumise à l'examen avant de juger sainement de la valeur d’un type et d'en créer un nouveau. Non-seulement il est nécessaire de suivre les développe: ments de la coquille à divers âges, mais il n’est pas moins essentiel d'observer le siphon dans l’eau à des températures différentes. S'il est parfois identique chez plusieurs Pisidies bien distinctes, il ne présente plus le même aspect sur des espèces très-voisines. La description qui suit en établit la preuve. Première Division. B. Orsreucara (Es. Monogr. Pisidies françaises). P. Dubrueili. Nob. Animal albo opalinum, supra rubescens ; pede tenui, extensibile, subacuto ; tubo siphonali brevissimo, fere eylindrico, pellucido. Concha solida, tumida, nilidissina, subæquilateralis, antice elongatula, posterius rotundata ; Striata ; longistrorsum radiolata ; striis radiantibus vix oculo armalo conspicuis ; umbonibus promi- uulis, rotundatis. NOUVELLE ESPÈCE DE PISIDIE FRANÇAISE. 31 HAUTEUR NE 3 millim. Largeur..." 4 ÉpalscEure lee 2472" Animal blanc opalin, presque transparent sauf à la région du foie qui est d'un rouge violacé très-pâle ; branchies différant à peine par leur nuance des autres organes ; pied long, extensible, blanc à peine opalin, subaigu. Lorsque l'animal est à l'état de repos, il en laisse souvent passer l'extrémité sous forme d’ampoule. Siphon presque translucide, évasé par moments, très-court, cylindrique, à ouverture ronde coupée obliquement ; pourtour de l'orifice très- contractile, dessiné par un linéament brûnâtre. C'est par un exa- men atlentif qu'il se distingue de l'eau dans laquelle il se déploie. L'animal met un temps fort long pour le faire saillir hors du têt. Il le développe insensiblement et même, pendant la marche, il le conserve fréquemment à l'intérieur des valves. Plongée dans l’eau tiède, au lieu de montrer la vivacité relative des autres espè- ces, celle-ci reste lente et timide. En étudiant la coquille, l'on trouve des rapports avec celle du P. nifidum, mais chez ce der- nier le siphon est constamment en éventail ou plissé pendant l'extension, tandis qu'ici il m'a élé impossible de decouvrir celte disposition malgré des observations soutenues sur un grand nombre d'individus. Coquille assez solide, gonflée surtout supérieurement, à peine allongée en avant, arrondie en arrière, un peu transparente, extrè- mement brillante; stries transversales fortes et régulières; d’au- tres, tellement fines qu’elles ne sont aperçues qu'avec une bonne loupe, viennent les couper où plutôt elles apparaissent dans l'in- tervalle des stries transversales, et elles forment ainsi un réseau très-délicat. La coloration générale est jaune soufre, principalement en approchant du bord inférieur. Souvent le jaune est un peu roussâtre avec la moitié supérieure gris très-pâle. Ligament inap- préciable au dehors. Valve droite : charnière étroite, deux dents cardinales coniques, subaiguës, saillantes, lamellaires, séparées par une sinuosité, placées sous le sommet ; l'antérieure plus forte , plus proéminente; la postérieure est située juste au-dessous et à 22 TRAVAUX ORIGINAUX. l'extrémité du ligament. Dents latéro-antérieures développées ; latéro-postérieures minces. Empreinte musculaire antérieure ovalaire, assez bien marquée. Valve gauche : une seule dent coni- que, subaiguë, située à la terminaison du ligament et se logeant au milieu des deux dents opposées. Dents latéro-antérieures fortes sans être épaisses, les autres comprimées et lamellaires. Empreintes musculaires ovales, très-allongées. Celle espèce est voisine du P. nitidum, elle a son siphon constamment cylindrique. Chez le P nitidum, il est en éventail ou plissé ou infundibuliforme. La coquille est solide, gonflée ; les stries transversales sont cou- pées par d’autres petites stries extrêmement délicates et formant un réseau des plus fins. Ce caractère ne se présente chez aucune de celles que j'ai soumises à l'observation. J'ajouterai que les valves de la Pisidie brillante sont déprimées, fragiles, translucides et d'une teinte complètement uniforme. Je dédie cette espèce à M. E. Dubrueil. Je l'ai trouvée à Saint-Félix (Oise), près du bâtiment de lalaiterie, dans un fossé de 0,50 à 0,60 cent. de profondeur, à fond très-vaseux, et situé dans un bois obs- eur, fangeux, parcouru par de petits écoulements d’eau presque stagnante. La vase de ces écoulements renferme de minimes sujets rabougris, translucides, qui n'arrivent jamais à un meilleur déve- loppement. Celle qui est décrite paraît être la même qui, soumise. à des conditions convenables, s’est accrue largement. Le fossé dans lequel je l'ai recueillie a été creusé il y a six ans, sur les limites du bois. Le soleil ne pénètre jamais jusqu'à lui, car il est recouvert par des broussailles et de hautes plantes aquatiques. Il y a quatre ans, je découvris cette espèce, qui élait abondante. Malgré mes recherches ultérieures, elle semblait avoir disparu de la localité, mais elle se montra de nouveau l'an dernier. Je n'ai jamais pu m'expliquer la disparition subite de certains Mollusques, et leur réapparition au bout de quelques années, lorsque rien n’a été modifié dans les lieux où ils ont pris naissance. Comme il est du devoir de rectifier toute erreur, afin de ne pas multiplier les difficultés trop nombreuses qu'apportent les fausses attributions, je m’empresse de le faire à l'occasion de cette. Note. NOUVELLE ESPÈCE DE PISIDIE FRANCAISE. 23 M. le Dr Companyo décrivit une evyelade sous le nom de C. Mou- Chousii(Hist. nat. du dép. Pyrénées-Orient., tom. WI, 1865, pag. 919-520). J'ai sous les yeux trente exemplaires authentiques de divers âges, et je ne puis y voir que le Pisidium casertanum, Poli, var. P. lenticulare, Norm., etnon une Cyclade. LA BOTANIQUE. — SON OBJET, SON IMPORTANCE. LEÇON D'OUVERTURE faile à la Faculté des Sciences de Nancy, Par À. MILLARDET (16 mars 1872). MESSIEURS, La connaissance des lois qui président à la vie végétale est un des problèmes les plus ardus qui soient proposés à l’esprit humain. Les phénomènes biologiques sont tellement multipliés el variés, leur dépendance mutuelle est si intime, qu'en abordant leur étude on sent en premier lieu le besoin d’une analyse atten- tive et minutieuse, afin d'arriver d’abord à les distinguer et à les comprendre. C'est cette analyse que je compte faire dans la suite de ces leçons; mais il ne faut pas oublier qu’elle n’est pour ainsi dire que le préambule de la science. En effet, s’il est vrai qu’une distinction méthodique et une exposition spéciale de chaque fait en particulier engendrent la clarté et la facilité, en éloignant de notre esprit tout ce qui est étranger à un certain point de vue, il n'est pas moins évident que nous ne saurions acquérir ainsi une intelligence complète des choses. Les rapports prochains sont les seuls que l’esprit puisse saisir par ce procédé ; l'harmonie générale lui échappe, et la science ne semble plus qu’un chaos de vérités sans liaisons, bonnes tout au plus à servir d’aliment à la curiosité. Il est donc nécessaire, après l'étude préalable dont je viens de parler, de se placer à un point de vue plus élevé; d’envisager chaque phénomène sous toutes ses faces; d’embrasser d’un seul coup d'œil un grand nombre d'objets, afin de découvrir leurs rela- 34 MÉMOIRES ORIGINAUX. tions et d'arriver ainsi à les coordonner. Grâce à ce second tra- vail, il devient possible, en s’élevant à des vues de plus en plus générales, de donner à chaque objet sa couleur propre, à chaque fait sa véritable importance, à la science tout enlière la vie et la fécondité qui résultent de l'harmonie de ses diverses parties. Ce sont quelques-unes de ces considérations générales, difficiles à présenter isolément dans le cours de l’enseignement, que je vais essayer de réunir et de résumer ici. Elles ont pour but de répondre à deux questions que je me suis entendu poser souvent : Qu'est-ce que la Botanique ? Quelle est son importance ? Qu'est-ce que la Botanique ? .La réponse à cette question sera à la fois une définition de l’objet que nous nous proposons dans l'étude de cette science et le programme de nos prochaines leçons. Les végélaux aussi bien que les parties qui les constituent peu- vent être envisagés à deux points de vue généraux très-distinets : au point de vue de leur forme et à celui de leurs fonctions ; de là une première division de la Botanique en MORPHOLOGIE et PHY- SIOLOGIE. Un exemple fera saisir la différence essentielle qui existe entre ces deux manières de considérer un seul et même objet. S'agit-il d'étudier la vrille de la vigne au point de vue Morphologique : il faudra porter son attention sur la forme, la couleur et les autres caractères extérieurs de cet organe ; reconnaître sa structure ; déterminer sa posilion sur la tige aussi bien que ses rapports de disposition relativement aux autres parties de même espèce ou d'espèce différente ; enfin rechercher si cette vrille est un organe sui generis où un autre organe transformé. Au point de vue Phy- siologique, il sera nécessaire de définir d’abord la fonction spéciale de l'organe dont nous parlons ; de déterminer par l’analyse les différents actes dont cette fonction est composée, ainsi que le siége de chacun d'eux; d'observer leur production, leur succession, leurs différents rapports ; de montrer quelle est l’action des divers agents sur ces phénomènes, quels sont ceux qui les favorisent, ceux qui les empêchent; en un mot, il faudra non-seulement LA BOTANIQUE. 39 découvrir la cause de tous ces actes physiologiques pris Séparé- ment, et rechercher dans quel rapport elle est avec soneffet, mais encore reconnaitre dans quelle mesure chacun de ces actes contri- bue à l’accomplissement de la fonction. Enrésumé, par la MORPHOLOGIE nous recherchonsle mode ; pa rla PHYSIOLOGIE, la cause. L'ordre logique veut que l'étude de la première de ces branches de la Botanique précède celle plus difficile de la Physiologie. Si les formes organiques étaient, comme celles du monde mi- néral, toujours invariables et semblables à elles-mêmes d’un indi- vidu à un autre, la Morphologie, en les déterminant dans l’espace, suffirait à nous en donner une connaissance complète ; mais les variations continuelles qu'elles présentent exigent que l’on ajoute à cette premiére notion leur détermination dans le temps. Ce nouveau moyen de définir la forme nous est fourni par la Mor- phogénie. Aïnsi que l'indique l’étymologie, cette branche de la Morphologie constitue l'histoire de la forme ; elle nous montre le point de départ de chaque être, de chaque organe; nous fait assister à leur naissance ; nous rend témoins de leur évolution, de leurs transformations successives, et finalement de leur déca- dence. La Morphogénie est le plus puissant auxiliaire que nous ayons dans la recherche de la nature véritable et des affinités de certaines formes. Les conclusions auxquelles elle nous conduit, loin d’être trompeuses et ambiguës comme celles que nous fournit souvent l'analogie, offrent au contraire le plus haut degré de cer- titude. ; La Morphologie proprement dite et la Morphogénie se com- plètent done l’une l’autre et doivent intervenir simultanément dans la solution de tout problème morphologique. La Morphologie se divise en GÉNÉRALE et SPÉCIALE : l'utilité de cette distinction ressortira des développements qui suivent *. 1. Dans l'étude d'une science, rien n'est plus important que la méthode : c’est elle qui éclaire l'investigateur et donne aux faits la couleur et le relief. Il ne me semble 30 - MÉMOIRES ORIGINAUX. Toutes les formes végétales sont du ressort de la Morphologie, fs depuis les plus complexes jusqu'aux plus simples. Les organes élémentaires appartiennent à cette dernière classe de formes, et comme ils dérivent tous sans exception de la cellule, c’est par la considération générale de celle-ci que doit débuter la Morphologie générale. La Morphologie de la cellule forme donc le premier chapitre de la science dont nous parlons. Elle a pour objet l'étude générale de la forme, de la constitution, des éléments et du dé- veloppement de la cellule végétale, suivant les lieux et les types. Comme dans les végétaux, les diverses formes de cellules, au au lieu d’être disséminées et mélangées sans ordre, sont groupées ensemble d’après leurs ressemblances, de manière à constituer autant de tissus de structure très-différente ; à la Morpho- logie de la cellule devra succéder la Morphologie et la Morpho- génie des différents tissus, c'est-à-dire l'Histiologie et l’'Histiogénie. C'est dans ce second chapitre que seront traitées les propriétés morphologiques du parenchyme, des tissus épidermique, fibreux, vasculaire, etc. Jusqu'ici nous n'avons considéré que les propriétés morpho- logiques des parties constiluantes élémentaires de l'organisme donc pas inutile de préciser davantage, en les développant, les points de vue géné- raux qui nous occupent. La classification méthodique des différentes doctrines qui composent une science doit marcher de pair avec les progrès de ces dernières, sinon les devancer. C'est ce qui n'a pas toujours eu lieu pour la Botanique, ét ce qui justifie cet essai. Un travail de ce genre n’est point facile. Il faut se tenir en garde à la fois et contre l'excès et contre l'insuffisance de la systématisation. Je crois n'avoir innové que là où la nécessité l’exigeait. En général , ainsi qu'on le verra, je me suis souvent inspiré de l'excellent Traité de Botanique de M. Sachs (2e édi- tion), pour la Morphologie générale notamment. MORPHOLOGIE. A. Première partie : Morphologie GÉNÉRALE. I. Morphologie de la cellule. j. Constitution générale de la cellule.,,Membrane. Protoplasma et nucléus Chlorophylle et pigments de la même série. Aleurone et crystalloïdes. Liquide cellulaire et ses pigments. Amidon. Inuline. Glycosides. Matières grasses, HATASES or E dbocbanondnc Substances minérales. 9. Formation et développement de la cellule. LA BOTANIQUE. 37 végétal ; il nous reste à étudier la Morphologie générale de cet organisme lui-même. Les formes si nombreuses de ce dernier se divisent assez naturellement en deux grands groupes, celui des Thallophytes et celui des Cormophytes, ou plantes dépourvues et pourvues de tronc. Chacun de ces groupes prête à de nouvelles considérations suivant que l'organisme conserve une forme simple ou qu'il se divise. Quelles sont les lois qui président à cette division ; dans quelle direction a-t-elle lieu; quel est l’ordre successif dans lequel ces nouveaux membres s'ajoutent au cerps végétal primitif; comment peut-on les distinguer et les classer ; quel est leur point de départ et leur mode de développement, enfin de quels tissus sont-ils composés et quelle est la disposition réciproque de ces derniers ? Telles sont les principales questions dont la discussion compose cette troisième partie de la Morpho- logie. Les divers points de vue auxquels nous venons de nous placer successivement nous permettent d'arriver à une connaissance aussi complète que possible des lois générales de la Morphologie, dans l’ordre habituel des choses. Mais à côté des formes nor- males, qui seules nous ont occupés jusqu'ici, il s’en présente quel- quefois d’exceptionnelles, qui, à premiere vue, paraissent sortir du cadre commun. Elles font l’objet de la Tératologie. Grâce surtout à la Morphogénie, il est devenu possible de subordonner II. Morphologie des tissus. 1. Formation des tissus. Moyens d'union des cellules. — Méats. Lacunes. Canaux aérifères , résinifères , gommifères. 2. Diverses espèces de tissus. Leur état primordial. — Tissu épidermique. Épi- derme. Cuticule. Poiïls. Aïguillons. Stomates. — Tissu subéreux. Périderme. Ryti- dome (Borke). Lenticelles. — Tiss urarenchymateux, vert ou incolore , avec ou sans méats. Collenchyme. Parenchyme glandulaire, Scléreux, Ligneux et du liber. — Tissu prosenchymateux. Prosenchyme libriforme. Prosenchyme trachéiforme. Trachéides. — Tissu vasculaire. Vaisseaux proprement dits (aérifères ). Vaisseaux propres (laticifères), criblés lymphatiques, utriculeux. 3. Divers systèmes de tissus. —Système cortical (structure et développement), fibro-vasculaire (structure et développement), fondamental (Sachs) (structure et développement). pe 3 38 MÉMOIRES ORIGINAUX. aux lois mêmes qu’elles semblaient violer ces formes anomales ; elles ne sont plus des aberrations de la puissance formatrice, mais des ébauches dont l’imperfection même sert à nous déceler la marche que suit la Nature dans l’exécution de ses chefs-d’œuvre. L'ensemble des trois doctrines que je viens d'exposer: Mor- phologie normale ou anomale de la cellule, des tissus, des orga- nismes, constitue la Morphologie GÉNÉRALE, c'est-à-dire cette partie de la science qui considère les rapports généraux de la forme. Mais, outre ces rapports généraux qui seuls nous ont occu- pés jusqu’à présent, il en existe d’autres non moins importants à connaître: ce sont les rapports spéciaux. Tandis que dans l'étude des premiers nous avons été obligés de considérer la forme d’une facon abstraite, en la dépouillant par la pensée de ses connexions prochaines dont la considération était étrangère à notre sujet, nous devons, pour arriver à la connaissance des seconds, nous placer au point de vue purement concret, et restituer aux objets ce caractère de réalité, cette diversité de relations qu'ils offrent dans la nature. Le moyen d’arriver à ce but, c’est l'étude morpho- logique de l'individu. Ainsi se trouve constituée, par la considé- ration des formes individuelles, une nouvelle branche de la IT. Morphologie de l'organisme végétal. 1. Deux formes générales de l'organisme végétal; le Thallophyte. deux expressions générales de la forme de l'organisme végétal ! le Cormophyte. 2. Parties distinctes de ces deux formes générales. Différents termes de ces deux expressions. — Tige et feuille. Accroissement terminal des feuilles et des formations axiles. Accroissement intercalaire des feuilles et des formations axiles. Allongement des feuilles et des formations axiles , leur accroissement dans diffé- rentes directions. Systèmes de tissus qui les constituent. — Poil. Accroissement. Poil chez les Thallophytes. — Racine. Racine principale. Accroissement terminal. Piléorhize. Systèmes de tissus qui la constituent. 3. Origine différente des parties de l'organisme végétal. — Axes foliaires issus de Thalles. Axes foliaires issus de feuilles. Formations adventives issues de racines. Bourgeons adventifs issus de diverses parties. Axe principal issu de la cellule ger- minative. Axes latéraux normaux issus du point végétatif ; leur arrangement basi- fuge ; leurs rapports de nombre relativement aux feuilles ; leurs rapports de position relativement aux feuilles ; les rapports que présente l'époque de leur ap- parition relativement à celle des feuilles. LA BOTANIQUE. 39 Morphologie que nous appellerons sPÉGIALE , par opposition à la précédente ou Morphologie GÉNÉRALE. Le champ ouvert à la Morphologie spécrALE est presque sans bornes. Ce n’est point assez pour elle d'étudier les formes exté- rieures, de tracer l'anatomie, de suivre le développement pro- gressif de chaque organe dans toutes les espèces de végétaux connus; elle va plus loin encore ct poursuit les variations mor- phologiques jusque dans les variétés, dans les formes, dans les individus de chaque espèce. Un travail aussi immense et aussi minutieux ne peut être utile que s'il est fait au point de vue comparatif. Aussi la méthode comparative appartient essentiel- lement à la Morphologie spéciale ; c’est elle qui a produit l’orga- nographie comparée, l’Anatomie comparée, la Morphogénie com- parée. C'est grâce à elle qu’il nous est donné de découvrir dans les formes individuelles des rapports de différents degrés qui nous permettent une classification méthodique des végétaux. La Morphologie spéciale est donc la base sur laquelle repose la clas- sification, ou, si l’on veut, la seconde n’est que l’expression abré- gée, la formule de la première ; elles sont inséparables. Après les affinités des formes végétales, il reste à étudier leurs rapports de distribution à la surface du globe, les lois qui prési- 4. Ramification. —Thalle. Racines. Feuilles. Axes foliaires. 9. Disposition des feuilles sur la tige. 6. Directions d’accroissement. — Direction de l'axe d'accroissement. Rapports de symétrie. Régularité. 1 T. Formes typiques principales des tiges, feuilles, racines. 8. Métamorphose. 9. Alternance de génération. 10. Tératologie générale ; anomalies de nombre des parties : a) Proliférations axillaires (latérales ?) Dédoublement. Multiplication. b) Développement. Arrêts. Avortement. Atrophie ; végétation devenant dé- finie. — Excès. Hypertrophie. Prolifération centrale ; végétation devenant indéfinie. ce) Accroissement. — Régularité. Pélorie. Irrégularité. Fasciation. Torsion, etc. d) Rapports de position. — Rapprochement. Soudure. Contraction. Éloignement : transversal, longitudinal. e) Métamorphose : ascendante, descendante. 40 MÉMOIRES ORIGINAUX. dent à leur groupement et à leur dissémination, leurs migrations, les limites dans lesquelles elles peuvent s’acclimater. L'ensemble de ces faits constitue la Géographie botanique. Au point de vue purement morphologique, cette partie de la science ne serait qu'une sorte de statistique des espèces, genres ou familles crois- sant dans tel pays, tel climat, telles conditions; une nomencla- ture fastidieuse et sans fin dont l'esprit pourrait à peine retenir quelques termes, parce que les raisons d’être de leur groupement lui échapperaient. Aussi étudierons-nous cette question au point de vue physiologique, ainsi que l’a fait A. de Candolle. Nous considérerons la distribution des plantes comme l’accomplisse- ment d’une fonction. En effet, c’est l’action de la lumière, de la chaleur, de l'humidité, de la constitution physique et chimique du sol, qui règle la santé des individus, favorise ou diminue leur développement et leur fécondité, détermine leur prépondé- rance ou leur diminution dans la flore d’une contrée. Ce sont les vents, les courants d’eau, les animaux, l’homme enfin, qui rè- glent les migrations des espèces; tandis que les chaînes de montagnes, les bras de mer et les déserts limitent leurs aires de distribution. Toutes ces questions rentrent dans le domaine de la Physiologie. B. Deuxième partie, Morphologie, Tératologie, Géographie et Paléontogie spécraLes des différentes classes et familles du règne végétal. Enumération de ces divers groupes : 6 . . . . , PHYSIOLOGIE. A. Physiologie des tissus et de leurs éléments (fonctions cellulaires). I. Composition générale de la substance végétale. — Corps simples. Sels minéraux. Principes immédiats. II. Propriétés physico-chimiques et physiologiques de la substance végétale ; phénomènes de son développement; ses divers états moléculaires. La mem- brane de cellulose jeune... Capillarité. Imbibition. Diffusion (transpiration). — La membrane de cellulose cuticularisée ; lignifiée ; minéralisée ; etc. L'amidon et ses congénères Le protoplasma et ses congénères. La chlorophylle et ses con- LA BOTANIQUE. 41 Les mêmes considérations sont applicables à la Paléontologie botanique, c’est-à-dire à cette partie de la science qui traite de l'apparition des formes végétales à la surface du globe, de la com- position des flores aux différentes périodes géologiques et de la géographie botanique à ces mêmes époques. Sans doute, les faits particuliers dont se compose la Paléontologie seront consignés dans les différents articles de Morphologie spéciale où nous étu- dierons les caractères des principaux groupes de végétaux exis- tants ou disparus; mais quant à l’histoire de l’évolution générale du règne végétal, elle appartient à la Physiologie. La distribution dans le temps des formes organiques, aussi bien que leur distri- bution dans l’espace, dont je viens de vous entretenir, dépend de causes obscures, il est vrai, mais que notre devoir est de recher- cher et de saisir quand cela nous est possible. Au reste, ainsi que vous le verrez tout à l’heure, il est impossible de séparer la Paléon- tologie végétale de la Géographie botanique. La distribution géographique actuelle des végétaux n’est que la suite naturelle de leur distribution pendant la période tertiaire, de telle façon génères (Anthonanthine, etc.). Les graines et les huiles. Les résines. Les glycosides. Le liquide cellulaire et ses pigments. Les substances minérales, IT. Nutrition de la substance végétale en général. 1. Conditions générales de la nutrition. — Eau. Chaleur. Lumière. 2. Aliments des plantes et leur assimilation. a) Absorption en général. — Assimilation des aliments tirés du sol. b) Respiration en général. — Assimilation des aliments tirés de l'atmosphère. .— x Réduction. Assimilation du carbone. 8 Oxydation. Assimilation de l'oxygène. — Plantes parasites. Fermentations. 3. Transformation des substances (Stoffwechsel). — Genèse des substances albu- minoïides et leur rôle physiologique. Genèse des substances amylacées, ete... Genèse des substances minérales, etc... Sécrétions et excrétions en général. 4. Phénomènes généraux dépendant de la nutrition. — Production de chaleur ; lumière; électricité. — Mouvement (mouvements de nutrition). Circulation lente, diffusion. Cyclose. Circulation cellulaire. Mouvements amæboïdes, etc. IV. Accroissement en général, considéré comme mouvement (mouvements d'accroissement). 1. Accroissement général, intime, moléculaire (mouvements généraux d'accrois. sement). Influence de divers agents ; lumière , chaleur. etc. Périodicité de l'ac- croissement, 49 MÉMOIRES ORIGIRAUX que l’étude de la distribution des espèces à cette dernière époque est le seul moyen de saisir la raison d’être des caractères les plus importants de nos flores actuelles. L'étude de la PHYSIOLOGIE comme celle de la Morphologie se divise en plusieurs parties distinctes. Avant d'aborder les mani- festations biologiques spéciales localisées dans des systèmes de structure et de fonctions complexes, il est nécessaire de recher- cher d’abord quelles sont les propriétés générales des parties élémentaires, cellules et tissus : c’est l’objet de la Physiologie géné- rale ou cellulaire. Elle traite de la composition générale de la substance végétale, de sa constitution, de ses propriétés physico- chimiques et physiologiques, de sa nutrition, de ses changements, de son accroissement. Ces connaissances préliminaires une fois acquises, il devient possible d'étudier les phénomènes que présentent les organes spéciaux, phénomènes plus compliqués que les précédents, pro- duits par le concours simultané de plusieurs actes physiologiques. Cette seconde partie de la science constitue la Physiologie des orga- 2. Accroissement des organes (mouvements organiques d'accroissement). — Tension en général. — Mouvements d’oppression, de géotropisme, d’héliotropisme, de nutation, périodiques, paratoniques et d'irritabilité. B. Physiologie des organes (fonctions organiques). I. Fonctions de nutrition. a) Fonctions des racines. — Absorption des aliments placés dans le sol. Ab- sorption des substances solubles dans l’eau. Mécanisme du phénomène. Va+ riations dans l'absorption. Absorption des substances insolubles. Action dis- solvante des racines. Force d’élévation des racines. Absorption chez les plantes aquatiques. Absorption chez les plantes inférieures. b) Fonctions des feuilles. 1. Respiration. — Absorption des aliments atmosphériques. Assimilation du carbone. — Réduction. Mécanisme de l'assimilation chez les plantes supérieures. — Fonctions des stomates. Mécanisme de l'assimilation chez les plantes aquatiques et chez les plantes inférieures. Assimilation de l'oxygène. Oxydation chez les plantes pourvues de chlorophylle et chez celles qui en sont dépourvues. 2. Transpiration. Mécanisme. Variations. c) Fonctions des faisceaux fibro-vasculaires. — Circulation. . Circulation des liquides. LA BOTANIQUE. 43 nes; elle comprend les fonctions des racines, des feuilles, du système fibro-vasculaire, des organes sexuels, etc. Si nous poursuivons la même marche analytique du simple au composé, nous arrivons à une fonction dont le siége ne se trouve ni dans un élément histiologique, ni dans un tissu, ni même dans un organe considérés isolément, mais dans l’ensemble de l’indi- vidu tout entier : cette fonction est celle du développement de l'individu. Dans cette nouvelle branche de la Physiologie nous aurons à considérer les propriétés de la graine, sa dissémination, sa germination; — le mode de végétation de la plante (parasite ou non, etc.), etles conditions de son développement, c’est-à- dire l’action des diverses influences cosmiques et telluriques sur sa santé, ses migrations, son acclimatation. Presque tout ce cha- pitre, ainsi que je l’ai dit plus haut, appartient à la Géographie botanique. La quatrième et dernière branche de la Physiologie a pour objet l'étude des phénomènes biologiques les plus élevés et les plus complexes, de ceux qui se manifestent, non dans l'individu isolé, mais dans les collections d'individus. Ces collections sont «) Circulation déterminée par les phénomènes d'absorption et de transpiration (sève ascendante). Tissus conducteurs. Mécanisme. Nature de ia sève. B Circulation déterminée par les phénomènes de nutrition et d'accroissement (sève descendante). Tissus conducteurs. Mécanisme. Nature de la sève. 2. Girculation des gaz. Dans les faisceaux f. v. Dans les méats et canaux. Mé- canisme. Gaz intérieurs. Circulation dans les plantes inférieures. IT. Fonctions de reproduction. a) Reproduction non sexuelle. b) Reproduction sexuelle: dans les Cryptogames, dans les Phanérogames. Floraison. Hermaphroditisme. Mono, Dioicité. Dichogamie. Hétéromorphisme. Dissémination du pollen. Fécondation. Maturation. C. Physiologie de l'individu (fonctions du développement individuel). Faculté germinative. Germination. Développement. Conditions du développement. Influence du sol. — Stations. Influence de la chaleur et de la lumière. Altitude. Latitude. Influence des météores aqueux. Dissémination. Vents. Eaux. Animaux. Homme. Montagnes. Mers. Déserts. Naturalisation. Périodes de végétation. Déca- dence. Maladie. Mort. 44 MÉMOIRES ORIGINAUX. variées, on les désigne sous les noms de variété, race, espèce, genre, famille, etc. D'une façon générale, les phénomènes dont ces divers groupes d'individus sont le siége, sont désignés sous le nom de développement, d'évolution des organismes. Comme cette évolution tend sans cesse vers le perfectionnement morpho- logique ei. physiologique, cette quatrième partie de la Physiologie recevra le nom de Physiologie du perfectionnement des organis- mes, ou, d’une façon plus générale, des formes organiques. Telles sont, en peu de mots, les différentes doctrines dont l’en- semble forme, à l'heure qu'il est, la science des végétaux. Je me suis efforcé de les présenter dans leur ordre logique et d'établir aussi nettement que possible les limites de chacune. Toutefois 1l ne faut pas oublier qu'elles offrent de nombreux points de con- tact, et que celui-là seul peutse vanter d’en connaître une com- plètement, qui connait également toutes les autres. De même que toutes les sciences sont sœurs et se prêtent un mutuel appui, de même aussi les branches d’une science, distinctes à leurs points extrêmes, finissent par converger ensemble dans le tronc com- mun, qui seul peut leur fournir les principes de leur développe- ment individuel. D. Physiologie des formes organiques collectives. (Fonctions du perfec- tionnement des formes organiques.) Diverses catégories de formes collectives : variétés , races, espèces, genres, fa- milles. I. Production primitive des formes organiques. Influence de la pesanteur. In- fluence de la lumière. IL. Variabilité des formes organiques. Variations végétatives. Variations sexuel- les. Croisement. Hybridation. III. Permanence et hérédité des formes organiques. Formes non héréditaires. Formes héréditaires: IV. Sélection des formes organiques. Sélection artificielle. Sélection naturelle. V. Filiation des formes organiques. Preuves directes. Preuves indirectes. æ Morphogénie organique. B Développement des formes organiques à la surface du globe (Paléontologie générale). y Distribution géographique actuelle (aires des espèces, genres, familles). VI. Du perfectionnement des formes organiques et de leur adaptation, — Méta- morphose. Harmonie. Plan de composition. ES (2 JL LA BOTANIQUE. J'arrive à la seconde question que j'ai posée au commencement de cette leçon : Quelle est l'importance de la Botanique ? L'importance d’une science se mesure aux conséquences qui en découlent ; celles-ci sont de deux ordres, pratiques et philoso- phiques. Il ne sera pas nécessaire d’insister ici sur les premières. Tout le monde sait que la Médecine emprunte au règne végétal la plupart des médicaments dont elle fait usage, et que la Patho- logie a constaté, dans plusieurs maladies, la présence de micro- phytes à la surface et jusque dans l'épaisseur de nos organes. On se rappelle la découverte récente des ferments végétaux et la lumière qu’elle a jetée sur les phénomènes qui intéressent le plus l'économie domestique. Enfin, il n’est personne qui ne recon- naisse l'influence croissante qu’exercent sur notre bien-être l’Agri- culture et l’Horticulture. Ces applications, pour être faites avec sens, demandent une connaissance générale des principes scien- tifiques de la Botanique, et celle-ci, à son tour, peut en tirer des indications précieuses. L'importance de la Botanique au point de vue philosophique n’est pas moins évidente que son utilité pure; il importe seule- ment, pour l’apprécier, de posséder quelques connaissances géné- rales en sciences naturelles. La rareté de ces connaissances el l'absence de philosophie sont les seules raisons pour lesquelles il existe encore tant d'opinions erronées sur ce point. Il n’est pas rare, en effet, de rencontrer non-seulement des gens du monde, mais encore des naturalistes, qui traitent notre science de science de mots. Ce reproche, la Botanique peut sembler l'avoir mérité Jusqu'au commencement de ce siècle, à une époque où les pre- miers observateurs, envahis par les détails qui s’offraient à eux de toutes parts, cherchaient à démêler quelques points de vue gé- néraux au moyen de détermipations et de classifications prélimi- naires. Mais il n’y a rien là qui doive élonner un esprit habitué à la réflexion. Une période semblable de tâtonnements se retrouve dans l’histoire de toutes les sciences : elle est dans l’ordre même des choses et précède forcément la phase du développement mé- thodique et raisonné, comme l'embryon précède la plante adulte, 46 MÉMOIRES ORIGINAUX. À l'heure qu'il est, continuer d'adresser à la Botanique ce re- proche immérité, c’est faire preuve d'étroitesse d'esprit, et mon- trer l'ignorance la plus inexcusable des progrès qu’elle à réalisés depuis le commencement de ce siècle et surtout dans ces der- nières années. | Pour traiter d’une facon un peu complète de l'importance de la science qui nous occupe, il faudrait passer en revue successi- vement les diverses vérités Botaniques et montrer quelle est la place qu'elles occupent dans l’ensemble de nos connaissances. Un programme aussi étendu ne saurait être rempli dans le court espace de temps qui me reste ; je me bornerai à faire ressortir les rapports des différentes branches de la Botanique avec les sciences les plus voisines, Zoologie et Géologie. Commençons par les rapports de la Morphologie végétale avec la Zoologie. Il y à trente ans, l’Histiologie animale n’existait pas. C’est à peine si la nature cellulaire de l’œuf, des éléments de l’épi- derme, des globules du sang, avait été reconnue. La structure des tissus si divers qui entrent dans la composition de nos organes était encore une énigme. On manquait de théorie générale de l'accroissement. Cependant, grâce aux travaux des botanistes, la Morphologie cellulaire végétale avait acquis déjà un haut degré de perfection. La forme relativement simple de la cellule végé- tale, sa résistance, avaient permis d'établir ce principe que tous les tissus végétaux sont composés d'éléments qui, quelle que soit leur forme, dérivent de la cellule. L’accroissement individuel aussi bien que la multiplication de ces dernières étaient connus, et le phénomène de l'accroissement des organes se présentait partoul sous la forme plus simple de la multiplication cellulaire. C’est alors qu’un homme d’un génie peu commun, Schwann, eut l’heu- reuse idée d'appliquer ces connaissances à la Zoologie, en étu- diant comparativement la structure des plantes et celle des ani- maux. Rapprochant les uns des autres, dans les deux règnes, les éléments des cellules, les cellules elles-mêmes, enfin les tissus, il parvint à donner la théorie générale de la structure intime et LA BOTANIQUE. 47 du développement des divers tissus animaux. A dater de ce jour l’Histiologie animale devint une science, et cette grande vérité morphologique, que la cellule est l'élément de toute organisation, fut reconnue sans conteste. Ge fait historique est un des exemples les plus frappants de la dépendance naturelle des sciences naturelles et des résultats auxquels peut conduire la méthode comparative. Ge qui a été fait déjà par ce moyen est un sûr garant de ce que l’on peut faire encore. L’Histiologie animale n’est point encore arrivée à sa perfection, et celui qui en étudie les points de vue généraux sent à chaque instant le besoin de la Morphologie cellulaire végétale. Encore aujourd’hui, il existe en Botanique des points d'Histiologie qui sont plus avancés que les parties correspon- dantes de la Zoologie, et dont l'étude comparative dans les deux règnes produira certainement des résultats importants. L'étude de la Morphologie cellulaire végétale sera utile non-seu- lement à l'investigateur, en lui permettant d'introduire dans l'His- tiologie animale des considérations nouvelles, mais aussi au professeur, en lui fournissant des exemples plus simples, et par conséquent plus facilement saisissables. Il serait à désirer qu'un cours d'Histiologie animale fût toujours précédé de quelques le- cons d'Histiologie botanique : l'esprit surmonterait ainsi plus fa- cilement les premières difficultés inhérentes à tout nouvel ordre de choses ; après avoir acquis par l'étude de cette dernière science des notions claires et précises, il lui serait possible d’a- border avec assurance l'interprétation des phénomènes plus com- pliqués que présente la cellule animale. Mais ce n’est pas seulement en Histiologie que la Zoologie et la Botanique se prêtent un mutuel appui. La plupart des lois géné- rales aussi bien qu'un grand nombre de faits particuliers de la Morphologie ont besoin du concours simultané des deux sciences, afin d’être compris et démontrés d’une façon aussi complète que possible; les lois de la Tératologie sont de ce nombre. C’est uni- quement par l'étude comparative des deux règnes qu'il devient possible à l’observateur d'atteindre le double but que se propose 48 MÉMOIRES ORIGINAUX. celte science, à savoir : en premier lieu, la connaissance des lois générales communes à tous les êtres organisés; ensuite, celle des lois particulières applicables seulement à un règne ou à des grou- pes moins importants. De même, les lois qui président à la dis- tribution géographique des organismes acquièrent souvent une généralité plus grande et un caractère plus élevé de certitude, par le rapprochement éclairé des deux règnes ; dans tous les cas, elles en reçoivent un intérêt nouveau. Beaucoup de faits paléon- tologiques peuvent être induits d’un règne à l’autre avec une probabilité si grande qu'elle touche à la certitude. Ainsi, la présence, à l’état fossile, de certains insectes qui vivent exclusi- vement sur les srandes espèces de champignons, démontre l’exis- tence de ces derniers dans les mêmes terrains, bien qu’on n’en retrouve aucun vestige. D’après le même principe, on peut con- clure de la présence de certaines plantes dans une formation, à l'existence simultanée des genres d'insectes que l’on a reconnus indispensables à leur fécondation. Jusqu'à présent cel ordre de preuves n’a été employé que dans des cas exceptionnels et avec une grande réserve ; 1l est certainement destiné à recevoir une application très-étendue lorsque nos connaissances des rapports naturels des êtres nous permettront des inductions plus certaines et plus éloignées. Les applications de la Morphologie végétale à la Géologie sont multiples : les unes ont trait à l’explication des phénomènes géologiques actuels, les autres à l’histoire des époques précé- dentes. Les faits qui témoignent du rôle considérable que jouent les végétaux dans les phénomènes géologiques actuels sont tellement multipliés, que je devrai me borner à une rapide énumération de quelques-uns. Les végétaux sont certainement, après les agents météorologiques, les causes les plus puissantes de la désagrégation des roches. Aucune n’est à l'abri deleurs atteintes: calcaire, granite, grès, silex même, tout leur estbon. Dans ce travail de désorganisa- tion, ce sont des lichens à peine visibles qui commencent l'attaque. À la faveur de l’humidité et de la rosée, les acides que ces plantes LA BOTANIQUE. 49 produisent incessamment corrodent le substratum et en désagré- sent la surface molécule par molécule ; dans les interstices péne- trent les radiculesmicroscopiques qui ébranlent les parcelles déjà disjointes. Une petite dépression se forme au-dessous de chaque ._ individu. Les générations succèdent aux générations. Il s’accu- mule dans les points qu'habite la colonie une petite quantité de matières minérales et de substances organiques ; des espèces plus grandes peuvent alors végéter sur ce terrain, moins ingrat qu'il ne l'était d’abord, et continuent le travail commencé par les pre- mières. Plus tard viennent les mousses, dont les tapis épais dé- posent un peu d’humus dans les anfractuosités. Les plantes her- bacées s’établissent à leur tour, et au moyen des substances corrosives qu'excrètent leurs racines strient et creusent la roche dans tous les sens. Une couche de terreau s’est formée, capable de nourrir des arbustes et plus tard de grands arbres. Ceux-ci en- foncent dans les fissures des racines plus puissantes, écartent les fragments, et, les vents et la gelée aidant, finissent par ébranler et diviser les massifs les plus compactes. Si les roches sont pla- cées sous l'eau, ce sont des algues souvent microscopiques qui se chargent de les désagréger. M. Schimper a signalé les curieux effets que produit l’£uactis calcivora sur les rivages calcaires des lacs. Grâce à certains principes corrosifs que sécrètent ces plantes, les pierres se trouvent creusées de sillons irréguliers qui augmen- tent incessamment en profondeur et donnent une plus grande prise au choc des vagues et des cailloux. Sur les bords du golfe de Bothnie, au contraire, une autre espèce d’Oscillatorinées (0. chthonoblastes) agglutine et fixe les grains de sable qu’apporte le flot. Dans d’autres cas (Hydrocoleum calcilegum), ces mêmes algues précipitent sans cesse des cristaux de carbonate de chaux, en décomposant, sous l'influence de la lumière, l’excès d'acide carbonique qui le retenait en dissolution. C’est de la même facon que les Chara s'incrustent de calcaire et donnent quelquefois nais- sance à des tufs. Les débris végétaux en décomposition au sein des eaux produisent des effets opposés. Ils engendrent, par oxy- dation, de l'acide carbonique qui enlève aux calcaires une portion 50 MÉMOIRES ORIGINAUX. de leur substance ; ce carbonate se dépose plus loin aussitôt que l'excès d’acide carbonique qui le tenait dissous a disparu. Tel est le phénomène qui détermine la formation de certains tufs. La présence de la végétation semble nécessaire à la formation de la limonite dans les eaux chargées de carbonate de fer. Enfin c’est par la réduction des sulfates, en présence des substances végé- tales, que s'explique la formation de certaines eaux sulfureuses. Je pourrais accumuler les exemples ; mais il suffira, je pense, de cette rapide énumération pour montrer quelle est l’importance de la Botanique dans l’étude de la Géologie du monde actuel. En général, les phénomènes qui nous occupent en ce moment marchent avec une lenteur excessive ; leur action est à peine ap- préciable lorsqu'il s’agit d’intervalles aussi courts que ceux que nous pouvons mettre entre deux observations successives, mais avec le temps ils finissent par produire des effets souvent sur- prenants. Qu'il me soit permis d'apporter un exemple à l’appui de cette dernière proposition. Les Diatomées constituent une famille extrêmement nombreuse en espèces d'algues microscopiques, répandue sous toutes les lalitudes, à toutes les hauteurs et dans tous les milieux, puis- qu’il en existe dans la neige et même dans l’atmosphère. L'eau est leur habitat de prédilection. Leur organisation est très-sim- ple : chaque individu se trouve composé d’une cellule seulement. Grâce à la présence d’une très-forte proportion de silice dans l'épaisseur de leur membrane, celle-ci persiste après leur mort comme une sorte de squelette extérieur. Les dimensions de ces cellules-individus sont en rapport avec leur simplicité organique ; elles varient entre 1/100 et 1/10 de millimètre environ, c’est-à- dire qu’un grand nombre n’offrent pas un volume aussi consi- dérable que celui d’un globule du sang de la grenouille. Leur multiplication se fait avec une rapidité inouïe, de sorte que, malgré leur petitesse, elles forment dans nos eaux douces de véri- tables nuages d’écume qui en couvrent la surface. À l’embou- chure de certains fleuves peu rapides, leur nombre est tellement immense que leurs carapaces constituent jusqu’à un quart de la LA BOTANIQUE. 51 quantité totale du limon qui se dépose. Hooker a constaté dans son voyage au pôle austral que du 60 au 80° parallèle, les mers antarctiques sont colorées en jaune brun par ces organismes sur des espaces presque sans bornes. Entre le 76° et le 78° degré de latitude australe, les Diatomées forment, par l’accumulation de leurs dépouilles au fond de la mer, un véritable banc de deux pieds au moins d'épaisseur sur plusieurs centaines de milles anglais de développement. Ce sont des bancs semblables qui constituent la roche appelée tripoh et Kieselguhr ; la pureté de cette silice et son extrême ténuité la rendent trés-propre au polissage des métaux et à la fabrication du silicate de soude. Il en existe de nombreux gisements, par exemple à Clermont en France ; Franzensbad, Lunebourg et Bilin en Allemagne ; Égine et Tripoli dans l'Orient; dans l'Amérique du Nord, etc. Ces dépôts ont en général quelques pieds d'épaisseur seulement et alternent avec des couches de composition différente ; à Lune- bourg et à Bilin ils arrivent à une puissance de quarante pieds. Les plus considérables que l’on connaisse sont dans l'Amérique du Nord sur les bords de la rivière Columbia. Dans un point de son parcours cette rivière se trouve resserrée antre des escarpe- ments à pic de sept à huit cents pieds anglais d’élévation, con- stitués en totalité par un tripoli très-pur. Cette couche atteint l'épaisseur énorme de cinq cents pieds anglais. Elle est antérieure à l’époque actuelle et formée par des diatomées d’eau douce. L'esprit recule d’abord effrayé devant le nombre presque incal- culable d'années nécessaires à l’accumulation d’un tel dépôt: à ce sentiment succède bientôt l'admiration pour cet enchaînement merveilleux de causes et d'effets qui permet à chaque être, même au plus humble, de remplir, à son heure, la première place dans l'harmonie générale de la nature. Les développements qui précèdent ont eu surtout pour objet de montrer quelle est l'importance de la Botanique dans l’explica- tion des phénomènes géologiques actuels ; cette science n’est pas moins féconde en applications à la géologie du monde ancien, 57 MÉMOIRES ORIGINAUX. Dans un grand nombre de formations terrestres et lacustres, les fossiles animaux sont très-rares ou même manquent tout à fait: c'est ce qui arrive pour la presque totalité de la grande série houillère et pour plusieurs dépôts des époques triasique, juras- sique, crétacée et tertiaire ; dans ce cas, la stratigraphie trouve dans la paléontologie botanique un auxiliaire indispensable. «Les marnes irisées, certaines formations des terrains jurassique et crétacé renferment une houille souvent toute semblable à celle de l’époque houillère proprement dite, mais elle ne forme d'or- dinaire qu'un très-petit nombre de couches peu puissantes et peu étendues. La qualité de ce charbon peut tromper le mineur le plus expérimenté et lui faire croire qu’il a rencontré une véri- table formation houillère. Mais si toutes les données géologiques précises lui font défaut, il suffira d’un seul fragment d’Æquise- tum columnare où d'Equisetum Meriani pour qu'il reconnaisse immédiatement les marnes irisées. De même, une tige d’Equise- tuim Münsteri où d'Equisetum hærense indique le lias supérieur, l’Equisetum Burchardti le wealdien ou crétacé inférieur. Ainsi un seul type de végétaux, celui des Équisétacées, suffit à nous guider à travers le labyrinthe des terrains anciens, et à nous faire reconnaître avec certitude chacune des formations dont ils se composent » (Schimper). Parmi les applications de la Botanique à la Géologie, les plus intéressantes peut-être sont celles qui ont trait à la climatologie du monde ancien. Dans cet ordre de recherches, la considération des types Zoologiques est loin de nous fournir des résultats aussi nets que l'étude des végétaux fossiles ; cela vient de ce que les animaux sont beaucoup moins dépendants des influences exté- rieures que les plantes. En effet, les espèces inférieures du règne animal habitant généralement les eaux, sont exposées à une lempé- rature comparativement uniforme ; elles peuvent même, en s’élevant vers la surface ou s’enfonçant davantage, échapper aux variations peu étendues qui se produisent. Quant aux animaux supérieurs, dont l’habitat est terrestre et non aquatique, non seu- lement leur système cutané est capable d’adaptations qui c LA BOTANIQUE. | 53 atténuent les effets de la chaleur et du froid, mais encore ils sont doués d'organes et d’instincts variés qui leur permettent de se mettre à l'abri des influences climatériques défavorables. Chez les végétaux terrestres, rien de semblable: à où une plante a germé il faut qu'elle reste. Si la quantité totale de chaleur nécessaire à son développement complet, depuis la germination jusqu’à la maturation du fruit, n’est pas produite, c’est-à-dire si la tempéra- ture moyenne annuelle, ou seulement estivale, baisse au-dessous d’une certaine limite, elle disparaît. Les végétaux peuvent aussi nous renseigner sur les températures extrêmes des saisons. Telle plante qui végète activement sous l'influence d’une certaine tem- pérature annuelle, ne pourra subsister dans un autre lieu où la température moyenne de l’année est égale, mais où des variations excessives , soit de chaleur, soit de froid, mettraient à chaque instant son existence en péril. D'après cela, on peut, par la seule étude de l’ensemble de la végétation d’une contrée, construire non-seulement les lignes isothermes, mais encore les isothères et isochimènes de cette dernière. C’est donc avec raison que la plante a été comparée à un thermomètre; sa dépendance étroite de l'humidité de l’air en fait aussi un psychromètre très-sensible. Beaucoup d'espèces qui préfèrent l'ombre à la lumière devien- nent, eutre les mains de l'observateur, de véritables photomîtres. Quant à la détermination de l’altitude, de la nature du sol ou des eaux, les résultats que fournit la considération de quelques formes caractéristiques le cèdent à peine pour l'exactitude au baromètre et à l'analyse chimique. Les principes que je viens d'indiquer ont donné lieu déjà à des applications très-importantes au point de vue de l’histoire climatologique de notre planète, Je me bornerai à donner un court aperçu de la marche de la température à la surface du globe pendant les périodes géologiques’. 1 Les Fougères et Lycopodiacées de l’époque houillère nous montrent qu'alors la surface entière du globe, du pôle à l'équateur, jouissait d'une température moyenne de 22 à 250 C.; c'est celle que présente actuellement la région équatoriale. La flore des périodes permienne et triasique indique une température moins égale, Le 4 54 MÉMOIRES ORIGINAUX. La végétation houillère nous montre qu'à cette époque la température du globe tout entier, du pôle à l'équateur, était en moyenne de 22° à 25° C.; c’est la température actuelle de la zone équatoriale. D’après les flores permienne, triasique, juras- sique et crétacée, 1l est permis de conclure que pendant ces quatre grandes périodes la température ne diminua pas sensiblement ; le climat seul changea et devint plus sec, par suite, sans doute, de quoique toujours tropicale : à côté des végétaux de l'époque précédente se trouvent des Conifères et des Cycadées, amies d’un climat plus sec et d’un air plus pur. Elles couvraient les montagnes encore peu élevées qui étaient venues accidenter l'uniformité des iles marécageuses où s'étaient formés précédemment les bassins houillers. Pendant la période jurassique, le climat devient de plus en plus conti- nental ; « les plantes qui ne vivent que dans une atmosphère humide et chaude, » dans des marais peu élevés au-dessus du niveau de la mer, n'occupent plus » que quelques bas-fonds dispersés sur les côtes ou dans l'intérieur des terres, et » l'on voit prédominer celles qui aiment un sol et un air secs, le climat des hau- » teurs. » (Schimper.) | D'après la flore des couches crétacées moyennes et supérieures, il est possible de reconnaître qu'en Europe la température avait à peine baissé à cette époque, et que les continents continuaient à s'étendre. Des conditions climatologiques sen- siblement pareilles caractérisent le commencement de l’époque tertiaire. Nos pays jouissaient alors d’un climat analogue à celui de la zone subtropicale. A partir de l'époque miocène, les variations climatologiques s'accentuent davantage, et, grâce à des matériaux de plus en plus nombreux, elles ont pu être déterminées avec une rigueur croissante et vraiment remarquable. Afin de présenter ces faits dans leur jour véritable et d'en apprécier les résultats à leur juste valeur, il est nécessaire d'entrer ici dans quelques développements. A l'époque du miocène inférieur, la température moyenne de la Provence et de la Suisse était, comme celle de la zone subtropicale actuelle, de 20 à 220 G. A côté des types purement tropicaux, tels que les Lygodium, les Acacia, les grands Pal- miers, on trouve des genres qui n'habitent actuellement que la zone tempérée : les Aulnes, Bouleaux, Charmes, Noisetiers, Hêtres, Ormes, Érables, etc... À la même époque, dans le Groënland, à Atanekerdluck, par le 70e degré de latitude boréale, florissait une végétation très-puissante, presque complètement ligneuse, analogue à celle des forêts de nos régions tempérées. À côté des Sequoias, conifères qui n'existent plus qu'en Californie, et d'autres plantes de la même famille dont les parents les plus proches se trouvent actuellement au Japon, s’élevaient de nom- breux représentants de ces essences qui forment le fond de la végétation forestière de nos pays, tels que Peupliers, Bouleaux, Noisetiers, Hêtres, Chênes, etc..… Un certain nombre de ces végétaux, comme cela a lieu dans la zone tempérée chaude, étaient à feuilles persistantes. La comparaison de toutes ces formes avec LA BOTANIQUE. 55 l'extension graduelle des continents. Au commencement de la période tertiaire, la température de nos pays n’avait encore baissé que de ?° à 3°C.; néanmoins elle n’était plus que celle de la région subtropicale actuelle. À partir de l’époque miocëne, le refroidissement s’accentue davantage, surtout vers les pôles ; on voit la végétation subtropicale disparaître insensiblement et céder peu à peu la place, pendant le miocène supérieur et le plio- cène, à des formes septentrionales analogues de celles que nous leurs représentants dans l'ordre actuel, a permis d'établir que la moyenne annuelle de la température, à ce point du Groënland, était de 90,5 au minimum, au lieu de — 69,3 que l’on trouve actuellement au même lieu. C'était à peu près le climat actuel de Paris, mais il devait être beaucoup plus uniforme. Pendant la formation de la molasse suisse et des schistes d'OEningen, c'est-à- dire à l'époque du miocène supérieur, la température s’abaisse sensiblement. Les genres purement tropicaux ont presque disparu de notre Europe; on y rencontre surtout des formes subtropicales mêlées aux Amentacées que nous avons siznalées plus haut comme caractéristiques des climats tempérés. A la même époque, c’est-à- dire au moment où se formaient la plupart des dépôts de lignites que l’on a ré- cemment constatés tout autour du pôle nord, à la terre de Banks, au Groënland, en Islande, au Spitzberg, sur les bords du fieuve Mackensie et de la Léna, c'est-à-dire depuis le cercle polaire jusqu'au 78e degré de latitude, le climat était également devenu dans ces régions un peu plus froid qu'à l’époque antérieure. D'après les remarquables recherches de M. Heer, la température moyenne de l'année était alors en Suisse de 21°, en Islande et dans le Groënland septentrional de 9, au Spitzherg de 59,5 G. Alors, comme aux époques antérieures, la température dimi- nuait moins rapidement qu'aujourd'hui de l'équateur vers les pôles. Pendant l'époque pliocène, le refroidissement graduel continue. Les forêts de ce temps, depuis l'Italie, la Styrie, jusqu'à la Silésie, ne contiennent plus de types réellement tropicaux; « les types subtropicaux ont décliné presque aussi rapide- » ment : les Laurinées, les Figuiers, les Plaqueminiers, les Myrsinées, ont diminué » de nombre et d'importance » (de Saporta). A leur place se trouvent des repré- sentants de plus en plus nombreux des formes septentrionales. Vers le Nord, le refroidissement devait vraisemblablement marcher dans la même proportion que dans nos pays, sinon plus rapidement. Les forêts si puissantes qui couvraient les régions boréales à l'époque antérieure étaient alors immergées pour la plupart, et les types de ces régions plus froides continuaient leur marche envahissante vers le Sud. C'est ainsi que la végétation acquérait peu à peu dans nos climats un carac- tère analogue à celui qu'elle offre encore aujourd'hui. Au commencement de l'époque quaternaire, la température de nos pays éprouva de grandes oscillations. L'Europe centrale fut à plusieurs reprises différentes en- vahie et abandonnée par d'immenses glaciers, tandis que des glaces flottantes par- 56 MÉMOIRES ORIGINAUX. avons maintenant sous les veux. D’après le caractère de la végé- tation, nous pouvons conclure qu’au commencement de l’époque quaternaire nos régions jouissaient d’une température sensiblement égale à celle qu’elles offrent actuellement. Cette dernière époque apporta de nouveaux changements; les flores quaternaires in- diquent de grandes oscillations de température en rapport avec les phénomènes d’extension et de retrait des glaciers. Ce n’est qu'après différentes variations dans leur caractère, variations corrélatives de celles des climats, que nous voyons s'établir à la fois et la flore et le climat modernes. Ainsi se trouve expliquée en grande partie la composition de de nos flores actuelles. En combinant entre elles les données que couraient les mers du Nord. Ces phénomènes se reflètent dans la composition des différentes flores quaternaires que l’on a pu examiner jusqu'ici. Grâce à l'étude de ces matériaux, il a été possible de déterminer les changements climatériques cor- respondants avec quelque précision. Pour ne parler que de la région méditerra- néenne, les dépôts quaternaires les plus anciens nous indiquent un climat analogue au climat actuel, mais plus humide ; on y retrouve encore quelques formes ter- tiaires. Un peu plus tard, celles-ci ont complètement disparu ; la température avait dû baisser à cette seconde époque par l'effet de la première extension des gla- ciers. Après cette première période glaciaire, la Provence jouissait d'un chmat peu variable ; la température hibernale paraît y avoir été de 8 à 10° en moyenne; elle devait s'abaisser très-rarement à 5 ou 6c et s'élever peu au-dessus de 120 ; la tem- pérature estivale se maintenait à 20° C., sauf quelques variations limitées. « Un » climat pareil, dont la moyenne annuelle serait de 14 à 159, expliquerait suffisam- » ment l'association du hêtre, du tilleul, du pin de Salzmann et des divers érables » avec le laurier des Canaries et le laurier ordinaire. » « Dans la période sui- » vante, » — je continue à laisser parler M. de Saporta, dont les travaux ont jeté une si vive lumière sur ce sujet, — « la température se serait abaissée ; les lauriers » auraient disparu ou se seraient retirés. Cette période, pour laquelle nous n’avons » que des données conjecturales provenant du fait même de l'élimination des es- » pèces anciennes, aurait eu pour effet de cantonner dans d'étroites limites toutes » les essences méridionales, et spécialement la vigne et le figuier, d’abord répandus » partout et plus tard devenus assez rares pour que leur introduction ait pu être » attribuée à la seule action de l’homme. Cette période, d'une durée indéterminée, » correspondrait à celle de la plus grande extension des glaciers. Le climat, dans » une dernière période, serait insensiblement devenu plus continental et enfin plus » sec, transformation à la suite de laquelle, grâce à un retour de chaleur, les es » pèces actuelles des bords de la Méditerranée se seraient étendues et combinées dans les proportions que nous leur connaissons. » b = LA BOTANIQUE. où nous fournissent la climatologie et la géologie, il n’est pas moius facile de se rendre compte du fait si curieux de la présence simultanée d’un grand nombre d'espèces végétales à la fois au sommet de nos Alpes et dans les régions polaires de l’hé'nisphère boréal. À l’époque du dernier grand refroidissement, ces espèces vivaient le long des glaciers, qui se prolongeaient jusque dans nos plaines, absolument comme elles habitent encore aujourd'hui les plaines de la Laponie et les rivages glaciaires du Spitzberg et du Groënland. Lorsque vint le réchauffement de notre hémisphère, elles durent quitter nos climats, devenus trop chauds, et remonter vers le pôle avec les isothermes qui réglaient leur distribution. Mais en même temps que les uns allaient dans les régions boréales reprendre possession de leurs anciennes habitations, les autres suivaient la retraite graduelle des glaciers sur le flanc des monta- gnes, où elles trouvaient la température et l'humidité nécessaires à leur développement. Par là même se trouve également expliqué le fait si remarquable de la présence d'un grand nombre d’es- pèces identiques au sommet des montagnes de l’Europe et de l'Amérique; en effet, ces espèces communes aux deux pays sonf celles qui caractérisent les régions arctiques. Je ne puis pas m'empêcher de tirer encore des faits qui pré- cèdent un exemple très-instructif des applications de la Botanique à la Géologie. On sait qu'il est quelquefois possible à cette der- nière science de déterminer la composition de l’écorce terrestre dans des points qui sont complètement soustraits à l'observation directe : c'est ainsi que l'on admet l'existence des terrains crétacé et jurassique au-dessous des formations tertiaires du bassin de Paris. Mais, afin d'établir ce genre de démonstration, il faut des points de repère, des affleurements, et il est de plus nécessaire que ces derniers ne soient pas placés à de trop grandes distances les uns des autres. En l’absence de ces conditions, et lorsqu'il s’agit d'étendues considérables, il est impossible d'arriver à la moindre présomption sur la présence ou l’absence de tel ou tel terrain. Un géologue serait, je crois, fort embarrassé de nous dire si, pendant l’époque miocène, l'Amérique septentrionale était 8 MÉMOIRES ORIGINAUX. reliée à l'Europe de facon à former avec cette dernière un seul continent, ou si ces deux parties du monde étaient déjà séparées par un océan. La réponse à cette question purement géologique a été donnée par un paléontologiste, M. Heer. Comparant entre elles les flores miocènes de l'Amérique, de l'Europe et des régions boréales, il a montré qu’elles offrent une ressemblance tellement étroite, que ces trois régions, maintenant isolées, devaient être reliées largement les unes aux autres par une grande terre, de de façon à ne former qu'un immense continent. L'étude des rap- ports de la flore actuelle des îles de l'Atlantique avec celles de l’Europe et de l'Amérique lui a permis d'établir approximati- vement les limites de ce grand continent. Il a rendu extrême- ment probable « qu’à l’époque miocène une vaste terre (l’At- lantide) s’étendait des côtes occidentales de l’Europe jusqu à l'Amérique vers l’ouest, au nord jusqu’à l'Islande, et vers le sud atteignait, au moyen de prolongements isolés, jusqu'aux îles de l'océan Atlantique ; entre ces iles et le continent africain devait s'étendre un bras de mer jusqu'à la baie de Biscaye. Tandis qu'aujourd'hui l’Europe constitue une presqu’ile de l’Asie, à l’é- poque dont nous parlons elle aurait été séparée de cette dernière et aurait formé une presqu'ile du continent Atlantique et de l'Amérique » (Heer ). Plus tard l'Océan sépara nos pays du nou- veau Monde; à peu près à la même époque, la grande mer qui s’étendait auparavant entre l'Europe et l’Asie disparut, notre flore entra en libre communication avec celle de l'Orient, et perdit bientôt son caractère américain, pour prendre la physionomie asiatique qu'elle offre actuellement. Les rapports de la Morphologie végétale avec la Zoologie et la Géologie sont à peu près les seuls qui nous aient occupés jusqu’à présent ; il nous reste à considérer ceux que présentent les mêmes sciences avec la Physiologie végétale. Comme les exemples donnés plus haut indiquent suffisamment quelle est l'influence de la vie végétale sur les phénomènes géologiques, je me bornerai à signaler les connexions que présente la Physio- logie des animaux avec celle des plantes. LA BOTANIQUE. 59 La Physiologie végétale offre avec la Physiologie générale des animaux des connexions nombreuses et importantes : il n’en saurait être autrement, puisque la Physiologie générale a pour objet les phénomènes primordiaux inhérents à tout être vivant. Dans son acception la plus étendue, la Physiologie générale n’est ni botanique ni zoologique, mais s'applique à l’ensemble des or- ganismes. Aussi ne faut-il pas s'étonner si une découverte dans ce domaine, qu’elle soit due à un botaniste ou à un zoologiste, trouve immédiatement une application dans les deux règnes. On se rappelle que c’est une observation de botanique qui fournit à Dutrochet le principe de sa découverte de l’endosmose. Tout ce qui a trait à ce dernier ordre de phénomènes, aussi bien qu'à la diffusion des gaz et des liquides, à l'absorption, à l’imbi- bition, appartient en même temps à la Physiologie des animaux et des végétaux. L'étude du mode d’agrégation des éléments moléculaires qui entrent dans la composition des membranes et du protoplasma; celle de ses changements sous l'influence de divers agents ; les phénomènes intimes de l'accroissement, sont d’un ordre tout aussi général. Les végétaux, à raison de leur plus grande simplicité d'organisation et de la complication moindre des actes physiologiques, se prêtent souvent mieux que les ani- maux à ce genre de recherches. Ainsi, jusqu’à présent, ils sont les seuls chez qui on ait étudié l'influence de certains agents, la lumière et la pesanteur par exemple, sur la configuration et la disposition des organes. Cette partie de la Physiologie générale, que l’on peut appeler Physiologie de la forme, est née d'hier ; elle ne se compose jusqu’à présent que d’un petit nombre d’ob- servations dues à M. Hoffmeister; mais sa haute signification lui assure désormais une place importante daus la science. C'est par elle que nous arriverons à la connaissance des causes qui déter- minent la forme des êtres vivants. Quelque lointain et élevé que ce but puisse paraître encore, la voie qui y conduit est ouverte, et dès aujourd'hui il n’y a plus de témérité à y prétendre. Les phénomènes de tension appartiennent également aux deux règnes organiques. Ils n’ont encore été étudiés que chez les végé- 60 MÉMOIRES ORIGINAUX. taux. Si leur théorie physique est à peine ébauchée, nous n’en possédons pas moins un grand nombre d'observations importantes qui pourraient trouver en physiologie animale d’utiles applica- tions. Tels sont entre autres les faits relatifs aux variations pério- diques dans la grandeur de la tension. Il sembie très-probable qne des variations semblables sont l’origine de la périodicité si curieuse et encore inexpliquée que présentent, dans un intervalle de vingt-quatre heures, un grand nombre de faits de la biologie animale, par exemple la chaleur, la proportion d’acide carbo- nique expiré, la tension de l’appareil vasculaire, le nombre des battements du cœur; la quantité de la bile sécrétée, de l’urée produite, ete., etc. Les recherches de M. Sachs montrent que l’ac- croissement des végétaux est soumis à des variations périodiques semblables à celles de la tension ; comme cette dernière aussi, il est profondément affecté par l’action des grands modificateurs: lumière, chaleur, etc. Un phénomène de cet ordre ne peut être que général, et sans aucun doute les physiologistes ne tarderont pas à constater dans l’accroissement des animaux des lois analo- gues. Il ne serait pas difficile de faire encore d’autres rapproche- ments non moins intéressants ; je m'arrête néanmoins: il me semble inutile d’insister davantage sur la nécessité d’étudier la Physiologie cellulaire au point de vue comparatif dans les deux règnes, elle ressort d’une façon nécessaire de l’universalité même des phénomènes qui font l’objet de cette science. La Physiologie du perfectionnement organique présente le même degré de généralité que la Physiologie cellulaire : comme cette derniere, elle embrasse les deux règnes. Animaux et plantes nous paraissent comme placés dans le temps entre leurs ancêtres et leurs descendants ; sollicités par deux tendances opposées, celle de la permanence des formes et celle de la variation, ils ne res- semblent, le plus souvent, ni à leurs parents ni à leurs enfants. Les formes individuelles obéissent d’une manière inégale aux deux tendances que je viens de signaler: tantôt elles restent pendant de longues périodes semblables à elles-mêmes, et l’hérédité des caractères semble présider seule à leur production ; tantôt les dis- LA BOTANIQUE. 61 similitudes se succèdent et s'accumulent rapidement, la tendance à la variation l'emporte sur la tendance opposée. Les effets de cette double influence sont plus ou moins marqués suivant les types, les temps et les lieux; une observation attentive amene le plus souvent à les faire reconnaitre. Ainsi done, la forme des êtres organisés ne présente, pas plus queles autres faits dont s’oc- cupe leur histoire, le caractère de la fixité et de l’invariabilité; cette forme nous parait, non à l’état de repos ou statique, mais à L'état de mouvement continuel ou dynamique. | Dans les deux règnes, ce mouvement, si capricieux et irrégulier qu'il puisse paraitre lorsqu'on a égard seulement à de courtes périodes, n’en suit pas moins, avecle temps, une ligne générale parfaitement définie; aussi a-t-on pu le caractériser par Îles expressions de développement, d'évolution, qui excluent toute idée de hasard et d’irrégularité. La ligne suivant laquelle ce mouvement se produit a reçu des morphologistes le nom de plan de composition. Les plans généraux de composition sont complètement analogues dans les deux règnes : chez les végétaux aussi bien que chez les animaux, ils prennent leur point de départ dans les formesles plus simples au point de vue géométri- que, pour s'élever insensiblement aux plus compliquées ; le déve- loppement physiologique suit la même marche, de sorte que, en résumé, la formule générale du développement organique c’est le perfectionnement. Jusqu'à ces derniers temps, malgré les travaux de Lamarck, le perfectionnement des organismes n’était qu'un fait. Reconnu par l’Anatomie et la Morphogénie comparées, déterminé pour les périodes du temps par la Paléontologie, il n’était pointsorti du do- maine de la Morphologie pure. On considérait les affinités organi- ques, aussi bien que les relations diverses qu’offrent les êtres dans leur apparition à la surface du globe, comme un ensemble de rap- ports dont la raison devait à tout jamais nous rester cachée. Dans ces dernières années, un grand progrès a été réalisé : le perfection- nement organique a passé de la Morphologie dans le domaine de la Physiologie. Grâce surtout aux travaux de Darwin, il est 62 MÉMOIRES ORIGINAUX. devenu une fonction que nous devons étudier, comme les autres, par les moyens que met à notre disposition la méthode scienti- fique. Actuellement, les rapports morphologiques et la succession des êtres aux différentes périodes géologiques nous apparaissent comme étant d’un ordre purement naturel. De même que nous demandons aux sciences physico-chimiques l'explication des phénomènes de la respiration et de la circulation, de même aussi nous cherchons les conditions et les causes du perfectionnement organique dans les forces inhérentes à la matière. Les travaux de Darwin sont un exemple des résultats que l’on peut espérer par cette méthode; ils nous montrent en même temps que cette partie de la science doit être traitée au point de vue comparatif dans les deux règnes. Si, malgré tant d'efforts, la Physiologie du perfectionnement organique n’a point encore atteint un plus haut degré de perfection, on doit l’attribuer au développement inégal des différentes branches qui la consti- tuent. En effet, nous possédons un bon nombre de connaissances certaines sur trois des actes principaux qui concourent à l’accom- plissement de cette fonction : l’hérédité, la variation, la sélection ; mais sur les causes qui déterminent la forme des organes et des individus, phénomène primordial et tout à fait essentiel, c’est à peine si nous avons quelques données. Après la résolution de ce dernier problème seulement, et lorsque nous connaîtrons les causes qui impriment à la matière organisée ses différentes for- mes, nous pourrons nous rendre compte de l’apparition de ces dernières, saisir la raison de leur permanence et celle de leur variation, et finalement comprendre comment la sélection, depuis l’origine des choses, en conservant les unes et supprimant les autres, dirige leur évolution générale vers un but idéal de plus en plus parfait. Alors le vaste ensemble de l’organisation et l’his- toire de son développement, depuis le plus mince détail jusqu aux faits les plus essentiels, offriront à notre esprit le tableau de l’enchainement nécessaire des causes et des effets, but suprème de ses efforts, ÉTUDES DE GÉOLOGIE PRATIQUE DANS LES ENVIRONS DE MONTPELLIER , Par le Dr BLEICHER , Répétiteur à l'École de médecine militaire de Montpellier. Dans aucune branche des sciences naturelles, le champ des re- cherches n’est peut-être plus vaste qu’en Géologie, car ils’agit, soit de ces faits directement utiles à l’industrie du pays, soit de ces faits grandioses appartenant à la philosophie de l’histoire naturelle, dont l'étude, trop délaissée parmi nous, ne doit pas être l'apanage de nos vainqueurs d’outre-Rhin. Chaque observateur doit donc, comme l’a dit éloquemment M. le professeur de Rou- ville, se mettre à l’œuvre pour compléter l'étude géologique de nos départements, et spécialement de nos départements du Midi, si favorisés par leurs productions minérales. C’est dans ce but et pour indiquer la marche à suivre, que nous donnons ici le résultat succinct des travaux des éminents géolo- gues du Midi, auxquels nous ajoutons nos propres découvertes, en les appliquant, par les méthodes les plus rigoureuses, à des localités des environs de Montpellier où l'amateur de géologie ‘pourra retrouver ce que nous y avons trouvé nous-même. Cette étude se composera donc : 1° de coupes à l'échelle au nombre de deux, comprenant tous les étages secondaires et ter- taires qui affleurent dans les environs de la ville; 2° d’un tableau d'ensemble qui donnera l’état actuel de nos connaissances en lithologie et en paléontologie sur ces différentes formations. / À 64 MÉMOIRES ORIGINAUX. di: Coupe DE Vic à GIGEAN PAR LA GARDIOLE, AU 1/80 000 HAUTEURS DOUBLÉES. Ce profil géologique, d’abord orienté Sud-Nordde Vic à Mireval, prend à partir de ce village une direction à peu près Est-Ouest, et comprend les terrains jurassique, oolite inférieure J' et moyenne J?, le terrain crétacé supérieur ? lacustre G (étage de Rognac), le terrain miocène lacustre et marin M. Le village de Vic, qui estson point de départ, est assis sur une butte isolée au milieu des marais, et repose sur une formation lacustre assez riche en fossiles : Pomatias cieuracensis, Planor- bis cornu, Helir deux espèces, Aydrobia, Lymnea, Spongilles avec leurs polypiers. Gette faune de Mollusques d’eau douce assez mal conservés nous reporte à l’époque miocène; ici nous ne trouvons pas les couches sous-jacentes, mais à Caux, à Pézenas, on trouve une faune analogue immédiatement au-dessus des marnes bleues à Ostrea longirostris, et de plus quelques-unes des espèces citées se retrouvent dans les environs de Gieurac, de Cordes (Lot, Tarn-et-Garonne), au même niveau. Ge calcaire la- custre est surmonté ici, comme dans les environs de Pézenas, par un dépôt marin irrégulier de calcaire pétri de coquilles bri- sées appartenant au calcaire moellon. Le passage du régime lacustre au régime marin semble avoir été brusque, car il n'existe pas de transition entre les deux horizons. Ces deux termes du tertiaire cessent vers Mireval, où affleure entre ce village et le pied de la Gardiole une nouvelle formation lacustre que sa faune et sa composition lithologique nous permet- tent d'identifier à l’étage de Rognac, si développé à Villeveyrac el à la Soucarède, près de Grabels. En effet, ici se trouvent des calcaires, des grès siliceux, des marnes bariolées, des brèches repliées en berceau qui contiennent : Cyclophorus heliciformis, Physa lacryma, Sand, Physa galloprovincialis, Math., Paludina Beauwmontiana, Math., etc. GÉOLOGIE DES ENVIRONS DE MONTPELLIER. 65 Une faille F très-nette met brusquement fin à cette série lacus- tre en faisant inopinément apparaître sous les pas du géologue le calcaire marneux plus ou moins compact de l'oolite moyenne (oxfordien) J?, déjà connu depuis longtemps par les travaux de M. le professeur de Rouville'. C'est le commencement de la petite chaîne de la Gardiole qui présente la série complète des formations oolitiques; des ondulations considérables, indiquées sur notre coupe, font en effet apparaître l’oxfordien et peut-être un lambeau de corallien sur le versant méditerranéen, tandis que de l’autre côté affleurent surtout le callovien (calcaire siliceux de M. de Rouville), et selon nous le bathonien (calcaire compact souvent dolomitique) et peut-être le bajocien, grès et calschistes à fucoïdes. L'étude paléontologique de ces différents étages est encore peu avancée, mais déjà nous sommes en possession d’un certain nom- bre d’espèces fossiles : Ammonites, Belemnites, Huîtres crétées, Térébratules, Rynconelles, Pentacrines, etc., qui paraissent appar- tenir à ces subdivisions de l’oolite *. Le versant septentrional de la Gardiole est très-fracturé, comme l'indique la coupe; il y a là une série de plissements et de dislocations semblables à celles que l’on rencontre au pied du grand massif du Larzac, près d’Arboras. Vers Gigean, au terrain jurassique succède la zone littorale de la mer miocène des marnes bleues et du calcaire moellon riche en fossiles, mais ne paraissant pas contenir l'horizon lacustre de Vic et de Frontignan. Coupe DE CAsTELNAU À CLAprERS AU 1/40 000, HauTEURs DOUBLÉES. Ce profil géologique, orienté à peu près Sud-Nord, traverse la série des terrains jurassiques J' J?, néocomiens W, étage de Ro- gnac G, éocène lacustre £, et quaternaires. 1 Thèse de doctorat ès-sciences. Montpellier, 1852. 2 Nous attendons de MM. Fabre et Munier (de Frontignan) des études complètes de ces étages fossilifères. 66 MÉMOIRES ORIGINAUX. À Castelnau, il nous fait voir la formation du tuf calcaire qua- ternaire dont la faune et la flore ont été l’objet des intéressantes recherches de MM. Planchonet de Saporta. Ce dépôt d’eau douce, qui se retrouve en maint endroit le long de nos cours d’eau, nous reporte à la période où l’homme existait déjà, car la faune et la flore méditerranéenne y sont représentées par les espèces ac- tuelles. Le tuf calcaire repose directement sur le terrain jurassique très- fracturé, pauvre en fossiles, et qui appartient, d’après M. de Rouville, à l’oolite inférieure et à l’oolite moyenne. On peut suivre les assises irrégulières et tourmentées de ces calcaires dolomiti- ques, cristallins, veinés de spath jusqu'au-delà du rocher de Substantion, où une faille F les fait butter contre le néocomien marneux inférieur W. Cette fracture, qui se profile au loin sur de grandes distances, n’a pas mis au jour les couches les plus infé- rieures de ce terrain, car on n’y rencontre pas l’horizon si connu des serpules du pare de la Valette. Ce sont des marnes laminées, écrasées par de violentes actions. dynamiques, et dans lesquelles on n’a pas trouvé jusqu'ici de fos- siles bien caractéristiques. Au-delà de ces marnes, dont la nature estpeu connue, se développe la partie supérieure du néocomien inférieur plissé, fracturé, mais contenant une faune qui estiden- tique à celle de la localité du moulin du Gasconnet, où abondent Ammonites astieranus, À. occitanicus, À, grasianus, Terebratula moutoniana, Belemnites latus, etc. Après une série de plis que l’on peut suivre le long de la route de Castelnau à Clapiers, vers la maison appelée sur la carte d'état-major le mas Banduel, le calcaire bicolore du néocomien inférieur disparaît, en plongeant vers le Nord, et permet au néocomien moven d’affleurer sur une grande étendue. Cette localité n’a rien à envier aux classiques marnes d’Haute- rive, près de Neufchâtel. Nous y avons découvert une faune litto- rale riche en Æchinides, en Encrines, en Bivalves, en Univalves, en Polypiers, en Foraminifères, et même en plantes ( Chara co- nica, Sap.). Il se rencontre là de rares échantillons d’un bivalve GÉOLOGIE DES ENVIRONS DE MONTPELLIER. 67 qui jusqu'ici n'avait pas été trouvé dans l'Hérault, la Requienia eurystoma, Pict., une des espèces les plus anciennes de ce genre si répandu dans le néocomien supérieur. Les calcaires marneux de cet horizon sont recouverts d’une calolte de calcaire compact à Encrines (de Rouville), couverts de grandes Wérinées malheu- reusement indéterminables. Le néocomien finit avec ces couches compactes plongeant vers le Nord, et butte par faille F contre une puissante série de couches de grès siliceux, de marnes ruti- lantes, de calcaires grumeleux jusqu'ici sans fossiles, mais dont l’ensemble rappelle assez l'étage de Rognac. Ces nouvelles assises plongent assez régulièrement vers le Sud et paraissent passer sous le néocomien ; elles correspondent à une profonde dépression et portent des traces de puissantes dénudations. À la hauteur du village de Clapiers, la route d’Assas coupe un bourrelet de calcaire compact, superposé en stratification trans- sressive sur la série précédente : c'est l’Eocène lacustre Æ qui vient terminer notre coupe. Ici les fossiles deviennent abondants, et depuis longtemps on y a indiqué les Bulimus Hopei et subcy- lindricus'. À ces deux espèces nous pouvons ajouter le rare Strophostoma lapicida, Planorbis pseudammonius, Celtis nouleti, Sap.; etc.: c’est la faune de Provins, de Bouxviller et de Castres. Ce premier horizon éocène est surmonté, plus au Nord, vers Vi- viers, d’un second, riche en Melanopsides (M. Gervaisii, M. Cas- trensis), en Aydrobia, ete., contenant souvent des argiles ligni- teuses, vrai horizon à Paleotherium, qui nous semble identique aux gisements bien connus de Coulondres et de la Soucarède. On le voit, partout plissements, fractures, torsions, laminations de nos formations secondaires, partout érosions puissantes dont témoignent nos collines démantelées, nos formations détritiques; mais aussi, sauf de rares exceptions, possibilité de déterminer l’âge des divers terrains au moyen de la paléontologie, guide le plus précieux dans l'étude des régions tourmentées par les ac- tions dynamiques. 1 Compte-rendu Réunion Soc. géol. à Montpellier, pag. 11, 68 MÉMOIRES ORIGINAUX. Dans ce qui précède, nous avons évité autant que possible les listes de fossiles et le détail des caractères lithologiques des étages traversés par nos coupes, pour présenter concurremment et sous la forme synthétique l’état de nos connaissances sur ce sujet. Le Tableau qui suit cette première partie n’a pas d’autre but, et nous y renvoyons le lecteur, qui verra d’un seul coup d'œil ce qui est fail et ce qu'il y à à faire. IT. Essar D'UN TABLEAU LITHOLOGIQUE ET PALÉONTOLOGIQUE DES TERRAINS DES ENVIRONS DE MONTPELLIER COMPARÉS A CEUX DES DÉPARTEMENTS VOISINS. Lias supérieur !. Zone de l'Ammonites bifrons. Zone de l'Ammonites serpentinus. Zone de l’Ammonites aalensis, avec Turbo subduplicatus, Nucula Ham- meri, Thecocyathus mactra, etc. Marnes schisteuses, noires, en minces feuillets. (Murviel, Mortiés.) Oolite inférieure (J!). Bajocien (d'Orb.). calcaire compact, | Fucoïdes (Zoophycos Scoparius, Thiol sp.). Posidonia indét., etc. (environs de Montpellier ). Ammonites radiatus? A. Eduardianus, d'Orb., Pinna cun- neata , Phil., Modiola Sowerbyana, d'Orb. Rynconella cynocephala, Ri- chard, Terebratula perovalis, Sow., Gresslya gregarea, Roem , Pecten pu- milus , Lamk., Ceriopora globosa, Michl. Isastrea, Polypiers nombreux, Encrines (escarp. mérid. du Larzac). Grès schisteux noirs. siliceux, dolomies grises, grenues, et calcaire à nodules de silice. (Murviel, Mortiés, Gardiole.) Baithonien (d'Orb.). 1° Marin. (Gardiole, Mortiés, Saint- | Ammonites indéterminées (Gardiole), Loup, Murviel.) “4 Polypiers , Bryozoaires, Huiîtres cré- Calcaire à nodules siliceux. tées, Encrines, Cidaris sublævis, Cott., Calcaire dolomitique gris. (Mortiés), Fucoïdes, etc. Schistes calcaires noirs. 1 Nousavons pris le Lias supérieur pour point de départ de ce tableau, quoiqu'il. n'affleure pas aux environs immédiats de Montpellier, parce que la faune de cet étage constitue un horizon fixe, constant, tandis que celle de l'oolite inférieure est trop pauvre chez nous pour marquer une date précise. GÉOLOGIE DES ENVIRONS DE MONTPELLIER. 69 90 Lacustre ct fluvio-marin. (Lot, | Flore. — Microdyction (Fougère) ruthe- Tarn-et-Garonne , Aveyron , Gard.) nicum, Sap., Mic. Woodwardianum, Calcaire dolomitique. Sap., Equisetum Duvalii, Sap., Chara Calcaire marneux à lignites. Blaicheri, Sap., Otozamites, Spheno- Schistes bitumineux. zamites indét. Faune d'eau douce. — Cyrena lyrata, Sandb., Corbula ( Potamomya ) tri- striata, Sandb., Paludina bulbiformis, Sandb., Bythinia trochulus, Sandb., Melania macrochiloïdes, Sandb., Ne- ritina bidens, Sandb., Cypris avena!, Sandb. Faune marine. — Nerinea Eudesii, Morr., N. Stricklandi, Morr., N. Volt- ziü, Dest., Natica pyramidata Morr., N.hemispherica, Roem., N. Verneuilli, d'Arch., Alaria trifida Phil., Chem- nitzia indét.. Trigonia bathonica, Lyc. Morr., Trig. imbricata, Sow., Ostrea Sowerbyi, Morr., O. Gresgarea, Sow., Cardium obolus , Sandb., C. subtri- sonum, Morr., Ceromya concentrica, Sow., GC. similis, Morr., C. plicata, Ag., Pholadomya Heraulti, Ag., Pleuromya Vezelayi, PI. securi- formis, Phil, Modiola gibbosa, Sow., M. aspera, Sow., Corbula agatha , d'Orb., Arca tenuistriata, Morr., Unicardium varicosum, Sow., Gervillia acuta, Sow., Isastrea limi- tata, Lamx., Cladophyllia Babeana, d'Orb., dents de Sauriens, de Sar- gus. (Cette faune et cette flore ne dé- passent pas vers le midi le plateau du Larzac (Aveyron), où elles se déve- loppent surtout aux environs des gise- ments exploités de la Cavalerie.) Oolite moyenne (2). Callovien (d'Orb.). Calcaire schisteux siliceux, marnes | Ammonites macrocephalus, Schlot., schisteuses, bitumineuses. Ammonites indét., Ostrea, Terebra- tula, Rynconella, Bélemnites indéter- minées. Fucoïdes. Calcaires marneux bleuätres à Fucoïdes. | Ammonites zygnodianus. A. plicatilis, d'Orb., Aptychus, dents de squales, etc. Oxfordien (d'Orb.). Calcaires marneux bleu-grisâtres, se dé- | Ammonites biplex, Sow., A. cordatus, bitant en globoïdes. AÀ.perarmatus Sow., A. tortisulcatus, d'Orb., A. hecticus. — Belemnites 1! Toutes ces espèces, appartenant à la faune et à la flore de cet horizon à lignites, sont nouvelles. Le 2 70 Calcaires marneux en plaquettes minces. Calcaire compact sub-lithographique en dalles, devenant vers la partie su- périeure bréchoïde et passant à la do- lomie. (Gardiole.) | | | MÉMOIRES ORIGINAUX. hastatus, Blainv., B. Sauvanosus, d'Orb., Aptychus, Nucula, Pecten, Pseudodiadema areolatum, Ag. (Naus- sargues), Pentacrinus , Apiocrinus, dents de squales, Fucoïdes, Serpules? Oolite supérieure (J°). Corallien (tithonique inférieur des Allemands). Calcaire blanc, compact, esquilleux, sub-cristallin, passant à la dolomie en certains points. (Gardiole.) Calcaire bréchoïde gris-blanchâtre, sub- cristallin. (Gardiole près Villeneuve, Bois de Valène, Crez.) HORIZON INTERMÉDIAIRE ENTRE LE TERRAIN JURASSIQUE ET LE NÉOCOMIEN Diceras deux espèces, Nerinea (crypto- plocus) depressa, Voltz, N. Zeusch- neri, Peters, N. Staszycil, Zeuschn., Phasianella carpathica, Zittel, Ceri- thium nodosostriatum. Peters, Purpu- roïdea Tschani, Ooster, Tylostoma ponderosum, Zittel, Turbo bicorona- tus, Zittel, Megerlea pectunculoïdes, Schlot, Waldheïimia magadiformis, Zeuschn., Terebratula formosa, Loech, T. moravica, Zeuschn., Ostrea, Na- tica. Ammonites, deux espèces indé- terminées, Cladophyllia, Isastrea, Po- lypiers nombreux!. INFÉRIEUR (TITHONIQUE SUPÉRIEUR). Calcaire gris sub-lithographique, en dalles, à rognons siliceux, devenant marneux à la partie supérieure. (Saint- Mathieu-de-Tréviès, Prades, Fon- caude.) Ammonites carachteis, Zitt.. A. colu- brinus , Reinecke , A. Staszyci, Zeuchn., A. tithonius Opp., A. pty- choïcus, Quenst. A. Calisto, d'Orb., À. contiguus, Catullo, A. transitorius, Oppel, Aptychus imbricatus? H. de Meyer, Rynconella contracta, d'Orb., Fucoïdes?. Néocomien (NW). N. inférieur (Valengien). Calcaire marneux bleuâtre, se débitant en globoïdes; — calcaire compact jaunâtre ; — calcaire marneux et bancs marmoréens (faciès à serpules de la Valette), pouvant être remplacé (Prades, Foncaude, Saint-Jean-de- Cuculles, etc.) par des calcaires mar- no-schisteux ; — calcaire jaunâtre schisteux; — calcaire bicolore bleu, grisâtre et jaune. Ammonites Berriasensis, Pict. (la Valette), A. Astieranus, d'Orb., A. Grasianus? d'Orb., A. occitanicus, d'Orb., A. Ca- listo, d'Orb., A. voisine deCryptoceras, A. voisine d'Euthymy, A. subfim- briatus? Belemnites latus, d'Orb., Bel. bipartitus, Blainv., Aptychus serano- nis, Coq., À. Malbosii d'Orb., Alaria n.sp. (Prades, Foncaude, la Valette). Neritopsis Q. n. sp. Terebratula Mou- toniana, d'Orb.,T. n. sp. Terebratella 4 Cette faune, que nous avons été le premier à faire connaître aux environs de Montpellier, est identique à celle des gîtes bien connus de Stramberg et d'Innwald. 2 La plupart de ces espèces, déterminées par M. leprofesseur Zittel (de Munich), n'avaient pas encore été trouvées dans le midi de la France et appartiennent à la faune des Carpathes et des Apennins, GÉOLOGIE DES ENVIRONS DE MONTPELLIER. 71 n. sp. Rynconella malbosii, Pict,, R. pe- regrina, Arca securis, d'Orb., Venus subbrongniartiana, Leym., Astarte voisine dela subformosa, Fitton, Pec- ten goldfusii? Nucula, Plicatula, etc. Serpula recta, vertèbres, dents pala- tines de poissons cycloïdes, dents de squales. Fucoïdes. Néocomien moyen. Calcaire marneux, grenu , schisteux. Calcaire compact, gris-jaunâtre; à cas- sure scintillante. Calcaire blanc-jaunâtre, cristallin, sub- oolitique. (Hortus, Clapiers, Saint- Mathieu-de-Tréviès, Vieux-Montfer- rier.) Ammonites occitanicus, Pict., A. Bois- sieri, Pict., A. sp. nova ? Pleuroto- maria, Nerinea indét., Pterocera Sp. nov. , Trochus, L. sp. nov. Cardium imbricatorium, Leym., C. subhillanum , Leym., Lucina cor- nueliana, Leym., Arca securis, Ag. Lima tombekiana , d'Orb., L. du- bisiensis, Pict., L. Royeriana, d'Orb., Janira atava , Roem, Requienia eurystoma, Pict., Ostrea tuberculi- fera, Koch. Terebratella sp. nova ? Terebratula Valdensis, Loriol, Pho- ladomya sp. nova, Pentacrinus in- dét., Psammechinus fallax, Desor., Echinobrissus Olfersi, Ag., Ech. subquadratus, Ag., Phyllobrissus indét., Pygurus Montmolini, Pseudo- diadema Jaccardi, Cott., Botryopygus sp. nova, Polypiers, Bryozoaires, Chara conica, n. sp. Étage de Rognac (G) (Matheron). Grès ferrugineux, marnes bariolées, avec ou sans gypse, bancs minces de calcaire blanc grumeleux (Villevey- rac) ; — grès en bancs minces. Calcaire compact, carié à la surface. Grès siliceux, calcaire compact, calcaire bréchoïde, poudingiforme rosé, bré- ches ; — calcaires noirs bitumineux. (Mas de Novi.) Sauriens de grande taille ayant les ca- ractères de ceux de l’époque triasique ( Gervais). Iguaniens ? Tortues de grande taille, Sargus. Physa gallo-provincialis Math., Ph. la- cryma, Sandb., Paludina Beaumon- tiana, Math., Megalomastoma buli- moiïdes, Sandb., Cyclophorus helici- formis Math., Melania scalariella, Sandb., M. Clathrata, Sandb., traces de plantes monocotylédones et dico- tylédones, Unio Cazalisii, Math., Lepto- poma Baylei, Math., Bulimus saler- nensis, Math., Pisidiumfabula, Sandb., Hydrobia subcingulata, Sandb. (Sou- carède), Chara, Typha indét. Eocène (E.) Horizon de Coulondres. Grès siliceux, Calcaire compact, sub-cristallin. Flabellaria gelyensis, Sap., Marchantia sezannensis? Pecopteris (Alsophila) Rouvillei, Sap., Palæodendron maxi mum, Sap., Diospyros styracifolia, Sap., Diospyros raminervis, Sap., Magnolia ? 72) MÉMOIRES ORIGINAUX. Horizon à Strophostoma. Argiles rouges. Calcaire compact blanc. Argiles rouges. Calcaire compact blanc-jaunâtre (CG. à Strophostoma). — Clapiers, Tour-du- Piquet, Valmaliargues , Saint-Gély, Mas-Gentil, etc. Horizon des Lignites. Marnes grises, feuilletées, avec traces charbonneuses. (Coulondres, Souca- rède, Grabels, etc.) Calcaires compacts. siliceux. Horizon de Saint-Pargoire. Calcaire marneux, ligniteux, C. mar- neux blanc. Strophostoma lapicida, M. de S., Buli- mus Hopei, Math., Bulimus subey- lindricus, Math., Paludina orbignyana Desh., Planorbis pseudammonius , Noul., Planorbis Rouvillei, Noul., Lymnea indét., Physa nov, sp. Clausillia, Chara, Celtis Nouleti, Sap., Typha. Paleotherium , Xyphodon gelyense, Gerv., Planorbis pseudammonius , Noul., PI. castrensis, Noul., PI. Ri- quelianus. Noul., Melanopsis cas- trensis, Noul., Mel. Gervaisii? Mel. mansiana, Noul., Lymneus aquensis, Math., L. bimarginatus, n.sp., Sandb. Hydrobia indét., Unio, Gyrena? dents de crocodiliens, débris de carapace d’E- mydes et de Trionyx, spicules de spon- gilles. Chara, Palmiers, f. de dicotylédons. ( Soucarède, Coulondres.) Neritina, Helix, Lymnea, indéterminées. Miocène inférieur ou Éocène supérieur? Argiles rutilantes. Grès. Calcaires marneux, poudingues, con- glomérats à éléments variés, conte- nant de nombreux cailloux de l'Eo- cène. (Tour-du-Piquet, environs de Frabels, Valhauqués, etc.) Calcaires marneux. (Assas, Saint-Ma- thieu-de-Tréviès.) Absence de fossiles jusqu'ici. Lymnea, Cyrena, Hydrobia, Planorbis indéterminables. Miocène. — Marnes bleues (étage Aquitanien) (M). Marnes bleues. Marnes sableuses. Horizon fluvio-marin et lacustre à ar- giles ligniteuses (Foncaude), à Cy- rena, Helix, Planorbis solidus, ete.f, Neritina, Melania, etc. (Pézenas...) Cerithium lignitarum, Eichwald, GC. mar- garitaceum, Broc., CG, granuliferum, etc. Ostrea crispata, Goldf., Arca aqui- tanica, Mayer, Cardium leognanense, May., Lutraria sanna, Bast. , Phoca Delphinus, Carcharodon megalodon, Lamna elegans, $S. dubia, etc. 1 Compte-rendu de la Réunion de la Soc. géol. à Montpellier, 1868, pag. 13. C’est dans cette excellente étude que nous avons pris quelques-unes de nos listes de fossiles, spécialement celles du tertiaire marin. Le lecteur pourra les y retrouver plus complètes que celles que nous donnons, car nous n'avons pas cru devoir indiquer tous les fossiles qui y sont cités, Revue des sciences Naturelles Tor. L: pl. IV. Coupes GÉOLOGIQUES + 1 Vic à GIiGEAN. 80 000 Hauteurs doublées. AMONT ANA AICL APTE RS al z 10000 Ilauteurs doublees. 7 l L Navitau. : Castelnau. pe . F. £ LS res E &° RS Ne CPAS Na JNEAloirenntémreurelet moyennes. Nu "Néocomien inferieur et'moyen G. Etage de Rognac. (MATHERON) E. Eocene lacustre. M.ME. Miocéne marin et lacustre. L23358) al Tuf quaternaire. fe F Failles. Th Zubr VAMnrele GÉOLOGIE DES ENVIRONS DE MONTPELLIER. 13 Calcaire moellon (4). Calcaire marneux ou compact, coquillier, souvent caillouteux. C'est vers ce niveau qu'il faut intercaler les horizons lacustres de Frontiguan, de Caux, de Saint-Siméon, près Pé- zenas, avec Pomatias cieuracensis, Noul, Planorbis cornu, Bronz., He- lix Rebouli, Hydrobia, Paludina, Spongilles, etc. Mollasse à dragées (environs de Péze- nas). Phoca, Halitherium, Squalodon, Delphi- nus, etc. Crocodilus. Sargus incisivus, Myliobates arcuatus, Squatina, Carcharodon megalodon, etc. Perna soldani, Pecten Beudanti, Bast., P. laticostatus, Lamk., Cytherea, Pa- uopea, etc.,etc.. Schizaster, Turitella, Pagurus. Pliocène (Sables jaunes). Sables jaunes, souvent micacés, quart- ZEUX. Horizon lucustre supérieur. Colline de Montpellier (Palais de Jus- lice). Mastodon brevirostris, Gerv., Rhinoceros megarhinus, de Ghristol, Tapirusarver- nensis, Croiz. et Job, Cervus australis, M. deS., Sus provincialis, Gerv., Ur- sus minutus, Gerv. Felis maritimus, de Christol, etc. Phoca occitanica, Gerv., Haplocetus cur- videns, Gerv., Halitherium, Serresia, Gerv., Physeter antiquus, Gerv., Ror- qualus. Ostrea undata, Goldf., Balanus tintinna- bulum? Auricula myotis, Broc., etc. Semnopithecus monspessulanus, Felis, Hyæna, Castor sigmodus, Gerv., Cer- vus australis, M. de S., Machairodus, Antilope Cordieri, de Christol, Helix quadrifasciata, M. de S., Auricula den- tata, myotis, limbata, acuta, myosotis, affinis, M. de S., Bulimus sinistrorsus, M. de S., Paludina angulifera, P. im- pura etc., Cerithium gemmulatum, Cerith. Basteroti, M. de $., etc. Tufs quaternaires. Tuf calcaire plus ou moins compact, banes de cailloux roulés et de marne calcaire. Espèces d'eau douce, Lymnées, Planor- bes, etc., Unio, Cyclas actuelles. Espèces terrestres actuelles, Helix, Cy- clostoma, etc. Végétaux identiques à ceux de nos jours! 1 G. Planchon; Étude des Tufs de Montpellier. 1864. 1 FS REVUE SCIENTIFIQUE. TRAVAUX FRANCAIS. — Zoologie. En France, l’année 1872 à commencé sous de bons auspices pour les sciences zoologiques : en effet, aux publications en trop petit nom- bre qui traitent de cette branche de l'Histoire naturelle, sont venus se joindre deux organes, publiés, l’un sous la direction du professeur H. Lacaze-Duthiers, bien connu par de nombreux et remarquables travaux sur les Invertébrés , l’autre sous celle du professeur P. Ger- vais, un des continuateurs de l’œuvre paléontologique de notre im- mortel Cuvier. L'importance de ces deux recueils nous engage à leur donner le premier rang dans la Revue des travaux de zoologie de l’École française, que nous inaugurons aujourd'hui dans les colonnes de ce Journal, qui, lui aussi. fera tous ses efforts pour conquérir une place honorable à côté de ses deux ainés. Dans un article servant d'introduction, le directeur des Archives de zoologie expérimentale et générale, tel est le titre du recueil publié par M. le professeur Lacaze-Duthiers, s'attache à justifier la qualification d’expérimentale, qu'il voudrait que la zoologie retint désormais. L'auteur, dans une revue historique empreinte d’un véritable es- prit philosophique, recherche, en se fondant sur le génie même de l'esprit humain, quelles ont dù être à leur origine les sciences zoologiques. Contempler la nature, décrire, nommer les animaux et les distri- buer dans des cadres plus ou moins imparfaits, en tenant compte surtout es formes extérieures Les plus frappantes et Les plus faciles à saisir: telle a été la première étape de la science zoologique, celle qui était d'avance assignée par la marche naturelle à l'esprit de l’homme. A la fin de cette première période, la résumant et la per- sonnifiant tout à la fois. nous trouvons le nom de Linné, créateur de la nomenclature binaire, à laquelle son nom est resté justement atta- ché. Plus tard, après cette série de tentatives qui précède et prépare toute conquête de l'intelligence, un grand progrès est réalisé par un naturaliste français, Cuvier, lequel, comprenant toute l'importance TRAVAUX FRANCAIS. — ZOOLOGIE. 75 qui s'attache à la connaissance de la structure et à l’organisation des êtres, fait entrer la zoologie dans une voie des plus fécondes, la voie anatomique. Si quelques naturalistes Ge nos jours sont restés les continuateurs fervents de l’œuvre du célèbre naturaliste suédois, la grande majo- rité, il faut Le dire, s'inspirant de l’exemple de Cuvier, s'applique à demander à l’organisation elle-même la révélation des rapports natu- rels qui existent entre les êtres vivants. L'auteur du Règne animal a donc, en définitive, lumineusement tracé la route que doit suivre dé- sormais le naturaliste qui veut faire œuvre philosophique, progres- sive et durable. La zoologie s’est donc constituée science expérimentale. Ce titre, pourtant, lui a été refusé par certains esprits des plus distingués. Était-on fondé à en user ansi ? Telle est la question qu’examine avec une hauteur de vues incontestable le savant directeur des Archives, dans des pages qui terminent sa remarquable introduction. Ces pages, écrites avec l'entrainement de la conviction la mieux affermie, nous y renvoyons nos lecteurs, persuadés qu’ils trouve- ront plaisir et profit à la lecture intégrale de cette habile et savante revendication. Quant à nous, nous nous bornerons aux simples ré- flexions qui suivent: La connaissance d’un être, la notion de ses rapports naturels, ne sont acquises que par une série laborieuse d’études comprenant, comme chefs principaux, l'anatomie des éléments et des organes, l’embryogénie, la morphologie. la recherche des accommodations biologiques, la distribution dans l’espace et dans le temps. Si, dans ce champ si vaste que le zoologiste est appelé à parcourir, il lui suffit, dans un grand nombre de cas, de demeurer contemplatear judicieux et patient de la nature, qui peut prétendre cependant que son œuvre complexe puisse être menée à bonne fin dans l'emploi nécessaire de ce que, sans abus de langage, on doitnommer l'expérience? Suivant les cas, son œils’attachera à saisir et à pénétrer des phénomènes, là spon- tanément produits, ici artificiellement provoqués et variés. Dans toute recherche du domaine incontesté de la zoologie, nous sommes amenés à admettre deux moyens d'investigation : la contemplation et l'expérience. Discuterons-nous maintenant sur l’excellence et la di- gnité relatives de ces deux procédés de notre esprit? En aucune facon: l’un et l’autre exigent des qualités qui ne sauraient être bien diffé- rentes ; d’ailleurs les méthodes, au fond, ne sont-elles pas les mêmes; dans leur application n’exigent-elles pas autant de prudence, de sa- gacité et de rigueur philosophique, et les nobles intelligences qui se 76 REVUE SCIENTIFIQUE. sont illustrées par l'application plus ou moins exclusive de l’une et de l’autre n'ont-elles pas des droïts égaux à notre reconnaissance et à notre admiration ? Le premier mémoire inséré dans les Archives est une étude sur le Dero obtusa, due à l’un des élèves de M. Lacaze-Duthiers, M. Édouard Perrier, maître de conférences à l’École normale supérieure. Le Dero obtusa est une petite annélide aveugle, voisine des Naïs, qui vit abritée par un tube qu'elle se fabrique elle-même, ow fixée sur les feuilles des plantes aquatiques ou au nilieu des conferves. On la reconnait du premier coup d'œil aux quatre digitations, revêtues de cils vibratiles, qui terminent son corps postérieurement. La vie de ces petits êtres comprend deux phases : dans l’une, privés d'organes de génération, ils se propagent par division spontanée : dans l’autre, ils deviennent sexués, se reproduisent, et ne tardeni pas À mourir. M. É. Perrier a complété, à beaucoup d’égards, les notions que nous possédions déjà sur les Dero à leur première période, ou période de scissiparité. Il passe en revue les différents systèmesorgauiques, étudie avec détail l'organe segmental, puis s'attache à retracer les différentes phases de la reproduction par scissiparité, déjà étudiées par 0. Müller, Max Schultze et Leuckart, mais diversement interprétées par ces ob- servateurs. M. Perrier a bien constaté que chez le Dero la partie pos- térieure du corps est en voie d'accroissement continuel : aussitôt que cette partie a acquis un développement égal à la partie antérieure, elle s’en sépare pour constituer un individu distinct. L'auteur du Mémoire nous promet, dans une deuxième partie, de traiter du Dero à l'état sexué. Cette nouvelle étude offrira d’autant plus d'intérêt, que les organes de la reproduction sont totalement inconnus chez cette es- pèce, et réclament d’ailleurs, dans le groupe auquel elle appartient, de nouvelles investigations. 5 Au Mémoire dont nous venons de donner une brève analyse suc- cède une importante étude de M. le professeur Lacaze-Duthiers sur les otocystes où capsules auditives des Gastéropodes. On sait que dans les Mollusques gastéropodes, l’appareil auditif si compliqué des animaux supérieurs s’est débarrassé de tous ses acces- soires de perfectionnement et se trouve réduit aux parties rigoureu- semen!: essentielles à la perception des ondes sonores, c'est-à-dire, à l'ampoule membraneuse avec son endolymphe et son otoconie. L'o- tocysle effectivement est une vésicule tapissée intérieurement par des cellules nerveuses en continuité évidente avec le système nerveu me TRAVAUX FRANCAIS.— ZOOLOGIE. 1 - central, et remplie d’un liquide au milieu duquel flottent en trem- blottant des particules calcaires agitées par les cils vibratiles. Mais avec quelles parties du système nerveux central ces vésicules sont-elles en relation ? De la revue historique à laquelle se livre l’auteur, il résulte que les malacologistes admettent l'union desotocystes, tantôt avec le gan- glion pharyngien supérieur, tantôt avec l’inférieur. Or, l'étude attentive poursuivie sur un grand nombre de types a démontré à M. Lacaze-Duthiers une fixité absolue dans ces relations telle, qu’à priori il avait été porté à l’admettre logiquement. Bien que la position relative de l’organe auditif et des centres nerveux soit su- jette à des variations dans les Gastéropodes, les Hétéropodes et les Cé- phalopodes, le nerf acoustique en définitive naît constamment du ganglion sus-æsophagien, lequel a sous sa dépendance les organes des sens, le ganglion pédieux restant plus spécialement affecté à la motricité. Après avoir indiqué les procédés et les modes de préparation qu'il a employés dans Le cours de ses recherches, renseignement indispen- sable dont les auteurs jugent trop souvent à propos de se dispenser, M. Lacaze-Duthiers passe à l'étude d'un premier type, c'est-à-dire, des Gastéropodes dans lesquels les otocystes sont éloignés du ganglion pédieux. Dans ce type sont compris : le Cyclostoma elegans, le Pilcopsis hungaricus, la Natica moniliformis, la Calyptræa sinensis, la Paludina vivipara, etc. Le deuxième type reconnu par le savant zoologisie comprend les Gastéropodes tels que la Neritina fluviatilis, la Patella vulgata, etc., dans lesquels les otocystes sont voisins, quoique séparés du centre antérieur ou des ganglions pédieux. Ce premier Mémoire est accompagné de planches dont les figures ont tout à la fois l'exactitude et l’élégance qui caractérisent les dessins de notre éminent collègue. La seconde partie de cette étude est réservée pour un autre fasci- cule des Archives ; nous ne manquerons pas d'en entretenir nos lecteurs. Ce premier numéro contient en outre deux analyses de mémoires allemands et une intéressante notice du directeur, relative à unesta- tion du Pentacrinus europæus sur les côtes de France. A Roscoff { Fi- uistère ). sur les bords de la Manche, M. Lacaze-Duthiers a observé toutes les périodes du développement du Pentacrinus europæus qui, comme on le sait d'après les beaux travaux de W. Thomson et de 78 REVUE SCIENTIFIQUE. Carpenter, n’est qu’une phase transitoire d’une Comatule, l’'Antedon rosaceus. Le recueil publié par M. le professeur P. Gervais porte le nom de Journal de zoologie. Un travail intéressant de M. Gervais, sur l’encéphale des Lémures, inaugure le premier fascicule. Après un exposé historique consacré à rappeler les différentes places que les zoologistes classificateurs ont accordées à ces mammifères, notre savant paléontologiste conclutque les Lémures doivent former un ordre distinct. Sur ce point il tombe d'accord avec M. Alphonse Milne-Edwards, quia étudié dernièrement leur mode de placentation, et leur a trouvé plus d’affinités avec les Carnivores qu'avec les Quadrumanes. Tout concourt à démontrer au- jourd’hui que ces type des Primates est une forme polymorphe qui répète les traits d’organisetion généraux des différents groupes de Monodelphiens : c’est ainsi qu’il y a des Primates insectivores, car- nassiers, édentés, etc., ce qui explique leur répartition dans ces ordres acceptés par certains auteurs. M. Gervais, après avoir indiqué la division des Lémures en trois tribus, entre dans une description détaillée des formes cérébrales de leurs principaux représentants. Nous ne suivrons pas l’auteur dans ces descriptions, dont on ne peut avoir l’entiève intelligence qu'avec le secours des figures qui accompagnent le Mémoire. Ce travail est suivi d’une curieuse notice de M. Harting sur la pro- duction artificielle de quelques-unes des principales formations calcaires de l'organisme, traduite du hollandais par M. Ed. van Beneden. Les sels solubles qui, par leur réaction mutuelle, doivent donner nais- sance aux sels insolubles qui constituent la base de ces formations, sont placés, à l’état solide, à une certaine distance les uns des autres, au sein de liquides renfermant de l’albumine, de la gélatine, ou même introduits au milieu du tissu de certains invertébrés. Une condition indispensable, signalée par l'observateur hollandais, est que le mélange de sels s'effectue par diffusion avec une ex- trême lenteur. En variant et les sels employés et les milieux organi- ques, M. Harting a obtenu des formes diverses qui toutes ont leurs analogues dans les concrétions calcaires existant chez les vertébrés et les invertébrés. IL a pu de la sorte reproduire artificiellement les concrélions de la bile, de la salive, de la glande pinéale, ies cyato- lithes des Batlhybius, les corps prismatiques de la couche externe des coquilles bivalves, les sclérites des Alcyonaires, etc. L'ingénieux ex- TRAVAUX FRANCAIS. — ZOOLOGIE. 79 périmentateur a pu aussi, en associant des matières colorantes, re- produire les formations calcaires colorées qui se rencontrent chez di- vers animaux. M. Édouard van Beneden a donné dans le même recueil une notice sur la place que les Limules doivent occuper dans la classification des Ar- thropodes d'après leur développement embryonnaire. Dans la classifica- tion artificielle fondée sur le milieu dans lequel vit l'animal, qui di- vise les arthropodes en deux groupes, les uns organisés pour une vie terrestre, les autres destinés à une vieaquatique , la place des Limules ne saurait être douteuse. On les fait rentrer dans la classe des Crus- tacés, et l’on ne peut différer d'avis que sur leurs affinités avec les autres groupes de cette classe. Mais ces dispositions artificielles, qui ont toutefois rendu de grands services, doivent être abandonnées pour faire place à des groupements naturels fondés sur l’embryogénie et sur les caractères généraux tirés de l’ensemble de l’organisation. L’anatomie avait conduit M. Strauss-Durckheim, l’'embryogénie vient d'amener M. van Beneden à exclure les Limules de la classe des Crus- tacés et à les ranger parmi les Arachnides. L'ensemble des faits ob- servés par le naturaliste belge le détermire à les rapprocher des Scorpionides, en même temps que les Trilobites, forme éteinte, rat- tachée par tous les naturalistes aux Crustacés, mais qui lui ont pré- senté les analogies les plus étroites avec les Xiphosures. Nous trouvons ensuite une note de M. Donnadieu, professeur à Cluny, sur l’acarus de l'Érinose de la vigne. Le jeune professeur décrit l'Érinose et donne des détails sur la forme de l’Acarien qui y élit do- micile ; il a ainsi l’occasion de relever certaines inexactitudes échap- pées à Dujardin. qui, lui aussi, s'était occupé de la même espèce. Il élève encore des doutes sur la structure anatomique telle qu’elle est décrite par M. Landois. L'animal qu’on rencontre sur les feuilles de la vigne est-il une larve ou un insecte parfait? Malgré la présence des œufs constatée par Dujardin, M. Donnadieu penche à le regarder comme un état larvaire. M. Henri Gervais a eu l’occasion d'observer un état hydropique des Awolotis. Il donne dans le journal dirigé par son père une notice ac- compagnée d’une planche, dans laquelle il décrit les modifications qu'avaient éprouvées les principaux organes, sous l’influence de cet état pathologique. Ce fascicule renferme en outre deux notices biographiques sur les 80 REVUE SCIENTIFIQUE. professeurs Aug. Duméril et Lartet, dont la science regrette la perte récente. Depuis le commencement de l’année, et nous ne remonterons pas au-delà, un assez grand nombre de mémoires ou de notices sur la physiologie et sur l'anatomie des Vertébrés et des Invertébrés ont été publiés en France. Nous devons maintenant en entretenir nos lecteurs. M. le professeur Paul Bert, auquel on est déjà redevable de nom- breux et importants travaux sur la respiration, s’est altaché dans ces derniers temps à étudier la composition de l'air confiné à plusieurs pressions, dans lequel les oiseaux succombaient asphytiés. Ce physiolo- logiste est arrivé aux résultats suivants: pour les pressions supé- rieures à deux atmosphères, la composition de l'air confiné est telle, au moment de la mort. qu’en multipliant le nombre des atmosphères par la proportion centésimale de l’acide carbonique, on obtient un nombre sensiblement constant pour chaque animal, 26 à 28 pour un moiueau, par exemple. Pour les pressions inférieures à l’atmosphère, ce chiffre oscille entre 3,3 et 3,8 pour la même espèce d’oiseaux. M. Bert, variant les conditions dans lesquelles se produisaient ces phénomènes, a recherché entre autres l'influence d’un abaissement considérable de température. Il a vu que, la pression fût-elle plus élevée ou plus faible que la pression normale, les oiseaux succom- baient avant d’avoir épuisé l’air autant qu'ils le feraient aux tempé- ratures moyennes, et qu'alors, vis-à-vis de l’acide carbonique de Pair comprimé, les oiseaux refroidis devenaient de véritables animaux à sang froid. On doit encore au même physiologiste, qui poursuit avec tant de zèle et de talent ses recherches sur l'influence que les changements de la pression atmosphérique exercent sur les phénomènes de la vie, une note importante dont nous nous contenterons de consigner 101 les conclusions. Quand la proportion d'oxygène est augmentée dans le sang, d'une manière notable, ce gaz agit comme toxique et lue en dé- terminant des convulsions. Chose remarquable, cette dose mortelle est de peu supérieure à celle qui existe normalement dans le sang artériel. M. le D’ Gréhant a repris les expériences de Humbofdt et de Pro- : vencal sur la respüration des Poissons. Il a reconnu, contrairement aux résultats annoncés par ces expérimentateurs, que les poissons enlè - vent à l’eau tout l'oxygène qu’elle contient: bien plus, qu’ils peuvent extraire ce gaz des globules du sang d'autres animaux. Cette dernière PRAVAUX FRANCAIS. — ZOOLOGIE. SI particularité à une haute importance, carelie est de nature à jeter de la lumière sur le mode de respiration du fœtus dans la période em- bryonnaire, et à expliquer comment le jeune animal peut emprunter au sang de la mère l'oxygène dont il a besoin. Il serait intéressant de rechercher si l'espèce de poisson mise en expérience n'aurait pas quelque influence sur les résultats obtenus ; nous sommes porté à soupconner que certains périraient avant d'avoir ainsi utilisé en tota- lité l'oxygène du liquide au sein duquel ils sont placés. On se rappelle les curieuses expériences de M. Georges Pouchet sur les changements de coloration de certains Poissons, changements prove- nant d'une influence transmise de la rétine au cerveau, et de là aux chromoblastes ou éléments contractiles de la peau par les nerfs crâ- niens etle grand sympathique. Dans une nouvelle série d'expériences poursuivies à Concarneau, M. G. Pouchet s'est assuré que des modifica- tions de coloration analogues se reproduisent chez les Salicoques, dans le Palæmon serratus en particulier. En plaçant desanimaux qui venaient d’être pêchés, dans des vases à fond blanc et à fond noir, et en se mettant en garde contre les effets qui pouvaient naître d’un contraste simultané, ce physiologiste a constaté lés phénomènes suivants : les Palémons qui présentaient une teinte rosée ou lilas légèrement ra- battue, passaient graduellement au jaunâtre ou devenaient presque incolores sur les fonds clairs, et viraient au rouge brunâtre sur les fonds sombres. L'étude microscopique des téguments et la connais- sance des pigments renfermés dans les chromoblastes rendent parfai- tement compte de la gamme de teintes parcourues par ces Crustacés. Comme chez le Turbot, ces modifications dépendent des impressions visuelles, et chez les Palémons, aussi bien que chez les Poissons, on les rend inpossibles en détruisant l'organe de la vision. M. G. Pou- chet a tenté de provoquer artificiellement les modifications des chro- moblastes, il n'y a pas réussi. Cepeadantil est parvenu à déterminer la contraction des chromoblastes rouges du Homard, après la première mue, en placant l'animal dans un milieu confiné de 2? centim. cubes d’eau recouverte d'huile et même dans une eau bien aérée. M.G. Pou- chet termine par cette remarque curieuse, que les chromoblastes manqueraient dans les Crustacés dépourvus d’yeux, Lernéonèmes, Anatifes, etc. Nous engageons ce physiologiste à essayer l’action des différents rayons colorés, et à rechercher si les changements de co- loration de certains Reptiles et Amphibiens sont subordonnés de même à l'intégrité de l'organe de la vision. Dans ces dernières années, J’atten'‘ion a été attirée sur certains 82 REVUE SCIENTIFIQUE. corps rencontrés dans les tissus, dont l’aspect rappelle celui des grains d’amidon, et qui, sous l’action de certains réactifs particuliers, se com- portent à peu près comme ces derniers. On leur a donné le nom de corpuscules amyloïides ou encore de zoomyline. M. Le professeur Dareste vient de les rencontrer dans les testicules, où Wagner les avait entre- vus, sans se rendre compte de leur nature véritable. M. Dareste les a observés dans des cellules qui tapissent la face interne des conduits testiculaires des oiseaux, mais seulement en dehors des époques de reproduction. M. le D’ Jobert, qui s’occupe avec zèle de recherches sur les organes tactiles des Vertébrés, a démontré la présence des corpuscules du tact dans la main privée de pouce des singes du genre Atèle. Il était inté- ressant de rechercher si la quene de ce Pédimane, organe de tact et de préhension, était dotée du même appareil nerveux. M. Jobert a reu- contré des papilles disposées en séries et affectant une disposition particulière : les unes se sont montrées uniquement vasculaires, les autres présentaient des corpuscules de tact parfaitement reconnais- sables et conformés comme ceux de l’homme. Dans la même région, il a constaté la présence de glandes sudoripares. Le même anatomiste a aussi communiqué à la Société philomati- que le résultat de ses recherches sur les poils du tact et sur la structure anatomique des rostres de l’'Echinorhynque et de l’Echidné. Les longues et minutieuses observations qu’il 4 poursuivies sur la structure des ailes des Chauves-Souris, l’ont amené à combattre des conclusions d’un micrographe d'outre-Rhin qui, après avoir parlé avec légèreté de notre immortel Guvier, paraît avoir fait lui-même de l’anatomie ima- ginaire. Certes, dans le domaine des sciences d'observation, personne n’est obligé de jurare in verbo magistri; mais quand la vérité, dont les droits sont imprescriptibles, vous oblige à vous inscrire en faux con- tre La parole du maitre, c’est un devoir de le faire avec une mesure et une prudence dont s'écartent souvent nos voisins pour tout ce qui n’est pas sorti d’un cerveau allemand. Les poils tactiles de l’aile des Chauves-Souris, qui suffisent à ren- dre compte de l’exquise sensibilité de cette région, et à expliquer les faits remarquables observés par d’illustres naturalistes, sans recourir à l'hypothèse d’un sixième sens qui leur serait dévolu, ont leurs ana- logues chez d’autres animaux. C'est ainsi qu’on peut les assimiler aux poils des moustaches, à ceux qui chez un grand nombre d'espèces existent à la lèvre inférieure et à la supérieure, aussi bien que sur les parties latérales du nez. TRAVAUX FRANCAIS. — Z0O0LOGIE. 83 Ces poils, suivant M. Jobert, seraient de deux sortes. Les uns, dont la papille est pourvue d’un sinus sanguin, recoit par sa base des tubes à myéline qui lui constituent une sorte de collier nerveux et rampent superficiellement pour venir se terminer peut-être dans l'é- paisseur même de la membrane vitrée. Les poils de la seconde sorte sont dépourvus de ce sinus sanguin, et le tube à myéline forme un enroulementsemblable à celui que nous venonsde signaler. M. Jobert a remarqué que certains tubes, qu'on peut suivre plus loin, passent à l’état de fibres pâles par la perte de leur myéline et vont se perdre dans le petit mamelon dermique qui supporte le poil, et plus parti- culièrement dans la portion du derme qui enveloppe ce dernier. La deuxième partie de la communication de M. Jobert concerne le pseudo-bec de l’Ornithorhynque et de l’Echidné. Ce micrographe se sert de cette dénomination parce que le rostre de ces Monotrêmes n’est pas constitué par une lame cornée, mais par les téguments mo- difiés comme ils se présentent à la face inférieure dénudée de la queue. Dans une lame épidermique d’une épaisseur considérable montent de longues papilles dermiques pourvues d’anses capillaires. Dans leurs intervalles passent les conduits excréteurs de glandes tubuleuses qu'on est tenté d’assimiler aux glandes sudoripares, et qui comme celles-ci possèdent une portion enroulée, laquelle est logée dans la profondeur du derme. Elles s'ouvrent à la surface de l’épiderme par un orifice qui apparait comme un point noir. C’est dans les profondes dépressions intéro-papillaires du derme que vien- nent aboutir les tubes nerveux, trait qui éloigne l’Ornithorhynque des Oiseaux et le rapproche des Mammifères. Parvenus au fond de ces dépressions comblées par les cellules de Malpighi, les tubes ner- veux perdent leur myéline et se divisent en fibres pâles de plus en plus ténues, à renflements de forme variable, puis viennent se per- dre dans cette couche dermique plus dense, en contact immédiatavec les cellules profondes de Malpighi. L’analogie existant entre la struc- ture de cette couche superficielle du derme et celle de la membrane externe du bulbe pileux et aussi la ressemblance qu'il a cru saisir entre la manière dont se comporte les nerfs à leur terminaison, dans les deux cas, ont conduit l’auteur à soupconner que ces coins épi- theliaux compris entre les papilles pourraient bien être tout simple- ment des poils avortés. . Un jeune anatomiste, M. J. Chatin, a eu l’heureuse occasion d'é- tudier l’anatomie et en particulier la myologie d’un mammifère très- rare (l’Hyæmoschus aquaticus, Ogilby) qu'on rencontre sur certains 84 REVUE SCIENTIFIQUE. points de la côte occidentale du continent africain, où les colonsfran- çais l’appellent biche-cochon. C’est la seule espèce vivante d’un genre qui vivait déjà à l’époque miocène. Ce Mammifère possède des mé- tacarpiens libres, non soudés en canons comme chez les Ruminants; en outre, le membre antérieur se termine par quatre doigts distincts. Chez l’adulte, les métatarsiens sont soudés en un canon semblable à celui des pécaris. L'auteur conclut de ses études anatomiques que ce Mammifère doit être séparé des Ruminants et prendre place à côté des Porcins, en tête des Pachydermes. M. le professeur Ch. Martins, poursuivant ses études d'Anatomie philosophique sur les membres, recherche la position normale et ori- ginelle de la main chez l’homme et dans Les Vertébrés. Il a reconnu que l’avant-bras occupe une position fixe. en denmu-supination, dans les Poissons, les Oiseaux, les Reptiles marins vivants et fossiles et les Pinnipèdes. Dans les Mammifères de l’époque actuelle, un premier mouvement de rotation de 9° de dedans en dehors peut s effectuer chez les Kangurous, les Paresseux. les Rongeurs claviculés, etc.; mais les Primates seuls, c’est-à-dire les Singes et l'Homme. peuvent placer le membre en supination complète par un mouvement de rotation de 180° du radius sur le cubitus. Dans les Primates, le membre anté- rieur possède un aufre caractère de supériorité dans la possibilité d'exécuter un mouvement de circumduction par suite de la direction spéciale qu'a prise le col de l'humérus. Suivant M. Martins, l’embryo- logie viendrait confirmer les données de la morphologie comparée, et ce savant conclut de ses recherches que la demi-supination est la position originelle et normale de la main, celle qui devrait être con- sidérée comme telle dans l’anatomie des Mammifères, où l’avant-bras n’occupe pas une fonction fixe et permanente. M. Hamy s’est occupé du développement proportionnel de l'humérus et duradius chez l'homme. On sait que l’avant-bras et le bras ne de- viennent distincts l’un de l’autre que vers la cinquième semaine de la vie intra-utérine; à ce moment, le premier segment l’emporte en longueur sur le second. Vers le cinquantième jour, l'égalité s’est pro- duite, etau moment de la naissance le radius en moyenne est à l'humérus comme 88,88 et 100. Ce n'est qu’à l’âge adulte que le rap- port définitif qu'on doit évaluer en moyenne à 72,09 s'établit d’une manière invariable. M. Hamy joint à sa note un tableau indiquant le rapport de longueur de l’avant-bras et du bras depuis le deuxième mois de la vie embryonnaire jusqu’à l’âge adulte, d’après des me- sures prises sur cent quinze sujets français. TRAVAUX FRANCAIS. — ZOOLOGIE. 85 M. E. Sauvage a décrit Le mode particulier de terminaison de la co- lonne vertébrale dans les Poissons de l’ordre des Pleuronectes, vulgaire- ment Poissons plats. Nous ne pouvons ici entrer dans les détails des- criptifs donnés par l’auteur, qui conclut de ses recherches compara- tives que le genre Rhombus et le genre Solea présentaient un caractère embryonnaire par rapport au genre Pleuronectes. IL fait remarquer à cette occasion que, dans l’ordre d’apparition des types à la surface de notre globe, le genre Rhombus précède le genre Pleuronectes et qu'il paraît y avoir concordance entre la succession des formes et leur degré de développement. Nous louons la réserve apportée par l’auteur dans un semblable rapprochement. La paléontologie est une science née d'hier, et toute conclusion basée sur les données nécessai- rement incomplètes qu’elle nous fournit nous paraît aventureuse et prématurée. M. Sanson a entretenu l’Académie des observations qu'il a faitessur ces curieux métis du Lièvre et du Lapin nommés Léporides, qu’on avait déjà obtenus vers la fin du siècle dernier, après les tentatives infructueuses de Buffon, et que tout dernièrement M. Guyot a pu reproduire à Boutigny-sur-Orge { Seine-et-Oise), De l’étade de ces métis il résulte qu’on peut les rattacher à deux types distincts : le Léporide ordinaire et le Léporide lonque-soie ; le premier à peu près identique au Lapin, le second fort semblable aa Lièvre. M Sanson combat l’opinion de certainszoologistes qui, tro) hâtés de conclure, avaient vu dans le résultat de ce croisement la production d’une es- pèce nouvelle. Les métis, ainsi qu'il s’en est assuré, oscillent un certain temps entre les types dont ils proviennent et font retour en définitive d’une manière constante au Lièvre où au Lapin, plus sou- vent toutefois au dernier de ces animaux. Pour que la fécondité d’un tel croisement soit assurée, il faut et il suffit alors que la première sénération puisse se produire, car la régression ultérieure vers l’un ou l’autre des types producteurs ne peut qu'assurer de plus en plus la fécondité, qui revient alors celle du type lui-même. L'Académie des sciences a recu également communication d’obser- vations de M. G. van Bambeke, relative aux premiers effets de la fé- condation sur l’œuf des Poissons. La fécondation détermine la séparation en deux couches du disque germinatif : l’une superficielle qui se seg- mente, l’autre profonde qui ne participe pas au fractionnement, Con- trairement à l'opinion de Lereboullet, ceite dernière couche doit être considérée comme partie intégrante du blastoderme. Elle se compose L: l 6 86 REVUE SCIENTIFIQUE. d’un bourrelet périphérique plus épais et d’une aire centrale mince. En s’accroissant, celte aire arrive à envelopper peu à peu le globe vitellin, et doit être considérée comme l’homologue du feuillet mu- queux ou glandulaire des embryons de Mammifères. M. van Bam- beke n’est pas encore fixé sur la signification du bourrelet péri- phérique. Nous avons publié une note sur l’Anatomie d’un rare poisson de la Méditerranée, le Gymnêtre épée, qui ne mesurait pas moins de 3,40 de longueur. Nous avons dans ce travail donné de nombreuses me- sures destinées à servir de base à une diagnose ultérieure des deux espèces méditerranéennes qui peut-être devront être identifiées. A la suite de ces travaux sur l’anatomie et la physiologie des Ver- tébrés, nous citerons quelques notices sur l’histoire des Invertébrés, cultivée avec succès par plusieurs de nos jeunes naturalistes. M. Léon Vaillanta fait connaître wn appareil glandulaire du sys- tème musculo-cutané qu’il a rencontré chez un Mollusque, l’Oncidium celticum, Guv., dont il avait précédemment décrit les mœurs et in- diqué la station. Ces glandes sont assez régulièrement sphériques, er veloppées d’une membrane propre résistante dont le canal excréteur paraît être la continuation, et constituées par la réunion d’une grande quantité d’a- ciui glandulaires simples. On compte de chaque côté onze de ces glandes qui viennent verser le produit de leur sécrétion au sommet de grosses verrues situées au point de réunion de la face ventrale et de la face dorsale. L'auteur n’a pu constater expérimentalement le rôle de cet appareil sécréteur, qui constitue peut-être un moyen de défense. Il serait intéressant de le rechercher chez les Veronicella voisines des Oncidium. MM. van Beneden et Hasse ont décrit autrefois un animal parasite d’un crustacé, la Nébalie de Geoffroy parasite qu’ils considéraientcomme un Bdellode voisin des Histriobdelles et auquel ils avaient imposé le nom générique de Saccobdelle. Ce parasite, nouvellement étudié par le fils du savant zovlogiste belge, a été considéré par lui comme un Ro- tateur dont le genre de vie spécial aurait amené l’atrophie des lobes. ciliés, interprétation que certains physiologistes pourront être tentés d'intervertir en disant que les Nébalies sont des Rotateurs que la- trophie des lobes ciliés à réduits a un genre de vie spécial. Au milieu des capsules nidamentaires du Murex brandaris, si commun dans la Méditerranée, on rencontre une autre espèce de Nébalie, Mebalia TRAVAUX FRANCAIS. — ZOOLOGIE. 87 Strausii, dont les lames branchiales portent de petits animalcules très-protéïforires, qu’on peut reconnaître pour de véritables Saccob- delles, mais qui sont distinctes spécifiquement de celles de la Né- balie de l’océan Atlantique. Jusqu'ici, malgré les recherches actives auxquelles s'est livré l’auteur de la note, M. Marion, les mâles, qui ont peut-être une existence nomade, n’ont pu être découverts. Dans le coeurs de recherches qu’il a entreprises sur certains points de l'anatomie de Gastéropodes, M Sicard, professeur-agrégé à la Faculté de médecine de Montpellier, a été amené à faire quelques observations sur l’histologie de la poche pulmonaire des Zonites algirus et à constater l'existence d’une glande qui ne paraît pas avoir été décrite par les anatomistes. La cavité respiratoire de cette Hélice, très-commune aux environs de Montpellier, peut être considérée comme un refoulement des téguments. Le microscope, en effet, y décèle la présence des mêmes éléments fondamentaux: fibres mus- culaires dont la contraction peut être invoquée pour expliquer le renouvellement du fluide respirable dans la poche respiratoire, folli- cules sécréteurs eatretenant l'humidité des parois, et enfin revête- ment épithélial superficiel. Ce dernier surtout, attesté et nié tour à tour, a dù être de la part de M. Sicard l’objet d’un examen attentif: l’auteur de la note l’a parfaitement reconnu, et conformément à l'opinion de M. Williams il a constaté la présence de cils vibratiles courts el à mouvements vifs sur le trajet des principales ramifications des vaisseaux pulmonaires. M. Sicard a rencontré en outre une glande en grappe composée, dont le plus grand diamètre peut attein- dre Î centimètre, adhérente à la paroi antérieure de la chambre res- piratoire, et pourvue d’un canal excréteur qui, après un court trajet de ? à 3 millim., vient s'ouvrir au voisinage et à gauche du pneu- mostome. Parmi les usages qu’on peut soupconner à cette glande, Le plus probable est celui que penche à lui attribuer M. Sicard, de lu- brifier les bords de l’orifice respiratoire et de représenter agglomé- rés les follicules glandulaires disséminés sur les bords de l'ouverture respiratoire de l’Helix aspersa. Enfin, pour terminer cet exposé analytique des travaux de zoologie française publiés du 1° janvier au 1° mai 1872, rappelons que nous avons Commupiqué à l’Académie de Montpellier une notice sur la Scolopendra cingulata, grande espèce de Myriapode qui n’est pas rare dans le bassin méditerranéen. Après une révision critique des es- pèces qui nous paraissent avoir été distinguées à tort de cette forme méridionale, nous avons exposé le résultat de nos expériences sur 88 REVUE SCIENTIFIQUE. l'effet de la morsure de ce Myriapode. Cette morsure produite par une paire d’appendices ambulatoires modifiés en crochets acérés, est promptement mortelle pour les petits animaux à sang froid et à sang chaud ; elle ne détermine au contraire qu'une inflammation plus ou moins vive chez l’homme en particulier. S. JOURDAIN. Nota. Les savants qui font aux Académies ou Sociétés de province des communi- cations de Zoologie dont ils voudraient que la Revue publiàt une analyse, sont priés de les adresser à la Direction du Journal. Botanique. Après une douloureuse période pendant laquelle les esprits ont été dominés par des préoccupations exclusivement patriotiques, l’œu- vre de progrès scientifique à laquelle la France a toujours si large- ment concouru a été reprise de toutes parts avec ardeur. Les travail- leurs sont revenus à leurs paisibles études et, dans le domaine de la Botanique, de nombreux Mémoires ont été publiés déjà, qui témoi- gnent d’une activité laborieuse et féconde. C'est de ces travaux que nous avons la tâche d'entretenir les lecteurs de la Revue, et, en ve- nant aujourd'hui la remplir pour la première fois, nous revendique- rons, à défaut d'autre mérite, celui d’une scrupuleuse exactitude. Les numéros des Annales des sciences naturelles parus en 1872 ren- ferment des travaux d’un haut intérêt. On y trouve d’abord un cas très-curieux d’hybridation dont l’his- toire est due à MM. de Saporta et Marion. Tous les faits relatifs à la production des hybrides méritent l'attention la plus sérieuse, car, malgré les importants travaux des Gærtner, des Brongniart, des Nau- din, etc….., beaucoup d’obscurités restent encore à éclairer sur ce point de Botanique physiologique. De plus, l'étude des hybrides inter- vient comme élément de discussion dans la question, si débattue de nos jours, de la fixité ou de la variabilité de l'espèce et, à ce titre, elle offre un intérêt particulier. Ce n’est pas que de la fécondation croisée il puisse résulter des formes nouvelles et permanentes; les descen- dants hybrides sont, en effet, généralement stériles et, en outre. M. Naudin a montré que les individus qui proviennent d’hybrides féconds reviennent au type primitif paternel ou maternel. Mais si, comme l'ont cru quelques naturalistes, les croisements entre espèces distinctes ne produisaient qu'une descendance stérile, tandis que les TRAVAUX FRANCAIS. — BOTANIQUE. 89 croisements entre variétés étaient suivis d’une postérité féconde, il y aurait là un criterium précis pour la détermination des espèces. Malheureusement pour cette manière de voir, elle est contredite par les faits : la stérikité n'est pas constante pour les hybrides, et la fé- condité ne l’est pas davantage pour les métis. L’une et l’autre pa- raissent être le résultat de différences ou d’analogies organiques en- core inconnues, sans Connexion absolue avec les dissemblances ou les ressemblances extérieures. Cependant, on peut dire d’une manière générale que deux plantes se fécondent l’une l’autre d'autant plus facilement qu’elles sont plus rapprochées par leurs caractères, et c’est ainsi que les croisements entre espèces sont plus rares que les croisements entre variétés. De même, moins il y aura de différences entre les espèces, plus il y aura de chances pour qu’elles puissent se croiser et donner naissance à des hybrides. Aussi, plus les espèces sont distinctes, et plus ïl est rare de les voir s’hybrider. À ce point de vue, l’observation de MM. de Saporta et Marion, d’un hybride spontané provenant des Pistacia te- rebinthus et lentiscus est des plus intéressantes, en raison même des différences botaniques qui séparent ces deux espèces. Les quatre pieds hybrides que ces botanistes ont observés dans la vallée de Saint-Zacharie, en Provence, présentent des caractères in- termédiaires aux deux espèces d’où ils proviennent. Deux de ces pieds portaient des fleurs femelles; les deux autres étaient stériles. Ces deux derniers paraissent être des mâles dont la stérilité est en rapport avec l'observation qui a été faite de la dégénérescence habituelle des organes mâles dans les produits hybrides. Examinant Le rôle des deux espèces qui sont intervenues dans ce cas d'hybridation, MM. de Saporta et Marion sont amenés à penser que les individus observés par eux proviennent de la fécondation d'un Térébinthe par un Lentisque. et ils donnent par conséquent à cette race hybride le nom de Pistacia lentisco-terebinthus. Une question bien intéressante consiste à savoir si les fruits portés par les piéds femelles seront fertiles, et, au cas où ils le seront, à examiner les formes qui en proviendront. Ge sera l’objet d’une nou- velle étude qui nous est promise par les deux sagaces observateurs. À cûté de ce cas d’hybridation, se place une observation analogue qui fait l'objet d’une note présentée par M. J.-E. Planchon à l’Aca- démie des sciences. 1 Le Cratægus Aronia {Spach) dans ses rapports avec l’Aubépine et l'Azerolier d Ilalie, par d.-E. Planchon. Compt.-rend., Acad. scienc., tom. LXXIV, pag. 673, 90 REVUE SCIENTIFIQUE. Un Azerolier, assez commun dans le midi de la France, présente des caractères intermédiaires entre ceux du Cratægus oxyacantha et ceux du Cratægus Azarolus : c'est le Cratæqus Aronia (Spach). M. Planchon n'admet pas cette forme comme espèce, et il se demande quelle est son origine. La fertilité de ses graines lui fait repousser l’hypothèse que ce soit un hybride véritable provenant de ces deux espèces : Aubépine et Azerolier. Il pense que c'est un métis, et 1l est ainsi amené à consi- dérer les Cratægqus oxyacantha et Azarolus comme des variétés d’une même espèce. Il fonde son opinion, d’une part sur la fécondité de cet Azerolier, et aussi sur ce fait. qu’un semis de Craiægus Aromia a donné sur un certain nombre deux pieds qui, par un phénomène de retour au type primitif, offraient presque tous les caractères du Cra- tæqus oxyacantha. Pour M. Planchon, cette manière de voir est corroborée par le fait que le Térébinthe et le Pistachier à gros fruits donnent naissance à une forme intermédiaire, Pistacia cappadocica (Tournef. ). Il regarde aussi le Pistachier comme un métis, et par conséquent les Pistacia terebinthus et vera comme de simples variétés. Le savant professeur de Montpellier se défend de vouloir préjuger la question de fixité ou de mutabilité de l’espèce, et dans l’état actuel de nos connaissances il croit pouvoir regarder toute race croisée fertile comme métisse, et toute race croisée stérile comme hybride. Si cette li était universelle, elle fournirait, en effet, un moyen sûr de distin- guer nettement les espèces des variétés ; mais la question parait beau- coup plus complexe, car bon nombre d'espèces considérées comme des plus légitimes donnent naissance, par leur croisement, à des hy- brides féconds. Ces espèces doivent-elles déchoir de leur rang, par ce seul fait que leur croisement est suivi d’une descendance fertile ? Il faut donc convenir qu’on ne saurait, à quelque point de vue qu'on se place. définir les conditions à la fois nécessaires et suffisantes pour la détermination de l'espèce. Telle est la conclusion qui nous paraît découler naturellement des faits. Recherches sur la moelle des végétaux ligneux. — Sous ce titre, M. Arthur Gris a présenté à l’Académie des sciences un Mémoire con- s'dérable qui a été publié in extenso dans les Nouvelles archives da Muséum. Les Annales des Sciences naturelles nous en donnent un extrait, en même temps que le rapport présenté à l’Académie par M. Bron- gniart, au nom de la commission chargée de l’examiner. Les limites de cette Chronique ne nous permettent pas de suivre TRAVAUX FRANCAIS. — BOTANIQUE. 