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REVUE

ENCYCLOPEDIQU

ou A^^ALYSE RAISONNEE

DES PRODUCTIONS LES PLUS KE^IARQUABLES

DAJ.S LA LlTTERATUaE, LES SClENCtS ET LES ARTS.

Sciences physiques et jnatkimatigues et ^irls mdustriels; Sciences nalurtUes et medicates: MM. Ch. Dupin^ Foup.ier, del'Inst.; Ferry; FRAiiCaiuii ; I.E NoRMAJJD , prof, de technologic, etc.— de Mol:6on ; A Michjelot ; Coquerel; Floubens, D. M. ; AuELON ; Bally; EsQuijiOL; Friedlan- UFR; Macoidii;; Orfila ; Pariset ; PkiQ'JEPAL, D. M. ; Cba?tal, de rinstilut; Desjiarest ; W. Hutchinson: Moreau de Jonxes De Ferussac:— DEsr-iouLiKS, D. M., etc.

1" Sciences phtloaopkiques et morales, politiques et histo- riques : MM. Lanjuinais ; M. A. Ji'llien, de Paris ; Al. de LA BoRDE, de rinstilut ; AuNiiE ; Arkold. de Strasbourg; Babev ; BARBiii-DuBOCAGE, de I'Tast. ;— J. ' . Bal'DE ; Bdckox- Cousi>'; Degerakdo del'Inst.; Depping; A. Dujrayer; loMARD^ del'Tnst.- Meyer, d' Amsterdam:— P. Lami; J. V. Le- CLERc; Laefok de Ladebat; deLasteyrie; Alex. Lameth:

NaUDET, de rinst. ; PARENX-RiAL; G. M. Baymojtd; E.

Salverte; Simon cE de Sismoxdf; Staffer; Thierry, etc. Littirature frangaise et etrcingtre, Bibliographie , Archeo- logie et Beaux jirts : MM. Aignan, Anbrieox, Amaitry-Duval, Lkmercier, del'Insiitut;— a. Maadi; Heic richs; Arxaud; AvESEL;— Barrier, conservaleurdesbiblioiiit'.jiiesduRoi, S.A. Bervit.le, Michel Berr; BRUGUiiRES de Sorsu.m; C.i.«et deGabsicourt; Cerbied,- Oa.vMPCx-LioH-ilGEAO,. coiTesp. de

rinst. ; J. DrOZ; DUMERSAN; EmEIIIC^U.KVIO ^ de I'liifl. ;

Fauriel; GiEPP; Ph.Golbery, deColinai;— ChaCvet,— Hei- BERG; KRjiFFT; Langles^ dei'Inst.; Lio rente ;-3J^lAHn ON ; A. jMetr.u,;— rviooLO Pouio; :Pougens, del'Inst.; y-Salei/ ScnwEiGH<EUSER Lils, da Strasbourg; df SfisuR ;— Sicard^ del'Inst.; deStassart; ^S. D.Thiery; Trissse; Verdier; ViOLLET Ledoc; .^ Warm-n, anciea Coiuul dc Etats-Lnis d'Araerique, ef:.

PARIS,

AU RUHKAU CENTRAL DE EA BEVUK i;>. CVCLVrKniQl' E,

Rue d'Kuter-Sainl-.yiilicl , S>^ iS,

ET CHEZ ArTHUS BkRTRAND, RUB U AUTEFEU JLI,B, S'' J*.

I.OMDRES. 'IREUTTEI. ET Wi)RTZ , et DcLAtr el (■•■.

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n- I A SOUSCRlPTIO?i.

Il<|>iii> Ic 111.11.-. ,iK |.t!nie.i 1819. il iii.i.i, (i.n ami. 1. , ilmi/r r.ihicrs lie <e Rprufil ; ('li;i(]iie caliief, publie It 3o (iu moik, kc < Dnipose <1 1'liviion ilouzc fruillcs (.riiiiptTSsioii.

On sotisr.iji^ H Piins . au Bureau central diil>orinc/ncni el il i.ypeditivn iudiijuosur le litic.

Prix lie la SouscripUon .

\ Paris 42 Ir. pour un an, 24 I'r. pom G nioii,

n.inslesdcpnrteniens. 48. 7.S.

Dans re'lianger 54. 32.

La flifFc'ienrc cntre Ic prix d'abonncmcnl , a Paris, dans Icb tUparteinens ex dans Vetranger , devanl due piopoiiioniielle anx frais d'expedition par la poste, a sei-vi de base a la fixalioii definitive portee ci-dcssus.

Lcmonrant de la Souscription, envoye par la ])ostc, doit 6ue adi'psse d'avaiice, et franc deport, awf^i que la concspoiidaiicf, au Direclcur de la Revue Encyclopedique , rut d'Erifer-Sainl- Michel, n" i8. (.Vest .\ la mcine adre«se qii'on devra envoyer Ics ouvrages de tout genre et les gravures qu'on voudia faiie annoticer, ainsi que les ai tides dont on desirera I'insenioD.

On pcut aussi souscrire ohez les djrccteurs des postes et clies If!, piiticipaiix lil)iaires, a I'aris, dans les departemeiis et dans les pays p'tv.Tngeis.

Trnis caliicis ou livraisons fornneront un volume. Cliaqiie vo- lume sera teiniine par uue taLIe des lu^tieres a1pliabe'iiqii° •l (iiialytiqne, qui eclaircira et facililera les recherches.

On envo'ic, avec les dix feuilles publiees d'abord separemeul , les cinq demieres qui terminenl le cahier de juillel, auquel est jointe la Table des matieres du tome X.

Le prix de VHistoire de la pie et des ouvrages de J. J. housseau, porle par erreur a lo francs, est de i4 fraucs.

V-ti-^r^iU.

REVUE

ENCYCLOPEDIOUE

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REVUE

ENCYCLOPEDIQUE,

ou

ANALYSE RAISONNEE

DES PRODUCTIONS LES PLUS PtEMARQUABLES

DANS t^ UTTERATURE, LE5 SCIENCES F.T LES ARTS,

PAPi UNE PiEUNION

DE MEMBRES DE L'INSTITUT,

ET D AUTP.ES HOMMES DE LETTRES.

TOME XI.

PARIS,

AU BUREAU CENTRAL DE LA. REVUE ENCYCLOPEDIQUE, Rue d'Enfer-Saint-iMichel , n" 18.

F.T CHEZ ARTHUS BERTRAND, RUE HAUTEFEUILLE , 23,

LONDRES. TREUTTEL ET WURTZ, ET DVLAXJ ET C"^-

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JUILLET 1821,

« Toutcs les sciences sont les rameaux d'unc ni^nie tige. »

Bacon.

« L'art n'est autre chose que le conlrole et le registre des meilleures

productions A contrfiler les productions (et les actions)

d'un clincun , il s'engendre envie des bonnes , et me'pris des maii-

vaiscs. »

Montaigne.

W Les holies -lettres ct les sciences , bien e'tudi e'es et bien comprises, sont des instrumens universels de raison , de vertu , de bonheiir. »

REVUE

ENCYCLOPEDIQUE ,

ANALYSES ET ANNONCES RAISONNEES

Des productions les plus reniarquahles dans la Littirature , les Sciences et les Arts,

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1. MEMOIRES, NOTICES,

LETTRES ET MELANGES.

NOTICE

Sui^ Us chcvres d& race thib6tain& , dttes chivrcs- - cachemire (i).

L'int^ret que le public ^clair6 a paru prendre h I'lm- portation desch^vres de Cachemire, eflectu^e en 1819,.

(i) Onpeut consulter dans le Bulletin de la societe d'encourage~- ment pour finduslrie nalionale , n' clxxv, une soiica tres-interes- sante siir V introduction en France des chevresd lainede Cachemire,. originaires du Thibet, -pAV M. Tkrmux, memh?e de la chamfare des d(^pute3 ct du comite des arts mccaniques de la societe d'oncoura- goment.

G NOTICE

par Ics soiiis tic MM. Ter.naux cl Jaubert, nous deter- mine ti faire connaitre h nos lectcurs I'^tat aclucl de celle belle entreprise, et Ics rcsullals qu'ont procures trois ann(5cs d'observalions cl d'expcriences. Quclque niinulicux que puissenl clre Ics d6tails oil nous allons cntrcr, ils neparaJtront pas indiffdrens aux agriculleurs instruits, aux manufacturicrs iolelligcns, aux noinbreux amis dc rinduslric nalionale.

Le troupeau se composait, an moment de son arri- \&c en France , de deux grandes divisions , dont I'une, anicnte parlenavire (e Saint-Nicolas , avail 6le dcbar- qu6e h Marseille, et I'autre^ cmbarqucc sur la Ca- therine, otail arrivec h Toulon.

Le Iroupcau du gouvernement cl une partie de celui qui appartenait 5 MM. Ternaux et Jaubert furent diri- gcs vers la bergerie royale de Perpignan , d'aprfes I'avis du respectable M. Tessier , membre de I'lnstitut , qui, aprfes avoir conlribud h. procurer a la France I'inap- preciable bienfait de Tintroduction des moutons meri- nos , devait naturelleraent associer son nom ci I'hon- neur de celte nouvelle importation ; le reste fut conCe aux soins de divers proprit^faires provencaux.

La division stationnce dans les environs de Perpignan a constamraent prospere ; les animaux sont dans un ('•lal dc santd parfait; la bcaut6 de leur duvet ne laisse rien Jj dcsirer, leur nombre est plus que doublti.

Soil que Ic climat de la Provence fut molns favo- rable , soil qu'on cut !aiss6 brouter h ces animaux des planlc6 moins salutaires , soil par dcfaut dc soins, la division slalionn^» ;. Toulon jierdil , dans Ics premieres

sun LES CHEVRES DE RACE THIlililfAINE. 7

anndes , un nombre considerable de ch^vres , en com- paraison des mortaliles eprouvt5es h Perpignan et ail- leurs. Cetle circonstance determina MM. Ternaux et Jaubert ii les disst^miner dans I'intdrieur du royaume , au moyen de ventes particuliferes , et h faire venir h Saint-Ouen , prfes Paris , la majeure partie de celles qui restaient. Elles y sont au nombre de centquatre-vingls environ , dont un tiers provient de I'importalion pri- mitive , un tiers de la croissance de iSao, et un tiers de celle de 1821. Elles sont parqu^es dans un grand carre , entourt^ d'arbres qui leur procurent un ombrage tres-frais en etd ; aux deux extrdmit^s , sont deux petits reservoirs d'eau fraiche , et deux bergeries conslruites sur le modele de celles du Jardin des Plantes ; les ch^vres peuvent boire , s'abriter, entrer et sortir libre- ment , quolque conservant toujours les separations au moyen desquelles on pent suivre I'education de ces pr^cieux animaux, dans toutes lespdriodes de leur exis- tence et de la croissance de leur duvet. Cette disposi- tion, pratiquee avec autant d'^conomie que d'intelli- gence , donne h cette partie du pare de Saint-Ouen un air piltoresque et anime qui produit une sensation trfes-agreable. Lechevrier a remarqu^ que les personnes qui visitent ce lieu ont de la peine h s'en eloigner.

Ces animaux ont dans leurs mouvemens une liberie , une adresse et un moelleux remarquables ; les jeunes surtout ressemblent aux plus jolis petits chiens pour la forme et aux jeunes chats pour la grace ; ils different de noire race indigene, en cc qu'ils ont les oreilles pendantes , la queue retroussee , les comes droites ot

8 iNOTICE

presquc loujours croisi^es. Ces chfcvres ne sont pas plus grandes que Ics nolrcs , mais dies ont plus de corps ; ct, en les comparant avec nos plus belles esp^ces dc chfevres blanches , dont M. Ternaux a r6uni quelques- jines dans son pare , on y pent observer la memo diffe- rence qu'cntre les chevaux arabes et les chevaux euro- peens.

Le lait dc ch^vre de race thib^taine parait Clre substanlicl et abondant, puisque les jeunes aniniaux sont, au bout dc Irois semaines , aussi grands et aussi forts que ceux du pays , au bout de six ; ils semblent d'un nalurcl moins sauvage que les nolres, m6ins vagabonds, plus faciles ij garder et h fairc marcher en troupe. Ces animaux ne sont pas plus difficiles nourrir que les chfivres de France ; ils mangent lout , nicme Ics marrons d'inde, les fannes dc pommes de terre, les herbcs provenant du sarclage , les fleurs que Ton arrache lorsqu'ellcs sont pass6es , les branches ct les feuilles dc toute cspi;ce; il en resulte que , sans rien prendre sur la nourriture des vaches , on pent , dans chaque pare ou jardin , nourrir unc certaine quanlilc dc chtvres-cachemire avec les debris de ver- dure que Ton jclterait.

La nourriture d'hivcr , toujours la plus couteusc pour tonic cspece d'animaux , est aussi Ires-econo- mique pour ccux-ci, surloutdans les pays de vignobles; on pent la composer de feuilles de vigne que Ton ra- masse aprcs Ics vcndangcs , en les mellant dans des lonneaux ou dans des vases quelconques ouverts par dessus ; on les y licnt enlassees avec des planches en

SUR LHS CHEVRES DK RACE THlBJ^rAINE. 9 croix , sur lesquelles on pose une ou deux grosses pierres ; on y verse ensuite <le I'eau fraiche , qu'on a soin d'entretenir tons les huit ou quinze jours , de manifere compenser I'evaporalion et h ce que les feuilles n'aicnt aucun contact avec I'air exterieur ; on peut y Jeter un peu de sel, donl les chfevres sont tr^s- friandes, mais cette d^pense n'est pas n^cessaire. Les feuilles d'orme, et meme celles de tout autre arbre , peuvent aussi etre conserv^es et servir h la nourriture de ces animaux. Mais, ce qui leur est aussi favorable que I'avoine et le son , c'est le marc de raisin , meme apr^s qu'on en a fait la piquette ou I'eau-de-vie , lorsqu'on est pret enfin h en faire du fumier. On doit le conser- ver de la meme manitjreque les feuilles de vigne.

La chair, qui est trcis-bonne lorsqu'elle provient de jeunes animaux, ou le lait dont on peut faire du fro- mage , offrent encore une branche d'economie ru- rale utile h exploiter, h plus forte raison lorsqu'on peat laisser brouter les troupeaux toute I'annee dans les landes , dans les bois, ou sur les montagnes, sans s'en inqui^ter. Comme il est constant que ces ani- matfx se plaisent mieux qu'aucun autre dans des temperatures diverses, puisqu'ils multiplient depuis le So" jusqu'au 62" degr6 de latitude, il n'est pas h craindre qu'ils souffrent dans aucun climat de la France , et I'on n'a point remarqu6 que le climat des environs de Paris leur fCit plus nuisible que celui de la Provence. L'humidile, que ceschfcvres supportent aussi aisement que les moulons (avec lesqucls elles out d'ailleurs plusieurs traits de ressemWancc ) , est neau-

10 NOTICE

moins ce qu'elles ont Ic plus a rcdouter. Les perles qui ont t^l(i lailes , depiiis que ces pr«3cieux troupeaux sont en France , sont proven ues dc ce qu'on nomme la ma- ladic des bois , parce que ces chevres avaicnt mange, au printems , une Irop grande quantity de jeunes bourgeons ou d'herbes trop fralchcs et trop humides.

On sail qu'cn g<5n6ral les chevres se reproduiscnt rapidement. Celles-ci ont souvent donn6 deux clie- vreaux , et plusieurs d'entre cllesont 6l6 couvertes deux I'ois dans la memo annde, avec succfes; loutes sont pro- pres ci la multiplication , h I'age de quinze h seize mois, et quelquefois beaucoup plus tot. Une chevrette , n^e au mois de Aivrier 1820, a mis bas une chevrette aumois d'avril 1821.

Depuis deux ans que I'importation a eu lieu , on n'a pas remarqu6 que ces animaux aient dt^gen^re sous aucun rapport ; le duvet qu'ils produisent est toujours aussi beau et aussi abondant que celui des jeunes betes qui sont n^es depuis leur si^jour en France.

Une seule ch^vre indigene a et6 couverte dans la premiere annexe , parce qu'alors les boucs <itaient telle- mcnt insulfisans qu'il lallut envoyer h la Valduc , prfes Marseille, le bouc de Cachcmire qui <5tait au jardin du roi. Cette seule ch^vre , sans duvet , a produit par le croisement une chevrette qui donne un duvet fort beau , se rapprochant bien plus du duvet de Cache- mire que du duvet indigene. Celte ^preuve ne laisse au- cun doute sur la possibilite d'obtenir, par le croisement des chevres de Cachcmire avec les notres , le meme suctt-s (ju'oiu obtoiui Ips agricullcurspar le croisernenl

SCR LES CHEVRES DE RACE THIB^TAINE. 11

des merinos avec les moutons du pays^ et la r6colle du duvet sera au moins un b6n6fice net, provenant de la subslitution d'une race h I'autre. Nous disons benefice net, parce que, s'il est vraique quelques especes de chfevres indigenes aient du duvet sous leur longpoil, comme les ch5vres de Cachemire , et que ce duvet soit fia et moelleux , il n'est pas moins constant qu'il est mou , cotonneux , incapable de supporter I'op^ration du peignage , et par cela meme de servir h la fabrica^ tion des chals ; il se trouve en si petite quantite d'aprfes tous les renseignemens parvenus au ministt;re de Tin- t^rieur , qu'il ne vaut pas la peine d'etre recueilli. II est d'ailleurs gen^ralement gris, et je ne sache pas qu'on en ait trouve de tres-blanc en France ; cette dernifere condition , qui rend le duvet propre h. recevoir toute espece de couleur, est cependant indispensable.

Au reste , I'existence de cette race de chtjvres indi- genes , portant duvet , est un indice pr^cieux , parce qu'il donne la certitude qu'^tant croisees avec les races de Cachemire, elles ne tarderont pas h nous affranchir d'un tribut que nous payons h I'^tranger pour I'achat de cette malifere; tribut qui deviendrait d'autant plus on^reux que , de toutes les substances filamenleuses , le cachemire r^unit le plus d'6lasticit6, de douceur, dc chaleuretd'^clat; propri6t6s qui tendent h. en accroitre de plus en plus Temploi.

La substitution de la race de Cachemire & nos races indigenes aura cet avantage que nos manufactures, ali- menl^es par leur produit, ne pourront plus etre arret^es

12 NOTICE SUR LES CIliiVRIiS DE RACE THIB.

dans leurs Iravaux par une guerre ou par des 6v6ne- inens qui cuipCchcraient do tirer dc I'^lranger cetlo malii^rc.

Pour niieux appri^cicr Ics utiles r(5sultals do la natu- ralisation des chiivrcs , dilcs dc cachemire en France , il serait important d'etre fix6 sur la quantity de duvet qu'on peut esp6rer de recueillir, ainsi que sur le prix qu'on peut en obtcnir, corame on Test sur la qualite ; mais on n'a pas encore de denudes certaincs sur ces deux points , parce qu'il exisle bcaucoup d'int5galitcs. Quelqucs chtjvres ont donue aSo et ooo grammes de duvet, tandisque d'aulres n'en ont produitque loo ou 120, soil qu'clles eusscnt Ic poil ras ou long. II en a 6te rccueilli , I'annee dernitire , a la bergerie royale de Perpignan, environ 12 kilogrammes sur iooanimaux;ce qui.d'apres le rapport de M. Tessier, a donne 0" 2)0 par chaque bOlc , I'une portant I'autre ; mais on en avait beaucoup perdu , h cause de la gale que le troupeau avail eue. II n'y a pas de doutc que , d'aprfes leur par- fait 6lat de saul(5, la rocolle , celtc annee , ne soil plus abondante. Celte petite quantit6 est d'autant plus sur- prenantc que Ics animaux dont on n'avait pas encore rccueilli le duvet par le peignage, en paraissaient trtjs- charg^s. Dcpuis quclque terns, le prix de cctte matiere a beaucoup varic j on peul aujourd'hui acheter pour 9 fr. le i;2 kilogramme de cachemire blanc , ^pluchc , quicou- tait , il y a deux ans , 20 Ji 22 fr. Mais , quclque mod6r6 que^ soil le prix de ce duvet , quelque petite qu'en soit la quanlile , loujours y a-t-il un avantage t\ (^changer la

BIOGRAPHIE DE SHAKESPEARE. 13

race francaise centre une espfece incomparablement plus parfaite.

N. B. Nous croyons utile de inentionner iciles noms de quelques propri^taires fran9ais qui tlevent en ce momenl des chevres-cache- mire, et qui au^'ont sans doute de nombreux imitateurs :

M"" Gibelin-No6 , au Verger, pres Marseille (Bouches du Rhone).

MM. Heurtaut de Lamerville, a Lapcrisse (Cher). Givry pere , a Varry (Cher). Theodore Geslin, i Beaurepaire. Bonnemere, k Sau- mur ( Maine-et-Loire). D'Artigues, i Voncches (Ardennes.) Petit-- Hutin,a Rheims (Marne.)DeNeuviIiette,i Vilbruan (Haute-Marne). Harmand, prefet , a Mezieres (Ardennes.) E. Boucherot , a Chartres (Eure-et-Loir. ) Barthellemy, i Metz (Mozelle. ) Poidbart, 4 Lyon ( Rhone.) De Courcy, h GervilJe (Seine-Inferieure.) Rion, i Brest (Finistfere. ) Rogier, k Moulins (Allier. )

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BiOGRAPHiE DE Shakespeare, ct coup d'(ziL gtndral suf le caractcrc dlstinctlf do son genie (i).

On ne voit jamais Shakespeare en France qu'au milieu des bourreaux et des supplices, arme du poignard ou de la coupe empoisonnee , et se plaisant i epouvanter I'imagi- nation de ses lecteurs par la peinture de tout ce que le crime a de plus atroce et Ic vice de plus hideux. On se le

(i) Shakespeare n'etait connu en France que par la traduction tres-fautive de Letourneur ; MM. Guizot et Pichot ont entrepris une revision complete dc cette traduction , et le libraire Ladvocat s'est charge de la nouvelle edition , dont il a deja publie cinq volumes, Ilmetbeaucoup d'activite et d'exactitudedans cette entrepri&p, ainsi que dans la publication de la traduction de Schiller par M. de Barante, dont il a paru trois volumes. Lc ministre de I'interieur a souscrif pout vjngt-cinq exemplaires de chacun des deux ouvrag-es.

lA lilOCRAPHII' DE SHAKESPEARE,

represente, implacable et terrible, comme la Nemesis an- tique, eclairant le front des coupables de la lueur livide de son flambeau , ou les voilant d'un funebre linceul pour les abandonncr au bras vengeur de la justice. Les spectres, les cercueils, les instrumens de torture, les echafauds, voil;\ les accompagnemens etcrnels que Ton donne A ses lugubrcs dramcs. Voltaire, qui le premier fit connaitre Shakespeare en France, a contribuc surtout a fiiire naitrc cctte fausse idee; et les critiques superficiels, qui croient souvent donner une haute opinion de Icur patriotisme , en defendant mcmc les pretentions injustes de la vanite natio- nalc, aux depens do la gloire veritable et fondee de ce qu'ils appellent les etrangers, comme si les lettres n'avaient pas partout leur droit de naturalisation , se sont empares de cette assertion , pour repcter a I'envl que les melodrames franf ais etaient souvent des chefs-d'oeuvre de raison aupres d£S grotesques et nhsurdes compositions du sauvage iure.

Les plus raisonnables d'entre eux avouaient bien qu'il y avait parfois de I'or dans le fumier de ce barbare ; mais ils pretendaienl en meme terns que, s'il reussit parfois i vous faire trembler, s'il sait mieux qu'aucun autre pre- senter le crime dans sa honteuse grandeur, il depasse aussi Irop souvent les bornes de la terreur tragique et ne sait jamais redcscendre a de plus doux tableaux pour eveiller notre sympathie , a la vue des vertueuscs douleurs d'une autre Andromaquc ou des interessantes faiblesses d'une tendre Monime.

II est d'autant plus etrange de voir une telle opinion accreditee, que les defauts et les qualites de Shakespeare sont reellemcnt tout-i-fait opposes aux defauts et aux qua- lites qu'on lui accorde. Chez lui, la terreur n'est qu'un ressori ii-t;s-secondairo , tandis que le pathetique est son

BIOGKAPHIE DE SHAKESPEARE. 15

caractere vraiment distiiictif. Shakespeare etait un ccrivain profondoment moral, qui sentait bien que, si la terreur peut un instant etonner les homines, ce n'est qu'en parlant a leur coeur qii'on obtient sur eux un triomphe durable. II savait, en nous inspirant I'horreur du crime, par lequel les coupables s'isolent de I'humanite, appeler ensuite la pitie sur eux, en les rendant a i'humanite par la puissance du remords. C'est ainsi qu'autrefois lecygnedel'Ausonie, rharmonieux et tendre Virgile, apres avoir fait descendre Mezence du rang d'homme pour le placer dans celul des tyrans, sait le relever ensuite en lui donnant les affections ctles douleurs d'un pere. Convaincu, comme Virgile, que le vice est hors de la nature et ne peut exciter aucun interet, Shakespeare, bien different des poetes qui prc- tendent etre de son ecole , a toujours su le faire plaindre dans I'adversite , mais jamais il ne lui a concilie dans sa prosperite une immorale admiration.

Lesdefauts de Shakespeare tiennent a I'abus memede ses qualites. Ce qu'on peut lui reprocher, c'est plutot de I'affeterie et du bel esprit qu'un exces de force ou de roideur.

Quand nous ne saurions pas, par les details qui nous sent parvenus sur lui, qu'il eut une de ces ames tendres, dont le sort est de souffrir plutot que de faire souffrir les autres, la lecture de ses ouvrages suffirait pour nous prouver qu'il etait fortement attache aux qualites qui ho- norentl'homme, et anime d'une haine vertueuse contre les >ioes qui le ddgradent. Ce n'est point dans les conceptions qui demandent rapplication de toutes les forces de I'intel- llgence, qu'on reconnait la verite de cette opinion recue, que I'ecrivain se peint dans ses ouvrages. Si I'on veut saisir son caractere, il faut attendre qu'il s'abandonnc sans mefiance i\ I'inspiration de ses affections naturelles. Si ce

16 BIOGRAPIIIK DE SHAKESPEARE.

n'est point I'artistc que Ton veut observer, il faut laisser de c6te tout ce qui appartient ii retude. pour saisir ce qui est de la nature. Malheureuscment, I'homme ne sc retrouve souvent que dans un trait fugilif , qui ecliappe aux obser- vateurs superficiels et qui se perd en passant d'une langue dans une autre. Les traductcurs rendent asscz bien le grand, le beau , le terrible, I'artificiel; mais le simple, le pathetiquc, Ic naturel resiste a leurs efforts. Voila par quelle raison un des ecrivains les plus pathetiques a cte si long-tems un des ecrivains les plus meconnus. Un coup d'oeil rapide sur sa vie fera niieux comprendre ce que nous avons a dire de lui commc auteur.

William Shakespeare naquit i\ Stratford sur I'Avon, dans le comte de Warwick, le a3 avril i56A, la 6" annee du regne d'Elisabclh. Ses premieres etudes durent lui ins- pirer fort peu de goCtt pour les Icttres grecques et latines. L'usage ^'etait alors introduit de faire apprendre par coeur auxenfans desrudimens ccrits en latin, et de leur enseigner les regies de la syntaxe au moyen de vers ecrits aussi dans ec latin barbare. Aussitot que leur jeune intelligence coramencait a surmonter I'ennui de ce fastidieux travail, on placait dans leurs mains, non pas ces auteurs qui, plus voisins que nous des tcms oii les liberies individuelles etaicnt encore respectees et oil la raison n'etait point en- chainee par des formules artificielles, ont imprime a leurs males ecrits un noble caractere d'independance et de ve- ritc, raais des auteurs fails expres pour les tems nouvcaux et les nouvclles formes sociales; tel ctait, par cxemple, ViipwcLpxic, sive ElisabetJia^ Wtve, ecrit en vers latins pour recommander aux sujets anglais un respect loyal et absolu pour le caractere et I'administration d'Elisabeth et dc ses sages ministres, quels qu'ils fussent. Celivre, d'apres les injonctions expresscb dc Tautorile supericurc, devait elre

BIOGRAPHIE DE SHAKESPEARE. 17

repute classique et se graver d'une mahiere indelebile dans la memoire de tous ceux qui seraient un jour appeles a jouir des bienfaits d'un tel gouvernemetit. Soil que la fausse direction donnee aux etudes degoutut le jeune Sha^- kespeare, soil que la fortune de son pere, diminuee pai? quelque accident, ne lui permit pas de suivre plus long- tems les cours du college, il en sortit de fort bonne heure, muni d'une assez mince provision de connaissances clas- siques, que sa vie agiteene lui permit pas d'augmenter. A dix-sept ans, on le trouve deja marie et etabli, selon les uns, comme negociant cnlaine, ainsi que I'etaitson pere; suivant d'autres, commc notaire dans sa ville natale.

Ce mariage precoce lui procura sans doute fort peu d'agremens, car on le voit peu apres associe a plusieurs jeunes gens pour exercer quelques depredations dans les pares voisins. Une de ces dernieres espi-egleries , punies alors avec la plus jalouse severite , I'obligea de quitter la scene de ses dissipations. II ne fut peut-etrc pas fuche da saisir cette occasion pour sedebarrasser dessoucis du me- nage et se Jeter sans contraintc dans le tourbillon des plaisirs de la capitale. Laissant done sa fcmme et sa fa- mille a Stratford, il se renditi Londres, vers I'annee i586 oii ihSj, age d'environ vingt-deux ans; ilymena, pen- dant plusieurs annees, une vie assez obscure et dont il deplore amerement I'infortune dans ses sonnets (29, 87, 90, 91, 112) imprimes long-tems apres. Quelques bio- graphes pretendent qu'il fut reduit a tenir la bride des chevaux de ceux qui allaient au spectacle; d'autres en font un assistant de souffleur, charge d'avertir les acteurs du moment de leur entree en scene. Des temoignages plus dignes de foi nous le montrent acteur lui-meme , et ayant deji obtenu, en iSSg, 90 et 91 , une assez grange repu- tation par son habilete a corriger d'anclennes pieces de Tome xi. 2

18 BIOGRAPHiE DE SHAKI^SPEAllE.

theillrc et a les adapter a la scene. En 1 692, des auteurs qui, probablement, s'etaient bien trou ves de ses conseils, avaient consentii\laisser imprimcr son noma cote du leur. Suivant qnelques comnientateiirs , ce fut cettc annee qu'il essaya de I'aire paraitre plusieurs pieces qui lui apparlenaient entiereinent. L'opinion la plus commune place Pericles^ ainsi que la premiere et la deuxieme partie ^Henri VI ^ parmi les pfus anciens ouvrages qui nous restent de lui. II est assez probable qu'en cela, commc sous d'autres rap- ports , semblable i\ notre illustre Moliere , on ne date son existence litteraire que du moment oii son genie se fut deploye dans dcs compositions d'un ordre superieur. Alors seulement le public, aussi bien que kii-mCme, attacha quelquc importance i la conservation de ses ou- vrages. Son poeme de Venus et Adonis, public en iSgS; celui sur le raptde Lucrece , public en i594 ; sa collection de sonnets, sous le litre du Pelerin pnssionne , sont au- tant de temoignages incontestables de I'ardeur avec la- quelle il se livrait au culte des muses, et de la celebrite qu'il avail deju obtenue; malbeureusement, sa fortune ne s'accroissait pas en proportion de sa renommee. Oblige d'exercer un ctal pour lequel il ne s'etail jamais senli de vocation bien determinee, el qui I'exposait a de conti- nuelles humiliations , il trouvait quclque adoucissement & decrire en beaux vers les chagrins dont son ame etait oppressee.

A raconter ses maux , souvent on les soulage.

Shakespeare devait d'aufant mieux senlir Ics desagre- mens de son etal qu'il n'etail pas place en premiere ligne. II faut croire qu'un defaut d'organisation ou la faiblesse de son organc lui presenlerent un obstacle insurmontable; autrement, Vbomme qui a ecrit les conseils donnes par

BIOGUAPHIE DE SHAKESPEARE. 19

Hamlet aiix comediens, et les liuit vers places dans la Louche do Buckingham et de Glocester, dans Richard III, n'auraitpas manque d'ai'river a un tres-haut degre de su- periorite dans son art. II remplissait ordinairementles rules de pere dans la comedie, et ceux de roi dans la tragedie. Peut-etre aussi, le public de Shakespeare et le public de Moliere n'etaient-ils pas en etat d'apprecier la simplicile naturelle de leur jeu. Mais, en depit des obstacles et des rivalites , sa celebrite s'augmentait de jour en jour. Depuis I'annee i5f)3, oii parut Romeo et Juliette, jusqu'a I'an- nee 161 3 oi'i il termina, par Othello, sa carriere dra- matique , on compte px'^s de quarante pieces de theatre reconnues de lui; dans ce nombre se trouyent des come- dies, des comedies feeries, des tragedies et des canevas historiques. Son talent n'etait pas, en effet, borne k un seal genre , et Ton pouvait dire de lui ce qu'on disait de notre Buffon , que I'etendue de son genie se mesurait sur la grandeur de la nature.

Les benefices qu'il I'etira de toutes ses pieces et de sa part dans la direction du theatre, nomme le Globe , q\ii lui avait ete concedee par Jacques I", mirent peu k peu sa fortune dans un meilleur etat.

Des qu'il se vit un peu d'independance, il ne songea plus qu'i quitter le theatre et k se retirer a la campagne pour y finir tranquillement ses jours. Une somme assez considerable qu'il recut de I'amitie de lord Sonthampton, iqui, dans sa jeunesse, il avait dedie ses premiers ou- vrages, lui servit a completer le prix de I'achat d'une jolie propriete dans son pays natal. C'est la que ses contempo- rains nous le representent, occupe de la culture de son jardin et de nombreux actes de bienfaisance qui le ren- dirent aussi cher a ses compatriotes qu'il s'ctait fait aimer de ses camarades de theatre. Son bonheur, a Londres,

0 *

20 BIOGRAPHIE DE SHAKESPEARE.

etait d'obliger tons ceux qui I'entouraient, et de favoriser Ic9 jeunes auteurs. Ce fut lui qui se fit le premier protec- teur de Bea-Jonson. Les actcurs avaient refuse sa pi^ce ; Sliakcipeare soutint le courage du jeune poete dont il avail devinc le talent, se chargea de son ouvrage, en pressa la representation, et contribua i\ sa fortune drama- tique. Ainsi Moliere , depuis, encouragea le jeune Racine.

A Stratford , devenu plus riche, son obligeance s'eten- dit plus loin. II visitait un jour la veuve d'un officier que son mari, en mourant, avait laissee sans ressources et chargee d'une nombreuse famille. La veuve lui raconta ses chagrins. Shakespeare sort sans rien dire, etrevientun instant apres avec une somme de douze mille francs qu'il remet a la veuve, en regreltant de nepouvoir faire davan- tage. Cettc bienveillance de caract^re ne contribua pas moins sans doute que la douceur de sa poesie i le faire designer par les noms du hon, du doux , du tendre Sha- kespeaje, du cygne harmonieux de VAvon, epithetes res- tecs inseparablement attachces a son nom , en Angleterre. On aime \x voir tous ceux qui I'ont connu s'accorder pour Celebrcr u la fols la gaite philosophique de son caractere , le charme de son intimite, la sQrete de son commerce et le calme inalterable de son humeur. Tous les poetes de son terns ne parlent jamais de lui qu'en I'appelant le 5^- duisantj le moelleux Shakespeare , le Terence mod erne , P esprit irresistible , dont la plume repand des jlots demiel et de nectar

Son genie etait encore dans sa maturite, lorsqu'il renonfa au theatre pour retrouver dans les champs ces plaisirs purs qui avaient toujours cu tantde charmes pour son ame simple ct aimante. II n'avait alors que quarante-neufans. Racine fut de mGme, et trop tot pour nous, desabuse des illusions de la gloire. Les esprits plus froids peuventseuls se

BIOGRAPHIE DE SHAKESPEARE. 21

conserver intacts , au milieu-du froissement des passions du monde. Le genie est comme I'amour qui fait vivro des si^cles en peu d'annees, ct donnc de bonne heure au repos tout I'attrait que Ton trouvait auparavant dans le trouble et dans les orages.

Le tranquille bonheur que ce changement de situation fit goQter u notre poete fut de courte duree^-Sa retraite date de i6i3; et, trois ans apres, la mort vint I'enlever, age sculement de cinquante-trois ans, comme si le terns envieux voulaitse venger, sur la yie des grands hommes, de I'immortalite qu'il est force de leur laisser. Shakespeare mourut le 25 avril i6i6, anniversaire de sa naissance, quatre ans avant la naissance de Moliere, la meme annce et le meme jour oii s'eteignait en Espagne un genie non moins brillant , Tinimitabie auteur du Don Quichotte, le profond et elegant Cervantes.

La maison oii Shakespeare termina sa vie fut long-tems visitee par les curieux. On aimait surtout a y voir le mQ- rier, plante de la main du po<ite. Aujourd'hui, on cherche en vain et la maison et le mOrier. Un ignorant ecclesias- tique, M. Francois Gastrell, entre les mains duquel cet heritage avait passe, fatigue des frequentes visiles des etrangers qui vonaient payer leur hommage a Shakespeare, ou chercher des inspirations a I'ombre de son mOrier, le fit abatlre en 1766 , et le deslinait a son foyer. Un horlor ger du pays sut profiler de la sotlise du pretre et de la curiosite du public; il convertit le bois du mdrier en ta^ batieres et autres petits meubles de toute espece, dont il fournit pendant toute sa vie I'Angleterre, I'Europe , I'If- lande , I' Amcrique et les Indes , leguant a ses successeurs , i Stratford, ce privilege inepuisablede transmutation, et retirant du mOrier une fortune plus considerable que Sha-

22 BIOGRAPHIE DK SHAKESPEARE.

kespcarc n'avait retire de toiites les productions de sod genie.

La chute du mftrier n'cloignait pas cepcndant tous les curieux; la niaison reslait encore. M. Gastrcll declara, dans sa furcur, que personnc ne serait plus desormais condamnc au snpplice de posseder cotte celi;bre maison ; et, nouvej Erostrate, il la detruisit de fond en comblc, en dispersa les matcriaux, en fit labourer les fondemens, renverser les murs de separation, el joignit Ic terrain i celui d'un jardin voisin.

Le seul monument qui rcsle aujourd'hui, auxhabitansde Stratford, de I'existencc de leur celcbre concitoyen, est son tombeau place dans I'eglisc. Ce qui donne une va- leur reelle au monument eleve en son lionneur, c'est un buste en relief, execute sous les yeux de scs parens , et dontune tradition ancienne alteste laressemblance. Selon I'usage barbare de cette epoque, oii les arts n'avaient pas encore eto retenusdans leurs limites respectives, ce buste etait revetu,comme nos madones de platre, d'une peinture grossiere. M. Malone, commentateur de Shakespeare, fit faire , en ijgS, u ce buste, I'operalion qu'on.fait encore annuellement a Dublin, i la statue de bronze de Guil- laume III. II lerevetit d'une couchedeblanc, rcparantainsi une barbarie par une autre. Sur ce tombeau, on lit I'epi- taphe snivante :

Judicio Pylium , genio Socraterii , arte Maronem , Terra tegit , populus mceret , Olympus habet. Nestor par la sagesse , Socrate par le ginle , Virgile par I'elegancc , la terrele couvre , les hommes le pleurcnt, TOlynipc le posscde

Un auirc monument lui a ete eleve, en 1/40, dans I'ab- bayc de >Ye5tminster, utcc la recette d'une representation

BIOGRAPHIE DE SHAKESPEARE. 2J

de sa tragedie d.t Jules-Cesar j donnee dans celte intention. II est place dans la partie de I'cglise, nommee le coin des pontes, iicote de ceuxeleves A Chancer^ Spencer, Milton, Dryden J Butler, TJiomson , Gay, Goldsmith j Addison ^ pres de celui du Franpais S nnt-Epremont , du Germain Handel ei du celebre comcdien Garrick.

Les Anglais ont senti en eflet que lamort, qui reunit tons les rangs , rapproche aussi toutes les gloires. Ilsn'ont pas, comme dans d'autres pays, transporte dans ce qui est hors du tenis les frivoles distinctions, al'aidedesquelles ori se cree des grandeurs factices aux depens des gran- deurs reelles. lis n'ont pas prononce, avec toute I'assu- rance et toute la jalousie de la mediocrite, que tel ou tel talent serait repute deshonnete, et tel ou tel homme ver- tneux traite, apres sa mort, en criminel. lis ont yu que tons les arts, toutes les sciences, toutes les superiorites se pretent un mutuel appui; et, loin de disperser a dessein les tombeaux des homnies celebres dans differens genres, ils ont reuni sous les memes voCites le prince patriote , le ministre honnete homme, le general habile , le musicien, le peintre, le poete, I'artiste et le comedien distingues, comme dignes egalement de la reconnaissance et de I'hom- mage des hommes

Mais le plus beau monument eleve a la memoire de Shakespeare est ia collection de ses ouvrages drama- tiques. La premiere edition de ses pieces de theatre reunies ne parut que sept ans apres sa mort, en 162S. Onz& seulement avaient ete imprimees pendant la vie de I'au- teur , mais non par ses soins. Shakespeare avait cou- tume de vendre ses pieces aux comediens, qui les faisaient imprimer quand bon leur semblait. Plus elles etaient po-' pulaires, plus on tardait a les faire paraitre, aCn d'attirer plus long-tems Ics spectateurs par le charme de Lt nou-

lA BIOGRAPHIE DE SHAKESPEARE.

veaiito. On sc pcrmcttaitniCme assez souveiit d'y faire des changcmens considerables pour les adapter, soil a une circonstance nouvelle, soil au lieu oOi cllcs etaient repre- sentees, soil meme au talent particulier des acteurs qui y prenaient un role. Lorsqu'on avait un mauvais roi dans la troupe, on abregeait les scones oii le roi paraissait; ou, »i Ton avait un bouffon aime du parterre et des galeries, on le laissait disposer i son gre de son role , I'abreger, I'alonger, et meme le changer cntierement

Voila par quelle raison il y a souvent tant de difference entre les divers commentateurs et les diverses editions du Iragique anglais. II est juste d'avoir egard ii cette circons- tance, quand on trouve des passages trop evidemment in- dignes de liii, et d'examiner, avant que de condamner, si c'estbien veritablcment a lui qu'on doit les attribuer.

Les fautes graves qu'on lui a reprochees , et quelquefois sans doute avec justice, peuvent efre considcrees sous deux points de vue ; les unes appartiennent a son siecle , les autres ne doivent etre impulees qu'a lui seul. Pour dis- tinguer avec impartialite les defauts qu'il doit a son siecle et ceux qu'il nc doit qu'a lui, il est necessaire de s'ar- reter un instant et d'examiner d'abord quels sont ces defauts.

En resumant tous les reproches faits a Shakespeare, on voit qu'il est accuse de meler souvent le reel avec le mer- veilleux et I'histoire ancienne avec I'histoire moderne, d'introduire des bouffons dans les pieces sericuses, d'em- ployerun style affecle ou desexpressionsindecentes; on lui reproche aussi quelquefois de I'extravagance dans la dispo- sition des plans. II est impossible d'apprecier la validite de ces accusations, si Ton n'a auparavant une connaissanco QSseKCXacte de I'etat general des moeurs, des lettres et du theatre au terns d'Elisabeth et de Jacques I".

BIOGRAPHIE DE SHAKESPEARE. 25

Aujourd'hui que la societe a ete renouvelee presque dans ses bases , que la civilisation ancienne , changeant de di- rection, a pris un mouvement plus rapide et plus libre, que les premieres classes de la societe ont ete fortifiees par des agitations politiques, qui, en isolant cliaque individu de I'appui de sa caste, de sa corporation , de ses ancetres, le reduisaient a chercher sa force dans son intelligence et dans ses moyens personnels; que les classes inferieures, eclairees par leurs voyages sur tous les points du monde, ont pu , par I'observation de moeurs et d'usages divers , apprendre a juger impartialement les mceurs et les usages de leur pays; que tous enfin, degages des chaines de I'ha- bitude, ont pu en appeler a leur raison des erreurs de leurs percs , nous avons peine a concevoir comment les croy ances les plus ridicules et les plus absurdes ont si long-tems con- serve leur empire. Les sorciers , les apparitions , les mi- racles, les revenans, la magie , tout ce qui blesse I'ordre naturel des choses est aujourd'hui tellcment repousse par presque toute la population , qu'on pent a peine ajouter foi a ce qu'on rapporte de la credulite, je ne dis pas des siecles eloignes du notre, mais de la haute societe qui, du tems des Voltaire et des Rousseau , fournissait encore tant de dupes au diacre Paris. Dans les pays protestans, oii la raison, plutot exercee, devait amener une guerison plus prompte des maladies intellectuelles, ilfallut encore un long espace de tems pour detruirelemaljusque dans ses racines. Ce n'etait pas seulement le peuple qui se rendait victime de ses terreurs; les theologiens, les guerriers, les hommes de cour, tout etalt peuple a cet egard; el les premiers re- formateurs eux-memes, a commencer par Luther et par Knox, semblaient ne depeupler le purgatoire que pour rendre plus redoutable aux imaginations epouv.'intees ce qu'ils appelaient les puissances des lenebres. Tous les fan-

25 BIOGUAPHIE DK SHAKESPEARE.

tomes de I'igiiorance ne s'evanouirent done pas, comme on pourrait le penser, aux premiers rayons de la philo- sophic ; sculement , a mesure qu'ils s'effacaient des croyances religieuses, ils passaient dans Ic domaine litte- raire, ct devenaient, comma les etres mythologiques pour les anciens poetes de la Grecc , autant de fictions et d'alle- gories subordonnGcs i\ un dcveloppcment moral. La partie la plus eclairee du public voyait la fiction ; mais la partie la plus nombrcuse doulait, ot le reste etait enliercnicnt con- vaincu. C'est done a cettc epoque que parut Shakespeare. L'existence des etres surnaturels avail bien ete attaqueepar quelques hardis novateurs; mais les esprits les plus forts n'etaient encore arrives qu'au doute, et les autres croyaient ce qu'avaient cru leurs percs. Bacon, ce puissant genie , ce reformateur des methodcs scicntifiques, n'osait pas con- tester la realile des larves et des fantomes , et le roi Jacques I", qui etait loin sans doute dti genie de Bacon , publiait sa Dhnonologie pour constater leur existence. Jacques avait d'ailleurs une raison particuliere de croire aux choses surnaturelles, possedant, en sa qualite de roi d'Angleterre, le droit incontestable ct surnaturel de guerir les ecrouelles, droit qu'il avait recu par ordre de succes- sion d'Edouard le confesseur, et qu'il transmit dans le meme ordre aux rois ses descendans. Ce privilege ne s'est perdu, en Anglcterre, que sous George I". D^nutres pays ont ete plus heureux ; et, malgre une interruption mo- mentance, ce droit ne parait avoir rien perdu de sa legi- timite.

Ces relations merveilleuscs etaient alors le sujet de toutes les conversations. Les pauvres faisaient errer leurs apparitions sur la lisierc des bois, au milieu des mines; les ricVies plapaient leurs ombres dans une voiture A six chevaux sans tete , conduits par un cochcr et des laquai*

BIOGRAPHIE DE SHAKESPEARE. 27

sans tete. Reginald Scot, dans sa Decouverte de la sorcel- lerie; Burton, dans iOXiAnatomie de la melancolie; Grose, dans son Glossalre provincial , et une foule d'autres au- teurs nous ont rapporte de ces contes qui occupaient les soirees d'hiver dans Ics chateaux aussi bien que dans les chaumicres. On doit sentir que des hommes habitues a de telles emotions ne pouvaient trouver une distraction assez puissante dans les visites fortuites d'un voyageur et d'un bote fatigue. II leur fallait une distraction qui vint re- mettre en equilibre leurs facultes ebranlees. De la, I'intro- duction generale des fous dans toutes les grandes families. La presence des fous devint bientut aussi indispensable a la table des barons que dans les salons des princes. Dans un tems oil la force etait la seule loi, une telle institution n'ctait peut-etre pas sans utilite ; les bouffons etaient alors ce que seraient les faiseurs d'apologues auprfes des tyrans de rOrient. lis representaient, pour ainsi dire, I'opinion morale de la societe , et faisaient passer, sous la protec- tion de leur marotte et de Icurs grelots , des conseils ou des reproches severes. Ainsi , notre Rabelais , en depit des bOchers, faisait impunement aux prejuges de son siecle une guerre obstinee. Lorsque, dans la vie reelle, les An- glais ne pouvaient se passer de leur clown (i), les Fran- cais de \&nvfou, les Espagnols de \quv gracioso ; lorsque tous les rois d'Angleterre , jusqu'a Charles I", avaient donne ace personnage toute I'importance d'un pcrsonnage historique, Shakespeare , dont le but etait d'offrir une image parfaite de son tems, n'etait-il pas, en quelque sorte, justifie de I'introduction du fou dans les drames sericux , pourvu qu'il augmentat par ce moyen I'intcret et

(i) Le r6le du fou est en general donne a un paysan {clown) dont la finesse se cache sous une enveloppe grossiL-re.

58 BIOGUAPHIE DE SHAKESPEARE.

la terreur dcs situations tragiques, ainsi qu'il I'a fait dans le roi Lear^ etcomme "Walter Scot I'a fait dcnos jours, dans son W'ainba, duroman d.^Iuanhoe. Le peintre qui a repre- sente rentrevue de Charles-Quint et de Franpois I", a-t-il ete blame d'y placer Triboulet ? II est incontestable que , dans les arts, tout ce qui n'ajoute pas i reffet le diminue ; qu'on applique cette regie aux bouffons de Shakespeare, et qu'on prononce hardiment que ce qui nuit a I'effet est mauvais. Mais, si telle ou telle innovation , que nous re- poussons avec raison sans doute de notre theatre , contri- bue i faire valoir I'ensemble , qu'on ne se laisse pas aveu- gler par Ic prejuge, et qu'on reflechisse un instant avant d'en prononcerla condamnation absolue , . .

Toutefois,si indulgence est louable a I'egarddes inven- tions qui neparaissentvicieuses que par une imitation trop cxacte do la nature, il n'en est pas de meinepour tout ce qui annonce I'affectation et la pretention au bel esprit; c'est la un dcs veritables defauts de Shakespeare. Tandis qu'il tourne en ridicule, dans plusieurs scenes de ses comedies, ra£feteriedes£'i/p//2//s^^s, iln'a pas su toujours resister ala contagion du mauvais exemple. Si Ton compare cepen- dant son style a celui des ecrivains de la meme epoque, on eentira micux combien , grace a sa profession de comedien qui I'eloignait de la cour et des societes a la mode, il a echappe i ce defaut universel d'un siecle qui offrait un singulier melange de raffinement et de grossierete ....

Quoi qu'il en soil, on peut appliquer justement au poete anglais cemot,qu'un de nos personnages historiques mo- dernes adressait i ses detracteurs : « Mes defauts et mes vices mime fiirent le produit de jnon siecle ; mon genie et mes vertuR sont a moi. »

( Extrait du cours de litterature dramatique anglaisefait i I'Athenee de Paris par M. J. A. BrcHON , en 1821 ).

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BEAUX-ARTS.— ARCHEOLOGIE. NOTICE

Sur las sculptures des frontons du Parthenon (i), dont le gouvernement a fait venir des platres (a), moul6s sur Us orlginaux maintenant en Angle- ten e ;

Et RiFLEXiONS sur la nccessitd de former un Mus6e special de copies j de in6 me nature , des statues an- tiques qui nous ont tte enlevees.

Depuis les terns appeles historiques , il est plusieurj epoques celebres oii des hommes de genie, trouvant dans leurs souverains des protecteurs eclaires, ont pu se livrer i des travaux qui ont pose, pour ainsi dire, les limitea de I'esprit luimain.

A chacune de ces epoques, au milieu des hommes extra- ordinaires qui semblent se grouper pour cooperer a I'illus- tration de leur siecle, on peut en signaler un qui domine tous les autres, et qui pourrait disputer au souverain lui- meme le droit d'y attacher son nom. La posterite a dit : Les siecles de Pericles j A^Augustej Ac Leon X, de Louis XIF"; elle eQt pu dire avfec autant de raison : les siecles de Phidias j de Virgile j de Raphael j de Racine.

()) Parthenon ou Hecatonipedon ; c'est le nom du temple de Mi- nerve , eleve par Pericles , et dans lequel etait la fameuse slatue da Pliidias. Ce temple, situe dans 1' Acropolis ou citadelle d'Athenes , fut presque entierement de'truit par une bombe, pendant le siege que les Venitiens firent de cette ville , en 1687,

(2) C'est I'expression technique pour nomraer les copies eu platre obtenues par le rooulagc.

30 BEAUX-AUTS.

Au reste, ces genios auxquels lous Ics esprits t-claires ren- (Icnt un culle egal, ont cu d'etranges destinees. Racine, apres avoir vu sa gloire long-tenis contcstee , meurt de cha- grin d'avoir cncouru la disgrace du plus absolu desmaitres. Raphaiil, dont la inort fit verser des larmes ameres i Leon X (i), expire a la fleur de I'age et dans toute la force d'un talent qui n'a pas encore trouve d'egal, pour s'etrc trop abandonnc aux caresses enivrantes d'une mai- tresse adorce. Virgile, meconnaissant son propre genie, veut, a scs derniers instans, desheriter sa memoire, et livrer aux flammes ce poeme, lecture favorite des esprits delicats et sensibles. Phidias, enfin, honore de I'amitie inlime dc Pericles, victime de la jalousie que lui portaient ses ennemis, et de celle qu'inspirait son protecteur qu'on voulaitpunir dans la personne de son ami, Phidias, dis-je, finit ses jours en prison (2).

Frappe du sort des homines qui ont eu le malheur de s'elever au-dessus de leurs contempoi^ains, un pofete mo- derne s'ecrie (3) :

Vivans , la haiiie les dechiie ; Et ces dleux que la terre admire Out pen comple de jours sereins.

Mais que sont devenues leurs productions ? leur gloire , au inoins, est-elle assuree ?

Grace a I'imprimerie , les ceuvres de Virgile et de Ra- cine seront connues, dans leur entier, de nos derniers neveux. Raphaiil, moins heureux, verrason nom survivre a ses admirablespcintures, dejabienalterees par le terns,

(1) Vasari, T. 11 , page 53.

(2) Plutarqiie, vie dc Pericles.

(3) M. de Fontanes, stances a M. de Chateaubriand.

ARCH]£OLOGIE. 81

etque dans pen de siecles on ne connaitra plus que par des gravures, c'esl-ii-dire par des traductions (i). Quant h Phidias, de tous les monumens echappes aux ravages dont la Grece et Rome ont ete tant de fois le theatre , il n'cn est auciin que Ton puisse avec certitude lui attribuer; il n'existe a ce sujet que des probabilites et des inductions. Quel scrait done I'enthousiasme du monde savant, si Ton etait enfin parvenu a recueillir des debris que Ton pflt, sans hesiter, attribuer au ciseau de ce celebre statuairel

Letems nous derobe , il est vrai, la certitude que nous recherchons avec tant d'ardeur; mais la gloire de Phidias n'en paraitra que plus grande, puisque I'on sera conduit a dire : Si les ouvrages que nous avons sous les yeux, exe- cutes sous sa direction, mais auxquels il n'est pas sftr qu'il ait mis la main, causent tant d'admiration , que devaient done etre ceux qui etaient le proJuit immediat de son ciseau ?

Les ouvrages dont je parle sont les figures des frontons du Parthenon, apportees a Londres par lord Elgin et dont le ministere de I'interieur a fait venir ]^li\sieurs jjldtres, moules sur les originaux (2).

On se rappellc qu'i I'epoque de I'expedition d'Egypte^ I'Angleterre devint I'alliee de la Sublime-Porte. Lord El- gin etait alors ambassadeur a Constantinople. II profita de I'influence que lui donnaient sa position et les circons- tances , pour demander la permission de depouiller Athenes des restes de son ancienne splendeur. Cette per- mission lui fut accordee , et I'usage qu'il s'empressa d'en

(1) L'analogie me parait etre complete. Le traducteui- essaie de rendre Ja pcnsee et le style , comme le gvaveuv essaie de I'eptoduire la forme et la coiileur. -:-l i '^ -''- ,

(2) Cesplatres ont ete deposes daas une sallo du LouTTe.

32 UEAUX-ARTS.

faire lui a valu des critiques sevtres et des eloges con- testes; anathematise par lord Byron , il a ete loue par pliisieurs archoologues, qui pensent que les monumens qu'il a cnlcves (i), maintcnant a I'abri de toule destruction probable, auraicnt peri, comme tant d'autres, dans quel- ques-uncs des catastrophes auxquellcs ce malheureux pays, autrefois la gloire de I'esprit humain, semble youc pour long-tems encore (2).

Le croira-t-on ! ces illustres debris trouvi^rent peu d'ad- mirateurs a Londres. Mais un homme profondement verse dans la connaissance de I'antiquite, M. Visconti, ayant ete propose par lord Elgin, et accepte par le gou- vernement pour en fixer la valeur, il vint a Londres el publia des memoires qui ne tardorent pas u eclairer

(1) Cet enlevement a donue' lieu a unefoule de trails dlrige's centre son auleur. Sur les murailles du Parthenon, on ecrivit : quid non

Jecerunt Gothi , fecerunt Scoti , par allusion a la patrie de lord Elgin. Le portique du temple de Pandrose etalt encore iutact- il en fitenlever" une carialide, qu'il remplaca par un pilier de briques. On e'crivit sur le pilier : opus Elgin; et sur la cariatide la plus proclie : opus Phidioe. EnCn , un Anglais de distinction fit exe'cuter a ses frais une cojiie en marbre de la cariatide enleve'e, ct la fit substituer au pilier de briques.

(2) Je ne puis m'empeclier de soumettre les considerations sui- vantes au jtigcment des persounes qui ne peuvent se consoler de ce que le Parthenon a e'te depouille de ses sculptures.

11 est tres-vrai que les monumens de ce genre perdent beaucoup a *tre enlevcs au cadre qui les renfermait, a la place pour laquelle ils avaient ete execute's ; on peut dire mcme qu'au milieu des nobles mines dout ils faisaient parlie, ils exercaient sur I'imagination une puissance qu'ils ne peuvent conserver ailleurs. Mais , si I'on considere de quelle miportance il est pouv les artistes modernes de pouvoir les etudicr ; s'il est bien constant qu'ils forment , dans I'histoire de I'art , une epoque trcs-importante et qui n'e'tait pas encore compleiemenl

ARCHEOLOGIE. 33

Toplnion publique sur le merite des ouvrages soumis a sa docte investigation (i). Bientot Canova' et M. Quatre- mere de Quincy allerent aussi, successivement , visiter cette collection; el ce fiit i\ cette occasion que ce der- nier ecri vita Canova des lettres pleines d'interet, publiees ;\ Rome, et dans lesquelles on peut connaitre I'opinion que le plus celebre statuaire moderne avait concue de ces productions de I'antiquite (a).

Parmi ces sculptures , les plus importantes , sans con- Iredit, sont celles des frontons du Parthenon; le gouver- nement, en faisant venir en France des platres des prin- cipales figures de ces frontons , a done rendu un veritable service aux artistes , aux archeologues et a tons ceux qui s'interessent aux arts du dessin , puisqu'il les a ainsi mis k meme de juger par leurs propres yeux du merite de ces monumens.

Le premier sentiment que Ton eprouve a leur aspect est celui d'une curiosite ardente , qui cause une sorte de transport; puis Ton se trouve nature llement amene i demander: de qui sont-ils? est-ce la creation d'un meme homme ou de plusieurs ?

Ici, I'artiste se borne a repondre : Ce sont des produc-

coniiue, pai'ce que les mate'riaux manquaient ; eafia, si I'ou s'arrete a cette pensee, que quelque nouvelle catastrophe aurait pu en ache- ver entieremenl la ruine , je crois que I'Europe savante devra se feli- r.iter qu'ils soient confies a la garde d'uue nation civilisee.

N- B. Les derniers evenemeus survenus en Grece et I'incendie d'A- thenesne justifient quetrop ropiuion exprime'e par I'auteur de cette No- tice,qui a etee'criteavantqueces eve'nemensn'eussente'clate. (N. d. R.)

(i) Ces me'moires, public's a Londres et adresse's a lord Elgin, ont ete reimprime's a Paris sous ce titre : Memoires sur des outrages de sculpture du Parthenon , etc.

(2) Depuis cette epoque, plusieurs artistes francais ont e'galement fait le voyage de Londres, dans le meme IjuI.

TOMK XI. •?

2A BKAL'X-ARTS.

lions inimitables, pen niimportP quel en soil I'auteur; mais Tarcheologue est oblige de compulser tous les ecri- vains. Malhcureuseinent, 11 arrive quelquefois que leurs rccits sont contradictoires ou incomplets, de sortc que I'on est oblige de rester dans I'incertitude ; et c'est jus- tement le cas oii nous nous trouvons.

L'etablissemcnt de la religion chrctienne, dans I'empire romain, a el6 une epoque de destruction pour tous les monumens eleves au culle paien. C'est a la ferveur des neophytes qu'il faut attribuer la perte de tant de chefs- d'oeuvre dont la Grtce pouvait s'honorer. Cependant la reputation de quelques-uns de ces chefs-d'oeuvre etait telle, qu'elle leur fit trouver grfice aux yeux meme des Chretiens. Constantin protdgea la fameuse statue de Mi- nerve, ouvrage des propres mains de Phidias, dont tous les ecrivains anclens ont parle avec tant d'admiration, et qui etait placue dans I'interieur du Parthenon; elle existait encore au terns de I'empereur Julicn , qui en fait mention dans ses ecrits; mais depuis il n'en est plus ques- tion, et Ton ignore entierement ce qu'elle est devenue.

Toutefois, puisqu'elle existait encore au terns de Julien, ce nc pent done etre que vers la fin du quatrieme siecle que le Parthenon a cte consacre au culte du vrai Dieu. Pour opercr cette transformation et pour eclairer I'inte- rieur du temple, les chretiens firent abattre le centre du tympan du fronton de Test, ainsi que les figures qui y etaicnt placces. C'est dans cet etat de mutilation que le dessinatcur de M. deNointel a represenlc ces frontons en 1674, et il est digne de remarque qu'aucune autre figure n'ayant ele renversee depuis cette epoque, quoique le corps de I'edifice ait ete detruit presque en entier par une bombe, pendant le siege d'Athenes, par les Venitiens, en 1687, toutes celles qui existaient encore a la premiere de ces deux epoques ont ete retrouvees et enlevees par

ARCHEOLOGIE. 35

lord Elgin, i I'exception de deux, et font mairftenant partie de la collection du British-museum.

Spon et Wilder, qui Tisiterent Athenes peu d'annees apres M. de Nointel (1676), et qui virent le Parthenon dansle meme etat oii il I'avait vu lui-mcme , remarqu^rent que les sculptures des deux frontons etaient d'un marbre plus blanc que le reste du monument; ils crurent recon- naitre, dans les deuxieme et troisieme figures de Tangle, k gauche, du fronton de I'ouest, et qui sont celles laissees par lord Elgin (i), les portraits de I'empereur Hadrien et de Sabine sa femme , et ils en conclurent que les scul- ptures des deux frontons pouvaient avoir etc executees par les ordres de cet empereur.

Stuart, qui nc nie pas que ces deux figures soient les portraits d'Hadrien et de Sabine, fait observer cependant, d'abord, que la blancheur du marbre des sculptures des frontons ne prouverait pas qu'elles fussent plus modernes que le reste du temple; ensuite, qu'il serait possible que les deux tetes de I'empereur et de sa femme eussent ete, selon I'usage assez communement suivi par les Remains, replacees sur deux anciennes figures (2).

M. Visconti, dans les memoires dejA cites, traite cette question assez bricvement, etn'admet pas la possibiliteque ces sculptures ne soient pas celles faites du tems de Pericles; il croit meme que les deux figures que Spon et "Wheler, et Stuart apres eux, ont cru etre Hadrien et Sabine, representent Vulcain et Venus (3). Cette derni^re

(1) Stuart {antiqidtes d' Athenes), T. II, chapitie i*"", planche 4, figure 2, donue le trait de ces deux figures , sur une assez grande cchelle.

[i) Stuart {antiquites d' Athenes), pages i8 et 19.

(3) Loco citato , pages ix el iS.

s*

Sr. BEAUX-ARTS.

qiieslioii iiesl vorituhleiuent que secondaire , et il serait ajsez diflicile de la decider sans avoir les monumens memes sous les yeiix; or, ainsi que je I'ai deju dit, ce sont pre- cisemcnt les deux seules figures qui aient ete laissees.

Mais que Ton ait, ou non, ajuste les tetes d'Hadrien et de Stibine sur deux anciennes figures, je n'en crois pas tnoins possil)le de prouver que les sculptures des deux frontons du Parthenon n'ont ete ni executees ni meme restaurees sous le regne d'Hadrien,

II y avait i\ peu pres quatre-vingts ans que Ic Parthenon etait acheve, lorsque Topislhodome de ce temple fut incendie (i). Mais dans ce temple, tout de marbre, il est bien evident que le feu ne put consumer que les richesses de toute n.iture renfermees dans la partie du temple que je viens de nommer; en supposant meme que les figures du fronton de I'ouest, les seules qui auraient pu etre en- dommagees , puisquc I'opisthodome etait a I'extremite ouest du temple, eussent eu besoin d'etre reparees, pense- t-on que les Atheniens auraient souffert qu'on attendit au-delA de trois cents ans pour faire faire ces reparations au temple eleve a la divinite protectrice de leur ville ? D'ailleurs, sices figures avaient ete endommagees, Plu- tarque, qui ecrivait sous Trajan , n'aurait pas manque de I'indiquer; au contraire, il dit (i) que, de son tems, les cuvrages de Pericles et de Phidias avaient encore tout I'eclat et toute la fraicheur de la nouveaute; enfin , Pau- sanias, quivisita ce temple du tems d'Hadrien, ne donne, dans sa description, aucun sujet de croire, ni que les sculptures des frontons fussent endommagees , ni que ce fussent des travaux recemment executes.

(i) Di'mosthcnes conlre TinioovMe. (2) Yie Je Pericles.

ARCH^OLOGIE. 37

Tenons done pour constant que ces figures sont des sculp- tures grecques, du beau terns de Pericles.

Mais ce n'est pas assez d'avoir fixe le terns qui les a ■vues naitre; il faut encore determiner quels sont les artistes qui les ontcreees. M. Visconti s'exprime ainsi ace sujet (i): « En visitant les marbres sculptes que lord Elgin a fait transporter d'Athenes a Londres, le connaisseur est certain d'avoir sous les yeux plusieurs de ces ouvrages precieux, qui, conf us et diriges par Phidias , et executes en partiepar son ciseau, ont fait, pendant plus de sept cents ans, I'ad- nniration du monde ancien , et que , du tems de Plutarque , c'est-a-dire an siecle de Trajan, on regardait comme inimi- tables par leur grace et leur beaute. »

M. Quatremere ne parait pas partager tout-a-fait I'opi- nion de M. Visconti, quoique d'ailleurs il exprime une egale admiration relativement au merite de ces sculptures. II observe que le temple, les cinq cents figures et plus dont il etait orne, parmi lesquelles ily en avait au moins quarante d'une proportion de sept a douze pieds, ainsi que la statue colossale de Minerve elevee de la main meme de Phidias, furent achevees dans le court espace de six a sept ans.

Quelle part put done avoir Phidias dans I'execution de toutes ces sculptures? son tems ne fut-il pas entierement absorbe, et par I'execution de la statue de Minerve, et par Indirection generale des travaux?

L'incertilude est cntiere a cet egard. Pausanias se borne a rapporter les sujets des sculptures des frontons (2); il n'en nommepas I'auteur ou les auleurs; ct Plutarque dit

(1) Loco ciuto , page 3. '3) Livrc !"■, chapitre 21.

8S BEAUX-ARTS.

seulement que Phidias fat charge de la direction generale des travaux entrepris par Pericles (i). Ne peut-on pas supposer toutefois, avec quelque vraisemblance, que, si CCS sculptures ne sont pas de lui, au moins il a preside i la composition generale des sujets, et que peut-etre il en a fourni les dessins ?

Phidias cut plusieurs el^ves , devenus comma lui des statuaires celebres; d'abord Alcami;nes, I'auteur des sculptures de I'un des deux frontons du temple de Jupiter Olympian et de la Venus aux jardins, que Pausanias (2) considere comme un des plus beaux monumens d'Athe- nes (3). A la yerite, s'il fallait adopter une tradition rap- portee par Pline (4), cette statue n'aurait atteint ce haut degre de perfection que parce que Phidias se serait plu k la terminer lui-meme. Je citerai aussi Agoracrite qu'il aimait d'une affection si vive(5), qu'il mit souvent le nom de son eleve sur plusieurs de ses ouvrages (6); Colotes qui aida son maitre dans quelques-unes de ses productions les plus iniportantes; enfin , Pandoenus , son cousin germain,qui travailla avec lui u la statue de Jupiter Olympien (7).

(1) Vie de PJiiclef.

(2) Livre !""■, cliapitve 18.

(3) Lucien, Jans un de ses dialogues intitule les Portraits, vou- lant fairela peinture d'une beautc accomplie , emprunte a cette Venus la gorge, les bras et les niaius.

(4) Histoire naturelle, Livre 56.

(5) Pausanias , Livre 9 , cliapitre 54 , dit : I'objet de ses amours.

(6) Pline , loco citato. T^oj^. aussi le Voyage du jeune Anacharsis , Tom. V et VI, pag. 3i et 555.

(7) Strabon , Livre 8.

ARCHliOLOGIE. 3^

Certainement, on peut regarder comme positif que ces memes artistes furent charges d'executer tout ou partie des figures des frontons dii Parthenon. On peut croire aussi que Phidias retoucha quelques-unes de ces figures ; mais c'est tout ce que I'on peut obtenir par induction, et il est aussi impossible de determiner auquel des artistes que je viens de nommer telle ou telle figure doit etre attribuee, que de designer d'une mani^re precise quelle* sont celles que Phidias a retouchees.

Au reste , au simple aspect de ces sculptures , il est impossible de ne pas reconnaitre , a I'elevation du style , qu'elles ne peuvent avoir ete produites que par des artistes tres-habiles. II est -vrai qu'elles sont mutilees et tres- frustes; mais le mouvement general, le beau jet des draperies et I'execution grandiose des parties intactes, en font des monumens tres-importans et tres-curieux qui, pour me servir des expressions de M. Quatremere, «sontpropre» i remplir une immense lacune dans I'histoire du goOt. •» Ce sont enfin des sculptures qui comptent au moins 2,3oo ans de duree, dont toute I'antiquite s'est plu k proclamer la beaute, et qui doivent donner la plus haute opinion du chef de I'ecole qui les a creees.

La dimension des figures, au nombre de six, dont les platres ont ete apportes en France , est d'environ sept pieds et demi ; elles sont entierement rondes-bosses , ainsi que les anciens en usaient ordinairement dans ces sorter- d'ouTrages , et terminees egalement des deux cotes.

Si Ton rapproche ces deux circonstances, on en peut conclure, et c'est aussi I'opinion de MM. Quatremere et Yisconti, que ces figures ont ete sculptees dans I'atelier de I'artiste, et posees ensuite sur la saillie du fronton. Or*; confoit facilement que des ouvrages, ainsi executes, de-

AO BEAUX-ARTS.

raient etre superieurs a ceux que Ton fait sur la place meme, au moyen d'echafauds, etc. N'est-il pas evident encore que des sculptures ayant un relief egal ^celui de la nature, etentre lesquelles raircirculaitlibrement, devaient produire une illusion et un effet bien preferables a ceux qui peuvent resulter de nos bas-reliefs modernes, dans lesquels les figures ne sont que des applications.

Felicitons-nous done de posseder ces monumens d'un grand prixpour les verltables artistes, qui savent bien qu'un pldtrej inouU sur Voriginalj pent en tenir lieu quand I'ope- ration du moulage a ete bien faite, et multiplions nos richesses en ce genre.

Qu'il me soit permis, avant de terminer cet article , d'exprimer un voeu que je crois etre aussi celui des artistes, des connaisseurs, et de tous ceux qui s'occupent de I'an- tiquite. Ce serait que Ton format un Musde special, dans lequel on rassemblerait des platres de toutes les statues antiques que nous avons perdues et de toutes celles qu'il serait possible de faire mouler. A cette occasion, je citeraj ce qui s'est passe en Italic , lorsque la victoire, dictant des traites honorables pour la France , conduisait a Paris les monumens precieux qu'une odieuse spoliation nous a enleves.

A Rome, a Florence, a la place de I'Apollon du Bel- vedere, de la Venus de Medicis, etc. , on mit des plStres moules sur ces statues. Tout, d'ailleurs , resta dans le meme etat. Les Italians ne cesserent pas d'avoir ces productions inimitablcs sous les yeux, el ils se confierent au tems du soin de leur rendre les originaux. Le tems ne les a pas depus : un nouveau Brennus s'est eerie : t'ce pictis! et les chefs-d'oeuvre de la Grece que nous devions a des traites ont ete, par suite de la violation manifcste d'un traite,, reprendrc leurs places a Rome et a Florence.

ARCHEOLOGIE. Al

Quelque prix que j'attache i ces monumens, je nc voudrois pas, et je suis bien sQr d'etre approuve par tous les hommes animes d'une veritable philantropie , qu'ils revinssent en notre possession , s'ils devaient nous etre ramenes par la guerre; oublions plutot qu'ils furent a nous; mais n'oublions pas de quelle importance il est pour I'art de conserver ces modeles sous les yeux.

Que le gouvernement se hate done, avant que les monies qu'il possede de ces belles statues soient tout-a- fait epuises, d'en reunir le plus grand nombre possible de copies. Sans doute, les originaux ont une Taleur intrin- s^que que des copies en plutre ne peuvent pas obtenir; mais, pour I'histoire de I'art etses progres successifs, si interessans a observer et a etudier, ces copies suffisent; pour I'etude des formes , les platres offrent meme un avantage sur le marbre : les effets de la lumiere sent mieuxsentis, et consequemment les contours sont moins vagues.

Esperons que, sous un gouvernement qui annonce la ferme volonte de proteger et d'honorer les arts et les artistes , cette demande , dont il lui est si facile d'apprecier {'importance, ne lui aura pas ete inutilement adressee.

P. A.

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II. ANALYSES D'OUVRAGES.

SCIENCES PHYSIQUES.

TbAItA COMPLET DE MiCAMQUE APPLIQUtE AtJX AHTS, elC. ;

par M. BoBGNis, in^inicur {yoy. ci-dessus, Tom. X, pages 299-520 ).

ClNQUIEME TRAITE.

Des machines d'acriculture i^x'); contenant', les ine- trumeris et machines aratoires ; les machines em- ployees a recoUer les produits du sol et a leur donner les preparations premieres ; les moulins et les meca- nismes qui seruent d Sparer le hie et a hluter lesfarines; A" enfin , les pt-essoij-s , les cylindres , les pilous et autres machines employees a I'extraction des huiles et du vin, etc.

Ce volume est une nouvelle preuve de I'immensite des recherches auxquelles I'auteur a dfl se livrer pour com- poser son ouvrage. Oblige de faire un choix dans la multitude infinie de machines et d'instrumens qui ont ete appliques aux travaux agricoles, il a dQ donner la prefe- rence aux machines dontle succesest assure, soit par une longue serie d'cxperiences, soit par I'assentiment unanime des plus habiles agriculleurs. II s'est attache a indiquer la qualite que doit avoir chaque espece de machine rurale, et k signaler les inconveniens qu'on doit soigneusement eviter dans chacune d'elles.

(1) Paris, iSao. 1 vol, jn-4° avec 38 planches, Bacbelier, libraire. Friz , 3 1 fr.

SCIENCES PHYSIQUES. AX

Simplicite, solidite, construction facile, leger entretien, sont des qualites essentielles dans les machines destinees u ragriculture et in I'econoinie rurale et domestique. Si la mecanique ne remplit pas toujours et simultanement ces conditions, elle doit chercher a s'en approcher, et les so- lutions qui s'en ecartent le moins sont les meilleures.

L'auteur n'a point neglige les details historiques qui sont instructifs et dignes d'interet. II a donne a I'examen des machines les plus utiles toute I'etendue desirable , sans tomber dans la prolixite ; il a consigne dans ce volume tout ce qui lui a paru d'une utilite bien constatee , et a dispose, avec une clarte et un ordre precieux, les nombreux objels qu'il renferme.

La division de I'ouvrage correspond i celle des travaux de I'economie rurale. Les premiers consistent a donner au sol les preparations convenables, et a lui confier les germes qu'il est destine a feconder ; les seconds ont pour objetde recueillir et d'enlever les fruits parvenus u leur maturite; les troisiemes , d'executer sur ces matieres premieres les operations convenables pour les approprier aux besoins de I'homme. Les derniers travaux ont pour but I'epuration et la mouture des grains, ou bien la confection du vin, des autres liqueurs fermentees et des huiles.

Quatre Livres conliennent les machines employees dans ces quatre grands travaux.

Le premier Ijit^re donne d' ahord une description circons- tanciee des araires et des diverses especes de charrues , avec une indication des principes qui doivent guider dans la construction de ces precieuses machines. On ne saurait apporter trop de soins pour les faire bien connaitre , si Ton songe k leur importance, et si Ton fait attention que rhomme leur doit les plus grands bienfaits. Si la terre etait, dans tous les lleux, travaillee a force de bras, et

kk SCII-INCES rHYSIQDES.

sans Ic secours des animaux , tons les habitans seraient forces de s'adoniier a I'agriculture ; il en resulterait la depopulation generale des villes et I'extinction des manu- factures et des arts. On peut done avancer qu'aucunc invention n'a ete plus favorable a rhumanite que celles qui donnent les nioyens d'abreger ou de perfectionner les travaux de I'agriculture.

Les cbamps sillonnes par la charrue ont encore besoin du secours dequelques autres machines pour perfectionner le travail. La herse brise les mottes, aplanit la teri'e et recouvre les grains ensemences. Les rouleaux remplissent le meme but que la herse et compriment en outre les terres legeres. Les ratissoires font aussi le meme effet que la herse, et de plus coupent entre deux terres les racines des raauvaises herbes. Les etaupinieres aplanissent les monticules formes dans les prairies par les taupes et les fourmis. Les houes k cheval, especes de charrues compo- sees, produisent un leger labour, extirpent les mauvaises herbes, aplanissent et ameublissent la surface du terrain. Les semoirs distribuent les semences d'une maniere regu- liere sur toute la surface des champs ; les charrucs-rsemoirs labourent et sement en meme -tems.

Le second Livre decrit d'abord les machines ct les ins- trumens employes pour la moisson et pour la fenaison. Pour recolter les cereales et les foins , on se sert de faux ou dcfaiicilles, lorsqu'on veut couper les tiges aussi pros de lerre que possible , et Ton emploie des peignes , quand on vent cueillir seulement les epis , en les detachant avec promptitude de leurs tiges. Les Gaulois se servaient d'un grand peigne a chariot, qui se trouve decrit dans le qua- rantiemc volume des Antmles des arts el manufactures. La machine a faner rclourne ct cparpille le , foin avcc la plus grandc promptitude ; unc autre enliaiae et rannisnc

SCIENCES PHYSIQUES, 45

tout le foin qu'elle rencontre sur son passage. Les animaux nc mangent bien la paille qu'autant qu'elle est coupee d'une longueHrconvenable. Diverses machines, imaginees dans ce but et designees sous le nom de hache-paille , hachent, tranchent et broient les fourrages. Les coupe- 7*ac£«es decoupent el tranchent les racines ou les fruits, tels que les pommes deterre, les carottes , les topinam- bours , etc. , que les animaux ne mangeraient pas sans cette preparation. D'autres machines ecrascnt les avoines, les leves, les pois, etc. , .pour rendre ces grains plus nu- tritifs. Une machine ingenieuse, de M. de Fellemberg, separe les graines de luzerne de celles de cuscute j nui- sibles aux prairies artificiellcs.

Les epis sont depouilles de tout le grain qu'ils con- tiennentpar I'operation du battage, qui s'effectue de quatre manieres :

Le battage au fleau est le plus simple et le plus usite; le battage i la rosse , ou le pietinage par les chevaux, est en usage dans les contrees meridionales ; le battage au rouleau est plus expeditif, et donne a la paille une souplesse qui la fait rechercher par les bestiaux. M. de Puymaurin a imagine et mis en usage un rouleau qui reunit ces avantages a un degre remarquable; h" une ma- chine k battre le ble {thranshing-Tnill) , inventee en Angleterre , est devenue d'un usage general dans ce pays ; elle egraine si bien les epis, qu'elle donne un seizieme de grains de plus que les moyens ordinaires, et fait beau- coup plus d'ouvrage dans le meme tems. Elle a ete simpli- fieeetrendue portative successivement par MM. Meickle, Tunstall et Lyster.

'Lttroisieme Lii^reA.onne. A' AhovA la description des vans; des cribles, des tarares, des bluteaux, en un mot de tons

A6 SCIENCES PHYSIQUES.

les instrumens qui servenl k i'epuration du ble. La con- servation des grains est un objet de la plus grande impor- tance. Parmi les moyens mecaniques employes dans ce but, I'auteur decrit les paniers de paille de Villin, les etuyes et les grcniers i ventilateurs de Duhamel. Le blu- tagc a pour objet de separer la farine du son ; il I'evente au moyen des bluteaux frappans , ou bien des bluteaux cylindriques, recou verts d'une ctoffe qui tamise la farine. Le but de la mouture est de reduire les grains en son^ farine et gruau , ct de separer ces trois substances sans les alterer. Elle reffectue au moyen de plusieurs varietes de moulins. M. Borgnis enumere piece par piece toutes les parties qui composent ces machines importantes, et in- dique les formes , les dimensions et ia disposition qu'elles doivcnt avoir. II decrit les diverses especes de moulins 4 aubes, a augets, a roue pendante, i cuve , a reaction, i rent, a manege, a bras et a vapeur, et donne les regies les plus certaines pour Icur construction. Dans ce nombre, on distingue le moulin economique, qui effectue a la fois quatre operations differentes : il nettoieet crible le ble, avant qu'il ne tombe dans les tremies des nieules; il le moud , de maniere qu'il ne puisse ni s'echauffer, ni con- tracter aucune mauvaise odeur, ni eprouver trop de de- chet et d'evaporation ; il blute en meme terns que les meules travaillent,et separe les diverses qualites de farine, les gruaux el le son ; il moud de nouveau les differens gruaux , afin d'en tirer de nouvelle farine. Cette esptce de mouture, adoptee par les meuniers et les boulangers les plus intelligens , economise la main d'ceuvre et donne aux produits toute la perfection desirable.

Pour preparer le sucre et la fccule, on est oblige, pour ainsi dire , de moudre la betterave et les pommes de terre. Les rSpes cylindriques executent cette operation.

SCIENCES PHYSIQUES. A7

D'autres machines servent li monder le riz , k perler Vorge , etc.

Une brasserie contient plusieurs sortes de machines. EUe renferme des cribles , des larares , das moulins, des pompes ; un seul motcur les fait ordinairement mouvoir toutes. Ce moteur est un manege, ou, ce qui est prefe- rable, un courant d'eau. En Angleterre , c'est la vapeur qui anime tout, surtout a Londres, oii les brasseries sont des etablissemens importans, dont la yaste etendue excite la surprise et I'admiration des etrangers. Parmi ces bras- series , il en est dont le capital priuiitif a surpasse douze millions de francs.

Ce Livre est termine par la description des machines qui servent a pulveriser les os.

La fabrication du vin, du cidre, des huiles de toute espece exige deux sortes de machines : des moulins pour ecraser les fruits ; des pressoirs pour en extraire ia liqueur. EUes sont decrites dans leqiiatrieme Liure, qui flit connaitre aussi les machines a ecraser les Cannes i Sucre , les cylindres de M. Auger, pour moudre le cacao torrefie, etles beurrieres, qui servent a separer le beurre du lait.

SixiEME Traite.

Des machines employees clans dipei'ses fabrications ; con- tenant la description des machines en usage dans les grosses forges et dans les ateliers de metallurgie j dans les papeteries, dans les tanneries, dans les imprime- rres, etc. (1).

Ce traile important fait connaitre jusqu'a quel point ces diverses branches d'industrie ont profite de I'impulsion

(1) Paris, 1820, 1 vol. in^" de a84 pages avec 29 planches. Bache- lier, Ijbraire. Prix , ai fr.

A8 SCIENCES PHYSIQUES,

generale impriinee a tous Ics arts , dks le commencement de la revolution. Jusqu'a ce moment, I'industrie franfaise avail suivi , il est vrai, une marche progressive, mais lente, mais contrariee par Ics cntraves multipliees que lui opposaicnt I'elablissement des mailrises et des jurandes, les statuts d'apprcntissage, la foule de reglemens, de droits fiscaux, ct surtout les prejuges du terns. Delivree de ces obstacles, I'industrie s'est elancec dans des routes nouvellcs, en mCme terns qu'cllc a parcouru les anciennes avec plus de succ^s. Ces progrfes rapides n'ont pas ete arretes dans les tems les plus critiques de nos troubles civils; ils ont pris, au contraire, une nouvelle energie , lorsque la passion de I'independance , le besoin de de- fendre leur patric et I'amour de la gloire ont agi plus for- tement que jamais sur le coeur des Francais. A cette epoquc, les savans et Ics artistes reunis faisaient des con- quetes precieuses sur la nature ; ils elevaient les arts a un degre de perfection inconnu jusqu'alors. Ces progres se sont soutenus jusqu'i\ nos jours, et le dix-neuvieme siecle fournira a I'histoire de I'industrie une de ses plus belles pages. La noble emulation qui n'a cesse d'animer nos ar- tistes produil chaque jour et produira encore de nouvelles merveilles, tantque lapaix et la liberte, premiers besoins et principaux mobiles des arts industriels, regneront en France.

Dans ce mouvement general, un des arts les plus im- portans, parce qu'il fournit des instrumens a tous les autres , est aussi celui qui s'est enrichi d'un plus grand nombre d'ameliorations; c'est I'art de travailler les me- taux.

« Ces ameliorations, dit M. Borgnis , sont dues en grande partie i ce moteur admirable qui pent agir en tout tern* et en tous lieux, et dont la force prodigieuse ne con-

SCIENCES PHYSIQUES. ;,9

naitrail point de limites, si Ton pouvall recevoir son nclion surdesorganes mecaniques, capables d'en supporter to-ite I'inlensite. C'est en vertu de la force expansive de la va- peur que, dans I'exploitation des mines, I'on peut main- tenant atteindre i des profondeurs autrefois inaccessibles, et que les ecouiemens d'eau les plus abondans ne sont plus un obstacle insurmontable.

« La vapeur donne le moyen d'etablir les usines dans les lieux les plus favorables, sous le triple rapport d* la proximite des materiaux, de I'abondance du combustible et de la fticilite des transports. »

Nous aliens voir, en analysant le premier Livre de ce volume , les applications que Ton a faites de la force de ce puissant moteur a presque toutes les operations de la metallurgie, et les ameliorations importantes qui en sont resultees, telles que la cclurite , la precision et I'economie. Apres que le minerai est sorti de la mine, on s'occupe de I'epurcr, c'est-a-dire de separer les particules metal- liques de la gangue ct des autres substances minerales. Pour y parvenir, on precede aux trois operations nommees triage, bocardageeX lavage, qui emploientun grand n om- bre de machines , dont les principales sont les cribles , les paiouillets, les bocards et les tables de lavage, decrits dans le premier chapitre.

Le second objet de la metallurgie est de f^iire, du mi- neral ainsi cpure , une masse homogene et compacte ; pour cela, on precede a la fusion, quis'effectue au moyen d'un feu violent, active par un courant d'air rapide et continu. Parmi les machines soufflantes , imaginees a cet effet,on remarque d'abord les soufllets de cuir, a cause de leur anliquite ; mais leurs defauts graves les ont fait abandonner dar.s les grosses forges oii ils ont ei<i Tome xi. ,

I>0 SCIENCES PHYSIQUES.

rcmpiiiciis i'Jii lessoudlels en bois, iinagiijcs, en 16:26', par uu uvtquc de Bamberg et par les trompes qu'un Ilalicn iuvcnta dans le meme terns. Ces machines, & leur lour, doivent ceder la place aux soufflelscylindriqucs (oupompes soufllanlcs) introduits depuis quarante ans en Anglclerro et en Ecosse, oii ils sont aujoiird'hni d'un usage general. Mis en mouvement par la vapeur, ils produisent trois fois plus d'effet que les soufflets ordinaires.

Dcsrcgulaleurs rendent le oourant d'air que ces soufflets produisent, continu et uniforme.^La machine soufflante de M. Baader donne ce mfime resuUat, au moyen de cames construites d'une maniire ingenieuse , et qui dispensent d'employer un reservoir d'air ou tout autre regulateur.

La fusion achevee, on donne aux metaux des formes diverses, par I'operalion du moulage ou par des moyens mecaniques.

La propriete qu'ont les metaux d'etre malleables a permis de leur appliquer le puissant moyen de la percus- sion qui s'cffectue u I'aide des martinets, c'est-u-dire d'enormes marteaux, pesant quelquefois jusqu'a six millc livres, mis cu mouvement par un oourant d'eau ou par la vapeur. Ces machines, qu'on nomme aussi ordons, offrent souvent des particularites remarquables. La roue motrice est support^e par un arbre creux, fait de plusieurs pieces de hois. En Angleterre, cet arbre est en fonte de fer , de meme que les roues hydrauliques. Quelquefois aussi , le marteau, le manche et toute la charpente sont de la meme matiere, et ne forment que deux pit^ces. On pcut dire que de parcilles machines sont d'une duree infinie.

Les Anglais ont employe le mouton pour couper les grosses barres de fer u des longueurs dcterminees. On se

SCIENCES PHYSIQUES. 51

sert aussi de cette machine pour imprimer une empreinte sur une plaque, ou pour agir sur un emporte-piece; mais, dans la plupart des cas , le balancier est preferable.

Le balancier, invente depuis deux siecles par Nicolas Briot, sert principalement i frapper les monnaies et les medailles. Cette machine, simple autant qu'ingenieuse, a donne la solution de ce probleme : trouver un moyen de percussioa tel que : i" tons les points de la surface , des- tinee a etre frappee, recoivent simultanement des chocs egaux ; que la dii'ection de tous ces chocs soient exac- tement perpendiculaires a la surface frappee ; que les chocs soient aussi energiques que reguliers, etque la masse destinee a les produire ait un volume et un poids egale- ment modiques.

M. Droz a perfectionne singuiierement cette machine , et a imagine un balancier qui frappe a la fois et I'em- preinte des deux surfaces et la tranche des monnaies. II a faitconstruire en Angleterre, a la soUicitation de MM. Watt et Bolton, huit balanciers, huit coupoirs et les ateliers necessaires a ce genre de fabrication. La puissance de la machine a yapeur a ete appliquee avec tant de succfes au mouvement des balanciers et des coupoirs, que chaque balancier frappe regiilierement soixante pieces par mi- nute, et qu'un enfant suffit pour le service de deux balan- ciers.

MM. Perrier ont propose d'appliquer aux balanciers monetaires le principe de la presse hydraulique.

La plupart des metaux possedent a un tres-haut degre la ductilite, propriete precieuse qui permet de les aplatir, de les etirer et de leur donner des formes tr^s-variees , au moyen des laminoirs , machines composees ordinairement de deux cylindres en fonle grise , dresses et travailles au tour.

A*

•,2 SCIENCES FHYSIQUES.

L'invcnlion dcccs imporlanlcs m.icliincs, qui iKMcmonlc. yucrc que vors I'an l5Ao, a. iciulu l«:.s services los plus signalos aux arls qui Iravaillonl Ics iiiotaux. Lour usage, Jcviciit <Ic plus en plus clcuilu, el Ton csl parvenu a conslruirc des laminoirs ile grandeur colossalc pour forger el corroycr le Icr avcc aulanl d'eoouoniio que de promp- titude , pour I'endrc dcs lames de fer en harros et en verges, pour laininer cc mOmc metal ol N; reduiro en tfile plus ou moins mince. Dos machines analogues lamincnl Ic cuivre, le plomb, I'elnin, lo zinc; rorment, avec nnc celerity admirable, une foulc d'objels utiles, qui semble- raient cxigcr un travail long et minuticux, tels que des couleaux, des clous, des barren garnics d'ornemens et de moulures, etc.

Les laminoirs dc petite dimension solit d'lmc wtilite non moins grande aux orfevrcs, aux mctteurs en (Buvre, aux fabricans d'ol)jets placpies en or ou en argent, aux manu- factures de galonsde toule cspece. Cesinstrumens oocupenl un rang distingu6 parmi les machines donees du precicux avantage de produire un travail t\ la fois precis, econo- inique et accelere, lis doivenl cos qualiles i\ la conlinuile et ik Tuniformite dc leur action.

M. Borgnis voulant faire connaitrc le parti avantagcux que les Anglais out tire de cette machine, enlasubstiluant aux marleaux pour forger et ctirer les fers, est oblige de decrirc prealablemcnt les precedes qu'ils out mis en usage pour forger et pour afTiner ce melal.

Ces procedes sont si perfcclionncs qu'ils sont devenus , en Angleten'e, d'un usage general, quoiqn'iis n'aienl etc inventus que depuis quarante ans par Henry -Corl. Les forges franyaises no sauraient adopter trop vite cellc nou- vclle mithodc; ses avanlagcs reposant principalement sur Veroploi dc la houillc, en rcmplacemcnt du charbon dc

SCIENCES PHYSIQLKS. j;,

bois, el sur l.i cooperation des cylindrcs forgcurs dont on distingue Irois especes, cylindies (ibauchcurs , prcpara- teurs et etireurs, tons inus par des machines a vapcnr.

En adoptant cc nouvcau precede, dit M. Dufaud, le prix du ler pourra diminuer de loo francs par millc kilo- grammes, en offrant encore aiix mailres de forges uii benefice beaucoup plus considerable que celui qu'ils ob- liennent par la methode actucllc ; alors on obtiendra cc melal, si necessaire a I'agriculture, a la guerre, a la ma- rine ct i tons les arts , a un prix tel que la concurrence des fers etrangers ne sera plus i craindre pour nos forges.

Les mailres de forges devraient done s'cmparer promp- tement de ccs procedes economiqucs, plutOt que de solli- citer aupres du gouvernement , contre les fers etrangers, des prohibitions toujours funestes u loutes les branches de I'industrie nationale.

M. Borgnis decrit avec soin ces ameliorations impor- lantes et les machines qui les procurent. II fait connaitrc la grande machine a cylindre, de M. "Wilkinson, qui fait ueuf Ibis autant d'ouvrage qu'on peut en obtenir du mar- teau A ourdon le plus vigoureux ; il indiquc comment s'opere le laminage du fer et de I'acier, il decrit le lami- noir qui profdc les pieces de fer, celui dc M. Bell pour fabriquer promptcment des lames de couteaui,de rasoirs, des limes et des clous.

II fait connaitrc les moyens employes pour le laminage du cuivre; il decrit les cylindres de M. Scheffield pour elirer les fils dc ce metal , ceux pour le placage du cuivre et de I'acier, ceux pour laminer le plomb et en fabriquer des tuyaux; enfin , les laminoirs de petite dimension.

Lorsquc, par le moyen de toutes ces machines, on a reduit les melaux en lames plus nu muins epaisses , ou en verges plus ou moins larges, on les coupe et on les

U SCIENCES PHYSIQUES.

refend, suivant le besoin. On emploie dans ce but des ci- jailles ou grands ciseaux, mus a bras d'homme ou par un moyen mecanique; mais on leur a substitue avec a van- tage les fralses ou cisailles cylindriques, a mouvemcnt continu. Les decoupoirs ou emporte-picces divisent les lames de metal en parties d'une forme determinee. Le dccoupoir de M. Droz est un des plus parfaits : celui de M. ftlolard est trcs-simple. Enfin, on a employe avec suc- ces les soles a bois, ordinaires, pour couper la fonte de fer a chaud.

Les metaux Ires-ductiles , tcis que le fer, le cuivre, I'or et I'argent, peuvent etre reduits en fil plus ou moins delie ; sous cette forme, ils servent a la fabrication des aiguilles, des epingles, des dents de cardes, des cordes d'instrumcns de musique , des cables en fer, des etoffes metalliques , des galons , des broderios , etc. ; on voit com- bien cette preparation est utile et feconde en applications. EUese fait dans les ateliers de trefilerie, par des fdieres de diverses especes. M. Mouchel I'a completee parl'invention d'une machine qui drcsse le fil de fer, propre aux cardes et aux aiguilles. Le docteur Wollaston a trouve un moyen ingcnieux de reduire les fils de platine a un degre de finesse extraordinaire.

Apres avoii subi les preparations que nous venons d'in- diquer , les melaux doivent encore recevoir des formes particulieres, appropriees aux usages auxquels on les des- tine. Pour cela , la plupart des objets metalliques sont d'abord ebauches et degrossis a la forge par le moyen du feu et du marteau ; puis la lime, la meule, le tour, I'alesoir, le plateau a rcfendre, I'emporte-piece , I'estampe, etc., les fafonnent avec plus de regularite: enfin, les polissoirs lour donnent tout I'eclat dont ils sont susceptiblcs.

Les plalcaux a refendre ct a diviser decoupcnt les den-

SCIENCES PHYSIQUES. 5.,

turcs dcs roues d'cngrenage, el servent u diviscr matliema- tiquement en parties egales les surfaces circulaircs. Ces machines,, non moins remarquables par leur precision que par leur cclerite, ont puissamment contribue aux progies des arts et des sciences menie. II est peu de grandes ma- chines qui n'aient besoin d'engrenages , de meme que le corps des animaux ne pent se passer d'articulations. Lcs plateaux seuls pouvaient les donner avec economic et exactitude. C'est par eux aussi que les instrumens d'astro- nomie et de geodesic ont recu la grande perfection a laquelle ils sent parvenus, qui a fait faire de si etonnans progres a ces deux sciences.

Une machine de M. Petit-Pierre possede , outre les qua- lites dont nous venons de parler, la propriete d'arrondir en meme tems les dents des roues.

Une autre machine du meme genre , imaginee par M. Japy, jouit de Tarantage de pouvoir fendre a la fois plusieurs roues et de canneler les cylindres. Get artiste habile a concu I'heureuse idee de faire executer, par une serie de machines ingenieuses, les principales pieces d'unc montre, qui sont achevees avec la plus grande celerite et la precision la plus parfaite, dans la belle manufacture d'horlogerie ^tablie a Beaucourt, departement du Haut- Rhin.

La machine de M. Caillon execute avec beaucoup de perfection des moulures sur le fer et sur le cuivre.

Les vis a bois, si commodes et si solides pour les assem- blages en bois et en metaux, sont devenues d'un usage general, Leur fabrication , perfectionnee par MM. Molant et Clement Lossen , est devenue d'une grande importance, tant sous le rapport dcs produits que par la nianiere ingc- nieuse dont ils sont obtenus.

31, Borgnis a ajoute, ;\ la description de ces inyeutions.

56 SCIENCES PinSIQUES.

ingenieuses. et dontla plupart daleiit a peine dc quclqucs annees , cclle de deux machines, dont unc sert a amal- gainerl'or avcc Ic mcrcure, ot Tautre a separcr la limaille dc fer de la limaille des autres metaux. Cette deniiere est de I'invention de M. Ross.

Le seco7id Lh're est consacre a la description des ma- * chines qui serveut a la fabrication du papier, operation non moins reniarquable par rimportance de ses resultats quo par la maniere dont elle change la matiere la plus vile en un tissu precieux. L'auleur, apres avoir fait I'histoire de cet art, dont il paraitque les Chinois sont les invcnteiirs, docrit les machines employees pour la trituration des chiffons, soil les anciens moulins a pilons, soit les moulins a cylindres inventes en Hollandc dans le xvn" siecle. II passe ensuite a la description des aulrcs machines et us- tensiles qui servent a former les feuilles de papier et a les lisser.

Cet art a recu depuis peu une amelioration importante, par I'invention d'un procede propre a fabriquer le papier sans fin. Ce perfectionnement, imagine en Fraiace par M. Robert, en Tan vii (1799), a ete mis a execution en i8o5parBramah, en Angleterre, d'oOi MM. Bcrtc et Gre- nevich I'ont rapporte en France, en i8i5. 11 consistc a faire tomber la pate liquide sur un chassis en forme cylindrique, qui tourne au fur et a mesure que la pate, en se scparantdc I'eau, prend dela consistance, et passe, sous forme defeuillc sans fin, entre d'autres cylindres, oii elle est comprimee et dessechee. Nous avons vu, ii I'exposition de 1819, des feuilles de papier fabriquces de cette maniere et de plus dc cent metres de longueur. Cette utile invention fournit en Ires-peu de terns des quantites considerables de beau papier, et c'cst a la regularite et a la continuite dc son action qu'cllc doit ces resultats remarquables.

SCIENCES PHYSIQUES. 57

Auparavant, les artistes ne pouvaient guere songer a appliquer le mouvement continu aux presses d'imprimerie; mais a present celte application pent devcnir tres-facile , an moyen d'une machine assez simple. 11 suflira de fairc passer la longue bande de papier entre deux cylindres, dont I'un portera les caracteres mobiles et recevra I'encre d'un cylindre-balle , qui la puisera dans un reservoir par I'intermediaire d'un autre cylindrc. Cette machine offrirait de grands avantages : sa regularite donnerait un moyen fa- cile de la faire mouvoir par la vapeur. L'encre , repandue avec plus d'uniformite que par les balles ordinaires, four- nirait une plus belle impression; avec la continuite de son mouvement, on obtiendrait au moins quatre fois plus d'ou- vrage que par les moyens ordinaires.

M. Bramah, qui le premier a execute le procede pour faire le papier sans fin, a trouve aussi un moyen meca- nique pour fabriquer promptemcnt des feuilles d'une plus grande dimension qu'a I'ordinaire et d'une epaisseur plus egale. II a fait usage de la presse hydraulique pour presser et dessecher ces feuilles d'une dimension extraordinaire, pour lesquelles les autres presses seraient insuffisantes. Enfin , il a trouve le moyen de prolonger la pression pen- dant un tems indefini, lors meme que les objets ortt ete cnleves de dessous la presse . . Outre ces pcrfectionnemens notables, I'art de la pape- terie s'ost enrichi d'un procede tres-important pour la refonte du papier, c'est-a-dire pour la conversion des vieux imprimes et des manuscrits en papier qu'on ne saurait dis- tinguer du papier neuf. Cette invention, nee en France en I'an II (1794) et negligee comme tant d'autres , a ete executee dans une manufacture etablie en 1800 pres de Londrcs. Une machine a vapeur, de la force de vingt-cinq chevaux, y fait mouvoir le moulin ii papier et des presses

58 SCIENCES PHYSIQUES.

hydrauliqucslrcs-vigouicuses; huit ccnls ouvriersy confec- tionnent 600 rames de papier et y consomment annuel - lenient i,Aoo,ooo livrcs de vieux papiers. M. Borgnis fait connaitre avec soin ccs decouvertes impoitanlcs , dont I'adoption en France ouvrirait une nouvellc source dc richesses.

La consommation la plus considerable du papier a lieu dans les ateliers d'imprimerie. La presse ordinaire des im- primeurs , successivement perfectionnee par MM. Haas , Anisson , de Pierre , Prosser , Ridley , et surtout par M. Clymer , n'a pas encore neanmoins atteint la perfection qu'exigerait une machine aussi feconde en grands resultats. Celle qui en a le plus approche est la machine a cylindres en usage dans Timprimerie du Tunes a Londres ; elle est mise en mouvementpar une machine a vapeur. La planche mobile a un mouvement horizontal et alternatif, qui la met en contact successivement avec un cylindre charge d'encrc et un autre reconvert d'une feuille de papier. Un filet d'encre coule sur d'autres cylindres qui I'etendent unifor- mement sur le premier. La feuille est placec sur le second cylindre par un ouvrier et enlevee par un enfant apres I'impression. Cctte machine se fait remarquer par la net- tcte et la rapidite du travail ; elle tire 55o feuilles par hcure.

La presse des imprimeurs en taille- douce est tres- simple ; elle se compose de deux rouleaux qui pressent tout a la fois la planche et la feuille a imprimer. M. Kirk- wood I'a perfectionnee ; il a aplati le cylindre supcrieur , qui alors cessc de presser lors du retour de la planche; par ce moyen, il evile les traits doubles.

La description dc la presse lithographiquc lermiuc di- gnement cettc seric dc machines reraarquablcs sous tons les rapports.

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SCIENCES PHYSIQUES. 59

L'usage du parchemin, qui remplace quelquefois le papier pour la conservation des ecrits precieux , nous conduit naturellemcnt a la preparation des peaux , qui renfermc plusieurs arts de la plus grandc utilite.

M. Borgnis decrit, dans le troisieme Lwre , plusieurs machines i pulveriser le tan ; entre autres celle de M. Bagnall, qui en outre decharne et nettoie les peaux; les machines i grener et a refendre Ics peaux et les cuirs. II termine par la description d'une manufacture de souliers fabriques mecaniquement , etablie pros de Londres par M. Brunei, dans laquelle on n'emploie que des soldats invalides, dont trente fabriquent cent paires de souliers par jour. Quatre machines y executent toutes les operations necessaires a la perfection de la chaussure; une d'entre elles, mue par un seul homme, fabrique 60,000 clous par jour.

L'auteur donne k la fin de ce volume une notice sur les machines a confectionner le tabac en poudre et i fumer, une autre sur la fabrication mecanique des tonneaux, dont on a vu des produits a I'exposition de 1819. Dans une manufacture de ce genre, etablie a Port-Dundas, en Ecosse, douze a quinze ouvriers fabriquent par jour plus de 600 barriques. On y refend aussi des planches excessi- vement minces , pour faire des tamis, et des feuillets de bois precieux pour I'ebenisterie et la marqueterie. Avec les rognures du bois, on y fait de I'acide pyroligneux, qui sert de mordant a la teinture , et du vinaigre pour les usages domesliques.

Lenormand, professeur de technologie.

SCIENCES MORALES ET POLITIQUES.

OfiSEnvATIONS SCR PLUSIEURS POINTS lillPORTANS DE NOTRE LEGISLATION CRIMINELLE ,' par M. DuPIN , cloclcur CIl

droit et avocat a la coiir rojale de Parts ( i ) , avec celle 6pigraphe :

Longa est injuria , longce .'■Imhages , sed sitmma sequarfastigia rerum.

ViRG., j'En. , I.

Gel ouvragc, tres-bien imprime, aura sa place dans la plupait dcs bibliotheques; il est aussi interessant qu'ins- truclif, ecrit avec convenance, et le ton de I'auleur est loin de toute exageration. Tel est le meiite si distingue dc M. Dupin, que, s'il plaide une cause, son discours devient un grand exemple, une lecon historique i\ citer long-tems, un geruie heureux d'amcliorations dans noire etat social ; ct, s'il ecrit sqr nos lois, sur nos pratiques judiciaires, son livre devient bientot le manuel du juge, de Forateur, du jurisconsulte et de rhomme d'etat.

Les regies des jugemens criminels , dit Montesquieu , interessent le genre humain plus qu'aucune chose du uionde, et I'esprit despotique dans lequel sont coucus nos deux codes criminels n'est un probleme pour personne. M. Dupin ne pouvait done clioisir un sujet plus digne d'al- Icntion pour tons les lecteurs, que des rccherches sur les

(i) Paris, juia 1S21. 1 vol. in-8», 535 pages. Baudouin, impri- nieur-libiaire , rue Vaugirard , 11° 56. II faut joindre a cos observa- tions rouvragc suivant : hois criminelles extrailes de la collection in-4», dile du Louvre, et du bulletin des lois ; Recueil compose en execution dcl'avis du conseil d'etat, du - Janvier i8i3, sur la com- mission spiicialc dc monseignciir Ic gardc-dessceaux ; par M. Dupin. Paris, 1821. 7. vol. in-S".

SCIENCES MORALES ET POLITIQUES. 6i

yices de notre lugislation relative aux crimes, sur les abu» trop evideiis qui doshonorent la justice criminelle en France, malgre tant de travaux entrepris pour la perfec- tiouner. II ne s'est point propose de signaler minutieu- sement lous les abus ; il ne s'attache qu'ii un petit nombre de points capitaux qu'il regarde comme les plus essentiels ; car il n'ignore pas les difficultcs qu'on eprouve pour obtenir les refornies les plus necessaires. II sail que les leformes ne sont trop souvent qu'un leger remede aux maux publics , ou meme une reelle confirmation des desordres , et il ne dissimule pas que des vices nouveaux et imprevus sont mis souvent a la place dc ceux qu'on aurait voulu detruire. C'estce qu'il expose dans des obser- vations preliminaires , suivies de onze chapitres , dont quelques-uns sont divises en plusieurs paragraphes.

Nous puiserons dans le chap. I", sur la Justice en general, cette verite bien importante a la suite des troubles et des revolutions : «S1, dans un pays, la justice parait n'etre exercee qu'au profit d'un parti contre le parti con- traire; si , pour les delits du meme genre , on deploie une severite inflexible contre I'uD , tandis qu'il y aura pour I'autre indulgence excessive ou impunite, les hommes de I'opinion detavorisee se croiront dans I'oppression. lis se sentiront interesses a combattre un ordre de choses qui les vexe; ils recourront A la vengeance, et I'esprit de parti fera chez cux ce que I'esprit de famille produit en Corse. Ne juger que les foits, non les personnes; les actes, non les opinions ou les pensecs ; poursuivre et punir ce qui offense les lois ou les moeurs, ce qui trouble I'ordre public, voili le devoir du magislrat impartial. « Entre la politique f-t la justice , dit ailleurs M. Dupin , tout contrat est pesti- lentiel, toute intelligence est corruptrice. «

Dans le chap. II, sur le pouvoir judiciaire , I'auteur fait

02 SCIENCES MORALES

senlir la ncccssite de rcgler par ties lois la competence, I'organisalion, la procedure de la chambre des pairs. II demande, comme etant de premiere necessite, une loi qui determine les cas oil Ton pent etre arrOte , poursuivi , et les formes de I'arrestation et des poursuites. Au sujet des cours prevotales facultatives, selon I'art. 63 de la charte, el qui etaient devenues, ayant 1789, presque entierement oisives et inutilcs, d'apres les lois d'alors, il fait cette ob- servation tres judicieuse : « L'essai malheureux qu'on a fait de ces juridictions exceptionnelles, en 1816, les tristes souvenirs qu'elles ont laisses, la joie qui a suivi leur sup- pression, sont de sQrs garans qu'un gouvernement eclaire n'usera jamais du droit de les retablir. »

II insiste, dans le chap. Ill, sur la necessite d'observer les formes; il s'eleve contre la justice h la turque exercec centre I'ex-general Guillaume Pepe a Naples; il la com- pare avec justesse i cette consigne qu'on lit affichee dans nos jardins publics : Les personnes qui amenent avec elles des chieus doivent les tenir en laisse ; autrement, on les pripient quils seront abattus. II fallait, dit-il , faire le proces au general Pepe et le juger dans les formes, non par les Autrichiens qui n'ont a Naples qu'une puissance de fait, mais par des juges ordinaires; autrement, il y a usurpation manifeste sur le gouvernement legitime, qui, d'apres la doctrine de Laybach, reside exclusivement dans la majestc royale.

L'auteur examine, dans le chap. IV, les principaux vices de notre instruction criminelle; et, aprts des observations generales, il traite de la violation du domicile, des arres- tations, de I'instruclion prealable qui se fait k la police, de la prolongation indefinie de I'instruction, de I'elargis- semenl provisoire sous caution, des telegraphes consideres comnic officiers de police judiciaire, du secret, du choix

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ET rOUTIQUES. 65

libre d'un conseil , de la communication de la procedure ct du secret de I'inslruclion. Voici en partie ce qu'il dit sur la longueur indefinie et le secret de I'inslruction, et sur le defaut de liberie dans le choix du conseil: «Chez nous, la loi ordonne de faire tel et tel acta de la procedure dans le delai le plus href; mais nulle peine qui garantisse que ce delai ne sera pas indefiniment prolonge. Aussi, Ton voit les affaires minimes , comme les plus graves , durer plus d'une annee , sans qu'il y ait aucun moyen de forcer le juge , ni d'avancer ni d'enoncer les motifs du rolardement. » Voila ce qui rend nos lois de suspects d'au- tant plus odieuses qu'elles sont inutiles , si Ton ne veut qu'emprisonner arbitrairement.

L'art. 295 du code imperial de 1820 porte que le conseil de I'accuse ne pent etre choisi que parmi les avocats do- micilies dans le ressort de la cour royale qui juge I'accu- sation , et qu'il faut une permission du president de la cour d'assises pour que I'accuse puisse choisir, hors de la liste de ces avocats, un parent, un ami pour le defendre. L'injuste et humiliant decret imperial du lA decembre i8io, qui ravit aux avocats leurs antiques liberies, leur defend de plaider hors du ressort de leur domicile, sans la per- mission par ecrit du ministre de la justice, permission restreinte encore par ce ministre , qui exige pour celte permission un visa prealable du butonnier, une attestation que I'avocat n'a subi aucune peine de discipline, et des renseignemens particuliers sur ses opinions politiques. Maintenant , rappelez-vous que le ministre de la justice nomme ou pent nommer les cinq juges pour chaque ses- sion de cour d'assises; ajoutez que I'organe du minislere public est nomme et destituable par ce ministre, et que les jures sont choisis par le prefet et par le procureur du roi, deux officiers aflidcs dii ministre et revocables; enfin,

6A SCIKNCES MORALES

ajoulez que Ics jnges d'iastruction sont designes chaqufe annee par le concours dii procureur du roi et dii president el Yous pourrcz, d'apres les seuls choix directement ou indireclement ministcriels de tous Ics acteurs d'une tra- gedie criminelle et politique, juger s'il reste pour les ac- cuses des garanties suffisantes.

Les infames lois de lese-majeste des tyrans de I'empire remain , dressees par des fanatiques , devinrent les regies des procedures des anciennes inquisitions episcopales et papales , sous pretexte de venger par des hommes la ma- jeste divine; et ces affreuses regies furcnt, chez nous, comme droit commun , introduites, en iSSg, par le cruel Poyet, et maintenues, en 1670, par Timpitoyable Pussort. De li, nous vint le secret absolu de la procedure criminelle, qui, de iSSg a 1789, fut unc calamite cffroyable. N'ou- blions jamais que, jusqu'a iSSg, la procedure criminelle ordinaire avait ete , sous les trois races , publique en France, dans toutes ses parties, selon les usages et les lois des Grecs et des Romains ; que les cclebres decrets de 1789 avaient fait cesser entierement cette pervcrsite , mais que, d'apres les codes de 1790 et surtout de 1810, le secret inquisilionnei Ic plus severe a die retabli dans toute instruction criminelle , jusqu'au moment tardif de cette communication trop parcimonieuse qui precede immedia- tement I'examen et les debats devant les jures. M. Dupin fait les reflexions les plus judicicuscs et les plus touchantes sur les inconveniens de cette marche tyrannique. On ne saurait trop la faire hair et graver dans la memoire sa fu- neste genealogie. L'Angleterrc a su conscrver la publicite de la procedure criminelle , a commencer par le premier interrogatoire de ['accuse. L'Espagne et le Portugal ont su la retablir; le royaume de Naples vient dc la perdrc ; ne nous sera-t-elle jamais renduc ?

ET POLITIQUES. 65

Nous voudrions pouvoir copier les beaux chapitres de I'auteur sur V accusation , les ddbats et lejur^; en voici quelques traits En matiere de deiits de la presse, le gouvernement perd plus souvent par les debats qu'il ne gagne par lejugement. Qu'est-ce done, si I'accusation s'at- taque a des faits, ii des actes, a des ecrits pour lesquels I'opinion s'est ouYertement declaree, i des hommes qu'elle honore, et s'il survient un acquittement complet ?... II ne faut pas que les hommes complaisans et empresses autour du gouvernement en usent avec lui, eomme Tours avec I'amateur des jardins : niieux vaudrait im sage eiuieini.

Au sujet des actes d'accusation qui devraient commen- cer la poursuite, et qui ne yiennent plus qu'a la fin du proces, M. Dupin rapporte les vives et justes plaintes du * lieutenant criminel Airauit. Puisse-t-il, en les renouve- lant, avoir contribue a les rendre un jour efficaces!

On n'a point oublie le beau travail de M. Guizot contre la tactiquc des faits gcneraux qui fut employee par Tin- fame Jefferies contre Sydney, et que nous voyons fre- quemment employee par les organes du ministere public. Les faits generaux, dit M. Dupin , sont etrangers a Taccuse , par cela meme qu'ils ne lui sont pas personnels. Mais ici le mal vient du magistrat, et non de la loi. II ne faut pas attendre le remede du legislateur, mais du magistrat et du gouvernement. La-dessus il raconte, pages 120 et iPS, les malheurs du colonel Duvergier, condamne dans Taf- faire des evenemens de juin 1820. II n'y a rien de plus triste et de plus touchant que ces episodes. Le magistrat quijuge, a son tour est juge.

Les proces criminels se terminent par des debats. N'est-

ce pas une atteinte k lapublicite si limitee de ces procfes,

que « souvent Tentree de la salle d'audience ne soit per-

mise qu'a des personnes munies d'Un billet du president

Tome xi. 5

66 .SCIENCES MORALES

de la cour ou du procurciir general ? Un auditoire alnsi compose est-il ce que la loi entend par \e public ? Dans les grandes representations theatrales, dit I'auteur, s'il y a des billets pour des spectatcurs choisis, il y a aussi dcs billets qui se vendent; au lieu qu'a la cour d'assises dc Paris, souvent la faveur seule les donne ou les fait ob- tenir. On y fait exception et acception des personnes. J'ai TU restreindre 4 deux, a trois au plus le nombre de ceux qu'on daignait accorder i\ I'accuse ou a son defenseur, et c'est la ce qu'on appelle police d'audience, qui appartient au president. Souvent aussi on charge les audiences de gendarmes et de soldats, on en met plus qu'il nc faut pour maintenir I'ordre; pour tenir I'assemblee en respect, on crie d'une voix de tonnerre : Gendarmes , je vous ordonne de conduire en prison le premier qui rira. J'ai vu un pareil ordre exciter dan3 I'assemblee des rires qui gagnaient tout le raonde et jusqu'aux colliigues de I'ordonnateur.

« J'ai entendu des presidens repeter i chaque instant : T^ousavez toute la latitude pour vous ddfendre, mats. . . et de m^ais en m,ais la defense etait accablee de restrictions et d'interruptions qui fatiguaient I'avocat, lassaient sa patience , ou le troublaient au point de le reduire k se taire.

« Depuis surtout qu'ilaete mis A I'ordre du jour de de- clamer contre les doctrines , de reprimer les doctrines, les presidens se sont empresses 4 I'envi d'interromprc les avocats et d'entrer en refutation avec eux , sous pretexte de retablir les saiues doctrines. . . Ces petites tracasse- ries renversent I'ordre des idecs, sjncopent I'etablisse- ment d'une preuve , refroidissent le developpement d'une consideration touchante et deconcertent I'orateur. D'ail- leurs , telle proposition, telle phrase, tel mot deplaisent au president et plaisent peut-etre aux jures. On ne salt

ET POLITJQUES. 67

pas de quoi I'un se fache; peut-on saToir de qiioi I'autre ne s'accommoderait pas ? Toutes ces interruptions frequentes sont contraires au devoir du president. Si le juge doit se montrer indulgent envers le defenseur, a plus forte raison doit-il I'etre envers I'accuse ; il doit lui pardonner quelque chaleur dans sa propre cause, et lorsqu'il s'agit de sa perle ou de son salut. J'ai entendu un accuse, interrompu dans sa defense, dire au president : Monsieur, le soin de me defendre I'emporLe sur tout ; en sortant d'ici, vous rentrez fort tranquille cliez vous , moije ventre en prison. Que repliquer a cela ? »

Dans le chapitre sur lejury, qui est tres-soigne, I'au- teur developpe, en homme libre et ami de la verite, les avantages de cette institution , et propose un jury mi-parti en faveur des etrangers,i\ moins qu'il ne s'agisse de crime contre la sQrete de I'etat.

Nous passons le chapitre fort important Aespsines et de I'exicution des condamnations , pour nous arreter a celui des abus de detail, qui sont les vices , non des lois, mais des homnies. L'auteur s'eleve energiquement contre les abus des delations, le crime factice de non revelation, la violation du secret des lettres, la corruption des domes- tiques par des agens de police, et I'emploi malheureuse- ment si commun des agens provocateurs. Nous regrettons que les bornes de ce recueil ne nous permeltent pas de suivre M. Dupin sur de si importans objets.

Sous le titre de questions particillieres , il traite des delitsde lapresse etdes calomnies par la poie de lapresse ; il dit des choses de la plus haute importance sur la neces- site d'unc loi relative a I'emploi de la force armee contre les mouvemens populaires , sur les dommages et interets dus aux accuses innocens, sur les lois d'exception, dont il desire la cessation, sans en excepter aucune. C'est avec

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68 SCIENCES MORALES

bien de la raison qu'il le? legarde toutes commc des abiis qui , outrant I'aulorilc, I'affaiblissent et la degradent.

Au lieu d'innocenler le duel ct de le punir de peine de mort, 11 voudrait une loi qui dcclarat les duellisles inha- biles a exercer Ics droits dc citoyen . indignes jde tous em- plois civils et militaires, incapables de temoigner en jus- tice, de tester, de succeder, de rccevoir par donation ou par testament, etc.

Rien de plus judlcieux que ce qu'il a ecrit sur les delits militaires J le delit commun, et sur la justice des Suisses, exercee au sein dc la France par des etrangers employes dans I'armee, au lieu de Francais, et receyant une paie deux fois plus forte que celle des Franpais.

11 parle centre la censure des journaux, mesure d'ex- ception , qui s'etend meme sur les comptes rendus des debats judiciaires , et jusque sur les textes des jugemens.

Enfin, cet ouvrage est teimine par un curieux me- moire sur les proscriptions par ordonnance.

Lanji'ikais , de I'Lisiiiiit.

The first Annual Report of the Managers of the So- ciety for the prevention of pauperism , etc. The SECOND Annual Report , etc.

Premier et second rapports des administrateurs dc la SociiTE FORjiiE A New-York, pour PRivENiR la PAuvRETi , lus et adoptes par la societe, avcc des observations sur les causes de la pauvretc (i). Les amis de rhumanite esperaient que les Etats-Unis

d'Amerique previendraient , par la sagesse de lour gou-

(0 Premier rapporl , in-S", 27 pages. New- York, 1818; iniprime par J. Seymour. Second rapport, in-S" , 91 pages, New-York 5 1820,

ET POLITIQUES. 69

vernement et de leurs lois , cette accumulation d'ouvriers sans emploi et de pauvres , dont rcntrelien et les desor- dres pesent sur tous les gouvernemens de I'Europe. II semblait qu'une nation dans la vigueur de I'age, placee sur un sol immense et fecond, sur des fleuves et sur des mers qui communiquent avec la terre enliere, richc de loutes nos connaissances, instruite par nos erreurs, dcvait rapidement atteindre un trfes-haut degre de civilisation et d'ordre social. Cette esperance ne s'est pas encore entiere- ment reulisee.

Le nombre des pauvres s'est accru dans les principales villes des Etats-Unis. II a fallu les sccourir, et organiser I'administration des secours qu'on pouvait leur accorder.

Nous avons sous les yeux les premier et second rap- ports des administrateurs de la Societeformee a New- York pour prevenir la pauvreti. Le premier a ete fait le 26 oc- tobre 1818; le deuxieme, le 29 decembre i8ig. Nous croyons utile d'en extraire les fails les plus importans, et d'j joindre quelques observations.

On voit, dans le premier rapport, que les administra- teurs de la societe furent d'abord charges de chercher avec soin et de signaler avec precision les causes de la pauvrete , afln d'en prevenir I'influence ou de la detruire. Divers comites furent crees pour cet objet, sous la presidence de M. Jean Clarkson; secretaire, M. Jean Griscom.

Les lois, les habitudes et les moeurs des Etats-Unis de- rivent, sousplusieurs rapports, de cellesde leurmere-pa^rie. C'est ainsi, disent les administrateurs, que nous avons

imprime par E. Conrad. Nous continuerons a faire connaitre les travaux et les succes de la meme societe , a mesure que son secre- taire , M. le professeur 3 . Gaiscosi , Tun de nos honorables amis , qui a bicn voulu 6tre I'un des correspondans de la Revue Encyclopedique aux Etats-Unis , nous fcra parvcnir les rcnscignemens nccessaires.

70 SCIENCES MORALES

plus d'une fois suivi des exemples dangereux et commis des errelirs graves que nous aurions pu eviter. Nos contri- butions pour les pauvres et le nombre de nos pauvres s^ac- croissent annuellement.

lis observcnt qu'en Angleteire la depense annuelle pour les pauvres s'est successivement elevee , de 1748 a i8i5, de 692,000 1. St. a fi,i47,iooou de 17,900,000 fr., argent de France, a 153,675,000. Les circonstances poli- tiques ont rendu cet accrolssement tres-irreguUer.

La depense desmaisons de charite, a New-Yorck, s'est elevee de 44,973 dol" (1) a 77,000, dans le cours de douze annees, de i8o3 a 18 15; la meme depense, en 1816 et 1817, a excede de beaucoup 77,000 del" ou4i7,34ofr.

Le plan adopte par la societe de New-York a ete trace d'apres les meilleures institutions de ce genre, etablies en Allemagne, et particulierement a Hambourg. Dans cette dcrniere ville , le nombre des pauvres, de 1788 k 1789, sous I'ancien systeme d'administration , s'elevait a 9,757; sous le nouveau systeme , de 1798 a 1799, ^ 4,73i.

Decroissement du nombre de pauvres, 5,026.

Ce rapport contient ensuite les premiers resultatsdestra- vauxdes comites, sur les causes de la pauvrete et sur les moyens de la prevenir. Les administrateurs insistent par- ticulierement sur la reduction de la vente des boissons et des liqueurs fortes , pour laquelle le nombre des detaillans , k New-Yorck, s'elcve k \ ,600 fr. ; ce qui suppose une vente annuelle deplusde i,46o,ooo fr. ,sommeenormearrachee

(1) La piastre aniericaine, ou le dollar .^ vaut 5 francs 42 cent. Sod poids legal est de 27,000 ; son litre legal, goj; le mfinie que celui de la piastre d'Espagne, dont le poids est dc 27,045.

ET POLITIQUES. 71

au travail utile, uux larraes et au malheur des femmes souffranles et des enfans abandonnes. La constitution de la societe est a la suite de ce rapport : elle est tracee avec beau coup de sagesse et de simplicite.

Le second rapport, beaucoup plus etendu , redige dans les memes principes et dans les memes vues, presente A la fois les resultats de deux annees d'exercice , et des faits et des observations d'un tres-grand interet. L'indication seule de ces resultats suffira pour en faire connaitre I'ini- portance et la rendre applicable a cette partie de I'econo- mie politique, si essenticUe aux progres de la civilisation, qui doit veillerau sort des classes indigentes,

Les administrateurs attribuent la pauTrete dans I'etat de New-Yorck :

i** A V ignorance. Sur 76,000 individus, population de la ville de New-Yorck en 1818, ils evaluaient a ai,ooo le nombre des enfans en age de recevoir les principes ele- mentaires de I'instruction : sur ce nombre, ils estimaient que 8,000 enfans en etaient entierement prives; d'oii il resulte necessairement que plus d'un tiers de la population ne salt pas mcme lire. La negligence coupable de n'assister a aucun culte religieux accroit encore I'ignorance et Tim- moralite. Sur 25, 000 families, a peine en peut-on comp- ter io,ODO qui assistent regulierement aux exercices de leur culte.

29 A Viniemphance. L'usage des liqueurs fortes est tel, qu'il y a, dans la seule ville de New-York, i,43i per- sonnes patentees pour en vendre, et que la consomraation annuelle s'eleve au moins a i,Gi 2,000 dol" ou a plus de 8,740,000 francs. Cependant des mesures tres-sages on£ ele prises par le chef magistral de New- York pour res- treindre ces deplorables abus ; et le nombre des li«encei

71 SCIENCKS MORALES

pour vendre des espriis ou dcs liqueurs fortes, qui etait, en 1818 , de 1,637, s'est trouvc reduit, en 1820 , a i,43i, quoique la population soit aujourd'hui de plus de 120,000 ames. Des reglemens de police tres-sagcs com- niencent a diininuer cette funcsle source de desordre et de depravation. Les administrateurs ont soumis a la legisla- tion un projet de loi pour mieux regler la ventc des liqueurs fortes et I'exercice des licences, dont le prix donne un revenu d'environ 17, 000 dol" on 85, 000 fr.

3'^ Aux prits sur gage. On ne peut se dissinuiler que CCS prels ne soient une grande source de pauvrete. Le maire de New- York a cepcndant regie avec la plus grande sagesse tout ce qui a rapport a ces prets. L'intcret est fixe a 7 pour cent, pour tout pret au-dessus de 25 dol" ou 125 fr.,cta25 pour cent, au-dessous de cette somme.

Aux loteries. On s'etonne que les loteries aient pu ctre admises dans des Etats oii d'autres branches de reve- nus dcA'aient suffire aux depenses publiques. Cependant on ne peut y vendre d'autres billets que ceux dont les lote- ries sont autorisees par le gouvernement. La licence pour chaque bureau de vente est de 5oo dol" ou 2,799 fr. II n'y avait eu a New- York, en 1820, que quatre licences ac- cordees depuis la loi qui regie la police des loteries.

Aux etablissemens de chnrite. La religion et la raison doivent diriger ces institutions, qui deviennent nuisibles au maintien de I'ordre public, des qu'elles fournissent des secours i la paresse, ;\ I'indolence et a rimmoralite. II n'est do de secours qu'i I'individu incapable d'un travail suffisant pour lui procurer des mojens d'existence.

Les administrateurs ont forme unt bibliotheque , oCi ils reunissent tous les ouvrages qui peuvent les eclairer sur Teducation dcs dilTcrentcs classes de la societe et sur le

ET POLITIQUES. 73

meilleur systeme de secours a donner a I'indigence (i). lis ont divise la population de la cite de New- York , de ma- niere a connaitre le mieux possible toutes les classes de la population, les travaux, les habitudes, le sort etles besoins de chaque famille et de chaque individu.

L,es banques d'epargnes ont eu une influence tres-salu- taire. On en a etabli a Philadelphie, a Boston, u Baltimore, a Salem, et partout elles ont inspire plus d'economie et plus d'activite. Depuis le 3 juillet jusqu'au 29 decembre 1819, on a depose a New-York plus de i5o,ooo dol", et on n'en a retire que 5, 000.

Independamment des causes deja indiquees, les admi- nistrateurs de la societe ont reconnu encore d'autres sources actuelles de pauvrete dans la cite de New- York :

L' emigration des pays etrangers, Les administrateurs eu sont effrayes; une grande partie des emigrans de I'Eu- rope afflue a New-York. Tous les evenemens qui ont trouble I'ordre social et qui ont laisse des milliers d'ouyriers, de gens de mer et d'individus de tout genre sans emploi, ont influe sur cette immense emigration ; c'est sui-tout vers New- York qu'elle s'est dirigee , depuis le 1" mai 1818 jusqu'au i" novembreiSig. Dans dix-huit mois 35,56o pas- sagers y ont debarque ; sur ce nombre 18, 980 sont etrangers. Un grand nombre y est arrive par I'interieur , venant du Canada; plusieurs ont echappe a la surveillance de la po- lice et ne sont pas compris dans ce denombrement. La progression de cette emigration n'annonce que trop les desordres de I'Europe. Dans moins de cinq mois, en 1818, i3,ooo emigres sont arrives a Quebec, dans le bas Canada. Les mauvaises moeurs d'un grand nombre de ces emi- grans, leur misere, leurs deplorables habitudes influent

(i) Vo^ez ci-dessu» , T. X, pag. 625 , 1'extnit de ce catalogue.

7A SCIENCES MORALES

d'une maniere tres-fucheusc sur la population de New- York. La miserc et le descspoir trainent a leur suite les maladies, les desordres et le crime.

Les administrateurs demandenta cet egard de nouvelles lois i leurs legislatures, dans I'interot de la population americaine et dans I'interet de I'humanite, pour les infor- tunes qui viennent cherchcr une autre patrie.

Nous ne pouvons ici qu'analyser rapidement cette partie cssentielle du second rapport. II est du devoir de tous les gouvernemens de I'Europe d'etre attentifs a cette eflrayante emigration. Si la belle experience qu'a faite M. Robert Owen a New-Lanark en Ecosse elait mieux appreciee (i) , chaque etat conserverait ses sujets ; et la plupart de ces emigrans, au lieu de s'exiler volontairement de leur patrie, en cultiveraient le sol, et en accroitraient la richesse et la prosperite.

Les administrateurs mettent encore au nombre des caus es de pauvrete :

7 Les nomhre.ux proces partes aux coiirs criininelles , dont Taction est trop lente. Ces cours sont accablees par la multitude de plaintes qui naissent des desordres que nous avons indiques. La society appelle I'attention de la legis- lature sur cette importante partie de Tordre public.

8 Le mauvais systeme de correction dans les prisons et dans les maisons de force est aussi une cause de pauvrete. La confusion qui regne dans les diverses classes des cou- pables, jeunes et vieux, incorrigibles etrepentans, con- damnes a perpetuite et detenus pour un tems limite, a

(i) \oj.l'£xanienimpartial desnouvelles vues de M. Oiven, etc., par le docteur Macnab, medecin de S. A. R. le due de Kent, Pa- ris, 1821, Treutell et Wiiitz ; et le compte rendu de cetouvrage dan* la Revue Encyclopedique , T. X, page 32 1.

ET POLITIQUES. 75

I'influence la plus funeste sur le caractere de tous ces in- dividus. II y avait , en 1819, dans la malson de correction de New-York, 358 prisonniers.

Dans cettepartie du rapport, penetres d'admiration pour les succes presque miraculeux qu'a obtenus a Londres , dans la prison de Newgate, ledevouementdemadame Elisabeth Fi-y (i) et de la femme Howard, les administrateurs de la societe de New- York expriment ainsi leurs Yoeux : Pour- quoi des femmes vertueuses n" entrent-elles pas ici dans ces asiles du, crime et du desespoir, comme des messagers ce- lestes, comme des anges de pitie^ de paix et de consolation?

90 Les maisons de jeu contribuent aussi a augmenter le nombre des pauvres. Partout I'influence de ces maisons est deplorable, et il semble qu'on ne voie pas combien elles plongent d'individus et de families dans les plus coupables egaremens et dans la plus affreuse indigence.

10° Ledefaitt de proprete est une dixieme cause assignee par les administrateurs de New-York ; ils complent avec raison ce desordre au nombre des sources qui influent sur I'accroissement de I'indigence et sur I'etat sanitaire du peuple.

C'est sur toutes ces causes que I'edueation doit avoir la plus grande influence. C'est des I'age le plus tendre qu'il faut dirigerla raison des enfans, et leur inculquerles prin- cipes purs et sacres de la religion, qui sont ceux de I'ordre et de la vertu , de I'amour de Dieu et des hommes. Ils rendent hommage aux cfl'ets salutaires qu'ont deja produits les ecoles lancastriennes d' enseignenient mutuel et les ecoles des dimanches. Tel est, disent-ils en terminant leur rapport , Vexpose de ce que nous avons fait et de ce que nous voudrions faire. Notre vue s'etend a mesure que nous

(1) Fiyes ci-dessu» , T. X, pag. 209.

76 SCIENCES MORALES

avangons J et de noiweaux deuoirs nous sont imposes a chaqite pas. lis rendent I'liommagele plus honorable a la meinoire dc M. Jean Murray, I'un des membrcs les plus zelcs dc Icur comite; il avail poite tous ses soins sur un etablissement d'educalion pour Ics enfans dc couleur, au nombre d'environ 2,000, ct sur I'organisation des banques d'epargnes.

Cos deux rapports sont dictes par un zele cclaire et par un amour ardent pour le perfectionnement de la civili- sation et le bonheur de I'humanite (i).

Laffon de Ladebat.

\\X% 1 Vl\ vvw^w*

Dell' Istoria d'Italia antica e moderna , elc.

HiSTOIRE d'ItALIE ANCIENNE ET MODERNE , par l&

chevalier LuiGi Bossi, etc. , avec des cartes g6ogra- phiques et des planches (2).

Nous avons deji donne une premiere annonce de cet ouvrage, dont il a paru jusqu'a present dix volumes.

Cette histoire doit etre divisee en six livres, dont le premier comprend les tems anterieurs a la fondation de Rome, et le second I'histoire de Rome, partagee en trois periodes : les rois, la republique et I'empire. C'est li que se termine Ic dixieme volume ; le reste de cette histoire fournira le sujet des autres volumes qui seront publies suc- cessivement.

(1) A la suite du second rapport est un appendice, qui contient des details interessans sur les diverses causes de pauvrete ct sur le» mesures qui 'pourraient les affaiblir ou les ditruirc. On y a joint le catalogue, que nous arons public, des ouvrages dont il a ete fait don & la societe. ( Foyez ci-dessus, T. X, pag. 625 ).

(a) Milan, 1819-1820, etc. Giegler %< Bjanchi, 10 vol. in-8°.

, ET POLITIQUES. 77

Quoique Ic premier livre ne comprenne qu'uD seul vo- lume, il pourrait paraitre un peu long a des lecteurs qui, impatiens tie parcourir I'histoire certaine, n'aiment point a s'arreter sur des terns obscurs et fabuleux. Cependant M. Bossi se montre, plus que beaucoup d'autres ecrivains, sobre dans ses recits et severe dans sa critique, et il ne s'occupe lui-meme do cette premiere epoque que le tems necessaire pour faire connaitre autant que possible les premiers babitans de I'ltalie, qui ont donne naissance an peuple romain.

Ce qu'on pent recueillir deplus important dans des tems si recules, ce sont les noms des pays, ceux des peuples qui les ont habites, et les indications de quelques evenemens plus ou moins alteres. L'auteur donne d'abord quelques ideessur la geographic ancienae, el uu cApose assez precis des systemes geographiques de Strabon, de Pline et de Ptolemee. Ces connaissances preliminaires sont neces- saires a ceux qui se livrent i I'etude de I'histoire ancienne, puisque cette histoire est entierement basee sur I'un ou I'autre de ces systemes de geographic jusqu'au commen- cement du moyen age.

Cette partie de I'etude de I'antiquite, qui, moins que les autres cependant, offre aussi beaucoup de contradictions et de difficultes , a donne lieu a de nombreuses recherches. L'auteur examine plus ou moins rapidement les opinions des ecrivains les plus distingues dans ce genre d'etude, tels que Bocart, Dickinson, Cluverius , Bianchini, Maffei, Guarnacci, Bardelti, Carli, Durandi, Fabbroni, Micali, etc. II cherche ensuite a remplir, si Ton pent s'exprimer ainsi, ces deserts historiques par le peu de materiaux que peuvent lui fournir les auteurs anfciens. II passe en revue tous ces peuples de I'ltalie , dont il ne reste a peu pres qu'une ste-

78 SCIENCES MORALES

rile nomenclature; il s'amte un pen plus surles Pelasges, tt surtout sur les Etrusques ct sur les Latins.

Malheureusemcnt,rhistoire de cespeuples, comme celle de tous les autres, peril avec Icur independance, et il n'en est reste que cc que les conqueraus ont bien voulu con- server et que les Grccs n'ont pas altere. M. Bossi rejette tout cc qui est incertain ou sans vraisemblance , prenant pour guides les autorites les plus authentiques, et surtout Jes monumens que la barbaric des hommes et Tempire du terns ont epargnes. II t5chc de determiner le plus exacte- ment possible I'esprit, les coutumes, les habitudes, la reli- gion, les arts , la legislation et la population de ces contrees.

Les Grccs, penetrant et s'etablissant dans I'ltalie, s'etu- di^rent a donner a tout ce qu'ils y trouverent des origines grecques. Ainsi, interpretant et d«'-nnturant Thistoire pri- mitiTC de ce beau pays, qui, cr.mme tous les autres, avail la sienne propre, ils y substituerent leur mytliologie natio- nale. Les Remains cux-mCmes tirerent vanite de rapporter leur origine k I'liistoire des demi-dieux et des heros de la Grece ; ce qui corrompit de plus en plus I'histoire veritable des premiers peuples de I'ltalie.

M. Bossi a voulu purger cette histoire , ou plutot cette mythologie , de tout ce qu'elle renferme d'etranger. Tel fut aussi, si Ton en croit G. B. Vico, le projet de Varron, de donner a I'histoire ancienne des Remains une origine toute nationale. Yico tacha d'appliquer ce systeme h toutes les nations; le nouvel historien suit le meme systeme, sans citer I'autcur auquel il appartient principalemcnt. L'ltalie avail ses peuples indigenes, auiocthones ouabo?-i- genes. M. Bossi les reconnait dans tous ces peuples a qui on ne pent attribuer imc origine elrangere, et qui exis- taieat deji i\ I'epoquc de ces emigrations et de ces colonics

ET POLITIQUES. 79

qu'on trouve indiquees dans I'histoire ancicnne de I'ltalle.

Mais quelle origine auraient ces peuples aiitocthones , si Ton ne leur reconnait pas une filiation suivie et unc soiiche commune? Voltaire, dans ces grandes questions, se tirait souvent d'embarras par des reponses qui ne sont pas toujours aussi legeres qu'elles peuvent le paraitre d quelques lecteurs. II appliquait les memes questions aux autres especes inferieures qui naissent et croissent dans tous les pays. C'etait rid(5e d'Epicure, c'etait la cosmogonie de la plupart des peuples , et surtout des Pheniciens. M. Micali (i) avait cru pouvoir concilier cette opinion sur les peuples aboiigenes avec la Bible : il a avance que, de meme que Dieu a donne un Adam a une parlie de I'Asie, il I'a donne aussi a plusieurs regions de la terre, qu'on pourrait regarder comme privilegiees, ou plu- totcomme plus propres a la propagation et ala conservation de leurs especes ou races differentes. Ainsi La Pejrere avait imagine des Preadamites ; et M. Micali multiplie les Adam, autant qu'il en faut pour donner un commen- cement a chaque peuple autocthone. Selon ce systeme , Moise aurait raconte la creation des premiers hommes, en la reduisant a un seul fait dans la personne d'Adam, qui serait I'embleme ou le genre des hommes primitifs.

Mais ce n'est pas assez pour conserver aux peuples au- tncthones leur propre origine ; il faut aussi que le deluge de Noe I'ait respectee. Autrement, il faudrait repeter la meme creation qui a precede le deluge; mais toutes ces recherches sont plutot curieuses qu'instructives.

Notre auteurs'attache surtout a faireressortir tout ce qui caraclerise la civilisation et I'esprit d'independance poli- tique des peuples primitifs de I'ltalie. II consaore un cha-

(0 L'lialia afandil dominio de' Romani.

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pilrc entier a la religion, aux arts, aux eludes, a la litlerature et a la langue des Elrusques. On dirail souvent qu'il en fait le panugyriquc , plutut que I'liistoire. II sou- ticnt que la culture des arts et dcs sciences existait deja parmi les Italiens, avant que les Gi'ecs eusscnt fonde chez eux leurs colonies et occupassent les villes deja florlssantes par leur population ct leur police. Plusieurs nionumens et quelques reflexions ingenieuses semblent constater ces epoques anciennes de culture et de civilisation, dont la trace est a peine indiquee par la tradition ou par I'liistoire. Ce qui est plus certain , c'est I'esprit d'independance que la plupart dcs peoples ancicns de Tltalie ont niaintenu avec un soin religieux. Plusieurs auteurs ont trouve chez ces peuples, surtout chez les Etrusques, cette organisation federative, qui laisse a chaquc cite sa propre administration interieure et qui concentre toutes les forces particulieres pour la defense exterieure et commune. L'auteur , comme tant d'autres antiquaires italiens , serable se dedommager de la perte acluelle de leur independance politique par des descriptions exagerees de celle dont jouissaient autrefois leurs ancetres.

On a conserve des series de rois appartenantaquelques- uns de ces peuples ou qu'on leur attribue. On a cru pouToir en assigner aux Sabins , aux Etrusques , aux Latins. M. Bossi passe rapidement sur la pretendue his- toirc des anciens rois du Latium ; il traite de I'arrivee d'Enee en Italic , d'Ascagne , des rois d'Albe ses suc- cesseurs, enfln de Romulus, fondateur de Rome. Comme I'histoire de ces personnages heroiques est remplie de fables, l'auteur cherche a separcr le vraisemblablc du fa- buleux, et il indique ce qui lui parait le moins incertain. Ainsi, il apprend a ses lecteurs a separer le domaine de la mythologie de celui de I'histoire. II lermine son premier

ET POLITTQUES. SI

Livre par un coup d'oeil sur les ilcs de I'ltalie , telles qu'elles etaient on devaient etre dans ces terns recules, specialement la Sicile et ses habitans , que nous ont decrits les poetes et les mythologues.

On ne peut contester a I'auteur le merite d'avoir con- suite tous les ecrivains classiques, grecs et latins, et leurs plus savans commentateurs , ainsi que tous ceux qui ont redige des memoires particuliers ou eclairci des monuoxens de tout genre, et specialement les etrusques. II a meme profite de la Chronique d'Eusebe , recemment publiie par MiM. Mai et Zohrab, et qui lui a servi a rectifier plusieurs points de chronologic. Qu'il nous soit permis cependant de Toir avec etonnement que I'auteur, ayant quelquefois rap- porte les opinions meme etranges et bizarres de la plupart des antiquaires anciens et modernes , n'ait pas donne place a celles de Vico, et ne I'ait pas cite parmi tant d'autres qui n'etaient pas plus savans que lui.

Le premier Livre de cette histoire est plutot une dis- cussion critique sur les anciens peuples de I'ltalie, qu'une narration suivie. C'est dans le second que commence I'histoire proprement dite; il comprend une periode de pros de dix siecles. Ce n'est que I'histoire de Rome, qui absoi'be celle de I'ltalie, u mesure qu'elle soumet Ic pays a son joug.

Cette grande histoire qui, dans salongue duree,presenle une unite, une progression, un but, se divise naturelle- ment en trois parties ou periodes, dont chacune est dis- tinguee par une epoque tres-remarquable qui la termine. Tels sont I'etablissement de la republique romaine , celui dc I'empire et sa chute. L'auteur ne se borne pas a repeter les faits ou les recits des historiens anciens et elassiques; il les compare, il les examine, il les rcjette ou les concilie, il tire tous les secours necessaires de leurs interpretes et Tome xi. G

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de leurs commentateurs. On voit bien que son higtoire n'estpas une copie , comme tant d'autres, abrcgee ou pa- raphrasec ; elle est I'extrait d'une lecture immense, me- thodique et comparative de tous les ouvrages anciens et modernes qui meritent d'etre consuites. II serait impos- sible de suivre le fil de la narration ; nous indiquerons quelques traits particuliers qui la caractcrisent.

La premiere parlie du second Livrecontientl'histoiredes rois de Rome. L'auteur ne manque pas d'y reunir celle des autres parlies de I'ltalie; il ne se borne pas i la simple narration des fails les plus certains; il etend ses remarques sur la religion, sur le gouvernement, sur les coutumes, les sciences, les arts, le commerce de chaque age (i); et, cc qui est fort intercssant, il signale les circonstances ou les causes qui, du terns des premiers rois, ont dQ contribuer .^i la grandeur du peuple romain.

En parlant des premieres colonies grecques d'ltalie , M. Boss! s'arrete quelques momens sur I'ecole de Pylhagore et sur les premiers Gaulois qui penetrerent dans I'ltalie. Pythagore , qu'Aristote regardait comme le premier pre- cepteur de la morale, etqui a merite le litre de legislateur v/e I'amitie, contribua plus que tout autre A la civilisation de la grande Grece. II sut combiner dans sa philosophic la theorie avcc la pratique , la contemplation avec le travail, la felicite privee avec la felicite publique. L'influence de ses principes et de son ecole fut une preuve continuclle de cc que peut operer I'instruction publique, au profit des peuples et de leurs gouvernemens. Crotone , Tarente , Regium, et plusieurs autres republiques de la grande Grece, furent heureuscs ct puissantes jusqu'a I'epoque oii les Py- thagoriciens furent persecutes et proscrits par Cilon, qui

-r

(i) Voytz livre 1 1 , Part, i , chap, 8,

ET rOLlTIQUES. 83

avait ^te exclu de leur ecole, et par d'autres lyrans en- nemis de la verite et de la vcrtii. A I'occasioa de la philo- sophie de Pythagore, I'auteur fait un tableau trfes-'curiciix de I'etat des sciences et des arts dans la grande Grece, pen- dant I'epoque des rois de Rome. II indique les philosophes, les artistes, leurs ecrits, leurs chefs-d'oeuvre, surtout les medailles et les vases de ce terns, conserves jusqu'a nos jours, temoins et monumens qui prouvent que les sciences et les arts fleurissaient en Italic long-tems avant de pe- netrer dans la Grcce, et que les Grecs eux-memes les ont probablement recus des Italiens. Telle est au moins To- pinion favorite de notre auteur.

Ondoitremarquer, en passant, I'observation de M. Bossi sur la taille et la physionomie des G^ulois, queTite-Live , Florus, Justin, etc., ont depeints sous des formes ef- frayantes. L'auteur croit qu'ils etaient d'une race particu- lifere de Celtes venus des regions habitees par la race pri- mitive caucasienne , et que leur taille elevee et leur figure singuliere en imposirent d'abord aux Remains eux- memes.

La seconde partie du second Livre, qui s'etend depuis la fondalion de la republiqiie jusqu'a celle de I'empire, est la plus importante. IM. Bossi fait de terns en tems les re- marques nccessaires sur les evenemens les plus eclatans de cettc pcriode. J'indique les principales : celles qui pourront donner la plus juste idee du merite et du carac- tcre de I'ouvrage.

L'auteur observe comme une chose tres-singulierc que les R^omains , avant la prise de Veies, pendant trois ou meme quatre siecles , n'eurent aucune communication avec ritalie meridionale, et surtout avec la grande Grece, qui pouvait beaucoup contribuer aux progres de leur civili-

6'

U SCIENCES MORALES

sation (i). Quelles que soient les causes de cet isolemcnt indiquees par I'auteur, son opinion fortifierait les doules exprimes par Vico sur le message des llomains , charges de porter, d'Athenes h Rome, les lois de Solon et d'aulres legislateurs grecs. Mais, comme nous I'avons dejA remar- que, M. Bossi a neglige de rapporter les opinions de Vico sur ce voyage, sur I'esprit des lois des XII Tables, sur TAsile ouvert , par Romulus, u Rome, sur le caractere de Pylhagorc et de son ecole, etc.

La republique romaine, jusqu'a I'epoque de ses guerres avec les Gaulois, pent etre regardee comme etant dans son enfance. L'auteur retrace la politique, I'art de la guerre, la religion, lesmceurs,la langue, I'eloquence, rheroisme des premiers Romains (2). Ce qui est fort re- marquable^ c'est I'esprit aristocratique qui parait tres- ancien chez les Italiens. L'auteur cherche a determiner le caractere des patriciens et du pcuple romain, et plus en- core cette sorte d'equilibre etabli entre eux , et qui se con- serva toujours tant que dura la republique. On connait les discussions de Machiavel et de Campanella sur ce sujet. M. Bossi pose cette question : « Si Ton n'avait pas separe les citoyens en classes distinctes , aurait-on prevenu leurs discordes ? » Mais, cette distinction etablissant une inegalite legale parmi les citoyens, le probleme propose donnerait lieu a une question plusgenerale : Pourrait-on, et par quels moyens, eviter dans la societe politique I'inegalite des rangs et les agitations intestines, resultant de Taction et de la reaction des classes ainsi divisees ?

L'epoque de I'invasion des Gaulois et de I'incendie de Rome est, selon notre auteur, fort remarquable, a cause

(1) Liv. II, Part. 11, ch. 9, [t] lltUL , oh, la.

t:t politiques. ss

des changemens qu'elle opera dans la religion , la legisla- tion , le caractere et la litterature des Romains. Les guerres puniques, malgre les desastres qu'elles amenerent dans ritaHe,eontrrbuerent beaucoupalacivilisationdes Italiens, qui seoiblaient se dedommager des maiix de la guerre et de Tinvasion de I'etranger par les connaissances qu'ils rece- vaient de leui-s ennemis. Depuis ce terns, tout s'ameliora progressivement a Rome et dans I'ltalfe.

On trouve de I'ifiteret et quelquefois des vues nouvelles dans les considerations que presente M. Bossi sur I'art de Fa guerre chez les Romains , sur le passage des Alpes execute par Annibal, sur les relations des Romains avec les autres peoples, sur I'interpretation des prodiges dont hi politique ne manque pas ordinairement de s'emparer^ sur les institutions religieuses, sur les premieres comedies^ sur la science astronomique de Cornelius Gallus, sur la destruction de Carthage et surses consequences, etc. (i); nous ne pouvons que les indiquer a nos lecteurs.

Les considerations contenues dans lesixieme Tolume sent encore plus remarqiiables, entre autres toutescelles qui sent relatfves au caractere des grands personnages des derniers tezns de h. republique, tels que Cesar, Ciceron , An- toine, Octave, Pompee, Cassius, Brutus, etc. Apres avoir rapporte les faits essentiels qui les concernent, il pose et discute les questions saivantes: Que serait-il arrive, si les republicains n'avaient pas hasard6 la batailite a Phi- Hppes? si Brutus et Cassius avaient remporte la vic- toire ? 3-° si^ au litu d'un peuple giierrfer et f&iblement instruit, il s'etait forme a Rome un peupic d^hommes kttres, de philosophes et d'artistes .^ oa si les Romains, an lieu de se livrer a la guerre et a la eonquete , avaient

'■.0 Foj. Tom,. IV,

86 SCIENCES MORALES

cultive rinduslrie et Ic commerce? 4" Enfin, dans cesdcux dernieres hypotheses , Rome scrait-elle devenue la mai- tresse du monde?.... Cclte manicie d'cxaminer quel- ques epoques imporlantes de I'histoire , nous parait inge- nieuse et philosophique; mais nous prcferons, sous ce rapport, les reflexions dcd'Alcmbert,dans son Discours sur I'histoire et sur les dijferentes rnanieres de I'ecrire : Qui peut embrasser toute la chaine des evenemens politiques ct de leurs circonstances pour en deduire les consequences necessaires ou les plus probables ?

L'auieur, en exposant les idees qui eclaircissent ces problomes , fait des reniarques tr^s - judicieuses sur I'etat de la politique, de la civilisation, des sciences etdes arts, du tems de la republique romaine. II determine les Teritables causes de la chute de cette republique ; et meme il rectifie quelques opinions de Montesquieu, sans oublier ce que Machiavel et Paruta avaient remarque , avantlui, sur le meme sujet. Parmi ces causes, il signale de prefe- rence les hommes qui ont exerce le plus d'influence par leur talent, par leur yaleur et par leur fortune (i),

L'auteur, ainsi que Bailly , Dupuis, Heeren etd'aulres, sent la necessite de supposer des epoques d'une civili- sation plus etendue , antei'ieures aux epoques historiques qui nous en ont a peine conserve quelques traces. D'a- pres cette supposition, on a imagine divers foyers de ci- vilisation dans la Tartaric , dans la Chine , dans le Thibet , dans les Indes, dans I'Assyrie, dans I'lilthiopie , dans les regions les plus septentrionales de I'Europe. M. Bossi assigne aussi un de ces foyers en Italic, comme paraissent I'indiquer plusieurs de ses opinions religieuses et de ses institutions politiques propres a cette contree (2).

(i) Chap. 63. (3) Chap. 64.

ET POLITIQUES. 87

Examinant I'etat progressif de la litteralure des Ro- mains, M. Bossi cherchea rectifier les ideesde M, Schoell, qui, verilablement, ne sont pas tres-exactes. Get ecrlvain distingue trois periodes de la republique romaine : la pre- miere est celle de sa barbarie, depuis la fondation de Rome jusqu'a la fin de la premiere guerre punique; la seconde , qui comprend la naissance de la litterature , s'e- tend depuis la fln de la guerre punique jusqu'ii la mort de S_ylla; la troisieme est I'uge d'or de la litterature ro- maine, qui, selon M. Shoell, ne depasse pas la mort d'Au- guste. Les observations critiques do M. Bossi , i ce sujet, nous ont paru d'une grande justesse (i).

Le 66' chapitre est consacre au commerce des Romains et des autres peuples de I'ltalie, sous le gouvernement de la republique. L'auteur profite beaucoup du savant ouvrage de IM. Mengotti, qui a pour titre : Commercio de' B.omanii il y ajoute ses propres reflexions. Mengotti et Delfico, preoc- cupes par leurs sentimens philantropiques , ont peut- etre un peu trop exagere la durete et I'injustice des Ro- mains. M. Bossi, plus modere ou moins partial, n'apu se dispenser de rappeler des principes et des fails qui, du terns de la republique , montrent les Romains tout autres que ne les ont representes ces ecrivains sevferes. II re- prouve aussi I'opinion de Raynal, qui ne reconnalt d'autre commerce chez les Romains que celui des depouilles des peuples conquis. Rome , ainsi que toute autre societe , ne pouvait exister sans le commerce , malgre sa rapacite et les richesses enormes qu'elle enleva aux nations.

L'auteur conclut, en disant que Rome republicaine posseda et cultiva la litterature, les arts et le commerce qui pouvaient se combiner le mieux avec I'objet de sa pri-

(i) Chap. 65, §. 19, p. 371 .

8S SCIENCES MORALES

mitive deslinalion et avec les progres extraordinaires de sa grandeur. M. Bossi voit partout une connexion neces- saire de causes et d'effcts cntre toutes les institutions ro- maines ctle resultatqu'elles ontproduit, c'est-a-dire, I'em- pire du monde (i).

Partout oii I'autcur expose ou rejette les opinions des autres, il lefait avcc la plus grande moderation. II semble ne pas avoir conserve le memo caraclere , lorsqu'il examine les idees de I'abbe Denina. Celui-ci flattait beaucoup le pouvoir; ce qui lui fit emettre plusieurs opinions contraires aux faits de I'histoire et aux principes de la saine raison. M. Bossi, indigne de la scrvilite de cet ccrivain, ne laissc echapper aucune occasion de le condamner.

L'ouvrage de M. Bossi contient, u la fin de chaque vo- lume, des notes destinees i eclaircir quelques points d'e- rudition indiques dans le cours de I'histoire, et surtout a expliquer quelques planches tres-uliles pour I'intelligence de quelques faits ou dc quelques usages.

Ainsi I'auteursignale et rectifie plusieurs meprises chro- nologiques, dans lesquelles est tombe Blair lui-meme. 11 a voulu combiner les lumiercs de la philosophic aveccelles de I'erudition ; mais je n'oserais pas decider qu'il soit aussi philosophe qu'erudit. Peut-etre encore, desirerait-on plus de precision dans cct ouvrage, mais ce doute n'ote rien a son merite; ctquand il serait fonde, Vhistoire d'l- ialie n'en est pas moins digne des suffrages du public eclaire, tant par le sujet en lui-meme, que par la mani^re dont il est traite. C'est la seule histoire de i'ltalie anciennc et moderne, concue sur un aussi vastc plan, et entreprise et cxecutee par le menie ccrivain. F. Salfi.

(») Chap. 66, §, 5, p. 097.

ET fOLlTIQDES. 89

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HisTOiRE DE l'assembl^e constituante , par M. Ch. Lacretelle , I'un des quarante del' Academic fran- false, professeur d'liistoiredla facuU6 des lettres de Paris (l).

II cxiste , comme on sail , un Precis historkjue de la Revolution frangaise J ouvrage dii vertueux et infortuuo Rabaut Saint-Etienne. Ce livre , compose peu apres la session de I'Assemblee constituante , dont 11 embrasse I'histoire , est ecrit sous la dictee des passions les plus genereuses; et, malgre un petit nombrc de jugemens que les evenemens posterieurs ont appris a rectifier, il etuit generalement considere comme I'histoire la plus vraie et meme la plus equitable de cette premiere epoque de la Revolution francaise. Reimprime souvent, et une fois aux frais de la nation , il n'a pas cesse d'etre reproduit jusqu'a ce jour par les presses francaises ; aujourd'hui, plus que jamais, il a de nombreux lecteurs. M. Ch. La- cretelle s'en est fait jadis le continuateur; il publia suc- cessivement Vllistoire de I'Assemblee legislative , de la Convention et die Directoire, dans le meme format, chez les memes libraires, dans les memes dimensions, et enfin sous le titre commun de Precis historique de la Revolution frangaise, adopte pour ses recits successifs, comme pour celui de son devancier.

Cependant, M. Ch. Lacretelle nous apprend aujourd'hui que s^.s ojjinions n'etaient point celles de'Rahaut, dont il paraissait i dit-il, etre le continuateur, Cclte revelation

(i) Paris, Strasbourg et Londres, Treuttel etWurtz, 1821, 2 vol. in-S" i2rr.— Ona the des fronlispiccs porlant ; WsLoira de France pendant k iS'- slide , Tom. VH cl VllI

so SCIENCES MORALES

tardive nous conduit a un etrange resultat ; savoir, que M. Ch. Lacretelle aura contribue, de toute la force de son talent, i seconder la propagation d'opinions qui n'etaient pas les siennes. Occupe A exposer les erreurs, les crimes ou les vertus des assemblces qui suivirent I'Assemblee constituante, il n'a point eu roccasion de rectifier ceux des jugemens de son predecesseur qui pouvaient lui pa- raitre errones; et cependant il a induit d'innorabrables Iccteurs a s'en laisser seduire , en ecrivant, presque sur les memes feuilies , les derniers actes du grand drame, dont Rabaut n'avait pu tracer que les premiers. II a con- tribue , plus que personne, a populariser ses opinions. Je dois le dire, dOt la modestie ou la conscience de M. Ch. Lacretelle en etre inquietee , c'est dans le Pricis historique de MM. Rahautet Lacretelle que presque tous les jeunes gens sortis du college pendant la longue duree du gouvernement imperial venaient, i leur entree dans le monde, apprendre I'histoire de la Revolution ; c'est la que I'ont apprise tant d'ames genereuses que I'Espagne , le Por- tugal, rAIlemagne,laGrece nousmanifestent chaquejour. C'est en tres-grande partieparcequeM. Ch. Lacretelle a pris le soin de continuer I'ouvrage de Rabaut, c'est parce qu'il a execute cetle entreprise avec talent, que celui-ci a obtenu un succes presque classique, atteste par de nom- breuses editions; et, s'il m'est permis de Tavouer, c'est ti la lecture de ce Livre, tombe de bonne heure entre mes mains, que je dois moi-meme ce sentiment, compose de respect et d'amour , que la memoire de I'Assemblee cons- tituante eveille dans mon cceur, sentiment que je p ie Ic ciel de ne jamais laisser eteindre ni refroidir en moi , quelles que soient les circonstances.

Mais voilii pourtant qu'aprt;s avoir souffert pendant tant d'annees de passer pour lo continuateur de Rabaut, d'etre

ET POLiriQUES. 91

simultanementlujvendu, broche et relie avec lui,]VI. Ch. Lacretelle s'avise de le refaire ; et certes, le ciel n'est pas plus distant de I'enfer, ni la lumiere des tenfebres , que les doctrines et les recits de Jean-Pierre Rabaut ne dif- ferent des doctrines et des recits de Charles Lacretelle. Si, aux jours du Directoire , alors que I'Assemblee cons- tituante etaiL peut-etre encore accusoe de superstition et de timidite par les puissans de I'epoque, on fat venu signaler ce qu'on appelle aujourd'hui ses egaremens et peut-etre ses crimes, 11 eClt fallu combattre de telles opi- nions , et cependant respecter la noble independance de celui qui les eQt professees. II estgenereux, lors meme qu'on se trompe, de precher I'ordre et la soumission aux lois devant la democratie , de precher la liberte devant la monarchic; c'est la un avantage de position dont jouissent, de nos jours, les defenseurs des libertes publiques, avantage qu'en diverses circonstances ils ont regrette de voir neglige par ceux qui se font aujourd'hui les avo- cats du pouvoir. C'est ainsi qu'ils admirent I'indignation vertueuse de M. de Lally, qui s'ecrie, du fond de I'exil, et apres les plus vehementes apostrophes contre les de- sordres sanglansdont la revolution de 1789 ne fut pas plus exempte qued'autres : « Ils me proscriront^ ils confisque- ront mes biens, je labourerai la terre , et je ne les verrai plus; » et , lors meme qu'on I'entend nommer I'Assemblee constituante, ii?ze caverne d'antropopliages , ontrouve avec satisfaction I'excuse de cette sorte de fureur, indiquee quelques lignes apres : « C'est a I'indignation, c'est a I'horreur, c'est aux convulsions physiques que le seul aspect du sang me fait eprouver, que j'ai cede. »Toutcela, dans la circonstance, etait bjen ; c'etait, a quelques egards , grand et honorable ; c'etait I'expression du de- sespoir de voirsouillee par le sang cette liberte lantaimee ,

92 SCIENCES MORALES

et I'on n'est point surpris dc retrouver plus tard le niemc homme, quand la force est retournee au pouvoir, jetec quelquefois des regards d'inquietude sur cette meme liberie , premier objet de son culte. Le sang avait coule dans les mouvemcns populaircs; et ce crime est du nombre de ceux qui ne permettent plus a I'homme juste de respirer tranquille sur la terre, jusqu'a ce que le pou- Toir qui protege la societe ait au moii« desavoue et fletri les assassins. Oui sans doute, il fallait, en 89, attaquer et poursuivre les monstres qui souillerent le lA juillet ; avec Bailly, il fallait tomber i genoux devant une popu- lace effrenee, pour lui epargnerle crime; avec M. de La- fayette, il fallait couvrir Foulon de son corps; et, au risque d'etre accuse de connivence avec rinfortune, il fallait s'ecrier avec Ic vertueux chef de la garde nationale : « Que diront vos ennemis, si tous commettez un si lache attentat; respect a la loi, ne prevenez pas le glaive de la justice. » Mais plus tard, comme on en a vu des exemples, n'etait-ce pas , de la part de quelques bommes, une basse et cruelle declamation de s'apitoyer sur les cendres rcfroidies de Berthier et de Foulon, quand le sangdeBrune, dcRame! et des malheureux^Nimoisfumait encore?

Ainsi, pour passer a un sujet moins odieux, comment cxpliquerlaconduitede I'bistorien qui, sous le Directoire, sefait le continuateurde Rabaul,et qui dresse aujourd'hui contre I'Assemblee constituante un acte d'accusation pas- sionne, alors que le pouvoir qu'elle avait modifie a recou- vre plus de preponderance qu'il n'en eut jamais ; alors que les rois [de I'Europe forment avec leurs soldats une ligne formidable , qui semblerait devoir rassurer les plus timides contre les invasions dc I'anarchie; alors que tous les bommes, a qui les principes dc la Revolution et dc la liberie sonl chcrs, se Irouvent, dans bcaucoup de pays.

ET POUTIQUES. 9S

exheredes de toute participation aux affaires publiques. Telle est pourtant la tache que M. Ch. Lacretelle s'est imposee et qu'il veut poursuivre; car il annonce qu'il se propose de depelopper son Precis Jdstorique de la Rii>olu~ tion ! Quand on a lu son Ilistoire de I'Assemblee consti- tuante , il est aise de pressentir qaels seront ces develop- pemens. Pour nous , au milieu des etranges vicissitudes dont nous sommcs tcmoins, ne perdons pas de vue que le premier caractere des hommes qui pretendent a quel- que valeur chez les peuples eclaires, c'est la fixite d'opi- nion et la fidelite politique.

Ce n'est pas, j'en conviens, sans quelque emotion, que je parle de ceLivre ; je le crois destine a produire beau- coup de mal, a egarer bien des esprits, a pervertir une foule de jugemens. L'historien est un ecrivain d'un merite eminent; son sujet excite vivement I'attention; ses recits sont tissus avec habilete, ils sont colores avec art. II est difficile de classer I'histoire avec plus de methode, de grouper les faits avec plus de lucidite, de semer la nar- ration avec plus d'a-propos, d'aaecdotes et de reflexions. Une fausse couleur d'esprit philosophique, des paroles de moderation , des sentimens de moralite viennent encore ajouter au prestige. Pourquoi faut-il que I'injus- tice et I'erreur ne se tiennent pas satisfaites de la force physique qu'elles opposent souvent avec trop de succes 4 I'ordre et i la justice ? pourquoi faut-il qu'elles usurpent jusqu'a cette force intellecluelle et morale, dont I'ascen- dant est si doux, et neanmoins presque irresistible? Quepeut une feuille legere contre un ouvrage historique, appuye d'un nom honore , et qui caresse tant de preemi- nences, d'autant plus ombrageuses qu'elles sont vivement contestees , tant d'interets alarmes , moins par les attaques

i)A SCIENCES MORALES

auxquelles ilssonten butte, que par le sentiment profond de leur faiblesse intrinseque et de leur illegitimite reelle? Fidcle an systeme dc rcndrc notrc Revolution odieuse , ct de faire de I'Assemblee constituantc un objct de haine, et quclqucfois dc mepiis , M. Ch. Lacretelle s'appesantit, avcc une douloureuse habilcle, sur le tableau des crimes qui aflligcrent de bonne heure les amis de la liberte et qui rcjouirent ses ennemis. Maudissons avec lui ces crimes, c'est le meilleur moyen d'en absoudre les liommes irre- prochables qu'on veut en accuser. La violence est quel- que chose de si naturellement injuste, qu'elle ne cesse pas de I'etre, lors meme qu'elle est employee en faveur de la justice. Toutefois , dans I'appreciation des faits, il ne faut pas perdre de vue les circonstances accessoires qui les determinent; ainsi, par exemple, si, le i4 juillet^ le peuple de Paris en appela a la force , il faut remarquer qu'un vaste appareil militaire etait deploye autourde lui, el que la representation nationale , reconquise apr^s tant d'annees d'interdiction , et objet de I'enthousiasme le mieux merite , se voyait menacee d'etre dissoute. Un parti heterogene a la Revolution vint d'ailleurs se jeter h. la traverse pour la detourner a son profit. Ce parti, que je ne veux point nommer par son nom , parce que ce nom ne lui convient plus aujourd'hui, mais dont les sectaireS de tems en terns recrutes existent toujours autour du pou- voir, quel qu'il soit, sans autre determination fixe que de s'associer a ses triomphes ou d'heriter de ses depouilles ; ce parti doit supporter la meilleure part des maledictions que beaucoup de personnes vertueuses adressent inconsi- derement a la Revolution. II se compose de ces hommes immoraux qui speculent tantot sur I'enthousiasme et tan- tfit sur la vertu , cceurs froids^ esprits ambitieux, carac-

ET POLITIQLES. 95

teres profondetnent dissimules, qui n'admettenl d'autre morale en politique que leurs calculs, et qui operent sur I'esp^ce humaine, comme sur la matiere inerte. Ce parti conspira pour la Revolution, quand toute la France ytra- vaillait ouvertement; il s'empara de tous les principea justes, de toutes les idees grandes et genereuses; il se glissa parmi les honimes de bonne foi; il recruta jusque parmi les scelerats ; il amenta la populace , et, survivant i la mort de ses premiers adeptes, on le vit successive - ment se vendre i I'etranger, faire avorter parmi nous la monarchie constitutionnelle et la republique , et contri- buer puissamment a elever et isoutenir le trone de Bona- parte, fonde essentiellement sur la satisfaction de toutes les passions vicieuses et de tous les interets injustes de I'ancienne et de la nouvelle France. Comment expli- quer differemment les ecarts d'une revolution , si pure dans ses principes, si necessaire dans ses causes, invo- quee par tous les hommcs probes et eclaires de la na- tion, applaudie a sa naissance par I'Europe entiere, et que le seal voeu populaire , sans rintervention d'au- cune force militaire , et malgre I'emploi de ces memes forces, avail su effectuer?

D'ailleurs, beaucoup d'evenemens posterieurs ont trop prouve que les exces sanglans ne sont point I'apanage exclu- sif d'un parti. Les troubles de Montauban, en mai 1790, les nombreux assassinats commis dans le midi par les compa- gnies de Jesus et du Soleil, vers i/gS, et des crimes plus recens, attestent qu'il ne manquait que la victoire a I'autrc parti pour egaler ses victimes a celles du parti contraire. Les passions humaines portees a I'extreme degre produisent mal- heureusement partout les inemes calamites , n'importe quelle en soil la cause. N'en accusons point la Revolution; car il est bien remarquable, au contraire, que les hommes qui la

96 SCIENCES MORALES

faisaientdansl'Assemblee constituante desavouerent ener- giquement les exces dont elle fournit Ic pretexte. Ses en- nemis n'ont pas toujours profile de cet exemple ; lis n'ont pas toujours accorde a la victime la consolation de desavouer et de pleurer sa mort. On n'avait pas encore , dans les premiers jours de la Revolution , Texperience des excis auxquels s'abandonne la fureur populaire. Comme, dans la monarchie, on perd la faveur en resistant aux volontes in- justes du maitre; ainsi, dans les gouvernemens democra- tiques , on perd la popularite , en resistant aux Tolontes injustes du peuple. Dans I'un comme dans I'autre etat, la vertu prescrit de sacrifier au devoir la faveur ou la popu- larite. Ainsi,rAssemblee constituante est coupable d'avoir passe a I'ordre du jour sur les meurtres de Berthier et de Foulon; mais du moins clle ne fut coupable que d'inaction : elle ne voulut point sauver les assassins, en niant I'assas- sinat; elle n'a point rappele a I'ordre celui qui vint a la tri- bune implorer la justice publique.

Les reformes operees par I'Assemblee constituante ne trouventpas plus de grace aux yeux de son historien , que les institutions qu'elle, avail creees. Sa censure atteintmeme des objets que le consentement unanime des hommes les plus moderes semblait devoir en garantir; par exemple, la suppression de la venalite des charges judiciairesetd'autres emplois. II faut cependant lui rendre justice en un point; 11 applaudit a la suppression de la potence, etdenos jours c'est bien quelque chose ; car nous avons entendu naguere donner , A la tribune , des regrets a ce genre de sup- plice.

Un objet plus conleste , c'est le merite et la legitimite de ['institution de la noblesse. Notre charte I'ayant maintenue en France, il est interdit de la discuter; on ne pourrait I'atlaquer sans peril , et dt;s-lors il est evident que I'appro-

ET POLITIQUES. 97

bation qu'on pourrait lui accorder , privee de lil)erte , n'aurait aucune \aleur. Les institutions peuvent se fonder ou sur la conviction des esprits , nee de la discussion , ou sur la sanction des loispenales. II est claii- que, dans I'etat present des choses, les partisans de I'institution de la no- blesse pourraicnt opposer a ses adversaires ce dernier argu- ment, auquel, pourle moment, je ne connais pas de re- plique. II est aise de concevoir que M. Ch. Lacretelle ne Yoit pas avec calme I'Assemblee constituante prononcer I'a- bolition de la noblesse ; je pense comme lui que la pre- sence ou I'absence de cctte institution altere I'essence du corps social. Son existence, seulement nominale dans les loi3,est, selon moi, d'une immense con-sequence , ne se- rait-ce que par la somme de vanites qu'elleblesseouqu'elle console. C'estun point sur lequel je tomberais d'accordavec ceux dont je pourrais apprehender une entiere dissidence sur le fonds de la question. Je me permettrai de blamcr ceux-la seulement, qui ont pu croire que c'etait une chose de pen de consequence, qu'une noblesse a laquelle la loi fon- damentale accorde des I'angs et des honneurs. Parmi les nobles qui concoururent efficacement a la suppression de la noblesse dans I'Assemblee constituante, I'auteur distingue M. de la Fayette, M. Charles de Lameth , M. le Pelletier de Saint-Fargeau , M. le vicomte de Noailles et M. le vicomte Mathieu de Montmorency, qui demanda la suppression des armoiries. Cette derniere partie du decret d'abolition de la noblesse me paraitrait, plus qu'aucune autre, susceptible de contradiction. Les armoiries sont pour les particuliers ce que sont les sceaux pour les etablissemens publics ou pour les corporations; elles sont utiles , comme les noms propres , a la distinction des families. Je ne saurais apercevoir quel priucipe ou meme quel amour-propre elles peuTent blesser.

TOMK XI. 7

c)8 SCIENCES MORALES

M. Ch. Lacretclle assure que, depids plus de pingt-cinq ans , tons les piihlicistes s'accordaient a parler avec un egal inepr-is de la constitution de ijgi. J«* conlcste d'abord rexactilude dc I'expression ; les ceuvres de I'Assemblee constituante ont bien rencontre de la haine ; du mepris , jamais. Je suppose d'ailleurs que quelqu'un eQt voulu prendre la defense de la constitution de 1791, quand aurait-il pu le faire depuis vingt-cinq ans? elait-ce sous I'e- pouvanlable regiiae de 1793? etait-ce sous le Directoire? Mais on possedait alors quelque chose de plus que la cons- tilution de 1791 ; et rcclamer celle-ci a celte epoque, c'eQt ete implicitement provoquer la destruction de ce qu'on possedait. Etait-ce sous le consulat? etait-ce sous I'empire? Mais il y avail alois iinpossibilile materielle d'ecrire sur les objels politiques; la libcrte de la presse elait bornee a louer la perfection de tout ce que faisait et defaisait le despo- tisme. M. Ch. Lacrctelle a done tort de s'etonner que la constitution de 1791 n'ait trouve qu'assez recemment des protectcurs ou des defenseurs; il etait dans la nature des choses qu'ils n'apparussent pas plus tot.

Uue des parties que I'auteur attaque avec le plus d'a- mertume dans la constitution de 1791, c'est \n declaration des droits; il la considfcre comme la source feconde et uni- verselledes fausses doctrines, qui ontproduit les malheurs de la Revolution. Parmi les objections qu'il s'adresse, on reraarque celle de I'adoption d'une pareille declaration par les Etats-Unis d'Amerique , renfermant les memes dispo- sitions et confue presque dans les memes termes. Au nombre des rtponses qu'il se fait, j'en releverai deux qui m'ont paru basees sur des erreurs evidentes. Une societe jeune , \X\\.-'A, peut se regir par des principes fort differens de ceux qui sent necessaires aux societes ancienaes. Mais personne n'ignorc que la societe qui forme les Etais de

ET POLITIQUES. 99

rAmerique du nord est tout aussi vieille que celle de la mere-patrie , dont cUe est unc emanation, contemporaine par consequent de la societe francaise. Les Anglais dcs litats-Unis sont les memesque lepeuple de la Grande-Bre- tagne ; ils ont conserve son langage, ses moeurs, ses habi- tudes physiques et religieuses, son caractere, et meme en partie ses institutions municipales et judiciaires. U}i peuple de cultU'aleurs oude commejgaiis d'une extreme ac- tivile J ditailleurs M. Ch. Lacretelle , n'abondepas enspe- culateurs oisifs, en sophistes dangereux, L'existence etla multiplicite, chaque jour croissante aux Etats-Unis, des sectes religieuses les plus livrees aux idees abstraites et spe- culatives , dementent cette assertion. On sait que nuUe part on ne public un plus grand nombre de journaux politiques, et que , dans aucun pays, ils ne penetrent plus avant dans les dernieres classes de la societe.

J'ai voulu repondre seulement a ces deux objections, parce qu'il m'a semble les reconnaitre parmi les paradoxes qui , malgre I'evidence des faits , sont reproduits chaque jour avec assurance dans les livres et dans les discours. Je n'essaierai pas de pousser plus loin une refutation qui ne pent se completer ici. Quel moyen d'ailleurs de s'entendre avec rhomme, assez aveugle par son nou veau symbole, pour trouver dans le preambule de la declaration des droits une parodie profane, impie et seditieuse de Vivangile Pj^ssure- ment c'est bien, je pense, la derniere chose qu'on se serait avise d'y decouvrir.

Je ne sais si je m'abuse; mais, quelles que soient les preventions de I'historien , il me semble que, meme apres ses recits et sans doute contre ses intentions, I'Assemblee constituante se presente encore a I'jmagination du lecteur sous un aspect grandiose, rayonnante d'une gloire pure

iOO SCIENCES MORALES

et embaumee d'lin parfum de vertu. Ce nom de la Fayelte,' qui vient se placer si souvent, accompagne de reproches , sous la plume de I'historien, est pourlant mele sans cesse h quelque devouement plein d'abnegation , tantOt aux li- bertes publiqucs, tantut a la pcrsonnc de Louis XVI; ct peut-etre qu'un lecteur, impatiente des epithetes de I'his- torien , pourrait s'ecrier : Mais voila un criminel qui n'ap- parait que pour commettre des actions vertueuses ! La manifestation du Livre rouge revele que la mere de MM. de Lameth a\ait recu 60,000 francs de la cour pour I'edu- cation de ses enfans ; et voila que les deux coiirtisans , de- veniis tribunSjpyirent le parti defaire reniettre cette somme an tresor royal. Vous croyez peut-etre que c'est la un trait de probite politique ; selon notre historien , c'est de I'in- gratitude. Celle-ci du moins n'cst pas contagieuse ; en voici tout aussitot une preuve en chiffres; je la trouve dans le budjet de I'annee 1790 arrete par I'Assemblee consti- tiiante. Les divers impots reunis eleverent les recettes k six cent trente millions, les depenses i six cent quarante- cinq millions. Trente ans apres, en 1821 , le ministre des finances presente a la chambre des deputes le tableau de Texercice de I'annee courante: : Recettes,, hiiit cent quatre- vingt-Jiuit millions ; depenses. huit cent quatre-vingt-deux millions. On voit que nous nous sommes corriges de cet esprit d'ingratitude reproche a MM. de Lameth; mais il nous en coQte un sacrifice annuel d'environ deux cent cinquante millions.

Nous nous sommes expliques assez franchement sur le talent de M. Ch. Lacretelle. Nous avons dit qu'il en de- ploie ici beaucoup trop au service d'une cause que nous croyons injuste; ce talent brille principalement dans I'art de tracer des portraits; le tableau de I'Assemblee consti-

ET POLITIQLES. 101

tuanle tout eutieie en offre une galerie d'autant plus precieuse, que plusieurs n'ont pu etre saisis que par un temoin oculaire. Nous avons remarque un petit nombrs d'inexactitudes echappees i une redaction rapide ou. Irou- blec par I'esprit de systems. M. Ch. Lacretelle parle dV- tangs battus par les vassaux , pour procurer a des sei- gneurs voluptueax le plaisir d'entendre la musique des grenouilles. C'est ici une distraction assez plaisante de I'historien; car, si des seigneurs voluptueux- oni jamais fait batlrc des etangs par leurs vassaux, c'est bien cer- tainement pour avoir le plaisir de ne pas entendre la mu- sique des grenouilles, dont le coassement importun cesss au moindre bruit. Ailleurs , M. Ch. Lacretelle dit que So- phie Lemonnier, abandonnee par Mirabeau , se donna la mort; il est vrai que cette fenime s'asphyxia volontaire- ment avec du charbon , mais ce fut pour un autre amant que Mirabeau.

Mais il est une distraction bicn plus grave que je re- procherai a M. Ch. Lacretelle ; c'est d'avoir reimprime, dans ses i>ieces Justificatipes ^ la lettre de M. de Bouille a I'Assemblee constituante, ecrite apres le voyage du roi i Varennes. On y lit ces passages : « Un peuple que vous avez rendu feroce et sanguinaire, et qui est devenu I'objel du mepris de I'univers ». (II s'agit du peuple francais) ...c'est ainsi que doit parler un homnie qui n'a plus pour vous etpourle peuple antropophage, que vous avezenivrede crimes, que du mepris, de Tindignation et de I'horreur. .. ...avant pen, il ne restera pas pierre sar pierre a Paris. {Eclats de rire dans V asserahUe .\ .... je connais 1«S che- mins, j'y guiderai les armees elrangercs, etc.... »; et c'est la ce que M. Ch. Lacretelfe appelle une '^'xh.cc justificative , Mais qui done doit-elle justifier cette piece etrangc? ce ii'est pas au uioins ceux pour qui vient de plaider I'histo- -rien, En verite . U distraction est Irop forle. -A. MjUI«l,

LITTERATURE.

HlSTOIRli DE LA VIE ET DES OUVRAGES DE J. J. RoBSSEAU ,

composSe dc documens authentiqties , et dont unc partie est restee inconnue jusqua c&jour; d'une biographic dc scs contemporains considMs dans leurs rapports avec cct honinic c6Ubre , suivic dc Uttres in6ditcs ( i ) .

N. B. Deux articles, faits par deux de nos collabora- teurs , nous sont parvenus a la fois sur cet ouvrage : chacun des redacteurs de ces articles a rendu compte des impres- sions qu'il a repues en Ic lisant. Nous avons cru pouvoir Ics admcttre tous les deux, vu qu'ils sont d'un egal interet ct d'une mediocre etendue. Nos lecteurs pourront Ics com- parer, et adopter, entrc Ics jugemens des deux rappor- teurs, dont le second est plus favorable k Rousseau, celui qui leur paraitra meriter la preference.

C'est un usage assez commun, en Angleterre, de pu- blier des memoires blographiques et litteraires sur les grands ecrivains. Cet usage pourraitetre suivi sans incon- venient en France. Au lieu de s'astreindre a la regularitc d'une composition historique ou d'un eloge, il admet des di- gressions, des citations, des details minutieux en appa- 1 rence, mais utiles au but qu'on se propose. Enfin, il faut considerer ces memoires biographiques, non pas comme I'histoire complete de la vie des personnages qui en sont le sujet, mais comme un recueil de materiaux, compares et eclaircis.

(i) Paris , 1821 , 2 vol. in-S", en tout 1088 pages. Prix , 10 francs. J. J. Paschoud, L. Colas, libraires. L'autcur, M. V. D. Mussel Pathay, n'a point mis son nom en tete del'ouvragc, mais s'est nomme a la fin de rintroductjon.

LITTERATURE. lOS

De ce genie est i\ peu pres I'ouvrage que IM. de Musset Tient de publier sur J. J. Rousseau. L'auleur, n'ayant voulu rediger qu'un travail qui put, enquelque sorte, servir de commentaire aux Confessions et a I'histoire' du philo- sophe de Geneve, a ete dispense, par I'exislence meuie des Confessions , de raconter en detail la vie de Rousseau ; niais il en a fait I'analyse. U a commente les actions qui ont donne lieu a divers jugemens; il les a eclaircies, jus- lifiees ou excusees par les temoignages des contemporains qui ont connu Rousseau , et qui onl ecrit sur leurs rela- tions afec lui. M. de Musset a examine la conduile de ces contemporains meme , et a tache d'apprecier la moralite de leurs temoignages. II entreprend de refutcr une foule d'imputations auxquelles leurs noms ont donne beaucoup de poids, et qui se sont accreditees, comme tant de choses s'accredilent dans le monde, parce que personne ne se donne la peine de les examiner k fond, et que tout le monde trouve plus commode d'adopter des opinions toutes faites.

II est toujours honorable de defendre un grand houime centre les accusations de ses ennemis, surtout lorsqu'il n'cst plus la pour se justifier. Rousseau a peut-etre ete en buttc a ces accusations plus que d'autres grands ecrivains; et, ce qui rendait sa position plus fiicheuse , il avait contre lui une foule de gens en credit, d'bommes riches et puis- sans, contre lesquels il aurait essaye en vain de lutter : s'il n'avaitpaspris soin lui-meme de faire I'aveude ses actions, qui sait sous quelles couleurs affreuses son portrait serail passe a la posterite ?

Ce qui, a mon avis, fait la plus grande gloire de Rous- seau, c'est d'avoir eu la force d'ame de rompre ouverte- mentavec les vices de son siecle, de se soustraire au joug houteux de ce qu'on appelait faussement les convenanre?

lOi LITTERATURE.

sociales, de revenir, en morale comme en politique, aux lois si sim2)les de la nature, et de prouver, par son exemple, qu'il n'est pas impossible de briser des liens qu« des abus inycteres avaient sculs affermis.

C'est en cela que Rousseau me parait infiniment supe- rieur a Voltaire. Celui-ci voyait, comme Rousseau, la corruption toujours croissante des mceurs, sous un regne qui ne faisait qu'ajouter a I'heritagc de la cour de Louis XIV et de la regencc; il ne pouvait se dissimuler les abus intolerablcs qui s'etaient introduits dans la so- ciete; il les signalalt avec le zele le plus constant et le talent le plus flexible : mais Voltaire n'eut point le courage de s'opposer ouvertementaux grands qui donnaient I'exem- ple de la corruption et de Tabus de I'autorite ; jamais il n'aurait ose proposer la reforme enticre de I'otat social. Voj'ez comme il flatte, dans sa correspondance, un ma- rechal de France; comme ilplaisante sur les debauches de ce seducteur dangereux, qui se faisait un jeu de repandre le trouble et le scandale dans les families honnetes, et dont on voil la conduite signalee avec la plus noble indi- gnation dans une foule d'ecrits, qui, au commencement de la revolution, feposerent au pcuple tous les desordres dont il avait etc victime , et qui avaient amene la dissolu- tion du corps social. Jamais Rousseau n'a cede a la puis- sance des noms et du credit ; jamais il n'a flatte les vices des grands; il leur a parle , au contraire, avec plus de franchise et de severite qu'a ses egaux, el la crainte de leur deplaire n'a pas un instant arrete sa plume. Rousseau est peut-etre le seul ecrivain qui ait su se detacher de toutes les considerations personnelles , et suivre uniquement les inspirations de sa conscience.

Quelle humiliation pour I'esprit humain, qu'un ecrivain ji grand, quandil s'erigc en reforniateur, et par consequent

LITTliRATURE. 105

en bienfaiteur de la societe entiere, redevienne si petit dans ses relations journalieres avec les individus ! On est honteux de ce contraste frappant, que Ton retrouve dans tout le cours de la vie de Rousseau. Si Ton excepte un petit nombre de pcrsonnes qu'il a toujours respectees, il s'est brouille avec tous ceux qui ont eu des relations in- times avec lui; et, a force de ne voir que des ennemis dans ceux qui I'entouraient, son imagination ardente, troublee par la faiblesse de sa constitution , a fini par se persuader que tout le genre humain ctait conjure contre lui. La mefiance et I'insociabilite n'ont jamais porte des fruits plus amers; et la vie la plus deplorable a puni severe- meat Rousseau de sa conduite farouche envers ses con- temporains. Je ne sais si un auteur quelconque a recu dans aucun tems autant de temoignages d'attachement sincere de ses contemporains. Les hommes et les femmes les plus distingues par leur naissance, par leur esprit, par leur fortune, recherchaient son amitie; les jolies femmes, si habituees a attendre des hommages , allaient au-devant de ceuxde Rousseau; elles les ambitionnaient en quelque sorte ; elles savaient choisir les moyens les plus ingenieux pour lui marquer leur estime. Ccpendant, combien de fois ne se virent-elles pas brusquees et rebutees par I'auteur d'Heloiise ! avec quelle durete il repoussa souvent les avances les plus sinceres, les affections les moins equi- voques !

Ce n'estpas ainsi qa'agissait Voltaire : toujours aimable, toujours plein de bienveillance, le philosophe de Ferney accueillait egalement bien et le prince qui arrivait avec faste et le jeune auteur qui presentait humble- ment au grand ecrivain les premices de sa muse; el, quoique la gloire d'etre I'objet de I'empressement des etrangers et des nationaux lui coCilat son rcpos, il ne se

106 LIT! jillAT LIRE.

lassait jamais de repoadre avec sensibilile a leiirs houi- mages.

Si done Rousseau a ete malheuieux, ses inforlunes ont ete en grande partie son propro ouvrage; sur ce point, j'ose t'tre d'un avis different de celui de M. de Musset. Je conyiens que sa gouvernante ou sa femme ayait aigri son caractere , qu'elle iui inspirait de la mefiance et qu'ellc rendait son esprit farouche; mais je ne puis croire que tous ceux que Rousseau represente comnie ayant des torts graves envers Iui, soient reellement aussi coupablcs qu'ii le fait entendre et que son biographe cherche a le prouver. Comment se fait-ii que Hume , Diderot , Marmontel , uiadame d'Epinay, Grimm, d'Alembert, Voltaire, et tant d'autres hommes celebres aient continue de jouir de I'es- time de leurs contemporains et n'aient point donne lieu, dans d'autres occasions, a ces scenes d'eclat qui ont amene leur rupture avec Rousseau ? Certainement ils ont eu des torts envers ce grand ecrivain. Quand on lit tous les argu- mens detailles avec une habilcte et une attention pen com- munes par M. de Musset, on ne saurait plus en douter. Mais rejeter sur eux tout le tort et vouloir disculper entic- rement Rousseau dans ces circonstances, n'est-ce pas aller un peu au-dela de la veritc ? II n'est pas aise de refuter le biographe, je le sens; ses preuves sont tellement accu- mulees, qu'on serait embarrasse d'y repondre , a moins d'ecrire un volume; mais quelquefois la raison repugnc a ailniettre ses conclusions , quoique sa logique soit tres- serree.

Lorsque, parcxemplc, Rousseau, pour prouver la prc- tenduc haine conslanle de Hume , commence par assurer gravement que I'historien anglais , en le conduisant i Londrcs, s'ecria en songe : ah! je le iie/iNl il m'est impos- sible dc croire que Rousseau soit de tres-bonnc foi dans

LITTER AT URE. 107

I'expose de ses deuieles avec un houimc, qui avait bien ses defauts, raais qui, dans ses demarches en faveur du phi- losophe persecute en France, ne parait avoir ete mu que par des sentiniens genereux.

A I'egard dc cc fameux ah! je le tiens ! je trouve un rapprochement curieux dans un manuscrit laisse par feu I'abbe Morellet: « Le reproche que Rousseau fait a Hume d'avoir dit en revant: ah! je le tiens! dit M. Morellet, est copie de Plutarque , qui raconte que Xerces , ayant donne asile a Themistocle banni d'Athenes, en etait si transporte qu'il s'ecriait souvent en dormant: ye le tiens! je le tiens!

Je ne crois pas que le trait soit copie; mais n'est-il pas singulier que Rousseau fasse un reproche a Hume d'une exclamation qui est echappce a un roi de Perse, il y a quelques milliers d'annees?

Dans I'expose de la querelle entre Rousseau et Hume , son biographe aurait pu ajouler aux temoignages qu'il cite celui de lord Charlemont, ami de Hume, mais pourtant assez impartial pour le juger severement el pour tenir la balance egale entre les deux ecrivains. Ce lord attribuc la plus grande bienveillance au cceur de Hume; seulement, dit-il , il ne voulait pas que chacun fit son salut a sa ma- niere. « Quand il fut de retour de France avec Rousseau , ajoute lord Charlemont, je rencontrai Hume au Pare; jc le felicitai de ses rapports agreables, et je lui fis entendre que j'etais persuade que son nouvel ami lui convenait par- faitement, puisque leurs facons de penser me paraissaient s'accorder en tout point. Vous vous trompez, milord, repondit Hume, Rousseau n'est pas tel que vous croycz; il est encore attache en secret u la bible , et au fond il nc vaut pas mieux qu'un chretien ; mais c'est un cbrcticn d'une facon particuliere (i). »

{\) Voycz la Vie de lord Charlemont, par Hardy.

108 LITTEKATURE.

Cette anecdote ne fait den au sujet de cet article ; mais je la rapporte, parce qu'elle ino parait curieuse.

Je ne me sens pas capable dc dcfendre tons les contem- porains de Rousseau, que son biographc accuse des mal- heurs du philosophe ; il aurait trop d'avantages sur moi. Je crois cependant pouvoir entreprendre en peu de naots la justiflcation de Diderot; je ne parlerai pas dc I'origine de leurquerelle, qui m'a toujours paru extremement insi- gnifiante, malgre I'importance que Rousseau a voulu lui donner; peut-etre y avait-il autant de tort d'une part que de I'autre, et ce serait toujours peu de chose. Mais c'estde la violente sortie contre Rousseau , inseree par Diderot dans sa Kie de Shieque, qu'il faut dire quelques mots. M. de Musset pretend qu'elle est ecrite avec \g fiel de la liaine j dans un passage qu'il cite, il trouvc autant demen- songes que de mots. Les termes sont bien durs; mais M. de Musset a-t-il examine bien attentivement quels sont les sentimens qui ont inspire cette diatribe de Diderot? Qu'on Use les termes insultans dans lesquels Rousseau parle de la femme de Diderot et de leurs liaisons equivoques avant leur mariage ; qu'on songc que les Confessions furent di- Tulguees a I'epoque oCi Diderot elevait sa fille, oii , aban- donne par la France, il trouva un appui dans I'imperatrice de Russie; que Ton songe de plus que la vie privee de la plupart des amis de Diderot etait raise a decouvert dans ces Confessions J avec aussi peu de discretion el de reserve que la siennc; et que Ton disc ensuite, la main sur le cceur, si chacun, dans une position semblable, ne vengerait pas son honneur domeslique et celui de ses amis , et si Ton ne dirait pas a peu pres comme Diderot : « Que penser d'un homme qui laisse apres sa raort des memoires oil ccrtai- nement plusicurs personncs sont maltraitees, et qui y joint la precaution odieusc de n'en permettrc la publicite que

UTTERATURE. 109

quand il n'y sera plus; liii, pour etre atlaque; celui qu'il attaque, pour se defendre ? Que Jean-Jacques dedaigne, tantqu'ii lui plaira, le jugement de la posterite, mais qu'il ne suppose pas ce rnepris dans les autres. On veul laisser une memoire honoree ; on le veut pour les siens , pour ses amis, el meme peut-etre pour les indifTerens. »

Je conviens que Rousseau avail quelque besoin de se juslifier conlre de nombreuses accusations, et de laisser, a cet effet, apres lui les memoires de sa vie; mais il n'etait pas autorise a rendre la femme de son ancien ami mepri- sable aux yeux de toute la France. Diderot ne s'etait jamais permis de publier une ligne sur la vie privee de Rousseau ; son indignation avait done, suivant mon avis, un motif honnete et legitime. Elle a pu I'emporter au-dela des bornes de la justice; mais faut-il condamner I'empor- tement d'un homme qui se sent blesse dans ses affections les plus cheres, sans qu'il y puisse jamais porter remede? En general , je crois que le desir tres-louable de venger la memoire de Rousseau des calomnies de ses ennemis a rendu son biographe injuste envers d'aulres ecrivains , quoique, dans tout cequi netient pas a leurs relations avec ce grand homme, 11 se montre dispose a rendre hommagea leur merite. Au reste , ce n'est jamais qu'apres une mfire discussion des temoignages que M. de Musset se prononce contre eux. S'il n'est pas favorable a la partie adverse, on ne lui reprochera pas du moins de n'avoir pas examine toutes les pieces du proems.

Une partie du second volume de son ouvrage est con- sacree a des notices sur les hommes et sur les femmes qui ont eu des rapports avec Rousseau. Au lieu de ranger ces notices par ordre alphabetique, et d'y comprendre jusqu'au moindre individu dont il est question dans les ouvrages du citoyen de Geneve, peut-etre eOt-il mieux valu les fondre

110 LITTliUATUKE.

dans son travail ct se borner auxpersonnages qui mt-i-itent d'etre connus de la posterite. La forme alphab clique est plus commode, il est vrai, pour Ics recherches; mais elle n'offre pas assez d'agremeus dans une lecture suivie.

Pour completer les derniercs editions des oeuvres de Rous- seau, I'auteur a insert: environ quarante lettres, soit ine- diles, soitpubliees isolement, et il a mis beaucoup de soin a classer, par ordre chronologique , toutes les pieces qui composent maintenant la correspondance de Rousseau et dont un bon nombre manque dans les anciennes editions.

Une partie interessante du travail de M. de Musset , ce sont les extraits des auleurs contcmpoi-ains du philosophe, qui ont fait connaitre des particularites de sa vie ou qui ont juge ses ouvrages. Tant de passages tires des ceuvres de Bernardin Saint-Pierre, madame de Genlis, Corancez, Dussaulx, d'Echerny, Marmontel,etc., et rassembles dans des niemoires biographiques , offrent une lecture tres- varicc et quelquefois meme amusante. On connait I'anee- dote de Sophie Arnould, qui mystifie des seigneurs de la cour en leur faisant, dans un souper, passer le tailleur de la comedie pour I'auteur du Contrat social ; mais il est piquant de rapprocher, ainsi que I'a fait I'auteur, cette anecdote, racontee avec beaucoup d'agrement, du recit in- teressant que madame de Genlis fait d'une mystification toute contraire qui lui arriva, et dans laquelle elle reput chez elle Rousseau, croyant nerecevoir que Preville jouant le role du philosophe. Madame de Genlis termine son recit par une critique de la conduite de Rousseau ; mai« M. de Musset cherche a prouver dans ses notes que, dans cette affaire , les torts furcnt du cote de madame de Genlis.

En resume , le travail de M. de Musset est le resultat de recherches faites judicieusement et en conscience ; il a produit un livre tres-instructif et qu'il sera presque indis- /

LITT^RATURE. Ill

pensable de joindre desormais aux editions des oeuvres de Rousseau. Je ne sais s'il persuadera completement tous les lecteurs de la purete constante des intentions et des sen- timens du philosophe; mais je suis certain que tous ceux qui liront I'ouvrage de M. de Musset estimeront beaucoup I'auteur et qu'iis avoueront qu'il leur a beaucoup appris.

Depping.

hlstoire de la vie et des ouvrages de j.-j. rous SEA,u , etc.

SECOND ARTICLE.

Les Anglais, auxquels nos exemples pourraient si sou- vent servir de lecons , peuventa leur tour nous en donner une dontil serait digne de nous de profiler. Nous devrions apprendre d'eux a attacher un plus grand prix a la vie privee des hommes qui ont illustre la patrie par leurs ta- Icns , et qui I'ont eclairee par leurs ouvrages. En Angle- gleterre il n'est peut-etre pas un seul ecrivain distingue dont la vie domestique , le caractere personnel et les ha- bitudes sociales n'aient ete I'objet des recherches les plus scrupuleuses, et ne se trouvent consignes , non pas dans de simples notices , mais dans des histoires aussi com- pletes que detaillees. En France, au contraire, a peine le lecteur peut-il trouver, dans quelques anecdotes eparses ca et la, les elemens d'un jugement sur le caractere prive de ses meilleurs ecrivains. Nos rivaux ont epuise toutes les chroniques, consulte toutes les traditions pour arriver i la connaissance de la famille , des habitudes , des goQts des occupations de Shakespeare, et nous savons a peine la moindre partie des circonstanccs de la vie de notre> grand Corneille. Nous n'avons pas d'histoire de Boileau , de Racine, de Moliere. De courtes et incompletes notices

112 LITTERATLRE.

nous apprenilenl lout au plus le jour de leur naissance , cclui de Icur mort et la dale de la publicalion de chacun de leurs ouvrages. Cette negligence et cetle injustice n'onl cesse pour Lafontaine que depuis six mois environ ; el telle a ete jusqu'ici noire incurie a cet egard , que la vie d'un auleur , mort il y a environ cent vingt-six ans (i), a cu besoin d'etre composee par un savant, et estdevenue un veritable ouvrage d'erudition.

