jjiit l-io'^-j. ( 33 '^ de la coliectioi. 97*^ LlVRAISOXf REYUE ENGYCLOPEDIO on -ANALISE RAISONNEE DES PIODUCTIONS LES PLUS REMARQUABLES DATjS LA UTTERATXJRE. U'.S SCIENCES ET I,ES ARTS. .i" Pour es ■Sciences physiques vx mathimatiqiies et les Arts industrieh : MM. Ca. UnuK, GtaARD, Wavier, de I'lustitut ; Ferry, Francoeur , Ad. Gon. niKHT, A. illCBEtOT, DE MONTGERY , MoREAH UE JONHES , QuETET^T, T. Bt- r.HARU, V iRDEW, etc. 2° Pou- 'Ss Sciences natureUes: MM. Geoffrot Saiht-Hilaire , de I'lnsUtnt; BoRT be .'uiHT-VirrcEHT, correspondaut de ITnstitut, Mathiec Bonapoos' de Turin; ^. GAtLioif , de Dieppe; V. .Tacquemont, etc. 30 Pom ,es Sciences mcdicales: MM. Bally.Damiron, G.-l", Doin, Amedee Ih/rAu, I ssAri, Gasc; Ger-sow, de Hanlbourg; Georoet; Legp.and; ije KiRCKBOl-.d'Anvers; R[G0l,i.0Tfils,d' Amiens. 4° Vov \e% Sciences philosophiques et morales , poUtiqiies , genriari'iiqucs et /liitoriqua, ■ MM. U. A. Julmen, de Paris, Fondateur-Dirtrtcur de la Hevue Encychpt itjue; Alex, de la Borde, .^omard. Artatjd, M. Avekel, Barbie iiu Boca E fik, Behjamin -Constant, Charles Comte, Deppimg, Du- 5» l>oi . la Lilteraturefrancaise cl etrangire, la Bihliographie , V Arckeolo'ie et les Bcii .r-Arts:MM. Andrieux, Amaury^Ddval, Emeric David, L^jmer- oiER, DH Segcr, de I'lnstitut;^!""- L.-Sw. Belloc; MM. J.-P. Bres Bcr- NO0P ril'v Chauvet, rHENEDOLLE, de Liege; P.-A. Corns , Fr. Degeorge DuMERSA • , Ph. Colbert, Heiberg, 1Ienric.es. E. Hebeau. Adguste Jullien M.'.Scmsis; LeokThiesspJ' F TtssoT, Villejtave, ,S. Vr.v A PARIS, AU BCTEAU CENTRAL DE LA FEVUE ENCYCLOPlfiDIQUE , BOS d'eKFER-S. -.MICHEL, N" 18; ARTHUS-BERTRAI^K LIBRAIRE. rue HAniE-FEUH^L^PSfli^aS. JAmiER 1827. CONDITIONS DE LA SOUSCRIPTION. Depuis le moisdejanvier tSrg, il parait, par ann6e, douze caliiers i , i8?.3, i8?.3, t8i4 ei- 182.^, au prix dc- 5o francs chacunt. Cbaque nnhee dt la Rcvnc Encyclopediqne est indcpendinte des .-innees qui prect^dent . et forme uue sorte dH Anniiaire sciemifi/ue et Urteraire , en .{ forts volumes iu-8", pour la p'iriode de terns inscritc sur le titre REVUE ENCYCLOPEDIQUK /^. /&(ro . SOia^MWMVid PARIS. DE L IMPROIEKIE I)E RIGNOUX , rue des Francs-Boiirgeois-S.-Micbel, no 8. REVUE ENCYCLOPEDIQUE, ou ANALYSE RAISONNEE DES PRODUCTIONS LES PLUS REMARQUABLES DANS LES SCIENCES, LES ARTS INDUSTRIELS , LA LlTTERATllUE ET LES BEAUX-ARTS ; PAR UNE REUNION DE MEMBRES DE L'INSTITUT, ET D'AUTRES HOMMES DE LETTRES. TOME XXXIII. PARTS, AU BUREAU CENTRAL DE LA REVUE ENCYCLOPJ^DIQUE, RUE d'enfer-saint-michel , n" i8. JANVIER 1827. « Totitcs les sciences sont les rameaux d'uiie meme tlge. » Bacoit. « L'art u'est autre cbose que le contrftle et le registre des raeillcures produc* tlons. ., A contr61er les productions (ct les actions) d'ua chacun, il s'engendre envie des bonnes, et meprls des mauvaises. » Montaigne. >i Les belles-lettres et les sciences, bien etudiees et bien comprises, sont des instrumens universels de raison, de vertu, de bonheur. » REVUE ENCYCLOPEDIQUE, ANALYSES ET ANNONCES RAISONNEES DES PRODUCTIONS LES PLUS REMARQUABLES DANS LA LITTERATUIiE, LES SCIENCES ET LES ARTS. I. MEMOIRES, NOTICES, LETTRES ET MELANGES. GOUP-DOEIL SUR LES PROGRES DES SCIENCES, DES LETTRES ET DES ARTS, EN 1826. Chaqbe siecle est marque par une sorte d'idee gene- rale qui le domine , par une tendance commune des esprits vers un meme but, par un besoin qu'eprouve Topinion , et que manifestent les ecrivains appeles a lui servir d'organes. L'hlstoire , consideree sous ce point de vue , ne nous offrirait pas seulement les crimes de lambition et de la politique, trop souvent recompenses par I'eclat trompeur d'une gloire fausse et funeste, mais les efforts ct les progres des peuples dans la carriere de la civilisation et du bonheur public. L'idee dominante , le besoin de notre epoque , c'est le T. XXXIII. — Janvier 1827. i a PROGRfeS DES SCIENCES ET DES ARTS, rapprochement, et, pour ainsi dire, \\\ confederation des honimes et des peuples, pour s'entr'aider, pour s'eclairer mutuellement; c estX esprit cP association , applique dans cliaque pays, et dans les relations des pays entre eux, a Tencouragement et au developpement de lagrlculture , du commerce, de I'industrie, des echanges , soit des clioses matcriellcs, soit des produits de la pensee et des rues de bien public, enlin, aux entreprises rapportees a I'utilite generale (i). Les peuples ne sont plus etrangers les uns aux au- tres; ils ne sont plus egares par cette politique barbare et insensee qui croyait qu'un Etat ne pouvait prosperer que par I'abaissement ou par la ruine des Etats voisins. On sent aujourd'hui generalement que le bien-etre de chacun contribue a 1 aisance et au bien-etre de tous; que le patriotisme trop exclusif , renferme dans les li- mites d'un territoire plus ou moins circonscrit, n'est qu'une sorte d'egoisme local ou national , toujours de- raisonnable et injuste ; que les gouvernemens et les peuples , au lieu de se nuire par des guerres sanglantes et ruineuses, ou par des prohibitions impolitiques, doi- vent etablir entre eux des relations de bienveillance mu- tuelle, des communications faciles et entierement libres; qu'aux rivalites liostiles doivent succeder une salutaire concurrence affrancbie d'entraves, une communaute de travaux et d'efforts pour etendre les conquetes de I'bomme sur la nature, pour faire participer successf- vementtoutes les contrees aux bienfaits des inventions, des decouvertes, des ameliorations qui sont propres a chacune d'elles , et qu'autrefois cbacune en particulier cbercbait a s'attribuer, a I'exclusion des autres, par une pretention odieiise de monopole et de privilege. La Revue Encyclopediqxje, qui prend de plus en plus le caractere d'une veritable institution de bien public, destinee a reunir dans un fonds commun, mis a la por- (i) Lc commencement de cette Introduction, at extrait , en grande partie, (I'an article portant pour Xhte-.VEsjN-it du siicle, que jai fait inserer dans un journal quolidieu , au mois de septerabre i8a6, et dont il a ete tire a part senlement cent cxemplaires, M. A. J. EN 1826. 3 tee de tous, les productions et les richesses intellec- tuelles de toutes les nations, continue avec perseve- rance, clepuis huit annees , a realiser cette conception qui est venue saisir tous les bons esprits, a satisfaire ce besoin qui s'est fait sentir a tous les cceurs genereux : unite des nations formant une seule famille , dont les membres epars sont lies par des rapports necessaires; — unite des connaissances hwnaines , formant le patri- moine et le vaste domaine que doivent exploiter de concert les liommes de bien , eclaires , industrieux et actifs de tous les pays , quelles que soient d'ailleurs les nuances de leurs opinions politiques ; — direction commune de Vactivite. pour ainsi dire, materielle, et de VactivitS intellectuelle des individus et des nations vers ce grand hut : amelioratiox de la coj«dition HUMAINE (l). Pour ameliorer notre condition , nous devons nous ameliorer nous-niernes, devenir plus sains et plus ro- l)ustes , plus instruits et plus habiles , plus vertueux et plus sages. Tout cela se tient, quoique lignorance et les prejuges aient long-tenis fait meconnaitre ces im- portantes verites. Elles acquierent une plus grande force et une influence toujours croissante , par la circulation, de plus en plus active, des nombreux ouvrages perio- diques qui torment en quelque sorte des Tables uni~ verselles de la civilisation comparee; qui mettent les na- tions en presence les unes des autres ; qui offrent de vastes repertoires , des expositions publiques et perio- dique^ , des Revues progressives de tout ce que les na- tions ont produit de plus remarquable ; qui transportent promptement au-dela des frontieres des royaumes et de (i) Ce BUT conimnn des sciences et des arts est signale, avec des deve- loppemens philosophiqnes et instrnctils, dans un Essai sur la philosopldc des sciences, qui est suivi d'un nouveau Tableau synoptiqiie des connais- sances humaines. L'esquisse et le plan de cetouvrage ont ete publics, dans le mois de decerabre 1818, et inseres dans les deux deruieis cahiers des Annales encyclopedlques. — L'oavrage merae , dont la premiere partie est imprimee, mais non pabliee , depuis six. annees, n'a pu etre encore ter- mine. /, PROGRfeS DES SCIENCES ET DES ARTS, la barriere ties mers les decouvertes , les precedes, les metliodes , les perfectionnemens, les connaissances ct les idees utiles qui autrefois restaient, pendant plusieurs annees, pendant des siecles entiers, enfermes, etcomme enfouis dans le lieu qui les avait vus naitre. Et neaninoins, ce grand bienlait dune communica- tion rapide entre les peuples (espece de tek'grapJiie uni- verselle)^ nest ni apprecie, ni encourage par ceux qui les gouvernent. Les petiles passions de nos pretendus hommes d'etat les aveuglent au point qu'ils voudraient, en s'appropriant la plus grande partie du fruit des sueurs de la classe laborieuse, et de la fortune de tons les membres de I'Etat , autrefois serfs et vassaux , puis sujets , et toujours les jouets et.les victimes de leurs oppresseurs , gener de mille manieres le travail et la liberte qui produisent ces richesses , objet de tons leurs voeux. lis ne voient pas que le resultat de leurs deplo- lables manoeuvres pour encbainer et opprimer serait de tarir les sources ou ils puisent les jouissances dont ils sont avides , et la puissance meme donl ils abusent si etrangement. Leur veritable interet, au contraire , serait d'encourager, de favoriser, parlous les moyens , le libre developpement de \ esprit (T industries gernie fecond de tout le bien-etre auquel la societe pent pre- tendre. Ces reflexions nous sont en partie suggerees par I'exa- men comparatif des Nations passees en revue dans noire Recueil, pendant I'annee 1826, el par la lecture de plu- sieurs Recueils analogues et auxiliaires qui, a I'insu nierae de leurs auleurs, et malgre leurs rivaliles quel- quefois bostiles , et la divergence meme de leurs opi- nions , concourenl au meme but. Nous citerons ici, avec un sentiment de satisfaction, comme d'utiles flambeaux qui distribuent au loin la lu- miere, et qui repandent les tresors d'une instruction variee : la Bibliotheque univcrsclle tie Geneve , donl Tori- gine est deja ancienne, et qui a soutenu dignement sa reputation; Texcellent Jonrndl (T Agriculture des Pays- Bas ; un grand nombre de Bevues el de Magasins anglais. EN 182G. 5 qui , malgre leur defaut de plan, leuv sentiment d'orgueil national trop exclusif , et la partialite souvent injuste de leurs critiques, ont le merite d'avoir ouvert, les pre- miers, la carriere dans laquelle les ouvrages periodiques des autres nations ne sont entres que plus tard , et n'ont peut-etre pas encore egale leurs devanciers (i). Nous citerons egalement plusieurs journaux americains, alle- mands, suisses , italiens, et surtout la Bibliotheque ita~ lietine, publiee a Milan, et \ Antologie de Florence. Nous citerons honorablement, en France, ie Globe ^ qui, bien qu'il manque peut-etre de plan et de methode, et qu'il ne conserve pas toujours assez d'egards et de mesure envers les anciennes ecoles philosophiques et litteraires, n'en occupe pas moins 1 un des premiers rangs pavmi nos journaux , par la variete, le choix et I'interet des sujets quil Iraite; les Annales de Geogra- p/ii'e et des Voyages et le Journal des Voyages; les Annales de Chiniie et de Physique, le premier, peut- etre, des Recueils scicnlifiques publics en Europe; les Annales de r Industrie; le Bulletin universel des Sciences , que nous avons annonce plusievu's fois comme un vaste et precieux catalogue des principales productions de Tesprit humain, dans les deux spheres scientifique et induslrielle ; la Revue britannique, compilation utile et instructive qui nous aidi^ a bien cbnnaitre I'Angleterre, par un choix judicieux des meilleurs articles de ses prin- cipaux journaux; la Bibliotheque alleniandc ^ publiee a Strasbourg, qui, bien que redigee sur un autre plan, doit nous faire aussi apprecier I'etat et les progres des sciences , des arts et de la philosophic en Allemagne; la Revue americaine^ fondee depuis peu a Paris; le Jour- nal des Connaissances usuelles, ouvrage destine a mettre a la portee dun grand nombxe de lecteurs, et surtout des classes pauvres et industrielles, les notions pratiques et les procedes nouveaux introduits dans les arts et metiers, (i) Tous ces Recueils sout annonces et appiecies dans notre Heriir sommalrc des outrages peiiodlques , publics Hans la Graude-Brrtagii''. (Toy. Rrv. Enc. , t. xxxii, p. 667 et siiiv.) 6 PROGRfeS DES SCIENCES ET DES ARTS, clont elles peuvent fairc de nombreiises applications; la Revue protestante ^ \ Encyclopedic modernc^ \ Encyclopedic porladve^ \' Encjxlopedie progressive^ la Bibliotlieque bcicn- tiflque et industrielle ^ etc., etc. — Tons ces ouvrages, et dautres encore, \e Bulletin de la Socicte d^ Encouragement pour r Industrie natlonale, le Journal des Savans, ou Teru- dition et la science reunissent de precieux niateriaux , les journaux de la Societe pour V amelioration de Venseigne- ment elenientaire , de la Societe de la morale chretienne ^ de la Societe de Geographic, de la Societe asiatique , le Journal des Prisons ; le Met cure du xix'^ siecle , qui ouvre un asile et quelquetois une arene a toutes les doctrines litteraires; les Annales des Sciences naturelles , dans les- quelles plusieurs jeunes naturalistes enregistrent avec soin tons les faits nouveaux et importans dont I'histoire de la nature s'enrichit chaque annee \ la Revue medicate, et douze ou quinze journaux consacres a la physiologic, a la medecine pratique, a Thygiene, a la pliarmacie, a la bibliographie niedicale; le Journal des Sciences mili- taires, le Spectateur militaire , et plusieurs Recueils qui, consacres a des sciences particulieres , lc5 considerent sous un point de vue general et philosophique , en pre- sentant leurs progres compares dans differens pays , et en indiquant leurs rapports avec dautres branches des connaissances humaines, sont venus, de nos joui's, avec des plans differens, et sous des formes variees a linfini, satisfaire au besoin de I'epoque, exploiter la pensee en- cyclopedique, et nous montrer les sciences, non plus, pour ainsi dire, stationnaires et immobiles , comme des monumens et des statues, mais progressives eten marche, consideroes dans leur action, dans leui-s developpemens , dans leur influence sur I'amelioration croissante des in- dividus et des societes. Si nous voulons maintenant jeter un coup-d'oeil rapide sur les travaux de I'annee qui vient de s'ecouler, que dirons-nous de 1826.^ Les annales de I'esprit humain en garderont-elles un honorable souvenir.'' Desormais, au- cun inlervalle de lems ne sera tout-a-fait perdu pour la raison; mais nous ne savons pas encore estinier avec EN 1826. 7 justice la part de chaque annee dans raccroissement de nos richesses intellectuelles. Seduits par I'eclat des de- couvertes , nous sommes trop disposes a perdre de vue les recherches et les observations qui les preparerent. Nous jouissons des sciences, des lettres et des arts, lorsque le genie , le gout et I'adresse les ont appropries a notre usage; et c'est alors seulement que nous les apprecions, suivant le plaisir qu'ils nous ont fait, ou en raison du bien que nous croyons en avoir recu : de meme que ceux qui ne cultivent point ne tienne.nt compte que des recoltes, et ne donnent aux labours et aux semailles qu'une attention tres-superficielle. Cependant, le teins employe a preparer les moissons qui nous alimentent , les oeuvres du genie qui nous eclairent et qui nous di- rigent vers la noble destination de Ihomme , les precedes nouveaux ou perfectionnes qui augmentent , varient et rendent plus abondans les produits de I'industrie : ce terns meriterait aussi d'etre cite avec reconnaissance; car on ne pent revoquer en doute I'utilite des travaux auxquels il est consacre. L'annee 1826 fut a peu pres reduite a cette sorte d'es- lime dont le public n'est point prodigue, et qu'il n'ac- corde pas toujours aux travaux qui en seraient le plus dignes. Entrons dans quelques details sur les productions lit- teraires les plus remarquables , sur les decouvertes et les inventions que Ion pent regarder comme apparte- nant a cette annee. En suivant la classification habituelle adoptee dans ce recueil, nous raettrons au premier rang le Cours nor- mal publie par M. Ch. Dupin pour V Enseignement in- diLStriel. L'influence de cet ouvrage ne se bornera point a la propagation des connaissances de geometric et de mecanique parmi les ouvriers , qui peuvent en faire im si bon usage; ces ouvriers, consideres comme hommes «t membres de la societe , recevront une existence nou- velle, contracteront des habitudes favorables a leur per- feclionnement intellectuel , et ne resteront , sous aucun 8 PROGRES DES SCIENCES ET DES ARTS, rapport, au-dessous des connaissances qu'ils aurons acquises. Les Sciences physiques et chimiques se sont enrichie* de nouveaux faits. Les travaux de nos savans ne pou- vaient demeurer infructueux; mais on a vu avec autant d'interet oue de surprise une dame (madanie Sommer- ville) s'associer a ces recherches difficiles, et faire des ex- periences sur la liimiere et sur le niagnetisme. La theorie des fluides imponderables, pertectionnee en Europe par les experiences et les applications du calcul , est livree , en Amerique , ii I'audace de I'imagination. Mais une autre sorte d'erreur s'est pi-opagee dans quelques par- ties de TEurope; avant de connaitre avec assez de cer- titude la cause de la giele , avant que la physique ait completement explique ce meteore , on a precede comme si I'experience avail appris tout ce qu'il faudrait savoir, et Ion a fait des paragreles avec autant de con fiance que des paratonnerres. Quelques zeles partisans de ces appareils se sont eleves avec force contre les socieles savantes qui ne partagent point leur enthousiasme, et contre les societes d'assurances qui offrent aux culti- vateurs une garantie dont I'efficacite nest point dou- teuse. Ces tentatives ne sont pas sans de graves incon- veniens. Si Ion n'a pas devine juste , si le succes ne repond point a ce que Ion avait annonce , c'est la science qui est accusee par le public decu. La Revue Encyclopedique s'est attachee a rappeler que, pour ap- pliquer un remede avec securite , il faut ou des ex- periences suffisantes sur son efficacite, ou une connais- sance plus approfondie de la cause du mal ; que les experiences fondees sur une hypothese peuvent etre utiles dans les recherches theoriques, mais qu'elles ne conviennent point aux applications usuelles , surtout en grand; que chacun est, sans contredit , le maitre de faire de telles epreuves a ses risques et depens , mais, que Ion doit s'abstenir de les conseiller. Tandis que les applications de la physique se mon- trent trop hardies en Europe , elles &ont plus sages eu EN 3826. - n Amerique; et par consequent, elles y sont plus utiles. La Societe philosophique americaine de Philadelphie nous a communique les travaux de M, Bull sur la quantite de chaleur degagee par la combustion des ditterentes sortes de bois employes pour le chauffage aux Etats- Unis, et des charbons de terre du nouveau continent compares a celui de New-Castle; et les resultats obte- nus dans les experiences analogues, faites par les pby- siciens de I'Europe, sont pleinement confirmes. Ainsi, les arts economiques ne manquent plus de donnees certaines pour regler i'eniploi des difterentes sortes de combustibles , et pour en tirer le meilleiu" parti dans les appareils caloriferes. De nouvelles machines pro- posees dans le nieme pays ne peuvent etre conside- rees jusqu'ici que comme des projets. On ne sait pas encore jusqu'a quel point I'explosion produite par la combustion de I'hydrogene f'ournira ini moteur plus puissant ou moins dispendieux que la vapeur d'eau; \dL force ascendante des aerostats proposes par M. Ge- net, au:tc'Etats-Unis , attend encore la sanction des epreuves en grand et dun assez long usage. Mais , ce que Ton admire le plus dans ce pays des gran des con- ceptions , c'est que Ion y termine si proniptement , dans des conlrees piesque desertes , des entreprises qui con- somment tant de tems au milieu de nos populations entassees sur un petit espace. Aux Etats-Unis, quelques annees suffisent pour ouvrir une navigation interieure entre des provinces eloignees ; une artilierie plus formi- dable estplacee sur les vaisseaux de guerre, etc. Tandis que nous deliberons lentement et que nous nous pres- sons encore moins d'executer ce qui presente quelque apparence de nouveaute , TAnierique du Nord avance a grands pas dans la carriere des perf'ectionnemens : I'etude de la nature n'y est point entravee; toute' ob- servation exacte y est bien recue et mise a profit. La Geologie, si timide aujourd'hui sur le continent euro- peen, y a presque discontinue ses recherches ; mais elle les poursuit en Angleterre et dans le nouveau conti- nent. Graces a la Societe geologique de Londres et aux lo PROGRES DES SCIENCES ET DES ARTS, iionibreux explorn tears repandus sur le sol ties Etats- Unis, I'annee cleniiere a beauooup ajoiite a nos con- naissances sur la croiite superficielle de notre globe. Quant aux autrcs divisions de Xhistoire naturelle, elles n'ont ete negligees nulle part, et la France a conserve son rang parnii les nations qui les cultivent avec le plus de succes. C'est dire assez que les sciences medicales ont ete aussi I'objet de travaux imporlans. Remarquons, a ce sujet, que la France et I'Angleterre semblent dif- ferer bcaucoup I'une de I'autre , quant a la maniere de cultiver les sciences. Dans la Grande-Bretagne , ou I'es- prit d'association a passe dans les habitudes , et, pour ainsi dire, dans les nioeurs, les societes savantes sont laborieuses et pi'oductives : chez nous, il y en a bien peu qui se livrent a des travaux communs , ou qui sti- mulentefficacement'kis travaux isoles. Si Ion recherche, dans quelques annees, ce que Yyicade/nie de inedecine aura fait pour les sciences medicales, on verra qu'elle recueille les decouvertes sans y prendre part, qu'elle conserve ce qui n'eut point ete perdu , et qu'/iUe a pre- tendu metlre entre les connaissances acquises un oi'dre qui ne pent etre celui dime bonne theorie, s'il est I'ou- \rage de plusieurs intelligences. Les veritables acade- mies de medecine sont les ecoles ou I'enseignement des sciences medicales est confie aux professeurs les plus distingues j c'est la que les decouvertes sont mises a leur place, que les faits se coordonnent , que les theo- ries sont preparees dans le silence du cabinet, compa- rees a I'ensemble des observations , rapprochees de la verite par des efforts continuels: tel est I'effet ordinaire, telles sont les inspirations des nobles fonctions de pro- fesseur. Ainsi, en 1826, les sciences niathcmatiques out fait naitre des ouvrages tres-estimables , et se sont repandues de plus en plus dans les ateliers : la theorie de Velectricite et du tnngnetisine s'est enrichie de faits nouveaux, et prend chaque jour plus d'extension : apres avoir rendu compte des effets mecaniques de I'aimant et de 1 electri- cite, elle essaie I'explication des phenomenes chiniiques, EN 1826. 