91 l’auteur de ce travail dans la longue étude qu'il à faite de cette ques- tion, comme le comporterait l'intérêt du sujet et la facon remar- quable dont il a été traité. Nous devons nous borner à un examen rapide et à l'indication des résultats auxquels il est arrivé. Dans des travaux antérieurs, M. A. Gris s'était occupé des phéno- mènes alternatifs de production et de résorption de la fécule dans les couches ligneuses des arbres. Ces recherches lui avaient fait recon- naître Le rôle que ces parties du végétal, considérées jusque-là comme inertes, jouent dans sa nutrition, et elles l’ont conduit naturellement à l'étude spéciale de la moelle, qui fait l’objet de son dernier Mémoire. L'opinion de De Candolle, qui regardait la moelle comme n'ayant de vie et d'existence physiologique que dans les premiers moments du développement du bourgeon et comme devenant ensuite flasque et inutile, a régné jusqu'ici sans conteste, malgré que Hartig, dès 1839, eùt indiqué l’action physiologique de la moelle. Le mémoire de M. À. Gris démontre combien cette manière de voir était erronée. Il étudie d’abord la structure de la moelle sur un grand nombre de végétaux, et, à cause des modifications qu’elle présente suivant qu’on l’examine en différents points de l’axe, il l’observe successivement dans les entre-nœuds (moelle internodale), dans les nœuds ( moelle nodale). à la base des bourgeons (moelle subgemmaire), aux points enfin où une pousse d’une année succède à une pousse d’une autre année (moelle interraméale ). La moelle internodale comprend trois sortes d'éléments : l° Des cellulesà parois épaissies et canaliculées, contenant des ma- tières granuleuses amylacées (cellules actives) ; 2° Des cellules à parois minces et ponctuées, ne renfermant pas de matières de réserve granuleuses, mais souvent des gaz (cellules inertes); 3° Des cellules à parois formées par une enveloppe ténue et con- tenant des formations cristallines {cellules cristalligènes) : Dans la moelle d’un entre-nœud ces éléments peuvent se combiner de facons variées. La moelle homogène est celle qui n'offre que des cellules actives ou des cellules actives et des cellules cristalligènes, sans éléments inertes. La moelle hétérogène est celle qui renferme des cellules actives et des cellules inertes. La moelle inerte, enfin, est celle qui n’est formée que de cellules inertes. La moelle homogène et la moelle hétérogène présentent des formes 92 REVUE SCIENTIFIQUE. secondaires qui résultent de modifications dans la disposition des élé- ments constitutifs. La structure, telle qu’elle vient d’être indiquée, de la moelle in- ternodale varie quand on considère la moelle des autres régions dis- tinguées par M. Gris. La moelle nodale présente dans les plantes à moelle hétérogène un développement plus grand de sa partie active, et forme même, dans certains cas, des disques d’un tissu plus dense et plus résistant dont les celiules à parois épaisses canaliculées contienuent de la fécule. La moelle interraméale et ia moellesubgemmaire sont forméesd’un tissu continu, très-différent, dans beaucoup de cas, de celui de la moelle internodale, et qui comprend, en proportions variables, des cellules inertes, des cellules cristalligènes et des cellules actives. M. A. Gris ne s’est pas borné à rechercher quelle était la structure sénérale de la moelle, mais il a encore appliqué à la Botanique phy- tographique les caractères présentés par elle, et c’est un des premiers exemples de l'emploi des connaissances fournies par l’anatomie des organes végétatifs, dans la détermination des groupes naturels. Ses recherches ont porté sur dix-huit familles, et l’ont conduit à des ré- sultats pleins d'intérêt. Enfin, le conteuu des cellules médullaires, leur vitalité et le mou- vement des matières nutritives qu’elles contiennent, telles sont les questions que M. Gris examine dans le dernier chapitre de son Mémoire. Les cellules actives peuvent contenir, indépendamment des cor- puscules amylacés et d’une petite quantité de matière verte qu'on y rencontre quelquefois, des cristaux et du tannin. Cette substance avait été déjà étudiée par MM. Trécul et Hartig dans un certain nom- bre de végétaux. Sa présence paraît être très-générale dans les cellules actives de la moelle, où elle accompagne ordinairement les granules amylacés. Elle paraît être assimilable et nutritive comme le sucre et l’amidon. L'existence, dans la moelle, de cellules actives, remplies de matières de réserve granuleuses, a été constatée par M. Gris dans des rameaux d'âge différent, et même il l’a observée dans certains arbres jusqu’à un âge très-avancé. Cette présence de la fécule est bien une preuve de la vitalité de la moelle, car cette substance y est alternativement élaborée et résorbée suivant les saisons. Ainsi, la moelle n’est pas inerte et passive, comme on l’a cru jusqu'ici ; c’est une partie vivante, qui concourt pour une large part à la nutrition du végétal. TRAVAUX FRANCAIS. — BOTANIQUE. 93 L'exposé trop succinct que nous venons de faire suffit cependant pour montrer toute l'importance et toute la valeur de cette étude sur la moelle des plantes ligneuses, dans laquelle M. A. Gris a apporté cet esprit d'observation exacte et rigoureuse qui caractérise tous ses travaux. Deux communications faites par M. Trécul à l’Académie des scien- ces sont reproduites dans les Annales des sciences naturelles. La pre- mière est relative au suc propre des feuilles d’Aloës ; la seconde à l'origine des lenticelles. Diverses opinions avaient été émises par les botanistes sur la con- stitution des organes qui renferment le suc propre des Aloës ; pour les uns C'étaient de vrais canaux, pour d’autres des méats ou des lacu- nes. M. Trécul a déterminé leur véritable nature et a montré que ce sont des cellules spéciales, qui en outre n’existent pas dans toutes les espèces. Les vaisseaux propres sont placés sur le côté externe libérien des faisceaux vasculaires verticaux qu'on trouve à la limite du paren- chyme vert externe et du parenchyme incolore central de la feuille. Dans certaines espèces, on trouve en ce point des fibres libérienaes à parois épaissies formant un groupe plus ou moins volumineux. Dans d’autres espèces, ces fibres du liber n'existent pas, et il n’y a à leur place qu'un cordon du tissu dit cribreux. Dans la plupart des Aloës, enfin, on voit, en dehors du cordon cribreux, des cellules à suc propre, grandes et oblongues. Elles se distinguent de celles du tissu cribreux par leur largeur et par l’aspect que leur donne le suc qu’elles ren- ferment. Ce suc est incolore ou diversement coloré, et cette colora- tion varie avec l’âge ou le degré d’activité des cellules. M. Trécul a observé que, dans certains cas, les membranes des cel- lules de suc propre pouvaient être résorbées, et qu’il se produisait alors des lacunes à la place qu’elles occupaient ; de même, il a vu des ca- naux continus résulter de la disparition des cloisons de séparation de cellules superposées ou de la fusion de ces cellules. Le suc propre des Aloës se solidifie facilement, et il se forme ainsi des globules colorés, de volume variable, en suspension dans le con- tenu liquide des cellules ; on les trouve surtout en grande quantité daus les cellules qui entourent les faisceaux vasculaires. Ces cellules sont remplies en même temps d’un liquide jaune qui rapvelle le suc propre, mais qui est moins foncé que lui. En outre, M. Trécul a con- staté dans le suc fourni par le parenchyme des feuilles d’Aloës, l’exis- tence d’une matière en dissolution qui se colore immédiatement en 94 REVUE SCIENTIFIQUE. rouge par l’action de l’iode, et qui se teint de la même couleur par l’action prolongée de l’oxygène de l'air. Enfin, il a observé un phéno- mène qui à quelque connexité avec le précédent: c’est que, sous l’in- fluence de l'humidité et de l'air, de petits cristaux prismatiques par- ticuliers contenus dans des cellules de feuilles d’Aloës se teignaïent en rouge à leurs extrémités; puis, chacune de celles-ci, se divisant en fines aiguilles, donnait naissance à une houppe qui prenait une forme hémisphérique et, les deux hémisphères ainsi formés par chaque cristal s'appliquant par leur surface pleine, finissaient par constituer une petite sphère de fins cristaux aciculaires d’un rouge éclatant. Le mot Lenticelles a été attribué en 1825 par De Candolle aux petites éminences qu’on remarque sur l’écorce des ‘arbres, et que Guettard, se méprenant sur leur nature, avait appelées Glandes lenticulaires ; mais tous les botanistes n’ont pas défini les lenticelles de la même facon, bien que l'opinion de M. H. Mohl, qui les considère comme une production subéreuse localisée, ait été adoptée par la plupart d’entre eux. Dans un travail daté de 1836, M. Unger avait émis à ce sujet un avis particulier. Il avait observé que les lenticelles prennent nais- sance sous les places occupées d’abord par des stomates; par suite il les regardait comme produites par l’oblitération de ces organes, et de plus il admettait une analogie de nature entre elles et les propa- gules des végétaux inférieurs: cette manière de voir avait été aban- donnée par son auteur lui-même, qui s'était rallié à une opinion très- voisine de celle de M. H. Mohl. Aujourd’hui, M. Trécul, se basant sur des recherches multiphées, établit l'exactitude de la première observation de M. Unger, en re- poussant l'hypothèse dont il l’accompagnait. Il a reconnu que les len- ticelles naissent au-dessous des places qui étaient occupées par un où plusieurs stomates. Il considère ces formations subéreuses comme destinées, l'épiderme étant détruit, à protéger les tissus internes contre l’action nuisible des agents atmosphériques. Cependant, de ces lenticelles nées sous les stomates, il faut distin- guer de très-petites excroissances subéreuses qui ont la même forme et qui se produisent an-dessous des crevasses de l’épiderme, soit avant la naissance du liége ou âu périderme ( Cornus sericea), soit à la surface d’une couche péridermique préexistante (Sambucus nigra). D'après M. H. Mohl, les lenticelles seraent dues à une excroissance du parenchyme cortical interne, tandis que le vrai liége est formé à la surface du pareuchyme corlical externe. M. Trécul combat cette TRAVAUX FRANCAIS. — BOTANIQUE. 95 assertion, et reconnaît au tissu lenticellaire et au tissu subéreux la même origine. Les feuilles des plantes peuvent-elles absorber l’eau liquide! ? M. Cailletet s’est proposé, après plusieurs autres physiologistes, de résoudre cette question. Il s’est servi pour cela d’une éprouvette à dou - ble tubulure. Par l’orifice supérieur il introduit la branche de végétal en expérience. puis ille bouche de façon que la fermeture soit par- faitement étanche ; un tube de verre de petit diamètre, adapté à l’o- rifice inférieur, fait l'office d’un véritable manomètre qui permet d'apprécier la moindre variation dans le volume du liquide que ren- ferme l'appareil. Des expériences faites par ce procédé dans des conditions variées ont permis à M. Cailletet de constater qu'une plante végétant dans un sol humide et recevant par ses racines une quantité d’eau suffisante n’absorbe pas l’eau liquide qui mouille ses feuilles, mais que cette absorption commence dès que les feuilles se fanent en raison de la dessiccation du sol. Les organes de sécrétion des végétaux ont fourni à M. Martinet le su- jet d’une thèse qui a été présentée à la Faculté des sciences de Paris. Il y avait là, en effet, matière à une importante étude, bien faite pour appeler l'attention d’un botaniste. Nous allons examiner de quelle facon M. Martinet a traité cette question d’Anatomie botanique. Dans des considérations générales, l’auteur commence par envisager la fonction de sécrétion qu’il cherche à définir, sans arriver cependant à en préciser bien exactement la nature. Selon lui, De Candolle éten- dait trop le domaine des sécrétions végétales quand il leur attribuait tous les sucs qui forment des produits spéciaux ne servant pas direc- tement à la nutrition. Qu'est-ce qui caractérise donc pour M. Martinet une véritable sécrétion? C’est la localisation de la fonction. Il exclut par conséquent du nombre des produits de sécrétion la gomme, le latex, le sucre, la fécule, etc... comme trop universellement répan dus dans le végétal. Il invoque, en outre, la différence de structure qu'il y a entre le tissu glandulaire et les tissus voisins, différence qui doit être en rapport avec la spécialité de la fonction. Il définit alors Les sécrétions végétales : « Une fonction exécutée par un organe purement cellulaire, mais d’une structure anatomique spéciale, fonction dont le résultat est la | Annales des sciences naturelles, tom. XIV, pag. 243. 96 REVUE SCIENTIFIQUE. production d’un liquide particulier que l’on ne retrouve pas dans les autres parties de la plante. » Il divise ensuite les organes de sécrétion en trois sections : 1° Les poils glanduleux : 2° Les glaudes proprement dites: 3° Les glandes florales. Nous ne pouvons suivre l’auteur dans l'étude historique et bi- bliographique de la question, à laquelle il a donné un grand déve- loppement. La partie du travail de M. Martinet qui traite des poils glanduleux est de beaucoup la plus considérable. Avec De Candolle, il distingue les poils glanduleux à leur sommet et les poils glanduleux à leur base ; seulement il rejette la dénomination de poils excréteurs donnée par ce botaniste à cette seconde catégorie de poils, parce qu’elle implique l’idée d’une erreur physiologique. Il n’y a pas, en effet, dans ces poils, de canal spécial qui conduise au dehors le liquide sécrété par les glandes végétales. Dans les poils terminés à leur sommet par une glande, De Candolle distinguait diverses formes, parmi lesquelles celle de poils à cupule. M. Martinet repousse cette distinction, parce que. selon lui, cette forme en cupule n'appartient jamais normalement à la glande, et qu’elle est purement accidentelle. Elle se produit quand il y a extra- vasation d’une portion du liquide sécrété entre la partie supérieure de la glande et La cuticule qui la recouvre. Celle-ci est alors distendue, ais la cellule glandulaire vient ensuite à s’affaisser sous la pression que cet épanchement exerce sur elle: la calotte supérieure se dé- prime et s’invagine en quelque sorte dans la calotte inférieure, d'où résulte la cupule, considérée à tort comme une forme particulière de glande. M. Martinet n’admet pas davantage la distinction des poils en tête et des poils à plusieurs lêles, ceux-ci n'étant, à ses yeux. qu'un cas par- ticulier des premiers, et il propose de diviser les poils glanduleux à leur sommet en trois genres : Premier genre. Glandes unicellulaires ; Deuxième genre. Glundes à plusieurs cellules résultant de cloisonne- ments verlicaut ; Troisième genre. Glandes à plusieurs cellules n'étaint pas le résultat de cloisonnements exclusivement verticaux. Les glandes qui rentrent dans le deuxième genre se divisent, sui- vant le nombre de cellules dont elles sont composées, deux, quatre, huit, seize ou plus, en quatre sous-genres. TRAVAUX FRANCAIS. — BOTANIQUE. 97 Enfin, chacun des groupes ainsi formés, genre ou sous-genre, est divisé en trois espèces, selon que le pédicelle est court, moyen ou long. Pour le troisième genre seulement, il y a une variante; le pé- dicelle moyen n’est pas mentionné, et le pédicelle long peut être formé par une ou par plusieurs rangées de cellules. Voici comment M. Martinet caractérise ces espèces de pédicelles : Pédicelle court, formé par une ou deux cellules de dimensions à peu près égales : Pédicelle moyen, c'est-à-dire d’une longueur moyenne, formé de deux cellules dont l’une est très-petite et l’autre très-grande ; Pédicelle long, formé par quatre, cinq ou un plus grand nombre de cellules plus ou moins allongées. Cesdivisions, fondéessur la longueur du pédicelle, sont évidernment mauvaises et ne sauraient être admises. Cette longueur, en effet, ne peut-elle varier avec les conditions de végétation, et comment déter- miner exactement à quelle limite finit le pédicelle court et commence le pédicelle moyen; et de même, à partir de quel point celui-ci mérite d’être qualifié de long ? Or, cette considération de longueur est pour M. Martinet la plus importante, bien qu’il fasse intervenir comme ca- ractère du pédicelle moyen les dimensions relatives des cellules con- stituantes. En effet, parmi les glandes formées de quatre cellules, celles de la deuxième espèce, à pédicelle moyen, ont bien un pédicelle d’une longueur moyenne, mais dont la forme n’est pas celle que lui attribue la définition donnée plus haut, car il est constitué ordinairement par une ou deux cellules plus ou moins développées. L'auteur n'hésite pas cependant à conserver cette division. Cette partie de la classification de M. Martinet est factice, et ilnous parait avoir cédé à l'entrainement de faire des coupes uniformes, de construire un tableau régulier. Cela est si vrai, que dans son qua- trième sous-genre il fait figurer la division des glandes à pédicelle moyen, tout en indiquant qu'il n’en a pas observé. L'auteur reconnait lui-même, quoique d’une manière implicite, combien cette base de classification est incertaine. Il Gït, en effet, à propos de la longueur du pédicelle qu’il qualifie de court: « Ce pé- dicelle peut devenir relativement considérable, comme dans le Scutel- laria alpina. Il est alors formé de deux et même de trois cellules, et constitue une véritable transition aux pédicelles des glandes de la troisième espèce du même genre (G1. à pédicelle long) », et plus loin, à propos des poils des Pelargonium : « Dans ces végétaux, le pédicelle de la glande est notablement plus allongé que chez les Labiées. Le 98 REVUE SCIENTIFIQUE. nombre des cellules qui le composent est plus considérable, et peut s'élever jusqu’à cinq, comme dans le P. cucullatum (pag. 54 et 55 ). Les poils glanduleux à leur base se distinguent en poils non urticants et en poils urticants. Les premiers ont été observés dans les différentes espèces de Dictamnus ; M. Martinet en a trouvé d’analogues chez le Cuphea lanceolata. Son attention s’est portée sur ces organes glandu- laires d’une facon spéciale. Ils sont formés d’une envelonpe de na- ture épidermoïdale et d’un tissu central ou glandulaire. À un moment donné, ce tissu se résorbe chez les Dictamnus, et il se forme ainsi une cavité centrale dans laquelle s’accumule le liquide sécrété. Ces glandes sont à la base de poils courts, formés par quatre ou cinq cel- lules peu développées. Celles-ci résultent de l’élongation d'une cel- lule unique appartenant à l'enveloppe épidermiqueet qui se multiplie par la formation de quatre ou cinq cloisons horizontales. Dans le Cuphea lanceolata, Les poils qui surmontent les glandes sont coustitués par plusieurs rangées de cellules juxtaposées, qui sont pro- duites par le développement et la multiplication de toutes les cel= lules placées à la partie supérieure de l’enveloppe glandulaire. Dans la glande qui occupe la base de chacun de ces poils, M. Martinet n’a jamais constaté le phénomène de résorption observé par lui chez les Dictamnus. Dans les poils glanduleux à leur base et urticants, les uns sont debout et perpendiculaires à l’épiderme, les autres sont couchés et paral- lèles à l’épiderme. Le type des premiers nous est donné par les poils de l’Ortie. Ces poils ont été étudiés par divers savants, et eu dernier lieu par M. Du- val-Jouve, avec l’habileté qui lui est particulière’. M. Martinet n’admet pas cependant l'opinion soutenue par cet observateur après De Can- dolle, Meyen, Schacht, Duchartre, qui considère le pédicule sur lequel est porté le poil comme l'organe producteur du liquide âcre et brù- lant contenu dans son intérieur. Il attribue cette fonction au bulbe et aux cellules seulement du pédicule qui l’avoisinent. Les poils urticants, placés parallèlement à l’épiderme et en forme de navette. ont été observés sur Les feuilles des Halpighia, d’où le nom de malpighiacés, qui leur a été donné par De Candolle. Les glandes proprement dites comprennent les glandes extérieures et les glandes intérieures. Celles-ci sont placées sous l’épiderme, dans le tissu parenchymateux des organes. tandis que les glandes extérieures, 1 Duval-Jouve; Étude sur les stimulus d'orlie. (Bull. de la Soc. botanique de France, tom. XIV. 1867.) TRAVAUX FRANCAIS. — BOTANIQUE. 9q constituées par des cellules épidermiques modifiées sont portées par une sorte de pédicelle et ne sont jamais recouvertes par l’épiderme. T'elles sont celles de certaines Rosacées, Passiflorées, etc... Leur tissu étant produit par une modification des cellules de l’épiderme, M. Mar- tinet donne à cette transformation le nom de dégénérescence adénoïde. Cette expression n’est pas heureuse, car le mot dégénérescence im- plique l’idée d’altération, et non de simple métamorphose. M. Mar- tinet appelle adénophore le pédicelle volumineux qui sert de support à ces glandes et qui contient, outre du tissu cellulaire, des faisceaux fibro-vasculaires ; ceux-ci n’ont du reste aucune relation avec le tissu glandulaire. On doit ranger les glandes des Drosera parmi les glandes propre- ment dites et non parmi les poils glandulifères, comme on l’a fait jusqu'ici. Leur pédicelle, en effet, n’est pas seulement furmé par l’'é- picerme; on y trouve aussi du tissu parenchymateux et des vais- seaux. Les glandes intérieures sont placées dans le parenchyme des orga- nes, au-dessous de l’épiderme ; elles sont closes de toutes parts. Ce sont les plusanciennement connues, et on les désigne le plus souvent sous le nom de glandes vésiculaires que leur a donné Guettard. On les rencontre dans les Aurantiacées, les Hypéricinées, les Rutacées, etc... C'est à leur présence que les feuilles d’un grand nombre de plantes qui appartiennent à ces familles doivent l’aspect ponctué qui les ca- ractérise. M. Martinet a suivi le développement de ces glandes dans l’Oranger. D'après lui, elles sont primitivement formées par un tissu glandulaire à cellules petites, remplies de fines granulations ; puis la glande s’ac- croît, ses cellules glandulaires augmentent de volume, et il apparaît dans leur intérieur des gouttelettes d’huile essentielle; plus tard, quand le développement est complet, il se produit dans le tissu glan- dulaire un phénomène de résorption analogue à celui dont les glandes de Dictamnus sont le siége. Le tissu glandulaire disparait ainsi, et il ne reste plus qu'une cavité pleine du liquide sécrété. Ces différents états qui correspondent à des âges divers peuvent s’observer en même temps sur l'enveloppe du fruit. Glandes florales. — Elles forment la troisième classe des organes de sécrétion. Le chapitre qui leur est consacré est bien écourté et laisse exister une lacune regrettable dans l’œuvre de M. Martinet. Quoiqu'il dise, en effet, que l'étude des glandes florales en général n’entre pas dans le plan de son travail et qu’elle l’aurait entrainé beaucoup trop loin, le titre adopté par lui: Organes de sécrétion des végétaux, ne lui 100 REVUE SCIENTIFIQUE. permettait guère de négliger ainsi cette classe si intéressante d'or- ganes glandulaires. Il ne s'arrête avec quelques détails que sur là. structure des glandes florales du Parnassia palustris, qui se présentent sous forme d’écailles au nombre de cinq, opposées aux pétales, por- tant sur leür bord libre des filaments de longueur inégale, dont l’ex- trémité est constituée par une glande volumineuse. M. Martinet termine ce court aperçu en proposant, à l’exemple d: de Jussieu, la suppression du mot nectaire, comme entraînant de la confusion, parce qu'il n’a pas toujours été appliqué exclusivement aux organes glandulaires floraux. Par l’analyse que nous venons d’en faire, on a pu voir que le travail | de M. Martinet, recommandable à certains égards, laissait néanmoins subsister de nombreux desiderata dans la connaissance des organes de sécrétion des végétaux. M. Trécul! avait déjà signalé, dans une communication insérée à la page 516 du tom. LXV des Comptes-rendus, l'apparition de mo- pades à l’intérieur de cellules médullaires après quelques jours de macération. Ces cellules appartenaient au pourtour de la moelle d’une tige d'Helianthus tuberosus. Les monades qu’elles contenaient auraient pris naissance par suite de la modification des vésicules chlorophyl- liennes. Les cellules de levüre de bière donnent lieu, d'après le même observateur, à un phénomène analogue. Il a vu, en effet, ces cellules devenir mobiles et se présenter sous l’apparence de véritables monades. Le nom de M. Trécul donne à cette observation une importance particulière, mais ses résultats sont contestés. M. de Seynes s’est élevé, en effet, contre la réalité de ces transformations, qu'iln'a jamais observées dans le cours de ses recherches (Comptes-rendus, p. 113); la divergence des opinions à ce sujet appelle de nouvelles expé- riences. x M. J.-E. Planchon? donne le nom d’Hemiptelea David à un Orme épineux, Planera Davidii (Hance ), découvert dans la Mongolie orien- tale par M. l'abbé Armand David. Ce gènre nouveau établit une tran- sition entre la sous-tribu des Ulmées et celle des Planérées, dans la famille des Ulmacées. Le nom d’Hemiptelea est tiré d’un caractère du fruit, qui présente une aile unilatérale, tandis que cette aile est cir- culaire dans les Ulmus, et qu’elle fait défaut dans les Planera. 1 Cellules de levüre de bière devenues mobiles comme des monades, par M. Trécul. Comptes-rendus, tom. LXXIV, pag. 23. 2 Sur l’orme épineux des Chinois, par d.-E. Planchon. Compt.-rend., pag. 131. TRAVAUX FRANCAIS. — BOTANIQUE. 101 M. Boussingault! a observé au Liebfrauenbery, dans les Vosges, en juillet 1869, la production d'une matière sucrée, d’une sorte de manne sur les feuilles d’un Tilleul. L'analvse a montré que cette substance contenait du sucre de canne, du sucre interverti et de la dextrine; la proportion de ces matières n'était pas constante ; il n’y avait pas de mannite. La composition de cette manne est la même que celle de la manne du mont Sfnaï. C'est une maladie de l’arbre qui produit l’exsudation de matières sucrées à la surface des feuilles. M. Boussingault repousse l’hypo- thèse qu’elle puisse être attribuée à la piqüre de certains insectes ou à l'intervention des pucerons, qui puiseraient cette substance dans le parenchyme et la rendraient ensuite à peine modifiée. M. Harting (Comptes-rendus, pag. 472) considère cette miellée comme produite par un puceron, l’Aphis tiliæ, qui vit à la face infé- rieure des feuilles du Tilleul et qui, d’après lui, laisserait tomber ses excréments liquides sur la surface des feuilles sous-jacentes. M. Bous- singan]t repousse cette opinion, quoique généralement admise, parce que, quand il a fait ses observations au Liebfrauenberg, il n’y avait pas de pucerons; il n’en est apparu que quelques jours après. De plus, les déjections des pucerons de M. Harting ne contenaient que du sucre de canne ; or, la manne renferme en outre du sucre inter- verti et de la dextrine. M. de Saporta, dont le nom rappelle de si remarquables travaux, doit publier prochainement un ouvrage sur la Flore jurassique. Dans une communication à l’Académie des sciences?, il a indiqué les prin- cipaux résultats qu'il a obtenus. : La période jurassique constitue une époque de transition, une sorte de moyen âge, suivant l'expression de l’auteur; elle présente ce trait particulier, que la végétation est demeurée à peu près stationnaire pendant sa longue durée: les Fougères, les Equisetum, les Cycadées, les Conifères, s'unissent pour lui donner une physionomie qui change peu. Cette végétation paraît avoir été pauvre et peu variée. Aux végétaux que nous avons nommés, si on ajoute quelques Monocotylédons, des Characées et des Algues, on aura le tableau complet de ce qu’elle de- vait être. Les résultats obtenus par M. de Saporta viennent à l’appui de la 1 Sur une matière sucrée apparue sur les feuilles d'un tilleul, par Boussin- gault. Compt.-rend., pag. 87. 2 Plantes fossiles de l'époque jurassique, par M. de Saporta. Comptes-rendus, pag. 258. je 1 102 REVUE SCIENTIFIQUE. distinction établie par M. Brongniart de trois grandes périodes de vé- gétation désignées sous le nom de règne des Acrogènes, règne des Gymnospermes et règne des Angiospermes. La flore jurassique appar- tient à la seconde de ces périodes. On voit aussi que la Paléontologie justifie 11 division, encore cou- testée par quelques botanistes, des Dicotylédons en Angiospermes et Gymnospermes, ceux-ci dominaient, en effet, à une époque géologique antérieure à l'apparition des premiers. M. Duclaux a recherché quelle pourrait être l'influence du froid de l'hiver sur les graines végétales *. Des expériences faites sur les graines de Belle-de-nuit etde Volubilis lui font regarder cette influence comme nécessaire dans uue certaine mesure à la germination. Nous signalerons enfin une note de M. A. Gris, sur la Structure de l'écorce dans les Éricinées ?. Cette structure présente des caractères gé- néraux propres à la famille, et des caractères particuliers aux diffé- rents genres. L’étendue déjà trop considérable de cette Revue nous oblige à l’ar- rêter ici. Nous devons nous borner à mentionner un intéressant mé- moire de M. Paul Bert sur les Mouvements de la sensitive, en nous ré- servant d'y revenir dans le prochain numéro. Henri SIcARD. TÉÈSS 25 — Géologie. La Géologie à la Réunion des Sociétés savantes de Paris. (Session du 4er au 4 avril 1872.) Le savant rapporteur, M. le professeur Blanchard, de l'Institut, constate que la Géologie a fait dans ces dernières années, malgré là guerre, de très-grands progrès en France. Du Nord au Midi les tra- vaux abondent : dans les Pyrénées, ce sont les études géologiques et EEE DE NEED LOT UE VU ML à à De l'influence du froid de l'hiver sur les graines végélales, par M. Duclaux. Comptes-rendus, pag. 802. 2 Considérations générales sur la structure de l'écorce des Éricinées, par M. A. Gris. Comptes-rendus, pag. 875. 3 Recherches sur les mouvements de la sensitive, par M. Paul Bert. Journal d'anat. et de phys. de Robin, pag. 201. 1872. TRAVAUX FRANCAIS. — GÉOLOGIE. 103 minéralogiques de M. l'ingénieur des mines Mussy, les belles recher- ches de M. Magnan sur la craie inférieure et la craie moyenne; dans l'Est, il cite‘ M. le docteur de Fromentel, qui nous a fait connaître les Polypiers de nos diverses formations géologiques, et dans le Midi M. le docteur Bleicher, dont les travaux portent sur la paléontologie et la stratigraphie de l'Hérault et des départements avoisinants. Hors de France, en Algérie, la paléontologie et la géologie du Sahel a été faite avec soin par M. Pomel et M. Nicaise. Mais l'intérêt se concentre sur les magnifiques recherches de M. Grandidier sur la faune de Madagascar. L'intrépide voyageur a retrouvé dans cette île un vaste développement de terrain jurassique semblable au nôtre ; Les fossiles qu'il y a rencontrés sont ceux du lias et de l’oolite. Le terrain tertiaire infra-nummulitique y.est également très-répandu, et, à côté des gigantesques Epiornis disparus, M. Grandidier a retrouvé des traces d'un hippopotame de petite taille, qui relie la faune si spéciale de Madagascar à celle de l'Afrique. Nous espérons plus tard parler plus au long de ces remarquables découvertes, qui prouvent que le goût des explorations lointaines n’est pas perdu chez nous. La section des sciences naturelles à eu à traiter différentes ques- tions intéressantes, parmi lesquelles nous croyons devoir choisir, pour en donner une idée celle des phosphates de chaux du Quercy. M. le professeur Malinowski (de Cahors), un des plus ardents promoteurs de l'exploitation de ce précieux engrais minéral, en a fait l'historique devant la réunion. Il y a deux ans environ, le premier gîte de phosphorite fut décou- vert dans les environs de Réalville (Lot) par M. Poumarède ; plus tard on le retrouva en immense quantité à Caylus,soit dans des poches, soit dans des fissures du terrain tertiaire lacustre éocène. Il en existe deux sortes de gisements: les uns avec brèche osseuse, dans laquelle M. Trutat (de Toulouse) a trouvé des dents de paleothérium; les autres sans trace de brèche osseuse avec phosphorite zonée amor- phe. Le plus souvent ce minerai donne près de 70 0/0 de produit brut, et actuellement on en a extrait près de 4,000,000 de tonnes à raison de 50 francs la tonne. La question de l’origine de cette phosphorite a vivement préoccupé les savants. Est-elle d'origine animale ou pure- ment minérale, hydrothermale ? Suivant M. le professeur Daubrée, qui en a fait une étude particulière, 1l faut le plus souvent admettre la seconde explication, pour laquelle dépose d'ailleurs l'apparence même du minerai. Dans quelque cas particuliers l’origine organique 1 Revue scientifique, pag. 983. Numéro du 13 avril 1872. 104 REVUE SCIENTIFIQUE. peut cependant être admise; mais ici c’est l'exception, tandis que dans d'autres gisements, tels que ceux que cite M. le professeur Lory dans les environs de Grenoble, c'est la règle. La section d'histoire naturelle a encore reçu les communications sui- vantes de M. le professeur Leymerie président, sur les petites Pyrénées et sur les accidents géologiques de fracture qui s’y rencontrent; sur la nécessité de maintenir la distinction anciennement établie entre les Ostrea, les Gryphea, les Exogyra ; de M. Lemoine (de Reims), sur la faune du terrain tertiaire éocène et sur la position exacte que l'on doit attribuer au calcaire de Rilly ; — de M. le docteur Bouyot sur la géo- logie et la paléontologie des environs d'Alger; sur des recherches paléontologiques qui l'ont amené à découvrir des traces des âges de la pierre polie, taillée, de l'âge de bronze ; de M. Bleicher sur la décou- verte quil vient de faire aux environs de Montpellier de cet horizon infra-néocomien que les Allemands appellent le Tithonique supérieur. Les études sur l'ancienneté de l'homme n'ont pas moins progressé que la géologie. Le midi de la France surtout paraît être le champ le plus favorable à ces recherches, qui sont mises en lumière par MM. Trutat et Cartailhac (de Toulouse), dans leur excellent Journal des matériaux pour l'histoire de l'homme. Une découverte intéressante de M. le docteur Garrigou vient enfin nous prouver que les cités lacus- tres existent dans les Pyrénées avec les caractères de celles de la Suisse et de la Lombardie. D' BLEICHER. TRAVAUX ÉTRANGERS. — Botanique. Analyse du Mémoire de M. J. Sacus, Ueber den Einfluss der Lufttemperatur und des Tageslichts auf die stündlichen und täglichen Aenderungen des Längen- wachtums (Streckung) der Internodien. (De l'influence de la température de l'air et de la lumière du jour sur les variations horaires et quotidiennes de l'accrois- sement longitudinal (allongement) des entre-nœuds.) — Dans Arbeiten des bot. Institutes, in Würzburg 1872. Hept. TU; pag. 99 à 193, ? gravures sur bois et 1 planches. Christophe-Jacob Trew semble être le premier qui ait étudié l'ac- croissement au point de vue physiologique, c'est-à-dire qu'il tint compte, en même temps que de l'allongement des organes observé, des EEE rare relate naar en aim TE ile A Te ET 1 Nous donnerons à nos lecteurs l'analyse des principales publications étran- gères qui ont trait à la Botanique physiologique. Le nombre des travaux ains TRAVAUX ÉTRANGERS. — BOTANIQUE. 105 variations de température de l'air, de l'intensité de la lumière, de la hauteur du baromètre et de l'état du temps (pag. 99 et 171). Depuis cette époque, malgré un très-grand nombre de travaux dont les plus remarquables sont ceux de Warting (1842), Caspary (1856) et Rau- wenhoff (1867), jusqu à ces derniers temps, la question avait à peine progressé. C'est tout au plus si quelque concordance se faisait jour dans les résultats ; bien plus, il était impossible de tirer seulement de cette masse énorme de faits incohérents les éléments d'une méthode convenable d'observation. La raison en est (pag. 99) que les questions auxquelles on devait répondre n'avaient pas été posées avec la clarté et la précision nécessaires, et que les difficultés de l'observation, aussi bien que les causes d'erreur, avaient à peine été prises en considération. Il était donc nécessaire, avant tout, de changer de méthode ou plutôt d'en créer une. Continuer à mesurer l'accroissement d'une plante dans ses conditions normales d'existence, tout en tenant note des variations . diverses de la température, de la lumière, de l'humidité et de l’état du ciel, c'était considérer dans son ensemble un phénomène extrêmement complexe, et s'exposer à échouer denouveau dans son explication, aussi, M. Sachs s'est-il proposé d'étudier séparément les différents facteurs de l'accroissement (pag. 110), et ce sont les résultats de deux années de recherches sur l’action de la température et de la lumière qui font l'objet de ce Mémoire. Nous ne faisons que mentionner la première partie du travail. L'au- teur la consacre d'abord à l'examen des résultats généraux qui lui étaient fournis par ses devanciers et de celui des conclusions qui en découlaient relativement à de nouvelles recherches. Plus loin, il envi- sage le phénomène de l'accroissement dans toute sa complexité, et ar- rive finalement à formuler cette conclusion : « que des recherches sérieuses dans cette direction doivent avoir pour but d'étudier d'une facon suivie l’action de chaque facteur de l'accroissement en particu- lier, ce qui permet d'analyser, de combiner et de prévoir, d'une facon plus précise qu'on ne le pouvait jusqu à présent, le cours habituel et régulier des phénomènes » (pag. 110). analysés ne pourra malheureusement pas être considérable; ille sera d'autant moins que ces travaux seront plus étendus, et qu'un plus grand nombre de détails seront nécessaires à leur intelligence complète. Si nous donnons aujourd'hui à l'analyse du travail de M. Sachs une étendue si considérable, c'est non-seulement afin de présenter sous leur jour véritable les résultats dont il à enrichi la science, mais encore dans le but de donner un exemple remarquable de la méthode qui préside aux recherches de la nouvelle école physiologique allemande, 106 REVUE SCIENTIFIQUE. La deuxième partie est consacrée à la description des appareils et des procédés d'observation. L'auteur emploie, pour ses recherches, des plantes en pot, de moyenne dimension, capables d'être cultivées dans une chambre, par conséquent dans des conditions aussi invariables que possible de température, lumière et humidité. Comme ces plantes doivent, en maintes circonstances, rester un temps assez long sous l'in- fluence de l'obscurité, il a recours de préférence à des espèces bul- beuses ou tuberculeuses, de facon que les matériaux de nutrition ne puissent faire défaut à l'accroissement. Avec des plantes d'aussi faibles dimensions et d'accroissement aussi limité que le Dahlia, le Fritil- laria, etc., il n'était plus guère possible d'opérer les mesures directe- ment par l'application d'une règle divisée à la plante elle-même; il a donc fallu avoir recours à des moyens de mensuration plus exacte, et même, la plupart du temps, à des instruments amplificateurs. Les appareils de mensuration mis en usage par l'auteur sont au nombre de trois. Le plus simple consiste dans un fil de soie passé sur une poulie dont l'axe est fixé horizontalement ; l'une des extrémités du fil est fixée à la plante mise en observation, tandis que l'autre supporte un poids de 10 à 15 grammes, en même temps qu'un index qui se meut le long d'une règle divisée. Avec de l'habitude on peut arriver à apprécier ainsi les dixièmes de millimètre. Le second appareil présente les mêmes parties essentielles, seule- ment l'index est fixé à la poulie, dans la direction de son rayon. On lui donne une longueur telle, que les mouvements de son extrémité libre fassent ressortir l'accroissement d'une façon convenable. Le chaume qui supporte l'inflorescence du Molinia cærulea remplit parfai- tement ce but. L’extrémité libre de l'index se meut le long d'un cercle divisé, placé dans un plan vertical perpendiculaire à l'axe de la pou- lie ; lamplification de l'allongement de la tige est dans le rapport de la longueur de l'index au demi-diamètre de la poulie jusqu'au fond de la gorge, augmenté de la moitié de l'épaisseur du fil, s'il est né- cessaire. Le troisième appareil se compose de celui que nous venons de dé- crire, auquel est ajouté un appareil enregistreur. Ce dernier est con- stitué par un cylindre de fer-blanc dont l'axe est vertical, et par un mouvement d'horlogerie qui fait exécuter au cylindre une révolution complète dans l'intervalle d'une heure. Le cylindre est disposé de manière que son axe de rotation soit un peu excentrique ; de cette fa- con, l'extrémité de l'index ne frotte pas continuellement contre la sur- face du cylindre, et son application à ce dernier ne peut avoir aucune TRAVAUX ÉTRANGERS. — BOTANIQUE. 107 influence sur ses mouvements d'élévation et d'abaissement. Une feuille de papier noircie à la fumée de térébenthine est appliquée au cylindre du côté le plus saillant, relativement à l'axe de rotation ; c'est sur cette feuille que vient appuyer l'extrémité de l'index consti- tuée par une aiguille fine d'acier fixée à l'extrémité de la tige de Mo- lina. L'auteur désigne cet appareil sous le nom d'Auxanomètre en- registreur ; pour une intelligence plus complète des détails, nous renvoyons à la description et à la figure qu'il en donne, pag. 113. La manière dont ces divers appareils fonctionnent ressort de leur composition. Ajoutons que la hauteur du cylindre est suffisante pour que la même feuilie de papier noirci puisse servir pendant vingt-quatre à quaranfe-huit heures. L'index se meut en sens inverse de l'accrois- sement, c'est-à-dire de haut en bas. Est-il arrivé au bord inférieur de la feuille de papier noirci, on arrête l'appareil, la feuille noircie est remplacée, et l'extrémité de l'index ramenée au bord supérieur de la nouvelle feuille par un léger mouvement d'élévation du pied qui sup- porte la poulie; cela fait, l'appareil est remis en mouvement, et l’obser- vation continue. L'accroissement se mesure d'après l’écartement des lignes tracées sur le papier noirci. Pour cela faire, avant d'enlever la feuille de papier du cylindre, on élève l'index de bas en haut, avec le doigt, de facon à ce que son extrémité trace sur la feuille noircie une ligne qui représente exactement le chemin qu'elle a parcouru. Gette ligne coupe presque à angle droit les lignes horizontales dessinées par le passage à chaque heure du papier noirci devant l'extrémité de l'aiguille ; elle est courbe, puisqu'elle est décrite avec la longueur de l'index comme rayon. La longueur de l'accroissement s'obtient direc- tement en mesurant la distance qui sépare en ligne droite les points où la ligne dont je viens de parler coupe les lignes horizontales. Il y a une erreur provenant de ce que la courbure de cette ligne est négli- gée, mais, vu la grandeur du rayon de cette courbure ( 60 centim. — longueur de l'index) et la faible longueur des arcs auxquels on a affaire (1/2 à 2 centim.), cette erreur devient insignifiante { Voyez DEN MARQUE L'auteur entre dans de minutieux détails relativement aux précau- tions à prendre et aux causes d'erreur. Nous ne mentionnerons que les principales de ses considérations. Faisons remarquer d'abord, d'une manière générale, que chacune des parties constituantes de l'appareil, avant d'être apphquée à l'ob- servation, a été essayée à vide. Par exemple, afin de se rendre compte de l'influence et de la grandeur des variations hygroscopiques de longueur du fil, l’auteur s’est assuré, en fixant l’une des extrémités du 108 REVUE SCIENTIFIQUE. fil à un corps immobile, que ces variations n'amènent qu un déplace- ment d'un millimètre dans l'extrémité de l'index, pour une période de vingt-quatre heures, et des variations d'humidité analogues à celles qui se sont produites au cours de ses expériences. Ce faible déplacement, réparti sur vingt-quatre mesures différentes, lui a paru insignifiant { pag. 119 ). L'auteur a fait usage d'un fil de soie mince, lissé avec de la cire pour le rendre plus égal, et soumis pendant quelque temps à l'action d'un poids égal à celui qui servait à en opérer la tension dans l'ap- pareil, afin d'en régler l'élasticité. La longueur du fil a été diminuée autant que possible par l'interposition d'un morceau de fil de métal entre la poulie et le nœud qui sert à attacher le fil à la plante. La poulie, soigneusement tournée et centrée, roulait facilement sur des pointes d'acier. Son diamètre était de 10 centimètres, de manière à annuler les irrégularités produites par les inégalités du fil. Les pots qui contenaient les plantes soumises à l'observation étaient placés, selon la verticale, sur une plaque de verre dépoli, de manière à être complètement immobiles. Dans différentes circonstances, les plantes furent enfermées dans des boîtes allongées en verre ou en zinc, fermant à charnière, et posées sur la terre du pot. Une ouverture étroite à leur partie supérieure donnait passage au fil. Ces boîtes servaient à entretenir autour de la plante une humidité constante et, lorsqu'elles étaient opaques, à produire l'obscurité. Un thermomètre plongeait jusqu'au milieu des racines. Si la plante était à l'air libre {dans la chambre), un thermomètre était placé à 20 ou 30 centi- mètres dans les mêmes conditions. Était-elle enfermée dans une boîte de zinc ou de verre, le thermomètre était établi dans une boîte sem- blable, sur un pot à fleur, à une faible distance. En outre, deux autres thermomètres, placés ensemble d'une facon analogue, servaient à indi- quer la différence psychrométrique de l'air; la boule de l'un était nue, et celle de l’autre couverte de mousseline imbibée d'eau. La tempéra- ture était relevée routes les heures, à partir de sept heures du matin jusqu à six ou huit heures du soir ; celle des différentes heures de la nuit a été déduite par des moyennes du refroidissement nocturne total, depuis la dernière observation du soir jusqu à la première du matin suivant (pag. 124 ). ; Une cause d'erreur importante consiste dans les déplacements que font éprouver à la plante les mouvements de gonflement et de contrac- tion de la terre du pot, suivant ses variations d'humidité et de séche- resse ; M. Sachs est arrivé à l'annuler en n'expérimentant qu'avec des pots saturés d'eau plusieurs jours à l'avance { pag. 120 ). = TRAVAUX ÉTRANGERS. — BOTANIQUE. 109 Afin de parer aux courbures héliotropiques, l'auteur s'est servi de miroirs placés du côté opposé à la fenêtre par où pénétrait la lumière, de facon à renvoyer cette lumière sur le côté de la plante le moins éclairé. Lorsque la lumière revenait de plusieurs fenêtres à la fois, il était nécessaire d'employer un nombre correspondant de miroirs. Moyennant cette ingénieuse précaution,l'héliotropisme a été complète- ment annulé { pag. 122 ). Quant à la nutation, d'après M. Sachs, il est impossible de sen rendre maître, et le mieux est de laisser de côté les plantes qui y sont sujettes ( pag. 122 ). Si le poids de 10 ou 15 grammes qui sert à tendre le fil était capable de modifier l'accroissement d'une manière sensible, les résultats fournis parles premières heures de l'expérience présenteraient quelque irrégulari té,et il suffirait, pour se mettre à l'abri de cette cause d'erreur, de les laisser complètement de côté. L'inspection des tables montre que cette supposition nest pas fondée. Disons enfin, avant d'aller plus loin, que les plantes soumises à l'observation étaient dans les pots depuis plusieurs semaines au moins (pag. 120 }), de facon que la terre en avait eu le temps de se tasser. Les tiges étaient choisies à l'origine de leur développement, et les feuilles coupées avec soin. Un fil d'argent courbé en S allongée servait à attacher le fil à la partie supérieure de l'entre-nœud dont il s'agissait d observer l'accroissement. Dans d'autres cas, cette S était passée dans une boucle qui terminait un nœud coulant fixé à la plante. La troisième et la quatrième partie du travail de M. Sachs sont consacrées au détail des expériences et à l'exposition des résultats qui en découlent. Il nous est impossible de donner à nos lecteurs l’ana- lyse de toutes les observations ; nous nous bornerons à en choisir quelques-unes comme types et aussi comme preuves des conclusions que l'auteur a formulées. I. «Grande période d'uccroissement. — L'accroissement d'un organe débute par de faibles augmentations ; peu à peu celles-ci deviennent plus considérables et l'accroissement atteint son maximun de rapi- dité ; à partir de ce moment, il diminue insensiblement et finit par s'arrêter complètement. Ce fait constitue ce que l’on désigne sous le nom de grande période d'accroissement » (pag. 162). « L'expérience 1 montre que dans un entre-nœud en voie d'accroissement chaque segment horizontal présente une grande période, et que la grande période d’accroissement de l'entre-nœud tout entier est formée par l'ensemble de ces périodes spéciales. Elle fait encore voir que l’accrois- sement marche de bas en haut et que les:segments plus anciens ont 110 REVUE SCIENTIFIQUE. déjà fini de croître ou se trouvent dans les dernières phases de leur grande période, alors que les plus jeunes sont au début de leur accrois- sement» (p. 262). « L'expérience 11 et la fig. 1, qui en est la traduction graphique, permettent de reconnaître également la grande période; en même temps les inégalités de la courbe d'acroissement indiquent l'influence des variations quotidiennes de température sur la marche du phéno- mène. On voit en outre, par la plante n° 1, que l'accroissement collectif et simultané de trois entre-nœuds est représenté par une grande courbe très-régulière, laquelle se distingue à peine, par sa forme, de celle d'un entre-nœud isolé (plante n° 2) » (pag. 163). Ajoutons que si les changements de température déterminent des variations momentanées dans l'accroissement, ils sont sans influence sur la marche générale de la grande période. Dans les plantes étiolées, d'après d'autres expériences dont nous ne donnons pas le détail, l'accroissement est beaucoup plus considérable que dans les plantes vertes; Son maximum arrive plus tard que chez ces dernières plantes ; il en est de même pour sa terminaison (pag. 163). EXPÉRIENCE 1 (pag. 127). Phaseolus multiflorus. Ste) cel et ml ele) Cle Désign. des entre-nœuds 22 #< 8 & Ê Ê£ 8e Ê=E 22 82 - FCI EE ER PRIE EE e open re oc a EE EE À a TA re Te Er er ET Te ET ET Haute nr IREM RS 5,5 127,009 0112, 01 10/01 MP ONE ( 1,52 12170106 016020) M9PS NOR RS" 0) MAO k 2100) M6 GED: 220 1 See 2 Sr ED 110 h 3,310 005 q 1,8 | 0,5 f An 02 € 0,6 | 0,3 d 0,6 0,3 b 0,3 BAS ECC 0,3 Total des acerts paris ee TAG AO TS SNS SAS ESA ONINTA CMP TRAVAUX ÉTRANGERS. — BOTANIQUE. 111 « Observation sur une plante étiolée placée dans une pièce obscure. Accrois- sement (grande période) des différents segments de l’entre-nœud épicotylédonaire. — Le 19 avril à 4 heures du soir, l'entre-nœud fut divisé en 12 parties de 3,5 mill. chacune de hauteur. — Ces segments sont indiqués de bas en haut par les lettres DD CNE jusqu'à m. — Les premières mesures ont été exécutées le 21 avril à 8 heures du matin, elles ont servi à calculer l'accroissement des douze segments pour un intervalle de 24 heures (1re colonne). Les mesures suivantes ont eu lieu chaque matin à 8 heures. — Température variant entre 10,2 et 11, 0° R. — Mesures faites à l'aide d'une règle divisée» (pag. 127). EXPÉRIENCE 11. ( Voy. fig. 1.) Houblon. « Plante verte dans l'obscurité. Grande période et influence de la température.» «Les plantes soumises aux deux séries suivantes d'observations étaient depuis deux années dans des grands pots. On ne laissa sur chaque exemplaire qu'une tige plus particulièrement favorable à l'observation, les autres furent coupées à ras de terre. — Pendant le cours des observations les tiges furent couxertes de cloches tubulées en verre, tapissées à l’intérieur de feuilles de plomb, de manière à être plongées dans l'obscurité. Tout à côté, deux thermomètres C.étaient disposés dans deux cloches semblables également placées sur de la terre humide, dans l'une le thermomètre sec, dans l’autre le thermomètre humide. Ce dernier marquait pendant la nuit 0,25 à 0,30 de moins que l’autre, et pendant le jour de 0,30 à 0,40. — Mesure de l'accroissement au moyen du premier appareil que nous avons décrit» (pag. 130). PLANCHE N9 | (pag. 130). « Les quatre entre-nœuds placés au-dessous du bourgeon terminal (à partir du niveau du sol) présentent au commencement de l'expérience les longueurs suivantes de bas :en haut: 90, — 31, — 28, — 17 mill. L'accroissement a eu lieu aux trois entre-nœuds supérieurs, principalement au plus jeune.» Accroissement | Actroissement |Température C. HEURE Température C. nl en millim. JOUR. Moyenne pour 24 heures, Moyenne DU JOUR. Moyenne. de 6h. du soir par heure. | 56h qusoir. [Pour 24 heures. 6 soir. — 8 mat. 140,6 0,18 mill. 18 avril. | 8 m. — Midi. 150,0 0,40 » 8,5 mill Midi. — 6 h.s. 150,3 0,73 » 19 avril. [8 h. m. — Midi. 140,7 1e) 6h.s.—8h. m. 140,7 0,90 » | Midi. — 6 h.s. 160,1 1,58 » 6h.s.— 8 h. m. 150,4 IS) | 20 avril. [8 h. m.— Midi. 150,2 1,651) Midi. — 6 h.s. 150,7 TR ANS) 6h.s—8h. m. 140,8 1,03 | 91 avril. |8 h. m. — Midi. 140,8 11200) DE D Midi. — 6 h.s. 150,4 1,00 | 6h.s.—8 h. m. 140,1 (PS0) 22 avril. |8 h. m.— Midi. 1 40,3 O2 Midi. — 6 h.s. 150,6 0,07 » À continuer. MILLARDET, BIBLIOGRAPHIE. Principales publications Botaniques de l’Étranger pour l’année 1872. Arbeiten des botanischen [nstitutes in Würzburg, herausg. von Prof. D' Juzrus Sacus : Hept. Il. Leipzig, 1872, in 8°. Contient: J. Sacas. — Ueber den Einfluss der Luft-temperatur und des Tages- lichtes auf die stündlichen und täglichen Aenderungen des Längen- wachsthums (Streckung) der nternodien. (Del'influence de la tempé- rature de l'air et de la lumière du jour sur les variations horaires et quotidiennes de l'accroissement longitudinal (allongement) des entre- nœuds). Längenwachsthum der Ober-und-Unterseite horizontal geleg- ter sich aufwärts Krümmender Sprosse. (Accroissement longitudinal de la face supérieure et inférieure des tiges placées horizontalement et qui se courbent en haut). — Ablenkung der Wurzeln von ihrer nor- malen Wachsthumsrichtung durch feuchte Kôrper. ( Déviation des racines de leur direction normale d'accroissement par les corps hu- mides.) H. ne VRries. —Ueber einige Ursachen der Richtung bilateral symmetrischer Planzentheiïle. {Sur quelques causes de la direction des parties symétriques et bilatérales des plantes.) J. Sacxs. — Die Pflanze und das Auge als verschiedene Reagentien für das Licht. (La plante et l'œil comme deux moyens différents d'analyse pour la lumière.) ASskENASY, E. — Beitrage zur Kritik der Darwinschen Lehre. (Con- tribution à la critique de la théorie de Darwin, 113 pag. Leipzig, in-80. FLora n°5. J. MüLLer. — Bestätigung der R. Brownischen Ansicht über das Cyathium der Euphorbien. { Confirmation de l'opinion de R. Browx sur le Cyathium des Euphorbes.) — E. Prrrzer. Ueber die Einlagerung von Kalkoxalat-Krystallen in die pflanzliche Zellhaut. (Sur l'incorporation de cristaux d'oxalate de chaux à la membrane cellulaire végétale.) Mars 1872. D' N.J. GC. Müczer. Botanische Untersuchungen. —I. Untersuch. üb. die Sauerstoffausscheidung der grünen Pflauzen im Sonnenlichte (Recherches botaniques. — I. Recherches sur l'exhalation d'oxygène dans les plantes vertes, à la lumière solaire.) Heidelberg, Winter 1872. 20 pages et { planche in-8e, BIBLIOGRAPHIE. 113 SacssE, R. — Ueber einige chemische Vorgänge bei der Keimung von Pisum sativum. (Sur quelques phénomènes chimiques de la germi- nation du Pisum sativum.) Leipzig, in-8, 55 pages. Cissiezski, Th.— Untersuchungen üb. die abwärts Krümmung der Wurzel. (Recherches sur la courbure des racines.) Breslau, in-8e. GrisEBACH, A.— Die Vegetation der Erde nach ihrer Klimat-Anord- nung. (La végétation de la terre d’après sa disposition relativement aux climats). BoTANISCHE ZEITUNG. (1e' avril) : — HiLDEBRAND, F.— Ueber Verbrei- tungsmittel der compositen Früchte. (Moyens de dissémination des fruits composés.) — HAnsTEIN, J. Bewegungserscheinungen des Zell- kerns. (Phénomènes de mouvement du nucleus.) — Lerrees, H. Ueb. endogene Sprosshildung bei Lebermosen. ( Bourgeonnement endogène dans les Hépatiques.) — Barancrzky, J. Ueb. den Einfluss einiger Bedingungen auf die Transpiration der Pflanzen. (Influence qu'exercent certaines conditions sur la transpiration des plantes); Ueber die Entwickelungsgeschichte des Gymnoascus Reessii. (Dévelop- pement du Gymnoascus Reessii.) JANEZEWSK1, Parasitische Lebensweis des Nostoc lichenoïdes. (Mode de végétation parasite du N. lichenoïdes.) — Krauss, G. Ueb. den Chlorophyllfarbstoff. Ueb. die winterliche Färbung immergrüner Gewächse. (Sur la chlorophylle. Sur la colo- ration hivernale des plantes toujours vertes.) PRiTzez G.-A.—Thesaurus litteraturæ botanicæ omnium gentium inde a rerum botanicarum initiis ad nostra usque tempora, quindecim millia operum recensens. Editi0 nova reformata, Fasciculus I. Leip- zig, Brockhaus 1872. NÉCROLOGIE. M. A. DE BRÉBISSON. La Revue des sciences naturelles a déjà le triste devoir d'enregistrer la mort d'un de ses plus distingués collaborateurs. M. Alphonse de Brébisson vient d'être enlevé à la science qui avait été de sa part l'objet d'un culte constant. — En consignant ici l'expression des re- grets que nous éprouvons, nous ne saurions ruieux faire, pour rendre hommage à la mémoire de ce »aturaliste éminent, que de reproduire 114 NÉCROLOGIE. l’éloquent discours dans lequel M. Morière, professeur à la Faculté des sciences de Caen, a retracé les principaux traits de cette utile et labo- rieuse existence. Messieurs, À peine la terre s'est-elle refermée sur l'un des membres les plus dignes et les plus vénérés de la Société Linnéenne de Normandie, qu'elle s'ouvre de nouveau pour recevoir la dépouille mortelle du savant aimable qui formait avec René Lenormand la plus illustre représen- tation de la botanique de notre pays. Vous me permettrez de rendre un dernier hommage au collègue et à l'ami. Alphonse de Brébisson, qui vient d'être si subitement enlevé à des enfants qu'il chérissait, et qui avaient pour lui la plus tendre affection, à un fils dont la vie s'était en quelque sorte assimilée à la sienne et qui, jusqu'au dernier moment, l'a entouré des soins les plus tou- chants, naquit à Falaise, en 1798. Son père lui inculqua de bonne heure le goût des sciences naturelles, qu'il cultivait lui-même avec le plus grand succès. Déjà, en 1825, peu d'années après la fondation de la Société Linnéenne, il faisait connaître les Orchidées, qui croissent na- turellement aux environs de Falaise. Ses relations fréquentes avec M. de Caumont le conduisirent bientôt à s'occuper de géologie et à considérer la Végétation de la Normandie dans son rapport avec le sol et les terrains. Des aperçus ingénieux et nouveaux firent remarquer ce travail du jeune naturaliste. De fréquentes herborisations sur diVers points de notre province, un remarquable talent d'observation, des relations avec toutes les personnes qui s occupaient de botanique, l'avaient sérieusement pré- paré à la rédaction de la Flore de la Normandie, ouvrage classique des mieux entendus et des plus appréciés, et qui rend chaque jour les plus grands services. Précédemment, par la publication des Mousses de la Normandie, M. de Brébisson avait singulièrement facilité l'étude de ces charmants végétaux. Laborieux comme un bénédictin, notre ami ne se reposait qu'en changeant de genre de travail, et l'aurore le trouvait toujours à son cabinet d’études. Le soir, il recevait Souvent quelques amis, et alors, dans des causeries toujours pleines de charmes, on pouvait apprécier tout ce qu'il y avait de ressources dans cet esprit si fin et si dis- tingué. Avec la photographie, science toute Inoderne qui lui doit plusieurs NÉCROLOGIE. 145 perfectionnements importants consignés dans divers ouvrages, les Diatomacées formaient ses études favorites. Aussi, quels progrès n'a-t-il pas fait faire à cette famille d'Algues microscopiques, à ces infiniment petits du règne végétal, qu'il affectionnait singulièrement et desquels il a pu dire avec Linné : « Natura maxime miranda in minimis». Combien n'a-t-il pas favorisé les études auxquelles il avait con- sacré toute sa vie ? Combien de jeunes botanistes dont il a guidé les premiers pas et auxquels il se plaisait à faire de généreuses donations qui devenaient pour eux un fonds précieux d'herbier ? Que de parties encore obscures de la science n'a-t-il pas élucidées ? Quelle précieuse collaboration n'a-t-il pas apportée à des publications qui se ratta- chaient à diverses branches de la botanique ? M. de Brébisson a été un des Membres de la Société Linnéenne les plus assidus à ces excursions annuelles destinées à la fois à faire mieux connaître les productions naturelles de la Normandie et à res- serrer plus étroitement les liens qui unissent les membres de notre Compagnie. Les lectures qu'il faisait dans les séances publiques tenues après chaque excursion étaient toujours écoutées avec avidité et vive- ment applaudies, tant elles étaient instructives et attrayantes. Ce n'est pas ici le lieu, et d'ailleurs je n'en aurais pas la force, de retracer complètement la vie studieuse, je dirai plus, la carrière glo- rieuse qu'a parcourue le savant dont je m'honorai toujours d'avoir été l'ami. Plus tard, dans la solitude et le silence, qui conviennent à la douleur, je me ferai un devoir de rassembler les divers titres qu'il avait à la célébrité. Contentons-nous de dire aujourd'hui que M. de Brébisson a été un des savants dont la Normandie doit être la plus fière, et qu'il est vive- ment à regretter, dans un intérêt de justice et de moralité publique, que les gouvernements qui se sont succédé en France aient oublié d'attacher sur sa poitrine une distinction qui lui était si légitimement due. Il est vrai que notre ami ne songeait pas lui-même aux hou- neurs : il pratiquait, dans toute sa pureté, le culte désintéressé de la science. Chose bien rare aujourd'hui, à un profond savoir il réu- nissait la plus grande modestie, la plus complète abnégation. Une voix plus autorisée que la mienne vient de rendre hommage à l'homme public, appelé par les suffrages de ses concitoyens à siéger dans les Conseils de la cité et du département, de vous rappeler quels services il a rendus dans des fonctions qu'il n avait acceptées que par pur dévouement. Vous parlerai-je de l'homme privé? Vous rappellerai-Je combien les personnes qui avaient l'he*="«ur d'être recues chez M. de Brébis- 116 NÉCROLOGIE. son étaient frappées de cette affabilité, de cette bienveillance, de cette exquise courtoisie avec lesquelles elles étaient toujours accueillies ? Combien de botanistes ont été heureux de connaître l'homme après avoir apprécié le savant! Mais à quoi bon vous raconter les vertus de l'homme public et de l'homme privé? Mes paroles en diraient-elles autant que ce concours de citoyens de tout âge, de toute condition, d'opinions diverses, qui se pressent autour du cercueil de l'homme de bien pour lui dire le su- prême adieu? Tout le monde ici sent profondément l'étendue de la perte que la Normandie et surtout la ville de Falaise viennent de faire. Adieu, cher et excellent ami! Cette terre vous sera légère, car vous avez glorifié le Seigneur en décrivant et en faisant admirer ses œuvres, et déjà il vous a décerné la récompense qu il promet à ses élus! L'un des Directeurs, E. DUBREUIL. om MONTPELLIER. — TYPOGRA% © DE BOEHM ET FILS. SJ MÉMOIRES ORIGINAUX. De quelques JUNCUS à feuilles cloisonnées ET EN PARTICULIER Des J. lagenarius et Fontanesii Gay et du J. striatus Schsb. Par M. J. DUVAL-JOUVE, Inspecteur d'Académie. @ 1. ÉTAT DE LA QUESTION. « Juncus. Du latin jungo, je joins, j'unis » (Théis, Gloss. bot., p. 249). Un esprit chagrin pourrait croire, au contraire, que ce nom est tout récent, et quil a été, par ironie et antiphrase, choisi pour exprimer la division; car, parmi les genres de notre flore, il semble spécialement destiné à diviser les botanistes. Établi d’abord par Linné, avec la confusion peu excusable de deux genres que déjà avant lui Scheuchzer avait indiqués en leurs caractères essentiels, que Micheli avait reconnus, nommés et figurés ‘, le genre Juncus fut définitivement, en 1805, divisé par De Candolle en deux genres évidemment distincts, Juncus et Luzula (F1. fr., HI, p. 162). Or, quoique dès 1809 Willdenow eût adopté ce dernier genre (Enum. pl. hort. berol., p. 393), quoique E. Meyer eût publié, en 1822, son Synopsis Juncorum et, en 1823, son Synopsis Luzularum; quoique Laharpe eût dans sa Monographie, en 1825, discuté et adopté la division de De Candolle, Host, plutôt que d'emprunter un genre à un auteur français, maintenait, en 1827, dans son Flora austriaca, I, p. 1 Scheuchzer dit de la capsule : «In tria loculamenta divisum in quorum singulo vel semen unicum oblongum, vel semina plura minuta » (Agr., p. 310). Cette distinction fut très-bien exprimée par Micheli pour l'établissement de ses genres Juncus et Juncoïdes (Nov. gen., p. 37, tab. 31); et c'est sur le premier de ces deux caractères que De Candolle à établi son genre Luzula, répondant aux Juncoïdes de Micheli. Te 8 118 MÉMOIRES ORIGINAUX. 445-454, le vieux genre linnéen Juncus, sans même indiquer aucune division ni aucune synonymie; et, ce qui est plus fort, la même année, Roth, dans son Enum. pl. Germ., I, p. 97-106, adoptant le genre Luzula, en attribuait la distinction à Willde- now et celle des espèces à E. Meyer, bien que Laharpe, Meyer et Willdenow eussent très-fidélement indiqué l’auteur du genre. I est difficile de pousser plus loin la jalousie ou la haine in- ternationale. Si le genre linnéen avait d’abord trop réuni, il fut plus tard trop divisé; à ses dépens on créa les genres Prionium E. Mey., Cephaloxis Desv., Marsippospermum Desv., Rostkovia Desv., Prionoschænus Rchb., etc.; je passe le reste, pour arriver plus vite aux espèces de notre flore. Je les prendrai dans l’ordre suivi par M. Grenier, et, laissant de côté la synonymie qu’on peut lire sans certitude el sans pro- fit dans le Nomenclator, de Steudel, je me bornerai à mention- ner les questions encore pendantes : 1° Les J. conglomeratus L. et effusus L. sont-ils deux espèces valables, ayant chacune des formes à panicule ramassée ou éta- lée, ou bien ne sont-ils que deux formes d’une même plante, le J. communis E. Mey., Junc., pag. 12? 20 Le J. diffusus Hoppe produit-il des graines normales ? Est-il une espèce ou un hybride? : 3° Les J. inflewus L. et paniculatus Hoppe sont-ils espèces distinctes ou simplement variations parallèles à celles qui se montrent sur chacun des J. conglomeratus, effusus et autres ? 4° Pour séparer du J. trifidus L. les J. Hostii Tausch et mo- nanthos Jacq., y a-t-il d’autres caractères que le petit nombre des fleurs et l’élongation de la feuille caulinaire ? 5° Le J. bicephalus Viv. est-il à séparer du J. pygmæus Thuill., comme le dit M. Grenier (F1. fr., III, pag. 351), ou n’en est-il qu'une forme, comme l’a soupçonné Laharpe (Mon. Jonc., p. 10), et, comme l’affirment M. Cosson (F1: Alg:, L p-r210)Pet M. Buchenau (Bot. Zeit., 1867, n° 26, p. 205 et suiy.? Ou bien ce J. bicephalus Viv. est-il identique au J. fasciculatus JUNCUS A FEUILLES CLOISONNÉES 119 Schousb., identique lui-même au J. bufonius, d’après M. Bubani (Dodec., p. 22, 23)? Tandis que d’après Kunth le J. fascicu- latus Schousb. serait « J. Fontanesii et J. pygmaæo prorimus » (En. pl. I, pag. 330) ?? 6° Le J. capitatus Weïigel comprend-il le J. ériandrus Gouan, selon M. Grenier, ou en est-il distinct « et primo aspectu dignos- cendus », comme le dit Koch, Syn. ed° 3°, p. 633? 7° Le J. nigritellus Don se rapporte-t-il au J. lampocarpos Ehrh., comme le veulent Hooker Brit. bot., pag. 162, et M. F. Schultz in Pollichia, 1863, p. 249, ou au J. supinus Moench, comme le dit M. Godron, F/. Lorr., 2° édit, IL p. 273? 8° Le J. nigritellus Don est-il distinct du J. nigritellus Koch, comme le veulent Koch Syn. ed° 3*, p. 364, et F. Schultz Pol- hichia, "1855, p. 32 et 1863 p. 250, ou identique à cette plante, comme le disent Sturm Deutschl. F1. T8, 2, Kirschleger HAS ealEp 201#etc? 9o Et ce mème J. nigrüellus Koch est-il une espèce propre, comme le prétend M. F. Schultz, qui en fait son J. Kochü (o. et 1. c.), ou n'est-il qu'une simple forme du J. supinus Moench, comme le soutiennent Koch lui-même (Syn. ed° 3*, p. 634, . Kirschleger (1. c.) et Doell (F1. Bad., 1, p. 331) ? 10° Le J. heterophyllus Duï. est qualifié par Kunth : J. uli- ginosi v® vivipara, « nullo modo distinguendus » (Enum. pl. IE, p. 334), et M. Duby en fait une variété du J. lampocarpos. 11° Les J. sphærocephalus Salzm., macrocephalus Viv., tri- chocephalos Lah., tricephalos Gay, ne sont-ils qu'une seule et même plante, et cette plante n'est-elle qu'une forme à gros ca- pitules du J. lampocarpos Ehrh., ou une espèce bien caracté- risée, comme le prétend M. Boreau (P{. Cors., I, p. 9)? 12° Sous les J. repens Req., lagenarius Gay, Fontanesii Gay et striatus Schsb., y a-t-il une seule plante ou plusieurs ? 13° Le J. anceps Lah. est séparé du J. acutiflorus Ehrh. par plusieurs auteurs; faut-il, avec M. Cosson, les réunir comme simples formes d’une même espèce? Le J. brevirostris Nees est-il distinct du J. acutiflorus ? 120 ._ MÉMOIRES ORIGINAUX. 14° Le J. asper Sauzé se ramène-t-il au J. acutiflorus ou à un autre ? Ou bien serait-ce une espèce nouvelle et irréductible ? 15° Les J. compressus Jacq. et Gerardi Lois. ont-ils à être sé- parés où réunis ? 16° Le J. sphærocarpus Nees est réduit par Kunth, Kochet M. Grenier au J. Tenageia Ehrh ; mais Steudel dit : « J. sphæ- rocarpus Nees est varietas laxior et minor J. bufonii » (Glum, IF, p. 307, n° 163). Qui croire ‘? 17° Le J. foliosus Desf. est-il à admettre comme espèce, avec M. Cosson (F1. Alg. I, p. 275), ou à ramener en variété au J. bufonius, avec Laharpe, Steudel et M. Boissier ? 18° Et J. ranarius Songeon, etc. ? Ainsi, au sujet de 31 espèces, voilà plus de vingt questions sur chacune desquelles certains botanistes des plus sérieux et des plus compétents disent oui, tandis que d’autres des plus com- n pétents et des plus sérieux disent non. Mais au premier rang des espèces qui ont le plus fourni ma- tière à division et discussion, se placent celles du deuxième groupe de la section IV de M. Grenier : les Juncus vivaces à feuilles cloisonnées. C'est aussi le seul dont je m'occuperai dans ce qui va suivre. En 1813, Requien recueillait « dans les lieux humides, au bord de la Durance, » un Juncus nouveau, et lui imposait le nom et la diagnose qui suivent : «J. repens. Culmo repente ramosis- »simo. Foliis nodoso-articulatis teretiusculis, panicula decempo- »sita pauciflora, floribus fasciculatis, perigonii laciniis acutis » (in Guérin, Desc. de la Font. de Vaucluse, ?° édit., p. 253). D'autre part, en 1822, un Juncus de l’herbier d’Agardh, en- voyé de Tanger par Schousboe sous le nom de J, siriatus, élait décrit par E. Meyer dans les termes suivants : « J sériatus »Schousb., Foliis caulinis approtimatis nodulosis, vaginis stria- »tis, anthela floribus capitatis composita, perianthii laciniis æqua- { Un élément pour la solution de cette question se trouve dans le Bulletin de la Soc. bot. de France, tom. XVII, p. 235, note. JUNCUS À FEUILLES CLOISONNÉES 121 plibus lanceolato-acuminatis capsulam triquetram acuminatam » superantibus » (Syn. Junc., p. 27). Cette description, très- fidèle sans doute, offrait l'inconvénient de toute description faite sur un échantillon unique, celui d'attribuer à des particulariés individuelles une valeur spécifique; j'ai souligné les deux ter- mes qui me paraissent dans ce cas. Or, en 1825, dans la Monographie des Joncées de T. de Laharpe, J. Gay décrivit un Juncus de l’herbier de Desfontaines, le nomma J. Fontanesii, en citant avec doute le J. striatus Schsb. romme synonyme. En même temps et à la même page 42 du même ou- vrage, J. Gay décrivait comme espèce nouvelle une plante de Toulon et de Montpellier qu’il nommait J. lagenarius, et à la- quelle il attribuait «€ capsula furbinata, basi subsphærica ros- ptrata ». Ces caractères qu'ils ne retrouvaient point, pour cause que l’on verra plus loin, empêchèrent MM. Duby et Loiseleur- Deslongchamps d'admettre l'espèce de Gay dans le Botanicon gallicum et le Flora gallica, qui parurent tous deux en 1828; mais ces auteurs mentionnaient le J. repens Req., que De Can- dolle avait introduit, en 1815, dans son Supplément, pag. 308. Malheureusement, ce dernier auteur avait indiqué comme « ca- »ractère absolument propre à cette plante, des rameaux ne par- »tant point de l’aisselle des feuilles, mais naissant à la base des »feuilles, lesquelles étaient ainsi à l’aisselle des rameaux ». Ce prétendu caractère, cité plus tard par plusieurs autres auteurs, est le résultat d’une erreur d'observation que j'ai signalée en 1857 (in Billot, Annot., pag. 114), et, comme il est commun aux Juncus de cette section, il jeta du doute sur la plante de Requien, de façon que M. Duby tend à la ramener au J. aculti- florus (Bot. gall., I, pag. 477), que Meyer en fait une variété du J. supinus (Syn. Junc., pag. 30), que Laharpe rapporte le J. repens DC. au J. lampocarpos (o. c., p. 37), et celui de Re- quien au J. acutiflorus (v*® B, o. c., pag. 40), et que Kunthen fait une variété du J. lampocarpus (Enum. pl., HI, pag. 325 et 326). Enfin, Mutel, qui fait aussi du J. repens Req. une forme du J. lampocarpos, fut le premier floriste français à mentionner 122 MÉMOIRES ORIGINAUX. le J. lagenarius Gay, en se bornant à traduire la diagnose de Gay, et, remarquons-le, en ne citant que l’herbier de Gay (F1. fr., IT, pag. 332). Et pourtant le Juncus de Requien était bien le même que le J. lagenarius Gay; mais ce ne fut qu'en 1855 que M. Grenier signala cette identité (#7. Fr., ILE, pag. 346), et en même temps cet auteur indiquait en France, à Narbonne, le J. striatus Schsb., le disant à tort identique au J. Fontanesii Gay, mais en tout cas bien distinct du J. lagenarius, et ayant le port du J. sylvaticus Reichd. Or, dans sa Flore d'Algérie, I, pag. 268, M. Cosson réunit les J. striatus et lagenarius sous le premier de ces deux noms ef les identifie si absolument, qu'il n'indique pas même la plus légère différence de forme comme avant justifié ces dénominations différentes ; et, remarquons-le encore, M. Cosson cite comme autorité l'herbier de J. Gay, qu'il a consulté à loisir. De plus, M. Grenier, comme Schousboe, attribue à son J. sériatus des feuilles et des tiges distinctement striées, parsemées d’aspé- rités et de petits poils courts, ce dont M. Cosson ne dit rien. Eh bien ! M. Grenier a eu raison d'admettre deux plantes distinctes et d’attribuer à l’une des stries et des aspérités ; et M. Cosson a été autorisé à faire la réunion qu'il a opérée et à ne mentionner ni aspérités ni stries ! Cette assertion n’est contradictoire qu'en apparence et sera justifiée par les détails suivants, dont je re- srette la longueur, sans pouvoir toutefois l’éviter. @. 2. FAITS PERSONNELS CONCERNANT LE J. lagenarius GAY ET LE J. stricius SCHSB. En 1859, j'entrepris de déterminer mes Juncus de l'Algérie et du midi de la France. De chaque provenance les échantillons étaient nombreux. Parmi ceux que j'avais recus, certains étaient nommés J. lagenarius, d’autres J. striatus; mais toute la diffé- rence que je pouvais y trouver consistait en ce que les échantil- lons nommés lagenarius étaient jeunes avec une panicule rou- geätre et des stolons, et que ceux nommés striatus étaient des pieds isolés, plus avancés, à panicule grisâtre et sans stolons. Impossible de m’en tirer et d'arriver à distinguer deux plantes. JUNCUS À FEUILLES CLOISONNÉES 123 En novembre de la même année, me trouvant à Paris, je priai M. J. Gay de vouloir bien me montrer l'échantillon type de sa description, attendu que, si je retrouvais bien sur tous mes échan- tillons « la capsule insensiblement atténuée en bec » du J. lage- narius Grenier, je n'y avais jamais pu voir la « capsula turbi- »nata, basi subsphærica, rostrata » du J. lagenarius Gay in Laharpe. Notre savant et regretté confrère mit à me satisfaire ce gracieux empressement que tout le monde connaît, ajoutant que les capsules bien développées paraissaient rares sur cette es- pêce, mais que j'en verrais de bien éwrbinées et même de bien sphériques à leur base. Et de fait, l'échantillon type qu'il me montra et qui, je crois, venait de Toulon, absolument semblable aux miens pour tout le reste, offrait, à côté de capsules ouver- tes ou mal développées, quelques autres magnifiquement turbi- nées et renflées en sphère vers la base et subitement rétrécies en col, « rostrata », enfin représentant si exactement une carafe, qu'on était forcé de reconnaître la parfaite justesse du nom Zage- narius; j ai fidèlement reproduit, pl. V, fig. 3, le grossier croquis que j'en pris à l'instant. Mais la force même du développement de ces capsules me parut anomale et me devint suspecte ; je crus y reconnaître le résultat de la présence d’une larve d’insecte, comme sur les utricules du Carex præcoæ Jacq, devenu par là le C. sicyo- carpa Lebel, et sur les utricules des Carex disticha Huds., vul- pina L., muricata L., etc., « sæpe corniculatæ, majores, ob lar- »vam insecti cujusdam inhabitantis monstrosæ ». Leers, FI. herb., (D SO) MON CM ONE Spot maitre d’en ouvrir une 1 Le J. multifiorus Desf. est tellement sujet aux attaques des insectes, qu'il m'a été impossible, en 1870, de trouver sur le littoral de l'Hérault, où cette espèce est assez répandue, une seule capsule intacte. Dans le Bull. Soc. bot., t. XNI, pp. 109 et 110, j'attribuais, par analogie, à la présence d'un insecte les renflements tuberculeux que M. A. Franchet avait signalés sur le «(J, heterophyllus (in Billot, Annot. fl. Fr. et All., pag. 234) et que j'avais vus plusieurs fois sur du J. lampocarpos. Or, j'ai pu retrouver de sembla- bles renflements sur les racines d'un J. lampocarpos et d'un J. bufonius et m'assurer qu'elles renfermaient un insecte. Déjà H.C. von Hall avait mentionné un «/. Bufonius, v% B, radice tuberosa, pendula », ajoutant: « Varietas hæc 124 MÉMOIRES ORIGINAUX. pour vérifier mon doute. Il s’y refusa d’abord; mais comme il aimait la vérité par-dessus tout, il Le fit, et reconnut que ma con- lecture était juste. Il en parut très-attristé, et me dit : Eh bien! nous verrons s’il ne faut pas ramener cette plante à mon J. Fon- tanesii, mais ilne m’en parla plus depuis. Il est de fait que les échantillons de son herbier étiquetés J. Fontanesii n'étaient que des pieds non déformés, mais sans stolons, de la plante que J. Gay avait nommée J. lagenarius. Je ne les vérifiai pas tous, croyant alors moi-même à l'identité du J. Fontanesii et du J. stria- tus ; mais ayant demandé à voir le J. repens Req., je le trouvai dans la feuille du J. acutiflorus, et sur l'étiquette était : «J. repens ». | « In ripis Druentiæ », de la main de Requien, et « J. acutiflorus, y repens » d’une autre écriture. C'était encore la même plante, mais avec de grands stolons et sans capsules mûres. C'était aussi la plante que je possédais venant de Requien lui-même. 1 devint donc évident pour moi que le type du J.. lagenarius Gay, quelques pieds au moins de son J. Fontanesii et le J. repens Req. (J. acuti- florus, v*® y, herb. Gay) n'étaient qu'une seule plante, dont le J. repens « capsula pyramidali acuta » Req. était l’état normal, et le J. lagenarius « capsula turbinata, basi subsphærica, ros- ptrata » Gay, une déformation. Mais, d'autre part, si le J. Fontanesü Gay à était le J. striatus Schsb., comme J. Gax le croyait; il. devait avoir ce caractère « vaginis striatis » si saillnt pour, Schousboe qu’il lui avait sug- géré le nom caractéristique ; cependant je n'avais pas vu ce ca- ractére sur les échantillons de l’herbier de Gay, et, j'avais beau faire, je ne pouvais pas non plus le rencontrer sur un seul de mes J. bufonio cæteroquin simillima, ab eo differt radice vere tuberosa, pendula. Inveni eum solo argillaceo humido, aliis J. bufonii plantis immixtum » (Syn. Gram. Belg., p. 143 ; 1831). Les déformations dues à la présence d'un insecte ne sont donc pas sur les Juncus des faits aussi rares qu'on peut le croire tout d'abord. JUNCUS À FEUILLES CLOISONNÉES 125 nombreux échantillons, soit secs, soit ramollis dans l’eau tiède, soit enfin sur les pieds vivants. Or, voilà que le 20 mai 1869, en herborisant dans les mares de Roquehaute (Hérault), je vis un Juncus, encore jeune, d’un aspect tout nouveau pour moi, et à ma question,mon compagnon, M. Richter, répondit : mais c'est le J. sétriatus; vous en trouve- rez autant que vous voudrez à Caunelles, Courpouiran, Font- froide, etc., près de Montpellier. Ne voyez-vous pas ses tiges droites, ses gaïnes et ses feuilles profondément striées, rudes et couvertes de petites aspérités, comme le dit M. Grenier? Et tout cela était exact; en fin juin, je retrouvai cette plante en abon- dance. En même temps son faciès, ses aspérités et ses stries me portèrent à soupconner son identité avec un Juncus publié par M. le D' Sauzé, par lui nommé J. asper (Cat. pl. Deux-Sèvres, p. 52), et par lui-même comparé au J. striatus. Je communiquai ma plante à l’auteur du Jasper, qui s’empressa de me répondre qu'il y avait avec la sienne identité complète. Ainsi, d’une part, je trouvais à Paris une tradition émanant de l’herbier de Gay et prenant pour le J. striatus le J. Fontanesii Gay, identique à son J. lagenarius, ce dernier fondé sur un cas de déformation, et, d'autre part, à Montpellier, une autre tradi- tion reconnaissant un J. striatus tout différent du J. lagenarius, lequel n’y était pas aussi nettement reconnu, bien qu’il abonde dans l'Hérault, où il m'a été récolté depuis , à Lodève, par M. Aubouy; à Pézenas, par M. Biche ; à Gigean, par M. Barran- don; à Mauguio, Saint-Chinian, Vias, etc. Cette dernière tra- dition vient évidemment de l'herbier ‘de Salzmann, conservé à Montpellier, et où un petit échantillon de ce J. striatus est éti- queté : © J. Fontanesii Gay, ex Bubani; Narbonne, M. Delort; 1842 », tandis que de nombreux échantillons du J. lagenarius Gay s’y trouvent répartis sous les noms de J. sylvaticus et de J. aguaticus —= J. lampocarpos ‘. ! Voici le relevé des Juncus de cette section existant dans l'herbier Salzmann : «J. alpinus Vill.» — Sans localité; très-petit échantillon, à un seul glomérule, « J. heterophyllus Duf. Dedit Lenormand» . 126 MÉMOIRES ORIGINAUX. Maintenant il restait à savoir si le J. striatus de la tradition de Montpellier était bien celui de Schousboe. Or, en avril 1870, notre excellent confrère, M. le D' Cosson, voulut bien me per- mettre de consulter l’herbier original de Schousboe, que sa libé- ralité a assuré à la France, et je trouvai identité parfaite entre la plante de Montpellier et la plante étiquetée de la main de Schoushoe : &«J. STRIATUS. » Legi in arenosis locis subhumidis prope Tingidem ; »20 mai 1802 ». N° 145, Reliq. Marocanæ. « J. sylvalicus» — Cahier contenant cinq feuilles : ire fe «J. sylvaticus, prope Gibraltar» — Trois pieds d'une espèce à rhi- zomes, à Moi inconnue. 2e fe « J. sylvaticus, in locis humidis circa Tangidem » — Deux beaux échan- tillons du J. heterophyllus Duf., dont un fluitant, et l'autre non. 3e fe contenant trois échantillons : 10 « J. articulatus Montp.» = J. lagenarius Gay ; 2° «J. sylvaticus circa Tangidem» = J. lagenarius Gay; 3° «J. sylvaticus Montp.— J. striatus Schsb.» &e fe «J. Fontanesii Gay — Ex Bubani — Narbonne; M. Delort. 1842» = J. striatus Schsb. 5efe «J. sylvalicus Pézenas » .— J. lagenarius Gay. Il n'y a donc pas dans ce cahier, étiqueté J. sylvaticus, un seul brin de J. sylva- ticus Reichd. a J. ustulatus — J. fusco-ater» —J. alpinus Vill.; sans localité. «J. aquaticus» — Cahier contenant sept feuilles : {re fe, K]. aquaticus — circa Tangidem» — J. lampocarpos ; 2e fe. «J. articulatus — Montp.«— J. lampocarpos ; 3e à Te fe «J. articulatus —Montp.» — J. lagenarius Gay. «J. repens Req. — Cherbourg» — J. lampocarpos. « J. divergens» = Jd. obtusiflorus. « J. articulatus» effacé et remplacé par J. «liltoralis, plage de Montpellier» — J. anceps Lah.... Cahier de 20 feuilles, n'ayant qu'une étiquette à la première. Cet examen nous montre que Salzmann, qui possédait de nombreux exemplaires du J. lagenarius Gay, n'avait pu y reconnaître la plante de Gay, parce quil n'avait que des exemplaires normaux sur lesquels il ne pouvait retrouver Îles caractères attribués par J. Gay à sa plante. — D'autre part, comme tous ses échantillons ne sont que des brins isolés et non accompagnés de leurs stolons, il ne pouvait y reconnaître le J. repens Req. Remarquons en outre que Salzmann avait reconnu comme espèce propre son J. littoralis (J. anceps Lah.), qu'il avait gardé en réserve et en nombre dans son herbier, mais sans le publier. JUNCGUS A FEUILLES CLOISONNÉES 127 Et enfin M. Cosson me permettait de constater dans son riche herbier que tout ce qu’il avait reçu des bords de ‘: Méditerra- née, sous le nom de J. striatus, avant l'acquisition de l’herbier de Schousboe (1870), était du J. lagenarius, Sans un brin de striatus véritable, comme tout ce que j'avais reçu moi-même. Les pieds isolés et sans stolons étaient étiquetés J. striatus ; les pieds stolonifères J. lagenarius ‘. C’est ce qui m'a fait dire plus haut (p. 122) que M. Cosson avait été autorisé à réunir sous un seul nom tout ce qu'il avait recu, et qu'en même temps M. Gre- nier avait eu raison de décrire deux plantes sous deux noms dis- tincts, ainsi que je le développerai plus loin. à 3. CAUSES DES DIFFÉRENCES D OPINION SUR LA DISTINCTION DES ESPÈCES. Si l’on cherche la véritable cause de toutes ces différences d'opinion, des oppositions même et des méprises auxquelles ont donné lieu les espèces du groupe qui nous occupe, on verra qu'elles proviennent : un peu de descriptions faites sur un échan- tillon unique, beaucoup plus de l’absence de figures accompa- gnant la description princeps, j'entends de bonnes figures d’en- semble et surtout de bonnes figures analytiques. On en jugera par l’état iconographique suivant, où les espèces sont avec les nomset dans l’ordre que leur assigne la Flore de France de MM. Grenier et Godron : J. supinus Moench. 1777 Moench Enum. Hess., n° 296, tab. 5. 1794 FI. Dan., VIE, tab. 1099 (fid. Pritzel). 1805 Host Gram. austr., III, tab. 88 (sub : J. subverticillatus). 1807 Vill. Cat. Jard. Sirasb., tab. 2, fig. 3 (sub : J. triandrus). 1808 Schkuhr Handb., tab. 98b (sub : J. uliginosus). 1831 Lorey F1. Côte-d’or, tab. 6 (sub: J. uliginosus), v* fluitans. ET a PQ pr Er mn A ON En RER MA A 2 M4 CA 2 1 M. Caruel a nettement formulé cette tradition: « J. striatus Schsb..… Variat ut præcedens, turionibus erectis, aut repentibus (et tunc J. lagenarius Gay) (Junc. ital. consp., p. 14). 128 MÉMOIRES ORIGINAUX. 1834 Sturm Deuischl. Fl., livr. 13, no 8 (sub: J. uliginosus) et livr. 78, n° 2 (sub: J. nigritellus). 1847 Reichb. F1. germ. exc.; Junc. tab. 397, fig. 882-886. J. heterophyllus Duf. Nulla. J. lampocarpos Ehrh. 1775 Leers F1. herb., tab. 13, fig. 6 — mala. 179% F1. Dan., VII, tab. 1097 (fid. Pritzel). 1805 Host Gram. austr., III. tab. 87 (sub: J. adscendens).—Pessima! 1838 Sturm Deutschl. Fl., livre. 71, n° 16. 1847 Reichb. Fl. germ. exc.; Junc. tab. 405, fig. 902-904. Vs 8. macrocephala. Nulla. J. lagenarius Gay. Nulla. J. striatus Schsb. Nulla. J. sylvaticus Reichd. 1834 F1. Dan. XIT, tab. 2112 ( fid. Pritzel). 1840 Sturm Deuischl. F1. livr. 78, n° 1. 1847 Reïichb. FI. gerim. exc.; Junc. tab. 496, fig. 905-907.Optima. J. anceps Laharpe. 1836 Mutel F1. fr., tab. 75, fig. 565. Vix bona. J. alpinus Vill. 1819 Hoppe Ant., pag. 30 (sub : J. ustulatus). 1832 Bory et Chaub. Exp. Morée, tab. 11 (sub: J. nodulosus). 1836 Fl. Dan., XIII, 2171 (fid. Pritzel). 1838 Sturm Deuischl. Fl., liv. 71, n° 15 (sub: J. fusco-ater). 1847 Reichb. FI. germ. exc.; Junc. tab. 403, fig. 896-900. J. obtusiflorus Ehrh. 1805 Host Gram. austr., LIT, tab. 86 (sub: J. sylvaticus). Pessima® 1827 F1. Dan., XI, tab. 1872 (fid. Pritzel). 1 Koch, Syn. ed. 3, p. 633, rapporte cette figure de Host au J. lampo- carpos ; d’autres la rapportent au J. acutiflorus. Host, dans son Fl. austr., I, p. 448, la cite au J. oblusiflorus, ce qui est évidemment une erreur. Cette planche est trop imparfaite pour pouvoir, avec quelques chances de certitude, être rapportée à une de nos espèces. Si la capsule est trop atténuée au sommet pour être celle du J. lampocarpos, elle est loin de l'être assez pour être celle du J. acutiflorus. 2 Figure si imparfaite qu'il est impossible de dire si elle se rapporte à cette espèce, comme quelques-uns le prétendent, ou au J. aculiflorus, ou à toute autre. JUNCUS A FEUILLES CLOISONNÉES 129 1840 Sturm Deutschl. F1. liv. 77, n° 12. 1847 Reichb. FI. germ. exc.; Junc. tab, 404, fig. 901. Comme on le voit, les figures sont peu nombreuses, dispersées dans des ouvrages peu répandus et quelquefois même erronées. Celles de Host, si souvent admirables, sont ici trop imparfaites pour avoir la moindre autorité ; et enfin, si nous avons quelques figures pour les espèces les mieux connues, nous en manquons absolument pour les espèces nouvelles ou litigieuses. Or, à mon avis, la publication d’une espèce, non appuyée d’une figure, of- fre de tels inconvénients, engendre tant de discussions inutiles et fatisantes, fait perdre tant de temps aux botanistes et tant de crédit à la botanique, que je voudrais qu'on püt s’accorder pour que nul nom spécifique nouveau ne fût admis dorénavant à avoir cours et droit de priorité, s’il n’était accompagné d’une figure. Je sais bien que cette exigence paraîtrait exagérée; et pourtan elle ne l’est pas, si l’on tient compte de la facilité que présente au- jourd’hui sa réalisation avec les Recueils scientifiques existant sur tous les points et le bon marché de la lithographie ; mais, la réalisation en fût-elle dix fois plus difficile, que je maintiendrais encore ce que j'en dis, au moins comme expression de la répu- gnance que me causent et les discussions oiseuses et les instants employés à se demander, sans solution possible, si c’est bien là la plante de tel auteur. Le temps qu'on perd à se contredire et l'argent qu'on dépense à demander des renseignements auraient suffi dix fois pour publier un bon dessin, ou pour l'acheter s’il était publié. Si l’absence de bonnes figures est une des principales causes de nos incertitudes, il fout se hâter de reconnaître aussi que, dans l'établissement des espèces de ce groupe, d’un aspect géné- ral assez ressemblant pour avoir conduit Linné à réunir sous le nom de J. articulatus celles qu'il en avait \ues', on n’a guère om 1 Il ne faut faire à Linné de trop vifs reproches, ni pour l'emploi de ce nom, emprunté par déférence à ses devanciers, ni pour la réunion sous ce même nom d'espèces distinguées plus tard. En effet, ce grand observateur a dit du nom: 130 MÉMOIRES ORIGINAUX. employé que les différences tirées de la forme de la panicule, va- riable à l'excès, ou du rapport, non moins variable, qui existe entre la longueur de la capsule et celle des divisions du péri- gone ‘, ou de la forme, un peu plus stable de la capsule et des divisions du périgone *. Il me semble qu’on n’a pas accordé une attention suflisante au mode de propagation ; et, d'autre part, on a négligé de rechercher, par l'emploi des comparaisons histotaxi- ques, si, dans toutes ces espèces très-ressemblantes, la disposi- tion des tissus élémentaires est exactement la même. Ce sont donc ces deux points que je considérerai dans l'étude compara- tive qui suit. à 4. QUESTIONS DE SYNONYMIE. Mais avant de l’entreprendre, je désire m'expliquer : 1° Surles motifs qui me portent à rejeter le nom de J. sylva- ticus Reichd., et à conserver celui de J. acutiflorus Ehrh. ; 2° Sur le nom à employer pour désigner la plante de J. Gay. 1. Dans la 12° édition du Systema naturæ, 1767, Linné avait ajouté à la diagnose de son J. articulatus : « Hujus « aquaticus foliis compressis, B sylvaticus foliis teretibus », p. 250. Or, en 1772, Reichard, publiant le premier volume de son Flora Mæno- Francofurtiano, ne mentionne qu’un Juncus à feuilles cloisonnées: « Dum folia digitis comprimuntur vel etiam objiciuntur, apparent interni » isthmi, ut proprie articulata non sint, sed modo isthmis interne interceptan» (FI. suec., ed. 2a p. 113),et de l'espèce : «Utrum « sita y vere specie divisus, »aut a solo natali mutatus, ulterius inquirendum.» (Mant. alt., p.368.) Il avait donc entrevu les distinctions opérées après lui. { Pour donner une idée de la variabilité de ce rapport, je dirai que j'ai dans mon herbier de nombreux échantillons de J. bufonius sur lesquels la fleur la moins élevée (terminale) offre des divisions extérieures frois fois aussi longues que la capsule °i comme foliacées (15 mill.), et sur les mêmes pieds, aux fleurs les plus élevées les mêmes divisions dépassent à peine la capsule et constituent alors le J. ranarius Song. 3 Le travail que M. le Dr Fr. Buchenau a publié Sur les ornements du test des Joncacées allemandes (Ueber die Sculptur der Samenhaut bei den deutschen Juncaceen,in Bot. Zeitung, juin 1867 (pp. 201 et suiv.), ne comprend malheu- reusement que les espèces allemandes. JUNCUS A FEUILLES GLOISONNÉES 131 «n° 231 — J. articulatus L. » — Mais Linné dans la 13° éd (Syst. veg., curante Murray; 1774), ajouta à la remarque ci-dessus la suivante : «forte species distinctæ ? » — Alors Reichard, dans l’'Appendix qui termine le deuxième volume de son Flora, publié en 1778, adopta la division que Linné avait proposée avec doute et en fit son : «n° 973. J. sylvaticus foliis articulatis te- retibus, panicula repetito-ramosa, » p. 181 — Mais la diagnose ci-dessus est celle du n° 1323 de Haller et se rapporte au J. obtusiflorus recent., comme l’atteste la synonymie de Scheuchzer, comme l’ont reconnu Gaudin (Agr. helv. II, p. 221, Steudel, etc., et comme le prouve le caractère « foliis teretibus » inapplicable au Juncus appelé plus tard acutiflorus, lequel a les feuilles plus ou moins comprimées (Gren., F1. Fr. II, p. 347). C’est le n° 1322 de Haller qui répond à ce même J. acutiflorus, et la v°B. sylvaticus de Linné pouvait si peu se rapporter à une espèce ayant les divisions du périgone aiguës, que Linné avait constamment dit dans sa diagnose du J. articulatus : « petalis obtusis ». Il devient donc impossible aujourd’hui de savoir si Reichard rapportait son nom et sa diagnose au seul Juncus n° 1323 de Haller (J. obtusiflorus recent.), ou à une confusion des deux espèces distinguées plus tard (J. acutiflorus et obtusiflorus recent). Ce qui a induit en erreur et fait croire que le J. sylvaticus Reichd. était le J. acutiflorus Ehrh. et recent., c’est que Roth, en 1789, reproduisit le nom de Reichard, J. sylvaticus, en le faisant sui- vre d’une excellente description..., « calycum foliolis augustio- »ribus, acutissimis » (Tent. fl. germ., IL, p. 405). Assurément le J. sylvaticus Roth est bien celui que depuis on a appelé acuti- | florus, et M. Cosson a eu toute raison de citer la priorité de Roth (F1. Alg., I, p. 266); mais c’est précisément ce même Roth qui nous atteste l’erreur et la confusion où le nom de Rei- chard l'avait conduit lui-même. Dans la 2° édition, publiée en 1827 sous le titre de Enum. pl. in Germ. nasc., Il, p. 82, Roth a abandonné comme incertain le J. sylvaticus Reichd., qui d’a- bord avait été aussi le sien, pour adopter la distinction des J. acutiflorus et obtusiflorus proposée par Ehrhart, et qui, répon- 132 MÉMOIRES ORIGINAUX. dant à la réalité, forme une opposition si heureuse, que presque tous les auteurs ont fait comme Roth, et adopté le nom d’Ehrhart. Après ce qui précède, il est presque superflu d'ajouter que le nom de Reichard, faisant allusion à une station qui n'est point celle de la plante en question, tombe ainsi dans le cas d’exclu- sion si justement prononcée par le 23 de l’art. 60 des Lois de la nomenclature botanique *. Il est facile de comprendre qu’un sen- timent de justice ait porté quelques auteurs à reprendre le nom de Reichard, qui avait une apparence de priorité; mais l'erreur, ou au moins l'incertitude de son application primitive, une fois constatée et jointe à son évidente impropriété, le même senti- ment de justice nous force à revenir au nom imposé par Ehrhart, qui véritablement a été le premier à bien distinguer et bien nommer les J. lampocarpos *, acutiflorus et obtusiflorus, d’abord dans ses Gram. eæsice. (seu Calam.), déc. VIE n° 66 ; VIII, n° 76; XIII, n° 126, et ensuite et surtout Beiträge, VI, p.86; 1791. C’est pourquoi nous faisons ainsi, comme ont fait avant nous Hoffm., Deuisch. Fl., p. 125; 1791 — Gaud., 4gr. helv., I, p: 299; 1811, et F1. helv., Il, p. 550, en signalant l'erreur commise au sujet du synonyme de Haller — Poiret, Dict.enc., HI, p. 158, no 43; 1813 — Meyer, Syn. Junc, p. 24; 1822 — Laharpe, Mon. Jonc, p. 39; 1825 — Roth, Enum. pl. Germ., Il, p. 82; 1827! — Duby, Bot. gall., I. p. 477; 1828 — Lois.-Desl., F1. gall., I. p. 261; 1828 — Reichb., F1. germ. exc., p. 96; 1830 — Kunth, Enum. pl. LI, p. 327; 1841 — Guss. Sic. Syn., L p. 4 Art. 60. Chacun doit se refuser à admettre un nom... « 3° Quand il exprime un caractère ou un attribut positivement faux dans la totalité du groupe en question, ou seulement dans la majorité des éléments qui le composent.» 2 Ehrhart a écrit J. lampocarpos ( 1auret , luire); beaucoup d'auteurs ré- cents écrivent lamprocarpus, comme venant plus correctement de l'adjectif Aaurpos luisant. Il est de fait que les composés formés par les Grecs avec cet adjectif sont beaucoup plus nombreux que ceux qu'ils ont tirés du radical Aéurew, mais enfin, les Grecs eux-mêmes ont employé ces derniers, par exemple : AauTroupos, Jauroupis, leuravyetis, etc. Dès lors il y a justice à reprendre la forme adoptée par l'inventeur et respectée par Smith, Meyer, Sprengel, Laharpe, Roth, Duby, Loiseleur-Deslongchamps, Mutel, Gussone, etc. JUNCUS A FEUILLES CLOISONNÉES 133 429; 1842— Fries Summ., p. 65; 1845— Steudel, Syn. Glum., IT, p. 298, n° 44; 1855 — Boreau, F{. Centr., 3° éd°., p. 608, 1857, etc. 2. Le nom de J. lagenarius Gay, se rapportant à un accident de déformation pris pour une forme permanente et essentielle, ne saurait être conservé, conformément au 2 précité, p. 132, de l’art. 60 des Lois de la nomenclature botanique. D'après ce que j'ai vu dans l’herbier de J. Gay, le nom de J. Fontanesii Gay se rapporte à des exemplaires de la même plante, et il me semble qu'il doit être repris. Je sais bien qu’on peut objecter que JS. Gay et Laharpe ont imposé ce nom sur la croyance oùils étaient que leur plante était la seule que Desfontaines eût nommée J. articulatus et répan- due sous ce nom dans les herbiers, tandis que la synonymie et les figures que cite Desfontaines, sans description à lui propre, ainsi que les plantes venant de lui, prouvent qu'il a compris sous le nom de J. articulatus L. et l'espèce algérienne et le J. lampo- carpos qui croît aussi en Algérie, Je sais bien aussi que beaucoup d'auteurs, et Laharpe le premier, ont employé à tort le nom de J. Fontanesii Gay comme synonyme de J. striatus : les uns en distinguant, comme M. Grenier, le vrai J. striatus, d'autres en prenant pour lui les échantillons sans stolons du J. repens Req. (lagenarius Gay). Mais une synonymie incertaine ou erronée ne constitue ni ne détruit un droit; et d’ailleurs, les termes de la description de Laharpe, malgré sa synonymie fautive, ne peuvent laisser aucun doute : « Culmus lævis..…., folia abbreviala, ..…. spicis »virescentibus..…., perigonii foliola virescentia vel hinc inde ru- »bescentia..., filamentis brevibus...» , conviennent tous au J. repens Req. et non au vrai J. striatus que Gay et Laharpe ne possédaient pas. Le nom princeps et si convenable de J. repens, imposé par Requien, alors qu'il était déjà appliqué par Michaux (F1. bor. Amer., I. p. 191; 1803) , ne saurait être repris; celui de J. Requienii serait un acte de justice, mais il a été consacré à un autre Juncus par M. Parlatore (F1, ital., Il, p. 345); celui de J. Gayanus eût également convenu à tous égards, mais Steudel s’en est servi pour dédier à M. CI. Gay un Juncus du Chili. Je 9 134 MÉMOIRES ORIGINAUX. Il me semble qu’il y aurait injustice criante à faire disparaître com- plètement le nom de l’auteur de l’espèce, et qu’il y a au contraire justice à reprendre, malgré quelques légers inconvénients, le nom de Gay, J. Fontanesii, avec la synonymie suivante : J. Fontanesii Gay, in Lah. Mon. Jonc. p. 4? — J. Repens Req. in Guérin Descr. Vaucl. 2° 64%, 253; 1813 (nom princeps, mais déjà employé par Michaux) — DC. #1. fr., VI, p. 308 — Duby Bot. gall., p. 471 — Lois. Fl. gall. ed° ?° I, p. 261 — J, acutiflorus repens Lah., o.c., p. 128 et herb. Gay— J. striatus Cosson Æ1. Alg., p. 268 (non Schsb.) — J. lagenarius Gay in Lah. o. c, p. 4? (en excluant les caractères : « Capsula turbinata, basi subsphærica » exprimant une déformation due à la présence d’un insecte). — J. lagenarius Gren. F1. de Fr., II, p. 346, forme normale. Des tiges isolées, dépourvues de leurs stolons, ont été prises à tort par plusieurs auteurs pour le J. striatus Schsb. à ©. MODE DE PROPAGATION DES JUNCUS VIVAGES A FEUILLES CLOISONNÉES ET RAPPORTS ENTRE L'ORGANISATION ANATOMIQUE ET LE MODE DE PROPAGATION. Des espèces vivaces du groupe à feuilles cloisonnées, les unes se propagent par rhizomes souterrains et sont entièrement dé- pourvues de stolons ; les autres n’ont point de rhizomes et ne se propagent que par des stolons qui, couchés à la surface du sol ou de la vase, s’enracinent aux nœuds et là donnent naissance à des fascicules de tiges et de feuilles. Comme exemple de ces derniers, je citerai le J. supinus Moench, et la figure qu’en donne Sturm (Deutschl. Fl. in Abbild., fasc., 13, tab. 8); il manque de rhizomes, et aux nœuds enracinés de ses stolons, l’agglomé- ration des racines, des feuilles et de la base des tiges constitue des grosseurs qui, s’il faut en croire Ehrhart, avaient fait illusion à Linné et lui avaient fait nommer cette plante J. bulbosus. Nos espèces stolonifères commencent par n'avoir qu'une sou- che fibreuse, tout à fait analogue à celle d’une espèce annuelle, puis une de leurs tiges se couche, et, tout en demeurant sembla- JUNCUS A FEUILLES CLOISONNÉES 135 ble aux autres par la couleur verte, la grosseur et la longueur de ses entrenœuds, ainsi que par ses feuilles normalement dévelop- pées, elle s’enracine à un ou plusieurs de ses nœuds, d’où s’éle- vent immédiatement des feuilles et des tiges, en un mot une nouvelle plante qui se comporte de la même manière. Sur nos Juncus indigènes à rhizome, cette partie, entièrement souterraine, sans chlorophylle et de la couleur des racines, est toujours beaucoup plus grosse que les tiges aériennes qui en naissent, et les entrenœuds en sont si courts, que les écailles qui les revêtent, courtes elles-mêmes, se recouvrent néanmoins en grande partie les unes les autres. Mais sous ces différences purement superficielles, il en existe de plus profondes et de plus essentielles. Les stolons, étant des tiges aériennes, ont l’organisation simple des tiges des mono- cotyiédones, c’est-à-dire un seul système de tissus recouverts d’une couche épidermique et sans zones concentriques. Les rhizomes, au contraire, offrent l'organisation propre aux racines et aux ap- pareils souterrains des monocctylédones, savoir : une zone cor- ticale cellulaire et une zone interne fibro-vasculaire'. C’est là le criterium suprème. Soit pour exemple le plus commun de nos Juncus de ce groupe, le J. lampocarpos. Sa tige (pl. VI, fig. 23) offre sous l’épiderme des cellules à chlorophylle (c) contre les- quelles court un rang de faisceaux fibro-vasculaires inégaux, 1 Ce qui a été attribué aux rhizomes comme caractère général, savoir : que, «en raison de leur structure anatomique», ils sont de la nature des tiges, n'est pas entièrement confirmé par la structure des rhizomes des Joncs et des Graminées (voir J. Duval-Jouve Agropyrum de l'Hérault, p. 331); car ces rhizomes, bien que portant des écailles ou expansions foliacées, n'ont point l'organisation de leurs tiges, mais bien plutôt, par leurs deux zones concentriques, celle des racines des Palmiers et autres monocotylédones, décrite par plusieurs auteurs (H. v. Mohl, Schleiden, etc.) dont les opinions ont été résumées avec une grande clarté par M. Duchartre (EL. bot., p. 215). Do plus, les rhizomes des Juncus que j'ai pu examiner n'ont point de cloisons transversales vers le point où naît une feuille- écaille ; et, en cela, leur structure ressemble plus à celle des extrémités des rhizomes de l'Arundo Donax qu’à celle des rhizomes de la plupart des Graminées. (Voir Agrop. de l'Hérault, p. 336.) 136 MÉMOIRES ORIGINAUX. puis de grandes cellules incolores (7) quelquefois déchirées en lacunes, dans lesquelles sont épars de deux à quatre gros fais- ceaux ; enfin, un rang de ces mêmes faisceaux (/), souvent unis entre eux par de grosses fibres libériformes, entoure comme une ceinture la masse cellulaire centrale (m). Telle est aussi dans sa généralité la structure des entrenœuds des autres espèces (fig. 14, 18, 26 et 29), et celle des entrenœuds des stolons. Les rhizo- mes de la même espèce (pl. V, fig. 12), et des espèces voisines, offrent une zone corticale toute cellulaire avec lacunes (c), puis une interne débutant par une ceinture continue de fibres hémi- cycliques (2) qui entoure la masse médullaire (m) où sont répar- tis les faisceaux fibro-vasculaires ‘. Dans les tiges et les stolons, la région fibro-vasculaire est vers l'extérieur; dans les rhizo- mes, à l'inverse et vers l'extérieur. Ce n’est pas tout. La conformation des faisceaux fibro-vascu- laires dans les tiges des Juncus est tout à fait semblable à celle des mêmes faisceaux dans les tiges et les rhizomes des Grami- nées ?, savoir (planche VI, fig. 24): entre des masses de fibres (f), deux gros vaisseaux rayés (a) disposés parallèlement à la circonférence, et vers le centre un grand canal annulifère (b) Au contraire, dans les rhizomes des Juncus, les faisceaux sont, non symétriques, mais plus ou moins cylindriques (pl. VI, fig. 22), ayant à l'extérieur une couche plus ou moins épaisse de fibres libériformes (mn), puis un cercle de vaisseaux rayés et de canaux annulifères de grandeur variable (a), et le centre est rempli par de petites fibres. Nulle symétrie, nulle place déterminée pour les canaux annulifères. Or, dans les stolons, même les plus forts, on trouve constamment les faisceaux symétriques des tiges, ja- mais les faisceaux cylindriques des rhizomes. J'ai choisi comme exemple le J. Zampocarpos, non-seulement parce que sa fréquence fait qu'il se prête le mieux à la vérifica- AIT RER EME RER RE 1 Comparer cette structure à celle des rhizomes des Graminées (J. Duval-Jouve, Agrop. de l'Hérault, p. 331 et suiv.). 2 J'en ai donné la description complète et la figure, dans mon Mémoire sur les Agropyrum de l'Hérault, p. 312 et suiv., 331 et suiv.; pl. XVI, fig. 1,3 et 7B. JUNCUS A FEUILLES CLOISONNÉES 157 tion de ce que j'avance, mais encore parce qu'il offre l'apparence d’un mode intermédiaire de propagation. Quelquefois, en effet, ses tiges se couchent et s’enracinent aux nœuds ; mais là, au lieu de produire directement de nouvelles tiges, elles donnent nais- sance à un gros bourgeon qui se développe en rhizome, et c’est de ce rhizome nouveau que proviennent les nouvelles tiges. De sorte que l'exception n’est qu'apparente sur cette espèce, la- quelle se propage essentiellement par rhizomes, et non par sto- lons. @ 6. — APPLICATION DE GE QUI PRÉCÈDE A LA DISTINCTION SPÉCIFIQUE. Si les comparaisons histotaxiques fournissent les plus solides différences entre un stolon et un rhizome, ce sont elles aussi qui, à mon avis, fournissent les caractères spécifiques les plus dé- cisifs. Des sections opérées sur toutes les parties m'ont permis de constater et d'affirmer que les sections de la méme espèce sur une même région montrent une structure identique ‘, et que celles d'espèces voisines donnent des différences très-grandes, étonnan- tes même quelquefois. Je crois donc que, dans la critique spéci- fique, il y avait lieu de prendre en grande considération les carac- tères histotaxiques et de les joindre à ceux que fournit le node de propagation. L’appréciation de ces divers caractères exige des études qui ne peuvent se faire sur la plupart des herbiers un peu anciens, où les espèces sont le plus souvent représentées par des échantillons réduits à une tige rarement bien entière, plus rarement encore 1 Les coupes que j'ai décrites et figurées ont été (sauf indication contraire) opérées : sur les rhizomes, à égale distance entre deux tiges ; sur les stolons, au milieu d'un entrenœud ; sur les tiges, au 2e entrenœud, en descendant, au milieu de la partie verte; sur les feuilles, au tiers du limbe, en partant de la ligule. En n'opérant pas exactement sur une même région, on doit s'attendre à des résultats comparatifs moins nets, à cause des légères différences qui existent entre la partie de la tige rapprochée du rhizome et la partie supérieure, entre la partie verte d'un entrenœud et celle qui, recouverte de la gaine, ne contient pas de chloro- phylle, etc. 138 MÉMOIRES ORIGINAUX. avec un fragment de stolon ou de rhizome, jamais avec un rhi- zome entier. Il faut étudier les espèces sur le vivant et sur place, autant que cela s: peut; et c’est après l'avoir fait pendant de longues années que je soumets aux botanistes le résultat de ces études. Nos espèces françaises de Juncus vivaces à feuilles cloisonnées se divisent en deux groupes : 1° Propagation par stolons ; J. supinus. J. heterophyllus. J. Fontanesii. 2° Propagation par rhizomes ; J. lampocarpos. J. striatus. J. acutiflorus. J. anceps. J. alpinus. J. obtusiflorus. Toutes ces espèces ont été décrites par M. Grenier dans la Flore de France, à peu près suivant le même ordre et avec assez d’exactitude pour qu'il devienne superflu d’en refaire des descriptions à côté des siennes. Ce qui suit se réduira donc à l’a- nalyse comparative des J. Fontanesii et striatus, puis à une brève comparaison, d’abord dela première espèce avec le J. lampocarpos, ensuite du J. acutiflorus avec les J. striatus et anceps. - Je dirai seulement du J. supinus Moench et du J. nigritellus Koch (J. Kochii Schultz) que les coupes des feuilles et des tiges ne m'ont offert aucune différence appréciable ; qu’il en a été de même des gaïînes et des ligules, si nettement caractéristiques sur celte espèce ‘ ; que les capsules y sont variables de forme, et que, comme sur le J. lampocarpos, elles sont moins longuement acu- minées, quand elles sont pleines et gonflées par des graines nor- 1 Ligules très-largement saillantes ; bords des gaïnes très-largement mem- braneux et ne se couvrant pas, ou seulement un peu tout contre leur base. JUNCUS A FEUILLES CLOISONNÉES 139 males, et plus longuement si leurs graines avortent, ce qui ar- rive presque toujours sur les tiges couchées et radicantes ; que le nombre des étamines ne peut être pris en considération, attendu que, sur cette espèce, comme sur la plupart des autres (J. ca- pitatus, pygmæus, etc.), il est très-variable et souvent sur un même pied, ce que Laharpe avait déjà constaté (Mon. Jonc., p. 1, 9 et 19) et ce que j'ai vérifié moi-même, et qu'ainsi il faut répéter avec Koch, qui a créé l'espèce et y a renoncé : « formis » intermediis in statum normalem abit ». { Syn. ed° 3°, p. 634). Il en est absolument de même du J. lampocarpos ; les formes radicantes et fluitantes, celles à petits slomérules sur des anthèles trés-grandes et très-divisées, celles à anthèles réduites à deux ou trois glomérules très-gros (J. tricephalos, Gay), ont donné sur toutes leurs parties des coupes identiques ( pl. V, fig. 12, et pl. VI, fig. 23). Ces dernières formes, à glomérules peu nom- breux et gros, se montrent parallèlement, et avec tous les inter- médiaires possibles, sur les J. Fontanesii, striatus, acutiflorus, anceps ‘ et obtusiflorus, et ne peuvent constituer des espèces, ainsi que l'avait très-bien pressenti Laharpe, qui n'avait conservé le J. tricephalos Gay que par déférence pour l’auteur du nom ( Hon. Jonc., p. 44). Le sommet de la capsule varie aussi de forme et se montre plus ou moins brusquement atténué *; enfin, comme le dit très-exactement Koch : « variat capitulis pallidioribus ni- » grantibusve ».(Syn., edo 3°, p. 633 ). CoMpARAISON DU J. FONTANESII ET DU J. STRIATUS. — Mode de propagation. Le J. Fontanesii se propage par stolons toujours très-développés et qui, sur un sol humide, atteignent ou même dépassent une longueur de deux mètres. Dès le mois de mai, ces 4 Je possède de nombreux échantillons de J. anceps, récoltés à Arles, qui ont une moitié de l'anthèle divariquée et à glomérules nombreux et petits, et l'autre moitié réduite à 2-3 glomérules très-gros. 2 La forme de la capsule figurée par Reichenbach (o. et 1. c.) est une forme extrême et des pluslonguement acuminée. On la trouve assez fréquemment sur les tiges enracinées à leurs nœuds, et dont les capsules ne renferment que peu ou point de graines normalement développées. 140 MÉMOIRES ORIGINAUX. stolons s’enracinent à leurs nœuds, distants de 0,05 à 0",15, et les entrenœuds, continuant encore à s’allonger, se soulèvent, comme de petits ponts, entre chaque pied nouveau (pl. V, fig. 1), ce qui fait qu’à cette époque, où celte plante n’a encore ni fleurs ni fruits, on peut, à grande distance, la distinguer de toute au- tre. Mais bientôt la vie se retire de ces entrenœuds; ils se flé- trissent, puis se dessèchent et se cassent, et chaque nouvelle plante isolée se comporte comme la premiére, si le sol est assez humide ‘. Ces stolons portent d’abord des feuilles à chacun de leurs entrenæœuds, et le plus souvent se relèvent vers leur extré- mité pour se terminer par une anthèle, tout comme les autres tiges, dont ils ont d'ailleurs non-seulement la forme extérieure, mais l’organisation intérieure, laquelle sera décrite plus loin et est figurée pl. VI, fig. 23. | Le J. striatus se propage par rhizomes entièrement souterrains etrampant au moins à 0°,03 c. au-dessous de la surface du sol (pl. V, fig. 4). Ces rhizomes sont peu ramifiés, parce quela ré- gion qui a supporté les tiges fructifères se détruit le plus souvent dans l’espace d’un an. La partie qui subsiste est relativement courte ; en juin, au moment de la floraison, elle atteint rarement plus d’un décimètre, et offre trois régions d’égale longueur : une en arriére, portant des fascicules de feuilles (fig. 4, a); une médiane, portant cinq à six tiges (fig. 4, b); et enfin une antérieure, sans tiges ni feuilles, portant seulement quelques écailles, un gros bourgeon terminal et rarement un latéral, puis un rang supérieur de petits bourgeons (pl. V, fig. 4, c). Cette disposition et l’étude suivie du développement nous révèlent que rien ne se produit plus sur les deux régions postérieures; que la régivn terminale, qui se prolongera pendant l'hiver et le printemps suivant, donnera, par ses bourgeons latéraux, naissance aux ramifications du rhizome; que les petits bourgeons produiront plus en arrière EEE 4 Sur un sol très-sec, on trouve quelquefois des pieds isolés, mal venus, avec des capsules avortées. M. Cosson m'en a montré et donné qu'il avait recueillis en cet état aux environs de Bédarieux. Ce sont ces pieds isolés que l’on reçoit or- dinairement sous le nom de J. striatus. JUNGUS A FEUILLES CLOISONNÉES 141 les fascicules de feuilles, puis plus en avant les liges fructiferes , et qu’enfin son prolongement constiluera une nouvelle région nue qui servira à son tour au développement ultérieur. Les fascicules de feuilles et les tiges sont très-rapprochés sur le rhi- zome, et seulement à une distance des 4-6 mill. ; le diametre des rhizomes est de 3-5 mil. au plus. Une coupe transversale du rhizome (pl. V, fig. 6) nous le mon- tre composé, sous un épiderme très-cadue, dedeux zones concen- triques nettement tranchées. L’externe, toute cellulaire (c), égale environ le tiers du rayon et se partage elle-même en deux bandes; l'extérieure est continue et composée de 7 à 10 rangs de cellu- les inégales, dont les plus externes et les plus internes sont à parois minces, et les intermédiaires à parois épaisses; l'intérieure est toute parcourue par des lacunes longitudinales que séparent des cloisons aussi larges ou moins larges qu’elles. La zone interne débute par un seul rang de fibres hémicyceliques (voir Bull. Soc. bot. de Fr., tom. XVI, p. 409) très-fortement colorées en jaune- citron (4), contre lequel s'appuient quelques cellules à parois épaisses, et tout le reste est rempli par un tissu cellulaire à parois assez épaisses (m), jusqu'au centre duquel sont distribués de nombreux et gros faisceaux cylindriques, composés d’une cein- ture de 3-5 rangs de fibres libériformes régulières, à parois très-épaisses, puis d’un cercle de vaisseaux rayés rempli d’un groupe de très-petites cellules (pl. VI, fig. 22). Tiges. — J. Fontanesü (pl. NI, fig. 14 et 16). Épiderme toutuni, à cellules toutes égales; stomaies épars, un peu au-dessous du niveau des autres cellules. Sous l’épiderme, trois rangs de cellules à chlorophylle ; contre elles un rang très-régulier de faisceaux et, jusqu'au-delà de la moitié du rayon, du tissu cellulaire lâche, inco- lore avec de grandes lacunes longitudinales, même aux entrenœuds supérieurs ; puis une ceinture de faisceaux symétriques unis par quelques fibres libériformes, et le reste rempli de tissu cellulaire incolore avec quelques granules amylacés. Cette organisation est, comme je l'ai dit p.135, absolument commune aux tiges el aux 142 MÉMOIRES ORIGINAUX. stolons; seulement, quand ces derniers se trouvent enterrés depuis quelque temps, ils perdent leur chlorophylle, et leur tissu incolore se charge de granules amnylacés; même dans ceux-là on trouve constamment les faisceaux symétriques des tiges, jamais les faisceaux cylindriques des rhizomes, J. striatus.— Coupes transversales de la tige (pl. VI, fig. 18 et 20} à contour profondément découpé en nombreuses et bizarres sinuosités répondant aux saillies et aux stries qui ont motivé le nom de cette plante. Épiderme à cellules arrondies très-inéga- les, petites au sommet des saillies, très-crandes dans les sinus, où les stomates, de niveau ou un peu en saillie, sont sur deux ow trois rangs assez réguliers. Sous l’épiderme, deux ou trois rangs de cellules à chlorophylle; contre elles un rang de faisceaux inégaux, les plus gros répondant aux côtes les plus saillantes, puis quelques rangs de tissu cellulaire incolore, auquel succède, vers le quart du rayon, une ceinture de faisceaux symétriques unis par du tissu libériforme; à l'intérieur, du tissu cellulaire inco- lore. Les entrenœuds inférieurs sont pleins, ainsi que la partie inférieure de chaque entrenœud ; les plus élevés ont dans leur moitié supérieure une lacune centrale. Les côles et les stries sont aussi moins prononcées sur la région des entrenœuds recouverte par la gaine. Ces saillies, bien qu'existant sur toute la longueur de la région verte d’un entrenœud, ne s’y montrent point uniformes: tantôt elles se réduisent à une couche de grosses cellules simples (pl. VI, fig. 21, a); tantôt elles sont soulevées en mamelon (4) et multipliées à l’excès sur un point où elles forment de courtes aspérités sensibles au toucher (ce qui a fait appeler cette plante J. asper Sauzé), mais peu visibles à l'œil nu, ce quia fait dire à M. Grenier : « Le J. striatus est ordinairement parsemé »de petits poils très-courts, apercevables seulement à la loupe.» (F1. Fr. II, p. 346). Feuilles.—J. Fontanesii. Les deux ou trois inférieures réduites à la gaîne, avec ou sans mucron; les supérieures (3-6) avec un JUNCUS A FEUILLES CLOISONNÉES 143 limbe relauvement court. grèle et un peu comprimé, égalant ou dépassant jusqu’au double la longueur de sa gaine. Ligule assez longue, le plus souvent déchirée au milieu en deux longues cornes; épiderme et cellules à chlorophylle comme sur les tiges; dans le tissu incolore un seul rang de faisceaux de trois grosseurs, en alternance assez régulière, savoir: entre deux gros, deux _petits séparés par un moyen. Lacune grande(pl. VE, fig. 13 et 15). J. striatus. Feuilles (3-4), toutes ( sauf rarement l'inférieure) munies d'un limbe gros, à peine comprimé, ayant trois ou qua- tre fois la longueur de sa gaine. Ligule saillante, entière ; épi- derme et cellules à chlorophylle comme sur les tiges; dans le tissu incolore, trés-réduit, un seul rang defaisceaux de trois gros- seurs et dans la même alternance que sur le J. Fontanesii. Lacune très-crande (pl. VI, fig. 17 et 19). Si nous ajoutons que le J. Fontanesi a ses bractées florales aiguës (pl. V, fig. 2, a), ses fleurs supportées par un pédicelle au moins aussi long que le périgone est large (fig. ?, a), sesan- thères égales à trois fois la longueur du filet (fig. 2, c), et ses graines longuement atténuées aux deux extrémités et fortement striées, —tandis quele J. striatus a ses bractées florales lancéolées et longuement acuminées {pl. V, fig. 5, a), ses fleurs brièvement pédicellées (fig. 5, a), ses anthères à peine plus longues que le filet (fig. 5, c) et ses graines ovoïdes brusquement alténuées aux extrémités, nous serons forcé d’en conclure que ces deux plan- tes différent par tous leurs caractères, tant extérieurs qu'anato- miques, COMPARAISON DU J. FONTANESII ET DU J. LAMPOCARPOS. — Mode de propagation. — Le J. lampocarpos, dont le mode de propagation a déjà été décrit p.136, diffère du J. Fontanesii en ce qu'il a des rhizomes et non des stolons, et du J. striatus en ce que sa végétation ne s’interrompt point, comme celle de ce dernier ; du premier printemps à la fin de l'automne, les rhizomes produisent constamment des tiges nouvelles, tout contre le bourgeon lerminal. Ces rhizomes n’ont point à être comparés, 144 MÉMOIRES ORIGINAUX. dans leur structure, aux stolons du J. Fontanesii. Ils différent de ceux du J. striatus en ce que leur zone corticale est réduite au quart du rayon ; les cellules de la région externe ont le grand axe transversal : la zone interne, toute cellulaire au centre, n’a guère que deux rangs de faisceaux, sur lesquels la couche extérieure de fibres libériformes esttrès-faible, quelquefois presque nulle, tandis que sur ceux du J. striatus celte couche commence brusquement et est composée de 5 à 6 assises. Les tiges(pl. VI, fig. 23) et les feuilles du J. lampocarpos dif- fèrent trop de celles du J.striatus pour qu'il soitnécessaire de rien ajouter aux comparaisons des figures 18 et 23 de la planche VI. Le J. lampocarpos a ses bractées florales larges, courtes, obtu- ses, dépourvues ou munies d’un court mucron, presque contiguës à la base des fleurs, qui sont sessiles ou à peine pédonculées (pl fe MA la.) Lesdivisions du périgone de la même espècesent membraneuses aux bords, obtuses avec un très-petit mucron; les extérieures, correspondant aux angles de la capsule, s'enroulent plus que les intérieures qui sont appliquées contre elle ; c'est ce quia fait dire les divisions extérieures aiguës et les intérieures obtuses, tandis qu’elles sont toutes semblables. Jusqu'après l’anthèse elles ont au bas de leur ligne dorsale une protubérance incolore, ovoïde- lancéolée, plus prononcée sur les extérieures, diminuant sur toutes à mesure que le périgone se dessèche. Capsule oblongue brusquement atténuée en une pointe de longueur un peu variable (pl. V, fig. 11, « ) et plus prononcée sur les tiges radicantes assez sujettes à l'avortement des graines. Il y a donc impossibilité à considérer le J. Fontanesii comme une variété du J. lampocarpos. COMPARAISON DU J. ACUTIFLORUS, DU J. STRIATUS ET DU d. ANcEPs. — Les J. striatus, acutiflorus et anceps ont un mode de propagation identique ; la structure générale de leurs rhizomes est également identique, et les différences ne se montrent que dans lesdétails et les proportions. Ainsi, le J. acutiflorus (pl. V, JUNCUS À FEUILLES CLOISONNÉES 145 fig. 8) a ses rhizomes plus gros, beaucoup plus longs et plus persis- tants que les deux autres; ainsi encore la zone externe est sur le J. striatus (pl. V, fig. 6) presque égale au tiers du rayon et parta- gée en deux couches égales, dont l’intérieure lacuneuse; — sur le J. acutiflorus (de l'Hérault, des D.-Sèvres, de l'Eure, du Bas-Rhin) égale ou supérieure à la moitié du rayon; couche extérieure réduite, l'intérieure avec lacunes très-grandes, et la zone interne a jusqu’à son centre des faisceaux trés développés (pl. V, fig. 8). — Sur le J, anceps (d'Alger, d'Arles, de la plage de l'Hérault, de la Nièvre etc.), la zone externe est égale au sixième du rayon, avec petites lacunes, et la zone interne n’a guère qu’un rang de fais- ceaux contre la ceinture de fibres hémicyeliques (pl. V, fig. 10). Les tiges et les feuilles du J. striatus, déjà décrites p.142? et 143. et fisurées pl. VI, fig. 18 à 20, présentent de telles différences avec celles du J. acutiflorus (pl. VI, fig. 25 à 27), que toute compa- raison de détail entre ces deux espèces devient inutile. Sur le J. acutiflorus, la tige, à peine comprimée, montre des assises de tissu incolore avec lacunes entre ses deux rangs de faisceaux, dont les plus intérieurs sont presque isolés, tant il y a peu de fibres libériformes; quelques-uns même sont épars dans le tissu central. Sur le J. anceps, au contraire (pl. VI, fig. 29), la tige est ancipitée avec angles prononcés, les assises de tissu inco- lore sont contre les cellules à chlorophylle et les deux rangs de faisceaux sont accolés contre une ceinture très-forte de tissu libériforme. La simple vue des coupes des feuilles lisses et presque cylin- driques du J. acutiflorus (pl. VI, fig. 25 et 27), et de celle du J. anceps (pl. VI, fig. 28 et 30) comprimées et carénées jusqu’à présenter un contour sublriangulaire sinueux, anguleux, rend superflue toute autre comparaison de détail. La capsule du J. anceps (pl. V, fig. 9, a et b), beaucoup plus courte que celle du J. acutiflorus (pl. V, fig. 7 a et b), n’est point longuementeffilée , mais elle est, comme celle du J. lampocarpos, brusquement atténuée au sommet qui dépasse à peine le périgone. Les divisions extérieures de celui-ci sont les plus longues, si rap- 146 MÉMOIRES ORIGINAUX. prochéesentre elles et si étroitement appliquées qu’elles recouvrent presque entièrement les autres. Sur le J. acutiflorus, au contraire, les mêmes divisions sont les plus courtes, les moins recourbées en dehors et sont écartées entre elles, même à leur base. Ainsi, c’est précisément du J. acutiflorus, auquel on l'avait réuni, quele J. an- ceps s’écarte Le plus par la forme de la capsule et des divisions du périgone, aussi bien que par la structure de ses feuilles, de ses tiges et de son rhizome. Dans leur port et leur aspect général, ainsi que dans l’en- semble de leur constitution anatomique, les trois dernieres plantes que nous venons de comparer présentent tant de ressemblances, qu'on est porté invinciblement à les considerer comme dérivant - originairement d’un même type. D'autre part, elles ont des diffé- rences extérieures constantes, et comme elles en offrent de non moins constantes dans la disposition de leurs éléments, dans leur HISTOTAXIE, elles paraissent avoir droit à être considérées comme constituant aujourd’hui des espèces bien séparées. L'examen ana- tomique me paraît propre à fournir, dans les cas douteux, un puissant molif de décision. J'en trouve un autre dans les variations parallèles qui se montrent sur les espèces congénères. J’ai consigné ci-dessous celles que m'a présentées l'étude suivie de ce groupe de Juncus; elles ont pleinement confirmé les vues que je soumettais aux botanistes, il y a sept ans (Bull. Soc. bot. de Fr., tom. XII p. 196- UE à 7. RÉSUMÉ. JUNCUS A FEUILLES CLOISONNÉES ; VIVACES. À. Se propageant par stolons. J. supinus Moench, Enum. Hess., p. 296, tab. 3 (1777). a Tiges jeunes, non stolonifères, un peu gazonnantes, étalées; «Culmo erecto humiliore» Willd. — J. supinus Moench. B Tiges décombantes, radicantes et prolifères. « Culmo folioso »repente, ad florum glomerulos prolfero. » — J. uliginosus Roth, Tent. fl. germ., IL. p. 405 et 406. | JUNCUS A FEUILLES CLOISONNÉES 147 Tiges allongées et flottantes — J. fluitans Lam. Dict. enc., lan. US à Six étamines; capsule plus courte, plus ventrue, subdépri- mée au sommet — J. nigritellus Koch Syn. edo 1*, p. 730 (non Don), ramené par l’auteur au J. supinus (Syn-eds,3;, p.632). Chaque forme varie à glomérules petits et gros. J. xereropuyLLus Duf. — Varie à tiges fluitantes et à tiges dressées. J. Fonranesir Gay. — Plante à stolons longuement rampants et radicants — J. repens Req. in Guérin, Descr. Vaucl. (1813); nom princeps. æ glomérules petits et nombreux. B glomérules gros et peu nombreux. B. Se propageant par rhizomes. J. Lampocarpros Ehrh. a glomérules nombreux et petits; forme la plus ordinaire. B glomérules peu nombreux, très-gros. J. tricephalos Gay, in Lah. Hon. Jonc., p. 44; J. macrocephalus Viv. Diagn. Cors., p, 5; Boreau, 1° Not. Cors., p. 9. - tiges couchées et radicantes. C'est à cette forme que Laharpe, o. c., p. 37, rapporte le J. repens DC., F1. fr. VI, p. 308; rame- nant à tort le J. repens Req. de l’herbier de Gay au J. acutiflorus Ehrh. à forme un peu fluitante — v*® fluitans Koch Syn. edo 3* p. 633, à laquelle M. Duby ( Bot. gall., p. 477) rapporte à tort le J. heterophyllus Duf. J. srriaTus Schsb. in Meyer Syn. Junc., p. 27; Grenier F1. fr., III, p. 346 (excel. syn.)— J. asper Sauzé Cat. Deux-Sèvr., p. 52. a glomérules petits et nombreux. B glomérules 3-5 plus gros. J. AcuTIFLORUS Ehrh. a Anthèle assez dense, brune. B Anthèle dense, brune, à glomérules plus gros; capsules à 148 MÉMOIRES ORIGINAUX. bec moins long— J. brevirostris Nees ab Es., in Bluff Comp. fl. gernm:, ed° 12, p. 884. 7 Anthèle très-diffuse, pâle et presque verte — v*® pallescens Koch. J. ANGEPS Lah. « Anthèle diffuse; glomérules petits. B Anthèle plus dense; glomérules moins nombreux, plus gros, à fleurs quelquefois disposées sur quatre rangs. J. ALPINUS Vill. x Anthèle diffuse; glomérules petits et noirs — J. fusco-ater Schreb.; J. atratus Hoppe; J. alpestris Hartm. B anthèle réduite = J. nodulosus Wahlbg. glomérules pâles = J. rariflorus Hartm. J. oBTUSIFLORUS Ehrh. æ Anthele très-diffuse, à rameaux réfractés; glomérules petits et nombreux. 3) B Anthèle resserrée; rameaux dressés; glomérules gros et peu nombreux. Ainsi, de deux choses l’une : Ou bien il fautériger en autant d'espèces chacune des variations présentées parallèlement par ces types qui conservent au-dessous": d'elles une organisation identique ; Ou bien il faut admettre que, avec la persistance de cette or- ganisation fondamentale, il y a pour chaque type possibilité de - subir des variations extérieures, variations qui se reproduisent parallélement et à peu près les mêmes sur chacun d'eux, parce que les combinaisons des conditions extérieures doivent aussi, dans une même période, se reproduire à peu près les mêmes et amener ainsi sur des types congénères des modifications parallèles. A notre avis, l’hésitation n’est pas possible. Mais, les pièces du procès élant réunies, il appartient aux compétents de les exami- , ner, de les apprécier et de se prononcer. Montpellier, le 20 mai 1872. De Fc À Fus Motel Revue des Sciences Naturelles », mais seulement pendant une certaine période. Nous reviendrons plus Join sur ce point. Milne-Edwards‘, tout en reconnaissant la valeur du système de Baudelot sur le développement complet des spermatozoïdes dans la glande hermaphrodite, fait pourtant observer que, pour accepter cette théorie, il faudrait que l’on eût constaté la destruc- tion des spermatozoïdes qui accompagnent les œufs depuis leur entrée dans l’oviducte; car, toujours suivant le même auteur, il y a anastomose entre cet crgane et la partie du canal déférent qui lui est attenante *. Nous répondrons à cette objection que l’on peut dire qu'à parlir de l'origine de la gouttière déférente, les corpuscules mâles suiventune autre voie que le produit femelle; jusqu'alors incomplet. En effet, l’anastomose qui existe entre le conduit déférent et l’oviducte est d’une nature particulière, et la communication entre ces deux parties n'a lieu que lorsque les bords de l’origine du demi-canal, comprimés dans leurs contrac- tions par un corps assez gros pour exercer Sur eux une pression, un ovule par exemple, se séparent sous cet effort ; de sorte qu'à l'exception de ce cas, la rainure est exactement close par ses bords qui chevauchent l’un sur l’autre. Il se produit ici un phé- nomène analogue à celui que présentent les Mammifères rumi- nants dans la conformation de leur appareil digestif, phénomène sur lequel nous reviendrons tout à l'heure. Un fait vient en outre à l’appui de notre manière de voir. Chez ious les Gastéropodes à orifices confondus, et surtout chez ceux à 4 Lecons de physiol. et d'anat. comp., tom. IX, ?e part., pag. 365, 1870. 2 Loc. cit., pag. 362. APPAREIL GÉNÉRATEUR DU G. HELIX. 299 orifices séparés, la même portion du canal excréteur n’adopte pas dans toute son étendue la forme d’un demi-eanal et n’est pas du- ranttout son trajet accolée à l’oviducte. Déjà, en 1837, Verloren ! avait signalé chez la Limace cendrée cette particularité remarqua- ble. La structure et la position de cet organe, que dans ce cas on ne peut nommer goutlière déférente, ont été constatées par Moquin-Tandon* et par Baudelot’, et relatées par Milne-Edwards lui-même, dans ses Leçons de physiologie et d'anatomie compa- rée*. Dans cette espèce, le repli déférent se soude à 1 1/2, quelquefois à 2 centimètres de l’orifice de la glande de la glaire, et forme un canal complet qui se sépare en ce point de l’oviducte pour ne plus le rejoindre. Ne pourrait-on pas, d'autre part, tirer de l’hermaphroditisme incomplet du genre Helix une preuve rationnelle à l’appui de la preuve expérimentale de la nature spéciale, dans ce genre, de l’anastomose en question ? Le passage des spermatozoïdes à travers les parois du canal elferent est manifeste. On trouve au temps du rut une quantité innombrable de ces corpuscules dans le contenu de ce conduit ; ils nagent dans un liquide albumineuX, sécrété par des cellules qui se trouvent placées le long de cet organe, surtout vers l’épi- didyme *. Le plus grand nombre est isolé et adopte les positions les plus { Commentatio de organis generationis in Molluscis Gasteropodis pneumo- nicis. Lugduni Batavorum, 1837. 2 Moquin; Loc. cit., tom. I, pag. 194, et pour le même organe chez le Planorbis contortus, pl. XXXI, fig. 26. — Voir pag. 52. 3 Baudelot; Loc, cit., pag. 52, pl. IL, fig. 17. 4 Tom. IX, 2e part., pag. 352 et 353, et note 1. 5 Ces cellules sans nucléus sont surtout apparentes dans le canal efférent de la Testacella haliotidea Le Zoniles candidissimus présente une particularité très-remarquable. A 4mm de la glande de la glaire, le canal efférent, qui mesure 23" de longueur, est accompagné de grosses glandes rondes ou un peu ovales. Ces glandes, qui sont visibles à l'œil nu, sont au nombre de 18 à 22. Leur coloration , blanchâtre ou jaunâtre, devient rougeâtre à l’époque des amours; nous ne saurions les consi- dérer comme des diverticulums du canal excréteur. 300 MÉMOIRES ORIGINAUX. variées ; on en distingue qui présentent l’extrémité caudale repliée plusieurs fois sur elle-même en forme de cercle d’un diamètre plus grand que celui de la cellule mère dans laquelle ils se sont produits. Cette position se rencontre déjà dans l’organe hermaphrodite. On voit aussi quelques-uns des corpuscules mâles dégagés de la cellule qui leur servait de capuchon dans cette glande et encore réunis en faisceaux partiels parallèles. La présence des cils vibratiles dont sont garnis la paroi interne des cœcums de la glande hermaphrodite et les bords du conduit excréteur, suffit pour expliquer, indépendamment de toute moti- lité de leur part, la cause du transport des spermatozoïdes. On a constaté en effet que ces cils se meuvent des parties profondes de l’appareil générateur vers les parties plus extérieures ‘. À partir du bout terminal du canal efférent, les corpuseules spermatiques vont prendre une voie autre que les ovules. En effet, ils suivent la gouttière déférente*, qui n’est que la conti- nuation du canal, tandis que les ovules arrivés au niveau de cette même gouttière vont tomber dans l’oviducte. La direction différente que prennent en cet endroit les pro- duits des deux sexes est ur fait acquis, mais dont personne, que nous sachions, n’a été témoin. Cependant, n'y aurait-il pas dans la série animale quelque groupe qui présentât, dans un point de son organisation, une particularité comparable à celle que nous offre en cette partie l'appareil générateur des Hé- lices ? Le système digestif des Mammifères ruminants, qui nous semble construit d’après un plan analogue , ne pourrait-il pas nous servir à nous rendre compte de ce fait °? 1 Lacaze-Duthiers a constaté la direction de dedans en dehors de l’épithélium ciliaire des conduits excréteurs des Acéphales lamellibranches.— Quelques auteurs pensent que chez les animaux supérieurs ce mouvement a lieu en sens inverse ; d'autres révoquent en doute l'existence de cette sorte d’épithélium chez ces der- niers animaux. À 2 Nous avons déjà dit que l'anastomose entre cet organe et l'oviducte est d’une nature particulière. Pour plus de détails, voir à la chute des ovules. 3 Cette manière de voir a été adoptée, dans ses conférences pour la licence, par M. Jourdain, professeur à la Faculté des sciences de Montpellier. APPAREIL GÉNÉRATEUR DU G. HELIX. 301 On sait que lorsqu'un de ces animaux « avale des aliments grossiers et d’un certain volume, comme ceux dont ils se nour- rissent habituellement, ces substances, arrivées au point où l’æsophage se continue sous la forme d’une goultière, écartent mécaniquement les bords de ce demi-canal transformé ordinai- rement en un tube par la contraction de ses parois, et tombent dans les deux premiers estomacs placés au-dessous ; mais, lors- que l’animal avale des boissons ou des aliments atténués et demi- fluides, leur présence dans ce demi-canal ne détermine pas l'écar- tement de ses ‘bords. Gette portion terminale de l’œsophage conserve par conséquent la forme d’un tube et conduit les ali- ments eu totalité ou en majeure partie dans le feuillet où elle se termine". » De même, chez les Hélices, les spermatozoïdes, d’un volume bien inférieur à celui des ovules, qui ont acquis leur entier déve- loppement, peuvent passer du canal efférent dans la gouttière déférente qui s’unit avec lui sans exercer une action sur les parois de ce dernier organe ; dans ce cas, le demi-canal déférent, dès son origine, remplit les fonctions d’un canal complet, et les corpuscules spermatiques jouent le même rôle que les boissons et les aliments atténués dans la digestion des Mammifères rumi- nants. Baudelot a démontré, par des considérations anatomi- ques sur lesquelles nous reviendrons, qu’à sa naissance le calibre de la gouttière déférente était capillaire. Le Limaæ cinereusne fait pas exception à cette règle, car chez cette espèce la gouttière déférente n’abandonne l’oviducte, pour se transformer en un canal complet, qu'à 1 1/2 ou ? centimètres au-dessous de l’orifice de la glande de la glaire. Cependant, il doit arriver que des spermatozoïdes, profitant de l’écartement des bords de la rainure produit par le passage des ovules, suivent ces derniers et tombent avec eux dans l’oviducte; de sorte que l'élément mâle et le produit femelle se rencontre- ront à l’état complet dans cette portion de l'appareil généra- oo 1 Milne-Edwards; Éléments de zool., pag. 429. 1834. 1e 24 302 MÉMOIRES ORIGINAUX. teur, où, d’après la majorité des auteurs, comme suivant nous, s'effectue la fécondation. Notons que ces spermatozoïdes n’ont pas encore traversé les organes destinés à leur faire perdre leur motilité. La destruction de ces corpuscules sera-t-elle une con- séquence de leur chute dans l’oviducte du sujet dans là glande hermaphrodite duquel ïls ont été formés? Nous ne saurions accepter cette manière de voir. Pourquoi le même organe d’un individu contiendrait-1l une substance délétère pour les spermato- zoïdes produits dans son propre corps, tandis qu'elle n’exercerait aucune action nuisible sur ceux produits dans le corps d’un autre sujet? L’imprégnation des ovules doit donc être opérée par les spermatozoïdes qui les ont accompagnés dans leur passage dans l'oviducte. Dans ce cas exceptionnel, l'hermaphroditisme ne sera pas relatif, mais absolu. Toutefois, ce fait se produira assez rare- ment, à cause de la migration des spermatozoïdes antérieure à celle des ovules. Ne serait-ce pas là un moyen de faire rentrer sous l’applica- tion de la loi générale, qui veut que l’action de l'élément mâle sur le produit femelle soit nécessaire pour la création d’un indi- vidu, quelques-uns des cas de parthénogénèse des Hélices rap- portés par les auteurs ? Revenons au cas normal. Continuant à opérer leur descente à travers la gouttière déférente, les spermatozoïdes, sans qu'il soit besoin d’invoquer d'aulres causes que des causes physiques, s’acheminent vers le canal déférent inférieur; mais durant ce trajet, la prostate déférente proprement dite, qui tapisse de ses glandes les parois du demi-canal dans lequel ils sont engagés, vient, par leur orifice capillaire, mêler au sperme le produit de sa sécrétion el exercer une influence notable sur la motilité don jouissaient les corpuscules mâles dans le canal efférent ‘. L'observation démontre que par son action le fluide albumi- neux fourni parles glandes dont est composé l'organe en question, 1 Fischer; Étude sur l2 spermatophore des Gastéropodes pulmon. (Ann. se. nat., 4e série, tom. VII, pag. 361. 1857.) APPAREIL GÉNÉRATEUR DU G. HELIX. 303 loin d'augmenter la motilité dont jouissaient les spermatozoïdes dans le canal efférent, produit sur eux un effet contraire : il les englue. Sans indiquer son action, Baudelot décrit très-exactement les caractères de ce liquide chez l’Æelix pomatia. Ainsi que nous l'avons dit dans notre Étude anatomique, le canal de chacune des glandes de ia prostate débouche dans la souttière déférente, et non pas dans l’oviducte. Ge fait est mani- feste chez la Limace cendrée, où la continuation du canal excréteur de l'organe hermaphrodite se détache de l’oviducte en formant un canal complet. D'ailleurs, l’état de motilité dont jouissaient les spermatozoïdes dans le canal efférent, et qu’ils perdent dans l’organe qui lui fait suite, n’est pas un fait unique chez les Gasléropodes. Il se re- trouve encore chezles Céphalopode:. Chez ceux-ci, en effet, une fois que les corpuscules mâles ont quitté le canal vecteur de la glande dans laquelle ils se sont produits et même dansla portion inférieure de ce dernier conduit, ils commencent à perdre leur motilité et sont agglutinés en une sorte de cordon, bien avant qu'ils ne soient arrivés au lieu de production du spermatophore *?. Dans le capreolus de certaines espèces, en voit très-distincte- ment le fluide prostatique, d’une densité moins grande que la substance qu'il renferme et séparé d'elle par une ligne de démar- cation marquée, surnager dans la partie supérieure de cet appendice *. Baudelot, dans son remarquable travail, n’a pas indiqué l’état des spermatozoïdes dans leur trajet à travers la gouttière déférente: il s'est borné à constater qu'ils avaient des caractères identiques à leur passage dans le canal excréteur de la glande hermaphrodite 1 Baudelot; loc. cit., pag. 42. 