Quelle elude cependaut pourrait etre plus philoso- phique que cello des actions privees, des habitudes inte- rieures , des relations usuelles de rhomme dont nous admirons les ecrits, dont le genie est pour nous I'objet d'un orgueil national et legitime. II est, sans doute, malheureu- sement vrai que peu de grands ecrivains ont porte le carac- tere qui distingue Icurs productions jusque dans I'inlerieur de leurs families et dans les actions communes de la vie. 11 n'en est qu'un petit nombre qui , pour nous servir d'une expression proverbiale, soient restes grands, memeera deshabille. Tonteio'is , si le spectacle de la vertu, enseignee par un homme vertueux, est pour le philosophe digne d'une juste admiration, celui de la vertu prechee par le vice , des passions honnetes enseignees par le talent sans moeurs, est d'un interet different sans doute, mais neanmoins instructif et philosophique. La vie privee de Salluste et celle de Seneque ne sonl-elles pas un chapilre de plus ajoute a I'histoire du coeur humain ?

Mais si les moindres actions des grands ecrivains me- ritent de nous attacher, celles des moralistes qui con- sacrent leur vie i I'etude de la philosophic sont plus dignes encore d'exciter noire interet. On aime i connailre les hommes dont les ecrits sont destines a nous rendre meil-

(i) Lafontaine est mort le i3 mars 1695.

littMature. ll.*?

leurs ; on aiiiie a penetrer dans les detours les plus caches de ces ames profondement sensibles, qui preterent un noble langage a la sagesse dont elles se rendirent les or- ganes. II est meme dans le coeur humain une sorte de sen- timent personnel , qui nous porte a rechercher s'ils n'en- trerent pas aussi dans le partage de nos faiblesses , ceux-la meme qui, se retirant dans le temple des sages, dans celte forteresse philosophique que Lucrece nous montre a I'abri des passions humaines, consacrerent leur vie a combattre les vices de la societe, dont ils vecurent eloignes, et choi- sirent la noble , mais orgueilleuse mission de reformer rhumanite.

Quel profond interet, par exemple^ ne doit pas faire naitre une histoire detaillee et impartiale de I'un des plus grands philosophes de France, et de I'un des plus eloquens ecrivains de tous les tems, de Jean-Jacques Rousseau, Ae cet homme extraordinaire , qui aurait dfl sa celebrite a la seule audace de ses opinions , lors metae qu'il n'eQt pas conquis le premier rang parmi les ecrivains de notre patrie ! Les ouvrages de Rousseau sont i la fois les delices des penseurs et le charme des ames sensibles, I'enthousiasme de la jeunesse et la consolation de I'age mQr. Objet d'ad- miration et de pitie , il excrce sur nous le double droit du genie et de I'infortune. Sa vie, entremelee de gloire et d'adversites , offre une conformite touchante avec celle de tant de grands hommes que la societe persecuta pendant leur existence et qu'elle idolutre apres leur mort. Calomuie par la haine de ses rivaux, poursuivi par les instrumens de despotisme, k la fois en butte a la fureur des athees et des pretres, il fut lui-meme son plus grand ennemi ; et, comme le poete de Ferrare, il atteignit le plus haut degre du genie dans ses ecrits immortels, et descendit aux dernieres limites de la raison humaine , lorsque le malheur eut peuple de Tome xi. 8

JIA LITTERATURE.

fantomes son imagination blesseeparrinjustice et troublee par les soinbres suggestions de la mefiance.

Deja, dans ses Confessiojis, Rousseau s'etait efforce de nous montrer i nu cette ame a la fois tendre et sauvage, passionnee pourl'humanite et atteinte dessombres vapeurs de la misantropie, dont la chaleur vivifiante cchauffe les pages de ses ecrits. Aigri par des persecutions trop reelles else creant des persecutions fictives, il avait cru noblement repondre aux ennemis que son talent lui avait suscites et 5 ceux que son imagination lui avait faits, en exposant sans Yoile et sans reticences toutes les actions , meme les plus minutieuses, de sa vie errante et orageuse. Mais cet ouvrage, unique dans son genre, d'un philo- sophe qui interroge son ame, qui analyse ses sentimens, qui saisit ses passions au passage pour se llvrcr tout entier au public, n'a pu etre acheve; et si, apres avoir lu les Confessions de Rousseau, nous pouvons esperer de con- naitre son caractere, une grande portion de sa vie nous est encore derobee. Nous ignorons la partie la plus inte- ressanle de sa carriere, celle oii son imagination, do plus en plus frappee, avait multiplic les egaremens de sa raison et lui avait persuade qu'une coalition de I'Europe entiere s'etait formee pour noircir sa reputation, avilir son carac- tere, enfm pour I'enterrer tout pwant fSnixant I'expression meme par laquelle il caracterise la ligue formee contre lui. C'est sans doute i cette epoque que Rousseau a le plus de droits a notre interet et que I'examen de son caractere est le plus instructif. Si sa jeunesse, en effet, offre le spectacle derinnocencepoursuivieparrinfortune,depareils tableaux ne se sont que trop souvent reproduits dans I'histoire des hommes. Son adolescence est obscure et sans fruits : Rousseau ne laissc voir encore qu'un jeune homme qui ne sait point ce que contient son ame; semblable i ce metal

LITTEllATUni:. 115

precieux qui, iTlele encore a des malieres communes , ne laisse entievoir par aucune issue I'eclat dont il doit briller un jour. II faut que I'age viril apparaisse pour lui reveler son genie ; mais si alors ce genie sort tout arme de cette tete soudain agrandie , si ses premiers pas le placent au premier rang parmi ses rivaux; encore confondu au milieu d'eux, admire par quelques-nnSj aime par plusieurs autres, il n'a point offert le spectacle d'un grand homme luttant contre la persecution; a peine a-t-il laisse soupconner que son genie aura bientut une lutte plus penible encore k soutenir contre lui-meme. Si le grand ecrivain existe, son apparition est trop nouvelle pour que sa gloire soitdevenue populuire. Mais lorsqu'apres avoir public son chef-d'oeuvre, il se trouve en butle u I'animadversion des fanatiques, et poursuivi par des decrets de prise de corps ; lorsqu'apres etre rentre dans sa patrie , il est banni de cette terre qu'il a illustree et qui lui devra sa gloire, il se voit chasse de ville en ville, persecute en France, persecute en Suisse, avili, )oue en Angleterre , alors sa reputation grandit avec ses malheurs, son nom vole de bouche en bouche. Le spectacle que presente ce malheureux grand homme devient aussi neuf qu'attachant ; on le suit avec attendris- sement dans la route epineuse qu'il continue de parcourir ; on aime a etudier cette imagination troublee, que tout effarouche, que I'apparence revolte plus encore que la realite , et qui fait elle-meme son supplice. On voudrait sonder les profondeurs de cette ame , parce que Ton est sOr de trouver de la grandeur jusque dans I'egarement, et du genie dans la demence elle-meme.

Ainsi, lorsque jadis un tyran, violant avec barbaric les droits du genie malheureux, fit enfermer le Tasse dans les loges derhopitalSainte-Ann3,etconfondit avec la demence hideuse du crime ou de la misere, la folic touchante et

8*

116 LITT^RATURE.

souvent sublime de rauteiir de la Jerusalem , quel coeur sensible n'eftt pas cherche k penetrer les secrets de cette ame ulceree, a saisir les jets devenus inegaux etsauvages de cette imagination sortie de la sphere qu'elle decrivait autrefois, mais encore sublime dans ses ecarts gigan- tesques et dechirante dans ses amers et sombres gemisse- mens.

II est done vrai de dire que les confessions de Rousseau ne suffisaient pas pour nous faire connaitre entierement ce grand ecrivain. Les dernicres annees de son existence, son voyage en Anglelerre, sa querelle avec M. Hume, son retour a Paris, les details de la vie qu'il mene dans cette ville, theatre de ses premiers triomphes et foyer de ses premieres persecutions, ses promenades solitaires dans les environs, ses relations, quelquefois expansives, plus souvent empoisonnees par des inquietudes et des soupgons , avec un grand nombre d'hommes de lettres ; cnfin , son dernier voyage i Ermenonville, oii il doit ache- ver sa course agitee ; ses derni^res promenades sous ces beaux arbres qui bientot vont ombrager son tombeau ; les douleurs courtes mais aigues qui terminent les longues souffrances de sa vie, les paroles supremes de I'ami de la nature, ses adieux au soleil, seul objet de ses regrets sur la terre; sa mort, dont les causes sont encore inconnues, les conjectures diverses et nombreuses qu'elle a fait naitre, comme s'il devait etre dans sa destinee de ne ressembler en rien aux autres hommes, et d'offrir, a toutes les epoques de son existence, de touchans mais insolubles problemes; voili tout ce qui nousmanquait dans I'histoirede Rousseau; voili tout ce que nous apprend M. de Musset, si son important ouvrage atteint le but qu'il s'est propose.

Une admiration, aussi juste que naturelle pour les ou- rrages de Rousseau, inspira a M. de Musset I'idee d'ecrire

LITTERATURE 117

I'histoire de sa vie. « A I'uge oil I'on commence k sentir, nous dit-il dans sa preface , je lus uiie partie des ceuvres de Rousseau; je fus vivenient emu; les homes de mon intelligence me parurent reculees : par un resultat natu- re!, j'eprouvai de la reconnaissance pour celui qui pro- duisait en moi cet effet. J'admirais ses ourrages, et j'aurais aime sa personne , s'il eQt encore vecu. » Depuis cette epoque, M. de Mussetconcentra toutes ses etudes etdirigea toutes ses recherches sur les ecrits , et prineipalement suf la personne de Rousseau. II consulta des hommes instruits, et voulut eclairer son opinion en la soumettant k celle des personnes qu'il estimait le plus; mais bientot il fut arreta par des difficultes et des obstacles puissans. Tout le monde s'accordaitsur le talent de I'ecrivain; si ses opinions etaient encore un sujet de discussion, nul ne lui contestait le me- rite d'un grand peintre, d'un penseur profond , et d'un philosophe eloquent. Mais son caractere etait I'objet de jugemens si contradictoires , d'un si vif enthousiasme et d'un denigrement si acharne, que M. de Musset fut quelque terns a savoir quel parti il devait prendre; il etudia de aou- veau son sujet, il chercha dans les faits de nouvelles lu- mieres; apres cette etude, il crut devoir se fier a son propre sentiment, etfitbien.

Ce sentiment n'avait point change ; c'etait toujour! un sentiment d'admiration pour les ecrits de Rousseau et d''a- mour pour sa personne. Tels furent la regie et le principa de son travail. II serait a propos peut-etre d'eiaminer ici si M. de Mueset prit le parti qui lui etait conseille par la raison et la verite , et de peser^ a son exemple, dans une balance impartiale , les merites et les torts de Thomme ; mais, outre que cet examen nous entrainerait dans des lon- gueurs incompatihles avec les homes d'uae simple anar lyse, le resultat de cette recherche, en supposant qu'il 10.^

lis LITTER ATU RE.

different dc celui qu'il nous a presente , n'aurait point d'autrc autorite que celle d'une opinion opposee i une opinion ; et d'ailleurs pourquoi essayer de demontrer que rhistorien aurait dQ censurer son heros. Je ne sais si beaucoup d'esprits applaudissent aux biographes qui ecii- vcnt I'bistoire d'un grand hommc pour outrager sa me- moire, pour presenter ses actions sous I'aspect le plus de- favorable, pour rabaisser ses vcrtus et faire ressortir ses defauts, espece de vautours qui ■vivent du cadavre qu'ils dechirent ; mais s'il y a des reproches a faire a un historien , ne vaut-il pas mieux censurer en lui I'exces d'amour pour son auteur, que I'exces de haine envers celui dont il ecrit la vie; ne vaut-il pas mieux le blamer d'avoir renonce quelquefois aux droits d'une juste critique, que s'il fallait I'accuser d'en avoir exagere les devoirs?

II est malaise d'ailleurs de garder un juste milieu avec un homme tel que Rousseau. Un grand ecrivain, un carac- tere de celte nature, n'a point d'admirateurs froids ou de tiedes ennemis. II est impossible de ne pas se passionncr pour rhomme dans lequel tout fut passion; il est impos- sible dedemeurer glace, en etudiantune ame de feu. Dans une telle alternative , M. de Mussct achoisi le role d'admi- rateur. II parle de son auteur avec effusion; on voit qu'il I'aime ; tous les efforts de son esprit s'appliquent a la jus- tification de Rousseau. II y consacre sa logique, ses re- cberches , ses pieces inedites , une erudition fort etendue. II nous apprend qu'il a parcouru tous les ecrits des detrac- teursde Rousseau, et « qu'il a Irouve de la mauvaise foi dans les uns, un esprit faux et prevenu dans les autres, et dans tous, sans exception, le langage de la passion et de I'erreur; ici , de I'inexactitudc dans les faits exposes, des conjectures gratuites ; la, de ralteration dans les citations,

LUTERATURE. 119

des suppositions sans fondement, des interpretations fausses; partout des preventions. »

Sans entrer dans I'exaOien de ces assertions diverses dont le lecteur pent apprecier la valeur, en lisant I'ouvrage de M. de Musset, il est impossible de nier que souvent les grands ecrivains ont ete juges d'apres des passages alteres ou incomplets de leurs ecrits ; et si quelque auteur a eu plus particulierement k se plaindre de cette injustice et de cette perfidie, c'est incontestablement J. J. Rousseau. II serait facile de citer des exemples. Combien^ pour en alleguer un seul, n'a-t-on pas abuse contre Rousseau depas- sages tronques ducontrat social; combienranarchie, d'une part, et, de I'autre, Ic despotisme , n'ont-ils pas invoque cet ecrivain pour justifier leurs communes fureurs! D'un tout parfait, dont les differentes parties se liennent ct s'en- chainent etroitement, et dependent tellement les unes des autres, que, si on les separe , le sens del'auteur est altere, et sa pensee n'est plus comprise, on detache telle ou telle proposition; on lui enlevedesantecedens qui la preparent, des consequens qui I'appliquent ou la modifient; et voili un textetrouve, voila une source feconde d'argumensfaux, de suppositions cnlomnieuses. J'ai vu de bons esprils en- Iraines par cet abus du raisonnement, et seduits par la verite apparente d'une critique perfide : j'en connais meme qui occupent le rang le plus eleve parmi nos publicistes , et qui, fideles a de malheureuses impressions, conservent encore contre Rousseau des preventions tellement enra- cinees, qu'ils repugnent a les dissiper par la lecture plus approfondie de I'auleur qu'ils meconnaissent.

Mais revenons k M. de Musset. Son travail se divise en plusieurs parties. Persuade de la reracite de Rousseau, lorsqa'il ccrivil ses Confession? , il s'est contente d'offrir

120 LITTERATURE.

une analyse succincte dcs fails racontes parl'auteur, et ne les a augmentes que de quelques circonstances echappces i la menioire du philosoplie de Geneve, qui ecrivait sans autres documens que ses souvenirs. C'cst au moment oii les confessions nous manquent, que M. de Musset devient reellement historien. Alors, abandonne a ses propres forces, il a recherche avec un soin curieux les relations des auteurs contemporains qui ont connu son auteur, celles surtout du petit nombre de ceux qui ont ete admis dans sa familiarite. II a compulse tous les memoires des ennemis meme de Jean-Jacques. Acetegard, ilarecueilli une foulc de fails inconnus jusqu'ici, et ensevelis, soil dans des re- cueils oublius, soil dans des relations inedites. On pent ' croire quepeu de documens inleressans ont echappe a son investigation. De la reunion de ces divers materiaux, il a fait sortir un recit entremele d'anecdotes et de disserta- tions, qu'a vrai dire , on aurait quelque peine a honorer du nom orgueilleux d'hisioire, mais qui, sous quelque nom qu'on le designe, offrent un ensemble aussi varie qu'in- teressant.

La seconde parlie est purement bibliographique; elle se compose d'une nomenclature raisonnee de la correspon- dance de Jean-Jacques. Les dates sont restituees; le secret de la plupart desinitiales est leve; ce travail, d'une ulilite reelle pour toutes les personnes qui possedent les oeuvrcs completes de Rousseau, n'est que d'un faiblc interet pour celles qui ne les possedent pas. Une biographic detaillee de tous les ecrivains, et de tous les hommes celebres qui ont eu des rapports avec Rousseau , et dont il est fait men- tion dans ses ecrits, forme la troisieme partie, et la qua- trifeme se compose d'un grand nombi'e de lettres inedites. Tel estjl'ensemble du travail de M. de Musset.

Le lecleur comprend aisement que la premiere partie

LITT1<}RATURE. 121

etaitlaplus difficile a faire, ct prcseate Tinteret le plus general. C'est lu que I'auteur s'attache a repondre aux reproches dont la conduite de Rousseau a ete I'objet, a cxpliquer les contradictions dont ce grand ecrivain est sou vent accuse; c'est la que viennent se reunir les pieces justificatives, dont la lecture doit, aux yeux de M. de Musset, justificr son auteur. Li s'eclaircit, d'une maniere qui parait satisfaisante , la querelle de Rousseau avec M. Hume, et le lecteur peut juger si, comme le disait I'ecrivain anglais dans un acces de colere , Rousseau est un scelerat. II peut apprecier aussi a sa juste valeur I'accu- sation d'ingratitude, adressee a I'auteur d'Emile; il est mis ^'■f'Oi'tee de juger si I'ingratitude n'est pas plutot I'oubli des bienfaits que le refus d'en recevoir, et si I'extreme susceptibilite de Jean-Jacques a cet egard n'e- tait pas plutot I'effet de I'alteration mentale dont il etait reellement atteint, que de la malignite de son coeur.

M. de Musset s'attache aussi i expliquer les contradic- tions imputees a Rousseau. La plus frappante et la plus cruelle de toutes est sans doule la conduite de Jean- Jacques a I'cgard de ses enfans. L'auteur d'Emile a mis ses enfans i I'hopital ! Quel terrible argument contre le livreet contre I'ecrivain ! Par quels raisonnemens peut-on le justifler d'une faute qui blesse les droits les plus sacres de la nature , ou plutot est-il possible d'employer dans un lei sujetles ressources d'une froide logique? M. de Musset a rassemble tous ses efforts pour attenuer le plus grand des torts que Ton puisse reprocher ii un homme, a un citoyen , a un philosophe. L'excuse la plus legitime et la plus morale tout ensemble que Ton puisse admettre peur une pareille faute , c'est la legerete de la jeunesse, c'est la situation precaire de Rousseau , ses longs et dou- loureux regrets , ses efforts inutiles pour reparer son

122 UlTKRATLRE.

crime; cnfin, c'estia consideration de la faiblessehuiliaine; il n'y a point d'autre justification i donner, le tenter seu- lemcnt est peut-etre une nouvelle faute, et , de ce cote, le lecteur doit reprocher i M. do Musset de I'avoir com- mise.

C'est avec moins de peine et plus d'avantage que I'au- teur de I'histoire de Jean-Jacques a entrepris de le ven- ger de cette nuee d'ennemis qui n'ont pu lui pardonner la juperiorite de son genie, et surtout la nature de ses opi- nions religieuses. II etait facile dc defendre Rousseau contre les calomnies du club du baron d'Holbach et des fanatiques de la Sorbonne et du parleraent. II etait facile d'expliquer comment cette ame religieuse et tendre dut etre egalement revoltee des arides raisonnemens de I'a- theisme et des dilemmcs intolerans de la superstition. M. de Musset n'a pas eu de peine non plus i\ venger Jean- Jacques des attaques de Grimm et de Diderot, qui man- qua bien cruellement aux devoirs de la philosophie dont il etait I'undes soutiens^ en exhalant une fureur tardive sur la tombe de son ancien ami. Triste exemple de la fragilite humaine ! On professe les memes opinions , on combat sous les memes etendards, on soutient de concert toutes les doctrines de la liberte et dc la tolerance; uiais que Ton differe sur un seul point, que Ton soit divise par un interet d'amour propre , alors des freres, des amis de- viennent ennemis acharnes; tolerant pour le parti con- traire, on cesse de I'etre envers les membres du parti que Ton defend ; de scandaleuses haines s'allument; le fiei coule a longs flols sous des plumes envenimees , et les verilables ennemis, ceux contre Icsquels il fallait reunir ses forces , triomphent et se fortifienl des divisions dc leurs adversaires.

Get rffel deplorable ne sc mauifcsta jamais d'unc ma-

LrniiRArLiiE. i2s

niere aussi fatale que dans la division qui eclata entrc Voltaire ct Rousseau. Les deux plus beaux geiiies de I'e- poque, rapproches par les sentimens d'une philantropic eclairee, fails pour s'aimer et pour s'apprecier, ofTrirent aux ennemis de la philosophic le spectacle affligeant de leur inimitie. Si ces deux grands ecrivains , separes I'un de I'autre , ont rendu, chacun dans sa sphere, de nom- breux services a I'homme et a la societe, quel immense bienfait leur union eQt ete pour I'humanite tout entiere! Affranchis du joug des malheureuses passions qui les di- viserent , ils se fussent offerts au monde comme une application vivante des principes qu'ils professaient , et leurs doctrines se fussent fortifiees de toute I'autorite de leurs exemples; mais, helas ! reclamer une pareille al- liance serait peut-etre exiger trop de la faible huma- nite. Sages et fous , ignorans et philosophes lui paient egalement un tribut , et il etait ecrit que les aputres de I'intolerancetrouveraient dans I'inimitie de deux grands hommes un argument toujours nouveau contre la philo- sophic. Mais, grace au ciel , les passions des grands ecri- vains passent avec eux ; le bien qu'ils ont fait reste. Vol- taire et Rousseau ne s'offrent plus aujourd'hui au monde comme des ennemis ; on les confond , malgre leurs torts , dans un sentiment commund'estime et de reconnaissance; et, pour me servir de I'expression sublime d'un poete, la voix du genre humain les a reconcilies (i).

M. de Musset ne dit que peu de chose sur I'inimitie qui divisa Voltaire et Rousseau ; en cela il a donne , sui- vant nous, une grande preuve de jugement. Avec moins de talent, de science et d'illustration, il s'est eleve a eel egard au-dessus de Condorcet , qui , dans la vie de Vol-

(i) GmiMER, epitte i Voltaire.

in LITTER ATI! RL'.

taire, a cherche i justifier I'aniniadversion du poete de Ferney contrc le philosophc de Geneve. Pourquoi, en effet, prendre un parti dans de si deplorables querelles? pourquoi entasser de penibles raisonnemens et se livrer a tant d'efforts d'une miseral)Ie logique pour arriver, en dernier resultat , a prononcer la condamnation de I'un ou de I'autre de oes grands hommes ? C'est dans une pa- reille occasion que Ton peut et que Ton doit rester neutre; admirons-les tous deux sans nous condamner a la tache inutile et penible d'et.iblir entre eux des superioriles de vertus ou de faiblesses.

Les causes de la mort de Jean-Jacques sont encore aujourd'hui enveloppees d'une obscurite profonde. Les uns Tattribuent a une apoplexie sereuse, les autres a un suicide. Selon les premiers, Rousseau perit naturelle- naent ; suivant les seconds, il avanca lui-meme sa fin; fatigue de la vie, il rejeta loin de lui ce penible fardeau. Prononcer entre ccs deux opinions qui s'appuient egale- ment sur des suppositions, n'est pas chose fort aisee; M. de Musset a reuni a cet egard tous les docuniens qui peuvent exister ; il s'est surtout etaye de I'opinion de madame de Stael , et s'est cru autorise , malgre les dene- gations de M3I. de Girardin , a decider que Rousseau s'est donne la mort; il attribue meme cette resolution deses- peree a la douleur que Jean-Jacques ressentit de la trahi- son d'une femme indigne de lui , et qu'il devait peut-etre accuser de tous ses malheurs. Si cette opinion est plau- sible, ferons-nous un crime a Rousseau du dernier acte de son existence ? Ah ! sans doute, s'il etait jamais permis d'abreger cette course agitee que Ton nomme la vie; si de longs malheurs et de longs degoiits pouvaient etre allegues comme une excuse aux moralisles severes qui nous or- donnent de souffrir au nom de la religion, quel homme

LITTERATURE. 12&

plus que Rousseau dut etre accable de cette chaine d'in- fortanes que sa raison troublee lui montrait plus penible encore! Calomnie par ses ancieas amis, en proie k une sauvage mcfiance, trahi par une femme pour laquelle il avail tout sacrifie , soumis a des peines morales qui s'ap- pesantissaientchaque jour sur son ame, il put concevoir le desirde lamort, elles coeurs sensibles lui pardonnent d'a- Toir ete la chercher, lorsque tant d'autres I'attendent avec effroi, et donnent le nom de courage a cette resignation forcee.

L' Histoire de la vie et des oiwrages de J.~J. Rousseau abonde, nous le repetons, en details historiques et en reflexions aussi utiles qu'interessantes. On peut dire que Ton ne connait point entierement Jean-Jacques avant de I'avoir lue. Elle est le fruit de tres-minutieuses recherches, et devient le complement indispensable des oeuvres du citoyen de Geneve. Si quelques erreurs, quelques faux jugemens , quelques taches de style s'y sont glisses, ces faibles defauts disparaissent aisement devant le nombre considerable de faits exacts et de renseignemens curieux qu'elle renferme.

Leon Thies&u.

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III. BULLETIN BIBLIOGIIAPHIQUE.

LIVRES ETRANGERS (i).

AMERIOUE.

ETATS-UNIS.

1. Journal of the ^cademj, etc. Journal de TAcademie des sciences naturelles de Philadelphie, Janvier 1821, 3a p.

Ce cahier contient la description d'un nouveau genre et dc plu- cieurs espfcces nouvelles de poissons d'eau douce particuliers aux Etats-Unis, par C. A. Lesdeub ; I'analyse de deux especes nouvelles d'exocetus , par le tnfime ; la description des thjsanource des !^tats- Unis, par Thomas Sat ; des observations sur la geologie de la vallee de Mississipi, par Thomas Ncttall; etquatre planches representant les poissons decrits par M. Lcsueur.

2. ^ Memoir, etc. Memoire sur le froment et sur la farine de I'Etatde New-Yorck , lu le 17 fevricr 1820, devant le bureau des di- recteurs de la Societe d'agriculture da comte de New-Yorck , et pu- blic par son ordre.

3. Annual Philosophical Magazine , etc. Magasin pliiloso- phique annuel , contenant le journal des Dames et des Messieurs , et un repertoire de sciences et d'amusemens , publie tons les ans au i'"^ octobre, par M. Nash, Annee 1820. New-Yorck, in- 12 de72 pages.

4- Third report of the American Bible Society, etc., Troisiime rapport de la Societe Biblique amcricainc, presente le i3 mai 1S19. New-Yorck, i8ig.

Cette Societe a fait imprimer , dans les annees i8i6 et 1817, 29,500 exemplaires de la Bible, et, en 1S18, 47>32o de la Bible et 24,000 du Nouveau-Testament. II a et6 tire en outre mille exemplaires de I'evangile de saint Jean, traduit dans lelangage des indiens Mohawks, et un 6gal nombre des epitres de saint Jean , dans celui des Dela-

(1) Nous indiquerons, par un asterisque (') plac6 i c6t6 du titre de chaque ouvrage , ceux ^es livres c-trangers ou fran^ais qui paraitront dignes d'une attention particuli^re , et dont nouf rendrons quelquefois compte dans la section des analyses.

LIVRES ETRANGERS. 127

•wares. La Society espfere 4tre i meme , sous peu de terns , de fournir Ja Bible , dans les divers dialectes indiens , lorsqu'elle aura pu en faiie faire des traductions exactes. Le nombre do Bibles distributes pen- dant les deux premieres annees s'eleve 4 2/1,004; et en 1818, il a ete distribu6 23,870 Bibles et 7,248 Nouveaux Testamens ; ce qui fait, depuis Pepoque de son etablissement, 55,122 Bibles et Testa- mens. A la fin du rapport, se trouvent des /ac simile des quatre for- mats stereotypes de la Bible anglaise , un de la Bible en fran^ais, un autre en espagnol , et deux de I'epitre et de I'evanglle selon saint Jean , traduits en mohawk et en delaware.

5. ^4 Discourse on the religion , etc. Discours sur les tribus in- diennes de rAmerique du nord , prononce devant la Societe histo- rique de Nevv-Yorck, le 20 dtcembre 1820, ^&r Samuel Farmar Jayvis , avec cette devise tiree de Charlevoix : « Jusque dans leurs demarches les plus indifferentes, on aper^ oit des traces de la religion primitive , mais qui 6chappent i ceux qui ne les etudient pas assez , par la raison qu'elles sont encore plus eflacees par le defaut d'ins- truction , qu'alterees par le melange d'un culte superstitieux et par des traditions fabuleuses. »

6. Manual of the Lancasterian system, etc. Manuel du systeme de Lancaster, suivi dans les ecoles de la Societe des ecoles-libres de New-Yorck, pour enseigner la lecture, I'ecriture, I'arithmetique et les travaux a I'aiguille , imprime a New-Yorck , par ordre de ladite Society et vendu a son benefice. 1S20, in-S° de 64 pages.

7. An extract from the life of Lorenzo da Ponte, etc. Extrait de la vie de Lorenzo da Ponte , avec I'histoire de plusieurs drames ccrits par lui , et entre autres de // Figaro , Il Don Giovanni , et La Scola degli Amanli , mis en musique par Mozart. New-Yorck, 1819, in-12 de 46 pages.

8. Catalogue of paintings and engravings , etc. Catalogue des tableaux et gravures exposes par I'academie americaine des beaux arts , en mai 1820. 6"^ exposition , New-Yorck, 1820, avec cette devise tiree de Virgile : Audit vocatus Apollo.

EUROPE.

GRANDE-BRETAGNE.

9- Philosophical Transactions of the Royal Society of London, 'tc. Transactions philosophiques de la Societe royale de Londres, pour I'Hnnee 1S20. Londres, 1821, Nicol et fih. i vol. in-4°.

128 LIVftES liTRANGERS.

Ce volume, qui fait suite h un premier compte rendu ties travaux de la mCmc Societe pour I'annee 1819, renferme un examen appro- fondi des parties qui composent le sang , par Sir Everard Hornet un traitii sur I'clasticite des poumons, par James Carson; une disser- tation sur quelques combinaisons du plaline , par Edntond Davy , professeur dc chiniic , et plusicurs autrcs memoires d'un grand in- tirSt. L. S. B.

10. Elements of chemistry, etc. Elemens de chimie, avec I'ap- plication de cette science aux ph^nom^nes de la nature ct aux pro- ced6s des arts et des manufactures, par J. Millak, membre du college royal des niedecins, et professeur d'histoire naturelle et de chimie. Edimbourg, 1821, un vol. in-S".

Get ouvrage peut etre recoramande comme un excellent manuel i ceux qui desirent acquerir les premiers principesd'une science qui est d'une grande importance et d'une application universelle. Dans I'introduction , I'auteur explique la nature de Taction chimique par quelques experiences fort simples, mais propres 6 donner i T6tu- diant une idee plus exacte de la chimie que celles qu'il pourrait ac- quirir par de savantes dtlinitions, II demontre I'influence de cette science par tous les changemens qu'operent dans le monde mattriel la lumiere et la chaleur , par la nature et la constitution de Tatmos- phfere , par les proprietes des mineraux et la possibilite de les rendre utiles k I'homme; par la nature, les proprietes et I'usage des plantes; par une connaissance approfondic des fonctions et des facultes des animaux : cnfin, parl'application generale des principes de la chimie au perfectionnement des arts. D'apres ce plan , I'ouvrage est divise en trois parties. La premiere renferme une exposition des principes de la chimie ; la seconde donne Texplication des ph6nomenes de la nature , selon ses principes ; la troisieme est consacree ^ une esquisse rapide des proc6des des arts , ou de quelques-uus des principaux arts et des manufactures qui sont du ressort de la chimie : telles que les fabriques de porcelaine, de savon, de verre; I'art de tanner les cuirs, de blancbir , de teindre , de brasser , de distiller, de dorer, de vernir , etc. L'auteur remonte i I'origine de chacun de ces arts et en donne un aperou. L'ouvrage est enrichi de rerharquesneuves, de pen- sees ingenieuses, et ne peut manquer d'interesser la classe des sa- vans, etmeme les hommes du monde qui ne veulent pasrester etran- gers a une science qui contribue si puissamment a la prosp6rite des

LivREs Strangers. 120

nations, en aidant le (.-onimerce et les arts par les plus utiles d6cou- vertes. L. S. B.

1 1. On the beauties, harmonies , and sublimities of nature, etc. Beautes , harmonics et sublimites de la nature ; suivies de remar- ques sur les lois, les coutumes, les mocurs et les opinions des diffe- rentes nations; par Charles Bucke. Londres, 1S21.

L'auteur de cet ouvrage est deji connu par sa Philosophie de la nature jlesAmusemens dans la retraite, une tragedie intltulee: Les Italiens, etc. II a mele i des descriptions interessantes des beautes de la nature , les reflexions d'un moraliste et d'un philosophe. Son style est parfois un peu ambitious; iln'a pas la simplicitc convenable au sujet qu'il traite ; en general , ce livre manque de plan et de mk- thode. 11 y a cependant des pages bienecriteset remplies d'erudition.

L. S. B.

12. The book of Henoch ^ etc. Le livre d'Enoch le prophete , production que Ton supposait perdue depuis plusieurs siecles, et qui a ete decouverte en Abyssinie , a la fin du siecle dernier ; public pour la premiere fois , d'apres un nianuscrit elhiopien de la bibliotheque Bodleienne, par M. Richard Lacrence, profcsseur royal d'h6breu, chanoine de I'eglise de Christ. Oxford, 1821, imprimerie de I'Uni- versite. Un vol in-S" de 2G2 pages.

Cet ouvrage est une des acquisitions les plus importantes qu'aient faites depuis long-tems les amateurs de la litterature biblique. Ce- pendant ce livre d'Enoch , lememe qui est cite par saint Jude {Epist., V. i4, i5), par saint Clement d'Alexandrie , par Tertullien, etc. n'a jamais figure parmi les livres sacres , ct quelques anciens peres I'ont traite d'apocryphe, « inter apocryphoscomputatur, dit saint Jerome , commentar. in Psalm, ccxxxu,"!), (i)» D'apres une pareille decision, iln'estpas ^tonnant que le livre d'Enoch ait ete neglig6 , au point de disparaitre meme parmi les livres apocryphes. Enfin , depuis long- tems, on n'en connaissait que le litre et quelques fragmens decou- verts et publics par Scaliger, dans ses notes sur la chronologia d'Eusebe, quandlecelebrevoyageur Bruce trouva, en Ethiopie, trois exemplairesd'une version ethiopienne de ce livre. II donna unde cos exemplaires, grand in-4°, i la bibliotheque du Roii Paris, en reserva

(t) Tertullien cependant le rcgarde comme un livre inspire, et .-econnait pour 6tre I'ouvrage dil prophete dont il porte le nom,

Tomb xi. 9

130 LIVRES ETRANGERS.

un pour liii-ni6mc, ct remit le troisienie a la bibliiitlieqiie Bod - Icienne d'Oxford, oil il est restti , sinon oublie , du moins negligi- jusqu'ii I'annee demifero. Lc docleur Laurence, ayant appris qu'un savant orientaliste allemand , M. Gcsenius, etait venu prendre copie dc la version ethiopiennc que nous possedons a la bibliothcquc du Roi , et que jc me suis cmpresse de mcttre a sa disposition , a cru devoir publier une traduction anglaise d'un ouvrage donl I'Europc savanle doit la decouvertc et I'acquisition a I'un de ses compatriotes. C'est la premiere traduction complete de cet ancien et important ouvrage qui ait paru en langue europeenne.

Dans un discours preliminaire de pres de cinquante pages , ou brille la plus saine critique, M. le docteur Laurence me semble avoir demontre que I'ouvrage dent il s'agit a tie suppose , en langue he- braique , par un Juif, qui ne doit avoir (icrit que tres -peu d'annees antirieurement a I'cre chretienne, a peu pres sous le regne d'llerode. Ce Juif doit avoir fait partic des tribus emmenees en captivitc* par Salmanassar et releguees dans les pays de Halah et de Habor , c'est- ii-dire dans la Colchide et dans I'Iberie , d'oii elles ne revinrent plus en Judee. Ces deux fails que M. Laurence me semble avoir etablis J'une maniere trus-satisfaisante, ne donneraient-ils pas lieu de con - jecturer que I'auteur de ce Livre se nommait Enocb , et qu'on I'aura confondu avec le patriarche de ce nom (i)? Parmi les nombreux rap- prochemens que je crois reconnaitre entre cet ouvrage et le zenda- vesta et ceux que nous possedons sur I'ancienne religion des Perses , je me contenterai de signaler les noms et la multiplicitd des anges bons et mauvais, leur sort, leurs fonclions, leurs relations avec les liommes. De leur commerce avec les filles des hommes, naquirent ces geans dont parle la Genese , et qui ont une etonnante ressem- blance-avec les A^ouras des Hindous, commejc I'airemarque Tom. I de mon ouvrage sur les monumens anciens el modernes de I'Hin- doustan On trouve dans/e lii>re d' Enoch des idees tres-positivessur rimmortalitt de I'ame, dogme sublime et consolateur auquel les Juifs itaient etrangers avant la captivite de Babylonc , sur la trinity , re- connue par les Hindous ct par Platon , et avant qu'elle fftt pro-

(i) Cette conjecture , j'en conviens, est un peu conlredite par la mention de son fils Matbusala ( ou Mathusalem), que I'auteur pseudonyme fait page gS, v, i3, page loo, v, i el passim.

LlVllES ETRANGERS. 151

clatnee par les Peres de I'Eglise ; cnfin I'attente d'un messie ou liberateur, fils dc Dieu , fils de I'liomme, decrit dans la vision de Daniel, qui doit avoir eu des relations avec les mages de Baby- lone. Je regrctte vivement de ne pouvoir suivrc I'auteur dans ses voyages a travers les espaces imaginaires , ni raconter toutcs ses vi- sions, qui nous donnent une idee dcs opinions populaires , des con- naissances astronomiques , des diffcrcntes croyances adoptees par les Juifs ou par les Persans , dans le premier siecle ant(^rieur i J. C.

Les renaarques que M. le docteur Laurence a plac6es a la suite de sa traduction du livre d'Enoch, decelent une connaissance appro- fondie des langues bibliques et de la litterature sacree, et je me plais a rendre un juste hommage k la vaste etendue de son Erudition , comnie a la politesse et a la moderation de ses critiques. II a su allier les intercts de la science avec la cLarite chretienne et les egards de la societe. Langl^s.

i3. Elements of the science of political economy ^iXc. El6mens de la science de I'economie politique ; par James Mill , auteur de I'histoire des Indes britanniques. Londres , 1S21 ; Baldwin et Cra- dock ; 1 vol. in-S".

Le but de I'auteur est de presenter avec ordreles grandes doctrines de I'economie politique , qui , toutes liees les unes aux autres , se prfitent un mutuel appui. Son travail facilite I'etude de cette branche des connaissances humaines et la rend accessible k tous les esprits.

L. S. B.

li.— Travels in the north of Germany , etc.— Voyages dans le nord de I'Allemagne, par T. Hodgskin. Londres, 1820; Colburn, 2. vol. in-S".

Un tcrivain allemand, en faisant la distribution des elemens aux differentcs puissances de I'Europe, a donne aux Fran^ais I'enipire de la terre ; aux Anglais , celui des mers, et h ses compatriotes, I'empire de Pair. II est certain qu'un des traits caractiiristiques de ce peuplc est d'etre plus particulierement porte a la speculation; cette dispo- sition a favorise une foule d'entrepriscs audacicusement conijues. C'est ainsi que se formci-ent un grand nombre d'associations secretes. La plus ancienne de toutes est la Franche-maronnerie , a laquelle succederent des institutions religieuses ; celles-ci furent bientOt sui- vies du tribunal secret et des illumines. En remontant a I'origine de ces soci^tes , on decouvre qu'elles sont, presque toutes, les branches

135 LIVRES J^TRANGERS.

d'une mSme tige , et qu'elles (latent de bcaucoup plus loin qu'on nc la suppose gencralement. Quelques-unes , conime celles dcs Moraves , s'assemblaient pour des motif's religieux ; d'autres , pour dcs re- rherches philosophiques , commc les Alchimistes , les Rose-croix et ceux qui s'occupent des sciences occultes. 11 parait Dependant que les Illumines, quoique pour la plupart mystiques et visionnaires , avaient parmi eux une classe particuliere, dontle but etait le pouvoir politique.

Nous sonimes entres dans ces details , parce que I'auteur de I'ou- vrage que nous annon9ons s'est principalement occup6 de faire con- naitre plusicurs de ces associations. II a aussi donne un tableau assez exact de quelques-unes des universites allemandes et des abus qui, selon lui, s'y sont introduits. L. S. B.

1 5. (*J An essay on the history of the englisch govemement and constitution , etc. Essai sur I'histoire du gouverncment et de la constitution anglaise, depuis le regne de Henri VII jusqu'i nos jours; pur lord John Russel. Londres, 1821 , Longmann.

i6. (*} Historical memoirs , etc. Memoires historiques des Ca- tholiques anglais, Irlandais et ecossais ; par Charles Butteb. Londres, 1S21 , John Murray ; 4 vol. in-S" ; prix , 5o scbellings.

17. Select Biography , etc. Biographic choisie , ou Vies des personnages eminens qui ont dte I'honneur de leur patrie ; par dif- ferens hommes de lettres. Londres, 1821 , Colburn.

Doiize parties de cet ouvrage , public periodiquement, ont d^ji paru en Angleterre. Elles contiennent les vies de Fox, de Pitt, de Nelson , de Marlborough , de Bruce , de Ralegh , de Johnson , du marquis de Montrose, etc. Les autcurs semblent perfectionner leur travail a mesure qu'ils avancent ; les derniers sujets sont mieux choisis et plus interessans que ceux qui sont traites dans les premieres livraisons. La plupart des memoires sont originaux , ou extraits avec discernement des enormes collections ou ils se trouvaient ensevelis.

L. S. B.

18 Generallndex to the Gentleman's Magazine. Index general du Magasin ou Repertoire du Gentleman , depuis I'annee 17S7 jusqu'a I'annee 1818 inclusivement; avec une introduction contenant I'histoire de I'origine et des progres de ce journal , quelques anec- dotes sur son principal fondateur et sur quelques-uns dc ses associes; par John Nichols, Londres, i8ai ; 5 vol, in-S".

LIVRES FIRANGERS. 13S

jLe Magasin , ou Eejertoire du Gentleman , est le premier journal periodique qui ait paru en Angleterre ; il y jouit , depuis en- viron quatre-vingt-dix ans , d'une reputation merilee. Ce fut une des louables entreprises du xvn^ siecle , que la publication de ce genre d'ouvrages destines k faii'e connaitre au public ce qui se passe dans la republique des lettres. L'idee en appartient «i M. de Sallo, con- seiller ecclesiastique auparlement de Paris; son journal fut re9u avec une approbation universelle, et Ton se bata de I'imiter en Italie et en AUemagne. En 16S2 , M. Meneke commenca Its, Ada eradilorum Lipsiensia , qui furent continues pendant plusieurs annees avec un succes toujours croissant.

Lorsque Bayle et Leclcrc allferent se fixer dans les Pays-Bas , le premier i Rotterdam et I'autre k Amsterdam , ils furent fort surpria de voir qu'en HoUande , pays qui 6tait alors le rendez-vous des savans, 4 cause de la liberte de la presse et du grand nombre de li- brairies et de bibliothequcs publiques et particulieres que Ton y Jrouvait, pcrsonne n'eut encore pense i publier un journal litteraire. Leclerc en commenca aussitot un , qu'il continua jusqu'en 1727, avec I'aide de Bayle ; mais ce dernier, tout entier h la publication de son Dictionnalre biographique , ayant cesse de travailler h cs journal au bout de quelque terns, Beauval se cbargea de le continuer sous le litre A'Ouvrages des sauans. Plus tard, les Noauelles de la repu- blique des lettres , par Bernard , furent bien accueillies du public , ainsi que le Journal de Treuoux j cette derniere production etait sp6cialement consacree i la religion et k la politique . et redigee pai une societe de jesultcs.

Gene fut qu'en 1701 qu'Edouard CaveSt paraitre en Angleterre le premier journal periodique, sous le titre du Magasin ou Repertoire du Gentleman. Ce recueil ne renfermait d'aJjord que des nou- velles et des anecdotes piquantes, tirees des journaux quotidiens ;. Cave resolut d'y joindre les actes du parlement , entreprise assez difficile, vu que ce genre de publicite etait defendu alors par la cbambre. II eut long-tems ce projet en vue sans pouvoirl'executer; il s'y aventura cependant, et commenca par donner le discours du roi en Janvier ijSj. II publia , au mois de juin de la merne annee , deux prolestalions des lords et les remercimens adresses par I'oratcur de Is chanibre des communes a lord Gage, le 3j mai 1703, aiasi que b

ISA LIVRES ETRANGERS.

r^ponse de sa scigncurie. Lc parlcmenl ayant et6 prorogu en julllet, il se hasarda^ presenter les actes el les debats de la derniere session du parlement, en designant les principaux orateurs par ieurs lettres ini- tiates. En 1734, le doctcur Johnson oflrit i Cave de I'aider dans son entreprise ; il lui suggera I'id^e d'ins^rer dans son Ripertoire des poesies inedites, de courtes dissertations litt6raires en latin ou en anglais, des observations critiques sur les autcurs anciens ct mo- dernes, les ouvragcs oublies et qui mcritaient qu'on les rappelit au public, etc., et il se chargea de cette partic du recueil. IM. Gave commen^a alors i proposer des prix de 5o louis ou d'une medaillc d'or, pour les meilleurs poemes composes sur des sujcts donnes. Le succes de son journal lui suscita un grand nombre de rivaux; mais, de tous les ouvrages cntrepris a I'imitation du sien, le seul qui surve- cut fut le Magasin ou Repertoire de Londres. II ri'nissit pendant plusieurs annees, et fut continue jusqu'en 1785 , epoque i laquelle il cessa de paraitre.

Les debats parlementaires furent publics regulierenicnt dans le Magasin du Gentleman jusqu'au i3 avril »738, od un ordrc sevfcre du parlement obligea de les supprimer. Cependant Cave ima- gina un nouvel expedient; en juin 1708, il Ct preceder les debats d'une espece d'introduction sous le titre A'Appendiced la description du celebre empire de Lilliput , donnee par le capitaine Samuel Gulliwer; et les actes du parlement furent publics sous le titre de Debats du sinat de Lilliput , avcc I'anagramme des noms des dif- ferens orateurs. Le docteur Johnson fut charge de la redaction de ces articles.

A la mort de son fondateur, le Blagasin fut dirige par IM. David Henry, qui avalt epouse une soeur de M. Cave. En 1778, M. Nichols, 'a. qui Ton doit la preface de VIndcx que nous annon9ons, prit une part considerable it sa redaction et continua depuis k en etre 1*6- diteur. Cet ouvrage est interessanl pour ceux qui aiment a suivre les progres de la litterature pendant un si long espace de terns. Les Index sont au nombre de quatre ; le premier est pour les essais , mdmoires , etc. ; le second pour la poesie, le troisieme pour les noms propres , et le quatrieme pour les gravures. ( Voyez , pour les autrcs journaux publies en Angletcrre, notre T. X , p. 635.) L. S. B.

i^.— Letters to, etc.— Lettres i '" sur les ecrits du reverend

LIVRES lilRANGEllS. l?,i

\\. L. Bowles , ronceinant la vie et Ics oeuvies de Pope; par luid fivRon. Londres, 1821. Colburn , biocliure in-8" de 55 pages.

M. Bowles s'est attire rindignalion de quelques ecrivains anglais en publiant une edition des oeuvres de Pope, dans laquelle il s'est permis de retrancher et d'altirer plusieurs passages. II a aussi at- laque directement la moralite de ce poete , dans la notice biogra- pbique qu'il a fait paraitre a la tete de cetle nouvelle edition. Lord Byron s'est charge de venger cet outrage. Les lettres que nous annon- ronssont une satire mordantedela prKSomption de I'editeurde Pope. Ony trouve une defense dece grand poete d'autantplusremarquable, qu'ellc est fondee surlc meprisde I'ecole roman'.icjue,dontlord Byron peutetre consider*; commelechef. Nous traduisonsce passage curieux; « Les efforts de la populace poetique d'aujourd'hui, pour obtenir un ostracisme contre Pope, s'expliquent aussi aisement que la sentence de I'Athenien contre Aristide; ils sont las de I'entendre toujour* appeler le juste. C'est aussi pour leur existence qu'ils conibattent; car, si Pope garde son rang, ils tomberont. Ils ontelev6 une mosquee aupresd'un temple grec de la plus belle architecture ; et , plus barbares que les peuples, auxquels j'emprunte celte figure, ils ne sesont pas contentes de leur grotesque edifice, ils ont encore voulu detruire le glorieux mo nument si beau ct si pur qui e.\istait avant eux, et qui les menarait , ainsi que leurs ouvrages, d'une honte eternelle. On me dira que j'ai eti (et que je suis peut-etre encore) au nombre de ces ecrivains : il est vrai , et j'en rougis. J'ai ete un des constructeurs de cette nouvelle lour de Babel, origine de la confusion des langues ; mais jamais , dii moins, je n'ai fait partie des envieux destructeurs du temple classiqu? cleve par notre predecesseur. J'ai aime , j'ai honore la gloire et le nom de cet homme illustre et sans livaux ; j'ai prefere sa gloire a ma vaine renommee et aux frivoles applaudissemens de la foule des ecole* et des pretendus poetes qui croient I'egaler ou menie le surpasser. Plulot que sa couronne perdit un seul fleuron , il vaudrait mieux que. tout ce que ces hommes ont jamais ecrit, ainsi que moi, fut employ^ a envelopper les poivres et les epices , ou a tapisser les cellules de Bedlam et de Soho (1). Beaucoup de gens croiront a la sincerite de ce Toeu ; beaucoup d'autres n'y croiront pas. Vous savez , Monsieur^ si je dis vrai, el si jc n'ai pas loujours exprinie la meme opinion dans

(1) Deux maisons de fous.

156 LITRES lilRANGERS,

mes lettres particuli<;res et dans ce que je destine i rinipresssion. Jc regarde ce siicle comme celui du declin de la po6sie anglaise : ni les i§gards pour les autres , ni les sentimens d'egoisme que je puis eprou- ver, ne m'empecheront de voir ct de proclamer cette v6rite. II ne peut y avoir de synipt6me plus frappant dela corruption du goftt que cette continuelle depreciation de Pope. » Cette diatribe contre la nouvelle ecole romantique est suivie d'un eloge complct du plus grand des poetes classiques del'Angleterre. Lord Byron lerepresente comme le plus parfait des ecjivains et le plus pur des moralistes. II croit ses ceuvres destinties ii surnager sur le torrent des siecles ct des revolutions. « Pope est, dit-il, lepoete moral de la civilisation ; es- perons qu'i ce titre il sera un jourle poete national du genre humain.» A un style 6nergique et piquant , cette brochure joint le raerite de renfermerune discussion remplie d'imagesetde pcnseessur la poesic.

L. S. B. RUSSIE.

20. Mimoires de I'academie imperiale des sciences a Saint-Pe- iersbourg; Tom. VII, avec I'histoire de I'academie, pour lesannecs i8t5 et i8i6. Saint-Petersbourg, 1820, in-4».

Cc recueil classe les memoires dans qualre sections ; savoir: ma- ihematiques , physique , politique et hisloire. On distingue, dans la section de I'histoire , un memoire de M. Ouvarof , ecrit en franrais , consacr6 a I'examen de la fable brillante d'Hercule. II soutient qu'elle * ete faite apres coup, et que le polytheisme, i son origine , n'offrait aucune trace de I'identite d'Hercule avec le soleil , enfin qu'Herculc ne fut d'abord qu'un homme , un heros deific. L.

rOLOGNE.

SI- Sebasliani Ciampi, novum examen loci Liviani de legalis JRomanorum Alhenas missis ut exscriberent leges Sulonis. Nouvel examen d'un passage de Tite-Live relatif aux deputes envoyes de Rome a Athenes pour transcrire les lois de Solon. Wilna , 1821, im- primerie diocisaine de la congregation de la mission. in-S" de 34 p.

Un Polonais a public a Varsovie , en 1819, un livre intitule Prin- cipia juris, dans lequel , a I'occasion d'nne coniparaison entre les lois de Solon et celles des decemvirs, il attaque en general I'autorite de Tite-Live , comme historien , et en particulier ce qu'il raconte du fait inonce dans le litre de Topuscule qui est I'objet de cette note .

LIVRES ETRANGERS. 137

Lacontroverse siirce passage n'estpas nouvelle; honamy { Mimoires de I'academie des inscriptions et belles-lettres , Tom. XII , p. 27 ). J. B. Vico, chez les Italiens; Gibbon, {Histoire de la decadence de r empire romain, c. 44) » ont 6leve des doutes sur I'authenticitfe de la mission leglslalive attestee par Tite-Live ; niais elle a ete admise par unauteurdoutrDpinionestimposanteencettematiere,parBonchand, Mians son Commentaire sur la loi des XII Tables. C'est dans le meme gens que se prononce le savant M. Ciampi, et ii vient de traiter ex- professo ce point d'hisloire important, que les auteurs cites n'avaicnt guerc louche qu'en passant. Lesprincipauxargumens des adversaires de Tite-Live sont ceux-ci : les monumens et les temoignages histo- riques n'indiquent point, disent -ils, que les Grecs aient eu aucune notion du noni romain, avant I'epoque d' Alexandre de Macedoine; les analogies qu'onpeutremarquerentreles loisde Solon et lesloisdes Douze Tables sont telles , qu'il sufBt , pour les expliquer, de diverses cjrconstances generates , sans qu'il soil besoin d'admettre une notion precise deslois atheniennes de la part des legislateurs romains, lesquels etant patriciens, ne doivenf pas facilement etre supposes avoir entre- prisunelongue navigation pour allerchercher des loisdemocratiques. M. Ciampi relablit dabord le respect du i I'autorite de Tite-Live, appuyee cette fois du temoignage de Denys d'Halicarnasse. Si les monumens grecs ne font pas mention de I'anibassade des Romains , c'est qu'i I'epoque oil elle eut lieu , la celebrite de ce peuple n'avait pas encore franchi les limites de son territoire italien: lorsque cette celebrite se fut etendue , Denys d'Halicarnasse rciclama pour sa na- tion I'honneur d'avoir transmis seslois aux Romains. D'ailleurs, de- vons-nous nous flatter de connaitre tous les monumens grecs ? les diflicultes de navigation avoient ^te bravees plus d'une fois avant I'e- poque dont il s'agit. M. Ciampi en cite des exemples: si les lois des Atheniens efaient democratiques, ne contenaient-elles pas divers re- glemens relalifs a la religion on aux principes generaux de la justice, parfaitenient applicables a toute republique etablie sur des bases le- gitimes ? Mais , poursuit-on , de quel idiome ont fait usage les Ro- mains, alors a demi barbares, pour communiquer avec les Atheniens ? falidra-t-il admettre , comme quelques commentateurs , que les lois des Douze Tables leur auront etii transmises par le geste? Non, re- plique M. Ciampi, les Romains n'etaient pas a demi barbares, au commencement du iV« siecle de leur fere; ct ii invoque a cet ligard

a38 LIVRES ETRANGERS.

Je liiinoigiiagc dc Icuis autcuis ; la langue dcs Giccs etait loin de leur Ctrc inconnuc ; des voyagcuis , dcs fiigilifs, des proscrils dc la Grfcce ne la leur avaient-ils point apportcc ; Demarate Ic Corinlhien n'ctait-il pas devenu le bcau-pcrc de Tarquin I'ancien ? bien plus , riinc rancicn , Sliabon, Diogciic Lacrrc, font mention d'lin Kplie- sien, noninii; Hcrmodoie, a qui uuc statue fut tlevee, piccicemcnt en recompense dc ce qu'il avail servi d'interprcle aux decemvirs pour la promulgation dcs lois de Solon. Nous sommcs conlrainls d'a- bregcr ces diverses argumentations , ce qui certainement leur enlcvc une bonne parlic de leur force. S'il etait permis de juger, lorsqu'on n'a entendu qu'une des deux parties, et apres une simple lecture, nous inclinerious volontiers pour I'Dpiniou de M. Ciampi Quoi qu'il en soil , I'babilete et reruditlon avec laquelle il I'a devcloppee et soutenuc ne peut qu'ajoutera sa reputation de critique etde savant.

A. Mahul.

NORViGE.

22. Daglog, etc. Journal tenu pendant un voyage a Congo eu Afrique,parM. leprofesseurC. Smith. Cbristiania, 1819 , i vol. in-S".

M. Smitb , naturalistc norvcgien , mourut pendant ce voyage. Ses papiersont eterecueillis aprcssamort, etlts annotations qui s'y trou- vaient consignees vienncnt d'etre publiccs par un de ses amis. Ce petit volume est fait pour augmcntcr encore les regrets que cause a sa patrie la mort prematuree du voyageur qui promcttait a la Norvege un digne successeur des celebres naturalistes Guiineius , Strom et Pontoppidan.

23. (*) Om Adel i Norge. Dc la noblesse en Norvege , a I'oc- casion des discussions de la diete i ce sujct, par M. P. A. Heiberc. Cbristiania, 1S21.

La paix de Kiel, signee le i4 Janvier i8i4, for^a le roi de Danemarck de renoncer a son royaume de Norvege , qui, d'a- pres la volonte formelle des souverains allies contre la France , fut donne a la Suede. Profitant de cctte decision toute puissante , et d'autres circonstanccs egalemcnt favorablcs , le roi de Suede aurail pu imposer a la Norvege le gouverncment arbilraire , ou lui donncr une constitution quelconque. II cut la generosite A'accepleAsi loi fon- damentalc decretee par los representans du peuple , et destin^c a ri-gir I'elat sous le goovernement d'un autre prince, donl le rfgnc ne

LIVRES ETIUNGERS. 159

fut qu'ephemerc. L'article 25 de cettc constitution dit « qu'a i'a- venir il ne pourra ttre accorde 4 personne de prerogatives heredi- taires , personnelles ou mixtes. » Lcs articles 78 et 79 permettenl au roi de refuser deux fois de suite sa sanction aux lois d^cretees par deux dietes consecutives ; mais si la meme resolution est encore adoptee sans amendement par la troisieme diele suivante , elle ac- qiiiert force de lot, qiiand meme elle ne seraitpas munie de Id sanc- tion rojale. C'est ce qui est arrive en Norvege. La diete de 181 5 avait juge convenable d'abolir tout de suite les privileges existans. Le roi refusa sa sanction a cette resolution , ainsi qu'a celle de meme nature , reproduite i la diele de 181S. C'est dans cet etat de choses que M. Ileiberg a public le petit ccrit que nous annon^ons , pour conseiller la diete norv^gieune depersister dans ses resolutions anterieures , mais sans prejudice aux droits acquis, et de laisser jouir de leurs privileges , leur vie durant , les hommes actuellement existans. 0 Les hommes nes avant la promulgation de cette nouvelle loi, dit-il, ont seuls des droits acquis; ceux qui naitront par la suite n'en ont pas de pareils a reclamcr, a moins qu'on ne veuille sou- tenir que les generations futures jusqu'i la fin des tems ont le droit d'etre les legislatrices de leurs ancGtres et des slecles qui ont pre- cede leur naissance. » Neanmoins , la diete actuellement reunie a conGrme la resolution des deux assemblecs precedentes; et, si la constitution n'est pas violee, cette abolition est devenue loi de I'etat. Prevoyant cependant que, dans le desir de reunir un jour la Norvege plus etroitement a la Suede, le gouvernement de ce dernier royaume ne cesscra jamais de solliciter le roi de proposer la creation d'une noblesse norvegienne , I'auteur s'est attache a prouver combien un pareil etablissement deviendrait desastreux dans un pays qui ne pos- sedc pas les elemens necessaires pour former une noblesse telle qu'clle doit etre pour etre quelque chose. Nous nous abstiendrons de details a ce sujet ; mais nous ferons connaitre les reflexions que I'au- teur soumet k ses compatriotes, dans le cas oii il faudrait absolument ceder i un voeu etranger, pour introduire dans I'etat un element re- pousse par la constitution. Dans ce cas, dit-il, la Norvege aurait a choisir entre quatre diflerentes especes de noblesse. La premiere , ou la noblesse hereditaire aperpetuite,a etc condamnee par le voeu dc la nation , fortement exprime dans trois legislatures consecutives et coniposees par des elections dififerentcs. La seconde , ou la noblesse

lAO LIVRES ETRANGERS.

personnelle , serait inutile et superflue , puisque la conslilution ac- corde au roi Ic droit de donner dcs ordres de chevalerie et d'autrcs distinctions de la meine nature. La troisieme consislerait a anoblir Jes homnies qui auraicnt bien nicrite de la patric , en leur cunfiranl un plus ou moins grand nombre de quarliers, qui diminueraienl da generation en gineralion jusqu'd leur enliere extinction. L'auteur croit que les recompenses honorifiques , tout comme les peines Q6- trissantes, devraient etre personnelles ct-nullement hcreditaires dans line famille. Cependant , dit - il , qu'un pere laisse en heritage i son Ills une illustration acquise par de grands services rcndus a sa pa trie , cela pourrait encore etre utile. Unpere verlueuxaura pu donner d'ex- cellentes le<;ons; son cxuniple aura pu profiter i son fils, et pourtanl Ton voit que cela n'arrive pas tons les jours; mais Ic petit-CIs est rare- ment contctnporain de son grandpere; et, quand cela arrive, les leoons. et I'exemple de celui-ci ne s'impriment que faiblement dans I'esprit de I'enfant, et I'impression devient presque nulle , a mcsure que les generations s'cloignent I'une de I'autre. La quatrieme esptcc de no- blesse est telle des Chinois , dont parle madame de Stael. L'auteur n'estpas grand admirateur dcs institutions chinoises, mais il accucille le bon sens partout ou il le trouve, et il avoue que la noblesse chi- noisc semblc a ses yeux etre la plus raisonnable et en meme tems la plus honorable. Illustrer un homme vertueux , et donner en mOme tems la meme illustration aux auteurs de ses jours , i qui il doit or- dinairenient I'exemple et les lemons qui lui ont servi de guide , c'est honorer une vertu qui a deja porte d'excellens fruits a leur maturite ; mais anoblir avec le pere le Cls encore enfant , c'est recompenser une vertu qui n'est encore qu'en germe, et qui se developpera peut- £tre un jour avec des fruits tres -amers. S'il faut absolument que la Norvege ait une noblesse , que le peuple adopte done celle de la Chine, du moins n'aura-t-il jamais a rougir de ses motifs.

II parait neanmoins que le roi insiste sur la creation d'une nou - velle noblesse. Nous nc counaissons pas les raisons qui engagent S. M. a ditruire un article fondamental qu'il connaissait lorsqu'il accepta la constitution norvegienne et qu'il prCta serment de la maintenir. Ce que nous savons avec certitude, c'est que Tabolitionde I'anciennc noblesse, cettc mesure si hcureuse pour la Norvege dans ses conse- quences nalurelles , n'a pu ruiner aucune famille. II n'existait dan» tout le royaume que deux conil'js , dont I'un appartient au joi, ct una

LIVIVES ETRANGERS. lAl

eeule baronnie. Ajoutons a cela douzc ou qulnze petites terres privile- giees, et dont le plus important des privileges consiste dans I'eseoip- tion partieilc de la dime. L'abolition d'une telle noblesse ne peut nullemement inquieter les puissances voisines; d'ailleurs, a cet egard, la Norvege a pour garantie les dilTerentes proclamations du roi, oil il est dit qu'un etat, quclque petit qu'il soit, doit chercher a maintenir son indt-pendancc en ne recevant jamais d'ordres de la part de ses voisins.

Le tems nous apprendra le rcsultat d'une lutte qui cause beaucoup de fermentation tn Norvege. Nous observerons seulement que l'abo- lition de tons les privileges hereditaires est un des principes les plus fondamentaux de la constitution , et que I'art. 112, qui prevoit la possibilite d'une revision, pour y faire des changemens exig^s par des circonstances impericuses et imprevues, ordonne neanmoins expres- sement que ces changemens ne pourront jamais etre contraires aux principes fondamentaux , el quails ne dei/ront avoir pour objet que des modijlcaiions dans quelques dispositions particulieres qui n^al- terent point I'esprit de la constitution,

DANEMARCK.

s4- Diclionnaire des auteurs danois el norvigiens , tant mort* que uiuans. Seconde el dernierepartie in-^". Copenhague , 1820. Par MM. NyERi'p et Kbafft (et non pas Hask, comme nous avons dit, par erreur, en annon^ant la premiere partie de cet ouvrage. T'oyez , ci-dessus, T. I, pag. 56i.)

Cet ouvrage est maintenant oomplet ; il y manque seulement un supplement qui contiendra les erreurs et les omissions echappees aux redacteurs. Dansnotre annonce dela premiere partie, nous avons remarque que les etrangers qui ont ecrit en Danemarck ou en Norvege y sont mentionnes avec soin, mais que les redacteurs n'y ont pas admis les ouvrages publics en pays etranger par des Danois ou des Nor- vegicns. Quoique cette marclie soit conformc au plan de I'ouvrage , ainsi qu'il a ete explique par M. Nycrup , dans sa preface , nous avons neanmoins remarque qu'il y a ete fait des exceptions qu'onnesaitcom- ment expliquer. G'est ainsi que nous avons trouve plusieurs etrangers, dont les noms sont suivis dela nomenclature de beaucoup d'ouvrages, imprimes hors des etats du roi de Danemarck. Nous citcrons un seul exemple, prisauhasard. II y avail ^Copenhague, sous leregnedeFi 6-

1A2 LIVRES ETRANGERS.

dcric III, "11 envoyO do la cour d'Espagnc , nommi' /c comic Rehul- ledo. On troiive, sous son noni , un seul ouvragc imprimc en Dane- niarck, en i655, ctsixaulres publies a Anvcrset6Cologne.il nous est (igalenient impossible d'expliquer par quels motifs les ouvrages dc M. Malle-Brun , publies i Paris, ont tie cxclus de cc dictionnaire, tandis qu'on y trouve la liste complete de toutes les brochures dc M. Brun-Neergaard. Ces observations n'cmpCchent pas que Ic dic- tionnaire que nous annon^ons ne soit un ouvrage trts-important, et qu'en le publiant, les rtdacteurs n'aient rendu un veritable service aux savans dc leurpatric.

25. Catalogus lidroruTTi samscrltanorum, quosbibliolhecce uni- versitatis Hafniensis vel dedit , rel paravit Nathanael TFallich , doctor medicina' et philosophia' , ordinis Danehrogici eques , horti botanici Calcullensis in India prafeclus. Scripsil EbasmisNyebup , libliothecariusunit-'ersitatis. Ilafniae , 1821. 54 pag. in-S», avec une gravure.

II a eti quelquefois question, dans notre Revue, de M.Wallich, ct notamment T. VIII , pag. 4ii , oil nous avons dit que ce jeune et savant Israelite , employe i des conditions honorables et bril- lantes , comme dirccteur du jardin botanique de Calcutta, avait en- voye i la bibliolbeque de I'universite de Copenhague une riche collection d'ouvrages en langue samscrite , dont une partie achet^e a scs propres frais , et le reste dft i la bienveillance dont I'hono- rent les deux societes litt6raires asiatiques de Calcutta et du fort William. Le celebre professeur Nyerup , appreciateur eclairede ces richesses litteraires , croit actuellement que la bibliolbeque de I'uni- versite de Copenhague, dont il est Ic conservateur, ne le cede en rien a aucune des bibliotheques europeennes pourle nombreetTim- portancc des livres imprimes ct manuscrits en langue samscrite. Le catalogue que nous annon^ons est divise en cinq chapitres , dont voici I'extrait : Chap. i". Grammaires, vocabulaires et diction- naires ; i4 ouvrages en i5 volumes. Chap. 2. Poesie indienne ; 21 ou- vrages en 3 1 volumes. Chap. 5. Theologie et philosophie des Hin- dous; 10 ouvrages en 12 volumes. Chap. \. Jurisprudence ; 7 ou- vrages en 9 volumes. Chap. 5. Manuscrits i5, contenant des poesies et plusieurs trait^s concernant I'histoire , la grammaire , "la lexico- graphic, la theologie, la medecine, I'astrononiie et I'astrologie. M. Kyei'up a accompagne chacun des litres de ces diffirens ou-

LIVRES ETRANGERS. 1A3

vrages de qiielqnes notes et de reflexions , qui interesseront sans doiite ceiix qui s'orciipcnt de la langue samsciite. IlEiBERr..

ALLEMAGNE.

itj.—Sii'Urigail ein bej'trag zu den Geschichten ron Lil/iauen , Russland , Pohlen und Pz-tussen. Switrigail, pour servir a I'hls- toire de Litluiauic, de Russic, de Pologne et de Prusse ; par /iuguste

DE KOTZEBUE. Leipsig , 182O.

Voici le fond du porte-feuille de M. de Kotzebue ; ce sent des do- cumcns sur I'liistoire du prince Switrigail, contemporain de Jagellon. Leseveneniens dont il est ici question, quoiquepeuimportanspource que I'esjjrit huniain atlend de luinieres de I'etude du passe, se rat- tachent ni^anmoins aux destinees des grands etats qui, dansle nerd, occupaient la scene du monde ; ils jettent un nouveau jour sur des caractferes jusqu'ici peu connus ou meme meconnus. En i8i3 , M. de Kotzebue vit a Kcenisberg le savant Ilennig; celui-ci etait alors occupe a depouiller de vieilles chartes ; des qu'il rencontrait quelque chose de relatif a Switrigail, il le mettait de cute, dans la vue d'ecrire un traite particulier. Peut-Ctre Hennig disait-il de rhistoire de Swi- trigail cc que Tacite a dit de celle de Nerva : uberiorem securioremque materiam seneciuti reposui ; maisla mort enleva M. Hennig, etM.de Kotzebue se prit pour Tacite et fit son livre. On se rappelle qu'au- trefois il avail lui-mcme declare, dansle Correspondant de Ham- bourg , que desormais il allait s'asseoir aii premier rang des histo- riens. L'indulgence de M. de Milller , qui voulut bien joindre com- plaisamruent son temoignagne a cette prise de possession, n'a pas peu contribue i persuader k quelques bonnes gens qu'effectivement Tacite , Salluste et Tite-Live 6taient ressuscites dans la personne de M. de Kotzebue. Cependant VHistoire ancienne de la Prusse court grand risque d'eprouver, en peu d'annees et en depit de I'im- primerie , le sort que I'injure du tems et le bouleversement des em- pires ont fait subir a quelques livres des Annalcs et des Ilistoires.

On deniande si les documcns de M. do Kotzebue seront utiles , et Ton repond assez gineralement qu'ils scraient de nature a I'etre, si leur compilateur avait fait, soit un livre assez interessanl pour etre hi, soit un recueil assez savant pour que Ton put y puiser; mais on s'exposerait,en le faisant,a d'elrangesmeprises. M. de Kotzebuelit si inexacVement que, dans une seule bulk du pape Honorius III , il a

UA LIVRES ETRANGERS.

trouv6 le raoyen de placer qiiarante-trois fautcs. Souvent , pour s'epar- giier la peine de dechiin-er, il a invente , souvent il a mis des conjec- tures la oil il pouvait donner du certain. M. dc Kotzebuc en voulait d'ailleurs a I'ordre teutonique i tel point, qu'il ne se f'aisait aucun scrupule des alterations dans les textes, pourvu qu'il le represcnt4t comnie avide de sang et de ricUesses , pourvu qu'il lui reprocliflt des crimes iinaginaires. Qu'on juge apres cela s'il aura rapporte fidele- mcnt tout ce qui pouvait constaler les vertus de cet ordre ! Meme en ce qui concerne son heros Switrigail, M. de Kotzebue n'a pas fait de Lien grandes recherches ; on lui reproche gen6ralement de ne pas s'6tre servi des correspondances de Witliold de Lithuanie et de Sigismond , roi des Rouiains. Nous ne nous serions pas arrfetes i celte production, qui semble par son titre meme condamnee h I'obs- curite , si elle n'etait de Kotzebue. Pn. Goleery.

27. De Apolline patricio et Minerra primigenia Alheniensium , scribebaiBoEBn philosophice doclor. Ileidelbergce 1820, in-^".

Ce n'est pas la premiere fois que nous avons occasion de nommer M. Boehr; il a fait, pour les Meletemala de M. Creutzer, un traits sur I'Artaxerce de Plutarque ; et , quoique ce traite se distinguiit par une sagacite et une erudition peu communes , nous avons ete obliges de nous en tenir a une simple indication , notrerecueilnecomportant pas un examen purement philologlque. Aujourd'hui , M. Boehr 6claircit un point de mythologle qui se lie essentiellement k I'his- toire d'Athfenes : cet ouvrage est done d'un int6ret plus general , et nous devons a nos lecteurs de leiirfairc connaitre cetteinginieuseet savante dissertation.

L'auteur part d'un passage de Plutarque dans la vie d'Alcibiade , ApoUon y re9oit le titre de Tictr^moo-, et Minerve celui d'^Afyj^yirtr. M. Boehr explique la valeur de ces 6pithetes ; il commence par Mi- nerve , et se demande si la qualification qui lui est donnee convient i plusieurs divinites , ou si elle n'est attribuee qu'i elle seule f C'est dans I'histoire que M. Boehr trouve la solution. Les anciens, au moment de quitter la patrie pour fonder une colonic, emmenaient avec eux une des divinites tutelaires de la metropole , et lui conCaient le soin de veiller a la prosperite du nouvel ctablissement. Comme cette divinity ne se bornait point a uue bienveillance ineflicace ; comme elle prenait une part active ^ la fondation de la cite , on rhonorait aussi sous d'autres noms ; en sorte que le meme dieu est

LIVRES i;TRA^'GERS. Hi

jouvent appel6 KxinV, O'fXfr^y ct Apx'^y^'^""'- Ainsi que I'attesto HesycUius , chaque tribu d'Athenes avail son heros k^xtytTnir. M. Boehr prouve , par de nombreux exemples , ce qu'il a si biea etabli par le raisonnement; il nous montre Apollon , Diane, Escu- lape , Hercule revetus de ces memes litres. Cela pose, le polnl es- senliel de sa disserlalion elail d'expliquer pourquoi Minerve esl ap- pelee h-oxnyiriT par les Atheniens; car,.dans le passage de Plularque , c'est Alcibiade quiparle. IciM. Boebremel une opinion quiappartient h. de grands savans , entre autres i M. Creulzer , mais qui Irouve aussi de nombreux contradicleurs. Selonlui, les Atheniens sonl une colonic egjptienne qui , partie de Sais , transplanla le culte d'Isis sur le sol dc la Grece. Or, celte Isis est Minerve elle-mcme nomine non- nihil immutato , dit M. Bocbr ; puis il cite M. Creulzer, mais la chose ralait la peine de transcrire le passage entier dans lequel ce savant niylhologuc etablit I'opinion que le culte egyptien a ete ap- porte dans I'Attique par des colons : voici une des preuves qu'il en donne. Les Egypliens appelaient celte Isis iVe^Aa ; ce nom , en I'e- crivant de la droile a la gauche, donne Allien : il n'y a done point de difference dans le nom , mais seulement dana la maniere de le lire. Au surplus, M. Creutzer declare qu'il imporle peu que celte origine soil vraie , ou que le nom grec soil une traduction du nom egyptien ; puis , il refute les diverses etymologies donnees par les philosophes el par les grammairiens. Mais, revenons a M. Bucbr, qui passe main- tenant i I'Apollon ■TrccTfocoj-. 11 se sert des observations da MM. Ast et Wyttenbach pour definir ce mot : puis il demontre que pliisieurs autres dieux ontrerula meme qualification. « L'orgueil des Atheniens . ajoute-t-il , voulail qu' Apollon eflt cpouse la Clle d'Erechtee , et qu'Ion fiit ne de celte union. Ce peuple pretendait €tre indigene , et se donnait Apollon pour auteur 7.a.T.Si<r, M. Brehr reconnait encore ici le culte de Sais : Apollon y etaitrever6 sousle nom dellorus, ainsi que I'afBrme Herodote , et les Egypliens le croyaient Ills de Vulcain. L'auteur se sert en cet endroit d'un pas- sage de Ciceron qui , dans son traite de ISatura Deorum , dit , en parlantdes nombreux soleils des theologiens : Terlius Vulcano Nili filio , etc. (Voyez dans les Memoires de F Acadeinie une disscrlatioa de M. de la Barre) Dans la suite, Vulcain cessa d'etre le marl de Minerve; et , comme il fallait qu'elle fut viergs , Horus ou Apollon ne fut p.'is son fils. L'ancienne tradition egyptienne se conserva dans le»

Tomb xi. . 10

JA(J I.IVRES KTRANGEKS'.

inystcres , landis que culte de la Gr6ce priivalul cliez le peupio atheoien, al'tipoque ou les Doriens cnvaliirent unegrande partie des pays voisins ; dc telle sorte qu'Apolion ct Diane , les principalps divlnit^s deces Doriens, se confondirent pen a peu avec les notions qu'on avait de Minerve et de Hoius. M. Bochr ctablit que Jupiter est aussi pour leg Atheniens line divinity importee, et que , si quelques tragiqucs I'ont appele -ffaTpSv , on ne tui a jamais donn^ ce litre dans les rites publics. On exigeait surtout des candidats aux haute* magistratures , qu'ils fussent n^s de parens atheniens , et que par consequent ilsrevt'^rassent ApoUon r^rfSot , et Jupiter E"^)c»(09-,

M. Bcchr a toujours soin d'appuyer ses conjectures du temoignage des auteurs anciens , il I'aut liii en savoir doublement gre ; car, s'il ue I'avait point I'ait , il aurait pu nous induire en crreur d'autant plu:> i'acileraent que la purcte de son style latin nous aurait permis d'ou- blier que nous lisions un moderne. Pii. Goi.bkby,

iS. /f'as ist der Zeilgeixt? Qu'esl-oe que I'csprit du terns? 1820, sans indication du lieu de I'inipression ; brochure in-S" de 3o pages.

Nous ne Savons pas precisement dans quel endroit de I'Ailemagne la presse a enl'ante ce chef-d'oeuvre ; I'auteur, I'iniprimeur et leurs complices en obscurantisme out jug6 i propos de se condamner eux- mfimes a leurs cheres tenebres. II ne tenait qu'h eux de se faire une ctlebrite a la maniere d'Erostrate. Get ouvrage n'est, k proprement parler, qu'urte rfeimpression du discours d'Eilert sur I'esprit du terns, ou bien , si Ton veut , c'est un extrait de la f'oudroyante Concordia de M. deSchlegel. Mais ce qui se concjoit i peine, c'est que J'on ait ose adresser un pareil ouvrage aux souverains assembles pour fixer le sort des nations. L'auteur prfiche une croisade centre les sciences; il appelle , pour les detruire, I'assistance des maitres de I'Europe; et , comme il deteste surtout la logique, la grammaire et la critique , il entre en campagne tout seul et sans attendre le con- tingent de personne. La grammaire a ete I'objet dc ses premieres hostilitus ; il I'a blessee par un grand nombre de I'autes de langue et d'orthographe ; mais l'auteur n'a pas longtems joui de sa victoire : la critique a venge la grammaire, et les souverains ne se sont pas soucies de I'alliance qui leur etait offerte. Ph. GolbSby.

20. G riechenlands If^iedergeburt . etc. La Renaissance de la Grcce, programme pour la f#te de la resurrection ; par NY. T. Krig,

LIVRES ETRANGERS. 1A7

professeur tie philosophie. a*. Edition. Leipsick , iSai. Brockhaus.

00. Die Sac he der Griechen die Sache JEuropax ; la cause de» Grecs est la cause de I'Europe. Leipsick , 1821. Vogel.

Ces deux brochures, publiees dans un paysoiilalitteraturegrecqus est cultivee avec soin , ef oil, par consequent , on ne croit pouvoir mieux s'acquitter de ce que Ton doit aux anciens Grecs qu'en s'in- ttressant vivement au sort de leurs descendans ; ces deux brochures, dis-je, ont pour but d'arracher I'Europe a sa letha>-gie , et de I'ex- citer a seconder les malheureux Grecs un peu plus que par des voeux steriles. En Allemagne , comme en Russie , la jeuncsse s'est montree disposee , malgre I'apathie de la tjiplomatie europeenne , k embrasser avec ardcur la cause de la civilisation contrc celle de la barbaric ; et si une espece de cordon de neutralite ne les repous- sait impitoyablement du theatre oil s'est engagee la lutte , peut-etre des milliers d'etudians combattraient deja pour cette cause si sainte et si juste. II n'est pas necessaire que I'Europe envoie des troupes an secours des Grecs; tqut ce que ceux-ci demandent, c'est de n'6tre pas entraves dans leur insurrection, comme ils le sent actuellement par deux puissances voisines; ils seront asser forts pour secouer le joug ottoman , si la plus fausse politique ne l,eur oppose pas d'obs- tacles au dehors , comme cela ai-rive dans ce moment.

Ce n'est pas sans etonnement qu'on a vu , en France et ailleurs, un parti qui se dit ami de la religion , embrasser la cause des Turcs et flctrir I'insurrection des Grecs du nom de rebellion : cette ma- niere de voir prouve une grande depravation des moeurs politiques, ou d'etranges prejuges. Dans un pays oii il existe un contrat quel- conque entre le gouvernement et le peuple ; oii celui-ci a consent! k fitre gouverne par telle dynastie , d'apres telles Iqis ; oii le gouver- nement, quoique soHvent mal inspire oa mal cooseille, ne peut pourtant, en definitive, avoir d'autre but que le bien-fetre de la nation; oil enfin des mouvemens violens ne peuvent produire qua des de- sordres, la rebellion peut fetre regardee comR^e un crjiHe; et les defenseurs de I'ordre social et monarchique sqnt coQsequens lors- qu'ils se declarent contre les rebelles. Mais quel rapport y a-t-il entre ce qu'ils fletrissent comme rebellion , et I'insurrection des Grecs J Jamais il n'a existe de traite ni de contrat entre les drscen- dans du peuple du Bas-Empire et les Tartares qui sont venus s'y elablir. Bien plus, les Turcs n'ont jamais considere ni traite let

10 *

JA5 LIVllES lilTRANGERS.

Grecs comme leurs sujets, car les sujets ont des droits ; on n'en accordii aucun aux Grecs ; done ils ne peuvent avoir des devoirs. Le Turc n'a jamais fait la moindre demarche pour le bien-6tre des Grecs ; il est reste dans un ctat permanent d'hostilil6 contrc les vaincus, et il a toujours agi avec eux comme agissent des hordes tartares en pays ennemi ; il a pris leurs femmes , leurs lilies , leurs Cls, quand ils lui plaisaient ; il a confisque leurs biens, massacre des families, des peuplades entieres, insulte Icur religion , couvert d'ignominie leur clerge ; il n'a jamais cach6 son mepris pour les Grecs ; il a declare qu'ils n'etaient pas plus pour lui que des chiens. Sont-ce li les rapports entre un souverain et des sujets , et ne sont-ce pas plutiit ceux des marchands d'esclaves et de I'Africain qu'il vient d'enlever? Cinquante annees d'esclavage peuvent -ils 6ter i I'Africain le droit d'echapper 5 son maitre ? Aussi , des districts considerables n'ont pas meme reconnu les Turcs pour leurs conque- rans. Les Malnottes , dans le Pcloponese, et les Sphakiotes , en Crete, ont toujours ete en guerre contre ces barbares, et ne les ont jamais laisse entrer dans leur pays.

Si les autres Grecs se sont soumis pendant quelques siecles , cet etat de choses ne pent constituer aucun droit , pas meme celui de la prescription en faveur des Turcs ; ccux-ci le senlent si bien qu'ils n'en riclament aucun, et qu'ils ne se sont jamais reposes que sur la force. 11 ne peut done etre question , dit M. Krug , de la domination legilime des Turcs en Europe ; ils n'y sont que des usurpateurs. Ils sont restes en etat de guerre permanente contre les anciens posses- seurs de I'empire d'Occident ; ceux-cl ne font que recommencer les hostilites apres un long repos, pendant lequel I'ennemi leur a fait tout le mal qu'il a pu. Le sol de la Grcce leur appartient; aucune autre puissance n'y a droit; si les armecs turques I'occupent, c'est aux Grecs , et aux Grecs seuls , qu'il appartient d'affranchir leur territoire , et de se donner ensuite le gouvernement qu'ils jugent le plus conforme k leurs intercts, ou a le diviser en plusicurs etats , eoTnme ils voudront. lis ne demandcnt qu'une scule chose aux puis- sances d'Europe , c'est de restcr entierement neutres et impartiales au milieu de cette grande lutte ; c'est la le plus grand service qu'elles puissent rendre k la cause de la civilisation et de la justice contre celle de la barbaric, de I'oppression et de la peste.

a Faudra-t-il, dit la seconde brochure , qu'on attribue 4 M. Tschir-

LIVRES liTRANGERS. 143

iier, faudra-t-il que les puissances d'Europe envoient leurs armies pour faire la guerre aux Turcs ? Non , car il se pourrait que cos exp6" ditions Gssent plus de mal que de bien aux Grecs ; et que, tandis qu'une puissance enverrait une armee auxiliaire, une autre, soup- 9onnant des projets de conqu6te , prit le parti de se ranger du cOte oppos6. Les Grecs ne combattent que pour leur cause; il s'agit de leur independance , il faut qu'ils fassent les plus grands sacrifices pour atteindre leur but : ils ne peuvent former qu'un vocu, c'est que les puissances d'Europe n'empechent pas qu'on leur envoie des lecours pticuniaires et des amies , et qu'elles ne s'opposent en au- cune nianiere i ce que les jeunes gens et les hommes qui ont envie de combattre dans leurs rangs , puissent les rejoindre. L'id6e d'une croisade , pour la delivrance de la Grece , est faite pour enflammer de nobles coeurs : que les cabinets ne fassent au moins rien pour reprimer cet elan genereux. » A ces considerations, la brochure de M. Tschirner en ajoute une autre qui n'est pas sans importance. «L'Amerique se detache de plus en plus de I'Europe , et tot ou tard cette partie du monde , jeune , vigoureuse et libre , entrera en lice centre la caducite des etats europeens : il est bon de se preparer k cetle lutte. Or, pour cela , il ne faut pas qu'un peupla- barbare paralyse une des plus belles contrees de I'Europe ; il faut que I'ancien empire d'Orient soil uni de religion , de sentimens , d'jdees, au reste de cette partie du monde. » Depping.

N. B. La cause des Grecs excite en AUemagne un si vif int^ret , qu'Independamment des brochures annoncees ci-dessus, il enaparu plusieurs autres ; M. Sickler annonce un ouvrage p^riodique sur Vhis- toire des Grecs, depuis V invasion des Turcs jusqu'd la guerre de deli- vrance, en 1821. Nous invitons nos lecteurs 4 consulter, dans le Journal des debals du 1 " juillet, une lettre d'un de nos coHaborateurs, iur les motifs puissans de religion , d'honneur, de politique, qui im- posent aux gouverneurs europeens le devoir de favoriser la cause des Grecs , qui est celle de la civilisation et de I'humanite.

ii.—Neue Berliner Monatschrifl fur Philosuphie Literatur und Kunst; zweitcs Hefi.— ^OMVeau recueil periodique sur la philosophie, la litterature et les arts. 2' cahicr. Berlin, 1S21.

Ce recueil est ecrit avec chaleur; on y declare une guerre impi- loyable a tous ceux qui veulent faire prendre i I'esprit humain une marche retrograde. D'apres cela , il ne faut pas s'etonner de trouver, au commencement de ce cahier, une attaque violente contrs

150 LIVRES ETRANGER5.

M. de Schlegel. « .>ous apprenoiis, disent les auteius , (jue IM. Sclilegel fait fondre des caractferes pour une imprimeriesamscrite; les fraisim- menscs de celte enlreprise n'arrfitent point nn gouvememenl prfit ^ tous les sacrifices, quand il s'agit d'encourager les sciences; mais il paraitquc, pour cette fois, les cltphans dc M. Schlegel seront nourris de pieces d'or, car chaque lettre cofltera quatre francs ; et quand on on aura depens6 plusieurs niilliers d'icus, on n'obtiendra que la facnlte de glaner dans le doniaine de la litterature indienne.n Quoi qu'il en soil de ce jugement , peut-Ctre un peu acerbe , I'article est fort spirituci; et comnie on remet sous les yeui du public tous les ptchiis philosopliiqucs de IMM. de Schlegel , il a Un grand nombre de Iccteurs ; mais ccla ne prouve rien contre leur qualite d'orientalistes.

Le second article, que nous rencontrons dans ce cahier, est un discours dc M. F. Carove, docteur en philosopbie ; il est intitule : He I'etat actuel de la philosophie , el de I' ilnportance dont elle est pour le ferns present. L'auteur s'appuie sur les principes philoso- phiques du celibre professeur Hegel, qu'il developpe avec clarte ; ses definitions sent satisfaisantes ; il offre beaucoup d'inter6t dans sa marche historique. Nous regrettons de ne pouvoir le suivre dans I'application qu'il fait de I'etude de la philosophic aux dilTerens etats de la societe actuelle. II y a du mouvement dans le style de M. Ga- rove , et , de plus , il est nourri de choses solides.

On trouve ensuite un compte rendu de I'exposition des objcts d'art a Berlin , ct plusieurs pieces de vers assez piquantes. Quoique ce journal ait commence avec I'annee , il obtient deja un grand suc- ces, ct tout lui presage unc existence brillante. Ph. Golb^uy.

.>0. Jahrbiicher der Lilerulur. Annales de la litterature, publiees parMatthieu de Collin. Vienne, iSjo. Ceroid, la"" volume, compre- nant les mois d'octobrc , norembre , decenibre 1820 , 3o8 pages in-8".

Nous avons parle plusieurs fois de la Revue litleraire, qui parait .i Leipsick, sous le titre d'llermes, ou Jnnales de la litterature , et qui est imite des Quarter^ Reviews , ou Revues trimestrielles Anglais. Les Annales de la litterature , qui se publient k Vienne depuis trois ans, sont faites sur les menies modeles. Ces deux ou- vrages, paraissent k la fin de chaque trimestre , et contiennent des arliclcii raisonnis et fort etendus sur des ouvrages nouveaux , tant de la litterature allemande que de la lilterature ttrangcre. Le goOt dc 1 imitation sc fait rcmarqucr jusque dans I'csprjt qui anime les rcdac-

LIVKES ETRA>GEiVS. 151

teur.i des deux recueils allemands. Ainsi , tandis que celui de Leip- lickprofesse desprincipes semblables a ceux de L' Edimburgh Refien', \ts Annates litieraires de Fienne ont pris pour modelele Quarterly Review de Londres; ou, en d'autres termes, tandis que le premier suit les principes de la liberie du journal d'Edimbourg, le second re- cueil est evideminent 6crit sous rinfluence du ministere, comme le Quarterly Review.QiC-ptnd-ini, la diiTerence des pays se fait sentiraussi dans ces reeueils litteraires; ce que la Rei^ue d'Edimbourg pent ex- prinier francheinent, \' Hermes de Leipsick n'ose le dire qu'a mots con- verts; ct lorsque le journal ministeriel de Londres se borne ^ defendre le pouvoir constitutionnel , les litterateurs de Vienne se rcndent les avocats du pouvoir absolu , et rtipetent servilement ce qu'ils ont lu dans VObsen-'ateur autric/iien. Si, en secret, ils ont des opiniont^ plus raisonnables, ils les cachent si bien qu'il n'en parait pas une trace. Ils sent a un demisiede en arriere du reste de I'Europe poui les idees civiles et religieuses. Cependant , ils ont la pretention de donner des lecons; mais il I'aut voir dans quel genre : ils insinuent tres-serieusement que, pour vivre heureux , il taut abandonner les idees constitutionnelles. lis conseillent aux peintres qui veulcnt s'ouvrir une nouvelle carriere , de choisir leurs sujets dans les legendes. Voila pour la politique et les luuiieres des redacteurs de ce journal. C'est nne partie a laquelle ils feraient bien de renoncer entierement , tant que des idees saines n'auront pas remplace chez eux ces prejuges gothiques qui oflusquent leur esprit. La partie litteraire des An- jiales de Vienne est beureusenient meilleure, et on y trouve mfime de tres-bons articles, dus a la plume des premiers ecrivains autri- cliieus, auxquels se sont joints quelques autres savans allemands. Le 12' cahier, que uous avous sous les yeux , contient entre autres un article interessant sur les antiquites gernianiques des bords du Rhin, comparees il celles de la Silesie; un autre, sur un recueil de chanson* populaires de I'Autriche, public par Fiska et Scboltky; entin, un uie- moire savant surl'histoire des Nibclungues, et I'esquisse d'un voyage en Dalmatic, avec un grand nombre d'inscriptious latines qui sent dispersees dans cette ancienne province romaine , oil Diocletieii avait un palais. Sous le rapport des articles savans , ce journal est uu des premiers de I'AIlemague. 11 est aussi mieux iiuprime que la pliipart des journaux allemands. Enlui , les Innales litteraires de I' tenne out asse/. de litres pour faire oublier la faiblesse de Iciirs piiiuipes [><>lili<|rics it riligieux. D-c.

152 LITRES ETHANGEPtS.

N. B. Ce journal litt6ralre et critique, quiavait aulcricurement joui d'unc sorte de libertci de la prcssc , a etc depuis soumis a la censure ordinaire, cc qui a engagt^ M. Collin, inslituleur du due de Rcichs- tadt , a ne plus concourir i la redaction de ces annates. Un autre re- dacteur lui a succ6de, mais le journal sera termine au commencement de I'annee courante. 11 sera remplace par nn journal politique ,dont la redaction doit etre confiue a M. Gentr , qui jouira desormais des in^mes avantages que le gouvernement a jusqu'ici accordes aux ^n- nales de la litierature. Lcs coUaborateurs les plus connus de ce journal sont MM. Schlegel, Pilat, Wernes , Haller, (de Berne , ac- tuellement i Paris) , et Adam MUller. On peut facilcmcnt augurer dans quel esprit il sera redige. B.

SUISSE.

5i. Annales de legislation et de jurisprudence ^ tome 11, 1" livraison. Geneve , 1821, JIanget et Cherbuliez , imprimeurs- libraires. In-S"

Nous avons deja fait connaitrc ce recueil i nos lecteurs. L'impor- tance des matitres contenues dans le premier cahier du deuxieme Tolume , nous parait meriter une mention particuliere. L'article le plus remarquable de ce cahier traite de I'institution du jury, il est de M. Rossi. On salt que le conseil-d'etat du canton de Vaud mit, il y a pen de tems , au concours , la question de savoir si le jury convenait a ce canton. On adjugea le prix i un memoire dans lequel I'auteur ne decidait point la negative , malgre le merite d'un autre xn^moire fait dans un sens oppose par M. de la Harpe, I'un des tnagistrats les plus instruits du paj's de Vaud. M. Rossi a cmprunte i I'ouvrage de M. de la Harpe plusieurs faits qui prouvent jusqu'a leiidence que la procedure criniinelU sera toujours imparfaite et meme barbare , lorsqu'elle n'aura pas lieu au moyen des jures choisis dans les dilTerentes classes de la societe. Les observations de M. Rossi sont extrCmement justes, et nous regrettons de ne pouvoir en citer plusieurs passages. On remarquera aussi un autre article de M. Mevmeb, dans lequel il donne des extraits ^le I'iraportant ouvrage de M. de Savigny, intitule : Ilisloiri: du droit remain ( Geschichte des rurnischen Rcchts ini Mitlelalter). Plusieurs des opinions de cet auteur nons ont paru snsceptlbles d'etre contest<5es, et nous aurons occasion de les examiner dans un conipte rendu de I'histoire du droit remain , par M. Berriat Saint-Prix.

LITRES Strangers. iss

Le cahier est termine par ua prospectus qui annonce une nou- relle edition criiico-exegetique du Corpus Juris civilis , que vont publier MM. Schroeder, Clossius et Tafel, de Tubingue. Ces savane demandent des renseignemens sur les meilleures t'ditionset lespria- cipaux matiuscrits du Corpus. Nous ne doutons pas que ceux qui auront des documens relatifs aux ouvrages des jurisconsultes remains, ne s'empressent de les leur envoyer , et de concourir ainsi a une en- treprise si utile pour la science. On leur fera parvenir les decouvertes que Ton pourra faire, par la voie des libraires, soil i Tubingue, soit a M. Reyma, libraire a Berlin. Cette nouvelle edition du depot des lois romaines sera d'autant plus avantageuse qu'il en existe fort pea de correctes , et d'un prix assez modique pour que les etudians puissent se les procurer. L'edition donnee par Denis-Godefroy, en i5S3, est fort rare, ainsi que celle des Elzevirs, de 1664, et celle de Gebaiier, publifie a Gottingueen 1796 et 1797. La plus repandueet la plus commode est l'edition connue sous le nom A' Academicum. ; mais on sait qu'elle est tres-mal imprimee. II etait done a desirer que des hommes laborieux entreprissent I'immense travail de publier un nouveau Corpus Juris civilis, Lorsqu'on pense au grand nombre de manuscrits qui existent dans les diverses bibliotheques de I'Eu- rope , et dont il faudra collationner plusieurs , on est effraye de la tSche que MM. Schroeder, Clossius et Tafel se sont imposee. La Bibliotheque royale de Paris possede vingt-quatre manuscrits du Digeste , dont presque tons apparliennent au quatorzieme siecle. Trois de ces manuscrits ccntiennent la glose inedite d'Azou. J'ai compose, selon le desir des nouveaux editeurs, le Peoemium des Institutes, en me servant d'une edition ordinaire, et du manuscrit le plus ancien de la Bibliotheque royale. (11 est du onzieme si6cle et se trouve sous le IVMCDXXI du catalogue imprime.) Je n'ai remarque aucune difference dans le texte ; mais il commence a ces mots : Iinperatoriam majeslatem, etc., et ne contient pas le pream- bule que Ton remarque i la tete de toutes les editions imprimees : Imperator Ccesar, Flavius , Jdstinianis, etc. Le seul travail d'exa- miner les textes contenus dans les manuscrits de la Bibliotheque rcyale demanderait beaucoup de tenis , et cependant il est impos- sible qu'il n'y ait pas de nombreuses variantes , qu'il serait indis- pensable de connaitre pour donner une bonne edition du Corpus Juris civilis. Alphonse Tailiandier, avocat.

5i. Expose des motifs de la loi sur la procedure civile pour U

ISA LIVKES ETRANGERS.

canton dt Genet^e; par M. Bellot , avocat, professeur hunoraiie de la faculte de droit, et membre du conseil repr6sentatif de Geneve. Gcnfeve , i8ai. Paschoud, libraire. In-S" de 236 pages.

Sonmise a la domination franrjaise, depuis 1798, Geneve avail i'e?u nos lois et nos institutions. Rendue a son ind6pendance, ellc voulut avoir une legislation qui lui IVit propre , niais elle eut la sa- gesse de ne pas nieconnaitre It-s avantages qu'elle pouvait retirer de la n6tre, et de ne pas les sacriCer au desir de faire disparaitre le» traces d'un joug etranger. Les codes franrais furent maintenus pro- visoirement ; on voulut en faire une nouvelle experience dans Ge- neve independante, afin de pouvoir, dans la legislation nouvelle, crt conserver tout ce qui paraitrait utile, C'est ainsi qu'on s'occupa d'une loi sur la procedure civile , dont M. Bellot fut charge de faire le rapport au conseil representatif , et dont il publie maintenant les motifs. Get ouvrage ne sera pas seulenient utile aux Genevois , en leur facilitant I'interprotation de la loi de leur pays ; il le sera en- core aux jurisconsultes et aux legislateurs i'rani^ais. Independam- nient des sages reflexions qui s'y trouvent, relativement i I'esprit dans lequel doivent efre concues les lois sur la procedure, M. Bellot s'est specialement attache 4 developper les motifs des changemens apportes par le conseil de Geneve a notre code. Une grande partie de ces innovations nous a paru heureuse , elles ont toutes pour but de degager radministration des formes trop compliquees peut-etre qui I'entra vent encore parmi nous, d'abregcr les delais , de dimi- nuer les frais de justice , et de rendre les procts moins embarrassans, moins longs, moins coftteux. Supirieur a toutes les lois qui I'onl precede , notre code de procedure presente encore des imperfec- tions qu'on a plusieurs fois signalees. Si jamais Ton s'occupe de les corriger, nous ne doutons pas qu'il n'y ait beaucoup a profiter dans I'exposition des motifs qui ont dirige les legislateurs de Geneve. M. Bellot n'a publie que la premiere partie dc son ouvrage; nous ne pouvons que donner des eloges a la justesse de ses observations , a la nettete de ses idees ct i laclarte avec laquellc il les exprime. On doit desirer, a Genfeve vl en France, qu'il acheve son utile enlre- prise. Din:< , auucat.

ITALIE.

35. Delle epizoozii; ■, etc. Des epizootics contagieuses el non contagieuses auxquelles sonl sujcts les aniuiau.v domesliqucs , prin-

LIVRES ETKANGERS. 1^5

tipalemcut ceux qui sont employes U I'agricultuie , dans I'etat de Venise et en Italic, par Trino Bottani. Venise, 1819. Picotti. 4 vol. in-8*.

Get ouvrage est partage en douze sections , dont le sujet ne semble pas toujours approprie k son but principal. On y traite de I'etat des animaux domestiques dansl'ex-republique de Venise et sous les gou- vernemens qui lui ont succede; du inagislrat sanitaire, des icoles veterinaires de Padoue et de Milan ; enfin , des epizooties en general et des riglemens donnes pour les prevenlr ou les arreter. Une section comprend la bibliographie des auteurs nationaux et etrangers qui se sont occupes des epizooties.

34.— iVwofo sistema diforlificazione , etc. Nouveau systeme de fortification, par ZJomenjco Chicchiatelli. Rome, 1819. Francesco Boulie.

7>5.—3Iemo(ia suUe strade e su ponti militari, etc.— Menioirc sur les ponts et cbaussees militaires. Naples, 1819. In-S".

o6. Saggio suirapporli, etc.— Essai sur les rapports que doivent avoir entre eux les moyens permanens de defense , la disposition to- pographique du terrain et les operations des armees ; par Slefano di RiVEBA. Naples, 1S20. In-S".

57. Memoriee letlere inedile, etc. Memoires et lettres inedites de Galilee , recueillis et commentes par le chevalier Giamhattisla Vekturi , etc. ; ouvrage destine a servir de supplement aux priiici- pales collections des ecrits de cet illustre philosophe, publics j usqu'ici ; seconde partie, etc. Mod6ne , 1821. Vincenzi et compagnie. ln-4°-

La premifere partie de ces savans memoires, que nous avons an- noncee ( ^^oj'ez ci-dessus , Tom. V, pag. iSg) , embrasse I'epoque qui a precede I'annee 1616; la seconde s'etend de cette epoque jusqu'i 1642 , annee de la mort de Galilee. Une partie de ses ma- nuscrits , cachee dans une fosse destinee ^ conserver le ble , fut ainsi derobie , dit M. Venturi, aux regards des inquisiteurs, par Viviani , digne 6leve et ami du vieux astronome. Apres la mort de I'abbc Panzanini , heritier de Viviani, arrivee en 1707, la fosse fut ouverte, et on vendit a vil prix les papiers que Ton y trouva. MM. Targioni et le senateur Nelli purent en recouvrer une portion. Le grand-due actuel de Toscane a cherche depuis k recueillir dans sa bibliotheque r^rticulifere tout ce qu'il a pu des ecrits de Galilee. M. Venturi a pu voiret cxtraire dans cette bibliotheque choisie tout ce qui lui man-

156 LivRES Strangers.

quait encore pour completer son travail , et tout ce qu'il vient do publier appartient en entier k Galilee lui-mCine. Voici I'index de» articles contenus dans le volume que nous annoncjons , selon leur ordre chronologique.— 1616 : Les meilleures pieces de I'apologic que Campanella, etant en prison, tcrivit a Naples pout Galilee; 1624, une Ruponse de Galilee i Francesco Ingoli pour le sysleme de Copernic; 1619 et 1626, Notices diverses sur les questions agitees entre Galilee et le P. Grassi sur les comctes; 1624 et i632, Corrcspondance epistolaire de Galilee avec Castelli , Gassendi , Baliani et autres ; 1602 et suivantes, Ecrivains qui combaltirent Ic Dialogue de Galilee sur le systeme de I'univers. M. Venturi rappelle plus de soixante ecrits publics pendant cette epoque pour et contra le systeme de Galilee. On y trouveaussiles documens les plus curieux relatifs au proces de ce pbilosopbe , et la traduction frani^aise de presque tout son proces original, faite i Paris et comrouniquee h r^dileur par M. Delambre. De li il resulte princlpalement que Ga- lilee, ayant tourn6 en ridicule Urbain VIII sous le nom deSimplicio, un des interloculeurs de son Dialogue, le pape, qui precedemment avait 6crit une lettre et fait meme des vers en bonneur de Galil6e, en fut tellement irritc qu'il le persecuta et le fit condamncr, acta bonteux dont I'inquisition ne pourra jamais se laver. 1634-39, Cor- rcspondance epistolaire avec des personnages tres-distingues. 1639-1641 , Corrcspondance de Galilee avec Liceli, etc. EnCn, I'lidi- teur n'oublie pas la persecution que la cour de Rome fit essuyer ti Galilee , meme apres sa mort. On tenta de declarer illegal sou testa- ment, de lui refuser la sepulture dans I'eglise, et Ton defendit de lui elever un monument; mais la posterity reconnaissantel'a amplement didommage des injustices de ses contemporains.

38. Storia della Spagna antica e moderna , etc.— L'histoire de rEspagne ancienne et moderne , avec des cartes geograpbiques et des tables gravees par le cbevalier Luigi Bossi, Milan, iSai , ty- pographic du commerce.

L'ouvrage que nous annon^ons est du mfime auteur qui continue l'histoire gentr.'jle , ancienne et moderne , de Tltalie. L'histoire de I'Espagne , dont le premier volume a deji paru , sera divis6e en huit livres , et forniera huit volumes.

Sg. Biografia cremonese ■, etc. Biographic de Cremoue ou dic- tionnaire bistorique des families et personnages illustrcs de Cr^mone,

LITRES Strangers, 157

<lepui$ les terns lea plus recules jusqu'a nos jours; par F'incenzo LincsTii , etc. Milan , 1820 , typographic du commerce ; volume II , in-4''.

Nous avons deja annonc6 le premier volume de cet ouvrage , que I'auteur continue a publier avec beaucoup de zelc et d'intelli- gence. On lui reproche des recherches trop minutieuses, surtout sous le rapport gcnealogique. De pareils details peuvent plaire aux ia- tiresses; mais ils sent fastidieux pour les autres. Plusieurs articles neanmoins sc font rcmarquer par les observations justes et patrio- tiques de i'auteur; tel est entre autres celui de Giovanni Baldesio. C'etait un Guelphe celebre du xi« siecle , chef des Cremonais , sau- veur de sa patrie ; ses concitoyens instituferent des fetes publiques et annuelles , et firent frapper des monnaies pour en celebrer la me- moire. On a taxe I'article de Pietr'-Antonio Boselli de trop de par- tialite. M. Lancetti reconnait dans Boselli non seulement i'antago- niste d'Aristote au xvii* siecle , mais aussi de Descartes, de Newton, le Buffon de I'ltalie et I'auteur d'une nouvelle cosmographie , dent il n'existe aucun monument. Notre biographe semble done avoir oublie les Patrizj , les Telcsio , les Campanella , les Porta, etc., qui certes avaient un peu plus de merite que Boselli.

4o. Cicerone: Letlere disposte per ordine de' tempi, tradotle e corredate di note , etc.— Ciceron : Lettres disposees suivant la date des tems, traduites et enrichies de notes; par M. L. Mabil, Padoue, 1820, in-S".

M. Ltiigi Mabil , ancien professeur a I'universite de Padoue , est connu par d'autres traductions, surtout par celle de I'histoire de Tite-Live et par son abrege de la morale de Stellini en forme de lettres. Dans les notes dout il a enrichi les lettres de Ciceron , M. Mabil a beaucoup profite de celles du savant et judicieuxWieland sur le meme sujct.

4i. Leltere e versi, etc. Lettres et vers de Torquato Tasso, etc. Milan, 1821 ; Giovanni Bernardoni.

On assure que Giuseppe Bernardoni possede un grand nombre de lettres manuscrites du Tasse , qui appartenaient 4 son illustre bio- graphe, I'abbe Serassi. II a cru ne pouvoir mieui celebrer le mariage de Carlo Kramer avec Teresa Berra , qu'en publiant ce recueil do lettres et de vers du celebre et malheureux auteur de la Jerusalem. On y trouve quelques nouvelles circonstances relatives h la vio et

to8 LIVRES KTKANGERS.

am inlorliinps de ce grand potte. Les poesi(>s consistent en une canzone , deus sonnets et hull madrigaux.

4?,. L' Inferno di Dante, etc. L'Enler du Dante, traduit en vers hcxamt'tres latins par le docteur Antonio Catelacci , professeur d'anatomie et de physiologic. Pise, 1819, in-S" ; Rainieri Prosper!.

Cette traduction latinc du Dante ne peut que paraitre fort inutile aux Strangers comnie aux Italiens. Ceux-ci ne doivent lire la diuine comedie que dans ridionie national, qu'elle a, pour ainsi dire, cree ; les etrangcrs , et surtout les Franrjais et les Anglais, non seu- lement sont riches en traductions, mais ils s'empressent encore de lire I'ouvrage dans I'original. Pourquoi done M. Catelacci s'est-il donn^ la peine de le traduire en latin , surtout quand il en existait dans cette langue une traduction trfes-iilegante faite par le p6re d'Aquinot

43. Tragedie, etc. Tragedies de Cesare Della Valie, due de Ventignano. Naples, 1820, Angelo Trani ; vol. II.

li'auteur de ces tragedies est un des nobles Napolitains, qui, en cultivant la haute poesie , s'occupent d'etudes encore plus utiles. Le second volume de son theatre contient deux pieces dont les sujets grecs sont tres-connus, Iphigenie en Tauride et Medee. La premiere avait d'abord etc traitee par Euripide chez les anciens , et ensuite par Rucellai, Pietr-Jacopo Martelli, Guiniond de la Touche, et rfecemment par GOthe chez les modernes. L'auteur a proiite des essais de ses devanciers pour eviter leurs imperfections. Nous avons aussi la Midee d'Euripide et celle qu'on attribue i S6- nfcque , la meilleurepeut-6tre des pieces latines qui soient parvenues jusqu'a nous. Pierre Corneille, Longepierre et d'autres ont reproduit ce sujet sur la scone moderne. Malgre ses efforts , l'auteur n'a pu eviter les imperfections inherentes la nature du sujet etau caractire de ses personnages.

44- Lettera , etc. Lettre de Custanzo Gazzkra adressee au comte Giuseppe Franchi di Pont , sur les ouvrages de peinture et de sculpture exposes dans le palais de Puniversite royale de Turin , en (820.

L'auteur de cet opuscule , ecrit avec assez d'6legance , decrit tout I'appareil et les circonstances solennelles qui ont acconipagnii Pexpo- sition publique des meilleures productions des arts. M. Gazzera , en lei passant en revue, signale ie mf^rite, le raraotere, le genre, lesini-

LIVRES blR ANGERS. 459

ppifections de chacunc. II se montre partout juge eclaiic c t ama- iciu' zele des progrt;s des arts et de la gloire. de sa nation.

ESPAGNE.

45. Decadas medico-quirurgwas y farmaceuticas ,tXc. Recueil decadaire des observations pratiques concernant la medecine, la chirurgie et la pharmacie, par une society de gens de lettres. T. I". Madrid, 1821. Cruz-Miyar, in-8».

Ce nouveau journal periodique se public tons les dix jours , et neuf decades forment un volume. Le premier, que nous annon(;ons, con- tient des considerations importantes sur le suicide , sur la mani^re d'enseigner la medecine, sur I'histoire de la pbarmacie, sur la bibliographic nationale et ^trangere, etc.

46. Diccionario geograjico , etc. Dictionnaire geographique universe! de tous les peuples de la terre, des nations, empires, royaumes, ripubliques et autres etats ; des provinces, districts, villes, bourgs et villages memorables ; des lacs, fleuves, deserts, montagnes, volcans, mcrs, ports, golfes, iles, peninsules, isthmes, bancs, caps, etc.; -' edition, corrigee et tres-augmentee , quant ii ce qui concerne I'Espagne etl'Amerique; par don j4ntoin.e\ bg as. Madrid, 1821; Davila , Sojo , etc., 6 vol. in-S".

Get ouvrage sera tres-utile non seulement aux Espagnols, mats aux Franf ais ; et , lorsqu'on donnera une nouvelle edition du diction- naire de Vosgien, on pourra tirer un grand parti de celui-ci.

4". Catecismo de la moral civil , etc. Catechisme de la mo- rale publique, et exposition -elementaire des facultes physiques et morales de rhomme, de ses besoins, de ses droits, de ses devoirs dans I'etat de nature et dans I'ordre social , et des droits des nations considerees dans leursju^ations mutuelles ; par don Francois Rodri- guez DE Ledbsma , avocat. Madrid , 1S21. Rodriguez, Matute. Un vo- lume in-S".

48. Principios de la economia general, etc. Principes de I'e- cononiie generale et de la stati.<tiqiie de I'Kspagne. Madrid, 1821. Esparza. Un vol. in-S".

Cet ouvrage anonyme contient quelques considerations siir I'eco- nomie doniestique et I'economie politique , sur la distribution de.< revenus publics et sur la statistique d'Espagne. On y tronve aussi I'iicte de navigation de I'Angleterre , qui etait pen ronnn en Es- pagnp.

IGO LIVRES JiTRANGERS.

{■;.— Historic de la dominacion de los Arabes en Espaha , etc.— Histoire de la domination des Arabes en Espagne, tires des manus- crits et mdmoires arabes, par D. Joseph Ant. CondiS. Madrid, i8ao. Un vol. in-.i" de G6o pages.

M. Conde, savant academiclen, niort I'annee dernierc, a fait de grandes recherches dans la bibliotheque de I'Escurial et dans d'autres bibliolheques qui possedent des manuscrits arabes; il en a tire une foule de renseigncmens curieux , qui jcttent un grand jour sur la politique des conquerans sarrasins, sur leur gouverncment, leur taetique , leur administration et leur systems financier, leur police, leur instruction publique, leurs moeurs et usages , leur litterature, la viedeleurs grands hommes, etc.L'auteura divise son travail en quatre Livres ; le premier, qui sert d'introduction & tout I'ouvrage , est un expose habile de I'etat dupeuple arabe lors de ses premieres inva- sions en Afrique. L'auteur passe cnsuitc aux autres invasions des Arabes en Afrique, au regne des Omirs , a leur politique et a leur conduite envers les indigenes de I'Espagae, aux guerres civiles qui diviscrent les Omirs , aux evenemens qui soumirent I'Espagne arabe aux califes de Danias , enfin, au tableau des exploits et du caractere des premiers dominateurs arabes en Espagne. Le deuxicme Jjivre commence par la fondation de la monarcliie arabe , indepen- dante des califes. Get evenement fut, ainsi que le prouve M. Cond6, I'efTet de I'esprit public des Arabes , qui se declarcrent en faveur de Beni Omega. L'auteur raconte I'bistoire des princes de cettc race, et de leurs conquetes en Espagne et en Afrique. II termine par I'expose de I'etat du gouverqement, des ai'ts et des lettres cbez les Maures de cette epoque, qui s'arrete ^ la guerre civile de io3o. C'est li aussi la fin du premier volume. Les deux autres , qui sont actuellement sous presse, contiendront les^pisi6me et quatrieme Livres. 11 faudrait qu'un savant , verse dans la litterature arabe , ajoutSt 4 la fin I'explication des mots arabes, la geograpbie com- paree et la charte de I'Espagne arabe , dont l'auteur n'a pu s'occu- per, ayant ete enleve trop t6t k ses etudes profondes.

44- Coleccion de Memorias hisloricasy pullticas, etc. Recueil des Memoires historiques et politiques, concernant la dissolution des cortfes de i8i4, I'arrcstation des deputes, leur exil, et les de- tails relatifs ^ ces evtnemens. Tome I*'. Madrid, i8ai. Castillo, Barco, etc.

LIVRES ETRANGERS. 161

Les hommfs de lettrfis et les hommes d'etat, qui se sont r^unis pour publier cette collection , se proposent d'y faire entrer toutes les pieces qu'ils ontrassemblees, pour demontrer les droits de la nation' et les veritables interfets du roi , et r6futer les fausses doctrines de quelques aristocrates exageres, doctrines qui derivent de I'ignorance, de la superstition , du faiiatisme , et surtout de I'interet personnel.

5i. Rejlexiones a las Cortes, etc. Observations adressees i I'assemblee nationale des Cortes de I'Espagne , concernant la loi publiee sur Is mode d'election des membres de la municipality de chaque ville ; par D. /oseyA DKCHUKRiiCA,avocat. Madrid, i8ai. Sojo. 52. Discurso, etc. Discours prononce par H. Joseph Joachin Mora, k I'Ath^nee espagnol , lots de I'ouverture de son cours de droit naturel , le 7 mars 1821. Madrid, Ored.

53. Nomenclatura de las bellas letrcis. Nomenclature de» belles-lettres, en forme de dialogues, i I'usage des eleves du col- lege de Vergara; par D- Felix Enciso Castbillon, professeur de belles-lettres dans lememe college. Madrid, 1821. Orea. Un vol.in-S", 54. Las Poesias de HoraciOf etc. Traduction des oeuvres d'Ho- race en vers espagnols, par D. JUavier dzBvrgos, avec des notes critiques. Madrid, 1821. Paz et Sojo. Deux volumes iu-8°.

On avait deji en Espagne une traduction d'Horace en prose, et une en vers de quelques-unes de ses oeuvres seulement. M. Burgos vient d'en donner une complete. L'auteur est connu pour un homme de merite, rempli d'esprit et de connaissances litteraires. 11 est le directeur principal du journal intitule : La Miscelanea (/e Melange) , sans contredit le meilleur de tous ceux qui paraissent a Madrid en langage castill.m. Le journal liebdomadaire le Censeur, le premier ouvrage critique de I'Espagne , a public un article sur la traduction de M. de Burgos; il en fait un grand eloge, en meme terns qu'il y signale de legeres imperfections.

55. £1 desemharco de los Eusos. La descente des Russes i Motril , port de la cute de Grenade, dans la Mediterranee ,• comedie en deuxactes; par D. Epiphane Esteban , representee sur le theStre de la ville de Grenade, le i'^ mai-s- 1821. Madrid , iSu. Matute.

Llorentr. ROYAUME DES PAYS-BAS.

56. Noufeaux memoiresde I'academie royaledea sciences el belles- lettres de BriixfUes. Bruxelles, 1820. P. J. Demat. In^" de 4^4 pag*

Tome xi. 11

162 LIVRES ETRANGERS.

Les savantcs recherches historiques de feu M. Lesbioussart sonl la partie la plus interessante de ce recueii , du tnoins pour la plupart des lecteurs.

^■j.—Annales du Salon de Gand , ou Recueii des productions des auteurs uioans de I'icole belgique , dediees a I'academie rojale de Gand, 1810 et 1821. Chez P. F. de Gacsln-Verhaeghc.

Belle entreprise et bien digne , par son execution , de raccueil qu'elle a re?u de tous les amis des arts en Belgique.

58. Coup d' ceil sur la nouvelle legislation cii^ile el I'organisalion de I'ordre judiciaire du royaume des Pajs-Bas , par un magistrat. Bruxelles, iSao. Picard ; brochure in-S" de 64 pag.

Memoire ecrit avec sagesse , mais trop favorable aux proj'ets de subversion des lois actuelles.

Sg. Expose du sjsteme d'educalion primaire actuellemcnt suivi enSuisse,en Allemagne elenHollandcparJ. Coquilhat. Bruxelles, chez les fr6res Delemes, vol. in-S" de 120 pag.

Ouvrage recommandable et qui se fait lire avec interet.

60. L' Ophialmiste , ou VAmi de la vue. Bruxelles, chez les freres Delemes; brochure in-i 2.

Cette petite brochure ,dont I'objet n'est pas sans importance pour les gens de lettres , est ecrite avec agrement et imprimee avec un soin que ne desavoueraient pas MM. Didot,

61. Considerations sur la distinction des personnes el lu dis- tinction des fortunes. Bruxelles, 1S21. Lecharlier, brochure in-12 de 74 pag.

62. Recueii annuel de poesies de la Societe de lilleraiure de Bruxelles. Delemes, in-18 de 127 pag.

La plupart des vers qui composent ce petit volume ( le 18' de la collection ) , feraient honneur a nos Muses parisiennes. MM. Con- chain , Hubin , Lesprit , O' Sulivan , Pire , Guetelet , Reiffenberg , Rouveroy , etc. sont de trcs-dignesdesservansdu temple d'ApoUon.

63 De la colonic de Frederiks-Ouord, et des mqyensde subvenir aux hesoins de I'indigence par le defrichement des terres uagues et incultes; Iraduil du hollandais par le baron de Keverberg. Gand, Hondin , 1821 ; in-8° de i83 pag. , plus deux planches.

Memoire rempli de vnes utiles et bien presentees.

64. Comedies de Terence , iraduites en vers fran^aispar P. Ber- geron, Tom. !"•. Gand, 1S21, Hondin , in-S" de 48' P^g.

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Bfibut qui donne des espcrances et merite des encouragemens. Cu premier volume contienl VAndrienne et VEunuque.

G5. Guillaume Premier, iragedie, par M- Alvin ; 1S20 , clicz les freres Delemes , in-S".

Tragedie jouce avcc succes au tlicatrc de Bruxelles , au mois de mars dernier. Le Mercure bel^e, journal plein d'esprit et de go6l , contient une excellente analyse de cette piece nationale.

Malgre les efforts du gouvernement hollandais pour faire dis- paraitre , ou du moins pour affaiblir I'lisage de la langue Iran^aisc dans la Belgique , elle y est cultiv6e avec plus d'ardeur que jamais. On y trouve le charnie du fruit defendu. Stassart.

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66. Seance puhliqae de la Societe rojalede midecine , cliirur- gie el pharmacie de Toulouse, tenue le 2^. mai 1821. Toulouse, 1821 ; imprimeric de .1. M. Douladoure. Brochure in-S" de 56 pages, Ce compte rendu d'ouvcrture renferme d'abord le discours pro- nonce par le president, M. Duffour, puis le rapport des tra- vaux de la Societe, depuis le 27 juillet 1820 jusqu'au 24 mai 1821 , fait par M. Ducasse fils , secretaire general. En faisant I'enumc- ration des memaires presentes a la Soci6te sur des cas de patho- logic interne, il donne des extraits d'obscrvations qui semble- raient prouver que la medecine physiologique n'a pas encore fixe I'attention des membres de cette corapagnie. Le secretaire general a mfime en grand soin , en citant avec eloge Bichat, Du- puytren ,etc. d'oublier I'illustre auteur des phleg/nasies chroniques. On aper^oit cependant, dans quelques passages, un coDimcncemcut de concession la nouvelle doctrine, et nous dcvonsesperer que des praticiens, dont la bonne foi doit egaler le savoir, ne tarderont pas a se rendrei I'evidence des principes professes par les medecins phy- siologistes. Une seconde section estremplie par descas dc patho- logic externe. Une observation de RI. Caffort, sur un polype iiterin , donne lieu a M. le rapporteur de faire la comparaison des differens precedes operatoires employes pour enlever les polypes , ct il donne toujours la preference a la ligature , parce qu'une hemorragir mortelle , ditil , pourrait Ctre la suite de la resection. Si M. Ducassp avail suivi la clinique de M. Dupuytren, ilaurait vu qu'on pent , sans danger, dans presque toutes les circonstances, enlever les polypes par

11 *

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IVxcision , el que jamais ce grand chiriirgien n'a cite arrcte par l.> crainle d'line hcniorragie , donl il sail tonjours se rendre mailre.

Lecomptc rendu dcs travaux dc la conipagnie est suivi de I'ana- lyse d'undiscours prononce parM. lUimebe, sur la question suivante : L'etude et lapralique de laricdedne peuifent-elles s^ associer d lacul- turedes helles-Iellres? L'annonce dcs prix proposes pour Tannic iS?.* tt le tableau desmembresde la sociele terminenlcctte brochure. D.

67. Precis analjyliquc des irapaux de I'acadimie rqyale des sciences, belles-lettres et arts de Rouen, pour I'annie 1621. Rouen, imprimerie de Periaux ; 1 vol. in-8° de 194 pages.

Le compte rendu des travaux de cetie conipagnie par MM. Vitalis et Bignon , secretaires perpetuels , forme deu\ sections: Sciences et arts, Belles-lettres el arts. La premiere est subdivjsee en six cha- pitres : Mathemaliques , Ilistoird naturellc , Cliiinie et arts indus- triels, Medecine , Medecine velerinaire , ylgriciilture et econoniie rurale. L'un des memoircs de celtc section a pour objet : VEncollage des etoffes oil toileries , an inoyen de dii^erses especes de pare- mens , etc. , par M. Dubuc I'aine, pbarmacien. L'auteur, ayant le desir d'etre utile a la nombreuse classc des tisserands et de les faire sortir des bas-fonds et des caves malsaines oil la nature de leurs tra- vaux les refient "une partie de leur vie, prisente differenlcs recettes feconomiques d'un encollage hygromctrique , qili permettent de fa- briquer les articles de rouennerie dans des lieux ni frais ni humides, au-dessus du sol , sans nuire a la tissure et k la confection des etoffes. L'addilion de Vhjdrochlorale de ihaux parait le moyen efficace qu'il prcsente pour alteindre ce but. On remarque ensuite , i" un memoire de M. Vitalis snr une nouvelle mine de chrome , trouvce depuis pen dans une ile voisine de Saint-Dominguc el dont M. Vitalis a fait la decouverte, en analj'sanl une certaine quanlite de sable noir que M. Senient , oflicier de santc , lui a rapporte des bords d'un ruisseau qui coule dans la partie sud de I'lle-d-var/ie , sitxUe a 9 milles sud de Saint-Doniiugue. 2" Un essai sur les causes de k couleur vertc que prennent les huilres des pares a cerlaines epoques de I'annee , par M. Benjamin Gaillvn { voy. Revue en- cycl., Tom. IX, pag. Sgg el 4o2 ). Kous devons rectifier une erreur qui s'itait glissec dans ce rccueil, dans la refutation de I'opinion qui regarde comme une maladie la viridite des huitres. On fait dire a l'auteur : « II est bicn reconnu , par I'usagc journaKei

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que Ton fait dcs huitres vertes , qu'elles sont aussi saines que les blanches ; done leur coloration n'est pas le pioduit d'une ma- ladie, » Preuve bien insigniGante , tandis qu'au contiaiie celle que donne I'auteur contie celte opinion resulte des experiences compa- ratives qu'il a laites du degre de vitalite des huitres blanches et des huitres vertes, lesquelles n'ont presente aucune difference. Des observations de M. Prevost pere, veterinaire i Rouen , sur une vache, qui, ayant aval6 une broche de fer servant a un metier a filer du colon, I'a conservee pendant deux ans entre la jilefre costalc et leS cotes, d'oii elle est sortie en perrant cette derniere partie. La vache, qui fait ie sujet de cette obseivation physiologique , toussait sou vent et maigrissait depuis quclque terns; niainlenant elle est guerie , ne tousse plus et reprend son embonpoint. 4" Le rapport d'une com- mission nommee pour examiner les memoires envoyes au concours de 1S20 sur cette question : Quels sont les moyens, dependans ou in- dependans da pyromelre de /fedgood, les plus propres a mesurer , avec Ie plus de precision possible , les hauts degres de cbaleur que certains arts, tels que ceux du verrier , du potier de terre, du faiencier, du porcelainier , du melallurgiste , etc., ont besoin de connaitre?i> La conclusion de la commission , adoptee par I'aca- d6mic, accorde le prix au a" 1", portant pour 6pigraplie : expenentia ]>ra:stanlior arte. En consequence le president a proclame le nom de M. Honore Flaugergues, de Viviers(Arderhe), auteurdu nieraoire. Les travaux de la classe Uelles-lellres et arts presentent I'analyse des discours de reception de MM. Fontanier, Lepltre et de M. le lieutenant general Bivaud de la Raffiniere; les rcmercimens de M. de Bernis, arcbevcque de Rouen , pour le diplome qui lui a etc cffert ; les adieux de M. Malouet, president de I'academie , dont les derniers accens , temoignage de la conlraternile ia plus ainiable, ont retenli dans tous les occurs et y laissent des regrets profondement sentis. Parmi les memoires consignes en entier dans ie Precis de I'academie, on remarque : une demonstration de M. Bignon, sur la nature el la veritable signification du verbe dans les propositions grammalicales et lofiques, dont le but est de conibaltre I'opinion de M. la Romiguiere sur la nature de celte partie de la proposition., et de prouver que le propre tIu verbe est I'expression des terns , la relation du jugement a. une epoque plus ou mains precise de la duree; a" des considerations sur le charms et I'utilite attaches a

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I'etude de Ihisioiie , par M. Aiigustc heprct^osl. L'aulcm , citoycrr patriole, rcgielle avcc raisoii que I'litude dc I'ljistoirc soit tiop ne- gligee.— Divciscs pieces de poesie , dcs elegies par M. Vigne , de* fables par madamc Victoire Bahuis , MM. Gultinger ct Ic Filleuldes Guerrols , dcs stances sur le Voyage de lapie par M. d'Ornay , no- nag^naire, doyen des academiciens , tcrminent cc recueil, en tetc duquel se trouve le discours prononce , i I'ouverturc dc la seance ptiblique, par M. Lcniarquis, vice-pr6sident, qui s'est attache a i'aire ressortir I'heureusc alliance de I'esprit du commerce ct du godt de rinstruction. Nous citerons le passage oil I'auteur peint a lat'ois I'acti- vite commerciale dc Rouen etl'influcncc scientifiquc de I'acadeniie : o En contemplant la prosperitii de cetle ville, oil le fleuve royal apporte niajestueusement Ics productions des contries les plus eloignees , oil Ics pavilions dc tous les pcuples flo'ttent sur les navires presses dans le port, tandis que d'autres encore imparfaits reposcnt pres de la sur les chantiers ; oil le coton de I'Inde, file par les plus inginieuses ma- chines , pare des couleuis les plus vives ct les plus varices , se trans- Ibrnie en tissus egalement legers , elegans, solides ; oil le genie du mecanicien s'exerce continuellement ;i diniinuer , a regulariser le travail des mains ; oii I'elranger , parcourant nos ateliers d'un ceil surpris , rcconnait , avoue uialgrc lui-mfimc une superiorite qui alarme sa jalousie ; combicn 11 nous est doux de penser que Taca- demie n'est pas ctrangerc k cet etat florissant , que plus d'un des pcrfeclionncmens qui ont contribue aux succes de I'industrie roucn- naise est emane de sou sein ! » B. G.

68. Pragmens de philosophie bolanique , ou de la maniere la plus conuenable de voir et da irai^ailler en hisloire nalurelle , el particulierement en botaniqiie , el des inojens de rendre cetle science plus simple el plus facile ; par A. L. Mabquis. Rouen, 1821, impri- merie do F. Baudry. i vol, in - 8" dc 207 pages. Se trouve 'a Paris , chez Mequignon -Marvis.

Cet ouviagc conticnt vingt-un cliapitres ; dans les six premiers, I'auteur s'elevc centre I'abus dc la multiplication des cspeces et des genres en botanique ; il passe en revue les idees que les naturalistes se font en general de I'cspecc, et s'appuie dc I'autoiilc dc Locke el de Condillac pour piouver que les espece» nc sont que des determi- nations de noire esprit ct non des groupcs cxactcmcnt delcrinines par la nature eilc-mCmc; il icgardc I'opinion dc la realiledcs cspeces

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comnie une source d'erreurs qui a conduit i I'idee d'unc precision severe , mais illusoire , qui n'est pas dans la nature des choses ; 11 voudrait qu'on effa^St des catalogues un grand nombre d'especes qui ne sont, d'apr^s deux exemples cites par I'auteur, que la mfime es- pfece alteree par des localites et des circonstances diverses. Ces six chapitrcs forment en quelque sorte la premiere partie de I'ouvrage; ils sont remplis d'aper^us spirituels et interessans ; ils preparent le lecteur k la relbrnie des especes, dont I'auteur developpe le principe et les regies dans le chapitre vii. Ce principe , suivant I'auteur , doit Olre tire de la consideration des etres relativement a nous ; le besoin, rulilite seront la regie du naturaliste dans la formation des especes. Aucuue distinction nouvelle , aucune espece ne seront introduites sans un motif raisonnable, sans une sorle de nccessite , ou du moins d'utilite relative, soit directement 4 I'homme, soit k la science. G'est ce que I'auteur, pour se servir d'un terme de la philosophic de Leib- nitz , appelle la raison suffisante d'une espece. II est a craindre que ce principe ne conduise pas a la precision et a la fixite qui parait etre le but louable des efforts de I'auteur. On se demandera quel pent etre le regulateur de cette raison suffisante? Puisque la mesure du besoin, de I'utilite , devient celle de I'attention plus ou moins grande que nous donnons aux objets , la raison suffisante d'un medecin et celle d'un artiste ne seront pas dans la meme ligne; tel savant scru- lateur profond de la nature, la contemplant d'un point de vue plus 6leve , admettra des distinctions que ne soup^onnera pas I'obser- vateur superficiel ; la raison suffisante de ce dernier serait pour le premier une entrave bien injuste. En emettant des doutessurl'effica- cite du remede que propose M. Marquis , nous n'en faisons pas moins des voeus bien sinceres pour que son livre plein de choses , fort d'i- dees et ecrit d'un stjie elegant, conduise les naturalistes a n'accueillir que les tiavaux qui tendent reellement k I'avancement des parties essentielles de la science. C'est cette essence sur laquelle il est k d6- sirer que Ton soit d'accord. Les travaux sur la physiologie vegetale paraissent devoir conduire a cette fixit6 tant desiree. Mais que de re- formes le developpement et la perfection de ces travaux ameneront dans les doctrines botaniques , et quelles resistances certaines Ve- ritas auront k vaincre ! N'anticipons pas sur I'avenir , et accueillons avec reconnaissance tous les bons ouvrages qui tendent a I'amelio-" ration dc la science. Dece nombre sont lesfragmens de philosophic

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botanique dc M. Marquis, abondans en utiles conseils, mais dont pourtant quelques propositions ne conviendiont ct'itainement point ti plusieurs savans, entre autres cclle oii I'autcur regarde les obser- vations microscopiques comnie line des sources do la multiplicite abusive des especes en iiistoire naturclle ; celle eucore oii les travaux BcrupuleuY des savans de la Germanic sont consideris comnie des ccarts du bon gotitet assiniiles au genre lomantique de la litterature. On peut opposer 4 la premiere proposition , que les observations mj- rroscopiques nous ayant conduits a uneconnaissancc pluscertaine dc Torganisation des Ctres , dont la simple vue soup<;onne a peine Ics liniiamens, consequemment les ressemblances ont et«i plus positi- vement determin^es ; et si ces observations ont produit des espices et des genres que I'on ne connaissait pas , ces creations d'ordre, loin de subdiviser le tableau de la nature , ont, en quelque sorte, concrete des individus dont le grand nombre fatiguait les limitcs de notre in- telligence : les observations microscopiques ont done simpliCe plutOt que complique la science. Quant au goftt romantique , i cette vague inquietude d'esprit que I'auteur suppose dans les travaux de plusieurs naturalistes allemands, elle me semble en contradiction avec cette marche severe, ces observations r6iter6es et ce besoin d'exprimerte qui est, tout ce qui est, rien que ce qui est; en un mot avec cette disposition philosophique de I'esprit , dont grand nombre de leurs ouvrages scientifiquesfont preuve, et que je considere comnie clas- sique, comme devant concourir i I'avancement des sciences natu- relles, Jecrois, comme I'auteur , que rendre les sciences simples, faciles, substantielles , lesfaire aimer, c'?st assurement les sert^ir; mais je pense que I'etude approfondie des diverses branches de la science doit conduire 4 ce resultat. Les progres de la civilisation ren- dront par la suite familiers h tons les esprits les apercjus qui nous etonnent et nous surpassent mgintenant. Ainsi, borner nos reclier- ches suivant la mesure de telles ou telles facultes , c'est entraver I'essor du talent , c'est fttablir I'empire des prejuges, c'est arreter les progres scienti((ques du siecle. B. G.

69.— F/ore d'Oware et de Benin , par M. Paiissot ds Beavvois. Paris, 1821 , chez la yeuye de I'auteur, rue Saint-Louis, n" 58, au ftjarais; et chez Arthus Bertrand, libraire , rue Iliiutef'euille , n" ao, In-folio. Prix, 48o fr.

Cette Qore est composcc dc i/ingt livraisons contenant chacunc

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irois feuilles d'iinpiession , et de C planches representant de 6 i lo plantcs. Elle contient la description et la figure exacle de tous les genres nouveaux et de toutes les especes nouvelles de plantcs recueiliies par I'auteur dans des pays peu connus, et qui n'avaient etc visiles paraucun naturaliste avant iui. La singularite, la beaule des flours , le brillant et la variiite de leurs couleurs rendent ce recueil egalement utile aux savans , aui artistes et aux gens du monde. A ce bel ouvrage s'en rattaclie un autre du meme auteur: Insecles recueilUs en Afrique el dans les Elats-Unis d'Amerique. Ce dernier, compose de i5 liuraisons , contenant chacune 4 feuilles d'impression , et de 6 planches qui representent de 36 a 4o inscctes de grandeurs et de families diiferentcs , se trouve egalement chez la veuve de I'auteur.

70. Traite de chimie ilementaire , theorique et pratique , par L, J. Thenabd, de I'Academie royale des sciences de I'Institut de France, etc., etc., 3' edition, revue et corrigee. Paris, i8ai. Crochard, libraire, rue du Gloitre-Saint-Benoit, n" i6,etruede Sorbonne, 3. 4 vol. ia-S" avec planches. Prix, pour Paris, 28 fr. et 07 fr. franc de port pour les departemens.

Lorsque M. Th6nard publia, en 18 13 , la premiere edition de son excellent Traite de chimie^ il ne fit que se rendre aux voeux souvcnt exprimes par ceux qui cultivaient cette belle scienco, et surlout par les nombreuxelevcs quisuivaient ses utiles et brillanteslec^ons, eleves au nombre desquels je m'honore d'avoir ete. Les uns et les autres regardaient M, Thenard commc ctant appele naturellement h remplir le vide qui existait, pour cette partie, dans nos livres elementaires scientiCques. Leur espoir fut entierement justifie ; I'ouvrage du savant professeur devint bientot classiquc, et fut promp- tement repandu dans tous les pays civilises. (Nous en avons annonce une ti'aduction italienne , Tom. II, p. 567.) Des I'annee 1S18, la premiere edition etait a peu pres epuis6e , et M. Thenard en fit une seconde dont le succes ne fut pas moindre, et qui a 6te traduite re- c£mment en grec nioderne. {l'"qy. Tom. X, p. 23i.) La troisi6me Edition a paru en juin dernier. L'auteur ne s'est pas contente de faire une simple reimpression de son ouvrage ; il y a fait entrer les nombreuses decouvertes , dont les progres rapides de la chimie pnt enrichi cette science dcpuis trois ans. Dans les deux premiers v.cjumes, il traite de tout cc qui est rclalif aux corps inoiganiqucs :

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dans le Iroisieme, de lout cc qui concerne les corps organiques, ct, dans le quatrieme, de I'analyse chimique ou des moyens giinO- raux par lesqucls on parvient i separer les principes consliluans des corps et 6 en determiner la proportion. Cc dernier volume renfcrme en outre toutes les planches dc I'ouvragc, la descrip- tion des ustensiles que Ton doit sc procurer dans un laboratoire de chimie, la manicre de s'en servir ct I'indication dc leurs usages.

On nc saurait trop louer Tordre qui regne non sculement dans la distribution generale des diffiircntes parties de Touvrage, niais encore dans chacune d'elles, consider^e separement. «La mtithodc quej'ai constamment suivie , dit I'auteur dans sa preface, consiste a proctder du simple au compost, du connu k Tinconnu, ^ reunir dans un mfime groupe tons les corps analogues , et i les etudjer d'abord d'une manifere generale, et ensuite d'une maniere particu- liere. L'avantage de cette methode , employee par les naturalistes, se fera sentir surtout dans I'^tude des metaui et des composes dont ils font partie. En effet, il est possible de fairc de ces sortes de corps une etude generale si precise, qu'on soil presque dispense de les etudier en particulier. » J'ajouterai qu'en abregeant I'itude de la chimie, cette methode la rend aussi facile qu'attrayante. On doit savoir aussi beaucoup de gre a I'auteur de n'avoir neglige aucun detail dans la^description des experiences : en mettantainsi ses lecteurs i meme de les repeter toutes , il contribue puissam- meut a accelerer encore la marche d'une science a laquelle ses tra- vaux et ses Icfons ont deji fait faire de si grands pa». Au reste , le' Traile de chimie dc M.'Thenard est un de ces ouvrages que le nom de leur auteur recommande mieux que tous les justes eloges qu'on pourrait lui^ donner ; il sufBt d'en faire connaitre I'existence h ceux qui s'occupent de la plus utile des sciences physiques, pour qu'ils s'empressent de se le procurer. A. Michelot.

"1. Tableaux des interels a tous les laux en usage dans le com- merce, et pour tel novibre de jours determines , suivis de tableaux du cours progressif de la rente sur Tetat , croissante ou d6crois- sante, suivant le taux de la rente legale de 5o fr. pour i,ooo francs par an , ou 5 fr. pour lOO fr. , depuis Ic cours do 5o fr. {haisseforcee), et successivement en remontant jusqu'a loo fr. {au pair) ; e,i A& coBiparaison du produit dc divers capitaux en rente sur I'etat , sui-

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vant le cours resultant de I'interGt i diveis taiix en usage dans le commerce, par P. Robebt. Paris, 1821. Chez I'auteur, rue dee Saints-Pferes, n"> Si.

72. Considerations sur quelqua avantages de I'induslrie et des machines, en France et en Angleterre ■, lues dans la seance pu- blique des quatre academies de I'lnstitut de France, parM. Charles DcpiN , menibre de I'academie des sciences. Paris, 1S21. Bachelier, libraire. In-S° de 02 pages. Prix, i fr. aS cent.

La Kevue Encyclopedique a rendu compte du succfes de cet icrit et de son utility. {Vojez Tom. X, p. 2440

70. Voyages dans la Grande-Bretagne , 2* partie. Force navale de la Grande-Bretagne; par M. Charles Dupik, membre de I'aca- ddtnie des sciences. Paris, 1821. Bachelier. 2 vol. in-4'' de 600 pag. Prix, 22 fr. 5o cent. , et aS fr. pour les non- souscripteurs.

La Revue a deji rendu compte de la premifere partie de cet ouvrage. Force militaire de la Grande-Bretagne. ( Voy. Tom. VII , p. 69 , et Tom. VIII , p. 48.) Dire que la seconde partie est encore au-dessus de la premiire pour I'abondance et I'ordre des matieres , ainsi que pour la beaut6 de I'execution des planches , c'est en faire I'eloge le plus complet. La Revue rendra compte de cette nouvelle partie. La 9", qui paraitra dans le cours de I'annee prochaine , traitera du commerce et des travaux publics utiles au commerce , c'est-i-dire des travaux des ponts et chauss6es. Cette partie con> tiendra pareillement 2 vol. in-4° avec planches et grand atlas , et seta donnee au meme prix que la precedente.

74- Exposition des principes el classification des sciences dans I'ordre des eludes, ou de la Synthese; par H. Tohombert, avocat des academies de Dijon et de Lyon. Paris, 1821. In-8 de i3o pages, avec un tableau synoptique des sciences dans I'ordre des etudes. Amablc Coste. Prix, 2 fr. 5o , et franc de port 3 fr.

II y a plus dc vraie science , plus de raison dans ce petit volume , que dans ccrtaines bibliotheques entleres. Par son titre , I'auteur, avocat distingue au barreau de Lyon , n'annonce qu'une exposition gtneralc des principes , et une classification des sciences dans I'ordre convenable pour Ics etudier ct les enseigner; et il donne de tels de- »eloppcmcns sur les principes rationnels de la morale, du droit public, du droit privc , du droit entrc Ics nations, que ccttc parlic seulc Uo son ouvrage est une bonne introduction gentrale a I'dtude des

172 LITRES FRANCAIS.

lois. Nous croyons que son livre sera 6ludic , meclite , hi ct rein avec avanlage par tons nos jeunes gens qui veulent faiic des pro- gr6s dans Ics science* quelconqucs. Les hommcs fails, les savans niume y trouveront ^ s'instiuirc. Mais ce sont MM. Ics clcves des c'coles dc droit qui doivent surtout Ic recherclicr et le prendre pom- guide.

Ses etudes le conduisent i la religion; il en fait le principal resullat dc la science, et il vante le bonheur ,que procurerait aui nations raccoinplissement des rtgles dc I'evangile , qui ne voit clans tous les liommes que des frfcres, qui regarde la justice conime Ja voix de Dicu , qui ne veut pas qu'il y ait des oppresseurs , qui conf'ond etpunil I'orgueil, qui met avant toutes choses les vertus , qui enchaine, pour ainsi dire , la force aux pieds de la justice et dc Ja sagesse. Cependant il lui est echappe una inconvenance grave, et la scule que nous ayons remarqu^c dans son livre d'un rare m^ritc. Sa jeunesse doit le faire excuser ; il ne veut pas qu'on disc a la femnie d'etre subordonnee <> son mari ; il propose que la raison comniandc a tous les deux , et c'est ce qui arrive quand I'un et I'autre sont rai- sonnables et vrais cbretiens; mais quand I'auleur sera plus avance dans la carriere de la vie , quand il aura etudie la religion chre- liennf avec autant d'applicalion et de succes qu'il a «';tudie la phi- losophic rationnelle , il pourra changer sur cet article, ct se recon- tilier avec I'apOtre des nations.

Baron, d'Alembert , Dupont-de-Ncmours, MM. de Tracy, Lan- cclin , Bentham et Jiillien de Paris, ont classiCe les sciences et le« arts; il pcut y avoir presque autant de diversite dans ces inethodes qu'on en remarque dans les esprits. Dans le livre de M. Torombert , I'etuds des corps de la nature, fondle sur les caracteres eties rapports rcci- proques etablissant entre eux des differences et des analogies, et I'e- tudeparticuliere de I'homme, fondec sur les rapports dc ses facultcs intellectuellesavec ce qui renloure, conduisent al'histoirc nalurellc, dont I'histoire civile est une branche, et aux arts. L'auleur coin- prend tout cela sous le nom de science physique; et, selon lui, I'e- tude de I'hommc , fondec sur les rapports de ses facultes morales avec ce qui I'entoure, sur les rapports d'alTection ou de besoin qui i'unissent a son scniblablc, conduit aux deux .sciences du druil ria- tiirel ct de la lep;islalion ; celle-ci a (rois branches, le droit public iutciicur, Ic dioit privti cl le droit international : c'cst ioutccia que

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I'auteiir appelle science morale. II expose, selon le droit naturel et ayec une grande force de raison, I'origine des droits et des devoirs, rorigine de la propriety , les notions sur la loi en general, sur la sou- verainete , sur I'esprit des lois civiles, etc. II definit la loi positive : une application specials des principes de la morale ou de la loi na- turelle ; il voit les principes de la loi natiirelle dans nos facultes et dans nos besoins , et il appelle loi de I'etat I'acte du legislateur qui protege I'exercice des facultes de chacun. II dit que c'est I'expres- sion des besoins , la limitation du droit de propriete , la regie des droits , autrement ce qui est juste. Tant que la loi n'est pas juste, il n'y a, dit-il, qu'un regime provisoire. II fait, sur tons ces points, une critique vive et fondee des notions qu'enseignerent Montesquieu et J. -J. -Rousseau, o Pour avoir, dit-il, des lois bonnes , justes, des lois veritables, il faut etudier les vrais besoins de )a societe : pour etudier des besoins, il faut qu'ils se puissent manifester franche* ment et h»utement. Ainsi, les k-gislateurs doivent recueillir attenti- vement I'opinion genOrale, comprendre les besoins qu'elle annonce et satisfaiio i ces besoins par des lois. Si les besoins changent , les lois doivent changer avec eux ; elles forment le pacle social , qui a ses bases dans la liberte individuelle et dans I'egalite de tous devant les lois. » 11 ne dit rien de special sur les constitutions , ni conse- quemment sur le droit de les suspendre et de les abroger.

L'auteur se propose de dcvelopper, selon sa mcthode , le droit civil dans un traite particulier. Nous croyons qu'il fera une chose utile , et que son traite general et son traite particulier recevront du public uu accueil triis-favorable. Mais c'est notre droit criminel qui a le plus besoin de reforme. Otez les substitutions et les majorats, perfectionnez et ne detruisez pas le systeme hypothecaire ; metter tous les articles de cecod.? en harmonic avec lui-meme, avec lesautres codes , cela suflirait pour long-tems. Notre code criminel peche par Ics bases et par de grandes lacunes. Lanjcinais.

75. Les Jluines , ou meditalions sur les reuolutions des empires, par G. F. VoLJiBY. Paris, 182 1. Bossange freres, rue de Seine , n" 12, 7* edition , i vol. in-iG , auquel on a joint la Loi nalurelle et un portrait de l'auteur.

VoLHEv avait un esprit infatigable dans la recherche de la verite; romme il croyait ne pas la Irouver exprimee assez clairenient dans les livres , il content le dessein d'aller la (.'hercher , loin de sa palrie ,

17A LIVRES FKANCAIS.

dans I'Egyptc et la Syric , dont Ics deseils sont encoro ipiiiplis des restes de leur grandeur passec, Aucun obstacle ne fut capable dc I'ari'Cter. 11 supporta la faini , la soif , les feux d'un climat brulant , et des privations de toute esp6ce. II vecut parmi des hordes d'Arabes dont il apprit la langue, vctu comme eux, douchant sur la terre , se conformant h leurs lois , i leurs" usages et a leurs moeurs. Mais cette passion , pour la Terite , venait nioins du desir de la gloire que de I'amour de la vertu. Transports en presence des mines de Palmyra , qui sont les plus etonnantes de I'antiquite , Volneys'arrete, les con- temple, les interroge , et transmet h la posterite le fruit de ses ins- pirations. II voit des deserts lA oil s'etendaient jadis des campagncs riantes et fertiles ; des ruines sur le mfinie sol oil regnait une opu- lente cit^, quelques hordes de barbares semees ca et li , tristes restes d'une population nombreuse , une morne solitude remplar^ant le bruit et le tumulte des arts; partout le silence des tombeaux. Em- brassant alors par la pensee la diversite des pays, des terns et des opinions , il medite profondement sur les causes de la misere des peuples exposes i'tant de riclssitudes ; et, voulant expliquer com- ment tant de nations (lorissantes ont disparu de la serine du monde , il descend dans le coeur de I'homme , et decouvre , dans I'amour de soi-meme, une source feconde du bien etdu mal , qui, s'accroissant de toutes les passions humaines, produit tantOt la grandeur, tantot la decadence des etats. En elTet , cct amour bien dirigo rend rhomme juste, bienfaisant , religieux ; s'il prend une fausse direc- tion, il le rend mechant, ingrat , opprcsseur. L'amourde soi meme renferme done tons les Siemens de la prosperite ou de I'adversite du genre humain.

C'est sur ce grand principe que Volney fait reposer tout son ou- Trage ; il demontre que cet amour de soi-meme ne peut dissiper les nuages des prejuges accreditSs par le tems , nous conduire au bien , qu'autant qu'il est place sous la direction de la loi naturelle , dont il esplique les rfegles eternelles et immuables , regies ecrites dans le coeur de I'homme. A. Mutual.

76. QEuures choisies de Fenelon , 6 vol. in-S". Les tomes 1 et a sont en vcnte. Paris , 1821 , Delestrc-Boulagc , libraire de I'Ecole de Droit, rue des Mathurins-S.- Jacques, n" 1.

Le second volume , qui vient de paraitre , contient les Dialogues sur I' eloquence ; \a LeUreal'acadimiefranfaise sur I'eloquence , la

LI V RES FRANCAIS. 175

poesie , I'hisicire ■, elc. Ic Discouis de reception a I'academie J'ran- faise ; des Mtimoircs tius-curicux et plcins de hardiesse sur la guerre de la succession d'Espagne , et divers autres opuscules. Les volumes suivans paraitront do moisen mois.

y-j. Penseesel maximes de Fi5nelon,2 vol. in-iS,avec portrait. Paris ,1821 ;Roret et Roussel , rue Pavee-S. - Andre ^ 9. Prix, 3 fr. et , pour les souscripteurs , 2 fr. So c.

CesdeuK volumes font partiede la collection des Pensees et Maxi- mes des ecrivains cilehres , que nous avons deji eu occasion d'annon- cer ( Voyez t, IX , p. 162 et 552 )• Parmiles Pensees de Fenilon , de ce digne prelat qui ornala morale des grScesde I'imagination , nous avons remarque celle-ci : o II faut qu'un peuple ait des lois ecrites , toujours constantes et consacrees par toute la nation ; qu'elles soient au-dessus de tout,- que eeux qui gouvernent n'aient d'autorite que par elles ; qu'ils ne puissent rien contre ces lois pour autoriser le mal.n G'est a M. H. Duval que nous devons le choix de ces pensees ; celles de Bossuet et de Massillon sont sous presse.

78. Des Delits et des Peines , par Becckrix , traduction nouvelle et seulc complete, suivie du conjmentaire de Voltaire sur le livre des delits et des peines , et du discours de J. M. A. Sebvan , avocat general au parlement de Grenoble, sur I'administration de la justice criminelle , par P. J. S. Dufey ( de I'Yonne ), avocat. Ladvocat , li- braire, Palais-Royal, Paris-, 1821 , 1 vol. in-S" ; prix,6 fr.

L'ouvrage de Beccaria a toujours joui , en France comme en Italic et dans toute I'Europe, de la plus haute estime, depuis sa premiere apparition , en 1764. Les trois premieres editions furent 6puis6es en diK mois. Ce futsurla troisifeme edition que Morellet fit sa traduc-. tion , ou plutOt son imitation, qui parut en 1766. Apreslacinquifeme edition , Beccaria fit quelques changemens au plan de son ouvrage, Quelques-uns lui avaient 6te indiques par Morellet. La traduction publiee ensuite par M. Chaillou de Lisy etait absolument conforme aux premieres editions. Les additions faites par Beccaria , depuis que les traductions ont paru , etaient absolument inconnues des lec- teurs fran(;ais. La traduction nouvelle , donnee par M. Dufey , est la seule qui les fasse connaitre. Elle a ete faite sur I'^dition italienne, pnbliee en 1807 , chez Bettoni , de Milan , par M. Beccaria , fils de I'auteur , seule edition regardee en Italic comme complete, et dont '1 26« edition , donnee par Ic libraire Silvestri , en 1810 , n'est

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LIVRES FRANCiS.

175

;>uesie , I'hisioire , elc. Ic Discours de recdion a I' academie fran- raise ; des M6moires tres-curieux et pleins s hardiesse sur la guerre de la succession d'Espagne , et divers autr opuscules. Les volumes suivans paraitront de moisen mois.

77. Penseeset maximes de Fkwelon , vol. in-iS,avec portrait. Paris , 1821 ;Roret et Roussel , rue Pavee-;- Andre _, nog. Prix, 3 fr. et , pour les souscripteurs , 2 fr. So c.

Gcs deux volumes font partie de la collecon des Pensees et Maxi- les des ecriuains cilebres , que nous avonseji eu occasion d'annon- cr ( Voyez t. IX , p. 162 et 352 ). Parmi lePensees de Pension , de c digne prelat qui ornala morale des grSode I'imaglnation , nous ivons remarque celle-ci : n II faut qu'un pjple ait des lois ecrites , oujours constantes et consacrees par toutea nation ; qu'elles soient u-dessus de tout; que ceux qui gouverne: n'aient d'autorlte que arelles ; qu'ils ne puissent rien contre ces Is pour autoriser le mal.» G'est a M. H. Duval que nous devons choix de ccs pensees ; dies de Bossuet et de Massillon sont sousresse. 78. Des Delits et des Peines , par Beccha , traduction nouvelle t seulc complete, suivie du coujmentairelc Voltaire sur le livre ies delits et des peines , et du discours de . M. A. Sbbvan , avocat tineral au parlement de Grenoble, sur I'aninistration de la justice liminelle , par P. J. S. Dcfey ( de I'Yonni), avocat. Ladvocat , li- jraire, Palais-Royal, Paris , 1821 , i vol. i-S" ; prix,6 fr.

L'ouvrage de Beccaria a toujours joui, eiFrance comme en Italic ■t dans toute I'Europe, de la plus haute eime, depuis sa premiere ipparition , en 1764. Les trois premieres etions furent epuis^es en Hk mois. Ce fut sur la troisi6me edition qi Morellet flt sa ion , ou plutot son imitation , qui parut en 766 dition , Beccaria fit quelques changemens u ' )uelques-uns lui avaient 6te indiques d& jiubliee ensuite par M. Chaillou de ux premieres editions. Les ad :ue les traductions ont paru , eurs fran<jais. La tro''')otio! I seule qui ' 'ubliee ^ auteui I a6«

176 tlVRES FRANCAiS.

qu'une relinpression. Le commcntaire de Voltaire fit le discours de Servan ,quitei'minent le volume , ttaient un complement necessairc de I'ouvrage de Beccaria , et ont ete substitues , avec beaucoup de jugement ,i» I'extrait, peut-Ctrenn pen sec, de la Theorie des peine s de Jeremie Bentham , donn6 dans I'^dition franc^aise de 1797, par M. Roedcrer.

79. Des Conspirations et de la justice politique, par F. Guizox , avec cette epigraphe : 0 iVe dites point conjuration, toules lesfois que le peuple dit conjuration (EsaVb, chap. 8, vers. 12). Paris, \^7.\ ; brochure in-8" de 119 pages; Ladvocat, an Palais-royal. Prix, 5 fr.

L'auteur signale un grand mal qui nous menace : la justice pres de tomber sous lejoug de la politique. G'est surlout dans les terns de fermentation politique , que la justice doit se montrer plus dilTicile , plus attentive et plus impartiale. Si quelque force etrangere veiiC la detourner a son profit, il faut s'clever contre une usurpation qui la perd. II s'agit ici de droits et d'interets qui sont au-dessus de tontes les opinions, que tout systeme est egalement tenu de garantir. M. Guizot, apres avoir indique le but de son iicrit, traite de la politique et de la justice. Une politique habile doit cmpecher que la conservation de I'ordre social n'exige sans cesse I'intervenlion de la force matirielle, bientOt funesle et impuissante, quand on lui donne trop a faire. Dans le chapitre II, l'auteur trace le cercle d'oi'i le pouvoir judiciaire ne peut sortir sans violer la loi , sans devenir I'instrument de la puissance pour descendre dans I'arene des partis. Les chapitres III et IV developpent les consequences effrayantes pourlasecurite individuelle de cct oubli des principcs. Le chapitre V traite des agens provocateurs ; il etablit la difference qui doit se trouver entre Vespionnase , juge quelquefois necessaire au maintien de I'ordre , et la profocalion , qui couve et fait eclore le crime et qui exerce sur la pauvre nature humaine I'atroce mission de Satan. Le chapitre VI [du ministere public) contient I'expose des ineonveniens graves qui rdsultent pour la justice et pour la morale des aberrations du pouvoir, transportant sur le terrain judiciaire toutes les forces et toutes les amies dont il est pourvu sur le terrain politique, pour- suivant les individus devant les Iribunaux avec le menie langage, I.-* meme latitude qu'il emploic pour sontenir ses actes dans les chambres. De cette nianiere, conclut l'auteur, la poMlique cnvaliit la justice et la coriompt en I't-nvaliissant. Apr^s avoir signalt- le mal,

LIVRES FRANgAIS. 177

il offre le remede dans le chapitre IX et dernier, en demontrant que Injustice est la meilleuTe politique , et qu'en donnant pour point d'appui i la puissance judiciaire la loi et I'equite, elle triompliera de I'esprit de parti et des preventions politiques, et contribuera es- sentiellement a consolider le gouvernement et i moraliser I'esprit public. B. G. '

So. Principes de jurisprudence franfaise , pour ser\ ir a I'intelli- gence du code civil ; par M. Boulage , avocat 6 la cour royale et professeur de code civil a la faculte de droit de Paris. Paris, 1820; Delestre-Boulage , rue des Mathurins-Saint- Jacques, n" 1"". Deux volumes in-S" ; prix , i j fr. , et par la poste i5 fr.

Get ouvrage contient la substance des lecons que M. Boulage pro- fessait i I'ecole de droit de Paris. L'auteur, arrfite par la mort au milieu de sa carriere, est loin d'avoir renipli la tache qu'il s'etait iniposee ; car il n,'a pu examiner que les deux premiers livres du code civil. Nous ignorons si I'on se propose de publier les materiaux que , sans doute , on aura trouves parmi les papiers de M. Boulage. Nous avions deja , sous le titre de Principes de la jurisprudence frangaise , un fort bon ouvrage de Prevot de la Jannes; mais 11 n'est relatif qu'i notre ancien droit. Sans pretendre mettre le livre de M. Boulage sur le meme rang que ceux de MM. Toullier, Pru- dhon, etc., nous pensons neanmoins qu'il pent etre utile aux eleves. On a reimprime, i la tcte du premier volume, VHistoire du droit f ran- fa'is, de I'abbe Fleury. A. T.

Si. Des Substitutions prohibees par le code cifil, par M. Bollard BE ViLLARGL'Es , jugc-suppleant au tribunal de premiere instance de la Seine. Paris, 1821; 2^ edition, revue, corrigee et augmenlee. Ilayet, rue de la Michoditire , n"> 12. Un volume in-S" ; prix, 6 fr. , et 7 fr. 5o c. franc de port.

Gette seconde edition d'un traite ex-professo sur une matiere diffi- cile, et sur laquelle, parcette raison meme, peu d'auteurs se spnt exerces, merite d'etre recommandee aux magistrals et aux juriscon- sultes. L'auteur possede bien les principes des substitutions, et les applications qu'il en fait aux diverses espfeces denotent un homme qui a joint la pratique des affaires a I'^tude des lois. D.

82.— (•_) Le Barreau frangais ou Collection des chefs-d'ceuvre de I'eloquence judiciaire en France , par Baquct , Beaumarchais , Cochin, d'Aguesseau, Dupaty , ]^lie de Beaumont, l^rald , Ferrere ,

Toms xi. 12

178 LIVRES FRANCAIS.

Geibicr, Lcniaitie, Lcnormanl , Linguct , Loyseau de INIaulion , Mirabean , Montesquieu , Patru , P6lisson , Portalis , Servan , Target, etc. {ancien barreau); et par Bellart , Bergasse , Berryer, Billccoq, Bonnet, Berville, Cliauveau-Lagarde , Courvoisier , Dcla- mallp, Dupiii, Duveyrier, Giiichard, Henncquin , Lacretelle aine , Lain6 , Lally-Tolendal , Manuel, Marchangy, Mauguin , Ravfes , Romiguiere , Simeon , Tiinquclague , Tripicr , Vatimenil , etc. ( barreau moderne). Paris, 1821 ; Panckoucke , rue des Poitevins, 16. Premier volume de la seconde s6rie, in-S" de 4S5 pages; prix, 6 francs. La collection enticre de cet ouvrage , public par souscrip- lion et dont il paraitra un volume toutes les six semaines, sera com- posee de seize volumes , huit pour Vancien barreau et huit pour le barreau moderne.

Le volume que nous annon^ons commence le barreau moderne, ct renferme le plaidoyer de M. de Lally-Tolendal pour Louis XVI, celui de M. Bellart pour mademoiselle Champion de Cice et celui de M. Bonnet pour le general Moreau; le discours de M. Billecoq sur la profession d'avocat, et celui pour F. de Riviere ; les plaidoyers de M. Dupin pour Robert Wilson et pour Savary, celui de M. Ilenne- quin pour Fievee, et le requisitoire dans Tafifaire de la Bibliothcque historique par M. de Vaiismenil. Le tome second , qui commence Vancien barreau, renfermera les plaidoyers de Loyseau de" Mauleon et d'J^lie de Beaumont.

83. Note sur la peritable interpretation d'une loi italienne , contenant des renseignemens sur la personne et sur les ecrits de M. Charles Pasebo, de Turin. Deiixieme edition, augmentee. Paris, 1821 ; impr. d'Antoine Bailleul , rue Thibautode, 8.

Cette notice n'est augmentee que d'un avant-propos. L'auteur pense que la loi piemontaise qui defend toute impression d'ouvrages dans les pays strangers, sans I'approbation des reviseurs pi6montais, ne doit pas s'etendre aux individus qui ont fixe leur domicile dans ces memes pays.

84. Du gouvemement, consideredansses rapports avcc le com- merce, ou de I'administration commerciale opposee a I'economie po- litique.ParF. L. A. Febbieb, (-dition, Paris , 1821 , Pelicier, place du Palais-Royal. Un vol. in-S".

Cet ouvrage est remarquable par une grande franchise d'opinion centre une science g6neralementrepandue, et pour laquelle les horn -

LIVRES FRANgAIS. 179

nies ont d'autant plus d'eslinie , que peu la compreniient bien et peuvent s'enrendre ua cotnpta exact. C'estla science de I'economie politique; o science recemnieatdecouverte, dit l'auteur,et qui, riche en thcorie qu'elle vante , quoiqu'elle en change perpetuellement , pauvre en faits qu'elle dedaigne, range toutes les nations sous la nieme loi. » L'administration , en general , embrasse tons les inte- r6ts positifs des peuples, et radministratioa commeiciale en est une subdivision. C'est de celle-ci que s'occupe particulieremcnt M. Fer- rier : en demontrant « qu'elle vit de faits , qu'elle repousse toute theorie absolue , parce que le malheurdes theories est d'etre inflexi- bles , » c'est-i-dire, sans application possible aux interets qui, de leur nature , sont toujours trcs-variables , il oppose cette science k celle de r^conomie politique , qui ne presente que des theories. Son but est d'expliquer le systeme d'administration commerciale ; de repro- duire , pour les combattre, les objections dont ilestTobjet. Remon- tant aux principes, qu'il deduit avec toute la clarte necessaire pa«r rendre facile et prompte I'intelligence de choses abstraites par leur nature , il divise son ouvrage en quatre parties , dans lesquelles il examine : i" ce que c'est que la richesse des nations ; 2" I'influence de I'argent sur la reproduction; le commerce, tant exterieur qu'interieur , et son action sur la richesse des peuples ; enfln , le systeme commercial de la France , ou I'objet et I'esprit des lois sur lesquelles repose la prosperite de notre Industrie. Dans ces quatre grandes divisions, liees entreellesavechabiletejl'auteur passe succes- sivement des principes , qu'il expose avec une logique lumineuse , a leur application. En faisant apercevoir la difference que suivent dans leur marche les deux sciences qu'il oppose I'une k I'autre , il reduit k sa plus simple expression une des questions les plus im- portantes. L'economie politique , suivant M. Ferrier ,procede dans ses speculations , comme si chaque nation n'avait pas des interets distincts , comme si tous les peuples ne formaient qu'un seul peuple : l'administration , au contraire, ne passe point de la thcorie i. la pratique ; elle remonte de la pratique a la theorie , n'admettant de theorie qu'autant que la pratique en a fait reconnaitre la jus- tesse. La manifere de poser la question , d'apris une indication aussi precise , influerait puissamment sur la solution. V. D. M.

85. De I'exportation et de l' importation des grains ; par J.-B. Ooi.N. Brochure in-8" , Paris , i8ai. (Ne se vend pas , mais se trouve chez I'auteur , rue Saint-Dominique , 17. J

12'

180 LIVRES FRANCAIS.

On doit de la reconnaissance am anciens administratcurs qui , ■i-etires des all'aires , chercheut , sans aucun intorfit personnel , k •faire profitcr Icur pays de Texpefience et des lumieres qu'ils ont acquisesdansl'exercice de leurs fonctions. Cette reflexion s'applique natiirelleinent a M. Ouin , qui , apres avoir occupc, pendant Jong- tems et avec distinction , des emplois supericurs dans I'administra- iion des subsislances militaires, a expose, dans un ecril a la fois clair et concis, Ics inconveniens de notre legislation actuelle surles grains, «t les dispositions qu'il convient , selon lui , d'y substituer. Aprt;s avoir demontrc , par des calculs rigoureux et par des raisonnemens .qui ne le semblent pas moins, que la loi du 16 juillet 1819 et celle du 34 juillet 1S21 qui la modifie sont a !a fois contraires aux interets des producteurs et k ceux des consommateurs, M. Ouin developpe le systeme qu'il croit le plus propre i les concilier. En voici les bases : i">. les deparlemens frontieres de la France seront divises en qua- torze classes, parce qu'il existe quatorze hassins qui aboutissent S la mer ou a Tetranger. Les marches regulateurs de Texportation seront choisis au sein des cantons les ■plus prod act if s de chaque bas- sin. 11 sera assigne a chaque marche regulateur uiie limite legale d'exportation , laquelle sera fixee sur le prix moyen naturel du fro- ment dans le voisinage de ce marche. L'exportation restera per- mise , dans chaque classe, aussi long tems que le prix courant de chacun des marches regulateurs n'aura pas depasse la limite legale determinee parle tableau de fixation. S" Les departemens frontieres seront egalement divises en quatorze classes , & I'egard de rimpor- tation. Les marches regulateurs de I'importation seront choisis parmi les communes les plus populeuses de chaque bassin. II sera assign^ a chaque marche regulateur une limite legale d'impor- tation , laquelle sera fixee sur le prix moyen naturel du froment dans le voisinage dudit marche , avec une addition de 5o cent, par hectolitre. Legouvernementauralafaculte de determiner les quan- tites de grains a laisser entrer dans chaque classe. 9" 11 continuera -d'etre percu des droits d'importation , non sur chaque hectolitre, mais sur chaque quintal metrique de froment admls & la consom- mation interieure ; ces droits seront gradues dans chaque classe sur la plus haute limite legale assignee i ladite classe , et ils seront susceptibles de decroitre dans les proportions que I'auteur indique plus loin. 11 donne aussi le tableau des marches regulateurs, tant

LIVRES FRANCAIS. 181

f onr I'expoiiation que jiour I'iinportation , avec les limites legales de ces difFerens marches ; mais il le presente seulement com me uu essai sur lequel il ap| elle un examcn attentif. Je ne me permettraipas d'emettre moa Oj'inion sur une matifere aussi importante , et qui de tout terns a divise les meillenrs esprits; mais je crois devoir dire que I'opuscule de M. Ouin me parait digne d'etre medita par tous ceux qui s'bccuj ent d'economie publique, par devoir ou par goiit.

A. MiCHELOT.

86. Qudquea Considerations generales sur les colonies. Paris , 1821. Jeulin, libraire, rue Saint-Honore , 338. in-S" de i5o p. Prix , 2 fr. 5o cent.

Cette brochure contient, ce qu'on aurait peine i croire aujour- d'hui, un long plaidojer enfaveurde la traite desnegres. L'auteur, auquel sa qualite et ses prejuges de colon paraissent avoir fait ou- blier sa dignite d'homme, semble croire que les noirs esclaves sont dans nos colonies cent fois plus heureux que les journaliers d'Europe. Selon lui , les negres sont incapables de sentir les bienfaits de la li- berie ; ils n'ont aucune notion du juste et de I'injuste , sont peu sen- eibles aux affections de la nature sur le sol natal ; en un mot , il les. cjasse parmi les etres seulement dou<5s de la vie animale, et totale- ment prives des facultes intellectuelles. Dans la description que cet auteur anonyme donne des travaux auxquels les noirs peuvent tStre employes , on croirait voir un naturaliste cherchant a depeindre les- mcEurs d'une nouvelle famille d'animaux. Voici les expressions dont il se sert : <• II suffit, pour voir le nfegre s'habituer a sa nouvelle po- sition , qu'on lui ait choisi I'espece d'occupations auxquelles sa nation est le plus propre. C'est le nom qu'on donne aux diverseis varietes de I'espece : ces varietes ont des earacteres distinctifs , re- marquables , m£me pour ceux qui ne les ont pas pris sur la cOte. Le Mandingue et Vibo sont propres k la terre ; le Senegalais, au service domestique et aux metiers, etc. , etc. » (page 52» )

En vain , une philosophic genereuse a demontre jusqu'a I'evidence combien il est cruel d'arracher ainsi des horames k leur patrie ;car, en les supposant meme plus depourvus d'intelligence que ceux de notre espece , ils n'en sont pas moins nos freres ; un ecrivain se trouve, qui n'aper^oit dans cet infame commerce qu'une action droite et nuUement reprehensible. On est force d'expliquer unesem- blable apologie par I'interet personnel, qui presque toujours fait mt-

182 LIVRES FRANCAIS.

connailre la justice ct la veritt;. Rcpoiidons a cet autcur anonyme par quelqucs citations lirecs de I'admirable chapitre de Montesquieu sur I'esclavage dcs negrcs. Si j'avais a soutenir le droit que nous avons cu de rcndre les nugres csclaves , dit ce grand publiciste , voici ce que je dirais ; Les peuplcs d'Europe ayant extermin^ ceux de I'Amerique , ils ont dft mettre en esclavagc ceux de I'Afrique , pour s'en servir i defricher tant de terres. Le Sucre serait trop cher, si I'on ne faisait travaillerpar des esclavesla plante qui le produit. Ceux dont il s'agit sent noirs depuis les pieds jusqu'a la tete , et ils ont le nez si ecrase qu'il est presque impossible de les plaindrc, etc.» Du reste , nous devons convenir que cot ouvrago est , sous d'autres rapports , I'un des meilleurs qui aient paru sur nos colonies. II abonde en idees saines et utiles , en aperrus lumincux, en raison- ucmens solides. Un style tout a la fois energique, elegant et naturel, contribue a rendre encore la lecture de ce menioirc trcs-attachante. 11 est facile de voir que son auleur a profondement etudie et sans doute parcouru le plus grand nonibre de nos ctablisscniens ct comp- toirs d'outre-mer. En consequence, nous le recommandons aux per- sonncs qui s'occupent de la question dc savoir si , dans I'etat actuel de notre societe politique , le systeme colonial offre plus d'avantages que d'inconveniens. A. T.

87. Etat actuel dela Corse; caiactere et moeurs de ses habilans; par P. P. PoMPEi. Paris, 1S21. Klefler , r. d'Enfer, 2. i vol. in-S» de 240 pages.

La Corse et le peuple qui I'habite valent niieux que la reputation qu'on leur a faite. Cette reputation fort equivoque date de loin , puisqu'elle est particuliercment due a Seneque , exile dans le coin le plus sauvage dc I'ile , et renfeinie pendant six ans dans une tour, d'oii , sans doute, il pretendit ttudier les moeurs et les usages du pays. Une terre d'exil, quelque paree qu'qn !a suppose des mains de la nature, n'est plus, aux yeux du captif, qu'un desert aride ; aussi le philosophe fit-il, pour exciter la pitie, le tableau le plus hideux du lieu de son exil , elant loin de se doulcr que son royal eleve le lui ferait un jour amerement regretter. La description calomnieuse de la Corse, i qui Seneque refusait les fleurs , les fruits, la verdure, les bois mSmc, quoique cette ile soil couverte de forets; la pein- ture des insulairrs , qu'il metamorphosait en brigands feroces , fu- rent repettes ct bicnlOt adoptees avec cette facility que Irouve tou-

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jours Ic nial a se I'aiie croire. Transmise d'4ge en age , cetle preven- tion est arrivee jusqu'ii nous, en subissant I'epreuve du tenis, mais seiilement modifiee quant an sol, et presque iutacte par rapport aux habitans. Renouvelee en partie dans dcs ouvrages recemment pu- blics, elle a inspire une juste indignation a M. Pompei , qui, pour venger sa patrie , vient de prendre la plume et de rel'ater les asser- tions accusatrices dent ses compatriotes etaient Tobjet. 11 arrive i son but , en consultant les annales de son pays , en representant les Corses combattant, a diverses d-poques, pour reconquerirlcurliberte. En rappelant que, dans le onzifeme siecle, ils donnerent I'exemple de I'affrancbissenient des communes , et dans le quatorzieme celui du gouvernement representatif, I'auteur prouve qu'ils nierit^rent d'etre appeles en Euiope les veterans de la liberie. Ils I'auraient conservee , sans la tyrannic des Genois, dont I'oppressive cupidite est peinte par M. Pompei avec une remarquable energie. II a soin de faire connaitre les guerriers corses qui lutterent avec des cbances diverses , mais tmijours avec un courage indomplable , pour affran- chir leur patrie du joug etranger. Des trails comparables a tout ce que I'antiquite nous a trausmis de plus admirable, font voir qu'il n'a manque a ces guerriers que des bistoriens, pour en faire autant de heros. Celui qui reunit les qualites et les talensqu'on aime a trouvcr dans le fondateur d'un 6tat, le celebre Paoli, est venge des doutes injurieux , des accusations meme dont I'envie a vainement tache de fletrir sa memoire. Parmi les preuves oules temoignagcsqui demon- trent que ce general fut exempt d'ambition , M. Pompei oublie celui de Jean-Jacques. En ecrivant au prince de Wurtemberg , en 1764, cet homme celebre s'exprimait ainsi : a Je crois que le general Paoli merite I'estime et le respect de loute la tcrre, puisquViani lemaitre, il n'a pas craint de s'adresser a quelqu'un qu'il sail bien , la guerre exceptee , ne vouloir laisser personne au-dessus des lots. » On sait que les Corses voulurent cboisir pour legislateur Rousseau , qui dit que les naissantes vertus de ces insulaires promettaient d'egaler celles de Sparle et de Rcvie , et qu'il avail quelque pre&sentivient qu'unjour celte petite He etonnerait I' Europe.

Demontrer combien les preventions contre la Corse sont denuiej de fondement, c'etait faire sentir combien il serait absurde d'exclure ct; pays des bienfaits de I'association dont jouissent les autres parties du vaste royaume auqucl il est reuni : opinion exprimee eependant^

ISA LIVRES FRANCAIS.

majs i'loquemment rcfutee par le general Sebastiani et par I'auteur de I'ouvrage que nous annon^ons. Ecrit avec une chalcur entrainante, plein do fails intercssans, d'observations judicieuses , cet ouvrage est du nombre de ceux qui se refusent i I'analyse , et qu'il faut lire quaud on veut connaitre la verit6. V. D. M.

S8. C)GaleriifraTipaise,o\iCollection de portraits des homines et desfemmescelebres qui ont illustri la France dansles seizieme,dix- sep tieme et dixhuitieme siecles,accompagnee de notices biographiques sur chacun d'eux ; par une socicle d'hommes de lettres et d'artistes , I", 2', 3", 4', 5". 6', et S" livraisons. Paris, 1821 ; Lefort , rue des Fosses-du-Temple , n" 4- On souscrit pour cet ouvrage, qui sera compose de cent portraits environ , et qui parait par livraison de quatre portraits, quatreyrtcsrm;7eet quatre notices, de rimpritnerie de Didot, sur papier velin ; grand in-4°; cbez M. Lefort, i I'adresse cidessus indiquee ; et au bureau des Jfffiches Parisiennes , rue de r Arbre-Sec , n" 02. Prix de chaque livraison : h domicile j 6 fr. 5o c. , et 7 fr. pour les departemens.

Cet ouvrage, honore de la souscription des premiers personnages de Tctat, se recommande par lui-mcme aux amis des lettres et des arts , ainsi que de la gloire nationale. En attendant que nous puis- sions en rendre un compte detaille, nous croyons devoir faire con- naitre a nos lecteurs cette belle entreprise, ex6cutee par une reu- nion d'hommes de lettres et d'artistes , parmi lesquels on re- marque MM. Andrieux, Denon et Fourier, de I'lnstitut; Droz , Forbin , Gautherot, Lemontey, Lesueur, Mathieu Dumas, Miel, Muriel, Picherand, de Segur et Villemain. Une ressemblance exacte et rigoureuse est le caractcre particulicr qui distingue les portraits publics jusqu'a present ; et les auteurs des notices , de leur c6te , desirant donner a I'ensemble de I'ouvrage cette unite si precieuse dans les arts, se sont moins attaches a etre biographes que peintres , et ont lutte, en quelque sorte, avec les artistes, de precision et de fi- delite. Nous citerons la notice de Budee, par M. Andrieux; de Pas- quin, par M. Auger; du president de Thou, du cardinal de Eetzet de madame de Longueviile , par M. Lemontey, et du cardinal de Riche- lieu, par M. de Segur; notices qui toutes avaient ete lues a I'Academie fran^aise. Cette emulation , entre des litterateurs aussi distinguds , doit augmenler encore le succfes d'une entreprise toute nationale. D'apres Ic prospectus, cbaquc notice devait Stre conipos6e d'une

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trenlaine de Hgnes , ou une page environ, et I'on n'avalt calcul6 que sur I'emploi d'une feuille pour quatre notices ; mais il n'a pas paru convenable aux collaborateurs de se renfermer dans des limites qu'eux-memes avaient tracees ; eta la huitieme livraison , I'ouvrage, qui n'aurait dd comprendre que huit feuilles , en comprend trente. Le desinteressement des editeurs, qui n'ont rien ajoute au prix pour la souscription, doit etre pay6, par un juste retour, de la faveur du public.

S() (•) Memoires historiques ■, politiques et litleraires sur le TOjaume de Naples, par M. le comte GregoiVe Obioff, etc., ou- vrage orne de deux cartes g6ographiques , publie avec des notes et additions par Amaury Duval, membre de I'lnstitut de France. Paris, 1S21 ; Chasseriau, libraire, au depOt bibliographique , rue Neuve-des-Petits-Champs, n"> 5j 5 vol, in-8». Prix, 20 fr.

Les trois volumes de ces Memoires, qui viennent de paraitre, com- plfetent I'ouvrage de M. OrlofT, dont les deux premiers volumes oat iXk publics en iSiS. II traite , dans ces trois derniers, de I'bistoire de I'administration interieure du royaume de Naples et de son histoire litteraire. Nous continuerons i rendre compte de cet ouvrage et des notes dont le savant editeur I'a enrichi. (Voy. Rev. £ncyc.,Tom. I, p. io4, et Tom. Ill, p. 223 et 292 ).

90. Recherches geographiques sur I'inlerieur de I'Afrique sep- tenirionale, comprenant I'bistoire des voyages entrepris ou executes jusqu'a ce jour pour penetrer dans I'intericur du Soudan; I'exposi- tion des systemes geograpbiques qu'on a form6s sur cette contr6e ; I'analyse de divers itineraires arabes pour determiner la position de Timbouctou ; et I'examen des connaissances des anciens relativement ^ I'interieur de I'Afrique : suivies d'un appendice contenant divers itineraires , traduits de I'arabe par M. le baron Silvestre dc Sacy et M. de La Porte ; et plusieurs autres relations ou itineraires 6gale- ment traduits de I'arabe , ou extraits des voyages les plus recens. Ouvrage accompagne d'une carte. Par C.-A. Walckesaeb. Paris, 1821. Arthus-Bertrand , lue Hautefeuille, 23. Un fort vol in-S". De I'imprimerie de F. Didbt. Prix, g fr., et , par la poste , 10 fr. 5o cent.

Cet ouvrage , qui n'a <ite imprime qu'a un tres-petit nombrc d'exemplaires , sert de complement a VHistoire des vojages el des

18G LIVllES FRANCAIS.

decoui-ertcs fails eii yifrique, depuis les siecles les plus recules Jus- qu'd nos jours- (Voycz Reuue Encj/clopedique , tome X, page 97.)

91. Cours d'uranographia , de geographie el d'histoire ancienne et moderne (Geographic de la France) , faisant partie du Cours d'e- tudes clemeutaires ; par M. CnEMiN-DupoNTts. Paris, 181 1. Cher I'auteur, rue Saint-Denis , n" 279. Prix , Co c.

92. Nouveaux elemens de geographie moderne et unirerselle , cxtraits de la dixicme edition de I'Abrege dc la geographie , de Go- ihbie; par I'aulcur du memc ouvragc. Deuxienie edition , poigneu- scnient revue, corrigee et augmentee de 4oo pages ; avec les nou- Telles divisions conformes i I'etat politique actuel de I'Europc et des autres parties du monde ; coniprenant les dernieres decouvcrles iaites en 1820, dans la nier polaire arctique au nord ouest de I'Amerique septenlrionale , par le capitaine Parry, et ccUes faites dans rOcean austral et dans les autres parages du globe , a I'usage des jeunes eleves des deux sexes. Paris, iSai. Ilyacinthe Langlois , libraire et geographe , rue de Seine, faubourg Saint-Germain, a" 12. Un volume in-12 de i,o36 pages, avec 4 cartes. Prix, 6 fr., et 7 fr. So c. par la poste ; le texte avec un atlas in-4° de tS cartes enluminees , 10 fr. ; le meme , avec un globe terrestre de 6 pouces de diametre, pour Tintclligence de cet ouvragc , i5 fr.; le meme, avec la carte des cinq parties du monde , en 5 feuilles grand-aigle , enluminees, donnant les nouvelles divisions et decouvcrtes, i5fr,

go. Nouvelles notions de geographie moderne et universtlle , extraites de la deuxieme edition des nouveaux elemens de geogra- phic de GuTHBiE, dans lesquelles on a conserve fidelement tous les tableaux synoptiques des nouvelles divisions des cinq parties du monde et de leurs etats , comprenant les dernieres decouvertes faites en 1820, dans la mer polaire arctique , au nord-est de I'Amerique septentrionalc, par le capitaine Parry, et celles faites dans I'Ocean austral et dans les autres parages du globe, avec 3 cartes. Paris, »8ai. Ilyacinthe Langlois, libraire et geographe, rue de Seine, faubourg Saint-Germain, 12. Un volume in-12 de 48o pages; le texte , avec les cartes des cinq parties du monde , en 5 feuilles grand-aigle enluminees, donnant les nouvelles divisions et decou- vcrtes. Prix , 12 fr. 94 -—['Wojage en Jrmenie et en Perse, par M. le che valicr.-^/rttft/fe

LIVRES FllANCAlS. 18T

Jaubebt, maitre des rcquetes, premier secretahe inlerprete de S. M., professeur a I'ecole royale des langues oiientalcs. Paris, 1821. Pclicier, place du Palais-Royal; Nepveu , passage des Panoramas. Un fort volume in-S", accompagne d'une trl's-beile carte et d'un grand nombre de planches.

Get ouvragc , fruit de quinze annecs de travaux et d'observations , contient plusieurs details nouveaux sur les mceurs des Persans , et uae carte tres-exacte des pays compris entre Constantinople^et Teheran. Cette relation, que le noni seul de son auteur su£Qt pour recom- mander, ne le cede, sous aucun rapport, a ce que nous avons de plus parfait dans ce genre. Une connaissance approfondiedes langues et des mocurs du pays , des observations neuves , un style plein de graces, des aventures qui paraitraient romanesques si malheureuse- ment elles n'etaient trop bien constatees , de savantes discussions geograpliiques qui n'ont rien de fastidieux, enfin I'interfit qui s'at- tache a une mission diplomatique d'une hautf importance , que les crimes les plus atroces n'ont pu faire echouer, tout se reunit pour assurer a cct ouvrage le succes le plus flatteur et le mieux nitrite. II n'a pas encore ete mis en vente. E. G.

gS. Essais sur la Valachie et la Moldai^ie , theatre de I'insur- re ction dile Ypsilanti ; par RI. de SALABEBRy. Paris , 1821. Simonot , rue du Roule, n" 2. Brochure de 55 pages. Prix , 1 fr.

96. Conjuration de quatre-uingt-seiLc gentilshommes polonais , tcossais, suedois et fran^ais , centre le gouvernement russe , el massacres dans les mines du chateau de Macizjowicke ; ouvrage traduit de I'anglais, par Alfeed F.... (Favot). Paris, Doniere, rue du Cimetiere-Saint-Andre-des-Arcs , 1821. In-S" de 20 ^siges.

Nous ignorons quel est le degre d'authenticite des faits extreme- ment curieux contenus dans cette brochure ; il est certain du moins qu'ellc olTre une narration extremement attachante : ce qui est du k la forme dramatique du tableau, ainsi qu'au talent de I'historien. Sa maniere a quelque chose du brillant de celle de Saint-Real, qu'il rappelle aussi par le fond du sujet et jusque par le titre.

^7. Opinion de M. Stanislas Girahdin, depute de la Seine-In- ferieure, sur le retranchement d'une sonime de 5o,ooo fr., demande par la commission du budjet , destinee a encourager Tinstruction primaire. De rimprimerie d'Hacquarl, rue Gil-le-Gceur, S. Bro- -^hure in-S° de 12 pages.

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98- Cours de litteralure ancienneet rnodemedl'usags des jeunas demoiselles; par madame la conitesse cI'Haitpoul, avec figures. Deu- xieme edition, revue, corrigee et augmenlee d'un volume sur la lit- tirature eirangere. Paris, iSai . Bossange pure et fils, rue de Bourbon, n" 6 iw. Londres, Martin Bossange, i4, Great Malboioug- Street. Deux vol in-12; prix, S fr.

Get ouvrage ofll'e un agrcable melange d'instruction ct d'amuse- nient. Si je pouvals citer les deux pages qui ibrment la preface , j'au- rais donne une juste idee de I'esprit superieur de I'auteur, qui a, de- puis loug-tems, obtenu dans les lettres un rang fort distingu6, par de» poesies pleines de grace et de sentiment ; car, pour le dire en pas- sant, il ne suffit pas d'un gout ou d'un jugement mediocre pour faire de bons livres clementaires. Je me bornerai ^ indiquer le plan remplj par I'auteur. Sous le litre A' introduction aux grands siecles, madame d'Hautpoul donne k ses lectrices nne idee de la poesie biblique et des poetes des terns heroiques et fabuleux , Homere , Hesiode , Esope, dont, grclce aux eruflits, I'cKistcnce est aiijnnrd'hui fortproblematique. Les granr1« sierlps sont ceux de Pericles, d'Au- guste, de Louis XIV, et le dix-huitieme siecle , qui , il faut bien en convenir, merite aussi le titre de grand. Cbaque siecle offre des subdivisions de genre; cbaque genre est signals par les chefs- d'oeuvre qui le distinguent. Un appendice traite des litterateurs nos contemporains. Le second volume est consacre i la littSrature etran- gere , et divisd par nations. 11 est termine par une Bihliographie des demoiselles. Ce cadre est parfaitement complet. J'ajouterai qu'il n'elait pas possible de le remplir mieux que I'a fait madame d'Haut- poul. Ses jugemens litteraires sont d'un goiit tres-pur^ appuyiis sur des citations bien choisies, entremeles d'anecdotes qui rendent la lecture de son livre extremement agreable. Onconcoit difCcilement comment une femme a pu se livreraux recherches que supposent des tableaux aussi varies. Ce que Ton con^oit plus fnrilement, c'est que nuUe autre qu'une femme du meilleur esprit et du meilleur sens ne pouvait ecrire pour les jeunes personnes de son sexe , avec cctte fleur d'eltgance et ce parfum de bon ton qui respire dans cbaque page de ce livre.

99- ""(') dEuvres completes de madame la baronne de Stazl, publiees par sonjils; precfedees d'une Notice sur le caractere et les ecriis da riadame deStaeU par madame ^ECKEB pb Saisscbs. Siiifeine et der-

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nifere livraison. Tomes XV% XVI' et XVII* et dernier de la collec- tion. Tiois volumes in-8°, 1821. PSris, Strasbouig et Londres, chei Treuttel et Wlirtz; prix , tS iV. Le mume ouvrage, editioa in -12 ; prix, 9 fr.

Le tome XV contient: Dix annees d'exil,fra'^mens d'un ouvrage inidit, compose dans les annees i8io a i8i3. Le tome XVI , Frag- mens dramatiques {A gar dans le desert, scene lyrique; Ge7ze;^/ep'e de Brabant, drame en trois actes et en prose ; le Capitaine Ker- nadec, ou Sept annees en unjour^ comedieendeux actes et en prose; la Signora Fantastici, proverbe dramatique; Saplio, drame en cinq actes et en prose). Le tome XVII : des Melanges, parmi lesquels {Jeanne Grfl/, trage'die en cinq actes et en vers; Sophie, ou les Sen- timens secrets, piece en trois actes et en vers, etc., d^s Poesies, tic). A la fin du volume est une Table chronologique des ecrits de ma- dame de Slael, avec Vindication des volumes oil ils sont contenus. Ces trois volumes forment la sixieme et derniere livraison de I'edi- tion in-S" et de cellein-12. lis se veiident aussi separement sous le titre d'(Suiyfc3 inedites de madame la baronii-e de Slael, publi^es par son fils. Le prix est le nieuie que dessus. Les m6mes editeurs an- noncent la tres-prochaine publication des tomes VI, VII et VIII des (Suvres completes de M. Necker, qui formeront quinze volumes in-8° et qui se rattachent par tant de liens aux CEuvres de ma- dame de Stael, que les deux collections peuvent en quelque sorte 6tre consid^rces comme n'en formant qu'une seule. Nous rendrons eompte separement de ces deux collections qui se recommandent i la fois par les deux noms de leurs auteurs.

100. (*) Encjfclopedie des dames, par une societe de savans, de gens de lettres et de dames. Histoire de France, par mesdames de Bawb et Sophie de Maeaisb; Tom. I" et 11' in-S°. Manuel de la maitresse de maison ou Leitres sur l' economic domestique , par ma- dams Pariset; I vol. in- 18. Paris, 1821; Audot, libraire - 6diteur, rue des Ma<;ons-Sorbonne, n" 11.

Ces trois volumes ouvrent la collection de VEncyclopedie des dames, dont nous avons annonce le plan ea donnant les noms des principaux auteurs et les conditions relatives a la souscription ( voy. Tom. IX, pag. 63o). On aimc a voir un ouvrage entrepris en faveur des dames s'annoncer sous les auspices d'ecrivains choisis parmi elles. II eCit peut-etre ete a desirer que toutes les parties de cette

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Enclyclopedic eussent pu Clre traitecs par des dames. Qui mieux qu'unc leninie pounait rendre la science accessible 4 son sexc ? Le style en general clair, simple, naturel des femmes, semble tout-ii- fait propre i rendre populaires les haulcs conceptions du genie et de I'Ltude. Mais les noms des auteurs charges des parties Ics plus se- Veres de cette collection sont un sur garant que leurs sujets seront traites avcc une precision et une elarte qui ne laissera rien i desirer. Les deux premiers volumes de VHisloire de France , par mesdames de Bawr et de Maraisc, comprennent les tems ecoules depuis Clovis jusqu'a Charlemagne inclusivement. Le style rapide et anime de leur narration fait relire avec un nouvel int^ret les faits les plus connus de cette premiere epoque de notre histoire, dont elles ont trace une peinture fidiile. Leur touche , legire et gracieuse, lors- qu'cllcs peuvent faire reposer I'attention sur des sujets agreables, devient forte et inergique , lorsqu'elles ont i decrire les scenes trop souvent horribles de ces premiers tems de la monarchic franc^aise. Mais, une matiere qui ne pouvait etre bien traitee peut-etre que par une femmc, c'est le Manuel i\e [a maili esse de maiiua. Madame Parisct s'est trouvee tout-a-lail sur sou terrain en s'occupant de ce sujet; et le censeur le plus rigoriste , qui pretend faire de I'ctude des sciences et des lettres, ainsi que de I'art d'ecrire , I'apanage exclusif des bommes, sera force d'avouer qu'i une femme appartenait le droit de guidcr et de doter, pour ainsi dire, deses conseils sur Teco- nomie domestique,les jeunes personnes destinees a etre un jour a la tete d'une maison. Madame Pariset n'a pas borne ses instructions aux details de menage , et I'on pense bien qu'elle a trouv6 moyen , plus d'une fois, en parlant ameublement et cuisine, de glisser dans ses lettres 4 mademoiselle L. ,. . des avis sur la conduite que doit tenir une femme dans son interieur, pour conserver la confiance et I'amour de son mari, ainsi que I'eslime et la bienveillance de ceux qui I'approchent. Nous croyons pouvoir dire avec elle 4 toutes les jeunes personnes qui mettront ses lemons en pratique : « Vous screz heureuses , puisque vous rendrez vos devoirs aimables comme vous , et que la pratique babituelle de ces devoirs paraitra si douce i ecus qui en seront les temoins, que, par un attrait irresistible, ils rem- pliront exactement leurs propres devoirs , ne fut-ce que pour vous imiter. D E. Hereau.

\Q\ .—(Euvres compUtes de madame Tsabelle de Montoliec, qua-

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tri6me livraison. Caroline de Lichtfield ., avec figures et musique. Paris, 1821, 2 vol. in-S" de 270 el 017 pages, formant les 9^ et 10' de la collection. Artlius Bertrand , libraire , rue Ilautefeuille , 11° 33. Prix , 6 fr. , et par la poste 7 fr. 5o cent.

Parmi les nombreux et intcressans ouvragesde cette dame aimable et spirituclle qui , des bords tranquilles du Leman , repaad dans les principalcs contrees de I'Europe les heureux fruits de ses douces inspiralions, on aime surtout a revoir, comnie une ancienne et tendre aniie , sa delicieuse Caroline de Lichtfield. Charmant carac- tere de Caroline, noble caractere de Walstein; caracteres aimables, I'un bouillant et passionne de Lindorf; I'autre en apparence plus calme, mais peut-elre plus solide et plus constant, de la naive et tendre Mathilde ; action simple , rapide , pleine d'interCt ; incidens naturels et peu compliques ; denouement satisfai'^ant pour les quatre principaux personnages du roman , et pour le lecteur devenu leur ami : tels sont les souvenirs que laisse dans notre esprit et dans notre coeur cette peinture ideale et seduisante, qui n'est peutetre pas sans danger, puisqu'elle fait trouver cusuite le monde reel trop monotone et trop insipidc. M. A. J,

102.— Emma ou la Nuit des noces, par Noel Hyeval. Paris, 1821. Hubert, libraire, Palais-Royal, galerie de bois, n" 222. In-12 de 197 pages.

Tel est le tltre d'un nouveau roman qui vient do paraitre , et qui obtient beaucoup de succes. On y trouve des caracteres neufs , des situations tour i tour sombres , terribles ou pathetiques ; un style quelquefois energique et quelquefois gracieux ; des descriptions qui annoncent le talent de I'ecrivain et de I'observateur. Cet ouvrage est le coup d'essai d'un jeune homme de dix-luiit ans, que nous enga- gerons a se tourner vers un genre de litterature plus eleve. M. B.

io3. Frankenstein, ou le Prometheemoderne, diidie a William Godwin , auteur de la Justice politique , de Caleb fVilliams , etc. ; par madame Shelly, sa niece , avec cette epigraphe : «Createur, t'ai - je demande de me tirer de I'argile pour me faire homme ? t'ai-je sollicite de m'arracher du n6ant?» Milto.n, Paradis perdu. Ouvrage traduit de I'anglais , par J. S. '". Paris, 1S21. 5 vol in-12 , ensemble de 715 pages. Correard, libraire, Palais-Royal , galerie de bois, 258. Piix, 7 fr. 5o cent. , et par la poste 9 fr.

Cette bizarre production d'une imagiuation malade fait regretter que I'auteur n'ait pas applique son talent a une conception plus

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raisonnable et plus digne d'interfit. On voudrait surtout que I'ou- V rage d'une feninie offrit dcs peintures aimables et giacieiises , au lieu d'objets et de r6cits toujours revoltans et hideux. Un GiSnevois, Franlensteip , va faire ses etudes a Ingolstadt , oil il suit des cours de philosophie naturelle et d'alchimie. Nourri des rfiveries de Cor- nelius Agrippa, deParacelse et du grand Albert, il r^ussit i dd-rober ^ la nature les causes niysterleuses de la generation et de la vie ; il devient mOme capable d'animer une matifere inerte; uiais il donne I'existencc k un etre epouvantable, aux formes glgantesques , i la figure humaine , moitie homme, moitie demon, dont la vue lui inspire a lui-meme une invincible Lorreur , et dont il se fait un en- ncmi redoutable et acharne , parce qu'il refuse de lui accorder une compagne. Get etre nionstrueux assassinele frure , I'ami, la fiancee, le pere du malheureux Frankenstein , qui le poursuit , pour en d6- livrer la race humaine, jusqu'au milieu des glaces du pOle arctique, oil il est recneilli sur un vaisseau anglais , et termine sa triste carriere, ^puise par la fatigue et par la douleur. L'Lorrible creature qui avail dctruit toute sa destinee nipnrt npr;.« lui. pn se precipitant dans un des gouffres de la mer glaciale. II ne reste dans I'esprit du lecteur qu'une impression p6nible de degofit, apres avoir devore ce tissu d'aventures invraisemblables et absurdes dont les heros n'inspircnt aucun intferet, et d'inventions extravagantes qui n'ont aucun but de moralite, qui ne peuvent ni eclaiier I'esprit , ni clever I'ame, ni instruire , ni amuser. Esperons que I'auteur, dans un sujet plus heureux , nous offrira des images plus agreables , des personnages plus interessans, des relations plus utiles, et appliquera les pr6- ceptes des grands niaitres ; le bon sens et la raison doirent etre les premiers guides d'un icrivain , quel que soit le genre de ses ou- vrages. ^^' "^' •'•

io4. Les Exiles de Par^a^ poiiiie , par M. le haron d'ORDKE, Hiembre de plusieurs societ6s litteraires; seconrip <^dition , suivie de poisies diferses , par le meme. Boulogne-sur-Mer, 1820. Leroy- Berger,et Paris, Louis Janet, rue St- Jacques, Sg. In-8° de i44 pag.