11 et prepare une revolution qui exigera peut-etre une nouvelle nomenclature. Uhistoirc naturelle a grossi ses catalogues 5 Vanatoniie et la physiologie ont sonde quel- ques mysteres de la nature organisee ; Yindustrie nest pas denieuree stationnaire; Y agriculture, toujours plus eclairee, se dispose a rapprocher du Nord I'education des vers a soie, en leur ofirant une autre nourriture que les feuilles du miirier. Mais Ihomme ne borne point a ces paisibles travaux I'exercice de son intelligence et de son activite; il veut etendre sa domination, non-seule- ment sur la nature, inais sur ses semblables; etdela, tous les maux de I'etat social et les remedes a ces maux : ori- gine et necessite des sciences morales et politiques. L'annee 1826 n'a ete que trop feconde en ecrits sur ces deux sciences, puisqu'il faut continuer a les regarder comme distinctes, les premieres s'atlachant a suivre les maximes de la divinite nieme, et les autres ne quittant point la banniere de Macliiavel. Notre Revue meme atteste que les discussions politiques ont envahi les pres- ses, dans toutes les parties de I'Europe ou cet organe de la pensee n'est pas reduit au silence. Quoique nous ayons aussi mentlonne avec soin les ouvrages les plus importans sur la statistique, surl'economie politique, sur la science de I'entendement bumain, sur la legislation, cbacun de nos cahiers contient plus d'analyses ou d arinonces d e- crits sur la politique proprement dite, que sur tout autre sujet. II a fallu poursuivre cet ennemi des societes sous les travestissemens qu'il sait varier suivant les cir- constances , affectant I'exterieur de la morale, osant meme se couvrir d'un masque religieux, toujours par- tisan du privilege du pouvoir dun maitre, et non de la puissance des lois. Mais, tandis que les interets sociaux, attaques a la lois par toutes les passions ambitieuses, appellentla raison publique a leur secours, au milieu de cette guerre defensive que nous sommes reduits a sou- tenir sur notre propre territoire, des verites nouvelles ne viennent point s'oifrir : des rapports encore inapercus ne sont point ajoutes a la somrae des connaissances; I'instruction se repand dans les tetes, et non pas dans li PROGRES DES SCIENCES ET DES ARTS, les livres. Les progres de cette nature, tres-essentiels^ pour le perf'ectionnenient social, sont annonces par la vogue des bons ecrits, el non par la publication de nou- veaux ouvrages dont 1 analyse entretient la presse perio- dique. C'est ainsi que I'annee 1826 s'est ecoulee au mi- lieu du choc des sentimens genereux et des opinions philantropiques contre toutes les passions anti-sociales; et, tandis que le combat etait le plus bruyant et le plus aninie, que la presse fournissait des armes aux deux par- tis , que les combattans rassemblaient toutes Itin-s forces pour I'attaque et pour la defense, la raison publique ob- servait en silence et avec un vif interet ses inlrepides defenseurs; elle rccueillait leurs pensees, les meditait, se les appropriait; elle recherchaitlinstruction avec ardeur, et remontait jusqu'aux sources on elle esperait puiser una doctrine plus pure. Les debats politiques de 1826 n'au- ront done pas ete sans une tres-grande utilite sociale, ■quoiqu'ils aient detourne I'esprit de recherche, et par consequent eloigne les decouvertes dans les sciences mo- rales et politiques, dont le hasard ne lavorise pas les pro- gres comme ceux des sciences naturelles, et qui sont entierement une creation de I'esprit humain. UHistoirc n'a point encore abandonne la fausse route des resumes. Plusieurs de ces ouvrages, sauf quelques exceptions honorables, confies a des ecrivains jeunes et sans experience, qui n'avaient point fait des etudes pre- paratoires suffisantes, et auxquels on n'accordait ni le tenis ni I'espace necessaires pour la tache qu ils entrcpre- naient, n'ont offert que des ebauches imparfaites , tra- cees avec precipitation, ou des extraits indigestes de tables des matieres d'anciens ouvrages, remplis de la- cunes et d'impostures. Cependant, plusieurs produc- tions historiques, dignes d'etre transmises a la posterite, ont vu le jour en 1826, et nous citerons seulement ici les importans ouvrages deMM. de Sisi?zondi, de Segur, Dani^ Guizot, Thierry, Barante, Thiers; Lingard, en Angleterre; Pertz, Schiosser, etc., en Allemagne; \Histoire de Don Juan, par M. Duniesnil, et le tableau d une grande catastrophe toute moderne, trace avec uneenergie etune EN 1826. 1 3 slmplicite antiques , VHistoire du siege de Missolonghi , par M. Augmte Fabre. II ne nous a pas toujours ete possible d'offrir anos lecteurs desanalyses de ces outrages, redigees avec letendue et les developpemens qu'ils auraient meri- tes;c'estune ol)ligationque nousneperdonspointdevue. L'Amerique du Nord a donne Futile exemple de re- cueillir les materiaux dune histoire nationale, et de les coordonner, travail trop au-dessus des forces dun seul homme. Nous pounions I'imiter, et peut-etre n'avons- nous aucun autre moyen d'arreter I'audace des faussaires historiques, si nombreux et si actifs depuis nos dissen- sions polltiques, et toujours prets a denaturer les faits, suivant les besoins du parti qui les emploie. L'anne'e qui vient de s'ecouler nest point remarquable par ses productions en litterature , quoique nous n'ayons manque ni de vers ni de prose, dans le genre le plus eleve, et dans les compositions dramatiques, les epitres, les chansons, les dissertations pour et contre le roman- tisme, etc. Lorsque le genie se repose, le gout a la pre- tention des'epurer, et quelquefois il s'altere ; niais une annee ne suffit point pour qu'il eprouve un changenient sensible en bien ou en nial. Nous sommes , a cet egard , en 1827 , ce que nous etions, a I'origlne del'interminable dispute de mots entre les classiques et les romantiques. Nous n'avancons point, et peut-etre avons-nous com- mence a retrograder, au moins dans quelques genres de compositions litteraires. Mais, ce qui tient moins a Tima- gination qu'au raisonnement a fait des progres sensi- bles; en general, quoiqu'on neglige trop et I'etude de la langue et les convenances du style, on ecrit sur tous les sujets avec plus de suite et de methode. La partie elementaire et mecanique des beaux-arts, celle qui aide les arts industriels s'ameliore; elle etend de plus en plus son influence bienfaisante a tous les travaux de I'industrie qui peuvent la ressentir. Le nombre des ecoles de dessin s'est accru, I'annee derniere, et bientot ces utiles etablissemens repondront aux vues genereuses de leurs fondateurs. A mesure que I'etude des formes fera des progres, il est a desirer qu'elle ne 1/, PROGRES DES SCIENCES ET DES ARTS, soit pas confiee a rimagiriation seule, quelle se lalsse guider par la raison , et que I'oeil s'accoutuine a trouver beau ce qui est bon et couvenable a tous egards. Nos peintres et nos architectcs out encore des prt^juges qui nuisent a la perfection reelle de leurs ouvrages ,* et dont ils ne seront debarrasses qu'apres s'etre livres a des etudes plus approfondies. L'ecole de peinture liistorique, dans I'opinion ile quelques artistes qui pourraient servir de modeles , degenere et prend une iausse direction. Si les observateurs pensent que cette esquisse tres- incomplete de I'annee 1826 presente neanmoins les traits principaux de I'etat actuel des societ.es , et que la direction de I'esprit bumain y est tracee avec exac- titude, notre travail approcliera de son but. Nos efforts tendent sans cesse a le perfectionner ; et nous conti- nuous a reclamer le concours et I'appui de tous les amis des connaissances utiles. Les DEUX TABLEAUX soMMAiRES ci-apres, contenant I'indication du noinbre et de la nature des articles con- sacres, soit aux differentes parties des connaissances HUMAiNEs, soit aux differentes nations, dont se com- posent nos quatre volumes de I'annee 1826, signaleront a nos correspondans les lacunes qui existent encore dans I'execution de notre plan , 011 cbaque pays n'ob- tient pas toujours une etendue pioportionnee a I'im- portance de ses travaux; et nous aimons a croire qu'ils voudront bien redoubler de zele et d'attention dans leurs recliercbes pour nous aider a remplir ces lacunes , et a ne rien omettre d'important (i). M. A. JuLHEN , de Paris. (i) Les personnes qui voudront connaiire a fond le plan, Tesprit et le BUT de la Revue Encyolopedique, trouveiont, dans une note do Ylntro- ductioii de I'annee derniere (Janvier 1826 , t. xxix de la collection , p. 2 ) , lindication des principaux arli'cles inseres depuis huit annees, qui se rapportent au plan general de notre Recueil central de la ch'ilisalion. E^ 1826. j5 I. RESUME lies articles, classes par sciences, qui sont cori- tenus dans les dottze cahiers mensuels de la Revue Encyclo- l>itterature, ancienne etmoderue, francaise et etraugere; Grammaire generale et Philologie ; Critique litteraire et Poesie OEuvres completes, eboisies, et Me- langes Theatres Beaux-Arts Journaux et Outrages periodiques. Academies, Societes savantes, litte- raires , de bienfaisance et d'utilite publique Necrolosie TOTAUX. les deux des et du DulUtin bilUogra. ph.que. 49 25 23 77 4t 33 26 1 6 84 Si 35 23 ii3 23 5o 177 46 3or i34 34 69 247 Nouvelle. scienti- fiques et 63 72 125 86 662 59 lO 35 6 29 14 gr 4 42 3r 72 3 i6 29 55 35 5 1 16 100 4 85 4 39 47 70 20 i33 10 33 I r (ii 9 1 86 20 66 IJf) 97 141 248 162 95 2,453 >6 PROGRKS DES SCIENCES ET DES ARTS , EN 182G. II. RESUME (ICS ARTICLES, CLASSES PAR NATIONS, quisont contenus dans les douze cahiers mcnsucls de la Revue Ency- clopediqiie, publies en 1826. (Tomes xxix, xxx , xxxi , XXXII de la collection. ') NOMBRE d'oUVRA- d-ARTICES anuonces dans les J,ins deux d'ovdre. DKSIGNATION DES PAYS. los ileiiX sections Aes et Ju BULLETIN BIBLIOGRA- PRIQUE. sections des et des FIQUES et TOTAUX. Amerique. I. Etats-Unis , et qiielques autres par- ties (IcrAmeriquc septeDtriouale. . 42 3S 80 4 2 6 3. I 10 It 4. Cdlombie et divers etats do I'Ame- 5. 5 I 17 i5 22 16 ASIE. 6. 7- 8. 5 4 i3 9 i3 OCEANIE oil AUSTRALASIE » I I Afrique. 9- Egypte ct colouies europcenoes. . Europe. " It II 232 42 274 84 1 1. Ru.ssie 44 40 12. Pologne , 20 7 27 i3. Suede 5 7 12 14. i5. 16. 6 6 12 27 i6 43 . AUeraagne : Autriclie, Bade, ba- viere, Confedi ration germauiqiie , Hanovre , Hesse, Priis.se, Saxe , '7- 18. loq ■4 41 29 I. TO 53 Suisse Italie loq 47 i5fi 19- Grece, et ties louienups 4 4 2 5 " 21. 22. a3. I 85 63 45 46 t i3o 109 Pays-Bas France, Departemens iK. r,oo6 216 1,222 '.79' 662 2,453 '-J CAMERIQUE. Lc monde est aiijourd'hui riche pour nous en grands spectacles. Depuis que toutes les communications sont deve- nucs si faciles entre les hommes, depuis que les dangers, les longueurs, les difficultes des voyages ont presque disparu, que le commerce met avec rapidito en rapport tons les climats, toutes les industries et toutes les productions de I'univei-s, depuis que la pcnsee ecrite circule avec plus de rapidite encore, que nos livres se repandent dans toutes les parties da moncle, et que toutes en retour nous envoient leurs journaux, notre interet se porte sur la race humaine tout entiere. Ce ne sont plus, comme au moyen age, les iulerets de notre cha- teau, de notre village, auxquels nous bornons notre vue; a chaque generation I'horizou de I'liomme s'est etendu; il a compris successivemcnt sa ))rovince , son pays, ses voisins, I'Etirope, et aiijourd'hui I'univers. Ce progres dans notre intelligence et dans notre philan- tropie n'est pas un des raoins honorables pour la genera- tion presente : en elevant notre vue, en generalisant nos idees, il nous rendra et plus sages et meiileurs. Nous nous compren- drons mieiix nous-meines, en observant I'homme parlout a la fois; nous aurons plus d'indulgenco , plus de commiseration pour la race tout entiere, qiiand nous nous serons micux compris nous-memes, Mais, independammeut de ce point de vue raoral, le spectacle de I'univers attire encore nos regards, comme simple curiosile; il nous eveille, il flatte meme noire vanite, par les grands evenemens dont nous sommes temoins , comme si nous y avions choisi nous-memes notre place. Tetais la, se dit-on a soi- mcmc avec un certain orgueil, au souvenir d'une victoire; Je I'ai vu , au souvenir d'un grand homme; et a ces mots, nos neveux nous regardent avec un etonnement mele d'admira- tion , comme si la grandeur de la chose passee se refletait jusque sur nous. T. xxxni. — Janvier 1827. 2 iS L'AM^RIQUE. Parmi ccs speclacles que doniie notre sieclc, ct ilont la pos- terite s'emerveillera rt demanclera comple aiix siirvivans d'entre nous, comnie ii dcs tomoins curieux, il en est un qui ne tixe point peul-otre assez noire attention, ct qui dans tnoins d'un Steele pai;iitia sans doiite le j)lus merveilleux de tons ceiix de I'histoire modcrne. Nous assistous a la naissance des plus giandes nations, dcs nati.ons qui semblcnt destinees i tenir un jour le sceptre de la puissance, de la richcsse et de rintelli^'ence. Nous les voyons naitre, non point isolement, mais toutes a la fois, ct toutes avec des moyens de prosperite et d'accroissement qui n'avaierit etc donnes ;» aucun autre peuple a sa premiere orii,'ine. Au moment du bonlcverscment de I'euipire romain, It-s vaincus designerent la Scandinovie, d'oii ils voyaient sortir tanl de flots de barbares, comme la grande fabriqne des nations, officina gentium; e'etait plus encore la fabrique de ces troupes de brigands qui ont desolc la terre : aujourd'hui, u plus juste litre, I'Amerique devient la fabrique des nations, la fabtique de celles qui doiveut peuplcr le moude, le civiliser, et Ic delivrcr des derniercs et honteuses chaines de la barbarie. Plus de cent peuplesuouveaux, arrives a rindepciidance pendant la duree d'une seule generation, y existent deja ; une autre cenlaine peut-etre est prete a eclore. Be toutes parts, la terre des Ameriqiies enfante des republi- ques, des confederations, des Etats reclamant I'independraice. A la vue d'un si grand mouvement, on voudrait consulter I'avenir sar la dcslinee de tant de jieuples nouveaux; on vou- drait pouvoir comprendre ct le sort qui kur est reserve, et le sort que doit attendre d'eux Tespece humaine. Le livre du Desfin dcmeure ferme pour nous; mais nous pouvons du moins diriger nos conjectures, a I'aide de TAllos des deux Ameriques public I'anncc derniere par M. Buchon (i). Cet ouvrage qui reunit en 63 cartes grand in -folio, tout ce (l) Atlas geographiqiie , hiitorique et chronologique des deux Ame- riques et dcs lies adjaccn:es , traduit de I'Allas execute en Amerique d'apr^s Lesage, avec de nombreivses corrections et augmentations; L'AMERIQUE. 19 que Ton sail aujoincVhui sur la geographic, la statisliqoe, I'histoire et le droit politique de I'Amerique, repond d('j;\ en parlie a la curiosite avide avec laquelle nous etudions le pre- sent, pour comi)rendre par liii I'avenir. On ne peut guere detacher ses yeux de ces vastes iableaux qui repondcnt a tant de doutes et a tant de conjeelures ; on s'elonne de tout ce qu'ils nous apprennent, et plus encore de lout ce qu'ils nous font de- sirer de savoir. Cherclions, en combinant ces tableaux, en comparant le monde nouveau avec le monde ancien , a nous faire unc idee un pcu precise de la revolution qui s'accoinplit, de rayciiir qu'elle prepare, et aussi de ce qu'il nous reste a savoir pour connaitre vraimcnt I'Amerique. Nous dcmandons pardon a nos lecteurs de leur rappeler a cette occasion quelques notions tout-a-fait elcmentaires de geographic; mais ce sont precisement de ces grands traits graves sans reflexion dans notre memoire des nofre enfance, que nous pouvons tirer de plus surs pronostics sur I'aveiiir. L'Amerique civilisec et independante ne s'etend point au- jourd'hui jusqu'aux regions gLicees, qu'on atteint plutot dans cet hemisphere que dans le notre ; elle finit vers le 5o® degre de par J.-A. BucHON. Paris, iSjS; J. C. Carez, editeur, rue Haute- feuille, no 18. i vol. gr. in-fol. L'ouvrage americaln ne porte point de nom d'auteur ; il est inti- tule : A complete historical , c/iroiiological and geographical American Atla'i ; being a guide to the history of North and Soulh America and the IVest Indies, to the year 1822. Philadelphia, 1823 ; Carey and Lea. In-fol. Cet atlas est compose de 53 feuilles; le fraricais en con- tient 63 : mais les additions ne se bornent pas a ces 10 fenilles nouvellss ; les cartes generales de I'Amerique, celles dn Mexique, de la Colombie, de toiites les iles des Indes occidentales , sont re- faites d'apres des documens plus certains. D'autres sont senlement corn'gees; les notes statisiiques des anciennes cartes sont ou abso- lument nouvelies , ou du moins compleldes jnsqn'a nos jours. Enfin , il n'y a guere que les 28 cartes des Etats de I'Union anglo-am^ri- c^ine qui soient restees confornies a I'Atlas americain. ao L'AMIlRIQUE. latiliuJe nord , et le /jO® tie latitiule sud. Nous supposons que c'esl clans ces limitcs que M. Biiclion lui donnc environ 12 millions de milles canes, cinqnante fois I'etendue de la France (i). l/Anglcterre et la Russie se sont fait assurer reciproquement par des Irailes I'espace qui s'etcnd dc cette limite moyennc jusqu'au pole arctique. Mais la plus grande partie de ce conti- nent est encore absolument inconnuc, et ses habitans sont loin de soupconner qu'il soient sujets du roi d'Anglelerre ou de I'empereur de Russie, dont ils n'ont jamais entendu prononcer le nom. Une partie comparalivement asscz petite dc ces re- gions polaires cedees a rAiiglctene est a moitie civilisee,et celle-la s'elend dans Ics regions teniperees; car sa poiute me- ridionale atteint le l\i^ degre(2). Le Canada avec ses depen- dances conipte aujourd'liui 700,000 habitans. La Russie se dit maitresse de plus quarante mille litues carrees dans la partie nord-ouest de rAmerique, niais la region la plus meridionale. de ses possessions glacialos est a peu pres a la latitude de Petersbpurg, ou au 60^ dcgre. La population de ces deserts nc monte pas a 5o,ooo ames, donl a peine mille sont sujets des Russes (3). Le continent meridional que les nations civiliseesne se sont point approprie, et qui est designe dans les cartes sous le nom de Patagonie, comprend environ 3i,aoo lieues carrees, sur lesquelles la civilisation s'etendra aussi un jour (4). Le systeme federatif domine dans rA.merique indepcndante, et il parait destine a s'y etenc're encore. La confederation des tlats-Unis compte viugt-quatje n-publiques constituees, une bien pres de I'etre, cinq qui sont encore en embryon, un petit £tat, en fin, qui appartient a I'autorile federale. La Confede- ration du Mexiqueen compte vingt-quatrc; celle de Guatemala ou de rAmerique centrale, sept; celle de Rio de la Plata sur la- (i) Carte n" i. (a) C. IV. (3) C. V. (4) C. ITU. LAMtolQUE. a I quelle I'atlas des Americjiies iie contient point Ics derniers icn- si ignemcns surveniis depuis sa publication, en compte plus de vingt (i). II est bien piobable que la Colombie et la lepiiblique dv Bolivia deviendrout a leur toiir des gouvernemens federa- lifs : le menie sort attend peut-etre le Bresil, le Peroii et Ic tlhili. Chacune enfin des anciennes confederations s'ostmenagee d'avance le moyen de former des Etats nouveaux, lorsque sa jiopulation se sera etendue sur des districts qui, encore aujonr- d'hui, soiit incultes ou deserts.. Ces confederations cependant ne ressemblent nulleuient h celles que I'ancien nionde nous a fait connaifre. Celles-ci etaient lormees entre de petit€S villes tres-rapprochees; celles d'Amc- lique entre de tres-grands Elats, qui occupent entre eux un espace superieur aux plus grands empires. A la reserve de deux Etats, Rhode-Island et Delaware, qui sont infiniment plus pefits que tous les autres, il n'y a pas une des republiques confederees de I'Amerique qui n'occupe plus d'etendue que Ics confederations tout entieres de la Grece et de I'ltalie anti- ques : il y a bion peu de ces republiques qui ne soit plus grande que la Suisse ou la Hollande, les j)lus grandes des federations modernes; la moyeune parmi ces republiques de- passe I'etendue des monarchies du second ordre, tclles que le Danemark, la Baviere, la Saxe, les Deux-Siciles ou le Por- tugal ; les confederations elles-memes enfin occupent chacune plus d'espace que les plus puissantes monarchies des terns anciens ou modernes. En effet, les Etats-Unis couvrent une surface de 2,076,400 milles carres, ou 23o,7i i lieues de vingt au degre , environ neuf fois I'etendue de la France actuelle. Le (i) Les deputes de quiuze republiques sont aujourd'hui reunis au Congr^s des provinces •unies de Rio de la" Plata, d'apr^s I'alma- nach de Buenos-Ayres pour I'annee 1826. Le Paraguai et quelques autres etats auxquels on a reserve une place duns I'Uuion, ne veu- lent pas la reconnaitre; d'autres enfin, au nombre de sept, ont ete reunis a la republique de Bolivia , .i laquelle une constitution fede- rative est promise. 22 L'AM^RIQUE. Mexique a au moins i5o,ooo lieues carrees; la Plata au raofns 100,000, tandis que Gualemaia n'est gneie plus grand (jue I'ltalie; on iui donne seulemenl 16,7/19 lieues carrees (1). Le phis pi-lit de tons les Etats de rAmerique, Rhode Island, n'a que i,36o niilles, ou i5i lieues cairees, et Delaware n'cn a que 2,068. C'est a peu pres la grandeur, pour le premier, du canton de Vaud, et pour le second , du canton de Berne. Six autrcs ctitre les anciens Etats presentent une nioyenne de g,ooo milles Carres, ou 1,000 lieues, environ I'elendue de la Toscanc pour chacuu. La nioyenne des seize aulres passe 45,800 milles canes, on 5, 000 lieues, et c'est I'etendue qu'ou donnera aux nouveaux territoires, a mesure qu'on les consli- tuera. L'etendue de chacun des iLtals du Mexique, de Guate- mala et de la Plata n'est point encore mesuree; mais elle ne sera pas moins considerahle. A cote de ces quatre confederations se langent quatre repu- bliques colossales, la Colombie, le Perou, Bolivia et le Chili : leur etendue n'est que tres-imparfaitement conniie; niais Ton pent cstimer la Colombie a (92,000 lieues carrees) trois fois l'e- tendue de la France; le Perou a ( 41,500 lieues) une fois et demie; Bolivia, a moins d'une fois; le Chili a la moilie de la France ( i4,3oo) (2). Au milieu de toutcs ces republiques, un seul empire, mais constitutionnel, le Bresil, a dix fois l'eten- due de la France (257,000 lieues carrees). Les Guianes fran- ^aise, anj^laise et hollandaise, enclavees entre le Bresil et la Colombie, sont soumises au regime des iles et non du conti- nent de I'Amerique. La population, il est vrai, de ces vastes regions est bien loin (i) M. de Humboldt ne donne aux fitats-Unis que 174,300 lieues carrees, de ao au degre equinoxial , et au Mexique 65,83o, parce qu'il ne comprend point, dans ces deux confederations, les regions inconnues qu'elles s'atlribuent. D'auire part, il donne 136,770 lieues carrees aux provinces unies de la Plata, avant les partages qu'elles or.t subis. (al C. LIU. L'AMllRIQLE ^"^ jIo se proportionner a leiir immense etcnduc. Lts Etals-Unis out plus ooo 1 Indiens bravos, ou Independans. 5oo,ooo j (Blancs 200,000 ] Mulatres et negres Sao.ooo ( , „ - j Indiens soumis 43o,ooo ''^So.ooo ' Indiens independans. Araucans. 53o,ooo I iBlancs .- . . . 