2 Voir, pour le spermatophore des Céphalopodes, Milne-Edwards; Observat. sur divers mollusques. (Ann. sc. nat., ?e série, tom. XVIII, pag. 346. f842.— Ibid., Physiologie et anatomie comp., tom. IX, 2e partie, pag. 333, 334, 335 et 336. Paris, 1870.) 3 Ce fait est surtout appréciable dans le capreolus du Zonites algirus. (Noir E. Dubrueil ; loc. cit,, pag. 41.) 304 MÉMOIRES ORIGINAUX. du sujet fécondant et dans la poche copulatrice du sujet fécondé, après la dissolution du capreolus. Il ne reste plus au sperme, pourarriver au fourreau de la verge, qu'à parcourir la dernière portion du canal qu'il à suivi depuis qu'il a quitté le lieu de sa formation. Les contractions des parois musculaires de ce conduit, déponrvues de cils vibratiles, facilitent à la semence l'æcès à la gaîne du pénis. Ainsi que nous l'avons vu, le canal déférent inférieur ne vient que dans un petit nombre d'espèces aboutir au sommet de la pre- mière partie du fourreau de la verge; il en est en général séparé par la deuxième portion. De plus, chez loutes les espèces du genre Helix qui ont le four- reau de l’organe mâle entièrement développé, et chez quelques- unes de celles qui ne possèdent pas de flagellum, on rencontre l'appendice connu sous le nom de capreolus. Le capreolus est un vérilable spermatophore : ilest destiné à servir de véhicule au sperme dans les parties femelles. Mais son rôle nous paraît se borner là : nous ne pensons pas qu'il ait pour effet, malgré quelques particularités de structure qu'il présente chez quelques espèces, de rendre le rapprochement sexuel plus intime. En admettant que les dentelures obliques dont ce corps est parfois muni s’opposer.t à sa sortie de la poche copulatrice de l’un des sujets, 1l est certain que cette même direction ne l’em- pêcherait pas d'abandonner la verge de l’autre. Nous dirons, avec Lister, que ces denticulations ont pour effet principal de retenir le capreolus dans la partie femelle. D'ailleurs, leur état de tu- méfaction et quelquefois même leur conformation suffisent pour que les deux pénis ne puissent pas sortir des deux vagins. Le produit de la sécrétion de la prostate proprement dite, versé dans la gouttière déférente et qui exerce une action si remarqua- ble sur les spermatozoïdes à leur passage, n’est pas destiné à pro- duire le spermatophore: cette fonction est réservée à la substance sécrétée, soit par la deuxième, soit par la deuxième et la troi- sième partie du fourreau de la verge, soit enfin, dans des cas irès-rares, par une portion du canal déférent inférieur. La mem- APPAREIL GÉNÉRATEUR DU G&. HELIX. 305 brane glandulaire qui revêt ces organes est chargée de ce rôle. Mais les spermatozoïdes n’affluent-ils seulement dans l’intérieur du capreolus qu'après son entière formation? L'expérience dé- montre le contraire. En contrôlant sur l’Æelix vermiculata les expériences de Moquin-Tandon sur l’Æelix tristis', relatives au lieu de création Gu capreolus, nous avons vu de nombreux soermatozoïdes parmi les éléments de eclui-ci?. La formation du spermatophore est occasionnée, suivant le pro- fesseur Jourdain”, à l'opinion de qui nous nous rangeons, par une action réflexe due à la présence du liquide mâle. D’après Milne- Edwards, ce corps se forme autour d’un amas de sperme à peu près de la même manière que l’albumen et les membranes extérieures de l'œuf se forment autour de l’ovule*. Quel est le rôle physiologique des canuelures qui existent le long de la deuxième et de la troisième partie du fourreau de la verge, ou de la deuxième seulement quand la troisième man- que ? Sont-elles uniquement destinées à la formation du capreolus? La réponse à cette question est pour nous à l’état de doute. En effet. le phénomène observé par Moquin-Tandon sur l’ÆHelir tristis, et par nous sur l'Aelix vermiculata, lors de la formation du sper- matophore, se produit aussi chez l’Aelir pisana, dépourvue de cet appendice. On sait que, dans cette espèce, iln'y a ni flagellum, ni capreo- lus ; le fourreau Ge la verge aboutissant terminalement au canal déférent inférieur ne se compose que de deux portions mesurant” ensemble 24 à 25%, Dans la saison des amours, à une hauteur de 12 à 14m à partir de la base de la verge, on remarque, sans entamer le fourreau, une matière d'un blanc opaque quis’étend jusqu'à la jonction de celui-ci avec le canal déférent. Si l’on ouvre la gaine du pénis, on voit cinq rangées de cannelures peu 1 Moquin-Tandon ; loc. cit., tom I, pag. 229. 2 Voir, dans le même sens, Fischer ; Loc. cit. 3 Compt.-rend. Acad. scienc. 30 octobre 1871. 4 Milne-Edwards; Ann. sc..nal., tom. XVIII pag. 346. 1842. 5 La verge, à l'étatde repos. mesure 5 1/2 millimètres. 306 é MÉMOIRES ORIGINAUX. prononcées et décrivant des ondulations qui naissent à un poin du fourreau situé à l’extrémité supérieure de la verge. Ces can- nelures deviennent de plus en plus apparentes en remontant vers le lieu d’origine de la matière blanche, leurs contours onduleux se transforment en angles très-aigus dont les sommets vont quel- quefois aboutir dans l’espace circonscrit par les côtés des deux angles subséquents des cannelures voisines. Parfois quelques cannelures supplémentaires { 3 ou 4) se produisent. Enfin, à peu de distance du canal, ces dernières sont tellement recou- vertes de molécules solides que les angles s'émoussent et consti- tuent des replis arrondis. Par l’action d’un lavage, ces petits corps, qui sont agglomérés entre eux, se séparent et se réduisent en des particules très-ténues de forme rhomboédrique, faisant une vive effervescence avec l'acide chlorhydrique : ce sont des parcelles de carbonate de chaux. Les spermatozoïdes des espèces qui ne possèdent pas de capreolus sont aussi bien agglutinés par un certain mucus que les mêmes corpuscules des Hélices pourvues d’un spermatophore. La quantité de l’élément mâle nécessaire pour un accouple- ment est contenue dans l’intérieur de ce corps. Les préliminaires de l’union sexuelle qui consiste, dans le genre de Mollusques qui nous occupe, dans l'intromission des pénis, ont commencé ; la bourse génitale s’est déjà renversée, et le dard a joué son rôle excitateur ‘. Enfin, la verge, ordinaire- ment assez courte chez les Hélices, à l’aide de ses fibres se ren- verse comme un doigt de gant jusquà l'insertion du canal déférent inférieur, et est introduite dans les parties du sujet fonc- 1 Les fonctions du dard sont trop bien connues pour que nous insistions sur ce point.— Voir E. Dubrueil ; loc. cit., pag. 51, 52 et 53.— Dans une communication à l'Institut, postérieure à la publication de notre Étude anatomique (30 octobre 1871), le professeur Jourdain adopte l'opinion que le dard, une fois détaché, se reforme promptement. «Quelques heures, dit-il, après l'accouplement, on en aper- coit des rudiments, et peu de jours suffisent à sa reproduction complète. On peut donc, dans certains cas, par le degré de développement de ce stylet calcaire, juger approximativement du temps qui s'est écoulé depuis le dernier rapprochement sexuel. » APPAREIL GÉNÉRATEUR DU G. HELIX. 3507 lionnant comme femelle ‘. Le muscle protracteur, chez les espèces qui en sont munies, coopère aussi à cet elfet de rétroversion de l'organe mâle. Quant au flagellum, il ne sort pas du corps des Hélices qui en sont pourvues ?. Ce fait, confirmé par Moquin-Tandon”, avait déjà été signalé par Laurent”; déjà, depuis longtemps, il avait observé que cet organe, qu’il désigne sous le nom de fouet de la verge, ne se retourne « jamais pour sortir au dehors ». Après avoir franchi l'ouverture commune, c’est par l'ori- fice du vagin de l'individu jouant le rôle de femelle que va passer le pénis du sujet fonctionnant comme mâle. Cet organe y est facilement introduit, car il n’a pas encore pris toute l’exten- sion qu'il doit avoir ; ce n’est que dans le sac vaginal qu'il acquiert tout son développement; en effet, « la verge y est étroile- ment serrée et ne peut en être retirée qu’en faisant un effort * ». Les replis longitudinaux dont est muni le vagin permettent à celte portion de l'appareil générateur de contenir, en se déve- loppaut, la partie mâle. De plus, le fluide sécrété par les prostates multifides facilite l'intromission du pénis. Celles-ci, énormes avant la copulation, ainsi que l’a constaté Blainville *, se trouvent vides, comme flé- tries, immédiatement après cet acte. Cette observation, de la plus grande justesse, suffit pour réfuter l'opinion de ceux d'après lesquels ces organes serviraient à fournir la matière qui forme 1 On sait que, «à cause de la situation de leurs orifices, les pénis se croisent néces- sairement». (Moquin; loc. cit., tom. I, pag. 227.) 2 C'est à tort que Defrance dit « qu'on admet généralement que, dans l'accou- plement, il se retourne comme font les tentacules, et que par conséquent il devient extérieur». (Dict. sc. nat. 1821. HÉLices et LIMACES.) 3 Moquin,; Loc. cit., pag. 234. 4 Laurent ; Détermin. des organ. génit. des Hélices. (Ann. franç. el étrang. d'anat. et de physiol., tom. I, pag. 267.) 5 Laurent; loc. cit., tom. II, pag. 258. — Voir E. Dubrueil; loc. cit., pag. 54. 6 Blainville; Voir Moquin, Loc. cit., tom. 1, pag. 231. Laurent nous parait s'être mépris en disant que les prostates multifides étaient plus volumineuses à l'époque du passage de l'œuf dans la cavité du vagin. (Loc. cil., tom. I, pag. 262.) 308 MÉMOIRES ORIGINAUX. la coque des œufs '; ces derniers n’effectuent leur descente qu'un temps plus ou moins long après l’accouplement. De Siebold se demande si les prostates multifides ne seraient pas destinées à fournir la matière du capreolus. Nous avons fait connaître le lieu de formation de ce dernier; de plus, les rapports anatomiques de ces prostates ne nous semblent pas permettre _cette hypothèse. Enfin, d’après Moquin-Tandon, «les Arions, qui n’ont pas de vésicules multifides, produisent un capreolus?». Le spermatophore se retrouve chez la plupart des Bulimes et des Maillots, qui ne possèdent pas non plus de prostates du même ordre. La longueur de ce corps, en général proportionnelle à celle du flagellum, démontre son véritable lieu de formation. Le liquide sécrété par les prostates multiformes et multifides, qui ne renferme jamais de spermatozoïdes, répond au dire des auteurs qui voient dans ces organes des testicules. Une fois arrivée dans le vagin, la verge* pénètre jusqu’à son sommet de facon à être coiffée par l'extrémité inférieure du canal de la poche copulatrice, qui vient s’insérer en cet endroit terminal : on sait, au contraire, que l’oviducte naît en général d’un point plus ou moins latéral du même organe. Enfin, quand elle a pris une position convenable à une bonne fécondation, par l’effet de ses contractions puissantes, par la nature de ses membranes, elle agit sur le capreolus et le fait entrer dans le conduit de la poche séminale. Suivant Moquin-Tandon#, « on a remarqué que le canal de la vessie à long col paraissait en proportion avec la verge »,....... «surtout si l’on prend pour l'organe mäle tout son fourreau, y a { Tout en leur attribuant une fonction erronée, Laurent caractérise justement les organes en question en les considérant commeles prostates du vagin. (Loc. cit., tom. I, pag. 255.) 2 Moquin; loc. cit., tom. I, pag. 232, Note 1. 3 Moquin-Tandon a dit au contraire «que la dissection lui a montré que cette partie se trouvait engagée dans le col de la vessie. » (Loc. cit. tom. I. pag. 233.) % Moquin; loc. cit., tom I, pag. 233 et Note 1. APPAREIL GÉNÉRATEUR DU G. HELIX. 309 compris le flagellum ». Cuvier avait fait déjà la même SUPpOsi- tion que quelques espèces, et entre autres l’Helix pisana, viennent démentir. En effet, cette dernière est dépourvue de flagellum et de capreolus, et à une verge qui mesure seulement 5 1/2 à 6 millimètres (au repos) ; elle possède pourtant une poche copula- trice petite, obovée, portée par un canal de 21 millimètres a® longueur. À 9 millimètres au-dessus du vagin, naît une branche copulatrice plus longue que le conduit de la vessie séminale. Dans la description de l’accouplement des Hélices et dans la figure qu’il en a donnée dans son Mémoire, remarquable à plus d’un titre, sur la détermination des organes génitaux de ce genre de Mollusques, Laurent' nous semble s’être trompé en représentant l’extrémité de la verge accolée au point d’origine de l’oviducte. Cuvier pensait que cette dernière pénétrait « dans la matrice, ou au moins vis-à-vis de la vessie ». Chez les espèces qui ontune branche copulatrice, le capreolus est-il introduit indifféremment dans le canal principal ou dans le canal accessoire ? Nous ne le pensons pas, car nous avons tou- jours trouvé chez les Æelix aspersa ouvertes peu de temps après la copulation, le spermatophore inséré dans le diverticulum. Quelques auteurs nous paraissent dans l'erreur en disant que le capreolus est logé dans la vésicule copulatrice. La majeure partie de celui-ci reste dans le canal de cette poche, et dans certaines espèces munies d’une branche copulatrice, c’est en partie dans ce diverticulum qu'il s’insère. Quelles sont les fonctions de la poche copulatrice? Ainsi qu'on l’a dit depuis longtemps, elle est un réservoir, un lien de dépôt pour les spermatozoïdes. Mais ses attributions ne se bornent pas (à. Parmi les nombreuses hypothèses qui ont été proposées sur son rôle, la suivante nous semble la mieux fondée. Cet organe a surlout pour mission de rendre leur motilité aux corpuscules mâles. Or, pour produire cet effet chez les sujets munis d’un capreolus, 1 Laurent ; loc. cit., tom. I, pag. 258, et PL, VIIL, fig. 1. 310 MÉMOIRES ORIGINAUX. elle sera forcée de dissoudre ce dernier; nous avons dit qu'il était composé surtout d’albumine et d'une faible quantité de carbonate de chaux. Parlant, la substance propre à agir sur la matière sécrétée par les glandes de la prostate déférente est aussi te à exercer une action sur le spermatophore. Qu'on ouvre en effet une poche ou une branche copulatrice renfermant des fragments de ce corps. on fera sur ces fragments les observations suivantes : ces débris plus ou moins longs ne présentent pas à leurs extrémités une cassure comme celle qui résulte d’une rupture ; au contraire, les deux bouts de ces por- tions du capreolus sont atténués, c’est-à-dire moins épais que leurs parties médianes. Cette atténuaion n’est-elle pas due à l’ac- tion d’une substance qui a agi chimiquement sur le spermatophore pour le dissoudre ? Lorsqu'il pénètre, par exemple, dans la branche copulatrice de l’Helix aspersa, on voit se produire dans ce canal plusieurs dilatations inégales; «vient-on à ouvrir ce tube, on constate qu'au niveau des points dilatés, la matière amorphe s est ramol- lie, gonflée, et comme fluidifiée' ». | Mais nous n'avons point constaté à l’intérieur de la poche copulatrice la présence d’une membrane glanduleuse destinée à fournir cette matière dissolvante. D'où peut donc provenir cette dernière ? Nous répondrons que, de même que « chez l’homme et chez un grand nombre d'animaux le liquide des vésicules sé- minales parail être un produit d’exhalation de la muqueuse, car on ne rencontre pas, en général, dans celle-ci d'éléments glan- dulaires ? » ; de même, chez les Hélices, le liquide du canal de la poche et de la branche copulatrice nous semble fourni par une des membranes qui entrent dans la constitution de leur conduit. La substance contenue dans la poche copulatrice elle-même ne 1 Baudelot ; loc. cit., pag, 50, ? Liégeois; Trailé de physiol. appliquée à la médecine et à la chirurgie, pag. 204. 1869. APPAREIL GÉNÉRATEUR DU G. HELIX. S11 nous paraît pas chargée de dissoudre le spermatophore. Dans les espèces qui ont une branche copulatrice et dans lesquelles le capreolus à pénétré dans cette derniere, il est réduit en fragments aussi bien que chez celles où il s’est logé dans le canal principal. Baudelot dit, avec raison, que ce liquide est sécrété par les parois du tube *. D'ailleurs, si l’on ouvre une Hélice peu de temps apres la copulation, on verra la poche très-yonflée, distendue par un liquide blanchâtre; la substance savonneuse, rougeàtre, qui semble spéciale à cet organe, y existe bien, mais en quantité minime. Ce ne sera que longtemps après que le capreolus aura été fragmenté, que le volume de cette matière augmentera et deviendra appréciable. Moquin-Tandon se demande si elle ne serait pas produite par la décomposition de quelques spermato- zoïdes ?. Comme nous l'avons dit plus haut, la destruction du capreolus est un fait accessoire dans les fonctions du canal de la poche copulatrice ou de son diverticulum: le rôle principal de ces organes consiste à rendre leur liberté aux corpuscules mâles. Chez tous les androgynes à orifices confondus, il existe une vessie séminale donnant souvent naissance à une branche plus ou moins longue. Toutes les espèces ne sont pas pourvues d’un capreolus : l’Aelix pisana en est un exemple”. 1 Baudelot ; loc. cit., pag. 50. 2 Voir Moquin,; loc, cit., pag. 236, note 1.—Chez une Helir aspersa dont l'ac- couplement avait cessé depuis environ trois heures, la poche copulatrice, disten due par un liquide blanchâtre, mesurait 5 millimètres de diamètre A travers ses parois , on apercevait dans son intérieur une petite tache rougeätre. Le capreolus inséré dans la branche copulatrice était déjà réduit en fragments ; à une hauteur de 2 centimètres au-dessus du point d'origine du diverticulum, on voyait une dilata- tion qui renfermait un morceau du spermatophore long de 6 1/2 millimètres. 3 Chez les Lépidoptères, dont l'organisation nous est connue, il résulte des recherches de M. Cornalia qu'un double rôle est dévolu à la poche copulatrice: elle reçoit le sperme éjaculé par le pénis, et elle rend leur liberté etleur motilité aux spermatozoïdes entourés d'une substance enveloppante. (Voir Milne-Edwards ; Physiol. et Anai. comp., tom. IX, 1re part., pag. 208.) Nous sommes arrivés au même résultat pour les Hélices que M. Cornalia pour les Lépidoptères. 312 MÉMOIRES ORIGINAUX. Ainsi, la dissolution du capreolus peut seule mettre en li- berté les spermatozoïiles. Cependant il existe un autre mode de structure du spermato- phore chez les espèces dans lesquelles ce corps est construit sur le type qu'il affecte dans le Zonites algirus. Son extrémité infé- rieure', lorsqu'il est inséré dans la poche copulatrice, .se recour- bant en arc de cercle, va s'introduire de 3, 4, et même 5 milli- mètres dans le col de l’oviducte, dépourvu, chez cette espèce, de muscle transverse. Cette position, que dans notre Étude anatomi- que nous ne savions comment expliquer, n'est pas le résultat du hasard : la capreolus l’adopte chez tous les sujets dans lesquels son introduction est terminée. Une matière visqueuse, blanchài- tre, assez abondante, dont la quantité augmente si l’on exerce une pression sur le capreolus, enveloppe l'extrémité de ce corps, qui est perforée. Portée sur le champ du microscope, cette matière présente une infinité de spermatozoïdes. C'est par l’action de la membrane musculaire du canal copula- teur, musculaire chez quelques Hélices, conjonctive chez quel- ques autres, que la sortie de l'élément mâle est facilitée. Nous devons pourtant dire qu’on trouve aussi des spermato- zoïdes aux endroits où la dissolution du capreolus est opérée, mais que cette dissolution est plus tardive que chez les espèces du genre Helix. Remarquons que chez le Zonites algirus, le capreolus sécrété par la partie large du canal déférent inférieur suit ce canal, qui, lors du mouvement de rétroversion de la verge, l'accompagne et sort avec elle du corps de l’animal auquel il appartient. Le nom générique de prostate, sous lequel certains organes sont (iésignés, ne saurait être applicable à la plupart d’entre eux, car ils remplissent un rôle d’une nature bien différente. De l’aveu des auteurs les plus accrédités, on trouve en toute saison des spermatozoïdes plus ou moins nombreux dans la vessie 1 L’extrémité supérieure du capreolus, également perforée, présente une ouver- ture moins grande. APPAREIL GÉNÉRATEUR DU G. HELIX. 19 séminale. Ne peut-on pas voir dans ce fait une explication de certains cas attribués par quelques physiologistes à un état d’her- maphroditisme complet ou de parthénogénése ? N'est-il pas na- turel d'admettre que quelques spermatozoïdes ont séjourné dans la poche copulatrice et ne sont remontés dans l’oviducte pour fécon- der les œufs que longtemps après le délai ordinaire, de sorte « qu’un seul accouplement peut suffire à plusieurs fécondations'» ? Quoi qu'il en soit, après un séjour dont la durée normale nous paraît impossible à fixer, les corpuscules spermatiques, passant par le vagin, franchissent le sphincter de l’oviducte et remontent le long de cette portion femelle de l'appareil reproducteur. Notons que, même chez le Zonites algirus, la position de son capreolus démontre que la fécondation n’est pas vaginale. La présence manifeste (le l'élément mâle dans cette partie ré- pond suffisamment aux malacologistes qui ont pensé que le vagin était le lieu de la fécondation. «D'ailleurs, il existe beaucoup d’es- pèces où le vagin est tout à fait rudimentaire, presque nul, et ne saurail remplir conséquemment l'importante fonction dont il s’agit? .» Enfin, comme preuve d'une grande valeur, nous ajouterons que chez les Gastéropodes ovovivipares, dont l’appareil génital est constitué d’après un plan analogue, on trouve des petits tout formés dans les œufs contenus dans l’oviducte et possédant même une coquille rudimentaire. C'est done dans un organe supérieur au vagin qu'a lieu l’imprégnation. Bien des hypothèses ont été proposées pour expliquer le mou- vement ascensionnel des spermatozoïdes dans les parties géui- tales profondes de la femme et dans celles des animaux supérieurs; mais aucun de ces systèmes, applicables aux Mollusques, ne nous semble rendre un compte suffisant de ce phénomène. L'influence 1 Baudelot ; loc. cil., pag. 104 et 105. 2 Moquin,; loc. cit., tom. I, pag. 236. — Lacaze-Duthiers nous dit, dans son Mémoire sur le Pleurobranche, que «très-probablement le même animal ne peut se suffire; le sperme déposé dans la poche copulatrice doit fécoader les œufs à mesure qu'ils sortent». 314 MÉMOIRES ORIGINAUX. d'une des causes le plus généralement admises, la capillarité, nous paraît d'autant plus difficile à invoquer à l’appui de ce mou- vement des corpuscules spermatiques, que son action serait com- battue par l'effet de la direction des cils vibraliles dont l’oviducte des Hélices est tapissé'. Il nous parait plus naturellement s’expli- quer, indépendamment de la vitalité des spermatozoïdes et d’une vis à tergo, par les mouvements du système musculaire général et surtout de ceux de cette partie de l'appareil générateur. Ces mouvements contractiles sont opposés à ceux qui amènent l’œuf dans le vagin, mais il n’y a rien de contradictoire dans ces con- tractions en sens inverse”. Une fois qu'ils sont parvenus au sommet de l’oviducte propre- ment dit, les spermatozoïdes ont accompli leur trajet. C’est en effet dans cet organe, ainsi que nous allons le démontrer, que s'opère l’imprégnation des œufs. (La suite au prochain numéro.) 1 Liégeois, acceptant cette cause et partant de cette observation de Coste, «que, chez les Crustacés décapodes et les Mollusques céphalopodes, les spermatozoïdes sont complètement dépourvus de motilité ou la perdent dès qu'ils pénètrent dans les organes maternels», en conclut «que leurs mouvements si remarquables doi- vent s'appliquer à un autre but que celui de leur propulsion vers les parties géni- tales profondes, et que ces mêmes mouvements sont nécessaires pour pénétrer dans le micropyle». (Liégeois ; Loc cit., pag. 284, 285 et 286.) Nous nous réservons d'examiner plus loin cette question. 2 Courty; De l'œuf dans l'espèce humaine, pag. 84 et 85. 1845. NOTE sur UN GISEMENT NOUVEAU DE DIATOMACÉES DANS LE TERRAIN QUATERNAIRE DES ENVIRONS DE ROME: Par MM. GUINARD et BLEICHER. Les alluvions quaternaires des environs de Rome ont fail l’objet des recherches de nombreux géologues, parmi lesquels nous devons citer MM. Ponzi, de Rossi, Rusconi, Ceselli, Pigor- rini, de Verneuil, de Mortillet, frère Indes, Gosselet, Falco- ner', etc... [résulte de leurs recherches que dans l’étroite vallée du Tibre et jusque vers son embouchure, on trouve les restes d’une faune extrêmement riche en Mammifères, en Oiseaux, en Reptiles, en Mollusques terrestres ou d’eau douce, apparte- nant, soit à des espèces contemporaines, soit à des espèces émi- grées ou éteintes. Jusque dans ces derniers temps, il n'avait été fait mention de végétaux fossiles que dans les travertins de Tivoli; les plantes qu'on y avait reconnues appartenant toutes à la flore actuelle du pays, et soit au Dicotylédones herbacées ou arborescentes, soit, plus rarement, aux Monocotylédones. Nous pouvons aujourd hui ajouter à cette flore un genre nou- veau : celui des Algues diatomacées, dont il existe un gisement remarquable au milieu des alluvions quaternaires qui bordent la route de Rome à Ostie, à quelque distance au sud de l’Osteria di Malafede. L'âge de ce dépôt semble établi par les coquilles palustres et terrestres quaternaires qui s’y rencontrent et par la présence, dans les gravières sous-jacentes aux Diatomacées, de 1 Bulletin de la Soc. géologique de France. — Annales de l'Institut archéolo- gique de Rome. — Atti de la Societa de nuovi lyncei. — Bullettin de la Société d'Histoire naturelle de Colmar, etc... passim. 316 MÉMOIRES ORIGINAUX. nombreux restes de l'Elephas meridionalis et de l’Hippopotarus major. , L’étendue et l'épaisseur de ce gisement ne nous sont pas con- pues, car il a été découvert en septembre 1872 sur un échan- tillon de la collection du terrain quaternaire que nous avons rapportée de Rome en 1866 et donnée au musée de la Société d'Histoire naturélle de Colmar. Aussi est-ce seulement au point de vue des conditions spéciales de ce dépôt, dans le delta du Tibre, et au point de vue de la détermination des espèces de Diatomacées qui s’y trouvent, qu'il est possible de l’étudier actuellement. Les marnes qui contiennent ces algues microsco- piques sont grises, jaunâtres, feuilletées; elles présentent au tou- cher une sensation particulière qui permel, jusqu'à un certain point, d’affirmer la présence de la carapace siliceuse de ces infi- niment petits, sans l’aide du microscope. Nous pensons qu'il faut les mettre sur le même niveau que ces puissants amas de marnes jaunâtres, à faune lacustre et terrestre à la fois, qui dominent les gravières du Tibre à Ponte-Molle, celles de l'Anio à Sainte-Agnès. Ce sont probablement les représentants du lehm, ou loess de la vallée du Rhin. Quoi qu'il en soit, il paraît établi que vers la fin de la période quaternaire, le régime des lagunes d'eau douce s’étendait jusqu'à une dizaine de kilomètres du rivage actuel, et c'est probablement à l'abri d'un cordon lit- toral déjà formé, et sur les bords d'un fleuve déjà en partie endigué, que les Diatomacées ont vécu. Elles paraissent avoir pullulé, car notre savant collaborateur résume ainsi qu'il suit ses recherches micrographiques sur ces marnes à Diatomacées. «Ce dépôt de marnes quaternaires des environs d'Ostie ne le cède pour la richesse des Diatomacées à aucuue terre fossile que nous avons été à même d'examiner, telles que celles de Santa- Fiora, de Müll, de Bilin, d'Auvergne, etc., etc... Nous y avons noté 20 genres et 41 espèces. Les genres Eunotia, Gomphonema, Synedra et Pinnularia, sont ceux qui se présentent le plus fré- quemment à l'œil de l'observateur. Quelques échantillons ren- contrés accidentellement sous le champ du microscope nous ont GISEMENT NOUVEAU DE DIATOMACÉES. 317 paru nouveaux ou du moins être des variétés. Nous n'avons pas voulu pourtant prendre sur nous de les nommer, laissant ce soin à une plume plus autorisée que la nôtre. Parmi ces derniers, nous citerons un Cocconeis remarquable par les grandes dimen- sions de ses valves. Il n’est, selon nous, qu’une variété du Cocco- neis pediculus. Nous l’avons rencontré au nombre de deux ou trois frustules dans chaque préparation. I n’est pas rare aussi, lorsqu'on examine un grand nombre de préparations renfermant des Diatomacées, de rencontrer plusieurs frustules présentant des cas tératologiques plus ou moins accu- sés. M. de Brébisson, le savant et regretté algologue, avait déjà rassemblé plusieurs faits de ce genre; nous possédons plusieurs dessins représentant des cas analogues. Nous avons observé deux de ces anomalies dans l'examen de cette terre d’Ostie. Le premier, un Epithemia turgida, présentait sur le côté dorsal une dépression infundibuliforme atteignant presque la moitié de la valve. Le second se rapporte à un Æimantidium Arcus dont la courbure du frustule faisait plus que le demi-cercle. Voici la liste des principaux genres et espèces que nous avons remarqués. Epithemia turgida (W. Sm.). — granulata (Kütz.). _ zebra (Kütz.). — sorex (Kütz.). — ventricosa (Kütz.). Eunotia monodon (Ehrb.). Cymbella affinis (Kütz.). — ventricosa (Kütz.). Amphora ovalis (Kütz.). Cocconeis pediculus (Ehrb.). Cyclotella kutzingiana (Thw..). Tryblionella angustata (W. Sm.). Cymatopleura solea (W. Sm.). Nitzschia palea (W. Sm.). Navicula semen (Kütz.). — gibberula (Kütz.). _— Amphirhynchus (Ehrb.). 1. 2? 318 MÉMOIRES ORIGINAUX. Pinnularia major (W. Sm.). — viridis (W.Sm.). — radiosa (W. Sm.). — gibba (W. Sm.). — acrosphæria (W. Sm.). Stauroneis phæœnicenteron (Ehrb.). — punctata (Kütz.). Synedra radians (W. Sm.). _ ulna (Ehrb.). — capitata (Ehrb.). Cocconema cymbiformis (Ehrb.). — cistula (Ehrb.). Gomphonema constrictum (Ehrb.). — acuminatum (Ehrb.). —_ cristatum (Ralfs.). — dichotomum (Kütz.). — intricatum (Kütz.). Himantidium arcus (W. Sm.). — gracile (Ehrb.). Fragilaria undata (W. Sm.). Achnanthidium lanceolatum (de Bréb.). Melosira varians (Agardh). Orthosira arenaria (W. Sm.). — punctata (W. Sm.). Nous devons aussi mentionner la présence de spicules d’é- ponges; ils ont beaucoup de ressemblance avec ceux qu’on observe dans la terre fossile d'Oran, qui est un dépôt marin. Leur grand développement les rapprocherait de leurs congénères des espèces marines. Selon nous, ce dépôt quaternaire s’est effectué d’une manière calme et uniforme pendant unelongue période d'années. Les espè- ces qui se rencontrent le plus abondamment sont justement celles qui aiment les eaux calmes et tranquilles. Un grand nombre d’espèces vivent encore dans les cours d’eau qui environnent les localités de Montpellier. Parmi celles que nous avons trouvées le plus fréquemment, nous devons citer : l'Epithemia zebra, la Cimbella ventricosa, l’'Amphora ovalis, le Cocconeis pediculus, le Cyclotella Kutzingiana, la Cymatopleura GISEMENT NOUVEAU DE DIATOMACÉES. 319 solea, le Nüzschia palea, la Navicula gibberula, les Pinnularia viridis, radiosa et gibba, le Stauroneis phænicenteron, les Synedra radians, ulna et capitata ; les Cocconeis cymbiformis et cistula. Toutes les espèces de Gomphonema , les Himantidium arcus et gracile, ainsi que l’Achnanthidium lanceolatum. Enfin, le Melo- sira varians vit en abondance dans nos eaux douces. ÉTUDES DE GÉOLOGIE PRATIQUE DANS LES ENVIRONS DE MONTPELLIER. (PASSAGE DU JURASSIQUE AU CRÉTACÉ. — Suite ). Par le Dr BLEICHER, Répétiteur à l'École de médecine militaire de Montpellier. Dans une première étude consacrée à la géologie des environs de Montpellier ?, les étages jurassiques supérieurs , indiqués par nous, se bornaient au corallien, dont la faune, très-remar- quable, avait fourni un grand nombre d'espèces fossiles au bois de Valène, près de Murles. Au-dessus du corallien venait immé- diatement « l'horizon intermédiaire entre le terrain jurassique et le terrain crétacé», tithonique supérieur des Allemands, caractérisé par Ammonites carachteis, colubrinus, etc. , auxquelles il faut ajouter actuellement la Terebratula dyphia. I n’était point ques- tion d'horizon jurassique supérieur au corallien, quoique MM. Co- quand et Boutin aientindiqué dès 1869 la présence probable du kimméridgien dans la montagne de Thaurac, près de Ganges. Des recherches, commencées vers la fin de l’année dernière et continuées cette année-ci, nous permettent maintenant de faire un pas de plus que les savants géologues dont nous venons de 1 Voir le numéro de juin 1872. 2 Revue des sc. nat., tom. I, pag. 70. 3 Bull. Soc. géol., tom. XX VI, pag. 854. 320 MÉMOIRES ORIGINAUX. parler, etde montrer qu'il existe en effet un horizon jurassique supérieur au corallien, que l’on peut caractériser par sa lithologie et sa paléontologie, et dont il est possible de tracer les limites supérieure et inférieure. C’est aux environs de Ganges surtout que cet horizon, qui cor- respond à celui de l’Ammonites tenuilobatus de Baden (Suisse), se développe sur de vastes surfaces, et forme des massifs monta- gneux d’une grande importance. I constitue à lui seul les flancs gauche et droit de la vallée qui s'ouvre à l’est de Ganges, et se relie au corallien vers les extré- mités du vallon de Cazilhac. Si, partant de ce point et se diri- geant suivant la ligne A B de la Carte, on fait une coupe orientée’ ouest-est jusqu'au vallon de Montouliers, on relève les couches suivantes, dont l'épaisseur est indiquée approximativement. 1° Limite inférieure. Calcaire blane (C') plus ou moins com- pact, sans traces de stratification, avec Diceras Escheri, Munsteri, Terebratula moravica Glock, Cidaris bavarica, etc”; 2° Calcaire compact, ruiniforme, plus ou moins dolomnitique, (G'), sans traces de stratification, excepté dans les bancs supé- rieurs, avec Polypiers, Cidaris, Terebratules indéterminables..… 100 mètres; 3° Calcaire compact gris, souvent lithographique, en bancs bien réglés de 50 à 60 centimètres , avec Ammonites subfascicularis d'Orb., 4. Lothari Opp., 4. Compsus? Opp., 4. Staszycii Zeuschn., Aptychus, Terebratules, Placunopsis, indéterminés...., 80 à 100 mètres ; 4° Calcaire souvent dolomitique, gris, compact, subcristallin, avec Polypiers abondants, Terebratules, Huîtres exogyrales indéter- minées....,. 30 mètres; 90 Calcaire marneux, gris, en dalles, bien stratifié, souvent lardé de rognons siliceux avec 4. Lothari, A. subfascicularis, 1 La carte d'état-major de cette partie du département n'étant pas dans le com- merce, nous n'avons pu, à notre grand regret, faire de coupes à l'échelle. ? Bull. Soc. géol., tom. XLVI, pag. 844. GÉOLOGIE DES ENVIRONS DE MONTPELLIER. 921 rares Ammonites, Belemnites, Aptychus, Terebratules, Hinnites ? indéterminés.... 70 mètres. Les divisions 3, 4, 5, sont surtout developpées sur la rive gauche de l'Hérault, dans le massif de la montagne de Thaurac, entre la Roque et Saint-Bauzille, tandis que les divisions !, 2, affleurent surtout sur la rive opposée ; mais la zone à Polypiers, 4, se ren- contre sur les deux rives. Elle passe de l’une à l’autre (coupe n° 2) en conservant à peu près le même niveau. Cest, selon nous, une sorte de retour à la phase corallienne dont les dépôts sont si développés au fond et sur le flanc gauche du vallon de Cazilhac. Il est à regretter que les fossiles y soient si mal con- servés au milieu de la roche ; les rares espèces que nous avons de ce banc paraissent avoir des affinités avec les espèces coral- liennes inférieures. L’horizon à 4. tenuilobatus, qui est formé par les divisions 3, 4, 5, du tableau précédent, affleure encore, comme nous l'avons dit plus haut, sur le flanc droit de la vallée qui s'ouvre à l’est de Ganges, et au lieu dit Camp de bataille, à mi-chemin de Ganges et de Sumène, le long de la voie ferrée en voie de con- struction. On y trouve‘ en abondance les fossiles que nous venons de citer. Si la limite inférieure à l'horizon à 4. tenuilobatus est indiquée nettement aux environs de Ganges, il n’en est pas de même de la limite supérieure, qui jusqu'ici n’a pu être tracée d'une ma- nière évidente que dans les environs de Sainte-Croix-de-Quintil- largues, à 20 kilomètres nord-est de Montpellier. Notre coupe n° { indique en ce point la succession suivante des terrains : Horizon à A. tenuilobatus (3, 4, 5, du tableau précédent), (1 de la coupe). Calcaires marneux ou lithographiques en dalles, souvent lardés de rognons siliceux avec À. subfascicularis, A. Lothari, À. Stas- zycù, Placunopsis; épaisseur inconnue... 1 Nous devons à l’obligeance de M. Michel, employé du chemin de fer à Ganges, une collection de fossiles venant de ce point. 322 MÉMOIRES ORIGINAUX. 6° Calcaire gris en dalles, souvent bréchoïde, à rognons sili- ceux, avec Terebratula dyphia, Ammonites carachteis, A. Staszycüi, 4. colubrinus, etc..., 10, 15 mètres : 70 Calcaire marno-schisteux, gris jaunâtre, en bancs minces, avec Ammonites Calisto, A. occitanicus, etc., du néocomien in- férieur. Ce deuxième tableau est donc le complément du précédent, et la couche n° 6 est probablement la première qui se soit déposée après la période de l’Ammonites tenuilobatus. Nous la regardons comme immédiatement inférieure aux calcaires marneux dans lesquels MM. Boutin et Coquand ont indiqué la T. UD avec la faune néocomienne (Cisterne', Carte). Les limites supérieure et inférieure de cet horizon établies, il reste à démontrer qu'il est possible de le distinguer de l’oxfor- dien, avec lequel on peut le confondre aisément. En effet, suivant M. le professeur Paul de Rouville *, cet étage se compose de haut en bas des assises suivantes : « 10 de marnes grises feuille- tées ; 2° de calcaires gris bleuâtres, plus ou moins compacts, en bancs netlement stratifiés; 3° de calcaires gris plus clairs, mas- sifs, devenant quelquefois dolomitiques. Le corallien spathique forme sa limite supérieure». Les assises n° 1, ordinairement sur- montées de calcaires marneux ou sublithographiques en dalles, cor- respondent à l'horizon de l’Amm. transversarius de la Suisse, car on y rencontre les fossiles suivants : Amm. plicatilis d'Orb., A. arolicus Opp., 4. canaliculatus Opp., 4. crenatus Brug., A. cor- datus, A. tortisulcatus, Pseudodiadema areolatum Ag., Apty- chus, etc., Belemnites hastatus, etc..., qui appartiennent à la faune argovienne. Partout où cet horizen aïfleure, les fossiles ne sont pas rares, et ce sont presque partout les mêmes. En effet, sur le causse de Campestre au sud-ouest d’Alzon (Gard), où en certains points le faciès à seyphia de l’argovien est très-développé, d’après les recherches de notre ami et collaborateur M. Julien (de la Salle), les mêmes Ammonites et Bélemnites se retrouvent pour 1 Bull. Soc. géol., tom. XXVI, pag. 847 et suiv. 1869. 2 Thèse de géologie, pag. 32. 1892. GÉOLOGIE DES ENVIRONS DE MONTPELLIER. 323 caractériser la faune. Il est donc le plus souvent possible de faire la distinction entre l’oxfordien et l'horizon à A.tenuilobatus. Le fait de l’existence, dans nos régions, d’un horizon jurassique supérieur autre que le corallien, n’est d’ailleurs pas isolé; il se relie à la découverte faite par M. Julien (de la Salle) et nous-même d'un gisement de fossiles appartenant au type séquanien, sur le Larzac, entre les deux villages du Couderc et de la Portalerie (Aveyron). En ce point, on trouve les fossiles suivants, déterminés par les soins de M. Bayan, de l’École des mines : Ærogyra brun- trutana Th., Terebratella substriata Schlot, Goniomya sulcata Ag., Mytilus, Arca, Terebratula, Rynconella, Cidaris, Apiocrinus indéterminés. C’est, jusqu’à un certain point, le faciès séquanien combiné au faciès corallien, et il serait permis de se ranger à l'opinion de MM. de Loriol et Tombeck ‘, qui admettent que ces deux types peuvent se remplacer. Quoi qu'il en soit, il paraît établi que les mers de la période jurassique supérieure ont subi de nombreux changements dans la nature de leur fond et dans la configuration de leurs bords. C'est ainsi que nous pouvons nous expliquer, avec la plupart des géologues modernes, l’alternance dans nos régions de puissants dépôts coralliens compacts, sans traces de stratification, avec des dépôts non moins puissants de calcaires marneux ou lithographiques bien stratifiés, dans lesquels dominent les Céphalopodes. Ce dernier ordre de choses, qui correspond à l'horizon à A.tenuilobatus, paraît avoir prédominé vers la fin de la période jurassique, et le passage au néocomien s’est fait dans ces condi- tions. Mais nous ne pouvons affirmer que dans le midi de la France il ne sera pas possible de trouver des couches peut-être lacustres (portlandien) entre cet horizon et les calcaires à Dyphia. En effet, dans l'intervalle du dépôt de ces deux derniers hori- zons, il s’est passé un long espace de temps pendant lequel la mer paraît avoir changé de place, car les premières strates néo- 1 Descript. géol. et paléont. des étages jurass. de la Haute-Marne, tom. XVI, Soc. linnéenne de Normandie. 1872. 324 MÉMOIRES ORIGINAUX. comiennes sont, partout où on peut les observer, en contre-bas des strates jurassiques supér'eures; celles-ci ont été le fond etles bords des bassins où se déposaient les calcaires à Terebratula dyphia de la Cisterne, comme il est facile de le voir sur notre Carte. Dans ces conditions, le néocomien inférieur, en y comprenant les couches à T. dyphia et Amm. carachteis, s’est déposé en stratification discordante ou transgressive sur son substratum jurassique. Il est même à remarquer que celui-ci,'plus ancien, est souvent horizontal, alors que la craie inférieure, plus récente, est plus ou moins relevée, plissée et quelquefois redressée verti- calement ‘. Il paraît évident que cette disposition qu'ont prise les deux terrains, l’un par rapport à l’autre, a dû être l’œuvre d’une longue période de temps, pendant laquelle il y aurait eu, soit exhaussement lent des derniers dépôts jurassiques, soit dénuda- tion après recouvrement du jurassique par le néocomien, soit abaissement du niveau de la mer; dans tous les cas, modification considérable dans la distribution des terres et des mers. La paléontologie nous vient peu en aide pour la solution de ce problème, car la seule espèce commune jusqu'ici à l'horizon à À. tenuilobatus et à l'horizon à A. carachteis, qui est l'A. Stas- zycii, ne suffit pas pour indiquer les relations de ces deux faunes entre elles. De nouvelles recherches sont donc nécessaires pour compléter l'étude des faunes de cesdivers horizons. Les seuls faits établis d’une manière positive sont : 1° la présence dans les environs de Ganges de près de 300 mètres de couches jurassiques supérieures au corallien proprement dit; 20 la présence de cet horizon dans la partie méridionale du département de l'Hérault, au-dessous des couches à Terebr. dyphia; 3° son indépendance complète, au point de vue paléontologique, de l’oxfordien, qui est l'étage jurassique s’en rapprochant le plus par sa lithologie. 1 Ce fait remarquable, indiqué dans nos coupes { et 2, est le résultat de l'écra- sement des roches schisteuses peu résistantes du néocomien contre des arc-boutants résistants du jurassique, à la suite de violentes actions dynamiques dirigées, selon toutes probabilités, suivant l'orientation E.-0. du système des Pyrénées. Tom! pl X. Revué des Siences Naturelles. COUPE IDÉALE N°1 de S'Bauzille de Montmel à S°Croix de Quintillargues OUEST = S'Croix de Quintill arçgues S'Bauzille de Montmel è TS 0 _a {Couches à Amm. tenuilobatus—2{ouches à T dyphia- 5 Néocomien ÉSSAI D'UNE CARTE CÉOLOGIQUE des terrains jurassiques supérieurs des environs de Ganges [Echelle delassini/EÆA horizon à À Lenuilobatus SS Coralhen Supérieur étinferieur xxx Localités fossiliféres … P Polypiers ; ES M NE De 7, _ Agonés MR) | UD 1 inter Jah 4 —_— COUPE IDÉALE N°2 suivant la flèche AB, de la carte 1 et ? même signification que dans la coupe précédenle, cs etez Corallien supérieur etmferieur. P, horizon à Polypiers Hérault Bleicher. del. Litk Boehm &fils, Monip* REVUE SCIENTIFIQUE. TRAVAUX FRANÇAIS'. — Zoologie. Les trois premiers numéros du tome XVI (v° série) des Annales des sciences naturelles, parus en août dernier, renferment un Mémoire sur le développement des Phalangides de M. Balbiani, déjà connu par d'importants travaux sur les Infusoires et les Aphidiens. Depuis les recherches de Hérold (1824) sur le Développement des Araignées, et de Rathke (1837) sur l'Évolution des Scorpions, plusieurs Mémoires intéressants ont été publiés sur l'Embryologie de la classe des Arach- noïdes : nous rappellerons ceux de J. Kaufmann sur les Tardigrades, de van Beneden et Claparède sur les Acariens, de ce dernier natu- raliste sur les Araignées, de Metschnikoff sur les Chelifer, de van Beneden, Schubart et Leuckart, sur les Linguatules, et enfin de Dorhn sur les Pycnogonides. Les renseignements manquent encore sur plusieurs groupes: les Phalangides sont dans ce cas, et l’on sait seulement, par quelques observations de Gerstäcker, que les Faucheurs sont vivipares et que les petits naissent dans un état peu avancé de développement. M. Balbiani a eu en sa possession des œufs d'une espèce de Fau- cheur ; malheureusement, une circonstance fortuite l'a empêché de saisir les premières phases de l'évolution embryonnaire, et il n’a pu que retracer l'histoire de la période qui précède immédiatement l’éclosion. À Les œufs de l'espèce indéterminée examinés par M. Balbiani mesuraienten moyenne {mm ,? de diamètre. Ils possédaient une double enveloppe : l'une externe, le chorion, mince et résistante, sans appa- rence d'ouverture micropylaire ; l’autre interne, plus épaisse, sans structure discernable, et dont la signification ne peut être encore rigoureusement déterminée. L'embryon, protégé par cette double membrane, était arrivé à la dernière période de la vie embryonnaire : le corps, en effet, avec tous ses appendices, se montrait parfaitement formé. Le jeune animal était recourbé en arc, les membres repliés, 1 Sont assimilés aux travaux français les travaux étrangers publiés dans un Recueil périodique français. je 2 \ 326 REVUE SCIENTIFIQUE. comme l'indique avec détail et le figure l'auteur, de manière à se loger dans l'étroit espace que lui offre la cavité intérieure de l'œuf. A ce moment, les différents zoonites qui constituent le corps de l'em- bryon sont nettement dessinés, mais le céphalothorax nest pas encore distinct de la région abdominale. En avant du tubercule oculifère, sur le milieu du premier segment céphalothoracique, se voit une saillie aiguë, qui doit disparaître à la premiere mue, et que l’auteur regarde comme analogue à celle qu'on observe chez d'autres Articulés, les Puces en particulier, où elle paraît aussi être employée à fendre les membranes de l'œuf. Le premier segment du céphalothorax, qui résulte probablement de la coalescence de quatre zoonites, comme Claparède en a acquis la preuve chez les Araignées, porte trois paires de membres: lès chéli- cères ou antennes-pinces, les appendices palpiformes et la première paire de pattes ambulatoires. Les trois paires de pattes suivantes occupent respectivement les trois segments qui porteraient alors les numéros », 6 et 7. M. Balbiani a constaté en outre la présence de pièces épimériennes rudimentaires, dont l'existence était controversée. Il importait d'étudier avec détail chacun des appendices de la région thoracique, dont la signification est encore fort obscure. Le mode d’in- sertion des chélicères ou protognathes vient confirmer l'opinion de Grube, Newport et Blanchard, qui, se fondant sur l’origine des nerfs reçus par ces appendices, ont voulu y retrouver les représentants anatomiques des antennes. En effet, dans les plus jeunes embryons observés par M. Balbiani, les chélicères sont insérés à la partie supérieure et antérieure de la tête, au-dessus de l'orifice buccal; ce n'est que plus tard que, par une sorte de glissement, ils viennent se placer immédiatement au-dessus de la bouche, simulant alors de véri- tables mandibules. En arrière des chélicères, on découvre une petite pièce médiane, triangulaire, qui représente le labre. Au-dessous du labre est placé un petit prolongement conique, impair, dont il est im- possible de préciser la signification. La valeur morphologique de la deuxième paire d’appendices est entourée de beaucoup d'obscurité : ce sont les palpes maæillaires de la plupart des auteurs, les pattes md- choires, d'après M. Blanchard. Pour ne rien préjuger, M. Balbiani les désigne sous le nom de deutognathes. La paire qui suit représente la première paire de pattes ambulatoires. L'article basilaire, ou coxite de la deuxième et de la troisième paire, a pris un développement parti- culier et constitue les deux principales paires de mâchoires des Fau- cheurs. Vers son insertion basilaire, le deutognathe montre deux petites éminences dans lesquelles l'auteur voit les rudiments des TRAVAUX FRANCAIS. — ZOOLOGIE. 321 branches accessoires ou parergopodites, qui chez Les Crustacés pren- nent un développement considérable. La branche principale ou pro- topodite rappelle la conformation d'une patte ambulatoire, et mérite bien le nom de patte déguisée que lui donne Savigny. La deuxième paire de pattes ambulatoires est principalement un organe de loco- motion, et accessoirement, par son coxite légèrement modifié, un instrument de manducation. Entre les points d'insertion de cette deuxième paire de pattes, et dépendant du sternite, naît une petite lamelle impaire qui paraît représenter la lèvre sternale des Aranéides. La troisième et la quatrième paire de pattes ambulatoires ne pos- sèdent plus d'article basilaire utilisé pour le service de l'alimentation : elles sont exclusivement locomotrices. Les observations de M. Balbiani, rapprochées de celles des auteurs qui se sont occupés de l’embryogénie des Arachnides, démontrent qu'il est impossible d'établir une loi générale touchant l’ordre suivant lequel se développent les différents appendices céphalothoraciques des Arliculés de cette classe. L'auteur s'occupe ensuite de la détermination homologique des appendices des Phalangides. Aïnsi quon vient de le voir, il y a de fortes raisons de considérer les chélicères comme les représentants anatomiques des antennes. Relativement aux deux paires qui suivent, M. Balbiani reste dans une prudente réserve en l'absence de consta- tations portant sur les premières phases de l’évolution ; il se borne à rapporter les différentes assimilations proposées par les zoologistes. M. Balbiani termine son Mémoire par la description du jeune Pha- langium éclos, lequel possède déjà bien constituées toutes les parties qui existent chez l'adulte. Les différents appendices ont leur nombre définitif de segments, sauf la région tarsienne, dont les éléments aug- menteront en nombre à chaque mue. Si le singulier prolongement en forme de corne qui surmonte la base de l'article terminal des chéli- cères, chez l'adulte mâle, n’a pas encore apparu, déjà l'on remarque chez certains individus une moindre longueur des pattes, quin'est autre chose qu'une différence sexuelle. Le vitellus a été vite absorbé; à la naissance, le jeune animal n'est point pourvu d’une réserve ali- mentaire, comme les Araignées : aussi le Phalangium, après son éclo- sion, meurt rapidement de faim s'il ne prend des aliments. Nous espérons que l’habile observateur dont nous venons d'analyser le travail aura la bonne fortune de retrouver des œufs de Faucheur, et pourra nous retracer l'histoire pleine d'intérêt des premières phases du développement embryonnaire. 328 REVUE SCIENTIFIQUE. — Le travail de M. Balbiani est suivi d'un Résumé des Recherches sur les oiseaux fossiles, par M. le professeur Alphonse Milne-Edwards, dont nous avons entretenu nos lecteurs dans le précédent numéro de la Revue, page 220. Le même savant décrit ensuite une nouvelle espèce de Tatou à cuirasse incomplète, qui lui avait été envoyé par M. Brunet, direc- teur de l'École d'agriculture de Fernambouc, et qu'il propose d'appe- ler Scleropleura Bruneti. — Aux deux notes de M. Alph. Milne-Edwards succède une notice de M. Théodore Lyman sur les Ophiures et les Euryales qui se trouvent dans les collections du Muséum d'histoire naturelle de Paris. L'auteur décrit un genre nouveau d'Euryale qu’il nomme Astrocnida, et dans lequel il fait rentrer le Trichaster annulata de Valenciennes, espèce originaire de la Guadeloupe; puis il signale une nouvelle espèce d'Asteromorpha, Ast. lævis. I] étudie en outre l'Hemieuryale pustulata, et démontre qu'il n'a aucune relation avec les Euryales, mais doit être rattaché aux vrais Ophiures à bras préhensiles. M. Lyman, ayant retrouvé dans la collection Michelin les originaux des Ophiures et des Euryales dont Duchassaing avait publié des diagnoses insuffisantes, est parvenu à donner de la plupart d'entre elles des déterminations précises. — La dernière partie du fascicule des Annales que nous passons en revue est occupée par un important travail de M. le D’ Jobert, consacré à l'étude de la structure des organes du toucher, et dont quel- ques points sont déjà connus de nos lecteurs. Dans l'Introduction, l’auteur indique que son Mémoire sera divisé en deux parties : l'une comprenant l'examen des organes actifs du toucher chez les Mammifères, les Oiseaux et les Poissons, l’autre réservée à l'étude des poils du tact, organes destinés à transmettre les effets de contact. Les corps particuliers destinés à la palpation et en rapport avec les nerfs cutanés sont de deux ordres : ou ils se rencontrent dans le derme, ou ils sont placés dans l’épiderme. Parmi les premiers, ceux qui sié- gent dans les papilles, où ils ont été découverts et étudiés par Meiïssner, Wagner et Krause, sont désignés sous le même nom collectif de bulbes terminaux. Les autres, placés dans l'épaisseur du derme, ont été appelés corpuscules de Pacini et de Vaier, du nom des anatomistes qui les ont fait connaître. Les corpuscules terminaux, dont M. Jobert rappelle la structure et TRAVAUX FRANCAIS. — ZO0OLOGIE. 329 quil ne paraît plus y avoir de raison bien valable de diviser, comme on le faisait, en corpuscules de Meissner et corpuscules de Krause, se rencontrent dans différentes régions du tégument de l'Homme, et se retrouvent dans les doigts des Singes de l’ancien et du nouveau conti- nent, ainsi que dans la queue prenante de ces derniers. Ils manquent chez les Makis, rangés à tort parmi les Quadrumanes. Ces mêmes cor- puscules s'observent également dans le bec et la langue des Oiseaux, où ils ont été étudiés par Herbst, qui les découvrit, puis par Leydig, Grandry , Michelson, Goujon, Ihdler , etc. Ils ne se montrent pas identiques à ceux de Vater, tels qu'ils existent dans la couche profonde du derme des Mammifères : ils s'en distinguent par l’exis- tence d’un espace situé entre l'enveloppe et le bulbe central , espace occupé par un lacis de fibres déliées que l'acide acétique fait dispa- raître. M. Jobert a repris l'étude approfondie de ces corpuscules : il les décrit avec détail dans le bec du Flamant rose, et il les indique dans un certain nombre de Palmipèdes. La langue des Oiseaux lui a offert également des dispositions intéressantes , et dans les papilles de cette partie il a retrouvé des corpuscules analogues aux organes du tact. Des corps à peu près identiques existent dans le tégument des doigts des Perroquets, Aras, Loris, Perruches, et paraissent faire défaut dans les espèces qui ne se servent point de leurs membres pos- térieurs pour la préhension. La constatation des terminaisons inter-épithéliales des nerfs tégu- mentaires occupe ensuite l'auteur. Ces terminaisons ont été signalées par un anatomiste allemand, Langerhans. D'un plexus nerveux sous- papillaire, on verrait se détacher des fibres isolées, qui franchiraient les limites extérieures du derme pour pénétrer dans la couche mu- queuse de Malpighi, et s'y terminer par des renflements en forme de boutons. Le même histologiste aurait en outre reconnu, dans les strates supérieures de la couche malpighienne, un grand nombre de corps étoilés en connexion avec les fibres nerveuses. Bien plus , un autre anatomiste, Conheim, a été jusqu à admettre dans la cornée, non-seulement un réseau nerveux entre les cellules épithéliales, mais encore des terminaisons flottantes au dehors, sous forme de cils courts. Rappelons que notre éminent micrographe, M. le professeur Robin, conteste l'exactitude des observations de Langerhans admises, il faut le dire, par.la grande majorité des histologistes d'Outre-Rhin. M. Jobert a bien retrouvé, surtout dans l’épiderme des Mammifères inférieurs, ces corps intra-épidermiques dont l'existence ne peut être révoquée en doute, mais il lui a été impossible de constater leurs rela_ tions avec les nerfs : il n'ose don: encore se prononcer à leur égard. 390 REVUE SCIENTIFIQUE. Les terminaisons nerveuses inter-épithéliales ont été reconnues chez les Mammifères, dans la langue en particulier, par Lôwen et Swalbe. En étudiant l'extrémité du museau de certains Insectivores et des Chauves-Souris, le boutoir du Tatou, les rostres de l'Échidné et de l'Ornithorhynque, M. Jobert a rencontré, à n'en pas douter, de petits corps ovoïdes inter-épithéliaux en connexion avec les nerfs. Nous ne reviendrons pas sur les minutieuses descriptions de l’auteur, en par- tie connues de nos lecteurs (Voir la Revue, tom. I, n° 1, page 82). Nous arrivons au chapitre le plus intéressant, et un des plus origi- naux, à coup sûr, de la thèse de M. Jobert: c'est celui dans lequelil est traité des organes du toucher des Poissons. Nos notions sur ces organes étaient encore très-imparfaites : quel- ques lignes à peine leur sont consacrées dans les traités d'anatomie comparée. M. Jobert passe en revue les travaux de ses prédécesseurs, puis il expose ses propres recherches. I] divise les organes du toucher actif en deux catégories : 1° les lèvres, leurs replis et les barbillons mous ou rigides ; 2° les membres modifiés. Avant d'entrer dans la description de ces parties diverses, M. Jobert a cru qu'il était bon de rappeler la structure de la peau. On sait que le derme des Poissons présente une apparence stratifiée caractéristique ; qu'il est traversé perpendiculairement par des faisceaux de fibres, comme l'a figuré Leydig ; que dans son épaisseur on rencontre des cellules pigmen- taires étoilées qui jouent le rôle de véritables chromatophores ; enfin que la plupart du temps il se prolonge en papilles simples ou compo- sées. En outre, une couche amorphe sépare le derme de l’épiderme, lequel se compose d'éléments cellulaires lâächement unis à la surface, mais plus cohérents à la face profonde, où ils deviennent prismatiques et s'engrènent avec le derme. Dans son épaisseur existent les cellules muqueuses étudiées par Schultze, puis des corps particuliers ovoïdes, reposant sur le fond des cupules dermiques, et dont M. Jobert donne une description détaillée. L'auteur fournit ensuite des détails nombreux sur les lèvres et les replis labiaux de plusieurs Poissons, Cyprins, Pleuronectes ; décrit la languette labiale de l'Uranoscopus scaber , et en fait connaître l'histo- logie. Puis il passe à l'étude des rayons mous, que d’après leur situa- tion il distingue en labiaux et nasaux. Ges prolongements s'observent plus particulièrement dans les Poissons qui se tiennent dans la vase. Il les décrit minutieusement chez les Barbeaux, où 1ls sont au nombre de quatre et recoivent leurs nerfs du trijumeau. On y retrouve des cellules muqueuses et des corps ovoïdes; le centre du prolongement est érectile, d'où sa turgescence possible sous certaines impressions. TRAVAUX FRANCAIS. — ZOOLOGIE. 331 Un paragrapheest consacré aux tentacules, c’est-à-dire aux prolon- gements, semblables aux barbillons, mais insérés sur le crâne. L'auteur en donne une description chez la Blennie quitorugine, où ils sont des plus remarquables ; il parle aussi des appendices foliformes des Bau- droies, des barbillons nasaux des Cyprins et des Motelles, et consacre quelques lignes aux boutons sous-maxillaires de l’'Umbrina cirrhosa, qui représentent comme un passage aux barbillons rigides dont il parle ensuite, c'est-à-dire aux prolongements pourvus d'un axe solide. M. Jobert les décrit soigneusement chez la Morue, en faisant remar- quer que les détails de structure qu'il indique se retrouvent chez plusieurs autres Gadoïdes. Il étudie également ceux du Mullus barba- tus, qui sont pourvus de muscles spéciaux, et dont l'axe ossifié peut être considéré comme un rayon branchiostége déplacé. Les Siluroïdes, si richement dotés sous le rapport des organes actifs du toucher, méritaient une attention spéciale : on trouve dans le travail que nous analysons une description de ces organes chez le Silurus glanis, le Pimelodus catus et le Saccobranchus Syngii. Les uns possèdent un axe osseux et des muscles moteurs, les autres ne présentent qu'une charpente centrale solide, formée de tissu conjonctif très-condensé, et sont ou non mis en mouvement par des muscles. Une partie du Mémoire est consacrée à l'étude des nageoires con- sidérées comme organes servant à percevoir volontairement les im- pressions produites par les corps extérieurs. Il nous est impossible, sans entrer dans des détails que ne comporte pas cette analyse, de suivre l’auteur dans l'examen qu'il fait du squelette, des téguments et des nerfs des nageoires de divers ordres, non plus que dans les descrip- tions détaillées qu il donne des rayons digitiformes des Trigles, des nageoires ventrales des Gadoïdes et des Phycis, des pseudo-barbillons de l'Ophidium, et des filets-pécheurs de la Baudroie. Aiïnsi que le dit l'auteur, il n'a pu que tracer l'ébauche d’un vaste travail d'ensemble dont les voyageurs pourront fournir les données plus complètes, car cest surtout dans les mers chaudes qu'il faut aller chercher ces types à organes tactiles si bizarres et si diver- sifiés. Dans le dernier chapitrede la première partie, nous trouvons quel- ques renseignements sur les terminaisons nerveuses inter-épithéliales et sur les corps ovoïdes de l'épiderme chez les Sangsues et quelques Mollusques. La seconde partie de la thèse est consacrée à des recherches sur les poils du tact."On nomme ainsi certains prolongements de la catégorie des phanères, en rapport avec les nerfs, et destinés à leur transmettre 4 DOS REVUE SCIENTIFIQUE. les effets de contact, On les rencontre dans les Mammifères, l'Homme excepté, et dans presque tous les Invertébrés. Un premier chapitre traite des poils du tact des Mammifères. Ils comprennent non-seule- ment les moustaches ou vibrisses, mais encore d'autres poils situés à la face, et ne se distinguant pas au premier abord des poils ordinaires. Au point de vue anatomique, on peut les diviser en poils à sinus san- guin et poils sans sinus sanguin. Parmi les premiers, il faut ranger ceux du boutoir du Porc, qui avaient échappé aux anatomistes, et ceux de la même région chez la Taupe. A leur base, ils sont entourés d’une sorte de collier nerveux qui rend leur sensibilité exquise. Parmi les poils dépourvus desinus sanguin, se placent ceux auxquels les expansions alaires des Cheiroptères doivent ce tact d'une si admi- rable délicatesse, qu'un observateur célèbre, Spallanzani, leur attri- buait un sens spécial. On sait, en effet, qu une Chauve-Souris rendue aveugle continue à éviter, en volant, les obstacles qui se trouvent sur son chemin. M. Jobert nous donne une étude approfondie des mem- branes aliformes et des prolongements nasaux de quelques-uns de nos Cheiroptères. Il en décrit scrupuleusement les muscles, les vaisseaux, les nerfs, les glandes et les poils. Il a entrepris de répéter les expérien- ces de Spallanzani et de Jurine. Il a constaté que les Chauves-Souris qu'on vient d'aveugler ne peuvent tout d'abord retrouver les issues er éviter les obstacles : elles commencent à voler avec précaution, comme si elles voulaient reconnaître les lieux. Mais un jour ou deux passés, et cette espèce d'éducation faite, elles évitent les obstacles avec une sûreté merveilleuse. Après la section des nerfs à leur entrée dans la membrane alaire, les animaux avaient un vol indécis et irré- gulier, ou même refusaient de prendre leur essor ; mais, pour bien mettre en évidence le rôledes poils alaires, il eût fallu obtenir une épi. lation complète, que M. Jobert n’a pu réaliser. [l nous fournit aussi des détails intéressants sur les usages de la membrane inter-fémorale. L'animal en repos la transforme en une poche pour recevoir sa proie, et la femelle, au moment de la parturition, y dépose le nouveau-né. Dans le dernier chapitre, nous trouvons de nombreux renseigne- ments sur les poils tactiles des Inver.ébrés, et plus spécialement des Insectes, poils signalés en premier lieu par Leydig, dans la larve de la Corethra plumicornis, et étudiés ensuite par Schôüdler, Hyks, Lespés, Claparède, Landois, Grimm, Lyman, etc. Le tégument des Articulés se compose de deux couches : l’une externe, chitinisée, traversée par des canaux appelés canaux poreux (Leydig), dilatés en ampoules à leurs deux extrémités ; l’autre pro- fonde, molle, formée ordinairement de cellules à grands noyaux. Chez TRAVAUX FRANCAIS.— ZOOLOGIE. SA les Diptères, on rencontre souvent une couche intermédiaire à grandes cellules pigmentées et très-résistantes. C'est sur la cupule externe des canaux poreux que s'insèrent le plus souvent les poils pleins ou creu- sés d'une cavité en communication avec le canal. M. Jobert a étudié les poils tactiles qui se trouvent à l'entrée des voies digestives chez plusieurs Insectes; il a principalement porté son attention sur la structure intime de la bouche chez certains Muscides. Il a constaté que les filets nerveux, avant d'atteindre la base du poil, se renflent en un corps pyriforme très-nettement délimité, dont l'extrémité se met en rapport avec cette même base. Ce renflement est formé d'une paroi contenant des cellules et une matière granuleuse; il est traversé, sui- vant son grand axe, par un filament à double contour d'une nature difficile à préciser, chitineuse suivant M. Jobert, nerveuse selon M. Landois. [ls fonctionnent, d'après l'auteur, comme un organe de transmission destiné à communiquer au système nerveux l'ébranlement venu du dehors. Ajoutons, en terminant le résumé de la thèse de M. Jobert, œuvre d'un mivrographe consciencieux et exercé, qu'elle est accompagnée de huit planches comprenant quatre-vingt-dix-neuf figures dessinées par l’auteur. — M. le professeur de Lacaze-Dulhiers publie le résultat de ses 1m- portantes recherches sur le Développement des Coralliaires. La pre- mière partie, comprenant le Développement des Actiniaires sans Polypier, a paru dans le deuxième et le troisième numéro des Archives de z0olo- gie expérimentale, que dirige ce savant. Dans l'Introduction, M. de Lacaze-Duthiers expose les idées de ses prédécesseurs sur le mode de succession et sur la symétrie des tenta- cules et des cloisons: il passe ainsi en revue les travaux si connus de M. Milne-Edwards et Jules Haime, ainsi que ceux de Hollard. D après ces savants, une loi très-simple présiderait au développe- ment successif des tentacules. Un premier cycle se forme, composé, par exemple, desix éléments, comme dans les Actinies; puis un second lui succède, dont les éléments occupent les intervalles des six pre- miers et sont par conséquent égaux en nombre à ces derniers. L’en- semble de ces deux cycles produit 12 intervalles inter-tentaculaires, dans lesquels on voit naître 12 tentacules. En raisonnant ainsi, on voit sans peine qu un quatrième cycle contient 24 tentacules, un cin- quième 48, etc. — Les cloisons correspondant à chaque cycle offrent un développement en rapport avec l'ordre d'apparition des tentacules entrant dans la composition de ce cycle. 334 REVUE SCIENTIFIQUE. Dans un travail récent (mars 1871), MM. A. Schneider et Botteken admettent une grande partie de la théorie classique, tout en n’accep- tant pas cependant certaines lois qu'ils qualifient de très-compli- quées. L'observation directe semble en effet venir à l’appui de cette théo- rie. Prenons une charmante Actinie de nos côtes françaises, le Bu- nodes gemmacea, bien développée et de taille moyenne: nous comptons 24 tentacules distribués sur 4 cycles, de quatre grandeurs différentes, et que tout naturaliste sera porté à noter comme l'indique la théorie (6 + 6 + 12 +24). Mais il ne suffisait pas de rencontrer la confirmation apparente de ces lois dans les individus adultes, on devait rechercher, par l'étude attentive de l'évolution de l'animal, suivi depuis l'œuf jusqu’au déve- loppement complet , que les tentacules apparaissaient en réalité comme l'indique la théorie, et que tout élément d'un cycle est formé en même temps que ses homologues. Tel a été le but des recherches poursuivies avec tant de persévérance et de sagacité par le savant professeur de la Sorbonne. Une première partie est consacrée à l'étude du développement de l’Actinia mesembryanthemum ou Act, equina, espèce très-répandue sur nos côtes de la Manche, et qui vit si facilement en captivité, que Dalyell en conserva une pendant vingt années. C'est sur la variété figurée par le naturaliste anglais que portent les observations dont nous allons donner l'analyse. Après avoir indiqué avec son soin habituel l'époque de la reproduc- tion (quin'est pas la même dans le type et dans la variété), le meilleur procédé pour récolter les embryons et le mode d'observation le plus favorable, l’auteur recherche si les sexes sont ou non séparés. Il résulte d'observations très-multipliées que l’hermaphroditisme est la condition la plus ordinaire. Gertains individus paraissent ou mâles ou femelles, mais il peut n'y avoir là qu'une apparence résultant de ce qu'une des glandes a cessé de fonctionner, et par suite n'est plus visible. La glande génitale se rencontre vers le milieu de la hauteur de ces replis rayonnants qui occupent le pourtour de la cavité générale.C'est entre les fibres musculaires et les cellules à granulations colorées qui entrent dans la composition de ces lames qu'on découvre des capsules dans lesquelles se développent les spermatozoïdes ou les ovules. Par la rupture’de ces capsules, les produits mâles et femelles sont versés dans la cavité générale. La vésicule germinative disparaît quand l'œuf est encore dans l'ovaire, où s'opère probablement la féconda- TRAVAUX FRANCAIS. — ZOOLOGIE. SU) tion. Malgré tout le soin qu'a pris M. de Lacaze-Duthiers, il na pu dans les Actinies saisir de visu le phénomène, pourtant si général, de la segmentation du vitellus. Dans l'ovaire, déjà le produit femelle doit être considéré comme passé à l'état d'embryon, montrant à sa surface des spicules coniques, transparentes, qui disparaissent vite quand le germe est tombé dans la cavité générale. L’embryon alors est le plus souvent ovoïde : les éléments qui le composent, d'abord simi- laires, ne tardent pas à former deux zones distinctes , une interne, colorée , l'autre externe, incolore, qui, lorsqu'elle est devenue bien délimitée, se revêt de cils vibratiles permettant au jeune animal d'exécuter des mouvements. Une particularité digne de remarque est notée par l’auteur : la taille des embryons n'est pas en rapport avec leur âge. Bientôt, à l’un des pôles de cet embryon, celui qui est devenu conique , se forme une sorte de flagellum composé de longs cils vibratiles. A l'extrémité opposée, se produit une dépression qui est l’origine de la cavité digestive. Pour mieux faire comprendre ce qui doit suivre, M. de Lacaze- Duthiers rappelle brièvement la conformation des Actinies. Elles représentent un manchon cylindrique fermé à ses deux extrémités par un disque musculaire: l’un à fibres contractiles très-développées, sans ouverture, c’est l'extrémité inférieure ou le pied; l'autre, le péri- siome, au centre duquel est pratiquée une ouverture en boutonmière, la bouche, portant sur son pourtour de nombreux tentacules. Des bords de la bouche descend un second manchon plus étroit et plus court que celui qui forme les parois du corps, ouvert inférieurement : c’est l'æsophage. Les deux manchons sont reliés l'un à l'autre par des lames rayonnantes qui se prolongent jusqu'au disque pédieux et qui portent dans leur épaisseur les organes génitaux et, plus bas sur leur bord libre, les corpssinguliers couverts de nématocystes qu'on nomme cordons pelotonnés. Les intervalles existant entre les lames rayon- nantes ou lames mésentéroïides constituent les loges périgastriques, ou- vertes par conséquent en bas etcomplétées plus haut par le manchon œsophagien, où chacune communique avec la cavité du tentacule correspondant. Esquissons maintenant d'après l'auteur, le mode de formation des premiers replis et des loges primordiales. Les deux premiers replis qu'on voit naître des parois de la cavité générale la divisent en se dirigeant suivant deux méridiens qui: croisent & peu près à angle droit la ligne d'ouverture de la bouche. Nous disons à peu près, car la cavité générale se trouve réellement par- tagée en deux loges inégales, soit a et À, correspondant aux commis- 336 REVUE SCIENTIFIQUE. sures de la bouche. Ce sont ces deux loges primordiales qui porteront plus tard les deux premiers tentacules de la série. Dans la plus grande loge A, qui par les progrès du développement s'est encore accrue, on voit bientôt apparaître 2 replis qui la subdivisent en 3 loges ; ce qui porte le nombre total à 4: ? grandes commissurales, 2 plus petites labiales.Get état peut se représenter par le symbole 1-+ (241), ou encore ERA La troisième paire de replis est formée par l'apparition de deux cloisons qui subdivisent à leur tour la petite moitié a primi- tivement constituée. On aurait donc à ce moment le nombre 6 pour représenter les lames et les loges périgastriques, nombre considéré comme point de départ par la théorie classique ; mais dans l'Act. equina ce type est très-passager, et promptement les loges latérales constituées dans la première ou plus grande moitié primitive amènent par leur subdivision la production de 8 loges, c'est-à-dire 3 +5 — (+2) + (242 +1) ,ou encore, d'après la notation que nous proposons (a+ a+ a) même du type 8, qui est facile à saisir, car il correspond à une sorte de ralentissement du travail organogénique apparent, pendant le- quel le péristome se constitue et les cloisons inégales se régularisent. Des replis de cinquième formation apparaissant dans les deux loges de la grande moitié A” A”, la plus voisine, comme l'indique notre diagram- me, des ? cloisons primitives, déterminent la formation de 10 loges 34 NT NO (OR GS) ARS COCOON CREER ESS les loges a’ a’ de la petite moitié se subdivisant, le nombre 12 est PR NET A E Le ra ie e 0 Le CREER ER Ei des 12? premières cloisons obéit denc à cette loi : il se forme alterna- tivement, en commencant par la grande moitié, deux cloisons symé- triques, opposées l'une à l'autre, dans les loges contiguës à la première paire de cloisons. Quand le nombre de lobes atteint est de 12, il semble que le travail de production des cloisons soit momentanément suspendu. Ce temps d'arrêt est employé à la régularisation des parties produites ; en outre le corps et le péristome s'arrondissent, les lobes inégaux s’égalisent, la cavité générale se limite plus nettement, et dans la couche externe apparaissent de nombreux nématocystes. Puis nous entrons dans une période caractérisée par l'apparition et l'allongement de mieux en mieux caractérisé des tentacules de la portion péristomienne. Leur Si le type 6 est fugace, il n’en est pas de 7, que nous noterons ainsi: . La formation TRAVAUX FRANCAIS. —ZOOLOGIE. 337 longueur est primitivement en rapport avec l’âge des cloisons dont ils dépendent, mais plus tard un travail de régularisation s'effectue, et on les voit se placer sur ? cycles composés de 6 grands tentacules, et de 6 autres plus petits alternant avec les premiers. Le nombre 24 est obtenu, non par l'apparition d'un nouveau tenta- cule dans les 12 intervalles existant entre les tentacules de deux pre- miers cycles, comme l’admet la théorie classique, mais par la nais- sance de deux loges dans chacun des éléments à petits tentacules du deuxième cycle, et par conséquent dans les loges A’A’A”A7"a«. Chacune des deux loges nouvellement constituées dans les 6 loges à petits tentacules se couronne à son tour d'un prolongement tentacu- laire. En ce moment, entre deux grands tentacules, A et A” parexemple, faisant partie du premier cycle, nous trouvons un tentacule de deuxième grandeur A’ voisin de À, et dans l'intervalle de A’ et de A” deux tentacules égaux, plus courts, rapprochés l'un de l’autre. Mais bientôt, le travail de régularisation se produisant et ramenant la symé- _trie et l’alternance, le tentacule moyen, c'est-à-dire un des petits tentacules de dernière formation, celui qui est voisin de A’, s'allonge, reste plus court que À, mais devient plus long que A”; le second petit tentacule de troisième formation prend une longueur égale à A” qui faisait partie du deuxième cycle, mais qui parait maintenant rejeté dans le troisième , l'un des petits tentacules de troisième formation s'étant substitué à lui dans le deuxième. En résumé, à cette période, 3 cycles se sont définitivement consti- tués : nous avons en effet 6 loges à tentacules de première grandeur À A’ A” a”a” a, 6 de deuxième grandeur constitués par une moitié des tentacules de troisième formation, et 12 de troisième grandeur formés des 6 éléments A" AAA” a’ a'et de l'autre moitié des petits tentacules de troisième formation. C'est dans ces {2 loges à petits tentacules qu'apparaissent à leur tour une paire d'éléments qui porteront le nombre total à 48. Ces loges se prolongeront en tentacules, les plus courts momentanément, mais, le même travail de symétrie et d'alter- nance s'étant accompli, l'un de ces tentacules s'allongera, deviendra plus long que son voisin qui l'a précédé, mais qui est rejeté dans le quatrième cycle, et plus court que l'élément de troisième formation qui s’est substitué, comme nous l'avons dit, dans le deuxième cycle, La même loi expliquerait la formation des cycles suivants, et en définitive, à part le premier, on voit que le numéro d'ordre d'un cycle est toujours d'une unité inférieure à celui qui indique réellement son ordre d'apparition ou son âge : l'un des éléments nouvellement formé se substituant en grandeur à celui qui l’a précédé, 338 REVUE SCIENTIFIQUE. Dans la deuxième partie de son Mémoire, M. de Lacaze-Duthiers vérifie à posteriori les lois du développement constatées chez l’Actinia mesembryanthemum, par l'étude de l’'embryogénie de quelques autres genres et espèces, en particulier du Sagartia bellis, Sag. troglodytes Gosse, et Bunodes gemmacea. L'auteur n’ayant constaté que des diffé- rences de détail, nous ne nous y arrêterons pas. M. de Lacaze-Duthiers a donc, dans la première partie de ses recher- ches sur le développement des Coralliaires, démontré l'inanité des lois déduites de l'observation de l'adulte. I] à fait voir que si le premier cycle appartient à l'époque de formation des 12 premières parties de l'embryon, le dernier, contrairement aux idées recues, est constitué non de parties contemporaines de dernière formation, mais d'éléments appartenant à tous les dges et même à la période des 12 divisions pri- maires. | — Le même naturaliste publie dans les Archives le commence- ment d'une étude sur le système nerveux des Gastéropodes pulmonés aquatiques, et sur un nouvel organe d'innervation, dont nous entretien- drons nos lecteurs, quand nous connaîtrons le travail en entier. — M. Alf. Giard, à l'occasion d'un nouveau Mémoire de M. le pro- fesseur Kupffer, intitulé : Zur Entwickelung der einfachen Ascidien (sur le développement des Ascidies simples), a publié (Archives de z0ol. eæp., tom. I, no 3, pag. 397 ), une Deuxième étude critique des travaux d'embryogé ie relatifs à la parenté des Vertébrés et des Tuniciers. Cette étude, comme le travail qui l’a provoquée, est divisée en deux parties: la première relative à l'embryogénie du genre Molgula, la deuxième au système nerveux du têlard des Ascidies (Ascidia canina et mentula. La première partie est l'objet d'un examen critique au triple point de vue systématique et descriptif, embryogénique et phylogénique. À propos de quelques considérations de l’habile naturaliste de Kiel sur la classification des Ascidies simples, l’auteur discute un point important de l'histoire des Molgulidés. On sait qu'en 1870, M. le professeur de Lacaze-Duthiers annonça qu'une espèce de Holgule, qu'il regarde comme la Molqula tubulosa de Forbes et Hanley, présentait, par une exception inattendue, un embryon anoure. Jusque-là l'exis- tence d’une larve urodèle dans les Ascidens était considérée comme la règle générale. M. Hancock, quelques mois après, déclara que cette exception n'existait pas pour tout le genre Molgule; il alla même jusqu'à s'inscrire en faux contre la détermination de l'espèce étudiée par le naturaliste français. Or il résulte d'un examen rigoureux que cette espèce appartient bien et dûment au genre Molgule: les TRAVAUX FRANCAIS. — ZOOLOGIE. 339 caractères tirés du sac branchial et de l'organe génital ne laissent pas le moindre doute. Deux autres espèces du même genre étudiées par M. Kupffer lui ont montré des larves anoures. En existe-t-il néan- moins d'autres du même genre dont les larves soient pourvues de queue ? On ne peut le nier, et deux espèces qui vivent fivées à l'état adulte devaient prendre, comme l'a établi M. Giard, et prennent en effet la forme de tétards. Cette dissemblance des embryons est-elle de nature à motiver le démembrement de ce genre ? Le cas est embar- rassant; cependant M. Giard croit qu il est conforme aux règles d’une classification bien ordonnée de séparer les Molgules à larves en têtard pour en constituer un nouveau genre. Le caractère le plus frappant de ce nouveau genre est l'existence d'une concrétion rougeâtre qui remplit l'organe rénal, d'où lenom de Lithonephrya, qu ilpropose de lui appliquer. Il y a rattaché deux espèces auxquelles il conserve le nom spécifique (complanata et decipiens) quelles possédaient déjà. M. van Beneden avait aussi observé, il y a quelques années, une larve en têtard chez l'Ascidia ampulloïdes, espèce très-voisine des Mol- gula, mais qui, d'après M. Giard, en est cependant assez différente à certains égards, pour former le type d'un genre nouveau qu'il nomme Gymnocystis, et dont il décrit une autre espèce sous la dénomination spécifique de comosa. Enfin, il donne la caractéristique de trois espèces de Molgules, Molqula macrosiphonica Kupffer, Molg. simplex Alder et Hancock, Molg. adhærens Giard. Les matériaux dont M. Kupffer a pu disposer étaient peu favorables à l'étude de l'évolution embryogénique ; toutefois le développement, tel qu'il l'a observé, concorde en majeure partie avec ce qu'a décrit M. de Lacaze-Duthiers. L'œuf des espèces étudiées par M. Kupffer se distingue par l'absence, à la surface interne de la coque, d’une couche nettement limitée de cellules du testa. Les recherches du naturaliste allemand viennent à l'appui de la distinction des Ascidies, proposée par M. Giard, et fondée sur l’époque de formation de cette couche. Dans un premier groupe, le testa apparaît avant la formation de la coque ; dans un second, après la formation de cette même coque, mais avant le fractionnement ; dans un troisième enfin, au moment où le fraction- nement se produit. Les Molgula tubulosa et simplex pondent des œufs qui se développent au dehors, mais M. Kupfer a vu avec étonnement la Molg. macrosi- phonica donner en outredes œufs agglomérés par une matière hyaline et amorphe. Ces œufs, qui ressemblent ainsi à ceux de certains Gasté- ropodes, au lieu d’être recouverts d'un revêtement continu de cellules 340 REVUE SCIENTIFIQUE. folliculaires, semblent présenter celles-ci, accumulées sur un point limité, en une masse unique où vient souvent plonger un des prolon- gements amiboïdes de l'embryon, qui semble y puiser ses matériaux de nutrition. M. Giard explique ces faits exceptionnels en admettant que M. Kupffer a eu sous les yeux des amas d'embryons qui, éclos dans un animal influencé par l'état de captivité, se sont agelutinés les uns aux autres. L'animal n'étant pas encore débarrassé de sa coque au moment où d'autres viennent se fixer sur lui, on s'imagine aisé- ment voir un prolongement amiboïde plongeant dans un amas de cel- lules folliculaires. Ces restrictions faites, les résultats suivants sont acquis par le Mémoire du savant allemand : les œufs de la Wolg. macrosiphonica ont une évolution rapide, et leurs cellules folliculaires disparaissent de bonne heure; leur coque est douée d'une élasticité qui leur permet de résister aux efforts de l'embryon. Ces résultats, rapprochés de ceux qui ont été fournis par les autres Molgulidés, jettent un grand jour sur la phylogénie de ce groupe. Parmi les observations de M. Kupffer sur le développement des différents systèmes organiques, nous ne relèverons que ce qui concerne les sphères de réserve, le sac de Bojanus et le corps hyalin. Les sphè- res de réserve sont un amas cellulaire qu’on aperçoit, au moment où l'embryon se revêt d'une couche épidermique, dans le voisinage du sac branchial et du rudiment de branchie. Leur signification est obscure. M. Giard y voit un vestige du corps müriforme, et, comme M. de Lacaze-Duthiers, nous somme frappé de leur analogie avec les cellules qui proviennent de la désagrégation de l'appendice caudal, chez les Ascidies à larves urodèles. M. Kupffer s'occupe assez longue- ment d'un corps formé de cellules à concrétion nucléiforme, situé dans le voisinage du cœur et comparé à l'organe de Bojanus. M. Giard se refuse à l'assimilation, que veut faire l’auteur, de l'organe rénal des Molgula (phaséole de M. Giard) avec l'une des vésicules du rein des Ascidies. Pour ce dernier, cest au contraire l’état le plus élevé de la glande urinaire, car il représente la forme différenciée par rapport à la forme diffuse. M. Kupffer s'occupe aussi du mode de for- mation d’un organe énigmatique qui se montre sous l'apparence d'un corps hyalin ramifié, situé entre les deux branches du tube digestif. On l'a pris pour un organe de sécrétion, mais M. Giard est tenté de le comparer à la tige cristalline des Lamellibranches, assimilation que nous avons peine à accepter. La Molgule est le type originel de l'évolution des Ascidies: telle est la conclusion générale que le naturaliste de Kiel tire de son étude TRAVAUX FRANCAIS .—ZOOLOGIE. 341 embryologique des Ascidies. M. Giard combat cette manière de voir; ses raisons peuvent se résumer ainsi: La présence ou l'absence d'un pro- longement caudal ne dépend que des conditions vitales différentes que sont appelées à remplir ces animaux. Les espèces libres à l'état adulte sont anoures, celles qui seront fixées ont une larve wrodèle, et celle-ci est si générale qu’elle constitue à bon droit la disposition typique. L'embryon de la Molgule reproduit bien la série de stades que parcou- rent les autres Ascidies, mais avec moins de complexité. La différen- ciation anatomique est portée plus loin chez la Molgule que chez la plupart des Ascidies. Le têtard des Botrylloïdes, où M. Kupffer veut voir une larve tendant à garder le type vertébré, n'est qu'une Ascidie pourvue d'un appareil de locomotion par l'effet d'une homologie de conditions. Rien, dans les organes de respiration, de circulation et de digestion, n'appartient au type vertébré, Si l’appendice caudal s'atro- phie, ce n'est point, comme il Le dit, par insuffisance de nutrition chez le jeune être, qui à ce moment prend des aliments. Comme pour montrer combien cet appendice est accessoire, il ne recoit pas de vaisseaux et se nourrit par imbibition. La deuxième partie du travail de M. Kupffer est consacrée spéciale- ment à l'étude de l'œil et du système nerveux de l'Ascidia mentula (Zool. Dan.). On peut distinguer deux régions dans le système nerveux de cette larve : 1° une cérébrale comprenant la vésicule cérébrable avec les organes des sens et le ganglion cérébral ; 2° la moelle épinière com- posée d'une partie renflée contenue dans le corps, et d'une portion cylindrique correspondant à la queue. À la paroi inférieure de la vésicule cérébrale, on trouve une vésicule à contenu transparent, que l’auteur penche à considérer comme le premier rudiment du labyrinthe. Sur le centre de cette vésicule, retenue par de fines soies, on découvre une grosse otolithe oviforme. L'œil offrirait une complication remarquable: peu s'en faut qu'on n'y retrouve un organe de vision de vertébré avec un véritable canal de Petit. Cette complication existât-elle à ce degré, et nous en dou- tons, elle ne pourrait constituer un argument en faveur de la théorie favorite de l’auteur Allemand. Il faudrait la rattacher simplement à une analogie d'adaptation : tout œil destiné à fournir une image doit nécessairement, comme le montre l'anatomie comparée, présenter des dispositions identiques. M. Kupffer, non content d'avoir retrouvé chez la larve une moelle épinière dont le parallèle peut être établi, jusque dans les moindres détails, avec celle des Vertébrés, a la prétention d'avoir découvert de l, 24 342 REVUE SCIENTIFIQUE. véritables nerfs spinaux. Pour les voir, il faut, à l'aide d'un objectif à immersion de Schrôder, avec un grossissement de 1100 à 1200 dia- mètres, observer la larve au moment de l'agonie : à l'instant de la convulsion suprême, ils se révèlent pour une ou deux secondes seule- ment à l'œil de l'observateur. Une observation aussi émouvante n'au- rait-elle point troublé quelque peu la vue du naturaliste allemand ? Quoi qu’il en soit, comme M. Giard nous portons envie au D'Langer- hans, qui a eu la bonne fortune de voir ces nerfs et de se déclarer convaincu. — Tous les anatomistes connaissent la pénurie des documents rela- tifsaux modifications qu'éprouve l'encéphale des Singes dans le cours de son développement; aussi est-ce avec plaisir que nous signalons à nos lecteurs un article des Archives (tom. I, n° 3, pag. 429) dû à l'un de nos jeunes anthropologistes les plus distingués, M. Hamy, et intitulé : Contributions à l'étude du développement des lobes cérébraux des Primates. La masse encéphalique de ces animaux peut être divisée entrois étages. Les deux premiers, formés parles hémisphères cérébraux, sont séparés par la scissure de Sylvius : l'un, correspondant à la région osseuse fronto-pariétale, est l'étage antéro-supérieur; l'autre, répon- dant à la région occipito-temporo-sphénoïdale, peut'être nommététage postéro-inférieur. Quand on passe des derniers Cébiens à Ceux qui leur sont immédiatement supérieurs parmiles Platyrrhinins, on voit un commencement de subdivision se produire dans l'étage antérieur, esquissant ainsi un lobe frontal et un lobe pariétal. En même temps, l'étage postéro-inférieur se décompose par l'apparition du pli nommé par Gratiolet scissure perpendiculaire, formant en haut la limite du lobe pariétal et du lobe occipital, et séparant, en se prolongeant sur la face externe, ce dernier du temporo-occipital. Sur un Singe à déve- loppement cérébral moyen, le Callitriche par ‘exemple, nous‘trouve- rons deux étages subdivisés en quatre lobes présentant un petit nom- bre de plis. Du Callitriche aux Pithéciens ‘supérieurs, à l'Homme même, le plan fondamental reste le même : au milieu de la com plica- tion des replis de la surface cérébrale, nous trouvons l'homsiogie la plus frappante dans les différentes régions encéphaliques. Ce n’est pas séulement par l'observation de l’adulte‘que ce résultat est acquis, dans toute la série des Singes de l'ancien continent, on observe des phénomènes évolutionnels comparables à ceux que nous ‘présente l'Homme lui-même. Si, pour demeurer surle terrain des faits constatés, nous comparons l'encéphale de notre espèce à celui du Singe au TRAVAUX FRANCAIS, — ZOOLOGIE. 343 moment de la naissance, nous voyons que chez l'Homme, le lobe frontal, dont la prédominance sera si marquée, n'a pas atteint tout son développement, d'où résulte une obliquité plus grande du sillon de Rolando. Les circonvolutions situées en arrière de ce sillon for- ment un ensemble destiné à éprouver peu de modifications. Le lobe occipital sera un peu refoulé par le développement subséquent, parti- cularité relevée par Gratiolet, qui avait eu tort de croire cependant à une réduction du lobe occipital plus marquée chez le fœtus que chez l'adulte. Des phénomènes évolutionnels analogues ont été constatés par M. Hamy sur plusieurs cerveaux de jeunes Singes de l’ancien conti- nent. Trois cerveaux d'Anthropomorphes lui ont montré cet état de réduction du lobe frontal, une obliquité plus sensible du sillon de Rolando et le refoulement progressif du lobe occipital. Toutefois la diminution proportionnelle du lobe pariétal est plus accentuée chez le Singe que chez l'Homme. Les mêmes particularités de développement apparaissent d'une facon plus saisissante encore, quand on observe les Pithéciens. Il est regrettable que pour les Singes du nouveau continent les ma- tériaux fassent complètement défaut. — Dans le quatrième numéro du Journal de Zoologie de M. le pro- fesseur P. Gervais, nous trouvons une note de M. Paul Fischer sur deux espèces de Globicéphales. Pendant longtemps, tous les gros Marsouins à tête renflée ont été confondus sous la dénomination de Delphinus globiceps.On a distingué du type représenté par le Globicephalus melus, qui habite les mers de l'Europe, le Glob. affinis Gray, des mêmes mers, le Glob. intermedius Harlan, des côtes atlantiques de l'Amérique du Nord et le Glob. Edwarsiü Smith, du cap de Bonne-Espérance, espèces qui toutes offrent une étroite analogie avec le melas. Mais ce dernierest fort différent des Globicéphales du Pacifique, encore mal connus, et dont le plus remar- quableestle Glob. macrorhynchus Gray. On ne possède sur cette espèce que des renseignements vagues et incomplets. M. P. Fischer décrit un fœtus rapporté en 1843 par le capitaine Delavaud, et qu'il croit appartenir au macrorhynchus. L'espèce du Cap, Glob. Edwarsü, n'existe pour ainsi dire que de nom. On en connaît seulement un dessin dû à M. Jules Verreaux, et le squelette d'un jeune animal figurant au musée de Bordeaux. C'est ce squelette surlequel M. Fischer nous donne des renseignements. Il en conclut que le Glob. Edwarsii doit être considéré comme très- 344 REVUE SCIENTIFIQUE. voisin du Glob. Melas, dont peut-être il ne constitue qu'une simple variété ou une race. — Le travail de M. Fischer est suivi d'une courte notice de M. Edmond Alix sur l'Existence du nerf dépresseur chez l'Hippo- poiame. MM. Ludwig et Cyon ont appelé nerf dépresseur un filet du pneu- mogastrique qui va se jeter dans le plexus cardiaque. Ces observateurs l'ont signalé chez le Lapin; M. Cyon, à son tour, l'a rencontré sur le Cheval. M. Alix croit l'avoir retrouvé chez l'Hippopotame dans un cordon nerveux formé par la réunion de deux filets naissant, l’un du paeumogastrique, l’autre du laryngé supérieur et cotoyant la carotide pour se perdre dans le plexus qui entoure cette artère. La gracilité de cette branche, comparée à celle du même cordon nerveux chez le Cheval, est peut-être une conséquence de la réduction de la carotide chez l'Hippopotame. — Nous laissons de côté des Mémoires de MM. Fiülhol, P.-J. van Beneden, P. Gervais et Albert Gaudry, qui intéressent plus spéciale- ment la paléontologie, pour arriver à un travail intéressant de M. William Turner sur la Placentation des Cétacés comparée à celle des autres Mammifères. Le chorion de l'Orca, comme celui des Dauphins, présente deux prolongements qui s'enfoncent dans les cornes utérines; sa sur- face est couverte de villosités, disposition qui le fait rentrer dans la catégorie des placentas diffus. De plus, la caduque utérine manquant, les membranes fœtale et maternelle ne feraient que s’enchevêtrer, restant en réalité séparées l’une de l’autre. On avait déjà constaté l'existence, à chaque pôle de l'œuf, d’un espace dépourvu de villosités, comparable apparemment aux extrémités nues du chorion des Carui- vores. Outre ces deux espaces, M. Turner en signale un troisième situé près de l'orifice interne de l'utérus. Ces trois point dénudés se retrouvent dans un animal unipare à placentation également diffuse, la Jument; le troisième manque dans la Truie, dont le placenta présente un type semblable. La forme des villosités est aussi analogue dans les Cétacés et dans la Jument. On observe de part et d'autre une couche de corpuscules sous-épithéliaux que Goodsir à nommés cellules internes des villosités, et Ercolani (de Bologne) cellules de la couche épithéliale interne. La muqueuse utérine, examinée à son tour, nous montre à Sa Sur- face, chez les Cétacés, la Truie et la Jument, un grand nombre de TRAVAUX FRANCAIS. — ZOOLOGIE. 345 cryptes recevant les villosités. C'est au fond de ces cryptes infundi- buliformes que s'ouvrent les glandes utérines chez l'Orca; chez la Truie, elles viennent aboutir à la surface ondulée de la muqueuse ou dans des fossettes peu profondes. Il en résulte que les glandes ont des rapports importants avec les villosités, et qu'en réalité les cryptes infundibuliformes peuvent être considérés comme les orifices évasés des tubes glandulaires. L'étude de la muqueuse utérine de l'Orca a aussi montré non-seule- ment un accroissement du tissu interglandulaire, dû à la production de corpuscules nucléolés, en tout semblable à celle qu'ont signalée Goodsir et Ercolani, mais encore elle a fait voir qu'une couche de corpuscules sous-épithéliaux existe en contiguiïté avec la muqueuse utérine. Les glandes utérines tubulaires se rencontrent dans les placentas cotylédonnaires , mais leur rapport avec les villosités est difficile à déterminer. Les observations de Sharpey, confirmées par Bischoff et Weber, sur la zone placentaire des Carnivores, prouvent l'existence de deux sortes de glandes, les unes simples, les autres composées, dont les orifices évasés admettent les villosités. On ne sait si ces glandes simples se retrouvent dans l'Orca. Chez les Mammifères à placenta discoïde, on trouve les glandes utriculaires, sauf chez les Rongeurs, où en revanche la muqueuse présente un plissement cérébriforme. Un grand nombre d’observateurs admettent que les villosités du chorion humain sont revêtues par des cellules qui jouent un rôle important dans l'échange osmotique nutritif de la période fœtale. Ces cellules se retrouvent chez les Mammifères disco-placentaires,; on a proposé, par suite, de réunir sous la désignation générale de Mammalia deciduata tous ceux qui possèdent cette couche, qui se dé- tache à la parturition, entraînée par les villosités du chorion. Une couche comparable peut être retrouvée chez l'Orca, mais on ne sait pas si elle se détache à l’époque de la chute des membranes. Il y a donc dans le placenta de l'Orca, comparé à celui de l'Homme, des différences non de composition, mais bien plutôt d'arrangement, et les formes des deciduata et des non deciduata ne doivent être regardées ni come nettes ni comme tranchées. L’allantoïde des Cétacés se prolonge moins que dans la Jument et les Rumimants; de plus, elle persiste longtemps, au lieu de disparaître à une période peu avancée de la gestation, comme chez l'Homme. L'amnios, contrairement à ce qu'on observe chez les Solipèdes, les Pachydermes et les Ruminants, l'emporte en développement sur l’al- lantoïde. Enfin la vésicule ombilicale s'atrophie de bonne heure. 340 REVUE SCIENTIFIQUE. En résumé, sous le rapport du placenta, l'Orca se rapproche beau- coup plus de la Jument que des autres Mammifères étudiés à ce point de vue. — MM. P. et H. Gervais ont ajouté au Mémoire de M. Turner la figure d'un fœtus de Delphinus delphis mesurant 0%,10. Sans entrer dans des détails qui n'auraient plus d'intérêt après le Mémoire du savant anglais, ils se bornent à faire remarquer le faible développe- ment de la nageoire dorsale, indiquée à cette période par un simple bourrelet, disposition déjà figurée d'ailleurs par Hombron et Jacquinot. — À la suite de cette note additionnelle, se trouvent un travail de M. Delfortrie sur les Phoques du Falun aquitanien, et des analyses d'ouvrages, lesquelles terminent le quatrième numéro. — Le cinquième numéro du même Journal débute par des analyses qui font suite à celle du fascicule précédent, et au nombre desquelles nous trouvons un résumé des travaux récemment publiés en Italie, sur la reproduction des Anguilles, dont nous parlerons plus bas. — À la suite d'un Rapport sur les découvertes faites dans la grotte de Loubeau, par M. P. Gervais, et d'un Mémoire sur les Balénidés fossiles d'Anvers, par M. P.-J. van Beneden, nous lisons une notesur la Disposition et la nomenclaiure du foie chez les Mammifères, par M. W.-A. Flower. L'absence d'un système uniforme de nomenclature rend la des- cription du foie généralement difficile à comprendre. La notice de M. Flower a pour butde fournir Îes bases de cette nomenclature. La principale difficulté naît de cette circonstance que le foie de l'Homme, des Ruminants et des Cétacés, divisé seulement en deux grandes mas- ses, se subdivise et se complique chez les derniers Singes, les Carni- vore et les Rongeurs. On peut considérer l'organe hépatique, en général, comme partagé en deux segments par la veine ombilicale, ou chez l'adulte par les ves- tiges de ce vaisseau et le ligament suspenseur. Dans le cas le plus simple, nous avons un segment droit et un segment gauche. Ces seg- ments, à leur tour, peuvent se subdiviser en lobes. Dans un très-grand nombre de cas, chaque segment présente une incisure plus ou moins profonde, que l'auteur nomme fissures latérales. Ces fissures, étant plus accentuées que la fissure ombilicale, font paraître l'organe divisé en trois : les deux lobes situés à droite et à gauche de la veine ombi- licale s’appelleront lobe central droit et lobe central gauche; les deux portions extrêmes prendront le nom de lobes latéraux droit et gauche. TRAVAUX FRANCAIS. — ZOOLOGIE. 347 Le segment gauche est rarement plus compliqué. La vésicule biliaire correspond au lobe central droit, qui est aussi en rapport avec la veine cave. Entre ce vaisseau et la fissure de la veine porte, à laquelle la fissure latérale droite vient aboutir, on rencontre le lobe dit de Spigel. La masse principale du lobe latéral droit est subdivisée non par une fissure, mais par un sillon, limitant une portion de sa surface qu'on peut nommer, à cause de sa forme habituelle, lobe caudé, et qui est est généralement en rapport avec le rein droit. Le cinquième numéro se termine par la première partie d'un Mémoire de M. le professeur Gervais sur les formes cérébrales propres à différents groupes de Mammifères. — M. Georges Pouchet a publié (Revue et Magasin de zoologie 1871- 1872, n° 3, 4, 5, 6, 7 et 8) des recherches sur l’Influence de la lumière sur les larves de Diptères privées d'organes extérieurs de la vision. Les larves de Mouches ou asticots, quoique privées d'organes de vision, se montrent, comme plusieurs Invertébrés aveugles, sensibles à la lumière, puisqu'elles la fuient, ainsi que l’a observé Weismann. M. G. Pouchet a repris l'étude de cette question, qu'il a envisagée à plusieurs points de vue. D'abord, pour bien mettre en évidence cette sensibilité, il dépose des asticots sur une feuille de papier blanc placée devant une fenêtre; bientôt il voit presque toutes ces larves se diriger vers le bord du papier correspondant au fond de l'appartement. Les mêmes résultats sont obtenus avec des vers placés dans une gouttière dont une des extrémités est tournée vers la fenêtre. On peut même en plaçant la larve, à son point de départ sur le papier blanc, dans une goutte d'un liquide coloré, obtenir des tracés graphiques démonstratifs de cette tendance à fuir la lumière. Les larves d'Eristalis tenax se sont comportées comme les asticots. Il était intéressant de rechercher si les vers étaient également affectés par les divers rayons colorés. En se servant de verres de coloration variée, l'expérimentateur n'a pas remarquéqu'unedes couleurs eût une action plus marquée; en général, l'influence était moins accentuée, mais on peut se rendre compte de cet affaiblissement d'action par l'intensité moindre de la lumière, résultat du passage des rayons à travers le milieu réfringent coloré. M. G. Pouchet a constaté également que la lumière incidente, de quelque côté qu'elle vint, d’un point situé au-dessus ou au-dessous du plan de progression, paraissait affecter l'animal au même degré. Quels organes sont le siége de cette sensibilité, ou, comme l'appelle M. G. Pouchet, de cette actinæsthésie? Seraient-ce les organes des sens décrits par Weismann sous le nom d'antennes et de palpes maxillai- 348 REVUE SCIENTIFIQUE. res ? Le moyen de s'éclairer à cet égard était de supprimer ces organes. Or l'expérience à démontré qu'après cette ablation, l'influence lumi- neuse était sentie comme auparavant; la progression était seulement un peu gênée. Dans l'obscurité, l'asticot ne serait-il point dirigé par d'autres impressions, celles de l’odorat, par exemple? Il n en estrien: les asticots placés dans l'obscurité, à peu de distance d'un morceau de viande entrant en putréfaction, ne paraissent point attirés par les émanations fétides, et leur marche semble indépendante de la présence de la viande. Enfin, M. G. Pouchet a voulu reconnaître à quel âge la larve devient sensible aux rayons lumineux. Il s'est aperçu que, dès la naissance, les jeunes vers manifestaient une certaine répulsion pour la lumière, sans cependant se diriger exactement pour l'éviter : leur pre- mier soin semble être de fuir le grand jour. La faculté actinæsthésique se développe graduellement et n’acquiert toute sa perfection que chez les larves bien formées. — Dans le n° 10 (oct. 1872) du même recueil, M. Georges Pouchet a publié en outre des Observations sur le développement d'un Poisson du genre Macropode. (Macropodus viridi-auratus Lac.). Nos renseignements sur le développement de cette curieuse espèce, originaire de la Chine, dont nous avons précédemment entretenu les lecteurs de la Revue (tom. LE, n° 2, pag. 219) se bornaïent à quelques lignes d'une Note de M. Carbonnier, présentée à l'Institut par À. Duméril, dans laquelle ce pisciculteur faisait déjà connaître la rapidité de l'évolution embryonnaire et la précocité de l'éclosion du jeune Poisson. Presque en même temps, deux naturalistes, M. le pro- fesseur Joly et M. Georges Pouchet, se livraient à l'étude du déve- loppement du Macropode. Nous donnons iciun résumé des recherches de M. Pouchet, en attendant que nos lecteurs puissent prendre con- naissance du Mémoire de M. Joly, qui sera publié, avec les planches qui l'accompagnent, dans le prochain fascicule de la Revue des sciences naturelles. Avant d'être placés par le mâle dans le radeau d'écume, les œufs flottent isolément à la surface de l’eau, immédiatement au-dessous de la surface. Cette légèreté spécifique est due à une goutte de graisse dont le diamètre est presque égal à la moitié de celui de l'œuf tout entier, et qui occupe le centre de ce dernier. L'élément femelle possède une enveloppe d'une minceur extrême (1 millième à 1 millième et demi de millim.), parfaitement hyaline, mais présentant à la lumière oblique de petites taches ombrées, disposées en quinconce, correspon- dant probablement à de légères dépressions de la surface. L'auteur ne TRAVAUX FRANCAIS. — ZOOLOGIE. 349 nous dit pas s’il a rencontré un micropyle; il constate seulement qu'il n'y avait pas traces de spermatozoïdes ni de globule polaire. L'œuf flottant à la surface, l'observation est facile; malheureusement les phénomènes évolutifs n'ont pu être complètement suivis, par suite du petit nombre d'œufs dont l'auteur a pu disposer. Dès le soir du jour (17 juin 1871) où l'œuf avait été pondu, le vitellus s'est rétracté, et sur un point de la surface s’est produit un cumulus granuleux indistinctement divisé en quatre parties, puis, la segmenta- tion se poursuivant, le cumulus est devenu un corps müriforme qui s’est étendu à la surface du vitellus. Le lendemain, le blastoderme, qui s'est constitué à la suite de la segmentation, a enveloppé l'œuf, qui à cette époque semble composé de trois portions emboîtées : une intérieure, le gloke graisseux; une extérieure, le blastoderme; et une intermédiaire, le vitellus; seulement cet emboîtement n’est pas symétrique : le corps graisseux, à cause de sa légèreté spécifique, ayant gagné la partie supérieure de la sphère flottante, tandis que le vitellus et le blastoderme paraissent refoulés au-dessous. L'œuf conserve cette situation pendant son évolution , les conditions d'équilibre restant les mêmes; il en résulte que le pôle ombilical est tourné vers le ciel, et que l'embryon apparaît sur l'hémis- phère opposé. Vers une heure après midi, on commence à discerner les premiers linéaments de l'embryon; l'extrémité caudale se montre la première, ensuite se développe l'extrémité céphalique, qui est plus étroite. Vers 6 heures, c’est-à-dire trente heures environ après la ponte, les deux vésicules oculaires se dessinent sur l'éminence céphalique. Le troisième jour correspond à la période la plus active du dévelop- pement. L'œil devient plus distinct, les hémisphères cérébraux et les lobes optiques s'ébauchent, la segmentation vertébrale commence à se produire dans la région caudale; bientôt on peut voir le cœur battre et quelques vaisseaux se constituer, puis l'embryon exerce de légers mou- vements. Le pigment se forme, non à l'œil d'abord, comme chez les Mammifères à développement intrà-utérin, mais sur la paroi de la vésicule ombilicale. Ce pigment s'étend, et les chromoblastes se con- stituent jusque dans la profondeur de certaines parties. M. G. Pou- chet a fait quelques remarques intéressantes sur le mode de formation du vaisseau ombilical. On dirait qu'un trajet lacunaire s’est constitué par la simple disjonction des éléments de la vésicule. Dans cette rigole irrégulière, on voit circuler de rares granules très-petits, qui sont peut-être des hématies naissantes. Tandis que le système nerveux se complète, l'organe olfactif fait son apparition. Bientôt, de vérita- bles hématies (globules du sang) vont teinter le liquide du vaisseau 390 REVUE SCIENTIFIQUE. ombilical qui a changé de position. Enfin, l'embryon continuant à grandir et à se perfectionner, l'œuf perd graduellement sa forme sphé- rique pour se moulersur le jeune animal. A cette période, se montrent deux petits ailerons, rudiments des nageoires pectorales, et vers le même temps on entrevoit la capsule auditive avec les otolithes. Vers la fin du troisième jour, c'est-à-dire environ soixante heures après la ponte, l'éclosion a lieu. Le nouveau-né ressemble assez bien à un têtard: la tête et la vésicule ombilicale confondues constituent une grosse masse ovoïde, se prolongeanten une queue assez développée. A ce moment il n'y a encore aucune trace de squelette, point de rayons à la queue, pas encore de cavité buccale. Le quatrième jour, la queue s'organise; la tête appliquée contre la vésicule ombilicale s'en éloigne; on découvre quelques traces de la cavité buccale, et une grande loge péricardique renfermant l'ergane central de la circulation se délimite. Quelques changements, que nous passons sous silence, s'opèrenten outredans le vaisseau ombilical, qui ne possède pas encore de capillaires. L'aorte et la veine cave sont bien distinctes. Le cinquième jour, l'oreille se complèteet se rapproche de sa position normale et définitive; la queue se perfectionne ; la cavité péricardique a diminué, et la bouche commence à s'ouvrir; en même temps, la tête se redresse et les yeux se relèvent. Bientôt, on voitles mächoires exé- cuter des mouvements. Les téguments présentent une teinte verdâtre et laissent voir des fibres musculaires. Le cœur paraît bien constitué dans toutes ses parties. Au moment où s'arrêtent les observations de M. G. Pouchet, la goutte graisseuse n'était pas encore résorhbée, et le squelette cartilagi- neux de la boîte céphalique venait de se constituer. — Le Bulletin hebdomadaire de l'Association scientifique de France a donné (tom. XI, oct. 1872, pag. 9) une analyse des travaux récem- ment publiés en Italie sur la question controversée et encore mal connue de la structure des organes reproducteurs et des phénomènes de la reproduction chez les Anguilles. Depuis longtemps, les ovaires de ces Poissons ont été signalés par Mondini, O.-F. Müller, et étudiés par Rathke. Ils consistent en deux rubans plissés, occupant toute la longueur de la cavité abdominale, adhérents par leur bord interne à la vessie natatoire et plus en arrière à la portion renflée de l'organe urinaire. Au milieu de nombreuses cel- lules adipeuses, il est facile d'y reconnaître, à l'aide du microscope, des ovules parfaitement caractérisés. Quelques observations, qui datent TRAVAUX FRANCAIS. — ZOOLOGIE. Jo déjà de plusieurs années, nous avaient conduit à supposer une simi- litude très-grande dans la structure des glandes génitales des deux sexes: la cellule spermagène remplaçant dans le mâle la cellule ovu- ligène. Nous étions porté à considérer les sexes comme séparés. Cette question vient d'être l'objet de nouvelles études dela part de MM. Bal- samo-Crivelli et Magei, et de M. Ercolani. Ces savants s'accordent à reconnaître que les Anguilles sont herma- phrodites, et ils ont, chacun de leur côté, la prétention d'avoir décou- vert une glande mâle sur les individus porteurs de l'organe femelle. Malheureusement les descriptions du testicule données par MM. Bal- samo-Crivelli et Maggi d’une part, et M. Ercolani de l'autre, sont peu concordantes, ni pour la place qu'ils assignent à l'organe, ni pour les caractères qu'ils lui attribuent. Faut-il voir la source de cette diver- sence dans ce fait que les naturalistes de Pavie auraient examiné l'Anguilla orthoentera, espèce distincte de l'Ang. anacamptoentera qu'a disséquée M. Ercolani ? Nous ne saurions le dire. Pour MM. Balsamo- Crivelli et Magsi, les testicules seraient asymétriques, celui du côté gauche avortant plus ou moins complètement. La glande développée se rencontrerait à droite de l'intestin, en dedans de l'ovaire, adhérant à la face interne du tube digestif qui est appliquée entre la vessie natatoire. Elle s'étendrait de la vésicule dufiel au cloaque,en augmen- tant de diamètre d'avant en arrière, où elle deviendrait plus ou moins frangée. L'examen microscopique y ferait reconnaître des cellules remplies de spermatozoïdes très-petits, à tête en forme d'ellipsoïde et à queue très-déliée à son extrémité, qu'on ne peut plus discerner. Ces savants ont vu parfois des spermatozoïdes à tête se rapprochant de la forme sphérique et à queue remplacée par un moignon relativement épais. Les œufs et le sperme tombheraient dans la cavité abdominale et seraient expulsés au dehors par des orifices pour lesquels ils propo- sent une nomenclature défectueuse. Pour M. Ercolani, du côté droit on trouverait un corps qu'il appelle troisième corps frangé, ne renfermant que des cellules adipeusesentre deux lames péritonéales, et qu'on peut regarder comme une glande mâle atrophiée. Le véritable testicule se rencontrerait à gauche et se présenterait sous la forme d'une vessie { vescica) allongée, pyriforme, s'étendant de l'anse que forme le tube digestif au-dessous du foie jusque vers le rectum. Cette vessie, dans les Anguilles d'eau douce, ne lui a pas présenté de spermatozoïdes, mais il les a découverts dans l'Anguille de mer. Ce naturaliste les décrit avec une apparence un peu étrange, car il leur attribue la forme d'un champignon et une couleur légèrement orangée. 902 REVUE SCIENTIFIQUE. En présence de ces résultats peu concordants, nous croyons que de nouvelles recherches sont nécessaires, et dans le but d'élucider la question nous avons entrepris une série d'observations. —Dans le courant de ses remarquables Recherches sur l'influence que les changements dans la pression barométrique exercent sur les phéno- mènes de la vie, M.le professeur Paul Bert a eu l'occasion d'étudier l'influence pernicieuse de la décompression subite sur les animaux (Comptes-rend. del’ Acad. des sciences, 19 août 1872). Depuis longtemps, les ouvriers-travaillant sous pression dans les mines, ou sous l'eau à l'aide du scaphandre, avaient fait la fâcheuse et souvent funeste expé- rience des dangers que présentait une brusque diminution de la force élastique de l'atmosphère ambiante. Sur 24 plongeurs employés par une Compagnie anglaise, 7 furent atteints de paralysie,et 3 moururent subitement. Les explications les plus variées ont été proposées pour rendre compte de ces accidents. Voici ce que l'observation directe a appris à notre habile physiologiste. Si un animal peutsubir sans inconvénient une augmentation de pres- sion brusque, un Moineau par exemple, passer,sans en être incommodé, de 1 à 10 atmosphères, il ne peut supporter aussi impunément une raréfaction subite. Des animaux mis en expérience ont été atteints de paraplégie et ont succombé à une paralysie ascendante. L'observation confirme l'hypothèse explicative due à feu le professeur Rameaux (de Strasbourg), et qui consiste à rendre compte des troubles produits par le dégagement, au moment de la décompression, des gaz dissous en surabondance pendant la période de pression exagérée. La quantité de gaz ainsi mis en liberté sous forme de bulles n'est pas toujours la même, et l'on comprend sans peine que les accidents qui en sontla conséquence varientsuivant la valeur de la pression et suivant aussi la rapidité de la décompression. Alors on voit, ou la mort se produire brusquement, ou des paralysies plus ou moins graves atteindre l'animal. Si la pression n'a pas dépassé 5 atmosphères, la décompression opérée en deux ou trois minutes n’entraîne pas d'accidents, mais ceux-ci apparaissent à partir de 6 atmosphères, et au-dessus de cette limite ils deviennent constamment funestes, à moins cependant que le retour à la pression normale ne s'effectue avec une extrême lenteur. En appliquant à l'Homme les données de l’expérience, M. P. Bert se croit en droit de conclure que jusqu'à 3 atmosphères environ, le retour à la pression normale peut s'effectuer brusquement sans entraîner de dangers sérieux, mais que des accidents sont à redouter si la pression atteint 5 atmosphères. TRAVAUX FRANCAIS. — ZOOLOGIE. 393 Un plongeur retiré à la brasse, d'une profondeur de 40 mètres, n'éprouverait pas le plus souvent d'accidents; mais, ramené de la sorte de 70 à 80 mètres, en supposant quil eût atteint cette profondeur en échappant à l'intoxication par l'oxygène, il serait, à sa sortie de l’eau, exposé à une mort certaine. — Le même savanta exposé à l'Académie ( Comptes-rendus, 26 août 1872) le résultat de ses recherches sur la composition des gaz con- tenus dans le sang artériel d'animaux soumis à des pressions baro- métriques supérieures à l'atmosphère. M. Bert est arrivé aux conclu- sions suivantes : 1° La richesse du sang en oxygène croît avec la pression, mais d'une manière très-faible, dans la limite de 1 à 10 atmosphères; 2° La proportion d'acide carbonique reste invariable, résultat qui contraste avec l'observation qui a été faite de la diminution de ce gaz sous l'influence de la baisse barométrique; 3° La proportion d'azote, gaz qui paraît exister dans le sang à l’état de simple dissolution, augmente notablement avec la pression, parti- cularité qui rend compte de la quantité considérable de cet élément (70 à 90 °/,) dans les gaz que la décompression met en liberté dans le sang. Il est assez difficile de se rendre raison, si ce n'est peut-être par une sorte d'entraînement mécanique, de la présence de l'acide carbo- nique dans ces mêmes gaz, puisque cetacide gazeux est resté en quantité normale dans le fluide sanguin. — Après les travaux de Ludwig et de ses élèves, de M. le profes- seur Claude Bernard et de M. Fernet, M. N. Gréhant, reprenant l'importante étude de l'absorption des gaz par le sang (Compt.-rend. 19août 1872), propose un procédé qui permet d'extraire plus complète- ment que par les méthodes habituelles les gaz qui se trouvent dans le fluide sanguin. Ce physiologiste a recherché si lesang artériel pris dans la carotide contient autant d'oxygène qu’il en peut absorber, autrement si ce liquide, en traversant les poumons, s'est chargé de tout l'oxygène qu'il prendrait dans le cas où on l'agiterait longtemps dans un vase rempli de ce gaz? Les recherches lui ont montré que la rapidité du cou- rantintra-pulmonaire, jointe au renouvellement du fluide respirable dans l'organe respiratoire, ne laissait pas au sang le temps d'empor- ter tout le gaz qu'il pourrait prendre. En vase clos, il absorberait jusqu'à 26,8°/, et normalement le sang carotidien ne renferme que 354 REVUE SCIENTIFIQUE. 16, 3 °/, d'oxygène; le rapport - exprime donc assez exactement l'effet utile de la respiration pulmonaire. De ces notions découlent plusieurs conséquences pratiques. Ainsi, dans les affections chroniques ou aiguës, l'inhalation de l'oxygène, avec les précautions que commandent les recherches de M. Paul Bert, semble appelée à rendre des services. De même, dans l'em- poisonnement partiel des globules produit par l'oxyde de carbone contenu dans la vapeur de charbon, l'inhalation de l'oxygène est encore indiquée, puisqu'on pourrait dans ce cas hématoser le sangen faisant absorber aux globules non atteints la plus grande quantité d'oxygène qu ils puissent prendre. Le volume maximum d'oxygène absorbable varie non-seulement suivant les animaux, mais encore, selon toute probabilité, avec les différents individus d'une même espèce. Une autre conséquence découle encore des expériences de M. Gréhant. L'hémoglobine pouvant être considérée, dans le sang, comme à peu près proportionnelle au plus grand volume d'oxygène qui puisse être absorbé, la quantité de ce gaz permettrait de doser cette partie constitutive du fluide sanguin. Cependant, en se servant de l'oxyde de carbone, M: Gréhant a obtenu des résultats plus précis encore. Des chiffres fournis par une analyse comparée de la quantité d'hémoglobine contenue dans le sang du cœur droit ou de la carotide et de la veine sus-hépatique, l'habile physiologiste est porté à conclure qu'il y a dans le foie une destruction d hémoglobine. — Les îles Andaman, situées dans le golfe du Bengale, sont babi- tées par une population que ses caractères physiques distinguent nettement des populations environnantes. Grâce aux documents qui lui ont été fournis par M. le colonel Tytler, notre éminent anthropo- logiste, M. de Quatrefages, a pu compléter (Compt.-rend. 5 août 1872) les renseignements ‘léjà donnés par M. Richard Owen et M. Georges Busk. ilest arrivé à reconnaître que les Mincopies se rattachent à une branche du tronc nègre désignée sous le nom de négrito, bien distincte des noirs Africains ou Mélanésiens. La branche négrito se subdivise elle-même en rameau malais et rameau mincopie. Elle paraît avoir précédé sur plusieurs points des populations qui se sont mêlées à elle, et avoir occupé jadis de grandes îles où l'on n'en retrouve pourtant aucune trace. — Après avoir précédemment entretenu l'Académie des particula- TRAVAUX (FRANCAIS. — ZOOLOGIE. 995 rités que présentait la constitution de la cicatricule chez les Plagiori- stomes (Voir la Revue des sc. nat. tom., I, n° ?, pag. 227), M. le D' Gerbe a communiqué le résultat de ses recherches sur la forma- tion des produits adventifs de l'œuf de ces même Poissons (Compt.- rend. 5 août 1872). Les observations de M. Gerbe ont porté sur les Plagiostomes ovipares, les Raïes ‘en particulier. La coque de l'œuf, chez ces derniers, est de forme quadrilatère, à angles prolongés en pointe, déprimée et composée de plusieurs couches difficiles*à isoler, mais qu'ou parvient à décomposer elles-mêmes en plusieurs lamelles très-minces. La structure de ces couches est variable: la plus pro- fonde est finement fibreuse, celle qui vient ensuite, aréolaire; à celle-ci succède une nouvelle couche fibreuse recouverte par la coucheexterne, d'un aspect tomenteux, qui devient lustrée par la dessiccation, particularité qui sur les côtes normandes fait désigner ces œufs, fréquemment rejetés sur la plage, sous le nom de sowris de mer. L'albumen, peu abondant, est plus fluide que celui de l'œuf de Poule et non stratifié comme ce dernier. La membrane chalazifère, qui enveloppe le jaune comme un sac, est extrêmement ténue et ter- minée par deux chalazes à peine tordues sur elles-mêmes. Où se forment ces différents éléments? On sait que l'ovule des Poules parcourt l'oviducte en exécutant un mouvement de rotation suivant l’un de ses axes, et qu’il se revêt successivement des chalazes, de l’albumen de la membrane coquillière, et en dernier lieu de la coquille. Il n'en est pas ainsi chez les Raies : l’ovule parcourt l'ovi- ducte, et c'est dans une portion bien délimitée de ce canal vecteur que l’ovule se recouvre en même temps de ses différentes envelop- pes. Gette portion est pourvue de nombreuses glandes qui, quoique confondues en une masse commune, présentent des variétés de struc- ture en rapportavec la variété même des substances sécrétées; chaque ordre de glandes a en outre ses orifices placés sur une zone particu- lière. M. Gerbe a encore remarqué que l'œuf, dans la région de l’ovi- ducte, où il recoit ses enveloppes, est replié sur lui-même; il descend ainsi dans la région utérine, et là 1l finit par se redresser et prendre la forme qu on lui connaît. — Malgré les travaux de Cuvier et Valenciennes, de Müller et d'Agassiz, nos classifications des Poissons sont encore très-impar- faites. Si ces naturalistes ont réparti les genres, avec plus ou moins de bonheur , en familles naturelles , les caractères des groupes d'un rang plusélevé, c'est-à-dire des ordres, sont purement arti- 396 REVUE SCIENTIFIQUE. ficiels. M. C. Dareste, professeur à la Faculté des sciences de Lille, s’estappliqué à faire aux Poissons l'application des vues présentées par M. Agassiz, lequel s'était adressé à la tête osseuse de ces Vertébrés pour obtenir les types d'ordres naturels , dont les représentants offri- raient de la ressemblance avec cette forme typique impliquant un ensemble de modifications corrélatives. Malgré l'insuffisance des matériaux que M. Dareste a eus à sa disposition ,il est parvenu à reconnaître dès à présent cinq types ostéologiques, dont il indique les caractères les plus saillants (Comp.-rend. 21 octobre 1872). Le premier type comprend les Acanthoptérygiens de Cuvier; les Ma- lacoptérygiens abdominaux, moins les Siluroïdes, les Cyprinoïdes et les Mormyres; les Malacoptérigiens subbrachiens et les Plectognathes, c'est-à-dire qu'on le retrouve dans la plupart des Poissons marins. La description générale qu'on est dans l'habitude de donner des Pois- sons osseux leur est appliquable ; notons cependant deux particula- rités caractéristiques: la réduction des ailes orbitaires et du sphénoïde antérieur, telle que ces pièces osseuses ne s'unissent point au sphé- noïde pour prolonger la cavité crânienne, et la séparation presque con- stante des deux pariétaux par l'interpariétal. Dans le deuxième type comprenant les Murénoïdes, les pariétaux sontréunis sur la ligne médiane, comme on le remarque dans les deux types qui suivent; en outre, un de leurs traits caractéristiques consiste dans l'existence d'un ligament, quelquefois ossifié, qui vient s'unir aux intermaxillaires après s'être détaché des frontaux principaux, formant ainsi une sorte de cloison postérieure de l'orbite. Le troisième type renferme les Cyprinoïdes et peut-être les Cobitis. En arrière du crâne, existent deux fosses profondes constituées par des expansions des occipitaux externes, des occipitaux latéraux et des mastoïdiens; de plus, les occipitaux latéraux sont percés de larges trous, d'un diamètre supérieur à celui du trou vértébral. Le quatrième type comprend seulement les Mormyres, auxquels M. Daresterattacheles Gymnarchus,que Cuvier plaçait dans les Malaco- ptérygiens apodes. Un de leurs caractères les plus saillants, outre la prolongation de la cavité crânienne jusqu'à l'éthmoïde, comme dans les précédents, consiste dans l'écartement des mastoïdiens et des occi- pitaux externes, écartement occupé par un os d'une détermination difficile, le rocher peut-être. Enfin un cinquième type, le plus aberrant et le plus diversifié, ren- ferme les Siluroïdes Sans reproduire ici la caractéristique de M. Da- reste, contentons-nous de rappeler l'absence apparente de pariétaux et surtout la constitution de l'aile temporale où manquele tympamal et TRAVAUX FRANCAIS. — ZOOLOGIE. 357 le symplectique, enfin la réduction du préopercule et le défaut d'ossifi- cation complet de l'interopercule. M. Dareste pense que ces cinq types ne sont pas les seuls qu'on devra établir dans les Poissons osseux, et il soupconne que les Ophicéphales d'une part, et les Gymnotes de l’autre, pourraient bien se placer en tête de nouveaux groupes. — Ainsi qu'on a pu en juger, les différents genres de Poissons osseux sont très-inégalement répartis dans les cinq types proposés par M. Dareste : le premier de ces types, en effet, renferme la grande ma- jorité des espèces qui vivent dans les eaux salées. Il y aura donc lieu d'établir des coupes secondaires qui correspondront évidemment à des familles. C'est encore à l’ostéologie du crâne que s'adresse M. Dareste pour l'établissement de ces nouvelles divisions (Compt.-rend. 28 octo- bre 1872 ). Il montre la possibilité, en tenant compte des variations de rela- tions et de proportions des pièces osseuses, d'obtenir une combinaison de caractères dont on pourra se servir efficacement pour la distinction de ces familles. [l fait remarquer la nécessité d'employer une combi- naison de caractères, car, en ne se basant que sur un caractère uni- que, on n'obtient qu un groupement artificiel, puisque ce caractère peut apparaître isolément dans des groupes très-éloignés. M. Dareste en donne quelques exemples. Ainsi, la soudure de l'intermaxillaire et des maxillaires, dont on avait prétendu faire la caractéristique des Plectognathes, se retrouve ‘chez les Acanthures, les Trichiures, les Thyrsites,et même, d'après Müller, chez le Serra Salmes. La réduction de l'interopercule à l’état d'une tige cylindrique logée dans une rai- nure du préopercule, si remarquable dans ces mêmes Plectognathes, se rencontre aussi dans les Callionymes et les Dactyloptères. Enfin un genre de Chétodons, les Zanclus, et un autre de Labroïdes, les Xirichthys, présentent cet écartement des frontaux antérieurs et des palatins, typique de certains groupes des Balistes, des Acanthures et des Fistulaires. | Dans une prochaine communication, M. Dareste nous promet de définir les types crâniens des familles naturelles de son premier groupe, et il fait savoir à l'avance qu à presque tous les égards son travail l'a amené à reconnaître les mêmes coupes que Cuvier, tout en fournissant la justification des démembrements effectués par Müller et Agassiz. — Nous passons sous silence une communication (Compt.-rend. A 75) 358 REVUE SCIENTIFIQUE. 30 sept. 1872) de M. le professeur Joly, relative aux métamorphoses du Macropode, le Mémoire de ce savant devant paraître in extenso dans la Revue. — Une communication du Père Secchi sur une éruption solaire observée le 7 juillet 1872 provoque d'intéressantes considérations de M. de Quatrefages sur la phosphorescence animale (Compt.-rend. 5 août 1872). D'après cet éminent naturaliste, on a confondu sous ce terme général des phénomènes très-différents. Dans les Lampyres, vulgairement vers luisants, dans les Élaters, ete., et peut-être aussi dans certains Mollusques, tels que les Pholades, la production de lumière paraît se rattacher à une véritable combustion lentement accomplie. Elle est accompagnée de production d'acide carbonique, est activée par l'oxygène et anéantie par les gaz irres- pirables. Chez d'autres hnimaux, au contraire, les Noctiluques, qui rendent la mer phosphorescente sur nos côtes, les mêmes agents ne semblent pas influencer le dégagement de lumière. Celui-ci procède par éclats et provient d'une multitude d'étincelles se produisant dans la trame contractile de la cavité du corps, et qui se rattachent évidemment à la contraction de ces trabécules. M. de Quatrefages pense qu il y aurait intérêt à étudier cettelumière par les procédés de l'analyse spectrale. M. Milne-Edwards annonce à ce propos qu'il a recu des travaux très-intéressants du professeur Panceri (de Naples) sur la phospho- rescence des animaux marins, et que ce savant s'est assuré que la lumière émise par les Pholades, les Béroés, les Méduses, etc., est constamment monochromatique. On retrouvera reproduites dans les Archives de zoologie, n° 3, p.LX, les conclusions des Mémoires de M. le professeur Paolo Panceri. — M. le D' H. Sicard a communiqué à l'Académie (Compt.-rend. 30 septembre 1872) la suite de ses intéressantes recherches sur l'ana- tomiedes Helix. Il a étudié avec le plus grandsoin, chez le Zonites al- girus, ancien Helix algira, une remarquable connexion existant entre le système nerveux et le système musculaire, relation entrevue par Cuvier et consignée à la hâte par notre grand naturaliste dans son Mémoire sur la Limace et le Colimacon. De la face supérieure du muscle rétracteur du pied, on voit, de chaque côté, se détacher un étroit faisceau qui bientôt se subdivise, pour se rendre au petit et au grand tentacule. La bandelette destinée TRAVAUX FRANCAIS. — ZOOLOGIE. 309 au petit tentacule s'épanouit en éventail sur son côté interne, de façon qu'uneportion des fibres, au lieu de se rendre directement à ce tenta- cule, vout s'irradier sur le collier œsophagien, au névrilemme duquel elles s'unissent d'une manière intime. La bandelette du grand tentacule loge dans son épaisseur le nerf correspondant, lequel, avant de s'en- foncer dans le muscle, est réuni aux centres nerveux par une expan- sion musculaire dont il est également enveloppé. M. Sicard fait judi- cieusement remarquer qu'en raison de ces connexions , ce groupe musculaire devrait prendre la dénomination de muscle rétracteur des tentacules et du collier œsophagien. Il démontre que son action n'est pas aussi simple que l'indique cette désignation, et quelle est variable suivant que l'animal est déployé ou contracté. M. Sicard a encore constaté que l'expansion musculaire qui entoure le collier nerveux va revêtir d'une gaine contractile les différents nerfs qui naissent des centres sus et sous-æsophagiens. L'examen microscopique ne.laisse aucun doute à cet égard, et l'on reconnaît que chaque cordon nerveux est revêtu d’une double gaîne ou, si l'on veut, d'un double névrilemme : l'un interne, de nature conjonctive, l'autre externe, formé d'éléments musculaires tapis- sés eux-mêmes par une couche superficielle de cellules volumineuses, qui n'est pas sans analogie avec l'adveniitia des vaisseaux. Ces connexions entre la fibre contractile et le système nerveux ont pour résultat de soumettre ce dernier, comme l’a ditCuvier, au système musculaire : le collier œsophagien, en effet, peut subir des déplace- ments en rapport avec les mouvements de contraction et d'extension si étendus del'animal, en même temps que, par une utile accommoda- tion, les cordons nerveux, en perdant ou reprenant activement leurs flexuosités, sont susceptibles de s'allonger et de se raccourcir. — Dans une note insérée aux Comptes-rendus du 7 octobre 1872, M. E. Gouriet indique quelques caractères extérieurs qui différencient les sexes chez l'Écrevisse fluviatile. Aux caractères tirés des appendices qui avoisinent les organes génitaux, et que de Geer a fait connaître, l'auteur de cette note a reconnu qu'on peutjoindre les suivants : longueur moindre des anten- nes, volume moins considérable des grosses pinces, développement plus marqué de l'abdomen, taille plus réduite chez les femelles. M. Gouriet a encore remarqué que chez le mâle le niveau des bords latéraux de la carapace dépasse sensiblement celui des bords de la queue,et qu'en moyenne, chez la femelle, la largeur de cette dernièré partie est à celle de la carapace comme 7 à 6; chez le mâle, cette différence est de un 360 REVUE SCIENTIFIQUE. quinzième seulement. M. Gouriet ajoute que, pour atteindre toute leur croissance, les Ecrevisses emploient sept ou huit années. — Jusqu'ici, l'organe de la vision était le seul organe des sens connu chez les Échinoïdés. M.S. Lovén ena découvertun autre (Compt.-rend. 7 octobre 1872) d’une existence très-générale chez ces animaux, puis- qu'ilne paraît faire défaut qu'au genre Cidaris. Ge sont des corps très- petits, globulaires ou ellipsoïdes, de Omm,011 à 0,375 dans leur plus grande dimension, pourvus d'un pédicule très-court s’articulant sur un petit mamelon du test. Il propose de les nommer sphérides. Ils sont durs, luisants, pigmentés et recouverts d’un épithélium et d'une cuticule à cils vibratiles. On ne les rencontre que sur les ambulacres au nombre de 1, 2, ou en plus grande quantité; sur les pièces péri- stomiennes, ils ne manquent jamais. [ls paraissent recevoir leurs nerfs des cinq branches émanant de l'anneau buccal, qui en dedans du test parcourent l’ambulacre. M. Lovén penche à les considérer comme des organes de gustation. Les sphérides n'apparaissent qu'un peu après les radioles et les pé- dicellaires, dans un ordre déterminé par une loi qui régit l'évolution des différentes parties de l’ambulacre, et que M. Lovén expose avec détail dans la dernière partie de son Mémoire. M. Villot (Compt.-rend. 5 août 1872) a eu la bonne fortune de rencon- trer la forme embryonnaire du Dragonneau, qui jusqu à présent avait échappé aux naturalistes. A cette période, le Gordiusse présente sous la forme d’un ver microscopique, cylindrique, mesurant à peine 0mm,205 de longueur sur 0"",045 de largeur. La tête est armée d'une triple couronne de piquants robustes et munie d'une trompe qui, dans ses mouvements de protraction et de rétraction, se comporte à peu près comme celle des Échinorhynques. Le corps, couvert de plis transver- saux très-réguliers, est terminé par une queue dont le sépare un étranglement. Cette queue porte à son extrémité, qui est émoussée, deux paires d'appendices inégaux en longueur. Le jeune Dragonneau vit dans l’eau et paraît rester cramponné aux corps immergés, en attendant sa victime. M. Villot l'a vu pénétrer, à l’aide de l’arma- ture de sa trompe, dans les tissus des larves de Tipulaires culicifor- mes, et s’y enkyster, continuant dans cet état à cheminer dans les tissus, le kyste s'allongeant autant qu'il est besoin. Les Gordius diffèrent donc des Mermis, puisque non-seulement ils exécutent des migrations nécessaires, mais éprouvent des métamor- phoses complètes qui les rapprochent des Acanthocéphales. TRAVAUX FRANCAIS. —ZOOLOGIE. 361 — M.J. Kunckel a exposé à l’Académie (Compt.-rend. 5 août 1872) le résultat de ses Recherches sur le développement des fibres musculaires striées chez les Insectes. Nous ne rappellerons pas les différentes opinions émises sur la structure de l'élément contractile par Schwann, Külliker, Leydig, Lebert, Margo, Weismann, et par notre habile micrographe, M. le professeur Rouget. M. Kunckel croit être arrivé à constater que, comme l'admet M. Rouget, et après lui M. Dônitz, l'élément primitif du muscle est la fibrille, provenant elle-même d’une cellule embryon- naire unique qui s'allonge, et dont le noyau granuleux disparaît au moment où se produit la striation. Plus tard, le sarcolemme, qui n’est qu une forme du tissu conjonctif, apparaît entourant un groupe de ces fibrilles, et constituant de la sorte un faisceau primitif. L'apparition des myoplastes ou sarcoplastes serait postérieure à celle des cellules embryonnaires des fibrilles: ils ne pourraient donc pas être considérés, avec MM. Lebertet Margo, comme les éléments générateurs du muscle; ils sont les centres de formation du perimysium. L'auteur combat encore les idées deM. Weismann relativement au rôle attribué autissu adipeux et aux muscles de la larve qui tous les deux, en se détruisant, fourniraient les matériaux destinés à la formation du tissu musculaire de l'insecte sexué. L'observation apprend que la constitution des fais- ceaux musculaires précède l'apparition des cellules génératrices des fibrilles. Enfin, l'on acquiert la certitude que pendant un certain temps les deux systèmes musculaires de la larve et de l'adulte coexistent. — Le Phylloxera, ce redoutable insecte dont nous avons entretenu nos lecteurs (Revue, tom. I, n° 2, pag. 215 ), ne borne pas ses ravages à la vigne, comme on le croyait jusqu'ici. M. Cornu ( Compt.-rend. 26 août 1872) l'a découvert sur les racines de différents arbres de nos vergers, tels que poiriers, pommiers, cerisiers, pêchers, qui, comme la vigne, finissent par succomber épuisés par ce parasite. —M. G. Carlet a soutenu, devant la Faculté des sciences de Paris, une Thèse intitulée : Essai expérimental sur la locomotion humaine ; Étude de la marche. L'étude de la locomotion est, sans contredit, un des problèmes les plus épineux de la physiologie. Son historique peut être divisé en deux périodes : l’une d'observation, ainsi que l'appelle l’auteur, embrassant tous les travaux depuis Aristote jusqu'aux frères Weber exclusivement, et à laquelle se rattachent les recherches de Fabrice d'Aquapendente, de Glisson, Mayow, Gassendi, Borelli, Barthez, Magendi, Roulin, Chabrier, Gerdy, et les calculs de Poisson; l'autre d’expérimentation, inaugurée par l'importante étude des frères 362 REVUE SCIENTIFIQUE. Weber, dont plusieurs résultats ont été contredits par un habile expé- rimentateur, M. Duchenne ( de Boulogne ). Pour arriver à la solution expérimentale de la partie du problème à laquelle il s'était adressé, l'auteur a employé la méthode graphique, définie par M. le professeur Marey : le microscope du mouvement, et qui a donné, entre les mains de ce savant, de si remarquables résultats. Ainsi que le spécifie M. Carlet, dans le titre de son Mémoire, il n'a étudié que la marche, c'est-à-dire ce mode de locomotion dans lequel le corps avance sans jamais cesser de porter sur le sol. Le trot, la course, le saut, restent en dehors du cercle dans lequel l'auteur s'est renfermé. Encore toutes les questions relatives à la marche n'ont-elles pas été abordées: M. Carlet s'est contenté de décrire dans le plus grand détail les mouvements successifs ou simultanés qui se produisent dans le seul mode de locomotion dont il se préoccupait. Nous ne pouvons entrer dans la description des appareils dont s'est servi cet expérimentateur, ni aborder le détail et la discussion des expériences. Nous nous bornerons à rappeler que les résultats qu'il a obtenus sont résumés dans quatre-vingt-cinq propositions dont il . déduit ensuite la théorie de la marche. I] y distingue deux temps, celui du double appui pendant lequel les pieds reposent sur le sol, et celui de l'appui unilatéral dans lequel un des pieds porte sur le plan résistant. Dans chacun de ces temps enfin, il admet trois périodes, celle du début, celle du milieu et celle de la fin, pendant lesquellesles mouvements et les attitudes sont analysés avec un soin et une rigueur dignes d éloges. S. JOURDAIN. — Es —— Botanique. L'étude de la reproduction des Cryptogames a été, dans ces der- nières années, l'objet de travaux considérables qui en ont révélé les curieux phénomènes et qui ont ouvert un champ immense d’obser- vations à explorer. Maïs, si rien n'est plus intéressant, rien n'est aussi plus délicat que cette investigation dans lemonde des infiniment petits, et on ne saurait trop admirer tout ce qu'ont dû déployer d'ha- bileté dans leurs recherches les botanistes qui ont attaché leur nom à cette partie de la science : MM. Decaisne, Tulasne, Thuret.