Le plus beau ministere des lettres , mais aussi le plus perilleux , est d'offrir des hommages i la courageuse infortune, et de fletrir par des traits ineffa^ables I'injustice des hommes puissans. 11 est peu d'evtnemens qui honorent plus notre epoque et notre litteratnre que les larmes que nous avons tous versees sur les malheurs de Parga. Ses habiians fugitifs, en ecoutant les consolations que leur

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adressaient nos pontes , ont etc distraits de leur douleur, autant qu'oa peut I'etre quand oa pleare sa patrie. Nous avons deji enlre- tenu nos lecteurs des beaux vers de M. Viennet ; ceux que vient de publier M. d'Ordie etiacellent moins de poesie, mais ils offrent des passages ecrits avec talent et dans lesquels on rencontre des pensees brillantes. Nous indiquerons le portrait du Pargauiote ; Ne parmi les rochers , sur une aride plage , L'habitant de Parga doit tout a auu uuurage : II n'estime Ip f"^' que pour armer ses mains, Et "'■ ronnait point Part de nourrir les humains. Fa^onne dOs I'enfance au dur metier des armes , Ses plaisirs et ses jeux naissent dans les alarmes. L— i.

io5, Contes et aulres poesies, suifis des moeurs villa^eoises nouuelle pastorale melee de vers ; par M. Bazot , membre de I'A- tbenee des arts, etc. 2" edition. Paris, 1S21; Barba, libraire, Palais- royal, derriere le the&tre frangais. Tin vol. in-iS, pap. viilin; prix, 2 fr.

^1 trouve dans ce recueil des morceaux oil il y a de la grSce , de I'esprit ei <lt: U facilite. M. Bazot est deji connu avantageusement dans la rcpublique des letiice par un onvrage sur la franc-ma^on- nerie et un eloge de I'illustre et respectable abbe de I'Epee , eloge couronne par la societe royale academique des sciences de Paris, et dont on vient de publier une o" edition. M. B.

106. Zm Promenade aux tomheaux, par M. H.B'>w«ellier. Paris,

1S2I ; Mignerei, brochure in So He pages.

107. Description de I'Egjple. Dixieme et onzieme liuraisons. Paris, 1821. Panckoucke , rue des Poitevins , 14. In-f".

Voici ce que renferment les deux derniferes livraisons dc cet ou- vrage , dont la publication se poursuit avec activite.

Dixieme lii^raison.

AsTiQUiTES, Vol. I, pi. 20. La Statue de Memnon , qui a ete decrite par plusieurs bistorlens , et qui , au lever de Taurore » rendait des sons harmonieux. On est encore reduit a des conjec- tures sur I'origine de ce phenomene , qui a cesso depuis le quStrieme siecle de I'ere vulgaire, bien que ties observateurs rccens pretendent avoir entendu ce bruit mystcrieux. Les voyageurs ont observe , au milieu des mines de I'Egyple , un son analogue produit par la grande rarefaction de I'air , et qui semble se rapporter au recit des autcurs ;

Tome xi. i(>

19A LIVRES FRANCAIS.

iiiais il resle encore k decouvrir la v6rilablc caiisd du plieiiomeDe et le micanisnie, plus ou moins ingenieux , doiit les pr6trcs faisaient usage. ( Voypz la Description ginerale de T/u-bes, chap. IX de la Description des antiquites , oii ces questions sont examinees.)

p'ol. Vy PI. 7. Cette planche donne les details de rarchitecturc dii grand temple de P/iilce, des galeries ct des pylOnes qui le pre- cfcdent.

^TAT MODFRXE. Ahts et MiSiiEBs. PI 2. Gclte planche re priisente les diCercnsybuw aujourd'hui employes Oans Ics .iits. La pliipart des figures s'expliquent d'elles-mcmes. Les fours les plus interessans sont, i" ceux oii Ton sublime le sel ammoniac dans de grands ballons de Terre ; 2" les fours a poulets. L'industrie qui fait eclore les ccufs sans le secours des oiseaux , est heredilaire en Egyple ct remonte a une epoque immemoriale. Au moyen de ces pratiques singulieres , qu'on a voulu ea vain naturaliser en France, les Egyptiena parviennent a fa ire eclore dans un scul four, cbauHe convenablement pendant environ trois semaines , jusqu'a cent cin- quante niille poulets.

Fl. 10. Representation de plusieurx arn reladfs a Vemploi du J'roment. L'un d'eux est celui qui sert a fabriquer la pate de vermi- cel , au moyen d'un plateau do cuivre mince fortement chaufle , sur lequel on verse une pSte liquide , par les trous d'un vase dispose en forme d'arrosoir.

Fl. %oo. Vases , mcuhlex ei instrument ~^f^r\ a rcuni dans cette planche les instrumens i vent aujourd'hui employes par les Egyp- tiens , ainsi que les instrumens de percussion : plusieurs d'entre eux remontcnt a une haute antiquite.

Onzihne lipraison.

Antiquites. Vol. J, pi, 5. L'objet de cette planche est de i.' cprisenter I'ensemble du plan des principaux monumens de Phila, les galeries qui les precedent et le detail particuller du grand tcmpl«.

Vol. I, pi. 81. On peut juger, par le detail du temple de Latopo- lis, que reprt'sente cette planche, de la prodigieuse quantite d'hi6- roglyphes qui rccouvrent les monumens d'Jigypte depuis le comble jusqu'au sol. Cclui-ci contenait plus de deux cent mille pieds carrt's sculpfijs avec la meme richesse.

LIVRES FRANCAIS. 195

Etai jiodenne. pi. 12. Vue de Soueys , qui a cte jadis un port floi'issant et I'entrepOt du commerce del'Inde avec roccident.

PL 101. Cette planche a le mfctne objet que la plaaohe 102 , c'est- a-dire , de donner un parallele entre les constructions de plusieurs

Tilles d'Egypte.

PL XV. AttTS ET METIERS.

loS. Les trois ages de M. Gbbabd , gravis par Morghen. Paris, iSai-. Potrelle,rue Saint-Honore. Prix, 5o fr.

Lc peintre de Psyche, de Belisaire , d'Ossian , accoutum6 aux succes , el or» pnsscssion de cette sorte d'ascendanl sur I'opinioa qu'obtient toujours un grand talent, exposa, en 1S08, un tableau dans lequel il voulut representer I'influence bienfaisante que les fenimcs excrcent sur nous a toutes les epoques de la vie.

Placee entre son pere et son mari, et tenant son enfant sur ses genous , une femme , tout a la fois fille , Spouse et mere , cxprimait avcc beaucoup de justesse et de grSce la pencic ijuc le peintre s'e- tait propose de reproduire. Cette pensee ne pouvait manquer d'etre vivement apjjlaudie dans un pays oil, loin de repousser Tascendant qu'elles exerccnt sur tous lea ages , par une tendresse aussi variee dans ses moyens qu'inepuisable dans sa nature , les femmes , au contrairc , obtiennent une sorte de culte.

Ce tableau , execute dans les dimensions historique? , et compose avec beaucoup d'esprit et d'entente des effets pittotesques, fut tres- goClte du public ot dot. cnnndooomo, 4UI le placercnt immediate- ment aprcs la Psyche et le Belisaire , chefs-d'oeuvre de cc maitre. Achete par madame Murat , il fut transporte i Naples.

Qu'est-il devenu au milieu des evenemens politiques survcnus dans ce paysf Je I'ignore. Mais le moins que Ton put craindre, c'etait qu'il ne fut entierement perdu pour la France. Heureusement, M. Gerard s'est occupe de le faire graver. II a confle cette operation a M. Morghen, I'un des graveurs les plus celebres de I'epoque actuelle.

En considerant cette nouvelle production , il est impossible de ne pas reconnaitre qu'elle sort de la mCme main ^ qui nous devons la Cine de Lionard de Vinci, dans la quelle M. Morghen a deploye le talent qui lui a fait une reputation europeenne ; seulement , un exa- men attentif fait retrouver 9A et la quelques traces de faiblesse dues i I'influence des annees; mais c'est Ic declin d'un beau jour, et cette

13*

19G LIVRES FRANCAIS.

gravure sera I'rchcicli6e aver, raison des connaisseuii! , parce que , dans sa masse, ellc reprodiiit biei> I'circt du tableau. P. A.

109. Plan de I' habitation de Bonaparte dans Vile Saint-He- line, dressi sur les lieux par M. de LkscksissJiIs, Crochard, cloitre Saint-Bcnoit , n" iG. Prix, 1 fr, 25 c.

Ltvres en langues cirangdres imprimis en France.

110. Specimen noiHc tjpographicv md/cn'. Specimen de ca- ractferes saniscrits , graves et fondus sous la direction de M. -^ug- Guil. ScnLECEL. Paris, 1821 ; in-ia.

Depuis Ic commencement de ce siecle, les publications, dans les langues de I'orient, ont recu une nouvelle activit(i. Sans parler des immenses travaux dessavans professeurs de Calcutta, nous trouvone, en Europe meme, un progres sensible, tant dans I'^tude de ces langues 4u«> dans leur execution typographique. La lilhographie est Tenue apporter de iiouvellcs ressources; et plusieurs essais, pour rendre son application facile au caractere samscrit et arabe , n'ont pas etd" sans succes. Mais, quelle que soit la perfection a laquelle on parvient, on nc peut cepcndant se Hatter de remplacer entiferement i'imprimerie. II sufiSt, pour se convaincre de cette veritd, de com- parer les Specimen que nous offre M. Sclilegel avec la Chrestomathie de son compatriote , M. Franc. Sans doute I'cuvrage de ce dernier est une producilon tres-remarquable ; mais la gracilit^ et la mes- quinerie de ses caractferes esi Lieu uu dcosuua Jc la calligraphie, qu'il eflt do chercher i imiter, et que M. Schlegel est loin d'avoir encore rendue , quoiqu'il ait certainement surpasse de beaucoup ce qui avait (>t6 fait avant lui. Nous devons ajouter que c'est a un artiste franijais qu'est due I'execution de ces caracteres , que M- Schlegel a fait fondre par ordre du prince de Hardemberg , cbancelier de S. M. le roi de Prusse; et nous saisissons cette occasion avec empresse- ment, de rendre un juste hommage a la noble liberality avec laquelle les ministres de ce royaume soutiennent, encouragent et recom- pensent les travaux de leurs savans. E. G.

111. Rime di F. Petrarca col comento , etc. Les Rimes de P6trarquc, avec le Commentaire de M. BiAGiOLi. Paris , 1821; chez I'iditeur, rue Rameau , n" 8. In-S".

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TV. NOUYELLES SCIENTIFIQUES

ET LITTl^RAIRES.

AMERIQUE.

Eiats-Ums.— EiAT DK l'Ohio.— Gfio/og/tf.— En crcusaut des puit» pifes de Ciicleville , de Ridge-Ville et des Lords du Scioto , on a de- couvert, i differentes profondeuis , des ossemens humains et des cranes qui, evldcmraont , n'ont pu y etre deposes par la main des hommes. On y a trouveegalement, jusqu'i une profondeur de vingt- deux pieds , plusieurs dents de Mamniouth , du poids de neuf a douze livres , le long du Scioto et de la rive meridionale du lac Erie, pres de Cincinnati. Ces curieux debris ont du y etrc ensevelis , a une ipoque oil tout le pays etait inonde. II a dCl I'etre pendant dp longues annees, puisqu'a dix-*ept pieds au dessous du eol actuel, on trouve des liis de cailloux qui semblent arrondis par le mouvement des eaux, couame ceux des riviires. M. Atwater, de Circlevilje , con- serve dans son cabinet une partlc de ces ossemens qui paraissent demon trer, comma il le fait observer, que le sol americain n'est qu'une gi-ande alluvion et un vaste cimetiere des etres vivans des ages anterieurs aux terns connus. American journal qf science and arts. B— Y.

—Source de bitaiiic.— 'M. Hall n Jcuouvert une source de petrole, au nord-ouest du Duck-Creek. Le bitume sort d'une espece de puits, de 42 pieds de profondeur et de 5 de diametre, situe au bord de la Crique ; il s'eleve en bouillonnant et coule par une rigole dans la petite Baic la source pent en fournir cinq barils par semaine. L'eau . de la Crique est couverte de cette huile jusqu'a trois milles de la source. Dans le puits elle parait occuper une profondeur de 3 pieds et Ctre portee sur l'eau salee. Un enfant voulant essayer si ce bitume prenait feu , en approcha un tison ardent ; en un clin d'oeil , toute la surface de l'eau fut en feu, et les flammes s'elevdrent jusqu'a la hauteur de 3oo pieds.

Socieiegeologiqueawi'rlraine. La premiere assemblee de cette societesavante a eu lieu, le 16 Janvier 1S20, dans la salle qui lui a ete assignee au college de Galle. Le colonel Gibbs occupait le fauteuil; comrne vice-president, Le professeur Silliman a presentc nn nse-

1»8 , AMiilllQUE.

moire trfesitendu sur quelques parlies liches en mineralogie ct en zoologie des comtes de Nov-Haven et de Litchfield, dans le Con- necticut ; il a offert i la socicte des echantillons d'un spath- fluor massif (sulfate de chaux). dont on avail riicemment decou- vert unc veine dans la paroisse de New-Stiadford , aux environs de la villa de Hemtington ( Conncclicut ). On apercevait cc spalh-fluor en deux cndroits, distans Tun de I'aulrc d'un quart de mille ; ce qui a fait conjeclurer que la mine occupe loute ccUe largcur. On ne pouvait s'en assurer qu'aprfes la fonte des neiges. La veine paraissait entremeiee de quartz, de mica , de feldspath et de talc, mais on n en avail encore examine que la surface. Ce mineral est cxtremc- ment massif, et semble forme de feuilles , et quelquefois de gros grains ; sa couleur varie du blanc au violet fence. M. Silliman a ep- «uite depose 4 la collection des echantillons du marbre vert trouve pres de New-Haven {foyezTom. IV, pag. 175), et qui, selon I'o- pinion de M. Brongniait de Paris , est le marbre vert antique. Le colonel Gibbs a presente une carte geologique de I'Angletene , par Smith, et diCferens tchanlillons de geologie, parnii Icsquels se trouvaient plu»ieurs morceaux des roches granitaircs dc Haddam (Connecticut). Ces roches contiennent d'asser beaux grcnats , des berils et des crj-^oberils.— M. le docteur Porter a enricbi la collection de tres-beaux cristaux. L S, B.

Lexington L'universite de Transyli-anie est etablie dans

cette ville de I'etat de Kentucky, au centre des ttats dc I'ouest dc rAmerique septentrionale, dans une contree saiue , fertile et bien arrosee. La btaute du pays , I'abondance et la variete de scs pro- ductions conlribuent i en faire le jardin de la grande vallee du Mississipi. Le climat en est doux et agreable , ni trop froid ni Irop chaud ,et il est exempt de ces changemens soudains dc temperature qu'on eprouve dans la partie voisine de I'Ocean.

Les etats de I'ouest, situes dans la >allee du Mississipi , comptent aujourd'bui environ trois millions d'habitans , et ce nombre aug- mente tous les jours dans une proportion etonnante. C'est pour cette population, si elbignee de cclle des anciens etats, qu'a etc fondee I'universite de Transylvanie qui est, et sera encore long-tems la seule institution du premier ordre, la- scule universite oil se feront des cours academiques. L'tUjlilissement avail etc autorise par Ic gouvernement , il y a en-

AMEIUQCE. loa

viiou tieule ans ; mais , <i cause de la nouveaule du pays dans lequel elle se trouvait, du pciil nonibre de ses habilans et de I'absence dcs inoyens d'instrucliou , elle n'a pu ttre regulicremcnt orgauisic que depuis trois ans. Le buieau academique actucl, ou senat, se com- pose d'un president, do dix professeurs, et de tiois ou quatre mailres pour ks classes inlcrieures. Le professeur de droit est acluellement lieutenant-gouverneur de I'etat. Le nombre des etudians s'elevc a environ 5oo. L'aidministration de I'universite est confiee a un bureau compose de treize membres, ou trustees, cboisis tons les ans par la legislature, parmi les hommes les plus 6clair6s du pays, et qui s'assemblent i des tpoques qu'il appartient Ji eux ou au president d'iudiquer.

Les fonds de I'universite consistent principalement en actions de banque et en terres ; ces dernieres cependant ne sonl pas unc source de revenu tr^s-productive. Mais I'^tat vient de s'enricbir der- nitrement par rextinction du droit des Indiens sur de^ etendues de terres fort considerables , et il en sera cede a I'universite une quaii- tite sulBsaute pour subvenir k tons ses besoins. Le traitement des olBciers et des professeurs provient en partie de la pension que paicnt les eleves. Le president recoit par an i5,ooo fr. ; le pro- fesseur de pbysique , de -,5oo a 8,000 fr. ; le professeur de matbe- matiques , 5, 000 fr. ; Ic professeur de langues anciennes , 5, 000 fr. Le professeur de droit n'a pas de traitement fise, attendu qu'il est pay6 a raisou dn nombre de ses eleves.

La population do la ville de Lexington est d'environ 7,000 aincf . Les maisons en sont spacieuses , belles ct commodes ; les rues bien pavees; la police excellente ; la societc agreable , eclairee ct dis- tinguec par son hospitalile et son bon gout. Le buliment de I'uni- versite est k la fois spacieux et elegant. Les babitans de cette villc , encourages par diverses circonslances heureuses , paraissent deter- mines a y fixer le siege de la lilterature et des sciences de cette contree. La vie est excellente et a trcs-bon conipte ; le prix d'um' pension n'est que de i5 fr. parsemaine.

Un liupital , ou se feront un cours de chimieet des demonstrations pratiques eu medecine el en cbirurgie, sera iucessammenl annexe a. I'tJcole de medecine de I'universite. Le doyen de cette faculte, M. ^s docteur Charles Caldwell , qui a bien voulu comniuniquer ces details a la Rerue , est actuellement a Paris, oil il s'occupe a faire cboix

200 A3IJ^IUQUE.

de bons ouvrages pour la bibliothequc , d'insfrumens de physique et de chimie, et de tout ce qui est neccssaiie pour les diverses branches d'instruction. B b.

PniLADF.LPHiK.— /7Z5/nic//o7Z (Ic's sourds-Tiiuets. Dans une as- seniblecdcsprincipauxhabitans dccctte ville, tenue le la avril 1820, et presidec par AI. le doclcur William White , eveque de Phila- delphic, on proposa de fonder un ctablisscmcnt pour I'instruction dcs sourds-muets de I'ctat de Pcnsylvanie , sous la direction de M. David G.JSeixas, qui avait d6ji ^tabli i ses frais , et sur le plan de celles d'Europe, une institution de ce genre , contenant alors onze ou douzc sourds-muets. M. Robert Vaux, charge de proposer un plan de constitution pour I'etablissement , commence par ob- server o qu'au milieu des nombreux efforts fails dans I'interet de la philantropie et des sciences, pour ctendre le cercle de I'inslruc- tion, de I'aisance et du bonheur parnii les hommes, on doit distin- guer ceux qui ont eu pour but la decouverte et I'application des moyens de pourvoir k I'instruction des sourds-mucte.

« L'Europe, poursuit M. Vaux, eprouve depuis long-icms les heureux effets des institutions de ce genre , et il en a ete forme dcr- nicrement deux aux Etats-Unis (1). Mais la Pensylvanie ne comptc pas encore au nombrc de ses ctablissemens de charite un asile oil ces enfans du malheur puissent apprcndre qu'ils ont des facultes intel- lectuelles , et qu'ils pcuvent trouver quelque jouissance dans I'exer- cice de ces facultes. La seulc raison du retard qu'on a mis a etablir une ecole pour rinstruction des sourds-muets, dansccttc vaste repu- blique , est que pen de citoyens savcnt combien y est grand le nombre de ces malheureux qui reclament Icur attention et leur pitie. »

Le 6 niai suivant, une adresse aux babitans de la Pensylvanie fut publiee par ordre de I'assemblee; et, le 29 novembre de la meme annee, une petition, signee par le president et les quatre vice-pre- sidens , fut envoyee au senat et a la cbambre des representans , pour implorer leur autorisalion et leur bienveillance en faveur de I'eta- blissement. En consequence de cette petition , il fut arrCte par la

(1) Une a Hartford, dans I'etat de Connecticut, sous la direction de M. GuLLaudel, seconde par M. Leclerc , sorti de la belle insti- tution de M. i'abbe Sicard , et I'aulre a IS'ew-Yoik.

ASIE. 501

legislature, le 8 fevricr 1S20, que Vlnsutution des sourds-muets de Pensjh'anie serait etablie i Philadelphie , et placee sous la direc- tion d'un president , de quatre vice-presidens, d'un tresorier, d'un secretaire et d'un bureau de vingt-quatre directeurs , tons membres de rinstitution; que toute personne pourrait devenir membre, moyennant une retribution annuelle de deux dollars, et souscripleur A vie, en payant aodol"; queles membres ( dont le nombre etait, au mois de fevrier dernier, de 442) devroient s'assembler, chaquc annee, le premier mercredi de mai, aPbiladelphie , pour proc6der a I'elec- tioa des ofBciers et des directeurs , pour traiter toutes Ics affaires relatives k I'etablissement , et entendre Ic rapport annuel des direc- teurs ; qu'il y aurait en outre un comite de douze dames , cboisies annuelle ment par ceux-ci pour veiller sur I'etablissement; que les enfans indigcns, de quelque comte de I'etat qu'ils fussent, seraient admis dans I'Institution , entretenus et eleves gratuitement, dans la proportion des fonds versus , etc.

La legislature vota une somme de S_,ooo dollars , payables sur-le- champ au president , et de 160 dollars par an pour chaque eleve indigent admis dans I'etahlissement , a condition qu'il ne fut a la charge de I'ctat que pendant trois ans, et que les sonimes payees annuellement a cet e£fet pour le compte de I'etat n'excedassent pas 8,000 dollars. L'etablissement est autorise a recevoir tous les dons et legs de personnes charitables ; 4 possedcr ou 4 aflfermer des terres,etc.,jiisqu'a concurrence de 3o,ooo dollars de revenu annuel. Au mois de novembre 1820, on avail deja admis dix-huit jennes sourds-muets des deux sexes. B— r.

ASIE.

Indes orie!(tales. BoiinAY. C/iirurgie. Dans un des der- niers qahicrs des Transactions de la societe lilleraire de celle pille , on trouve le fait suivant : t Un chirurgien indien ayant i traiter un Arabe, qui avait eu une partie de I'os du bras emporte , imagina de suppleer a cette perte par un tube d'argent destin6 a remplacer I'os qui manquait. L'operation reussit completement, et rendit au bras malade son anciennc vigueur. »

Chine. Macao. iVof<pe//econiete.—Le 5 mai 1S20, M. Prevel a decouvert une comete dans le centaure. Cet aslre, qui n'avail

502 AFRIQUE.

qu'une lies-couile clievelmc , clait ccpendant visible a Idil nu ; il se dirigc?iit vers le nord est avcc beaucoup de Icnteur.

IwDES OFIKNTALES, CkLcvTT k.—SocHle aslatique.-— Siatitc du 20 decevibre 1820. On proclde i la reelection des vice-prcsideos pour rannc'c 1S21. Le secretaire infornie I'asscmblee que loo exem- plaires des Asiatic Researches ont et(i expedies pour rEurope. II est fait hommage A la society d'un ouvrage ayant pour litre On the genealogies of the Hindoo deities , princes and heroes, par le docteur Hamilton. M. Caldcr communique le rcsullat des observations ba- rometriques du capitaine Cullen , faitcs pendant un long voyage dans diffcrcnles parties de I'Inde. La niont.ngnc la plus elevce que cot offi- cier ait mcsuree s'elevait a 8,077 pieds anglais au-dessus du niveau de la nier. Le mfime M. Calder lit un memoire du capitaine Mac- kintosh sur le mode employe a Magpour pour conslruirc I'arche d'un pont. Le reverend M. Thorn envoie du cap de Bonne -Esperance une collection de mineraux d'Afrique , Ct de restes organiqnes. Le lieutenant-colonel William Thomas fait hommage de scs obscrvaiions thcrmometriques et melcorologiques recueillies a Sanger, pendant I'annee 1S19. Le docteur Tytlerenvoiedeuxmedailles anciennes;lc capitaine Mackenzie, unc medaille chinoise ; le lieutenant Wild, une collection dc mineraux rassemblcs dans diverses parties de I'Inde ; M. Moorcroft , deux planches en cuivrc couvertes de caracteres in- connns. MM. Carey et Price sont charges de faire un rapport sur ccs incriptions. Le docteur Barley lit une dissertation sur Ics inscrip- tions dc Koutoun Minaret surles mines qui sc Irouvent aux environs.

E. G.

AFRIQUE.

Sit.K^k-huon^.—Statlsliqaeelcommerce.—CtH^^ colonic anglaise voit »a population s'accroitrerapideuient,non seulementparlesnaissanccs, par les Afrieains pris h bord des navires negriers et rendus a la li- berie ^ mais encore par les indigenes qui accourenl des pctits etats roisins, pour deniander de I'emplni ou cherchcr protection. Lors du recensement dc juillet 1820, on y coniptait 1 2,621 habitans; cc qui preseute, depuis le dernier denombrement en dicembre iSiS , inter- vallr de dix-huit mois , unc augmentation de 2,g56 peisonncs. Dans ce nonibrc, sont compris- g/jo esclaves delivres , et 8gS nouveau-nes uu jndigrncs (jniigres. Le nombrc des mariagcs , depuis le r' jau-

AFIUQUE. 203

Tier 1810 jusqu'au 6 juillct tSao, a litc de455; les naissances, de 571; et les bapttnies, de 1260. Le nombre tolal d'enfans ct d'adultes qui y recoivent del'uducation elait, au mois de juillet dernier, de 2,097; c'est un sixieine de la population. Dans toutes les ecoles , on siiit la mithode de I'unseignementmutuel du doeteurBell.

Depuis I'abolition de la traite a Sierra-Leone et aus environs de la colonie, le commerce y fait des progres rapides. L'Anglcterre , dans le cours de I'annee 1819 , y a expedie vingt-sept bitimens avcc des cargaisons estimees 8o,863 lir. sterl. , et en a exporle 5,873 ton- neaux de productions du pays. Dans le cours de I'annee 1820 , Ic commerce anglais a expedie i ccite ooloniequarantebatimens, dont le tonnage etait en tout de 9,160. Les principaux objets d'exporta- tion de la cote occidentale d'Afrique sent : les bois de charpente et de teinture , les dents d'elepbant , I'huile de palmier , le rlz blanc , le poirre malaguette, les gommes, le bois d'acajou, la poudre d'or. On peut juger, d'apres ce court expose, quel parli la France pourra tirev de sa colonie du Senegal , lorsque la traite y sera enlierement abolie , si elle veut y suivre le plan de civilisation adopte a Sierra-Leone. ( ?^oy. Tom. IX , p. 176.) B— y.

Cap de Boxne-Espkbancb. Emigration anglaise. Depuisquel- que terns il se fait une emigration d'Angleterre au cap de Bonne- Espcrance ; le gouvernement la favorise et I'encourage de tout son puuvoir ; il fait les frais du passage de ccs emigrans , fournit a leurs premiers bpsoins, leur distribue des terres dan? les districts eloignes de la capitale. Ccs nouveaux colons prennent, pour les aider dans leurs travaux , des Hottentots libres, qui ne demandent qu'un tres- modiquc salaire pour leur traTail. On a craint d'abord qu'ils ne pro- fitassent de leur eloigncment pour se soustraire aux loisde la colonie qui ont aboli I'esclavage; mais le gouvernement ne pense pas qu'ils soient teutes d'en introduire, vu la facilite qu'ils ont d'avoir des Hottentots dont I'entretien est moins dispendieux. Cependant, il a cru devoir prendre des precautions a cet egard , en enjoign:;Lit au gouverneurduCapde n'accorderaucune portion de terreaux families emigrces, que sous la condition de n'employer .i leur culture que des domestiques ou journaliers salaries et libres. Mais rinslituuon aj'ri- caine, persuadee qu'une loi positive est indispensable pour assurer I'execution des engagcmeus imposes aux nouveaux colons, a charge MM, Wilberibicc et William Smith d'en faiic la proposition a,. la

20A EUROPE.

cLanibrc dcs communes, ct I'on ne doute pas que le pailcmciit iie seconde le zclc de cette honorable soci6te pour I'exlinclion de la traite el I'abolition progressive de I'esclavage.

RoYAUME DK Maboc. Enscigncment mulucl. Dans le journal dela captivitii du capitaine Paddook, quaker do New- York, com- mandant VOsuego, naufragu en 1809 sur la cote de Mogador , on re- marque,enlre autres observations sur le caractcre , Ics moeurs et les coutumesdes Arabes dc W'idnoun, le passage suivant: «Leshommes savent gencralement ecrire , et tons apprcnncut a liix. A cct effct , il y a dans chaque tcnte une planche de bois dur sur laquellc se trou- vent graves les caractcres de Talphabet ct dco uiuximes du Coran. A I'Sge de huit ans, le petit garoon salt tout cc que contient son tableau ; il saisit avidement les occasions d'apprendre avec les etrangers qui viennent voir ses parens, et qui se font un plaisir de lui apportcr des planchettes sur lesquelles sont traces des passages du Coran. Dans plusieurs endroits, il y a des prfitres on Talbes occu- pes a parcourlr le pays pour V instruction des enfans , au moyev de, I'enseignement mutuel. Les garcons se rendent au lieu dc reunion , munis de leur planchette ; les plus grands et lesplus usances resol- vent directement leurs lerons du mailre et les communiquent en- suite i leurs condisciples. Cette education n'a jamais rien de force , ct ce serait un crime de battre un enfant pour le corriger. Nean- moins, les enfans apprennent tout ce qu'ils ont besoin de savoir , avant I'dge de le metlre en pratique , et des observateurs altentils avouent qu'ils n'ont trouve , chci aucuue uation , consideree en masse , autant d'intelligence , autant de vivacite d'esprit que parmi ces Arabes. 0 Voila done la question de la priorite d'invention de la melhode d^enseignement mutuel, decidee en faveur des Arabes, a qui nous devons d'ailleurs tant d'invenlions et de decuuvertes im- portantes. Babey.

EUROPE.

ILES BRITANNIQUES.

icossB.—jdberdeen Telescopeperfeclionne.-M. RAMCVEvient de

construirc un telescope a reflexion sur de tri'S-grandes dimensions; il a plusdc 25 pieds de longueur; la force focale du miroir r^flecteur est de 25 pieds ; le diametrc de ce miroir est de 10 pouces. Get ius- tt'umtnt est le plus grand de tons ceux qui ont i;t« constiiuts, excepte

EUROPE. 205

toutefois celui de M. Heischcll , qui a , comnie on salt , 4o pieds de foyer. Celui de M. Schroeter, i I'observatoire dc Lilienthal , est de la Hifime force que ce dernier. Ce qui rend les grands telescopes de peu d'usage , c'est la difficult^ non seulenient de les executer, niais de les diriger. Le mecanisme dc M. Ramcye permet de le niouvoiravec facilite. Le pouvoir amplifiant peut aller jusqu'i i,5oo. Francoeuk.

LoivDBEs. Technologie. Alliage de I'acier auec V argent et le platine. En fondant ensemble une partie d'argent et 5oo d'acier, MM. Ilodart et Faraday ont forme un alliage, mais qui se forge tres-bien, quoique tres-dur. II parait d'autant plus avantagcux qu'on peut se le procurer a peu de frais : la valeur de I'argent , qui s'y trouve en si petite proportion, n'influe pas sur celle de I'acier. Avec partie egale en poids de platine et d'acier, on forme un alliage qui prend un superbe poli et ne se ternit point; la couleur est la plus belle qu'on puisse imaginer pour un miroir. Les proportions de pla- tine, qui paraissent ameliorer i'acier pour des instrumens tranchans, sent de I a 3 pour lOO.

Email pour la porcelaine. La Societe d' encouragement de Londres a fait faire I'essai d'un nouvel email pour la porcelaine et la faience fine , compose par M. John Rose , et qui a ete trouve supe- rleur a tons ceux qu'on a employes jusqu'ici ; on I'obtient en faisant wn melange de 27 parties de feldsphath pulverise , avec iS de borax , 4 de sable , i de sel de soude , i de nitre et i d'argile ; apres I'avoir fondu en fritc , on y ajoute 3 parties Jc borax et on reduit en poudre. Get email s'applique aisement et uniformement, sans que la porce- laine doive etre ni fondue , ni meme ramoUie. II s'etend uniforme- ment sans bulles et saas saillies ; il ne couvre ni n'altere les cou- leurs , m^me les plus delicates , telles que les verts et les rouges de chrome , etc. ; il s'incorpore parfaitement avec elles , et la porce- laine qui ea est recouverte peut passer une seconde fois au feu, sans que c'et email se gerce ou eclate.

Economie rurale. Moyen d'utiliserla chaleur des ecuries. Le Garlen-magasine propose d'etablir, au-dessus des ecuries ou des etables , soil des serres , soit des couches ou des bacs i forcer. Les porcherles, qui ont une temperature si elev6e , et dont les dimen- sions , surtout en hauteur, peuvent etre tres-petites ( 3 pieds et denii Isuffisent) , seraient particulierement adaptees a cet usage. La porte ct le bac a manger se trouverakut au nord, oil serait aussi la plus

20G EUROPE.

grandc elcvalion du mur. On pourrait , pour conscrvcr plus de chalciir, construii'C dcs interstices dans IcJ murs , aCn de faiix cir- culer I'air cliaud dans la scne , la couchc ou le bac i forcer.

NonxH-MoLTON. Agriculture. Nouuclle charrue. M. R. Locke a invents une machine pcrfcctionnce pour labourer la terre. On pent s'cn servir dans toute cspece de sol oil la charrue est en usage. Elle creuse Ic terrain a une profondeur donnie , dcpuis un pouce et denii jusqu'i huit pouces, et depuis cinq pouces jusqu'i onzc en largeur; on lui fait tracer de mcme des sillons sur les collines, quelle que soit soil la rapidite de leur pente. L. S. B.

LoNDDES. L'academie royale a propos6 un prix de 20,000 livrcs sterling pour la decouverte de la direction horizonlale des aeros- tats, MM. Mingrelli, de Boulogne; Pietropoli, de Venise , et Lein- bcrger, dc Nuremberg, pretendent, chacun de leur c6t6, avoir re- solu ce grand problOmc.

Camrkidge. Socieie philosophique. M, Cecile a lu (deuxiemc stance de cette annec) un memoire sur les avantages du gaz hydro- gene employe comme force motrice dans les machines , ct a donne en meme tems la description d'un apparcil pfoprc a s'en servir de cette manifere.

IjOrDRHS. Societi, des missionnaires. Le prince Ratafic, frere du loi de Madagascar, qui est maintenant a Londres, s'est rendu i la derniere seance aanuelle de la Socieie des missionnaires ; il a remis une lettre du roi , son frfcre , qui prie la societe de lui envoyer, non seulement de pieux missionnaires , mais aussi d'habilcs artisans , parce qu'il desire faire de ses sujets de bons Chretiens et de bons ouvriers. La societe a promis qu'elle chercherait les moyens de sa- tisfaire aux voeux du monarque africain. L. L. B.

RUSSIE.

Statistique lilteraire.— La Russie posstde trois cent cinquante auteurs vivans qui, pour la plupart, appartiennent i la noblesse; les ecclesiastiques n'y sont que pourun huitieme. Backmeister, dans sa Bibliotheque russe , compte 45OOO ouvrages publics jusqu'en 1807 , c'esti-dire une quantite seulement egale & ce que produit une seule foire de Leipsick. En 1800, la bibliothfequc de l'academie des sciences posi^dait k pen pres trois mille ouvrages nationaux , parmi lesquels se trouvaient cent cinq romans ; aujourd'hui , il exisle plus

EUROPE. 207

(Je 8,000 ouvrages en langue russe. II y a des gazelles allemandes et lusses a Saiat-Pctersbourg, a Moscou , a R'ga, ^ Mittau, i Revel, & Abo, a Casan; Moscou voit paraiUe un recueil litteraire en I'ussc, et Wilna en fournit un autre en polonais (^poyez T. IX, pag. 602). On compte, J"! Moscou, neuf bibliotlieques et dix impri- meries; a Saint-Pctersbouig, sept bibliotheques et quinze imprlme- ries ; i Wilna , une bibliolheque et cinq imprimeries ; dans chacunc des rllles de Revel, Dorpat et KLarkow , il y a une bibliothfeque et deux imprimeries. Enfin , on comple , dans I'emplre russe , huit ou neuf fonderies de caractfcres. Ph. <i y.

SAiNT-PKTUBSEOiiHi. J-,it/iograj?hie.^Qct ait, naturalise dcpuis peu en Russie , fait maintenant dc rapides progres (i.'oyez Tom. VII , pag. 192). Parmi plusieurs collections que I'on public dans ce mo- ment, nous citeron* : les p'ues de SainL-Pelershourg et de ses en- virons : chaque livraison contient qaatre planches in-folio. Gelles de la premiere rcpresentent le palals d'hiver, la bourse, I'ile Krestovsky ; le texte de ce recueil est russe. Les frals de rentreprise sont fails par des amateurs , et les produits sont dislribues aux artistes. Un autre ouvrage du mGme genre, par M. Sevenin, parait aussi par cahiers ; mais il est d'uue molndre dimension. Le texte est en russe et en fran(^ais. Quatre cahiers sont deji en vente. M. Martinof donne nn voyage pittoresque de Moscou aux frontieres de la Clune , dont les figures coloriees couteront jusqu'^ 23o roubles. Ph. G y.

SUIEDE V^r NORWEGE.

Chuistunia. Magnetisme. Le professeur Hansteen , connu par ses interessans travaux , et particulierement par ses belles expe- riences, dont I'objet est de determiner les variations diurnes et an- nuelles de I'intensite d'action magnetique dn globe terrestre , an- nonce , dans les journaux savans du nord dc I'Europe , qu'il vient de se livrer i de nouvelles observations ; d'oii il resulte que tout objet vertical , tel qu'un arbre, un mur, un clocher, etc., se cons» titue naturellement a I'etat d'un aimantj la partie inferieure porte le pole boreal; la superieure, le pule austral. On attend avec impa- tience des developpemens sur ces experiences et sur les resultats qu'a obtenus M. Hansteen. Ce sujet esl aujourd'hui du plus haut iattirfet pour les physiciens , depuis que M. CHrsted a indique les relations qui unisscnt les fluldes magnetique et electrique.

FsAKCOEtE.

208 EUROPE.

Nourel oiivrageperiodique. Joumaux publics en Horuege. Deux militaires distingufcs , MM. jB/ocA et Iluhwth, viennent d'an- noncer la prochaine publication d'lin nouveau journal sous le titre de IltRMODER ( le Mercure du Nord ) , dont il paraitra , chaque se- maine, un cahier. II contiendra des articles originaux , tant en poesie qu'en prose ; dcs extraits des meiUcurs joumaux litteraires , suedois , dauois, allemands, franrais, anglais et italiens; ainsi que I'analyse dcs ouvrages remarquablcs , historiques , politiques et de lilterature , publics dans les memes langues. On y joindra de terns en terns des portraits et des dessins lithographies. On voit avec plaisir les progres qu'a deja faits cette precieuse decouverte , qui a p6n6tre j usque dans les pays voisins du pOle.

Voici la liste des autres joumaux qui se publient i Christiania : i" le Journal de VEmpire { Rigstidenden ). Cette feuille est , pour ainsi dire , officielle ; elle public les actes du gouvernement , ainsi que des nouvelles politiques ; la Feuille nalionale , journal d'opposition , dont la redaction a tellement deplu au gomerne- ment , qu'il en a rccemmcnt defendu I'envoi par la poste ; le Spectaleur nort'egien ; lo. Feuille du matin •■ joumaux qui rem- plissent leurs pages de dissertations pbilosophiques , historiques et morales , et d'cxtraits des meilleurs ecrits periodiqucs qui parais- sent en Dancmarck.

Loi relative a I'exercice du droit de la liherte de la presse. Le roi vient de proposer a la difete une loi repressive des abus de la presse. On voit avec plaisir que S. M. desire I'^tablissement du jugement par jures ; mais quelques hommes eclaires pensent que le mode de formation du jury, d'apres le projet royal , rend cette ins- titution trop dependante du pouvoir. Cette dependance pourrait de- renir dangereuse avec le tems , qnoiqu'il n'y ait rien i craindre pour le moment, vu le noble caractere d'independance et d'impartialit^ qu'ont deploye les tribunaux , spccialement dans le jugement des auteurs mis en accusation , cbmmc ayanl abuse de la libcrte de la presse. Ce qui etonne le plus dans le projet de loi dont il s'agit , c'est de voir que , provisoirement , et jusqu'i la publication du nou- veau Code criminel , on parle de remcttre en vigueur la fanieuse loi danoise du 27 septembre 1799. Cette loi, faite pour un gouver- nement arbitraire , parait absolument incompatible avec le regime constitutionnel, Ce n'est pas icile lieu de montrcr jusqu'i quel point

ELI ROPE. 209

elle aneantit toute liberty de la piesse ; nous renvoyoiis ceux de no3 lecteurs qui desireraient la connaitre , au recueil intitule : Jour- nal genkraL de legislation et de jurisprudence ,, torn. II, pag. j5 et suivantes. H— o,

DANEMARCK.

Stockholm. Publication nouvelle. On a public dernierement ici ua ouvrage intitule : uictes secrets de I'llistoire de G us tape III, et qu'on dit trfis-interessant.

CopEKnAGcE. Polemigue litteraire. Mythologie du Nord. Les savans danois.sont en guerre au sujet de la mythologic, de- pui9 que M. Baden , secretaire de Tacadeiiiie des arts , a mis en question I'existence de celle du Nord. II a pour lui MM. Eckersberg et Hoger; niais MM. Ewald et CEhlensciilager, qui ont tire un si grand parti de la mythologie d'Edda, se sont ranges du cote de M. Fcna Magnusin, adversaire de M. Baden. Gclui-ci ne veut pas que Ton substitue aux fables ingenieuscs de la Grece des tra- ditions qu'il appellc barbares. On lui repond qu'il n'est point ques- tion de remplacer la mythologie des Grecs par une autre , mais de placer k cOte d'elle de nouvelles ressources offertes au genie. L'Alle- magae compte dans ce moment de nombreux partisans de cette mythologie du Nord. Pu. G.

DuchS de Schleswig-Eckernfordb. Necrologie. Le comte Chretien de Stolberg est mort, le 18 Janvier dernier, peu apres son fr6re, et immediatement apres avoir termine sa rtponse au c6lebre Voss. On sait que le changement de religion de MM. de Stolberg excita contre eux toute la colore du traducteur d'Homere et de Vir- gile , et que I'etroite amitie qui les unissait a lui fit place a des sentimens entierement opposes. Ce fut la source d'un grand nombre d'«crits polemiques , dans lesquels les questions thcologiques et les controverses de protestans i catholiques sont melees de details de la vie privee de ces hommes de lettres. La guerre entre Hume et J. -J. Rousseau n'a jamais fait autant de bruit en France , que cette querelle n'en a cause en AUemagne , oii tous les recueils periodiques en retentissent encore. Ph. G.

ALLEMAGNE.

ViKNNE. Machine aplonger. M. Fran(^ois Farkas , de Farkas- falva , connu par la publication dp plusieurs ecrits en langue hon- TOMK XI. lA

210 liUROPI?.

groise , a inventc unc machine ii I'aidc de laqucllo on priil plongcr , A qiielque prof'ondeur que ce soit , et sejourncr an fond des eaux danS toutes los attitudes desirables , sans en eprouvcr le inoindre in- convenient. Le plongeur renionte , h volonte, i telle hauteur qu'il lui plait, et n'a besoin , pour cela, d'aucun secoui's etranger. Ce qu'il y a de plus avantageux , c'est que ses pieds et ses mains sont libres pour le travail. M. Farkas a nomme sa nouvelle machine le dauphin ; voici en quoi elle I'emporte , selon lui , sur toutes les au« tres. Dans toutes les cloches connues , la pression de I'eau ^ une certaine prol'ondeur devient insupportable , et I'air vital est bientOt epuisd', m6me dans celles qui sont pourvues de<tuyaux : M. Farkas a pleinement obvie i ces defauts ; au nioyen du dauphin, tous les mouvemens se font a volonte et non sur les tronipeuses indica- tions d'une corde. Enfin , les secours etrangers etant toujour* tres-coiiteux , on obtient a peine, i Dublin , avec i,ooo liv. sterl. , les a vantages que le dauphin procure pour loo. L'experience de cette machine a ete faite , le !•"■. octobre 1S20, devant le prince d'Esterhazy, a I'ecole de natation de Vienne(i).

Behlin. Giographie. Globes en relief. M. Zeune, qui a fait construire , il y a plus de dix ans , un globe terrestre en relief, a I'aide duquel les aveugles de son etablissement apprennent tres-fa- cilement la geographic , a prevenu le public que desormais ses globes ne seront plus executes en bois , mais en papier. Us y ga- gneront en precision et en solidite ; ceux de bois etant exposes k se briser par la moindre chute. M. Kummen est I'artiste charg6 de remplir les intentions de M. Zeune. Les decouvertes les plus recentes doivent etre portees sur ces nouveaux globes , dont le dia- metre est de 25 pouces,!mesure de Berlin, 24" 1 ligne de France, et dont le prix varie , selon le plus ou molns de details geographiques qu'ilsTepresentent {voy. ci-apres, art. Paris).

'Halle. Societe des sciences naturelles. Voici le resume des tra- vaux de cette societe pendant le second semestre de 1S20. Le i5 juillet, un memoire de M. Schultz sur la lumiiire, sur les coulours et sur les orages. Les 29 juillet el 12 aotit, un tralte de M. Nitzsch

(1) La cloche a plonger , dont on fait usage depuis long-tems en Anglcteire , et depuis quelques annecs en France , dans les tra- vaux dn pent dc Bordeaux et du port de Cherbourg, ofTre la plus grandepartiedcsavantages queM. Farkas annonce comnie no^iveaux. ^Foy. la Revue, T.y ill, Y,. 17:1,61 T. X, p. 456 et 61 5.) A. M— t.

liUROPE. 21 J

■im' les maladies <iii nor.. Le 2 septemhre , line analyse chimique des •■aux minerales de Lauchstwdl pai' M. StoUz. Le \(i seplembre , nn memoire de M. Leuckart sur la formation de la come dans les'ani- maux ; le meme jour , des additions de M. Schweigger aux expe- riences electro-magnetiques d'Girstedt. Le 00 du meme mois , un rapport de M. Winder sur quelques accidens de barometre a I'ob- servatoire de Halle. Le 7 oclobre , M. Mertens a lu un traite sur les produits de I'ocean; M. Dieterich a entretenu la soci6te des pierres sablonneuses des environs de Lauchstnedt et de Scopau. Le 21 oc- lobre, M. Keferstein a examine ce que les anciens ont ditsurflvac tou\o( ct ^xoKo-TTifffoi. Le 11 not'embre , lecture d'une dissertation sur les ouvrages que le docteur Gronaw avait cnvoyes de Berlin. Le iS , M. Scbultz a rendu compte de deux ecrits de M. Schneider, sur les poissons et sur la topographie medicale d'Etlingen. Le aS , M. Keferstein a communique une dissertation sur la geognosie d'Al- lemagne, et notamnient sur la culture des Alpes. Enfin , le 9 de- cembre , M. Schweigger a fait quelques experiences electro-magne- tiques.— La societe a re^u un grand nombre de memoires sur la marche des orages pendant 1S20. On parle d'une association dont le but est d'en observer plus specialement la direction dans toute TAl- lemagne , ainsi que M. Brandt I'a fait pour la Siiesie. On assure que ces observations seront faites , en Saxe , par MM. Lindenau, Posselt et Arzberger; qu'en Bavi6re , dans le Saltzbourg et dans le Tyrol , elles seront dirigees par M. Henrich ; dans le duche de Baden, par M. Bocckmann ; dans le Wiirtemberg, par M, Schiib- ler, etc., etc. La societe invite tous les pasteurs et cultivateurs k tenir note de I'arrivee et du depart des orages, ainsi que de leurs divers accidens. ( Fij'. Tom. XXXI, 2" cahier du Journal de phy- sique et de chimie. )

Berliht. Societe littcraira. Le lo Janvier dernier, la societe ap- pelee Humanitdts- gesellschafl celebr6 le 24' anniversaire de sa fondation. Le directpur , M. Kcepke, a ouvert la seance par la lecture d'ua memoire relatif k Zenobie , reine de Palniyre, M. Ideler a cnsulte presente une dissertation sur le poete Saadi et sur le poeme de Gulistan. Enfin, M. le conseiller d'etat Klein a fait le resume des travaux de la societe pendant I'ann^e 1820, et con- sacre quelques souvenirs aux membres que la mort a frappes dans ■e cours de cette annee (MM. Nicolas Rulis et Bemhardi). La ■seance a ete tcrminee par un banquet.

?12 ELllOPE.

Lfniversiti. Au commencement du semestre d'ite, I'universjtt- lie Berlin comptait onze cents eleves et quatrc-vingt-un professeurs , dont cinquante-trois en litre et vingt-huit sans fonctions, mais avec la qualile de maitres particuliers , prirat-docenl. M. Ozann, dont nous avons fait connaitre les travaux (Tom. VIII , pag. 6'24) ■> passe ^ I'universiti de Jena comnie profcsseur de philosophie. C'est lui qui vient de publler le Lexicon lechnologicum de Philemon ; il promet & I'Allemagne un philologue consommd-.

McNicB. Publication nouuelle. Une socitte , dlrig^e par M. CCrtel, profcsseur a Ausbach, va donner de nouuelles iraductions des classiques grecs et latins ; elle publiera toujours i la fois un auteur grec et un auteur latin. Voici ce que promet M. CErtel dans un prospectus insert au journal de Halle : les traductions seront digagees de toute expression etrangere ou commune ; 2" quand I'auteur est obscur et serre en grec ou en latin , il sera obscur et serre en allemand; on n'estropiera point les noms propres , etc., etc. M. CErtcl craint cdanmoins qu'on ne I'accuse de nioderniser les an- ciens {modernisiren'); mais il repond d'avance i ce reproche cpi'on ne leur fera pas voir le monde a. travers les lunettes du prejugi , et qu'on ne les fera pas errer sur V ocean de la fie, un compas a la main. D'ailleurs, ajoute-t-il , on ne coiffdra point Paris d' une per- ruque, et Marcellus n'aura , pour assieger Syracuse , ni canons ni

mortiers Le tutoiement sera generalement supprlme ; mais On

ne traduira point le )i«( o-u tsxvov de Cesar par auch sie herr sohn (et vous aussi , monsieur mon flls). On voit que M. OGrtel est ca- pable d'egayer ses lectenrs dans I'occasion,

Bealin. Noufeau journal, 11 par.^tt, depuis le commencement de I'annee, un journal intitule : dar Zuschauer (le Spectateur). On en attribue la redaction k M. Symanscky, qui publiait autrefois le Freimiithige (le Sincere) , et plus anciennement encore die Leuchte (la Lanterne), recueils periodiques qui n'ont pas eu de diiree.

Ph. Golb^ry.

ITALIE.

BsESCiA. Alhenee. Biographie litteraire. M. Camillo Ugoni, connu dans la republique des lettres parson zele et par ses ouvrages, et nomme president de I'athenee de cette ville , a propose i ses col- legues une entreprise litteraire qui ferait beaucoup d'honneur a Brescia et k I'ltalie : c'est la continuation des ecrivains italiens

EUROPE. SIS'

{tcritton d'ltalia) , du couite Gianimaria Mazzuchelli. On sait qu'il ne publia de ce grand dictionnaire que six volumes in-folio , conte- nant environ trois niille articles, et qu'il csp^rait de le porter lui seul i plus de cinquante mille. Surpris par la mort, il a laisse, parini ies papiers, una instruction si{r la methods qu'il auait suifie dans sa compilation , et Ies manuscrits suivans : 2 vol. des Scrit~ tori Italiani; 2" 2 vol. de vies d'hommes de lettres alors vivans^. 11 vol. de lettres de divers savans; S vol. de memoires litte- raires; S" 3 grands vol. de repertoires contenant des materiaux pour la continuation de son dictionnaire. M. Ugoni prouve la neces- »it6 d'achever cet important ouvrage par I'iniperfection des diction- naires etrangers de ce genre qui circulent dans I'ltalie. II s'arrete i signaler particulierement la Biographie universelle et la Biogra- phie des hommes vivans. Nous ne repetons pas ici Ies expressions de la noble indignation que lui Inspire la justice ; mais nous croyons necessaire de citer cc qu'il dit sur la premiere , en se bornant 4 la partie qui regarde Ies auteurs italiens. n Quel long catalogue , dit-il , ne pourrais-je pas presenter d'inexactitudes , d'omissions , de fails et de mots altires , de noms et de vers latins et italiens estropi6s,. d'hommes vivans annonces comme morts , et ensuite condamnes k revivre dans la Biographie des hommes vivans, lorsqu'ils n'existent plus. » II regarde enfin la Biographie tmiverselle comme une corn- pilation indigeste , du moins pour ce qui concerne Ies ecrivains de ritalie. M. Ugoni excepte , dans une note , Ies articles de MM. Gin-i guene, S... et Sismondi. Ilajoutedi; plus que la veriti etmimel'hon- neteti sont outragees dans presque tous Ies articles signes G. N. (Voy, Commeniarj dell' Aleneo di Brescia, 1820.)

Poesie dramatique.— On a donne lecture de plusieurs tragedies ^ cette society litteraire; deux sont de Giuseppe Nicolini, et intitu- l^es : la Clorinda et le Conte d'JEssex. Le jeune auteur s'^carte ,. dit-oti , dc I't'cole d'Alfieri , par la composition et par le choix des sujets : I'amour est le principal ressort de sespieces; mais il ne lui. conserve pas toujours toute la dignite qu'exige la tragedie. L'avocat Buccelleni, adoptant un genre severe, a traite un sujet nationaLG'est la mort de Tebaldc, ciloyen de Brescia, chef de cette r6publique et du parti des Guelfes , au tems de I'empereur Henri, comte de Luxem- bourg. ye^aWo, prisonnier , ne pent sauver sa vie qu'cn engageant •es concitoyens a reudie la ville, Mais, nouveau Uegulus > ii leur per~

nu EUROPli.

suadc de se dtfendre, ct il est condainnc. La iiiarchcdeceltc tragodic parait fort simple et regulierc. Francesco Ganibata a lire de riiistoire de Machiavel, le sujct d'une nouvelle tragedie , Hosmonda a Rafenne. Le mfime auteur a fait unc pifice sur la inort de Co- riolan.

MiLiiN. ArcMologie. M. Bignoli public , pour I'usagc dcs ar- tistes, UDC collectioa d'antiquitis grecques et romaines, dessiaces ct gravies par lui-meme. La premiere livraison in-4° a paru cette annee. L'auteur esp6re que son travail sera d'une grande utility ceux qui ne peuvent ni voir ni copier les modeles. La collection sera divisee en plusieurs classes : I'une , par exemple , contiendra les vases, I'autre les candelabres , la troisieme les bustes, etc. etc. II parait qu'on trouve tres-bons Ic ehoix , le dessin et Ja gravure des objets qui composent cet ouvrage.

Padode. Necrologie. Assemani. L'abbe Simeone Assemani est mort, leSavril dernier, i I'Sge de soixante-neufans. Ce c61ebre orien- talisteetaitnei Tripoli deSyriele aofevrier ijSi : il futelev6 a Rome, oil sa famille avait obtenu le droit de citoyen ct I'honneur du patri- ciat. Domicilie k Padoue, il fut nomm6 professeur de langues orien- tales, d'abord dans le seminaire , et ensuite dans I'universite. II fut aussi membre de l''academie des sciences , lettres et arts , et de I'institut royal. Ses nombreux ouvrages et ses vertus le firent de plus en plus estimer ct par les nationaux et par les etrangers. Infati- gable quand il s'agissait de remplir ses devoirs litteraires, il avait annonce , trois jours avant sa mort, un nouveau memoire pour la stance de I'institut. F. S.

ESPAGNE.

Madrid. Publications noMfe/Ze*.— L'ouvrage de M. Bignon , Du congres de Troppau , ou Examen des pretentions des monarchies absolues a I'egard de la monarchie constitutionnelle de Naples, it et6 traduit en espagnol , ainsi que YEssai , de M. Daunou , sur les garanties indii/iduelles que reclame I'etat actuel de la societe.

Necrologie. M. Marchena , auteur tres-actif, est mort au com- mencement de cette annee. 11 etait ne , vers 1770, a Utrera , en An- dalousie; il se fit prfitre ; mais la philosopliie fran^aise, qui coni- mengaitapenetrer en Espagne nialgre Ics douaneset les inquisileurs, eut plus do charmc pour lui que la thcologie. Persecute par Ic saint -

KUKOrE. 215

office, il se refugia en France , oil la revolution venail d'eclater. Marchena en embrassa cbaudenieut les principes ; il coopera d'abord an journal de Marat, puis il cntra dans le parti des girondins. Arr6t6 a Moulins, il fut conduit a Paris et y resta en prison jusqu'au g tber- midor. Sa caplivite, loin d'abattre ce caractere ardent, semblait en augmenter la fougue. II adressa de sa prison de vives reprfesenta- tions aii gouveruement ; remis en liberie , il Iravailla a V Ami des lois , ecrivit contre les thermidoristes , et fut exile apres le i3 vendenilaire. Cependant, il obtint la permission de rentrer en France , fut place a I'armee du Rhin , et devint ensuite secretaire de Moreau. Apres le proces de ce general , Marchena vecut dans I'obscurite a Paris. II ecrivit , a cette epoque, une bonne description des provinces basques pour les Annales des voyages. Lors de I'inva- sion des Francais en Espagne , on vinl le cbercher pour I'employer coninie journaliste et agent. II partit avec I'armee, redigea un journal en Espagne , y fit jouer sa traduction du Tartuffe et du Misantrope ; et, lorsque les armees furent obligees d'evacuer, Marchena revint en France a leur suite. 11 s'etablit a Nimes , et commenga de traduire en espagnol VEmile de J. -J. -Rousseau. Apres la revolution du mois de mars 1820, il se hata de rentrer en Espagne ; il n'y jouit d'aucunc consideration , et mourut dans I'in- digence. Marchena etait un petit homme disgracie par la nature , cxcessivement remnant et flexible , sans principes fixes et sans beau- coup de nioralite. II elait loin de nianquer de talent, et cet abbe au- rait pu se faire un nom dans la lillerature, si, au lieu de courir les camps, il avait voulu s'occuper de Iravaux solides. D— g.

PAYS-BAS.

MeJecine. Proprieles anli-ieieneuses du Sucre. A diverses ♦■poquesde I'annee, cerlaines especes dc poissons, des gcnresperca, esox , sparus, scomber, etc., compromeltent la vie de ceux qui les niangent. Le docleur Ciiisliolmindique comnie reniede le sucre ou le sue de la canne qui le fournit, ainsi que du sue de balate. On avail deja propose le sucre couinic un excellent antidote des oxides et des sels melalliques, ct il parait qu'il a etc employe avec succes dans des cas desesperes. (Extrail de rcxcellenl recueil publie a Bruxelles, et que nous avons annoncc plusieurs fois : Annates generates des sciences pliysiques).

HwwiLiiis.—Bea'/x-arts.Sculplurc.—On vicul dc placer, dans

216 EUROPE.

une iglise de cette ville, la statue de I'amiral hollaudais Vau Kins- beiger, liomnie bienfaisant et protecteur eclaire des beaux arts. C'est I'ouvrage de M. Gabriel, membre de I'institut des Pays-Bas.

FRANCE.

AuBB. Troves. Enseignement miituel. M. Baudouin , pro- prietaire d'une vaste filature de cctte ville , vient dc donncr ix tous les tnaniifacturicrs du rovaume un bcl cxemple i suivre. 11 a etabli , en faveur de ses ouvriers , dans I'enceinte mfinie dc sa fabrique, une ecole d'enseignement mutuci, qui sera ouverte pendant Ics lieures et les jours de repos , et qui seia dirigce par les niaitres de I'ecole- niodele du departement de I'Aube.

DoiiBS. Mandeure. Ruines d'un theatre roniain. En an- nongant les fouilles entreprises au mois de juin 1S20, pour nieltre M d^couvert les restes de ce beau monument, nous nous sommes en- gages h en faire connailre la disposition et les dimensions priucipales. Des details qui nous ont etti transmis derniercment nous meltent a meme de remplir cette promrsse.

Ce qu'on aperroit deja du llieStrc prcscnte un aspect imposant ; 11 est adosse, ou plutot entailiti dans un petit coteau au niidi du Mandeure. Les restes des murs de I'etage superieur, qui sont de vingt-quatre metres audessus du niveau de la plaine, surpassent encore la crete du coteau', oii se trouve un plateau assez vaste, i rextremite duquel s'Oleve la montagne qui le couronne. Le choix dc cet emplacement aura ete determine par la concavite du coteau en cet endroit, oil il avait naturellement la forme demi-circulaire d'un amphitheatre; ce qui aura diminue de beaucoup le travail pour les excavations et I'assise des constructions.

L'inegalite et la grandeur des distances qui separent les murs con- centriques de I'amphitheatre , ainsi que leur epaisseur et I'elevation de tous les degres qu'ils Ibrment, repoussent I'id^e qu'on avail cue d'abord , que c'etaient des banquettes pour les spectateurs. L'eleva- tion de ces murs demicirculaires , dans trois endroits oii ils sont le plus rapproches entre eux , I'ait conjecturer que lii ils formaient des corridors de separation entre les divers amphitheatres; partout ail- leurs, ces murs sont a fleur du terrain qu'ils soutiennent , et dont ils scrvent i adoucir la pente.

Ainsi, il y aurall lu qualre etages dc loges ou d'amphilheatrcs ;

EUROPE. 21T

ie premier de 44 mfetres de diametre , compris eatic le demi-cercle , au-dessous ou au-dedans duquel etait rorchesUe, et les deux pre- miers demi-cercles saillans formant corridor; le second s'etendant depuis ce corridor jusqu'au corridor superieur, qui en est 6loigne de treize metres ; le troisieme comprenant les trois murs qui sont im- niediatement au-dessus^ et qui forment trois terrasses , ayant en- «emble une largeur de 9 a lo metres ; enCn , le quatrieme composant les deux galeries superieures , dont I'une pouvait servir en mcme terns de passage.

D'apres la surface de ces divers rangs de loges, qui etait pour le premier d'euviron S,5oo pieds carres ; pour le deuxieme de 16,200; pour le troisieme de i4,6oo; et pourle quatrieme de 5,Soo, ou peut (■valuer ce que chacun devait contenir de spectateurs, suivant qu'il* y etaient debout ou assis, en leur assignant I'espace necessaire dans ces diflerens cas. L'etage superieur etait-il termine par des por- tiques oil les femmes pussenl se trouvcr a couvert ? Rien ne I'indique encore.

Excepte quelques fragmens de corniches, on ne voit point dans les ruines de gros materiaux. La regularite dc petites pierres de trois ou quatre pouces d'epaisseur cmploj'ees i cette maconnerie prouve qu'elle avail ete faite avec le plus grand soin. II est a croire que de grandes dalles servaient de recouvrcment a tous les murs concentriques pour en empecher la trop grande degradation ; et que les escaliers qui conduisaient aux diSerens etages , mais dont aucun n'a ete encore decouvert , etaient egalement en grandes pierres, probablement enlevees pour des constructions modernes.

Si ce tbe&tre avail ete construit pour les habitans d'une ville qui devait etre considerable, si Ton en croit la tiadition, etsil'on en juge par les decouvertes anterieures a cellcs dont nous nous occupons , ainsi que par les ruines eparses dans la plaine situee entre le theStre et la riviere, pourquoi n'y trouve-t-on pas ces materiaux de forte di- mension qui pouvaienl assurer la duree de cet edifice? Si ce monu- ment n'avait ete eleve qu'a la bate pour occuper des troupes en sta- tion sur ce point, dans I'intervalle des operations militaires, et pour le mieux disposer a de nouvelles entreprises , en leur donnantla repre- sentation de beaux fails d'armes, pourquoi I'aurait-on decore de ces cornicbes et de ces divers orneniens dont il se trouve des fragmens ? ?^^onibien de questions on pourrait faiie sur la deslinatiou des diverse*

218 EUROPE.

parlies de ce iiionunieiil, qui ibuniit iin vaslc champ aux runjec- Jures, ct attcud encore les explications des savans.

Anliquitis, Un autel antique a etc decouveit , dans le niois de mai dernier, it. deux licues de Besan^ou , sur le bord de la route de Dole. II etait dcbout, engage en enlier dans la route, elcvceencet endroit de deux ou trois metres au-dessus des champs. La carte de Cassini indique qu'il passait en cet endroit une voic romaine , sur laquellc la route actuelle est en partie etablie.

Malgre les soins que I'on a pris, I'autel s'est brise en le sortant de terre. La personne de qui nous tenons ces details en a recucilli les debris. Voici I'inscription gravce sur une des faces :

MA. TRA,

BVS. SA

CRVM. OXIA.

MES. SOPI.

V. S. Q.

M.

Cette dedicaec aux deesses meres, malrahus , rend ce monunienl assez remarquable.Gruttus, dans son grand ouvrage, n'eu cite que deux ou trois scmblablcs. On trouve dans Dunod(Tom. II de son Histuirc de Vi'gUse de Besancon ) une petite inscription avec inatralius pour viatribus. II est aise dc voir que cet autel est I'ouvrage d'un ouvrier siussi ignorant que peu habile ; les lettres sent d'un travail grossicr, et des points aprcs chaque syllabc du mot malrahus en feraicnt trois au lieu d'un. C'est encore .Vl'ignorance de cet ouvrier que Ton pent attribuer et la suppression de la Icttre D ou des lettres DD , abreviatrices dc Deabus , qui devraient commencer I'inscription , et le changemcnt de L en Q dans cette formule finale V. S. L. M. ( poluin sol fit labens merilo ) , qu'on voit sur ces sortes de moiiu mens.

Les champs cnvirounans sont converts de debris de tuiles ro- maines ; on y avait trouve, il y a quclques annees, beaucoup de medailles, depuis le Ilaut-Empire jusqu'aux Constantins; une petite nicule antique conique ; des fragmens d'autres meubles , de vases et de pctils ustensiles qui ont etc rceueillis par la personne qui possedc I'aulcl. Tout reccmnicnl encore , a loo nicttcs de dis-

EUROPE. 21i>

tancc de ce monument , on a trouv6 iine medaillt; de Tiajaii en ar- gent , parfaitement conservee , niais commune , et un poids en plomb lres-oxid6, ayant la forme d'un cylindre qui aurait pour base deux droites paralliles , terminces par deux portions de cercles ; il a six poucesde long,trois de large, deuxtrois quarts de hauteur; ses angles sont arrondis ; il est garni d'un anneau et d'une boucle en fcr; il pcse un peu moins de 8 kilogrammes.

SOCIETES SAVANTES ET d'uTILITE PUBLIQUE.

Corse. Bastia. Societe d'inslruction publique de la Corse ; siante a Bastia. Sujets de discours proposes : i" Des a vantages qu'on peut retirer du departement de la Corse , eu egard a sa posi- tion, a son sol, a son climat et a ses productions. ( Prix, imc me- daille d'or dc 3oo fr. ) ; Eloge de Pascal Paoli. ( Prix , une nie- daille d'or de 20ofr.)Les ouvrages devrontetre parvenus a la socittc, avant le i" mai 1S22.

Metz (^Moselle). Societe des lettres , sciences et arts. Prix pro- poses pour 1822. 1" Pour leperfectionnement des machines soiif- Jlantes.— On sail de quelle importance sont pour les arts metallur- giques les machines qui servent a allmenter d'air les fourneaux, les forges , et quelquefois aussi a renouveler celui des mines vicie par les gaz deleteres. Ces machines se subdivisent en plusieurs especes, mais dans toutes on distingue deux parties essentielles : la machine souj/lante jiwprement dite, et le porte-uent. L'cxperience a dopuis long- terns appris que, pour une force motrice quelconque, il cxiste une certaine distance , assez rapprochee , au-dela de laquelle Pair ne peut plus se transmettre au moyen des porte-vents genc- raJement en usage; mais il ne parait pas que I'on ait encore bien approfondi les causes de ce singnlier phenomine, ni qu'on ait pro- pose des dispositions oil I'inconvenient eut ete evite au moins en partie. On a meme assez generalement accorde fort peu d'influence a la maniere dont les porte-vents peuvent etre adaptes a la macliine. Cependant une experience faite par I'un des membrcs de la societe semble prouver que cette partie est susceptible de quelque perl'ec- tionnement. VoicL cette expcSrience : ■■ L'orifice ou buse d'une ma- ihine soufflante ctant plac6 a une certaine distance dc celui du porte-vent, on obtient un courant d'air bcaucoup plus fort f\\ic dans Ic cas oil Ic porte-vcnt est inimediatenient applique ;i la machine, aiosi que cela se pratique d'ordinairc. » On salt que ridcl

220 EUROPE.

est dx\ k plusieurs causes, telles que la communication lalerale, la suppression du viJe k I'endroit de la buse, etc. , causes qui tiennent pour la plupart a la nature elastique du lluide en niouvenient et de celui dans kquel tout le systeme est plonge. La societe voulant en- courager les arts qui tiennent particulierement aux besoins dc la vie , propose un prlx de la somme de 3oo fr. i I'auteur du meil- leur memoire sur la question suivante : « Quels sont les changemens a appoKerauxporte-vents des machines soujfflantes , poury mellre a profit soil les perfectionnemens qui viennent d'etre indiqu&s , soil loutes les autres especes de perfectionnemens dont pourraient etre susceplibles les procedes jusqu'ici en usage pour transmettre I'air a des distances plus ou mains considerables?

11 est i desirer que le memoire contienne unc explication pliy- lique des divers phenomenes que presentent les courans d'air dans les portcvents, et qu'il fasse connaitre aussi , d'apres des expe- riences faites , autant qu'il sera possible , en grand , le rapport neces- saire a etablir entre les diametres des orifices de la buse du portc- vent , et la quantite de leur ecartemcnt, afin d'obtenir un maximum d'ellct pour une distance et une force motrice donnee , c'est-a-dire la plus grande quantite d'air possible dans le meme intervalle de terns.

Pour la propagation de la langiie franfaise dans les parties allemandes du departement de la Moselle. Dans un espace d'assen peu d'etendue , le departement de la Moselle presente deux peuplei •epares et par leurs moeurs et par leur idiome. La societe , penetr6e de I'iuiportance qu'il y aurait pour ce pays d'operer une fusion entra la parlie allemande et la parlie franfaise du departement, et de di;truirc la barrierc que la difference de langage eleve entre les enfans d'une mOme patrie , met au concours la question suivante ; « Quels seraient les mojens a employer pour generaliser le plus promptement V usage de la Ian gue franfaise dans les parties du de- partement de la Moselle oil la langue allemande est seule em- ployee? D Le prix est de i5o fr.

La societe decernera , s'il y a lieu , ces deux prix dans sa stance generale d'avril 1822, Les memoires devront etre adresses, avant le i*' Janvier 1822, k M. Herpin , secretaire de la sociite , k Metz.

Nantes {Seine- inferieure). Societe academique , seance du i"/e- trier 1821 , presidee par !\J. Ze^o.ver.— M. Thomas Bolley Grattan a

ELIROPI',. 221

fait remettre & la 90ci6t6 im exeniplaire de son poeme intitule Phi- libert. [VojezT. X,p. i5o). Voici le compte qui en a (ite rendu par M. de Tollenare , secretaire general :

« S'il ne nous apparlient pas de prononcer sur Ic merite litteraire de I'auteur, puisque son ouvrage est ecrit en anglais , du moins pou- vons-uous apprecier ses intentions. Le poete ne fait resonner sa lyre que pour celebrer notre belle France.

« Les avenlures de Philibert de Valombar et d'Isabellc sont suppo- s^es avoir eu lieu vers les terns malheureux du regne de Charles VI, et sont imitees de celles de Martin Guerre, qui, a une epoque plus rapproclxee, faillit ttre victime d'unecelebre imposture. II s'y trouve des citations tres-dramatiques. Le choix de I'epoque pouvait effarou- cher la delicatesse franoaise; mais I'auteur a cvitc avcc une touchante discretion tout ce qui pourrait oflenser nos affections nationales. S'il s'est place au milieu de nos troubles civils , dans le quatorzieme sifccle , c'est pour se rapprocher des terns chevaleresques , de ceux de nos Duguesclin et de nos Clisson, dont le souvenir glorieux etait alors, comme aujourd'hui , dans tousles esprits ; c'est pour se rap- peler qu'un capitaine anglais, capitulant dans une place forte, vient en deposer les clefs sur le cercueil de notre illustrc compatriote, qui avail perdu la vie en I'assiegeant. Aucun mouvement de vanite offen- sanle ne se fait remarquer dans tout le cours du poeme. Loin de li , c'est dans nos archives les plus heroiques, dans la Gaule poetique , dans Sainte-Palaye, Delarocque, dans nos propreshistoriens, que I'au- teur va puiser ses inspirations : aussi I'ouvrage est-il tout-a-fait fran- ?ais. Les exploits de nos preux , les ballades et les lays de nos trou- badours, nos mceurs feodales , nos cours d'amour, nos usages pieux , galans ou bizarres, fournissent i I'auteur les plus charmans tableaux.*

Institut. Acadi5mie des scii!kces. JuiJi 1821. Seance du 4. Au nom d'une commission, M. Arago lit un rapport sur un memoire de M. Fresnel , relatif k la polarisation de la lumiere. Quelques re- clamations s'etant elevees, I'academie ajourne la discussion. M.Blan- chard , de Falaise , envoie un manuscrit intitule : Precis de laphilo- sophie nouvelle. M. Vene lit un memoire sur les gazometres de pe- tites dimensions. (Commissaires, MM. Girard et Ampere.)

Du II. Au nom d'une commission , M. Thenard lit un rapport

222 KUKOI'E.

sur un nicinoiie Jc iM. Clievreiil, concenianl I'aclion ties alcalis siir lescorpsgra,'!. » Cc dernier memoire, dit le rapporteur en lerminant, nitrite I'-s clones que nous avons dd donnera ceiix qui le precedent, et nous en reclamons egalement I'impression dans les menioires des savansetrangers." L'acadcniie approuve le rapport etlcs conclusions. M. Caucliy lit un rapport sur le conipas peifectionne et le calcu- laieur de M. Lain-. « La levee d'un plan, dit M. Caucliy, exige en general trois cspeces d'operations ; savoir : des mesures d'angles, de niesures de distances et des reductions de distances inclinces , en raison de la pente. M. Laur execute ces trois especes d'operations a I'aide de rinstrument qu'il nomnie le compas perfectionne. C'est ef- lectivement un grand compas de bois , dont les deux branches recti- ligues sont assemblees a charniere; lorsque Tangle qu'elles fornient entre dies est de loo dcgres, la distance cntre leurs extreniites est de 2 metres cxactemenl. Ce compas est tellement construit, qu'on peut ajustera la tetc un cercle en cuivre qui fait I'office de graphomfetre, et porte une lunette mobile. Enfln, Tune des branches du compas porte une ^chelle de pente constrnite de manierc que , Tinclinaison d'une ligne etant donnee, on reconnait, k la seule inspection, la dillV;- rence de cette ligne a sa projection horizontale. »

Le calculateur de M. Laure consiste en une plaque de corne reclan- "ulaire , sur laquelle on a trace des courbes qui ont pour objet de mcsurer la supcrficie d'un terrain dont on a le plan.

0 En resume, nous pensons, ajoute M. le rapporteur, que les in- ventions de M. Laur sont d'ingenieuses applications de moyens deja connus. EUes facilitent les operations trigonometriques qui embrassen t un terrain peu considerable. Dans le memc cas, elles diniinucnt no- tablement les depcnses ct permettent in un seul ingenieur de lever un plan sans autre secours que celui de deux mires verticales et du oonipas perfectionne, etsans endommager aucunement les proprictes qu'il est oblige de pareourir. L'academie approuve ces inventions, et donne i Tauteur les encouragemens qu'il merite.» M. Biot lit un niemoirc relatif aux objections qui ont ete faites a sa iheorie de la polarisation mobile , dans la seance precedcnte. M. Arago repond a plusieurs articles de ce memoire , et reproduit , avcc quelques mo- difications , des conclusions que l'academie approuve. Le memoire de M. Fresnel sera imprime avec ceux des savans etrangers. DmiS. M. Kaler, de Londres,ecrit pour detromper les membrc;

■^'^

(le racnd(''mie qui I'ont suppose autour ilii Commcutaire sur la tniica nicpie celeste ile M. Laplace : ct-t oiivrage est du docleur Young. M. Dupiii rend uii coinpte verbal de rouvrage de M. Knontes sur la carie seche oiile dry-rooc, si dangcreuse pour les vaisseaux. M. Am- pere lit un meinoire sur quelques nouuelles proprietes des axes prin- cipaux des corps. M. Biot lit un memoire sur la mesure dupendule en Angleterre et dans les ties Shetland. La section de medecine est invitee a presenter une liste des candidats pour la place decorres- pondant , vacante par la mort de M. Gregory. MM. Biot et Mathieu sent nommts commissaires pour examiner un nouvel instrument pre- sente par M. Mongi , capitaine d'artillerie.

Du 25. M. Geoffroy-Saint-Hilaire lit un memoire intitule : De I'existence de tout un appareil dentaire chez les oiseaux ., et nomme- mentde la forme el de l' arrangement des dents chez les perroquets. M. Girard lit un memoire sur les canaux de jiauigation, sous le rap- port de la chute et de la distribution de leurs ecluses. M. F6burier reclame centre des assertions contenues dans le dernier memoire de M, Dupetithouars; sa lettre est renvoyee h la section de botanique. M. Pelletan fils presente i I'acadcmie un ail de baleine qui lui a et6 adresse par M. Ransone , chirurgien de Manchester , et oii so voient les muscles particuliers qui ont ete observes dans cet reil par I'anatomiste anglais. M t.

AcADiJMiE r&\N(;\ist..— Seance du 5 juillet.—M. Lemontey lit des notices sur le cardinal de Retz et sur madame de Longueville. M. le due de Levis, trois actes de sa tragedie de la Mort d'HenrilK, compos6e en 1S12.

Seance publique du 28 juin 1821 , pour la reception de

M. VlLlEMAIN.

On a entendu successivement le discours de reception de M. Vti,- lemain; la reponse de M. Roger, directeur; un episode du poeme inedit de La Grece sauvee , par feu M. de Fontanes ( Eschylc an tombeau d'Homere).

Tous les journaux out rendu compte de cette seance rcmar- quable par Taflluence extraordinaire qu'clle avait attir^e, et par I'empressement qu'avaient mis a s'y rendrc une brillante societe et quelques grands pcrsonnages. On devait y parlor de M, de Fontanes qui fut long-terns compte parmi eu\- , qui appartient sous plusieurs

J2A EUROPE.

rappoils ii I'histoire conteniporaiae , et I'un des honimes qui , dan» Jes diverses fortunes de la France , a le plus constamment conserve un des premiers raugs dans I'^tat. Le jeune r^cipiendaire lui devait en grande partie ses sncccs, parce qu'il avail reru de lui scs premiers encouragemens , et rien n'est plus proprc k developper le talent quo le sentiment d'une vive reconnaissance. M. Villemain a monlr6 beaucoup de I'un et de I'autre ; mais celle-ci parait Tavoir trop se- duit, et nous sommes bien eloignes d'y trouver le motif d'un re- proche , quoique nous nc pensions pas que son eloge de M. de Fontanes en soit a beaucoup prcs I'liistoire veritable ; mais cet eloge restera toujours comma un nouveau litre de I'orateur i I'estime qu'on accorde au talent qui puise ses inspirations dans les plus bono- rabies senlimens. M. Roger a encore parlc de M. de Fontanes, apris M. Villemain ; il a raconte des anecdotes , sans avoir la pretention d*fitrenihistorien,ni impartial, ni vraisemblablement de donner des preceptes a ceux qui veulent ecrire I'liistoire. Le fragment en vers , tire du poeme inedit de M. de Fontanes, a paru froid et d'un me- diocre interet. Le sujet de la Grece sauvie exciterait aujourd'hui plus d'entbousiasme , et dej4 M. Viennet a commence, dans une premiere epitre aux monarques europecns , a le traiter avec succis {■foy. ci-dcssus , Tom. X , pag. 644). C.

AcADliMIE DES IKSCniPTIONS ET BELLES-LETTBES. M. ChampolHon le

jeune a presente a cette academic une partie de son travail sur les icritures egyptlennes , destine i faire suite aux deux premiers vo- lumes, deja publics , de son ouvragc qui a pour titre : I'JUgypte sous les Pharaons , etc. , ou Recherches sur la geographie , la religion , la langue , les caracleres el I'liistoire de I'Egypte , avanl I'invasion de Camhyse; 2 vol. in-8", chez Debure , libraire. Cette partie est re- lative aux manuscrits egyptiens traces en ecriture hieratique. Pour faire connaitre a nos lecteurs en quoi consiste I'imporlante decou< verte exposee dans ce travail , nous allons extraire de Vexplication des planches i presentee a I'academic , le passage suivant qui en con- tient I'^nonce.

« Les manuscrits egyptiens, qu'un hcureux basard a fait retrouver dans les bypogees de Tbfebes et de Memphis, sont Merits sur toile ou sur papyrus, soit avec le roseau , soit avec le pinceau. Ces volumes, d'une anliquite bien plus reculee que ceux d'llerculanum et qu« tous les manuscrits connus , sont de deux especes. »

EUROPE. 2J5

« Les uns , et les plus rares , soat couveits de signed oU'raQt dcs images plus ou molns exactes d'objets naturels : des quadrupedes, des oiseaux, rhomme et ses parties diverses y paraissent groupes avec des objcts d'art ou des figures geometriques. Ces signes furent appalls Iiieroglj'phes , et I'espece d'ecriture dont ils sont les elemens constitulifs porta, chezlesanciens, lenom d'ecriture hieroaljpJiique. Les modernes ont generalement adopte ces denominations. Les signes hieroglyphiques etaient disposes en colonnes perpendiculaires du haut en has do la page , ou en lignes horizontales de gauche i. droite , et plus souvent encore de droite k gauche. »

Les signes dela seconde espece dc manuscrits egyptiens affectent au contraire uue disposition constante ; ils sont traces de droite a gauche , en lignes toujours horizontales. Ces signes consistent en traits varies, enlaces les uns dans les autres, d'un aspect bizarre el formes de lignes droites ou de courbes, »

« Ces manuscrits ont de bonne heure attire I'attention des savans. Rigord , Montfaucon , le comte de Caylus , I'abbe ISarthelemy ,. Zoega, M. de Humboldt et les membres de la commission d'Egypte, ayant reconnu quel'ecriture de ces rouleaux differait essentiellement de V/iieroglj'phique, la considererent , les uns comme ctant I'ecri- ture egyptienne hieratique, les autres comme I'ecriture epistologra- ph ique OM pojmlaire, mentionnees par les auteurs grecs ; mais tous s'accordent sur ce point important , que I'ecriture de ces manuscrits Sgjptiens est alphabetique, c'est-i-dire qu'elle se compose de signes destines ii rappeler les sons de la langue parlee. »

« Une longue etude , et surtout une comparaison attentive des lextes hieroglyphiques avec ceux de la seconde espece rcgard^s comme alphabeliques, nous ont conduits Ji une conclusion contraire." « II resulte en effet de nos rapprochemcns :

Que I'ecriture des manuscrits egyptiens de la seconde espece n'est point alphabetique ;

2" Que ce second systeme n'est qu'une simple modification du systeme hieroglyphique et n'en differe uniquement que par la forme des signes;

Que cette seconde espece d'ecriture est Vhieratique des auteurs grecs et doit etre regardee comme une tachy graphit hieroglj- phiquej

Enfin, que les caractercshi^ratiques sont des signes de choses , ct non des signes de sons. »

ToMi XI. 15

1

526 EUROPE.

Comme complement de ce travail sur I'liciiture hieratuiue M. Champollion le jeune a cherch6 les sigiics numeiiques de cette espece d'6criture. Ce n'est pas sans quelquc surprise qu'il a rcconnu des chiffres ayant les mfimes formes que Ics chiflres hindoux ct arabes, et devant avoir comme eux une valeur de position. On se rappelle d'ailleurs le travail de M. Jomard sur les chiEfres hierogly- phiques, insure dans notre recueil. Son m^moire a jet6 les premifercs lumi^res sur les signes num6riques hi6roglyphiques , comme celui de M. Champollion I'a fait sur les signes hieratiques.

Nous reviendrons sur le travail de M. Champollion , lors qu'il aura

re^u plus de publicite.

Lasociete de pharjnacie de Paris a proposii pour premierprix .•

De determiner quelle est la maniere d'agir du charbbn dans la

decoloration, et par consequent quels sont les changemens qu'il

eprouve dans sa composition pendant sa reaction ;

a". De rechercher quelle est I'influence exercec dans cette meme

operation paries substances etrangires que le charbon pent contenir;

3». Enfin , de s'assurer si I'etat physique du charbon animal n'est

pas une des causes essentielles de son action plus marquee sur les

substances colorantes.

Ce premier prix sera une medaille d'or de la valeur de 600 fr. Un deuxi^me prix, de la valeur de 3oo fr. , sera decerne i I'auteur da la meilleure analyse vegetale. La Societe desirerait que le sujet de I'analyse f (I t une substance m^dicamentcuse , on au moins une substance trcs-employee dans les arts , afin qu'il resultSt un avan- tage plus marque de son examen .

Le terme du concours est rigoureusement fixe au 1" avril 1S22. Les memoires devront etre adresses 4 M. Robiquet, secretaire ge- neral de la Societe , rue de la Monnaie , n" 9.

Hisloire naturelle.—Boianiqite. II est arrive de Chandernagor a Bordeaux, pour des maisons de commerce, une plante celebre en Asie sous le nom Ae^Chirayila , et cnvoyce sous celui dc Chirclta. Ce vegetal , d'apres une notice de M. le docteur Virey { Journal dc pharmacie,mai iS2i),parait devoir entrerdans I'usage delamedecine fran^aise : son amertume est tres-forte, sa vertu jebrifuge tres-re- nomm^e , et il pent etre prescrit en Europe contre la goutte et I'inertie des organes digestifs. II n'y a point encore de description

I

EUROPE. 227

)l»otaniqiie complclc dc cetle plante. M. Virey , d'apres des restes de lleurs et de I'niclification adherens aux echantillons qui liii ont i4t6 reniis et d'apris quelques details de Roxburgh dansles transac- tions de la Societe du Bengale ( Asiatic Researches , etc. Calcutta, i8io ) , la considere comme une Gentiane , et I'appelle Gentiana chirayila.

Agriculture. Action des os employes comme engrais- On salt generalenient que les os peuvent servir d'engrais ; mais nous croyons que M. D'Arcet est le premier qui ait rendu compte de Icur action dans ce cas. Voici I'extrait d'une note de cet habile chi- niiste, publiee t. XVI, p. 36i des Annales de chiraie et dephysique. « J'ai Tu souvent un tas considerable d'os exposes 4 I'air , dans le voisinage d'une fabrique de sonde factice, se couvrir , toutes les fois que les vapeurs acides etaient porteesde soncOte , d'un nuage blanc tres-epais, forme de sels ammoniacaux en vapeurs ou suspendus dans I'air. Ayant souvent essaye des os souniis a I'influence de I'air, je les ai toujours trouves legerement alcalins, etdonnant, avec I'eau dis- tillee , un eau de lavage contenant de la matiere animate en disso- lution. J'ai expose des os sur un pre pendant un an , ils etaient de- venus blancs ; toute la graisse qu'ils contenaient s'etait inGltree de proche en proche , et avail ete absorbee par le sol ou deeompos6e : ces OS n'avaient perdu que 2 pour 100 de gelatine environ.

« Je pense , d'aprtis ce qui precede, que lorsqu'on emploie les os comme engrais , la graisse qu'ils contienncnt, liqueliee par la chaleur -du soleil , est en partie absorbee par la terre ; que les os, ainsi de- graisses niecaniquement , deviennent plus facilement attaquables par Taction combinee de I'air et de I'eau ; qu'alors les reactions chi- niiques ont lieu ; qu'une partie de la graisse et de la gelatine conte- nues dans les os se convertit en ammoniaque ; que cette ammo- niaque saponifie une partie de la gelatine , la rend soluble dans I'eau depluie,qui, entrainant cette espece de savon , le repand sur la terre, oii il agit comme engrais. Les memes causes ramenent les memes effets , tant qu'il reste de la graisse et de la gelatine dans les OS. Mais cette action devicnt d'autant plus lente , qu'elle a lieu sur des os plus compacts, plus epais ou plus vieux : c'est parce que les OS n'eprouvent ainsi qu'une decomposition presque insensible , et parce qu'ils contiennent , terme moyen , pres de 4o pour 100 de matifere animale, qu'ils forment un engrais si durable , et dont les

15'

258 EUROPE.

rfl'ets sont si »ftr« cl i\ constans. C'est probablemeni ainsi qu'agis> sent une foule d'autres «ngrais ,tels que la cornc, les polls , lesvieux nuirs , les debris d'animaux , etc. J'ai mis , il y a huit mois , au pied d'un Granger, 200 grammes de cornc en petits morceaux ; je suivrai d'annee en ann6e I'aheralion de cetfe' substance animate, et je »errai decette maniere si mon idee est juste ous'ilfaut la rectifier.*

Economie. Wlarasquin mahaleb. On u'avait pas encore tire parti du fruit de I'arbre de Sainte-Lucie ( Prunus mahaleb , Lin. ) M. Cadet de Vaux a reconnu qu'elle fcrmente et qu'elle four- nit par la distillation un alcohol prussique ; mais la mettant d'abord infuser dans I'eau-de-vie, on obtientparla distillation au bain-marie, une liqueur qui, sucree conrenablement , est comparable au meil- leur marasquin d'ltalie. II est n^cessaire d'ecraser les fruits et leur» noyaui avant de les mettre infuser dans I'eau-de-vie. II faut aussi ramener la liqueur i 31 degres avant de la sucrer ; on ajoute alors 367 grammes ( la onces ) de sucre par litre.

Geographie. Cartes en relief. Reclamation. « II est fait men- tion (Tom. IX, p. 385 de la Reuue) , dcs cartes gecgraphiques ex(5- cutees en relief et presentees au roi de Prusse , par un artiste prus- sien. L'interet que prend la liei'ue k tout ce qui peut con- tribuer k la gloire des Frangais, c.omme i la propagation dcs con- naissances utiles , me fait ua devoir de revendiquer, au nom d'unde nos concitoyens , I'honneur de la priorite dan» I'execution d'une semblable entreprise ; priority qui, d'aprfes le contexte de I'article , semblerait appartenir i I'artiste Stranger. »

M. P. Lartigue , ingenieur hydrographe de la marine, t'est adonne depuis tres-Iong-temsi ce genre de travail , et I'on peut dire qu'il est parvenu 4 alteindre toute la perfection desirable. Dfes I'annee 1777, M. Lartigue avait eu I'honneur de presenter k Louis XVI un globe ex6cut6 en relief, du diamitre de dix- huit pouces. Sur ce globe, les grandes chaines de montagnes sont parfaitement indiquies, et le cours des fleuves tres-bien suivi. Louis XVI , juste appreciateur des sciences gfeographiques , comme I'annonce d'ailleurs assez les belles instructions donnees et ecriles de sa propre main k M. de la Peyrouse , daigna faire Iransmettre k I'auteur, par M. de Sartines, alors minislre de la marine, les paroles les plus obligeantes et les plus flatteuses, en I'assurant desornaai* de sa bienveillante protection,

EIROPE. 229

Depuis 1780, M. Laitigue eut le courage d'executer, d'abord en cire , puis en pUtre et a I'echelle de dixhuit lignes au degre , une carte de France en relief, avec tous ses details. Ghaque bassia de rivieres y estbien distinct; ies montagaes, formant des cbames con- tinues ou des pics separes, y scat tracees arec une precision rigou- reuse , elles s'elevent ou s'abaissent graduellement suivant leur hauteur naturelle ; c'est ainsi que sent figurees Ies Alpes, ou Ton aper<;oit Ies diverses somniites du Mont-Blanc et des autres purties de la cbaine , Ies Pyrenees, Ies Cevennes, Ies Vosges et Ies mon- tagnes-de la Foret Noire , avec loutes leurs ramifications. Les hau- teurs sous-marines elles-memes, le long des cotes de France, n* sont pas marquees avec moias de soin. De semblables et de si peni- bles travaux m^ritaient assurement d'attirer I'attention du gou- vernement. Aussi, 4 I'exposition publique de 1806, M. Lartigue eprouva-t-il une satisfaction biea douce : le jury d'exposition lui d^cerna k I'unanimile une medaille d'or. A peu prfes vers le meme tems , on faisait a I'academie des sciences un rapport extrfimenient favorable sur ces travaux. Les objets exposes au musce, h cetts epoque, etaient: i" Un tableau du Golfe du Mexique, execute en relief, a I'ochelle d'un pouce environ au degre (ce tableau est rea- ferm6 dans un cadre de deux, pieds dix pouces de large sur un pied onze pouces dehaut); un tableau de Varchipel de la Medilei- ranee, k I'echelle d'environ deux pouces au degr6 (renferme dans un cadre d'un demi-pied de largeur, et de deux pieds de haut); un tableau de {'Europe, egalement en relief, sur le diametre d'un globe de dix huit pouces; 4' enfin , un tableau coule en etain A'nne panic da Golfe du MexiquCy depuis la bale de Honduras jusqu'a I'isthme de Panama , sur la meme echelle que le grand tableau du Golfe du Mexique. L'auteur s'est livre 4 d'autres travaux du meme genre , qui n'ont point encore ete vus du public. De belles cartes ( toujours en relief) representent V Amirique septentrionale, Vllalie et la mer Mediterranic ; cette derniere surtout est d'une assez grande dimen-^ sion. Voulant eviter les inconveniens qui resultent de I'emploi du plSitrc, il a cherche i y supplier par I'usage du carton; il a fait en ce genre quelques essais. A tous les suffrages honorables deja cites, je dois ajouter celui du Roi , a qui tous ces objets furent present6s fin i8i4, et qui applaudit au zele et a la perseverance de M. Lar- tigue. C'est la assurement pour lui une bien douce recompense

230 EUROPE.

dcs pehies qn'il s'cst donn<ies ct des soins qu'il a pris pour faiie <?cs decouvci tes , dont il lui serait bien puniblc de voir I'honncur acquis tt uii ttianger. Son regret est de n'avoir pu trouvcr de nioyens asser peu dispendieux pour rendre , ^ I'aide de son proccde , I'tlude de la geographic et plus facile ct plus commune. Alkx. B. du B.

Institution de M. Morin. Enseignement du latin par la melhode de M. J. J. Ordinaire.

En annon^ant ( t. X. p. 253 ) que plusieurs institutions de Paris venaient d'adopter , pour J'enseignement du latin , la methode de M. J. J. Ohdinaihe , recteur de I'acad^mie de Besangon , nous nous sommes engages i faire connaitre leurs travaux et leurs succes. Nous avons assiste aux exercices qui out eu lien , le jeudi 19 juillct , dans le bel etablissement de M. Morin, rue Louis-le-Grand, le seul oi\ M. Ordinaire dirige lui-m6me I'application de sa methode. Voici les resultats qui avaient eteobtenus icette 6poque : La classede M. Mo- rin a 6t6 ouverte au commencement du mois de juin dernier. Dans le courant de la premiere semaine , quatre groupes , composes chacun de sept ou huit elfeves , sc sont formes successivement et ont 6te exerces par les procedes de la nouvelle methode. Ainsi , le premier groupe , c'est-i-dire oelui des el^res les plus avanc6s , n'existait , le igjuillet, que depuis six semaines , desquelles on doit retrancher les dimanches et fgtes , ce qui reduit k trente-cinq le nom- bi-e des jours consacres au travail. Dans ce court espace de tems, les enfans du premier cercle , qui avant ne 'savaient pas un mot do latin, ont appris : i" les vingt-sixjtableaux des declinaisons latines rii- guliferes et irr^gulieres , de maniere a en reproduirc imperturbable- ment les cas isoles ou reunis , dans quelque ordre qu'on les leur de- mande ; les significations d'unmiUier Ae. substantifs latins , c'est- i»-dire de tous ceux qui se trouvent dans le texte de V Epitome his- torice sacrce. lis reproduisaient non seulement la signification fran- ^aise qui se rapporte a chacun de ces mots, mais encore le mot latin lui-m6me sur chacune des significations frangaises , en ajou- tant i chacun des mille radicaux latins la desinence caracteristique dans I'un des deux nombres du cas regulier ou irregulier , qui leur etait arbitrairement designt. Ces cni'ans connaissaient dela mCmc maniere plus de deux cents adjcclifs latins, dcsquels ils relranchaienl la desinence adjectiue pour y substituer i\ volonte la terminaison substantive ,\oxs(iVi<i ces adjcctils claient formes d'un substantif , ou

EUROPE. 231

la lerminaison aduerbiale ,lotsqae ces altiibulifs etaient suscep- libles de la recevoir.

Les enfaus dcs ccrcles inferieurssuivaient de pr6s ceus du gioupe dont nous venons de faire connaitre les travaux. Tous repondaient avec facilite aux questions qu'on leur adressait sur le radical et la desinence , sur la formation des cas , sur les genres et les nombres , sur la valeur de I'accentuation latine , sur I'orthographe des deux langues , etc. etc.

Nous avons remarquc, parmi ces eleves , cette emulation et ce contentement que I'ancienne methode avail fait regarder comme jncompatibles avec I'etude des langues mortes. L'ardeur de.ces en- fans est telle , qu'on est oblig6 de la moderer ; et il est hors de doute qu'apres qualre mois de travail , ils seront en etat d'ex- pliquer I' Epitome hislorice sacrce , resultat aaquei M. Ordinaire ne croyait arriver qu'en huit mois.

II n'est pas un p6re de famille , pas un membre de I'universile qui, aprfes avoir assiste aux exercices de cette ecole, n'ait joint ses vifs remercimens a ceux que la Societe pour V instruction elementaire a voles unanimement, dans sa derniere seance publique, au respectable recteur de Besan^on. Nous devons nous fcSliciter d'avoir donne les premiers une analyse de son excellente Methode pour renseignetnent des langues ( T. VllI, p. 554) (0' ^' surtout devoir les succ^s qu'elle oblient aujourd'hui surpasser encore ceux que nous avions predits.

Commerce, Maison de banque de consignations commer- ciales. L'industrie el le commerce fran(;als demandaient une inslilulion qui ei'il pour objet principal de faciliter el d'acc6lerer. I'execulion des conceptions utiles, les speculations, les echanges , notammenl des maticres premieres; cnfln, de moderer les interets el les frais des avances sur consignation. M. Pincepre, apres vingt ans de travaux honorables chcz MM. LaCtte et compagnie , et chez le chef primitif de cette respectable maison, vient de fonder cette institution en societe en commandite , sur un fonds capital de 4 millions , se composant de 4,000 actions , sous le litre de Maison de banque de consignations commercialese ct sous la raison Pince- THE el compagnie , i Paris, rue du Faubourg-SainlMartin , n" Sg , el a la Villette, Grande-Rue , u" 100; le prospectus el les slatuts ds cette Societe nous ont tie adresses. En voici un extrait:

(1) Paris. Colas, imprimeur-libiairc , rue Dauphiue , 33.

23? EIROPE.

Ouviir.un entrepot general Jc inarchandises , les afTectera une raleur invariable par leur estimation que garantit im expert respon- sable , mettre cette valeur en circulation sous la f6rme d'effets de commerce ; tel est le mode aussi simple que neuf qui rcalisera !e TOcu forme pour la creation de cc grand etablissement , en mon- noyant , pour ainsi dire, lesproduits industriels et les marcbandises. Par cette centralisation et ccltc combinaison , le manufacturier el lecommer(^ant obtiendront sur-le-champ , de cette maison , le credit le plus ^levc , le plus disponible qu'ils puissent retirer par la voie de consignation ; des occasions de ventes particuli^res ou pt-riodi- ques qui se succederont avec rapiditc ; de I'cconomie et de la mo- 'dcration dans les interets, et I'invariabilite des frais. Le consigna- teur nc sera plus intempestivcment dcpossede de sa marchandise ; les chances d'une vcnt« opportune nc lui seront point ravies ; il n'aura plus k redouter de stagnation d'^coukment , ni d'incertitude sur les rcnouvellemcns d'echeaaces , la conipagnie pouvant les lui accorder iadefiniment. Avec le moyen de conversion de la marchan- dise en une valeur de change qui la frappe d'un privilege special , ( art. 93 du Code de commerce}, le ntjgociant peut multiplier ses operations lointaines ou sur place ; le manufacturier , ses fabrications bien avant I'cpoque des saisons ; tous , des escomptes facilement realisables, non seulement k la Banque de France ( depositaire d'un million que lui vcrsera , dans cette vue, la Maison de banque com- mercials ) , mais encore en tous lieux , parce que cette valeur est le signe representatif d'un objet inalterable « son estimation garantie , et que I'assurance faite contre I'incendie aux frais de la Societe , le transforme en une sorte de lingot. »

Ce- nouvel etablissement compte deja au nombre de ses action- naires , des capitalistes , des banquiers et des negocians experi- ment's ; il parait susceptible d'un grand developpement , et doit fixer I'attention du monde commercial , par I'essor qu'il peut don- ner i ses combinaisons , et par les heureux resultats qu'on doit attendre de la loyaute et de la sagessc des operations de son chef, ilevedel'une des plus respectables maisons de I'Europe.

1/ Histoire du droit romain, suirie de I Histoire de Cujas, par M. Beriiat Saint-Prix , annoncee dans notre T. X, pag. i'Q, va 6tre traduite en allemand. C'est une puissante et honorable recommanda- tion en favcur de cct ouvrage.

EUROPE. 233

Biblioikeque du Roi.~ On trouve dans notre cahier de juin (T. X , p. 65o ) une annonce relative k la magnifique edition de la version italienne de V^ni'ide d'Annibal Caro , executee i Rome , aux frais de madanie la duchesse de Devonshire. Nous apprenons aujourd'hui que cette duchesse a fait present d'un exemplaire de ce hel ouvrage A la Bibliolhuque du Roi a Paris.

PuBLicATioits fiOvvELht.s . Hisloire naturelle. —On s'occupe en ce moment de la publication d'un Dictionnaire classique d'histoire naturelle.

La redaction de cet important ouvrage est confiee i MM. Victor Audoin , Adolphe Brogniart , Edwarts, d'Audebard, de Ferussac, Drapiez, L6(?n Dufour, Flourens, Jussieu fils , Kunth , Lamouroux , Thiebaud de Berneaud , Lucas , Achille Richard , Serie et Borry de Saint Vincent. MM. de Humboldt , Arago , de Lacepede , de Can- tlole , Geoffroy de Saint-Hilaire , Latreille et Beudantont bien voulu se charger de la redaction d'articles generaux.

M. Borry de Saint Vincent est charge de la direction de I'entre- prise. L'ouvragesera compose de dix volumes in-S",; 7 fr. le vol. pour les souscripteurs ; 8 fr. pour les nonsouscripteurs. La souscription sera fermce le premier novembre , jour dc la mise en vente du pre- mier volume ; tous les deux mois , il paraitra exactenient uti nouveau tome.

L'atlag, joint au teste , sera compose de 100 planches qui parai- tront en loliyraisons. Prix : 3 fr. 5oc. chaque.

On souscrit chez Rey et Gravier , libraires editeurs, quai des Au- gustins, n" 55 ; Baudouin frferes, libraires , rue de Vaugirard , n" 36 ; Correard , libraire , au Palais-Royal.

Projet d'un Dictionnaire des sciences morales el politiques. Une partie desredacteurs de la Retnie encyclopedique, aux quels sont convenusde s'associer d'autrcs collaborateurs,egalement recomman- dables par leurs connaissances, leurs talens et leurcaractere, vont preparer de concert un ouvrage qui pourra devenir classique, et qui parait devoir satisfaire a I'un des besoins de notre epoque. Cest un Dictionnaire historique etraisonne des sciences morales etpolitiques, qui sera un repertoire et un dep6t des faits les plus importans,reIa- tifs 4 ces sciences qui exercent une si puissante influence surle bien- *tre des particuUers et sur la propriete des etats. Le plan , a la fois

23A EUROPE.

simple, vastc et niOlhodique de cc Diclionnaire , doit couipiendic cinq irrandes dirisivns :

I. Idiologie et P/iysiologie inlellecluelle , elude de I'liomnje phy- sique ct de riioniinc moral , auquel se rapportent les sciences et leK institutions sociales. 11 faut itablir sa base, rechercher de bonne i'oi la nature et les besoins de rbomme, d'oii Ton deduit la necessile de la morale, des sciences et des institutions qui en decoulent.

II. Education J jnorale religieuse , el philosophie rationnelle. Aprt's avoir examine et appr6cie la nature et les besoins de i'bommc jndividu et de I'espece humatne, on doit traiter de I'education ou de la culture et du developpement des faeultes liumaines dans i'individu et dans I'espece ; puis , de la morale appuyee sur la religion et surla philosophie , ou de la connaissance des devoirs qui reglent nos actions.

III. Legislation et politique genirale. Nous avons appris i con- naitre rhomme par IVrfeo/o^fe combinee avec la physiologic j puis a I'elever , i le former ct a le perfectionner, par VMucation, la religion et \3i morale; nous sommesnaturellement conduits a la legislation et a la politique generale , ou S la science descommandcniens humains, des droits et des devoirs , appliques aux divers etats de rhomme en soci^te.

IV. Economic politique , statislique ct administration jmhlique.— Les soci^tt's humaines sont instiluees. L'cconomie publique doit nous r<^veler les secrets de leur puissance , de^leur force et de leur prospe- rite, ou nous expliquer la nature ct les causes de la richessc des na- tions , les lois de la production , de la repartition , de la circulation et de la consommation des richesses.

V. Geographie cifile et politique , et Hisloire. Enfin , quaud nous avons etudie I'origine , les causes et les progres de la civilisation, qui a son premier gcrme dans la nature perfectible de rhomme, el scs trois principaux moycns dans I'education , aidee de la religion et de la morale; dans la legislation et dans I'economia publique , nousarrivons i la geographie, a la chronologic eta 17»'s/om', qui nous donnent la triple connaissance des lieux , des lems ct desfaits, con- sidercs par rapport i la morale et a la politique : nous rapprochons et nous comparons les dilFcrcns peuples, aux diffOrentes epoques de leur existence , pour nous rendrc comple du point d'oii ils sont pailis.

liUROPl!:. 235

tic celui oil ils sonl airivt's , dcs traits caracleristiques qui distin- guent ieiir (itat social actucl , et pour indiqucr peutetre le point plus avanc6 oii Ton est fonde a presumer qu'ils pourront atteindre...

Ce n'est point iciun ouvrage systematique , ni un recueil destine a faire prevaloir telle ou telle doctrine. C'est un depot de faits ; c'est un inventaire.des sciences qui int(5ressent le plus I'homme en societe; c'est un monument consacrc , comme le veut BScon , i la dignite et a I'utilite de I'homme etdel'espfece humaine. Beaucoup d'hommesde m^rite qui n'ont pas le loisir de faire de longs ouvrages , mais qui pos- sedent i fond un sujet sur lequel ils ont concentre leur attention , ont bien voulu promettre d'enrichir ce Dictionnaire, en y deposant les rcsultats de leurs meditations et de leur experience. Le pros- pectus de cet important ouvrage , qui comprendra les nonis de ses principaux redacteurs, devant etre public dans le courant du mois prochain, nous nous empresserons dele communiquer a noslecteurs.

M. A. J.

Biographie Dauphinoise. De toutes nos anciennes provinces , le Dauphine est , sans contredit , une de celles qui ont produit le plus de magistrats recommandables, de guerriers illustres , d'inge- nieux et de savans ecrivains , de jurisconsultes profonds ; la patrie des Lesdiguieres, des Bayard, des Condorcel, des Mably^ des Servan , ofTre de precieux souvenirs aux amis des lettres et de la vertu , et aux admirateurs de la gloire des armes. Nous pensons qu'on doit accueiilir avec bienveillance I'ouvrage dont nous annoncons la tres- prochaine publication , et qui se composera de notices hisloriques sur les hummes les plus remarquables par leurs verlus , leurs ta- lens, leur courage ou leur Industrie , qui soni nes ou qui ont figure dans le Dauphine , depuis sa reunion a la France jusqu en 1821. Cette Bicgraphie formera un volume d'environ quatre cents pages in-S" , sur beau papier velin , et avec des caracteres sortis des ma- trices de Firmiu Didot. II sera accompagne de dix portraits dessines par M. Jacquemain, et lithographit's chez M. Marc-Aurel, editeur de cet ouvrage, et chez lequel on souscrit , i Valence. Prix , 6 fr. M. Eymery, libraire , a Paris , est aussi charge de recevoir des sous- criptions jusqu'au 5o aoilt prochain.

—Philologie.—Nouveau dictionnaire general commun a loulcs h-s langues. L'autcur des Observations sur les inconveniens du systeme actuel d'instruciion publique en Europe et surloul en France, et sur les moyens d'y remedier {hiochwc dont nous avoiis

356 EUROPE.

rendu comptc dans noire cahier d'avril, Tom. X, pag. 134), d6si- rant faciliter les moyens dc niettre en pratique le nouveau mode d'instruction qu'il propose dans la troisiemc partie de son ouvrage , a con^u le plan d'un nouveau dictionnaire general coinmun k toutes les langues, a I'aide duquel il serait facile d'apprendre avec intthode et en Ires-pcu dc terns les langues des peuples civilises.

' Voici les principes sur Icsquels M. Pettier base son ouvrage , qui doit paraitre sous ce titre : jEssai sur les principes generaux de la philosophic du langage, ou /inalyse raisonnee de la marche pro- bable de I'espril humain dans la formation de la i-'aleur des signes, outrage poufant seruir de type a la redaction des dictionnaires des differentes langues.

Les langues, considerees dans la valeur des mots, ne presentent qu'une reunion de signcs destines S exprinicr des idees. Les id6es sont ou directes ou reflichies. Les idees directes sont le resultat des impressions que les objets exterieurs produisent sur les sens. Les ide^s re/lech ies sont Paperfu des divers rapports, sous lesquels I'es- prit peut considerer les idees directes ou les objets qui les occa- sjonncnt. Les objets cxterieurs , principe des id6es directes , sont necessairement limites quant k leur nombre ; et dans I'^tat actuel de la civilisation , oil , par des ecbanges et des communications conti- nuelles , les productions propres a un pays ont et6 transportees et souvcnt meme naturalisees dans tons les autres, ces objets sont, k tres-peu de chose prcs , les mOmes cbez tous les autres peuples. Quoique les differens rapports sous lesquels on peut considerer les objets soient infiniment plus nombreux que les objets eux-memcs , cependant le nombre de ces i-apports est lui-meme restreint dans de ccrtaines bornes; et, grSce au bienfait de rimprlmerie, les reflexions de tous les hommes susceptibles de penser, confines h ce vehicule , ont ete transmises cbez tous les peuples civilises et sont devenues en quelque sorte un domaine commun.

Dans cet etat de cboses, Ton est autorise a dire que la somme des idees directes et des id^csriflechies, qui, dans les dilTerentes langues, sont eiprimees par des signes divers, est, sous un petit nombre d'exccptions, absolument la menie cbez tous les peuples parvenus au meme degr6 de civilisation et de connaissances. D'un autre cOte, I'esprit humain , dont jusqu'i present Ton n'a pcut-etre pas obserre avec a«sei d'attention la marche dans la formation du langage , pro- ctde avec une regularitO ei une methode qui ont diji et6 reconnue*

EUROPE. 237

par un petit nombre de bons esprits, et ses moyens dans tous ses precedes sont I'analyse et ia synthese. Quoique la marche de I'esprit humaio, fondle sur I'analyse et la synthese, soit absolument la mgme dans toutes les langues, les points de depart ou les idi-es-meres ne sont pas les mfimes pour toutes; et peut-etre, lorsque cette nouvelle m^thode d'envisager les valeurs des signes sera dev-enue plus fami- liere, sera-t-il possible de classer les langues par systemes. M. Pettier se propose de developper ces idees dans les observations preli- minaires du trait6 general des prepositions.

D'apres ces faits , toutes les idties sont susceptibles d'etre reparties par families distinctes, dans lesquelles une idee-mere donne nais- sance k ua nombre plus ou moins grand d'idees speciales et secon- daires. M. Pettier a essaye de former un tableau pour cbaque famille; et ce tableau, redige sur les meilleurs dictionnaires des principales langues , a pour but de donner la valeur de tous les signes qui, dans les differentes langues d'un meme systeme, servent i exprimer leg idees appartenant a une famille. Chaque valeur, dcterminee par les faits et par le raisonnenieat, est distinguee par un signe destine a Taccompagner dans le dictionnaire particulier i chaque langue et a faciliter le recours au dictionnaire general,

Avant de publier la totalite de son travail, 51. Pettier a cru devoir en soumetlre un essai au public. Les prepositions sont sans contredit, de teutes les parties du discours, la plus abstraite , la plus diGQcile , la plus inconnue jusqu'ici, et peut-etre cependant la plus importante, Le Traiie general des prepositions pour les langues qui ressortent du systeme de la langue latine doit paraitre dans le courant d'oc- tobre prechain ; les valeurs prepres ii chaque idee-mere seront expliquees et develeppees par des figures de geemetrie. L'auteur doit y joindre le Dictionnaire .particulier des prepositions de la langue latine el de la langue franfaise. 11 espere peuvoir en rediger un semblable pour les langues anglaise , italienne et espagnole. La langue grecque et la langue allemande forment, du moins pour les prepositions, un systeme tout different de celui de la langue latine. II se propose de donner successivement les autres parties du discours. Si le travail de M. Pettier repond aux idees qu'il fait conceveir, I'on ne pent nier que sen dictionnaire general ne rende un service imi- nemment important aux lettres et & I'instruction publique.

Beaux-arts. Gravure. M. H, Ch. Muller s'occupe en ce

238 EUROPE.

moment de graver le portrait de icu M. Camille Jordan , niembrc de la chambre des dtputt^s, d'aprtjs un tableau trfes-ressemblant peint par mademoiselle Godefroi , sous les yeux de M. Gi- rard. Cctte gravure, executee au burin, sera d'une dimen- sion de 7 pouces et demi sur 6. Prix, pour les souscripteurs , lo IV. ct 20 fr. avant la Icttre. La souscription sera f'ermec Ic 3o aoflt pi:ochain; passe cc terme, Ic prix sera portc a J2 fr. et 24 fr. arantla leltre.— Cctte gravure paraitra dans le courant du mois d'octobre prochain.

On souscrit chez I'auteur, cloitre Saint-Benoit , 1 , au coin de la rue des Mathurins ; Benard , marchand d'estampes , boulevart des Italiens ; Delaunay, libraire , Palais-Royal; Eymcry, tditeur des ceuvres de Camille Jordan, rue Mazarine; et chez Treuttel et Wiirtz, rue de Bourbon, n" 17.

Th^xtbes. Thedtre-Frangais. La Mere rivale, comedie en trois acteset en vers , par M. Casimie Bonjouk ( 4 juillet). Cette piece a obtenu , i la premiferc representation, un succfes qui parait devoir se soutenir. C'est ii tort qu'on a reproche i I'auteur d'avoir mis sur la scene un caractere denue de verity. II ne sefait malheureusement pas impossible de trouver une mere qui , tenant sa fille dans une espece d'exil perpetuel , ne I'a vue que le jour de sa naissance et le jour de son mariage. L'auteur a reussi i rendre la comtesse Dorval moins odieuse , en fondant sur desapparences tres-fortes I'crreur qui lui fait voir une rivale dans sa fille : son amour qu'ellecroit trahiluifait prendre en haine celle que sa coquetterie lui avait rendue indifferente.

Ce n'est pas par I'invention que M. Bonjour nous semble meriter les eloges qui lui ont ete donnts avec justice. Le caractere de cette femme , qui est a la fois dame de charitS et mauvaise mure , offre un melange fait avec esprit , des caracteres de la Mere jalouse de Barthe , et de I'hypocrite des Deux gendres. Le chevalier Belcour est plus original : c'est un philosophe de salon , qui rit de tout, et qui prouve son amitie par des tpigrammes. Cependant il nous pa- rait manquer de verite , lorsque , voulant marier Sophie i son ami Germon , il fletrit en quelque sorte dans I'opinion publique la com- tesse qu'il doit epouser , en faisant connaitre la coupable inimitie que celleci nourrit contre sa fille. La piece est sagement conduitc ; mais on y trouvc pen de situations comiques. Nous louerons avec moins de restrictions le style qui, selonnous, fait le principal me-

EUROPE. 239

vite de la nouvelle comedie , el que nous trouvons, a quelques vers pres J elegant sans recherche, et spirituel sans allectation. Ge coup d'essai d'un jeune homnie est fait pour donner de grandes espe- rances.

Opera-Comique. Emma^on la Promesse ijnprudenie, opera en trois actes, paroles de M. Planard, musiquedeM. Auber(7 juillet). Raymond, riche cultivateur des environs de Vienne, a deux fils : I'atne habite la ferme avec son pere ; I'ambition a decide Edmond le plus jeune i entrer au service. Comnie il aime i briller, il jouc et perd I'argent avec lequcl il devait, suivant I'usage allemand , acheter une compagnie. N'osant avouer sa faute a son pere , il est a Vienne depuis un niois , sans pouvoir se decider a retourner i !a ferme. Dans ce moment critique, madame Palmer, riche veuve , qui vient de se brouiller avec un baron allemand, dont elle recevait les hommages, offre sa main k Edmond. La vanitc et le besoin d'ar- gent font oublier un moment a celui-ci qu'il doit epouser Emma, jeune orpheline recueillie par Raymond , et I'engagent a signer une promesse de mariage , que la prudente veuve exige de lui. II se de- cide pourtant a se presenter chez son pere , et arrive au moment oil Ton va marier son frere avec la soeur d'Emma. Raymond veut cele- brer en meme terns la noce de son second fils; celui-ci se trouve alors force de lui avouer ses torts. Sur ces entrefaites, madame Pal- mer arrive suivie du baron , qui provoque secretement en due! le jeune ofHcier. Edmond a retrouve toute sa passion pour la jeune amie de son enfance; mais il craint, en I'epousant, de ceder aux menaces du baron , et va se battre. Emm? , ignorant le courroux de son pfere adoptif , prend pour sa confidente madame Palmer, qui , revenue i de plus tendres sentimcns pour le baron blesse par son rival , charge la jeune orpheline de remettre a Edmond la promesse de mariage. Tel est le sujet de I'opera nouveau. M. Planard a fait de nombreux emprunts a Sedaine ; mais il a choisi avec gofit , et sa piece, disposee avec adresse , offre des scenes interessantes et d'a- gr6ables details. La musique , qui nous a paru gracieuse et char- mante, a beaucoup contribue au succes.

NiSgrologie. Vanloo. Carle Vanloo , dont tons les amateurs connaissent les tableaux de neige, est mort, au commencement de juillet, .i I'dge de soixante-dix-neuf ans , apres avoir parcouiu avec honneur sa longue carriOrc.

TABLE DES AHTICLKS

CONTENLS

DANS LE TRENTE-UNIEME CAHIER, JUILLET 1821.

I. MEMOIRES, NOTICES ET MELANGES.

1, Notice sur les chevres de race thibi'taine. pag, 5

9. Biographic de Schakespeare. /. A- Buchon. >3

3. Notice sur les sculptures du Parthenon. P. A. 19

II. ANALYSES D'OUVRAGES.

4. Traite complet de m6canique appliquee aux arts , par

M. Borgnis. Le Nonnand,

5. Observations surplusieurs points iniportans de notre legis-

lation criminelle , par M. Dupin , avocat. Lanjuinais. 60

6. Premier et second rapports de la sociele formde i New-

Yorck , pour prei'enir la pauurete. Laffon de Ladebat. 68 p. Histoire d'ltalie, ancienne et nioderne, par M. Bossi.

F. Salfi. 76 ,8. Histoire de rAssemblee constituante , par Lacrctelle.

A. Mahul. 89

9. Histoire de la vie et des ouvrages de J.- J. Rousseau , par

M, de Musset. Deppins;. 102

10. MCme ouvrage. {Autre article.) Leon 2'hiessf. in

III. BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.

Annonces de 111 ouvrages, fran(^ais et ctrangers. 127

IV. NOUVELLES SCIENTIFIQUES ET LITTERAIRRS.

AuEBiQUE. Etats-Unis. Philadelphie. 197

AsiF. Indes Orientales. Chine. Calcutta. He de Ceylan.

Perse. Turquie asiatique. Hes Philippines. 201

^fBiQCE. Sierra-Leone. 20^

EcBOPE. Grande-Bretagne. Russie. Suede. Danemarck. AUemagne. Italic. Espagne.— Pays-Bas France. Paris. 3o4

CHANGEMENT DE DOMICILE.

DEPOT BIBLIOGRAPHIQUE,

CI-DEVANT RUE DE CHOISEUL, N". 3, MAINTENANT RUE NECVE-DES-PETITS-CHAMPS,

N°. 5,

PASSAGE DBS PAVILLONS.

En annoncant la translation du Dep6t Bibhographiqde dans un autre local, nous croyons devoir rappeler au public quelles sont les bases de cet ^tablissement , et quel en est le but. Cinq annees d'exp^rience , et les en- couragemens que nous avons recus des amis des sciences el des lettres, ainsi que des amateurs des belles Editions, nous ont port6 a 6tendre noire commerce , en joignant la Librairie moderne a la Librairie ancieune , a laquelle jusqu'ici notre ^tablissement 6tait sp^cialement affect^; et nous nous sommes decides a choisir un local plus vaste et plus commode. Nous pensons avoir bien ren- contrd en placant le D^pot bibliographiqvie , rue JVeiwe- des-Fetits-Champs , JV". 5 , prfes le Palais-Royal , et par consequent au centre de Paris et du commerce.

Le principal but de cet (Jtablissement est de faciliter les moyens de vente et d'acquisition de tout ce qui con- cerne la Librairie. Ainsi les personnes que des circons- tances forccnt a vcndre leuis livres pcuvent, rn les pla- cant dans notre depot , eviter de gran<ls sacrifices , ct

(2)

acqui^rent la certitude d'en obtenir toujours la juste valeur. Les livres , aprfes que les prlx en auvout did fixds conjointement avec le directeur du Ddpdl , sont exposes pendant trois mois, sans aucuns frais. En cas de vente, le droit de I'Etablisscment sur le prix n'est que de dix pour cent. Apres trois mois rdvolus, I'administrateur du Ddp6t avertit les ddposans de retirer les livres qui n'ont point dt6 vendus, ou, s'ils le prdfferent, il leur offre de comprendre ces livres dans des ventes a Tenchfere qui se fqnt pour le compte de rEtablissement , -au moins une fois par trimestre, et aux conditions les moins ondreuses. Les ddposans peuvent aussi en traiter de grd a gr«j avec rEtablissement , qui leur en donnera toujours un prix avantageux.

Les Auteurs et Editeurs de grands ouvrages de scien- ces , beaux-arts , voyages , etc. , sentiront sans doute qu'il est de leur intdrdt de ddposer dans rEtablissement un ou plusieurs exemplaires de leurs ouvrages , qui par ce moyen seront connus des Strangers qui visitent en grand nombre notre Ddp6t.

Tous les objets ddposds sont inscrits sur un registre special , ou sont aussi dtablis les comptes de vente. Ce registre sera reprdsenld tous les jours aux ddposans, s'ils le requiferent , et le montant des objets vendus leur sera soldi aussitot.

Ces dispositions sont communes aux Auteurs et Librai- res des ddpartemens , et meme aux Auteurs et Libraires etrangers (i). C'est pour eux tous un moyen de faire con- naJtre d'une manifere facile et peu dispendieuse , leurs

(i) 11 est bien enicndu que tous les envois I'aits au Depot doiyent fire J~rwtcs de port.

(3) livres dans Paris, maintenant le centre du commerce europ^en. Combien dc fois n'est-il pas arrive que des livres bons et utiles n'ont point joui de la rt^putation qu'ils m^ritaient, faute d'avoir dt^ connus dans la capi- tale , et cons6quemment d'avoir pu ^tre appr^ci^s?

Afm de faciliter encore par tons les nioyens la vente des livres qui nous sont confi^s, nous avons depuis long- temps imaging de distribuer un grand nombre de cata- logues , oil sont inscrits les articles principaux nouvelle- ment d^pos^s, avec les prix fixes. L'exp^rience nous a demontr6 Futility de ces catalogues , faits avec le plus grand soin , et ou chaque livre pr6cieux est accompagnfi de notes bibliographiqucs , tendant a en d^montrer la raretd ou I'importance. Nous y joindrons a I'avenir un catalogue pour les livres modernes qui seront d6pos6s.

L'Elablissement contient aujourd'hui plus de trente mille volumes en tous genres. On y remarque plusieurs livres tr^s-rares et manuscrits curieux.

D'aprfes cet expos^, nous esp^rons que les Auteurs , Editeurs, Libraires , et amateurs de livres, apprecieront I'ulilit^ de notre Etablissement; et que, secondes par eux, nous parviendrons au r^sultat que nous desirous, d'^tablir dans Paris un Depot central pour la Librairie, tant ancienne qvie modei-ne, tanl I'rancaise qu'^trangfere.

LIVRES DE FONDS

Qui sc trouvent thez Chassekiau, lib r aire ^ propiictaire du depot bibliographique.

Theatre complet bes Latiws , traduit , avec le texte en regard, accornpacno de notes philologiques et arclieologiques , par J.-B. Levee, ct par feu I'abbe Le Monnier; augmente de Dissertations, Examens des pieces, etc., par MM. AmaurjDm'al, de I'Aca- dcmie des Inscriptions et Belles-Lettres, et Alexan- dre Duval, de TAcadcmie fran9aise. 14 vol, iu-8".

Pap. vel.le vol., pour les souscriptcurs , fi f. 5o o.

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( II en parait nxaintenant 10 volumes.)

ConECTioif DE MoRALisTES Francais (Montaiqne,Cliar- ron, Pascal, La Rochefoucauld, La Bruyere, Vau- venargues, Duclos), ornee de leurs portraits nou- vellement graves par P. Audouin , et publiee avec des Commeiitaires et de nouvelles Notices biogra- piiiques ; par Amaiirj Duval, membre de I'lnstitut. 14 rol. in-S".

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( Cincj volumes sont en vente. )

Lais , Fables et autres productions de Marie de France, poete Anglo-norniand du I'i'. siecle, avec la traduction en regard du texte , et des Notes et des Commentaires ; ainsi que des Observations sur les usages et coutumes des Francais et des Anglais , dans les I2« et iS" siecles , par /. B. B. do Roque- fort, de la Socie'te' des anliquaires de France, etc. 2 v. in-S"., avec fig. , imp. de Firmin Didot. Prix. 16

Pap. vel. 3a

Scppt.EjiENT on Glossaire de la Lancue somane , par J. B. B. de Roquefort , auteur du Glossaire de la Langue romaue. i vol. in-S" a deux colonnes. Prtx. 7

Memoires niSTORiQUES, politiques et litte'raires sur le royaume de Naples, par le comte Orloff, senateur de Kussie ; avec des notes et additions ; par M. Am nury Duval , membre de I'lnstitut. 2 vol. in-S". avec deux cartes geographiques, 1"=. partie- Prix. i5 Pap. vel. 3o

Les I.' ., 3'. et derniere parties de cesmemoires (3 v. ^in-8") [taraissent cu ce moment. Prix, 20

Pap. vel , 40

L'ouvrage entier, 5 vol. , 35

La priwcesse d'Amalfi, par le comte Fedor GolowJcin. I vol. in-S". pap. vel. , portrait. Tmiir. par Firmin Didot. Pn... '^ ' ' 5

(Ouyrage piulailt-meul cxcculti et tire a petit nombic.)

'VDOui.

tJ

Messieur* lef auleurs , ^dileurs d'ouvragos , on libraires, qui desireraient que la REVUE KNCYCLOPEDIQUE fit connaltre, soil dans la section (ks Analyses , soit dans celle du Uidlctm Bibliographique , les ouvrages nouveaux qu'ils piiblient, sont invites & en faire parvenir ubux EXEMi'i.AiRES au Btireau central (U redaction , d'abonnemenl cl d'expcdition, rue d'Enfer-Saint- Michel, n" iS, h Paris. Tous les ouvrages envoycs; se,ronl insciits parordre de date, et annonc6s dans le plus court d^Iai.

Si quelques r6dacteurs ou quclques IccLeurs dn 'a Revue croient devoir lui adresser dcs question.'^ intcressantes sur les sciences, les le tires ou les heaux arts, la Direction s'enipressera de les pro- j)oser dans I'uu dcs plus prochains cahiers, et pu- hliera exactemenl les rcpon^cs qui lui seroiil envoy^es.

L Misloire de hi fit- el- t/f* oiwtag?s de J. J. Iiouv- fsfciUj dont nous avons rendu coin pic dans ce cahier, ;■€ Irouve au bureau cenir.il de la RevuC

Libraires chcz lesquels on petit souscrire dans les pays etiunsers.

Aix-la-Chapelle, Laruelle fiis. Amsterdam, G. Dulbiii-. Arau (Suisse), Sauerlander, Berlin, Schelesiiiger. Berne, Clias, an c.ihinet litter. Breslau , Tli. Korn. Bruxelle.o, LecliaiJier. Bruges, Bogaerl, Dumorlier. Florence, Piatli. Fribourg (Suisse), Aloi'sc Eg-

geudoi'l'ciT. Francfort-sur^Mein, S<Iia<flfer. Genei^e, J, -J. Paschoiid. Lausanne, Fischer. Leipsick, (irifsliamincr. Liege, .Tallieau pJive. Li.wnrie, Paul Maitin. •.

Londres , Dulau tt comn,,

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Maialori. Petersbourg, Saint Fioren;,-~

Giaeir. ' T^ubingun, Cotta. Titriri, Bocca. ('(irsooie , Glucks)>cig , /a-

■vadsky. .fienne . Ai'-tiicfu-l, Oi-rold.

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Guadeloupe (Poimc-a-Pitre), Pir)!et aint. 7/e de-France ( Poi-i-Louis), E. Burdct.

ON SOUSCRIT AUSSl A PARrS ,

Au BuREAV BT? REnACXioN, nie d'Eufcr SaiiH-Minhcl, ji" 18, ou doivent ^t''e cn-'oxes, francs dc port, ics iivrrs. dessins etgravures. dont on desire rannoncn. cl \p& Lettrcs.Mi'moiics, Koiices on Extraits destines a ctre iiiseris daas oe Kecueil ;

Cur.2 Treuttei- it WhrtZj rne de Bonrboii. n" 17 ; Hey et Gravier, quai des A'lignstins, n" 55 ; MoKGiB aine^ houlevard Poissonniere, n" ij) j FiYMERY, lue Mazaiine. n" 3o ; RoRET ET RoussEL^ riic Pave'e-Saint-Andi (:, n" g ; Baudouin fiures, rue de V.iugirard, n" 36 ; CuASSERi-^.u ET Hkcart, rue de C'loiseul, n" ?i ; I)Ei.AtJN'AY, P^LiciER, CoRRt\RD, au Palais-Ko vil: ft[r '.1: Cellis, rne du Clierche-MIdi, x\° 4 ; Madame CAMlLLE-DEFR^JiE, rue du Jlarchc-Saint- Honore, 4;

A LA TrKTE, Cabinet LiTTiRAiRR tenupar M. Ganticr, ancien iiiilitairc, Galeric dc Dois, n" igy, au Pjlais-Royal.

All Cabinet special d'affaires, pour la litle'ralure, Ics sciences et 1>» arts, ^ilace des Victoires, 3;

Aux Cercle et Salon litteraires, rue Neuve-des-Petits-Chainps , n" 5, au premier.

Nola. Les oiivragcs annonce's dans la Revue se trourent aussi cliez Arthus Bertrand, rue Hauicfeuille, n'^ 23; Eyjiery, rne Mazarine; 3o, et Roret et Roussel, rue Pavee St.-Andie- des-Arts , n' g.

J):: I. iMi'iuunnv dj: j. s^.iij :i.

1~~M^

REVUE r^i. ENCYCLOPEDIQU'

ou ANALYSE RAISONNEE

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log^e et Beaux ^rts : MM. Mor..v^%^^^,^^,^%[^l\,1^^!^l^ AvENELi-B.,nBiER, conse. vateur des biliiioU.eq.u-sd., Roi.-!s'A

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PARIS,

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I-ONDRHS.-Treuttei, et WiiRrz, ci DoLAUct C^ AOUT nS2i,

C0ND1TI0^'S

DE LA SOUSCRIPTION.

Uepuis le mois de jaDvier 1819, il paratt, par annac, douc* cuhiers de ce Recueil ; chaque cahier, publie le 3o du mois, vompose d'enyiron douze feuilles d'iinpressioii.

On souscritj a Paris, au Bureau central d'abonntmtni *t d'expedition indiqu^ Bur le litre.

Prix de la Souhcription.

A Paris 42 fr. pour un an, 24 fr. pour 6 mois.

Danslesdepartem«ns. 48> 28.

Dans I'etrangcr 54. Sa-

La difTerence cntre le prix d'abonnement , a Paris, dans Ic.i dipartemens et dans Vetranger, deranl «!tre proportionnelle aiix frais d'expedition par la poste, a servi de base a la fixation definitive pyrte'e ci-dessus.

Lemontant de la Souscription, cnvoy^ par la poste, doit ^tre adresse d'avance^ el franc de port, aiwn que la correspondance, au Direcleur de la Reuue Encyclopedique , rue dEnjer-Saint- Michel, 18. C'est i la m6me adresse qu'on devra envoyer les ouvi'ages de tout genre et les gravurcs qu'on A'oudra faire annonccr, ainsi que les articles dont on desirera I'inserlion.

On pent aussi souscrire chez les dirocteurs des postes et chcB Ic9 principaux libraires, a Paris, dans les de'partcmens et dana les pays etrangers.

Trois cahiers ou livi-aisous foiTneront un volume. Chaque vo- lume sera termini par une table des raatieres alpbahetiquc «t analyiique, qui ^clairciia et facilitera les recherches.

AVIS.

Le prix de I'ouTrage que nous avons annonce sous le n" 192 du Bulletin (^Pastes universels), est de 120 fr. en feuilles, et de 126 en demi-reliure -, ceux de lo^ et 156 fr. que nous avions donnes, sont pour les non souscripteurs.

REVUE

ENCYCLOPEDIQUE,

ou ANALYSES ET AINNONCES RAISONNEES

Des productions les plus remarquables dans la Liiterature , les Sciences et les Arts,

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I. MEMOIRES, NOTICES,

LETTRES ET MELANGES.

DISSERTATION

Siir It BYSSfs dcs anciens , et sur son identitd avee l& duvet des chtvres de Cachemire.

Il existe parmi quelques savans uno grande controverse

au sujet du bvsscs des anciens. C'est aujourd'hui que l.i

connaissance des tissus faits avec le duvet des chevres du

Thibet est tres-repandue ,. qu'on pent, ce me semble,

^resoudre le probleme, et fixer inyariablement ses idees sur

j^ ia nature du ivssjis.

Qu'est-ce que ce byssus si precieux, dont parlent uvec une sorte d'admiration les historiens sacres et profanes, dont etaient rev&tus David et les levites, que Mardochee porte dans son triomphe , dont etaient couverts les inities Tome xi. 2>V Cahier.—Aout 1821. 16

?A2 DrSSKIVlATlON

;inx liiyslirt's d'lsis, qui fiiisait partic des sopiiltiircs \e plus magnifiques chez Ics Egyptiens, ct qui devinl plus tard la parure favorite dcs dames roniaincs? Qu'cst-ce que celte matiere , sur la nalnrc de laquelle Ics anciens ne s'accordent pas plus que Ics niodernes? Est-il permis d'y ■voiraujouid luii autre chose que lecelebre duvet des chevies du Boutan? Pour resoudre celte question , il suflit de sc rappeler ce qu'en ont dit les anciens , de le comparer avec les commcnlaires des niodernes, et d'examiner leurs con- clusions.

Pliilon est le premier des ecrivains anciens qui ont traitr de la nature du byssus. Suivont lui , le byssus n'est pas le produit d'un ctre anime, mais celui de la lerre.

Pline vient ensuite. Apres avoir dit un mot de la toile faite avec I'amiante, il ajoute que ce qui s'en rap- proche le plus et qui fait les plus cheres delices des dames romaines, c'est le byssus, dont I'origine est auprcs d'Elis , dans I'Achaie, et qu'on obtient au prix de quatrc deniers le scriptule (i) ; autrefois, ajoute-t-il, on le vendait an poids de Tor.

IJn troisieme ecrivain, Philostrate , dans la vie d'ApoI- lonius de Tyane, avance que son heros, etant aux Indes , observa que tout le bj'ssus qui passe en Egypte sort de ces contrees.

Pollux i conlemporain de Philostrate. dit que le byssus est, chez les Indiens, une espece de lin. En Egypte, on fait , avec la laine d'un certain arbre, un fil qui sert a fuire des vetemens qu'on pourrait regarder comme ressemblant beaucoup a ceux de lin, si ce n'est qu'ils ont plus de densite.

("i) A 35 cent, le denier, suivant le systeme de M. le conite Gamier, c'6tait 29 fr. 4" cent. I'once roniaine,ou 55 fr. 60 cent, notre once poids de rnarc.

I

SUR LE DYSSDS DEP. ANCIENS. 2A3

Enfiu, laiJore. qui iic date que du yh° sit'Cic, iricerlaii de ce qii'est le byssiis, ecrit d'abord que c"est quelquc espoce de lin assez epais; il ajoiilc queplusicurs personnel oroicnt que c'est une qiialite de lin.

En passant aiix moderncs, noas trouvons Emsme qui, dans son edition de Pline, en i525, ne sachant ce qnu c'est que !e hyssns , ow fait uniquement une couleur, nu lieud'un tissii. Dans la table des matieres, tous trouvez: Byssini tiiigendi i\%t!0 , et pour designation , le cha- pitre 4i du IX' Livre, avec ce titre : De tingendo ametJiys' fino ; dans tout le cours de ce cliapitre, le mot hyssus nc se trouve pas une fois.

Demsierius J dans ses Paralipoinenes ad Pcos'immi , vers. .'^1, confondle byssus avec la soio,et cniploie ce mot comme synonyme dc sericcf ; cnfin, parmi les moins an- ciens, Larcher^ dans ses notes sur Herodote, Beyuold- Forstei-j dans son Liber singularr's de hysao j et Rouelli' , dans son Memoire a I'acadejnie^ en font une toile de coton ; tandis que Greav?s , dans ses Miscellaneous PF'orks, veut que ce soit du lin, et tandis encore que Jaitcoiirt, dans VEiicycIopedie in-folio, assure que le l)yssi)s n'est que le produit de I'espece de soie du coqull- lage appelee pinne-marine.

An milieu de tant de confusion, coioment reconnallro uneorigine? Consultcz les anciens; iis ne sout point d'ac- oord entre cus. Si I'un vous conduit, Tautrc rous egare aussitot. Voyez les modernes , vous Irouverez la mome divergence d'opinions. Qu'en conclure, sinon que les uns ni les autres n'ont su au juste ce qu'etait le byssus. Les anciens ne Tout pas su , parcc qu'ils ne connaissaient pas le paj^s qui le foiirnil, ct qu'ils ne le recevaient que des marchandsqui Irafiquaient dans Mndo ; les modernes Tout ignore, parce ((u'cn ciTel ils ne pouvaient pas le devinor,

16 *

2AA DISSERTATION

parccqn'il fallait nne occasion , commeccllede I'cxpeditieH d'Egypte, pour nous rendre familiers les tissus de cache- mire, t"t qu'il fallail en oulre dcb honimes d'un patrintisme cclairc, comme M. Ternaux, couragcax et verses dans la coiiiiais.*ance des divers idiomes de I'Asie, comnie M. Jau- bert, pour nous en niontrer I'elemcnt sur Tanimal meme, et le sounictlre li nos climats.

II est ix remarquer que, pour faire prevalolr son senti- ment , chacun a recuse le temoignage de tei ou tel auteur, et qu'il a plus ou moins force le sens de tel ou tel autre. Jaucourt ne coinptc pour rien ce que dit Philostrate : que tout le byssus vient de I'lnde; et les auties alongent ou delayent dans d'autres citations le peude mots si courts et si insigiiifians que nous ont laisses les anciens sur cette mntiere. En efTet, Larcher, Forster, Williams Vincent, dans son estimable J^oyage de Niarque , qui veulent que le byssus soit le colon, op6rent, dans les citations des auteurs, des rapprochemens evidemment forces. Les deux joremiers citent d'abord Pollux, comme garant de ce qu'ils avancent; mais que dit Pollux? « Le byssus est, chez les Indiens , unc espece de lin. En Egypte, on trouve sur un arhrisseau une espece de laine, dont on fait des toiles qu'on pourrait rcgarder comme ressemblant beaucoup a celles de ce lin. » Pourquoi, dans ce passage, joindre la seconde phrase a la premiere, comme une consequence ou une confirmation de ce qu'elle exprime? Le byssus, dit Pollux, est, chez les Indiens, une espece de lin. Tout est dit la pour le byssus. Si le grammairien reprend ensuite son discours el qu'il disc : II existe , en Egypte, un ar- hrisseau qui produit une espece de laine semblahle a ce lin, ce n'est pas qu'il veuillc fixer un rapport d'identite entre ces deux ohjets; ce n'est qu'une comparaison qu'il clablitcnlrecux. Soyons, en cffet, dans lauecessitedc com-

SUR LE BYSSUS DES ANCIENS. 2A5

parer Ic fil de cachemire a un autre fll : nous trouvcrons que celui qui s'en rapproche le plus par le moelleux, par le duvet qu'il conserve , c'cst le colon; le fil et la soic sont trop lisses et trop unis pour en donner une idee. Au reste, si Pollux se sort du mot Un, ce n'est pas qu'il pretende parlcr de la matiere que nous connaissons sous ce nom ; mais, dans sa phrase, lin estl'equivalent dejil. La preuve en est au livre V, chapitre 4, ou, parlant des instruinens des chasseurs , pour exprimer le nombre de fils qui doivent cntrer dans la composition des mailles ou des cordons des filets, il se sert des mots neuflins, trois lins , donze liiiSj seise lins, etc.

Le naturalisle romain dit seulement quelques mots du byssus ; les voici : « Le byssus, qui nait aux environs d'Elis, dans TAchaie, coftte quatre deniers le scriptule. » Voila le prix du byssus bicn determine. Quant a la cir- constance de son origine en Achaie, c'est ici evidemment line de ces fautcs qui defigurent le texte de Pline , une lacune remplic par un copiste maladroit. Si le byssus etait vine production de la Grece, y aurait-il eu tant d'incerli- tudes a son egard parmi les anciens , et Pline lui-meme n'en eftt-il pas fait aussitot la description, comme il I'en- treprendde tout ce qu'il connait , souvent avcc une exacti- tude qui sert encore aujourd'hui de guide dans bien des circonstances ?

Ainsi que le dit Erasme, il n'est pas d'auteur qui aitete plus maltraite que Pline. II faut le tirer de ses ruines, a travers les restitutions qu^on a voulu lui faire et les lacunes qu'on a pretendu remplir. Combien de soltises ne lui a-t-on pas fait dire en le restituant ! que d'erreurs, que d inepties inserees dans son texte! et combien n'en ont pas signale dcja les savans qui se sont occupes de ces cor- rections, depuis Hermolaus Biubarus, Guillaume Budee,,

2(6 rrriSKUTATION

Nicohis BcraKiii.- lI laiit (rauiri.',s, jiisqiru iics joins !' C'cst, comme ie dit encore iliiiirinc, Ic travail cie Pencloiic , quit Taut refairo avec Lien de la peine, et il se scrt a celle oc- casion d'linc comparaison qui fail bien reconnaitic I'auteui- dc VEIai;eile la foUe: « Piaule, dit-il , pretendit autrefois que qui voudraii trouver uu rapport outre dcs clioses qui doniient bcaucoup de tracas, n'avait qu'a prendre pour coiiiparaison un vaisseau et une fenime; car rien ne donne plnsde souci que ces dt;ux chyses. Ainsi pourrait-on dire, plus sorieusement, qu'il ne manqiicra pas affaire a celui qui Toudra restituer IMine. »

Ce temoignage d'un ecrivain celebrc sudlrait seul pour fairc connaitrccombien on doit etre circonspect en prenant Pline pour appui, si d'ailleurs on ne s'en apercevait pas soi-meaie a la nioindre rechercbe. I! est done evident que Tarlicle de \a patric du byssus est un de ceux qui sont tronques, et que, sur la ressemblance de quelques lettres ou d'apres la conforrailc de quelques nouis qu'il n'a pu lire, le copisle a ecrit Elidem et J.cliia.

Laissons de cote,coniuie evidenjiment suspect, ce quire- garde I'Acbai'e, puisque, couune je I'ai dit plus haut, si la matiere du byssus avail ete une production de la Grece , elle n'aurait pas ete I'objet de taut de controverses, et sur- tout que les* grecs Pollux et Philoslrate, qui I'auraient bien connue , n'auraient pas ele obliges de !a iaire venir de I'lnde ; et tenons-nous-en a I'eslime qu'cn faisaient les dames romaines, pour qui c'etait un grand bonheur d'en avoir : c'esl lu tout ce que Pline dit de ce tissu. Ccpendunt, pour donner plus de poids u I'opinion que Ic byssus est du colon , on a accole a ce peu de mots , qui se Irouvent dans Ic VHP Livre, un autre passage lire du IX. " ct qui n'ya aucun rapport. Si Pline avail voulu parler du byssus dans cct autre passage, nc raurait-ii pas noaimc, comme il I'a

SUR LE BYSSUS DES ANCIENS. 2A7

vait fait dans le Livre precedent? Ce n'est pas le del'aut dc oet auteur que de ne pas repctcr les noQis , quand il s'agit de donner I'intclligence d'une chose , ct il ne fait jamais deyiner par des periphrases cc qu'ii pout exprimer par le nom technique. Dans le chapitre I" du IX* Livre , il ne traite que du Gossopion, que quelques-uns appellentJYi/o/?. Si le byssus avait ete I'objetde ce chapitre, il en aurait ajoute le nom aux deux premiers; il I'aurait nomme la d'une maniere aussi expresse qu'il I'avait fait dans le Livre precedent.

Le rapprochement de ces deux passages, si etrangers I'un II 1 'autre, etait necessaire sansdoute, et.j'en conviens, pour faire du byssus unetoilede coton ; car, en les separant, I'e- chafaudage s'ecroule. II est bien demontre que les anciens ne savaient pas plus quelle etait I'origine du byssu^, qut; nous ne le savions nous-memes il y a quarante ans.

De tout tems, les Egyptiens se sont habilles avec le coton. Ces robes si legeres qu'elles accusent le nu, conmie s'il n'y avait rien sur la peau , et dont on ne reconnait I'existence, sur la plupart des figures des monuniens de I'ancienne iigyple, qu'a une ligne tracee an bas des jambes, etaient de toile de coton tres-fine , peut-etre de ce que nous appe- lons mousseline. Or, comment supposer que les Hebreux, qui avaientdemeure silong-terasenEgypte, ne connussent pas cetle plante etses produits? Comment se persuader que le roi David se parat d'une robe de toile de coton, quelqne line qu'elle fflt, comme d'un vetement d'un grand prix? Quand le Livre des Paralipomenes dit, I, xv, vers. '2j, que ce prince etait vGlu d'une robe de byssus; quand Ezechiel, XXVII, ]6, range le byssus parmi les objets du plus haut prix que les marchands syriens devronl apporter, et qu'il le j)lacc cntre les dianians, la pourpre, la sole et ccUe ma- tti^re I'lt'cicusc d'ml !a coini.ii'v'aiite Otail drva perdue de^

2A8 DISSERTATION

lercgnedcsPtoIonues, tl qui, pourcetleraison, a conserve dans lo version j^rcrqnc son noiti hebreu chodcliod, il n'cst pas jhissIIjIc <1«' < mire qu'il sagisse d'lm tissu aussi coni- muii (laii.T le iw? que celui Ju ooton. Comnienl conccvoir en( oie (juiin roi d Assyrie , dans le.s elats duqiiel le colon est indigene, croie fairc nn honneui- extraordinaire i un honime qu'il voulait reconi})enser niagnifiquement , en le revetantd'une robe de cette nialierc? On est force de recon- naitre d;«ns le byssus une maliere beaucoup plus riche, de voir dans ce celebre tissu nn objel que sa rarete et son prix rendaient tres-precieux et digne de faire la parurc des souverains les plus puissans.

On Ibnde encore I'opinion de I'identite du colon avec le byssus sur ce que les lanibeaux des bandeletles qui en- tourent les momies ont ete reconnus pour elre de la veri- table toile do colon. Rouelle I'assure positivement, Mem. de Vacadeinie, annee lySo, et il en dit autanl des linges qui enveloppent les oiseaux embaumes. Mais a-t-on lu avec attention le passage d'Herodotc (jui en parle , el n'a- t-on pas fait a son egard ce qu'on a fait a I'egard des aulrea bistoriens cites , en donnanl i ce qu'il dit une extension qui n'elait point dans sa pensee ? C'est en decrivant les em- baumcmens les plus precieux , qu'Herodote cite les bande- letles de byssus dont on cnveloppait les cadavres qui en etaienl I'objel; et ces mots les plus precieux, mis en tele de sa description, annoncent assez que peu de personnes pouvaient y pretendre. Ce meme avertissement se trouve encore repetea la fin du paragrapbe, sous une autre forme: « Telle est , dil-il , la maniere la plus magnifique d'em- baumer les morts. » Apres ce premier embaumement du plus haul prix, eel historien decrit deux autres manieres d'embaumer les morts des autres classes de citoyens. Je le demaude raaintenunt u tout lecteur impartial : He-

SLR LE BYSSUS DES 4NCIENS. 2/i9

rodotc veut-il dire, par ce que je viens de rapporter, que tons Ics luorts sonl necessairemciit enveloppes de byssus? NV'St-te pas dire, an coiitraire, que les plus riches d'entre les i5)gypticns, les princes, les grands, ceux en un mot que leur rang ou leur fortune mettent a mOme de faire une de- pensc considerable, jouissaient souls du privilege de ces emhaamemens prdcleux et magnifiques ; que ceux-la seuls claient enveloppes dans le byssus; et, s'il n'y a que ceux-la qui cussent une si riche sepulture, n'est-ce pas annoncer que I'enveloppe des aulres etait plus simple et plus com- mune? Ne s'ensuit-il pas que les bandelettes de ceux-ci ne sont en effet que de toile de colon ? Or, quelles sent les momies qu'on deterrc aujourd'hui? Ce ne sont certainement pas celles de ces personnes qui, pour derober leur sepul- ture a la profanation, les faisaient cacher sous des masses plus ou moins considerables, mais aussi imperissables les unes que les aulres. Ce sont celles des ciloyens des autres classes, qui se faisaient enterrer dans les caveaux de cer- tains temples, dans les hyppogees et dans les autres tom- beaux lant de fois violes. 11 n'y a done pas lieu de deduire cetle consequence : « que le byssus fut la matiere dc tons les suaires et que ce lissu fut consacre pour les embau- memens. »

Le Thibet, patrie des chevres qui fournissent le precieux duvet, est une des contrees que les anciens n'ont jamais bien connues. Alors, comme aujourd'hui, les marchands allaient en caravane faire des echanges , recevoir la laine de la main des Indiens et la rapporter en Egypte , sans s'enquerir peut-etre de ce qui la produisail. Peut-etre aussi les nalurels du pays les trompaienl-ils sur I'origine de ce produit, pour qu'on ne leur enlevat pas cetle branche de commerce en emporlantles animauxquile fournissent.

Que les carayanes apportassent ce duvet des Indes, il

TA) Dl.SSKRTATION

ii"y II .nKiiii (Iciiilf: Kzicliiel imiist'Ctcinent , I'liiiostralc et Pollux (liirefeiticiit , rtous nionlrent ccllc loiile. Phiius- Irald'ailplus; il iiou? dit positivemcnt qtrApdlloniiis, ctiint ;iux Iniles, vit que lout !e byssus qu'on porlait en Egypte venait do ces contrees. Sans doutc il avait cte temoin du retour de quelque caravane Tenant du Boutan, ct il avait vu la malieie premiere, telle qu'on I'apportait avant dTUe ouvree.

On nc pent pas avancer que I'art dc tisscr le duvet de cachemire soit unc invention moderne. Ce n'est pas sous la domination dcs Tnrcs qu'on a pn fairo des dccouvertes d'aucune espece ; Tislamismc detruif ,♦ niais ne cree pas. On pent etre sOr que ce qui exisle aujourd'hui existait avant I'invasion des musnlmans. Quand I'Alcoran parcourut. I'Asie, fuivi par le ler et la flammo , les connaissances S6- pcrdirent; ce qui nc se perdit pas resta et est toujours yesle dans un elat stationnaire. On peut voir hi preuve dv ce que j'avancc dans le magnifiqae travail des membres de la commission d'Egyptc. Ce n'est pas depuis que les belles conti'ces de la Grece, de I'Asie-Mineure , de la Syrie, sont tombees sous le joug des Ottomans , que les arts et le luxe ont pu conquerir le piecicHX fissti qui nous occupc. Ce tissu elait connu an moment de I'irruplion; il continua u rC'trc, parce que ?;'. flnesye jilitt ari.ssi bieu aux Caronclies ealii'es qu'elle avait p!u aux voluptiieuses Piomaines. On le travaillait avant par iiuiuslrie; on le travailla depuis par routine. Les palmes qu'on y fait sont elles-memes , n'ea doulons pas, une imitation , je dirais presque une corrup- tion des fleurs qu'on ybrochait anlreioisetqui coustiluaiiiit res robe? fleuries, dont Apulee couvre les inities auxmys- leres d'lsis , floru/e clepictd i'esle conspicii/is. Torsttr , l.ardicr, llouelle n'out \)\\ reconnailre dans le byssus 'e dii\cl (les cltevretdu 'Ibibel, parce que de leur tCMUS or, us;

SUR L11 BYS3US DES ANCIENS. 2ol

Ic coimaissait pas ; et ils sc sont rejetcs sur le colon , liuile do iiiieiix, quoiqu'ils ciisscnt bit-n du s'aporcevoir (JUG CO duvet, originaire des contrces oi'i Ic l)yssus clait si recherche, ne poiivait pas etre hii-memerolemcnt dc cettc etoffe si precieuse. Quant aux contradictions et a Tigno- rance des anciens sur cette nialiere , elle ne doit pas nous surprcndre. Aurions-nous ele nous-memes plus instruits qu'eux, sans les decouvertes dc la geographic moderne; et savions-nous au juste, il n'y a pas bien long-terns encore , si ce duvet etait un poil de chevre , dc mouton ou de chamcau? D. J. M. Hekry,

Membre de plusieurs societes lltteraires.

ivw» vvvvv^v^ \

Observation suj' la dissertation qui precede.

Quelque ingenieux que soient les raisonnemens dc M. Henry, son opinion semble de la nature de celles qui peuvent etre controversees avecsucces. En effet, plusieurs d'entre les passages qu'il cite paraissent indiquer que cc hyssus etait une substance vegetale.

II existe, sur les bords septentrionaux de la mer Cas- pienne, une espece dc Clemalite ou ii\isclepiade pro- duisant un duvet fin, soieux, d'une eclatante blancheur ct susceptible d'etre file. On a recemment tente de le melcr avec du coton , ct il en est resulte des tissus tres-beaux , quoique legers etpeu solides. Sans doute, ce n'est point la le byssus; mais ne serait-il pas possible qu'une matiere d'une nature analogue eQt autrefois ete transportee dc rinde en Europe, et qu'on TeCit employee a fabriquer h:. etoffcs dont il est question dans la dissertation de RI. Henry >

Que les anciens connussent Ic duvet de cachemire, <'t qu'ils en fissent visage pour fabriquer les manteaux et le.-; draperies qui orncnt el accuscnt si bien les contours du

252 SllR LE CONSUIL DK SALIIBRITK.

corps hcimain, c'cst cc qu'il est difficile dc rcvoquer or* doutc. L'aspect de plusieurs statues antiques concouil a accreditcr cette opinion. Mais quel noni donnait-on a ccllc precieusc maticre ? C'est ce qu'il n'cst pas aussi aise de decider.

Aujourd'hui, les Turcs et les Persans I'appellent ///iiX, c'est-a-dire , tres-probablement, tliiheUque. Chez les Rir- gliis, les Kalmoucks et les Armeniens de Russie, elle porte le nom de tihetj nom duquel il ne serait pas impossible (avec un pen de goCit pour les etymologies douteuses) de faire dcriver notre mot franf ais duvet j altendu la frequente mu- tation du t en d et du h en v, dans les langues orientales, comme dans les langues europeennes. II serait curieux, au surplus, d'examiner si le mot hyssus lui-meme existe dans la langue thibetaine, et, dans ce cas, ce qu'il signiGe. Des rccherches dirigees dans ce sens ajouteraient peut-Ctre un nouveau degre de vraisemblance aux conjectures dc M. Henry, et tendraient a eclaircir une question digne , sous plusieurs rapports, d'exciter I'attention des savans. {^Note communiqiiee par M. Jaubert. )

»*V\^'VVfcWV»iVW»

NOTICE

Sur le CoNSEiLDE sALUuniTi, ciabli pris la Prefecture de police de Paris.

M. ***^enait d'etre promu a une place dont il senlait toute I'importahce : « Que vous etes heureux ! lui dit un homme de bien, un philosophe, un vrai philantrope enfin.Que vous etes heureux , et que j'envie I'une de \os attributions ! Levee d'hommes, levee d'impots , exercice de la justice crimi- nelle ; tous ces acte* du gouvernement, necessaires a la vie du corps social, sont accompagnes, de rigueurs inevi- tables. Magistral charge de la sQrete publique, vous n'aver.

I

SUR LE CONSEIL DE SALL'BRITE. 253

Yous , que du bicn a faire , et votre seule etude doit ctro tie le faire le mieux possible.*

Le magistrat, nous ravons dit, conna ssait rimportance des fonctions qui lui etaicnt confiees ; il savait done qu'on ne pent que gagner a ccouter les reflexions, ou , si Ton veut, les reveries d'unhonime bien intentionne et penelre de son sujet. « Vous m'obligeriez, dit-il a son ami, si vous vouliez me developper. . . . Ce que vous savez mieux que moi. Je n'ai pas cette pretention ; niais alors meme je me rappellerais ce que je vous ai entendu dire plus d'une Ibis : que, si vous pouviez obtenir d'un ami qu'il exposat devant vous, avec quelques details et comme lui appartenant , le plan et les idees d'un ouvrage dont vous lui auriez conOe le manuscrit, vous seriez sQr de reconi- mencer votre travail avec un avantage immense.

Je vous obeirai done, et ce sera avec d'autanl plus de satisfaction que nous ne pourrons faire un pas sans recon- naitre et benir les bienfaits d'une civilisation perfeclionnee. C'est peu que, dans une carriere si vaste, elle vous envi- ronne de moyens de succes, proportionnes a I'etendue de vos devoirs : c'est elle qui vous ouvre la carriere , puis- qu'elle seuieaenfinassigne aupeuple, dans la societe, unc place qu'il n'avait jamais occupee auparavant.

Tenir les sujets dans une soumission muette, en tirer le plus d'argent possible, et, poui' faire la part dc la gloire , les instruirea aller, au profit du chef, piller et egorger leurs voisins ; voila a quoi se reduisent les combinatsons du gouvernemcnt, sous un despote asiatique ou sous un sei- gneur feodal , combinaisons d'autant plus simples , que les memes individus peuvent au besoin servir de ministres, de juges et de bourreaux. Ne parlez point lii, pour les sujets, de mesures sanitaires. Trop heureux de servir leur sublime maitrc , qu'importe qu'ih meurent, pourvu que

?^A J^v R LK COISSLIL DE SALlBlU'lt.

los siirviviiiis cnvoient Ics nirines soinmcs au tresor , Ic inCnic iionibre de iccrues a Taruiue ? Voila I'ordre clc (hoses auquel cerlains liomtues , iiioins eloigncs do nous «jiie les contieos de I'Asio ct les tem? feodaiix, no seraienl pas faches dc nous conduire.

A la longue cependaiil, on s'eclairc; un grand politique finil par apercevoir que les troupcaux d'bommes, comnic Ics autres troupeaux, ne diminucnt jamais sensiblemenl sans porter prejudice au proprietaire. 11 n'a pas d'ailleurs parlout, comme en Turquie, la ressource du fatalisme pour etoiiffer les plaintes d'autrui et scs propres crainles. Alorscommencent les precautions sanitaires, maistoujours dirigees dans le meme esprit et pour I'lnteret dc celui qui les ordonne. La conservation, le bien-etre du people, s'ils ne sont pas lout-a-fait oublies, r.rrivent en Iroisicuse ou quatrifeine ligne ; I'interet de tous les inlerniediaires passe auparavant ; rien de plus legitime.

Le premier medecin du pacha de Janinaj qui probable- ment ( ainsi que Petiijean des Plaideurs ) compie quel- <luefois avec son genereux maitre , a mis i lerme la propagation de la yaccine (i). En payant , du nioins on jouit de cette admirable dtcou\erte: I'avidite pecuniaire est moins pernicieuse que la vanite ! On laissa , il ^ a cent ans , se developper avec toute son energic la terrible pestc de Marseille, plutot que de compromettre Tinfailli- bilitc de M. lo premier medecin, qui avait nie hautemenl que cette maladie fQt la peste. En i^iig, S. E. le general en chef menace de punir, comme coupable de-haute tra- hison, un medecin qui annonce que la lievre jainir existe <(ans I'lle de Leon (2); et le neuvieme d'une population,

fi) Voyage. (Ittrm lu Cre-.e, par Vi. Poiiqurviilr, Tom. f , jiag 7>'(r), ^») Fiijez :■ P.ci'ue Ev'jcliipcdtqiic , Toiii.X, iin.T. So 54.

sun LE CONSKiL BE SALUiJaiTK. ^:^:^

aissee voloiilaircniout en [)roie aii Hoaii , petit victime u;i respect dft a S. E. le general en chef.

Rien de pareil n'arriycra sous un gouvcrneuient sngo, ct tel que tous aujourJ'hui doivcnt Ictrc ou le devenir, sous un gouverneineiit en harmonie avec les progres de la civilisation. Entraine par les prinoipes de cettc civili- sation , lors meme qu'il ne le serait point par les siens propres, il ne voit autour de lui que des hoinmes , des citoyens. Dans loutes les chances de la vie sociale, il doit compte de chacun d'cux a I'elat; il doit a chacun d'eux de concllicr avec la surele publique !a plus grande liberto in- dlviduelle , le plus grand developpemeut de rindustrie particuliere.

II ne doit raT-iTie phis altendji-c que le mal existe , que le danger soit iinmincnt. pour reparer Fun, pour com- battre I'autrc ; un mot renferme presque toutes les obli- gations de la police sanitaire : prevexir.

Plus vous etes eclaire, plus, j'en suis sflr, tous sentirez le besoin d'appeler a votrc aide les conseils de la science ct les lecons de rexperience.

C'est mon dessein , dit le magistral; c'est nion devoir. Le tems n'est plus oti, pour combattre le fleau qui a fait si cherement expicr a I'avide Europe le pillage des tresors de I'Amerique, on prononcait un bannisseinent, so.is peine de -wirt (i), contre tous les malheureux qui on seraient atteints et qui n'auraient pas I'avantage d'Otrc Iiourgeois de Paris.

Le tems n'est plus ou un arret etait rendu contre I'e- mttique par des juges , qui eussent trouve fort mauvnis que Ton eutfait decider un point de droit par uncassemblec de medecins. Le tems n'est plus ou ces legislateurs sans

[i) En liJOO-

25G SIR LE CONSEIL I)E SALl BRITE.

mission pi ojcrivaicnl rinoculalion (i); oCi un grand sei- gneur, digiie (lu litre de ciloyen (■'.), etiit puni par une letfre de cachet, pour avoir ctabli que cette pratique salu- taire diuiinuait la mortalite dans la proportion de i!5 li i.... Et cela, quand, dans la Sicileidemi-barbare, on jouissait depuis quatre lustres des bienl'aits de I'inoculation (.")!

P.lrdonuons au passe ct benissons le present : grace au cicl, I'autorite ne croit plusqu'il soit de son honncur de rester en arriere dc plusieurs si^cles sur la raison , Thuma- nite et I'iuitruction generale. L'esprit de parti, d'ailleurs, qui, au xviii", siecle influa, plus qu'on ne le suppose, sur une opposition si contraire au bel essor qu'avaient pris en France la philosophie et les sciences naturelles ; Tcsprit de parti sera desormais etranger a toutes les questions de sa- lubrite publique.

Je n'en jurerais pas, dlt \e philai? (rope , depuis que j'ai entendu deux personnes, tres-estiniahles a cela pres, implorer pour leur patrie les bicnfaits dc la peste. L'une voulait seulement diriger la peste dans le choix de ses vic- tiines ; je crois bien que je me serais trouve sur sa liste de

visiles,, et vous aussi peut-ftre I'autre, plus large

dans ses conceptions charitables, demandait le retour de la peste noire, qui, au xiV siecle, depeupla le quart de I'Europe; ajoutant, comme le legat du pape, au massacre de Beziers : Dieu connaitra les sieus !

(i) Arret du parlement de Paris , 5 juin i-Gd.

(2) M. le comte de Lauraguais, aujourd'hui due de Drancas , membre de la chambre des pairs. La lettre de cachet fut expediic centre lui , le i5 juillet 1763.

(51 Le baron iiiedesel, voyageanl en Sicile , en 1767, remarqu.-i que I'inoculation etait usitee A Catane, oil tile avait ete apportec vingt-cinq ans auparavant par des vojageurs grecs. f^oyez la traduc- tion auglaise de son voyage , par I'orstcr, pag. 1 20.

I

SUPt LE CONSEIL DE SALUBRITl!;. 257

Saillies extravag;intes , que produit line opinion exaltee et que le coeur desatoue ! Revenons a notre sujet ; ma tache , telle que yous la presentez, se ramifie en des details innonibrables ....

Mais tous importans: lous interessent I'existence de rhomme en societe. Plalsirs, besoins, travaux, induslrie, accidens, maladies, desasties, fleaux de la iiature, tout ce qui remplit les diverses scenes de la vi^ appelle, sous le rapport de la salubrite, votre inf'atigable suryeillance.

Quand nous allons chercher dans une salle de spectacle un amusement conforme aux goQts nobles d'un peuple civilise, devons-nous y respirer, pendant plusieurs beures, un air infect ; ou , pour n'etre point suffoques , nous exposerades variations de temperature subites, et des-lors malsaines? Vous demandercz a la science comment on pent aerer convenablement les salles de spectacle. Apres avoir appris d'elle ce que Ton peut faire de mieux pour les edifices existans , pourquoi ne I'inviteriez-vous point a s'elever plus haut, et a chercher, pour les edifices projetes, le secret de se passer de ces moyens secondaires, et, par le mode s€ul de leur construction, d'entretenir la purete <le I'atmosphere , sans en faire brusquement varier la temperature ?

Ne bornons point nos recherches aux salles de spec- tacles, dit M. ***; rendons-les applicables a tous les lieux ou beaucoup d'hommes sont assembles: ateliers, temples, Iribunaux, quel que soit le but de la reunion, le probleme restele meme. II augmente d'importance, si la reunion est durable , s'il s'agit d'un lieu d'habitation commune. Le premier exemple , que m'indique sous ce rapport I'interet public, est celui des casernes. Ne laissons pas s'alterer dans le repos une sante que le militaire conserve sou vent Tome xi. 17

XiSi SLR Lli OONSKIL DK SALtBRITK.

inicux dans I'activite lies camps, an milieu des perils el Jes

fatigues.

L'bumaaite, repiil le philantrope, reclame Ics mC-mes soins pour ces asiles dc douleur, ojii la necessite seule a droit de retenir Thomme au nom de la loi. II faut des depdts de mendicite , puisque, moiiis heureux qu'on no Test i Munich et a Dublin (i), nous ne sommes pas encore parvenus a giierir cette plaie honteuse de la civilisalion. II faut des prisonnj . . . mais n'j torUnons point rindigent, raccuse, le coupable, par une humidite funeste, par le manque d'air respirablc , par I'emanation de miasmes meurtriers ; et, quand la maladie I'atteint, que les secours dont il a besoin soient d'autant mieux survcilles, qu'il ne peut les aller chercher au-dehors, ct que, par un triste effet de I'habitude, il inspire plus de haine et dc mepris que d'interet et de compassion aux bommes a qui la loi confie sa garde et son existence.

D'autres organes de la loi, dit le magistral, etabliront

(») Des proprietaires et des ndgocians de Dublin, reunis en sociele de btenfaisance , ont fait les fonds necessaire* pour ouvrir de grands ateliers aux mendians valides , et un hospice aux mendians inva- lides. Quand ces itablissemens out 6t6 prets , Ics fondaleurs en ont doane avis, par des afficlies et des circulaires, a tous les habitans de Dublin, en les conjurant, au nom du bien public , de ne plus faire I'aumOne dans les rues, mais d'adresser it I'adtninistration de la societe les sommes qu'ils voudraient consacrer au soulagement des malheureux. Get avis, revctu des signatures les plus respectables , et appuye des motifs les plus convaincans, a fait soudain cesser les aum6nes publiques. Les mendians ne recevant plus pour reponse que ces mots , Allez a la maison de secours, se sont rendus tous il I'hospice ou aux ateliers. (Extrait d'un rapport de M. Jluzardiih, menihre-adjoint du conseil de salubrite , sur un voyage qu'il a fait Aiigliterre , en iRiS. )

I

SUR Li: CONSEIL DE SALLBRITli. 259

des cfifTerences dans le sort des habitans de ces tristes de- mcures : mni , je nc verrai dans tous que des infortunes ; ricn de ce qui les concerne ne doit echapper a mcs soins. Pour leur interet et celui de la chose publique, je recher- cherai a quels travaux utiles et salubres on pent les occuper. Pour lenr interet et celui de I'humanite, je m'efforcerai de les preserver de la negligence des gardiens et de la cupi- dite des fournisseurs pour rameublement des lits, I'habil- lement, le cliaufiage, I'eclairage. Ma sollicitude journaliere s'etendra sur leurs alimens. . . >.

Et sur les notres aussi. La partie plus compliquee que diflicultueusedes approvisionnemens n'entre point dans vos attributions; mais par combien de details s'y rattache la nourriture quotidienne d'une grande ville! Le choixdel'eau meme n'est pas indifferent : des sources qui la fournissenf, des moyens employes pour la porter au loin, des procedes mis en oeuyre pour I'epurer, dependent ses qualites plus ou moins salubres.

Vous avez voyage; vous avez vu que, dans toutes les viiles, la necessite de se nourrir de la chair des aniuianx expose un ou plusieurs quartiers a devenir des foyers d'in- fection. L'etablissement de grands abattoirs doit remedier a ce mal; il Tangmentera, au contraire, si la science ne preside point a leur construction, aux moyens de les aerer et d'y entretenir une proprete scrupuleuse, et si votre se- verite vigilante ne previent pas la negligence, toujours si prompte a laisser le bien tomber en desuetude.

La meme severite maintiendra dans les marches I'exe- cution des ordonnances de salubrite qu'une police eclairee y introduit. Ce n'est pas seiilement la negligence qu'il Taut ici reprimer; c'est I'avidile mercantile, c'est I'insou- ciance ignorante , toujours pretes, I'une a livrer, I'autre 'X accepter des alimens dangereux. Je ne ciferai que la fn-

17*

S60 SLll LF. CONSEIL DE SALUBRITE.

queiice des accidens causes par I'usage des champignons, quanJ, pour satisfaireune miserable ^ourmandise, on violc ou I'on elude les ordonnances de police, Vous ne perdrez point de Yue non plus les boissons, si iaciles a alterer d'une maniere dangereuse , ni la purete des vases et des mcsures metal- liques , ou le sejour d'une liqueur innocente pent developper en quelques hcures un poison redoutable. Ce qui , dans tout ceci, rend votre tache plus delicate, c'est le danger d'a- larmer les imaginations par des craintes mul fondees , ou d'entraver par des precautions superflues un commerce necessaire, de tous les jours et de toutes les heures.

A cote du besoin de se nourrir, vient s'en placer un autre, moins,souventrenouvele,mais non moins imperieux et souvent plus aveugle dans ses inspirations: I'homme souffrant ou malade veut guerir. Quand un gouvernement sage donne a I'etude des diverses sciences medicales les plus grands encouragemens , il n'a rempli que la moilie de sa tache. Combien de malades , dont la sante morale est aussi derangee que la sante physique ! Entraincs par le caprice, I'ignorance, la sotte credulite, ils s'eloignent du medecin modeste et cireonspect, et courent chercher I'au- dacieuxempirique, arme de ses infaillibles secrets, Demas- quer et livrer a la vindicte des lois ces cliarlatans qui escroquent quand ils n'empoisonnent pas, faire connaitre la vanite ou le danger de leurs remedes secrets, c'est ,^ dit-on en certains pays , se placer entre le risque de de - plaire a leurs protecteurs et le desir de sauver chaque annee la sante et la vie d'un grand nombre de citoyens.

Une discipline hygienique doit egalement prcsider a la confection des remedes avoues par la science , ;\ I'adminis- tration des bains publics, des bains medicinaux, a la com- position et au debit des eaux minerales. L'abus se glisse dans les meilleures choscs.

SUR LE CONSEIL DE SALUBRITE. 261

J'etcnflrai cettc niaxiine jusqu'au zelc que portent dans ieurstravaux des anatomistes avides d'instruction; les am- phitheatres de dissection doivenl Otre siirveilles. Des con- siderations , puisees dans la jurisprudence , portent i desirer la suppression des amphitheatres particuliers; I'in- teret de la salubritc, surtout dans le tems des chaleurs, la. rend indispensable.

Une necessite, aussi hien prouvce que celle-cf me- parait I'etre, pourra seule, dit le inagistrat, me dieter des mesures prohibitives. II faut que celui qu'elles atteignent soil contraint, a la reflexion, d'avouer que lui-meme les solliciterait contre une autre personne. Les progres des sciences, les interets de I'industrie, les droits de la pro- priete sont si respectables!

Voila dans quelle disposition d'ame vous devrez jour- nellement procedcr a I'examen des diverses professions dont I'exercice, incommode ou insalubre> n'en est pas moius deyenu indispensable pour nos plaisirs ou nos besoins. II faut preserver de Icurs efforts pernicieui, et I'homme qui s'y livre , et les hommes dont la proximite des ateliers peut alterer la sante, compromettre hx fortune, exposer I'exis- lencehabituellei desdesagremens intolerables. Ici encore, vous voudrez, j'en suis sCir, aller plus loin que de simples precautions: sans relache et sans vous rebuter de plusieurs essais infructueux, vous demanderez a la science d'assainir les professions insalubres.

II est des objets dont un degoflt fonde eloigne nos re- gards, dont le voisinage afflige nos sens: une telle delica- tesse vous est interdite. Les chantiers d'equarrissage, oii Fon retire des cadavres des animaux tout ce qui peut en- core servir aux arts; les voiries , oii s'entasse»it et pour- vissent les immondices d'une grande vilie; les egouts, les puisards, ou se perdcnt les eaux qui out nettoye nos rue?-

202 SUR LE GOr^SEIL DE SAUJBRITL:.

ct uos fours ; !cs fosses d'aisance publiques ou particuliercs, tous ces ctabiissemcQs dont on nc pent se passer, dc- \iciinent cinineinment malfaisans, si dcs soinsbicn diriges ne prcsidenl a Icur police, a leur cntretien , a lour curage. a leur conslructiun, au clioix dc leur einplaccuient. Les mCmes soins sont ncccssaircs pour les puils , qui se galeiU si i'acileincnt par des infiltralions, et dout le curage, noces- sile par rini'eclion qu'ils repaiidcnt et par la qualite dele- tere que conlractent leurs oaux, est une operation assca delicate pour compromettre souvent la vie des ouvriers qui rcntrcprennent.

Le curage des canaux ei dcs rivieres, ic desseclieinent dcs niarais, sout commandes par les besoins de la navi- gation et la prosperite de Tagricullure. lis ne peuvent s'efTecluer sans que ratmosphcre ne se reinplisse d'exha- laisons mepliitiques, a uioins que dcs precautions sanitaircs ii'y president constaminent.

Si Ton neglige ccs precautions, ou si Ton ne peut les opposer a des inondations soudainement suivies de I'ortes chaleurs, on verra se manifesler des maladies plus ou moins intenses, plus ou moins promptes a etendre au loin leur conlagieuse influence. C'est la une cause fecondc d'e- pideniics; malheureusement, ce n'est pas la seule. Trop souvent, une nature uiaratre se jouede notre prevoyance, et developpant a riinprovisle une epidemic meurtriere , ne nous laisse que la triste ressource de combatlre , avec des moyens incertains, le fleau que nuUe sagesse Inniiaine n'aurait pu conjurer.

A cote des epideniies, (igurent les epizoolies , dont les ravages paralyseiuragricullure, portent la desolation dans nos feimes et la I'amine dans nos marches.

On voyail jadis dans Tun el I'aulre llcau dcs ellels dc la sorccUerie ou dcs si;^nc5 dc la vengeance divine. A ces

SUR LE CO?<SEIL DE SALUBRITE. 2^3

opinions decouragcanles ont succede avec avanlage les precautions qui, cemant la contagion, en preservent les lieux les plus voisins de son centre, et les uioyens curatifs avec lesquels des inedecins courageux viennent I'attaqucc de front et lui arracher ses victimes.

Moins meurtriere qu'une epidemic, mais plus effrayante ijuand ses ravages deviennent frequens , I'hydrophobin prescrit une police presque cruelle centre le A'agabondage des animaux, dont la rriorsure la fait naitre le plus com- uiunenient, et I'emploi de secours douloureux, mais effi- caces, s'ils suivent de pres la oiorsure.

Nous avons rappele I'arret qui proscrivit I'inoculation; I'autorite n'a point proscrit la vaccine, bicn au contraire. Comment done se fait-il que vous deviez compter au iiombre de vos devoirs celui de lever les obstacles qui s'op- j)osent a ce qu'elle devienne d'une utilite universelle ? Pourquoi sommes-nous tentes d'envier pour notre pays Vappalto (i) d'Ali-Pacha , chez les sujets duquel la vacci- nation est probablement forcee, comme I'etait autrefois la consommation d'une certaine quantite de sel dans les pays dits de grande gabelle ? Comment la petite verole existe- t-elle encore parmi nous ? quels hommcs ont iuteret a .voir leurs semblables victimes de celte horrible maladie?... _;;i— -Le magistral parut reflechir profondement et garda le silence. Le philanlrope comprit apparemment sa re- ponse, car il coniinua ainsi : Mettons tout cela, puisqu'il le faut , sur le compte de scrupuks inexplicables. Nous placerons ces scrupules sur. la meme ligne que la sevcrite pcu eclairee et souvent pen sincere qui, dans an autre genre de maladies, n'a voulu voir long-tems que le vice puni par lui-meme. II ne nous est plus permis d'ignorer

(i.J La niisc en feiine de la vac<'iiiation.

26.i SIR LE CONSEIL DK SALDBRITE.

conibieu dc fois le fruit d'uu moment d'oubli n etc com- inuniquti par I'hymen i I'epouse irreprochable , i renfant qui n'avait pas encore vu Ic jonr, ou qui , attache an sein nourricier , y a puise avec Ic lait un aboininable poison. 11 ne nous est plus permis d'ignoicr combien do maladie? conslitutionnelles , d'affections meiirlriercs, nc sont que des degenercscences du meine poison , modific et masque dans sa transmission par deux outrois generations succes- sives. II est du devoir, et il n'est pas au-dessus des forces d'une qutorite eclairee, de combattre le fleau dans son foyer le plus actif et de rendrc la prostitution moins mal- faisante, en attendant que le progres des moeurs la fasse un jour entii'rcment disparaitre.

Je me fais peu de scrupulc, vous le voyez, d'arreter votre attention sur des details toujours tristes et quelquefois repoussans. . . .

Et vous avez raison: I'aspect des mauxde I'humanite devient moins penible , quand on s'en occupe pour Ics soulager.

Les accidens, frequens dans une grande ville,reclament en faveur des blesses des s(icours prompts et sagemcnt combines : des secours maladroits peuvent si facilemcnt aggraver le danger et la souffrance! Les personnes sub- mergees en ont souvent fait la triste epreuve. Vous multi- pliurez d'abord , sinon les prohibitions, au moins les pre- cautions pour sauver les nageurs et les baigneurs de leur propre imprudence : mais cette imprudence est telle que, partout oii Ton en observera les effets, on n'hesitera point a les assimiler a ceux d'une epidemic, pour peu que les moyens de secourir les noyes et les asphyxies ne soient pas nombreux et tenus toujours en etat do scrvir.

Au tcrme oOi tons arrivent par tant dc scntiers divers, I'autoritc n'a point encore achcvc sa lache; s'il convicnt

SlJR LE CONSEIL DE SALUBRITE. 265

que les inhumations soient decentes , il est ndcessaire qii'elies soient salubres. L'encombiement des cimetieres exposait autrefois rouvrierqui creusait une fosse nouvellc i\ eutr'ouvrir avec son outil uiie ancienne sepulture, d'ou s'elancait une vapeur deletcre (i), aussi prompte dans ses effets que I'armc la plus terrible. On a reconnu et cloigne ce danger; mais il est encore des mesures de sft- rete et de convenance qu'on doit prendre dans les exhu- mations commandoes par les recherches de la justice ou sollicitees par la pieuse affection des families. Enfin, I'em- placement d'un cimetiere n'est point une chose indifferente, non plus que la determination de I'instant oii Ton doit cesser d'en faire usage , et I'emploi des moyens propres i empecher qu'en aucun lems il ne repande au-dehors de putrides exhalaisons.

L'economie politique reclame la publication annuelle de tableaux de mortalite. La comparaison du nombre des deces a celui des naissances sert au gouA'ernement d'avis et de reproche, ou d'cloge et d'encouragement. Le tableau des decfes de chaquc age fournit i I'administrateur I'cle- ment de calculs interessans sur la marche retrograde ou progressive de la population, sur la duree moyenne dc la vie humaine dans les divers pays, sur revaluation probuble des jouissances viageres, etc. Le physiologiste , u son tour, les consulte ; mais il y cherche des details plus precis ; elles ne seront completes a ses yeux que lorsqu'elles lui apprendront, autant que la chose est possible, a quel genre de maladie chaque victime a succombe.

Puisse-t il, dit le magistral, y puiser alors, sinon la certitude , au moins I'espoir de diminuer le nombre des dec<;s, en prcvenant , par le regime et par les moyens

(l) Les fossoyeurs noinuicnt ccttc vapeur le.plomb.

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268 Stl]\ LK CONEIL DK fJALUBRITE.

Jeurs atliibutioihs line jrtie de la surveillance qu'exigc lit salubrite publique. Dea, riinpossibilite d'avoir sous ce rapport un systeme coiplet et une jurisprudence regu- liere, comme cclle qn le conseil de salubrite s'efforce d'etablir depuis quclqm annees.

« La police cependat etait fort bien faite sous M. dc Sarline, sous M. de Biteuil, sous M. Lenoir; mais il faut convenir qu'elle etaitbeaucoup plus facile a fiiire. Au commencement de la iVolution , la population dc Paris, suivant les releves fas par ordre de I'assemblce consti- tuante, etait de 55o,!'o habilans;- tandis que le dernier recenscment, fait en lif, la porte i\ 713,765 individus. A la premiere cpoqu, la >consommation journalicre tu farrne etait de i,5o(sacs; elle s'el^ve aujourd'hui a j,86osacs.!Vlaiscen'es)asseulementparcequ'ilyaif)2,9r)5 individus dc plus i\ Fris que la police est plus difficile, e'est parce qu'il y a n mouvement bcaucoup plus grand d'affiures. Le blocus intinental, en suspendant pendant plusieurs annees ton le commerce marilime, a eveille Industrie franfaise, ui a fait les plus grands efforts pour suppleer aux objets ant le pcuple etait prive. Le com- merce intcrieur a priune activitc incroyable; Paris en est devenu I'entrepot gteral Les fabriques et Ics manu- factures se sont mulliliecs; pour eHcctuer le transport dcs matieres premieres « des marchandiscs , des maisons de roulage se sont ckees dans tons les quartiers. Les etrangers abondent ie toutes les parlies du globe ; ce concours immense, ( mouvement conlinuel, ces travaux si divers ont dft rendrles accidens beaucoup plus frequcns et la surveillance pli difficile.

« Eni8o2 (i), ioies les fois que M. le prcfet do poliie

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SLR LE CONSEIL DE ^ALUBRITE. 2<5<)

avail unc decision u donner sur u objet de salubrite, il prenait I'avis d'un medecin, d'un cimiste, d'un agronome ou d'un chirurgien veteiinaire, sivant I'objet qui fixait son attention. Cet avis n'etait pasoujours demande a la meme personne ; il n'etait pas discie ; quelquefois les con- siderations que presenlait une afifaij exigeaient la reunion de deux ou trois artistes ou savat , qui formaient une commission temporaire.

. a Cette manicre de proceder ava des inconveniens qui furcnt bientot sentis ; et I'un des chiiistes habituellement consultes (.M. Cadet de Gassicourt)irofOia a M. le prefet de police la creation d'un conseil e salubrite, qui serait charge de discuter et de resoudre h difTerentes questions que I'hjgiene publique fournirait a iduiinislration prefec- torale. »

Ce conseil fut institue le 6 juilK 1802 (1). Compose d'abord de quatre membres , il eut pur attributions I'exa- mcn de? epizooties, des boissons laifiL-es, des manufac- tures ou ateliers insalubres , puis la isite des prisons et la direction des secours publics. En 1^7, Ic nombre de ses membres fut porte a sept; il tut ten de s'assembler au moins deux fois par mois. On lui cona la statistique me- dicale et la confection des tableaux d mortalite , Tanalyse des remedes saisis et des vases su»ects , I'examen des marches, des rivieres, des tueries, «c.

Des epidemics se manifesterent «ns les environs de Paris; les soins assidus qu'elles ncessitaient faisaient alors partie des attributions du consei(2) ; ony adjoignit, en consequence , deux medecins. Seattributions prenant

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Ibid.

pages 4 et 5.

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Les soins que reclament les

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266 SLIl Lii: CONSKTL I)E SALLBRl 1' li.

propiiyhicliques , les lualadies doiit elies. ruuruiit iiisUiiiS :'i pitjvoir Tiiivasion.

Je croirai cet espoir Ibndc , rcpoiidit lo phiUintrona , qiiand la petite verole ne figurera plus sur les tableaux du morialile.

line autre maladie y inscrira aussi ses victimes et affli- gera le moralisle autaiit que i'liomme d'etat : U suicide.

Voire idee est juste. En mettantdc cote les accidens, doiit la plupart seraicnt prevenus, si les lioinmes voulaieut se soumeltie aux plus simples precautions; une disposition nianiaque, que la niedccinc peut rcconnailre et conibattie jusqu'a un certain point , voila la cause principale des suicides.

Oui ; raais quelquefois aussi une volonle indepen- dante de Torganisation pent y conduirc. Un ancien philo- soplie voulait qu'on punit par rinlamic le suicide ; jc. transportcrais volontieis la flelrissure au legislateur ou au gouverneinent d'un pays dans lequel se mulliplieraient les suicides reflechis.

Vous serier severe. . . .

Je ne serais pas injustc. On reste ou Ton est Lien; riiomme tient naturellement a la vie. Si une disposition maladive ne vient pas detruire en lui le penchant irresis- tible qui porte lout ce qui a recn rexislenee u se conserver, croyez fcrmenlcnt que, dans I'educalion, dans les lois, dans I'administration, se cache quelque vice secret, dont les suicides vous niontrent le resultat. Non, certes, qu'il ne puisse cxister des douleurs verilablenient intolerables, quand nul espoir ne les soulage : telle est celle dc voir toinber sa palrie sous le joug d'un tyran ou sous le joug plus huuiiliant de I'ctrangtr. Mais ces grands desastres ne sont pas couimuns, et Tcs ames capables de les sentir dans toute leur clcndue sont plus rarcs encore. Hors dc la, Ics

SlUl LE COlNSEIL I)E SALLBlUTIi. 267

coiisulalioiis et le tcins liiiissent par triompher du chagrin Ic plus juste ; le travail ou Ta bJenfaisancc viennent soulagcr la misere; Ja mort n'est plus regardec que comme une uecessite eloignee , et non comme un terme desirable. J'apprccie, airisi qu'ils meritent de I'etre, les argumens, les exhortations, les dispositions penales que Ton oppose au suicide ; mais je penche a croire q^ue le plus sCir moyen d'empecher les hommes de se tuer, c'est de les laisseretre bons, de les aider i devenir raisonnables et de les rendro heurcux. . . Oh! si la deroiere pensee des infortunes qui lenoncent a la vie se pouvail exhaler avec leur dernier soupir, combien accuseraient les loteries ! combien les maisons de jeu ! combien ....

Ici le magistral interrompit son ami , parce qull sortait de la qui'slion ; . . . ou plutot, par la meme raison, j'interromprai une conversation imaginaire , en avouant que toutcs les idees utiles qu'elle peut renfermer ont ele inspirees par I'etude des travaux du conse.il de saliobrile , elabli pres de la prefecture de police de Paris.

Et pour prouver a I'ami de I'humanite que ces idees ne sont point des reves philantropiques , pour lui offrir I'espe- lance de voir le bien s'operer chaque jour davantage, en lui tnontrantpar quels moyens faciles on peut y parvenir, je traccrai I'histoire de celte excellente institution, d'apris les comptes qu'clle-meme a rendus de ses travaux a I'au- torite qui s'cnvironne de ses lumieres.

« Avant la revolution (i), la police administrative et judiciaire, partagee eutre plusieurs autorites, n'avait ui eel ensemble ni celte unite d'action si necessaires dans une grande cite. Le myiistre de Paris , le lieutenant de police, le prevot des marchands, avaient chacun dans

(i) Cuiiijie rendu des Iraiaux du conseil de salahrUe jiend>.:nt I'annee 1817, pages 2 et 3.

268 SVW LK COMSEIL DV. SALrDRITi:.

Jeurs atlributibifs iinc partie de la surveillance qu'exTgc la salubrite piiblique. Do la , rimpossibilite d'avoir sous ce rapport un systeme complet ct uno jurisprudence regn- liere, comme celle que le conseil de salubrite s'eflbrce d'etablir depuis quelqucs annees. *

« La police cependant etait fort bien faite sous M. do Sarline, sous M. dc Brctcuil, sous M. Lenoir; mais il faut conrenir qu'elle etait beauconp plus facile a faire. An commencement de la revolution , la population de Paris , euirant Ics releves faits par ordre de I'assemblee consti- tuantc, etait de 55o,8oo haljilans ; tandis que le dernier recenscment, fait en 1817, la porte a 71. "5, 765 individus. A la premiere epoque , la «onsommation journaliore en farinc etait dc i,5oo sacs ; elle s'eleve aujourd'hui a j,86osacs.Maiscen'estpasseulementparccqu'ilya 1^2,905 individus de plus ;\ Paris que la police est plus dilTicile. e'est parce qu'il y a un mouvement beaucoup plus grand d'affaires. Le blocus continental, en suspendant pendant plusieurs annees tout le commerce marilime, a eveilie I'induslrie francaise, qui a fait les plus grands efforts pour suppleer aux objets dont le peuple etait prive. Le com- merce interieur a pris une activite incroyable; Paris en est devenu I'entrepot general Les fabriques et les manu- factures se sont mullipliees; pour elTectuer le transport des matieres premieres et des marchandiscs , des maisons de roulage se sont elevees dans tous les quartiers. Les etrangers abondent de toutcs les parties du globe ; ce concours immense, ce mouvement conlinuel, cestravauxsi divers ont dft rendrc les accidens beaucoup plus frequens et la surveillance plus diflicilo.

« En 1802 (i), toutcs les fois que M. le prefcl do pnlire

(») Coinple rendu dija cilt; , page 4-

SUR LE CONSEIL DE SALUBRITE. 2<50

avail une decision a donner siir iiii objet de salubrite, il preiiait i'avis d'un medecin, d'un chimiste, d'un agronorae ou d'un chirurgien veteiinaire, suivant I'objet qui fixait son attention. Get avis n'etait pas toujours demande a la nienie peisonne ; il n'etait pas discute; quelquefois les con- siderations que presentait une affaire exigeaient la reunioa de deux ou trois artistes ou savans , qui formaient une commission temporaire.

« Cette maniere de proceder avail des inconveniens qui lurcnt bientut sentis; el I'un des chimisles habituellement consultes (Jl. Cadet de GassicourC) proposa a M. le prefet de police la creation d'un conseil de salubrity, qui serait charge de discuter et de resoudre les differentes questions que rii3^giene publique fournirait a I'aduiinislration prefec- torale. »

Ce conseil fat instilue le 6 juillet 1802 (1). Compose d'abord de quatre membres , il eut pour attributions I'exa- inen des epizootics , des boissons I'alsifiees , des manufac- tures ou ateliers insalubres , puis la visile des prisons et la direction des secours publics. En 1 807 , le nombre de ses membres ful porte a sept; il fut tenu de s'assembler au moins deux fois par mois. On lui confia la stalistique me- dicale et la confection des tableaux de mortalite , I'analyse des remedes saisis et des vases suspects, I'examen des marches, des rivieres, des tuerics, etc.

Des epidemics se manifeslerenl dans les environ* de Paris; les soins assidus qu'elles necessilaient faisaient alors partie des attributions du conseil (2) ; ony adjoignit, en consequence , deux medecins. Ses attributions prenant

(1) /6jc/., pages! et 5.

(a) Les soins que reclament les epidemics sont aiijoiird'liui dii ressort de la prcferture du departemTit de la Seine,

270 SLR LE CONSEIL DE SAI.UBUTTE.

siiccessivcMieiit |)his <rciciiJiic , on a oto dans le cas (raui;iiienl(;r encore le uonibro de ses inembrcs ; il est aujoiird'hui de douze (i). Le conseil s'asseinble lognlicie- mcnt !e vendredi de cliaquc semaino.

A-t-il repondu anx espcrances qii'on arait dfl concevoir de son institution ? II est difficile de nc pas I'affirmer, qiiand on voit que ses travaux n'ont c<,'sse d'embrasser, ct toujouis avec fruit, le cerclc immense que nous avons trace. Nous nous bornerons a rappeler Ics plus importans.

Tels sont I'analyse des differenles eaux que distribuent dans Paris la pompe Notre-Dame, I'aqueduc d'Arcueil ct le canal de I'Ourcq ; la visite et I'approbation motivee du grand apparei! epuratoirc de Smith ct Cuchet; U: con- cours aux expcriencc& faitcs sur Ics moyens de secours dans les incendies , nvecles eche^les proposees par MM. lle- gnier et Trechard, et le sac saiweur de M. Daujon; dcs tableaux statistiques de mortalite, executes tons les ans^ et la redaction d'une nomenclature nosographique des- tinee a I'usage des medecins d'hupitaux et proprc a don- ner plus de regularite et de precision aux tableaux p ar- lielsde mortalite, dontle tableau general doit se composer; de nombreuses institutions sur les champignons veiie- neux (2), la construction dos pnratonnerres, les precautions

(i) Sous la presidence de M. le prefet de police : M. Berahd, mailre des requetes , uice-presidenl ; M. Cadet de Gassicocht, secre- taire-rapporteur; MM. J. J. Leroux, Deyeux, Huzard, Duplvtren, Petit, Pabiset, Dabcet, Mabc, Girahd; et liiiZARD fils, adjoint.

(a) Un botaniste est charge, par la prcfeclure de police , d'ins- pecter tous les jours les champignons qu'on apporte aux inarches de la capitale. On n'y admet que les champignons cultives, etseulement quand ils sont nouveaux et pen developpiis. Depuis que cette me- siire est en vigiicur, il n'y a pas d'exemple que des champignons achetes ^ la lialle aient cause dcs accidcns-

SlJll LK CONSKiL DK SALLBRITI-;. 271

a prendre contre rii3'clrojtho!>i(; , Ic enrage cles piiits et des egouts, les procedcs dc desinfection et ceiix de venti- lation.

Una occasion ij'est oSferte pour appliqner en grand la theorie de la venlilation. Apres avoir recueiili , tant en France qu'en Angleterre, tous les documens nccessaires snr la construction la plus parfaite des theatres, le conseil a communique son systerae a I'architecte qui a entrepris la uouvelle salle de Vopi^}-a; cet artiste, en consequence, a tdut dispose pour que I'air se renouvelle duns la salle sans abaisser la temperature, et pour que Ton puisse meme regler la temperature selon la saison et I'affluence des spectateurs.

Les moyens de secours publics , les brancards meca- niques, les apparcils et Iwiiefs de sauvetage, les boiles fumigatoires, places sous I'inspection particuliere d'un des membres du conseil ( M. le docteur iJ/«re) , onl etc perfectionnes chaque annee , en meme terns qu'une ins- truction precise indiquait la marche a suivre pour rappe- ler a la vie les noyes et les asphyxies. Le conseil a pro- voque et obtenu I'emploi des chiens de Terre-Neuve, qu'un instinct admirable instruit a sauver les hommes submerges; deja, Ton possede a Paris un certain nombre de oes utiles animaux , et les occasions ne manqueront nialheureusement pas pour reclamer leurs services.

Le regime des prisons du departement et du depot de mendicite devait fixer I'attention du conseil de salubrite. Tous les ans, a des epoqucs indeterminees, plusieurs de ses membres out visite ces etablissemcns ; ils ont mis chaque fois sous les yeux de M. le prefet de police les observations qu'avait fournies ou confirmees I'examen le plus scrupuleux. lis ont ete asscz heureux pour oblenir de nombreux clian'^emens en bien. Les !o2;emens et les indr-

272 SLR LE tONSEIL DE SALUBRITE.

mcrios des piisonniors out elo ;iss;iiiiis, et Iciir nouni- ture et Icurs vOteiiitMis ainelioios; on a supprime les tra- ■vaux quialtcraient leursante, et abolil'usage des cacliots SOutcirains \ la Force et au depot de Saint-Denis.

L'n dessechement considerable j celui de I'ctang de Coqucnard, a ete entrepris sous la direction du conseil. Trois cents ouvrieis y ont ete occupes dans la saison la plus aialsaine; pas un seul n'est tonibe malade. Les niemes nio^ens de salubrite ont etc iudiques pour le enrage an- nuel do la riviere de Bievre.

Les plaines de Creteil et de Maisons eprouv^rent plu- sieurs inondations, auxquelles succederent des Sevres endemiques ; le conseil s'y transporta, deux annees de suite, pour indiquer les moyens d'assainissement; et les autorites locales peuvent maintenant prevenir le rctour de ces accidens; mais, en cette occasion, justement frappe de I'importance dont seront toujours, dans les epidemics , la promptitude des secours et I'uniformile de leur direc- tion, le conseil proposa de creer, pour atteindre ce but, une ambulance departementale , et redigea le plan de son organisation.

Je ne dois point passer sous silence la suppression des amphitbeatres particuliers de dissection, les reglemens faits pour les bains publics et medicinaux et la vente des eaux minerales, le transport des voiries bors de la vilie, la poursuite et la condamnation d'unc foule de vendeurs de remedes secrets ^ esptce d'honimes qui , au mepris dc la loi; ne cesseront de se rcproduire que quand,^une severite inflexible pour les reprimer, se joindra, pour les laire connaitre , une telle publicite (i) qu'ils ne pourront plus desormais abuser personne.

(i) On a observe que les joiiriiaiix , qui rendenl coniptc si volon- (icrs des actes des tiil)unau\ , se (aiscnt prcs(|TiR tnujouis sur les

SUR LE CONSEIL DE SALUBRITE. 273

De ces bienfaits, obtenus par le zele du conseil de salu- brite, se rapproche naturcllement retablissement, a Paris d'un dispensaire. Les attributions de cc bureau de consul- tation s'etendent surtout aux maladies des femmes pu- bliques. Le nombre des maladesqui, en 1800, ctait dans la proportion de un k neuf, a graduellement diminue. En 1816, la proportion n'etait plus que de un a vingt- six , et, en 1820 , de un ^ quarante-trois.

II est des professions (i) et des manufactures dont les ateliers exhalent des vapeurs incommodes , souventmeme insalubres. Les personnes que le voisinage expose k en souffrir adressent leurs pluintes k I'autorite, qui les ac- cueille et charge le conseil d'examiner jusqu'a quel point elles sont fondees. Les reclamations de ce genre , dans I'espace de dix-neuf annees , sont devenues I'objet de plus de deux mille rapports. Le conseil a conclu k I'eloigne- ment et a I'isolement des ateliers nuisibles ; et, en votant la conserTation de ceux qui ne meritent point celte rigueur, il a mis leurs proprietaires sur la voie d'ameliorations propres a attenuer leurs inconveniens ou a les faire dispa- raitre. Envisageant ensuite, dans son ensemble, ce vaste sujet, il a presente au gouvernement, sur la classificatiou des professions insalubres et incommodes, un travail qui est devenu la base d'une ordonnance du roi, en dale du 1 A Janvier 181 5. Ces professions y sont divisees en trois classes : celles dont les ateliers doivent etre isoles de toutes les habitations; celles dont retablissement, dan?

arrets de ce genre. Ainsi, un jeu/ journal a annonce la condamna- tion prononcee successivcmenl par deux tribunaux , contre M. ' * * pour avoir vendu, sans titre , de pr^tendus grains di same.

(1) Les t-acAcr/es desnoMT-msewr* appellent frequeniraent I'exa- men du conseil de lalubrit^.

Tome xi. 18

27A SUR LE CONSEIL DE SALUBRITli.

1.C voisinngc tics hal)il;ilioiis, no doit elre pcrmis qii'aufafnt (jiie (Ics procaulioiis legales seroril prises pourqu'il n'cii icsulte aucune incommodite ; ccllcs qui , sans Ctre assujelies aux restrictions enoncees, cat bcsoin, pour s'ctablir, d'une autorisation que les localites et les circons- tanccs peuvent fairc accordcr, refuser on modifier.

Cclte ordonnance nous parait avoir atteint parfaitcnient son but. Ce n'cst pas sculemcnt Ic magistrat charge de son execution qui en doit cludier les details , c'est aussi le philosophe politique, s'il Ycut acqucrir une idee juste de cette partie importante et pcu connuede I'administration.

Le terns neanmoins y apporlera des cliangeraens , mais des changeniens utiles et honorables ; ils seront le fruit des efforts que la science fail cliaque jour pour diminuer le nombre des professions insalubres. Deja, depuis quatre ans, I'operation du si'crStage, qui exposait jadis les ou- vriers chapeliers a des maladies graves, a etc heureuse- ment modifiee; le conseil de salubrite s'est assure qu'clle ne compromet plus la sante de ceux qui I'executent, et qu'on peut des-lors ayloriser, dans les prisons, la forma- tion d'ateliers de chapelleric.