476,000 1 Mulatres 3o5,ooo I Negres 70,000 } 2,000,000 Indiens soumis 930,000 I Indiens independans 220,000 / (i) Presq'ue tous ies Etats libres d'Amerique ont fixe par leurs lois una epoque a laquelle I'esclavage doit etre aboli; mais, jus- qu'ici , aucun d'eux n'a prepare I'etat social qui devra suiyre : aucun ne semble prevoir comment il effectuera un si grand changement. Dans plusieurs fetats de TAuierique ci-devant espagnole, les nm- latres paraissent exercer une tr^s^grande influence. L'AMjfeRIQUE. 37 par les homines de peine dans les societes europeeinios : ils doivent elevcr les negres libres et tons les honimes de cou- leur jusqu'au nivean des honimes blancs. Tout le monde convient, meme aux Etats-Unis, des dangers de I'esclavage, de la necessite d'y mettre un terme , et Ton n'y a cependant pas encore fait un pas vers radoucissement du sort des negres, vers leur protection par les lois et les magistrals , vers leur affranchissemenl. On s'excuse sur I'ex- treme difficulte des mesiires a prendre. EUes ne sont pas ce- pendant si difficiles , puisque nos pei'es, en Europe, tout barbares qu'ils etaient, y o'nt bien reussi. Les trois quarts des Anglais, des Francais, des Allemands, ont etc esclaves, puis serfs, puis roturiers, puis libres. Aujourd'hui meme, un affranchissement graduel s'opere en Russie , en Pologne , en Boheme , en Hongrie. Avec des esclaves, on ne pent pas faire tout a coup des paysans anglais ; mais on pent du jour au lendemain les elever au rang des serfs russes et meme des metayers ; le serf russe , qui en retour pour la cabane et I'eten- due de terrain qu'on lui cede en toute propriete , est oblige de donner a son maitre un certain nombre de journees de travail, de cinquante jusqu'a cent cinquante par annee, est soumis , pendant ces journees de service , aux chatimens corporels; cependant il se sent homme, il sait qu'il est sous la protection , quoique imparfaite, des lois. Le metayer qui, sur le terrain qui lui est donne pour vivre avec sa famille , fait tons les travaux sous la direction du maitre, et partage toutes les recoltes , se sent libre , et se conduit en homme iibre , quoiqu'il soil en meme tems le serviteup du proprie- taire qui a le meme interet que lui (i). Certes , ii est triste de devoir reprocher aux legislateurs americains de n'avoir pas autant de sagesse , d'humanitc et de prevoyance que le (i) Voyez, tant sur I'exploitation par corvees que sur cellc a moitie fruit, les Nouveaux Principes d'economie politique de I'auteur, L. Ill, chap. V et VI. Deuxihne edition. Paris, chez Delaunay. a voJ; in-8". 38 L'AMERIQUE. La politique la plus vulgaire , los lumieres les plus com- munes de rexpcrience suffuaienl pour affranchir I'csclave, et Uii faire commencer ces progies graduels par lesquels ont passe toutes les nations de I'Europe ; mais la rehabilitation des castes et I'enseignenient du respect pour le caractere de I'homnie, quelle que soil lacouleur, sont des operations plus difficiles et peut-etre plus iniportantes encore; c'est aleur ac- complissement que tient I'estime que I'liumanite accordera ou refusera aux Aniericains. Croirait-on que, dans celte patrie de I'egalile et de la liberie, on ne permet pas a un negre libre, u un homme de couleur libre, quelque leger que soit en lui le melange du sang negre, de s'asseoir a la table d'un blanc, de parliciper i ses plaisirs , a ses fetes, de se reunir a la meme assemblee , de recevoir les services venaux du meme barbier? Croirait-on que, dans tons les details de la vie, les Anglo-Americains blessent, oftensent, liumilient des hommes dont ils ne connaissent point le caractere , et qui ne sont enta- ches d'aucune fletrissure ? Les negres, disgnt-ils, sont une race infericure; ils nc sont pas les egaux des blancs : je ne le crois point; ils sont seu- lement une race que vous avez degradee; vous les avez abru- tis par I'esclavage, avilis par le mepris, eloignes de vous par I'ignorance. lis ont les defauts et les vices qu'on trouve dans les blancs exclaves des Barbaresques ; ceux-la aussi se re- gardent comme une race degradee et confessentlcur inferiorite. Parmi les blancs, nous voyons encore une autre race degra- dee ; c'est celle des maitres d'esclaves ; car I'esclavage cor- rompt bien autant celui qui commande. que celui qui obeif. Le maitre d'esclaves a perdu dans ses rapports avec ses iu- ferieurs plusieurs des qualites qui distinguent et anoblisseut la race humaine; la pi tie , la justice, la generosite, la pu- deur, sont comme obliterees en lui. Celte inferiorite n'est pas le vice d'un individu , elle s'etend a toutc la classe, elle se transmet des peres aux enfans, et cependant, nous savons avec certitude que les maitres d'esclaves sont de meme ori- legislateur de la Pologne , de la Hongiie et de la Russie. L'AMERIQCJE. 3y gine , de meme race que nous , que c'est rorganisatiou seulo de la societe oi\ ils vivent qui les a fails ce qu'ils sont. D'ailleurs, quand il serait vrai que les negres seraient de race inferieure, est-ce une raison pour le leur faire sentir a routes les heures? N'y a-t-il aucune autre inferiorite recounue dans la societe, etprend-on occasion de toutes les autres pour les changer en offenses? La vertu, le talent, I'esprit, la beaule , la force , ne sont-ils pas aussi des avantages que nous tenons de la nature j du secret imperscrutpble de notrc nais- sance? n'etablisscnt - ils pas une bien plus grande inegalite en- Qore enlrc les homnies que celle de la couleur de la peau ? Et. seraitil prudent, serait-il juste, serait-il humain, de faire sentir a toute heure , a ceux qui en sont prives , leur faiblesse , leur laideur, leur sottise , leur incapacite , meme leurs vices ? Certes, I'egalite ne supprime pas les differences entre les horames; mais elle jes laisse a la nature, et ne les aggrave pas par de cruelles distinctions. C'est a detruire ce prejuge funeste et honteux que tous les hommcs eclaires , humains , religieux doivent travailler dans toutes les Anieriques ; leur devoir les appelle a temoi- gner sans cesse par leur exemple qu'ils reconnaissent les liommes de toutes les couleurs pour leurs freres, et conime pouvant devenir leurs egaux par la vertu ct les talens. Plus ils jouissent de consideration dans la societe , et plus ils doivent I'employer a relever a eux leurs freres ; qu'ils leur temoignent, toutes les fois que I'occasion s'en presentera , de I'amilie et des egards , qu'ils s'associent a leurs plaisirs, qu'ils s'asseoient quelquefois a la table du negre et de I'homme de couleur, et qu'ils fassent asseoir ceux-ci a la leur; qu'ils invitent ceux qui se distinguent par leurs falens, leurs vertus, par une education plus soignee , a leurs assemblees ; qu'ils aient soin de leur montrer devant temoins ces deferences sociales, ces egards qui tous furent inventes par I'aristocra- tie, et qui cependant portent tous I'empreinte de I'egalite : surtout, qu'ils s'occupent de faciliter, de favoriser leur edu- cation, de los faire passer , s'il le faut, pour cela, en Europe,. 4o LAMERIQUE. oil ccrtcs nous iie les traiteroiis pas en infeiiciiis , niais oil nous Ics cntourerons au contraire de lous les egards que ni(i- ritent ceux qui s'avancent dans la carriere de la civilisation; qii'ils profttenl enfin des premiers talens qui se developperont parmi eux pour en appcler quelques - uns a des fonctions t-rainentes. II faut que I'lionime blanc se voie quelquefois appele a respecter I'homnie noir, A lui obeir; il faut que, dans les premieres dignites des republiques , quelques liommes de couleur soient introduits, pour que des exemples vivans et presens a tons les yeux rappellent sans cesse aux citoyens I'egalite des races. Lorsque quelques noirs libres auront etc nommes deputes au congres, lorsqu'on en verra sieger quel- ques-uns sur les bancs desjuges, lorsque Ton en entendra professer quel(jues-uns dans les universites, ou preclier dans les chaires , la plaie de I'Amerique comniencera h se cicatriser ; I'orage affreux qui menace ses republiques sera detourne loin de leur horizon. J.-C.-L. de Sismondi. EfFETS DB l'eNSEIGNEMENT POPUIiAIRE SUR LES PROSPE- RiTES DE LA France ; par RI. Ch. DuriN. Discours prononce dans la Seance d^ouverture dn Cours normal de geometrie et de mecanique appliquees, le 2i> no- vembre 1826, au Conservatoire des arts et metiers (i). C'est pour la sLxieme fois que j'ai I'honneur de professer, dans cette enceinte, la mecanicjue et la geometrie appliquees aux arts. Le zele avec leqiiel les amis de I'industrie , habitans de la capitale , ont suivi cet enseignement , a fait naitre I'esperance qu'il pourrait ^tre propage dans toutes les viiles importantes du royaume, qn'il y rendrait les ( i) Quoiquc ce discours soit deja repandu dans plusieurs parties de la Fraiirc, uous avous cru devoir , d'apres le desir de I'auteiir , le reproduirc en cnticr daus notrc rccueil : les Terites qu'il reuferme sont d'un inU'ret general pour tous les peuples, ct ce u'est pas seulcment a uotre patrie qu'il doit apporter unc instruction du plus haut prix ; d'autrcs nations, plus lieurcuses que nous, en profitcront niiuux eucorc, et saurout apprccier de plus en plus les iuimeuses avanlapes dc riustructiim populaire ct dc renseigncmcnt industricl. M. A. J. EFFETS DE L'ENSEIG.^EMENT POPLLAlllE. . /,i nidincs services, et qu'il y serait soutenu par la nieme bienveillance et le Illume amour du pays. Le gouvernenient , avec une bonte pour laquelle j'exprime ici ma vive reconnaissance , a fait , du cours de Paris , un cours normal d'oii sont deja sortis des professeurs pour plusieurs grandes cites. Ces professeurs ont acquis une existence hono- rable ; une carri^re nouvelle s'est ouverte devant eux ; la nature m^me de leurs lecons les a mis en relation , dans chaque ville , ^vec les chefs des principau,\ etablissemens d'industrie, auxquels ils ont pu rendre des services essentiels , en les eclairant sur des pra- tiques dont la perfection ne peut <5tre obtenue que par la theorie. A mesure que ces professeurs deviendront plus familiers a^ec la con- naissance des arts , ils deviendront aussi plus capables d'en diriger les travaux ; plusieurs passeront dans I'induslrie , a laquelle ils pro - cureront des lumieres en echange de la fortune. En mdme tems de nouveaux eleves , formes par le cours normal, remplaceront ces pro- fesseurs. Ainsi nous ctabluons un ecoulement periodique, qui four- uira d'avantageuses carri^res a des sujets distingues , et qui recom- pensera dignement les professeurs que leur talent el leur zele auront signalcs a I'estime , a la reconnaissance des chefs de nos grands ateliers et de nos principales manufaclures. Que les hommes auxquels la nature a donne plus de merite que d'opulence , plus de talent que de bonheur, viennent a nous avec confiance ; ils auront deux titres de plus a nos yeux. En retour de cette preference , nous ne leur demanderons qu'une chose ; ce sera d'accueillir avec la meme predilection les hommes d'une humble fortune , les hommes de metiei , les simples ouvriers qui suivront un jour leurs lecons , et de leur tendre une main amie qui les aide a sortir de la penurie , a sYlever par la culture de I'intelligence'ajipli- quee au labeur physique , pour le rendre plus fruclueux. On a commence par croire que les verites mathematiques etaient necessairement inintelligihjes pour de simples ouvriers, parce qu'elles sont presentees, dans les livres dogmatiques , sous des formes abs- traites et difficiles ; on a cru qu'il n'etait pas possible de les rendre aisees et palpables : c'etait une erreur; la melhode seule etait defec- tueuse. II n'existe aucun principe matliematiquc , applicable aux tra- vaux des arts , qu'ou ne puisse , avec un peu d'etude , trouver le moyen de faire aisement comprendre a tout individu qui possede une intelligence ordinaire. Pour demontier cette verite, je n'irai pas cher- cher en e.xeniple les principes clementaircs de la simple geoujctrie, ou les conihinaisons mtraniques le» uioins conqiliquees. Jc choisirai 1,1 EFI-ETS dcs lois math^matiquL'S que les pciiples savans out cherchees diiraiit cinquante si^cles avant de les dccouvrir. Siipposons que , pour delasser un instant I'esprit des ouvriers qui suivent le cours de geometrie et de mccanique appliquees aux arts , je veuille Icur montrer dans la nature les formes gcometriques dont leur induslric fait usage. En peu de mots , je poiirrais , ce me seml)le , rendre clair cet admirable syslfeme du nionde , qu'il a fallu cinq mille ans pour decouvrir et calculer. Je dirais au ferblanticr, au plombier, au cliaudronnier, au tourneur : Quand vous taillez de biais un tuyau , un rouleau, unenlonnoir, vous faites une coupe ovale; et vous , jardinier, vous traccz le nieme ovale avec un cordeau et des piquets ; supposes que voire ovale ait pour longueur deux cents millions de lieues , remplacez un piquet par une l)oule cternellement luraineuse , un soleil i,348,4fio fois plus gros que la terre ; enfin la terre elle- m^me, faites-la rouler sur cet ovale, avec une vitesse de vingt-trois mille lieues par heure ; alors vous aurcz I'idee de la force immense que le Tout-Puissant emploie pour mouvoir I'un des moindres globes d'un des moindres niondes, qui comptent autant de soleils que nous pouvons compter ou plutot supposer d'etoiles dans I'etendue de I'uni- vers. Traccz ensuite autour du meme piquet, centre du soleil, autant d'ovales que de planfetes , en les inclinant plus ou moins , en les fai- sant de la largeur et de Id longueur que je puis vous donner en chiffres , et voila les routes des plaiTetes ; enfin chaque planete est le soleil de ses satellites et le fojer de leur ovale. Voila comment nous ferons aisement comprendre aux ouvriers la grandeur de noire syst^me solaire et celle des masses qui le com- posent , et I'ordre si simple , si beau , et j'ose dire si divin , des mou- vemens eternels qui en reglent les pbenomenes. Cetle idee qu'ils auront acquise en peu de minutes, je le repi-te , des peuples polices , illustres par les oeuvres de leurs arts , ont cultive les sciences , durant des siccles , saiis pouvoir s'elever aux m^mes coimaissances. Les Grecs, parexemple, avec tout leur genie, n'ont jamais eu la moindre idee de la grandeur des astres et de I'etendue des espaces qu'ils parcourent. Avec un calcul bien simple , en partant des nombres que nous venons d'indiquer, vous comparerez aux forces du systeme du monde les forces dont nous pouvons disposer sur la terre , la force du cheval, par exemple , trainant une voiture sur une route horizon- tale. Vous vcrrez que, pour produire une quantite d'action compa- rable a celle du simple mouvement de la terre aulour du soleil , il faudrait altaclier au char de la terre plus de dix milliards d'atlelagcs DE L'ENSEIGNEMENT POPULAIRE. i^^^ ayant chacun dix milliards de chevaux. Pour faire parcourir au soleil ie m^me espace qu'a la terre, dans ua m^me tems , il faudrnit 1,348,460 fois dix milliards de machines a vapeur, ayant chacune la force de dix milliards de chevaux. Les Grecs , que je vous ai cites, avaient dcs idees plus simples a cet egard ; ils faisaient aussi trainer par des chevaux le char du soleil, et ils en mettaient quatre avec un dieu pour cocher. Ainsi , de uos jours , avec des moyens hien simples , des demon- strations hien aisees et dcs calculs elementaires , on pent faire com- prendre aux artisans de toutes les professions ces verites scientifiques et ces secrets du systeme du monde que les pliilosophes de I'antiquite , les plus illustres par leur genie , ont cherches sans pouvoir les de- couvrir. Eurichir les esprits de tout un peuple par ces tresors de la science moderne , sans sortir du cercle d'etudes' qui convient aux progrfes , a I'exercice des plus simples travaux manueb , n'est-ce pas (ilever ce peuple meme au-dessus de tons ceux qui I'ont devancc dans radmirable carri^re de la civilisation ?... On je me trompe, ou des rapprochemens pareils auront, pour I'esprit des ouvriers, un noble et genereux attrait, plus pur, plus vif meme que la contemplation des edifices , des tableaux et des statues , chefs-d'ceuvre de nos grands artistes. Quand les hommes de Tindus- trie viendront a comparer la force du bras le plus robuste a la force qu'il faut pour mouvoir la terre , le soleil et les planfetes , les satellites et les cometes , ils comprendront qu'une intelligence superieure , jra- mortelle , infinie , veille a la geometric du monde , et regie, par les lois d'une science immuable , les formes et les mouvemens de I'uni- vers ; et nous leur dirons .- « Le grand homme qui nous apprit ces lois imposces par le Createur de toutes choses , ce ne fut ni un brame , ni un pai'en , ni un musulman , ni un athee ; ce fut im chretien. Profon-. dement penetre de la sublimite d'un systfeme dont il avait embrasse la grandeur et decouvert la sagesse , il n'entendait jamais prononcer le nom du Createur de cette harmonic eternelle sans decouvrir sa Idte et courber son front respectueux. II devenait plus humble croyant , a mesure que son genie concevait une plus haute idee des ocuvres du Tout-Puissant. Ouvriers francais ! elevez vos idees jusqu'a la piete de Newton ; c'est aux grands peuples qu'il appartient d'etre religieux a la mani^re des grands hommes. » En tenant ce langage aux adeptes de I'industrie , en soulevant ainsi quelques voiles qui derobent a Jeurs regards I'ordre general du monde et la majeste de la cieatioii , peut-etre j'cveillerai dans quelqup U EFFETS liHe puissanle uii genie qui s'igiiorait lui-in^me. Alors j'aurai fait present a noire pays d'un talent siiperieur, et je pourrai ine dire, avec I'orgueil d'un maitie pour son eleve : « J'al du inoins [)roduit un ouvrage qui vivra dans la posterite. » ■ Et quand je n'aurais travaille que jiour un plus humble resultal , pour eclairer les pratiques et rectifier les routines de quelques petils ateliers , en m'adressant aux ouvricrs , je croirais avoir encore recueilli de nia peine un prix suffisant; j'aurais fait beaucoup pour I'industrie. C'est une grandc ejTeur de supposer que, dans les arts m^me les j)lus communs , il suffit que le maitre ait du savoir et des facultes in- tcllectuelles activement deployees. Par une bizarrerie singuliferc de I'esprit humain , cette erreur sourit le plus aux personnes ni^mes qui possedent le moins d'esprit. Dans quelques localites , oii les arts sont encore au berceau , la vanite des mauvais chefs de boutique voit avec chagrin que les simples ouvriers acquifereut une instruction dont trop de maitres d'atelier n'ont pas encore fait acquisition. Dans le fond de la Bretagne, et dans quelques parties de I'Auvergne et du Limosin , a peine ces industriels sans industrie ont-ils entrevu que leurs ouvriers coniprenaient en effet quelque chose a la geometric aiusi qu'a la me- canique , ils ont emp^che leurs jeunes apprentis de suivre les cours que I'autorite municipale ouvrait geuereusement en leur faveur , le soir, a I'heurc ou les travaux du jeune Age devraient naturellement finjr. Je tairai le uom des villes ou ce honleux esprit de jalousie s'ef- force a defruire un grand bienfait public; non point parce que j'ai peur d'attirer sur moi la vindicte des prejuges , mais dans I'espoir que les homnics dont je signale ici le miserable egoisme seront ramenes a des sentimens plus gcnereux avant qu'on ait besoin de signaler davantage la terre sur laquelle ils nuisent et vegetent. J'aimerai mieux signaler a I'estime, a la gratitude de Fa France, les provinces plus heureuses , ou les chefs de I'indutsrie ont lendu la main au bien-etre de leurs ouvriers , et fait des efforts fructueux pour les rendre plus pclaires et plus habiles. Mais , avant de presenter ce tableau , qui fait honneur a notre pays , demontrons encore une fois tout I'avantage que I'industrie francaise relire de I'instruclion generalementrepandue dans la classe laborieuse ; examinons I'inlluence de la pensee sur les travaux materiels. Si nous comparons rhomnie a d'autres ^tres animcs , nous sommes frappcs aussitot du sentiment de sa faiblesse. Conibien il est loin d'egaler, pour la vilessc il la course , le ccrf , la renne et le cheval ; piiur la Constance et lu duree de la niarclie , le chicn , le clianieaii DE L'ENSEIGNEMENT POPLLAIRE. 