…, en France; Al. Braun, de Bary, Pringsheim..…, en Allemagne. TRAVAUX FRANCAIS. — BOTANIQUE. 363 C'est à cet ordre de travaux qu'appartient un important Mémoire de M. Max. Cornu, présenté par lui comme Thèse à la Faculté des sciences de Paris, et inséré dans le tom. XV des Annales des sciences naturelles :. Ge Mémoire forme la première partie d'une Monographie que ce botaniste a entrepris d'écrire sur les Saprolégniées. Rangé d'abord dans la classe des Algues, le groupe des Sapro- légniées est aujourd'hui placé parmi les Champignons aquatiques. L'étude générale de ces singuliers végétaux était à faire, car les Mémoires dont ils avaient été l'objet jusqu'ici n'avaient porté que sur des espèces ou des genres particuliers. M. Max. Cornu l’a abordée, et malgré les difficultés inhérentes à un pareil sujet, il l'a traité de facon à montrer que la sagacité dans la recherche, l'exactitude dans l’obser- vation, ne sont pas des qualités spéciales aux savants d'Outre-Rhin, ainsi qu'ils le prétendent avec plus de vanité que de justesse. La Monographie des Saprolégniées a été divisée par son auteur en quatre parties qui traiteront successivement de la Reproduction sexuée, de la Reproduction asexuée, de l'Etude systématique, de la Physiologie et de la Biologie. C'est la seconde de ces parties, la plus importante sans contredit, qui fait l'objet du Mémoire dont nous avons à nous occuper. M. Cornu commence par établir quels sont les végétaux compris dans la famille des Saprolégniées, parmi lesquelles il range les Péron- osporées. Ila eu de plus la bonne fortune de rencontrer des espèces nouvelles qui lui ont permis d'ajouter aux observations déjà faites, en les rectifiant. «Je tiens pour certain, dit-il, quil y en a encore un grand nombre d'inconnues; leur connaissance pourra faciliter la solu- tion de questions encore obscures et incomplètement élucidées à l'aide de celles que l’on connaît actuellement. » En se basant sur le mode de reproduction asexuée, M. Cornu a établi des coupes naturelles dans cette famille. I1 la divise en Sapro- légniées vraies et en Monoblépharidées. Dans les premières, les Zoospores sont munies dedeux cils; dans les secondes, elles n'ont qu'un seul cil, et leur mode de sortie est spécial. En outre, les filaments ont une con- stitution différente dans les unes et dans les autres; leur membrane est formée par de la cellulose dans les Saprolégniées vraies, tandis qu'elle en est dépourvue dans les Monoblépharidées. Ces dernières ne sont composées jusqu ici que du genre Monoblépharis établi par l'auteur et qui comprend les trois espèces proliferum, sphærica et polymorpha. Dans les Saprolégniées vraies, on observe des Zoospores réniformes t Annales des sciences naturelles. Botanique, tom. XV, pag. 5. 304 REVUE SCIENTIFIQUE. communes à toutes les espèces, soit qu'il y ait des Zoospores de deux sortes appartenant à deux formations successives, ce qui est le cas général), soit qu'il n yen ait que d'une sorte, comme dans Les Pythium. Les filaments sont tantôt cylindriques, tantôt munis d’étranglements; les plantes à filaments cylindriques forment les G&. Saprolegnia, Achlya, Aphanomyces, Dictyuchus, Pythium. Celles qui sont munies d'étran- glements forment une série parallèle à la précédente. Le Leptomitus lacteus Ag. et le L. brachynema Hildebr., pour lesquels M. Cornu propose d'établir le genre nouveau Apodya, correspondent au G. Sapro- legnia. Le genre Achlyogeton Schenk. correspond aux Achlya Nees, A. Aphanomyces de Bary. Les genres Myzocytium, Schenk. et Rhipi- dium (gen. nov.) correspondent aux divers Pythium Pringsh. Dans ces deux séries, la sortie des Zoospores se fait à peu près de la même manière; il v a une sorte de Zoospores à forme identique. Ces préliminaires établis, M. Cornu aborde l'étude de la reproduc- tion sexuée, qui fait l'objet de son Mémoire. Ce mode de reproduction s'effectue par le moyen d'un certain nombre d'organes que l’auteur commence tout d'abord par définir. Ce sont les Oogones ou cellules sphériques qui constituent l'organe femelle; ces Oogones contiennent les Oospores, qui proviennent de la fécondation par l'élément mâle des Gonosphéries, petites masses Hoban que la fécondation transforme en cellules parfaites. L'organe mâle est représenté par de ramifications qui entourent les Oogones et s'appliquent sur eux; on les appelle Branches latérales, leur extrémité renflée et isolée par une cloison constitue l'Anthéridie. Dans certains cas, les branches latérales manquent, et il faut chercher ailleurs l’organe mâle. M. Cornu range les faits que comporte l'étude de la reproduction sexuée sous cinq chefs : 1° Description des oogones et des branches latérales adultes ; leur développement ; 2 Action réciproque de ces organes, c'est-à-dire fécondation ; 3° Examen des cas dans lesquels manquent les branches latérales. Théorie de M. Pringsheim sur la sexualité des Saprolégmiées ; 4e Fécondation par anthérozoïdes véritables ; 5° Des oospores ; leur germination. La partie historique et critique à nécessairement une grande im- portance dans l'examen de ces questions, qui ont exercé dans ces dernières années la sagacité de quelques-uns des savants les plus considérables, et elle a dû être traitée par M. Cornu avec d'autant TRAVAUX FRANCAIS. — BOTANIQUE. 369 plus de soin qu’il a été amené, comme nous le verrons, à combattre la manière de voir de certains d'entre eux. L'oogone est constitué le plus souvent par l'extrémité renflée et dilatée d'un filament ; il en est séparé par une cloison transversale qui, dans la plupart des cas, laisse au-dessus d'elle une petite portion cylindrique du filament ; la forme sphérique est la plus commune. Quelquefois l’oogone n'est pas terminal; chez les Pythium, par exemple, il se forme un peu au-dessous de l'extrémité du filament, et il est alors surmonté d'une portion cylindrique. Les parois de l’oogone sont plus épaisses que celles du filament ; leur surface est lisse ou échinulée. Dans certains ças, on y remarque des perforations destinées à faciliter la fécondation; elles sont en nombre variable, mais en général disposées régulièrement. M. Pringsheim avait attaché une grande importance à ces perfora- tions, cependant elles manquent très-fréquemment. Les filaments qui portent les oogones varient de forme et de lon- oueur; ils fournissent néanmoins de bons caractères spécifiques ; chacun d'eux est en général porteur de plusieurs oogones, mais en nombre variable; rarement iln'y en a qu’un. Il n’y a également rien de fixe dans le nombre d'oospores que contient un même oogone; souvent l’oospore est unique: dans les G. Pythium, Rhipidium, etc.; leur forme est sphérique ou un peu irrégulièrement étoilée ; leur couleur est blanche, brune ou rosée. Souvent on rencontre sur un même individu les deux modes de reproduction, asexué et sexué. Généralement, le deuxième mode succède au premier après un intervalle de quelques jours, mais son apparition est subordonnée aux conditions dans lesquelles la plante se trouve placée. Les branches latérales, quand elles existent, constituent l'organe mâle. Elles se composent de deux parties : l'une terminale, l'Anthé- ridie, l'autre moins importante, le Filament porteur de cette Anthé- ridie. M. Cornu, tout en employant le terme d'anthéridie, consacré par l'usage, le critique comme impliquant l'idée de la présence d'anthérozoïdes dans l'intérieur de cet organe; or, il n'y en a jamais observé, et à cause de cela il préférerait le nom d'Androcyste, qui a l'avantage de ne rien préjuger. L'anthéridie vient s'appliquer sur l'oogone, et le filament qui la porte s'infléchit et se courbe à cet effet; elie s'applique, soit par son extrémité , soit par une face latérale. Un oogone peut présenter plu- sieurs anthéridies fixées à sa surface. Ces anthéridies émettent des prolongements qui pénètrent dans l’intérieur de l'oogone à travers 366 REVUE SCIENTIFIQUE. des perforations qui existent déjà, ou qu'ils déterminent eux-mêmes dans l'épaisseur de sa paroi, et ces prolongements s’enfoncent dans la substance même des gonosphéries ; les anthéridies se vident alors avec lenteur. C'est l'acte fécondateur qui transforme les gonosphéries en oospores. M. Cornu à étudié la formation des oogones et celle de branches latérales; il a réussi à observer leur développement sur des exem- plaires cultivés. Dans les espèces polyspores, ce développement donne lieu à des phénomènes compliqués au sujet desquels les savants ne sont pas d'accord. Ainsi, l’on voit à un moment donné se produire, dans le plasma que contient l'oogone, des vacuoles lenticulaires en assez grand nombre. M. Pringsheim prétend qu'elles apparaissent précisé- ment aux places où la paroi se résorbera plus tard et où il se produira des perforations. Cette opinion est erronée, car on observe des va- cuoles chez des espèces dont les parois restent imperforées ; de plus, M. Cornu a observé sur les parois de l'oogone des points de couleur différente qui paraissent correspondre réellement aux places où se formeront les perforations par résorption de la membrane, mais ces portions destinées à être résorbées ne sont pas en rapport avec les vacuoles. M. Al. Braun considère ces vacuoles comme les nucléus des spores futures, mais cette interprétation tombe entièrement devant une observation de M. Cornu, qui à vu dans un oogone où il y avait d'un seul côté quinze vacuoles visibles, se former deux gono- sphéries seulement. Pour M. Cornu, ces vacuoles sont le premier effet de la séparation du plasma en sphérules pour la formation des gono- sphéries. Celles-ci, une fois formées, se rassemblent au centre de l'oogone. Dans les espèces monospores, la gonosphérie se forme par la con- densation au centre de l’oogone du plasma, sous forme d'un globule sphérique. | Les branches latérales naissent sous la forme d'un mamelon au voisinage de l’oogone ; leur extrémité, où le plasma s'est accumulé, s'isole par une cloison et constitue l'anthéridie. Quand les gonosphéries sont devenues aptes à être fécondées, l’anthéridie appliquée à la surface de l'oogone émet des pro- longements qui pénètrent, soit par les perforations que présente la paroi, soit en traversant cette paroi, si elle est continue, par l'effet d'une action mécanique de pression ou d'une action chimique de dissolution. Ces prolongements, qui peuvent présenter plusieurs bran- TRAVAUX FRANCAIS. — BOTANIQUE. 367 ches, s'implantent sur une gonosphérie, et c'est par eux que l’anthé- ridie se vide entièrement dans l'oogone. D'après M. Pringsheim, le contenu de l'anthéridie est formé par des Anthérozoïdes qu'elle déverse entre les gonosphéries. Telle n'est pas l'opinion de M. Cornu, qui d'une part n'a pas vu d'anthérozoïdes, et qui d'autre part a observé la pénétration des ramifications de l'an- théridie dans les gonosphéries. Ce qui est admis par tous, C'est que l'anthéridie se vide de son contenu dans l'oogone. A la suite de cet acte, les gonosphéries s'enveloppent d'une membrane et se transfor- ment en véritables oospores. L'étude de la fécondation arrête longuement M. Cornu, et c'est avec raison, car il doit discuter avec soin les théories émises par ses devan- ciers. Il démontre d'abord la réalité de la fécondation, sa nécessité, ce qui n'est pas contesté; puis il fait l'historique de la question. Avant lui, tous les observateurs admettaient, avec M. Pringsheim, la présence des anthérozoïdes, à l'exception pourtant de M. Hildebrand, qui n'a vu qu'un mouvement moléculaire dans le contenu des anthéridies de son Achlya lignicola. Les observations de M. Cornu ont porté sur diverses espèces, et elles l'ont conduit à se prononcer en faveur de cette dernière manière de voir. Il a suivi avec une minutieuse atten- tion les phénomènes de la fécondation sur le Pythium gracile Schenk. Il a observé l'épanchement du plasma de l’anthéridie dans les gono- sphéries, et les détails qu il donne à ce propos présentent le plus vif intérêt. Après la fécondation, les processus des anthéridies deviennent le plus souvent indistincts et disparaissent. Nous avons vu que dans certaines Saprolégniées, les oogones étaient dépourvus de branches latérales. Où donc se trouve, dans ces espèces, l'organe mâle ? Comment s'opère la fécondation ? Ces ques- tions ont été étudiées par M. Pringsheim, qui a émis une théorie sur la sexualité des Saprolégniées. Il distingue deux cas. Dans l’un, corres- pondant à la diæcie, il y aurait sur certains filaments des cellules particulières produisant des anthérozoïdes. Il appelle ces cellules 4n- théridies, et il les regarde comme les analogues de celles qui terminent les branches latérales. Dans l'autre cas, les espèces qualifiées de Gynandrosporiques émettraient des zoospores mâles produites par des sporanges spéciaux et destinées à se développer sur l’oogone en indi- vidus mâles remplaçant les branches latérales. Ces sporanges parti- culiers, appelés Dictyosporanges et considérés par M. Pringsheim comme ayant trait à la fécondation, ne sont autre chose que des spo- 3068 REVUE SCIENTIFIQUE. ranges ordinaires dont les zoospores se sont échappées en laissant dans leur intérieur un élégant réseau cellulaire. La théorie de M. Pringsheim est erronée de tous points, et la dis- cussion qui en est faite par M. Cornu est des plus attachantes. Par une analyse très-délicate des observations de ce savant, il arrive à démontrer non-seulement les erreurs qu’il a commises, mais à indi- quer quelles en ont été les causes. Pour ce qui est des espèces dites gynandrosporiques, 1l montre que sur les deux qui ont servi de base d'observation à M. Pringsheim, l'une est fort douteuse, l’autre est le Dicityuchus monosporus Leïtgeb. Il s'occupe spécialement de cette dernière, qui à été de la part de M. Leïtgeb l'objet d'une étude spé- ciale ; il prouve que cette plante est bien l’Achlya de M. Pringsheim, et cela en s'appuyant sur le Mémoire de Leitgeb et sur ses observa- tions personnelles, qui concordent avec celles de cet auteur ; mais tandis que M. Leitgeb, hésitant à mettre en doute les faits énoncés par M. Pringsheim, croit que son Dictyuchus est une espèce différente de celle qu'avait observée ce savant botaniste, M. Cornu établit leur identité, de facon à ne laisser aucun doute à cet égard. Dans les cas qui ont été considérés par M. Pringsheim comme appartenant à la diæcie, il résulte, de l'enquête établie par M. Cornu, qu'il ne faut voir que des faits de parasitisme. C'est dans la seconde partie de son Mémoire, qui traite spécialement des parasites des Sapro- légniées, qu il développe les raisons de cette manière de voir. I fait avec détail l'historique de ces formations ambiguës, qui ont été regar- dées par quelques-uns comme des sporanges. M. AI. Braun, le pre- mier, reconnut en elles des parasites qu il appela Chytridium Sapro- legniæ. Mais si la théorie de M. Pringsheim est inexacte, où sont donc les organes mâles des Saprolégniées dépourvues de branches latérales? C'est ce que M. Cornu a dû rechercher avec soin et ce qui constitue la partie la plus personnelle de son travail. Démontrer, en effet, la fausseté des opinions émises, c'était beaucoup sans doute, mais l'essentiel était de substituer la vérité à l'erreur. Nous ne pouvons suivre l’auteur dans le détail des observations quil a faites dans ce but. Elles portent principalement sur deux espèces du nouveau genre Monoblepharis, qu'il appelle M. sphærica et M. polymorpha. Il a pu reconnaître chez elles des sporanges spéciaux où se forment des anthérozoïdes qui fécondent les gonosphéries et qui sont semblables aux zoospores. La forme et la disposition des oogones et de même la forme et la disposition des anthéridies varient suivant les espèces, mais ce point est secondaire. Le point capital était de déter- TRAVAUX FRANCAIS. — BOTANIQUE. 369 miner par l'étude des phénomènes de la fécondation la nature et le rôle de ces organes. M. Cornu n'y a pas manqué: il a noté les modi- fications qui se produisent dans l'oogone pendant la période qui précède la fécondation, et il a observé la formation de la gonosphérie : d'autre part, il a suivi les phénomènes qui se montrent dans les an- théridies pour le développement des anthérozoïdes, et il a vu ceux-ci sortir de l’anthéridie. Il a constaté la pénétration de ces petits corps agiles dans l'intérieur de l'oogone, et il a vu la fécondation résulter de la fusion des éléments d'un d’entre eux avec ceux de la gono- sphérie. Celle-ci, une fois fécondée, prend une forme sphérique, se limite par une membrane et se transforme en oospore. Elle sort de l’oogone en s’épanchant au dehors dans le #. polymorpha. Dans les Monoblepharis, la similitude des anthérozoïdes avec les zoospores, leur mode de sortie de l'anthéridie, leur action fécondante sur un oogone à large ouverture contenant une gonosphérie unique, sont autant de caractères qui établissent la véritable analogie de la famille des Saprolégniées avec celle des OEdogoniées et celle des Coléochétées. Dans les Saprolegnia et les Achlya dépourvus de branches latérales, c'est par induction, par analogie avec ce qui existe dans les HMonoble- pharis, que M. Cornu est amené à penser que tous les sporanges ne sont pas identiques, que certains d'entre eux sont de véritables an- théridies, et les spores agiles qu ils contiennent des anthérozoïdes. De très-grandes difficultés n'ont pas permis de constater ces faits par l'observation directe. Il nous reste quelques mots à dire sur les oospores et sur leur ger- Imination, pour en finir avec la première partie du Mémoire de M. Cornu. La gonosphérie a été transformée par l'acte fécondateur en oospore, cest-à-dire en un globule sphérique immobile, entouré d’une mem- brane. Cette membrane de l'oospore est formée de deux parties : l'Épispore et l’Endospore. La première crève lors de la germination et laisse la seconde faire hernie au dehors. Dans le contenu de l’oospore on distingue également deux parties; un ou plusieurs globules oléagineux occupent le centre et sont plongés dans un plasma granu- leux plus sombre. Les différences que ces oospores présentent dans certains genres sont indiquées avec soin par M. Cornu; à cette étude succède celle de leur développement, pendant lequel le contenu des oospores et leur paroi subissent des variations. Ainsi, le contenu ne présente pas, dès 310 REVUE SCIENTIFIQUE. le début, les globules oléagineux qu on y trouve plus tard; il esb d'abord homogène, comme celui de la gonosphérie. La paroi, primitive- ment mince, s accroît en épaisseur, se durcit, se colore diversement, se couvre parfois d'éminences. Pendant ce temps, il se développe à sa face interne une membrane cellulosique incolore et molle, l'endo- spore. Il y a accroissement en épaisseur de la paroi par l'effet d'un développement effectué sur ses deux faces, interne et externe. Quels sont donc les éléments qui servent à former l'Épispore ? Contraire- ment à l'opinion de M. de Bary, qui considère le tégument externe comme se formant aux dépens du plasma périphérique de l’oogone, M. Cornu conclut de ses observations que la-membrane de l'oospore s'accroît, par l'extérieur comme par l'intérieur, aux dépens du plasma interne, en épispore et en endospore. La germination des oospores a été observée dans quelques cas par M. Cornu. Il a constaté quelle peut s'effectuer, les oospores étant dans l’intérieur de l'oogone. Tantôt elles émettent un filament sembla- ble à ceux de la plante-mère et à l'extrémité duquel se développe un sporange, tantôt elles s'organisent directement en Zoospores. Les phénomènes qui accompagnent cette germination sont analysés avec beaucoup de soin par M. Cornu; nous nous bornerons à signaler que les oospores ne germent qu'après un temps de repos prolongé et même après avoir été desséchées; de plus, il faut qu'il y ait dans leur voisi- nage un substratum propre à leur nutrition. Chez les Péronosporées, l'eau suffit à déterminer le développement, ce qui s'explique, selon M. Cornu, parce que l'eau fait germer en même temps les graines de la plante nourricière de ces parasites. Le rôle des oospores est en tout cas « de conserver les plantes pendant la sécheresse, la gelée, au milieu des circonstances les plus défavorables auxquelles l'appareil végétatif, les sporanges et les zoospores, ne peuvent résister ». Nous avons vu qu'il fallait, pour que l'argumentation de M. Cornu contre la théorie de M. Pringsheim sur la sexualité des Saprolégniées fût inattaquable, qu'il prouvât la nature parasitique des productions prises par cet observateur pour des Anthéridies. Pour arriver à cette démonstration essentielle, M. Cornu a dû faire avec un soin tout par- ticulier l’étude de ces formations ambiguës, et la seconde partie de son Mémoire leur est consacréee sous le titre de « Chytridinées parasites des Saprolégniées ». Leur nature avait été inconnue jus- qu'ici; on les avait prises pour des organes de la plante nourricière; seul, AL. Braun, ainsi que nous l’avons dit déjà, en soupçonna le parasitisme, mais il revint ensuite sur cette opinion. Ces parasites sont très-rares, d'une observation très-difficile, pour TRAVAUX FRANCAIS. — BOTANIQUE. 371 laquelle il faut souvent en appeler a un heureux hasard; aussi cette étude toute nouvelle, et en outre spécialement délicate, mérite-t-elle à son auteur les plus vifs éloges. Dans ces Chytridinées, M. Cornu distingue trois groupes, suivant que les sporanges sont libres dans l'intérieur d’un filament renflé, soudés aux parois de ce filament, ou enfin environnés d'une mem- brane générale, comme les Sores des Synchytrium de Bary et Wor. Ces groupes correspondent à des chytrydinées déjà connues, mais s'en distinguent néanmoins par plusieurs caractères qui ne permet- tent pas de les faire rentrer dans les genres existants ; aussi M.Cornu propose-t-il d'établir trois genres nouveaux, auxquels il donne les noms d'Olpidiopsis, de Rozella, et de Woronina. Le développement des sporanges, la sortie des zoospores, leur péné- tration dans les filaments à l’état plasmatique et sans membrane, la vie de ce plasma parasite au milieu du plasma de la plante et aux dépeus de celui-c1 : tous ces points sont successivement exäminés et offrent un réel intérêt. Un deuxième mode de reproduction des chytridinées s'opère au moyen de spores immobiles qui naissent, en général, comme les sporanges, dans des portions de filament renflées ou dans des articles terminaux. L'analogie indique que ces spores sont dues à une fécon- dation, c'est-à-dire que ce sont des oospores; mais où est l'organe mâle fécondateur ? Y aurait-1l deux sortes de zoospores dont la copulation se ferait, soit en dehors, soit en dedans de la plante hospitalière? M.Cornu incline vers cette hypothèse, mais ici les difficultés d'observation sont telles qu'il n y a pas d'affirmation possible. Ce qu'il y a de plus essentiel à démontrer pour la thèse de l’auteur, c est que ces formations sont bien réellement des parasites et non des organes sexuels. Les raisons par lesquelles il justifie cette opinion sont énumérées par lui de la facon suivante. C'est : 1° L'analogie des espèces des divers groupes avec des chytridinées déjà connues, et la forme identique des zoospores dans tous ces para- sites des Saprolégniées ; 2° La présence d'organes sexuels nets et certains sur les individus attaqués ; 3° Le double mode de reproduction des parasites ; 4 Leur apparition tout à fait accidentelle ; 5° Leur présence simultanée sur plusieurs espèces ou genres habi- tant ensemble, tandis que rien de pareil ne se montrait AUREN EUX sur les espèces types décrites par les auteurs de REVUE SCIENTIFIQUE. 22 6° Les changements, perturbations, hypertrophies qui se présen- tent dans la plante nourricière. A propos de chaque espèce en particulier, M. Cornu insiste sur la démonstration de ces preuves. Nous ne saurions le suivre dans cet examen minutieux qui comporte l’histoire complète de ces plantes : nous devons nous borner à en constater le résultat, dont la légitimité ne paraît pas douteuse. Enfin, il formule la conclusion générale de son long travail dans les termes suivants : « La reproduction sexuée, chez les Saprolégniées, s'accomplit sui- vant deux types seulement. La fécondation s'opère, dans l’unau moyen des branches latérales, dans l’autre au moyen d'anthérozoïdes sem- blables aux zoospores. » Ces deux types, considérés à un point de vue un peu général, diffèrent à peine: chez l’un, l'élément mâle, non doué de mouvement, est déversé par l'organe mâle dans la gonosphérie ; chez l'autre, il est muni de cils et pénètre dans l'intérieur de l’oogone, etse fond dans la gonosphérie, sans le secours d'aucun organe. » Dans les deux cas, l'élément mâle est plasmatique ; il a pour effet de déterminer autour de la gonosphérie la production d'une mem- brane cellulosique et de changer ce globule en oospore. » — Le Mémoire de M. Cornu est suivi de Recherches morphologi- cues sur l'Ascobolus furfuraceus Pers. par M.Ed.de Glinka Janczenski!. Les connaissances acquises jusqu'à ce jour sur ce genre de champi- gnons, établi par Persoon en 1797, étaient assez incomplètes, surtout en ce qui concerne l'étude de sa structure et de son développement ; c'est ce qui a inspiré à l’auteur l'idée de ses recherches. Il fait d'abord l'anatomie de la cupule, qui est de forme discoïde, quelquefois un peu stipitée; elle se compose du réceptacle propre- ment dit, et de l'hyménium, qui occupe sa face supérieure. Dans le réceptacle, il y a lieu de distinguer trois tissus : le tissu cortical, Le tissu pseudo-parenchymateux, et le tissu sous-hyménial. Chacun d'eux est décrit et figuré avec soin. L'hyménium se compose de thèques, de paraphyses, et d'une sub- stance gélatineuse interposée, nommée Gélin par M. Crouan, et colo- rée, dans cet Ascobole, en jaune-soufre. M. de Glinka examine ensuite le développement et la structure des spores. I1 montre les phénomènes qui, dans la jeune thèque, accompagnent leur formation: il signale les changements que ces spores elles-mêmes subissent ————————_—aEZEaE— a ————————————— t Annales des sciences naturelles. Botanique, tom. XV, pag. 199. TRAVAUX FRANCAIS. — BOTANIQUE. 313 depuis leur apparition, sous forme de portions sphéroïdales de plasma jusqu'à leur maturité. Alors elles se composent d’un contenu proto- plasmatique, d'une double enveloppe membraneuse,dontl’uneinterne, Endospore, est elle-même formée de deux couches, l’autre externe, Exospore, présente une coloration violette remarquable, et enfin d’un appendice gélatineux dont la durée est limitée. L'exospore violet est strié dans le sens longitudinal; il est d'une consistance fragile ; au bout de quelques jours, il perd sa couleur vio- lette et prend une coloration brune; en même temps sa constitution se modifie, comme le montre l'action différente des réactifs chimi- ques. M. de Glinka a réussi à faire germer des spores de l’Ascobolus fur- furaceus. Pour cela, il en a mêlé une certaine quantité à la nourriture d'un lapin, et il les a retrouvées disposées à la germination, sous l'in- fluence de causes indéterminées, par leur passage dans le tube digestif. Les phénomènes de cette germination quil a pu alors observer con- cordent avec les résultats de M. Bouvier, qui avait obtenu et observé la germination de l’Ascobolus viridis. L’organogénie de la Cupule a fixé spécialement l'attention de M. de Glinka. M. Woronine, le premier, a étudié le développement de la cupule dans l’Ascobolus pulcherrimus. M. Tulasne a nommé Scolécite un corps vermiforme naissant des filaments mycéliens et formant le premier indice de la cupule. Ge scolécite est embrassé par les ramuscules pollinodes d’une branche voisine. Il n’a pas été possible de constater s'il y avait alors copulation réelle, mais l'analogie de la fonction permet d'attribuer au pollinode le rôle d'organe fécon- dateur. Ensuite, le scolécite s'entoure des filaments entre-croisés qui proviennent du mycélium environnant, et qui forment autour de lui une sorte de pelote. Ce tissu filamenteux, par son développement, constituera la cupule, et il formera, par ses modifications, le tissu cortical et le tissu pseudo-parenchymateux. Cette métamorphose s'opère graduellement de la base au sommet. Quand elle est à peu près complète, les paraphyses naissent de la partie supérieure restée fila- menteuse; elles s'allongent, se ramifient, sécrètent le gélin et forment bientôt l'hyménium encore dépourvu de thèques. Concurremment, le scolécite éprouve des changements ; une de ses cellules, mais une seule, engendre des hyphes, qui par Jeurs ramifications constituent le tissu appelé sous-hyménial et mentionné plus haut. Les hyphes donnent naissance aux thèques, et nous avons vu comment dans les thèques se développaient les spores. M. de Glinka nomme cellule asco- gène la cellule qui dans le scolécite produit les hyphes, et il nomme 116 314 “REVUE SCIENTIFIQUE. celles-ci hyphes ascogènes. Il n'a jamais trouvé qu'une seule cellule ascogène dans un même scolécite, mais 1l a rencontré dans une jeune cupule deux scolécites ayant chacun leur cellule ascogène. Ultérieurement , la cupule se développe par l'accroissement en nombre et en volume de ses éléments. L'évolution des thèques dans l'hyménium augmente son volume, et il en résulte une pression sous laquelle le tissu cortical se rompt ; de là provient la forme définitive que présente la cupule. L'auteur termine cette étude par quelques remarques générales déduites de ses observations. L'Ascobolus lui a fourni dans les Disco- mycètes un fait nouveau de sexualité qui prend place à côté de ceux que M. de Bary a constatés dans les Ascomycètes. Les paraphyses dérivent du tissu du réceptacle et n'ont rien de commun avec les orga- nes sexuels. Il n'y a pas encore de caractères bien nets qui distin- guent les Ascoboles des Pezizes, qui forment un genre très-voisin, et pour le moment la différence la plus marquée paraît consister, selon M. de Glinka, dans le développement de l'hyménium, qui chez les Ascoboles se fait au-dessous de la couche corticale et n’est mis à nu que plus tard, tandis que chez les Pezizes il apparaît toujours à la surface de la cupule. Enfin, l'intervention d'un acte physiologique, la digestion pour amener la germination des spores, est un fait particu- lier aux ascoboles et qui mérite de fixer l'attention. Le Mémoire de M. de Glinka ajoute un intéressant chapitre à l'histoire de ces curieux Cryptogames. —MM. Tulasne, à qui la Mycologie doit de si remarquablestravaux, ont publié dans les Ann. des sc. nat. de nouvelles notes sur les Fungi Tremellini et leurs alliés {. Ge petit groupe de champignons basidio- mycètes avait été déjà, de la part de M.L.-R. Tulasne, l’objet d'obser- vations datant de 1852, et dans lesquelles il avait reconnu les carac- tères particuliers que présente leur appareil de reproduction. Il avait trouvé leurs basides construites suivant deux types dis- tincts; dans le premier (Dacryomyces, Guepinia, Peziza), elles sont étroitement claviformes et s'allongent ensuite en deux processus épais et divariqués, qui portent chacun une spore réniformeet cloisonnée. Dans le second (Trémelles proprement dites), ce sont des cellules glo- buleuses qui se partagent le plus souvent de haut en bas en quatre parts égales ; chacun de ces segments, soit qu'ils se dissocient ou qu'ils restent unis, se prolonge en un long stérigmate qui se porte à ! Annales des sciences naturelles. Botanique, tom. XV, pag. 215. TRAVAUX FRANCAIS. — BOTANIQUE. 315 la périphérie de la plante et y produit une spore réniforme, ordinai- rement indivise. Un troisième type serait formé par les Auriculaires, si, à l'exemple des anciens mycologues, on admet leur parenté avec les Trémelles. Ici, la baside consiste dans un tube droit et épais, divisé par des cloi- sons transversales en quatre loges; chacune de ces loges émet par son extrémité un long spicule sporophore. Quel que soit le type, le plasma contenw dans la baside est tout entier employé à la formation des spores, de sorte que, quand celles-ci sont développées, les organes qui les ont produites sont absolument vides et diaphanes. Parmi ces champignons, MM. Tulasne en ont découvert de nou- veaux, et ils ont apporté d'importantes rectifications à la connaissance que l'on avait de certains autres. Nous ne pouvons que signaler les points principaux de ce travail, qui comporte des détails nombreux relativement aux espèces dont les diagnoses sont données avec un soin extrême. Un petit champignon dont l'hyménium est constitué comme celui des Dacryomyces, et qui appartient par conséquent au premier type, a recu le nom de Dacryomitra Pusilla. Dans les Trémelles, une espèce nouvelle, Tremella neglecta, croît en parasite sur le Sphæria strumella Fr. Le T. helvelloïdes DC. trans- porté avec raison par M. Fries dans son groupe des Guepinia, diffère cependant de ceux-ci en ce quil n'est fertile qu'à la face inférieure de son chapeau. Deux Corticium, le C. incrustans Pers. et le C. cæsium Pers., doi- vent être détachés des Théléphores, parmi lesquels on les a rangés jusqu'ici. Ils possèdent, en effet, la même structure hyméniale que les Trémelles, et MM. Tulasne proposent pour eux le nom générique de Sebacina. Entre eux cependant et les vraies Théléphores, il n’y a pas une grande distance, et on trouve une espèce, le Corticium incarna- tum Fr., qui paraît être intermédiaire. Le Tremella cerasi Schum. présente un magnifique appareil sper- matophore et fournit un exemple remarquable de la disposition par groupes de ces éléments. Sur l'écorce des rameaux morts du Salix Capræa, on rencontre une production trémelloïde que MM. Tulasne regardent comme très-ana- logue au Dacryomyces deliquescens Dub. La couleur en est rou ge car- minée, d'où le nom qui lui a été donné de Dacryomyces purpureus, Tul. Ces champignons présentent cela de particulier qu'ils se résol- vent parfois tout entiers en une infinité de gemmes ou conidies. 3176 REVUE SCIENTIFIQUE. Les spores des Trémellinées peuvent produire en germant, soit de simples filaments, soit des spores secondaires ou sporidies- qui sont solitaires et à peine plus petites que les spores mères, ou beaucoup plus exiguës, d'une forme spéciale et très-nombreuses. S'appuyant sur l'abondance de corps reproducteurs de diverse nature qu'on trouve dans les Trémellinées, MM. Tulasne n’admettent pas qu'ondoive, avec M. Fuckel, les ranger parmi les Fungi imperfecti, c'est-à-dire parmi ceux dont la forme fertile la plus parfaite est encore inconnue, et ils considèrent ces champignons comme aussi complets el aussi bien connus que tout autre groupe de Basidiomycètes. __ Dans les numéros parus des Annales, nous trouvons le com- mencement d'un Mémoire de M. van Tieghem, qui a pour titre: Observations anatomiques sur le cotylédon des Graminées. Nous nous bornons aujourd’hui à mentionner ce travail, nous réservant d'en faire l'analyse lorsque nous l’aurons tout entier sous les yeux. La question traitée par M. van Tieghem est de celles qui ont été le plus controversées et au sujet de laquelle les opinions sont demeurées divergentes parmi les botanistes. Elle présente donc un intérêt tout particulier, et le Mémoire dont elle fait l'objet se recommande en outre à l'attention par le nom de son auteur. — M. Th. Lestiboudois a fait part à l’Académie ‘ de recherches nouvelles sur la structure des Dicotylé dones, qu'ila nommés hétéro- gènes. Ces végétaux ont pour caractère de ne pas produire leurs tissus nouveaux exclusivement dans la zone génératrice placée entre le bois et l'écorce. L'aspect particulier de ces tiges anormales n'avait pas échappé à l'attention des botanistes, qui l'avaient signalé chez quel- ques-unes d’entre elles, mais n avaient pas reconnu comment se pro- duisaient ces dispositions spéciales. Ils avaient vu dans quelques cas que plusieurs couches concentriques de structure différente pouvaient apparaître dans une même saison : ils n'avaient pas observé leur pro- duction extra-libérienne. Cependant M. Decaisne, en 1839, avait indi- qué la formation de faisceaux ligneux en dehors du liber, dans quel- ques espèces de Lardizabalées et de Ménispermées, mais il croyait que ces faisceaux étaient dépourvus de fibres libériennes et que le corps ligneux ne s’accroissait plus quand ils s'étaient montrés. Dans des communications précédentes à l’Académie des sciences, M. Lestiboudois avait démontré que certaines plantes présentent des EEE I M ne 4 Comptes-rendus, tom. LXXV, pag. 336, 567, 811. TRAVAUX FRANCAIS. — BOTANIQUE. 371 faisceaux de formation extra-libérienne, que ces faisceaux ont eux- mêmes un liber,et que l'apparition de nouveaux faisceaux n'empêche pas les formations antérieures de s’accroître. Dans la racine de Betterave, M. Decaisne avait constaté qu'il se produisait dans une seule saison plusieurs zones vasculaires concen- triques séparées par des zones parenchymateuses. M. Lestiboudois a montré que ces zones successives se formaient en dehors de la zone génératrice. Pour le prouver, il s'appuie sur l'existence de fibres libériennes interposées entre chacune de ces formations, et c'est là une raison péremptoire, en effet. Cependant ces fibres libériennes peuvent quelquefois ne pas se distinguer très-nettement, et il est alors impossible d'apprécier la nature de la zone utriculaire qui sépare deux zones ligneuses. En ce cas, la difficulté est levée si l'on voit exister simultanément plusieurs zones d’accroissement; de plus, les faisceaux intérieurs continuent à s’accroître pendant un certain temps après l'apparition des faisceaux extérieurs ; il en résulte que ceux-ci seront d'autant moins développés et auront d'autant moins de vaisseaux qu'ils seront plus rapprochés de la périphérie. En se fondant sur ces indications, on peut déterminer sûrement si des formations ligneuses sont créées en dehors de la zone génératrice, mais il y faut la plus grande attention, car il y a bien des végétaux dont les couches ligneuses présentent des zones ou des ilots d'un tissu parenchyma- teux bien différent d'aspect du tissu ligneux. Avec Lindley, Schultz, H. Mohl, M. Lestiboudois regarde les Hété- rogènes comme établissant une transition entre la structure des Mono- cotylédones et celle des Dicotylédones. Cette opinion n'est pas admise par tous les botanistes, et les raisons alléguées contre elle sont les suivantes : Dans les hétérogènes (Lardizabalées, Minisper- mies), les faisceaux fibro-vasculaires sont disposés circulairement autour de la moelle ; ils s'accroissent pendant une certaine période ; ils seraient dépourvus de liber. À ces objections, M. Lestiboudois répond que si les faisceaux des Monocotylédones ne sont pas disposés circulairement dans l'épaisseur de la tige, ceux de première forma- - tion sont pourtant rangés en cercle autour de la moelle centrale, comme dans les Dicotylédones ; en outre, dans les hétérogènes, la disposition circulaire des faisceaux extra-libériens n'est pas de règle absolue. Quant à l'abscence de liber dans ces productions, il la nie formellement. Reste enfin l'accroissement plus ou moins prolongé des formations intérieures quand les faisceaux extérieurs sont déjà créés. C'est là une différence, mais elle n'est pas de nature à effacer l'analogie que 378 REVUE SCIENTIFIQUE. constitue, entre les dicotylédones hétérogènes et les monocotylédones, l'apparition de faisceaux nouveaux en dehors de la zone génératrice. Il y a donc là une structure intermédiaire évidente entre les dicoty- lédones et les monocotylédones. On n'y saurait voir toutefois un motif suffisant pour détruire les affinités basées sur les organes les plus essentiels et, comme Lindley, rapprocher les Lardizabalées des Aristoloches, qui s'en éloignentpar tant d’autres caractères. Ces forma- tions anomales, en effet, se rencontrent dans des familles très-diverses et n’appartiennent pas à toutes les espèces d'une même famille. Dans les végétaux hétérogènes, les faisceaux fibro-vasculaires peuvent se produire en dehors de la zone génératrice, suivant deux modes différents. Dans les uns, ils s'engendrent en dedans du sys- tème ligneux déjà formé, dans la moelle centrale; dans les autres, ils se forment extérieurement à la zone génératrice, dans le tissu utri- culaire de l’écorce. M. Lestiboudois appelle les premiers entogènes, les seconds ectogènes. Quelques-uns sont à la fois entogènes et ecto- gènes. Les entogènes ont leur faisceaux dispersés sans ordre dans la moelle, ou rangés symétriquement par rapport à la zone ligneuse environnante, dont ils paraissent être ;alors les faisceaux primitifs. | Dans les végétaux hétérogènes ectogènes, les faisceaux extra-libé- riens présentent dans leur structure des modifications remarquables. Quelquefois, ils sont cylindriques, entourés dans toute leur circonfé- rence par une écorce propre, et ont une zone d'accroissement dans toute leur périphérie, de sorte qu'ils forment comme une tige com- plète dans la tige principale. D'autres fois, ils n’ont d’écorce qu'en _dehors, décrivent un arc de cercle tourné en dedans, et leur zone d’accroissement tend à se réunir à celle des faisceaux voisins, pour constituer une grande zone concentrique. Les faisceaux de nouvelle formation des ectogènes naissent souvent dans le parenchyme cortical, et ils méritent bien alors le nom de fais- ceaux extra-libériens, mais quelquefois ils paraissent naître en dedans du premier cercle de Liber {Convolvulus turpethum, nervosus). Enfin, l'époque de leur apparition varie : chez certains ectogènes, ils se mon- trent de très-bonne-heure, etles zones qu'ils forment s’accroissent pendant une période de temps égale; les plus anciennes ont la même largeur, puis on les voit décroître en épaisseur à mesure qu’elles se: rapprochent dela périphérie, c'est-à-dire que les faisceaux fibro- vasculaires sont plus récents. Il y a des espèces qui ne produisent des faisceaux extra-libériens que tardivement et d'une façon irrégulière. TRAVAUX FRANCAIS. — BOTANIQUE. 379 De sorte qu'il y a un cercle ligneux intérieur, large et formé de plu- sieurs couches ; les autres sont très-variables. Nous avons insisté avec assez de détails sur la structure des végé- taux hétérogènes en général; nous sortirions des limites qui nous sont imposées si nous voulions suivre M. Lestiboudois dans l'examen des particularités que ces formations extra-libériennes présentent dans chacune des familles où on les rencontre. Des types remarquables en sont offerts parles Cycadées et les Gnétacées dans les Gymnospermes. Les Pipérinées offrent un exemple de productions extra-libériennes développées dans l'intérieur de la moelle. Les Plumbaginées et les Gentianées, contrairement à ce qu'on avait cru, ne renferment pas d'espèces hétérogènes. Les Chénopodées, les Phytolaccées, les Amaran- thacées, les Nyctaginées, les Convolvulacées, les Viticées, où l’on rencon- tre des végétaux hétérogènes, sont successivement passées en revue par le savant botaniste de Lille, dans la partie qu'il a publiée de ses études sur cet intéressant sujet d'anatomie végétale. — Nous avons eu l'occasion, dansnotre précédente Revue!, d’enre- gistrer les résultats fournis à M. Duval-Jouve par l'étude anatomique des cloisons que présentent les feuilles de certains Juncus. I1y avait constaté la présence d'un réseau fibro-vasculaire, et il croyait alors ce fait particulier à ces feuilles, mais de nouvelles recherches lui ont montré depuis que de semblables réseaux existent dans tous les dia- phragmes des feuilles cloisonnées des Monocotydones aquatiques. Dans la nouvelle Note qu'il a communiquée sur ce sujet à l'Académie des sciences?, cet habile anatomiste donne de ses nombreuses observations un résumé que nos lecteurs nous sauront gré de reproduire : « 1° L'organisation de feuilles cloisonnées par des diaphragmes n'est pas réduite au Juncus ; elle n’y est qu un cas particulier d'une loi commune aux Monocotylédones aquatiques. » 2° Dans ces plantes, les diaphragmes des tiges, des pétioles et des feuilles sont disposés de diverses manières: » a. Ils ne s'étendent que sur une seule lacune ayant à son pour- tour au moins autant de faisceaux longitudinaux que de faces; ex: Luzula maxima, Scirpus lacustris, Cyperus fuscus, etc. » b. Ils s'étendent sur plusieurs lacunes qui n'ont pas un faisceau longitudinal à chacun de leurs angles, et ils relient entre eux des 1 Revue des scienc. nat., tom. I, pag. 243. 2 Comptes-rendus, tom. LXXV, pag. 715. 380 REVUE SCIENTIFIQUE. faisceaux disséminés ; ex: Cyperus Papyrus, Sagittaria, Acorus, etc. » €. Un seul diaphragme relie tous les faisceaux longitudinaux épars au pourtour d'une lacune unique ; ex: Juncus lampocarpos, etc. » 30 Les réseaux vasculaires qui accompagnent les diaphragmes occupent diverses positions : » a. Ils sont accolés au-dessous ; ex: Scirpus lacustris, etc. » b. Ils s'intercalent dans l'unique assise du diaphragme qu'ils interrompent ; ex: Sagillaria, etc. » c. Ils rampent dans l'épaisseur du diaphragme composé de plu- sieurs assises de cellules; ex : Cyperus Papyrus, etc. » d. Ils courent entre les bords des grands diaphragmes ; ex: Strelitzia. » 40 La forme des cellules d’un diaphragme diffère toujours de celle du reste du parenchyme; cette forme, rigoureusement déterminée sur une même espèce, varie à l’excès d'une espèce à l’autre: » 5° Cependant cette forme est toujours telle qu'elle présente de grands méats pour permettre le passage des gaz, fonction qui, avec la consolidation de la tige ou des feuilles, était la seule qu’on attribuât précédemment aux diaphragmes . » 60 Comme ces diaphragmes sont accompagnés de faisceaux trans- versaux, leur fonction paraît être aussi de fournir des points d'appui à ces faisceaux, qui mettent en communication les faisceaux longitu- dinaux. Ces derniers, sur les Monocotylédones aquatiques, ne sont donc ni aussi isolés, ni aussi indépendants qu'on l'avait cru d'abord, en n'attribuant un réseau vasculaire, avec anastomoses, qu'à quelques groupes d'Aracées, d'Asparaginées, etc. » 19 Dans un même genre, les espèces aquatiques ou des lieux très- humides ont des diaphragmes avec faisceaux transversaux, tandis que les espèces congénères tout à fait terrestres en sont privées, ce qui montre que l'influence des milieux se fait sentir non-seulement à l'extérieur, mais jusque dans l'organisation la plus intime. » — Une autre communication de M. Duval-Jouve à l'Académie des Sciences est relative à un fait intéressant d'anatomie microscopique !. Cet observateur a constaté dans les Cypéracées l'existence de cellules épidermiques d'une forme particulière. On les rencontre dans cette portion de l'épiderme qui recouvre les bandes de tissu parenchyma- teux disposées longitudinalement autour de la tige. Elles forment une ou deux lignes qui occupent le milieu de chaque bande; elles sont un 1 Comptes-rendus, pag. 371. TRAVAUX FRANCAIS. — BOTANIQUE. 381 peu en retrait sur les autres cellules, et de leur paroi interne s'élève un cône très-élégant. La base de ce cône estovale et a son grand diamètre dirigé suivant la longueur de la tige; la paroi de la cellule en ce point est beaucoup plus épaisse et constitue comme un plateau sur lequel repose le cône, qui est également plein. Ges cellules à fond conique sont plus longues et plus régulières que les autres ; on en trouve non- seulement sur les tiges, mais encore à la face inférieure des feuilles et sur les rhizomes. M. Duval-Jouve à constaté leur présence sur toutes les Cypéracées qu'il a pu examiner vivantes, et d'autre part il ne les a rencontrées dans aucune des espèces de Typhacées, de Jon- cées et de Graminées qui ont des bandes de tissu parenchymateux sous l'épiderme; aussi y a-t-il de fortes présomptions de croire que cette forme de cellules est particulière aux Cypéracées. —. Le Lilium Thomsonianum Lindl, jolie espèce à fleurs roses, origi- naire de l'Inde, a été de la part de M. P. Duchartre ! l'objet d'obser- vations portant principalement sur l'organisation du bulbe et sur la multiplication par caïeux de cette plante. Le bulbe adulte, en cours de végétation, présente d’abord à l'exté- rieur quelques tuniques sèches, brunes, à nervures nombreuses ; chacune d'elles embrasse la moitié au moins de la périphérie de l'oignon, et n’est autre chose que la base dilatée et persistante d'une feuille qui a appartenu à la période végétative antérieure. On y trouve ensuite de grandes écailles nourricières, habituellement au nombre de sept, insérées en ordre quinconcial; elles présentent à leur face interne des nervures sur lesquelles naissent de nombreux caïeux. En dedans des écailles nourricières, on rencontre le faisceau des longues feuilles de l’année, et ce sont les bases élargies de ces feuilles qui, persistant après la destruction du limbe, et une fois la période végé- tative terminée, constituent les tuniques externes. Le nombre de ces feuilles est de sept, comme celui des écailles nourricières. Enfin, au centre se trouve le bourgeon formé de jeunes écailles destinées à devenir pendant la prochaine période végétative, les unes les écailles nourricières, et les autres les feuilles. Le Lilium Thomsonianum est remarquable par l'abondance des caïeux épiphylles ou bulbilles produits à la face interne des écailles nourricières, surtout des écailles internes. Sur l’une d'elles, on peut en trouver sept ou quatorze, suivant qu'il y en a un ou deux à la base 1! Observations sur le bulbe du Lilium Thomsonianum Lindi., et sur sa mul- tiplication par caïeux; par M. P. Duchartre. Compt.-rend., tom. LXXV,pag. 601. 382: REVUE SCIENTIFIQUE. de chaque nervure; ce nombre même peut être dépassé, et un seul oignon compte en moyenne de cinquante à soixante caïeux. On voit combien est puissant ce moyen de propagation, mais la présence de caïeux en si grande quantité absorbe toute la force végétative de l'oignon, trop épuisé dès-lors pour produire une tige florifère, et c'est pourquoi on voit cette plante fleurir rarement dans les jardins où elle est cultivée. Un amateur de Carlsruhe, M. Max Leichtlin, réussit à déterminer sa floraison en lui enlevant des caïeux pendant l’hiver, et sur un pied envoyé par lui, M. Duchartre a vu l'axe fondamental développé en une belle tige fistuleuse portant inférieurement des feuilles et terminée par une grappe de belles fleurs roses, campanu- lées, pendantes. Cette plante est monocarpique , c’est-à-dire qu'elle ne fleurit qu une fois, et elle se distingue des autres espèces de Lys également monocarpiques, par l'organisation de son bulbe, que nous venons de faire connaître dans ce quelle a d’essentiel, d'après l'étude qu'eu a faite l’'éminent professeur de la Faculté de Paris. — M. À. Trécul, dans deux communications intitulées : Observations sur la nature des diverses parties de la fleur!, a discuté une intéressante question de philosophie botanique. Contrairement à l'opinion généra- lement admise par les botanistes, le savant académicien ne croit pas qu'on puisse considérer toutes les parties de la fleur comme de véri- tables feuilles modifiées. Peut-on, en effet, établir des limites bien nettes entre l'axe et les feuilles ou les appendices ? M. Trécul ne le pense pas, et il combat comme inexacte la définition de. M. van Tieghem, qui prétend que l'axe est symétrique par rapport à un point ou à une ligne centrale, tandis que la feuille l'est par rapport à un plan. Il n'admet pas l'interprétation, donnée par le même botaniste, des cas où il y a insertion des étamines sur les pétales, des pétales sur le calice. Définissant en effet l'insertion anatomique d'un organe sur un autre : le point où le système vasculaire du premier organe se sépare du système vasculaire du second, avec lequel il était jusqu'alors confondu , M. van Tieghem conclut qu'une étamine insérée sur un pétale n’en est qu'un appendice. El voit ainsi des feuilles composées dans l'ensemble que présentent plusieurs étamines insérées vasculairement sur le pétale, ou les étamines, le pétale et le sépale insérés les uns sur les autres. M. Trécul pense qu'en cela le mot feuille est pris dans une acception beaucoup trop étendue, et il considère qu'on s'est mé- 1 Comptes-rendus, tom. LXXV, pag. 649 et 773. TRAVAUX FRANÇAIS. — BOTANIQUE. 383 pris jusqu'ici sur la nature des parties de la fleur. Si on applique au calice le raisonnement par suite duquel M. van Tieghem établit la nature calicinale des étamines et des pétales sur leur insertion vascu- laire, on doit se demander également si les sépales ne sont pas de même nature que les pédoncules, sur lesquels ils sont aussi atta- chés par leur système vasculaire. Cette opinion est en effet celle de M. Trécul. Pour la démontrer, il s'appuie sur la structure anatomique des orga- nes et sur leur insertion dans un eertain nombre d'espèces pouvant servir d'exemples, er de cet examen il résulte pour lui qu'il n'y a pas de limites susceptibles d'être définies entre les axes et les appendices. Les branches d’une tige, les feuilles et les diverses parties de la fleur, ne sont que des formes particulières de la ramification destinées à remplir des fonctions différentes. Ce n'est pas la feuille qui doit être considérée comme l'organe fondamental, mais la tige, dont les feuilles, les pétales, les étamines, les carpelles, ne seraient que de simples ramifications modifiées. Telle est l'idée défendue par M. Trécul avec toute l'autorité de son talent, et bien faite pour appeler les méditations des botanistes philosophes, — Les progrès de l’histologie végétale devaient nécessairement con- duire les botanistes à l'étude comparative des dispositions affectées par les éléments constitutifs des tissus dans les diverses espèces. Il éitat naturel, en effet, de rechercher si la structure, de mieux en mieux connue, ne fournirait pas de bons caractères pour la détermination des groupes naturels. M. Duval-Jouve, qui est entré un des premiers dans cette voie nouvelle, a donné à cette branche de la science bota- nique le nom fort bien fait d'Histotaxie (istos , tissu ; rébx, ordre, disposition), et il en a montré l'importance dans un Mémoire remar- quable t. D'un autre côté, un savant distingué, enlevé récemment par une mort prématurée, M. A. Gris, dans ses Recherches sur la moelle des végétaux ligneux?, avait appliqué à la botanique phytographique, les données fournies par l'anatomie comparée du système médullaire Nous voyons aujourd'hui M. Ed. Bureau, suivant en cela l’exemple de son prédécesseur au Muséum, présenter à l'Académie un Mémoire “À . . . Des comparaisons histotaxiques, et de leur importance dans l'étude critique des espèces végétales ; par J. Duval-Jouve. 1871. 2 nn £ | Recherches sur la moelle des végétaux ligneux ; par A. Gris.£ln Annales des sciences naturelles. Botanique. tom, XIV, pag. 34. °Analysé in Revue des sciences naturelles, tom. I, pag. 90. 384 REVUE SCIENTIFIQUE. sur la valeur des caractères tirés de la structure de la tige pour la classi- fication des Bignoniacées 1. T1 a reconnu que cette structure était en rapport constant avec l'organisation de la fleur. La tige, ilest vrai, ne lui à fourni aucun caractère de famille, c'est-à-dire propre aux Bigno- niacées arborescentes, mais elle caractérise souvent des espèces, parfois des groupes supérieurs aux genres, et elle fournit pour chaque genre des caractères excellents. — L'importance des considérations histotaxiques a éte parfaitement comprise par M. Joannes Chatin, dans un Mémoire qui a pour titre : Études botaniques, chimiques et médicales sur les Valérianées?. La pre- mière partie de cet important travail, étant exclusivement botanique, rentre dans la catégorie de ceux auxquels cette Revue est consacrée : en s’occupant des caractères propres à la famille, aux genres et aux principales espèces, M. Chatin ne s’est pas borné à énumérer avec plus ou moins de soin, suivant l’usage général, les caractères emprun- tés aux formes extérieures et tirés presque exclusivement des organes reproducteurs. S'inspirant de l'exemple et des conseils de son père, le savant professeur de l'Ecole de pharmacie de Paris, il a tenté de déterminer quels sont les caractères anatomiques qui appartiennent à la famille, ceux qui sont propres aux genres et aux espèces. Il a réussi à tracer des diagnoses anatomiques qui constituent la partie la plus originale de son Mémoire et la plus intéressante pour les botanistes. « D'autant plus faciles à saisir, dit l’auteur, et plus exactes qu’elles répondent à des groupes de moins en moins considérables, ces dia- gnoses anatomiques me paraissent devoir être d'une précision absolue quant aux unités spécifiques » Ce Mémoire est accompagné de plan- ches dont les figures, parfaitement dessinées, représentent avec une remarquable netteté, les détails si délicats que comportent les études histologiques. Henri SIcARD. 1 Comptes-rendus, tom. LXXV, pag. 934. 2 Paris, 1872. J.-B. Baillière. 389 Géologie. —Desterrains stratifiés., par M. Daubrée (Bull. Soc. géol.).—L'origine des différents matériaux dont se compose l'écorce du globe est encore peu étudiée ; on sait que les uns sont d'origine extérieure et sont des produits de trituration de roches antérieurement existantes, et que les autres, venant de la profondeur ,se sont formés aux dépens de la masse interne de notre planète. Les roches de la première catégorie sont dites détritiques : ce sont surtout les grès, les poudingues, les conglomérats et certaines argiles; mais il faut en séparer cer.ains grès et certaines argiles évidemment d'origine chimique ou hydrothermale, comme l'ont démontré les tra- vaux les plus récents de MM. Daubrée, Chanconrtois… Les roches de la seconde catégorie, venant de l’apport des parties internes du globe, sont dites d’origine chimique, thermale où hydro- thermale. Ce sont surtout ces roches que le savant Directeur de l’École des mines étudie au point de vue de leur origine. Ce n’est pas seulement par des manifestations volcaniques que la réaction de la masse centrale sur l'écorce terrestre se traduit au dehors ; il faut admettre que les filons, les couches métallifères bien ordonnées, appartiennent au même ordre’ de phénomènes. En effet, en analysant les éléments qui constituent les filons et Les couches métallifères, on trouve qu'ils ont une grande analogie ; de plus, quand on recherche l’origine de certains éléments, tels que le calcium, le magnésium, le fer, le phosphore et même le carbone, si abondants dans les couches stratifiées, on ne les retrouve pas en quantité suffisante dans le substratum granitique du globe pour expliquer leur immense accumulation dans certaines formations géologiques. Il faut donc admettre que ces éléments ont leur origine dans les parties profondes du globe, et les considérer comme prove- nant de l'apport interne. Ici, l’étude des roches volcaniques appar- tenant, à raison de leur densité, aux couches infrà-granitiques, nous vienten aide, car on y trouve en abondance le magnésium, la chaux, le fer, le phosphore et même le carbone. Le groupement des éléments varie seul dans les deux cas de roches volcaniques et de roches sédi- mentaires ; ce sont, dans le premier cas des silicates dans le second des carbonates ou des sulfates. Le soufre est, comme chacun sait, un des produits les plus abondants des volcans: quant au carbone, il est lancé par eux en quantité considérable dans l'atmosphère, à l’état 386 , REVUE SCIENTIFIQUE. d'acide carbonique. Le transport de ces divers matériaux de la pro- fondeur vers la surface s’est fait, soit par des cheminées volcaniques, soit par des filons, des fractures, des failles traversés par des sources thermales. Ces apvorts de l’intérieur du globe ont varié à chaque époque géo- logique, Certaines espèces minérales on! eu. pour ainsi dire, leur règne, qui a cessé pour faire place à celui d'une autre espèce; ily a eu aussi pour certaines d'entre elles des récurrences. Un dernier chapitre de cette importante étude est consacré à l’in- fluence des apports d’origine interne sur la consütution de l’atmos- phère et de la mer. À ce point de vue, les dépôts de sel gemme des différentes formations géologiques sont intéressants à étudier, car on y rencontre, d'une part des sels déliquescents (Carnallite), et d'autre part du quartz, de l'oligiste cristallisés. On peut expliquer ces faits par une évaporation subite des eaux de la mer, provoquée par des émanations chaudes provenant de l'intérieur. La mer, à toutes les époques géologiques, a été un vaste entrepôt de matériaux de sédimentation chimique; d'une part elle n’a pas cessé de recevoir des apports, tandis que d'autre part elle se dépouillait peu à peu de certains éléments, soit en les précipitant à l’aide de la vie organique, soit en les déposant simplement, non sans production de réactions multiples dont nous constatons les résultats. Il résulte done de cette étude que la géologie peut difficilement se passer de l'hypothèse de la chaleur centrale, qui explique, en s’aidant de la circulation souterraine de l’eau sous une pression et à une tem- rature élevée, tous ou presque tous les problèmes de l’origine des roches sédimentaires ou non sédimentaires. — Sur la corrélation directe des formations éruptives..…, par M. de Chancourtois (Bull. Soc. géol.). — Les formations sédimentaires non détritiques sont l'épanouissement plus ou moins direct de matières d'émanation fournies par les magmas sous-jacents, matières que l’on retrouve daos les filons. On pourrait, à ce point de vue, imaginer «un filon théorique complet, formé par la juxtaposition ordonnée de tous les remplissages partiels, réguliers, ou d'incrustation, observés dans les différents filons d’une même région ; ce filon complet présen- terait dans le sens horizontal une succession correspondant, terme à terme, à la série des formations sédimentaires non détritiques super- posées verticalement». Il existe pour une même période géologique une analogie remar- quable entre les éléments des filons et ceux des roches sédimentaires; TRAVAUX FRANÇAIS. — GÉOLOGIE. 387 les exemples cités à l’appui de cette remarque appartiennent à l’époque permienne et crétacée. Ce parallélisme se poursuit à travers les âges, et on le retrouve à l’époqne tertiaire, qui nous présente la structure aragonitique des calcaires dans les basaltes, dans les tufs calcaires et les calcaires lacustres compacts. — Sur le fer météorique du Groënland.…, par M.de Chancourtois (Ball. Soc. géol.). — Les gneiss et les roches granitoïdes de l'ile de Disco, ainsi que du continent voisin, contiennent des gisements puissants de fer charbonneux qui permettent de douter de la nature météorique des masses de fer que l’on a signalées dans ces parages. Les filons éruptifs auxquels se rapportent ces gisements sont disposés suivant des lignes qui se rattachent à un système de fractures que l’auteur étudie en ce moment. —Sur la théorie des soulèvements., par M. de Chancoartois (Bull. Soc. géol.)—Par un diagramme très-simple, le savant professeur résume la théorie des soulèvements. Il rappelle que tout mouvement de ce genre est précédé d’un mouvement lent qui est lui-même le résultat du refroidissement du globe. Une relation évidente de cause à effet unit la déformation lente de l'écorce terrestre, suite de refroidisse- ment, à son relèvement en bourrelet, ride, rempli ou crête de rebrous- sement ; Ce relèvement est en quelque sorte un phénomène critique de retour à l’état normal d'équilibre stable. Il suit de là que les sou- lèvementsaffectent nécessairement certaines directions, et que chaque soulèvement est d'autant plus puissant qu'il est plus récent. — Note sur le soulèvement du pays de Bray..…., par M. de Lapparent (Bull. Soc. géol.).—Un grand système de fractures orientées N 45° à 46° O traverse les départements de l’Aisne, de l'Oise, et se continue à l'ouest par la vallée de la Seine. L’âge de ces fractures est donné par la discordance de stratification du grès de Beauchamp (Éocène moyen) avec la craie et l'Éocène inférieur. Ce soulèvement est dù à un phéno- mène brusque; il est tout à fait local. c’est-à-dire qu'à droite et à gauche des lignes de fracture, les différentes assises géologiques sont à peu près horizontales. — Résumé d'une explication... par M. le professeur Leymerie (Bull. Soc. géol.).—Suivant Le savant professeur de Toulouse, il faut distin- guer dans la région pyrénéenne la région de la plaine, essentiellement lacustre tertiaire, et la région montagneuse, où se trouvent étagées, du nord au sud, toutes les formations géologiques. Dans ce second groupe, 388 REVUE SCIENTIFIQUE. il faut distinguer les grandes Pyrénées, composées de terrains de tran- sition, de Trias, de Jurassique, des petites Pyrénées, qui sont surtout composées de craie supérieure, de Garumnien, d'Éocène. La première partie de ce Mémoire ne doune qu'un apercu des terrains de transition. Selon M. Leymerie, on retrouve dans les Pyrénées centrales le cam- brien azoïque, le silurien et le dévonien fossilifères. Au milieu de la région secondaire, se rencontrent des îles anciennes formées de granit, de roches cristallophylliennes et de terrains de transition qui s’avancent assez loin de l’axe pyrénéen. Mais la partie la plus intéressante de la géologie de ces régions est celle qui a trait aux terrains secondaires Jurassiques et crétacés. Les derniers surtout ont fait l’objet des études de notre savant Maitre, qui y a reconnu les types des étages sénonien, danien, et y a créé le nouveau type la- custre et marin du garumnien. Les grands accidents de terrain qu’on rencontre dans les petites Pyrénées, où ces étages sont très-déve- lop:és. seraient dus à l’ophite, roche dioritique sur la nature de laquelle Les géologues sont loin d’être d’accord. En contre-bas de la chaîne pyrénéenne, se trouvent les terrains ter- tiaires supérieurs, dont la faune lacustre a surtout été étudiée par M. le professeur Noulet { de Toulouse ), puis les terrains quaternaires avec leur appareil de phénomènes glaciaires et fluviatiles. — Note sur l’origine des couleurs..…., par M. Ed. Jannetaz. — Il faut faire une distinction entre les espèces minérales qui ont leur couleux propre et celles qui n’ont que des couleurs d'emprunt ; ces dernières sont le plus souvent dues à des matières colorantes étrangères qui n'empêchent aucunement la cristallisation régulière. La chaleur agit d’une manière variable sur les espèces minéräles colorées par des matières étrangères, telles que le rubis, le quartz enfumé, le quartz: améthyste, etc. La décoloration de ces pierres est le résultat le plus ordinaire de l’application de la chaleur, ou bien elles acquièrent, par une température élevée, des couleurs différentes de celles qu’elles possédaient primitivement. La lumière modifie également les colorations d’un grand nombre d'espèces minérales, mais les divers rayons qui la composent agis- sent d'une manière différente. La lumière jaune paraît, à ce point de vue, être la plus active. Suivant une curieuse observation de l’auteur, le brouillard paraît enlever à certaines espèces minérales fluorescentes leurs propriétés. Telle est la fluorine verte, à laquelle le brouillard enlève sa couleur bleue de phosphorescence. TRAVAUX FRANGAIS. — GÉOLOGIE. 389 —0bservationsà propos d'une note... ,par M.Magnan.—Selon l’auteur, il n’est pas exact que le fossé de Flamichon, ou dépression longitudi- nale qui séparerait sur une grande étendue les petites des grandes Pyrénées, corresponde à une seule et même fracture ; il y en aurait en certain points plusieurs qu’il a indiquées dans ses derniers tra- vaux. La série des terrains affleurant dans les hautes et basses régions de la chaine ne serait pas complète si on n’y ajoutait le Cénomanien, l’Albien, l’Urgoaptien, le Néocomien, don! la nature a été reconnue depuis quelques années par l’auteur, qui les a suivis sur tout le ver- sant septentrional des Pyrénées. De plus, les grandes lignes de frac- ture indiquées par M. le professeur Leymerie ne sufliraient pas pour expliquer l’orographie du pays. — Sur la base des formations secondaires. par M. Magnan.—Entre les dépôts jurassiques et le terrain howiller.il existe dans les Corbières une série de couches peu coanues appartenant au Permien, au Trias, à l’Infra-Lias. Le Permien a, jusqu'à un cerlain point, les caractères de celui de l'Héraul! et de l’Aveyron. Le Trias se compose des trois étages clas- siques, Grès bigarré, Muschelkalk, Keuper, avec leurs caractères litho- logiques et même paléontologiques (Encrines, Terebratula vulgaris). L’Infrà-Lias, qui repose en concordance sur le Keuper, contient dans ces régions : Avicula contorta, Plicatula intusstriata, etc... Gette note est accompagnée de nombreuses coupes traversant toute la série des terrains qui affleurent dans les Corbières septentrionales. Son impor- tance, au moment où l’auteur vient d’être enlevé à la géologie, n’é- chappera à personne ; elle est, avec les nombreux travaux posthumes que la pieuse main de M. l’ingémieur Joulin a déjà mis au jour, le testament scientifique de notre ami Magnan. — Orographie du Jura Délois., par M. Jourdy. — Le Jura Dôlois est cette bande étroite de terrains jurassiques qui s’avance, entre le Doubs et l’Ognon, au milieu des argiles bressanes. Les terrains sui- vants,Trias, Lias.Oolite inférieure et moyenne, s’y trouventlargement représentés et constituent une série de massifs généralement orientés N. 35 E., que l’on peut diviser en quatre régions orographiques. C'est dans l'étude attentive des accidents géologiques qui s’y rencontrent, que M. Jourdy cherche les preuves du soulèvement post-Bathonien dont il avait déjà parlé dans un de ses précédents Mémoires. Il re- marque que le Bathonien jaune (supérieur) a glissé en beaucoup de points sur le Bathonien blanc {inférieur ), et que cet étage termine 1: AT 390 REVUE SCIENTIFIQUE. une série concordante par-dessus laquelle l’Oolite moyenne et supé- rieure se sont déposées en discordance de stratification. L'étude dynamique des accidents géologiques observés dans la | chaine du Jura Dôlois préoccupe à juste titre l’auteur. Par des figures schématiques remarquables, il cherche à explique: la genèse des failles transversales à la direction générale du système, le mode de production des cirques, des dépressions en auge, qui sont si commu- nes dans les terrains jurassiques de ces contrées. IL n’admet qu'avec réserve le phénomène glaciaire dans la chaîne, et pense qu'il a été limité à la lisière de la première région de la Serre. Chaque région étudiée par M. Jourdy présente des accidents géolo- giques intéressants : nous citerons surtout: pour la seconde région, le fait de l’écartèlement des couches jurassiques; pour la troisième, celui des failles convergentes ou étoilées, qui ne peuvent se com- prendre qu’en admettant « l’affaissement de la pointe nord dela Serre, entraînant, et la modification du tracé de la grande faille de la Serre (orientée N. 35° E.), et la chute convergente de toutes les roches, et le crevassement rayonnant de l’amphithéâtre formé par les collines environnantes». La quatrième région est celle des pitons, recouveris ou nus, dont le noyau est le plus souvent formé de Bathonien blanc flanqué d’Argo- vien et de Gorallien. L'étude détaillée de ces quatre régions est suivie de celle des révo- lutions antérieures à la période jurassique. Suivant l’auteur, le massif de la Serre (1" région) serait, au point de vue des soulèvements, en connexion intime avec les Vosges, dont il avoisine le pied méridional. Cette connexion serait rendue assez évidente par la présence, dans la Serre, du Permien et äu Trias, ayant l’un à l'égard de l’autre des rapports analogues à ceux que l’on trouve à ces deux terrains le long des pentes Vosgiennes. La période jurassique elle-même aurait été interrompue par un soulèvement survenu après l’époque bathonienne. soulèvement brusque qui interrompit la série régulière des dépôts et opéra des changements considérables dans les rivages. Ce soulèvement aurait été suivi d’un affaissement qui dura jusqu'à l'étage corallien. Ces divers mouvements orogéniques sont d’ailleurs peu étendus en surface et ne paraissent pas avoir réagi au loin. L'étude dynamique des chainons du Jura Dôlois, qui termine la première partie du Mémoire de M. Jourdy, est très-intéressante, et nous devons en donner une idée. Les chaînons doivent leur origine à l'effet simultané de deux actions, TRAVAUX FRANCAIS. — GÉOLOGIE. 391 l'action d'affaissement et l’action de plissement, qui dans le reste du Jura Dôlois sont restées séparées. Ces deux actions mécaniques se sont combinées suivant Ges lois que l’on peut retrouver. Elles ont abouti forcément à la production de reliefs exagérés et de failles obliques à la direction des chaînons. Les nombreuses figures qui accompagnent celte partie du Mémoire permettent de suivre avec intérêt les rai- sonnements de l’auteur, qui cherche par d’heureux efforts à faire ren - trer les lois de la dynamique terrestre dans les lois de la dynamique ordinaire. —Associalion française pour l'avancement des sciences... (Bordeaux, août 1872). — Une communication intéressante est faite par M. Lu- domir Combes, de Famel (Lot-et-Garonne), sur la constitution géolo- gique de ce département. Grâce aux recherches de l’auteur, la paléontologie des formations jurassiques, crétacées et tertiaires s’est enrichie d’un certain nombre d'espèces nouvelles. Nous avons surtout remarqué dans sa riche collection de beaux échantillons de la faune ichthyologique du Kimméridgieu et de la faune mammalogique du tertiaire du bassin sous-pyrénéen. M. Combes a également fait connaître, dans les environs de Fumel, l'existence de la série crétacée supérieure qui paraît complète dans les environs de cette ville, tandis qu'on n’en constate plus aucune trace jusque dans les Pyrénées. —Observations à propos de deux notes de M. Cayrol (Compt.-rendus. Note posthume de M. Magnan). — Dans cette note, que notre ami très-regretté avait préparée quelques jours avant sa mort, il revient sur la composition du terrain crétacé pyrénéen, qu'il a étudié de l'Océan à la Méditerranée. Partout il a pu reconnaitre la récurrence du calcaire à Caprotina Lonsdalii dans les étages néoconien et urgo- aptien. Il indique les localités où il est possible de vérifier ce fait, à la réalité duquel un grand nombre de géologues se refusent à croire. — Description géologique et paléontologique des étages jurassiques supérieurs de la Haute-Marne, par MM. Loriol et Tombeck (Mém. Soc. Linn. Normandie, tom. XVI ).—La classification suivante est admise par ces savants paléontologistes pour ces terrains dont l’étude occupe en ce moment la plupart des géologues : Zone à Cyrena rugosa. 1°. Etage portlandien.! — à Cyprina Brongniarti. — à Amm. gigas. 392 REVUE SCIENTIFIQUE. 2 Etage Zone à Amm. Caletanus (ét. virgulien). kimméridgien. — à Ami. orthocera (ét. ptérocérien). 2e Zone à Tereb. humeralis (calc. à Astartes)- — à Cardium Corailinum (calc. de Lamo- À the). 3° Etage séquanien : : a re Zone à Terebratula humeralis (Corallien ou compact). {re Zone à Cardium corallinum (Corallien infé- corallien. rieur) et zone à Hemicidaris crenularis et Glypticus hieroglyphicus (Corallien compact). Selon MM. de Loriol et Tombeck, les noms Séquanien et Corallien s'appliquent à des systèmes identiques ; ce sont deux faciès différents mais contemporains du même terrain, et non deux divisions succes- sives du terrain corallien. La faune de la zone supérieure du séquanien se relie à celle des couches à Ammonites tenuilobatus par dix espèces ; cette zone est le faciès à Scyphies et à Céphalopodes de l’étage séquanien, dont la zone à Cardium corallinum est le faciès coralligène. Ces conclusions sont d’une grande importance pour la géologie du Midi, où nous venons de trouver le faciès séquanieo sur le Larzac, et l'horizon à 4. tenwi- lobatus dans les environs de Ganges. — Sur un dépôt osseux. (Comtes-rendus. —Note de M. Le professeur Sirodot).—Il existe au pied du mont Dol (Ille-et-Vilaine) un gisement très-étendu, mais peu épais (50 centimètres), d'ossements brisés et de débris de foyers appartenant évidemment à l'époque quaternaire. L'auteur a pu y reconnaitre les genres Elephas, Bos, Ursus, Equus, Rhinoceros, Sus, accompagnés de silex travaillé de la main de l’homme et de cendres. Quelques-uns de ces os présentaient des traces évi- dentes de calcination. et les silex travaillés sont formés d’une roche étrangère à la contrée. Il est permis de voir dans ce gisement inté- ressant un amas de restes de cuisine de la plus haute antiquité, puisque les espèces éteintes s’y trouvent largement représentées. — Flore carbonifère du département de la Loire, par M. Grand’Eury. (Rapport... Comptes-rendus Ac. sc.).— Il est possible actuellement de classer les dépôts houillers en trois séries: 1° les plus anciens, correspondant à la fin de l’époque devonienne, serencontrant surtout dans l’ouest de la France; 2° ceux qui correspondent au carbonifère inférieur, très-répandus en Angleterre et dans le nord de la France; Le TRAVAUX FRANCAIS. — GÉOLOGIE. 393 3° les plus récents, disséminés sur le pourtour du plateau central de la France. L'auteur a surtout étudié ces derniers dans les bassins de la Loire, au point de vue de la répartition des espèces fossiles dans les diffé- rentes couches, et au point de vue de l’organisation morphologique et histologique des débris végétaux que l’on y rencontre. A ces deux points de vue, les résultats auxquels 1l est arrivé sont d’un haut intérêt. En effet, selon M Grand'Eury, certaines Fougères du terrain houiller du bassin de la Loire, les Nevropteris, avaient des frondes de 5 à 6 mètres de longueur. Elles avaient de plus deux for- mes différentes : une forme normale, celle des Nevropteris, et une forme accessoire, connue depuis longtemps sous le nom de Cyclopteris, et attribuée jusqu'ici à une espèce de Fougère particulière. Les gros pétioles de ces Fougères ont uns structure analogue à ceux du genre actuel Marattia. L’affinité des Fougères houillères avec ce genre ressort également de l’observation des organes de fructification retrouvés sur les ner- vures dorsales des pinnules des Odontopteris. Selon M. Grand'Eury, les Calamites sont distinctes des Calamodendrées ; les premières sont voisines des Équisétacées, mais n’ont pas de traces d'organes appendi- culaires ni de gaine ; les secondes ont un axe ligneux et des organes appendiculaires verticillés ( Astérophyllites) qui les rapprochent des Dicotylédones. De plus, l'inflorescencedes Calamodendrées est connue; elle se présente sovs la forme de chatons qui pourraient bien être de deux espèces. les mâles et les femelles. Les Cordaïtes des couches inférieures du terrain houiller paraissent être des gymnospermes intermédiaires entre les Cycadées et Les Coni- fères, et leur apparence devait rappeler celle de nos Yuccas : leur in- florescence formait un épi dont les fruits mürs constituent les Cardio- carpus où Cyclocarpus, qui rappellent les fruits de certains Conifères exotiques. En résumé, on peut caractériser le terrain houiller étudié par M. Grand'Eury, par la présence des Cordiites dans les couches infé- rieures, par l’abondance et la variété des Fougères dans les couches moyennes. et enfin par l'association des Calamiles, Calamodendrées et Annularia dans les couches supérieures. — Nous avons publié dans la Revue scientifique ( numéro du 26 octobre) une étude sur la Géologie des bassins secondaires et tertiaires de la région sous-cévennique, pour présenter une vue d’ensemble sur les travaux que nous avons entrepris dans ces régions. Les con- 394 REVUE SCIENTIFIQUE. clusions sont les suivantes, que nous reproduisons textuellement . «Si l’on cherche à embrasser d’un seul coup d'œil la série des phé- nomènes géologiques qui se sont succédé dans la région sous-céven- nique, depuis l’époque permienne jusqu’à l’époque quaternaire où nous sommes arrivés, on voit qu'ils se résument en: 1e une action à peu près continue de la sédimentation unie à la vie organique; 20 une action intermittente des mouvements lents du sol tendant vers l’exondation définitive : 3° en mouvements brusques ; 4° en éruptions ou manifestations volcaniques. » La sédimentation passe par des phases successives; elle est d’abord surtont marine, et le plus souvent alors uniforme aux mêmes épo- ques sur toute la région étudiée. Vers la fin de la période jurassique, se manifeste cependant une certaine irrégularité qui se retrouve dans d’autres parties de la France. Plus tard, la sédimentation devient sur- tout lacustre, tout en conservant les mêmes caractères physiques et chimiques. »La vie organique, essentiellement soumise à la sédimentation et aux causes perturbatrices que nous avons énoncées plus haut, est égale- ment d’abord marine, puis lacustre et terrestre. »Dans la période marine, les faunes et même les flores se suivent, presque saus interruption, du Trias au Jurassique supérieur. Il existe peut-être une lacune entre les derniers dépôts coralliens à Tercbratula Moravica et les couches à Terebratula dyphia du Tithonique supérieur, mais à ce niveau de transition il nous a été impossible de constater le mélange des faunes jurassique supérieure et crétacée inférieure. »On peut dire, en général, des faunes marines secondaireset même tertiaires de la région sous-cévennique, que plus elles sont riches en individus et en genres, moins elles durent; c’est ce qui arrive pour le Lias supérieur et pour le Néocomien moyen. Il semble, au con- traire, que, plus les faunes sont simples, plus elles durent; c’est ce que l’on voit dans l’Oxfordien supérieur, qui conserve sa faune sur près de 200 mètres d'épaisseur. »La mesure de la richesse des faunes marines pélagiques de l’époque secondaire est, jusqu à un certain point, donnée par le nombre d’es- pèces de Céphalopodes qu'on y rencontre. Les Ammonites n'apparais- sent dans nos régions que vers la base du Lias moyen; elles atteignent un premier maximum avec le Lias supérieur, décroissent, au point de vue du nombre des individus et des espèces, dans le Bajocien, le Bathonien, redeviennent abondantes avec le Callovien, l’Oxfordien, puis diminuent jusqu'à disparaitre presque complètement dans le Corallien. Dans le Néocomien inférieur, elles reparaissent avec un TRAVAUX FRANCAIS. — GÉOLOGIE. 395 grand nombre de formes nouvelles, passent par uu nouveau maxi- mum qui s'arrête avec l’Urgonien.. »Ces maæima et minima des espèces d'Ammonites ont leur impor- tance, car ils correspondent à des phénomènes géologiques différents; en effet, le minimum Bathonien est en relation avec le régime fluvio- marin de nos régions à cette époque, tandis que celui du Corallien est le résultat de causes spéciales générales, puisqu'on peut le con- stater partout où cet étage affleure. »Les faunes tertiaires ont pour caractéristique positive de nombreux Mammifères qui suivent la progression suivante : Palæotherium, Xi- phodon pour l'Éocène; Anthracotherium pour le Miocène inférieur; Rhinoceros, Mastodon, Dinotherium pour le Miocène supérieur; Hyœna, Felis, Semnopithecus peur le Pliocène. »Les faunes fluvio-marëes et lacustres présentent à travers les temps géologiques une certaine fixité dans les associations des espèces de Mollusques. En effet, les genres Cyrena, Potamomuya, Paludina, Mela- nia, ete , se continuent de l’époque bathonienne à l'époque tertiaire; ce n’est qu'à ce moment qu'’apparaissent les espèces à respiration pul- monaire. »La flore des terrains secondaires et tertiaires de la région sous- cévennique présente le double caractère de fixité dans la nature de certains types végétaux, et de marche progressive vers les formes supérieures.» D'après la note insérée dans la Revue « sur les horizons jurassiques intermédiaires entre le Corallienet les couches à Terebratula dyphia», on voit que depuis l'impression de cet article, dont nous venons de donner le résumé, la question du Tithonique a fait un pas décisif. La lacune, que nous signalons avec doute, entre lesderuiers dépôts coral- liens à Terebratula moravica et les couches à Terebratula dyphia, n'existe plus ; elle est combiée par la découverte de l’Étage à Ammo- nites tenuilobatus qui vient s’intercaler exactement entre ces deux limites. BLEICHER, Docteur ès-sciences.  Notre ami et collaborateur, M. le Docteur Bleicher, vient d’être envoyé dans la Province d'Oran, par suite de la dissolution de l'École de médecine militaire, où il était répétiteur. Son éloignement ne nous privera pas Je son active et précieuse collaboration, et nous sommes heureux de pouvoir annoncer à nos lecteurs qu'il continuera à faire la Revue géologique, française et étrangère. E. DuBRuEIL. 396 REVUE SCIENTIFIQUE. Réunion de la Société Géologique de France, à Digne, le 8 octobre 1872. La Société a tenu, cette année, sa réunion extraordinaire dans les Basses-Alpes : Digne, Barrême, Castellane, sont les trois centres d’où elle a successivement rayonné sur l2 région. Nous n’étions pas certes daus la grande chaire des Alpes ; cependant le sol a déjà dans ce pays des allures de hautes montagnes : vallées profondément encaissées, pentes abruptes, masses rocheuses puissantes, alignées en longues crêtes anguleuses qu’on voit de tous côtés dominer les montagnes inférieures ou se perdre dans la brume de l'horizon. Les pentes cal- caires ou marneuses, aussi bien que les crêtes toutes calcaires, sont arides. La nudité de ces montagnes fait horreur : un déboisement immodéré de ces pentes a amené dans ces régions la perte de toute la terre végétale, et par suite la sécheresse et la nudité absolue de la pierre : c’est le désert, moins l'égalité du sol. Le bureau de la session a été constitué de la manière suivante : Président : M. Lory (de Grenoble): Vice-Présidents : MM. Garnier, inspecteur des Eaux et Forêts, à Digne; le comte G. de Saporta; Secrétaires : MM. Vélain, répétiteur à l'École des hautes études de la Sorbonne, et Dieulafait, actuellement professeur à la Faculté des sciences de Marseille. Je citerai en outre quelques noms bien cannus des géologues : MM. Hébert, président actuel de la Société, Leymerie, de Rouville, Tournouër, etc. Ainsi que cela était convenu, les travaux de la Société ont porté exclusivement sur les terrains jurassiques, la base du crétacé et les terrains tertiaires. La question délicate était la relation existant entre la partie supérieure du groupe jurassique et la partie inférieure du groupe crétacé. Aussi les terrains secondaires ont-ils été de beau- coup les plus visités, et pendant les dix journées laborieuses remplies par des courses que les hommes ayant la connaissance des lieux, MM. Garnier et Vélain, avaient su rendre toutes fructueuses en les: dirigeant sur les points précis qui devaient fournir quelque éclair- cissement, nous ne nous sommes pas fait faute de passer du Juras- sique au Néocomien, et du Néocomien au Jurassique. Plusieurs crêtes du pays sont fofmées par le terrain jurassique: calcaires gris de fumée, durs, compacts, appartenant à l'Oxfordien supérieur, au nord-ouest de Castellane ; calcaires blancs de l’étage TRAVAUX FRANCAIS. — GÉOLOGIE. 397 corallien, au sud-est. La chaine des Dourbes est un bel exemple du premier Cas. Voyons d'abord ce qu’on trouve à la base de ces montagnes : Aux environs immédiats de Digne, dans le vallon de Champorein, les Gypses triasiques forment la base sur laquelle vienrent s'appuyer successivement les couches : 10 à Avicula contorta ; 2° à Amm. planor- bis; 39 à Amm. angulatus ; 4° à Gryphæa arcuata et à Amm. Bucklandi. Les Gypses semblables à ceux de Digne étaient généralement re- gardés, il y a dovze ans, commeuneépigénie des calcairesjurassiques. M. Favre montra qu’en Savoie ils supportent l'Infrà-Lias, et M. Hébert leur a, depuis lors, assigné leur véritable position: ils sont une dé- pendance des marnes irisées, stratifiés avec elles, ot présentant une structure zonaire qui atteste leur origine sédimentaire. Un fait a frappé les géologues : c’est le contraste qui existe entre les formations tria- siques et l’Infrà-Lias. Le Trias se termine par des marnes sans strati- fication avec gypse et dolomies, tandis qu’au-dessus de lui l’Infrà- Lias montre des. couches calcaires parfaitement stratifiées, ‘et l’on passe de celui-ci au Lias sans changement d'aspect. L’Iufrà-Lias se rattache donc bien naturellement à l’ensemble des formations liasi- ques, et avec lui un ordre de choses tout nouveau commence. Dans le Languedoc, les observations sont un peu différentes: les Gypses sont souvent moins bien stratifiés ; l’Infrà-Lias et le Lias inférieur formés d’arkoses, de grès, de dolomies, se rattachent dans cette contrée, par leur nature minéralogique. au Trias d’une manière plus étroite. On peut voir l'explication de ces différences en ce que le Languedoc a reçu sur le bord du plateau central des dépôts litturaux (grès), tandis qu’à Digne on rencontre des dépôts effectués dans une mer peu pro- fonde, mais qui s'étendait uniformément jusqu'au-delà de la Suisse, où les formations présentent les mêmes caractères. Si, sortant de Digne par Feston, on se dirige obliquement, par les bains de Digne et la vallée de Lescure, vers le col de Beaumont, on parcourt une coupe grandiose de l’Infrà-Lias, du Lias et de l’Oolite inférisure, que je résumerai de la manière suivante : INFRA-LIAS. — Avicula contorta. Ammonites planorbis. Amm. angulatus. LraS INFÉRIEUR. — Gryphæa arcuata et Amm. Bucklandi. Pentacrinus tuberculatus (pierre de Saint-Vincent servant à faire Les bijoux de Digne). Calcaires bréchiformes et marnes. Lras MOYEN. —Calcaires siliceux à Gryphæa cymbium, formant de 398 REVUE SCIENTIFIQUE. grandes barres ruiniformes de couleur rousse. À leur partie supé- rieure, on recueille les Amm. fimbriatus, Amm. Normanianus et Ami. zetes. C’est au pied de cette muraille calcaire, qui descend en ce point jusque dans le fond de la vallée, que surgissent les eaux sulfureuses de Digne, dont une source atteint la température de 450 C. Paissantes couches marneuses dépourvues de fossiles; quelques rares Amm. murgarilatus. Galcaires durs, à Amm. spinatus. Au-dessus viendrait se placer l'équivalent des schistes de Boll, mais il y a ici uue petite lacune à laquelle correspond l'érosion irrégulière de la surface du calcaire, dont les trous sont remplis de nodules ferru- giNeux. Immédiatement au-dessus, on trouve : Lras supéRIEUR.—Amm. Valcotii et calcaire marneux à Cancellophycus liasicus Sap. Ces algues à frondes, régulièrement percées à jour comme des dentelles, ont couvert complètement de leurs empreintes, longues de 40 cant , larges de la moitié, {outes les plaques qu'on détache du rocher. Grande masse de schistes noirs : Amm. radians, Turbo: subduplicutus, Amm.Aalensis, Amm. cornucopiæ, Amm.serpentinus, Astarte Volizt, elc. Amm. opalinus. Amm. insignis. Nouvelles couches à Cancellophycus. OoL1TE. — Amm. Levesquei, Amm. Sauzei. Avec ces Ammomites commence l'Oolite. mais aucun caractère minéralogique ne sépare ces couches des couches toarciennes qui les supportent. La Belemnites Blainvillei commence à peu près à se montrer. Puis viennent, à mesure oœu’on s'élève sur le col de Beaumont, les fossiles suivants : Amm. Circe, Amm. Humphriesianus, Amim. Brongniarti, Amm. pyg- mæus. Sur la route de Bärrème à Castellane, à la montée du col Saint- Pierre, on retrouve la même succession à partir des marnes irisées avec gypses. Nous avons recueilli en cette localité de heaux échantil- lons d’Avicula contorta : mais le Lias inférieur manque, et la couche à Amm. planorbis est directement en contact avec l’Amm. fimbriatus du Lias moyen. Le Lias moyen, le supérieur surtout, sont loin d'offiir le développement prodigieux de Digne. Dans la clue de Chabrières (route de Digne à Barrême), on ren- contre les couches aui font suite à celles du col de Beaumont, c'’est- à-direla granie Oolite à Amm. arbustigerus, qui y est très-fossilifère. Puis, sans changement dans l'aspect des couches, on arrive au Callovien : Amm. macrocephalus et Amm. Hommairei, qui se retrouve TRAVAUX FRANCAIS.— GÉOLOGIE. 399 plus bas. Au-dessus, existe l’Oxfordien moven avec Amm. cordatus, Amm. perarmatus, etc., et, par une douce transition, l'Oxfordien su- périeur avec Amm. toucasianus , Amm. polyplocus, Amm. iphicerus et Amm. bimammatus. Les bancs, toujours composés de calcaire gris de fumée, deviennent de plus en plus épais, moins marneux, plus pâles, peu fossilifères. Ces calcaires gris, relevés jusqu’à la verticale, ont une épaisseur de 400 mètres environ, dont les 100 derniers sont par- semés de rognons de silex blanchâtres. En montant aucol Saint-Pierre, l'Oxfordien se développe à peu près äe la même manière. Au-dessus des masses à Amm. tortisulcatus et à Amm. arduennensis, on trouve une longne série de couches de cal- caire dur, dont la cassure présente tantôt une couleur grise uniforme, tantôt des mouchetures plus ou moins sombres qui lui donnent un aspect bréchoïde : Amm. polyplocus, Amm. tortisulcatus, gros Aptychus épais. Au-dessus de ces couches, viennent des calcaires à silex blancs, des calcaires blanchâtres à pâte fine, et enfin une vraie brèche cal- Caire à laquelle on fait commencer le Néccomien. Au Cheiron, près Castellane, l'Oxfordien supérieur à Amm. poly- plocus est formé par des calcaires gris, durs, dont la surface est très-âpre à parcourir ; ces Calcaires contiennent dessilex. Au-dessus, vient la zone à Terebratula janitor (10 environ), avec quelques Am- monites de Berrias, et plus haut encore, toute la faune de Berrias: Amm. macilentus, Amm. ptychoïcus, Amm. Occitanicus Du Cheiron, la Société s'est avancée jusqu’au Courchon, au sommet duquel elle est allée arracher plusieurs exemplaires de Ter. janitor dans une brèche à éléments peu marqués. qui forme les derniers bancs au-dessus du calcaire à silex, des calcaires à Amm. polyplocus, des marnes à Amm. cordatus, etc., jusqu'au Lias inférieur. Le col de Chaudon, près Barrême, nous a montré les calcaires gris moins puissants qu’à Chabrières. Les derniers bancs sont les plus épais ; ils surplomblent les marnes néocomiennes. Lorsque, à partir de Castellane, on descend le Verdon, on s'engage dans une gorge étroite qui est La clue de Chasteuil. On y coupe une longue série de ces calcaires gris qui dans la région terminent le Jusassique: vers le haut de cette série, plus haut que les couches à Amm. tenuilobatus, à Amm. trachinotus, Amm. polyplocus ; au-dessus même d'un banc de petites Aminonites qui paraissent représenter la faune de Rogoznick, on reurontre la Ter. janitor dans des bancs de calcaire avec rayons de silex. Mais celle-ci est encore séparée de la faune à Ammonites de Berrias par plus de 100" de calcaire gris. Au-dessus de l’Oxfordien, nous avons traversé, jusqu’au Trias, toutes 400 REVUE SCIENTIFIQUE. les formations inférieures, en nous y arrêlant juste assez pour con- stater que le Lias y est très-peu développé, où même y manque com- plètement. Au pont de Trigance, une faille nous a fait arriver le Néo- comien, dont les assises inférieures consistent en bancs de calcaire blanc grenu, pétri de petites Rhynchonelles. Ceux-ci sont supportés par des calcaires plus blancs encore, à pâte fine, avec Coraux et Néri- nées. Au-dessous d'eux. viennent des calcaires gris clair à Dicerus Lucii, puis une grande épaisseur de dolomie cristalline, et enfin des calcaires très-blancs, à pâte très-fine, en masse puissante (calcaires de Rougon ). Ces calcaires sont riches en fossiles: Tereb. Moravica, Pectens, etc. On ne voit rien au-delà, car une nouvelle faille ramène ie Néocomien avec Ost. carinata. Telle est, ans les gorges de Chasteuil et Rougon, la terminaison des terrains jurassiques, bien différente de ce que nous avons décrit dans les autres localités. Maintenant que j'ai résumé la description des dernières couches jurassiques des Basses-Alpes, du moins de celles qu'a visitées la Société, voyons com ment se présente le Néocomien. Aux grandes masses rocheuses de la clue de Chabrières, on trouve adossées, du côté du nord, des couches de caicaire blanc grenu à 4mm. occitanicus, Amm. Calypso, Amm. Malbosi, Anvm. Astierianus : c’est la faune de Berrias. Les marnes blanchâtres qui font suite à ces cal- caires contiennent à divers niveaux: Collyrites elongatus, Pinna Robi- naldina, Amm. Leopoldinus, Holuster Lardyii, Echinospatagus Ricor- deanus, Arca Gabrieli, etc. Au col Saint-Pierre, je rappellerai seulement que les calcaires marneux blancs, avec faune de Berrias, succèdent aux calcaires Ju- rassiques gris, dont la terminaison est marquée par une couche très- nette de brèches. Au col de Chaudon, après avoir traversé les marnes aptiennes, le calcaire à Scaphites Yvanii, dans lequel plusieurs de nous ont ren- contré la Tereb. dyphioïdes, les calcaires marneux à Crioceras Duval . les marnes à Ammonites ferrugineuses et à Belemnites plates, nous sommes arrivés dans des calcaires blancs, un peu marneux, verticaux ou ayant même une légère pente vers le N.-E , par l'effet d’un ren- versement, tandis que les couches précédentes plongent en sens in- verse. Ces calcaires blancs contiennent: Ter. janitor, Amm. ptychoïcus, et répondent aux couches de Berrias, au Néocomien inférieur de la Cadière (Gard). Ils sont en contact avec les calcaires gris, mouchetés, noduleux de l'Oxfordien supérieur qui se renversent sur eux. Au Cheiron, j'ai déjà dit que la faune de Berrias se trouvait dans les marnes qui surmontent les calcaires à Ter. janilor : la série est la TRAVAUX FRANCAIS. — GÉOLOGIE. 401 même qu’à Barrême, et se termine aussi par les marnes noires de l’Aptien. A. Ghasteuil, au-dessus des calcaires blancs, avec coraux, dont j'ai déjà parlé, nous avons trouvé des calcaires blancs grenus à Rhyn- chonelles, dans lesquels les Céphalopodes, très-communs à la base du Néocomien de nos autres coupes, ne se montrent pas. Donc, dans les gorges de Chasteuil et Rougon, terminaison diffé- rente de la série jurassique, commencement différent du Néocomient. Voici, d’après M. Lory, l’idée qa'on peut se faire des phénomènes qui ont amené le dépôt de toutes ces couches: ce sera à la fois un résumé et une explication de ce qui précède. La grande mer oxfordienne a étendu ses dépôts sur toute l’Europe: des coquiiles identiques en grand nombre en Russie, dans les Kar- pathes, à [a Porte de France ( Grenoble), à Digne, en Espagne, attes- tent la contemporanéité, l'unité de ce manteau de sédiments. Sur les roches formées par cette mer se sont élevés les récifs coralliens du Jura, et, de même, celui, isolé de Rougon. Les mêmes polypiers se sont développés à Chambéry, à Grenoble, à Rougon, dans le Gard, dans l'Hérault, sur des fonds de mer tout semblables. Montant peu à peu jusqu’à la surface des flots, ils ont mis à sec certains espaces : de même aujourd’hui s’édifient les Atolfs du Grand-Océan. En Provence, la mer a été mise à sec, vers ce temps, par un mouvement du sol; il y a discontinuité dans les dépôts. Dans le Jura, ces récifs ont circon- scrit d'immenses lagunes dans lesquelles ont vécu des bivalves et autres animaux de mers peu profondes : ce sont les faunes Kimmé- ridgienne et Portlandienne. Ces lagunes, en se comblant, ont été ré- duites à des dépôts d’eau saumâtre et finalement d’eau douce ( Pur- beck) : ces dépôts commencent à Grenoble et se continuent au nord dans le Hanovre, dans le sud de l’Angleterre. Ainsi, tôt ou tard la mer jurassique s’est partout terminée par un exhaussement du sol. De nouveaux mouvements ont ramené les eaux dans lesquelles vécurent la Ter. janitor, diverses Ammonites, etc. Les fossiles de ces mers attestent des eaux profondes et ne sont point ceux qui habitent les récifs de Coraux. Il est naturel de supposer qu'ils se sont déposés entre les récifs et non pas sur eux ; aussi ne les trouvons-nous ni à Rougon., ni à Échaillon. De là, la différence entre les couches néoco- 1 M Duval-Jouve, qui, à son grand regret et aux regrets plus grands encore de la Société, n'a pu assister à la réunion, avait en 1841 indiqué d'une manière très-nette les différences entre ces deux néocomiens et les différences correspon- dantes dans les calcaires gris ou blancs qui les supportent. 402 REVUE SCIENTIFIQUE. miennes, selon qu'elles se sont formées sur les calcaires gris oxfor- diens ou sur les hauts fonds coralliens, comme à Rougon. Ici des calcaires blancs, grenus, attestent un certain mouvement dans les eaux qui étaient habitées par des Rhynchonelles, des Oursins, tandis qu à la surface des eaux peu profondes flottaient les Ammonites et les Bélemnites. Les différences qui existent entre Rougon et le nord de Castellane ne sont que la copie de celles qu’on observe de Chambéry, de l'Échail- lon et du Jura avec les Alpes. Si l’on a, dans les dernières couches du calcaire gris, des fossiles qui se retrouvent plus haut, on doit remar- quer que ces dermères couches sont généralement des brèches, et qu on peu. alors considérer les fossiles comme postérieurs aux élé- ments de la roche qui, sous la forme où nous la trouvons aujour- d'hui, proviendrait d’un remaniement. Quant à la Ter. janitor, M.Lory est peu disposé à lui accorder une grande valeur chronologique, d'au- tant plus qu'à Lemenc il la trouve au-dessous de la Ter. Moravica: il ne faut pas s'attacher à un seul fossile, mais à l’ensemble d’une faune pour caractériser un dépôt. Je serai irès-bref en parlant du terrain tertiaire. Celui que la Société a visité est de l'Éocène supérieur. À Barrême, un conglomérat gros- sier, à bloc de calcaire à Scaphites, percé par des coquilles perfo- rantes, s'appuie sur les marnes aptienres: il a une épaisseur de 4" environ. Immédiatement au-dessus de lui, des grès contenant des Polypiers, Pectens, Nummulites, Turbos, etc.; puis grande épaisseur de marnes et sables dont la partie supérieure contient des bois fos- siles avec moules de galeries de Tarets et la Natica crassatina. Par-delà un poudingue de quartzites, de gabbros, de calcaires noirs siliceux et une puissante alternance de marnes rouges, de pou- dingues, de calcaires blancs, on rencontre la Bithynia Dubuissoni, puisdes plaques de Cerithium margaritaceum, et enfin l'Helix Ramondiü, ce qui nous place au niveau du calcaire d'eau douce de la Beauce ( Miocène ). L'ensemble des couches tertiaires a environ 600% d'é- paisseur. Au nord de Saint-André, dans la vallée d’Allons, le conglomérat qui forme la base reposant sur la craie moyenne ou même supérieure supporte des marnes bleues à Natica rapicensis, Cerith. diaboli, Cerith. hexagonum et autres nombreux fossiles. Ces couches sont l'équivalent de celles des Diallerets, de Faudon (Hautes-Alpes) Au-dessus vien- nent des Polypiers, des Nimmulites dans un calcaire bleu, dur et grenu : puis des grès rouges avec Operculina ammonea, Cyclolites, et divers Acéphales qui peuvent représenter les sables de Beauchamp, TRAVAUX FRANÇAIS. —— GÉOLOGIE. 403 les couches de Biarritz. Le système se termine ici par des marnes bleues à Operculines, Tornatelles, Spirula serpulea (??) qui sont syn- chroniques de la partie supérieure des gypses de Paris, des couches de Bos-d’Arros, près Pau. J'ai cherché à donner une idée générale des choses les plus inté- ressantes qu'a examinées la Société; je ne saurais mieux faire que de renvoyer Ceux qui voudraient des descriptions exactes et plus com- plètes, avec les conclusions établies en connaissance de cause, au Compte-rendu que vont publier les Secrétaires de la session. L. CozLorT, Préparateur à la Faculté des sciences de Montpellier. TRAVAUX ÉTRANGERS. M. Senoner, bibliothécaire de l’Institut impérial de géologie, nous adresse de Vienne (Autriche) les lettres suivantes : — La nouvelle Société Vénéto-Trientine des Sciences naturelles de Padoue a tenu en juin dernier sa séance à Venise. Entre autres com- munications, le professeur Canestrini a exposé dans cette séance quel- ques particularités secondaires relatives au sexe des Tanches. Selon lui, il est constaté que chez cette espèce de Poisson le mâle se distin- gue aisément de la femelle par un plus grand développement du deuxième rayon des nageoires ventrales. De plus, outre que les mâles présentent dans toutes leurs parties et dans leurs pièces osseu- ses la même supériorité de développement, il a observé qu'ils avaient au-dessus de chaque nageoire ventrale uve saillie considérable entiè- rement musculaire Chez eux, les nageoires ventrales ont une grande tendance à se replier vers l'abdomen; elles exécutent ce mouvement au plus léger attouchement sur le deuxième rayon ventral: il en résulte que les individus du sexe mâle peuvent, en comprimant leur abdomen à l’aide de ces nageoires, faire sortir le sperme nécessaire à la fécondation des œufs, sans avoir besoin, pour arriver à ce résultat, de frotter leur corps sur le sol fangeux des rivières où ils vivent. — Le comte Nini, à l'occasion du catalogue des poissons de la mer Adriatique, donne d'intéressants détails sur les nids et les mœurs de quelques Gobius. Une des espèces de ce genre forme un nid qui a une chambre centrale destinée à contenir plusieurs femelles et leurs œufs. Ce nid est muni de deux galeries et d'une ouverture pour un courant 404 REVUE SCIENTIFIQUE. d'eau continu. D'autres Gobius construisent leur nid sous des coquilles ou des abris quelconques. Un manuscrit d'Olivi, sur le même sujet, est communiqué à la Société par le D' Nardo. Le D' Fanzago lil un travail sur les Scorpions d'Italie. Enfin, la séance est terminée par la présentation d'un Prodrome de la Faune entomologique du Padouan, par le D' Tachetti; il donne le catalogue de cent quarante espèces de Lépidoptères diurnes qui habi- tent cette province (Gazette de Venise, 1° juillet 1872). — En 1845, le professeur Reuss décrivit Les fossiles de la formation crétacée de la Bohême. Le D' Schloenbach et le D' Fritsch se propo- sèrent de publier en 1867 les Céphalopodes de la même formation. Le premier de ces deux auteurs étant mort en 1870, dans une excursion géologique dans le Banat, le second a continué ses recherches et vient de publier un travail intitulé Cephalopoden der Bæhmischen Kreidefor- mation (Prague, 1872). Danscetouvrage, se trouventdécrites cinquante- quatre espèces appartenant aux genres Glyphiteuthis, Belemmaites, Nautilus, Rhyncholithus, Ammonites, Scaphites, Hamites, Helicoce- ras, Baculites, Aptychus. Le D' Fritsch divise cette formation en trois groupes : 1 Groupe.— Période de l'Ammonites Cenomanensis d' Arch. Céno- manien inférieur. 2° Groupe. — Période de l’'Ammonites peramplus d'Arch. Turo- nien (?) moyen. 3° Groupe. -— Période de l’Ammonites Orbignyanus d'Arch. Séno- nien supérieur. Les genres Nautilus, Ammonites, Scaphites, Baculites, sont repré- sentés dans toutes les périodes de l'époque crétacée; quant aux genres Belemnites, Hamites, Helicoceras, ils appartiennent aux dépôts plus récents de la même formation. — M. O. Feisimantel va publier sur les plantes fossiles de la Bohême un travail détaillé dont pour le moment il nous donne un aperçu. Dans la formation houillère, se trouvent représentés trois genres de plantes : Megaphytum, Caulopteris et Psaronius. Outre le Megaphytum giganteum déjà connu, il indique, comme ayant été trouvées dans les mêmes couches, des espèces nouvelles; ce sont : Megaphytum Pelikani, Megaphytum macrocicratissatum et Megaphytum trapezoïdeum ; le Megaphytum majus Stbg., et le Megaphytum Goldenbergi, plantes nou- velles pour la Flore fossile de Bohème, viennent se joindre à ces espè- TRAVAUX ÉTRANGERS. 405 ces. Quant au Caulopteris Cisti, au Caulopteris Phillipsi et au Caulo- pteris peltigera, leur découverte remonte à peine à quelques années. M. Feistmantel fait remarquer que la Zippea disticha;: Corda devrait être rapportée au genre Megaphytum, et propose pour elle le nom de Megaphytum Cordai. Dans l'étage Permien, on rencontre les genres Psaronius et Temskya. Les représentants du premier genre n'ont été trouvés ces dernières années que dans les cailloux roulés, ils viennent d'être récemment découverts dans les couches les plus élevées -de la formation Permienne. — M. E. de La Rue (Bulletin Soc Impér.… Sc. natur. de Moscou, 1872, n° 1) a observé les modificatio ns difformes de la feuille du Syringa vulgaris. La difformité consistait en ce que la marge de la feuille présentait des divisions locales de la lame. Selon cet auteur, la division se passe d'une manière tout à fait progressive : la première apparition de la modification consiste en ce que la feuille présente à son sommet une courbure ou contraction qui se prolonge en une pe- tite dent. Aïlleurs, la dentelure se forme à la marge de la feuille et est plus ou moins éloignée de son sommet. Cette dentelure commence plus tard à croître et se sépare de plus en plus de la lame primitive de la feuille ; elle prend la forme d'une lame indépendante, jointe à la lame primitive par un nerf commun qui n’est que le prolongement d'un des nerfs de cette dernière. Quelquefois la marge de la feuille paraît dentelée en plusieurs endroits; enfin, chez certaines feuilles, cette dernière, au lieu d'être entière, est irrégulièrement dentelée. Cette modification permet d'admettre avec probabilité que les feuilles dentelées et même divisées présentent, à leur apparition, l'aspect de feuilles entières et ne prennent que plus tard la forme qui leur est na- turelle. Rossmann désigne ce phénomène sous le nom de Phillomor- phose. Vienne, le 23 juillet 1872. — Le professeur Laube (de Prague) communique à l'Institut géo- logique de Vienne (juillet 1872) le résultat des recherches qu'il a faites aux environs de Tœplitz. Dans cette localité, il a trouvé l'argile à Baculites représentée par des fossiles de Priesen , tels que Venus laminosa Reuss, Nucula impressa Linn., Turbo concinnus Roem., Cerithium trimonile Mich., Aporrhais Reussi, Gun ; en outre, cette ar- gile contient des Foraminifères identiques à ceux des couches de Priesen décrits par le professeur Reuss ( Verh. geol., 1872). 1 28 406 REVUE SCIENTIFIQUE. — En creusant un puits dans la cour impériale de Vienne, on a trouvé à une profondeur de 3 mètres, dans des terrains d'alluvion, une dent d'Elephas primigenius , mais malheureusement on n’a pas pu l'extraire entière (loc. cit. ). - — Le professeur Heer (de Zurich) a étudié les plantes fossiles re- cueillies par l'expédition Suédoise, dans la péninsule de Noursoak, dans le Groënland septentrional, en 1870. Il distingue deux espèces de schistes dans les lieux où elles ont été trouvées. Dans ceux nom- més Schistes de Rome, Heer énumère 40 espèces de plantes, dont 24 appartiennent aux Fougères, 5 aux Cycadées, 8 aux Conifères, etc.; le Zamites articus était l'espèce la plus nombreuse parmi les Cycadées, tandis que parmiles Conifères, c'étaient le Pinus Crameri et le Sequyi. Cette flore peut être considérée comme subtropicale et identique avec la flore de la craie inférieure de l'Europe centrale. L’autre flore, celle des Schistes noirs d'Atane, contient 45 espèces: 11 Fougères, 7 Co- nifères, 24 Dicotylédonées, etc. On remarque dans ces Schistes l'ab- sence des Pinus et la présence plus nombreuse des Séquoya ; une feuille de Salisburya, recueillie dans cette localité, montre que ce genre vivait dans ce pays déjà à la période crétacée inférieure: Îles Gleichenias y manquent complètement. Comme on le voit, ces deux flores présentent déjà des caractères différents : dans la première, on trouve deux seuls fragments de Dicotylédonées, tandis que dans la seconde celles-ci sont très-nombreuses et très-intéressantes : On y rencontre, outre de longues feuilles, des fruits qui leur appartien- nent. — Le D' Feistmantel donne un aperçu de la flore de la période car- bonifère de Rakonitz, en Bohême. Il énumère 36 espèces, dont 18 déjà décrites, et les autres découvertes par lui. Parmi celles-ci, méri- tent une mention spéciale : le Neuvropieris Loshi Brgt., et Flexzuosa Stbg.. Sigillaria trigona Stbg. et Sillimani Brgt. etc., etc. La Stig- maria ficoïdes est la plante la plus commune et se trouve dans toutes les mines de charbon : on a observé que plus cette espèce était nom- breuse, plus les autres sont rares et qu elles manquent même com- plètement. — En 1870, une collection de fossiles du Pampas fut offerte au professeur Cornalia, directeur du Musée civique de Milan, pour le prix de 40,000 francs L'an dernier, cette collection arriva dans cette ville : frappé de sa valeur scientifique, Cornalia s'adresse à la géné- rosité de ses concitoyens, et en très-pen de temps, les revenus du TRAVAUX ÉTRANGERS. 407 Musée ne suffisant pas, il put disposer d'une somme de 24,000 francs à laquelle contribuèrent le Prince Humbert, le Ministre de l'Instruc- tion publique, Cornalia lui-même, ses deux conservateurs, et vingt- trois autres.personnes: la collection fut donc acquise au Musée. Parmi les 300 morceaux les plus remarquables, est un squelette entier de Megatherium Americanum Blum, dont il n'existe que trois autres exem- plaires en Europe : un à Turin, le second à Londres, et le troisième à Madrid. On y remarque aussi des crânes entiers de Scelidotherium leptocephalum Ow., de Glyptodon asper Burm., de Toxodon Burmeïsteri G., et des mâchoires, des dents, des os des extrémités, des plaques de Glypiodon Tuberculatus Ow., de Mylodon robustus, de Glyp. ornatus, Ow. de Glyp. gracilis, Nid. Toxodon Plaiensis, Ow. Cornalia, dans un Mémoire publié à Milan en 1872, donne un apercu des formations géologiques de la faune des Pampas, et des ouvrages se rapportant à cette faune. —Le professeur Simony (de Vienne), qui s'occupe depuis plusieurs années des phénomènes qu'offrent les glaciers du grandiose amas calcaire du Dachstein, dans la haute Autriche, a observé que, à cause de l'hiver dernier, pauvre en neige, le glacier a diminué de beaucoup dans son extension et son épaisseur: le bord extrême s'est, depuis 1871, relevé d'environ 6 mètres, et sa densilé a diminué de 3 mètres à peu près (Linz. Tagpest.). C. Grad a publié, dans la Revue des Cours scientifiques (Paris, 3 août 1872), un Mémoire recommandable sur le mouvement des gla- Ciers. — L'Artemisia , dite semence vermifuge du Levant, n'appartient pas à l'espèce connue sous le non d’Artemisia Valhiana Koss., comme le croyaient Tréviranus et Nees, mais à l'Ariemisia lina, décrite par le professeur Berg. Le professeur Willkômn, qui a eu l’occasion de re- cevoir vivante cette plante, dont les habitants du Turkestan recueillent la semence pour la mettre dans le commerce, sous le nom de vermi- fuge, conserve le nom spécifique de Berg, et dit qu’elle appartient à la section Seriphidium (Bot. Zeit., 1872). — Dans la littérature botanique, il manque encore ‘un aperçu sur la flore de la Galicie et de la Bukowine; c'est pour remplir cette lacune que M. Knapp a recueilli les notices éparses dans les journaux et les ouvrages, etest parvenu à faire une histoire des plantes aussi complète que possible d'un pays qui pour beaucoup était une terre inconnue ; il donne la liste des travaux faits sur la botanique de cette contrée, la 408 REVUE SCIENTIFIQUE. localité et la synonymie de chaque espèce ; la diagnose des espèces non enregistrées dans le Synopsis Floræ Germaniæ de Koch estsoigneu- sement faite par lui. — Suivant les observations de Mohl, les grains verts de Chloro- phylle ne sont pas détruits quand les plantes prennent une couleur rouge ou brune; suivant lui, auprès de ces grains de Chlorophylle, se forme dans le tissu cellulaire une substance rouge ou bien dans les Conifères les corpüscules de Chlorophylle restent ïintacts, mais prennent une coloration rougeâtre ou brunâtre. Le professeur Krauss, a fait connaître cependant qu'en même temps que se produitla décoloration des grains de Chlorophylle, se produisent aussi leur destruction et leur disparition. La coloration hivernale des feuilles, qui au printemps doivent prendre une belle teinte verte, est un phéno- mène seulement local. Pour constater la cause de cette décoloration, le professeur Krauss, porta au temps dela gelée des rameaux du ,Buxus dans un appartement etles mit dans l'eau; après cinq jours au plus, la couleur rouge brunâtre des feuilles se changeaen une belle couleur verte. On doit en conclure que le froid de l'hiver est la cause de des- truction de la forme et de la couleur des corpuscules de Chlorophylle, de même que la température élevée est la cause de la rénovation des mêmes corpuscules déformés et décolorés (Bot. Zeit., 1872). — Le malacologiste distingué Clessin fait connaître le résultat de ses observations sur la vie des Mollusques pendant l'hiver; il décrit comment l'Helix pomatia s'enfouit dans la terre, comment les Mol- lusques se retirent dans des lieux à l'abri de l'air, comment ils for- ment leur épiphragme (Corresp. Blait. de zool. min. Ver., Regens- burg, 1872). — Au commencement de septembre, les habitants de l'Illyrie furent témoins d’un phénomène fort singulier : la mer, près du rivage, était entièrement couverte de grandes masses d’un mucus incolore qui couvrait tous les objets voisins; les filets des pêcheurs étaient tellement revêtus de ce mucus épais qu'on ne pouvait plus s’en servir. Personne ne se hasarda, comme de coutume, à prendre les bains de mer ; on ne voulut plus manger de poisson, etc. Le conservateur du Musée de Trieste, le D' Syrski, reconnut la cause organique de cette masse muqueuse, et déclara qu'elle contenait la Mitzschia closterium sous divers états et sous les différentes formes de son développement. Cette espèce n'est pas rare dans l'Istrie et se trouve en grande abon- TRAVAUX ÉTRANGERS . 409 dance dans les salines de Serrulo, Muggia, Capi d’Istria (Trieste, Zig., 1872). — Pour conserver les collections zoologiques contre les insectes destructeurs, le conservateur du Musée del Institut vénitien, M. Trois, propose l'huile empyreumatique du Bouleau blanc. Il délaie cette huile avec un tiers de son volume d'alcool dans le savon arsenical et l'étend sur la peau et les pattes des oiseaux. Trois a exposé plusieurs de ces derniers dans des circonstances propres à les faire attaquer facilement par les insectes, mais ils demeurèrent intacts. Des Reptiles, des Poissons, des Coléopteres et autres insectes couverts en diverses parties de cette huile, se conservèrent parfaitement. Du coton trempé dans cette huile et placé dans les collections de Lépidoptères suffit pour les préserver (Aiii del R. Inst. ven., 1872). — Jereçois en ce moment une lettre du Rév. pasteur, D' Rawal, de Possen (Courlande), m'annonçant que la Société d’Anthropologie et d'Histoire naturelle de Moscou, sous les auspices de laquelle a eu lieu l'expédition, s'occupe vivement de l'étude des produits naturels pro- venant du Turkestan; cette étude est confiée à divers savants de Russie et de l'étranger, parmi lesquels il nous suffira de citer de Saussure, Mac Lachan, Low, Martins, Strauch. Kissler, Radoschoff, Ky, etc. L'œuvre entière sera publiée en 300 feuilles de texte et 200 planches, et sera probablement terminée pour le voyage de {a Novura publié à Vienne. Vienne, 28 septembre 1872. — L'étude des Insectes et des Arachnides fait tous les jours de nou- veaux progrès. Parmi les spécialistes, nous citerons le professeur Canestrini (de Padoue), qui décrit plusieurs espèces d'Opilionides. Déjà, l'an dernier, cet auteur avait publié la description de l'Opilio Tar- gionu et de l’Opilio argentatus de la Sardaigne, de l'Opilio granifera, voisin de l’Opilio vorax L. Koch, dont il diffère par la petitesse de sa taille, la couleur uniforme de ses pattes, etc. IL nous fait connaître l’Hoplites Parisi de la Valteline, du canton du Tessin, etc., l’Hoplites lœvipes de la Lombardie et de la Vénétie, l'Acantolophus granulatus, le Platynolophus Rhinoceros et l'Homalonotus depressus, recueilli près de Spezzia (H. 2, 1872). — Le Bulletin de lu Société entomologique Italienne (H. 5 , 1872) con- tient une série de travaux très-importants. Le professeur Carruccio Y 410 REVUE SCIENTIFIQUE. décrit un nouvel Hyménoptère de la Sardaigne sous le nom de Pelo- pocus Targionii (corpore cyaneo-virescens, cinereo-villosus, abdomine cyaneo-virescenti, femoribus cyaneis, tarsisnigro-Cyaneis;, prothorace punctulato, mesothorace unisulcato, metathorace transversim rugoso- alis nonnihil hyalinis, apice et areolis infuscatis violascentibus, long. corps mill. 17). Lepelletier de Saint-Fargeau décrit dans le même fascicule un Pelopocus de la Sardaigne, qu'il nomme P. Sardonius. Le même numéro contient en outre la continuation du traité sur les Insectes parasites, par Randoni; du catalogue synonymique et topo- graphique des Coléoptères de la Toscane, par F. Piccioli; des maté- riaux pour la faune entomologique de l’île de Sardaigne, par P. Bar- gagli; du catalogue des Coléoptères de l'Italie, par Bertolini. — Dans la correspondance scientifique de Rome, nous trouvons, sur l'Hippopotame, l'extrait d'un travail en cours de publication du professeur Geselli. Le nombre des espèces vivantes de ce genre se porte à trois, savoir : Hipp. Capensis, Hipp. Senegalensis et Hipp. Abys- sinicus. L'auteur fait observer que l'Hipp. Capensis est la même espèce que l'Hipp. amphibius de Linné et que l’Hipp. antiquorum de Fab. Col. Les espèces vivantes ont 4/4 incisives, ainsi que les espèces fos- siles trouvées en Europe, tandis que les espèces fossiles de l'Inde en ont 6/6. Dans les sables quaternaires de Ponte Mammolo, près de Rome, Ceselli a trouvé, entre autres dents et cailloux taillés par la main de l'homme, une dent de l'Hippopotame désigné par lui sous le nom d'Hipp. dactyliotus — Les fouilles faites pour construire un aqueduc à Vienne ont donné lieu à des faits et des études intéressants au point de vue géologique et paléontologique. Aïnsi, M. Kavvav a donné connais- sance, dans une des dernières séances de l'Institut géologique de cette ville, de la découverte faite par lui, entre Liesing et Perchtolsdolf, dans un sable compact jaune brunâtre, d'un fragment de mâchoire de Dinotherium, probablement du D. Cuvieri. Les dents molaires man- quent : l'animal les avait probablement perdues pendant sa vie, car les alvéoles sont presque oblitérées. — Dans l'Annuaire de la Société des naturalistes de Messine(1871- 72), le professeur Doderlein donne un aperçu de la Faune de la Sicile. À propos des Poissons, il décritune nouvelle espèce de Cymbium qu'il a rencontrée dans le Tonara di Solanto, et qu'il nomme C. Verany. Gette TRAVAUX ÉTRANGERS. 411 espèce diffère du C. Bonaparti et du C. Commersomi par les proportions du corps, celle dumuseau, des nageoires dorsales, des dents et surtout parle nombre remarquable des rayons dorsaux, etc., etc. Vienne, le 22 octobre 1872. Géologie. Dans le courant du mois d’aoùt 1872. le Congrès international d'anthropologie a tenu sa session annuelle à Bruxelles, sous la prési- dence du savant et vénéré géologue Omalius d'Halloy. La France y était représentée par la plupart des savants qui s'occupent des graves et intéressantes questions de l’histoire de l’homme aux époques pré- historiques. Le lieu de la réunion ne pouvait être mieux choisi, car la Belgique est, au point de vue des stations de l’âge de la pierre etdu bronze, un pays privilégié, comme l'ont prouvé les nombreuses communications des savants belges et les deux excursions faites sous leur direction pendant la durée de la session. En effet, pendant la journée du 26 août, les membres du Congrès ont visité les tranchées du chemin de fer à Spiennes, et ont pu con- stater que le terrain quaternaire d’alluvion y est très-développé, et que l’on y rencontre des silex taillés du type de Saint-Acheul, mêlés à des ossements de Mammouth et de Rhinoceros tichorhinus. Pendant la journée du 28, dans une courte excursion à Namur et au camp d'Hastedon, ils ont étudié un système de fortification formé par des levées de terre soutenues de fascines et de roches, et chacun a pu recueillir en abondance des silex taillés et polis qui témoignent de la haute antiquité de ce retrapchement. Les séances ont présenté le plus haut intérêt, et un grand nombre de questions y ont été discutées à l’aide des lumières qu'apportaient de tous les points de l’Europe les savants représentants de la science préhistorique. Parmi ces questions, nous avons surtout remarqué les suivantes : 1° Quelle est la date de l'apparition de l’homme ? 2° Comment faut-il diviser les âges préhistoriques ? 3° Quelle est l'importance des caractères tirés de l'étude du sque- lette des races préhistoriques ? 4° Quels ont été les migrations, les échanges et la civilisation de ces âges? 1° Suivant quelques anthropologistes, l’homme aurait existé dès 412 MÉMOIRES ORIGINAUX. l’époque tertiaire moyenne. et leur opinion s'appuie surtout sur les faits suivants : M. l’abbé Bourgeois, dès 1867, avait trouvé dans le terrain miocène, à Pont-Levoy (Loir-et-Cher), des silex taillés, des . grattoirs, des percuteurs, que l’on pensa devoir attribuer au travail de l’homme. Il présente au Congrès de Bruxelles ces pièces de con- viction ; la question, étudiée par une commission spéciale, n’est pas résolue par une affirmation générale, et un certain nombre de mem bres de la Commission pensent qu’il faut. pour porter un Jugement définitif, un nouvel examen du gisement. Selon MM. de Quatrefages, Desor et Bourgeois, la découverte faite en Californie (1869) d'un crâne humain dans une couche limoneuse, inférieure au terrain diluvien, viendrait à l'appui de ce premier fait. Cette question, comme on le voit, exige de nouvelles recherches pour être complètement élucidée. 2 C’est enPelgique, ea Angleterre et en France surtout que l’on a cherché à classer les faits de l’époque préhistarique au moyen des espèces animales disparues ou émigrées, et des instruments dus au travail de l’homme. La classification proposée il y a quelques années, par Lartet, repose sur ces bases, qui sont évidemment les meilleures. En Belgique, M. Dupont reconnait quatre âges, parmi lesquels nous citerons comme les mieux déterminés: l’âge n° ? des alluvions limo- neuses et des cailloux roulés avec ossements de Mammouth et de Rhi- nocéros: l’âge n° 3 du Renne correspondant au dépôt de l'argile à cailloux et aux armes de pierre polie. Selon le savant sous-directeur du musée de Saint-Germain, M. de Mortillet, l’âge de la pierre se diviserait ain£i : A. Époque paléolithique ou de la pierre taillée. a. Instruments de pierre. 1o Époque de Saint-Acheul. 22 Époque du Moustier. 3° Époque de Solutré. b. Instruments de pierre et d'os. 4 Epoque de la Madelaine. B. Époque néolithique ou de la pierre polie. Époque de Robenhausen. Il existe une lacune entre l’époque de la Madelaine, pendant la- quelle l'os est devenu la matière principale dont l'homme a fait ses armes. et l’époque de la pierre polie qui correspond aux plus anciennes cités lacustres. D’après M. Broca, on rencontrerait précisément des vestiges dans certaines stations de la Lozère (vallée de la Jonte), où M. le D' Pru- nières (de Marvéjols) vient de faire des fouilles. Dans cette vallée, se TRAVAUX ÉTRANGERS. — GÉOLOGIE. 413 trouve une caverne sépulcrale contenant des débris de squelettes hu- mains et d'animaux domestiques mêlés à des poteries grossières, à des armes de silex et à des cendres de foyers. La race d'hommes qui habitait cette vallée avait les habitudes de l’âge de la pierre taillée, habitait les cavernes, et avait l’usage de la pierre polie et des animaux domestiques. — Le fait de l'existence d’une race de transition entre les deux périodes est également confirmé par les recherches de MM. Cazalis de Fondouce et Ollier de Marichard, dans les grottes du midi de la France. Le savant ingénieur en chef des travaux de Paris, M. Belgrand, propose, pour les dépôts quaternaires des vallées de l'Eure etde la Seine, la classification suivante : 1e Alluvions caillouteuses de Saint- Prest avec Elephas meridionalis et Rhinoceros etruscus ; 2° alluvions des hauts niveaux de Paris avec Rh. etruscus et Merckii, Elephas antiquus et primigenius ; 3° alluvions des bas niveaux avec le KRenne et une grande quantité d'Aurochs. Ces classifications, comme on le voit, concordent à peu près avec celles que M. Dupont admet pour la Bel- gique Elles paraissent avoir l’assentiment de la plupart des savants qui s'occupent de l’âge préhistorique, ainsi que le constate le savant professeur de la Sorbonne, M. Hébert, qui. résumant la question, dé- montre qu'il est indispersable, pour comprendre l’époque quaternaire dans le nord de la France et en Belgique, d'admettre la succession et l'indépendance des phénomènes suivants : lo remplissage du fond des cavernes par un dépôt caillouteux; %% dépôt limoneux: 3° dépôt argileux à cailloux anguleux. 3° L'étude des caractères anatomiques des races humaines porte surtout sur le crâne. À ce point de vue, il paraît établi que la race méditerranéenne représentée par les crânes de Menton et de Croma- gnon est plus perfectionuée que celle du nord. Selon M. Hamy, les races humaines les plus anciennes que l’on connaisse appartiennent au type du Néanderthel ; elles ont le crâne dolicho-pentagonal, et mé- ritent par leurs affinités le nom d’Australioïdes ; plus tard ont apparu des races moins dolichocéphales, et, plus on avance dans la série des temps, plusle mélange des races est grand. De nos jours cependant, il est possible de retrouver des cas d’atavisme qui font revivre les races les plus anciennes. 4 Les migrations des peuples préhistoriques ont un intérêt qui n'échappe à personne ; dès qu’elles seront copnues d’une manière complète, elles nous éclaireront sur bien des points obscurs de l’his- toire de l'homme. Les questions de la domestication des animaux, tels que le chien, le cheval, le bœuf: des échanges d'armes ou d’us- 414% REVUE SCIENTIFIQUE. tensiles; de la civilisation de ces époques, en un mot, se rattachent directement aux migrations. La race des dolmens paraît avoir été une de celles qui ont émigré le plus loin de leur point de départ. Selon M. le général Faidherbe, Pémigration se serait faite, à cette période, du sud au nord, et non du nord au sud, comme on l’admet généralement. Peu de savants sont de cet avis; on pense au contraire que le bronze. qui apparait vers cette époque avec des formes variées d'armes et d’ustensiles. est venu primitivement de l'Orient. Telle est surtout l’opinion des savants danois. Selon M. Vorsae, il y aurait eu deux civi- lisations de l’âge du bronze: l’une au midi, l'autre au nord, ayant une même origine orientale, mais se développant indépendamment l’une de l’autre. Vers la fin de cet âge, les Étrusques auraient importé dans le nord les objets que l'on retrouve en plusieurs endroits, spéciale- ment dans le gisement préhistorique d'Eygenbilsen, en Belgique. Les armes de jade, si répandues dans les stations de l’âge de la pierre polie, ont également occupé l'attention du congrès. Sont-elles l'indice de relations de commerce avec l’extrême Orient, où l'on trouve les seuls gisements de cette rare espèce minérale: ou existe-t-il en Europe des localités encore inconnues où la jadéite affleure? Selon M. de Mortillet, les armes de cette matière ne sont pas parteut iden- tiques au point de vue minéralogique, et il est possible qu’elles aient une origine européenne, contrairement à l'opinion de M. le professeur Desor. Cette origine, M. de Mortillet la voit dans nos massifs monta- gneux non encore explorés, et il fait remarquer que sur le trajet sup- posé de l’émigration ou du commerce venu de l'Orient, les armes de jade n’ont pas jusqu'ici été indiquées en abondance. Le midi de la France paraît être une des régions les plus favorisées pour l'étude de ces migrations, car les recherches récentes de MM. Duval-Jouve et Cazalis de Fondouce démontrent que c’est à l'époque du bronze ou- vragé qu'appartient la station de la grotte des Fées, près d'Arles, où ils ont trouvé des ossements humains avec un poignard de bronze et une coupe de poterie assez fine, faite à la main, et rappelant l’orne- mentation de certaines poteries des terramare d'Italie. Espérons qu il sera donné aux géologues du Midi placés sur la route de ces émigra- tions, de résoudre définitivement les problèmes que s’est posés dans les derniers temps la science anthropologique ! — L'Évolution des Échiniges dans la série géologique... par M. le professeur Desor.. Neufchâtel, 1872. — Les Echinodermes consti- tuent une classe d'animaux à Zoonites groupés par cinq autour TRAVAUX ÉTRANGERS. — GÉOLOGIE. 415 d'un axe central. Cette disposition si simple se voit surtout chez les Ophiures et les Astérées, mais elle est de moins en moins nette quand on la recherche chez les Échinodermes supérieurs, Échi- nides, Holothuries. Le passage des Astérées aux vrais Oursins se con- coit facilement, mais ne peut être prouvé avec les données actuelles de la science. Ilen est de même du passage des Crinoïdes aux Oursins, mais ici on connaît cependant des intermédiaires, qui sont, pour les Crinoïd>s, les familles paléozoïques des Blastoïdes et des Cystides, lesquelles paraissent avoir des affinités avec les Oursins paléozoïques à plaques polygonales, Tessellés de M. le professeur Desor. Les iransitions de ces derniers avec le genre Cidaris, qui vient immédiatement après dans l’ordre des temps, sont encore inconnues, car le Permien et le Trias, où les formes intermédiaires devraient se reacontrer, sont jusqu'ici très-pauvres en Échinides. Le rôle de ces animaux ne devient réellement important que vers la fin de la période secondaire. Le terrain jurassique surtout présente un très-grand nombre de genres et d'espèces d'Oursins, et le type échinologique parait s'être alors enrichi de nouvelles formes, mais « sans secousses, sans écaris, par des modifications lentes que l’on peut suivre pour ainsi dire pas à pas ». Le rôle qu’ont joué les Oursins a d’ailleurs varié dans les différents étages du terrain jurassique. Dans le Lias, il est peu important, et ce sont surtout des Cidaris que l’on trouve. Dans l'Oolite inférieure, on constate une recrudescence remarquable de genres et d'espèces nou- velles. Deux familles même viennent s'ajouter aux Gidaritides; ce sont : les Echinoconidés et les Cassidulidés, mais la multiplication des types s'arrête avec l'Oolite moyenne où les Échinides ne sont abon- dants que dans certains faciès peu étendus en surface ( faciès à Scy- phia). Le Corallien et le terrain à chailles, grâce à une abondance extraordinaire de coraux, abondent en formes variées, et l’on peut dire que la faune échinologique a dès-lors atteint son apogée. Les étages jurassiques supérieurs n’ajoutent rien aux faits précédents, tandis que la base du terrain crétacé présente partout un grand nom- bre de genres et d'espèces d'Oursins à symétrie bilatérale. Les maxima et les minima des Échinides paraissent être en rela- tion intime avec les conditions spéciales des fonds de mer; lorsque la faune coralligène peut se développer, comme dans le Jura, à l’époque du Corallien et des chaïlles, les formes sont nombreuses; lorsque, au contraire, comme il arrive dans les Alpes, des fonds vaseux prédomi- nent, les formes pour une même époque sont peu abondantes. Un pareil phénomène pourrait s'expliquer par de simples varia- 416 REVUE SCIENTIFIQUE. tions dans la direclion des courants et dans Le fond des bassins mari- times. En effet, des oscillations du sol, en exhaussant ou abaïssant le fond de la mer, forceront les espèces d’'Oursins qui y vivaient à émi- grer à la recherche de stations plus favorables à leur développement. Ces migrations s’accompagneraient de modifications légères qui resteraient acquises lorsque, par suite d’un nouveau mouvement du sol, les espèces émigrées reviendraient à leur point de départ. Tous les types d'Échinides, d’ailleurs, ne seraient pas également modi- fiables par l'influence des milieux, car les Gidaris sont restés ce qu'ils étaient à l’époque du Trias et du Jurassique inférieur. Certaines espèces cependant présenteraieut des indices du passage des Oursins réguliers ({ Endocycliques ) aux Oursins irréguliers (Exo- cycliques): ce sont les Pygaster et les Holectypus, dont la physionomie extérieure se rapproche des Cidarides les plus harmonisés. Quoi qu'il en soit, c'est à l’époque crétacée qu’apparaissent les Spatangidés, dont la filiation ne nous est pas encore connue. « En résumé, dit le savant géologue suisse, les Échinides ont, depuis leur première apparition dans les terrains paléozoïques, suivi une marche ascendante sous le triple rapport du nombre, de la va- riété et de l’organisation. D’abord insignifiant, leur rôle acquiert une importance considérable à partir de l’époque jurassique. C’est le mo- mert de leur premier épanouissement, comme l’époque carbonifère avait été celui des Crinoïdes. Leur développement ultérieur n’est pas le fait du hasard. Il est lié à tontes les vicissitudes du sol marin, non-seulement aux grandes révolutions qui ont modifié l'étendue et les limites des anciens océans, mais encore aux changements inté- rieurs survenus au sein des eaux, et qui ont eu pour effet d’influer sur le régime des populations marines, soit en les modifiant, soit en provoquant des migrations ». — Étude sur le terrain quaternaire du Sahara, par M. Ch. Grad (Arch. sc. phys. nat. génér). Le terrain quaternaire est comme partout, dans la région méridionale de notre colonie, formé d'éléments détritiques, mais qui ne paraissent pas se relier à de grands cours d’eau. Sa puis- sance est énorme; en certains points elle dépasse 158 mètres. Rien de régulier dans la disposition des bancs de cailloux roulés, de grès. de marnes gypseuses. Quant à l’origine de ces alluvions, l’auteur pense qu'elle est plutôt fluviatile que marine, contrairement à l’opinion des savants éminents qui se sont occupés de cette question. Quoi qu’il en soit. une puissante dénudation a donné naissance sur des pentes de l'Atlas à ce terrain, qui est par sa stérilité le vrai terrain du désert. TRAVAUX ÉTRANGERS. — GÉOLOGIE. 417 — Archives des sc. phys. et nat. de Genève. — La 55° session de la Société helvétique des sciences naturelles s’est tenue du 19 au 22 août, et des communications intéressantes y ont élé faites sur la géo- logie de la Suisse. Nous y avons appris que chaque année ane aJloca- tion de l'État favorise les recherches d’un certain nombre de géologues qui ont à étudier une partie du territoire. C’est ainsi que la géologie de cet État a fait en quelques années des progrès immenses. Parmi les communications qui out été faites à la Société, nous re- marquons celle de M. Théodore de Saussure, qui affirme de visu que dans les phénomènes éruptifs qui ont donné naissance au Jorullo, la part du soulèvement des terrains avoisinant le cratère a été nulle. Ici, comme dans la plupart des volcans, c’est par l'accumulation des cendres et des lapilli que le cône s’est élevé. M. Gilliéron insiste sur ce fait, que la faune de certains terrains secondaires des Alpes de Fribourg se rattache à celle des terrains cor- respondents du nord de l'Europe, tandis que pour d’autres les équi- valents paléontologiques ne se rencontrent que dans les Carpathes et sur le pourtour de la Méditerranée. M. le professeur Ch. Vogt cherche à démontrer qu'il existe une rela- tion entre la structure intime des roches et leur origine Selon M. Vogelsang, les roches volcaniques présentent au plus haut degré la structure fluidale, siructure résultant « de la disposition des micro- lites de cristaux dissérmainés dans la masse vitreuse et entourant les cristaux plus gros qui sont préformés dans la lave ». Cette structure fluidale se rencontre dans les porphyres, mais elle existe également dans les dépôts siliceux des geysers ; elle ne peut donc être regardée comme caractéristique des roches ignées, Les trachytes, les basalles, les laves ont des caractères microscopiques communs. Il y a dans les laves des cristaux préformés, puisqu'ils sont émoussés, fissurés, péné- trés par la matière vireuse ; mais tous les cristaux ne sont pas dans ce cas. Quant aux porphyres, l’auteur déclare qu’il n'y a pas de ca- ractère qui les rapproche d’une manière indubitable des laves. — Soc. Géol. de Londres, 10 août. — Selon M. Daintree, la géologie de la partie orientale de l'Australie peut se résumer ainsi : alluvions fluviales probablement quaternaires, avec Mammifères didelphes presque tous éteints, et coquilles existant encore actuellement : ter- rain crétacé sur lequel le précédent repose en discordance ; terrain jurassique supérieur et nombreux affleurements du terrain houïiller, riche en combustibles ; terrain carbonifère et devonien. La paléonto- logie de ces terrains est encore peu avancée, mais déjà on sait que 418 REVUE SCIENTIFIQUE. le nombre des espèces nouvelles est considérable, que d’autres (végé- taux) ont de grandes affinités avec celles de l'Amérique du Nord D' BLEICHER. TESTS 255 —— Botanique. Analyse du Mémoire de M. J. Sacxs, Ueber den Einfluss der Lufttemperatur und des Tageslichts auf die stündlichen und täglichen Aenderungen des Längen- wachtums (Streckung) der Internodien. (Suite. Voir même Recueil, n° 1, pag. 104.) PLANTE n09 2? (pag. 130.) « L'avant-dernier entre-nœud (au-dessous du bourgeon), c'est-à-dire le troisième en comptant depuis le bas, ne s'est accru que de 12 millim. pendant les cinq derniers jours, à la lumière ; au commencement de l'expérience, il a 32 millim. de long. Le dernier entre-nœud, celui qui est immédiatement au-dessous du bourgeon, offre une longueur de 20 millim. ; c'est à lui qu'il faut rapporter l'accroissement observé. » - Accroissement } ï sr rat HEURE Température C. HE en milin. Température C: Ê en mill. our eures Moyenne DU JOUR. Moyenne ce 6 h. du soir L , par heure. aGh.dusoir quotidienne. RE Ç) a LL 8 h. m. — Midi. 140,3 0,45 mill. 29 avril. IMidi. — 6 h.s. 150,6 0,75 » 19,0 mill. 140,9 6 h.s.—8 h. m. 149,8 0,91 » 8 h. m. — Midi. 140,7 1,30 » | 23 avril. |[Midi. — 6 h.s. 140,9 1,03 » 2 520 0m 140,5 6h.s.— 8h. m. L40,2 0,97 » 8 h.m. — Midi. 140,5 12500) | 24 avril. |Midi. — 6 h.s. 150,1 175000 26,0 » 149,3 6h°s—8h°m: 140,0 0,75 » 8 h. m. — Midi. 130,9 1,00 » | 25 avril. Midi. — 6 h.s. 149,8 12500 (220) 130,9 6 h. s.—8 h. m. 130,3 OPA) - TREUCAE 8 h. m.— Midi. 149,1 0,40 » 26 avril. [Midi — 6 h.s. 150,0 ONE 4,8 » 140,1 6h.s.—8 h. m. SONT 0,04 » 1 Influence des variations de température sur la marche horaire et quotidienne de l'accroissement. — Les observations entreprises dans le but d'établir cette influence ont toujours été faites dans l’obs- curité, sur des plantes étiolées qui avaient été élevées à l'abri de la lumière. Cette précaution avait pour but d'éviter les perturbations qui auraient pu se manifester dans l'accroissement d'une plante élevée à la lumière, par suite de son accommodation même à l'obscurité. » TRAVAUX ÉTRANGERS. — BOTANIQUE. 