Feu M. Ravrio avail fonde un prix pour celui qui trou- vcrait le moyen de preserver les ouvriers doreurs de la vapeur pernicieuse du mercure , sans nuire a la precision et i\ la perfection de leur travail. Le probleme a ete com- pletement resolu par un membre du conseil de salubrite, M. Darcct.

Dans un grand nombre d'ateliers, le conseil a inlroduit I'usagc salutaire des fourneaux fmnwores. II a indique aux fabricans de bleu de Prusse des apparcils propres u neutraliser le degagement du gaz hydrogene sulfure. II a donne aux hongroyeurs le moyen de passer leurs cuirs en ?ujf.- sans cxposer les ouvriers i etre asphyxies par la va-

SUR LE CONSEIL DE SALUBRIXfi. 275

pcur du charbon. II a reclifie les appareils employes pour la carbonisation du bois et pour la distillation des eaux- de-vie de pommes dc terre. II a introduit des ameliora- tions considerables dans les fabriques d'acides et de pro- duils chimiques, dans les raflineries de sucre, les fonde- ries de suif, les amidonneries, les savonneries et les fa- briques de soude artificielle. Enfin, il a obtenu de la mu- nificence de M. le prefet de police les fonds d'un prix pour le perfeclionnement de I'art de la boyauderie. Le concours est ourert, et deja il a conduit a I'invention du perfectionnement demande.

Chacon des membres qui composentle conseil de salu- brite est astreint, par les places qu'il occupe ou la pro- fession qu'il exerce , a des occupations qui sembleraient devoir Tabsorber toutentier; chacun d'eux consacre les courts instans de son loisir a destravaux scientifiques (i), que plus d'une fois le public a ete dans le cas d'apprecier. Comraent done ce corps peut-il faire autant etaussi bien ? Tel est le fruit d'une organisation sage. Tel est surtout I'effet de cctte philantropie qui echauife toute ame hon- netc , et que developpent encore , en rendant sa marche plus sOre, I'accroissement des lumieres et I'activite morale qui en est la consequence : noble sentiment, dont jamais, en France, un magistral ne sccondera I'essor, sans elre bientot recompense de ses soins par les resultats les plus brillans et les plus avantageux.

Penetre de cet espoir legitime , et bien certain que le

(ij M. Cadet de Gassicourt doit incessarament publier un Traili. de police hygienique , oh de sal uh rile publiqiie. Oa ne pent qu'au- gurer favorablemeut d'un ouvrage oii I'auteur a consigne les fruits de dix-ncuf annees d'experience dans la place laborieuse de secre- taire-rapporieur d\i conseil de salubriii.

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476 SUR LE CONSEIL DE SALUBRITE.

chef till conscil de salubritc el scs meinbrcs peiiscnl comme moi, que Ton n'a pas faitas.^ez dc bicn taut qu'ii en reste a faire , je me permettrai d'offrir a leur zelc quol- qiics probltmes A resoudre.

Aprfes ayoir assaini !es boiiclu-iie-; par retablissomciU des abattoirs J pourqiioi n'cn pas faire disparaitrc les scenes de cruaute, toujours revoltantes, ct quclqucfois accoinpa- gnees de dangers? II ne s'agirait que de substituer, au procedehabituellement employe pour abattre les aniinaux, Une lesion forte etsubite a la moelleepiniere. On a,je crois, tente en ce sens quelques essais qui n'ont pas reussi; cela arrive souvent aux methodes contraires a I'usage recu, ct ne prouve jamais beaucoup contre leur adoption. Lc pro- cede que nous recommandons reussit constamment en Espagne, oi'i Ton n'en connait point d'autre.

La police, qui empeche les cimctieres existans de devenir insalubres , ne peut-elle s'occuper, une derniere fois, de ceux dont elle present la cloture, et ordonner qu'on y repande avec profusion , dans la saison conve- nable, les graines d'arbres les plus proprcs ky prosperer ? Leur vegetation forte et prompte assainirait le sol, en ab- sorbant ou en epurant les vapeurs que la chaleur et I'hu- midite en feraient sortir ; elle preserverait pour long-tems de I'atteinte de la beche ou de la charrue une terre que I'interetdelasalubrite, non moinsque celui de ladeccnce, proclament inviolable. Ces arbres enfin, quand I'bomme pourrait se reposer sous leur abri , melant une douce im- pression de melancolie a la jouissance de leur ombrage , lui rappelleraient le souvenir des generations eteintes, dont ils couvriraient les restes; souvenir qui ne serait pas sans avanlage , et pour les sentimens affectueux , et pour les inspirations poetiques, et pour les hautes lepons de la philosophie.

sua LE CONSEIL DE SALUBIUTE. 27/

II est des contrees oii Ton rogarde le crime et les habitudes pcrvcrses comme des maladies de I'ame , centre lesquclles echoue rarcment i'emploi d'un regime i la fois physique et moral. Comment n'essaie-t-on pas de natura- liser en France une idee si bien appropriee a la douceur et a la generosite du caractere national ? On a plus d'une fois provoque l^ abolition de la peine de mort : ca serait, ce me semble , conimencer I'ouvrage par la fin , aussi long-terns que le systeme des lois penales ne lendra pas visiblement a I'amendement et a I'amelioration du cou- pable, aussi long-tems qu'on n'aura pas supprime ces fletrissures , ces reclusions a perpetuite, ces travaux for- ces qui, loin de corriger un condamne , ne servent guere qu'a le rendre plus pervers et plus habile dans sa perver- site. Un seul moyen d'y parvenir se presente : c'est d'imi- ter en France Vhygiene des prisons de Pliiladelphie (i). Les membres du conscil de salubrite, qui portent fre- quemment dans les prisons le regard observateur du phy- siologiste et celui du philantrope , peuvent provoquer 4 cet egard une premiere tentative ; ellc serait peu coCiteuse; et, en supposant qu'elie ne reussit pas immediatement , les coupables sur qui elle aurait echoue n'en sortiraient pas plus medians qu'ils ne le sont, apres une annee de

(i) Des prisons de Pliiladelphie, par M. de la Rochefoucault- Liancoiirt ( in-S". Paris , an IV.) Turnbull , Visile d la prison de I'hiladelphie, Iraduit par M. Petit-Radel vin-8°. Paris, 'an VIII. ) On lira aussi avec fruit les Notes reeuelllies en i-isilanl les prisons de la Suisse J etc. , par Francis Cunningham ( in-S°. Geneve, 1820.) Enfin , dans la cause de I'humanite, on nous cxcusera peut-etre, si nous rappelons que I'idee de fairc du regime des prisons un veritable traitement moral a etc developpee avec quelque etenduc dans un ouvrage intitule : Des rapports de la rnedecine avec la politique, par Eusebc Salvertc ijn-u. Paris, 1806). pag. 4^82.

278 SUR LE CONSEIL DE SALUBRITE.

sejour i BicGtre ou aux galores. Et si clle rcussissait! . - Celui qui, d'un enncmi de la societe , parviendrait aiiisi a faire un homine bon et utile , ne meriterait-il pas bicn la couronne decernee, dans unc aneiennc lepublique, a celui qui avait sauve la vie d'un citoyen ?

En fonnant de tels voeux , je ne prononcc pas sur la facilitc de Ics realiser. Pour hater ce jugemcnt, pour ac- croitre cette facilite, puisse le conseil de salubrite voir s'agrandrir encore le cercle de sa bienfaisante influence! Depuis 1817, il a publie chaque annee un Rapport general de ses trayaux (1) , et M. le prefet de police vient de I'au- toriser a faire inserer, dans les Annales de I'iiiduslriena- tionale et Hrangere (2), les Rapports particuliers, dont la publication lui paraitrait avantageuse. C'est un pas impor- tant : la publicite est amie de I'induslrie comme de la justice et de la verite ; mais I'institution elle-meme pour- rait ctre concuc dans un plan plus vasle. La veritable place du conseil de salubrite ne scralt-elle point prcs du ministre de I'interieur, d'oCi il correspondrait avec les pre- fetsqui, dans chaque departement , auraient pres d'cux une institution analogue ? Alors les travaux faits pour la capitale serviraient pour toulcs les parties du ro3'aiimc; alors, en epargnant le Icms et I'argcnt que la divergence des diverses autorites force i depenser, on ferail tout plus

(1) Notre expose des travaux du conseil dc salubrile est cxtralt presque textuellement de ses quatrc Rapporls , et de rcnseignemens 6ur les annees anterieures k 1817, que nous devons a la complaisance de M, le secretaire-rapporteur.

(2) Annales de V Industrie nationale el elrangen', ou Mercure tec/inologiijue , par MM. Lenormand et De Moleon. ( Paris, Daghe- lier, librain? , quai dos Augustins , n" 55. ) Cc rccucil , annonce avec elogc dans la Revue BncjcJopkliqiie , se compose deji dc quatre volumes ia-8".

SUR LE CONSEIL DE SALUBKITE. 279

vile, a nioins de frais, et avcc cet ensemble precieux qui double la valeur des operations adminislratives.

Lc Conseil de sahihrite compte dix-neuf annees d'exts- tence : il n'cst done pas difficile de prononccr si I'amelio- ration proposee ne serait point, de la part du gouverne- ment, un veritable bienfait.

Peut-etre se decidera-t-on quelque part pour raffirma- five, si, comnie il est permis de I'esperer, cettc estimable institution compte un jour, en Europe, de nombreuses ri vales (i). Ecsebe Salverte.

iV". B. Les attributions du Conseil de sALUBaiTE embrasseat dans Icur ensemble les objets qui interessent le plus la santti et la silrete publiques, la civilisation et I'bumanite. Tout faitesperer que des ins- titutions analogues seiont successivement natuialistiesdaus toutes les contrees de I'Europe. Si les boiumes eclaires et philantropes , qui doivent etre appeles a former de semblables conseils, etablissent entre cux , sur quelque point du globe qu'ils soient places , des echanges mutuels de leurs observations, de leurs experiences et des amelio- rations qu'ils auront pu introduire dans les differentcs parties de la police sanitaire et de I'liygiene publique, ces communications nc tarderont pas i faire jouir chaque grande ville et chaque nation des avantages qu'une seule ville on une seulc nation aura d'abord obtenus. La Rei/ue Encyclopedique , dont I'un des principaux objets est d'of- frir un moyen regulier et central de communicalious et d'echanges entre les hoinmes qui s'occupent de vues utiles, recevra avec recon- naissance et s'cmpressera de publier tout ce qui coneerneles moycns d'anieliorer la surete et la saute publiques, clans lous les pays oil s'e- tendent scs relations; et scs correspondans sont invites a rechercher particulierement et a lui trausiuetlre les details de ce genre qui Icur paraitront d'un interet general, dans les lieux qu'ils habitent ou qu'ils ont roccasion de visiter. {Foy. cidessus, Tom. II, pag 062, Tom. IV, pag. 2S6 et suiv.) M. A. J.

(i) hii. Sociile d' humanile de Londres {The royal humane So- < iely ) a le meuic but que le Conseil dc salubnle. EUe vient de pro- poser a celui-ti unc communication reciproque des travaux des deux institutions : son offre a etc acceptcc avcc cmprcsscmcnt.

JJ. ANALYSES D'OUVRAGES.

SCIENCES PHYSIQUES.

MiMOIRE SUR LA DIGUE DE CHERBOURG, COmpareC rttt

Breakwater, ou jetce de Plymouth , par J. M. F. Ca- CHiN , inspecteur general des ponts-cl-cliauss6es , officier de la L6gion-d' Ilonneur , etc. (i) .

C'est avec bien de la raison que Pline Ic jeunc a dil : major e longinquo reverentio. Au physique comme au moral, cetle maxime trouve chaque jour de nombreuses applications, et j'en apporterai pour nouvelle preuve I'ouyrage que je vais examiner. Quelle celebrite n'a-t-on pas donnee i ces inutiles pyramides , a ces fastueux et gigantesques monumens de Torgueil d'un despote, qui , suivant I'energique expression du malheureux Legouve,

D'un vain poids apres lui fatigue encor la terre ? Etcependantjsous nos yeux, pour ainsi dire, un monument plus utile, presquc aussi vaste et non moins etonnanl, a etc construit dans les immenses profondeurs d'une mer orageuse, et pendant les tempetes plus terribles encore peut-etre des guerres civiles et etrangeres ! A peine dai- gnons-nous jeter un regard sur les resultats d'une aussi prodigieuse entreprise , quand lis nous sont ofTerts par ie savant ingenieur memc qui a eu I'audace de Fexecuter! Et I'homme aussi a dit a I'Ocean : Tw viendras jasqu'ici et til iiiras pas plus loin; il a pose, a une lieue du

(i) Paris, iSjo.—ln^" dc 85 pages avec planches. Imprimerje de Firmin-Didot.

SCIENCES PHYSIQUES. 281

rivage, une vaste et iuimuable barriere, contre laquelle vicnt mugir, se biiser ct s'eteindre toule la rage dcs flols impuissans.

Depuis long-tems , le gouvernement avail senti la nc- cessite de creer un port militaire dans le canal de la Manche. Les debris des vaisseaux qui perirent dans le fu- neste combat de la Hougue (1692), s'elevent encore pour accuser la negligence de ceux qui n'avaient pas songe a leur assurer une retraite (1). « La baie de Cherbourg, dil M. Cachin , parut la position la plus favorable i cetle destination. En effet, sa situation tres-avancee sur la route des vaisseaux ofifre loutes les facilites desirables, soit pour surveiller les mouvemens de I'ennemi, soit pourinquieter ses convois, soit enfin pour rassembler tous les details necessaires a une grande expedition maritime. »

Cette rade, d'une excellente tenue, est egalement favo- rable ii I'arrivee et au depart des vaisseaux de presque tous les airs de vent et dans tout etat de maree. Elle comprend un mouillage d'une vaste etendue; elle est susceptible de toutes sortes de moyens d'attaque , de protection et de defense; elle reunit enfin. sous les rapports militaires et maritimes, tous les avantages qui peuvent influer sur le sort de nos forces navales et de nos relations commerciales.

Divers projets furent successivement formes et abau- donnes presque aussitot. Cependant, onproposad'echouer quatre-vingt-dix caisses de forme conique, tronquee de i4o pieds (45 metres 5o centimetres) de diamctre a la base, sur 60 pieds ( 19 metres 5o centimetres) de hauteur verticale. On devait ensuite les combler en pierres seches , etj les liant avec des chaines de fcr, clorre ainsi la partie

(i) On voit encore au Cap la Hougue des carcasses des batiniens coulea pendant et aprOs le combat,

282 SCIENCES PHYSIQIjES.

ouverlc ilc la radc. Ce systeine, sediiisant par recouomic qu'il presentait cl par la siinpliciu'; do son cxociition , fut LientOt rcconnu impialical)le.

On convintalors qu'il lallait veiser, dans toule I'otenduc de la partie que Ton devait fermer, des masses de pierrcs considerables, et I'activite dcs Iravaux fut telle, qu'A la fin de 1790, le volume des materiaux verses s'elevait a deux millions six cent soixante - cinq millc quatrc cents metres cubes, ct occupait unc etcndue de 3,898 me- tres, sur une largcur de quatre-vingl-dixpieds (29 metres 25 centimetres); mais I'experience fit connaitre bientol que les dimensions des picrres employees i\ cc travail n'offraient aux efforts continuels de la mer qu'une faible et inutile resistance. II fallut employer des blocs de i5 a 20 pieds (5i a 69 centimetres) cubes , que Ton arrachait des flancs de la montagne du Roule, et qu'une multitude de bateaux construits pour ce travail allait porter a leur destination. II taut lire, dans le memoire meme, les de- tails de cette operation dont on concoit toute la difficulle ; nous nous bornerons a dire qu'cn pen de teuis, la digue , revetue de ces masses de rochers , opposa unc force suf- fisante aux coups de mer qu'cUe devait arreter.

Lorsque la digue, vers la fin de i8o3, eut etc elevee a 9 pieds (2 m6trcs 92 centimetres) au-dessus des plus liautes marces d'equinoxe, le gouvcrnement resolut d'y elablir une batterie dont on avail depuis long-lems re- connu la necessite pour proteger los passes est et o«<,s7de la rade.

En i8o4, les travaux furcnt continues avcc beaucoup d'activile. Soixante batimens furent employes journellc- menl au transport des materiaux, et seize boucbes a feu furent ajoutees a ccllcs qui se trouvaient dcju sur le fort. Les aunccs suivantes, quelquce oragcs occasionuerent

SCIENCES PHYSIQUES. 283

de legers degats; mais, le, i2 fevrier i8oS, unc tcmpetc effroyable s'cleva, renversa les epaulemens dc la batterie, enleva les canons pour Ics porter a une grande distance de leur place et causa de grands malheurs. Si les efifets de cet ouragan furent deplorables sousbeaucoup de rapports, lis eurent du moins I'avantage de donner a la digue la forme plus convenable a sa solidite; les blocs enormes qui en formaient le recouvrement furent boule verses, presses et disposes sur de nouvelles pentes avec une telle regularite , qu'ils semblcrent avoir ete cimentes par la main des hommes.

« Le principal effet de cette tempete , la plus violente dont on ait conserve le souvenir, fut de consolider I'ou- vrage , en mettant un dernier terme au doplacement des uiateriaux dont il avait ete forme. Ces enrochemens ont offert depuis ce tems I'aspect d'une plage naturelle de rochers, sur lesquels les varech^ croissent et se multiplient , de maniere k offrlr la preuve incontestable d'une stabilite par- faite, et qui ne pouvait etre que le resultat d'un ebranlc- ment general et tout-ii-fait extraordinaire.

« La reconnaissance qui fut faite a cette epoque de la nouvellc configuration que la mcr avait attribuce aux en- rocbemens , confirmee par toutes les verifications ulle- rieures, a fait connaitre que /es digues, ainsi construites el exposees a Inaction de la mer, ajfectent , enlre leur somineL et le sol SU7- lequel elles reposent , quatre talus entieremenl differens J dont I' inclinaison varie en raison de la i-'iolence des flots et de la duree de leur action , aux dii-'eis dcgres d^ ascension et d'ahaissementdes marees. »

M, Cachin donne les rcsultats des observations qui out conduit a cette regie generale, incounuc jusqu'a cc jour, el qui sera du plus haul iDlercl pour les ingcnieurs qui

284 SCIENCES PilYSIQLES.

auraienl dcsonuais a entrcproiulic des construclions sous- uiarincf.

Aprcs avoir pnjsentc Ic tableau des maleiiaux employes ct des sommes deponsees (olles s'elevcnt a 20,968,936 fr.), des materiaux a employer et des sommes i depenser encore pour que I'ouvragc soil cnlicrcment termine, le sa- vant auteur du memoire fait connailre Ics plans qui restcnt a executer, et 11 passe a une seconde parlie qui interesse eminemmeut I'honneur national , puisqu'il s'agit de la comparaison de la digue francaise avec un ouvrage du meme genre consfruit a Plymouth, par les Anglais. Nous donnerons d'autant plus d'etendue al'analyse de ce second cbapitre, quelesredacteursde VEncyclopedie Brilannique, trompes par les renseignemens errones sans doute qu'ils ont recucillis sur les travaux de Cherbourg , n'ont pas craint de comparer les entreprises des deux nations, et d'avancer que la maniere simple et expeditive avec laquelle le breakwater (jetec de Plymouth) avait etc construit, offrait un contraste curieux avec la multitude d'employes, le tems ct I'ostenlation que Ton a mis a la conduite des travaux de Cherbourg. Citons Icurs propres expressions : n T]ie small estahlishment and quick manner with which this great work has been carried on, form a curious con- trast with the juultiludes employed on the breakwater of Cherbourg , the time occupied by that undertaking and the parade and ostentation with which it was conducted.-!* (Annee 1817, pag. A58. fo^/>?z.) Les memes redactcurs ne craignent pas d'ajouter: vA very considerable part of expencc niiglit have been saved by dispensing altogether with the cones, all ofwliicli burstj as might have been ex- pectedjfrom the superincumbent weight of a deep coloumii of water pressing the stones within against their sides. »

SCIENCES PHYSIQUES. 285

tt Une partic tres-considcrablc de la depense aurait cte epargnoe, si Ton s'ctait abstenu de conslruire dcs cones qui creverent lous, comme on devait s'y attendre, a cause du poids enorme de la colonne d'eau qui pressaitles pierres sur les parois, dans Tinterleur.))

Quoi ! c'est dans le pays qui a donne naissance a Newton et qui possede encore ses Davy, ses Rennie , ses Tedford et tant d'autres hommes celebres; c'est dans un des prin- cipauxrecueils scientifiques, c'est sur la terre classique de I'Ecosse, qu'un ecrivain, ignorant les premiers principes de I'hydroslatique, en jugeant et en critiquant avec beau- coup de severite un des plus beaux monumens qui soient dus au genie de Ihomme , ne crainl pas d'avancer que la pression exercee verticalement par une colonne d'eau est plus forte que la resistance laterale opposee par une co- lonne d'un plus grand volume! . . . Ce fait sufllrait seul pour donner une idee de I'article que nous refutons; mais comme chaque jour les decouvertes francaises sont en butte k des attaques aussi peu fondees, nous allons suivrc le savant Anglais dans ses calculs. Nous venous de voir que d'apres lui le breakwater de Plymouth a ete execute d'une maniere plus economique que la digue de Cherbourg. Eh bien! M. Cachin prouve jusqu'a I'evidence que I'ouvrage anglais a coCile 16,491 fr, le metre courant, tandis que I'ouvrage francais, pour le meme volume , n'a coute que 8,717 fr., c'est-a-direa peu pres moitie moins. Cependant, les difficultes qu'on avait a surmonter de part ct d'autre n'etaient nullement comparables. A Cherbourg , on creait un monument entierement nouveau ; a Plymouth , on imitait un ouvrage deja fait, et Ton profitait des lecons inap- preciables de I'experience: a Cherbourg, il fallait travailler sur une cote qui n'etait presque pas abritee; a Plymouth, on elevait dans une rade dejatres-bonne dans son etat na-

286 SCIENCES PHYSIQUES.

turcl : a IMymouth, il iic fallait qu'iinc digue dc pcu d'c- londiic; a Cherbourg, on avail a fcrmcr un cspace qualrc ibis plus grand: cnfin, a Plymouth, le rocher d'oCi I'on tirait dcs materianx tres-commodcs touchait au rivagc, tandis qu'a Cherbourg la montagne du Roule, d'oOi il fallait arra- chcr avec peine des blocs dc grcs tres-durs et quartzcux, est a unc ccrtaine distance de la mer.

Que devienl done maintenant, je vous le demande, cct orgueil britannique que vous vous complaiscz a etaler avec si peu de menagement ? que deviennent surtout ces plai- santeries ameres et insultantes que vous prodiguez aux Francais avec tant d'arrogance ? Vous le voyez, nous n'a- vions pas cherche a tirer avantage de I'immcnse superiority de nos travaux sur ceux de vos ingenieurs, et vous voulei nous forcer i le faire. Nous n'avions pas parle de celte fre- gate si peu digne du nom qu'elle portait, qui vint inso- lemment troubler nos travailleurs et fut prise par deux de nos petites barques canonniercs(i);mais,puisque vous vous egayez si bien a I'occasion des fetes dont notrc digue a etc I'objet, vous nous obligeza vous rappeler que celte fete-la nc fut pas la moins agreable, el que, celte fois, ce ne fut pas la France qui en paya les frais. « Cessez done, vous dirai-jc avec M. Cachin , cessez ces rapprochemens envieux , ces eomparaisons chagrines que le vrai talent ne saurait avouer et qui nc peuvent ajouler au merile dcs uns, ni rabaisser le merite des autres. Si I'Anglelerre a des ingenieurs ha- biles, la France aaussi les sicns. » Partout vous trouverez cette France, non voire jalouse rivale, mais toujours voire emule, el quelqucfois meme voire niodele. Ses malheurs

(i) La fregate anglaisc la Minerpe fut prise sur la radc de Cher- bourg par les deux canonuitres, la Chijfone ct la Terrible, capit, Lecolier ct Petr6c.

SCIENCES PHYSIQUES, 2S7

li'onl pas abalUi sa ficrU';; t^Hc vous propose de marcher tie concert a la iCtc de la civilisation europocnne, mais elle fcra tons ses efforts pour nc jamais vous laisser prendre le premier pas. Pourquoi done ccs insultes journalieres a nos decouvertes , i nos arts , a notre agriculture ? pourquoi cliercher a entretenir de basses rivalites et d'odieuses haines entre deux peuples fails pour s'estimer ?

11 ne me reste qu'un mot a dire sur le travail de M. Cachin, c'est que son interessant ouvrage n'estqu'une partie de celui qu'il nous promet sur les travaux de Cher- bourg. ((Quelque considerables que soient ceux dont nous venous dc rendre compte, ils ne ferment, dit ce savant ingcnieur, qu'une partie tout-a-fait accessoire et di^incte de ceux qui ont ete projetes, et dont I'execution est deja tres-avancee , pour creer sur cette partie de nos cotes le plus vaste et le plus complet des etablissemens de marine militaire. Cette importante creation devait etre tout en- tiere I'ouvrage de I'art ; elle offrait des difficultes dont on aurait vainement cherche des exemples dans les monumens des anciens et dans les travaux des peuples modernes. La difficulle de les surmonter fut long-tcms I'objet du doute et de I'incertitude ; mais elle a cesse d'etre problematique. Ce nouveau port existe ; il a etc ouvert a I'ocean des le luois d'aofit i8i3, et dcpuis ce tems la marine royale est en possession des principaux avantages que Ton s'en etait promis.

« Les precedes nouveaux, les moyens extraordinaires dont I'heureuse application a assure le succes de ces tra- vaux , ont enlierement disparu ; il n'en reste plus de traces que dans le souvenir dc ceux qui en ont ete les temoins. S'il pent parailre utile aux progres de I'art d'en conserver la tradition , nous considererons comme une obligation de faire connaitre I'ensemble et les details de cette immense entreprise, de decrire la configuration, I'etendue , les

288 SCIENCES PliYSIQUES.

moycns d'extculion de ccs constructions hydrauliqucs, cle- vees engranit, dn sein d'une mer oragcuse, avec tons les caraetorcs dc la plus rare magnificence , de la plus parfaite solidite, et dont les fondemens reposent sur des masses dc rochers qui ofifraient nagutre le spectacle des ecueils les plus dangereux , li oi\ Ton voit maintenant un port vaste et profond, egalement propre a la construction et au ra- doub, a Tarmemcnt et i\ I'expedition ; un port, oii les vaisseaux du plus haut rang accedcnt dans tous les tems sans nul obstacle, et stationnent ayec sQrete, constamment a flot dans tout etatde maree; un port enfln qui, par sa si- tuation, par la facilite de ses abords, par la regularite et la convenance de ses dispositions, offre toutes les pro- prietes que Ton pent desirer et que Ton ne trouve reunies dans aucun des etablissemens du meme genre, que le genie des arts a consacres a la gloire des souverains et a la sftrete de leurs sujets. »

Le monde savant attend avec une vive impatience ce iiouveau travail de M. Cachin, qui decrit avec autant d'art et d'habilele qu'il execute. C'estl'eloge le plus complet et le plus juste que nous puissions faire du memoire que nous venons d'analyser (i). U doua rd GA.viJiv.Ti.

(]) Depuis la redaction de cet article, quelques lieuues anglaises ont public , contre les ouvrages fiancais , des critiques oil rcgne la plus insigne mauvaise foi. Nous citerons notamment les jugemens portis sur I'ouvrage de M. Chaptal, et une diatribe violente contre nos litterateurs et contre nos savans les plus distingues. Si ces deplo- rablcs exces continuent , quelques ecrivains fran(^ais s'enipresseront dc relever I'inexactitude d'une foule d'assertions erronees qui pour- ront encore faire quelques dupes en Angleterre , mais que les gens senses apprccicront a leur juste valeur. Esperons pourtant que nos confreres d'outre - mer, au nombre desquels se trouvent d'ailleurs beaucoup d'hommes tres-recommandables , nous epargneront cette tachep^nible, en nes'ecartant plus des convenances que toutLomme doit respecter , mais qui doivent etrc sacrees pour celui qui s'est voue au culte de la science et de la verite.

SCIENCES MORALES ET POLITIQUES.

PrINCIPES DE la science MORA.LE ET POLITIQUE , OU Ri- SUJli DES LECONS DONNEES AU COLLi;GE d'EdIHBOURG ,

par Adam Ferguson , pi'ofesseur de plulosophie morale; traduit de I' anglais par A. D. (i).

Une tendance impossible a meconnaitre porte aujour- d'hui les esprits vers I'etude des sciences morales et poH- tiques. Ceux qui ont reflechi sur la marcbe des choses humaines ne voient pas sans esperance la predilection des hommes de notre age pour les etudes serieuses. En effet, tout ce qui tient au domaine de la philosophic doit exercer I'influence la plus heureuse sur nos facultes intellecluelles. Ces etudes trouvent beaucoup de partisans dans lajeunesse contemporaine, dontle caractere est essentiellement grave etmeditatif. Aussi Montesquieu, Burlamaqui, Vatel sont- ils entre les mains de tons les jeunes gens, qui pourront maintenant, grace aux travaux d'un nouveau traducteur, profiler aussi des lecons d'un des plus illustresprofcsseurs de I'universite d'Edimbourg.

Ferguson appartient a cette celebrc ecole ecossaise qui s'honore des noms de Blair, de Robertson, de Hume et de tant d'autres hommes dislingues, dignes successeurs des philosophes franpais du dernier siecle. C'est dans les ecrits de Bacon,. de Descartes, de Hobbes, de Mallebranche , qu'ils puiserent des connaissances qu'ile ont contribue a repandre, et qui se sont perpeluees jusqu'i nous par les heureux efforts de quelques eleves de ces grands hommes.

(i) Paris, 1821. 2 vol. in-8^ Kleffer , libraire, rue d'Enfer-Saint- Micheljn" 2 (premifire livraison compos6e de la premiere partie du i""' volume).

Tome xi. 19

290 SCIENCES MORALES

Les Principes clc la science morale et politique de Fer- guson deviendront un ouviage classique pour cenx qui ctudient le droit nalurel, c'est-a-dire la science de la mo- rale. Les connaissances morales forment une seric de regies i suivre dans la conduite de la vie; elles tendenl a nous enseigner les preceptes traces dans le code des lois primitives que la nature nous impose ; et le meilleur moyen pour parvenir i les bien connaitre est de s'appliquer a etu- dicr I'homme, en ce qui le distingue des autres etres animes. Aussi Ferguson a-t-il commence son llvre par la description de I'homme et par I'indication de la place qu'il occupe dans rechelle des etres.

Une difference manifeste existe enlre la matifere inerte et la nature animale. Les corps doues d'un principe de vie sont composes de parties diverses , dont les substances dures, molles, fluides, nerveuses, servent toutes a la vie; aucune d'elles n'est inutile dans I'organisation animale. Mais il existe aussi de nombreuses differences dans les corps doues de la vie ; s'ils partagent tons la volonte et la faculte d'errer librement dans I'espace, lous n'agissent pas d'apres les memes principes. Chaque utre anime a sa nature par- ticuliere, possede ses organes propres , necessaires pour son existence dans ['element oCi doit s'ecouler sa vie. Doues de I'instinct de leur conservation, les animaux apprennent par la douleur ce qui leur est nuisible, et par le plaisir ce qui leur est salutaire ; car la sagesse de leur auteur a voulu qu'ils ne trouvassent de vrai plaisir que dans ce qui tend a prolonger leur existence.

Toutes les especes si varices du regne animal ne sont pas egalement destinees k vivre en societe ; si I'essence des unes est de partager ensemble les courts momens qu'elles ontci passer sur la terre, d'autres sontnaturellementportees i rechercher un genre de vie solitaire et sauvage.

ET rOLITIQUES. 291

L;i nature de I'hoinme I'appelle-t-elle i\ vivre ensociete? doit-il etre range dans la classe des animaux sociables {gregarii) , ou bien faut-il Ic rejetcr parmi les etres crees pour trainer una existence sauvage et solitaire? Cette question a partage les philosophes, qui en ont fait I'objet d'un^rand nombre de discussions souvent contradictoires. La societe est un fait, on ne g,eut la nier; mais les homraes ont-ils primitivcment vecn en communaute? Voilaou reside reellement la question. Nous citerons le passage meme de Ferguson qui traite de la destination naturelle de I'homme : « Les uns prctendent , dit-il , que I'espece humaine , quoique maintenant unie en societe et souvent enpaix, garde encore les marques d'une condition originaire diffe- rente, sinon contraire. Pourquoi, dans les etats les plus pacifiques, les citoyens croient-ils necessaire de se forti- fier? contre qui eniploient-ils ces portes, ces murs ? pour- quoi le riche cache-t-il ses tresors ? les homines doivent-ils craindre le voisinage d'allies ou d'amis ? ou plutot ne montrenl-ils pas un instinct de ravage et d'hoslilite, en redoutant dans chacun de leurs semblables un voleur ou un espion , pret a les depouiller ou a les denoncer ?

« Pourquoi le magistral est-il arnie d'une epee, instru- ment de violence et olijet de terreur ? d'oii vient qu'il faut se donner tantde soins pour conserver la paix interieure et repousser les invasions? pourquoi ces prisons, cet appareil de fers, de torture? le bourreau est-il I'anneau principal de la chaine sociale ? est-ce pour recevoir des amis que les frontieres sont herissees de forteresses?Toutes ces precau- tions nous donnent plutot la conviction, qu'au-deli du cercle oCi Thomme etablit la paix par des mojens factices, il n'y a plus rien a atlendre que la guerre. »

« Pour repondre a ces assertions, continue Ferguson, admettons que, dans beaucoup de circonstances,la paixde

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la societc soil evidemment forcee, et nie soil maintcnuc que par line vari6t^ infinic de moyens artificiels.

« Quand nous jetons un regard sur I'liistoiie , nous voyons les faibles dcvcnir la proie du plus fori; ilsont done do se liguer pour la defense commune. La duree de la confederation ne garantit pas sa tranquillite ; car les parties sont toujours prctcs i entrcr en dispute. La guerre etran- gere servait, dit-on, i calmer les Piomaius, en les forpant a se reunir. Sans cette cause, la hache du licteur eCit cte trop faible pour reunir ces esprits inquiets.

« De tout ceci, nous pouvonsconclure que les hommes, quoique naturellement en soci^te, ont Ic choix du bien et du mal attaches h leur etat ; que les individus sont souvent disposes i\ abuser des avantages du voisinage pour troubler la pais. De li derivent la necessite d'un gouvernemcnt et I'application d'une loi penale; et, quoique I'homme soit destine i vivre avec ses semblables et qu'on puisse , sous ce point de vue, le ranger parmi les animaux sociables, il est cependant permis d'avoir unc opinion differente. L'in- dividu, pouvant etre un bon ou un mauvais membre de la societe dont il fait partie, doit encourir toutes les conse- quences d'un cboi* bieu ou mal fait, o

Ferguson examine ensuite quels sont les effels imme- diats de la societe. lis decoulent de deux sources princi- pales, la faculte de I'homme pour la parole etcette propension qui I'entraine vers ses semblables, que Ton appelle socia- bility. Mais ces differences ne sont pas les seules qui existent entre Telre doue de I'intelligence et les autres ani- maux; les causes morales les eloignent encore plus que les causes physiques.

L'etude des facultej intellectuelles de I'homme doit done occuper le philosophe qui veut s'initier dans la connais- sance des sciences morales, c'est-^-dire des regies imposees

ET POLITIQUKS. US

a tout t'tre pcnsant par sa pr&pre nature , et que pour cela on doit appeler di-oU nature!.

La premiere observation qui s'offre a la pensee de celui qui recherche quelles sontles sources primitives de rincli- nation dans la nature huinaine , c'est que Thouime n'est pas guide dans ses actions par un mobile instinctif et inde- pendant de sa propre volont^. II est evident qu'on lui a laisse , comme ses privileges , I'observation et le choix. Cependant il est dirige aussi par des instincts qui pre- cedent la connaissance des fins. Ferguson donne pour exemple de ces impulsions instinctives, communes aux hommes et aux aniniaux, I'effort qui fait servir les muscles i la respiration et celui qui nous fait appliquer nos I^vres sur le sein pour sucer le lait. Le philosophe explique cette apparente contradiction de notre nature, et il est amene i dire que le caract^re le plus general des Inclinations de I'homme n'est pas celui d'un penchant areugle i se servir de ses moyens, mais une vue instinctive du but; et, poury arriver, il lui est libre de decouvrir et de choisir, d'aprfes ses observations et ses experiences, les moyens qu'il croit les plus efflcaces.

Les sources du caprice etl'aflrection accidentelleou la pas- sion oflfrent i Ferguson les matiferes de sages observations sur la nature du bien et du mal moral. Cette partle de I'ouvrage, composee de tout le deuxiime chapitre, forme un traite complet de psycologie, C'est li que se termine la premiere livraison des Principes de la science Tn,orale et politique. Lorsque le second volume aura et6 public, nous examinerons en detail ce que I'auteur entend au juste par droit naturel. Tout ce qui touche i cette matiire contienl, dans I'ouvrage original, deux chapitres : I'un pose les principes des rfcgles de la morale ; I'autre indique les moyens de maintenir les droits sur lesquels elles sont

29A SCIKNCES MORALES

fondees ; savoir, les lois et I'aulorile clans I'etal social, et la guerre de nation a nation. Cette derniere parlie tient plus specialement au droit des gens.

II ne sera pas inutile do terminer cette analyse de roti- vrage de Ferguson par une courte notice sur la vie et les principes philosophiques de cet homme celcbre. Adam Fer- guson naquit dans un bourg d'Ecosse, en 172A. Son pere y exercait les fonctions de niinistre. Apres avoir fait ses etudes dans les universites de Saint-Andre etd'Edimbourg, il fut lui-meme attache a un regiment ecossais, en qua- lite d'aumunier. En lySc), Ferguson obtint une chaire de philosophic naturelle a Edimbourg; mais il la quitla , en 176A, pour occuper celle de philosophic morale dans la meme universite. Ilpublia, quelques annees apres, son premier ouvrage, intitule : Essai sur la societe cwile. II fit paraitre ensuile ses Instiliitions de pJiilosophie mo- rale , qui n'etaient que la substance de ses lepons. Fer- guson a compose un ouvrage fort important, intitule : His- toire des progres et de la chute de la repuhlique romaine ; on le place sur la meme ligne que celui de Gibbon. II quitta sa chaire en 1781, et fut remplace par Ch. Du- gald Stewart. Ce fut quelques annees apres qu'il publia I'analyse de ses lecons, souscctitre : Principes de la science morale et politique, Cet ouvrage n'avait pas ete , jusqu'i present, traduit en francais. II n'^tait connu que par les extraits qu'on en donna dans les T. Ill et IV de la Bihlio- theque Britannique , aujourd'hui Bihliotheque universelle, excellent recueil public i Geneve par M. Pictet. On s'accorde k dire que le caractere d'Adam Ferguson etait modeste, genereux, et son exterieur noble et prevenant. 11 prit fort peu de part aux discussions politiques de son terns. Pour bieu connaitre la philosophic de Ferguson , il faut

KT POLITIQUES. 395

lire une paitie de rintroduction des Prlnclpes de la science morale et politique, dans laquelle I'auteur apprend qu'il penchait pour le systeme des Stoiciens. « Les Stoiciens , dit-il, considerent la vie humaine comme un jeu ; I'interet et le merite des joueurs consistent u bien jouer, quel que soit le gain (i). L'auteur a vu jouer ce jeu dans les camps, en face de I'ennemi, avec cette facilite que Ton doit tou- jours trouver dans les situations avantageuses ; et, avant d'avoir fait attention aux eclaircissemensdonnes par Epic- tele, sur la comparaison precedente de la vie, avec un jeu de hasard et d'adresse, il fut long-tems sans pouvoir se rendre compte de ce fait.

« Si ces recherches le conduisent a suivre les doctrines philosophiques, professees par une secte, il y a deux mille ans, il s'y conformera, quoique cette ecole soit re-' gardee de nos jours comme insensee.

« Ciceron professait le scepticisme; mais, quandilins- truisitson fils des devoirs de la morale , il eut recours aux principes de la philosophic stoicienne , comme etant plus applicable a la conduite de la vie. Les meilleures lois ro- maines y prirent naissance, et la jurisprudence a toujours eu pour base la grande distinction du bien et du mal moral , parce qu'en etablissant ses regies , on nedoitfaire attention qu'a la justice, et non i I'importance du cas.

« Chez les modernes meme, cette secte fut respectee

(i) Discours d'Epictfete conserve par Arrien. (L. II , ch. V). Nous n'avons pas le teste anglais sous les yeux , et nous ne savons pas comment Ferguson a entendu la phrase d'Epictfete qu'il rapporte ; mais la traduction de la Bibliotheqae Britannique nous semble meilleure. La voici : « Les Stoiciens comparaient la vie humaine i une table de jeu : le merite et I'amusement du joueur consistent i user avec habilet6 et avec attention des chances qui lui viennent, et ils ne dependent nullement de la force de son enjeu.

296 SCIENCES MOIULES

par ceux qui en out connu le veritable esprit, tcls que laid Schaftesbury , Montesquieu, Harris, Hutchinson et beau- coup d'autres ; et cerles, I'une des premieres Iccons a donner a la jeunesse, et meine a ceux qui ont depassel'iigo. oiiron peulapprendre, c'est de leur interdire I'admiration ou lemeprispour des choses qu'ils nc connaissentpas. »

Nous ne pretendons nullement prendre la defense de la philosophic stoicienne, qui a ete attaquee avec beaucoup de force dans les tems modernes ; mais certes , il est lou- joars glorieux de se tromper avec des homines tels que Zenon, Calon, Epictt;te, Marc-Aurele et Antonin.

Alphonse Taillandier.

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HisToiRE G^NiRALE DB France , depuis Ic rdgne de Charles FlI jusqu'ii la paix ginirale, en 181 5 , par M. DuFAu ; orn6e de plus de deux cents portraits. Regnes d' Henri 111 ct d' Henri IF {\).

II serait i desirer que Ton pOt toujours etudier I'histoire dans des sources aussi pures que cellos oii M. Dufau a puise les grands developpemens qu'il vient de nous donner sur les regnes d'Henri III et d'Henri IV. Get ecrivain a porte la critique la plus seT^re et la plus eclairee dans le recit des guerres civiles, dont la religion a constamment ete la cause ou le pretexte, et qui ont dechire la France, depuis le regne de Francois I" jusqu'a I'edit de Nantes et k la paix de Vervins. Les fait? qu'il rapporte sont toujours Trais , les clrconstances qui les accompagnent toujours exactes; ses obtieryations sont profondes; ses reflexions , jusles; ses jugemens, sOrs. II ne cesse jamais d'etre I'or-

(0 Paris, 1821. 4 vol. in-12, Desray, libraire, rue HautefeuilJc, n" 4.

ET POLITIQUES, 297

gane d'une religion pure , de donncr les lefons d'unc phi- losophic douce, et il n'admet d'autre politique que celle qui est toujours en harmonic avec les intcrCts du peuplc et des rois. II n'est jamais au-dessous du sujet qu'il traite, et il n'attache pas moins par la force de la pensee que par la chaleur de I'expression.

Le regne d'Henri III n'offre qu'une suite obscure de desordres, de crimes, d'assassinats ; et la plume se refuse a mettre en lumiere de si tristes atrocitcs. Lorsque le second fils de Catherine de Medicis monta sur le trune sanglant de Charles IX, il n'eut ni I'habilete convenable pour reunlr les factions, ni I'energie necessaire pour les enchainer ou les aneantir. II ne sut que flechir sous la vo- lonte ferme et impetueuse du prince lorrain, qui deviut d'autaut plus audacieux que le monarque fut de jour en jour plus faible, jusqu'a la catastrophe qui termina succes- sivement la vie de tous les deux.

Livre a ses courtisans, enerve par la debauche , quel- quefois couvert du sac de la penitence et fatiguant les autels d'un hypocrite repentir, Henri ne sut jamais sou- tenir de sa puissance un parti qui ne combattait pas seule- ment pour la foi, mais pour le trone, pour I'heredite de la couronne menacee par une famille ambitieuse , que secon- dait un peuple fanatique. Mettant toujours une Tolont4 impuissante qui multiplie les difficultes a la place de la veritable energie qui les surmonte , le successeur de Charles IX fut digne de son modele, et prouva que la tyran- nic accompagne presque toujours la faiblesse sur le trone.

Les profusions du roi exigeaient sans cesse de nouveaux edits, qui excitaient le peuple a la revolte. II tentait d'ap- paiser les murmures, tantot en s'entourant d'un cortege menapant , tantot en cherchant u obtenir une popularite qui n'est sOre que pour les bons princes. Aussi le manifeste

598 SCIENCES MORALES

delaliguc ii'eut pas plus tOtparu,quetousceuxquijusque-la avaicnteteindcL'is, d»isertercntla cause d'un trone, que Ton rcgardait dcja comme renverse. En vain, Henri sc flattait dc maintenir son autorite entre les deux partis qui dechi- raient son rojaume; en vain, il nourrissait I'espoir de les detruirel'un parl'autre. «C'est en suivantcette marche, dit M. Dufau, qu'un gouvernement faible se perd; chaque faction gagne alors de jour en jour des forces aux depens du pouvoir qui s'ecroule bientut, pour ne laisscr apres lui que ranarcliic. »

La fermentation fut bientot a son comble; rien n'arreta plus le due dc Guise ; il osa attaquer Henri jusque dans les murs de Paris. La journee des barricades en chassa le faible nionarque , qui se refugia u Charlres. La, le roi conclut enfin un traite avec la liguc ; mais cc n'etait qu'un simu- laci'c de paix. La niort des chefs de cette grande conspiration etait arretce ; Henri n'osa leur donner des juges , il leur envoya des assassins. Ce fut aux etats de Blois que les sa- tellites du tyran massacrerent le due de Guise et le car- dinal. La froide atrocite avec laquelle ce dernier crime fut commis dispose , dit I'auteur de cette histoire , a rcgarder comme un juste retour de I'equite divine I'atlentat qui frappa le roi lui-meme, un an apres. Catherine de Medicis ne survecut pas long-tems aux deux chefs de la ligue : « en descendant dans la tonibe , ajoute M. Dufau , elle dut prevoir que le nom de Valois s'eteindrait couvert d'un op- probre qui devait en grande partie retomber sur elle. »

Cependant une revolte generale eclata dans toutes les provinces; une vaste ar^ne de combats, de spoliations e de crimes s'ouvrit dans toute la France. Les magistrals furent chasses, les pretres egorges, les temples detruits, le commerce aneanti, toutes les lois violees; et Ton ne vit partout que les horreurs de riutolerancereligieusc etpoli-

ET POLITIQLIES. 299

iique, jusquau fatal moment oOi le ianatisme eiifonpa le routeau sacre tie la religion dans le sein do I'infortune monarque , par les mains foicenees de I'infame Jacques Clement. On a besoin de se reposer de tant de crimes et de tant d'atrocites, et Ton eprouve quelque soulageraent en apprenant que le rormourant a norame Henri de Bourbon pour son successeur.

Sous le regne desastreux d'Henri III , les differens corps de I'etat subirent quelques modifications. La pairie dechut de sa premiere splendeur; la noblesse, forte de son in- fluence , fit revivre tous les abus du regime feodal. Le parlement de Paris acquit au milieu des troubles civils un pouvoir dont il n'avait jamais ose s'emparer; la justice devint un veritable trafic et se vendit avec une scandaleuse efifronterie ; les finances furent livrees i I'aviditc des trai- tans que I'ltalie avail vomis sur le sol de la France; les moeurs nationales furent portees au dernier degre de cor- ruption; les Italiens, vils instrumens d'une foule de com- plots et de crimes, introduisirent la magie en France, et cette nouveaute devint une folic generale , contre laquelle devaient bientot se dresser les echafauds et les bOchers de I'inquisition. Chaque page des annales de ces terns mal- heureux offre des traits qui font fremir.

Les desastres publics, qui precipitaient chaque jour tant de victimes dans la tombe , n'empecherent pas Henri de songer au faste du trone. II institua I'ordre du St.-Esprit, crea la charge de grand-maitre des ceremonies, nomma vingt-quatre gentilshommes ordinaires de sa chambre et plusieurs autres officiers, et, au milieu de toutes ces crea- tions de I'orgueil, fonda I'ordre plus utile des frores de la charite.

Les changemens pour le costume furent plus remar- quables. La toque italienne remplaf a le chapeau de Fran-

300 SCIENCliS MORALES

pois I"; oil laissa croitrc sa baibe; les fcinmes se scrvaicnt tic paniers ct portaicnt encore le masque en viHe. Cost sous Ilcnri III, qu'on introduisit a la cour I'usage du fau- teuil pour le roi et des plians pour sa suite. On croit que les premiers cventails parurent a cettc epoque.

Sous cc regnc, Gregoire XIII rendit celcbrcs, par la rc- forme du calendrier, son nom et son pontifical; mais son dt'lirc fanatique, son caracti;re faible ct pusillanime n'ont point ecbappc i; la severile de I'histoire. La protection eclairec que Franpois I" avail accordee aux letlres se soulint au sein des discordes civiles. Ronsard fit de mauvais vers et ne fut pas meme egale par ses imitateurs ; Jodelle crca la tragedic et la comedie; Garnier commenca i regulariser la scene, et les comediens italiens se fixerent a celle epoque dans le royaume. Henri III aima les savans et les gens de lettres ; il accorda ses faveurs aux plus distingues d'entre eux. Plusieurs ouvrages reraarquables furent publics sous sonregne; les Essais de Montaigne T^arurent, el ce premier monument du genie fut I'heureux presage de la gloire lit- teraire de la France.

Nous n'avons eu a retracer jusqu'ici que des fautes ou des crimes; un grand homme parait enfin sur la scene du monde pour consoler la terre , pour fermer cette longue carri^re de calamites. «La France, en prole i tous les fleaux de la guerre civile, dit M. Dufau, jouit enfin d'une pais dont les souvenirs s'etaient presque effaces au milieu des troubles. La bravoure , la bonte et le genie se trouvent , par un rare et precieux bienfail de la providence , reunis dans le meme homme ; les dissentions religieuses sont eteinles , et les etrangersbannis de ce sol qu'ils cnsanglan- tent depuis trente ans. La France riche,heureuse et forte est replacee au premier rang cntre les puissances de I'Eu- rope, et I'Espagne descend de celui o\i ravaient fait monler

ET POLITIQUES. 501

Ic genie Je Charles-Quint, I'or de Philippe H et Ics fautcs (Ics Valois. Tel est le tableau que presente le beau regne (I'Hcnri IV; il se compose dc deux parties distinctes, qui sont Tunc et I'autre du plus haut inleret. La premiere nous qui offrirace prince arrachant, pourainsi dire, piece i pi^ce a la liguc et aux elrangers son malheureux royaume; nous suivrons dans la seconde ses travaux, ses soins et ses efforts pour faire disparaitre jusqu'aux traces des malheurs publics. Le regne d'un prince, dont tous les instans furent devoues a son pays et dont presque toutes les actions sont des titres de gloire pour la nation qui I'a produit, ne demande que des couleurs simples et naturelles et repousse tout faste d'expression. Ici, c'est I'homme qu'on veut voir el non I'art de I'ecrivain ; il s'agit de faire comprendre une grande ame , et tout I'art ne consiste presque qu'a la comprendre soi-meme. »

On nepeut s'exprimeravecplus de noblesse. L'hommage que M. Dufau rend ici au meilleur des monarques est d'autaot plus pur et plus touchant, qu'il est dans tous les coeurs , que le prince qui en est I'objet vivra eternellement dans la raemoire des Francais, et que I'Europe entiere ne cessera de I'offrir pour modele aux rois qui voudront faire le bonheur de leurs peuples.

Les montagnes du Beam avaient vu Henri de Bourbon croitre et se fortifier i la cour de Jeanne d'Albret; forme dans I'art de la guerre par le vertueux et habile Coligni, le jeune prince lui ayait succede apr^5 le massacre de la Saint- Barthelemi ; il avait venge les calvinistes dans les plaines de Coutras. La France ne retentissait pas moins de la re- nommee de ses vertus que du bruit de ses exploits. II s'e- lait enfin reuni i Henri III pour lui ouvrir les portes d'une cit6 rebelle, lui rendre son autorite et le retahlir dans loute sa puissance, lorsque I'attentatde Jacques Clement ouvrit

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une carrierc nouvelle a son heureuse audace cl lui imposa d'autrcs devoirs en changcant sa deslinec. II nc s'agissait plus de combattrc pour conserver le sceplre dans la main des Valois, il fallait renionter sur son propre trcine et re- conquerir son royaume presque lout entier.

Ces details sont ecrits par M. Dufau avec ce talent qui caracterise un veritable historien. Ici , comme dans tout le cours de son excellent ouvrage, il ne marche qu'a la Incur du flambeau de la critique la plus eclairee. II puise t\ toutes les sources, mais il ecarte avec art les prestiges de I'erreur ou des passions ; les difficultes ne I'arretent point , mais il ne marche qu'a pas lents dans les routes semees d'ecueiis, et il porle I'examen le plus severe dans la discussion des faits, que le terns ou la mauvaise foi auraient pu alterer ou denaturer. II montre i ses lecteurs le roi aux prises avec Mayenne ; fait un parallele frappant entre le monarque francais et le chef de la ligue; peint avec force les troubles du royaume, les exces du fanatisme de la cour de Rome, qui met au rang des martyrs I'assassin de Henri III ; I'ele- vation du cardinal de Bourbon au trone, dont Ic pape sanc- tionne I'usurpation ; la desertion d'une partie des plus fideles sujets du prince legitime ; la defaite de Mayenne a Arques ; le bon Henri couvert de gloire, triomphant de ses ennemis et ramenant autour de lui des coeurs plus egares que corrompus; enfin, la fameuse batnille d'lvry, oii les ligueurs tallies en pieces sont forces de fuir et de livrer, pour ainsi dire, Paris au vainqueur.

C'est dans I'ouvrage meme qu'il faut prendre une juste idee de la situation de cette malheureuse capitale, lors- qu'elle fut reduite 4 tons les tourmens de la plus affreuse famine. Les processions de la ligue, les seditions sans cesse renaissantes , des conferences toujours inutiles , n'ap- portaient aucun remede i tant de maux- Les herbes que

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I'on Iroiivait dans les rues desertes, les animaux les plus repoussans, les ossemens liumains convertis en farine, ne faisaient que prolonger I'agonie de ses infortunes habitans. La population entiere allait perir, si le roi, plus touche de sa misfere qu'irrite de son ingralilude , n'efit sauve ce peuple de sa propre fureur en faisant distribuer des vivres dans la ville qui refusait si obslinement de lui ouvrir ses portes,

Cependant le due de Parme , a la tete d'une armee es- pagnole , arriva au secours de Paris , et forca le roi d'en lever le siege. Quelle etait alors la situation de la France? La guerre etendait ses ravages dans toutes les provinces; le roi entendait gronder et les murmures de son armee et les foudres du Vatican; les villes ne rentraient que lente- ment sous son autorite, et ses finances etaient epuisees. II fallait sa grande ame pour lutter contre tant d'obstacles. La ligue n'etait pas plus lieureuse ; le despotisme des seize avait souleve tous les esprits, la bonte de Henri avait touche tous les cceurs; le parlement ne voulait sur le trone ni de Mayenne ni de I'infanle d'Espagne , lorsque le combat d'Aumale changea la face des affaires. Le roi y fut blesse; mais il y remporta une victoii'e qu'il ne dut pas moios a son intrepidite el a son imprudente mais heureuse audace, qu'a ses habiles dispositions et a son genie. Des-lors, tous les voeux furent pour la paix; et I'ambition des puissances alliees , les vues secretes de I'Angleterre et de I'AUemagne la faisaient desirer plus vivement encore.

L'auteur expose avec autant de clarte que de precision tout ce que firent Mayenne, I'Espagne et Rome, pour re- tarder cette paix tant desirce ; et lorsque I'abjuration du roi rallie autour du trone la plus grande partie de ses en- nemis, c'est avec la meme impartialite qu'il juge les inten- tions du monarque. M. Dufau pense que ce grand acte du

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meilleur de nos rois I'ut rcfTct dc sa conviction plus encore que de son amour pour le pcuple. La fureur dcs ligueurs et la joio publique, loisqu'on apprit que Ic roi ctait rentre dans le sein de I'eglise et que I'interet et le devoir appelaient tous les Francais autour de ses etcndards, ne peuvent etre pcintes avec plus de chalcur et de scnsibilite.

L'enlree d'Henri IV dans Paris, la vive emotion dont il nc put se defendre, le pardon genereux qu'il accorda i ses ennemis, et qu'il trouva bien plus encore dans son cceur quedanssapolitique, I'ivressedetoutun peuple,laconfiance qui des le soirmemeregnait entre les bourgeois etl'armee, sontpeints parl'auteur avec les traits les plus touchans,.et toute celtepartie de I'ouvrage se lit avec un interet toujours croissant. On croit voir les factions disparaitre devant le roi, et les Francais tous egaux a ses yeux, des qu'ils riva- liseront de devouement pour sa personne etpour la patrie. Combien on regrette de voir un si touchant tableau se noircir des attentats de Barriere et de Jean Chatel, que les ennemis eternels des rois, les jesuites, armerent d'un fer parricide contre le meilleur des princes ! Apres ces tenta- tives contre la personne du monarque, les jesuites furent bannis du royaume. Get institut, qui s'eleva si rapidenient contre les gouvernemens et contre les peupIes,aYec autant d'adresse que de Constance, par ses tresors, sa puissance, ses travaux dans I'apostolat et ses talens distingues dans les sciences et dans les lettres, porta les caract^res d'une civilisation eminemment avancee, dit notre historien, et semble n'avoir ete cree que pour mettre des bornes aux hardiesses de I'investigation humaine et aux progres des lumieres.

II ne suffisait pas a Mayenne et aux fougueux partisans de la ligue que le roi fftt rentre dans le sein de I'eglise , il fallait encore qu'il fQt absous par le pontife romain ; et le

ET POLITIQUES. 305

refus que faisait constamment le saint pere servait de pre- texte i la continuation de la guerre et aux tentatives les plus criminelles. Enfin,lepape prononca rabsolution dcs censures ecclesiastiques; et, six mois apris, le due de Mayenne se soumit, et conaprit dans son traite tons ceux qui avaient porte les armes contre le roi. Ainsi finit cette grande et malheureuse epoque de notre histoire , cette longue periode de calamites publiques, oii les ministres d'un Dieu de paix violerent tous les principes de la justice et de la morale, oil les passions populaires se mirent k la place de I'ordre etabli, oii le couteau sacre de la religion fut leve pendant trente annees sur le sein des femmes, des enfans, des vieillards, et oii Ton ne connut d'autre politique que la perfidie et les supplices.

La sagesse, la bonte, la Constance et le genie d'Henri IV mirent un terme aux malheurs de la France. L'edit de Nantes reunit tous les partis ; les Francais surent qu'ils pouvaientadorer Dieud'unemaniere differente, sans cesser d'etre les fils de la meme patrie, et la paix de Vervins leuc rendit parmi les nations la preeminence dont les avait Drives la conspiration d'Amboise. C'est ici que commence le beau regne du plus grand de nos rois, et c'est le moment de faire connaitre le ministre immortel qui doit etre associe u sa gloire , comme il le fut i ses dangers et a ses travaux. Nous rendrons compte de cette seconde partie dc I'ouvrage de M. Dufau, lorsqu'elle aura paru; nous esperons qu'elle ne sera pas inferieure a la premiere, et que la France aura enfin une histoire digne du monarque qui en est le heros,

TOMF xj, 5)1)

300 SCIENCES MOKALES

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M^MOrHES HISTORIQUES , POLITIQUES ET LITTtRAIRES SUB

LE ROYAUME DE Naples , par M. le comte Grdgoire Orloff, sinateur de I'empire de liussie, ouvrage ornA de deux cartes gdographiques , publU avec des notes et additions , par M. Amaury Duval , membre de I'Institut de France (i).

Nous avons rendu compte (T. I , p, io4 et T, III , p. 292) des deux premiers volumes ou de la premiere partie de cet ouvrage, contenant VHhtoirecwile du royaumede Naples. Nous allons faire connaitre les trois volumes suivans, qui viennent de paraitre; ils completent I'ouvrage , et com- prennent I'histoire de I'administration et I'histoire litte- raire du meme pays.

L'histoire de I'administration devrait etre une partie integrante de I'histoire proprement dite, c'est-i-dire du recit des faits ou des evenemens, des revolutions et de leurs causes ; car elle nous apprend k mieux connaitre" le caractere des gouvernans et I'etat des gouvernes. C'est done avec raison que M. le comte Orloff a cru nous inte- resser en nous presentant un tableau de I'administration du royaume de Naples, pendant les epoques les plus re- marquables de I'histoire ancienne et moderne de ce royaume.

Apres avoir rappele ce qu'etait le gouvernement de cette partie de la peninsule , sous les Romains , sous les Goths et sous quelques empereurs d'Orient, il retrace, d'aprfes des donnees plus certaines, ce qu'il a ete sous les Lom-

(1) Paris, 1821. 5 vol. in-8°. Chasseriau , libraire, an d6pdt biblio- |;rapbique, rue Neuve-des-Petits-Chanips , n" 5.

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bards, les Norniands, \es Suabes, les Angevins, les Ara- gonais, les Espagnols et les Franpais. Mais, ee qu'il exa- mine plus soigneusetnent ericore , c'est I'administration des derniers tems, celle qu'etablirent les Bourbons, et celle que chercherent a y naturaliser les Franpais, pendant leur derni6re etcourte invasion.

Dans tout le cours de cette histoire , ce qui nous a sur- tout frappes, c'est I'esprit de philantropie qui se manifeslc a chaque page , et qui devrait caracteriser tous les histo- riens. Des le commencement de son livre , I'auteur de- plore , dans la nation dont il ecrit I'histoire , la perte de cetancien esprit d'independance , de cet amour de la pa- trie, de ces vertus qui avaient precedemment produit tant d'actions eclatantes.

Dans ces tems de depravation morale, les Barbares, plus forts et moins corrompus que les Romains, parvin- rent, presque sans peine , k leur ravir toutes leurs con- quetes. Ici I'auteur, toujours attentif aux progres de la civilisation, semble se feliciter qu'apres avoir emprunte aux Romains les restes de culture que tant de vicissitudes n'avaient pas encore detruits, les Barbares, a leur tour, leur aient communique une partie de leur energie. II signale les institutions et les habitudes nouvelles que I'es- prit etranger d'independance introduisitchezles Italiens, et il s'arrete particulierement sur cette diete nationale des Lombards, ou reunion de la nation armee, qui seulejouis- sait de I'autorite supreme et du pouvoir legislatif. Mais il a soin de remarquer aussi que les veritables vertus sociales etaient ignorees de ces peuplesqui, n'appreciant que I'in- dependance ot la guerre, ne connaissaient d'autre droit que celui de la force. Les Italiens indigenes, exclus de I'honneurde pouvoir porter les amies et d'obtenir des em-

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plois dans le gouvernement , n'etaicnt qiic Iribulaires, cn- Jons, ou tout au plus centeniers.

L'ignorance des veritables droits des hommes et des na- tions donna naissance c\ une multitude de droits pretendus, ou plutot de privileges crees en faveur de quclques hommes contre tous les autres, et dont la reunion forme ce que Ton nomme encore droit feodal et droit canon. Ainsi fu- rentconsacres deux genres d'usurpation, I'un parl'epee, I'autre par la croix , et I'esclavage civil et spirituel fut reduit en systeme. Au milieu de cette degradation gene- rale, Roger, un de ces heros aventuriers qui finirent par subjuguer des peuples qu'ils avaient d'abord defendus , fonda la monarchic des Deux-Siciles, et, A I'exemple des rois lombards, donna ses lois dans des assemblees natio- nales, composees de barons, d'eveques et d'abbes, usage observe dans la suite par les Normands, les Suabes et leurssuccesseurs.

Le tableau que trace I'auteur, du regne de I'empereur Frederic, fait ressortir toute I'atrocite de lacourde Rome , qui ne cessa de persecuter ce grand et digne souverain , ce prince vraiment philosophe. Son crime ctait d'avoir essaye d'abaisser la puissance de I'eglise et I'aristocratie feodale ; d'avoir procure la liberte civile a un grand nombre de cites qu'il declara domaniales ; d'avoir appele enfin aux assemblees nationales les deputes des communes. Frederic etait convaincu que, pourque les lois soient justeset utiles, elles doivent ?tre I'expression du voeu general. Aussi, fai- sant entrevoir i ses peuples I'aurore de la liberte, il s'etu- diait ^ ranimer en eux les talens, les vertus qui peuvent rendre les nations grandesetpuissantes, et que la tyrannic feodale avail jusqu'alors etouffees. Mais que pouvaient produire ses genereux efforts, puis-

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qii'il devait avoir pour successeurs des rois imbus de prin- cipes tout differens? Les rois angevins et aragonais , qui vinrent successivement occuper son Irone , loin de le prendre pour raodele, tacherentde detruire toutes ses ins- titutions. L'auteur ne se hiisse pas eblouir par les eloges qu'ont prodigues a Alphonse d'Aragon , surnorame le magnanime J les gens de lettres qu'il protegeait, et les gens d'eglise aux controverses et aux disputes desquels il prenait trop de part. A mesure qu'il avance dans I'histoire de ce malheureux pays , le comte Orloff ne peut etouffer un sentiment de douleur el d'indignation , en voyant ces belles contrees toujours gouvernees , ou plutot oppriinee's par des etrangers , et condamnees a etre le theStre des plus desastreuses revolutions. On peut deja compter les Romains , les Grecs , les Lombards , les Bulgares , les Normands, les Allemands, les Provencaux, les Aragonais, les Albanais, les Sarrasins! Apres ces continuelles vicissi- tudes, comment ces peuples, habitues a un aussi long joug, n'auraient-ils pas perdu tout sentiment d'indepen- dance et de vie politique? On ne doit pas s'etonner nou plus de ne trouver, dans le royaume de Naples , pour code civil , qu'un amas de lois contradictoires , source d'inter- minables proces. Dela, cette foule innombrable d'avocats, qui , profitant du vice des lois , jouissaient seuls de quelque aisance, quand le reste de la nation vivait dans I'ignorance et la misere , et n'avait nulle notion du juste et de I'hon- nete ; mais il ne faut imputer cette demoralisation com- plete d'un peuple qu'aux princes qui le gouvernaient.

Enfin, nous arrivons au regne de Charles III de Bour- bon, et I'auteur s'arrete avec interet sur cette memorable epoque. II decrit plus en detail I'administration politique, militaire et ccclesiastique , qu'etablit le savant et sage ministre Tanucci. Ce qui doit paraitre bien singulier, c'est

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»]ue , nialgre les heureuscs reformes et les efforts ile ce mi- nistre et de quelques autres , le nombre des juges , des avo- cats, des procureurs, des notaires et des employes subal- ternes de la justice, s'elevait encore, selon I'auteur, jus- qu'i u6,ooo, et le nombre des ccclesiastiques a environ 100,000; et poiirtantia population de tout leroyaume etait au plus de A,8oo,ooo amcs. Par la, on pent juger de ce qu'il restait encore i entreprendre pour la prosperite pu- blique, malgre tout ce qu'on avait fait d'utile.

Le tableau du gouvernement des Bourbons est suivi du tableau du gouvernement des Franpais , sous Joseph Bona- parte et sous Joachim Murat. C'est ici que I'auteur, avec non moins de franchise que d'impartialite, comparant I'un el I'autre systeme , fait sentir I'avantage de celui des Fran- pais, qu'il juge plus conforme aux lumiercs du siecle, et plus adapte aux besoins de la nation. Mais il n'oublie pas en mfime terns de signaler les abus qui se glisserent dans I'execution des plans adoptespar les nouveaux monarques, et il remarque avec raison que I'esprit militaire , repandu par Napoleon dans tous les etats qui dependaient plus ou moins desa volonte, arretait oualterait les effets salutaires des institutions politiques.

M. le comte Orloff tache d'apprecier avec la meme jus- tice les effets de la restauration , qui pouvait et devait cor- liger les imperfections de I'administration precedente. II indique les causes qui ont sensiblement augmente la mi- sere publique et la masse des impots. La seule inspection du budjet de I'etat, i deux epoques tres-rapprochees, prouve que, sile royaume de Naples eut a s'applaudir d'avoirre- couvre son ancien souverain, il lui fallut acheter ce bonheur par de nouveaux sacriBces. En effet, on voit, dans I'an- nee i8x5, que Joachim Murat no prelevait sur le peuple que i6yooo,ooo dc ducats, et Ic roi Ferdinand a preleve',

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dans I'annee suivante , 18, iA3,65o ducats, etde plus, une contribution extraordinaire du sixi^me de I'impdt foncier, c'est-i-dire 1,162,275 ducats. Le budget de 1817 porttf les revenus necessaires k 20,062,000 ducats : dans le meme budget, I'etat desdepensesde chacun des ministeres forme un total de 28,609,231 ducats. Nous avons dQ porter I'at- tention des lecteurs sur ces calculs , que nous tirons de I'ouvrage de M. le comte Orloff; car on sait que le veri- table etat economique des nations est un sOr indice de leur prosperite plus ou moins grande , et que c'est le meilleur moyen de juger si elles ont de justes motifs de meconten- temens et de plaintes.

Les derniers evenemens arrives dans le royaume de Na- ples ont fait sentir k I'auteur la necessite d'ajouter un Sup- plement i ses memoires historiques. II a tache de choisir, dans le grand nombre de recits souvent dictes par I'exage- ration, tant d'un parti que de I'autre, les fails authenti- ques et confirmes par des actes notoires, que toutecrivain, ami de la verite, doit s'empresser de recueillir. II resulte de la lecture de ce Supplement, que dans le commencement on a trop exalte peut-etre des hommes et des evene- mens, qu'on cherche trop k deprimer aujourd'hui. Nous nous rangeons k I'avis de I'auteur : pour bien apprecier les evenemens de la derniere revolution, ilfaut attendre qu'ils aient, pour ainsi dire, subi une epuration dans le creuset du tems. La posterite impartiale jugera mieux que nous, et le peuple qui avoulu changer ses lois, et les princes qui I'ont replace sous le joug.

II est tems de nous dedommagerde ces tristes souvenirs, en passant a des objets moins importans, sansdoute, mais plus agreables. La troisieme partie des Memoires de M. le comte Orloff comprend VHistoire litt^raire du royaume de Naples. II la commence, a cette epoque reculee 011 la Grande-

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Grece jelait tant d'eclat dans les sciences et dans Jcs arls, et il s'arrete surtout i\ I'ecole de Pylhagorc. Suivant Cice- ron, Timee avait nie I'existence de ce philosophe. Un tel paradoxe, dit notre auteur , a ete renouvele chez les mo- dernes par Bentley ; maisVico, avant ou en ineme terns que Benlley, et sans rien savoir de I'opinion de celui-ci, avait soutenu une hypothfese encore plus singuliere : il donnait une existence plus ancienne et meme plus reelle k I'ecole despythagoriciensqu'i son fondateur. Le nom de Pythagore designait, selon lui, le titre ou le caracttre des chefs de cette ecole, plutOt qu'un individu auquel on attribue des opinions et des vicissitudes qui ne peuvent gutire appar- lenir qu'a plusieurs hommes et a plusieurs ages.

Quoi qu'il en soit, c'est de cette association mysterieuse que tire son origine la secte italique , qui, pendant deux sitcles, fut si utile aux peuples, et qui fut si long-tems persecuteepar la tyrannic. L'auteur parle ensuite de I'ecole heleatique, fondee par Xenophon, etqui se distinguait par les vertus civiques de ses disciples. Parmenide, Zenon , Leucippe , dont Ic systeme fut developpe par Democrite et Epicure, etaient tons d'Elia ou Velia. Zenon eut a suppor- ter les tourmens les plus horribles , pour avoir ose retablir la liberte de sa patrie , opprimee par le tyran Nearque. Si I'on en croit Platon lui-meme, ce fut dans ces deux ecoles qu'il recut d'Architas , de Timee et de Parmenide la plu- part des doctrines qu'il porta dans la Grece. On assure que les Calabrois s'enorgueillissent encore aujourd'hui de ce que leur pays a ete leberceau des pythagoriciens, etde cc que plusieurs d'entre eux n'ont jamais cesse de les imiter.

En passant de la litterature grecque i la litterature des Remains, l'auteur nous fait remarquer que les premiers ecrivains qui repandirent a Home la langue et les connais- sances des Grecs, etaient tou? nes dans les provinces qui

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composent maiatenaiu le royaume de Naples. Tcls furent Livius Andronicus, Naevius, Pacuvius, Quintus Ennius, Luciliiis, Salluste, Vitruve, Horace, Ovide, Ciceron, etc.

II est penible de quitter ces epoques classiques pour ar- river ii celles du moyenSge, de cet age que couvrent les epaisses lenebres de rignoranceetde la superstition. Apres la translation du siege de I'empire a Bysance, les sciences et les arts vont declinant sans cesse, sous les Goths, les Lombards, les Sarrasins, les Normands. Dans le cours de plusieurs siecles, on ne rencontre guere, au tenisdeTheo- doric et d'Athalaric, que Cassiodore de Squillace, en Ca- labre , i\ qui nous devons divers ouvrages et la conservation de plusieurs anciens manuscrits. Depuis Cassiodore, les lettres, ou les etudes qu'on appelait alors de ce nom, se refugierent dans les couvens, qui recueillirent aussi les monumens les plus precieux de I'antiquite. C'est dans le couvent du Mont-Cassin qu'on trouve Paul diacre, auteur deVHistoire des Lombards ; Erchembert, qui ecrivit les Faits des princes de Benevenf, Constantin de Carthage, Pierre diacre, et autres historiens ou chroniqueurs.

Paries soins de ce Constantin de Carthage j que nous venons de citer, et de quelques autres professeurs de me- decine, fleurit I'ecole de Salerne , qui jouissait , au onzitme siecle, du plus grand credit , et a laquelle on doit cet ou- vrage celebre qui porte le titre de Medicina Salernitana j ou de Flos medicines. Dans le siecle suivant, la decouverte des Pandectes, enlevees aux Amalphitains par les Pisans, et ensuite aux Pisans par les Florentins, optre en Italic une revolution dans I'etude des lois. Ainsi, puisquela re- naissance des lettres, et surtout celle de I'histoire , de la medecine et de la jurisprudence datent de cette epoque , on ne peut contester au royaume de Naples la gloirc d'cn avoir prepare le berceau et d'avoir recucilli , pour ainsi

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dire, le premier souffle de vie qui devaitrauimer les sciences et les arts dans le reste de I'Europe. « Ce pays, dit I'au- teur, semblait etre destine i faire renaitre et brlller pour la seconde fois les lumieres; et c'est ainsi qu'il payait. par des bienfaits, tous les maux qu'il avail recus des pcu- ples du Nord (i). » II serait a desirer que les Napolitains vengeassent, par des bienfaits semblables , les humilia- tions qu'on ne cesse de leur faire essuyer.

Ce fut a I'epoque de Frederic que les sciences et les lettres furcnt veritablement protegees dans le royaume de Naples. II y fonda I'universite ; il donna un nouveau lustre A I'ecole de Salerne ; il en ouvrit plusieurs autres sur di- vers points du royaume; il appela de toutes parts et entre- tint genereusement les plus celebres professeurs. II etait philosophe et litterateur lui-meme, et il avait compose divers ecrits d'histoire naturelle. II eut pour cooperateur , dans ses travaux litteraires et politiques, I'homme le plus savant de son terns , Pietro delle Vigne , dont I'infortune etla mort ont inspire au Dante un de ses meilleurs episodes. Les Constitutions de Frederic , qu'il compila , et les Lettres qu'il ecrivit au nom de ce souyerain , sont les monumens les plus precieux du treizieme si^cle.

Tant de merite dans ces deux hommes superieurs devait naturellement armer contre eux les suppots de la supersti- tion. On attribua t\ I'un ou a I'autre le Livre fameux intitule : De tribits impostoribus, qui, sansdoute, n'existait pas en- core, et que bien plus tard on a attribue A d'autres ecri- vains qui n'en etaient pas non plus les auteurs. M. le comte Orloff indique , a cette occasion , un ouvrage portant lemfimetitre, qu'on croit a voir ete public a Vienne, en i753, sous la date de iSgS, pour accreditor, je pense, I'impu-

(i) T. IV, pag. io3.

ET POLITIQllES. 315

tation qu'on a faile de cet ouvrage au P. Canipanella. On sail que celui-ci, qui, par une singularite assez reinar- quable, etait dominicain et philosophe, fut poursuivi, au commencement du dix - septieme siecle, comme incredule et comme conspirateur. II fut accuse d'avoir ecrit ce Livre, qui, i ce qu'on disait, circulait en secret parmi les savans, ses contemporains. Mais Campanella se defendit de cette calomnie , en prouvant que I'ouvrage dent il etait question existait dejitrente ansavant sa nais- sance, c'est-a-dire en i538, date qui pourrait donner quelque consistanee a I'opinion qui avail attribue cette production a Pierre Aretin.

Les lettres firent encore des progres au quatorzieme siecle, surtout sous Robert d'Anjou, surnomme le Salo- mon de ce terns. Ce fut alors que Barlaam et Leontius , son disciple, tons deuxcalabrois, repandirentles premiers la litterature grecque en Italic, a pen pres un siecle avant que les Grecs emigres y cherchassent un refuge. Leontius fut surtout connu et estime de Petrarque et de Boccace. Cette periode de I'histoire litteraire du royaume de Naples s'etend jusqu'a la fin du quinzieme siecle, epoqueoiifleurit cette academic, fondee par le Panormita et par le Pontano, etque rendirentcelebre Sannazaro,GaIateo, et entre autres ce Leto, qui alia a Rome en fonder une autre encore plus fameuse par les membres qui la composaient , et par les malheurs qu'ils eprouverent.

Arretons-nous un instant sur Girolamo Tagliavia qui, atj dire de noire auteur , disputa ii Copernic le merite d'a- voir relabli le systeme de Philolaus sur le mouvement de la terre autour du soleil (i). Nous devons d'autant moins le passer sous silence que Tiraboschi et Ginguene semblent

(i) T. IV, pag. i8i.

81<» SCIENCES MORALES

Tavoir oublie. Cclui-ci sc borne a dire, d'aprcs I'historio- graphe italien , que Dominique-Marie Novara donna au monde le grand Copernic, son eleve, qui peul-etre avait appris de son maitre le systeme qu'il developpa dans la suite (i). Mais ce systeme etait celui de Tagliavia, qui florissait vers la fin du xv' sitjcle, et par consequent avant Copernic. Tommaso Cornelio nous assure que de son terns le bruit courait que Tagliavia, calabrois, avait beaucoup medite et ecrit sur le systtjoie de I'univers , et que scs ma- nuscrits etaient tombes entre les mains de Copernic, pen- dant qu'il professait a Rome (2). Si cette tradition est con- forme a la verite , le systeme du mouvement de la terre aurait ele ressuscite dans cette meme Calabre, oii Pythagore I'avait jadis enseigne. On sail cependant que le cardinal de Cusa, mort en 1A6A, avait deji essaye de mettre en vogue la meme hypothese , qui fut depuis renouvelee par Celio Calcagnini, peut-etre encore avant que Copernic eflt public sa doctrine et ses ecrits. Ce qu'il serait fort curieux d'exa- miner ici, ce serait pourquoi Galilee a ete persecute au xvii* siecle avec tant de fureur, pour avoir presque demonlre le meme systeme, tandis que, plus d'un siecle auparavant, on avait respecte et meme favorise plusieurs autres savans qui avaient professe lu mCme opinion.

Nous voici arrives au xvi" siecle , que Ton regarde comme I'age d'or de la litterature italienne , a ce siecle dans lequel les productions de I'esprit sont si abondantes et les ecrivains en si grand nombre , qu'il est difficile de citer tous ceux meme qui se sont distingues par la superio- rlte de leur genie.

Tiraboschi sentit le premier la necessite de considerer la

(i) Histoire lUlirairc de riCalie,T. Ill , pag. 587. (2) Voy. scs Prohlemes phj'siques J etc.

ET rOLITIQUES. 317

lilterature italienne dans ses genres principaux et de les classer de la maniere la plus convenable. Ginguene a suivi i peu pres la meme methode; et cependant, quoi- qu'il ait donne a son plan plus de subdivisions et de details, il n'est pas encore parvenu a les arranger dans I'ordre le plus satisfaisant. Mais , d'apr^s de tels essais et d'autres que Ton a faits jiisqu'i present, quelle serait la classifi- cation que devrait adopter I'auteur d'une histoire litteraire pour atteindre son but? Nous pensons qu'il faudrait com- biner I'ordre encyclopedique avec I'ordre chronologique, de sorte que les genres qui se succedent les uns aux autres se trouvassent lies entre eux par une chaine qui permit d'en suivre tous les developpemens progressifs. Je ne fais qu'indiquer ma pensee , ce n'est pas ici le lieu de la developper.

II me semble que M. le C. Orloff s'est approche de celte methode plus que ses devanciers; il range les divers genres des sciences et de la litterature dans un ordre tel que Ton peut facilement les suivre dans leur marche pro- gressive. Tous sont compris dans deux classes principales, \?i philosophie et la philologie. Dans la premiere, il place la jurisprudence, la theologie, la philosophic scolastique, les mathematiques, la physique generale, I'histoire naturelle, la medecine; et, dans la seconde , la grammaire, les anti- quites, I'erudition, I'histoire particuliere, generale et lit- teraire, la rhetorique, I'eloquence et la poesie. L'auteur assigneen meme tems auxecrivains la place qui lui parait la plus convenable, en raison de leurs ouvrages et de leur caractere. Ainsi plusieurs auteurs, qu'on avait regardes comme des theologiens, sont presentes par lui comme des philosophes, parce qu'il a cru plus juste de les ranger dans cette categoric.

Tel est a peu pres le plan general et particulier de This-

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loire lilloraire de M. Ic C. OrloiT. II la purtageen pliisieurf periodes, et dans chacune il commence par des observa- tions preliminaires sur I'etat de I'instruction piiblique. C'est li que I'auteur decrit I'influence que le gouvtrnement a exercee sur les lettres et la philosophic, sou vent obligees de lulter contre le despotisme et la superstition, etqui plus souvent encore gemissent sous leur double inquisition. On est etonne que la philosophic ait pu faire lant de progres, au milieu des persecutions dont elle etait I'objet et des bOchers dont ses apotres etaient toujours menaces.

L'auteur divise le xviii' siecle en trois epoques assez distinctes. La premiere s'etend jusqu'a I'annee i'/3'2, oi\ I'etat de Naples, cessant d'etre une province, prit, sous Charles III de Bourbon, I'attitude d'une monarchic inde- pendante; la seconde, jusqu'i I'avenement de Ferdinand, son fds; la troisieme , commencant avec ce prince, finil avec le siecle. C'est dans cette troisieme epoque que la lit- tefature et surtout la philosophic prennent chez les Napo- litains un nouvel essor; elles auraient fait de plus grands progres, si, vers la fin du siecle, la persecution la plus feroce ne les eCit arretes dans leur magnanime elan. « Les muses, dit I'historien, se turent devant la hache des bour- reaux; leur temple, A I'erection duquel deux generations avaient travaille, fut renverse de fond en comble. La oi'i I'on s'etait efforce d'elever des autels, on ne vit plus que des ruines , sur lesquelles il ne fut pas m6me permis de repandre une larme (i).»

Nous nous taisons entierement sur les donieres pages des Memoires de M. le C. Orloff; il les consacre aux hommes de lettres vivans qu'il a eonnus pendant son se- jour i Naples. Comme ils n'onl pas termine leur carriire litteraire, nous devons laisser a la posterite le soin de

(i) T. V, pag. 73.

KT POLITIQUES. 319

porter sur leurs ouvrages un jugement copiplet et definitif. Mais , pour mieux faire sentir rimportance des Memoires que nous venous d'analyser, et la confiance qu'ils doivent inspirer aux lecteurs, n'omettons pas d'observer que leur auteur n'a neglige aucun moyen pour se procurer les ren- seignemens les plus sOrs. Bien different de ces etrangers suffisans ou prevenus, qui semblent ne voyager que pour meconnaitre ou calomnier les nations qu'ils visitent, il a consulte les meilleurs ouvrages et les savans les plus dis- tingues. Ce n'est qu'apres qu'il s'est vu en etat de bien apprecier le pays dont il avait entrepris d'ecrire I'histoire , apres avoir puise les fails dans les sources les plus sQres, qu'il y a joint ses reuiarques et ses reflexions; et nous pou- vons assurer que', si ces Memoires nesont pas, couime le dit I'auteur lui-meme trop modestement , une histoire complete de Naples, du moins ils serontd'un grand secours pour les bistoriens futurs de ce pays. Quant au caractere personnel de I'auteur, pourrais-je le faire mieux connaitre qu'en repetant ici les derniferes lignes de son ouvrage ? « Naples , pendant plusieurs annees , a ete pour moi un sejour de paix et de bonheur. J'ai vu une foule de magis- trats eclaires, de nobles sans orgueil, de savans modestes, d'hommes de lettres sans pretention et sans jalousie. Tous se sont empresses a I'envi de me communiquer leurs obser- vations, de m'entourer de leurs lumieres; je jouis de I'a- mitie de plusieurs, de I'affection de tous. Qu'ils recoivent le tribut de ma reconnaissance, ils vivront dans mes sou- venirs. Leur patrie n'etait pas aussi bien connue qu'elle meritait de I'etre ; j'ai voulu en donner une idee plus avantageuse et plus juste. J'espere qu'ils me sauront gre du moins de I'intention (i). »

{i) T. V, pag. ij;.

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M. Amaury Duval^qui aviiit ciirichi denotes la premiere partie des Me moires de M. le C. Orloff, en a reserve de plus interessantes encore pour la troisieme. II y entrctient le lecteur de diverses questions de litterature ancienne et moderne. Dans une de ses notes (i), par exemple, il s'e- tudie i prouver qu'apres le siecle de Lucain et de Stace, le goflt des lettres en Italic ne s'eteignit point, mais que seulement le genie prit une direction nouvelle. Vers la fin du v" siecle, les lettres, suivant lui, continuaient d'etre cultivees et honorees ; les tenebres de I'ignorance et de la barbaric ne s'etendirent reellement sur I'ltalie qu'i I'epoque de I'invasion des Lombards. II observe aussi que, si I'Eu- rope ne sortit pas plus tot de la profonde nuit dans laquelle elle se trouva plongee pendant plusieurs sitcles, il ne faut en accuser que I'ambition des papes , qui concentraient toutes les lumieres dans les eglises et les couvens. lis avaient senti que, pour conserver et etendre icur domi- nation, il importait que les ecclesiastiques fussent les seuls hommes eclaires au milieu des nations.

Dans une autre note, ou plutot dans une autre disser- tation (i), M. A. Duval se plait a revcndiquer en faveur des Italiens I'originalite de leur litterature, originalite qui leur a ete con testae par des auteurs dont I'opinion est d'un grand poids. A en croire ces auteurs, c'est aux Provencaux que ritalie est redevable de sa litterature ; mais M. A, Duval ne se rend point aux raisons qu'ils allfeguent. II lui repugne de croire que la divine Comedie du Dante , que le Deca- meron de Boccace , etc., soient des productions, pour ainsi dire, exotiques; que leurs auteurs aient puise leurs inspi- rations dans les poesies legires et les canzones provencales, seule litterature des troubadours.

{.) T.V, p.-.g. i55. (2) Ibid., pa^. 174.

ET POLITIQUES. 321

Ailleurs ( i ), M. A. Duval jette un coup d'ceil sur les Uialectes italiens; il leur trouve, ainsi qu'auxdiulectes de la France, unc originc ct une base communes , le latin , et il s'efforce de prouver qu'ils nc different guere entre eux que par la pjononciation : on a , dans les uns , multiplie les voyelles; dans les autres, les consonnes; ici, Ton a totalement supprime les desinences latines ; la, on en a conserve une partie. En retablissant ces desinences, en supprimant les articles, etc. , on retrouve les mots latins dans leur pnrete primitive. Pour preuve de son systcme , il cite plusieurs morceaux, tant en prose qu'en vers, ecrits en dialecte na- politain, dialecte qui, selon lui , semble s'eloigner de I'o- rigine commune plus que les autres dialectes d'ltalie. Quoique je ne sois pas de son avis sur ce dernier point , je ne puis m'empecher de rcmarquer que ses recherche* philologlques ont de I'interet.

Dans ses observations sur les diverses revolutions de la litterature en Italic , M. A. Duval dit (2), en parlant de Tecole dont le poete Marini fut le chef : « Son ecole , appelee de son nom 3Iarinesca , a ete en honneur pendant tout le siecle dernier , et je n'assurerais pas qu'elle n'eut encore aujourd'hui bon nombre de partisans. » Voila cc que les Italiens auront peine a lui accorder. Pour moi, je puis re- pondre au severe critique eta tous les etrangers qui pensc- raientconime lui, que I'ecole de Marini est mainlenant si decreditec chez les Italiens, qu'ils se servenl generalement du mot marinesco pour marquer le plus grand abus que Ton puisse faire de I'esprit en litterature. D'ailleurs , les preceptes et I'exemple de Caroprese et de Gravina au dix-septieme siecle; desZanotti, deG. Gozzi, deParini, de

(») T.V, pag. 189. (3) lb. , pag. SI 8.

Tome XI. 2i

322 SCIENCES MORALES

CesaioUi , d'Alfieri, ail (.lix-hiiiticinc; dc Monli, dc Pinde- uionlo,deFoscoIo, d'Arici,otc.,do nosjours,prouvcnlassci que cetle especc dc pcslc Htlorairc a disparu a jamais du parnasse italien.

Je me crois encore oblige de ropondre a une observation dc M. A. Duval, d'autant plus que, sous quelquc rapport, clle me regarde personnellement. L'autcur, dans ses notes, s'arrete long - terns sur la vie et les ouvragcs de Sannazar, parce que, dit-il, l'autcur de VHisioii-e litteraire[Gm^\ici\t.), n'eu parlc que dans une seulc phrase. «C'est, ajoute-t-il(i) une injustice ou un oubli que j'ai dO reparer, une lacune qu'il me restait a remplir. » II observe plus bas (a) que Gin- guene n'a ricn dit aussi du Vendeinmlatore , poeme celebre de Luigi Tansillo , ct 11 prend de la occasion d'en citer plu- sieurs strophes. Mais , si M. A. Duval s'est cru oblige de rendre justice a Sannazar et a Tansillo , mes concitoyens , qu'il me soit permis de la rendre aussi a Ginguene, notre commun ami, d'autant plus qu'en ma qualite de continua- teur de son ouvrage, je pourrais meriter le meme reproche que lui.

- M. Ginguene, d'apres le plan qu'il avait adopte, devait encore consacrer a divers genres de poesie plusieurs cha- pitres que la mort I'a empeche de rediger. 11 en destinait un au genre pastoral j et c'est la qu'il aurait parle, comme il I'avait lui-meme annonce, de Muzio, de Rota , de Baldi, et sm'tout du celebre auteur AeVArcadiej Sannazar. Un autre chapitre etait reserve pour les Poemettij mot qui n'exprime pas ce qu'on entend en francais par petits poemes; et c'est alors que Ginguene aurait parle du Vendemmiatore deTan- sillo,aihsiqued'unautrepoeme,connusousIetitredeZ«/'/ra^s

(i) T. V, pag. jo5. (a) /(/. , pag. ao;.

ET POLITIQUES. 223

lie saint 7^je/7c% que Ic memo poetecomposa pour leparerle scandale occasionne parle premier. II n'auraitpas manque non plus de parler des pontes latins , ainsi qu'il I'aA'ait fait jiour Ics siecles precedens; et Sannazar, comnie auteur du poeme si renomme departu T^irginisj aurait reparu parmi les Flarainio, les Paleario, les Vida, les Fracastoro et autres, qui reclament encore la mention qui leur est due.

Ces chapitrcs et quelques autres, pour la redaction des- quels je me suis conforme au plan adopte par mon illustre devancier, ibrmeront un dixieme volume, que je me pro- pose d'ajouter aux neuf volumes de VHistoire litteraire df I- ialie deja publics; et ce n'estqu'alors qu'on pourraregarder comme vraiment complete I'histoire du seizieme siecle.

Je ne m'arreterai pas plus long -terns sur les savantes additions de M. A. Duval, dans la crainte de trop etendre cet article. Qu'il me suflise de remarquer que toutes sont importantes, et qu'il fait preuve a chaque page d'espritet d'erudition.

A ces notes , I'auteur a cru devoir joindre un ou vrage qui n'offrepasmoins d'interet. Ce sont des Tableaux de Naples et de ses environs^ que ^ jeune encore, il avait traces, comme il le dit lui-mGme, en presence des modeles. Ceux qui ont visite ces contrees celebres, aimeront a seles rap- peler avec I'auteur; et ceux qui nelcs ont point encore vues, desireront les parcourir. Ses descriptions sont d'une verite frappante. Bien qu'il me reste peu d'espace pour des cita- tions , je rapporterai du moins ici le tableau que Tautenr fait d'une eruption da Vesuve.

« Tout-a-coup, et sans que ricn ait annonco la crise, une colonne de fumee sVlance de la cime du Vesuve a une hauteur prodigieusc, oii elle forme ensuite un large nuage noir , qui ressemble a la tcte d'un haut pin : des eclairs brillans et mulliplies siilonncnt ce nuage , qui va toujours

U *

32A SCIENCES MORALES

s'agrandissant, et I'on ententl, dans Ics profondeurs dc la monlagne , de sourds mugissemens, d'effriiyantes delon- nations. Bientot, au milieu de la colonne defumee, on voit s'elancer, i des intervalles prcsque egaux , dcs flammes rougeStres , et le nuage noir qui termine la colonne pa- rait parseme d'etincelles. Ces flammes indiquent des jets de matieres fondues; ces etincelles sont autant de pierres embrasees, dont quelques-unes sont d'une enorme grosseur, C'estalorsque, pendant la nuit, on voit couler surlesflancs de lamontagne de longs torrens de feu; ils sont quelquefois en si grand nombre et sirapproches, que, vus de Naples, ils semblent ne former qu'une large nappe de feu, etendue surtoute lamontagne. Lamer, qui en repute I'image, parait aussi toute de feu; et Naples est au milieu, conime un grand vaisseau Toguant sur un fleuve de I'enfer (i). »

L'auteur termine son interessante promenade par quel- ques phrases, oii Ton trouve des sentlmens que toutvoya- geur impartial devrait partager avec lui.

« Adieu , rives cheries du Sebeto. Pour prix de la douce hospitalite que vous m'avez offerte , mon coeur reconnais- sant souhaite que la paix dont vous jouissez ne soit jamais trpublee ni par la folic exaltation des peuples, ni par I'im- placable colore des rois. Moi, je retrouverai ma patrie glo- rieuse, triomphante , mais agitee, malheureuse , ensan- glantee.... Parthenope ! et toi , tu voudras peut-etre un jour, a I'exemple des Francais, te donner de justes lois et la liberte! Oh! puisse la providence tcreserverunmeilleur sort ! »

Tels etaient, au temsod il ecrivait, lesvoeux du voyageur philantrope. Malheureurement , ils n'ont pas encore ete exauces! F. Saifi.

(i) T. V,pag. 591.

El POLlTiOLliS. 325

'W\* V\/V» VV\^ WW

BlOGRAPHIE NOUVELLE PES CONTEMPORA!NS , OU DicttOtl-

naire kistorlque et raisonni de tousles liommes qui , deptiis la revolution frangaise , ont acquis de la celebritd par leurs actions , leurs ccrits , leurs erreurs ou leurs crimes , soil en France , soit dans les pays itrangers; par MM. Arnault, Jay, Jouy, NoRviNs, etc. Orn^e de 240 portraits au burin , d'a- prfesles plus c6l6bres artistes (1).

Qui s'imaginerait que les Turcs soient le peuple qui a fouille le plus avant les mines fecondes de Ja biographic ? Si Ton en ci'oit le temoignage du celebre lord Byron , leurs memoires historiques ne remontent pas seulement, comme les notres , a la creation du monde : ils possedent une biographie des Preadamites. Un tel ouvrage a cela d'a- greable, que les erreurs ysont difficiles a verifier, et qu'on peut s'y permettrc un peu de calomnie, sans s'attirer de facheuses affaires avec les particuliers ou avec les tri- bunaux.

Mais il s'est trouve parmi nous des entrepreneurs de livres qui, bien moins avides de securite que de scandale et d'argent, ue se sent avises d'exploiter ni la vie des de- vanciers de Mathusalem , ni les anecdotes Toisines du de- luge; ce sont les honimes pivans qu'ils ont cites a leur tribunal ignorant et partial (2); c'est centre eux qu'ils ont

(1) Paris, 1821. la-S". A la librairie historique, rue Saint-Ho- nort, 123. Prix de cbaque volume in-S", 6 fr. Les T. I et II sont en vente.

(a) Voyez, sur ce libelle, dans le 1" cahier de la Revue (Jan- vier 1819 , T. I, p. 142) une note tresdetaillee , au has d'un article de M. Barbier, ayant pour titre : Exumen des dictionnaires Aisto riques modernes lesplus repandus.

S26 . SCIENCES iMOlULES

prononcc dcs arrets, iniqucs an fond, iiulcccns dans la forme, ct qui nc pouvaient flctiir que les jugcs eux- memes. Mais les jugcs no los ont pas signes ; ccs diffa- mateurs a tant la page sc couvrcnt lachcinent du voile do ranonyme , voile soulcvc quclqucfois sansqu'ils le sachent. Je connais un d'entre cux dont la basscssc s'est acharnec sur un hominc qui naguerc lui avail procure du pain.

El c'est au noni de la morale etdc la religion que s'exerce un tel brigandage litteraire ! c'est pour venger I'ancien re- gime , cette arche sainle de toutes les vertus, corame chacuu sail, que ces Messieurs foulent aux picds la jus- tice ct la decence! Pourquoi ne pas meltre mieux ieurs precedes d'accord avec Ieurs paroles ? Sied-il aux pre- tendus champions de I'autel ct du trone d'irailer les satur- nales de la revolution?

Ce qui me fait penser qu'au fond, Grecs ou Troyens leur sent iudiffercns, et qu'un sordide amour du gain dicte seul ces meprisables ecrits, c'est que j'ai vu paraitre der- nierementj sous le litre de Cours du Novel j line biogra- phic de princes et de princesses, non pas de nouvelle fa- brique, niais des plus antiques dynasties, et que, dans cette rapsodie grossiere, des notes et une preface loul-a- fait moiiaicJiiqaes forment le contrastc le plus ridicule avec les honteuses anecdotes dont I'ouvrage est rempli. Plaisanle manicre de rendre la legilimile respectable aux yeux des peuples, que de vouer aTexecration les derniers rejctonsde plusieurs branches de cet arbre auguste, ct de presenter, comme un ramas d'ivrognes et de crapuleux debauches, de messalines el d'empoisonneuses, lout un college de rois el de reines dont les cendres sonl a peine refroidies !

L'irruplion de ces biographies d'antichambrc nous ren- dait neccssaire un livre de salon et de bibliolheque, oil les

ET POLITIQUES. 327

contemporains fussent apprecies avec justice el enthou- siasme, lorsque la gloire les avoue ; avec justice et poli- tesse , lorsque le seul esprit de faction les reclame ; et tel est I'ouvrage qu'ont entrepris les homines les plus capables de le bien faire : MM. Arnault, Jay, Jouy et Norvius. Les deux volumes deja publics ont obtenu un succes general. Le merite de I'exactitude dans les faits et de la decence dans les reflexions distingue eminemment I'un et I'autre; le soin des particularites curieuses m'a paru se faire scntir encore plus dans le second que dans le premier, soit qu'un plus grand nombre de noms eclatans y ait ete appelc par I'ordre alphabctique, soit que les habiles auteurs aient voulu redoubler d'efforts pour justifier les suffrages du public. De men cote, j'ai a justifier mon eloge, et je vais le faire par quelques citations.

J'ouvre le livre a I'article d'un homme qui, par son me- rite et son elevation , par la noblesse de son caractere, par les positions delicates oii il s'est trouve, par celles oii il pent se trouver encore, fixe les regards de I'Europe, et surtoutde la France quis'honorede I'avoirvu naitre, quoi- qu'il se soit cru oblige de porter les amies contre elle. On Toit que je veuxparler du general Bernadotte, passe roi , coinme disent les soldats, mais sans cesser d'etre general. Plusieurs circonstances importantes de sa vie glorieuse et agitee sont presentees par les biographeSj d'une maniere aussi neuve qu'interessante. Voici comment ils le peigneut a la fameuse bataille de Wagram , ayant en tete le redou- table prince Charles, et, dans ses propres rangs, des ennemis caches, plus redoutables encore : r L'atlaque fut des plus vives ; les Saxons se battirent avec un courage admirable. Wagram fut pris et repris par eux. Pendant deux heures, ils arreterent les Autrichiens au milieu du village cnflainmc. Leur pertc etait considerable. Upe di-

32Ji SCIENCES MOUALES

vision francaisc, commandec par ie general Dupas, laisait partie du 9' corps. Le prince de Pontc-Corvo lui ordonna d'avancer pour soaieiiir Ics Saxons. Le general Dupas re- pondit qu'il avail ordre de garder sa position. Cetlc reponse inaltenduc, de la part d'un general qui appartenait au corps d'armee A sa disposition , le frappa de surprise et d'indignation. II s'occupa d'abord a sauver ce qui restait de Saxons; et, apres avoir acquis la certitude que le ge- neral Dupas ayait en effet recu des ordres.superieurs, con- traires aux siens, il se rendit en hate au quartier-gcneral pour informer I'Empereur de cc qui venait de se passer. II se plaignit energiquemeut de cette violation desr^gles militaires, et dit, entre autres choscs , que, si c'etait dans la vue de le faire perir, on avait des moyens moins odieux que de sacrifier avec lui tant de braves gens. Ce n'etait ni de TEmpcreur ni dc son armee qu'il seplaignait, mais de celui ou de ceux qui, par haine ou par jalousie, s'etaient portes a ce qu'il considerait comme un veritable guet- apens. L'Empereur le jugea ainsi, et chercha a le calmer, en lui disant que c'etait une de ces erreurs ou de ces me- priscs inevitables dans un si grand mouvement. Mais Bernadotle, ne voulantplus s'exposera depareilles chances, demanda et obtint son conge. Cette anecdote, poursuivent les auteurs , a ete denaturee dans plusieurs biographies : nous la tenons, telle qu'elle vient d'etre racontee, d'un temoin oculaire. »

lis citent aussi des faits curieux et positifs sur ce qui se passa entre Napoleon et le marechal Bernadotte , lorsque I'election libre et la confiance des peuples conduisi- rent cc dernier sur les marches du trone de Suede. Mais je suis force de negliger ces details pour arriver a la partie la plus delicate de I'histoire du general Bernadotte , a sa conduite cnvers la France, dans la coalition de 18 14 ; con-

ET POLITIQUES. 520

duilc qui, selon les iiiterets ou les passions, a ele diverse- rnent envisagee. « Nous allons , disent a cette occasion les biographes, rapporter des fails qu'oii ne peut conteslcr , et qui peuvcnt servir de base a I'opinion des conteuiporains, comma au jugement de I'avenir. Les relations entre la Stiede et la Fiance, apres I'election du nouveau prince royal, furent d'abord Ires-amicales. Les demandes reite- rees de Napoleon n'eprouverent aucun refus. Le prince royal alia meme jusqu'a obtenir que la Suede, contre ses intert'ts les plus manifestes , declarat la guerre a la Grandc- Bretagne. Napoleon commenca bientot a trailer Ic prince royal de Suede avec aussi peu de menagement, que les rois qu'il avail places lui-mume sur divers troncs et qu'il considerait comme ses lieutenans. Mais Bernadolte n'etait pas dans la meme position que le roiJMuratouleroi Jerome : il tenait son rang de la volonle librement exprimee de la nation suedoise, et les interels de cette nation devaient Teniporter chez lui sur les interets de Napoleon, meme sur ses propres affeclions. Les Suedois se plaignaient des corsaires franpais qui saisissaient leurs batimens; les de- cisions meme du conseil des prises n'avaient plus d'auto- rite, lorsqu'elles se trouvaientfavorablesaux Suedois. L'oc- cupation imprevue de la Pomeranie, sans que Napoleon daignat s'expliquer sur les motifs de cette agression , exalta

le mecontentement de la Suede Ces circonstances ame-

nerent I'entrevue du prince royal avec I'empereur Alexan- dre dans la ville d'Abo, en mars 1S12, et le traite qui en fut la suite. Ainsi tombe le reproche que quelques biogra- phes ont fait au prince royal, de ne s'etre declare contre Napoleon qu'apres les revers de la campagne de Russie. La correspondance entre le prince et Napoleon , qui a ele publiee en i8i3, et divers documens authentiques que nous avons sous les yeux, prouvent que ce n'etait point

r,SO SCIENCES MORALES

conlri' la Fiance, niais seulcment contie le dcspolismc do Napoleon que le prince royal de Su^de croyail avoir pris

Ics amies On assure que, pendant la desaslreuse cam-

pagne do i8i3, il engagea I'Enipereur a conclurc la pais. Co n'etait pas un motif pour I'y decider. Bernadotte au- rait-il etc troinpe par les allies, dans tous les evenemens postericurs, au passage du Rliin? On I'ignore jusqu'a pre- sent. Quoi qu'il en soit, ce prince a ete juge avee unc grande severite , et a dQ s'attendre a I'etre ainsi par les Franfais. Peut-etre a-t-on trop oublie qu'il avaitunenou- velle patrie, el qu'une nation genereuse et independante lui avail confie sa defense et le soin de son honneur. Ricn n'avait plus mecontente la Suede que la perte de la Fin- lande , que Napoleon avail abandonnee a I'empereur Alexandre], sans compensation. Peut-etre aussi le prince royal de Sucde's'etait-il trop presse de faire cause com- mune avec les nouveaux garans de sa future royaute : il le fit avec eclat, on ne peut en disconveuir. »

J'ai cite tout ce morceau , parce qu'il rectific dcs fails imporlans, et que la maniere dont il les presenle est un modele de bienseance et d'imparlialite. Cememe merite se retrouve dans tous les articles de I'ouvrage; graves et approfondis, lorsque le sujet I'exige ; legerement malicicux , quand la matiere le permet. L'impression qu'il m'a laissee , c'est que les Francais y sont juges par des patriotes ennc- mis de lout desordre , de tout execs , de quelque nature qu'il puisse etre ; les etrangers , ues en France ou ailleurs, par des hommes equitables et de bonne compagnie ; les uns et les autres, par des ecrivains aussi spirituals qu'exer-

CfcS. AlCHAS.

ET POLITIQl^ES. 3'^1

Wl*! A W\ %\ V'\\.V\AV%/\'V

Voyage dans la GniiCE , comprenanl la description ancicntic ct modcrne de I'Epirc , do i'lliyric grccque, do la Thessalie, de I'Acarnanie , de I'Etolie an- ctenne , de la Locride Hespertenne, de la Doride cl da Peloponese ; avec des Considerations surl'ar- clUologie , la nuniismatique, tcs mceurs , les arts, I'industrte ct le commerce des habitans de ces pro- vinces; par F. C. H. L. Pouqueville; ouvrage orn6 de figures et enrichi de carles geographiques dress6cs par M. Barbie du Socage , de I'InstiUit de France (i ) .

On pent dire que la Grecc antique etait de nos jours niieux connue que la Grece moderne, grace au savant Bartheleniy, qui employa plus de yingt annces de sa vie a reunir, dans son Koyage cVAnacharsis , tout cc que les anciens avaicnt ecrit de plus remarquable sur cette terro illustre et a jamais classique, sous le rapport des arts, dc la poesie, de I'eloquencej des sciences philosophiques et de la (lignite morale de I'hommc. Un grand nombre de livres out ete publies sur la Grece , depuis le seizieme siecle jusqu'a I'opoque prescnte; ct celui qui pourrait en lire ct en mediter la compilation enticre, n'aurait encore que des notions imparfaites et sou vent contradictoires sur I'etat acluel de ce meme pays, dont les souvenirs glorieuxsont prcsens u chacun de nous, des I'age de nos premieres etudes, et dans i'histoire duquel, auxperiodes ulterieures de leur vie , le legislateur, I'artistc, Thomme de lettres, le guerrier , vont chercher et retrouvent sans cesse le type de tout ce qui est juste, beau, harmonieux, heroique.

(i) Paris, 1821. Firmin-Didot , ptre et fils , libraires , rue Jacob , n" 2i, Les quatre premiers volumes ont paru.

.">;^2 Sciences morales

Uii uuviage cnfin a paru, qui scmble destine a soulenir en quelque sorte le parallele avec celui de Barlhcleniy , et a dcvcnir clajsique a son tour, considerc sous Ic rapport de I'elat modernc el de la situation sociale de la Grcce. II est aussi le fruit de longues annees dc travail, d'observa- tions ct de sejour dans cc pays. « C'est I'oeuYre de ma vie, » dit M. Pouqucville. L'autcur vcnait de publier , en i8o5y uii voyage en 31orce, qu'avec une rare modestie il qua- lifie, dans celui-ci, de tdche a peine ihauchee , quand il fut noninie consul general de France aupres d'Ali, pacha de Janina. Malgre la cruaute connue du satrape de I'Epire, malgre le souvenir d'une oaptivite recente dc trois ans , aux sept tours, M. Pouquevillepartit pour sa destination, entraine par I'amour de la science , par son zele , et sans doute aussi par cctte conscience de ses forces, qui lui pro- mettait et qui nous a valu Timporlant ouvrage que nous annoncons.

En debarquant en Epire, M. Pouqucville, comme Bias, dont ilallait visiter la patrie, emportait avec lui toutes les richesses morales qui pouvaient servir i'l elever un monu- ment durable. II avail appris le grec vulgaire, pourpouvoir se mettre en rapport direct avec les liabitans, et il etait assez helleniste pour avoir la clef du style des inscriptions; initie dans sa jeunesse aux secrets de la science medicale, la physique et I'histoire naturelle lui etaient connues; il s'etait rendu familiers les auteurs anciens; son sejour for- cementprolonge a Constantinople I'avaitinstruit des moeurs privees et des institutions poliliques du peuple ottoman; mais, par-dessus tout, il etait doue de toute la candeur ne- cessaire a I'hislorien, et de cet ardent amour du vrai, si peu coinmun au voyageur.

Ces deux^qualites ,.jointGS a la vertueuse indignation que lui inspirent le crime el la tyrannic, ont dicte i\ l'autcur sa

ET I'OLITIQUES. 333

notice biogiaphique sur Ali-Pacha. Pendant douzeannees, observant avec Constance la physionomie atroce du visir, souvent spectateur oblige de ses actes de cruaute, qu'il desapprouvait hautement, paifois airachant quelques rares \ictimes aux hecatombe? d'un dcspote, qui s'etonnait de ['ascendant de I'liomme juste, inais qui n'etaitpas moins dangereux quand il feignait de caresser que lorsqu'il me- nacait, M. Pouqueville, entoure de delateurs et d'assassins, semble de son burin vengeur avoir ajoute chaque jour, el avec I'impassibilite severe de I'histoire, quelque trait ca- racteristique a une peinture hideuse de resseinblance. Ce morceau, rejete a la findu troisieme volume, suffirait seul a la reputation d'un ecrivain; c'est la maniere de Tacite unie a celle du Dante.

L'Epire dut etre naturellement le premier objet des in- vestigations litteraires et geographiques de I'auteur. Ce pays, devaste de tout tems par le brigandage des emirs et des beys, petits tyrans ieodaux, comme il Test encore par I'administration sanglante d'Ali-Pacha, n'avait jamais ete explore en detail par les voyageurs europeens , qui pou- vaient i peine y aborder ou le traverser rapidement. II etait moins connu , suivant I'expression d'un savant ( M. Gussellin ) , que la majeure partie du nouveau monde. Plus heureux par sa position diplomatique, deja au bout de trois ans de courses et de travaux assidus, M. Pouque- ville etait parvenu a pouvoir decrire exactement la topo- graphic de cette contree. Sur les soixante-dix villes qui y furent detruites par Paul Emile, il en avait retrouve cin- quante-cinq. D'apres un syst^me fort sage , dans la clas- sification de ses decouvertes, il placait au premier rang les acropoles en architecture cyclopeenne pure, etqui, par consequent, n'ont pas ete relevees depuis une haute anti- quite ; il raugeait en seconde ligne les constructions pelas- giques, restaurees partiellementen maconnerie hellenique.

S3h SCIENCES MORALES

aiiisi que les villcs ciUieicment dc Hibrique grccquc; dcs- cendaiU dcl;\ a travors Ics siccles qui siiivirent la conquete des Roinains, il distribuait egaleinent par classes les en- ceintes a bases cyclopeennes, restaurees par les Hellenes ct snrchargecs de reparations roniaincs; Ics places uniquc- inent baties en briqiics et moellons, telles que Nicopolis sous Auguste ; les fabriques mesquines du Bas-Empire, et le pliitrage meme des Turcs, qu'on trouve applique a cer- taines Ibrteresses des premiers ages. C'est ainsi que noire savant voyageur se plaisait a lire dans les murs u polygenes irrcguliers, en belles pierres de taille, en brique ou en blocage , I'histoire des siccles ecouies, depuis les indigenes le plus ancicnnenient connus jusqu'i I'invasion des maho- inetans.

A celle epoque des recherches de M. Pouqueville , quel- ques ingenieurs geographes et officiers du genie francais, appeles a Corfou par le general Donzelot, avaient etabli des bases fixes ctpris destriangulations sur plusieurs points des cotes de la Chaonie et de la Thesprotie. Ce fut une donnee invariable qui servit a coordonner le plan de I'au- teur. Des-lors, il s'occupa de classer les villes les plus rap- procheesdela mer, en remontant d'etages en etagesjusqu'au pied du Pinde. II ne dedaigna pas de s'instruire , pour ce vaste travail, des traditions populaires, qui, employees avec discerncment , peuvent etre de bons guides ; il mit a con- tribution les cartulaircs des abbayes , les archives metropo- litaines; sut tirer de justes inductions des etymologies lo- cales; se servit a propos des compilations de dom 7'aissetle et du pere Lequien , et consulta tous les ouvrages qui out traite des guerres et des conquetes des Turcs. II remonta ainsi aux terns du Bas-Empire, oii les chroniques des By- zantinss'offrirent alui comme unpont jete entre la barbaric et les siecles historiques. Ici, se prcsenlaient denombrcux signaux de reconnaissance , fournis par les ecriyains do

ET POLITIQUES. 335

i'anliquite, tols que Thucydide , Polybe , Titc-Live, Plii- taique , et les indications piecieuses dc I'astionomie et de la geographic anciennes chcz Strabon, Marin de Tyr , Pto- Icmee et Pausanias. Pour riatelligence de ces auteurs , M. Pouqueville prefere la critique judicieuse de Paulmier deGrentemesnilaux discussions deCellariusetded'Anville.

Une decouTerte importante viut se joindre encore a tant de mo3'ens de succes : ce fut celle du veritable emplacement de Dodone. L'auteur avoue que c'est aux instructions et aux dessins que lui fit parvenir le savant M. Petit-Radel , qu'il adu I'eclaircissement de ce probleme, dont la solution jette la plus grande lumiere sur la geographic ancienne. Dodone J qu'il avait cherche bien loin, d'apres les faux er- remens de Cyriaque d'Ancone , se trouvait aux portes de Janina, ainsi que la demieure sacreedes Celles etle Hieron de Jupiter Pelasge. Des-lors, tout s'orienta sans peine au- tour de lui ; la plus haute antiquite lui parut devoilee , et il put Ciicilement appliquer aux lieux qu'il visita les details Iransmis par les historiens et les geographes grecs et latins.

Si la position de Dodone, incontestablement fixee, devint le point central des operations topographiques de l'auteur, la ville de Janina fut, pendant son sejour en Epire, le quartier general d'oii il se mettait en marche pour ses invasions scientifiques, et oii il rapportait le fruit de ses conquelcs. Apres un grand nombre de courses, qui n'etaientpas toujours sans dangers, il fut en etat de dresser avec exactitude un tableau des quatorze divisions de I'E- pire ancienne, comparees a ses cantons modernes. L'ex- ploration de ces provinces et celle de I'lllyrie macedo- nienne remplissent le i" et une partie du Tom. de I'ouvrage. Viennent ensuite les details d'un voyage execute a traversla Bosnie, parM. H. Pouqueville, frere de l'au- teur, lequel, en nous faisant connaitre encore la Mace- doine septentrionale, ses montagnes, continuation des

3-"6 SCIENCES MOKALES

Alpcs lyroliciiiics , et les sources de I'Axius ou Vardar, complete ainsi pour nous la description de I'ancien royaume d'Alexandrc. On doit aussi , a ce digue col- laborateur, la reconnaissance de I'Etolic, province ignoree de nos jours, autanl qu'elle avail etecelebre dans les fastes de la Grece; il y a retrouvc Thermus et le lac Trichon , I'emplacenicnt de plusieurs villes, le vaste pont qui ouvre une communication entre I'Ophie et le mont Aracynthe ; la decharge des lacs dans I'Achelous et non dans I'Evenus , comme le pretendalt d'Anville.

Apres avoir determine I'emplacement des provinces et des villes anciennes de I'Epire ; apres avoir dessine Ics montagnes et leurs points culminans, les fleuves et les courans d'eaux, ces grands et eternels lineamens de la physionomie du globe, M. Pouqueville offre une serie d'observations sur la nature du sol, de I'air et des lieux : il rend compte des phenomenes particuliers aux tremble- mens de terre , frequens dans cette contrce ; de la tempe- rature, des maladies et de la condition des agriculteurs. II trace des indications generales sur les regnes de la na- ture, et tcrmine le volume de son voyage par une histoireabregee des Schypetars, vulgairement connus sous le nom d'Albanais. Cette nation populcuse et remar- quable par son courage, son industrie et son activite, changera un jour la face de la Grece, si Ton en croit M. Pouqueville, qui a etudie avec perseverance les moeurs des Albanais, et meme leur langue, dont il donne aux phi- lologues un vocabulaire assez etendu pour qu'ils puisseut y rechercher I'origine de ces intrepides peupladcs cauca- siennes,transplantees enAlbanie par d'antiques migrations. Le 4' volume contient la description de la Thessalie , de TAcarnanie, des deux Etolies^ de la Locride, de la Doride ; I'introduction a la topographic du Peloponese et du voyage dans I'Achaiie; enfin, cette vie d'Ali-Pacha, dont

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Ef POLITIQCES. 337

presque tous les chapitres de cet ouvrage letracent les fuieurs et I'odieuse politique.

Parmi ces provinces, la Thessalie meritait les recherches et les developpemcns que lui accorde I'autcur. Cette re- gion fut le berceau des principaux peuples de la Gr^ce, et les faits historiques s'y rattachcnt aux traditions de la my- thologie. Ainsi, pres du sejour des Centaures et des La- pithcs, pres de ce golfe Pagasetique, d'oii s'elanf a le vaisseau des Argonautes chante par tous les poetes de I'antiquite, on retrouve cette vallee delicieuse de Tempe toujours emaillee de fleurs, et ou semblent bourdonner encore les nombreux essaims d'Aristee, colonie plus constante sur ce sol que les races d'hommes qui en ont disparu. La sont les Cjnocephales fameuses par la defaite de Philippe, dernier theatre de la gloire macedonienne expirante devant les aigles du peuple-roi; et ces champs de Pharsale, oil la force mit aux pieds de I'usurpation les liberies romaines, et qui rappellent cette journee des grandes demarcations poliliques : epoque surtout memorable en ce que des-lors s'eteignirent, au milieu du monde civilise, les institutions du republicanisme si anciennement et si universellement repandues , pour faire place au systeme des monarchies qui, diversement modifie, regne encore depuis cette longue suite de siecles.

Fidele a la methode qu'il a adoptee , M. Pouqueville , avant d'entrer dans le detail de ses excursions en Moree, presente quelques rapprochemens entre les mesures gene- rales que Strabon a publiees sur cclte presqu'ile et celles de nos astronomes. Lu longitude et la latitude du cap Te- nare, que donne ce geographe, sont parfaitement exactes. II en resulte, aux yeux de I'auteur, que les anciens, ayant beaucoup vu et calcule, savaient, depuis un terns proba- blcment bien anterieur a Strabon , evaluer les mesures de Tomb xi. 22

Sas SCIENCES MORALES

la terre autrement que par la reduction approximalive des

periples et des itineraires.

M. Pouqueville parle ensuite des malheurs qui oht desole Ic Peloponese ; il donne un tableau comparatif de ses provinces anciennes et do ses divisions actuelles , ainsi que la topographic de I'Achaiie.

Dans le Tom. IV, il decrit la Sicyonie , Corinthe et son golfe, Salamine et cette celtbre Athfenes, dont les voya- geurs nous parlent sans cesse et sur laquelle notre curiosite est toujours insatiable. En revenant sur ses pas, il visile ^leusis, Megare, Mycenes , la Corinthie et I'isthme de Corinthe. M. W. Gell, qui s'est acquis quelque gloire par son voyage en Gr^ce , dans lequel il a public la description des monumens de Mycenes, avail cru, comme d'autres voyageurs, y reconnaitre des cerarium. M. Pouqueville pense, avec plus de fondement, que ce sont les tombeaux des Alrides , et non des caveaux destines k renfermer les richesses de ces princes. II restitue les pretendues decou- vertes du voyageur anglais i leurs veritables auteurs, Fourmont, dont la veracile fut trop long-tems conlestee, et M. Fauvel, notre vice-consul a Athfenes.

Tout en rendant hommage au beau talent de M. de Chateaubriand , M. Pouqueville ne pent lui accorder la double gloire qu'il s'atlribue d'avoir retrouve les tombeaux d'^gisthe et de Clitemnestre dans deux sepulcres mo- dernes, precedemment vus et dessines par Foucherot, et les ruines de Sparte que le meme Fourmont avail de- crites (i). II regrette qu'un itineraire si rapidement es- quisse n'ait pas laisse le tems au noble voyageur de se

(i) M. de Chateaubriand avail dit ; Singuliere deslinie qui me faitsorUr de Paris pour fixer I' emplacement de Sparte, et decouvrir les cendres de Clitemnestre. II est bien reconnu que ces sepultures appartiennent , I'une a Halil, aga d'Argon, assassin^ en 1771 par det brigands , et I'autre k 6on domeatique qui eut le mSme sort.

ET POLITIQUES. S39

leconnaitre. Dejile savant M. Ouvaroff avail fait au chantre des Martyrs un reproche pareil, au sujet des ruines d'E- leusis (i).

L'Argolide, I'antique Cynurie, la Phliasie et les restes inconnus jusqu'alors de Phlionte, le gouffre de Stymphale, celui de Pheneon, Caphys que fonda Dardanus, le bassin du Ladon, le mont Cyllene et le vallon du Cerynite sont tour li tour I'objet des observations que I'auteur rattache a. Patras.

Nomine consul dans cette Tille, en 1816, il en part au printems pour entrer dans la vaste Elide, et il expose la topographic entiere de cette province, plutot indiquee que decrite par les voyageurs. II revivifie Olympic, son stade, son hippodrome et le territoire consacre par Hercule k Jupiter.

Passant ensuite u la Potamographie de I'Alphee et de rErymanthe, il en indique les sources, le cours et I'embou- chure ; il decrit la montagne poetique de Ladon , le Lampee , I'Olenos, le Cyllene cher a Mercure ; et dans une excursion au monastere de Megaspilion , il fait connaitre le regime et les oeuvres charitables des pythagoriciens du christianisme , dont I'exemple et les vertus soutiennent le courage des fidelcs au milieu de la Grece asservic.

Le cinquieme volume de I'ouvrage n'a point encore para : il doit presenter Ic tableau des revenus, des charges, des productions de la Moree, et une statistiquc de cette province, a laquclle seront joints des apercus sur le com- merce francais dans le levant, aujourd'hui presquc envahi par celui des Grecs , dont I'auteur montrera les richesses et la puissance navale.

II nous promet aussi des episodes qui ne seront pas sans iiiteret et les details de son voyage dans la Triphylie, la

(1) Essai sur les mysteres d'Eleusis. SainlPelersbuurg , 1811.

22*

SAO SCIENCES MORALES ET POLITIQUES.

Messenie et le Icrritoire de Gerennius, dont Nestor portait le surnom. II annonce une notice sur Sparte, les inscriptions qu'il a rccueiUies dans rElcuthero-Laconie, et une carte generate dressee par M. Barbie-Dubocage, qui fera juger combien la geographie dc la Grece a gagne par les sa- vantes explorations de M. Pouqueville (i). L'archeologie, la nunmismatique , I'histoire comparee et la science des inscriptions ne devront pas moins de developpcment aux recherches de I'auteur que la statistique et la geographie speciale.

Dans cette rapide analyse des quatre volumes que nous avons lus avec un interet vif et soutenu , circonscrits k regret dans un cadre resserre et ne pouvant nous ctendre avec quelque detail sur ce Voyage, uniquement entrepris dans I'interet de la science et execute de maniere i en elargir le domaine , nous avons dQ nous borner i indlquer les sommites, les parties saillantes de I'ediGce ; nous nous sommes d'abord occupes de ce qu'on pourrait nommef en quelque sortele materiel delaGr^cemoderne. II noussufllsait pour le moment d'annoncer un ouvrage oii d'immenses re- cherches, une erudition profonde et un beau talent s'u- nissent aux plus pures intentions ; un ouvrage que les circonstances actuelles doivent faire rechercher avec em- pressement et qui restera, quelle que soit leur issue. Quant i sa partie morale, c'est-i-dirc la description des mceurs publiques et privees des Turcs et des Grecs, I'csprit du gouvernement , les institutions civiles et religieuses des uns, I'etat social, les interets et les dispositions politiques des autres, enfin tout ce qui constitue, modifie, altere le principe de vie dans la cite; nous en ferons le sujet d'un second article. EL de Gavedell Geannt.

(i) II est a desirer que Ton se serve de ces docunaens pour les cartes de la nourelle edition du Voyage d' Anachanis.

LITTERATURE.

Philibubt, roma?ipo6tiqu6 ensix chants ; par Thomas Colley Grattan (i).

L'action principale de ce poeme est empruntee au fameux proces du faux Martin Guerre , recueilli dans les Causes cdlebres de Gatot de PiTAYAi. Ne dans la province de Biscay e, Martin Guerre epousa, au mois de Janvier iSSg, Bertrande de Rols , de la ville d'Antigues , qui unissait un jugement droit d une grande beaute. lis vecurent environ dix annees ensemble, jouissantd'une honnete aisance, etilseurent un filsde leur union. Vers cette epoque , Martin desira voyager; il quitta sa femme et sa famille, et ne leur donna point de ses nouvelles, durant un laps de terns considerable. Ber- trande continua Dependant a mener une vie iiTeprochable. Huit ans s'etaient ecoules depuis le depart de son mari, lorsqu'un imposteur, Arnaud duTilh, se presenta devant elle , sous le nom de Martin Guerre. Sa prodigieyseressem- blance avec ce dernier le fit recevoir sans hesitation; il fut egalement reconnu par les quatre soeurs de Martin , par son oncleetparplusieurs autres parens. 11 remplitson role avec autant d'adresse que d'audace : ayant connu Martin Guerre dans ses voyages , il avait appris de lui et de quelques-uns de ses amis les details les plus minutieux sur sa''epassee, et mille circonstances secretes, uniquement connues des deux epoux.

Get imposteur usurpa , pendant trois ans, tous les droits de Martin Guerre ; mais a la fin , ayant ete soupponne de fourberie parl'oncle et parquelques autres personnes, Ber-

(i) Londres, 1821, un vol. in-S" de 239 pag. et notes, XLVIII. Longman hurst Rees , etc. Piix , la schellings.

3A2 LlTTIiRATLlRE.

trande se joignit a ses accusateurs, et il I'utlivreu la justice. II se defendit avec intrepidite : cent cinquante temoins fu- rent entendus , parmi lesquels il y en eut trente ou quarante qui deposcrent qu'il etait le veritable Martin Guerre ; un plus grand nombre jura que c'etait Arnaud du Tilh, et plus de soixante refuserent de preter serment pour ou centre , tant la yerite leur paraissait douteuse des deux cotes. Le prisonnier repondit avec la plus grande exactitude aux ques- tions partlculieres qui lui furent faites, surle lieu de nais- sance de Martin Guerre , sur son pere, sa mere, ses freres, etc. II donna les renseignemens le» plus positifs sur le jour de son mariage, sur le pretre qui avait celebre la ceremonie , lur les personnes qui etaient presentes , la manifere dont elles etaient vetues, etc. Cependant, apres un long proces, il fut juge coupable et condamne a perdre la tete sur I'e- chafaud et k etre ecartele. II en appela au parlement de Toulouse : la cause fut plaidce de nouveau , et il etait sur le point de la gagner, lorsque le vrai Martin Guerre parut. Arnaud du Tilh fat a!ors condamne a mort et execute sur un gibet, en face de la maison de Martin Guerre.

M. Grattan , auteur de Philibert, ne s'est pas astreint k suivre servilement la version que nous venons de citer. li a d'abord place ses personnages dans un rang beaucoup plus eleve. Remontant aux siecles de la chevalerie, ila fait re- Tivre les anciennes coutumes des preux. Aide par de sa- vanles recherches, il a trace un tableau anime de ces terns de factions et de troubles , oii les droits sacres de I'homme etaient perdus et comme enscvelis au milieu des epaisses tenfebres de la feodalite; oii. le flambeau palissant de la li- berte ne lanpait plusqu'un feu mourant, pres de s'eteindre sous le souffle corrompu de la tyrannic. Mais, revenant k des sujets plus gracieui, M. Grattan peint en vers charmans la paix et I'union qui regnent enlre les families de deux

LITTERATURE. Ui

vaillans guerriers. Amis et voisins, ils se delassent des fa- tigues de la guerre, en partageant les jeux de deux jeunes cnfans, I'espoir de leur avenir. Philibert et Isabelle gran- dissent sous les yeux de leurs parens : ils s'aiment, et bientot rhymen vient couronner leurs feux : la peinture de leurs amours, des joies de leur union , est remplie de charraes et termine bien le premier chant.

Le debut du second forme un contraste frappant avec ces tableaux de calme et de bonheur. Le traducteur de cet in- teressant poeme ayant bien voulu nous communiquer quel- ques passages de sa traduction, qui doitparaitre incessam- ment, nous lui empruntons ce morceau :

« Les chants tristes et cadences de la messe des morts sc succedent lentement, et les gemissemens long-tems com- primes eclatent de toutes parts. Tristes, ranges autour de la tombe, les moines entonnent I'hymne funebre. La lumiere faible et vacillante des flambleaux presque eteints lancc son dernier eclat surles sombres roCites sepulcrales, dout les pierres humides semblent aussi repandre de froides larmes sur le cercueil de celui qui u'est plus. Ces tristes murs reflechissent, a travers I'epaisse obscurite de la nuit, les rayons Tacillans des torches funeraires. De terns en terns, les moines afiligessetaisent pourserecueillir danslaprifere; I'orgue sonore fait alors entendre I'air de I'antienne solen- nelle; mais, lorsque le choeur reprend ses chants lugubres, le Tent du soir semble porter vers les cieux les pieux ac- cens des fideles , et les echos d'alentour font retentir au loin les saints cantiques.

HYMNE FUNEBRE.

« Repose en paix, noble heros , Illustre fils , d'un illustre lignage : Vainqueur des tens, brisant leur esclarnge ,

3AA litti«:ratuiie.

Dans la nuit des tombcaux ,

Que la gloire devienne k jamais ton partage 1

« Repose en paix, jusqu'au jour solennel

Ou dans les airs la tiompette derniere ,

Du sfipulcre en eclat evoquant la poussifere ,

Au tribunal do I'etcrnel

Appellera les enfans de la terre ;

Et jusqu'i ce jour gloricux ,

Oil dans le ciel ton ame rappelie

S'ilancera vers la voilte etoil6e ,

Repose en pais au sein de tes ai'eux.

<i Quel est celui que la niort a recouvert de sonfroidlin- ceul ? A qui cette cloche funebre adresse-t-elle inaintenant le dernier adieu des hommes ? pour qui brfllent cos cierges ? pour qui celcbre-t-on ce service pompeux? Regarde cetlc femme si pSle et si touchanle , donl les larmes trahissent la muette doulcur; vois ce vieillard courbe , dont le regard inquiet voudraitpenetrer jusqu'au sein du froid domaine do la tooibe ; contemple encore ce jeune guerrier plein de cou- rage , qui s'efforce a la fois de consoler les chagrins de sa die , et de reprimer les douleurs de I'ami ; et cesse alors de demander quel est I'infortune que I'impitoyable mort a reduit en poussiere »

A peine lepered'Isabelle repose-t-ilaupres de sesancetres, qu'une nouvelle douleur se prepare. Somme par le roi Charles VI de se joindre i lui avec ses vassaux, Philibert s'eloigne; il laisse ilsabelleunefille, fruit de leurs amours. Les regrets de la jeune epouse, I'empressemept des vas- saux a suivrc leur seigneur, la confusion des apprets d'un depart precipite , formcnt un tableau rapide et tres-anime. Le silence qui succede itant de bruit, le vide du chateau devenu desert en un instant, le calme d'une douleur qu'une esperancc trop eloignee nepeut adoucir, sontparfailement decrits ct produisent un effet tres-poctique ; mais , laissant

LITTER ATURE. SA5

Isabelle en proie a ses ennuis, le pofete nous conduit sur les traces de son heros. Nous le voyons franchir, a la tete de ses soldats , la cime escarpee des montagnes qui avoisi- nent le Jura. Pret k s'eloigner dc sa belle patrie , il jette sur elle un dernier regard d'amour etde regret, et lui adresse un chant d'adieu :

CHANT DU GUERRIER.

« Terre qui m'as vu naitre , 0 France tant cherie !

Re^ois mes adieux ; Mais toujours tu seras , 6 ma belle patrie !

Presente a mes yeux. Quittant avec regret son nid hereditaire, Ainsi I'oiseau du Nord , chasse par les frimats , Maudit , en s'elancjant vers la rive etrangere , L'aquilon qui le porta en de plus doux climats, Et benit le printeins qui vient finir sa peine. Bien plus cruel encore est le sort qui m'eatraine ; Car je pourrais en vain parcourir I'uuivers; En vain tous ses tresors seraient en ma puissance , Les charmes reunis des royaumes divers, Helas ! ne valent pas un seul jour de la France. »

Philibert rejoint I'armee du roi , campee sur les bords du Danube. Paruni la foule de guerriers enroles sous la ban- niere royale, on remarque Pierre de Rouvergne. Devore par une ambition sombre et farouche, un profond mystere enveloppe ses actions; les chefs et les soldats ignorenl ega- lement sa naissance et le rang qu'il occupait jusqu'au jour oiison glaive lui ouvrit le chemin des honneurs. La pein- lure du caractere de ce guerrier rappelle les heros gigan- tesques de lord Byron, dont les yertus ou les vices les ele- veiit, memeparleursexces, au-dessus del'humanite. Une ressemblance frappante existe entre Philibert et Pierre dc Rouvergna. C'est ici qu'on retrouve la version ou I'auteur

SAG LITT^RATURE.

a puise son sujet. C'est Arnaiid du Tilb cunobli; il gagne la confiance de Philibert, voit le portrait d'Isabelle, en devientamoureux, s'insinue dans les bonnes grScesde son rival, s'emparc de tous ses secrets; et, dans le tumulte d'unebataille, il tourne conire lui son arme meurlri^re.

Les jours, les uiois, les annees se sonl ecoules, et au- cune nouvelle du retour de son epoux n'est venu rejouir le triste coeur d'Isabelle et animer la solitude du chate.nu. Sa fille essaie vainement d'adoucir, par ses caresses, la douleur dont elle est consumee. Mais un guerrier apparait devant elle : c'est Philibert ; ce sont ses traits et jusqu'au son desa Toix; elle ne pent plus nrieconnaitre I'epoux cheri qu'elleatantpleure. Cependant, de sombres presages trou- blent la joie de son arrivee ; un reve funeste agite le sommeil du guerrier; il tressaille , il semble lutter contre un puissant ennemi. Isabella lui demande en vain I'explication de son trouble. Les vassaux rassembles sont venus oflrir a leur seigneur leurs hommages et leurs voeux. Mais un parent, qui devait heriter de ses richesses, ne peut,lui pardonner de lui avoir enleve, par son retour, I'espoir qu'il avail npurri si long-tems. II I'accuse d'imposture et lepoursuit devant les tribunaux : le guerrier I'emporte; il ne jouit pas long-tems de sa securite. Un autre Philibert reparait, comme I'assassin de Walderne , pere de Philibert , qui tombe sous les coups d'un meurtrier, la veille meme du jour oil ce vieillard avait annonce qu'il revelerait k ses enfans la cause de I'inexplicable ressemblance qui existait entre son fils et Pierre de Rouvergne. La jeune fille, te- moin du meurtre, accuse son pere, qu'elle croit avoir re- connu. Ilest juge etcondamne; maisun complice do Pierre de voile le veritable imposteur. Fils naturcl de Walderne, Pierre a confu le projet de supplanter son frere; arrive trop tard, il vcut aumoins cacherle secret de sa naissance,

LITTERATURE. 3A7

et assassine le vieillard, au moment ou celui-ci s'apprete i tout reveler.

On decouvre alors que celui qu'on avait soupfonne de trahison est le veritable Philibert, rentre dans ses foyers apres une longue caplivite. Je ne sais si ce moyen d'etonner le lecteur est heureusement choisi : peut-etre eOt-il mieux valu suivre en cela le recit historique. Au reste, ce poem* est plutot remarquable par des beautes de detail que par la perfection du plan. L'ouvrage de M. Grattan est une suite d'imagcs tour a tour sombres et gracieuses. Des situations fortes, une poesie harmonieuse et souvent inspiree, lui donnent I'interet d'un roman et le charme d'un poeme. Nous terminerons cet article par le passage suivant, oiil'auteur gemitiur I'Irlande , sa patrie, etrappelle le poete celebre qui I'a illustree dans ses vers.

« Hatons-nous d'arriver au denouement de cette his- toire, oii les accens de la joie se font entendre, pendant les courts intervalles de repos accordes au malheur : ainsi qu'oa distingue parfois, dans les sombres melodies d'Erin (i), quelques notes joyeuses, melees aux tristes accords consacres a la douleur et au desespoir. Et moi aussi, 6 ma patrie, je veux elever ma voix jusqu'a toi ! Mon entreprise est temeraire, je le sens, et mes vers sont pen dignes d'un si noble essor. Je vois deja le front de la critique s'armer de severite, et menacer de punir ma folle presomption ; et cependant, 6 Erin, je veux meler mes chants i tes chants de douleur. Ton nom a fait vibrer une corde qui reveille de fortes emotions dans mon ame : il fait reyivre , par son pouvoir niagique , un sentiment que je croyais eteint. Ce sentiment, dans le tems de mes jeunes esperances, me faisait tirer des sons plus hardis de '

(i) Les Melodies Irlandaises , par Moobe,

Uh LITTEllATCRE. ma lyre sauvage, lorsque, couche sur I'aride I'ougere de Carraghmore , ou prfes des bords du lac de la inontagne de Moonvalla ; ou lorsqu'etendii sur la pclouse dessechce , livrei tous les roves de la poesie, jc plongeais mes regards avides sur la plaine qui s'elendait a mes pieds, alors mon imagination s'enflammait du feu de la liberie : les ombres sacrees des heros de la Grece m'apparaissaient en foule , et repandaient leurs prestiges glorieux autour de moi

« Helas! les illusions ont disparu ! je parcours une plage etrangere, et d'autres mains que les miennes ont tresse, 5 ma patrie, la triste couronne qui ceint ton front.

« Tes malheurs offrent un sujet difficile a retracer : ils reclament la voix de ce chantre babile (i) , dont les accens audacieux, redits par la renommee, respirent uneharmo- nieuse melancolie, dont les douces plaintes allegent les rudes travaux de I'habitant de tes solitudes marecageuses, et font briller, sur le scntier solitaire qu'il parcourt, I'eclat de la gloire des terns passes et un rayon d'esperance. Je ne veux pas demander, o Erin, le sujet de tes douleurs ct de tes geuiissemens : que d'autres plaident la cause de tes cliaumieres violees, de tes lois outragees ; pour moi, je dirigerai mes yeux humides vers les lieux oii pleurent mes compatriotes (2). L. S. B.

(ij MOOHK.

(2) f^qy. ci-dessus, pag. 220, le rapport fait A la societe acade- mique de Nantes, sur le poenie de Philibert , dont M. Grattan lui avail fait hnmmagc. -

III. BULLETIN BIBLIOGUAPHIQUE.

LIVRES ETRANGERS (i).

AMERIQUE.

ETATS-UNIS.

111. American medical Botany, being a collection, etc. Botanique m^dicale de rAm^rique, composee d'une collection de plantes medicinales indigenes aus Etats-Unis, avec leur histoire bo- tanique et leur analyse chimique , ainsi que leurs proprietes et leurs usages dans la m6decine et dans les arts,orneedegravures coloriees. N"" V etVI , par Jacob Bicelow, et Rdmfobd, professeur de mati^re medicale et de botanique a l'universit6 d'Harvard. Boston, 1821.

110. Remarks, etc. Remarques sur I'emploi des femmes en chirurgie, comme sages-femmes ; par un m^decin. Boston, 1S20; brochure in-S" de 22 pages.

11 4- Address delivered before the Hampshire , etc. Rapport fait i la society d'agriculture de Hampshire , de Franklin et de Hampden, lors de I'assemblfee annuelle tenue i Northampton; par J. H. Lymon. Northampton, 1820; 1 vol. in-8°.

1 15. A Treatise on inland nafigation. Traite sur la navigation

interieure, avec une carte; par Robert Mills. Baltimore, i vol. in-S".

u6. Annual Report, etc. Rapport annuel du conseil des com-

missaires americains nommes pour les missions etrangeres. Boston,

1820 ; brochure in-8"> de 34 pages.

W].— Fifth annual Report, etc. Cinquieme rapport annuel de la soci6te de paix de Massachusets. Cambridge, 1820.

118. American education society , fifth Report. Cinqui6me Rapport de la soci6t6 d'6ducation americaine ; 4 octobre 1820. 119. Third Report of the american colonization society.

(i) Nous indiquerons , par un ast^risque (*) place k cOte du titre de chaque ouvrage , ceux des livres etrangers ou frangais qui paraitront dignes d'une attention particuliere , et dont nous rendrons quelquefois compte dans la section des analyses.

350 AMiiRIOUE.

Troisitme Rapport de la societO dc colonisation anitiricaine. Wa- shington, 1S30.

120. Thoughts on political economy. Pcns6es sur rOconomie politique, en deus parties ; par Daniel Raymond, avocat. BaUimore, i8ao; I vol. in-S".

lai. Sketches of universal history , etc. Esquisses sur I'histoire universelle, sacree et profane, depuis la creation du monde jusqu'i I'annee i8i8; par Frederic Bdtlek. Hartford, 1820; i vol. in-12; prix , 1 louis 5o.

122.— History of the war of the independence of the United Stales. Histoire de la guerre de I'independance des Etats-Uuis, par Charles Botta, tradultc de I'italien par Georges Otis. Philadelphic, 1820 ; 2 vol. in-S".

1 23 (*). Memoirs of the Mexican revolution, etc. Memoires sur la revolution du Mexique ; suivis de la Relation de I'expedition du ge- neral Xavier Mina, avec quelques observations sur la possibilile d'ouvrir un commerce entre la merPacifique et I'Ocean Atlantique, par I'isthme du Mexique dans la province d'Oaxaca, et par le lac de Nicaragua ; et surl'importance future de ce commerce pourle monde civilise , particuliferement pour les Etats-Unis ; par William Robinson. Philadelphie , 1820, 1 vol. in-S" ; prix, 2 louis 5o.

124. History of the United Slates ^ etc. Histoire des Etats- Unjs, avec un court aperQU de quelques-uns des principaux empires ct royaumes des terns anciens et modernes , i I'usage des ecoles pu- bliques; par un citoyen de Massachusets. Keene, 1820; 1 vol. in-8« de 25 1 pages.

125. North American Revieu>. Revue de I'Amerique du Nord, et journal de melanges , publie par Olivier Evbbeti. Boston , 1821 . Hilliard et Metcalf , n" xxx. i vol. in-8".

Ce journal, dont nous avons deja parlef voy. Tom. VIII , p. 108 et 343 ), est un des plus interessans recueils de TAmerique. On y suit les progres des sciences , des arts et de la litt^rature dans les Etats-Unis. Lesprincipaux articles de ce trentifeme cahier sont: i" Un Examen des universites anglaises comparies aux universiles nais- sanles de r Amerique ; 2" un Tableau des ameliorations et des per- fectionnemens interieurs operes dans la Caroline du Nord. La plu- part des faits et des materiaux de cet article sont puises dans trois ouvrages am^ricains qui traitent du m£me sujct ; une Analyse

ASIE. 351

des Lettres de madame de Grafi/^ny , publi^es sous le litre de Vie privie de Voltaire et de niadame du Chatelet , perrdant un sejour de six mois a. Cirey; avec un rapide examen des oeuvres de Vol- taire , et quelques details sur ie caractere et la fortune de ce pofete. L'article est g^neralement bien , quoiqu'on y put relever quelques erreurs ; Nuuveau. tarif, propose d'apres le rapport du comite des negocians de Boston et autres , sur le tarif; 5" Examen critique d'un ouvrage qui a pour titre : Doctrine celeste de la Nouuelle J irusalem revelee par le del , el traduite du latin d' Emmanuel Swedenborg. On sait que Swedenborg a fonde et propag6 une secte qui porte son nom. 11 se dit inspire , et r6v61e dans ses Merits les visions que le ciel lui envoie. Plusieurs de ses disciples ont ccrit pour soutenir la verite de ses predictions , et paraissent croire sincerement a sa mission divine ; 6" Notice et remarques sur Hiati et sur ses habitans , tirees en partie de neufouvrages publies par des HaJitiens : deux sont de M. le baron de Vastey ; 7" sur les essais giologiques de Hoyden; Analyse de Thistoirede Vastronomie an- cienne et moderne , par Bailly; une Lettre sur la fief re jaune qui a desole les Indes occidentales ; suivie d'observations sur les moyens de prevenir la contagion ; par Daniel Osgood , medecin ; 10" Histoire de la sculpture chez les Grecs, ou examen d'un ouvrage allemand sur les principales epoques de I'art de la sculpture chez les Grecs; par Frederic Tbie&sb; h" Examen de I'ouurage de Theodore liTfu\« , surVetat politique de I'ltalie. L, S. B.

ASIE.

126. Asiatic Researches , etc. Recherches asiatiques , ou Memoires de la society etablie au Bengale. Calcutta, 1821. Tom. XlllSin-S".

Voici les titres des articles contenus dans ce volume : Memoiresur la mesure d'un arc du m^ridien, depuis le i5« jusqu'au i8« degre de latitude , par le lieutenant-colonel W. Lambton; sur I'existence de la religion des Hindous dans I'ile de Bali, par J. Crawfurd; voyage aux sources de la Djemna, par Eraser ; sur les meurtriers appel6s jjAaresjTZgars , par le Aocte.ni: Sherwood; sur la carte du Kimdn , par le capitaine lVebb\ ceremonies du couronnement d'un radjale hindou , par M. Brotf re ,- analyse chimique, par J. Davy; des serpens venimeux qui se trouvent sur la c6te de Madras , parle

J52 EUROPE.

doctcur Mackensie ; les mines de Prainbanon dans I'ile de Java , par/. Craicfurd; description de quelques plantes rares de I'lnde, par A'. Vallich , D. M.j menioire sur unc nouvelle espece dc tapir , trouvee dans la prcsqu'ile de Malacca, par le maj. Forquhar. ( Voy. \a. Rei/ue Encjclopedique , Tom. X, pag. 2o5, art. Calcutta. J Sur une nouTclle espece de camellia sauvagc ; Beydjapour en i8i i , par le capitaine Sydenham: le BinOme connu des Arabes , par /. Tyltler,

E. G.

EUROPE.

GRANDE-BRETAGNE.

127. Vindicice geologicce , or the Connexion, etc. Assertion* geologiques , ou la geologie conciliee avec la religion ; legon pro- noncee devant I'universitc d'Oxford , le i5 mai 1S19 , par M. le docteur Guillaume Bucrlakd, lorsqu'il fut installe dans la chaire de g6ologie de cette universite. Oxford , 1820. in-4° de 4o pages.

La geologie est cultivee et trfes en honneur chez les Anglais , de- puis plus d'un siecle. II existe a Londres une society libre de geo- logie, qui a deja publie, sur I'objet de scs recherches , d'utiles m6- moires. M. Buckland et un autre avant lui ont enseigne cette science k I'universite d'Oxford , mais il n'y avait point alorsde chaire fondde h Oxford pour cet enseignement ; celle qui existe n'a it€ do- tee qu'en 1819.

Dans la premiere partie dc cette lec^on , M. Buckland a etabli les rapports tres-remarquablcs de cette science, encore assez nouvelle, avec les autres sciences physiques ; dans la seconde , il considere l.i geologie dans les preuves qu'ellie fournit de I'existence de Dieu; et dans la troisieme , il montre que les deux grandes traditions de Moyse , sur la nouveaute relative de I'espece humaine et sur I'uni- versalite d'un deluge arrive il y a environ 6000 ans, n'ont rien qui ne se concilie avec les observations sur I'fetat present de la surface de notre globe.

Sur tous ces points, il est d'accord avec MM. de BufiTon , de Luc Dolomieu et Cuvier, et il a soin de les citer avec de justes 61ogcs, particulierement M. Cuvier , qui , par ses admirables travaui sur la thiorie de la terre , sur les fossiles dcrnierement decouvert»y s'est place pour long-tems i> la tetc de tous les geologues, lorsqu'il etait diji I'un des premiers anatomistes ct naturalistes du monde savant. Lasjpihais, deVInstitut,

LIVRES ETRANGERS. , 853

iiS. £ssajs on hypochondrias , etc. Essai sur rhypocondiie et sur d'autrcs affections nerveuses ; par JoAreREio, d, m. Londres i 1S21. Longman , i vol. in-S".

La bizarre maladie qu'on a nominee iiypocondrie , et dent I'exis- tence a paru long-temsproblematique aux gens dumonde, et memC aiix mcdecins , est inaintenant comptee au nombre des maladies ULTvcuses les mieux connues. Le docteur Reid s'en est occupe avec siicces , et les moyens qu'il a employes pour guerir I'imagination frappee de ses malades sont aussi singuliers que plaisans. II les raconte avec esprit et facilite, et son livre doit commencer la me- tamorphose que son art acheve sur les esprits livres k la melan- colie.

129. Sketches of the domestic manners , etc. Esquisses des nioeurs domestiques et des institutions des anciens Romains. Lon- dres, 1S21. Muri'ay , i vol.in-i2, 347 pages.

Ce petit volume offre une peinture fidcjle des habitudes du peuple romaiu, telles qu'elles existaient sous la republique et sous I'empire. Pline , Juvenal, Perse, et quelques anciens auteurs, ont fourni les principaux traits de ce tableau. L'auteur a eu aussi recours i plu- sieurs savans commentatcurs ; il a reuni leurs recherches et en a fait un ouvrage d'un egal interet pour le jeune etudiant et pour I'homme du monde. Le style , simple et concis , n'est point herisse de ces mots barbares , et quelquefois trop savans , pour etre compris par toutes les classes de lecteurs.

i5o. On the liberlj of the press. De la lifccrte de la presse et de la discussion publique, par Jeremie' ^EUTnkis. Londres, iSai. Hone; in de 58 pages.

Ce nouvel ouvrage, d'un des plus habiles publicistes de notre tems, est en quatre chapitres : le premier est consacre ii defendre et a justifier I'entiere liberie de la presse sur les questions d'interet public; les trois autres c§ncernent les reunions oil les particuliers s'occupent de ces memes questions.

i3i. (*) yi chronological Retrospect, etc.— Revue chronologique, oil Memoires sur les principaux evenemons de I'histoire mahome- tane, depuis la mort du legislateur arabe jusqu'i I'avenement au trone de I'empercur Akbor et I'etablissement de I'empire du Mogo, dans rindoustan , d'apres les manuscrits originaux persans ; par

ToMv: XI. 23

35A LIVRES ETRANGERS.

Dai^idPdiC.E, uiajor au service dc la conipagnie dcs Iiulcs oricntalts. Londresj i8ai , Golburn ; 3 vol. iii-4° ; priij 7 guin(ics 17 schellings 6 pences.

iSa. Charles the first pourtrayed. Peintiire du caractere dc Charles I", par G. Coode, d'Exeter. Londres , 1831, Longman; brochure in-8".

Ce petit ouvrage a elk reimprimc d'aprcs I'edition do 1747 ct con- tient la rclatioa do plusieurs fails authentiqucs, rclatifs i la conduitc de Charles I" ct tendant k faire tomber sur ce nionarquc plusieurs grares accusations.

i35. The Lives of eminent Scotsmen, etc. Vies dcs Ecossais celebres , publiees par la society des anciens Ecossais. Edimbourg, 1821 ; 1 vol. in-8'>.

Ce petit ouvrage contient dc courtcs notices sur la vie ct Ics ceuvres des hommes de lettres les plus distinguis de I'Ecosse. Ccs notices sont 6crites d'une maniere agreable et variee. Paitni les ar- ticles les plus int^ressans consacr6s aux poetes, on remarque la vie de Jacques !•' d'Ecosse , de Ramsay, de Beattie et de Burns.

i34. ^ Tour through the southern provinces of the kingdom of' Naples, etc. Voyage dans les provinces meridionales du royaumc de Naples, auquel on a joint une esquisse des circonstances qui ont precede la derniere revolution ; par Richard Keppei, Cba ven. Londres , 1821 ; 1 vol. in-4° de 449 pages.

Un peuple turbulent et vindicatif , prompt i sc revolter, mais de- pourvu de l'6nergie qui conduit au succcs , offre , h la veille d'une revolution , un spectacle curieux pour I'observateur impartial et at- tentif ; mais peu d'bommes savent se placer au-dessus des 6v6nemens et contempler avec calme les querelles des factions, dont il serait facile dc prevoir les rfesultats. La revolution de Naples , comprim6e a sa naissance, n'inspire plus Tinteret qu'elle avait d'abord excite ; cependant, on aime encore a examiner les causes et les circonstances de cet evenement. M. Craven ne les a pas presentees avec autant de clart6 qu'on pourrait le desirer ; il a plutut dfecrit I'aspect de Naples et les mocurs de la haute classc que les mouvemens populaircs. Aussi ne trouve-t-on pas dans son ouvrage le genre d'interfit que, d'apres le titre, on scrait tent6 d'y cherchcr.

i35. Recollections of a classical tour, etc. Souveniis d'un

LIVRES tTRANGEPiS. 355

Voyage classiquc dans difltTentos parties de la G-rece , de la Tarquic ct de I'ltalie , I'ait pendant les annecs 1818 et 1819; par Pierre Edmond LAcjiEfiT ; ornede gravures coloriecs. Londres, 1821 ; i vol. in-4° do 3i7 pages.

M. Laurent quitta Oxford en 1S18, accompagne de deux membres de Tuniversit^. lis passerent les Alpes par la route du Mont-Cenis, traverserent le Piemont ct les fertiles vallecs de la Lombardie, et s'arrctcrent quelque tems a Turin , a Milan, a Mantoue , a Verone , a Vienna et A Venise. De cette derniere ville ils se rendirenti Trieste, d'oii ils s'embarquerent pour Constantinople, aprfes avoir fait une excursion aux ruines de Pola. Dans le cours de leur voyage, ils virent la plaine de Troie et le lieu oil Ton croit qu'Ilion etait situee. Bedoutant la peste qui ravageait alors les provinces du nord de la Grece , ils se rembarquerent i Constantinople pour aller Athenes ; passerent ensuite dans le Peloponese , visiterent les ruines de Corinthe , de Sicyone , de Nem6e , d'Argos, de Mantinee , de Sparte , de Messine, de Phigalie , d'Olympie, de Patrae, etc. Nos voyageurs s'embarquerent pour les iles loniennes ; revinrent de la en Italic; touchferent k Otrante , a Brindes et h Barletta, et retour- nerent en Angleterre par Naples , Rome et Florence. L'ouvrage dc M. Laurent est agreablement ecrit ; on y trouve des peintures ani- mees des lieux qu'il a vus; les maurs et les coutumes des Ath^niens modernes y sont decrites avec esprit et discernement.

i56. T/ie Pamphleteer. Recueil des meilleures brochures du jour. Londres, 1821, Valpy ; prix , 6 shellings G penccs, chaque livraisop.

Le 35« N" de ce Recueil vicnt de paraitre ; on y rcmarque les articles suivans : la Declaration de 1' Angleterre centre les actes de la Sainte- Alliance, avec des documens officiels , etc. ; Reflexions sur la conduite des allies ; sur la jurisprudence criminellc , plan d'un nouveau code penal; sur la dissolution de la cbambre des deputes, par M. B. Constant; Portraits historiqucs : Octavius Cesar et William Pitt ( reimprimcs ) , Rienzi et Bonaparte , par G.Meadi.ey; sur le systenie des prisons destinees auxcriminels en Angleterre ; I'exclusion de la reine de la Llturgie , consideree sous un point dc vue liistorique et legal ; sur le caractere de Pope, conimepoetc, etc. Ce recueil est rcniarqiiable par I'esprit d'imparti.i-

356 LIVRES ETIVANGERS.

lite qui prtisiile .'i sa itHlaclion et par It; choix dcs niorcoaiix qui y sont inseics.

i'5j. The retrospcclice Refieif. Revue rtlrograde ou des tems passes. Vol. Ill , partie 2", n" vi ; \" mai. Londres , 1821, in dc deux feuilles d'imprcssion ; prix, 5 shcllings.

Ce journal, dent le but est de sauvcr dc I'oubli les ancicnnes pro- ductions de quelqiics (icrivaius distlngu6s , rcnf'crmc dcs critiques, des analyses et des extrails d'ouvrages curieux , utiles et estimes , publics dans toutes les langues , depuis la renaissance des lettrc,s jusqu'au commencement dc ce siecle. Un article tres-rcmarquable du cahier que nous annon^ons, c'est un tableau dc la littt'uature poii- lique de I'Espagne par M. Bowringj auteur de V jlnthologie russe (rviy.notre Tom. X, pag. 355). On y trouve de I'erudition, une juste appreciation du m6rite des dilFcrens poetes dont les oenvres sont citees, traduitcs en vers anglais trespurs et tres ilegans. M. Bowring s'est borne h presenter I'histoire litteraire de I'Espagne jusqu'au xiv"^ sifecle; il compte faire paraitre la suite dans le meme recueil. Passant en revue la poesie des Maures, celle des troubadours, etenfin la poesie castiliane , 11 remontera jusqu':\ I'agc d'or dc la littiraturc ospagnole.

1 38. Miscellanies. Melanges; par Richard Warneb. Londres, 1821. Longman, 2 vol. in- 12. Prix, 10 shellings.

La lecture des journaux periodiques, qui se composcnt pour la plupart d'arliclcs detaches, de critiques litteraires,d'anecdotes, de bons mots, adi> conlribucrausucces des compilations intituleesit/t'/flngtw. II se public en Anglcterre un grand nombre d'ouvrages dc ce genre , qui trouvent des acbcteurset des lecteurs, bien qu'ils ne renferment souvent que des productions ni^diocres. Le peuple anglais ainie k passer du serieux au plaisant , et le manque de suite et de liaison qui nuirait en France k ces recueils est un merite de plus en Anglcterre, oil neanmoins I'on accuse les Frangais de frivolite. On y traite tour i tour de politique, de philosophie , de litt6rature,- et I'csprit de bouf- fonncrie n'cn est point exclu. Les Melanges dc M, Warner renferment dcs anecdotes nouvclles racontees avee talent, quclques cbapitrcs bien ecrits et beaucoup de choscs communes. On peut citer au nombre des articles remarquables ceux qui sont intitules: liaison el Folic ; le Sceplic/uc ronrc/li ; Remarqttcs sur la decadence el la perle de la raison. L. S. 13.

MVRES ETlUiNGKUS. So/

n L' s s I K.

' i3g —FmnisckeSpravhlehre fur Finnen and nichl Finiien, ck-. Grammaiie finlandaise , k I'usage des Finlandais ct dcs etrangers , avec des considerations sur les rapports qui existent entre la langue de la Finlande et la langue hongroise , et un appendicc des mols semblablcs dans I'une et dans I'autre ; par Jean Strahlmahn. Saint- Petei'sboui'g , 1S20.

La langue des Finlandais sc distingue non seulement par son eu- phonic , nials encore par sa richesse. Outre les six cas usitcs dans presque toutes les autres langues , elle parvient , au moyen de pre- positions ajout6es aux mots, 4 designer les differentes destinations donnces a la chose ; elle distingue aussi dans les verbcs les formes causatives , frequentatives , diminutives , etc. L'auteur de cetle grammairc s'est acquis un titre 6 la reconnaissance des infatigablcs Allemands, enles mettant i memed'etudier une langue qui, jusqu'ici, n'a 6te connue que des Suedois. 11 a pris pour base de son travail le dialecte usite dans la prev6te de Sudkerholm , et principalement a Walkjxrwi, oil il est pasteur, parce que ce dialecte est le plus pur. Voici maintenant les reproches que i'on fait A son ouvrage. On pre- tend qu'il n'a point fait usage dcs travaux de ses devancicrs, ct qu'a peine il parait les avoir connus. II aurait, dit-on , tire un grand parli des ouvrages intitules : Mariini Ilodegus Jinnicus , 1689, ct Anvisri lil Finske sproirel, Stokolm , 1772 ; et c'est a 'tort qu'il s'en est tenu a Vhaels [Grammatica finnica , Abo, 1733). En second lieu, on reproche k M. Strahlmann de n'avoir pas mis i la fin de son livre des exercices de lecture ; les proverbes qu'il a donnis nc pouvant les remplacer, et la traduction en etant d'ailleurs inintelligiblc. Mais cc qui rachete tous ces d6fauts , c'est la comparaison du hongrois avec le finlandais, qui est suivie avec art ct avec profondeur, tant dans le corps de la grammairc que dans un appendice specialement des- tine i ces rapprochemens, que Ton avait aper(;us avant M. Strahl- mann , sans cependant que pcrsonne les cut encore traites comme il ponvient de le faire. Pn. Golderv.

DANEMARCK.

i/|0, llistoria Cyieiiesi inde a iernpcre quo condua uibs est usque ad cctalem qua in prouincicn fonnatn d Romariis esU rcdacla jCXc; par 5. i\'</-. Tiiuiue, Copcnhaguc , 1820; 111-8°=

obS, LiVftES ETRANGIiRS.

Cyrcnc utail un dcs ctablisscmcns grccs Ics plus importans , el journellemcnt ciuorc on dicouvrc dans ses environs des vestiges do son antique splendour : plus on approche de son enceinte , plus ces restes sont marquans. Le volume publie par M. Thrige est divis6 en deux sections; dans la premiere , 11 s'occupedes <ivencmens qui out accompagnt la fondation dc cctte colonie et donne sa description topographique ; dans la seconde, il en prescntel'histoire, et dans une partiesupplementairc, il traite de la constitution de Cyrenc, de son commerce et de ses rapports avec la Grcce. Les traditions sont fort amplcment developpees; mais I'auteur n'en embrasse pas assez la coherence : par exemple , il n6gllge d'indiquer que la race royale des Euphcmidcs descendait des Minyens d'Orchomene , circonstance a I'aide de laquelle tant de choses peuvent s'expliquer. L'auteur a de plus omis de rapporter la mention qu'Hesiode fait d'Euphemus. Quant i la fable de Gyrene , mere d'Aristec , elle est fort ingenieu- sement traitee ; mais on ne trouve pas un mot sur celle d' Aristae et d'Hercule , qui est 6galement cyrenaiqae et qui repr^sente si bien la lutte des colons grecs centre les indigenes , qui , toujours ciiassts par eux, reviennent toujours du fond de leurs deserts. M. Thrige classe leg rois de Cyrenc avcc une grande exactitude chionologique, Selon son calcul, Battus II est celui qui fut surnomme I'l'Ieu/eiix ; apres lui vicnt Arcesilaiis II ; puis Battus III , sous Icqucl Gyrene rcQut des lois plus favorables i sa liberie. Arcesilaiis III est celui qu: se soumet i Cambyse ; Battus IV, moins connu que les aulres, Juisuccede ; enCn, Arcesilaiis IV est celui que chanta Findare. L'ou- vrage est tcrmine par un examen du culte d'Ammon , que les habi- tans de Gyrene communiquerent k leurs metropoles , Thebes et Spartc. On rcgrette de ne rien trouver de relatif au temple d'Escu- lape, it Balanagra , oil il y avait nne ecole de medecine. En revanche, tout ce qui regarde le commerce ne laisse rien i desirer.

Pa. GOLBEBV.

ALLEMAGNE.

j4i Einrichiungder medizinischen Kltnik , etc. Organisation de la clinique medicale dans I'hijpital de I'universite de Heidelberg, avec quelques reflexions sur les maladies qu'on y a trailers; par M. L, W. H. CoNBADi, conseillcr prive du grand -due dc Bade, cl profcsseur de mtderine dc I'universite, etc., avcc la vue ct le plan

LIVIVKS jfeXRANGERS. 359

de I'hdpilal, graves. Heidelberg, 1820. In-8», <jG pag. Mohr el Winter.

Cette brochure donne la description de retablissement, accom- pagQ^ d'un plan lithographic de I'hOpital, qui contient vingt-huit lits pour les maladies internes, et plusieurs salles pour les personnes affectees de maladies contagieuses ou chirurgicales . Les ouvriers , les domestiques et les pauvres du pays, y sont admis de pr6f6rence ; les premiers contribuent k I'entretien de cet h6pital par une legcirc retribution. On y trouve aussi une salle de dissection et un amphi- theatre pour les lemons de professeur. Plusieurs paragraphes de cette brochure contiennent des priceptes tres-utiles sur la maniere d'exa- miner les malades, sur les devoirs du medecin , sur la maniire de prendre des notes pour faire I'histoire des maladies , et surtout sur la facilit*^ qu'on procure au jeune m6decin , de s'exercer en traitant les malades , sous la direction du professeur. Cette mithode merite- rait d'etre imit6e 4 Paris , pour former un plus grand nombre de bons praticiens. Les soins assidus sont sans doute I'Dbjet principal de tout traitement , auquel un professeur , qui veut tout embrasser , ne pourra jamais, & la longue, sufBre. Cette petite brochure contient aussi quelques reQexions sur les maladies qui ont ete trait6es dans la clinique , et fait honneur k M. Conradi , qui est deji connu par d'autres ouvrages infiniment estimables. Friedlandeh.

142 C). Darslellung der fabriken , etc. Tableau technologiquc de I'industrie nationale dans les 6tats autrichiens, par Etienne de Kehss. Vienne , 1820. Strass; 3 vol. in-S".

i43. Comrnenlationes Herodotea. Commentaires sur Herodotc, par le professeur FWt/e/-. Cheuzeb. Premiere partie. Leipzig, 1820. Chez Hahn.

II y a deji quinze ans , dans la preface de VArl historique chez les Grecs, M. le professeur Creuzer promit au public savant des com- menlaires etendus sur le pere de Thistoire. L'habile critique remplit sa promesse ; la premiere partie des commentaires vient de paraitre. Elle traite de I'Egyple et de la Grece , ces deux matieres in6pui- sables de voyages, de recherches et de dissertations de tout genre. Lc professeur allemand rend un juste hommagc aux savans anglais et fran^ais qui , depuis la glorieuse expedition fran^aise en Egypte , ont consacri Icurs veillcs h rcxplication des monumens divers qui contiennent tout cc qu'il nous est pcrmis de tavoir de I'histoire po--

360 LIVRES ETRANGERS.

litique, religieuse et privee de ces deux grands peuples. On ne pent m^connaitre , dans I'ouvrage de M. Creuzer, nne vastc lecture , des observations ing^nieuses ct des idees philosophiques. Mais on ne voudrait pas souscrire k toutes les hypotheses qu'il admet comnie d6niontr6es ; on regrette surtout que son livre ne soil pas compose plus m(5thodiquement. Malgre ce def'aut grave , qui se fait sentir a chaque pas, le lecteur qui aura le courage d'etudier ces comnien- taires, y trouvera autant d'interfit que d'utilite. Voici les points sur lesquels nous appelons surtout son attention : i" Dans le chapitre second , I'article sur les pille.i eonsacrees a la sepulture , sur les ca- racteres de la religion populaire , en explication du chapitre 2 do Livre u d'Herodote. Meme chapitre. De la Venus egjplienne; M6me chapitre. De V Immorlalite de I'ame , et de hi Meiempsy- cose chez les Egyptiens. Herodote , Livre 11, chapitre 123. Des Hiiroglyphes que I'on trouue sur les cercueils. Herodote, Livre i , chapitre i4o; Livre 11, chapitre 36; Livre iii, chapitre 16. 5" Des- cription d'une Momie , conservee aujourd'hui ix Darmstadt. Hero- dote, Livre n, chapitre iGg. H faut examiner la planclie qui rcpre- sente ce tnorceau d'antiquit^ jusqu'alors inconnu. La partic grecque est moins etendue que la partie egyptienne , et ne contient ricn d'important. 11 faut pourtant consulter le passage oil M. Creuzer explique pourquoi les Lacedemoniens regardaient le salut de leur empire attache 4 la possession du corps d'Oreste. Herodote, Livre 1 , chapitre 67 , 68. V. C.

i44> De Thesmophoriis disseruit ^<luguslus'WEiL.KVER. Wratcs- laviie , 1S20.

La philologie n'est pas uniquement consacr6e aux discussions de mots ; souvent clle est une partie essentielle de I'histoire , en ce qu'elle nous 6claire par de savantes dissertations sur les mceurs , sur les usages , sur la religion des peuples dc I'antjquite. M. Wel- lauer vient d'en donner une nouvelle preuve , par la disserta- tion que nous annon^ons. Aristophane nous a laiss6 une coniedic intitulie ©f^/zoipofia^ouo-aj , que Ton ne pourrait comprendre i I'aide de recherches purement grammaticales; c'est le sujct lui- niSme qu'il faut expliquer. Mais, oil le lecteur puiserat-il des ren- seignemens sur les fetes appelees Thesinophories? Ricn de ce que Ic tems a respects n'est specialement consacre ix tclaircir ces mysteics ; c'csltout au plus si rbymne dc Callimaquc «• Ceris pcut faire uaitre

LIVRES ETUANGERS. 361

quclques conjectures. D'ailleurs, il n'est pas sftr que les usages d'A- lexandrie soient les ni6mes que ceux d'Athunes : il faut faire la part de I'intervalle et du terns qui les separe. Mallieureusement encore, les livres de Melanthus, de Menandre, de Philochorus et d'Arignote ne nous sent point parvenus. lis contenaient des traites importans surces matieres, qui paraissent devoir nous rester 6ternellement ca- chces; car, outre I'obscuritii du terns, il faut encore percer le voile epais jete sur les mysteres par la superstition. Aristophane, toujours occupe i faire rire aux depens des choses sacrees , n'est pas un guide bieu sur. Si nous voulions connaitre une tragedie inipo- sante, ce n'est point dans la parodie que nous irions en etudicr la disposition. 11 faut done prendre son parti , et se resoudre a ne voir les choses que par leur c0t6 exterieur ; cela pose , on doit beaucoup k la sagacite de M. Wellauer. II s'est appuye sur des bases solides , en faisant usage des travaux de Meursius , de Corsinus , de Sainte- Croix, de M. Greuzer. II regrette , avec raison , de n'avoir pu sc procurer la dissertation inseree par M. Laporte du Theil au treiziemc volume des Mcnwires de V Academie des inscriptions. M. Wellauer pense que jamais, quels que soient nos efforts, nous ne fixerons notre choix entre les differentes versions qui existent sur I'origine des Thesmophories. II examine ensuite quels jours du mois de Pua- nepsion etaient consacres a ces fdtes , et concilie., i ce sujet, Pho- tius ct Alciphron avec Aristophane. L'espace nc nous perniet pas de faire connaitre a nos lecteurs I'usage qu'il fait d^un passage d'llesy- chius et d'un autre de Plutarque , pour determiner le nombre de Jours assignes aux Thesmophories, la denomination et les rites de chacun. L'auteur ne se borne pas aux seuls usages d'Athenes ; il recherche ce qu'etaient les fetes de Ceres chez les autres peuples, et notamment chez les Romains; puis, dans un chapitre intitule Cor- rolarium, il discute plusieurs endroits du texte d'Aristophane. Ce qu'il y a de plus remarquable dans cette partie de I'ouvrage , c'est la manifere ingenieuse avec laquelle , sans aucune transposition , il change absolument le choeur qui commence au vers gSg. Nous re- commandons la dissertation de M. Wellauer i ceux qui aiment I'an- tiquite. Ph. GoLBiSBy.

»45. Dionjuii Ilalicarnensis de compositwne verborum liber, e copiis bihliothecw regiwMonacensisedidil F.G;ei,lbr: accedunt variK

362 LlVRIiS ihRANGERS.

IcLlivnes in Thetmsui orutiunibu-i qulLusdam ex codicc Monacensi. excerplce. Jena, in-S".

Denys d'Halicarnasse est genuralement connu conime historien ; peu de personnes savent qu'il a ccrit un traitii de giammaire sur la composition des mols , et que ce traits est d'une grande importance pour I'clude de la philologic. M. Goeller, qui a trouv6 dans la bi- bliolheque royale de Munich un exemplaire de I'edition des Aides, cnrichi de notes et de variantes de la main de Victorius , a con?u I'heureuse idee de faire jouir le public de cette decouverte. L'on Toit avec plaisir que ces variantes confirment , eu beaueoup d'en- droils, les conjectures'dc Sylburg, de Reiske et de Scba;fer : sou- vent aussi, elles Iburnisscnt un sens tout nouveau. Un philologue est heureux de pouvoir, le premier, ramener un passage i son etat primilif; mais il ne faut pas que le desir inimodere de restituer les mots Teloigne de la Vulgate sans dlscernement ; et c'est ce qui ar- rive quelquefois i M. Ga;ller. Gependant , il est d'autres passages oii il I'a respectee mal k propos; par exemple , k la section pre- miere , page 2 , Sojpiv to/ e'yce Tf'xvov (pix£ , toC7o iiSay.i, Les va- riantes de M. Gaeller devaient ici lui faire adopter une conjecture jngcnieusede Sylburg, puisqu'elles la confirment. Ce savant pensait que Denys d'Halycarnassc ne parle pas ici lui-meme , mais qu'il cite Homere. Eneffet, en ajoulant apres Tcila conjonction xai , on re- trouve en entier le vers laS du quinzieme livre de I'Odyssee. 11 iallait done se rendre a Tevidence et imprimer ce vers comme ci- tation. En g<5neralj on rcproche a I'editeur de s'etre borne i ras- sembler des variantes sans en discuter la valeur. Ph. Golb^ry.

'46. Die Slufen der Bildung. Les degrcs de la civilisation , poeme, par G. Scevteighcieuser, professeur de littferature grecque i la faculte des leltrcs de Strasbourg. Briinn, 1821 ; in-S°.

Place sur les frontiercs de deux nations egaleraent eclairees , ap- partenant k I'une comme k I'autre par la connaissance approfondie qu'il a de leur langue et de leur litterature , M. Schwcighrcuscr fils vient de cucillir un double laurier. Dans le terns meme oil I'lnstitut de France lui decern.iit la premiere des medailles dcstinees par le ministrc de I'interieur aux autcurs des meilleurs memoires sur les antiquites nationalcs, il publiait a Briinn un poeme. que Icsrcdac- tcurs des Fejerslunden se sont empresses d'inserer dans Icurrccueil; ct, d'un autre cole, cct infaligabln savant iisait, a la societe des

LIVRES jfiTRANGERS. 363

sciences do Strasbourg, un diecours sur ce quii la ai^ilisalion de ['Europe doit a I'ancienne Grcce. Nous n'occupcrons aujourd'hui nos lecteurs que du poime allenaand. Le premiei- chant seul a paru; il traite de la creation. Voici la division des autres : Ic second sera consacre au monde primitif ; le troisieme aux mystiires; le quatrieme ^ la civilisation ancienne ; le cinquieme au christianisine ; enfin, le sixieme i la civilisation nouvelle. Dans le premier, I'histoire an- cienne est coDsideree tout 4 la fois sous le rapport des traditions sa- cr6es ct sous celui des sciences , et de ce qu'elles nous ont appris sur les premiers jours du monde. L'auteur pense que ces sciences , Join de renverser les traditions , n'en sont au contraire qne le com- plement naturel et la veritable explication ; que c'est done a tort que des ames timor^es ont cru que leurs progres nuiraient a I'objet de k'ur veneration. La concordance des traditions chez les differens peuples, dont chacun les a eaveloppecs d'idees qui lui etaient pro- pres, est pour M. Schweighauser une grande preuve que la divinite s'est manifestee aux bommes. Lts notes sont rempJies de savantes rechercbes; on y rappelle une civilisation anterieure 4 celle des peuples connus; et, pour I'etablir avec certitude, M. Scbweigbceuser se sert de differens textes de I'antiquite , et surtout de Diodore de Sicile , qui parle d'un vaste empire atlantique. " Quelques recits , que peut-Ctre nous avons mal compris, dit l'auteur du nouveau poeme , donnent des origines asiatiques 4 tout ce que nous connais- sons. Mais les ancicns , pour lesquels se deroulaieot encore les tra- ditions d'un monde primitif, n'ont pas vu les cboscs ainsi : ils indi- quent le plus sou vent I'Afrique comme le berceau de la civilisation; ils designent des peuples qui, del'occident decette partie du monde , auraient porte leurs lumieres dans les pays de I'Europe qui, dans ses premiers tems, n'en etaient point separcs par la mer. Nous ne Savons pas bien si M. Scbweigbceuser fera triompber ses opinions sur cette antique civilisation occidentale ; mais nous pouvons assurer qu'elles sont tellement ingenieuses ct tcllement suivies, qu'il ne pent manquer d'avoir pour lui tous ceux que la lecture agreablo d'un ouvragc attache ordinairement a l'auteur. On se tromperait si Ton nechercbait, dans celui-ci, que I'agrtable ; le savoir le plus profond , les idees les plus philosophiques , doivent engager les eru- oits cuxmCmes 4 lire le poeme des Stufen der Bildiing, que j'ap- ptllerais volonticrs le pcemc de la pcrferiibiJile , si Ton n'ctait accou-

S6h LIVRES ETRANGEKS.

funic :i ciitciidic , inal ;i piopos, pai' cc luol , quclipic chose d'oppoi* aux idtScsrellgietiscs. I'u. GolbiSry.

SU ISSli.

147. Les Lefonsde la parole de Dieu sur I'etendue et I'orieine du mal dans Vhommef par C. E. F. Moolihi* , pastcur de I'tglisc de Geneve , ut membra de racademie de Besan^on. GencTc , 1821, chei les principaux libraires ; Paris, Treuttel ct Wurli , rue de Bourbon, n" 17. Un volume in-S° de 5iS pages. Prix, 5 fr. 5o c.

Get ouvrage est spdcialement consacre i la theologie ; I'auteur, en Ic coniposant, a eu surtout en vue les candidats au ministere evan- I6gique; il le declare, des les, premieres lignes : » Jcuues serviteurs de J.-G., dit-il , vous qui avez mis le pled sur les premiers degres dc I'autel , c'est a vous particulieremeui que je consacre ces lei^ons. » Nous nous bornerons k dire quelques mots de leur objet, L'autcur considfere d'abord I'excellence de I'liomme et sa dignite premiere au milieu de la creation , dont il est le roi ; puis il nous le montre souillu de la tache originelle , ct il developpe a nos yeux cet etat dc faiblesse et de misere iutellectuelle et physique , oil la chute du pre- mier homme a jete toutes les generations. Passant cnsuite a celte grande question , si souvent debattue parmi les philosophes : I/homme nait-il bon? il s'attache d'abord a combattre les prin- cipes de J. -J. -Rousseau et des autres ecrivains qui ont voulu decider la question avec les seules lumieres de la raison; puis, declarant qu'on ne pent reconnaitre I'origine du mal qu'au moycn de la reve- lation, iltrouvecetteorigine dans la seduction desmauvais angesetlc peche du premier homme. Apres avoir consacre plusieurs chapitres .i I'examen des textes sacris dont il s'appuie, I'auteur cherche dc nou- velles preuves dans les traditions anterieures au christianisme , sur r^tat primitif de rhomme et sur sa chute. Les Chinois , les Egyp- tiens, les Perses, le Phenicien Sanchoniaton , le Chaldeen Berose , les auteurs grecs sont tour tour invoquiis par M. Moulinie. Nous avons indiqu6 , le plus brievement possible, I'Dbjct dc cet ouvrage ; nous n'avons ni approuve ni combatlu les doctrines de I'auteur ; nous laissons ce soin aux tlieologiens ; nous donncrons cependant de juslcs elogcs a la purclc de la morale qu'il professc; elle est digne d'un homme que Tcglise de Geneve regardc commc iju dc ses paslcuis les plus jnstruits cl les plus jcspcelablcs. M. A.

LIVRES miRANGERS. 3G5

ITALTE.

i4S. La P'lta di Gesa-Chrislo , etc. La Vie de Jesus-Christ pt sa religion; par le P. Antonio Cesari. Verone, 1S20, 5 vol. in^"-

Get ouvrage se fait rcmarquer par le sujet et par le style. L'auteur, tris-connii par son dictionuaire italien et non moins zele pour sa langue que pour sa religion, seinble s'eti-e propose pour but, en tcrivant la vie de Jesus-Christ, de faire sentir combien la plupart des Chretiens s'eloignent de Icur modele , solt dans leurs pratiques, soil dans leurs maximes.

lig.—L'Oracolo di Delfo , etc. L'Oracle de Delphes, on Consi- derations de Francesco Torriceivi, sur I'Oracle de Delphes du conite Francesco Men^otti , etc. Milan, 1821 ; Gio. Silvestri.

Nous avons annonce I'ouvrage de M. Mcngotti sur i'oracle de Delphes , qu'il regarde comuie une institution politique dirigee par le congres des amphictions. RI. Torrlceni prouve d'nne nianierc assez convaincante que les amphictions n'etaient pas une institution politique federative ; qu'il n'y eut jamais choz les Grecs de sem- blables reunions avant la federation des Acheens, et que I'oracle de Delphes , comme tous les autres , ne fut qu'une institution entit:re- nient religieusc , qui ne dut ses succes qu'a la superstition des peuples, a I'obscurite des oracles et i I'imposture des pretres. L'au- teur fait aussi quelques rapprochemens entre la pylhie et les partisans du magnetisme et du mesmerisme.

i5o. Famiglie celebriitaliane. Families celebres d'ltalie^ par Pompeu\jm:k, 3' et 4" livraisons. Milan ,1820, Paolo-Emilio Giusti.

L'auteur de cet ouvrage patriotique Ic continue avec heaucoup de soin. La premiere de ces deux livraisons traite des Simo- netta de Calabrc et des Gallio de Come; la seconde , de la famille Trivulzio de Milan , et surtout de Giangiacomo Trivulzio , surnomme le Grand, dont il est souvent question dans I'his- toire de France. Cet ouvrage est interessant par I'exactitude et la rapidite des recits , par le choix des moniimens ef par les reflexions qui les accompagnent.

i5i. Delia Letteralura iialiana , etc. De la Litterature ila- licnne , dans la seconde moitie du xviii"^ siecle ; par Camillo Ucom. firescia, 1820; i"^' volume.

Le comte J, B. Corniani avaif ronduit les F-ccoli della Iclteralura

3G6 , LIVllES KTRANGERS.

iLaiiaiui jujqu'6 la moilii du xvni'' sitcle. M. Camille Ugoni a entre- pris de coritimier I'ouvia^'c , A paitir de cette epoque ; mais il lui a donnti, avec un nouvcau titre ct plus d'etendue, un caractirc tout different dans Ics analyses et dans le style. Le premier volume que nous annonrons contient dix articles , consacres i Giuseppe Tartini, Ruggero Giuseppe Boscovich , Francesco Algarotti, Antonio Geno- vesi, Gasparo Gozzi, Gian-Carlo Passeroni , Giuseppe Baretti, Ap- piano Buonafede , Prospero Manara et Paolo Gagliardi. Lorsque de nouvelles publications nous fourniront Toccasion de revenir sur cat ouvrage , nous rectifierons quelqucs erreurs oil tombent souvent Ics biographes etrangers , qui icrivent pour I'ordinaire avec trop d'assurance ou trop peu de soin sur la litterature et les ecrivains de ritalie.

i52. Sul merito traglco, etc. Sur le meritc tragique de Vit- torjo Alfieri; memoire de I'avocat Gaetano Mabb&, professeur & I'universite de Genes. Milan, iSai , Gio. Silvestri; in-8°.

Ce memoire a ete couronne par I'academie royale des sciences de Turin , qui a donn6 i I'auteur une midaille d'or , prix propose par M. le marquis Lodovico-Arborio Gattinara. M. Marre s'est cru d'a- bord oblige d'attaqucr la doctrine romantique d'A. W. Scblegel sur le genre tragique. II s'etudie k en relever I'incoherence et la singu- larite , et souvent il se sort des principes meme employes par I'auteur allemand pour le refuter completement. II presente les tableaux de Shakespeare , cit6s par M. Scblegel i I'appui de son sys- t£:me, et il en montre la confusion, la contradiction et le ridicule. Mais ce n'est pas li, d'aprfcs uotre auteur, ce qui constitue le genie du poete anglais; cesdel'auts nppartiennent k I'epoque dans laquelle il a vecu. Tous les efforts de son genie ne purent le faire triompher des imperlectionsde I'art encore dansl'enlance. M. Marre determine en- suite le caractere du systeme tragique d'Allieri, fonde, i I'exemple des Grecsct plus encore d'apres I'autoritede la raison et de I'experience, sur la plus grande simplicite. II le justifie des imputations injustes 6u exag^rees qu'on lui a i'aites 4 I'egard des plans , des personues et de son style. II prouve cnfin que , sans s'eloigner des maximcs fonda- mentales des Grecs ou des auteurs classiques , il a su donner i ses pifeces cette originalite qui , le faisant distinguer de la foule des imitateurs serviles , lui assure un rang immortel p^trmi les veritables ginies du parnnsse ilalicn.

LIVRES l^TRANGERS. 3G7

i53. Tribiiio alia memoria , etc. IIommaq;e rendu i la me- moire du cclfcbre astronome le chevaliei- Antonio Cagiioli de Verone. Vdrone, 1821 , a la soci6t6 typographiqtie.

Get opuscule est un recueil de douze sonnets ; ils meritent d'6tre mentionnes , soit k cause du savant astronome auquel ils sont adress^s, soit h cause du talent du poete. G'est le chevalier Ippolito PiNDEMONTB, qui a consacre ces vers, pleins de sentiment et de m6- lancolle, k son concitoyen et son ami. F. S.

154. Iliadis fragmenta antlquissima cum picturis; item srholia i^dleraad Odjsseam; edenle Anp;eloM.kiOy etc, Madiolani, regiis typis, 1819. 1 vol. in-folio , avec 58 planches.

Nous avons fait mention , dans une notice sur les decouvertes de M. I'abbc Mai, de ces fragmens de I'lliade, dus aux recherches de ce r; vant antiquaire , si avantagcusement connu par la publication d'autres anciens manuscrits. Les peintures occupent avec le textc du sujet de chaque tableau la moitie de ce precicux volume. Elles nc se rapportent qu'a dix-huit des vingt-quatre chants de I'lliade ; il y a done lieu de croire, avec M. I'abbe Mai, qu'elles sont du qua- tri^me , cinquieme ou sixitme siecle de notre ero, ou meme d'une epoque plus reculee. L.

ESPAGNE.

i55. Metodo de cuentay razon , etc. Methode k suivre dans les comptes, pour les livres i partie double; par do'ni 7fa/7Z072 Valdes. Madrid, 1820. Perez et Erun.

Cetouvrage, tros-estime , a ete choisi comme livre elimentaire dans les icoles de commerce de Malaga et dans quelques autres.

i56. Memoria presenlada a las cortes , etc. Memoire sur le credit du papier-monnaie; par dom Finnin Nafabrondo. Madrid, 1821. Bailo.

Le but de I'auteur est de prouver que , si I'on adoptait les moyens qu'il propose, le credit deviendrait chaque jour plus florissant, et la dette nationale se trouverait bient6t <;teinte.

Sj. Obseruaciones , etc. Observations sur le plan du credit public, pr6sent6 aux cortfes , sur I'emprunt, sur la loi concernant la liberie de la presse , et particulierement sur les jures qui sont cr6es par cette loi pour 6trc jugcs du f;iit ; par dom Thomas Moohb d'AL- frtn/c'. Madrid, 1821. Sanz. i vol. in-8°.

368 LIVRES liTRANGERS.

Nous nc I'crons sur cet ouvragc qu'unc scule obscrvatioD , c'esl que tous ccux qui counaisscnt I'ctat actucl ties lumiires en Espagne , doivcnt Ctre convaincus que des jures elus par le sort, entre ceux qui sont compris dans la liste faitc par la municipalitc d'une ville , chef- lieu do province , nc seront que tres-raremcnt capables de jugcrsi un ouvragc, conccrnant les dogines, le culte, la discipline ct la morale religieuse , est criminel ou non. Nous n'avons pas besoin de faire observer que cette remarque ne sc rapporte qu';\ un fait particulicr ct h la situation actuede de I'Espagne, et que nous n'entendons point en faire I'application au systfeme general du juge- nient par jury.

i58 (*) Memorias , etc. M^moires de I'Academie de This toire d'Espagne, etablie k Madrid. Cinq volumes in-4° , conteuant plusieurs mtmolrns particuliers, tcrits par les memhres de laJitc academic, sur divers sujets cuucciuaui I'histoire, la chronologic et la geographic d'Espagne. Madrid, 1S21 , k I'academie.

iSg, Coleclion, etc. Collection des lois castillannes, faitc dans le Code des sept parties , par le roi Alphonsc le Savant, i I'aca- demie de I'histoire. 5 vol. in-4°.

Le teste de cet ouvrage a" etc corrige d'apres un grand nombre d'exemplaires manuscrits tres-ancicns dont on donne une notice exacte.

160, Demunslracion historka, etc. Demonstration historique de la valeur des monnaies dont on faisait usage en Castille sous le roi Henri IVet de leur rapport avec les monnaies duregne de Charles IV; par don Liciniano Saez ; i I'academie de I'histoire ; 1 vol. in-f".

i&i. Ensajo., etc.— Essai d'interpretation des -alphabets in- connus dont on a fait usage pour les legendes des monnaies ancienncs d'Espagne ; par don Louis-Joseph Velasqcez ; a I'academie de I'his- toire ; 1 vol. in-4°.

i6i.—Memoria hislorica, etc. —Memohc historique, dans lequel on recherche quelle a etc en Espagne I'opinion nalionalc i I'egard de I'etablissement, et de la conservation du tribunal de I'inquisition; pardon J«j7!-v^«<owe Llorente ; .^ Tacademie de I'histoire ; 1 vol.

in-S">.

i65. Diserlauon hisiorica , etc. Dissertation historique sur la question de savoir quel parti prirent les Espagnols dans les an- tirnnes gurrrcs des croisadcs contrc les mahometans dcl'Oricnt;

LIVRES ETIl ANGERS. S6D

paV don Blarlin Febnandez (feNai/arrete ; kl'academie de I'histoire; brochure in-4*'

164. Elogio academico , etc. Eloge acadimique de la reine Isabellede Gastiile, dite la Cat/iolique, par don Diegue ClemehciK', membre des cortes d'Espagne ; k I'academie de I'histoire ; brochure in-4°.

i65. Memoria, etc. Memoire sur les divertissemens publics; par don Caspar de Tovellanos ; k Tacad^mie de I'histoire ; brochure in-4°. Llobente.

ROYAUME DES PAYS-BAS.

166. De la necessitede reformer renseignement medical dans la Belgique; par D. De la Have, docteur en medecine, avec cette epigraphe : o La societe enti6re est interessee i ce que rhomtne de I'art ait fait de bonnes etudes, et que sa capacite soit bien et dument reconnue : c'est un malheur bien grand pour I'humaDite, quand celui qui est destine pour la secourir dans ses souffrances est plus dange- reux que la maladic. » Klcvsens, discours prononce a I'ouuerture de son cours. Bruges, 1821. Iniprimerie de la veuve de Moor et fils. Brochure de 33 pages.

Le titre de cet ecrit pourrait faire croire qu'il existe un enseigne- ment medical en Belgique; niais on sera bientot detrompe, si I'on veut se donner la peine d'en parcourir quelques pages. On compte , dans une etendue de trente lieues, trois universites , et chacune d'elles est composee de trois professeurs qui sont charges de I'ensei- gnement de toutes les branches de la medecine. M. De la Haye prouve qu'il est impossible a ces professeurs de remplir les devoirs qui leur sont imposes , et que toutes les sciences qui composent I'en- semble de I'art nesont point ou sontmal enseignees. II voudrait que les trois universites fussent supprimees,et qu'on etablit une seule 6cole de medecine sur le modele de celle de Paris , en n'assignant toute- fois qu'un seal professeur par chaire , ce qui est presque toujours suf- fisant. 11 repond victorieusement aux objections qui ont ete faites, et dont quelques-unes sont vraiment pueriles, telles quecelle-ci, par eXempIe : « On a dit qu'en n etablissant qu'une seule ecole de mede- cine pour toute la Belgique y any reunirait un trop grand nombre d'eleves; le grand nombre detruisant toule Emulation , pa rce qu'a- lors lesileves ne peufentplus se connaiire ni s'estimer. L'autcur

Tome xi. 24

370 LIVRES ETUANGERS.

d^moQtre 6galeinent la necessity d'titablir I'ecole de inedecine dan* une grande ville , parce qu'alors seulement on est 6 port^e d'avoix des li6pitaux oil Ton pent faire devant les tileves rapplication des differentes theories qui leur ont 6t6 enscigntes. II ne doute pas qu'un fetablissement de cette nature ne pOt un jour rivaliser avec les ecoles franfaises , qu'il prend toujours pour terme de comparai- SOD. Gette brochure, inspir^e par des sentimens d'honneur national et d'amour de Thumanit^, doit fixer I'attention du gouvcrnement.

Damibon , D. M.

167. Verhandelingen , etc. Memoires de U premiere classe de I'institut royal des Pays-Bas , tome V. Amsterdam , 1820. Pieper et Ipenbuur , in-4° de 5 1 2 pag.

Les huit memoires contenus dans ce volume , sont relatifs ^ la m6- decine et k I'art veterinaire.

168. Bydragen , etc Recueil de pieces roncernant I'icono- mie politique du royaume des Pays-Bas, par Gisbert Charles Van HocENDOBP. Tom. IV, 2* partie. La Haye, 1S20; Jn-S° de 129 pag.

M. le comte de Hogendorp, quia joue un role trfes-honorable dans la regeneration politique de la Uollande, continued bien m6riter de la chose publique par le recueil que nous annon^ons , et oil il fait preuve d'un excellent esprit dans des discussions lumineuses, remplies d*int6ret et d'utilite.

169. Algemeene Geschiedenis , etc. Histoire universelle, en 241ivres, par Jean Van Mclleb, continuee apres son decfes , par Jean-George Mcller, son frire , traduite sur la 3" edition de I'origi- nal allemand et enrichie de suppl6mens et de notes par N. G. Van Kaupen. Tom. I", Harlem, 1820. Bobn, in-S" de 610 pag.

Cette traduction est enrichie de notes tres-interessantes.

170. Carthago , etc. Carthage, considcree dans ses relations politiques et commerciales, par A. H. L. Heeren ; trad, de I'allem. et enrichi d'observations,parG. Dornseiffeiv. Amsterdam , 1820. H6- ritiers Gartman , in-8'' de Sog pag.

Le nom de Heeren suflit pour recommander un ouvrage de la na- ture de celui-ci. La traduction ne pouvait etre conCee i un ecrivain plus capable de la bien faire. M. D. S. a detacht ce tableau de Car- thage d'un plus grand ouvrage de M. Heeren, consacr^ aux princi- pales nations de I'ancien monde.

'71 (*)• Iieknopiegeschiedenis,cXc. Histoire succincte des lettres

LIVRES ETRANGKRS. 371

'■t des sciences dans les Pays-Bas , par N. G. Van Kasipex. Tome I^^. Amsterdam, 1821 , veuve Allart et compagnie ; in-8°.

Cette histoire manquait ; I'liomme de lettres qui I'annonce 6tait digne de I'entreprendre. Elle ne formera que deux volumes ; ce qui nous fait craindie qu'elle ne soit un peu trop succincte.

172. Gedachien , etc. Pensees de Jean Paul, par J. A. Wbi- i.AND. Rotterdam, 1820, Immerzeel; 2 vol. in-S".

J ean-Paul-Frederic Richter , beaucoup plus connu sous les noms de Jean-Paul , est un des beaux esprits du xviii' siecle en AUe- magae. Ce qui le caracterise , c'est cette bizarrerie , cette causticity, que les Anglais appellent humour et qui distingua Rabelais et Vol- taire en France , Cervantes chez les Espagnols , Swifft et Sterne chez lies Anglais, Wieland et Nicolai chez les Allemands, Francklin chez les Americains. Les Hollandais sent descendus au-dessous du genre , en se jetant dans le bas comique : leur litterature a aussi ses Tenier, ses Ostade, et meme ses Jean Sleen. M. If^e'iland^ qui a fait lui- meme ses preuves dans le genre dont nous parlons par son Scrible- riana, a imagine d'extraire des nombreux ecrits de Jean-Paul ses pensees les plus piquantes et les plus originales. II fera penser, il fera rire , parfois meme il laissera quelque chose a deviner, et son but sera recnpli.

173. Mengelingen, etc. Melanges de la soci^te litteraire etablle ix Bruxelles, sous le titre de Concordia. \" recueil ; Bruxelles , 1820, Stapleaux ; in-8° de 2S6 pages.

Quatorze articles ( dont deux seulement ecrits en frangais ) com- posent ce premier cahier. Nous y avons distingue , un memoire sur la chronologic mathematique , par H. Somerhausen ; 2" un discours sur le caractfere et la mort de Caton le jeune , par G. T. Baumhauer ; un discours de N. G. Van Kanipen , oil I'on trouve un tableau du siecle de Fredtric-Henri , stadhouder des pro- vinces-unies des Pays-Bas. L'auteur a consid6re cette epoque princi- palement sous le rapport de I'administration de I'excellent prince que nous venons de nommer.

1-4. G edich ten. Poisies de A. C. W. Staring. Zutphen , 1820, Thiemen ; in-8'> de 356 pages.

M. Staring est deja compte parmi les veterans du parnasse hollan- dais ; mais sa muse ne se ressent point de son 3ge. Ses premiers essais pariirent rn 1789. II a nne manirrc a Iiil, et le caractere de son

2A*

372 LIVRES ElKANCiERS.

talent est la facilitc , la bonhomie , la naivete. Le recuell que noiijf annoncjons se compose de cantates, de cantiques sacr^s, de poesies melees, de contes, d'epigrammes et de deux ^pitres en prose et en vers. M.

175, jilgerneen zajnenvallend rnaandwerk Irene, etc. Irene, ouvrage mensuel contenant , outre Ics articles originaux , un choix d'articles tires des journaux etrangers ; par T. O. ScHiLPEBooaT. N" 1, juillet 1821. Amsterdam, veuve Diederichs et fils ; in-8° de io4 pages.

Ce nouveau recueil pourr4 devenir interessant , si le choix des ar- ticles est tonjours fait avec soin, et si, independamment des traduc- tions de journaux strangers , le r^dacteur fournit aussi de bons articles sur la litterature hollandaise moderne , qui n'est pas assez connue hors des Pays-Bas. Dans le premier num6ro qui tient de pa- raitre , 11 n'y a qu'un seul article original : Pensees sur la soucerai- neti el la representation nationale ; tout le res'te a ete choisi dans les recueils p6riodiques fran^ais , anglais el allemands. La Bibliolheque ' uhiverselle a fourni un article sur Velat ecclesiaslique de I'Angle- terre; la Revue encyclopedique a 6te mise i contribution pour les recherches dhistoire naturelle failes au cap de Bonne- Esperance. Dans le Quarterly Review, le redacteur a pris un exposi de la situa- tion acluelle des Grecs; les principaux journaux aWemanAs^V Hermes , leMorgenblatt, le Conversationsblatt de Leipzig, \cs Ephcmerides gio- graphiques de TVeimar ont egalement donne un choix d'articles inte- ressans. L'Irfene de M. Schilperoort est destinee a embrasser toutes les branches des sciences et des lettres. Le premier numero est ter- mini par tine revue des derniers ouvrages litteraires de I'etranger, et par un choix de petites pieces de vers, d'anecdotes, trails de carac- tfere , pensees , etc. D g.

LIVRES FRA^CAIS.

1 76 {*).—Dictionnaire des sciences naturellesj dans lequel on traife mithodiquement des dilTerens elres de la nature , consiJ6r6s soil en eux-memes , d'apres I'elat acluel de nos connaissances , soil relalive- ment i I'utilitfi qu'en peuvent retirer la m6decine, I'agricullure , le commerce et les arts; par plusieurs professeurs du Jardin du Roi et desprincipales ecoles de Paris. ( 1821 , T. XIX, gla-gbz. )— On sous- crit i Paris , chez Lenormand , rue de Seine , n" 8.