45 et le diomadaire ; pour I'agilitd des mouvemens , le chat , le singe et le tigre ; pour la force des coups portes , le taureau , le lion ct I'elephant ! et , quant a la perfection des sens , quelle inferiorite pro- digieuse de sa vue comparee a celle de I'aigle et de tous les oiseaux ; de son ouie et de son odorat compares a I'odorat et a I'ouiie des ani- maux chasseurs ; de son gout , enfin , compare a ce gout instiuctif de tous les animaux , qui leur revile ce qui leur est nuisible ou salutaire ! La nature m^me des choses nous fait arriver k cette conclusion qui flatte peu la vanite de notre esp^ce : I'homme , envisage sous le point de vue de ses facultes physiques , n'est au premier rang pour au- cune , ou plutot il est presque , pour chacune d'elles , dans un des rangs les moins favorises de la creation. Mais I'homme garde en sa memoire le souvenir et le fruit du passe ; il suit , par degres , cette filiation des rapports enlre les causes et leurs effets plus ou moins prochains , qui constitue la science de la nature. II se place a propos , selon ses voeux et ses besoins , dans cet enchainement des effets et de leurs causes ; il fait executer par tous les auxiliaires dont il a I'art de s'entourer , ce quo lui seul n'aurait jamais pu produire ; il emploie la force inerte des objets inanimes, pour dompter la force intelligente des etres animus ; il fait combattre d'abord , et concourir ensuite , ces deux forces si diverses , pour arriver a I'accomplissement de ses volontes ; et I'un des dtres les plus faibles de la creation arrive ainsi jusqu'a la con- qu^te de la creation m^me. Apres avoir asservi les animaux les plus utiles, extermine ou confine dans les deserts les plus malfaisans et les plus destructeurs , il a su , par la culture du r^gne vegetal , changer les aspects , et modifier, decupler, centupler les produils de la terre; il s'enfonce aux plus grandes profondeurs , pour y chercher des tre- sors que sa science y devine ; il s'eleve dans I'air, il y navigue. Les eaux, depuis des sifecles , sont devenues son empire ; il y deploie ses voiles , et, sans autre impulsion que la force des vents et des courans, il arrive a son but, centre la direction m^nie ou des courans ou des vents. Ainsi , partout , Thomme commande sur la sphere qu' il habite ; et les globes que sa vug peut a peine atteindre observent dans leurs mouvemens les lois dont il a decouvert I'existence et le principe. Aujourd'hui, les phenomfeues des cieux n'arrivent plus qu'aux epoques et dans les circonstances assignees a I'avance par les calculs do I'homme : tant la science du passe I'a rendu puissant et profond dans la science de I'avenir ! Qui croirait que, pour exercer cette domination sur toute la na- ture , rhomnie ait besoin d'accomplir moins de travaux corporels 46 EFFETS que pom- nifeindie humblement la borne des destinces auxqiielles il semble confine, cians I'enfance de I'induslrie I Mais , dans ce premier etat , I'homme ne vieflt a bout des travaux qu'il s'impose que par la force de son corps et de ses membres. II arrose de ses sueurs les produits infonnes des arts les plus grossiers. II s'cpuise a fabriquer des ebauches ; tandis que , par le progr^s de son experience et de son intelligence, il fiiiira par produire quelqne jour, avec une facility rapide, les chefs-d'oeuvre des arts les plus parfaits. Ainsi , I'un des plus grands et des plus nobles avantages de la science dont je dois envisager les applications, c'est d'avoir delivre riiomme d'une foule de travaux qui n'exigent qu'une grande consom- mation de forces physiques, pour lui ronfier des travaux ou rinfel- ligence est le moteur principal. Examinons de plus prfes I'influence de cettc faculte developpee chez les simples ouvriers. Lorsqu'on observe avec soin les travaux d'un atelier nombreux , on est frappe de la difference des resultals obtenus par les divers ouvriers qui les executent. On voit les uns , doues par la nature d'une tres-grande force materielle , s'epuiser en efforts prodigieux , et ncanmoins produire un travail egalement mediocre, soit pour la quantite du produit , soit pour la qualite de I'execution. On en voit d'autres , dont Ic corps gr^le ou la complexion delicate ne promet guere de grands efforts physiques , mais qui compensent ce defaut par ime rare intelligence, et par I'habitude d'observer, de comparer, de reflechir. lis ne perdent pas un seul mouvemenl ; ils n'appliquent a la production de cliaque effet particulier que la por- tion de forces strictement n^cessaire pour le produire ; ils evitent et les faux coups , et les pressions superflues , et les frottemens in- utiles ou contraires. Par cette economic de leurs moyens , ils font plus vite , plus parfaitement et avec peu de fatigue , ce que les hommes les plus robustes s'cpuisent a produire quand le savoir et I'adresse lie viennent pas a leur secours. Des dispositions naturelles a I'obserTatlon, une dexterite dont la source est dans la souplesse de certaines articulations, dans I'aisance et la pr<5cision de certains mouvemens , doivent rendre moins long et moins imparfait I'apprentissage de chaque art mecanique. Mais , dans cet appreutissage mdme , ou trop souvent on conCe tout au ha* sard , au tems , a la routine, la science pent offrir d'utiles enseigne- mens pour atteindre , par une voie plus siire , plus directe et plus facile , au but dont , sans elle , on ne peut approchcr que par des a peu pr^s et des tfttonnemeus. C'est au dirccteur d'atclior ct de maiinfaclare a faire , avrc Ic s ecoles ne contiennent qu'un jeune C'lhve sur deux cent vingt-neul' habilans ! — Oui , Messieurs, il en existe; et m^nie de plus ignares encore. Mais, ajoutera-t-on , ce sera sans doute au fond de la Basse- Bretagne ? — Non , Messieurs , la Basse-Bretagne meme est un peu moins reculee ; elle a des ecoles qui contiennent la deux cent vingt- deuxieme partie de la population. — Ce sera done au somtnet des Hautes-Alpes et des Hautes-Pyrenees , ou les hommes sont pauvres , et luttent coutre les glaces eternelles et contre les avalanches , pour cultiver un territoire exigu ? — Non , Messieurs ; I'habitant des Hautes- Alpes el des Hautes-Pyrenees est au uombre de ceux ou i'instruction populaire est le plus repandue ; parce que rieu ne donne de I'energie morale aux populations comtne d' avoir a lutter contre les grands obstacles de la nature. Cette partie obscure, oii seulenient le deux cent vingt-neuvieme de I'espece humaine frequente les ecoles , elle est au milieu du royaume, dans une large vallce , sous un ciel doux et serein, dans la region de la vigne , des miiriers et du mais, surles bords d'un fleuve superbe ; on Tappelle le jardiu de la France ; c'est la Touraine. Regardez, au contraire , au fond des Pyrenees , la palrie de Henri- le-G rand, le Beam ; il contient dans ses ecoles le qulnzienie de la population lolale , et c'est dans le voisinage du pays magnifique, sur- nomme jadis le jardin des Hesperides, le jardin de I'Occident, du pays dont la teinle foncee , proportionnelle a son ignorance presenlo, me dispense assez de prononcer le nom. Ainsi la fertilite de la terre, la douceur du cliniat, n'entrent pour rieii dans rinstrucliou des habitans de nos provinces ; et, je le repete, c'est leur activite , c'est leur energie morale plus ou raoins developpee, qui produisent les enormes differences qui frappent vos regards dans Li carle qne j'ai I'honneur de mettie sous vos yeux. Hemarquez, a paitir de Geneve jusqu'a Saint-Malo, une ligne tranchee el noiratre qui separe le nord et le midi de la France. Au nord , se Irouvent seulement trente-deux deparlemcns, et treize mil- lions d'habitans ; au Sud , cinquante-quatre departemens, et dix-huit millions d'habitans. 24 El't'ETS Les treize inillionii d'habitans dii Nord envoiciit a I'ecule 740)B4'> jeunes geDs ; les dix-huit millions d'hubitans du Midi envoient a I'ecolc 075,931 eleyes. II en rdsulle que , sur iin million d'habitans , le nord de la France envoie 5(>,988 enfans a IVcole, et le Midi , ao,885. Ainsi, I'inslruction piimaire est trois fois plus I'tendue dans le Nord que dans le Midi. A present, vous allez voir quellos consequences remarquables re- (ultent de cette disproportion. Dans le nord de la France, malgre la rigueur du cllmat, qui non- seulement ne permet pas de cultiver I'olivier , le c^prler , I'Dranger , le ritronier , niais qui ];erinet a peine de cultiver le mais et le niiirier dans quelques deparfemens frontieres de la partie du Sud, et qui prive la Norniandie, la Picardie , I'Artois, la Flandre francaise et les Ar- dennes de cultiver la vigne , malgre cette privation de tant de riches cultures , la masse du pcuple septentrional ayant plus d'instructiou , d'activitc, d'iiidustrie, obtient de la terre iin rcvenu qui suffit a payer 127,634,765 fr. d'impot foncier , pour une superCcie de 18,692,191 hectares ; tandis que les cinquante-quatre departemens du midi ne paientque 125,412,969 fr. d'impot foncier pour 34,84r,'^35 hectares. Ainsi, pour un million d'hectares , le ti-csor public recoit de la France eclairce, 6,820,000 fr. d'impot foncier; et de la Prance obscure 3,599,700 idem. On objectera peut-etre que I'impot foncier est, proportlonnellemeDt au revenu net, plus considerable dans le Nord que dans le Midi. A cela je rcpondrai qu'ayant calcule la difference totale, j'ai trouvii cjue le Nord paie iin vingtienie seulement en sus de ce qu'il devrait jKiyer pour que les charges fussent proportionnees : difference, comme vous le voyez , trop modique pour detruire en rien les conse- quences que je viens de presenter. J'ajouterai m^me que deux vingtiemes de surplus d'impots n'em- p^chent pas le Nord de payer plus aisement ses contributions que le Midi, qui n'a pas autant d'industrie , de commerce, de moyens d'e- change et de numeraire. Ainsi , le trcsor public pent , sans faire crier autant le contribuable , en extraire de plus forles contributions, proportionnellement aux revenus , dans les pays ou il y a beaucoup de savoir, beaucoup de production , et beaucoup de moyens d'cchange. La supcriorite des revenus publics foiirnis par la partie eclairee de la France est surtout sensible pour rimp6t des palentes, quiseprcleve an m^me taux dans touterclenduc dn rovaume. DE L'EXSKIGNEMENT POPULAIRE. To Les trentc 82 SCIENCES PHYSIQUES. ces animaux, conime cello des phoques , varie suivant les saisons. Unc autre question relative aux animaux do ccs con- trees fut resolue pendant ce dernier sejour a la torre d'En- draclit; I'animal que Dampier a pris pour un hippopotame n'a rien de comniun avec cet habitant de I'Afrique : c'est un dtigon mammifere marin pen connu , ct qui parait confine dans la mer des Indes. On le dit herbivore, long d'une vingtaine de pieds , et, veritable poisson, ne vcnant jamais a tcrrc. La terre de Witt fut aussi visitee une seconde fois. Ici linissent les recits de Peron : il avait commence ce chapitre lorsqu'il fut enleve aux sciences. Jusqu'a I'arrivee des deux vais- seaux en Europe , M. de Freycinet sera notre guide. Nos raarins ne furent pas mediocrement surpris de roncontrer sur les cotes de la ?Soiivelle-Hollande unc flolte malaise occupee a la peche des Itoloturies , zoophytes fort estimes a la Chine, ou ils passent pour de puissans aphrodisiaques. Timor eut aussi une seconde visite de nos navigateurs, qui passerent plus d'un mois dans cette lie, se preparant a une derniere excursion a la teri'e de Witt , et a leur retour a I'lle- de-France. Lc nouvcau sejour a Timor ne fut pas perdu pour I'actif Peion : il cntreprit une chasse aux crocodiles, et parvint a se procurer un de ces animaux, malgre les obstacles qu'il rencontra dans les habitans , qui, par des idees peut-etve reli- gieuses, n'osent approcher des crocodiles, ni des lieux qu'ils habitent, et qui se croiraient souilles s'ils avaient touche quelque partie de leurs depouilles. Le recit de cette chasse singuliere appartient ii I'histoirc des superstitions.- Le troisiemc volume de cet ouvrage est termine par la description des pro- duits du sol aux environs de Coupang , capitale de I'lle de Timor, et le quatrieme commence par des details assez etendus sur les moeurs des habitans. Au depart de Timor pour aller terminer les operations sur les cotes de la Nouvelle-Hollande, I'etat des malades empira , et bientot on eut a regretter de nouvclles pertcs. L'astrononie de I'expeditiou succomba ; le commandant lui-meme etait du nombrc des malades j les vivres , et I'eau surtout, etaient en SCIENCES PHYSIQUES. 8^ petite quantite, et pouvaient manquer avant qu'on put les re- nouveler : on fut done contraint a renoncer au travail qui restait encore a faire , et Ton se mit en route pour I'lle-de- France. Le Geographe y arriva le premier; le Casuarina, dont la marche ctait plus Icnte, n'entra dans le port que trois jours plus lard, aprcs avoir perdu dans un coup de vent, son maitre voilicr, excellent marin qui fut rcgrette vivenient par tout I'equipage. Dans la traversee de I'lle-de-France en Europe , Peron fit una tentative infructueuse pour apportcr et multiplier dans nos rivieres et nos etangs le goiuamy , excellent poisson d'eau douce, di'ja transporte do la Chine dans notrc ancirf^nne colo- nic ou il a prospere. Les causes qui s'opposerent au succes de cette entreprise sont discutees par M. de Freycinet avec beau- coup de clarte. II parait, d'apres les experiences de M. Cere, directeur du Jardin des Plantes a I'lle-de-France , que le gou- ramy pent etre accoutume a I'eau demer, et qu'il sera possible de faire arriver en Europe des individus awxquels on aura fait prendre cette habitude. On les remettrait ii I'eau douce lente- mcnt, ct par degres, avec les precautions employees pour les faire passer de I'eau douce a I'eau de mer. Apres la relation de ce voyage si fructueux pour les sciences, etsi honorable pour ceux qui en assurerentle succes, on trouve dans cet ouvragc sept memoires sur differens objets que les terres australes ont offerts aux yeu'x et aux meditations de nos voyageurs. Dans le premier, Peron At^cv'it \e pjrosoma , nou- veau genre de zoophytes mous, qui parait confine dans un espace d'une vingtaine de lieucs en tons sens, dans le voisinage de I'equateur. Tout est mysterieux dans cet animal, sa phos- phorescence, sa nutrition, sa generation; I'rsii de I'observa- teur n'a pa rien penetrer , et I'aiiteur est reduit a n'exposer que des conjectures qu'il donne pour teiles. Le second memoire a pour objet la temperature de la mer a la surface et a differentes profondeurs. Le resultat general des experiences thermometriques faites a la surface, est que, le matin et le soir, la mer et I'air ont la meme temperature; que G. 84 SCIENCES PHYSIQUES, la nier est plus froitle que I'air h midi, et plus chautle h rainuit. Les observatious faitcs prcs de la cote occidcutalc de la INou- velle-Hollaude, d'accord avcc ccUfs de Marsigli dans la Mcdi- terraneo, Tout voir que, dans certains lieux, lo fond de la nier pent ctre d'une tenipt'rature beaucoup plus elcvec qu'on ne •I'aurait cru:Maisigli et Peron attvibuent h la presence des zoophytes celte ohaleur extraordinaire du fond, explication qui n'est pas encore appuyee de fails asscz nombreux et deci- sifs. II faudrait que les habitans du fond de la mer develop- passent luie temperature prodigieusenient elevee pour que la couche d'eau qui les baigne, continuellenient renouvelee, soumise aux mouveniens generaux des mers et au mouvement ascensionnel que lui impriment les couches superieures moins echauffees et plus denses, put cependant contracter plus de dix degres de chaleur au-dessus de la temperature naturelle du sol a cette profondeur. Ne prendrait-on pas ici I'effet pour la cause? Quelqucs parties du fond des mors, echauffees par des combinaisonschiniiquesqui out lieu danslinterieurde la terre, seraient-elles plus favorables a I'accroissenient et a la pro- pagation des zoophytes? Loin des cotes et a de grandcs pro- fondeurs, Peron, d'accord avec tous les autres physiciens, a trouve que la temperature est tres-basse : niais il ne (ixe ni sa valeur moyenne, ni les limites de ses variations; il I'econnait que les nioyens d'experiences sont encore insuffisans, el qu'a- vant do soumettre a de nouvelles rccherches cette question de geographic physique , il faut que le thermometre ait ret u des perfectionnemens qui le rendcnt proprc a conserver I'indica- tion du degre le plus bas ou le plus haut auquel il soit parvinU dans rintervalle d'une experience. Cememoire contient des details tres-curicux de rexperience. d'une bouteille plongee a 700 metres de profondeur. Quoique fortemenl bouehce , scellee avec de la cire a cacheter recouvertc d'une toile goudronnee , elle fut retiree pleine d'eau. Ellc avail etc remontee assez promptemcnt pour qu'ellc conservat encore en partie la basse temperature du fond. Mais, cc qni etonna beaucoup I'observateur et requipago du vaissenu sur leqnel SCIENCES PHYSIQUES. 85 cfttc experience fut faite, c est que I'eau contenue dans la bou- teille moussait comma du vin de Champagne. Peron explique ce phenomene d'une maniere assez satisfaisante : I'air contenu dans !a bouteille lorsqu'on la descendait, reduit a un petit vo- lume par la forte pression de I'eaii qui avail forc6 tous les obstacles et enfoncc- le bouchon, s'est combinee avec cette eau. Pour que cette explication fut complete , et piit contenter les physiciens, il aurait fallu recueillir le gaz dcgage de I'eau, le mcsurer et constater sa nature. L'experience de Peron n'est encore qu'ua avertissement : elle doit etre recommencee. Le memoire suivant est d'un grand interet pour les geolo- gues et pour I'histoire de I'especc humaine : Peron y resume les faits qu'ils a recueillis sur la formation des lies madreporiqucs dans les regions australcs , sur les terres de meme nature , et , trcs-evidemment, de meme formation, qui sont actuellement au-dessus des caux, et dont quelques parties forment des mon- tagnes assez hautes. Suivant notre' observateur , il est douteux que la Nouvelle-Hollande ct la terre de Diemen aient jamais etc reunies. D'ailleurs , la constitution geognostique des diffe- rens sols ne presente, dans les regions australes, que ce que Ton observe partout ; des roches coquilleres a de grandes hau- teurs au-dessus des mers , des vegetaux , et surtout des arbres cnfouis ct petrifies , etc. On ne pent douter de I'exactitude des faits observes par Peron ; mais ses raisonnemens ne persuadent pas toujours; ct, malgre les pi-euves qu'il accumulc, on par- vicndra peut-etre a prouver, contre son opinion, que les deux giandes portions des terres australes, si rapprochees Tune de I'autre , furent autrefois reunies , et que I'Ocean s'est ouvert le passage qui les separe aujourd'hui. On doit encore a Peron un memoire sur la dyssenterie des pays chauds, et sur I'usage du betel, qu'il recommande aux ob- servations des medecins, et qu'il rcgarde comme le meillcur preservatif contre I'influence pernicieuse des regions equato- rialos. Les deux memoires suivans sont inseres en grande par- tic dans la relation du voyage, ainsi que le dernier que Ton doit aM. Leschenault, et oil ce savant botaniste faitTcnume- 86 SCIENCES PHYSIQUES. ration des productions vegctales Ics plus utiles de la Nouvelle- HoUande et dc la terre dc Diemcn. En tciminant ccttc analyse, nous nc pouvons nous dissimuler qu'ellc est b'caucoup trop courtc, que Ics extraits que nous avons traascrits sont trop rares, et que les Iccteurs de I'ouvrage y noteront une multitude de choses qu'il aurait fallu placer ici. Notre excuse se reduit fi ce peu de mots : I'espace qui nous- etait accorde est plus que rempli. Fkkry. SCIENCES MORALES ET POLITIQUES. PrOBLEME DE l'eSPRIT HUIViAlN, OU OrIGINE, DEVEtOP- PEMENT ET CERTITUDE DE NOS CONNAISSANCES ; faisailt suite et complemenl au livre : Du Rapport de la na- ture a Vhomme et de Vhomme a la nature; par M. le baron Massias, ancien charge d'affaires de France^ resident, consul general a Dantzick (i). Parmi les productions litteraires , les ouvrages de metaphy- sique semblent devoir, moins que tout autre genre d'ecrits, se ressentir de I'influence des opinions qui doniinent le siecle ou ils paraissent. Appartenant a un ordre d'idees superieur a la sphere des interets qui laissent leur empreinte dans nos pensees et les colorent toutes plus ou moins piofondement, ouvrages d'hommcs qu'occupent, dans le calme des passions, des pro- blemes etrangers au mouvement de la vie intellectuelle et so- ciale de Timmense majorite des esprits instruits et actifs, ils s'adressent a un jjetit nombre de personnes que I'auteur sup- pose, sinon entierement indiffercntes aux affaires et aux pro- jets qui se partagent les affections el absorbent I'attention de ses contemporains , au moins disposees a faire treve aux objets de soucis et de reflexions vulgaii'es, et a s'elever au-dessus des discussions graves ou frivolcs du jour, dans la region pure des principes qui restent inalterables au milieu des phases chan- geantes de I'existence huniaine. L'histoire de la philosophic nc rcmplit pas cette attente. On pourrait , dar«3 les institutions et les destinees des nations qui (i) Paris, iSaS; Firmin Diilof , rue Jacob, n° 24- i vol. in-S" de r.x el 4<''i pages; pris , 7 fr. 88 SCIENCES MOilALES I'ont cultivt'c , signaler facilcmcnt les circonstanccs et Its pit- ventions qui expliqucnt la direction qu'y a prise , dans chaque siecle, la speculation metaphysique et la faveur avec laquelle les theories les plus abstraites y ont etc accucillies par les es- prits exerces a la meditation. Quelquefois, une grande corrup- tion de moeurs a, tour a tour ou simultanement, faiteclore des theories qui la mettaient a I'aise, et donne, soit par le degout qui I'accompagnait dans quelques anies privilegiees, soitcommc remede ou refuge, naissance et faveur a des doctrines d'une purete et d'une exaltation prcsque surhumaines. Mais, hors meme d'un etatde degradation extreme, une existence qui est simplement douce et qui n'est agitee que par une succession de jouissances sensuelles et de plaisirs intellectucls, eloigne ceux qui aiment I'iastruction de toute meditation dont Ic sujet les oblige a sortir d'un monde ou ils se trouvent si bien , ct de se livrer a des efforts d'attention qui effraient leur moUesse et qui ne sont pas soutenus par les points d'appui habituels de leurs pensees. Au dix-huitieme siecle, les esprits ont eprouve, par d'autres raisons encore, beaucoup de repugnance a reconnaitre un ordre de choses distinct du monde visible et tout aussi reel que la nature exterieurc. En comparant les etonnans progres que les sciences lirent a la suite de Bacon et des grands hommes qui appliquerent sa methode a I'exploration des lois physiques , avec le cercle d'idees contradictojres dans lequel tournoyaient les metaphysiciens depuis plus de deux mille ans ; on concut de I'indifference et presque du mepris pour les recherches qui em- brassent les questions de I'origine et de la certitude de nos connaissances, ct les rapports du sujct pousant aux objets scnsi- bles. Les succes brillans qui couronnaient chaque jour les tra- vaux des savans dans le champ des sciences naturelles, sem- blaient promcttre des resultats plus heureux a I'investigatioa qui aborderait ces questions par la physiologic et par I'analysc des conditions materiolles de la sensation. A cettc tendance doctrinalc se joignait, dans les contrees ou la religion, privee de sa vertu morale et ennoblissante, ctait consideree par les ET POLITIQUES. 89 classes instiuites conmie un obstacle a ram«lioration tie I'etat social et a la propagation des lumieres , un secret desir de voir s'affaiblir de plus en plus le credit des systemes de philosophic qui offraient des appuis a la puissance acclesiastique ou qui etaient du moins en possession de fournir des armes aux theo- logiens. Toutes les theories, favorables au spiritualisme , avaient k combattre ces deux genres de prevention , et se trouvaient , avant examen, frappees de reprobation , soit comme auxiliaires d'Opinions et d'influences qu'on repoussaic, soit comme incom- patibles avec les principes et les methodes des sciences qui faisaient la gloire du siecle , et qui avaient ouvert aux peuples civilises des sources d'une prosperite indefiniment croissante , en decuplant leurs jouissances ainsi que leurs moyens d'action sur la nature. Quoiqu'on ne puisse se dissimuler que les memes causes n'operent encore sur les csprits et ne contribuent adi- minuer le pen de penchant que I'homme a naturellement a se detourner des choses accessibles aux sens pour se livrer a des etudes qui demandent une force d'attention reflexive, difficile a acquerir, on ne saurait disconvenir cependant que la meta- physique ne trouve, sous I'un ct I'autre des rapports que nous avons indiques , moins de prejuges a combattre aujourd'hui. L'un desresultats les plus constans des troubles civils , estde ramener I'homme au sentiment , et k I'observation des forces mo- rales de sa nauire. lis lui revelent I'importance de ceux des liens sociaux qui tiennent a des principes etrangers aux calculs de I'interet. La puissance des ressorts que les ames fortes deploient dans ces crises , la necessite qui leur est imposee par le malheur de se replier sur elles-memes et de se creer des ressources in- terieures contre les degoiits et les mecomptes , les tresors qui s'ouvrent a elles dans le sanctuaire de la pensee, et dont la de- couverte rend a la meditation ceux qui dans des terns ordi- naires eussent etc tout entiers aux jouissances et au paisible cours d'occupations traditionnelles, le spectacle contagieux d'innovations hardies^ tentees sur le theatre de la vie exterieure, qui dispose les esprits a se frayer de nouvellcs routes dans un autre ordre d'interets, le besoin de rattacher a des principes go SCIENCES MORALES qu'une grande elevation rende inattaquables , la theorie d'insti- tutions qu'on crec et qu'on defend, ou qu'on decredite et qu'on repousse, voila quelques-uncs des consequences dcs revolutions politiques qui cxpliquent pourquoi ces changcmens de la scene du monde amenent aussi uu changement de direction dans le mouvement des idees speculatives et dounent a I'investigation pliilosophiquc plus d'activite el de profondeur. L'intime con- nexite entre les plus liautes theories de I'cntendement et les principes qu'iMvoquent tour a tour les partis vainqueins "ou vaincus, se niontro avec une nouvelle clarte et sous un jour plus frappant , et ranime I'interet qu'on avait cesse de pren- dre aux questions metaphysiques. Si a une conviction renaissante de I'importance des opinions en matierc de philosophie, viennent sc joindre a la fois et le reveil des sentimens religieux et retablissement d'institutions qui cloignent de la religion ce qu'elle paraissait avoir de menacant pour la pleine et bienfaisante application des sciences morales au perfectionncmcnt social, I'esprit huniain se reportera, avec une ardeur nouvelle , avec plus de calme et d'impartialite, sur I'examen des problemes qui ne cesseront d'occupcr I'esprit humain jusqu'a ce qu'il les ait resolus, ou au moins, jusqu'a ce que, soit Timpossibilile de les resoudre se trouve motivee par des raisons universellenient admises , soit les limites que ses efforts ne peuveiit franchir aient ete determinees, en vertu d'une analyse de ses facultes, inaccessible desormais a toute objection raisonnable. L'influence de I'un et I'autre de ces changemens arrives dans la disposition des esprits et dans les rapports des institutions religieuses avec les lois civiles, s'est deja fait sentir dans la lit- terature francaise d'une maniere tres-propice a la discussion impartiale des questions de philosophie qui dans le dernier siecle se traitaient et se decidaient avec une propcnsion mar- quee aux principes materialistes. Le terrain ainsi rendu a une culture plus variee, et ameubli, pour ainsi dire, par tant de bouleversemens qui rappelaient la meditation irresistibleraent sur I'ordre moral et sur ses bases iminnables, etait pirj^aro ;\ ET POLITIQUES. 