419 « Ces résultats offrent des différences remarquables, selon que les variations de température sont rapides et étendues, ou bien lentes et de peu d'intensité. »...« La première classe de variations est constituée par une différence de température d'un ou plusieurs degrés {(C. ou R.) dans l'espace d'une heure ; la deuxième, par une différence d’un seul ou de quelques dixièmes de degré (G. ou R.) seulement, pendant le même temps... Sous l'influence des premières, la courbe d'accroissement suit de si près celle des températures, qu’elle semble presque en être la reproduction ; au contraire, les variations lentes et de faible intensité permettent à d’autres influences d'exercer une action prépondérante qui masque l'effet des oscillations de tem- pérature‘ (pag. 164).» A l'appui de la première proposition nous citerons l'expérience suivante, dont la fig. 2 est la traduction graphique . EXPÉRIENCE at ( pag. 132.) Dahlia variabilis. « Plante étiolée , dans un récipient opaque de zinc. Effets de grandes oscillations de température sur l'accroissement. Observations faites à l’aide de l'’auxanomètre enregistreur. — Accroissement grossi douze fois. » « Plante élevée dans l'obscurité, pourvue de deux entre-nœuds au-dessous du bourgeon terminal. Aussitôt que l'accroissement de l’entre-nœud inférieur est com- plètement terminé, la première paire de feuilles est enlevée, et le fil de l'auxano- mètre fixé à l'extrémité supérieure de l’entre-nœud supérieur, au-dessous des feuilles du bourgeon terminal. Les nombres qui suivent n'intéressent donc que l'entre-nœud supérieur. — Pendant la durée de l'expérience, la plante est placée sous un récipient de zinc, de telle sorte que les rayons du soleil puissent atteindre le récipient dans la matinée et l'échauffer. Un écran de papier sert à tempérer l'intensité du rayonnement. —Le thermomètre (R), plonge par sa partie inférieure dans un récipient semblable placé sur de la terre humide, tout à côté de la plante, de façon à subir, comme le premier récipient, l'influence du rayon solaire. » Comparez avec la figure 2. i C'est surtout à l’époque de la plus grande rapidité de l'accroissement que les variations considérables dans la température exercent sur le phénomène une in- fluence décisive. L'accroissement, lorsqu'il est à son début ou qu’il commence à se ralentir, se montre plus indépendant relativement à la cause perturbatrice dont nous parlons. « À l'époque du plus grand accroissement de la plante (milieu de la grande période), les changements de température d’un ou plusieurs degrés, dans l’espace d’une heure, altèrent profondément la marche de l'accroissement: à l'élé- vation de température correspond une augmentation d'accroissement, à l'abais- sement de température une diminution (pag. 164).» 4920 REVUE SCIENTIFIQUE. RAS BR OT RE D PRE GARE SRE LE CS SR PI AP mc RES SUR D a DU JOUR. lon millim.| le récipient. | une heure. 4 mai. 6 h. matin. Hine 2,8 110,7 Fi 0e À o,1 d'aug. 9 h. 3,0 130,9 Presque toujours som- 10 h. DS 120,7 1,2 de dim.(bre, nuageux. L'effet de 10 h. 30 | 120,3 0,4 dimin. . à COHEN 2,0 augm. 10 h. 50 140,3 il Le 2 V2,2 dimin. A Midi. 3,0 120,5 De midi à midi 3 m.,so- leil; à midi 30 m., ombre. Pinot) 160,3 3,8 augm. 1 h. soir. Te 150,6 0,7 dimin. 2h 4,5 2,1 dimin. Jane 4,0 120,9 k h. 4,3 130,0 0,1 augm. 5 h. 4,6 120,71 0,3 dimin. 6 h. 4,4 120,0 0,7 dimin. Gihhe 4,2 stn: 4,0 S) la. 3,8 10 h. 3,9 11H 3,0 Minuit. 2,9 BTE In Tien 7216) 2 h. el 3 h. 2,0 4 h. 177 h 1,8 6 h. 1,6 HAN 0,8 110,1 8 h. 1,9 OM BE om Ciel habituellement nua- Gjne 2,0 120,3 9 geux; entre 10et 11h. sol. 10 h. 1,8 120,5 0,2 augm. 11h dre 160,0 3,5 augm. Midi. 5,0 LOS din: — 5,0 — 9,6 moy. 0,07 d. 3 h. soir 6,5 130,6 TRAVAUX ÉTRANGERS. — BOTANIQUE. 421 Accroiss. | Tempér. R. |. L? Plus grande JOUR. re TON CAMES, A RE PÈRE LUMIÈRE. DU JOUR. lon millim.| le récipient. | Le heure. a Small. 4h 8,4 or 2 dimin. oh. Disposé à nouveau 120,0 6 h. 110,6 on HS 8 hb. 9,0 G) Mme 4,1 10 h. 4,0 11m 4,0 Minuit. 3,6 Gmail Ah ématin- "574 À. Ina 3:D 3 Je 3,8 0h. 4,0 Shi 4,0 6 h. 4,0 Time 4,0 110,0 8 h. 3,9 119,7 0,7 augm. Sn 52 120,1 1,0 augm. 10 h. 5,9 130,4 0,7 augm. Ciel toujours couvert. (Mn D,8 130,0 0,4 dimin. Midi. 6,0 130,1 0,1 augm. IMHRSOIT 1,0 x 2 h. 6,5 jou SCIE 3 h. 235 4 D. 5,8 bine 6,3 0,5 dimin. 6 h. 6,0 HD 5,8 110,0 8 h. 6,0 Où: 9,0 10 h. 4,1 ns 4,3 Minuit. 4,1 ma eh ematin tr 0 Ah 3,6 3 ne de 4 h. 2,6 Sun 2,6 6 h. 275 100,5 422 REVUE SCIENTIFIQUE. | Laplusgrande : Accroiss. | Temp. PR. sat JOUR. EURE mit. ta CE À | à td de LUMIÈRE. DU JOUR. }on millim. | le récipient. | no Here. Das 2,5 1,0 augm 8 h. 3,0 120,5 One 4,3 130,2 0,1 augm. 10 h. 3,6 140,0 1,7 augm. Rayons solaires arrêtés par un écran de papier. ln 5,0 140,2 0,2 augm. Midi. D 159,3 1,1 augm. 1 h. soir. 4,9 PIE 3,6 0,8 dimin. Son 2,8 129,7 D D'après ce que nous avons dit plus haut, «les variations lentes et de faible intensité dans la température n'exercent aucune influence appréciable sur la marche de l'accroissement; il est clair que dans ce cas ce sont des causes internes et des influences externes très-faibles sur lesquelles nous reviendrons (voyez plus loin ce qui a trait à l'in- fluence de la lumière), qui déterminent la forme de la courbe d'ac- croissement» (p. 165). À Citons les deux séries suivantes d'observations à l'appui de cette proposition. EXPÉRIENCE 1v (p. 138). Dahlia variabilis. «Plante étiolée ; dans l'obscurité, c'est-à-dire entourée d’un récipient de zinc placé dans une chambre obscure. Marche de l’accroissement sous l'influence de très- faibles variations de température. Observations faites à l’aide de l’auxanomètre enregistreur. — Accroissement grossi 12 fois. » «Ce tableau comprend des observations horaires faites du 7 au 13 juin, observations dont sont tirées les moyennes de trois heures qui figurent en B dans le tableau suivant. La plante avait été placée déjà sous un récipient de zine, du ? au 5 juin, mais dans une pièce qui recevait du jour par une fenêtre; du 7 au 13 juin, elle fut mise à l'abri des variations de lumière et de température d'une façon plus complète encore: non-seulement elle fut laissée sous son récipient opaque, mais encore la fenêtre fut (comme l’étaient déjà les deux autres) hermétiquement fermée par un écran noir. La tige fut assujétie au fil de l’auxanomètre au-dessous de sa troisième paires de feuilles ; son entre-nœud inférieur mesurait 52 millim., le suivant 55, le 3e 15, de facon que l'accroissement regarde ce dernier. — Le thermomètre sec et le thermomètre humide (R), renfermés dans deux récipients semblables à celui de la plante, furent placés tout auprès de cette dernière. Les indications du thermomètre humide restèrent au-dessous de celles du thermomètre sec de 0,1 à 0,20 R. » TRAVAUX ÉTRANGERS. — BOTANIQUE. 423 som. | ame, léee om ous | one [ae | Vans | mut,42, | état mu. | M géinent are à bus Tjuin 6 h. soir. 110,1 9 juin 10 h. 5,3. 100,9 mob 2,6 lite 5,6 110,0 8 h. 3,2 Midi. 5,6 110,1 9 b. 5,0 L'h.soir. 5,6 10 b. 4,6 2h 5,6 Ib 4,0 3h 5,4 110,2 Minuit. 3,6 4 h. 5,6 110,3 8 juin [| h. mat. de o h. 9,6 110,4 20h 3,9 6h 5,6 110,3 3h 3,5 7h 5,4 4h 3,6 8h DA 5h 3,6 9 h 5,3 6h 3,0 10 h 9,0 7h 3,1 100,6 HD 5,0 8h. 3,3 100,6 Minuit. 5,5 9h 2,6 100,8 10 juin 1 h. mat. 9,0 10 h 3,0 100,9 CRE 9,4 Hot 5,6 110,0 3h 5,0 Midi. 5,6 110,0 4h 5,5 l'ysER 6,0 5 h 5,4 an 2 "he 5,8 110,2 6 h. 5,7 Dune 5,5 110,2 The 5,1 100,8 4h 9,4 110,2 8 h 9,0 110,0 5 h. 5,0 110,2 9 h 6,0 110,2 6 h. 5,2 110,2 10 h 5,8 110,4 7 h. 5,4 ii 6,0 8 h. 4,5 Midi. 6,1 110,5 9h: 4,8 1h07 -200;0 10 h. 4,8 re 5,5 in 9,0 She 6,5 110,6 Minuit. 9,0 £ D. Disposé 9 juin 4h. mat. 5,0 à nouv. 120,0 2 h. 4,6 5 h. . 4,4 110,7 3 h. 5,0 6 h. 4,5 110,7 4 h. 5,5 7h. 4,6 o h. où 8 h. 4,8 6 h, 5,9 JB 2,2 Wen 5,0 100,7 10 h. 6,0 8 h. 5,6 100,8 11h 7,0 6) 35e 5,6 100,8 Minuit. 6,0 424 REVUE SCIENTIFIQUE. A . ao Le rétient || pe 7 ut de | te récipient {1 juin 1 h. mat. 5,8 Pia (One 4,8 2h 6,0 os 5,0 sun 6,0 8 h. 9,0 119,9 4 h. 6,0 9 h. 5,3 120,1 Erin 6,2 10 h. 50) 6h 6,0 11 h. 5,4 120,2 fus 6,3 Midi. 5,0 120,2 8 h 6,9 110,6 Mn Soir MED 9 h. 1,0 110,8 20h: 4,6 120,3 10 h. 71672 120,0 one 4,8 120,3 1Aihe 7,0 120,2 4 h. 5,3 190,3 Midi. 6,9 120,6 aie 4,6 120,3 1 h. soir. 6,4 6 h. 4,4 120,3 2 UD: 5,8 he 4,3 sn 9,2 129,3 8 h. 5,3 4 h. 4,6 Sù na 5,0 5h 4,7 10 h. 4,8 6h 4,6 1'1AHe 4,4 TNbe 4,6 Minuit. 4,3 8 h. 4,5 13 juin 1 h. mat. 5AS CD 4,3 Dane 5,4 10 h. 4,2 ant 9,0 Aa 4,6 4 h. 5,0 Minuit. 9,0 5 h. 4,6 42 iuin 1 h. mat. D, 6 h. 9,0 2 1h: 4,6 be 5,4 120,0 Sub 4,7 8 h. 9,6 120,1 4 h. 4,7 SE 5,0 120,1 Duin 4,5 ExPÉRIENCE V (p. 140). Dahlia variabilis. «Plante étiolée ; dans l'obscurité. Influence d'une très-faible lumière et de varia- tions de température d'intensité minime sur l'accroissement. Observations faites à l'aide de l’auxanomètre enregistreur. Accroissement grossi 12 fois.» « Le tableau suivant embrasse trois séries d'observations faites sur la même tige étiolée, dans le but de découvrir quelle influence une protection plus ou moins complète contre les radiations lumineuses et calorifiques, aussi bien que contre les oscillations de température, exerce sur l'accroissement. Pendant la première série d'observations, la plante était entourée seulement d'un récipient de zinc; la pièce était éclairée par une fenêtre donnant au midi, de façon cependant TRAVAUX ÉTRANGERS. — BOTANIQUE. 425 que les rayons solaires directs ne pouvaient atteindre l'appareil. Pendant la seconde série d'observations, les trois fenêtres de la pièce furent également fer- mées par des écrans noirs. — Les deux thermomètres (R.) plongeaient par leur partie inférieure dans des récipients de zinc semblables à celui qui couvrait la plante; le thermomètre humide marquait régulièrement de 0,1 à 0,30 R. de moins que le thermomètre sec. — Les feuilles de la plante avaient été coupées jusqu'au bourgeon; de l’eau ne cessa de couler des surfaces de section pendant toute la durée de l’expérience.—Pendant la première série d'observations, le fil de l’auxano- mètre était fixé au-dessous de la deuxième paire de feuilles : pendant la deuxième série, au-dessous de la troisième paire; et pendant la troisième, au-dessous de la quatrième; l’entre-nœud correspondant (c'est-à-dire le deuxième, le troisième, le quatrième) offrait au commencement de chaque série d'observations, une longueur de 15 millim.; mais les autres entre-nœuds s’accroissaient encore en même temps que lui. Les différents nombres sont des moyennes calculées d'après des observa- tions horaires (nous avons indiqué comment ont été obtenues les températures de la nuit).» SÉRIE A. Lumière diffuse par une fenêtre donnant au midi. Plante sous un récipient de zinc. © —————— aa ( JOUR.—HEURE | Accroiss. Moyenne JOUR. — HEURE Acroiss. Moyenne in | en 3 heures | de températ. de en 3 heures | de températ. e | millim. pour 3 h. x mill. pour 3 h. à | mult. 42. °R. à | mult. 12. °R. DRE CRAN € Dee Pr PT 2 juin. 4 juin. Midi. — 3 h.s. 12H 1528 Minuit.—3 h. m. 11) 13,3 3 h. — 6 h.s. 10,0 14,9 3 h. — 6 h. m. 17,4 13,2 6 h. — 9 h.s. 15,6 14,4 6 h. — 9 h. m. 13,0 13,0 9 h.s.— Minuit. 19,8 14,2 9 h. m. — Midi. 13,4 13,0 3 juin. Midi. — 3 h.s. 13,0 127 Minuit.— 3 h. m. 23,6 14,0 3 h. — 6 h.s. 11,6 È 123 3 h.— 6 h. m. 26,8 13,8 6h. — 9h s. 10,7 1271 6 h. — 9 h. m. 26,9 14,1 9 h. — Minuit. 11228) 12,0 9 h. m. — Midi. 212 14,5 5 juin. Midi. — 3 h.s. 18,4 14,4 Minuit — 3 h.m. 14,6 1159) 3 h. — 6 h.s. 14,4 14,0 3h. — 6h m. 15,2 11,8 6 h. — 9 h.s. 14,2 13,8 6 h. — 9 h. m. 112250) 11,7 9 h.s. — Minuit. 17,0 13,9 9 h. m.— Midi. 11,5 11,9 SÉRIE B. Chambre obscure. — Plante dans un récipient de zinc. 7 juin. Midi. — 3 h.s. 18,0 11,6 6 h. — 9 h.s. 10,8 11,0 3 h. — 6 h.s. 139 1177 9h.s.— Minuit. A 22 10,9 6 h. — 9 h.s. 14,6 11,6 8 juin. 9h. s. — Minuit. 19,0 11,6 Minuit — 3h. m. 10,2 10,8 11 juin. REVUE SCIENTIFIQUE. Moyenne JOUR. — HEURE JOUR. — HEURE Accroiss. Moyen | | Accroiss. | GE. en 3 heures. de températ. de en à heures | de températ. ee ae Îla os IAE à | mu | | | ee eee FN TER 3 h. — 6 h. m. 10,2 10,7 Minuit.— 3 h.m. 7,8 11,6 6h. —9h.n 9,0 10,7 3 h. — 6 h. m. 18,2 11,6 9 h. m.— Midi. 14,2 10,9 6 h. — 9h. m 19,8 LP Midi. — 3 h.s. 175 bol 9 h. m. — Midi. 20,7 12:72 3 h. — 6 h.s. 15,6 149? Midi. — 3 h.s. 17,4 12,4 6 h. — 9 h.s. 14,7 AMP 3 h. — 6 h.s. 100 1 9 h. s.—Minuit. 14,8 11,1 6 h. — 9 h.s. 13,4 sil 9 juin. 9 h.s.— Minuit. 13,8 11,9 Miout.— 3 h.m. 14,6 10,9 12 juin. 3 h. — 6 h. m. 16,2 10,8 Minuit.— 3 h. m. 14,5 11,8 6 h. —9 h. m. 16,7 10,8 3 h. — 6 h. m. 14,0 117 9 h. m.— Midi. 16,5 10,9 6 h. — 9 h. m. 115) 11,8 Midi. — 3 h.s. 16,6 LP 9 h. m.— Midi. 15,7 12,2 3 h. — 6 h.s. 16,8 11,3 Midi. — 3 h.s. 14,4 1923 6 h. — 9 h. s. 15,9 11,3 3 h. — 6 h.s. 14,3 12,3 9 h. s.—Minuit. 15,9 11,1 6 h. — 9 h.s. 14.6 12,3 10 juin. 9h.s. — Minuit. 13,5 122 Minuit.—3 h. m. 15,9 10,0 13 juin. 3 h.— 6 h. m. 16,6 10,9 Minuit.— 3 h. m. 15,7 sil 6 h.— 9 h. m. 16,7 11,0 3 h. — 6 h. m. 14,6 12,0 9 h.m. — Midi. 140 11,4 6 h. — 9 h. m. 16,0 12,1 SÉRIE cC. Lumière diffuse par une fenêtre donnant au midi. Plante sous un récipient de zinc. JOUR. — HEURE Aceroiss. Moyenne JOUR. —HEURE Accroiss. Moyenne de fe SES, de températ. || de FL sons de températ. à mult. 42. pour 3heur. || à mult, 12. pour 3 heur. emmmmnes | ns MEET 14 juin. 3 h. — 6 h.s. 14,3 ,15,6 Midi. — 3 h.s. 14,5 14.5 6 h. — 9 h.s. 16,3 15,3 3 h. — 6 h.s. 8,7 14,2 9h. m.— Minuit. 17,3 15,3 6 h. — 9 h.s. 8,2 13,9 16 juin. 9 h.s.— Minuit. 8,8 1579 Minuit.—3 h. m. 17,3 152 15 juin. 3 h. — 6 h. m. 17,9 15,1 Minuit.— 3 h. m. 12,0 13/9 6h. — 9 h. m. 16,4 15,3 SU GR nn 20 13,80 00109 Hem. — Midi 15,8 16,6 6 h. — 9h. m. 11,6 14,2 Midi. — 3 h.s. 14,2 17,0 9 h. m. — Midi. 9,7 AA he 60h s 1005 16,9 Midi. — 3 h.s. 10.8 15,8 TRAVAUX ÉTRANGERS. — BOTANIQUE. 497 Le tableau de l'expérience Il et la fig. ? montrent que des variations de température d'intensité moyenne de 0° à 1,5° GC. au maximum, dans l'espace de trois heures, suffisent pour modifier l'accroissement d'une facon analogue, pendant la partie moyenne de la grande pé- riode ; le commencement et la fin de la période ne sont plus dans ce cas, ainsi qu'on le voit nettement par la direction réciproque des courbes. LIL. Influence de la succession périodique de la lumière du jour et de l'obscurité de la nuit sur la marche quotidienne de l'accroissement. EXPÉRIENCE VI (pag. 148 ). Dahlia variabilis. « Plante verte exposée à la lumière. Période quotidienne sôus l'influence des variations de température et de lumière. Observations faites à l’aide de l'auxano- mètre; accroissement grossi 12 fois. » — La fig. 3 est la représentation graphique des observations que contient le tableau suivant. « Plante élevée auprès d'une fenêtre tournée au Sud. Les trois premiers entre- nœuds ont terminé leur accroissement : le quatrième continue à s'allonger et a atteint une hauteur de 50 millim.; le cinquième, long de 7 millim. seulement, commence à s'accroître rapidement, le fil de l'auxanomètre est fixé au-dessous de la paire de feuilles de ce dernier, de sorte que l’accroissement mesuré regarde le quatrième et surtout le cinquième entre-nœud. — A l'issue de l'observation, après 136 heures, le quatrième entre-nœud a atteint la longueur de 108 millim., le cin- quième celle de 43 millim.: l'accroissement commun de tous les deux a été par conséquent de 87 millim., mesurés directement à la règle divisée. Or, la somme des accroissements horaires mesurés à l'auxanomètre divisée par 12, donne 90, 5 millim., seulement; la différence de 3,5 millim. doit être attribuée en partie à l'inexacti- tude des quatre mesures exécutées directement à la règle divisée, en partie à celle des 136 expressions de l'accroissement horaire faites sur le papier noirci. — Pen- dant l'expérience, la plante, éloignée de 2 mètres de deux fenêtres donnant, l'une au Sud, l'autre à l'Est, ne recevait que de la lumière diffuse; dans le but de la mettre à l'abri des premiers rayons solaires de la matinée, chaque soir à 7 heures la fenêtre de l’Est était fermée par un écran noir que l’on enlevait au matin sui- vant à 7 heures, lorsque la lumière solaire ne pouvait plus atteindre la plante. Deux miroirs placés parallèlement aux deux fenêtres, derrière la plante et tout auprès d'elle, empêchaient complètement la courbure héliotropique. — Afin d’em- pêcher une différence psychrométrique trop considérable dans le voisinage de la plante placée à découvert, on a eu soin d’arroser le plancher de la chambre avec de l’eau au commencement de l'expérience, et plus tard chaque jour, à 7 heures du matin et quelquefois aussi dans l’après-dinée. Le thermomètre humide et le sec étaient suspendus auprès de la plante. Les feuilles de cette dernière avaient été coupées, à l'exception de celles du bourgeon.» 428 REVUE SCIENTIFIQUE. A. Observations horaires. Accroissement Température °R. horaire x JOUR. HEURE. FU Re | LUMIERE. DH2; Air. différ. psychr. 19 juin. 5—6h. du soir. 3,0 17,6 Poil ne 3,0 17,1 À ES 8 h. 3,3 9ùn. 4,8 10 h. 9,0 11 h. 4,8 Minuit. 4,0 20 jum. 1 h. du matin. 5,0 IT 5,0 3h: 5,8 4 h. 6,1 5 h. 9,8 6 h. 4,3 rie 6,5 16,5 125 sombre. 8 h. 8,0 17,3 2 9 h. 14,0 17,3 21 10 h. 14,3 1Lg2 2,0 11 D. 15,6 1745 2,0 6 Midi. 10,0 17,3 2,0 "00 core 1 h. du soir. il 17,4 2,0 À ne 4,8 ain 3,4 17,3 AD 4 h. AP 17,2 270 ) sombre. Shin. 2,4 6 h. 2,5 16,5 159 rhone 4,3: 16,4 1,8 8 h. 5,1 S). Int. 6,9 10 h. 9,8 11 h. Ta Minuit. 8,1 21 juin. 1 h. matin. 8,8 2h 9,6 She 10,8 4 h. 11,5 5 h. 12,5 6 h. 13,5 7 h. 15,5 15.7 207 clair. 8 h. 12,4 17,6 2,4 TRAVAUX ÉTRANGERS. — BOTANIQUE. 429 D OL | Accroissement | Température °R. h JOUR. | HEURE: A en A ECS Air différ. psychr. ————— mm | ee, 21 juin. 9ùh. 1255 16,5 PLAN 10 h. 17,0 MM 10,5 Etes Midi ons 10,3 16,9 22 (Nha or 7,0 À ne DD 16,6 2,0 De replacé. 16,3 2,0 4 h. 4,5 16,2 16% oh. 4? sombre. (DE 3,9 MIS 1,5 7 Joe 5,6 15,7 1400077 8 h. 9,0 9h 11,0 10 h. 9,0 in 9,0 Minuit. OP 2? juin. 1 h. matin. 10,4 2h? 11,0 3 b. 1MSS 4 h. 12,0 5 h. 11,6 6 h. 11,0 in 12,4 15,5 21 S®h: 12,5 16,5 275 serein. 9 h. 11,0 15,9 1,9 10 h. 12,2 15,8 1,9 11h (236 15,8 22 Midi. 10,0 16,1 22 { h. soir. To 2h 2,2 3h 4,0 16,1 22 serein. 4h 4,0 15,8 1,8 5 h. 3,6 15,8 407 6 h. 3,0 15.6 1,6 71h 4,3 15,4 1,5 8h 0 9h 11,0 10 h. 9,5 tin 7,5 Minuit, 8,0 430 REVUE SCIENTIFIQUE. EEE cross eme Température °R. RE JOUR. HEURE. | aimer | —— LUMIÈRE. | | Air différ. psychr. 23 -juin Î h. matin. 10,8 20: 10,4 3} In 11,6 4 h. 12,0 o h. 11,2 GR 10,6 he 1125 15,4 1,0 8 h. 13,5 16,9 1,6 Gin 12,4 16,8 1,9 10 h. Disposé à nouveau. 16,9 1,6 ) serein. 11: 13,5 Midi. 17,8 16,5 [Be 1Mh-esS0ir: De 2h 35 3 h. 3,0 16,9 1,4 4 Dh. 2,6 16,2 1,3 #) lo 3,9 sombre. GR: 5 15,9 1 Fin. 4,2 15.8 MSP 8 h. He 9 h. 8,0 10 h. 8,0 Nine 7,9 Minuit. 8,5 24 juin { h. matin. 9,6 he 102 Sn 10,4 4h 11,0 > h Lil 6) 6h: 10,8 1 haine 1105 15/1 1,341 8h 12,3 F3 9guh 9,0 15,6 10 10h 9,9 16,1 12 ile 9,» 16,0 1,6 sombre. Midi. HA 16,4 1,8 1 h. soir. 5,0 HUIT 5e a 4,0 16,4 1,3 TRAVAUX ÉTRANGERS. — BOTANIQUE. 431 oi Accroissement Température °R. JOUR. HEURE. RU 1 PER eR LUMIÈRE: | mult. 49. Air différ. psychr. 4 h. 2,0 16,4 1,3 À he LÉ sombre. 6 h. 3,0 15,9 12 fine 4,2 15,8 lon: / Sn 6,5 Sn 8,0 10h? 6,0 Te 5,8 Minuit. 6,8 25 juin. 1 h. matin. 1,9 Dan 8,0 Jin 9,0 4 h. 9,0 ain 9,0 6 h. 9,5 Ho 11,5 15,3 1 8 h. 10,2 1572 19 Ce) 9,0 15,2 15 Moyennes pour trois heures calculées d'après la table précédente. HEURE | Accroiss. | Température RAR JOUR. de Dis de Rome | pendant t—10 à | 4e 2. | les trois heures. |en chiff. ronds. memes ec mn a 19Mjuin. 6h. M9 hMsoir. DE ln 15 9 h. s. — Minuit. 13,8 17,0 19 20 juin. Minuit. — 3 h. m. 15,8 16,9 23 3 h. — 6 h. mat. 16,2 16,7 24 * C’est-à-dire l'accroissement divisé par la température moins 10. «Un procédé auquel je n'attache pour le moment qu'une importance empirique, montre que l'augmentation d'accroissement pendant le jour n’est qu'un effet de l'élévation de la température, tandis que l’augmentation de l'accroissement pendant la nuit, et sa diminution au matin ou pendant toute la journée, dérivent d’une autre cause. En effet, si l’on désigne les températures observées par f, et si l’on divise chacune des moyennes d’accroissement pour trois heures par {—n (n croissant de 0 jusqu'à un nombre qui n’est que peu au-dessous de la plus petite valeur de t), on voit que l'augmentation d’accroissement qui se produit dans la journée disparait d'autant plus complètement que n est plus rapproché de la plus petite valeur de #, sans cependant arriver à se confondre avec lui.».,... «Le tableau XIII montre cependant que ce procédé ne réussit pas toujours» (pag. 165). — C'est d’après ce procédé qu'est construite la courbe supérieure (D) dans la fig. 3. 21 juin. 22 juin. 23 juin 24 juin. 25 juin. REVUE SCIENTIFIQUE. HEURE 6 h. — 9 h. mat. 9 h. mat. — Midi. Midi. — 3 h. soir. 3 h. — 6 h. soir. 6 h. — 9 h. soir. 9 h. s. — Minuit. Minuit. — 3 h. m. 3 h. — 6 h. mat. 6 h. — 9 h. mat. 9 h. mat. — Midi. Midi. — 3 h. soir. 3 h. — 6 h. soir. 6 h. — 9 h. soir. 9 h. s. — Minuit. Minuit. — 3 h. m. 3 h. — 6 h. mat. 6 h. — 9h. mat. 9 h. mat. — Midi. Midi. — 3 h. soir. 3 h. — 6 h. soir. 6 h. -— 9 h. soir. 9 h. s. — Minuit. Minuit. — 3 h. m: 3 h. — 6 h. mat. 6 h. — 9 h. mat. 9 h. mat. — Midi. Midi. — 3 h. soir. 3 h. — 6 h. soir. 6 h. — 9 h. soir. 9 h. s. — Minuit. Minuit. — 3 h. m. 3 h. — 6 h. mat. 6 h. — 9h. mat. 9 h. mat. — Midi. Midi. — 3 h. soir. 3 h. — 6 h. soir. 6 h. — 9 h. soir. 9 h. s. — Minuit. Minuit. — 3 h. m. 3 h. — 6 h. mat. 6 h. — 9 h. mat. | | | | Accroiss. den que Ole ne 49. 28,5 39,9 15,3 th 15,9 24,2 29,2 37,5 40,4 37,8 17,5 12,2 21,6 27,2 32,9 34,6 35,9 34,8 16,9 10,6 22,3 25,0 32,8 33,8 37,4 34,3 10,0 8,6 19,4 24,0 30,2 33,3 32,8 26,6 14,3 6,8 18,7 18,6 24,5 27,5 30,7 Température pendant les trois heures. 16,9 1123 17,3 17,0 16,4 16,2 16,0 15,8 16,6 16,7 16,6 16,1 15,7 15,6 15,6 15,5 15,9 15,9 16,1 15,8 15,4 15,4 15,4 15,4 16,1 16,6 16,5 16,2 15,8 15,6 15,4 15,2 15,3 16,0 16,4 16,2 15,8 15,7 15,5 15,4 15,2 ni t—10 en chiff. ronds. 41 54 21 10 25 34 48 65 63 56 26 20 38 48 99 63 61 59 28 18 41 46 61 63 61 02 15 14 33 43 96 64 62 44 a? 11 32 33 44 o1 59 TRAVAUX ÉTRANGERS.— BOTANIQUE. 433 «On voit (comparez la fig. 3, qui est la reproduction graphique des tables À et B) qu'en général les courbes d’'accroissement s'élèvent du soir au matin, quand même la température de la nuit diminue d'un ou de plusieurs degrés ; qu'après le lever du soleil, elles s’abaissent subitement avec une grande rapidité, bien que la température aug- mente de plusieurs dixièmes de degré. Cet abaissement peut (comme dans l'expérience VI et la fig. 3) continuer jusqu'au soir, de manière à donner lieu à une période quotidienne simple caractérisée, du soir au matin par l'augmentation de l'accroissement, et du matin au soir par sa diminution Il n'est pas rare de voir se produire, surtout dans le cas où la température du jour augmente de quelques degrés, une aug- mentation passagère de l'accroissement vers midi, ou dans l’après- dînée, mais cette augmentation n empêche point le minimum du soir de se produire (pag. 165). » Il est presque impossible de se rendre compte de l'élévation de la courbe d'accroissement du soir au matin, et de sa chute subite au lever du soleil, chute qui se continue jusqu’au soir, autrement qu’en admettant que l'augmentation d'accroissement produite par l'obscurité, aussi bien que sa diminution déterminée par la lumière (faits qui sont suffisamment prouvés par la comparaison de l'accroissement de plantes semblables sous l'influence de la lumière et de l'obscurité) ne se produisent pas subitement, mais seulement petit à petit. D'après . cela, la plante qui a subi pendant le jour l'influence de la lumière n atteint pas immédiatement, quand la nuit se déclare, toute la rapi- dité possible d'accroissement, mais elle n'y arrive que peu à peu : l'état d'accroissement lent qu'a déterminé pendant la journée l'action de la lumière, demande un certain temps pour passer à l’état d'accrois- sement rapide qui correspond à l'obscurité ; ce phénomène de modifi- cation lente se traduit par l'élévation continue de la courbe d’accrois- sement du soir au matin. De même, on peut rapporter simplement l'abaissement de la courbe d'accroissement du matin jusqu'au soir à ce fait, que l'état d'accroissement maximum que la plante a atteint pendant la nuit ne cède, sous l'influence de la lumière, que peu à peu la place à un état nouveau qui répond à l'accroissement à la lu- mière. Bien que l'augmentation de l’intensité de la lumière jusqu'à midi contribue certainement à favoriser la diminution de l’accroisse- ment jusqu à cette même heure, la continuation de cette diminution pendant l'après-dînée, malgré la diminution de la lumière, est une preuve que c'est la durée seule de l'influence lumineuse qui agit dans le sens donné. Si l'élévation de la courbe d'accroissement commence déjà avant le coucher du soleil, la raison en est dans la diminution 434 REVUE SCIENTIFIQUE. notable de lumière qui se déclare à cet instant. Le fait de l'existence d’une période quotidienne d'accroissement dans une plante soumise aux alternatives du jour et de la nuit, en même temps qu à des varia- tions de température de faible intensité , trouve ainsi une explication simple et suffisante. Cette période se présente-t-elle encore en plein air sous l'influence d'une forte élévation de température à midi, et d'une diminution considérable de cette même température le matin, ou bien disparaît-elle sous l’action de ces changements, et même est- elle transformée en une période opposée? C'est là une question réser- vée pour le moment» (pag. 167). «La connaissance de la période quotidienne d’accroissement pro- duite par la lumière nous donne la clé des phénomènes que présentent les plantes dans l'obscurité ou sous un récipient opaque, dans des conditions de température peu variable et dont nous avons déjà parlé. Les expériences 1v et v montrent que dans ces conditions les plantes, depuis le matin jusqu à midi ou même jusqu au soir, croissent de plus en plus lentement, tandis qu'à partir de ce moment jusqu'au matin, leur accroissement augmente d'une quantité, minime il est vrai. Or, ce double phénomène se trouve en opposition avec la marche que suivent les faibles variations de la température ; il est impossible par conséquent de l’attribuer à la température, et je pense qu'il faut le rapporter au degré extrêmement faible de clarté qui, pendant la journée, subsiste dans la chambre obscure ou dans le récipient de zinc placé dans un endroit modérément éclairé. Quelque incroyable que cela puisse paraître, lorsqu'on considère qu'il s'agit ici d'une clarté que l'œil même perçoit à peine après plusieurs minutes de séjour dans l'espace obscur, cette supposition, en admet- tant que l'on tienne compte des variations d'accroissement, malgré leur petitesse, se trouve démontrée par l'expérience v. Dans cette expérience, en effet, la première et la dernière série d'observations (série À et C) montrent encore assez clairement la périodicité, surtout si l'on tient compte de la marche opposée de la température ; or, dans ces deux séries, la plante était placée sous un récipient en zinc, dans une pièce modérément éclairée. Au contraire, dans la série intermédiaire d'observations (série B), alors que l'obscurité régnait dans la pièce où se trouvait cette même plante dans son récipient, la période quotidienne est à peine appréciable : la courbe d’accroissement suit celle de la température. Ce fait est plus évident encore sur des courbes que je dois laisser au lecteur le soin de con- struire à l’aide des observations ci-dessus mentionnées (p. 167). » Dans l'expérience précédente, on a affaire à des plantes étiolées ; TRAVAUX ÉTRANGERS — BOTANIQUE. 435 des plantes vertes, dans les mêmes conditions, permettent également de reconnaître la période quotidienne plus ou moins affaiblie (p. 168, voyez tableaux 15 et 16 dans l'original). « Dans mes observations de 1870, faites sur des plantes vertes éle- vées à la lumière, j'ai eu recours également à des enveloppes opaques, mais dont l'occlusion était moins parfaite que celle de mes récipients de zinc, en 1871. De ces observations, j'avais cru devoir conclure que la période quotidienne induite par la lumière persiste encore indé pendamment de cette dernière, dans l'obscurité, pendant quelques jours!. D'après ce qui précède, cette opinion ne me paraît plus soute- nable (pag. 168). » IV. « Concordance de la période quotidienne de l'accroissement induite par la lumière avec la périodicité de la tension des tissus et celle des mouve- ments des feuilles. Krauss? et Millardet * ont prouvé, par denombreuses mesures, que la tension des tissus dans les organes en voie d’accrois- sement présente, sous l'influence de la lumière du jour et de l’obscu- rité de la nuit, des variations périodiques de son intensité; en outre, ils ont montré que ces variations coïncident de telle sorte avec les mouvements périodiques des feuilles, que l'on peut considérer ces der- niers comme étant la suite des variations qui se produisent dans la tension des tissus... En conséquence, si l’on juge de la marche de la tension d'après les mouvements périodiques des feuilles, mouvements qui ont été, de la part de Millardet, l'objet d'observations très-nom- breuses exécutées sur le Himosa pudica, on est frappé de la concor- dance extraordinaire de la période quotidienne de la tension avec celle de l'accroissement dans le cas où les deux phénomènes ont lieu sous l'influence de l'alternative du jour etde la nuit. Ces courbes de tension du dernier de ces observateurs concordent d'une manière tout à fait frappante avec nos courbes d’accroissement { : comme ces dernières, elles s'élèvent à partir du soir jusqu'aux premières heures 4 Verhandl. der phys. medic. Geselsch. in Würzburg. 4 febr. 1871. Bot. Zeit. 1867. Mémoires de la Soc. d'hist. naturelle de Strasbourg, tom. VI. Aïin que le lecteur puisse comparer, je donne (fig. 4) la réduction d’une de mes courbes de tension auxquelles M. Sachs fait allusion. La ligne supérieure (f. 1) indique la marche de latension dans la première feuille complètement développée de l'extrémité de la tige d'une Wimosa pudica végétant dans une chambre, et placée à la lumière, près d'une fenêtre donnant à l'Est ; la ligne inférieure (f. 5) donne la tension de la quatrième feuille au-dessous de cette dernière, 19 3 4 430 REVUE SCIENTIFIQUE. du matin, s’abaissent alors subitement, pour arriver à leur minimum de hauteur dans la soirée; elles offrent en outre, vers midi ou dans l'après-dinée, un ou deux mouvements d'élévation peu considérables (maxima et minima secondaires de Millardet), mouvements qui cor- respondent à l'élévation analogue des courbes d’accroissement. J’ai démontré que dans ce dernier cas l'élévation de la courbe était un effet de la température; il est probable que les maxima et les minima secondaires des courbes de tension devront être rapportés à la même cause, du moins les observations thermométriques de Millardet con- cordent parfaitement avec cette opinion (pag. 169). » « La période quotidienne qui se manifeste par l'augmentation de la tension à partir du soir jusqu'au matin, et par sa diminution depuis le matin jusqu'au soir, est, comme la période correspondante de l'ac- croissement, une fonction de la lumière : ce qui le prouve, c'est d’a- bord cette circonstance que ses deux points principaux, le maximum et le minimum, coïncident avec la disparition etl'apparition dela clarté du jour, et surtout que dans l'obscurité continue elle disparaît, ainsi que Krauss l'a prouvé. » «La concordance des courbes de tension et d’accroissement va encore plus loin. Les changements rapides dans la vitesse de l’accrois- sement à de courts intervalles, changements que l'on peut comparer à des soubresauts (Stossweis), et qui déterminent des oscillations dans la courbe d'accroissement, trouvent également leurs analogues dans la marche de la tension. En effet, Krauss, le premier, a montré que sous l'influence de l'obscurité la tension présente des oscillations plus ou moins régulières, d'une durée très-courte (environ 2? heures). Grâce à la dépendance mutuelle de la tension des tissus et des mou- vements périodiques des feuilles, ces oscillations se traduisent par les changements continuels de position des feuilles douées de motilité. Ces mouvements se produisent aussi bien à la lumière qu après un assez long séjour dans l'obscurité ; ils sont si précipilés, qu'il a été possible de les constater de quart d'heure en quart d'heure’. » « La tension des tissus est produite par des différences dans la rapidité d’accroissement et dans les propriétés physiques et physiolo- giques des diverses couches de tissus d’un organe. Une fois qu'elle s’est déclarée, la mécanique de l’accroissement lui est nécessairement ! Ces soubresauts constituent les oscillations de la courbe inférieure (A) dans la fig. 3. « En général, ils sont d'autant moins apparents que les conditions exté- rieures sont plus uniformes.» (pag. 103 note). ? Sachs Flora ; 1863. — Millardet ; Op. cit., pl. IL et LI, pag. 468. ( uopnef ) Ta ur PIN up LL xx enbrauy eALO ik JE Pt PIN BTE UT SATAIMIEN SANUATIS SD MAI TRAVAUX ÉTRANGERS. — BOTANIQUE. 437 subordonnée à sou tour. Il faut donc s'attendre à ce que les variations de tension indiquent des variations d'accroissement, etréciproquement,; à voir les agents extérieurs tels que la lumière, la chaleur, l'humidité, agir en même temps et dans le même sens à la fois, et sur la tension des tissus et sur l'accroissement. La recherche exacte de ces rapports présente une grande importance. Celle-ci gît beaucoup moins dans la possibilité de trouver ainsi l'explication de certains phénomènes par- ‘ticuliers de la vie des plantes, que dans l'établissement d'une base solide pour la théorie mécanique de l'accroissement, ce phénomène vital par excellence, le plus général de tous ceux que nous présente la biologie (pag. 170). » Ce Mémoire se termine par une Revue de la littérature afférente à la question, pag. 170.-192. { MILLARDET. EXPLICATION DES FIGURES. Fig. 1,2,3. Réduction photographique des planches IE, IV et VI du Mémoire de M. Sachs. Les courbes ponctuées À représentent les températures. Les courbes B représentent l'accroissement d'après chacune des observa- tions faites. Les courbes ( représentent l'accroissement d’après des moyennes de vingt- quatre heures pour la fig. 1, de trois heures pour la fig. 2. La courbe D, fig. 3, représente l'accroissement calculé d'après la formule (voyez pag. 431, note.) 3A t—10 Les temps se comptent sur l’axe des abcisses, les températures et l'accrois- sement sur l'axe des ordonnées. Lorsqu'il y a augmentation d’accroisse- ments, la courbe s'élève d'une hauteur correspondante ; s'il y a diminu- tion, celle-ci se traduit par un abaissement analogue de la courbe. Fig. 4. Reproduction réduite de deux courbes de tension auxquelles M. Sachs fait allusion. La ligne supérieure f. 1 indique la marche de la tension dans la feuille supérieure complètement développée d'un Mimosa pudica élevé à la lumière, dans une chambre, devant une fenêtre donnant à l'Est. La ligne inférieure f. 5 indique la marche de la tension dans la quatrième feuille au-dessous de la précédente sur la même tige. Les valeurs portées sur l’axe des ordonnées sont les degrés que fait le pétiole commun avec la tige. La tension augmente avec l'élévation des feuilles et des lignes (f. 1 et f. ?). Nora. — Des fautes d'impression se sont glissées dans la première partie de cette note. Nous prions le lecteur de n’enrendre aucunement l'auteur responsable. HD: "à 30 438 BULLETIN. BIBLIOGRAPHIE. Sur une nouvelle espèce d'ALTHENIA trouvée dans le département de l’Hérault. Le n°2, tom. LXXV,des Compt.-rend.de l'Académie des Sciences contient une communication sur une espèce nouvelle d'Alihenia, et une autre communication sur le même sujet a été faite à la session , extraordinaire que la Société botanique de France atenue en juillet der- nier, dans les Pyrénées-Orientales. Comme cette plante a été trouvée dans le département de l'Hérault, et que l’auteur des communications est M.J. Duval-Jouve, un de nos collaborateurs, nous lui avons demandé quelques renseignements, au moyen desquels nous pouvons donner à nos lecteurs une idée suffi- samment exacte de cette découverte, si intéressante pour nous. Dans une Note insérée au Bulletin de la Société botanique de France, t XVIII, p. 174, par M. Barrandon (de Montpellier), ce botaniste, après avoir mentionné une récolte de plantes rares faite par lui sur les sables des Onglous, ajoutait : « Nous trouvâmes ensuite l'Althe ia fiiformis Petit, forme dressée et plus rapprochée de la figure de Mutel ( F1. fr., pl. 63, fig. 473) que du dessin de Petit(Ann. sc. obs., t. I. pl. 12, fig. 1), où les groupes de fleurs sont représentés sur des tiges rampantes». Comme les dessins de la planche jointe à la descrip- tion de Petit sont dus à M. Decaisne, leur parfaite exactitude était une vérité absolue, et dès-lors toute différence était faite pour inspi- rer des doutes, çorroborés d'ailleurs par la description disant formel- lement : « Herba humilis, in cespites laxos, 4-6 uncias latas extenditur, Caules humi repentes, rami vix supra terram 4-8 lineas elati» (o. c. p. 452). M. Barrandon et ses compagnons projetèrent une nouvelle course pour se procurer la plante en abondance, et, le 23 juin dernier, ils en récoltèrent tant que voulurent en récolter quatre bota- nistes, cequi veutdire jusqu à indiscrétion. Heureusement, la quantité était telle que, après cette récolte, on n'eût pas dit qu'on eût touché ala mare d'eau saumâtre, qui en contenait encore des millions de pieds. La plante récoltée avait cent fois la hauteur de celle de Petit, était bien en fleur et surtout en fruit; mais la différence de taille ne parais- BIBLIOGRAPHIE. 439 sant à M. J. Duval-Jouve qu'un faible motif de présomption pour une distinction spécifique, il a demandé ses caractères spécifiques à l’ana- lyse des parties de la fructification, et avec d'autant plus de raison que la même analyse avait été très-exactement décrite et figurée dans le travail précité de Petit. En donnant à son nouveau genre le nom d'Althenia, Petit avait voulu rappeler les services qu'Althen avait rendus au littoral méditer- ranéen en y introduisant, vers le milieu du dernier siècle, la culture de la Garance. En donnant à la plante nouvelle le nom spécifique d'A. Barrandonii, M. J. Duval-Jouve à voulu, lui aussi, faire acte de justice en reconnaissant la part de M. Barrandon dans la découverte de cette plante, et surtout les services qu'il a rendus et qu'il rend chaque jour à la botanique de notre département. Voici, extraite des Comptes-rendus, l'indication sommaire des carac- tères qui distinguent la plante nouvelle de l'Alihenia filiformis Petit. « La plante de Petit ‘a de courts stolons, présentant une écaille entre chaque tigelle; les feuilles de chaque tigelle presque;contiguës, serrées en paquet et se recouvrant les unes les autres, terminées par un limbe capillaire un peu concave à sa face supérieure; la capsule tronquée à ses extrémités a ses faces divisées par une crête saillante et ses marges bordées d'une aile membraneuse, large, ondulée et très-mince. — Notre plante a plutôt des rhizomes que des stolons, sans écailles entre les longues tiges qui s’en élèvent ; ses feuilles, éparses sur les tiges, sont écartées entre elles de 2 à 3 centimètres ; le limbe qui les termine est filiforme , beaucoup plus gros que sur l'autre et convexe sur ses deux faces; la capsule, beaucoup plus grosse, atténuée à ses extrémités, à ses faces tout unies, sans lignes saillantes et les marges non ailéesmembraneuses, mais épaissies en bourrelet, comme certaines espèces de Zannichellia. » Ce dernier caractère est très-important, en ce quil fournit un rapprochement entre deux genres si voisins et force de retrancher du nombre des caractères génériques de l'Althenia celui des ailes marginales de la capsule mentionné par Petit, Endlicher et autres, mais supprimé par Kunth, qui paraît avoir eusousles yeux, en faisant sa description, un échantillon de notre grande plante. Pour le reste, les caractères génériques sont absolument identiques. » L'étude anatomique du limbe m'a démontré qu'Endlicher avait eu tort de dire: « folia brevia, nervo medio elongato excurrente aristata », ou, en d'autres termes, de considérer la région élargie de l'organe foliaire comme une feuille et la partie capillaire comme une arête formée par la nervure médian prolongée et ‘isolée, tandis que 440 BULLETIN. Petit et Kunth avaient eu pleine raison de considérer comme une gaîne la région élargie et de voir un limbe dans le long fil qui s’en détache. Cette partie présente, en effet, autour du faisceau fibro-vas- culaire médian, un parenchyme abondant avec lacunes longitudinales. et vers chacun de ses bords un faisceau de tissu prosenchymateux, le tout recouvert par un épiderme dont les cellules sont remplies de chlorophylle » Il est maintenant un point sur lequel nous appelons l'attention de M. J. Duval-Jouve. M. James Lloyd, dans sa Flore de l'Ouest, 2° édi- tion, p. 473, signale la présence de lAlthenia filiformis « dans les » marais salants de l’île d'Oléron, à côté du Chara alopecuroïdes », I serait intéressant de savoir si la plante de l’île d'Oléron est identique à la plante de Petit, ou à celle des mares des Onglous, ou bien si, avec la différence de station, elle n'offrirait pas quelque différence de formes. Voici, en attendant, les caractères des deux espèces actuelles du genre Althenia résumés dans les diagnoses suivantes que M. J. Duval- Jouve a bien voulu nous communiquer. ALTHENIA FILIFORMIS F. Petit : Stolonibus ad limi superficiem repentibus, 3-5em longis, ad basin ramulorum et inter ramulos brac- teas emittentibus. Ramulis brevissimis . ue 1 oi altis ; foliis omnibus imbricatis confertis; limbo antice concaviusculo, marginibus incrassato ; capsula subovali, plus minusve truncata, in utroque latere alata et in utraque facie linea eminente in duas partes inæquales partita. Semine ovato, compresso. ALTH. BARRANDONIH J. Duv.-J.: Stolonib1s sub limo decurrentibus, longissimis (50%); inter ramulos nudis. Ramis erectis altissimis (20-50em) ; foliis in caule remotis , ad inflorescentiam confertis; limbo antice et postice convexo ; capsula ovato-lanceolata, utrinque attenuata; ad margines incrassata, in utraque facie lævissima. Se- mine oblongo, compresso. E. DUBRUEIL. TE ES——— Botanique descriptive. Les travaux consacrés à la botanique descriptive ou à l’énumération des plantes d'une localité ont rarement un grand retentissement, et cependant ils coûtent à leurs auteurs tant de temps, de recherches et d'études, qu'il doit sembler juste de ne pas les laisser dans l'oubli. BIBLIOGRAPHIE. 441 Nous allons passer rapidement en revue celles des publications de cette nature récemment parues, et qui sont venues à notre Con- naissance. M.J.-B. Verlot, jardinier en chef-directeur du Jardin-des-Plantes de Grenoble, a achevé la publication d’un Catalogue raisonné des plan- tes vasculaires du Dauphiné‘. La réputation de richesse attribuée depuis longtemps à la végétation de cette vaste province nest pas démentie par ce nouvel inventaire, et le soin consciencieux qui a pré- sidé à sa rédaction doit faire accepter de confiance les nombreuses in- dications qu'il fournit à la flore de France. L'auteur, qui a pu conférer les herbiers de Villars et de Mutel, cite partout la synonymie de leurs flores et rectilie ieurs erreurs. Toutes les indications de localités sont le résultat de ses propres re- cherches ou de celles d’autres explorateurs dignes de foi. Le Dauphiné a fourni dans ces derniers temps un grand nombre de cès formes peu tranchées qu'un célèbre botaniste a mises en lumière. M. Verlot accepte celles qu'il a pu vérifier par lui-même, et se contente de mentionner celles qu'il n’a connues que de nom ou par des descriptions souvent intelligibles pour leur seul auteur. On doit louer cette prudente ré- serve etattendre du temps, qui met chaque chose à sa place, la solution de ces questions en litige. Autant nous sommes disposé à déverser le mépris sur les auteurs qui se respectent assez peu pour publier sciem- ment des faits controuvés, autant nous devons prodiguer les éloges au botaniste consciencieux qui a employé tous ses soins et son temps à la recherche de la vérité, et nul. assurément, n’amieux mérité cet éloge que M. Verlot. Nous voudrions pouvoir louer aussi sans restrictions un opuscule publié sur la même contrée ? qui présente les descriptions d’un assez grand nombre d'espèces nouvelles ou réputées telles, sous des noms parfois bizarres ; peut-être quelques-unes d'entre elles étaient-elles déjà signalées, mais nous nous abstiendrons de juger cette question en l'absence des pièces de conviction. L'auteur paraît être un jeune homme donties recherches actives méritent d’être encouragées, et dont le talent d'observation, en acquérant de la maturité, contribuera aux progrès de la botanique française. ! Un vol. in-80 de 408 pages 2 Essai sur les plantes du Dauphiné: par M. Casimir Arver-Touver , petit in-80 de 72 pages. 442 BULLETIN. Les circonstances ont retardé longtemps l’achèvement du Catalogue raisonné des plantes de l'arrondissement de Montluçon ( Allier ), que M. A. Pérard a livré au public cette année‘. On peut le citer sans crainte comme un des meilleurs modèles du genre. Après des consi- dérations très-intéressantes sur la topographie de cette contrée acci- dentée, l'auteur expose l’énumération des espèces observées par lui, et des nombreuses localités où il les a constatées. Des notes assez fréquentes ont pour but d'éclaircir certains points obscurs de la cri- tique botanique, et souvent la reproduction des descriptions originales puisée à des sources qu'on n'est pas toujours à même d'aborder fournit des données très-précieuses. L'auteur étend même parfois son sujet hors de son cadre primitif, et les botanistes lui sauront gré de leur avoir offert une exposition savante de la famille des Fougères, une classification générale des Menthes françaises avec des tableaux ana- lytiques, une analyse générale des Euphrasia et une illustration com- plète de l’Agropyrum cæsium. Dans un opuscule publié à la même époque?, M. Pérard ajoute des données intéressantes qui complètent en quelque sorte son premier travail. M. le D'Sauzé et M. le pasteur Maillard ont associé depuis longtemps leurs explorations dansle département des Deux-Sèvres, et, réunissant leurs études, sont en voie de publier la flore de cette contrée, où un reflet méridional assez prononcé vient se projeter sur la végétation occidentale. Le premier volume de cette flore, qui vient de paraître *, ne contient que les préliminaires, un peu développés peut-être pour un livre consacré à une localité restreinte. Dès à présent, les clés analy- tiques nous donnent une idée des espèces curieuses qui caractérisent la végétation de cette partie de l’ancien Poitou. Attendons la seconde partie, qui nous offrira les descriptions et l'indication des localités, com- plément le plus important d'une flore locale. Ni le talent d'observation ni la probité scientifique ne font défaut aux auteurs, et l’on peut espé- rer d'eux un excellent travail. Parmi les plantes notables qu'ils ont su observer, citons dès à présent le Juncus siriatus Schoush., espèce mé- diterranéenne qui pénètre jusqu'aux environs de Niort, et dont M. Duval-Jouve a heureusement éclairci l'histoire, dans son beau { Un vol. in-80 de 248 pages, avec une Planche. 2 La Flore de l'Allier comparée à celle des départements limitrophes, in-8° de 45 pages. 3 Flore du département ds Deux-Sèvres, tom. I, in-1?2 de 343 pages. BIBLIOGRAPHIE. 443 Mémoire sur les Juncus à feuilles cloisonnéest, en démontrant que le Juncus asper de nos auteurs Poitevins n'est qu'une forme qui ne peut se séparer du striatus. Malgré leur peu d'éclat, les Zlatine attirent toujours l'attention des botanistes et leur inspirent un intérêt particulier. M. Apollon Hardy nous a adressé de Gand une monographie des Elatine de la Flore Belge? , qui, sans prétendre ajouter beaucoup de faits nouveaux à leur bistoire,est un exposé complet des travaux publiésjusqu ici en Belgique sur ces curieuses petites plantes, et est destinée à en faciliter singu- lièrement l'étude. Depuislongtemps, M. Nouel s’est appliqué à la recherche des plan- tes étrangères introduites par la culture aux environs d'Orléans. Une circonstance due à de tristes événements a fourni de nouveaux élé- ments à ses études : le mouvement des troupes pendant la guerre a favorisé la dissémination d'un grand nombre de plantes, la plupart méditerranéennes, dans le centre de la France. Tandis que M. Fran- chet en constatait 150 aux environs de Blois, M. Nouel en réunissait 90 dans l’Orléannais. Les mêmes espèces se sont retrouvées en partie sur d’autres points de la France. À Besançon, M. Païllot recueillait toute une florule exotique qu'il a publiée dans les Mémoires de la Société d’émulation du Doubs. À Angers, notre attention, attirée trop tard sur cet objet, ne nous a révélé l'existence que d’un petit nombre d’es- pèces étrangères au pays : Rapistrum rugosum, Erodium malacoides, Hordeum maritimum, Polypogon maritimus. Dans la Sarthe, le Trifo- lium resupinatum et le Berteroa incana semblent s'être fixés. Ces plantes continueront-elles à se reproduire ? Verra-t-on, comme on l'a avancé, nos prairies eurichies de nouvelles essences fourragères ? I] est permis d en douter, mais il était utile de constater l'apparition de ces épaves, afin de connaître l’origine de celles qui, dans la suite, devront occuper une place dans les flores de nos contrées. La Cryptogamie, trop longtemps négligée en France, vient de s'en- richir d'un tres-important ouvrage qui devra faciliter singulièrement l'étude de la Muscologie aux amateurs français. Dans sa Flore crypto- gamique de l'Est*, M. l'abbé Boulay ne s'est pas borné à présenter des 1 Voir Revue des Sciences naturelles, page 117. 2 In-80 de 26 pages. 5 Notice sur un certain nombre de plantes adventices, 10 pages in-80 # Muscinées (Mousses, Sphagnes, Hépatiques) in-80 de 892 pages, 444 BULLETIN. descriptions très-détaillées des Mousses propres à la région de l'Est, il a eu l'heureuse idée d'intercaler les signalements des espèces des autres parties de la France etmême des contrées limitrophes, en sorte que son livre peut servir de guide aux amateurs sur tous les points où ils porteront leurs explorations. M. Boulay a donné déjà tant de preu- ves de son talent d'observation et de sa sagacilé scientifique, qu'on peut affirmer d'avance que ces qualités se retrouvent dans cette flore, et nous ne doutons pas que l'accueil fait par les botanistes à cette publication ne récompense les lougues et patientes études auxquelles l’auteur a dû se livrer pour mettre en lumière les charmantes produc- tions qu il a décrites. On devra trouver dans le livre de M. Boulay la description de tous les végétaux énumérés dans le Catalogue des Mousses, Sphagnes et Hé- patiques des environs de Montbéliard, que M. le D' L. Quelet vient de publier dans les Mémoires de la Société d'Emulation de Montbé- liard.— A la suite de ce Catalogue, se présente un travail plus impor- tant du même auteur: c'est la florule des champignons du Jura et des Vosges. Après une introduction offrant les généralités relatives à ces végétaux, un aperçu de leur classification, viennent des descriptions concises mais suffisantes des formes observées par l’auteur. Vingt- quatre planches, représentant les figuresau trait de nombreuses espèces rares ou litigieuses, mettent en relief les principaux genres. Nous sommes heureux de constater que les études sur la flore de France se poursuivent ainsi sur tous les points avec une ardeur qui garantit le succès. Que les naturalistes continuent à multiplier leurs recherches avec zèle et conscience, et notre patrie restera victorieuse dans la noble lutte des combats intellectuels ! A. BoREaAu, Directeur du jardin botanique d'Angers. Nous publierons, dans le prochain numéro de la Revue, un Mémoire de M. Esror, Professeur-agrégé à la Faculié de Médecine de Montpellier, sur les Microzymas. Le Directeur E. DUBRUEIL. MONTPELLIER. — TYPOGRAPHIE DE BOEHM ET FILS, MÉMOIRES ORIGINAUX. ETUDES SUR LES MOŒEURS, LE DÉVELOPPEMENT ET LES MÉTAMORPHOSES d'un petit Poisson chinois du genre MACROPODE (Macropodus Paradisi, Nobis)!: Par M. le D' N. JOLY, Professeur à la Faculté des Sciences de Toulouse. PREMIÈRE PARTIE. INTRODUCTION. Quelques réflexions sur les Métamorphoses en général et plus spécialement sur celles des Poissons osseux. Plus on étudie l’embryogénie, plus on acquiert la conviction qu'un nombre d'animaux bien plus grand qu’on ne le pensait, il y a quelques années à peine, subissent après leur naissance des métamorphoses plus ou moins considérables. Les Mammifères et les Oiseaux sont, parmi les Vertébrés, les seuls qui dérogent 1 Le Mémoire qu'on va lire était complètement terminé lorsque nous avons recu le n° 10 (Octobre 1872) de la Revue de zoologie de M, Guérin-Méneville, où se trouve publié le travail de M. Georges Pouchet, intitulé : Observations sur le développe- ment d'un poisson du genre Macropode. Nous avons vu avec plaisir les résultats que nous avons Communiqués à l'Institut, le 30 septembre dernier *, confirmés, sauf sur quelques points tout à fait secondaires, par le jeune savant qui porte avec distinction un nom bien connu, et qui en agrandit lui-même l'illustration. Nous regrettons seulement que M. G. Pouchet n'ait pas indiqué d'une manière plus précise, c'est-à-dire par des lettres de renvoi accompagnant ses dessins, les organes dont il parle dans son texte, où nous avons aussi vainement cherché le mot Méramorpaose. La chose a été décrite, mais le nom n'a pas, cette fois en- core, été prononcé : les prémisses ont été posées , la conclusion n’a pas été tirée. * Voir, dans les Comptes-rendus de l’Institut, séance du 30 septembre 1872, l'extrait de notre Mémoire qui a pour titre : Observations sur les Métamorphoses des Poissons osseux en général, et partculièrement sur celles d’un petit poisson chinois du genre MAGROPODE, récemment introduit en France. L, 31 446 MÉMOIRES ORIGINAUX. à la loi générale, et encore, pour les ranger dans l'exception, faut-il ne pas tenir compte des changements, souvent très-mar- qués, que l’âge, les saisons, l’époque des amours, etc., amènent chez bon nombre d’espèces appartenant à ces deux Classes de Vertébrés. Les métamorphoses des Reptiles Batraciens sont connues et parfaitement décrites depuis longtemps. Pline en parle, mais en mêlant à chaque instant l'erreur à la vérité. Ovide les a décrites de manière à ne pas être démenti par les naturalistes, sauf tou- tefois en ce qui regarde l’origine singulière qu'il attribue à ces Reptiles. Quant aux Poissons, bien que l’embryogénie de certaines espèces ait été étudiée avec soin par plusieurs observateurs très- habiles, parmi lesquels il me suflira de citer Rusconi, Fihppi, Carl Vogt, Baër, Duvernoy, le regrettable Lereboullet, etc., il était naguère encore généralement admis qu'ils sortaient de l'œuf avec les formes et les organes qu'ils devaient toujours conser- ver ‘. Erreur grave et d'autant plus étonnante que les œufs des Poissons, par leur transparence habituelle, par leur grand nom- bre chez un seul et même individu femelle, par l'extrême facilité avec laquelle on peut les féconder artificiellement, offrent à l’ob- servateur des moyens d'étude jusqu’à présent trop négligés. Aussi concevons-nous lrès-bien que le professeur Agassiz ait excité une surprise générale lorsque, 1l y a sept ou huit ans à peine, il est venu dire aux naturalistes que l’Argyropelecus hemi- gymnus (Gocco ) n’était pas autre chose que le jeune âge de la Dorée ou poisson Saint-Pierre (Zeusfaber Linné), et que le genre Sarchirus de Rafinesque était un jeune Lépidostée. Quand nous tracions ces lignes, nous étions loin de penser que le père du sa- vant dont nous parlons succomberait bientôt à la suite d’une grave et douloureuse opération. La science perd en M. F.-A. Pouchet un de ses plus dignes repré- sentants; et moi, je perds en lui un éminent collaborateur, un excellent ami qui emporte tous mes regrets. 1 En 1855, M. de Quatrefages répétait encore, en parlant du groupe des Ba- traciens, qu'il était «de seul parmi les Vertébrés qui présente des métamorphoses»; et ailleurs, «que le poisson sort de l'œuf, complètement formé». MACROPODUS PARADISI. 447 Et cependant, dès l’année 1856, Auguste Müller nous avait fait connaître les singulières métamorphoses de la Lamproie de Pla- ner, el par cela même il avait rayé de nos catalogues le genre Ammocète, reconnu aujourd'hui par tous les naturalistes comme étant le premier âge du Petromyzon Planeri. « Der Name Ammocetes, disait Auguste Müller, kann fortan nür die Larve der Neunaugen bezeichnen, wie Gyrinus die der Frôüsche '. » Traduction : Le nom d’Ammocète ne peut plus désigner désor- mais que la larve des Lamproies, comme celui de Gyrinus, le têtard des grenouilles. Ge qui a surtout lieu de nous surprendre, c’estde voir que des observateurs très-habiles, qui ont eu sous les yeux des embryons de Poissons, qui en ont suivi le développement dans l’œuf jour par jour, heure par heure, aient méconnu la nature des modifica- tions qu'ils constataient, au point de ne pas les signaler à l’at- tention des naturalistes, comme indiquant de vraies métamor- phoses. Les recherches de Baër sur le développement des Poissons en général, les travaux de Rusconi sur la Tanche et l’Ablette, ceux de Carl Vogt sur la Palée, enfin les savants Mémoires de Lereboullet sur le développement de la Truite, de la Perche et du Brochel, se taisent complètement sur ce pointsi important de l’em- bryogénie des Poissons. Avant Auguste Müller, on savait cependant déjà que certains Squales ont en naissant, non-seulement des évents, qui disparais- sent chez l’adulte, mais encore des branchies externes et tran- sitoires, comme celles des Batraciens anoures et urodéles: et nous avons tout lieu de penser que si l’embryogénie des Poissons car- hilagineux ou Chondroptérygiens était mieux connue, d’autres changements seraient signalés parmi eux. Quant aux Poissons osseux, Agassiz affirme (il est vrai dans de simples communications épistolaires) qu’il vient d'observer chez 1 Voy., dans J. Müllers Archiv., pag. 333, 1856, le Mémoire d'Auguste Müller intitulé : Ueber die Entwickelung der Neunaugen. 448 MÉMOIRES ORIGINAUX eux des métamorphoses aussi considérables que celles que l’on connaît chez les Reptiles. «Aujourd’hui, dit-il, que l’on s’occupe de pisciculture avec tant de succès et sur une si grande échelle, il est surprenant que ce fait n'ait pas été remarqué depuis longtemps. Peut-être faut-il l’attribuer à cette circonstance, que ces métamorphoses commen- cent ordinairement après l’éclosion des pelits, à une époque où ils meurent rapidement lorsqu on les retient en captivité. A cet âge, ils sont du reste, pour la plupart, trop petits pour être faci- lement étudiés dans leur élément naturel. Néanmoins cette pé- riode est la plus importante de leur accroissement, lorsqu'il s’agit d'étudier leurs affimités naturelles. Je me propose prochainement de faire voir comment certains petits poissons, ressemblant d’abord à des Gadoïdes ou à des Blennoïdes, passent graduellement au type des Labroïdes et des Lophioïdes. Je pourrai également montrer comment certains embryons, semblables à des têtards de grenouille ou de crapaud, prennent peu à peu la forme de Cyprinodontes; comment certains Apodes se transforment en Jugulaires ou en Abdominaux, et certains Malacoptérygiens en Acanthoptérygiens, et enfin comment on pourra fonder une clas- sification naturelle des Poissons sur la correspondance qui existe entre leur développement embryogénique et la complication de leur structure à l’état d'adulte'. » Nous sommes heureux de pouvoir, par des observations per- sonnelles et toutes récentes, confirmer sur un point spécial l'exactitude des assertions de M. Agassiz. En effet, un des plus jolis poissons dela Chine (le Macropode paradisier), naguère im- porté en France, nous a fourni l’occasion de nous convaincre qu'après sa sortie de l’œuf ce poisson subit de nombreuses et bien réelles métamorphoses. Disons d’abord un mot de son histoire et de ses mœurs. ‘ Lettre à M. H. Milne-Edwards, de l'Institut, dans Annales. scienc. natur., tom. III, 5e série, pag. 55. Année 1865. MACROPODUS PARADISI. 449 PARTIE ZOOLOGIQUE Description, classification et mœurs du Macropode paradisier ; son introduc- tion et son acclimatation en France. Les Macropodes sont de petits poissons des Indes ou de la Chine très-voisins de nos Muges (Wugil) et remarquables par l’éclat de leurs couleurs, la grâce de leurs mouvements, la sin- oularité de leurs mœurs et de leur organisation. [ls appartiennent à la dixième famille des ACANTHOPTÉRYGIENS de Cuvier, c’est- à-dire à celle des pharyngiens labyrinthiformes, ainsi nommés, dit notre grand naturaliste, «parce qu’une partie de leurs os pharyn- siens supérieurs sont divisés en petits feuillets plus ou moins nombreux, irréguliers, interceptant des cellules dans lesquelles il peut demeurer de l’eau qui découle sur les branchies, et les hu- mecle pendant que le poisson est à sec, ce qui permet à ces poissons de se rendre à terre et d'y ramper à une distance souvent assez grande des ruisseaux ou des étangs qui font leur séjour ordi- naire : propriété singulière qui n’a pas été ignorée des anciens, et qui fait croire‘au peuple, dans l'Inde, que ces poissons tombent du ciel ! ». La famille des Poissons à os pharyngiens labyrinthiformes ne compte qu'un petit nombre de genres ou d'espèces, parmi lesquels les plus remarquables sont : 1°1e Pangrrt ou Monteur aux arbres ( Anabas ou Perca scandens des naturalistes), répandu dans toutes les Indes orientales, et ainsinommé parce quenon-seu- lement il peut sortir de l’eau sans inconvénient, mais encore, s’il fallait en croire Daldorf, grimper sur les arbustes du rivage. 2° l'OsPHROMÈNE ou &ourami (Osphromenus olfax Commerson), transporté de Chine à l'Ile de la Réunion, où il a très-bien réussi, et dont l'introduction en France a été tentée jusqu’à présent sans succès : échec d'autant plus regrettable que le Gourami atteint la taille du Turbot, et que sa chair a la réputation d’être encore plus savoureuse que celle de ce dernier; 3° les OPHICÉPHALES, ou Pois- 1 Cuvier ; Règne animal, tom. II, pag. 225. 2e édition. 450 MÉMOIRES ORIGINAUX. sons à tête de serpent, c’est-à-dire à tête déprimée, garnie en dessus d’écailles ou mieux de plaques polygonales, à museau court et obtus; poissons très-communs dans les Indes, où les enfants et les bateleurs les emploient pour se divertir ou pour divertir le peuple, en les faisant ramper sur le sol. En Chine, les grandes espèces d'Ophicéphales figurent sur les marchés et y sont coupées toutes vivantes en morceaux pour être distribuées aux consommateurs ; 4° enfin, les MAcroPoDEs, dont on ne connaît jusqu’à présent que deux espèces : le Macropode vert doré (Macropodus viridiauratus Lacépède) et le beau Macropode (#. venustus Cuvier et Valen- ciennes), auxquels il faut ajouter le Macropode récemment intro- duit de Chine en France, dont nous allons maintenant retracer l’histoire, en prenant pour guide le seul auteur qui ait jusqu'à présent étudié ce très-joli poisson, nommé } ar lui poisson de Pa- radis, à raison de l'éclat resplendissant de ses couleurs ". Pour lui assigner un rang dans nos catalogues ichthyologiques, nous baptiserons celte magnifique espèce du nom de MAcRoPODE PARADISIER (Macropodus Paradisi), en accolant à cette dénomi- nation un orgueilleux MVobis, qui très-certainement, nous en sommes bien convaincu d’avance, ne suffira pas pour faire pas- ser notre mémoire à la postérité. DESCRIPTION DU MACROPODE PARADISIER. Si l’on excepte la grandeur de ses nageoires, par ses formes extérieures le Macropode paradisier ne se distingue en rien de nos poissons les plus communs. Sa tête et son corps sont laté- ralement aplatis; son museau courtet obtus ; sa bouche peu fendue et sans dents ; son opercule d’une seule pièce et couvert d’écailles comme le reste du corps; l'iris de ses yeux, relativement assez gros, brille de l'éclat de l'or et du rubis. L’anus est placé tout 1 Carbonnier; Trois Mémoires pour servir à l'histoire zoologique du poisson de Chine, le Macropode. Paris, 1872. Ces trois Mémoires ont été aussi publiés dans le Bulletin de la Sociélé zoologique d’acclimatation. Années 1869, 1870 et 1872. MACROPODUS PARADISI. 451 près des nageoires pectorales et à la naissance même des nageoires ventrales. « Les nageoires dorsale et anale, dit M. Carbonnier, sont très- longues et teintées des plus vives couleurs. Les écailles, présen- tant toutes les nuances de l’arc-en-ciel, offrent des bandes verti- cales jaunes, rouges, bleues, sillonnées, de la tête à la queue, de rayures aux couleurs changeantes; joignez à cela des formes gracieuses, mollement arrondies; une nagcoire caudale longue, fourchue, se développant largement en éventail comme celle d’un paon qui fait la roue, et l’on ne s’étonnera pas du nom de Poisson de Paradis que j'ai cru devoir lui donner, car il est parmi les poissons ce qu'est l’Oiseau de Paradis dans la gent volatile ‘.» QQui n’a pas vu, dit à son tour Victor Meunier, l’ample et moelleux mouvement de ses nageoires flottantes, ne sait pas jusqu’à quel degré un habitant des eaux peut s'élever dans la grace, et combien, sous ce rapport, un poisson peut ressembler à un oiseau *. » Taille de l'animal, du bout du museau à la base de la queue : 0,05; la queue y comprise: 0°,08. La femelle est un peu plus pe- tite que le male, etses couleurs sont beaucoup moins brillantes. Habitat : l'Inde, la Chine, et notamment les rizières de Canton. On l'élève aussi dans les viviers des jardins, qu’il pare de ses teintes irisées. Introduit pour la première fois en France (à Paris), le 8 juillet 1869, par M. Simon, notre consul à Ning-Po. MOEURS DU MACROPODE PARADISIER. Respiration. — Üne particularité intéressante se rattache à l’his- toire naturelle du Macropode: c'est qu’il peut, quand l’eau où il séjourne est trop altérée, aspirer de l'air à la surface et l’ex- pulser sous forme de bulles à travers ses ouvertures branchiales, ! Carbonnier ; Mém. cité, pag. 4. ? Victor Meunier, dans le Rappel du 16 octobre 1872. 452 MÉMOIRES ORIGINAUX. après qu'il a fourni aux besoins de la respiration, devenue insuffi- sante ou difficile dans une eau viciée. Durée de la vie. — La durée de la vie du Macropode est in- connue ; mais M. Carbonnier possède plusieurs couples qui, au moment où j'écris ces lignes, doivent avoir atteint la fin de leur cinquième année. L'animal est adulte à l’âge de 10 ou 11 mois. Accouplement, ponte et nidification; soins donnés par le mâle aux œufs et aux petits. — Les Macropodes sont très-féconds ‘ et très- ardents en amour. M. Garbonnier croit avoir observé chez eux une sorte d’accouplement, et il a vu le mâle construire à la surface de l’eau un véritable nid aérien pour y placer les œufs de la femelle. Celle-ci en pond 400 ou 500 à la fois. Nous ne saurions mieux faire que de laisser la parole à cet ingénieux observateur. Il dé- crit ainsi qu'il suit les préludes de la ponte et de la fécondation. « Le matin du onzième jour {le treizième après leur arrivée en France ), je remarquai, non sans surprise, un grand changement dans l'aspect et la manière d’être de mes poissons. Chez les mâles, les bords des nageoires s'étaient colorés en jaune bleuâtre ; l’épine * qui prolonge chaque nageoire ventrale était d’un jaune safrané; ils faisaient la roue tout comme les paons et les poules d'Inde, et semblaient, par leur vivacité, leurs bonds saccadés et l’étalage de leurs vives couleurs, chercher à attirer l’attention des femelles, lesquelles ne paraissaient pas indifférentes à ce ma- nége ; elles nageaient avec une molle lenteur vers les mâles, et semblaient se complaire dans leur voisinage. » M. Carbonnier isole un des couples amoureux dans un aquarium particulier, dont il garnit le fond de sable fin et de plantes aqua: tiques. Écoutons-le de nouveau : « Ceci se passait le 21 juillet au matin; la température de l’eau élait de 22 degrés centigrades. 1 En le plaçant dans de bonnes conditions, M. Carbonnier a obtenu dans un même couple onze pontes dans un an. ? Ce mot nous semble impropre : la nageoire ventrale étant terminée non pas par une épine poignante, mais bien par un long filament assez mou. MACROPODUS PARADISI. 453 » Après dix minutes passées à examiner leur nouveau domicile, le mâle vint se placer contre la face transparente bien à la surface de l’eau, et, absorbant, puis expulsant sans trêve des bulles d’air, il forma ainsi une sorte de plafond d’écume flottante, d’un dia- mètre de 5 centimètres d’abord, puis d’une surface d’un déci- mètre carré, qui se maintint sur l’eau sans résorption, ce que l’on doit attribuer probablement à la sécrétion d’un mucus graisseux produit par la bouche du mâle, et qui constitue l’enveloppe de chaque bulle d'air. | » Bientôt, la femelle s'étant approchée du male, je visce dernier dilater ses nageoires et se ployer en arc comme un cerceau ; puis la femelle, qui se tenait verticalement, la tête à fleur d’eau, vint en oscillant placer la partie inférieure de son corps dans le demi- cercle formé par le mâle, lequel, ployant et contractant ses lon- gues nageoires, l’attacha à son flanc et, pendant une demi-mi- nute au moins, fit d’évidents efforts pour la renverser. Rien de plus gracieux que les mouvements de ces animaux parés de leurs plus vives couleurs et se laissant tomber ainsi de la surface à 15 ou 20 centimetres de profondeur, puis continuant le même manége et le renouvelant toutes les dix minutes environ, depuis 1 1 heures et demie jusqu à 3 heures du soir. » Pendant les intervalles de repos, le mâle ne cessait de tra- vailler à son plafond d’écume, lequel, sur un décimètre carré de surface, avait bien un centimètre d'épaisseur au centre. » Mais jusqu’à 3 heures du soir il n’y avait eu en réalité qu'un simulacre d’accouplement. Sans doute que les œufs dans la femelle, et les principes fécondants chez le mâle, n'étaient pas encore dans un état de maturité qui en permit l'expulsion ; mais à partir de 3 heures, les accouplements devinrent effectifs. Le mâle, serrant la femelle avec plus de force, la renversa entièrement, et, la pressant contre lui, lui fit faire une première ponte. Les œufs, à leur sortie, se trouvaient ainsi en contact pres- que immédiat avec les parties génitales du mâle, et recevaient en passant les principes fécondants. » Le rapprochement réel se fait au milieu de l’eau : l'opération 454 MÉMOIRES ORIGINAUX. commence à la surface et se termine avant que les poissons aient atteint le fond. Ils se séparent alors, et les œufs flottent cà et là‘. » Dés la première ponte, je vis le mâle chercher à avaler tous les œufs qu'il rencontrait ; désireux d’en sauver quelques-uns, j en recueillis avec une pipette 100 à 150 que je plaçai dans un plat creux; puis, voyant que les pontes continuaient, j'en laissaiï le produit dans l’aquarium pour voir ce qu’il en adviendrait. Alors, à ma grande surprise, je reconnus que, bien loin de dévorer les œufs, le mâle les récoltait dans sa bouche et les portait ensuite dans le plafond d’écume, et jusqu'à 7 heures du soir je vis se reproduire les mêmes faits : accouplement, ponte et récolte des œufs par le mâle. » L'opération terminée, le mâle chassa la femelle ; pâle et dé- colorée, elle se réfugia, immobile, dans un coin de l'aquarium, tandis que lui se chargea seul des soins nécessaires à l’heureuse incubation des œufs, reconstituant le plafond d’écume dès qu’une lacune venait à s'y produire; prenant avec sa bouche quelques œuis là où ils étaient agglomérés en trop grand nombre, pour les placer dans un endroit inoccupé; donnant un coup de tête à où la couche d’écume lui semblait trop serrée, pour en épar- piller le contenu ; remplissant tous les vides en y produisant tout de suite de nouvelles bulles. Il travailla ainsi dix jours du- ran!, sans trêve et sans repos, et sans prendre de nourriture *.» Éclosion et alimentation des alevins ou des embryons larvaires.— Les petits une foiséclos, le difficile était de les nourrir, de trouver une proie vivante (car il sont carnassiers) assez petite pour pou- voir passer par la bouche étroite des nouveau-nés. En vain M. Carbonnier leur offrit-il d’abord, comme aliments, diverses substances organiques. Ces substances n'étaient pas de leur goût; 1 Nous les avons vus de même monter à la surface de l'eau et se mettre ainsi en contact avec les bulles d'air expulsées par le mâle. La grande quantité de matière grasse qu'ils contiennent explique facilement pourquoi ils flottent dans le liquide ou montent à sa surface. 2 Tout le monde connaît aujourd’hui le nid de l'Épinoche (Gaster osteus osseus Cuv.), auquel M. Coste a donné une si grande célébrité. MAGROPODUS PARADISI. 15 mais elles s’accumulèrent au fond de l'aquarium, entrèrent en fermentation et donnèrent naissance à une foule d’infusoires que les petits poissons nouvellement éclos dévorérent par milliers, et qui leur procurèrent vigueur et bonne santé. Dès ce moment, le problème si difhcile de la première alimen- tation était résolu, et résolu en quelque sorte par le hasard. Mais, en bon observateur qu'il était, notre zélé confrère de la Société d’acclimatation sut tirer de ce fait une conclusion pratique: il fabriqua des infusoires, en découpant par petits morceaux des plantes aquatiques et en soumettant le tout à la fermentation. Cependant il fallait éviter de salir et d’infecter l’eau de l’agua- rium. Cette nouvelle difficulté fut vaincue de la manière la plus ingémieuse : M. Carbonnier filtra le liquide de fermentation et recueillit le dépôt retenu par le filtre, pour en nourrir ses élèves aquatiques. Mais ceux-e1 croissaient en grosseur, et leur appétit croissait en même temps que leur taille. Au bout d’une vingtaine de jours, l'alimentation par les infusoires seuis ne leur suffit plus ; il fallut leur en procurer une autre plus substantielle et plus abondante. Les petits Entomostracés, et surtout les Cyclopes, qui fourmillent dans les eaux des fossés creusés au pied des remparts de Paris, vinrent s'ajouter aux Monades et autres Protozoaires qui avaient suffi jusqu alors à nourrir les jeunes Macropodes. Quelques larves d’Éphémères fournirent aussi leur contingent alimentaire. Mais, pour se procurer des animaux presque tous microscopiques, que de peines ! que de fatigues ! que de seaux d’eau à tamiser pour obtenir la proie voulue, pour opérer le triage entre les ani- malcules comestibles et les espèces voraces et offensives, telles que les Wépes, les Coryses, les Notonectes, les Hydropores ét même les Hydres ou Polypes d'eau douce, qui de leurs longs bras enla- cent le petit poisson assez imprudent pour s’en approcher, et l’en- gloutissent dans leur cavité digestive ! Les Cyclopes eux-mêmes, dont la chair fournit un des mets favoris du Macropode à l’état d'embryon, se fixent souvent sur lui en très-grand nombre, le harcèlent et le font périr. À trois mois, le Poisson de Paradis est assez fort pour manger 456 MÉMOIRES ORIGINAUX. des vers de vase, des Waïs ; alors on peut le considérer comme tout à fait sauvé. Triste épisode se rattachant à l’histoire du Poisson de Paradis. — A l'histoire du Macropode se rattache une des pages les plus tristes et les plus sanglantes de l’histoire de Paris, ou, pour mieux dire, de notre histoire nationale. Après des peines infinies, M. Carbonnier était parvenu à élever avec un plein succès en- viron 300 alevins, dont le nombre, au printemps de 1870, se ré- duisait à 55, malgré le chauffage artificiel (au gaz ou à la lampe) auquel il avait soumis les réservoirs où il les avait placés, mal- gré le soin qu'il avait pris de les maintenir, pendant l'hiver de 1869, à une température convenable ( de 12 à 20° centigrades), et de leur donner une pâture très-difficile à recueillir dans la glace des fossés. Heureusement que, dès les premiers jours d'avril 1870, la température extérieure devint sensiblement égale à celle des aquariums. M. Carbonnier avait disposé isolé- ment les couples destinés à la reproduction ; le 15 juin, les pontes commencèrent et donnèrent de nombreux produits. Mais jl n’a fallu rien moins qu’une persévérance rare, jointe à un amour de la science poussé presque jusqu'à la passion, pour soutenir le courage de M. Carbonnier au milieu des luttes péni- bles et douloureuses qu’il a eu à soutenir pour mener à bien sa louable entreprise. Félicilons-le donc d’avoir triomphé des diffi- cultés que lui opposaient tout à la fois, et la rigueur d’un hiver sibérien, et les cruelles exigences des ennemis de la patrie. On ne peut toutefois se défendre d’une juste émotion en li- sant, dans ses #émoires, toutes ses tribulations de savant, toutes ses douleurs de citoyen, pendant le siége de Paris et les événe- nements à jamais déplorables qui le suivirent. MACROPODUS PARADISI. = ot 1 DEUXIÈME PARTIE. EMBRYOGÉNIE ET MÉTAMORPHOSES DU MACROPODE. Dans l’un de ses intéressants Mémoires sur le Macropode, M. Carbonnier s’exprimait ainsi qu'il suit : « Ce qu'il y a de particulier dans l’espèce qui nous occupe, c'est que l'embryon subit deux transformations avant d'arriver à l’état parfait. Immédiatement après l’éclosion, c'est un vrai têtard. La queue est bien conformée, mais la tête, le tronc et la vésicule ombilicale sont enfermés dans une sphère. Il nage en cet état; les yeux sont visibles, mais on ne distingue point la bouche. Elle ne se forme et ne se détache que du deuxième au troisième jour. Cinq jours plus tard, c’est-à-dire huit jours après la naissance, la vésicule est résorbée, et le petit animal est complètement formé ‘ ». Toute brève et même un peu inexacte qu’elle esi, cette des- cription suffit pour nous convaincre que M. Carbonnier a bien vu l’énorme différence qui distingue le Macropode à sa naissance du Macropode adulte. Cette différence nous a frappé nous-même, et nous avons pensé qu'en étudiant, avec plus de soin que n'avait pu le faire M. Carbonnier, le développement du petit Poisson chinois, nous arriverions très-probablement à trouver d’autres particularités propres à confirmer notre opinion sur la réalité des Métamorphoses chez les poissons osseux. Description de l'œuf. — Gros à peu près comme une graine de pavot (0°®,7) au moment où il est pondu, l’œuf du Macropode est de couleur blanche et d’une transparence qui permet d’en distinguer tous les détaiis. Disons tout d’abord qu'il ne diffère en rien d’essentiel de celui de la plupart des poissons osseux. Il 1 Carbonnier ; Trois Mémoires pour servir à l'histoire zoologique du poisson de Chine: le MACROPODE, pag. 8. Paris, 1872, 458 MÉMOIRES ORIGINAUX. se compose en effet d'une enveloppe extérieure (coque ou cho- rion) à travers laquelle on aperçoit, après la fécondation, un liquide albumineux enveloppant de toute part le vitellus et la membrane qui lui est propre. Une très-grosse goutte huileuse et de nombreuses gouttes plus petites et de même nature accom- pagnent les globules et les granules vitellins. Je n’ai pas aperçu distinctement le micropyle, qui d’ailleurs s’oblitère ordinairement après la fécondation. Développement de l'œuf. — Prévenu un peu tard par M. Guy du moment où la ponte avait commencé, nous n’avons pu, à notre grand regret, étudier les changements qui ont lieu dans l'œuf pendant les premières heures de son développement, et notamment la segmentation du vitellus. Ici, heureusement, le travail de M. Georges Pouchet nous vient en aide, et nous le citons textuellement « Premier jour. — Dès le soir même de la ponte, à 4 heures et demie, la rétraction du vitellus s’est effectuée, et on distingue sur un point de la circonférence un cumulus granuleux, mame- lonné, analogue à celui que figure M. Vogt dans les Salmonés : seulement les éminences (peut-être au nombre de quatre) ne sont pas aussi nettement distinctes. » Là masse vitelline est pleine de vésicules de graisse, éparses entre sa surface et celle de la goutte graisseuse centrale. À 8 heures du soir, ces mamelons ont fait place à un corps müriforme plus étendu à la surface du vitellus. Si on éclaire celui-ci à la lampe, il paraît, dans toute son épaisseur, d’une belle coloration MERE AS » Deuvième jour. — À 4 heures du soir, on commence à dis- tinguer la première des deux saillies qui formeront les extrémités de l'embryon. Celle qui apparaît d’abord est la postérieure. Ellese montre comme une éminence formée d’une substance plus grise, plus grenue, beaucoup plus opaque que le reste. Elle présente deux mamelons distincts, séparés par une sorte de dépression. » À ce moment, les tissus qui enveloppent la goutte de graisse MACROPODUS PARADISI. 459 forment autour d'elle deux zones concentriques s’'enveloppant mutuellement. La plus externe (blastoderme) est, en général, plus claire; elle est d’une couleur qui rappelle la teinte sépia. La plus interne est plus verdâtre ".» Nous concluons de la description qui précède que, au moment où nous avons commencé nos observations, les œufs examinés par nous étaient âgés de 20 heures environ. En effet, au commencement du second jour après la ponte, l'œuf s’est présenté à moi, comme à M. Pouchet, sous la forme de trois sphères exboîtées l’une dans l’autre, dont la plus exté- rieure était en même temps la plus transparente, et représentait le chorion. Au-dessous des points correspondants aux deux pôles opposés de cette sphère, on voyait, vers le soir du même jour, deux éminences ou mamelons qui prenaient leur origine dans le blas- toderme, lequel s’étendait de chaque côté, et circulairement, de manière à former une couche blastodermique plus ou moins épaisse autour de la sphère interne, entièrement occupée par les gouttes huileuses et les globules vitellins. Le premier de ces mamelons représentait la tête avec ses yeux, sous la forme de deux ampoules incolores, séparées par un espace plus clair. Le second n'était rien autre chose que l'extrémité postérieure de la queue”. À cette époque de son développement, le corps de l'embryon recouvre donc à peu près la moitié supérieure du vitellus. Quelques heures plus tard, la tête se dessine ; l’œil et son cristallin se voient distinctement ; le tronc et la queue sont tou- jours recourbés autour de la vésicule vitelline, qui à ce moment est parsemée, comme le corps lui-même, de taches noirâtres et plus ou moins irrégulièrement uniformes. Le cœur existe, et il a 1 G. Pouchet; Mém. cité, pag. 372 de la Revue zoologique, no 10. 1872. 2 On avu plus haut que, d’après M. G. Pouchet, le premier mamelon que l'on aperçoit est celui qui représente la queue ; nous n'osons pas trancher la question, bien que nous ayons constaté que la queue se forme en effet la première chez l'em- bryon de la Caridina et dans celui des Éphémères. 460 MÉMOIRES ORIGINAUX. commencé à battre déjà depuis longtemps (dès la quarantième heure). La circulation du sang est établie, soit dans le système général (du moins en partie), soit dansla vésicule vitelline : mais elle subira des modifications importantes dont il sera bientôt question. Au commencement du troisième jour, celui où, suivant la juste remarque de M. G.Pouchet, le travail estle plus actif, les lobes op- tiqueset les hémisphères, qui n’existaient pas jusqu'alors, font leur apparition,mais les yeux sont encore dépourvus de pigment : lobes olfactifs indistincts ; circulation ombilicale bien établie; circulation générale encore incomplète; sang déjà légèrement coloré en rouge; palettes ou nageoires pectorales rudimentaires. Les capsules au- ditives se présentent sous la forme de deux cavités contenant chacune deux otolithes; pas de traces de labyrinthe ; cavités olfactives à peine visibles. L’embryon exécute dans l’œuf des mouvements assez vifs, indices d’une éclosion toute prochaine ‘. Soixante ou soixante-cinq heures après que l’œuf a été fécondé, l'embryon brise ses enveloppes, dégage sa queue en l’étendant, tandis que la tête et le reste de son corps demeurent appliqués sur l'énorme vésicule vitelline, qui longtemps encore doit four- nir à sa nourriture et au développement de certains organes de nouvelle formation (branchies et appareil branchial, intestin, foie, etc.). Au moment où il naît, le jeune Macropode a la forme d’un têtard de Batriciens. Ses deux gros yeux sont encore dépourvus de pigment. Il n’a ni bouche, ni intestin, ni orifice anal. Cepen- dant le cœur est en mouvement depuis plus de quinze heures. 1 La rapidité avec laquelle les phases embryogéniques se succèdent dans l’œuf du Macropode: ne nous a pas permis de nous assurer, de visu, s'il présente à une certaine époque de son développement la rotation de l'embryon contenu dans son intérieur. Mais il est très-probable que ce phénomène doit avoir lieu dans l'œuf de notre petit poisson chinois, puisque Baër l’a observée dans la Brême, Rusconi dans le Brochet, Carl Vogt dans la Palée: Lereboullet l'a vue dans la Perche, mais il prétend qu'une véritable rotation embryonnaire n’a jamais lieu dans l'œuf du Brochet. MACROPODUS PARADISI. AG Pas de branchies, pas d'organes sécréteurs de la bile ou de l’u- rine, pas de nageoires autres que les pectorales, pas de squelette osseux, pas d'organes génitaux. Mis dans une goutte d’eau sur le porte-objet du microscope, il y frétille vivement par inter- valles, bien qu'on n’aperçoive encore chez lui aucune fibre mus- culaire striée ou non striée. La taille est alors de 0,15. Le premier, et même les deux premiers jours après la nais- sance, les palettes natatoires sont immobiles. Vingt-quatre heures plus tard, la bouche apparaît sous la forme d’une fente ou plutôt d’un simple sillon transversal. Le lendemain elle s'ouvrira, et la mâchoire inférieure sera nettement séparée de la supérieure. Elle commencera même à exécuter de lécers mouvements. Le cœur bat avec vitesse. Appareil circulatoire. — Deux courants sanguins princi- paux sont en mouvement : l’un, artériel ou centrifuge, part du cœur, côtoie le dessous de la corde dorsale, s’étend jusque vers la partie moyenne de la queue, et, se recourbant sur lui-même à la manière d'une anse, devient l’origine de la veine cave pos- térieure, tandis qu'une grosse veine ombilicale ramène au cœur le sang qui a respiré dans la vésicule du même nom. Car alors, ne l’oublions pas, il n'y a aucune trace de branchies, ni même d’ares branchiaux. Ces organes se formeront plus tard lorsque, la circulation vitelline ayant à peu près complètement cessé, la respiration branchiale deviendra nécessaire pour l’hématose. Durant cet intervalle, de nombreuses modifications auront lieu dans la circulation vitelline, qui, de äiffuse et de lacunaire qu’elle était d’abord, du moins en parte, deviendra lout à fait vascu- laire; des anses artérielles et veineuses apparaîtront sur les côtés de la queue ; mais elles ne s’étendront pas tout d’abord jusqu'à sa partie terminale. Canal digestif. — L'intestin n'apparaît que beaucoup plus tard, vers le sixième jour après l’éclosion. Il est alors très-peu 1e 32 462 _- MÉMOIRES ORIGINAUX. distinct et ne paraît contenir encore que des gouttelettes huileüses et des globules vitellins. Cependant je l’ai vu fonctionner et rendre par l’orifice anal de véritables excréments chez un indi- vidu à peine âgé de huit jours. Le foie, les reins, les urèthres et la vessie urinaire ne se montreront également que très-tardive- ment: j'avoue même ne les avoir jamais aperçus d’une manière bien certaine chez les individus soumis à mon observation, et je conserve des doutes sur leur existence chez les petits Macropodes âgés de près d’un mois. Squelette. — La partie centrale du squelette futur ( corde dor- sale) apparaît de très-bonne heure (dès le second jour de l’incu- bation) et quand la plupart des organes sont encore à l’élat de gangue cellulaire. Elle s'étend, en avant jusque derrière les yeux, en arrière jusqu à l'extrémité de la queue. Elle est, comme toujours, formée d’un assemblage de grosses cellules, pour la plupart elliptiques ou polygonales, et contenue dans un étui bien visible, qui en s’ossifiant donnera naissance, beaucoup plus tard, aux arcs vertébraux, tandis que la corde dorsale elle-même formera le corps des vertèbres. Les os, ou plutôt les cartilages de la tête, existent, d’après M. G. Pouchet, chez les individus nés à peine depuis deux jours : j'ai vu les arcs branchiaux nettement dessinés vers le cinquième jour après la naissance *. Pas de côtes visibles, même à la fin du premier mois. Mais les masses musculaires sont indiquées déjà chez l’em- bryon encore dans l’œuf, et les fibres striées se montrent dés la fin de la deuxième semaine autour de la corde dorsale. La division de cette corde en cylindres (corps ou centrums des vertèbres futures) a lieu, avons-nous dit, chez l'embryon encore dans l’œuf. Système nerveux. — Du système nerveux, je n'ai aperçu un 1 Chez un de mes poissons, j'ai vu les arcs postérieurs se former le troisième jour après la naissance. MACROPODUS PARADISI. 463 peu distinctement, grâce à la demi-transparence des cartilages crâniens, que trois masses cérébrales disposées par paires et à la suite l’une de l’autre. Je serai d'autant plus réservé dans la détermination de chacune d'elles, que les anatomistes sont encore loin de s’entendre au sujet de l’analogie à établir entre les parties constitutives du cerveau des Poissons et celui des Mammifères. Je dirai simplement que le cerveau existe chez le Macropode même avant la sortie de l'œuf, et que, vu l’énorme développe- ment des yeux, je suis tenté de regarder comme étant les lobes optiques les deux masses cérébrales les plus volumineuses, c’est- à-dire les masses médianes ; les masses antérieures représentent les hémisphères cérébraux, et les postérieures le cervelet ‘, dont l'apparition est généralement plus tardive que celle des autres masses nerveuses cérébrales. Quant à la moelle épinière, elle m'est apparue très-distinctement, vers le huitième jour, sous la forme de deux cordons nerveux placés côte à côte au-dessus de la corde dorsale (plus tard les vertèbres ). Nulle trace percep- tible de nerfs périphériques chez les embryons larvaires âgés d’un mois. Et cependant, à cette époque la peau est encore assez transparente pour laisser voir le cours du sang dans presque toutes les parties du corps, malgré les nombreuses taches de cou- leur obscure dont son tissu est partout parsemé. Ces couches elles-mêmes, très-semblables à celles que nous avons étudiées chez les jeunes Axolotls, ne sont non plus rien autre chose que des cellules chargées de pigment jaune ou noir et plus ou moins ramifiées *. Quant aux écailles, si nombreuses et si brillantes chez le Macropode adulte, il n’en existait pas vestige chez le dernier sur- vivant de nos élèves, mort un mois après sa naissance. Du reste, personne n'ignore que l'apparition des écailles est encore plus 1 Lereboullet donne de ces trois paires de masses nerveuses une détermination peut-être plus exacte: il considère les antérieures comme étant les lobes olfactifs ; les médianes sont pour lui les lobes optiques; et les postérieures les auditifs. ? La formation des taches pigmentaires chez le Macropode a été très-bien étudiée par M. Georges Pouchet ; Mémoire cité, pag. 378. 464 MÉMOIRES ORIGINAUX. tardive que celle des dents chez les poissons osseux, exceplé toutefois la Pæcilie de Surinam. Organes des sens. — Les yeux sont les premiers dans l’ordre d'apparition (deuxième jour): leur pigment noir apparait seule- ment après la naissance. Immobiles d'abord, ils deviennent ensuite mobiles dans leur orbite. Je n'ai pu distinguer nettement qu'après la naissance les fossettes olfactives et les capsules auditi- ves, renfermant chacune deux otolithes. Organes locomoteurs. — La queue, si puissante, si efficace, si gracieuse dans ses mouvements chez l'animal adulte, ne sert que très-peu à la locomotion chez les très-jeunes individus. Et cepen- dant, chez ces derniers elle est entourée, en dessus et en dessous, d’une membrane continue, très-transparente , anhiste, dans laquelle on aperçoit de très-bonne heure les rudiments des rayons qui devront faire partie des futures nageoires dorsale, anale et caudale , qui elles-mêmes seront formées aux dépens de la nageoire embryonnaire. Le travail qui leur donnera nais- sance s'effectue ordinairement assez tard chez les quelques poissons osseux dont on a suivi avec soin l’embryogénie (Tan- che, Brochet, Truite, etc.), mais non chez la Pœcilie vivipare de Surinam, d’après les observations de M. Duvernoy. Chezce pois- son, en effet, les nageoires impaires existent déjà dans le fœtus sortant de l’œuf ‘. Quant aux nageoires pectorales, déjà visibles à l’état de ru- diment chez l'embryon encore dans l’œuf, elles ne se développent et n’entrent en fonction que deux ou trois jours après la nais- sance. Elles ont alors la forme de palettes membraneuses d’une grande délicatesse, que l’animal agite avec beaucoup de rapidité, et au moyen desquelles il glisse dans l’eau (la queue restant immo- 4 Duvernoy; Sur le développement de la Pæcilie de Surinam ( Pœcilia Suri- namensis Valenciennes), dans Annales des sciences naturelles, 3e série, tom. HE, pag. 341. 1844. MACROPODUS PARADISI. 465 bile et tendue) comme fait un cygne à la surface d’un lac tran- quille. Mais, pendant les premiers jours qui suivent sa naissance, notre petit Poisson chinois git au fond de sa prison liquide dans un tel état d’immobilité, qu’on le croirait tout à fait mort, et que l’on ne peut revenir de cette erreur qu’en le touchant avec un corps quelconque (aiguille à pointe obtuse, baguette de verre, etc.). On le voit alors monter à la surface, en frétillant à la manière des têtards de grenouille, puis, agitant rapidement ses nageoires pectorales et en s’aidant de sa queue, s’élancer en droite ligne comme un trait, ou bien enfin demeurer immobile à la même place, malgré le mouvement précipité et incessant de ces mêmes nageoires pectorales. Avec le temps, les palettes natatoires changent de forme, ou du moins se présentent sous divers aspects. D'abord allongées, de fieure presque triangulaire et terminées au sommet, c'est-à-dire à leur extrémité libre, par un bouquet de cils divergents , elles prennent plus tard la forme de vraies palettes à contours arrondis et sont munies d’une membrane très-fine, légèrement concave en dedans, et garnie de longs cils sur ses bords: Plus tard, ces cils ressemblent à de petites baguettes obtuses à leur bout libre, et m'ont paru enveloppés dans une membrane très-délicate, premier rudiment de la membrane définitive qui doit loger les rayons. Extrèmement rapides et presque continus, avons-nous dit, chez l'embryon, les mouvements des nageoires pectorales se ra- lentissent beaucoup chez l'animal adulte. Ajoutons que, par une sorte de balancement organique, ces mêmesnageoires, aussi bien que les ventrales, resteront toujours peu développées en compa- raison des nageoires dorsale, anale et caudale. Notons encore que, avant d'acquérir sa forme définitive, notre Macropode aura vu sa queue diminuer sensiblement de longueur, et par consé- quent se résorber, du moins en partie, à la manière de celle des Batraciens anoures. Modifications importantes dans la respiration et la circulation. — 466 MÉMOIRES ORIGINAUX. La respiration qui, avant l'apparition du réseau vitellin, était uniquement générale ou cutanée, s'exécute, dès que ce réseau est formé, au moyen d’un appareil transitoire (la vésicule vitelline), qui lui-même sera bientôt remplacé par l'appareil branchial. Quant à la circulation, bien qu’il ne nous ait pas été donné de la suivre daus toutes ses phases et notamment pendant la forma- tion du tube intestinal et après la disparation de la vésicule vitel- line, ce que nous en avons vu suffit pour nous convaincre que le cours du sang subit chez le Macropode, à ses divers âges, des modifications tellement analogues à celles que Lereboullet a ob- servées chez la Perche, que nous pouvons nous borner à trans- crire ici presque textuellement ce qu’il a dit dans son important ouvrage déjà cité. Voici comment s'exprime le savant professeur de la Faculté des sciences de Strasbourg: € La circulation vitelline apparaît, pour ainsi dire, en même temps que la circulation générale. » Déjà, avant que les globules soient en mouvement, avant même que le cœur soit pourvu d’une cavité, on voit se former à la surface du vitellus, principalement dans la région qui corres- pond au foie, un réseau trés-fin, dont les cordons sont linéaires. Mais bientôt ces cordons s’élargissent et donnent naissance à des lacunes dans lesquelles le sang ne tarde pas à pénétrer. » Je crois donc que les vaisseaux du vitellus, comme ceux du corps, se forment par écartement des tissus et sont d’abord des lacunes ‘.» ; Le réseau dont nous venons de parler est d’abord simple et situé du côté gauche ; plus tard, il s’en formera un semblable du côté droit. = Le premier est une dépendance dela veine cave postérieure ; le second dérive de la veine sous-intestinale. » Lereboullet continue : 1 Lereboullet; Recherches d'embryologie comparée sur le développement du Brochet, de la Perche et de l'Écrevisse, pag. 140. Paris, 1842. MACROPODUS PARADISI. 467 « Pendant que l'intestin se développe, il reçoit un appareil vasculaire particulier qui lui est fourni par l'aorte. Cet appareil se compose de deux rameaux artériels, qui vont former un nom- bre considérable d’anses vasculaires autour de l'intestin, puis se réunissent à la veine sous-intestinale. » Cette dernière se jette dans le vitellus, et forme alors à elle’ seule le réseau vitellin. » Cette disposition diminue la quantité de sang veineux qui se rend au vitellus, parce que le sang de la veine cave se rend di- rectement au cœur et cesse d'alimenter le réseau vitellin. » Il existe alors dans l'embryon trois sortes de sang : du sang artériel pur dans le réseau vitellin: du sang veineux pur dans les veines qui reviennent au cœur sans passer par le vitellus; et du sang mélangé dans le cœur et dans l’aorte ‘... » « À la naissance, le cœur est composé de deux poches repliées l’une sur l’autre. En avant, il se prolonge entre les arcs bran- chiaux en un vaisseau qui se bifurque et envoie un rameau le long de l’arc branchial le plus reculé en arrière. Arrivé à l'extrémité de l’arc, le rameau forme une boucle et se continue, après avoir rejoint le rameau du côté opposé, pour former l'artère aorte. Celle-ci se porte en arrière jusqu’à une petite dislance de l’extré- mité du corps. La veine qui fait suite à l’artère est placée au- dessous d’elle et retourne directement au cœur. » De l'aorte partent deux vaisseaux : l’un en avant du tube di- gestif, l’autre en arrière, qui se portent le long de l'intestin, pour former des anses intestinales. La veine qui ramène le sang de ces anses contribue seule à établir le réseau vitellin. Ce dernier se jette dans l'oreillette avec la veine cave principale ou posté- rieure, et la veine cave antérieure, qui ramène le sang de la tête. La réunion de toutes ces veines à l’entrée de l’oreillette furme les sinus de l'oreillette connus sous le nom de ductus Cuvieri... » Quand la vésicule vitelline a disparu, la veine sous-intestinale qui lui fournit un de ses réseaux se rend au foie, s’y capillarise et devient veine porte. 3 4 Lereboullet ; Ouvr. cité, pag. 156. M 7 468 MÉMOIRES ORIGINAUX. Lorsque la circulation générale est établie, c’est-à-dire quelques jours après la naissance, «on voit partir de l’aorle, dans toute l'étendue de son bord supérieur, des artérioles très-déliées, qui montent verticalement vers le dos, se recourbent, soit en avant, soit en arrière, dans une direction horizontale, puis se changent en veinules qui redescendent parallèlement aux arté- rioles, et vont se jeter dans la veine cave. Les parties latérales du corps sont alors munies de petits vaisseaux plus ou moins si- nueux, également distancés, qui tous forment sur le dos deux séries linéaires symétriques d’anses reliées les unes aux autres ?. » Le Macropode subit des métamorphoses. — Telle est, en rac- courci, la série des changements qui se manifestent à divers in- tervalles chez notre poisson nouveau-né, Ces changements ne sont-ils pas de même nature, et au moins aussi nombreux que ceux qui se succèdent chez la Lamproie de Planer (Petromyzon Planeri) etmême chez les Insectes et chez les Crustacés décapodes*? Admetire la réalité des métamorphoses pour la Sauterelle, par exemple, et pour les autres ORTHOPTÈRES OU HÉMIPTÈRES qui sortent de l’œuf avec toutes leurs parties, sauf les ailes, et refu- ser de croire à ce phénomène lorsqu'il s’agit des poissons, ce 1 Lereboullet ; Mém. cité, pag. 146, 156, 170, 174. 2 Avant la publication de notre travail intitulé : Études sur les mœurs, le déve- loppement et les métamorphoses d'une petite Salicoque d’eau douce (Caridina Des- marestiü), suivies de quelques réflexions sur les métamorphoses des Crustacés décapodes en général, (Ann. sc. nat.. ?esérie, tom. XIX, pag. 34. 1843), et malgré les affirmations de Thompson, on croyait généralement que les Crustacés décapodes ne subissaient aucune métamorphose. Le professeur Westwood avait même com- posé un long Mémoire dont le titre seul : «On the supposed existence of meta- morphoses in the Urustacea, indique assez le but etles conclusions. Nous croyons avoir contribué, pour notre part, à détruire l'erreur que semblait vouloir consa- crer M. Westwood. Si nous rappelons ici notre propre travail, c'est que nous te- nons à bien constater que seize ans avant la publication de la Note de M. Coste (Compt.-rend. de l’Institut, séance du 22 mars 1858), nous avions démontré chez chez la Caridina Desmarestii, la réalité des transformations très-analogues à celles que le savant académicien a signalées chez la Langouste, transformations dont on a retrouvé depuis d'autres exemples chez les Crustacés les plus élevés dela série. MACROPODUS PARADISI. 469 LS serait, ce me semble, tout à la fois manquer à la logique et fermer volontairement les yeux à l’évidence. Qu'est-ce, en effet, que la métamorphose ? On entend par ce mot, dit Lacordaire, «tout changement par lequel un animal paraît autre qu'il n’était auparavant, par l’ad- dition de nouveaux organes ou l’occultation de ceux qu’il présen- tait. » La définition de Lacordaire s'applique aux transformations qui ont lieu dans l'œuf, aussi bien qu’à celles qui s’opèrent après la naissance. Celle de Lamarck est moins compréhensive, et, par cela même, plus en harmonie avec l’idée qu’on se fait généralement du phé- nomene. L'auteur de la Philosophie zoologique appelle MÉTAMoRPHOSE cette particularité de l’INSECTE de ne pas naître, soit sous la forme, soit avec toutes les sortes de parties qu'il doit avoir dans son der- nier état *.» Supprimons le mot insecte, qui particularise trop la définition de Lamarck, et cette définition pourra évidemment s’appliquer aux modifications que subit un animal quelconque, lequel offrira en naissant une forme difiérente de celle qu’il doit avoir à l’âge adulte, ou sera privé’ de certaines parties qui caractérisent ce même âge. À l'exemple de M. de Quatrefages, réserverons-nous le nom de MÉTAMORPHOSE aux changements subis après l’éclosion, et qui altérent profondément la forme générale ou le genre de vie de l’in- dividu * » ? Quelle que soit celle des trois définitions qu’on adopte, elle conviendra de lous points à l’ensemble des modifications que l’âge et la série des développements impriment aux formes exté- rieures ou à l’organisation intime de notre petit Poisson chinois. 1 Lacordaire ; Introduction à l'Entomologie, tom. I, pag. 15 ? Lamarck; Histoire naturelle des animaux sans vertèbres, tom. LIT, pag. 277, ire édition. $ De Quatrefages ; Les métamorphoses; Revue des Deux-Mondes, 1er avril 1855. 1, 33 470 MÉMOIRES ORIGINAUX. A l’idée de métamorphose se rattache un caractère d’une haute importance : c’est la substitution graduelle d’un ou de plusieurs organes définitifs à un ou plusieurs organes transitoires. Or, ce caractère, nous le retrouvons aussi chez notre Macropode. ÏH y a donc chez lui, comme chez la Grenouille, comme chez les Insectes, comme chez les Crustacés décapodes, etc., tout à la fois ou successivement : 1° Formation de parties nouvelles (bouche, intestin et ses annexes, branchies, appareil générateur, nageoires ventrales, dorsale et caudale; écailles, squelette osseux ); 2° Disparition de parties précédemment existantes ( vésicule ombilicale et ses vaisseaux transitoires, membrane caudale ou nageoire embryonnaire); 30 Modification. La modification s’observe dans la forme du corps, dans la structure du cœur, toute cellulaire à l’origine; dans les yeux, d’abord immobiles et privés de pigment ; dans la place qu'ils occupent chez l’adulte et chez l'embryon ; dans la nageoire embryonnaire, d’où sortiront les vraies nageoires impaires, etc. Or, formation, disparition, modification, tels sont les trois modes essentiels que comprend, suivant Dugès, notre Maître si regretté, cette opération très-complexe qu'on appelle Méiamor- phose, et dont, si je ne me trompe, l’embryogénie du Macropode nous arendus témoins. Du reste, la petitesse de l’œuf ", et surtout l'extrême rapidité du développement de l'embryon encore enfermé dans cet œuf, auraient suffi pour nous faire présumer que chez cette espèce il existait de vraies métamorphoses. Nous avons tout lieu de penser que les observations du professeur Agassiz établiront bientôt la généralité de ce phénomène chez les Poissons osseux. 1 La petitesse relative de l'œuf entraine nécessairement avec elle la petitesse de l’embryotrophe et la rareté des éléments formateurs. C'est là, sans doute, une des causes principales de la métamorphose. Par exemple : l'œuf de la Langouste est très-petit: elle subit de notables changements après l'éclosion. L'œuf de l'Écre- visse est relativement très-volumineux : elle naît avec tous ses organes essentiels. La précocité de l’éclosion est aussi l'une des causes dont il doit être tenu compte pour expliquer la métamorphose considérée d'une manière générale. MACROPODUS PARADISI. 471 EXPLICATION DES FIGURES. Les quatre premières Figures de cette Planche sont empruntées au Mémoire de M. G. Poucxer. F16. {. OEuf du premier jour, observé à 4 heures et demie du soir. FiG. FIG. FIG. FrG. FIG. 2. Le même, vu à 8 heures du soir, même jour. 3 : Le même, observé le lendemain. Le même, vu de profil. OEuf observé par moi le deuxième jour après la fécondation, à 6 heures du matin; y, y les yeux; e éminence plus claire qui les sépare ; g, saillie représentant la queue ; b blastoderme; v vitellus avec ses gouttes huileuses et ses globules; c coque ou membrane extérieure de l'œuf; / liquide albumineux. Embryon près d'éclore. La tête £ et le corps c sont enroulés autour du vitellus ; & p taches pigmentaires ; y, y yeux ; c' cœur; v vésicule ombilicale déjà semée de taches pig- mentaires et renfermant une grosse goutte huileuse et des gouttes plus petites; ao aorte; v c veine cave envoyant une bran- che à la vésicule vitelline où la circulation du sang est établie; p palette natatoire à l’état rudimentaire. Fig. 7. Embryon éclos, âgé de quatre heures de plus que le précé- dent. Les mêmes lettres indiquent les mêmes parties que dans la fig. 6 : a o artère aorte,qui se continue en formant une anse a avec la veine cave v c; v, Lo veines et lacunes ombilicales ; p, p palettes natatoires ; c d corde dorsale avec ses divisions vertébrales d v.; m masses musculaires divisées; ne na- geoire embryonnaire ; mc masses cérébrales. Fire. 8. Embryon de quelques heures plus âgé que le précédent. Les mêmes lettres indiquent les mêmes parties que dans la fig. 7; m c, masses cérébrales. Fi. 9, Embryon larvaire encore ua peu plus âgé que celui de la fig. 8. Les mêmes lettres indiquent les mêmes parties que dans les fig. 7 et 8. F1G. 10. Dessin schématique destiné à donner une idée de la circula- tion vitelline quand la veine sous-intestinale est formée : vs 4 cette veine sous-intestinale longeant la vésicule vitelline, et 472 Fic. 11. Fiac. 12. F1G. 13. F1G. 14. MÉMOIRES ORIGINAUX. lui envoyant du sang qui circule dans les lacunes / des parois de cette même vésicule ; g h grosse goutte huileuse; g'h’ gouttes plus petites; v c p veine cave postérieure ; a o aorte dorsale formée par les deux arcades branchiales à, db; c’ cœur; a a arcades artérielles ; v veinules qui en naissant vont se rendre dans la veine cave postérieure ; a à artère intestinale et son réseau capillaire; c d corde dorsale. Embryon larvaire de Macropode âgé de huit jours; b bouche; y y yeux, fo fossettes olfactives; c a capsules auditives; m c masses cérébrales peu distinctes et vues par transpa- rence; op opercules qui s'ouvrent en même temps que la bouche et en dehors desquelles j'ai cru voir de chaque côtéun des rayons branchiostéges avec des cils en mouvement ; pp palettes natatoires ou nageoires pectorales ; g h grosse goutte huileuse du vitellus, comme devenue bifide par l’appli- cation de la partie dorsale de l'abdomen à sa surface; p a parois abdominales qui commencent à englober la goutte bifide; q queue ; nr nageoire embryonnaire. À travers la peau parsemée de chromoblastes, dont plusieurs déjà sont étoilés, on aperçoit la corde dorsale divisée en cylindres c y, ainsi que les masses musculaires m indiquées par des lignes de séparation. L’ani- mal est vu en dessus. Pour ne pas compliquer la figure, on n’a pas représenté les vaisseaux sanguins, où la circulation est très-active, et qu on aperçoit encore, grâce à la demi-transpa- rence des tissus. Larve ou têtard de Macropode âgé de près d'un mois. Les let- tres indiquent les mêmes parties que dansla fig. 11; 1, lobes ol- facifs; 2, lobes optiques; 3, hémisphères cérébraux; 4,cervelet. Les grosses gouttes huileuses sont déjà considérablement ré- duites. Elles le sont encore davantage dans la fig. suivante, qui représente ces mêmes gouttes huileuses chez un têtard encore plus âgé (un mois juste). Palettesnatatoires ou nageoires pectorales d'un têtard âgé d'un mois: g À gouttes huileuses; à intestin bien formé, mais encore peu distinct. Perche âgée de cinq jours; réduction considérable du vitellus. a a'otolithes; b b’ canaux demi-circulaires ; c aorte ; d artères qui forment les anses vertébrales ; e veines de ces anses; f veine cave ; g artère intestinale antérieure; hartère intestinale postérieure ; à veine intestinale ; elle ne fournit au vitellus, ou plutôt sur la goutte d'huile k, qu'un petit rameau s qui forme MACROPODUS PARADISI. 473 des mailles allongées; / veine cave antérieure ; m paroi de l'intestin ; n sa cavité; o corps de Wolf; p dilatation ter- minale de son tube excréteur ; g vessie natatoire ; r nageoire pectorale ; s vitellus ; s’ goutte d'huile ; & parois abdominales; x anus. N. B. Cette figure, copiée d’après Lereboullet, pl. IT, fig. 15 de ses Recherches d'embryologie comparée, est destinée à faire voir la circu- lation telle qu’elle existe quand l'artère intestinale et la veine sous- intestinale sont formées. F1G6. 15. Portion de corde dorsale cd, avec la gaîne g et les masses musculaires qui l'entourent; f s fibres musculaires striées. F16. 16. Portion postérieure de la queue d'un embryon larvaire âgé de huit jours : c d corde dorsale; r p rayons primitifs de la fu- ture nageoire caudale, vus à travers la nageoire embryon- naire. F16. 17. Portion postérieure de la queue d’un embryon larvaire âgé de dix jours : c d corde dorsale; r p rayons primitifs des na- geoires. F16. 18, 19,20. Nageoires pectorales à divers degrés de développement. En m, fig. 20, on voit la fine membrane qui réunit les rayons r jusqu alors isolés. F16. 21. Taches pigmentaires ou chromoblastes à divers degrés de déve- loppement. F16.22. Cœur vu à travers les tissus chez un embryon larvaire âgé de six jours: v c veines caves ; o œil droit, b bulbe artériel? v ventricule ; or oreillette. F16. 23. Cœur d’un individu à peu près de même âge. Les mêmeslettres indiquent les mêmes parties que dans la fig. précédente : v si embouchure de la veine cave sous-intestinale, ou plutôt de la veine ombilicale qui en dérive. Fa. 24. Macropode adulte et de grandeur naturelle. 74 MÉMOIRES ORIGINAUX. DESCRIPTION GÉOGNOSTIQUE DU VERSANT MÉRIDIONAL DE LA MONTAGNE NOIRE DANS L'AUDE, Par M. LEYMERIE, Professeur à la Faculté des sciences de Toulouse. PROLÉGOMÈNES. DÉLIMITATION DE LA MONTAGNE NOIRE. La chaîne de montagnes que l’on désigne par le nom de Mon- tagne Noire se rattache au massif central de la France, dont elle forme l’extrémité du côté du sud. Néanmoins elle peut être regardée comme ayant une existence propre, ne füt-ce que pour la commodité des études spéciales dont pourrait être l’ob- jet cette protubérance qui joue un grand rôle dans l’orographie et dans la géologie du Languedoc. L’individualité de la Montagne Noire s’accuse même assez bien lorsqu'on cherche à l'embrasser d'un coup d'œil dans son ensemble ; mais on éprouve quelque embarras lorsque lon cherche à préciser ses limites. Si on la considère d’abord dans un sens longitudinal, on la voit commencer à l’ouest par une pointe bifurquée au milieu des dépôts tertiaires et quaternaires du bassin de Revel. Il n’y a donc aucune incertitude de ce côté; mais il n’en est pas de même du côté où elle vient se souder aux Cévennes. En se plaçant au point de vue le plus élevé, il semblerait qu’elle devrait se terminer vers Bédarieux, où une région jurassique vient ar- rêter ou au moins suspendre l’extension des terrains anciens qui jusque-là avaient régné dans la composition de ce massif. La limite méridionale est nettement accusée par la ligne d’intersection du versant sud avec la plaine, c’est-à-dire avec la vallée du canal du Midi. Reste à déterminer la limite au DESCRIPTION GÉOGNOSTIQUE DE LA MONTAGNE NOIRE. 475 nord. À cet égard, on pourrait rester dans une indécision analo- gue à celle que nous avons signalée en cherchant à fixer l’extré- mité orientale. Cependant il faut prendre un parti, et nous adoptons celui qui consisterait à arrêter notre chaîne, de ce côté, à une ligne tracée au milieu de la zone schisteuse dirigée au nord- est, passant par Brassac, zone que l’on voit, sur la Carte géolo- gique de France, s’allonger entre la chaîne que nous étudions et le massif central qui se terminerait par le granite du Sidobre. Cette manière de voir est d’ailleurs à peu près conforme à celle qui a été adoptée et exprimée par M. Dufrénoy dans lar- ticle consacré à la Montagne Noire, à la page 158 du premier volume de l'explication de la Carte géologique de France. Telles sont les limites possibles de la Montagne Noire considérée dans son ensemble avec toute l'extension qu’on peut raisonnablement lui attribuer ; mais il y a lieu de distin- guer dans cette chaîne générale un massif plus restreint que l’on pourrait regarder comme la Montagne Noire proprement dite. En effet, la Carte géologique de France, où nous avions déjà trouvé l'indication des limites générales qui viennent d’être esquissées, nous suggérera l’idée de considérer à part et de lais- ser à l'écart les montagnes de Lacaune qui appartiennent au département du Tarn, formant un chaînon assez distinct par sa direction N.-E. et par son élévation dont la cote maximum atteint 4,255" au pic de Montalet, non loin et au S.-E. de la petite ville qui vient d'être nommée. D'un autre côté, la limite orientale du massif général, que nous avions étendue jusqu’à Bédarieux, pourrait être rapprochée du département de l’Aude jusqu’à une ligne comprise entre Saint-Chinian et Mazamet, passant par Saint-Pons, et qui se trouverait bien accusée par les deux petites vallées contraires du Vernazobre et du Thoré. La montagne, ainsi réduite, formerait un massif fusiforme allongé de l’est à l’ouest, assez nettement circonscrit entre la ligne précédente, continuée par le bord de la plaine de Revel, et la base du versant sud au bord de la vallée du canal. Le dépar- 476 MÉMOIRES ORIGINAUX. tement du Tarn en prend une zone septentrionale, et ceux de l'Aude et de l'Hérault se partagent le versant méridional dans la proportion des 2/3 pour l’Aude et de 1/3 pour l'Hérault. Si nous ajoutons que la Haute-Garonne revendique une parcelle de la pointe occidentale, c’est pour avoir l'occasion de signaler cette particularité bizarre, que le point où la limite de ce dépar- tement vient rencontrer celles du Tarn et de l’Aude se trouve au milieu du bassin de Saint-Ferréol, où s'emmagasinent les eaux qui descendent de la montagne, pour l'alimentation du canal du Midi, bassin dont la superficie, nonobstant son exiguité, se trouve ainsi répartie entre trois départements. MONTAGNE NOIRE PROPREMENT DITE. COUP D'ŒIL D'ENSEMBLE. La petite chaîne dont nous venons d'indiquer les limites, et dont la direction E.-N.-E. diffère sensiblement de celle des montagnes de Lacaune, forme un tout continu; mais sa crête n’est pas très-régulière : elle s’avance beaucoup au nord vers le milieu de sa longueur, au-dessus de Laprade, et détermine ainsi une assez grande inégalité entre les deux versants, dont l’un, celui du sud, est beaucoup plus large que l’autre. La ligne de faîte est marquée par des cimes ; mais ces points culminants consis- tent en des bosselures qui diffèrent beaucoup des dentelures pro- fondes et des pics hardis qui accidentent habituellement la crête des Pyrénées et qui s’accusent aussi plus ou moins dans le massif des Corbières. Ces protubérances de la Montagne Noire n’ont d’abord qu’une faible altitude vers l’extrémité occidentale où le massif sort de terre pour ainsi dire. Elles s'élèvent de plus en plus en avançant vers l’est, c’est-à-dire vers la région par laquelle notre montagne se lie aux Cévennes. C'est de ce côté, à peu près sur le méridien de Caunes, que se trouve le pic de Nore, dont la cime atteint l'altitude maximum de 1.210m. Le versant nord de cette petite chaîne appartient au dépar- tement du Tarn. Nous n’aurons pas à nous en occuper ; mais le versant sud, le plus important à tous égards, doit appeler au * DESCRIPTION GÉOGNOSTIQUE DE LA MQNTAGNE NOIRE. 477 contraire toute notre attention, parce qu'il constitue un destraits les plus accentués du Languedoc. Ce versant est simple et régu- lier dans toute la partie qui rentre dans la circonscription du département de l’Aude, qui comprend plus des 2/3 de la mon- tagne ; mais elle ne l’est pas autant dans la région de l'Hérault séparée de la précédente par une sorte de faille générale à l’est de laquelle les terrains se portent brusquement au nord et avec des traces de dérangements dont l’autre partie est exempte. Nous n’aurons pas d’ailleurs à nous occuper de ces perturbations qui se trouvent en dehors des limites de l’Aude, où s’arrête notre travail. Considérée dans une même coupe transversale, la pente de notre versant n’est pas uniforme ; elle y prend deux valeurs très- différentes : l’une, assez considérable, se rapporte au terrain fon- damental qui constitue les hauteurs ; l’autre, beaucoup moindre et faible même dans son ensemble, n’est autre que l’inclinaison naturelle des strates qui sont venues, à une époque relativement récente, recouvrir les premiers sur une partie du flanc et à la base du versant. ( Voir les coupes, fig. 1 et 3 de notre 1" planche.) On ne distingue dans le versant que nous avons à étudier aucune solution de continuité assez considérable pour mériter le nom de vallée ; mais il est creusé transversalement en plu- sieurs points inégalement distribués sur; sa longueur, d'où résultent des gorges la plupart étroites et profondes, quelques- unes, comme celle de l’Orbiel, sauvages et pittoresques. Au fond de ces gorges coulent des ruisseaux plus ou moins torren- tiels qui descendent pour verser leurs eaux d’abord dans le Fresquel, sorte de canal collecteur qui longe le pied du versant dans sa partie occidentale, jusqu'à Carcassonne, où la rivière d’Aude, qui vient d'entrer dans la vallée, se substitue pour ainsi dire au Fresquel dans cet emploi. Tels sont les traits les plus généraux de la Montagne Noire proprement dite. Ils nous représentent cette petite chaîne placée en face, à une très-petite distance, des Pyrénées et des Corbières, 47 MÉMOIRES ORIGINAUX. comme ayant des caractères propres, malgré certaines analogies géognostiques que nous aurons l’occasion de signaler; et il nous paraît rationnel de lui accorder une existence individuelle dans la géographie de la France, et de résister à cette tendance des géographes qui les porte à considérer notre montagne et les Cévennes, auxquelles elle se rattache, comme un jalon planté au pied des Pyrénées pour servir à lier cette chaîne aux Alpes par les montagnes du Lyonnais et par le Jura, qui lui-même est une chaîne bien distincte, malgré sa proximité des Alpes, par ses formes, par sa structure et par les terrains dont elle est essentiellement composée. APERÇU GÉOGNOSTIQUE DU VERSANT SUD. La faible pente des dépôts qui viennent d’être indiqués à la base de la montagne, sur son versant sud, les fait passer insen- siblement sousles remblais qui occupent le fond de la vallée du canal et de l’Aude, et toutes les probabilités sont en faveur de l’idée que ces étages si peu inclinés sont les mêmes qui se re- lèvent du côté opposé de la vallée, pour entrer dans la consti- tution des basses Corbières où ils ont subi des dérangements considérables. Il y a donc lieu de distinguer dans l'appréciation géognostique que nous avons à faire : 4° les terrains anciens ou fondamen- taux qui forment réellement l’ossature de la montagne ; 2° les dépôts plus récents, ci-dessus indiqués, qui ne seraient qu’une marge ou lisière des formations, soit lacustres, soit marines, qui ont leur développement normal dans les Corbières, et qui ont dû être déposés dans des bassins ayant leur rivage sur le versant que nous nous proposons d'étudier, à une assez faible hauteur au- dessus de sa base. Pour distinguer l’ensemble de ces dépôts peu inclinés qui occupent la partie inférieure du versant, de ceux qui constituent la haute montagne, nous emploierons souvent le nom de bande marginale. Nous nous occuperons successivement de ces deux ordres de DESCRIPTION GÉOGNOSTIQUE DE LA MONTAGNE NOIRE. 479 terrains si différents d’allure, d’âge et d’origine, en nous éten- dant davantage sur les premiers, qui sont restés presque incon- nus jusqu’à ce Jour. DESCRIPTION DES TERRAINS. PREMIÈRE PARTIE. TERRAIN ANCIEN. Le terrain fondamental de notre petite chaîne, constitué par le terrain primordial et le terrain de transition, et qui s’accuse au loin par son élévation, par son relief et par ses pentes ra- pides de part et d'autre de la ligne de faîte, a été objet de l’at- tention de M. Dufrénoy, l’un des auteurs de la Carte géologique de France. Mais ce savant géologue s’est occupé à peu près exclusivement du versant qui appartient au département du Tarn, auquel il a consacré un article à la page 459 du premier volume de la Carte géologique de la France, avec deux coupes figurées. Pour le versant sud, il n’en est question que dans la description d’une coupe de la chaîne entière passant par Caunes, sur laquelle nous aurons l’occasion de revenir. Dans la Carte géologique elle-même, le terrain primordial est assez bien séparé du terrain de transition sur notre versant, et l'ensemble de ces’ deux terrains anciens s’y trouve convenable- ment limité à régard des formations plus modernes qui s’éten- dent de ce côté vers le pied de la chaîne; mais il n’y a rien dans le texte sur la composition des terrains dont il s’agit, pour les- quels d’ailleurs aucune subdivision n’est indiquée. Les auteurs qui, après M. Dufrénoy, ont eu à s'occuper de cette partie de la montagne, n’ont fait que s’en tenir aux limites précédentes, et les choses ne sont pas plus avancées dans une carte inédite de M. Vène, coloriée sur Cassini. Il résulte de là que la région ancienne du versant sud de notre montagne, à l'exception du terrain de transition de Caunes, est restée Jusqu'à ce jour à peu près inexplorée. Ayant eu à nous 480 MÉMOIRES ORIGINAUX. occuper de ces terrains anciens pour la Carte géologique de l’Aude, nous avons été conduit à y reconnaître les principaux étages qui constituent le terrain primordial et le terrain de transition considérés d'une manière générale, et d’en étudier les caractères et la disposition. Nous nous proposons d'exposer ie brièvement les résultats de cette étude. Un coup d’œil général sur cette partie ancienne nous permet de reconnaître en premier lieu que, après avoir formé la crête de la montagne, elle s'étend et s’étale sur le versant jusque vers la base, où elle disparaît sous les dépôts modernes que nous avons signalés. — Si nous cherchons ensuite à faire la part des roches primordiales dans cet ensemble, nous remarquerons d’abord qu’elles jouent ici le principal rôle, et que le terrain de transition y occupe une place beaucoup plus restreinte. En effet, en considérant d'abord la partie occidentale du versant, entre Revel et Montolieu, nous verrons que, si ce n’était une interrup- tion locale dont nous allons parler, toute cette partie serait conslituée par le terrain primordial qui s'y trouve, en effet, en contact immédiat avec le calcaire garumnien. L’interruption a lieu par une bande de transition qui traverse la montagne vers son extrémité occidentale, où elle affleure entre Labécède et Verdun pour s'étendre vers les Cammazes (Tarn), dans une direction N.-E., et qui sépare et isole un petit massif de gneiss formant la pointe extrême de la montagne, massif que nous désignerons par le nom de Saint-Ferréol dont le bassin est pres- que entièrement dans ce gneiss. Dans la partie occidentale dont il vient d’être question, le terrain de transition normal existe probablement en superposition sur le gneiss ; mais 1l s’y trouve caché par les dépôts modernes, et ce n’est qu’à partir de Montolieu qu'il vient se montrer, entre la roche primordiale et l'étage garumnien sous la forme d’une bande qui ne fait que s’annoncer en bas de Montolieu, mais qui prend presque aussitôt vers l'Est une largeur assez consi- dérable qu’elle conserve jusqu’à Caunes vers la limite du dépar- tement de l’Aude. DESCRIPTION GÉOGNOSTIQUE DE LA MONTAGNE NOIRE. 481 Nous verrons plus loin que cet état de choses tient à la direc- tion de ce terrain, qui est oblique relativement à celle du rivage présumé du grand bassin où se sont déposés les terrains mo- dernes qui recouvrent la base du versant. Cette ligne de rivage qui forme la limite inférieure des terrains anciens, très-découpée à l’est du bassin de Saint-Ferréol, passe à la Pomarède, en bas de Labécède et de Verdun, à Cenne et à Montolieu, en descendant dans les gorges comprises entre ces villages. À partir de Montolieu elle remonte entre Brousse et Fraisse, d’où elle va passer sous Villardonnel et à Salsigne pour redescendre à Saissac au fond de la gorge de l’Orbiel et remon- er à Salelles d’où elle se dirige directement de l'ouest à l’est vers Caunes, par Villeneuve et le château de Villerembert. TERRAIN PRIMORDIAL Ce terrain est composé d’une partie massive essentiellement granitique et d’une partie stratifiée ou cristallophyllienne qui est ici principalement le gneiss. Granite. — Occupons-nous d’abord du granite. Si nous cherchons à le séparer du gneiss, nous éprouverons quelque difficulté. En effet, les deux ordres de terrains s'accompa- gnent presque partout, sont liés par des passages et leur limite générale est assez obscure, irrégulière et capricieuse. Nous avons cherché néanmoins à nous en faire une idée et à la tracer sur la carte. Voici le résumé des observations qui nous ont permis d'atteindre ce résultat : En procédant de l’est à l’ouest, nous ne trouvons pas de granite normal jusqu’à une petite distance à l’ouest du méridien de Lespinassière. Lo crête, vers cette extrémité, est occupée par le gneiss; mais au-delà de la limite indiquée, la roche mas- sive commence à s’y montrer, etelle ne la quitte plus jusqu’à la limite occidentale du massif. De ces hauteurs elle descend ptus ou moins sur le versant. Elle occupe, notamment au-dessus de Constans et de Pradelle, un espace assez considérable compre- 482 MÉMOIRES ORIGINAUX. nant le pic de Nore (1,210) point culminant de toute la chaîne. Sa limite se rapproche ensuite de la ligne de faîte en passant par le village des Martys; mais, à partir de ce point, elle descend brusquement au-dessous de Fontiers et de Brousse, en pous- sant un lobe avancé au sein des schistes de transition, pour | remonter bientôt par le hameau de Cros, un peu au nord de Saint-Denis et au-dessus de Saissac vers Lampy, où se termine le massif principal. Il n’y a pas lieu d’ailleurs de s'occuper à ce point de vue du lopin primordial de Saimt-Ferréol, qui est entièrement gneissique. La roche dont nous venons d’indiquer les limites se pré- sente sous différents aspects et varie aussi sous le rapport de la consistance, suivant les localités où on la considère dans une contrée donnée. Elle est quelquefois vive, mais plus souvent en état de désagrégation, offrant des masses solides, noyées ou éboulées au milieu d’une arène granitique. D’un autre côté, elle passe à l’état kaolinique par la décomposition de son feld- spath. Les grains qui la composent sont moyens ou assez petits, et son mica est noir, rarement vert. Il y a cependant des variétés à gros grains et même porphyroïdes, et d’autres qui prennent par atténuation le faciès de la leptynite. Comme roches accessoires formant particulièrement des amas ou des filons, nous citerons la pegmatite et le quartz. Le granit, tel que nous venons de le décrire, se trouve quel- quefois en contact avec les schistes de transition : il en est ainsi à l’est de Fontiers et de Brousse ; mais généralement 1l est ac- compagné de gneiss et passe même à cette roche en prenant des joints parallèles comme il arrive , par exemple, dans la région de Saint-Denis. Gneiss et Micaschiste. — Le gneiss est la roche qui domine dans notre terrain primordial. On pourrait y distinguer deux sortes : l’une à éléments assez gros peu solidement agrégés, qui pourrait être regardée comme un granite stratifié, et l’autre, plus solide, plus fissile, plus normale, qui passe au gneiss schis- DESCRIPTION GÉOGNOSTIQUE DE LA MONTAGNE NOIRE. 483 teux ou au schiste gneissique et même au micaschiste, et qui se laisse assez facilement diviser en dalles. Ces deux sortes sont souvent réunies dans le même lieu, et dans ce cas la première est généralement sous-jacente à la seconde; mais elles ne se trouvent pasen même proportion dans toutes les parties de la chaîne. Le gneiss grossier ou granitique règne dans la partie occidentale, tandis que l’autre se montre plutôt du côté opposé. Montolieu, qui se trouve être le point de séparation de ces deux sections de la montagne, est situé dans une conque ouverte dans le gneiss granitique, au point même où il va disparaître sous le calcaire garumnien, et les choses conti- nuent à se passer ainsi du côté de l’ouest jusqu'à Verdun, où le terrain de transition vient s’interposer, comme nous l’avons déjà dit, en isulant le petit massif terminal de Saint-Ferréol où do- mine un gneiss granitique très-sujet à la désagrégation. La sorte de gneiss que nous venons de citer comme la roche dominante dans la section du versant qui s'étend à l’ouest de Montolieu, a généralement une structure assez grossière, qui passe à la structure glanduleuse ou même porphyroïde par la présence de nombreux et gros ganglions ou de cristaux ébauchés de feldspath (Orthose). Le mica y est brun foncé ou noir, et le quartz, qui n’est ici qu'un élément accessoire ou secondaire, s’y présente en grains plus ou moins gros avec la teinte grise qui lui est habituelle. La stratification de ce gneiss est toujours distincte; quelquefois les éléments semblent s’y ordonner réla- tivement à une ligne droite, auquel cas il prend une structure longitudinale qui le dispose à se laisser diviser en parties bacil- laires. Ce gneiss, comme certains granites, est très-sujet à la désa- grégation et à se réduire en une arène grossière où dominent les nœuds feldspathiques dont il a été question ci-dessus ; mais il n’est pas rare de le voir associé ou même soudé à un autre gneiss fin et résistant, qui passe même au granite. D'un autre côté, on y distingue souvent des parties parallèles ou transver- sales blanches et jusqu'à un certain point kaolinisées d’une 484 MÉMOIRES ORIGINAUX. pegmatite riche en feldspath, à mica blanc irrégulièrement dis- posé, et dans laquelle le quartz est gris, bleuâtre ou noirci par la matière de la tourmaline. Ce dernier minéral forme d’ailleurs des enduits et s’introduit en cristaux imparfaits dans certaines parties de la roche. Celle-ci est encore accidentée par des veines et des nœuds de quartz. La seconde sorte de gneiss, plus consistante que la première, peu sujette à la désagrégation et à la kaolinisation, schisteuse au point de se laisser assez facilement diviser en dalles planes et régulières, peut être regardée comme le vrai type du gneiss or- dinaire ou normal. Le quartz y manque ou y est rare. Nous avons déjà dit que lorsque ce gneiss se trouvait avec le gneiss gra- nitique, il occupait le plus souvent la position supérieure, cir- constance qui nous permet d'expliquer son absence ou sa rareté dans la section occidentale. D’un autre côté, il passe, par le haut, au schiste gneissique ou même au micaschiste, et donne ainsi la main, pour ainsi dire, au terrain de transition. Le gneiss plus ou moins schisteux dontil est question se déve- loppe, nous l’avons déjà dit, dans la section orientale de notre pe- tite chaîne, où il occupe naturellement une place assez élevée au- dessus des dépôts modernes de la base, à cause- de l’interposition de la bande de transition au-dessus de laquelle seulement 1l y a lieu de le chercher. C’est en effet sur les hauteurs que nous le trouverions d'abord vers l’extrémité orientale du versant, où 1l recouvre une assise de gneiss grossier, en partie terreux et très- sujet à la désagrégation, qui constitue la crête de la montagne. De là il se prolonge en descendant un peu vers l’ouest sous la forme d’une zone passant entre le Mas-Cabardès et les Martys. Dans toute cette région orientale, le gneiss des deux sortes est très-régulier et affecte une inclinaison généralement modé- rée qui le porte constamment vers le sud. Nous avons à y signaler deux accident remarquables. L'un de ces accidents consiste en des filons de quartz qui traversent le système, en s’accusant à l'extérieur par des saillies longitudinales ou par la présence sur le sol de nombreux blocs éboulés, dont les angles et les arêtes DESCRIPTION GÉOGNOSTIQUE DE LA MONTAGNE NOIRE. 485 intacts indiquent le voisinage de la roche en place. Nous avons eu l’occasion d'observer à quelques kilomètres au nord de Les- pinassière, non loin de la crête, deux de ces filons très-rappro- chés lun de l’autre et que l’œii pouvait suivre dans la direction O. un peu S. sur une longueur de plusieurs kilomètres. ( Voyez la coupe fig. 1 de la planche déjà citée.) Un autre filon, qui tra- verse le gneiss granitique au voisinage de Brousse, nous a été indiqué par des blocs anguleux d’un beau quartz blanc qui gisent à mi-chemin entre Montolieu et Saint-Denis. Le second accident sur lequel nous désirons appeler un in- stant l’attention est plus curieux: c’est un véritable piton grani- tique qui à la crête même, au méridien de Lespinassière, sort brusquement du gneiss qu'il semble avoir relevé tout autour, formant ainsi une saillie prononcée qui a reçu le nom de Roc de Peyremoux, par lequel il est désigné sur la Carte de l’État- Major. La roche qui constitue ce piton est un granite grossier et altéré, divisé en blocs anguleux accumulés au pied d’une masse centrale ruinée et fendue en plusieurs sens. Il est entouré de tous côté de gneiss, et de grandes écailles de cette roche stra- tifiée semblent s'appuyer contre lui à sa base. Le Roc de Peyremoux forme dans la contrée un point culmi- nant (alt. 1,007m), qui a servi de signal pour les travaux rela- tifs à la Garte de France. Il se trouve compris dans notre coupe déjà citée, où l’on pourra juger de sa position. Nous avons cherché à donner une idée de sa forme et de son état ruiné et délabré, par le croquis (fig. 2.) rapidement esquissé en nous plaçant près de son pied du côté septentrional. Le gneiss normal dont il vient d’être question devient schis- teux dans la partie supérieure, et passe à un véritable schiste gnelssique que nous rattachons encore au terrain primordial. Nous y comprenons aussi, avec une certaine hésitation, un schiste micacé très-cristallin, qui est un véritable micaschiste en certaines places où le quartz entre dans sa composition, mais qui généralement ne paraît constitué que par du mica en larges I 4 486 MÉMOIRES ORIGINAUX. lames fortement adhérentes, légèrement courbes ou ondulées, d’un éclat brillant ordinairement argentin ; auquel cas le quartz ne se montre plus que comme un accident, comme s'il avait été sécrété de la masse sous forme de petits amas ou de veines irrégulièrement disséminés. Le terrain primordial stratifié en cristallo-phyllien affecte, au voisinage du massif granitique une inclinatson variable, assez mo- dérée dans la plupart des cas; mais, dans la partie orientale du versant, où il se développe indépendamment du granite, …1l forme des bandes parallèles, régulièrement inclinées aux environs du sud comme le terrain de transition qui lui est superposé et auquel il passe, nous le verrons ci-après, d’une manière insensible. TERRAIN DE TRANSITION. La terrain de transition ne se développe que dans la section orientale de la montagne où il forme, à partir de Montolieu, une bande dont la largeur assez uniforme est de 7 à 8 kilomètres. A l’ouest de Montolieu, où les terrains modernes couvrent immé- diatement le gneiss, nous savons qu'il n'est représenté que par une zone transversale qui affleure sur le versant entre Verdun et Labécède. Nous dirons quelques mots de cette zone, après avoir décrit la bande générale où le terrain ancien se trouve au complet avec tous les caractères qu'il est suscepüble d'offrir dans notre petite chaîne. Nous rappellerons d’abord que, à l’exception peut-être de la partie tout à fait occidentale de la bande, près le méridien de Montolieu, où il paraît être en contact avec le granite, le’ter- rain dont il s’agit repose sur le gneiss et particulièrement sur la partie schisteuse et sur le micaschiste. La ligne qui sépare notre terrain de ces schistes primordiaux n’est pas facile à tra- cer ; elle reste un peu vague à cause du passage presque insen- sible, déjà signalé, qui existe entre les deux ordres de for- mations. En effet, les schistes argentins , largement micacés ( mica- schiste sans quartz), dont nous venons de parler, perdent peu à DESCRIPTION GÉOGNOSTIQUE DE LA MONTAGNE NOIRE. 487 peu, à mesure qu'ils se rapprochent des schistes suivants, ce vif éclat qui nous a engagé à les rattacher au primordial. Ceux- ci, en effet, ne diffèrent des précédents que par une cristalli- nité plus affaiblie, qui dégénère bientôt en ce reflet luisant «1 habituel dans le terrain de transition. Silurien. — Les premiers schistes que nous rapportons à cette dernière catégorie dans la Montagne Noire ont une cou- leur grise ou légèrement verdâtre ; le mica y est plus fondu que dans le micaschiste, plus argileux et même souvent indiscer- nable. Get affaiblissement des caractères cristallins s’accuse de plus en plus dans les parties supérieures où ces schistes devien- nent plus ternes et même sub-terreux, sans perdre toutefois entièrement l'éclat luisant ou satiné qui est plus prononcé dans les strates inférieures. Ces schistes où nous faisons commencer le terrain de tran- sition, forment un étage inférieur qui n’admet jamais l'élément calcaire dans sa composition. Cette roche ne commence à se montrer que plus haut dans un autre étage où elle constitue des couches ou des groupes de couches alternant avec d’autres schistes qui sont quelquefois assez brillants, mais plus souvent mats ou ternes et qui prennent des teintes plus variées, comme le gris, le bleuâtre et même le noir. Cet étage, du reste, offre les mèmes accidents quartzeux que le précédent, bien qu'ils y soient peut-être moins fréquents. On n’a jamais trouvé, que je sache, aucun fossile dans ces étages. Néanmoins, si je m'en rapporte à quelques analogies que j'ai cru reconnaître entre ces dépôts anciens et ceux qui jouent un rôle semblable dans les Pyrénées de la Haute-Garonne, je serais assez disposé à considérer comme silurien l'étage cal- carifère dont il vient d'être question en dernier lieu; l’étage inférieur pourrait représenter nos schistes cambriens, à moins qu’on ne préférât les rattacher encore au silurien, dont ils forme- raient alors la partie inférieure. L'opinion quitendrait à faire regarder comme silurienne notre 488 MÉMOIRES ORIGINAUX. étage calcarifère est d’ailleurs corroborée jusqu’à un certain point par la considération qu'il est recouvert par un dernier étage dont l’âge dévonien est incontestable. Dévonien. — Le calcaire, qui n’était qu'un élément en quel- que sorte secondaire dans l'étage précédent, occupe dans celui- ci la plus grande place, et se distingue d’ailleurs de l’autre par la vive coloration de certaines de ses parties et par la présence de nombreux fossiles dévoniens (goniatites, clyménies, ortho- cères...). Les goniatites surtout sont accumulées en nombre immense dans plusieurs couches d’un rouge intense, aux- quelles ces fossiles communiquent une structure amygdaline très-prononcée. L'élément schisteux, qui jouait un si grand rôle dans les étages assimilés au silurien, n’est pas étranger à celui dont il est ques- tion ; mais il n’y est que secondaire ou accessoire. [l forme cependant une assise inférieure et une autre supérieure entre lesquelles le massif calcaire se trouve pour ainsi dire emballé; quelques veines de schiste s’introduisent aussi dans la masse, et certaines parties même pénètrent plus intimement dans les couches de griotte où elles entrelacent les ganglions organi- ques dont ces couhes sont principalement composées. Nous ne faisons que mentionner ici cet étage, le plus inté- ressant de tous ceux qui constituent notre terrain de transition, nous proposant de nous en occuper ci-après avec toute l’atten- tion qu’il mérite. Disposition et étendue des étages du terrain de transition. — Les étages dont nous venons d’indiquer les principaux ca- ractères forment, sur le versant du sud de la Montagne Noire, de grandes écailles superposées dans leur ordre d’ancienneté. La stratification, assez régulière vers l'extrémité orientale du versant où elle offre une inclinaison plus ou moins modérée dans le sens normal, c’est-à-dire au sud, paraît se conformer à une direction générale qui court à l'E. 20 à 25° N., un peu différente de celle de la montagne elle-même. DESCRIPTION GÉOGNOSTIQUE DE LA MONTAGNE NOIRE. 