LIVRES FRANCAIS. 373

On nomme sciences naturelles I'ensemble de toutes les connais- sances acquises et comparees sur les productions et les phenomfenes de la nature. Sous ce titre, sonl comprises non seulement TA/stozre Tialurelle, mais celle des met^ores, de I'electricite, du magn6tisme, le cours des astres , les proprietes de I'air et des eaux , la chimie , ranatomie, etc.; tel est, dans I'etat actuel des progres de I'esprit bumain, la connexion qui lie les differentes branches des connais- sances naturelles, qu'il a'est plus permis a celui qui veut les acquerir d'ignorer leurs aOinit^s et les rapports intimes qui existent entre elles. Sans ce rapprochement, on n'apprend rien de positif; on ne salt rien d'exact ; on ne con9oit rien clairement. G'est 4 ex6cuter ce vaste plan que s'attachent constamment les professeurs distingu6s , les hommes sup6rieurs qui concourent k la redaction du Dictionnaire que nous annon9ons. Aucune speculation de librairie , aucune Tue d'intergt ne parait mel6e a cette imposante entreprise ; point de pre- cipitation dans la publication de I'ouvrage ; les articles qui le rem- plissent semblent etre elabores, comme les objets de la nature dont ils offrent la description. Les decouvertes nouvelles y sont scrupu- leusement presentees et appr6ci6es au flambeau d'une saine critique. Le tome dix-neuvieme , qui parait depuis pen , contient les produc- tions et les phenom^nes de la nature, commen^ant paries syllabes CIA i GHZ. Nous regrettons de ne pouvoir citer tons les articles remar- quables de cette livraison ; mais nous sommes persuades que I'homme du monde, comme le naturaliste , lira avec beaucoup d'in- teret ceux de M. Bbabo sur les glaciers, les globes de/eu, la roche primitive appelee gneiss , sur le grenat et les gres. Le zoologiste sera satisfait de la description nouvelle , trfes-exacte et tres-detaillee , que M. DE Blainvillb donne d'un tres-joli petit moUusque, de la longueur d'un pouce, de couleur bleue, argente sous le ventre, qu'on nomme Glaucus et qui se trouve dans les mers des pays chauds et dans la M6diterranee. Nous citerons aussi, comme tres-instructif en zoo- logie, I'article Grenouille de M. Cloqcet; ces reptiles, de la famille des batraciens, sont examines sous le rapport de leur organisation, de leurs moeurs et de leurs habitudes ; les organes de la locomotion , des sensations < de la digestion , de la circulation , de la respiration , de la voix , des secretions et de la generation , sont analyses s6pare- ment et expliques avec precision et clarte. L'expose dc leurs moeurs et de leurs habitudes est extremement curieux et d'un grand interei.

o7A LIVRIvS riUiNCAIS.

pour ciux qui iiabilenl la caiiipagiie. En cliimie, Ics ailklcs Glucine (base saliCable decouverte dans Vimeraude), Gluten ct Gu mines , sont traites par M. Chkvreul de la maniire la plus satisfaisantc et la plus detaillee. De nombreux articles de botanique de M. Poihbt, parini lesquels on distingue le Grenadier et la Grenadille, inte- ressent les amateurs de la plus aimable des sciences. M. db Jussieu a traite I'arlicle Graniinee avec cette etendue de vue , celte precision et cette perspicacite qui le distinguent. Un nouveau genre de la fainille des algues marines articulees , le Griffitsia du professeur su6dois Ayabdh , a fourni i M. Leman I'occasion d'un article qui doit fixer I'attention des amateurs de crjptogamie.

Nous terminerons en rappelant que le Dictionnaire des sciences naturelles, vaste tableau de la nature, est sous la direction generalc de M. GDviKa,et qu'il est accompagne d'un ^//as representant avec la plus parfaite exactitude les plantes, les oiseaui, les poissons, les insectes ct les reptiles. L'ex6cution de cet atlas est conCee a M. Tdrpin. B. G.

'77 (')• Jlefrni vegetabilis Systema naturale , sive ordines , genera etspeciesplantarum, secundum methodi naturalisnormas di- gestarum el descriptarum ; auctore A. Pyramo Decandolle ; volumen secundum sistens ordines sex, nempe Berberideas, Podophylleas , Nympbacaceas, Papaveraceas , Fumariaceas et Cruciferas. Paris, 1821. Treuttel et Wiirtz, rue de Bourbon, n". 17 ; Strasbourg et Lundres , meme maison de commerce. Un fort volume grand in-S" de 745 pages ; prix i5 fr. , etfranc de port 17 fr. 5o. ( P'qy. le Comple rendu du premier volume ci-dessus , torn. V, pag; SS-gj).

Les decouvertes botaniques se sont succedees depuis trente ans , avecunesigrande rapidite , dans tous les pays , que, depuis la publi- cation des ouvrages de Wildenowetde Vahl (qui, par la mort de leurs illustres auteurs, sont restes incomplets),on a generalement senti le besoin d'un nouveau catalogue des v6getaux. M. Decandolle a en- trepris cette grande tSche , aid6 des secours qu'il a puises , non seule- ment dans son propre herbier ( I'un des plus considerables qui existent), mais encore dans les plus riches collections botaniques de I'Europe , qu'il a visitees , et dans les communications des decou- vertes de plusieurs voyageurs celfcbres. II a eu le rare avantage do decrire prcsque toutes les especes sur des ecbanlillonsauthentiqucs. Son ouvrage conlicndra au moins Ic double des espfeccs consignees

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dans ceux de Wildenow et de Persoon ; il offre , de plus , le mdrite d'etre dispose d'apreslcsprincipes dela methode naturelle , methode qui a deji rendu tant de services a la science. G'est le premier ou- vrage general de botanique , oil les esp6ces se trouvent classees en families naturelles. Get important ouvrage, impriui6eu petits carac- tferes , grande justification , se public par volumes ; le premier , en tete duquel estplac6une bibliotheque botanique, a paru en 1818 ; le second vient de paraitre, etdeviendra, comme le premier, un manuel presque indispensable i tous ceux qui cultivent la science de la botanique. Les volumes suivans seront publics sans interruption.

ijSC]. Icones selectee plantarum quas in systemale universali , ex herbariis parisiensibus , prcesertim ex Lesserliano descripsit ^ug. Pyr. Decandolle , ex archelypis speciminibus a F. J. F. Tur- pin delineatce, et editce a Benj. de Lessert , Academice scientiarum socio honorario , etc., Vol. I, exhibens Ranunculaceas , Dillenia- ceas , Magnoliaceas , Anonaceas , et Menispermeas.'Pans, 1821. Treuttel et Wiirtz, rue de Bourbon , n" 17 ; Strasbourg et Londres , meme maison de commerce. In-fol. , papier velin, 70 fr. ; in-4°, meme papiei", 5o fr. , et papier fin 35 fr.

Tel est le titre d'une collection de cent planches executees au burin, d'apres les dessins de M. Turpin; elle presente les esp6ces nouvelles existantes dans les divers herbiers de Paris, d^crites dans le 1" volume de M. Decandolle, et que M. de Lessert vient de faire paraitre ; il se propose de donner, pour les autres volumes , une suite i cette collection de planches qui, rendant plus sensibles l€S caractferes desplantes decrites parM. Decandolle, ajouteront un nouveau prix k son travail.

179. Botanique des dames, par M. Boitabd. Paris, 1821 ; Audot, rue des Ma9ons-Sorbonne, n" 11, 5 vol. in-18. Prix, 9 f. et 10 f. 5o c. franc de port.

Ces trois volumes forment la deuxifeme livraison de V Encjclopedie des Dames , ouvrage que nous avons d6ja annonc6 ( Voj. Tom IX , pag. 63o, etTom. X, pag. 189), et sur lequel nous nous proposons de revenir quelquefois pour faire connaitre le merite de son execution.

180. (') Flore medicate des Antilles , ou Histoire naturelle des plantes usuelles des colonies franpaises , anglaises, espagnoles el portugaises ; par M. E. Descoubtilz , D. M. , peinte , d'apres les dessins fails sur les lieux par M. Theodore Dbscouktili;. Paris, 1821.

57ft LIVRES FRANCAIS.

Chei Taiitcur , nie Saint-Louis, au Marais, n. iS. S volumes in-S" » avec planches coloriees au pinccau.

La Flore midicale des Antilles sc composera de cent cinquantc livraisons , qui formeront 8 relumes in-S°. Chaque livraisoD aura 4 planches et une feuille de tpxte. Les i"'et 2' ont di\k paru, et les autres paraitront successivement, chaque niois, par deux livraisons ct plus, si les souscripteurs le desirent. Le prix de chaque livraison , en papier fin, est de 5 fr. , ct de 3 fr. 5o c. par la poste. On souscrit chfz I'auteur, ^ I'adresse ci-dessus, et au cabinet litt6raire de la Tente , Palais-Royal , galerie de bois, n. 197.

ia Flore viedicale des Antilles est un ouvrage absolument neuf , qui interessera les medecins , les peintres , les amateurs , et plus particulierement encore les proprietaires des colonies fran- 9aises , anglaises , espagnoles et portugaises. L'auteur est un ancien medecin naturalistedu gouvernement de Saint- Domingue,et ce litre seul rfepond des ressources dont il a pu faire usage pour l'ex6cution de son ouvrage, et surtout pour I'exactitude ct la Cdelite du dcssin,

181. (•) Phyiographie midicale, orn^e de figures coloriees de grandeur naturelle , oil I'on expose I'histoire des poisons tires du regne vegetal , et les moyens de remedier bi leurs eflets deletferes , avec des observations sur les proprietes et les usages des plantes he- roiques; par /osejjA Roques, D. M. Prix de chaque livraison , papier fin grand raisin , in-4'' , 8 fr. ; papier nom de 36sus velin satine , petit in-follo, 3o fr. Chez l'auteur, rue de Louvois , n" 5 ; chez Hocquart jeune, rue des Ma^ons-Sorbonne , n"> :5.

En 1809, ^^- "'• Roques publia, sur les plantes usuelles , un traite qui fut fort bien accueilli du monde savant. Jusqu'ici , aucun me- decin naturaliste n'avait considere, avec toute rimportance qu'ellc mirite , Yapplicadon de la holanique a la medecine. Le docteur J. Roques s'est propose de reraplir cette lacune , par I'ouvrage qu'il nous donne aujourd'hui. 11 indique d'abord quelles sont les plantes v6n6neuses, afin de prevenir les dangers qui psuvent re- sulter de leur emploi dans les besoins domestiques ; il donne un des- sin si exact de ces plantes , qu'on pent k I'instant les reconnaitre en nature , apres avoir consulte son livre ; enfin , il dit dans quels cas et par quels moyens ces substances v6neneuses peuvent 6tre employees pour combattre reflet de ccrtaines maladies et procurer Vne guirison eflicace. Ces diff"6reDs points dc vuc sont expQS<Js avec

LIVRES FRANCAIS. 377

beaucoup de mutLode dans le discours priiliniinaire ut dans I'mtro- duction de la phytographie medicale. Ces deux morceaux , ecrits d'un style elegant et facile, donnent la plus favorable idee du travail de I'auteur. Mais de semblables ouvrages ne peuvent 6tre juges sur un premier coup d'oeil ; une critique hasard6e serait inconvenante pour un travail qui a dij exiger tant d'annees d'etudes , de meme qu'une approbation irr6flechie pourrait sanctionner des precedes medicaux dangereux. Nous reviendrons plus tard sur cet ouvrage , quand un examen approfondi nous aura mis en etat de prononcer sur son merite r6el. II est toutefois une justice qu'on doit rendre sur- le-champ au docteur Roques. Ses dessins, de grandeur naturelle , sont d'une perfection remarquable , meme aujourd'bui ; et le texte , sorti des presses de M. Didot jeune , est imprinie d'une maniere aussi correcte qu'6legante. Les trois livraisons qui viennent de pa- raitre oifrent I'histoire complete des champignons; la quatrieme li- vraison paraitra vers le i5 septembre. L'ouvrage sera termine en trente-six livraisons. B.

182 (•). Exposition mithodique des genres de I'ordre des poly- piers , avec leur description et celle des principales especes figurees dans 84 planches; les 63 premieres appartiennent k I'histoire natu- relle des zoophytes d 'Ellis et Solandbr; par J. Lamodroux, D. E. S., professeur d'histoire naturelle i I'academie royale de Caen, corres- pondant de I'lnstitut de France, etc. Paris, 1820. Imp. de v^Agasse. 1 vol. in-4'' de 1 15 pag.

Depuis 1786, 6poque oil Splsinder puhlia. VHistoire naturelle des zoophytes , de J. Ellis , les sciences naturelles ont fait de grands progrfes ; il etait k desirer que les beaux dessins d'Ellis el Solander , dont I'execution est parfaite, fussent reproduits dans une nouvelle edition de cet ouvrage , mise au courant de la science pour la clas- sification , et augmentee des principales figures de tous les genres de polypiers que nos modernes zoologistes nous ont fait connaitre , et que renferment les riches collections de la capitale. M. Lamou- roux, avantageusement connu dans les sciences naturelles, parses utiles et nombreuses recherches sur les plantes marines ( Thalas- siophytes ), et par son histoire des polypiers coraligenes Jlexibles , s'est charg6 d'executer cet important travail. On pent considerer comme un genera polypariobum, aussi complet que les connaissances actuelles le comportent, cette nouvelle edition, entierement re-

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fondue ct tres-augi„enlee , dc I'histoire ualurcllc dcs zoophytes d'ElUs et Solander. Toutes les descriptions sunt en fran^ais ; on a ajourt, comme synonyme, une phrase latine, soit de Lamarck , d'Ellis, de Pallas, etc. Une phrase courte et precise donne les ca- racteres propres it chaque genre ; elle est suivie de la description d'une ou de plusieurs espices , choisies parmi les intdites parfaite- ment caract^risees , ou parmi celles qui sont d^ciites dans les ou- vrages les plus ripandus. La classification de ces productions ani- males est faite d'apres la methode de Lamarck , pour les polypiers pierreux, et d'apres celle de Lamouroux , pour les polypiers Hexi- bles ; elle est le moins syst^matique possible , mais elle n'est pas encore naturelle. Elle se compose de trois divisions : polypiers Jlexi- bles ou non entierement pierreux; polypiers entierement pierreux et non flexibles ; polypiers sarcoides plus ou moins irritables et sans axe central. La premiere se subdivise en trois sections : polypiers celluliferes , calciferes , corticiferes; laseconde, en polypiers /ora- mmes, lamellifeies, tubules; la troisieme n'est point partagee en sections; elle se compose de trois ordres : le nombre total desordres est de vingt, celui des genres est de soixante-douze. Les figures nou- vellement ajoutees ne le ci-dent point en exactitude i celles d'Ellis et Solander. Les amateurs d'histoire naturelle, les curieux croiront toucher les coraux et les masses poreuses , blanchatres et strides, qui ornentleurs cabinets, tant la ressemblance est parfaite. B. G.

iS3 ( ), - Traite general des eaux etforets, chasses etpeches, com- pos6 d'un recueil chronologique des r^gleniens forestiers, d'un dic- tiounairedes eaux etforetset d'un dictionnaire des chasses etpeches; avec un atlas contenant un grand nombre de tableaux et de figures; par M. Baddhillabt, chef de division adjoint ^-I'administration ge- n6rale des forets , membre de la societe royale et centrale d'agri- culture, et de plusieurs autres societes savantes.

Get ouvrage formera cinq volumes in-4° , imprimes sur beau pa- pier, h deux colonnes, en caractferes neufs petit-romain , avec les notes en petit-texte. II sera public par demi-volumes , chacun de 45 a 46 feuilles d'impression ( 56o a 368 pages ), qui paraitront tres- regulierement de trois mois en trois mois. Le Recueildcs lieglemens paraitra le premier , parce qu'il forme la base de tout le travail sur la partie reglementaire ; viendra cnsuitc le dictionnaire des forets , puis le dictionnaire des chasses ct pOchcs. L' Atlas formera trois ca-

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hiers , qui contiendront ensemble plus de 5oo figures , ct lous les modeles de tableaux et d'actes concernant les forets. Le premier cabier paraitra avec le dictionnaire des forfits, et les deux autres accompagneront le dictioanaire des chasses et peches. On ne pro- pose la souscription que pour le recueil des r6gleniens et le diction- naire des forets. Quant au Dictionnaire des chasses et peches , il ne sera annonce que lorsqu'il paraitra. Le prix de la souscription est lixe par livraison : a S fr. pour le recueil , et a lo fr. pour le diction- naire des forets , y compris les tableaux , formules et figures ; et , comme le nombre presume des livraisons est de quatre pour cbacun de ces ouvrages , le prix total sera d'enriron 52 fr. pour le recueil , et de 4o fr. pour le dictionnaire. Le paiement aura lieu au fur et i raesure de chaque livraison. La souscription sera fermee fin de septembre , epoque oil la liste de MM. les souscripteurs sera imprimee et jointe au dernier volume du recueil. Le prix pour les non-souscripteurs sera , par livraison, de lo fr. pour le recueil, et de i3 fr. pour le dictionnaire. Les frais de port ne sont point com- pris dans le prix de I'ouvrage. Les deux premieres livraisons , for- mant le premier volume du recueil , sont en vente en ce moment ( 1" juillet 1821 J. On souscrit chez madame Huzard , rue de I'Epe- ron , n" 7.

1S4 (*). Recherches sur les ossemens Jossiles , oil I'on retablit les caract^res de plusieurs animaux dont les revolutions du globe ont de- truit les especes ; par RL le baron G. Cdvier, conseiller d'etat , etc. Nouvelle edition , entierement refondue et considerablement aug- raentee. Tome premier , contenant le discours preliminaire et I'his- toire des elephans , des niastodontes et des hippopotames fossiles. A Paris, 1S21. G. Dufour et Edmond d'Ocagne , libraiies, quai Vol- taire, n.° i3. In-4.° de64feuilles et demie, plus 35 planches gravees. Prix, cartonne , 4o fr. , et 45 fr. par la poste, franc de port.

i85. Expose des experiences sur le magnetisme animal , failes a VHotel-Dieu de Paris, en octobre, noi/embre et decembre 1820 ; par J. DU PoTET. Paris 1821, chez I'auteur et chez Bechetle jeune. In-S."^ de 78 pages. Prix, i fr. 7S c.

Ces experiences paraissent tr6s-favorables a la doctrine quiadmet, commc r6els et utiles a la medecine , les phenomenes du somnam- bulisme excite par ce qu'on appellc magnetisation animale. Vingt- six medccins ct une ancienne ruligieuse ont ele presens a ces expe-

380 LIVRES FRANCAIS.

riences ; M. du I'otet s'y rsl inonln; aussi olonnanl inagneli.seur qu'il est habile dtifenseur des precedes magnetiques , qui semble- raient ici avoir opere une cure asscz remarquable , sous I'inspection enchefdeM. le docteurHusson, depuis long-tems adversaire connu dela th^orieet de la pratique du magnctisme. On peutconsulter a ce sujet un Mimoire, peu connu, sur le magnctisme animal, presente i I'acaddmie de Berlin en i8iS , et qui porte pour cpigraphe : « Lcs lois de la nature sent la volonte de Dieu, manifestee par I'ordre do la creation. »Ce memoire, iniprim6 a Paris chez Baudoin, se trouve chez Bossange. L.

186. Gymnastique medicate , ou I'exercice applique aux organes de Vhomme , d'apres les lois de I'/iygiene , de la phjsiologie et de la therapeulique; par Charles Londe, docteur m^decin, etc. Paris, 182 1 , Croullebois, rue des Mathurins-Saint-Jacques, Prix, 4 fr., et 5 fr. par la poste.

Vers6 dans I'tfude des anciens, et riche de sa propre experience , M. Londe avail des litres pour composer I'ouvrage que nous annon- 50ns. Le rapport qu'en ont fait MM. Esquirol et Chaussier, conimis- saires de la soci6t6 de la faculty de medecine de Paris , k laquelle Pauteur avail pr6sente son manuscrit , est une autorile d'un grand poids, el quioffre une garantie aux lecteurs. Les personnes qui s'int6- ressenl auxprogrfes de I'educalion, au perfectionnemenl del'lionanie, S I'atnelioration des socieles, liront eel ouvrage avec plaisir et profit. Les hommes de lettres y trouveront des conseils judicieux pour pre- venir les effets souvent nuisibles de leur genre de vie. Dans son intro- duction , I'auteur trace i grands traits I'histoire de la gyninastique dont il dcmonlre les avantages ; il expose le plan de son travail , qu'il divise en deux parties : dans Tune , la gymnastique est appliqufie i I'homnie sain ; dans I'autre , k I'homme malade. C'esl la premiere partie que nous avons sous les yeux ; la seconde doit faire le sujet d'un second volume. Dans celte premiere partie, I'auteur traite suc- cessivement : i.» du mouvement en general, de la classification des exercices, etc.; ■x." des effets generaux determines par les exercices actifs sur toules les fonctions de I'tcononiie , et de I'examen parti- culier de ces diff^rens exercices; 5.° des exercices passifs ct dc leur influence generale ct particuliere; 4>" des exercices mixtes ; 5." des g}'mnascs modernes ; G." des frictions , des onctions ct du massage ; 7.1 dc quelques considerations relatives h I'agc, aux temperamcns,

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aux sexes, aux habitudes , etc., et de quelques precautions k inettre en usage dans I'emploi hygienique de I'exercice; 8.° enfin, de I'm- fluence du mouvement musculaire sur le cephale en general et des effets determines par I'exercice de I'organe intellectuel en par- ticulier, sur le reste de I'^conomie , et sur quelques - unes des facultes de cet organe. II est diBScile de traiter ce sujet d'une ma- niere plus complete , plus agreable et plus philosophique que ne I'a fait M. Londe. Des recherches historiques pr6c6dent ordinairement la description de chaque exercice, et le tableau de I'influence de chacun d'eux sur I'economie animale. Souvent I'auteur empruate, aux monumens de la sculpture antique, ce que les traites ne peu- vent lui fournir, relativement a I'histoire des pratiques gymnastiques. Nous indiquerons la refutation qu'il a faite des opinions de Bichat surle si6ge des passions, et ce qu'il dit sur le mobile des phenomenes attribues au temperament nerueux , et sur le siege des desordres appeles nerueux. L'auteur parait avoir aussi tres-bien observe I'a- lienation mentale , le mode d'action de ses causes , la manifere de diriger le traitement moral des ali^nes. Ailleurs, nous avons trouve quelques idees gen^rales sur les principes qui peuvent contribuer au

' perfectionnement de Thomme; principes toujours deduits deson or- ganisation et des circonstances exterieures qui peuvent la modifier. Nous avons vu avec unvifplaisir M. Londe payer un juste tribut d'hommage aux hommes qui se sont occupes avec le plus de succes de I'education, tant en France quechez les nations etrangeres. Parmi les noms de ces philantropes , nous avons distingue ceux du vertueux Helvetien Pestalozzi, et de M. Julliea, dont on ne jsaurait trop appr6- cier les tableaux d'education pratique. Nous ne pouvons que nous joindre i MM. les commissaires , pour engager le docteur Londe h donner promptement la seconde partie de son ouvrage.Nous ajouterons

. toutefois que la premiere forme, i elle seule, un travail complet , qui convient ^ toutes les classes de la society. G. D. M.

i8y.— Entretiens sur la pluralite des mondes , augmentes des Dialogues des morts; par Fontehelle. Paris, 1821, Jules Bossange et T6non, rue des Poitevins, n"> 10, et a Londres, chez Martin Bossange et compagnie, i4, Great Malborough-street. In-12.

« J'ai voulu , dit Fontenelle dans sa preface , traiter la philosophie d'une manifere qui nefut point philosophique ; j'ai t4ch6 de I'amener •> un point oii elle'ne fCit ni trop seche pour les gens du monde, ni

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trop badinc pour les savans. » Tout le luonclc sait jusqu'ii quel point re philosophe aimable a r6ussi dans son projet , et avec quel art il a r6pandu des grflces sur une matiere qui en paraissait pcu suscep- tible. Quelques critiques ont trouv6 que cet exemple etait dange- reux ; ils ont dit que « la veritable parure de la pbilosopLie est I'ordre, la clart6, et surtout la verite. » Nous ne pretcndons point ap- peler de ce jugement; niais nous croyons que Ton doit savoi? gr6 ix Fontenelle d'avoir reussi par un moyen ingenieux a faire naitre chez les gens du monde du goiit pour I'etude d'une science qui, jusqu'6 lui, avait paru devoir faire partie du domaine exclusif de quelques esprits privilegies. Les editeurs ont joint a cette nouvclle edition les Dialogues des marts du m£me auteur, et les soins qu'ils ont apportes dans I'execution de cet onvrage doivent leur meriter 6galenient les suflfrages des gens de lettres et des bibliophiles. E. H.

188. Rapport deM. ie cheualier Delaisbre , secretaire perpetuel de Vacademie des sciences ■, sur les memoires lus a cette acadimie par M. DE PAnAVEY , membre du corps du genie des ponts et chaussees; memoires ou I'auleur ctablit que les spheres de tous les anciens peuples ont une origine commune, et que les epoques re- tracees par les zodiaques decouverts en Egypte , specialement ceux de Dendera , ne sont que voisines du commencement de I'ere chre- tienne. Paris , 1S21 , Belin ; in-8" de 88 pages.

Tousles hommes lettrt^s connaissent la grande question del'origioe des zodiaques, liee i celle de I'origine et de I'histoire du genre liumain ; question sur laquelle on trouve d'un cOte la Bible, Pline , Newton, Leibnitz, Bossuet, I'abbe Testa, Lalande , Larcher, Vis- conti, Delambre , Cuvier, etc.; et , de I'aulre , Dupuis, Volney, Fourier, Grobert, Francoeur, Remi-Raiges, Jomard , etc. Les me- moires de M. de Paravey sont i I'appui de la chronologic religieuse adoptee jusqu'a present. L'auteur en a lu des fragmens a I'academie des sciences et I'academie des belles-lettres; ces deux compagnies ont applaudi i ses recherches laborieuses et I'ont encourage dans son entreprise. La brochure que nous annonc^ons , et par laquelle M. de Paravey prelude i la publication de ses importans memoires, a trois parties: I'introduction , un aper^u des mimoires, et le rapport fait sur ces memoires, en fevricr dernier, 6 I'academie des sciences, par MM. Delambre, Cuvier et Ampere. Dans I'introduction, M. de Pa- ravey expose I'elatde la question relative a I'antiquite des monumens

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astronomiques decouvcrts en Egypte. Dans Vaperfu, il fait connaitre les rapports singuliers qui existent entre ces monumens et les cons- tellations de la haute axe ; il prouve que les constellations de tous les peuples derivent d'une seule et m6me sphere, et soutient, d'apres une multitude de rapprochemens nouveaux et remarquables , que les zodiaques apportes d'Egypte ne marquent pas une epoque ant6- rieure i celle des Ptolemees. Cette brochure est d'un gi-and interet et fera ddsirer k toutes les personnes eclair6es la continuation des memoires de M. de Paravey. LAHjumAis, de tinstilut.

189. Precis de la vie de Jesus-Chrisl, extrait de l'6vangile et des meilleurs auteurs qui ont 6crit sur cette matiere , avec des notes historiques, geographiques et chronologiques , a I'usage de la jeu- nesse, et particulierement destine aux 6tablissen)ens d'instruction publique; par M. Peigne, ancien professeur et pensionnaire de I'uni- versite. Ouvrage orne d'un beau portrait de Jesus-Christ, d'apres Leo- nard deVinci,etde5ogravures. Paris, 1821; J. L. Chanson, imprimeur- libraire, rue des Grands- Augustins , n" lo; i vol. in-S" de 672 pages.

190. De I'inamouibilite des pasieurs du second ordre , par I'auteur du traite de I'Appel comme d'abus. Baudouin freres , rue de Vaugirard, 56 ; in-S" de 120 pages ; prix , 1 fr. 5o c.

II y a vingt ans que la question de I'inamovibilite des cures eut 6te regardee comme une question oiseuse ; personne ne la rivoquait en doute. Mais, depuis qu'on a voulu transformer en simples desservans les sept huiti6mes des cures de France , et les rendre amovibles i la volonte des eveques , il est devenu necessaire de demontrer que cette innovation dans la discipline de I'eglise d.e France est con- traire aux saints canons et a I'int^ret meme de la religion. Peu de personnes en France etaient plus en etat de discuter cette importante question que le savant et profond canoniste, auteur de cet ouvrage. C'est arme de I'autorite de I'ecriture , des pferes de I'iglise , des con- ciles , qu'il defend les droits des pasteurs du second ordre; comme, dans ses autres ecrits , il avait defendu les droits inalicnables des eveques fran^ais et les liberies de I'eglise gallicane, contre les usur- pations et les pretentions des papes et de la cour de Rome. Babey.

191. Aratus et Nicocles aux enfers; dialogues par Charles d'Outrepont. Paris , 1821 ; Ladvocat, Palais-Royal , galerie de bois , igS ; brochure in-S" de 32 pages d'inipression.

Montpsquifiu , dans son admirable dialogue de Sylla et d'Eucrate.

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a mis a nu I'ame d'un tyian ; ce profond philosophe a i «;v6l6 par la bouche mOme de Sylla les turpitudes d'un coeur corionipu; il a pe- nutre tous les secrets qui le firent agir, et trace , en les d6voilant , le plus beau tableau d'histoire qui soit peut-Otre parvenu jusqu'i nous. La forme du dialogue se prctait favorablement 4 rintention de I'his- torien. Par ce moj'en , c'etait Sylla lui-m6me qui expliquait k Eucrate ses abominables principes; et, en lisant le peu de pages qui les ren- ferment, on serait tente de croire qu'elles oat ete trac6es par le c6- Icbre proscripteur. L'auteur du nouveau dialogue , Aralus et Ni- cocles , a fait usage du meme cadre ; il lui 6tait plus indispensable encore qu'il Montesquieu ; car il ne s'est pas contente de mettre dans la bouche de Nicocl6s les principes qui ont guide et guideront tou- jours lestyrans, il les combat avec uneenergie vigoureuse parl'organe d'Aratus. Ces deux champions se pressent I'un I'autre par des argu- mens solides, qui prouvent que M. d'Outrepont a m6dite sur les ques- tions les plus importantes de la morale et de la politique. A. T.

192 (*). Les Pastes unifersels, ou Tableaux historiques, chrono' logiques et geographiques , contenant, sitcle par sifecle, et dans des colonnes distinctes, depuis les tems les plus recules jusqu'a nos jours : I'origine , les progres, la gloire et la decadence de tous les peuples , leurs migrations , leurs colonies , I'ordre de succession dc leurs princes , etc. ; le precis des epoques et des cvenemens po- litiques ; 3" I'histoire g6n6rale des religions et de leurs differentes sectes ; Thistoire de la philosophic et de la legislation che2 tous les peuples anciens et modernes ; les d^couvertes et progres dans les sciences et dans les arts; enfin, une notice sur tous les hommes celebres , rappelant Ipurs ouvrages et leurs actions : pre- cedes de trois grands tableaux sjnopliques , servant de sommairc i I'ouvrage , et suivis de deux tables alphabitiques comprenant , I'une les nonis d'hommes, I'autre les nonis de choses , et presentant toutes deux , par leur ensemble et par la maniere dont elles sont concucs , un nouvel art de verifier les dates ; ouvrage dedie au Roi , par M. Buret de Loncchamfs. Paris, 1821 ; un gros vol. in-f°. format grand colombier. Prix, i5o fr. en feuilles, et i56 fr. en demi-re- liure. Cet ouvrage , execute en caract^res neufs et fondus expres, sera publie en six livraisons qui paraitront de mois en mois. La pre- miere a paru le i5 aoftt. On souscrit, & Paris, chez M. Dondey- toupre, pferc et fils, <idite«r» dc I'ouvrage , rue Saint-Louis, n. 46 1

J4.1

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au Marais ; chez Tieuttcl et Wiirtz , rue de Bourbon , n. 17 , et chez Chajseriau, au depot bibliographique , rue Neuvc-des-PetitsChampSj n. 5.

ig3. Tableaux chronomelriques , divises par siecles, pour servir i Tetude de rhistoii-e de France , avec la carte des agrandis- semens successifs du royaume , et un precis borne aux faits ; par F. GoFFAux , auteur du Tableau chronometrique des epoques prin- cipales de rhistoire. Paris, 1821; Didot le jeune , rue des Ma^ons- Sorbonne, n. :3. in-S" de 85 pages.

Ces tableaux, au nombre de dix-buit, offrent , sur des lignes perpendiculalres, divisant chaque siecle par dix annees , la chrono- logie des rois de France , avec les principaux evenemens civils et militaires. Chaque siecle est distingu6 parun titre qui le caractirise, ou par les nonis des rois auxquels se rattachent de grands souvenirs. L'idee premiere de cet ouvrage est bonne ; tnais nous craignons que les details d'execution n'offrent k I'oeil, et par consequent i I'esprit, un peu de confusion, ce qui devait etre evite avec d'autant plus de soinque I'ouvrage est destine i un Sge dont I'attention se fatigue aisement. Un cabier de questions, correspondant au teste, accom- pagne ces tableaux. E. H.

194. (*) Annuaire historique universel , pour 1820 , auec un ap- pendicecontenanl les actes publics , traites , notes diplomatiques , papiers d'etats , el tableaux statistiques , financiers , administratifs et necrologiques ; Une chronique offranl les iuenemens les plus piquans , les causes les plus celebres , etc. Des extraits de uoyages ou de menioires interessans , et des notices sur les productions les plus remarquables de I'annee , dans les sciences , dans les lettres et dans les arts. Par C. L. Lesub. Paris , 1821. A la librairie grecque- latine, rue de Seine-Saint-Germain, n. 12. in-8° de 824 pages. Prix, 10 fr. , et , par la poste , 12 fr. 5o c.

Nous rendrons un compte d^taille de ce volume, comme nous I'avons dejS fait des deux volumes du meme ouvrage , publics pour 1817 et 1819.

195. Dictionnaire historique , ow Hisloire abregie deshommes qui se sont fail un nom par leur genie, leurs talens, leurs ver- tus , etc., etc.; par I'abbfe F. X. de Feller; cinquieme edition, enrichie d'un grand nombre d'articles nouveaux, intercales par ordre alphab6tiquc , ct corrigee par les observations de nos meil-

TOME XI. 25

,386 LIVRES FRANgAIS.

Jeurs biographcs. Tome II, Paris, 1821. in-S". Miquignon fils alne. Prix , 5 fr. , et 6 fr. j5 c. par la postc.

On trouve , dans ce second volume , les mCmes omissions , Ics niemes fautes et les mCmes negligences que dans le premier. A I'ar- tide Olivier Basselin, Feller avait presentt les chansons k boircdc ce poete normand, composees dans les valines ou vaux de vire , comme les modules de celles qui , depuis, ont eti , par corruption , nomm^es vaudevilles. ( Voy. la Revue , Tom. X, pag. 4^5. ) Les nouveaux iditeurs ont bien reproduit cette opinion de Feller, qui est celle delaplupartdes hommes instruits ; mais, i Particle Charles de Beys , ils insinuent que le mot vaudeville tire son etymologic de voix de ville ; ce qui nese trouve pas dans I'ancien Feller, et ce qui met le bon jusuite un peu en contradiction avec lui-mfime. Les jeunes editeurs ont denature le nom de monseigneur Bechetti , mort en i8i4 ) evfeque de Gitta della Piera; ils le nomment J5e< Aa///; et , par une meprise encore plus forte , ils le presentent comme le continuateur dc I'lJisloire ecclesiaslique d'Oroi , au lieu de dire du cardinal Orsi. Ces negligences portent a croire qu'ils ignorent que cette continuation se compose de 29 vol. in-4° , imprimes i Rome , depuis 1770 jusqu'en 1797. Elle ne va que jusqu'en 15S7. L'auteur avait annonce qu'elle s'etendrait jusqu'au pontifical de Pie VI. L'ar- tjcle Behaim , de Feller, etait a refaire , puisqu'il y a insere la pretendue decouverte de Pile de Fayal , par ce celebre voyageur. M. Jans en a traduit en I'ran9ai8 les nouvelles et curieuses recher-' ches, publiees en allemand par M. de Murr, sur la vie et les tra- vaux de Martin Behaim. Cetle traduction se trouve , soitdans les deux premiers volumes du Recueil de pieces interessantes sur les antiquites, Paris, 1787, in-S" ; soit & la fin Aa premier voyage au- tour du monde , par le chevalier Pigafetta , traduit en fran(;ais par Pabbe Amoretti. Paris, 1S21 , in-R". Reproduire un article de cette importance, avec ses anciennes meprises , n'est-ce pas manquerau public , i qui Pon a promis de presenter un ouvrage corrige sur les observations de nos meilleurs biographt's?

Dans I'edition du dictionnaire de Feller, de Liege 1797, on dit qu'il y a une Vie du cardinal de Bcrulle , par I'abbe Goujet, impri- mee en 1767 , qui se resscnt de Pcspril du parti auqucl l'auteur s't- tait vou6. Le fait est que Pouvrage de Goujet n'a jamais vu le jour; M. Tabaraud en conserve Ic manuscrit autogiaphc. On a ajoiitr,

LIVRES FRANC AIS. >SS7

dans le P'cller dc 1S21, que I'histoirc du cardinal de Ceiulte , pu- blitie par M. Tabaraud , se ressent du meme esprit; et , pour le prouver, on renvoie a VAmi de la Religion. Comme I'article parait «*tre de la nieme main que le journal, c'est ce qui s'appelle prouver ideal per idem. Du restc, Ic jpurnaliste s'etait empressc de decrier Touvrage sur la simple auuonce , pres de six mois avant qu'il fht rendu public ; il fallait bien ensuite qu'il soutint son dire. Trop de confiance dans la Biographie uniuerselle a egare nos editeurs ; ils en ont abreg6 I'article du medecin Thomas-Bernard Bertrand , mort en 1751 , bien plus connu par les manuscrits qu'il a laisses , que par ses ouvrages imprinies. Dans la Biographie universelle ainsi que daus le noufeaii Feller , on prusente la plupart de ces der- niers comrae ayaut vu le jour du vivant de I'auteur , tandis que leur ilnpression ne remonte qu'aux annces 1773 et 1778. En effet, nous en devons la conuaissance i M. Hazon , dans son Eloge hisiorique de la faculte de inedecine de Paris (lyj^) , et dans sa Notice des hommes les plus cilebres de la mime faculti{\'y-S) , in-4°. Des addi- tions, redigeesavec autant de negligence, gStent plutot un ouvrage qu'elles ne I'anieiiorejit. On lit i la fin de I'article de Jean-Paul Bignon , bibliothecaire du Roi et auteur du roman intitule : Aven- tures d' Abdalla , fils d'Hanif, qu'un nouvel editeur p-ient d'ache- ver ce roman , et de le publier en deux volumes. 11 s'agit de redition donnee en 1773 par M. Colson; I'article Blache est defigure par une meprise bien plus forte, puisqu'on y assure que cet abbe a. publie , en 1699, nne histoire intitulee : Anecdotes , Qu Histoire secrete, qui decouvre les menees sourdes du cardinal de Retz et de ses adhe- rens , j)Our oter la vie au roi el au dauphin. Cet ouvrage ejt rest6 manuscrit. Le vol. 4 du Supplement de Feller , que nos jeunes edi- teurs ont copie, porte ( p. 543 ) que I'abbe Blache avait compose ces anecdotes en 1G99. 11 faut etre bien novice en bibliograpliie , pour croire que le mot composer est synonyme de publier. Dans I'article Blai-et, on lit j5iVZam au lieu d'Eidous, et Boucher, deux fois , au lieu de Roucher. Des fautes aussl multipliees prouvent que les edi- teurs sont tout-a-fait etrangersii I'histoire Iitt6raire; anssi, nous par- lent ils encore, a I'article du comte dc Bonneval, des P'/e/uoires fe- Wia6Ze5 de cet bomme extraordinaire. 11 est generalement reconnu aujourd'hui que ces meraoires n'ont pas plus d'authenticite que ceux qui ont paru sous le nom de M. de Mironc. ^Tyezle i"^"^ vol.de

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388 UVRES FRANCAIS.

mon Examen critique ties Diclionnaireshhloriques. Jepourrais mul- tiplier cesremarquesjmais jeme content eiaiaujourd'liui dcl'aircobser' vcr aiix jeuncs ecclesiastiques qui se sont charges du solndc comple- ter le dictionnaire de Feller, qu'il fautavoir etudie I'histoire Utterairc pendant une trentaine d'annfies , au moins, pour entreprendre un travail de cette nature, lis seraient convaincus de la veritti de cetle assertion , s'ils avaient lu attentivement les ecrits des abbis Goujet, Saas, Rive et Mercier Saint-Leger, qui ont rendu lant de services 6 la bibliographie , dans le cours du dis-huitieme siecle.

Basdigb. 196.— (Euvres de Rabaui-Saint-Etienne. Precis de I'histoire de la revolution frangaise. —Paris , 1821. KleEfer , rue d'Enfer, n.° ». Un vol. in-18.

Rabaut-Saint-Etienne , temoin oculaire et meme acteur dans le dranie celebre de la revolution fran9aise , voulut ecrire I'histoire de notre premiere assemblie nationale, comme on d6crit un combat, le lendemain du jour oii il a ete donne ; ce sont ses propres expres- sions. L'ame de I'bistorien , pleine de patriotisme et du plus pur amour de la liberie , se peint tout entiere dans le r6cit des premiers 6v6nemens de la revolution. Aussi, ne saurait-on trop recommander le Precis qu'il nous en a laisse. Des pensees nobles, un style ferme et soutenu , des fails racontes avec une grandc bonne foi et une sinceritc peu commune , font de I'buvrage de Rabaut la meilleure hisioire que nousqyons de l' Assemblee conslituante. On n'y aper^oit pas, comme dans d'autres recits plus modernes , des evenemens de la meme 6poque , la haine des grandes verites proclamees par la voix de tons les sifecles , entendues et comprises par les liommes du dix-huitifeme. Nous en avons assez dit pourfaireconnaitrecombien il etait i desirer qu'on rtimprimat I'ouvrage de Rabaut , qui etait devenu tres- rare ; le nouvel editeur joindra au volume qui est public d'autres volumes qui contiendront les discours et les autres ceuvres du m6me ecrivain; chaque ouvrage se vend separement. A. T.

197. Leltressur V Anglelerre ^ ou I)eux armies a Londres , par niadame D'Avot ; deuxiiime edition, revue ot corrigee. Paris, 1821. Painparre, au Palais-Royal , galerie de bois, n ° aSo. In-S." de 294 p. Prix , 5 fr. et 6 fr. ( Vojez I'annonce de la premiere edition , T. V , page 255).

0 La naliou anglaisc est uue socittc lassembUe sous les mCiue*

LIVRES FRANCAIS. 589

lois. Ellc est foite de son union relative au hien general; mais scs njembres leslent isol^s, faniille parfamille , scion leur principe d'e goisme. On pourrait la comparer i una soci6te de castors, qui cons- truiscnt leurs digues en commun , et se reunissent partout oil cette society a besoin de toutes ses forces. Hors de li , chacun rentre chez soi , 6leve ses enfans , et avise aux moyens d'empecher que son voisin ne puisse surprendre le secret de son commerce pour en profiler." Ce trait de pinceau, seul, peint parfaitement la nation chez laquelle I'auteur a s6journ6 pendant deux ann^es. On ne peutcontester k ma- dame D'Avot une quality precieuse, indispensable, et cependant bien rare dans un voyageur, I'esprit d'impartialit6. Tout en restant Fran- (aise , elle n'a point cherch6 i faire le panigyrique de ses compa- triotes , aux d^pens du peuple qu'elle visitait; elle n'a point non plus voulu flatter ses botes : elle fait , avec justice et discernement, la part du blSme et de la louange. II faut plaindre avec elle les Anglais d'avoir chez eux des agens provocateurs « excitant au d^sordrc, puis d6non<^ant les hommes qu'ils ont seduits et entralnes; » ilfaut les plaindre de cette etrange prodigality <■ qui leur fait d6penser , dans une seule fete , des mille livres sterling, en planchers points au pastel <'t representant les pins riches dessins , dont le pied des danseurs em- porte un morceau k cliaque pas ; » il faut les plaindre de voir les un- /low peser6galement chez eux sur les caprices duluxe et surlesbesoins du pauvre, « qui, s'il gagne vingt sous par jour, en doit donnersix au gouvernement , et peut k peine , avec ce qui luireste, suffire i ses premiers bcsoins et i ceux de ses enfans; » il faut les plaindre d'avoir il Londres un quartier {Sainte-Jailes), "servant pour les malfaiteurs de repaire inaccessible k I'oeil de la police et aux poursuites do la justice; » il faut les plaindre des demarches humiliantes que fait souvent , aupres du plus gx'ossier artisan , un candidat au parlement , pour obteuir une voix ; » il faut les plaindre encore , avec ma- dame D'Avot, qui , femme, Frangaise, et sans doute accoutumee aux hommages dont nous cntourons en France la beautc, les graces et ramabilitc , a dii Ctrerevoltdecn royant un matelotamener saytJ/ziwe au marche, "la tenant par rextrcmile d'un licou , qui servait k la conduire en le voyant , dis-je , « la vendre publiquement pour la sonimc de trois schelings , en presence d'une multitude immense ac- courue a ce spectacle, et malgrc rintervenlion des magistrats, venus trop laid pour i'cmpechcr. » Mais aussi il faut feliciter les Anglais

390 LITRES FRANCAIS.

de leur respect pour la propriili', la justice el L's lois; il faut les fcli- citer d'ayoir dcs J uges oqui libiirent ou condamnent un individu quelconque , sans distinction de rang ni de fortune ;• il faut Ics feli- citer de cctte ginerosile ingenieuse , si digne de trouver des imitateurs en Prance , « qui , cheque ann6e , & une 6poquc fixe , fait de la rue d'Argyle, S Londres, unc espfece de bazar, ou les femmes les plus elegantes ne dedaignent pas de venir vendre , au profit des pauvres , les bagatelles qu'elles s'amusent i faire pendant I'annce , ct que les Anglais , en galans chevaliers , croient ne pouvoir jamais payer assc7. cher; nil faut lesfclicitem de ne voir chezcuxaucun soldat armi venir porter la crainto etla terreur au sein mCmedes plaisir3,et d'avoir une police qui n'emploie que des officiers civils ; o il faut les filiciter enfin de voir aux elections « I'exemple de'la moderation donne par les preniiferes classes de la society , et suivi bientot par la deniicrc , qui finit par faire des choix respectables, et par 6lire des hommes tels que sir Robert Wilson, dont le titre de liberateur de I.avnletle a sembl6 le plus honorable ausyeuxde ses compatriotes, etM. Wood, ami du fameux lord Erskine , auquel le roi a permis de prendre pour legende ces mots, qui rappellent le bienfai| dont son pays lui est reflevable : The trial hy jury (c'est-i-dire le jugenient par jures). » Madame D'Avot, qui avait proniis <i son amie o de s'approcber de tout, aCn de pouvoir lui rendre compte de tout, » parle aussi du theatre anglais. «Ses pieces, dit-elle,ne sont point en vers; ony cbantc parfois , et les id6es les plus bouDTonnes sont a cote des passions ks plus violentes. Ce genre est le plus rapproch6 de la nature, j'en conviens , et doit plaire au peuple. Cela se rattache encore h la prevoyance du gouvernement et i I'esprit qui regit cette nation. On fait beaucoup pour le peuple ; c'est une espfece de souverain qui laisse regner les autres, pourvu que les droits qu'il sait avoir par sa force lui soient assures sans contestation. » Que Ton refleehisse maintenant pour quelle classe de la soci6te principalement ont ecrit chez "nous les Corneille et les Racine , et peut-etre on aura trouve le secret de la difference qui existe entre le thtiStre fran^ais et le theatre anglais. Du reste , la haute societe , en Angleterre , rend parfaitement justice au merite de nos chefs-d'oeuvre; elle I'a prouve recemment par I'accueil flatteur et enipresse qu'elle a fait i Talma, et par la galanleric dont madame D'Avot elle-meme a ^tii I'objet au theatre dc Surrey, oil le dirccteur fit repelcr cxprcs pour die le Gvd

LIVRES FRANCAIS. 391

safe the King, qu'clle regrettait de n'avoir pu entendre, etant' arrivie trop taid au spectacle. Voili une galanterie toute fran9aiuc et i laquelle je ne connais lien de comparable, si ce n'est la po- litesse et I'urbanite des jugemens de madame D'Avot, qui tendent h faire des deux nations riuales deux nations amies. E. Hi^bbau.

igS, Naufrage de la f negate la Meduse , faisant partie de Vex- pedition du Senegal en 1816; par Cobk^abo et Savigny ; 5" Edition ornee de 8 gravures. Paris, 1821 ; Corr6ard, au Palais-Royal; 1 vol. in-S" de 5o8 pages. Prix , 7 fr. , ou avec deux gravures seulement , 6 francs,

Les aventures des naufrages de la Meduse sont au nombre des plus extraordinaires qui soient arriv6es dans les tems modernes , et surpassent en horreur celles de VOswego et du brick le Commerce , dont le naufrage eut lieu vers le meme tems et presque sur les mfimes c6tes. II etait facile de prevoir que le public lirait avec un vif interet le recit de ces malheursinouis, et que cette relation aurait plus d'une edition. La troisifeme qui vient de paraiti'e est beaucoup plus volumineuse que les precedentes et ornee de huit gi-avures; mais peut-elre les auteurs n'ont-ils pas assez consulte leur int6ret en grossissant ainsi leur ouvrage. Ce sont les aventures du naufrage de la M6duse et les 6venemens deplorables arrives sur le radeau que le public a voulu connaltre, et non pas tout ce que les auteurs ont pu imprimer. 11 etait inutile de joindre i I'bistoire du naufrage les details minutieux des procis que I'un des auteurs a eu a soutenir, comme libraire , devant les tribunaux de Paris; il fetait encore plus inutile d'enfler le volume en y ajoutant, par forme de supplement, I'aventure de Gollin dans la houilliere de Beaujonc. Cette histoire, d'ailleurs tresconnue , n'a pas le moindre rapport au naufrage de la M6duse ; et diviser I'iuterfit, n'est pas le moyen de I'augmenter. II est vrai que les auteurs, en rapprocbant les deux evenemens, onl voulu faire voir comment , sous un autre gouvernement , le courage dans le malbeur re9ut d'eclatantes recompenses, tandis que depuis, des hommes non moins courageux ct plus infortuncs ont 6te de- laisses , et n'ont regu que du public quelque dedommagement de leurs souffrances inouies. Mais les deux cas ne sont pas les memes. GoQin fut recompense pour avoir contribue au salut de ses cama* radcs , ct peut-fitrc aussi parce que le chef de I'ttat avait I'habitude dc tout rapporter a sa personnc. Les naufrages de la Meduse, loin de

S92 LIVRES FIUNCAIS.

sauvcr quclqu'un, avaient jetti les blessds i la mer pour conserver leur piopre vie. Cependant, une autre consideration aurait dd atlirer sur ces malhcureux la pitie du gouvernement; c'cst de Tineplie dcs chefs, choisis par le ministiire de la marine pour cominander I'cxpii- dition , que sont venues toutes les calamit^s qui ont accable les nau- frag(!:s. La haute administration aurait dft riparer partous les moyens possibles les suites effroyables de cette grande faute. Voila ce qu'clle n'a pas fait, et voilii ce qu'on lui reprochera , tant qu'on lira la relation de MM. Gorreard et Savigny. Farmi les gravures qui accom- paguent leur relation, il y en a quelques-unes qui sont bien eiecutees.

Dkpping. 199. Blemoires de NapoUon Bonaparte. Paris, 1821 ; Baudouin, rue de Vaugirard, 56. Ce livrs est la reimpression du fameux mu- nuscrit dit de Sainte-IIelene.

zoo. (Euf res de Napoleon Bokapabtb; Tom. II et III. Paris, i8»i ; Panckoucke, rue des Poitevins , i4 ; in-8° de 5oa pages.

Nous reviendrons sur cette collection , lorsqu'on en publiera le premier volume. On retrouve, dans les deux que nous annongons, une partie de la correspondance militaire et politique de Bonaparte, alors gin^ral en chef des armees d'ltalie et d'Egypte; et cette correspon- dance renferme des materiaux imporlans pour I'histoire.

201. Documens historiques , suiuia de pieces just ijicalives , sur la maladie et la morl de Napoleon Bonaparte ; par le docteur O' M^ar^ , son midecin pendant trois ans i Sainte-Helene. Paris , 1821 ; Mongie aine , boulevart Poissonniere , n<> iS ; brochure in-S° de 7 pages.

202. Appel aux Grecs , iraduit du grec moderne d'AxROMtiE, natifde Marathon, avec la proclamation d'Ypsilanliaux Frangais . Paris, 1821; Baudouin, rue de Vaugirard, 36; brochure in-S" de 60 pages , avec une gravure.

Une preface nous apprend que oe petit 6crit fut public dans les trois premiers mois de 1801, a I'epoque oil les Franq'ais occupaient encore I'Egypte, et oii cette puissante diversion semblait oHVir aux malhcu- reux Grecs une chance favorable. G'est une peinlure cloquente des fruits amers qu'ont produits les dissenlions entre les Grecs , et de I'e- tat d'abaissement de iuisere et de servitude dans lequel ils sont tom- bcs. C'est une invocation i la foisrcligieuse et politique , en faveurdn i'afFranchisscment et do la renaissance de la Gri-ce, dont la cause est ■jujourd'hui ecllc du chrislianismc , do la civilisslion et de rhumanilc.

LIVRES FRANCAIS. S95

aOo. (Euures de Rabaut-Saimt-Etienne. Le vitux Ceuenol , ou Anecdoles de la vie d' Amhroise Eorely, ned Londres, age de cent irois ans septmois et quatre jours ; precedees d'une notice historique SUT la pie de I'auleur , par M. le comte Boissy-d^Anglas, pair de France. Nouvelle edition , revue , corrigee et augmentee , ornee du portrait de Rabaut et de celui de M. le comte Roissy-d'Anglas. Paris , 1821 ; Kleffcr, rue d'Enfer , n" a ; 1 vpl. in-8». Prix, i fr. 75 c.

204. (Euvres completes de madame de Gbafigny; nouvelle 6di- tion , ornee de 9 gravures et du portrait de I'auteur. Paris 1S21 ; Lc- long, au Palais-Royal, galerie de bois , n" 233. i vol. in-S" pap. fin d'Auvergne. Prix , gfr. , et par la poste 10 fr. 5o c.

Cette edition se compose des Lellres peruviennes avec une intro- duction historique , de Cenie , dranie en cinq actes , de la Fille d' A- ristide , egalement en cinq actes , et d'une Nourelle espagnole. Cette dernicre production est celle par laquelle M°>= de Grafigny debuta dans la carriere des lettres. Elle fut inseree dans le Recueil de ces Messieurs , volume in-i2 qui parut en ijIS, et pour lequel elle lui avait 6te deniandee. « Cette bagatelle, dit I'auteur de la Notice, n'ayant pas ete goOtee par quelques-uns des associes , M"" de Grafi- gny , piquee des plaisanteries de ces messieurs, composa , sans riea dire i la societe , les Lettres d'une Peruvienne , qui eurent le plus grand succes. i II serait & desirer que la critique , excitant I'amour propre des auteurs , produisit souvent un aussi beureux effet que dans cette circonstance. II y a bien loin de sa Nouvelle Espagnole, pro- duction tr6s-ordinaire , aux Lettres p6ruviennc"s qui la suivirent im- mediatement. Ce dernier ouvrage est un niodele d'invention ,debon gout, de natural, de grace, de fine plaisanterie, et en nieme tenis de style. Le voile ingenieux sous IcqucI I'auteur se cache pour faire la critique des moeurs du tems, est d'autant plus heureux, qu'il lui perniet de liasarder les verites les plus fortes, verites qui ccssaient d'etre offensantes en passant par la bouche d'une jeune fille sauvagc , dont la simplicite et la candeur amusaient le lecteur, tandis qu'il ne les aiirait point voulu souffrir d'un compalriote , de son egalenfin. C'est li tout le secret de I'allegorie, et c'est ce qui fait tout le charme de Tapologue. Les Lettresperuviennesplairont tant que Ion conser- vera du gout pour la bonne litterature : je n'en dirai pas autant de Cenie ; c'est un drame qui a le merite d'etre bien ecrit ; mais on y trouve trop dc sentences, trop de ces licux communsde morale vul-

S9A LIVUKS FKANCAIS.

gaiie. 11 I'iiut nibiiis dc paroles el plus tie inouvcmcnt it la scene. Un autre d6faut me parait nuire essentiellement h cctte pi6ce ; on y ren- contre trop de gens sages , et les gens sages , comme on sail , ne sent pasceux qui amuscnt le plus au thiiltre. Tout I'inlerCt repose surces suppositions ronianesques dont on nous a lasses depuis. C'estle secret de la naissance de Cenie et Ic charme rcpandu par le style sur tout le sujct qui fit, dans la nouvcautc, Ic succis de cc drame ; il serait regu avec indiflercnce , s'il paraissait aujourd'hui pour la premiere fois. L'editeur n'a rien neglige pour rendre cette edition , confiee aux presses de Didol jeune et ornee de gravures dessiniiesparLe Barbier aine et Chasselat , la plus belle et la plus complete de toutes celles publiecs dans le mOme format; on regrette cependant de nc pas y trouver les lettres de M'"^ de Grafigny sur Voltaire. E. Hi5heau.

2o5. Af;nes de France, on le Douzieme Sieclc;ronianbistorique, par M""^ SinionsGandeille. Seconde edition. Paris , 1821. Maradan , rue des Marais, n" jG. 3 vol. in-12.

Ce reman a un grand tort k nos yeux , c'est d'etre un roman ; quel- ques efforts, quelques recherchcs de plus, et M"'"^ Candeille avait icrit I'bisfoire d'un siec'le dont elle a trace le tableau d'une main habile et d'un pinceau vigoureux, mais malbeureusement , si Ton pcul s'exprimer ainsi, sur un fond qui donne une fausse teinte aux couleursles plus vraies. A part cedefaut, commun a tons les romans historiqucs, on conviendra que cet ouvrage , remarquable sous le rapport du style , plcin de pensees profondes et rempli d'interet , est une des mcilleures productions de ce genre , et merite les elogcs qui lui ont ete donnes. Nous regretlons vivenient que la nature de ce ]{ecueil ne nous permettc pas de lesjustiCer par des citations; mais, en renvoyantle lecteur ii I'inleressantc Agnes, nous n'avons point & craindre de voir notre jugement infirme. A^ous devons pourtant adresser un reproche i madame Candeille. Pourquoi a-t-elle sup- prime les pronoms dans les discours de ses personnages? Je ne pense pas qu'elle ait voulu imiterparlk lelangage du tems, qui ferait acluellement un assez singulier effet dans un roman. En cnipruntant le langage d'un siecle de beaucoup posterieur, elle a fait k petl prfes comme I'historien de Rome ancicnne qui ferait parlcr i'italien a ses lieros. Nous devons dire neanmoins que cclte suppression de parti- cules donne au discours une concision ct une naivete qui seront A K'grettcr lorsqu'il faudra se confoinicr aux regies ordinaircs. Nous

LIVRKS FRANCAIS. S95

voudrions bien criti^uer aussiquclques-unes des notes ; mais I'auteur n'a voulu 6crire qu'un roman historique. E. G.

206. Voyage aux Alpes el en Ilalie, ou Lettres en prose et en vers, contenant la description de ces con trees ^ at^ec des details sur les curiosites naturelles el induslrielles , les mceurs el coutumes des habitans, les etablissemens , etc. ; par Albert Moktemont. Paris, 1821. Lelong, libraire , Palais-Royal, galerie de bois, n" 233. 2 vol. in-18, avec deux gravures et nne carte des Alpes et pays circon- voisins. Prix , 6 fr. , et 7 fr. So c.

On pourrait former une bibliotheque uniquenient coniposee de Voyages en Suisse et en Ilalie. Gette richesse n'empeche pas cepen- dant qu'on ne puisse ecrire encore sur ces contrees ou les arts et la nature ont r6uni toutes leurs laerveilles. Ordinairement, les voyages de ce genre sont une source de belles pensees ; et I'aspect de taut d'objets dignes d'admiration, eleve le style derecrivain. Le fojage aux Alpes el en Ilalie est d'une lecture d'autant plus agreable, qu'il offre une grande variete, et que des recits pleins d'images gracieuses s'y melenti des compositions fortes et po6tiques. L'auteur se dirige d'abord vers Geneve, et traverse les plaines de la Bourgognc, dont I'aspect monotone a desespere son genie poetique. Arrive k Feruey , il s'cst empresse de faire le pelerinage de rigueur aa chateau de Vol- taire , dont il nous donne une description en vers faciles et elegans ; il parcourt ensuitela vallee de Chamouni , dont la decouverte ne re- monte pas h plus de quatre-vingts ans , et dont les babitans ont vecu jusqu'alors ignores du reste du monde , au pifed du Mont-Blanc ; il trace un tableau piquant des maurs, simples encore, des babitans de Cbamouni. Ce petit village, situe sur la lisiere de la mcr de glace, sert de point de depart i toutes les excursions sur le Mont-Blanc ; il est, chaque annee, peuple d'une foule d'etrangers, ce qui a sans doute contribue & donner aux babitans cette ardeur pour le gain que leur reproche M. Montemont. L'auteur consacre quelques lignes k la m6moire du jeuue Eschen, qui fut englouti dans une des crevasses du glacier; ce moi'ceau est ecrit avec sensibilite. Sa lettre sur le Mont-Blanc renferme des d(^tails curieux sur la formation et les pro- gres des glaciers , et sur les avalancbes ; il donne le precis des princi- pales tentalives qu'on a faites pour en alteindrc le sonimct, ct il signale les dangers de cos ascensions, entierenieut sterilcs pour ks sciences , dcpuis que Saussure a fait sur la cimc meme toutc;< lei-

.396 LIVRES FRANCAIS.

experiences qu'ilesl possible d'cxecuter dans unc situation Aussi pc'ril- leuse et aprus les fatigues de cette excursion. M, Monteniont , en traversant le Simplon, ne manque pas de rappelcr les noms dcs inge- nieurs fran^ais ct ilaliens quidirigerent I'execution de ce beau monu- ment, dont on peut dire avec lui o que si les puissans de la terre ne concevaient jamais que de semblables projets, il Diudrait se prosterner devant leurs pas. » 11 nous apprend en peu de mots quels efforts I'art a dftsurnionter pour suspcndre la route du Simplon aux flancs des nionlagncs, pour percer en galerie d'enormcs rocbers , pour jeter des ponts sur des abimes oil la vue n'ose descendie. La onzitme lettrc est la plus interessante de tout I'ouvrage. La description que I'auteur donne de Milan est complete. On lit avec plaisir le recit de ses vi- sites au palais de Brera , cnrichi des peintures i fresque du celebrc Appiani; au palais des sciences el des arts, dont le rez de-cbaussce contient des ecoles d'arcbitecture, de peinture , d'anatomie ; le se- cond etage , la magniGque galerie de peinture , dans laquelle on rc- marque le mariage de la Vierge, de Rapbaijl ; et le troisieme , un observatoire , garni d'instrumens astronomiques des premiers artistes de la France et de I'Angleterre. On ne sera point ctonne de I'admi- ration de M. Montemont pour les gouts litteraires des Milanais , quand on aura parcouru avec lui la belle bibliothtsque Ambroisienne, cnricbie de tant de livres et dc manuscrits precieux. Les amans des beaux arts partagcront son cntbousiasme pour les monumens qui de- corent Milan ; niais lorsquc, entraine par son imagination poetique, il semble prevoir I'indepcndance de cette belle Italic., I'ami de la liberte reconnait avec tristesse que ce morceau a etc ecrit quelques mois trop tot. Vers la flfi de sa lettre sur G6ncs, est place un chant lyrique sur VOcean , que I'auteur a compose en contemplant la Me- ditcrranee du haut du phare : cette ode ofl're plusieurs strophes oil Ton trouve beaucoup de verve et de majeste. La lecture de cette piece doit faire desirer vivenient la publication promise par M. Mon- temont du rccuell de ses poesies. L'auteur est rentre en France par Grenoble ct Lyon ; il a visite , en passant , la grande Chartreuse , dont il donne une description fort piquanlc. En resume, ce P^ujage aux Alpes el en Italie se fait lire avec un vif interet , par la diversile dcs observations qu'il rcnfcrnie sur les mocurs , la litteraturc el les arts. Apres avoir trace , avec I'enthousiasme d'un poete , le tableau de ces niontagnes ct de leurs imposans phOnomOucs , il decrit , en homme

LIVRES FMNCAIS. 397

dc goftt, les institutions de la classiquc Italic , ces monumens de respiit huniain , imperissables comnie ceux de la nature.

C. COQI'EREL.

ioy.C) —Theatre de Marie-Joseph Ch^nieb, precede d'une ana- lyse , par M. N. L. Lemercieb, de I'Academie franijaise. Nouvelle edition revue sur les manuscrits. Paris, 1821. Baudouin ft6res , rue de Vaugirard , n" 36. 5 vol. in-iS, ensemble 1189 pages.

On a oublie de rappeler que I'analyse qui precede cette nouvfelle edition est entierement composee des trois comptes rendus de ce theStre par M. Lemercier , rediges pour notre Revue Encjclope- dique, et inseres dans Ic torn, i*', pag. 110,298 , 4875 t* qui nous dispensent de revenir sur le meme ouvrage , dont I'estimable aiiteur du cours de Liiterature analjtique a si habilement fait ressortir les beautes et indique les defauts.

2o8('). Description de VEgypte , ou Recueil des obseruationsel des recherches qui ont ele faitcs en Egjpte , pendant Vexpedilionde I'armee franraise , secoude edition dediee au Roi. Tom. I du teste, {^niiquites. -Descriptions. ) Paris, 1821. Panckoucke. in-8» de 860 pages. Prix , 7 fr. Le texte ne se vend pas separenient.

Ce volume , iniprime en caracteres neufs avec Ic plus grand soin, sur papier fin des belles fabriques d' Arches, est consacre aux des- criptions des villes antiques de Pbilac, de Syfene , des Cataractes , de I'ile d'Elephantine, d'Ombos, de Selseleh , d'Edfou , d'Elethyia , d'Esne et d'Erment. II est precede de la Pre/ace historique par M. Fourrier. Nous rendrons un compte detaille de cette publi- cation attendue avec impatience par les souscripteurs, et qui doit remplir leur attente.

DocziiiMB LivRATSON. Antiquiiis. Vol. I , pi. 9. L'objet prin- cipal de cette planche est de faire voir I'int^rieur des grandes cons- tructions qui precedent les temples d'Egypte et qu'on appelle pylones. Aniiquites. Vol. /, pi. 91. Cette planche represeute le temple d'Hermonthis qui se distingue de tons les temples d'Egj'pte par des colonncs d'une proportion plus elancec e t qui approche de cello de I'ordre ionique. Les ruines de ce temple sont trts-pittoresques ; il renferme des sculptures astrononiiques et mythologiques pleines d'intiret pour les savans et les antiquaires. On trouve dans cette ville, voisine de Thebes, les restes d'un nilometre antique. Elat .lodeme. Vol. Ii, pi, 1, Les villes modernes de Sy^ne, Esne et Syout

398 LIVUES FRANCAIS.

ont I'ourni les dclails qui composent cette planchc- Ilistoire naiu- relle. Zoolofi^'e.-Puissvns du. Nil. Pi. 5. Deux espices dc poissons du Nil appeles charucin ne/asch cl serrasalme cilliarine .—Ilistoire nalurelle. Bolanique. PI. 5. Deux planlcs lanipantes, nommues tioerhaai'ia repens ct salicornia slrohilacea.

Trei/.iemh LivRAisoM. AniiqiLiles. Vol. I, jil. 72. Fig. i, 2. Em- placement du grand temple de Latopolis ct de dcUx autres temples des environs. Fig. 3 et 4- Plan et coupe du portique du grand tem- ple.— Anliquiles.Vol. i , pi 8. On a repr^senle dans cette planche quinzc chapiteaux de I'ile de Pbila;. Etatmoderne. Vol. I, pi, 11. On conuait le projet de reunir l'Oc<Jan et la Mediterranee par un canal trace a travers I'islhme de Soueys. Ce travail a etc effectue dans les tenis anciens; maisune foule de causes ont fait abandonner le canal antique , dont il reste aujourd'hui peu de vestiges. Le meme dcssein a ete tente pendant Texpeditionfranc^aise; les ingenieursont execute, de 1798 i iSoi , toutcs les operations prtliiiiinaires pour cette grandc entrcprise .-plans, nivellcment, recherches, devis, etc.; le resullat de leurs travaux est consigne dans un ecrit fort etendu in- titule : Meinoire stir le canal des dtu.v mers ( Voycz £lat modeme , vol. 1 ). La planche 2 represente le plan de rextremitti dc la mer Rouge, les environs de Soueys, les traces du canal antique, enfin les plans et profils du nouveau canal qu'on se proposait d'executer. Etatmoderne. Arts et metiers. PI. 20. On fait en tgypte une grande quantite de nattes , dont une partie est destinee au com- merce du Levant ; elles se preparent avec une espece de jonc qui vient des lacs de Natroun. Lfi planche reprcjscnte I'art de les fabri- quer; elle represente aussi I'art de fairc les coufies, espece de pa- niers flexibles et tres-commodes, tisses avec la feuille du dattier. Ilistoire naturelle.— Poissons du Nil. PL 5. Poisson appelti polyp- leres bichir , avec les details anatomiques. (Voyez les Memoires sur les poissons du Nil. )

QuATonziKME LivBAisos. Anliquites. J'ol. I, pi. 60. Details d'architecture et de sculpture du grand temple d'Apollinopolis magna. Anliquites. Vol. I, pi. 67. Vues pittoresques des envi- rons d'El-KSb, I'ancienneEle thy ia.—£'/a/ 7reO£/tT/?e.—.'/?-/5t'<77Jtii/e/-5. PL II. Les arts mecaniques ct chimiqucs sont aussi en arriere chez les Egyptiens actuels qu'ils etaicntavances parmi leurs ancetres. On voit dans la prcsse du vinaigrier, que represente cette planche, une simple vis d'un travail grossirr; la meule est un tron(;on de colonne

LIVRES FRANCAIS. 399

dc granit. L'apparcil tin distillaleur pour la fabrication de I'caii-de- vie est formti d'alambics de I'especc la plus simple ; 4 defaut dc tubes de verre , il fait usage de roseaux , luttes convenablement. On salt que la loi musulmane interdit I'usage des liqueurs fermentees; c'est done pour les ehretiens que Ton pratique la distillation dc I'eau-de-vie; cependant iln'est pas tr6s-rare de voir les Musulmans braver la defense de Mahomet. Elatmoderne, Vol. I , pi, 22. La planche represente une mosquce ruinee qui a ete convertie en pou- dri6re pendant la duree de I'cxpedition. Botanique , pi. 6. Plu- sieurs graminees , analogues aux plantes appelees scirpus.

QniNziKME nvRAisON. AutiquMs. Vol. I, pi. 73. On a doane, dans la treizlenie livraisou , le plan et la coupe du portique d'Esne ou Latopolis. La planche ■j'b represente I'elevation de ce beau temple , avec la multitude de sculptures dont le frontispice est charge. Antiquiles. Vol. I , ])l. 74. Cette coupe presente un cote du portique du mfime temple, avec tous ses bas-reliefd, sauf les ins- criptions hieroglyphiques. Etat modems. Vol. I , pi. 4o. Cette planche represente des parties ext6rieures de la ville du Kaire , prfcs de la portc la plus voisine du quartier qui etait habite par I'lnstitut d'Egypte. Etal moderne , pi. FF. Plusieurs planches de I'ouvrage sont consacrees aux vases des Egyptiens modernes et 4 ceux des anciens Egyptiens , qui ont servi de modele aux premiers. —//is- toire naturelle. Reptiles, PI. 1. Detail en grand de la tortue du Nil, vue en dessus et en dessous.

209 (*). Choi.x de tableaux et statues dss plus celehr:s musees et cabinets elrangers , ou Recueil de gravures au trait , d'apres les tableaux des grands maitres de loutcs les ecoles , et les monumens dc sculpture ancienne et moderne les plus remarquables , sous le rapport de I'art, conserves dans les divers mus6es Strangers, et les plus celebres collections particulieres, avec des notices histo- riques et critiques. Paris, 1S21. Treuttel et "Wiirtz, rue de Bour- bon , 17.

Get ouvrage formera douze vol. in-S", distribues chacun en deux Hvraisons de 36 planches, et d'environ 80 pages de texte historique et critique. Le prix de chaque livraison est de 9 fr. Nous donne- rons quelques details sur eet ouvrage dont il a dejS paru cinq Hvraisons.

AOO LIVRES FRANCAIS.

Ouvrages pdriodiques.

210. Chronique religieuse. 1821.6 vol. in-8». Paris, Baudouiii rrt'ies , libraires , rue do Vaugirard , n" 36.

Une sociiti d'ecclesiastiques et de magistrals , convaincus des dangers que couraient les vfiritables principes de I'eglise de France , a entrepris, depuis deux annees, cet estimable ouvrage, dans lequel on retrouve la doctrine la plus pure du christianisme. Ces savans z6les ont eu i combattre sans cesse les erreurs du fana- tisme et de I'ignorance. Leurs couiageuses remontrances finiront- elles par triompherf Le clerge , plus eclair6 sur les veritables interfits de I'eglise , reviendra-t-il enfin aux principes pour lesquels nos grands docteurs , les Arnaud , les Bossuet, les Fenelon ont si souvent pris la plume? On assure que les redacteurs de la Chro- nique religieuse ont pris le parti de suspendre la publication de ce recueil. Les sinceres amis de la religion regretteront qu'ils n'aient pas monlre plus de perseverance , et feront des voeux pour que cette interruption soit de courte dur6e. A. T.

211. Chrislliche Mittheilungen. Communicalions chritiennes. Strasbourg, 1821. Tom. I, cahier 4-

Ce recueil est destine a des articles en vers et en prose sur des sujets religieux et moraux. Dans le 4" cahier, qui a paru r6cem- ment, nous trouvons, entre autres, un expose decequela confession d'Augsbourg a fait de plus utile i Paris , dans les derniferes annees , pour le culteet pour Tinstruction de la jeunesse. D. c.

212. Journal des sarans; un cahier in - , pour les sept premiers mois de I'annee 1821. On s'abonne rue de Menilmontant , n" 22.

Le Journal des savans est I'un des plus anciens ouvrages de ce genre, qui aient 6te publics en Europe. Inteirompu pendant vingt- cinq ans , il a et6 repris par ordre du gouvernement , qui a nommti pourses redacteurs plusieurs membres de I'academie des inscriptions et belles-lettres et de I'Academie fran^aise. Le savant et judicieux M. Daunou en est le principal redacteur, et renrichit de fort bons articles sur I'histoire. On y remarque aussi de nombreux articles sur la littcrature orientale , dc MM. Sylvestre de Sacy , Abel R6musat , dr Chezy , et autres savans orientalistes. Le genre un peu sevfeie de

LIVllES FRANCAIS. AOl

ce journal n'est pas toujours a la portee d'lin ties-grand nombre de lecteurs ; raais il n'en fait pas moins honneur a la France, par les travaux des homnjes distingues qui prennent part 4 sa redaction.

2 13. Noufeau Journal des Dames , om petit Courrier des modeSj des theatres t de la litlerature el des arts. In-S". Ge journal, com- mencd au mois de juillet dernier, parait tous les cinq jours ; on s'a- bonne i Paris, au bureau , rue Meslee, n" 3o.

Dans uu pays oil la mode exerce un si grand empire , ce n'cst pas trop que deux ou trois journaux qui ticnnent le public, ct surtout la plus belle partie du public, au courant de toutes les vicissitudes et de toutes les revolutions qui arrivent dans cet empire , ainsi que de toutes les nouvelles qui peuvent interesser les gens i la mode, ou ce qu'on appelle vulgairement le beau monde. Le nouveau jour- nal a I'avantage d'etre redige par des dames , comme tous les jour- naux des modes devraient I'etre. Quoiqu'il ne fasse que commencer , on voit qu'ii sera varie et piquant : il I'est peut-etre un peu trop dans un article sur V Italie , de lady Morgan , qui aurait dii etre un peu plus m^nagee par des personnes du mfime sexe. Lady Morgan , qui n'a pas autant d'instruction que d'esprit , et qui est plus caus- tique qu'il ne convient & une dame , fait quelquefois des quiproquo singuliers, et on pent lui reprocher des jugemens hasardes. Mais il faut rendre justice a son esprit observateur et a son grand talent de presenter, sous leur veritable jour, des pretentions absurdes et des caractferes ridicules. Sa plume est redoutable pour le parti qui favorise en Europe le regne des usages surannes. Les gravures qui accompagnent le nouveau Journal des Dames ne sont pas toutes employees a faire connaitre les formes nouvelles des cha- peaux et des robes ; elles retracent aussi quelquefois des portraits de femmes cclebres : c'est ainsi que , dans trois des derniers nume- ros , on voit des portraits bien executes de Clemence Isaure, de madame de Stael et de lady Morgan. D.-c.

Livres etrangers imprim&s en France.

2 1 4- Apologia catoUca delprojecto da Constitucion religiosa, etc. Apologie catholique du Projet de Constitution religieuse , ecrite par un Americain; par D. J. _•//;/. Liokkkte, docteur en droit canon, avocat aux tribunaux nationaux, editeur du projet snsdit ; .ouvrage qu'on peut considerer comme un traite sur differens points

Tome xj. 26

A02 LIVllES FllANgAIS.

d'histoirc et de discipline ecclisiastiqiie. Paris, 1S21. Moroau , rue CoquilU6re, n'aj. 2 vol. in-S".

L'ouvragc original a cte poursuivi par rolTicialito de Barcelone ; la Societe patriotique de cette ville luichoisit dans son sein des defcn- seurs. Depuis, I'eveque et son grand vicaire , obliges de s'cxilcr pour des motifs politiques, ont laissi les poursuites suspendues ; mais I'auteur, jaloux de se justiCer de rimputation d'liercsie aux yeux de sesconcitoyens, plaide lui-meme sa cause , et son plaidoyer est encore uo savant ouvrage ; seulement , tout en rendant justice aux vues droites et a la science de I'auteur, nous n'entendons pas adopter sans reserve ses opinions sur les questions trfes - delicates qu'il agite.

ai5. Observations on the political , moral and religious state of l/ie cifilised world, etc. Observations sur I'etat politique, civil et religieux du aionde civilise, au commencement du dix-neuvieme sifecle; par M. H. G. Macnab, etc. Paris, 1820. Nouzou , rue de Clery, n" 9 ; in-4'' de 28 pages.

Les observations de M. Macnab sont celles d'un philantrope iclaire , d'un ami sincere de la religion et de la liberty civile et po- litique. Les principes qui leur servent de base sont avoues par la raison , la morale et I'interet public. On pourrait peut-etre contester quelques-unes des consequences qu'il en deduit; mais on doit rendre Justice aux nobles sentimens qui leslui ont dictees.

« L'unite de principes , de vues , de moyeris et de but , dit I'au- teur, est le caract^re d'une bonne administration; sans cet accord indispensable, un gouvernement libre ne peut long-tems se main- tenir. La mobilite des mesures qu'il ne peut manquer d'adopter aflaiblit, par degri^s, les rapports du cbef du corps politique avec ses membres, et de li naissent des germes de revolution. Pour j»uir des bienfaits d'un gouvernement libre , la fidelit(^ du peuple doit £tre fondee sur I'opinion qu'il est bien gouverne. Je regards cette maxime comme incontestable. Les ministres d'etat dans un gouver- nement libre, qui, soit directemcnt , soit indirectement et a dessein, afi'aiblissent , par des mesures anti-sociales , les relations de la cou- ronne avec le peuple, sont, de tous les r^volutionnaires , les plus coupables et les plus dangereux. » B y.

216. Les oisea'ux et lesjleurs , allegories morales d'^zz-Eddin El Mocadessi , en arabe, avec une traduction et des notes; par M. Gabcih, Paris, 1821. Iraprimerie royale. i volin-S".

***'*VV\\*VV\'VVX\jVV%*Vl\\^VX\\V\'V%'V\V\X\,\\VV\^\'W'fcWt\'W\'\\W*V\*V\X'VVWWWT,*

IV. NOUYELLES SCIENTIFIQUES

ET LITTERAIRES.

AMERIQUE.

]6tats-U.ms. Nevt-Yobck.. CoUe^re da medecine et de chirurgie. Les cours de ce college commencent , tous les ans , au premier lundi de novembre et finissent au premier mars. Les 61feves doivent se faire inscrire i chaque session ; mais ils ne paient que la premiere iiiscriptioQ, qui est de cinq dollars (27 francs}. Ceux qui desirent prendre un grade doivent t-tre 5ges de vingt-un ans, et avoir suivi tous les cours du college , au moins pendant un liiver entier. Le president et les professeurs leur font subir le premier examen , qui est toujours secret ; le second est passe, le 1 5 mars, devantlesagriges du college. Le^o du meme mois , le candidat est oblige de remettre au doyen une these sur un s.ujet quelconque de m6decine ou de chirurgie , ^crite en latin , en anglais , en fran^ais ou en espagnol. Le troisi{;me csamen , qui se fait publiquemcnt , le premier lundi d'avril , dans la grande salle du college , roule sur cette thfese. II en coiite , pour ces divers examens , trente dollars. II y a des cours de medeclne, d'accoucbement tbeorique et pratique, et de ma- ladies des femmes ; 2" de chimie et de matiere medicale; d'ana- tomie, de pbysiologie et de chirurgie; d'bistoire natiirelle, y compris la botanique , la zoologie et la geologic ; de principes et de pratique de chirurgie ; de clinique ; 7" de medecine legale ; 8" de mineralogie. Le college posside une bibliotheque , un musee d'ana- tomiCj des cabinets de physique , d'bistoire naturelle et de minera- logie ; et, en vertu d'un acte de la legislature de I'etat , il jouit du droit de se procurer des sujets dans la prison d'etat de la ville. B b.

Iles Sandwich.— 7)/miorzs. Progres du christianisme. La mort du roi Tamahama, arrivee au commencement de I'annie 1S20, a occasionn6 dans ces iles une revolution generale en faveur du chris- tianisme. Les idoles ont ete brulees, les /raorea/w ( lieus consacres aux prieres ) detruils , la pretrise abolie ; enfin , les travaux de la mission ont 6t6 couronnes du plus brillant succes. Les missionnaires sont tres-aimis et soutenus en partie par la charite publique. Des icoies ont ete fondees, et I'etude de la langue anglaise s'etend chaque

2«*

AOA ASIE.

jour davantage. Parnii les Aleves, soiit le roi et la reinc d'Atooi, qui ont dictii cux-m6mes des leltres adressiics k des amis que Ics niission- naires ont en Aincrique. L. S. B.

Etats-Unis. Neivfoundland. Colonne antique.— On. a Tail ici, I'cte dernier, unedecouverte qui a cxerce lasagacile des antiquaires. A environ un millc des rivages do la bale de Gander , on a trouvc un fragment d'une petite colonne de marbre blanc, de i'orme oclogonc , d'environ dix-huit pouces de long, et de douze dc diametre. La sur- face en est alteree par I'air; il est probable qu'elle a demeure fort long-tems dans Ic memc lieu. EIlc ne peut avoir ete apportee, comnielest, a bord d'un vaisseau , puisque rendroit ou elle ctait est eloign^ de la mer de plus d'un demi-mille, ct que les vaisseaux ne peuvent approcher de cette rive de plus de trois quarts de mille. Cette partie du paysn'est point habitee, ct I'onn'a trouv6 dansle voi- sinage ailcune pierre semblable, niaucun ouvrage del'art. Le marbre dil'fere de ceux qu'on eniploie daus I'architecture ou dans la sculp- ture : il est d'un blanc jauniitre , d'un gros grain, et plein de petites cavittis, qui permcttent de le separer en feuilles aussi minces que du papier. L. S. B.

Etat de Niiw-YoKCK. Whitehall. Longivite. Necrologie. Le venerable Henri Francisco , Sge de cent trente-quatre ans , est mort pres de cette ville, apres une nialadie de quarante-cinq jours. Ne en Angleterre , il avail emigre en Amiriquc, il y a environ quatre- viugt-dix ans. 11 assista , commc tambour, au couronnement de la rcine Anne, et servit dcpuis dans la guerre de I'independance.

ASIE.

Ile de Cetlan. La Societe litteraire, philosophique et scientifique a arrete ses reglemens, dans la seance du n decembrc 1820. M. Les- chenaux de la Tour, naturalistefran^ais, estnomme nienibre corres- pondant de cette societe.

Pebse. Distinction honorijlqae accordee a, un Europeen. Le sbaL de Perse a envoyt i M. de Hammer, celebre orientaliste alle- mand , les ordres du Soleil et du Lion. Tous les ministrcs du shah ont signe cette decision , qui fera epoque dans les annales des rela- tions diplomatiques de I'Autriche avec I'orient.

TuBQuiE AsiATiQUE. Smybme. Joumal francuis. On''pub!ie, de uis quclque tcms, dans cette ville , un journal fran^ais, intitule

ASIE. A05

le Speclaleur orienlal. Dans le n" dii ai avnl, on icniaique la piece 'de vere suivante, sous Ic litre du Depart.

Adieu , dil-il , arbre ch6ri : Tiiste jouet de la fortune , Je dois aux chances de Neptune SacriCer ton doux abri ; Va , va , balance au hoin ta cime , Couvre la pente du coteau. J'irai , fendant rimmcnse abime , Pleurer ton ombre et mon berceau.

Adieu, soleil de la patrie! Le souffle paisible d'Eurus Blancliit au loin les Acts 6mus; L'onde recule vers I'Asie ; L'instant fatal ne pent tarder. Jusqu'au berceau du vieil Homire , O puisses-tu nous seconder, Brise propice et tut(ilaire !

Une tendre melancolie Vient succeder i sa douleur; Et si les accens du inalheur Interrompent sa reverie, Le nom cli6ri de son amie Parfois 6cbappe de son ca'ur, Avec le nom de sa patrie.

iLEsPiiiLirpiNES. Manille. Nectolugie. Godefrvy. Mas- sacre des e tr angers. M. Godefroy, naturaliste frani^ais, i peine fige de trente ans , a 6te massacr6 dans cette capitale des Philip- pines, le 9 octobre dernier ( le lo du calendrier gregorien ) , avec plusieurs de ses compatriotes et d'autres etrangers, contre lesquels on avait excite le fanatisme et la cupidite des Indiens. Voici , sur cet horrible ev6nement et sur ses causes presumees, un extrait des de- tails que nous tenons d'un Fran^ais sauve du massacre par un res- pectable vieillard, Don Vincente de los Reyes, qui I'a recueillidans sa maison avec une faniille francaise tout entiere.

Dans la nuit du i" au 2 octobre ( 2 au 3 J , il se declara un vent du S. 0. d'unc violence extreme , qui souflla pcndajnt trente heures

A06 ASIE.

cons6cutivcs , c.l ful iniinecliatuinent sulvi d'un leger Ireniblcment de terre. Trois jours aprt's, \t cholera-morbus se manii'esta,ot bientOt )es ciinelieies ne sutTirent plus aux entcrremens. La desolalion etait ii son comble parnii Ics Indicns, qui, dans le principe de la mala- die, en etaient sculs attaqucs , ct parmi les blancs, qui ne tarderent pas h en Otre victinies i leur tour. Jamais fleau semblable n'avait ravage les iles Philippines, renonimecs par luur salubrite : les pcr- sonnes les plus ctlairees crurent que le germe en existait darlsl'air. Tandis que cliacun ne seinblait Ctre occupe que du soin de sa con- servation , quelques miserables meditaient en silence les moyens defaire naitre, de ces circonslances d6ji si funestes, un nialheurd'un autre genre.

oDesle 6 octobre (le 7), les Indiens accus^rent les Frangais d'avoir empoisonnii la riviere Passig , en y versant plusieurs barriques de poison , lesquelles barriques avaient 6te retrouvees vidcs non loin de Manille.Cespropos 6taient trop absurdespour que nous y fissions attention; mais,lc7, ^^ jeune bomme qui suivait une voiture ou j'etais avec un de mes amis , entendit distinctement des Indiens qui disaient , en nous designant : t p'oildles miserables que nous devons tuer. » Frappesde ces paroles, nous eninform4mes le charge d'affaires britanniquc , M. Stevenson , qui, le 8 au matin, fit part au gouverneur des bruits inquietans qui circnlaient 4 I'^gard des etrangers. Celui- ci lui dit qu'on ne devait pas s'en alarmer, et que , dans tous les cas , les etrangers pouvaient compter sur sa protection. Pen rassure par cette reponse , M. Stevenson se dttermina , le 9 , ^ faire circuler une adresse ii tous les dtrangers des faubourgs et des environs de Manille , oiiil les invitait 4 se reunir pour se consulter sur les moyens de sOrete & prendre. II n'etait plus terns'.

« Le premier attroupemcnt cut lieu dans le village de Santa-Cruz, separ6 de Manille par la riviere Passig ; et voici quel en fut le pretexte : M. Godefroy , medecin , frere du naturaliste, parcourait ce quartier , dans la matinee du 9 ( 10) , portant les secours gratuils de son art dans les chaumieres des Indiens , dont plusieurs avaient etc sauv^s par ses soins. L'un d'eux , qui, negligeant scs conseils, avail rcpris son genre de vie ordinaire, succomba , malgre I'assis- tance de M. Godefroy. Aussitot, quelques-uns des parens et des amis du mort s'assemblent aatour du medecin, I'attaquenl, s'emparent de deux fiolcs rentiplies de laudanum qu'il porlait sur lui pourle soulagc-

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menl immedial de ses malades, et les font avaleriun chien, qui meuit sur-le-champ.Cette race stupide ci'ie aussilOtirempoisonneur ; toute la populace des environs s'ameute; M. Godefroy est accable de mau- rais traitemeus ; et. apres avoir recu plusieurs blessures , il est remis entre les mains du corregidor (chef de la police) , qui le fait con- duire dans un des plus noirs cachots , et le laisse outrager sous ses propres yeux. M. Godefroy, le naturaliste , accoiiru au bruit de cette scene pour faire sortir son I'rere de prison, n'obtient pas meme la permission de raster avec lui , et se voit oblige de retourner seul i son logement , qui se trouvait dans la maison occupee par M. Guillot, subrecargue du navire V Eglantine de Bordeaux. A peine y est-il entre , que les Indians , faisant entendre un cri de rage contre tons les Francais , passent un petit pont qui les separait des faubourgs et courent assaillir la maison de M. Guillot, lis en for- cent I'entree ; et , conjointement avec un sergent et quatre soldats que I'autorite y avait cnvoyes pour proteger ces etrangers , ils mas- sacrent MM. Godefroy, Guillot, ainsi qu'un capitaine anglais et un oflScier de la marine americaine , refugies dans la maison.

« Enbardis par ce premier succes , les Indiens , dont le nombre augmentait toujours , attaquerenl successivement la plupart des maisons des faubourgs habitues par des etrangers , egorgerent tous ceux qu'ils purent trouver, et finirent par piller et devaster entiere- ment leurs demeures. Cette derniei-e circonstance prouve que ces brigands etaient guides 'bien plus encore par le desir du pillage que par la vengeance. Ayant trouve dans deux maisons, oudemeuraient des jeunes gens qui s'occupaient d'histoire naturelle , divers reptiles conserves dans des bocaux d'eau de-vie , les Indiens s'imaginferent que cette eau-de-vie avait servi i leur faire des remedes empoison- nes , et que le venin trouve dans les serpens avait ete jet6 dans la liviere. Mais, ce qui est encore plus surprenant , c'est que le cor- regidor et memi; des ecclesiastiques aient cru oO paru croire a de telles absurditis.

•Aprfes s'etre impunement livres, pendant six heures entieres, aux cxces les plus affreux , les brigands se retirerent fort tranquille- ment , a cinq lieures et demie du soir , pour aller partager les de- pouilles de leurs victimes. II est affreux de penser que le gouver- neur espagnol , Don Mariano de Folgueras , bien loin de chercher a prevenir d'abord ou k reprimer ensulte de pareils exces, aittenu

A08 ASIE.

dans rinnction trois niille liommes arniLS , el raititleiie qui gainis- sait los rciupails dc Maiiille , sous lesquels sc passait cctte scene nDieuse.

Quel contraste cntrc la pusillaniniitu do celui qui devait mon- trer le plus d'cncigie , et la belle conduite que liiirent plusicuis per- sonncs , que nous regrettons de ne pouvoir nonimer toutes ? Madame Scarella , femme d'un ncgociaat, sauva quatre Franc^ais qui s'etaient vefugiis chez elle , et que la populace reclamait ^ grands cris, en assaillant i coups de pierres un observatoire oil clle lefe avait caches. MM. d'Olea et de Lemon ,olIjciers des troupes, se Tirent remarquer par r^ncrgieavec laquelle lis demanderent, quolque inutilement, au gouverneur Tordre de faire feu sur leslndieus , en lui repondaut sur leur tetc d'arreter le dd'sordre avec cinquante hommes seulement.

o Le cure de Santa-Cruz fit inhumer dans le cimetit-re de sa pa- roisse les quatre personnes assassinees dans la maison Guillot. Un autre cure arreta , par ses prieres, les Indiens qui allaient penetrer dans une maison habitee par trois Fran^ais. Quelques particuliers rspagnols offrirent leurs malsons pour asile A plusieursetrangers,dans le moment du plus grand danger; d'autres se prdcipiterent au mi- lieu de ces barbares , pour leur arracher quelques victimes. On cite aussi quelques Indiens des habitations francjaises qui se devoufcrent pour sauver la vie de leurs maitres. On doit des hommages particu- liers i Don Alexandre Parreno, commandant du fort de San Jago , a Manille , et k Don Vincente Posada , premier juge au tribunal de I'Audiencia : au premier, pour avoir regu ct nourri chez lui , de ses propres deniers, plus de trente strangers, qui se trouvtrent sans de- meure apres la funeste journee du g octobre (le lo) ; et au second , pour avoir egalemcnt mis sa table et sa maison i I'entiere disposi- tion des etrangers, apris leur sortie du fort. C'est Don Posada qui lit des representations inergiques dans rassembl6e des notables pour qu'on rendjt les honneurs iunebres aux malheureuses victimes de cetle journee, dont les cadavrcs avaient ete jetes pele-mfile dans vne fosse creusee sur le rivage. II demanda aussi , mais en vain, que prompte justice fut faite des coupables.

«Le lo octobre (le ii) les Chinois furent attaquiis 5 leur tour, poursuivis et massacres, au nombre de seize environ, jusque dans les murs de Manille. Au moment oil les Indiens 6taicnt a la pour- suite des Cliinois et pillaienl leurs inagasins, Tarchcveque de Ma-

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nille se rcndll sur le champ du carnage , escorte par un grand nombre de religieux. A son aspect, tons les Indiensseprosternfirent; mais i peine fut-il retourne a la ville, que le disordre recommenca.

» Les deux journiies du 9 et du lo (10 et 11) eurent pour afFreux resultat la mort de plus de cinquante individus de toutes nations , et une perte d'environ 3oo,ooo piastres. Lorsque les Indicns eurent divaste les magasins cbinois , ils donnerent i entendre, par leurs cris, qu'ils en voulaient a tous les blancs. Alors, les membres du gouvernement cspagnol, craignant pour euK-memes , commence- rent 4 prendre des mesures vigoureuses , et firent rentrer f'acilement dans I'ordre des brigands rassasies de carnage. Trois Espaguols, ap- partenant k de bonnes families du pays , furent saisis , comma pr6- venus d'avoir ete k la tete du complot. Huit jours aprfes, ils furent reMches , sans avoir ete confrontes avec leurs accusateurs. Les pri- sons se remplirent d'Indiens soup^onnes d'avoir pris part aux jour- nees des 9 et 10 ; plusieurs furent reconnus coupables i la suite d'une longue procedure ; mais, le 27 novembre , jour de notre depart <le Manille , c'est-i-dire plus de six semaines apres le massacre , au- cun de ces mis6rables n'avait encore et6 execute. Quant aux objets voles , il n'en avait 6te restltu6 jusqu'alors que de nulle valeur.

« Nous adress4mes une petition au gouverneur pour reclamer des indemnites ; il y r6pondit negativement , comme nous nous y 6tions altendus ; mais notre but 6tait de nous mettre en regie. Nous nous fimes donner, en outre, un procfes-verbal du pillage de nos maisons. Le 27 novembre 1820, nous appareilliimes, en meme terns que l'£s- p&rance, de Bordeaux. Pour rendre les derniers'honneurs aux Fran- 9ais morts dans la journee du 9 octobre, tous les navires de cette nation rangerent leurs vergues en bataille , en signe de deuil , et sa- luerent de cinq coups de canon chacun la plage oii les cadavres de ces infortunes avaient ete jet6s. A la sortie des detroits , nous ap- primes, par le Cultii>ateur, de Nantes, parti deux jours aprfcs nous, que le gouverneur avait envoye <i son bord pour s'informer du motif de ce salut, et que, I'ayant connu , il avait declar6 aux capitaincs et subrecargues des navires fran^ais restant en rade , qu'il avait donne les ordres necessaires pour qu'un service divin fat celebr6 en riionneur de leurs malheureux compatrioles ; tristc ct tardive repa- ration dc son indigne conduile A. M— t,

AlO EUROPE.

Cap db Bonhe-Esp^rance. Voyage. Le niissionnairc Campbell , qui a donnd au public la relation dc scs premiers voyages dans le sud do I'Afrique , est de retour d'une seconde expedition egalcment intcressante. II dit avoir penetre k huit cents milles au-dcl^ de la ville du Cap , distance qu'aucun voyageur europien n'avait encore franchie , et avoir decouvert plusieurs nouvelles villes fort grandcs , dont la population s'eleve , pour la plupart , i dix ou douze mille pcrsonnes. Lcs habitans se montraient partout affables et deciles , habilcs i fabriquer la poterie, h fondre le fer, et a exerccr plusieurs autres arts utiles. lis semblaient connaitrc le prix des talens , sou- haitaient beciicoup de voir arriver parmi eux quelques habiles arti- sans, et desiraient aussi avoir des missionnaires. En general , selon M. Campbell , on trouve cbez ces Africains un degr6 de civilisation Inconnu aux peuplades barbares qui avoisinent le nord de I'A- frique.

Dans ce voyage, le missionnaire anglais a trouvd Ic rhinoceros unicorne , qu'il suppose devoir etre I'animal dicrit par Job (chap. Sg, vcrsetg). On a fait des recherches dans le Thibet, pour retrouver quelques individus de la meme esptce ; mals deux jeunes natura- listes franc^ais , MM. Diard et Duvaucel , I'avaient deji decouvert k Java, ( Vqy. Tom. X, pag. 473. ) L. S. B.

ificYPTE. Voyage scienlifique. On assure que MM. Waddington et Hanburg, voyageurs anglais, ont decouvert I'ancienne ville de Meroe , dont parlent J/eroffoie, liv. 11, chap. 29; Diodore de Si- dle, 1,7)5 ; Strabon , xvii ; Jdsephe,Ji, 10. Suivant ces trois der- niers auteurs, la ville de Meroe etait situee dans une ileformee par le Nil, I'Aslapus, et I'Astaboras, maintenant Bahrel Abiftd, Abawiet Taccaza. E. G.

EUROPE.

ILES BRITANNIQUES.

Lo^DRES. Dispensaire royal petur les maladies de l^oreille. A la derniere stance annuelle des gouverneurs de cette institution bienfaisantc , il a cte prouve , par tes rapports de chaque medecin, que plus de deux mille deux cent dix personnes afiligtes de surdite , et d'autres maladies attaquant I'organc de I'ouie, ont ete gueries ou soulagecs. Ces hcureux resuitats feront apprecier davantagc encore

EUROPE. All

I'ulilile de ccl elubllsseuicnt , dont les fondateurs livalisent de z6le pour soulager les malheurcux : I'un d'eux vient encore dernicrement de verser entre les maios du tresorier une somme de cent louis.

L. S. B.

Publications prochaines. i" M. Valpy se propose de publier , par souscription , la Collection des (Euires des poetes les plus cele- bres de I'ltalie , depuis la fin du douzieme jusqu'aa commencement du dix-neuvieme siecle , classees par ordre chronologique , et accom- pagnees de notices biographiques et critiques snr leurs vies et sur leurs ecrits , estraits des meilleurs auteurs qui ont ecrlt sur I'histoire litteraire de I'ltalie. Cette utile compilation sera faite sous la direction de William Roscoe, auleurdela Viede Lorenzo de Medici, appel6 le magnifique, et de la Vie etdu Pontifical de Leon X', etparaitra en 48 parties in-8"> , de 4oo pages chacune , avec plusieurs portraits ; M. Lowe, auteur Acs Articles statistiques sur la France et sur V Angleterre , intprimes dans le supplement de rEncyclopedie Bri- tannique , doit faire paraitre bicntSt un volume sur la situation et les ressources de la Grande-Bretagne en agriculture , en commerce et en finances. Les plus hautes questions d'economie politique se- ront discutees et approfondies dans cet ouvrage , qui contiendra un tableau coniparatif de la situation de I'Angleterre avec celle de la France; M. A. Maxvvell , auteur de la Pluralite des mondes , ou lettres, notes et memoranda philosopbiques et critiques, en r6- ponse au r^v^rend docteur Cbalmers , prepare une traduction de I'ouvrage latin Conamen recuperandi notiliam principiorum veteris et verce philosophioe, etc., par A. S. Gatcott;ou Essai pour retrouver les principes de I'ancienne philosophic, tire des ecrits sacres et der- ni^fiment explique par John Hotchinson , avec une nouvelle pre- face et des notes additionnellcs ; 5" Recherches zoologiques dans I'ile de Java , avec des gravures representant les quadrupedes et les oiseaux du pays, par Thomas Harsfleld , publie en huit livraisons. Les maleriaux d'apres lesquels seront fails ces ouvrages, sont de- poses au musee des Indes orientales, oil ils sont exposes au public certains jours de la semaine. Ils ont ite presque tons rassembles depuis iSii jusqu'a 1817 , cpoque pendant laquelle Java etait sous la protection de la Grande-Bretagne. L. S. B.

Necrologie. Arthur Young, secretaire du conseil d'agricul- ture, etc. etc.,.. naquit a Bradfield-Combust, dans le comte de

A12 EUROPE.

SiiQblk , lo 7 scptenibrc 174 i. G'est lui qui, le premier, posa , en Anglcterre, les fondemens de I'agriculture; science qui, jusqii'alors, y avail 6te livr^e an hasard , ou soumisc i dcs pratiques routiniercs , que les prejuges et I'ignorance rendaient fort difficiles i d6raciner. Les voyages de cet honime eclair6 et les details intcressans qu'il publia crierent , parmi ses compatriotes , un esprit de recherclic ct de pcrfectionnement. M. Young Ct lui-mfime plusieurs cssais dans I'agricullurc pratique. II echoua d'abord, faute d'expirience et des fonds necessaires ; mais il avait trop de z6le pour se laisser d6coura-

•ger, et ses succ^s le r6conipensferent amplement de ses peines. Ce fut en 1776, 1777, 1778 et 1779 qu'il visita I'lrlande. Les princi- paux proprietaires de cette ile , attires par sa reputation , vinrent en corps lui detnander ses conseils. 11 publia, vers cette epoquc , la

premit're edition du Manuel dufermier, ouvrage g6n6ralement ap- precie et qui produisit les plus heureux r6sultats. En 1784, il com-

-men^a les Annales d' agriculture , qu'il fit paraitre , tous les mois, par livraisons , pendant plusieurs anniies. 11 y donnait ses propres opinions et les exemples tir6s d'une pratique journalifere , joints i ceux que lui fournissaient les plus habiles cultivateurs du pays. 11 y traitait aussi les sujets relatifs a I'^conomie politique , au commerce, aus finances et i tout ce qui s'y rattache. Ses correspondans etaient pour la plupart des hommes d'un rang fort distingue , et le dernier roi d'Angleterre , Georges III , lui envoya plusieurs articles sous le nom de Ealpb Robinson de Windsor. M. Young nourrissait depuis long-tenis I'idee de passer en France, afin d'en examiner le tcrri- toire, lorsque MM. LazowsLi et le due de La Rochefoucauld lui propos^rent de les accompagner dans un voyage aux Pyrenees. II s'y dccida et partit. Cette excursion eut lieu en 1787, et M. Young revint Ji Londres, dans I'biver de la meme ann^e , pour assister h une discussion du parlement sur une question commerciale d'un grand intiret. II fit sa seconde tournee en France en 1789, et les details qu'il a publics sur ce pays prouvent autant d'instruction que de jugement, Comrae secretaire du conseil d'agrlculture , il s'appliqua sans relacbe k etendre et i facililer I'instruction de Part auquel il s'etait devoue. On lui doit un grand nombre d'ouvrages importans. Depuis longtems, il en j^K'patait wasni ics iUmens pratiques d''a- griculture , con tenant ses experiences et ses observations pendant une periode dc cinquante annecs. En 1811, il deviut tout-i-fait avcugle , et fut langujssant jusqu'au moment de sa uiort. L. S, U.

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EUROPE. A13

SUEDE.

SrocsnoLM. AcadeniieJes sciences. L'un dcs membres de cette academic , M. le conite de Schwerin ( petit - fils du general Schwerin , qui mourut au champ d'honneur sous les drapeaux de Frederic II) , s'est declard avec energie centre les nouveaux statuts qui viennent d'etre rediges pour cette societe savante. II a remis au Roi un memoire , dans lequel il lui fait observer respectueusenicnt que les nouveaux statuts font devier Tacademie de I'esprit dans lequel elle a et6 fondee en ijii- 11 ajoute qu'avec I'organisation qu'on veut lui donner , cette societe ne serait plus qu'un tribunal impose aux sciences et aux lettres , et qui s'arrogerait le droit de prononcer tous les ans un jugement , par lequel il declarerait que les productions litteraires de la Suede sont dignes Ou sent indignes de son approbation. M. le comte de Schwerin se prononce surtout hautement centre I'article 2 des statuts en question, par lequel le nombre des academiciens est fixe i.cent : selon lui, une telle dis- position fait manquer totalement a I'academie le but de son insti- tution primitive , celui de recevoir dans son sein tout homme qui a bien merile des sciences et des lettres.

ALLEMAGNE.

ViENNE. Botanlque. Un journal de Vienne contient d'interes- sans details sur les plantes de la Martinique. lis ont 6te donnas par un jardinier-botaniste, que M. Sieber, savant distingue, a envoye dans cette ile , i ses frais. II a deja fait passer en Europe une grande quantlte de plantes , de semences , d'arbrisseaux ra'res , avec lesquels il espere composer une flore de trois ou quatre cents especes. II a parcouru les montagnes bleues de la Martinique , qu'aucun bota- niste n'avait encore visitees ; mais il a eu beaucoup de peine a obte- nir d'y etre accompagne dans ses excursions, par des habitans de I'ile , qui redoutaient les serpens qu'on y trouve en grand nombre. Les natui'els ont une singuliere maniere de se garantir de ce danger ; ils placent sur la route un vase de terre rempli de sang de poulet , et pritendent que ce breuvage empeche les serpens d'C'tre venimeux. Arriv6 sur les sommets des montagnes, le voyageur se trouva en- toure d'une vegetation si riche et si variee, qu'a peine savait-il par o<i commencer sa collection. Les bords d'un lac situe ^ mi-cOte d'unc coUine etaient couverts de plantes et d'arbustes de differentes

espfcces , de vigncs, etc. Plus haul, il cueillit dcs plaiilcs et dcs fleurs d'uii genre parliculier, qui n'avaicnt point encore uti dc- crites. Co botaniste devait quitter la Martinique pour aller faire Ics tn€mes recherches i la Janiaique. L. S. B.

SiOTTGABD, Sooiite royale d'economie rurale. L'activite de cette soci6t(5 nc se dimcht pas ct continue i 6tre couronn^e des plus heureux succes. Cette reunion d'hommes distingues par Icur savoir et leur pliilantropie est un excellent comit6 consultatif pour les ministcres du royaume. Elle examine avec soin les d6couvertes utiles i I'agriculture ; et , lorsqu'ellcs sont sujettes i des experiences prfealables, la societe fait elle-mfime les premiers cssais et propage ainsi, sans aucun danger pour le cultivateur, tout ce qui peut am6- liorer sa position, en mCme terns que sa prudence ctouffe, dfes leur naissance , les indications qui pourraient egarcr ceux qui seraient tentes de les suivre. Le roi accorde une attention particullere aux travaux de cette bienfaisantc societe ct se fait rapporter tous les proces-verbaux. On regrette beaucoup en Allemagne qu'il n'y ait pas un redacteur salari6 , cbargd de publier dans un journal les r6sultats de tant d'utiles observations.

Phusse.— Ehfuht. L' academie rqy ale des sciences usuelles avail propose, en 1817 > un prix de la valeur de cent 6cus i I'auteur du meilleur memoire sur la question suivante : Quelle influence la guerre de la liberie, de i8i3 a i8i5, a-t-elle exercee sur les deve- loppemens de I'esprit humain ? Plusieurs ecrits sont parvenus a I'academie ; mals elle n'a point juge que leurs auteurs eussent traite le sujet sous son veritable point de vue. Elle a done retire la question proposee , i laquelle elle en a substitu^ une beaucoup moins 61evee, que voici : Quelle substance pourrait remplacer le tan 7 celles qui ont he decouvertes par Hatchet en tiennenl-elles riellement lieu, el peut-on les employer dans la grande fabrication? L'academie ne veut point de tbiories ni de raisonnemens ; elle demande des expe- riences et des r^sultats. Les auteurs des mfemoires devront mCme y joindre des ichantillons du cuir qu'ils auront obtenu. Ces m^moires seront re(;us jusqu'au i"' mai 182a et devront etre adresses a M. Schorch, secretaire de l'academie.

BaESLAw. Unii/ersite. Le savant et respectable bibllothicaire de notre university, M. Schneider, a re^u I'ordre de I'Aigle-Rouge le jour meme ou il venait d'atteindi'e sa 71* annee, Nous avons dans

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ce moment quarante cours de tliiologie , dont dix-sept protestans et vingt-trois catlioliques , quinze cours de droit , trente-trois de m6de- cine,huitde pliilosophie, deux de pedagogic, neufde mathematiqnes, quatorze d'histoire naturelle, sixd'tconomie politique, dix-sept d'his- toire; enfin, dix-huitdepbilologie. Parmi les noms des professeurs, le public distingue avec plaisir celui du celebre hell6niste Schneider, de M. Kruse (les travaux de ce dernier sur les antiquites de la Silesie ont ete annonces dans notre cahier du mois d'aout, pag. 225) ; enQn, de M. Wellauer , auteur d'une ingenieuse dissertation sur les Thes- mophores.

Stdttgard. —La bibliotheque royale est, depuis quelques mois, placee dans un local plus commode pour ie public ; les salles sont Tastes et bien eclairees. L'cidifice estisole de tous cOtes, et se trouve ainsi k I'abri du feu.

Slatistique. II vient de paraitre a la fois plusieurs ecritssurla statistique etsurla topographic de notre royaume. Voici les principaux r^sultats qu'ils presentent : La surface totale du Wurtemberg est de 355 milles carres d'Allemagne, sur lesquels vivent 1,397,564 ha- bitans. La valeur des produils est , en froment , de 32 millions de florins; en fourrages, de 9 millions; en vins, de 3 millions; en fruits , d'un million et demi. La valeur generale des biens-fonds , maisons, capitaux, bestiaux, etc., est de 1,000,662,800 florins; et le revenu net de I'etat est de 19,570,000 florins. L'un des dcrits dans lesquels nous puisons ces renseignemens est de M. Meminger, qui a beaucoup augmente I'interet de son ouvrage par des obser- vations de geologic et d'histoire naturelle. II a -meme etendu ses recherches en ce genre au-deli des frontieres du royaume ; il fixe la hauteur de quelques montagnes qui ne sont pas sur notre territoire , par exemple du Feldberg eleve au-dessus du niveau de la mer de 4,610 pieds, et du Belcken qui a 45^55 pieds au-dessus du mSme niveau. L'auteur decrit avec un soin particulier tout ce qui a rapport aux montagnes et i leurs divers embranchemcns ; il ne neglige pas les antiquites, qui pour I'ordinaire sont assez mal examinees dans ces sortes d'ouvragcs. L'agriculture I'emporte ici sur toutes les autres parties , et I'auttur ne nomme aucun produit de la terre , sans indiquer combien d'arpens sont consacres k le cultiver. M, Roeder a aussi publie un ouvrage, dont la lecture sera tres-utile i tous ceus qui (itudient la statistique.

416 EUROPIi.

Gortii.— Publication noufelle.—Philulogie. M, Brclschneidcr se dispose i donncr au public un Lexicon Novi Teslamenii grcvco- lalinum manuale, DejJi I'Europe savantc posscdait un ouvrage sem- blable , dont I'auteur 6tait M. Schleussner ct qui a eu trois Editions. M. Bietschneider annonce qu'il n'cntend pas que son livre remplacc celui-li; il dit avec raison qu'il y aura loujours une grande difference entre un Thesaurus philologicus complct et un simple manuel des- tine surtout aux theologiens , pour lesquels le premier est trop cLer. L'ouvrage de M. Bretschneider n'aura done qu'un seul volume in-S" de 74 feuilles ; il sera redige d'apres le texte de Griesbach ; mais les lecons vulgaires , que I'^dition de ce savant rejette, seront donnees entre parentheses.

ViENNE. Nouveau Recueil periodique. Quand nous avons in- dique it noslecteurs les journauxet recueilspirlodiques deTAutriche, (T. X, p. 642), nous ne connaissions pas celui qui s'imprime depuis peu k Brunn , en Mora vie , sous le litre de Feyer-Slunden (heures de ffite ou dc delassemensj. Ce journal est redige, i Vicnne , par M. le baron de Biedenfeld, auteur de plusieurs elegantes productions, et par M. Kaffner, qui s'est distingue par plus d'un ouvrage dramatique. Outre ces deux litterateurs, les Feyer-Stunden ont pour redacteurs les hommes les plus marquans de rAllAnagne , tels que MM. La- motte-Fouque, Fr. Laun , Fr. Kind, Muller Brentano , de Hammer, Hang, Theod. Hell, Kuhn ; le c^lebre Goethe egalement y fera in- sererdes articles. Ontrouve dans ce recueil des contes en prose et des pofesies fort agr6ables. Le premier cahier, que nous avons sous les yeux, contientle premier extrait d'un poeme intitule die Slufen der bilduncr, ou les degr6s de la civilisation , par M. Schweighiiuser Ills, de Strasbourg. {T^oy. cidessus, p. 362.) L'etendue et I'objet de ce pofeme meritent sp6cialement I'attention. Les Feyer-Slunden parai- tront dc deux mois en deux mois;l'ex6cution typographique ne laisse rien i desirer , et de jolis portraits ajoutent encore ii son elegance : la premiere livraison contient ceux de M. Kind et du celebre orien- taliste M. de Hammer.

Grand-Di'Ch^ du RHiN.— CBEUTZNACH.—/our«aZ. II parait, de- puis quelque terns , un ecrit p^riodique intitule : Darstellungen aus dem preussischen Rhein und Mosel Lande ( ou Tableaux choisis dans les pays prussiens du Rhin et de la Moselle). M. Storck, de Creutznach , editeui- ct traducteur d'Ausonc, est I'auteur de ce nou-

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veaurecueil , qu'il ne pouvait mieua ouvrir que par I'idylle de la Mo- selle : c'est en eOet la piece de vers la plus ancienne de toutos celles qui sont consacrees k ces belles contrees. Le premier volume de M. Storck contient des details trfes-curieux sur le moyen age; on y trouve une genealogie du vin duRhin, qui ne deplaira pas aux gour- mets. II y a beaucoup de franchise et de hardiesse dans la maniere dont I'auteur emet ses opinions : il dit nettement qu'avant I'arrivee des Frangais , la dime , les corvees , les droits de chasse , etc. etc. ne permettaient point k ce pays d'esperer une prospirite r^elle; tandis que , pendant la reunion de sa patrie i la France , on vit s'etablir I'e- galite des droits; les biens de I'eglise , vendus comme biens natio- naux, allerent augmenterl'aisance de la classe moyenne de la societe. Les rigueui'S de la conscription etaient quelquefois excessives , mais M. Storck y trouve encore un bon cOte : la chert6 des remplacemens, dit-il , faisait tout-i-coup passer un capital dans une famille pauvre, et lui permettait d'acquerir des terres. EnGn tout , jusqu'au systeme continental lui-meme, tout, selon lui, presentait des avantages. L'au- teur rappelle aussi les belles routes construites par les Franijais ; puis 11 paye un juste tribut d'feloges aux hommes vertueux qui ont admi- nistre le departement de Rhin-et- Moselle. Les noms de MM. de Chaban , de Lanieth et de Leza - Marnezia y sont toujours pro- nonces avec la meme veneration. L'on n'oubliera jamais, dit M. Storck, ce qu'ils ont fait pour I'instruction publique et pour I'agriculture ; le respect qu'ils inspiraient a survecu k leur pouvoir. Nous ajouterons avec douleur que deux de ces excellens administrateurs, MM. de Chaban et de Marnezia , sont deja descendus dans la tonibe.

Cassel. Recueil periodique intitule Die T'orzeit {le terns passe). Ce recueil , qui est k sa seconde annee, se distingue par une gravity que n'ont point les autres Taschenbiicher de I'Allemagne. M. Justi , connu d^jii par une vie de Sainte- Elisabeth et par d'excellentes po6sies , riunit dans le Vorzeit divers materiaux hlstoriques. Ce sont des documens puisi^s aux bonnes sources , et classes de maniere k plaire aux gens du monde. Le num^rode 1821 contient: i" une dis- sertation sur Henri 1 , landgrave de Hesse ; 2" des recherches sur la sepulture du landgrave Guillaume III ; un recitdu pelerinage fait en Palestine par Philippe, dernier comte deKatzenellenbogen; 4.° une liste chronologique de tousles grands-maitres de I'ordre Teutonique; une dissertation sur les Tenipliers ; G" enfin , des melanges. Tome xi. 27

A18 litROPK.

SitrtcinD.—Lithograpfne.—UM. Boiserie et Bertram Tont litho- graphicr par I'habile M. Strixner leur belle collection de tableaux de I'ancicnne ecole allemandc. A en juger par ce qu'ils ont deji fait paraitre , leurs cahiers ne laisseront rien i desirer. On pent les acheter sans souscrirc pour le tout , et mCme on peut se procurer se- parement chacun des dessins qui les composent. Le texte est r6dige avec le soin qu'on devait attendre des redacteurs. Les tableaux que MM. Boiseree etBertram possedent eu originaux continuent toujours 4 attirer ua grand nombre decurieux. Parmi les etrangers de marque qui les ont visiles en 1820, on cite M. Gau, architecte voyageur, lord Elgin , le professeur Heeren de Goettingen , MM. Wolf et Savigny de Berlin, Daub , Creutzer, Thibaut et Leonard de Heidel- berg , enfin M. Thorwaldsen , qui a donne I'idee de faire litho- graphier la collection que nous annon^ons. Le roi en a accepte la d^dicace.

McNSTBB. Necrologie. M. Charles-Louis Buck , anclen avoue au tribunal de cette ville, est mort le 17 Janvier dernier. 11 etait auteur de plusieurs ecrits politiques, parnii lesquels 11 y en avait un sur cette question : Les pay sans des contrees oil les lois Jranfaises ont delruit la servitude peuvenl-ils , dei'uis le relour de I'ancien ordre de choses, compter avec quelquefondement sur la continuation de leur liberie? M, Buch publlait ce memoire en i8i4; et, comine on peut le penser, son ouvragc produlsit une vive sensation. M. Buch etait ne h Burgsteinfurdt, le 29 decembre ijSS.

Phussb. Veber. Le 25 mars, la Prusse a perdu un compositeur

distingue, le chevalier Anselme Veber, maitre de chapelle du roi, n6 i Manhelm en ij66. Destine par ses parens i i'etat eccl6siastique, Veber falsalt ^ Heidelberg ses eludes en theologie , lorsqu'un pen- chant irresistible I'entraina vers la musique. II obtlnt bientOt des succ6s marquans dans la nouvellc carriere qu'il avalt choisie , et fat le compagnon de voyage du celebre abb6 Vogel , avec lequel ii parcourut la Hollande , I'Allemagne , le Danemarck , la Norvfege ct la Suede. En i8o3 , Veber fit k Paris une excursion , 4 la suite de laquelle le roi de Prusse le nomma son maitre de chapelle. 11 avait 616 jusqu'alors direcleur de I'orchestre du premier theatre de Berlin. Dans ses compositions, Veber eut le bonheur d'associer son nom aux noms les plus illustres de I'Allemagne, tels que ceux de Schiller et de Goethe. 11 fit pour ce dernier la musique do Hermann el 2'hus'

EUROI'E. Alt)

nelda. Les operas de Veber sont toujours representes avec un grand succfes.

M. Achard, directeur de la classe dcs sciences physiques dc notre acadeniie , est niort a Cunern le 22 avril dernier, a I'age de soixante-neuf ans. Ce savant , connu par d'utiles travaux , etait membre de plusieurs societes et academies elrangeres. Ph. Golcebv.

SUISSE.

Geneve. Bibliotheque nationale. Obseri>atoire. Museum d'histoire nalurelle. Buste de J.-J.-Housseau.—'PaT une Leureuse imitatioQ de ce qui se pratique en France, notre Bibliotheque na- tionale va etre ouverte au public plusieurs fois dans la semaine , et pendant plusieurs heures de suite. On y trouvera toutes les faci- lites dcsirablb^ , soit pour lire , soit pour cmpruoter les exccllens ouvrages qu'elle renfcrnie. Des fonds seront assignes aux direc- teurs pour la niettre insensiblement au niveau de I'ctat actuel des sciences et des letlres. Ce monument de la liberalite patrio- tique de nos ancetres , neglige depuis une trentaine d'annees , n'etait plus qu'un objet de sterile curiosity. Notre observatoire vient d'etre reconstruit a neuf, et orae d'une rotonde a toil mobile , pour faciliter les observations telescopiques. L'administration ne neglige rien pour favoriser I'etude des sciences naturelles. Nous avons un museum d'histoire naturelle et un jardin des plantes , di- rige par le celebre botaniste DecandoUe , qui compte deji parmi ses (ileves des collaborateurs dignes de le remplacer.- Le buste de Rousseau doit etre place incessamment au Jardin des Plantes- parmi ceux des naturalistes qui ont illustre Geneve. Le projet de lui elever une statue en pled a cte abandonne, pour le moment , comme trop dispendieux.

ITALIE.

Pise. Zoologie. Ncuielle espece de salamandre. Le docleiir Paolo Savi, adjoint au proi'esseur de botanique de I'universite dc Pise, a trouve, dans divers endroits des Apennins de Toscane, et specialement k Mugello , une nouvelle esptce de salamandre terreslre, trus-remarquablc par sa figure et par ses couleurs , et douee de caracteres si particuliers qu'elle lui semblc inconnue jusqu'ici. II Vappelk sa'ammdra persjK'iiHata quinque palmis

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A20 liUROPE.

plantisque tetradaciylis. "EWc a une tachc dans la parlie superleurc de la tcte, laquclle represente a peu prfcs une paire de lunettes. Mais ce qui la caracterlse encore davantage , c'cst d'avoir quatre doigts a chaqiie pied ; ainsi, elle ne peut etre confondueavec lasala- inandre a trois doigts, dont a parle M. Laccpede [Ilisloire natu- relle des ijuadrupedes ovipares el des serpens , Tom. VI , pag. 496 , tab. 56). La dcsciiptioa dttaillee de cette nouvelle salainandre se Irouve dans la Bibliotheque ilalienne , N" LXV, pag. 228.

MoDiiKE. Optique. Microscope. M. Amici, professeur de niatheniatiqiies a i'universite de Modene, vient d'inventer un appa- rcil optique, qui r^unit i une giande force d'amplification une disposition de ses parties telle, qu'on peut lui soumettre comnio- dement toules sortcs d'objets liquides ou solides , transparens ou opaques, sans qu'iL soil necessaire de les trop divisor, et en leur laissant mfime loute leur integriti. Get instrument , que I'auteur appelle microscope catadioplrique ■, est forme d'un tube horizontal comme un telescope ; la vision s'y fait dans le nieme sens et non de haut en bas, comme dans les microscopes dioptriques. A I'une des extr6mitcs de cetube, celle qui est opposee au verre oculaire , se trouve une combinaison de niiroirs m6lalliqucs, sur lesquels la re- flexion se fait, au moyen d'une petite ouverture pratiquee sous le tube et correspondant perpendiculairement au porte - objet qu'on eleve ou qu'on abaisse au moyen d'une vis; un grand miroir eclai- rant est place sous le porte-objet, comme dans tons les microscopes composes. Les divers degres d'amplification s'obtiennent en chan- geant seulement les verres oculaires ; ce qui permet de faire passer uu objet tres-promptement par tous les degres de grossissement , en le conservant toujours dans le champ de vision. On peut, avec ce microscope , observer les corps plonges dans un liquide , i un demi-pouce de profondcur ; ce qui est impraticable avec les autres microscopes. L'auteur ajoute i cet appareil, deji si superieur aux autres J une sorle de chambre claire, au moyen de laquelle on des- sine et mesure les objets avec les dimensions qu'on leur voit dans I'instrument, et qui peuvent devenir un million de fois aussi grandes qu'elles le sont naturellement. {Vqyez , pour plus de details, le Tom. XVIII des Actes de la societd italienne des sciences de Mp- dene , et le Tom. XVII de la Biblolheque univcrselle de Genfeve.)

B. G.

EUROPE. A2i

1v&iN.—j4cademie rqyale. Manuscril. L'ahbiVeyron a dcrnie- rement annonce i cette societti savaiite qu'il cxiste, dans la bibliotLt- que de I'universitc royale de celte ville, un manuscrit palirnpseste du vii*" siccle contcnant plusioiirs fragmens du code theodosien. 11 y a di'jix dt-couveitplusicurslois ou inconnues ou mutilties par Tribonien, dans le code de Justinien. On y distingue surtout deux decrets de Theodose , qui ordonnent la compilation du code, dtisigncnt les ju- risconsultes auxquels ce travail devait etre confiii, et leurprescrivenl la methode k suivic pour Texecution de cette difficile entreprise.

Rome. La bibliolhcque du Vatican vient d'ajouter aux richesses litteraires qu'elle possedait deji, parl'acquisition d'environune cen- taine d'ouvrages tant manuscrits qu'imprimOs, appartenant i la bi- bliotheque Colonna : ce sont prcsque tons des ouvrages d'autcurs grecs sacres ou profanes,

Milan. Publication prochaine. Une traduction italienne des voyages de Belzoui en Egyptc doit paraitre sous peu. EUe contiendra quelquescbangemens fails par I'auteur, et sera publiie en deux volumes in -8°, avec six cahiers de gravurcs. L'cditeur est M. Bettoni.

Rome. Beaux-arts. Lc 3o mai , la commission gencrale consul- tative des beaux-arts s'est assemblec jfour statucr sur les mesures proprcs i facil!ter le ddblaiemcnt et les excavations du forum. Le gouvernenient pontiCcal a rcsolu de mettre bcaucoup d'aclivile dans ces travaux.

GbKEs. Necrologie Le comle Louis-Bminanuel'Corpallo , ne a Genes , le 12 juillet i/56, est mort dans celte ville a I'age de soixante- quatre ans. Plusieurs journaux italiens et franrais ont parle de ses qualit6s privces et publiqucs ; ils ont rcmarque. surtout qu'apres avoir etti d'abord un des premiers magistrals k Genes, ptensuile conseiller d'etat et ministre des finances en France, sa patrie adoptive, il est mort sans laisser de fortune. Nous nous bornerons ici h montrer en lui I'amides letlrcs el de ccux quilcs culliveni; rexercicedesesfonctions poliljques ne lui a pas permisdc prouvcr Icsconnaissances litteraires donl son esprit etait orne. 11 brilla d'abord dans la carriere du bar- reau ; malgrc I'aridite des premieres etudes du droit , son eloquence prit de bonne beurc un lieureux devcloppemcnl ; il raisonnait avec une force , une facilite el une douceur persuasive qui entrainait les adversaires les plus prevenus. An milieu de ses iinportantcs occupa-

A52 EUROi'li.

tions, il n'avait jauiaisoubliO ccs etudes plus paisiblcs pour Icsqubllcs il avail un penchant decide. II avait d'abord cultiri les muses : on a do lui quelques poesies; quoiqu'clles aient 6t6 composees dans sa premiere jeunesse, elles annon(;'ent ce que le jeune auteur pouvait devenir, s'ileftt suivisa vocation. II conserva dumoins ce goOt exquis et severe qu'il avait puise et forme i I'ecole des ecrivains classiques. Done d'uuc memoire toiijours souaiise aux besoins de son esprit, il repandai t dans ses conversations particulieres beaucoup d'instruction , soit par ses jugemens , sojt par les autorites dont il les appuyalt. On I'a entendu souvent , an milieu des souffrances que lui causait sa pe- nible maladie, riJciter des chants entiers de la Jerusalem ou de la Divine Comedie et de longues scenes A'AlJieri; il les analysait et en faisait sentir les beautes avec beaucoup d'interfit. II semblait oublier ses douleurs dans ces entreticns, et c'etait le seul repos qu'il trouvflt au milieu de ses serieuses occupations. II rivalisait avec les Fran^ais pour ces vertus bospitalieres dont ils aiment h user envers les etran- gers, et surlout envers les hommes distingu^s dans les sciences et dans les arts. E. Q. Visconti fut toujours son intime ami; C. Botta et d'autres savans italiens, qui s'honorent de vivre en France, recher- chaient avec empressement ses entreticns; son amitie leura laisse de touchans souvenirs , et ils lui ont voue de longs regrets.

Home. Filippo-Luigi Gilii est mort d'une attaque d'apoplexie le i5 mai de cette annee ,- il etait mi & Corneto le j4 mars ijSG. L'hisloire naturelle, la botaniquc , et surtout I'astronomie ont ete .«!cs etudes favorites. II etait chanoine de la basilique du Vatican et directeur de I'observatoirc fonde par Gregoire XIII. II avait forme un musee d'histoire naturelle , dans lequel 11 recueillit les richesses que renfermait celui du pere Tommaso Gabrini , et qu'il a donne :ivant de mourir i la bibliotheque Lancisiana. On a trouv6 de lui divers manuscrits, parmi lesquels on distingue un traite sur les^a- ratonnerres et la Vie du celfebre Zabaglia. Les ouvrages qu'il a fait imprimer sont : DissertazionesuUe macchine igrometriche. Home , 1775 ; 2" Agri romani hisloria naturalis , etc. , ibid., 1781 ; 3" Memoria sopra unfulmine caduto in Rotna , etc. , 1782 ; Fi- siogenografia , o sia delineazione de' generi naturali diuisi in set classi , etc., 17S5; Osservazxoni filologiche sopra alcune pianle esotiche introdolte in Roma ^ 17S9 d '792; plusieurs memoires sur divers objets de physique , particulieremcnt des observations

EUROPE. ASS

mfet^orologiqucs faites a Rome , avec des notes sur quclques instru- inens employes i cet objet. 7" II a fait r^imprimer, en i8ia, avec des 6claircissemens , VArcliitettura de'la basilica di santo Pielro in Valicano, expliquee en 52 planches par Martino Ferraboschi. F. S.

TURQUIE.

Statistique. Population. II est sans doiite difficile d'arriver & line exactitude parfaite sur la statistique et la population d'un pays administre d'une maniere aussi irregulifere. Nous presentons done Ic tableau suivant, non comme parfaitement eiact, mais com me opprochant de la veriti.

Chretiens, Grecs, etc. Tares.

Thrace (avec Constantinople) . . 689,000 343, 000

Macedoine 724?ooo 244>ooo

Thessalie 679,000 89,000

Albanie (Haute et Basse-) 691,000 563,ooo

Moree 3oo,ooo 35, 000

Bulgarie 620,000 170,000

Valachie 36o,ooo 18,000

Moldavie 226,000 3o,ooo

Servie 780,000 160,000

Bosnie et dependances 420,000 i4o,ooo

Total 5,288,000 1,592,000

Ainsi , la population grecque excede la population des anciens conquerans lures de 45696,000 hommes.

ESPAGNE.

Madbid. Projet d'une ecole des arts et metiers. Dans la stiance extraordinaire des cortcs cspagnoles du 26 juin, les commissions reunics des arts, de I'industrie et du commerce ont fait un rapport tres-detaille sur le plan presente par D. L. Voidet , et qui a pour objet Vetablissement d'une ccole nalionale desarlsel metiers duns la p6ninsule el dans les provinces espagnoles d'oulrc-mer. Les com- missions, apres avoir fait un grand eloge de ce plan, qu'elles ont considere comme susceptible de donncr aux arts et a I'industrie nationale les plus prompts et les plus heureux developpemens , ont nonclu a re qu'il soil renvoye au gouvernement pour en protegrr

k2h EUROPE.

I'execution par tous les moyeus qui sont en son pouvoir, & charge de reclaincr rautoriti des cortes, dans tous les cas oil il le jugera nccessaire pour assurer I'existence et la prospOrite de I'etablisse- nicnt dont il s'agit. Ces conclusions ont ete adoptees sans discussion ct 4 la presque unanimitc.

Un cours de droit valuiel a (;le ouvert , le 7 mars dernier, k I'atliente de cctte ville , en presence d'une societe nombreuse et choisie. Cette chaire importante a 6te confice au zele , aux talens et au patriotisme de don Jose Joaquin de Mora , savant distingu6 par ses vertus autant que par ses profondes connaissances. Le discours d'ouverture , que nous avons sous les yeux , nous parait i la fois remarquable par la force des pensees et I'inergie de I'expression : le style en est pur, correct et ne manque pas d'clegance ; quelques passages m6me semblent ecrits d'inspiration ; I'auleur redouble d'ardeur et trouve une force nouvelle lorsqu'il trace le tableau de I'arbitraire aux prises avec la faiblesse , et lorsqu'il peint les nations courbees sous le joug du despotisme et de I'intolerance : dobladas bajo el y ago del despotismo , dominador por unaferoz intolerancia.

On Ao'it beaucoup atfendre d'un professeur dont le vaste coup d'ocil a pu embrasser sans effort toutes les relations des bommes entre eux , et dont la main sure a pu fixer la ligne au-deli de laquelle le pouvoir n'est plus que tyrannic et la libcrte qu'une hor- rible licence. A. T.

PORTUGAL.

LisBOSNB. Jj'acadimie royale des sciences a tenu sa seance pu- lilique annuelle le 24 juin 1821, sous la presidence de don Joseph Joachim de Cunba de Azeredo Goutinbo , eveque de Fernanibouc et d'Elvas, associ6 honoraire. La stance a 6t6 ouverte par la lec- ture d'un rapport fait par le vice-secretaire Francisco Villela Bar- boza , sur les travaux de I'acadeniie depuis la derniere seance de 1820. Le secretaire de la society de vaccine, Francisco Elias Rodrigues da Silveira, a lu ensuite un rapport sur les travaux de cette societe depuis la meme epoque.

Les morceaux suivans ont etc successivemept entendus: me- molre sur la botanique et sur la nieilleure methode pour I'etudier, par le marquis de Ponte dc Lima; exposition d'un traite de na- vigation , par Math. Valente do Coulo; 3" nuinoire historique sur

i

EUROPE. A25

ia ville de Ceo , par Atig. de Mendoga Falcaon ; sur une nou- velle machine propre h fouler les raisins, par Ant. Lobo de Barbosa Ferreira Teixeira Giraon ; extrait d'an m6moire du Fr. Fortune de S. Bonaventure, sur les commenceniens , les progres et la deca- dence de la litterature grecque en Portugal, par Manuel- Joseph Pirez ; description geognostique de la montagne d'Arassociaba dans la province de Saint-Paul, avec I'histoire du premier etablisse- ment des fabriques de fer en cet endroit, faite par Fred.-Louis-Guill. Van Hagen , et lue par Joseph Villela de Barros.

Les ouvrages suivans ont ete presentes cette annee i I'academie : Le tome VII des memoires de I'academie royale des sciences de Lisbonne; Essai dermosographique ou description systematique et succincte des maladies de la peau,par Bernardino Antonio Gomes; Essai sur quelques synonynies de la langue portugaise , par Fr. Frfene de Saint-Louis, moine de Saint-Benoit ; ^ memoire pour servir k I'histoire de la medecine portugajl^e , par Jos. Marie Svarez ; ephemerides nautiques pour I'annee iS22,par Antoine-Denis do Contro Valcnte. L'academie a public , dans le cours de cette annee, la carte du Br6sil de M. Beauchamp , corrigee et augmentee par les correspondaus Marino Miguel Franzini et Francisco Villela Barboza.

Legislation. Exlraitdu Diario do goperno , da 7 juillet 1821.— Cortes. Seance du 6. M. le president annonce qu'il y a sur le bureau une lettre de M. Bonnin . publiciste fran(;.ais , avec I'oflfre d'un de ses ouvrages intitule : Principes de la legislation de tous les peuples (i). Le president donne lecture de la lettre, dans laquelle M. Bonnin prodigue aux representans de la nation portugaise les plus grands eloges des resolutions judicieuses qu'ils ont prises. M. jtlves do Rio propose que I'ordre soit donne pour la traduction et I'im- pression de I'ouvrage , et que la lettre soit consignee de suite sur le Journal du gouvernement, avec declaration dela satisfaction que sa lecture a causee. Cette motion est approuvee : M. le president nomme une commission composee de MM. de Femandes Thomas, Castello Branca et Borgez Carneiro, pour examiner i'ouvrage,

(i) Doctrine socialeoa Principes universels des lois et rapports de peuple a peuple , deduits de la nature de I'homme et des droits du genre fiumain. 1 vol. in-S". Paris, chez Brissot-Thivars, rue Cha- bannais, 2, et Kleffer, rue d'Enfcr, 2. Prix, 2 fr. 5o cent.

AJ6 EUllOPE.

FRANCE.

Ahdkchk. CoMMCMB OB JDVI^As {canton d'Entraigues). yfiro- lithe remarquable. II est tomb6 dans cette commune, le i5 juin dernier , une atrolithe du poids de 220 livres (1 10 kilogrammes). Les habitans de Juvinas, ainsi que tous ceux de cette partie du depar- tement, furent frappis d'une telle terreur par Ic bruit epouvantable qui accompagna la chute de cette pierre metcoriquc , que ce ne fut que le 28 juin qu'ils oserent tenter d'alleri la decouverte de I'objet qu'ils avaient aperc^u tombant k quelquc distance de leurs habi- tations. A I'epoque oii nous ecrivons, le prefet n'avait pas encore pu satisfaire au voeu de I'academie des sciences, en lui envoyant un fragment de cette aerolithe , parce que les habitans , csptrant en tirer un grand parti , Tent cassee pour se la partager. On sail seu- lement qu'un fragment , soumis i la balance hydrostatique , a pes6 a,8o et qu'jl n'avait aucune action sur le barreau aimante.

HicTK-ViBKNB,— Limoges. Fabriques de porcelaine.—ht depar- tement de la Haute- Vienna fournit dcpuis long-tems les matitres premifcres pour la fabrication de la porcelaine aux principales manufactures du royaumc, et meme de I'Europe. La ville de Limoges est le berceau de cette fabrication : sur dix fabriques, dont buit dans cette ville, cinq sont exploitees par des ouvriers reunis en society , qui font tout par eux-roemes , et qui ont le bois et la main- d'ocuvre a beaucoup meilleur marcbe qu'i Paris. Les pates employees dans les fabriques de Limoges sont d'une qualite superieure i celles mises dans le commerce, attendu que chaque fabricant fait lui- meme ses compositions. Les fabriques de Paris, qui ne pourraient soutenir la concurrence avec celles de Limoges pour le blanc et le blanc et or, I'emportent seulement par la beautu , I'elegance et le fini des peintures. D'autres fabriques du menie genre existent dans la Haute-Vienne, 4 Magnac et i Saint-Yrieix ; dans les departemens duNord, i Lille; de laNievre, i Four; de I'lndre ; du Cher, k Foiscy, pres Bourges. M. Martin, ancien rcceveur dc I'enregis- trcment a Limoges, qui suit, depuis trente ans, les travaux de ccs fabriques, comme naturaliste, chimistc et amateur des arts, qui a fourni une grande partie des matcriaux de I'ouvrage sur les anti- quites dc la Jlaute-Vienne, demandc par le niinistre de I'inltrienr, an nom dc I'acadeniie des inscriptions et belles-lettres, enire aulrcs

EUROPE. A27

Ics (lessins ct la partie historiqae de plus de deux cents monumens remains, gaulois et du moyen age, vient d'etablira Limoges, comme amateur des arts et commissionnaire, un grand depot de produits choisis des fabriques de porcelaine du departement qu'il habite. II y joint plusieurs autres genres de fabrications analogues, dont le se- cret lui appartient; des creusets, des capsules ou autres vases chi- miques, sur lesquels le savant M. Vauquelin a fait un rapport trfes-avantageux , et dont il vient d'fitre envoye des echantillons h la societe d'encouragement , k Paris.

AvEYBOJf. RoDEz. Sourds-muets. M. Perier , directeur de i'institution des sourds-muets de cette ville , vient d'adresser, a MM. les presidens et membres des conseils geniraux des departe- mens du midi de la France, un projet pour I'etablissement d'une institution de sourds-muets dans la ville de Toulouse , telle qu'elle existe i Bordeaux, Angers, Auray, FU'Uen , Caen, Arras, Lyon et Marseille. M. Perier designe Toulouse comme le point le plus cen- tral et celui qui offre le plus de ressources. II faut esperer qu'il trou- vera, dans les proprietaires des d^partemens meridionaux , des hommes dignes d'encourager une entreprise aussi utile a I'bumanit^.

Seine-inf^bikcre. RocEN. Encouragement aux beaux-arts. Le conseil municipal de cette ville vient de voter la somme de 1,000 francs en faveur de M. Joseph Court, de cette ville, qui a remportc le grand prix de peinture (foy. I'art. Paris).

SOCIETES SAVANTES ET d'ctILITE PUBLIQDE.

Strasbocbg [Bas-Rhin'}. La societe des sciences el arts s'est reunie le 3o juillet en seance publique , sous la presldcnce dc M. Malouet , prefet du departement du Bas-Rhin. Dans un dis- cours ecrit avec elegance , M. Malouet a parle des titres que Strasbourg s'est acquis dans la republique des lettres. Cette t4che a lite djgnement lemplie par un adrainistrateur fait pour apprecier tous les genres de merite ; ct la maniere dont il s'est exprime sur la gloire des Brunck , des SchOpflin , des Oberlin , des Koch et des SchweigliJiuser , a prouve ^ ses auditeurs que , s'il n'etait tout entier aux soins de sa place, il laisserait peut-etre un nom de plus a ajouter k ecus qu'il a loues. M. Hugot a lu ensuite un rapport tres- int^ressant sur les travaux de la societe ; il I'a termine en accordant un souvenir a quelques membres que la morta frappes dans le cou-

A28 EUROPE,

rant de rannie. Le nom de M. Levrault , rectenr de racadd-mic , qoi s'est fait entendre parmi les dernieis, a luveillc de nouveau la dou- kurct la reconnaissance publiques. M. Mailer, duja connu par son excellente liistoire de recolc d'Alexandrie (ouvrage couronnc par racademie royale dcs inscriptions^ a cntretcnu Tassemblee de I'etat du christianisme sous Constafttin et sous Julieo. Ce traite se fait remarquer par une erudition vaste et profonde ; mais ne pourrait-oa pas dcmander une justice plus severe pour Constantin ? Je sais qu'Euscbe de Cesaree a os6 dire que Dicu seul pourrait se faire le panegyriste de ce prince , et Crevier I'a beaucoup bl&me de ce mot ; mais il nous semblerait susceptible d'interprctation , s'il appartenait 4 tout autre qu'i Eusebe. II faudrait en elTet la plenitude de la puis- sance divine, pour faire supporter I'eloge d'un honime auquel on peut reprocher Jutant de crimes et de cruaules. Quoi qu'il en soit, M. Matter combat I'opinion re^ue , selon laquelle la politique aurait optre le changement de religion de cet cnipereur. 11 pense au con- traire qu'en desertant le paganismc, il s'exposait aux plus grands dangers, et que la justice seule de son rcgne a pu le sauver. Julien n'a pas obtenu de M. Matter plus d'impartialite ; et , quoiqu'il ne partage point le fanatisnie de ceux qui accablent cet empereur des plus grossieres injures et des imputations les plus absurdes , il n'a vu en lui que I'adversaire du christianisme, et il a trop oublie le philo- sophe et le guerrier.

M. Matter descendait de la tribune, lorsque M. ScLweigbaeuser Ills y a prononce les mots Grcce et Uberli. 11 a fortement enchaine Taltention de I'assemblee ; sans doute il appartenait i un hellenistc de rappeler les services que les Grecs ont rendus a la civilisation. M. Scbvveighxus«r nous montre les sciences et les arts passant de I'Egypte en Grece et y recevant des d6veloppemens rapides ; il suit les idecs religieuses dans leurs progres et dans leur influence sur la poesie ; puis il prouve que tout ce qui, dans les arts, est recllemcnt beau est du aux Grecs, sans en exccpter meme la poOsic legere. '^Les « Jleurs que cueilUt Anacreon ne se sont point fanees dans le couts " des siecles ; nos Chaulieu et nos Parny les ont iroufees toules cc fraiches, pour en Iresser aux graces el aux amours des guirlandes . 0 nouvelles. Le christianisme doit, selon M. Schweigha-user , lout autaat a I'uniTersalile de la langue grecquc , dans laquelle furent . ticrits ses premiers Irailes , qu'a la puissance de I'cmpire remain.

EUROPE. 429

Enfin, qtt^ndles, 4 bassides voulurenlallierles sciences et les arts avec la crqyance de Mahomet, Us en trouuerent les mqyens dans la tra- duction des auleurs grecs; les uastesetats soumis a la domination des Arabes brillerent quelque terns des restes de la civilisation d'Athenes. M. Schweighaeuser ills a termine , en exprimaat le dtisir fortement prononce de voir renaitre les jours liberateurs de Maralhonel de Salamine , elces jours fortunes oil Platon ecoutail Socrale ou les chants d'llomere el les choeurs de Sophocle retentissaient aupres de la tribune de Pericles et des temples de Phidias. Qui pourrait s'od- poser i ce noble elan ! qui pourrait faire des vocux pour ces barbares qui,insultant aux debris des plus beaux monumens de la civilisation profanent en meme tenis le tonibeau du divin fondateur de la reli- gion des cbretiens! -La seance a et6 terminee par une distribution de prix. Les menioires avaient pour objetune question d'hippiatriquc.

Ph. Golbeey. Dans la seance du i4 aout, la soci':fe a nomme membres cor- respondans MM. Golbery, conseillera Colmar, I'un des collaborateurs de la Rei'ue Bncyclopedicjue ; Jobn, professeur de chimie a Berlin; Haas , directeur des forges du Bas - Rliin. Et membres residans : MM. Hepp, professeur de la faculte de droit; Richard, professeur de la faculte de theologie ; Engelhardt, docteur es - sciences et licencie en droit. Dans la meme seance, la societe a entendu , avec beaucoup d'interet , un memoire sur la civilisation des cultes , par madame Saint - Julien. Ce memoire a 6te lu par M. de Laizer , frere de I'auteur.

IssTnm, Acadhnie des sciences. Juillet 1821. Seance du 2. M. Brongniart lit un memoire intitule : Sur les Terrains

calcaires Trapeens du pied meridional des Alpes lombardes.

M. Dupetit-Tbouars lit une premiere reponse a la lettre de M. Fe- burier , presentee dans la seance preceidente. M. Garros pr6- sente un bureau a, repertoire alphabetique , que M. Prony est prie d'examioer. M. Moreau de Jonn6s lit un memoire intitule : Mono- graphiedu genre anolis , reptile de I'ordre des Sauriens (arpetalogie caraibe).

Z)Mg. M.le directeur des ponts et chausss^es adresse desechan-

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tillons du mastic risineux dc M, Vicat, et un nitimoirc oil il csl di:- crit (MM. Prony, Girard et Gay-Lussac, commissaires}. M. dc Ferussac adresse un cxemplaire de son Tableau general de la fa- mille des imacons ; M. Duniferil en fera un rapport verbal. M, Hall6 rend un compte verbal de Touvrage de M. Charmeil, intitule : Observations sur les Metarlases, suiuies d' experiences sur la gene- ration des OS.— M. Cuvier rend un compte verbal de la Description du plateau de Saint-Pierre de Maeslricht, par M. Bory Saint-Vincent.

j)ii 16. M. Hall6 rend un compte verbal de I'ouvrage anglais

de M. Fusely , intitule : Legons sur la peinture, r—M. Dupelit- Thouars lit un m^moire intitule ; Notice historique sur la moelle.

Du a3. M. Ch. Dupin fait un rapport verbal sur les Annales de V Industrie. M. Moreau de Jonnes lit un memoire intitule : Recher- ches sur les Antropolithes de la Guadeloupe. M. Dumeril fait ua rapport verbal sur I'ouvrage de M. de Ferussac relatif i la distribu- tion des mollusques. La section d'anatomie et de zoologie presente la liste suivante des candidats pour la place vacante dans son sein par le d6c6s de M. Richard : MM. Savigny, de Blainville et Serres {excequo); Desmarest , ie baron de Ferussac, Audoin, Moreau de Jonnfes et Strauss; ces trois derniers ex cequo. M. Geoffroy Saint- Hilaire annonce que cette presentation a ete faite seulement par M. Latrei'le et par lui, M.deLac6pede 6tant absent , et MM. Pinel et Dum6ril ayant refuse de voter. M Dum6ril, en son nom et en celui de M. Pinel, declare qu'ils ont cru ne pas devoir prendre part a la presentation pr^cedente , parce qu'ils ont voulu conserver le droit de presenter une liste des personnes occupees d'anatomie hu- maine, en declarant toutefois que le voeu de cette partie de la sec- tion est aussi pour cette fois en faveur de M. Savigny. Voici la liste des anatomistes: MM. Chaussier, Serres, Magendie et Edwards. Apres une assez longue discussion, I'academie rcnvoie I'election a la seance suivante.

Du 5o. L'acad^mie va au scrutin pour la nomination d'un membre de la section d'anatomie et de zoologie. Le nombre dest votans est de48. M. Savigny reunit suffrages; M. de Blainville 4 ; M, Moreau de Jonnfesa ; M. de F6russac 1 : en consequence, M. Sa- vigny est proclamA.

Acadimie frangaise. Seance du 8 aodt. M. Laya a lu une traduction du disconrs latin, on Lebeau, traitant de la necessite dc

EUROPE. A31

rCacher I'art daas I'eloquence , dit pourquoi et comment oa doit le cacher. M. MoUevaut, de I'acadtmie des inscriptions et belles- lettres, a lu le chant des bardes la veille de la d^faite de Varus ; a" la mort de Roland , chant guerrier M. le due de Levis, les qtw- trieme et cinquieme actes de sa tragedie de Henri IV, composOe en 1812.

L'academie a tenu , le 25 , sa seance annuelle ; noug en rendrons compte dans notre prochain cahier.

L'academie rqyale des inscriptions et belles-leHres a tenu sa seance publique , le vendredi 27 juillet 1821 , sous la presidence de M. Walckenaer. La gravity des matieres n'avait paseffraye le public, et rii!n ne prouve niieux I'heureux changement opere dans les niaeurs fran(;aises, ou, si Ton veut, dans le caractfere de la nation, que I'atter;- tion qu'elle accorde i tout ce qui hoaore les lettrcs ou peut assurer leurs progres : elle sent qu'elle sera d'autaut plus heureuse , qu'rfle sera plus eclair<ie. Le jugement des memoires envoy6s aux deux con- cours pour cette annee, et la proclamation des prix, ont ouvert la seance.

L'un des prix, remis Tannic derniere au concours, et renvoye k celle-ci, avail pourobjet, ^'examiner queletait, a Vepoque de I'auenement de Saint-Louis au trSne , I'itat du gouuemement el de la legislation en France ; et de montrer quels elaient , a la fin de son regne, les effels des institutions de ce prince. Le prix a et6 partage entre le memoire n" 2 et le memoire n" 3 : I'auteur du premier est M. Arthur Beugnot, svocat a la cour royale de Paris, fils de M. Beugnot, ministre d'etat; I'auteut du second est M. P. Mignetj avocat a Aix.

Le sujet du second prix que l'academie avail propose pour la premiere fois, etait : Comparer les monumens qui nous reslent de I'ancien empire de Perse et de la Chaldee , soit Mifices , bas-reliefs, statues; soit inscriptions , amuletles , monnaies , pierres gravies , cylindres, etc, apec les doctrines et les allegories religieuses con- tenues dans le Zend-Afesta , et avec les renseignemens que nous ont conserves les ecriuains hebreux , grecs, latins et orientaux, sur les opinions et les usages des Perses et des Chaldeens , et les eclair- cir, autant qu' il sera possible , les uns par les autres. Aucun des memoires envoyes au concours n'a paru a l'academie r^unir toutes les conditions ntcessaires pour meriter le prix. Elle aurait d6sire

A32 EDROrE.

que les autcurs de ces meinoires eussent accordii iin pcu moins <Jc confiancc aus ecrivaius modernes de rOricnt; qu'ils eussctit fait plus souvent usage du Zend-Avesta, et qu'ils se fussent attaches it comparer, autant qu'il est possible, la doctrine rcnl'ermec dans ce livre et les renseignemens que nous ont transmis les auteurs ancicns sur ce m6me objet, avec les religions professeesa Babylone et dans d'autres regions de Tcmpire persan. Elle aurait youlu qu'ils deter- mina^ent si la loi de Zoroastre fut ou ne fut pas une religion nou- velle, i quelle 6poque elle s'6tablit, I'influence qu'cUe exer9a sur les croyances repandues ea Asia , et les revolutions qu'elle a eprouvees. Enfin , elle aurait d6sir6 qu'ils eussent essay6 de sou- mettre i la critique I'opinion assez accr6ditee des rapports religieux de r^^gypte avec Babylone et la Perse. L'academie a pourtant jugt- digne d'une mention honorable le memoire qui porte une epigraphe tir6e de J6remie, xxui, 29. Elle propose le mCme sujet pour I'annec 1823.

L'academie renouvelle I'annonce qu'elle fit , I'annee dernicrc , du sujet du prix qu'elle adjugera dans la seance publique du niois de juillet 1822; ce sujet est : Rechercher , (Vapres les monumens historiques t et principalement d'apres ceux du nord de T Europe , quelles ont ele les causes des -.nombreuses emigrations des peuples connus sous le nont gkneral de Nohuakds , dans le tnoyen age, et tracer I'histoire abregee de leurs incursions et de leurs itablhsemens dans loute r elendue de I'ancienne Gaule.

Elle propose pour sujet d'un autre prix , qu'elle adjugera dans sa seance publique du mois de juillet iS23, d'examiner quelfut I'itat des Juifs en France , en Espagne et en Italie , depuis le commence- ment du cinquieme siecle de I'ere vulgaire jusqu^a la Jin du sei- zieme , sous les divers rapports du droit civil , du commence et de la litterature.

Le prix, pour chaque sujet, sera une miidaille d'or de la valeur de i5oo francs.

Les ouvrages envoyis au concours dcvront 6tre ecrits en frani^ais ou en latin, et ne seront re^us que jusqu'au \" avril de chaque ann^e. Ce terme est de rigueur.

Un nouveau sujet de concours a ete annonce cette annee pour la premiere fois ; il est relatif aux antiquiles nationah'.s. Le gouverne- ment a ordonne dans chaque departement des rccherchcs qui se

ELKOI'E, A.5S

poursuivent avec un /.ele et une activitt dignes ties plus graad» ^loges. Le min'istre de rintOiieur ayant juge k propos d'accorder trois mcdailles d'or, de cinq cents francs chacune, aux trois auteurs qui, au jugement de I'academie, auront envoye les meilleurs me- moires sur les antiquit^s de la France , I'acadtimie a decerne le« trois medailles ^ MM. Schweighseuser fils, professeur 4 I'academie de Strasbourg; Delpon , membre du conseil general du Lot, et pro- cureur du Roi a Figeac ; et Alexandre du Mege , membre de diverses academies et de la commission des antiquites des departe- mens de la Haute-Garonne , de I'Aude, de Tarn-et-Garonne , etc. Parmi les nombreux memoires qui lui sont parvenus, I'academie a encore distingue tres-particulierement cr<^yt de MM. Girault, pre- sident de la commission des antiquites de la C6te-d'0r; le baron Chaudruc de Crazanes, maitre des requetes, inspecteur-conserva- teur des antiquites de la Charente-Inferieure ; de Gerville, membre de la commission des antiquites de la Manche , et de quelques autressavans ; et elle a regrette de n'avoir pas un plus grand nombre de medailles a decerner : mais le merite de ces divers memoires a etc expose dans le rapport general que I'academie a adresse au ministre de I'interieur, sur I'etat actuel des recherches relatives aux antiquites de la France. Nous ferons connaitre ce rapport, dont nous sommes informes que S. Ex. a ordonne I'impression , pour etre envoye k MM. les pr6fets, aux savans et aux commissions qui, par leurs recherches, concourent a I'exccution de cet utile et important projet.

La seance a ete remplie par la lecture des morceaus sulvans ; Notice historique sur la vie et les ouvrages de M. Millin, par M. Dacier, secretaire perpetuel. Memoire sur I'origine et rhistoire des Arsacides , par M. Saint-Martin. Extrait d'un memoire sur I'etat des personnes pendant la premiere race de nos rois ; de I'etat des serfs , par M. Naudet. Extrait d'un mil'moire sur les plus anciens caracteres qui ont servi de base a I'ecriture chinoise , par M. Abel Remusat. L'heure avancee a prive le public d'un m<i moire sur I'art du monnoyage chez les anciens et les modernes, par M. Mongez.

L'extrait du memoire de M. Naudet a d& calmer quelques-uas de ces regrets irrtflechis qu'excitent encore les pretendus beaii^t jours dn moyen Sge, et cp qu'a dit le savant acadcmirien sin I'etat des

Tome xi. 28

^j^ EUROPE.

personnes aurant la premiere race dc nos lois a dii confondrc cc» impcrturbables laudalores temporis acti qui scnibleraicnt ne rcgret- ter le teins du scrvage que parce que la liberie est aujourd'Lui legalement repartie entre tous : il est vrai que quelques-uns y pcrdent du pouvoir, mais tout le monde y gagnc du bonheur : il y a la au moins compensation.

Le precis du memoire dc M. Abel Remusat sur Ics plus anciens caractires chinois est quelque chose de plus qu'unc dissertation sur le nombre ct la forme des traits qui les composent : c'est comme premier moyen de peindre la pens6e que M. Remusat les examine, et ce premier pas d'un peuple dans la grande voie de la civilisation excite UD plus noble sentiment que celui d'une simple curiosite , car on sail aujourd'hui qu'il faut ^tudier I'histoire ancienne par les lan^ues, les croyances et les institutions des peuplcs anciens; et I'ln- venUon d'une ecriture en est Tepoque et le fait le plus important. ■Honneur 4 ceux qui prcparcnt ccs notions nouvelles encore dans la critique historique, qui, bient6t enfin, preKrera les monumens aux systfemes, et la vi^rite a tout autie interetl

Dans la meme seance , un de nos plus habiles et des plus labo- rieux arcWologues, M. MiUin , dcvait rccevoir cet hommage public qu'unpieux usage decerne i la m6moire des morts : M. Dacier a acquitte cette dett;e acadimlque avec ce talent sup6rieur que I'age n'a point affaibli , et que semblc fortifier encore cette douce philo- sopbie d'un octogenaire, qui a son parti pris sur bien des choses de ce monde , qui en juge avec toute I'autorite de I'^ge et toute la hberl* d'un esprit fin et penetrant, qu'ont miiri I'habitude de la reflexion ct I'itude des hommes. Rien ne dispose mieux 4 la bien- veiUance; ici , elle 6tait une justice , et M. Dacier a mis beaucoup des deux dans sa notice sur M. Millin : il a rappele ses nombreux outrages, et surtout ses voyages, de manifere h concilier i la me- moire du mort I'estime et les suffrases du public , comme il a depuis long-terns celle des savans et des artistes de I'Europe. En indiquant son voyage dans le midi dc la France , M. Dacier a reuni dans quelques lignes un tableau exact de notre patrie ; le voici : . II eommenca ses courses savantes par la France,.i laquelle il crut de- Toir consacrer ses premieres recherches et offrir les premices de Icurs resultals. 11 ne borna point ses investigations aux objets qui sent du domainc de I'areheologie ; il obscrva tout J. la Ibis les

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hommes et les moaumens , I'agriculture , I'indugtrie et leurs innom- brables productions ; il trouva partout des richesses et des espe- ranccs , les arts en honneur, les sciences cultivees et leurs plus utiles applications favorisant la salubrity publique et ameliorant les usages de la vie privce , les lettres eclairant le goClt et le jugetnent ; cnGn , dans quelques cantons , des mceurs singuli^res produltes par la sterility du sol , et montrant a la fois une cause et un effet de la marche inegale de la civilisation.!

Un autre passage de ce discours a surtout lnteress6 I'assemblee et excit6 ses vifs applaudissemens ; c'est celui oii I'ltalie et la France , visitces I'une et I'autre par M. Millin , sont ensuite compar^es dans ce qui les caracterisc particulierement. Pour ne pas affaiblir ce mor- ceau, nous le donnerons tout entier. all meditait encore, entre autres travaux , un grand chapitre qu'il devait placer i la fin de sa relation de I'ltalie , dans lequel il se proposait de comparer cette contrfee et la France, qu'il avail successivement etudi6es et trouv^es tres-differentes , quoique tres-voisines et parvenues I'une et I'autre a un haul degr6 de civilisation. II avait et6 6tonn6 plus d'une fois en considerant combien de regies g6n6rales en Italic ne sont en France que de rares exceptions , en voyant , dans I'une , presque tou3 les dons de I'esprit abandonncs aux caprices de I'imagination ; dans I'autre , I'iniagination dirigee par la science et par la reflexion ; la premiere toujours passionnee et ne rfevant que le beau, la seconde le recherchant avec ardcur, le saisissant avec transport, mais me- ditant et perfectionnant I'utile ; la France ihiposant les produits d'une Industrie riche et savante au monde civilise, I'ltalie I'instrui- sant aussi , le polissant encore par les beaux-arts , et lui fournissant k la fois les maltres et les modeles. Frappe de ces dissemblance* sociales, M. Millin croyait en avoir trouve la cause dans celles des lieux et des mocurs, et surtout dans cette perpetuelle alliance, par- ticuliere a I'ltalie , du sublime de la religion avec le sublime des beaux-arts; car I'ltalie, savante et chretienne a la fois, a su, peut- fetre seule , habilement allier, par une sorte de fusion , le culte de Dieu au culte des arts et des muses , la religion de I'elat aux hon- neurs et k la gloire de la patrie ; puisant dans I'une et dans I'autre ses plus heureuses inspirations ; honorant toutes les vertus civiles et religieuses, ses saints martys et ses cltoyens illustres ; pla^ant la sta- tue de Pline le jeunc dans le temple d'un Dieu que Pline ignora ;

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A36 EUROPE.

prtehant sans cessc par la multiplicilc des monumens I'unferaires , la plus persuasive des morales, la morale des tombeaux ; conservant, par respect pour I'autorite des tcms, les riles et les pratiques de la primitive eglise, parce que , & la difference des contrees moins me- ridionales, la religion est rest6e pour I'llalie une grande affaire de ce monde fpeut-ctre autant que de I'autre) ; animant toutes ses pen- sees et tous ses souvenirs , errant pour tous les arts une poetique nouvelle , un merveilleux fortifie par les merveilles meme qu'elle nous id'vele, et leur offrant aussi, avec une inepuisable fecondit6, les types de leurs plus belles creations ; comme autrefois le ginie re- ligieux et poetique d'llomere preta au ciseau de Pliidias les seules formes dignes du maitre de I'Olympe. » C. F.

Academie royale des heaux-arls. Dans sa seance du \l\ juillct, I'academie a prononce sur le concours de paysage hislorique , dont voici le sujet : "Proserpine etant occupee avec ses compagncs i cucillir des fleurs autour d'un lac voisin d'Enna en Sicile, Pluton la voit, en devient amoureuxet I'enleve. La scene se passe en Sicile , on aperroit dans le fond la ville d'Enna et le sommet du mont Etna.o Le premier prixaetedecerneiM. Charles^twoxo, de Paris, age de vingt-six ans, eleve de MM. Regnault et Berlin; le second prix, a M. Louis -Fre- deric ViLLENECVE , Sge de vingt-cinq ans , aussi eleve de M. Regnault; le 2^ second prix, i M. Amedee Bodkgeois, de Paris, dge de vingt- trois ans, eleve de M. Regnault. Une mention honorable a ete ac- cordee i M. Aljihonse Perrin, flge de vingt-trois ans, eleve de de MM. Gu^rin et Berlin.

Stance du ii juillet. Grands prix de peinlure. Voici le pro- gramme donne aux concurrens par I'academie : «Dalila, ayant su que Ja force de Samson 6tait dans ses clie veux, I'endormit sur ses genoux, ct lui fit , pendant son sommeil , couper les sepl touffes dont se com- posait sa chevclure ; ensuite , le repoussant , elle lui cria : Samson , poici les Philislms! Les Philistins se precipitent aussitot sur lui et s'eu emparent.D L'academie a decerne le premier prix a M. Joseph- Desire Court, de Rouen , iige de vingt-quatre ans , eleve de M. Gros; le second prix, a M. Jean-Etienne-Francklin Dleois, de Paris, Sge de vingl-sept ans, eleve de M. Regnault.

Dans son proces-verbal, I'academie a consign^le regret de ne pou- voir ddcerner un autre premier prix i M. Pierre- Raymond-J acques MoHtoisi.> , de Bordeaux^ 9ge de vingt-sept ans, eleve de M. Gu6rin.

EUROPE. A.37

Son tableau avail cte designe, par la section de pcinlure , comine uieritant le premier prix , et , au scrutin general , il ne lui a manque que peu de sufrrages pour I'obtenir. Sur la demande de I'acadi-mie , le ministre de I'intericur a accorde a ce jeune artiste une place k I'e- cole de Rome.

Economic. Cuves en plomb pour conserfe^les grains et les f<i- rines. Nous avous fait connaitre (T. VII, pag. 402) le moyen que M. le comte Dejcan , pair de France , a propose et mis a execution en iSi(), pour la conservation illimitee des grains et des farines , dans les bStimens de la manutention des vivres de la guerre, rue du Gherche-Midi. M. Dejean , ayant joint a son opinion, sur le projet de loi relatif a I'exportation et 4 I'importation des grains, les resultats obtenus au bout d'un an d'experience , nous nous empressons de les communiquer k nos lecteurs.

C'est le i5 novembre 1S19 que les recipiens cylindriques en plomb, construits d'apres les ordres de M. Dejean, ont et«i remplis de grains ou de farines. Le 20 novembre 1820, on a precede a I'ou- verture d'un des trois petits recipiens qui accompagnent chacun des grands, ainsi que des six recipiens places dans la cave. Le reci-i pient du rez-de-chaussee , contenant nn hectolitre de froment, deuxieme qualite de i8i<), offrit a son ouverturc le metal doue da brillant metalliquc , aussi parfait que s'il venait d'etre coulc , et qu'il eut , comme on sait , promptement perdu , s'il cut etc expose a I'air. Le grain avait I'aspect de la plus parfaite conservation. II avait sculement a sa surface, comme a son interieur, une legire odeur laiteuse , attribuee, par les experts, a la mauvaise qualite des bles de 1819, et a ce que celuici avait ete renferme avant d'etre com- pletement ressuy6 ; au reste, cette odeur disparut apres que le grain eut ete acre pendant quelques lieures. Le rcicipient du premier etage presenta dans son interieur le m6tal aussi brillant que le precedent; et , comme il en fut de mtjme pour tons les autres, on n'en parlera plus. Le froment qu'il contenait , et qui etait de bonne qualite de 1818, n'avait aucune odeur et n'avait subi aucune espece d'alte- ration. Celui de la cave, qui contenait du froment de premiere qualite de iSig, presenta les monies resultats observes ii I'ouverture du premier recipient,

Apres avoir ainsi constate (par analogic du moins ) I'etat interieur des trois grands recipiens, on procida a I'examcn des farines ct de&

ASS EIROPE.

bl6s charangonnes. Ceux-ci (itaientrenfcrmisdans trois r^cipicns sc- pares et provenaient des luagasins de I'approvisionnemcnt de reserve de la villede Paris. lis ont 6t6 trouves exactement dans le djCibc 6tat apparent ou ils etaient au moment de la cloture; une grande partie des charan^ons n'existait plus , et tout porte a croire que ceux qui ont surTccu n'ont pas bouge de la place oii ils se sont trouvis lors- qu'ils ont ete mis dans les recipiens ; de maniere qu'ils ont ete , pour ainsi dire , suspendus de toutes leurs fonctions pendant tout le tcms qu'a dure leur incarceration. On sait qu'il en est tout autrement dans des circonstances differcntes, et que ces insecles se portent toujours en masse vers I'endroit oil ils peuveut csperer de se mettre plus ou moins en communication avec I'air atmospheriquc. L'un des ouvriers occupes k verifier la mesure et le poids des grains re- roarqua , au fond d'un des recipiens contenantlesblescharan^onnes, une boule de grains agglom6res , de la grosseur d'une pomme environ , et qui avaient tous les caracteres de la moisissurc. AussitOt on examina attentivement I'enveloppe m^tallique, et I'on aper^ut prfes du fond une petite ouverture k pen pres du diamfetre d'une grosse ^pingle ; c'etait par li que I'humidite avait eu acces pour gdter une petite portion de grains, qui avait cnsuitc, en quelque sorte, cicatrise la plaie de maniere a enipecher le mal de gagner plus loin. Un pareil incident, que le hasard seul fit naitre, ne pouvait venir plus h propos pour conCrmer la thdorie.

Plusieurs fails constans viennent en outre i I'ap; ui decelte theo- rie, et la confirmeraient s'il en etait besoin. A Metz, des tas de bleSj enfermes i I'epoque d'un siege, en iSjS, dans un souterrain , se sont conserves intacts pendant Hn,tres-grand nombre d'annees , au moyen d'une fermeturc I.ermefique accidcntelle, produite par la nioisissure des grains i la surface exterieurc. En Suisse, durant les campagnes de Massena, on a trouv^ dans plusieurs villes des maga- sins de ble , conserves par une semblable methode, dont la partie int^rieure parfaitement saine a servi a faire de tres-bon pain pour notre armee.

Les recipiens qui contenaient les farines furent eufin ceux qu'on ouvrit en dernier lieu ; ils prcsenlirent les rdsultats les plus salisfai- sans. L'un d'cux contenait de la farine de seconde qualite , un autre de la farine de gruau ; ct I'experlise la plus minutieuse ne put decouvrir pour I'une et pout I'autre le nioindrc indice d'altera-

EUROrE. A39

lion. Ua troisieme renfermait de la farine brute provenant de ble de >8i9 ; elle avait une odeur analogue k celle des grains de cettc ann6e, ne presentait aucune marque d'alteration , et s'6tait sini- plement agglomeree it I'epaisseur de trois ou quatre doigts au fond du r6cipient, sans avoir pris pour cela le moindre echauffement. Les experts attribuferent cet effet a ce qu'elle av;«Jg 6te enfermee aussi- tdt sa sortie du moulin , et d6clarerent qu'elle se fiit infailliblement g&tee , avec cette cause d'alteration , si on I'e&t plac6e dans toutdi autre situation que celle de la cldture herm^tique, quiTavait prot6g6e contre elle-meme.

On voit par ces risultats combien le proced6 de M. le comtc Dejean presente d'avantages. En effet, s'il est besoin d'en indiquer ici plusieurs , quelle utility de pouvoir faire servir k la conservation bien efficace d'une grande quantite de grains et de farines la pins mauvaise portion des casemates d'une ville de guerre , menacee d'un siege ; de pouvoir renfermer , pour un terns indefini , dans un local tr6s-restreint et sans avoir i s'en occuper i aucune 6poque , les approvisionnemens de reserve des grandes villes, et surtout de la ville de Paris; de rendre inalterables les farines employees dans le service de la marine , soit pour la subsistance des equipages , soil pour I'exportation aux colonies les plus 6loign6es , etc. , etc. !

Conseil royal de I' instruction publique. Le 16 aofit dernier , la distribution des prix aux eleves des colleges royaux de Paris et de Versailles a et6 faite, dans la salle des seances publiques de I'lnsti- tut , par le Conseil royal de I'lnstruction publique. Le president du conseil des ministres, le ministre dc I'interieur, le corps ensei- gnant, ainsi qu'un grand nombre de personnages distingues, assis- taient h cette seaace. M. Gaillard , professeur de r6tborique au col- lege de Henri IV, a prononco le discours latin d'usage. M. I'abbe Nicolle,meaibre du Conseil royal et Recteur de I'academie de Paris, a pris ensuite la parole, et a rendu justice ii la conduite, au tra- vail et aux sentimens des eleves. M. Cuvier, conseiller d'etat, membre du Conseil royal , qu'il preside par interim , lui a rcpondu , au nom du Conseil royal , par un discours qui se termine ainsi : n Jeuncs et chers amis, cette cbaleur avec laquelle vous aspirez a ces palmes, douces et justes recompenses de vos premiers travaux , promettez-nous de la mettre aussi k meriter ces palmes bien autre- ment nobles, que la patrie reserve Ji ses cnfans fidcles.

» Et mfime, sachez-le bien, I'eclat dece jour, cette assemblcc

m EUROPE.

imposaule , ceUe pompe, ces couronnes , ne soul autre chose qu'une consecration plus solennclle de vos talens ^ votre pays ct ii voire Roi..

Le prix d'honveur, ou premier prix de discours latin , a it6 de- cerne i M. Gustave-Gabriel de Wailly, de Paris, Ag^ de dix-sept ans, eleve du college de Henri IV , et Ills de I'ancien proviseur de ce college ; le premier prix de discours franfais , i M. Gabriel Chablier, de I'ile de France, flge de dix-sept ans, eleve du col- lege dc Saint-Louis; le prem,ier prix d'hisloire (en rethorique), & M. Edouard-Joseph Boitahd, de Paris , 9g6 de dix-sept ans, eleve du college de Louis-le-Grand ; les deux premiers prix de philosophic ( dissertations fran^aises et latines ) , i M. Pierre-Auguste Lemaibe, de Trancourt, Sge de dix-neuf ans, eleve du college de Saint-Louis ; le premier prix de p/i_ysique, ^M. Fran^ois-Marie-Esther Bdhot, de Guinganys, ag6 de dix-neuf ans , eleve du college de Louis-le-Grand ; enfin , le premier prix de mathemaliques speciales , i M. Philibert FiNEON, de Charolles, Sge de dix-neuf ans, tleve du college de Louis-le- Grand. Le jeune IsaieBerr, Cls d'un de nos collaborateurs, M. Michel Berr, a obtenu le deuxienie prix d'histoire , et , au college de Charle- magne , le premier prix de cette mcme composition, et le deuxieme prix de version latine. 11 est eleve de I'institution Bourdon.

Ecole spiciale de commerce , rue Saint-Antoine , n" i43. ( /^oyez Tom. VI , pag. 4^2 ; et Tom. VIII , pag. 436. ) line reunion, dont I'objet etait I'inauguration des bustes du Roi,de Sully et de Colbert, a eu lieu , le 27 juin dernier, dans cet utile etablissement. M. Ter- naux , qui presidait , a ouvert la stance par un discours , oii il a fait une histoire rapide de I'influence du commerce sur la prosperite des nations, et particulierement sur celle de la France ; il a montre ce que I'industrie franc^aise doit au ministre d'Henri IV, k celui de Louis XIV ; au vertueux Turgot (1), « donl la reputation s'agrandil a mesure que les lumiires se repandent; et enlln, i I'Assemblee constituante. M. Ternaux a fait sentir ensuite aux elfeves I'avantage qu'ils ont de vivre dans un tems oii le commerce jouit de cette li- berte , sans laquelle il ne peut prosperer ; il leur a montre qu'avant la fondation de V Ecole de commerce', les connaissances niccssaires a un nigociant , a un manufacturier , s'acqueraient avec autant de

(i) Sullyct Turgot ont demcure tons deux dans rbOtcI our^cole est itablie.

EUROPE. Ul

lenleur que dc difficulte; enfin, il a termini par l'6num6ration des principes d'apris lesquels le vrai n^gociant doit se condulre , prin- cipes qui ont d'autant plus de force dans la Louche de M. Ternaux, que sa vie en offre une constante application.

M. Francklin , professeur de legislation commerciale , a prononce ensuite un discours dont nous regrettons de ne p*.uvoir donner une analyse.

M, Brodart , directeur de I'ecole , prenant ensuite la parole , fait voir combien , avant la restauration , la tendance des esprlts 6tait peu favorable a une institution du genre de celle qu'il dirige , et qui n'a pu se fonder qu'a la pais; il admire, avec raison, la rapi- dity avec laquelle un grand nombre de militaires, abandonnant leurs illusions de gloire , ont su se creer un nouvel avenir. 11 trace ensuite I'histoire de I'Ecole de commerce , i la direction de laquelle il n'a pris part qu'en 1819 , et demontre toute I'utilite de ce bel etablissement. Plus loin , il fait connaitre les services qui ont ete rendus i I'ecole par M. Laffitte, dont le nom se rattache a tous les projets d'utilite publique ; enfin , il sollicite la bienveillance de tous les negocians fran^ais , et les prie de choisir, parmi ses jeunes eleves, ou plutOt ses jeunes amis, les commis , les coUaborateurs dont ils auront besoin.

M. le prefet de la Seine , auquelM. Brodart a envoy ele programme de cette ceremonie, lui a 6crit une lettre trfes flalteuse, oil il le fe- licite sur les succfes de son ecole , et sur la bonne direction qu'il a su donner aux etudes , ainsi qu'aux sentimens de ses elfeves.

Le I*' aoftt dernier, M. A. T. Desquiron de Saint-Aignan , avo- cat a la cour royale de Paris , a ouvert , dans la meme ecole , un cours de droit naturel et de droit public. Dans le discours qu'il a pro- nonc6 k cette occasion , il a trace le plan qu'il se propose de suivre ; et a ensuite adresse de sages conseils k ses jeunes eleves. Plusieurs parties de ce discours sont ecrites avec talent; d'autres nous ont paru obscures ou pretentieuses ; en general , nous aurions desire plus de simplicity et un emploi moins frequent d'expressions ambi- tieuses dans un ecrit destine i la jeunesse.

Voyage scientifique. M. Witte Cls est de retour d'un voyage dan s I'interieur de la France et de I'Angleterre. Les recherches qu'il a faites dans les bibliotheques de ce dernier pays ne sont pas restees sans succes. Dans un manuscrit de la bibliotheque Bodleienne

iAS EUROPE.

d'Oxfoid , il a tiouve les constitutions du dernier livrc dii Code Thtodosien, qu'on ne connaissait jusqu'a present que par Ics collec-, tions dcs synodes. Le Musee britanniquc i Londrcs lui a prescnti; trois constitutions faisant suite aux Nouuelles do Justinien el non comprises dans la redaction dite la vuIgate, ainsi que des vieux manuscrits du Digcste et du Code de ce meme empcreur.

PcBLicATiOMS KOcvEiLEs. Anc.tomie de V Homme, ou Description, etjigures lithographiees de toutes les parties du corps hutnain; par MM. BicLAflD ft Jules Cloqdet , publiee par M. de Lasley-rie , tditeur. On possede deji plusieurs ouvrages d'anatoniie enriclus de plan- ches e»cciitees avec plus ou moins de perfection ; de ces ouvrages, les uns sont des traites tpeciaux sur telle ou telle branche de la science , et lie sauraient convenir au but que se proposent les fediteurs de ce- lui-ci ; les autres sont des traites cotnplets , mais ils laissent beaucoup de clioses & d^sirer sous le rapport de rexicution des figures , et de plus ils sont rares et fort chers. MM. A. Biclard el J. Cloquet , qui professent ranatomie , dont ils ont fait I'objet d'6tudes sp6ciales , se sont reunis pour travailler de concert au grand ouvrage que nous annonfons. Ces analoinistes donneront pour le teste, non point une explication siche et aride de figures, mais une description exacte et concise des organes qu'ellesreprfisenteront. MM. A.Beclard et J. Clo- quet traiteront successivement, de I'ost^ologie ou des os el des li- gamens; 2" de la myologie ou des muscles et de Icurs annexes ; des organes dcs sens ; de la nevrologic ou des nerfs ; de I'angiologic ou des vaisseaux ; de la splanchnologie ou des visceres ; de I'em- briologie ou du foetus et de scs dependances.

Avant d'entreprendre en lithographie I'execution d'un ouvrage dont les planches doivent rcnfermer des preparations anatomiques qui demandent ii etre rendues avec autant de verite que de delica- tesse, I'editeur s'est assure, avec MM. Haincelin ainc et Feil!ete, que les gravures auronttout le degr6 de perfection qu'on peut desirer. Ces deux artistes se sont adonnes specialenient a I'etude de I'anatoniie; aussi leurs dessins sont-ils remarquables par la verit6, par la pr6ci- sion , la forme et la nettete. lis seront traces, les uns d'aprts les meillcures planches originales que nous possedons dejh; les autres seront executes sous la direction de MM. B6clard et Cloquet, et toujours d'aprts nature. Quelques planches seront it dem i-coloriecs ,

EUROPE. MS

afin de faciliter rintelligence de certaines parties , telles qua les artfcres . les veiaes , les nerfs.

L'ouvrage sera compos6 de 24© planches et de J 20 feuilles de texte au plus, grand in-fol. , papier j6sus velin , pour les gravures. II paraitra reguliferement chaque mois par livraison de sis planches et trois feuilles de texte, i dater du 1" septembtt 1821. L'editeur, voulant faciliter aux eleves en medecine Tacquisition de cet ouvrage, n'a porte la livraison qu'i 9 fr. On fournira, k raison de i5 fr. , des exemplaires dont les gravures et le texte seront tires sur tres-beau papier velin , d'apr^s les demandes qui en seront faites. Gomme la lithographie ne permet pas de conserver des planches, ct que le ti- rage doit ttre subordonn6 au nombre des souscripteurs , on invite les personnes qui voudraient se procurer cet ouvrage de se faire ins- crire avant le i^' decembre 1S21. Pass6 cette 6poque , le prix en sera considerablement augmente. On souscrit i Paris, rue du Bac, n" 58, i la lithographie de M. de Lasteyrie , et , dans les departemens , chez les priacipaux libraires.

(Bui^res chuisies de Cauille Joedak, contenaut ses discours au Conseil des cinq-cents et ci la Chambre des deputes; ses ecrits poli- tiques, litteraires el philosophiques ; ses traductions, pens6es , poe- sies, etc.; enGn, sa corrcspondance avec plusieurs pcrsonnages cilebres (ces divers ecrits pour la phipart inedits J ; precedecs d'une notice biographique sur sa vie , et orn^es de son portrait par Mullcr, de la gravure du monument qui lui est 6leve par les membres des deux Chambres , et d'un fac simile de son ecriture ; publiees par M. DE G^EANDo, de rinstitut. 4 vol. in-S" d'enviroa 5oo pag. chacun. On souscrit k Paris , chez Alexis Eymery, libraire , rue Mazarine, 3o. Prix, 7 fr. le volume.

Description historique des maisons de la ville de Rouen les olus remarquables par leur decoration exterieure el par leur en- \ceinte ; precedee d'une introduction oil Ton traitera d'une manifere ; succincte des variations de I'architectnre dans le moyen ftge , consi- derees particulitrement dans les 6diGces de la ville dc Rouen. L'ou- vrage sera orne de vingt-un sujets inedits , dessines et graves par E. H. Largiois , du Pont-de-Larche. Un vol. in impriine sur beau papier, par Firmin Didot , rue Jacob.

Beaux - arts. Panorama d'Athenes. li est difficile de nc pa

hkk EUROPE.

iprouver une vive emotion i la vue du panorama d'Atlitncs. Lessouve- nirs les plus glorieux , meliis aux rcgrels qu'inspire une grande infoi- tune, remucnt I'anic d'une maniere puissantc. La Gr6ce est, pour lous les esprits tclaires, pour tous les coeurs genereux, une scconde patrie ; et la ville de Mincrve tient , sans contredit , le premier rang cnlre les cites de ce pays cfelebre. Athenes n'existe plus, la Grece entiere mOnie n'cst qu'un vaste champ funeraire oil les nations niodcrnes vont, depuis dcs siecles, exhumer des debris qui attestent le haul degre de culture de I'esprit de ses anciens habitans. Mais ccartons ces souvenirs; et, nous attachant a la triste realile, tfichons de rendre compte du tableau que le pcintre a mis sous nos yeux.

Athenes est bStie au pied d'an monticule eleve , sur lequel a ete construite la citadelle (Acropolis\ Pour entrer dans cette citadelle , on traversait des propyl6es ou portiques magniGques dont il ne reste que des vestiges. L'interieur de I'Acropolis etait convert de monumens, parmi lesqiiels le Parthenon tenait le premier rang ; it n'existe plus qu'une partie de I'enceinte de ce temple. C'est d'une tour b4tie dans l'interieur de la citadelle que M. PruvOt a pris son point de vue. II m'a paru que le spectateur pouvait etre i iSopieds au-dessus de la ville. De cette distance , I'Athenes moderne ne pre- sente pas nn aspect tres-pittoresque ; mais I'horizon en est d'une grande beaute. Le mont Hymette, trcs-rapproche de la ville , borne la vue k Test et se prolonge vers le midi. Du c6te de I'ouest et du nord , I'ceil embrasse toute la plaine , audela de laquelle on voit a I'ouest la mer d'Egine, et, dans le lointain , les cotes du P6lopo- ncse. Au nord , I'oeil se repose sur des montagnes d'une belle forme qui se dirigent vers I'ouest et I'est , et dont les noms sont , depuis notre enfance, graves dans notre mfemoire. C'est le Corydallus (i), sur la pente duquel Xerces etait assis pendant la bataille de Sala- mine ; c'est le mont Cilheron , le mont Otta , le Pentelique , etc. En examinant avee attention les lieux au milieu dcsquels on est place, on doit remarquer, comme un caractere distinctif du gout eclaire dcs Atheniens , qu'ils avaient eleve des monumens sur presque toutes les montagnes et les collines qui entouraienl Icur ville. Tous ces monumens sont detruits ; et, de tous ceux qui

(i) M. de Chateaubriand, dans son Itinerairc, le nomine Cov- dyalus , p. 2o3.

EUROPE. AA5

«?xistaient dans rinteriem- de la ville , il n'en reste que deux qui soient k peu prts dans leur entier : le temple de Thes6e et la petite tour des Vents.

M. Prevots'est montre grand artiste , dans le panorama d'Athenes. II rfegne dans ce tableau une verite d'efFet et ua talent d'execution qui portent I'illusion k un degre qu'il ne semblait pas possible d'atteindre; c'est la nature meme. Sans doute*es circonstances sont bien propres i exciter la curiosite publique, et le nom d'Athenes a quelque chose de magique pour toutes les imaginations ; cepen - dant , M. PrevOt pent , avec raison , s'attribuer une grande partie du charme puissant qui s'attache a cette nouvelle production. P. A.

Tni.KTRES. —Thedtre-Franpais. Le Retour ou I'Oncleel le 'Neveu comedie en deux actes et en vers, par M. de RancS (2 aoflt). Une intrigue usee , des details insignifians et un style sans couleur , ont caus6 la chute de cette pretendue comedie , qui n'a eu que trois re- presentations.

—Second Thedlre-Frangais. Louis IX en Egypte, tragedie en

cinq actes, par M. Lemebcieb, de I'academie fran9aise (4 aoiit).

L'auteur a une maniere toujours bardie et souvent dramatique de concevoir les sujets qu'il traite ; la nouvelle piece qu'il vient de donner au theatre est un de ses ouvrages les plus remarquables. M. Lemercier s'est attache a peindre avec fldelitd* les moeurs de ses divers personnages , et la verite de ses tableaux transporte le spec- tateur dans le lieu meme oil se passe la scene. Malheurcusement , I'interet se partage entre Octair et Louis IX : le premier est un jeune chef arabe, musulman fanatique, dont la croyance aveugle au fata- lisme contraste parfaitement avec la conCanoe religieuse , que le Dieu des Chretiens inspire au pieux roi des Franoais. Ces deux carac- teres sont traces avec une egale habilete ; mais ils se developpent dans deux actions distinctes , dont le faible lien n'est pas toujours aper^u : la premiere est une intrigue de serail qui met Octair sur le trone, 4 la place d'Almadan ; la seconde presente la captivite de Louis IX, ses dangers, sa resignation et sa delivrance.

L'Arabe est le heros des deux premiers actes ; le roi captive toute I'attention pendant le troisieme, que nous regardons comme le plus beau de Touvrage ; Octair remplit une partie du quatrieme, i la fin duquel Louis IX ne parait que pour sauver la vie au soudan , par un

U8 EUROPE.

coup de th^&tre un pea hasard^, qui semble terminer la pi^ce , et qui ccpendant est U point ou les deux actions cominencent seulemcnt k se licr. La peripiilie du cinquienie acte produit peu d'effet , parcc qti'elle remet Saint-Louis dans la situation oil il etait au troisiemc , ct qu'il 86 fait dans le caractere d'Octair un changement inattendu , nOccssaire au denouement, maisnuisible a Tintt-rCt dramatique. Nous n'ignorons pas que M. Lemercier s'est confornie k Phistoire avec une scrupuleusefidelite; peut-Ctrc meme iaut-ilattribuer a cette Gdelitc, poussie k I'exces , une partie des dcifants qui jettent quelque froid sur I'ouvrage. L'imperfection du plan est d'autant plus ficlieuse que , parmiles ouvrages de M. Lemercier, il n'en est pas un^ etc'est beau- coup dire, oil ily aitplusde bellesscenesetde beaux vers que dans son Louis IX. Lc gen^reux tilence des prisonniers sur le sort de leur roi, cacb6 au milieu d'eux ; Tberoique d6vouement de celuici , lorsqu'il se decouvre au soudan pour sauver ses compagnons d'infortune ; la discussion qui s'etablit entre ces deux personnages sur le cbristia- nismc et le mahometisme ; le monologue de Louis IX, cclui d'Oc- tair pres du soudan endormi, offrent des beautes du premier ordre. 11 en est beaucoup d'autres que le defaut d'espace nous empcche de titer, et qui ont contribu6 au succes merite que la pi^ce nouvelle a obtenu sans contestation,

Opera comique. Le Philosophe en voyage, opera en trois actes et en prose, parole de M. Deeock, musique de MM. Frederic KeedbS et PaADnEB (i6 aoilt}.— Un colonel, qui se croit pbilosopbe parce qu'il fuit les femmes, s'apprfite k partirpour la Suisse, lors- qu'un jeune officier, poursuivi par suite d'une affaire d'bonneur, ar- rive dans I'auberge oil se trouve \e philosophe , et s'empare de son cheval, afin d'arriver plus promptement au chateau d'une soeur, chc« laquelle il veut se cacher. Cependant , il prie celle-ci , que le hasard a conduite dans cette meme auberge , d'offrir une place dans sa voiture au colonel, et de I'amener au chateau ou son cheval lui sera rendu. Le philosophe, d'abord fort en colere , Unit par se decider jk partiravcc Am6lie, qui se trouve ttre une jeune et jolie veuve que, sans la connailre, il a refus6 de voir a Paris. Airiv6 avec elle dans une autre auberge , il rencontre un capitaine de fregate , amoureux d'Amelie, qui le croit son rival et le force i se battre pour une femnie dent il ne sail pas meme lenom. Manque par le capitaine , il tire en I'air ; !a jeune veuve, touchee de son divouement, en mOme

EUROPE. AA7

lems qu'elle est piquet; de sa froideur , cherche h s'en faire aimer. Sur ces entrcfaites arrive un onclc d'Amelie , courant aprts le frerc de celle-ci, dont il a appris le duel. La jeune veuve craint sa s6ve- rite ; et , pour eviter toute explication , elle lui preseijte , comme son niari, le colonel, qui se prSte de bonne grSce i la supercherie, et suit Amelie i son chateau , en formant deji le vce<Jffeecret de conser- ver le litre suppose qu'elle vient de lui donner. Li , il entend du fond d'un bosquet une conversation d'Amelie avec son frere , qui s'est cach6 dans un pavilion ; il le prend pour un amant aim6, veut partir, et decile par sa jalousie I'amour qu'il a con^u pour sa pre- tendue femme. L'oncle et le capitaine de fregate reviennent , I'af- faire du neveu s'arrange ; tout se decouvre , l'oncle pardonne , et le titre de mari reste definitive ment au philosophe.

Cette pifece a reussi sans opposition; d'abord un peu froide , elle s'anime par degres et finit par gtre agrcable. A defaut de situations tres-dramatiques et de traits piquans , on y remarque quelques in- tentions comiques et un style naturel. Plusieurs morceaux de la mu- sique ont ete tres-applaudis ; c'est une composition qui ne^peut qu'a - jouter i la reputation de MM. Fr6d(5ric Kreube et Pradher.

Nkcrologie. iJf. Lefeure Boschard, officier de I'universite et ancien proviseur d'un lycee , est mort a Saint-Quentin le 25 juil- let dernier. 11 etait excellent latiniste , profond helleniste, et pos- sedait nieme la langue hebrai'que. Eleve tres-distingue de I'ancienne universite de Paris , il y remplissait une place importante; et, au moment oil elle fut supprimee, il 6tait designe pour etre son recteur. Apres cinquante-cinq ans de travaux , il obtint sa retraite , et alia en jouir a Saint-Quentin , oil il trouva encore le moyen d'etre utile i ses concitoyens en se chargeant des fonctions d'administrateur du college, de membre du comite cantonal pour I'instruction primaire , et de president du comite central de bienfaisance.

TABLE DES ARTICLES

CONTENUS

DANS LE TRENTE-DEUXIEME CAHIER, ^ AOUT 1821

1. MEMOIRES, NOTICES ET MELANGES.

X

1. Dissertation sur le -BKSSM5 des anciens. Henry, fz^. 241

a. Notice sur le Conseil de salubrite etabli pres la prefec- ture de police de Paris. E. Salverte. aSa

II. ANALYSES D'OUVRAGES.

3. Mimoire sur la digue de Cherbourg, par Cachin.

E. Gautlier. 280

4. Principes de la science morale et politique , par A. Fer-

guson. A- Taillandier. 189

5. Histoire generale de France, par DuFau. M. 296

6. M6moires historiques , politiques et litt(5raires sur le

royaume de Naples , par le comte Orloff. F. Salfi. 006

r. Biographie nouvelle des contetnporains. Aignan. 525

8. Voyage dans la Grece , par Pouqueville. D. de Gavedell-

Ceanny. 55i

9. Philibert , reman po6tique , par Grattan. L. S. B. 7>'n

III. BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.

Annonces de io5 cuvrages, fran9ais et Strangers. 349

IV. NOUVELLES SCIENTIFIQUES ET LITTERAIRE8. Am^riqie.— New- Yorck.— lies Sandwich. New-Foundland. 4o5 AsiE.— He de Ceylan.— Perse.— Turquie asiatique.— lies Phi- lippines. 4o4 Afbiqce.— Cap de Bonne-Esperance. ]&g)pte. 4 'O EDROPB.—Grande-Bretagne.-^ Suede. Allemagne. Suisse. Italic. Turquie.— Espagne.— Portugal. Pays-Bas France.— Paris. Il>id.

Messieurs le» auleurs , edileur* d'oiivragw , ou libraires, qui desireraient que la REVDE ENCYCLOPfiDIQUE fit connaltre, soil dans la section des Analyses , soit dans celle du JJuUetin Sibliograpliique , les ouvrages nouveaux qu'ils publient, sont invites h en faire parvenir deux EXEHPLAiRES au Burcau central dc redaction , d'abonnement et d'expdditton, rue d'Enfer-Saint- Michel, n" iS, h Paris. Tous les ouvrages envoy^s seront inscrits parordre de date, et annonc^s dans le plus court d^Iai.

Si quelques r^dacteurs ou quelques lecleurs dc la Revue croient devoir lui adresser des questions intdressantes sur les sciences, les letlres ou les beaux arts, la Direction s'empressera de les pro- poser dans I'un des plus prochains cahiers, et pu- bliera exactcment les r^ponses qui lui seront envoyees.

\t Histoire de- la <<ie et des ouvrages de J. J. lie us- seauj dont nous avons rendu compte dans ce cahier, se trouve au Bureau central de la Revue , prix 11 fr.; ainsi que YAnnuaire necrologique , ou Supplement an- nuel et continuation de toutes les biographies ou die- tionnaires bif^graphiques , dont nous avons annonce la souscrlptlon et dont la premiere annee (1820) vieiit dc paraitre. Prix, 4 fr. pour les souscriptcurs , et 5 fr. pour !&) non sousciipleurs.

3

4 (07

Libraires dies lesqueU on peut souscrire dans les pays etraneers.

Aix-la-Chapelle, Laiuellc fils. Amsterdam, O. Dufour. Arau (Suisse), Sauerlauder. Berlin, Sclielesiiigei-. jBerwe, Clias, an cabinet lilte'r. Breslau , Tli. Koin. Bruxelles, Lecharlier. Bruges, Boj»am, Dumortier. Florence, Piatti. Fribourg (Suisse), Aloise Eg-

geiidoi'ferr. Francforl-sur-Mein, ScUacffer. Geneve, J.-J. Paschoud. T^ausanne, Fischer. Le psick. Giiesliainmer. Lie^e, Jallioau pere. Lishonne, Paul Martin.

Londres, Dulau et comp,

Trenttel et Wiiriz. '

Madrid, Denuc'e, Pcics. Milan, Gicgler, Vismara. Moscou, Gautiev, Rjs. Naples, Borel. NeucJidtel (Suisse), Gvester. Nouuelle-Orleans, Jouidaii. Palerne ( Sicile ), Pedonne «t

Muiatori. Pitersbourg , Saint-FIorent,

Graelf. Tubingen, Cotia. J^urin, Bocca. Varfouie , Glucksberg, Za-

vadsky. Vienne (Autviche), Gerold.

COLONIES.

Guadeloupe (Pointe-d-Pitrc), Piolet ame. He de-France (Port-Louis), E. Burdei.

ON SOUSCRIT AUSSI A PARIS ,

Au Bureau de REnACTiCN, me d'Enfer-Saint-Michcl, 18, ou doivent ctie envoyes, fVancs de port, les livres, dessins ctgravures, dontondesirel'anuonce, etlcs Lettres.Memoires, Notices ou Extraits destine's a £ire inse'rc's dans ce Recueil ;

Chez Treuttel et WiiRTz, rue de Bourbon, 11° 17 j Hey :et Gravier, quai desAugustins, u" 55; MoNGlE aine^ boulevard Poissonuifere, n" 18 ; Eymer"* , rue Maiario-;, ri" 3o ; Roret et BousseLj rue Pave'c-Saint-Andre, n* g ; Baudoujk ficres, rue de Vaugitard, n" 36 ; Chasseriau et Hecart, rue de Clioiseul, 3 ; Delaukay, PjfeLiciER, CoRRiARD, au Falais-Royal; Madame Cellis^ rue du Cherche-Midi, 4 j Madame CAMiLLE-DEFRiNE, rue du Marche'-Saint- Honore, 11° 4; A LA Tente, Cabinet LiTiiRXiRE tenu par M. Gatitjer, ancien

militaiie, Galerie de Bols, n" 197 , au Palais-Royal. Au Cabinet special D'ArPAiRES, pour la litldratuie, les sciences

et les artSj place des Victoircs, n* 3; Aux Cercle et Salon litteraires^ rue Neuve-des-Pctits-CJiamps , n* 5, au premier.

Nota. Les ouvrages aunonce's dans la Revue se ironvent aiissi chez Arthus BERTRANn, rne H; uiefeuille, u" 25; Eymery, rue Maxariuc, 11° 5o, et Roret et Roussei-, rue Pavee St.-And;e- des-Arts , n" 9.

DE i'lAn'RIMEKir DE J. SJIITH,

i\* VdtUME.

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H?RA1S<33^.

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REVUE

ENCYGLOPEDIQ,

ANALYSE RAISONIXEE DEs PRoiJucTrorvs les plus jrejharquables

DAirS LA LITflEHATURE, I.ES SditelfCES'B^ tfeS AHTS.

1* iSiiencea pijr'titfaiV ei^malkemaHquestl Arts industriefx- Svienr^s ruattir^tea et widicaUs : MM. €}». Dupin, Foukier, flcl'Inst.; Ferkv; Frahc<kur ; Le Mormaicd , prof, if tfdinolngic. cit;.4-do MotAtw ,— A, MreH«i,©*r-,i-'CoQ»EHEi,,- J-'iotrKPHs, D-. Ml :>*-Ai)F.M)jr i BaIiy; EsQyiROi.; FkiEnLABf-

iJERj MAoSNbtr.j- OjtFUA ; P-Vnisrx ; PnjQUEPAI., D. M. ; CiiAPTAB, da I'Fiisuiut; DEsMAKE£;T;-r-\V, HtrrcnilrsoN irfoRKAo uE JToNxi^^s^ Dr FEnu.<=aAC-,— DESMOULtKa, D. M., Ae. 2^ hxxencia jrhiloSophiquei, et morales, j>olitiq.ues el histoi- nyacj.'MM. LAkjtJiNxrs ; M. A. Jullien, de Paris; Ai.. de tABoRDE, ilel'Instiiut; AxKEE ; Arnoi.i), ile Stiasboiirg ;

BaBEY; BARBlfe-DuBOCAGE.del'InKt.;— JiJ.BAUBE;— BUCHOS; ^COVSINJ— DlcfeHANDodel'IuSt.; DEPPtNG; ^A. DufrAYER;

loMARD, dp rinst.: Meyer, d'Arnsterdain;— P. Lami; J. V. Le- CLERc;— Lawos de Lauebat; DE Lasteyrie; Alex. Lametb;

NaUDET, de rinst. ; PARESTX-RiAL; G. M. RAY.MONn;~E. SaLV^RTE; SiMONDE DE SlSilONDr';— StAPFERj TniERRY.etc,

Littiraturefran^aise el etrangere, BLbliographie, Archeo- logie el Beaux Arf'ts : MM. Aicnan, ASdrieux, Amaury-Duval, Lemercier, dej'institut;— A.Mahol; Henrichs; Artaud; AvEnel; BARBiEk.coiiservattufucBbiblioiheqaesdu'Roi; S.A. BeRVILLE MibKEtBEAR; BRUGUltftES DE SORSUM; Cadet deGassicobrt;— Cerbied; CHAMPOiLloN-FiGEAC, corrcsp. de * I'ltrtt. ; .1. Dhciz; DtrMEitSAK;— Emeric-David, de I'lnsi. ; FxUrifi.:— G<K?Pi— Ph. GotBERY, de Colmar;— ChATTVEr;— Hei- BBRG, KrAFFT;— LASGIiliS, de I'tnst.; LloreNTE; IVtlRROK ;

A. MeTRAI,;— NlCOLO POULO; PoUGElTSjdePIuSt.; F.SaI-FI;

ScRWEIStKEirSER fds, de StrriKKouvg:— DE SiGlTR; SiCARD, del'hist;; be Stxssaiit; S, D.TmERY; THiEssfe; Verdier; —VioiLET Lebcc! Wardbi*, aocten coosn} Hei Eiut»>Uiiis d'Anaeri^*; -^-li, liiRKAU , etc.

PARIS,

: Ro» d"lialor-Sainl»-M»qlit-l . 18, , tt CHEE AttTntrs BeRTRASTDj J\UE nAUTEESUILtEj H" 23.

fjONDRIiS. TasuTTEt. et Wurtc , ei Dulaw et C^ SEPTEMBRE 182,.

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]>E LA SOUSCRIPTION.