91 recevoir et h feconder ce germe de doctrines plus favorables au spiritualisme que lui apporteraient les communications rou- vertes avec les nations du Nord. L'insuffisance et les lacunes de la theorie de Condillac qui escamotait a Thonimc la plus belle moitie de sa nature , en donnant a une notion purement logique de la sensation, une valeur et une portee incompatibles avec les elemens que I'analyse psychologique pent seule y re- connaitre , ces defauts de la pliilosophie de la sensation , mis en evidence par quelques bous esprits , se devoilent de plus en plus aux yeux du petit nombre de personncs que ces matieres interessent. Ce cercle de jug€s eclaires s'agrandit par le lumineux en- seignement de M. Royer-CoUard , et parl'accueil que les lecons eloquentes et I'autorite de cet illustre citoyen procurerent aux ouvrages de I'ecole ecossaise, plus piopre qu'aucune autre a ramener les esprits a la veritable methode experimentale en psychologic , et a leur faire apeicevoir ce monde interieur , si iong-tems derobe aux regards sous les prestiges de metamor- phoses imposees a la sensation par les disciples de Condillac , et traite de chimerique par les physiciens attaches a la glebe de leur domaine matei'iel. II est inutile de rappeler avec quel succes M. Cousin acheva ce que M. Royer-Collard avait com- mence. Les services qu'il a rendus aux bonnes etudes philoso- phiques ont ete apprecies dernierement par un juge competent, qui est lui-meme un des hommes dont elles attendent avec le plus de confiance leurs progres (i). Anterieurement a ces heureux essais de restauration de la saine philosophic et independamment des travaux qui I'ont eue pour objet, soit en France , soit a I'ctranger, un esprit eminem- ment done du talent de I'observation psychologique , avait deja, par ses propres meditations, ete conduit dans une nou- velle route. M. Maine de Biran apercut , avec la nettete et la (1) Voyez les pages cxLv et suivantes de rexcellente Introduction que M. Jouffroy a placee en tete de sa traduction des Esqiiistes t/e pliilosophie morale, par M. Dugald-Stewart. Paris, 1826. yi SCIENCES MORALES sagacite qui caracti'iiscnt la faculty si rare dc s'attacher aux fails dc conscience en les separant de tout phenomenc adventice, non-seulement les deux elemens qui se combincnt dans la sen- sation et qui nous renvoient a deux sources differentcs; mais il signala surtout I'iniportant appui que Ic sentiment de I'activite du moi , considere comme origine du principe de causalitc ct garant dc sa valeur, preteraita la philosophic, si ce sentiment devenait I'objet d'une analyse purement psychologique. II est a jamais regrettable qu'il ne lui ait pas ete accorde dc mettre la derniere main a I'ouvrage oil il se proposait de dcvelopper son point dc vue, ctd'enmontrer lajustesse ct la feconditc parson ap- plication detaillcc auxprincipauxphenomenesdela vie sensitive, intellectuelle et morale dc I'homme. Plusieurs des amis qui le pleurent ont vii la premiere 'partie de cat ouvrage entierement terminee et en etat de paraitre. Il est a desirer que la litteraturc philosophique s'en enrichissc sans trop de delais. Les meilleurs esprits comme les penseurs les plus profonds sont encore loin d'etre d'accord sur la nature , I'origine et la portee du principe de causalite ; ils le sont encore moins sur la maniiire d'en cta- blir la legitimite absolue. L'idce ingenieuse par laquelle Kant a elude les attaques scep- tiques de Hume , et qui donne a son auteur le premier rang parmi les genies hardis et originaux, suffit bien pour expliquer comment rhommc se sert de I'axiome de causalite dans le champ dc rexpericnce avec la certitude d'y etre autorisc sans jamais avoir a craindrc une exception i\ cette regie dans aucun cas qui a pu ou qui pourra se presenter a I'observation dc I'homme. Mais la theorie dc Kant, donnant au principe dc causalite une valeur purement subjective , le frappe d'im- puissance ou en rend au moins I'usage problematiijue, en de- hors des limites dc rexperiencc; et ccpendant, aucun des sys- temcs qui, posterieuremcnt au criticismc , ont etc tentes pom- assurer a ce meme principe les caractcres dc necessite et d'uni- versalite absolues, n'a reussi a en legltimcr I'application a tons les etrcs et a leurs modifications avec cette clarte qud'hyiio- Hiese de Kant repand sur la h'gitimilc dc I'cmpire de la causalitc ET POLITIQUES. g3 dans le domaine des perceptions et des actions hinnaincs. Car, dire avec Rcid que le principe de causalite porte son evidence en lui-meme , est simplement afiirmer qu'on croit a son autorite souveraine, parce qu'on nc pent renier cette croyance qu'eu se refusant a satisfaire un besoin imperieux de I'esprit; cher- cher la source de la notion de cause dans Taction de la volontc sur elle-meme, dans la production d'une resolution, c'estbien faire remarquer la connexite intime de la notion de cause avec la conscience de notre personnalite ; mais, ce n'est pas montrer que nous sommes autorises a clever un fait de conscience , ou unc idee dont nous ne pouvons nous separer, au rang d'un principe legislateur pour toutes les existences. II est vrai que nous ne rapporterions meme pas une seule de nos perceptions a un objet exterieur comme cause , si cette notion n'etait pas anterieure a toutes les operations de notre esprit. Mais la ne- cessitc subjective d'un axiome ne suflit pas pour en faire unc loi dc I'univers, et la grande question : De quel droit etendez-vous h tout ce qui est , qui arrive et qui arrivera , une regie que vous puisez en vous-menie ? encore intacte, n'est resolue que dans le point de vuede Kant, et cela uniquement pour I'arrangenient systeinatique de nos sensations, pour le tissu purement subjec- tif de nos perceptions et dc nos connaissances. La manierc dont M. Maine dc Biran a taclie d'y repondrc ne nous parait pas exempte d'objections, mais elle offre de nouveaux motifs pour legitinicr I'espece d'anthropomorphisme auquel nous as- sujctissons la nature, en la soumettant a un principe de notre raison, et nous ne pouvons qu'exprimer iterativement le voeu de nous voir bientot en possession des memoires et des traitts que cet eminent psychologiste a laisses en etat d'etre livres a I'impression. Parmi les symptomes d'une meilleure tendance des esprifs en matiere de philosophic rationnelle et de Icur retour vers ces meditations qui seules fournissent aux sciences leurs bases et leur ciment, tandis qu'elles donnent a ceux qui s'y livrent une vigueur mtcUectuellc, propre a leur rendre pUis faciles tons les autres genres dc recherches scicntifiquos, je n'hesite pas a 94 SCIENCES MORALES assigner un des premiers rangs aux ecrits de M. le baron Mas- sias. Dans un ouvrage etendu, dont la Revue Encyclopedique a fait un juste eloge (i), ilavait embrasse toutcs les parties de la philosophie, tantgencrale qu'appliquee a notre constitution or- ganique ct intellectuelle , a nos besoins sociaux et moraux, a la tlioorie dcs beaux-arts ct a nos sentimens religieux (2). II manquait a ce vastc ensemble de travaux sur la science de I'homme , considert- comme partie d'un grand tout auquol il est incorpore, a titre d'intelligence servie par des organcs, stimulee a Taction par dcs lois instinctivcs ct univcrsellcs, se dovelop- pant sous Tcmpirc dc ccs lois pour attcindre sa triple dcstinee d'etre sensible, social, moral ct religieux : il manquait a ce grand tableau un traite sur Ics moyens mis a notrc disposition par la nature pour acquerir la connaissancc reelle et certaine des vcrites exposees paT I'auteur dans son principal ouvrage. La nouvellc production de sa plume , que nous annoncons , est done le complement et la clef du cours de philosophic reli- gieuse, sociale ct poetique, rcnfermc dans les cinq volumes precedemment publics. II cherche a y etablir que la connais- sancc humaine ri'est que le rapport de la nature a Vhnmmc ctde I'homme a la nature. « Nous faisons nos efforts , dit M. Massias, pour y donner des bases a la certitude, ct rcsoudre le pro- bleme dont, depuis quatre mille ans, la philosophie cherche la solution. Sans un livre qui cffcctue ce que nous osons ten- ter, I'education de I'csprit humain nesaurait etre complctement rationnclle (3). » L'importance et la difficulte du sujet,la saga- cite , la candeur , rindepcndance de toute opinion systematique et de toute consideration etrangcre a Tinterot de la veiite que M. Massias a apportees a I'examen de la question a laquclle il entrcprend de rcpondrc, sollicitent I'attention la phis sericusc (i) 69'' livr.iison. ( 3*^ du 23« volume. — Septembre 1824.) (2) Rapport de la nature a I'homme ei de I'homme a la nature. 5 veil. in-8", y compris la Theorie .du beau et du sublime, avec dix tablc.nix synopliques. Firinin Didot, rue Jacob, n" 24; prix, aS fr. (3") DIscours Pieliminaire, p. xxvi. ET POLITIQUES. gS des amis de la philosophic , comrae la variete d'instruction que" I'auteur deploie, les intentions droites, pures, profondement religieuses qui I'animent et les resultats consolans auxquels 11 arrive par I'examen des bases sur lesquellcs s'appuient les prin- cipales branches du savoir humain, inspirent une haute estirae pour I'auteur et le plus vif desir de pouvoir acquiescer aux conclusions auxquelles son raisonnement le conduit. Nous tacherons d'en presenter Ic resume suh'Stantiel. L'auteur se demande : Quest-ceque connnilre? Que pouvons-nnus connaitre ? A cela il repond que, dans I'etre huniain, connaitre, c'est etre soi, se reflechir, qu'etre et connaitre sont une seule et meme chose pour rintelligence, parce que I'intelligence qui cesserait de con- naitre cesserait d'etre intelligence, comme la matiere qui cesse- rait d'etre etendue cesserait d'etre matiere. La connaissance est done I'etendue de I'etre intelligent. Connaitre est done etre; connaitre davantage, apprendre ou avoir appris, est agran- dissement de I'etre. Comment aura lieu cette extension, cette ampliation de I'etre intelligent? ou en trouvera-t-il les materiaux homogenes ? lis ne peuvent etre qu'en lui ou hors de lui. Il s'agrandira, en de- veloppant ses proprietes, en rendant explicite ce qui n'est en elles qu'implicite. II s'agrandira, en s'adjoignant ce qui est d'une essence semblable a la sienne, en s'assimilant l' intelli- gible qui est hors de lui. C'est au developpement de cette propo- sition qu'est consacre tout I'ouvrage. Partant du principe qu'une chose, pour etre accessible a notre cognition ( mot de la phi- losophic de Kant, qu'il adopte parce qu'il rend son idee mieux qu'aucun autre), doit pouvoir etre rangec dans l' intelligible , I'auteur passe en revue les ohjcts et ce que nous cntendons par leur existence., Icurs qualites , Xewvsfornics , leurs modifica- tions, leurs rapports, leurs mouvcmens dans I'espace et dans la duree , les Ids individiielles et universelles auxquelles ils sont assujetis, faction et I'eXfet de ces lois, notre propre activiie et nos ojierations,et cherche a prouverque toutes ces choses dont Tensemblc est aussi immense que la nature , n'ont de prise sur nous que par leur maniere de nous affecter qui consiste dans i)G SCIENCES MOR\LES uii mode d'action imniaterielle ; qu'elles sont en consequence intelligibles , n'etant au fond que dcs rapports entre I'etendue et rintelligence, et que I'univers n'est pour nous, en derniere analyse, qu'une collection de qualites, nous parvenant par des impressions que nous ne connaissons que par Icurs effets. Nous dcvons nous borner a un precis aride des developpe- mens dans lesquels I'auteur entre pour justifier ce point de vue fondamental de son systeme. Pour connaitre I'essence des choses, il faudrait que nous cessassions d'etre ce que nous sommes, d'etre nous-memes, et que nous sortissions de nous pour nous identifier avec d'autres natures. La sidistance interne des etres est inaccessible : I'esprit ne se revele que par la connaissance , la matiere ne se fait con- naitre que par Vetendue et la resistance. Que sont etendue et 7e'«Vto«ce? Deux abstractions dc notre esprit, a I'occasion de I'impression ; deux mots signiliant I'unite concrete, formee par le concours du nioi qui tend a tout ramener a la simplicite de sa forme ou a I'unite typique, et de la conscience du non-nwi, qui nous permet de poser I'unite concrete, et par celle-ci, indefiniment multipliee, I'etendue, I'espace. L'unite concrete, ayant des dimensions dans tous les sens, est par consequent impenetrable et resistante. Etendue et resistance sont deux mots indiquant le sujet inconnu d'un plienomene connu, par lequel nous avons le sentiment de la resistance et de I'etendue. Ainsi I'objet producteur de ce sentiment est une cause , chose emi- nemment intellectuelle , et {'effet est une sensation qui n'a rien de reel pour nous , si ce n'est dans la perception , acte dont le resultatest denue de toute materialite , puisque ce resultat est tin rapport ( entre I'etendue et I'intelligence), chose toute spi- lituelle. Or , tous les sens sont toucher , perception de I'etendue resistante : en voyant les couleurs, en flairant les odeurs, en goutantles saveurs, en entendant les sons, c'est done I'intclli- gible, et rien que I'intelligible, a des degres differens, que per- coit I'intelligence. Meme appreciation de la forme et du mouvement. I.es formes sont des caracteres dont chacuii exprime dcs idecs ET POLITIQUES. 97 on dcs affections, les ptriseos de la Diviiiiti,ou Ics sentimens de I'homme. Les formes n'existent que pour les besoins des in- telligences finies ; Tintelligence supreme n'a qu'une seule idee non limitee , reflexion et forme d'elle-meme. Toute matiere a tine forme quelconque qui se donne sans rien oter a son sujet. Toute matiere est susceptible de toutes les formes. La forme est distincte de la matiere. Qu'a de commun celle-ci avec I'enipreinte, avec V action per mancnte du mouvement intelligent qui la faconne et la maintient dans les lineamens qui la cir- conscrivent ? Co n'est pas le corps figure qui nous parvient , c'est la lumierc , ou plutot le sentiment qu'elle en donne. La forme est pour la vue ce que le son est pour I'oreille; et le son, considerc dans le sentiment que nous en avons, mode unique de son existence , est immattriel. Les formes sont I'etendue analysee ; la parole de la matiere ; les idees de la Divinite. La forme consideree dans le sujet qu'elle modifie , est matericlle; consideree dans I'aete qui la produil, c'est-a-dire, qui limite les corps pour la plus sAvante des fins , elle est intel- ligence souveraine. LTn corps , passant d'un point de I'espace dans un autre point , nous donne Ic inouvcmcnt, succession de rapports de position. Un corps se meut-il par sa propre vertu? Mouve- ment est deplacement , partant un acte. A qui est-U donne de produire des actes ? nous en produisons ; qui les produit en nous? notre volonte; elle est cause d'e^fets ou d'actes. Le mou- vement est done un acte, un effet ayant sa cause dans la vo- lonte. Tout mouvement est wn titre a la suzerainete de la ma- tiere. Or, les corps qui operent des mouvemens a nos yeux , la picrre qui tombe, le fleuve qui coule , I'astre qui parcourt I'es- pace, n'ont pas de volontes qui produisent leur deplacement. Tout cela est mu , et ne se meut pas. Ainsi , tout mouvement nous monlre unc volonte; tout mouvement ordonne nous rhontre une volonte iiitclligcnte. Toute volonte intcUigente sup- pose rigoureuscment individualite; car volonte et intelligence ne sont nuUement divisible*. Done, tout honime reconnait une volonte, une intelligence , une cause , aussi superieures a s^ T. XXXI n, — Jnrmei 1827. -^ g8 SCIENCES MORALES volonte, a son inlelligeiice ot a son j)Ouvoir, que los nioii- vemcns produils clans runivcrs sont supcriours en puissance et en savoir a ceux (jn'il pent produire Ini-mcnic. II n'est point d'athees. Le point de depart de I'auteur elant la proposition , quo nous ne pouvons saisir ies objets que par ce qu'ils ont d'ana- logue avec nos facultes, en d'autres teimos, par Ictir cote in- telligible, niettrc en evidence I'intelligible dans Ies impressions, Ies affections ct Ies perceptions, devait etre le principal butde tout I'ouvrage , seme d'ailleurs d'unc foule de vues souvent justcs , quelquefois profondes , toujours ingenieuses. Nous re- grettons d'etre forces de renfermer notre analyse dans une tres-sechc exposition de I'idee-mere a latjuelle elles se rap- portent. Pour la faire plus ncttement comprendre , et engager Ies personnes pour Icsquelles ces rechcrches sur Ies principes de nos connaissances ont de I'attrait , a recourir au livre meme , nous offrirons encore quelques-unes des reflexions qui presen- tent la theorie de M. le baron Massias sous plus d'un aspect , et qui en resument Ies elemens avec Ic plus de concision.. Le problems de la connaissance humaine depend essentiel- lement de la connaissance dn lien qui unit le moi au, non- moi , ou da raj)j>ort en tic riiitclligciicc ct la iiiaticrc. Poiu' rend re; sensible a Timagination la maniere dont I'auteiu- conceit ce rapport , il suppose une montre intelligente , renfermee dans la grande horloge de I'nnivers , en recevant son mouvement , inscrivant et lisant sur son cadran tons Ies phenomenes extc- vieurs qui s'y repetcnt en petit ; ayant aussi un mouvement propre qui pent seconder ou contrariei; Taction generate, sans pouvoir cependant s'en affranchir totalement. Dans cette hypo- these , le rapport en vertu duquel la irlontre percoit en elle Taction universelle , sc compose de sa propre action , do sa propre perception , combinees avec Taction et Tintelligence universelles ; k" Ht'n qui Ies unit est leur action commune et reciproquc. Ce rapport , cette action mixte de Tindividuel et de Tunivcrsel unissant deux extremes, le fini et Tindefini , et , par I'intermediaire. de celui-ci , le fini et Tinfini , est le troisieme ET POLITIQUES. 99 clement de la constitution tic Phuninu' qui a jusqu'ici, scion M. Massias , etc neglige oil mal apprccie, ct qui fait de 1 liommc line unite ternalrc , ayant en soi la cause de son action , par consequent ses moyens et son effet; et hers de soi, son objet , son stimulus et son rcgulateur dont , en la percevant , il s'ap- proprie et s'assoeie Taction. Cerjui se passe hots de nous , con- clut I'auteur, se passe aussi en nous , etfait partie de nous. L'ensemble des vues de M. Massias sur les rapports de la nature a I'liomme, et les branches d'arts ou de sciences qui en deconlent, se trouvc resume dans trois tableaux qui ont e'ite places a la Qn de I'ouvrage ; deux offrent la representation figuree de I' unite ternaire humaine , et des rapports de I'homme a la nature; le troisieme presente synoptiquement les connais- sances humaines dans leur rapport area leur objet , entre eltcs , et avec nos facultes (1]. En derniere analyse , la reponse de I'auteur a la question : Qu'y a-t-il de vrai dans ce que nous contiaissons? se rcduit a ceci. Toutcs les sciences sont donnees par la perception et la reflexion; dans I'une et I'autre, il n'y a que Taction de la nature et la notre, action qui s'unit en nous, et a laquelle ces deux facteurs de la connaissance humaine participent diverse- ment et inegalement , suivant les circonstances. La verite n'est que le sentiment et Tevidence de cette analogic entre notre moi et ce qui n'est pas lui. Ce qu'il y a de vrai dans nos connais- sances est, ainsi , le sentiment et Tidee que nous avons de Taction uniyerselle et indivrduelle , de Texistence de la ma- tiere et de ses modifications par la forme , les couleurs et le son. Dans toiite perception, il y a coirespondance entre Tac- tion univcrselle et individuelle, par Tintermediaire de la na ture organique et inorganique. Dans Tunivers, il n'y a que ma- (l) Nous avons place sous les yeux de nos lecteurs ces tableaux (Voy. Rev. Enc. , au commencement du cahier du mois d'octobre 1826 ou du torn. XXXII.) qui font apprecier d'un coup dVil les bases dnsysteme de M. Massias, et I'espece de classification encyclopedique des connais- sances humaines qui en resulte et qu'il explique , p. 288 et suiv de sou ouvrage. Voy. aussi p. 26 et 34- soo SCIiiNCES MORALES tiere , mouvement et intelligence. La matiere nous est conniif par le mouvement , ct le mouvement n'est qu'un ejfct dc I'in- telligence agissant sur la matiei'e. Ainsi nous voyons en nous* mcmes les objets c'claires par celui qui a cree la lumiere dcs esprits , et qui est justcmcnt appele le soleil des intelligences, parce qu'il a rendu les objets accessibles a notre perception, en leur donnant une action sur nous a laquelle la notre s'associe analogiquement. L'action qui a lieu au-dedans de nous , celle qui se passe hors de nous , et qui nous parvient par la per- ception , font partie de nous-memes. Ainsi Taction percuc de la nature est identiquc a JE. La certitude etant sentiment d'idcntite , 11 y a done certitude pour I'liommc , puisqu'il esl sur de son moi , ct que la connaissance est identique a ce moi. Pour faire ressortir ce qu'il y a dans ce point de vue d'eleve et de fecond en idees lumineuses ou attrayantes, nous emprun- terons les paroles d'un philosophe qu'une reunion des plus rares talens a place egalement haut, comme penseur et comme ecrivain , et qui arrive par une autre voie a un resultat ayant beaucoup d'analogic avec celui des meditatiocs de M. Mas- sias. « Le moi » , dit M. (Cousin dans la belle preface qui pre- cede ses fragmens philosophiques (i) , « le moi n'cst pas passif, et ne pent jamais I'etre , puisqu'il est I'activite libre; ce n'est pas I'objet non plus qui est passif, puisqu'il nous est donno uniquenient dans la raison de cause , de force active. • — Le monde exterieur n'est done qu'un assemblage de causes cor- Tespondantes a nos sensations reelles ou possibles; le rapport de ces causes entre elles est I'ordre du monde. Ainsi ce monde est de la meme etoffe que nous, et la nature est la soeur de I'homme ; elle est active, vivante, animee comme lui; et son histoire est un