489 D'un autre côté, la ligne de contact ou de superposition sur le versant des terrains modernes se portant à très-peu près de l’ouest à l’est, il en résulte que les diverses parties de nos ter- rains anciens viennent couper obliquement cette ligne et dispa- raitre successivement sous ce dépôt postérieur. Cet effet de la discordance de ces deux lignes est surtout très-sensible pour le terrain dévonien, qui ne se montre réellement avec tous ses caractères, dans les limites de notre versant, qu’à Caunes et à une petite distance à l’ouest de cette petite ville, où il ne tarde pas à être caché par le calcaire garumnien. Les étages que nous considérons comme siluriensiforment au contraire des bandes continues dans toute l'étendue de la région où nous allons cher- cher à les suivre, en procédant de l’ouest à l’est. Les schistes inférieurs, ainsi que l’on devait s’y attendre, rè- gnent à peu près exclusivement dans toute la partie occidentale de la région, à l’est de Montolieu. Lorsqu'on suit, par exemple, la route de Carcassonne à Maza- met, on ne trouve pas autre chose entre Villardonnel et Caude- bronde. Ces schistes occupent même, dans cet intervalle, une largeur exceptionnelle de 6 à 7 kilomètres, qui s’explique d’ail- leurs par la faible inclinaison qu'ils affectent dans cette contrée dont l’aspect tranquille et monotone, entre Villardonnel et Cuxae, semblerait indiquer un terrain plus moderne. Les mêmesschistes, tout en conservant un éclat sub-satiné, avec quelques lopins de quartz çà et là dispersés, sont là très-friables et même terreux en certaines places. Ils acquièrent plus de consistance et une inclinaison assez prononcée vers Cuxac, où ils passent même par la présence d’un élément feldspathique presque imperceptible au schiste gneissique, dont ils se distinguent d’ailleurs par leur faible cristallinité et par une teinte d’un gris un peu verdâtre. En se prolongeant à l’est, nos schistes inférieurs s’élèvent peu à peu sur le versant en vertu de leur direction oblique, en prenant une inclinaison généralement normale, plus prononcée et plus uniforme, et qui, malgré sa valeur modérée, a pour effet de ré- duire la zone schisteuse à une largeur moitié moindre qu’elle 490 MÉMOIRES ORIGINAUX. conservé à peu près jusqu’à l'extrémité orientale du versant. C'est ainsi qu'elle traverse la gorge de l’Orbiel, où elle occupe tout l'intervalle de 3 à 4 kilomètres compris entre le Mas Ca- bardès et un point situé à mi-chemin entre les [hes et Lastours. De là elle va traverser le val du Glamoux, vers Cabrespine, pour monter à la limite du versant qu'elle occupe dans tont l’espace compris entre Citou et Lespinassière, où uous allons bientôt la retrouver. On peut évaluer à 4,500 mètres au moins son épais- seur totale. L’étage du terrain de transition, qui admet le calcaire comme élément essentiel dans sa composition et qui repose constam- ment sur le précédent, dont le caractère est d’être exclusivement formé par le schiste, ne se montre pas d’abord à l’ouest de notre région primaire, où cependant 1! doit exister sous les dépôts mo- dernes qui couvrent la base de la montagne. Le calcaire ne commence à poindre qu’en bas de Villardon- nel, au rocher de Canecaude, d’où il se prolonge vers Salsignes pour arriver au val de l’Orbiel. Là il joue un rôle très-important. Il est surtout très-remarquable à Lastours, où 1l se relève en hautes tranches posées de champ, au sommet desquelles sont perchées les ruines d'anciennes tours qui ont sans doute suggéré le nom que porte le village dont les maisons sont elles-mêmes échelonnées à diverses hauteurs sur des rocs escarpés. Le cal- caire, au reste, dont la présence à Lastours donne lieu à ces effets pittoresques, n'est pas l'élément dominant. Ce rôle doit être attribué à des schistes dont la plupart ont une couleur verte qui appelle l'attention. Ges schistes accidentés par la présence. du quartz et par l’intercalation de bancs plus massifs, peut-être euritiques, s'étendent d’ailleurs en aval jusqu’à une assez grande distance, et comprennent, à l'endroit appelé la Gauneite, à 4,500 mètres environ au-dessous de Lastours, une nouvelle assise de calcaire qui renferme du minerai de fer (limonite) exploité en plusieurs points. Ge calcaire, comme celui de Lastours, est très-tourmenté et subit des courbures et des relèvements qui le portent dans une position voisine de la verticale. Les schistes DESCRIPTION GÉOGNOSTIQUE DE LA MONTAGNE NOIRE. 491 partagent ces perturbations. Toutefois on distingue dans cet ensemble troublé une tendance à plonger au sud, qui est un sens normal pour le versant méridional de la Montagne Noire. Le val d’Orbiel, en traversant cet étage, s’y trouve profondé- ment encaissé, et y prend l'aspect d’une véritable gorge, juste assez large au fond pour contenir la rivière. Elle conserve ces caractères en amont jusqu'à mi-chemin entre Lastours et les Tlhes, où commence l'étage schisteux inférieur, et, dans le sens opposé, Jusqu'à pareille distance au-dessous de Lastours, où nos schistes siluriens cèdent la place à des schistes supérieurs que nous sommes porté à regarder comme dévoniens et qui s’enfon- cent en pointe à Lassac sous le calcaire garumnien. L’étage silurien calcarifère occupe donc dans la vallée de l’Orbiel une longueur d'environ 3,000 mètres, et la position souvent verticale ou au moins très-inclinée des strates qui le composent nous autorise Jusquè un certain point à évaluer à 2,000 mètres le chiffre maximum de sa puissance. Si nous cherchons à le suivre dans sa marche sur le versant du côté oriental, nous le verrons former une zone oblique pas- sant par Limousis ‘ et Trassanel, pour aller traverser le val de Clamoux sous Cabrespine, d’où il se continue avec la même allure jusqu'au val de l'Argent-Double, où nous aurons ci-après l’occasion de constater sa présence et sa composition au-dessous de Citou. Nous avons signalé plus haut l'effet de la direction oblique de nos zones de transition sur celle qui est formée par l’étage dé- vonien, effet par lequel cet étage, aussi complet que possible à l'extrémité orientale du versant sud de la montagne, s’amoindrit de plus en plus du côté de l'ouest, où ses diverses assises vien- nent successivement disparaître sous les dépôts modernes. Il 1 C'est dans les calcaires de cet étage que se trouve la grotte de Limousis, située à 1 kilom. au N. de ce village et marquée sur la Carte de l'État-Major. D'un autre côté, M. Tournal a signalé à Sallèles une autre cavité de ce genre, où il cite des 05 humains calcinés. (Annuaire du département de l'Aude pour 1868-69.) 492 MÉMOIRES ORIGINAUX. résulte de cette disposition que c’est seulement dans cette partie extrême où il se montre à l’état complet, qu'il y a lieu d'observer ce terrain, si l’on veut en acquérir une connaissance entière. Cest aussi là que nous allons l’étudier; mais nous ne nous bornerons pas à cette étude. Considérant que cet étage, si développé aux environs de Cau- nes, s’y trouve en rapport avec les autres étages du versant, qui dans cette partie extrême sont mieux caractérisés et plus régu- liers que partout ailleurs, nous avons eu l’idée de profiter de cette circonstance favorable pour mettre en rapport tous ces éléments de nos terrains anciens dans une coupe générale sui- vant à peu près le val méridien de l’Argent-Double, direction dans laquelle nous avons été heureux de rencontrer les points remarquables de Caunes, de Citou, de Lespinassière et même le curieux piton granitique de Peyremoux. Cette coupe se trouve figurée sous le N° 1 dans la planche I qui accompagne ce Mémoire. Nous avons cru devoir la pro- longer au sud au-delà de Caunes à travers les dépôts modernes afin de montrer les relations discordantes de ces dépôts en quel- que sorte adventifs avec Îles terrains anciens pour lesquels nous devons réserver, quant à présent, toute notre attention. Coupe générale du terrain ancien de la Montagne Noire (versant sud) au méridien de Caunes. La coupe figurée qui vient d’être indiquée a été tracée à l'échelle de ti celle de la carte de l’État-Major, les hauteurs doublées. Nous en avons recueilli tous les éléments, en suivant d’abord la route de Caunes à Saint-Amans, passant par Lespi- nassière et en traversant, au-dessus de ce dermiervillage, la région gneissique jusqu’à la crête au roc de Peyremoux‘. 1 Nous avons eu la bonne fortune d’être accompagné dans cette exploration par M. Rousseau, sous-inspecteur des forêts à Carcassonne, membre de la Société géologique, qui connaît parfaitement les localités que nous devions parcourir. DESCRIPTION GÉOGNOSTIQUE DE LA MONTAGNE NOIRE. 493 Dans la légende suivante, qui se rapporte à cette coupe, nous la suivrons dans l’ordre d’ancienneté des terrains à partir de la crête. Gneiss et micaschiste. — Le granite massif n'existe pas en- core normalement au-dessus de Lespinassière. [Il ne commence qu’à une certaine distance à l’ouest. Notre coupe ne l’atteint donc point ; mais elle passe par le piton granitique de Peyremoux ci-dessus signalé et décrit, qui figure au point culminant de ce profil. La crête d’ailleurs est formée par le gneiss, qui descend au sud jusqu’à environ À kilomètre en droite ligne au-dessus de Lespinassière avec un plongement modéré et régulier dans le même sens. On distingue dans ce gneiss les deux sortes qui ont été décrites d’une manière générale, la sorte plus schisteuse, qui consiste principalement en un beau gneiss normal, constitue une assise supérieure au-dessous de laquelle se trouve le gneiss granitique qui est ici assez grossier, en partie glanduleux et quel- quefois dans un état avancé de désagrégation. Cette dernière assise occupe naturellement la crête et la partie supérieure du versant, tandis que le gneiss schisteux forme une zone plus bas. Notre ceupe montre ces deux assises réunies, et nous y avons indiqué dans leur véritable position les filons de quartz protubérants qui les traversent, et dont il a été question dans nos généralités. Sur cette assise franchement gneissique, repose l’assise des schistes qui, d’abord liés au gneiss par la présence de très-min- ces parties feldspathiques, finissent par être presque entièrement formés par les micaschistes argentins que nous avons consi- dérés comme formant le dernier élément du terrain primordial, et qui s'étend jusque vers Lespinassière avec une inclinaison méridionale absolument concordante relativement au gneiss sous-jacent. Silurien. — Les schistes de transition que nous faisons partir un peu arbitrairement de Lespinassière forment, entre ce vil- lage et celui de Gitou, une assise aussi régulière que les précé- 494 MÉMOIRES ORIGINAUX. dentes et dont il est facile de reconnaître les caractères ‘en descendant la route ci-dessus indiquée. Dans ce trajet, onre- marquera particulièrement un certain affaiblissement dans la cristallinité de ces schistes, el ceux qui constituent une légère éminence qui supporte le village de CGitou ont l'aspect ordinaire des schistes de transition légèrement modifiés. Ges schistes conservent encore ce faciès jusqu'à une petite distance au-delà du point que nous venons d'indiquer ; mais si l’on descendait un peu plus bas, on verrait s’y associer un nouvel élément qui n’est autre qu’un calcaire gris bleuâtre, sub-cristallin, qui y forme plusieurs assises et des alternances, le schiste restant toujours prédominant. La route montre, à À kilomètre environ au-dessous du village, uve assise de ce calcaire dont l'inclinaison se trouve très-faible en cet endroit. Get état de choses se continue encore jusqu’à environ 2 kilomètres plus loin où nous plaçons la limite de cet étage. La présence, dans l'étage supérieur, de ce nouveau système, d'un calcaire dont les caractères nous ont paru semblables à celui de Bagnères-de-Luchon, et la position de l’étage entier entre le terrain primordial et un système dévonien bien carac- térisé nous ont porté à le considérer comme silurien supérieur. Les schistes sub-cristallins, immédiatement appliqués sur le micaschiste, formeraient le silurien inférieur ou le cambrien. Au-dessus de l'étage calcarifère vient enfin l'étage dévonien, qui mérite toute notre altention. Étage devonien, — Dufrénoy a donné une bonne description de cet étage dans son mémoire sur les calcaires amygdalins ‘ ; il l’a reproduite plus récemment dans le 4° volume de l'Expli- cation de la Carte géologique de la France (1841). À l’article déjà cité qu'il consacre à la Montagne Noire, et dans lequel 1l met en rapport cet étage avec les étages plus anciens, dans une coupe générale traversant toute la montagne entre La Caba- 1 Mémoires pour servir à une description géologique de la France, tom. IT. 1834. DESCRIPTION GÉOGNOSTIQUE DE LA MONTAGNE NOIRE. 495 rède et Caunes, où il indique la plupart des assises que nous avons nous-Mmême reconnues. | La partie consacrée à l'étage de Caunes est celle que l’auteur a le plus développée, et on y trouve de précieux détails sur les principales variétés des marbres colorés qui ont rendu celte lo- calité célèbre. Nous n’avons pas la prétention de reprendre ici cette description, mais de produire le résultat des observations que nous avons faites à plusieurs reprises dans cette intéressante région, et qui nous ont suggéré quelques idée sur l’origine et le mode de formation des marbres précieux qu’elle offre à la décoration et à l’architecture. Nous ne nous arrêterons pas d’ailleurs à réfuter lopinion émise par Dufrénoy, que ces marbres, ainsi que les assises infé- rieures de transition, appartenaient au système cambrien. La classification de ces terrains anciens a fait des progrès depuis l’époque des observations de cet éminent géologue, et nous avons quelque raison de penser que s’il existait encore, il n’hé- siterait pas à se ranger à l'opinion généralement admise aujour- d’hui sur l'autorité des de Buch, Élie de Beaumont, de Verneuil, que les marbres dont il s’agit, aussi bien que ceux de même nature qui se trouvent dans les Pyrénées, datent de l'époque dévonienne. La route de Lespinassière à Caunes coupe entièrement cet étage dévonien. Le géologue qui continuera à la descendre au- delà de la limite que nous venons d'assigner au silurien, ren- contrera d’abord une nouvelle assise de schiste, remarquable par les plis et les autres perturbations qu’ils ont éprouvés et dont nous avons cherché à donner une idée sur la coupe figurée. Ces schistes ont pour couleur dominante le gris-clair ; mais ils offrent, en certaines places, des teintes verdâtres et violacées, et ils admettent çà et là un peu de calcaire dans leur composition. Ils précèdent la puissante assise calcaire qui forme réellement le corps du dévonien dans la région qui nous occupe, à laquelle succède une nouvelle assise schisteuse qui termine la série visi- ble de nos terrains anciens. 496 MÉMOIRES ORIGINAUX. L’assise calcaire elle-même, qui règne jusque tout près de Caunes et que nous désignerons par le nom de cette petite ville, forme un massifd’environ 2,000 mètres d'épaisseur, dont la conti- nuité n’est interrompue que par l’intercalation de minces assi- ses ou de veines schisteuses. C’est sur ce calcaire surtout que les forces perturbatrices ont laissé le plus de traces de leur ac- tion énergique, sans effacer entièrement toutefois une inclinaison générale vers le sud, et ces traces ne consistent pas seulement en des relèvements, des courbures, des plis anguleux et même des cassures à parois verticales, mais encore elles accusent l'influence d’effluves thermo-minérales qui semble avoir été assez puissante pour communiquer à la masse une certaine plasticité et pour y déterminer des concrétions, en déformer et dissoudre partiellement les fossiles et y introduire capricieusement, dans quelques parties, des principes métalliques colorants (fer et manganèse), accidents curieux dont l'effet a été de produire les marbres si connus du Languedoc qui sont exploités tout près et au nord de Caunes depuis très-longtemps. Ces colorations et dispositions n’affectent d’ailleurs jamais une assise entière, mais seulement quelques parties d’une étoffe générale, qui consiste en un calcaire gris-clair plus ou moins compact qui fournit des pierres de construction. Aussi les marbrières en exploitation sont-elles disséminées capricieuse- ment dans la masse, où chacune offre d’ailleurs une variété par- ticulière ou au moins prédominante. Il y a lieu de remarquer cependant que toutes les exploitations se trouvent dans la partie supérieure ou extérieure du massif au voisinage des schistes de Caunes par lesquels l'étage dévonien se termine. La plus simple des colorations qui viennent d’être mention- nées d’une manière générale consiste en une sorte de flambage qui a produit des taches rouge de chair sur le fond gris d’un calcaire compacte, qui constitue un marbre commun très-em- ployé dans le Languedoc. Ce marbre flambé, qui offre souvent des sections d’articles d’encrines de forme circulaire, semble être le prélude d’une DESCRIPTION GÉOGNOSTIQUE DE LA MONTAGNE NOIRE. 497 variété qui, sous le nom d’incarnat ou de grand incarnat. con- stitue pour l'intérieur des édifices, des églises surtout, le plus bel ornement qu’on puisse imaginer ‘. Dans ce marbre, qui git à une assez petite distance en dedans de la masse à l'égard du premier , une belle teinte d’un rose foncé , tirant au rouge, colore le fond où elle laisse subsister des taches irrégulières cristallines, blanches ou légèrement teintées d’un gris-elair, généralement allongées ou flexueuses, plus ou moins rapprochées ou même confluentes, où l’on distingue souvent une structure zonaire analogue à celle des agates, dans laquelle nous ne pou- vons voir qu'un effet de concrétion *. L’incarnat est exploité dans une grande carrière située sur la lèvre droite ou méridionale d’une grande fracture au fond de laquelle coule le ruisseau de Cros, fracture profonde qui n’a au fond que quelques mètres de largeur et dont les parois presque verticales montrent des sections de plis aigus, des courbures en voûtes et d’autres accidents curieux. Il y a quelques carrières qui fournissent des variétés 3 petites parties colorées et serrées qu'on appelle cervelas, rosé, etc. : mais nous les laisserons de côté pour arriver de suite au marbre le plus intéressant detous au point de vue géognostique : je veux parler de la Griotte et de ses dérivés dont le gisement excep- tionnel et local se trouve. à l'extérieur du massif, au contact de l’assise schisteuse supérieure *. 1 Il est très-employé même à l'étranger. On le retrouve dans tous les édifices religieux un peu importants de la France, surtout dans le Midi. A Paris, la plupart des églises en offrent de beaux spécimens, principalement l’église de Saint-Sulpice, qui est entièrement revêtue vers le bas de belles plaques de ce marbre où il serait facile de constater les principaux caractères que nous ne faisons qu’indiquer ici, notamment la présence des encrines et la structure concrétionnée des parties blanches. On sait que le même marbre était très-apprécié par Louis XIV, qui l'avait fait servir à l’ornement des palais de Versailles et de Trianon. 2 M. Dufrénoy avait cru y reconnaître des polypiers. 3 On exploite le marbre griotte dans deux carrières situées à 500 mètres environ à l'E.-N.-E. de la chapelle de N.-D. du Cros, et qui ne se trouvent séparées que par une légère inflexion de terrain, qui forme de ce côté la limite des départements 498 MÉMOIRES ORIGINAUX. La griotte proprement dite offre une pâte d'un rouge plus ou moins foncé, au sein de laquelle se développent des ganglions d’une teinte un peu différente, ordinairement plus claire. IH y a des variétés où le calcaire règne seul ; mais en général il s’intro- duit dans la composition de la roche un peu de matière schis- teuse, rouge également, qui enveloppe les ganglions et qui donne au marbre cette texture entrelacée qui est mieux ca- ractérisée dans le marbre pyrénéen vert de même âge qu’on appelle Campan ‘. La couleur verte toutelois n’est pas étrangère au marbre amygdalin de Caunes ; mais elle n'y joue jamais le rôle principal, les parties où elle se fait le plus remarquer pas- sent à une variété particulière qu’on appelle vert de moulin. Quant aux ganglions eux-mêmes, il en est certainement qui ne sont que le résultat d’un concrétionnement opéré sous lPin- fluence d’une humidité thermale; mais il n’est pas moins: vrai que dans les plus belles griottes la plupart de ces corps arrondis ne sont autre chose que de petites gomiatites sub-globuleuses, à tours recouverts, déformées et même comme fondues par un Hi- quide dissolvant qui était peut-être de l’eau acidulée par le gaz carbonique. Ces fossiles, souvent, passés en tout ou en partie à l’état de calcaire spathique, sont accumulés en très-grand nom- bre dans certaines couches, principalement dans cellesique les marbriers de Caunes désignent par le nom d'œil de perdrix et dont nous donnons un spécimen dans la fig. 2 de notre deuxième planche. M. Dufrénoy, auquel ont doit cet belle observation a démontré le fait d’une manière irréfutable, et chacun peut en constater la de l'Aude et de l'Hérault. L'une de ces carrières, et c'est celle qui donne les plus beaux marbres, se trouve ainsi dans le domaine de mon savant collègue, M: de Rouville, chargé de la Carte géologique de l'Hérault. Ce voisinage nous donne un sujet commun d'études, et je ne puis que m'en féliciter dans l'intérêt de la Carte géologique de l'Aude. 1 Cette participation du schiste dans la formation du marbre dont il s’agit n'est qu'une conséquence de la proximité de l'assise schisteuse supérieure. On conçoit, en effet, que vers la fin du dépôt calcaire, au moment où le schiste allait lui suc- céder, les deux éléments aient pu concourir dans une œuvre commune. DESCRIPTION GÉOGNOSTIQUE DE LA MONTAGNE NOIRE. 499 réalité en reconnaissant, sur la plupart des marbres griottes polis, les circonvolutions et souvent même les cloisons des cé- phalopodes que je viens de nommer, et que M. Dufrénoy consi- dérait alors comme des Nautiles. Quant à la détermination comme genre de ces ganglions cloisonnés, elle n’est douteuse actuellement pour personne. On a pu isoler, dans quelques par- ties peu consistantes des griottes de Gierp (Pyrénées), qui sont identiques à celles de Caunes, des individus où l’on ne saurait méconnaître les caractères des goniatites ; nous en possédons même un exemplaire figuré dans la planche déjà citée (fig. 3 et 6), qui me paraît déterminable comme espèce, et susceptible d’être rapporté à Gonialites retrorsus si fréquente dans les couches des environs de Neffiés (Hérault), qui occupent la même place que nos griottes, mais avec cette circonstance, que les goniatites y gisent au sein d’une roche brunâtre d’où elles peuvent se déta- cher facilement et même se répandre sur le sol à la disposition des collecteurs. Les gonialites, au reste, ne sont pas les seuls céphalopodes que renferme la griotte de Caunes. Il s’y trouve aussi et même assez fréquemment un céphalopode plus large, à tours beaucoup plus découverts, qui est rapporté au genre clyménie, considéré comme caractéristique pour l’époque dévonienne. La fig. 4 de notre seconde planche n’est que la reproduction d’une coupe que nous avons calquée sur une plaque polie du marbre dont il s’agit. Îl y a dans la zone extérieure où se trouvent les griottes, des marbres où domine la couleur rouge, sans texture amygdaline prononcée : c'est le rouge antique des marbriers. Nous croyons devoir le citer, parce que, indépendamment de rares sections de petites goniatites et de clyménies, il renferme une ou deux espèces de goniatites de grande taille et très-différentes de celles qui constituent les ganglions. Nous avons rapporté de Caunes un morceau poli qui offre une belle section ayant 49 centimètres de largeur, à l’état de calcairespathique, qui se dessine en blanc sur le fond rouge du marbre et qui laisse voir quatre à cinq 500 MÉMOIRES ORIGINAUX. tours ornés de lignes élégamment sinueuses très-rapprochées. Nous en donnons une figure sous le N° 5 de notre deuxième planche. La figure À représente un fragment à cloisons plus ondulées, qui sans doute appartient à une autre espèce. Il y a aussi dans le même marbre des fragments d’orthocères de plusieurs tailles, en général très-déformées par dissolution, par écrasement et par des inflexions et ruptures. Une plaque polie que nous possédons offre la section longitudinale d’un tragment brisé et recourbé ayant près de 40 centimètres de lon- gueur sur une largeur moyenne de 5 centimètres, dans lequel les cloisons d’ailleurs très-visibles, ont été oblitérées par écrase- ment, et qui a dû appartenir à une très-longue espèce presque cylindrique. Le croquis fig. 6 la représente réduite à la moitié de sa grandeur. La couleur du marbre du Languedoc, qui les fait tant recher- cher comme moyen de décoration, est due à des oxydes métalli- ques. Le fer à l’état de peroxyde (oligiste) doit jouer ici un grand rôle. Il faut encore citer le protoxyde pour les teintes vertes qui se montrent accidentellement; mais ces matières ne sont pas les seules que la nature ait employées : 1l nous paraît assez probable qu’elle a fait également usage des oxydes et du carbonate de manganèse. Ce dernier minéral a dû contribuer à la coloration en rose ou rouge de chair des marbres, et il est naturel d'attribuer, au moins en partie, aux oxydes, les teintes violacées qui se montrent fréquemment dans les schistes dévo- niens associés aux Calcaires. Un fait vient appuyer cette influence du manganèse sur la coloration des marbres et des schistes dévoniens de Caunes: c’est la présence d’une mine de ce minéral, marquée sur la Carte du dépôt de la guerre, qui se trouve à 3 kilomètres environ à l’ouest de Caunes, en face et près du château de Villerem- bert, à la limite même qui sépare l’étage dévonien du cal- caire garumnien où commence l’ordre de choses moderne. Nous avons visité ce gîte, aujourd’hui abandonné, mais qui offre des traces d'exploitation au sein d'un calcaire gris, auquel DESCRIPTION GÉOGNOSTIQUE DE LA MONTAGNE NOIRE. »01 est superposée immédiatement une assise de marbre rouge an- tique vivement coloré qui offre lui-même, au grand déplaisir des marbriers, des poches remplies ou tapissées par un oxyde de ce manganèse cristallin souvent accidenté par des veines ou druses de quartz cristallisé. Cette assise, qui est ici très-régulière et nor- malement inclinée au sud sous un angle assez considérable, s'accuse en escarpement, le schiste supérieur en partie enlevé par les eaux étant d’ailleurs caché par le terrain moderne. Il serait difficile de ne pas supposer, en présence du fait dont il est question, une influence colorante de la part du manga- nèse. Cette influence est d’ailleurs indiquée d’une manière géné- rale par la position qu’occupent presque tous les gîtes manga- nésifères des Pyrénées et des Corbières, au sein et au voisinage des assises colorées de l'étage dévonien. Nous citerons à cet égard les gîtes importants des vallées d'Aure et de Louron (Hautes- Pyrénées); ceux de Portet, de Luchon et d’Argut dans la Haute- Garonne ; celui de la Montagne d’Ournes, à l’ouest d’Arques, dans le massif de Monthoumet (Corbières)'. La puissante assise de calcaire qui renferme, commeaccidents, les marbres colorés dont il vient d’être question, se termine en escarpement presque vertical, laissant reconnaître toutefois une certaine inclinaison au sud, et dont la direction E. 20° N. indique celle de l'étage tout entier, état de choses qui résulte de l’ablation des schistes supérieurs, dont la faible consistance a permis aux eaux et aux agents atmosphériques de les enlever en partie. en déchaussant la muraille calcaire. Le chemin de Caunes à N.-D.-de-Cros est tracé sur ces schistes, tout près de la ligne qui les sépare du calcaire, et la chapelle elle-même se trouve dans un fond, au bord droit du ruisseau de Cros et au pied du mur dont il s’agit, au point même où le ruisseau sort de 1 Depuis que ceci est écrit, M. Daubrée a bien voulu m'informer qu'il avait eu comme moi l’idée d'attribuer au manganèse une part dans la coloration des mar- bres du Languedoc, mais qu'il avait dû y renoncer parce que cette hypothèse, qu'indiquait si naturellement l’observation, n'avait pas été confirmée par l'expé- rience. L 39 502 MÉMOIRES ORIGINAUX. la profonde crevasse dont il a été question plus haut, pour entrer dans la région plus déprimée des schistes. Ceux-ci s'étendent à partir de là jusqu’à une certaine distance à l’est et au sud, où ils viennent passer sous les dépôts modernes. Ces schistes supérieurs, d’abord fortement.relevés par l’assise calcaire, offrent plus loin des inclinaisons plus modérées, des inflexions en divers sens et des brouillages. Ils sont géné- ralement feuilletés, écailleux, souvent en état de désagrégation. Leur couleur dominante est le gris. un peu bleuâtre ou verdâtre, mais ils prennent par place des teintes plus vives, qui sont le vert, le rouge et le violacé, et sont quelquefois accidentés par des bancs d’une eurite impure. L'assise schisteuse, dont nous venons d'indiquer brièvement les caractères, constitue le dernier élément de nos terrains an- ciens. Assez développée à l’est du mur calcaire, elle se rétrécit considérablement au-dessus de Caunes et ne tarde pas à dispa- raître à l’ouest, ainsi que cela devait être en vertu de la direc- tion discordante qui a été signalée plus haut. | Au nord et tout près de Villeneuve-les-Chanoines, le massif calcaire se montre encore au fond du val de Clamoux, puis 1l disparaît avec l’étage dévonien lui-même, à moins que l’on ne voie dans les schistes de Laissac, au fond dela gorge de l’Orbiel, un dernier représentant de l’assise des schistes inférieurs. TERRAIN DE TRANSITION DE LA BANDE TRANSVERSALE A L'OUEST DE MONTOLIEU. . ; Nous avons vu, en commençant, que la partie haute du ver- sant sud dela Montagne Noire, qui s'étend à l’ouest de Montolieu, est presque entièrement formée par les roches primordiales, principalement par le gneiss ; toutefois nous y avons signalé une interruption qui consiste dans l’intercalation d'une bande de tran- sition transversale qui isole à l’ouest le petit massif gneissique de Saint-Ferréol. Cette petite bande, dont la largeur est de 4 à 5 kilomètres,.se, DESCRIPTION GÉOGNOSTIQUE DE LA MONTAGNE NOIRE. 503 dirige à peu près au N.-E. et ne tarde pas à entrer dans le Tarn. Nous n’avons fait que la reconnaître entre Labécède et Verdun, où nous avons pu constater la présence des étages siluriens. Voici le résumé de cette reconnaissance, que nous nous proposons de compléter par de nouvelles observations. Le village de Labécède est pittoresquement situé sur un massif calcaire protubérant, entouré de profonds ravins creusés dans des schistes argileux sub-satinés. Le calcaire forme là des bancs épais encaissés dans ces schistes. Îl est gris ou bleu très- foncé, sub-marmoréen, à cassure esquilleuse. On y voit des ru- bans de quartz. Du côté oriental du village, la route des Cammazes est tracée au sein d’une assise schisteuse où l’on remarque aussi des bancs calcaires, et qui affecte un pendage assez régulier et mo- déré au N.-E. En quittant cette route pour se diriger directement vers le village de Verdun, on marcherait sur un plateau dont les ravins et les écorchures accusent des schistes argileux sub-satinés plus ou moins terreux, qui ressemblent à ceux de Villardonnel. Ces schistes s’avancent au sud, au fond des ravins où ils ne tar- dent pas à disparaître sous des nappes de cailloux quartzeux auxquelles se superpose le grès de Carcassonne. Nous avons dit que ce terrain traversait le terrain primordial: en effet, si on franchit les limites que nous lui avons assignées, on rentre de part et d’autre dans les roches de cette catégorie. À l’ouest de Labécède, paraissent immédiatement des gneiss et des schistes primordiaux accidentés par le quartz et par la peg- matite à tourmalines ; de même que, à Verdun, le schiste de transition disparaît pour laisser la place au gneiss et à ses acci- dents qui se développent immédiatement à l’est de ce village. (La suite au prochain numéro.) 504 MÉMOIRES ORIGINAUX. DES RÉGIONS BOTANIQUES DE L'HÉRAULT avec une appréciation préliminaire Des causes qui nous privent, depuis un siècle, d'une Flore de Montpellier, Par M. Henri LORET. e — Un de nos doctes professeurs signalait naguère dans la Revue des Deux-Mondes l'infériorité actuelle de la France dans les scien- ces physiques et naturelles. Cette assertion, qui sera contestée peut-être en ce qui concerne la botanique physiologique, nous parait douloureusement vraie quant à la partie descriptive et systémalique de celte science. L'organisation intime des végétaux, inconnue trop longtemps faute d'instruments grossissants, est devenue aujourd'hui. où sous prétexte de progrès nous nous jetons souvent dans les extrèmes, l’objet presque exclusif des études officielles. Qui ne s’est apercu, en effet, en parcourant nos programmes d’enseigne- ment et d'examens, que la botanique organo-physiologique s’y est attribué la part du lion, et a dépossédé presque entièrement sa sœur aînée, la botanique systématique? Aïlleurs on a su tout concilier, en faisant les parts moins inégales entre les deux par- lies de cette science sans la connaissance desquelles il n’existe point de botaniste complet. Dans les Universités allemandes et russes, à côté du professeur d'anatomie et de physiologie un second professeur est exclusivement chargé des herborisations et de l’étude des espèces. L'Italie, qui possède moins de phy- siologistes distingués que la France, compte en revanche dans l'enseignement officiel un plus grand nombre de spécificateurs distingués. Elle est fière avec raison d’avoir, outre deux Flores gé- nérales remarquables, de nombreuses Flores régionales qui toutes sont l'œuvre de professeurs célébres. Il n’est point question ici d'intelligence ni d’activité; car sous ce rapport, on le sait, nos RÉGIONS BOTANIQUES DE L HÉRAULT. 505 professeurs français ne le cèdent nullement aux professeurs étrangers. D'où vient donc que nos Flores, déjà nombreuses, sont, à peu d’exceptions près, l’œuvre de simples botanophiles mus par l’amour de la science et le besoin d'occuper leurs loisirs? Et, pour ne parler ici que de la région qui nous intéresse le plus, comment se fait 11 que d’éminents botanistes, tels que Delile et Dunal, dont nous reconnaissons le mérite plus que personne, aient songé pendant longues années à doter Montpellier d’une Flore locale, sans dépasser, leurs herbiers en font foi, les bornes d’une ébauche ? Nous n'’ignorons point que la préparation des cours absorbe presque tout le temps d’un professeur conscien- cieux ; inais est-ce là le motif de la regrettable lacune dont nous parlons ? La vraie cause ne se trouve-t-elle pas surtout dans la direction centrale de l’enseignement dont les programmes nous enferment étroitement dans l’organo-physiologie, et font une part trop faible à l'étude des espèces ? C’est là notre conviction, etnous ne dou:ons pas que nos vœux d'amélioration sur ce point, vœux partagés par beaucoup de botanistes, ne soient quelque jour réalisés. Quoi qu’il en soit, il importe peu, dans l’état actuel des cho- ses, que la Flore de Montpellier soit l’œuvre de tel ou tel bota- niste ; l'essentiel, c'est que tous ceux qu'intéresse l’histoire de la nature, c'est que les botanistes qui tiennent à connaître nos plantes, la saison et les localités où on peut les recueillir, voient enfin leurs vœux exaucés. J'ai dit naguère * comment je fus amené, il y a bientôt dix ans, à m'associer à l'un de mes amis pour travailler à la Flore de l'Hérault. Nous avons fait nos efforts, depuis cette époque, pour conduire à bonne fin une entreprise qui depuis la Flore de Gouan, c'est-à-dire depuis plus d’un siècle, n’a été réalisée par personne. M. Barrandon, jusqu'au moment où j’acceptai son offre, avait pris pour bornes de la Flore qu’il préparait celles de l'arrondissement de Montpellier, que les courses fréquentes récla- ! Voy. Bull. Soc. bot. de France, tom. XVI, pag. 285. 506 MÉMOIRES ORIGINAUX. mées par sa profession l’avaient mis à même d’explorer d’une manière spéciale. Nous modifiämes alors ce projet primilif, et pour mieux répondre au vœu général nous crûmes devoir don- ner à notre Flore les limites mêmes du département de l'Hérault. Le retard apporté par ce nouveau plan à la publication de notre travail n’a point été une perte de temps. Ayant plus de loisirs que mon collaborateur, j'ai consacré depuis cette époque presque toutes mes journées d’hiver à rechercher dans nos herbiers pu- blics les localités de nos plantes. Ces localités y sont nombreuses pour les espèces montpelliéraines proprement dites ; mais, quant aux plantes des montagnes qui nous séparent du Tarn et de l'Aveyron, que de lacunes à remplir, ou, pour mieux dire, quelle absence complète de documents ! Il m’a fallu, pour y suppléer, explorer chaque été, dans la mesure de mes forces, une portion du vaste hémicycle des Cévennes de l'Hérault, négligées jusqu'a- lors. J'ai tâché d’intéresser à notre Flore les botanistes voisins des montagnes; j'ai initié là-haut à notre chère science les rares amis de la nature sur lesquels je pouvais compter dans l’avenir, prin- cipalement pour la récolte des espèces hâtives du premier prin- temps. C’est ainsi que nous avons pu accroître de plus de 260 espèces, et compléter, autant que possible, le faisceau des maté- riaux indispensables pour une rédaction sérieuse. Une autre cause de retard s’esl présentée à nous là-même où nous espérions rencontrer un secours. Qui ne sera surpris, en effet, d'apprendre que les documents fournis par nos herbiers publics sont loin d’être tous authentiques ? Les lois les plus sim- ples de la géographie botanique m'ont révélé, hélas ! qu’il en est ainsi, et que, dans telle collection, des étiquettes infidèles attri- buent de nombreux échantillons à des localités impossibles. Plu- sieurs botanistes et mon collaborateur lui-même y ayant été déçus, je crois qu’il est temps de donner l'éveil aux travailleurs. Je regarde même aujourd'hui comme un devoir de provoquer à cet égard une sérieuse circonspection, car sans cela les écrits relatifs à la Flore locale finiraient par être entachés de déplorables erreurs. Heureux sommes-nous encore d’avoir reconnu le péril ! RÉGIONS BOTANIQUES DE L'HÉRAULT. 507 Toutes les précautions possibles ont été prises par nous pour y échapper, et nous espérons arriver enfin bientôt, malgré de gra- ves et nombreuses difficultés, au terme de notre entreprise. Avant de classer ici par groupes naturels une partie notable de nos richesses végétales, il me parait utile d’esquisser la topogra- phie du département qui forme le théâtre de nos investigalions. Le département de l'Hérault, auquel on a donné le nom du petit fleuve qui forme son principal cours d’eau, a une superficie totale de 6,239 kil. carrés. Ses limites sont : au nord les dépar- tements de l’Aveyron et du Gard; à l’est celui du Gard; au sud là Méditerranée, vt à l’ouest le département du Tarn. Le dépar- tement de l'Aveyron le touche également au nord-ouest, et celui de l'Aude au sud-ouest. Il est très-accidenté, surtout dans ses parties occidentale et septentrionale. Nos montagnes les plus éle- vées, qui nous séparent du Tarn et de l'Aveyron, font partie des Cévennes méridionales, et, en continuant les Corbières et la Mon- tagne Noire, elles relient les Pyrénées aux Cévennes septentrio- nales et aux Alpes. Quoique d’une médiocre élévation, les Cé- vennes (le l'Hérault ont une certaine importance; car elles font partie de la grande ligne de faite européenne qui sépare le versant méditerranéen de celui de l'Océan. Leurs groupes principaux, dont les plus hauts sommets atteignent à peine ou dépassent peu 1,100 mètres (le Caroux, 1,094 m. ; l’Espinouse, 1,122) , por- tent de l’ouest à l’est les noms de montagnes de l’Espinouse, monts de l’Escandorgue et plateau du Larzac. Cette chaîne est granitique, vers l’ouest, à l’Espinouse et au Sommail, où elle do- mine les pentes schisteuses qu'on trouve plus bas entre Saint- Pons et Saint-Chinian, et qui s’étendentsur une grande surface dans la direction de Bédarieux. La même chaîne, sortant de l’Hé- rault en face de la Croix-de-Mounis, y rentre vers les sources de l’'Orb. Elle finit là par se transformer en un plateau mouve- menté de formation jurassique qui fait partie de celui du Larzac. Ce froid plateau, type de nos causses sans eau et sans arbres, se termine par la montagne calcaire de la Sérane, qui aboutit près de Ganges au confluent de la Vis et de l'Hérault. 508 MÉMOIRES ORIGINAUX. Au-dessous de la Sérane et des chaînes secondaires qui s'en détachent et bordent pendant quelque temps le cours de l’Hé- rault, le sol s’abaisse graduellement vers la mer, et est beaucoup moins tourmenté que dans la partie septentrionale et occidentale dont nous venons de parler. C'est surtout dans le vaste triangle formé par Lodève, Saint-Ghinian et Lunel, et dont le côté méri- dional touche les terrains salés voisins de la mer, qu'on cultive la vigne et l'olivier Le long de la mer s’étend une ligne de côtes sableuses d’en- viron 100 kilomètres, depuis l'extrémité orientale de l'étang de Mauguio, jusqu’à l’embouchure de l’Aude. Ce vaste cordon litto- ral est bordé dans sa plus grande étendue par de nombreux étangs salés dont les principaux sont, de l’ouest à l’est : l'étang de Thau, ceux de Frontignan, de Maguelone, de Pérols et de Mauguio. Tous les botanistes savent que les sables maritimes et les terrains salés ont leurs plantes spéciales. Lorsque, en outre, on connaît bien l'influence de l'altitude et de la température, de la sécheresse et de l'humidité sur la végétation, il suffit de jeter les yeux sur une bonne carte du département de l'Hérault pour le diviser en régions botaniques très-naturelles. Ces régions, au nombre de trois, sont : 1° Région littorale, qui se subdivise en deux sections : A, cordon littoral; B, étangs marins, vases et terrains salés ; 2° Région de l’Olivier (plaine, garrigues et basses collines ); 3° Région montagneuse. Les espèces de la région littorale, espèces maritimes dont l’aire de dispersion est immense, caractérisent peu une Flore locale; mais elles ont du moins l'avantage d'offrir une divi- sion extrêmement naturelle. Nous verrons que le département de l'Hérault est un de nos départements maritimes les mieux partagés en plantes de cette catégorie. Notre région de l'olivier, où le calcaire se retrouve presque partout, appartient en entier au climat provençal. Ce climat chaud, généralement dépourvu de pluies régulières, et où un soleil ardent brûle un sol perméable et sec, imprime à la végé- RÉGIONS BOTANIQUES DE L'HÉRAULT. 509 tation un faciès particulier. Cette région, qui s'élève jusqu’à une altitude variant, selon les lieux, entre 300 et 350 mètres, em- brasse la plaine et les coteaux incultes connus suus le nom de garrigues. C'est surtout à ces garrigues , coteaux pierreux Si agréa bles aux botanistes, si infructueux pour l’agriculteur, qu'il faut de- mander nos plantes indigènes par excellence. Là se trouve cette végétation semi-africaine qu'on ne rencontre en France que sur les coteaux méditerranéens de la Provence analogues aux garri- ques si chères aux botanistes montpelliérains. Quoique, depuis Magnol et surtout depuis Gouan, on ait appauvri notre végé- tation, en défrichant impiloyablement plus de la moitié de nos bois et de nos garrigues, il nous en reste encore une étendue considérable qui bravera longtemps le zèle des défricheurs. Heu- reux les botanistes herboriseurs auxquels leur département peut offrir comme le nôtre, malgré l’activité de la population, plus de 200,000 hectares de terres incultes réchauffées par un soleil méridional ! Que dire de notre région montagneuse et des Cévennes de l'Hérault? Là règne le climat girondin, climat humide par tous les vents, et où le mistral lui-même, si sec à Montpellier, est là- haut, sous le nom d’albigeois, un messager de pluies ou de neiges abondantes. Qu'on joigne à cela l'influence de roches naturellement humides, d’une altitude à laquelle on doit des nuits toujours fraiches , et l’on sera convaincu que la Flore de cette région diffère essentiellement de celle de Montpellier. Ceci est surtout rigoureusement vrai des espèces de l’ouest et du nurd-ouest. À mesure qu'on s'approche de nos plateaux calcaires élevés, en suivant de l’ouest à l’est notre plus haute chaine, l'aspect de la végétation se modifie graduellement. On remarque, en s’avançant vers le Larzac, que les espèces moins hygrophiles tranchent moins aussi par la taille, par le vert-foncé des feuilles, par la grandeur et l’éclat des fleurs, avec les plantes peu déve- loppées et à teinte grisâtre des coteaux inférieurs et de la région de l’olivier. Toutefois, cette dégradation progressive, qui frappe surtout lorsqu'on a passé une partie de sa vie dans la société 510 MÉMOIRES ORIGINAUX. des plantes, n'empêche point que les espèces ne reconnaissent toujours la région que la nature leur a assignée. Si les bota- nistes du nord, de l’est ou de l’ouest de la France, viennent à parcourir nos listes régionales de plantes, autant le catalogue de nos espèces méditerranéennes leur en offrira d’étrangères à leur pays, autant la liste des espèces de nos montagnes leur paraîtra conforme à celle qu’ils pourraient dresser eux-mêmes des plantes de leur région. Ce n’est donc point là-haut que nous inviterons ces botanistes à venir chercher des espèces intéressantes pour eux. Nos garri- _gues auront à bon droit leur prédilection, et, malgré la pauvreté relative du tapis végétal, rien ne pourra valoir à leurs yeux les plantes rares que leurs terres froides et leur pâle soleil sont im- puissants à leur donner. Pour nous, qui avons passé une partie de notre vie au milieu des espèces montpelliéraines et provençales, nous avouerons notre faible pour les plantes de nos montagnes. Ce contraste de notre double Flore, contraste dont nous pouvons jouir facilement en herborisant chaque année dans nos deux régions, est un spectacle toujours nouveau pour nous et la source de nos plus douces jouissances. Nous sommes heureux sans doute de recueillir, dés le pre- mier printemps, nos raretés méditérranéennes et toutes ces es- pèces inconnues là où ne se fait point seniir la bénigne influence de notre soleil méridional ; mais avec quel plaisir nous montons plus tard vers la région où l'humidité faitgermer presque toutes les graines! comme nos yeux sont réjouis là-haut par l'éclat inac- coutumé des fleurs, et par un luxe de végétation incomparable! que de fois ce spectacle nous a fait regretter que l’ardeur solaire, ne trouvant point dans nos chères garriques assez d'humidité pour répondre à son action, y arrête souvent l’essor d’une mul- titude de plantes! Nous avons joui souvent en comparant l’en- thousiasme des botanistes du nord devant nos plantes franche- ment méridionales, à l'enthousiasme non moins vif du bota- niste montpelliérain ou provençal foulant pour la première fois l'éblouissant tapis végétal de nos montagnes. Cela rappelle;un RÉGIONS BOTANIQUES DE L' HÉRAULT. off vers qui, déparé un peu par l'abondance des mpnosyi abes, n’en est pas moins applicable au cas présent : «On hait ce que l'on a; ce qu'on n'a pas, on l'aime.» Qu’on me permetteici, pour ne pas interrompre plus tard la série de mes catalogues régionaux, de mentionner un phénomène qui m'a frappé en dressant la liste des espèces de nos monta- gnes. On peut tracer, en deçà du faîte des Cévennes de l'Hérault, une ligne sinueuse en face de laquelle les nuages venant de l'O- céan se vaporisent au contact de la chaude atmosphère propre à la région des oliviers. Au-delà de cette barrière infranchissable pour nos espèces montagnardes, elles sont évidemment à l'aise, et toutes m'ont paru là aussi vigoureuses que dans les Pyrénées et dans les Alpes : or, presque toutes ces espèces (336 sur 400) sont rares, trés-rares souvent dans nos montagnes, où elles ne comptent qu'un très-petit nombre de localités. A quelle cause faut-il attribuer ce phénomène ? On suppose parfois, et peut-être avec raison, qu'il y a eu plusieurs centres de végétation. Admet- tons que les Pyrénées et les Alpes aient formé anciennement deux centres principaux de propagation. Ne croirait-on pas, Si cette supposition est fondée, que les espèces de nos montagnes se trouvent à l’une des extrémités de leur aire d'extension, et n’ont pas eu encore le temps de rayonner en nombre considéra- ble du point central d’où elles sont parties ? Malheureusement le vraisemblable est loin d’être toujours vrai, et la science, qu'on pourrait presque définir de doute sur tout», en est réduite ici, comme dans beaucoup d’autres cas, à confesser son impuissance”. Les espèces qui accompagnent l'olivier chez nous, quoique plus régulièrement distribuées, pourraient donner lieu à des ré- flexions analogues. Le département de l'Hérault se trouve, en effet, à l'extrémité occidentale de cette vaste région de l'olivier 1 De Candolle, dans l'Avant-Propos de sa Physiologie, applique surtout aux science s naturelles cette observation d'un auteur qu'il ne nomme pas : « Le point d'interrogation est la clef de toutes les sciences. » te MÉMOIRES ORIGINAUX. dont le centre de création paraît avoir été beaucoup plus orien- tal. Il n’est pas surprenant par suite que la Provence, située plus à l’est, soit plus riche que nous en espèces méditerranéennes. Cela peut s’expliquer, dans l’ordre d’idées qui nous occupe, par la lenteur avec laquelle les espèces dont nous parlons se sont avancées de l’est à l’ouest. Certaines espèces, en effet, parties anciennement de l'Orient, et cheminant le long de la Méditer- ranée, par étapes en partie connues, ou ne sont pas encore arrivées jusque chez nous, ou s’y sont à peine établies, de ma- nière à mériter droit de cité. Un plus grand nombre de ces espè- ces, qui en Provence ont envahi par myriades d'individus de nombreusés localités, ne sont pas encore aussi largement repré- sentées chez nous, parce qu'elles y seraient arrivées à une époque plus récente. Donnons maintenant les listes régionales de nos plantes qu'il nous à paru utile de renvoyer ici, pour ne pas rompre l’ensem- ble de nos réflexivns générales. N° 1. — RÉGION LITTORALE A. Cordon littoral Malcolmia littorea R. Br. Polygonum maritimum L. Matthiola sinuata R. Br. — Roberti Lois. Sisymbrium nanum DC. — littorale Link. Cakile maritima Scop. Euphorbia Peplis L. Reseda alba L. — Pithyusa L. Spergularia salina Fries. — Paralias L. Medicago marina L. — Terracina L. Lœæflingia hispanica L. Asparagus scaber Brion. Daucus maritimus Lam. Ephedra distachya L. (et no 2). Orlaya maritima Koch. Pancratium maritimum L. Crithmum maritimum L. (rochers). Saccharum Ravennœæ P. B. Echinophora spinosa L. — cylindricum Lam. Eryngium maritimum L. Sporolobus pungens Kunth. Crucianella maritima L. Anthemis maritima L. Diotis candidissima Desf. Evax pygmæa Pers. (et n° 2). Crepis bulbosa Cass. (et no 2). Chlora serotina Koch. — imperfoliata L. fil. Convolvulus Soldanella L. Echium arenarium Guss. Stachys maritima L. Corispermum hyssopifolium L. Kochia prostrata Schr. Rumex tingitanus L. (et B.). Lagurus ovatus L. Ammophila arenaria Link. Aira articulata L. Spheunopus divaricatus Rchb. (et B.). Kæleria villosa Pers. Scleropoa maritima Parl. — henmupoa Parl. — loliacea God. et Gren. Triticum junceum L. — acutum DC. — littorale Host. Lepturus incurvatus Trin. — filiformis Trin. (et B.). RÉGIONS BOTANIQUES DE L HÉRAULT. 515 B. Étangs marins, vases et terrains salés. Ranunculus Baudotii God. Salsola Soda L. Frankenia pulverulenta L. — KaliL. (et n° 2). — lœvis L. Kochia hirsuta Nolt. — intermedia DC. Iris Xyphium Ehr. Sagina maritima Don. Ophrys tenthredinifera Willd. Spergulariamarginata (sub Arenaria) DG. | Triglochin palustre L. Lotus decumbens Poir. — Barrelieri Lois. Aster Tripolium L. — maritimum L. Artemisia gallica Willd. Althenia Barrandonii J. Duv.-J. Inula crithmoides L. Caulinia minor Coss. et Germ. Scorzonera parviflora Jacq. Naias major All. Sonchus maritimus L. Posidonia oceanica (sub Zostera) L. Erythræa linarifolia Pers. Ruppia maritima L. Cressa cretica L. ‘* | Zostera maritima L. Heliotropium curassavicum L. — nana Roth. Statice serotina Rchb. Cymodocea nodosa (sub Zostera) — Girardiana Guss. Ucria?. — Dodartii Gir!. Juncus maritimus L. (et n° ?). — bellidifolia Gouan. Hacutus LU (tin) — virgata Willd. — multiflorus Desf. — ferulacea L. — anceps Lahar. — echioides L. (et n° 2). Scirpus maritimus L. (et n° 2). Plantago Cornuti Gouan. — holoschænus L. (et no 2). — crassifolia Forsk, Carex extensa Good. Atriplex crassifolia Mey. Spartina versicolor Fabre. — portulacoides L. Polypogon littorale Sm. Beta maritima L. — maritimum Willd. Chenopodium rubrum L. — monspeliense Desf. (et n° 2). Salicornia fruticosa L. Glyceria distans Vabl. ne macrostachya Moric. — festucæformis Heynh. — sarmentosa J. Duv.-J. — convoluta Fries. — patula J. Duv.-J. Dactylis littoralis Willd. — Emerici J. Duv.-J. Hordeum maritimum L. Suæda fruticosa Forsk. Triticum elongatum Host. — maritima Dumort. — Rouxii Gren. et Duv. — splendens Gren. et God. 4 Espèce nouvelle pour l'Hérault, trouvée par M. Barrandon, entre Cette et Agde, et par moi sur la plage de Sérignan. À 2 Quoique MM. Grenier et Godron aient à tort, après M. Gay, considéré cette espèce comme étrangère à la France, M. Duby l'avait avec raison indiquée à Montpellier sous le nom de Zostera mediterranea D C. (Bot. p. 441). M. Touchy l'a recueillie à Maguelone en 1849, et M. Duval vient de la trouver dans l'étang de Thawet sur plusieurs points de nos côtes où la mer la rejette abondamment au moment des tempêtes. [PA = - > MÉMOIRES ORIGINAUX. No 2. _ RÉGION DE L'OLIVIER. (Plaines, garrigues et basses collines.) Myosurus minimus L. Ceratocephalus falcatus Pers. Ranunculus Lingua L: — lateriflorus DC. — ophioglossifolius Vill. — albicans Jord: Nigella damascena L. — gallica Jord. Delphinium pubescens DC. — Staphysagria L. Papaver sylvestre God. Rœmeria hybrida DC. Hypecoum procumbens L. — pendulum L. Fumaria spicata L. Brassica humilis DC. Diplotaxis erucoides DG. Malcolmia africana R. B: Matthiola incana R. B. Cheiranthus Cheiri L. Sisymbrium Columnæ Jacq. Nasturtium stenocarpum God. Cardamine parviflora L. Alyssum serpyllifolium Desf. Isatis tinctoria L. Teesdalia Lepidium DC. Iberis ciliata All. Lipidium ruderale L: Senebiera pinnatifida DO. Cistus ladaniferus L. — albidus L. — crispus L. — salvifolius L. — monspeliensis L. Helianthemum ledifolium Willd. — intermedium Thib. Viola nemausensis dord. Polygala monspeliaca L. — exilis DC. Silene italica Pers: Dianthus longicaulis Ten. Velezia rigida L. Arenaria leptoclados Guss. Stellaria borœana Jord. Elatine macropoda Guss. Linum gallicum L. Malva ambigua Guss. — parviflora L. Lavatera marilima Gouan. Geranium tuberosum L. — minutiflorum dJord. Erodium ciconium Willd. Hypericum tomentosum L. Ruta augustifolia Pers. Coriaria myrtifolia L. Pistacia Lentiscus L. — Terebinthus L. Rhus Coriaria L. Anasyris fœtida L. Ulex parviflorus Pourr. Cytisus triflorus l’Hérit. — monspessulanus L. Lupinus hirsutus L. — reticulatus Desv. Ononis ramosissima Desf. — pubescens L. — breviflora DC. — reclinata L. Anthyllis tetraphylla L. Medicago scutellata All. — leiocarpa Benth. — disciformis DC. — coronata Lam. — præcox DC. — agrestis Ten. — tribuloides Lam. — truncatula Gærtn. — tuberculata Willd. — muricata Benth. Trigonella Fænum-græcum L:. — gladiata Stev. — monspeliaca L. — ornithopodioides DC. = corniculata L. Melilotus sulcata Desf. mn italiCd Anne — parviflora Desf. — uneapolitana Ten. Trifolium stellatum L. — hirtum All. — maritimum Huds. — Bocconi Savi. — tomentosum L. — spumosum L. —. micranthum Viv. (et n° 3). Dorycnium gracile Jord. Lotus rectus L. — hirsutus L. — conimbricensis Brot. Astragalus pentaglottis L. — Stella Gouan. — sesameus L. — hamosus L. — narbonensis Gouan. — Glaux L. — incanus L. Glycyrrhiza glabra L. Coronilla Varia L, RÉGIONS BOTANIQUES DE L HÉRAULT. Vicia cuneata Guss. — amphicarpa Dorth. — narbonensis L. — pubescens (sub Ervum) DC. Lathyrus ochrus L. — Clymeaum L. — annuus L. — inconspicuus L. — ciliatus Guss. Pisum elatius Bieb. Scorpiurus subvillosa L. Hippocrepis ciliata Willd. — unisiliquosa L. Hedysarum humile L. — capitatum Desf. Onobrychis supina DC. ns caput-galli Lam. Potentilla supina L. — recta L. Rosa sempervirens L. — tomentella Lem. — myriacautha DC. Punica Granatum L. Lythrum thymifolia L. — bibracteatum Salz. Peplis erecta Req. Tamarix gallica L. — africana Poir. Myrtus communis L. Ecballium Elaterium Rich. Telephium Imperati L. Corrigiola telephifolia Pour. Paronychia nivea DC. — argentea Lam. Tillæa muscosa L. Bulliarda Vaillantii DC, Sedum rubens L. — cœæspitosum DC. (et ne 3). Hydrocotyle vulgaris L. Torilis helvetica Gm. Bifora testiculata DC. — radians Bieb. Thapsia villosa L. Anethum graveolens L. Peucedanum officinale L. Ferula nodiflora L. Opoponax Chironium Koch. Seseli tortuosum L. — elatum L. Æthusa silaifolia Bieb. — fistulosa L. — globulosa L. Buplevrum protractum Link. — tenuissimum L. — glaucum Rob. et Cast. — rigidum L. — fruticosum L. Ptychotis hetorophylla Koch. Sium latifolium L. Sison segetum L. Pimpinella peresrina L. Ammi Visnaga Lam. Scandix australis Li. (et no 3) Falcaria Rivini Host. Cachrys lævigata Lam. Viburnum Tinus L. Lonicera implexa Ait. Galium maritimum 4. — constrictum Chaub. — divaricatum Lam. — murale All: Vaillantia muralis L. Asperula galioides M. B. Valerianella echinata DC. — discoidea Lois. Scabiosa stellata L. Kuautia hybrida Coult. Cephalaria syriaçca Schrad. Phagnalon sordidum DC. Conyza ambigua DC. Bellis annua L. — sylvestris Cyr. Senecio Doria L. Chrysanthemum segetum L. Anthemis mixta L. — nobilis L. — altissima LL. Santolina squarrosa Willd. Achillea odorata L. Bidens bipinnata L. Buphtalmum aquaticum L. Jnula britannica L. — helenioides DC: — Sicula (sub Erigeron) L — tuberosa Lam. Tyrimous leucographus Cass. Onopordon taurieum Willd. _— illyricum L. Cynara Cardunculus L. Pichnomon Acarna Cass. Cirsium odonto lepis Boiss. Carduus pychnocephalus L. Centaurea pullata L. — intybacea Lam. — collina L. — melitensis L. Carduncellus monspeliensium All. Microlonchus Clusii Spach. Cnicus benedictus L. Stæhelina dubia L. Carlina corymbosa L. — lanata L. Atractylis humilis L. Hedypnois polymorpha DC. Thrincia tuberosa DC. Picris pauciflora Willd. Urospermum Dalechampii Desf. — picroides Desf. Geropogum glabrum . L. Taraxacum obovatum DC. Lactuca tenerrima Pour. — ramosissima Al, Cr 516 MÉMOIRES ORIGINAUX. Sonchus tenerrimus L.. — arvensis L. b. $S. decorus Cast. Picridium vulgare Desf. Zacintha verrucosa Gærtn. Crepis setosa Hall. fil. Hieracium præaltum Vill. Scolymus hispanicus L. — maculatus L. Xanthium macrocarpum DC. — spinosum L. (et n° 3) Campanula rapunculoides L. Arbutus Unedo L. Erica multiflore L. — arborea L. Utricularia vulgaris L. Coris monspeliensis L. Asterolinum stellatum Link. Lysimachia naummularia L. Phillyrea augustifolia L. Jasmiaum fruticans L. Vincetoxicum nigrum Mœænch. Cynanchum monspeliacum L. Limnanthemum nymphoides Link. Erythrœa spicata Pers. — maritima Pers (et no 1, A.) Cicendia pusilla Griseb. Cuscuta planiflora Ten. — suaveolens Seringe. — monogyna Vahl. Convolvulus althœæoides L. Symphytum officinale L. Cerinthe major Lam. Nonnea alba DC. Lithospermum tinctorium L. — fruticosum L. Echium italicum L. Cynoglossum cheirifolium L. Asperugo procumbens L. Heliotropium supinum L. — curassavicum L. Lycium barbarum L. — mediterraneum Dun. Solanum villosum Lam. Physalis Alkekengi L. Verbascum phlomoides L. Scrofularia peregrina L. Linaria Cymbalaria Mill. — græca Chav. — micrantha Spreng. Veronica acinifolia L. — anagalloides Guss. — Buxbaumi Ten. — cymbalaria Bod. Bartsia Trixago L. — viscosa L. — Jatifolia Sibth. et Sm. Orobanche arenaria Bork. — Galii Duby. — rnbens Wallr. — loricata Rchb. — cernua Læfl. Vitex Agnus-castus L. Lavandula stæchas L. — latifolia Vill. Mentha cervina L. Satureia hortensis L. Lamium ffexuosum Ten. Stachys arvensis L. — hirta li. Sideritis romana L. hrs taie Ajuga Iva Schreb. Teucrium Polium L. Plantago lagoçus L. — MN albicansie — Psyllium L. Aristolochia rotunda L. — lonza L. Cytinus hypocistis L. Osyris alba L. Laurus nobilis L. Amarantus Delilei Richter et Loret. Atriplex rosea L. Camphorosma monspeliaca L. Rumex bucephalophorus L. — intermedius DC. Polygonum mite Schr. — romanum Jacq. — Bellardi All. Potèrium Magnoliü Spach. Urtica pilulifera L. Theligonum Cynocrambe L. Celtis australis L. Ficus Carica L. Euphorbia Chamæsyce L. — pubescens Desf. — serrata L. — sulcata Delens. — peploides Gouan. — Characias L. Mercurialis tomentosa L. Croton tinctorium L. Callitricre pedunculata DC. Quercus coccifera L, Pinus halepensis Mill. Juniperus oxycedrus L. — phænicea L. (et no 3 rarem.) Damasonium polyspernum Coss. Colchicum longifolium Cast. Tulipa Clusiana DC. — Oculus-solis S. Am. — prœæcox Ten. — gallica Lois. Uropetalum serotinum Gawl. Ornithogalum narbonense L. Allium polyanthum R. S. — rotundum L. — Chamæmoly L. — roseum L. Bellevalia romana Rchb. Muscari neglectum Guss. — racemosum DC, RÉGIONS BOTANIQUES DE L HÉRAULT. SEA Asphodelus fistulosus L. Aphyllantes monspeliensis L. Asparagus acutifolius L. Smilax aspera L. Romulea Columnæ Seb. et Mauri. — ramiflora Ten. Leucoium æstivum L. Narcissus Tazetta L. — dubius Gouan. Cephalanthera ensifolia Rich. Orchis longibracteata Biv. — mascula L. — Simia Lam. — palustris Jacq. (et no 1 B). — militaris L. — purpurea Huds. — provincialis Balb. Ophrys Scolopax Cav. — lutea Cav. Hydrocharis Morsus-ranæ L. Vallisneria spiralis L. Potamogeton pusillus L. Juncus pygmæus Thuil. — capitatus Mey. — Striatus Schousb. — fontanesii Gay (secund. Duv.). — Tenagrea L. Cyperus badius Desf. — serotinus Rottb. — flavescens L. Schænus nigricans L. Cladium Mariscus R. B. Scirpus littoralis Schrad. — pauciflorus Lyhtf. Carex stricta Gaud. — humilis Leyss. — flava L. — maxima SCOP. — Linkiü Schk. — halleriana Ass. — nitida Host. — hispida Willd. — ædipostyla J. Duv.-J. — Mairi Coss. — punctata Gaud. — pseudo-Cyperus L. — paludosa Curt. Andropogon halepensis Sibth. — Gryllus L. Setaria glauca P.B. Stipa Aristella L. Echinaria capitata Desf. Panicum Digitaria Laterr. Lappago racemosa Willd. Leersia oryzoides sol. Phalaris brachystachys Link. — canariensis L. — minor Retz. — paradoxa L. — cærulescens Desf. I, — nodosa L. — arundinacea L. Phleum Bœhmeri Wibel. Alopecurus bulbosus L. Crypsis schænoides Lam. — aculeata Ait. Agrostis verticillata Vill. — interrupta L. Stipa juncea L. — capillata L. Milium lendigerum L. — multiflorum Lois Arundo Donax L. — maxima Forsk. Airopsis globosa Desv. Aira fasciculata(sub Corynephorus) Boiss. — cupaniana Guss. — capillaris Host. Avena barbata Brot. ù — bromoides Gouan. Gaudinia fragilis P. B. Glyceria spectabilis M. K. Melica Bauhini All. — minuta L. (petite et gr. forme). Briza maxima L. Eragrostis major Host. — minor Host. — pilosa P. B. Sclerochloa dura P. B. Vulpia ciliata Link. — ligustica Link. — bromoides Rchb. — Michelii Rchb. Diplachne serotina Link. Bromus maximus Desf. — madritensis L. — rubens L. — squarrosus L. — maäcrostachys Desf. — intermedius Guss. Brachypodium ramosum R. S. — distachyon R. S. Hordeum secalinum Schreb. — Caput-medusæ (sub Elymus) L. Triticum villosum P. B. — monococcum L. Ægilops ovata L. (et n°3). — triaristata Willd. — triuncialis L. Lolium multiflorum Lam. — rigidum Gaud. Lepturus cylindricus Trin. Ophioglossum vulgatum L. Polystichum Thelypteris Roth. Cheilanthes odora Sw. Marsilea pubescems Ten. — strigosa Willd. Isoetes setacea Del. — Duriæi Bory. — minuta Durieu. 30 518 MÉMOIRES ORIGINAUX. No 3. RÉGION MONTAGNEUSE. Clematis recta L. Anemone rubra Lam. — nemorosa L. — Hepatica L. Ranunculus hederaceus L. — aconitifolius L. — platanifolius L. — auricomus L. — tuberosus Lap. — saxatilis Balb. 2. Caltha palustris L. Helleborus occidentalis Reut. Aquilegia vulgaris L. — viscosa Gouan (non auct.}. Aconitum Lycoctonum L. Pæonia peresrina Mill. Meconopsis cambrica Vig. Corydalis solida Sm. — claviculata DC. Fumaria Bastardi Bor. Raphanus Landra Mor. (et n° ?). Sinapis Cheiranthus Koch. Barbarea intermedia Bor. Turritis glabra L. Arabis brassiciformis Walir. — auriculata Lam. — Stricta Huds. — muralis Bertol. — Turrita L. Cardamine sylvatica Link. — impatiens L. Dentaria pinanta Lam. Alyssum montanum L. Draba aizoides L. Kernera saxatilis Rchb. Camelina sativa crantz. — dentata Pers. Iberis maialis jord. — saxatilis L. Thlaspi arvense L. Hutchinsia pauciflora (sub capsella) Koch Lepidium heterophyllum Benth. (forma L. Smithii Hook.) Helianthemum umbellatum Mill. Viola palustris L. — virescens Jord. — scotophylla jord. — Canina L. — arenaria DC. — segetalis Jord. (forma V. Timbali Jord.). — sagoti Jord. — sudetica Willd. Reseda Jacquini Rchb. Astrocarpus purpurascens Walpers. Drosera rotundifolia L. Parnassia palustris L. Silene saxifraga L. — Armeria L. — autans L. Lychnis diurna Sibth. Gypsophila muralis L. Dianthus monspessulanus L. — carthusianorum L. — graniticus Jord. Sagina procumbhens L. Alsine Jacquini Koch. — verna Bartl. b. Thevenei. — Bauhinorum Gay. Arenaria serpyllifolia L. — hispida L. — modesta Duf. — tetraquetra L. — trinervia L. — pentandra (sub Mæbhringia). Gay. Stellaria nemorum L. — Holostea L. — uliginosa Murr. Cerastium triviale Link. — arvense L. Spergula arvensis L. — vulgaris Boën. Tilia platyphylla Scop. Geranium sylvaticum L. Hypericum humifusum L. — hyssopifolium Vill. — pulchrum L. — montanum L. — Elodes L. Acer opulifolium L. Oxalis acetosella L. Pyrola minor L. Dictamnus albus Y.. Rhamnus alpina L. — saxatilis L. Ulex europæus Sm. Genista anglica L. 1 La latitude compensant l'altitude, les plantes de notre région montagneuse sont souvent, dans le nord de la France, des espèces de la plaine. 2? Des échantillons authentiques du Ranunculus saxatihs de Balbis m'ont prouvé que le R. cyclophyllus Jord. n’en est qu'un synonyme. RÉGIONS BOTANIQUES DE L HÉRAULT. — sagittalis L. Lupinusangustifolius L. Ononis striata Gouan. Anthyllis montana L. Trigonella hybrida Pourr. Trifolium medium L. — lævigatum Desf. — patens Schreb. Lotus major Scop. Astragalus glvcyphyllos L. Vicia Orobus DU. Lathyrus cirrhosus Ser. — macrorrhizus Wimm. — niger Wimm. — asphodeloides God. et Gren. Ornithopus perpusillus L. Cerasus avium Mœnch. — Padus DC. Cotoneaster tomentosa Lindi. Malus acerba Mér. Sorbus aucuparia L. — Aria Crantz. Spiræa Ülmaria L. Potentilla rupestris L. — micrantha Ram, — fragariastrum Ehr. — caulescens L. — Tormentilla Nestl. — argentea L. — inclinata Vill. Agrimonia odorata Mill. Epilobium montanum L. — collinum Gm. = roseum L. — obscurum Schrep. — alsinifolium Vill. Circæa lutetiana L. Peplis Portula L. Montia minor Gm. — rivularis Gm. Paronychia cymosa L. — polygonifolia DC. Illecebrum Verticillatum L. Scleranthus perennis L. Sedum purpuraesens Koch. — maximum Sut. — reflexum L. (et n° 2). — anglicum L. — brevifolium DC. — arvernense Lec. et Lamt. — arachnoideum L.. Ribes Uva-crispa L. — alpinum L. Saxifraga Clusii Gouan. — granulata [. — prosti Sternb. — hypnoides L. — mixta Lap. Chrysosplenium oppositifolium L. Sanicula europæa L. Torilis Anthriscus Gm. | Laserpitium latifolium L. — Nestleri Soy. Will. — Siler L. Augelica sylvestris L. Peucedanum Oreoselinum Mœnch. Heracleum Lecokii God. et Gren. Athamantha cretensis L. Æthusa Cynapium L. Ænanthe peucedanifolia Poll. Buplevrum falcatum L. — caricinum Pimpinella magna L. — Tragium Miletine fe Carum verticillatum Koch. — CarviL. Anthriscus vulgaris Pers. Conopodium denudatum Koch. Chœærophyllum aureum L. _— Cicutaria Vill. Conium maculatum L. Sambucus racemosa L. Lonicera Periclymenum L. — Xylosteum L. Galium Cruciata Scop. — obliquum Vill. — uliginosum L. Asperula odorata L. Valeriana officinalis L. — dioica L. — tripteris L. Knautia sylvatica b. latifolia Dubvy. Adenostyles albifrons Rchb. Solidago Virga-aurea L. (et n° ?). Aster alpinus L. Doronicum Pardalianches Willd. — anstriacum Jacq. Arnica montana L. Senecio sylvaticus L — adonidifolius Lois. — Doronicum L. — spathulæfolius DC. Tanacetum vulgare L. Chrysanthemum pallens Gay. — monspeliense L. — inodorum L. Anthemis collina Jord. — Triumphetti L. Bidens tripartita L. Inula salicina L. (et n° 2). Gnaphalium dioicum L. — sylvaticum L. — uliginosum L. Cirsium eriophorum Scop. — palustre Scop. Carduus nutans L. Centaurea nigra L. — maculosa Lam. Serratula nudicaulis DC. Jurinea Bocconi Guss. Carlina cynara Pourr. — acanthifolia All. 520 MÉMOIRES ORIGINAUX. Lappa intermedia Rchb. Hypochæris maculata L. Arnoseris minima Koch. Leontodon autumnalis L (et n° 2). Scorzonera purpurea L. — humilis L. Prenanthes purpurea L. Sonchus Plumieri L. Crepis albida Vill, Hieracium saxatile Vill. — auricula L. — amplexicaule L. (et no 2). Phyteuma orbiculare L. (et n°2). — spicatum L. — Charmelii Vil. Jasione perennis Lam. Campanula Trachelium L. — ‘ rotundifolia L. — persicifolia L. (et n° 2). — patula L. — speciosa Pourr. Vahlenbergia hederacea Roth. Vaccinium Myrtillus L. Pinguicula Vulgaris L. Primula elatior Jacq. — officinalis Jacq. Androsace maxima L. Cyclamen repandum Sibt. et Sm. — b. monspeliense Nob. Lysimachia nemorum L. Centunculus minimus L. Menyanthes trifoliata L. Gentiana lutea L. — cruciata L. — Pneumonanthe L. — ciliata L. Cuscua major DC. Onosma echioides L. (et n° 2), Pulmonaria tuberosa Schr. Myosotis sylvatica Hoffm. Cynoglossum officinale L. — montanum L, etno 2). Atropa Belladona L. Verbascum Lychnitis L. — nigrum L. Antirrhinum Azarina L. (et n° 2). Scrofularia alpestris Gay. _— nodosa L (et no 2). Veronica scutellata L. — montana L. — serpyllifolia L. — verna L. — præcox All. Digitalis purpnrea L. Erinus alpinus L. Rhinanthus hirsuta Lam. Euphrasia oflicinalis L. — montana Jord. — rigidula Jord. — ericetorum dJord. — salisburgensis Funk. - Pedicularis sylvatica L. Melampyrum nemorosum L. = pratense L. Orobanche Teucri Holland. Mentha sativa L. Lathrœæa clandestina L. Calamintha grandiflora Mænch. — ascendens Jord. Melissa officinalis L. Salvia Æthiopis L. verticillata L. Nepeta lanceolata Lam. Leonurus Cardiaca L. Lamium maculatum L. Galeobdolon Crantz. Galeopsis intermedia Vill. — dubia Leers (et n0?). Scutellaria minor L. Armeria juncea Gir — plantaginea Willd. Plantago carinata Schrad. — argentea Chaix. Thesium alpinum L. Daphne alpina L. Chenopodium hybridum L. — Bonus-Henricus L. Rumex obtusitolius L. scutatus L. Polygonum Bistorta L. Alchemilla alpina L. Mercurialis perennis L. Euphorbia hyberua L. — Duvalii Lec. et Lamt. Callitriche hamulata Kütz. Fagus sylvatica L. Castanea vulgaris Lam. Querous pedunculata Ehr. Corylus Avellana L. Salix aurita L. amygdalina L. Pinus sylvestris L. monspeliensis Salzm. Taxus baccata L. Tulipa Celsiana DC. sylvestris L. (et n°2? très-rarem.). Fritillaria pyrenaica L. Lilium Martagon L. Scilla Lilio-Hyacinthus L. bifolia L. Ornithogalum pyrenaicum L. Gagea stenopetala Fries. bohemica Schult. Allium Victorialis L, flavum L. fallax Don. ursinum L. Erythronium Dens-canis L. Muscari botryoides DC. Narthecium ossifragum Huds. Phalangium planifolium Pers. Asparagus tenuifolius Lam. RÉGIONS BOTANIQUES DE L HÉRAULT. 2 Paris quadrifolia L. Polygonatum officinale AI. — multiflorum All. Convallaria maialis L. Maianthemum bifolium DC Crocus nudiflorus Smith. Iris lutescens Lam. Galanthus nivalis L. Narcissus Pseudo-Narcissus L. Epipactis atrorubens Hoffm. Orchis Sambucina L. — maculata L. — montana Schm. Arum maculatum L. Juncus supinus Mænch. — acutiflorus Ehr. — squarrosus L. Luzula sylvatica Gaud. — nivea DC. — erecta Desv. Eriophorum latifolium Roth. — angustifolium Roth. Scirpus sylvaticus L. — compressus Pers. — multicaulis Sm !. Rhyncospora alba Vahl. Carex pulicaris L. — paniculata L. — leporina L. — pallescens L. — pilulifera L. — montana L. — depauperata Good. (et n° 2). — lævigata Sm. — ampullacea Good. Agrostis canina L. — vulgaris L. Sesleria cærulea Ard. Lasiagrostis Calamagrostis Link. Aira præcox L. — cæspitosa L, — flexuosa L. Poa sudetica Hænck 2. Triticum caninum L. Nardus stricta L. Osmunda regalis L. Polypodium Phegopteris L. Aspidium aculeatum Del. Cystopteris fragilis Bernh. Polystichum Filix-mas Roth. Asplenium Filix-fæmina Bernh. — Halleri DC. — lanceolatum Huds. — septentrionale Sw. — Breynii Retz (A. Septentrio- nali-Trichomanes.) Blechnum Spicant Roth. Equisetum sylvaticum L. ÿ Lycopodium clavatum L. Selaginella denticulata Koch. — echinata Murr. — vulgaris Fries. En additionnant toutes les espèces qui précèdent, on trouve : Espèces du cordon littoral. ............... ON — des terrains salés.......... see ee bete re — de la région de l’olivieret.. ......... 472 — de la région montagneuse............ 399 Total.2.19934 Ce chiffre approche de la moitié des espèces dont se compose la Flore de l'Hérault. Si l’on y joint en effet les plantes ubiquistes communes à nos deux principales régions, et un certain nombre d'espèces rares omises comme peu caractéristiques, on aura la 128 Espèces nouvelles pour l'Hérault, découvertes récemment à Fraïsse par M. Vidal, instituteur de cette commune. 4 On peut voir à quelles observations de notre part ont donné lieu déjà un certain nombre de ces espèces. Mémoires de l'Académie de Montpellier, tom. VI, année 1864; Bull. de la Soc. bot. de France, tom. X, pag. 375: tom. XI, pag. 327; tom. XIII, pag. 13, 312 et 440 ; tom. XV, pag. 104; tom. XVI, pag. 285. D22 MÉMOIRES ORIGINAUX. Flore complète dont les dernières familles ne sont pas encore entièrement rédigées, mais qui ne devra pas, au total, dépasser de beaucoup 2,000 espèces. En supposant, avec notre ami M. Ardoïno ‘, que le nombre des plantes vasculaires d’un département français ne soit en moyenne que de 1,000 à 1,300 espèces, chiffre un peu incertain, faute de documents complets, on voit combien l'Hérault est, sous ce rapport, heureusement partagé. Notre situation méditerranéenne et notre climat suffiraient à priori pour faire prévoir l’énorme différence qui existe, quant à la quantité des espèces, entre notre département et les départements éloignés de la Méditerra- née. Nous avonscomparé, pour mettre ce faiten évidence, le nom- bre de nos espèces à celui de la Flore de la Normandie *, qui em- brasse cinq départements, et à celui de la Flore des environs de Paris %, d’une circonscription analogue à celle de la Flore nor- mande, et au moins quatre à cinq fois plus vaste que la nôtre. Il nous a fallu, pour établir des rapports exacts et conceluants, commencer par ramener les plantes des Flores prises pour terme de comparaison à la délimitation de l'espèce telle que nous l’avons exposée autrefois dans nos Glanes d’un botaniste. Or, après avoir fait subir ainsi à toutes les plantes comparées la même délimitation spécifique, nous avons trouvé que la Flore des environs de Paris renferme près de 700 espèces de moins que la Flore de l'Hérault, et que celle de la Normandie, avec ses cinq départements, en contient environ 500 de moins que la nôtre. On peut se convaincre également de l'influence de la chaleur sur les chiffres que nous venons de mentionner, en rapprochant entre elles les deux Flores que nous venons de comparer à la nôtre. Nous trouvons, en effet, que la Flore de Normandie, 1 Flore des Alpes-Maritimes, pag. 7. 2 Flore de la Normandie; par M. de Brébisson, 4° éd. 1869. 3 Flore des environs de Paris; par MM. Cosson et Germain, 2° éd. 1861. # Voy. Bull. Soc. bot. de France, tom. VI, pag. 14. RÉGIONS BOTANIQUES DE L HÉRAULT. 523 quoiqu'il s'agisse d’un pays en majeure partie plus septentrional, renferme environ 200 espèces de plus que la Flore des environs de Paris. Cela tient évidemment à ce que la Normandie confine à la mer, qui tempère la rigueur du froid, et aussi, sans doute, à ce que le Calvados et le littoral de la Manche sont soumis à l’action du Gulf-stream, courant chaud de l'Océan dont les météorologistes et les botanistes ont plus d’une fois constaté l'influence. On préférera peut-être une comparaison à termes moins iné- gaux, et qui consiste à rapprocher la Flore de l'Hérault de celles des départements maritimes qui l'avoisinent. Si mes chiffres doivent subir plus tard des rectifications, je puis du moins les «onner dès aujourd’hui comme approximatifs. Les riches départements des Bouches-du-Rhône et du Var, dont je n’ai pas encore supputé les espèces, offriraient à cet égard un grand intérêt. J’y reviendrai plus tard, car il serait puéril de se -complaire dans des rapprochements avantageux pour nous, et de fuir une défaite certaine, mais qui nous permettra toujours d'occuper avec honneur un des premiers rangs. Le département du Gard", qui nous borne au levant, offre une très-grande analogie avec le nôtre, quant au caractère el au nom- bre total de ses productions végétales ; toutefois, en comparant la topographie du Gard et celle de l'Hérault, il est facile de com- prendre que les chiffres respectifs des espèces régionales doivent entièrement différer d'un département à l’autre. Le Gard, en effet, a un littoral fort restreint, comprenantla seule plage d’Aigues- Mortes; aussi l'Hérault a-t-il, dans cette catégorie, beaucoup plus d'espèces que son voisin. Les montagnes du Gard, en revanche, sont plus nombreuses et plus élevées que les nôtres. L’Aigoual surtout (1,568 mètres), plus septentrional et dépassant de plus de 400 mètres les plus hauts sommets de l'Hérault, contribue à enrichir le Gard d'environ 120 espèces montagnardes qui nous manquent, tandis que nous n’en avons qu’une demi-douzaine 1 Voir la Flore du Gard; par de Pouzolz. 1862. ’, 24 MÉMOIRES ORIGINAUX. dont il soit privé. Qu'on joigne au bilan de la plaine du Gard une quarantaine d'espèces de plus que chez nous, et, malgré notre avantage sur le littoral, nous serons obligés d’avouer, au total, notre infériorité pour environ 130 espèces. Pouzolz, il est vrai, a fait figurer dans sa Flore beaucoup d’espèces de trop, notamment celles que Gouan a indiquées à tort sur l’Espérou et sur l’Aigoual; mais les botanistes du Gard en ont découvert, depuis Pouzolz, un nombre à peu près égal, qui établit compensation. Le département du Tarn, qui nous borne à l’ouest, est plus difi- cile à comparer au nôtre. Si j'ai considéré, en effet, comme des espèces beaucoup de variétés de la Flore des environs de Paris, Flore si remarquable à tous les autres points de vue, je prends au contraire pour de simples variétés beaucoup d'espèces préten- dues de la Flore du Tarn'. Toutefois, même au point de vue de M. de Martrin-Donos, et en lui concédant ainsi un immense avan tage, la Flore de l'Hérault compterait encore au moins 250 espèces de plus que celle du Tarn. La différence serait beaucoup plus grande et double au moins, si, logiquement, on donnait la même délimitation spécifique à toutes les plantes comparées. Ces diffé- rences n’offrent rien d’extraordinaire, lorsqu'on pense que le Tarn est naturellement privé de toutes nos espèces maritimes, et que presque toutes les espèces de notre seconde région sont incompa- tibles avec le climat girondin. Je termine par la Flore des Alpes-Maritimes de mon ami M. Ardoïno. Cette Flore, quoique plus restrictive que la nôtre, renferme plus de 400 espèces de plus que celle de l'Hérault. 1 Après avoir lu dans le Journal du Tarn, en 1865, un article relatif au Musée d'Albi, dans lequel je parlais de l'herbier de la Flore du Tarn, dont M. de Martrin- Donos venait d'enrichir le Musée, ce savant botaniste m’écrivait, avec sa bienveil- lance ordinaire : « Si je vous avais eu pour guide, j'aurais tenu la main plus ferme et fait moins de concessions aux idées nouvelles». Ce compliment sans conséquence prouve que cet excellent homme n'avait point d'idées décidément arrêtées sur la valeur de ses espèces. Il sentait qu’il avait payé peut-être un trop large tribut au système d'une école qui a pour chefs deux éminents botanistes, sys- lème soutenable, mais souvent mal compris par des disciples dont l'exagération contribue, chaque jour à le discréditer. RÉGIONS BOTANIQUES DE L HÉRAULT. 925 On devine facilement de quelles espèces il s’agit ici, lorsqu'on songe aux sommets élevés des Alpes-Maritimes et aux nom- breuses montagnes qui, descendant presque jusqu'au rivage, resserrent Nice et Menton entre leurs masses et la mer. Nous sommes beaucoup mieux pourvus que M. Ardoïno en espèces du littoral et de la région des oliviers, parce que cette dernière région et la plage maritime offrent dans l'Hérault une superficie bien plus étendue; mais nous comptons à peine 30 espèces montagnardes étrangères aux Alpes-Maritimes, tandis que la Flore de ce département en renferme près de 600 qui font complètement défaut chez nous. L'auteur, il est vrai, franchit les bornes de son département; mais nous devons avouer que, sans dépasser les limites politiques qui le séparent de ses voisins du Var, il nous tiendrait encore à distance du chiffre imposant de sa Flore. Montpellier, le 27 janvier 1873. DES MICROZYMAS, Par M. A. ESTOR; Professeur-Agrégé à la Faculté de médecine de Montpellier. La cellule est l’élément le plus important de l'organisme : elle se nourrit, se développe et se reproduit. Pour Schwann, elle se composait d’une enveloppe, d’un con- tenu plus ou moins liquide, d'un noyau, d’un ou plusieurs nucléoies. Qu'on admiît la génération blastématique de la cellule, ou, avec Remack et Virchow, la théorie du développement con- tinu, le schéma de la cellule n'avait pas été modifié; la cellule était toujours composée d’une enveloppe, d’un contenu, d’un noyau et de nucléoles. Mais dans ces dernières années, grâce surtout aux travaux de Max Schulize, de Hugo von Mohl, de Reklinghausen, de Kühne, de Hæckel (d'Iéna), la définition dela cellule a été profondément modifiée. S96 24 52 MÉMOIRES ORIGINAUX. Depuis longtemps, Dujardin avait découvert que les êtres infé- rieurs composés d’une cellule ne sont pas tous enveloppés par une membrane, mais qu'ils sont simplement constitués par une masse susceptible de changer de forme. Il donna à la substance fonda- mentale le nom de sarcode, et aux mouvements l’épithète de sar- codiques. En 1835, Dujardin écrivait que tous les êtres vivants sont composés d’une substance qui dans les animaux supérieurs est susceptible de recevoir avec l’âge un degré d’organisation plus complexe, mais qui dans les animaux du bas de l’échelle reste toujours une simple gelée vivante, contractile, extensible et susceptible de se creuser spontanément de cavités sphériques ou de vacuoles occupées par le liquide environnant, qui vient toujours, soit directement, soit par imbibition, occuper ces vacuoles. Annoncer, en 1835, qu'un animal peut être composé d’une substance sans enveloppe et sansorganisation, constituait une vé- ritable découverte heurtant tous les principes de la physiologie générale de l’époque; aussi souleva-t-elle les critiques les plus acerbes. On rit même, on plaisanta beaucoup de ce qu'on appelait l'invention du sarcode. Depuis, on a simplement étendu les observations de Dujardin, non-seulement aux animaux unicellulaires ( amibes), mais encore aux éléments cellulaires des animaux supérieurs. Max Schultze a comparé ces masses d'origine animale à la substance fondamen- tale des cellules des végétaux que l’ou nommait déjà protoplasma, et a conservé cette dénomination. Rien n’est plus facile, en réa- lisant certaines conditions de milieu, de chaleur et d'humidité, que d'observer au microscope les mouvements amiboïdes des globules blancs du sang : la fusion des prolongements qui prennent nais- sance, la pénétration au centre de la masse de particules colorées, démontrent que ces éléments anatomiques n'ont pas de membrane extérieure. La définition de Schwann doit donc être modifiée : la cellule est formée, pour les physiologistes modernes, d’un noyau environné d’une atmosphère de protoplasma granuleux. On trouve dans le protoplasma nn liquide filant et muqueux et des granulations moléculaires ; quand on a dit que le liquide est DES MICROZYMAS. De formé d’une substance albumineuse tres-peu fixe, on a résumé ce que l’on sait d'essentiel sur sa composition intime. Quant aux granulations, tous les auteurs les signalent, mais ils parlent peu de leur nature et de leur rôle; on peut aujourd'hui combler celte lacune. Nous allons, pour le démontrer, rappeler quelques détails bien connus de l’histoire naturelle des êtres inférieurs; en second lieu, présenter l’histoire de la découverte des microzymas; en troisième lieu, faire connaître les expériences fondamentales qui établissent leur existence et leur rôle. I. 4. Depuis les travaux de Steinstrup, van Beneden, Leuckart, Kuchen-Meister, etc., les faits relatifs aux générations alternantes sont connus de tous'. Ces faits, étudiés d’abord chez les animaux, sont surtout fréquemment observés chez les végétaux inférieurs. Tout le monde connaît l’aisloire de ces moisissures si répandues du penicillum crustaceum : c’est un végétal branchu, gris bleuâ- tre, ayant à l’extrémité de ses branches des pinceaux de spores qui, agitées, se détachent et se répandent sous forme d’une pous- sière verte. Si ces spores sont semées sur un terrain identique, un végétal semblable prend naissance. Plongées dans l’eau, ces spores se gon- flent, le noyau devient apparent, puis le tout se résout en granu- lations qui à la rupture de l'enveloppe sont projetées au loin et sont animées de mouvements oscillaloires à la manière de pseudo-vibrions. Puis, des phénomènes de prolifération ont lieu; ils donuent naissance à des chapelets ( torwla ) ou à des filaments très-petits et mobiles: ces filaments ne sont autres que des bacté- ries ; plus longs et immobiles, ils répondent à la définition de la bactéridie; plus développés, ils ontle caractère des leptothrix. Tous ces éléments, semés de nouveau sur le terrain primitif, donnent naissance au grand végétal branchu et bleuâtre qui a servi de point de départ à l’expérience. 1 Nous jugeons utile d'entrer dans ces détails, quoiqu'ils n'aient eu aucune influence sur la découverte des microzymas, que quelques auteurs considèrent comme des êtres à part, 528 MÉMOIRES ORIGINAUX Une observation importante doit être rappelée : dans l’évolution que nous venons de décrire, on ne surprend aucune règle absolue de succession ; le végétal peut vivre, se nourrir et proliférer dans chacune des phases précédemment indiquées. Si le milieu reste albumineux, le penicillum peut rester indéfiniment à l’état de granulations sphériques se multiplient par division ; dans l’eau sucrée, on observe d’abord les pseudo-vibrions déjà notés; plus tard on voit des cellules, analogues à celles de la levüre de bière, se multipliant indéfiniment par gemmation. Près de l'air, ces cellules germent, poussent des filaments qui s’entrelacent, se feutrent et prennent l'aspect des végétaux du genre achorion ou oïdium. Le végétal peut vivre et proliférer indéfiniment sous une seule et même forme, pourvu que les con- ditions de milieu ne soient point modifiées. B. Une seconde remarque mérite de trouver sa place dans cet exposé: les végétaux inférieurs s’accommodent parfaitement, pour vivre et proliférer, du milieu que leur offrent les tissus des ani- maux. L’achorion Schünleinii produit le favus à la surface du corps de l’homme: l’oïdiumalbicans produit le muguet sur les muqueuses de l’homme, et parfois dans l’intérieur d'organes creux assez éloi- gnés de l'extérieur. D’après les travaux modernes, le choléra asiatique, la variole, la rougeole, la scarlatine, la diphthérie, les fièvres intermitlentes, seraient dus à des végétaux microscopi- ques vivant dans l'intimité même des organes et des tissus. La muscardine et la pébrine des vers-à-soie sont des maladies pa- rasitaires dues au développement du botrytis bassiana et des cor- puscules de Cornelia. IT. Un mot sur l’histoire de la découverte des microzymas. Il y après de vingt années, un chimiste annonça que l’eau distillée pouvait, à froid, convertir le sacre de canne en glucose. En effet, le sucre de canne en solution, abandonné à l'air, se transforme ordinairement en glucose. Ce fait méritait un sérieux examen. M. le professeur Béchamp, analysant toutes les circon- DES MICROZYMAS. 29 stances du phénomène, fut bientôt frappé de cette particularité que, toutes les fois que la transformation avait lieu, le microscope décelait dans le liquide la présence de végétaux microsco- piques, de moisissures. Mais il fallait démontrer non-seulement que cette conversion coïncidait toujours avec l'apparition d’une moisissure ; il fallait en outre s'assurer que cette conversion ne pouvait pas avoir lieu sans elle, et pour cela il importait d'empêcher la naissance dans l’eau de toute production orga- nisée. Une foule de substances furent essayées pour s'opposer au développement des germes apportés par l'air : la créosote remplit si bien l'indication, que M. Béchamp à fini par l’'employer d’une manière presque exclusive. Du sucre de canne, dissous dans l'eau distillée additionnée de quelques gouttes de créosote, peut rester pendant dix ans inaltéré ; il a conservé aprés ce laps de temps toutes ses propriétés. Quand le flacon contient des moisis- sures, bientôt le sucre de canne disparaît ; mais en même temps la liqueur, qui était neutre, est devenue acide par l'acide acétique engendré, et de plus toujours il se forme de l’alcool. Ainsi, le sucre de canne se trouve converti en glucose d’abord ; celui-ci est ensuite transformé en produits semblables à ceux que l’on trouve dans ce que l’on nomme fermentation alcoolique. Ces travaux conduisaient donc tout naturellement à l’étude des fermentations, qui fut faite par M. Béchamp avec un tel succés, que bientôt pouvait être formulée la théorie physiologique de la fermentation. Pendant le cours de ces recherches, M. Béchamp usa dans certaines expériences de carbonate de chaux à l’état de craie. Malgré toutes les précautions, en présence de la craie le sucre de canne se transformait, l’'empois de fécule se liquéfiait, et ce pendant le microscope ne dévoilait pas de production végétale analogue à celles que l’on rencontre dans les fermentations alcoo- lique, butyrique ou lactique. Les examens furent répétés, et les plus forts grossissements du microscope finirent par dévoiler de petites particules mobiles, animées d’un mouvement très-vif de trépidation. Dès-lors, la craie n'était pas seulement du car- 530 MÉMOIRES ORIGINAUX. bonate de chaux ; elle contenait des organismes actuellement vivants. En effet, si l’on use de carbonate de chaux chimique- ment pur, le sucre de canne ou l’empois de fécule restent inal- térés pendant des années. L'empois ne se liquéfie pas, le sucre de canne ne se transforme pas spontanément : ni l’eau ni le car- bonate de chaux n’ont d'action sur ces substances ; dans la craie, il y a donc autre chose, il y a des granulations mobiles. M. Bé- champ les a isolées : comme tous les ferments organisés, elles contiennent du carbone, de l'hydrogène et de l'azote à l’état de matière organique; elles renferment en outre une matière albu- minoïde et un principe saccharifiable comme la cellulose. La craie sortant de la carrière contient donc des organismes actuellement vivants, adultes et sans doute très-vieux. Ils peuvent être tués par une chaleur humide soutenue pendant plusieurs heures à 150 ou 200°, ce qui n'altère en rien le carbonate de chaux; ils perdent alors toute action, et sur l’empois de fécule, et sur l’eau sucrée. Il y a donc dans la craie des organismes très-ténus, qui fonctionnent à la manière des ferments ; M. Béchamp les a nom- més microzymas. Un peu d’étonnement était permis à la première mention d’une découverte aussi inattendue. La craie, extraite à des profondeurs souvent considérables, contenait des êtres vivants qui sommeil- laient peut-être depuis des siècles et qui n’attendaient pour revi- vre qu'un peu de chaleur et d'humidité, c’est-à-dire un milieu fa- vorable. Ce ne fut pas le seul sentiment exprimé : l'apparition des microzymas eut les honneurs d’une grande découverte. On rit beaucoup de la résurrection de ces petits êtres de quelques dix millièmes de millimètre, comme on a ri, il y a quarante ans, du sarcode et de Dujardin. Voilà les microzymas découverts, le mot et la chose sont con- nus de tous; nous pouvons maintenant aborder l'étude de leur rôle en physiologie; j'espère justifier cette conclusion, qu'il est immense. L'étude des microzymas permet seule de jeter les fon- dements d’un chapitre particulier des sciences biologiques qui a nom Physiologie cellulaire. DES MICROZYMAS. 931 HI, 4. Tout était prêt pour étudier les granulations molécu- laires des cellules et des tissus des animaux. La première expé- rience date de janvier 1868 ‘; elle a été faite sur le foie, organe dans lequel le mouvement brownien et les granulations sont très - accusés. Les microzymas du foie sont insolubles dans l'acide acétique Quelques renseignements préalables doivent trouver ici leur place : a. D'abord les expériences fondamentales sont faciles à répéter; il n'est pas permis aux hommes de science de ne pas chercher à contrôler des faits d'une importance aussi capitale. On prend deux ballons, et dans l'un d'eux on introduit 240 cent. cub. d'eau distillée; on le chauffe, et pendant l'ébullition on ajoute 6 gr. de fécule de Groult préalablement hydratée; on continue l'ébullition pendant quelques minutes, puis on ajoute 5 à 6 gouttes de créosote, et on fait deux parties de l'empois formé. Une moitié est placée dans un ballon, que l'on bouche ; il est des- tiné à servir de témoin ; il est inaltéré et solide pendant des années. Dans un second ballon, on place la seconde moitié de l'empois, et on ajoute, ou un fragment entier de foie, ou 3 ou 4 centimètres cubes environ de pulpe de foie obtenue par le raclage du parenchyme de cet organe. Les deux ballons sont soumis à une tempé- rature uniforme de 30 à 40 degrés, que l'on obtient très-facilement par un bain- marie au-dessous duquel on place une lampe dont on varie la distance pour obtenir la température voulue. Le tout ainsi installé, on observe d'heure en heure le con- tenu des fioles, à l’aide d'un microscope ayant un pouvoir amplifiant de 5 à 600 diam. Le n° 7 (obj. de Nachet), avec l'oculaire 1 ou ?, convient parfaitement pour cet examen. Sur cette expérience, qui n'exige ni laboratoire ni installation dispen- dieuse, on peut calquer toutes les expériences analogues. b. Dans l'exposé des expériences on a pu se servir quelquefois indifféremment des expressions microzymas et granulations moléculaires, pour éviter des répétitions désagréables ; quelques auteurs en ont conclu que les deux expressions étaient absolument synonymes, et que, par suite, toute granulation étant un microzyma, c'est-à-dire un microphyte ferment, nous étions arrivé à nier l'existence de granu- lations graisseuses, pigmentaires ou autres. Ce serait là une erreur et presque une absurdité à laquelle personne n'a jamais songé. Parmi les granulations molé- culaires, il y en a qui sont de véritables microzymas: nous les considérons comme les plus importantes; nous les étudions seules, mais sans nier les autres. c. Les travaux qui vont être analysés n'ont trait en aucune façon à la découverte des granulations maléculaires des cellules et des tissus; ces granulations sont con- nues depuis longtemps, bien décrites par les auteurs, et dessinées dans toutes les planches d’histologie. Ce qu'il importait et ce qui a été fait, c'était d'établir leur nature, leur fonctionnement et leur importance. Leur existence ne peut aujour- d'hui être mise en doute que par des gens qui n'ont aucune habitude du micro- scope et des recherches histologiques. 532 MÉMOIRES ORIGINAUX. et dans la potasse caustique au dixième, ce qui exclut leur nature albumineuse et graisseuse. L'eau ne les altère en aucune façon, même après plusieurs jours de contact; ils sont en quelque sorte imputrescibles. Dans tous les tissus à l’état normal, les micro- zymas conservent leur forme sphérique ; mais dans des condi- tions anormales, ils subissent des modifications de forme qu'il est important de faire connaître. Quand on place de la pulpe de foie dans l’empois créosoté maintenu à une température de 30 à 35° environ, on trouve peu de temps aprés, dans le mélange, des bactéries nombreuses et bien conformées ; le résultat est obtenu en moins de vingt-quatre heures. Quelle est l’origine de ces bactéries? Ces bactéries ne sont autre chose que les microzymas à une certaine période de leur évolution. Pour démontrer l'exactitude de cette réponse, il convient de prouver que ces bactéries ne peuvent avoir pour ori- gine des germes venus de l'air; en second lieu on doit indiquer les formes intermédiaires entre le miérozyma et la bactérie. a. Nous avons plusieurs fois placé un fragment de foie de chien dans de l’empois bouillant créosoté ; pendant que l’ébulli- tion continuait, nous avons rempli complètement la fiole avec de l’eau distillée bouillante, et nous avons bouché, sans laisser d’air, avec un bouchon porté à 100 degrés ; dans d'autres expé- riences, la fiole a été scellée à la lampe ; la fiole obstruée était immédiatement refroidie et placée à l’étuve. Vingt-quatre heures après, on reprenait le fragment de foie, on l’incisait, et dans la partie profonde de l’incision, quand il n'avait pas été cuit en en- tier, on retrouvait des bactéries assez nombreuses et bien confor- mées. Des reins, des pancréas et des rates ont donné des résultats analogues. b. Dans les expériences faites à l’aide de l’empois, on ne peut saisir les formes intermédiaires entre le microzyma et la bac- térie, la transformation est trop rapide; mais d’autres milieux, en la ralentissant, facilitent au plus haut degré l’observation. Dans l’eau ordinaire ou créosotée, les microzymas gardent fort DES MICROZYMAS. 533 longtemps leur forme normale ; dans les solutions créosotées de sucre de canne, les bactéries apparaissent plus vite. Dans l’une et l’autre de ces solutions, les périodes intermédiaires sont faciles à observer; on peut quelquefois les apercevoir à côté les unes des autres. On trouve, par exemple, des microzymas isolés, d’autres associés en chapelet; on voit des microzymas présentant un grand et un petit diamètre, progressant à la manière des bactéries; enfin on voit aussi des bactéries véritables. Il existe, en outre, des for- mes intermédiaires impossibles à décrire. Ces diverses formes sont évidemment les diverses phases du développement des bac- téries. Mais ce n’est pas seulement en dehors de l’économie que ces phénomènes s’observent ; le contenu d’un kyste de la grande # lèvre, examiné au moment même de l’opération, nous a offert toutes les périodes de l’évolution des microzymas : on apercevait des granulations isolées, d’autres associées, d’autres un peu al- longées, enfin de vraies bactéries. Ainsi, chez l’homme vivant, les micerozymas peuvent se transformer en bactéries. M. Liouville a confirmé ces observations par l'examen qu'il a fait des granulations contenues dans la sérosité des vésicatoires : il a vu ces granulations s’associer, s’allonger, se fragmenter et devenir de véritables bactéries à l’état libre ou associé. Ce n’est pas tout encore : les bactéries typiques déjà étudiées ne sont pas les derniers termes du développement des micro- zymas; elles deviennent bientôt immobiles, s’allongent sans rien gagner en largeur ; un seul article peut avoir jusqu'à 0°",01. Dans certains cas, particulièrement dans la gangrène, on rencontre des bactéries munies d’un noyau; ce noyau est ordinairement à une extrémité, et représente assez bien une tête analogue à celle des zoospermes. En résumé, le bacterium chaïnette, le bacterium termo, le bacterium capitatum, le bacteridium, ne sont que les phases diverses de l’évolution des microzymas des cellules ani- males. Les nombreuses expériences faites avec les microzymas du foie n'ont pas seulement servi à établir leur histoire naturelle ï 37 534 MÉMOIRES ORIGINAUX. complète, elles ont aussi permis d'étudier leur fonctionnement : ils fluidifient l’empois avec rapidité et produisent, de la fécule solu- ble quand on les emploie isolément ; associés aux cellules hépa- tiques, ils saccharifient la fécule avec une extrême rapidité; après quelques heures, on constate la formation d’une notable quantité de glucose; s’ils ne saccharifient point la fécule quand ils sont isolés, cela tient aux circonstances anormales dans lesquelles ils se trouvent: ils ont besoin, pour la formation du glucose, de leur milieu propre, c'est-à-dire de la cellule, avec les matières albu- minoïdes de laquelle ils produisent le ferment soluble qui est l'agent de la saccharification. B. Tout le monde connaît la mère de vinaigre : c’est une sorte de membrane gélatineuse qui se forme dans le vinaigre. Gette membrane est capable de produire de l’alcool et de l’acide acéti- que, avec le sucre. Le microscope la montre composée de granu- lations moléculaires accolées, unies ensemble par une matière hyaline. Par le raclage on peut séparer ces granulations, et on les voit alors isolées, mobiles, et comparables aux granulations moléculaires des animaux et des végétaux. Ce sont ces granu- lations qui, dans la mère de vinaigre se nourrissant de sucre, produisent l'alcool et l’acide acétique. La mère de vinaigre est donc une membrane organisée, vivante, tissée de ces granula- tions. Mais il y a plus : la mère de vinaigre peut, dans certaines conditions, se transformer en bactéries, et dans ce nouvel état agir comme ferment lactique et butyrique, ou bien engendrer de belles cellules et agir alors sur le sucre de canne comme un ferment alcoolique aussi énergique que la levüre de bière. Telle est l’histoire de la mère de vinaigre telle que l’a décrite M. Béchamp. Il est une substance formée aux dépens d’un des liquides les plus essentiels des animaux, dans certaines condi- tions assez mal définies encore : la fibrine du sang, qui au point de vue physique et microscopique rappelle au plus haut degré la structure de la mère de vinaigre. L'étude de la fibrine con- stitue un des chapitres les plus importants de la physiologie, et DES MICROZYMAS. 535 certainement aussi un des plus obscurs. Les microzymas libres du sang, sortis de leur milieu naturel, sécrètent une substance qui les agglutine; ils forment une vraie fausse membrane qui n’est autre que la fibrine ; ils se comportent comme le mycoderma aceti pour former la mère de vinaigre ; la fibrine est la mère des ferments libres du sang. La fibrine, en lames minces, présente un aspect strié et très-finement granuleux. Les granulations qui la composent sont des microzymas ; on peut installer, pour le démontrer, des expériences analogues à celies que nous avons précédemment décrites ; ces expériences sont singulièrement fa- cilitées par l’addition de carbonate de chaux pur. Le 27 janvier 1869, on place une canule bien lavée dans l'artère crurale d’un chien de forte taille, et on recueille le sang dans une capsule contenant environ 100 grammes d’eau distllée créosotée. Pen- dant que le sang coule par jet dans la capsule, on le bat avec un petit balai métallique, et on sépare la fibrine. Gette fibrine, bien lavée, toujours avec de l’eau distillée créosotée, est mise dans une fiole qui contient de l’empois de fécule créosoté et du carbonate de chaux pur ; le tout est mis à l’étuve. Vingt-quatre heures après, la liquéfaction commence ; quarante heures après, elle est complète; à cette date, le microscope montre des bacté- ries à tous les degrés de développement. Le ? février, on trouve encore les formes intermédiaires du microzyma à la bactérie; on voit ainsi bon nombre de chapelets de ?, 6, et jusqu'à 12 et 15 grains. Le 1° mars, même observation. Les microzymas de la fibrine, comme ceux du lait, peuvent supporter pendant quelques instants la température de 100°. Le 2 février 1869, à 10 heures du matin, à l’abattoir, nous recueil- lons du sang de bœuf dans une capsule bien lavée et contenant environ 100 grammes d’eau distillée créosotée ; le sang est battu, la fibrine est séparée, lavée, et soumise dans l’eau à l’ébullition: on installe l'expérience suivante : fibrine bouillie, empois créosoté, carbonate de chaux pur dans une fiole placée à l’étuve. Trois jours après seulement, le 5 février, la liquéfaction est complète ; dans le liquide, on trouve des bactéries à tous les degrés de déve- 536 MÉMOIRES ORIGINAUX. loppement: on prend un fragment mince de fibrine ; dans cer- tains points transparents, on voit clairement que la membrane n’est qu'un lissu de bactéries. Des expériences de ce genre, répétées un très-grand nombre de fois avec des résultats identiques, ont démontré la justesse de l'énoncé qui précède : la fibrine est la mère des ferments libres du sang. C. De la structure et de l’origine des globules du sang. — Je crois ne pouvoir mieux faire, pour résumer ce qui est relatif à ce sujet, que de transcrire la Note scientifique que nous avons adressée à l’Académie des sciences, le 7 février 1870. «À part la description faite par les anatomistes pour chaque espèce, on ne connaît guère sur les globules du sang que quel- ques détails de chimie qui ont jeté jusqu'à présent fort peu de lumière sur le fonctionnement de ces organes. »On considère ordinairementles globules sanguins de l’homme et des mammifères comme de petites masses élastiques dans les- quelles on ne trouve ni membrane ni noyaux; de sorte que beau- coup de physiologistes modernes n’osent pas les considérer comme des cellules (Hermann). Trompé par l'aspect que présentent les globules sous le microscope, on est donc porté à les regarder comme de petites masses homogènes. Contrairement à cette opinion, nous venons de démontrer, par l'expérience, que les glo- bules du sang ne sont pas autre chose que des amas de granula- tiuns moléculaires, de microzymas agglutinés. » Quand on recoit du sang directement du vaisseau qui le four- nit, dans un vase contenant de l'alcool à 45°, le sang reste com- plètement liquide ; il ne se dépose ni fibrine ni globules ; la masse paraît rouge et limpide. Mais bientôt on voit la transparence s’affaiblir, et il se forme au fond du vase un depôt abondant, que le microscope démontre à peu près exclusivement formé de granulations moléculaires libres et mobiles, ou bien encore agglutinées . »On peut, en quelque sorte, élever ces granulations et assister DES MICROZYMAS. 37 à leur rapide prolifération. Pour cela, on jette le premier mélange sur un filtre ; la masse du dépôt est retenue, mais il passe tou- jours quelques microzymas qui prolifèrent si bien, qu'à une tem- pérature de 25 à 35° environ on voit, après deux heures, le dépôt se reformer, et, après trente-six heures, être aussi abondant que le premier; et la même série de phénomènes se reproduit jusqu’à ce que, le liquide étant complètement décoloré, les ma- tériaux de nutrition fassent défaut. L'expérience pouvant être faite avec du sang battu et défibriné, ce n’est pas la fibrine qui fournit les microzymas ; ils proviennent des globules, où l’on peut les retrouver par quelques artifices bien simples. »On peut retenir sur un filtre des globules ayant préalablement subi l’action d’une solution de sulfate de soude ; on les place ensuite sur une lame de verre, et on les broie à l’aide d’une mo- lette de verre : les globules sont déchirés, et les microzymas, devenus libres, nagent dans le liquide avec le mouvement oscil- latoire qui leur est propre. »On peut varier l'expérience : on prend une goutte de sang défibriné, on l’examine au microscope, et l’on trouve une masse de globules; il est souvent difficile ou même impossible de trou- ver entre eux un seul microzyma. On dépose alors une goutte d’eau distillée sur le bord de la lame couvre-objet ; aussitôt les globules pâälissent, puis deviennent granuleux, puis se désagré- gent en laissant à leur place des microzymas très-mobiles, et sans qu’on puisse jamais apercevoir de lambeau d’une membrane préexistante, question sur laquelle nous aurons occasion de revenir. On peut suivre de l’œil la transformation des globules en masses granuleuses d’abord, et enfin en granulations libres. » Les microzymas des globules sanguins se comportent, au point de vue de leur évolution, comme ceux du foie, que nous avons étudiés depuis longtemps. D'abord libres, ils peuvent, dans cer- taines circonstances déterminées, se rencontrer sous la forme de chapelets plus ou moins longs; placés dans des fioles contenant de l’empois créosoté additionné ou non de carbonate de chaux pur, ilsse développent très-rapidement en bactéries et bactéri- 538 MÉMOIRES ORIGINAUX. dies. Dans bon nombre d’expériences, nous avons pu saisir toutes les formes intermédiaires du mierozyma à la bactérie. » Les microzymas des globules sanguins agissent à la manière des ferments: d’abord sous la forme de microzymas; plus tard, après leur développement, sous la forme de chapelels et de hac- téries. L’empois de féeule créosoté est rapidement liquéfié par eux ; le mélange présente bientôt les caractères de la fécule so- luble et de la dextrine. Si l’on a préalablement additionné la liqueur de carbonate de chaux pur, cette liqueur, filtrée après une réaction prolongée du mélange, précipite par l’acide oxalique, ce qui démontre la présence d’acides organiques formés sous l'influence de ces ferments. [ls restent quelquefois pendant toute la durée de la transformation à l’état de microzymas ; certaines expériences positives nous ont démontré en effet que leur évo- lution en chapelelts ou en bactéries n’est nullement nécessaire pour assurer leur action sur la fécule : l’empois est même tou- jours fluidifié avant l'apparition des bactéries. » Bien plus, nous croyons pouvoir affirmer que ces micro- zymas, jadis contenus dans des cellules, sont aptes à les repro- duire. Dans les mélanges en expérience nous avons souvent vu naître un grand nombre de petites cellules pâles, un peu fram- boisées, fort analogues aux leucocytes, mais généralement plus petites etplus transparentes. Nous en a ons parfois trouvé beau- coup (12 à 15 par champ de microscope, obj. 7 de Nachet), dans des liqueurs qui, quelques jours auparavant, n’en présentaient pas une seule ; et ces cellules ne nous ont jamais offert les carac- tères d'organes en voie de prolifération. Nous n’avons jamais observé les traces d’une scission de ces globules où d’un bour- sgeonnement; au contraire, nous avons souvent rencontré des cellules très-pâles, à peine indiquées par des microzymas agglo- mérés en forme de sphère et immobiles ; on en voyait d'autres à côté, un peu plus nettement délimitées ; plus loin, de vrais leucocytes. L'observation a été assez souvent répétée pour que DES MICROZYMAS. 539 nous n’hésitions pas à voir dans ces apparences diverses les di- verses phases du développement de ces cellules. » Des faits qui précèdent nous conclnons : » a. Les globules du sang sont des agrégats de microzymas. »b. Ces microzymas peuvent évoluer en chapelets, en bactéries, en bactéridies, etc., comme tous ceux que nous avons précé- demment étudiés. » c. Ils se comportent comme des ferments. »d. Les microzymas des globules sanguins donnent naissance à des cellules semblables à des leucocytes. Ces microzymas sont donc capables, dans des milieux variés, d’engendrer des cellules; tout nous porte à croire que le globule du sang est, dans l’orga- nisme, le résultat du travail de ces mêmes microzymas ; nous reviendrons sur cet important sujet. »Nous ne saurions insister aujourd’hui sur les conséquences qui découlent de ces recherches relativement à la respiration , qui n’est qu'un mode de la nutrition; l’activité des globules sanguins est expliquée par celle des microzymas qui les constituent : dans ce sens, la respiration n’est qu’un cas particulier de cette classe de phénomènes qu’on appelle fermentation. » Cette conclusion semble hardie; et cependant, qu’on reprenne avec cette donnée l’histoire générale de la respiration, et l’on verra bientôt toute obscurité s’évanouir. Comprend-on, par exemple, une oxydation directe, une combustion qui s'arrête, parce que la température du milieu dans lequel elle s’accomplit s'élève de quelques degrés, tandis qu'on connaît au contraire l'importance de toutes les conditions de milieu, et surtout de la température dansles fermentations? Ce développement des bactéries par les granulations des élé- ments du sang a été, dans des conditions bien différentes, remarqué par d’autres observateurs, en particulier par Oscar Grim (4rchiv. 1 Voir, Comptes-rendus, tom. LXVIII, pag. 877, le travail de M. Béchamp, intitulé : Conclusions concernant la nature de la mère de vinaigre et des micro- zymas en général. 540 MÉMOIRES ORIGINAUX. für mikroskopische Anatomie) : «Sur des bêtes atteintes de char- bon, dit-il", les corpuscules blancs du sang deviennent granu- leux ; les granulations, soit albuminoïdes, soit graisseuses qu'ils renferment, sont affectées d’un mouvement moléculaire pure- ment passif : les premières deviennent libres, prennent une forme ovale, présentent une cavité d'abord voisine d’une de leurs extrémités (tête), puis centrale; ces organismes enfin affec- tent la forme d’un bâton arrondi aux deux bouts. Les vibrions ainsi formés tantôt présentent des mouvements actifs et demeu- rent isolés, tantôt se réunissent en chaînes d'aspect et de dimen- sions variables. » . Des observations variées confirment ce fait de la naissance des bactéries par le développement des microzymas. Au mois de juillet dernier, pendant les plus fortes chaleurs de l’été, un vieil- lard de l'asile de l’'Hôpital-Général succomba à un épanchement apoplectique énorme qui, ayant envahi surtout la partie anté- rieure de l'hémisphère cérébral, n’enleva pas brusquement le ma- lade. La mort arriva lentement, après une agonie de 36 ou 48 heures. L’autopsie fut faite 16 heures après la mort. Je ne rap- pelle que ce qui nous intéresse en ce moment : la cavité thora- cique ouverte etle péricarde incisé, nous remarquâmes le feuillet viscéral de cette membrane séreuse, sur la face antérieure du cœur, soulevé par une infinité de petites bulles de gaz à peine visibles. Ce gaz indiquait des phénomènes de fermentation assez intenses ; nous enlevâmes rapidement le cœur entier, et quelques instants après, dans le laboratoire du même établissement, à deux pas de la salle d’autopsie, nous constations dans le centre des parois du ventricule gauche des bactéries à tous les degrés de développement : des microzymas isolés et mobiles, des microzy- mas associés deux à deux, d’autres un peu allongés, enfin de vé- ritables et belles bactéries. Or le malade n’avait pas succombé à une maladie infectieuse: la mort était véritablement due à un ac- cident, mais elle était arrivée lentement; de plus, la chaleur ! Voir Archives de zoologie expérimentale. Avril 1872. DES MICROZYMAS. 541 normale avait été pendant longtemps conservée par l’élévation extérieure de la température, et l’on sait l'importance de cette dernière condition de milieu pour les fermentations en général. Les microzymas avaient évolué en bactéries. Nous avons d’a- bord observé toutes les formes intermédiaires; et en second lieu comment expliquer l’arrivée, dans le centre des masses mus- culaires du cœur, des germes de bactéries apportées par l'air? Certes les parois de la poitrine sont autrement efficaces pour fil- trer ce fluide qu’une colonne de coton, qui suffit cependant. À l’Hôpital-Général de Montpellier, pendant l'été dernier, trois fois le même phénomène a été noté, à peu près dans les mêmes circonstances que dans l’observation précédente. D. Nous venons de voir dans le dernier paragraphe les mi- crozymas facteurs de cellules. Leur étude est appelée à jeter la plus vive lumière sur certaines questions fondamentales de la doctrine générale du développement des tissus. Deux grandes théories sont en présence : la première veut qu'il n’y ait point de création nouvelle, que la génération spontanée ne soit pas plus acceptée pour les éléments particuliers que pour les organismes complets. Il est certainement inutile de rappeler l’adage devenu classi- que qui est en quelque sorte la formule de la doctrine : l’omnis cellula e cellul& a reçu des démonstrations irréfragables dans une foule de cas divers ; mais, de la généralité du phénomène à l’absolue vérité d’une loi sans exceptions, il y a certainement place pour un doute très-philosophique. Ce doute existe dans l'esprit d’histologistes très-autorisés ; nous en avons eu, il y a quelques années, une preuve éclatante dans la discussion qui a eu lieu entre Virchow et Robin. Parmi les faits qui semblent favorables à la doctrine du pro- fesseur de Paris', on peut citer en premiéreligne des expériences 1 Au point de vue de la doctrine du développement des tissus, les histologistes sont Séparés en deux camps bien distincts : les uns regardent les cellules comme un élément toujours semblable, ayant une même origine que nous venons d'indi- 242 MÉMOIRES ORIGINAUX. de M. Onimus, qui assure avoir vu des cellules prendre naissance dans un liquide complètement séparé de toute connexion avec les parties solides environnantes. Il n’y avait rien de solide dans le liquide employé, dit M. Onimus. Cet expérimentateur se trompe; il s’est servi de la sérosité de vésicatoire : cette sérosité contient des microzymas, et le passage du liquide à travers un ou plu- sieurs filtres ne saurait l'en débarrasser. Ces microzymas exis- tent si bien dans la sérosité en expérience, que M. Liouville vient récemment de les décrire, d'étudier leur évolution, et a confirmé par ses expériences les faits annoncés dans la première partie de ce travail. Les microzymas existent, et leur rôle ne peut être méconnu dans les résultats constatés par M. Onimus, comme dans tous les faits invoqués par M. Robin. Ce n’est pas la première fois que la ténuité des granulations moléculaires dé- . joue la sagacité des expérimentateurs. Ce sont ces granulations qui sont destinées à mettre d'accord les doctrines françaises et allemandes. Comme le dit Virchow, il n'y a pas plus de génération spontanée pour les éléments que pour les êtres complets. Jamais une cellule ne prendra naissance dans un liquide; mais il n’est pas nécessaire que ce liquide contienne déjà une cellule, comme on l'entend en histologie humaine ; quelques microzymas suffi- sent à l'œuvre. Mais si les microzymas jouent un rôle prépondérant dans la formation des éléments anatomiques et des tissus, il faut qu'il y ait des microzymas partout dans l'organisme et sartout pendant quer ; les autres ne voient plus dans les éléments histologiques que le résultat du morcellement du protoplasma, matière primitive, amorphe, capable de revêtir des formes distinctes par suite de son évolution ultérieure. Tout récemment, Hæckel (d'Téna) a proposé ce qu'il appelle la Théorie des plastides*, qu'il semble vouloir substituer aux deux précédentes ; pour lui, l'élément le plus simple est une petite masse globuleuse de protoplasma (matière à. formation, Bildungstoff), qui peut être regardée comme ayant une origine ou génération spontanée. Ge serait le substratum matériel et actif de la vie, la matière vivante par excellence. Ce n'est là évidemment qu’une variété de la théorie blastématique , surtout défendue par Robin. * Voir Archives de zoologie expérimentale. Avril 1872. DES MICROZYMAS. 543 la période du développement le plus rapide, pendant la période embryonnaire. Une note adressée à l’Académie des sciences, le 21 octobre 1872, établit en effet la présence des microzymas dans tous les éléments anatomiques, durant les premières périodes de la vie embryonnaire. Des expériences très-nombreuses ont été faites sur des embryons de poulet. Dans l’œuf, les microzymas, étant donné certaines circonstan- ces, agissent, comme ils le font hors de l'œuf, sur le sucre ou sur la fécule : ils sont donc de l’ordre des ferments figurés. Nous les avons suivis pendant toute la période embryonnaire dans chaque tissu: tissu conjonctif, globules du sang, muscles, centres nerveux, glandes, etc. En résumé, tous les tissus suivent dans leur développement plus ou moins rapidement une marche très-analogue, sinon iden- tique : sur les plaques ou dans les masses uniformément granu- leuses, au sein desquelles ne s'aperçoit aucun autre élément fi- guré que le microzyma, on voit à un moment donné, sur toute l'étendue de la surface à la fois, des formes cellulaires apparaitre. Une cellule antérieure, d’où dériveraient par des modifications insensibles toutes les autres, n’est donc pas nécessaire, ainsi que l'exige une théorie célèbre du développement des tissus: Cette théorie, acceptée et défendue par nous, nous semble pécher par la base. Jamais on ne verra naître une cellule de toutes pièces dans un liquide : on observe toujours préalablement des granulations, des microzy mas, qui sont le point de départ. Si l’on veut bien considérer avec nous que les microzymas sont déjà des organismes doués d’une activité propre, ce que nos précédentes recherches ont mis hors de doule, on comprendra aisément qu'il n’est pas besoin d’une cellule primordiale, ni d'admettre la géné- ration spontanée pour comprendre la cellulo-genèse. Le microzyma et le milieu qui se crée au sein de la masse quile contient sufti- sent... Nos expériences permettent d’aller plus loin. Ces notions nouvelles ne donnent pas seulement la clef de discussions rela- tives à l’histoire du développement des tissus et des fermenis, mais aussi de leur fonctionnement; elles seules donnent une 544 MÉMOIRES ORIGINAUX. base solide à la théorie de la nutrition, à la physiologie cellulaire. Voici d’ailleurs la contre-épreuve de cette théorie. De même que par progression les microzymas sont facteurs de cellules, toute cellule, tout tissu, revient au microzyma par régression. Gelte contre-épreuve peut être faite sur l’embryon lui-même. L’embryon du poulet peut mourir dans l’œuf avant son complet développement et sans qu’il s’y putréfie, dans le sens vulgaire du mot putréfaction: dans ce cas on peut observer la régression de tous les tissus qui le composaient. On peut alors suivre le retour de chacun des tissus observés à la forme granuleuse primitive, ou même on peut suivre la transformation des microzymas isolés en microzymas accouplés et en bactéries ; et certes, il est impos- sible de soutenir qu'ici les microzymas et les bactéries ont pour origine les germes venus de l'air, germes que l’un de nous a démontrés être surtout des microzymas. Un œuf, à la couveuse depuis le 29 mars 1870, est examiné le 13 avril suivant. L’embryon est mort dans l'œuf depuis trois ou quatre jours. Les muscles commencent à subir une transformation régressive ; les tubes ne sont plus accusés, les masses musculaires sont remplies d’une foule de microzymas, beaucoup sont accou- plés ; dans les membres, on découvre quelques rares bactéries. Dans le cœur, les bactéries, longues, grêles et immobiles, sont très-nombreuses. Dans le foie, on trouve des bactéries à tous les degrés de développement: microzymas isolés et mobiles en foule, grand nombre d’associés; petites bactéries, moyennes et grandes; il est impossible de ne pas les considérer comme les divers degrés de développement du même être. Nous venons de voir quelle est l'importance, en physique, du rôle des microzymas. Mais il ne faut pas perdre de vue que l’ap- plication au fonctionnement des organes et des lissus de la doc- trine du microzyma ne heurte en rien les idées générales régnan- tes. Que les esprits timides, auprès desquels le reproche d’inno- vation est si puissant, se rassurent et écoutent ce que pensent les anatomistes et les physiologistes contemporains. Kôlliker, étudiant les périodes on phases de transformation de DES MICROZYMAS. 945 cellules, distingue quatre époques : 10 protoblaste sans noyau; 2° protoplasme avec noyau; 3° protoplasme avec noyau et enve- loppe (cellule complète); 4° cellules transformées. Chacune de ces périodes correspond à des degrés de vitalité des corps cellu- laires. 4 la première période, la vie est à son summum dans cette masse homogène de substance protéique visqueuse et contractile. Le protoblaste est la matière histogénique par excellence; c’est le formateur des premiers noyaux embryonnaires et des sphères de segmentation, d'où dérive le tissu du fœtus tout entier'. Avons- nous besoin de faire remarquer que le protoblaste de Külliker n’est autre chose que le protoplasma granuleux des auteurs ? C’est l’ensemble des microzymas au milieu de matériaux de nutrition ou de désassimilation. Les physiologistes ne sont pas moins affirmatifs au point de vue du fonctionnement : « Avant que la cellule végétale ou ani- male, dit Wundi, livre ses éléments à la décomposition, elle per- siste d'ordinaire longtemps sans modifications apparentes, mais pendant ce temps elle ne se repose pas; son action chimique s’o- père, elle prend et rend des matériaux. Elle ne saurait rester dans cet état, s’il n’y avait une égalité parfaite entre la quantité de matériaux qu’elle absorbe et ceux qu’elle rend, entre le doit et l'avoir. Et cependant le groupement des éléments dans les matériaux absorbés n’est pas le même que dans ceux sécrélés ; la cellule, tout en ne modifiant pas sa propre composition, agit done chimiquement sur ces substances. Les corps qui possèdent la propriété de décomposer les substances avec lesquelles ils se trouvent en contact, sans éprouver eux-mêmes de modifications, sont désignés par les chimistes sous le nom de ferments, et leur action prend le nom générique de fermentation. Une étude plus approfondie des fermentations a fait voir que si, en réalité, le ferment n'est pas modifié dans sa constitution, il augmente cepen- dant souvent de volume... Or, c’est précisément ce que nous voyons se passer dans les cellules des deux règnes ; elle peuvent { Archives de physiologie, pag. 771. 1872. 546 MÉMOIRES ORIGINAUX. en effet s’accroître et se multiplier dans le même temps que se produisentles phénomènes de métamorphose chimique qu’elles provoquent. Ce que nous venons de dire nous permet donc déjà d'envisager la cellule comme un ferment et son activité comme une fermentation". » On le voit, loin de heurter les idées contempo- raines, nous donnons une base solide, c'est-à-dire expérimen- tale, à une sorte d'aspiration ou de sentiment. D’Amador a soutenu que les découvertes en sciences ne pou- vaient pas échapper aux deux lois suivantes : la première veut que toute découverte à son origine soit méconnue, et le plus sou- vent bafouée (les microzymas ont subi cette épreuve); l’autre, qui s'adresse à la seconde période de leur histoire, apprend que la découverte est toujours disputée à son véritable auteur. Nous verrons, dans un prochain article, quels sont les efforts qui sont faits pour démontrer une fois encore l'exactitude de cette loi. (La fin à un prochain numéro.) RÉPONSE De M. le Professeur De ROUVILLE à M. le Docteur BLEICHER SUR LES QUESTIONS DES TERRAINS JURASSIQUES SUPÉRIEURS Du département de l’Hérault. M. le docteur Bleicher, dans son dernier travail ? sur les ter- rains jurassiques supérieurs de l'Hérault, affirme qu'il existe à Ganges, au-dessus des calcaires blancs à terebratula morayica, une masse de 300 mètres d'épaisseur de calcaires appartenant à l'horizon del Ammonites tenuilobatus. Cette affirmationra provoqué de ma part de nouvelles obser- ! Wundt,; Traité de physiologie; pag. 77. 1872. ? Revue des Sciences naturelles, tom. T, n° 3. TERRAINS JURASSIQUES SUPÉRIEURS DE L’HÉRAULT. 547 vations dans la région, d’ailleurs très-limitée, qui est indiquée par l’auteur. Ces observations, appuyées de coupes, mepermettent de main- tenir, contradictoirement à M. le D’ Bleicher, les faits stratigra- phiques afférents à cette région, dans l’état où les avait consta- tés, dès 1846,É. Dumas (de Sommières), et où les avaient trou- vés après lui tous les observateurs qui ont visité cette même région. Aujourd'hui, comme en 1846, on peut affirmer qu’à Ganges la zone à terebratula moravica constitue le toit de nos dépôts juras- siques, et la masse calcaire prétendue supérieure n’est autre chose que le quatrième sous-groupe établi par Dumas dans son Oxfordien ‘, servant de support immédiat et passant même pétro- graphiquement au calcaire Corallien. Les fossiles énumérés par M. le D° Bleicher occuperaient donc, à Ganges comme ailleurs, un niveau inférieur. Voici ce qui s’observe dans la direction indiquée par l’auteur. À Cazillac, le calcaire blanc à terebratula moravica supporte immédiatement le Néocomien inférieur; à une très-petite distance, une cassure surélève et disloque les calcaires blancs et les couches néocomiennes qui les surmontent, et donne lieu à une arête ro- cheuse, prise par M. Bleicher pour un horizon nouveau et supé- rieur. Les calcaires blancs se dépouillent peu à peu, dans leur prolongement, de leur faciès corallien, et passent pétrographique- ment en continuité de couches parfaite au quatrième sous-groupe d'É. Dumas, qui compose les hauts sommets du Taurac, dont la base, au lieu d’être formée, ainsi que le système de l’auteur l'exigerait, et comme il le figure du reste dans sa Coupe, par les couches à terebratula moravica, présente au marteau et à l’œil du géologue la pétrographie et la faune du troisième sous-groupe, l'horizon des Amimonites biplex et tortisulcatus.' Nulle part, dans la direction indiquée par M. Bleicher, on ne saisit le recouvrement dont il parle. 1 Bull. de la Soc. géol., 1846. Session à Alais. 548 MÉMOIRES ORIGINAUX. Je tiens cette confirmation des notions depuis longtemps ac- quises sur notre terrain jurassique, d’un observateur très-com- pétent, M. Torcapel, préposé aux travaux du chemin de fer du Vigan, qui a bien voulu, sur ma demande, procéder à cette véri- fication. J'extrais de la lettre de M. Torcapel les Coupes suivantes, qui me paraissent suffire à la démonstration dont il s’agit’. 1 Ge sont les couches O’ des fig. 2 et 3 qui renferment les mêmes fossiles que celles du Camp de Bataille, et qui ont dû fournir à M. Bleicher les espèces citées dans sa Note. 549 REVUE SCIENTIFIQUE. TRAVAUX FRANÇAIS!:. — Zoologie Les phénomènes de phosphorescence chez les animaux marins ont été l'objet d'observations suivies et variées de la part de M. le profes- seur Panceri, de l'Université de Naples. Plusieurs mémoires ont été successivement communiqués par ce naturaliste, qui en a envoyé une traduction française aux Annales des sciences naturelles. Le travail du savant italien est imprimé dans les numéros 4 à 6 du tome XVI de la 5m série, et précédé de l'Essai expérimental sur la locomotion humaine par M. Carlet, et du Mémoire de M. Joly sur le genre Prosopisiome, dont nous avons rendu compte à nos lecteurs. Dans un premier chapitre, l'auteur étudie la phosphorescence de la graisse. Ses premières constatations portèrent sur un élégant poisson de la Méditerranée, le Trachypterus iris. L'animal, pêché depuis un jour, émit le soir une lumière assez intense pour que M. Panceri pût lire les heures sur le cadran de sa montre. Les expériences auxquelles se livra ce savant lui permirent de s'assurer que la matière phospho- rescente était la graisse, particularité qui explique pourquoi certaines parties de la surface tégumentaire du Trachypterus, privées ou à peu près de cet élément, n'émettent point de lumière. La phosphorescence, ainsi que le démontre l’action contraire de l'oxygène et de l'acide car- bonique, est due à un phénomène d'oxydation ou de combustion lente. C'est encore à la même cause quil faut attribuer la lumière émise par le Scymnus fulgens, suivant Bennet et Giglioni, ainsi que par les exsu- dations et Les plaies de l’homme et des animaux dans certaines cir- constances. : La matière phosphorescente de la Lucioleayantété reconnue de na- ture albuminoïde par Külliker et Schultze, on en doit conclure que ces substances partagent avec la graisse la propriété d'émettre de la lu- mière, sans quon puisse saisir d'élévation quelconque dans leur tem- pérature. Dans un autre Mémoire, M. le professeur Panceri a étudié le siège i Sont assimilés aux travaux français, les travaux étrangers publiés dans un Recueil périodique français. 1 38 550 REVUE SCIENTIFIQUE. de la phosphorescence dans les Méduses, phosphorescence dont l'éclat a depuis longtemps fixé l'attention des observateurs. L'auteur fait re- marquer que, contrairement àl'assertion d'Eschscholtz, cette propriété ne se retrouve pas dans toutes les espèces ; que certaines, telles que le Rhizosioma Cuvieri, le Geryonia proboscidalis, le Ger. exigua et le Lizzia Kollikeri ne luisent dans aucun cas. Toutefois, certaines espèces appartenant aux genres qui précèdent peuvent être obscures dans une mer et lumineuses dans une autre. [Il en est de même des Salpes, Cléodores, Créséides, Sagittes et Sapphirines, dont quelques espèces sont phosphorescentes, et d’autres privées de la faculté de luire. Il n’est pas jusqu aux Pyrosomes, ces animaux phosphorescents par excellence, dont une espèce, dit-on, n’émet jamais de lumière. Le siége de la phosphorescence varie suivant les cas. Certaines Mé- duses, telles que des Thaumantias, les Mesonema , les Liriope et quel- ques Geryonia, émettent de la lumière par les boutons marginaux situés à la base des tentacules. Chez d'autres, telles que la Cunina mo- nela, la Pelagia noctiluca, la Pel. phosphorea, une partie limitée de la surface externe du corps émet de la lumière. Dans d'autres cas, ce sont les parties internes qui se montrent phosphorescentes : les canaux gastro-vasculaires, dans la Dianæa appendiculata, et les ovaires, dans l'Oceania pileata. Depuis longtemps on avait constaté que le mucus qui recouvre les Méduses est lumineux, et Spallanzani a cru que c'était le mucus lui- même qui était le siége de la phosphorescence. En soumettant cette matière à l'examen microscopique, M. Panceri y a reconnu deux sor- tes d'éléments: les cellules épithéliales et les nématocystes. Les pre- mières seulement émettraient de la lumière; elles se montrent rem- plies de granulations qui par leurs réactions se rapprochent beaucoup des matières grasses. Quand une partie quelconque, douée de phos- phorescence, est dépouillée artificiellement de son revêtement épithé- lial, elle cesse d'émettre de la lumière. Dans les Méduses, comme dans les cas examinés dans le premier Mémoire, ce serait la matière grasse qui serait le siége de la phosphorescence. Dans un troisième Mémoire, M. Panceri s'occupe de la phospho- rescence de ces gracieuses colonies de polypes connues sous le nom de Pennatules. Ce Mémoire contient deux parties : l’une anatomique, l'autre physiologique. Dans la première, l’auteur établit que chez tous les Pennatulaires phosphorescents la lumière émane exclusivement des polypes et des zooïdes (polypes rudimentaires). Elle est produite par huit cordons (cordoni luminosi) adhérant à la surface externe de l'estomac et se prolongeant dans les pupilles buccales. Ces cordons, TRAVAUX FRANCAIS. — ZOOLOGIE. GO dont les éléments se dissocient avec une grande facilité, sont compo- sés de cellules renfermant une matière fort analogue aux substances grasses, associée à des granulations albumineuses et à des cellules multipolaires. Dans la deuxième partie, l'auteur se préoccupe d'abord des divers états dans lesquels peut se trouver une Pennatule surlaquelle on veut étudier la production de lumière. Ces animaux, retirés d’une profon- deur de 40 à 100 mètres et même davantage, et portés dans un aqua- rium, se gonflent démesurément et arrivent jusqu’à doubler de volume. Dans cet état anormal et pathologique, ils ne sont pas propres à l’ex- périmentation. Pour celle-ci, il convient de choisir un animal sortant de la mer, et chez lequel cette déformation ne se soit pas encore pro- duite. En procédant méthodiquement, on observe qu'en touchant la base de l'étendard on détermine dans ce dernier une onde lumineuse ascendante; si l'on excite l'extrémité supérieure, le courant est des- cendant ; enfin, si la stimulation est portée sur le milieu, on obtien- dra deux courants divergents, l’un ascendant, l'autre descendant. Dans les trois cas, les pinnules sont parcourues par des courants lumineux qui se portent de la base au sommet. M. le professeur Panceri a mesuré la rapidité de cette transmission. Le courant ne commençait à s'établir que 4/5 de seconde après l'appli- cation de l'excitant. Il employait 1 seconde 1/3 à 2? secondes 4/5, soit en moyenne ? secondes, pour parcourir l'étendard de bas en haut dans la Pennatule phosphorescente, ‘et de une seconde 1/8 à 3 sec. 1/5, c'est-à-dire en moyenne 2? secondes 1/5, dans la Pennatule rouge, pour franchir les mêmes distances. En comparant ces données à celles qui nous ont été fournies par les expériences d Helmholtz sur la rapidité de la transmission nerveuse dans les animaux supérieurs, on voit que la vitesse du courant de la Pennatule est 600 fois moins rapide que celui de l'excitation motrice dans les nerfs de la grenouille, et seulement 160 fois plus petite que dans les nerfs des chats ivres, où la transmissibilté est réduite à 8 mètres par seconde. Reste à savoir si les Pennatules possèdent des nerfs, question que l'anatomie n'a pas encore résolue d'une manière satisfaisante. Le 13 avril 1872, M. Panceri a présenté à l'Académie de Naples, deux exemplaires vivants d'une espèce très-rare de Cavernularia, genre voisin des Pennatules, établi par Valenciennes pour une espèce provenant de la mer des Indes. L'espèce napolitaine paraît se con- fondre avec le Veretillum pusillum de Filippi, que Herklots rapporte sans hésitation au genre Cavernularia. Comme les Pennatules, les 552 REVUE SCIENTIFIQUE. Cavernularia présentent des courants lumineux ascendants, descen- dants, convergents et divergents, suivant les cas. Ce sont encore les polypes et les zooïdes qui sont les producteurs de la lumière ; mais, si M. Panceri a retrouvé les mamelons blancs phosphorescents situés autour de la bouche, il n'a pas rencontré les cordons stomacaux qui leur font suite. Le savant napolitain a soigneusement étudié les organes lumineux des Pyrosomes , qui, réunis par bandes innombrables, produisent ces illuminations splendides de la mer dont les voyageurs parlent avec admiration. En examinant avec attention l'un de ces Pyrosomes, l'auteur reconnut que la lumière provient d'une myriade de points disposés par couples. Chaque individu possède un de ces couples, et chacun des points correspond à un de ces corps que Lesueur et Savi- guy appellent des ovaires, mais que Huxley a démontré ne pas ap- partenir à l'appareil générateur. Get ananatomiste les a appelés Cell- Masses, Keferstein et Ehlers les ont décrits sous la dénomination de linsenfoermiges Koernerhaurifen. Is se trouvent près du bord supérieur des deux branchies, immédiatement au-dessous des deux rameaux qui constituent la paire supérieuredes nerfs latéraux du ganglion. Ils sont composés de cellules sphériques d'environ 0"", 02 de diamètre, sans nucléus, contenant une substance soluble dans l'éther et une matière albumineuse. Des recherches portant sur les embryons provenant des Cyathozcoïdes de Huxley ou larves nourrices, et sur ceux pro- duits par le bourgeonnement du tubercule situé à la base de l’endo- style, montrent que ces corps dépendent de la couche externe du blastoderme. L’excitation détermine aussi des courants lumi- neux assez analogues à ceux des Pennatules, courants dont la nuance varie et dans le même individu et suivant les espèces. Les études auxquelles l’auteur s'est livré pour reconnaître le mode de propagation des lueurs phosphorescentes, l'ont amené à la découverte d'un curieux système musculaire colomial, dont malheureusement les nerfs n'ont pu être démontrés avec certitude. M. Panceri, après avoir parlé des différents agents qui produisent la phosphorescence ou qui la modifient, fait remarquer que la production de lumière doit encore, selon toute probabilité, être attribuée à une matière de la catégorie des corps gras. Un intéressant Mémoire traite des organes de La phosphorescence chez les Pholades, Lamellibranches perforants communs sur les côtes de France, et qui, à d'autres égards, ont beaucoup occupé les natura- listes. Non-seulement le corps de ces bivalves paraît lumineux dans l'obscurité, mais il s'en écoule un mucus abondant qui luit d'un vif TRAVAUX FRANCAIS. —ZOOLOGIE. 