I)rpuis Ir nioifc <\e j;u»vj«r i^^ig, '1 })ara1t, par auner, cJoh'? »;iliier!j de re Rcciicil ; oliaijiie «;alitftrj ^)uLUt: le 5o du mois, «c «on>j)ose il'eivvlron tloiixc fi'iiijles d'impiRSsioii'. '

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L;t diaeieiice enire Ic piix-d'abounemeat, a Paris, daris k* fUparieinensei dans Vilranger, tlevaot 6tTe propovUonnelle iiii'X )Vai» d'expeditioti pat' la poste, afervi de base li la fixation »)^lHiiiive poitee ci-dcssu*.

{^eirioiifaut de flouscrjptioii, envoyepm la poste, doit etre a'lfcss^ d'«^»Hce,- el franc de port , ainsi que la correspondaii<^, Hii lyirectejtr de Id Jleuue }incyclopidi(jue , rue d' Enfer-Sainl- Mivfiel, n" j8. tJ'cst a )a mfinit; atiio.sse (ju'on devra envoyer >es oiiv>agc8 d<; tovil genit' et les giavure.s qu'oji voHdr.! I'aire ^luioJiwr, .linsi fjtie les articlcij don.t on dt^sirwa I'inseilion.

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Tiols cahlfis on liviaicoijs ioinierotit. ini volume. Cliaiiiie vo- Junit? jiera lemiiiirt ])ar uiic table d«s matiircis .-ilphaijeiitjii* ei awaWtUjiie, <(iu (U;i;>irci.ia et faciUicva Ie« recheiohes.

AVIS ESSENTIIiL

/'(;,/ A/, 'bl'ijsrrip/i.'i/r.'i de la Revue JEncyclopikiujiw , qui ri'sideni dans hs pciys elrangers.

ISIM. \(i^ Soiisciipt«nir6 acluels de la Hei'jie Encyalu- p('di(iutt i>\»\Aiii dans !os pays etrangevs, qui roudronl iiontintun- Ibnv .-ibonnement pour I'anm^e 1822, sont yvwi (Vciivpyer cVirecleuaent au jjtJj^jpAV central (/we i}' Ell ferSctiihl- Michel, n' )0) d'ici an i'*^ decenibre proc-haia , Ic moatant de Jeiii" abonnemeut ct Icur inlfcsfe, afm <juc la direction de la Kevuc pius-r ])rendic d'avaiice les nieiUiei necessaircs poar piopoi - rioimei" Ic fiiagf^ dcs cxemplaires de ce leciicii au iVoiiibif! de.s dcai:i:ulcs qii'ciieaiija replies , el atfti que ](; gcrvit'c des envois n'c/u'ouvc aucun relard.

•MM. les Librairfcs iouironl de la i-eniiie d usaii^e. rl d'Hii trei/jcme e.ve!vt|ikirc cii suo de chaiuc rio'.iy;iir,c

REVUE

ENCYGLOPEDIQUE,

ou ANALYSES ET AINNOINCES RAISONNEES

Des productions les plus remarquables dans la Litterature, les Sciences et les Arts.

I. MEMOIRES, NOTICES,

LETTRES ET MELANGES.

OBSERVATIONS Sur les Revues scienti/iqueset lltUraires , anglalses.

Nors sommes heureusement arrives a une epoque oii tout ce qui peut eclairer la marche de I'esprit humain et favoriser les progres de la civilisation est recherche avec avidite. Comme les journaux seientifiques, philosophiques et litteraires sent particulieremeht destines a donner une meilloure direction et une impulsion plus rapide aux travaux utiles dans tous les genres, il iniporte d'esaminer si les principaux ouvrages periodiques , qui ont cctte noble destination, la remplisserit avec un'soin religieux, et si, enetalant, aux ycux dc I'Europe savante, les richesses litteraires des contrees dont elle se compose , ils les appre- cicnt toujours a leur juste valeur.

Tome xi. 33" Cahier.—Spptemhre 18 3i. 29

A50 OBSERVATIONS

II faut convenir d'abordqu'il n'est aiicune de ces Re^'lles qui nc rcnfermc, presquc dans chaque caliier, des articles tri;s-remarquables ; les homines curieux de connaitre les progres des lumieres, dans les differentes parties du nionde, ne sauraientlire ces recueils avec trop d'attention. Parmi ceux qu'oii public en Angleierre, VEdimburgh Jiei-'ieii', les Quarterly et British Re^'iews, et la Literary Gazette, tiennent le premier rang.

Le plan naturel de ces Revues est I'examen critique des ouvrages les plus interessans qui paraissent cliez les peuples civilises, etqui meriteut d'appeler I'attention, soit par le sujet qu'ils traitent, soit par les vues qu'ils pre- sentent, soit enfin parce qu'ils signalent des erreurs non encore apercues , et des verites que I'ignorance ou le pr6- juge avait jusqu'alors couvertes d'un voile. Souvent ce travail est confie, en Angleterre, a des hommesd'un talent si distingue , d'une erudition si profonde , que les extraits des ouvrages les moins susceptibles d'interet deviennent sous leur plume des dissertations judicieuses et ins- tructives.

Toutefois, nous craignons que la plupart des lecteurs franf ais , qui rechercheraient les Revues Britanniques sur la foi de leur reputation, ne soient surpris, peut-etre meme indignes, d'y trouver des censures i la fois amires etpartiales, surtout contre les productions qui ne sont point anglaises. Une fausse direction, donnee ice qu'ils appellent mal i propos esprit national, les rend evidem- ment injustes. Cette disposition, quidegenere souvent chez les Anglais en esprit de parti, intolerant et exclusif, obscurcit le jugement des hommes les plus eclaires, et leur fait envisager les objets sous le point de vue qui flatte leur passion. Un Anglais trouve que, dans sa patrie, tout C5t le niieux possible; il est intimemenf persuade que la

SUR LES REVUES ANGLAISES. A51

nivlion anglaisc est superimire a toiiles les autres nations, non seulement sous Je rapport dii gouvernement, des lois, des institutions, des moeurs, du commerce et de la ricliesse, mais encore sous le rapport des sciences, des lettres et des arts. Get amour de la patrie est un sentiment si noble, qu'on est faclie de voir sortir^ d'une source aussi pure, des pretentions injustes et ridicules; mais il faut bien avouer que, lorsque le sentiment mal entendu de I'amour du pays nous rend assez injustes pour meconnaitre ce qu'il y a de bon chez les elrangers , pour rabaisser leur merite et leur gloire, et pour caresser un pueril orgueil, en nous donnant a nous-memes la palmc que nous leur otons, il cesse d'etre honorable, et parait devoir nous atti- rer plus de moquerie que d'admiration. Ceux quiaccordent le plus d'estime aux savantes Res-'ues dont nous parlons, sont particulierement choques d'y trouver aussi souventdes diatribes injurieuses contre les Franpais, et ils ne savent a quoi attribuer tant d'injustice et d'acrimonie. Serait-ce une suite de cette ancienne rivalite de force, de richesse, de bravoure, de civilisation et d'industrie entre les deux peuples ? Nous ne pouvons le croire. Des ^entimens de jalousie ne peuvent exister sans motifs, et les auteurs des articles injurieux que nous avous en vue nous assurent qu'ils ne trouvent absolument rien en France qu'ils puis- sent nous envier. Quoi qu'il en soit, I'iniquite de leurs jugemens et de leurs pretentions n'en est pas raoins de- plorable. On n'hesitera pas cependant a leur pardonner, si Ton songe combien ces petites illusions de I'amour- propre , et ces passions qui naissent de I'interet personnel , ont d'empire sur des hommes d'ailleurs raisonnables ; el, dedaignant les faciles represailles que nous pourrionsexer- cer envers des censeurs plus chagrins qu'irroprochables, nous excuserons chez cux coUe faiblesse.

29*

A52 OBSERVATIONS SUR LES REVUES ANGL.

C'est sans doute a cettc reflexion salutaire et toutc libe- rale, qn'il faut attrihuerle silence qu'ont ciu devoir gardcr, sur les articles que nous venons de signaler (i) , les savans distingues dans tons les genres, que possede la France, lis ont pense, comme nous, que notre patrie avail d'autres rcssources que la recrimination pour repondre aux cen- sures de scs voisins. Elle y repond glorieusement, selon Dous, lorsqu'eile leur presente des savans et des littera- teurs, qui agrandissent chaque jour la reputation non contestee que ses grands homines d'autrefois lui ont ac- quise.

Nous revenons done francliement a nos eloges des Revues anglaises , et nous les recommandons, sans craindre qu'on nous accuse de manquer d'esprit national. EUes sont du plus haut interet , et il serait malheureux que les injustices que nous leur reprochons empechassent d'apprecier ce qu'elles contienneni d'utilc.

Que ceux de nos jeunes lecteurs, et ceux de nos ecri- vains, qu'irriteraient ces ecarts de nos voisins, se gardent done bien de les relever. Le silence est plus digne du ca- ractere francais; car, pour repondre, il n'est que deux moyens : rendre accusation pour accusation; mais, en prouvant que les Anglais ne valent pas mieux que nous, nous prouverions fort mal que nous I'emportons sur eux; a" les refuter, en nous louant nous-memes; mais ce serait les imiter, et nous avons deji remarque que cet exces d'amour-propre pouvait les rendre ridicules.

Ainsi , lisons leurs bons ecrivains ; etudions leurs sages institutions; louons hautement leurs qualites estimables; profitons de leurs lumieres; applaudissons a leurs progres

(i) Edimburgh Reyiew , n'^ 64, 69, etc. Quarterly Reuiew ,

SUR LES AVANTAGES DE L'INSTRUCTION. ASS

dans les arts, a leur zele pour les ameliorations sociales, A leur desir d'lntroduire la civilisation chez les peuples barbares : ce sera encore une vengeance , si I'onveut; mais cette maniere de se venger ne pent blesser per-* Sonne (i). B t.

SuR LES AVANTAGES l'iNSTBUCTION PUI5L1QCE CHEZ

LES Grbcs modernes , par Charles Dupik, ancien secretaire de I' Academic lonienne , et membre de I'lnstitul de France.

Au moment oii les Grecj sent appelesa de noiiveauxdes- tins , peut-etre ne verra-t-on pas sans iiiteret les efforts qu'avaient tentes quelques Francais , a I'epoque de nos conquetes, pour rappeler un pcuple malheureux a la civi- lisation et k la grandeur d'ame qui firent la gloire de ses ancetres.

Quand, par suite des conventions de Tilsitt, nos troupes occuperent les iles loniennes, les officiers et les adminis- trateurs envoyes dans ces belles contrees s'empress^rent d'unir leurs efforts k ceux des Grecs les plus eclaires, pour cultiver de concert les lettres , les sciences et les arts. Les Francais arrivferent dans les Sept-Iles, vers la fin de 1807; et , des le printems de 1808, ils fonderent VAcademie lonienne. lis firent plus; ils ouvrirent, dans le local de I'a- cademie , des cours gratuits oil Ton prolessales mathema-

(1) Nous avons nomme, au commencement de cet article, la Gazette ou Chronique litteraire ; elle ne m^rite pas Dependant, au Rieme degni , ies reproches que nous adressons aux Reuues anglaises. Elle s'egaie bien parfojs aux depens des litterateurs francais; mais il y a , dans ses observations critiques , plus de ce que les Anglais appellent humour, gaite maligne , que de spleen scientifique et acri- monieux, Elle est polie, quoiqu'elle ne soit pas fran^aisc.

A5A SUR LES AVANTAGES DE L'lNSTRt'CTION,

liques (i), la physique (2), la medecine (3), la jurispru- dence (4), et la litlerature grccque (5); enfin, pour encou- ragcr la jeunesse , racatleuiie oflVIt des prix annuels aux t'lcves qui se distingueraient Ic plus dans lours etudes; ellcproposaen outre des prix oIyinpiadiques,ainsi nommes parcequ'ondevaitlcsdecernerau commencement dechaque nouvelle olympiade. Les prix olyinpiadiques, annonces a I'Europe entiere , etaient offerts aux litterateurs de toutes les tribus grccques . qui , dans la langue hellenique ou dans la langue modernc , auraient compose ou traduit les plus beaux ouvrages.

Des obstacles sans nombre et lafatalite des evenemcns, qui mit un lernie au succ^s de nos armes, ont traverse les desseins des fondatours de I'Academic lonienne , et n'onl pas permis que ces desseins obtinssent tout le succes qn'il etait juste d'en attendre.

La noblesse greco-venilienne, accoutumee a faire clever ses enfanspar des pedagogues italiens, ne voulait pas en- voyer ces precieux rejetons d'une race orgueilleuse dans nos ecoles publiques , ou ils eussent eprouve I'affront d'etre assis , sans distinction, i cote des fils du simple citoyen.

C'est pour combaltre un esprit aussi fatal a la regene- ration de la Grece , que I'ut compose le discours suivant. II nti ressemble guere a nos compositions academiqucs; mais on doit se rappeler , en lisant celte proddclion d'un

(1] M. Augoyal, capitaiiie du genie mililaiie , aujourd'huj pro- fesseur h. I'ecolc d'^tat-major de France , ful charge de cc cours. (7) M. C/». Dupin, alors capitaine du genie maritime. (5) M. Gangadi.

(4) M. Deh-iniolli.

(5) M. Mavroinali ^ I'un des savans et des litterateurs les plus distiogucs qu'ait possedes la Grcce moderne, et qu'clle a nialhcu- leusemeni perdu.

SDK LES AVANTAGES DE L'lNSTRUCTlON. A55 auteur bien jeune alors , qu'elle n'etait pas destinec pour des auditeurs dont I'esprit cultive n'eQt besoin, pour etre seduit, que des touches gracieuses elpures d'un atticisuie depuis Ipng-tems disparu des contrees qui furent son ber- ceau.

On aurait tort de chercher dans ce morceau ce que I'on Irouve dans les productions regardees comnie les mo- deles du genre : un art consomme, un poli parfait, de I'elegance dans le style, de I'epigramme dans lapensec, et de I'esprit sous la forme du sentiment.

Mais, au milieu d'un etat-major de I'armce franpaise, campee sur les confins de la Grece , en presence de I'elite des habitans d'une contree dont la volonte dominante est de reconquerir les lumiferes, I'independance et la gloire de ses aieux, c'etait avec de plus males accens et des mouve- mens plus hardis qu'il fallait attaquer cesgrandeset nobles passions.

Si le lecteur veut partager I'impression produite par le discours que nous publions maintenant, il doit se reporter 5 I'epoque et dans la contree oii il fut prononce. II doit songer que c'est dans la capitale des iles loniennes , dans la patried'Alcinous, que I'orateur fit entendre ses paroles. II doit songer que, du lieu meme oiise trouvaient reunis ses auditeurs, ondecouvre, par-dessus les monlagnes de I'E- pire et de I'Acarnanie, les sommites du Pinde et les lieux qu'ont illustres les plus grands evenemens.

Tel est le site majestueux, tels sent les souvenirs et les espcrances que le lecteur doit maintenant retracer k son imagination.

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456 SUR LES AVA.X TAGES DE L'lNSTRUCTIOX.

Discouns prononci dans la seance pubtique de CAca- demie loniennc , (e i5 aout 1809.

Si aut acriiis egero, aul libcriiis quim qui ante mo dixerunt : pcto i vobis, ut tantiim oralioni mese con- cedalis, quantum et pio dolori ct justae iracundix concedendum putetis. Cic. /;ro P. Sexiio.

O vous , honneur de I'Hellenie, vous qui repCites de la nature une ame au-dessus du vulgaire, qui I'avez elevee encore par yos veilles et vos meditations, c'cst a vous que nous nous adressons. C'est par vous que nous pouvons etre de quelque utilite pour vos concitoyens. En vain , nous chercherions a repaudre la verite ; portee sculement par notre faible voix , la verite ne serait point entendue, ou serait negligee. Vous seuls, dans votre propre patrie, pouvez detruire cette foule de prejuges qui s'opposent en secret a ses progrfes. Vous seuls pouvez combattre I'erreur, maitriser I'opinion, la dirigerau grand, au beau, a I'uUle; la rap- peler enfin a la pensee de vos peres. Faites-nous done con- naitre ce que vous pouvez etre , a la maniere des hommes illustres, par des ceiivres plutut que par de vaincs repu- tations. A chaque prejuge que vousaurez detruit, achaque principe, a chaque fait important, a chaque projet utile que vous aurez exposes, propages, nous nous empresserous de proclamer vos noms. cSur les murs de cette enceinte, dirons- nous i nos compatriotes, vous voyezsuspendu le tableau des Lienfaiteurs des lettres, des sciences et des arts, envers I'aca- demie; nous avons i vous presenter un autre tableau non moinsprecieux,c'estcelui deshommes qui vous ontconsacre leurs travaux et Icurs veilles. Les largesses de leur genie ne meritent pas moins votre reconnaissance, quelespresens de ces premiers donateursdont I'academie garderatoujours le souvenir avcc les plus doux scntimcns dc respect ct dc

SUR LES AVANTAGES DE L'lNSTRUCTION. 457

gratitude; >) A ce simple recit, les acclamations tie tout un peuple partageront les suffrages de la gloire, et les Iributs de radmiration , entrc les bientaits du talent et les bienfaits de la vertu.

loniens, a la seule pensee de ce touchant spectacle, s'il est parmi vous un liomme qui sente son cceur palpiter et brQler du desir genereux de conquerir cet amour, cette estime de tout un peuple , voila I'homme que nous cher- chons. Qu'il paraisse ; qu'il imite par ses travaux ceux qui, comme lui, furent etrangers i I'academie ; nous nous era- presserons de le recevoir comme eux parmi nous, et nous le placerons aux premiers ran^s dans la carriereoiinous vou- lons marcher a la prosperite de ces contrees.

Hommes superieurs, c'cst a cette epoque heureuse, oii racademie, devenue forte par votre appui, vous comptera tous dans son sein ; c'est alors qu'elle pourra remplir ses promesses, et les surpasser encore. Vous nous cleverez au- dessus de nous-memes. Une noble emulation viendra s'e- tablir entre nos collegues nouveaux et ceux qui voudront devenir nos collegues. Vous rendrez, en ces lieux, aux lu- mieres du savoir, tout I'eclat dont elles brillerent autrefois. A leur chaleur fecondante germeront pour la posterite mille talens nouveaux. Qu'il nous sera doux de nous ap- plaudirdeleurdeveloppement, comme del'ouvragedenotre zele et de votre genie ! Peuples de la Grece , c'est alors que sera detruite dans I'Europe ,cette opinion injurieuse qui pese encore sur vous. On ne vous croira plus les fils dege- neres du plus illustre des peuples; vous obtieiidrez justice dans i'estime des hommes ; et I'Europe sera fiere de voir rendue a ses antiques destinees celle de ses nations qui, la premierede toutes,adeploye ses fastes pourl'immortalite.

Mais, ne vous Ic dissimulez pas, plus ce but est eleve, plus il est glorieux de Tattcindre ; plus il est difficile aussi

UbS SLR LES AVANTAGES DE L'lNSTRl'CTION.

d'y parvciiir : cc sera rouvrage du terns, et dc ccltc Cons- tance qui nous I'ait Iriompher de lous les obstacles. O Tous, de qui racademie ose esperer la regeneration de vos freres, voici les verites qu'ilvous faudra, pour la pro- duire, recevoir et propager. II faut que vous soyez per- suades que les hommes n'acquierent dc superiorite sur les homnics, que par I'cducation, ct les nations sur les na- tions, quepar I'education publique. Voulez-vous, loniens, que vos fils deyiennent dignes de vos peres ? il faut tout faire pour leur education. Daignez preter I'oreille i ma voix. Si vous etes les enfans des Grecs, vous etes faits pour entendre la verite ; et moi , mon coeur me dit que je suis fait pour vous la dire. Que si je devais meme en- courir vos reproches ou votre haine , pour prix dc ma fran- chise, je vous dirais, comme votre Themistocle, parlant pour le salut de la patrie : « Frappe , mais ecoute. » Et le bien que j'aurais pu faire, me paierait du mal que je recc- vrais en echange.

Ce n'est ni par ladebauche, ni par le jeu, ni par le luxe et par ses vices, que vos fils deviendront jamais des hommes eminens dans I'ordre social ; c'est par I'etude , et parle travail dontl'apprentissage austere nedeviendrafruc- tueux que dans la seulc education publique. Qui pourrait causer votre aversion pour elle? Serait-ce un va>a orguell? Mais un tel sentiment est indigne des neveux de ces hommes dont les generaux, les prytanes , les monarques meme , plafaient leurs fils a I'ecole des plus simples ci- loyens. Je nc suppose done pas qu'un motif aussi bas ail pu jamais approcbcr de vos coeurs.

Penseriez-vous, d'ailleurs, que I'instruction partiouliere est, [par elle-meme, pJus propice au developpement dc I'cSprit dc vos fils? Penseriez-vous qu'cllc est, plus que I'instruction publique, aiiiiedcs verlus socialcsou privces;

SLiR LfiS AVANTAGES DE L'INSTRUCTION. A59

et que, sous les yeux de la palrie, les nioeurs de vos fils s'altcreraient plus qu'clles ne le font maintenant dans la malson paternelle (i)? A ces doutes specieux, je repon- drai d'abord que I'homme eleve loin de ses semblables n'apprend ni a les connaitre ni a les aimer; qu'il rcste ainsi ignorant de leurs passions et de leurs merites; qu'il devient par-Ii egoiste et superbe; qu'il reste faible, parce que I'emulation ne vient jamais doubler ses forces; etque, dans sa mediocrite dedaigncuse autant que meprisee , il fait son propre malheur, en se rendant a charge ilui-meme et a la societe tout entiere. Mais laissons la les preuves abstraites fournies par le seulraisonnement, et consultons la voix irrecusable de rexperience. Je vais vous parler de vertus, dehautsfaits, de talensimmortels ; je vaisprendrc mes exemples chez vos pferes.

Parmiles villes grecquesles plus illustres par les chose* qu'elles ont faites , par les hommes qu'elles ont produits ; la premifere de toutes , c'est Ath^nes. Son nom seul nous rappelle la deesse du genie, de la sagesse et de la valeur (2). La fille du maitre du monde, qui, dans les cieux, presidait a ces vertus, avaitsur la terre son temple en cetteville (3); elle I'animait de son esprit et la couvrait de son egide : le nom d'Athenes, enfin, est I'embleme de? beaux siecles de son peuplc. Voyons done ce que nous apprendront les fastes et les lois de la ville du genie, de la valeur et de la sagesse. L'Attique entiire n'est guere plus grande que Cor- cyre ; une peuplade se forma sur son sol aride , et la peu- plade a renipli I'univers de son nom. Sous les plus grands

(1) Lrs mceurs vcnitiennes onl infestti de leur corruption la plus grande paitie du la haute classe dcs Septinsulaires.

(2) La Minerve dcs Grccs porte ie nom d'Athenes.

'•)) Le Parthenon, C'est le beau temple dont les debris majestueux sont rcpresentes avec tant de fidclitc dans le panorama d'Athenes.

A60 SUR LES AVANTAGES DE L'lNSTRUCTION.

des mortels , elle vainquit les baibares a Marathon , i Pla- tee. Elle succonibait sous le poids de I'Asic , ellc saciifia ses biens, sts palais, ses foyers domes tlqiies, ses temples meme ; elle s'embarqua toute pour aller vaincre I'Asie a Salamine, et elle la vainquit a Salamine. Elle devint mai- tresse des Cyclades , de I'Archipcl , des cotes de I'Helles- pont et de I'Asie-Mineure; elle fut I'arbitre de la Grfece, de laGr^ce alors triomphante de tout I'Orientl .... Savez- vouscomments'elevaicnt deshommesquifalsaientde telles choses? C'est dans le sein des ^coles fondees par Solon; et les lois de Solon parurent si belles -k toute la Grece , qu'elles lui acquirent un rang parmi les sept sages dont elle s'honore. Ce grand homnie n'avait pas dedaigne de fixer jusqu'aux moindres reglemens des ecoles publiques. II avail defendu, sous peine de mort , que des maitres non autorises par les lois frustrassent les ecoles publiques de la jeunesse qui leur appartenait. Que croyez-vous , loniens, qu'ait pense le sage Solon sur I'education pu- blique et sur I'education particulierc ? Laquelle des deux croyez-vous qu'il ait preferee ? Que pensez-vous enfin de la justesse de ses Yues ? Jugez-Ics par leurs succes , et prononcez. Dites , que croyez-vous qui fit vaincre les forces de I'Attique a Marathon , i Platce , i Mycale? Est-ce la valeur innee du peuple grec? Mais cette valeur, au- jourd'hui I'apanage de ma patrie, c'est un bien qui fait le tour de la terre , et passe , d'epoque en epoquc , des cceurs d'un peuple aux cceurs d'un autre peuple. Quel fut done I'auteur de ces brillans succt;s ? Quel fut-il ? . . . Ce fut Solon. Quelles furent les armes qui rendirent dix mille guerriers d'Athenes superieurs a cent millc soldats de Da- rius? Ce ne furent pas les cuirasses qui couvraient leurs corps , mais bien celles dont I'education de Solon avait en- ceint leurs cceurs. Enfin , quand Xerxes s'avancc a la tete

SUR LES A VAN! AGES DE L'lXSTilUCTION. A61

des forces de I'Asie , lorsqu'il s'empare de TAttique et d'Athenes meme, qui ne croirait que le peuple de cette ville est vaincu ? II a lout perdu , tout, jusqu'u ses foyers domestiques! Soyons Iranquilles surlui; la fortune n'a pu lui ravir cette grandeur d'anie qu'il doit a sa male educa- tion, et le peuple d'Athenes est encore. Lc genie de Solon donne encore a tons les coeurs les lecons de rheroisine, et ce peuple va les suivre : il est en armes , 11 est tout entier sur les eaux ; il s'en est fait une patrie; et I'element des naufrages I'a conserve pour la victoire. Devant les faibles vaisseaux d'Athenes la flotle immense de Xerxus s'est dis- persee, et leur roi fugitif n'en a sauve que les debris qui ont eu des voiles legeres et des rameurs agiles. Honneur, mille fois honneur au createur des heros et des grands hommes !

Yoili, Corcyreens, ce que fut le peuple, eleve du sage Solon , ces illustres Atheniens dont vous eCitcs jadis la gloire d'etre les allies.

Que si vous doutiez encore de I'influence des lois de Solon, je vous dirais qu'aux jours malheureux, oil ces lois perdirent leur vigueur, oii I'orgueil ignorant crut s'honorer en substituant I'education particuliere a I'education pu- blique etablie par ce grand hoiiame , les courages s'ener- verent,lesespritss'abaisserent,etlesvainqueursderOrient, quiavaient vu dans leur sein les Aristide , les Miltiade et lesThemistocle; lesEschile, les Euripide et les Sophocle; les Socrate , les Xenophon et les Platen; cette ville, qui semblait etre comme la pepiniere des grands hommes et des talens immortels, lorsqu'elle eut altere I'education de sa jeunesse, vit a la fois son independance, son bonheur, et ses hommes illustres finir avec Pbocion et Demosthenes. JElle devintle rendez-vous et la demeure des esclaves et des retheurs, etmit en opprobre , dans tout I'empire des Ro- raains, le caractere jadis si noble ct si revere des Hellenes.

M2 SUK LES AVA>iTAGES DE L'INSTRUCTION.

Fils dcs Giccs , cclte faiblc pcinluic dc ce que furent vos peres en Icuis beaux jours , a-t-elle fait naitre dans vos coeurs le desir dc vous elevor jusqu'i^ eux, d'obtenir une gloire egale a la leur? Employez les moyens qui la ieur ont acquise , et vous I'acquerrez de meme i voire tour. Honorez les vertus , admirez le genie , fecondez-en les germes par I'cducation publique de vos fils. Que vous manque-t-il pour vous relever jusqu'i la majeste de vos aieux ? pensez-vous que ce soient les richesses ? Mais les vainqueurs de I'opulentc Asie furent des hommes dont les generaux raeme etaient des pauvres , comme Aristide et Miltiade. Mais, c'est quand leurs fils furent devenus les riches marchands d'Athenes, que les soldats pauvres de la Macedoine leur ont donne des fers. Mais, c'est quand les Romains etaient pauvres qu'ils conquirent la lerre , et c'est apres qu'ils en eurent amasse les tresors, que les hordes des barbares , avec leurs epees pour tous tresors , les ont vaincus. Ah ! j'appellerai bienfaiteur et restaurateur de la Grece, non pas uniquement I'artisle industrieux qui rendra ses villes opulentes etson commerce fastueux, c'est-a-dire, peut-etre les caracteres enerves et les coeurs corrompus; mais bien le sage , qui vous fera sentir comment on est riche encore avec les seuls tresors de Fame et de I'intelli- gence , et pauvre avec les seuls tresors de la terra ; mais bien le politique profond qui saura vous convaincre qu'on est un grand peuple par la seule magnanimite, et jamais par !a seule richesse. Songeons d'abord k eclairer les esprits, pour les rendre sensibles Ala honte et a la gloire; montrons- leur combien est belle la vertu , combien elle fait le bon- heur de celui qui la possede. Abandonnons a ses propres moyens I'ardenle cupidite. Elle saura se servir de I'ins- truction meme que nous aurons repandue; et, tout en ne pensant qu'i\ la sagesse , a la grandeur dcs ames , nous aurons cependanl agi commepour arriver suivant lavoiela

SUR LES AVAiNTAGES DE L'lNSTRUCTION. A65

plus courte aux moyens qui procurent , par !c trav.iil et I'industrie, I'aisance d'une fortune honnete, c'est-a-dirc d'une fortune acquise par la seule voie de I'honneur.

Tournez done ^os esperances et vos vues du cote de rintelligence ; portez un regard sev6re sur vous-memes ; vous Yousdirezce qui Tous manque, etvosperesviennentde vous dire ce qu'il vous faut acquerir pour devenir, coiTwne eux, I'exemple et I'orgueil de la terre.

Observons quel est ici I'etat des professions les plus in- teressantes , ct jugeons des autres par elles. Je vois parmi vous des hommes qui font honneur i toutes les professions utiles. Je rends homraage i leurs lumieres , et j'admire d'autant plus leurs talens , qu'il etait plus difficile de les acquerir en ces lieuj. Mais je ne rn'arretc point a ce coup d'oeil superflcici et Irompeur. Je tourne mes regards vers le peuple de vos villes et de vos ca npagnes. Je le vois porter, sur son front pule ou d'un vert livide (i), la preuve vivante de I'ignorance profonde d'empiriques et de char- latans, qui pour tout art ont celui de feconder les fleaux du climat par les fleaux de leur imperitie. Je songe ensuite a quelle foule de legistes d'une mediocrite sans pudeur, les Septinsulaires livrent imprudpmment leurs biens , leur honneur et leur existence. Je deaiaode partout quelles lois furent portees pour empecher I'horrible brigandage , qui fait, de la jurisprudence, un commerce sans conscience et sans pitie. Je le demande a la nature; et la nature, eu rou- gissant, se tait; elle me montre un code, et elle picurc. Que contient done ce code, qui fait pleurer et rougir la nature? Je I'ouvre an hasard; j'y vois un acte de bienfai- sance pour vous, loniens; mon coeur se console! Je lis avidemeut. Pour faveur singuliere , tout Septinsulaire

(i) La decadence de I'agriculture a rendu malsaine iine grande partie de file de Corcyre.

A6A Sl)R LES AVANTAGES DE L'INSTRIJCTION.

ctait revetu dii caractc-ic auguste qui le rendait capable dc dcfendre, de sauver la Ibrtune et la vie de ses compatriotes , aussitot qu'il faisait actc de presence a I'universitc de Padoue. Pour tout le reste des hommcs , il faut etre plus instruit qu'eux, il faut savoir leurs lois pour les defendre; mais pour des Grecs, auxyeux des Italiens, cela n'est pas necessaire. Des Grecs pcuvent etre ruines, deshonores, supplicies. Qu'importe , pourvu que les Grecs demeurent ignorans, qu'ils soient esclaves et qu'ils oublient leurs p^res ? Voila done ce qu'a fait i votre egard la politique de Venise ! Rougis, humanite, pleure; le machiavelisme avait atteint son but, et le machiavelisme souriait avec satisfaction.

Je parcours vos campagnes, je les vois couvertes de vos temples; mais tous ont I'aspect de la misere. Je vois vos pretres bechant la terre et touchant les bestiaux, et les ministres du Seigneur ne disent plus qu'avec peine les hjmnes composes par leurs savans predecesseurs. Je de- mande si, dans toutes lesiles, il n'est pas une ecole oii les serviteurs des autels aillent apprendre a instruire, a con- soler les humains; et la religion rougit aussi en cachant son visage baigne de pleurs. Ah! je rends graces auciel, loniens, que vous soyez enfin les freres d'unpeuple, qui veut des compatriotes forts comineses propres citoyens, et qui dedaigne d'acquerir des sujets pour les garder, en les rendantfaibles, miscrables et degrades.

Afflige par le tristc spectacle de vos campagnes, je rentre au sein de vos cites, au sein de votre capitale. J'y cherche la langue d'Homere, que je n'avais pas encore entierement meconnue dans la bouche de vos paysans. Je demande i I'enfant du riche s'il connait sa langue maternelle, et il me repond qu'il I'ignore. Je demande si, de tout terns , des ecoles publiques n'out pas conserve parmi vous ce dep6t precieux du genie de vos peres ; et la Grece indignee

SDR LES AVANTAGES DE L'INSTRUCTION. A65

m'appi'cnd que le peu d'etablissemens deserts qui sub- sistent encore, ne sont dus qu'aux fils de Pierre-Ie-Grand, qui proLegerent un moment ces contrees.

Comment ! et plus heureux que le restedu monde, vous n'avcz subi le joug ni des dcA^astateurs du nord , ni des devastateui'S du midi ! Nil'Arabe, nileSarmate, ni I'Os- manli, nile Vandale, n'ont envahi votre contree; et c'est a des pcuples que nous appelons polices que vous avez ap- partenu. Mais dans le reste de la Grece, a Pathmos,a Thes- salonique, a Joanina, a Cydonie (i), au mont Athos, en cent autres endroits, je vols des ecoles publiques oti vos frercs vont apprendre la langue et les hautes pensees de tos peres. Toila ce que permettent des peuples que nous ca- racterisons, en les appelant barbares; et ce sont des peuples polices qui vous ont domiues, eux qui ne vous ont pas permis d'etablir uneccole dans vos iles! lis ontplus fait, ces propagateursdc la servitude ; ils ont eu I'art de meltre en deshonneur parnii vous le seul moyen qui pOt vous rendre a votre elevation premiere. Calcul du faible et du mar- chand! lis ont eu I'adresse de rendre ridicule dans le beau- monde le majestueux idiome que les bouchcs des Platon et des Pindare ont consacre ; ib vous en ont presque fait pei'dre les resles precieux; et vos femmes elles-mGmes, avec vos petits-maitres, rougissent de parlerja langue dc leurs sublimes aieux; et les meres la dedaignent pour leurs fils et la rejettent pour leurs filles ; et c'est le patois de Bergame, c'est le jargon dc Sganarelle, de Pantalon et de Bisognoso, qu'onlui prefere (2). Ah! que n'ai-je en partagc

(1) L'ecole de Cydonie n'cxiste plus : les professeurs et les Aleves viennent d'etre massacres par les Turcs (en 1821).

(2) Les babitans qui ne font pas usage de la langue grccquc

ailcnt , dans les sept Jlcs j Ic vC-nitien Ic plus corrompu. P

Tome xi. ao

A66 SDR LES AVANTAGES DE L'INSTRUCTION.

une faiblc clinccUe do ce mSme gonic qui caraclcrisa les immoilcls crcatcurs dc voire languc ! avcc quelle force ne combaltrais-je pas d'aussi viles opinions , d'aussi barbarcs prejuges! Je saurais vous dire des veritcs ameres et lour retlrer toutc leur amertume. La persuasion coulerait dc mes levrcs. Aux acccns de ma voix, vos cceurs scraicnl emus ; ils croiraicnt rccoiinaitre Ics acccns de la palrie meme, ils seraient entraincs ct rendus a Icur grandeur premiere. Le bien public sc montrerail i vous dans loul son jour. Jc saurais vous dire tout ce qu'il vous faut fairc pour vous relever vers votre premiere splendeur; el tout cc qui vous serait montre digne de vous, vous le feriez. Eh bien! si je ne puis atteindre de si haules destinecs, c'cst a vous dc seconder mes faibleseflbrts. Ne songozphis A moi, nc me regardez plus, et supposez que Ics raiilumcs muels de vos peres , debout autour de moi , supplcciU meme par leur silence ;\ ce qui manque i ma voix. S'il ne pent m'Ctre donnc dc vous persuader, obeissez a ccs mnnos illustres; ils vous invitent k marcher sur Icurs traces; ils vous montrent les voies que vous dcvez tenir, les obstacles qu'il vous faudra franchir ou renverser ; ils vous com- mandcnt de lout faire pour les suivre a I'immorlalile. En- tendez-vous? ils vous commandcnl! . . . Fils des Grocs , obeirez-vous i vos p^res? Irez-vous les rejoindre a ce noble rendez-vous? ou passerez-vous pour jamais, en quillanl la vie, dans les obscurs abimes dc I'oubli? Je mc lais ct j'at-

tends votre reponse Ah ! je la lis dans vos regards, ceKc

reponse; je Tenlends au milieu de vos acclamaliuns : cllcs ra'apprenuent que vous etes encore les digncs nevcux des grands hommes ; que deux mille ans de malheura el dc persecutions n'ont pu degradcr vos amcs, cl vous faire oublier vos glorieuscs deslinecs. Vous saurcz Ics remplir; vous saurcz rcgencrcr, vous, vos frcrcs, vos cnfans; leur

SUR LES AVANTAGES DE LINSTRUCTION. AG7

rcndre Ics sciences, les letlres, les arts; plus encore que tout ccla, les vertus de vos peres. Vous verrez tos soins prosperer ; osez le vouloir, et dans peu vous verrez les belles conceptions, les beaux travaux et les belles actions icnailrc parmi vous, comuie ccs plantes qui repoussent d'olles-mC-mes dans leur torre natale, aussitOt que la main du dcvastateur abandonnc la nature a son cours.

Avant d'ciilreprendrc ccllcrogcneration devous-mume): consultez I'histoirc, ccHc immortelle institutrice des mor- tels ; elle vous dii'a : II n'y a que peu de siecles encore , et TEurope entiere ctaitbarbare; sestnbunaux retcntissaient alors, commeles votresmaintenant, desaccensd'unelangue etrangerc; une langue etrangcre regnait partout, et les langues de I'Europe rest^iient dans I'enfance oii la votre est aujourd'hui tombee. Cependant quelques homnies, hardis bienfaileurs de leurscompatriotes, s'elevercnt danschaque nation. lis osercnt parlcr leur propre dialecte , ils I'enri- chirent, I'epurerentetrembellirent, Ilsfurentpayes dc leur audace par la reconnaissance dc? pcuples, par I'imitation des bommes superieurs ; et bientot les nations modernes, for- mees par vos peres, du rang de leurs elevcs s'elevercnt a celui deleurs rivaux.

Si I'Europe etait naguere ce que vous etes aujourd'hui , vous pouvez dcvenir ce qu'elle est maintenant. Avec com- bien plus de facilite ne le pouvez-vous pas? vous avez, pour chemin facile , la carriere ouverte devant vous par Ic progres des sciences et des arts , et ce progrcs est immense. L'Europc avait des langues barbares qu'il Adiait reformer en entier; vous n'avez, pour tout travail, qu'a vous rap- procher un peu de la langue de vos ancetres , et vous pos- sederez le plus riche, le plus honore, le plus majestueux desidiomes. Eh quoi! vingt siecles dc maihcur, une poli-

SO*

A68 SUR LES AVANTAGES DE L'INSTKUCTION. tique adroite et constante n'ont pu detruire en vous \^ langue de vos peres. Les neuf dixiemes desScptlnsiilaircs n'ont pu savoir la languc du conquerant, et vous pourriez penscr qu'on ferait perdrc, en quelquesannees , i ccs nciif dixiemes, ce qu'on n'a pu fairc perdrc en deux mille ans audixieme d'entrc vous? Non, vous ne le penscz pas. Vous ie savcz, la langue d'un peuple degcnere ; mais ellc ne change jamais en entier pour une langue elrangferc. Dcs que vous le voudrez, au contrairc, vous rcviendrez presque en entier a I'idioine de vos ancetres. II ne faudra pas perdrc Ic temsleplus precieux devotre jeunesse, pour apprendredes langues etrangeres; la vOtrc vous redira bientOt tout ce que le genie peut cnfanler de beau. Penetres dc vos su- blimes modeles, vous vous eleverez jusqu'a eux, vous Ics imiterez , et il faudra qu'une seconde fois I'Europe enticrc vienne entendre les philosophes et les poetes de la Grece, pour prendre des leconsde vertu , de savoir etd'cloquencc.

Ces pensees, je ne les cmcts pascommcnouvelles; ellcs sont gravees dans les coeurs d'un grand nombre d'entrc vous, lis sont intimemcnt convaincus du bcsoin indispen- sable dc la conservation , de la regeneration de votre Ian- gage, derimpossibilileenfin dc le detruire jamais enlierc- tnent. II est encore parmi vous beaucoup de families dis- tinguees qui, superieures aux prejuges et i I'opinion pu- blique egaree, elevent leurs enftms dans Petude de Icur langue maternelle : honneur ices dignes families ! qu'elles soient pour loutes les autresunexcmple glorieuxi imiter, honteux a ne pas suivrc !

Si les ecoles publiques vous semblent trop peu etendues ( el ellcs le sont trop encore pour le nombre des elives que vous y envoyez), eh bien ! devancez les vues liberalcs du gouvernement : I'amour de la patrie sc nourrit de sacriGces , sachez-cn faire. Dolez a vos frais des ccoles publiques ;

SUU LES AVANTAGES DE L'lNSTilUCTION. A69

fondez-y des pensions pour le pauvre que la nature a vcnge de la fortune. Imitez les autres Grecs ct quelques-uns de vos concitoyens; hommes riches, soyez nobles el genereux commeles Zosimades (i); comma eux, employez vos trc- sors a enrichir vos freres de la plus grande des richesses , de celle des lumieres et des vertus. Hommes de geuie , imitez les Boulgaris, les Rigas, les Theotoky, les Corai ; consacrez vos talens ct vos veilles irinstruction de vos con- temporains, audeveloppementdes ideesgrandesetliberales, dans les ames de la jeunesse; consacrez de nobles efforts k la regeneration d'un peuple tout entier. Alors on dira : Les Grecs expatries ne sont pas les seuls grands hommes d'entre les Grecs, on compte encore les Grecs des iles louiennes.

Tandis que les citoyens de tous les ordres concourront k cette regeneration de la langue et des moeurs , et vous , mi- nistres de Dicu, resterez-vous spectateurs oisifs de cebeau mouvement ? Voudriez-vous , comme le font maintenant les niinistres de I'occident , parler aux peuples un langage que vos peuples n'entendissent plus, et rendre ainsi leurs prieres et leurs cantiques , le recit de quelques formules que leurintelligeuce n'cxpliquat plus a leurcceurPNon saus doute, vous no le voulez pas. Eh bien! conservez done ce depot precieux de la langue de vos peres; conserrez-le comme le plus puissaat moteur que vous puissiez manier, pour maintenir la morale et ranimer sans cesse la vertu. A coup sQr, la langue des Cyrille, des Basyle, des Chry- sostome vous semble une langue eloquente ; une langue qu'il est utile que tous les Grecs entendent ; une langue,

(t) Les Zosimades ont fait Imprimcr, a leurs frais, les chefs- d'oeuvie de la langue grecque, et les ont fait distribucr gratis i leurs jeuQC£ compatiiotcs Ics plus studieuz.

A70 SUR LES AVANTAG^S DE L'INSTRUCTION.

cnfin, consacrcc par votrc religion. Cherchez done vons- inGmcs A rcnlendrc , a I'eneourager, a la propagcr. lien- dcz-vous les plus instruits comme les plus sages d'entre les homines, pour en Clrc les plus reveres; et rappcloz- ?ous que ce fut li voire secret de tons les siecles : tiop heureux les mortels, si vous en eussicz loujours profile! Maintenant, jevais^ous parlerdes plus nobles services ren- dus au genre humain. ficoutez-ilioi ; ils seront pour vous dcs modeles. Songcz que cc n'esl point par dcs riles, mais par dcs bicnfails, que les religions excellent aux jeux dcs jnges de la Icrrc^ et, j'osc tlirc, auxyeux dc relernel.

Quand I'Europe etait redevenue barbare, c'esl dans quclque tmonasteres que s'y conscrvaient les rcsles dc scs antiques lumieres. C'est lA que des hommes simples et laboricux on recueillaient , en ravivaient les derniores lueurs.

Ce qu'ils otaienl pour de? pcuples enlicrs, les pasteurs de nos campagncs le sont encore pour nos simples pay- sans. Dans notrc palrie , le ministre des antels est I'homme le plus docte et souvent le plus verlucux de son humble pnroissc. C'esl lui qui protege et qui di- rige ce pen d'instruction qn'il est possible dc repandrc dans les dernieres classes i]i\ peuple; lui qui signale au richc bionfaisant les dispositions naissantes dc I'cnfant sans I'oitunc; c'est le meme hommc, cnfin, qui inslruil les pclils du pauvre ct qui console la famillc du malheureux. Pretrcs de I'Orient, voulez-vous, comme la derniere, qu'ai- je dit? conmie la premiere classe des prclres dc mon pays, devenir rhonncur ct la Ycncralion du pcuplc? soycz ins- truits comme cux, comme oux rcpandcz vos lumiLres ct vos consolations dans le sciu de tons les pauvrcs, dc tons les mallu'urcux. Vous dilcs toujours que vous ctcs les

SUR LKS AVAMAGES 13E L'INSTKUCTION. A71

pcre? (Ic roiphcliii. Eh bien! soycz-le done de tous Ics Grccs qui sonl orphelins tie Icur palrie , et qui en ont perdu tout rhcritagc. Elcvez des ecoles pour Ics filsde I'indigent, olevez-en d'autrcs pour vos propres successeurs. Qu'on ne disc pas seulement de vous: lis sont probes. Qu'on ne puisse plus dire que les successeurs des Cyrille , des Ba- syle et des Chrysostome ont oublie les exemples et qu'ils n'entcndent plus les sublimes acccns des peres de leur cglise. Instituezdes ecolcsoii soientenseigneslespreceptes ct soil developpee I'eloquence de ccs hommes venera- bles. Qu'il ne soil pas dit que vous le cediez a ceux qui re- levcront les ecoles oii les Pythagore, les Socrate et les Platon developpaient leur morale si pure, dans un si beau langage. Au contraire, qu'unc noble rivalite s'etablisse cntre cux et vous. Commencez vous-memes par etre ins- Iruits ; qu'on ne puisse etre revetu de voire sacre carac- tere , sans avoir faitpreuve de lumieres. Vous apprendrez alors a vos peuples ce qu'ils gagneronl eux-mGmes u s'e- claircr. Vous emploierez votrc puissante influence sur tous les esprits, pour les conduire au bien, au grand, par la persuasion; et c'est a vous surtout que seradue la rege- neration de la Grece.

Je finis en vous redisant encore , et je voudrais pouvoir vous le dire tant de fois que je parvinsse i le graver dans vos ames, en traits inelTacables: c'est I'education, etl'educa- lion publique elle seule, qui pourra vous conduire auxdesti- nces qui vous attendent,et vous devez tout faire, tout sacrifier pour elle. Mais pourquoifaut-ilqueje vous presente sans cesse commc un sacrifice, comme un devoir, cequidcvraitn'etre pour vous que le plus doux des plaisirs ? Ah! sans doute, c'est que vous ne savez pas quelles delicieusesjouissanccs eprouvcnl un pac, unc mcic, en voyant leur fils raarqucr

A72 SUR LES AVANTAGES L'INSTRUCTION.

sa superioriti; future , pur ses progr^s naissans et par Ics avantages qu'il remporle deji sur ses jeunes condisciples. Que vos Cls ficquentent les ecoles de I'Etat, nous Icur doiinerons dcs prix, ils serout modestes; ils seront ccux que !a Gr^ce assembleedecernaitaux Simonide, aux Pindare , aux Platon : un simple feuillage. Nous y joindrons les ceuvres de ccs grands hommes; les dedaigneriez-vous pour vos fils ? Yous ne seriez done pas des Grecs, et les plus doux sentimens de la nature seraient done etrangers Svoscoeurs!

Laissez-moi terminer mon trop long discours par une bistoire qui dcmeurera toujours gravee dans mon souvenir. Un eleve (i) ctait dans unc ecole celebre , bien loin de sa famille dont il ne devait voir personne encore. Cependant la fin do I'annee scolaire amene la distribution des prix. Deja les magistrats et tout ce que la ville a d'hommes re- commandables se sont reunis en presence d'un concours immense de peuple. Deja les couronnes se distribuent. Le Jeune eleve en avail acquis une. II ne pensait qu'a sa petite gloire litteraire, il goCitait avec ivresse ces premiers suf- frages de I'honneur et de i'estime. II repoit sa couronne, il se retourne; que voit-il ? sa mere, sa bonne mere qui avait fiiit son voyage en secret, et qui etait arrivee comme pour etre heureuse du bonheur de son fits. Couronnes, prix, spectateurs, ah! je vous oubliai tous; I'orgueil fit place k la nature; je ne vis plus que ma m6re, ina tendre mere, et je m'elanpai dans ses bras, en lui faisant hom- mage dc ma couronne et de mon prix.

Sexe enchanteur, 6 vous dontle coeur, plus sensibleqoe lenotre, resiste raoins aux naives impressions de la na-

(i) L'auteur de ce discours.

SUR LES AVANTAGES DE LINSTRUCTION. A73

tuie, dites-moi! vos ames n'ont-elles pas ete cmues i moil recit? Vous ne seiiez done pas meres! Eh bien , quand vous eprouverez ces enivrantes sensations, rotrc bonheur surpassera mille fois encore tout ce que pourrait vous promettre votre imagination. Persuadez done I'autre raoitie du genre hi.main sur laquelle vous avez un si puis- sant empire; adoucissez mes apres et durs accens par votre touchante ct persuasive eloquence; faites-moi par- donnercequi pourrait avoir choque dans mes discours, trop ingenus,trop libres peut-etre. Que par vous tous les peres apprecient les bienfaits, qu'ils pressentent les plaisirs si purs qui naitront d'une heureuse education et de I'instruc- tlon publique de leurs fils ! Charles Dupik.

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IJ. ANALYSES D OUYRAGES.

SCIENCES PHYSIQUES.

llisToir.i; BE l'astronojiie moderne, pa/' J/. Dej-Amhre, chcvalict' de Sainl-Michcl el de la Ltn'ion-d' Uonneiit' , sccrelairc perpcluel dc I'acadcmie royalc dcs sciences, etc. (i).

M. Dclambic avancc a grands pas daiis la carrioic im- mense qu'il s'est oiiverle; bientol il I'aura parcourue tout enli('ic. Nous lui devrons non sculcment une liistoirc com- plete de I'astronomic, niais encore rcxposilion etlc resume des tiavaux de tons les astronomcs, I'analyse dc tons Ics edits sui' la science, sur ses methodes, ses instrumens , leur construction et leur usage. Les matieres precieuses, eparses etenfouies seront exploitees, epurees; la substance d'un nombre prodigieux de volumes . degagec dc tout me- lange inutile ou nuisible, paraitra telle qu'elle est et sous ses veritables dimensions. Des tresors caches nous seront rendus; et, grace aux veilles d'un aslronome infiiligable, nous saurons, an moins en astronomic, qucUes sont nos richesscs reelles et comment nous les avons acquises.

Les trois premiers volumes de I'ouvrage de M. Delambre ont conduit ses lecteurs jusqu'au tems de Copernic (2) ; les deux siecles suivans mcltront sous lenrs yeux Ic beau spectacle de rintelligence bumainc decouvrant , par des

(i) Paris , 1S21. 2 vol. in '\". Madame vcuvcCdUicicr , imprimcur- libraire pour les sciences.

(2) Reiiic Enrjclopcdiqiw , T. I , png, 25-/)Oi.

SCIENCES PHYSIQUES. A75

uioycns quelle a su creer, qiielques-unes (.losluisgciieialcs dc la naluie. Lcs nialhematiqiies , la physique, ct surtout la saine philosophic pcrfectionncrout les methodes, mul- tiplioronl les decouvertes, chasseront les vieilles errours , et placcront la connaissance du systeme dii mondc au premier rang- entrc les sciences accessibles a notre raison. La luchedc I'historien devient moins pcnible, parce qu'elle est plus agreable; mais, d'un autre cote, les materiaux abondent, les hommes sent vus de plus pres, leurs passions et lours interets n'ont pas encore perdu toute leur in- fluence. L'histoire de I'astronomie moderne n'estpas moins embarrassee dans sa marche que cellc des evenemens poli- liques de nos jours. Malgre ces entrayes, M. Delambre ne s'ecarte pas de son impartialite historique, poussee quel- quefois jusqu'a la severile. L'auteur a cru devoir en pre- venir ses lecteurs; ecoutons-le.

« Cette impartialitc severe ct historique se Irouve ega- lement dans les notices que nous ayons consacrees i quelques-uns des plus illustres bienfaiteurs de la science, quand nous avons ete forces de combatlre leurs idees ou leurs pretentions. Elle sc trouve dans les notices de Ptole- mce , de Copcrnic, de Kepler, de Galilee ct de Descartes. On la trouvera pareillement dans les articles des grands hommes , que I'abondance des matieres nous a forces a renvoycr au Iroisieme volume de noire histoirc. Cc volume est tout pret , ou du moins il n"y manque que quelqucs notices courles ct faciles d'autcurs tres-modernes; il aura pour fitre : Ilistoire de I'astronomie du dix-hiiiLieine Steele. Nous le commenccrons par Newton , Flamstced , Halley, qui paraitraicnt appartcnir au sieclc precedent; niais les decouvertes dc Newton n'ont porte leur fruit que long-tems apres la premiere apparition du livrc des Prin-

A76 SCIENCES PHYSIQUES.

cipce. C'cit le xvia" sitcle qui a vn paraitre la Coinelo- graphic dc Haliey et I'llisloire celeste de Flainsteed. Notre histoirc sera termince par I'exanicn do tous Ics ouvrages qui ont pour objot la grandeur et la figure dc la lerre; ct ce dernier livre sera Ic seal ou pourront Ctrc compris quelques autcurs encore vivans. Ainsi, noire histoirc de Tastronoinie n'aurapas uioins dc six volumes. On trouvera sans doute que c'est bcaucoup pour une scule science; et c'est cc qui nous avait fait balancer sur le titre que nous devions donner a notre ouvrage. Nous aurions pu lui donner cclui de BlbUotheque , a I'excmple de Photius et de Fabricius ; nous I'avons redige principalement pour les astronomes et pour les inathematiciens en general. Nous avons desire qu'il contint le tableau complet dcs differcns ages de I'astronomie; qu'il ffit un repertoire oil Ton Irouvat toutes les idees, toulcs les methodes, tous les iheoremes qui ont scrvi succcssivement au calcul dcs plienomencs. Quant aux lecteurs qui n'ont que peu ou point de connais- sances mathematiqucs, I'histoire de I'astronomie est ren- fermeepour eux dans nos discours preliminaires et dans les parties des notices particulieres, oii ils n'apercevront ni calculs ni demonstrations. Aux six volumes de notre his- toirc , on pourra joindre les ti'ois volumes de notre astro- nomic, oil nous avons tachc de reunir toutes les methodes dont on se sert aujourd'hui. II est vrai qu'apres la lecture de I'histoire, on pourrait trouver quelques rctranchemens a faire dans le traite. Nous pourrons meme, si nous en avons le tems et les moyens, executer ces changemens et quelques aulres, dont I'objet scrait d'en mieux coordonner toutes les parties, sans que le traite ccsse d'etre un ouvrage complet en son genre. » Aprcs avoir transcrit ccs explications ct cct; proracsscs

SCIENCES PHYSIQUES. A77

tie I'aiileur, il reste peu d'obserrations a faire siir quel- ques-uns dcs seize livres, dont so composent les deux nouveaux volumes de I'histoire de I'astronomie.

Le premier Ih're expose avec etendue I'etablisseraent du calendrier gregorien et les methodes de calcul qu'il rend necessaiies. Au sujet de la determinalion du jour de Paques , M. Delambre compare sa formule a ccUe de M. Gauss pour le meme calcul , et il exprime le regret que Ton ait conserve sans necessile des fetes mobiles, d'apres une loi tout-a-fait etrangere i la division de I'annee. II rapporte, en les approuvant, les motifs quifirent rejeteren France le calendrier ephemere dont notre legislation rap- pelle seule quelque souvenir. Pour combler les inforlunes de ce malencontreux projet, il ne lui manquait que d'etre condamnc par les aslronomcs , car il semblait u'avoir ele fait que pour eux.

Le second lU're est coPiSacre a Copernic, et le troisienie a Ticho-Brahe. On salt que le premier fut un savant mo- deste et prudent, et qu'il echappa par la mort aux orages que sesocrits allaicnt exciter. Le second enrichit la science d'un nombre prodigieux d'obscrvations failes avec soin tt avec les meillcurs instrumens q^ue Ton eQt alors. Ses con~ temporains lui firent une reputation immense, que I'histo- rien a dfl resserj-er entre ses limites. M. Delambre s'est acquitte de ce devoir avec une eqnite dont Ticbo lui-memc nc sc plaindrait pas. Lalande, qui ne craignait pas de sc livrer a quelque peu d'enthousiasme , n'a pas epargne a I'illustre astronome danois les eloges qu'il ne donne a Kepler qu'avec beaucoup de reserve, et dont il se monlre encore plus econome cnvers Descartes; mais il a soin dc premunir ses lecteurs centre les erreurs qu'il a pu com- mettre. « La memoire nous trompe , dit-il; le calcul nous egarc a tout moment; la rbaleur de la composition nous

A78 SCIENCES fllYSIQUES

onlraiiio; cnlin, on ignore souvent dcs clioses qii'il auiait fallii savoir. D'aillciir.s, jo n'ai pas pris bcaiicoup dc peine pour chcrchcr mc« i'aiitcs ; il y avail Irop dc terns a perdrc cl Irop d'cnnui a cjironver. J'tcris pour mon amusement, ct j'y rcnonccrais , si j'clais oblige dc mcttrc dans mos vcrils cette rigourcusc cxacliUide si cnnuyante pour un auleur, etqui fait souvent, dit-on, loullc sublime dessols."

11 faul prendre cette declaration a la letlrc ; car on nc pent penser que Lalande I'ait ecrite pour son amusement. C'est apparemmcnt aussi de pcur de s'ennuyer que, dans ?a B'lograpJiieasti-onoiniqiie, oi\ il adniet plusicurs reveries snrlesysleme du monde, elmeme des traites d'astrologie, ilne fait mention d'aucun des ouvrages dc Descartes. . « Mon ouvrage sera utile tel qu'ii est, ajoute Lalande soil: mais il I'eQt ete beaucoup plus, si vous y aviez mis Ics solns , le scrupuleux amour du vrai qu'on remarque dans les ecrits de M. Delambre.

On ne sera done pas surpris de trouver de tems en terns quelque opposition entre les jugemens dc notre autcur et ceux de I'un de ses predecesseurs, dont les ouvrages ont obtenu et conservent sans doute encore assez de credit , ineme chez les ctrangcrs.

La vie et les oeuvres de Kepler sont presque tout Ic sujet des deux Livres suivans. L'histoire de ce grand bomrae est bien courle. Ilvecut pauvre, charge d'une nombreuse fa- mille, souvent contraint, pour obtenir le paiement d'une pension modique, a perdre en sollicitations un tems dont il eut fait un emploi si noble et si utile. Ses contemporains lui accorderent i peine la subsistance, etsa depouille mor- telle n'obtint qu'au bout de deux siccles les vainshonneurs d'un tombcau ct d'une inscription. Ajoutons, pour la ve- rite historique, que cet acte d'une reconnaissance tardive

SCIENCES PHYSIQUES. A79

fut suggci'e l>>ir dcs Francais aii sage prclal (i) qui lu fii excculer, sccoiulc par riiifluence alors loulc piiissantc dcs amies franraises. Le moiiumenl que 31. Dclauihre lui e!cve dans son histoirc durera plus long-tems que cclui dc Ra- lisbonne ; Kepler en a fouini lui-niemc Ics materiaux. C'est un extrait subslanliel de tons ses ouvrages; Ics astronomes et Ics geometres le consultcrontfrequcnimcnf.

Arretons encore un moment nos regards sur I'hommc dc genie qui nous rcvcla Ics premieres lois de tons les mou- vemens celestes. Le sort qu'il eprouva n'efTraicra pas les ames aussi elevees que la sienne ; mais il nous afilige et nous lunnilie , il serable accuser ou rcspece humaine ou nos institutions sociales. Nous aimons a contemplcr rhomme vcrlueux lultant contre I'adversile, parce que nous sorames assures que la vicloire le couronncra ; mais lout est repoussant et douloureux dans la vue d'un hommc tcl que Kepler, roduit par I'indigence a descendre des plus grandes hauteurs dc la pensee, parce qu'on neglige d'acquitter envers lui la dclte de la societe.

Suivant I'ordre des terns ct la connexion des malieres, M. Delambre a parle de Neper el dc Briggs a Toccasion de Kepler; mais il complete dans un autre livrc I'liistoire dcs logarithmes et de la confection des tables. Observons a ce sujet que la theoric de Neper, moins exacte que cclle dcs modernes, n'a pas encore disparu de rcnseignemcnl; on la trouve sansaucune rectification dans I'arithmctique dc Bezout. II est done indispensable de revoir de tems cu lems les ouvrages elementaires Ics plus juslcmentestimes, d'en faire disparaitre les taches et d'y remplir les lacunes que le progres des connaissances aura rendues visibles.

Galilee. La biographic de cet illustrc Florcntin occupc

(i) Charles d' Albert , prince jiriinat , grand due dc Francfoil.

ASO SCIENCES PHYSIQUES.

plus de place que cclle dii grand aslionomc dii Wiirlcm- bcrg. Ses dtmeles avcc rinquisition, son proces, sa con- damnalion ct son cmprisonnoment , tons ccs faits que M. Delambre racontc avcc cxacliludc ct d'apres des temoi- gnages aulhentiques , scront pour lous Ics sioclcs unc grandeetsalutaircinsUuction. Cc futcn vain queBenoit XIV essaya de rcpnrcr le scandalc dc ccttc ahsurdc procedure; I'inexorable histoire en est saisie. Par unc singuliere con- tradiction, la rehabilitation de I'ecrivain ne {'ut pas etendue jusqu'i ses ecrits. La doctrine du mouveracnt de la terre autour du soleil etait universellcment admisc, enseignee publiquement a Rome ; et cependant il etait defendu d'en lire les preuves dans les oiivrages de Galilee.

Tous ces maux provienncnt de ce qu'on n'a pas encore fait une delimitation precise entre le domainc des croyances religieuses ct celui de la raison ; mais cette ope- ration suppose avanl totit Tetablissement de quelques ve- rites generales sur Icsquellcs clle serait fondce , et ces verites no paraissent pas encore avoir recu les develop- pemens et le degre de clarle qui les feraient admettre par tous les bons esprits. Auti'e embarras : une doctrine bien proMvcc et bien elablis; ne fructifie qu'en se repandant, en dcvenant vulgaire. Or, nous sommes encore peu avances dans I'art de propager les verites d'un certain ordre , prin- cipalement les verites morales. Jusqu'a present, nos re- cherchcs sur ce sujet se sonl bornees presque cxclusivemcnt aux methodes d'enseignement, et c'est ce dont il ne s'agit point. Ces observations seront continuees au sujet de Descartes. Le siecle de Galilee attaqua la thcorie du cicl, parcc qu'ellc etait encore naissante; notre siecle altaquc par les mOmes manoeuvres et avec les mCmes armes la iheorie dc la terre, et Ic combat durera peut-etre plus long-terns que celui duni le ciol lut le sujet. Malheureu-

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sement, rhumantto supporte une partie du poids de cette petite guerre. Lc meme esprit qui fit condamner Galilee, repoussa dans le tems I'inoculation comme injurieuse a la providence , les paratonnerres comme une tentative pour se soustraire a la vengeance divine. Les habitans d'une contree du nord, pour lesquels la pomme de terre serait un dondu del, la rejettent avec effroi, en se rappelantqu'elle leur fut offerte par des mains heretiques. « Nous savons, disent-ils, avec quels alimens nos peres ont vecu sur cette terre et merite le ciel ; nous voulons les imiter en tout, afin de nous assurer la meme recompense. » Ce raisonnement est tres-faon, tres-sage ; mais il a pour ces pcuples des in- con veniens qu'on leur aurait epargnes, si I'esprit religieux eOtm,'eux connu ce qui est de son ressort.

Des noms moins celebres , des travaux estiniables, mais sans eclat, remplissent les livres suivans jusqu'a Descartes. Le lecteur sait deja que 31. Delambre traite notre philo- sophe tres-severement; voyons jusqu'4 quel point son ju- gcment peut etrc adouci.

Comme astronome, M. Delambre ne pouvait louer Des- cartes. Le systeme des tourbillons, qui hcureusement ne s'etendit pas hors de la France , retarda quelque tems parmi nous I'adoption des bonnes doctrines en physique et en astronomic; les sciences en eprouvcrent un dommage que les docouvertes de Descartes en mathematiques n'ont peut-ctre pas compense ; et en mathematiques, il cut parmi ses conlemporains des egaux, si toutefois Pascal et Fermat nc lui etaient pas superieurs. Bornons-nous done k considerer notre illustrc compatriotc comme res- taurateur de la philosophic.

Dans sa jeuncsse, il fit beaucoup de demarches afin de penetrer les mysteres des Rose-croix. Mais accordait-il quelque confiance i ces jongleurs ? M. Delambre Ic pense. Tome xi. 31

A82 SCIENCES PHYSIQUES.

Remarquons cependantque, dii tems de Descartes, la phy- sique etait encore reduite aux premiers elemens, aux fails les plus ordinaires ; que les coramunicalions scientifiques etaient plus rares; que les inventeurs se plaisaienti s'en- vironner des ombres du secret. La curiosite de Descartes pouvait etre trfes-pliilosophique. C'est ainsi que de nos jours d'excellens esprits se sont livres aux rechcrches du "N^ mesmerisme , avec I'espoir d'y rencontrer quelque fait nouveau, soil en morale, soit en physique. D'ailleurs, que Descartes crftt ou ne crftt pas aux Rose-croix, ildeyait parler et se conduire de maniere A pouvoir pcnetrer jus- qu'i eux et se faire initier i leurs pretendus secrets.

Selon M. Delambre, la doctrine philosophique de Des- cartes est celle de Bacon, de Gassendi et de plusieurs autres philosophes , dont les ouvrages ont precede la publi- cation de la Methode: cela est vrai. Voyons done comment Descartes a pu imprimer un aussi grand mouvement h I'esprit humain , que ses predecesseurs araient a peine ebranle. Cette question nous conduit i examinier en quoi consiste le pouvoir des livres.

Unlecteurou unauditeurnemedite point; son attention est purement passive. La lecture et I'etude peuvent se succeder I'une a I'autre k des intervalles tres-rapproches ; mais elles ne se confondent jamais. II faut done qu'im livre destine a nous instruire produise les effels de I'etude et qu'il nous I'epargne.

Si les verites que ce livre doit nous apprendre sont im- portantes et nombreuses , si elles formentun ensemble, un systeme dont les parties sont necessaires les unes aux autres, il faut que I'auteur ait bien s.nisi la liaison de ces parties, qu'il nous la fasse scntir, et que tout le systeme arrive dans notre intelligence, sans que nousy apercevions aucune discontinuite.

M

SCIENCES PHYSIQUES. A83

Surtoul, que la lecture de I'ouyrage soit facile, enlrai- nante; qu'ellc souticnne I'altention sans la futiguer. C'est assei dire que les matieios les niieux choisies et la me- thode d'expositioa la plus parfaite ue pcuvent se passer des secours du st}Ie.

Tout livie qui, traitant un sujet grave et d'une ulilite generale , aura satisfait a ces conditions, pourra, merae en n'offrant rien de neuf, operer one revolution dans les es- prits. Tel fut le secret de J. J. Rousseau, qui n'inventa rien et qui prit neanmoins sur son siecle un ascendant qui ne s'affaiblit pas encore. Le terns epurera ses doctrines et n'en conservera que les verites qu'elles peuvent contenir; mais, quand meme 11 les reduirait a rien, nous dcvrions encore chcrcher dans les ouvrages de cet ecrivain un excellent modele de dissertation philosophique. Tel fut aussi le secret de Montesquieu ; ajoutons , celui de Des- cartes. II sutreunir les verites eparses, et les trailer conime il le fallait pour les mettre k la portee du plus grand nombre des lecteurs. Le talent d'ecrire ainsi ressemble & tous egards & celui d'un avocat habile, qui sait coordonner, varier, etendre ses moyens et ses preuves, suivant I'im- portance de sa cause , le caractere et la portee de ses juges. Descartes se fit lire; on peut d'autant moins lui re- fuser cemerite, que, suivant I'expression si exacte de Buffon, le st^le, c'est rhomme. II n'y eut ni hasard ni bonheurdans les succes qu'il obtint; ils sent a lui, etnotre gratitude envers lui n'est que justice.

A propos de Buffon, plapons ici une observation qui confirme ce qui vient d'etre dit. Quel autre auteur a rd- pandu dans ses ecrils autant de pensees morales exprimees avec autant d'eloquence? Cependant, ces pensees seraient demeurees steriles, si on ne les eOt trouvees que dans I'historien de la nature. En lisant cet ouvrage admirable,

31* .

/^8i SCIENCES PHTSIQUES.

c'est d I'histoirc naturclle que I'atlentioa s'attachc ; tout Ic reste lui echappe. Mais on sait ce que les observations dc cc grand homme sur I'education physique dcs enfans ont produit, avec le secours de la plume de llousseau.

La revolution philosophique operee par Descartes est done reelleinent un bienfait que nous tenons de lui scul ; que notrc ;-econnaissance et nos hommages lui restent dan^ ieur eutier! III. Delambre lui-meme ne lui refusera pas ce juste Iribut.

Placons encore ici quelques reflexions sur Descartes, sur les services qu'il rendit a la philosophic, et sur la propa- gation de la verite. Si c'est une digression , rimportance de la matiere I'excusera.

Une doctrine n'est t-'i-aie qu'autant qu'eile forme un tout, un syslome complet et bicn lie : elle ne pcut souffrir au- cune ironcature, aucune discontinuite. Une doctrine fausse est ordinairement fondee sur des principes vrais, mais in- complets , mutiles et sans liaison.

Une doctrine vraie et nouvelle est un ensemble de ve- riles, dont quelques-unes sent nouvelles ou dont I'eachai- nement n'avait pas ete apercu. Une doctrine fausse , nouvelle ou non, ne se compose que de notions vulgaires, combinees par limagination et non par le raisonnement.

L'etablissement et la propagation d'une doctrine vraie et nouvelle exigent le concours du genie qui fait les decou- vertes, du terns qui les marque du sceau de la verite, et du talent d'cxposilion qui les met k la portee des esprits ordinaires. Une doctrine fausse peul naitre et se repandrc sans aucun de ces moycns; il lui suffit que les esprits se presentent a elle sans defiance, suivant Ieur habitude. L'i- magination qui la crea n'est pas aussi cxigeanlc que le ju- gement; elle n'impose pas a la pensce des efforts prolonges etne redoute pas ses distractions: enfin, les passions ncfont

SCIENCES PHYSIQUES. A85

aucune alliance avec la rerite et n'exercent leur pouvoir qu'au profit de I'erreur.

Partoutes ces causes, Iss progres de I'erreur sont faciles etrapides, au lieu que ceuxdelaveritesontnecessairement lents et quelquefois incertaias. Des moralistes chagrins at- Iribuent cet etat des choses a la corruption de notre nature et a la faiblesse de notre raison ; mais ils ne de- vraient y Toir que la consequence necessaire de ce fait dont pcrsonne ne doute: Iifous at-'ons commence par tout ignorer; il a fallii dicouvrir lout ce que nous sapons , et nous ne sommes pas infaillihles. Quels que soient les phe- nomenes de notre intelligence, ils ne nous la montrent en relation qu'avec elle-meme, et, en bonne logique, ils ne peuTent rien nous apprendre sur la place qui nous est as- signee dans I'ordre des etres iatelligens.

Les verites is.olees sont perissables : les doctrines elles- memes seraient sujettes aseperdre ou a s'alterer, si elles n'etaient pas renfermees dans des livres bien faits. C'est i ces livres que nous sommes rcdevables non seulement de la conservation de nos richesses intellecluelles, mais encore des fruits plus abondans et plus mOrs qu'elles ont produits. Mais les esprits capables de no.us faire ces dons precieux sont plus rares que le genie qui penetre el devoile les secrets de ia nature. Descartes fat un de ces esprits; sa re- putation philosophique ne descendra pas du haul rang oii son sieclc I'a placee , aussi long-tems qu'on estimera les hommcs et leurs ouvrages d'aprcs leur utilite, ct I'utilite d'apres le succcs.

Les trois livres suivans mettent sous les yeux des lectcurs les Iravaux d'un grand nombrc de savans, parmi lesquels on trouve les noms celebres d'Hevelius, de Gasscndi, de Roberval, etc., et d'autrcs noms moins connus qu'ils ne meritcnt de I'etre. Cetlc multitude de notices a rcsserrer

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dans un cspace etroit imposait ;\raulouruii travail lierls£e de oes diflicultes rebutantes, qui n'exercent que la patience et dont on triomphe sans plaisir. L'abondance ct Ic dcsordre dcs materiaux dont il fallait nerien pcrdrc, Iciir connexion qui exigeait un classemcnt pcu d'accord avec celui que rcclamuient les dates, dontrautorile nepeutftre meconnue dans une liistoir^; ia ntkessile de sacrifier qiiolquefois Tun ii rantre, d'anticiper sur les tems ou de rctrograder; I'o- bligation non moins impcrieusc de n'adopter qu'un pelit nombre de divisions , et par consequent dc former des groupes et de los assortir convenablemenl: M. Dulambre a surmonte tous ces obstacles, car seslecteurs ne les remar- queront pas.

L'historien acquitte une dette de la posterite envers RIouton, astronomelyonnais, auquel des travauxnombreux et utiles devaient assurer plus de rcnommee. On ne lira pas sar Interet I'histoirede Maria Cunitia, I'Hypatbie po- lonaise. Les ecrits de celte savantc ne donnenl pas, a beaucoup pres, la mesure de ses connaissances; on assure qu'elle possedait une erudition trcs-remarquable. Plus heurcuse que I'illustre Grccque i laquelle on I'a comparee, elle jouit des douceurs d'une vie paisible, de I'amilie et d'un hymen bi«ui as;orti. Scs oeuvres, dont son mari fut I'editeur, ne sont plus a noire usage; nous pourrons les reprendre, si le gout de I'i'strologie nous rcvicnt.

Huygens remplit le quatorzieme livre. Cet Iiomme extraordinaire, egalement cher aux malhematiques, a I'as- tronqmie, a la physique et aux arts, fut pour la France une des conquGtes de Louis XIV. Mais le citoycn hollandais n'oublia pas sa patrie; il la revitdc terns en tems, et finit par lui sacrifier les hommagcs d'une grande nation el les bienfaits du grand roi. Sa reputation brille d'un nouvel «clat, depuis que d'habiles physiciens de notre tems. munis

SCIENCES PHYSIQUES. A87

dc toutesles lessourcesque possedent aujourd'hui I'analysu nialhematique et I'art des experiences , suivent la route que ce grand maitre leur a ouverle, conlinuent et com- pletent sos decouvertes sur la double refraction de la lumiore.

L'horlogerie doit plus a Huygens qu'au plus fameux des horlogers : exemple memorable du pouvoir des sciences sur les progres des arts; avis aux hommcs d'etat.

M. Delambrereunit , dans le livre suivant, les contem- porains d'Huygens et de Cassini. On y remarquera I'infa- tigahle et universel Lahire, en qui on trouvait tout une academie, dit Fontenelle; Picard, qui conimenca la pre- miere des grandes entrepriscs modernes pour la mesure de la terre; Roemer , qui decouvrit le mouvement pro- gressif de la lumiere et mesura sa vitessc; Auzout, qui perfectionna le micrometre par un moyen dont Tinvention fut aussi reclamee par Gascoyne , etc.

En lisant le dernier livre consacre a Cassini , on aura besoin de se rappcler que I'auteur n'ecrit pas I'histoire des astronomes, mais celle de I'astronomie, et que, par con- sequent , il suit quelquefois d'autres masimes que cclles des biographes. II ne perd pas son objct de vue, et lui subordonne tons les details de sa vaste entreprise; il s'est charge de faire I'inventairedenos richessesastronomiques; il note chaque bienfait que la science a repu, apprecie sa valeur reelle , et il y attache le nom du bienfaiteur. C'est ainsi qu'il soumeta une sorte de calcul les droits de chacun k la gratitude des amis de la science. Cette methode ne sera pas desapprouvee, meme de ceux k qui elle neplaira point. II faut cependant conTcnir qu'elle traite severe- ment les autcurs qui valurent plus que leurs ouvrages : tel fut Cassini. Ses travaux astronomiques, d'aprcs lesquels M. Delambre ado le jugcr, n'ontpu conserver I'empreinte

A88 SCIENCES PHYSIQUES.

des connaissances elendues ct varices qu'il unissait au sa- voir de rastronomc, ct dont racademie des sciences pro- fita souvent. Favorise en tout par la nature, son nierite , corame savant, clait rchausse par les qualites les plus estimablcs de I'anie, ct mCme par cclles du corps. C'est assez pour excuscr Fenlhousiasme de ses contcmporains, s'ils ont un peu trop loue I'un des ornemens de leur siecle qui fournit tout i I'eloge. On se plait k voir Louis XIV negocier en Italic I'acquisition d'un astronome , comme s'il cQt ete question d'une province ou d'un traite de la plus haute importance. La France, qui ne sut pas con- server Huygens, fut plus heureuse avec Cassini : elle se I'appropria, et s'enrichit d'une faniille touteastronomique. Ce phenomene, que I'histoire des sciences n'avait pas presente jusqu'alors, ne se reproduira peut-etre jamais.

Le nouvelouvrage de M. Delanibre fait desircr plus vive- ment encore la publication du volume qu'il nous promet ; on s'attend bien i ne pas y trouver tout le tableau du dix- huitieme siecle, mais on est assure d'avance que cette epoque si admirable et si decriee sera peinte sous I'un des points de vue les plus vastcs et les plus propres a faire deviner ce que Tosil n'apercoit pas. Des Iccteurs d'un tige mOr, des vieillards mcme , y reconnaitront avocun plaisir melancolique les maitresqui leur ouvrirent la carriere des sciences J les regrets de quelques pertes recenles seront adoucis par la vue de ce qui nous reste, de ce que promet une jeunesse instruite par des methodes dont ses progres attestent I'excellence, et qu'elle saura perfectionner en- core. C'est a cette generation qu'il est reserve de venger dignemenl les grands hommes tant calomnicsaujourd'hui. Elle leur donnera des successeurs qui poursuivront leurs nobles travaux et s'illustrcront comme eux, iandis que

les calomniateurs et les calomnics iront s'aneanlir dans I'oubli. Febry,

SCIENCES MORALES ET POLITIQUES.

De l'espiiit des institctions POLITIQUES; par J. A. F. Massabiau , sous ~ bibliolk'xaira de Sainl&-Ge7ie- vtdve (i).

J.-J.-Rousseau regrettait qu'il n'existat pas en France un ouYiage qui renferraitles principes du droit politique, et il regardalt Montesquieu comme le soul homme du dix- huitieme siccle capable d'executer cette difficile entreprise. M. Massabiau vient de la tenter, en piibliant I' Esprit des instihiiions poUtiques. Mais, bien loin d'avoir pris Mon- tesquieu pour guide, il seaible n'ecrire que pour le com- battre. M. Massabiau s'est choisi un terrible adversaire, et il faut avouer qu'il le traite souvent avec un peu de lege- rele. Placer ce grand horame au nombre desecriTains su- pcrflciels, dire qu'on n'apercoit qu'un chaos Oii d'autres croient voir de la profondeur, que I'esprit des lois, sem- blable au Roland de rArioste, est un livre oii le charme des details empeche de senlir le manque total d'ensemble, que le passage qui contient Tcloge de I'empereur Julien est ecrit sur un ton digne de Tartujfe ^ etc., etc. ; Toil4 ce que bien des gens regarderont comme autant d'irreve- rences de M. Massabiau envers Montesquieu. Voltaire a combaltu V Esprit des Zois, maisavecplusdemenagement que M. Massabiau.

Nous ne voulons pas nous etablir juges de cette lutte ; et nous n'ayons pas la pretention de porter en quelques lignes , etd'apresunepremiere lecture, unjugcment approfondisur un ouvrage qui a dQ coGter a son auleur de longues me-

(i) Paris, iSai. Maradan , rue des Marais, n" i6, faubourg' Saint- Germain, 2 vol. in S". Prix, 12 fr. ; c\ franc de port, i5 fr.

I

A90 SCIENCES MORALES

dilations. Nous nous bornerons ii en faire connaitrole plan et a en dOnner ane idee.

M. Massabiau a voulu, ainsi qu'il I'annonce lui-mGnie, rechcrcber les moycns de combiner enseniblc les forces et les passions humaines dans la societe, de manicrc qu'il en resultc une puissance qui protege la liberte dc se? mem- bres, et qui ne puissc point I'opprimer.

Le livrc I" est intitule : les cli!Jtnit ions; il estenelTet des- tine d definir les idees generales qui doivent entrer dans les raisonnemens de I'auteur, telles que la sociabilite , la civilisation, la liberte, le despotisme , les constitu- tions, etc. Suivant M. Massabiau, la constitution d'un peuple est I'ouvrage de la nature et des choses; le legisla- teur ne la cree pas; il la voit et s'y conforme; de 14, le gouvernement ou I'institution politique. Ce n'est pas la forme de cette institution qui la rend despotique; on peut ctre esclave par les lois et les institutions, aussi bien que par le caprice d'an homme.

Apres ces notions preliminaires , I'auteur remonte a.l'o- rigine des societes politiques. II ne la voit point dans un contrat forme par la yolonte libra de tons les membres du corps social, mais dans la force qui les contraint i subir les consequences des diverses positions oii ils se trouvent, et qui produit ainsi la diversite des formes du gouvernement. 11 trouve partoutune souverainete de fait etablie par la na- ture des choses ; en quelque ondroit qu'elle reside, c'est Ic point d'appui necessaire de la puissance sociale : il faut la lalsser oil elle se trouve; on ne saurait la deplacer; et tout ce qu'on peul faire est de I'entourer d'institutions sages qui, la dirigeant vers le bien commun, la rendent souverainete de droit ou legitime.

Recherchant ensuite quel est le principe des gouverne- mens, il etablit qu'il est le meme pour tous. II peul y avoir

ET POLITIQUES. A91

plus d'honnenr dansl'un, plus <le vertu dans I'autre; mais c'est li I'esprit du gouverncraenl, qui varie necessairement ; ce n'en est pas le principe, qui est uniforme. ct que I'au- teur place dans la crainte des lois.

De Id, il passe a I'examen des causes particulieres qui peuvent influer sur la liberie. Le climat et le terrain ne lui paraissent exercer qu'une influence secondaire. Toutefois, il troHve que les climats temperes oil la sensibilite est mo- deree, et les terrains fertiles qui, invilant rhomme a la culture, le disposent i plier son independancc au jougdes bis, sont les plus liivorables k la liberie.

Ce n'est pas non plus telle ou telle reUgion ; ce ne sont pas meme les institutions politiques qui, suivant lui , pro- duisent la liberte. Seulement, les institutions sont neces- saires pour la defendre. Mais quelles seront celles qui at- teindront mieux ce but ? Ici , I'auteur ouvre une theorie nouvelle. II cherche i prouver que I'unite du pouvoir sou- verain est indispensable pour le bien de la societe. II ne volt que des inconveniens dans la division de la souverai- nete, dont il examine les consequences dans les differens gouverneraens. Le pouvoir doit etre un ct concentre dans le monarque, et il ne doity avoir de division que dans son exercice.

L'auteur arrive enfin a ce quMl regarde comme la veri- table source de la liberie; c'est, la civilisation, que tant d'autres ont regardee commc la source de I'esclavage. Elle dctruit la republique et perfectionne la monarchic , qui lui parait le meilleur gouvernement; elle place le monarque dans une situation telle, que sa volonle est naturellement droite ; elle porle au plus baut degre la puissance de I'opi- nion publique, etelleaugniente ainsi la force morale des na- iions, enmeraetems/qu'elle ote a chaqueindividucette vio- lence et cette barbaric incompatible avec laliberte detous.

A92 SCIENCES MORALES

Cette monarchic civilisee, premier fondemcnt de la li- berie , doit etrc entouree d'institutions prises dans sa na- ture. Telles sont, suivant I'auteur, un conseiL national elu par le peuple, non pas pour partager le pouvoir souve- rain , mais pour conseiller le monarque et I'eclairer par une discussion libra; une cour suprhne , depositaire des lois, chargee de leur enrcgistrement et autorisee^ refuser cette formalite, toules Ics fois que la loi n'auralt pas ete soutnise a la discussion du conseil national.

On voit qu'il y a dans tout cela un xe-lange des anciens parlemens, du tribunal, de la constitution de I'an 8, etdu senat conservateuT de I'empire. Du rsste, M. Massabiau regarde la noblesse purement hereditaire comme repous- see par I'opinion et la force des clioses; il voudrait une noblesse , moitie personnelle, moitie bereditaire, c'est-a- dire,que les enfansd'un noble fussent nobles eux-memes, quand ils auraient rendu des services i I'etat.

Dans le livre dernier, M. Massabiau traite de la legiti- mite , consideree comme le droit exclusif d'ur.e famille au trone. II la regarde comme inseparable dela souverainete. II recherche comment e!le peut scprescrire, et quels moyens la dynastie legitime peut employer pour remonter sur le trone, tant que la prescription n'estpas acquise. II exclut de ces moyens la guerre civile et la guerre etrangere. On voit qu'il n'a pas recule devant les difficultes et qu'il n'a pa§ craint d'aborder franchement les questions les plus deli- cates ; celles dont oh peut dire, quand on oseles soumettre a la discussion : Incedo per ignes siippositos cinere doloso,

DupiN, at'ocat.

Observation. C'est sans doule le desir d'etre href quia engage le savant auteur dc cot article a sc borner a une simple exposition del' r''/'(T/;/e imaginec par M. Massabiau,

ET POLITIQUES. A9J

et qui I'a empeche de discuterlesprincipes assez singuliers, f contenus dans ce livre. Peut-etre, en rendant justice aux bonnes intentions dont M. Massabiau sembla anime, pen- sera-t-on que les institutions dont il doune I'idee seraient loin d'atteindre le but qu'il se propose; que, par exeraple , ce corps, qui n'est ni niandataire , ni representant du peuple, et qui est destins uniqaement adonner desconselh ausouverain, est revStuici d'une influence tout-a-fait ima- ginaire; car,ainsi que le dit M. Massabiau lui-meme : « Un conseil ne produit d'autre obligation, pour qui le recoit, que celle de I'exaniiner de bonne foi, etde s'y conformer , s'il lui parait sage. » Or, on sait par experience que trop souvent les hounmes revetus de la puissance comptent cette obligation pour pen de chose ;mais M. Massabiau est done d'une grandeconfiancedanslepouvoir; cetteconflance peul avoir sa noblesse, quand onne livre que sesinteretsparticu- liers ; mais il faut peut-Gtre y regardcr de plus pres, quand il s'agit de I'interetdes peuplcs et de ceux de la liberte. Nous pensons que M. Massabiau les a presque entierement sa- crifies. C'est h son insu sans doute, et il s'est fait illusion i lui-meme; mais cette illusion est grande; car les insti- tutions qu'il nous offre, et qu'il croit si parfaitement con- formes i I'esprit du siecle , nous rameneraient a peu pres , sinon pour les mots, du moins pour les choses, au regime politique que 1789 a detruit. Note d. R.

ww^jMvwivwsAnni

Des Institdts d'Hofwyl , consid6res plus particu-

Iwretnent sous les rapports qui doivent occuper la

pensee des homines d'etat ; par le cointe L. de V. ( i ) .

Les ctablisscmens que M. de Fellenberg a formes a

U) Geneve, i8ai. i vol. ia-S" de 209 pag. J. J. Paschoud , li- braire. Paris, mfimc maison de commerce, rue de Seine, n" 48- Prix , 3 fr, , et 3 fr, G5 cent, par la posle.

A9A SCIENCIiS MORALES

Hofwyl, a deux lieucs au nord do Berne, ont ete, Aks leur oi'igine, depuis pris de vingt ans, I'objet de I'atten- lion de lous les hommes qui s'inlercsseni anx progresdes deux arts eminemmciil nouniciers du corps ct dc Tame, de Vagricultiire et de Yhhualion. La UKmiere dont le fondaleur de ces insliluts a essaye de faire serTir les tra- Taux de I'un, a seconder les soins et it assurer les succes de I'aulre, a surtout frappe les esprils auxquels n'a pas echappe loute I'etendue des laciines et des dcfauts de nos anciens systemes d'instruction. Tendance presque enliere- ment intellectuelle, sans influence satisfaisante sur la for- mation du caraclere et des habitudes Terlueuses; ensei- gnement du peuple i la fois incomplet et surabondant , qui n'etaitpropre ni i lui faciliter raccomplissement des devoirs de sa condition, ni a lui faire trouver contenlement d'es- prit et bonheur dans des travaux , ou bumbles , ou penibles ; preparation des classes superieures de la sociele au role que leur position et le bien de Telat leur destinent, telle- ment insuflisante etsimal dirigee, qu'au lieu de se main- tenir en possession de cette preeminence de lumieres, d'babilete et d'energie qui seule pent lcurconserver,parmi leurs compatriotes, leur preponderance dans I'interct de I'ordre et de la civilisation, elles se virent envahies et supplantees, sans trouver en ellcs-mCmes les moyens de resistance et d'ascendant que donnent les connaissances et la force de caraclere ; ces vices , inherens i I'ensemble de nos anciennes institutions scolasliques, avaient ete mis en grande et desastreuse evidence par les evenemens dont nous avons ete victiuies ou temoins.

M. de Fellenberg, appele, par sa naissance et par son merite personnel, a parcourir, dans I'ancien canton de Berne, toute la serie des charges et des dignites de I'etat, est du petit nombre des hommes de son rang, qui , au lieu

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d'attendre de secours etrangers, de remploi de la force ou de la ruse^ dela lassitude, et souventderastucieuse com- binaison de quelques obscures intrigues^ le retour de leur existence et de ses jouissances materielles ou de vanite, furent excites, par le spectacle des folies, de la deraisoa et des crimes de leurs conlemporalns , a reflechir plus mOrement sur les causes de raffaiblissement des liens sociaux et sur les reformes a operer dans un regime civil et pedagoglque qui ayait porte de si tristes fruits. Re- montant aux sources des desordres qui ont detruit I'effet des intentions les plus pures et des plus gencreux sacri- fices, comme des plans en apparence les plus sages, M. de Fellenberg reconnut , aTec tous les bons esprits qui ont medite sur la nature de I'homme et sur les vcritables nioyens de satisfaire a ses besoins, que c'etait yainement que nous demanderions a de pures modifications de formes politiques le remede des maux inveleres qu'un meilleur systeme de developpement et de direction de nos facultes morales pouvait seul guerir. Apres avoir, a I'epoque de la revolution de la Suisse, en 1738, fait d'infructueux essais pour etre utile a une patrie qui, gemissant sous le poids de I'oppression etrangere, avait encore k deploi'er le dis- sentiment de ses meilleurs citoyens sur le choix des moyens de salut; M. de Fellenberg se vouai la vie privee, et crutpouYoir, mieux que par son activile politique, payer sa dette k son pays natal, en formantle double plan de fonder une meilleure education- du pauvre, appuyee sur les procedes d'une agriculture perfectionnee, et de contribuer au repos comme a I'amelioration du corps so- cial, enelevant des jeunes gens des classes superieures a la hauteur de leur vocation, par le developpement le plus complet des facultes de leur coeur, de leur caractfcre et de leur intelligence.

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Lcs etablissemens deslincsa rcaliscr ces vuesgencreuses ont tie decrits ct juges dans un grand nombre d'ouvragcs, la plflpartaussi recommandables par leur rncrite que par le noin de leurs auleurs. La Fermemodele, la Ferine exph-l- mentale^ lesAieliers de fabrication et de perfectionnement dev ntecaiiiqiies agricoles ont trouve , dans M. Charles Pictet dc Rochemont ( un des rcdacteursdes Bihliotheqiies britaiinique et unii'ei-seile) , un approbateur eclaire; dans M. Thaer, auteur des Aiinales d* agriculture , un juge a layeritetres-compctent, maispeu equitable, etprononcant, sur des rapports incomplets, avec des preventions dcfavo- rables; dans MM. HofmannelSchefFold, Kuenzliet Yetsch en\oyes a Hofwil par leurs gouvernemens; dans MM. Escher de Berg , Ic baron d'Imhof et Schwerz qui ont public les rcsultats d'obscrvations faitcs avec beaucoup de soin , des appreciateurs scrupuleux et profondement verses dans toules les parties de i'agronomie. L'Ecole d' Industrie pour les jeunes gur^ons pauvies a ete I'objet de deux rapports publics chez Paschoud. L'un estadresse ula socicte d'agri- culturc du canton de Yaud, par M. le professeur Chavannes; I'autre, ofifrant un tableau complet de I'ccole des pauvres, a etc rcdigc (aunoui d'une commission etablic pour I'ins- pcclion de eel institut) par M. Rengger, un des hommes d'etat les plus respectables et des ecrivains les plus dis- XinguesdeldSuisse.L^J^cvlepourlesclassessupthieujesdela societtj Y Institut special d' agriculture et VEcole normale ont moins frequemment occupe la plume des voyageurs et des journalistes. Les meilleurs renseignemens qui aicnt ete donnes sur leur but , leur organisation et leur exten- sion progressive, doivcntetrc puises dans les cahiers, ac- compagnes dc planches, que M. dc Fellcnbcrg a mis au jour lui-menie , sous le titre de Feuilks d'economie ru- rale d'Hofwyh et qui ont paru dans les annecs 1808, 1809,

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1810, iSi3 et 1817. Un coup d'oeil general a ete jetc sur rensemble des etablissemens d'Hofvvyl par M. le comte Capo d'Istria (1), par M. JiiUien de Paris (2), et par M. Simond, le spirituel auteur du Voyage d'un FranQais en Angleterre. M. Simond a juge Hofwyl avec la sagacite, lecalme, I'iinpartialite qui ledistinguent. Ses observations, tres-favorab^es u M. de Fellenberg, ont ete inserees dans la Revue d'Edimhourg An mois de novembre 1820.

Toutefois, aucun de ces ecrits n'offrait, soit un tableau complet desinstituts d'Hofwyl, et des resultats de leur in- fluence reciproque, soit I'expose de leur etat actuel et les pensees que leur utilite presente, ainsi que leur avenir probable, doivent faire naitre dans I'esprit de Thomme d'etat et de I'ami de I'humanite. Cette lacune vient d'etre remplie par I'auteur de I'ouvrage que nous sommes heu- reux de pouvoir indiquer aux personnes qui desireraient connaitre les etablissemens de M. de Fellenberg, et ap- precier I'influence qu'ilsexercent sur leurs eleves, et qu'ils exerceront infailliblement partout oCl Ton formerades ins-

(1) Le rapport presente par ce ministre i I'empereur Alexandre, ainsi que tous les ouvrages relatifs i Hofwyl, cites ici , se trouvent chez J. J. Paschoud , a Genfeve, et i Paris , rue de Seine , 48.

(a) Precis sur les instituls d'educadon et d agriculture de M. de Fellenberg. Paris, 1817. In-8°. Empreint du mfime amour du bien et des vues philantropiques qui ont inspire I'anteur des intd-ressan* et utiles ouvrages sur la Methode d' education de Pestalozzi (Milan , 1812. 2 vol. in-8*) , sur un Plan d'Mucation pratique (Paris, 1808* In-4"), suiVJEmploi du terns (en deus parties ; une theorique dont la 2' edition a paru en 1810, I'autre pratique, sous les litres de t Memorial horaire ou Uiometre , el de : Agenda general, 1}' edition i8i5 ), et sur la Philoaophie des sciences. Ce Precis sur Hofwyl, txtrait da journal d'educalion (novembre, 1816. Chez L. Colas}, fait particulieremenl bien connaitre I'esprit qui a preside A la crea- tion des instituts d'llof^rvl.

ToMI XI. o'l

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titulions sill' leur moilelc, en Iciianl comptc desressources ct des localitus.

JM. le comte Louis de Villevleille avail deji'i, ii y a plusieurs annces, publie des observations surles precedes agronomiques suivis parM. de Fellenberg ; ellessont con- signees dans une lettre adressee aux redacteurs de la Bi~ bliotheque hritannique , sitr le parti que le midi de la France peut tirer des moyens et des methodes agricoles d^Hofwyl. Comme il a sejourne i differentes epoques i Hofwyl , et prolonge ses sejours tout le terns necessaire pour faire une etude approfondie des etablissemens de M. de Fellenberg , aucun Francais n'etait mieux en elat que M. de Yillevieille d'exposer k ses compatriotes ce que leur fondaleur a voulu et ce qu'il a fait. En s'acquittant de cettc lache avec autant de talent que de fidelite, il a cu egard a deux differentes classes de lecteurs, qui se ver- ront satisfaits egalement. Ceux qui ne veulent qu'avoir une idee generale, mais exacte et nette, d'institutions dont on parle tant sans les bien connaitre, trouveront, dans la premiere partie de I'ouvrage (p. 5-70), qui en est comme le texte, un tableau rapide et anime des neuf dif- ferens instituts que M. de Fellenberg a crees successive- ment, ainsi que ['expose succinct des vues qui ont pre- side i\ leur etablissement, et d'apres lesquelles ils ont ete eoordonnes de maniere i se preter, tout en conservant chacun son independancc, unmutuel et bienfaisant appui. Des notes, placees k la suite de ce texte ( p. 71-209), of- frent de plus amples developpemens aux personnes qui desireront avoir une connaissance plus detaillee des con- ceptions et des etablissemens du proprietaire d'HofwyL

L'ouvrage de M. le comte de Yillevieille etant deji lui- meme un resume concis de ses observations , un expose succinct bien que lumincux et plein d'interetdes reflexions

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qu'Hofwyl , dans son etat actuel , et surtoiit dans son avenir et dans les institutions analogues dont il provo- quera la creation , suggere a un ami du bien , penctre dfc Timportance de cet ensemble d'instituls pour I'ameliora- tion pbysique et morale de toutes les classes de la societe, nous ne saurions en faire une analyse complete , sans en copier une grande partie et sans depasserles limites que le plan de ce recueil ne nous permet pas de franchir. Nous devons nous borner a appeler I'attention de nos lecteurs sur quelques-unes des parlies saillantes du tableau que M. de Villevieille offre aux hommes qui s'interessent aux progris des deux arts incontestablement les plus noble? et les plus utiles, puisque de leurs principes et de leur etat de perfection dependent, en definitive, egalementle bonheur indiriduel et la prosperite publique.

La ferme-modele est I'ensemble de toutes les pro- prietes de M. de Fellenberg a Hofwyl. II se propose d'y montrer I'exemple d'une agriculture portee au plus haut point de perfection dont soit susceptible I'exploitation du terrain qui est a sa disposition. Le cours d'assolement de quatre annees , introduit a Hofwyl, produitteaucoup plus decereales qu'aucun autre assolement usite en Suisse. Au moyen de son semoir , M. de Fellenberg economise pres de la moitiesur la quantite ordinaire de la semence. M. de Villevieille pense que, si I'agriculture de M. de Fellenberg etait adoptee , partout oii les localiles permettraient cette imitation, la Suisse prodnirait, tant en grains qu'en pommes de terre, qui entrent pour un quart dans la culture d'Hof- wyl, tout ce dont elle a besoin pour sa subsistance, et se verraitdelivree de la dependance ou elle se trouve aujour- d'hui a cet egard des pays voisins.

Ferme expirimentale. Des portions du sol , dissemi- nees el qui forment a pen prts la vinglieme partie des

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proprietes fonciores dc IVl. (Je Fellcnbcrg soumise? aur travaux aratoires, sont consacrees a un coiirs systema- tique d'experiences agricoles , dcstinees i eclaircir succes- sivemcnt toutes les questions qui divisent Ics agriculteurs eclaircs. Chaquc annec, on rend i la terre plus qu'on ne lui enleve ; on augmente la proportion de Vhumiis dans les parties integrantes du terroir, et Ton ajoute i la pro- fondeur du sol ameubli. Les grains de M. de Fellenbcrg augmenlent chaque annee de qualite, connparativement i ceux de ses voisins; la proportion entre la semence et les grains recoltes est chaque annee plus favorable, et , chaque annee aussi , la terre devient plus meuble , par I'effet combine des amendemcns et des travau.i aratoires. Quoique ces fails prouvent suffisamment que M. de Fel- lenberg n'est point dupe d'idees speculatives , on ne pourra juger des resultats de ses procedes et de I'emploi de ses mecaniques perfectionnees , que lorsque son sys- leme d'agriculture sera execute par des ouvriers formes expres et eleves avec intention par I'autcur du systeme lui-meme ; ce qui arrivera a I'epoque oii les eleves de I'ecole d'industrie pour les pauvres auront remplace les ouvriers auxquels M. de Fellenberg est encore oblige d'a- voir recours , et qui sont trop accoutumes a I'ancienne routine , pour qu'on puisse esperer de leur faire adopter d'autres procedes.

Nous ne pouvons qu'indiquer les sections du texte et les notes qui concernent deux autres etablisscmensd'Hofwyl, designes sous les titres : A^ atelier de fabrication des ins- trumens d'agriculture ^ et d'' atelier de perfectionnement des mecajiiques agricoles. En combattant la doctrine de Malthus , sur la contrainte morale, par laquelle une grande partie de la population , dans les etats civilises , sc yerrait condamuec au celibat , commc scul moyen de pre-

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venir Ics effcls dcsastrcux qui, selon M. Malthus, doivcnt Otre le resultal inevitable de !a disproportion d'accroisse- ment, etablie par les lois de la nature entre la population, croissant en proportion geometrique, et les produits dc Tagriculture , augmentant tout au plus en proportion arithmetique, M. de Villevieille s'appuie de I'opinion de M. de Fellenberg, qui propose a sa patrie, toarmentce d'un exces de population, de faire, en nationalisant ses methodcs, correspondre les progres de I'agriculture avec ceux de la population. Pour donner u celte opinion plus de poids, M. de Villevieille atteste que, dans rcspacc de vingt- deux annees , M. de Fellenberg a quadruple le re- venu net du domaine d'Hofwyl, ct en a porte le produit brut au sextuple.

L'esprit du philantrope , eftraye des calculs dc M. Mal- thus, aime sans doule a se reposer sur cette perspective d'augmentation des progres agricoles, qui marcherait de tVont avec les progres de la population et les devancerait meme, sile systemed'agriculture deM. deFellenbergpou- vait etendrc ses conquetes sur les domaines de I'ignorance et de laparesse. Toutefois, les plus douces jouissances atten- dent I'ami de ses semblables, a la lecture des pages consa- crees au cinquieme des neuf instituls d'Hofwyl,. a Yecole d' Industrie pour les jeunes gargons paupres. Ici, point de promesses, point d'esperances subordonnees i Taction in- certaine de la raison et a I'empire des prejuges , d'autant plus opiniatres qu'ils sont plus opposes aux vrais interels, des cultivateurs et de la societe. Dans Tinstitut d'educa- tion des pauvres , i Hofwyl, on trouve realise le projct de faire de jeunes garcons pauvres, admis a cinq ans dans I'e- tablissement, des agriculleurs cclaires et vertueux qui, a vinglans, soicnt, paries connaissanccs ct les habitudes acqiiisc? , au niveau dc leur besoin, ct uii modele b. pro-

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poser aux hoinmes de leur condition, aprcs avoir, au moycn des produits dc leur travail pendant les cinq der- nieres annees de leur sojour i I'ecole, rembourse tous Ics frais de leur education. L'instruction y est eminemment -eligieuse, et enibrasse tousles objets, tous les travaux Ae I'esprit et des mains, qui peuvenl eclairer les eleves sur leur position dans la societe, la leur faire cherir, leur inspirer I'amour de leurs devoirs et leur en facilitcr I'ac- complissement raisonne, joyeux et zele. Elle est de tous les momcns , au milieu des occupations exterieures; on saisit toules les occasions de les former a la justesse du coup d'ceil, a I'adressc manuelle, a I'exercice libre et rationjiel de leur intelligence ; on est bien plus soigneux encore de n'en laisser echapper aucune, soit dc se servir du spectacle de la. nature pour retracer i leur pensce la grandeur et la bonte de Dieu , soit de leur donner a pro- pos, sur les phenomenes qui s'offrent a leur observation, des notions simples, exactes^, propres i les premunir contre les erreurs populaires. Au nombre de vingt-cinq a Irente, ils n'ont qu'un seul instituteur, I'excellent et dans la plus humble fortune, sans le savoir dej;\ celebrc, Wehrli, qui est bien plus leur frere atne, leur guide, leur compagnonde travail, de privations etdejouissances, que leur chef et leur maitre. Tandis que les mains des en- fans et les siennes s'exercent k la maison ou dans les champs, il fait rouler I'entretien sur tous les objets qui peuvent occuper leurs pensees utilement, pour I'acquisi- tion des connaissances indispensables a leur vocation et pour leur amelioration morale. Faire servir a I'education de I'enfant du paysan cctte meme agriculture , dent les operations absorbent tout son terns des I'age de dix ans, ou meme plus tot, et scmblcnt etre incompatibles avec une instruction favorable au developpement suflisant de ses

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facultes morales , cette idee fondaoMntale de M. de Fel- lenberg ctait, pour ainsi dire, sanctionnee d'avaiice par rhistoire comparative des peuples livres aux occupations de la chasse ct de la peche, aux soins de la vie pastorale, aux entreprises du commerce ou de la guerre ct dcs peu- ples agricoles, incontestablement superieurs aux autres, par des moeurs i la fois douces ct fortes , une sante meil- leure, une energic plus soutenue, une activite mieux re- glee, dcs habitudes d'ordre, de sobriele, de temperance et de justice. Le travail est le grand moralisateur de I'homme; raais le travail des champs a des avantages qui lui sont particuliers, et que M. Ch. Pictet a singuliere- mentbien caracterises dans ses Obseri^'ations sur les moyens que r agriculture fournit a I' education (i). Ces reflexions montrent avec une telle evidence combien I'idee fonda- mentale sur laquelle repose I'ecole des pauvres a Hofwyl, est une idee belle et heureuse qu'il nous parait utile d'en offrir ici le resume , et comme moyen de mieux apprecier les vues de M. de Fellenberg, et comme motif d'imitation pour les proprietaires qui, en combinant les travaux agri- coles avec renseignement sur le modele d'Hofwyl, se- raient, par de bien 16gers sacrifices, h portee d'ouvrir, dans leurs domaines, k la population indigcnte, une source infaillible de contentement et de vertus , ainsi que de s'as- surer poureux-meraes unepepiniered'ouvriers intelligens, actifs et honnetes.

L'exercice continuel, en plein air et dfesl'enfance, rend I'homme plus robuste, plus insensible aux variations de la temperature. Le succ^s des travaux du laboureur depend

(i) Voyez le Sa' vol. de la Bihliolh. Brilannique , division ; liUd- I'iiUre.

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dc la i'avcui' du ciel ; il doit I'imploicr; il vil d'cspcraiicc ; lorsqu'elle est trompee, il se resigne. S'il est laborieux, regulier, temperant, il prospere : son iiiteret lui reconi- i^iandc des verlus qui.garautissent son bien-etre. Les phc- uonfiunes qui se passenl sous ses yeux, at qui influent si puissamment sur Ic resultat de ses soins; les qualites, les "tlemens, la situation du terrain qui refoit ses sueurs et sa semence , sont I'objet necessaire d'observations et dc combinaisons qui exercent son intelligence et I'accoutu- inent a reflechir pour tacher de prevoir et de prevenir, dc profiter des chances propices, ou d'ob\ier a des accidens possibles.

Les diflicultes qui font acheter le succfes, les mccomptes souvent repetes, sont autant de lecons pour les enfans. La •vie en estremplie, et I'apprentissage s'en fait avec moins d'amertunie , dans un art qui s'exerce sous rinfluence im- i^iediate de la nature. L'habitude de la resignation , de la patience, du courage, doit se former dans une education oii Tenfanl est sans cesse sous la main de la Providence, et comme en regard avec elle , oii les merveilles de la creation se renouvellent incessamment sous ses yeux, oOi il agit, pour ainsi dire, sans intermediaire entre Dieu et lui, et oii I'esperance renait dans son coeur presque aussitot qu'elle est detruite.

JjH propriete acquise parle travail inspire le respect des droits d'aulrui; elle double I'aclivite; ellc donne un but a I'economie et du charme a la prevoyance. Ce sentiment de la propriete entre aussi comme moyen dans I'educalion des indigens d'Hofwyl. Chacun d'eux possede un petit jardin , un arbre et ses fruits, les produits de son glanage, les graines qu'il a recueillies; chacun a ses instrumens a part, ses outils a soigner; cnfln, une partie des salaircs

ET POLITIQUES. 505

qu'ils sont capables de gagner, est appliqucc ;\ un londs qu'ils trouvcroiit un jour, lorsque I'emploi leur en sera utile.

Le cultivateur a le privilege d'obtenir des siicces qui ne coutent rien aux autres; ses voeux font les voeux de tous ses emules; leurs desirs, leurs csperances, ne se croisent en rien. Loin de donner lieu a cette contagion des senti- mens haineux qui empoisonnent le caractere ct qui trou- blentla vie , I'agriculture est, pour les enfans des pauvres, une ecole de sociabilite, de dispositions douces et secou- rables dans leurs relations de tous les momens. La disci- pline exacte a laquelle ils sont soumis i Hofwyl, cette vie encadree et comme divisee en compartimens, oii cbaque devoir, chaque occupation a sa place, i'ormeront des hommes pour lesquels I'ordre sera un besoin.

Tout ce que leur conduite en bien ou en mal , tout ce que I'effet des conversations du chef de I'ecole avec ses. eleves offre a son observation d'important a reinarquer, tout ce qui peut devenir motif de changetnent ou de per- severance dans le plan d'education adopte par le fondateur, et suivi avec tant de devouement par son digne collabora- leur, est consigne avec candeur dans un journal que ce dernier tient tres-regulierement. Rien a la fois de plus touchant et de plus instructif que les extraits du journal de Wehrli , que M. Rengger a inseres dans son ecrit sur I'ccole des pauvres a Hofwyl, ecrit redige au nom d'une commission nommee pour prendre une connaissance ap- profondie de cet admirable institut, et dont les membres ont vecu plusieurs jours au milieu des enfans, du matin au soir, pour observer les exercices de religion , les travaux des champs , les occupations sedentaires , les repas , les jeux des elevcs , enfin leur instruction , qui cmbrasse la pratique de I'agriculture ,. la lecture, rucriturc, I'arithmu-

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tiquc J qut'Iques notions dc grammaire el de gconielric (celle-ci, principaleinent, comuie servant de base a I'ar- pentage , riiistoire naturcUe dans scs rapports avcc I'agri- cullure) , un abregede rhisloire et de la geographie dc la Suisse et la tnusique elcmcntaire.

Cettc dernicre partie de renseignement n'esl nullement envisagee a Hofwyl comme une espece de recreation ou de hors-d'oeuvre, mais comme clement essentiel de I'ins- Iruction, ou plutot de Veducation que M. dc FeUenberg distingue soigneusement de V instruction. L'education est rensemble des mojens propres ii operer ledeveloppement des faculles de I'eleve, el a leur imprimer une direction conforme i sa noble destinee, et ne comprend I'instruc- tion au nombre de ses moyens, qu'en qualile d'un instru- ment, dont Taction doit etre coordonnee i celle des autrcs ressorls, et subordonnee a la grande finderanoblissement moral de I'homme. L'experience d'Hofwyl a prouve que le chant est, pour tous les enfans, un moyen puissant de civilisation el de sociabilite, un moyen de les accoulumer a une regie , a une cooperation calme el harmonique , un moyen de moderer les elans desordonnes, d'epurer les senlimens el d'elever I'ame a de hautes pensees (i). II sert en particulier efficacement i\ adoucir les affections , i re- jouirplus dignement le coeur, aassouplir, pour ainsidire, le naturel grossier d'enfans tires en partie de la classe des mendians, et qui ont apporle dans I'ecole d'induslrie des formes rudes et abjectes , souvent meme le germe d'ha- bitudes vicieuses. La pluparl d'entrc eux savent par coeur une cenlaine d'hymnes, de cantiques, de chansons de composition tr^s-variee, quelques-unespleines d'une gaile

(i) Voyez , sur la destination et Vinjluence morale de la musiquc ; Esprit de la mcthode de PeHalvzzi (Milan , 1813), Torn. 11 , p. 263 et 5uiv.

KT POLIIIQUES. 50r

a la fois naive et spirituelle , loutes crunc Icudaiice par- failement morale.

Lalitteratureallemandeestparticulierementricheenmor- ceaux de poesie aussi elevee qu'adaptee a I'intelligence la plus commune. Les hymnes de Gellert, de Lavaler, de Rrummacher, etc., remplacent, a Hofwyl, les chansons insignifiantes, frivoles, immorales, dont les champs re- tentissent ailleurs; et, partout oii les vrais amis du peuple voudront s'occuper de ce grand moyen de son perfection- nement moral, avec un soin proportionne i sa haute im- portance, des chants propres a nourrir I'ame d'une joic pure et de hons sentimens , peuvent remplacer ces chan- sons sales et degoQtantes qui font d'uu des plus puissans organes de la sagesse et de I'enthousiasme divin , un des instrumens les plus funesles, les plus actifs de degradation et d'abrutissement des classes inferieures.

Comment, sans une coupablclegeretu, laisser an hasard le choix d'un moyen d'education si eflicace? Comment livre-t-on aux passions abjectes ou destructives, au vice et i lafrivolite, I'usage d'un levier dont les premiers le- gislateurs s'etaient empares avec tant de prevoyance et desucces? Le besoin qui nous est inne, d'exprimer nos pensees et nos sensations en sons mesures et melodiques , est un des ressorts que I'education ne pent negliger de faire servir, par un emploi raisonne et par une prudente coordination avec ses autres agens, sans manquer i I'un des devoirs le plus clairement indiques par I'auteur de notre organisation physique et intellectuelle. Qui pouri'ait, sans emotion et sans ua sentiment profond de la verite de ces reflexions, lire ce recit extrait du journal du digne Wehrli. « L'automne dernier, dit-il, je me promenais avec mes enfans au clair de la lune : I'un d'eux s'ecriaque la lune paraissait d'un beau rouge au-dc*su5 du lac; aIor'=

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uij autre cnlonna spontaucmciit IMiyiune qui counuciicc par CCS mols : Elle se leve avec mcijesU ; elle hrille d'un doiix eclat. » Get etc, quand nies efifans voyaient vcuir uu orage , ils chantaient I'hymnc dont les premieres pa- roles sonl celles-ci : « Dieu tonne, et molje suis scais crainte, » Un de Icurs cantiques favoris est celui qui commence ainsi : « Le terns que Dieu nous accorde s'en- fuitavcc rapidite , » et nous le chantons toujours pour la cloture de notre entretien du samedi au soir.

Lorsqu'onreflechit au pouvoir magiquede la mclodie sur notre ame; lorsqu'on a eprouve quelles idces d'infini, quels dcsirs secrets et incffables, quel degoflt des trivialites de hi vie, reveillent en nous la bonne musique, on dirait qu'ellc nous rappelle notre veritable patrie, et qu'ellc nous frappe, pour la cite celeste , de celte nostalgic que le j-anz des raches donne aux habitans des nionlagnes , exiles dans les plaines de I'etranger.

Tout proprietaire instruit, qui passe une grande partie de I'annee a la campague, pent, s'il joint a I'amour du bien quelque force de caractere et de volonte , fonder dans son domaine une ecole de pauvres, sur le modele de celle d'Hofwyl, compter sur leur travail pourle remboursemcnt de ses frais, et jouir, en recompense d'unc avance legtre et d'une tres-facile surveillance , de I'inexprimable bon- heur d'avoir arrache au vice et au malheur trente i qua- rante infortunes qui donncront I'exemple des vertus ap- propriees a leur condition, la oii ils auraient peut-etre repu et propage les germes de la corruption et du mecon- tentement, de I'cnvie et de la faineantise. II fautvoir, dans I'ouvrage de M. de Villevieille, les conditions aisecs a Irouver et peu nombreuses, qui sont indispensables pour le succcs d'une Scole d^iaduslrle modelee sur cellc d'Hofwyl.

ET POLITIQUES. 509

Nous Youdrions pouvoir nous arri-ter sur I'expose qu'il fait des pensees qui ont dirige le fondateiir dans la con- ception et I'ex^cution de ses deux principaux instituts, I'ecolc des pauvres et I'institulion qu'il a destinee a I'edu- cation de jcunes gens appartenant aux classes superieures de la societe. Celle-ci, dans I'ordre d'enumeration adopte par M. de Yillevieille, occupe le septieme rang ; Vecols pour les Jilles pauvres , i laquelle il assigne le sixieme , n'existc encore qu'en projet, ne pouvant etre instltuee que iorsque I'achevement de quelques mesarcs prepara- toires pennettra de la placer dans un batimenl d'attentc deja construit.

On a reproche a M. de Fellenberg de n'avoir point songe aux classes mitoyennes, et de s'etre borne a offrir ;\ celles qui dominent dans la societe les moyens de con- serTer ou de recouvrer leur preponderance, par un deve- loppement plus complet et mieux dirige de leurs facultes morales et de leurs ressources materielles. L'unanimite meme des suffrages qu'a obtenus son ecole des pauvres , n'a point desarme la severite des censeurs des intentions et des creations du proprietaire d'Hofwyl. lis ontpersiste a lui supposer des Yues personnelles qu'une noble bienfai- sance , exercee enyers des etres abandonnes , et des rela- tions etablies avec des families riches etpuissantes, etaient seules propres i satisfaire. Sans rappeler ici a ces detrac- teurs, qu'il seraitassurementfort desirable que les hommies doues des vertus et de la perseYerante activite de M. de Fellenberg ne fussent jamais animes d'une ambition moins genereuse , on peut leur falre observer d'abord , qu'une trop grande etendue de plan etait le plus sQr moyen d'en empecher le succes, et que les classes qu'on regrette de voir negligees par Ic fondateur des instituts d'Hofwyl sont lout juste celles qui , par suite de leur position et de Petal

510 sciklNCes morales

actucl des inslitulions europeennes , trouvent le plus tie sccours et courent le moins de danger dans la carrifcrc dc jeur dcvcloppement physique et moral ; tandis que, par des causes diverses, mais egalement funestes, la depra- vation des moBurs, raffaiblissement de i'energie native et le defaut d'aptitude nux fonctions difficiles, menacent principalement les classes placees aux deux extremites de la chaine sociale.

Le plan d'education suivi dans I'ecole des pauvres a Hof- wyl tend a inspirer le gout de leur etat i ceux qui y sont admis , et on n'aurait garde de s'en ecarter, a mqins qu'un des enfans n'annoncat le germe de talens transcendans. Dans ce cas, M. de Fellenberg, convaincu que rien de cc que la Providence nous accorde avec une prudente eco- nomic ne doit etre perdu pour la societe , se ferait un de- voir de le placer, a ses frais , dans I'institut des classes superieures. Quant aux autres enfans , on cherche, A Hof- wyl, a les retenir dans la carriere a laquelle leur position les appelle , en leur fournissant les moyens d'y vivre con- tens d'eux-memes et de leurs travaux. On s'occupe A etouffer en eux le germe de sentimens liaineux et de dispo- sitions envieuses; on ecarte sevferement toute instruction inutile , en ne leur refusant aucune des connaissances qui peuvent les aider i fournir leur carriere avec plus de suc- cfes. M. de Fellenberg pense que chaque homme porte en lui un capital, le plus precieux de tous, I'ensemble de ses facultes. Chaque homme vaut, chaque homme est heu- reux , sert lui-mCme et les autres , selon que son capital est plus habilemenl, plus completement et plus genereu- sement exploite. Ce capital interieur, exploite dans les classes inferieures avec une tendre et noble soUicitude , les rendraheureuses du bonheur inherent k leur situation : elks aimeront la tranquillite et repousseront toute idee de

ET POLITIQUES, 511

changcmeaL « J'ai vii , flit M. de VillcA'ieille , j'ai vu ( et cela sans exception ) tons les elcves soitis tic I'ecole des pauvres d'Hofwyl , porter dansle monde un esprit de bien- veillance et do paix, et je les ai Tus reunir a un tres-vH" desir d'etre utile , le mepris de toute pretention qui ten- drait i les faire sorlir de leur etat. »

Avoir expose lebutet lesresultalsderetablissementque M.deFellenberg a forme pourdevelopperla justessede I'eg- prit et les affections douces et morales da coeurdans les classes infericures, c'est avoir repondu d'avance aux hommes qui voient quelque chose d'incendiaire dans la pensee d'eclai- rer le peuple , et qui proclament son ignorance comme un element de sa tranquillite et de son bonheur. Si I'exemple d'Hofwyl ne les rassure pas; si celui des Ecossais , Jadis de tous les peuples le plus seditieux, le plus avide de nou- veautes, devenu, par le bienfait d'une education natio- nale que leur dernier parlement leur a legue , le peuple de la terre le plus ami de I'ordre et de la tranquillite, le plus calme, le plus penetre de ses devoirs, le plus labo- rieux; si cctte experience memorable et decisive ne peut leur ouvrir les yeux, qu'ils les arretent au moins sur les mceurs du peuple, dans les pays oii il est en posses- sion de toute I'ignorance qui leur parait si desirable, et qu'ils comparent sa conduite dans les troubles politiques avec celie du peuple , dans les contrees oil cette instruc- tion qu'ils redouten test le plus generalement repandue, en Hollande, en Suisse, en Saxe, etc. lis verrontles effets de cette politique qui croit fonder la securite des gouver- nemens sur I'abaissement el rignorance de leurs sujets , traces en caracteres de sang dans I'histoire de tous les tems, et principalement dans celle de nos jours. Quels sont les hommes les plus paisibles, les plus dociles obser- vateurs des lois ? Ceux dont I'entendement est obscure! par

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(Ics piejugt'S dc tout genre, qui sont moconlons dc leur sort ct envient cclui de leurs superieurs , quo leur incnpa- cite rend miserablement dependans et livres a loute espece de seduction par I'appSt d'un gain facile , par I'attrait dc coupablcs esperances ? Ne les trouvera-t-on pas bien plus sQrement dans une generation d'hoinmes formes a I'amour (]u travail et de I'ordre , instruits a Tecole de la nature et de la religion, connaissant les veritables el utiles rapports des difFerentes classes dela societe, respectantla propriete, parce qu'ils participent a ses avantages, et possedant «n eux-memes ala fois les ressources qui peuvent les mettre a I'abri du besoin, et les lumieres qui les rendront inacces- sibles aux pieges de la perversite.

1/ [nstitut df education pour les classes superieures de la societe est place, a Hofwyl, acotede I'ecolc des pauvres , commc pour meltre sous les yeux de jeunes gens , destines a jouir d'une fortune considerable, ce qu'un proprietaire , meme avec des moyens bornes, peut faire pour le perfec- tionnement et le bonheur du peuple des campagnes, tout en donnant les soins les mieux entendus i la culture de ses terres et en se menageant une pepiniere d'ouvriers adroits et honnetes pour I'exploitation plus utile de ses domaines, tandis que les enfans de I'ecole d'industrie apprennent de bonne heure a connaitre leurs veritables relations avec la classe des riches , et a les chercher dans an actif echange de services et de bienfaits. Les meines principes ont, au surplus , guide le fondateur, lorsqu'il s'est occupe de I'organisation de ces deux differens eta- blissemens. Mettre les eleves au niveau de leur position sociale par une education bien dirigee dont une instruc- tion, n'offrant ni lacune, ni luxe, ni confusion d'objets d'enseigncment, serait un des moyens principaux, mais nullementlebut ; tel est I'objet que M. de Fellenberg s'esl

J

ET rOLITIQlJES. 513

propose d'atteindre dans I'un et I'autre inslilut. Persuade que les classes superieuresnepeuventconserverleur haute vocation, et que les socictes ne sont fortes que lorsque ces premieres classes appuient leur primaute de convention sur une veritable preeminence morale, il a cru rendre un service important a I'ordre social ebranle, en tachant de realiser un plan d'education qui, en retrempant leur ca- ractfere, en les formant au role auquel leur situation les appelle , par des etudes fortes et par I'habitude d'un travail soutenu, leur rendrait cet ascendant d'opinion qui a repu de si graves atteintes, et leur conserverait ou les mettrait en elat de retablir cette superiorite de fortune qui tend d decroitre, et qui est une des bases indispensables de leur preponderance (i).

Je regrette de ne pouvoir suivre M. de'Villevieille dans les details qu'il donne sur les objets de I'enseignement et sur !a marche des eludes dans cetinstitut, ainsi que sur I'orga- nisalion de ses eleves en une espece de corporation qui se gouverne elle-meme , d'aprfes un reglement fort sage et qui sert i leur inspirer un zele de bien faire, totalement different d'une emulation envieuse. Je dois me borner k i'indicationde quelques-uns des traits qui caracterisent plus particulierement cette institution de M. de Fellenberg. L'instruction embrasse toutes les branches de connalssances humaines qu'on pent a]ppe\cr prSparatoires, et les exercices qui donnenl de la force ct de I'agilile au corps. Aucune science speciale n'entre dans le plan des e tablissemens d'Hof- wyl , si ce n'est I'agriculture pratique et raisonnee , a laquelle

(i) Cette disposition i perfectionner I'edncation des enfans des classes superieures , qui a quelquefois donne lieu d'attribuer aux ins- tituts d'Hofwyl une sorte de tendance aristocratique , est ncanmoins , ik beaucoup d'egards, parfaitenient appropdee auxbesoins actuels de civilisation. Note d. R,

Tome xi. 33

51A SCIENCES MORALES

un instilut special est Vonsacrc. Lcs eludes philologiques tieniicnt unc grandc place, on pourrait dire le premier rang, dans les cours dc I'ecole de M. de Fellenberg, pour les classes superieures de la soclete; et, qiiand on reflcchit i la nature et au nombre des operations de I'esprit , de la memoire,de I'imagination, du jugement qui sont mises en jeu par les savantes combinaisons de rinterpretation etdc la critique, on augurera bien de I'aptitude ;\ tous les iravaux qui exigent du tact, I'habitude de I'analyse et une certainc liberie de coup d'oeil que lcs eleves doivent ac- querir dans les lefons des habiles professeurs de langues ct de litteralure a Hofwyl. Les personnes vcrsees dans la biograpliie des hommcs celebres savent que presque tous ceux qui se sont fait un nomdans I'administration, ou par des conquetes scienlifiques et des creations litleraires , avaient donne , dans leur jcunesse , beaucoup de terns aux etudes philologiques. On ne pent, par des raisons analogues, qu'approuver le role qu'on fait jouer, i Hofwyl , a la langue grecque, cet instrument si souple et si parfait de la pen- see, la plus belle des productions de Thomme et la plus feconde en resultats brillans ou bienfaisans, puisquc c'est il'usage de cet organe admirable que lcs Grecs doivent leur superiorite inlellectuelle sur tous les peuples de la terre. Mais, si I'ordre de priorite et de suprematie assigne a la langue grecque me parait motive par des raisons de- cisives, je ne crois point que son etude puisse dispenser de celle de la logique qui est exclue de I'encyclopedie propedeutiquc a Hofwyl. Sans altribuer i la theorie des propositions et des syllogismes plus d'importance qu'elle ne merite, et en avouant que son exposition la plus soi- gnee ne suflit pas pour former un bon logicien, cette doctrine offre cependant des notions elemcntaires que rhomme instruit ne pent ignorcr sans inconvenient. Je

ET POLITIQUES. 515

dois encore me permettre de reclamcr contre I'espcce de proscription qui parait frapper, a Hofwyl, renseignerKent des principales parties de la philosophic pure et applique". Je concois que les changemens successifs el ftrqaens qu'elle a subis en AUeinagne depuis un demi-siucle, et qui ont repandu I'inquietude dans les esprits reli- gieux, et I'incertitude siir le choix des principcs qui doivent servir de fondemens u la metaphyslque, com- inandent une grande circonspection et heaucoup do reserve dans la direction de cette partie de Tinstruction scolalre. Mais il y a inoyen de satisfaire i ce que demandent cette grave consideration et I'etat presque anarchique de I'en- seignement de la philosophic speculative, sans priver les eleves d'une etude qui offre un des exercices les plus utiles des facultes de rhomme, et qui fournit des notions subsi- diaires, des bases indispensables aux connaissanccs les plus usuelles et les plus inaportantes. Je ne nommerai ici que la morale et ses branches nombreuses, en y compre- nant le droit naturel et la religion ratiomialle. Jc ferai encore observer que, dans I'etat actuel de la iilterature, les el6ves ne peuvent echappor aux discussions philoso- phiques souvent les plus hardies. lis risquent d'en trou- ver partout, et, en depit de toutes les precautions qu'on prendrait, jusque dans des ouvrages historiques, dans des traitesd'erudition, dans des essais litteraircs, en apparence relatifsade purs objets de goftt et aux arts de I'imagination, sans parler des livres de theologie et de politique. S'ils n'apportent i ces lectures quelque connaissance d'une philosophic saine etprofonde qui serve a les orienter dans les regions elevces dc la speculation, et qui les premil- nisse contre I'illusion d'idees seduisantes par leur appa- rcnte profondeur et leur specieuse feconditc, ils seront exposes a des impressions bien plus dangercuses qu'ils ne

3-r

h SCIENCES MORALES

pourront en recevoir de rcxposition mclhodique et sage d'un bon traite elementaire dc philosophic theorique et morale.

Au surplus , ce qui vaul mieux que le meilleur enseigne- ment didactique, c'est la philosophic profondement reli- gieuse et pratique que respirent tous les travaux des cent eleves d'Hofwyl et des trente profcsseurs distingucs qui se parlagent leur instruction, graduee sur les nombreux classetnens etablis par les progres indefiniment nuances des eleves et mobiles au gre du developpement de leurs fa- cultes ou des resultats de leur application. Leur inspirer le mepris des jouissances sensuelles, le goClt de celles de I'esprit, du travail et de la bienfaisance; faire naitre en eux des habitudes d'ordre, de proprete, d'attention, de surveillance et d'un sage emploi du terns, est le but qu'on ne perd pas un moment de vue dans tout ce qui se fait pour eux, par eux et devant eux, i Hofwyl.

Dans I'etude de I'histoire, on s'attache a leur faire voir la main de Dieu empreinte dans tous les evenemens, et surtout a leur faire apprecier tous les camcteres de cette graiide mutation ( pag. 1 28 ) vraiment dwine , dont le resultat fut la propagation du christianisme et de tous les ileniens de civilisation qu'il renferme. Nul doute que cette maniere de considerer les phases de la destinee des nations ne soitnon seulement la plus edifiante et la plus salutaire, en I'envisageant comme un mojen, plus sQr qu'aucune ins- truction dogmatique, de jeler dans les coeurs de la jeu- nesseles racines de sentimens religieux, profonds et inef- fafables, mais encore la plus philosophique et la plus con- forme aux vues des plus savans historiens. Bossuet, Ro- bertson, J. MiJller, CD. Beck,ont annonce, comma resultat de leurs profondes meditations, de leurs immenses recbercheset d'une conviction ill laquelle ils ne pouvaieat

ET POLITIQUES. 517

cchapper, la convergence des affaires huniaines vers un seul but, vers le triomphe final do la loi dc saintcte et d'amour , proclamee par Ic christianisuie. Faire predo- miner ce point de vue dans I'enseigncment dc I'histoire , est un moyen d'expier la necessite d'occuper la jeunesse long-terns et presque uniquement des ecrivains classiques de I'antiquile , impregnes de tous les miasmes corrupteurs , de toutes les maximes d'impiete, de ferocite et de luxure, dont le sauveur des hommes est venu les aider a secouer le joug honteux.

II ne nous reste plus d'espace pour donner une idee de VScole normale de M. de Fellenberg, le neufieme Aes ins- tituts que M. de Villevieille passe en revue, etablissement dont I'autorite superieure a ordonne la suppression, au bout de huit annees d'activite. Nous engageons les amis de dis- cussions lumineuses et impartiales, qui ont pour objet des questions relatives a Teducation , consideree soit dans ses principaux moyens , soit dans ses rapports avec le bien de la societeetle sortavenir desEtats civilises del'Europe, a lire les reflexions de M. de Villevieille, sur la difference del't/w- tniction el AgV education (pag. ii3 et ii4),sur Tabus des matheniatiques (pag. i63), sur les progres que le rassemblement d'instituts concentres dans le mcuie local tel qu'il existe a Hofwyl , promet a I'analyse de I'entende- ment humain (pag. 64) , sur les inconveniens et les avan- lages de la diffusion des lumieres (pag. iii), sur lu difference entre les progres des lumieres el les progres de I'esprit humain (pag. igS), sur le dangereux aveuglement des gens du monde qui, au lieu d'ajouter leur cooperation loyale et patriotique a Taction centrale du gouvernement, se font un point d'honneurde demeurer en dehors de cette action , et de se borner a lui dcmander la garantie de leurs jouissances pour prix d'une deference passive (pag. 197 ) , et sur Ic nicrite comparatif des mcthodes d'education de

518 SCIENCliS MORALES

M. Pcstalozzi et de M. de Fellenbcrg (pag. 17G-189), parallele piquant et delicat, fait avec predilection pour I'illustre ami de I'auteur, mais avec beaucoup d'equite et avec le sentiment d'une profonde veneration poiir I'liomme snperieur qui, anime du plus pur amour de I'liumanile, a consacre un beau genie et une longue vie laborieuse exclu- sivenient A ramelioration du sort de ses semblables.

P. A. Staffer.

An account of the improvements , elc. Compte rendu

DES BONIFICATIONS FAITES Al)X DOMAINES DU MARQUIS

DE Stafford, par James Loch, esq' (1).

D'apres le litre de cet ouvrage, on pourrait croire qu'il prc- scnte tout au plus la solution de quelques questions d'econo- niie domestiqjie ou d'economie rurale, et s'etonner qu'un seigneur anglais ait cru convenable d'annoncer au public comment il a augmente sa fortune. On se tromperait com- pletement; il s'agit, pour I'auteur et pour celui qui I'cm- ploie, de justifierune grande revolution operee, duranl le cours des dernieres annees , dans les montagnes d'Ecosse. La nation des Gaeles, reste des antiques Celtes, reduile 11 trois cent quarante mille individus, est aujourd'hui expul- sec de ses foyers par ceux meme qu'elle regardaitcomine ses chefs, par les families auxquelles elle avait montre, pendant une longue suite de sieclcs, un devouement en- thousiaste. Toutes les proprietes qu'elle avait cultivees , de generations en generations , sous des redevances fixes , lui sontravies; les champs qu'elle labourait, destines de- sormais au paturage des troupeaux, sont livres i des ber- gers etrangers; ses maisons et ses villages sont rarcs ou detruits par le feu, et Ton nc laissc aux montagnards de

(1I Londrcs, 1820. Un vol. in 8", de 354 pages ct />f) planches.

FT POLITIQUES. 519

la nation exjnilsee d'aiUre choix que d'elevcr des cubanes siir Ic bold de la mer, pour essayer de maintenir par la peclie Itur miserable existence, en vue des montagnes d'oii on les a fait sortir, ou de traverser cetle mer pour aller chercher fortune dans les deserts de I'Amerique.

Comme cette revolution s'operait k huit cents milles de distance de Londres, dans un pays presque barbare, et dont la langue est inconnue i tout le resle de I'empire, cllc fut quelque terns ignoree, ou du moins elle n'excita que bien peu d'attention. On apprit enfin , en Angleterre , que quelques habitans du nord de I'Ecosse avaient attendu les soldats destines a les chasser de leurs villages , que quel- qucfois ils les avaient repousses k coups de pierre; qu'on les avait entendus demander a etre massacres avec leurs femmes et leurs enfans sur les tombeaux de leurs peres , plutOt que d'etre envoyes, pour perir dans la misere etl'a- bandon, dans un monde qui ne voulait pas les recevoir, ct oii aucune place ne leur etait reservee : cette resistance reveilla la compassion d'un peuple genereux. Parmi les seigneurs ecossais qui chasserent leurs compatriotes de Icur ancien asile, la marquise de Stafford, heriti^re du comte de Sutherland , attira surtout Fattention , soit par I'etendue de ses domaines, soit par I'activite avec laquelle ello accomplissait sondessein, soit meme parlesimmenses capilaux qu'elle versait sur ce pays, dont elle changeait toute I'administration. On apprit qu'environ quinze mille paysans etaient forces de sortir d'une conlree, grande comme un des departemens moyens de la France; que ces malheureux etaient le seal reste des nombreux vassaux de sa famille qui, pendant tant de siecles, avaient repandu leur sang pour elle. On assura que , pour les forcer a se re- tirer, le factcur, charge de faire evacuer le pays, mettait Te feu ii leurs maisons; onpretendit meme qu'un vieillard.

520 SCIENCES MORALES

d'autres disaient une vicille femme, ayant rcfuso d'aban- donner sa cabane pour allcr braver I'exil etlamistrc, sa presence n'avait point arrete rincendiaire, ct que la vic- titne ayait peri dans Ics flammes. Alors ranimadversion publique se manifesta par des signes quij chez une nation libre, ne sauraient etre mcconnus.

La marquise de Stafford n'a pas cru meriler le jugement severe que Ton commenfait i porter sur elle; et c'est pour sa justification que le livre dont nous parlous a etc com- pose. Peut-elre, lorsqu'il s'agit de faits affirmes et nies con- tradictoirement, la sentence d'un jury pouvait-elle seulc inspirer une entiore confiance. II est juste, cependant, de ConTenir que le plaidoyer de M. Loch pour le marquis de Stafford^ ou pour sa femme la comtesse de Sutherland, est fait pourproduire une grande impression sur I'opinion pu- blique. L'auteurparait reunir une humanile compatissante h une raison elevee ; il aborde franchement son sujet , et il le traite sous son vrai point de vue , celui du bonheur ou du malheurde ses vassaux, dont il reconnait que le seigneur est responsable. II prodigue pcut-etre trop d'eloges aux moindres employes du marquis de Stafford, tant en Ecosse qu'en Angleterre : il a peut-etre trop I'air de vouloir me- nager tous les suffrages, et de regagner les mecontens par des paroles flatteuses; mais les faits qu'il rapporte sont clairs, precis, et les preuves dont il les appuie laissent peu de doute dans I'esprit.

Ilresulte dece livre que la marquise de Stafford ctait sou- veraine, dans la partie la plus scplentrionale dcl'Ecosse, d'une moitie environ du comtc de Sutherland , supcrieure en etendue au departement du Haut-Rhin , peu inferieure a celui du Bas-Rliin, et contenant huit cent mille acres ecos- sais, ou un million d'acres anglais, ce qui fait plus de quatre cent mille hectares de superficic. Quinic mille hn-

ET POLITIQUES, " 521

bitans seulement se parlagerent ce territoiie , et cette po- pulation puraissait encore beaucoup trop nombreuse au seigneur, depuis qu'il n'en exigeait plus de service mili- taire (p. i3).Tout, en effet,etait militaire dans I'ancienne organisation du pays : une trentaine seulement de gentils- hommes relevaient immediatement des corates ; on les nommait Tacksmen, et le district qui leur etait assigne k gouverner et a cultiver s'appclait tack : ceux-ci I'avaient partage de meme entre leurs subordonnes, quipresidaient k chaque hameau et a chaque vallee , et au-dessous de ces derniers se trouvaient les laboureurj. Los tacksmen hX^ienX en merae terns juges de tous leurspaysans durant la paix, capitaines durant la guerre , et Toljeissance etait adoucie par la persuasion des subordonnes , qu'ils ctaient tous parens de leur chef; tous, en eflfet , portaient le meme nora. Chaque chef pouvait user de la prerogative de donner ou de retirer i volonte, aux hommes qui lui obeissaient , les portions de terre qu'ils cuUivaient, et sur lesquelles ils devaient vivre : mais chacun, loin de songer a depouiller ses tenanciers, etait interesse aaugmenter sa puissance en attirant de nouveaux laboureurs dans sa capitainerie. D'ailleurs, le revenu percu par le comte de Sutherland sur les tacksmen, par ceux-ci sur leurs vassaux et leurs arriere-vassaux , etait si peu de chose , qu'on deyait le regarder plutot comme une reconnaissance de souverai- nete que comme une rente. Chaque famille etait tenue tout au plus k une prestation annuelle de quelques schelings en argent, de quelques pieces de volaille et de quelques jour- nees de travail (i).

Mais, d'autre part, tout homme qui naissait sur le do- maine des Sutherland, dans tous les dcgres de I'echelle

(i) Appendix 1. Rental pf Kintradwcll for l8ii.

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fcodalc, elait kiui de prodigucr son sang cl sa vie pour la defense de la souvcrainclu ct de I'lionnenr de la famille a Knquelle il se regardait comme agrege. Avant le dixiemc siecle, Ics Danois dcbarques sur les cutes avaicnt conquis les plaines dn Caithness, et repousse les Gaelcs dans les monlagnes.Dts-lors, Ic Caithness ct le Sutherland, autre- fois reunis sous un mCme noni et un mOme gouvernement, avaicnt cte separes parunelangue diverse etpar une cons- fante inimilie. Mais Ic Mhoir-Fhear ChaUaibh, comnie on I'appelait en gaelique, ou le grand Jiomme cfe Suther- lavd ^ avait loujours trouve ses compagnons d'armes prets a le defendre, an peril de leur vie, conlre tons ses ennemis, danois ou ecossais, etrangers ou domestiques.

Dans le dix-huitieme siccle, les guerres pvivees devin- rent plus rares ou moins dangcreuses, ct les rois d'Angle- terrCjSansctendre jamais une autoriterccUe sur cesprovinccs eloignecs, voulurent du moins que le pouvoir dcs grands parQl etre une emanation du leur. lis cncouragercnt done la levee de regimens de families , qu'ils accorderent aux seigneurs ecossais , et ils leur permirent de combiner ce nouvel etablissement railitaire avcc le systeme national des Clans ; de maniere que I'un servit d'appui i I'autre. Lc 93* regiment fut accorde au comte de Sutherland, et sapaie devint des-lors lc principal revenu de la famille, tandis que les gentilshommcs du comte obtenaient des tacks dcs concessions de terre, proportionnces a leurs grades dans le regiment, et qu'i leur tour ils se procuraient dcs recrues Rux memes conditions, en partageant ces concessions de terre entre leurs subordonnes (p. 46).

Sous cette administration, la population s'ctait repartie d'une maniere asscz egale sur totite la surface du Suther- land. Chaquc vallec contenait son hameau, les terrains d'alluvion avaicnt etc destines a la culture de I'avoinc et de

ET rOLlTIQUES. 623

i'orge ; on faisait des giiteaux de la preinit-rc, on dislillitit line boisson nommcc wJiisl-ey dc la sc.coade (p. 5i) : les montagnes, couvertcs d'une herbe asscz epaisse, etaient abandonnecs aiix froupeaux. Les habitans etaient braves, mais panvrcsctpeu industrieux; i!s olaient passionnement attachos a leur langue, a leur costume , a lour honneur national, a leur chef, a leurs montagnes; mais les huttcs qu'ils habitaient etaient miserables, les terrains qu'ils lais- saient cultiver A leurs femmes ne se couvraient que de moissons languissantes ; les troupeaux avec lesquels ils erraient dans les montagnes etaient d'une race faible et degeneree , et, dans les mauvaiscs annees, les hommes, comme le betail, souffraientpresque toujours etperissaient qiielquefois de la faira. Depuis plusieurs siecles , le pays n'avait fait aucune sorte de progres; il n'y avait point de grandes routes, point de porte, point de communication, si ce n'est pour les piclons, entre les differentes parlies du conite; et, loin d'obeir auxlois de I'Angleterre , laphipart des habitans ne savaientpasmemequ'elles dussentlesregir. Danslecoursdeshuitou ncuf dernieres annees, cesquinzc mille personnes, formanten viroutrois mille families, ontete chassees, ou, selon I'expressionadoucie de notreauteur, di- placees [removed) de toutrinterieurducomle;tous leurs vil- lages ontete demolisoubriiles,et tons leurs champs con vertis en paturages (p. gaj.Une operation semblable etait faitc, a peupr6ssimultanement,par les septou huitautresseigneurs qui possedaient le restc du comte de Sutherland, dont la surface est de plus d'un million d'acres ecossais, et pres- que tons les seigneurs du nord de I'Ecosse avaient donne ou suivi cet exemple; mais ilparait,d'apres M. Loch, que la marquise de Stafford a montre bien plus d'humanite qu'aucun de ses voisins. Elle s'est occupee du sort de ceux qu'ellc dyplafait; elle leur a offerl unc retraite sur ses

k

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proprcs terres; ct, Icur rcprcnant sept cenl quatrc' Tingt-quatorzemille acres dcterrc, dont ils elaient en pos- session depuis un terns immemorial, elle lenr en a laisse six milie environ, ou deux acres par famille.

Ces six mille acres , ouverls pour scrvir de refuge aux pelits tenanciers, elaient auparavant en friche, ct ne ren- daient rien au proprietaire. Celui-ci nc les a ccpendant pas concedes gratuitement : il les a assujetis a une vente moyenne de deux schelings et demi par acre, ct il n'a point fait de baux plus longs que pour sept ans, mais il a promis de renouveler le bail pour septaulres annees, si la terre se trouvait bien cultivee (p. 107),

Les sept cent quatre-vingt-quatorze mille acres, dont la marquise de Stafford a repris ainsi possession, out ete divises en \ingt-neuf grandes fcrmes fort inegales en clcndue. II en est de plus grandes que le departement de la Seine, qui lui-mGme a 46, 181 hectares, et nc formerait par consequent pas plus du neuvicme de la sur- face du domaine des comtes de Sutherland. Ces fcrmes, destinees uniquement au puturage des moutons, ne sont habitees chacunc que par une seule famille; et, comme I'industrie qu'elles introduisent dans le pays est nouvelle, elles n'cmploient gucre que des ouvriers ou des domes- tiques tires du midi du royaumc. Dix-sept genlilshommes, cependant, ou anciens tacksmen de Sutherland, ont pris autant de fcrmes de la comlcsse, malgre les prejuges na- lionaux, qui leur persuadaient que ce nouveau metier les ferait deroger ; les douze autres sont etrangers. Cent Irente-un mille moutons remplacent deja les braves qui versaient jadis leur sang pour la defense de Mhoir-Fhear Chaltaihh, et Ton sc flatte qu'avant deux ans leur nonibre sera encore augmente (p. 147). Les gorges etroites des montagn«s, illustrees par les combats d'une antique race,

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n'ont plus dc Icinoins qui puissent en rappeler les glorieux souvenirs; les vallees n'ont plusdchamoaux; aucune voix humaine , aucune atteinte de joio ne troublera plus ces vastes solitudes; raais le seigneur peut desormais, a plu- sieurs centaiocs de milles de distance , etaler une pompe royale dans le chateau de Trentham, et encourager par son luxe les fabriques de I'Angleterre.

On ne peut revoquer en doute que ce bouleversement de la propriete , des habitudes , des aEFections, de I'exis- tence entiere d'une petite nature, n'ait prodigieusement augmente la fortune , deji colossale , de la comtesse de Sutherland; mais M. Loch demontre qu'il a augmente aussi la richesse du pays ; qu'il y a plus d'argent , plus d'activite , plus d'industrie, plus de jouissances de luxe; que tout le Sutherland est desormais dans un etat pro- gressif de prosperite , apres avoir ete stationnaire pen- dant des siecles. Plusieurs routes de quarante, de qua- rantc-cinq, de cinquante milles de longueur, travcrsent deja tout le pays; des ponts en pierre et enfer, dont quel- ques-uns sont d'une hardiesse remarquable , ont eteeleves sur les grandes rivieres; des jetces et des digues arretent les inondations ; des ports ont ete ouverts au commerce ; des diligences parcourent le pays jusqu'aux petites villes baties a scs extremites ; des hotelleries , des maisons de poste ont ete construites par le marquis de Stafford , et I'exportation des 4i5,ooo livres dc laine fine, qui furent vendues I'annce derniere, comme celle de tous les autres proJuits de ce vaste patrimoinc, a trouve de grandes facilitos.

Le sort meme de ces milliers d'habitans , exiles de leur patrie, n'a pas ete aussi deplorable que le presageaient Icurs craintes et leurs regrets. Quelques-uns , il est vraj.

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n"oiU ricn voulu Icnir de celle qui Ics chassnil do Iciirs dc- ir.cures : le clan Gunn, ou des Mac Hamish, en aban- donnanl los montagncs de Kildonan, et los vallees du Naver et du Helmsdale, est sorti tout enlier du pays, et I'auteur ne nous apprend point ce qu'il est devenu- Mais, a la reserve de cette tribu et de trente-deux families de Strathbrora, parties pour TAmcriquc dans les deux der- ni^res annees, les autres ont^jresyz/e tons acceple les lots que la marquise de Stafford leur avait destines. Rejetes sur les bords de cet immense domaine^ entre la mer et le pied des montagncs, lis y ont trouve des terres propres a la culture, et Tauleur affirme, cc qui doit paraitre fort etrange, que c'est seulement dans une ceinture de demi-mille de largeur, au bord de la mer, ceinture jus- qu'alors hiissee en friche, que le Sutherland est propre a la culture des cereales. Ces malheureux exiles, designes par le nom de petits tcnanciers , ont refu des secours pour batir leurs nouvelles maisons, de I'encouragement pour defri'cher leurs nouvelles terres; et les jardins sur lesquels ils doivcut vivre , ont ete assez promptement mis en valcur.

Dans loutes ces families, les jeunes gens ont deploye le caraclcre avenlureuxquisemblepropreaux montagnards d']5cosse : toutetrangersqu'ils etaient i la mer et a ses. ha- bitudes, ils ont achete ou fabrique des bateaux; ils ont fait un rapide et hardi apprentissage sous les bateliersque Ic marquis de Stafford avait charge de les former , et ils ont ele attendre , sur le grand banc, les morues et les ha- rengs, qui visitent les parages alternativement , et dans des saisons differenlcs. De vasles magasins ont ete butis a Helmsdale et u Brora , pour curcr et preparer le poisson ; des maisons de commerce d'Ecosse el d'Anglelcrre y ont

ET POUTIQUES. 527

envoye leurs pasteurs, et la peche , s'accroissaiit d'anueei en annee , de i8i4 a 1819, est dc venue pour ce pays une source abondante de riohesses. ( p. i25. )

On peut done conclure, avec M. Loch, que les projets I'oraiespar la marquise de Strafford pour ramelioration dc ses terres dans le comte de Sutherland ont cu un plein succes. Non seulement ei!e en a recueilli d'immenses avan- tages, elle a encore fait passer rapidetnent ce pays de la barbaric a la civilisation ; et si elle a cause les plus dou- loureuses angoisses a ce petit peuple , dont la dcstinee lui etait confiee, en retour, dit notre auteur, elle a ouvert un champ plus vaste i son Industrie , et elle a tache d'adou- cir ses regrets, en lui offrant plus d'aisance et plus d'es- perance pour Tavenir. Mais les moyens par lesquels la mar- quise de Stafford a anime le commerce et les arts a I'ex- tremite de I'Ecosse ne sont-ils pas tout semblables i ceux que le pacha du Caire employait dans le meme tems en Egypte? On a vu, par I'un et I'aulre exemple , que lors- qu'un dospote a par hasard le desir de civiliser un peuple, il y reussit plus rapidement et plus completcment qu'un gouvernement libre, parce qu'il dispose seal de loutes les forces, de toutes les riohesses de la societe, et parce qu'aucun egard pour les habitudes, les sentiraens , les prejuges ne I'arrete. Aucunhomme sage n'en concluraque c'est par des moyens despotiques qu'on doit faire avaacer la civilisation ; car leur eaergie, pour faire le mal, n'est pas moins grande que pour faire le bien; et si la marquise de Stafford s'etait trompee, lorsqu'elle opposait ses pro- pres calculs aux desirs et aux regrets de tout un peuple , des milliers de malheurcux eussent ete victimcs de son erreur. D'ailleurs, dans sept ans , dans quatorze ans, a thaque terme de leur bail, ces families depaysees seront de nouveau, peut-etrc, cxposees a voir leur existence sa-

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crifice par la dissipation ou I'avarice , la folic ou rinjustice de ses hcritiers.

En admettant, avec M. Loch, que la marquise a exe- cute ses projets avec autant d'huinanitc que de prudence , encore doit-cn fremir a I'idee que la loi, telle qu'clle est interprelce en Angleterre, pcrmettait d'expulscr lout ce peuple de ses foyers, sans pourvoir aucunement i sa sub- sistance et a son sort i venir; que le gouvernement au- rail prcle, au besoin, I'appui d'une force militaire pour celte execution, comme il parait qu'il I'a fait dans une oc- casion recente; et que, d'apres M. Loch lui-uieme, d'au- tres proprietaires du comte n'ont point ete si humains. « La population des Gruids, sur le Loch-Shin, dit-il, etait considerable. II ne parait point qu'aucun lot de terre ait ete assigne a ce peuple, ou qu'il ait recu aucun dedomma- gement, au moment de son expulsion , qui s'effectua dans rhiver de 1818. »

Cette expulsion du peuple gaelique, hors de ses antiques foyers , est consideree comme legale ; mais osera-t-on dire qu'elle soit juste? N'y a-t-il pas un rapport frappant, aussi bien qu'un contrastc etrange , entre la traite des negres et I'expulsion des blancs ? et le crime de ceux qui transportent ala Jamaique de malheureuxAfricains,poury labourerdes champs etrangers, ne doit-il pas se comparer i celui des hommes qui repoussent loin des cotes d'Europe de mal- heureux Ecossais, auxquels ils ne permettent plus de la- bourer leurs proprcs champs? Celte nation antique, qui fat mailrcsse, non seulement des ilcs Britanniques, mais de la Gaule et de l^Espagne, sera-t-elle chassee, au nom des lois , de ces rochers meme oix clle n'a jamais ete vaincue , de ces rochers oii elle a maintenu son indepen- dance, perdue partout ailleurs? Ces derniers representans des plus anciens maitres de I'Europe doivent-ils t-tre de- pones?

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C est par un cruel abus des formes legales, c'est par line usurpation inique, qucles tachsmen et Ics tenanciers, soil du coalite de Sutherland, soit du reste de I'Ecosse , sont consideres commc n'ayant aucun droit a la Icrre qu'ils occupent depuisdessiecles, etque leursanciens capitaines sont autorises a violer le contrat qui a uni pendant tant de generations le cultivateur avec son seigneur. Ce n'est pas en Ecosse seulcment que la propriete aete confondue avec la souverainete, mais ce n'est qu'en Ecosse qu'une souve- rainete antique est devenue un tiire a une propriete mo- derne. Dans tout I'empire de Charlemagne, dans la plus grande partie de I'Occident, on avait vu des provinces entieres usurpees par des chefs belliqueux, qui les faisaient cultiverpour leur compte par les vaincus, par des esclaves, ou quelquefois par leurs compagnons d'armes. Aux neu- vieme et dixieme siecles, le Maine, I'Anjou, le Poitou^ etaient, pour les comtes de ces provinces, bien plutot trois grandes fcrnies que trois principautes . Mais, quel que pQt etre, a son origine, le droit du comte, la legislation n'a cesse, pendant huit siecles, de garantir et d'ameliorer le sort du fcudataire, du vassal, du serf, quirelevaient de lui, d'affermir I'independance du paysan, de changer ses coutumes en droits, de le mettre a I'abri d'executions noa- velles , et d'elever peu a peu ses censives au rang des pro- prietes.

La condition du tenancier s'est constammcnt amelioree en France ; elle s'est constamment degradee en Ecosse , parce que la legislation britannique n'a garanti que les droits de propriete qui pouvaient s'assimiler aux droits anglais. Le vassal francais, devenuproprietaire, etait ori- ginairement ou un vaincu, ou un esclave, ou, dans la sup- position la plus favorable, un homme libre , arimane , qm renoncait a sa liberie pour devenir le.iide , et qui, en Tome xi. Ih

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retoui'-, pour unc tcnc rcfiic en don de son scigneor, s'engngcait a dc certains services feodanx; ccpendant cc qui manquait a scs droits liii a etc succcssivement accordo par I'usage, et il s'cst cnfin clcve au niveau do son dona- teur. Le tenancicr gaeliquc, au contraire, ctait, dans I'o- rigine, co-propri6taire avec son chef on avec son clan. Le seigneur qu'il accompagnait a la guerre, etauquel il obeis- sait pour leur avantage commun, le considcra d'abord conime son ami et son parent, puis comme son soldat, en- suite comme son vassal, plus tard comtne son fermier, et enfin comme un laboureur h. gage qu'il voulait bien souffrir, pour son propre avantage, sur le sol de la patrie commune, mais qu'il ctait raailre de cbasser des qu'il nc trouvait plus d'interet a le garder.

II ne faut point oublier, en effct, que les higllianch d'E- cosse, les montagnes gaeliques, n'onl jamais ete con- quises; que le systcme feodal n'y a jamais ete vraiment introduit, quoiqu'on les ait assimilees ensuite aux pays gouvernes par ce systeme ; que le rapport meme des noms qu'on croit saisir dans la langue anglaise ne se trouve plus dans la langue du pays, et que le comte de Sutherland n'est pour les Gaeles que le grand homme du sud de Caithness.

On ne peut csperer de retrouver chez une nation barbare, et qui n'avait pas nieme I'usage dc I'ecriture, des documens authentiques sur la manicre dont se soni formces ces grandes associations de families connues, en Ecosse, sous le nom dc Clan. Mais leur nom mcme Klaan signifie en gaeliquc enfans ; tous leurs usages, tous leurs rapports reciproques, toutes leurs affections sont fondees en cffet surle tradiiur (\ui leur persuade qu'ils sont enfans d'nne ni^me famillej et leurs droits ont dO etrc ceux iVenfans d'une meme famille sur Ic patrimoinc com-

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ET POLITIQUES. 631

mun : ils n'ctaicnt soiimis \ d'autrc subordination qu'A ccllc dont la defense de tons falsail unc necessite ; et I'ins- tabilite du partage desterres n'affaiblissail point la propriete commune du clan, sur le district qui lui etait demeure, non seulement chez les Ccites, mais chez les Germains et cbez tons les peuples dont Tagriculture est encore dans I'enfance. On a vu la societe changer frequemment la dis- tribution des terres entre les citoyeus , quelquelbis meme la changter annueilement. Tous avaient un droit a toift, mais le lot de chacun etait variable ; quclquefois il lui etait assigne par le sort, quclquefois il se proportionnait k ses nioyens de culture, quclquefois aux services rendus i la patrie. II n'y a pas un pays d'Europc oii Ton ne trouve des traces, mCme assez recentes , du partage temporaire et va- riable du domainc de la communauti. En Ecosse , la divi" sion ct la subdivision des terres du clan indiquc et main- tient la subordination entre les soldats et leur chef. An- cicnncmcnt le grand homme de chaquc clan excrca , usurpa peut-etre le droit de faire seul ces distributions. II donna ct reprit les differens tacl:s de sa terrea ses officiers, selon qu'ils s'etaient montres plus ou moins utiles i la guerre; mais, quoiqu'il pfit ainsi recompcnser ou punir militaire- mcnt les membres du clan, il ne diminuait en i-icn la pro- priete du clan lui-meme. L'individu favorise etc.it diffe- rent, mais Tobligation du service etait toujours la meme. Quand meme les magistrats militaires, ctablis pour le bien desterres, acqueraicnt ou perdaient unc part plus ou moins considerable dans ce domainc national, le Suther- land n'en appartcnait pas moins aux hommcs du Suther- land; la tenure des terres etait toujours la meme; leur contribution pour la defense publique , leur redevance au :-eigneur qui les menait au combat , et qui maintcnait I'ordre chcj eux, n'etaient jamais augmentes.

532 SCIENCES MORALES

Lorsque la civilisalion commenpa d ("aire ties progres, les seigneurs , avec la languc ct les habits do rAngleterre , coiiimcncorent aussi a adopter Ics usages el la mani^rc de penser des Anglais ; lis ne comprirent plus ou ne se sou- cierent plus dc compiendre Ic contral national des Celles ; ct, pourlui donner la forme usitee chczlospeuples civilises^ ils le redigtrcnt par ecrit. En mcme terns ils accorderent i\ leurs vassaux les tacl-s ou portions de terre pour un tenis determine; ils parurent ainsi leur faire une grandc concession, car auparavant ils pouvaient les renvoyer a volonte : o'etait une usurpation au contraire , puisque autrefois, en les renvoyant, ils devaient toujours les reni- placer par d'autres, a des conditions absolunient scmbla- bles ; tandis que , des qu'ils commencerent i\ leur donner ces terres, ils commencerent aussi ii etablir qu'i chaque renouvellement de bail ils pourraient faire des condi- tions nouvelles , ou aggraver les redevances de leurs te- nanciers.

Par cette sourde usurpation , les seigneurs des terres gaeliques changerent la propriete d'une rente invariable contre la propriete illimitee du domaine qui leur payait cette rente. Toutefois, ils etaient loin de prevoir, ou leurs vassaux etaient loin de craindre , qu'ils profileraient un jour de I'epoque du renouvellement des baux, non pour augmcnter la redevance des laboureurs , mais pour les expulser. Avant d'en venir a une resolution aussi barbare , \\ fallait que le seigneur eflt absolument cesse de partager les opinions, les sentimens, le point d'honneur de ses compatriotes ; il fallait qu'il eflt non seulement cesse de se croire leur perc ou leur frtre , mais meme de se croire icossais; il fallait qu'une basse cupidite eflt etouffe en lui tous ces sentimens genereux sur lesquels leurs ancetres communs avaicnt compte , lorsqu'ils avaienl abandonne

ET POLITIQUES- 538

i sa bonne foi la deslinee de son peuplc. C'est lorsqu'un semblablc changcnient s'est opcre dans les opinions, dans les interets, dans la position respective des peoples que le legislateur doit intervenir, pour que la nation tout enticre ne soil pas livree a la merci d'un petit nonibre d'hommes avides et imprudens. II ne s'agit point de solliciter la pitie des seigneurs, mais d'etablir les droits du peuple gaelique. M. Loch a pris a tache de prouver que la marquise de Stafford n'a point fait ce dont la voix publique I'accusait; mais si ce qu'elle a fait, elle I'a pu faire legalement, c'est au parlement a abolir un si odieuxpouvoir.

C'est deja un grand malheur pour un etat que d'avoir permis la reunion des proprietes territoriales dans un aussi petit nombre de mains : lorsqu'un seul homme posscde le pa- trimoine qui devaitsuffireaplusieurs centaines de families, son luxe remplace leur aisance, et les revenus qui auraient nourri leurs vertus sont dissipes par ses folies. Mais que deviendra I'etat, si le proprietaire d'une province se figure que son interet est en opposition avec celui de ses habitans, et qu'il lui convient de remplacer des hommes par des moutons ou des boeufs? Ce n'est pas dans ce but que la propriete territoi-iale a ete etablie ou qu'elle est garantie par les lois. Les peuples I'adopterent , dans la persuasion qu'elle etait utile a ceux qui n'avaient rien, comme i ceux qui avaient quclque chose ; mais la societe est ebranlee quand les droits de la propriete sont mis en opposition avec les droits nationaux. Un comte n'a pas plus dc droit de chasser de chez eux les habitans de son comte, qu'un roi d'expulser de son pays les habitans dc son royaume. Le plus despotique des monarques , s'il en faisait aujourd'hui la tentative, apprendrait bienlot qucUes sont les bornes de son autoritc. Que !cs grands seigneurs d'Angletcrrc prenncnt garde ! moins ils sont nombreux, plus il scrait

hU SCIENCES MORALES

dangercux pour eux dc se incltic eu opposition avec la nation, ct fie sc prefercr 4 elle. Qu'ils nc discnt point, lorsqu'il s'agira dc Iciir inlcrct : « Pourqiioi, dans ce cas, adopterait-on unc regie diffcrcnte de celle qui a etc suivie dans lous les auties? Pouiquoi I'autoritc absolue dcs pro- prietaircs sur leur propriete devrait-eilc Olre abandonncc ct sacrifice pour I'interet public, ct d'apres des motifs qui no regardent que Ic public (pag. 4i , note)? » S'ils en viennent un jour a croirc qu'ils n'ont pas besoin da peuple, le peuple pourra croire t\ son tour qu'il n'a aucun besoin d'eux. S'ils estiraent que trois cent quarante mille braves montagnards de la race gaeliquc peuvent etre remplaces, avec profit pour eux, par quatre millions de moutons, ccs montagnards pourraient, avec plus de facilite encore, trou- ver d'utiles remplafans pour trois ou quatre cents seigneurs qui ont cesse d'etre leurs compalriotes.

J. C. L. »F, SiSMONDl.

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Galeuie FHANgAiSEj ou CoUccllon dc pm'traits des homines et des femmes colcbres qui ont illastri la France dans les i G% 1 7", et 1 8*= siccles ; par unc socUti d' homines de Icltrcs et d' artistes (1).

Si quelque chose doit toucher le cceur d'un Franfais , c'est de voir i quel point tout ce qui intercssc la gloirc dc

(i) Paris , 1821. Pi'ix dc chaquc livraison pour Paris , S t'r. , cl 8 fr. 5o c. pour lc3 departcuiens. On souscrit chcz M. Lefort, dessina- t cur del a grandc edition dii nnisOc , rue Aniclot , n" 32,

ET POLITIQUES. 5S5

son pays occiipe maintcnant I'allcntionpublique. Tandisquc dos eciivains couiagoux leclainenl les droits dcs nations, que des mandataircs fideles dcfcndent la chartc centre ses faux amis, et appellent les lois qui en sont les conse- quences necessaires, que les savans appliquent les decou- verles de la science a rutilite commune, on voit eclore de toutes parts des ouvrages destines i reproduire tous nos titres d'illustration. Entre ces ouvrages , il faut placer au premier rang la Galerie des hommes et des femmes cel^- brcs de la France, depuis le i6' siecle jusqu'i\ nos jours, c'est-i-dire , pendant les trois siecles qui ont fait faire 4 I'esptce humaine de plus grands progres que tous ceux qu'clle a pu devoir a aucune autre epoque. Cetle Galerie, composee de portraits dessines d'apres des modules au- ihentiques, excite d'autant plus d'interet qu'elle promet de satisfaire une curiosite ardente et presque generale. Les pofjtes, qui sont peintrcs et qui aiment i I'etre, les mora- listes, qui cherchent tous les moyens de nous persuader, nous repetent sans cesse que I'ame et le genie d'un homme sontempreints sur sa figure. Preoccupes de cette idee su- pcrstitieuse, pleins du modele ideal que se plait a creer notre imagination pour chacun despersonnages historiques qui vicnnent la frapper , nous esperons rotrouver leur ca- racterc dans leurs traits. Ainsi , le peintre ou le statuaire , et la nature, qui a travaille avant eux, doivent nous re- proscnter I'inflexible severite dans le premier des Brutus^ le mepris dela mort dans Catou, la haute eloquence dans Demosthenes , la magnanimite dans Alexandre; et plus les heros se rapprochcnt de nous , plus la certitude d'avoir leur veritable image augmente en nous le desir d'une com- paraison qui nous flatte. Quel est le Franpais, parexemple, uiquel I'art nc causcrait pas un vif plaisir, en hii mon-

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trant I'einpreintc d'une bonle presque divine sur la phy- sionoiiiie dc Louis XIL Le portrait ilc cc prince ouvrc la Galerie nalionalc que nous annoncons, et lui donne un grand prix. Mais , apres avoir contemplc la physiononiie du bon roi, on eprouve le besoin de relire son histoire; le terns manque- t-il pour la consulter? on trouve, a cote du portrait qu'on ne peut se lasser de regarder, une notice aussi exacte que curieuse, qui vaut un livrc. Dans cette notice, redigee par M. Andrieux , les lecteurs apprennent i\ connailre Louis XII tout entier. Combien cette foule de rois , dont il a fallu payer si cher , dans tous les tems, la naissancc, la vie et la mort, ressemble peu a ce nionarquc adore qui n'a jamais foule le peuple ! Parvenu au tronc en J A98, Louis XII paya de ses deniers et sur ses propres revenus les funcrailles de son predecesseur ; il acquitta de meme les depenses de son sacre, sans qu'il en coutat rien a ses sujets; il leur remit aussi le tribut feodal qu'on levait sur le peuple au commencement de chaque regne, et qui etait connu sous la denomination assez singuliere de droit dejoyeux apSnemont. Bien different dc la plupart des autres princes, Louis XII pardonnait reellement ; sa ven- geance mourait avec sa colore; ct, quand ilavaitdit : « tout estouhliii), on n'avait rien a craindre de lui.

« La justice, dit Saint-Gelais, nc fut oncque tenue en si grand honneur que sous le regne de Louis XII , tclle- ment que le plus petit a justice contre le plus grand , sans faveur aucunc. II ne vbulait point, dit le meme auteur, qu'on le favoris5t iui-mCme, en quelque cause qu'il eOt en aucun de ses parlemens. » Ce roi, toujours occupe de soulager le peuple , eut I'economie pour principale verlu ; aussi laissa-t-il, a sa mort, moins d'impots qu'il n'en avail trouve d'etablis. H n y a peut-elre, dans les trois dynas-

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ties, que Louis XII qui ait luisso uii pareil exemple*. Les nobles , faches de ce qu'ii protegeait le peuplc contre leur insolente tyrannic, le nomniaient entre eux le roiplebeien, le roi roturier. lis appelerent ensuite Franpois I" le roi gentilhomme , parcc qu'il fermait les yeuxsur leur licence oppressive et leurs deportemens. Dieu nous preserve des rois gentilshonimes !

A cote de Louis XII, si bien rcpresente par la plume elegante et facile de M. Andrieux, George cV Amholse , qui partage avec son maitre le titre de pere du peuple , a trouve dans le savant M. Fourier un judicieuxpanegyriste. Mais je ne puis rien citer de plus heureux que ce passage de M. Lemontey sur Marguerite de Valois : « Etrang{;re aux vices de sa mere , aux folies de son frere et aux travers du terns , belle et reine sans arrogance, vertueuse sanspru- derie, savante sans pedantisme, douce et bonne sans fai- blcsse, chaste au milieu d'une cour corrompue,superieure et fidele a ses deux maris , elle est sans contredit la prin- cesse la plus aimablc et la femme la plus parfaite qui soit sortie de la maison de France. Je ne sache point de tr3ne qu'elle n'eQtembelli, et point de siecle qu'elle n'eQt ho- nore. » Le meme auteur a peint sous ses veritables cou- leurs Pheroique Jeanne dfAlbret.

En lisant les faits et gestes de Frangois premier , retraces par M. Andrieux, on pouvait craindre que I'homme de lettres ne I'emportrit sur le philosophe; I'un et I'autre ont su garder une juste mesure, et la reconnaissance du poete n'a rien ote i la raison du juge eclaire. Mais les notices ne sont ici que I'accessoire, tandis que les portraits sont le principal , n'oublions pas de dire que ceux de Francois premier, de Bayard ai Ac Ilahela is , dcssines parM. Chre- tien , se font remarqucr par unc expression , par unc

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viguour de ton et par un caractcrc dc voritc qui uicrilciil beaucoup d'eloges.

Si les inloleransmurmurent en lisant I'eloge dc Calvin, trace par M. Marron, tout le monde sera force d'applaudir i tout cc que M. Lemontey dit sur Frangois de Guise, dont la figure represcnte toutcs les passions d'une grando auie. Get homme, si redoutablc a scs rois ct k la France, est caractcrise tout entier dans quclqucs parties de I'ecri- vain : « Guise fut trop grand pour un sujet; il eQt etc le modele des rois , s'il fflt ne sur le trOne. »

Louons ici avec plaisir la tete dc Ciijas , qui parait si venerable sous le crayon de M. Rulmann, etl'adresse avcc laquellc cet artiste a trioniphe des difficultes que lui oppo- sait la laidcur de Passerat. On retrouvc dans le Montaigne , dessine par MM. Gauthcrot et Weber, le doute et la pensec de I'auteur des Essais ; mais pourquoi cet air de melancolie qui 6te k la physionomie cette vivacite d'esprit que le philosophe gascon conserva toute sa vie? Montaigne etait reveur , et non pas triste. Je reprocberai aussi k M. Ville- main la maigreur et la secheresse de sa notice. II dcvait etre en fonds pour parler de Montaigne. M. Fourier olTre au contraire le modele d'une narration interessante, lors- qu'll nous apprend i\ rendre justice au naathomaiicien Frangois Viete.

Je n'ai point encore vu Marie Stuart, si belle que dans son nouveau portrait par M. Rulmann. M. de Segur a fait, sur cette reine si malheureuse, une notice elegante el judicieuse, mais peut-etre un pen trop academique. —Que cc portrait de Mathurin Regnier, par M. Chretien , a de vigueur et _d'expression ! Mais quelle absence dc vie et de couleur dans la prose de M. Creuzc de Lesser , au sujet dc ce grand poetc , que Boilcaii tcnait en si haute

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ET POLITIQUES. 539

cslimc pour de Ires-bonncs raisons ! L'autcur dc tant dc poemcs doit dcinander pardon aux muses d'avoir si laible- mciit parle du maitre de la satire fruncaise.

Avaut de terminer cet article , la faison et la justice nous ordounent de payer notre tribut i I'exccllente notice de M. Micl, sur Bernai-dde Palisny, qui crea I'arl du potier parmi nous , devina les sciences , trouva dans son ame les secrets de I'art d'ecrire, et eut a la fois du genie, de grandes vertus, avec une Constance que la Saint-Barthelcmy ne put ebranler (i). William.

(i) La Galeeie FHAN9AISE sera composee de vingt-cinq liiraisons , contenant chacune guatre portraits avec notices etj'ac simile. II en a deji paiu dix qui offrent, avec quarante portraits , des notices sur Louis XII r, par M. Andrieux ; George d'Amboise, Fourrier; Clement Marol , Campenon j Marguerite de Valois , Lemon- tey; Pranpois I, Andrieux; Jeanne d'jllbret, Lemoutey ; Bajard , Andrieux ; Rabelais , Auger ; Caluin , Marron ; le due de Guise, Lemontey; Etienne Jodelle , A. Duval; Cujas,

Juge; Robert £tienne, F. Didot; Anne de Montmorency^ Landrieux; Philibcrl de lOrme, Alavoine; Ambroise Pare , Richerand; Guillaume Budee , Andrieux; Michel de I'Hopital,

J. Droz ; Gaspard de Coligny, Lemontey ; Jean Cousin ; Miel; Michel de Montaigne , Villemain ; Jacques .^myot, Campenon; Jean Passerat, Auger; Frangois P'iete , Fourrier; Marie Stuart, de Segur ; Theodore de Reze, Marron ; le presi- dent de Thou , Lemontey ; Pierre Charron , Campenon ; Rene'e de France, Amaury-Duval ; Mulhurin Regnier, Creuz6 de Lesser; Bernard Palissy, Miel; Achille de Ilarlaj, de Joly ; Olivier de Serres , Silvestre ; Catherine de Parthenaj, Lan- drieux; Etienne Pasquier, Auger; Frangois de Malherbe, Liadieres; Mathieu Mule, Juge; Duplessis-Mornaj , H. Du- val; Pierre Jeannin , Greuze de Lesser; Jean Goujon, MicL

LITTERATURE.

(ffiluVRES COMPLiiTES Dli MADAME DE StAEL , pubtteCS par

son /lis ( 1 ) .

De l'InFLXJENCE DES passions SUR IE BONDEUn DES INDI- VIDUS. DeLPHINE. CORINNE. SoPUIE , Oil LES

Sentimens secrets , com6die.

Nous avons annonce a plusieurs reprises, dans ce rc- cueil, les livraisons successives de I'importante collection des OEuvres de madame de Staijl , dont nous allons rendre compte. ( Voy. ci-dessus, Tom. IV, pag. AA6 ; Tom. VI, pag. 195; Tom. IX, pag. 167; Tom, X, pag. 188, i8g. ) II nous resterait k remplir une tuche difficile, celle d'em- brasser d'un seul coup d'oeil I'ensemble des productions de cette femme celebre, peut-etre la plus distinguee de notrc siecle, et de reproduire avec fidelite le resume des jugc- mens portes sur son caractere et sur ses ecrits. Nous au- rions desire passer en revue chacun de ses ouvrages, ct signaler les divers degres de merite qui leur sont propres, les laches legeres ou les erreurs qui peuvent s'y rencon- trer, I'influence qu'ils ont exercee et qu'ils peuvent cxercer encore; enfin, les deux caracteres distincts , soit de I'ecole litteraire, soit de I'ecole philosophique et politique a la- quelle ils appartiennent. Un de nos collaboratcurs , qui n'a entrepris qu'une partie de cette tuche, et dont les eloges et les critiques nous ont paru exempts d'un engoue- ment aveugle ou d'une severite injuste, s'est borne a exa- miner, dans les ouvrages de madame de Stael, les doc-

(1) Taris, 1820 ct 1821. 17 vol. in-8°. Treuttel cl Wiirtz , libjaires, rue de Bourbon, 17, Prix 6 I'r. Ic vol, , ou 102 francs.

LITTJ^RATURE. 5A1

Uines morales , liUcrairos ct poliliques qu'elle a professees. Nous livi'oiis sua cxamcn au jugemenl de nos lecteurs.

Madame de Stael a eciit sur les passions, sur la littera- litre et sur la politique. Je suivrai cette division dans I'examen que je vais faire de ses ouvrages.

Les passions, dont madame de Staiil examine I'lnflaence sur le bonheur, pourraient etre classees en passions na- / urelles , donl Thomme apporle le germe en naissant, et qui se developpent chez tons les individus de I'espece hu- maine , dans quelque rang oii ils se trouvent , dans quelque climat qu'ils habitent; et en passions factices , nees de I'clat social, du desir d'obtenir le pouvoir, la celebrite , les distinctions , les richesses.

Uamour de la gloire avail ete le premier besoin de madame de Stael ; aussi , c'est de cette passion qu'elle s'occupe d'abord. Elle place la gloire des actions avant celle des ecrits; cumme, dans sa tendresse et dans son respect filial , elle plapait la gloire de M. Necker avant la sienne.

Les efforts que doit tenter, et les obstacles que doit vuincre I'homme qui veut s'elever par son seul merite personnel, dans vm pays oi\ les distinctions sont lieredi- laires ; la difficulte , pour le favori de I'opinion publique , de conserver long-tems une gloire que la faveur seule de cette opinion cree et recompense ; la difliculte plus grande encore de savoir jusqu'a quel point il faut se livrer a la popularite, en jouissant de distinctions impopulaires, et de connaitre toujours avec certitude le dcgre d'empresse- ment qu'il faut montrer a Topinion generate; I'impossibi- lite de soutenir I'admiration par des miracles nouveaux, et .roloigner le jour oii chacun dira, comme I'Athenien qui donnait sa voix pour le bannissement d'Arisiide : « Je sitis

5A2 LITTfiUATURE.

Ins de f entendre nomnier le juste. » L'etat d'abatlometit et dc mort oCi tombe celui qui , apri;s avoir passe unc par- tic dc sa vie au milieu des brillantcs illusions des cours ct des reves pompcux de la gloire, est force, par Ic sort ou par rinconstance des bommes, de rentrer dans la vie pri- vee, et de revcnir aux realites dc l'etat naturel. Toutcs CCS vicissitudes sent representees avec beaucoup d'art ct de fidelite par madiune de Slael. Mais tant de travaux, dc laligucs, de douleurs et de regrets me trouvcnt insensible; jc nc sais pas m'attendrir sur des malheurs qu'il etait si facile dc prevenir et d'cviter. « Ce n'est pas u inon perc, dit oiadame de Stael , a I'homme de ce terns (jui a recneilU le plus de gloire j et qui en retroin-'era le plus dans hi jus- tice des siecles, que pent convenir un scul des traits dont j'ai compose ce tableau. » J'avais besoin dc ccs paroles pour me detromper ; car ce que madame de Stael appellc im tableau me paraissait n'etre qvi'wn portrait.

Madame dc Staiil distingue ramour de la gloire de Vani- bition ; elle fait de celle-ci une passion subaltcrne qui ne porte pas ses dcsirs au-dcla des jouissances ministcriellcs. Obtcnir et conserver le pouvoir, voila , dit-elle, lout Ic plan d'un ambitieux. Cette passion suppose une person- nalilc concentree qui ferme I'ame aux autres jouissances ; elle est plus contagicuse que I'amour dc la gloire, parce que la mediocrite peut aussi concevoir I'ambition ct en obtcnir les succt^s; mais ces succes ont pour cnncmis la majorite des intercts particuliers, qui, s'ils n'ont pas cu de lots dans le resultat actuel du sort ^ demandcnt tons un nouvcau tirage; ils ont pour ennemi le besoin que le pu- blic eprouvc de voir le sort ou le caprice des princes fairc mieux apprecier, par des chutes cclatantes , le bonheur des conditions privces et des destinees communes. L'am- bilicux n'cst occupe qu'a trompcr Ics autres j el, pour y

LITTI^IRATURE. 5A3

parvenir, il nc doit jamais sc perdro de vue lui-meinc : un instant d'oubli lui scrait fatal. Condamno ;\ suivre le meme systenie de dissimulation qui I'a conduit au poste qu'il occupe, il doit se courber sans cesse devant le maitre , peuple, roi ou ministre, dont il tient sa puissance. Con- damne ii jouer sans cesse sa destinec, il ne pent rien es- perer de la yeille pour le lendemain. Quelle sujelion ! quelles fatigues ! quelles miseres ! Mais cette passion est- elle celle dcs ames honnetes? Ces miseres appellent-elles les consolations des cceurs compatissans ? Non : je le dis , sans crainte d'etre accuse d'insensibilitc. Le chatiment de I'ambitieux est dans le retour a la vie privee : supplice trop doux s'il n'etait sou vent accompagne de reniords.

Dans le vastc champ des passio?i^ politiques, madame de Staijl ne neglige point les inflniment petits. Des miseres de I'ambition , elle descend aux petitesses de la vanite, et decouvre une passion oiibeaucoup de personues n'aper- coivent qu'un ridicule. N'y a-t-il pas en effet plus de ridicule que de passion dans un attachement qui n'a rien de reel, ni dans soi, ni dans les autres; qui se consume dans la recherche d'avantages apparens et d'effets passa- gers ; dans un sentiment enfln qui sc nourrit des rebuts de I'ambition et de la gloire ? Les jouissances de la vanite sont imparfaites et fugitives; ses triomphes se composent d'ap- plaudissemens ephemeres. Les malheurs qu'elle entraine consistent presque tons dans la depcndance servile oOi elle met celui qui I'eprouve, du cercle qui I'cntoure. Qui croi- rait que, dans une passion si etroite, si privee de ressorts, madame de Stael voit Tunc des causes de la revolution franpaise. «C'est, dit-elle, le desir des applaudisse- mens ; c'est le besoin de faire effet qui a porte tant d'ora- teurs A attaquer les vieilles institutions : il fliut chercher dans les battemens de mains des tribunes, plus que dans

5AA LITTlilRATDRE.

ties scntimens ilc hainc et ilc fiircnr, la cause secrete ties

decrcls Ics plus baibares tic la convention. » L'une tic ccs

causes, honteuse, mais vraie, c'est la peur, tlont I'in-

flucnce ne s'est que trop reproduite i\ beaucoup d'autrcs

epoqucs.

Madame de Stai-l, toujouis plus brillante par le coloris que profonde par la pensee, pciiit cependant du couleurs cnergiques et vraies la plus redoutable des passions poli- tiqucs, V esprit de parti : cette passion tient du fanatisine, a quelque objet qu'clle s'appliquc. Semblable aux forces aveugles de la nature, qui vont toujours dans la meme direction, elle donne a la penscc une espece de roideur qui lui ote presque ses attributs intellectuels. Les lionimcs qui se precipitent, les yeux fennes, dans I'opinion d'un parti, n'entendent, ne voient , nc conaprennent que deux ou trois raisonnemens, avec lesquels ils font face a toutes les objeciions. Four cux, un Iriomphe acquis par une condescendance paraitrait aussi honteux qu'une defaite ; ils aiment mieux toniber en entrainant leurs ennemis , que de vaincre avec eux, que de faire Ic nioindre sacrifice pour assurer la plus belle victoire. Les hommes de parti ne savent point reconnaitre les grandes qualites d'un homme qui n'a pas leur religion politique. Mais ils se font illusion sur les torts, meme sur les crimes de ceux qui partagent leur opinion, el rien ne peut les detacher d'eux. Pendant les fureurs du regime revolutionnaire, quelques hommes, exultes jusqu'A la rage, ont dit, sans etre des assassins : « ily a deux millions d'hommes de trop en France. » J'ai entendu repeter, k une epoque plus recente, par des hommes incapables du moindre crime prive : il y a en France trois millions d' homines que ^ pour son repos, il faudrait en fairc disparaitre ; et les memes individus , forces de reculcr, non dcvant la grandeur du forfait, mais

LITTIilUTURE. 5A5

Jcvant la didicuUe de I'execution, se croyaient tres-mo- deres en ne demandant que la proscription de quatre cent mille tetes. Ces hommes, dit fort bien madame de Stael, eussent etc catholiques ou protestansau quinzieme siecle, comme lis etaient aristocrates ou jacobins il y a vingt-huit ans, comme ils sont aujourd'hui ultra monarchiques, ou ultra liberaux.

La source de I'esprit de parli est tout-a-fait ctrangcre au crime ; et cependant II n'est point de passion qui puisse au meme degr« borner la pensee, et depraver la moralite. Cest unc espece de frenesie de I'ame, qui ne tient point a la nature de son objet. Quand la pensee en est saisie, ce n'est pas des objets a soi, mais de soi vers les objets que partent les impressions. Cette passion furieuse n'a de jouis- sances que dans I'espece de delire qu'elle procure; uiais, comme le fanatisme est le seul sentiment qui puisse reunir ensemble des actions coupables et une ame honnete, il doit naitre de ce contraste le plus affreux supplice dont I'imagination puisse se former Tidee; et le premier reveil de la raison doit etre plus effroyable encore.

La cruaute est mise par madame de Stael au rang des pas- sions. Quand I'homme a eteentraineparia perversitede ses penchans a un certain degre de sceleratesse, I'effet devienl la cause, et le crime, qui n'etait d'abordquele moyen, de- vient le but. ,11 passe dans le sang une sorte de fievre qui donnelebesoin du crime; c'estunesensationphysiquetrans- porteedans I'ordre moral. Dans cette horrible ivrcsse, il faut que celui qui est ainsi domine par la passion du crime aille sans cesse en avant; non que I'esperance soit devant lui , mais parce que I'abime est derriere. II veut detruire les autres hommes, moins encore comme des ennemis que oomme des temoins. Lorsque le fleuve de sang est traverse, ie mal est irreparable, et le rcpentir devient infruclueux. Tome xi. 35

5A6 LITTlilVATUllE.

Tout cela peul etre vrai; mais, en contemplant cet hor- rible tableau, on se demande dans quel but I'auteur I'a trace ? II ne connait, il n'indique lui-merac d'autre remede que la mort; c'est sortir du domaine de la morale, pour rentrer dans celui de la justice des hommes , ou de la jus- tice de Dieu.

De ces terribles passions politiqucs, qui jettent reffroi parmi les peuples, et semblent menacer les destinees de tout ce qui respire , la pens^e ne descend pas sans effort vers les passions nees de I'ordre social , et que j'appellc passions ch'iles : lej'eu , ravaricej l^envie , la vengeance meme. Mais que sont les malhcurs individuelsaupres des calamites nationales? D'ailleurs , quel moraliste n'a pas considere ces passions sous le rapport de I'influence qu'elle» excrcent sur les actions et sur le bonheur des individus?

On suit iTiadame de Stacl avecplusd'interet, lersqu'elle examine I'influence des passions naturelles. Mais ce n'est pas sans etonnemeut qu'on la voit mettre au nombre des obstacles au bonheur, \aniitie , la tendresse paternelle j la pietefdiale etla religion elle-meme.S^W faut Ten croire,ram»- tie inspire lebesoin du retour; et, sous ce rapport, elle fait ressentir plusieurs despeines de I'amour, sans promettre des plaisirs aussivifs. Chez les femmes, les epanchemens les plus intimes de I'amitie ne sont quelquefois que des confi- dences reciproques , un sacrifice fait par celle qui ecoute i I'esperance de parler a son tour. Dans les relations des parens et des enfans , lorsque I'ame se livre assez vivement a ces penchans du cceur pour eprouver le besoin de la reciprocite , le repos cessc et le malheur commence. II y a dans ces liens, dit madame de Staiil , une inegalite naturelle qui ne permet jamais une affection du meme genre, ni au meme degre : I'une des deux est plus forte , et par cela mome trouve des torts u I'autre; soit que les enfans cherissent

I

tlTTERATURE. 5A7

jeurs parens plus qu'ils n'en sont aimes , soit plutot que les parens eprouvent pour leurs enfans plus dc sentimens cm'ils ne leur en inspirentw Lorsque lea parens restent dans eux-mcmes, les enfans sont i leurs yeux des successeurs, presque des rivaux, des sojets devenus independans, des obliges k qui Ton neglige de plaire, des associes d'eux i soi, plulot que de soi a eux; c'est une sorte d'araour dans la- quelle les parens, donnant une latitude indefinie a I'idee de leurs droits, veulent que vous leur teniez compte de ce vague de puissance dont ils n'usent pas , apres se I'etre suppose. Enfin, la religion , dans I'acception generale, suppose uiie foi inebranlable ; mais , en matiere de foi , ancuue action sur soi-meme n'est possible; on espere oil Ton craint, on doute ou Ton croit , selon la nature de I'esprlt, et les com- binaisonsqu'il fait naitre. La foi paraitetre unefaculte qu'il ne depend pas de nous d'acquerir; je ia ooasidere ccmme un don aussi independant de nous que la beaute, le genle^ ou tout autre avantagequ'on tient dela ..ature, elqu'aucun effort ne peut obtenir.

L'esprit, dit madamc delitaSl, estramenepar intervalles a douter de tout ce qui est contraire i la raison. La devo- tion exaltee est presque toujours destructive des qualiles naturelles; ce qu'eiies out de spontane , d'involontaire, est incompatible avec des regies fixes sor tous les objets> et les qualites naturelles , developpees par les principes , par les sentimens de la moralite, sont de beaucoup superieurtfs aux vertus de la devotion. Je prie le lecteur de reroarquer que je rapporte ici les pensees demadame de Stael, et que souvent, dans la crainte de les alterer, je conserve ses propres expressions.

L'auteur cherche , dans la troisi6me partie de son ou- ^fage, quelles ressources independanles du sort, et surtou*

35.

5A8 LITTliRATURK.

dc la volonli! dcs homines, on pcut trouver en soi contrc

I'influence dcs passions.

Velude, cxcitec par Ics deux mobiles de la nuriosite et de I'esperance, fait trouver, dans le plaisir si pur depenser et d'cnrichir ses meditations par les connaissauccs et les iJces des autres, une sortede satisfaction intime, qui lient k la fois au besoin d'agir et de se perfectionner , et qui n'astreint Thomme aaucune dependance. La hienfaisance n'exige ni de la force dans le caractere , ni une attention soutenue : ellc ne yeut, elle n'attend rien des autres; die donne des jouissances simples et faciles , et dont Tim- pressionestindependante, memedupouvoirde la reflexion; elle place sa felicite tout entiere dans les emotions si douces et pourtant si profondes qu'clle eprouve. L'etude occupe I'esprit j labienfaisance remplitle coeur. C'est sur- tout dans la philosophie que rhomme doit chercher des secours contfe les traits aceres du malheur; mais celte phi- losophie , madame de Staiil la place si haut , qu'il n'est donne d'y alteindre qu'a un petit nombre d'esprits supe- rieurs et de courages inflexibles. II faut se placer au-dessus de soi pour sedominer, et au-dessus des autres pourn'en rien craindre, deux conditions tres-difficiles i\ remplir ; il faut se desabuser des illusions du bonheur et se contenter de quelque chose qui lui resscmblc ; il faut, renoncant a toute influence sur le destin et sur les hommes , ne se com- plaire que dans I'cxercice du pouvoir qu'on s'est reserve sur soi-meme; enfin, il faut des loisirs et de la solitude; ce qui met les puissantes consolations de la philosophie a la portee d'un bien petit nombre de malheureux.

Madame de Staiil n'ecrit pas, il est vrai, pour la multi- tude; elle s'adresse seulement aux caracteres passionnes, c'est- i- dire li quelques etres extraordinaires dont les

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LITTKRAtURE. 5A9

jouissanccs ct les ilouleurs sont etrangnrcs a la presque tolalite de I'cspece humaine. Ellc suppose, dans les pas- sions, ct niC-me dans les affeclions naturelles, descalculs et des suscepiihiliUs que le couimun des hommes est hors d'etat d'apprecier. Cependaiit, quelque borne que soit le nombre de ces pcrsonnes passiouuoes, il serait trcs-dan- gereux pour le repos du monde de repeter, avecmadame de Statil , que, dans la passion, nul ne pent dire : la fiiiit la nature. Ces axiomes :.oii paut toujours se raiticrej on est toujours le maltre de sol, madame de Staelles trouve impitoyables ; elle les repousse commc etant la morale des anies froides et des esprits mediocres. Mais, sans doute, en youlant excuser des ecarts et des errcurs auxquels elle a consacre depuis ses plus brillans ouvrages , madame de Staiil n'a pas vu quelles seraicnt les funeslcs consequences d'un si dangereux syslenie. Si I'homme ne pent etoufTer les desirs de son coeur, circonscrire les mouvemens de son ame, toute moralile cesse; il n'y a plus ni bien ni mal moral, et le monde rentre sous rempire;de la fatalite. L'anteur, qui a transibrme Ic crime en passion, ne pcut nier que tous les hommes sont les maitres de triompher de leurs passions, sans refuser a la societe le droit de pu- nir , sans accorder au crime le privilege d'une revollanle inviolabilite.

'Vamour a occupe, sinon dans la vie, du moins dans les ouvrages de madame de Staiil , une trcs-grande place. Ses idecs sur cette passion ont quelque chose de bizarre, d'extraordinaire, et I'ont jetec , depuis ses premiers essais, jusqu'a ses derniers ouvrages, loin des routes .battues et des opinions les plus generaleuient admises. Madame de Stai-l etait encore mademoiselle Neckcr ; et deja elle com- posait une coraedie , ayant pour tilre : Sophie , ou les Seii- timens secrets , dont rhcroJine conco'ii, piesque a son iiisii^

850 LiTTJ^UATUKE:

la plus vive passion pour son tuteur , quoique ce tutcur soil r^poux do I'amie dc Sophie. DelphLne est une autre Sophie, qui devlent amoureusc, mSme avant de le con- uaitre , d'un homme qu'elle sait destine iv devenir le mari de sa cousine, et qui mcurt devoree de desirs, consumee de regrejts, apres avoir entretenu avec son amant une liaison k iaquelle 11 n'a inanqu^ quo le triomphe des sens pour avoir tous les caracteres d'un long et scandaleux adult^re. Les femmes emportees, par des facultes emi- nentcs et par des passions fougueuses , hors de la ligne des devoirs que leur ont traces la nature et I'ordre social, sont des modeles peu honorables a offrir; il ne sufflt pas de les rendre victimes de cet egarement du coeur et de I'es- prit, enlivrant leur vie entiere a la douleur, en I'eteignant dans les larmes ; c'est profaner la vertu que de les revetir de ce quelle a de plus seduisant, et de solHciter la pitie pour celles i qui tous les coeurs honnetes doivent rester fermes. Cependant je me plais i penser que la creation de Delphine est une erreur de I'esprit , et non une faute du coeur, et je nc partage point I'opinion de I'auteur de la notice, qui pretend que Corinne est I'idial de madame jrfe ^aelj et que Delphine en est la Halite pendant sa jeunesse.

Cette brillante Corinne brave aussi I'opinion; mais elle respecte le devoir; elle aussi tombe victime de Tamour, mais apr^s avoir sacrifie i la gloire ; cet amour est malheu- reux, et n'est point criminel. Poete, artiste, Corinne avail renonce a son pays, au nom de ses aieux, pour se livrer an culte des muses, aux inspirations du talent, et pour fonder sa renommde sur une gloire qui n'appartient qu'i elle. L'amour arriva trop tard pour dominer seul dans un coeur deja en proie i d'autres delices ; il y laissa tou- jours une grande place aux seatimens nobles et elevcs.

UTTlinATURE. 5&1

Si madame Je Stael n'avah pas cru , pour rhonncur dc cette passion jalouse, devoir lui sacrifier Corinne; si I'amour n'avait pas laisse dans Tame indccise d'Oswald de longues impressions d'une langueur sentiinentale qui tantot aifadit et tantot fait pcrdrc toute patience, avec quel plaisir ne le rclrouverait-on pas dans la description d'un pa3^s oii il est si bien place, et ou iljoue un roleaussi anime ! Corinne, con- sidercecommeroman, n'estpas, au jugementdes dames, un ouvrage assez passionne ; comme description de I'ltalie, il laisse beaucoup i desirer, et n'est point exempt d'erreurs : il satisfait davantage sous le rapport de I'art d'ecrire et des inspirations poctiques. Les chants de Corinne ont souvent toute I'ardeur, tout I'abandon , toute la mollesse et la vo- lupte des Muses de I'Ausonnie , et il resulte de la comhi- naison de ces differentes parties un melange delicleux, un ensemble plein de charmes. Corinne, iraprovisatrice, mu- sicienne, peintre; Corinne, jeune, belle, sensible, ales formes, la puissance et les seductions du genie. On ne pent pardonner i Delphine d'avoir voulu s'elever au-dessus du jugement des hommes; loin d'avoir la force de blamer Corinne lorsqu'elle recherche les homniages publics, le moraliste le plus severe cede au desir de mcler sa voix aux acclamations de ses adorateurs. Mais un Franpais ne peut, sans une irritation h laquelle il se laisse aller, parce qu'il la croit legitime, retrouver dans cet ouvrage I'injuste pre- vention dc madame de Stael centre un pays et centre des hommes pour lesquels elle professe a chaque instant un amour que sa plume dement sans cesse. Elle eQt pu flatter davantage I'Angleterre , qu'elle pcrsonnifie dans Oswald , ct orner son heros de tons les dons , de toutcs les qualites qu'il laisse a desirer ; mais si , pour mieux le faire brillci-, elle avail besoin d'un contraste, ne pouvait-elle le trouver sans sortirde I'Angleterre, ou du moins nc pouvait-cUe le

552 LITXERATURE.

prendre chez un peuplc qui diffcrc des Anglais par sa reli- gion, son esprit et scs habitudes? Los Irlandais sent la pour tout Ic uionde, ct les ecrivains de la Tamise nc sc font pas fautc dc ces malheureux pour les sacrifier aux prejuges et i I'orgucil des vicux Bretons. Pourquoi done prendre un Fiancais ? pourquoi surtout charger les cou- leurs dont la jalousie de I'etrangcr se complait i deflgurer notre caractijre national? Ce comte d'Erfeuil qui joue avec les mots, avec les phrases, raais qui ne prend jamais pour sujet de ses discours ni les objels exterieurs, ni les senti- mens intimes, clout la conversation n'est id du dehors ni du dedans; cet homme qui, meme dans le malheur, est incapable d'affections profondes, et digne d'etre aime seu- lement comme il aime, en honcamarade deplaisirs et de perils J mais qui ne s'entend point au partage des peines; ce comte d'Erfeuil, enfin, qui dit des choses d'une imper-' linence si ridicule, peut etre line caricature agreable, et^ jusqu'a un certain point, le portrait fidele d'un courtisan ou d'un aimable petit -maitre; mais jamais, meme i I'e- poque oCi ils etaient les plus frivoles , les Francais n'ont pu c'tre representes sous de pareils traits : ces traits leur con- viennent aujourd'hui moins qu'u aucune epoque, et il y aurait i s'y reconnaitre une modestie aussi ridicule qu'il y a d'injustice a les tracer. La meme injustice se retrouve a regard des Francaises; elles n'ont pas plus la faussete, les ruses et le manege de madame d'Arbigny , que les An- glaises ne poss^dent la douceur, les vertus et toutes les qualites solides dont madame dc Statil enrichit si genereu- sement la jeune epouse du lord Nelvil. Tous ces portraits de nations manquent de justesse el de veritable philoso- phic. Madame d'Arbigny n'est pas la France; Corinne n'est pasl'Italie; Lucilc n'est pas I'Angleterre; la gloire comme ks yertus modestes, le bonheur domesllquc comme les

LITTERATURE. 553

jouissanccs du genie sont de tous Ics pays, ct les diffe- rences exterieures ne cachent qu'a des yeux inattentifs runiformite des sentiraens, des principes et des vertus qui regnent i peu pres au mGme degre chez toules les nations policees de I'Europe. En France , la vie des hommes et des femmes est toute exterieure, il y a peut-etre trop de bruit etd'eclat; maisailleurs, et surlout en Angleterre, n'y au- rait-il pas trop de mysttre et d'obscurite? En France, les vices merae sont i\ peine deguises; notre petulance de- range a tout moment le voile leger que le sentiment des convenances jette sur nos travers : voila pourquoi ils frap- pent d'abord les yeux de I'etranger, qui les cherche comma un soulagement aux souffraaces de I'amour-propre ; toutes les pieces de I'appartement s'ouvrent devant lui, tous les membres de la famille lui sont presentes. En Angleterre, a peine I'etranger trouve-t-il place en un parloir bbscur, le reste est clos, et c'est la que se retirent les visages meur- tris et les yeux gonfles de larmes. Pour connaitre ce qui se passe dans les families, pour s'instrulre des moeurs do- mestiques, il faut consulter la liste des avortemens ct des suicides J il faut lire les sentences des cours d'assises.

Annee.

III. BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.

LITRES ETRANGERS (i).

AMfiRIQUE.

ETATS-UNIS.

217. —Biography , etc, —Biographic des signatairos de la d«i- claratioQ d'ind^pendance , par /oAra Sandbbsow. Philadelphic, 1821. I vol. Jn-S".