drame, tout aussi bien que celle de I'huma- nite. » « L'univers » , dit M. Massias (a) , « n'est qu'une vaste ana- (i) P. XXXIV et suiv. (j) P. 2ig et snir. ET POLITIQUES. loi logic ; sans analogic, point d'lmite dans le nuildplf, point de multiple dans I'unite. — En derniere analyse, nos connais- sances , nos sciences , nos arts ont lenr origine dans la per- ception. Rien n'est percu que Taction de la nature et la notre. La nature agit sur nous par les formes des objets , qui sont sa science et son art. La variete de nos perceptions provient des modes divers du mouvement et de la variete des formes impres- sives. La perception, d'ou vient toute notre connaissance, n'a done lieu qu'en vertu de I'analogie qui existe entre le sujet et I'objet , entre le moi et le non-moi. Par la perception (activite intelligente) , nous saisissons , nous nous adjoignons la forme ct ['impression qui agissent sur nous. La forme et I'impres- sion , qui, en dernier resultat, sont action, ne pourraient passer dans I'etre qui est pour soi (I'etre intelligent) , si celui-ci ne I'admettait dans sa propre action. Dans la perception , la part de la nature est la plus grande ; dans la reflexion, la part la plus considerable est celle de I'homme. Lorsque deux amis , ajoute M. Massias , se serrent doucement la main , leur exis- tence passe dans le point de contact; et, loin que I'un ote rien a I'autre , I'activite de leur etre est doublee par cette commu- nication. >. « II semble » , dit-il ailleurs , « que la matiere soit un voile jcte entre nous et la Divinite : ce voile est tissu de toutes les formes et de tous les groupes existans dans I'univers : le cote tourne vers nous aboutit, par les sens, a notre intelligence; I'autre cote aboutit aux idees divines , types eternels. » En nous attachant, dans cette annonce d'un ouvrage qui roule sur des questions metaphysiques , a ce qu'il renferme de plus abstrait, mais aussi de plus important pour I'appre ciation de la theorie de I'auteur, nous craignons d'avoir donne une fausse idee de I'interct de son livre et de I'attrait qu'y trouveront les lecteurs les moins habitues aux meditations spe- culatives. Une grande variete d'instruction scicntifique et litte- raire , une foule d'idees fines etjustes, d'apercus vastes et in- genieux, d'images brillantes et d'exprcssions heurcuses , re- pandues sur I'exposition des matieres les plus arides , cap- loa SCIENCES MORALES tivent ou rcposeiit agreabltnient I'attention et la sovitienncnt dans ses efforts. Nous citorons , pour cxemples , le parallelc du genie de Descartes ct de Newton, et des services qu'ils ont rcndus aux sciences (p. 126-1 33), les reflexions sur I'art de I'historien (i54-i58) , sur la rhetorique et la pottiquc d'Aristote (161 et suiv.) , sur Ics niethodes (166 et suiv.), sur les langues (p. 1 70-185) , en particulicr sur les onomatopees, sur la difference des lanyues ancienncs et modernes (p. 265) , sur I'expression , cspece de reaction instinctive , mere du laugage (170-174). Parmi les digressions utiles ou piquantes qui servent de point de repos a I'esprit ou de developpcment a la theorie de rauteui", nous signalerons encore des observations sur la pro- gression des formes du sentiment religieux (140-1/16); sur le romantique et le classique (i65) ; sur la difference entre les sciences exactes ou metriques et morales ou analogiques (i33- 81); sur le principe de I'arithmetique (io5-i35) et de I'algebre (ii4); un expose des rapports dans I'ordre mineral, vegetal, animal , intellectuel et moral (27-37) ; un recensemcnt detaille des choscs materielles, tendant a montrer que nous ne les per- cevons qu'au nioyen dc la prise immatericUe qu'ellcs ont sur nous (5 1- 57) ; la refutation du matcrialisme de MM. Lancelin et Azais (187-216); celle des opinions de Volney sur I'oi'igine des idees religieuses et morales (p. 299-3x8); une note rela- tive a I'influence des signes sur la pensee (3i8-324); des con- siderations sur I'homogeneite de la matiere (325-33o) ; et I'examen de quelques propositions de I'Essai sur les prohabi- lites , par M. de Laplace, morceau polemiquc egalement re- xiiarquable par le ton dc politesse qui yregnc, par la justesse des reponses que M. Massias oppose aux doctrines materia- listes de I'illustrc savant qu'il combat , et par I'incoherence des assertions qu'il releve. II montre tres-bien la contradiction qu'il y a entre ces assertions et les principcs que le grand geometrc a poses lui-momc. Dans son Essai sur les prohabilites , ' \\ admet la possibilite d'apporter dans la theorie de rcntcnde- uient hnniain la mome exaclitude (pic dans les autres branches ET POLITIQUES. io3 tie la philosophie naturelle, eu appliquaiit aiix observations du sens interne qui peat seal apcrcemir ses propres nioclifica<> tions, la methode dent on a fait usage pour les observations des sens externes (i) ; et cependant, il affirme presqu'en meniu terns (2) que la psychologic n'cst qu'une continuation dc la physiologic visible ; que Ics vibrations du sensorium , qui est Ic siege de la sensation ct de la pensce , sont assujeties aux lois de la dynamiquc ; que Ic sensorium est ce nieme sens interne quipercoit ses pi'opres modifications, et, confondant ainsi des phenomenes qui appartiennent a deux sources absohniient differentes , il transporte le domaine des sens externes dans la sphere du sens interne qui se trouve ainsi meconnu et aneanti , apres que son existence distincte et son ressort special avaient ete reconnus. Le meme savant, oubliant que, dans un des ouvrages qui font le plus d'honneur a I'esprit humain (3), il a refuse a la matiere toutc faculte de se donner aucun mou- vement on de changer la direction de celui qui lui a ete im- prime par une force etrangere , fait executer des mouvemens au sensoiium on sens interne materiel (qui ne croit entendre quelquc chose d'analogue a : cercle carre ou point a trois dimen- sions?) , le dotant del'activite qui forme les langucs (224) , com- pare (226), se modifie par I'attention (239) et par les croyances (242). Pour compenser rinconsequence par laquelle un priu- cipe d'activite qui lui permet de se mettre en mouvement elle- ineme, est attribue a la matiere ailleurs declaree inerte en soi, M. de Laplace appelle illusion de I'esprit la persuasion ou nous sommes que la volonte se determine d'ellc-meme (4)- Mais alors il ne fallait pas parler des principes etcrnels dc raison de justice et d' humanite , qui fondent et maintiennent les socictes (b). M. Massias a raison de dire que la oil tout est necessaire , ou (i) Cinqnieine edition, p. 220. (2) lb., -p. 219. (3) Voyez p. 2 5o de V Exposition in srslcme du monde. (4) Essai sur les prohabiUles , p. 3. (5) /^., p. 177. io4 SCIENCES MORALES rlen li'est librc , il ne pent y avoir nl raison , tii justice , ni humanite , ct que, dans cette hypothese, il est aussi al)suide d'exhorter rhonime a la vertu , que d'exhorter une horlogc a sonner exactement I'heure. C'est pour cela vraisemblablement que I'illustre auteur de I' Exposition du systeme du monde a re- tranche de la ciuquieme edition la phrase suivantc : « F^-rite , justice , hum an ill' , voila des lois immuables de I'ordre social. Loin de nous la dangercuse maxinie qu'il est quelquefois utile de s'en ecarter et de tromper ou d'asservir les honimes pour assurer leur bonhcur. Dc fatalcs experiences ont proiive dans tous les terns que ces lois sacrees nc sont jamais impunemcnt enfreintes. » Cette suppression ne nous etonne pas , parce que nous con- cevons I'iniportance qu'un esprit superieur met a ce qu'il y ait rigoureuse consequence entre ses principes et toutes ses asser tions ; mais nous pensons qu'il est parfaitement contradictoire d'admettre I'existence d'un sens interne , de lui assigner une juridiction propre etun genre de manifestations particulieres , et de I'assujetir en meme terns a une legislation toute diffe- rente , en I'enchainant aux lois du monde visible et tangible. Ce n'est que lorsque ces deux classes de phenomenes seront nettement distinguees, et qu'on ne se perniettra plus de con- fondre les limites de Icurs deux terrains si completement dis- parates ^ que la psychologic pourra s'elever au rang d'une science independante , egale en clarte et en certitude aux con- naissances que nous acquerons par I'entremise des sens exte- rieiu's. Et c'est a cette observation que peut se rattacher le seiil dissentiment ou nous nous trouvions , a I'egard , non , certes , des resultats de la theorie de M. Massias, auxqnels nous atlherons pleinement , mais de quelques-unes des premisses ou des doctrines qui leur sevvent dc points de depart ou d'appui. P.-A. Stapfib. ( Le suite an rah icr pi ochaiii . ) ET POLITIQUES. ' o5 MiMOlRtS 6UR DIVEKS EVENEMENS nE LA REVOLUTION ET DE l'Emigrationj par //. de Dampmabtin, marecbal ties camps et arniees du Roi (i); Souvenirs de l'Emigration, a Vusage de Vepoque ac- tuetle; par le marquis de Marcillac, colonel d'etal- major, sous-prefet de Villefranche, commissaire du Roi dans le Midi a lepoque des Cent-Jours (2). Pen d'annecs avant la Revolution, un jeuno capitaine dc cavalerie se trouve en qiiartier pres d'une ville 011 des eaux minorales attirent la mciUeure compagnie. II est recu et fete dans des societes charmantcs. II vent prendre sa revanche, et prepare, a son tour, unc fete. Son premier soin est d'y pricr un liomme plein d'esprit et de coiinaissauces , mais qui avait pour lors le malheur d'etre j'uge severement par les dames. Cette invi- tation fait Jeter les hauts cris. Une femme jolie , aimable et duchesse, intime an jeunc officier sa resolution irrevocable de nc se rencontrer de la vie avec une cspece sans moears , sans niaintien ct du ton le plus detestable. « Au huitieme mois dc la Revolution , ajoutc M. de Damp- martin (car c'est lui qui etait le jeune officier), je me trouvais, unjour, chez la femme dent le rigorisme m'avait cause tant d'impatience... Son inquietude eveilla ma curiosite. Je I'inter- rogeai. « C'est , me repondit-elle, que, dcpuis trois semaines, je sollicite en vain pour qu'un membre famcux de TAssemblee me donne quelques momens. Le desir dc le posseder est si vif que pas un seul diner ne reste a sa disposidon. Mais aussi quel homme extraordinaire! que de genie, que de courage, que dc grandeur d'ame il rassemble au supfeme degre ! » Je n'ai pas besoin de dire que le grand horolfte ' sollicite (t) ParU , i8ji5; Hubert j Palais-Royal, galeries de bois. •>. vol. in-S" cle 432 et 4i6 pages ; prix., i4 fr. (•;>) Paris, iSaS; Baudonin Preres , rnc de Vangiracd, n° 17. i vol. iij-S" de 2 ! 8 pages ; prix , 4 fr. 10 6 SCIENCES MORALES ticpuis trois semaines etait \nt;chvmcnt I'cspecc avec On a envoys nii aide-de-camp a Ostende pouv avertir de rarrivee dcs Russes ; la nouvelle du depart do la flotte est done oflicielle, etc. , etc.... Cette nouvelle so comrau- uiquuit a toutc I'tniigration , qui la ropandait en France... « Vous arriverez trop tard, ajoutait-on dans les correspou- dances ;vousserez deshonores; vos enfans ne scront jamais rien... » Comme au terns dc la seconde croisadc, sous Louis VII, on envoyait aux geutilshommes (pii iiesitaicat a quitter Icurs manoirs , une quenouillc ct ties fuseaux. Quelque trente annees plus tard , M. de Marcillac s'est dc- mande : L'emigration ctait-clle politique? or, voici la reponso qu'il s'est faite; je la transcris mot pour mot : « Cette ques- tion serai t a resoudrc, si les evencmens n'avaient pas di-mantro h tevidcnce la faussete de cette mcsurc que Ton croyait con- servatrice dc la monarchic. S'eloigner du trone pour soutenir le trone , sortir de France pour reconquerir la France , s^cn- /(?wr son influence pour se servir de cette influence, voila des fjuites impardounables , et que I'histoire doit juger avec toute sa severite. - II taut qu'unc tardive experience eut Lien change les idees dc I'auteur, car toute la premiere partie de son livre €st destinee a nous peindre avec quel enthousiasme il avail pris part a ces fautes que le jugement de I'histoire doit con- damner si se^rerement. Nous le voyons a viugt ans (mars 1791), quitter avec ivresse le toit paternel , traverser en fugitif tout le midi de la France j et , du moment qu'il pose Ic pied sur le territoire pienioutais , livrer son imagination a des idees cnchantcressrs qu'il lui serait impossible dc decrirc. II rencontre a Chambery quelqucs of- Gciers francais qui I'y avaient precede , et croit lefea remlution- naire cteint. Cependant , deux mois apres , comme il se pro- menait un dimanche avec MM. de Joinville et Uoridan , voili les Savoyards qui s'attroupent, et tout a coup s'elancant aux cris : A bas la cocardc! a la lanterne les emigres ! font pleuvoii' sur les trois amis une grele de ])iprres. Sans I'assistance- d'un ET POLITIQUES. n3 poste voisin , et le secours , devenu necessaire , d'un deta- chement de cavalcrie, ils aiuaient etc lapides ; ce qui malheu- reiisement dut prouver a M. de Marcillac que le feu revolution- ««i> — " Mieux vaut tard ET POLITIQUES. ii5 que jamais. » — De bruyans eclats de rire faisaient russortir les traits des epigrammes. Boisseulh et Vczins (deux amis do rautcur'i , fort peu disposes a supporter la raillerie , repliquent par des mots piquans. La querelle cngagc'e s'echauffe... » Heu- reusement, et fort a propos , survient un oflicier superieur : ses regards ne tardent pas a exprimer la joie la plus vive ; et M. Dampmartin apprend qu'il se trouve au milieu des che- valiers de la couronne , commandts par le comte de Bussy, ancien capitaine au regiment des dragons de Lorraine. Le commandant embrasse avec amitie ses ancieris camarades , et le corps entier s'empresse de les feter. Reunis a un banquet , ils apprennent que les chevaliers de la couronne vont former I'avant-garde du prince de Conde dans sa marche sur Landau. On les presse de s'y faire inscrire ; on n'oublie rien , surtout , pour les detourncr de se rendre a Coblentz , ou les monarchiens dominent. Surpris , mais peu effrayes de cette revelation , ils opposent a tant d'instances la promesse que les princes leur avaient fait parvenir, de former une legion de Lorraine , dans laquelle ils seraient reunis a leurs anciens compagnons d'armes; on cede , et ils poursuivent leur route. Apres bien des fatigues , et plus d'une traverse , ils pensaient mettre le pied en terre promise ; ils se felicitaient d'entrer dans les etats d'un frere de la reine de France (I'electeur de Cologne) , quand tout a coup les sentinell^s placees aux portes de'Bonn leur signifierent , avec brutalite, de chercher ailleurs un asile. lis nommerent cette injonction brutale un desappointement. Un autre les at- tendait a Treves , ou s'etait transporte , de Coblentz , le quar- tier general des princes. Cette legion de Lorraine qu'ilsvenaient grossir n'eut pas lieu. Enfin , ils furent admis dans la coalition languedocienne. » Cependant allait s'ouvrir la campagne de 1792. On doutait si peu, dans le camp des emigres, d'une reussite complete et soudaine , que deux officiers eureot une prise fort vive , et furent sur le point d'en venir aux mains , pour savoir auquel des deux resterait le droit de profiter du conge de semestre , au I*'' octobre suivant. Ces illusions avaient seduit jusqu'aux chefs 8. II 6 SCIENCES MORALES de rentreprisc. An rapport de M. Danipmartin, les liommes les plus distingiK'S par Ic rang , I'age, les services, attcstaient, do bonne foi , qu'nn nioiichoir blanc deploye sur les frontieres du royauinc suffirait pour rallier aussitotles bourgeois, les paysans ctles troupes. Le baron d'Heuman, brave oflicier dont le mar- quis de Conflans avait fait la fortune militaire, dit a la table du roi de Prusse : « J'ai apporte dans ma poche les clefs des for- leresscs de France : » sur quoi le chevalier de Borghese , am- l)assadeur d'Kspagnc , ropondit : « Nous pourrions bien trouver les serrures changees. » Plus coufiant que I'ambassadeur, le due de Brunsvs'ick , pres d'entrer en eanipagne , n'etait travaille que d'uh souci : il craignait de voir les Francais se derober par une ob6issancc trop prompte a la Iccon dont ils avaient grand bcsoin. Aussi le fit-il bien voir par son curieux nianifeste. On a souvent reproche au faible Frederic -Guillaume la publication de cette piece eternellenient famcuse. Les Memoires du general Dampmartin fournissent a cet egard des renseigne- mens tout nouveaux, et qui, bien verifies, pourront donner des himieres a I'histoire. D'apres lui, le roide Prusse desap- prouva hautement la declaration de Brunswick, et s'opposa quelque terns a ce qu'elle fxit rondue publiquc. « Mais a Franc- fort , les raisons specicuses et les instances adroitcs le pour- suivirent pendant tout un diner, et surmonterent sa repu- gnance. Bientot, fidele a la marche des caracteres trop faciles, il substitua un souhait au maintien de sa resolution. « Puisse ce frianifesfe , dit-il , satisfaisant au vceu de mon coeur , assurer le saint de Louis XVI , et I'integiite de la France ! » Tout le mondc sait trop bien quels furent les prompts effets dc cette declamation ridiculemeut furibonde; et les resultats de la campagne sont egalement trop connus pour que je doive m'y arreter. Mais je trouve dans les Souccnirs de M. de Marcillac un Vait dont la singularite ne scrait pas sans importance; et je le transcris pour ceux qui se verraient a portcc de I'eclaircir , de le combattre, ou dele fortifier par de nouveaux renseignemens. T/auteur vient de dire, quelques pages plus haut, que tout fai- •^n'u jjicfsentir la pcrfidic qui prvsitlnit olors ait.r conseils des ca- ET POIJTIQUES. 117 billets. Arrive au moment ou Dumoiiriez se relraiiche dans ie poste des Islettes, pom* couvrir Chalons et la route de Paris, il ajoute : nLe quartier general des princes fut etabli a Somme- Suippes; celui dii roi dc Prusse etait au chateau de Dampierrc. On avait reconnu la position de I'armee francaise; elle avait ete jugee difficile a enlevcr, ce qui fit retarder long-tems Ie projet d'attaque. II parait meme qu'on eut un moment Ie projet de la tourner, enprenant la direction de Reims; mais dans un conseil oil furent appeles les princes et quelques-uns de )eurs gene- raux, il fut decide qu'on I'enleverait dc vive force. Les princes reclanierent, comme Ie poste Ie plus perilleux, I'attaque de la batterie de droite. Le jour etait fixe pour cette affaire, qui de- vait decider du sort de la campagne , et ouvrir aux allies le chemin de Paris, s'ils obtenaient la victoire, qui ne paraissait pas douteuse... Le prince royal, ou le prince Louis de Prusse ( je ne puis me rappeler lequel des deux ) , etait venu diner avec les princes le surlendcmain da conseil dans lequel on avait de^ cidela bataille. Il s etait rcfarde , et ne put partir qu'a la nuil close. II ne connaissait pas les chemins : on lui donna un guide que je relevai a son passage a Somme-Tourbe occupe par la coalition d'Auvergne. II etait une heure du matin lorsque nous arrivamesau chateau deDampierre. Je prenais conge du prince, lorsqu'il me dit : « Monsiein- I'aide-de-camp , vous devez etre fatigue ; rcposez-vous un moment : je dois aller visiter les avant- postesa lapointe dujour; vous m'accompagncrez : je vous ferai voir en detail la position de Tarniee republicaine. Les princes seront bien aiscs d'en avoir le rapport, que vous pourrez leur faire. » Nous montames a cheval a trois heures du matin. Lie prince parcourut toute la ligne de I'armee francaise... En face de la batterie de droite, « Voila, me dit S. A. , la batterje que les ])rinces ont demande d'attaquer. Si nous livrons la bataille, nous la gagnerons indubitablement; mais a quoi cela servira- t-il ? a faire tuer des hommes, et voila tout. Nous ne parvien- drons pas a sauver le roi;les Francais n'en veulentplus, j'en suis assure. J'ai etc dernierement au camp de Dumouriez ; j'ai \usori arniee, j'en ai ete bien recu , mais elle ne vent plus de liS SCIENCES .MORALES roi, c'est le cri des soldats. Pourquoi done fair« verser dusang pour un but que nous ne pourrons atteindre? « Revcnu au quartier general prussien , M. de Marcillac se hate de prendre conge de Son Altesse et de porter aux princes sa conversation. Elle partit les etonner. « La bataille devait se donner le surlendemain, poursuit-il; la cavalerie montait a chcval, quand tout a coup un ordre arriva de nidnoeuvrer en inarche retrograde... On crut d'abord qu'o« avait renonce a I'attaque pour tourner la position, mais on ne tarda pas a s'a- percevoir qu'on battait en retraite... Le desespoir se manifesta d'une maniere qui tenait de la rage contre les Prussiens... II eut ete dangereux de rencontre r dans la marche des troupes de cette puissance. L'influcnce et les ordres des princes eussent ete in- sufiisans pour empecher un engagement a outrance...» Pour dernier trait, I'auteur ajoute : «0n assura... que la retraite avail ete decidee sur des depeches de Londrcs et de Vienne, appor- tees par un courrier qui avait passe dans la nuit au quartier general des princes, et auquel on avait donne un guide. » M. de Dampmartin , d'aillcurs bien eloigne d'accuser Frede- ric-Guillaume, ou plutot qui cherche avec soin tons les moyens del'excuser, n'en a pas moins retrace avec la merae energie I'indignation des emigres, trop malheureux pour n'etre que justes. Ce prince qui, pcu de jours auparavant, s'etait offert a leurs esperances coninie le moclerne. Agdinemnon , n'etait plus a \e\yc?,^evx. (\f\e.Xopi)robre des rois. Le liconciemcnt d'Arlon vint ajouter a I'amertume des accusations et des plaintes. Apres avoir foule le sol de la patrie dans I'ijlusion et deja toute I'i- vresse du triomphe, nos fugitifs :ie voyaient tout a coup remer- cies de leurs services , abandonnes sans ressource sur une terre sans asile pour eux , forces de se disperser , et d'errer sans pain parmi les nations. Les uns, ivres de fureur, courent a I'in- stant grossir les phalanges republicaines , par emportement et par vengeance ; d'autres succombent au desespoir , se precipi- tent dans lesfleuves ou sur la pointe de leurs epees. Parmi ccs scenes dechirantes, dont on me pcrmettra de dt- tourncr mes regards, se trouveunc revelation qui , rapprochee ET POLITIQUES. 