553 éclat. Or, deux cas étaient admissibles: ou toute la surface du corps sécrétait la matière phosphorescente, ou cette matière avait sa source dans des points limités et enduisait toute la surface. Cette dernière supposition était l'expression de la vérité. En lavant à l’aide d’un filet d’eau la Pholade largement ouverte, on remarque que la lumière émane de trois points déterminés : {° d'un arc correspondant au bord supé- rieur du manteau et se prolongeant jusqu'à la moitié environ des valves ; 2 de deux organes triangulaires dont la signification est encore indéterminée, et qui sont placés vers l'entrée du siphon anté- rieur ou afférent; 3° de deux longs cordons parallèles situés dans le même siphon. La matière lumineuse, soluble dans l'alcool et dans l éther, etqu'il serait intéressant d'étudier chimiquement, est renfermée dans les cellules épithéliales des régions phosphorescentes. M. Pan- ceri a constaté que l'oxygène et l’air avivent et entretiennent la lu- mière des Pholades, et que l'acide carbonique la ternit et l'éteint, cir- constance qui autorise à penser que le dégagement de lumière est encore ici un phénomène d’oxydation. À l’aide d'expériences très- délicates, il s'est assuré que les organes phosphorescents présentent une incandescence spéciale, sans élévation de température apprécia- ble, à l'aide de nos appareils les plus sensibles et les plus perfec- tionnés. Le Phyllirhoe bucephala {Péron), petit Mollusque gastéropode nudi- branche de la Méditerranée, douéd’une transparence parfaite, n'était pas rangé par les naturalistes au nombre des animaux phosphores- cents. M. Panceri a découvert qu'à la suite de certaines excitations cet animal émettait une lumière azurée. Les recherches de Leuckartsur les nerfs tégumentaires des Phyllirhoés ont montré qu'ils présentent sur leur trajet de nombreux renflements. Les travaux de H. Müller ont fait connaître qu'aux ramifications nerveuses se rattachent des cellules de diamètre variable, à contenu granuleux ; il a signalé en outre, sur les rameaux les plus déliés, des cellules sphériques munies d'un nu- cléus et d'un corps sphérique jaune et réfringent. Ce sont ces cellules de Müller et les cellules ganglionnaires nerveuses qui sont le siége de l’émission lumineuse. Dans certains cas même où l'excitation était très-vive, M. Panceri a cru voir le collier œsophagien et les deux ganglions tentaculaires devenir phosphorescents. L'auteur croit pou- voir conclure de ses observations que la lumière ne provient pas du tissu nerveux lui-même, mais d'une matière qui lui serait associée. Enfin, dans un Mémoire présenté le 10 août 1872, M. Panceri a entretenu l'Académie de Naples 4e la phosphorescence des Béroïdiens. Les espèces dans lesquelles ce phénomène a été aperçu sont: le Beroe 554 REVUE SCIENTIFIQUE. albens Forsk, le Ber. rufescens Forsk, plusieurs espèces de Cydippe, le Bolina hibernica Patters, l'Alcinoe papillosa D. Ch., l'Eschscholtzia cor- data Kôll et le Cestum Veneris Lesueur. La lumière se produit de très-bonne heure, puisque déjà elle est appréciable, comme nous l'apprend Allman, pendant la période em- bryonnaire. La lueur que les Béroés émettent a peu d'intensité, mais sous l'influence d’une excitation on voit jaillir des éclairs très-vifs. Les ondes lumineuses partent du point excité et se propagent d'une manière analogue à celle que nous avons décrite dans les Pennatules. A la suite d’un choc un peu violent, toutes les côtes deviennent flam- boyantes, et l'illumination est telle, qu'elle permet de lire et de recon- naître une personne. Le pouvoir photogénique s'épuise promptement dans ce cas : au bout d'une minute environ, la lumière s'éteint. Une recherche attentive a permis à M. Panceri dereconnaitre quela lumière émane d'une matière particulière qui entoure les gros troncs gastro- vasculaires disposés comme des lignes méridiennes. Soumise à l’exa- men microscopique, cette matière se montre de couleur jaunâtre et renfermée dans des cellules sans noyau ; elle est soluble dans l’alcool et dans l’éther, et très-analogueà celle qui est le siége de la phospho- rescence dans les Pennatules, les Pyrosomes et les Phyllirhoés. Dans certaines espèces, le Beroe albens par exemple, elle revêt éga- lement les vaisseaux secondaires qui naissent des huit canaux prin- CIpaux. Dans le Cestum, non-seulement les canaux des deux côtes supé- rieures sont phosphorescents, mais aussi le canal marginal inférieur, qui reste toujours obscur dans les autres Béroïdiens, et les canaux que M. Milne-Edwards a appelés canaux costaux des petitsambulacres. M. Panceri a constaté que la lumière des Béroïdiens de la Médi- terranée est couleur d'azur très-vif ; celle du Bolina hibernica cepen- dant tire sur le jaune. M. le professeur Panceri avait cru d'abord, sur la foi d'expériences entreprises par le père Secchi, que la lumière émise par les Lampyres et les autres animaux dont il vient d'être parlé était monochroma- tique ; mais le savant astronome,ayant modifié les conditions de l'ex- périence, a reconnu que la lumière des Pyrosomes, comme celle des Lampyres, est composée et que le spectre en est sensiblement con- tinu (Compt.-rend. 5 août 1872). Il y a lieu de penser que le même résultat serait obtenu avec la lumière.phosphorescente des Acalèphes, des Pholades et des Béroïdiens. — Les n° {et 2 du tome XVII (5m°série) des Annales des Sciences TRAVAUX FRANCAIS. — ZOOLOGIE. 555 naturelles, contiennent un Mémoire de M. Hesse sur la famille des Sphéromiens, dans lequel l'auteur traite des affinités et des relations seæuelles qui paraissent exister entre les Sphéromiens et les Cymodocéens d'une part, les Dynaméniens et les Néséens d'autre part. Les Crustacés dont s'occupe M. Hesse appartiennent, avec les Ancées et les Pranizes, qui ne sont qu'un état larvaire des Ancées, à la section des Isopodes nageurs. Les Sphéromiens vivent la plupart du temps en société, quelquefois dans les flaques d'eau, plus habi- tuellement sous les pierres ou dans l’intérieur des Téthyes abandon- nées par les Bernards-l'ermites ; presque toujours on les rencontre associés à des Cymodocéens. En effet, jamais il n a rencontré de Cy- modocéen adulte avec des œufs, tandis que les Sphéromiens adultes en possèdent constamment. Il pense que la faculté de se rouler en boule, dont ces derniers sont pourvus, est liée au besoin de protéger les œufs : qu'elle est par conséquent inutile aux Cymothoaciens, qui effectivement ne la possèdent pas. Enfin les Sphéromiens seuls, à l'exclusion des Cymodocéens, sont munis d'organes de fixation et d'incubation du produit femelle. Nous regrettons que M. Hesse n'ait pas eu recours à l’investigation anatomiqne pour vérifier ses Suppo- sitions. [l a tenté seulement d'élever de jeunes Sphéromiens jusqu'à l'âge adulte, pour voir s'ils deviendraient des Sphéromes et des Cy- modocéens ; mais jusqu ici il n'est pas parvenu à conduire ses éduca- tons au-delà de la troisième mue. Relativement aux Néséens et aux Dynaméniens, l’auteur est arrivé à des résultats qu'il croit plus positifs. Les Néséens vivent blottis dans les petites cavités des pierres et aussi parmi les algues; l'espèce étudiée plus spécialement par M. Hesse, la Nesea bidentata, élit domi- cile dans les alvéoles des Balanes. Le mâle est une Nésée nettement caractérisée ; la femelle, qui viten compagnie de cette première forme, ne présente que de très-légères différences avec les Sphéromiens : Les premiers n’ont jamais d'œufs, les seconds en possèdent toujours. Les éducations tentées par M. Hesse ne lui ont pas permis d'obtenir la confirmation qu'il recherchait. L'auteur entre en dernier lieu dans des détails descriptifs étendus sur les Sphéromes et les Nésées à l'état jeune; mais ces descriptions ne peuvent être bien comprises qu à l’aide des figures que l’auteur a jointes à son Mémoire. Il donne ensuite une nouvelle systématisation du genre Cymodocée et du genre Nésée, accompagnée de caractéris- tiques de la Cymodocea truncata et des Nesea bidentata, N. propinqua, N. rubrocephala, N. flavoscutatu, N. subviridiscutata, N. contracta, N. pilosa, N. decorata, N, viridis, N. angulosu, et de la Campecopea lineata. 556 REVUE SCIENTIFIQUE. — Le travail de M. Hesse est suivi de la description, par M. Bo- court, de trois nouvelles espèces de Sauriens du Mexique : Anolis ru- biginosus, Anol. metallicus et Gerrhonotus viridiflavus. — Nous trouvons ensuite un intéressant Mémoire de M. Arthur de l'Isle sur l'hybridation des Amphibies. A la suite de ses mémorables ex- périences sur la fécondation artificielle, Spallanzani avait fait quelques essais d'hybridation entre diverses espèces de Batraciens ; mais ces espèces étaient trop éloignées les unes des autres, puisque les sujets appartenaient à des familles et même à des ordres distincts, pour que ces tentatives fussent couronnées de succès. M. A. del'Isle a évité cet écueil, et dans ses expériences d'hybridation il s'est adressé à des espèces présentant une étroite parenté. L'auteur commence par rappeler et préciser les caractères distinc- tifs des trois Anoures nantais : Grenouille rousse (Rana temporaria), Grenouille agile (Rana agilis Thomas) et Grenouille verte (Rana viridis). Mettant en présence des mâles de Rana temporaria qu'il venait de séparer de leurs femelles, et des femelles de Rana viridis, il vit l'ac- couplement de ces deux espèces se produire. Le même résultat fut obtenu entre des mâles de Rana agilis et de Rana temporaria, ainsi que de Rana viridis. Des expériences de fécondation artificielle des œafs de la R. tempo- raria par le sperme de l'agilis furent fentées sans succès; M. A. de l'Isle ne réussit pas davantage en employant la liqueur fécondante de la R. viridis. Les tentatives d'hybridation artificielle des œufs de l’agilis par la semence de la viridis et de la temporaria n'eurent pas un meil- leur résultat. Elles échouèrent encore complètement en faisant agir la liqueur spermatique de la temporaria sur des œufs de viridis. Il eut été à propos, dans ces expériences, que M. de l'Isle soumît le sperme à l'inspection microscopique, pour s'assurer s'il contenait réellement des spermatozoïdes. Une autre série de tentatives d'hybridation ont été exécutées sur deux espèces du genre Bufo. Ainsi que le fait remarquer l'auteur, ces deux espèces, Bufo vulgaris et Bufo calamita Laur., n'appartiennent pas à la même section : le premier rentre dans les Phryne de Fitzinger, sans vessie vocale ni pli cutané au côté interne du tarse, tandis que le se- cond fait partie des Rubela de V. Fatio, qui possèdent ces deux carac- tères. M. de l'Isle rappelle ensuite les différences, qui existent dans les mœurs et les habitudes des deux espèces. Le B. calamita a des pontes TRAVAUX FRANCAIS. — ZOOLOGIE. 557 échelonnées et successives, de mars en septembre; le Crapaud com- mun, au contraire, fraie dans une courte période d'une quinzaine de jours, de la fin de mars aux premiers jours d'avril. Malgré la dispro- portion considérable existant entre le mâle du B. calamita et la femelle du B. vulgaris, il a pu obtenir l'accouplement du premier avec le se- cond ; il réussit également avec le mâle du B. vulgaris et la femelle du B. calamita. L'hybridation artificielle fut ensuite tentée à l'aile du sperme du B. calamita sur des œufs du B. vulgaris, et réciproque- ment. Dans le premier cas, sur environ 3,600 œufs de vulgaris, 600 se développèrent plus ou moins; mais aucun des têtards ne pui être aumené jusqu à la transformation en anoure : le plus âgé périt à deux mois et demi, avant d'avoir développé ses pattes postérieures. Dans le second cas, sur environ 2,600 œufs du B. calamita fécondés par le sperme du B. vulgaris, 15 seulement se développèrent et quittèrent leurs enveloppes ; mais aucun ne vécut au-delà de deux mois. M. A de l'Isle, dans un dernier chapitre, recherche pourquoi l'hy- bridation est possible entre deux espèces assez distinctes du genre Crapaud, et demeure sans effet entre des formes voisines du genre Grenouille. Ce résultat lui paraît être en raison du rapport qui existe entre les organes de la génération, fort semblable dans les deux Crapauds, présentant de notables différences dans les trois Grenouilles. : En terminant, M. A. de l'Isle cite des exemples d'accouplements entre espèces différentes et même entre Anoures et Urodèles, dont il a été témoin. Pour se rendre compte de ces faits, il suffit, croyons - nous, de se rappeler que, pendant la période du rut, tout attouche- ment des parties du corps qui pendant l’accouplement du mâle sont en rapport avec la femelle, détermine des actions réflexes sous l’in- fluence desquelles on voit le mâle embrasser étroitement des corps même inertes. C'est ainsi qu'on a trouvé des Anoures, le Crapaud en particulier, embrassant dans une étreinte amoureuse des poissons, tels que des Carpes ct des Barbeaux. M. A. de l’Isle nous promet de prouver dans un autre Mémoire que l'on peut obtenir, en variant les facteurs, des hybrides à l'état de larves et même à l'état parfait, aussi bien entre Urodèles qu'entre Anoures. — Nous lisons ensuite un Mémoire intitulé Recherches sur l'ana- tomie des Limules, que M. le professeur Alph. Milne-Edwards a détaché d’un travail plus étendu qui doit être publié par la Commis- sion scientifique du Mexique. 558 REVUE SCIENTIFIQUE. Les Limules, vulgairement appelés Crabes des Moluques, sont des Articulés dont la place dans la classification n'est pas encore déterminée d’une manière définitive. La plupart des atteurs les ont rangés parmi les Crustacés, dans un ordre particulier dit des Xiphosures; cepen- dant, vers 1834, un habile naturaliste alsacien, Straus-Dürkheim, proposa deles faire rentrer dans les Arachnides, manière de voir quiest adoptée et défendue par M. E. van Beneden. { Voir la Revue des sciences naturelles, tom. I, pag. 179.) De l'ensemble de ses recherches, M. Alph. Milne-Edwards conclut quon doit les placer dans une Classe spéciale à laquelle il applique la dénomination de Merostomata, déjà employée par Dana et Woodward dans un sens plus restreint. Cette classe était représentée à l'époque paléozoïque par les Euryptéres, les Pierygotus et peut-être aussi par les Trilobites. La distribution géographique des Merostomata vivants, qui ne comprennent que le seul genre Limule, composé d’un petit nombre d'espèces, est des plus remarquables. L'une, le Limulus Polyphemus, est confinée dans la partie septentrionale de l'océan Atlantique ; l'autre se rencontre sur un point très-éloigné, c'est-à-dire aux Moluques, ainsi que dans les mers de la Chine et du Japon. Si l’on veut considérer ces deux formes spécifiques comme dérivant d'une souche voisine, on est forcé d'ad- mettre que leur spécification remonte à une époque antérieure à la période tertiaire, alors que l'Atlantique et le Pacifique communi- quaient ensemble autrement que par les mers polaires. Si une lacune existe entre les espèces de Limules jurassiques et celles qui pa- raissent représenter les ancêtres des formes actuelles, on peut l'ex- pliquer par ce fait que les terrains marins, à l’époque crétacée, se seraient formés dans des eaux profondes, où ces Articulés font défaut. Avant d'exposer les résultats de ses recherches, qui portent princi- palement sur la constitution du système circulatoire et du système nerveux, l’auteur rappelle les travaux de Straus-Dürckheim, de van der Hoeven, de Duvernoy, d'Owen, de Gegenbaur et de quelques autres naturalistes sur l'anatomie des Limules. L'appareil irrigatoire présente un degré de perfection organique qu'on ne retrouve peut-être chez aucun Articulé. Les vaisseaux ont des parois propres et se résolvent en capillaires dont quelques-uns n'atteignent pas 1/100° de millimètre de diamètre. Une des particu- larités les plus dignes d'attention consiste dans les relations intimes des vaisseaux avec le système nerveux, dont les parties centrales et plusieurs des gros troncs sont logés dans l'intérieur même des tubes vasculaires. Le cœur est représenté par un grand vaisseau contractile, occupant TRAVAUX FRANCAIS. — ZOOLOGIE. 559 la ligne médiane de la région dorsale, où il est retenu par sept brides formées par du tissu connectif et élastique. Ses parois sont consti- tuées par des fibres striées. Fort semblable pour la forme au cœur du Scorpion, il n’est point, comme ce dernier, partagé en chambres successives. Il est logé dans un sac péricardique qui recoit, par six paires de troncs afférents, le sang artérialisé qui revient de la bran- chie, et ilest percé de huit ouvertures en forme de boutonnières, à bords faisant l'office de valvules qui permettent au liquide sanguin de pénétrer dans son intérieur. Du cœur on voit naître, sur les côtés, quatre paires de vaisseaux artériels, et de la partie antérieure se détachent trois vaisseaux que l'auteur nomme crosses aortiques, ce qui porte à onze les troncs effé- rents nés du cœur. Celui-ci postérieurement se termine en cul-de- sac. L'auteur décrit avec le plus grand soin le trajet et les rapports de ces différents vaisseaux, dont il donne une représentation détaillée dans les belles planches qui accompagnent son Mémoire. Dans lim- possibilité où nous nous trouvons de le suivre dans cette description, nous nous bornerons à attirer l'attention sur le nombre et l'impor- tance des anastomoses qu'il a reconnues entre les principaux troncs vasculaires, Que le fluide sanguin soit sorti du cœur par les efférents artériels antérieurs ou par les latéraux, il paraît pouvoir, dans les deux cas, rentrer dans cet organe sans passer par les veines, et par conséquent circuler sans traverser ces dernières. On constate ainsi l'existence de plusieurs cercles circulatoires artériels ; en outre, comme à l'ordinaire, les capillaires terminaux communiquent avec les racines du système veineux et forment d'autres voies au sang qui doit passer par l'organe respiratoire, pour les besoins de l'hématose. De sem- blables dispositions anatomiques paraissent manifester leur effet utile lorsque, l'animal étant sorti du liquide, les branchies s’ap- pliquent l'une sur l’autre comme les feuillets d'un livre fermé, et qu’alors la circulation s’y trouve en partie suspendue. Le sang qui a traversé les capillaireset quirevient aux branchies, soit par les vaisseaux bien délimités de l'organe hépatique, soit par le sinus intestinal ou par les méats interorganiques, est versé dans deux grands troncs vasculaires ventraux ou canaux collecteurs, afférents de l'organe res- piratoire. Ce réservoir, à parois isolables par la dissection, est percé à sa paroi inférieure, dans la région post-thoracique, de six ouver- tures qui le mettent en communication avec les sinus placés entre les deux lames des feuillets branchiaux et de la valve operculaire. L'auteur décrit avec détail deux systèmes de muscles antagonistes 560 REVUE SCIENTIFIQUE. qu'il appelle, l'un abdominal oblique, l'autre branchio-thoracique. Le premier, en se Contractant, tend à intercepter les orifices de communi- cation entre le canal collecteur et les branchies; le second, par le rac- courcissement de ses fibres, rétablit leur perméabilité, en même temps qu il comprime le réservoir sanguin, et fait par suite affluer le sang à l'organe respiratoire. Les rapports étroits qui existent entre le système artériel et le sys- tème nerveux rendent la dissection de celui-citellement difficile, qu'il en est résulté pour les auteurs de graves méprises. Une distinction importante doit être faite entre les nerfs: les uns, destinés aux organes de la vie de relation, sont libres, sauf à leur origine, comme les nerfs des autres animaux ; les autres sont inclus dans les artères et baignés par conséquent par le fluide sanguin. Tant qu'ils sont contenus dans l’intérieur des vaisseaux, les cordons nerveux ne possèdent qu une gaîne névrilématique très-délicate; mais, au moment où ils s'en dégagent, ils se décomposent en faisceaux, dont chaque élément est revêtu par un prolongement de la gaîne ar- térielle trop intimement appliquée sur eux pour que le sang puisse y avoir accès. Il existe un collier œsophagien baigné par le réservoir sanguin circumbuccal. Les ganglions cérébroïdes sont soudés en un corps pisiforme, et on en voit naître des nerfs quise rendent aux yeux simples et composés, aux téguments de la région frontale et au pour- tour de la bouche. Le collier œsophagien est constitué latéralement et postérieurement par la coalescence de 8 paires de ganglions, dont les commissures rejetées en arrière sont très-rapprochées et ne restent pas toujours indépendantes les unes des autres. La chaîne nerveuse se compose d’une série de ganglions réunis par des connectifs très- rapprochés sur la ligne médiane. Chaque ganglion émet deux paires de nerfs. Enfin, cette chaîne se termine par deux troncs volumineux qui ne tardent pas à se bifurquer. L'une des branches est en relation avec un petit ganglion placé sur le rectum, un peu en avant du sphincter anal. L'auteur termine cette description du système nerveux en faisant remarquer que ce système présente plus de ressemblance avec celui des Crustacés qu'avec celui des Arachnides. Dans un dernier chapitre, M. Alph. Milne-Edwards traite des orga- nes appendiculaires des Limules, dont l'étude à tant d'intérêt au point de vue morphologique. Pour mieux faire apprécier les ressemblances et les différences que présentent à cet égard les Limules comparées aux Arachnides et aux Crustacés, l’auteur a cru devoir s'écarter de la manière habituelle d'envisager ces appendices. Abandonnant les divisions classiques du corps en tête, thorax et abdomen, il préfère TRAVAUX FRANCAIS. — ZOOLOGIE. 561 répartir la série des segments ou somites en deux groupes : un groupe procéphalique dont les somites recoivent leurs nerfs des ganglions sus-æsophagiens, et un groupe sternal innervé par les ganglions post- œsophagiens. Eu égard au développement relatif de ces deux groupes, les Crustacés et les Limules, rapprochés par les classificateurs, occu- pent les points extrêmes de la série, dont les termes intermédiaires seraient représentés par les Insectes, les Myriapodes et les Arach- nides. Les antennes, qui sont au nombre de deux paires au moins chez les Crustacés, d'une paire chez les Insectes et les Myriapodes, ainsi que chez les Arachnides, où elles ont pris la forme de chélicères, font ab- solument défaut chez les Limules, qui seraient privés d'appendices frontaux. En effet, les petits appendices appelés palpes par Cuvier, mandibules succédanées par Savigny, et pattes antérieures par van der Hoeven, ne peuvent être assimilés aux antennes, car leurs nerfs naissent du collier œsophagien, et non des ganglions cérébroïdes, comme ceux de ces dernières. Les appendices sternaux se divisent en général en deux groupes: l'un antérieur, se répartissant d'une manière variable entre l'appareil buccal et l'appareïl locomoteur; l’autre postérieur, approprié principa- lement aux fonctions génitales et respiratoires. Chez les Limules, la différentiation ne s'est pas établie entre les appendices du groupe antérieur, lesquels sont tout ensemble des pattes-mâchoires et des instruments de préhension. M. Alph. Milne-Edwards considère les pattes-mâchoires non comme les homologues des antennes externes des Crustacés, mais bien plutôt comme correspondant aux appendices désignés sous le nom de palpes ou pattes-mâchoires chez les Scor- pions. Les appendices rudimentaires qui de chaque côté accompa- gnent le tubercule buccal, et qu'on dirige sous le nom de maxilles chez les mêmes Arachnides, représenteraient les palpes ou mâchoires des Limules. Enfin, les membres abdominaux, élargis en cinq paires de lames, dont les quatre dernières portent de nombreux feuillets bran- chiaux, pourraient être assimilés aux sacs pulmonaires des Scorpions, retournés et saillants au dehors, en vue de leur adaptation aux exi- gences de la respiration dans un milieu liquide. — Une note de M. E. Sauvage sur le Sebastes minimus termine le fascicule des Annales que nous venons d'analyser. M. Sauvage pro- pose d'établir sous le nom de Sebastopsis une petite division dans le genre Sebastes de Cuvier et Valenciennes, division dont le caractère serait l'absence de dents aux palatins et d’écailles à la base des na- 562 REVUE SCIENTIFIQUE. geoires ventrales. Le Sebastes minutus, dont M. Sauvage donne la description et qu il considère comme non distinct du Scorpœæna lania- ria de Bleeker, serait le type de cette nouvelle coupe générique, dans laquelle rentreraient le Scorpæna bandanensis BIKk., différent du Scor- pœna haplodactylus de Gunther, et le Scorpæna laniaria. — Dans les numéros 3 et 4 des Archives de zoologie expérimentale, M. le professeur de Lacaze-Duthiers a publié un Mémoire accompagné de planches sur le système nerveux des Mollusques gastéropodes pulmonés aquatiques et sur un nouvel organe d'innervation. Ainsi que le fait remarquer l’auteur, ces recherches sont le corollaire et la conti- nuation de celles quil a publiées sur les otocystes. (Voir la Revue des Sc. nat., tom. I, pag. 176.) En constatant qu'un nerf de sensibilité spéciale ne naît pas indifféremment d'un point quelconque du système nerveux, M. de Lacaze-Duthiers s’est demandé s'il n'en serait point ainsi des autres nerfs affectés à la sensibilité. L'anatomie a répondu affirmativement ; elle lui a montré en outre que les rapports et les connexions des nerfs demeurent invariables, principe que les zooto- mistes ne s'étaient pas attachés à mettre en évidence. Les centres nerveux des Gastéropodes peuvent être divisés en symé- triques et en asymétriques. Les premiers comprennent le centre cé- rébroïde, le centre pédieux ou antérieur‘, puis le centre stomato-gas- trique. Le centre asymétrique, qu'on'peut encore appeler inférieur ou moyen, offre une disposition caractéristique de la classe des Gasté- ropodes. Dans l'étude de ces différents centres, il est à propos, pour mieux faire ressortir les différences et les homologies, de distinguer les pul- monés dextres, tels que les Lymnées, des pulmonés senestres, comme les Planorbes et les Physes. M. de Lacaze-Duthiers s'occupe d'abord des Lymnées, dontila étudié trois espèces: Lymneus stagnalis, L. auricularis et L. pereger. Dans chaque ganglion cérébroïde, il reconnaît deux masses distinctes qu il nomme d'après leur position lobe antérieur et lobe postérieur. Du premier naît le connectif qui unit le centre cérébroïde au centre pédieux; le second donne naissance au connectif quijoint ce centreau centre inférieur ouasymétrique. Lelobe postérieur se subdivise en trois lobules : le premier est situé sur le côté postérieur de l'origine de la commissure: ilse distingue sur le vivant par sa teinte blanchâtre plus { Il ne faut pas oublier que l’auteur décrit l'animal comme s'il marchait la tête en haut, la sole appliquée sur un plan vertical, TRAVAUX FRANCAIS. — ZOOLOGIE. 563 opaque; le second est placé, en dehors du premier, sur le bord supérieur du ganglion; enfin la troisième se présente sous la forme d’un mamelon arrondi rejeté vers le bord postérieur de chaque ganglion cérébroïde. De ce dernier on voit sortir trois nerfs : l’acoustique, l'optique et le tentaculaire. Sans rien affirmer relativement aux fonctions du tenta- cule comme organe d'olfaction, en ne tenant compte que de ses rela- tions constantes avec les deux premiers nerfs, on peut appeler avec l’auteur cette région : lobule de la sensibilité spéciale. Du sillon qui sépare le lobe antérieur du postérieur naissent, des deux côtés, les nerfs fronto-labial postérieur, labial inférieur, et à droite seulement, le nerf pénial. Citons en outre, comme ayant leur origine à la face antérieure de la masse cérébroïde, le connectif qui unit cette partie au stomato-gastrique. On voit donc qu'outrelesnerfs de sensibilité spéciale, la masse cérébroïde fournit encore ceux de la sensibilité générale. Le centre antérieur ou pédieux donne naissance à des nerfs mo- teurs qui se distribuent presque exclusivement au disque musculaire ou sole servant à la locomotion. Ces nerfs peuvent être distingués en antérieurs et postérieurs : les premiers sont les nerfs pédieux anté- rieur, moyen et inférieur; les seconds, aussi au nombre de trois, comprennent le nerf columellaire, les nerfs cervicaux et le nerf cer- vical inférieur. Les ganglions inférieurs ou palléo-génitaux, que Huxley a pro- posé d'appeler pallio-splanchniques, sont au nombre de cinq. qui se distinguent par leur asymétrie et que nous désignerons par CBABC. Les deux ganglions extrêmes CC ne donnent naissance à aucun nerf: ce sont, si l'on nous permet cette expression, des ganglions commissu- raux. Tous les nerfs tirent leur origine des trois autres masses gan- glionnaires BAB et vont se distribuer au manteau, à la cavité respira- toire, aux parois de la cavité viscérale, au cœur et aux organes de la reproduction. Il est important de remarquer que, des trois ganglions BAB, c'est celui qui est le plus gros après le moyen A, qui, par sa po- sition à droite ou à gauche, caractérise les espèces dextres ou senes- tres. Pour les premières nous proposons d'employer la notation bAB; pour les secondes BAb. Dans l’énumération des nérfs qui naissent du centre inférieur, nous n'avons alors eu à envisager que ceux qui se rattachent à bAB. B émet le nerf palléal gauche ou latéral ; b fournit le palléal droit ou post-vulvaire : c’est ce dernier qui, à la hauteur de l'orifice respira- toire, se termine en un renflement qu'on avait pris pour un ganglion et dont la structure fait l'objet de la dernière partie du Mémoire qui 564 REVUE SCIENTIFIQUE. nous occupe. Du ganglion médian A sortent quatre nerfs : le palléal antérieur ou pré-vulvaire, le deuxième palléal antérieur, le rameau aortique et le nerf génital, dont une branche va se rendre dans le plancher de la poche respiratoire et peut-être même innerve le cœur. En définitive, le ganglion A fournit des nerfs à la ponction médiane antérieure du manteau au-dessous du pneumostome et de l'orifice des organes femelles, puis se rend aux parois de la porhe respiratoire et aux organes profonds de la reproduction. Remarquons que, des trois ganglions médians bAB, A seul innerve d'autres organes que le man- teau. M. de Lacaze-Duthiers passe ensuite à l'étude ‘du système nerveux chez les pulmonés senestres, mais il se borne à indiquer les analogies et les différences qu'il a relevées en les comparant aux dextres. Il s'occupe d'abord du type des Physes. Les plus grands rapports exis- tent entre ces gastéropodes et les Lymnées : on ne peut noter, à vrai dire, que la dissociation de certaines branches nerveuses qui en fait paraître le nombre plus grand, et aussi l'isolement plus complet de certaines racines; enfin, B du côté gauche devenant prédorminant, leur formule devient BAb. Dans les Planorbes, le tortillon présente un développement considé- rable en longueur. Le pavillon de l'orifice respiratoire possède deux lobes, dont une partie apparemment joue un rôle dans l'acte de la respiration. Il est probable aussi que la cavité respiratoire pourvue de lames saillantes peut utiliser l'air en nature et jusqu'à un certain point l'air dissous dans l’eau. Ces quelques détails font pressentir quelques dissemblances dans la disposition du système nerveux. Le centre dor- sal ou cérébroïde n'a rien de particulier ; on en voit naître les mêmes uerfs que dans la Lymnée, à part toutefois cette différence que le nerf copulateur naît à gauche. Dans les deux types, les dispositions des centres pédieux ou antérieurs sont identiques; le manque de simi- litude ne provient que de l'extension plus oumoins grande de certaines branches nerveuses, et de cette particularité que le nerf péricardique se sépare à droite du génital. En définitive, comme le fait remarquer l’auteur, l'inversion des organes dans le type senestre est absolument semblable à celle que donnerait l'image d'un Mollusque dextre réflé- chie par une glace. Dans la dernière partie de son Mémoire, M. de Lacaze-Duthiers dé- crit un curieux organe d'innervation dont la structure réelle avait échappé jusqu ici aux recherches des zootomistes. On sait que dans le voisinage du pneumostome il existe, à droite dans les dextres, à gauche dans les senestres, un ganglion placé sur TRAVAUX FRANCAIS. — ZOOLOGIE. 565 le trajet du nerf palléal post-vulvaire, et connu des zootomistes sous le nom de ganglion respiratoire. Une étude histologique approfondie de ce renflement a appris qu'il était constitué par l'invagination, au mi- lieu d'un ganglion nerveux formé des mêmes éléments que les au- tres centres du même genre, d’une portion de la peau et de l'épithé- lium cylindrique qui la revêt. Get épithélium se montre pourvu de cils vibratiles. Les fibres nerveuses s'épanouissent au milieu des cel- lules ganglionnaires, sans qu'il ait été possible à l’auteur de constater des relations directes entre ces deux éléments. Dans les Physes et les Planorbes, c'est-à-dire chez les pulmonés se- nestres, l'organe en question se présente sous sa forme la plus simple, avec cette seule différence, entre le premier et le second de ces Gasté- ropodes, que dans les Physes le fond du cul-de-sac tégumentaire n'est pas complètement entouré par le tissu nerveux. Dans les Lym- nées, quisont dextres, le cul-de-sac n’est pas simple: il se bifurque, et ainsi, au lieu d'un seul cæcum, on en trouve deux entièrement enve- loppés par le tissu nerveux. C'est à la physiologie qu'il appartient de déterminer les fonctions de cet appareil. Toutefois, en l'absence de données expérimentales, sa position dans le voisinage du pneumostome porte à faire supposer qu'il est destiné à apprécier certaines qualités spéciales de l'air ou du liquide ambiant. — Dans le même numéro des Archives de zoologie est inséré un im- portant Mémoire de M. Alfred Giard, présenté à la Faculté des sciences de Paris pour obtenir le grade de docteur ès sciences naturelles, et faisant suite aux deux études critiques insérées précédemment dans le même recueil. Le travail de M. Giard est intitulé: Recherches sur les Synascidies. L'auteur débute par un exposé historique des travaux de ses pré- décesseurs, complété par un Index bibliographique très-soigneuse- ment dressé de tous lesauteurs qui ont traité de la classe des Tuniciers. Avant de s'occuper de l'anatomie et dela physiologie des Synascidies, il recherche dans quelle position doit être placé l'animal qu'on se propose de décrire. Il rejette la méthode suivie par M. de Lacaze. Duthiers, lequel place l’Ascidie les siphons en bas, comme si elle était suspendue à la voûte d'un rocher. Il accepte l'orientation adoptée par M. Milne-Edwards, qui regarde le ganglion comme situé à la partie dorsale et ladéterminant; mais il n'admet pasles dénominations de thorax, d'abdomen et de post-abdomen employées par l'auteur des Obser” I. 39 566 REVUE SCIENTIFIQUE. vations sur les Ascidies composées de la Manche : il préfère désigner les régions par les organes qu'elles renferment. . Abordant la partie anatomique de son étude, M. Giard s'occupe d'abord de l'enveloppe tégumentaire. Cette enveloppe est formée d'une substance dure et cartilagineuse, isomère avec la cellulose vé- gétale, que lemicroscopenous montre comme constituée par de gros- ses cellules arrondies à contours nettement dessinés, avec des noyaux amæboïdes fortement réfringents. Outre les matériaux étrangers qui peuvent être agglutinés à la sur- face externe, on peut trouver dans le tégument des cellules pigmen- taires, et surtout dans les Leptoclinum et les Didemnum, des spicules calcaires dont la forme a pu être utilisée par l’auteur dans la coordina- tion systématique de ces animaux. El ne comprend pas la formation de ces spicules comme on le fait généralement, c'est-à-dire par remplis- sage à l'aide du carbonate de chaux de l'intérieur d'une cellule et par incrustation subséquente de la cellule elle-même. Il penche à croire que les unes dérivent de l'incrustation des noyaux réfringents, tandis que les autres proviendraient des dépôts calcaires effectués sur les noyaux simples ou multiples des grandes cellules tégumentaires. L'auteur étudie encore un dernier élément du manteau : ce sont les fibres découvertes par Kôlliker dans la tunique du Botryllus polycyclus. Les unes, longues, pâles, très-minceset sinueuses, occupent la couche la plus externe de la tunique et paraissent de nature cellulosique ; Les autres, plus courtes, : plus larges et plus opaques, se rencontrent plus spécialement dans le voisinage des orifices de l'enveloppe com- mune.M.Giard estporté àles considérer comme des prolongements des fibres musculaires du manteau. Celles-ci sont orientées suivant deux directions principales : les unes, longitudinales, partent des siphons et vont s’étaler sur le manteau; d'autres, circulaires, jouent le rôle de sphincters des orifices naturels. Au-dessous de la couche musculaire existe une troisième enveloppe, renfermant souventun pigment vive- ment coloré et constituant la chambre thoracique et Le vestibule cloa- cal, dans lequel elle forme un plancher que traverse la partie ter- minale du tube digestif, M. Milne-Edwards la croit limitée à la région que nous venons d'indiquer; mais chez certaines espèces elle descend manifestement jusqu’à l'ovaire, entre lequel elle s'enfonce comme un septum. Le système nerveux consiste en un ganglion situé entre l'orifice afférent et efférent du manteau ; il émet des ramifications difficiles à suivre. Deux de ses branches principales circonserivent l'o- rifice buccal et vont se réunir dans cet organe siugulier que Savigny a appelé le tubercule postérieur. L'auteur suppose que, de ce point, des TRAVAUX FRANCAIS. — ZOOLOGIE. 567 filets descendent dans l'endostyle. Le centre nerveux paraît constitué par des cellules apolaires, à noyaux punctiformes. En intime relation avec le ganglion nerveux, on observe un appareil auquel Savigny donne le nom de tubercule antérieur, et qu'on désigne généralement sous la dénomination de fossette vibratile. Il est impossible de rien affirmer relativement à l'homologie et au rôle physiologique de cet organe : on ne sait si on doit y voir un appareil auditif ou un organe d'olfaction. Chez les Botrylles ct les Botrylloïdes,ilexiste un deuxième ganglion spécialement affecté à l'innervation du cloaque commun. Les bords de celui-ci possèdent des dents plus ou moins distinctes: ïl en est quelquefois de même de l'ouverture branchiale ; les dents sont alors généralement au nombre desix. A l'entrée de l’orifice afférent, on rencontre encore des prolongements dirigés horizontalement, et qu'on peut considérer comme les analogues des appendices tentaculaires des Rayonnés. Leur nombre varie avec l'espèce et avec l’âge, leur dénom- brement est d’ailleurs difficile ; aussi vaut-il mieux ne pas en faire usage dans la zoologie systématique. M. Giard n'est pas disposé à regarder comme des organes de vision les taches pigmentaires pla- cées entre les dents des orifices branchial et cloacal : il veut qu'on réserve le nom d'œil à tout organe qui possède à la fois pigment, nerf et corps réfringent, opinion qui nous paraît trop exclusive. L’ap- pareil digestif est précédé d’un vestibule occupé par l'organe respira- toire. La déglutition des matières très-ténues dont se nourrit l’Ascidie s'effectue par un procédé que les observateurs paraissent avoir mal saisi, La plupart, en effet, admettent que le transport des particules so- lides s'effectue à l’aide des cils vibratiles du sillon ventral, lequel abou- tit à la bouche. L'emploi du carmin et du noir de Seiche a démontré à M. Giard que les matières alimentaires suivent la ligne des languettes dorsales pour parvenir jusqu’à l'entrée des voies digestives. En prenant pour sujet de ses observations le Perophora Listeri, dont la transparence est parfaite, M. Giard a pu reconnaître le cœur et constater, comme ses devanciers, l'alternance irrégulière qui s'établit dans le sens des mouvements de contraction de cet organe, d’où résul- tent des renversements dans la direction du courant sanguin. Une disposition curieuse, qui a échappé aux observateurs, empêche qu'un vide ou un trop-plein se produise dans ces conditions. Le vaisseau colonial, en pénétrant dans un autre individu, se divise en deux branches, dont l’une va au cœur et l’autre au tronc ventral. Or, quand le courant sanguin s'éloigne du pédicule, le vaisseau ventral, dont l'ondée est dirigée vers le réservoir commun, lui restitue une quan- tité égale à celle qu'il en recoit, de manière à rendre en tous points 568 REVUE SCIENTIFIQUE. la pression uniforme. Existe-t-il des vaisseaux distincts, ou le sang se meut-il dans des lacunes vasculiformes? M. Giard s'arrête à la pre- mière interprétation. [1 pense toutefois qu'il faut distinguer des véri- tables vaisseaux les tubes servant à la circulation coloniale: ceux-€1 présentent des appendices terminés en cæœcum et souvent subdivisés, suivant leur axe, par une cloison les transformant en deux demi- canaux dans chacun desquels le fluide nourricier se meut en sens opposé. Le sang est très-liquide, transparent, tenant en suspension des globules différemment colorés, suivant l'âge et les conditions exté- ricures. Ges globules ont une surface framboisée ou lisse et un noyau réfringent. Le sang peut encore contenir des ‘granulations pigmen- taires de teintes variées et très-vives. La cavité branchiale offre à considérer, du côté ventral, l'endostyle, dont la structure et l'importance sont diversement appréciées, et sur lequel l’auteur n’émet pas d'opinion personnelle. Relativement au nombre des rangées transversales de fentes branchiales, il a fait l'inté- ressante remarque que le nombre #, qui existe chez les Synascidies les plus inférieures, se retrouve à l’origine, quel que soit le chiffre dé- finitif, chez toutes les Ascidies composées. On rencontre chez les Ascidies divers organes de sécrétion dont l'étude offre de l'intérêt : d'abord les glandes rénales ou organe de Bojanus, qui recouvrent le canal digestif dans la portion qui fait suite au pylore ; puis un appareil réfringent (voir Revue des Sc. nat., tom. I, pag. 340) qui repose sur la portion pylorique du tube digestif, et que Küpffer a tort de considérer comme une dépendance du système san- guin. L'auteur termine la partie anatomique de son Mémoire par des con- sidérations sur les organes génitaux, se réservant de décrire dans la partie systématique leur forme et leurs rapports dans les divers types. Les spermatozoïdes dérivent de noyaux réfringents qui se trouvent d'abord en grand nombre dans les culs-de-sac de la glande mâle. L'œuf, chez les Synascidiens , subit une incubation interne: il se développe à l'intérieur de sa mère et en sort à l'état de têtard. Ganin s'est trompé en déclarant que dans les Ascidies composées il n'y a au- cun canal pour la sortie de l’œuf mür. L'oviducte est accompagné par le canal déférent, visible seulement quand il est rempli de sperme ; c'est dans le cloaque que s'opère la fécondation. La chambre incuba- trice, où s'opère aussi l'imprégnation, est quelquefois située à l'opposé de l'ouverture sexuelle, et il est difficile alors de se rendre compte du mode de pénétration en ce lieu du produit femelle. Un long chapitre de la Thèse est consacré à la zoologie générale et TRAVAUX FRANCAIS. —- ZOOLOGIE. 569 à la biologie des animaux que l’auteur étudie. IL fait connaître l’ha- bitat des Ascidies à l’état de larve et à l'état parfait. Il a remarqué que ces animaux se rencontrent depuis la fin de la zone des fucus, en com- pagnie des Patelles, des Turbos, des Pourpres, des Nasses, etc., jus- qu'au niveau des plus basses eaux et apparemment au-delà. Il indique le mode de répartition des différentes espèces dans ces zones diverses. Une question digne d'intérêt est celle de l'influence de l'habitat et des conditions de milieu sur les Ascidies composées. M. Giard s’en est occupé avec soin. La forme des cormus, évidemment affectée dans cer- tains cas par la station,ne se modifie nullement dans d’autres espèces. La lumière amène parfois une production anormale de pigment, et aux approches de l'hiver, chez les Didemnum cereum, on constate l'ap- parition de nombreuses spicules produisant une sorte de pétrifi- cation des cormus. Chez les Amaroucium Argus, densum et Nordmanni, l'hivernage détermine une destruction centripète des animalcules de la colonie, dont les blastozoïtes restent stationnaires comme les bourgeons d’un végétal pendant la froide saison. En même temps, chez l'Amaroucium, se développent des grains calcaires à structure stratifiée, que M. Harting est parvenu à reproduire artificiellement et qu'il nomme calcosphérites. Enfin, aux approches de l'hiver, M. Giard a été frappé de change- ments de coloration curieux, dont le zoologiste classificateur devra tenir compte. Les Synascidies ont leurs ennemis : ennemis du dehors, ennemis du dedans, Ces êtres sans défense sont la proie des Pleurobranches orangés, des Doris, de Crustacés, de Pvcnogonides, d Ophiures, etc. Certains Crustacés vont jusqu'à s'établir en commensauxdans le ves- tibule branchial. D’autres, des Lernées cette fois, pénètrent dans l'a- nimal et s’y installent en vrais parasites, arrivant jusqu'aux ovaires et mêlant leurs œufs à ceux de leur victime laquelle éprouve des modi- fications d'ordre pathologique, qui pourraient faire croire à l’existence de nouvelles espèces. La question du mimétisme occupe longuement M. Giard : il en a observé des cas nombreux et frappants. Généralement ce mimétisme lui a paru défensif, c'est-à-dire que l’animal, prenant des teintes se confondant aisément avec celles de l'objet qui lui sert &e support, se trouve dans de meïlleures conditions pour échapper à ses ennemis. Il n'entre pas dans notre plan de discuter cette question de mimé- tisme, nous nous bornerons à faire remarquer que si ce mimétisme existe pour l'homme, on ne peut rigoureusement en inférer qu'il en soit ainsi pour les animaux ; plusieurs faits démontrent le contraire. 570 REVUE SCIENTIFIQUE. L'auteur nous donne à cette occasion une longue dissertation sur les différentes sortes de mimétisme, avec bon nombre de distinctions et de dénominations spéciales; qui seraient peut-être mieux à leur place dans une étude du mimétisme en général. M. Giard aborde ensuite la question de la morphologie générale. Les masses composées formées par la réunion d'animaux vivant dans une union plus ou moins intime, les cormus, pour employer l'expres- sion du professeur Hæckel, peuvent être produites par scissipa- rité, par gemmiparité et par concrescence. La scissiparité n'intervient que rarement d'une manière normale dans la formation du cormus: cependant dans chaque partie séparée on voit s'opérer la rédintégration desanimalcules mutilés et la réparation des colonies endommagées. M. Giard a suivi avec attention les diffé- rentes phases de ces phénomènes de bourgeonnement réparateur, eta puse rendre compte ainsi de la production de certains cormus bifur- qués. Sur lescormus décapités, le moignon se cicatrise, et, comme dans un arbre tronqué, les bourgeons dormants de la base en recoivent un surcroît d'activité qui détermine leur évolution rapide. Quand la section a emporté les parties thoracique et intestinale, de mamière à ne laisser que l'ovaire et le cœur, qui continue à battre, la cloison ou septum de l'ovaire se dilate à la partie supérieure en une cavité affaissée par la résistance de la tunique externe, laquelle finit, en revenant sur elle-même, par obturer l'ouverture résultant de la lésion. L'ovaire en même temps subit une dégénérescence graisseuse, et il se forme une masse granuleuse aux dépens de laquelle s'opère la reproduction des parties détruites. M. Giard n'a pu suivre en tous points l'évolution des nouveaux organes, mais il est probable qu'elle est soumise à la loi suivante, que nous avons reconnuedepuis long- temps : la régénération d’une partie s'effectue conformément à son processus embryonnaire. Les Ascidies composées se multiplient surtout par gemmiparité. De semblables phénomènes de bourgeonnement ne manquent pas absolument chez les Ascidies simples , comme on pouvait le croire, mais ils sont bornés à la production des stolons radiciformes, renfer- mant un tube vasculaire, prolongement des vaisseaux de la tunique palléale. Sur un Perophora, on observe la production de stolons ana- logues, avec diverticulums vasculaires à couche interne réfringente. Les bourgeons n'apparaissent au début que comme une hypertrophie de cette couche interne, entourant une dilatation terminale du vais- seau. Bientôt le système nerveux se forme aux dépens d’une cloison longitudinale, préexistante chez les Pérophores ou ultérieurement dé- TRAVAUX FRANÇAIS. =— ZOOLOGIE. 971 veloppée chez d'autres types ; il apparaît le long de la ligne d'adhé- rence. El est d'abord creusé d'une cavité en point d'exclamation ; plus tard la lumière s’oblitère dans la partie renflée qui s'ouvre dans la cavité branchiale et devient la fossette vibratile, tandis que le reste demeure au système nouveau, mode d'évolution qui ne concorde pas avec le résultat des observations récentes de Ganin. 11 y a encore un autre mode de bourgeonnement qu’on peut appeler palléal, et d'où peut naître un cœnobium, par la soudure des différents éléments nouvel- lement formés. Sur ce point encore, M. Giard fait remarquer le désac- cord quiexiste entre ses propres observations et celles de Metschnikoff. Un troisième mode de hourgeonnement peut être appelé ovarien : il se rencontre chez les Ascidies du type des Polyclinum, c'est-à-dire à ovaire inférieur au tube digestif et contenu dans un pédicule. C'est sur la cloi- son normale de la masse ovarique qu’on voitapperaître les tubes gem- mifères. Enfin, un mode de bourgeonnement très-curieux est qualifié par M. Giard de pylorique. I1 se présente chez les Synascidies à cor- mus plats et de formeirrégulière, tels que les Didemnum, Leptoclinum. Les tubes vasculaires nés de la région pylorique s’allongent, et sur leurs ramifications s'organisent des bourgeons qui se développent comme à l'ordinaire. Toutefois, les Astellium et les Pseudodidemnum offrent une forme spéciale de ce bourgeonnement qu'on peut appeler direct. Deux épaississements cellulaires du manteau donnent nais- sance à deux bourgeons qui concourent chacun pour leur part à la formation d'un seul individu : l'un qui mérite le nom de bourgeon thoracique, d'où procède le sac branchial, le système nerveux et le système musculaire; l'autre bourgeon abdominal, à évolution moins rapide, donnant naissance au reste de l'organisme. La manière dont s'opère la jonction des deux bourgeons ne paraît pas encore complète- mentélucidée, même après les observations de Ganin etde M. Giard. Ce dernier a toutefois bien reconnu qu'avant que la fusion se soit effec- tuée, de nouveaux bourgeons se sont déjà formés à leur tour dans la région pylorique de la future Ascidie. Les Botrylles ont offert à M. Giard un cas particulier de gemmipa- rité auquel convient la qualification d'intercalaire. Au lieu de se con- stituer à la périphérie du cormus, les nouveaux groupes ou cœno- biums ont leurs individus intercalés entre ceux du cemele primitif et alternant régulièrement avec ces derniers. Des deux cercles concen- triques, quel est le premier formé ? La situation, la pigmentation plus prononcée du cercle extérieur, ainsi que le volume prédominant des œufs des individus qui le composent, semblent au premier abord prou- ver qu'ils sont les derniers constitués. Il n'en est rien cependant : 572 REVUE SCIENTIFIQUE. x l'observation directe a fait voir à M. Giard que les individus du cer- cle intérieur se sont interposés entre les autres et Les ont refoulés pour prendre leur place. Pour rendre compte de ce processus particulier, l'auteur invoque des raisons de nutrition insuffisante du premier cy- cle dépendant de l'évolution des œufs, qui finissent par comprimer le sac branchial et oblitérer incomplètement le cloaque commun. Dans ce cas, les phénomènes de gemmiparité s'exagéreraient et déter- mineraient ce tourgeonnement intercalaire. Les individus de forma- tion nouvelle se constituent un cloaque commun et servent à rajeunir le cormus, dont les premiers individus, une fois débarrassés des œufs expulsés peut-être par les orifices branchiaux, seraient plus tard éliminés. Ainsi se trouve établi un de ces suppléments, comme eût dit Buffon, qui nous mettent sur la voie du mode d'apparition des métamères des Tæniadés. Les bourgeons de diverses origines qui se développent sur les Syn- ascidies montrent de nombreuses variétés qui, comme dans les végétaux , peuvent se. transmettre aux divers systèmes issus par le même mode de production. Ainsi que les branches d’un arbre ou de deux arbres voisins peuvent se souder par le procédé dit de la greffe par approche , les parties d'un même cormus peuvent s'unir les unes aux autres par un procédé analogue, pour lequel l’auteur propose le terme de concrescence, qu il définit : soudure symétrique de deux parties appartenant à un même tout. Cette concrescence peut être observée chez les Circinalium. Il existe une forme simple de ce genre, voisine des Clavelines; que celle-ci se trouve en rapport, soit avec ses propres stolons, soit avec des oozoïtes voisins , dans les deux cas il y a soudure des individus par la face dorsale et production d’une forme nouvelle comparable au Synoïcum de Savigny. Les dents supérieures du cloaque commun subsistent seules, ou dans les cormus à élé- ments plus nombreux les bords deviennent entiers, comme on le voit dans les Amaroucium. Il est permis d'admettre dans ce cas que l’action du milieu, tantôt favorisant la concrescence, tantôt l'empêchant, constituerait, l'ata- visme aidant, deux types spécifiques dérivés du Circinalium concres- cens. Après avoit défini quelques termes empruntés ou créés par lui, M. Giard s applique à rechercher les lois de la cormogénèse. L'auteur est arrivé à cette conclusion, que la gemmiparité, s'exercant confor- mément à l'attraction du soi pour soi, suffit pourrendre compte detou- tes les particularités que présentent les agrégations de Synascidies. M. Giard a formulé les lois, au nombre de onze, qui lui paraissent TRAVAUX FRANCAIS. —ZOOLOGIE. 573 présider à la constitution du cormus ; nous ne mentionnerons ici que les principales. Les cormus de Synascidies formées d'individus plus où moins in- timement unis et pourvus d'une cavité centrale, à laquelle chacun vient aboutir directement ou indirectement, sont formés épigénétique- ment par des blastozoïtes, c'est-à-dire des individus provenant de bourgeons. La blastogénèse, qui peut se manifester déjà sur l'être à l'état em- bryonnaire, donne naissance à des individus placés, soit à l'extrémité des stolons, soit sur l'Ascidie mère. Généralement ces deux modes sont successifs, et les blastozoïtes stoloniaux peuvent à leur tour par bourgeonnement, conjugaison ou concrescence, produire denouveaux systèmes. Enfin la soudure des blastozoïtes s'effectue toujours par des parties similaires et, suivant les propres expressions de Savigny, «amène une union plus ou moins directe des orifices de l'anus, union qui rétablit la réciprocité de certaines impressions, et la société ou la vie com- mune ». Une partie considérable de la Thèse de M. Giard est consacrée à la zoologie systématique et descriptive du groupe des Synascidies. L’au- teur, après quelques considérations générales, fait une revue critique de tous les essais de classification des Ascidies qui ont été proposés jusqu'à ce jour. Il donne à son tour une nouvelle distribution systé- matique, mais qu'il déclare lui-même considérer comme provisoire. Atiribuant une importance capitale aux caractères tirés de la cormo- génèse, 1l reconnaît trois groupes dans les Synascidies. Première section : Catenatæ, à bourgeonnement basial, sans blasto- génèse dans l'embryon. Deuxième section : Glomeratæ, à bourgeonnement ovarien avec blastogénèse rudimentaire chez l'embryon. Troisième section : Reticulatæ, à bourgeonnement pylorique avec blastogénèse embryonnaire. Les Catenatæ comprennent trois familles : les Clavelinidæ et les Pe- rophoridæ, qui n'ont pas de cæœnobiums, et les Botryllidæ, qui en pos- sèdent. Les Glomeratæ sont subdivisées en deux familles : les Polyclinidæ, qui forment des cœnobiums, et les Disiomidæ, qui constituent des agrégations. Les Reticulatæ renferment aussi deux familles : les Didemnidæ, pourvues despicules, et les Diplosomidæ, quien mauquent. 574 REVUE SCIENTIFIQUE. M. Giard donne la description des Synascidies suivantes, qu il a observées à Roscoff : SECTION I. Catenatæ. 1 Tribu: Cravezininæ. Clavelina lepadiformis Müll. 2 Tribu: PeroPHortpx. Perophora Listeri Wiegm. de Tribu: Borryzzinx. Botryllus violaceus M. Edw.;— Bot. calendula (an. sp.);— Bot. Schlosseri Sav.— Bot. smaragdus M. Edw.;— Bot. prui- nosus (n. Sp.) ; — Bot. aurolineatus (n. sp.); — Bot. morio (n. sp.) ; — Bot. Marionis (n. sp. ); — Bot. rubigo (n. sp.) ; — Bottrylloides roti- fera M. Edw. ; — Bot. prostratum (n. sp.) ; — Bot. rubrum M. Edw.; — Bot. clavelina (n. sp.) ; — Bot. insigne (n. sp.). SECTION II. Glomerataæ. 1e Tribu : Pozyezininx. Aplidium zostericola (n. sp.) ; — Amarou- cium Nordmanni M. Edw.; — Amar. densum (n. sp.) ; — Fragarium elegans (n. sp.) ; — Circinalium concrescens (n. sp.) ; Morchellium Argus M. Edw.; — Polyclinum sabulosum (n. sp.). SECTION III. Reticulatæ. , {© Tribu : Dipemnin. Didemnum niveum (n. sp.) ; — Did. cereum (n. sp.); Did. sargassicola (n. sp.) ; — Eucæœlium parasiticum (n. sp.) ; — Leptoclinum maculosum M. Edw. ; — Lepioc. asperum M. Edw. ; — Leptoc. fulgidum M. Edw. ; — Leptoc. durum M.Edw. ; — Leptoc. per- foratum (n. sp.) ; — Leptoc. Lacazii (n. sp.) ; — Leptoc. gelatinosum M. Edw. 2e Tribu: Dircoseuinæ. Pseudodidemnum cristallinum (n. sp.) ; — Astellium spongiforme (n. sp.). L'auteur termine cette série de descriptions par quelques notions phylogéniques suggérées par l'étude générale des formes du cormus des Synascidies : il y fait une large application des doctrines de Darwin. On peut se représenter le cormusd'un Astellium commeun dôme membraneux percé d'une ouverture à son sommet, fixé à la péri- phérie et présentant de nombreuses dépressions en doigts de gant, lo- seant des individus ascidiens dont l'anus aboutit à la cavité centrale, et que des tubes vasculaires rendent solidaires les uns des autres. Il est intéressant de rechercher comment et sous quelles influences les dif- férentes formes sont dérivées de ce prototype. Chez les Displosomidés, des parasites envahissent lacavité commune etles animalcules sont im- puissants par eux-mêmes à réagir, mais la sélection y est arrivée par des procédés variés et dignes d'intérêt. Dans cette cavité, encombrée TRAVAUX FRANCAIS. — ZOOLOGIE. 579 de parasites, par bourgeonnement pylorique direct ou stolonial, se forment de jeunes animaux qui nen sortent qu'en soudant leur orifice branchial à la membrane commune, et se pratiquant une ouverture au dehors, processus difficilement réalisé à camse de l'état flottant du jeune blastozoïte. Pour remédier à ces imper- fections, les Leptoclinum abaïssent leur membrane commune, la rap- prochent du point d'appui, et l'incrustent de spicules. Les Didennum s’incrustent également et se soudent par leur tuniqueépaissie, englo- bant ainsi les trabécules vasculaires et les stolons. Pour éviter l'ob- struction du cloaque résultant de cette soudure, leur tube anal se dirige en bas et communique avec la cavité commune, réduite à des canalicules irréguliers. Dans des types plusélevés, le perfectionnement est obtenu par la coo- pération et la formation de cœænobiums, où chaque animal contribue par sa languette à repousser les ennemis. Ceux dans lesquels la centrali- sation est bien marquée offrent peu de variations et sont considérés comme de bonnes espèces, tandis que les Botrylles, réunies en répu- blique fédérative, constituent des formes que la sélection est appelée à modifier profondément. Enfin d’autres Ascidies, telles que les Pero- phora et les Claveline, ont renoncé à la vie commune, et, pour éviter les deux inconvénients cités plus haut, ont supprimé la membrane qui les reliait, et ne sont rattachés les uns aux autres que par des sto- lons à circulation languissante. La dernière partie de la Thèse de M. Giard est réservée à une étude embryogénique des Synascidies. Dans cette partie de son travail, l'au- teur ne donne pas un tableau complet des différentes phases évoluii- ves du jeune animal : il se contente d'esquisser les phénomènes en ce qu'ils ont de plus essentiel, complétant ainsi ses deux notices anté- rieures et insistant sur les points obscurs et litigieux. Il rappelle les beaux travaux d’Audouin et de Milne-Edwards, ceux de Kowalewsky, et surtout la découverte par M. de Lacaze-Duthiers, de l'exception remarquable présentée par l'embryon de la HMolgula tubu- losa. Les observations personnelles de l’auteur ont porté sur un grand nombre de types, mais il s’occupe principalement des deux termes extrêmes de la série, c'est-à-dire du Perophora Listeri et de l'Astellium spongiforme. L'ovaire du Perophora est placé dans la concavité d’un arc formé par le testicule; les canaux excréteurs des deux glandes se portent accolés l’un à l’autre vers l’extrémité de l'intestin. Les œufs, qui paraissent ne se développer que quelques jours avant les sperma- tozoïdes, sont recouverts d'une coque doublée d'un épithélium à 576 REVUE SCIENTIFIQUE. cellules aplaties. Plus tard, cet épithélium venant à prendre de l'accroissement, l'œuf devient bosselé, sans présenter cependant ce cloisonnement qui existe chez les Ascidies simples, non plus que ces villosités si remarquables de la surface de l'élément femelle. Le frac- tionnement s'opère dans la cavité incubatrice, oùles œufs, au nombre de 12 ou 15, arrivent successivement. Il est à remarquer que ce frac- tionnement s'accomplit sans formation de cavité centrale de segmen- tation. M. Giard regarde la couche du testa comme dérivant du vitellus et non des cellules épithéliales de la coque, ainsi que le prétend Kowa- lewsky. ‘ Plus tard, on voit se former une cavité d'invagination (cavité bran- chiale ou de Rusconi), par le refoulement de la membrane superfi- cielle de la masse embryonnaire, laquelle se déprime momentané- ment. Quelque temps après,la membrane superficielle, origine première du manteau de l'Ascidie et composée de plusieurs couches de cellules, se sépare des strates sous-jacentes, laissant un intervalle qui formera la cavité générale, dont l’origine ne peut être rapportée à la cavité centrale de segmentation. Il n'y a pas toutefois séparation, dans tous les points, de la membrane superficielle et des parties sous-jacentes. Les bords de la cavité d’invagination (anus de Rusconi) présentent une petite échancrure d'où naît un sillon qui s'étend comme une ligne méridienne sur un quart de la circonférence de l'œuf. Le long de ce sillon, la membrane superficielle reste adhérente aux couches sous- jacentes. Ce sillon ne tarde pas à s’effacer, et à sa place on découvre un amas ovoïde de cellules, qui est le rudiment du système nerveux. Quels sont les rapports de ce système avec la corde et la cavité de Rusconi ? Sans reproduire les opinions divergentes des auteurs, voici ce que nous apprennent les recherches de M. Giard : Prenant pour axe de l'embryon le diamètre qui passe par l'anus de Rusconi, lorsque cet axe occupe une position horizontale, et le système nerveux la partie supérieure de la masse embryonnaire, sur la gauche on dé- couvre l’origine de la queue ; de telle sorte que l'extrémité postérieure du système nerveux se trouve près de l'orifice de la cavité gastro- branchiale ou de Rusconi. Dans cette interprétation, la queue se développe d'avant en arrière. Jamais la partie atténuée du système nerveux n'a paru à M. Giard fournir un prolongement dans la partie caudale au-dessus des articles de la corde dorsale. Les éléments qui remplissent la vésicule nerveuse se différencient peu à peu, pour don- ner naissance aux organes de vision etd'audition. On voit également, TRAVAUX FRANCAIS. — ZO0OOLOGIE. 577 par les progrès du développement, une ouverture en voie de formation à la partie effilée du système nerveux ; mais dans aucun cas on n’aperçoit le canal postérieur et caudal tel que l'ont signalé Küpffer et Kowalewsky. Enfin deux branches nerveuses antérieures entourent l'orifice branchial et deux autres rameaux se dirigent versl'ouverture anale. A l'origine, la corde dorsale est constituée par un seulrang de cellu- les qui deviennent cubiques et entre lesquelles s'effectue ultérieure- ment un dépôt de matière réfringente sous forme de disques bicon- vexes. La corde est entourée d'une double couche de cellules qui s'allongent, acquièrent des stries transversales et ne sont autre chose que des cellules musculaires ; la couche la plus externe de la queue est formée par un prolongement de la tunique, et a paru à M. Giard munie de quatre lignes saillantes. Les papilles adhésives sont au nombre de trois : dans le Perophora, elles naissent d'un renflement antérieur. Nous: avons parlé ailleurs d'autres appendices placés au milieu des papilles adhésives, et que M. Milne-Edwards appelle prolongements frontaux : ce sont des stolons naissants ou rudimentaires, et rappelant dans ce dernier cas une dis- position atavique. On en trouve 8 chez les Didemnum et les Leptocli- num; on en compte jusqu à 20 dans la Cynthia morus. Au moment où apparaissent les ménisques biconvexes de la corde dorsale, les divers organes de l’Ascidie commencent à se constituer, et quand le jeune animal est déja bien formé, la corde dorsale n’a P encore atteint son complet développement. as M. Giard ne considère pas le tube digestif comme une continuation de l'invagination qui a donné naissance à la cavité de Rusconi : cette dernière ne formerait que la cavité gastro-branchiale et une partie du tube digestif jusqu à l'estomac inclusivement,. La dernière partie du tube alimentaire (Enddarm des Allemands) procéderait d'une autre invagination voisine de la première et qui se souderait à celle-ci au niveau de l'appareil réfringent. En même temps, le cœur se constitue dans son péricarde, et bientôt on voit circuler un liquide chargé d'éléments provenant de la cavité générale et aussi des vaisseaux eux-mêmes. Les fentes branchiales paraissentavoirun autre modede constitution que dans les Ascidies simples. Sur la membrane branchiale on voit, d'après M. Giard, apparaître des taches plus réfringentes, au centre desquelles se forme une petite ouverture munie de cils vibratiles déri- vant du protoplasma des cellules. On voit aussi les bandes du système 578 REVUE SCIENTIFIQUE. musculaire se différencier, au nombre de six, dans les Polycliniens et les Didemniens. | Au moment de son éclosion, le Perophora est une Ascidie toute formée, avec un organe de natation, la queue, et des sens régulateurs. Le têtard nage peu de temps; bientôt les vésicules nerveuses éprou- vent le mouvement régressif, et la queue disparaît. Chez l'Asiellium, la rapidité des métamorphoses est encore plus grande. Quand le têtard éclôt, son renflement céphalique égale en volume celui de l'animal dont il provient ; la corde dorsale se montre avec une netteté parfaite, et son tronc renferme déjà une colonie d'As- cidies dont les extrémités anales sont en communication avec un espace vide qui est le premier indice du cloaque commun. Au bout de deux ou trois heures, le têtard se fixe, et la blastogénèse, activée par la résorption de la queue, ne tarde pas à donner naissance à cinq ou six blastozoïtes dont l'évolution est très-rapide. M. Giard n’a pu conserver assez longtemps les oozoïtes de Synascidium, pour s'assurer si, comme le prétend Ganin pour les Botrylles, les blastozoïtes seuls portent des œufs, les oozoïtes demeurant stériles. Dans un dernier alinéa, M. Giard discute longuement la place des Ascidies dans le règne animal, après avoir passé en revue les diffé- rentes opinions soutenues par les zoologistes classificateurs. D'après l’auteur, la classe des Tuniciers ne rentre naturellement dans aucun de ces groupes fictifs qu’on a uommés Embranchements; toutefois il déclare que l’idée d’une parenté immédiate avec les Vertébrés infé- rieurs «doit être désormais rejetée par tout partisan sérieux de la théorie de l’évolution ». L'intéressant travail de M. Giard est accompagné de 10 planches dessinées par l’auteur, dont plusieurs sont chromolithographiées et qui font le plus grand honneur au pinceau de ce jeune naturaliste. Sa Thèse est l'œuvre d’un esprit ingénieux, ardent, plein de foi scientifi- que, appelé, nous n'en doutons pas, à prendre un rang distingué parmi les jeunes naturalistes de l'École zoologique expérimentale. Elle ap- porte un appoint important à l'histoire des Ascidies : en plus d’un endroit,on y ressent l'influence de l'esprit allemand avec ses qualités, mais aussi, Critique qui n'est de notre part qu'un conseil bienveillant, avec quelques-uns de ses défauts. — Dans les numéros 5 et 6 de son Journal de zoologie, M. le profes- seur Paul Gervais a publié un Mémoire, accompagné de planches, sur les formes cérébrales propres à différents groupes dé Mammifères. L'auteur y donne le résultat de ses recherches sür l'encéphale du TRAVAUX FRANCAIS. — ZOOLOGIE. 579 Toxodon, du Typotherium, des Insectivores, des Rongeurs et de diffé- rents Ongulés, tant vivants qu'éteints. Le Toxodon est un animal sin- gulierqui vivait à l’époque quaternaire dans l'Amérique du Sud, et dont la place dans la série des Mammifères est encore indécise. À l'exem- ple de M. R. Ovven, l'étude du squelette a amené M. Gervais à sépa- rer le Toxodon des Pachydermes jumentés ou Anisodactyles, et des Porcins ou Périsodactyles, et à en faire un ordre à part, pour lequel le professeur du Muséum a proposé la dénomination de Toxodontes. Pour se renseigner sur les affinités de ce groupe, M. Gervais a eu la pen- sée d'interroger le moule crânien du Toxodon. De la comparaison à laquelle il s’est livré, il a conclu que, malgré certaines analogies avec les Mégathères, l'encéphale du Toxodon présentait une analogie frap- pante avec celui des Rhinocéros et surtout avec celui de l'Hippopo- tame. Ainsi se trouve justifié à certains égards l'établissement du sroupe des Toxodontes, qui constituerait alors une troisième subdivi- sion des Ongulés. Le Typotherium, animal fossile de l'Amériqueméridionale décrit ja- dis par Serres souslenom de Mesotherium offre un mélange decaractères qui rendrait sa place difficile à déterminer, à ne considérer que certai- nes parties de son squelette. La structure et la disposition de son appa- reil dentaire portent à le rapprocher des Rongeurs. La forme de son crâne nest pas sans analogie avec celle des Léporides,mais le reste du squelette ne reproduit point les caractères de celui des Duplicidentés. Le moule de l'encéphale qu'a pu obtenir M. Gervais reproduit dans ses traits essentiels celui des Léporides, ce qui, aux yeux de l'auteur, justifie le rapprochement qu’il propose avec ces Rongeurs. Le Typothe- rium deviendrait dans cet ordre d'idées une famille appelée à prendre place dans le même ordre ou sous-ordre que les Léporides proprement dits. Le troisième chapitre traite des formes cérébrales des Cheiroptères. A part les grandes espèces de la famille des Roussettes, tous les Chei- roptères paraissent avoir le cerveau dépourvu de circonvolutions.Chez les espèces de Roussettes, au nombre de quatre, examinées par M. Gervais, le cerveau présente parallèlement à la faux deux sillons plus ou moins accentués. Les lobes olfactifs sont renflés, et un large tractus les relie inférieurement aux hémisphères. Le cervelet est pres- que entièrement à découvert, et le vermis égale à peu près en largeur chacun des hémisphères cérébelleux pris séparément. Dans les gran- des espèces de Sténodermes, M. Gervais a retrouvé un certain nom- bre de sillons à la surface du cerveau; de plus les lobes olfactifs et le cervelet ne sont pas recouverts, 580 REVUE SCIENTIFIQUE. L'ordre des Insectivores, auquel M. Gervais consacre le quatrième chapitre de son Mémoire, s’est enrichi dernièrement de plusieurs gen- res, tels que les Solenodon de Cuba, les Rhynchocyon et les Pétrodromes du Mozambique, les Potamogale du Gabon. En laissant de côté le genre Galéopithèque que M. Saint-Georges Mivartproposed'y réunir,cetordre peut être partagé en trois groupes principaux : le premier comprenant les espèces terrestres ou arboricoles ayant des affinités avec les Héris- sons ; le deuxième renfermant les Musaraïignes et les formes alliées ; un troisième réunissant les Insectivores essentiellement fouisseurs, dont la Taupe forme le type. Dans un quatrième groupe on pourrait faire figurer les Macroscélidés, qui par les Rhynchocyons se lient aux Musaraignes. M. Gervais entre dans des descriptions comparatives de l'encéphale du Hérisson d'Europe (Erinaceus europeus), du Tupaia fer- rugineux (Glisorex ferrugineus), du Tanrec (Centeles ecaudatus), du Ten- drac ou Ericule (£riculus spinosus), du Macroscélide (Macroscelides Rozeti) et de la Taupe. Puis il s'occupe de la forme encéphalique du Galéopithèque (Galeopithecus volans). Gette forme ne se laisse pas ra- mener complètement à celle qui caractérise les Insectivores, mais en même temps elle ne reproduit point le type cérébral des Lémures, avec lesquels le Galéopithèque offre des traits de ressemblance dont il con- vient de tenir compte. Ajoutons cependant que par son placenta dis- coïde cet animal se rapproche des Cheiroptères et des Insectivores. L'examen des formes cérébrales des Rongeurs constitue l'objet du cinquième chapitre. Ces animaux sont considérés comme ayant un cer- veau lisse ou tout au plus possédant des dépressions qui annoncent les circonvolutions. Quand on examine l'encéphale des animaux que Leuret range dans la catégorie de ceux qui n’ont que des rudiments de circonvolutions, tels quele Paca et le Porc-Épic, on constate l'existence de saillies limitées par de véritables sillons. Les Rongeurs les moins élevés en organisation, c'est-à-dire les Muridés, ont le cerveau com- plètement lisse et ne différant que par la proportion des parties. Déjà, dans les Hélamys ( Pedetes capensis), on observe un indice de scissure et un fort sillon le long de la faux. Le Castor, que M. Gervais a depuis longtemps associé aux Sciuridés, malgré sa taille, ne présente que de faibles dépressions à la surface des hémisphères, tandis que de véri- tables sillons s’ot servent chez les Hystricidés et les Caviadés, dont certains à cet égard rappellent les Mammifères Gyrencéphales. Les Sciuridés n'arrivent jamais au degré de complication des Caviadés, car dans les grandes espèces on ne trouve que de simples dépressions (Marmottes), ou même un cerveau lisse (Sciurus vulgaris et Sciuropterus volitans). L'encéphale présente aussi des modifications TRAVAUX FRANCAIS.-— ZOOLOGIE. 581 secondaires qui sont en rapport avec les différentes familles de cet or- dre, et dans certains cas avec les diverses coupes génériques. . Dans un dernier chapitre, M. Gervais nous donne des renseigne- ments sur les formes cérébrales de quelques petites espèces de Mam- mifères ongulés. Dans tous les cas examinés, on a rencontré des cir- convolutions bien développées et à replis tortueux. Pour le moment, l'auteur ne s'occupe que des Moschidés. Les Chevrotains présentent à la surface de leur cerveau des plicatures moins nombreuses que celles des grands Ruminants, particularité qui se trouve en rapport avec leur taille moindre. De plus, chez ces animaux, les plus petites espèces à leur tour paraissent avoir le cerveau le plus simple. Le moule intra-crânien de l'Hyœmoschus aquaticus vient à l'appui de cette manière de voir, et l'examen des formes cérébrales des Rumi- nants à cornes creuses ne semble pas le contredire. Les Moschidés offrent plusieurs traits de ressemblance avec les Bisulques Porcins, eten particulier avec les genres éteints Xiphodon et Cainotherium, dont le régime était frugivore, on peut même dire que par ses membres antérieurs l'Hyæmoschus a pris le caractère des Porcins. De l'examen auquel s'est livré l’auteur, il résulte que les formes cérébrales du Cainotherium commune et de l'Oreodon gracilis sont d'une plus grande simplicité que celles des Porcins vivants. Le Cainotherium présente trois circonvolutions antéro-postérieures simples et sans flexuosités. L'Oreodon reproduit les principales dispositions du Che- vrotain porte-musc, avec cette différence que le cervelet n'est pas re- couvert. M. Gervais termine son Mémoire par quelques considérations sur le cerveau des Damans (Hyrax), dont les affinités ont été si diverse- ment comprises par les zoologistes. Leur forme cérébrale est plus sim- ple que celle des Jumentés, les Rhinocéros en particulier, auxquels Cuvier et de Blainville les ont associés ; mais peut-être trouverait-on la transition dans les types cérébraux des espèces de taille plus réduite que possédaient les faunes antérieures. À la place des circonvolutions multiples de Rhinocéros, on ne rencontre chez le Daman que des cir- convolutions antéro-postérieures rappelant jusqu à un certain point l'apparence du cerveau des Roussettes, des Moschidés, du Cainothe- rium, etc. ‘ — Le Mémoire de M. Gervais est suivi d’une courte notice de M.E. Alix, sur laglande parotide de l’'Hippopotame. Sur un jeune Hippo- potame femelle, mort quelques heures aprèsla naissance, cet anatomiste a constaté la présence de la parotide, qu'il avait mise en doute dans un it; 40 582 ; REVUE SCIENTIFIQUE. chapitre complémentaire des Recherches sur l'anatomie de l'Hippopotame, par Gratiolet. La glande présente une grande analogie avec celle du Cochon, mais est beaucoup moins développée. Elle se compose d'une portion post-maxillaire et d’une portion sous-maxillaire, dont l'auteur indique avec détail la forme et les rapports. Seulement, comme il lui aété impossible de suivre les ramifications du canal de Sténon, il na pu apprécier complètement les relations des deux parties de la glande. — Le placenta de tous les Mammifères, y compris la femme, est composé de deux portions entièrement distinctes : une portion fæ- tale vasculaire ou absorbante, et une portion maternelle à laquelle est ann exé un organe glandulaire sécrétant qui s'interpose entre les deux portions,et dans lequel pénètrent les villosités du chorion. Ce n’est donc pas par de simples échanges osmotiques établis entre les vais- seaux de la mère et ceux du fœtus, que s'opère la nutrition de ce der- nier, mais à l’aide d'une sécrétion maternelle (lait utérin) élaborée par l'organe glandulaire du placenta maternel. Cet organe, décrit par M. Ercolani dans un Mémoire qui a pour ti- tre : De la portion maternelle du placenta chez les Mammifères (Journal de zoologie, n° 6, p. 472), ne se développe que dans les points où les villosités du placenta fœtal se trouveront en rapport avec l'utérus. Dans les auimaux, il procède d'une modification ou transformation de la muqueuse préexistante, tandis que dans l'éspèce humaine c’est un produit de nouvelle formation, déjà connu en partie des anatomis- tes sous le nom de decidua serotina. Dans sa forme la plus élémentaire, cet organe glandulaire est re- présenté par de simples follicules occupant ou toute la surface ou une région limitée de la paroi de l'utérus. Tantôt les follicules présentent des orifices isolés dans la cavité utérine, tantôt plusieurs follicules s'y ouvrent par un canal commun. Dans tous les cas, les villosités fæ- tales pénètrent par les bouches des glandes utriculaires, jusque dans l'intérieur des follicules. La parturition effectuée, si le placenta est disséminé et multiple, la portion maternelle n'est pas entraînée avec le fœtus, et peu à peu elle se détruit, ou complètement, ou en laissant des vestiges qui, le cas échéant, sont le siége d'une nouvelle formation. Ces débris de l'organe glandulaire sont connus sous le nom de Cotylédons rudimentaires. Dans les animaux à placenta unique, il ne sé dé- tache que les portions modifiées occupant les parties saillantes des plis utérins; l’autre portion, demeurée adhérente à l'utérus, disparaît par dégénérescence. Ce n'est que dans l'espèce humaine que l'expul- TRAVAUX FRANCAIS. — ZOOLOGIE. 583 sion totale de l'organe glandulaire s'effectue, laissant à nu le tissu uté- rin dans toute la portion placentaire. La partie glandulaire du placenta est produite par un stroma qui n'est autre chose que la sérotine. Celle-ci, au niveau du placenta, se change en un véritable tissu fibreux qui a pour usage d'endiguer les lacs sanguins du placenta maternel; elle revêt également les nom- breuses ramifications du placenta fœtal. Cette gaîne est alors consti- tuée par une partie externe fibreuse tapissée de cellules qui forment le tissu fondamental de l'organe glandulaire. Les villosités fœtales, en s’'allongeant, refoulent les gaînes dans la cavité des méats sanguins, de sorte que ces prolongements sont baignés par le sang maternel. Ce nest aussi que dans l'espèce humaine que les artères et les veines utéro-placentaires ne se subdivisent pas en branches et en rameaux : dans les grands méats sanguins, qui se constituent chez la femme seu- lement, se trouve un sang mixte artériel et veineux. Il s'établit par suite une sorte de circulation lacunaire qu'on ne retrouve pas dans les autres Mammifères. — Le n° 6 du Journal de zoologie, pag. 480 renferme encore un travail de M. Aloïs Humbert sur l’Accouplement et la ponte des Glomeris. La facilité avec laquelle on conserve les Glomeris en captivité a fourni à M. A. Humbert l’occasion d'observer les phénomènes de la reproduction chez ces Myriapodes. Ses observations ont porté sur le Glomeris limbata et le Glom. marmorea. Cet expérimentateur, ayant trouvé, le 16 mai 1868, un Glom. marmorea mâle accouplé avec un Glom. limbata femelle, eut la pensée de provoquer artificiellement ces unions anormales ; mais ces tentatives l'’amenèrent à cette conclusion que les individus d'espècedifférente éprouventune grande répugnarce à s'accoupler. Il constata toutefois que ces accouplements se produi- sent chez des individus qui sont cependant en position de s'unir à des représentants de leur propre espèce. De telles unions sont-elles fécon- des ? L'auteur n'a pu jusqu'ici s'en assurer. Les femelles possèdent 17 paires de pattes ; la plupart des auteurs sont d'accord sur ce point. Il n'en est pas de même relativement aux mâles, auxquels on a attribué tantôt 16, tantôt 18 et même 19 paires de membres. Ce dernier chiffre est exact, si l'on y comprend les deux dernières paires d’appendices qui ont subi des modifications et ne sont pas représentées chez la femelle. Les naturalistes étaient réduits à faire des hypothèses sur le rôle de ces appendices. M. A. Humbert s’est assuré que le mâle se sert de la seconde paire pour saisir la fe- melle au niveau des vulves, qui font saillie à la base de la deuxième 584 REVUE SCIENTIFIQUE. paire de pattes. Pour cela, le mâle relève ses derniers segments et les glisse sous la partie antérieure du corps; les deux sexes peuvent garder cette position ou se coucher sur le flanc, ventre à ventre, la tête de l'un en rapport avec la partie caudale de l’autre. M. Humbert n'est pas parvenu à reconnaître comment le sperme est introduit dans les voies génitales femelles. Il s’est ensuite attaché à étudier le mode de formation de ces singu- lières boulettes de terre dont chacune renferme un œuf à son centre. C'est avec des matières terreuses rejetées par le rectum, malaxées et façonnées à l'aide des pattes postérieures, que la mère construit cet abri pour sa progéniture. M. Humbert n’a pu s'assurer si l'œuf forme le noyau primitif de ces boulettes, ou si l’animal y ménage une cavité dans laquelle l'œuf serait introduit. Bien qu'expulsées par l'anus, les matières qui servent à la confection des boulettes ne peuvent être confondues avec les matières fécales. Les premières sont très-fluides et non sous forme de crottins, comme les secondes, et de plus elles sont dépourvues de ces détritus de tissu cellulaire végétal siabondant dans les excréments de ces Myriapodes. —Le numéro de novembre 1872 de la Revue et Magasin de zoologie contient une notice de M. Théophile Deyrolle sur une espèce remar- quable de Poissons qui vit dans les eaux du lac Van, lac qui a environ 90 lieues de tour et estsitué à l'est de la Turquie d'Asie. près des fron- tières de la Perse. Ses eaux sont tellement chargées de sels, et en par- ticulier de carbonate de soude que, lorsque les gens du pays y lavent leur linge, elle moussent, comme s'ils employaient du savon. On n'y rencontre aucun être vivant, à part un Coléoptère du genre Hydroporus, et un Poisson qu'on y pêche en abondance au prin- temps, alors qu'il remonte dans les petits ruisseaux tributaires du lac. Avec l’aide de M. le docteur Moreau, M. Deyrolle a étudié ce Pois- son, dont il donne une description : c'est un Cyprin du genre Ablette, l'Ablette Tarikh (Alburnus Tarichi), Cyprinus Tarichi Pallas, déjà décrite par ce dernier naturaliste, qui l'avait recue du lac Gotschka. — Ce travail est suivi d'une notice de M. Henri Jekel sur les Cac- cobius, genre de Coléoptères crés par G.-G. Thomson. — On y litenfin la suite des descriptions d'Hyménoptères nouveaux du bassin méditerranéen, par M. le docteur Dours, et un deuxième ar- ticle de M. Cotteau sur des Échinides nouveaux ou peu connus. — M. A. Bavay, pharmacien de la marine, a publié dans le xv° volume des Mémoires de la Société Linnéenne de Normandie un Cata- TRAVAUX FRANCAIS. — ZOOLOGIE. 089 logue des Reptiles de la Nouvelle-Calédonie avec description d'espèces nouvelles. Nos documents sur les Reptiles néo-calédoniens se bornaient à quelques renseignements succincts fournis par le P. Montrouzier et par M. Jouan, capitaine de frégate, et à une description d'un curieux Gecko de cette île, par M. Guichenot. Pendantun séjour de près de quatre années en Calédonie, M. Bavay a recueilli environ trente es- pèces de Reptiles, parmi lesquelles quinze, il y a lieu de le croire, sont nouvelles pour la science. Sur les côtes, on rencontre la Chelonia Midas Schw. et la Chel. im- bricata Schw. La terre ferme nourrit plusieurs Geckotiens intéres- sants : Pladydactylus leachianus Cus., Platyd. Chahoua (sp. nov.), Platyd. Duvaucelii Dum. et Bib., Plaiyd. pacificus Aug. Dum., Platyd. crepuscularis (sp. nov.), Platyd. Vieillardi (sp. nov ); Correlophus cilia- tus Guichen; Hemidactylus Garnoti Dum. et Bib.; Gymnodactylus Arnouxi Aug. Dum., Gymnod. Candeloti (sp. nov.). Les Scincoïdiens sont représentés par trois sous-genres du genre Gongylus : une espèce du genre Anotis (Bavay) et une du genre Able- pharus. Ce sont: Eumeces Garnieri (sp. nov.); Lygosoma tricolor Vieillard ms., Lygos. arborum (sp. nov.), Lygos. Austro-Caledonica (sp. nov.), Lygos Deplanchei (sp nov.): Lygos gracilis (sp. nov.), Tropidolo- pisma variabilis (sp. nov.), Anotis Mariei (sp. nov.); Ablepharus Peronii Dum. et Bib. M. Bavay y a rencontré enfin plusieurs Ophidiens : un Aprotéro- donte, Enygrus Bibronii Homb. et Jacquin., et sept Protéroglyphes: Platurus fasciatus, Platurus Fischeri (sp. nov.) ; Aipysurus fuliginosus Dum. et Bib., Aip. Duboisii (sp. nov.), Aip. chelonicephalus (sp. nov.): Hydrophis protervus Jan.; Pelamis bicolor Daud. — M.le D' Paladilhe a publié une notice sur un nouveau genre asiati- que pour lequel il propose le nom de Francesia. L'espèce pour laquelle ce malacologiste a créé ce genre avait été envoyée par Benson au pro- fesseur Mousson (de Zurich), sous l'étiquette manuscrite de Carychium scalare. Un échantillon unique avait été recueilli sur les bords de la Jumma, dans l'Inde ; mais dernièrement M. Arthur Issel {de Gênes) l'a retrouvée en assez grande abondance, pendant son voyage scien- tfique en Abyssinie, à Kursi (Yémen), sur la côte occidentale de la rade d'Aden, à une heure environ de la mer. L'étude attentive et mi- nutieuse de ces spécimens a déterminé M. Paladilhe à séparer nette- ment celte coquille des Carychium, et à la considérer comme une espèce fluviatile, probablement inoperculée, qu'il rattache, provisoire- 586 REVUE SCIENTIFIQUE. ment au moins, à la famille des Limnéidées et au genre nouveau Fran- cesia. L'auteur donne avec son soin habituel la caractéristique de la Francesia scalaris, à laquelle il rattache, avec un point de doute, l’4- chatina balanus de Benson, sous le nom Francesia ? balanus. M. Paladilhe a joint à sa notice sur le genre Francesia la descrip- tion de quelques espèces nouvelles des environs d'Aden. Ces espèces sont les suivantes : Bulimus Yemenensis, Bul. Samavaensis, Bul. ver- miformis, Bul. cerealis, Bul. lucidissimus; Limicolaria Bourguignati, Ennea Isseli, Pupa Antinorii, Cœcilianella Isseli, Physa Beccarii. L'étude de la faune malacologique de la péninsule Arabique amène M. Paladilhe à cette conclusion, que l’Yémen, pas plus que le reste de l'Arabie, ne possède un ensemble de formes caractéristiques de cette contrée, mais bien une faune toute d’acclimatation. — Les recherches poursuivies par M. N. Gréhant sur le dosage de l'hémoglobine (voir la Revue des Sc. nat., pag. 353) ont conduit ce physiologiste (Compt.-rend., 27 janvier 1873, pag. 233) à déterminer la quantité d'oxyde de carbone qui entre en combinaison avec l'hémoglo- bine, dans le cas d’empoisonnement partiel ou complet. Pour arriver à cette détermination, il suffit de mesurer, avant l'inhalation du gaz toxique, le plus grand volume d'oxygène que peut absorber le sang de l'animal soumis à l'expérience, et, l'intoxication produite, d'appré- cier le plus grand volume d'oxygène que le sang du même animal peut alors absorber : la différence donne le volume d'oxyde de car- bone entré en combinaison avec l'hémoglobine. L'élimination du gaz toxique a été démontrée par les expériences de M. le professeur CI. Bernard, mais les recherches de l'éminent physiologiste ne font pas connaître sous quelle forme elle s'effectue. On admet généralement, avec MM. Cheneau et Pokrowski, que l'oxyde de carbone brûlé dans l’organisme est éliminé par les poumons sous forme d'acide carbonique. Si ces expérimentateurs ont constaté la production de ce dernier gaz dans le sang, ils n'ont pas démontré en même temps la disparition du corps auquel ils en attribuent la for- mation. À l'aide d'expériences dans le détail desquelles nous ne pou- vons rentrer, M. Gréhant est arrivé à démontrer que l'oxydede car- bone est éliminé en nature par le poumon, c’est-à-dire par le même organe qui l'avait fait pénétrer dans le sang, et que par conséquent il ne peut brüler dans l'organisme. Comme résultat pratique de ces expériences, on doit noter l'impor- tance qu acquiert la respiration artificielle dans les cas d'asphyxie grave par la vapeur de charbon. TRAVAUX FRANCAIS. — ZOOLOGIE. 087 — M.L. Malassez s’est occupé (Compt.-rend., 2 décembre 1872, p. 1528) du difficile problème de la numération des globules rouges du sang chez les Mammifères, les Oiseaux et les Poissons. S'inspirant de l'exemple de M. le D' Potain, et laissant de côté la méthode longue, délicate etcompliquée de Vierordt, M. Malassez fait un mélange d’une très-petite quantité de sang avec un liquide conservateur. Ce mélange est introduit dans ce que l’auteur appelle un capillaire artificiel, c'est- à-dire dans un tube de verre à parois aplaties, dont le volume est connu pour chaque unité de longueur. À l'aide d'un microscope à oculaire quadrillé, on compte les globules compris dans un certain nombre de carrés, et, par un calcul facile avec’les données que l’on possède, on déduit aisément le nombre de globules renfermés dans un millimètre cube. D'une série de recherches exécutées à Concarneau et au Jardin d'ac- climatation, M. Malassez tire les conclusions suivantes: 1° le nombre des globules est plus considérable chez les Mammifères que chez les Oiseaux, et chez ces derniers que chez les Poissons. L'homme en pos- sède en moyenne 4 millions; chez la Chèvre, le nombre peut s'élever jusqu'à 18 millions. La moyenne ordinaire des Oiseaux peut être évaluée à 3 millions. Les Poissons osseux en ont de 700 mille à 2 millions, et chez les cartilagineux ce chiffre descend à 230 et même à 140 mille ; 2° leur nombre est presque toujours en raison inverse de leur volume ; 3 le rapport entre le nombre et le volume n'est pas proportionnel : les Oiseaux gagnent plus par l'augmentation de volume de leurs globules qu'ils ne perdent par la diminution du nombre de ceux-ci ; c'est pourquoi les physiologistes ont constaté que les Oiseaux avaient un poids de globules plus considérable qus les Mammifères. — Les expériences de M. le professeur Lortet (Compt. reud , 16 dé- cembre 1872, p.1417) démontrent la pénétrationdes leucocytes à travers les membranes organiques, phénomène nié par plusieurs histologistes. Toutes les membranes animales peuvent être traversées par ces élé- ments en voie de formation, qui ne font qu'écarter les cellules et Les fibres pour se pratiquer un passage. On peut acquérir la preuve de leur pénétration directe à travers des fragments de vessie de poisson, de baudruche, et dans l'intérieur de la chambre à air des œufs de poule, dont la membrane est appliquée sur des plaies suppurantes, dans des conditions convenables. La rapidité de la pénétration paraît être indépendante de la pression atmosphérique. Pour qu'elle ait lieu, il faut que les leucocytes soient jeunes et vivants, c’est-à-dire doués de mouvements amiboïdes ; dès 588 REVUE SCIENTIFIQUE. qu'ils deviennent granuleux et immobiles, le passage ne peut plus s'effectuer. Enfin, une dernière condition est celle de l'élévation de tempéra- ture : à + 30 degrés, les leucocytes du lapin et de l’homme paraissent perdre le mouvement, et à + 45 degrés, ils s’agglutinent et se défor- ment. Dans ces deux cas, la pénétration devient impossible. — À l'occasion du débat qui s'est élevé au sein de l'Académie &es sciences relativement au siége des combustions respiratoires, et dans lequel on à vu, avec autant de regret que de surprise, un savant, jouis- sant d'une légitime notoriété comme médecin, se faire le défenseur d'une théorie depuis longtemps réfutée parl'expérimentation, MM. Es- tor et Saintpierre ont publié (Compt.-rend.,6 janvier 1873, pag. 54) un Mémoire sur l'oxydation du sucre dans le système artériel. Pour ren- dre sensibles les combustions intra-artérielles, ces physiologistes in- jectent une solution de glucose dans la veine fémorale, et recueillent aussitôt le sang de l'artère fémorale du côté opposé ; puis, dans le li- quide extrait, ils recherchent l'oxygène et la matière sucrée. Ils ont constaté que la glucose disparaît très-rapidement, et que la quantité d'oxygène s’abaisse jusqu’à 0, pour se relever après combus- tion complète du principe sucré. Or, si l'oxygène de l’air, dont le sang s'est chargé dans son trajet intra-pulmonaire, a disparu en passant du poumon à l'artère fémorale, c'est que le sucre mélangé au liquide sanguin a été l'agent de cette disparition. À la vérité, comme à la suite de cette injection du liquide sucré l'animal éprouve des angoisses respiratoires, on serait tenter d’attri- buer la diminution d'oxygène à cette entrave apportée aux phénomè- nes de Ja respiration. MM. Estor et Saintpierre se sont assurés que cet effet ne se produit pas; que la quantité d'oxygène absorbée n’a pas éprouvé de diminution, et que l'acide carbonique produit n’est pas en rapport avec la quantité d'oxygène disparue. — MM. Legros et Onimus ont communiqué à l'Académie (Compt.- rend., {1 novembre 1872, pag. 1192) le résultat de Recherches expéri- mentales sur certains poinis de la physiologie des nerfs pneumogastriques. En employant des appareils qui permettent de graduer à volonté le nombre et la rapidité des intermittences du courant électrique, ces expérimentateurs ont pu étudier, sur des animaux à sang chaud et à sang froid, l'influence de l'excitation des nerfs pneumogastriques sur les mouvements du cœur, suivant le nombre des excitations dans un temps donné. D'abord ils ont constaté que l'abaissement de la tension TRAVAUX FRANCAIS. — Z0OLOGIE. 589 artérielle est le résultat constant des excitations du pneumogastrique, -et que cet abaissement croît avec le nombre des intermittences du courant. Cet affaiblissement de la tension artérielle est accompagné dans tousles cas d’une diminution dans le nombre et d'exagération dans l'amplitude des battements du cœur. La relation est si directe qu'on peut à volonté graduer en quelque sorte les mouvements de cet organe. De rares intermittences n'immobilisent point le cœur et ne cau- sent qu'un ralentissement et une modification des contractions. Pour suspendre les mouvements, quinze à vingt intermittences par seconde sont nécessaires dans un animal à sang chaud ; le même ré- sultat est obtenu en les réduisant à deux ou trois pour un animal à sang froid, surtout pendant l'hibernation Chez un animal à sang chaud, ils n’ont pu arrêter le cœur plus de quinze à trente secondes; chez ce dernier encore, l’'excitant produit son effet dans un temps assez Court; mais l'intervalle peut être d’une demi-minute chez les animaux à sang froid, pendant la torpeur hibernale en particulier. —M. de Sinéty (Compt.-rend., 23 décembre 1872, pag. 1773) a re- connu qu il existe un état graisseux du foie qui n’est pas lié à la ges- tation, qui se développe et s'accroît en même temps que la fonction de lactation, subsiste pendant cette période et prend fin avec elle. La graisse est disposée dans l'organe hépatique d'une manière toute par- ticulière: elle occupe des cellules qui entourent la veine centrale du Lo- bule, et ce dernier peut même être envahi plus ou moins. Cette dispo- sition est l'inverse de celle qu'on constate dans la dégénérescence grais- seuse de l'organe, où l’envahissement procède alors de la périphérie au centre. —M. CI. Bernard a communiqué à l’Académie’ (Compt.-rend.,23 dé- cembre 1872, pag. 1777) les conclusions d’un travail de M. Defresne sur les sécrétions biliaire et pancréatique chez les omnivores. La bile, par son alcalinité, joue un grand #ôle dans la digestion pancréatique, qui sans cette intervention d'un principe alcalin serait abaissée d'un tiers. Elle contient aussi un acide organique qui émulsionne les corps gras quandil est libre, condition qui se trouve remplie sur toute la longueur de l'intestin grêle. Les graisses émulsionnées restent neu- tres, tandis qu'elles sont dédoublées en glycérineet en acides graspar le suc pancréatique. Ces derniers s’émulsionnent spontanément et peuvent à leur tour entraîner à l'état d'émulsion les corps gras non altérés. Par l'action du suc pancréatique, les albumines les plus di- 590 REVUE SCIENTIFIQUE. verses sont transformées en albuminose incoagulable par la chaleur, soluble dans l'alcool. — La régénération des yeux chez les Écrevisses a été de la part de M.Chantran l’objetld'expériences (Compt.-rend., 27 janvier 1873, pag. 240) qui font suite à celles qu'il avait entreprises sur la reproduction des membres de ce Crustacé, et dont le résultat avait été communi- qué à l'Académie des sciences dans la séance du 17 juillet 1871. Si l'ex- cision a liea sur un animal d'un an, au mois d'octobre, après les mues accomplies, la mutilation persiste jusqu'à ce que de nouvelles mues se produisent à partir du mois de maisuivant. Quand se furent opérés les quatre changements de peau qui se succèdent depuis cette époque, c'est-à-dire onze mois après l’opération, les yeux étaient re- poussés et fonctionnaient comme à l'ordinaire Si, sur un sujet de deux ans, la même ablation est faite, soit im- médiatement avant la série des mues , soit dans l'intervalle de deux mues , l'œil se régénérera, mais bien souvent d'une manière incomplète et anormale. La reproduction paraît aussi imparfaite quand l'excision de l'organe de la vue a lieu chez les écrevisses adultes, qui muent , les mâles deux fois et les femelles une seule fois. Il faut que la section respecte la partie inférieure du pédoncule oculaire, car, si celui-ci est retranché en totalité par arrachement ou par section, la reproduction devient impossible. — M. G. Prévost (de Genève) a exécuté dans le laboratoire de phy- siologie de l'Académie de Genève une série de recherches expérimen- tales sur La distribution de la corde du tympan (Compt.-rend., 30 décem- bre 1872, pag. 1828). Le procédé suivi par M. Prévost consiste à sec- tionner la corde du tympan d'après la méthode de M. CL. Bernard, ou à interrompre la continuité de celle-ci en arrachant le facial à son émergence du trou stylo-mastoïdien, et pratiquant de la sorte l’ablation de la partie pétreuse de ces nerfs; puis à examiner si la langue pré- sente des fibres altérées, comme,l'a conseillé Waller. Cette altération a été constatée dans la muqueuse de l'extrémité de la langue, et aussi, à l’aide de certaines précautions, dans les papilles de cet organe.Après l'arrachement du ganglion sphéno-palatin ou la section du nerf vi- dien, la corde du tympan ne présente pas d'altération. La section du glosso-pharyngien seul, chez un chat. n’a pas entraîné de modification dans les branches terminales du lingual, ce qui prouve que, s'il existe des anastomoses entre. ces deux nerfs, elles sont de peu d'im- portance. TRAYAUX FRANÇAIS. — ZOOLOGIE. -291 _M.L. Ranvier rend compte (Compt.-rend., 4 novembre 1872, pag. 1129) d'observations faites à Concarneau sur les étranglements an- nulaires et les segments inter-annulaires chez les Raïes et les Torpilles. M. Ranvier ayant obtenu des préparations très-démonstratives des tubes nerveux des Mammifères, en traitant les nerfs avec l’acide os- mique à { 0/0, a eu la pensée d'appliquer ce mode de préparation aux tubes nerveux des Raïes complètement développées, dont les plus gros sont visibles à l'œil nu. La forme des étranglements annulaires de ce Poisson diffère un peu de celle que l’auteur a observée chez les Mammifères. De chaque côté de l'étranglement, le cône nerveux va s'élargissant, limité exté- rieurement par la membrane de Schwann, jusqu'à ce qu'il ait atteint son diamètre normal. Au centre de l’étranglement, dans le point où la myéline cesse d'exister, le cylindre-axe présente un renflement com- parable pour la forme à deux cônes opposés par la base; la grande circonférence de ce renflement biconique est adhérente à la gaine de Schwann, avec laquelle elle se confond; de chaque côté l'on aperçoit une seconde gaîne, absente chez les Mammifères, que l'auteur nomme gaîne externe, par opposition à la gaîne interne ou membrane de Sch- wann. Les segments inter-annulaires, autrement dit la portion com- prise entre deux étranglements annulaires, est soumise aux variations de la croissance. Chacun de ces segments possède au moins trois noyaux, l’un appartenant à la membranede Schwann, et les autresdé- pendant dela membrane externe, circonstance qui explique l'absence de ces derniers chez les Mammifères. Des dispositions fort semblables ont été retrouvées par M. Ranvier sur les nerfs de la Torpille. Les étranglements y sont très-rapprochés, mais on y rencontre encore la double membrane, la pluralité des noyaux, les variations avec l’âge, et de plus avec les fonctions des nerfs. Cet histologiste a constaté que les segments des nerfs électri- ques n’ont, toutes choses égales d'ailleurs. que la moitié de la lon- sueur des segments des autres nerfs, résultat qui lui a suggéré cette hypothèse que la longueur des segments des tubes nerveux est en raison inverse de l'activité physiologique des nerfs. M. Ranvier s'est également occupé de l'importante question de la distribution des nerfs dans les plaques électriques. Ses observations l'ont conduit à reconnaître que la gaîne observée sur les terminaisons ultimes dans l'organe électrique n’est pas un prolongement de la gaîne lamelleuse du faisceau nerveux, qu'ils perdent en traversant l'enveloppe connective du prisme, mais simplement la gaîne externe des tubes contenus dans les faisceaux. 592 REVUE SCIENTIFIQUE. — M. Debove à entrepris l'Étude de la couche endothéliale sous- épithéliale des membranes muqueuses (Compt.-rend., 23 déc. 1872, pag. 1776). Cet anatomiste nomme ainsi des cellules plates situées au- dessous de l'épithélium et réunies aux cellules voisines par un ciment très-fin formé de protoplasma pour ainsi dire desséché. Sous l'épithé- lium intestinal, l'imprégnation, à l’aide des sels d'argent, détermine l'apparition d’un élégant réseau de lignes noires marquant les limites des cellules de l'endothélium. Cette couche revêt les villosités, et His, qui l'a aperçue, l'a considérée à tort comme le revêtement du chy- Lifère central. Elle tapisse aussi les culs-de-sac des glandes de Lieber- kühn, représentant ce qu'on a appelé leur paroi propre. La couche en- dothéliale de la muqueuse bronchique est formée d'éléments limités par des contours polygonaux, et se continue probablement avec l’en- dothélium des infundibula. L'endothélium de la muqueuse vésicale est formé de cellules polyédriques de grandes dimensions. M. De- bove n'a pu s'assurer si une couche semblable existe au-dessous de l'épiderme du tégument externe. — “La torsion de l'humérus, l'une de ces anomalies normales étu- diée avec tant de soin par M. le professeur Ch. Martins, a été l'objet, de la part de M. J.-P. Durand (de Gros), d'une série de recherches dont le résultat a été communiqué à l'Académie (Compt.-rend., 23 déc. 1872, p. 1778). La torsion de l'humérus, qu'on avaitconsidérée comme constante chez tous les Vertébrés pourvus de membres, n'existe point chez tous ces animaux, et de plus le sens de la torsion n'est pas in- variable. La torsion est nulle chez les Enaliosauriens, les Ichthyosau- res, les Plésiosaures et les Tortues de mer; elle est aniéro-interne chez les Reptiles, les Mammifères terrestres, les Phoques, les Morses, et les Sirénides ; elle est antéro-externe chez les vrais Cétacés et les Oiseaux. On peut admettre comme type primordial le membre anté- rieur présentant une homotypie complète avec le membre inférieur, en supposant que, comme le fémur, l'humérus ait sa face dorsale en avant et sa face ventrale en arrière. Dans cette hypothèse, le radius etle cubitus sont juxtaposés parallèlement et latéralement, et par suite, l'articulation huméro-cubitale présente, comme celle du genou, son angle saillant en avant. Admettons maintenant une torsion de l'humérus suivant une demi-circonférence : l'avant-bras ainsi que la main seront amenés en supination. Pour restituer alors à la main sa position première, c'est-à-dire pour tourner la paume en arrière, les deux os sont forcés de se croiser d'une manière bizarre qui caracté- rise la pronation, pendant laquelle les deux os de l'avant-bras sont en TRAVAUX FRANCAIS. — ZOOLOGIE. 593 contact par leurs faces ventrales. Une exception curieuse toutefois vient infirmer cette théorie : chez l'Échidné, les os de l'avant-bras sont juxtaposés parallèlement, leurs faces latérales en regard ; en ou- tre, es deux os ont leur face dorsale en avant. Chez ce Vertébré cependant, l’'humérus est tordu. Pour transformer en pronation la supi- nation due à la torsion de l'humérus, il faut qu’il se produise une in- curvation et un déchirement profond de l’'épiphyse inférieure de l'os du bras équivalant à une demi-rotation radio-carpienne. L'auteur fait encore remarquer que les divers genres de Tortues présentent une extrême variété dans la conformation des membres. L'humérus des Tortues de mer n'a pas éprouvé de torsion ; celle-ci est faible dans les Emysaures américaines, etleur avant-bras n’est pas amené en pronation ; enfin chez les Cistudes et les Chersites de l’an- cien monde, au mouvement de rotation de 90 degrés de l'humérus se joint une véritable luxation normale du coude par rotation antéro- interne. — Dans une note (Compt-rend., 6 janvier 1873, pag. 54), sur les Equidés de la faune quaternaire, M. Sanson déclare qu'il n'y a aucun moyen de distinguer, en ne prenant en considération que les dents et les os des membres, les diverses espèces du genre Equus, l’Ane, par exemple, du Cheval. Les dimensions plus considérables des os des membres, dont on a voulu faire un caractère pour reconnaître le se- cond de ces animaux, ne constituent qu'une donnée incertaine, les os longs de certains Anes l'emportant en longueur sur ceux des Chevaux. Le seul caractère vraiment positif sur lequel on puisse asseoir une détermination est celui que fournit la forme tout à fait particulière de l’apophyse orbitaire du frontal, qui chez les Anes est beaucoup plus large, rugueuse à sa surface externe et à son bord antérieur, et en forme de V ouvert, au lieu de décrire un arc de cercle. — M. le D' Jobert (Compt.-rend., 23 décembre 1872, p. 1780), pour- suivant ses recherches sur les organes tactiles, a étudié la structure intime du bec chez cet Echassier auquel la forme allongée et dépri- mée de cet organe a valu le nom de Spatule. La faceextérieure du bec est lisse, tandis que la face interne est parcourue par de petits sillons longitudinaux qui vers l'extrémité de l'organe s'infléchissent pour s'accommoder à la courbure qu'il décrit. Les deux tables minces et denses des os du bec présentent un grand nombre de perforations, et dans leur écartement existent de larges alvéoles remplies de graisse et abondamment pourvues de vaisseaux. Au-dessous de la gaîne épider- 594 REVUE SCIENTIFIQUE. mique qui revêt les mandibules, on rencontre une couche conjonctive pourvue de nombreuses fibres élastiques à direction plus ou moins sinueuse. Ce n’est qu'au niveau des sillons de la face interne qu'on rencontre des papilles; celles-ci se montrent exclusivement vasculaires. Le bec reçoitd'énormes branches du trijumeau; les derniers rameaux s'engagent dans ces orifices, dont nous venons de signaler l'existence dans les tables externe et interne des os mandibulaires ; ils pénètrent ensuite dans des alvéoles constituées par des refoulements internes de la membrane coujonctive. A l'intérieur de ces dépressions, les nerfs se divisent, et chacun de leurs tubes, devenu très-sinueux, va se mettre en connexion avec un corpuscule terminal. Dans chaque alvéole, on compte de quatre à six corpuscules semblables à ceux que l'auteur a décrits ailleurs, c'est-à-dire à fibres nerveuses perdant sa myéline et se terminant en petites boules au centre du corpuscule. L'os mandibulaire envoie aussi de longs prolongements analogues à des digitations, entre lesquelles s'enfonce le derme et se voient de nombreux corpuscules. On doit donc considérer le bec de la Spatule comme un organe doué d’une grande sensibilité. En effet, ses parois cèdent sous le moindre effort, et la plus légère pression se trouve ainsi transmise avec une extrême facilité à l'appareil sensitif. — Dans une note communiquée à l'Académie (Compt.-rend., 9dé- cembre 1872, pag. 1636), M. Em. Moreau a signalé l'existence d'un muscle remarquable dans l'œil du Germon. Ce muscle, qui est com- posé de fibres lisses et de fibres striées, est placé entre la sclérotique et la choroïde ; il est aplati, arqué, et mesure de 22 à 25 millimètres de longueur sur 5 à 6 de largeur ; il s'insère en dedans vers le pour- tour de l'anneau de la sclérotique en dehors du ligament ciliaire, puis se dirige en haut et en avant pour se porter sur la partie réfléchie de la choroïde, à laquelle il adhère. Il recoit un rameau du nerf ophthal- mique et doit agir comme constricteur de la choroïde. L'œil du Ger- mon, comme celui du Thon, possède en outre un processus falciforme, mais il est dépourvu de véritables procès-ciliaires. M. Moreau pré- tend que le processus falciforme et les procès-ciliaires ne coexistent jamais. D'après cet anatomiste, l'œil des Poissons présenterait trois types destructure bien déterminés: {° le type des Sélaciens, Le plus élevé en organisation, où les procès-ciliaires existent; 2° celui des Poissons osseux, où l'on rencontre un ligament falciforme, mais où les procès- ciliaires font constamment défaut ; 3° celui des Petromyzon, qui sont privés de procès-ciliaires et de ligaments falciformes. TRAVAUX FRANCAIS. — ZOOLOGIE. 595 _—M. Ernest Dubrueil (Compt.-rend., 4 novembre 1871, p. 1126) a décrit le Capreolus ou spermatophore d'un Gastéropode pulmoné, le Zonites Algirus. Ge corps a la forme d'un tube atténué à ses deux extré- mités et muni à la surface de cannelures disposées en spirales. Lors- que ce spermatophore, au moment du coït, a été introduit dans les voies génitales femelles, l'extrémité qui y a pénétré en dernier lieu et qui est percée d'un orifice capillaire se recourhe et s'engage dans le col de l’oviducte, où, sous l’action des mugcles du canal copulateur, elle déverse son contenu. Le spermatophore est sécrété dans la partie inférieure dilatée du canal déférent, qui, physiologiquement alors, correspond au flagellum des Hélices. Les cannelures de la surface du spermatophore sont produites par de nombreuses lamelles disposées en spirale, qui font saillie sur la surface interne de la portion dilatée du conduit déférent, et sur lesquelles le produit de sécrétion de ce même conduit se moule exactement. —M. le professeur C. Dareste a communiqué à l’Académie (Compt.- rend., 4 novembre 1872, p. 1086) la troisième partie de ses études sur les types ostéologiques des Poissons osseux (Voir la Revue des Sciences naturelles, tom. I, n° 3,pag. 355). Conformémentà sa promesse, ce zoo- Jogiste s occupe de déterminer quelques-unes des formes crâniennes secondaires qui appartiennent aux types de son premier ordre, et quil considère comme indiquant les véritables caractères des familles naturelles. Les Ésoces, en écartant les Belone, les Exocætus et les Hémiramphus, se distinguent par la forme carrée et aplatie du crâne, l'absence des crêtes frontales, de rochers, l'allongement du palatin situé à côté du crâne, et l'articulation de l'aile palatine avec les frontaux prin- cipaux se faisant par le ptérigoïdien. Les Characins, détachés par Müller des Salmonides et comprenant les genres Serra, Salmo, Myletes, Hydrocyon, ont les intermaxillaires soudés au crâne d'une manière fixe. Les frontaux principaux viennent en contact avec les frontaux postérieurs et les mastoïdiens ; les paric- taux restent écartés et l’interpariétal porte une crête. Les Clupées, ainsi que Cuvier les comprenait,contenaient des gen- res tels que les Polyptères et les Lépidostées, qui en ont été avec juste raison détachés par Agassiz. Réduits au genre Clupea, Alosa, Engrau- lis, Chirocentrum et Glossodon, leur crâne, vu par sa face supérieure, a la forme d’un triangle isocèle à base occipitale assez étroite et pré- sentant une ligne brisée résultant de la position des occipitaux ex- ternes en arrière des mastoïdiens. Leurs frontaux principaux sont 596 REVUE SCIENTIFIQUE. séparés de l’interpariétal, qui est presque dénué de crête, par les pariétaux unis sur la ligne médiane. Les frontaux antérieurs et les frontaux postérieurs sont complètement exclus de la face supérieure du crâne. M. Dareste, qui a eul’occasion d'étudier les Sudis ou Arapaima, leur trouve un type crânien fort différent de celui des Clupées. La forme en triangle isocèle de la face supérieure du crâne se re- trouve dans la famille des Gadoïdes ; mais le développement que prend le rocher en élargit considérablement la base occipitale. De plus, les frontaux postérieurs rentrent dans la composition de la face supérieure du crâne, en s’interposant entre les frontaux principaux et les mastoïdiens. Outre son asymétrie, connue de tous les naturalistes, le crâne des Pleuronectes présente une crête médiane formée en avant par le relè- vement du bord interne des frontaux principaux, lesquels s'écartent en partie pour recevoir l'œil déplacé, et en arrière par une carène de l'interpariétal. Les frontaux postérieurs et les mastoïdiens scnt re- couverts par l'extrémité postérieure des frontaux principaux, des pariétaux et des occipitaux externes. Les Blennioïdes, auxquelles on doit rattacher le genre Anarrhichas, ont les frontaux unis sur la ligne médiane, et comme les Murénoï- des, une véritable fosse temporale, résultant de la présence d’un liga- ment post-orbitaire inséré à une petite éminence latérale de ces mêmes frontaux. Il existe une véritable crête sagittale se bifurquant en arrière, de manière à en former deux autres qui s’éténdent sur les mastoïdiens. Les pariétaux présentent un grand développement et constituent, avec l'interpariétal, la face postérieure du crâne. La diversité de forme que présentent les Gymnodontes, dont M. Da- reste écarte les Triodon, rend leur type crânien difficile à préciser. Cependant on peut constater comme caractères communs : l'absence de crêtes à la face supérieure du crâne, l'existence des frontaux posté- rieurs sur cette face, l'union des frontaux principaux et des mas- toïdiens, et surtout l'articulation de ces derniers avec les occipitaux externes, d'où résulte la présence de trois crêtes seulement dans la ré- gion occipitale ; enfin on peut noter encore l'articulation fixe avec le crâne du palatin et du ptérygoïdien interne. M. Dareste termine sa communication par l'examen du type crâ- nien des Fistulaires. Les Poissons de cette famille se font remarquer par l'allongement excessif des frontaux principaux, de l'ethmoïde et du vomer, allongement auquel participel'aile temporale. Par contre, l'aile palatine et les mâchoires sont très-raccourcies. La boîte crâ- TRAVAUX FRANCAIS. — ZOOLOGIE. 597 nienne est très-petite et dénuée de véritables crêtes ; enfin les occi- pitaux externes présentent un grand prolongement osseux s'étendant jusque dans la région dorsale. $ Les types définis jusqu'ici, ayant été choisis parmi les plus aber- rants, n ont point présenté de difficulté ; mais la plupart des Poissons osseux appartenant au premier ordre se ressemblent tellement par la conformation de leur crâne, que la distinction et l'établissement de leurs types sont loin de présenter les mêmes facilités. M, Dareste (Compt.-rend., {1 novembre 1872, pag. 1172) pense cependant être arrivé à un résultaten tenant compte de certaines particularités qui pa- raissent au premier abord avoir peu d'importance, mais en acquièrent par leur constance dans les mêmes groupes. Le plus grand nombre des Acanthoptérygiens et aussi quelques Malacoptérygiens, comme les vrais Salmones, ont un type crânien qui se rapproche beaucoup de celui qu'a décrit Cuvier dans son His- toire des poissons, et qui est devenu classique. Malgré cette ressem- blance, on parvient à démêler des types secondaires ; une famille cependant semble échapper à une définition précise: c'est celle des Percoïdes, où la forme crânienne présente une grande variabilité. Les Sciénoïdes, que font reconnaître au premier abord leur crâne à os caverneux, sont caractérisés encore par l'obliquité de la ligne supé- rieure de la tête, ainsi que par Le développement du sphénoïde anté- TIeULE Les Sparoïdes, auxquels il convient de rattacher les Amphacanthus, placés à tort parmi les Teuthyes, se font distinguer par la courbure de la face supérieure du crâne accompagnée d'une courbure en sens opposé de l'occipital basilaire et du sphénoïde; ils possèdent aussi des crêtes assez développées, mais qui ne dépassent pas un rebord saillant occupant la partie postérieure des pariétaux. Une grande analogie existe entre le type crânien des Sparoïdes et celui des Labroïdes, lesquels ne présentent pas toutefois la courbure du basilaire et du sphénoïde postérieur, et montrent la soudure en une seule pièce osseuse des diverses parties du pharyngien inférieur, caractère qui avait fait établir par Müller un ordre particulier, celui des Pharyngognathes. F Le type des Chétodons, moins les Brama et les Pempheris, n’est en ‘quelque sorte qu'une exagération de celui des Sparoïdes : il présente un redressement de la ligne formée par le sphénoïde postérieur et l'occipital basilaire; on y retrouve le prolongement interfrontal de l'interpariétal muni d'une crête élevée, et la non-intercalation de l'ethmoïde, quand il existe, entre les frontaux antérieurs. L. 41 598 REVUE SCIENTIFIQUE. Dans ses traits principaux, le type des Acanthures et celui des Ba- listes rappelle celui des Chétodons ; il n’en diffère surtout que par l'intercalation d’un ethmoïde bien développé entre les frontaux anté- rieurs, et par la plectognaithie. Les familles que nous venons de passer en revue ont toutes le crâne plus ou moins développé dans le sens vertical ; dans d’autres, au contraire, le diamètre transversal se montre prépondérant. Ainsi sont les Scombéroïdes, comprenant un premier type, celui des véri- tables Scombres, des Thyrsites, des Lépidopes, et probablement des Trichiures; et un second, embrassant les autres Poissons de cette grande famille, sauf les Espadons, les Notacantes et le poisson Saint- Pierre, auxquels il faut joindre les genres Brama et Pempheris. Le premier de ces types possède un crâne à surface à peu près plane, où se voient à l’état rudimentaire les cinq crêtes de la Perche. Dans le second, le crâne est à contour triangulaire avec des crêtes fort élevées. Les Mugiloïdes se rapprochent de ces derniers, mais ont une tête plus élargie. Les crêtes ont à peu près disparu chez les Salmones, dont les frontaux principaux sont très-développés et la région occipi- tale fort réduite. Le contour de la bouche, formé par l'intermaxil- laire et le maxillaire, constitue un trait caractéristique de ce groupe. L'insuffisance des matériaux n'a pas permis à M. Dareste de définir suffisamment le type des Pharyngiens labyrinthiformes, que Cuvier rapproche de la plupart des familles précédentes. Il est toutefois porté à y voir deux types différents : celui des Osphronèmes et celui des Anabas. Dans une cinquième et dernière communication (Compt.-rend., 18 novembre 1872, pag. 1253), M. Dareste se borne à signaler l'exis- tence de plusieurs autres formes typiques quil lui est encore impossible de définir complètement, faute de données suffisantes. L'un de ces types se rencontre chez les Gobioïdes, dont on doit, à l'exemple d'Agassiz, séparer les Blennioïdes. Chez les Gobius, les frontaux principaux forment une gouttière très-étroite, à bord relevé, puis ils divergent en décrivant des arcs de cercle, de telle sorte que les yeux, très-rapprochés de la ligne médiane, deviennent visi- bles à la partie supérieure de la tête. Les Ophidium possèdent un crâne tout à fait semblable à celui de Gobioïdes, avec moins de lar- geur cependant de la boîte crânienne. Les Trachinus sont aussi fort voisins des uns et des autres ; on peut en dire autant de l'Uranoscope, bien que certaines particularités dans les connexions des pièces osseuses doivent peut-être en faire un type particulier. Ces groupes, dans lesquels le crâne est élargi dans la région posté- TRAVAUX FRANCAIS.—ZOOLOGIE. 599 rieure, forment une transition à d'autres où se montre un dévelop- pement transversal de toutes les parties. Ce sont, d'une part les Batrachus, que Cuvier rangeait parmi les Acanthoptérygiens, à la suite des Lophius et des Gobiésoces rattachés par ce naturaliste aux Malaco- ptérygiens subbrachiens. Ces deux genres, qui paraissent voisins des Diodons, doivent apparemment prendre place à côté des Lophius et des Echeneis. La famille des Joues cuirassées renferme une grande variété de formes crâniennes. L'auteur fait des réserves relativement au grou- pement de ces Poissons ; il se contente de nier l'importance attribuée à l'extension des sous-orbitaires sur les ailes palatine et temporale, qui se retrouve dans des genres tout différents, tels que les Anabas, les Myletes et les Sudis. Le Zeus faber présente un type exceptionnel qui l'éloigne des Scom- béroïdes, dont Cuvier le rapprochait; ce type pourrait se retrouver peut-être dans les Equula et les Gymnelrus. Les genres Belone, Hemiramphus et Exocætus, dont le type crânien présente des analogies avec celui des Clupées, s'en distinguent par l'interposition de l'interpariétal et par la soudure des pharyngiens en une seule pièce, comme chez les Labroïdes. L'auteur enfin se borne à signaler pour le moment comme types distincts les Gastérostes, les Xiphioïdes, les Notacantes et les Anabas, sur lesquels il n’a pu réunir que des données insuffisantes. —M. Léon Vaillant a présenté à l'Académie (Compt.-rend., 18 no- vembre 1872, pag. 1278) une note sur la distribution géographique des Percina (première section des Percoïdes). Ge zoologiste insiste d’abord sur l'importance de la géographie zoologique, puis rappelle combien le groupe des Percina est naturel, puisqu'on le voit conservé par tous les zoologistes classificateurs. Quelques-uns des représentants de cette section habitent les eaux douces ; mais le plus grand nombre sont plutôt marins. C'est parmi les espèces d’eau douce, résultat assez inattendu, que se trouvent celles dont l'aire d'extension est la moins limitée. Ainsi, la Perca fluviatilis et l'Acerina cernua, répandues dans toute l'Europe, s'étendent jusqu'en Sibérie et atteignent la ligne de faîte qui sépare les tributaires de l'océan Glacial de ceux du Pacifique. Au sud de cette arête montagneuse, les Percina sont représentées par les Siniperca. Dansles Indes et en Afrique, on retrouve comme espèces équivalentes les Lates calcarifer et Lat. Niloticus. Dans l'Amérique septentrionale, on rencontre la Perca flavescens, presque identique à l'espèce Européenne ; au Mexique s’y substitue le genre Centropomus. 600 REVUE SCIENTIFIQUE. On doit encore considérer comme espèces équivalentes les Lucioperca Sandra et Volgensis et la Lucioperca americana. À côté se trouvent des espèces à aire très-restreinte, telles que les Aprons et les Percarina pour l'Europe, quelques Perches et le Huro pour l'Amérique septentrionale. Les espèces marines donnent lieu à des remarques analogues. Les Labrax lupus et punctatus de la Méditerranée et des côtes occiden- tales de l'Europe sont représentés dans l'Amérique du Nord par les Labrax americanus et lineatus; aux Labrax se substituent dans les mers de la Chine les Percalabrax. Les Percina font à peu près défaut dans l'hémisphère austral : à peine trouve-t-on au Chili quelques Per- cichthys L'Océanie, à côté du Labrax Waigiensis, possède le genre aberrant Enoplosus. En résumé, les Percina paraissent propres surtout aux zones froides et tempérées, et aux grandes terres avec les mers qui les baignent. — M. Léon Vaillant a examiné (Comp.-rend., 2 décembre 1872, pag. 1535) la valeur de certains caractères employés dans la classifica- tion des Poissons. On sait l'importance que M. Agassiz a attribuée, dans la classification de ces animaux, à ia forme des écailles. Si l'or- dre des Ganoïdes paraît justifier cette manière de voir, les groupes des Cténoïdes et des Gycloïdes ont été justement attaqués comme rom- pant les affinités naturelles. L'examen de la structure des écailles chez les Percina vient fournir de nouveaux arguments aux contradic- tions du célèbre ichthyologiste. Dans une même espèce, d'un point du corps à un autre, on constate de grandes variations. Chez les Aprons, aux écailles cténoïdes qui recouvrent le corps on sen voit associées, chez certains individus, d'autres qui appartiennent au type cycloïde. Mais si dans les Aprons cette exception constitue un acci- dent, il n’en est pas ainsi dans un Poisson de la Nouvelle-Hollande, l'Enoplosus armatus, dont toutes les écailles sont cycloïdes, particula- rité reconnue par M. Agassiz lui-même, qui n'a pu s'empêcher cepen- dant de rattacher ce genre aux Perches. Enfin, si l'on voulait tirer un argument du type anormal que représente l'Enoplosus, il suffirait de rappeler que chez les Siniperca, dans lesquels le type dela famille est nettement exprimé, les écailles appartiennent au type cycloïde le mieux caractérisé. D'autre part, M. Vaillant a cru saisir des rapports entre le nombre des écailles des lignes latérales et transversales, tel qu’on l’exprime en zoologie descriptive, et la distribution géographique des Percina. Il cite plusieurs exemples à l'appui de sa manière de voir. TRAVAUX FRANCAIS. — ZOOLOGIE. 6OI Il fait remarquer en outre que les espèces d'eau douce du genre Perca sont très-semblables par leurs caractères anatomiques essentiels, tandis que les Labraxæ, habitants des mers, présentent dans l’arrange- ment des dents des différences pariaitement appréciables, qu'on a eu tort cependant d'élever à la dignité d’un caractère générique. Le parallèle entre les Perca et les Labraæ, ainsi qu'entre les Sini- perca et les Percalabrax, confirmé par la formule des écailles, se poursuit dans la disposition des dents. Si l'absence de dents sur la portion terminale de l'appareil hyoïdien permet de séparer les pre- miers des seconds, les dents linguales des Labrax peuvent être con- sidérées comme représentant les plaques dentaires des osselets intermédiaires des arcs branchiaux, plaques absentes chez les Sini- perca. — M. De la Blanchère signale et décrit (Compt.-rend., 9 décembre 1872, pag. 1632) une nouvelle espèce de Chondrosiome (Chondrosioma Peresi) dans les eaux du Rouergue. Ces Gyprinidés, au moment du frai, c'est-à-dire en automne et en hiver, époque exceptionnelle pour un Poisson de ce groupe, se réunissent en très-grand nombre dans les eaux d'Entraygues (arrondissement d'Espalion), pour remonter du Lot dans la Trueyre. Ils portent le nom vulgaire de Coulauds, et se trou- vent aussi dans l'Aveyron. M. de la Blanchère leur attribue la formule suivante : hg. lat. 54 à 55 écailles D 248.9 P 1412 V 148.9 À 2-L11 C 20.21. La forme de la bouche, celle des écailles et des dents pharyngien- nes, ainsi que le position de l'œil, distinguent ce Chondrostome de ses congénères et en particulier du Chondrostome de Drème. Le dos est d'un vert-jaunâtre pâle, avec un léger reflet bleu sur les épaules, le dessous du corps vert-noirâtre et les flancs argentés., La note de M. de la Blanchère est accompagnée d'une figure sur bois représentant l'animal entier, les dents pharyngiennes, une écaille et la tête vue en dessous. — Le Cyprin télescope (Cyprinus macrophthalmus Bloch), que les Chinois nomment Longt-sing-ya, est originaire de la Chine et du Ja- pon ; ila le corps globuleux, une nageoire caudale et anale doubles, et des yeux faisant sur la tête une saïllie de deux à cinq centimètres. M. Carbonnier (Compt.-rend., 4nov. 1872, p. 1127) penche à le regar- der comme un monstre du Cyprin doré, résultat obtenu artificielle- ment par des procédés pratiques dont les Chinois ont le secret, et qui s'imprime si profondément dansl'organisme qu'il devient héréditaire. 602 REVUE SCIENTIFIQUE. M. Garbonnier à pu étudier ces singuliers animaux dans ses aqua- riums et en observer la reproduction. À cause de sa forme globuleuse, le Télescope se maintient difficilement en équilibre dans le liquide ; aussi au moment de la ponte va-t-il frotter son abdomen au fond de l'eau, sur le sol, prenant de la sorte un point d'appui fixe qui oppose une résistance directe à l'action des nageoires. | Pendant la ponte, la femelle est pourchassée par les mâles, qui la culbutent et la font rouler sur elle-même. L'embryon présente tout d’abord la forme allongée de son congénère, le Cyprin doré; les yeux sont peu saillants, mais la duplicité de la nageoire dorsale peut être déjà constatée. Il nage sans difficulté et dans la position horizontale, tant qu'il possède sa vésicule ombilicale ; mais quand il commence à prendre des aliments, il se produit un développement anormal qui, joint sans doute à une position vicieuse de la vessie aérienne, trouble profondément l'équilibre et réduit l'animal à nager la tête en bas. La plupart des alevins ont ainsi succombé au bout de deux ou trois jours, par suite de l'impossibilité où ils se trouvent de pourvoir con- venablement à leur alimentation. — M. Villot, qui a découvert la forme embryonnaire des Dragon- neaux (voir Revue des Sciences naturelles, 1 vol., pag. 360) décrit (Compt.-rend., ? déc. 1872, pag. 1539) La larve de ces Nématoïdes et son mode de développement. L'auteur nous a appris que les embryons de Dragonneaux s’enkystent d'abord dans les larves de Chironomites ; or, ces larves sont très-recherchées par certains poissons de nos eaux douces, le Cobitis barbatula et le Phoxinus lævis. Les liquides digestifs détruisent le kyste, et les embryons mis en liberté pénètrent, à l'aide de leur armure céphalique, dans l'épaisseur des parois de l'intestin du Poisson ets’ y enkystent denouveau. Mais ce second kyste est assez différent du premier. L'auteur décrit la position de l'embryon à cette nouvelle phaseet nous en donne les caractères; à cette occasion, il fait remarquer qu’il s'était trompé en attribuant quatre stylets à la trompe qui n en possède que trois, et en admettant une similitude complète entre les trois rangées de piquants dont l'embryon est armé. Pour se transformer en larve, la queue de l'embryon s'allonge et s'attémue; le corps se développe, et l’étranglement qui le séparait de la partie caudale disparaît. À ce moment, le jeune Dragonneau, par la forme de da région postérieure, se rapproche des Nématoïdes, mais par l'’armature de sa tête il ressemble encore aux Acanthocéphales. Comment expliquer la sortie de Gordius de l'abdomen des Carabes, Blaps, Forficules, Sauterelles, Grillons, etc, constatée par différents TRAVAUX FRANCAIS. — ZOOLOGIE. 603 naturalistes? L'auteur sort d'embarras en admettant que les individus peuvent se fourvoyer dans le corps d'animaux terrestres. De l’ensemble de ces recherches, il résulte que le développement du Gordius diffère à tous égards de celui des Mermis, lesquels quittent l'œuf après avoir pris presque tous les caractères de l'adulte, et se bornent à passer de la terre humide dans les [nsectes, et deceux-ci dans leur premier milieu. Les Gordius présentent trois états où ils possè- dent des formes distinctes : 1° l'état embryonnaire, pendant lequel ils vivent d'abord dans l'eau, puis s’introduisent dans le corps de larves aquatiques de Diptères pour s y enkyster; 2° l'état larvaire, pendant lequel ils vivent enkystés de nouveau dans les Poissons ; 30 l’état par- fait, pendant lequel ils deviennent libres, sexués, et se tiennentdans les eaux douces. — M. Bérenger-Féraud a fait présenter à l'Académie { Compt.- rend., 4 novembre 1872, pag. 1133) une étude sur les larves de mouches qui se développent dans la peau de l’homme au Sénégal. La larve dont il est question est désignée sous le nom vulgaire de ver de Cayor (ou Kaïior). Gette larve pénètre sous la peau et y détermine des tumeurs furonculeuses.Elle donne naissance à une mouche appartenant à l’or- dre des Diptères, que M. Blanchard a étudiée et qu'il rattache au genre Ochromyra de Macquart, très-voisin des Lucilia, dont une espèce de la Guyane, Lucilia hominivorax, vit à l’état de larve aux dépens de l'homme. Le professeur du Muséum propose pour la mouche décrite par M. Bérenger-Féraud le nom d’Ochromyia anthropophaga. — Dans la séance du 9 novembre 1872, M. E. Oustalet a commu- niqué à la Société philomathique une liste de Libellules apportées des îles du Cap Vert par M. Bouvier. Cette liste comprend les espèces sui- vantes : Anat formosa Van der Lind, Libellula trinacria de Sél., Lib. erythræ Brull. Lib., rubrinervis de Sél. La plupart occupent des aires géographiques très-étendues, l’Anax formosa, par exemple, se trouve en Angleterre, en France,en Alle- magne, en Russie, en Egypte, en Algérie et aux Canaries. Il est éga- lement remarquable de voir ces mêmes espèces, vivant sous des lati- tudes si différentes et soumises à un régime qui varie nécessairement avec l'habitat, conserver obstinément l'intégrité de leurs caractères spécifiques*. S . JOURDAIN. 1 Nous renvoyons au prochain numéro l'analyse d'un Mémoire sur les Lombri- cins, de M. E. Perrier, dont les dessins originaux nous parviennent pendant l'impression de cette Revue. 604 REVUE SCIENTIFIQUE. Botanique. Dans les numéros des Annales des Sciences naturelles parus depuis notre dernière Revue, celui qui termine le tom. XV de ce Recueil renferme le complément du Mémoire de M. Van Tieghem sur le Cotylédon des Graminées!, Mémoire dont nous avons déjà signalé l'appa- rition. (Revue, tom. I, n° 3, pag. 376.) Bien des opinions ont été émises sur la nature des diverses parties qui composent l'embryon de ces végétaux, et, malgré que cette ques- tion aitexercé la sagacité des botanistes les plus éminents, on ne pou- vait la considérer comme résolue. De nouvelles recherches étaient né6- cessaires, et M. Van Tieghem a été conduit à les faire par suite de leur connexité avec une autre étude entreprise par lui sur le passage anatomique de la racine principale à la tige, dans les Monocoty- lédones. On sait que l'embryon des Graminées est placé en dehors de l'al- bumen, à la surface duquel il est appliqué par une partie élargie qui à cause de sa forme a recu le nom d’Écusson ( Scutellum ), Hypoblaste de Richard. Sur cet écusson et à sa base, on voit saillir un corps plus petit, cylindroïde, Blaste de Richard, Piléole de Mirbel, qui surmonte la fente gemmulaire. Souvent, au-dessous de cette fente, on remarque un pelit appendice placé à l'opposite de l'écusson, et nommé Épiblaste par Richard, Lobule par Mirbel. Ce sont ces différentes parties de l'embryon dont la signification a été interprétée diversement parles botanistes : pour les uns, l’écusson représente le cotylédon, tandis que pour les autres c'est la piléole, l’écusson et le lobule opposé n’étaut alors que des expansions de la tigelle ou de la radicule. Parmi ceux qui voient le cotylédon dans l'é- cusson, certains regardent le lobule ou Épiblaste comme une dépen- dance de ce dernier; d'autres au contraire le considèrent comme une seconde feuille indépendante , la piléole étant alors une troisième feuille, tandis que pour les premiers elle n'est que la seconde de l'embryon. Telles sont les opinions qui se partagent l'adhésion des botanistes modernes. Il en est cependant une autre plus ancienne et due à Gœærtner, dans laquelle le Cotylédon est considéré comme formé tout à la fois des diverses parties que nous avons indiquées, 1 Observations anatomiques sur le cotylédon des Graminées ; par M. Ph. Van Tieghem. (Ann. des sc. nat. Botanique, tom. XV, pag. 236.) TRAVAUX FRANCAIS. — BOTANIQUE. 605 écusson, lobule, piléole, ces trois organes composant une seule et même feuille cotylédonaire. M. Van Tieghem formule d'abord les objections que soulèvent les premières de ces interprétations. À propos de celle qui voit dans l’é- cusson le cotylédon tout entier, il remarque que le lobule opposé à cet écusson ne peut être considéré comme une feuille indépendante, car il ne recoit de l'axe aucun faisceau vasculaire ; sa présence, du reste, n'est pasconstante. L'opinion qui attribue ce lobule comme dépendance à l'écusson, toujours envisagé comme cotylédon, se heurte également à une difficulté : la piléole, étant alors la seconde feuille indépendante, devrait en effet présenter une certaine divergence avec la première ; or, elle est directement superposée à l’écusson. M. Van Tieghem fait observer que dans la manière de voir qui considère l'écusson comme une excroissance de la tigelle ou de la radicule, cette excroissance doit être simplement parenchymateuse; ou bien, si elle est vasculaire, les faisceaux y doivent former une anse et revenir ensuite dans l'axe suivre leur course verticale. Or, il y a dans l'écusson un système vasculaire, mais il s'y distribue sans faire retour à la racine ou à la tige. Pour arriver à la solution du problème, M. Van Tieghem a fait l’é- tude du système vasculaire des plantules en voie de germination, et cette étude l’a amené à reconnaître dans la partie inférieure de la tige des Graminées trois modes d'organisation différents. 4 I. La piléole s'insère sur la tigelle immédiatement au-dessus de l’é- cusson ( Triticum, Stipa, Secale, Hordeum, Ægilops, etc... ). Par l'examen des plantes decettedivision, M. Van Tieghem a reconnu qu'un faisceau fibro-vasculaire se détachait de la tige au niveau de l’é- cusson, que ce faisceau se trifurquait et envoyait sa branche médiane, quelquefois bifurquée (dans l'orge), à l’écusson lui-même, lequel est par conséquent de nature cotylédonaire,; le lobule de structure celluleuse qui lui est opposé n’en est qu'une dépendance. Les deux branches latérales du faisceau fibro-vasculaire divergent, contournent la tige sur une portion de sa circonférence; puis se relè- vent dans la zone externe du parenchyme cortical, presque en face l’une de l’autre. Aussitôt cette zone externe se sépare circulairement du parenchyme intérieur et forme la piléole. Celle-ci enveloppe d'a- bord la gemmule, mais à la germination elle se fend du côté opposé à l'écusson, pour la laisser passer. La piléole est donc une dépendance bilatérale du cotylédon, et doit être considérée comme composée de ji 42 606 REVUE SCIENTIFIQUE. deux stipules soudées bord à bord en une gaîne fendue au sommet du côté opposé à la feuille qui est ici l’écusson. Ainsi, écusson, lobule et piléole sont les diverses parties du coty- lédon. L'écusson représente le limbe de la feuille cotylédonaire; il reste hypogé et ne prend pas d'accroissement à la germination. La piléole, d'origine bistipulaire, se dévéloppe par la germination et devient épigée. La première feuille verte est donc la deuxième du végétal ; elle est située à 180 degrés de la première, c'est-à-dire oppo- sée à l'écusson. IT. La piléole est séparée de l'écusson par un intervalle de tige plus ou moins long. Dans ce cas-ci, il faut distinguer deux modifications, suivant qu'il ya ou non un faisceau libéro-vasculaire qui relie, à travers le pa- renchyme cortical, la piléole à l'écusson. Dans les végétaux qui présentent la première de ces deux modi- fications, on trouve un faisceau qui, après s'être détaché du cylindre central de latige, se dédouble dans le parenchyme cortical; une bran- che externe se porte horizontalement en dehors et pénètre dans l'é- cusson, tandis que l’autre branche, branche interne, s'élève dans la zone moyenne de ce parenchyme cortical et offre une disposition inverse des éléments qui la composent, les cellules libériennes étant placées en dedans et les vaisseaux en dehors. Arrivé à la hauteur de la piléole, ce faisceau se place à la périphérie du cylindre central de la tige; là, il se bifurque, et ses deux branches se comportent alors exactement comme les deux branches latérales du faisceau trifurqué que nous avons étudié dans le cas précédent. Le faisceau libéro- vasculaire qui relie l’écusson à la piléole peut donc être regardé comme provenant de l'union des deux branches latérales du faisceau cotylédonaire. Il est à remarquer que, entre l'écusson et la piléole, le cylindre central présente une structure spéciale et ne prend les caractères définitifs de la tige qu'au point d'insertion de la piléole. L'écusson et la piléole restent donc unis vasculairement à traversle parenchyme cortical et offrent la même connexion anatomique que dans les végétaux qui ont été d’abord examinés. La seule différence qu'il y ait, au point de vue de l’insertion du cotylédon sur la tigelle, consiste dans un accroissement intercalaire qui porte sur la portion du nœud cotylédonaire comprise entre le dédoublement antéro-posté- rieur du faisceau vasculaire destiné au cotylédon et la bifurcation latérale de sa branche interne. TRAVAUX FRANCAIS. — BOTANIQUE. 