3 18. '^Journal of Voyages and travels , etc.— Journal de Voyages dans I'int^rieur de rAmirique septentrionale j'usqu'i I'Ocian paci- fiqne, fbrmant une distance de cinq mille milles; avec une carte da pays; par Daniel Habhoit. Andover. i vol, in-8°.

219. Filial affection. L'amour filial, on la petite fille dc l'Eccl6siastique protestant. Conte moral. Boston, j8ao. i vol, in- 18 de 162 pages.

Outrages ariglais reimprimSs en Amerique.

aao. Life of IFesley , etc. Vie de Wesley, et naissance et progrfes du m^thodisme ; par Robert Souihey. a vol. in-8».

221. Life of the Right Hon. John Philpot Curran. Vie de I'honorable Jean Philpot Curran , maitre des BOles en Irlande ; par son fils JVilliam Cubbak , conseiller. 1 vol. in-8''. (Voyez I'analyse de cetouvrage,i?ef. J?ncxcZ., torn, IX, p, 287,)

322. Memoirs of Richard Louell Edgeworth. M^moires de Richard Lovell Edgeworth; commencclis par lui et achcv6s par sa fille Maria Edcewobth. Boston, 1820. 2 vol. in-S".

EUROPE.

GRANDE-BRETAGNE. aaS. The history of plague ^ etc. Histoire de la pesle

(i) Nous indrquerons, par un astdrisque (*) placd i c6t6 du titre de chaque outrage, ceux des livres Strangers ou frangais qui paraitront digncs d'une attention particuli6re , ct dont nous rendfons quclqucfois comptc dans la section des analyses.

LiVRES Strangers. 555

qui s'est manifest^e derniferement dans les isles de Malte , Goio , Gorfou , Cepbalonie , etc. ; contenant plusieurs faits Importans qui expliquent la contagion sp^cifique de cette maladie , avec les moyens particuliers pour la d6truire ; par J. D. Tolly , chirurgien niilitaire , membre de racademie lonienne , derniferement president du comit6 de Sant6 des lies loniennes. Londres, 1821. Longman .et comp. un vol. in-8».

Les recherches qu'a faites derni^remenl le parlement pour recon- naitre la veritable nature de la peste ,ont donne lieu k la publication de cet -ouvrage , qui contient rhistoire des pestes qui ont ravagi la M6diterranee , pendant les sept derniferes annees, surtout celle des lies lonienifes, dont I'auteur a fait les rapports officiels. II ne se doutait pas alors qu'on eleverait des doutes sur la nature contagieuse de la peste. II ne croit pas que la contagion se propage par I'atmos- pbere , et que le froid ou le cbaud contribuent 6 en arreter le progr6s. Make a eu fr6quemment la peste depuis iSga. On y bSitit le Lazarelh en 1675 ; et c'est en i8i3 qu'on 6prouva la dernifere peste qui fut apport^e d'Alexandrie : elle occasionna beaucoup de ravages; et , au moment oil elle paraissait diminuer, elle fut de nouveau r^pandue par le pillage des marchandises infect^es ; ce n'est que lorsque sir Tbomas Maitland fut arrive pour etablir nn cordon plus serre , que les progr^s du mal furent arrSt^s. Le 4' cli^- pitre de I'ouvrage donne Tesquisse de la peste, en i8i3 et j8i4» sur les rives de Lipanto et en Albanie ; le , celle de Corfou ; le 7°^ celle de C6phalonie ; le 8' , celle de Noja. Partout on a employ^ des moyens analogues, et partout ils ont 6t6 couronn6s de succis lorsqu'on y a mis assez de perseverance. L'auteur fait connaitre, dans le 6' cha- pitre, ceux dont on s'est servi pour procurer des provisions k la popula- tion s6questr6e, et pour garantir de la contagion les personnes chargees de soigner les malades. 11 traite , dans le 9" chapitre , de la necessite de la quarantaiae, qui avail et6 tgalement reconnue par Buonaparte, en Egypte , et de la manifere de purifier les lieux infect^s. 11 y a sans donte des mabdies, dipendantes du climat et de la saison, qui peuvent 6tre confondues avec la peste ; celles-ci se presentent aussi pendant la peste , on doit necatMircment les distinguer pour ne pas prodi- guer Inutilement des moyens rigoureux ; mais la contagion de la peste , par le contact , et la niccssitd du s6questre , ne lui paraisssont

556 LIVRES ETRANG ERS.

sujcttcs ii aucun doute, ct tout ce que rapportc I'autwii- nous coufumc pleincmcnt dans cette opinion. F— b. D. M.

324. The greek Testament, etc. Textc grec du nouvcau Tes- tament, avec des notes latinos, Wttcs des ouvrages de Hardy, Ra- phcl, Kypke, Schleusner , Rosenmuller, et la plupart des variautes de Giiesbach ; par E. Valpv , chapelain de I'evequc de Norwich. Londres, 1S21. 3 vol. in-S"; prix, 2 liv. 12 sh. 6 d.— 62 fr.

Cette savante edition est destinee aux (liludians en theologie de I'eglise anglicane.

3^5. The y!ge of christian reason. L'Age de la ralson chre- tienne, ou Refutation des doctrines de Thomas Paine ct de M; de Volney , sur la religion et sur la politique ; par Thomas BuoLcniow, Londres, 1820. Livington. 1 vol. in-S° de 280 p.

En retranchant de ce volume quelqucs doctrines hasardees , ct les injures fort superflues contre les deistes , les athees et les calholiquos , I'ouyrage, s'il itait traduit dans notre langue , avec.quelques addi- tions , serait tres-utile et obtiendrait un grand succes.

226. 2'/:e enlhousiasm ofmetliodisis and papists , etc. Les ca- ractfcres et les effets du zele excessif des methodistcs et des papistes , par I'eyeque Lavikgton ; nouvelle edition, avec une introduction et des notes, par le rev. Polwhele. Londres, 1821, chez Ics associes Whittaker, etc. 1 voL iu-8°.

On sail que deux communions tres-nombreuses , cellcs des pari- tains ou methodistes, et celles des papistes, autrementdcs catho-. liques, rivalisent, chez les insulaires nos voisins, avec I'eglise ctablie ou I'eglise anglicane reformec. Get ouvrage , plein de faits remar- quables etde reflexions curieuses,a pour objet deservird'instruction aux Anglicans , et de les premunir contre I'csprit de proselytismc des deux autres communions , dont les progres sensibles ont donne do I'inquietude i leurs adversaires. L s.

_ 227. Italy and the Italians, etc. L'ltalic et les Italiensau 19" siecle, ou Lettres sur Petal civil, politique et moral de ce pays, ^■crites en 1818 et 1819; avec un appendice contenant des extraits de litterature italienne modernc , par un officicr etranger, au service de I'Angleterre. Londres, 1821. i vol. in-S" de 271 pages.

Madame de Stael adit ; a Les Italicns sontplus remarquablcs parcc qu'ils ont etc et par ce qu'ils pourraient ttre , que par cc qu'ils sont

LiVRES Strangers. 657

maintenant. ■> Tous ceux qui connaissent I'histciirc dc I'ltallc ne penvent contester la justessc dc cctte remarque. Oependant les Italieus ne mcritent pas non plus d'etre traites avec cette espece d'iadiffcrence dont on peut accuser plusieurs des voyageurs qui ont visite leur pays. Presque tous ont diicrit longuement les mines et les nionumens de I'ltalie, sans s'occuper de peindre le peuple qui I'habite : on, s'ils essaient d'en donner uneidee, o'est en prfitant le memc caraotcre aux Toscans, aux. Napolitains, aux Lombards, aux Genoiis, aux Venitiens , aux Romains, qui different presque autant les uns des autres que les Allemands dififerent des Anglais , et les IloUandais des Fran^ais. L'auteur de cet ouvrage a eu pour but de recliiier plusieurs crreurs de ce genre, en s'appliquant h peindre les moeurs et les habitudes des Italiens,non d'apres -des donnees generales et vagues , mais d'aprus ses propres observations. Elcve en Italie, dont il possede parfaitement la langue, l'auteur y a fait dernieremcnt un voyage et un sejour de quelques mols.' Parmi plusieurs details interessans sur les moeurs et les institutions des Napolitains, nousavons remarque le passage suivant : « II existe i Naples une institution, la seule de ce genre qu'il y ait en Europe; o'est un college oii sont 6leves de jeunes Cbinois , enlev^s i leur palrie par les missionnaires , quand ils n'ont que treize on quatorze ans. lis resolvent les ordres, et retournent ensuite dans leur pays pour y repandre le cbristianisme : il y avait six Cbinois an coll6ge en iSiS. » Cet ouvrage, ecrit avec elegance, eveille et satisfait la' curiosite. II renfernie des apergus interessans sur I'etat moral et politique des Italiens. L. S. B.

228. yin account of the interior of Ceylan , etc. Description de I'interieur de I'ile de Ceylan, par John Davy. D. RI. F. R. S. Londres, 1821. 1 vol. in-4°.

D6ji Knox, Gauticr, Schouten, R. Percival, Cordiner et plusieurs autres ont decrit les moeurs et les usages des Chingulais ; un pseu- donymc d'Oxford a trace leur histoire. Gependant Pouvrage de M. Davy contient un grand nombre de details entiferement neufs snr cette ile , interessante sous tant de rapports. L'antiquite des Itraditions conserv6es paries Indous sur Tapou Rarana (I'ile de BaTana) (1) , les temples immenses qui subsistent encore dans quel-

(i) De lale nom grec Taprobane. Voy. les Monumens de I'Hin- doustan, parM. Lakgl^s. Paris, 1S21. 2 vol. in-folio.

658 LIVRES iXRAffGERS.

quea-tuu de ses cantons, la, singularitii des coutumes dc see habitans,- les bizarreriea geologiques que le sol offre aux naturalistes ; enfin , I'importance de ses produita, tout appelle I'intirfit sur ce pays, dicritparM. Davy avecd'autant plus de soin que li,comme partout ailleurs, le titre dc m^decia sufEt pour aplanir tous les obstacles.

E. Gacttieb.

aag. Journal of a voyage for the discovery of a norlh-west passage, elc. Journal du voyage entrepris pour d^couvrir un pas- sage au nord-ouest , entrel'ocean Atlantique et la mer Pacjfique...., par le capitaine W. Parhy. Londres, i8ai. i vol. in-4°«

D6jS plusieurs relations interessantes avaient entretenu le public de I'bistoirede la seoonde expedition cntrcprise par la marine an- glaise, ponr decouvrir un passage au nord-ouest de rAmirique; mais elles n'avaient pas de caractfere officiel. Le capitaine Parry , commandant I'expedition , vient enfin de publier la relation authen- tique de son voyage. Nous n'en extrairons que les details cssenticis , attendu que cet ouvrage vient d'etre traduit en fran^ais.

Des leur entree dans le detroif de Davis, en juillct 1819, les deux frogates anglaiscs rencontrerent tant de glaces , qu'elles eurent de la peine i avancer ; elles entrferent n^anmoins , le 3o juillet, dans le Sund de Lancaster, oil elks trouvferent une immense quantite de baleines. Le capitaine Ross, commandant de Texpcdition prece- dente , n'y etait arriv6 , en i8i8, qu'a la fin d'ao&t; ce qui avail augmente les obstacles de la route. Son successeur avail I'instruction de p6netrer dans le grand Sund , k I'ouest de la bale de Baffin. Ce fut done dans cette direction que les deux fregates avanctrent , en donnant des noma aux cOtes , aux caps et aux iles qu'elles rencon- trferent. Suivant I'usage , ce furent les fonctionnaires publics et les hommes bien vus du gouvernement , dont on emprunta les nonis. pour les appliquer h la geographic. Ce n'cst pas an parti de I'Oppo- sition, quelque respectable qu'il soil, que de pareils honneurs sont j^serves. Un capitaine de marine , mfime , est assez courtisan pour s^voir qu'il serait maladroit d'honorer des noms qui diplaisent aux ministres. L'expedition conlinua de naviguer dans la direction de I'ouest , pendant le mois d'aoftt ; il n'y avail pas de doute qu'elle ne ffit dans la mer Polaire ; elle trouva un groupe d'iles , qui re^ut le nom de la Nouvelle Georgie, ct une des plus grandes de ces ile* fut nominee He Melville; le 5 septembre, les deux batimcns se

iiVRES Strangers. ^^

trouverenl 4 no" ouest du m^ridien de Greenwich, et h 74" 44' a" de latitude septentrionale ; par consequent, ils eurentgagn6 la prime de cinq mille livres sterling, promise par le parlement aux b&timens qui arriveraient les premiers i cette longitude, dans le cercle polaire arctique. Les matelots apprirent avec joie cette nouvelle, que leur communiqua le capitaine Parry , et la premiere pointe de ^erre qu'ils rencontrerent teqixt d'eux le nom de cap de la Prime (Bounty cape). On essaya de se porter plus loin vers Touest; mais les vents et les glaces les en emp£ch6rent; le theMnomttre tomba subitementi 5o°; les jours devinrent tres-courts , et il fallut se resoudre a passer un hiver de plus de dis mcis dans une baie de Tile Melville ; encore fallut-il se frayer , pour y arriver, un passage 4 travers la glace. Tons les agrfcs fureat mis a ccuvert , et Ton s'arrangea pour passer ce long hiver le moins desagreablement possible. Le capitaine Parry s'kna- gina de faire rediger, par ses officiers, un journal qui fut intitule : Ga- zette de la Nouvelle Georgie, et qui, au retour de I'expedition', a^t6 imprime en Angleterre (^. ci-apr6s} : de plus , il organisaun theatre, dont les representations amus^rent infiniment les matelots et i'ureat tr6s-suivies. Le soleil disparut, le 4 novembre , pour ne reparaitre que quatre-vingt-seize jours apres. Les loups commencJ'.rent k hurler sur les neiges et les glaces autour des b4timens; ce furent les seals ani- manx que Ton vit en nombre ; un ours blanc fit une courte appari- tion ; les coups de fusil dont il fut accueilli ne I'engagerent pas k revenir. Vers la fin de novembre et au commencement de decembre, la temperature fut d'une rigueur extrfime ; I'obscurit^ 6tait dissipee en partie par les belies aurores boreales et par la lune , dont le disque brillant scmblait reposer quelquefois snr une colonne de lu- miere , ou que la refraction de la lumiere faisait paraitre comme brise ; quelquefois la lumitre jaillissait de nuages legers et transpa- rens. Le scorbut commenQa k se manifester parmi I'equipage ; mais on fit croitre , pour les maladcs , du cresson dans de la terre humide au-dessous d'un pofile ; on eut soln aussi de distribuer journellement aux matelots du jus de citron avec du sucre ; par ces moyens , on empecha la maladie de faire des progres. 11 est k remarquer que la salade que Ton fit croitre dans le bStiment n'avait pas de couleur, parce que la vegetation avait ete priv6e d'air.

Le 3 fevrier , on aper^ut le soleil , du haut des huniers ; ks joi)r» suivans il y eut une aurore qui alia toujours eh augmentant; enfin ,

560 LIVRES ETRANGERS.

Ic 7 , le jour fut assez long pour que Ton pflt alkr i lerrc ct com- mcncer 4 travaillcr aux preparatifs du depart. Les mois suivans sc passfercnt dans I'attcnte du degcl. Au inois de mai, le capitainc Parry fit dans I'ile un petit jardin oil il planta des oignons, des radis, du cresson ct de la moutarde; aucune dc ccs plantations ne ruussit. Lc i"''juin, on fit une excursion dans I'ile; on n'y trouva que peu de vegfjtaux, entre autrcs une renoncule en plcine floraison ; on vlt des gouris, un bocuf musque, des hirondelles, des canards ct des oies sauvages, des betes fauves , etc. Sur une pointe deterre, on vit des restesde six huttes d'EsquimauX , qui apparemment viennent dans cette ile pendant la courte dur6e de Pete. An milieu du mois de juillet , le tems fut doux et agreable ; I'cqUipage se llvra 4 la chasse ; la mer fut libre , ct , au i" aoCit , les deux bdtimens mirent a la voile pour continuer leurs decouvertes k I'ouest , et passer', s'il etait possible , dans la mer du Sud. Cependant ils curent a lutter contre des vents si violens et des masses de glaces tellenient fortes , que le commandant perdit I'espoir d'aller plus loin. II tint consnil avec ses oEGciers , et il fut resolu que Ton retournerait , pour n'etre pas expose a passer infructueusement un second hiver dans ces re- gions glacees. On prit done le chemin de retour, avec la certitude d'avoir pousse la navigation dans la mer Polaire , plus loin qu'ellc ne I'avait ete. Le rapitaine Parry ne doute pas qu'il n'existe un pas- sage entre I'Ocean Atlantiqiie et la mer du Sud ; mais, vu la courte duree de la saison navigable, les vents et les glaces, il n'est gufere possible d'en proGter ; peut-etre , le parcourrait-on plus facilement en partant du detroit de Behring, et en allant par consequent de I'ouest i Test. II peut se trouver, d'ailleurs, k des latitudes moins elev6es , des communications entre I'Ocean et la mer Polaire. Le capitaine designe comme des points qui meriteraient d'etre explores dans cette intention , le detroit de Cumberland , le passage dit Sir Rowe's-ff^elcome , situe entre I'ile Southampton et la cote d'Ame- rique ; enfin , la bale de Refus , Repulse-Baj. On sait que ce niarin habile a rc^u de I'amiraute anglaise le conimandement d'une autre expedition qui va continuer les decouvertes commencees dans le cercle polaire. D— g.

23o. The north Georgia Gazette , etc. Gazette d6 la Georgie septentrionale , ou chronique d'hiver. Londrcs, 1821. 1 vol. in-4" de i32 pages.

LiVRES Strangers. sgi

Get ouvrage est rcmarquable par les circonstances singuliires qui I'ont fait naitre. Exiltis loin du monde civilisi ; reduits a passer ua long hiver dans les mers arctiques , au milieu de* glaces du pole , les officicrs qui composaient I'equipagc des deux vaisseaux anglais, I'Hecla etle Griper, envoyes i la decouverte d'un passage nord- ouest de rOc6an Pacifique dans rOcean Atlantique, imaginerenl deux nioyens d'6chapper a I'ennui qui les menacait. lis ouvrirent un theatre et fond^rent un journal qui devait paraitre toutes les se- maines, et qui n'etait compos6 que de morceaux originaux. La di- rection du theatre fut confiee au lieutenant Beechey, qui peignit les decorations , et le capitaine Sabine consentit k devenir 6diteur du journal. On recomnianda k ceux qui voulaient coatribuer k la re- daction de ce recueil , de mettre au has de leurs articles un signe particulier , dont eus seuls auraient la clef, et de deguiser leur ecriture , afin que les jugemens et les censures pussent avoir le ca- ractere de I'impartialit^. La boite aux lettres de I'editeur fut plac6e sur le cabestan de I'Hecla , et le premier num6ro de la Gazette de la Georgie septentrionale parut le i'^' novembre 1819. Le recueil alia jusqu'a vingt-un cahiers. Ces feuilles detachfees, que Ton a r6unies et que Ton vient de publier en Angleterre sans y rien changer, contien- nent des lettres , des poesies fugitives , des critiques dramatlques et d'autres morceaux detaches. On sent qu'un ouvrage de ce genre ne pourrait supporter une critique bien s6v6re ; aussi doit-il 6tre regards plutot comme objet de curiosity , vu la situation oil se trouvaient les auteurs , que comme production litteraire. On remarque une des- cription en vers des mers arctiques et des glaces 6ternelles des p6les , qui est icrite avec verite. Ce volume pent servir d'appendice k la relation du voyage que nous avons annonce ci-dessus.

201. T/ie Legend of Argyle , etc. La Lcgende d'Argyle , ou II y a cent ans passes. Londres, 1821, Colburn. 2 vol. in-S".

Ce titre est evidemment imit6 de celui de TVaverley ou V icosse il y a soixante ans. L'autcur n'avait pas besoin d'employer ce petit artifice; I'ouvrage pent etre lu pour lui-meme. L'intrigue est fond6e sur la revoke de 171 5 en faveur de la maison de Stuart, et le due d'Argyle, celebr6 par Pope, en est le heros. Les caracteres histori- ques sont peints avec esprit et fid6lit6 ; les personnages imaglnaires sont bien dans I'esprit du terns, et tels que I'epoque a dii en pro- duire. Ce sont^ pour la plupart, des Jacobites et des anti- Jacobites,

Tomb xi. 36

562 LIVRES fiXRANGERS.

des enthousiastes d^vou^s aux diiKrens partis, des ofliciers de for- tune, etc. Une imagination ft^conde a sii animer, par une foule de details interessans, Ics fails empriinles rhistoire. Le style est gi- neralement pur et facile.

252. The History and Anliquitles of the Tower of London , etc. Hjstoire et Antiquites de la Tour de Londres, avec des anec- dotes biographiqucs sur plusieurs personnes royales et sur des per- sonnages de distinction; liries des registrcs, des papiers de I'etat, des manuscrits deposts k la Tour, et d'autres sources authentiques ; par John Bailey. Publiees en deux parties. i'* partic. Londres , iSai. Murray, i vol. in-4° de 3o6 pages.

La Tour est un des plus antiques edifices de Londres. Apris avoir ete la residence de plusieurs souverains , elle est devenue prison d'etat. Le sceptre el les diamans de la couronne d'Angleterre y sont aiissi deposes. L'auteur de I'ouvrage que nous annon^ons donne au public, dans cette premiere partie , une histoire chronologique et gcnerale de la Tour, comme palais et comme forteresse , avec la description de tous scs batimens. Elle servit de refuge au roi Jean, en i2i5, lors de la revolte de ses barons. Henri III I'habita long- tems , la fortifia et orna la chapelle de peintures et de sculptures. Vers la fin du rfegne de ce prince , la possession de la Tour lui fut contestee par les nobles revolt^s. Sous Edouard III , elle deviut la prison du celebre roi ecossais David Bruce, qui y fut renferm6 avec plusieurs chefs de la mfime nation , fails prisonniers i la balaille de Neville's Cross , en i346. Charles de Blois , I'un des compttiteurs k la couronne de Bretagne, le vaillant Jean de Vienne , le gouverneur de Calais , et douze des plus braves d6fenseurs de cette ville , enfin Jean, roi de France, et son fils Philippe furent aussi diStenus dans la Tour. M. Bailey promet , pour la seconde partic , des notices bio- graphiques sur lous ces personnages et sur plusieurs aulres captifs en- fermes dans la Tour pour crime d'etat. Cette partie , qui sera la plus inleressante , paraitra incessamment ; elle contiendra la description des anciennes coutumes, de la juridiclion et des privileges attaches i la Tour. L. S. B.

POLOGNE.

a33. yistronomia , elc. Aslronomie des Dames, par La- lAKDE , traduite du frani^ais par Franfois Srouorowsr.i. Varsovie , 1821. Gliicksberg. 1 vol. in-18.

LIVRES ilTRANGERS. h6S

234. O^talnic lata panoivanie , etc. Dernieres annies du r^gne de Slgismond- Auguste. Ouvrage extrait de manuscrits sur I'histoire de Pologne; ])at Joachim Lelewbl. Varsovie, I'Szi. Gliicks- berg. 1 vol. in-S".

Le public desire depuis long-tems que M. Lelewel fasse imprimer ses manuscrits sur I'histoire de Pologne. L'extrait que nous annonijons est bien propre i justifier cet empressement.

235. Pielgrzym Dobromilu , etc. Suite du P^lerin k Dobro- mil. Varsovie, 1S21. N. Gliicksberg. 1 vol. in-12, avec figures litho- graphi6es.

Nous avons deji annonce ( Voy. Tom. VIII, pag. 58o. ) le Pele- rin a Dobromil ^ auquel I'auteur vient de donner une suite. Madame la princesse Czartoriska , aprfes avoir consacr6 une partie de sa vie et dc sa fortune k l'6ducation de quarante-neuf jeunes personnes , qu'elle avail prises dfes I'Sge le plus tendre , et qu'ellc dirigea jus- qu'au moment de leur mariage , emploie aujourd'hui ses loisirs k la composition d'ouvrages moraui k la portd-e des paysans , et destines k servir k I'instruction du peuple; elle est secondee dans cette noble t4che par sa fille, la princesse de Wiirtemberg, dont on trouve , dans le premier volume de cet ouvrage, cinq Nouvelles pleines de grdce et de naivete, Celui que nous annon^ons, comme le pr6c6- dent , contient des observations morales puisfees dans les moeurs villageoises , ce qui donne aux ricits la couleur de I'idylle. Le Pe- lerin loue et critique ce que les paysans font sous ses yeux ; toutes les conversations ont pour objet les bonnes qualites et les mauvaises habitudes des paysans polonais. Cet ouvrage respire I'amour de la patrie , et Ton ne saurait lui accorder trop d'6loges. On y trouve , a la fin , quelques chants nationauz avec la musique.

256. Diezwica z Abidos , etc. La Vierge d'Abidos , poeme de lord Bybon , traduit en vers polonais par le comte Ladislas Os- TBOwsKi. Varsovie, iSai.N. Gliicksberg. In-S".

Cette charmante traduction fait naltre le desir de voir son auteur enrichir la litterature polonaise des autres productions du poete anglais. L'exccution typographique prouve que M. Gliicksberg n'6- pargne aucuns soins ni aucune depense pour donner aux ouvrages sortis de sa librairie tout le degr6 de perfection dont Timprimerie est susceptible. B.

257. Pie rre-le-G rand , ou I'Amonr du monarque pour sa Na-

36*

56A LIVRES STRANGERS.

tion , tragidie polonaise en prose; par M, Szomski , professeur au gymnase de Posen ; ouvrage dont Tempereur Alexandre a accepts la dedicace. Poscn, 1S20.

L'auteur de cette tragedie, connu par quelques ouvrages concer- nant I'instruction publique, s'occupe surtout a repandre le goilt de la litleratiire polonaise dans la partie de la Pologne lichue 6 la Prusse. II a f'onde i Poscn une blbliolhOque d'ouvrages polonais, choisis avec soin , la seule qui existe dans le grand-duclni de Posen.

NORViGE.

•iiS. Loi-'givnings-Principies, etc. Priucipes de legislation, ou I'Elat dans ses rapports avec la religion , les moeurs et la civi- lisation, par M. N. Tbeschow. Cbristiania , 1820. i vol. in -8° de 464 pages.

L'auteur de cet excellent ouvrage merite d'etre mieu* connu qu'il ne Test. Penseur profond , pbilosophe eclair^ , il aurait et6 plus celibre , son nom aurait ete prononc6 avec ceux des Kant, des Fichte , des Scbelling , s'il av.iit appartenu a un pays dont la langue ffit plus rtpandue que la sienne. Parmi plusieurs ouvrages dejii pu- blics par M. Trescbow, nous distinguons une Philosophie de I'his- foiVe, qu'il fit imprimer,en 1811, a I'usagedeson coursde pbilosophic, lorsqu'il etait professeur i I'universite de Copenbague. L'ouvrage que nous annonc^ons aujourd'bui est divise en cinq parties. Dans la premifere , il examine I'essence et le but de la societe ; dans la seconde, il traite de la civilisation et des moyens d'yparvenir; dans la troisieme, il s'occupe des devoirs de I'ctat par rapport A la reli- gion ; dans la quatrieme, il montre de quelle maniure et jusqu'i quel point I'elat peut et doit exercer son influence sur les moeurs publiques ; enfin, dans la cinquieme partie, il explique ce que I'itat doit faire pour encourager les progrcs des sciences et de toutes les connaissances humaines, et pour leur donner une direction utile i la societe et 5 I'humanite en general. Toutes ces matieres sont traitees avec la profondeur et la sagacite qui distinguent 6minemment cet auteur, si celebre dans son pays. II est k regretter seulement qu'il semble avoir abandonne, du moins jusqu'i un certain point , un petit nombre de ces principes liberaux qu'il se faisait autrefois un honneur de professor. C'est ainsi que plusieurs des principes qu'il Atablit aujourdbui nous paraissent conduire a I'intolerance en ma-

LIVRES ETRANGERS. 555

ti^re religieuse; c'est ainsi qu'il voit la noblesse el les oidics de chevalerie d'un ceil plus favorable qu'il ne convient i un phllosophe. Ce changement d'opinion seiait - il par hasard une consequence hecessaire du changement qui s'est opere dans la position politique de I'auteur, qui, de professeur a Puniversite de Christiania, est devenu tout-a-coup grand fonctionnaire public, commandeur d'un ordre suedois, et conseiller d'etat k porte-feuille ? Nous ne voulons pas le croire ; nous aimons inieux attribuer ce changement inattendu «k la faiblesse presque toujours inseparable d'un flge tres-avance. M. Treschow est arrive a I'age de soixante-dix ans. Le second volume paraitra cette annce; il sera suivi d'un troisieme et dernier volume.

239. Norraena ,etc. Collection de chants nationaux, norve- giens. Christiania, 1821, in-S°.

En 1819, le prince de Ilesse-Philipsthal proposa, en Danemarck, nn prix pour la meilleure chanson nationale. En faisant connaitre aux lecteurs de la Reuue Encyclopedique cette idee, qui nous pa- raissait plus noble que reflechie , nous avons ctetaille les raisons qui nous ont emp6ch6s de I'approuver. [Voy. T. VI, p. 4io.) Nous croyons que le tems a justifie nos reflexions. Neanmoins , cette id6e en a sugger6 une pareille A M. Ptoen , negociant tres-respec- tablc de Christiania , et surtout bon patriote. II proposa un prix pour le meilleur chant national uorvegien , et le livre que nous annoDfons prisente le risultat de son entreprise, en vingt-un chants plus ou moins bons, que nous n'hesitons pas d'appeler patriotiques, en laissant au tems a decider si l*un ou plusieurs de ces petits poemes seront un jour dignes d'etre considenis comme des chants vraiment nationaux. II faut avouer, en attendant, que la justice a preside au choix de la piece couronnee. Son auteur est M. Bjerbe- G'AABo. On pourrait bien nommer apres lui d'autres poetes ; mais il y en a qui se sont etrangement trompes sur le veritable caractere d'un chant national. lis ont eu le malheur d*oublier que le prince et les families royares meurent, et que la patrie et le peuple seula. sont eternels. Heiberg..

ALLEMAGNE.

a.-io. Uinriss der Geschlchiedes PreussischenStaates. Esquisse- de I'histoire dcs Etats pnissiens, par C. II. L. Pcelitz, professeur de sciences politiques h I'universile dc Berlin. Leipsick, 1821.

566 LIVRES STRANGERS.

Ce n'est pas le premier ouvrage quo M. r<rlitz public sur I'histoire de la monarchic prussienne ; il est d(iji connu trfes-avantagcuscment, et personne n'a fait , en co genre , de plus profondes recherches que ' lui. Sans 6tre un abregej I'ouvrage que nous annon^ons est deslin^ k guider les professeurs dans Icurs le<;ons d'histoirc ; il n'a done pas lui-meme une bien grande etendue. La Marche de Brandebourg est le point de depart de I'auteur : les annales dcs autres parties de la Prusse nc sent expliquees aux yeux des lecteurs que quand M. Palilz arrive tk lour reunion i la monarchie. C'cst alors seu- lemcnt que, remontant pour chacune aux tems anciens, il les fait plus specialement connaitre. Cette esquisse est divisic en cinq par- ties. La premiere atteint I'tpoque oil la dignit6 de margrave fut declaree h6r6ditaire, c'est-i-dire I'annee 1142; la scconde montre cette dynastic des margraves regnant dans le Brandebourg , jusqu'en i320 ; la troisifeme traite de I'histoire de Brandebourg, sous les dynasties de Wittelsbach et de Luxembourg, jusqu'en i4>5 ; la quatrieme s'occupe de la dynastic de Ilohenzollern , depuis I'elec- teur Frederic !"■ jusqu'i I'elccteur Frtideric-Guillaume , en i64o ; enCn la cinquiime, qui s'^tend jusqu'en 1820, nous montre le Brandebourg devenu royaumc. L'une des parties les plus brillantes de ce livre est , sans contredit , I'histoire du Grand-Frederic.

241. Briefe von Joseph II , etc. Lettres inedites de Joseph II, ou traits caracteristiques pour servir h I'histoire de la vie publique et privee de ce monarque. Leipsick, 1821, in-S".

L'edileur ne s'est point nomm6 ; et, quoiqu'il ait privc les lecteurs de tout moyen de verifier I'authenticite d'une correspondancc aussi importante, tout en elle revele le g6nie de I'illustre empcreur auquel clle est attribuee. On sera bien aise sans doute de savoir ce que pensait ce monarque sur plusieurs points qu'on semble vouloir re- naettre en discussion. Commen9ons par les jesuiles : « Jelesconnais, ecrivait-il k M. de Choiseul en Janvier 1770; je saia leurs projets aussi bien qu'aucun autre. Leur plan est de couvrir la terre de te- nfebres et de brouiller tout en Europe , depuis le cap Finistere jusqu'a lamer Baltique. En Allemagne, ils sont mandarins ; en France, ils sont academiciens, honimes de cour et confesscurs ; en Espagne et en Portugal, ils sont les grands de la nation ; enfin au Paraguay, ils sont rois. Si Joseph P' n'etait point arrive a rempire, I'AlIe- magne amait appris a connaitre leurs Malagridas et leurs Avciros;

LIVRES ETRANGERS. 567

elle auralt et6 temoin d'une tentative de regicide. » Les mSmes sentimens se retrouvent dans une lettre de Joseph II au comte d'Aranda ; elle est datee de juillet 1773. En 1780, Joseph II 6crivait Ix M. de Choiseul : « L'influencc du clerge siir le gouvernement , sous le rfegne de ma tnfere , sera I'objet d'une reforme de ma part. Je n'ainie pas k voir ceus dent la mission est dc nous preparer une autre vie, appliquer leur sagesse aux choses d'ici-bas. » En 1782 , rempereur, ayant Ote le commandement de la Boheme au prince de Furstemberg, fut vivement sollicite de revoquer cette decision; mais il repondit qu'il persistait dans sa resolution ; qu'i la verite il connaissait les services de la famille de Furstemberg, mais qu'il voulait que chacua fut i sa place ; et que le gentilhommc qui comptait des marechaux parmi ses aieux n'en restat pas moins un simple lieutenant, s'il n'etait doue des hautes qualites necessaires pour le commandement. Une dame avait demandc de I'emploi pour son fils , elle etait veuve d'un general ; mais ce guerrier n'avait point legue son merite i ce jeunc homme , tres-infatue de sa nais- sance. « Je suis fiche, Madame, repondit Joseph II, de ne pouvoir faire de votre fils ni un officier, ni un homme d'etat, ni un pretre ; en un mot, il n'est que gentilhommc, mais il I'est de toute son ame. » On se tromperait , si Ton pensait que cette fermete de Joseph II , opposee si i projjos k des pretentions deplacees , excluait en lui les sentimens doux et tendres. Chaque fois qu'il parle des parens que la mort lui a ravis, ou des personnes qui lui sont chercs, il le fait dans les termes les plus touchans, et Ton peut citer, comme un modele en ce genre, la lettre qu'il ecrivit, en fevrier 1786, au roi de France actuel , alors comte de Provence. Nous citerons encore les passages suivans, extraits d'une lettre de I'empereur i I'un de ses amis, en octobre 17S7. « Depuis mon av6nement, je me suis efforc^ de gagner la conBance de mes peuples ; j'ai souvent prouve par les faits que le bien de mes sujets etait ma passion; que, pour la satisfaire , je ne redoutais ni peines, ni travaux, ni tourmens; eufin, que je n'employais aucun moyen sans avoir murement re- fl^chi sur son utilite. Et cependant, partout on oppose des obstacles,, aux ameliorations que j'ai projelees ; et ces obstacles viennent de ceux-la meuie de qui je ne devais pas en attendre. Si je n'etais persuade que la providence m'a impost le fardeau du diademe avec I'obligation de subir toules les peines qui s'y Irouvent attachics.

568 LIVRES ETRANGEllS.

le d^couragement accablcrait ma vie , et le vocu dc n'fitre plus s'euiparerait de mon esprit malgr6 moi ; mais jc connais trop mon coeur, la droiture de mes intentions me soutient, Oui , je I'espire, «n jour, quand je ne serai plus, la posterite plus juste, plus impar- tiale , appreciera ce que j'ai fait pour mon peuplc. » Ces lettrcs sont en allemand. On so demande si Joseph II les a toutes 6crites en cette langue , ct s'il a traduit ou fait traduire en fran^als celles qui n'ont pu etre envoyees qu'en fran^ais ; ou bien si I'tditeur n'aurait pas lui-meme mis en allemand les lettres Sorites en francais par I'empereur.

242. Homers Hymnus , etc. Hymne d'Homere i> Certs , traduit en vers , avec le teste grec en regard , expliqu6 au moyen des hitroglyphes et des traditions sacrees ; ouvrage prficedu d'une lettre 4 M. Greutzer; par F. A. L. Sicklee, directeur du gymnase de Hildburg-Hausen. Hildburg-IIausen , 1820. in-S".

L'auteur est deja connu par plusieurs ouvrages dans lesquels il a toujours eu pour but de prouver que la civilisation et la mythologic des Grecs leur sont venues d'Orient; il s'est livre a cet egard 6 de longs d6veloppemens , que Ton peut lire surtout dans son Cadmus, oil il cherche ^ etablir que tous les noms mythologiques sont ddrires des lan^xxts semitiques. M. Sicklerne voit pas dans les Lieroglyphes et dans les symboles la designation de choses et dc pensees, mais des sentences et des adages qu'il faudrail expliquer par les noms donnes en hebreu aux objets representes , et surtout par la conson- nance de ces noms. Ce systeme a ite amplement discutti dans la dissertation intitulee : Die Uieroglj'phen in dem Mjlhus des JEs- culapiuS' L'epitre dedicatoire qui precede I'bymne i Ceres indique le but de I'auteur : il a voulu demontrer la haute antiquity de la doctrine contenue dans cet hymne; il commence par des idees gene- rales sur les langues, les hieroglypbes et la /(aroTZomai/e. G'est sur- tout de cette derniere que M. Sickler fait usage ; elle repose sur la similitude des sons dans des mots dont les |uns dcsignent<les objets sensibles et palpables , et les autres des etres abstraits, M. Sickler dit que I'ancienne langue hellenique n'a d'autres elemens que ceux que nous retrouvons dans tous les dialectes semitiques. A ce sujet, nousrecommandons aux Iccteurs la correspondance de deux hommes justement celebres, MM. Greutzer et Hermann; leurs vues sur ce point important ont ete de nouveau reproduites par un penseu?

LIVRES liTRANGERS. 569

profoad, M. le comte Ouvaroff, dans un ecrit intitul6 : Uber das vorhomerische zeilalier (_sut les terns anterieurs i Homfere). Get dcrit a paru i Saint-Petersbourg en i S 1 9. On trouve , dans ces ou vrages, des choses qui ne plairont pas aux hommes qui ne veulent rien d'aa- terieur a Homiire. Quant au texte grec, M. Sickler a suivi Wolf, i peu de chose pres. Ph- Goldkhy.

243. Allgemeines bibliogr. Lexicon. Dictionnaire general de bibliographle ; par Fr. A. Ebert , secretaire de la bibliotheque royale de Dresde. Leipsick, 1S21. Brockhaus. Gah. 5 et6, in-i"-

Nous avons deji annonc6 cet ouvrage utile et dont le Manuel da Libraire, par M. Brunet , a donne la premifere idee : mais le plan de M. Ebert est plus vaste et plus savant que 'celui du libraire de Paris. M. Brunet a traits la bibliographic sous les rapports du com- merce de la librairie , et n'a pas mis toujours une exactitude scru- puleuse dans I'indication des titres; la litterature 6trangere est en grande partie negligee dans son livre ; quant & la litterature classique, il n'a indique que les editions qui sont recherchees dans le com- merce. Le bibljographe de Dresde, tout enrendant justice au merite du Manuel, qui a obtenu trois (Editions en peu d'annees, a cher- chd a composer un ouvrage qui put & la fois satisfaire les savans et les bibliomanes. Avec ce systfeme d'abreviation et d'impression dconomique qu'il a suivi pour son dictionnaire, il pourra renfermer presque toute la bibllograpLie en 3 vol. in-4°, de grosseur moyenne ; il est vrai qu'il est oblige de laisser de cote les livres qui n'ont qu'un interet tres-special , et, pour ainsi dire, purement local. Pour la France , le Manuel de M. Brunet et les ouvrages bibliographiques de M. Renouard I'ont mis k meme d'etre aussi complet que pos- sible ; toutefois , il s'est etendu sur les vieux romans franrais et sur les ouvrages en patois, plus que le premier de ces auteurs. Les biblio- manes de I'Angleterre ont ete si productifs , que I'auteur ne pouvait etre embarrasse pour la litterature de ce pays. L'ltalie a fournj aussi de bons ouvrages bibliographiques , dont M. Brunet n'a pas assei profile. II n'en est pas de meme de I'Espagne , gen^ralement pauvre' en bibliographes. On ne peut se fier entierement a Machedo ; An- tonio Santander n'a donne que peu de renseignemens ; et Caballero, que I'auteur n'a pu se procurer, n'est ni exact , ni complet. Pour le Portugal, M. Ebert se rejouit d'avoir pu profiler du catalogue d'auteurs , public par I'academie de Lisbonne ; de m^me qu'il a tire

570 LIVRES ETRANGERS.

bon parti du Naamlyst Lollandais. II assure avoir ^le bicn scrvi pour la Sut:de ; mais il avoue son indigence bibliographique i I'ugard des litt(iratures danoise, polonaise et russe. II s'est peu attache k la litteraturc orientale , a cause de son inleret borni , et il a presque passe sous silence la litttirature rabbiniquc. Au reste , M. Ebert assure avoir vcrifie par lui-mcme les litres de tous les livres que pos- stide la bibliolhcque de Dresde. II est difficile de trouver en dcfaut un homme aussi exact: toutefois, M. Ebert avoue que son diction- nairc est loin d'etre exempt de fautes. Je lui ferai reniarquer en passant que la collection des Memoires de Vacademie des belles- lettres, d'/iistoire et d'antiquiles de Suede a plus de 8 volumes ; I'exemplaire que cette academic a adressc i la societe royale des Antiquaires de France en a lo, dont le dernier est de 181G; peut- €tre en a-t-il paru d'autres dcpuis ce terns. Je ne vois pas pourquoi M. Ebert n'a point fait mention des auteurs allemands vivans. 11 a ite court dans la partie qui concerne la litterature allemande dc la deuxieme moitie du dix-huitieme sifecle , parce qu'il observe que I'ouvrage d'Erscb traite specialement de cette partie. Je suis fdcUu qu'un bibliographe aussi distingue ait mis i la tete de son dictionnaire unc dedicace aussi humble ; M. Ebert y parle de la grace que lui fait son Mecene , un baron de Friesen , en daigncnt s'intercsser i ses rechercbes. Un cbambellan est sans doute un personnage important; cepcndant il semble qu'un bon bibliographe vaut aussi quelque chose , et que la distance n'est pas si grande pour que le savant doive s'ahaisser devant I'homme de cour. Depping.

244- Uber Deutsche Runen. Sur les runes allemands , par Guillaume-Charles Gbimm. Goettingeu. 1821, in-4° de 028 p. avec figures.

On nomme runes ou runiques, des caracteres trfes-differens de tous ceux que nous connaissons. On les trouve graves sur les pierres et sur les monumens , dans le nord de I'Europe , en Danemarck , en Suede , et meme dans une partie de la Tartaric. Diverses opinions se sont elevees i ce sujet ; les uns veulent voir dans les runes une mauvaise imitation des caracteres romains; les autrcs disent qu'un eveque.appcle Ulphilas, les a inventes, lorsqu'il traduisitlaBible en langue gothiquc ; d'autres encore, et avec plus de raison , eta- blissent pour les runes une antiquite plus reculec. Enfin , on a prelcndu qu'Odin, ce dieu Icgislateuj des peuplcs scptentiionaux ,

LIVRES ETRANGERS. 571

les avait apportes de Scythie. M. Grimm s'occupe d'aboid de I'origine du mot /■«««, que quelques pcrsonnes ont voulu faire deriver d'un mot gotbique qui signiCe couper , tailler ; il en trouve uoe toute difffirente, qu'il prend dans le mot raunen, encore usitc , mot qu'il rend dans le mCme sens que re^oit en latin susurrus ; en sorte que , selon lui , rune signifie murmurer k voix basse, et se rapporte aux choses secretes que Ton revelait par ce moyen , ou bien encore i la manitire dont les personnes peu habituees k la lecture pro- noncent les mots en les dSchiffrant. Ce n'est que des runes alle- mands que s'occupe M. Grimm ; on a tant ecrit sur ceux du nord, que le seul catalogue de ces trait6s tient plusieurs feuilles dans Vllisloire des Danois , par Suhm , et dans la Litteralure Danoise de Nierup. M. Grimm n'a pas une aussi terrible concurrence S redouter; il est jusqu'ici le seul qui ait parle i fond des runes allemands ; et la bonte de son livre pourrait , en desesp6rant ses concurrens , le faire jouir dc cet avantage pendant long-tems. M. Grimm a un talent tr6s prononce pour remonter , i I'aide des langues , vers les faits bis- toriques les plus recul6s. II etablit un parallele entre les alphabets runiques du nord , des Allemands et des Anglo-saxons ; puis il exa- mine entre eux la question de priorite, et accorde la preseancc a celui du nord, compost de 16 runes ou caracteres, parce qu'il a etc ap- porte par les peuples de I'Asie , i I'epoque des grandes emigrations. Si nos lecteurs sont curieux de voir des alphabets de cc genre , nous les renverrons i lapaleographie scandinaue que M. Arendt d'Altona a fait graver en 1818; lapreuve la plus sQre, selon nous, qu'Ulphilas n'est point I'inventeur de cescaractfcres , c'est qu'en Su6de les tradi- tions sont d'accord pour attribuer au roi Harald Hildctand (qui rfegnait au septicme eieclcj et qui etait paien) des runes que Ton voit tallies dans un roc , auprfes d'un chemin de la province de Blec- kingie. D'ailleurs , on en trouve aussi dans les tumuli ou buttes en tcrres rapportees , qui sont si communes en AUemagne. Dans un appendice d'un trcs-grand interet, M. Grimm traite des pierres chargees de runes , que Ton a decouvertes dans des tumuli. 11 n'y a pas long-tems que M. de Schorzell en trouva une dans ses tcrres ; cette Jiieirc a its decrite, dans \e Journal deGcetlingen,de iSi9,p. i43' M. Grimm I'a fait graver de nouveauetl'a comparce i deux autres du meme genre , dont I'une a di^ji occupe M. Kostam. Une note savante est jointe a cc parallele. Elle indique tous Its tcrils qui ont

$72 LIVRES ETRANGERS.

paru sur les luinuli. II serait utile sans doute i I'itude de Tantiquite de r^unir en corps d'ouvrage tout ce qui a 6le dit jusqu'S ce jour sur ce genre de monumens. Pcut-4tre conviendrait-il de signaler par une carte tous les lieux de I'Europe oii il y en a eu ; peut-Ctre enfin un pareil travail ferait-il faire un grand pas aux connaissances Listo- riques. On reinarque gineralement que le midi de rAllemagne en pr^sente beaucoup moins que le nord. Ph. GoLBiiBv.

Ouvragcs pdriodlques allemands.

245. Morgenblatt fur gehildete Stcende. Feuille du matin, pour les classes instruites ; 1821 , mois de jvyllet. Stuttgardt et Tubingue. Cotta.

Ce journal litteraire continue d'etre un des plus ripandus de I'Al- lemagne. Une partie qui devient fort interessante dans cette feuille, c'est celle qui conlient la revue de tout ce qui concerne les progrcs des arts en Europe , et des ouvrages nouveaux qui y ont rapport. Nous trouvons, entre autz-es , dans le cahier de juillet, une critique d'un ouvrage , pour Icqne 1 , dit-on , on a pris, & Paris , aux frais de la nation, 1,200 souscriptions , tandisque les auteursd'ouvrages, dix fois plus utiles, n'en peuvent obtenir une senle , malgre leurs solli- citations. Cet ouvrage est intitule : Recueil d' estampes , gravees d'apres des peintures antiques ilaliennes , etc. , par ^ug. Boucheb- Deskoyebs, et executees sous sa direction , d'apres les dessins qu'il a fails en Italic , dans les annies 1818 e< iSig. A Paris, in-fol. Puis- qu'aucun journal fran^ais n'a soumis cet ouvrage i un examen cri- tique, il n'est pas inutile d'apprendre comment il est juge par les etrangers. Yoici I'extrait de I'article du Morgenblatt :

« IS'ous apprenons, par la dedicace au ministre Simeon, mis en tete de cet ouvrage de luxe, que M. Boucher- Desnoyers a sejourne dix mois en Italic , pendant les annies indiquees sur le titre. 11 a dessin6 , ii cette occasion, tout ce quipouvait I'interesser, ou ce qui se presentait par basard, et il souniet au public les etudes faites dans ses voyages. L'annonce de ce recueil etait faite pour exciter quelque attention; car M. Desnoyers est un artiste d'un m6rite reconnu, et il est, avec Richomme , Lignon et Massard le jeune, i la tete des graveurs historiques vivans en France. Walheureusement, les amis des arts se sont vus cette fois completement trompds dans leur attente. . . . Cc recueil est fait sans plan et sans choix : aupres d'ua

LivREs Strangers. 57s

Enfant-J6su3, de Mantegna, se pr^sente une jolie auberglste du Grindelwald, encore vivante, etune gentille cantatrice napolitaine figure dans la compagnie de Judas Iscariote. II faut que M. Dcs- noyers ail fait ses dcssins avec une lugLTcte iuouie, puisqu'on ne pent expliquerautrement pourquoi ils trahissent partout I'ticolier, et n'an- noncent pas la moindre entente du nu. Sous ce rapport, les portraits dessines d'apres nature par M, Desnoyers lui-meme sont moins mau- vais que le reste , quoique d'un autre c6t6 on ne puisse les recom- mander comme modfele du style des portraits. D— g.

SUISSE.

246. Des mojens de perfectionner les etudes litleraires, par Jean Hdmbeht, professeur d'arabe ; prem. part. Broch. in-S" de 47 pag. Geneve , 1821 ; Paschoud , et a Paris , meme maison de commerce.

M. Humbert, connu par un Coup d'oeil sur lespoeles elegiaques francais , et par une Anthologie arabe dent nous avons rendu compte ( vqy. Tom. Ill , p. 12S , et Tom. VIII , p. oSj. ) , s'etait montre i la fois orientaliste habile et ecrivain elegant : dans cette derniere production, anirae par un patrk)tisme eclaire, il s'occupe des moyens de rendre a son pays natal son ancienne gloire litteraire; il voudrait faire revivre les etudes du xvi'' si6cle , et voir renaitre des Robert Etienne , des Scaliger , des Leclerc, des Casaubon. Geneve, dit-il , a peu a envier aux etrangers sous le rapport des sciences exactes ; ainsi ses voeux sont tourn^s vers I'erudition , les belles- lettres et la philologie. Pour parvenir ct I'amelioration des connais- sances litt^raires , il propose divers moyens d'emulation ; tels que des contours publics , des voyages en AUemagne et en Angleterre , aux frais de I'etat, la publication des travaux des jeunes litterateurs; enfin, la formation d'une societe litteraire et protectrice. Toutes ces vues paraissent aussi sages qu'elles sont bien exprimees; cepcndant ce n'est qu'a Geneve qu'on peut en apprecier le merite, et sur- tout la possibility de I'execution. M. Humbert , qui recommande la litterature moderne, et qui ne veut pas sans doute qu'on neglige la litterature fran^aise , propose de faire voyager les jeunes gens partout ailleurs qu'a Paris ; n'est-ce pas vouloir que ses compatriotes n'acquierent jamais une connaissance approfondie de notre langue et de nos chefs-d'ccuvre , et ne puissent atteindre au point od lui- mfeme est arrive ? Quelque sort qu'ait le plan de M. Humbert, nous

57A LIVRES filRANGERS.

ne pouvons que formrr iles vocux pour que cet habile profcsscur eoit encourag6 dans scs travaux de litt(iiature oricntale , cl fasse jouir le public dc la traduction de plusieurs des manuscrits arabes qui en- richisscnt la bibliothfeque publique de Geneve. Jomabd.

247. yoyage en Ecosse et aux iles Hebrides , par L. A. Necker DE Saissure, professeur honoraire de mineralogie et de geologic i I'acadiimic dc Gen(!;%'e. Geneve , J. J. Paschoud. 1 vol. in-S" de 42Sp. Prix, 5fr.

248. LvUres diverses , recueillies en Suisse, par le comte FiDOR GotowKiN, accompagneeS' de notes el d'eclaircissemens. Geneve, J. J. Paschoud; 1 vol. in-S" de 42S p. Prix, 5 fr.

2.ly^. Alpenrosen,einSchufeizer-Taschenhuchauf das Jahr 1S21 . Les roses des Alpes, almanach Suisse pour l'ann6e 1821 , publi6 par MM. Kuhn, Mcisner, Wyss et autres. Berne, 1821. J. J. Burg- dorfer. 1 vol. in-12 de 570 pages , avec gravures et musique.

Cet almanach, qui compte onze annees d'existence, se distingue aujourd'hui par des caractcres et un format plus grand que ceux em- ployes jusqu'ici, ainsi que par le commencement d'une galerie de costumes suisses des quinaiume , seiziume et dix-septiime sifecles. Les gravures , execut6es par les plus babilcs artistes zuricois , Ess- linger et Lips, sur les dessins de MM. Martin Usteri et Volmar, se font remarquer par leur fini et leur grSce. Le volume que nous avons sous les yeux renferme deux morceaux qui intiiressent la geographic et la statistique de notre pays : I'un , sous le titre de Deux jours dans les Alpes, contient le rtcit de deux excursions : la premiere faitedu 17 au 20 aofit 1819, en partant du Haut-Simmenthal pour se rendre aux bains de Louesche, dans le Vallais , en franchissant les rocs et les glaciers du Rawylberg ; I'autre , qui n'est que la suite de la pr6- cidente, en gravissant les arfites des montagnes primitives j pour rc- tourner dans le Simmenthal par la Gemmi. Ccs courses furent exe- cutees avec autant de hardiesse que de bonheur par M. B..., pr6fet dans le canton de Berne. Les descriptions de ce voyageur sent neuves et d'un grand interet. L'cxcursion cntreprise par M. le pro- fesseur Wyss , dans la partie nord-est de la Suisse et a Constance , bien diff^rente de celles dont nous venons de parlcr, ne fut accom- pagnee d'aucun danger ; le journal de son voyage est rempli de notices intercssantes sur les hommes, la litterature et les arts, et sur une foule d'autres objets qui font honneur i notre patrie , ou qui

LIVRES I^ITRANGERS. 573

tendent i procurer Je nouvclles joiiissances k riiomme clvllisi^. M. Wyss cite avee eloges , i Zurich , la riche collection d'6tudes de peintre, que M. Vogel a rccueillie en parcourant la Suisse; il loue la ffancliise et la Ijberte avec lesquelles on discute , dans la Societe pour Vauancement del'hisloire nationale , les points les plus deli- cats , et meme I'histoire du terns actuel. 11 fait sentir les avantages de cette institution, ou il est facile de se convaincre qu'avec dcs opinions souvent opposees , on peut nianmoins etre egalement hon- nfetehomme et attache k son pays,quoiqae Ton diiFire surles moyens i employer pour en assurer le bonheur. Arriv*^ i Winterthur, le voyageur nous entretient des travaus de Hegner, i SchafTouse , du beau cabinet de M. le triumvir Veith. 11 donne , sur les monuniens d'architecture allemande qu'on observe encore bi Constance, des de- tails tout-a-fait nouveaux et dignes de remarque. On doit souhaiter que cet almanach continue i s'enricbir de pareils morceaux, qui ajoutent singuli6rement i son prix. Les nouvelles et les l^gendes de MM. Kueniin , Kuhn et Wyss, et particulierement le Tresor, qu'on doit a ce dernier, offrent une lecture agr^able. Les pieces de poesie contenues dans ce recueil, au nombre de soixante-dix environ, sont dues a une vingtaine de litterateurs. Notre celebre J. U. de Salis, les deux Wyss , MM. Usteri , Hegner , Hanhart et autres poetes soisses, ont fourni d'int^ressans materiaux. Parmi ceux envoy es par des etrangers amis de la Suisse , on distingue quatre morceaux du fameux Mattliisson. Nous ne saurions terminer cet article, sans ex- primer nos regrets de ne pas trouver dans ce Recueil le tableau sommaire de I'^tat de la litterature Suisse , que les redacteurs pu- blient tons les deux ans, et qui aurait du figurer dans Talmanach de 1821. lis promettent de d6dommager leurs souscripteurs de cette suppression, en leur donnant, I'annee prochaine, ce tableau aug- mente d'une notice sur I'etat des beaux-arts. A. S.

ITALIE.

25o. U Arte delnuoto, etc. L'Art theorique et pratique du nageur, d6montre suivant les principes de la physique, avec des planches; par Adolfo Gohti. Venise, 1819; in-S". Fracasso.

Vers la fin du siecle dernier , un ecclesiastique du royaume dc Naples, tr6s-habile dans Part denager, s'(5tait proposfe de fonder une ecolc de natation dans la capitale de ce royaume, II donna assez

57G LIVRES lllTRANGERS.

de preuves de son habilet6 pratique ct thtorique , pour mtriter la favcur du oiinisttTe. U publia aussi un livre riche en observations eten planches. 11 pritendait que, si I'hoinme savait connaitre et conserver I'dquilibre de son corps, sa tete jusqu'h la bouche res- terait au-dcssus de I'eau, sans art ct sans efforts. 11 indiquait les mouvemcns les plus simples ct les plus efEcaccs pour donner une direction quelconque au corps nageant. Je me souviens que lui- nifime et quclques-uns de ses eleves cmploycrent leurs bras i divers exercices au-dessus de I'eau, demeurant debout et tenant tout le reste du corps en equilibre. Ce qui est incontestable, c'est qu'il insplrait^ ses 6coliers , par ses maximes et par ses essais, beaucoup de courage. Je ne sais si I'auteur de I'ouvrage que nous annongons a connu et examine les principes de I'ecrivain napolitain , qui avait renouvele I'exemple de Wj'nman Nlcolaus et de Digbeins Everardus, auteurs, au seizieme sifecle, de deux ouvrages sous le'meme litre : de arte nalandL; mais M. Corti s'6tudie 4 donner les meilleures regies pour faciliter le mouvement presque horizontal. 11 n'oublie pas non plus tout ce que M. Thevenot a public sur cet art , et il ne neglige pas de s'occuper des naufrages , auxquels il propose d'appli- quer la pile de Volta.

25 1. Delle acque semitermali de S, Pellegrino, etc. Des eaux demi-thermales de S. Pellegrino , dans la province de Ber- game; essai du D. G. Luigi Cabbaba. Bergame, 1820; in-8°.

Les temperatures des eaux de S. Pellegrino etant'entre les 21 et 23 degr^s environ du therm, R., sont nommees demi-thermales.

L'auteur de cet ouvrage exalte leur vertu , au point de pr6tendre que leur usage peut rendre la beaute et la jeunesse.

252. Del cinismo, ossia della Jilosofia de' Cinici , etc. Du Cynisme, ou de la philosophic des cyniques ; discours de M. de MoNTRONE, avec la satire X de Juvenal^ traduite en terza rima. Na- ples, 1820. Saverio Giordano.

Francesco Antonio Grimaldi, auteur de plusieurs ouvrages philoso- phiques, avait public , a Naples , la l^ie de Diogene le cynique , oil il s'itudiait & le disculper des accusations des anciens, et surtout de celles de Diogfene-Laerce. Grimaldi pensait que ce philosophe avait ete indi- gnement calomnie , et que ses maximes etaient entierement con- formes aux principes de la morale exempte de tout prejuge. M, Montrone , voulant pourvoir aux besoins du siecle, propose la

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LIVRES ETRANGERS. 577

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mbrale des cyiiiques, dont tout I'objet consiste dans la maxime de Juv6nal, mens sana in corpore sano. II regarde, avec les cyniques, les peuples les plus anciens, et surtoutles Spartiates, comme les plus par- I'alts. Mais ce qui semblen'a voir pas assezde conformity avec lecynisme que professe I'auteur, c'est son style trop elegant et trop recherche.

255. La difinaconimedia, etc. La divine coniedie du Dante, edition faite d'apres une copie manuscrite de Boccace. Roveta, 1820; in-S°.

Aloisio Fantoni , auteur de cette nouvelle edition de la Difina commedia du Dante , assure le public qu'il trouva , a Paris , parinl les livres emportes de Rome , un manuscrit de ce poeme , copi6 par Boccace, avecl'epitre latine qu'il ecrivit k P6trarque en lui envoyant ce manuscrit, et quelques corrections de Petrarque lui-meme. Ce monument existait, depuis long-tems, dans la bibliotheque du Vati- can, et il est etonnant qu'on n'eflt pas soup^onn^ jusqu'ici qu'il etait de la main de Boccace. M. Fantoni a 6tabli expres une imprimerie 4 Roveta , petite ville situee au milieu des Alpes, sur le sommet du mont Presolano , pour faire imprimer et publier ce pr^cieux manus- crit. L'edition en est faite avec beaucoup de soin ; et lors mfime que Ton voudraitrevoqueren doute I'authenticite dela copie attribuee k Boccace , toujours serait-il vrai qu'elle aurait 6te faite sur un ancien manuscrit de sa main.

254. Nuova raccolta teatrale , etc. Nouvelle collection de pifcces dramatiques, ou Repertoire choisi 4 I'usage des thefltres d'ltalie , par le professeur Gcietano Bahbiebi. Milan, 1821. Gia Pirotta.3 vol, in-i2.

Le premier volume de ce recneil comprend la traduction des Vepres Siciliennes , tragedie de M. C. Delavigne, par le comte de Benioivski , celle d'une comedie de Kotzebue , et le Terno al lotto , com^die originale de M. Barbieri. L'iuteur ne se borne pas k tra- duire les pieces des autres ; il s'etudie aussi a les modifier et & leS rendre plus propres k la scene. Si Ton en croit la Bibliotheque ita- lienne ( n" lxvi , pag. 285 ), il n'a pas toujours atteint son but; il a fait plusieurs changemens dans la comedie de Kotzebue; il en a fait aussi quelques-uns dans la tragedie de M. Delavigne. II a voulii r^tablir I'entiere innocence d'Amilte ; 'a I'exemple d'Atalide, il fait tomber de ses mains, dans un evanouissement , le billet qui d6- couvre le mystere de la conspiration. Le journaliste italien loue beau- Coup les deux premiers actcs de celte tragedie ; mais il ne traito pas- Tome xi. ^'7

578 LIVRES ETRANGERS.

de in£tue les trois suivans , surtout It cause de I'invraisemblanGe des tvfenemens. Pour ce qui regarde la traduction , le style n'cn est pas toujours asscz correct. La comedie dc M. Barbieri semblc offrir une tiop grandc coraplication d'evcneniens , et le succes qu'cUe a obtenu au theitre ne se soutient pas i la lecture.

. a55. Di Cennino Cennini, trattato clellapiltura , etc. Traite de peinture de Cennino Cennini, public pour la premiere fois par le chevalier Giuseppe Tambhoni. Rome, 1821. Salviucci.

Ce traite inidit de Cennino, indique deji par Vasari, existait dans la bibliothcque Laurentienne. L'abbe Mai en a derniferement troUve une copie dans la bibliotheque Oltoboniane , et M. Tambroni s'estempresse de la publier. C'est I'ouvrage le plus ancien des Italians en matiere de peinture. L'auteur I'avait termine en i^oj , et il nous trace I'etat de cet art au quatorzieme siecle et aucomxnencement du quinzifeme. Ilparle surtout de la methode de peindrei I'huile, comme d'une pratique deja Ircs-connue en Italic, et qui lui avait et6 montr^e par Agnolo Gaddi, son niaitre, mort en iSSj, quoi qu'en disc Vasari. Sous ce rapport, cet ouvrage ne preseute qu'un objet de curiosity pour Ics artistes, mais un monument de gloire pour les Italians. Leg amateurs de la langue italienne pourront y trouver aussi une ample provision de locutions et de mots relatifs surtout k la peinture , et dont I'editeur a donn6 un index i la fin de I'ouvrage , comme un moyen d'enrichir et d'eclairer le fond de la langue. Cette edition a donne lieu i beaucoup de remarques et de discussions, sur le m^rite el la preference de quelques autres manuscrits du mCme traits , exis- tans dans les bibliotheques de Florence , et plus encore sur la valeur de certaines locutions ou mots surannes ou peu intelligibles. F. S.

ESPAGNE.

256. Elemenlos de la verdadera Logica. El6mens de la vraie Logique, deduits de I'ldiologie de M. Destutt -Tracy pardon Jean Juste Garcia , ancien professeur de matb^matiques a Salamanque. Madrid, iSsi.Brun. 1 vol. in 8°.

aSj. Principios de economia politica. Principes d'economie politique, par M. Destutt-Tracy , extraits de son Ideologic, et tra- duils par don Manuel Maria Gutibhhez. 2 vol. in-ia.

258. Commentario , etc. L'Esprit des Lois de Montesquieu , avec le Commentaire de M. DestuU-Tracy , traduit par don Jean Lopez Pehalvkr. Soso. 4 vol. in-S".

LtviVES Strangers. 579

tes trois ouviages du trts-savant auteur de I'ldiologie commen- Ceat k devenir populaires en Espagne, et tout porte i croire que, dans peu de terns, il en sera de mSme de tous les ouvrages de M. de Tracy et des autres savans fran^ais , dont les Merits peuvent contri- buer i la rcgen6ration de I'Espagne.

259. Bibliotheca Espailola economico-polUica. Biblioth^que espagnole ^conomico -politique, par don Jean Sbmpehe Goibinos, ancien procureur du roi k la cour royale d'appel i Grenade. Madrid , 1821. Sancha. 4 vol. in-i2.

Cette Bibliolheque ne sera pas moins utile que celle publide pr6c6- demment par le savant et infatigable auteur, qui a demeur6 pen- dant long- terns i Paris, oil il s'etait r^fugid comme ayant 6t6 I'un des partisans de la constitution espagnole publiee a Bayonne en j8o8. Ce premier ouvrage portait le titre de Bibliolheque Espagnole des plus celc'bres icriuains du regne de Charles III. Les articles Cairt- pomanes, Monino , Feijoo, Isla, Jouellanos , Melendez-Valdes , et quelques autres, prouvent que le gout des sciences, des arts et de la litterature r6gnait des ce tems-li en Espagae , beaucoup plus qu'ori n'aurait pu I'attendre d'un pays oil I'inquisition religieuse et I'espion- nage civil s'accordaient pour empgcher la lecture des meilleurs ou- vrages fran9ais. L'avenement de la famille des Bourbons au tr6ne d'Espagne avail rendu plus faciles les communications avec les sa- vans fran(^ais, ct ccux-ci rendirent aux Espagnols le m6me service que les auteurs espagnols des terns de Charles-Quint et de Philippe 11 avaient rendu k la litterature franf aise. La nouvelle Bibliotheque de M. Sempere revele I'existence d'un grand nombre d'auteurs espa- gnols qui ont ecrit sur I'economie politique , pendant les xvi«, xvu' et xviii' siecles, et Ton en trouve dans le nombre queJques-uns d'ud mirite distingui. Les principes d'apr6s lesquels on proc6daIt pour tirer des consequences economiques n'etaient pas certainement aussi bons qu'aujourd'hui,- mais il n'en est pas moins vrai que ces auteurs ont 6crit dans un sens qui ferait croire que, s'ils 6taient nos contemporains, ils adopleraient les doctrines du savant Say et des autres dconomistes modernes. La connaissance meme des erreurs dans lesquelles les economistes espagnols sent tombes , pourra Ctre fort utile, en ce qu'ellc servira .'i faire abandonner les systimes nui- sibles qui ont pr6valu jusqu'a I'^poque de la liberty espagnole. On ne peut que recommander la lecture des deux ouvrages de M. Sempere,

0-7*

{,80 LIVRES ETRANGERS.

ainsi que d'un aulrc qii'il a public sous le litre A'llistoire du /«.iv et des luissompluai/es d'Espa^^ne. ,

260. Tahlas cronologicas , etc. Tablettes chronologiques dcx trois codes Itgaux, savoir : du droit roinaia, du droit canonique et du droit cspagnol, i I'usage des etudiaus en droit. Madrid, 1S21. Ro- driguez. I vol. in-S".

261. Nulidades , etc. Inconveniens de renseignement nui- tuel, d'apris la methode de Lancaster comparfee avec les melhodes suivies jusqu'ici en Espagne ; par don Joseph Diaz MANZAKARis. Madrid, 1821. Davila. Brochure ia-S".

L'annonce de cet ouvrage , faite dans la Gazette de Madrid, fait penser qu'il doit ctre utile ccux qui se vouent ^ I'instruction pri- maire. J. A. Lloeehik.

ROYAUME DES PAYS-BAS.

262. Kerhandeling Ofer Mahomed, etc. Dissertation sur Maliomet, ou Tableau de rinflucnce de sa doctrine religieuse sur les peuples du moyen age, par E. E. Oelsnek ; ouvrage couronne par I'institut de France (en iSio), et traduit sur I'edition allemande, augnientee par I'auteur. Franeker, 1S20. Ypma. In-8.° de 558 pag.

Dans le conipte que nous rendons des ouvrages de litttirature etrangere, nous ne devons annoncer une traduction qu'autant qu'elle offre un interet et un ui6ritc particuliers. A ce titre, nous ne pou- vionsomettre celle-ci ; elle se recommande egalement par la fidelite, par un style elegant et par des notes curicuses.

263. Lucius, sive nai^igantes. Lucius, ou les voyageurs par eau, par Louis-Gerlacli PAHEAn, candidat en belles-lettres et 6tu- diant en theologie k I'academie d'Utreclit. Utrecht, 1S21. Van-Pad- denburg, etc. In-S" de 1G6 pag.

Depuis la nouvellp organisation universitaire, due au gouverne- meut actuel de la Hollande, des concours ont ete ouverts parmi les etudians sur des sujets donnas. L'experience a diji prouve I'uti- lite de cette institution, l^ns Annates academiques (creation ega- lement nouvelle) inserent les pieces couronnees; on y remarque d'exccllens morceaux : nous avons deja cu I'occasion d'en niention- ner quelques-uns dans notre Rccueil. Celui que nous annongons ne merite pas nioins de fixer I'attention des lecteurs. La faculte.de philosopbie theoriquc et de bellcs-letties de I'academie d'Utrecht

LIVRES ETRANGERS. 581

^vait pioposu, pour le concours du nvois de mars 1820, la ques- tion suivantc : « Recherchcr ce qu'etait la tragddie grecque , -et comparer a ce type la celebre piece de Vondel (i), inlilulee : Gis- berl d'Amslel. »

, Deux memoires ayant balance les suffrages de racadeiiiie, c'est le sort qui a designe le vainqueur; et M. Huet, etudiant en theologie, a ete couronne. M. Pareau , son jeune rival, aussi etudiant en tlieo- Ibgie , annonce nn talent tres- distingue. 11 a donne i sa composi- •lion la forme du dialogue, et ses entretiens rappellent ceux. de riaton ; on y reconnait un bon disciple de I'ecole de '^l,- Fan ■Heusde , professeur d'histoire et de grec k Utrecht , et qui se plait k f.iniiliariser la jeunesse confiee a ses soins avec la doctrine et la mcthode du disciple de Socrate. Comme le titre I'indique, les in- terlocuteurs de M. Pareau se trouvent h Lord d'un vaisseau. Leur premier entretien a pour objet : interna ratio tragcedia- grcBCCv , le caractere propre de la tragedie grecque, les affections nalurelles et les mouvemens qu'elle avait essentiellement pour but de peindre. Le deuxieme dialogue traite de la forme exterieure, du clioeur, de la musique, consideree d'abord comme I'essence de . la tragedie grecque, et ensuite dans ses rapports avec la danse. L'autcur ^rend la tragedie grecque, pour ainsi dire, au berceau, et, la suivant .dans ses progres , il trace un parallele aussi ingenieux que jusle d'Es- chyle, de Sopbocle et d'Euripide. Les regies de la poctique moderne sont inapplicables , selon notie auteur , a la tragedie grecque. Ce que nous appelons imbroglio (intrigue a nouer fortement el i. denouer avec babilete) etait inconnu aux anciens. Les rapports et la dissem- blance du theatre d'Athenes et de notre theatre , du but et des moyens de I'un et de I'autre , sont prescntes avec une lucidite et une verite qui laissent pcu de chose ii desirer.

Dans le Iroisieme entretien , il est enfin question de comparer la tragedie de Vondel , intitulee Gisbert d\4tnstel , avec les cbefs-

(i) rondel (Juste Van), le coryphee du Parnasse hoUandais , naquit a Cologne le 17 novembre i5SS, et mourut a Amsterdam Ic f) fevrier 1679. ^'^^ oeuvres poetiques se coiiiposent de tragedies, d'odes, de poenies, d'epitres , de satires, d'epigrammes ct " lyi^" Joule de vers decirconslance. Son theatre seul forme deux vol. '"'1"' et it contient trenledeux tragedies, la pluparl originalcs. 11 a fraduil en vers les odes d'lloracc, Virgile , les Melamorpho5cs d'Ovulc , etCv

58« LIVIVES tTRANGERS.

d'oEuvie dc la Melpomene antique. Le scul point qui puLsse fournir icl quelque objet de comparaison , c'est I'usage que Vondel a fait des choeurs. lis sont admirables dans la plupart de ses piiices : ce sont des niorceaux lyrlques de la plus haute po6sie ; du reste , Vondel n'a pas chcrche k imiter les Grecs , dont il parait qu'il ignorait la langue ; il n'a m£me appris le latin que fort tard.

Selon M. Pareau,les chccurs de Vondel sont bcaucoup molnsessen- tiels i ses pifeces que ne I'^taient ceux des Grecs i Icur th6Ati-e. Mais un point Bur lequel on pent etablir des rapports frappans , ce sont les eirconstances au milieu desquellcs la trag^die prit naissance en Gr6ce et en HoUandc. Vainqueurs des Perses, et pleins de renthousiasme de leurs succfes, lea Grecs virent apparaitre Eschyle. Apris une lutte de soixante-dis ans, les Hollandais, vainqueurs de Philippe , appro- chaient de la glorieuse epoque de leur plein affranchissement , quand Vondel donna Gisbert d'Amstel. La liberty religieuse , qui promet- tait aux Hollandais la liberte civile, causait alors parmi eux cette exaltation qui jadis animait les Grecs pour la conqufite de leur ind6- pendance. Vondel cdl^brait, dans son h(^ros,la Constance, la magna- nimity , les nobles sacrifices de la vertu , I'inalterable resignation i toutes les rigueurs de la fortune , augustes traits de tout vrai patrio- tisme'; c'est ainsi qu'Eschyle avait peint la force d'ame et I'inflexible d^vouement k soufTrir de son Prom6th6e , gencreuse victime du bien public, comme nous I'a fait voir M. Andrieux (i). Vondel donnait toujoursun grand but morale ses compositions tragiques , et il aimait a I'annoncer meme dans le litre , comme : Palamede , ou la Mori de l'inTtocence['i)\PhaethoTtiOn I'Audace irrejlechie; Adonija ,o\il' Antr

(i) Voy. Rev. Encycl. Tom. VI , p. 44^-

(2) Le veritable sujet de cette trag<5die est la mort de Barnevell. Le pofete croyait alors , avec tout le monde , que ce grand homme d'etat etait une victime immolec i I'ambition et a la vengeance du stathouder Maurice. Une secte nouvelle de politiques, s'inscrivant en faux conlre im sifecle et demi d'hommages, pretend aujourd'hui que la condam- nation de Barnevelt fut un acte de justice, et que les Bataves out comrais un grand crime en secouant le joug de Philippe H , leur niaitre legitime. 11 est triste de voir le plus beau genie de la Hoi- lande professer ces honteuses maximes. Si ces messieurs pretendent ainsi faire leur cour , il est h craindre qu'ils ne r6ussisscnt mal. On as- sure qu'un jeune adeplc de la secte ayant presente au roi des Pays- Bas une longue these de monarchid , soutenue i Leyde , el toute consacr^e i ttablir cette doctrine , le Roi lui dit : « Monsieur, par le terns qui court, voys risquez de ne pas aller loin avec votre systfemc. »

LIVllES FRANCAIS. 5S3

bition pernicieuse. M. Pareau jette un regard en ariicre sur I'origine du theatre hoUandais, n6 des Chanihres, de rhitoriciens , {colleges de rhetoric/ ue,) dont M. Kops , dans le i"' vol. des Memoires de la sociele philologique hollandaise de Leyde , (p. 2i5 3iS,) a es- quisse rhistoire depuis le quatorzieme siecle, et que Lambert Ridio a fait remonter jusqu'i 1200. Si la tragedie fut chez les Grecs un spectacle musical, Vondel en a fait un spectacle historique ; les fastes anciens et modernes , et m^me les annales contemporaines (temoins SB Marie Stuart et ujeme son Palamede) , lui but fourni ses sujets. Gisbert d'Amstel rappelle un trait national du commencement du quatorzieme siecle ; Vondel voulut le consacrer dans uoe represen- tation dramatique, i 1 'occasion de I'inaiiguration du nou¥cau theStre d'Amsterdam , en iGSj , et sa tentative fut couronnee du plus brillaut succes. Cette piece est demcuree comme un monument civique ; de- puis prfcs de deux si6cles , on la joue chaque annee i unc ipoque fixe , et le patriotisme des citoyens d'Amsterdam se plait h I'applau- dir. L'art dramatique a fait depuis de grands progrts ; mais la poesie de Vondel dut frapper ses contemporains ; les ecrivains nationaux que i'on connaissait alors 6taient loin d'un pareil genie , HoofTt seul excepte. M. Pareau, qui regarde la tragedie des Grecs comme un spectacle musical, compare leur muse tragique <i cette Diane d'Ho- m6re , qui va dansant et chantant dans de riches campagnes , oil elle efface en attraits le groupe nombreux de ses nymplies ; tandis que la muse de Vondel est , i ses yeux , la Venus de Virgile : elle marche, et son port reuele une deesse, L'espace ne nous permet pas de nous itendre davantage sur cette production academique , tres-remar- quable , aussi bien pour le fond que sous le rapport du style et de la diction latine. Vingt-cinq pages de notes intdressantcs prouvent une erudition classique tres-etendue, et ce premier succes du jeune au- teur donne de grandes esp6rances. MAaaow.

LIVRES FRANgAIS.

a64.— rmjV<i elementaire du physique, par M. I'abbc Hauy, trol- sieme edition. Paris, 1821. M"' veuve Courcier, rue du Jardiuct - Saint-Andre-des-Arcs, n" 1 ; 2 vol. in-8». Prix, i5 fr. , et , par la postc , 18 fr.

365. Precis elementaire dc physique expeiinu'ulale , sccondo

p84 LIVRES I'UAiNCAIS.

uditiuD , par M. Biox. Paris, 1821. DetervUlc , rue llaulcruuiilc, n" 8 ; deux forts vol. in-S", avec planches. Prix, i6 fr.

Ce n'cst pas seulement sous le rapport de renseignement public que les bons livres de physique sent recommandables ; cetle belle science a fait rtcemment de si grands progres, queriennc ressemble moins aux ouvrages que nous annongons ici , que ceux qui ont 6te publics par les plus habiles physiciens , dans le dernier siicle. Lorsquc Dufay, Franklin ct Epinus eurent pr6sente leurs systfcmes sur Ic mode de Taction electrique. Coulomb , en y appliquant le calcul, montra la route que les savans devaient suivre pour donner a la phy- sique la certitude math^matique que I'astronomie avail re^ue du g6nie de Newton. C'est depuis cette epoque que la physique est rtellement devenue une science, en s'affranchissant des systenies vagues , fruits de I'iinagination speculative. Les beaux travaux de JLapIace et de Lavoisier sur la dilatation des corps et I'influence du calorique dans leur composition, la belle thdorie de Volta sur la pile galvanique^ la dicouverte de M. Davy sur son action pour decom- poser les corps , et les experiences de MM. Bertholet , Thenard , Gay - Lussac et Berzelius , pour en constater les effets et en etendre les r6sultats ; les theories de Deluc , Dallon et Lesni sur la chaleur, et siir la maniere dont les vapeurs existent dans Tair ; les memoires de M. Poisson sur I'dlectricite , ceux de MM. Biot , Arago et Fresnel sur la lumiere ; enfin , une foule de belles observations ont tellement etendu nos connaissances en physique, que cette science a pris rang parmi les sciences exactes , et qu'il est permis d'esperer de voir un jour la chimie , I'une des plus belles, des plus difficiles et des plus utiles connaissances humaines , atteindre au meme degre de perfection , sous le rapport de la theorie et du calcul. C'est pour rendre la physique populaire , que deux savans du premier ordre ont, dans plusieurs editions successives , expose avec clarte , et par des methodes affranchies des difficultes de I'analyse algebrique , les principaux faits qui forment aujourd'huil'ensemble de cclte science, et d^veloppe les theories qui scrvent k lier ces faits enfrc eux et a les expliquer. On ne s'attend pas sans doute que je m'erige en juge de deux academiciens aussi distingues par Icur nicritc et leurs travaux ; le rang eleve ou les place I'estime publique ne me permet pas d'esperer que nion avis sur des travaux dont je suis admiratcur pourrait avoir quelque importance. Mais, saos manquer aux ligards

LIVRES FlUNCAIS. 685

et am devoiis qui me sont imposes, je puis comparer les deux ouvragcs , et indiquer les qualites particuliferes qui les distingucnt. On est surpris qu'un vieillard , dont la longue existence a et6 con- sacree a I'etude de la nature , conserve , k plus de quatre-vingts ans , le goiltdes sciences, et se montreaussiassidu i setenirau courantde toutes les d6couvertes , que lorsqu'il avait le feu de la jeunesse. Le Traite de physique de M. Haiiy est redig6 avec methode ; le style en est simple ou eleve , selon les sujets qu'il traite , et toujours elegant ; les theories sont demontrees avec clarte ; I'ouvrage se lit sans peine , et on croirait que rien n'etait difficile a expliqucr, parce que rien n'y est difficile i concevoir. Sans doute , cette edition qb- tiendra le succ6s des deux premieres.

Dans un Traite mathematique , M. Biot avait expose les parties qui composent la physique, en s'aidant des ressources que lui ol- f'rait I'analyse algebrique qu'il manie avec tant de facilite. Mais les cours publics de la faculte des sciences ne comportant pas I'emploi des calculs , I'auteur avait ete force de s'y renfermer dans un cerclc plus etroit. G'est 4 ces circonstances qu'on doit la publication dc son Traile elementaire de physique , qu'il presente aujourd'hui de nouveau , avec des additions considerables. La science s'enrichit chaque jour de I'aits nouveaux, et M. Biot ne pouvait oublier dc parler des decouverles recentes sur le magnetisme et Paction elec- trique, decouvertes qu'on doit aux Iravaux de MM. OErsted, Ilaus- teen , Arago , Ampere , et auxquelles M. Biot lui-meme a contribue. On sait que M. Biot ecrit avec elegance et clarte ; son Traite dc physique est peut-etre moins facile a concevoir que celui de son esti- mable collfegue ; on y reconnait partout le g^ometre qui veut at- teindre, sans calcul , a la rigueur des calculs memes : il est plus profond et plus savant, et la lecture de ccs deux ouvrages satisfera tout lecteur intelligent, parce qu'il trouvera dans I'un I'explication des faits qu'il n'aura pas bien compris dans I'autre ; et, se rendantmaitre de son sujet , il s'elevera a la hauteur qui est indispensable pour con- cevoir les doctrines diverses qui constituent la science. Si vous assis- tcz k des lemons faites sur le meme sujet par deux professeurs habiles, comme chacun est distingue par des qualites personnelles, vous pourrez profiler k la fois dans cette double etude. Ce ne seront ni k's memes discours ni les memcs formes logiques; souvcnt, il y ■lura diversite dans la methode, ou dans les conceptions generales, ;

586 LIVRES FRAN<?AIS.

«t cepcndant, vous entendrei les deux maiti'ea avec fruit ct intciut. C'cst I'impression que doit produire la lecture des Traitts de phy- sique de MM. Haiiy et Blot. On nc saurait trop recommandcr ces cs- tiinables ouvrages, oil sont exposees avec talent les diverses branches de la physique. Fhakcqelb.

266. Voyage souterrain, ou Description du plateau de Saint- Pierre de Maestricht et de ses pastes crjplcs , par M. le colonel Bohy DB Saiht-Vimcsnt; ourrage erne d'une carte topographique , et de trois vues , dessinees sur les lieux par I'auteur , suivi de la relation de nouveaux voyages entrepris dans les Montagnes-maudites , par M. Leon Dofocb, D. M. Paris 1821. Pontliieu , libraire au Palais- Royal, galerie de bois, n" 282. Prix , 6 fr. , et 7 fr. 5oc. par la poste.

M. Cuvier, charge de faire un rapport i Tacadeniie des sciences sur cctte production de M. Bory, lui a rendu la justice qu'elle mtTite,et nous ne pouvons mieux faire que de renvoycri ce rapport d'un juge competent ceux de nos lecteurs qui desireraient connaitre, avant de lire I'ouvrage tnfime, les details curieux de topof^raphie , de geo- logic et de botanique qu'il renferme. Nous indiqucrons sommaire- ment ici les principaux objets qui ont appelii I'attention de I'auteur. Avant de decrire le plateau de Saint-Pierre, il a cru devoir parler des personnes qui I'avaient visit6 precedenimeiit ; il nomme MM. Fau- jas de Saint-Fond , Hericart do Thury , Mathieu , capitaine d'artille- rie , et Clere , ing6nieur des mines ; il cite surlout avec 6loge le Memoire de ce dernier. Son second chapitre est consacre k des recherches 6tymologiques. Le dixieme offre un parallele tres-bien fait entre les travaux antiques des Romains et les travaus modernes. La situation et I'aspect du plateau , son elevation e' son t^paisseur , sa composition, I'aspect des cryptes ( galeries souterraines ), leurs principales entrees, leur tempt'rature , la description des orgues geologiques , ou puits de terre , etc. , occupent presque entierement les vingt-cinq chapitres suivans , et le vingt huititme tt dernier ren- ferme un catalogue linneen des plantes du plateau de Saint-Pierre. Nous le rip^tons, o'est dans I'ouvrage seul que les savans peuvent prendre une idee exacte de toutes les recherches qu'a dii faire I'au- teur, pour presenter un tableau aussi complet et aussi satisfaisant de ces labyrintbes souterrains , sejour eflrayant de la solitude , de la nuit et de la niort , et dont les besoins de deux arts, I'agriculture ct 1 'architecture , tendent continucllcmcnt a augmcnter le dcdalc. Le>

LIVRES FRANCAIS. 587

gens du Qionde , que son titre scienlifique n'auront pas efiVay^s , y trou-reront aussi dc I'int^ret , et regretteront que personne n'ait en- core eu I'id^e de faire de cette espece de ville souterraine le lien de la 8c6ne d'un roman bien sombre et bien path6tique. Le chapitre vii du Voyage oITrirait, seul, un teste suCBsant ft celui qui voudrait i'en- treprendre. E. H.

%&■].— Le Guide des propriitaires et des jardiniers,pour le choix, la plantation et la culture des arbres, par Stanislas BKiuwiEa. Paris, 1S21 ; Uuzard, rue de I'rlperon, n" 7. 1 vol, in -8°, avec fig. Prix , 3 fr. 5o c. , et 4 fr. 25 c. franc de port.

Ce trait6 de la plantation et de la culture des arbres ne pouvait £tre offert au public dans un moment plus favorable. G'est au mois d'octobre que I'auteur conseille surtout d'arracber et de planter les arbres. Nous saisissons cette occasion d'annoncer son ouvrage aux proprietaires des viiles et de la campagne. lis trouveront , dans le Guide qui leur est destin6, les meilleurs pr6ceptes pour reussir, et ilsne seront point trompes par ce charlatanisme qui deshonore tant de pages de nos agriculteurs modernes. M. Beaunier 6crit de bonne foi , ne dissimule aucune difliculte , et s'etudie principalement k preserver les proprietaires de la friponnerie de certains jardiniers ou pepioieristes. La seule chose que nous puissions reprocher i I'auteur, c'est un peu trop de concision dans ses preceptes et ses descriptions; mais ce reproche paraitra peut-6tre un 61oge aux nombreux lecteurs ennuyes de tant de longues et futiles compilations. P. S' A.

268. Manuel du chasseur el des gardes - ch^sse , contenant un Trait6 sur toutes les chasses, le Precis des ordonnances, lois, r6- glemens, ordonnances de police, etc., sur le port d'armes, la chasse, la pfiche , la loaveterie ; les Formules des proc6s-verbaux qui doivent 6tre dresses par les gardes-chasse , forestiers et champetres ; suivi d'un Kocabulaire des termes de v6n6rie , de fauconnerie et de cbasse; par M. db Mebsan , ancien capitaine des chasses; nouvelle edition ornee de figures. Paris, 1821. Roret et Roussel, rue Pavee- Saint-Andre-des-Arcs, g. i vol. in-18 de 386 pages, Prix, 5 fr.

II faut ajouter k tout ce que renferme d^ji ce titre , un Supple- ment au precis des lois el reglemens sur la chasse , la liste des dignitaires composant la pinirie de France, et un Extrait de V ins- truction publiee par S, E. M. le grand- chancelier de la Ligion- dHonncur, dans lequel il est dit que les membres de ce corps « re

588 LIVRES FRANgAIS.

9oivent les permissions n^ccssaircs pour le port d'arincs, sans a\t)ir besoin dc justifier d'aucune pioprietc et sans payer aucun dririt. h On voit qu'il ne manque ricn h ce Manuel; Ics editciirs onl pousso rattention jusqu'ii donner le costume de chasse : habit a la fran<;aisc, vert dragon, boutons ct galons d'or, culolte do casimir blanc , bottes h . I'ecuyere , sans revers ; tel est I'liabit de cour pour la grandc chasse ou chasse au cerf ; c'est egalement cclui dc toiitc personuc admise aux chasses du Roi et des princes de la famille royale. Dans un moment oil la chasse ;vientde s'ouvrir, nous croyons utile d<j signaler cette nouvelle edition , qui ne laisse ricn i desircr.

E. II. 269. Traites dh'ers d'econoviie rurale, alimentaire el domes- lique; savoir : i" du bli premature et de ses avantages, sous les rapports de quantite, de qualite du grain, et d'amelioration du pain; du moulin economique de Dronsart ; de la conserration du grain dans un silo ou fosse souterraine , par M. Ternau.x : des noufelles appropriations de lapomme de terre , qui la placcnl au premier rang des bases alimentaires , et la dcslinent i cinquan- tiipler la subsistance publique , et des-lors & opposer une barriere a la I'amine; experiences, faites le 9 mars iSi5,sur les at^antages dc I'associalion de farines extraites de la pomme de terre ,avec la farine des cereales d'une qualite inferieure ; ouvrage dedie au Roi , par P. A. Cadet-de-Vadx , et imprime par ordre du' gouvernemcnt. Paris, 1821. Colas, rue Dauphine, 02, et M°"= Huzard, rue dc rEperon , 7; in-S° de i32 pages. Prix : 1 fr. 5oc.

A peine le philosophe , Tanii-dc rhumanite commcncc-t-il a respirer, en voyant se fermer les plaies occasionnees par la guerre, que de nouvelles craintes viennent assi^ger son ame. Le rapide accrolssement de la population parait mcnacer quelques pays d'un fleau plus affreux encore que la guerre , et des niillicrs d'hommcs peuvent etre exposes «» envier, dans les horreurs d'une agonic Icnte ctcruelle , le sort de ceux que le fer a moissonnes. On nc saurait done trap recommander I'etude de I'economie domestiquc ,• dc cette science, qui est, comme le dit M. Cadet-de-Vaux , le plus solide appui des trOnes; on ne saurait trop encourager les cssais des cuonomistcs, ni donner trop de publicite aux decouvertes utiles, dans le genre dc cellcs que nous signalons aujourd'iiui a la. recon- naissance dc toulcs les classes de citoyens. La premiere de ccs de-

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couvertes est due i M. Salles , membre de la society d'agriculture de B6ziers ; elle consiste i couper le Lie huit jours avant sa parfaile malurite. Dans cet etat , dit M. Cadet-de-Vaux , le grain est plus iiourri, plus volumiueux et plus beau, et n'est jamais attaqu^ par le charangon. On a v6rlfi6, ajoute-t-il, qu'il donne alors un becto- litre de plus par demi-hectare. « Le moment de moissonner est celui oil le grain , 6cras6 sous les doigts , presente un aspect pSteux , comme de la mie de pain que Ton petrirait de meme 4 la sortie du four. » Nous craignons que M. Cadet-de-Vaux ne se soit laiss6 trop promptement eblouir par les avantages que presente cette nouvelle metliode , relativement i la quanlile , et qu'il n'ait un peu trop pe;du de vue la qualile desirable dans le grain pour la panification. A Paris, comme cbacun le sait , le supreme degre de I'art con- siste i faire entrer dans la fabrication du pain la plus grande quantit6 d'eau possible; et M. Cadet-de-Vaux convient que ce pain est done de peu de qualitii nutritive. Le voila done en contradiction avcc lui-meme ; car, si la farine provenant de ble premature absorbe beaucoup d'eau, ce dont il n'est pas possible de douter, le pain qui en resulte ne pent manquer d'etre parfaitement analogue a celui du boulauger, qu'il regarde avec raison comme peu nutritif. Nous croyons qu'avant d'adopter la nouvelle metbode , il convien- drait d'attendre que les faits exposes dans I'ouvrage de M. Cadet- de-Vaux fusseut bien constates par I'experience. Les moulins a bras, de I'invention de M. Dronsart, offrent des avantages plus reels. 0 Les meules d'un de ces moulins , etabli k la Ferte-sous-Jouarre , dit le rapport , reduisent en farine trois , cinq et buit becto- litres de blti-froment, en douze beures de travail, i I'aide d'un sen! homme , lequel n'emploie que douze i quinze livres de force , pour une dimension de meule de deux et trois pieds. La facility des mouvemens est telle , qu'ua cheval, un boeuf, au moyen d'un manege , pent faire tourner trois et quatre de ces moulins , qui , alTrancbis des retards causes par les grandcs eaux, les secberesses, les gelees, I'absence du vent, seront pour le consommateur d'une utilite indispensable (i). » II est k regretter que le prix de ces moulins (depuis Soo francs pour une dimension de 2 pieds, jusqu'a 2,000 pour une de 4 ) les rende inaccessibles a la classe indigent*.

__ (i) On peut s'en procurer, a Paris , rue des Tournclles, n" iS.

b

m LIVRES FRANCAIS.

Le moulia portatif que vient d'inventer M. Helftnberger, k Milaii, doit lui 6tre pr6Kr6,6i, comme I'annonceni plusieurs journaux, au tnoyen de ce petit moulin, d'un prix trfcs-modique, Une seule personne pent moudre soixante livres de bl6 par heure. Le silo de M. Ternaux, sur lequel nous avons d6ji public des details (F'qy. ci-dessus T. IX, p. 211.), est une admirable invention h laquelle on ne saurait donner trop de publicite , en recomman- dant toutefois de choisir un sol 6lev6 , comme le plus propre k ccs genres de constructions , et de ne jamais introduire dans le silo que des bl6s parfaitement sees. Mais ce qui noua paralt le plus •digne de fixer I'attention de tous les economistes et de tous Ics •cultivateurs , dans le livre de M. Cadet-de-Vaux , ce sent les nou- ^elles appropriations de la pomme de terre , « appropriations qui la placent, dit-il , au premier rang des substances alimentaires, et la destinent k cinquanlupler la subsistance publique. » Ce mot cinquantupler n'a rien d'exagercj I'academie de Marseille ayant rc^u de Londres, il y a quelques annfies , une espece de pomme de terre dont une seule plante donna, la seconde annee, 2,1 Go livres de tubercules , d'une quality excellente. Un tel prodige de vege- tation ne pent manquer de fixer I'attention de nos agronomcs ; et quels bienfaits n'auraient pas produits les nouvelles appropriations de la pomme de terre, si, comme M. Cadet-de-Vaux nous semble I'avoir prouv6 , un arpent de terre qui, sem6 de bl6, ne suffit pas toujours k la nourriture d'un journalier, si ce mfime arpent , dis-je , ensemenc6 d'un vegetal , dedaigne jusqu'i present dans quelques contrees de I'Europe, assure la subsistance de cinquante individus!

E. U. 270. Traili de medecive pratique de Pierre Frank, traduit du latin, par J. M. C. Goudabead, D. M. , membre de la society de medecine pratique. Paris, 1821. Migneret , rue du Dragon, n" ao. 4 vol. in-S".

Cette traduction , qui se recommande par une grande exactitude , ne peut manquer d'filre favorablement accueillie. Depuis qu'on a cesse de parler latin dans les 6coles , c'est un veritable service ii rendre au public que de traduire en langage vnlgaire les ouvrages latins dont le style ne fait pas tout le merite ; et Ton attendait avec impatience que M. Goudaheau achevSt de publier la traduction de ce traite de medecine pratique , dont 11 avait fait parattre le pre- mier volume il y a plus de trois ans.

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iyi, De I'Arne dans la ueille et dans le sommeil; parM.Opoix, inspecteur des eaux min6rales de Provins, etc. Paris, i8ai.Bruaot> Labbe, quai des Augustins, n" 33. i vol. ia-8°.

Ce petit ouvrage se recommande par un grand nombre d'obser- vations psychologiques , presque toujours justes. L'autenr insiste sur quelques phenomcnes du sommeil , auxquels jusqu'ici les metaphy- sicians ont fait trop pea d'attention. II se demaade, par example, comment il arrive que , dans les rfives , notre ame puisse non seu- lement voir, entendre, palper des objets qui n'existent pas, mais encore assister k des conversations suivies qui paraissent sortir de la bouche de personnages imaginaires , avec lesqucls nous croyons converser. II fait remarquer que les pens^es qu'ils expriment, et qui souvent nous ^tonnent et nous embarrassent , ne peuveht sortir que de notre propre intelligence , dont nous meconnaissons ainsi les operations. De cette observation et de plusieurs autres sem- blables^ I'auteur tire cette consequence : que Yintellect est hors del'ame, ou du moins qu'il ne la constitue pas, puisqu'il peut agir entiferement k son insu. Mais, qu'est-ce done que I'amef L'au- teurla deCnit ainsi : a L'ame, dans I'homme, est ce qui pense , ce qui veut , ce qui sent et ce qui aime , ce qui jouit et ce qui soulTre : c'est le moi , c'est ce qui a la conscience de son existence. » On voit, d'apres cela, que I'auteur, qui confond mal a propos le moi avec Vanie , n'a, au reste, qu'une idee tres-confuse de ce qui constitue en nous la personnalite. Si M. Opoix avail pris la peine de s'iastruire de ce qu'ont pens6 sur cette matiere les plus celebres psycholo- glstes modernes , il aurait sans doute reconnu avec eux que ce qui constitue la personnalite dans rhomme ; ce qui fait qu'il peut dire moi , c'est la llberte dont il jouit ; le moi n'est autre chose que la ■conscience de la suite des actes libres. Un peu d'erudition dans I'histolre de la philosophic I'aurait ^galement dispense de se livrer k une assez longue dissertation pour dfemontrer que c'est notre ame seule qui voit, qui sent, et que, hors de nous, il n'y a ni cou- leurs , nisons, ni odeurs. L'auteur etablit cette verite,i laquelle il a ete conduit par ses propres reflexions , et qu'il croit tout-4-fait nouvelle , sur les raisonnemens les plus concluans ; mais il paralt ignorer que , depuis Descartes , qui I'a dimontree jusqu'i I'evidence, aucun philosophe ne I'a revoquee en doute. Une grande partie de cet ouvrage est consacr^ a une explication physiologique du

592 LIVRES FRANCArS.

iommeil et des rCves. L'aulcur croit en voir la cause prochaJne dans Ic relScliement des organes du cervcau ; ce relflchement, sui- vant lui , produit dans les facult6s de I'intellect la disunion et le defaut d'ensemble , d'oii r^sultent les rCves. U admet I'opinion de la plurality des organes ; mais ses idiSes sur ce sujet n'ont rien de conimun avec la doctrine de M. Gall ; et, loin de s'appuyer de I'au- toriti de ce cfelebre medecin, il ne le nonime nienie pas. Au reste , pour M. Opoix, la doctrine de la pluralite des organes n'est qu'une idee accessoire , et I'on serait tent6 de croire qu'il ne I'adopte que parce qu'il la trouve plus commode pour le diveloppemenl de son hypothese. Mais si cet ouvrage renferme quelques opinions inad- missibles, I'auteur qui se trompe souvent dans I'appreciation des causes assignees aux phenomenes qu'il a observes, presente aussi plusieurs observations justes, et Ton aurait tort de se rebuter par les hypotheses defectueuses qui se trouvenl des les premieres pages de son livre. B. d. D. M.

272. Apergu sur I'abiis du voTnissement prorogue dans les ma- ladies , avec des reflexions pour venir a I'appui de la doctrine phy- siologique de M. Broussais ; par Deleau jeune , docteur en medecine, ex-chirurgien au 4°"^ regiment de cuirassiers. Commercy , 1820, im- primerie duNarrateur de laMeuse; Paris, Croullebois, rue del'Ecole de Medecine; Nancy, Vincent, libraire. Prix, 1 fr.Soc.

273. ('). Voyage aux Alpes mdritimes , ou Histoire naturelle , agraire, civile et medicale du comt6 de Nice et des pays limi- trophes , etc. ; par Fh. Em. Fodkbe, professeur de medecine legale ^ I'acad^mie de Strasbourg , etc. , etc. Paris , Levrault , rue des Fosses- Monsieur- le-Prince, 33; Strasbourg, meme maison. 1821. 2 voK in- 8°. Prix, 10 fr.

Savant ouvrage, redige avec toute la conscience d'un observateur philosophe , qui n'ecrit pas pour le marchand de livres , mais pour l'utilit6 de ses semblables et pour sa propre gloire. Le Voyage aux Alpes maritimes est un bienlait pour le pays que le voyageur a par- couru ; il occupera une place distinguee dans la bibliothfeque de I'administrateur, du m6decin , du naturaliste ; c'est, en un mot , une excellente statistique,c'est-4-dire un ouvrage tres-bien fait, dansun genre eminemment utile.

374. Catalogue general des objets de sciences el arls , tels qu'ins'- trumens d'optique , de dioptrique, de catoptrique , de mathhnatiquts

LIVRES FRANCAIS. 593

el deph^sique experimenlale en lerre, qui sefabriquentel se uendent chez I'ingenieurCBEWhtiEa, autear da. Conseruateur de la vue et de i'JEssai sur I'arl de I'lngenieur. Paris , 1821. Chez I'auteur , tour de I'Horloge du Palais, 1. in-S" de 63 p.

275. Les Propheles nouuellement iraduits sur Vhehreu , avec des explications el des noles criliques4 Prophelies d'Ezechiel. Paris , jSai. Eberhart et Mequignon le jeune, 2 vol. ia-8" de 702 p.

Cette nouvelle publication est due au zele pieux, aux lumi^res et aux talens de I'illustre magistrat qui s'est charge de recueillir et d'expliquer toutes les propheties de Tanoien et du nouveau Testa- tament. On voit que M. le president Agier poursuit avec ardeur la tache laboiieuseet honorable qu'il s'est imposee. Outre les Propheties eparses dans la Bible, il a deji mis au jour les Psaumes (i) les Pro- phelies d'lsaie, et, cette annee meme, les Propheties de Jeremie. On doit s'attendre h voir bientOt paraitre son travail sur Daniel, prophete si celebre , surtout pour avoir, au terns d'Ezechiel, cinq cents ans avant notre 6re , fixe I'ipoque et les circonstances du pre- mier avenement de J6sus-Ghrist. Ezechiel , que M. Agier vient de publier , est celui de nos auteurs sacres qui a toujours paru le plus obscur. Dans cette traduction, dans ces explications nouvelles, on voit disparaitre une grande partie des difCcultes connues,et les plus graves meme y sont eclaircies i un certain degre. On sent bien qu'il n'est pas aise d'etre en tout precis et convaincant, lorsqu'on s'efforce non seulement de mettre en frangais d'anciens textes hebreux,quimon- trent i5nigmatiquement les dernieres destinees des juifs , de I'eglise chr6tienne et de tout le genre humain, mais qu'on s'applique encore ii en d^couvrir le sens propre et le sens figur6. Sur ces grands objets, I'auteur a des pens6es qui lui sont communes avec un grand nombre d'ecrivains eccl6siastiques anciens et modernes , et d'autres qui lui sont particulieres pour le fond ou pour les accessoires. Les conjec- tures qu'il appuie ou developpe d'une maaiere nouvelle , et qui nous

(1) Independamment de sa belle traduction franraise des Psaumes , disposes dans un ordre aussi nouveau qu'instructif , et des Explica- tions non moins savantes que pieuses qui la suivent, 3 vol in-8'>,il a public, en iSiS, chez Eberhart et Mequignon jeune : Psalmi ad hebraicam veritatem translali el in ordinem naturalem digest i , accesserunt canlica , etc. i vol in-i6 de 26I p. ; c'est un Manuel tros- jnteressant, surtout pour les Chretiens.

Tome xx. 3S

5jA LIVRES FRANQAIS.

ont le plus frappiis, sont que la papaut^ sera traosfdree et r^tablte ^ Jtirusalfin ; que rAntechrist viendra dans la Jud^c pour dutruirR IVglise chretienne renouvelie apres la conrersion des Juifs ; que ce sera un prince d'origine tartare ct devcnu chef de I'empire des Rnsses ; (•uQn, qu'il perira lui et toule son arniee, conime un autre Sennacherib, sans avoir elFectue ses desseins. Mais, i cote des tableaux qui rcstont encore voiles , il y a dans Ezechiel des trails intercssans pour bien des classes de lecteurs ; nous entendons ceux qui se rap- rortent i la promesse du Messie , i I'histoirc et aux antiquites des peoples de I'Asie occidentale ; les curieux details sur la nature et I'etendue de I'uiicien commerce de Tyr, les peiutures de mocurs, les Tives le9ons de morale, les desordres du pcuple juil" et des levites, qui rappellent les abus trop reels des chretiens et de leurs pretres. Sur tous cesobjetSjM. A. se montre ici, comme dans ses publications pre- c6dentes, 6crivain habile et judicieux, clair et m^thodique, elegant et profond , hardi et cisconspecl, ediCant surtout, et, sur un pointy d'uno austerite qui pouvra sembler extreme. II prend, dans le sens le plus etroit, le plus absolu, les deux passages d'Ezecbiel qui re- prouvent I'interet de I'argent. Cependant, ces deux passages doiveut Ctre concilies avcc les distinctions etablies sur ce sujct dans le Deu- teronome; et il est permis de penser que les explications donnees sur I'usure, dans les actes du Sanhedrjn tenu i Paris, sous Napoleon , parailraient a beaucoup de lecteurs plus conformes i la verite , i la vraie morale naturelle et revelee , que I'explication litterale du nou- Tel interpr^te , si digne d'ailleurs de notre estime et de nos respects, Voici une remarque d'an tout autre genre ; elle est minuticuse, mais elle appartient k I'histoire de I'humanite. Ezechiel a parle des an- neaux que les dames juivcs avaient au nez. M. A. dit que ces anneauz Icur tombaient du haut du front. N'y a-t il pas lieu de croire plutOt qu'elles se faisaient percer les narincs, ainsi que les oreilles , pour y attachcr des anneaux, signes d'abord de leur religion oil de leur d6- pendancc , et ensuite de la mode et de la vanite f 11 existe encore en Asie des contrees oil cet ancien usage s'est conserve. Dans I'ln- dostan, les dames qui sont riches eu biens ou en enfans portent I'annrau dans la narine droite, et on les appelle en samscrit Nasa- dakshinna-vartta (litteralement : au nez a droite amicau ); celles qui sont pauvrcs ou dans le chagrin le portent i la narine gauche , et sc nomment dans la meme languc Nasa-vama-vartta (litteralement: au nez a gauche anneaii). Laniuinais, de i'lnstitiiU

LIVftES FRANCAIS. 595

2j^6. Abregi Je I'Origine de tous les culies; par Oofdis, nou- Velle edition. Paris, 1821. Chasseriau, libraire , rue Neuve-des- Petits-Champs , n" 5. 1 vol. in- 18. Prix , 5 fr.

Dupuis a senti lui-menje qu'un ouvrage aussi etendu et d'une eru- ditioQ aussi vaste que son Origine ch tous les cultes ne pouvait etre lu que par peu de personnes. II en donna un Abrege , dans lequel il analysa son systeme general. L'ouvrage , ainsi reduit i des propor- tions plus convenables pour un grand nombre de lecteurs, fait par- faitement connaitre les sources d'oii decoulent , seloa Dupuis , les diffcrens cultes qui ont successivement regri6 sur la terte. Peut-6tre n'adoptera-t-on pas le systeme de I'auteur dans toutes ses cons<-- quences; mais on sera du moins force de rendre justice aux immenses connaissances qu'il avait acquises dans I'etude de Tantiquitu. Une reimpression de V Abrege de I'Origine de tous les cultes, dans un format commode et peu couteux , etait done devenue necessaire. Quelque tems apris la publication de cet ouvrage, on publia une Analyse raisonnee de I'Origine de tous les cultes , generalement attribuee k M. Destutt-Tracy. Malgre la ressemblance qui semble exister entre deux livres destines a faire connaitre le meme ouvrage , I'execution n'en est pas moins tres-differente. Nous citerons un pas* sage du discours preliminaire de V Analyse qui fait voir en quoi con- siste cette difference : « Cet Abrege , dit I'auteur de I'Analyse , ne me parait pas rendre inutile mon travail ; il n'est pas destine it remplir le meme objet. II presente le sommaire de l'ouvrage ; telle etait I'intention de I'auteur; mais moi, je me suis attache princi- palement a indiquer sa marche, I'enchainement de ses idees , la serie de ses preuves et la liaison des matieres.» L'Abrige et I'Ana- lyse de I'Origine de tous les cultes sont deux livres fort int^ressans , qui ne dispensent pas n6anmoins les personnes qui voudront acquerir une veritable instruction dans les sciences morales , de lire les trois volumes in-4° de l'ouvrage original de Dupuis. A. T.

277 C*). Memoires sur lu Religion , avec des tableaux de la dis- cipline et des moeurs du tems present, dans les differentes commu- nions. — Premier memoire, des OJJicialites anciennes et nouvelles, par M. Lanjdinais, pair de France. Paris , 1821. Baudouin freres, rue de Vaugirard , n" 36. In-8° de 74 p Prix , 1 fr. 5o c. , et , par la postc , 1 fr. 75 c.

.\ propos d'une ordonnance de M. I'«vrque de Mi^ti , qui nitahlit

59G LIVRES FRANgAlS.

dans son diocese line officialite, cspcce de tribunal mixta, leqnel appelle I'exercice du pouvoir ecclesiaslique sur des actes de la vie civile, M. Laujulnais avait publie , Tannic dernifere, un opuscule ( mCme adresse que ci-dcssiis ) , oil il itablissait claiiement I'illega- lite , dans notre gouvernement conslitutionnel, de.ces sortes de tri- bunaux , alors surtout que Ic pouvoir legislatif n'avait pas ete appel6 i connaitre du nierite de leur retablissement. Des journaux des bro- chures spcciales nienie ont ele consacres a repondre i I'icrit de M. Lanjuinais. C'est ce qui I'a determine i une replique que nous croyons devoir etre definitive sur cet objet ; car nous ne voyons pas , ni ce qu'il serait possible d'ajouter, ni ce qu'il serait possible de xi- pondre. On pent envisager ce dernier ecrit comme un traitfe abreg6 de la matifere, consideree relativement au droit politique et au droit canonique ; ce qui est son veritable point de vue, L'auteur a m6me adopte les formes d'argumentation autrefois usitees en ces matieres, formes qui ajoutent peut-etre ii la nett(fte et i la force de la logique , et qui d'ailleurs ne deplairont pas aux pcrsonnes que ces sortes de suiets interessent. Le meilleur moyea de donner une idee precise et un peu complete d'un livre de ce genre, c'est d'en transcrire les sommaires. Les voici : Expose du sujet. Reponse aux reproches personnels adresses a M. Lanjuinais. Qu'etaieut les officialites avant le 17" siecle? Des trlbunaux oppresseurs. Comment et en quel sens les officialites furenl-elles abolies en ijgo? Comme abusives et inu- tiles. Que seraient les officialites d'aujourd'hui , si elles itaient relablies valablement? Des tribunaux inutiles et dangereux. Sont- elles litteralement et intentionnellement r6tablies par des iveques ? Oui. Si des evfiques ont retabli les officialites , en le voulant, ont- ils mal fait ? Tres - mal. Si des eveques ont r6tabli les officialites par mtgarde, ont-ils moralement et grammaticalement bien parle ? lis ont mal parl6 en tous sens. Observations speciales relatives 4 I'ordonnance de monseigneur Tevcque de Metz, pour retablir I'offi- cialite diocesaine. Nous ajouterons qu'ici , comme dans les autres Merits de M. Lanjuinais, la plus saine doctrine est appuyd-e sur la plus vaste Erudition. A. M.

2-8. (*) Histoire abregee de I'lnquisition religicuse en France, par M. Lanjiiiisais ; suivie de I'Ojiinion ^ du mfime pair, conlre le projelde loi relutif aux pensions ecclesiastiques , autrement k l'6rec- tion de trente eveches nouveaux ( Seance du 27 juin 1S21 ). Paris >

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i8ai. Baudoulii ireres, rue de Vaugirard , n"> 3G. In-S" de 54 pages. Prix, 1 fr. 5o c. , et, par la poste, i fr. -5 c.

La seance de la CLambre des Pairs, oil se discuta la loi dont ii est question dans cet opuscule, n'a ete rendue que d'une maniere deco- loree dans le proces-verbal insere au Moniteur. La discussion y fut tres-animee ; la tribune y fut difficile a tenir pour plusieurs mem- bres de I'Opposilion. M. Lanjulnais, entre autres , qu'on est assure de trouver dans toutes les circonstances diCGciles , essaya vainement de repondre a une assertion du ministre des affaires etrangeres , qui avait pretendu que les evfiques fran(;ais nous avaient preserves de I'etablissement de I'inquisition dans notre pays. La parole lui fut in- terdite par la cl6ture. Quelle que soit I'habilete qu'on veuille accor- der au ministre, il est perniis de croire que, place sur le terrain de I'histoiie et de la discipline ecclesiastique, il aurait trouve, dans M. Lanjuinais, un adversaire qui meritait au nioins d'etre ecoute. Au defaut de la tribune, la presse a recueilli ses raisons. Que dis-je? ses raisons ; ce sont les fails historiques les plus irrecusables , au moyen dcsquels le savant defenseurde toutes nos liberies elablit que I'ejjiscopat fran^ais se montra , en plus d'une occasion, trop favo- rable a retablissement , dans notre pays, du tribunal de I'inquisi- tion, qui a pese , au moins de I'odieus de son nom, sur les pro- vinces meridionales de la France , jusque vers le milieu du siicle de Louis XIV. Le Precis hislorique de M. Lanjuinais forme , avec son Opinion, prononcee a la Chambre des Pairs, un Traite fort ins- Iructif , et qui donne des idees jusles sur I'esprit qui devrail diriger notre legislation , relativement a I'etablissement civil de I'episcopat.

A. M.

279. (') Science da Publicisle, par.M. Fritot, avocat k la cour royale de Paris; 4" et volumes. Paris, 1821. Bossange , pere et fils , rue de Tournon , 6. Prix , 7 fr. pour les non-souscripteurs.

Le Moniteur, dans son n" 240, dn mardi 28 aout dernier, fait ua nouvel eloge de cet ouvrage ; il I'indique comme pouvant suppleer , du moins pour le plus grand nombre des lecteurs, les Traites isoles des auteurs les plus celebres qui ont ecrit sur les differentes parties, de cette science , et comme presentant le grand avantage de les coordonner, de les unir, pour les faire tons concourir au but commun qui doit etre I'objet essenliel de cette branche iniportante des con- naissances humaincs , le perfuctionnemcnt des institutions sociales.

595 LIVRES FRANCAIS.

II en rccommande la lecture, non seulement aux legislateurs , auic bommes d'etat, mais encore 4 toutes les classes de la societe, pour lesquelles il le considc^e comme fort n^cessaire sous Tcmpire d'une monarchic constitutionnelle.

a8o {*). Collection des constitutions , chartes el lois fundamen- tules des peuples de I' Europe et des dfux Amiriques , avec des pr6cis oBrant I'histoire des liberies et des institutions politiques chez les nations modernes , par MM. P. A. Dufad, J. B. Duvebcier et J. GuADET, avocats il la cour royale de Paris. Paris, 1821. Chanson, iditeur, rue des Grands-Augustios, 10. i vol. in 8°. Prix, 7 fr. 5o cent. , et 9 fr. par la poste.

C'est une heureuse idee que d'avoir reuni aux principes du droit public qui regit les nations modernes, le tableau de I'etablissement de leurs institutions politiques et de leurs libertes ; et Ton pent etre 6tonn6 qu'aucun de nos publicistes n'eut encore songe k exicuter le projet entrepris avec succes par MM. Dufau, Duvergier et Guadet. II faut le dire, toutefois, nous ne connaissons eng^ntral notre propre droit politique , que par ce que nous en avons appris dans les jour' naux , et celui de nos voisins nous est encore plus etranger : la plupart des hommes meme que leurs fonctions appellent 6 la direc- tion des affaires publiques ont bien pu lire quelques traitis de droit politique, parcourir quelques commentaires sur les actes constitu- tionnels des differens etats; mais toute leur 6tude s'est bornee 1^ , et le legislateur a la tribune , le publiciste dans son cabinet , I'horome d'6tat au conseil , comme le professeur en chaire , attendaicnt encore la publication d'un ouvrage facile it consulter, et dans lequel ils pnssent Irouver rapproch6es et comparies les differentes lois formant la legislation constitutionnelle des peuples civilises. On doit done ac- cueillir avec reconnaissance I'ouvrage que nous signalons i I'atten- tion de nos lecteurs ; c'est li qu'on pourra etudier de bonne foi le droit politique de I'Europe ; c'est li que les hommes d'etat pourront voir en quoi est unanime le consentement de tous les peuples , et ce que chaque principe re9oit de modifications ,k raison des terns, des lois , des moeurs et des circonstanccs.

Le plan des auteurs nous parait heureusement concu ; quoique leur but principal soit de donner le texte mfime des lois composant les constitutions des peuples, ils ont senti qu'il ne suffisait pas de Mpporter uniquemcnt ce texte, mais qu'il fallait raccompagncr de

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notions ou precis historiques qui pussent mettre le lecteur k inline de bien apprecier le merite du gouvernement. Ces precis sent des- tines i presenter rhistoire etles revolutions des institutions poiitiques qui ont precede les constitutions rapportees dans I'ouvrage ; les au- teurs ont encore eu soia de signaler, toutes les fois qu'il a etc neces- saire, des usages constitutifs consacres seulement par le terns et par les moeurs des peuples , usages qu'on peut regarder chez plusieurs nations conime des conslilutions nun ecriies, pour einprunler les expressions de I'ouvrage.

Ce qu'on vient de lire peut donner une idee gen^rale de la col- lection des constitutions; occupons-nous particulierement du pre- mier volume actuellement en vente ; il se compose des constitutions de France et d'Angletcrre. Le travail relatif i la France se divise en trois parties : i" Precis de I'histoire du gouvernemenl de la France^ depuis I'originc de la monarchie jusqu'i I'annee 1789; 2* constiluliun non ecrite de la France avant 1789 ; endn les dif- ferentes constitutions qui se sont succedees depuis celle de 179'- Dans le precis historique , qui remonte bien avant Vetabtissement de la monarchie , les auteurs out su trouver des considerations nouvelles aprfes Dubos et INIably, surtout apres notre grand Montesquieu ; ils se sont trace, au milieu des systemes opposes dont chacun a enve- loppe le berceau de nos institutions, une marche independante et d6gagee de toute discussion fastidieuse : des jugemens sains, un boil esprit, un style vif et anime nous ont paru distinguer ce mor- ceau qu'on ne peut manquer de lire avec interet. On y suivra, jus- qu'au tenis de nos guerres religieuses, I'etablissement et les progrfes de notre gouvernement dont les principes, tout-4-coup meconnus et oublies, disparaitront totalement pour faire place h un despotisme qui ne fut verilablement bienfaisant que sous Henri IV. Arrive i cettc epoque , I'auteur poursuit avec une noble francbise : « Le genie hardi et sanguinaire de Ricbelieu, le brillant despotisme et les victoires de Louis XIV coutribuerent egalementi detruire jusqu'au souvenir de I'ancienne influence des grands : il ne fallait plus que les cor- rompre pour qu'ils cessassent d'exister ; c'est ce que fit Louis XV. Sous le regne de ce monarque, tout fut souille, tout tomba dans le deperissement ; mais , tandis que les premiers ordres de I'litat s'abais- saient , le troisieme s'elevait par les progr^s des sciences , des arts el d'une phjlosophie audacieuse. Une revolution devait avoir lieu ; les

coo LIVRES FRANCAIS.

vertus de Louis XVI ne firent que la retarder. II fallut enfin revenir a ces principes du gouvernenient de France , si long-tems oublies. La nation fut convoquce; et alors commen(;a une revolution qui

ebranla rEurope entifere dans ses antiques bases Tin demi-sifecle

avant, ce n'eftt peut-tStre et6 qu'une utile et paciCquc reformelo Ce sont les derniires lignes de ce morceau ; elles peuvent faire juger de tout le reste. Peut-Ctre nous dcmandera-ton ce que c'est que la constitution non ecrite de la France ; les auteuis rtpondront que c'est I'ensemble des usages et des regies fondamentales de I'ancien droit public de la France , reproduit dans une suite d'articles redig^s sur le plan de nos constitutions modernes. En lisant ce travail, on admire les soins de I'auteur ; mais on est oblig6 d'avouer que la plu- part des dispositions rapportees furent plus souvent meconnues qu'appliqu6es ; aussi, les auteurs ne nous les donnent-ils pas comme des dispositions d'une application constante, mais comme genera- lement revues et sanctionnees par les grands corps d'etat , tels que les Etatsgenerau'x, les parlemens , le grand conseil , par le monarque ou meme par les auteurs recommandables; ils ont toujours eu soin de citer pour garans , des actes publics , les faits historiques ou les auteurs sur l'autorit6 desquels ils s'appuient,

'La.Coiislitution d' An^leterre demanderait une analyse tres-etendue, autant par son importance que par la maniere neuve dont elle se trouve presentee. Nous dirons seulement qu'il ne faut pas confondre I'ouvrage de MM. Dufau, Duvergier et Guadet, sur cette constitution, avec les tralt^s qu'on pent avoir lus sur le mCme sujet : ici, comme pour les autres etats , c'est I'ensemble des lois constitutives et orga- niques que donnent les auteurs , lois d'autant plus curieuses pour nous que la plupart n'ont jamais ete traduites en francais, et ne se trouvaient que dans les grands recueils de lois anglaises qu'on ne peut guere avoir que dans les bibliotheques publiques , oii il nous viendra sans doute rarement dans I'esprit d'aller les consulter.

281. Considerations sur la France, par M. Joseph de Maistre. Nouvelle Edition , la seule revue et corrigee par I'auteur ; suivie de VEssai sur le Princijie generaleur des Constilulions politiques et des autres institutions humaines , troisieme edition, revue et corrig6e par le meme. Paris, 1821 ; Potey, rue du Bac, 46. i vol. in-S° de 368 pages, Prix , 5 fr. et 6 fr. 25 c. par la poste. Les Considerations sur la France furent publjecs sous le gouvcr-

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ueincnt du Directoire. Ce livre , quoique fonde en general sur des idees fausses, 6tait cependant digne d'attention par une foule d'a- per^us judicieux , fins , profonds , qu'on y voit briller quelquel'ois comme des Eclairs au sein d'une profonde obscurity. L'auteur ne s'etait pas encore laisse subjuguer enticrement par ce systeme d'illu- minisme barbare , dont les Soirees de Saint-Petersbourg offrent le deplorable monument. C'est i M, de Maistre surtout qu'on pent ap- pliquer ce que lui-meme a dit de Rousseau, o II faut veiller cet homme sans rel4che, et le surprendre lorsqu'il laisse echapper la ve- rite par distraction, d Or^ voici un aveu assez remarquable, je pense, que je viens de surprendre i M. de Maistre (page 24). » Le roi, dit-il, n'a jamais eu d'allie; et c'est un faitassez evident, pour qu'il n'y ait aucune imprudence i I'dnoncer, que la coalition en voulait k I'integrite de la France. » Ceci pent servir de regie pour juger bien des actes qu'on voudrait aujourd'hui fl^trir ou meme incriminer : il n'est peut-etre pas une page dans ce livre qui n'offre quelque chose digne d'observation ; et s'il doit achever de fausser des csprits en- clins i I'erreur, nul doute qu'il fera reflechir utilement ceux qui ont le jugement droit. Ici, comme dans le dernier livre de M. de Maistre, le bourreau joue un role important; c'est la seconde providence, c'est I'image de Dieu sur la terre. On voit que c'est un sujet sur le- quel l'auteur s'appesantit volontiers , et qu'il le traite avec amour. C'est ainsi qu'il s'amuse (p. 20 ), dans la supposition d'une contre- revolution operee par la force , i convoquer a Paris tous las bour- reaux du rqyaume, el tous les cheuaux de Vartillerie pour ecarteler des hommes', i faire dissoudre dans de vastes chaudieres leplomb et la poix pour^n arroser des membres dechires par des tenailles rou- gies. Certainement, un livre qui contient des passages de cette force m^rite d'etre recherche , surtout par les soixante mille hommes qui composaient la garde nationale de Paris en ijgS , auxquels , suivant les raisonnemens de M. de Maistre, et dans ses hypotheses, tout ceci ne devait pas rester indifferent. Ce que cette edition a de parti- culier, c'est qu'on doit la considercr comme la seule authentique , ayant ete executee d'apres un exemplaire corrige de la main de l'au- teur, en 1817, et remis par lui i M. Barbier.

\j'Essai sur leprincipe generaleur des Constitutions politiques est un ouvrage plus abstrait, et encore plus rempli de sophismes que Ic precedent. Kcanmoins, il est place fori convenablemeni .i sa suite,

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puisqu'il conticnt Ic devcloppcment dc ceus dont Ic premier ou- Trage n'offrait que riiidication. X.

282. (*) Ilistoire gin&rale des Institutions militaires de France pendant la revolution; leurs principes , leur esprit , Icur in- fluence el leurs resullats. Paris , i8ai . Baudouin , frcres , rue de Vau- glrard , n* 36. 1 vol. in-S". Prix , 5 fr. , et , par la poste , 6 fr.

Cost une curiosite naturelle qui fait rechercher par quels moycns ont 6te obtenus des resultats que Ton admire. On aime i se rendre compte de ces resultats, a comparer les effets aux causes , a voir quel rapport existe entre les premiers et les secondes. Qu'on suppose des penples polices, ayant des lois, des institutions sages et calculces dans leur interet ; ayant chacun leur periode de gloire , les mfimes armes, la mfime tactique militaire , les memes arts, enfin la meiuc civilisation , a peu de nuances pres. Du milieu de ces peuples , doues des memes avantages , il en parait un vicloricux de tous les aulres ligu6s contre lui, envahissant les paj-s de quelques-uns , et les for- gant tous k apportcr dans leur systfeme politique des modifications importantes. Aucun objet n'est plus digne de la meditation des hommcs. Parvenir k connaitre par quels moyens I'armee conqui- rante opdra tant de prodiges ; consequemment, quels furent son orga- nisation, ses principes, sa discipline : tel est le but que se propose I'auteur de Pouvrage que nous annon^ons. Voulant se rendre maitrc d'un sujct aussi vaste et aussi complique , il a divise sa matiere en Luit parties, pour aider aux developpemens de la memoire et mana- ger, de distance en distance, des repos k la pensee. Voici cette di- vision : les pouvoirs constitulifs de la nouvelle force publique ; 2" la legislation spcciale qui a regi les armees; les modes organi- ques adoptes pour tous les cadres militaires ; les formations alter- natives des corps de troupes et des itablissemens de defense; les prestations de I'etat et les charges du tresor; 6" les devoirs et les obligations du service aux drapeaux; les regies de comptabilite et d'adniinistration de la guerre ; 8" enfin les resultats generaux des operations de I'armee. La premifere livraison, la seule qui paraisse en- core , est compos6e des deux premieres parties. L'une offre I'ensemble de ce qu'ont etc , pendant la revolution , les pouvoirs constitutifs de I'armee , conime principes de toute organisation militaire ; et I'autre , ses relations legales dans I'ordre du droit commun, soit pour les prinrlpes politiqucs de son existence , soit pour ses droits partiou-

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liers, soil pour son etat civil personnel et ses rapports avcc les insti- tutions diverses de la sociiite. Chaque partio est subdivisee en livres, dans lesqucls on pr6sente le tableau des operations d'une mSme na- ture. II n'esl pas d'observations qui ne soient appuyees sur des fails, et I'auteur parcourt ainsi une serie longue et glorieusc d'evene- mens dont I'interet est augmente par le rapprochement des causes, sans lesquelles ils n'auraient pas eu lieu. Nous reviendrons sur cet important ouvrage , quand de nouvelles livraisons nous mettront & m6me d'en considerer l'ex6cution , d'en suivre le plan et les dive- loppemens. V. d. M.

380. -De I'Histoire enuisagic comme composition litleraire jthbse soutenue par M. G. F. Sen^e, avocat, pour obtenir le grade de doc- teur fes-lettres. Caen, 1821. Poisson. in 8" de 3o pages.

—De signis siue de signorum in ideis generandis et instruendo ingenio pi ac poteslate [these soutenue par M. G F. Sen^e, pour ob- tenir le grade de docteur es-lettres ]. Caen , 1S21. Poisson. in-S* de 28 pages.

Le sujet de la premiere de ces theses est cclui d'un grand et bel ouvrage qui reste encore i executer : c'est la Didactique de rHistoire, livre d'autant plus necessaire , que beaucoup de gens prennent la plume pour ecrire I'histoire , comme s'il ne s'agissait que de coucher parecrit le parlage des gazettes, des bourses, et des salons. Le talent avec lequel M. Senee a trace le plan de sa these, nous permet de supposer qu'il a du le developper de vive voix d'une maniere tres- interessante , et qu'il serait aussi capable que qui que ce soil d'exe- cuter le livre que nous reclamons. La these latine de M. Sen6e roule sur un sujet moins neuf et moins piquant; toutefois, I'on y observe avec interfit les progres que les nouvelles methodes philosophiqucs ont fails dans nos ecoles. Aucun des ouvrages importans de I'ecole ecossaise n'a ele ignore du candidal, qui les cite avec beaucoup d'in- telligence. Sa latinitc elegante et pure est une preuve de plus, que les etudes varices ne sont nullement incompatibles avec les etudes fortes. Assur^ment , apres avoir parcouru ces deux theses, il est permis de douter que le sujet le plus distingue de I'universite ancienne put soutenir la concurrence avec celui que runiversit6 moderne vient de former, et dont nous saisissons avec plaisir I'occa- sion de rappeler le merite. A. M.

284. Tactiquc electorate a Fasa-^e dc l'0/iposition , oil sont indi-

60A LIVRES FRANCAIS.

ques et developpcs lous les nioyens Icgaux de dirigcr el de concciilrer Ics forces de I'Opposition dans les colleges 6lectorailx, et dc faire trlomplier son candidal. Dediee aux Elecleurs de la 5" serie. Paris , i8ai. Brissot-Thivars, rue Chabannais, n" 12. In-8° de 46 pages. Prix , I fr. 25 c. Prix de 100 exemplaircs, 65 fr.

Cette brochure , ecrite avec beaucoup de modcralion et dans un esprit vraimcnt constitulionnel , meriterait d'etre connue de tous les electeurs de la France ; car elle expose parfaitement leurs droits ct leurs devoirs. Nous transcrivons le litre de quelqueschapitres qui of- frent une analyse sommaire de Touvrage : Necessitc de se reunir et de s'enlendre quelque tems avant I'eleclion. Inscriptions d'elccleurs. Souscription. Gandidats. Notices imprimtes sur les candidals. Prtiliminaires de I'eleclion, Transport des ilecteurs. Secret des votes. Formation du bureau. Scrutin. Ballottage. Transactions.

285. Letlre de M.Tt.B.nkvs.aine , menibre de la Chambre des De- putes, k ses Correspondans (et Opinion sur le projct de loi des fi- nances de 1821; recelles\ Paris, 1821. In-S° de Irois feuilles un quart, imprimerie de Hacquart.

Cetle letlre, qui n'a pas eu moins de trois editions en huit jours, est la profession de foi energiquc et franchc d'un excellent citoyen qui s'honore de la noble carriere de I'industrie dans laquelle il s'est distingue ; qui proclame cette maxime : Jlonneur au travail, honte a lafaineantise; qui fait lessorlir tout le ridicule des leltres dites de relief accordees au sieur Herrier-Charrin , en date du 20 Janvier 1820 , ayant pour objet de le relever de la pretendue derogeance de la noblesse qu'il aurait encourue , parce que son pere avail exerc6 le commerce. L'honorable depute, s'elevant ensuile i des considera- tions generales , pleines de sagesse , sur la situation de la France el sur la conduile des ministres, eveille leur sollicitude pour le main- tien de la Charte constitutionnelle et des principes de vraie liberie qu'elle renferme. M. A. J.

286 Bonaparte et Napoleon, parallele ; par M. Cabrion-Nisas, fils. Paris, 1821. Bousquel, palais- royal. Broch. in-S». Prix, 1 fr.

Cette brochure est piquanle; elle est surtout bicn pensec. i-Napoleon sera celebre , Bonaparte est un grand homme. » Ces dcrnieres paroles de I'auteur sonl le resume de son opuscule et en indiquent I'esprit ; cet esprit est generalement philosophique , et pourtant nous croyons que I'auteur a cede a un prejuge de I'epoquc , en admcttant

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que Bonaparte I'ut un grand liomme. Sans doute, Ton peut Ctre dis- pose a I'indulgence pour Bonaparte, quand on le compare a Napo- leon ; cependant, qu'il y a loin de Bonaparte au grand Iiomme, dans la veritable acception du mot. M. Garrion-Nisas I'a quelquefois senti et indique ; aussi, doit-on bien le distinguer de cette populace d'e- crivains qui font retentir les alentours du tombeau de Napoleon de leurs clameurs adulatrices. Est-ce done li le temoignage du profond ressentiment d'un peuple , blesse dans tout ce qu'il a de plus noble et de plus juste ? Que diront nos ennemis i I'aspect de cette hon- teuse aberration? Les journaux politlques, organes habituels de I'Op- position , sont coupables d'avoir seconde cette ficheuse disposition de quelques esprits. Nous savons bien que ce n'est qu'un acces pas- sager; nous avons meme remarque avec satisfaction que pas un ecrivain de renom ne s'est compromis dans cette prostitution d'eloges; la tribune nationale en est restee pure ; quelques ames genereuses meme ont fait entendre des protestations, et I'ecrit de M. Carrion- Nisas peut etre range dans le nombre. Ges circonstances sont con- solantes ; toutefois , rappelons-nous que des Remains pleurferent Cesar, et que Rome fut opprimee par Octave; j'enteuds parler de

la baine qui doit expirer au bord du tombeau Mais, quand

Tibere n'est plus , n'est- il pas tems que Tacite vienne s'asseoir sur sa tombe ? A. Mahul.

287. Tots Kpo-THiolciToii Tus EufU'Tms Bao^iKiuTi. Aux lres-puis~ sans sou cerains de I' Europe, Paris, 1821; Eberhart. Brochure in-8* de 63 pag.

Get (icrit qui porte pour date : en Grece , le 28 mai 1821 , et qui est imprime en langue grecque et fran^aise , a et6 envoye en France, ainsi que dans toute I'Europe, pour y etre publie. G'est un cri de liberte qui doit etre entendu de toutes les ames genereuses. Les Grecs, auteurs de cette supplique, font d'abord une touchante peinture de I'horrible tyrannic dont ils sont victimes ; ils mon- trent que leur Insurrection est legitime ; ils s'autorisent des principes meme de la Sainte-AUiance pour reclamer les secours des princes Chretiens. Les puissances europeennes, disent-ils , sont interessees k leur preter un appui tutfelaire ; car, si les barbares d'Asie, appeles pour exterminer les Grecs, parviennent a les de- truire , ils ne tarderontpas a se repandre sur I'Europe, comme un torrent devastatcur, tandis que les Grecs trioniphans sezaient, an

606 UVllES FUANCAIS.

cootrairc, un rempart eternel contre les invasions futures des bar- bares de rOrient. Les Grecs, s'appuyant des exemples du passe, rappellcnt les ravages des Sarasins en Europe , depuis leur conqu6te del'Espagne; et, aprfes avoir montre que la politique conimande de ne pas les abandonncr , ils (Inissent par invoquer en faveur de leur cause la fraternity religieuse. Esp^rons que les puissances de I'Europe entendront cette voix suppliante ; la guerre , presque tou- jours si injuste dans son principe, si funeste dans ses resultats> aura du moins cette fois une cause noble et sainte , et de glorieux succfes ne peuvent manquer de la couronner. L'opinion des peuples civilis6» s'est asserprononcdse pour les Grecs. En France surtout, des vocux presque unanlmes appellent sur leurs magnanimes efforts Ic triomphe qu'ils nieritent. Ceux de nos publicistes qui se montrent toujours au premier rang des defenseurs de la liberte et de la cause des peuples , n'ont pas tarde ix elevcr la voix pc-ur la defense de la Grecc ; ceux meme qui paraissent ordinairemcnt dans des rangs opposes , cotnbattent , dans cette circonstance , sous le mcme etendard; ct M. de Bonald vient depublier, dans une de nos feuilles quotidiennes (Journal des Debats du 20 septetnbre), une espfcce de manifeste, qui convertira sans doute k la cause des Grecs tons ceux qui , par un amour mal entendu de la legitimite , ont era jusqu'i present devoir prendre parti pour les Turcs. Une lettre d'un des colla- borateurs de la Reiue Enc-yclopedique , inseree dans le Journal des Debals du i" juillet 1821 , renferme aussi une defense cnerglque de !a Grece,» qui offre le spectacle d'une lutte opiniStre et d'un gene- reux courage contre une longue et Jnjuste oppression , de I'amour de la patrie contre I'^goisme et la tyrannic; enCn , des progres des lTimi6res contre les epaisses tcntbres de I'ignorance et du fana- tisme. «

288. DiclioTinaire languedocien -f ran pais , contenant un re- cueil des principales fautes que commettent dans la diction ct dans la prononciation fran(^aise les habitans des provinces miridio- nales, connues autrefois sous la denomination g6n6rale de la Langue- d'Oc, etc., par M. I'abbe de Sadvages; nouvelle edition, revue, corrigee, augmentee de beaucoup d'articles, et precedee d'une no- tice biographique sur la vie de I'auteur, par son neveu L. A. D. F. Ala is , J. Martin ; Avignon, Guichard ; Monlpcilier, Srguin. 182! , a vol. in-8°. Prix , 1 2 fr.

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Les Anglais et les Allemands impriment k grands frais , et pu- blient, avec un z6le louable sans doute , des glossaires sur les idiomes des peuplades les plus obscures de I'lnde , ou meme des tribus sau- vages de rAmerique. On est un savant quand on a fait un lirre da ce genre ; et le plus souvent on devient un acad^micien. Pourquoi les idiomes antiques de nos provinces ont-ils ite si long-tems di- daignes? GrSce aux travaux de MM. Raynouard , Champollion-Fi- geac, Oberlin, de Rochegude, Legonidec, etc. Ge dedain n'existe plus aujourd'hui : aussi , nous ne doutons pas que la nouvelle edi- tion du Dictiunnaire languedoden de M. I'abbe de Sauvages ne soil accucillie favorablement. On ne saurait dissimuler neanmoins que le nouvel 6diteur n'a pas fait subir i ce livre toutes les ameliora- tions que le systeme actual des travaux d'erudition rendait n^ces- saire. Le dictionnaire de Sauvages ne donne que le languedocien des Ct'vennes , de Nimes et de Montpellier ; celui qu'on parle dans le Haut-Languedoc , qui comprend les pays des Albigeois, des Tecto- s£^ges , des Atacins, et ce qu'on appelait sous les Romains VAquiiaine et la Nouempupulanie , diJTcre considtirablement du precedent. Pour inoi , je suis porte ^ croire que ce dialecte offre des formes plus r«i- gulicres , et un caractere plus original que celui qui est usite dans le Bas-Languedoc ; celui-ci pourtant a fourni un plus grand nombre de productions ecrites, et I'opinion commune lui attribue plus d'eu- phonie. On cou^oit que, pour faire un dictionnaire languedocien complet , il etait indispensable de visiter les divers cantons oil cet idiome est parle , pour en signaler les dialectes , en indiquant les lieux oil chacun d'eux est usite. Or , c'est ce qui reste encore i faire. Tel qu'il est neanmoins, le dictionnaire de Sauvages sera recher- che par tous ceux que la connaissance de quelqu'une des langues du' midi de I'Europe met k portee de cultiver I'histoire, ou la litteraturc du moyen age dans ccs contr^es. A. M.

289. Ilistoire liueraire du, XIII« siicle de I'ere chretienne , traduite de I'anglais de BEBiNGxoif. Paris, 1821. Maradan , in-8°; (L'ouvrage original qui porte pour tiire : Ilisloire litleraire du mojen age, a et6 public a Londres, ehez Ma-vvman, en iSi/j.)

On doit a I'un de nos plus laborieux litterateurs la traduction' successive de diverses parties de cet ouvrage , et le volume que- nous annon^ons en est le quatrieme ; les trois autres, contenant, I'histoire litteraire des huit premiers siecles, cello des 9* et w

608 LIVRES FRANCAIS.

Slides, enfin celledu ii« et du i2%ont paru en i8i4, i8i6 et 1818; cclui-ci est relatif au iS"", et bientOt le i4* et le i5« auront leur tour. Tant que I'histoire litteraire de la France , commencce par les b6-< n6dictins et continuee par une commission de I'acadtmie dcs belles-lettres , ne sera pas terminee , il faudra bien avoir recours aus compositions mOme etrangures qui, sur ce curieux et important sujet , nous oflrent des documens authentiques ou nouveaux. C'est done rendre un veritable service aux lettres que de faire passer dans notre langue et de repandre les travaux des etrangers sur notre propre litt6rature , lorsque d'ailleurs la connaissance de celle des au- tres peuples ne peut nous 6tre ni inutile ni indiffurente. Aujourd'hui que Ton veut tout savoir, ou du moins bien savoir, ce genre d'etude a quelques partisans, etl'on sent plus gen6ralement que I'histoire de I'enfance de notre langue ne peut pas etre separee de I'histoire de nos progres dans les connaissances humaines ; c'est sa langue que chaque peuple a d'abord amclioree , i mesure que son intelli- gence s'est etendue , et cette action de I'esprit humain est la plus digne des meditations du philosophe. On lira done avec un vif interfet ce qui , dans I'ouvrage annonce^ se rapporte Ji la formation des langues modernes, surtout dans ce que I'on peut , sous ce rapport , nommer I'Europe latine ; car c'ast Ik que se trouve I'histoire de la langue fran^aise. Aux recherches du savant auteur anglais, le traducteur fran^ais a ajoute quelques 6claircissemens necessaires. C'est ainsi que M. Boulard salt rendre de nouveaux services aux lettres , et avec ce z6le eclair^ et ce noble de- sinteressement qui , dans les carrieres diverses qu'il a parcourues , I'ont toujours plac6 au nombre de nos plus utiles et de nos plus honorables citoyens. C. F.

290. (*} Annuaire necrologique , ou Supplement annuel el con > tinualion de toutes les biographies ou dictionnaires historiques ; contenant la vie de tons les hommes cel6bres par Icurs ecrits , leurs vertus ou leurs crimes ; morts dans le cours de chaque annee , a commencer de 1820; orne de portraits ; redige et public par Al- phonse Mahul. 1" annie, 1820. Paris, 1821. Baudouin freres , rue de Vaugirard, n" 36; Rey et Gravier, quai des Augustins, n" 55. 1 vol. in-8°. Prix, 4 tr. et 5 fr. par la poste. CFoj. ci-dessus T. X, page 664.)

Nous rendrons un compte dt-taille de cc volume, qui obtient

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beaucoup de succes. 11 est ornc drs portraits de S. A. R. Mb"'" le due dc Berry, du marichal Kellermann, de Fouebe ct de Volney.

291. Notice sur Claude Brossetle; suivie d'une leltre inedite du president Bouhier (extraitdn journal de Lyon, du 3i juillet 1821). In-S" de 4 pages.

Brossette, le commentateur de Boileau, i qui le satirique ecri- vait : 0 A I'air dont vons y allez, vous saurez mieux votre Bollcau que moi-mfime, » etait de Lyon. Un litterateur lyonnais, M. A. Pe- HicAUD , vient de lui consacrer une notice dans le journal de cette villa. Quelques exemplaires ont 6te tir6s 4 part. On lit, 4 la suite de la notice , une leltre fort int6ressante du savant president Bouhier, adressee k Claude Brossette ; elle est relative i quelques diflBcultes survenues au sujet dc certains ouvrages de jurisprudence. II y est question entre autres d'un arrfit en matiere civile , dans lequel , dit le president , on jugea les personnes plutOt que la th6se. Pareille chose n'arrive plus aujourdhui, , . . ; . en matifere civile.

292. Messenienne sur la liberie de la Grece. Paris, 1821 ; chez les marchands de nouveautes. In-S" d'une feuille d'inipression.

Le Chant des Grecs , avec le texte en regard. In-S".

La Grece libre , ode par A. Bignax. Paris, septembre iS2i.Chau- merot jcunc, au Palais-Royal , galerie de bois , n" 189.

Les efforts dcs Grecs pour reconqu^rir leur liberte sur une nation qui, seule en Europe , reste etrangere aux progres des sciences et de la civilisation , etaient bien faits pour exciter renlhousiasmc des poetes. Mais les inspirations de ecus qui ont voulu traiter ce beau sujet, n'ontpas toujours 6te heureuses, ce qui ne prouve rien contre le genie poetique de notre siecle. De tels ev6nemens acca- blent I'esprit du poids de leur grandeur; et I'impression soudainc et generale qu'ils produisent, I'admiration qu'ils font naitrc nuisent necessairement a celui qui veut les decrire. Le lecteur attend du pofete plus de cbaleur, plus d'enthousiasme encore qu'il n'en tiprouve lui-meme, et il est en droit de le juger severement, lorsqu'il n'en a pas re(;u de nouvelles emotions. Un aussi noble elan d'ailleurs se sent peut-6tre mieux qu'il ne s'exprime ; c'est peut-etre I'epee et non la lyre que doit saisir celui qui sail le comprendre. Quoi qu'il en soit, les trois pieces que nous annoncjons ne sont pas sans merite. II y a de la verve el du mouvement dans le Clianl des Grecs , dont

Tome xi. 39

GiO LIVRES FllANCAIS.

I'aiitcur anonyme rtvfele dans sps vers cettc ardcur brtilante et g(S- ncreuse qui caracterise la jcuncsse , et surlout la jeunessc fran- (^aise. La Messinienne est, i cc qu'on assure, le premier essai de son auteur. On y f rouvc des id6es et des expressions tres-poetiquc* d^parees par des longueurs et quelques incorrections. Jj'ode de M. Bignan est, selon nous, inferienre aux deux autres pifeces. On demandc plus de verve , plus de mouvemcnt , plus de veritable enthousiasme dans une ode ; la sienne est froide , et n'exprime guire que des idees communes, dans un style en giniial pen pofe- tique. E. H.

293. Le Roman comique, par Scabron. Nouvelle Edition, revue et corrigi-e. Paris, 1821. Roret et Roussel, rue Pav6e-Saint-Andr6- des-Arcs , n" 9. 4 vol. in-12 ; prix, 8 fr. , et par la poste 1 1 fr.

La Harpe , dont la posterite n'a pas sanctionne tousles jugemens, dit dans son Cours delitteralure, i Particle Scarron : «Le Roman co- miqiie est ce qui nous reste de meilleur des remans du si6cle der- nier ; on y trouve de la gaiety , et meme de la bonne ; le caractere de la Rancune est piquant, vrai, bicn trace; le style a du nature! et de la verve ; 11 est meme assez pur, et beaucoup plus que dans les autres ecrits du mfinie auteur » . Nous ne lui contesterons pas la derniere partie de cet eloge ; mais nous croyons que La Harpe, cri- tique souvent beaucoup trop severe, ne I'a pas etc assez a I'igard de Scarron, que, selon nous, Chenier a jug6 plus sainement dans son Tableau historique de I'etat et des progres de la luterature frangaise. ■> Au tems mfime oii Ton admirait Cassandre et CleopStre , dit-il, chapitre VI,(i) le coryphee trop fameux du genre burlesque, Scarron donnait son Roman coniique. Des ridicules de province, des comediens de campagne , des scfenes d'auberge ou de tripot , vdili ce qu'on y trouve; les incidens , les personnages, le style, tout est ignoble et grotesque; mais tout est rrai.a Nous partageons entierem^nt I'opinion de Chenier , que nous croyons celle de tons les gens de goCit , et le Roman comique nous parait une debauche d'esprit , pleine de naturel et de verite , mais ou la gaiete descend jusqu'i la farce. Le ton qui regne dans cet ouvrage contraste singu- lierement avec la situation oil se trouvait son auteur ; et peut-6tre.

(1) Voj. p 355, nouvelle edition in-iS, publico par les soins des fr^res Baudouin.

LIVRES FRANCAIS. Gil

en y n-flechissant bien , est-ce dans ses souffrances physiques mfime qu'il faut chei'cherla cause de la tournure caustique et piquante de son esprit. La gaiete de Scarron n'estpas cette gaiete douce, egale, inalterable de I'liomme heureux; c'est de rexageration , de la folie c'est un veritable delire. Nous croyons , toutefois, qu'il faut savoir gr6 aux editeurs d'avoir r^imprinie son Roman comique, qui corn- men^ait ^ luanquer dans nos bibliothtques de romans , oil il tient fort bien sa place, a c6te de ceux d'un auteur plus moderne, qui I'a surpasse par le nombre et le merite dc ses productions , mais qui n'a pas su toujours se preserver des defauts de son modele. Je veux parler de Pigault-Lebrun, qui , s'il n'a pas eu, conime Scarron , k sup- porter des maux physiques, inouis dans les annales de l'humanit6, a eprouve trop souvent , dans le cours de sa carriere litt^raire , des peines morales, dont la franchise, la douceur et I'amenite de son caractere auraient dil le preserver, si ces diverges qualites n'etaient pas trop souvent, dans le monde, des causes de persecutions et d'infortunes. ft^ E. IlBaEAu.

294. Description deVEgypte. SsiziiMB LiVRkisoa. ^nliquites. Vol. I, pi. 65. Petit temple dedi6 4 Typhon ( le mauvais g6aie ). Antiquites. Vol. I, pi. 69. Divers bas-reliefs tirts des grottes

d'Eletbya , et fragmens de statues trouv6s dans les memes mines.

Eial moderne. Vol. I , pi. 09. La place des elephans [Birket el fyl), dans la ville du Caire, pendant le terns de Tinondation. Etal moderne. Vol. I , pi. FF. Vases, meubles et instrumens. Les vases representes dans cette planche sont tous d'une petite proportion ; ils font I'office des bouteilles ou carafes de nos tables. Gonuus sous le nom de bar- daques, leur objet est de donner a I'eau la fraicbeur, si necessaire dans un climatbrulant. Les Egyptiens y sont parvenus, en rendantoea vases poreux ; I'evaporation de I'eau qui transsude rafraicbit I'cau in- terieure. Pour les fabriquer, on mele du sel au limon dont les poteries sont formees ; la premiere eau qu'on y verse dissout le sel , et laisse des pores a la place. L'usage des bardaques ou vases refrigfirans est universel; aussi, s'en fabriquet-il une immense quantity, d'autant plus qu'ils ne servent pas long-tems. La temperature s'abaisse , dans ces vases, de dix degres, etquelqucfois beaucoup plus; on augmente le refroidissement par un courant d'air ; cet usage appartient h I'an- tiquite. ( Voy. pi. 65 , Ant. , vol. L ) Ilistoire naturelle. Mammi- feres. PI. 1. Details de trois especcs de chauve-souris.

39*

612 LIVRES FRANCAlS.

Dix-sKPTiliME LivnAisoN. Antiquites. Vol. I , pi. 25, bas-reliefs du temple d'Isis ii Phila;. Antiquitis. \ol. I , pi. 55. L'interieur du portique du grand temple d'Edfou (ApoUinopolis magna). J^iae moderne. Vol. II, pi- i.On a rassemble dans cette planche vingt trois portraits, dessines fidelement ct graves avec soin, representant des individus de plusieurs races et de professions diverses. L'Arabe du desert se distingue & son a?il vif et percant, aussi bien qu'i sa coifTure (Voy. fig- 2 ) ; les Mamlouks , 6 leur menton rase et un peu recule en arriere (Voy. fig. 8.); les cheyks et hommes de loi, i des traits pro- noncis fortement , surtout le trait du nez. On reniarque dans le mar- chandd'Alexandrie une physionomic commune, qui annonce un sang alter6 par le melange des races , comme il arrive toujours dans les villes maritimes. Au contraire , les hommes du Caire et du pays sup6- rleur ont un caract^re de tete qui n'est pas sans une sorte de beautii, et qui a beaucoup d'analogie avec celui des anciens Egyptiens , si on en juge par les bas-reliefs qu'ils nous ont laisscs et par les momies (Voy. fig. 3, lo, 12, 17 et la Description des /lypogees de Thebes, Ant. Desc. , vol. III). Onreconnait aisement combien cette physio- nomic s't'loigne de celle du negre ( Voy. fig. 11). Le chretien Cophte se reconnait au caractere d'humilit6 empreint sur son visage et dans toute sa personne (Voy. fig. 1 , 4> 5). £tat modeme. Vol. I, pi. aS. Vue du port et de la grande mosqu^e deBouiriq,au Caire. C'est dans ce port qu'arrivent toutes les marchandises de la Basse-Egypte ; le marche au bl6 se tient sur la greve, en face de la grande mosquee. A gauche, on remarque un sarcophage de basalte en forme de momie, qui vient d'etre retire du Nil; c'est Monge qui en fit la d^couverte peu apres I'arrivee de I'armee. Ce beau morceau de sculpture est maintenant au musee britannique, oil Ton a rassembl6 dans une salle egyptienne les precieux monumens que I'Institut du Caire avail recueillis dans la Thebaide et dans I'Egypte inferieure. Ilistoire naturelle. Botanique, pi. 5. Trois espcces de graminties.

295. Les uillesde la Gaiile raseespar M. J. A. Dulache , et rc- bdtiesparV. A. DEGoLuiiBy, conseiller A la cour royale de Golmar. Paris, 1821. Levrault, rue des Fosses-M.-le-Prince, 53; in-S" de 46 pages.

Cette brochure est la refutation d'unc Dissertation de M. Dulaurc, ins6ree dans les Memoires de la sociele royale des Antiquaires de France , sur les lieiix d'habitation , les citCs et les fortcresses des

LIVllES FIlANCAIS. 613

Gaulois. Le savant auteur de cettc dissertation avait avance que la Gaulc ancienne n'avait point do viUes. Au lieu de huit cents que lui accorde Plutarque, il ne faisait prendre a Cesar que des encdntes de murailles d'environ sept pieds de haut. On trouve la meme opinioa reproduite dans son Ilistoire de Paris , oh M. Dulaure dit , en parlant de Lutece : « Ce n'etait point une viUe. Les Gaulois, I cette epoque, n'enavaient pas; ils habitaient des chaumitres ^parses dans les campagnes ; et, lorsqu'ils craignaient une attaque, ils se retiraientavecleursdenxees, leurs menages et leurs bestiaux , dans ieurs forteresses, et y construisaient a la hfite des cabanes oil ils abritaient Ieurs families et Ieurs provisions. . M. Golbery a entrepris de refuter cette assertion. La discussion roule sur les mots cii^iias , urbs, oppidum, vicus , cedes ou cedificium , sur la signiBcation des- quels MM. Dulaure et Golbery ne sont pas d'accord. Le premier pretend que le mot c^Wto^ avait , suivant les lieux , une acception differente. .Gemot, dit-il , signifialt une ntition ch,z les Gaulois mdependans, et une pille capUale chez les Gaulois soumis aux Remains. M. Golbery, appuye sur plusieurs tutorites, entre aufres sur celles de Cesar, de Tacite et de d'Anville, prouve que ce mot designeuniquementle/emto/r^e7z</erd^zz7z;7e«p/e. M. Dulaure ne veut pas que le mot urhs signifie ville. a II f*ut le prendre, dit-il , dans lesens A'orhis, qui se ir^(^nxi^,.x arrondissement.pays, virion. Selon lui, par le mot oppidum , il ne faut entendre qyx'nT^eforteresse, tandis que M. Golbery donne a ce mot I'acception de utile fortifiSe, etcite, a I'appui deson opinion, le temoignage d'Ennius, qui qua- l.ee Atheneselle-meme d'oppidum. MM. Dulaure et Golbery ne sont d'accord que sur le mot ulcus, auquel ils donnent la signification dequarlier, dans une ville, et de village, hors des villes. Quant au mot cedificium, M. Golbery cite Varron , qui I'emploie pour de- signer toule une ville. Ainsi , tandis que le premier veut que les an- ciens Gaulois aient babite des demeures eparses dans les forfits., et qu'Usn'aient eu pour enceintes que des forteresses, qui leurservaient delieu de refuge, le dernier voit, dans les mots d'oppida , vici , cedificia, tioisdegresd'habitaiion, comme chez nous , W/Zm , vil- lages ct maisons. Du reste , M. Golbery pense , avec M. Dulaure , quW se trompe en attribuant aux Gaulois quelques vieux Edifices quel'on voit dans lesGaulcs; il les qualiOc , comme lui, de rcstcf. des Celto-Romains, ct les attiibue au premier ou au second sitclc.

61A LIVRES FI\ANCA1S.

Nous avons rappoitt; bien imparfaitenicnt luVujct <Ie leur conlro- vcrse ; c'est dans les ecrits dcs auteurs cux-nienies qu'il I'aut etudier IfS preuves diverses qu'ils apportcnt k I'appui de leur opinion , afip de pouvoir decider entre cux. Mais, nous croyons devoir i'aire remar- quer que la refutation de M. Golbory est un modele d'uue discussion sage, modiree , polie, oil la plaisanterie n'a rien d'ofFensant ni d'amer, d'une discussion telle cnfin qu'elle devrait loujours exister entre dcs gens de lettres. E. H.

Menioires et Rapports cle Societes aa^'cintes et d'uiilile puhliquc.

296. Academie royale des sciences, arts et belles-lettres de la ■uille de Caen. Rapport sur les travaux de I' yicadhnie , par M. Hebeht, secretaire. Caen,. 1821. G. Chalopin ; in-S".

Ce rapport nous fait connaitre les travaux d'unc des premieres societes savantes de France. M. Lamouroux fait imprimer un ou- Trage sur la Geographie physique du globe le/restre. M. Pallu a pu- blic des Observations sur des travaux faits i la mine dc Litry, pour d6- couyrjr de nouvelles veines de houille. M. Lesaupage a communique sesrecherches sur la circulation du sang dans les poissons. Nous avons indique pricedemment (Tom. IX, pag. 201, 4oi et 616) divers tra- vaux de MM. Gaillon, Spencer- Smy the, Vautier, ct le secretaire de I'Acadtnaie en a pr6sent6 I'analyse. Le prix de po6sie a et6 de- cerne in M. Urhain Guilbert. Le sujet 6tait le Deuil de la ville de Caen, a roccasionde la mort de Algr. le due de Berry. Nous croyons que I'Academie a compte pour beaucoup les sentimens de I'autcur ; car sa po6sie n'atteint pas toujours a cette honnele mediocrite qui, pourtant , devrait etre de rigueur dans les concours, X.

297. Menioires el rapports de la sociite d'agricultu re et arts du diparlement du Doubs. 1820-1821 , premiire ann6e de sa restaura- tion. Besan^on , 1821. Veuve Daclin , imprimcur du Roi.

Nous avons diji fait connaitre (Tom. VIII, p. 64i) le rfetablisse- ment de celte society , aiusi que les prix qu'elle a proposes pour i8ai et 1822. Rien ne prouve mieux son utilite que le volume qui fait I'objet de cet article. II est divise en deux parties; je commen- cerai par celle qui est consacr6e aux travaux de 1820.

Uanalyse de I'essai de M. de Tschudy, sur la greffe des plantes herbacees et des arbres , par M, bi; LArPiiiiiiDi! , prisente nne expo-

LIVRES FRANC A IS. 61 ;i

sition prd'cise de cetle brancbe important!; de lecoiioniie rurale.— On doit 6 M. Girod de Chantrans , president annuel de la societti , tiois memoires d'un grand interfit. Le premier, intitule Notice sur quelques Jails relalijha la vegetation, renferme des observations tres-interessantes , entre aulres celles qui ont rapport a la culture du, hie de miracle, Dans Ic second memoire , qui est plein de faits curieus , I'auteur traite cette question : Quelle peut elre , dans I e regne vegetal , Inaction dece qu'on appelle communement engrais ; il arrive k. cette conclusion : « De toutes les substances fertilisantes , I'eau et les gaz seraient done les seules qui meriteraient la denomi- nation d'engrais , ctant en effet les seules employees i la nourriture des plantes. Les autres ne seraient considerees que comme utiles pour I'amendement des fonds de terre . qu'elles disposent k trans- mettre les Quides nourriciers , dans des proportions relatives aux besoins des difiRrens veg6taux que Ton cultive. » Sans entrer dans une discussion approfondie , je dois dire que M. Girod de Chantrans se trouve ici en contradiction avec nos plus savans chimistes qui ad- toettent , d'apres des experiences recemment repet6es par M. Theo- dore de Saussure , que les engrais fournissent aux plantes une plus ou moins grande quantite de sues qu'elles peuvent s'assimiler. C'est pour se conformer au voeu de la soci6te , que M. Girod de Chantrans a fait un extrait des principes d'cenologie de M. Dandolo ; il en a, de plus, tire plusieurs consequences qui ne sont pas indiquees dans I'ouvrage du celebre agronome italien. Dans un m6moire in- titule : Observations sur la race bovine et sur les mqyens de la perfectionner , M. Desire Ordinaire a fait connaitre les diverses espfeces de boeufs elevees dans le departement, et les moyens de les ameliorer par des croisemens. C'est i ce memoire qu'est due I'allo- cation faite parle conseil general du departement du Doubs, d'une somme de 1,800 fr., qui doit etre distribuee en primes aux cultivateura qui auront eleve les plus beaux taureaux. L'action des engrais fait robjet d'un autre memoire de M. Desire Ordinaire , oii cet habile agronome passe en revue les diverses especes d'engrais, en indiquaat ceux qui conviennent dans telle ou telle localite , et Taction qu'ils esercent sur les plantes. M. le marechal-de-camp Pernet a fait parvenir a la society des observations sur lesforels de sapins ct sur leur exploitation ; elle les a crues assez importantes pour les com- muuiquer aux agens de I'administralion forestiere.

616 LIVllES 1-llANCAIS.

La premiere paitte du volume, par laquelle j'iii cm devoir ter- miner cet article , renferme les memoires et les rapports lus dans la stance publique du i" fivrier dernier. Dans le discours d^ou- verlure , M. Girod de Chantrans s'est d'abord attache i faire res- sortir les avantages qui doivent resulter, pour I'agriculture fran^aise, des mesures prises depuis quelques annees par le gouvcrnement. Apres avoir jndique les ameliorations qui rcclament d'abord la soUicitude de la societe, il a fait connaitre les essais qu'elle a dejk tentes pour les obtenir.— ie compte rendu par M. Laurens, secre- taire annuel, des travaux de la socieii depuis sa reslauradon , est fail avec bcaucoup de soin. On y remarque ce que I'auteur dit de I'etablissenient d'un jardin experimental dans un enclos de I'aca- demie, dont M. le recteur Ordinaire a bien voulu ceder la jouissance a la soci^tc, et pour lequel il a obteAi de la pepiniere du Luxem- bourg , un envoi de ceps de toutes les especes de vignes qui peuvent prosperer dans le departement du Doubs. Je m'arreterai plus long-terns sur un m6moire de M. Bruand, ayant pour titre : Con- siderations sur I'utiliti des fermes-modeles; sur les mojens faciles et peu dispendieux de former et de multiplier ces ilablissemens ruraux , et sur le mode d'assolement a suifre dans le domaine de la Colore, propose pour un etablissemenl de ce genre. Nous arons deji dit quelques mots (Tom. VIII, p. 64i) sur ringenicuse pensee d'etablir une ferme-modfele dans un domaine particulier, dont le fermier consente a suivre le mode d'assolement prescrit par la so- ciete, pourvu qu'elle lui abandonne tous les benefices, et s'engage a I'indemniser des pertes qui pourraient resulter des essais auxquels il se soumet. Cet arrangement ne pent qu'etre avantageux pour le fermier, sans etre onereux ^ une societe composee d'hommes qui reunissent I'experience a la thtorie. On con^oit quelle doit £tre I'influence d'une semblable institution sur les cultivateurs voisins, qui peuvent observer des procedes nouveaux et utiles, et en appre- cier exactement les resultats. lis auront bien plus de confiance dans une ferme-modele, ainsig6r6eparun simple cultivateur, que dans ces etablissemens formes k grands frais , auxquels le gouverncment pa- rait avoir renonc(5 , et dont les succes meme exciteraient la mefiance des paysans , parce qu'ils sauraicnt qu'on les a obtenus en faisant des depenses au-dessus de leurs ressourccs. Je ne suivrai pas M. Bruand dans les details du plan qu'il a propose pour converlir le

LIVRES FRANCAIS. 617

donaainc dc la Covre en ferme expiiiimentale ; son mumoiie sera sans doute lu par toutes les personnes qui s'occupent d'agriculture ; elles y trouveront developpes avec une grande clarte les moyens d'execution qui , apres avoir obtenu I'approbation de la societt; d'agriculture, ont re^u la sanction plus decisive encore de I'expe- rience d'une annee. Je n'ai rien i dire sur le memoire de M. De- sire Ordinaire, intitule : Sur Vital de V agriculture en France, dent /a /Jet-Mc a deja donn6 une analyse detaill6e (Tom. X, p. Sgi). II est suivi de Vanalyse des eaux minerales de Guillen, pres de Baume-les-Dames, par MM. Bosc et Desfosses. Le dernier me- moire, du i M. Verlel, a pour tilre : Considerations sur la desli- Tialion des niontagnes dans I'economie de la nature , et sur les limites que cette destination semble avoir fixees au domaine de r agriculture.

La societe a termine la seance en decernant deux medailles : I'une i M. Etienne Joseph Pougdet, pour avoir construit a Ornans , sur la Loue, un moulin sans barrages , dont la roue pent etre baissee ou haussee i volonte, ce qui empeche qu'elle ne s'arrcte pendant les basses eaux, ou qu'elle ne s'engorge dans les grandes crues ; la seconde, a M. Jean Claude GnyAao, cultivateur plus qu'octoge- naire de la commune de Champvaus, pour avoir donnii a son can- ton le constant exemple de toutes les vertus. MM. Pouguet et Guyard ont regu chacun leur medaille des mains de M. le prefet , president ne de la society. De semblables prix n'honorent pas moins ceux quiles donuent queceux qui s'en rendent dignes. A, MicnEtOT.

Ouvragcs piriodiques.

298. Annates de V Agriculture f ran gaise , par MM. Tessiee ct Bosc. On souscrit a Paris chez M""" Huzard , nee Vallat-la-Chapelle , rue de I'Eperon-Saint-Andre-des-Arcs, n" 7. Prix de la souscription , pour les 4 vol. ou pour I'annc-e : 25 fr.

Ce recueil , dont il parait chaque niois un cahier d'environ huit feuilles in-S" , y compris les tables , est precieux pour les proprie- taires qui veulent diriger eux-m ernes I'exploitation de leurs terres , pour les fermiers et pour toutes les personnes qui veulent se tenir au courant des ameliorations agricoles. Le cinquieme cahier, 2"^ serie , Tom. XIV, 3i mai 1821, que nous citerons pour donner une idiic du plan et de I'utilite de cc rccucil , conlicnt , cnfrc autres articles, des fiagmcns sur la chairue pav M. Malhicu Donibaslc; une

618 LIVIIES FUANCAIS.

k'tUc do M. dc Baiban(;'ois sur unc nouvellc maniiTc do conseivcr les grains ; un rapport de M. Busche sur Ic moycn propose ; des calculs compares des produits de la terrc propres k la nourriture de rhomme, etc.

^99' Feuille d'annonces , Affiches et Avis divers de la ville de Ca&ulnaudary . Castelnaudary ; Labadic. In-S°. Prix de I'abonne- ment annuel : S fr. , et lo fr. par la posle. Cctte feuille parait cbaque lundi , depujs le 6 aout de cette anniie.

Nous croyons devoir encourager les recueils periodiques qui s'eta- blissent dans nos departemens ; ils sent a la fois des symptOmcs ct des instruniens de civilisation. En Angleterre et aux Etats-Unis, les deux pays les plus civilises du monde , le moindre chef-lieu de Comte ou d'Etat a son journal. Celui qui vient de s'etablir dans I'un des chefs-lieux d'arrondissenient du departement de I'Aude, nitrite d'etre distiugufi; il est redige avec gout, et offrirait une lecture agieable , memc i Paris, par un heureux melange de philosopbie, d'anecdotes, de poesies ; nous souhaitons que I'esprit de parti n'y trouve point d'acces ; alors il est k croire que les riches agriculteurs, qui bordent le canal du midi dans toutc la longueur du departement de I'Aude, feront de la lecture de ce journal le delassement de leurs soirees. Le nom dc M. de Labouisse ne se lit point sur les premiferes feuilles du nouveau journal de Castelnaudary ; mais nous avons quelques motifs de croire que ce litterateur instruit n'est pas etranger k sa publica- tion. Cette circonstance explique le merite de ce journal et doit en fajre prisager le succcs. A. M.

Ltvres en langues ctrangeres imprlmcs en France.

3oo. Ivanhoe , a romance by the author of ll'averley. Ivanhoe, roman par I'auteur de Waverley. Paris, 1821. 2 vol. in-S". M°" Richard, rue neuve de Seine, n" 54- Ces deux volumes font partic d'une edition des ccuvres completes en prose de Walter- Scott en 25 volumes, dont le prix sera de 125 f. et dc io5 fr. seule- ment, pour les souscripteurs. Chaque livraison se composera d'un ouvrage complet.

Le goCit de la litterature etrangere fait , en France , des progrus ra- pides ; nous commen^ons k nous guerir de ces idees paresscuses qui nous portaieut a croire que nos chcfs-d'icuvre <;taient un aliment EulBsant a cctte soif dc jouissances dont I'esprit ne saurait fitre ras- sasie, Lc dcsir dc ronnaitrc , qui est sans limitc, nous a rcndus pres-

LIVRES FRANCAIS. 619

que familiers uoe langue et des ouvrages ou nous troiivons , sinon la perfection de style k laquelle nous croyons gtre parvenus , du moins roriginalit6 et la force des pensees , qui donnent a un esprit cultive les plaisirs les plus vifs qu'il puisse eprouver. On ne veut plus s'en rapporter a ce que Voltaire a dit de Shakespeare , ni au tableau im- parfait qu'une traduction , quelque exacte qu'elle puisse 6tre , pre- sente toujours , on veut lire et etudier ce genie 6tonnant dans sa propre langue. Parmi les ecrivains modernes, la brillante imagination de Walter-Scott I'eleve majestueusement au-dessus de sescontempo- rains. Personne niieux que lui ne sait unir a la peinture naive des moeurs antiques , a la fid^lite historique, I'interet eutrainant qui n'ap- partient qu'aux romans ; il identifie son lecteur avec ses vaillans Ecos- sais, et sait lui fairepartagerleur enthousiasme patriotique et plaindre leurs revets , comme si I'Ecosse etait sa patrie. 11 n'est pas moins ha- bile dans la peinture des sentimens tendres. L'episode de la belle Juive dans luan/ioe en est une preuve. A.

3oi. Sketches of poetry , etc. Essais de poesie , par J. W. Lake. Paris , 1821. Galignani , rue Vivienne. In-12 de 5 feuilles. Prix : 3 fr.

302. Griechenlands Erwachcn. Le Reveil de la Grece , par E. Stober. Strasbourg, 1821. Levrault, et a Paris , meme niaison de commerce. In-S" d'une demi-feuille d'impression.

303. Comedias de Moratin, etc, Comedies de Moratin, se- conde edition corrig6e et augmentee d'une comedie. Paris, 1821. Baudry, 2 vol. in-12, ensemble, de 29 feuilles et demie. Prix : 7 fr.

N. B. L'intention des redacteurs de la Rei/ue Encyclopedique etaut de signaler aux lecteurs de ce Recueil les productions les plus remarquables qui appartiennent a chaque branche des connaissances humaines,notre Bulletin bibliographique,outie les annonces des livres qui auront ete deposes au Bureau central, contiendra desormais les titres des autres ouvrages dout le sujet aura paru digne de fixer par- ticulierement I'attention des savans et des hommes de lettres. Ges titres seront precedes d'un signe particulier *, destine k faire con- naitre k nos lecteurs que les ouvrages eux-memes n'ayant pas dte places sous nos yeux par les auteurs ou les editeurs , nous n'avons pu en offrir qu'une simple indication bibliographique. Des soins par- ticuliers seront donnts a I'cxamen et aucomptc rendu des ouvrages qui seront deposes au bureau de la Jlei^ue.

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IV. NOUVELLES SCIENTIFIQUES

ET LITTliRAIRES.

AMERIQUE.

Iles Abctiques. Geologic el mineralogie. Plusieurs vaisscaiix , partis de diffi-rcns ports des EtatsUnis pour la pCche du veau marin, devant s'avancer vers les poles, avaient i bord quelqucs savans Anit'ricains. Les regions que ces hardis navigateurs ont visilecs sent situ^es vers le 62' degr<i de latitude. La vegetation y est si rare, qu'i peine y d^couvre-t-on quelques brins d'herbe et de mousse , qui croissent dans les creux des rochers. Le pays est couvert d'une neige eternelle ; on ne voit , sur ces plages de glace , ni arbre , ni arbris- seau, Les niineraux recueillis et rapportes aux Etats-Unis, par M. B. AslOT , sonten partie primitifs et en partie volcaniques. Les icbantlllons donncs par le docteur Mitchill soat : du quartz, en masse et en cristaux; des amithistes en cristaux; du porphyrc parpetitsfragmens; de I'onyx brut en cailloux ; des pierres a feu ; des pierres ponces ; des pyrites. La carle manuscrite , dessinee par M. Hampton Stewart, qui etait de I'expedition, est d'un grand prix pour les gcograpbcs. Les geologistes n'apprendronl pas sans surprise que les bautes terres , ainsi que les sommets des rochers que les voyageurs ont parcourus , sont converts de squc- leltes de baleines et d'ossemens d'autres animaux marins. Gette decouverte ferait croire que des Eruptions volcaniques ont arrache ces debris a la mer.

!6tats-Ukis. Massachcsset. Ponl en chaines. On vicnt d'e- lever un tris beau pent en chaines sur la riviere Merrimack, a trols milles environ de Newburg-Port. Ce pont se compose d'une seulc arche , de 244 pieds de long; les deux aboutissans sont de pierre , cl ont 46 pieds de long sur "S- de haul. lis soutiennent une cbarpentc de 5o pieds ; dix chaines isolees sont appuyees sur cetle cbarpente ; les bouts de chacune de ces chaines sont enterres , des deux c6lcs de la riviere, dans des trous profonds, et sont assujettis par de largcs pierres; chaque chainc a environ 5i6 pieds de longueur. A I'cndroit oil elles passent par dcssus la cbarpente, ct a celui oii vienncnt abou- tir Ics plus fortes traverses , cllcs soul triples ct foimecs do irts

ASIE. 621

courts chaiiions. Ce pout prcscnte deux passages, qui ont chacun 1 5 pieds de large. Lcs voitures les plus lourdes et Ics plus chargecs y passent avec autant dc rapidlte que I'on vcut , sans que la partie du pont qui est suspendue en soit ebranlee de maniere a faire craindre des accideas. L. S. B.

ASIE.

Indes Ohientales. Voyage scientifique. Le colonel Franklin a termine son voyage dans les montagnes de Radjah-Mahal. II a examine soigneusement la chaine granitique de Barcouf , et 11 est parvenu k gravir le Djila-Koundi-Ghat. Les moeurs des montagnards sont, dit-on, tres-extraordinaires. Le colonel Franklin rapporteavec lui une riche collection de mineraux. Au moment oil il donnait ces nouvelles, il se disposait a visiter, dans le district de Baguelpour , la cataractede Moutti Ghurna, qui, tombant de izS pieds de hau- teur, s'engoulTre , a ce qu'on assure, dans le cratere d'un ancien volcan. E, G.

OCEANIQCE.

NouvELLE-HoLLANDE. Pori-Jackson. Expeditions russes. Les vaisseaux russes leiJ/ag'ORrzTTierenTzoi et I'Otkrille, qui 6taient partis de Cronstadt, le i5 juillet iSig, sous les ordres du commandant Vasilieff , pour faire des decouvertes , sont arrives au port Jackson le i'^"' mars 1S20; ilsen sont repartis le 27 ^ pour se rendre au Kams- chatka. Le but de cette expedition est la decouverte d'un passage au nord de I'Amerique par le detroit de Behring. Dans le cas oil des obstacles insurmontables s'opposeraient a cette navigation , il a ete ordonne aux oCBciers de s'avancer sur la glace aussi loin qu'il serait possible. A cet effet, on a embarque une espece de bateau de nouvelle invention , qui peut remplir I'ofiSce d'un traineau et etre manoeuvre par un petit nombre de pcrsoanes. Independamment de I'ex^cution d'une entreprise aussi difficile, et qui doit etreaccom- pagnee necessairement de beaucoup de travaux et de dangers, il a ete donne des ordres pour qu'un di-tachement s'avamjat , par terre , le long des cotes du detroit de Behring, tant que la chose sera pra- ticable. Cette double expedition , agissant concurremment avec celle du capitaine anglais Parry , procurera sans doute des lumieres interessantcs sur la geographic de la partie la plus septentrionale de

G22 OCEANIQDE.

I'Anit'riquc. Une seconde expedition russe , partie aussi de Crons- tadt , le i5 juillet 1S19 , avcc deux vaisseaux sous les ordres du com- mandaut Dillinghausen , a cl6 chargee de faire une reconnaissance detainee des iles Sandwich ct des autres iles du Grand-0c6an. Cetle expedition a relach6 deux fois au port Jackson : la premiere en avril , et la seconde en novembre 1S20.

ExpiDiTiOKS AHGLAisEs, La goelcttc le Prince Regent ct le trans- port le Diomadaire ont ete exptidicis du port Jackson en 1S20, ct employes h faire des reconnaissances giographiques a la Nouvelle- Z6lande.

Le lieutenant King, oEGcier tres-instruitet filsde I'anciengouver- neurde ce nom ilaNouvelle- IloUande, partit d'Angleterre, en 1817, avecordre d'aller explorer, dans le plus grand detail, les cotes dunord, du nord-ouestetdel'ouest de la Nouvelle-IIollande. 11 se rendit d'a- bord, comme passager, auport Jackson , oii il pritlecommandement du cutter colonial deS. M., laMermaid, avec lequel ilcommenc^ason exploration. Revenu deux fois dans cette colonic, pour y reparer sot» vaisseau ety dresser les cartes nombreuses qui etaient lerdsultat deson investigation, il en repartit de nouveau, le i5juin 1820, pour faire sa premifere campagne. La Mermaid , surprise par un coup de vent sur la c6te orientale de la Nouvelle-IIollande , fut obligee d'aller mouiller au port Bowen ; mais le mauvais tems I'ayant fait aller a la cote, il eprouva des avaries dont une voie d'eau assez forte fut la suite. Le lieutenant King, cependant, crut pouvoir continuer sa campagne. 11 se rendit done a la cCte nord - ouest ; aussitOt qu'il y fut arriv6, il sentit I'importance de faire reparer son vaisseau. Nepouvant y reussir, il prit la resolution de revenir au port Jackson pour s'y radouber,et se mit en route sans dtilai. Arrive, le 3 decenibre au matin, en vue du cap Jcrvis, ratmosphfire devint 6paisse et fortement pluvieuse, et bient6t un coup de vent d'est-sud-est se ddclara. M. King manoeuvra pour se trouver, le lendeniain, i I'entree du port Jackson ; mais ce n'est qu'aprfes avoir couru les plus grands dangers qu'il parvint, le 5 decembre 1820, a entrer dans Botany-Bay, oii il mouilla en sftret^.

icoles. Le sS mars i8ao, le gouverneur Macquarle a pose , au port Jackson , la premiere pierre d'une ^colc pour I'education des enfans pauvres ; elle sera designee sous le nom de Georgian public school, tt pourra rcccvoir cinq cents enfans, qu'on instruira d'apres

AFRIQDE, 623

la mithode Lancaslrienne- Independamment de cette institution et de plusieurs autres, destinecs 4 I'instruction des classes aisees de la colonic , il y a encore , au Port-Jackson, une ecole pour les orphii lins, une pour les orphelines, et une autre enfin pour les enfans indigenes des deus sexes. Cette derniere est (igalement due aux vues paternelles de M. Macquarie. Les enfans y sont elevcs dans la re- ligion chretienne et apprennent i lire , a ecrire , 4 compter, les 6le- niens du dessin et ceux de I'agriculture pratique. Leurs progre* sont tres-satisfaisans , et m6me beaucoup au-deli de ce qu'on pouvait attendre d'une race aussi abrutie que Test celle des sauvages de la Nouvelle-Hollande. Le projet du gouvernement est de marier entre eux les eleves de cette ecole, aussitOt qu'ils auront atteint Page et I'instruction convenables , de leur donner des fermes , des bestiaux , des instrumens aratoires, et de les mettre en etat de suflBre k leurs besoins et a I'education de l(!ur famille. Get etablissenient, encore pen considerable , doit etre regarde comnie la, pierre angulaire de la civilisation et du bonheur futur d'un peuple encore barbare. C'cst en 1821 qu'ont eu lieu les premiers mariages entre les eleves de cette ecole.

Fondation d'une ville nouuelle. Le 1" decembre 1820, legou- verneur Macquarie a fonde , dans cette contree , une nouvelle ville sous le nom de Campbell - Town ; elle est situee dans le district A'Aird, dans les plaines du meme nom. Cette ville est la septitme etablie par les Anglais dans cette partie du nionde : les autres sont Sydney (capitale), Parramatta, Windsor {ci-d&YAnt Hawksbury), Liverpool, Newcastle et Bathurst. F.

AFRIQUE.

NuBiE.— DojiGOLAH. FcJ/age scientifique.—Exlrait d'une lellre de M. CailliauiL, en date du i^ Janvier 1821. {Voyez Tom. X, p. 629.)— Depuis Wadi-Halfa, oii se trouve la seconde cataracte, cet infatigable voyageur a fait des decouvertes qui augmentent en- core le domaine des antiquites egyptiennes. Non loin de Dongolah, capitale de la Haute-Nubie , a pres de cent quatre-vingts lieues au- dessus de la ville de Sytine, il existe un grand monument cgyptien comparable a quelques-uns de ceux de la ville de Thebes. Sa lon- gueur est de plus de trois cents pieds; on y compte quatre-vingl- Jix colonnes , de plus de trentc pieds de baut. Toutes les parties du

62A ATFKIQUE.

monument soiit coiiveiics d'liicrogly plies ct iJfe basrelicl's. La plu- part dcs sujtts reprodiiisent Ics images qui abondent sur les lidillces dc riigypte : des ofliandcs , des sujets religieux, dcs marches do prisonniers , etc. Outre les figures de caractere tSgyptien , on re- inarquc cliez les personnages , tant6t la' physionomie de la race noire, tantOt celle de la race caucasienne. Le lieu ou sont ces belles ruines s'appelle Selib ou Therbe. Ce qui reste du monument a etc mesurc , diicrit , dessinc. par le voyageur. Six autres ruines 6gyp- tiennes, nioins considtrables , se Irouvent sur les rives du Nil, entre la secondc cataracte et Dongolagh. Dans aucune on no Irouve d'inscriptions grecques ni rien qui annonce le sejour des Grecs ou des Roniains. II est remarquable que ces inonumens sont nioinis bien conserves que ceux de la basse ou de la haute Egypte : la cause en est dans les pluies qui, a cette latitude, sont frequentes, et aussi dans la nature friable du gres dont ils sent bStis.

11 rcsulte des d6couvertcs de M. Cailliaud , que les Egyptiens ont ileve des monumens bien au-deli des lie\ix qu'on avail assignes comme limites i ces antiquites. 11 y a & peine quatre ans , on (itait loin dc soup^onncr, entre les deux premieres cataractes, I'existcncc d'un temple soutcrrain , tcl que celui d'lpsamboul. Au lieu d'etre averti par cette dccouverte , on s'est hSte de conclure qu'il n'exis- tait plus de monumens egyptiens dans les parties superieures du Nil, et ccla parce que Burkhardt n'en faisait pas mention. Si cette con- clusion est deji dementie , c'est une preuve qu'il faut suspendre toute consequence prematuree sur I'etat des arts et sur I'epoque de la civilisation dans ces pays , qui sont encore mal connus , malgre Ics ecrits ou les voyages de Ludolf , de Poncet , de Lenoir du Roule , de Norden, de Bruce, de lord Valentia , de M. Salt dc Burkhardt, et qui I'ont ete iniiniment mieux connus des voyageurs et des histo- riens de I'antiquite qu'ils ne le sont de notre tems. Les monumens qu'on decouvre tous les jours, surtout ceux qui renferment des ins- criptions grecques, ajouteront beaucoup aux renseignemens tirfs des auteurs. N'a-ton pas appris recemnient, par une des inscrip- tions que M. Gau a copiees en Nubie , sur le temple de Talmis, I'exis- tence d'un loi d'Ethiopie, absolument inconnu i I'histoire , avec le rccit de ses guerres ct de ses conquetes ? (Voyez Insvi: Nuhienses , a B. G. NiEEiiiiB, Roma- ^ 1S20.)

Le point dc dipart de M. Cailliaud est la scconde cataracte, on

AFRIQUE. - 625

Wadi-Halfa, it 80 lieues de Syine, que la plupart des voyageurs recens n'ont pas d6pas36e. MM. William Hamilton et le colonel Leake, auteur de la carte jointe au voyage de Burkhardt, ont pe- netrepeu avant dans la Nubie. MM. Legh et Smelt sont alles jusqu'a Ibrim ; M. Belzoni , le colonel Slratton, M. Gau et M. Huyot , etc. jusqu'i la deuxicme cataracte ; mais, tout recemment, MM. Wa- dingson et Hanbury ont remont^ jusqu'k Ghaguy et Korti , pres de Dongolah. Pr6c6demment, M. Banks etait remonte jusqu'i Amara oil il avail vu un temple egyptlen , que M. Cailliaud vient de des- siner. Quant k Burkhardt , on sait qu'il est all6 jusqu'i Chendy, Mais , ce qu'on ignore , c'est que M. Drovetti , consul general de France , est un des premiers qui aient eu connaissance du monument d'Ipsamboul. Ce fut le 5 mars 1816 qu'il y arriva , et qu'il fit meme des dispositions pour y penetrer ; M. Cailliaud I'accompagnait a cette epoque. Dans le journal de voyage de ce dernier, qui doit bien- t6t paraitre, il est aussi fait mention du fameux temple souterraiu que, depuis, M. Belzoni a ouvert avec tant de peine et de succes ( le i^' aottt 1817 ) ; il y avait fait une premiere excursion au mois de septembre precedent. II parle egalement, dans son journal , d'un temple avec des colosses, creuse dans le rocher comme celui d'Ip- samboul, et situe i trois journees de la deuxi6me cataracte. C'est peut-etre I'un de ceux qui sont i Sebnai ou Sebnat.

Dans son second voyage, M. Cailliaud a vu des antiquites en six endroits differens , au-dessus de Wadi-Halfa : k Sebnai ou Sebnat , au-dessus de la deuxieme cataracte , oil se trouvent deux petits temples ; k Amara ; dans I'ile de Sai , qui renferme un petit monument ; deux jours plus au sud , les restes d'un edifice ruintr, dont une seule colonne est debout et chai-gee d'hieroglyphes : le chapiteau est k tete d'Isis; 5" k Therbe ou Selib, aux trois quarts de la distance qui separe Wadi-Halfa de Dongolah , environ yS lieues; Ik se trouve le grand monument decrit plus haul; sa distance, a Syfene, est de i55 lieues ; 6" k Sesse , un jour plus air sud, oil sont les restes d'un temple de douze colonnes, k chapiteaux de palmier; trois sont debout, avec une enceinte de 363 metres de long, qui renfermait beaucoup d'habitations. La plupart de ces antiquites ne sont point marquees sur les cartes les plus lecentes, principalement celles qui sont au sud de I'ile de Sai,

Tome xi. AO

62G AFMQUE.

M. Cailliaud voyage par terre avcc iine escorte, dos guides, des chaincaux et des provisions : accoulumc ti la faliguc ct aux priva- tions , il teste sur les ruines asscz de tems pour y recucillir des ma- t^rlaux exacts, et jusqu'i cc que ses recherches soient completes; lien d'imporlant ne peut lui cchapper. Pour se rendre de Syfene i Dongolah , il a mis quarante-cinq jours. Dcssins des antiquit^s , plans , topographic , mesurcs , observations astronomiques , observa- tiotis de physique et de meteorologie , collection d'echantillons d'histoire naturelle , lels sont les travaux qui I'occupent sans rel4che, et il est parfaitement seconds , pour les calculs des observations , par son conipagnon de voyage , M. Letorzec , aspirant de marine. DejS le cours du Nil, depuis Assouan jusqu'i Dongolah, est enti6- rement releve et assuj^ti & un grand nombre de positions celestes. 11 parait que la carte de Bruce est presque entierement fausse dans cette partie , et que la position de Dongolah , dans les cartes de D'Anville, s'eloigne beaucoup de la veritable.

Aprfes avoir consacre un mois ii visiter Dongolah et les environs, notamment la grande ile d'Argo, qui renferme un temple et deux colosses en granit rose, d'un beau style, le voyageur a le dessein de se rendre k Chendy, de prendre des renseignemens sur le Darfour et les pays de I'Ouest; ensuite il se rendra i la mer Rouge, en traversant les affluens du Nil et I'emplacement de I'ile de Meroe ; il reviendra ensuite en Egypte , en c6toyant les rivages de cette mer.

L'armee d'Ismail Pacha^ occup6e i la conquete de la Nubie, apr^s s'etre emparee de Dongolah , se trouvait h Chaguy et Korti le 4 Janvier. Non loin de li , il se trouve une grande cataracte. Plu- sieurs Itallens, qui ont obtenu la permission de suivre I'exp^dition , ont vu lesmonumens dont il est question dans cette note. MM. Han- bury et Wadingson, qui sont alles plus loin, ont trouve, h Chaguy, des pyramides et les ruines de deux ou trois temples. Ainsi , les tgyptiens ont laiss6 de leurs ouvragcs k la distance de cinq cents lieues des bouches du Nil.

Bahbah. Extrait d'une lettre de M. Cailliaud, en date du 6 mars i8ji. <■ Je vous ai ecrit de Dongolah , et dernierenient de la province de Chaguy, qui vient d'etre le theatre de la guerre , et oi le fils du pacha a et6 victorieux , dans toutes les batailles qu'il a livr6es il I'ennemi. » Je vous ai fait part, le mois dernier, de quelques details juries antiquit6s dn montBarkal et deNoiirloii sont les ruines descpt

EUROPE. C27

temples, et trente-six pjramides. C'est ii rexptdition que fait au- jourd'hui S. A. que nous devons la decouverte de ces nombreux tnonumens qui, sans lui, nous seraient encore rest6s inconnus. II en est de meme du cours du Nil dans cette province et dans le royaume de Dongolah , dent toutes les cartes connues jusqu'i present manquent d'exactitude. Deux voyageurs anglais ont fiit la carte de ces pays, mais les instrumens leur manquaient pour de- terminer la position geographique des lieux ; ils ont dessine peu de monumens. Ces voyageurs sont retournes au Caire. Aujourd'hni, S. A. ne permet plus aux etrangers de venir dans ce pays. Si j'ai pu obtenir de suivre Tarmee , je le dois aux faibles connaissances que j'ai en mineralogie, et i I'esperance que I'on a de trouver quelques mines importantes. Nous resterons ici quinze ou vingt jours ; puis nous nous acheminerons sur Chendy et Senuar, ou sans doute le prince fixera la limite de ses conquctes, »

JoMAKD, memhre de I'lnstltut.

Nota. La lettre du mois de fevrier n'est point parvenue.

Cedta. Journal. II parait ici depuis assez long-tems un journal espagnol intitule : // Liberal africano.

EUROPE.

ILES BRITANNIQUES. Dublin. Societi rqyale.—Marais moavant. Un des membres de cette soeiete, chargd par elle d'aller examiner les ravages qu'avait fails le marais mouvant de Kilmaleady, a fait sur ce sin- gulier phenomene un rapport interessant et tres-detaille. Le ma- rais de Kilmaleady est situe a environ deux milles au nord du village de Clara, dans le comt6 du roi. II est d'une etendue consi- derable , et couvre environ 5go acres de terrre. Dans plusieurs endroits, il a jusqu'a quarante pieds de profondeur. C"cst le ma- rais le plus humide de toute la contree ; il est borne de tons c6tes, excepte au sud , par de bautes berges , composties, a leur surface , de gravier , et, en dessous, de pierres blancbitres, formant des cavernes oii se trouvent des sources souterraines. Au sud , le ma- rais s'ouvre dans uae vallee large d'environ un quart de mille , et suivant la direction sud pendant plus d'un mille. Au centre de cette valine, coule un ruisseau qui a douze pieds de largeur, et qui recoit les eaux du marais et du pays avoisinant, II se decharge

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628 EUROPE.

dans la riviere Briisna, au-dessus du pont de Ballycumber. Le niarais dc Kilnialeady, comme tous les autres marais profonds et hunildes, est compose, jusqu'S une profondeur de huit k dix pieds , d'une substance sponj^euse d'un brun rougeatrc, formee des fibres de la moussf de niarais (sphagnumpaluslre), qui absorbe I'eau en grande quantite. Sous cette masse fibreuse, le marais devient de plus en plus marecageux, et, vers le fond, ce n'est plus qu'une boue noire etdetremp6e par I'eau. 11 s'«ilevait i plus de vingt pieds au-dessus du niveau dc la vallee , lorsqne sa surface presentant plus de fermet6 que decoutume, par suite de la s^cberesse de la saison, les habitans du voisinage se basardferent ^ y aller faire des tourbes, et creuserent au mcins ^ dix pieds au-dessous du niveau de la valine; lis atteignirent la claie bleuStre sur laquelle repose le marais. Les terres se trouvaient alors elevtes i trente pieds perpendiculai- rement au-dessus du sol de la vallee, lorsque,le ig juin , la partie uioUe et humide du marais, ne pouvant resister i la pressioa de I'eau qui cberchait i s'ouvrir un passage, cdda, et, une fois en mouvement , entraina toute la partie superieure du marais , et s'avan^a avec une rapidite etonnante le long de la valine , cnlevant non seulement les troncs d'arbres plantx^s sur les bords du marais, mais encore des prairies entiferes de plusicurs pieds de profondeur, dont la surface verdoyante s'agitail et tournoyait comme les vagues de la mer. En tres-peu de terns, toute la valine, dans une lar- geur d'un quart de mille , depuis I'ancien marais jusqu'a la base de la coUine de Lisanisky, fut couverte d'une boue t'paisse, profonde de huit a dix pieds, et parsemde de pifeces de gazon. Cette colline arrSta pendant quelques instans la marche du torrent fangeux , mais enfin il recomnien^a k couler dans une autre direction ; et, gagnant toujours du terrain , il atteignit la route de Kilbride , et boucha le pont sous lequel passent les eaux du ruisseau. Cette bar- riere retarda les progres du marais : il fut arrfit^ cinq jours. Au bout de ce terns , le limon du marais et les eaux du ruisseati etaient tellement amonceles , qu'ils inonderent la route , et cou- vrirent la vallee presque entifere ; ils continuerent 4 couler avcc rapidity vers une seconde route qui mfene de Clara A Woodfield. Ayant encore surmonte cet obstacle , il s'avan^a lentement vers I'ouest, et aurait infailliblement englouti les champs fertiles et les prairies qui s'itendent du mOme c6te, si Ton n'avait pris de promptes

EUROPE. 629

et judicieuses mesurcs pour mettre un terme i> ce (leau. La cons- ternation ttalt g6n6rale dans le pays. A la requete des juges de paix des differens cantons , M. Gregory pria M. Killaly, ingcnieur distingue, d'aviser aux tnoyens de prevenir de plus grands maux. M. Killaly 8'aper9ut d'abord que le seul remede etait de faire ecouler I'eau qui s'etait accumulee ; en consequence , il employa un grand nombre de paysans 4 deblayer le cours du ruisseau partout oil il etait combl^ ; il fit ouvric dans la valine plusieurs canaus qui se rendaient au lit de la petite rlviire. II parvint ainsi k dimiauer beaucoup la force du courant , qui entrainait la masse des terres : celles-ci s'arreterent bientOt. Des ouvriers , places de distance en distance , brisaient les mottes de terre qu'emportait le ruisseau. Ces travaax , poursuivis avec activity , ont dtlivre les babitans de toute crainte pour I'instant.

Les ravages oecasionn6s par ce marais mouvant sont fort consi- derables. La vallee qui le s^parait de la route de Kilbride , longue d'un demi-mille, et de 60 k 80 acres d'etendue , pent etre con- sid6ree comme entiferement perdue pour I'agriculture. Le marais a parcouru une distance d'environ trois milles,et il a envabi en- viron i5o acres de terre cultivee, L. S. B.

LoNDBES. Societe pour la conuersion des Bohemiens errans en Europe. La societe missionnaire pour I'inUrieur ysi donner 4 ses travaux une nouvelle direction , qui aura peut-etre les resultats les plus heureux. Dans une circulaire ecrite en son nom , le comite remarque avec raison qu'il existe , en Angleterre , une population de plus de dix-huit mille ames, sans cesse errante, que les lois ont toujours regardee comme composee de vagabonds et de gens sans aveu , et qu'il est terns que des bommes pieux s'occupent d'a- meliorer la situation pbysique et intellectuelle de ces hommes restes sauvages , au milieu de la civilisation. En France , ces Bobemiens ou JEgyptiens, qui abusent de la credulity des gens de la campagne et vivent de superstition , n'ont pas cte toleres ; mais il en existe encore un tres-grand nombre en Angleterre, en AUemagne, en Pologne et en Russie. Le comit6 remarque que des chretiens eclai- res out envoye , dans ces derniers tems , des missionnaires dans toutes les parties du globe ; occupes presque exclusivement d'objels lointains , ils semblent avoir oublie les Indiens qui babitent leur patrie memc ; car il est aujourd'hui prouvti , de maniere a ne laisser

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aucun doutc, grdce aux rechcrchcs jle plusieurs oiientalistcs dis- tingues, que ces Dohemiens erraiis , loin d'etre originaires dc I'Egypte , comme on I'a long -terns cru , et do parler un patois dc pure conveation entre eux, ont conserve la langue do la tribu Suder, unc des castes qui s6parent les peuples de I'lndostan. II parait qu'ils furent expuls6s de ce pays en i4o8 , lorsque le sultan Tiniur Beg ravagca I'lnde et en massscra un tres-grand nombre. On compte , en Europe, environ 700,000 Bohemiens, epars en di- Tcrses contr6es , qui tous parlent absolument la mfime langue , S de trfes-l6gi;res differences pres. Non seulement des efforts diriges avec intelligence et avec zele auraient le r6sultat de civiliser ces hommes dent les habitudes ct les mceurs sont tres-grossi6res , mais il est tres probable qu'une fois ranges sous les lois de I'evangile , ces nouveaux convcrtis pourraient rendrc d'cminens services , en s'embarquant comme missionnaires pour aller repandre la parole sainte chez leurs compatriotes d'Asie. Pour remplir ce but impor- tant , il est question de fonder une society , qui s'occupera princi- palement de cet objet , et le comit6 invoque le secours et les conseils paternels de tous les Chretiens qui auraient le dessein de cooperer avec lui , soit par leurs avis , soit par leurs travaux , U cette oeuvre salutaire de piete, de zfele social et religieux. (Extrait des Archives du christianisme au xix« siecle; excellent recueil, r6dige par des membres de r6glise 6vang6lique. Prix , par an , G fr. pour douze cahiers; on souscrit chez M. Soulier, ancien pasteur, rue Neuve-Saint-Martin , n"> 3.)