1.9 Jes paroles attribuees par M. Marcillac au prince Louis ou au prince royal tie Prusse, peut offrir de I'interet et acquerir quel- que importance. D'apres les Memoires de M. Dampmartin , le premier aide-de-camp de Frederic , Bischoffswerder qui , comme on sail, etait pour lors le depositaire de toutes les pen- sees de son maitre , apres avoir offer t a Monsieur et au comte d'Artois de se choisir en Prusse une retraite , soUicita et obtint une conference avec les conseillers des princes francais. Apres des protestations de zelc et des offres de service, il hasarda quel- ques observations. « Le retablissement de Louis XVI sur son trone , dit-il, o»t I'objet d'un voeu general. Mais ne serait-il pas de la justice comme de la prudence de faire a la nation le sacri- fice de certains abus de I'ancien gouvernement ?... » Un mem- bre du conseil prit la parole, et dit : "Monsieur, pas un seul changement, pas une seule grace. Nous savons que le roi de Prusse se laisse approcher par des hommcs seduisans, mais dangereux; il serait affligeant qu'il leur laissat prendre de I'in- fluence; car les monarchiens sont aussi criminels a nos yeux que les demagogues. Si les souverains allies adoptaient des erreurs si contraires a la nature du pouvoir monarchique , nos princes les lemercieraient de leurs sccours. » Toute reflexion serait inu- tile, ctjepoursuis. De tant d'emigres qui avaient fait la campagne avec les Prus- siens, ceux qui formaient le corps, et devinrent ensuite Var- inee du prince de Conde , demeurerent seuls sous les arnies : le reste se dispersa par toute I'Europe ; quelques-uns passerent jusqu'en Asie, d'autres dans le Nouveau - Monde, ou sur les cotes d'Afrique. Nous voyons M. Dampmartin chercher d'abord <\ Bruxelles un asile , et y trouver une noble et douce hospita- lite; mais a peine commence-t-il d'en jouir, que voici le tour qu'on lui joue. La nouvelle de la bataille de Jemmapes est ap- portee a I'archiduchesse (soeur de la reine Marie-Antoinette ) ; les autorites dissimulent ; sur le soir , un bulletin repandu avec profusion annonce que des faclieux se permetlent de semer lalarmc; qu'il y a eu, en effet, un combat acharne , mais i/idecix ;c[ue la ville n'est menaccc d'aucun peril; qu'enfin ce lao SCIENCES MORALES tju'ont de niiciixa fairc seshabitans, coinmelcs I'tiangers, estdc^ se tcnir bien tranquilles. A niimiit , rarchicUichossc , le due , tons les ministres, toiites les personnos attachecs a la cour prenncnt la poste. Lcjour revele leur fiiitc. La douleur et I'indignation se peignent sur les traits des emigres errans en foulc et comme au basard dans les divers quartiers de la ville. Point de places^ pas line rue qui ne soient aussitot encombrees de meubles , de caisses , de voitures. Mais le terns presse ; on se bate ; trop beu- reux de livrer ses effets pour c^^nelques pieces d'argent, beu- reux meme d'abandonner tout, et d'echapper, seul et^ pied, aux legions republicaines. M. Danipmartin , quf ni'a fourni on indique tons les traits de ce tableau , ajoute : Plusieurs de ces fugitifs fiircnt insultes et depouilles dans les environs de Mallncs^ II fuit lui-incme comme les autres, passe en Hollande, etplus, tard se refagie a Amsterdam. Mais, quelque terns apres, le voila cbasse en toute hate d'Amsterdauj , comme il I'avait ete de Bruxclles , par les victoires des republicains. Deux jours s'etaient ecoules depuis Tentree dePichegni : reso- lu de s'echapp.er a tout prix , M. Dampmartin se hasarde a suivre nneroule frayee siu'la glace. Lechevalier dePotra, ci-devant chef d'escadron dans le regiment d'Orleans-cavalcrie, le marquis dc Falaiseau, ancien mousquetaire, etlc baron de Saint-Paul, jeune officierlanguedocicn, furent les seuls emigres qui voulurentcou- rir les chances de cette tentative hasardeuse. Abandonnes, pres- que aussitot, par des guides pay es fort chcr, diriges quelque tems sur la neigc par une trace legere qu'une nuit toujours plus som- bre ne tarde pas a leur derober , ils finissent par s'avancer au basard, perdus dans un espace immense, glaces par un froid terrible , et sur le point de succombcr a un assoupissement in- vincible, avant-coureur de la mort. « Deja, dit I'auteur des Memoircs , nous nous donnions le baiser de I'adicu eternel , lorsque I'arrivee presque miraculeuse de quclques pecheurs nous sauva... Nous sorlimes au point du jour dela cabanehos- pitalicre ou nous avions ete recus, etnouseumesbesoin d'une niarche de quatre heures pour parvenir a Harderwick, dont un effet trompcur d'optiquc nous avail fait mal apprecicr la dis- ET POLITIQUES. lai tance. TS^os pieds se posaient a peine sur cette teire aidemniciil souhaitee... , que I'avis nous fut donne avec les signes de la pitie que la ville etait occupte par los Francais : sans nuUe he- sitation, nous preferames les horreurs de la captivite aux dan- gers dont nous n'etions sortis que par des combinaisons extraor- dinaires. Une surprise agreable nous attendait... Les Francais . qui venaient de causer notre cffroi composaient la legion de Rohan. Accueillis comme des freres dans I'infbrtune , nous fumes combles de prevenances... Durant trois jours, nous mar- chames avec le corps des emigres qui faisaicnt I'avant- garde de I'iirmee sous les ordres de M. le due d'York. » C'etait la der- niere fois que M. de Dampmartin devait se trouver sous les drapeaux d'un general etranger. II ne larde pas a se refugier d'abord a Hanibourg , puis a Berlin , oil il passe les six annees que devait encore durcr son emif^ration , partageanl toutes ses journees entre les soins qu'exigeait I'educalion d'un fils de la , duchessede Lichtenau, dont il avait consenti a se charger, et la culture des lettres, qui seules adoucirent pour lui les longues peines de I'exil. La destinee de M. de Blarcillac fut tout-a-fait differcnte. On le voit toujours en action dans les conseils comme dans les ar- mees et dans les missions diplomatiques : on le suit a Madrid, a Londres , dans le camp de Souvarow, et menie en France , on I'envoient tantot les esperances des piinces, tantot Xa politique astucieuse etfausse des monarques coalises. Aussi est-ce chez lui <|u'il faut apprendre quel ressentinient amer ont nourri long- tems nos fugitifs, si cruellement decus, contre cette politique dont le but ne ful jamais de soutenir la Icgitiinite. Le resume de toute cette partie de son livre est qvi'une seule puissance agit avec quelque loyaute; et ce fut une des premieres TJu'on vit se detacher de la coalition. On croirait qu'ayant penetre les des- seins caches de toutes les autres, elle aima niieux cncourir le blame d'une desertion que la complicite de taut de perfidies. Cc n'est ici qu'une conjecture , niais qui acquiert pom* le moins une grande vraiscmblance du rapproclienient de quelques faits, Un seul des evenemens qui caracterisent le mieu.\ cette epoque^ 121 SCIETSCKS MORALES sfiiible eii i'ournir un triple teinoignage. Quand dcs royalisles fiancais offrent de livrer Toulon aux puissances coalisees , I'Es- pagne ( oil n-j^nait alors Charles IV , detrone depuis par Ferdi- nand ) demande, el ne pent obtenir, parce qu'elle est seule a le vouloir , qu'on y proclamc Ic roi de France : quand I'arnMie republicaine, qui devait rejirendre la ville, en presse vivement le siege, I'Espagnc veut envoyer des secours; elle donue I'or- dre d'embarquer des troupes ; ses allies se refuscnt a les rece- voir , ne dissimulant plus leur crainte de laisser prendre quel- que influence a uii roi de la niaison de Bourbon : enfin , quand on se voit force d'cvacuer les remparts et le port, I'amiral espagnol, Gravina, s'oppose, toujours seul et toujours vaine- ment, a Tincendic des naviros, a la dcstiuction desarsenaux; seul il recoit a son bord les royalistes francais , que ses allies abandonnont a une mort inevitable, entre les gouffres de la Mediterranee et la mitraille des conventionnels. Telle avait ete par tout, telle continua toujours d'etre la con- duitc descoalises. Si Charles IV, qui, sans doute, aurait rougi de concourir au demembrement d'un royaumc qu'il regardait comme un heritage de sa famille, se separa de Icurs projets, meme alors qu'il concourait a leurs attaques; si les troupes qui envahirc'nt lui moment le Roussillon prenaient possession de toutcs les places au nom de S. M. leroi de France, en re- vanche, les arniees du Nord arboraient sur les remparts de Conde et de Valenciennes le drapeau imperial d'Autriche : le cpmte d'Artois n'obtenait I'autorisation tacite de paraitre au milieu des bataillons anglais qu'en qualite de simple volontaire; encore tardait-on bien pen a se lasser de sa presence, et a le forcer de s'eloigner : enlin on contraignait de meme son frere, Louis XVIII, a quitter I'armee de Conde, qui, de I'aveu de M. Marcillac, n'etait phis considerec que comme itrie division (lutrichiemic. Voila I'etat oil se ti'ouvaicnt reduits I'emigration et les prin- ces , lorsque , aux premiers jours du dix-neuvierae siecle , Us fiururent aux puissances , dit le general Dampmartin, gener les n/uages dv la niaclunc jjolitiqae en Europe. La Russie repoussa ET POLITIQUES. la^ hors de seb frontieres los gardes du corps rcuiiis a Mittau. L'Autriche inteidit aux emigres lesejour de sesvastes provin- ces. Un ordre parti de Londres alia, dans Ic Portugal, metlre un tcrme aux services des regimens de Mortcmart et de Castries; et des commissaires anglais se permirent de licencier le corps de Conde. Maintenant que aos lecteurs ont vu passer sous leurs yeux k pen pres tout ce que renferment d'assez neuf , d'assez impor- tant, ou meme d'assez singulicr les trois volumes qui sont I'objet de cetle analyse , je dois ajouter que les deux ouvrages , quoiqu'on suppose aux deux ecrivains une egale sincerie, n'ob- tiendront peut-etre pas le meme degre de confiance. M. Mar- cillac se passionne beaucoup plus souvent que M. Dampmartin : et il y a dans son livre trop d'erreura , trop de clioses evidemment hasardees pour qu'on puisse jamais le lire sans beaucoup de pre- caution. Mais d'ailleurs ce livre est curieux ; et, rapproches des Menwires sur I'ciiiigration, les Souvenirs de I'auleur peuvent donner quelques lumieres. II sort de ce rapprochement, a cliaque fait et presque a chaque page, une grande et terrible lecon. Puisse-t-elle etre profitable a la generation presente et a celle qui va nous reniplacer! Puissent les Francais de tons lestems, si jamais, dans leurs dissensions, ils en appellent encore a I'epee, du moins vider entre eux la querelle! Puissent-ils se gardcr avec effroi de Tintervention des puissances qui, en ixtour des degouts sans nombre et des humiliations qu'elles leur feraicnt lentement devorer, se serviraient de leurs bras pour dechirer la patrie, dans I'espoir de se partager ses de- pouilles et la leur! Puissent enfin leiu's discordes civiles, dus- sent-elles encore devenir des combats, ne pkis laisser de ces blessures qu'envenime la presence ou la trace empoisonnee de la baionnette etrangere, et qui, lentcs a se fcrmer, iiourrissent, pour un long tems, sous la cicatrice meme, la menace de se ^■ouvrir. * 114 SCIENCES MOllVLKS IIlSTOIRE DU SiKGE DE MiSSOLONGHI , SUivic de piCCeS justificatives en grec moderne^ avec la traduction tVancalse en regardj par M. Auguste Fabre (i). Le divorce de la politique et de la morale ne date point d'hier : depuis long-tems, les peuplessont faconnes a ce regime, et une dure experience lour a appris que ces vulgaircs notions de bonne foi et d'humanite en honneur parnii eux; que ce sen- timent du juste et de I'injuste, cmpreint au cceur de I'liommc par une main divine, entrcnt raremenl dans la balance oil se pesent leurs destinees. Ces verites, devenues triviales u force d'etre constantes, ont acquis un bien triste degre d'evidence, depuis la douloureuse resurrection de la Grece. A la vue de cette Saint-Barthelemy nouvelle, oii du moins les victimes ne sont pas cgorgees sans gloire, I'Europe a fremi; partout a eclate un admirable mou- vement de sympathie : a Verone seulcment , les heros expirans n'ont point fait couler de larmes. D'oii vint cette indifference pour de si nobles infortunes? Et pourquoi la plus legitime desprieres a-t-clle etc repoussee? La reponse est facile, Depuis quolques annees, c'cst la peur qui gouverneune grande partie deTEiu-ope. La peur preside a tons les congres : c'est elle qui etouffa dans le coeur genereux d'Alexandre la pitie que lui inspiraient les souffrances de ses coreligionnaires. Or, la peur, qui mene I'individu au crime ou a I'iufamie, entraine les gouvernemens a des actes honteusement iniques; elle les egare , elle les deconsidere. Telle est la cause de Taffiigeant spectacle qui, depuis six ans, fatigue nos yeux. Le jour ou la politique vit dans les Grecs des esclaves brisant leurs fers , elle cessa d'y voir des hommes. De la ces rigueurs opiniatres que ne piu'cnt attendrir ni le supplice du patriarcho Gregoire,ni les desastres d'Ipsara, ni les massacres de Chios; (i) Paris, i8a6; Moulardier , libriiiie, lue Git-le-Coeur, n" 4- i vol. Jn-S° (le ,^oo pages eaviiou; pi'ix., 'i fi'. , cl par la posle 6 f'r. So c. ET POLITIQUES. i25 de la cette revoltante partialite que I'histoire vcngcresse a deja nctrie dans ses annales; de la aussi cette vive et profonde indi- gnation que tous les hommes genereux out ressentie, indigna- tion repfoduite sous millc formes di verses, a la tribune, dans Ics camps, sur la lyre des poetes, dans lesecrits des publicistes, pres du niodeste comptoir de I'artisan, comme dans les salons dores de I'opulence. Vainement des plumes salariees ont represcnte les Grecs sous des couleurs odieuses; je ne sais meme si on ne leur a pas refuse le courage; vainement on leur a prodigue par ordre les opithetes de revolutionnaircs et de carbo/iari ; I'opinion publi- que a fait justice de ccs miserables declamations : elle sait a <|Uoi s'en tenir. Un peuple veut devoir a lui-meme I'honneur de sa delivrance ; que ce peuple flechisse ou meure : tel est I'arret supreme. Mais les Grecs, toujoursrejetcs par de sauvages conquerans Hors de la loi des nations, ne sont point des rebelles : nul contrat n'existait entre eux et leurs tyrans; chaque annee, ne devaient- ilspas racheter le droit de conserver leurs tetes? Est-ce la une legitimite?... N'importe, ils devaient souffrir et attendre : pe- risse la Grece plutot qu'un principe ! La sainte alliance apparait lout entiere dans cette derniere ligne. yipparenl dirce fades , inimicaque Trojfe Numina. Aujourdhui, dit-on,la politique laisse tomber sur les Grecs un regard bicnvcillant : peut-etre trouvc-t-elle que le sang d'uii million d'hommcs est une assez copicuse expiation, etqu'il faiil en garder pour de nouveaux exemples; peut-etre aussi la fer- vente docilite du grand reformateur Mahmoud I'a-t-elle mise en joie : quels que soient ses motifs, graces lui soient ren- dues. Toutefois je n'ose esperer encore , et souhaite de tout mor> coeur que nos frercs d'Orient n'appellent a leur secours que le glaive de leurs braves et la pitie des peuples. Leur gloire est irop pure , et leur cause trop sainte pour qu'ils s'abaissent is subir un hospoilar, ou un mnitrc impose par I'ctranger. 0»u» tof^ SCIENCES MORiLES quelesGrecs ne s'ab;mbonnent point eux-memes, et le moncJc civilise ne les abandonnera pas. Le monde a compris que la ques- tion delaGrcce n'est point une question locale, mais universelle. Ces reflexions m'ont ete inspirces par la lecture de I'ouvrage que vient de publier I'auleur de la Caledonic oii la guerre na- tionnle , I'auteur A' Irene (i), M. Jiigiiste Fabre. Get ouvrage est Vliistoire dti siege de Misnolonghi. Nous manquions d'un tableau fidele oil cet admirable epi- sode d'une guerre sacree fut represente avee ses heros d'apres nature, avec toutes ses circonstances militaires , politiques, accidentelles. Cctte lacune est enfm remplie. Profondement verse dans la connaissance du grec ancieu, comme dans celle du grec modernc; aide dune foule de documens que plusieurs Hellenes distingues lui ont fait parvenir , M. Auguste Fabre a entrepris de debrouiller un chaos jusqu'a present inextricable- Kien ne I'a decourage, ni I'obscurite des textes, ni la contra- diction entre les temoignages, ni rincoherence des relations militaires ou des idees encore toutes nouvelles sur un art tout nouveau en Grece, n'ont point eu le tems de produire des expressions exactes; il a vaincu tous les obstacles, et ^ graces i\ cette savante perseverance , nous pouvons contempler, pleins d'un respect reiigieux, la lente et sublime agonic des Leonidas Chretiens. Ah! necraignonspasd'interroger cesruinesfumantes encore; nous y trouverons de grands exemples et de magni- fiques lecons. M. A. Fabre a place en tete de ce livre un Discoars pre- liminalre dont voici le debut : « La nouvelle de I'insurrection de la Grece fit tressaillir I'Europe entiere. Des braves de tous les drapeaux voulurent se ranger sous I'etendard de la croix. Tous les peuples civilises comprirent qu'ils avaient une d«tte a acquitter. •> (i) Recne i I'unanimite, il y a pins de quinze mois, a I'un de nos grands theatres, cette belle el toiicLante tragedie reste eiiiprlsoiinee dan* les cartoDS de la censure. ET POLITIQLES. 1..7 « Mais on n'a vu jusqu'ici qu'une partie de la question. On n'a parle que de la reconnaissance qu'on devait a la.Grece antique. Or, ce n'est pas seulement pour les services de leurs ancetres qu'on doit aux Gi'ecs de la reconnaissance ; c'est aussi , c'est surtout pour les services qu'ils nous rcndcnt cux-memes tons les join's. Sortant des chaines et sur le bord de la tombe , ils sont devenus les instituteurs de I'univers; ils lui donnent des instructions plus utiles peut-etre que celles de leurs aieux. Au moment oii, d'un cote, les honteuses doctrines que repan- dent les agens du pouvoir, de I'autre, les systemes etranges que quelques hommes propagent au noni de la liberte, detrui- ^aient en Europe la morale des nations, les Grecs ont refute par leurs exemples et ces doctrines et ces svstemes. Tandis que de vils agioteurs de conscience font de la religion un moyen d'aller aux honneurs par les bassesses , les Grecs nous ont fait voir encore cette religion qui est un moyen d'aller au ciel par le martyre Tandis que la guerre, se denaturant comme tous les arts, n'etait plus en Europe qu'un echange de corruption, uci marche de sang et de chaines, les Grecs I'ont rappelee a sa purete premiere , ils I'ont rendue de nouveau un duel entre les nations. Une foule d'hommes a qui Ton avait fait oublier jusqu'a la veritable signification de tous les mots de la politique, et que des voix gtnereuses n'avaient pu guerir de leurs erreurs, ont retrouve, en etudiant les fastcs des Grecs, ce que c'est que liberte, tyrannie , trahison, civisme ; et, les yeux mouilles des larmes de Tadmiration , le coeur palpitant de nobles pensees, ils ont repousse d'insidieuses et miserables arguties , pour devenir les disciples de cette politique franche et pure qui n'a besoin ni d'ombre , ni d'amalgames , parce que, soutenue par le courage, elle ne craint pas de separer son camp, et ne se reserve point de retraite ( page 7, 8 et 9 ). » On juge par ce morceau de quel point de vue eleve I'auteur envisage son sujet. Avant d'arriver a la catastrophe qui termina si glorieuse- ment la courte et brillante destinee de Missolonghi, M. A. Fabre donne une idee sommaire du premier siege entrepri* taft SCIENCES MORALES par Oiner-Vrionis , en i8'22 , et souteiiu par Mavrocordatos; U peint ensuite I'invasion dc Moustai, pacha do Scodia ; il nous montre le boulevard de la Grece occidentale s'elevant, commc par enchantenient, a la voix de la liber tc, sur ce meme rivage oil naguerc on ne voyait, ainsi qu'au terns dc Theocritc, que des cabanes de pecheurs. Enfin, le siege d'immortelle memoire commence, et avec lui nos angoisses, nos tcrreurs, nos elans d'enthousiasme patriotique. Plus d'une fois, des moyens de salut furent offerts aux Mis- solonghiotes par I'ennemi lui-meme epouvante de leur resis- tance; mais ces braves repousserent la vie avec horreur, comme un honteux present : tons sentaient qii'il est des positions d'ou Ton ne doit sortir que par la victoire on la mort : ils moururent. Que ne m'est-il permis dc retracer ici quelques-uncs de ces merveilles de Constance et d'intrepidite que Ton serait tente de croire fabuleuses, si I'histoire n'etait la avec ses preuves, si toiite la conduite des Grecs, depuis six annees, ne conlir- naait ces glorieux temoignages ! mais trop pen d'espace m'est accorde. An restc, que pourrait unc froide analyse? c'est I'ouvrage nienie qu'il taut lire. De pareils honimes doivent etre vus en action; et pour bien mcsurer la haute stature de cettc race heroiquc, il faiit la voir debout sur les debris dc son naufrage. Depuis long-tems , les assieges appelaient a leur aide Gouras, Fabvier et les vaisseaux de Miaoulis. Quand tout espoir de secours leur eut cte enleve, quand ils sentirent lem^s remparts, . reduits en poudre par la mitraille enneniie, s'ecrouler sous lem's pieds ; quand ils virent la hideuse famine^ devorer leurs peres, leurs femmes, leurs cnfans, ne considtant plus que le desespoir, mais un desespoir digne d'eux, ils s'adresserent au seul corps qui fut a portee de les secourir, a Kairaskaki et aux generaiix de sa division ; ils leur ecrivirent de se porter Ic 22 (lo) avril, sur les derrieres du camp ennemi, et de signaler leur arrivee par une decharge de mousqueterie tiree des hauteurs de I'Aracynthe. La meme lettre ajoutait que la garnison sorti- rait anssitot, ct que, leiinissani sos (Tloits aux leiu's, elle teii- KT POI,IT[QUF.S. i'xQ terait d'oiivrir un passai^c ;i la population dcsaiiuc'C \^i;. ]\Iais fc plan, qu'il otait si important do tenir secret, fut coniiu do:, soldats, ct ini Bulgare conrut le decouvrir a Ibrahim. « Le 22 avril arriva. On fit Ic reccnsement de la population. II restait trois mille soldats, en y comprenant ceux qui,,quoiqnc blesses ou malades, pouvaient encore marclier soiitenns par leurs camarades ; millc ouvricrs ou autrcs liommes inhabiles a combattre, et environ cinq mille femmes ou cnfans. Les Grec- ques, qui se croyaient assez de force pour braver les fatigues et les dangers de la sortie, revctirent, la plupart, des habille- mens d'hommes, afin que, si elles nc pouvaient eehapper a I'ennemi , il les tuat du raoins sur-le-champ , les prenant pou'' des guei'riers. Plusieurs attacherent au cou ou sur la poitrine de leurs en fans, comme un talisman capable de lesdefcndre, lesi'eliques reverees de leurs aicux,et conscrvees dans lours families , en meme terns qu'elles aiguisaient le glaive pour en frapper rennemi, ou pour s'assurer du moins un moycn de nc pas toniber vivantes entre ses mains. CcUes a qui leur faiblcsse interdisait I'espoir de suivre les guerriers se reunissaient aux blesses, aux malades, aux vicillards, aux jeunes enfans qui avaient resolu de s'enscvelir sous les mines de la ville. » « Co fut la I'j moment le plus terrible. Presque toutes les families se diviserent en deux partis; ceux-ci restant pour at- tendre la mort, ceux-la courant a la vengeance, a travers dc nouveaux dangeis. Dans 1:65 adieux eternels, les larmcs inon- daient le visage des plus faroiiches guerriers; los plus grands courages etaient sur le point de flechir. » Inutiles precautions! Devoxuncnt superflu! Ibrahim, instruit de tout pai- le transfnge, tonehe au moment dc devorer sa pioie; bientot il se prrcipite dans la vill,>, ses tigres ct leur maitre etanchent leur soif dans des flots de sang chretien. Alors commence une scene digne de pareils monsties, et le plus affreux combat entre la rage et le desespotr... « Au milieu de ces femmes desolecs, une voixse fait entendre : Dans la mer, (i) For. p. 3oo et suiv. T. x.