607 Par conséquent, l'intervalle compris entre l’écusson et la piléole correspond à un nœud cotylédonaire allongé, avec faisceau cortical inverse, et la structure particulière de cette portion de l'axe se trouve ainsi expliquée. Il y a, par suite de cet allongement du nœud, disso- ciation des deux parties constituantes du cotylédon, l'écusson et la piléole. Beaucoup de Graminées rentrent dars cette catégorie: Lolium, Bromus, Agrostis, Alopecurus, Phalaris, Oryza, etc. b. Reste à examiner le cas dans lequel l'écusson et la piléole, séparés l'un de l’autre, ne sont pas reliés par un faisceau libéro-vasculaire cortical. Gette modification est due, comme la précédente, à un accrois- sement intercalaire; mais ici cet accroissement porte sur une région différente du nœud. Dans ce cas, on rencontre encore un faisceau qui, se détachant du cylindre central de la tige, vis-à-vis de l’écusson, se trifurque aussi- tôt. La branche médiane pénètre dans l’écusson, tandis que les bran- ches latérales divergent et se placent sur les côtés sans quitter toute- fois le cylindre central. Celui-ci, au-dessus du point d'émergence du faisceau cotylédonaire, présente une structure spéciale : les faisceaux Hbéro-vasculaires y sont unis par leur partie libérienne en un cylin- dre interrompu seulement en face de l'écusson ; on ne trouve pas dans le parenchyme cortical de faisceau vasculaire inverse, mais sous la piléole on voit s'échapper de chaque côté un faisceau qui se relève dans la zone corticale externe, et cette zone, se séparant alors circu- lairement du reste de l'écorce, constitue la gaîne bistipulaire, comme nous l'avons vu précédemment. En même temps la disposition des faisceaux en un cylindre creux disparaît, et les faisceaux isolés sont répandus dans la moelle centrale. Il en résulte que l'intervalle qui sépare l’écusson de la piléole n’est pas un entre-nœud, mais bien un nœud cotylédonaire allongé. L'indépendance apparente des deux fais- ceaux de la piléole, qui n'est reliée à l'écusson par aucun faisceau à travers l'écorce, s'explique par un accroissement intercalaire portant sur la région du nœud, où les branches latérales sont en contact avec le cylindre central, mais sur le point de s'en dégager. On observe cette disposition dans les espèces suivantes : Zea, Pani- cum, Sorghum, Eleusine, Coix, etc. Ainsi, malgré les modifications anatomiques qui éloignent sur la tige la piléole de l'écusson, on arrive à la même interprétation de ces parties que dans le cas où elles sont insérées au même niveau. Le cotylédon des Graminées doit donc être’considéré comme toujours formé de l’écusson, limbe hypogé dont la lobule ou épiblaste n'est 608 REVUE SCIENTIFIQUE. qu'une dépendance, et de la piléole, qui résulte de la soudure bord à bord, en avant et en arrière, d'une double stipule formant ainsi une gaîne épigée qui protége la gemmule. Le mode d'insertion de ces parties présente les trois modifications anatomiques que nous avons successivement examinées : tantôt, le nœud cotylédonaire restant très-court, la gaîne s'insère immédiate- ment au-dessus de l’écusson; tantôt le nœud cotylédonaire s’allonge, et la gaîne est alors séparée de l'écusson. Mais, suivant que l'accrois- sement intercalaire porte sur une région ou sur une autre, cette gaîne lui demeure reliée par un faisceau libéro-vasculaire cortical, ou bien elle ne conserve avec lui aucun lien vasculaire à travers l'écorce, et paraît avoir sur la tige une insertion indépendante. Cette étude de l'embryon des Graminées est complétée par la com- paraison de la feuille cotylédonaire avec les autres feuilles de la plante, et par la recherche de l'orientation de l'embryon sur la plante- mère. Comparée à la feuille végétative, la feuille cotylédonaire se montre dépourvue de gaîne; le limbe est représenté par l’écusson, et la ligule, très-développée, constitue la piléole. La même analogie de composi- tion se retrouve entre la feuille cotylédonaire et la feuille-mère du rameau floral ou la paillette inférieure de la glumelle de la fleur, dont la structure a été élucidée récemment par M. Duval-Jouve. Dans cette foliole, l’arête correspond au limbe de la feuille végétative, et la portion trinerviée inférieure à cette arête correspond à la gaine. La ligule est représentée par la paillette supérieure binerviée et souvent bifide de la glumelle : de sorte que l'écusson dans la feuille cotylédonaire, l'arête dans la paillette imparinerviée de la glumelle, ne sont autre chose que le limbe; la piléole dans la première, la paillette parinerviée ou supérieure de la glumelle dans la seconde, ne sont autre chose que la ligule très-développée de la feuille. Dans la feuille cotylédonaire, il est vrai, le limbe et sa ligule bistipulaire peuvent être dissociées, comme nous l'avons vu, par un accroissement inter- calaire de la tige. Pour ce quiest de l'orientation de l'embryon, M. Van Tieghem établit que le plan des feuilles de la plante nouvelle coïncide avec le plan de symétrie de la graine, et que la première de cesfeuilles fait avec lelobe foliaire de la plante-mère où elle est née un angle de diver- 0 1 Étude anatomique de l'aréte des Graminées ; par M. Duval-Jouve. ( Mém. de l'Acad. des scienc. et lettres de Montpellier. 1871.) . TRAVAUX FRANCAIS. — BOTANIQUE. 609 gence de 180 degrés égal à l'angle de divergence de ces feuilles entre elles. On sait, en effet, que ces feuilles sont distiques. Par rapport à la feuille-mère de la fleur ou glumelle, la première feuille de l'embryon présente également un angle de divergence de 180 degrés ; de sorte que le plan des feuilles de la plante nouvelle coïncide avec le plan des feuilles du rameau qui la porte, et de l’un à l’autre la divergence est toujours de 180 degrés. Dans un rameau vé- gétatif, au contraire, le distique s'établit transversalement par rapport à la feuille-mère, avec une divergence de 90 degrés. M. Van Tieghem termine son Mémoire par quelques considéra- tions sur le cotylédon des Cypéracées et de quelques autres Monoco- tylédones. Dans les Cypéracées, les choses se passent comme dans les Grami- nées, qui ont la piléole séparée de l'écusson, mais reliée à lui, à travers l'écorce, par un faisceau libéro-vasculaire; seulement ici, le faisceau se renddans la piléole uninerviée, sans se dédoubler ni changer de direc- tion. La piléole uninerviée n'en est pas moins une gaîne bisti- pulaire formée par les deux branches vasculaires latérales de la même feuille unies l’une à l’autre. Enfin, M. Van Tieghem examine comment le système vasculaire se distribue dans le cotylédon, suivant que ses parties sont diverse- ment développées, dans un certain nombre de Monocotylédones. Il a reconnu que dans les Graminées et les Cypéracées la gaîne bistipu- laire est séparée du limbe d'une façon plus complète que dans les autres Monocotylédones, chacune de ces parties étant munie de fais- ceaux qui lui sont propres. On observe cependant toute une série de transitions entre le cas où cette gaîne fait défaut, comme dans l’Ail et le Lys, et celui où elle est très-développée et dans un état d'indépen- dance presque complète par rapport au limbe, comme dans les Gra- minées et les Cypéracées. Nous avons analysé avec détail l'intéressant Mémoire de M. Van Tieghem, qui nous semble avoir heureusement résolu cette question si débattue de la vraie signification morphologique des parties qui composent l'embryon des Graminées. — Un travail important de M. de Saporta est inséré dans le même tome des Annales ; il forme un supplément aux Études de cet éminent paléontologiste sur la végétation du Sud-Est de la France à l'époque tertiaire, et traite de la Révision de la Flore des Gypses d'Aix 1. 1 Annales des Sc. nat. Botanique, tom. XV, pag. 277. 610 REVUE SCIENTIFIQUE. Dans ce Mémoire se trouvent exposées les remarquables recherches que M° de Saporta poursuit depuis plusieurs années sur ce sujet. Nous en avons déjà fait connaître les résultats les plus saillants f, à propos de la communication dont ils avaient été l'objet de la part de leur auteur à l'Académie des Seiences. Nous n’y reviendrons pas, nous bornant à renvoyer le lecteur, pour plus de détails, au Mémoire même de M. de Saporta. — Le Tome XV des Annales se termine par la suite du Prodromus Floræ Novo-Granatensis, ou Énumération des Plantes de la Nouvelle- Grenade, par MM. J. Triana et J.-E. Planchon. Cinq familles sont passées en revue dans cet article : Simaroubées, Zygophyllées, Méliacées, Chaïllétiacées, Olacinées. — Le Tome XVI s'ouvre par une Étude anatomique, organogénique et physiologique sur les Algues d'eau douce de la famille des Lémanéacées, par M. Sirodot. Le genre Lemanea a été établi en 1808 par Bory de Saint-Vincent. 11 comprend des Algues qui se présentent sous la forme de filaments simples ou ramifiés, d’une longueur très-variable, réunis en touffes ; ces végétaux ne croissent que dans les eaux battues, à courant rapide, fortement aérées. Leur organisation était très-imparfaitement connue ; leur mode de reproduction n'avait pas été observé. Dans un ouvrage récent , Flora europæa Algarum aquæ dulcis et submarinæ, Rabenhorst, en parlant des spores nombreuses, moniliformes, groupées en faisceaux que renferment les filaments creux qui constituent ces Lemanea, les qua- lifiait de « sine fecundatione germinantes». C'est cette allégation qui, paraissant douteuse à M. Sirodot, vu l'organisation élevée de ces Algues, lui a suggéré l'idée des recherches qu il a entreprises sur les Lemanea, et qui l'ont conduit à découvrir l'existence de la reproduction sexuelle dans ces végétaux. M. Sirodot a divisé son étude en cinq chapitres, qui ont trait suc- cessivement aux objets suivants : 1° Structure des Lemanea ; 20 Dis- position et structure des organes de la fécondation et de la fructifica- tion, 3° Organe dela végétation: Thalie; 4° Organogénie de l'appareil de la fructification;, — 5° Définition, classification des Lémanéa- cées. Tout d'abord, et pour la facilité de l'étude, l'auteur sépare les 1 Revue des Sciences naturelles, tom. I, n° 3, pag. 252. TRAVAUX FRANCAIS. — BOTANIQUE. 611 Lemanea en deux groupes ou deux sections suivant la forme des fila- ments. Dans l'une, il range les espèces à filaments le plus souvent ramifiés, sensiblement cylindriques ou sétacés, présentant à des in- tervalles rapprochés des verticilles d'éminences mamilliformes ou de nodosités. Dans l’autre, il place les espèces à filaments ordinaire- ment simples, toruleux, c'est-à-dire munis de renflements régulière- ment espacés. On verra que cette division est confirmée par les différences notables que présentent dans leur organisation les espèces de l’un ou de l’autre groupe. Pour étudier la structure intime des Lemanea, il faut prendre les filaments à une période déterminée, quand la fructification commence à se montrer sur la paroi intérieure. Alors, en effet, la cavité dont sont creusés les filaments est libre: plus tôt, elle est remplie d’une sorte de gelée transparente qui gêne l'observateur ; plus tard, à l'époque de la maturité des spores, certaines dispositions organiques sont masquées. Examinant la structure du Lemanea fluviatilis Ag., qui appartient à la première section, M. Sirodot à reconnu dans la paroi du tube trois couches distinctes : l’une extérieure ou corticale, une autre inté- rieure ou médullaire, et enfin une autre intermédiaire où moyenne. Ces couches sont composées de cellules qui se différencient par leurs caractères. Dans l’intérieur de la cavité du tube se trouve un appareil fort important, car cest de lui que l'organe femelle tire son origine. Cet appareil se compose d'un axe central articulé, et chacune des cellules cylindriques qui entrent dans sa formation correspond par sa lon- gueur à l'intervalle compris à l'extérieur entre deux verticilles d'émi- nences mamillaires. Un peu au-dessous de chaque articulation nais- sent de l'axe quatre cellules disposées en croix ; chacune d'elles forme un rayon qui, arrivé à la paroi interne, se bifurque et donne deux branches , l'une ascendante et l'autre descendante. Ces branches entrent dans la composition d'un tube articulé parallèle à la paroi interne, etque M. Sirodot désigne sous le nom de tube latéral. Ce tube n'estpas indépendant de la couche médullaire ; chacune de ses cellules est articulée avec deux cellules disposées par couple, appartenant à cette couche. D'après ce qui précède, il y aurait donc quatre tubes latéraux; mais par suite de la bifurcation de deux d'entre eux, à une hauteur variable et généralement dans la partie inférieure à la ramifieation cruci- forme, on peut en trouver cinq ou six sur une coupe transversale. La ramification cruciforme correspond exactement au milieu de 612 REVUE SCIENTIFIQUE. l'intervalle compris entre deux verticilles d'éminences mamillaires, et les tubes latéraux s'arrêtent justement à la hauteur de ces mêmes verticilles : d'où M. Sirodot conclut logiquement que le filament est constitué par une série de tronçons identiques, limités par ces verticilles. Dans les espèces de la seconde section, les choses sont un peu plus compliquées; les observations de M. Sirodot ont porté sur le Lemanea catenata Kütz. La paroi du tube est également formée ici de trois couches : médul- laire, moyenne et corticale. L'appareil interne est de même constitué par un axe articulé; mais la ramification cruciforme présente de nota- bles différences. Chacun des rayons"qui la composent n'arrive pas au contact de la paroi intérieure du tube; il s’y rattache par une cellule piriforme faisant partie de la couche médullaire. A l'extrémité de cha- que rayon s'implantent trois ou quatre tubes articulés, un ou deux ascendants et deux descendants. Ce sont les tubes latéraux qui sont, comme dans le cas précédent, parallèles à la paroi, et chacune des cellules qui les composent est reliée à cette paroi par des cellules piri- formes, géminées ou ternées. Mais ici ces tubes sont plus nombreux: il y en a primitivement de six à huit, tandis que dans les espèces de la première section il n'y en a que quatre. La position de la ramification cruciforme est toujours correspon- dante au milieu de chaque segment, et les tubes latéraux se termi- nent à leur extrémité, c'est-à-dire dans la région moyenne de chaque renflement. Dans les Lemanea de la première section, l'axe est nu. tandis que dans les espèces du second groupe il est entouré de filaments ramifiés qui le contournent en spirale. Ces filaments naissent de la face infé- rieure des bras de la croix; chacun de ces bras n’en produit qu'un, mais ces filaments s'allongent, seramifient et forment un épais faisceau autour de l'axe. Il naît aussi des filaments articulés des cellules piriformes qui rattachent les tubes latéraux à la couche médullaire. M. Sirodot assimile ces filaments à des paraphyses, et voit en eux des organes femelles avortés. La disposition anatomique que présente la ramification cruciforme rend compte de la forme cylindrique des espèces de la première section et de la forme toruleuse des espèces de la seconde. Chez les premières, les bras de la croix, rattachés chacun par un seul point à la paroi inté- rieure du tube où ils se bifurquent, peuvent s’allonger aux dépens de leurs branches de bifurcation à mesure que celui-ci s'accroît en dia- mètre. Chez les secondes, aü contraire, chaque bras est constitué par TRAVAUX FRANCAIS. — BOTANIQUE. 613 une cellule limitée dans son développement, et comme il est en outre rattaché à la paroi par des insertions multiples, cette paroi subit en ce point une traction qui l'empêche de s’accroître en diamètre, d’où résulte la production d'étranglements correspondants. M. Sirodot aborde ensuite l'étude des organes de la Fécondation et de la Fructification. Les éminences mamillaires que l’on remarque sur les espèces de la première section ont été désignées par les anatomistes descripteurs sous le nom de Papilles. Elles sont recouvertes à leur sommet d'un enduit visqueux. L'étude microscopique révèle dans ces papilles, outre l'existence de cellules analogues à celles qui entrent dans la compo- sition de la paroi du tube, une couche superficielle de cellules cylin- driques, pâles, libres latéralement, quoique serrées les unes contre les autres. À leur sommet s'articule une autre petite cellule allongée, un peu atténuée à la base, pâle, très-finement granulée, contenant l'an- théridie ; ces cellules sont donc des sacs anthéridifères. À l'époque de J’anthèse, les anthéridies s'échappent par le sommet de ces sacs qui restent vides. Souvent sur les cellules cylindriques on trouve des poils ténus ou Cils, qui ne sont autre chose que des sacs anthéridifères stériles, dont le nombre est en raison inverse de celui des sacs fertiles et que dans certains cas on rencontre exclusivement à ces derniers. Voilà donc les organes mâles déterminés. C'est sur les tubes latéraux, et parexception sur les cellules qui les relient à la paroi, que se développent les organes femelles, sous forme de ramuscules très-courts qui s'enfoncent dans l'épaisseur de la pa- roi correspondante, et font saillie au dehors par l'extrémité d’une cel- lule spéciale que M.Sirodot appelle Trichogyne, à cause de son analogie de forme et de fonction avec le poil qui surmonte le cystocarpe jeune dans les Floridées et qui a eté désigné sous ce nom par MM. Thuretet Bornet. Quant aux ramuscules eux-mêmes, ils ontreçu de M. Sirodot la dénomination de rameaux gynégènes. Dans les espèces de la seconde section à filaments toruleux, les an- théridies se développent sur la région moyenne du renflement ; la structure de la paroi correspondante est analogue à celle que nous avons vue dans le cas précédent L'existence des rameaux gynégènes terminés par le Trichogyne est facile à constater. M. Sirodot fait remarquer l'analogie frappante qui semble exister entre les tubes latéraux et les placentas de l'ovaire des Phanérogames. Les premiers portent en effet les rameaux gynégènes de la même manière que les seconds portent les ovules, et pourraient par consé- quent être désignés par l'expression de tubes placentaires. 614 REVUE SCIENTIFIQUE. La fécondation s'opère par la fixation sur le trichogyne des anthé- ridies devenues libres. Leur translation au milieu d'une eau agitée est favorisée par la substance mucilagineuse qui enveloppe les papilles. Le trichogyne, qui avant la fixation des anthéridies était transparent, hyalin, se trouble après et prend un aspect floconneux ou granulé; puis la partie extérieure du trichogyne disparaît, et il n'en reste plus trace. C'est alors dans l'intérieur du tube que se passent les phéno- mènes de la fructification; il faut les suivre dans chacun des deux groupes. Première section. — Après la fécondation, la cellule qui dans le ra- meau gynégène sert de base au trichogyne, produit à sa surface des tubercules, ordinairement au nombre de quatre, qui en se développant forment les faisceaux de filaments moniliformes, dont chaque article représente une spore. Ges filaments s’allongent, se ramifient, et il en résulte une véritable arborisation. Tous ces rameaux sont empâtés dans une substance mucilagineuse sécrétée par la membrane-enve- loppe des cellules et formant autour d'elles comme une gaîne qui les enveloppe sans toutefois leur être adhérente. Si en effet elle vient à se rompre, on peut voir s en échapper les cellules qui y sont contenues: ces cellules ont d'abord la forme de barillets ; mais quand, parvenues à maturité, elles se séparent pour devenir des spores libres, elles sont de forme sphérique ou ellipsoïdale. Toutes n'atteignent pas ce degré de développement; celles qui sont à la base de la ramification restent cylindriques, plus ou moins allongées, et il n'y a que les derniers ra- meaux nettement moniliformes dont les articles séparés deviennent des spores. Deutième section. — G'estencore ici de la cellule qui sert de base au trichogyne que naissent les organes sporifères, mais ce n’est pas uni- quement d'elle; celle qui est immédiatement voisine, c'est-à-dire la seconde et même la troisième, peuvent aussi les produire. Dans cette section, on n'observe pas la différence que nous avons indiquée plus haut dans la forme des cellules qui sont à la base ou à l'extrémité de la ramification. Les faisceaux sporifères sont également enveloppés d'une gaîne qui les rattache aux filaments dont l'axe est entouré, et aux autres organes intérieurs, d'où il résulte, au voisinage de la ramification cruciforme à cause du nombre de ces parties, un vé- ritable diaphragme. On voit que les spores désignées comme nudæ par Rabenhorst ne le sont nullement. De plus. quand Fépoque de la maturité est arrivée, il TRAVAUX FRANCAIS. — BOTANIQUE. 615 ne suffit pas pour amener leur dispersion que les filaments se rompent il faut encore qu'il y ait destruction des parois du tube. Des faits exposés, il résulte que les filaments, simples ou ramifiés, des Lemanea constitués par une série de segments identiques, pré- sentant à la fois les organes mâles et femelles, ont tous les carac- tères d’une inflorescence ou d'un appareil fructifère, et M. Sirodot, après avoir ainsi déterminé leur nature, devait nécessairement rechercher les organes de la végétation ou le Thalle de ces végétaux. Cette recherche lui a présenté de grandes difficultés, surtout pour les espèces appartenant au premier groupe, mais il les a heureusement surmontées. Les organes végétatifs consistent en de petites arborisations de fila- ments articulés souvent pilifères. Les cellules plus courtes qui sont à la base de la tige émettent des filaments radicellaires qui se terminentsur lasurface à laquelle la plante est fixée par des cellules courtes, ovoïdes , à contenu granuleux. Ces cellules des extrémités radicellaires jouent un rôle important dans l'accroissement de ces végétaux, car c'est sur elles que se produit l'apparition de nouvelles tiges. Leurs caractères se modifient ; juxtaposées et devenues polyédriques par la pression, elles forment un ensemble qui offre une grande analogie avec le tissu pro- embryonnaire ; aussi M. Sirodot le désigne-t-il sous le nom de tissu pro-embryoniforme. Il appelle éléments primitifs du thalle les filaments articulés caulinaires qui se développent sur ce tissu. . Gest sur ces éléments végétatifs constituant un véritable thalle que prennent naissance les rameaux fructifères. Particularité remarqua- ble! de la base de ces rameaux partent des filaments radicellaires, grâce auxquels ils acquièrent bientôt une vie indépendante ; le thalle s'é- tiole alors et disparait; il ne persiste plus, pendant quelque temps du moins, que sur le contour de la touffe formée par les rameaux fructifères. Dans les espèces toruleuses, la recherche du thalle est plus facile que dans les précédentes; l'appareil végétatif ne présente aucune diffé- rence essentielle avec celui que nous venons de décrire; il ne s'en distingue que par des caractères spécifiques. L'indépendance qu'acquiert l'appareil fructifère et la disparition plus ou moins rapide et plus ou moins complète de l'appareil végétatif démontrent que l'espèce dans les Lemanea se compose de deux indi- vidus distincts : l'un végétatif, qui avait été ignoré jusqu'ici, et l’autre fructifère, quiavait été décrit comme représentant le végétal complet. Le développement des organes de la fructification a été suivi par M. Sirodot dans l'un et l'autre groupe. Nous ne saurions en repro- 616 REVUE SCIENTIFIQUE. duire ici les détails que cet habile observateur a relevés avec beaucoup desoin. Ces organes apparaissent d'abord sous forme derameaux courts, composés d'une série simple de cellules discoïdales. Chacune de ces cellules constitue par son développement un des segments qui entrent dans la formation des filaments fructifères. Le dernier chapitre du Mémoire est consacré à la taxonomie des Lémanéacées. Les caractères de la famille, tels qu'ils résultent de l'é- tude précédente, y sont énumérés. Au lieu du seul genre Lemanea dans lequel on avait compris jusqu'ici toutes les espèces, M. Sirodot distingue dans cette famille deux genres. Il ne conserve dans les Lemanea que les espèces dont les filaments fructifères sont toruleux, et il crée un genre nouveau pour toutes celles dont les filaments sont cylindriques ou sétacés. Ce genre, dédié par lui à M. Sacher, prépa- rateur de la Faculté des sciences de Rennes, a recu le nom de Sacheria. Les différences que ces deux genres présentent dans leur organisation ressortent de l'étude même dans laquelle nous avons essayé de suivre rapidement le savant professeur de Rennes, dont l'important travail est complété par la description des espèces trouvées dans le départe- ment d'Ille-et-Vilaine. Nous résumerons maintenant en quelques mots les principaux ré- sultats obtenus par M. Sirodot. Il a reconnu la sexualité des Lemanea. Il a découvert chez elles la présence d’un trichogyne ; il a constaté que les anthéridies étaient représentées par des organes que les auteurs désignaient jusqu'ici sous le nom de papilles, et qui fragmentent le tube en segments identiques. Ce qu’on connaissait jusqu’à présent des Lemanea n'en est que l'ap- pareil fructifère, M. Sirodot a donc recherché les organes de la végé- tation, soit le thalle proprement dit, lequel est dans certaines espèces extrêmement fugace. Il a reconnu que ce qu’on appelait Lemanea n'est primitivement qu'un rameau du thalle qui se fixe ensuite par des filaments radicillaires issus de sa base, et devient indépendant. Il y a donc lieu de distinguer deux périodes dans la vie annuelle des Lemanea : l'une végétative, l'autre fructifère, et par suite l'es- pèce se compose en réalité de deux individus, l'un végétatif et l'autre fructifère. L'étude du développement de l'appareil fructifère montre que cha- cun des segments dont se composent les filaments dérive d'une cel- lule primitivement discoïdale qui se transforme en un tube creux muni d'un axe central, lequel est mis en rapport avec la paroi interne par une sorte deramification cruciforme sur laquelle se développent les organes femelles. TRAVAUX FRANCAIS. — BOTANIQUE. 617 Enfin, les Lémanéacées doivent être divisées en deux genres : Le premier comprenant les espèces à filaments cylindriques ou sé- tacés, G. Sacheria ; le second comprenant les espèces à filaments toru- leux, G. Lemanea. — M. Lestiboudois a communiqué à l'Académie des sciences la suite des recherches qu'il a faites sur la structure des végétaux hétéro- gènes!.Cette nouvelle partie de son travail à trait aux familles suivan- tes : Bignoniacées et Rubiacées, parmi les Monopétalées ; Ménispermées, Lardizabalées, Malpighiacées, Sapindacées, Caryophyllées, Portulacées, Mésembryanthémées, Crassulacées, Calycanthées et Légumineuses, parmi les Polypétalées. M. Lestiboudois a observé que, dans les Portulacées, les Mésem- bryanthémées et les Crassulacées, qui avec les Caryophyllées font partie des Cyclospermées, il n'y a aucune espèce qui présente vérita- blement la structure des hétérogènes. On trouve parfois dans leur bois des zones d'aspect différent, mais qui n ont pas les caractères des zones extra-libériennes. Remarquons en passant que ce botaniste place les Crassulacées dans les Cyclospermées. Elles ont en effet un ca- ractère qui leur est commun avec quelques genres de Cactées qui ap- partiennentà cette division : c'est l'absence de périsperme dans leur graine, et par là elles se rattachent aux Cyclospermées; cependant, à cause de leur embryon parfaitement droit, Brongniart les range par- mi les Périspermées; elles forment en tout cas le passage des unes aux autres. M. Lestiboudois donne de ses nombreuses observations le résumé suivant : « Il résulte des faits précédemment exposés que les hétérogènes (ec- togènes) se rencontrent dans toutes les grandes divisions des dicoty- lédonés ; rarement le caractère qui les distingue se trouve dans tou- tes les espèces d'une même feuille. Ils ont pour attribut essentiel de former des faisceaux composés d'un système cortical et d’un système ligneux en dehors de l'interstice d'accroissement des faisceaux préexis- tants, le plus souvent en dehors du premier cercle des fibres cor- ticales de ces faisceaux, Par cette formation ils ont de l’analogie avec les Monocotylédonés ; ils en diffèrent parce que les faisceaux s’ac- croissent encore après la formation des faisceaux extra-libériens pen- dant un temps variable, de sorte que leur forme primitive est modi- fiée. ne QE PO En 1 Comptes-rendus, tom. LXXV, pag. 1451, et tom. LXXVI, pag. 195. (Voir Revue des Sc. nat., tom. I, no 3, pag. 376.) 618 REVUE SCIENTIFIQUE. » Les faisceaux extra-libériens apparaissent tantôt immédiatement après la formation des faisceaux qui les précèdent, tantôt tardive- ment ; leur accroissement est tantôt égal, tantôt inégal ; ils sont quel- quefois complètement entourés d'uneécorce propre, et ont un accrois- sement circulaire; ils peuvent même se séparer de la tige principale, de manière à former des rameaux distincts, le plus souvent privés de centre médullaire apparent. D'autres fois ils n’ont d'écorce propre que du côté extérieur et ne s'accroissent que sur une ligne qui tend à s'unir à la ligne d’accroissement des faisceaux voisins, et à former ainsi des cercles ligneux complets ou incomplets, irréguliers ou régu liers, séparés par des zones d’écorce. Quand ils sont réguliers, la tige à un moment donné présente au centre des formations qui parve- nues au terme de leur développement sont d'égale largeur, et, à la périphérie, des formations de plus en plus petites, parce que leur ac- croissement a duré d'autant moins quelles sont plus extérieures ; ceux qui touchent à la limite du parenchyme ne sont que des points de tissu transparent en état d'organisation. » — Dans un Mémoire quiapour titre: De lathéorie carpellaire d'après des Papavéracées 1, M. Trécul, s'appuyant sur des considérations ana- tomiques extrêmement délicates, bat en brèche cette théorie et voit dans le pistil de ces plantes, non pas le résultat d'une modification des feuilles, mais bien de la tige. Il fonde sa manière de voir sur la disposition du système vasculaire. Dans lesdiverses espèces de Papaver, les faisceaux de la tige n'’affec- tent pas dans le réceptacle une distribution uniforme pour se porter aux sépales, aux pétales et aux étamines; mais toujours, après s'être divisés en fascicules destinés aux étamines, ils se réunissent pour former les cordons pistillaires, qui sont en nombre égal à celui des carpelles. Ces cordons, en s'écartant de bas en haut, contournent la cavité ovarienne et se rapprochent ensuite à son sommet au-dessous du stigmate, où ils se subdivisent. Les intervalles compris entre ces cordons sur les parois de l'ovaire constituent ce que l'on appelle les feuilles carpelluires simplement, ou les feuilles curpellaires stériles, si, avec M. Van Tieghem, on regarde l'ovaire comme formé par deux verticilles de feuilles, les unes fertiles portant les ovules, les autres stériles constituant les valves. Mais la structure de ces parties n'est pas la même que celle des feuilles ; elles sont parcourues par un réseau vasculaire irrégulier, dont les princi- 1 Comptes-rendus, tom. LXXVI, pag. 139 et 181. TRAVAUX FRANCAIS. — BOTANIQUE. 619 paux faisceaux s'insèrent sur les cordons pistillaires voisins. Pour M. Trécul, c'est un réseau secondaire garnissant la large maille représentée par chacun des espaces compris entre les cordons pis- tllaires. Un autre argument contre la théoriedes feuilles carpellaires est puisé par M. Trécul dans lemode de distribution des ovules sur les placentas des Papaver : en effet, leur grand nombre et l'insertion des faisceaux que reçoit chacun d'eux ne permettent pas, selon lui, d'admettre qu'ils soient produits par les dents ou par les lobes des feuilles carpellaires. L'examen de l'organe femelle dans d’autres plantes de la même famille, Glaucium fulvum, Eschscholizsia Californica, a conduit le savant académicien aux mêmes conclusions sur la nature axile de cet organe. — Nous avons eu occasion de mentionner dans une de nos précé- dentes Revues les observations de M. B. Renault sur la structure du Dictyoxzylon *. Une nouvelle note sur ce sujet a été présentée à l’Académie par lui et par M. E. Grand Eury ?. On sait que ce nom de Dictyoxylon avait été donné par M. Bron- guiart à des fragments de bois fossiles trouvés aux environs d’Autun. L'éminent professeur du Muséum avait pensé que ces fragments pouvaient être la partie corticale d'un végétal dont la partie ligneuse avait été trouvée d'autre part isolée et désignée par lui sous le nom de Sigillaria xylina. La découverte d'un morceau de tige complète a permis à MM. Re- nault et Grand Eury de constater l’exactitude de cette prévision. Ce morceau présentait en effet à sa surface les cicatrices foliaires carac- téristiques des Sigillaires ; au-dessous se trouvait le tissu réticulé du Dictyoxzylon, et à la partie centrale le tissu ligneux du Sigillaria æylina. Ce tissu forme un cylindre continu uniquement composé de fibres rayées. On n’y observe pas les faisceaux rayonnants distincts du Sigil- laria elegans ; cependant on y trouve de minces lames médullaires rayonnantes. Sa partie interne est occupée par un rang de faisceaux vasculaires dont la coupe horizontale est lunelée et semblable à celles des mêmes faisceaux dans le Sigillaria elegans. RER RIT ES ER: RE 1 Revue des Scienc. naturelles, tom. I, n° 2, pag. 255. 2? Sur le Dictyozylon et ses attributions spécifiques ; par MM. B. Renault et E. Grand'Eury. (Comptes-rendus, tom. LXXV, pag. 1197.) 620 REVUE SCIENTIFIQUE. Le cylindre ligneux est séparé de la partie corticale par une zone de tissu cellulaire que parcourent des faisceaux vasculaires qui s'élè- vent d'abord parallèlement entre eux, puis se jettent en dehors pour se porter aux cicatrices des feuilles. M. Renault s'était d'abord demandé si les échantillons de Dictyoxæy- lon observés par lui ne devaient pas les faire rapporter au Sigillaria lepidodendrifolia ; mais l'absence de saillie du bord inférieur des cica- trices foliaires, la forme de la trace médiane produite par le faisceau vasculaire, la direction des stries que présente l'écorce, ne permettent pas ce rapprochement. L'examen de ces caractères a amené MM. Re- nault et Grand Eury à considérer le végétal qu'ils ont trouvé comme voisin du Sigillaria spinulosa (Germar), et du Sigillaria denudata (Güppert); aussi proposent-ils pour lui le nom de Sigillaria spinuloso- denudata. — La Société botanique de France a publié le premier numéro de son Bulletin qui donne les Comptes-rendus de ses séances pour 1872. Nous trouvons à y relever d'intéressantes communications. La première est due à M. Ad. Brongniart, et est relative au Psaronius brasiliensist. Le nom générique de Psaronius s'applique à un groupe de tiges fossiles des plus remarquables,qui avaient d'abord reçu, d'a- près leur aspect, les dénominations diverses de Psarolithes, Astéroli- thes, Helmintholithes. Longtemps on n’en avait trouvé qu'en Bohême et en Saxe, lorsqu'on en découvrit, il y a une quarantaine d'années, un gisement important près d'Autun (Saône-et-Loire). Ces végétaux fossiles appartiennent, soit aux couches supérieures du terrain houiller, soit au grès rouge qui les recouvre. Leur struc- ture doit les faire ranger parmi les Fougères, bien qu'ils s'éloignent par certains caractères des espèces arborescentes de cette famille qui vivent actuellement, ce qui suppose l'existence à cette époque de Fou- gères en arbre appartenant à d'autres tribus de cette famille. Le Psaronius qui a été trouvé au Brésil est une des espèces Les plus intéressantes de ces végétaux fossiles, et se distingue par ses caractères de toutes celles trouvées en Europe. M. Brongniart en a décrit la structure avec un soin minutieux, et cherchant ensuite quelle place on doit lui donner dans la classification établie par Stenzel et adoptée par M. Schimper, il pense qu'on pourrait le ranger, malgré de nota- 1 Notice sur le Psaronius brasiliensis; par M. Ad. Brongniart. (Bull. de la Soc. bot. de France, tom. XIX, pag. 3.) TRAVAUX FRANCAIS. — BOTANIQUE. 621 bles différences, dans la section des Helmintholithes et dans la division des Vaginati, près du Psaronius helmintholithus lui-même. — Une communication de M. Germain de Saint-Pierre a trait à la nature des organes souterrains des végétaux!. D'après l'auteur, le caractère précis qui permet de distinguer d’une manière absolue les tiges souterraines des racines, est la présence d'un bourgeon terminal à l'extrémité des premières et l'absence de ce bourgeon terminal à l'extrémité des secondes. A cette loi, dont l'énoncé n'a pas été sans soulever des objections, il reconnaît cependant qu'il y a quelques exceptions. Certaines tiges ou certains rameaux peuvent en efiet, par avortement , arrêt de développement ou oblitération, d'une facon accidentelle ou même parfois normale, manquer de bour- geon terminal; mais est-il une seule loi qui puisse être dite générale dans le sens absolu du mot? M. Germain de Saint-Pierre examine ensuite si l’on doit consi- dérer comme caractère absolu de la racine la présence de la Pilorhize dans les Dicotylédones et d'une Coléorhize dans les Monocotylédones. Il ne le pense pas, car pour lui ce sont là deux formes ou deux ma- nières d'être d un même organe qui résulteraient de larupture éprou- vée par l'écorce de la racine à la suite de l'accroissement rapide de sa partie centrale ; on ne les rencontre pas très-fréquemment dans le: règne végétal. Enfin, on ne saurait davantage considérer l'absence de bourgeons adventifs comme un des caractères de la racine, car on y en rencontre dans un grand nombre de cas. Ainsi, M. Germain de Saint-Pierre conclut que les tiges souterraines se distinguent des racines, à bien peu d’exceptions près,'par la présence de feuilles rudimentaires et d'un bourgeon terminal. — M. Ad. Chatin a entretenu la Société botanique de la Truffe et des conditions dans lesquelles se produit ce précieux Champignon?. Le genre Tuber, de la famille des Tubéracées, renferme beaucoup d'espèces qui ne sont pas toutes comestibles. Celle qui est recherchée pour sa saveur et pour son parfum est le Tuber melanosporum de Vitta- 4 Nouveaux documents sur la nalure des organes souterrains des végétaux. rhizomes et racines ;- par M. Germain de Saint-Pierre. (Bull. de la Soc. bot. de France, tom. XIX, pag. 10. 2 De la Truffe, de sa culture et de sa naturalisation dans les contrées aux- quelles elle est actuellement étrangère ; par Ad. Chatin. (Bull. de la Soc. bot., de France, tom. XIX, pag. 22. 1 43 622 REVUE SCIENTIFIQUE. dini et de Tulasne, dite Truffe noire, Truffe du Périgord, et non sans raison aussi Truffe des gourmands. D'autres espèces, quoique moins estimées, sont cependant employées dans l'alimentation. En Italie, par exemple, on fait grand cas de la grosse Truffe blanche, Tuber magnum ; en Bourgogne et en Champagne, on apprécie fort la Truffe grise, Tuber brumale, et la Truffe rouge ou rousse, Tuber rufum. On sait que les Truffes se rencontrent particulièrement au pied de certains chênes ; elles aiment les terrains maigres, de nature cal- caire ; elles ont besoin, pour se développer, d'une certaine quantité d’eau, mais une trop grande humidité les fait disparaître. Il leur faut un climat tempéré, correspondant à celui de la vigne. C'est en hiver que la Truffe est mûre. Au printemps, elle se putréfie, et alors, par suite de la rupture des sporanges, les spores sont mises en liberté. On n'a pu réussir à observer directement la germination de ces spores. Le premier, M. Tulasne a reconnu le Mycélium de la Truffe ; ila observé que vers le mois de juin le sol des truffières est traversé de filaments blancs fort délicats; puis ces filaments s'accu- mulent sur certains points et forment une sorte de feutre au milieu duquel apparaissent les Truffes: celles-ci en se développant s’isolent du M ycélium,qui disparaît avant leur maturation. Pourtant M. Chatin a reconnu encore l'existence du Mycélium réduit à quelques fils épars après l'hiver, et il le regarde comme pérennent, ce qui assure- rait aux Truffes un mode de muliplication indépendant des spores. De plus, il a constaté que le Mycélium existait dans les truffières en voie de formation, bien quil ne dût y avoir production de tubercules qu'après quelques années. Les signes auxquels on reconnaît l'existence des truffières, les procédés de récolte, et enfin la culture de la Truffe, ont fourmi à M. Chatin des détails qui n’ont pas de l'intérêt pour les seuls bota- nistes. — M. E. Roze et M. Max. Cornu ont successivement fait à la So- ciété botanique des communications relatives aux Myxomycètes 1. Les Myxomycètes sont des êtres ambigus, d'une organisation extré- mement simple, constitués par une masse plasmatique sans aucune membrane ni enveloppe ; ce plasma est doué de mouvements contrac- tiles ; il pénètre dans les interstices des vieux bois ou des écorces 1 De l'influence de l'étude des Myxomycètes sur les progrès de la physiologie végétale ; par M. E. Roze, et Affinité des Myxomycèles et des Chytridinées ; par M. Max Cornu. (Bull. de la Soc. bot. de France, tom. XIX, pag. 29 et 70.) TRAVAUX FRANCAIS. — BOTANIQUE. 023 ramollis par l'humidité ; il y puise par absorption les éléments nutri- tifs nécessaires à son développement et y forme un lacis de filaments anastomosés. On appelle cet état l'état de Plasmodium. On ne voit apparaître de membrane qu'à l'époque de la fructification, autour des spores qui résultent de la transformation de la masse plasmatique. Ces spores germent sous l'influence de l'eau, et émettent les Zoo- spores munies d’un cil unique, à mouvements amiboïdes. On s'est demandé si ces êtres singuliers appartenaient au règne végétal, et s'ils ne devaient pas être plutôt rapprochés des Amibes ou des Polythalamies, avec lesquels ils présentent tant de rapports. C'est ainsi que M. de Bary a proposé de les ranger dans le règne ani- mal, sous le nom de #Mycozoaires ou de Mycétozoaires. : M. Cornu a montré l'affinité que les Myxomycètes présentent avec les Chytridinées, qui sont des Champignons véritables, dont quel- ques-uns, parasites des Saprolégniées, ont été de sa part l'objet d’une étude spéclale (V. Revue des Sc. naï., tom. KE, n°3, pag. 370). Ces parasites vivent à l’état plasmatique, aux dépens du plasma des filaments dans lesquels ils ont pénétré ; on y observe parfois des mou- vements. Les Zoospores n'ont qu'un cil unique, et sont douées de mouvements amiboïdes. Ces diverses particularités permettent de placer les Myxomycètes auprès des Chytridinées, dans la classe des - Champignons. M. Roze a fait ressortir avec bonheur l'importance que l'étude de ces végétaux devait avoir pour la Physiologie générale et a indiqué tout ce qu'il y avait de recherches fécondes à poursuivre dans cette voie. — Les Podostémacées et leur distribution géographique ‘ ont été l’ob- jet d'une communication de M. Weddel, qui a été à même, dans ses longs voyages, d'observer beaucoup d'espèces appartenant à cette inté- ressante famille. Plantes aquatiques des zones intertropicales, les Po- dostémacées se présentent sous des formes très-variées; aussi leur place dans l'échelle végétale n'est-elle pas bien définie. Elles sont dépour- vues de véritables racines, et ont un faciès particulier, qui pourrait les faire prendre à priori pour des Algues ou des Mousses. M. Wed- del a étudié surtout la station de ces singuliers végétaux, qu'on ren- contre dans les eaux entraînées d'un mouvement rapide, comme les 1 Sur les Podostérracées en général, et leur distribution géographique en par- ticulier ; par M. H.-A. Weddel. (Bull. de la Société bot. de France, tom. XIX, pag. 50.) 624 REVUE SCIENTIFIQUE. torrents ou les cataractes, et qui ont malgré cela une aire de végéta- tion généralement restreinte. Leur distribution géographique a été déterminée par l’auteur, d'après des données numériques relevées avec beaucoup de soin. — Enfin, sous le titre de Considérations philosophiques sur les Fleurs doubles!, M. Ch. Fermoud a recherché quels étaient les résultats pro- duits par la multiplication ou la transformation de leurs divers élé- ments constitutifs, et quelle interprétation morphologique devaient recevoir, selon lui, certaines dispositions d'organes ainsi modifiés. Henri SICARD. GR CR D Géologie. Le SAHARA. — Observations de géologie et de géographie physique. Alger, 1872; par M. Pomel.— Le Sahara se compose, non d’une large cuvette séparée de la Méditerranée par une mince bordure de collines, sur les confins de l'Algérie et de la Tunisie, mais d’une série de bas- sinus indépendants les uns des autres, séparés par des plateaux très- étendus, dont on peut suivre le développement jusqu'au golfe de Guinée. Au point de vue géologique et orographique, on peut y reconnaître trois divisions principales: 1° la Hamada; 2 l’Erg ; 3° la Sebkha. La Hamada est le vrai sol du désert, rocheux ou terreux, profondément raviné, ne nourrissant, malgré la variété des terrains auxquels elle peut appartenir, que de rares animaux et végétaux. L'Erg consiste en accumulations considérables de sables qui, loin d'être arides, comme on l’a souvent cru, sont couvertspar places d’une végétation touffue de Graminées, de Ghénopodées, de Salsolacées. Ge sable n’est pas meuble, et il faut attribuer la perte des caravanes plutôt aux qualités délétères du Simoun qu'aux enfouissements. Les dunes sableuses de l’£rg occupent seulement 1/9 de la super- ficie totale du désert et sont ordinairement superposées au terrain de Hamada. Cette forme particulière du sol paraît éminemment favo- rable au maintien de l’eau sous la forme de nappes souterraines. Le Chott ou Sebkha n’est qu’une dépression plus ou moins profonde, souvent à sec en été, dont le fond est couvert d’efflorescences salines, C’est cette forme particulière du désert qui a fait naître dans l'esprit AU Ut D he RARE 1 Bull. de la Soc. bot. de France, tom. XIX, pag. 61. TRAVAUX FRANCAIS. —— ŒÉOLOGIE. 625 des premigrs observateurs l’idée de grands bassins maritimes asséchés actuéllement. La géologie du massif du Sahara méridional, ou Soudan occidental, est assez simple, et les renseignements que l’on possède sur ces ré- gions démontrent qu'elles sont formées d’un noyau granitique entouré de schistes cristallophylliens, d’une ceinture démantelée de forma- tions jurassiques, et plus bas, vers le Sénégal, de formations crétacées moyennes. En divers points affleurent des roches basaltiques et trap- péennes. Les dépôts quaternaires y sont également très-développés, et certains d’entre eux, ceux des vallées du bassin du Niger, contiennent probablement l’or que les Soudaniens apportent à la côte en échange des marchandises européennes. Le massif atlantique qui limite au nord le Sahara occidental a une constitution géologique bien plus compliquée. Ici les terrains cris- tallins et cristallophylliens semblent se concentrer le long de la ligne du littoral. Autour d'eux se développent de puissantes masses de schistes, de quartzites, de calcaires paléozoïques, qui n’ont encore donné que de rares fossiles, parmi lesquels on cite un Rhodocrinus, probablement dévonien, rapporté par un officier de l’expédition de 1870. Les étages houiller, permien, triasique, manquent ou sont en- core peu connus. Cest surtout dans la province d’Orau qu on pourrait les rencontrer. Le Jurassique laisse encore bien des énigmes à de- viner, ainsi que Le dit M. Pomel. La première ride du Tell le montre commençant par des dolomies ou des calcaires avec quelques fossiles du Lias: Ammonites kridion, A. concavus; Bel. acutus Spirifer rostratus: Ostrea cymbium; Pecten Helii, P. disciformis, P. novemplicatus; Rhynco- nella serrata, R. subvariabilis. Cette association d'espèces rappelle assez bien la faune liasique des Pyrénées. L'oolitheinférieureet la grande oolithe manquent, puisque le lias dont nous venons de parler supporte immédiatement l’Oxfor- dien fossilifère. À partir de cet étage, on trouve une série assez nor- male constituée ainsi qu'il suit, de bas en haut: 1° grès quartzeux avec alternances de 1narnes, contenant Ostrea dilatata, Ceromya excen- trica, Cidaris florigemma, Glypticus hieroglyphicus, fossiles représen- tant un faciès spécial du Corallien ; 2 dolomies avec coquilles rares représentant, soit le Corallien supérieur, soit le Kimmeridgien. L’As- tartien vrai n'affleure qu’en certains points et termine la série des terrains jurassiques. Le Crétacé est très-développé dans la région atlantique ; il com- mence par le Néocomien, qui dans Les provinces d'Alger et de Constan- tine se rapproche par sa faune du Néocomien du midi de la France. 626 REVUE SCIENTIFIQUE. La craie moyenne, surtout cénomanienne et turonienne est, dans ces mêmes provinces, riche en fossiles et comprend Les assises Suivantes: 1° grès marneux avec Ammonites mamillaris et Belemnites minimus ; 2 marnes et calcaires avec Amm. rothomagensis à la partie inférieure, Hemiaster Fourneli à la partie supérieure ; 30 assises à Inocerames et Hémipneustes correspondant à la craie des Charentes. Ces formations sont souvent relevées, disloquées, et n'ont pas partout le caractère fossilifère que nous venons d'indiquer. | Les couches de passage du Crétacé au Nummulitique sont peu con- nues jusqu'ici, en raison du peu de développement de ce dernier étage. Lorsque le Nummulitique est complet, comme aux environs de Con- stantine, il consiste en marnes et calcaires avec Ostrea multicostata et Periaster obesus, en calcaires compacts, lardés de Nummulites. Partout ailleurs il ne contient que de rares fossiles, et on peut dire de cette formation qu'elle a été démantelée par de puissantes dénudations. Rien ne remplace jusqu'ici dans la région atlantique les nombreuses alternances de dépôts lacustres et marins qui occupent le niveau de l'Éocène supérieur dans le bassin de Paris, et le Miocène commence par l'étage Carténien (Cartenna, Tenez) que l'auteur met au-dessus du Tongrien ou Miocène inférieur. Le Carténien comprend habituel- lement deux grandes assises, dont l'inférieure est formée de poudin- gues et de grès avec Clypéastres, Amphiopes, Schizobrissus cruciatus, bancs de Polypiers, tandis que la supérieure, marneuse, contient de nombreux Pétrospongiaires dont l'apparence rappelle ceux de la craie turonienne. À ce premier sous-étage du Miocène succède l'Helvétien, en stratifi- cation discurdante ou transgressive avec le Carténien. Il se compose des assises suivantes : 1° Marnes, argiles, grès, souvent conglomérats peu fossilifères, 20 Calcaires concrétionnés, avec algues calcifères du groupe des Mélobésies, Foraminifères { Nummulines et Amphistégines ), Bryozoaires nombreux, Clypéastres ; 3° Marnes bleues ou grises, avec plaquettes gréseuses; fossiles rares (Chenopus thersites ) ; 4° Grès en bancs avec lits marneux; Ostrea crassimina en abondance. C'est l'étage Helvétien ou Aquitanien des géologues suisses et fran- cais, mais il faut ajouter à cette description que rarement il est aussi complet que l'indique le tableau précédent. Au-dessus de l'Helvétien, mais toujours dans la série miocène, il faut placer Le « Sahélien » de Sahel, littoral, qui est l'équivalent du Torionien des géologues italiens. Ge sous-étage ne dépasse pas les li- TRAVAUX FRANCAIS. —— GÉOLOGIE. 627 mites du Tell; il se compose de couches marneuses et marno-sa- bleuses, passant vers la partie supérieure à des molasses et à des cal- caires compacts. Les fossiles y sont nombreux ; on y remarque surtout les Clypéastres, Ostrea cochlear, Ceratotrochus 42 costatus, Flabellum; de nombreux Foraminifères du groupe des Globigérines, et, vers le haut, la Terebratula ampulla. En certains points, ce sous-étage prend un ca- ractère fluvio-lacustre et renferme des couches de lignite avec une faune peu étudiée. Le terrain Pliocène (Astien) qui le surmonte n'a pas une grande épaisseur. Il se distingue nettement du Sahélien par sa nature gréso- quartzeuse et par ses fossiles, Ostrea hippopus, Pecten maximus, Pec- Lenculus pilosus, Echinolampas et Schizaster. Vers sa partie supérieure, il change de caractère, devient marneux et contient des Hélices diffi- ciles à distinguer des Hélices actuelles. L'histoire du terrain quaternaire est encore bien obscure. On peut, d’après M. Pomel, le classer de la manière suivante : {° Terrain de transport fluviatile formé de poudingues, de galets recouverts d’un limon rougeâtre lardé de concrétions calcaires. Cette forme du terrain quaternaire s'élève très-haut sur les pentes et recouvre de vastes sur- faces d’un manteau continu. Il faut y joindre des travertins avec une flore voisine de l'actuelle, et des dépôts marins qui atteignent 200 mètres au-dessus du niveau actuel de la mer; 2° Terrain de transport sub-atlantique et plages émergées, contenant la faune marine ac- tuelle, et, de plus, des débris d’un Éléphant qui serapprochaïit de l'E. antiquus. À ces atterrissements littoraux correspondent des atterris- sements continentaux sablonneux et caillouteux, surtout répandus sur les hauts plateaux; 3° Terrain limoneux des Chotts ou Sebkha; ces alluvions sont cantonnées dans les vallées des fleuves actuels et, tout en présentant des traces d'une faune contemporaine, indiquent des conditions climatériques bien différentes de celles que nous con- statons aujourd'hui. C'est dans ces alluvions qu’on trouve Le Cardium edule, au milieu de sédiments argilo-gypseux qui doivent leur origine à des sources hydrothermales qui ont sélénitisé les marnes. Le Sahara proprement dit, ou Sahara occidental, se compose, au point de vueorographique, de deux vastes plans anticlinaux dont l’in- tersection culmine au voisinage de 2,000 mètres, dans une direction qui se rapproche de la normale au méridien. C’est une région de pla- teaux où l’on rencontre les types précédemment décrits: Hamada, Erg, Sebkha. Le granit en constitue l’ossature; il est recouvert de srès, de marne, de schistes micacés souvent gypsifères, alunifères, même salifères, appartenant probablement au Silurien, car au-dessus 628 REVUE SCIENTIFIQUE. affleurent des assises de grès plus ou moins fin, contenant les fossiles suivants: Spirifer ostiolatus, Sp. Bouchardi, Chonetes crenulatus, Tere- bratula duleidensis, T. longinqua. Ce terrain de transition s'étend en immenses Hamada rocheuses, sans végétation. La série des terrains sédimentaires de cette partie du Sahara se continue immédiatement par le terrain crétacé, grès et marnes gypseuses appartenant à l'é- tage du gault et contenant de rares fossiles. Cette formation couvre d'immenses espaces, vrai type du désert; elle se rencontre surtout entre Coléah et Laghouat. Les étages supérieurs de la craie affleurent cependant en certains points, car on y a constaté l'existence d'Hippu- rites et d'EÉchinides turoniens. Quant au terrain tertiaire, il paraît être représenté par des formalions lacustres avec Hélanopsides voisines des Mélanopsides quaternaires. Le terrain quaternaire lui-même est, dans cette partie du désert, d’une puissance considérable ; on peul en juger par les gara ou té- moins, troncs de cône ou de pyramide qui ont souvent 60 à 80 mè- tres d'épaisseur, sans atteindre la base des alluvions de cette époque. Cette forme spéciale de Hamada est creusée de profonds sillons rare- ment arrosés par un filet d’eau. La région des Chotts ou Sebkha donne lieu aux mêmes observations que précédemment ; mais il est à remarquer que, dans un de ces bassins abandonnés depuis longtemps par les eaux, M. Marès a trouvé, sous une croûte de sel, des coquilles fluviatiles, Mélanies, Mélanopsides, Paludines, associées au Cardium edule. En résumé, on peut dire que ce terrain quaternaire, qui est par ex- cellence le terrain Saharien, est constitué à sa base par des matériaux de transport conglomérés cu libres, d'autant plus volumineux que l’on considère des points plus rapprochés de l'Atlas; que sa partie su- périeure est composée de limons et de marnes passantau calcaire sur une épaisseur de près de 150 mètres C'est donc à un phénomène détritique qu'il faut rapporter l’en- semble des dépôts quaternaires, sans cependant que l’on puisse en préciser l’origine. Dans tous les cas, selon M. PFomel, ces dépôts n’ont aucune régula- larité et ne sont pas distribués d’une manière uniforme dans des bas- sins, comme l'ont admis les premiers observateurs, qui ont émis l’o- pinion que tout le pays compris sous le nom de Sahara avait été recouvert d'une nappe d’eau unique à une époque assez récente. Cette opinion serait une pure hypothèse, car on n’a pas démontré d'une manière suffisante qu'il y a eu une communication ancienne entre le bassin des Chotts et la mer par un canal aujourd'hui oblitéré. Quant TRAVAUX FRANCAIS. — GÉOLOGIE. 629 aux immenses accumulations de sables de l’Erg, elles sont indépen- dantes des terrains sous-jacents, soit Hamada quaternaires, soit for- mations secondaires et de transition. Pour M. Pomel, « Les éléments de ces deux formations, Hamada limoneux et Erg sableux, résulte- raient du départ naturel opéré dans les matériaux de transport d’un véhicule aqueux, le sable d’abord, les boues ensuite. » Les dunes sont ordinairement associées aux Ghotts, et pourraienté:re considérées comme le résultat de la désagrégation partielle du grand manteau quaternaire dont nous venons de parler; mais il faut évi- demment chercher une autre origine aux 20,000,000 d'hectares de dunes sableuses du Maroc et du Sahara méridional. Les hypothèses suivantes sont en présence : 1° ces dunes sont des lais d’une ancienne mer ; 2° elles résultent de la désagrégation des roches superficielles ; 3° elles sont le résultat d'ure dénudation suivie de sédimentation confuse, sous l'influence de causes climatériques toutes spéciales. L'auteur combat la première hypothèse par des arguments tirés de l’orographie de cette partie de la région Saharienne et de la nature purement fluvio-lacustre des fossiles que l’on rencontre dans ces allu- vions. La salure des Chotts doit s'expliquer par le lavage des couches salifères du substratum du désert. Les renseignements que l’on possède sur les parties Les plus méri- dionales du Sahara, jusqu'au lac Tchad d’une part et jusqu’au Sé- négal de l’autre, ne sont pas favorables à cette première hypothèse, car, selon l'auteur, les ossements de Cétacés et Les coquilles marines trouvés dans ces régions sont plutôt tertiaires que quaternaires. + La deuxième hypothèse qui fait dériver le sable de l'usure des ro- ches Sahariennes est difficilement soutenable quand on voit combien peu les roches des Hamada sont délitables, et combien le frottement, au lieu de les désagréger, les read plus dures. M. Pomel s'arrête donc à la troisième hypothèse, qui lui parait la plus plausible, sans cependant considérer le problème du désert Sa- harien comme complètement résolu. Dans une dernière partie de cet intéressant Mémoire, consacrée à la zoologie et à la botanique du Sahara et de l'Atlas, l'auteur cherche à démontrer que l’idée d’une connexion récente de la Berbérie atlantique avec l’Espagne par le détroit de Gibraltar est une « hypothèse systé- matique ». Les faits qu’il avance à l'appui de cette opinion sont sur- tout tirés de la malacologie. Sur 40 espèces de mollusques terrestres et fluviatiles propres au Sahara, un grand nombre ont leurs analogues en Italie, en Syrie, aussi bien qu'en Espagne. Quant aux espèces du Tell et de l’Ailas, elles sont au nombre de 337, qu'il compare aux 300 630 REVUE SCIENTIFIQUE. espèces d’Espagne. Déduction faite des ubiquistes, il ne reste que 80 espèces communes aux deux pays. [l en résulterait. que les 3/4 des espèces espagnoles manquent en Berbérie. Dans ce grand nombre de coquilles propres à l'Algérie, il en est qui appartiennent à des types complètement étrangers à la région ibérienne: ce sont les genres Glandina, Brondelia, tandis que d’autres se rencontrent surtout en Italie. L'étude des insectes, des poissons, des reptiles, des oiseaux et des mammifères même, indique un grand nombre d'espèces communes à la Berbérie et à l’Asie-Mineure. La flore de la région Saharienne a également un certain nombre de types génériques et spécifiques propres. Sur 500 espèces environ qui ont été constatées dans la région Saharienne, un certain nombre de formes européennes manquent totalement: ce sont les Orchidées, Amentacées, OEnothérées, Aristolochiées, Saæifragées, Violariées. On y retrouve au contraire des types nombreux spéciaux de Composées et de Crucifères. + La flore atlantique, qui comprend près de 3,000 espèces, a incontes- tablement le caractère européen, surtout dans la région du Tell; vers les hauts plateaux, elle se mêle à celle du désert, mais partout la flore a autant d’affinité pour l'Italie que pour l'Espagne. Les conclusions de ce Mémoire peuvent se résumer ainsi: L’orographie de la région Saharienne exclut l’idée d'une mer inté- rieure d’une grande étendue, communiquant à l'époque quaternaire ancienne avec la Méditerranée par le détroit de Gabès. Le vrai désert n’est pas le désert de sable ( Erg), mais le désert de roches { Hamada). La mer n’a pas envahi le Sahara au commencement de la période actuelle, car elle n’y a point laissé de traces de son passage. Les dépôts quaternaires sont tous de formation continentale etsont distribués conformément aux divisions hydrographiques actuelles dans les parties basses de chaque bassin Saharien. Le terrain tertiaire touche à peine au Sahara, et le crétacé y est très-développé avec les formations paléozoïques, cristallophylliennes et granitiques. Le Sahara n’a pas recu d'espèces animales ou végétales des-régions voisines, et l'Atlas constitue une région botanique etzoologique parti- culière se rattachant beaucoup à l’Europe méridionale, maïs pas assez pour être considérée comme anciennement reliée à l'Espagne. Le Sa- hara n’est pas devenu un désert par l’'émersion d’une immense mer occupant une parlie du continent actuel. TRAYAUX FRANCAIS. — GÉOLOGIE. 631 — Géologie et paléontologie de la Provence: Cours de M. Marion (Rev. scientif.). La Provence, dès la fin de l’époque secondaire, semble avoir eu son autonomie au point de vue zoologique ; dès celte épo- que, elle peut être considérée comme détachée des bassins de la France septentrionale. À partir de l’étage sénonien, on peut même indiquer d’une manière assez précise les limites des bassins mariti- mes qui occupaient le sol actuel de la basse Provence. C'est ce que l'auteur essaie de faire pour la région située entre Marseille et l'étang de Berre. Grâce à de nembreuses observations lithologiques et pa- léontologiques, ce tracé offre toutes les garanties d’exactitude désira- bles, et nous voyons se dérouler devant nous un rivage irrégulière- ment découpé et fort accidenté au point de vue orographique. Dans le basSin ainsi circonscrit, se sont formés bientôt les dépôts suivants : lo calcaire marneux, souvent chargé de lignite, avec une faune ma- rine ; 2 marnes avec nombreuses coquilles d'eau saumäâtre et d'eau douce, Melanopsis galloprovincialis, Cyrena globosa, C. Ferussaci, etc., appartenant à une faune nouvel!e qui sera décrite par les soins de l'éminent paléontologiste de Marseille, M. Matheron. L'auteur, compa- rant entre elles les coupes prises dans ces horizons sur divers points, cherche à démontrer qu'un mouvement énergique de soulèvement a dû se produire entre le Turonien et le Sénonien, mais sans avoir produit de grandes perturbations et sans avoir arrêté partout la con- tinuité de la sédimentation. Certaines espècee en effet passent d’un étage à l’autre. « À Martigues, par exemple, les Hippuriles organisans et cornuvaccinum persistent dans les premières assises sénoniennes et représentent, au milieu des nouvelles familles de Rudistes, les an- ciennes familles déshéritées. » Au-dessus des couches à Melanopsis galloprovincialis se développe « l'étage de Fuveau », continuation d’une période d’exhaussement et indice d’un régime fluvio-marin. Cet étage est caractérisé par une faune d'eau douce remarquable, étudiée depuis longtemps par M. Ma- theron. Quant à sa place dans la série chronologique des formations crétacées, elle se trouve marquée à côté de la craie de Gosau ( Autri- che), superposée immédiatement aux souches à Melanopsis gallopro- vincialis, et par conséquent sur le niveau dela craie de Meudon. L'Étage tithonique.... par M. Zittel (Rev. scientif. ). — On sait que l’école allemande nouvelle admet qu'il y a eu, dansla région méditer- ranéenue, une continuité régulière de couches entre la fin du dépôt du terrain jurassiqueet le commencementdu dépôt du terrain Crétacé, tandis qu’une partie de l'École française, dont M. Le professeur Hébert 632 REVUE SCIENTIFIQUE. est le chef, affirme qu'il y a eu interruption dans la sédimentation à cette même époque. Cette interruption correspondrait, dans cette hy- pothèse, à une émersion, et donnerait comme résultat la superposition directe du Néocomien à l’'Oxfordien, que l’on peut constater dans les Alpes. Selon MM. Moesch et Zittel, le calcaire à Astarte des géologues Jurassiens serait synchronique des couches à Ammonites tenuilobatus et À. polyplocus, et ce fait ressort de plusieurs coupes géologiques prises en Suisse, et spécialement de celle qui a été faite par M. Zittel entre Oberbuchsitten et Langenhruch. Ainsi se trouverait comblée la lacune signalée par un certain nombre de géologues français. Le Tithonique se placerait entre le Kimmeridgien et le Néocomien, comprenant deux sous-étages avec une faune en grande partie nou- velle. Le sous-étage inférieur renferme des Ammonites, ou analoeues. ou très-voisines de celles que contient le Jurassique supérieur des Alpes. Le sous-étage supérieur que M. Hébert range dansle Néocomien devrait plutôt se placer sur le niveau du Wealdien. Le mélange des espèces jurassiques aux espèces tithoniques ou cré- tacées inférieures ne peut être mis en doute, selon M. Zittel, qui se refuse à l'attribuer à la présence d'immenses brèches résultant d'une érosion qui se serait étendue des Carpathes à la France méridionale. Selon ce savant, il est fort étonnant que les dénudations qui ont donné lieu à ces brèches n'aient jamais entrainé que des blocs arrachés aux couches à A. tenuilobatus. Il reste donc convaincu que le système de couches dépendant de l’époque intermédiaire entre le terrain juras- sique et le terrain crétacé est trop important pour ne pas mériter ans le midi et l’est de l'Europe un nom spécial. — Réponse à M. Zittel (Revue scientif.). — Selon M. Leprofesseur Hé- bert, tandis que MM. Moesch et Zittel ont trouvé en Suisse la zone à Ammonites tenuilobatus au-dessus du Corallien, M. le professeur Dieu- lafait vient de la trouver au-dessous du même étage. Les calcaires à Ammonîtes polyplocus et A. Achilles, appartenant à l’Oxfordien, sont donc séparés du Kimmeridgien par les couches suivantes : 1° tout ou partie du Corallien: 2° le sous-étage Astartien. Cette série régu- lière se rencontre sur toute la bordure jurassique du bassin de Paris et jusqu’en Allemagne. Aux assertions de MM. Moesch et Zittel, M. Hébert oppose celles de MM. Jaccard et Greppin. qui mettent également l'horizon à 4. tenui- lobatus au-dessous du Corallien. La continuité des couches Astartiennes avec celles à À. tenuilobatus est loin d’être prouvée ; elle est difficile, sinon impossible à démontrer dans un pays aussi accidenté que l’est TRAVAUX FRANCAIS. — GÉOLOGIE. 633 la bordure du Jura. Le calcaire à Terebraiula moravica ne peut égale- ment faire partie du Tithonique, car il est le représentant du Coral- Rag du Nord. Quant à la question des brèches, elle est d’une très- grande importance : à Stramberg, comme dans les Alpes, et dans ce terrain remanié qui s'étend sur de si grandes surfaces, on retrouve tout aussi bien des blocs appartenant au Corallien qu'aux couches à À. tenuilobatus. Avant ce dernier article, M. le professeur Hébert, abordant à la So- ciété géologique cette question si brülante du Tithonique, déclarait (séance du 19 nov. 1872 ) que dans les Alpes on rencontrait la série suivante de bas en haut: {ozone àAmmonites transversarius (Argovien de M. Marcou); 2° zone à À. tenuilobatus; 3° zone à Terebratula mo- ravica, Diceras Lucii. Cette série est inverse de celle que M. le profes- seur Zittel établit, et diffère radicalement de celle qui est admise par MM. de Loriol et Tombeck. On nous permettra de rappeler que dans le dernier numéro de la Revue nous avons cherché à démontrer, au moyen des coupes et d’une carte que tout géologue peut vérifier, que dans l'Hérault on trouve la série suivante, sans trace aucune de conglomérat ni de brèches: 1° Corallien avec Diceras Escheri, Munsteri, Terebratula moravica ; 2°zone à Ammonites tenuilobatus; 3° zone à Terebratuladyphia, Ammoni- tes carachteis ; 4° Néocomien inférieur à Ammonites Callisto. Rôle des glaciers en géologie... par A. de la Rive (Rev. scientif.).—La théorie glaciaire estd’origine récente, c’est Venetzqui en eutle premier l’idée ; depuis elle a étésurtout développée par deCharpentier, Agassiz, Desor, Vogt, Le professeur Martins. Il n’a été possible de l’établir dé- finitivement que lorsque les phénomènes principaux que présentent les glaciers actuels ont été bien connus. Parmi: ces phénomènes, les plus récemment étudiés sont ceux qui ont trait à la nature même de la glace des glaciers. On sait que la neige subit, en descendant des nevés, des transformations moléculaires spéciales qui en font un corps solide susceptible de s’écouler lentement comme un corps visqueux. Depuis la découverte de cette propriété spéciale de la glace des gla- ciers, Tyndall a prouvé que la glace devenait plastique sous la pres- sion, alors qu'elle ne l'était pas sous la tension : fait d’une haute importance et qui explique certaines particularités propres aux glaciers. La théorie physique de ceux-ci est donc à peu près définitivement établie, mais on en est encore réduit à des suppositions sur la ques- tion de savoir à quelle cause attribuer la grande extension des gla- 634 REVUE SCIENTIFIQUE. ciers au commencement de l’époque quaternaire. On sait que, de nos jours, une série d'années pluvieusessuffit pour alimenter les glaciers d’une manière surabondante et les faire progresser beaucoup. Cest pourquoi M. de la Rive admet qu'à l’époque du dernier cataclysme qui à accidenté notre hémisphère boréal, l'atmosphère était chargée : d'abondantes vapeurs aqueuses qui se sont précipitées sous forme de neige sur les hautes montagnes qui venaient de se former. Cet excès d'humidité a disparu depuis, sous l'influence des changements consi- dérables opérés sur la surface de la terre, par les émersions de con- tinents et peut-être sous l'influence de la végétation, qui a condensé d'immenses quantités d'eau. Toutes ces causes, unies probablement à un affaiblissement de la chaleur solaire, ont finalement dépouillé l'atmosphère de cet excès de vapeur d’eau. Il n'est pas nécessaire enfin d'admettre à cette époque une température moyenne plus basse que la température actuelle; il est au contraire à présumer qu'elle devait être plus élevée et permettait à une grande quantité de vapeur d’eau de se dissoudre dans l’air et de se condenser sur les hauts sommets. Crocodiliens tertiaires. par L. Vaillant (Ann. des se. géolog.).— C'est à Cuvier que nous devons les premières recherches sur le sujet; après lui sont venus Jobert, Croizet, Lartet, le professeur Gervais, Pictet, Marcel de Serres, Owen, CGautley et Falconer, etc... Des recherches de ces différents auteurs il résulte que, défalcation faite des espèces douteuses ou nominales, le nombre des Crocodiliens tertiaires et même quaternaires se trouve réduit à douze ou quatorze espèces. C'est à ces espèces légitimes que l’auteur compare les Crocodiliens trouvés à Saint-Gérand-le-Puy. Ces Sauriens se rapprochent surtout des Alligators, et les recherches qui ont été faites dans ces derniers temps ont mis M. Vaillant en possession de magnifiques pièces qui lui permettent de compléter les découvertes déjà anciennes faites par M. Pomel dans cette même localité. Un squelette entier de l'espèce appelée Diplocynodon gracile a été surtout la base de cette remarquable étude. Le genre Diplocynodon est dù à M. Pomel, qui l’a établi dès 1847. Les caractères saillants de cette espèce sont surtout tirés du crâne ; celui-ci, en effet, présente au niveau de Ja suture prémaxillaire une échancrure moins marquée que chez les vrais Crocodiliens, mais plus marquée que chez les Caï- mans. Dans cette échancrure se loge de chaque côté une dent de la mâchoire inférieure. L'intermaxillaire est marqué de fossettes qui sont situées presque sur le bord de l'os, au niveau des alvéoles den- TRAVAUX FRANCAIS. — GÉOLOGIE. 635 taires, au lieu d’être perforé en arrière du bord maxillaire, comme chez les Crocodiles. Le maxillaire supérieur est allongé et étroit, pourvu de seize dents à droite et de quatorze dents à gauche. La mâ- choire inférieure porte des dents puissantes, dont la première est assez forte, la seconde plus faible, tandis que les deux suivantes sont plus faibles, surtout la quatrième, d’où le nom de Diplocynodon donné par M. Pomel. La formule dentaire de cette espèce serait de 21/18-21/19. Étudiant la face dans son ensemble, l’auteur se demande s'il n’est pas possible d’enexprimer d’une manière exacte la forme générale. Il pense y arriver en prenant pour point de repère, de chaque côté de la mä- choire, la onzième dent, qui est la plus développée. Ces deux points, reliés entre eux et avec l'extrémité antérieure de la symphyse par des lignes droites, constitueraient les éléments d’un triangle isoscèle fa- cile à calculer. À ce premier triangle mensurateur, il propose de joindre un trapèze dont une des bases parallèles serait la base du pré- cédent triangle , l’autre étant la ligne qui joint la cinquième dent de chaque côté de la mâchoire; les côtés égaux de ce trapèze seraient la distance séparant la onzième de la cinquième dent. Avec ces données, on pourrait jusqu’à un certain point rendre compte du caractère spé- cifique de la face. Les différentes parties du squelette du Diplocynodon gracile donnent également lieu à des remarques intéressantes ; vient ensuite l'étude approfondie des pièces de l’armature osseuse épidermique. Les plaques osseuses des Crocodiliens appartiennent à deux types différents: 1° dans la famille des Crocodilidæ et des Alligatoridæ, le bouclier dorsal est formé de pièces simplement placées les unes à côté des autres ; 2° dans les genres Caïman et Jacaré, au contraire, les écailles, imbriquées les unes sur les autres, sont articulées. L'étude des plaques osseuses du gisement de Saint-Gérand-le-Puy démontre que toutes les pièces osseuses du dermato-squelette s’y trouvent re- présentées. Les pièces osseuses du dos se retrouvent à côté des pièces cornées du ventre et toutes se rapprochent beaucoup de ce que nous trouvons chez Les Crocodiliens actuels. Le Diplocynodon Ratelli, autre espèce décrite par M. Vaillant, n’est connu que par plusieurs intermaxillaires : un maxillaire supérieur gauche et un maxillaire inférieur assez complet. Les caractères gé- néraux de ces pièces du squelette démontrent que ce Crocodile se rapprochait beaucoup de l'espèce précédente. Le seul caractère qui l'en distingue consiste en une vraie fossette de réception pour la troi- sième dent inférieure, que l’on rencontre en arrière de la cinquième dent sur l’os intermaxillaire. Ce caractère est aujourd’hui propre 636 REVUE SCIENTIFIQUE. aux Caïmans, et paraît exister à toutes les périodes de la croissance. La formule dentaire de cette espèce est 22/19-22/19. L'auteur juge que la position toute spéciale des fossettes de réception des dents est suffisante pour l'établissement d’une espèce particulière. Une troisième espèce complètement nouvelle, Crocodilus æduicus, du même gisement, a un museau régulièrement décroissant qui donne à l’ensemble de sa tête la forme d’un triangle dont les côtés sont presque droits. D’après les caractères de la tête, qui est la seule pièce bien conservée, cette espèce se rapprochait des Crocodiliens actuels, surtout par le caractère de La dentition, mais tout en conser- vant d’étroites affinités avec les Diplocynodon. Sa formule dentaire est 19/17-19/17. En résumé, on peut dire, avec M. Vaillant, qu’il existait dans le dé- partement de l'Allier, à l’époque du calcaire à Indusies, trois espèces de Crocodiles, dont deux étaient très-voisines par les proportions de leur tête des Alligators, en s’écartant de ceux-ci par la dimension de la troisième dent inférieure, très-développée et presque égale en taiile à la quatrième ( Diplocynodon); la troisième espèce, plus rapprochée des Crocodiliens, avait cependant conservé quelques caractères des Caïmans. — Documents relatifs au terrain crétacé.…, par M. Hébert (Bull. Soc. géol.). — Le savant professeur de la Sorbonne donne sous ce nom la suite d’un travail, commencé depuis longtemps, sur les formations cré- tacées du midi de la France. Ce sont surtout les étages suivants qui ont attiré son attention : {ole Néocomien supérieur; 2° l'étage de la craie glauconieuse ; 3° l’étage des calcaires marneux à Hippurites. IL résulte de ces recherches que le Néocomien supérieur (Aptien d'Orb.) aune puissance de 180 mètres auprès de la Bedoule ; que sa nature lithologique est surtout marno-calcaire, et qu’il contient la plupart des fossiles caractéristiques de cet étage, Ostrea aquila, Plicatula pla- cunea, Echinospatanqus Collegni, Ammonites fissicostaius, Belemnites semicanaliculatus, etc... L’étage de la craie glauconieuse, qui est en stratification concor- dante avec le précédent, se compose dans la basse Provence de sables ordinairement jaune verdâtres, avec fossiles nombreux, Orbütolina concava, Echinides, Rudistes (Capriua ); de calcaires compacts, avec alternance de sable, d'argile, de grès, de marne, formant un ensemble de près de 127 mètres de hauteur avec Orbitolites conica, Caprina, Osirea carinata, et à la partie supérieure Ostrea columba, qui en mar- querait la partie supérieure. Ici, comme au Mans, on trouve un hori- TRAVAUX FRANCAIS. — GÉOLOGIE. 637 zon limité à Pygaster truncatus, qui peut servir à diviser en deux assises distinctes la craie glauconieuse. Dans la partie septentrionale de la Provence, à Escragnolles, les sables de la craie glauconieuse prennent un grand développement, mais conservent les fossiles de la craie du Mans et de Rouen: les cal- caires ne contiennent pas de Rudisies et sont riches en Ostrea columba. L'étage n° 3 de la craie marneuse contient, avec des Rudistes nom- breux ( Hippurites, Sphærulites), un banc avec Hemiaster Verneuilli. Ce massif à Rudistes, pris dans son ensemble, atteint l'épaisseur de 152 mètres, et c’est au-dessus que se développent les grès d'Uchaud, qui ont une puissance de près de 500 mètres et une faune toute spéciale. — Ondulaiions de la craie dans le bassin de Paris. ..., par M. Hébert (Bull. Soc. géol. ).— Les divisions de la craie du bassin de Pariesont les suivantes : 1° craie glauconieuse d'Al. Brongniart ; 2° craie marneuse à Inoceramus labiatus ; 8° craie dure à Holaster planus ; 4 craie à Mi- craster cor testudinarium ; 5° craie à Micrasier cor anguinum; 6° craie à Belemnitella quadrata et mucronaia; T craie supérieure. Cette série est loin d être continue, et on peut reconnaître entre chacun de ses termes une lacune correspondant à un horizon qui se trouve repré- senté en dehors du bassin de Paris. C'est ainsi qu'entre la craie mar- neuse et la craie à Holaster planus manque dans le bassin de Paris la craie à Hippurites si développée dans le midi et l’ouest de la France. De plus, chacun des termes de la série précédente a une faune dis- tincte et se trouve séparé de l'horizon inférieur et supérieur par des surfaces limites. Deux coupes géologiques, l’une des falaises du Havre à Boulogne- sur-Mer, l’autre de la région comprise entre le Perche et l’Artois, montrent successivement les surfaces limites de la plupart des hori- zons de la craie à partir du Néocomien supérieur. — Faille de la Seine., par M. Hébert (Bull. Soc. géol.).—I1 y a plus de dix ans que M. Hébert a étudié la question de la faille de la Seine, et dès-lors il a pu en déterminer la direction. C’est surtout dans les environs de Rouen que cet accident géologique est d'une grande net- teté ; il a été possible d'y trouver trois points en ligne droite qui ont servi à en déterminer l’orientation. Cette étude a été poursuivie au sad-est de Rouen, dans la vallée de la Seine, au moyen de nombreuses coupes qui ont démontré que les 1e 44 638 REVUE SCIENTIFIQUE. terrains accidentés par cette fracture appartenaient surtout au cré- tacé supérieur. — Note sur la faille de Vernon. , par M. Douvillé (Bull. Soc. géol.). —Cette fracture, qui est d’abord assez bien indiquée par le cours de la Seine, offre, dans les régions étudiées par l’auteur, trois sections: 1° celle de Vernon à Blaru ; 2° de Blaru à Saint-Illiers; 3° de Saint-Illiers à la Mare-de-la-Forge. Dans la première section comprise surtoutdans le terrain tertiaire Éocène supérieur et Miocène inférieur, affleure le sa- ble granitique, auquel l’auteur, dans de précédentes communications, attribue une origine hydrothermale. La deuxième section présente des affleurements de la craie supérieure et des étages tertiaires précé- demment cités, en même temps que de nombreuses traces de la même éjaculation de sables grauitiques. Dans la troisième seclion, l’Éocène inférieur vient se joindre aux formations que nous venons d'énumérer, et l’on continue à trouver des traces des accidents filo- niens granitiques. M. Douvillé conclut de ses recherches, que cette faille se continue de Vernon à Perdreauville, en s'accompagnant de dénivellations puissantes qui ont surtout intéressé le terrain tertiaire, jusqu’au calcaire de Beauce (Miocène); les sables granitiques liés à la présence de cette fracture sont arrivés à la surface postérieurementau dépôt de celui-ci. — Observations sur le terrain Permien....,par M. Favre (Bull. Soc. géol. ). — Ge terrain a été surtout étudié par MM. Coquand, Reynès et de Rouville, Boisse, Magnan, et, dans ces derniers temps. par nous- même. Selon M. Favre, le sous-étage supérieur du Permien (schistes rouges) est généralement en discordance de stratification avec Le Trias ou l’Infrà-lias, qui lui sont directement superposés, et les faits con- traires observés par Magnan et par nous-même ne sont que des ex- ceptions à la règle. Ce même sous-étage supérieur, en se rapprochant des montagnes granitiques du plateau central, se charge de grès quart- zeux analogue aux grès vosgien. On y trouve quelques traces d’oi- seaux, ornitichnites, des Volizia heterophylla, fait qui prouverait que ce genre de conifères a existé dans ces régions dès le Permien su- périeur. — Extension des terrains jurassiques…, par M. Favre (Bull. Soc. géol.). —Les formations jurassiques, au lieu de se borner aux bords du pla- teau central, se poursuivent jusque sur les hauts plateaux qui s’é- tendent entre les sources du Lot et de l'Allier. Sur ces hauteurs, que TRAVAUX FRANCAIS. — GÉOLOGIE. 639 l’on croyait jusqu'ici granitiques, on trouve en effet des traces non équivoques de l’oolithe inférieure avec ses fossiles, Posidonia Vellava, Ammonites Murchisonæ. En plusieurs autres points très-élevés du pla- teau central, et jusqu’à 1,380 mètres d'altitude, la mer jurassique a laissé des dépôts d’une certaine épaisseur et d’une grande étendue. Ce niveau de 1,380 mètres est le plus élevé de ceux qu’atteignent les terrains sédimentaires sur le massifgranitique du centre de la France, et il est fort intéressant d'y retrouver, contrairement aux idées géné- ralement recues, la base de toute la série jurassique. — Note sur la craie du cap Blanc-Nez..., par M. Chelloneïix (Bull. Soc. géol. }.—Les affleurements du cap Blanc-Nez donnent, entre Wissant et Sangatte, la série crétacée moyenne et supérieure suivante: 1° zone à Terebratula biplicata (craie glauconieuse) avec Amm. rothomagensis, varians, etc., du Génomanien; 2° zone à Amm. varians et Turrilites tuberculatus ; 3° zone à Amm. cenomanensis; 4o zone du Belemnites plenus, craie marneuse du grand Blanc-Nez; 5° zone à Inoceramus la- biatus, craie argilo-siliceuse, avec Ammonites de grande taille à la partie supérieure, 4. Woolgari, A. Lewesensis, À. peramplus ; 6° zone à Inoceramus Brongniarti et Terebratulina gracilis, craie blan- châtre sans silex ; 7° zone à Micraster breviporus et cor testudinarium. Par-dessus se trouvent des grès et des sables rapportés par l’auteur au Pliocène. — Note sur la corrélation.., par M. Levallois (Bull. Sos. géol.).— T1 existe une liaison très-étroite entre la distribution des différents ter- rains sur les cartes géologiques et sur les cartes agronomiques. On peut s'en rendre compte en comparant la carte géologique d’une région à la carte agronomique. Cette comparaison a été faite par M. Levallois, pour l’arrondissement de Toul (Meurthe), et il en res- sort que le tracé des limites des différents terrains concorde sur les deux cartes faites par des observateurs différents et à des époques différentes. — Sur la dernière éruption du Vésuve.. par M. de Verneuil (Bull. Soc. géol.).— Le caractère dominant de l’éruption de 1872 a été l'énorme abondance de cendres et de lapilli lancés par le volcan. C’est surtout à partir du 26 avril que ce phénomène s'est manifesté: il a atteint son maximum d'intensité le 29 avril, et M. de Verneuil n’estime pas à moins de 5 à 6 centimètres la longueur des lapilli qui sont tombés ce jour-là. A l'observatoire, d’où l’on pouvait observer cette pluie de pierres, on était témoin d’un spectacle grandiose. En effet, de ce 640 REVUE SCIENTIFIQUE. point, on apercevait une première coulée de lave paraissant venir de l’Atrio del Cavallo; cette coulée, en 24 heures, avait parcouru plus de 4 kilomètres. Dans cette même éruption deux autres coulées se sont fait jour sur les flancs du cratère ; l’une d'elles s’est déversée du côté de Resina, et a menacé un moment Torre del Greco; l’autre, partant du côté opposé du cratère, a pris la direction de Pompéi. L'épaisseur de ces coulées a été telle, que la vallée qui s'étend entre l'observa- toire et le cône du Vésuve commence à se niveler sur une grande étendue. D' BLEICHER. — Gisements et mode de formation des phosphorites; par Alph. Favre. (Bibl. et Rev. Suisse, 15 nov. 1872). La source première du phosphate de chaux, si important pour l’agriculture, qu'on trouve dans diverses conditions, est dans la croûte primitive, granito-gneissique du globe et dans la masse sous-jacente. M. Daubrée pense que dans les pro- fondeurs de celle-ci les matières phosphorées pourraient bien être à l’état de phosphures, comme dans les météorites. Les phosphates sont disséminés en quantités relativement minimes daps les granites, les micaschites, les laves, mais la masse des roches est si énorme que le phosphate de chaux provenant de leur décomposition doit être pris en considération. Les eaux, surtout lorsqu'elles sont chargées d’acide carbonique, peuventdissoudre le phosphate de chaux et le disséminer dans divers milieux. Ainsi, les eaux superficielles le portent dans le sol labourable qu’elles fertilisent, ou l’entraïnent dans les lacs ou dans la mer, tandis que les eaux profondes amènent de plus bas des quantités con- sidérables de ce sel et en forment des amas volumineux mais bien limités, sur leur passage. En résumé, et comme ces considérations permettent de Le prévoir, sans parler du phosphate de chaux dissiminé dans les roches de toute nature, les dépôts de phosphate de chaux paraissent formés de quatre manières différentes : 1° Dans la mer ; 20 Dans les bassins d’eau douce ; 30 Par les sources ; 4° Par les animaux terrestres et par l'homme. I. Phosphorites formées dans la mer. — Couches siluriennes à lin- gules, du Canada, où Le phosphate fait partie de la coquille ; couches siluriennes de Llandeiïlo; terrain houiller (rognons disséminés dans TRAVAUX FRANCAIS. — GÉOLOGIE. 641 des argiles noires); couches à ossements (bonne bed) du trias et de l'infrà-lias ; rognons du Jurassique; grès crétacé de Ssamorod en Russie, où les grains de quartz sont reliés par un ciment contenant 30 °/ de phosphate de chaux ; gault d’une manière très-générale, ter- tiaire très-rarement. Le dépôt de Bellegarde, près la Perte du Rhône, étudié par Brongniart, Pictet, etc., appartient au gault : le phosphate y forme 50 à 70 °/, de la matière qui remplit les fossiles, tandis que les coquilles elles-nêmes et surtout le sable chlorité dans lequel elles sont répandues en sont dépourvus. Le Rév. 0. Fischer et l’auteur ad- mettent que la présence exclusive du phosphate dans la moule est due à une action condensatrice exercée par la matière animale pen- dant sa décomposition sur le phosphate dissous dans les eaux de la mer. Dans divers gisements, du bois est changé en phosphate de chaux. IT. Le district de Leira (Portugal) offre un exemple de phosphorite formée dans un bassin d'eau douce. III. La formation des phosphates qui se trouvent dans les filons des roches cristallines peut être attribuée à des sources; mais cette ori- gine est plus évidente encore dans les phosphorites concrétionnées ayant l'apparence d’un tuf, ou en masses compactes à couches minces emboîtées, à éclat résineux, qu’on trouve à Ramelot et Verviers ( Bel- gique), à Amberg (Bavière), à Larnagol, près Carjac, et à Concots (Lot), à Caylux. près Montauban. Cette phosphorite occupe des poches irré- gulières ou des espèces de fosses à parois verticales: elle est associée à de la limonite, du manganèse, du minerai de fer en grain. Celle du Lot et du Lot-et-Garonne occupe deux systèmes de fractures disposées sur le bord du plateau central, dont la plus ancienne, dirigée N. 25 E., ue contient pas de fossiles, tandis que celle E.-0., remplie plus tard, renferme une faune de mammifères éocènes. Le remplissage des poches, soit par de la phosphorite, soit, à la partie supérieure, par de l'argile, a continué pendant le reste de la période tertiaire. En même temps des courants diluviens sont venus mêler les cailloux quartzeux qui recouvrent le sol au phosphate qui se déposait ( Daubrée, Ger- vais, Trutat). IV. Guano, brèches osseuses, partie des Kjækenmoddings, des terra-mare ; le clos Charnier, à Solutré, près Mâcon. À — Note sur la géologie des Ralligsioecke (bord du lac de Thoune), par E. Favre (Bibl. et Rev. Suisse., 15 décembre 1872). Les Ralligstôcke 642 REVUE SCIENTIFIQUE. sont une chaîne de montagnes comprise entre les collines de Sigriswyl à l'O. et la chaîne de Beatenberg qui s'étend vers le mont Pilate, au bord du lac de Lucerne. Les pieds des Ralligstocke et du Beatenberg sont baignés parle lac de Thoune. Quittant la plaine Suisse et les col- lines miocènes de Sigriswyl, si l’on gravitla montagne de Ralligstôcke, on trouve des cargneules accompagnant des marnes rouges et du gypse. Aussitôtaprès,on rencontre @es roches liasiques et rhétiennes, puisles grès de Taviglianaz, des schistes marno-sableux que l’auteur désigne sous le nom de Schistes de Merligen. Au-dessus viennent les couches néocomiennes,urgoniennes, nummulitiques, surmontées par les Schistes de Merligen, qui forment le sommet de la montagne. Ces couches plongent vers l’axe de la chaîne. Lescouches du versant E. font demême, de sorte que l’ensemble est disposé en éventail. Sur ce ver- sant, on descend des schistes de Ralligen aux marnes néocomiennes; mais les calcaires urgonien et néocomien ne s'y montrent qu'une fois, tandis que sur le versant précédent ils sont récurrents, par suite d'un plissement profond. La coupe du versant E. des Ralligstôcke n’est donc pas symétrique à celle de l'O., mais elle correspond par- faitement à celle du Beatenberg, qui lui fait face, de l’autre côté de la vallée de Justithal, comme les deux culées d’une arche doni la voûte a été enlevée. M. Favre se demande si le gypse rencontré au commencement de cette coupe ne serait pas tertiaire ; il cite à ce propos des exemples de gypse de cet âge, avec ou sans sel et cargneule, en Suisse, en Espagne, dans les Carpathes, l’Asie-Mineure, etc. L'auteur, voyant les schistes de Merligen reposer sur la formation nummulitique, ne peut accepter l'opinion de M. Ooster, qui les place dans la craie. Il se tronve également en désaccord avec MM. Oosteret Fischur-0oster au sujet des grès qu'on observe à la base de la mon- tagne, en apparence intercalés entre les couches liasiques et néoco- miennes. Tandis que ces derniers veulent y voir une formation d’é- poque rhétienne, lui, s2 fondant sur sa ressemblance avec les couches qu'on voit reposer en divers points des Alpes de la Suisse et de la Savoie sur le nummulitique, et sur cequ’il supporte en ce point-ci Les schistes de Merligen, l’assimile au grès de Taviglianaz, d'âge éocène. Le schiste de Merligen forme un socle à la base de la montagne, et c'estderrière ses couches peu inclinées que surgissent, dans un abrupte qui forme une coupe transversale naturelle, les bancs des terrains que nous avons cités, avec une direction à peu près perpendiculaire à la sienne. Le lac de Thoune est logé dans une fracture, et la rive gauche (Morgenberghora), toute différente de la rive droite, présente la série TRAVAUX FRANCAIS. — GÉOLOGIE. 643 complète et renversée du flysch, qui forme la base au Néocomien. — (Compt.-rend. de l’Acad. des sc., 18 novembre 1872). M. Gaupry signale une molaire d'Elephas primigenius rapportée de l'Alaska, par 560 lat. N., et 1560 4 long. 0. Cette dent a les lames de son émail très-serrées, et est, même au point de vue chimique, d’une conserva- tion parfaite : en effet, la racine contient 24 o/, de matière organique. Les rives du Kouitchak, minées par les eaux à l’époque de la fonte des neiges, s’éboulent et laissent un grand nombre d'ossements à dé- couvert. M. Gaudry insiste sur les ressemblances des faunes et des flores des deux continents, qui auraient leur point de départ dans une communication probable entre ceux-ci dès les premiers temps miocènes. — D'après une note de M. P. Fiscxer sur quelques fossiles de l’A- laska et des îles Aléoutiennes (G.-r., 23 décembre 1872), ces contrées contiennent certains fossiles communs avec l’Europe, tels que Monotis salinaria Bronn, des dépôts salifériens de Salzbourg, espèce que Zittel a d'ailleurs reconnue dans le sud de la N.-Zélande, et E. Des- longchamps à la N.-Calédonie. Ces couches paraïssent la continuation du terrain triasique de la côte occidentale de Californie. Les forma- tions jurassique et quaternaire sont aussi représentées. — M. CHanTRe (C.-r., 23 décembre 1872) a rencontré les espèce sui- vantes dans le lehm de Saint-Germain, au Mont-d'Or (Rhône), proba- blement contemporains de la grande extension des glaciers alpins dans la vallée du Rhône: Bos primigenius, Bison, Cervus tarandus, Equus caballus, Rhinoceros tichorhinus, Elephas primigenius. Ces osse- ments ont sans doute été accumulés là par un remou de la Saône. Dans ce gisement, comme dans tous ceux du Mont-d'Or lyonnais, ceux du plateau Bressan, de la plaine Dauphinoise, ce sont les ossements de proboscidiens qui se trouvent en plus grande abondance (l'E, intermedius Jourdan, plus que le primigenius). Le cheval est commun; le Cervus megaceros, le Bouquetin, le Renne, les Carnassiers et les Rongeurs sont rares. —M. Leymerie (Compt.-rend., 9 décembre 1872) signale aux environs de St-Martory, à la ferme de Paillon, une colonie de fossiles siliceux, polypiers, spongiaires, caprines, Hippurites, qui appartiennent à l'étage turonien, dont aucun représentant normal n’est d’ailleurs connu dans la H.-Garonne, et qui sont intercalés entre le sénonien et une assise à Hemipneustes radiatus. Celle-ci est recouverte par le 644 REVUE SCIENTIFIQUE. calcaire nankin qui représente dans la contrée la craie de Maëstricht. M. Leymerie confirme dans la même note que « les terrains pyré- néens supérieurs (craie proprement dite, garumuien, nummulitique, poudingue de Palassou) sont complètement représentés dans le chai- non marginal, à l'exclusion des terrains inférieurs, qui restent pour ainsi dire l'apanage de la chaine principale ». —M.P. Fiscuer (Compt.-rend., 18 janvier 1873), a étudié Les fossiles recueillis par M. Grandidier à Madagascar, parmi lesquels se trouve un certain nombre degastéropodes, notamment des Nérinées, des Ammoni- tes, un Isastræa et autres Polypiers, et dont certains ont pu être déter- minés spécifiquement. On est arrivé par là à cette conclusion que le lias. l’oolithe, sont représentés dans cette île. Il serait intéressant de savoir si l’on pourra relier ces dépôts avec les dépôts jurassiques de Zanzibar. Le lias est signalé sur la côte O. de l’Afrique. —M.E. Rivière (Compt -rend., 17 février 1823) décrit un abri préhis- torique situé au cap Roux, entre Eza et Beaulieu, de Nice à Monaco. C'est un petit plateau situé à 28" au-dessus de la mer, surplombé et abrité par un rocher qui s'élève encore à environ 100 au-dessus. Au- dessous de la couche superficielle remaniée (1",70), apparaît un premier foyer constitué par de la cendre, du charbon, des os, des dents, des coquillages et des silex taillés ( 1»,40 ). Les os sont surtout des diaphyses fendues; ils appartiennent aux espèces suivantes: Bos primigenius, Cervus elaphus, C. capreolus, C. corsicanus? Capra primi- genia ; Equus (1 dent}; Sus (dents) ; Lepus caniculus (peu abondant ). 1%,05 environ au-dessous du premier foyer, en est un second, fouillé par l’auteur sur une épaisseur de 0,90, sous lequel ii comprend : Ursus spelœus, Hyœna spelæa, Equus caballus, Cervus elaphus, C. capreo- lus, Capra primigenia. Les ossements, sauf les phalanges, ont été brisés par la main de l'homme en trois fragments. En fait de Mol- lusques, les Pratelles et les Moules dominent. Ces coquilles, qui vivent fixées aux rochers à fleur d’eau, étaient plus accessibles à la peuplade qui habitait l'abri. M. Rivière a trouvé dans les deux foyers des poinçons en os et une grande abondance, surtout dans le supérieur, d’éclats de silex et de silex taillés en pointes et en la- mes. Il considère cette station comme de la même époque que celle des grottes de Menton; mais les débris d'animaux y sont moins nom- breux, d'espèces moins variées. Aucun ossement humain n’a été trouvé. TRAVAUX FRANÇAIS. — (ÉOLOGIE. 645 — Sur quelques travaux relatifs à une nouvelle classification des Am- monites, par E. Favre (Bibl. et Rev. Suisse, 15 janvier 1873). La clas- sification primitive des Ammonites est fondée sur les caractères les plus apparents de la coquille. Aujourd’hui l’histoire de ces animaux s’est enrichie des faits assez nombreux qui ont permis de les répartir dans plusieurs genres, d'après des caractères nouveaux. La dernière loge a une grandeur constante dans un groupe, variable d’ua à l’autre, puisqu'elle occupe dans les uns un tour et demi, dans d’autres seulement un demi-tour. L'animal est fixé par son pourtour à la coquille ; tantôt par sa partie postérieure il sécrète du calcaire et forme des cloisons, tantôt de l’air qui s’accumule dans le fond, et il avance lentement dans la grande loge. L. de Buch supposa que les aptychus appartenaient aux Ammoni- tes. Oppel constata que ceux-ci, lorsque les circonstances de fossilisa- tion ont été favorables à leur conservation, ont toujours une position parfaitement définie dans le voisinage du côté siphonal de la dernière loge. La position où on les trouve correspond à celle des glandes ni- damentaires chez les nautiles femelles; aussi plusieurs paléontolo- gistes admettent que les aptychus sont un encroûtement calcaire du tégument des glandes nidamentaires de l’'ammonite femelle. Les bords de la coquille des Ammonites présentent souvent des pro- longements latéraux ou oreillettes, auxquels M. Suess avait assigné le rôle de surface d'insertion des muscles adducteurs du corps de l’ani- mal lorsque la dernière chambre est trop courte pour contenir tout l’animal. Mais le développement des oreillettes n’est pas du tout enrai- son inverse de la longueur de cette chambre ; d’ailleurs leur présence est variable dans une même espèce, et il n’est pas à supposer que des muscles aussi importanis que ceux-là fussent restés seulement abrités par: lapartie la plus avancée de la coquille exposée à toutes Les chan- ces de rupture. La présence ou l’absence de cesoreillettesne constitue pas une différence sexuelle. En effet, d'après ce qui vient d'être dit sur les aptychus, ceux-ci indiquent d’une manière sûre le sexe de l'individu lorsque la conservation est assez parfaite pour qu'on ne puisse pas attribuer l’absence d’aptychus à un entraînement acci- dentel. Or, dans les coquilles d’une même espèce, la présence des oretllettes ne suit pas régulièrement la présence ou l’absence d’apty- chus. La coquille des nautiles est formée par deux couches calcaires : {1° l’ostracum sécrété par le manteau, constitué par de grandes cellu- les: 2° la couche interne nacrée, composée de très-petites cellules: elle revêt l'ostracum intérieurement, et forme les cloisons; elle est 646 REVUE SCIENTIFIQUE. sécrétée par Le corps même. La même structure a été reconnue dans beaucoup d'Ammonites. Les grandes différences de structure des aptychusindiquent des diffé- rences considérables dans la structure des glandes nidamentaires, et par conséquent dans l’organisation des Ammonites. Aussi M. Waagen a pris pour base de sa classification des Ammonites en genres la structure des aptychus; puis il a ajouté d’autres caractères : longueur et forme de la chambre d'habitation, forme de la bouche, disposition des cloisons et des ornements. La forme générale paraît un caractère variable. L. CozLor. BULLETIN. BIBLIOGRAPHIE. Nouvelles recherches sur la PARTHÉNOGÉNÉÈSE, par De Sieboldi. Le journal anglais Nature? a publié, dans ses numéros des 10 et 24 octobre 1872, un remarquable compte-rendu de l’ouvrage précité dont nous sommes heureux de reproduire un extrait. Depuis la publication, en 1856, des premières recherches de Leuc- kart sur la Parthénogénèse, le professeur de Siebold (de Munich), qui en 1850 s'était montré un antagoniste bien prononcé de l'hypothèse qu'il a maintenant prouvé être complètement justifiée par les faits, fit paraître, à la date de 1857, le résultat de ses observations sur les Abeilles. Il démontre ( ce qui n'avait été que soupconné jusque-là ) que la Reine-abeille épuise, pour la fécondation des œufs destinés à produire exclusivement des femelles, la provision de sperme qu’elle arecue, et qu'ensuite elle pond des œufs non fécondés qui donnent in- variablement naissance à des Bourdons, tandis que les femelles ou- 4 Beiträge zur Parthenogenesis der Arthropoden ; von C.-Th.-E. von Siebold, professor der Zoologie und Vergleichenden Anatomie in München. Leipzig ; Engelmann,1871. 2 C'est pour nous un devoir de témoigner notre gratitude au Directeur de cette Revue pour l'empressement si bienveillant qu'il a mis à nous permettre d'analyser tous les articles de son Recueil qui pourraient intéresser nos lecteurs. E.: DuBRUEIL. BIBLIOGRAPHIE. 047 vrières non fécondées pondent aussi des œufs qui, comme ces derniers, produisent invariablement des mâles. A ces faits, de Siebold en joignait d’autres relatifs à certaines Teignes (Psyche et Solenobia) chez lesquelles des œufs non fécondés ne produisent jamais que des femelles. En 1858, Leuckart publia, sur la Parthénogénèse, un autre Mémoire dans lequel il établit ses droits au mérite d’avoir, le premier, em- brassé la cause de ce singulier mode de reproductiou, et appela sur ce sujet de nouvelles observations histologiques. Depuis cette époque, l'ouvrage de Darwin, sur l’Origine des espèces, avait entrainé les esprits dans une autre voie, et le fait de la Parthé- nogénèse était devenu dans le monde savant d’un intérêt secondaire. Mais le professeur de Munich ne perdait pas son sujet de vue; son désir de répondre à certains doutes qui s'étaient élevés à propos de la légitimité de ses conclusions l'avait engagé dans une série de recher- ches parfaitement conduites, dont il nous a donné le résultat dans l'ouvrage remarquable que nous allons faire connaître à nos lecteurs. Nous nous bornerons, pour le moment, à extraire de l'important travail de de Siebold une analyse succincte des faits les plus remar- quables qu'il a relatés sur la Parthénogénèse de la Polistes gallica et des Apus cancriformis et productus. Les Reines et les Ouvrières chez la Polistes gallica, var. diadema La- treille, espèce assez abondante dans les environs de Munich, sont des femelles également susceptibles de copulation et de fécondation: les ouvrières ne se distinguent des Reines que par une taille un peu plus petite. À Munich, dans les premiers jours du mois de mai, les Reines nées l'été précédent, et fécondées alors, commencent cha- cune à construire un nid ; il est à remarquer qu'aucune des Reines qui se sont livrées à ce travail l’année d'avant ne survit, et que les jeunes Reines ne se servent jamais de vieux nids: un mur, un tronc d'arbre, souvent à côté d'une de leurs anciennes constructions, mais autant que possible dans une position à l’abri du vent et de la pluie et bien exposée au soleil, sont les localités qu’elles choisissent. Quand elle a construit de quinze à vingt cellules, la Reine y pond ses œufs, est fort occupée de la garde de son nid, et plustard, après l’éclosion, de la nourriture des jeunes larves. Tout cela n'est pas pour elle une petite peine, car elle est seule pour faire face à ces divers soins. Les vers, les chenilles et autres insectes mous, composent le menu de sa progéniture, et elle sait fort bien les débarrasser de leurs entrailles, «comme un cuisinier extrait celles d’un poisson», avant de présenter la becquée à ses nourrissons. Les produits de cette première 648 BULLETIN. ponte, qui se compose exclusivement de femelles, sont plus lents à se développer que ceux des pontes ultérieures pour lesquelles la Reine est aidée dans ses différents travaux par ses premières filles nées, vers le milieu de juin. Vers la fin de ce mois{{c'est-à-dire avant la naissance d'aucun mâle), les femelles qui éclosent sont de la taille de la vieille Reine, dont elles ne diffèrent que par la fraicheur de leurs couleurs et de leurs ailes. Le développement des œufs est soigneusement décrit dans l'ou- vrage de de Siebold; cet auteur a observé un état de « Pseudo-Nym- phe » entre celui de Nymphe et celui de Chrysalide. L'insecte parfait rompt avec ses mandibules le couvercle de sa cellule, et fait son apparition avec deux ailes complètement déve- loppées; il dépose d’abord quelques gouttes d’excrétion urinaire, pra- tique dans l'air un vol d'essai et se hâte de revenir au plus tôt par- tager les travaux de la colonie. . Ce n’est que dans le courant de juillet qu'il commence à éclore des mâles. Ce fait est d’une haute importance pour les expériences de de Siebold sur la Parthénogénèse, car si l’on veut étudier le nid au point de vue de cette question, il n’y a pas à attendre plus longtemps; il devient indispensable de tuer, avec ceux de ces mâles qui pourraient être déjà nés, la Reine-mère et toutes les larves ou chrysalides exis- tantes, afin de se bien assurer que l’on conserve une colonie composée uniquement de femelles vierges. Après leur éclosion, les Bourdens jouent d’abord un assez triste rôle: ils rôdent autour des cellules vides et derrière le nid jusqu’en août, époque à laquelle seulement leurs organes génitaux sont entiè- rement développés. C'est à ce même mois qu'ils font leurs premières avances auprès Ges femelles, avances mal accueillies par les ouvrières occupées de leurs travaux. Ce n’est qu’à une certaine distance du nid que leurs empressements finissent par être agréés par celles des femelles, plus grosses que les autres, qui sont destinées à devenir des Reines. Toutes les grosses femelles ne semblent pas réservées à cette diguité, et aucune, paraît-il, ne quitte le nid jusqu’à ce que toute la progéniture soit élevée, c’est-à-dire jusqu’au commencement d'octobre. À cette époque, ces constructions sont abandonnées. Il ne reste que quelques vieilles guêpes, de forme aplatie, qui sont tuées par les premières gelées, tandis que les jeunes Reines, après avoir été fécondées, se cherchent des retraites convenables pour y passer l'hiver. D'après de Siebold, et il a même cherché à se rendre compte de BIBLIOGRAPHIE. 649 cette différence, il existe parmi les mâles des individus aux yeux noirs et d’autres aux yeux verts. Désireux d’avoir une colonie, placée dans des conditions favorables à ses expériences, aussi nombreuse que possible, cet habile obser- vateur eut recours au procédé de destruction que nous avons indiqué plus haut. Les Reines ainsi éliminées furent réservées pour l'étude histologique des organes de la génération: le receptaculum seminis de chacune d’entre elles, rempli de spermatozoïdes très-actifs, donna au savant professeur la conviction que, dans tous les cas, il avait sup- primé la Reine. Cette œuvre indispensable accomplie, et après quel- ques jours d'attente, de Siebold eut la satisfaction de trouver dans les cellules de plusieurs nids les premiers œufs pondus. Les précautions qu'il avait prises lui donnèrent la conviction que ces œufs étaient le produit des ouvrières vierges laissées seules en possession des nids. Pour la surveillance et l'entretien de ces der- niers, ainsi que pour la nourriture des larves, tout se passa dans chaque colonie avec le même empressement et la même assiduité que lorsque la Reine-mère était seule chargée de ce soin. Remarquons que dans quelques cas où de Siebold surprit une ou- vrière déposant ses œufs, cette ouvrière pondeuse fut soumise par lui à des recherches anatomiques : il acquit la preuve, par la présence du corpora lutea, que des œufs avaient été pondus, et, par l’absence de spermatozoïdes dans le receptaculum seminis, que l’insecte était vierge. _ Afin de pouvoir constater lesexe du produit parthénogénétique, dans - la plupart des cas le professeur de Munich ne laissait aller le déve- loppement qu'assez avant pour que la dissection lui permit de recon- naître les organes de la génération. Constamment et invariablement les produits des œufs pondus par des femelles vierges ont été des mâles. Les Reines-guêpes ou femelles fécondées, ainsi que nous l’avons dit, pondent bien, dans l’arrière-saison, des œufs qui donnent nais- sance à des Bourdons, mais ceux-ci se distinguent facilement des Bourdons sortis d'œufs non fécondés par la grosseur relative de leur taille.—De Siebold craignit un moment que quelques-uns des mâles, produit de la poute des Reines-guêpes, ne vinssent visiter sa colonie vierge et compromettre le résultat de ses expériences: mais il fut bientôt rassuré à cetégard, quand il eut fait connaissance plusintime avec les Polistes : il reconnut, en effet, que ces Bourdons princiers (qu'on nous passe cette expression) ne font jamais leur apparition que vers la fin de juillet, tandis que c'était vers le commencement du même mois qu'il avait eu des œufs de ses petites femelles vierges, 650 BULLETIN. Ce n’est, ent outre, que dans le courant d'août, ainsi que l’auteur l’a fait remarquer, et quand les cellules réservées à ses expériences étaient complètement garnies d'œufs, que Le pouvoir sexuel et le désir de le satisfaire s’éveille chez les Bourdons provenant de la Reine- guêépe. Nous terminerons cet aperçu par l’analyse sommaire des principaux faits que l’auteur a observés, au point de vue de la Parthénogénèse, chez le genre Apus. Déjà. en 1856, il avait émis la supposition que l’Apus cancriformis, la Limnadia gigas et le Polyphemus oculus, espèces dont les mâles étaient alors inconnus, présentent des exemples de ce mode de génération. Leuckart exprima ultérieurement une opinion semblable en ce qui concerne la reproduction des Daphnia, des Apus et des Limnadia.—Ce ne fut qu’en 1858 queles Apus mâles furent décou- verts par Kozubowski, etque de Siebold en recut de différentes loca- lités. Ce dernier apprit à distinguer les sexes avec la plus grande facilité, et put seconvaincre que dans ces Crustacés, ainsi que dans les genres de Lépidoptères Psyche et Solenobia, on trouve des pontes uni- quement composées de femelles qui continuent à se reproduire par- thénogénétiquement, tandis que dans d’autres éclosions les deux sexes sont en présence. Le nombre des Apus cancriformis et productus étudiés par l’auteur (de 1864 à 1869) dans l'étang du Gossberg, près de Munich, se monte à plusieurs milliers ; à ce chiffre imposant il faut joindre quelques examens portant sur des individus des mêmes espèces qui lui ont été adressés de divers étangs de l’Europe centrale. En prenant successi- vement, à plusieurs reprises, des centaines d’Apus dans l'étang de Gossberg que nous avons mentionné ci-dessus, 1l ne lui est jamais arrivé d'y rencontrer un seul mäle. Dans une occasion unique, il put faire recueillir l’entier contenu de ce petit étang, de manière à avoir la certitude parfaite qu'il avait obtenu tous les Apus de cette localité. Sur 5,796 individus de ce genre, chacun, examiné avec soin, se trouva être femelle ; tandis que sur 2,576 spécimens de Branchipus récoltés dans le même étang, les deux sexes se trouvaient représentés comme de coutume. Une observation qu'a pu faire de Siebold sur les produits de trois étangs renfermant des générations mixtes dont il recevait chaque année grand nombre d'échantillons, c’est que le nombre des mâles suivait constamment une progression décroissante; ce qui le porte à supposer que, dans ces cas, les mâles finiront par disparaître tout à fait, comme dans l'étang de Gossberg et un grand nombre d’autres semblables. Avant de se livrer à ses recherches sur les Apus, de Siebold avait BIBLIOGRAPHIE. 651 fait une étude approfondie des organes génitaux mâles et des sperma- tozoïdes, ainsi que des ovaires et de leur développement. Il avait re- connu que les spermatozoïdes étaient, chez eux, immobiles comme chez les autres Crustacés, et il ne lui est jamais arrivé d’en découvrir trace dans les organes génitaux des femelles recueillies dans les étangs qui ne renfermaient que des individus de ce sexe; maiscomme il n’a non plus trouvé ni spermatozoïdes ni receptaculum seminis chez les femelles faisant partie de générations mixtes, on ne peut tirer aucune conséquence de ce fait. La structure et le développement de l'œuf rendent pourtant cette observation décisive, puisque l’auteur a pu s'assurer qu’une coquille se forme autour de l’œuf dans l'utérus, et que, vu l'absence de micropyle, la fécondation, si ellea lieu, doit être accomplie avant l’endurcissement de la coque. Une expérience fournit au savant professeur de Munich une preuve d’un autre genre: ayant enlevé à des femelles qu'il regardait comme vierges les œufs qui à cette époque ne reufermaient bien certainement pas de sper- matozoïdes, et les ayant déposés dans un baquet, il en obtint des embryons d'Apus. Suivant de Siebold, la structure de l'œuf est identique, soit que la femelle dont on l’extraitappartienne à une colonie parthénogénétique, ou à une colonie digénétique. Les organes génitaux femelles consis- tent en deux grands tubes placés de chaque côté du canal alimen- taire, s’ouvrant extérieurement à la partie postérieure et se divisant vers l’autre extrémité en branches primitives et secondaires. Au som- met de ces courtes branches secondaires sont situés les follicules ova- riques ; chaque follicule, à une époque très-peu avancée de son déve- loppement, présente quatre cellules dont une prend un accroissement plus rapide et devient la cellule ovarique, tandis que les autres dis- paraissent; l'œuf acquiert alors une certaine taille, et la vésicule ger- minative est visible. Mais dans cet état il est beaucoup plus petit que ceux qu'on trouve dans le tronc principal du tube uvarique ; en voici l'explication, et elle est du plus vif intérêt. Les œufs s’échappent tout naturellement de leurs follicules et passent dans une branche pri- mordiale du tube ovarique ; là, deux et quelquefois trois d'entre eux se fondent en une seule masse autour de laquelle une coquille est sécrétée, ce qui forme l'œuf actuel, en réalité un œuf composé de trois œufs, ur œuf triple; et de cet œuf si merveilleusement constitué, un seul embryon se développe. De Siebold ne dit pas ce que devien- nent les vésicules germinatives; d’après ses dessins, elles disparai- traient à cette époque: L'auteur paraît convaincu que cette fusion de deux ou trois œufs en un seul est un fait normal, ei non dù à-une 652 BULLETIN. pression où à une action osmotique produite pendant l'examen mi- croscopique. En conservant le nom d’Arrénotokie, adopté par Leuckart pour dé- signer le phénomène de la Parthénogénèse donnant lieu à l’éclosion constante de produits mdles, fait qui se présente chez les Hyméno- ptères , de Siebold propose l'expression correspondante Thélytokie pour les cas de Parthénogénèse donnant constamment naissance à des pro- duits femelles, ce qui est aujourd’hui bien définitivement démontré pour certains Lépidoptères et certains Crustacés. D' PALADILHE. TRAITÉ SPÉCIAL DES PHOSPHATES DE CHAUX NATIFS. Tel est Le titre d’un ouvrage que vient de publier M. Malinowski, notre collaborateur. Ge livre est consciencieusement et savamment écrit, et, quoiqu'il se rattache plus spécialement à des sciences autres que celles qui font l’objet de notre Revue, nous devons dire que les aéologues liront avec intérêt et profit Les chapitres sur les Phospho- rites des terrains secondaires et des terrains tertiaires, et celui sur les gisements du Phosphate de chaux du Quercy. E. DuBRuEIz. VARIÉTÉS. C'est chose peu commune qu'une municipalité qui s'intéresse pra- tiquement à la vie scientifique de la cité qu'elle administre. Aussi faut-il s'empresser de signaler l'exception, quand elle se produit. La municipalité de Lyon, à ce titre spécial, a bien mérité de la science et de la patrie. On sait dans quel déplorable état étaient les collections du Musée de la Ville, au Palais Saint-Pierre. C'était le chaos, le royaume de la poussière et de l'inconnu. Le budget était trop faible pour qu'il pût en être autrement. En 1870, M. le D' Louis Lortet, professeur à l'École de médecine et chargé de cours à la Faculté des sciences de Lyon, fut appelé, par le Conseil municipal des derniers jours de l'Empire, aux fonctions de directeur. Il comprit qu'il" y avait là une œuvre à faire ; mais avant de rien entreprendre, ileut la pensée rare, même en province, d'aller voir comment on s'y prenait ailleurs en pareille occurrence. Il visita peu de temps avant la guerre, Les col- lections les plus célèbres de l'Europe, revint avec un plan de réorga- VARIÉTÉS. 653 nisation basé sur les données les plus nouvelles, et se mit résolûment à l’œuvre. Le budget municipal lui avait dès l’abord alloué pour le Musée 11,900. fr. En 1871, les dépenses étaient de 17,437 fr., que le nouveau Con- seil soldait libéralement, et désormais ce taux sera certainement dé- passé. Nous ne pouvons entrer ici dans le détail des réformes accomplies ou à accomplir, ni dans celui des richesses considérables que possède le Musée de Lyon. Ce qui nous a frappé tout spécialement dans cette œuvre intéressante, c’est la préoccupation du but, quise montre partout. Tout y est fait en vue de l'instruction de tous; grâce, par exemple, à la manière dont sont disposées les salles de géologie et de paléontologie, un homme d'une instruction élémentaire peut, en commençant par la première, suivre toutes les phases de l’évolu- tion géologique de notre globe, illustrée par des cartes de toute na- ture, et faire en quelque sorte une promenade à travers l'écorce terrestre. Le public lyonnais semble avoir compris l'intention, et déjà l’an- née dernière on comptait plus de dix mille visiteurs par semaine. Il reste encore beaucoup à faire au Palais Saint-Pierre ; il est à craindre que la place ne manque pour tout caser, mais les résultats de ce court passé de deux ans remplissent d'espoir pour l'avenir. Il y a plus : pour couronner son œuvre, la Ville vient de commencer à ses frais une superbe publication qui porte le nom d’Archives du Muséum d'Histoire naturelle de Lyon, et dans laquelle seront exposées les richesses des collections municipales. La première livraison a déjà paru; elle a pour titre : « Études sur la station préhistorique de Solutré (Saône-et-Loire); par M. l'abbé Ducrost et M. le D' L. Lortet, avec 7 planches. La seconde livraison est sous presse. Voilà ce que fait Lyon. Puisse son exemple être contagieux! WESTPHAL-CASTELNAU. P. S. Comme il arrive toujours, une initiative en appelle une autre. Les Lyon- nais se sont bien vite intéressés à l'œuvre de leur municipalité, et il s’est fondé une Société des Amis des Sciences naturelles, qui a pour but d’accroitre par des souscriptions les ressources du Musée et de développer l'intérêt qu'il inspire. Nous publierons dans la prochaine livraison de la Revue des Sciences naturelles un Mémoire de M. Hesse, intitulé: Observations biologiques concernant les Cymothoaciens parasites, et notamment le Cymothoe Œstre (Cymothoa CŒstrum); un travail de M. Godron, doyen honoraire de la Faculté des Sciences de Nancy, qui a pour titre : Des races végétales qui doivent leur origine à une mons- truosité: ainsi qu’un fragment d’un ouvrage encore inédit du Dr Sabatier, sur l’Anatomie et la physiologie du cœur dans la série des Vertébrés, dont nous sommes heureux de donner les prémices à nos lecteurs. ERRATA. Pag. 277, lign. 33. pouvait au lieu de pourrait. Pag. 278, lign. 9 — — — Pag. 410, lign. 10. Rondani au lieu de Randoni. Pag. 410. lign. 20. Karrer au lieu de Kawavw.… Pag. 410. lign. 35. Modène au lieu de WMessine. Le Directeur : E. DUBRUEIL. MONTPELLIER. -— TYPOGRAPHIE DE BOEHM ET FILS. NOTE DE LA DIRECTION. Une année s’est écoulée depuis la création de la Revue des Sciences naturelles ; l’accueil qu’elle a recu des hommes auxquels elle s’adresse est pour nous un puissant encouragement à continuer sa publication. «Notre principal but, disions-nous en exposant le programme que nous nous étions tracé, est de contribuer à l’œuvre com- mune de la presse scientifique, en tirant tout le parti possible de la situation, souvent favorable, où la plupart des savants de province se trouvent placés.» — Ce but, que nous avons été assez heureux pour atteindre, explique le succès de notre Recueil. C’est en premier lieu aux articles insérés dans nos colonnes que nous en sommes redevables, et, peut-être aussi, à la méthode qui a présidé à leur choix. Nous trouvons un second motif de la faveur qui à marqué l’apparition de la Revue des Sciences naturelles dans la manière dont les analyses scientifiques ont été comprises et traitées par ceux de nos Collaborateurs qui ont bien voulu se charger et qui restent encore chargés de ce soin. Nous venons de résumer en quelques mots les principes qui nous ont servi de guide pour le passé: les mêmes principes nous serviront de règle pour l’avenir. E. DuBruEIL. “HAT Ë AT ar j A 7 sa à f ie (3 eco REVUE DES SCIENCES NATURELLES TABLE DES MATIÈRES Contenues dans ce volume (Tome I). MÉMOIRES ORIGINAUX ZOOLOGIE. Étude sur les Métamorphoses des Axolotls du Mexique; déve- loppement et rotation de leur embryon dans l'œuf; par NORTON. CRU) es Me Re AE HO oege 7 Étude sur les mœurs, le développement et les métamorphoses d'un petit poisson chinois du genre Macropode ; par LE MÊME GB OMAN) EL oEn arc dbtone om ARS SAR TRE 445 Description d'une nouvelle espèce de Pisidie française (P. Du- brueut)Epar BAUDONNP IAE CCE APR ACER #... 30 — D'une Olive des sables inférieurs du bassin Parisien (0. an- HAUT) DAT CRIMEME NBI EC) ERP RME RER PES SRE re Sono Nouvelle classification des Mammifères ; par CONTEJEAN. ....... 151 Description d'une nouvelle espèce d'Helminthe; par Corre..... 199 Contributions à la physiologie du système nerveux des Insectes ; DAT D AUDEEONRE eee cc Cine ie oee e Eee Jet PA) Note sur l'Hylodes Martinicensis et ses métamorphoses ; par PAVA Viet ee ce lee Rate eimoeslale à leic ee cieicie eieltiele Dbpoctéoo cet ve Etude physiologique sur l'appareil générateur du genre Helix (partie) Dan BE EUBAUE. 0 0OURCE D HR short 292 Des Microzymas ( {'e partie) ; par A. EsTor.....,....,...,.... D2D BOTANIQUE. La Botanique, son objet, son importance ; par A. Mizrarper... 33 De quelques Juncus à feuilles cloisonnées, et en particulier du J, lagenarius et Fontanesii Gay, et du J. striatus Schsb. ; par Dovar-JOUvE (BIEL VAN) RSS RC RNECeS nt etc cree 0 ERA Diatomacées de la mousse de Corse ; par Alphonse de BrÉBIssoN CAIN) Re D se ennemies dde ces OO Des régions botaniques de l'Hérault, avec une appréciation pré- liminaire des causes qui nous privent, depuis un siècle, d'une Flore de Montpellier; par H. LorET...........,... 504 GÉOLOGIE. Etudes de Géologie pratique dans les environs de Montpellier ({re et 2e parties); par BLEICHER (PIN, X)-22" 000 2R0 005 36, 319 Note sur un gisement nouveau de Diatomacées dans le terrain quaternaire des environs de Rome; par Guinarp et BLeicHer. 315 Description géognostique du versant méridional de la Montagne Noire dans l’Aude ({'e partie) ; par LEYMERIE (PI. XIV, XV, NON SOI PACE EP ECMERERAR CRE Do die 0000000. 474 Réponse à M. le D' Bleicher sur la question des terrains juras- siques supérieurs du département de l'Hérault; par DE Ronan ES ITU) ne ob oo o HARAS Mas e oo o2 546 REVUE SCIENTIFIQUE. TRAVAUX FRANCAIS. Zoologie ; par le professeur JOURDAIN...:......... 75, 201, 325, 549 Botaniqué; par le D' H. Sicanp................. 88, 233, 362, 604 Géologie ; par le D' BLEICHER. ................ 102, 256, 385, 624 — DA MOOLLOM LR ELEC ERERPREL EEE PNR CERE 396, 640 TRAVAUX ÉTRANGERS. Botanique; par le professeur Miccarper (PL. XI)......... 104, 481 Géologie; .par le D' BLEICHER.............. 2 JATAT ORIE A1! Lettres adressées de Vienne ; par SENONER.....,..., HUE Los 403 BIBLIOGRAPHIE. (Voir la dernière Table.) NÉCROLOGIE. Mort de A. DE BRÉBISSON. .......... D ne o + 2 LOS 113 VARIÉTÉS. Musée Saint-Pierre à Lyon; par WESsTPHAL-CASTELNAU, . ...,,. 655 63 TABLE PAR ORDRE ALPHABÉTIQUE Des Mémoires originaux par noms d’Auteurs. Baudelot ‘E.). Contributions à la phy- ; Guinard et Bleicher. Note sur un siologie du système nerveux des in- sectes. 269 Baudon. Description d'une nouvelle espèce de Pisidie française 30.—Des- cription d'une Olive des sables infé- rieurs du bassin Parisien. 290 Bavay. Note sur l'Hylodes Martini- censis et ses métamorphoses. 281 Bleicher. Etudes de géologie pratique dans les environs de Montpellier. 63 26,319 Brébisson (Alph. de). Diatomacées de la mousse de Corse. 188 .Contejean. Nouvelle classification des Mammifères. Corre. Nouvelle espèce d'Helminthe 199 Dubrueil (E.). Étude physiologique sur l'appareil générateur du geure Helix. 2197) Duval-Jouve. De quelques Juncus à feuilles cloisonnées, et en particulier du J. lagnarius et fontanesii Gay, et du J. siriatus Schsb. 117 Estor (A.). Des microzymas. 525 T5 AN gisement nouveau de Diatomacées dans le terrain quaternaire des en- virons de Rome. 315 Joly (N.). Étude sur les métamorphoses des Axolotis du Mexique 7. — rntude sur les mœurs, le développement et les métamorphoses d'un poisson chi- nois du genre Macropode. 445 Leymerie. Description géognostique du versant méridional de la Montagne Noire dans l'Aude. 474 Loret (H.). Des régions botaniques de l'Hérault , avec une appréciation pré- liminaire des causes qui nous privent, depuis un siècle, d'une Flore de Mont- pellier. 504 Millardet. La botanique; son objet; son importance. 33 Rouville (de). Réponse au Dr Blei- cher sur la question des terrains juras- siques supérieurs du département de l'Hérault. 546 TABLE PAR ORDRE ALPHABMIIQUE DES NOUS D'AUTEURS des Communications et des Publications Analysées dans la Revue scientifique et bibliographique. crane area am Alix (Ed.). Sur l'existence d'un nerf dépresseur chez l'Hippopotame. 344 — Glande parotide de l'Hippopota- me. 81 Analyse des travaux récemment publiés en Italie sur les organes reproducteurs et la reproduction des Anguilles. 350 Balbiani. Sur le développement des Phalangides. 329 Barrandon. Compte-rendu de quel- ques promenades autour de Montpel- lier. L 245 Baudelot. Etudes générales sur le système nerveux, 206 Baudon. Mémoire sur les Limaciens du département de l'Oise. 230 Bavay. Catalogue des Reptiles de la Nouvelle-Calédonie. 989 Bernard (Claude). Évolution histolo- gique du glycogène dans l'œuf des oiseaux. 223 Bert (Paul.) De l'influence des condi- tions barométriques sur la vie. 80, 224, 352, 353. — Recherches sur les mouvements de la sensitive. 102, 259 Blancherie (de la). Nouvelle espèce de Chondrostome. 601 Bleicher. Passage du jurassique au crétacé. 257. — Sur la géologie du bassin secondaire et tertiaire de la région sous-Cévennique. 393 Bocourt. Description de trois nouvel- les espèces de Sauriens du Mexique. 556 Boreau. Botanique descriptive. (Bibl.) 4Al Bouland. Recherches anatomiques sur la courbure naturelle du rachis chez l’homme et les animaux. 229 Boulart. Sur le Macropode de la Chine. 220 Boussingault. Sur une matière sucrée apparue sur les feuilles d'un tilleul. 101.—Recherches sur le fer contenu dans le sang d’un Invertébré. ?26 Brongniart (Ad). Sur le Psaronius Brasiliensrs. 620 Bureau (Ed.). Valeur des caractères tirés de la structure de la tige pour la classification des Bignoniacés. 383 Cailletet. Les feuilles des plantes peuvent-elles absorber des liquides? . 95 Garbonnier. Trois Mémoires pour ser- vir à l’histoire zoologique du Macro- pode. 219 — Sur le Cuprinus Ma- crophthalmus. 601 Carlet. Etude expérimentale sur la locomotion humaine. 361 Cayrol. Essai sur les Corbières. (Bi- bliog.) 265 Chancourtois (de). Sur la corrélation diverse des formes éruptives, etc. 386 — Sur le fer météorique du Groën-" land. 387. — Sur la théorie des sou- lèvements, etc. 387 Chantran. Sur la régénération des yeux chez les Écrevisses. 290 Chantre. Sur la faune du lehm de St- Germain-du-Mont-d'Or. 643 Chatin (Ad). De la truffe, de sa culture, et de sa naturalisation dans les con- trées auxquelles elle est complète- ment étrangère. 621 Chatin (J.) Myologie de l'Hyæmoschus aquaticus. 83, 201.— Etudes botani- que, chimiques et médicales sur les Valérianées. 384 Chelloneix. Note sur la craie du Cap Blanc-Nez. 639. Combes (L.). Constitution géologique du Lot-et-Garonne. 301 Congrès internat. d'anthropologie. 411 Cornu. Sur le Phylloxera. 361. — Monographie des Saprolegniées. 363. — Affinité des Myxomycètes et des Chytridinées. 622 Daintrec. Géologie de l'Australie. 417 Dareste (C.). Corpuscules amyloïdes dans le testicule. 82. — Recherches sur l'anémie des embryons. 205. — Affinités des Balistes. 219. — De l'existence de l’amidon dans la Tortue d'eau douce. 224. — Sur la classi- fication des poissons. 357, 595 Daubrée. Examen des roches avec fer natif découvertes, en 1870, au Groën- land 264. — Des terrains stratifiés CICR 385 Debove. Etude de la couche endothé- liale sous-épithéliale des membranes muqueuses. 392. Defresne. Étude sur les sécrétions bi- liaire et pancréatique chez les Omni- vores. 589 Delesse. Lithologie du fond des mers. 258 Delfortie. Les phoques du falun aquitanien. 346 Desor. Évolution des Échinides dans la série géologique. At4 Deyroille (Th.). Note sur une espèce remarquable de poisson qui vit dans les eaux du Lac de Van. 584 Donnadieu, Sur l'Acarus de l’Erinose de la vigne. ü8)e Dours. Hyménoptères nouveaux ou peu connus du bassin méditerranéen. 084 Douvillé. Note sur la faille de Vernon. 638 Dubrueil(E.). Nouvelleespèce d’Althe- nia (Bibliograph.) 438. — Sur le ca- preolus du Zonites algirus. 995 Duchartre (P.). Observations sur le bulbe de Lilium Thompsonianum.381 Duclaux. De l'influence du froid de l'hiver sur les graines végétales. 102 Dufossé. Production du son chez les Poissons. . 21 à Dugés (Alf.). Nouvelle espèce d'Axo- lotl. 203 Dumortier. Sur la répartition de l'Am- momites viator et del’'Amm. triparti- tus. 262 Durand (J.-P.). Sur la torsion nor- male de l’humérus chez les Vertébrés. 292 Duval-Jouve. Sur l'anatomie des feuilles de certains Juncus 243, 379. — Sur quelques tissus de Juncus 343. — Sur une nouvelle espèce d’Althenia 245. — Diaphragmes des feuilles de Monocotylédones aquatiques 319. — Sur une nouvelle forme de cellules épidermiques qui paraît pro- pre aux Cypéracées. 38 Ercolani. De la portion maternelle de placenta chez les Mammifères. 3582 Estor et Saïintpierre. Sur l'oxyda- tion du sucre dans le système arté- riel. 288 Favre (Alph.). Observations sur le 661 terrain permien 638.— Extension des terrains jurassiques 638.— Gisements et mode de formation des phosphorites. 640 Favre (E.). Note sur la géologie des Ralligstoecke 641. — Sur quelques travaux relatifs à une nouvelle classi- fication des Ammonites. 545 Féraud (Bérenger). Étude sur les larves de mouches qui se développent dans la peau de l’homme au Sénégal. 603 Fermoud (Ch.). Considérations philo- sophiques sur les fleurs doubles. 624 Fischer (Paul.). Note sur les Cacha- lets échoués sur les côtes océaniques de France 219.— Note sur la distri- bution des Crustacés podophthalmaires du golfe de Gascogne 229 — Note sur deux espèces de Globicéphales 343. — Note sur quelques coquilles fos- siles de l'Alaska et desiles Aléoutien- nes 643. — Note sur les fossiles re- cueillis par M. Grandidier à Madagas- car. 644 Flower (W.-A.). De la disposition et de la nomenclature du foie chez les Mammifères. 346 Gaudry. Faune fossile du Léberon. 263 Gerkbe. Recherches sur la formation des produits adventifs dans l'œuf des Plagiostomes. 399 Gervais (H.). État hydropique des Axolotls. 79 Gervais (P.). Sur les formes céré- brales propres à l’ordre des Lémures 78 — Sur le Phylloxera 216. — Mam- mifères fossile d'Italie 219. — Sur un singe fossile d'espèce non décrite 262. — Sur les ossements fossiles des Phosphorites de Caylux 263. —Sur les formes cérébrales propres à différents groupes de Mammifères. 347,518 Gervais (H. et P.). Addition au mé- moire de Turner sur la placentation des Cétacés. | 346 Giard (Alfred). Étude critique des matériaux relatifs à la parenté des Vertébrés et des Tuniciers 209,262. 9me Étude critique 336.— Recherches sur les Synascidies. 965 Glinka Janczenski (Ed. de). Recher- ches morphologiques sur l’Ascolobus furfuraceus. 372 Gouriet (E.) De quelques caractères extérieurs qui différencient les sexes de l'Écrevisse fluviatile. 359 Grad (Ch.). Etude sur le terrain qua- ternaire du Sahara. 416 Grand Eury. Flore carbonifère du dé- 662 partement de la Loire. 392 Grandidier (Alf). Notice sur des ani- maux rapportés de Madagascar. 203 Gras (Scipion). Note sur la géologie agronomique. 216 Gréhant. Sur la respiration des pois- sons. 80.— De la quantité d'oxyde de carbone qui entre en combinaison avec l'hémoglobine dans les cas d'empoi- sonnement partiel ou complet. 586 Gris (Arthur). Recherches sur la moelle des végétaux ligneux. 90.— Considé- rations sur la structure de l'écorce des Éricinées. 102 Hamy. Développement proportionnel de l’humérus et du radius chez l'hom- me. 84. — Contribution à l'étude du développement de lobes cérébraux des Primates. 342 Harting. Production artificielle des principales formations calcaires de l'or- ganisme. . 78 Hébert. Réponse à Zittel (Etage ti- thonique), 632. — Documents relatifs au terrain crétacé 636. — Ondula- tions de la craie dans le bassin de Paris 637. — Faille de la Seine. 637 Hesse. Des affinités et des relations sexuelles qui paraissent exister entre les Sphéromiens et les Cymodocéens d'une part, les Dynaméniens et les Néséens d'autre part. 299 Humbert (Aloïs). Sur l'accouplement et la ponte des Glomeris. 583 Isle (Arth. de l'). Amphibies. Hybridation des Jeannetan (Ed.). Sur l'origine des couleurs, etc. 388 Jeckel (H.). Note sur le genre Cacco- bius, } 084 Jobert. Organes tactiles des Vertébrés 82, 328, 593. — Sur les poils du tact et sur la structure anatomique des rostres de l'Ornithorhynque et de l'Échidné. 82 Joly (N.). Contributions à l'histoire naturelle et à l'anatomie de la Mou- che-feuille des îles Seychelles, 222.—- Sur la Palingenia virgo 222.— Sur le Binocle à queue en plumet de Geof- froy. 230 Jourdain (S.). Anatomie du Gymnètre épée. 86. — Notice sur la Scolopen- dra cingulata. 81. — Note sur le Pseudis de Mérian. : 232 Jourdy. Orographie du Jura Dôlois. 389 296: Kunckel (J.). Recherches sur le déve- loppement des fibres striées chez les Insectes. 361 Lacaze-Duthiers (de). Archives de zoologie expérimentale et générale. Introduction. 74.— Sur les Otocystes ou capsules auditives des Gastéropodes 76, 204. — Station des Chétoptères et des Myxicoles sur les plages de Ros- coff et de Saint-Paul-de-Léon. 214.— Sur le développement des Coralliaires. 333. — Sur le système nerveux des Gastéropodes pulmonés aquatiques, et sur un nouvel organe d’innervation. 338 562 Lapparent (de) Note sur le soulève- ment du pays de Bray. 381 Legros et Onimus. Recherches expé- rimentales sur Certains points de la physiologie des nerfs pneumo-gas- triques. 588 Lespés (Ch.). Étude anatomique sur une Annélide du genre Chétoptère.201 Lestiboudois (Th.). Recherches nou- velles sur la structure des Dicotylé- doues hétérogènes. 376. 617 Levallois. Note sur la corrélation entre les cartes géologiques et les cartes agronomiques. 639 Leymerie. Résumé d'une explication sur les Pyrénées, etc. 387 Loriol et Tombeck. Description géo- logique et paléontologique des étages supérieurs de la Haute-Marne 391 Lortet. Pénétration des leucocytes à travers les membranes organiques. 581 Loven (S.). Étude sur les Échinoïdées. 360 Lyman (Th.). Ophiures et Euryäles du Muséum de Paris. 328 Magnan (H.). Sur la partie inférieure du terrain de craie des Pyrénées fran- çaises et des Corbières. 257. — Ob- servations à propos d'une note sur le fossé de Flamichon. 389. — Sur la base des formations secondaires dans les Corbières. 389. — Observations à propos de deux notes de M. Cayrol. 391 Malassez (L.). Numération des glo- bules rouges du sang chez les Mam- mifères, les Oiseaux et les Poissons. 5817 Malinowski. Traité spécial des Phos- phates de chaux. (Bibliogr.) 652 Mandl. Recherches sur la phonation et les registres de la voix. 203 Marey. Vol des Insectes et des Oi- seaux. 201 Marion. Sur l'Oria Armandi. 231. — Description des plantes fossiles de Ronzon. 253. — Géologie et paléon- tologie de la Provence. 631 Martinet. Organes de sécrétion des végétaux. 95 Martins (Ch.) Recherches sur la po- sition normale de la main chez l'Hom- me et les Vertébrés. ; 84 Mégnin. Sur le développement des Cestoïdes inermes 231 Millardet. (Voy. Sachs). 104, 418 Milne-Edwards (Alph.). Sur le placenta du Tamandua tetradoctyla. 202. — Oiseaux fossiles. 220. — Dé- couverte d'une nouvelle espèce d'Ibis et de Salamandre. 230 — Sur un Tatou fossile. 328. Recherches sur l'anatomie des Limules. 297 Moreau (Em.). Existence d'un muscle dans l’œil du Germon. 994 Mortillet (G. de). Géologie du tunnel de Fréjus. 256 Oustalet. Libellules rapportées du cap Vert. 603 Paladilhe.— Nouveau genre Fran- cesia. 585. — Voyez de Siebold. 646 Panceri. Phénomènes de phosphores- cence chez les animaux marins. 549 Péligo. Sur la répartition de la potasse et de la soude dans les végétaux 249 Perrier (Ed.). Sur le Dero obiusa. 76 Planchon (J. E.), Le Cratægus aronia dans ses rapports avec l’Aubépine et l'Azerolier d'Italie 89. — Sur l'Orme épineux des Chinois 100. — Sur la distribution géographique des Ulma- cées. ; 246 Pomel. Le Sahara. 624 Pouchet (Georges). Observations sur lesdifférentes colorations des animaux 81, 228.— Développement du système trachéen de l’Anophèle 208. — De l'influence de la lumière sur les larves de Diptères privées d'organes exté- rieurs de la vision 347.—Observations sur le développement d'un poisson du genre Macropode. 348 Prévost (G.). Recherchès expérimen- tales sur la distribution de la corde du tympan. 990 Prillieux. Influence de la congélation sur le poids des tissus végétaux. 239 Quatrefages (de). Des populations des îles Andaman. 354. — De la phos- 663 phorescence animale. 358 Ranvier (E.). Des étranglements an- nulaires et des segments inter-annu- laires chez les Raiïes et les Torpil- les. 591 Renault (B.) et Grand’Eury. Sur la structure du Dictyoxylon. 255, 619 Rive (A. de la). Rôle des glaciers. 633 Rivière (E.). Station préhistorique du cap Roux. 644 Rouville (de). Voy. Cayrol.— Au sujet de la Rhynchonella peregrina, de la Valette. 256. — Sur un tableau des terrains du Gard, dressé par Émilien Dumas. 256 Roze (E.). De l'influence de l'étude des Myxomycètes sur les progrès de la physiologie végétale. 622 Sachs (J.). De l'influence de la tempé- rature de l'air et de la lumière du jour sur les variations horaires et quotidiennes de l'accroissement longi- tudinal des entre-nœuds. 104,418 Saint-Meunier. Étude minéralogique de la Serpentine grise. 264 Saint-Pierre (Germain de). Nouveaux documents sur les organes souterrains des végétaux. 621 Sanson. Sur les métis du lièvre et du lapin 85, 201 — Equidés de la Faune quaternaire. 593 Saporta (de). Plantes fossiles de l'époque jurassique 101,250 — Sur une révision de la Flore fossile des gypses d'Aix. 252,264,609 Sauvage (E.). Mode particulier de terminaison de la colonne vertébrale chez les Poissons de l'ordre des Pleuronectes 85,—Note sur le Sebas- tes minimus. 561 Seynes (de). Sur le Penicillium bicolor et sur la prétendue transformation des Mucédinées en levüre alcoolique. 250 Sicard (H.). Observations sur l’histo- logie de la poche pulmonaire du Zo- nices algirus 87. — Sur la connexion qui existe entre le système nerveux et le système musculaire dans les Hélices. 358 Siebold (de). Nouvelles recherches sur la parthénogénèse. (Bibliog.) 646. Sinety (de). Etat graisseux du foie. 988 Sirodot. Sur un dépôt osseux au pied du Mont-Dol 392. — Étude anatomi- que et physiologique sur les Algues d'eau douce de la famille des Léma- néacées. 610 664 Toucas (A.). Terrains crétacés du Beausset. 258 Trécul. Du suc propre des feuilles d’Aloès 93.— Remarques sur l’origine des lenticelles 93.— Cellules de levûre de bière devenues mobiles comme des monades 100. — Disposition remar- quable des stomates sur certains vé- gétaux, et en particulier sur les pé- tioles des Fougères. — Observations sur la nature des différentes parties de la fleur 382. — De la théorie car- pellaire d’après les Papavéracées. 618 Triana (J.) et Planchon (J. E.) Prodomus Floræ Novæ-Granatinæ. 250, 610 Tulasne. Note sur le Fungi Tremellini et leurs alliés. 374 Turner (W.) De la placentation des Cétacés comparée à celle des autres Mammifères. 344 Vaillant (Léon). Sur un appareil glan- dulaire du système musculaire cutané de l’Oncidium Celticum 86 — Distri- bution géographique de Percina. 599 — Valeur de certains caractères em- ployés dans la classification des Pois- sons. 600 Van Bambeke (C.) Premiers elfets de la fécondation dans l'œuf des poissons. 85 Van Beneden (Ed.) Sur la place que les Limules doivent occuper dansla classification des Arthropodes d’après leur développement embryonnaire. 79 — Développement des Ascidies. 218 Van Tieghem. Observations anatomi- ques sur le Cotylédon des Graminées 376. — Sur les Graminées. 604 Van Tieghem et Le Monnier. (G.) Sur le polymorphisme du Mucor mu- cedo. 211. Sur le polymorphisme des organes reproducteurs dans le genre Mortierella. 241. — Sur les zygospo- res du Mucor phycomices 241 Verneuil (de). Sur la dernière éruption du Vésuve. 639 Vibraye (de). Sur l'apparition sponta- née en France des plantes fourragères exotiques. 245 Villot (A.) Sur la forme embryonnaire et sur la forme larvaire des Dragon- neaux. 360, 602 Weddel (H.-A ) Sur les Podostéma- cées en général, etc. 623 Yermoloff. — Sur les phosphates de chaux de Russie. 264 Ziegler. Sur un fait physiologique ob- servé sur des feuilles de Drosera. 238 Zittel. Etage thithonique. 631 Ce TPE NS | “Xe Two met A + SASIMIPN SHOUSL0S S9p ANAIU Revue des Sciences Naturelles Tom.Lpl. XIV & XV. FOSSILES DÉVONIENS des MARBRES de CAUNES /Mimisgné Noire) Montp'Lith Boëhm & Filse #e | | Revue des Soicnces Naturelles + Frot COUPE des TERRAINS ANCIENS de la MONTAGNE NOIRE au MERIDIEN JeCAUNES Échelle gaéor hauteurs doublées Roc granitique d e Payremoux Lespinassière 1007 S È Citou Caunes de Quartz NN À 903" Schiste micace Inférieur nn jeur Silurien Niveau déls Mer Calcaires marmoréens SIN Sipérieur ig- IL. ROC de PEYREMOUX , / face Nord) Hg COUPE dela BANDE MARGINALE par S'ROCH de MONTOLIEU et PEZENS Echelle grovo hauteurs doublées F . St Roch à È de Montolieu Butte de Valleron : 5 PE près Moussoulens pate ee n * ES Terrain à nummulites ce , ne Cale. de Ventenac Ü deCarcassonne | Gneiss.… NN O. = = Gneiss et Schuste î … Niveau de la Mer Fresquet R Li Peak à fils, Mentp® E 550. Revue des Siences Naturelles Tom. | plAVHl Cazillac C.Calcaire Corallien de Cazillac Ne Néocomen T N2.Marnes Néocomiennes ‘ORD SUD Llaine deLarogue, <<, LD Plaine de SfBauzille C. Calcaire compacte, lithographique ruiniforme . 0° Uxfordien supérieur en bancs de 9,50 à 0,80 0. d° roprement dil avec Ammonites biplex trés abondant en bancs minces PUR SR MOMTEE SSI CR N.Néocomien l'Hérault C'Calcaire à faciès Corallien CRUE compacte, ithographique ruiniforme O'Oxfordien supérieur en bancs de 0,50 4 0,80. CNE inferieur à banes minces avec Ammonites biplex. N Néocomien Z18 Drelm #1 Monip? 4) ARS POP Rat RARE DEA LE? MESSE ir Ua N'ES | SA QE CA à, 4 . as. t PA Ale => gone NS F z