DcBiipf. Journaux. II parait dans cette villc trois journaux quotidiens du matin; un journal quotidien du soir; trois gazettes du soir, publi6es tous les trois jours; un journal du matin, paraissant tous les trois jours , et six journaux hebdomadaires ; ce qui , avec les deux journaux du gouvernement, la Gazette et le Cri public, non compris dans cet article, forment un tolal de seize feuilles periodiques. Journaux quotidiens ; ils ont au nombre de huit : tIteFreeman's journal, qui est celui des commerfans de Dublin, contient toujour* un grand nombre d'annonces. En politique , il est plus remarquable par I'impartialite que par la profondeur de la discussion ; il ne se permet gufere que quelques critiques sur la conduite des differens •conseils ou soci6t6s publiques, ou sur des taxes vexatoires; le Courrier du matin , de Carrick ( Carrie k's morning post) , est 6gale-

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meat consacr^ au commerce et h Tagriculture, etc., et se borne, comme le Freeman , i traitef des sujets d'an int^rfit local; les Papiers-Nouvelles de Saunders ( Saunder's news papers) sont des especes de Petites-Afllches , qui contiennent quelquefois des passages extraits des journaux anglais et irlandais. Ces trois journaux donnent , de tems en tems, des rapports bien faits sur les assemblies publiques qui se tiennent i Dublin , et sur les jugemens interessans rendus par les cours de justice de I'lrlande. On calcule que chacun de ces journaux a 1,000 a 1,200 abonn^s; i" le Correspondant est le seul journal quotidien publie le soir k Dublin ; il semble se modeler sur le Courrier anglais, dont il adopte les principes et I'intolerance po- litique , sans savoir les d6fendrc avec le mfime talent et la meme adresse. L'editeur, qui. en est aussi le proprietaire , se jette dans de longues et fastidieuses dissertations , dont le but est I'approbation constante de tous les actes arbitraires , ou la depreciation de toute mesure adoptee pour le bien de I'humanite : en un mot, le redac- teur de ce journal peut fetre considere comme un des plus zeles avocats du despotismc. II a eu assez de vogue pendant la guerre, mais depuis la pais il a beaucoup perdu de ses abonnes. Joui- naux publiSs tous les trois jours , au nombre de quatre ; le Courrier du soir de Dublin ( Dublin evening post) est, sans con- tredit, un des meilleurs journaux de I'lrlande. II a toujours soutenu les principes liberaux ; et ses riidacteurs ont beaucoup souffert pour la cause du patriotisme et de la liberte , soit par des emprisonne- mens , soit par des amendes. L'editeur montre du talent dans la redaction de cette feuille , mais ses vues manquent d'6tendue et de profondeur : on peut lui reprocber anssi de s'adresser souvent aux prejuges du peuple , et d'en suivre les impulsions , au lieu de les diriger sagement vers le bien. Ce journal , ainsi que le Correspon- dant, est fort r6pandu en Irlande : on en distribue environ 2,5oo exemplaires ; le Journal de Dublin dut son succes aux ecrits patriotiques de Swift , et continua pendant long-terns a tenir un rang distingue parmi les ecrits periodiques. A la mort de Georges Faul- kner, qui I'avait fondi , il passa entre les mains de Jobn Gifford , membre du conseil de la ville , et violent defenseur du gouverne- ment. II le reduisit 6 quelques pages, et I'entacha tellement de ses opinions, que les preventions qu'il avait fait naitre existerent long- tems , malgre les efforts des nouveaux proprittaires pour rehabiliter

632 EUROPE.

ce journal dans I'opinion publiquc. Leur impartiality ct Icurs talens ont cependant r^ussi h d^truire en partie cet injustc prcjuge , cl le Journal de Dublin comptc parmi ses abonnes plusicurs des hommes Ics plus respectables do I'lrlande : il a environ 800 sous- cripteurs; le Patriate, autre journal du soir , usurpe ce titre ; il est plut6t servile que liberal. II ne contient presque jamais que des articles mal choisis des autres journaux , et quelques productions Sorites avec autant de frivolite que de pedanterie. L'impression et le papiei, qui sont sup^rieurs ciceux des autres journaux , contribuent^ le soutenir : on compte qu'il s'en vend jusqu'd i,5oo ; le Journal hibemien surpasse le Correspcndant en partialite ; ses hostilit^s sont principalement dirigees contre les catholiques; il cherche surlout ^ ra- uimer et 5 entretenir les dissentions rcligieuses. La redaction ne man- que ni de vigueur ni de talent. On en distribue un grand nombre d'exemplaires gratis; il n'a pas jS abonnes. Journaux hebdoma- daires ; le TVeekly freeman se rapproche du journal quotidien du meme nom. II est surtout utile au commerce , i I'industrie , aux ma- nufactures, etc. C'estle premier recueil pdriodique hebdomadaire qui ait iXk public i Dublin ; aussi a-t-il plus de so«scripteurs que les autres Merits du mfime genre : il se tire i 2,oco; 10° le Registre de chaque se- maine est I'organe des membres les plus violens du conseil catbolique. II est rempli de plaintes sur I'esprit de protestantisme qui dominc dans lea 6coles proteslantes, et de details sur I'^tat d'oppression et de degradation du peuple irlandais. On y remarque des articles fort bien rediges; V Obseruateur de la semaine est un journal franc et impartial. II contient un excellent sommaire de nouvelles : il s'en vend environ 800 exemplaires ; 12° le Journal dufermier serait utile Ji la classe d'agriculteurs et d'artisans k laquelle il est destine , s'il donnait plus souvent des instructions pratiques sur I'agriculture ; mais il est fastidieux, difTus, et n'enseigne rien de neuf; il parle ra- rement politique, et passe pour avoir i,5oo abonnes; 13" le Moni- teur des marckands est un nouveau journal, commence, il y a quelques mois , sous les auspices des n^gocians de Dublin. Son titre indique asscz son objet : il donne un tableau des fonds, les diffe- rences du change , les marches et les ventes un peu importantes ; enCn , tout ce qui regarde specialement le commerce. Les journaux irlandais ne paient que moitiii de la taxe imposee aux journaux an- glais; ils sont en general fort iiial iniprimes, ct ceux dc? provinces

EUROPJi. 63o

prouvcnt la stagnation dcs affaires , par le petit nombre d'annonces qu'ils contiennent. Oh doit en excepter les journaux de Belfast', qui egalent presque ceux de la capitale, sous le rapport de la redaction et de I'impression ; i4° \" Irlandais est un journal patriotique fort bien r^dige. L. S. B.

RUSSIE.

SAiNx-PETEBSBOuao. h' Luvalide russe, ou la Gazelle militai/e , d'apree la volont6 de I'empereur, inserera d^sormais les ordres de i'armee , les promotions , les recompenses dans le civil et autres nou- velles de rint6rieur; mais les nouvelles politiques, quelles qu'elles soient , en seront entiferement exclues.

Kasan. Publications nouuelles etprochaines. Le Koran , qui a ete imprim6 plusieurs fois dans notre ville , vient de I'etre de nou- veau aux frais du negociant Apariai ; ainsi , taadis que les soci^tes bibliques propageat la connaissance des livres sacr6s des chr^tiens , des negocians arabes, comme s'ils rivalisaient de zele , multiplient ceux des mahometans.

h'Histoire des Mbgols et des Talares occupe dans ce moment un grand nombre de savans. M. de Romanzof fait imprimer VAhul- ghasi Bahadur chants :c'est une genealogie des Turcs. Ce livre, que nous possedions seulement dans des traductions allemandes, fran- 9aises el russes peu fiddles, va paraitre i Kasan. M. Cbalfin prepare aussi , dans cette ville , une edition du Dschingis Changs et du Ti- murleng's; jusqu'i ce jour on ne connaissait de ces deux ouvrages que des fragmens inseres dans une dissertation : De urigine vocahuli Dengi et de Bularice urbis origine.

Saint-P^iebsboubg. M. Charmoy , professeur de persan dans cette ville, compose, en persan et en fran^ais^ une histoire des Mongols et des Tatares ; les sources dans lesquelles il a puise , sont le Raschid Eddin , Mirchond Chondemir et Abd - ur - Rassack. M. Schmidt 6crit aussi I'histoire de ces peuples, mais en se fondant sur des autorites mongoles. Enfin, M. Frahn a resolu de comprendre, dans son travail sur les m^dailles mahometanes , celles des Dohm-

M. Frahn vient de livrer au public le premier volume de son ouvrage intitule : Nummi Muhammedani qui in acad. imperialis scienliarum musceo asialico asser^'anlur, Tom, /, texlum sen Num.-

63A EUROPE.

morum lilulos in scripturam arahicam recenliorcm IranscriploSifidtii- que interpretalione auctos conlinens. L'infatigable autcur a donn6 presque en meme terns deux autres Merits ; le premier , Schem Eddin Muhammedis Damascen i mirabilia mundi selecta ccod. petrop. edid. prolegamen et annot. crit. instruxit Frahn ; le second a pour litre : Ahmed-sbn-Foslan's , ou Tableau des mceurs ct des usages russes , au commencement du dixiemc si6cle. La traduction est en regard du teste , et M. Frahn y a joint des notes critiques ct litt6raires.

Ph. GoLB^ar. SUEDE.

Botanique. On cultive actuellement, dans ce pays, I'astragalus balticus ( Linn6) , plante que Ton croit excellente pour remplacer le caf6 , et dont la decoction n'emploie que la cinquieme partie du Sucre ordinajrement necessaire, Cette plante sc reproduit six cents A mille fois , et ne souEfre point de I'jntensitu du froid. Le docteur Bayrhammer, de Wurtzbourg , a public qu'il enverra graiuitement cent grains de ce vegetal 4 ceux qui voudront promettre de le culti- ver et de lui faire connailre les resultals qu'ils auront obtenus.

DANEMARCK.

CoPENHAGUB. Universite. Prix proposis pour 1822. Aprfes avoir propos6 en langue latine differens sujetsa traiter dans la meme langiie , en iheologie , en jurisprudence , en medecine , en philoso- fhie , en maihemaiiques , en histoire , en philologie , en hisioire naturelle, cette universite propose, pour la partie appelte eslhelique, ou litUrature et beaux arts , de determiner quelle est la difference entre le genre comique elle genre satirique. On peut consulter, pour les autres questions proposees , le n" VIl du Journal de la liltera- iure krangere, publie par MM. Treuttel et Wiirtz , dont il parait un cahier tous les mois.

Dictionnaire Danois. La Societe des sciences k Copcnhague vient de publier un nouveau volume do son grand Dictionnaire Danois ; il contient les lettresL et M.

Traduction. Le capitaine Tf^ulf, traducteur des ocuvres do Shakespeare, vient de traduire en danois la poeme de lord Byron , intitule Manfred.

Necrologie.— M. Thomas Thuarup , doyen des poclcs danois, est mort a Coptnhaguu, a I'tigc de soixanie-douze ans. JXe en ijig?

EUROPE. 635

il fut nomm6, en 1781 , professeur d'histoire, de geographic et de belles-lettres i racademie des cadets de marine. Pendant les an- nees 1-94 i 1800, il 6tait membre de la direction du th6Atre royal h Copenhague, et, en 1809, il fut decore de I'ordre de Dannebrog. Les poesies de M. Tbaarup, qui ne sont pas tres-nombreuses , se distinguent surtout par la douceur des pensees et par I'elegance harmonieuse de la diction. II etait plutot habile versificateur que grand po6te ; car il n'6tait dou6 ni d'un esprit inventif , ni d'une imagination vlve et ardente. N6anmoins , toutes ses productions avaient Ic don de plaire. II a compose , pour le theStre , quel- ques pastorales de circonstance , qui , abstraction faite de ces memes circonstances , ont merite le grand succ^s qu'elles ont ob- tenu. II a fait aussi , pour la musiqoe sacree , quelques cantates qui ont trouve des compositeurs dignes d'associer leurs travaux & ceux du poete. Depuis plusieurs annees, M. Thaarup vivait en retraite 4 la campagne , oil il jouissait d'une pension que lui avait accordee le gouvernement. Heibebg.

ALLEMAGNE.

BEBtm. Medecine. On lit dans le Journal de medecine de Hu- feland , public dans cette ville , que la belladonna est un preservatif contre la fievre. Ce fait , qui avait d'abord etc observ6 k Leipsick , a ete confirm^ par plusieurs experiences.

Leipsick. Le professeur K. H. Dzondi a public dernierement , dans cette ville, chez Jean-Ambroise Barthe , le premier cahier d'un nouveau journal , intitule : ^skulap (Esculape), qui estconsacr6 au perfectionnement de toutes les branches de I'art de guerir. II y aura quatre cahiers par an , qui couteront 4 thalers , ou 6 florins.

Munich. Legislation. Le president de Fenerbach est de re- tour dans cette ville, du voyage qu'il a fait i Paris, pour y ^tudier Fesprit des lois judiciaires qui regissent la France , et notaniment celles qui reglent la procedure civile et criminelle. Get homme d'etat est charge de donner son avis definitif sur celle des institutions judiciaires fran^aises qu'il conviendra d'lntroduire en Baviere. Cette affaire doit Ctre decidee avant la reunion des chambres bavaroisss, afin que le gouvernement puisse Jeur soumettrc le projet du nouveau Code de procedure.

Presboubg. _ Philologie. M- George Palkoifiuh , professeur

636 EUROPE.

de languc cl de litterature esclavonnc au lyc6e evangeliquc de ccllc ville, a termin(i recenimeiit la publication de son Vocabulaire bohc- mien, qui renferme aussi Ics expressions propres aux Morauiens ct aux Slowakes : il est compose de deux volumes , dont le premier a paruen 1S19.

Eblargeiv. Uniuersiti, Lc nombre des ^tudians de notre uni- versite s'accroit tous les jours. Rien n'6gale la sollicltude du gouver- nement pour ce bel itablissement, dont I'eclat est encore augmcnte par I'acquisition qu'il vient de faire de M. Schelling , membre de I'academie des sciences et de celle des beaux -arts. Aussi t6t apr^s son installation , ee savant professeur a ouvert un cours , qu'il ap- pelle initia philosophice universce. L'afiluence des auditeurs y est si grande , que Ton se croit i ces beaux jours oil nous avions encore le celebre "JP/cA/e. Le roi , par un rescrit du 12 mars, a ordonn6 que le chateau du margrave, qui a 6t6 donne i I'universite , scrait sur-le- cbamp mis dans un etat convenable i sa destination , et que I'hos- pice serait dispose pour I'etude de la clinique. Pb. G.

Landshut. Nominations. Le savant professeur Bucltner, h peine de retour du voyage qu'il vient de faire en France et dans les Pays- Bas, a ete nomm^ membre de Vacademie Leopold-Carolus des na- luralisles, de la sociele pharmaceutique de Saint-Petersbourg , et de la society d'histoire naturelle de Bonn.

\iEKiiE,— Style des Orientaux. Le diploma de I'ordre persan du Lion-du-Soleil , qu'a re^u derniferement le c^lfebre orientaliste M. Joseph de Hammer , presente , dans le passage ci-apres , traduit litteralement, un exemple curieux de I'orlginalit^ du style des Orien- taux. Ce passage enonce les titres qu'on lui donne i cette occasion : Tres-estimable , tres-honorable , eloquent dans I'art oratoire , pene- trant, habile interprfete de la langue du bon peuple chr6tien qui croit en J^sus , conseiller de la haute -cour imperiale allemande , dont la plume est bien taill6e , et dont I'ecriture est fleurie , dont les doigts sont agiles , et dont la langue est exercee , colonne des plus excellentes et des plus venirees, lis de dix langues, Joseph Ham- HEB, etc. a

Publication nouvelle. Roman. Madame B6n6dictc Naubert vient de donner, sous le titrc d'Eudocia, un roman , dont le prin- cipal merile est moins dans I'invention que dans le tableau qu'elle fait de la situation des empires grec et romain , apies lc partagc effcc

EUROPE. 637

tae en SgS , sous Th6odose-le-Grand. Les caractires sont tous vrais , et particulierement ceux des femmes : celui d'Eudocia est cit6 comme un modele en ce genre. La lecture de ce livre est d'autant plus agreable, qu'i c6te d'ing^nieuses fictions se trouvent des peintures de moeurs puls6es dans I'histoire. Ph. G.

Beblik. Archeologie. La direction des recherches antiques, etablie par le gouvernement dans les provinces du Rhin et de la Westphalie , a fait Tacquisition dc la riche collection formee par le prince Isembourg. On salt que ce prince avait, pendant toute sa vie , apporte le plus grand soin i I'etude de I'antiquit^ , et qu'il avait acquis , i tout prix , les objets d^couverts successivement dans les contr6es voisines du Rhin et de la Moselle. Ph. 6.

ViEWNE. Exposition permanente des produiis des beaux-arts. Extrait d'un arrete de I'empereur, en date du i6 ao&t. S. M., con- siderant que I'etablissement d'un lieu public , destine au debit des produits des arts du dessin, est un desmeilleurs tnoyenspour etendre les connaissances dans cette partie et pour acc^lerer les progres de I'lndustrie, aordonne qu'outre les expositions publiqucs des objets d'art, qui ont d6ji lieu dc terns en terns, conformement aux ordon- nances , il soit etabli , d'une maniere fixe et permanente , une expo- sition uniquement destin^e au commerce des productions des beaux- arts. Le but de cet ^tablissement est de faciliter aux artistes le debit de leurs ouvrages , et aux amateurs I'achat de ces produits , d'une maniere qui reponde le mieux qu'il sera possible aux d6sirs des uns et des autres. N6anmoins, on veillera particulierement i ce qu'il ne soit expose que des ouvrages remarquables , le but d'un etablisse- ment public, fonde dansl'interet del'art, nepouvant 6trede favoriser les productions mediocres. Cet etablissement embrassera les pro- duits de toutes les branches de I'art. Le lieu destine i I'exposition permanente est I'edifice de Sainte-Anne, dans la rue du mCme nom, au rez-dechaussee , et au premier etage. On pourra y presenter les ouvrages k compter du 20 aout, »

VfnrEHt-E&G.—L'inauguralion de la statue colossale de Lulher se fera sur la grande place de cette ville, par ordre du gouverne- ment prussien, et avec la plus grande solennit6, le 3i octobre , anniversaire du jour oii Luther se separa des catholiques en faisant afTicher a I'eglise de I'universite de Wittemberg, en iSij, ses fa- meuses thfeses centre la cour de Rome, Le roi dc Prusse el tous

6S8 EUROPK.

les priQCCS protcstans dc I'Alleniagne dojvcnt assister k cotte c6- riimonie , qui est une ft-te nationalc pour toute TAlleniagne t-van- gelique.

SAtTZBOUHG. Hommage a Haydn. Cette ville, ou Haydn a pris naissancc , vient de payer un juste tribut aux mfines de ce ce- Ifebre compositeur, Les restes niortels de I'auteur de la Criation tlaient presque oublies depuis quinze ans , dans le cimetiire de Saint-Pierre. Le cur6 Werigand, son ami, ct le compositeur Uac- ker, 6l6ve du defunt, se sont charges d'ouvrir une souscription pour lui clever un monument. Le 9 aoOt, jour anniversaire de sa mort , le monument, place dans I'tigllse de Saint-Pierre, a etc consacre par un Requiem solennel , dernier ouvrage d'llaydn , que la mort I'a empeche d'achever. On y a supplee par la fin d'un ancien Requiem qu'il avait compos6 precedemment. Une foule d'amateurs , de concitoyens et d'amis de cet homme illustre , ainsi qu'un ties-grand nombre d'etrangers, ont assiste k cette ceriSmonie funibre, qui a acquis un nouvel interet par la presence de la veuve de Haydn.

BERLm. Nicrologie, HJ. Chretien Abraham-Gerhard, chevalier de I'Aigle-Rouge , conseiller des finances, membre de I'academie des sciences , de la societe des sciences naturelles , ct de huit autres societes savantes, est mort, le 9 mars dernier, k i'&ge de quatre-vingt- quatre ans. Pendant sa longue et laborieuse vie , il n'avait cesse de prendre une part active 4 toutes les recherches de medecine et d'histoire naturelle , de physique et de chimie , en ne negligeant aucun moyen d'en propager les resultats et d'en rendre I'application plus g6nerale, C'est dans cette vue qu'il publia 'plusieurs ecrits es- timables. M. Gerhard est encore connu par une Histoire du regne mineral (Geschichte des mineral-reichs) et par la traduction des Voyages melallurgiques de Jar, ouvrage qu'il a enrichi de deve- loppemens pr^cieux sur I'exploltation des mines. Pn.G.

YiEKWE. Le docteur Jean-Pierre Frank, conseiller-d'ctat et premier m6decin de I'empereur, est mort dans cette ville, le 2/(. avril, k rSge de soixante-dix-sept ans.

Halle. Le 37 du meme mois , I'universite de cette ville a perdu U. C. /'^oss , professeur d'histoire, qui n'avait que cinquante-huit ans. II a mis au jour plusieurs ouvragcs estlmes , et s'est particulie- rement fait connaitre par Ic journal qu'il pubtiait sous le titre dc Die Zeiten (les Terns), qui renl'erme des niateriaux prt'cieux pour I'hisloirc de nos jours.

EUROPE. 639

BaGSLAD. Le docteur Jean-Timothee Ilermes ^ suntitendant ecclesiastique , et premier pastcur de I'^glise de Sainte-Elisabeth , est mort ici, le 24 juillet, a Tage de quatre-vingt-trois ans. On lui doit quelques ouvrages qui ont eu plusieurs editions , entre autres le J^qyage de Sophie de Memel en Saxe , qui a 6te traduit en fran9ais.

Leipsick.. Jean Adolphe Rossmaeler, gravcur distingue, est mort ix Leipsick , le 26 Janvier dernier, i I'Sge de trente-cinq ans.

SUISSE.

Canton de Berne. Ferme experimentale alpine. M, Kasthofer (Voy. Rei^ue Encjclopedique , T. X , pag. iGo}, garde general des forets, savant distingu6, a 6tabli, prfes d'lnterlacken , sur une mon- tagne qui domine les lacs de Thoun et de Brientz, le cours de I'Aar et le torrent de la Liitschine , une ferme experimentale , dans laquelle il fait des essais de culture sur les plantes alpines , qui sont k peu prfes la seule richesse de tons les pays eleves ou septentrionaux. Ces essais mcritent Tattentiop de tout homme capable de reflechir sur les r^sultats ctendus et importans qu'ils peuvent avoir, N'est-il pas deplorable, en effet, de voir la science de I'agriculture s'arrcteraux regions peu elev6es , de manicre i laisser peut-utre le quart de I'Eu- rope prive, dans son economic, de toutes les lumiferes acquises f

Canton de Geneve. Sociele pour I' encouragement des arts. Prix proposes. Une medaille d'or de la valeur d'environ 200 fr,, pour la meilleure tcte en creux sur acier, par un artiste, habitant du canton. Le sujet du concours sera une tete en profil , d'aprfes I'antique et au chois de I'artiste , renferm^e dans un cercle de 18 lignes de diam^tre. On ne prescrit point k I'artiste les proc6des qu'il doit suivre dans I'execution; on lui laisse, k cet egard , une pleine liberte , soit qu'il lui convienne de graver directement en creux , soit qu'il pr^fere executer d'abord sa tete en relief, pour obtenir ensuite le coin par le moyen du balancier , ou de toute autre manifere. Le coin restera en propriete k I'artiste. Le terme du con- cours est fixe au 3i mars 1822. La societe , desirant plutOt encourager les jeunes artistes que recompenser le talent deja acquis, n'admettra au concours que les personnes qui, k I'epoque fixee, n'auront pas trente-cinq ans accomplis. 2" Un prix de la valeur de 46o fr. environ , il I'artiste habitant du canton, qui, le premier, aura pr^sente a la flOciet6, des limes carrelettes donees, rudes ctdemi-rudes, de quatre .

6A0 r.uROPi;.

pouces dc taille ; tellcs quo pour la forme , pour la taille et pour la trempe, dies soient jugties aussi bonnes que les lueilleurcs limes counues. La societc met assez d'importance icet objet pour ne point fixer un terme definitif et pour laisser au concours une durec illi- niitee. Les concurrens remettront ^ la societe deux douzaines de limes de chaque espece , pour qu'elles soient soumises aux epreuves diverses qui doivent en constater la qualite. 3* 11 sera adjuge une medajlle d'or de la valeur d'environ 25o fr. k I'auteur du m^moire qui, au jugement de la soci6t6, aura le mieux repondu ^ la question suivante : « Quelles sont les principales industries y peu ou point connues dans notre canton , qui seraient susceptiLles dy etre na- turalisies; et quelles sont les pirconstances favordbles ou con- traires que chacune d'elles aurait a rencontrer dans notre pays? » Le terme du concours est fix6 au i«» mars 1822.

Camtom de Bale. Hospice du Saint-Bernard. Souscriplion. Les soins g6n6reux que les religieux de cet hospice donnent aux , voyageurs souffrans , leur empressement ix les sauver au peril de leur propre vie, sont connus et admires de toute I'Europe. Mais, ce qu'on ignore assez genei-alemeut, et ce qui rend leur devoue- ment encore plus admirable , c'cst I'insalubrite de I'^difice qu'ils habitent : au bout de ,peu d'annees , ils sont attaqu6s de rhuma- tismes aigus et incurables , qui les condamnent i venir trainer, en- core jeuncs , dans la plaine , les restes d'une existence triste et douloureuse.

On a pu voir, dans une notice sur I'histoire naturelle du Saint- Bernard (1), que le reverend pfere Biselx, prieur du convent et membre de la Societe heluitique des sciences , fit connaitre , i la session de Saint-Gall, la cause de ces efiets pernicieux ; elle n'est autre que la temperature froide ct humidc qui rt'gne , en toute saison , dans I'int^rieur de cet hospice , a raison de sa construction et de la rigueur du climat. Ce grave inconvenient est susceptible de remfede, d'apres les progres que I'art , guid6 par la science , a fait de nos jours relativement k la distribution de la chaleur dans I'interieur des edifices. Mais I'etablissement ne possede que les ressources neces- saires pour subsister et pour distribuer annucllement de trente -a

(1) Cette notice a ete inseiec dans la Biblioiheque universelle , pviblit'P .'1 Geneve.

ELROPE. 6A1

trente-cinq mille rations tie nourriture ii des voyageurs de tous etals et dc toutes conditions.

Un professeur de I'universite russe de Dorpat, M. Parrot, frappe de ces considerations , invita , I'ann^e derniere , tous les philan- tropes i venir au secours de ces bons religieux , par une souscription dont le produit serait employ^ k I'amelioration dcsiree. Cette invi- tation, rcpetee dans la Bibliotheque universelle , division intitulee Sciences et arts, Tom. XV, p. 208 i 245, ne fut pas sans effet. Mais les sommes revues sont encore loin de suflire aux d6penses necessaires pour chauffer la portion habitee de ce vaste edifice.

II y a plus ; dans une visite faite k cet hospice , vers le milieu du niois de juin dernier, M. Prevost, gendre de M. le professeur Pictet , s'est as8ur6 que la face meridionale de I'^difice exige de grandes reparations , sans lesquelles elle est exposee k tomber en ruines. Ce surcroit de depenses necessaires exige aussi un surcroit d'ef- forts pour y pourvoir. Les frtres Mellerio , trfes-habiles construc- teurs de caloriferes, se sont transport's k I'hospice pour y dresser les plans et devis prealables ; et si , d'ici k leur retour, la souscription ouverte (qm devrait fitre europeenne) fait des progres, on mettra de suite la main k I'oeuvre. M. Pictet , de Geneve , persuade que la maniere la plus prompte et la plus efficace de parvenir promptement k ce but serait de donner k la deplorable situation de ces homines si utiles la plus grande publicite possible , en la signalant k la Society Helvelique des sciences nalurelles, dans la session dc cette annee a Bdle , a propose k cette soci6t6 de contribuer personnellement k cette oeuvre philantropique. L'assemblee, deliberant sur la propo- sition qui lui etait faite , a alloue , dans sa stance du 2S juillet der- nier, une somme de vingt-cinq louis , applicable aux reparations necessaires pour rendre le sejour de I'hospice moins insalubre. Quoique les naturalistes soient plus fr'quemment appeles que d'autres voyageurs i s'exposer sur les sommit6s voisines de I'hospice, el k mettre k I'epreuve le courage et I'adresse des religieux, et que, sous ce point de vue , la somme vot6e soit plutOt I'acquit d'une dette qu'une simple offrande philantropique, c'est cependant une chose digne deremarque de voir une institution, dont les desserrans sont catholiqnes , etre aidee d'une maniere aussi efficace et aussi d6sinteressee par une societe principalement composce d'indi- vidus qui professent la religion fcformec.— Les personnes qui se-

Tome xi. hi

6A2 KUROPE.

raicnt dispos^es participer i cette bonne ceuvre poiirront faire parvenir, par les voies ordinaires du commerce , h MM. de Candolle , Turreltifii et comp., banquiers de Geneve, tresoriers de la Sociiti Ilclvelique , aux redacteurs de la lUbliotheque uniferselle , ou au bureau central de la Revue Encyclopedique , les sommes qu'elles voudraient bien y consacrer; il sera rendu compte de leur emploi , ct la Hste des souscripteurs sera publiee. A. S.

Publications nouuelles. Le libraire Paschoud , 6 Geneve, dolt faire paraitre, dans la premiere quinzaine de novembre, un ouvrage du jeune baron de Schwarzkopf, intitule : Exposi du droit public de I'^llemagne. II sera compos6 de quatre livres , dont le premier contiendra une courte tlieorie' gen^rale des rapports civils et poli- tiques d'un 6tat ; le second , un aperru historique des changcmens successifs que I'organisation politique de TAllemagne a subis avant d'arriver 4 sa forme actuelle ; le troisieme , un tableau du droit public federal ou de la confederation germanique , en tant que puis- sance collective independante , dont le gouvernement reside dans la diete; et le quatrierhe , un expos6 des diverses modifications du droit public allemand, qui sont propres i chacun des 6tats coni- posant la confederation.

Lausanke. Bjssus des anciens, Reclamation. Lettre d M. Jdllien, surla nouvelle opinion emise relatiuement au byssus des anciens. Je viens de lire, dans voire interessant recueil {Vojy. ci-dessus pag. 241 et suivantes.) des Recherches sur le byssus des ajiciens , que I'auteur pense devoir etre le duvet des chfevres de Gachemire. 11 a ralson de se meCer beaucoup de la compilation de Pline, oil il existe une foule d'erreurs, nees plutOt de sa manifere de travailler que du peu de correction de ses copistes. Mais Pausanias, dont I'exactitude est connue , dit positivement que le bjssus (itait le produit d'un vegetal, culliv6 en Elide, et que cependant il y etait d'une qualite inferieure k celui de la Judee. II parait que I'auteur du memoire que vous venez de publier n'a pas eu connais- sance des recherches que j'ai faites pour fixer I'opinion sur cette substance : elles ont paru dans un memoire insere dans la Dicade philosophique (20 niv. an xii) , et je viens d'en reproduire la subs> tance dans mon ouvrage sur I'Sconomie publique et rurale des uirabes et des Juifs. Ainsi , le t^moignagne de Plinc est confirm6 par celui de Pausanias ; I'un et I'autre donnent une origine judaique

EUROrE. GAS

& cette substance qui, par consequent, est la mfme k laquelle les livres sacris donnent le nom de bulz , auquol il manque seulement la terminaison grecque sos, pour Ctre celui du bussos ou bjssos des Grecs, dont la langue latine a fait /^S5us. Des-lors, il est evident que cette substance doit etre un produit vt'g^tal , comme I'ont dit ces auteurs, puisque aucun produit animal ne pouvait servir aur vetemens sacerdotaux, leur emploi etant proscrit par le culte dans I'interieur du temple. L. Reynieb.

ITALIE.

TcBiN, Physique. Riclamation. Le docteur Fohni reclame sur M. Oebstedt la priority de la decouverte de I'idenlite dujluide magnelique et galvanique , et pretend I'avoir dcmontree dans un ouvrage depos6 i la bibliotbeque de I'universite de Turin.

Rome. Astronomie. Le gouvernement papal ayant r^solu d'adopterle syst6me du monde deCopernic,il est maintenant permis d'ecrire en faveur de ce syst^me.

Naples. Societes savanles. Par un decret du lo juillet,le roi a reuni, sous Tautorit^ du ministrc de sa maison, I'imprimerie royale et la socielk Bourbonienne , composee de trois sections ; savoir : \'/4cademie archeologique d Herculanutn ^ VAcadetnie des sciences, et V Academic des beaux-arts, Le meme deci'et assigne, sur le depar- tement de la maison royale, les fonds necessaires 4 I'entretien de ces etablissemens , aux fouilles et aux reparations des monumens de Pompeia , a I'entretien du musee de Portici , et i I'atelier des manuscrits.

FtOBEKCE. L'^nio/o^j'a, journal de cette ville, continue h m^ritcr I'attention du public , par plusieurs articles originaux ou choisis avec discernement dans les meilleurs recueils periodiques europeens. Dans le n"> V, on remarque un article sur les anciennes traductions de VEniide, par Caro, Alfieri-et Solari, et sur une nouvelle qui en a ete faite dernifercment par Michele Leoni , traducteur infati- gable et distingue de plusieurs pofemes anglais. Un autre article du mgme cahier est consacre i la defense du Vocabulaire de la Crusca. Le VI contient Veloge de Lorenzo Pignotli , et un long article surle Traite de peinlure, de Cennino Cennini (annonce ci-dessus , p. 578.)11 nous semble que ces articles philologiqucs sonttrop frequens

6SA" EUROPE.

daasV^ntoIogia. lib pourraient faire crohe qu'un grand nombrc d'l la- liens ne s'occupent que «le grammaire, et il scrait pi-nible de penser que leurs auteuis ne se livrent i ce genre de travail que pour nourrir cet esprit de pedanterie et de jalousie , qui souvent est devenu un germe de discorde politique , dont les ennemis de I'ltalie n'ont su que trop bien proCter. Privenus centre cette sorte de disputes et de rivalit^s qui tendraient a deshonorer la nation aux yeux des etrangers, nous nous arrfitons quelques instans, avec un esprit tout dilT^rent, sur un article du n" VIII, p. 212, consacr6 aux deux traductions de Vlliade d'Homere, faites par I'abbe Fiocchi et M. Mancini, et qui regarde principalement la Revue Encyclopidique. Le r6dacteur de cet ar- ticle se plaint d'abord que notre recueil ait avance que I'abbe Fiocchi arenouvele la difficile entreprise, essayie par Bozzoli et par Mancini, de traduire Vlliade en otlava rima. II nous fait remarquer que la tra- duction de Fioccbi a precede de deux ans celle de Mancini , la pre- miere ayantparu en 1816, etla secondeen 1818. Nous ne connaissions que I'edition de Vlliade de Fioccbi, faite ou annoncfee par M. Son- Zogno ^ Milan, en iSiS ; et nous faisons au ridacteur de I'article de V Antologia des remercimens proportionnes a I'importance de sa reniarque. II se plaint beaucoup plus longuement de ce qu'on a os6 accorder quelque preference k la traduction de I'abbe Fiocchi sur celles de Bozzoli et de M. Mancini. M. le redacteur aurait mieux fait d'examiner les savantes analyses pen favorables a son opinion , qu'on trouve dans la Bibliotheque italienne, le Journal encyclope- dique de Naples , etc. , plut6t que de faire une aussi. longue dis- sertation sur une petite annonce de la Revue , qui , en general , s'occupe tres-peu de traductions. De plus, nous dirons franchement que, d'apres les morceaux qu'il a rapport^s lui-meme pour compa- rer avec la traduction de Fiocchi celle de Mancini , morceaux que sans doute il a dil choisir a I'avantage de ce dernier, la traduction de Fiocchi, tnalgre ses imperfections, a, suivant nous, plus de C- deiite et de precision que I'autre. Au reste , comme M. Mancini a suivi et non devanc6 I'essai de M. Fioccbi et qu'il n'a pas encore achev6 son travail , nous esperons qu'il profitera de I'cxemple, tou- jours utile, de son devancier, et plus encore des remarques qu'on a faites sur cc qu'il a public jusqu'ici , particulitrenxent dans la Bibliotheque italienne, n'- XLII , pag. 343. Alors la patrie des

liUROl'E. 6A5

Menage , des Regnier, des Ginguen6 , et tous ceux qui savent appre- cier le vrai m6rite des litterateui-s italiens , donneront k M. Man- cini tous les eloges qu'il ambitionne et qu'il aura m6rites.

GfiwEs. Publications prochaines. Poesies de Falamonica. Une lettre de M. le professeur Gagliuffi, au redacteur de la Gazette de Ge«*5, a dernlferement annonc6 la d6couverte faite par M. J. C. Dinegro, et la prochaine publication des Rimes de Falamonica , pofete ligurien du xiv« slfecle, dont rhistorien Giustinianl a fait le plus grand 6loge possible , en le comparant au Dante. Tous ceux qui cultlvent la litterature italienne attendent, avec une vive im- patience , la publication de ce precieux manuscrit. F. S.

Turin. Art dram,atique. L'avocat Albert Nota , qui est re- gards comme le premier auteur comique actuel de I'ltalie , va faire rcimprimer ses oeuvres. D6ji, il en avait (ite public plusieurs editions, tant h Milan qu'i Parme ; mais M. Nota les a toutes desavouees et ne reconnait pour bonne que l'6dition de Turin de 1818, en 4 vo- lumes. Un cinquifeme volume va etre imprim6 pour faire suite aux quatre prec6dens. D.

Naples. M. Nota parait avoir trotiv6 un rival dans M. Genoino de Naples. Ce dernier a fait representer plusieurs pifeces avec beau- coup de succes. La premifere de ces comedies est intitul6e : Le Nozze dello Zingaro pittore. La vie de ce ctlebre artiste et celle de Niccol'-Antonio del Fiore , tous deux peintres de l'6cole napolitaine^ du tems de la reine Jeanne , ont fourni au pofete le sujet national de la pifece. Le Journal encj clopedique de Naples, IX, 1820, assure que les situations sont d'une grande verit6 et d'un touchant interfit. II a donne aussi au theatre une com6die, sous le titre ega- lement curieux et piquant pour les Napolitains, de Gio-Battista Vico, personnage principal de la pifece, ainsi que deux autres ouvrages intitules : Le Nozze in testamento et la Lettera anonimu. Une autre comedie etait deji prepar6e sous le titre de // vero Cittadino e Vipocrita. Le sujet parait avoir quelque rapport avec les derniers 6venemens politiques du royaume de Naples. S'il est vrai que I'auteur ait compose ces cinq pieces dans I'espace d'une ann6e , on doit craindre qu'elles ne se ressentent de cette extrfime facility, trop souvent voisine de la negligence.

Milan.— L'^carftSmz'e des beaux-arts de cette ville a propose les sujets suivans pour le concours de 1822. lOjirchileclure.Vn edifice

GA6 EUROPE.

magnifiquc, destine a rctablJsscmcnt de la douanc , dans unc viile capltale qui ne soil pas maritime. Prix : une mtdaille d'or de la valeur de 60 sequins ;— Peinture. Le depart d'Ovide pour son exil, decrit dans la troisieme el^gie du 1" livre des Tristes. Prix : une mtdaille d'or do 130 sequins;— Sculpture. La famille de Niobe, j,app6e de fliches par Apollon et Diane; unemedaille d'or dc4oseq.; Grapure. Un sujet empruntti i un auteur estime , qui n'ait pas encore 6te grav6 avecsuccts; une m6daillede3o sequins;— 5" ZJessm deJigure.Les obs6ques de Patrocle, dderites par Hom^re; une medaille de 3o sequins ;— Dessin d'ornement. Une lampe tris-riche, de m6- tal, pour t'tre posee sur une table ; une medaille de ao seq. F. S.

TuEm. Necrologie. J'ecfieux. Un assez grand nombre de pro- fesseurs et d'amis des beaux-arts se sont riunis dans la maison de M. Spalla, professeur de sculpture, pour entendre Tiloge du cbeva- lier Pecheux , premier peintre du roi , lu par M. Monticoni , profes- seur de dessin. L'on a arrete que les honneurs funebres lui seraient rendus aux frais de la societci , et qu'on eleverait un buste de marbre i la nicmoire de cet illustre artiste , qui, parnii ses litres de gloire , comptait Tbonneur d'avoir eu pour elives MM. Girard, premier peintre du roi de France, et Berger, premier peintre du roi des Deux- Siciles.

TURQUIE.

Constantinople. LiUerature lurque. II y a desimprimeries a P6ra , i Scutari et k Dar-el-Kamar , au mont Liban. La premitre se trouve dans le palais de I'ambassadeur de France k Constantinople; la seconde est sous la protection immediate du gouvernement turo ; la troisifcme est destinee i Timpression d'ouvrages chretiens.

Voici la liste des principaux ouvrages imprimis i P6ra et W Scu- tari, depuis I'annee 1782 : ies Annales de V empire ottoman , de- puis 1730 jusqu'A 1745; Sami, Shakir et S'ubh^i ; in-fol. , 1783 ; les mimes, depuis 1744 jusqu'i 1762 ; par Izzi , in-fol. , 1784 ; idem , depuis 175a jusqu'i 1775; par Vas'if, in-fol., i8o4; Traiti de la Castrametation ; trad, du fran(;. , de Lafue , 1784; Traitedes Mines, trad, du franrais , de Vauban, 17S7; idem, d'un auteur anonymc, trad, d'une langue cnroT^bGnnc ; Essai sur V art miiitaire, trad, du ftani;. , de Lafue ; in-fol. , 1787 ; Trailes des manoeuvres pratiques , par M. Truguct; Constantinople, dc riaiprimcric de I'ambassadeur

EUROPE. 6A7

France , avec le lesttj turc; in-6" , 1787 ; Traile sur les conslruc- iions et les manoeuvres des vaisseaux de guerre ; ibid. , in-4° j 1788 ; Iiehjetel-loghdt, DictionnaLre turc , persan et arabe, par Blohammed Esdd Efendi ; in-fol. , 1795; Traite sur les Jontairies et les sources d'eau uiuepres de Constantinople , par Dervish Ilafid; in-i2, 1797; S'uhkahi S'ihyan , Vocabulaire arabe ct turc ; in-^" , 1798 ; Tableau des nouveaux rej;lemens de I'empire ottoman, composes par Mah- nioud Efendi , ci-devant secr6talre de Tambassade imperiale pres la cour d'Angleterre , imprim^ dans la nouvelle imprimerie du genie , sous la direction A' Abdor-rahman Efendi, professeur de geometric et d'algebre ; Constantinople, /nyo/. , 1798; Traduction turque dn Borkan Kat'fl, par Ah'med Aas'im; in-fol., 1799 ; Comm,entaire sur le Toh'feh de T^ehbi, in-4" , 1800 ; Traite sur les mines, par Hosein jRifky Temani;in-8'', 1800; Traite de geomitrie, in-^", 1802; Tables de logarithmes , in-S" , de I'impiimerie de I'arabassadeur de France ; Table des distances pour les armes a feu, in-S". Traduction de la g6om6trie de Bonneycaslle, par Hosein; in-4°; idem, auec un Traite de geometrie pratique, in-4''; Traite de giomitrie, par Imtih'anul Mohendisin , Hosein K(//t/; in-4", 1802; Tarifrusse, par Antoine Fonlon; in-4'', 1802; Izharu'l Esrar. Traite grammatical, par Beregli. Le Izhar, par Z eini- zadeh ; diatribe de ring<5nieur Mustafa sur I'etat actuel du g6nle militaire et des sciences ^ Cons- tantinople , imprimee dans la nouvelle typographie de Scutari , fond6e par le [sullan Selim III; in-fol., iSoS. Traite sur la re- ligion mahometane , par Bergeli; in-4'', »8o3. Un Atlas ( copi6 d'apres Faven) , avec une explication des cartes ; in-fol. , i8o4. Shu- ru'l es'-s'alat, livre de priferes; in-i2, i8o4. Ferayidu'Efqyid, Trait6 de religion , par Ah'med Emin ; in-4'' > »8o5 ; idem , par Zeini-Zadeh ; in-4'' > i8o5. ElBorhan ; logique, par Ismail Efendi, 1806. Is'lah' u'l Ghala'tat\ Dictionnaire des corruptions de la langue arabe et autres langues parlies en Turquie , par Dervish Ha- fid; in-4'', j8o6. 5 'a//: —Collection des traitcs 6lementaires de gram- maire , 1818. Traite sur les regies du pelerinage , 1818. SherKul dkajjdi'lazadji'jh. Sur la grammaire et la m6thaphysique, par Jelilu'ddin eJ diivani , 1817. Trois Traiies dc grammaire arabe.

(US Eunorii.

ESPAGNE.

Legislation. Libert/-, delapresse. La loirendue p^r lesGorlts con- cernant la liberie de la presse est peu connue en France, et nous croyons que DOS lecteurs en trouveront ici avec plalsir les principalcs dispo- sitions, soil pour se former une id6e des principes professds par les legislateurs d'Espngne , soil pour y chercher de nouvelles lumieres sur un droit dont rexercice est du plus haut int6r6t dans les gouver- nemensTepriisentatifs , el qui doit avoir une si grande influence sur la civilisation du xix"' sifecle.

La loicontientSo articles, et ccla seul nous semble un motif pour douter de sa perfection. L'Angleterre n'a aucune loi repressive contre la libertd de la presse, et neanmoins les d6lits commis par la voie de Timpressioa n'ecbappent pas plus que les autres auxcbft- tiniens qu'ils merilent.

La liberie de la presse est un des principes fondamentaux de la constilulion espagnole. L'article 33 1 portc : « Tous les Espagnolsont la liberie d'ecrire , d'imprimer et de publier leurs id6es politiques , sans etre soumis a aucune censure ou approbation prealables , sauf les restrictions et la responsabilite que les lois etabliront. »

L'article i" de la loi du 12 novembre 1820 contient une nouvelle sanction de ce principe ; mais l'article second porte que les ecrits relatifs a l'inlerpr6tation des saintes ecritures , ou aux dogmes de la religion cathoiique, ne pourront etre imprlmcs qu'avec I'autorisa- tion de r^veque. Gelui-ci ne pourra la refuser qu'en produisant I'avis d'un censeur choisi par lui-memc ; el si, apres avoir repondu aux observations du censeur, I'auteur n'obtient pas \e permis d'impri- nier , il pourra porter plainte au comite de protection de la liberie de la presse; institution dont on parlera plus bas.

Les d^Iits prevus par la loi sont divises en cinq classes; et les ecrits reprehensibles sont disignes par les mots de subpersifs , s&di- tieux , instigateurs , immoraux et dijfamaioires : i" ; dans la/»7-e- miere classe, sont ranges les ecrits qui tcndent, directement ou indirectement, au renversement de la religion calbolique ou de la Constitution du royaume ; la seconde comprend tout ouvrage qui conticndrait des maximes ou des doctrines dont le but scrait d'exci- ler it la revoltc, ct de fomcntcr des troubles; 3'' ^ la troisieme ap-

EUROPE, 6A9

partlennent les ecrils qui precheraient direclement la dcsobuissancc aux lois ct k I'autorite publique , ou qui tendraient indirectement au mCme objet , par des satires et des invectives ; la quatrieme classe comprend les ouvrages obscfenes; 5" la cinquieine , enfin , tout 6crit injurieux ou diffamatoire dirig6 contre des particuliers.

La loi 6tablit, pour les ccrits subuersifs, les ecrits seditieux et les libelles dijfamatoires , trois degres de culpability , dont I'apprecia- tion est remise aux jures. 11 n'y a que deux degres de criminaJitc pour les Merits instigateurs; savoir : rinstigation directe i la d6so- b^issance , rinstigation indirecte , caract6risee par les satires et les invectives. Le delit de la quatrieme esp6ce , V outrage aux moeurs, n'est pas divise en classes.

L'auteur d'un 6crit qualifie de subt^ersifoa Ac siditieux , &vl pre- mier degri, subira six ans de detention (non dans la prison publique, mais dans une niaison d'arret pai ticuliere , qui sera designee a cet eflet); la privation de ses emplois et honneurs, et le sequestre de son temporel , s'il est ecclesiastique. Au second degre, la prison est r6duite i quatre ans; et i deux ans pour le troisicme.

L'auteur d'un ccrit instigateur, au premier degre , ^era puni d'un an de prison; au second degre, il paiera une amende de 5o ducats ( i37 fr. So c. ) , ou subira un mois de prison.

L'auteur d'un ecrit obscene, ou contraire aux bonnes moeurs, sera condamn^ k une amende de la valeur de i,5oo exemplaires de I'ticrit inculp6 , ou i la prison pendant quatre mois.

Le delit d'injures , au premier degre , sera puni de trois mois de prison et SjS fr. d'amende ; au second degre , deux mois de prison et 25ofr. d'amende; au troisieme degre, un mois de prison et 125 f. d'amende.

La r^cidive emportera, dans touslescas, une peine double.

Les exemplaires non vendus de I'^crit condamne , seront confis- ques par I'autorite.

L'imprimeur est responsable des ecrits qui sortent de ses presses, s'il ne represente pas un manuscrit signe de l'auteur, ou s'il ne donne pas des renseignemens positil's sur le domicile de l'auteur ou dc I'editeur.

Tout ecrit dolt porter leg prenoms et nom de l'imprimeur, le lieu et la datedel'impression, sous peine dc iSy fr. 5o c. d'amende, lors mSnie que rccrit serait dOclaic nou ccupablc.

650 ECFxOPE.

Ctlui qui vL'udia uii ccrit dont la saisic est oidouiitic, iiaiuia iiiic aniendt- equivalant au prix de luillc exemplaires.

Tout individu pcut dtnonccr les tcrits subt-'ersifs ct Ics ecrits si- ditieux; le minislere public provoque les poursuiles conlre les ecrits insligateurs et les ecrits immoraux ; quant aux «icrits injurieux, c'est A la personne offensd'C A demander justice. La denonciation sera faite devant Valcade constilutiojinel du chef-lieu de la province. . Deux mcmbres de la municipalitu et le secretaire, rfeunis i I'al- cade , tireront au sort neuf noms parmi ceux qui composent la liste des jur6s de I'annie. Ces neuf jures, appeles en vertu d'une ordon- nancc de I'alcade, prCteront seraicnt d'etre juges imparliaux du fait, llsresteront seuls, liront I'ecrit denonci , ct dcclareront s'ily a ou noil niatiere i accusation. 11 faut au moins les deux tiers dcs voix pour decider raffirmalive. Dans ce cas, I'alcade envoic au tri- bunal de premiere instance la denonciation , I'ticrit et la declaration des jurds. Le jugc ordonnc alors la saisie des exemplaires.

Si I'ecrit a 6t6 denonc6 comme suhversif, sedilieux , ou instiga- teur au preraTer degre, I'accusc sera mis en prison; dans les aufres cas, il pourra rester libre , en fournissant une caution suQlsante.

Douze jures, autres q-ue les neuf dont on vient de faire mention , mais qui scront egalement design6s par le sort , formeront Icjury de jugement; leurs noms seront envoyes par I'alcade constitutionnel au tribunal , et le juge les communiquera, in son tour, au prevenu. Celui- ci pourra, dans le d6lai de vingt-quatre heures, exercer, centre sept d'entre eux , une recusation peremptoire , sans en donner les mo- tifs; alors I'alcade tire au sort sept autres jures, qui peuvent encore Ctre recuses comme les premiers; mais, dans ce cas, les sept nou- veaux jures designes k leur place ne sont plus recusables.

Les debats sont publics ; I'accusateur et I'accusd ont toute la lati- tude possible pour presenter leurs moyens, verbalement et par ecrit. Le president du tribunal fait son resume, et les jures se retirent pour conferer entre eux. Leur avis forme , ils rentrent dans la salle d'audience; leur declaration est lue publiquement, ct le tribunal prononce ensuite le jugement 'flellnilif. II faut au moins les deux tiers des voix , pour que I'accuse soil declare coupable. Les jures doivent determiner le degre de culpability ; s'ils ne le font pas , leur silence est expliquc en faveur dc Taccuse , et Ic delil est consider e comme elant du moiudre degre.

EUROPE. OH

Lorsqu'il n'y a point de condamnallon, reciit est rendu ii I'ac- cus6 , qui est sur-Ie -champ mis en liberie et dechargi dc toute caution.

Dans le cas oii les juges de premifere instance penseraient que la declaration de culpability rendue par le jury est erron6e , ils sent autorises k suspendre le prononce du jugement d^finitif , et h dc- manderi I'alcade constitutionnel douze nouveaux jures, autres que ceux qui sont d6ji intorvenus dans raffaire ; si la sentence de ces derniers est en favour de I'accuse , il est absous.

Lorsque I'^crit est d6clar(i coupable, I'accus^ paie tous les frais du procts ; et , dans cc cas , I'accusateur re9oit la somme qui lui re- yient pour son travail.

Celui qui r6imprimerait un ouvrage declare coupable , serait puni de la peine portee par le premier jugement,

11 n'y a aucun priviltige d'exemption de juridiction pour les delits de la presse.

Dans le cas oh le tribunal aurait mal applique la loi , on peut ap- peler devant la cour du district ; il en serait de meme si les forma- lites prescrites par la loi n'avaient pas ete observecs; mais, dans ce dernier cas, la cour no doit s'occuper que de ce manque de for- malites , sans prendre aucune connaissance du fond de I'accusation.

La liste des jur^s'sera formee , chaque ann6e , par la municipalile dii chef-lieu de chaque province ; Icur nombre sera triple de celui des membres de la municipalile. On ne peut y comprendre les ciloyens qi]i exercent quelque juridiction , soil civile , soil ecclesiaslique : tels que le chef politique , i'inlendant , le commandant mililaire do la province, les ministres, les employes des ministeres, les con- seillers d'etat et les personnes attachees au service de la famille royale. Les autres ciloyens qui scront designes ne pourront s'exemp- ter de cette fonction que dans le cas d'un empechement physique ou moral. Ceux qui ne se rendraient pas d I'appel de I'alcade scront punis d'une amende de 5o fr. pour les deux premieres fois, et de 100 fr. pour la troisieme.

On a cree , par la mcme loi, quatre comites de proleclion de la liberie de la presse , composes de sept membres , que les Cortes eliront au commencement dc chaque legislature , et qui seront rce- ligibles. Ces comites resideronl ; savoir : le premier a Madrid, pour la piininsule elks ilcs adjaccntes; le second, au Mcxique , pour

652 EUROPE.

toutes les provinces de I'Anioiique Septentiionalc ; Ic troisicnie, 5 Lima , pour ccllcs di; rAnidrique M6ridionaIc ; et le quatrifcnic , S Manilla, pour les ilus riiilippines. Lcs fonctious dc ces comit^s sont : de soumctlre aux Cortes, en y joignant leur avis, tous les doutes que les autorites des provinces auront presentcs sur I'ex^cu- tion de la loi , et les cas extraordinaires qui arriveront-t 2" de com- muniquer aux Cortes toutes les reclaoiations qui leur seront adres- sees par les autcurs et les ^diteurs ; de faire part i cette asscmbl^e de leurs propres observations et des moyens que I'expt-rience leur aura suggeres pour trioinpher des obstacles qui pourraient encore s'opposer i la jouissance de la liberto dc la presse ; d'examiner les llstes de lous les proces relatifs ix la liberte de la presse , dont les autorit6s de province sont tenues de faire I'envoi; de publier, dans la Gazette officicUe, les jugemens qui seront rendus dans cette niatierc.

Cette loi pourrait etre i'objet d'un assez grand nombre d'observa- tions critiques. Je me borne 6 unc seule : c'est qu'il me parait im- possible que , dans I'etat oil se trouve aujourd'bui Tinstruction pu- blique en Espagne , on trouve, dans chaque cbef-lieu de province, un nombre suilisant de personnes instruites pour remplir le vceu de la loi. En effet, l'ex6cution de toutes ses dispositions peut exiger jusqu'4 quarante-sept jures , pour une seule affaire ; et les hommes en place , qui ont precisement en leur faveur la presomption de I'ins- truction necessaire pour bien remplir dc telles fonctions , ne sont pas susceptililcs d'etre design(is. Qui done remplira les fonctions de jures dans des affaires aussi dfilicates ? trois ou quatre avocats , et tous les autres seront des prCtres et des moines. Et quels pretres! quels moines 1 II est malheureusement trop petit, le nombre de ceux qui ne confondent pas la religion avec les pretentions du clerge, et les saintes doctrines de I'^glise avec les abus qu'on y a meles. Ainsi , par exeniple, un savant ecrivain emploiera une ou plusieurs annees Ji composer un traitti concernant la discipline, et il sera jug6 , sur une seule et tres-rapide lecture, par des hommes qui ignorent peut-etre jusqu'aux premiers elemens du sujet sur lequel ils doi- vent prononcer !

Je crois que , provisoiremenl , le comite de la protection de la li- berie de la presse devrait Ctre juge en dernier ressort , parce que, sie- geant a Madrid , il pourrait toujoiirs ctre compose de sept hommes rhoisjb paimi lcs phis instiuils. 3, A. Llohewe.

EUlVOPJi. 653

Madkid. lieauxarls. Au inuis dc mai ile cclle unnce, on a ex- pos6 les pieces du concours ouvert I'annec derniere par V Academic des beaux-arls ou de San Fernando ■, pour le plan d'un monument national, ayant yjour but d'eterniser la jouineedu gjuillet 1820,0(1 le roi preta serment k la constitution. ( I oy, T. IX, p. 1940«

La municipalite de Madrid a public le programme pour un autre concours ; il s'agit d'un monument en I'honneur des victimes de la journ6e du 2 mai 1808. Le prix sera une m^daille d'or du poids de six onces. D. g.

PAYS-BAS.

Amsterdam. Canal. On continue de travailler avec beaucoup d'activit6 au grand canal de la Hollande septentrionale ; il a douze milles de longueur et vingt-cinq pieds de profondeur , et doit etre navigable pour les vaisseaux de la compagnie des Indes , depuis le Helder et le grand port de Ilet Niewe Diep jusque dans le Het Y devant Amsterdam. Ce travail fait le plus grand Lonneur a I'inspec- teur general Blanken : c'est en effet une grande entreprise que de pratiquer un canal d'une aussi grande etendue dans un terrain ma- recageux , forme en quelque sorte de tourbes flottantes sous une coucbe de terreglaise d'un pied de profondeur, et d'y faire construire des ticluses massives dontcbacune doit couterplus de3oo, poo florins, Un grand nombre de batimens doivent etre employes tous les jours a enlever la tourbff, ainsi que la terre marecageuse, que Ton ne peut Jeter sur les bords du canal , parce que cette masse molle serait bientOt enfoncee par son propre poids. Les travaux coiiteront plu- sieurs millions ; le commerce d'Amsterdam , pour lequel ce canal est de la plus grande importance, y contribue pour un million de florins de Hollande ; on en a dej4 fait une partie , ainsi que la pre- miere grande ecluse , i I'entree du canal , vis-i-vis Amsterdam.

MiDDELBOUKG. L' Academie Z elaudaisedes sciences{Vqy .T .\U1, p. i35) a tenu, le 25 avril 1821 , son assembl6e generale au mus^e de cette ville. Elle s'est d'abord occupee des m6moires envoyes en reponse aux questions proposees en 1818 : sur les corps de metiers; sur I'autorile des lois de Moise dans une socieie de chretiens. L'academie a re^u quatre memoires relatifs a la premiere question ; elle a adjuge le prix k celui qui portc pour epigraphe : f^is unita fortior, dont I'auteur est M, H. N. Tvdeman , professeur de droit dans

G5A EUROPE.

T universite de Ley de, mcmlre de la seconde classe de I'lnstilut royal des Pays-Bas et de l^ Acadhnit: Zilandaise des sciences. Sur la se- conde question , I'academie a rei^u deux memoircs porlant pour epi- graphc, I'un : Gy zilnietonderde TVetenz; I'autrc : Zoo wic dezelve zal f;edddn en geleerd, ebben eiiz. Ces deux pieces n'ayant pas el<i jngees dignes du prix , la question a (ite remise au concours dans les termes suivans : Quelle autoriti coni>ienl-il d'ailribuer aux lois di- vines donnies par Moise au peup'e d' Israel, pour la decision de ce qui est moralement bon ou mauvais, juste ou injuste dans une so' cielede Chretiens? Les memoires doivent ttre parvenus le i" avril 1822.

L'academie n'ayant point re(^u de rtponse aux questions : i" sur les paralonnerres', I'sur la situation geographiquede la Zelande; 3" sur la situation geographique de la Flandre , la premifere a tte retiree, et les deux autres sont remises au concours pour le premier avril iSaS. Ontrouve ces questions detaillees dans Ic programme de iSiS.ElIen'a pas non plus re^u de r^ponse aux questions concernant : i.° V/iis- toire de la ville de Flessingue ; les differenles especes de mollusques connues dans nos contrees. Cctte derniere question a ete retiree; la premiere reste au concours jusqu'au 1" avril 1823. Le programme de 1818 en fait connaitre les conditions.

L'academie cspere rccevoir les memoircs demandes dans son programme de 1819 , et qui sont : un manuel a I'usage de tous teux a qui I'inspection et la surveillance des outrages hydrau- liques sont confiees dans les diuerses administrations des digues (avant le i'"' avril 1822) ; 2" une notice sur loutes les academies, so- cieles ou itablissemens scientijiques , consacres aux progres des lu- mieresel de la cinlisation , qui ont existe autrefois et existent encore dans le royaume des Piys-jBcrs (avant le i"- avril 1823) ; Unecon- iinuation de Vouvrage de De la Rue, intitule Geletterd Zeeland (avant le i"^' aril 1824).

Enfin, l'academie a mis au concours une autre question dont voici I'objet : La province de Liige possede une riche mine de calamine, et, dans la fonderie de Liege , on se sert du zinc pour fabriquer des vases destines ^ differcns usages, ainsi que des ustensiles de cuisine soil pour apprcler des viandes, soit pour conserver des liquides. On y confectionne aussi des feuilles de zinc pour doublcr les vaisseaux, garnir les toits, fabriquer des conduits, des gouttieres, des tuyaux de pompe, etc. Cependant, une commission faisant parlie de la classe.

EUROPE. 655

des sciences physiques et mathematiqucs de I'Institut de France, a montr6, dans un rapport fait le i5 mars i8i3, 'que I'usage d'usttn- siles de rinc pour apprfiter dea viandes pouvait n'etre pas sans danger pour la sant(!;; de son c6t6, le ci-devant proprietaire de la mine et fonderie s'estcfforc6 de refuter, dans un tnemoire etendu, I'opinion de cette commission, et il a donn(, ix I'appui de ses raisonnemens, di- verses experiences faites k cette occasion. En consequence , I'aca- demie demande : i" si Von peut , en toute circonstance , sans le moindre danger, faire usage des ustensiles de zinc pour appreter des viandes; 2" sous quels rapports le zinc , Men employe, et toutes choses igales, merite-t-il la preference sur d'autres nietaux donton se sere actuellement pour doubler les vaisseaux , garnir les toils, et pour tous les usages mentionnes ci-dessus? Pour ce qui regarde la pre- miere partie de la question , I'academie demande une discussion exacte et impartiale du contenu du memoire sus-mentionn6 et des faits qui y sont rapportes, et elle desire que Topinion qui sera emise par I'auteur soit appuy6e d'experiences faites parlui-m6me. Quant k la seconde partie , il faudra avoir 6gard aux donnees que I'experience a fournies jusqu'ici , et surtout k la solidity et au prix des diflFerens metaux, pour en deduire des resultats comparatifs. Le prix est une medaille d'orde trente ducats, ou sa valeur en argent. Les memoires seront re^us jusqu'au 1^' avril 1820. Les reponses ecrites en hollan- d'aisj en Za^iTzouenyrawpawdoivent etre envoyeesaM. J. de Kanter, secretaire de I'academie k Middelbourg.

FRANCE.

GiaoNDE. BoRDBALX. Musie d'histoire naturelle. M. le baron Milius, commandant pour le Roi k Bourbon, ayant obtenu son rappel , vient , en rentrant dans sa patrie , d'ajouter de nouvelles richesses a celles que possedait deji le musee de Bordeaux. Une suite interessante des produits volcaniques de Bourbon ; des madre- pores et des lithophytes de la mer Rouge ; differens poissons de rOcean indien, des oiseaux , des coquillages, des vers i soie d'une esp6ce qui ne nous etait pas connue ; qnelques quadrup6des ; un ^chantillon de tous les bois qui croissent k Bourbon ; beaucoup d'autres objets d'histoire naturelle , dont le detail nous entrainerait trop loin : tels sont les nouveaux tresors que le mus6e de Bordeaux

056 EUROPE.

<|oit ^ M. Milius, qui apportc co outre un gvaad nutnbrc do plantcs curieuses, utiles oil r>res.

'. A ces productions do la nature dans Ics trois r(:gnes , M. Milius a joint , avcc la m£me generosity , divers produits de I'industrie in- dienne. Un modfcle des pirogues d'Otaiti ; un module des bateaux d'Anjuan , avee Icurs cables d'berbe et d'ecorce ; divers instrunaens de musique, usites chez les peuples de Madagascar; un metier do tisserand du mCme pays, mt-tier si simple, nous avons failii dire, si grossier, qu'il appartient i renfance de I'art, tandis que la toile qui en provient est si fine, qu'on la croirait fabriquee par le plus habile ouvrier. Ces jolis tissus sont en feuilles de raphia. . Pont de Louis XVIII. Le aS aofit , la derniere arche de ce beau monument a etc ferm^e , avec la plus grande solennite , par le prefet du dtpartement , en presence des autoriles civiles et mili- taircs de Bordeaux. 11 a fallu tout le talent et toute I'activitfi de MM. Deschamps, directeur des travaux, etBillaudel, ingenieur, pour amener i cette 6poque les constructions au degre d'achevp- ment necessaire. Nous avons donn6 (T. X, pag. 454)? des details syffisans sur ce nouveau litre de gloire des inginieurs fran(^ais.

Deux medailles ont He. frappees i cette occasion et mises par le prefet dans une boite de plorab. L'une olTrc I'image du Roi , et, au revers, la vue d'une partie du pont, sur lequel s'eleve uue figure cplossale de Neptune; au-dessous est la nympbe de la Garonne. L'inscription porto : Garumna primiim ad Burdigalam subacla. La deusieme medaillc offre aussi, d'un cOte , la figure du Roi , et , de I'autre , l'inscription d'usage.

.Landks. Saikt-Sevbb. Nouueau pont. L'inauguration du pont de cette ville , appele pont de Louis XVHI , a eu lieu le 25 aottt ; inimediatcment apri^s, le passage a ete ouvert au public.

Maime-ex-Loihe. Angebs. Enseignement mutuel. Le ministre de I'interieur vient d'accorder k la societe , formee dans cette ville pour I'encouragement de I'enseignement mutuel, une somme de 8,000 fr. pour acheter le bfitiment dans lequel I'ccoleest etablie.

Moselle. Suivant le journal de ce departement, trois cent soixante-quinze eleves frequentent maintenant les ecoles de Metz ; la depense annuelle est de 6,ooo I'r. ; celle de I'instruction d'un enfant nc levieut ainsi qu'ii iG fr. par an, ou i fr. 53 cent, par

EUROPE. 657

niois ; et si I'on considere que les enfant sont dispense* de toute esp^ce de depenae pour achat delivres , papier, cncre, plumea , etc., que le terns de I'dtude est abreg6 d'une aanfie au moins ; qae les jeunes filles emportent de I'^cole , non seulement le genre d'instrac- tion cominun aus deux sexes, mais encore assez d'habiUte dans les ouvrageg k I'aiguille pour gagner leur vie ; si I'on remarque , de plui , que cent jeunes gargons et cinquante jeunes filles pour- raient encore tUe admis dans les 6coles , sans qu'il en r^sultSkt an- cune augmentation de depenses , on reconnaitra que jamais m^tbods d'enfeignement ne fut plus ^conomique.

IsiiBK. G£Eii0Bt.B. Sculpture. Monument en I'honneur de Bayard. Le conseil g^n^ral de ce d^partement a reconnu qu'il lui appartenait de provoquer I'^rection d'une statue en I'bonneur du Chevalier sans peur et sans reproche ; il a joint h I'expression de son v«u le don d'une somme de ao,ooo francs. La ville de Grenoble, imitant cet exemple, consacre une somme a la mSme destination. Enfin , le ministre de I'int^rieur a promts les marbres nicessaires. Od espire que cette impulsion ne s'arrfitera pas anx Ijmites du d6- partement de I'lsere , et que tons les Frangais, jaloux de la gloire de leur pays, voudront contribuer k honorer la memoire de Bayard, comme ils I'ont fait pour Duguesclin , Turenne , F6nelon et Malos- Iterbes. M. Raggi , sculpteur distingu6 , auquel on doit d6jk la belle iitatue pedestre de Henri IV, exticutee pour M. Digeon , a etc charge du monument. Le beros sera repr6sent6 au moment oil , frapp6 d'un coup mortel, il vieut d'etre dcscendu de cheval. Appuy6 contre un tronc d'arbre , il adresse au ciel sa derni6re priere , et il regarde le pommeau de son 6pee, qui lui tient lieu de cruclflx. La statue aura dix pieds de hauteur; le pi^destal sera orn6 de deux bas-reliefs, representant : I'un, Bayard refusant la radgon d'une jenne prisonnifere , et Pautre, son entree dans Milan.

SOCIETES SA.TAMES ET d'cTILITE PUilLIQOE.

Amikks. {Sjmrne-) h'Academie des sciences , agriculture , com- merce, belles-lettres et arts (seance du 26 aout) avait propose, pour sujet du prix de poesie , V Amour de la palrie. {Vojf. T. VIII, pag. 201.) Elle a adjug^ le prix a I'epitre, quia pour ^pigrapbc : Palriaydulce nomen! et dont I'auteur est M. de Baugy. Elle a ac- cords Vaecessit k une ode de M. CrelOD , avocat k la cour royale

Tome xi. A2

•4)5S KliUOl'E.

d'Amiens, ajnnt poui epigraphc : O pairia! et une mention hbuo- rable 6 un dithyrambe, dont I'epigraplie est : Vincet amor jiatria: L'academie propose , poir sujct du prix de poesie de I'annee pro- chaine , le don de la L'harte ; et pour sujct du prix de prose : Exposer I'elal de I' agriculture dans le departemenl de la Summe , avant la rei.'olution ; deinontrer si elle est aujourd'hui plus ou moins florissante ; assigner les causes de ses progres ou de sa de- cadence-, 'indiquer les ?i.ojens li'uccroltre les tins, ou de reme.dier a I autre. Chaque prix sera une medaille d'or; le concoiirs sera ferni6 le i5 juillet 1S22. Dans celte tnfime seance, l'academie a nonime mcmbre tltulaire M. Liadieres , capitaine du genie, autcur de Con- radm et Frederic, et de Jean sans peur, tragedies joules avec un grand succes au second Theatre Fran(;:ais. ( I'oj. ci-apres , Particle Pabis. Theatres.)

Gambbai. [Nord.) La Socieie d'emulalion a tenu sa seance publique annuelle, le 16 juillet. Les lectures ont eu lieu dans I'ordre suivant : Discours d'ouverture , par M. Belhune-IIouriez, president ; Expose des travaus de la Societe, depuis sa dernifere seance publique, par M. Le Glaj, D. M. , secretaire perpetuel ; 5" Rapport sur le concours de poesie, par M. Lussiez ; 'a Vie champCtre , ode imitee de I'italien de Parini , par M, Pascal Lacroix , vice-president; 5" le Tombeau du roi Stanislas k. Nancy (extrait d'un voyage en Lorraine ) , par M. F. Helcroix y secretaire annuel; hlegie, par M. Lussiez; 7" sur les Spar- tiatcs modernes; traduction de I'anglais de M. Gait, par M. Vabbe Servois ;— S" Epitrc a MM. *", poetcs et paresseux, par M. Aime Dupont ; Notice sur Pierre de Franqueville , ne k Cambrai ,' premier sculpteur des rois Henri IV et Louis XIII , ouvrage con- ronne par la Societe. II n'y a point eu de prix, cette annee, pour la poisie et pour I'eloquence. Les deux primes, pour I'amelioration des bestiaux dans I'arrondissement de Cambrai, ont 6te decernees A MM. Gauthier, de Gievecoeur, et Defontaine, de la Neuville-Saint- Remy. M. Coijuin-Dei'i/.lers, oiYicier dc sante k Gouzeaucourt , a obtenu une medaille , i* litre d'encouragement, pour un memoire sur la topographie medicalc de quelques communes du canton de Marcoing.

Deux mfimoircs etaient parvenus i la societe, en reponse aux questions qu'cUe avail proposers sur I'liistoire locale et les antiqni-

EUROPE. 6o9

tos. L'un avail pour tiUe : Essai sur L's monnaiei frappeex dans le Cambresis et sur les midailles dont ceUc province a ele I'ohjet. L'aiitcur qui, fort jeunc encore , se livre avec succes aux reclierches numismatiques, est M. Augusie Tribuu , de Gambrai. Un prix de la Taleur de cent'cinquante francs lui a ele decernc.

La palnie la plus brillante des concours de cette annce , consis- tant en unc urne d'argent du pris de deux cents francs, a ete rem- portee par M. Dulhilloetil , de Douai , auteur du second memoire, qui est un eloge hisloriqus de Pierre de Franqae villa , sculpteur c61tbre , ne i Gambrai. En couronnant I'ouvrage , la Societe a decide qu'elle inviterait I'autorite municipale i donner le nom de Franqueville i I'une des rues de Gambrai.

Sujcts mis au concours pour I'annee 1S22 : i" la Topos^raphie medicale d'une oil. deplasieurs communes del'arrondiskemenl de Cam- brai; 'A,°Antiquites, hisloire locale. La societe couronnera le meilleur Memoire sur un point quelconque del' archeologie del' arrondiasement de Cambrai;—?)'' Hloge de Franfois Vanderburch , mort archev6quc de Gambrai , en i644 ; une ode ou un poeme sur la bataille deHenain. (Sujetdeja propose I'annee dernifireetremisau concours.)

Lcs ouvrages des concurrens devront etre envoyes h M. Le Glay, D. M. , secretaire perpetuelle de la societe, avant le i5 juin 18251.

Lyon, {llhune.')- L'Academie des sciences et belles-lettres de cette \ille a tenu sa stance publique le 4 seplembre. On y a lu d'abord le compte rendu de ses travaux , pendant le dernier se- mestre de 1820 et le premier seniestre de 1821 ; puis, le rapport d'une commission cbargee de I'examen des ouvrages envoyes an concours. Des divers sujets proposes par racadcmie , celui qui con- cernalt V administration des hSpitaux , est le seul pour lequel il y ait eu des concurrens; I'acadeniie a decerne une medaille d'or a I'un des auteurs , et une mention honorable k un autre. On a ter- mine la stance, en faisant connaitre les encouragemens accordes par I'academie i I'auteur d'une mecanique dont I'objet est de per- fectionner les ftietiers propres a la fabrication des etoffes de soie.

Marseiile [Bouches- du' Rhone). Academie des sciences, belles-lettres de Marseille. Depms long-tems, cette societe n'avait cu de seance aussi interessante que celle du 26 ao&t dernier , presi- dee par M. Reguis. Elle a ete , en partie , consacree ^ la reception dc M. Grange, jcnne ecrivain qui avait deja obtenu d'honorahles dis-

A2*

660 liUKOrJi.

tinctiuns dans les concours acadcmiques de Marseille et de Lyon, et qui vient de remportcr I'accessjt pour V&loge de T^auvenargues 4 I'acadiniie d'Aix. La seance a (iti terminee par des lectures va- rices , oil la po6sie et I'eloquence ont tour a tour fixe I'attention de I'assemblee.

Nantes (, Loire -Inferieure), La Socieie academique de cette ville, qui avail retnis trois fois au concours Veloge d' Aheilard, vient enfin de decerner le prix i M. Prion. Ce morceau d'eloquence est, dit-on, remarquable par I'eclat du style, la sagesse des id6es , et surtout pas le soin que I'auteur a pris de venger d'un injuste oubli les ouvrages d'un homme plus connu par ses infortunes amoureuses que par ses travaux litleraires.

RocEN { Seine- Inferieure). Socieli libre d' emulation. L'exis- tence de cette societe date des premieres annees de la revolution ; elle fut fond6e par quelques hommes estimables et instruits , qui s'occupferent d'abord des arts industriels, et prouvfirent ensuite qu'ils n'etaient pas moins propres i cultiver les sciences et les lettres : leurssuccesseurs, animes du mCme esprit, tendent au meme but. Dans sa seance annuelle du 9 juin, cette societe a distribu6 les prix suivans : i M. Collin , ouvrier tisserand, demeurant k Rouen , pour la decouverte et Temploi de divers moyens propres 4 diminuer, dans certains cas , la fatigue de I'ouvrier , et i abreger le travail , en empecbant le fil de se casser aussi souvent; a" k M. Le Grip fils, fabri- cant de faience, pour la confection du minium de bonne quality , k un prix inferieur k celui de Paris et de I'etranger ; 3<> i MM. Dise- rignj et Garnier, pour I'avantage qu'ils ont procur6 aux raflineries de ce d6partement, en mettant k leur portee une fabrique de char- bon animal, si utile k la clarification.

Les noms de MM. Talon, Lecnffre, Nourril,Lecomte, Picard, Char- don et Halley ont ete mentionn6s honorableipent pour divers autre^ proc6des industriels, parmi lesquels on cite des rouleaux de pression, un perfectionnement dans le mouvement descacdes, une liqueur, un enduit et un mortier propres k suppleer aux precieux precedes qui donnaient tant de solidite aux constructions antiques. Un prix de 3oo fr. sera dicerne , dans la seance du 9 juin 1822 , k I'inventeur du meilleur procede/jour la preparation du Un et du chanfre, sans rouissage. (Nous rendrons compte du Recueil public par cette societii. ) "• •^*

EUIVOPE. 661

Toulouse ( Haute Garonne). Academic des sciences , inscrip- ti.insel belles-lettres. Cette academic avait propose , pour le sujet d'ttn prix de 5oo francs qu'elle devait adjiiger en 1821 , les questions suivantes : Paire- connaitre les circonstances particuUeres que la stratification de chaque sorte de masse jninerale peul presenter , tant sous le rapport de lajorme des couches que sous celui de leur direction et de leur inclinaison ; determiner les lois, soit gene- rales, soit particuUeres , auxquelles la stratification des masses mi- jierales pent etre soumise. Celte determination doit etre hasee sur des faits positifs et Men constates. L'academie , n'ayant point ve,q\i de memoires sur ce sujet , le retire du concours. EUe continue , comme objet d'un prix extraordinaire de la valeur de 5oo francs, poar fitre donn6 en 1822 , la question suivante : Quels sent les mo- TUimens historiques , litteraires et scientifiques qui, depuis dix-huit siecles , onlfail donner a Toulouse le surnoni de Palladienne. Elle continue encore, pour sujet du prix ordinaire en 1822, les ques- tions suivantes : 1" Determiner I'etat politique , cifil et religieux de la Gaule, afant I'entrde des Romains dans celte partie de I' Europe; z" fixer , dapres les auteurs et les monumens , les connaissances que les Gaulois avaient deja acquises dans les sciences et dans les arts. Le prix sera une medaille d'or de la valeur de 5oo francs.

Elle propose , comme sujet du prix & donner en 1820 , une Theorie physico-malhemat'ique des pojnpes aspirantes et foulantes , faisant eonnaitre le rapport entre la force motrice employee et la quantity d'eau reellement elevee , en ayant egard i tous les obstacles que la force pent avoirs vaincre , tels que le poids et I'inertie de la colonne d'eau elevie, son frottement contre les parois des tuyaux , son 6tranglement en passant par les ouvertures des soupapes , le poids et le frottement des pistons, le poids des clapets ou soupapes, I'inigalite entre la surface snperieure et la surface inferieure de ces clapets au moment oil la pression va les ouvrir, etc. Cette th6orie doit 6tre basee sur des experiences positives , et les formules qui en seront deduites doivent etre faciles k employer dans la pratique. Le prix sera une medaille d'or de la valeur de 5oo francs. Enlin , l'aca- demie propose, pour sujet du prix Ji donner en 1824 , et qui con- sistera en une medaille d'orde la valeur de 5oo francs , les questions suivantes : i" Determiner par des observations comparatives les cas oit I'emploi des sels a base de quinine est aussi avantageux que celui du quinquina ; designer les cas oit il mirite la prefirence.

C62 EUROPE.

Les ^avuiis de tousles puys soul iuvites u tiuvuiller sur Ics sujcU proposOs. Lcs ouvrages doivent Ctre ecrits en frau^ais ou en latin , et adressis i M. d'Aubuisson de Voisins , correspondant dc I'Institut, secretaire perpetucl dc racadeniic. Lcs memoires seront rcous spulcment jusqu'au i" mai de cliacune des ancees pour lesquelles Ic concouis est ouvert. L'acadeniie , qui ne prescrit aucun systeme , declare qu'clle n'entend pas adopter tous les principes des ouvrages qu'elle couroiinera.

La Societe d'af;riculture de Toulouse , convaincue que la charrue de ce d^partenient est encore susceptible de peri'ection- nenient, malgre les ameliorations executecs par le sieur Bellaval, auquel il a ^te decerne un prix d'encouragenient , proroge a I'an 187.2 le sujet propose I'an dernier et les ann6es pr^cedeutes : elle ofl're , en consequence , une m^daille d'or de la valeur de 5oo fr. i celui qui presentera la charrue perl'ectionnee , de manifcre k tra- vaillcrla terre a une prolondeur dc dix pouces, sans autre secours que la I'orce d'une patie de bccufs ou de cbevaux. Le societe appelle particulierement I'allention des concurrens sur les principaux ele- inens de notre cliarrue ordinaire , le coutra et le soc ; elle les invite a cxposer les modifications qu'il conviendrait de leur faire subir. Le c(/ulre, dont la destination est de fendre la terre, doit-il 6tre place dans le plan vertical dc I'arete du soc ? sa pointe doit-elle elrc placee immediatement au-dessus de celle du soc, et daus la mSme direction , pour cviter la resistance qu'on eprouve en pure perte , quand on I'incline aussi du cOtci oppose au versoir ? Le HOC ne pourrait -il pas etre itabli en fer de fonte et a aile simple du cOte du versoir? L'aile double parait inutile a la cbarruis qui n'a iju'un versoir. Les concurrens devront adresser a la societe, aveo leurs memoires descriptifs , une charrue dans les dimensions qu'ils auront determinees pour son perfectionuement ; le prix de cons- truction sera rembourse en sus de la medaille.

La societe dislributra annuellcment des medailles d'eucouragc- ment aux niaitrcs-valets des quatre arrondisseniens et des cinq de- parfemens limitrophes, qui auront le niieux rempli les conditions ci-apies : les concurrens devront remettre un certificat signe du proprietaire , et vise par le maire de la commune ; ce certilicat porlera : que le uiailre-valet demeure depuis dix ans au moins dans le domainc ; 2" q\i'il est de bonnes ma-urs ; que sa probite est il loulc eprcuvc ; 3" qu'il est bieu soigneux dc scs bcstiaux ;

EUROPE. 66S

qu'il lie ics iiialiraile point; 4" qu'il est ccoiionie de founage ; qu'il lie neglige rien pour les conserver, notamniKnt les crates ct les tiges du mais; qu'il dirige avec intelligence la construction dcs pailliers, et qu'il n'estpas sujet a avoir une partie de la paille pour- rie dans I'biver; 6" qu'il laboure bien, ct se distingue par sa dili- gence <i fairc donner les differentes farons aux terrcs; qu'il monte bien une charrue , ct en ajuste toutes les pieces de maniere a ce qu'elle laboure convenableraent la terre, sanstrop fatiguer les bceufs; qu'il est adroit h faire ecouler I'eau des cbamps , par le inoyen des saignees et des egouts ; j" qu'il a soin de recurer les etables , et qu'il ne laisse point bruler les fumicrs par le soleil, mais qu'il les recouvre de terre, apres les avoir arranges sur le tas , cbaque semaiue au moios." Les memohx's el letlres doiveut etrc adresses a M. Marque J'iclor, secretaire perpetuel de la soci6te, S Toulouse.

1^STITL'T. /jcadimie des sciences. Aoui 1821. Seance du 6. M. Gcofl'roy-Saint-IIilaire , rappelant a I'acadeniie le voeu qu'elle inanifesta pour que le gouvcrnement fit demandcr des gymnotes electriques en Amerique, informe I'assemblee qu'un de ces poissans est recemment arrive vivant et bien porlant au Jardin du Roi. Une commission , composee de RIM. Arago, Cuvicr, de Humboldt, Gay- Lussac et Geoffroy-Saint-Hilaire , est cbargee de suivre les expe- riences auxquelles on doit soumettre ce poisson. M. Garros adresse un traite manuscrit sur les proprieles d epuratoires du charbon de hris. (Commissaires , MM. Berthollet, Vauquelin , Thenard et Gi- rard. ) On depose un memoire de M. Dcuaux , ingenieur de la marine , sur un instrument propre a mesurer le sillage des vais- seaux , et qu'il nomme dromographe. (Commissaires, MM. de Rossel et Fourrier.) M. GeotTroy-Saint-Hilaire lit un memoire sur les organes de la deglulilion et du gout chez les psrroquels nucro- glosses ou aras indiens. M. Ilenri , ingenieur des ponts «t cbaussees, lit un memoire sur le projet d'une nouvelle machine hydrauUqiie, ay ant pour objet le passage des bateaux. (Commis- saires , MM. de I'rony, Girard et Caucby.) M. de Ferussac con- tinue la lecture dc son memoire sur les couches superieures de la <:raic. (Gomnilssain'S , MM. Lamarck, Cu\icr, IJosc ct Biongniart.)

Q&A EUROPE.

M. .Sarlandicre presenle un myrle qui a etc «lev6 par M. La- vaH^e, eultivateur d'Abbcville, dc maniiire i representer un vase t au moyea de ses branches multipliees et dispos6es sym^lriquement. (MM. dc Jussieu ct Dupetit-Tbouars, commissalrcs.)

Du i3 aoit. M. Hyde de Neuville transmet un ouvrage de III. John-Quincy-Adams, secretaire d'etat dcs Etats-Unis et president de la soci^te atn^ricaine , ayant pour titre : Rapport sur les poiebe et rnesures y €n execution d'une re^solution du s^nat, en date du 3 mars 1817 (M, Delambre, un compte verbal). Le nom deM. Adams tKttt inscrit parmi ceux deg savans qui di^sirent le titre de correspon- daat de Tacad^mie. On lit un cxtrait d'un journal allemand , envoy6 par M. Gauss, et traduit par M. liurckbardt. On y voit que Bf. C;ias8 a imaging de faire reil^chir par un miroir la lumi^re du soUit , sur un signal terrestre , pour le rendre visible k une grande distance. Dans I'cxp^rience qui en a 6t6 faite , les stations etaient eloign^es de 85, 000 metres; le tniroir avail deux pouces sur un pouce un quart , et la lumi^re re£l<ichie se voyait parfaitement. j^u nona d'une commission , M. Latreille lit un rapport sur le me- moire de M. Virey, retatif a une nouvelle espece de eochenille qui J'mt. pirir les rosiersj 1«8 GOBclusiofls de ce rapport, toutes favorables ••» travail de M. Virey, sont appronv^es par I'acadfeniie. M.Cuvier Utua M/dntoire intitule : Ossemens de fossiles analogues aux tapirs. U. Moogei lit un memoire sur Part mon^taire des anciens et des moderaee.

1?» so. M. Lassis ptisente un memoire sur les verilables eauaes des maladies ipidemiques , etc. { MM. Portal et Dumeril , e(MnBii$6aiFe».) Aitnom d'une commission, formee de MM. Prony, 6a]>-Lussac et Girard , celui-ci lit un rapport trfcs-important sur la noupelle machine d. vapeur de Mannoury-Declol , exicutee depuis quelqoe terns pour le service des> abattoirs de Crenelle ; en voici kg conclusions : « Nous pensons que I'appareil i vapeur , qui fail F»bj«t de ce rapport, est tres-propre i conlirmer I'opinion avanta- ^u«e que fes diverges machines imaginees par M. Mannoury Dectol OBt dejA donnte de ses connaissances, de son ginie inventif et de sa sagacitiB , et qu'en consequence cet appareil , dont une experience denx an* atteste le bon emploi , est tout-ii-fait digne de Tappro- bation de Tacademie. » L'acad6mie approuve le rapport et arrfife q.n'il sera jmprimt dans ses memoires. M. Latreille lit un me-

EUROPE. 665

moire intitule : Ecluinisseinens relatifs a I'opinion de 7)7. Huber fils , sur I'origine et I' issue extirieure de la ci/e. La sectiun de niedecine prcsente les candidats suivaos pour la place correspon- dant , vacante dans son sein par la mort de M. Gregory ; ce sent MM. Baillie , Barbier, Maunoir, Fodere et Lauth.

Du 27. On lit une lettre de M. le marechal due d'Albufira , relative k I'aerolitlie d'Aubenas , du poids de 220 llvres { F'ay. ci- dessus p. 426.}; il envoie un fragment de la pierre. Au nom d'une commissloa nominee pear faire des experiences sur la gyranote ^lectrique , M. Arago donne une idee des recherches auxquelles clle s'est livr^e; il d^crit un instrument construit tout expres , et qui n'a pu servir, parce que ranimal est mort lundi dernier. M. de Humboldt ajoute quelques renseignemens curieux sur la diffe- rence entre la torpille et la gymnote. Au nom d'une commission , M. Vauquelin lit, sur I'encre indelebile de M. Dumoulin, un rapport, duquel il resulte que M. Dumoulin n'est pas Ic premier qui ait su composer une encre de cette espfece; que celle de M. Dize , et surtout eelle de M. Delunel , dont il a et(i rendu compte a I'lnstitut en I'an rx , ont les memes qualites ; cette derniere est ni€me d'un noir pins intense et change moins par les acides que celle de M. Dumoulin. « Nous pensons , dit en terminant M. le rapporteur, qu'au moyen de ces encres, les administrateurs, les banquiers, les n^gocians, etc. n'ont plus rien ^ craindre de la fraude- » Rapport et conclusions approu- vdes. M. Arago rend un compte verbal de I'ouvrage de M. Scoresby sur le Spilzberg , Vile de Maye et les mers polaires»

L'academia francaise a tenu sa stance publique annueUe, do- 35 aout,sous la pr^sidence de M. de la Place, chancelier de I'acad^mie. On a d'abord entendu le rapport de M. le secretaire perpttuel sur les concours de po^sie et d'eloquence. L'academic avait k decerner un prix ordinaire de poesie , et deux prix extraori dinaires , I'un de poesie , I'aulre d'eloquence. Le sujet du prix or- dinaii-e de poesie etait : la reslauration des lelires et des arts sous Francois I". Yingt-trois pieces ont i't6 envoyees au concours, nais, dans ancune , ce sujet int^ressant et national n'aparu trait6 assez heureusement pour obtenir le prix. L'academie a cependant distingue trois pieces , et a decide qu'elles seraicnt nommees dans I'cr- dre de leurs n"' d'enregistrement ; savoir : n" 9, qui a pour epigraphe : Charlemairne, Francois I", LouisXIFj—a' n, dont I'epigraphe est :

6ti(> ElROl'E.

£nfin Fran^'jis mujuil ; u" i5, porUiiil iiouicpigiapLe : Je- (/iraj/si exploits dc son re/^e paisible. Kile propose de nouveau cc sujet.

Lcs aulrcs concoiire ont «Ue plus heureux. Le sujet du Vevoue- menl de Malesheihes, popose pour la scconde fois , avail excite une touchante euiulutiou ; inais le merite des ouvrages n'a pas 614 en proportion de Icur nombre ; r.';cademie a vu du moins avec interet quaraatusix eoncurrens s'exercer s.ir un sujet aussi digue d'inspirer lcs muses Iranoaiscs. Dans les quarante-six pieces , une Bcule a fixd spccialeinent I'atteution de I'academie , c'est une ode, porlant pour epigraphe le passage d'Horace : JusUiin ct tenacem propositi firuni , etc. L'autcur est M. A. Gaulniier, professeur de rhetorique au college de Kevers.

Le sujet du prix extraordinaire d'eloquence consislait a determi- ner ce qu'esl le Genie poelique , el comment il sefuil reconnaitre , independammenl de la diversile des langues et des Jbrmes de la versification , ef dans tous les genres , depuis I' Epopee jtisqu'a V Apologue. Vingt-quatre discours ont iX<i soumis au jugement de racademie. Les eoncurrens avaient i iadiquer les causes qui excltent renthousiasme politique : il est a regretter qu'ils n'aient pas asscz explique combien les sentimens nobles et vertueux , que produisent les rapports de I'houinie avec la divinite, la patrie , la societe et la famille , founiissent encore plus 4 I'imagination ct a I'inspiration , que la contemplation de la nature physique. En ap- proibndissant le sujet sous ce rapport vraiment philosophique, ils auraicnt sans doute prouve que les grandes vertus , les nobles Amotions , couiptent parmi les premiers et lcs plus beaux elemens du genie poelique , et surtout que le geuie de la poesie pent beau- coup moins s'en passer que le genie des autres arts.

L'academieadecerne le prix au discours inscrit sous Ic n" 6, et dont Vautcurest INI. A. Thery, professeur de secondeau college deVersailles. . Des mentions honorables ont ete accordees aux autcurs des dis- cours u" 14, i5 et 22.

L'auteur de ce dernier est M. Bert. 11 a soutenu qu'on ne peut connaitrc le genie poetique ; qu'on peut seulement etudier les signes qui le revelent ; cepcndant il a deflni la potsie , le don de creer et de rendre sensibles, par le cbarme d'un langage consacre , lcs fictions proprcs a (^niou\oiv ct a cxaltcr en nous le sentiment du beau.

EUROPK. 667

Apics le rapporl dc M. Raynouard, on a lu le discoiiis et I'odc Couroniies. Plasleurs passages de Tun et de I'autre ont excite do vifs applaudissemens. Le discours sur feu M. de Montyon , fondateur de plusieurs piix de sciences et de vertu , a constamment interesse par la succession et le noinbre dos bonnes actions qui ont honore la vie et qui recommandent la niemoire de ce zelepliilantropc, destined sc survivre par la perpctuite de sa bienfaisance : car, en France , on no inanquera jamais ni de bonnes actions , ni d'ouvrages utiles aux mceurs a recompense!'. Les deux faits qu'on a cites comme preferes par I'academie dans le nombre de ceux qui pouvaient pretendre aus prix de vertu , ont arrachi des larmes d'attendrissement. Le premier prix a cte decerne i madeuioisclle Marie Madeleine de Courty , domestique de la dame Chartier, rue Hillerin-Bertin, i5 ; le deuxicmeprix, i M. Ant. Bonafou, remouleur, rue des Orlcvres, n" 5.

Le Programme des prix qui scront distribues dans la seance annue^e d'aout 1822 , a ete arrete ainsi : Prix d'eloquence : Elos^n de Li Sage. Prix de poesie : La reslauration des lettres et des arts sous Francois \". Les ouvrages envoyes au coucours ne seront re(^us que jusqu'au i5 mai 1S22.

Cbaque prix sera d'une medaillc d'or de la vaieur de i,5oofr.

L'academie d^cernera , en 182s, un prix consistant en une me- daille d'or de la vaieur de 1,000 fr. , a I'auteurde I'ouvrage litteraire public en entier , et pour la premiere fols , dans I'intervalle du i"' Jan- vier au 01 decembre 1821 , qui aura ete juge le plus utile aux mcBurs.

Dans la menie seance, l'academie decernera un prix consistant en une medaille d'or, de la vaieur de 1,000 fr. , pour r^compenser un acte de vertu qui aura eu lieu pendant les trois annees anterieures au i"^ juillet 1822, dans le departement de la Seine. On aura soin d'adresser, avant le iG juillet 1S22, a M. le secretaire-perp6tuel de l'academie , les preuves qui constateront I'acte de vertu.

Seance du 4 septembre. M. Boissy-d'Anglas, de l'academie des inscriptions et belles-lettres , lit une notice sur Vincent de Paule. M. Andrieux, une notice sur la vie et les ouvrages de' Collin d'llarlei'ille. M. de Lally-Tolendal, des vers sur la fete i laquelle il a assiste , le 10 aoCit-^ i Lucerne , pour I'inauguration du monument consacr^ a la memojre des officiers et soldats suisses qui ont peri le 10 aoiit et le 2 septembre 1792. -—Academic des beaux- arts. Fri.x de sculpture.— \oici Ic pro-

668 EUROPE

gramme qui avait itii doniiii par I'acadcmlc, pour im has reJief : « AUxandrt dans la ville des Oxydraques (dans I'lnde). Alexandre ctait monte le premier sur la muraille; seul, il se precipite dans une ville pleine d'ennemjs. II y avait non loin dn mur un vieiix arbre dent les branches touffues semblaient s'ttendre expres pour couvrir le Roi.

cAlcxandre, aCn de no pas Ctre enveloppe, s'appnya centre Ic tronc , qui 6tait fort gros. Deux des ennemis qui osferent s'approcher, furent re^us si vigoureusement, qu'ils tomb<:rent morts i scs pieds, lorsqu'un Indien lui lanc^a une flecbe qui I'alteignit au flanc droit. Abattu dc ce coup et perdant beaucoup de sang, il ne put tirer le dard de la plaie ; celui qui I'avait blessii accourut plein de joie pour le dti- pouiller. i)/rtz,s, des qu' Alexandre sentit meltre la main sur lui, outride I'indigniie de cet approbre, il se ranima et plongea son ipee dans le corps de son ennemi. Ces trois corps etendus autour de lui intimiderent les autres eanemis, ce qui donna i son arm6e le terns de le rejoindre et de le secourir.

L'academie a decerne le premier grand prix i M. Philippe Joseph Henry Lemaire, de Valenciennes, age de vingt-trois ans, eleve de M. Cartellier; le deuxifime grand prix , h M. Alexandre Dumont , de Paris, Sge de vingt ans, eleve de son pere et de M. Cartellier. Sociele de la morale chretienne , ay ant pour ob jet V application des preceptes dit christianisme aux relations sociales. Extrait du reglemenl de cette noufelle societe , tire de son prospectus du 20 aout dernier. "Plusieurs amis de I'humanile , convaincus que la plupart des crreurs et des vices qui retardent le regne de la justice et de la paix parmi les hommes, naissent de I'ignorance ou de Toubli des preceptes du christianisme , et d^sirant conconrir Ji rendre leur application plus g6nerale dans les diverses relations des peuples et des individus , se sont r^unis en societe, sous I'autorisatioa du gou- vernement , pour travailler d'un commun accord ^ diriger I'atten- tioa des hommes , leurs freres , sur de si grands interets. Dans I'espoir de realiser cet utile projet, ils ont arr6t6 entre eux le regle- ment suivant : Titrb \".—Bu4 de la societe. Art. 1". Le but de la sqciete est d'exposer et de rappeler sans cesse a I'esprit des hommes les preceptes du christianisme dans toute leuip purete , de leur faire remarquer I'heureusc influence que ces prfeceptes ex^rcent sur le honheur du genre bumain , et de contribuer ainsi i faire naitre ou a ranimer de plus en plus des sentimens de chaiite et d'une commune

EUnorii. 669

bi&nveillancc , si propjesii I'aire regner la pais sur la terre.— Titbk ii. Travaux de la sociile. Art. a. Lestravauxdela societu consistent t i recueillir les leaseignemens qu'elle pourrase procurer 6ur les^ta- blissemens, les travauxetles productions en tous genres, qui, dans lei divers pays et sous des formes diverses , ont pour objet I'amelioration de I'etat moral et physique de Thomme; i publier un ouvrage periodique specialement consacr6 k faire remarquer la salutaire influence des preceptes du cbristianisme sur les institutions, la civi- lisation et la prosperite des peuples, et k faire connaitre tout ce qui, dans les documens recueillis par la society , paraitra utile et digne d'imitation; 3" la soci6t6 publiera aussi, suivant que ses facultis pourront le lui permettre , d'autres ecrits destines k convaincre les bommes et surtout la generation qui s'eleve , qu'il ne peut y avoir de bonbeur reel et durable que dans I'observatioa des preceptes de rSvangile. Dans les diverses publications de la society, on evitera scrupuleusement d'elever aucune discussion sur les points qui divisent les differentes branches de la famille chrttienne. Titbb hi. Organisation. Art. 4. Le nombre des societairesest indetermio^t toute personne qui, p6netree des principes de la societe, desirera concourir au but qu'elle se propose ,y sera admissible, en se conformant aux r6glemens etablis. Art. S. La societe aura des membres cor- respondans et strangers. Titbb iv. Administration. Art. g. A I'effet de pourvoir aux diverses depenses qu'aura i faire la societe, il est arrele que, pour en etre membre , on versera annuellement dans la caisse de I'administration une somme dont le minimum sera de aS fr. Dans cette somme se trouvera compris I'abonnement k la feuille periodique que la societe se propose de publier. Toute autre offrande presentee a la societe sera egalement reoue avec reconnaissance. La society se reserve d'inscrire au nombre de ses membres toute personne qui cooperera d'une maniere active aux progriL'S de s^s travaux. »

On vpit que tout ce qui pourrait faire naitre des discussions fS- cbeuses et absolument contraires au but de la societe , devra etre banai de ses publications et de tous ses travaux. Une commission nommee dans son sein veillera a la stride observation de cette regie. Mais, tn etfitant ce, qu'un apOtre appelle les questions inutiles, sachant qu'elles sonl une source de contestations (II Tim. 2, 23),

670 lilUOPK.

on insistera d'aulant plus sur les sublimes preccptes dft la morale cbretienne, sur les v^rites essentiellcs qui leur servent de base ou d'appui, et sur lesquelles il ne peut y avoir dissentiment. Persua- des qu'un tel projet ne peut manquer dc trouver des approbateurs , et plcins de confiance dans la Providence divine qui se plait h benir ce qui est con^u dans des vues pieuses et charitables , les fon- datcurs de la society esperent que leur entreprisc sera couronnee de succes , et ils invitent toutc personne qui Ibrme avec eux dca vcBux sinctres pour le bien des honimes ses iVeres, it y prendre part rt i faire connaitre 4 cet effet ses intentions a I'un des soussignes incmbres du comite provisoire , nolamnient a M. Delacroix, notaire royal, rue du Mail, n" i5, et k MM. de la Rocliefoucault-Jjinn- co«rt, president ; Dec^erando , c\i\-<\ii-&ac Ferou , n" 7; Goepp (J. J.), rue Sainte-Croix-de-la- Bretonneric , n" 02; T.ahoide ( Alexandre ), rue d'Artois, n" 2S; Lasleyrie. , rue du Bac , n" 58; Spurzhe'im , rue Neuve-Saint-Augustin , 3 ; S/aiil-Holsiein , Irue de Buurbon , 76 ; Stopfer, rue des Deux-Ecus , n" 4 > Tiirdheim , r. d'Anjou , fanbourg Saint-Honore , n" i3,- lyilrlz (J. G.}, rue de Bourbon, n" 17; IP'Ulm , secretaire, boulevardPoissonniere, i5 ; Coqiierel , secretaire adjoint, r. Hautefeuille , n" i.

Nolo. Les lettres et paquets destines pour la Socicle de la morale chretienne, etc., serontprovisoirement adressesi la maison Tredtiel KT WuRTZ, rue de Bourbon , n" 17. On est prie de les affranchir.

Bolanique. Obseri-alions sur la prelendue decouvertefaitepar M. Gimbernat, dune substance q nil apjielle zoogene , extrailes d'une note adressee a la Revue par la Societe Linncenne de Paris. « Plusieurs reeueils periodiques , et quelques-uns meme de ceux qui sont consacres aux sciences , tant en France qu'i I'etranger, ont repete dernierement, Ji I'envi les uns des autres , qu'un naturaliste espagnol , M. Gimbernat , venait de decouvrir , dans les eaux ther- males de. Baden, en Allemagne, etd'Iscbia, pri;s de Naples, une substance organique nouvelle , qu'il a nomn>ee zoogene ou zoagene. Cette singuliere substance ressemble, dit-on, 4 de la cbair liuniaine rccouverte de son epiderme. Soumise a la distillation, clle fournit les produits ordinaires des niatieres aniinalcs ; bouillie , on en ob- tient une gelatine propre au collage du papier. Cclte substance ,

ninori:. C7i

prisent<ie cotnme nouvelle, est connue dcpuis pres de soiiante- quinze ans ; elle a ite.decrite , en ija?., par Springsleld (i), qui venait de la ti-oiiver dans les caax chaudes de Carlsbad , en IJohi^mo; clle a etK, quelqiiesannees apros, Ic sujet do ruerrioires I'ort bieufaits, par Schrank (2) et Scherer (5), qui la nominerent conferva thernia- Us. Les botanistes I'appellent aujoiird'hui tremella reticulata. De Saussure I'aramassee dans les bainsd'Aix, en Savoie ; DecandoUe, dans ceux de Plombieres. D'autres observateurs , bien anterieure- nient i I'an 1800, aux eaux Ihennales de Toeplitz, en Bohfime , de Bareges et de Dax, aux pieds des Pyrenees , et de Cliaudes-Aigues , departement duCantal, oil elle a et6 trouvee unie .'i va fucus d'un vert eclatant. Moi-memc , je I'ai trouvee aux eaux chaudes d'ls- chia , en 1S02 , a celles de Mont6catini , en Toscane, et de Lucques , en i8o5.

« Ce n'est pas la premiere fois que des conferves , des tremelles, des ulves , etc. , ont ete prises pour des substances nouvelles ; on se rappelle encore le pretendu papier natural, decouvert, en 17G3 , par Coltellini , aux environs de I'ancienne ville etrusque de Cortona, et qui n'etait, comme I'a prouve Strange (4) , que la conferee com- mune, conferva rivularis , rassemblee en masses plus ou moins con- siderables. La nature singuliere , quelquefois memc equi^joque de ces cryptogamcs , leurs formes extremement varices , leur couleur

(1) De planlci quddam , qucc prope scaturi^^inem therniarum Ca- tolinarum crescit et tremella thermalis gelatmosa reticulata y etc., dicitur. Mem. insert; dans les Acles de V academic de Berlin , iy5a, pag. 102-108.

(2) Beschreibung einer JVas&erseide von moll's oherdeuische hey- trage, pag. iSo-iSj.

(5) Observaiiones el experimenia super materia viridi thermaruvi Carolinarum el Tceplizentium , regni Bohe/nice, inserees dans les Collactanea de Jacquin , vol. I", pag. 1-1 -i85. (4) Lettera sopra Vorigine della carta nalurale di Cortona , corre- data di varie altre osservazioni relative agli usi e prerogative della conferva Pllnii el allre piante congeneri. Pisa, 1764, in-8". On en trouve encore une traduction franraise dans le Journal de physique, torn. I", pag. 45 ; et une latine dans les Philosophical transactions; Vol LIX , pag. 5o.

672 EUIVOPE.

ct leur consistance gelatineusc , inolle , presque ctiarniie , p«uvent tromper des yeux inexp^timeatcs ; mail, pcur I'observateur attcntii', I'erreur ne peut diirer. II peut bien un moment , avec quetques naturalistes estimables, tels que Girod-Chantrans et Vaucher, les consid^rer comme des animaux, i cause de leur niouvement d'ut'f tabilite et d'oscillation , i la verity tres-faible. Mais , en reflechissantt il les rend au rugne T6g6tal , auquel elles servent de premier anneau. EUes se reproduisent k la maniere des polypes amorphes , el c'est en automne qu'elles jettent leurs bourgeons s^miniformes. Les mouve- tnens d'oscillation qui les caracterisent me paraissent d^pendre d'une simple action hygromitrique , comme leur irritability se rap- porte k celle des elamines de I'epine vinette ( berberis vulgaris) , de la parnassie ( qui croit 6galement dans les marais et sur leg coteaux crayeux et arides , quoique Linne la designe uniquement par le nom de pamassia palustris , etc.), k celle des folioles de la sensitive ( mimosa sensiliva ), du sainfoin originaire des bords du Gange ( hedysaruDi Gyrans"), etc. , ou bien encore 4 celle qu'on observe dans le p6tale du Laperia racemosa de Gavanilles , qui forme la labelle ou tablier de cetle fleur irreguliere et d'un rouge pMe. »

Thiebagt OB Bebmeaud.

Arlsindustrieh. Coutellerie. Acier de damas- Un de nos couteliers les plus habiles et les plus industrieux , Sir Henri, de Besan^on , etant parvenu k fabriquer I'acier, dit de damas, bien superieur i celui de Perse et de Syrie, I'emploic maintenant pour faire des instrumens de chirurgie , qui I'emportent sur ceux qu'on construit avec I'acier fondu anglais. L'extrfime durete ct la grande clasticite de cc damas le rendent particulierement trc»- precieuz pour la fabrication des instrumens , qui exigent un tran- chant tres-acer6, tels que les rasoirs, les bistouris , les lancettes , les instrumens 4 cataracte , etc, , qui s'emoussent si promptemeot , surtout lorsqu'on s'en sert pour couper ou percer des corps un peu r^sistans. Nous avons vu des lancettes de Sir Henry , traverser avec la plus grande facilite des morceaux de parchemin et des lamet de plomb , et meme des planches , sans rien perdre de leur 111 , tandis que de tres-bonnes lancettes ordinaires se brisaient ou s'e- moussaient i ne plus servir , lorsqu'on les soumettait aux m^mes experiences. Sir Henry fabrique en outre , avec son damas , tous les autres objets de coutellerie, tels que canifs, ciseauX) etc., avec

EUROPE. C73

lesquels on peut couper I'os , I'ivoire , et mfime le fer , sans qu'ils s'emoussent. Nous avons remarque particuli^rement des lames de sabre et d'autrcs armes , dont la qualite nous a paru bien supe- rietjre it celle des armes turques, qu'elles entament sans etre ebr6- chees. La Societe d' encouragement , le Noufeau. Journal de medc e:«e ( cahier de juillet), et plusieurs autres gazettes, ont donn6 les plus grands eloges i ces nouveaux et utiles produits de I'industrie fran^aise. Sir Henry a ses ateliers place de I'^cole - de - Medecine, a taris.

Institution de itf. Morin , rue Louis-le-Grand. Enseignement du latin par la methode de M. 1. J. Ordinaieb. {.F'oyez Tom. V III, p. 554.) Nous avons fait connaitre, page 23o de ce volume, le point au- quel les eleves de M. Morin , instruits par cette m6thode , sous la direction de M. Ordinaire , etaient parvenus , le 19 juillet dernier , apres trente-cinq jours detravail.Depuis cette 6ppque jusqu'au 24sep- tembre, malgre le derangement cause par les vacances, les Aleves du groupe le plus avance ont appris plus de 1800 mots ; savoir : le reste des adjectifs de VEpitome historice sacrce , avec leurs desinences adverbiales; 2" le tableau des noms de nombre latins , ordinaux et cardlnaux , ainsi que les adjectifs et ies adverbes qui en sent deri- ves^ Ce tableau est tellement familier aux enfans , qu'ils traduisent sur-le-cliamp , sans hesiter , les nolnbres les plus compliqu6s , ex- prim6s en latin ou en francais ; chose qu'aucun el6ve de rhetorique, et que m6me peu de professeurs seraient en etat de faire; tous les pronoms ; les prepositions a-zec leurs complemens ; les verbes r6guliers , irreguliers et deponens de la premiere et de la deuxieme conjugaisons, Ces 1000 mots, ajoutes aux 1200 que les eleves savaient 6 I'epoque du 19 juillet, forment un total de 2600 radicaux latins, auxquels ils appliquent toutes les desinences relatives k chacun d'eux. De plus , ils traduisent immediatement , avec la plus grande facilite , les phrases latines formees de ces mots , et dont I'explication n'exige pas la connaissance des r6gles de la syntaxe ; ils en font aussi I'analyse avec une regularite parfaite. Mais, ce qui est trfes-remar- quable , c'est qu'ils mettent aussi facilement des phrases fran9aises en latin , sans autre secours que leur memoire et leur jugement , qui sont egalement developpes par ces exercices.

Tels sont les resultats que M. Ordinaire a obtenus en trois mois ot dcmi, avec des eltves frcquemment distraits de leurs (itudes ;

Tome xi. AS

67A EUROPE.

risultats que rhacun pent verifier soi-mCnie , coiumc nous I'avou!) fait avoc le plus vil'inlerGt.

Lc succ^s tonjours croissant de cctte classe latine a d^lcrminti M. Morin a joindre i son etablissemcnt une maison contiguii , qui lui donne les moyensde recevoir soixantc-dix pensionnaires de plus. Jj'expcrience a prouve quo plus le nombre d'elcves est considerable, plus les progr("!s sont rapldes , parce qu'alors il est plus facile de classer les enfans suivant leur degre de connaissances. Un profes- seur , envoye de Bruxelles, va s'etablir cbez M. Morin , pour mieux suivre les proced^s de M. Ordinaire , qu'il doit appliqucr ensuite dans la capitale de la Belgique.

Esperons qiie I'universite de France ne se laisscra pas pr6venir par les strangers , et qu'elle fera jouir promptement la jeunesse conCee ii ses soins des avantages de la nouvelle methode, en I'introduisant dans les classes inferieures des colleges royaux. Get cspoir est d'autant plus fonde, que les membres du corps enseignant, qui onl etudie I'ou- vrage ou assiste auxlecons do M. le recteurde Besan^on, n'ont trouve aucune objection i falre centre sam6tbode, et que mfime ilssont d'ac- cord avec tons ceux qui ont rtflicbi sur ce sujet , pour la regarder comme infiniment superieure h la methode actuelle , dont les vices font gemir chaque jour les pferes de famille et les amis de la jeunesse.

^rcheologie, Toile de niomie, portant des caracteres igyptiens qui paraissent etre la niarquede I'etoffe. On a trouve, sous la tetc d'une momie apportee i Nantes par M. Gailllaud, un linge avec des franges , plisse en plusieurs doubles , et portant une marque tracee en noir. Le frfere de ce voyageur m'a envoye la toile dans laquclle ce linge 6tait de- pose ; j'ai trouve d'abord , d'un c6t6, les caracteres que Ton avait an- nonces ; mais, aprfes avoir developpe la bande avec precaution, j'ai vu, d I'autre bout, une seconde marque analogue 6 la premiere. Ces mar- ques sont i I'encre noire ; I'une est a I'extremitc gauche de la bande , I'autre i la droile ; la premiere a dix caractires ; la seconde en aonze, cten outre un oiseau dont la masse est reconnaissable,etnonrespece, mais quiressemble plus h I'ibis qu'i tout autre. Malheureusement,deux des caractferes sont effaces dans I'inscription de gauche, et, dans cellc de droite,plusieurs signcs sont incomplets. La difficuUe qu'a eue I'ecrivain d'appuyer la plume ou le pinceau sur la toile, est la principale cause de celle que Ton eprouve aujourd'hui pour lire les caracteres. Cependant jecrois avoir bien rcconnu que ceux qui sont A la droite, sont des hie-

EUIIOPE, 675

roglyphes , et les autres des signes analogues ii ccux de la pierre de rosette. En effet, les premiers sont places I'un au-dessus de I'autre , ce qui est particulier aux hi(iroglyphes, ils sont plus grands que les autres signes ; enfin , la plupart sont tout-i-fait etrangcrs aux formes des lettres de la pierre. En outre, la presence de la figure d'oiseau qui est a la droite de la bande , est un indice de la nature des signes qui sont de ce cote. Je trouve, a la fin de la marque de gauche, trois unites , comme si on eut voulu numeroter ce linge de la marque 3. Les lettres qui precedent ce 3 , en lisantde droite a gauche, et qu'ilest possible de dechiffrer , sontau nombre de cinq ou six ; onne peut que conjecturer que ces lettres sont des iultiales , ou bien les parties d'un nom propre. La piece d'etoffc a 2"°, 70 de loug(pres de 9 pieds),sans les franges, et vingt-deux centimetres de largeur (Spouces) ; elle etait sans doute plus large originairement, puisqu'elle n'est pas bordee par en bas, o'est-i-dire du cOte oppos6 aux deux marques. C'etaitouune ceinture ou un voile, comme on en Toit dans les peintures des hy- pogees, et comme les Egyptiennes en portent encore aujourd'hui ; si Ton a trouve ce niorceau sous la tete de la momie , c'est sans doute qu'il avail 6te place pour remplir un vide, ainsi que les embaumeurs avaient coutume de le faire. Je ne parle pas des autres curiosit6s trouvees sous la momie , par les commissaires de la sociele de Nantes qui ont ete charges de Touvrir, telles que plusieurs meches de che- veux blancs, soigueuscment conservees dans des sachets de toile, etc.

JoMABD.

Nomination.— M. Alphonse de Caillieux , i'un des collaborateurs du Voyage piliuresque dans Vancienne France^ vient d'etre nomme secretaire general du Musee royal, en remplacement de M. de Se- nonnes , nomme secretaire general du ministere de la maison du roi.

Publications nouvelles et prochaincs.— Pastes unu-ersels, ou Ta- hleauxhisloriques,chronologiqueselgeographiqaes, par M. Buret de LoNGCHAMPS. Les deux premieres livraisons sont en vente. Depuis que nous avons annoncc cet important ouvrage (coy. ci-dessus, p. 384), les ministres de Tintirieur et de la guerre ont souscrit pour un cer- tain nombre d'exemplaires. Pour la garantie des souscripteurs , les editeurs, MM. Dondey-Dupri; pere et fils, annoncent que I'ouvrage esttermine, ct qu'ils Ic livrcnt, soil coniplct ct demi-relie, au pnx

676 ELROPE.

dc 126 fr. , soil par livraisons brochecs (an nombre de six , sc publlant de mois en mois ) , k raisoa de 20 fr. la livraison brochee.

Hisloire de France, par M. de Segur. Get ouvrage , qui fait suite k I'idition in-iS du m6me autcur, annoncee dans la Revue ( J^qy. Tom. IX, p. 164 ), aura de dix h douze volumes aussi in-iS, avec cartes, plans, etc. , comme ceux qui oat ete publics pr6cedem- ment chez Eymery , libraire , rue Mazarine , n" 3o. L'auteur s'est determine k livrer d'abord i rimpression la premiere epoque de I'histoire de France , qui s'etend jusqu'a Ilugues-Capet. Celte pre- miere epoque comprend qua tre volumes, quisont les 26', 2-'', 2S''et 29' de VHistoire uniuerselle , et dont le prix est de S fr. Une edition :>z-8° du meme ouvrage, 6galement annoncee dans la Revue ( Tom. X, p. 4>9)» se continue avec la m6me activite, cbez le mfime libraire; elle sera composee de c?;x volumes , dont le prix, avec I'atlas, sera de 80 fr. 11 en a dej4 paru cinq, qui contiennent I'bistoire des peuplcs d'Egypte, d'Asie, de Perse, de la Grece, de Sicile, de Carthage, des Juifs et dcs Remains. Nous en rendrons compte avec soin dans la section des Analyses.

Histoire civile et jwlitique de la nation espagnole , depuis les tems les plus recul6s jusqu'ii nos jours ; ecrite d'abord en espagnol et d6diee au congres souverain des Cort«;s,parua descendant de Pelage; traduction fran^aise faite par le mCme, et dediee aux courageux de- fenseurs de la liberte des nations. La souscription est cgalement ou- verte pour I'ouvrage original et pour la traduction anglaise, faite par l'auteur. L'ouvrage entier formera buit volumes grand in-8°. Prix dans chaque langue , 48 fr. H n'est necessaire d'avancer que 6 f. pour chaque volume, afin de couvriri mesure les frais de I'impression. Les non souscripteurs paieront k raison de 7 fr. le volume. S'adresser ^ Paris, chez l'auteur, rue de Richelieu, aS, hotel de Bretagne ; Galignanl , libraire , rue Vivienne , n" 18; 4 Paris , Londres et Stras- bourg, chez Treuttel et Wilrtz; k Madrid , chez Perez, rue de las Carretas.

Archeologiefrangaise J ou Vocabulaire de mots anciens tombes cn desuetude , et qu'il serait bon de restituer au langage moderne ; accompagn6 d'exemples tires des ecrivains fran^ais des xn« , xiii« , xiv«, xv'' et xvi" sieclcs, manuscrits ou imprimes ; par CharleaFov- GEKs , de I'Institut de France , acaden^ic royale dcs inscriptions et belles-lettres. « J'ose assurer, dit M. Pougcns dans son prospectus, quo

liUROI'Ji:. 677

plusicurs des mots que je cherchc a restituer au langagc moderne ne contribueront pas mediocrement a multiplier ces nuances aussi pr6- cieuses k I'eloquence qu'i la poesie, et qui constituent, lorsqu'elles sont renfermees dans de justes limites, la veritable richesse des langues. Par exemple , le verbe assavourer, que je retrouve dans Willaume-li-Vi- niers (vqyez Recueil de poetes manuscrits , avant i3oo, dans Per- cefojestj etc.), est plus rapide et plus expressif que donner de la saveur : conjlagration et embrasement ne sont pas exactement la meme chose : desanime et inanime sont loin d'etre synonymes : dt- seslimer n'est pas mepriser; desembellir n'est point enlaidir; desaimer n'est point hair, c'est cesser d'aimer ; deuouloir, cesser de vouloir : eguanimite est plus rapide qxi'egalite d'ame, etc.

0 Un grand nombre de ces memes mots, si injustement proscrits, en completent aussi plusieurs autres. Par exemple, on se sert du compose inadi^ertance ,' et nous avons perdu le simple, adi- erlance , employe par Eusiache Deschamps, Amyot, Montaigne, etc. On ne dit plus angoisserj et nous avons le substantif angoisse : on connait la medisance, et nous avons perdu le mot biendisance : nous avons aguerrir, anoblir, asserfir, capliver, favoriser ; et nous n'avons plus desaguerrir , disanoblir , disasservir , decapliver , defavoriser : les verbes devorer, engloutir, envahir, ont perdu leurs substantifs de- voraieur, engloutisseur, enuahisseur : enfin, nous voyons des hommes etranges , des choses elranges, et Ton ne dit plus, comme Montaigne, etrangete: les adjectifs aigu, ue, aqueux, euse, ont perdu leurs subs- tantifs acuile, aguosite, etc. ; et cependant plusieurs de nos ecrivains modernes ont fait un heureux usage de ces divers mots , quoiqu'ils ne se trouvent point dans le dictionnaire de TAcadtmie , edition de 1762 , seule autorite legale. Je n'ai point , au reste, accompagne mes definitions de phrases de pure invention : j'ai cite les textes meme des ouvrages , soit manuscrits , soit imprimis , en suivant , autant qu'il m'a ete possible , I'ordre des siecles. A la suite des exemples ti- res des anciens tcrivains fran^ais, j'ai place divers passages anglais, italiens, espagnols , dans lesquels le mot oublie par nous, et le plus souvent d'origine franc^aise , se trouve conserve par les ecrivains de ces troislangues, sauf les modifications et les desinences propresichaque idiome. On trouvera, a la fin dejce vocabulaire,une bibliographie exactc des ouvrages imprimes ou manuscrits d'oii Ton a tire chacun des tcrmcs qui Ic composcnt , ainsi que les divers exemples dont ils sent

/)78 ELilVOPE.

accompagn^s. » L' Archeologiefrangaise, qu'il ne faut pas confondic avcc le Tresor des origines et dictionnaire grammatical raisonne de la lavguefrancaise, formera trois volumes inS", imprimes en caraclores neufs, par M. Firmin Didot. Le prix do chaque Tolume brochti sera, pour Ics souscripteurs , de 7 fr. en papier fin. Le premier volume pa- raitra dans le courant d'octobre iSsi. II suffit de se faire inscrirc i Paris, chez Th. Dcsoi'r, libraire , rue Christine , u" 2; i Liege, chez J. F. Dcsoiir, imprimeur-libraire.

Les Lellres de Soslhene a Sophie, du nieme auteur, paraitront en un volume in-18 chez Ics memes libraires , en meme tems que y Archeologie frangaise.

Thkatres. Second Thedlre-Franfuis. Jean sans peur, tra- gedie en cinq actes, par M. Liadiebes ( i5 septembre }. Cettc pi6ce a obtenu un succes brillant et merite. Le sujet est le complot forme entre la reiue Isabeau de Baviere , le due de Bourgogne (Jean sans peur ) et I'ambassadeur anglais , pour faire signer au malheurcux Charles VI I'acte par lequel 11 desh6rite ses propres enfans , et livre sa couronne a Henri V, roi d'Angleterre. La decouverte de ce com- plot forme le noeud de la tragedie , dont la catastrophe est I'assas- sinat du due d'Orleans , par ordre du due de Bourgogne.

L'exposition est remarquable ; elle ofTre un tableau historique fort bien trace , et le meme elogc doit s'appliquer i la totalite du premier acte ; le second laisse a d^sirer plus de liaison entre les scenes ; le troisiime est d'un eOet penible, qui rtsulte de I'infSme trahison de Jean sans peur , livrant son pays aux Anglais qu'il vient de com- battre ; le qualrieme et le cinquieme actes sont d'une grande beaute.

L'auteur , qui a trace avec beaucoup de force et de verite le ca- ractere du due de Bourgogne, s'est ecarte de I'histoire, d'une raaniere heureuse, selon nous, pour faire du due d'Orleans le modele dcs che- valiers fran^ais et I'un des personnages les plus inliressans qui soient au theatre. M. Liadicres a pu , sans invraiseniblance, attribuer dcs actions genereuses h un prince qui dechira le traite au moycn duqucl il pouvait pcrdre Jean sans peur, son ennemi. Le due de Bourbon, vieillard toujours sage, toujours calme, produit un bel eflet entre les deux personnages dont nous venons dc parler. Lc style est d'une elegance soulenuc , et la piece offre un Ires-

EUROPE. 679

grand nombre de belles pens6es exprimdes en beaux vers. Enfin , ce qui est d'un heureux augure pour I'avenir du jeuae poete , sa der- niire tragidie est tres-superieure a Conradin et Frediric , piece que distiuguent deji une action habilement conduite et un style natural et correct. Ces deux ouvrages assurent incontestablement a M. Lia- dieres uue place tr6s-honorable parmi les poetes trugiques de notre epoque.

Opera-Comique. UHabil retourne , opera en un acte , pa- roles de MM. *** , muslque de M. Maresse ( 1 1 septembre). Cette pifece n'a eu qu'un petit nombre de representations ; Ik muslque of- frait|plusieurs morceaux agreables , qui n'ont pu soutenirun po6me au-dessous du mediocre.

NiScROLOGiE. Madame Lerehours. Marie Angelique Anel , veuve de M. Lerebours , ancien contr6leur general des postes , 4 Paris , est morte , le 3 aout 1821, 4 I'Arche , pres du Mans , i I'age de quatre-vingt-dix ans. G'est h I'ardeur avec laquelle elle avail adopteles principes de J. -J. -Rousseau , que nous devons I'v^cfs aux meres qui veulent nourrir leurs enfans, ouvrage souvent reimprim^, et toujours sans nom d'auteur. Ce qui prouve d'autant mieux la modestiedemadame Lerebours , c'est que ce livreeut la plusgrande vogue, k I'epoque de sa publication, et obtint Tapprobation de presque tous les medecins , particulierement celle du savant Tissot. Les connaissances de madame Lerebours, en litterature et en phi- losophie , Tout fait rechercber des personnes les plus celtibres de son terns; et ce n'cst pas un de ses titres les moins honorables, d'a- voir ete I'amie de d'Alembert, de Dupaty, de Condorcet, deDupont de Nemours, et de I'infortune Roucher. Nous ajouterons que ma- dame Lerebours cultivalt aussi la peinture avec succfes ; plusieurs de ses portraits out ete pris pour des Rembrandt. M. Victor Lerebours, un de nos jeunes acteurs tragiques qui donne le plus d'esperances, est son petit-Gls. M,

FIN DU ONZliME VOtUME.

TABLE DES ARTICLES

CONTENUS

DANS LE TRENTE-TROISIEME CAHIER, SEPTEMBRE 1821.

I. MEMOIRES, NOTICES ET MELANGES.

t. Observations sur les Revues soientifiques et littiraires

anglaises. Babey. pag. 449

a. Sur les avantages de I'instructioB chcz les Grecs mo-

dernes. Ch. Dupin. 453

3. Discours prononce (en 1809) dans I'Acadeinie lonienne.

Le meme. 4^6

II. ANALYSES D'OUVRAGES.

4. Histoire de I'astronomie moderne, par Delambre. Ferry. 474

5. De I'esprit des institutions politiques ,, par J. A. F. Mas-

sabian. Dupin aine. 489

6. Des instituts d'Hofwyl , par L. de V. Stapfer. 493

7. Compte rendu des bonifications faites aux domaines du

marquis de Stafibrd, par J. Loch. De Sisjtiondi. 5iS

8. Galerie i'rancaise. JVilliam. 534

9. CEuvres completes de madame de Stael. Annie. 54o

III. BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.

Annonces de 86 ouvrages , fran9ais et Strangers. 554

IV. NOUVELLES SCIENTIFIQUES ET LITTERAIRES.

AMiaiQxiE.— Iles-Arctiques. Etats-Unis. 620

AsiB. Indes orientales. 6"

OciSAwiQnE. Nouvelle-HoUande. Ibid.

Afhiqce. Nubie. 62' EcnopE. Iles-Britanniqucs. Russie.— Siifede. Danemarck.

Allem.ngiie. Suisse. Italic. Tiirquie. Espagn' _

Pays-Bas France. Paris.

TABLE

ANALVTIQUE ET ALPHABETIQUE

DES MATIERES

DU ONZlfeME VOLUME

DE LA REVUE ENGYCLOPEDIQUE.

Jl'lLLET, AOLT, SEPTEMBRE 182I (*).

On a reiini aux qualre mots indicatifs des quatbe chasdes divisions dc ce Rccueil :

I. MEMOIRES, NOTICES ET M:1BLANGES;

II. ANALYSES ET EXTRAITS D'OUVRAGES CHOISISj

III. RULLETIN RIRLIOGRAPIIIQUE;

IV. NOUVELLESvSCIENTIFlQUES ET LITTliRAIRES ;

le detail et le renvoi des articles qui s'y rappbrtcnt; puis, on a caracte- rise CCS articles , <i la suite des noms de leurs auteurs , par I'une des quatre abreviations ci-apres : M. (meuoires et kotices); A. (analyses) ; R. (bulletin BiBLioGRAPHiQUE ) ; N. (nouvelles LiTTERAiHES ). La designa- tion C , apres les noms propres , indique les collaborateurs dc la Revue , lorsqu'il s'agit des articles qu'ils ont fournis.

All lieu de comprendre, sous la denomination generale sciekces et arts (commc dans nos quatre tables des matieres de I'annee 1819), I'lndication des diirercntcs sciences dont tzaite ce volume, on a cru devoir, pourrondrc les recherches plus I'aciles , et pour mieux caracteriscr le but philosopliiqno de la Rei'ue £^ncyclopedique , ouvrir un compte particulier et special , en lettres capitales , non sculement a chacune des branches des connaissanccs liumaines, agriculture, anatomie, etc. ; a chacun des elcmcns essentlcls dc la civilisation et des moyens principaux de communication entre les hommes: academies et societSs savanies: dictiohnaires; eivseicnement mutuel; ikstruc- TiON ruBLiQUE ; jouRNAUx; theatres, etc.; mais encore a chacun des pays dont il est fait mention dans ce Recueil : de maniere qu'on puisserapprocher et comparer tour i tour, soit I'etal des sciences el des elcmens de la civili- sation dans chaque pays , soit les nations elles-memes, sous les difftrens rapports sous lesquels on a eu I'occasion de les considcrer.

J\cADEMiE royale dc Londres , 206. des sciences de Pctersbourg , i56. des sciences de Stockholm , 4i3.

des sciences usurilcs d'Erfurth ,

414. des sciences dc Bruxelles, 101.

archeologique d'llerculanum ;

(*) On sonscrit, poiir cc noiivcau Recueii. scientifiqiie et LiTxinAiRE, ilont il parait un caliier de doazc fcuilles d'impression , tous )es mois , au Bureau cknthal p'AB.)sNEnr.NT . me d'Eafer-Saint-Micliel , numcro 18; chez Arthus Hertrand, rue HriUlcfeuillc, n. 33 , et chcz K.VMEKV , lihrairc , rue Mazarine , n. 3o. Piix de la soiiscriplion ; a P.iris , 42 fr. pour un an; Jans Us dt'iiartcnuiu , iS li.; it IV. Jaui I'l trau^ir.

TABLE ANALYTIQUE

des sciences ; des l)e»ux-arts de

Naples, 645. —de Turin, 421. —des beaux-arts, de Milan , 645. de I'histoire d'Espagne , 6tablie k

Madrid, 368.

des sciences, de Lisbonne, 424- Z6landaise des sciences, 653.

des sciences, de Lyon, 659.

des sciences, de Marseille , 65f). des sciences, de Toulouse ,661. des sciences, d'Amiens, 657. des sciences, de Rouen, 164. —des sciences, de Paris, 221,429,

663.

frangaise , 2 25 , 43o , 665.

des inscriptions et belles-lettres ,

224 , 43i.

des beaux-arts, de Paris, 436, 667. {Foj. ausfi le mot Sociiste )

Acierde Damas, de I'invention de M.

Sirhenry, 672. Actes secrets de I'histoire de Gus-

tave III, 209. Administration, 68, 252. Aerolitbe reniarquable tombe dans la

commune de Juvinas (Ardeche) ,

426. Afbiqce ( Recherches geographiques

sur I'intirieur de 1') par Walke-

naer , i85. Agier. ?^oj'. Prophstes. Agnes de France , par mad. Simons-

Candeille , 394. Agriculture, 42j 206, 227, 617. {T'oy.

aussile nioticononiE buhale.) fran?aise ( Annales de 1' ) par Tes-

sier et Rose, 617.

AlGNAN, G. A. ,325.

Alfieri ( Sur le merite tragique d' ) ,

par Marr6, 366. Allemagne, i3i , 143, 209, 358, 4i3,

565,635. AUiage de Pacier avec I'argent et le

platine, 2o5. Alpenrosen, ein Schweitzer Taschen-

buch , 574. Alvin , Guillaume premier , tragedie,

i63. Ame (De 1') Voy. Opoix Analyses ( II ) d'ouvrages anglais :

Principes de la science morale et

politique, par A. Ferguson ( Tail-

landicrl , 289.— Philibcrt, roman

poeliquo, par Grattan (L. S. R.) . 341. Compte rendu des bonifica- tions faites aux domaines du mar- quis dc Stafford , par J. Locb (J. G, L. de Sismondi) , 5i8.

d'ouvrages des Etats-Unis : 7'he first annual report of the mana- gers of the society for the preven- tion of pauperism. 'Vhe second id. (Lall'on de Ladiibat) , 68.

d'ouvrages frangais : Traite com- plet de mecanique appliquee aux arts , par Borgnis (Le Normand) , 42. Observations sur plusieurs points importans de notre legisla- tion criminelle , par Dupin ( Lan- juinais) , 60. Hist, de I'assemblee constituante , par Gh. Lacretelle (A. Mabul), 89. Histoirc de la vie et des ouvragcs de J. J, Rousseau (Depping) , 102. Meme ouvrage ( Leon Tbiesse ) , 1 1 1 . Memoire sur la digue de Gherbourg, par Ga- chiu (Gautticr), 280. Histoirc ge- neralc de France, par Dufau (M.J, 296. Memoires bistoriques sur le royaume de Naples , par le comte Orloff (Salfi) , 3o6. Bio- graphie nouv. des contemporains , par Arnault, etc. (Aignan), 325. Voyage dans la Giece, par Pouque- ville (GavedellGeanny),35i Hist, de I'astronomie moderne , par De- lambre , (Ferry) , 474- ~De I'esprit des institutions politiques, parMas- sabiau ( Dupin , avocat ) , 489. Des instituts d'Hofwyl , etc. (Stapfer) , 493. Galerie f'ranc^aise (William) , 534. CEuvres compl. de mad. de Stael (Annee) , 54o.

d'ouvrages italiens : Dell' Istoria d' Italia antica e moderna (SalfiJ , 76.

Anatomic de I'bomme , par Bcclard et Gloquet , 442. /

Angleterbe. / oy. Gh.-Rretagne,

Annales du salon de Gand , 162.

Annee , G. A. , 54o.

Annuaire historique universel, par Lesur, 585.

necrologiquc , par A. Mabul , 608.

Antiquites, 193, 194, 216, 218, 397, 398 , 399 , 4o4 . 611,612. ( F'oyex, aussi le mot Arch£oiogie.)

DES MATIERES.

(Colleclion d' ) du prince d'lsetn- bourg, 63-.

Aiatuset Nicocles aux enfcrs, par Cli. d'Outrepont , 385.

ARCntOLOCIE , 29, 2l4> 2^4) 45i) Sjo,

607, 674. fran(;-aise, par Ch. Pougens, 676. Arithmetiqde, 170, 567. Ahmenie, 186.

Art MiLiTiiRE , i55, 602, 653. vSteeinaire , l52.

M^CANIQUES , 4") '71) 4^6, 592, 639,

672. Atr.imfete , AppeJ aux Grecs , 592. Asiatic Researches, Vol. XIII , 55i. Assemblee constituante ( Histoire de

1') par Ch. Lacretelle, A. 89. Astragalus balticus , plante cultivec

en Sufede , et que Ton croit excel-

Icnte pour remjjlacer le cafe, 634.

ASTROKOMIE , 201 , 2o4 . 4/4 > 562,645.

niodernc (Histoire de 1') , par De-

lambre , A. 474- Ath^nee de Brescia ,212.

de Madrid , 424- Aulel antique decouvert prfes de Be-

san^on . sur la route de Dole, 218.

B.

Babey, C,— B.,3S3. N. 204. Baiyk's History oj the Tower of

London , 662. Barbier,C.— B. 585. Barhieri , Nuova raccolla leatrale ,

577. Barreau (Le) francals , ou Collertion

des chefs-d'oeuvre de I'eloquence ju-

diciaire en France , 177. Baudrillard, Traite general des eaux

et forCts, chasses et peches, 578. Baviere , Code de procedure pour ce

royaume, 655. Bawr (Mad. de) , Histoire de France,

189. Bazot, Contes et autres poesies, igS. Beaunier, Le guide des proprietaires

et des jardiniers , 587. Beaux-abts, 421, 4^65 443) 607, 653.

[T'oy. aussi les ttjo^s Dessin, Gba-

VCRE el SCULPTCBE.)

Beccaria, Desdelils etdespeines.175. Beolard et Cloquet, Description et

figures llthographiies de toutes les

parties du corps humain, i\^. Bella-dona (La) , preservalif contrc la

fievre, 635. Belies-letthes. Vqy. Litt^batore. Bellot, Expose des motifs de la loi sur

la preuve civile , pour le canton de

Gentve, i54. Belzoni, Voyage en Egypte, trad, en

italien, 421. Benlham , On the liberty of the

press, 353. Bcrington, Histoire litt^raire du xiri"

siecle, 607. Berriat Saint- Prix, Histoire du droit

romain , trad, en allemand , 232. Biagioli, Rime di F. Petrarca, colco-

mento, 196. Bibliographie, i41) i42) 569. BiBLiOTHKQDE royalc deStuttgard,4i5. nationale de Geneve, 4'9-

du Vatican, 421. de Tuniversitt; de Turin, 421. espagnole economico-politique, par

don Jean Sempere Guarinos , 579. Bigeloiu and Rumford , American

medical botany , 54g. Bignan , La Grece libre, ode, 609. Bignoli, a Milan , public une collect.

d'antiq. grecques et latines, 214. Biografiacremonese, l56. BioGRAPHiE , 102, 111, 127, i4i> i84»

354 , 365 , 385 , 534 , 608 , 609. de Shakespeare, M. , i3,

nouvelle des contemporains , par Arnault, Jay, etc. , A. , 325.

dauphinoise , 255. des signataires de la declaration

d'independance , 554.

Biography [Select], ou Vies des per- sonnageseminens qui ontete I'hon- neur de leur patrie , i32.

Biot , Precis eleuientaire de physique cxperimentale , 2" edit. , 585.

Boehr, De ApoUine Patricio el Mi- nerva primigenia Atheniensium ,

»44.

Boitard, Botanique des dames. 375.

Bonjour (Casiinir) Voy. Mere rivale.

Bonnellicr, La promenade aux torn- beaux, 195.

Bonnin , Doctrine sociale. L'auteur fait I'offre de cet ouvrage aux Cor- tes de Portugal, 425.

Borgnis, Tiaitii complot dc niccani- quc appliqucc aux aits, A. , ^2.

Boiy (le SaintVinccnl , Voyage sou- terrain, 586.

]3ossi, Deir isloria d' Italia anlica e vwderna , A., -6.

Storia della Spagna anlica e ino- derna i56.

BoTANiQi'E, i66, i68, 226, 549,574? 5-5 , 5-6 , 4»5 , 634 ? 670.

Holla's llislory of the war of the in- dependence of the United stales , 35o.

Bottani, ^^or. Epizootics.

Boulage, Principcs dc jurisprudence fran^aise, 177.

Bowles. FoK-liyron.

Bretschneiiier , Lexicon noi'i Testa- menli grceco lalinum manuale , 4 1 6.

Uriefe von Joseph II, 566.

Brossette (Notice sur), 609.

Ijrous^hton's yJge of chrisUan reason, 556.

Buccelleni , auteur dramatique ila- lien, 2i5.

Buchon, CM., i5.

Bucke, On the beautiei of nature ,

Buekland, Vindicia' {^eolos;icce , 55?..

Bulletin bibliographique (111) : Al lemagne, i45 , 558 , 565. Dane- marck, i4i ,,557.--Espagne , 159, 567, 578. Etats-Unis, 126, 349, 554. France, i65 ,372, 585. Grande-Bretagne , 127 , 552 , 554 Indes-orientalcs, 55]. Italie , i54,565, 575. Norwege, i58, 564- Pays-Bas , 161,569, 58o. Pologne, i56, 562. Russie , i56 , 557. Suisse, i52, 564, 575.

Buret de Longchamps, Tableaux liis- toriques, chronologiques et geogra phiques , 584 , 6/5.

Burgos, Las poesias de lloracio, 161,

Butler's , Sketches of universaL his lory , 55o

Butter's llistoricul memoirs, i52.

Byron (Lord), Lettres .sur les ecrits du reverend W. L.Bowles, i54.

La Vierge d'Abidos , trad en polo nais, 565.

Manfred , trad, en danois, 654.

TABLE AN-VnTlQUE

Byssus (Sur le) dcs anciens, et stir son identite avec lo duvet des elitvres de Cacheniirc, M. , 241.

Observations de M. Jaubcrt , 25 1.

Leltre ii M. JuUien, 64a.

Cacliln. T^oy . Digue de Cherbourg. Cadet de Vaux , Traites divers d'eco-

nomie ruralc , 588. Cagnoli de Veronc (Ilonimage rendu

a la memoire du celebre astro-

nonie) , 567. Cailliaud (Extrait d'une lettre deM.),

voyagcur francjais en Kubie , 625 ,

626. Cailleux (A. dc) , est nonimt; secre- taire general du musee royal, 675. Canal de la Ilollande septentrionale ,

655. Cap de Bo."sne-EspiiRance , 2o3. Carrara . Delle actjue seintterinali di

S. Pellei^^rino , 57G Carion-Nisas, Bonaparte et Napoleon,

60 i. Cartes geograpbiques en relief, par

P. Lartigue, 228. Castrillon , Nomcnclatura de las bel-

las lelras, 161. Catalogue des tableaux exposes par

racadcmic americaine des beaux- arts, 127. Catalogus librorum samscrilorum ,

quos bibliotheccB universilatis

Ilafnienxis, vel dedil vel paravit

N- IFalLick, 142. Catecbisuie de la morale publique ,

par Ledesma, 159. Catelacci. Voy. Dante. Catholiques (Mcmoires sur Ie.s) an- glais, irlandais et ecossais , par

Butter, i52. Cennino Cennini, Trailato dclla pit-

tura, 578. Cesari {Jlntunio) , La fita di Cesi'i-

Cristo. 565. Ghauipollion le jeunc, Reclierches sur

la geographic et I'histoirc de I'E-

gypte, avant I'invasion de Canibyse,

224. Chants nationaux ( Collection de )

norwcgiens , 5G5,

DBS MAIIEKES.

Charles ihu first pourtrayed , 354. Cbarrue (IVouvelle), de I'invention de

M. Locke, iNorlliMolton, 2u6. CuAssE , 5S7. Chcmin-Dupontcs, Goius d'uranogra-

phie, 18S. Chenier(M. J.) , Theatre, 097. Chevalier, ingtinieur , Catalogue de

ses inslrumens, 692. Chevrcs ( Sur les ) dc la race thibe-

taine, M. , 5. identite de leur duvet avec le Bys-

sus des anciens, M. , 241. observations de M . Jaubert , 25 1 . ChiccliiatcUi, Ntiovo sistema diforti-

ficazione , i55. GaiMiE (Elimens dc) , par Millar,

128. elementaire (Trailc de) , par Tbt-

nard , i6g. Chine , 201. Chirayita, plante c^lebre en Asie ,

226.

Chibcbgie ,159, i63, 20 1, 549 , 4o3.

Choix de tableaux et statues des plus

celebrcs musees et cabinets (itran

gers , 399.

Christianisme (Progres du) dans les

iles Sandwich, 4o3. Cbboitologie , 353, 384, 5S5 , 5So ,

675. Churruca , Rejlexiones a las Cortes ,

161. Ciampi {Sehdstiani), Noi^um examen locLLiviani de legatis Romanorum Athenas missis , etc., i36. Cicerone, leilere disposteper ordinede'

tempi, 157 Civilisation (Les degres de la), poeme

par Schweighaeuser, 5G2 Classification des sciences, par To-

ronibert, Clemcncin (DIt;gue),elogedc la reine

IsabcUe dc Castille, 56t). Colleccion de memorias historicas y

politicas, 160. Collection des lols castillanes,368. College de medecine et de chirurgie

de New-York , 4o3. Colonic (Dc la) de Frederiks-Ovord , 162

Conifrtc dtcouverlc parM.PrCxel, en Chine , 201.

COMMKBCE, 170, 202, 23l , 44o.

Compas perl'eetionncet Iccalculatcur

de M. Laur , 222. Ccnde , Ilistoria de la dominacion de

los ylrabes en Bspana , 160. Conjuration de quatre-vingt-scize gen- lilshoninicspolon. , par Fayot, 1S7. Conradi, Einrichtung der mediani-

scheri Klinik. 358. Conseil de Salubritt\ Sur le) etabli priis

lapr6f.de pol. de Paris, M., 262. Consideration sur la distinction des

personnes , 162. Conspirations (Des) , par Guizot, 176. Constitutions ( Collection des) , char- tes , etc. des peuples de I'Europe et des deux Ameriques , 598. Copernic , son systeme du monde est adopte par le gouvern. papal , 643. Coquerel , C.-B. , 095. Coquilbat , Expose du systeme d'edu-

cation primaire, etc. , 1G2. Correard. f'oy. Naufrage. Corse (_Etat actuel de la), par Poni-

pei , 182, [Cortts d'Espagne , 423. de Portugal , 4a5. Corti 1 L'aite delnuoto , 5y5. Court (J. D.) de Rouen L'academie des beaux-arts de Paris diccrne i ce jeune artiste le proiuier grand prix de peiuture , 43(3. —La ville de Rouen vote en sa faveur

un encouragement, 427- Creuzer. f'oy. Ilerodote. Cllte. Voj. Theologie. Curran (William) , Vie de Jean Phil- pot Curran , 554. Cuves en plonib pour conscrver les

grains et les I'arines , 4''7- Cuvier, Recherches sur les ossemcns

fossiles- 379. Cynisme (Du) , par Montronc , StG. Gyrinc. Foy. Tbrigc.

D.

Damiron, C. B. 3Cg. Dakemabck, lit, 209, 357, 6J4.

Colonics (Considerations sur les 1 , Dante (L'Enfer du) , Iraduit en vcvs 181. . latins, par A. Catclacci, 130.

Luiiivina cornmedia, 5-y. Da fj 's y/cco u rr t of Cej Ian , 5 5 7 . D'Avot (Madame) , Lettres sur I'An-

gleterre, 388. Decadas medico - quirurgicasy far-

naceulicas, iSg. Decandolle , Jiegni vegetabilis sys-

lema naturale , ~'>~i. Iconesselecla'plantarum, etc. fO-pH. Dc la Haye , De la nccessite do Kilor-

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Deleau jeune , Sur I'abus du vomisse- ment provoque dans les maladies , 592.

Depping, C.-A. loa.-B. 147,391,569.

Descourtiltz , Flore medicale des An- tilles, 375.

Dessin et Pbintuhe , 127, 399,436, 578.

Destutt-Tracy , Principes d'economie politique, trad, en espagnol , 678.

Devonshire (Madame la duchesse de) faitpresent dela version de TEneide d'Annibal Caro i la bibliothfeque du roi de France, 253.

DicTioiNNAiRE geographique de A. Ve- gas, iSg.

bibliograpUique d'Ebert , 669.

histor., par Tabbci de Feller, 385. des sciences natur., To. XIX, 372.

des sciences morales et politiques (Projet), 235.

classique d'histoire naturellc, 233. grec du Nouveau Testament , par

Bretschneider, 4 "6. danois, 634.

vocabulaire boh^mien , 655. languedocien - franijais , par I'abbe

de Sauvages, 606. vocabulaire des mots anciens tom-

bes en desuetude, par Ch. Pougens,

678. (Nouveau) general commun a toutes

les langues , par Potticr (Projet) ,

235. Digue de Cherbourg (Mcmoirc sur la),

par Cachin, A., 280. Dionjsii Ilalicarnerisis de composi-

TADLE ANALYTIQXJF,

tione verburum Itber , ed. GaelUr,

36i. Discours prononce dans la stance pu-

bliquc de Tacadtmic lonienne, Ic

i5 aoftt 1809, par Ch. Dupin, 456. Dispensairc royal pour les maladies de

I'orcille, institution bienfaisante dc

Londrcs, 4'o. Droit NATUHEL, t^o.!^.

FUDLic (Expose du) de I'AUemagnc, par le baron Schv\'ar2kopl', 642.

Dufau, Hist. gen. de France, A., 296.

Dufour (Leon), Nouveau voyage dans les montagnes maudites, 586.

Dulaure. Voy. Gaule.

Dupin , avocat , observations sur plii- sieurs points importans de notre le- gislation criminelle. A., 60.

-C.-A., 489. B., i55.

Dupin (Charles) , Considerations sur quelquesavantages de I'industrie et des machines, en France et en An- glctcrre, 171.

-Voyage dans la GrandeBretagne , 2'' partie 171.

C.-M., 456. Dupuis, Abrege de I'origine de tons

les cultes , 595. Duval (Amaury). Voy, Orlofl'.

Eberls jtllgem. hibliographisches

Lexicon , 669. EcoLEdesartset metJers(Projetd'une),

i Madrid, 433. speciale de commerce, deParJs,440' —pour I'education des enfanspauvres

au Port Jackson, 622. Economia general ( Frincipios de la), , >59-

EcONOMlE BOMKSTIQDB , l8g, 928. POLITIQDE , 1 59, 179, 181, 350, 370 , 578,^579.

(Elemens dela science de r)»par

Mill, i3i.

RCBALE, 5, 205, 878, 4i4? 437, 493,

, 5iS, 588, C59.

ECOSSE, 2o4, 574.

Edgeworth (Maria), M6moires de Ri- chard Lov. Edgeworth, 554-

Education, 162, 493, 563.

Egvpte (Dcscrip. de T), 193, 597, 61 1. (L'), sous les Pharaons, par Ghani- pollion le jcunc, 224.

DES MATIERES.

Ancienne villc de Mcioij, 4'<J- Eloquence, 36g, 45G. -^-juDiciAiRE, en Fiance, 177. Email; Nouvel)pour la porcelaine,2o5 immigration anglaise an cap de Bonne-

Esperance, 2o3. Emma, ou la Nuit dcs noces, par Hye-

val, 191. Emma, ou la Promesse imprudcnte ,

opera , par Planard, 239. ErscYCLOPEDiE dcs Dames, 189, 075. Enoch (Le livre d') le propbete , par

R. Laurence, 129.

ElVSEIGNEMENT ELI^MENTAIRE, 23o, 673.

Enseigmeme.nt ml'tuel a Angers, dep.

de Maine-et- Loire, 656.

hMetz, diip. de la Moselle, 656.

Ecole fondee par M. Baudouin i

Troyes ,216.

La priority de Tin vention de cette

methods appartient aux Arabes , , 204. Epizootics ( Des ) contagieuses et non

contagieuses, par Bottani, i55. EspAGNB, i5g, 160, 214,367,423,578,

648. (Histoire del')ancienneetmoderne,

par Bossi, i56. Esprit du tems(Qu'est-ce que 1'), i46. Estefan, EL desembarco de los Riisos, , 161. Etats-Unis , 68, 126, 197, 34g, 4o3,

4o4, 554, 620.

(Histoire des'), 35o.

(Histoire de la guerre de I'indcpen- dance des), par Botta, 35o.

Eudocia, roman allemand de madame Naubcrt , 636.

Exil6s(Les) de Parga , poeme par Or- dic, 192.

Expeditions riisses, 621 anglaise ,6 2 2.

Exportation (De 1") et de I'importa- tion des graina, par Ouin, 179.

Exposition do tableaux aux Etats-Unis, 127.

permanente des produits dcs beaux- arts de Vienne, 637.

F.

Families celebres d'ltalie , par Litta,

365. Pastes (Lcs) univcrscls , par Buret dc

Longcbamps, 084,675.

Fayot. f'oy. Conjuration. Fellenberg (Des instituts de M. de) a

Hofwyl. A. , 493' Feller, Dictionnaire historiquc , 385. Fenelon, OEuvres choisies , 1-4.

Pensees et niaxiniKs, 176. Ferguson, Principcs de !a science mo- rale et politique, A., 289.

Ferme cxperimentale d'Intcrlaken,

639. Fernandez . Disertacion /i/slonca,elc. ,

368. Ferrier , Du gouvernemeat considere

dans ses rapports avec le commerce,

178. Ferry, C.-A.,474. Filial affection , 554. Flore d'Oware et de Benin , par Pa-

lissot de Beauvois , i68. medicale des Antilles, parDescour-

tiltz, 575. Fodere, Voyage aux Alpes marilimes,

592. Fonteuelle , Pluralile dcs mondes

38i. Fragmens de philosophic botanique ,

par Marquis, 166. FrShn, Nouvelles publications, 633. France, i63, 216, 2S0, 296, 372, 426,

534, 585, 655, 676,

(Considerations sur la) , par J. de Maistrc, 600.

( Histoire generale des institutions niilitaires de), 602.

(Hist, gen de),par Dufau, A , 296. Francoeur, C.-B. 583, N. 204, 207. Frank, Traite de m^decine pratique,

tradult en fran(^ais, Sgo. Frankenstein, ou le Promethee mo-

derne , par madame Shelly, 191. Friedlander, C.-B., 358. Fritot, Science du publiciste, 597. Froment (Sur le) et sur la farine dc

I'ittat de New-York, 126.

G.

Gacller, Koy .Dionysius Ilalicarnen-

sis. Galerie franraisc, ou Collection dc

portraits, etc. , 184.

A. 534.

Garcia , Elementos de la ucrdadera

logica, 57S.

TABLE ASALYTIQUE

Gaiilc (Les vUlos dc la) rasOcs, par J.

A. Dulaurc, ct rebfilies, par 1'. A.

de Golbory , 612. Gauttier(Edoiiard),C.-A,.2So.B.^557. Gazette dc la Giiorgic septentrionale,

56o. Gazzera ( '"ostanzo) , Letlera, i5S. Geanny (de Gavedell) , C.-A., 33i. Genoino, autcur dramatique italicn ,

plusieurs de ses pitces , 645. GiSoGRAPHiB, iSg, 182, iS5, 210,228,

5S2, 557, C23, 675.

nioderne et universclle , par Gu- thrie, 186.

GiSoLociE, ic)7, 586, 620.

(La) conciliee avcc la religion, par

IJuckland, 552. Gerard , Les trois igcs , graves par

Morphea, igS. Girardiii (Opinion de) sur le retran-

chement du budget d'une somme

de 5o,ooofr. destinee a Tinstruction

priniaire, 187. Globe en relief de M. Zeune i Berlin,

pour I'inslruction d es aveugles, 2 1 o. Goffaux , Tableaux chrononnStriques ,

3S5. Golbery. Toy. Gaule. C.-B. 143, i44, i46, 149, 357, 36o,

36:, 362, 568, Sjo.-N. 212, 419,

427, 633. Golowkin (Le comte Fedor) , Lettres

diverges, 574. Gouvernement (Essai sur I'histoire du)

et de la constitution anglaise , par

Russel, i32. Grafigny, (Madame de},Cffiuvres coin-

plt'tes, 393. Grammaire finlandaise, par Strahl-

mann, 357. Gbande-Bretacke, 127, 171, 204j552,

388, 410, 5i8, 554,627. Sa situation et ses rcssources en

agriculture , en commerce et en fi- nances, par Lowe, 4 1 1 Grattan (Collcy) , Philibert , roman

poetique, 341. Gravube, 184, 195, 237, 554. Grecb (Messenienne sur la liberie dc

la), 609.

(La) librc, ode par Bignan, 609. (Le r6vcil de la), par Stobcr, 619.

(.Renaissance de la), par Krug, i46

(Voyage dans la ), par Pouqueville, A. 33 1.

—Instruction publique, M., 453. Grecs (Chant des), 6og.

(La cause des) est la cause de I'Eu- rope, 147.

Grimm, Ueber Deutsche Bunen, 5jo,

Guillaume 1", tragedic, par Alvin , i63.

Guizot, Des conspirations et dc la jus- tice politique, 176.

Guthrie, Nouveaux elcmens de geo- graphic , 186.

Nouvelles notions de geographic , iS6.

Gymnastiqie , 575.

medicale , par Londe, 38o.

H.

Habit (L') retourne, opera en unacte,

679- Hammer, cclebre orientaliste, h Vien-

ne, revolt du Shah de Perse les or-

drqs du Soleil ct du Lion, 4o4. Hansteen i Christiania, ses nouvelles

observations sur Taction magnetique

du globe terrestre, 207. Harmon's Journal of voyages and

travels, 554. HarsCeld , Rechercbes zoologiques

dans 1 lie de Java, 4"' Hautpoul (La comtesse d'), Cours de

litterature anc. et moderne, 188. Haiiy, Traite element, de physique,

5" edit., 583. Haydn (Hommage a) dans sa ville na-

talc, 638. Hebert , Rapport sur les travaux de

I'academie royale des sciences de

Caen , 614. Heeren, Carthage consideree dans ses

relations politiquesetcommerciales,

trad, en hollandais , par Dornseil- I'en , 370. Heibersr, Qm Adel i Norge, i58. -C.B., i4i, 564. N.,634. Henry, C M., 241. Hircau , C.-B., 1S9 , 388, 3g3, 610.

Redaction generalc du BuUel^n

bibliograph. ctles art. sign^s E. H, Herodote (Commentaires sur), par F.

Crcuzcr, 3.69. HisioiBE, 89, 102, i56, 1S7, 1S9, 296,

DEb MATIEUES.

3o6, 35o, 368, 370, 384, 3S5 , 588, 3c)i, 392, 432, 563, 596, 6oi, 633, 675, (L') envisagce comme compositioa litteraire, par Sen6c, 6o3.

(Materiaux pour servir a 1') du Li- tliuaQie,etc., par A. Kotzebue, i43.

des etats piussiens, par Poelitz, 565.

d'ltalie, par Bossi , A. 176. civile et politique de la nation cspa-

gnole , 676. de la domination des Arabes en Es-

pagne , par Conde , 160. de France, par Segur,- 676.

gjiner. de France, par Dufau, 296

de France par mcsdanies de Bawr et de Maraisc , i8g.

de rAssemblee conslituante , par Ch. Lacretelle, A., 89.

Rabaut Saint-Eticune, 388.

littSraibe du xui"= siecle, par Be rington, 607.

KATL'BELLE, 225, 226, 233, 24l, 372

577, 079, 426, 642, 655. History of the United States, 55o. Hodgskin's Trai-'els in the North of

Cerinaii)', i3i. Ilorwyl. J'^oy . Fellenberg. Hogendorp (G. G. Vanj, Recueil de

pieces concernant I'ljconomie poli- ^tique des Pays-Bas, 370. Homers IJymnus , etc. yon Sickhr,

568. Horace, traduit en vers espagnols, par

Burgos, 161. Hospice du Saint-Bernard, 64o. Humbert, Desmoyensde pcrfection-

ner les etudes litteraires, 5-3. Hutcbinson , Essai pour retrouver les

principe^ del'aacienne pliilosopliie,

411. HyDHOCBArniE, 2S0, 349.

HYDROTECHHlQrE, 653.

Hyeval. P'oy. Emma. nvGiiiNE, 38o. Hypocondrie (Essai sur 1' ', par Reid, 353.

I.

Ile/De Gevlan, 4o4. Iles Abctiques, 620.

I'niLipriivES , 4o5.

Sasdwich , 4o3.

Imprimerics turques !x I'era , a Scutari

ct i\ Dai el-Kamar , an monl Liban ,

646. Inamovibilite (De 1') des pastcurs du

second ordre , 583. Indes Oriemales , 201, 202, 55i ,

557 , 621. Tndex ( General ) to the gentleman's

magazine , i32. Inquisition religieuse (Histoire abre-

gee de 1') en France, par Lanjuinais,

596. I.NSTiiuT royal des Pays-Bas, 570. de France, 221 , 429, 663. Institutions militaires ide France, 603. politiques ( De I'esprit des), par

Massabiau, A., 489.

iNSTRtCTION PUELIQUE, 2lg, 439-

(Sur les avantagcs de 1') chcz les

grecs moderncs, M.,453. Inventions, f-^oy. Abts mecaniqoes. Irlande, 627, 600. Italib , j54, 212, 365, 4'9) 556,

575, 645.

(Histoire d') ancienne ct moderne par Bossi, A., 76. Italy and the Italians , 556. Ifanhoe ; a romance hj the author of

JVaverley , 61S.

J.

Jardimagb, 587.

Jaubert, voyage en .Vrmcnie et en

Perse, 186. Observations sur le Byssus des an-

ciens , 25 1. Java, 4' l Jawis (S. F. ) , Discours sur les Iribus

indienncs de rAmOrique du nord ,

127. Jean- Sans-Peur, tragedie par Lia-

dieres , 678. Jomard, C.-B., 573. N., 623,626,674. Jordan (Camille) , son portrait grave

par H. Ch. Mullcr, 237. CXJuvros choisies, 443. Joseph II ( Lcttres inedites de) , 566.

JOUBNACX EI BECIEILS PEEIODIQUES, Cn

Afrique : II liberal Africano , pu- blic a Ceuta , 627. en Allcmagne : Neue Berliner Mo- natsschrift, i4g. TFiener Jahr- hiicher, i5o. 'Der Ztischaiier, pu- blic a Berlin , 212,— -Fc^jersiunden,

10

TABLE ANALYJIQUF.

Darslellun-

publ. a Vienne, 4 16

^en aus dem preus.-iischen Rheinu Mozel Lande , piibl. ^ Crcutznach, 4 16. Die Vorze.il, publ. 6 Cassel, 4'7- Murgenblatl , publitia Stutt- gard, ^ji. yleskulap, publiii ii Leipsick , G55. —en Anglelerre et en Irlande : The gentleman's Magazine,p\ihl.kLon- dres, i32. The retrospertit'e lie- i/ew^, publ. a Londros, 356.— Jour- naux publics 4 Dublin au nombre de quatorze , 65o. aux Etats-Unis : Journal de I'aca- d(5mie des sciences naturelles de Pbiladelphie, i i6.— Annual philo xop/ucal Magazine , publ. i\ New Yorck, 1 i6.— North American Re- pieic, publ. i Boston , 35o. en Prance: Cbionique religleuse, publiee k Paris , 4oo.— Christlichc Miltheilungen, publ. i Strasbourg, •foo.— Journal des savans, publ. .'1 Paris, 4oo. Nouv. Journal des dames, 4oi.— Annales de I'agri- culture fran(;'aise , 617, Feuille d'annonce de la ville de Castelnau- dary, 61S.

"-en Italie : Antologia , publ. i Flo

rcnce , 643. en Norwege: Le Mercure du nord.—

Le journal de I'Enipire.— La Feuille

naiionale. Le Spectafeur norwe-

gien.-La Feuille du matin; tons

les cinq publics i Christiania, 20S. —dans les Pajs-Bas : Irene, publ.

h Amsterdam , 872. —en Russie : L'Invalide russe , publ.

a Petcrsbourg , 635. —en Suisse: Annales de legislation et

de jurisprudence, iSz. —dans la TurguieasiatKfue : he Sfec-

tateur oriental, journal fran(j., pobl.

a Smyrnc , 4o4. Jovellanos , Sur les divertissemens

publics , 369. Jullicn (M. A.) de Paris, fondaleur

et directeur de la Revue Encycl.

C.-B. igo, 191,604. N. 235. JtRisrnLDEHCE, i52, 1 55, 175, 176. frani^'aise (Principcs de) , par Bou-

lage, 177.

K.

Keppel Craven's Tour through the southern provinces of the kingdom, of Naples, 554.

Kerss Darsiellung der Fahriken, 359.

Kinsbcrger (Van) , amiralhollandais , honimages rendus i sa memoire ,

2l5.

Kock (Paul de) , Voy. Philosophc. Koran (Le), pubU6 k Kasan , aux f'rais

d'nn negociant , 633. Kolzebue ( Aug. ) Switrigail, i43. J^rug, Griechenlands IVUrdigung ,

146.

LacrctcUe (Gh.), Histoirc del'Assem-

bl6e constituante , A., 89. Lafond de Ladebat, C. A., 68. Lake's , Sketches of poetry , 61 g. Lalande , astionomie des dames , tra-

duite en polonais, 562. LamourOux, Exposition methodique

des genres de I'ordre des polypiers,

377. Lancasterian sjslem (_ Manual of

the ) , 127. Lancette. Voj. Biografia. Langlfes, C.-B., 129. Langlois , Description bistorique des

niaisous de la ville de Rouen, 445. Lanjuinais, G,-A., 60. B. 171 , 382,

593. Memoires sur la religion , 5^S.

Histoire abreg6e de I'inquisition re- ligicuse en France, 596.

Lartigue. Voj. Cartes. Lascases fils , Plan de I'babitation de

Napoleon dans I'ile de Sainte-H6- lene , iijG.

Laur i'oy. Compas.

Laurance, The book of Henoch, 129.

Laurent's Recollections of a classi cal Tour, 354.

Lavingtons Enthousiasm of metho- disls and Rapists, 55G.

Ledesma , Catecismo de la moral ci- vil, 159.

Legend {The) <f/lrgyle, 56i.

LEGISLATION. l52, 2o8, 568, /(25,4'il,

564, S'jS, 635, 648.

DES MATIERES.

11

Civile (Coup d'oeil sur la nouvcUe) des Pays-Bas, 162.

CniMiMELLE (Observations sur plu- sjeurs points iniportans dc iiotre), par Dupin, A. , 60.

Lclewel , Derniercs annues du rfegne de Sigismond-Auguste , 565.

Lemercier. f^qy. Louis IX.

Le Noiuiand, G.-A., 42.

Lesur. p'oy. Annuaire.

Liadifcres , Jcan-sans-Peur , trag6die , 678.

Liberie de la presse ( De la ) , par J. Bentham , 553.

EnNorwege, loi y relative , 208.

Loi y relative, rendue par les Cor- tes d'Espagne , 648.

LiTHOGHAPHiE , piogres de cet art eii Russie , 207.

(Progrcs de la ) 6 Stuttgard, 4i8.

Lilla, l^'amiglie celebri iialiane, 365.

LiTTtRATuaE Allemande , i49 1 i5o,' 211 , 212, 362, £66, 568, 5-2, 574, 619, 636. Anglaise, i55, 34i, 449) ^^•' ^iS' 6'9- Aiabe, 402. Biblique, 129,556, SgS. Danoise, i4i,634. Espagnole, 161, 56g. Francaise, 102, 111, 174, 188, 191, 192, 193, 590, 594, 595, 597, 445, 446, 540, 600, 609, 610, 67S. Hol- landaisc, 162,371. Italienne, i55, 157, i58, 2i5 , 565 , 566, 4ii ? 577 645, 644- Norwegienne , 565. Polonaise, 563. Russe, 206. Samscrite, 142. Turque, 646.

Italienne ( de la), dans la seconde moitie du xviii^ siecle , 565.

Lives {The) ofeminenlScolsmen,7>^!i

Llorente {J uan- Anlonio) Memoria historica, 568.

Apologia calolica del pray eclo de constitucion religiosa , 4oi.

G.-B , 159, 367, 57S., N. 648.

Loch ( James) Compte rendu des bo niCcations faites aux domaines du marquis de Stafford, A. , 5 18.

LOGIQCE , 678.

Londe, Gymnastique medicale,3So

long(';vite (Excmple rare de) , 4o4-

Lorenzo da Ponte {An exlracl from the life of)., 127.

Louis IX en Egyple, tragedic, par Lemercier , 44'^-

Luther, inauguration dc sa statue colossale k Witteinbcrg, 637.

Lymon, Rapport fait h la societc d'a- griculture de Hampshire, 349.

M.

Machine a plonger, dc M. Farkas , ^

Vicnne, 209. Machines (Des) employees dans di-

verses fabrications , 47. ]\lacnah,OhservaLioni>onlhepoUllcal,

moral and re'igious xtate of the ci- vilised world, 4o2. Magn£tisme. Voy ez tlansteen. animal ( E.\p6riences sur le), par

du Potet , 379. Mahul (A.) , G.-A., 89. B. , i56, 6o4. Annuaire necrologique, 608. Maison de banque de consignations

commerciales, (Uablie i Paris, 23 1. Maistre (Joseph del, Considerations

sur la France , 600. Majo [Angelo). Hindis fragrnenla

anliquissima cum pictiiris , 367. Manuscrit palimpseste , contenant

plusieurs fragmens du code Theo-

dosien ,4^1. Manzanares, Inconveniens de I'ensei-

gnement mutuel,d'apres la methodc

de Lancaster, 5So. Marais mouvant de Kilmaleady, en

Irlande, 627. Maraise ( Madame de ) , Histoire dc

France, 189. Marasquin Mahaleb , 22S. Maboc , 204. Marquis, Fragmens de philosophic bo-

tanique, 166. Marre. p^oyez AlOeri. Marron , G -B. , 58o. Martinique, sur les plantes de cettc

ile,4i3. Massabiau, De I'esprit des institutions

politiqucs, A.,489' Massacre des etrangers 4 Manille ,

4o5.

MaTHKMATIQDES, 222.

MiicAniQUE (Traite complet de) appli- quee aux arts, parBorgnis, A. , ^i.

Medecinb, iSg, i63 , 2i5, 353, 558, 069, 4o3. 4io, 554, 590, 592, 655.

Melanges dc la socictu litteraire de Bruxellcs, 571.

12 TABLE ANALYTIyVE

M^HOIRBS cl RAPPOBTS (le sociit^s sa- i-antes el d' ulilitcpubliquc de I'aca dcmic des sciences dc Pctcrsbourg,

toire d'Espagne, 368— De racadtj niie rojale des sciences dc Caen , 6i4- De la sociele d'agriculture du dtpartement du Doubs , 614. ^^appoits (Premier ct second) de la societii, pour pievcnir la pauvrete

de New- York, 68.— (Tioisieme) depiiKiiRAioGiE, G20.

Kidaction gcjneralc des Nuuudles scientijiques el litiiraires , el Ics articles signOs M-

sscur Amici , dc

tical economy f

Millar's elements of chemist rj, 128.

Millin, homniage dccernc J> sa mi- moire par racadtmic des inscrip- tions et belles-lettres dc Paris, 434'

Mills Treatise on Inland navigation, 349.

la socicte hiblique americaine,i26 Annuel du conseil americain pour les missions etrangeres, 549. (Cin- quiemc) de la societti de pais de Massachussets, 549.— (Cinquieme) de la societe d'education ameri- caine , 34g. (TroisiemeJ de la so- ciete de colonisation americainc, 349. De I'academie royale des sciences de Rouen, 164. —De la so- cittc de medecine de Toulouse , 160. Transactions dc la societti royalc de Londres, 127.

MlSuoiRES, NOTICES , lETTBES Ct ME-

l.A^GES (I^) : Sur les cht-vres de race thibetaine, 5.— Biographic de Sha- kespeare (Buchon) , i3.— Notice sur les sculptures du Parthenon (P. A), 29. Dissertation surle Byssus des ancicns (Henry), 241. Notice sur le conseil de salubrite , etabli prfes la prefecture de police de Paris fE. Salverte) , 262. Observat. sur les revues scientifiques et litteraires anglaises (B.— y.) , 449. Sur les avantages de I'instruction publique chcz les Grecs modernes,455. Discours prononcc dans la seance publique de I'academie loniennc, le iSaoiit 1809 (Ch. Dupin), 456. Memoria sulle sLrade e su' jjonli mi- lilari, i55.

M

mir Bonjour, 208 Mersan{de', Manuel du chasseur, 58?. Mclral (A.'),G. B , 173. Mexique (Mt'moircs sur la revolution

du), par Robinson, 35o. Mirhdot . C,-B. , 169, 179, 6i4. La

Mogols (Hist. des)tt des TatareSj633.

MoLDAviE , 187.

Moniimont, Voyage aui.Alpes et en Italic, 3g3.

Montesquieu, Esprit de lois , traduit en espagnol , 578.

Montolieu ( Madame de ) , C85uvrcs completes, 190.

Montrone , Del Cinismo, 676.

Monument propose par I'academie des beaux-arts de Madrid, pour etcr- niser la journ6e du 9 juillet iS^o, oil le roi preta serment k la consti- tution , 653.

propose par la municipalitt5 de Madrid, en I'honneurdes victimes dc la journee du 2 mal iSoS , 655.

en rbonneur de Bayard , propose pour orner la ville de Grenoble^ 657.

erige a Wittembcrg en I'honncur de Luther, 607.

Moore (Thomas) d'Alicantc, Obser- vations sur le credit public, 367.

Mora, Bisrurso, etc., 161.

Morale, 289.

Moratin {Coinedias cle) , 619.

Morghen. T'ojez Gerard.

Moi'in. J'^cyez Ordinaire.

Mouline , Les le(;otis de la parole dc Dieu sur I'etendde et I'originc du mal dans rhomme , 364.

Muller, graveur. Voyez Jordan.

ere rivale (La), comedie, par Casi- Muller (Jean de), Hisloirc universcllc, —■-"■-■ -"" traduite en hollandais parVan Kam-

pen , 370. MusKE d'histoire naturcllc de Bor- deaux , 655. d'histoire iialur. de Genrve , 4'9. -^ special dc copies ( Sur la ncccssitc

dc former uii) , M. , 29. Musset-Pathay, Histoirc dc la vie ct

des ouvrages de J.-J. Rousseau, A.,

102 ,111. Mythologie du Nord , log.

N.

Nafarrondo , Memoria presenlada a

las Corles , j6~. Naples (Mem. hist, sur le royaume de) ,

par le comte Orloir, i85, A. , 006. Napoleon Bonaparte (Memoires de) ,

392,

(lEuvres de) , 092.

(Documens historlques sur la ma- ladie et la mort de), 592.

f^oy. Carrion-Nisas. Natation , SjS. Naufrage de la frygatc la Meduse, par

Correard et Savigny, 5gi. Necker de Saussure, Voyage en Ecosse,

Necrologies : Lc comte Chretien de Stolberg, i Eckernforde , dans le duche de Schleswig, 209. L'abbe Simeone Assemaui, a Padoue, 214.

Marchena , en Espagne , 214. Carle Vanloo ,peintrefrancais, 209.

GodelVoy, naluraliste i'ran^ais , massacre a Manille, 4o5. Arthur Young, secretaire du conseil d'agrl- culture de Londres, 4>i. G. L. Bucli, a Munster, 4i8. Weber, maitre de chapelledu roi dePrusse, 4i8. Achard, de I'academie des sciences de Berlin, 419. —Le comte L. E. Corvetto, a Genes, 421.- F. L. Gilii, i Rome, 422. Lefe- vre-Boschard, a Saint-Quentin,447'

Th. Thaarup , poete danois , 6 Copenhague , 654. Le docteur Franck, i Vicnne. 658. ^C. A. Ge- rard , conseiller des finances, i Ber- lin , 638. Le professeur Voss , a Halle, 658. -J. T. Hermes, surin- tendant ecclesiastique , i Breslau , 639. J. A. Rossmaeler, graveur, a Leipsick, 639. Lechevalier - Pc- cheux, peintre, a Turin, 646.' Madame Lerebours, a I'Archc, pres de Mans , Gjg.

Nbvvfouivdlan (Terre-Neuvc), colonic antique, 4o4.

DES MATliiftES. 13

Kicolini (Giuseppe), autenr drauiati- que ilalien , 2i3.

Noblesse ( De la) en Norvvcge, par Helbcrg, i38.

Nominations acad^miqkes : Ph. Gol- bery, i Colmar ; John , i Berlin ; Haas, Hepp, Richard ctEngelhardt, i Strasbourg, 429.— Savigny, a Pa- ris,4J0 Buchner, aLandshut,65G,

Liadieres, 658. Grange, GSg. NoBWEGE , i38, 207, 564. Nota , auteur dramatique italien , nou-

velle publication de ses ocuvrcs , 645.

NonVELLE-HoLLANDE, 621.

NOUVELLES SCIENTIFIQUES ET LITT^RAIRES

(IV.) : Allemagne, 209, 4i3,635. Cap de Bonne - Esperance, 2o5. Chine, 201. Danemarck, 209, 634-

Egypte , 4;o- Espagne, 214, 423,648. Etats-Unis, 197,403, 4o4)G20. France, 216,426,655. Grande-Bretagne, 2o4 , i^o, 627. Hes Arctiques,620. He de Ceylan, 4o4. Hcs Philippines, 4o5. Hes Sandwich, 4o3. Indcs orientales, 201, 202, 621. Italic , 212 , 419 , 643. Maroc, 204. Norwege, 207. Nouvelle-Hollande, 621. Nubie, 623. Paris, 221, 429, 663. Pays- Bas, 21 5, 653. Perse, 4o4. Por- tugal, 424- Piussie, 206, 653. Sierra-Leone , 202. Suede , 207, 4i5, 654. Suisse , 4'9? 639. Tur- quie,425,646. Turquie-Asiatique, 404.

NuBIE , 623.

NnmsMATIQ^E , 368.

Nummi Mahamedani qui in acad.

iinperialis scienliarum museo asia-

lico asserfanlur, 653. Nycrup et Krafl't, Dictionnaire des au-

tcurs danois, i4i. Cataloqus Ubrorum samscritano -

rum , guos bibliolheccB unii>ersila-

tis llafniensis uel dedil, velpara-

vh N. IFallich ,142-

o.

Oelsncr, Dissertation sur Mahomet, traduit en hollandais, 58o.

(SJdvbes COMPLETES de madame de Staijt, 88. 540; de madame de

14

TABLE ANALYTIQIE

dc niadnmc d<

Montolicu , Kjo ; Grallgny, 3()3.

choisies de Fcnilon , yj^.

de Camille Jordan , 445.

Oiscanx (Lcs)tt les flturs, en arabe,

piiblies par Garcin , 4o2. Ophtalmiste , ou I'ami de la vuc, 162. Opoix, De I'anic dans la vcille ct dans

le sommeil, 591. Optiqub , 4*0.

Oracle do Delphcs , par F. Torriccni, 565. Ordinaire (J. J.) , Application de sa

methode d'enseig:nenient dans Tins-

titulion do M. Morin , 200, 675. Ordre , Les exiles de Parga, 192. Orlofl' ( Le conite) , Menioircs histo-

riqucs sur le rojaunie de Naples ,

publies parAiiiaury Duval, A., 5o6.

-B., iS5. Os (Action des) employes coninie en-

grais,227. Ossemens fossilcs ( Rccherches sur

les), par Cuvier, 579.

huniains , decouverts sur les bords du Scioto dans I'etat de TOhio, 197

Ouin , Dc I'exportation ct de I'impor tation des grains, 179.

P.

Palissot dcBeauvois, Flore d■O^Ta^e et de Benin, 168.

Pamphleteer {The), 555. _

Panorama d'Albenes, 44^.

Pareau , Lucius, sife napiganles . 58o.

Paris, 221, 262, 429, 665.

Pariset (Madame) , Manuel de la mai tressc de maison, 1S9.

Parry's Vojage for the discovery of a nor'h west ])assage, 558.

Parthenon (Sur les sculptures des frontons du) , M., 29.

Pasero, Note sur la veritable interpre- tation d'une loi italienne, 17S.

Pauvret6, ses causes et les moyens em- ployes a New-York pour^la preve- nir. A., 68.

Pavs-Bas, 161, 2i5, 069, 5So, 655.

Peinture. Voyez Dessin.

Pelerin (Le) a Dobromil, suite, 565.

Pebse, 186, 4o4.

Peste (Histoire de la) qui s'est mani-

fcslci' k Malle, Gozo, etc., par J.

D. Tully, 554. Pliilibcrt , roman po^tiquc , par C.

Graltan, A., 54 1. Phiiolocie, j56, 144 5 '57, a55,357,

56o, 56i, 067, 4i6, 454» 570, 573,

5So, 655. Philosophc (Le) en voyage, op6ra,par

de Kock, 446. PiiiLOsopHiE, 171, r75 , 58i , 4o2, 4>

576, 5So, 6o3. Physiqie , 206, 576, 6/(5.

elementaire de Biot, 585.

de Haijy, 583.

Phytographie medieale,par J.Roques,

576. Pierre-le-Grand , tragcdie polonaise,

par Szumski, 564. Planard. Voy . Emma. PoiisiE , 1 58, 161, 162, 192, 1 95, 371,

565, 565, 568, 609,619, 654.

dramatique , i58 , i65 , 2i5 , 597 , 445, 446, 563, 577, 619 , 654, 678.

Poesies (Becueil annuel de) de la so- citte litteraire deBruxelles, 162.

de Falamonica, 645.

Poetes celebres de I'ltalie, collection de leurs a'uvres , faite sous la direc- tion de W. Roscoe, 4ii.

Polemiquc litteraire, 209.

Politique, i32, i3S, i46, iSg, 160, 161, 1 78 , 1 87, 2 1 4 » 2S9 , 355 , 367, 592 , 489, 578, 597, 598 ,600, 6o3 , 6o4, 6o5, 648.

Politz, Umriss der Geschichle des Preussische7i Staals , 565.

PoLOGHE, i36, 562.

Polypiers. Koy. Lamouroux.

Pompei. P^oy. Corse.

Pont en chaines sur la riviere Merri- mack, aux Etats-Unis, 620.

de Louis XVIII a Bordeaux, 656.

du meme nom , i Saint - Sever, 656.

Population de la Turquie, 423. Porcelaine (Fabrique de) dans le dc-

partement de la Haute Vienne ,

426.

PORTDGAL, 424.

Potet, Experiences surle magnetisme

animal , 379. Pougens (Ch.) , Vocabulaire de mots

anciens,tombes en desuetude, 676.

Lettres de Soslhtine i Sophie, 678.

DES MATIEfiES.

15

rouqucvillt; , voyage dans la Grece , A., 35..

Price's ( Dafid) , Chronological re- trospect, 353.

Peigne, Precis de la vie de Jesus- Christ, 38.3.

Prix peoposes : par I'acadeniie roj'ale de Londres, 206; par la socicte d'instruction publique de la Corse, 2ig; par la society deslettres,etc., de Metz, 219 ; par la societo de pharmacie de Paris, 226; par I'a- cadtimic roy. des sciences usuelles d'Erfurt , 4i4 ; P^f l'acad6aiie des inscriptions et belles-lettres de Paris, 432; par I'universite de Co- penhague,634; par lasocietii pour i'encouragemunt des arts de Ge- neve , 639 ; par I'acadeniie des beaux-arts de Milan, 645;— par I'a- cadeniie ztlandaise des sciences , 654 ; par I'acadeniie des sciences d'Amiens, 658; par la societe d'e- mulation de Canibrai , 659; par I'acadeniie des sciences de Tou- louse, 661 ; par la societe d'agri- culture de Toulouse ; 662 ; par I'academie franQaisc, 666; par I'a- /;ademie des beaux - arts de Paris, 667.

DECEHNES : par I'academie des ins- criptions, etc. de Paris. 43 ij 432; par I'acadeniie des beaux-arts de Paris, 436, 668; par I'universite de Paris, 44oj—"P2r I'academie z6- landaise des sciences, 653; -par I'a- cademie des sciences d'Amiens , 65^; par la societe d'6mulationde Cambrai,65S; par I'academie des sciences de Lyon, 669 ; par la so- ciety acad6mique de Nantes , 660; par la societe libre d'6mulation de Rouen, 660 ; par I'academie franc^aise, 666.

Prophetes ( Les ) , nouvcllemcnt tra- duils de I'hibreu , par Agier^ Sgo.

PsYCHOLooK, 591.

Publiciste ( Science du) , par Fritot , 597-

R.

Rabaut-Saint-liltienne, Precis de This- toirc de la revolution francaise ,

388.

le vieux Cevenol , SgS.

Ramcyc. f'^oj'. Telescope.

Ranee f^oy. Retour.

Rapports de Societes savantes , f^oy.

Memoires. Raymond's , Thoughts on political

economy , 35o. Reclamation de priorite du docteur

Forni a Turin, relativenient ft la

decouverte de, I'identite du fluide

magnelique , 643. Reid's Essays on hypochondrias ,

353. Religion, t^oy . ThiSologie. (Memoires sur la) , par Lanjuinais,

595. Retour (Le) , ou ronolc et le neveu ,

comedie , par Ranee , 445. Revues (Observ. sur les), scientifi-

ques et litt. anglaises, M. , 449« Reynier(L.), Lettre a M. Jullien re-

lativ. au Byssus des aaciens , 642. ilii.-era,Safrrrio su i rapport: ^ttic. , 1 55. Robert , Tableaux des interOts, 170. Robinson's, Memoirs of the Mexican

revolution , 55o. Rolland de Villargues, f^oy. Substi- tutions. Romains (Esquissedes moeurs domes-

tiques des anciens), 353, Romans, 191, 54i , 394, 56i, 610^ 6i8,

636. Rome (Deblaiement et excavations du

Forum de), 42'- Roques, Phytographie medicale,376 Rousseau (Hist, de la vie (jt des ouvra-

ges de J. -J.) , A. , 102 ,111. llonneurs rendus a sa nieinoire ft

Geneve ,4'9' Runes allemands(Sur les), par Grimm,

570. Rus^el's Essay on the history of the

english got'ernement and consti- tution , 102. Russie, i36, 206, 357,633.

Saez , sur la valeurdesmonnales dont

on faisait usage en Castillo sous le

roi Henri IV, 368. Sages-femines, sur leurcmploi en chi-

rurgic , 1 49. Salaberry^ Essais sur la Valacliie cf la

Moldavie, 187.

16 TABLE ANALYTIQVE

Salamandrc ( Nouvclle cspicc de ) . dcs sciences naf ur. do Ilalle

trouvec en Italic , 4'9

Sairi,C.-A.,76,5oG.

Salverte (Eusi.be) , C.-M. , aSa.

Sanderson , Biograpliic des sijjnatai- res dc la declaration d'indcpen- dance, 554.

Sauvagfcs, Dictionnaire languedocien fran^ais , Go6.

Scarron , Le reman comique , Gio.

Schlcgel{Aug. Cuil,) , Specimen no- va' typographia- indicce , 1 96.

Schwartzkopf. T'qy, Droit public.

Schweighwu.ter (G.) , Die Sicu/'en der Bildung, 062.

Scrittori d'llalia, Voy. Ugoni.

Sciir.pTCRE, 2i5 , 099, 637,657.

Sculptures (Sur les) des frontons du Parthenon , M. , 29.

Scgur, Histoire do France, 676.

Sempere Guarinos , Bibliolheca espa- nola economico-politica , 679.

Senee , De Thistoirc, etc., 6o3.

De sign is , 6o5.

Serres chaulTees par la chaleur des ecurics , 2o5.

Shakespeare (Biographic de) , M.,

Shelly (Mad.\ Voy. Frankenstein

Sicklcr. Voj. Iloinere.

SiEnRA-LEO>E,accroissemcntde la po- pulation ct de laprosperite de cette colonic J 202

Signis {De), sife de signorum in ideis

generandis vi ac poles late yGoS Simons-Candeille, Agnes de France ,

.594- Sismondi (J- C. L. de) , C.-A. , 5 iS Smith , Journal tenu pendant un

voyage a Congo , i5S Societe pour prevcnir la pauvretii de

New- York , A. , 68.

giiologique americaine, 197. asiatiquc, de Calcutta , 302.

litteraire , de Ceylan , 4o4. roy. de Londres , 1 27.

DcsMissionnaires, de Londres, 20C d'cncouragement, de Londres, 2o5.

de Londres, pour la conversion des Bohemiens errans en Europe , 629

philosophique dc Cambridge , 206 royale de Dublin , 627. litteraire ditc Iliimaniiets Gesell- scluift , d^' Berlin

d'econ. ruralc <lc Stultgard,4 i4- pour rencouragcmeut dcs arts dc Geneve J G39.

bourbonienne, de Naples , 643. academique, de Nantes , 660.

de medecine,.de Toulouse , iC3. d'agricullure , de Toulouse , 662.

des sciences et arts, dc Strasbourg, 427-

des leltres , sciences ct arts , de Mctz , 219.

libre d'emulalion, de Rouen , 660.

d'emulation , de Cambrai, 658.

de I'instruction publique de la Corse ,219.

de pharmacie , de Paris , 226.

dela morale chretienne, 6 Paris, 66S.

BiELiQuE aux Etats-Unis , 126. [P'oy. aussi le mot AcADt;!iiE.)

Source de bitumedecouverteau nord- ouest du Duck-Creek aux Etats- Unis , 197.

SouRDs-siiETs (instruction des) ii Phila- delphie, 200.

(Institution des) k Rodez (Avey- ron),427.

Souscription proposee pour I'hospice

du Saint-Bernard, 640. Southey. Voy. Wesley. Staiil (Mad. de), OEuvres completes,

1S8, A. ,540. Stafford. J'oy\ Loch. Stapfer, C.-A., 495- Starings Gedichltn , Syi. Stassart , C -B., 16 r. Staiistique , i59, 182, 202^4">4l5,

423. litteraire de Russie , 206. Stober, Griechenlands Erwachen ,

619. Slra/ilmans Finnische Sprachlehre,

557. Strixner, Collection litographiee dc

tableaux de I'ancienne ecole alle-

mande, 4i8- Style dcs oricntaux, 636. Substitutions (Des) prohibees par le

code civil , par RoUand de Vil-

largues, 177. Sucre, sa proprietu anti-vencneuse,

2l5.

SuiDK , 207 , 4'3 , 634.

SiMssE, iSz, 364, 4>9^ 49^7 '^7^) 63g.

DES MA.T1ERE3.

17

Tables chronologicas , 58o. Tableaux chronometriques , par Gof-

faus , 385. Tactique 6lectorale h I'usage de I'op-

position, 6o5. Tailtandier , G.-A. 289 , B. iSa, Tasso {Torquato)-, Lfttere e versi ,

15.7. .:,.-, . , _. , ,:

TsciiNOLdGiSi, aoS,.2i9, a%^j ■. ',j,/ Telescope perfeclionne par M.^fl^a-

mcye , a Aber.deep , .2q4;> .tt' Terence (Comedip^ idaj , tfaflluites en

vers francais , par Berger^ip^ 162. Ternaux. (Lettre de M.), membre de

la chambre des (leputes , a ses cor-

respondans , 6o4- Testament (Teite grec.dn noureau)^

par Valpy , 556. Theatre de M. J. Chenier, Sgj. remain (Ruines STun) , decouvertes

pres de Mandeure (Doubs) , 216. Theatres de Paris, 208, 445 , 6781 Thenard, Traite de cbiooie (ilemen-

taire , 169. . )

Thkologie, Religio!* kt Cpitb , 129,.

353, 364, 365 , 383 ,4oo, 4oi , 4;o5,

556 , 595 . 596 , 629 , 633. Thesmophoriis {De) . disseruit Au- gustus JFellauer, 56o. Thiebaut de Berneaud, G.-N,, 670. Thiesse (Leon) , C.-A. ,111. Thrige , Historia Cyrenes . d5y. Toile de Momie , portant des carac-

teres egyptiens qui paraissent etre

la marque de I'etoffe , 674. ToiC Kfalaioo-Sarof tms Ey^a)7r«f Batri-

xeua-t , 6o5. Torombert, Exposition des prlncipes,

ou Glassificaiion des sciences, etc.,

Torriceni , JJoracolo di Delfo , etc. ,

565. Tour de Londres (Histoire et antiqui-

t6s de la) , par Bailey , 62. Traductions nouvelles, en allemand ,

des classiques grecs et latins , 212. Tragedies de C. della Valle, due de

Ventignano , i58. Transactions {Philosophical), of the

royal society of London, 127. Treschow , Lovgivnings-Principies ,

564.

Tully. Voy. Paste.

TuKQCIE , 423 , 646.

AsiATIQLE , 4o4- TyPOQEAPHlE , 196.

u.

Ugoni (Camillo) propose la continua- tion de I'ouvrage biographique {Scriltoi*i d' Italia) du comte G. M. •Maizuchelli ,212.

I Della lilteratura italiana , 365.

Univehsitj?^ : de Transylvanie , i Lexington, 198;— de Breslau , 4>4; de Gopenhague , 634 ;— d'Erlan- geu , 656.

UaAisoGRAPHiE (Cours d'j, par Che- min Dupqi^iss, 186.

; ' t. 'K .'V A- •.

Valachie, JS7.

Valdes , Meiudo de cuenlay ruzon ,

567, Valle {Cesam della) , IVagedie, i58. Valpy' s., Greek testament, 556, VanCampen, Histoire des lettres et

des sciences dans les Pays-BaSj57i.

Voy. Miiller.

Velasquez, Interpretation des alpha- bets dont on faisait usage pour les legendes des monnaies anciennes d'Espagne , 568.

Venturi , Memorie el lettere inedite , i55-

Vargas, Diccionario geografico, toij.

Villenouvelle (Fondation d'une) dans la contree de Macquaire , ( Nou- velle-HoUande) , 623.

Vocabulaire bohemien , du professeur Palkowitsh, 635.

Volney, Les ruines, 173.

Voyages dans I'interieur de I'Ameri- rique, par Harmon, 554-

du missionnaire anglais Gampbell , dans I'interieur de I'Afrique, 4 10.

iGongo, par Smith , i5y.

en Armenie et en Perse , par Jau-

bert^ 186. dans la Grande-Bretagne , par Cli,

Dupin , deuxienie parlie , 171. en :6cosse, par Necker de Saussure,

5-4.

dans le nord dc rAllemagne, par Hodgskin, i5i.

2

18

aux Alpes et en Italic , par Monte-

mont , 395. aux Alpes maritimes, parF. E. Fo

deti, Sga. dans le royaume de Naples , par

Keppel Graven , 354. —dans la Grece, par Pouqueville,

A. ,33i. —en Grfece, par P. E. Laurent , 354.

souterrain , par Bory de Saint-Vin- cent , 586.

dans les Montagnes nwudites , par Leon Dufour, 586.

DBD^cocvEBTEs ducapitajne anglais W. Parry, 558; du commandant russe Vasilieff, 621 ;— dulieutenant King de la marine anglaise , 622.

sciEKTiFiQUBs : de MM. Waddington €t Hanburg, en jfegypte, 4io ; du jeune Witte, en France et en Angleterre , 44' ;— de plusienrs sa- vans am^ricains, auxiles Arctiques, 620; du colonel Francklin,aux In- des orientales, 621 ;— de M. Cail- liaud, en Nubie , 6a3, 626.

TABLE INAlYTIQrE DES MATIERES.

w.

Walkenaer , Recherches geographi- qnes sur Pinter, de I'Afrique ,i85.

Warner's [Richard) , Miscellanies , 356.

Was ist der Zeitgeist? i46.

Weyland , Pens^es de Jean Paul Richter, S^i.

Wellauer , Voy. Thcsmophories-

Wesley (Vie de) , par R. Sonthey ,

554. ■>! -. ; .

William, C..A.,53(i. - '- <'• Wurtemberg.statistiqne de ce royau- me, 4i5.

Young (Arthur) ) , Notice biographi- que, 4ii>

Z.

Zoog^ne (Substance appelee) , obser- vations sur cette pr^tendue d^cou- verte, 670.

ZooiOGiE, 4>i > 4ig<

riN DE LA TABLE DU ONllEME VOLUME.

ERRATA.

Page 19, ligne 26, Sonthampton, lisez: Southampton; p. 65,1. in, Sydney, lisez : Sidney ; p. i52 , 1. 24, 1'auteur ne decidail point la nega.' lii^e,\isez : se deciduit pour la n,egative; p. i53, I. 2fl, compose, lisez : compare; ibid. I. 23, la bihliotheque royale de Paris possede vingt- quatre manuscritidu Digeste, lisez : La bihliotheque de Paris possedevingi- quatre manuscrits des Institutes de Justinien, dont neuf avec le texle seuL et quinze avec des gloses ; elle a, en outre, plus de quaranle manuscrits du Digeste ; p. 161, 1. 25, miscelanea , lisez ; miscellanea ; ibid., I. 35 , Llorentr, lisez : Llorente ; p. 172 , 1. 24 , Barron , lisez : Bacon; p. 20 , J. i3, Magpour, lisez : Nagpuur; ibid., 1. 17, Sangor, lisez : Saugor;—' p. 296, 1. 21, Londrrs, lisez : Londres ; ibid., 1. 28', L. L. B., lisez •• L. S- B.; p. 207, 1. 5 , 6, 7 et 8, bibliotheques^ lisez : maisons de librairie , p. 218, 1. i5, 6'0/V, lisez : SoJtl; p. 224, 1., 27, les caracleres,lisct :

SUITE DE U ERRATA.

Ics ecriiures ;— p. 233, 1. 12 et 16, Borry de Sl.-Vincent, lisez : Bory deSi.- l^incent; ibid., derniere \igae, propriete, lisez : prosperiti; p. 239, 1. 33, iharmante, lisez : chantanle ; p. 242, au bas de la page, 3i' cahier , lisez : 32« cahier; p, 254, 1. 20, aferme^ lisez : enferme; p. 261, 1. 19^ ifforts, lisez : effets; p. 262, I. ib, ne se remplisse, lisez : se remplisse; p. 270, 1, 22, intitutions, lisez : instructions ;— p. 3oi, 1. la premiere nous <]ui offrira , lisez : nous offrira; p. 34 1, 1. 6, Gqyot., lisez : Guyot ; p. 35 1, I. 56, Vadjal, lisez: f^adjah;—p. 35 1, I. i4, Hiati, lisez Haiti; p. 552, 1. 4,forguhar, Visez farqhar; p. 557, ^- "°» Madiolani, lisez : Mediolani ; p. 369 , 1. S, Toi/ellanoz , lisez : Jofellanoz ; p. 43o. 1 . 33, da 5oj lisez : du 3o ; —p. 572 ,1. 18, 1 200, lisez : 200 ; p. 577, 1, 28 et 39, par le comte Beniouski , celle d'une comedie de Kotzebue, lisez : celle du. lomte de Beniowski , comedie de Kotzebue ; p. 617,1. 21, Champuaus, lise2; Champvans ; p- 663, 1. 33 , passage des bateaux, lisez ipesage des bateaux ; p. 672 et 673, sir Henry , lisez : M. Sirhenry.

2 FEB.95

DE L'IMPRIMERIE DE J. SMITH.

fj\)OU

)Qi6 ?0»R LE» AMIS DE LA LITT^RAXURK ANGLAJSE.

Un Aiiylais, liomuie deleltres, elabli a Paris, de- »eau I'un des coUaboratcurs de la Revae Encyulopi^ dique , desiran^, d'apres le plan et le but de ce recueil, faciliter les comrnunications scientifiques et litteraires entre I'Angleterre ct la France, offre de faire par- venir a Paris tons les livres anglais qui lui seront de- mandes, au mfimp prix pour letjuel ils se vendent a Lontlres, et de les fournir du jo an i5 de cliaque mois , pouryu que les deinandes aietit die faites avant le 20 du TOOis precedent. Les jjcrsonncss qui voudront se procurer dej livres angjais par cette voie, dcvront joindre a leur demande , adressee au Jiiireau central de la Jiet-'ue Kncyclapediqite , rue cif S "fir-Saint- Mic fie L , n" i^jie montant des oavrageSj et les faire r^clamer a la meme adresse , dans Ig terme indiqiie j dansle cas oit les ouvrages demandus ne seraient point arrive.*, ] argent depose serait rendu, a moius qn'oa ne voulut ai'endrt'l'cuvoi du mois suivant,

Libraires chez lesquels on peut souscrire dans lei pays

etrangerSi j^ix-la-ChapeUe.LaTiieUe &lB. Londres , Dulau et comj).

Amsterdam, G. Dufou j4rau (Suisse), Saucrlander. Berlin, Sclielesiuger; Ueme, Cjjas, au c»Hti»ei littery Bres/aK , Til. Korii. Bruxelles, Lecliavtier.

Bruges, Bo?;aert, > DumortieY. Nout'elle-OrlmnS, iourdan

Florence, Piatt

Ffil/ourg (Suisse), AloTse Eg-

gpiidorfciT. F^tincfon-Bur-Main. S«haeifer, G'sneve, J. -J. Pnsclroad. Lausatine^ Fischw; lieipsick. GiieshanlinM. Lie^, Jalhfau p^i e.

Ti-eiuicl et VViirlz. Madrid, Denn^e, Pei.^s. Milan, GitglfT, Vjsniara. Moecou, GsKHaePj—Ri*. Naples, fini-c1'. '

Neuchdtel (Suisse), Grestev,

I'alerme ( Sicile ), Pedonnc el

Moratori. Pi'tefsbourg , Sairit-Prorent,

Gr-aclf. Tubingen, Cotta. Turin, Bocca. Farsotfie , Glucksberg , -^ Za-

vadsky. f^/'tfnne t^utri<A«)i G<Srold.

Guadeloupe (Pointe-a-lltt'c), Plwlet ntue. Ih de-France f Port-Luuis), E. JBurdet.^

ON SOUSCRIT AUSSI A PARIS ,

Atf ntJi-EAtf DB ttinxcTioir, 1-no d'Enfei-Sarat^Michiel, n^ ifi;

OM doivent Stie envoves, fiancs de port, les livres, dessins

etgiavures, doutondesirel'annontJe, etlesL«itres,MAto>ircs,

Notices ou Exrraiis dt-i>tinc£ a ^tre'inseres dans ce Recaeil j

Chkz TREUTTfit E* WiiRTZ, rue de Bourbon, n" 17 ;

Fey et Gn.vviER, quai de'g Augustins, n" 55;

BfejfiGiE aiixe, boulerard PoiSsomiierCj n* 18 ;

Eymery, rue Mazarine, 3o j

SoifRT ]5T HoW9«Et, rue PaY(?c -Sainl-AaJdr^, b" 9 ;

Baudouin fier?*, rue de Vaugiraid, n'36;

CHASSETaATT ET HlCART, rue de ChoiSeul, n" 3';

Delaunay, PiticiBR, CoiiR&«,RD, aa Palait^Royal;

Madame CelI/IS, rue du Chcrche-Midj, n" 4 ;

Madame CAMiLtE-DEFiifeirr, rue da Marche'-Saint- HonorCj n" 4^

A LA Tent*^ Cabinet Litteraire tenu par M. Gautier, ancien milltaire, Galeiie de Bois, n" 197 , au Palais-Royal.

Atr Cabiket SPECIAL d'affaires, poiulalitte'rature, leS sciences ot les arts, place des Victoires, n" '6;

Aux. Ccrcle ct Salon liiteriiircs ^ rue Neuve-des-Petits-ChampS , n" 5> au premier.

Nota. I/i's oiivragcs annonce's dans la Revue se irouvent aussi chez ArTuiis BjiRTRASTD, rue Haiuefeiiillc, n" 25; EymeRY, rue Mazarine, n"5o, et PiOREX etRoussEf,, ru<! Pavtc Saint- Andid- dcs-Arcs , n" 9.

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iitiiTOmiiiifrflf

Tip. f, xMrniMT-BU; nE j. smith.