\xitt. — Jam'icr 1827. i3.. SCIENCES MORALES. nwi cnfaas, dans lamer, suivex-moi. D'autres se precipitent vers le grand puits, y jeltcnt Icurs enfans, et se pendent au- pres. Mais bientot les puits furent combles, et il y avait loin desremparts aux endroits du bassin ou I'eau est assez profonde pour mettroen surcte. Lcs vainqueurs, qui dojiicherchaient des esclaves , sui\ aieut de pres leurs victimcs. QueUjues femmes , quelques enfans eurent assez d'adresse et de bonhcur pour s'affranchir, en sc precipitant sur les glaives nus des Arabes; d'autres s'elancerent dans les flammes des maisons incendiees; douze cents, qui ne Irouverent aucun moyen de se donner la mort, tomberent au pouvoir de I'ennemi. « n L'attention des vainqueurs ne tarda pas ii se porter sur Ic magasin des poudres. La grandeur et la solidite de cet edifice leur foisaient croire que les richesses des habitans devaient y etre renfermees. On salt qu'il ne s'y trouvait que des femmes, des enfans et Capsalis (i). La, on ne pleurait plus : on n'avait plus de separation i\ craindre; la tombc et le ciel allaient tout reunir. Les meres pressaient tranquillement leui's (ils contra leur sein; elles comptaient sur Capsalis. Cependant les enne- mis s'etaient rassembles en foule autour de cet asile : ceux-ci tentaient d'en briser lcs portes, ceux-la d'cscalader les fenetres; quelques-uns etaicnt deja parvenus sur les toits, et s'efforcaient de les demolir pour penetrer dans I'interieur. Alors Capsalis, qui les voit reunis en assez grand nombre, employant une priere familiere aux Grecs : « Soiiviens-toi de moi, Srigneur, » s'ecrie-t-il. La detonation fat si forte que les maisons voisines s'ecroulerent , que de larges crevasses s'ouvrircnt dans le sol qui les portait, et que la mer, repoussee de son lit, inonda tout un quartier de la ville. Deux mille barbares sauterent avec Capsalis. » '< Ce bruit, dont la garnison connaissait la cause, fit un mo- (i) C'etait on des primats de la ville, qui, ayant refuse obstioeinent de sortir avec la garnison , conduisit vers le magasin des poudres ane fonle de femmes et d'enfans, et leur dit ; Venez, ft soyez tranqtdlles; j'y mullral moi-memr le. feu. ET POLITIQIjES. i3i ment frissonner les heros, engages alors an milieu dn camp . ennemi. » Tel fut le denoument de ce drama terrible. Toute reflexion serait inutile. M. A. Fabre vient de rendre un important ser- vice a la cause des Grecs : il a fait phis , il a bien mcrite de tons les peuples. Sous le point de vue politique, etconime his- toire, son livre ne laisse rien a desirer. Aux fails militaires les plus exacts, a la plus fidele peinture des evenemens du siege, I'auteur a su joindre d'interessans details sur le gouvernement de la Hellade, surses homraes d'etat, sur ses guerriers. Si Ton examine Texecution purcment litteraire, on ne pourra qu'ap- plaudir a cette marche simple , a ce talent de narration vraiment rcraarquable, a ce style noble et concis ou I'elegance s'allie avec la dignite,etqui rappelle lesecrivains de I'ancienne Grece, comme Missolonghi en a si bien rappele les plus glorieuses epoques. Dans un terns ou la corruption du gout suit de pres celle des consciences , on aime a reposer ses yeux sur d'honorables excep- tions. Ce consolant plaisir, M. A. Fabre nous le procure : en lui , I'homme de lettres et le citoyen s'ennoblissent muluelle- ment. Camille Pagakkl. 9- LITTERATURE. OF.UVKES COMPLETES DE M. LE VICOMTE DE ChATEAU- BRIA1VD, pair de France, membre de TAcadeniie fVan- oaise. Tomes I et II : Essai historiquc ^ politique et moral sur les revolutions ancieiines et modernes ^ considerees dans lours lapports avec la Revolution francaise, dedie a tous Its partis; avec cette epi- graphe : Experti invicein sumus ego ac Jortuna. Ta- ciTE. — Tome XVI : Atala, Rene, et les Aventures DU DERNIER AbENCERAGE (i). Lorsque M. de Chateaubriand parut dans Ic monde , la philosophie attaquait avec autant do talent que de hardiesse les abus de la religion , qu'elle confondait souvent avec la re- ligion elle-meme. Temoin de ces abus dont I'histoire etait depositaire , et qu'une lente civilisation avait eu bien de la peine a limiter, il partagea I'incredulite de son siecle. Mais , bientot (car telle est la faiblesse de I'esprit humain , que I'opi- nion triomphante ne croit pouvoir assurer son regne qu'en exterminant les contradicteurs), bientot le clerge se vit a son tour proscrit et decime, au nom de la philosophic. A'lors, comme toiites les ames genereuses , M. de Chateaubriand se rangea , par sympathie , du cote des opprimes. Toutefois , bien que fugitif au milieu d'eux, il eut assez de courage et de sagesse pour rester fidele aux piincipes de la libertc , en condamuant ses abus, c t plus touche que convcrti , il flotta quelque tems encore entre le scepticisme et la foi. C'cst dans ' cette disposition d'esprit qu'il composa son Eaxai histori(iur (i)Pai'is, i82fi ; I.atlvocat. 3 vol. in-'i": prIx. r i fr. la llvralsmi .!<• 9 vol. LITTERATL'RE. i33 sui- les ret'oliitions. Plus tard , le dernier voeu dune mere le ramena aux croyances de I'cglise , et il ecrivit le Genie du christianisme. Le succes prodigicux de cet ouvrage ne fut pas unique- ment du au talent de I'auteur ; il parut dans des ciiconstances singulierement favorables. Un pouvoir cruel et intolerant avait couvert la France d'echafauds. La liaclic s'etait surtout appesantie sur les pretres , et sur tous ccux qui sc niontraient devoues a I'ancien cidte. La persecution avait porte ses fruits : de toutes parts, I'interet s'attachait aux victimes; on condani- nait la philosophic, comme, quelques anuee* plus tot , on avait accuse la religion. II semblait aux peuples qu'iin retour vers la foi allait les delivrer de tous leurs maux. Mais Icurs oieilles etaient blasees au langage des pasteurs ; il fallait , pour les ramener aux autels, que la religion empruntat une voix dont I'eloquence eut quelque chose de hardi , de mondain et de nouveau. Le Genie da Christianisme se presenta , riche a la fois de la poesie des ecritures alors presque oubliees , des images qu'avait offertes a I'auteur la nature vierge d'un autre conti- nent, et des oruemens mcmes de la philosophie qu'il venait combattre. Au milieu de I'enthousiasme avec lequel une partie du public acpueillit cet ouvrage, les critiques ne nianquerent pas d'opposer aux nouveaux principes rcligieux de I'auteur ceux qu'il avait precedemment enonces. lis I'accuserent de contra- diction , de palinodic. Cette accusation nous parait injuste. Nous ne partageons entieremeut , ni en religion , ni en poli- tique, ni en litteraturc , les opinions de M. de Chateaubriand. II nous semble meme que ces opinions ont.souvent eprouve I'influence de la position oii I'auteur se trouvait niomentane- mcnt place. Nous n'en sommes pas moins persuades qu'il a toujours parle d'apres une conviction inlime (conviction qui a pu varier, suivant le point de yue d'ou il cousiderait les objetsi ; ct nous j)ensons meme qu'il ne pouvait mieux rcpondre aux accusations dont son Essai hisiorique avait fourni le pretexte , qu'en pubhant cet ecrit en France. 1 34 LlTTJ'lRATURE. L'auteur avait embrasse clans son plan iin siijet immense ; il 30 proposait d'oxaminer : i" Quellc-s sont los revolutions arri- vecs autrefois dans les gouvorneniens ; quel ttait alors I't-lat de la socicte, et qiicllxj avail ('le lour influence ; 2° si , parmi ces revolutions, il en est qui, par I'esprit, Ics moeurs et los caracteres da terns, puissent etie comparees a la revolution francaise ; 3" quellcs ont ete les causes de cette dernierc re- volution; 4" qiif 1 etait alors (en 1797), le gouvcrncment de la France, et s'il pouvait subsister; 5° s'il subsistait , quel en serait I'effet sur les nations et sur les gouvernemcns de I'Eu- rope; 6" s'il etait detruit , quelles en scraient les consequences pour les contemporains et pour la posterite. M. de Chateaubriand n'a public que Ic premier livrc des six qui devaient composer I'ouvrage. Ce premier livre tiaitc seulement do la revolution qui suppiima la monarchic dans I'ancienne Grecc et de la revolution monarcliique qui lui suc- ceda sous Philippe et Alexandre. L'auteiu' a compare les terns anciens avec les evenemens contemporains , en opposant caste a caste , parti a parti , guerre a gueire , etat a etat, souverain a souvcrain , homnie a homme , ecrit a ecrit. Il est resulte de scs efforts une multi- tude dc rapprochemens , quelquefois ingenieux , mais plus souvent forces. M. de Chateaubriand a releve, dans ses nou- velles notes , ce defaut esscntiel de son plan , avec une severite qui ne laisse plus rien a dire a la critique. II y a a coup stir quelque chose de ridicule a mettre en paralleleles Spartiates et les jacobins , Xerxes et I'empereur Francois , Theramenes et Sieves. Mais la faute de I'ecrivain doit en grande partie re- tomber sur ceux de nos legislatcurs qui crurent pouvoir donncr a la France les lois et les moeurs d'une republique ancienne. II existe entre les societes anciennes et les modernes deux points essentiels de divcrsite , qui s'opposent a tout rappro- chement entre les deux epoques. Chez les anciens , la partie travaillante de la population etant esclave , les citoyens , tou~ joins inoccupes, aspiraient moins a la liberie qu'au pouvoir, (|u'ils confondniont avec elle. Aiusi , la democi'atie , ordinaire- LlTTftRATURE. i35 ment suivie de guerres d'invasion , portait dans son sein U gorme du pouvoir militaire et de la tyiannie. Chez les mo- dernes, au contraire , la suppression de I'esclavage ayant rendu le travail necessaire a presque tons les membres du corps social, il en est resulte en meme tems la diffusion de la liberie et la concentration du pouvoir ; plus de vertus privees et de bonheur, moins de vertus publiques et de gloire. En second lieu , les anciens n'ayant point nos moyens rapides de communiquer la pensee a de grandes distances , les relations de nation a nation etaicnt peu influentes. L'organisation de chaque etat, de ciTaque ville , etait speciale ; la liberte etait un privilege pour quelques-uns , et non un principe qui put etre invoque par tons. II suivait de la que les revolutions d'un pcuple n'avaient pour les peuplcs voisins que dcs consequences niaterielles , tcllesque la gncrre, I'invasion , la conqucte , etc.; et que les consequences intellectuclles et morales etaient pres- que nulles. Aujourd'hui , par suite du developpement des moyens de communication , I'imprimerie , les postes , les jour- naux , le telegraphe , etc. , la sympathie cntre les peuples civi- lises est devenue telle qu'ils forment comme un seul corps social , divise en deux nations ; ccUe des hommes du privilege et celle des hommes du droit commun ; de telle sorte que les guerres sont plutot de caste a caste que de nation a nation, et- que les congres et les assemblees deliberantes sont devenus les veritables champs de bataille. Outre les vices du plan , M. de Chateaubriand a signale saus menagement dans ses notes les contradictions , les inexacti- tudes, et ces nombreuses digressions qui trahissent le jeune homme presse de faire montre de tout ce qu'il sait. En resume , I'Essai sur les revolutions est un mauvais ou- vrage, qui ne pouvait etre fait que par un grand ecrivain. Au milieu du desordre des pensees et du style , on y rctrouve a chaque instant cette profondeur de vues, cette puissance d'ima- gination, cette vigueur de pensee, ce brillant colons, qui ont assure a I'auteur la premiere place parmi nos ecrivains vivans. Lesprincipes politiquesde I'Essai sont constamment ceux d'une 36 UTTERATi RE. liberie sage ; ils soiit couloimes a ceux que M. de Chateau- briand a toujours professes depuis, a quelques deviations pres que IVxamen de ses autrcs ecrits nous fournira I'occasion de remarquer. Quant anx opinions rcligieuscs, dies sent soiivent tres-hardics, particulieremeiit dans les dcrnicrs chapitres, ou I'auteur agite cotte question : Quelle sera la? religion Le long sejour que lit M. dc Choiseul a Constantinople , et le rang qu'il tint dans cette ville , qui , apres avoir ete la capitale du monde chretien , est aujourd'hui le chef-lieu de la domination de I'ennenii le plus acharne .du ehristianisme, I'avaicnt mis a portee de la bicn connaitre. Aussi , tout ce qii'il en dit excite un intcret qu'il s'est plu a augmentcr en- core par la richcsse des details, par le nombre ct la beaute des planches, par la fidelite des descriptions , par les costumes pittoresqucs dont il a reproduit les images. Extraire quelques parties de ce grand et maguilique tableau , conficr aux faibles' efforts de la plume la peinture d'un spectacle que nous avons eu si long-tems sous nos yeux ( an Panorama de Constantinople ), ce serai t le mutiler et en affaiblir I'effet; nous aimons mieux renvoyer nos lecteurs au Precis place par M. de Choiseul en tete de la description de Constantinople. On ne saurait refuser des elogcs au zele infatigable du libraire-editeur , M. J. -J. Blaise, qui n'a point recule devant un projet que , de I'aveu meme de I'auteur, on pouvait re- garder comme tc'muraire , et qui a concu la noble pensee de sauver de I'oubli Tiuimense travail d'un homme de genie, en- leve trop tot 'i sa patrie , aux arts et a I'amitie. Le public ne pent que partager sa reconnaissance pour MM. Bariue-Dubo- CAOE et LetfvOsne , qui sc sont charges de reunir les fragmens epars dans les porte-feuilles de M. de Choiseul , qui les ont classes , et qui ont snpplee aux lacunes avec tant d'art et de talent , que tout semble sorti de la meme main. Nous devons aussi une mention parliculiere a MM. Hilaire ct Dubois, dont les dcssins pittorcstiues, qui ne sont pas luie des moindres richesses 4$ I'ouvrage , ont ete reproduits par les plus hsbiles graveius. ^- m. BULLEIIN BIBLIOGRAPHIQUE. IIVRES ETRANGERS (i). AMERIQUE SEPTENTRIONALE. ETATS-UNIS. I. — * Recollections of the Inst ten years passed in occasional residences and journey ings in the valley of Mississipi , etc. — Ob- servations recueillies pendant dix ans de voyages et de sejour en differens lieux de la vallee du Mississipi, depiiis Pittsbourg et le Missouri jusqu'au golfe du Mexiqiie, et de la Fioriiie aux frontieros espagnoles; formant une suite de lettres adressees an reverend James Flint, de Salem ( Massachusetts ), par Timo- thcc Flint, principal da scminaire dcs Rapides, dans la Loui- sianc. Boston , 1 826. Ciimmings et HiUiard. In-iS" do SgS pages. Cet ouvrage ne pent ctre sans Lnteret pour les Francais. II donne, sur une coutree ou tout rappelle encore notre nation , les documens les plus complets et les plus receus que I'on puisse trouver dans un livre. L'auteur etait encore en iSaS dans le pays qu'il decrit, et ne le quitta que pour aller respirer I'air natal , et tacher de reparer les graves attcintes que la fatigue avail portees a sa sante. Lestravaux de Tapostolat dans les pays a demi sauvages ne sont pas aussi commodes que coax ties mis- sions dans rinterieur de la France. II ne faut pas chercher dans cet ouvrage des materiaux pour la geogvaphie et I'liisloire nalurelle : I'aiiteur n'a ecrlt que ses observations sur les habitans des vastes contrees qu'il a par- courucs dans plusieurs directions. Ce qu'il nomme vallee du MississijH est le bassin de ce grand fleuve. Parfi de la Nouvelle- Angletcrre, il se rem! a Pittsbourg ou il reste peu de tems : puis, a Marietta, et tie la a Cincinnati , d'ou il etend ses courses dans les etats de I'Ohio, d'Indiana et du Kentucky jusqu'a Lexington. (i) Nous iudiqiions par un asterisqiie (*) , place a cote du litre de cliaqvs ouvrage, ceux dcs livres etraugers ou IraDcais qui parailroiitdigne.id'uue attiR- tion particiiliore , et nous cu reudroiis quelquefnis rompte dam la section dfs Analyses. J48. LivRES Strangers. Revenu i Cincinnati, il s'embarquc avec sa famille et vienl tt Saint-Louis, ou il passe quelques mois; de 1;\ , il se rend a Saint- Charles, ou il ne manque pas d'occupations. Mais son zele, qui en cherche encore plus, I'entraine chez les Arkansas, ou toutes sortes d'adversites I'atteignent ainsi que sa famille. Il est con- traint a remonter le Mississipi , jusqu'a Saint-Francisville, oii il passe I'hiver. Sa famille se trouvant au printems dans un etat de sante tolerable, il rcprend ses courses et les pousse jusqu'i New-Madrid, Jackson, le Cap- Girardeau, Sainte-Genevieve, et revient a Saint-Charles, avec une sante plus delabree qu'elle ne I'eut ete jusqu'alors. En 1822, ses amis de la Nouvelle-An- gleterre lui fuent passer quelques fouds : nouvelles courses, nouvelles fatigues. II descend le fleuve jusqu'a la Nouvelle- Orleans, visitela Floride, revient a la Nouvelle-Orleans, et la on le charge de diriger le seminaire des Rapides a Alexandria, surla riviere Rouge ( Red river ). II etait parti au mois d'octobre i8i5, et revint, en iSaS, faire \]>\\ sejour momentane dans sa patrie, afin de se mettre en etat de reprendre ses travaux apostoliques. Ce livre est rempli de descriptions d'autant plus interessantes que le ton de I'auleur est d'une extreme simplicite, sans man- quer d'elegance. II parle avec complaisance des progres de la culture au miheu des forets de I'Amerique : il ne tiendrait qu'a nous de jouir du meme spectacle sur le sol francais, non dans les forets, mais dans les landes. Aujourd'hui meme, sous lebeau ciel de la Touraine, dans les vastes bruyeres qui forment en- core une partie considerable de ce jardin de la France, on voit des cabanes qui seront un jour des fermes, des champs et des vergers naissans, d'autres qui promettent deja des recoltes abondantes, etqueique aisance au cultivateur; enfm, la cabane est transformee en maisou, une culture reguliere et permanente est etablie. Mais, en Amerique, ces heureux changemens sont I'ouvrage de quelques annees; chez nous, ils exigent plusieurs generations. Dans les forets du Nouveau-Monde, un hameau de quelques maisons a son ecole; on lit dans les cabanes; el, des qu'on a pu batir une maison, on commence une bibliothe- que. Tel colon, dit le venerable M. Flint, qui, ne sachant que lire et ecrire, et ne possedant qu'une tres-petito somme, est venu s'etablir dans les bois, se trouve au bout de quelques^ annees proprietaire d'une bonne maison avec des champs, des pres, des vergers, des bestiaux; il devient ensuite membrc d'une justice de paix, et cnfin juge de comte. Ces traits carac- terisent le Nouveau-Monde ; il ne faut pas les chercher dans celui-cL ETATS-UNIS. 149 a. — * An address to the White, etc. — Adresse aux blancs, discours prononcc dans la premiere ej^lise prcsbyterienne de Philadelphie, le 9.6 inai 1826; par Elie Bot'DiNox, indigene americain de la nation des Chirokis. Philadelphie, iHaG.In-S". Parmi les nonibreux discours prononces ct publies chaque anuee aux Etats-Unis, nous choisissons cclui-ci comme I'un des plus iiistriictifs pour les habitans de I'ancien niotide. On a cm asscz generalement que les indigenes de I'Amerique n'etaient point propres a la civilisation, et que les etablissemens euro- peens les feiaient disparaitre insensiblement, en sorte que, tot on tard, le Nouveau-Monde serait totalement occupe par les colonies de cette petite partie de I'ancien monde que nous habitons. Mais voici une nation ameiicaine qui dement cette opinion : ellc se constitueen corps de nation, se donne des lois, reforme les habitudes de la barbarie, adopte les arts, et avant tout I'agriculture. L'influence de ces changemeus se fait sentir en peu dc tems; dans I'espace de 14 ans , la population des Chirokis, quoiqu'affaiblie par deux fortes colonies qu'ellea laisse partir pour de nouveaux etablissemens a I'oiiest des Etats-Unis, s'est accrue de deux mille individus. Plus de polygamic, ni de servitude des femmes. Plus de meurtres de vieillards pour cause de sorcellerie. « Le meurtre, dit I'orateur, est devenu le crime nes gouvernemens. " Cette peuplade indigene conserve une profonde reconnaissance pour M. George Guest, qui luiprocura le nioyen d'ecrire en creant I'alphabet de la langue chirokie, et auquel elle doit la traduction du nouveau Testament dans cet idiome. Cependant le systeme d'pcriture invente par M. Guest n'e- tait pas simple; il employait 86 caracteres, laplupartsyllabiques. 11 adeja recu d'importantes modifications qui en rendent I'usage plus commode; meme dans I'etat oul'inventeur I'avait produit, des Chirokis de tcus les ages apprirent a ecrire , et les change- Inens heureux dans les mosurs et les destinees de ce peuple sont le resultat de cette premiere instruction. Aujourd'hui un gou- vtrnement representatif , avec deux chambres , la division re- guliere du territoire, des tribunaux de differens degres, et I'institution du jury, des impots moderes, une force publique organisee, en un mot, un systeme complet dc civilisation : voila ce qui a remplace I'ancienne barbarie. Et comme ce peuple rouge ne se mele point avec les Europeens, la race americaine est sauvee de la destruction totale ; les Chirokis la conserveront. » Notre territoire, dit I'orateur , est compris entre les limites des etats de Tenessee, d'Alabama et de la Georgie, fixees par des contrats. Son etendue est d'environ 200 milles de longueur, et 120 milles de largeur : raais une partie de cet espace est occupe 1^0 LITRES Strangers. t)ar de hautes montat^nes que 1'on re^arde conime non ciiltiva- )lcs. Les vallces sont bieii arrosecs, d'une fcitilite admirable; le climat est tempc'tc et sain; je ne crains pas^ dc nicritt-r anctiii reproche d'enthoiisiasni(; oii d'cxaguration, cii aflifmant qu'au- cune controe n'cst, i cet e^aid, niieux, ni poiit-t-tic aiissi bion partagcc... Cette tene privileyiik', qui, bicn cidtivt-e, \a con- tribiier si eflicaccmcnt a developper la vigueur et rintellit;cnce de scs haljitans, sera mise iin jour au nombre dcsjcirdi/is dc CAmcrique. Elle le doviendrait, quand meme ses habilans ac- tuels scraieut livrcs a eux-memos; mais elle atteiiidra bien plus tot cette haute prospeiite, si elle est guidee et protegee par le genereux gouvcrnement des Etats-Unis. » M. Elie Boudinot etait charge par ses compatriotes de soUi- citer I'appui des Etats de I'Union contre des voisins fortement tentes de s'emparer de leur territoirc. Le choix du delegue atteste le bon sens de ses commettans. Le gouvernement des Etats-Unis a fait respecter leurs droits; le terns n'est pas loin, sans doute, ou un depute chiroki siegera dans lecongres. Y. 3. — • * The diplomacy of the United- States , etc. — La di- plomatie des Etats - Unis, ou R^apport des relations diploma- tiques de cette republique, depuis son traitc avec la I 'ranee , en 1778, jusqu'au traite de Gand, en 1814. Boston, 1826; Wells et Lilly, i vol. in-8°de38i pages. A I'aide de cet ouvrage, on pent suivre la marche toiijours progressive de la situation de la nation americainctlansses rap- ports avec les gouvernemens etrangers : il fait connaitrc les diverses negociations dans Icsqiielles ce peuple a ete engage depuis le commencement de sa revolution; il demontre ('im- portance des avantages que les Americains ont tires de leurs traites avec la France , les Pays-Bas, la Suede, la Grande-Bre- tagne, laPrusse, I'Espagne, la Russie, leDanemarkct le Portugal, qui successivementreconnurentson independance : sonventaussi il donne lieu a des rapprochemens utiles entre les honinies des vieilles monarchies et cenx de la nouvellc republique; et il permet d'opposer avec avantage, au fastc, a I'etiquette, aux intrigues des envoyes des rois, la simplicile , la franchise, la bonne foi des representans d'uiie nation librc. On pent appre- cier la politique de presque tons les cabinets de I'Europp par la seule comparaison du langage dedaigneux que tenait la oour de Saint- James au commencement de la guerre americaine, avec celui qu'elle prit ensulte apres les victoires de Jackson et de . Brown , de Hull et de Perry. I^a derniere guerre arracha ce que n'avaient pu obtenir les succes de Washington et les demandes de Jefferson. • La guerre de I'lndcpendance, dit un journal AMtRlQUE MfiRIDIONALE. i5i americain , annonca la naissance de la nation ; la guerre de 1812 consoinnia son emancipation et raffianchit a jamais de tout honteux vasselage. » C'est a des homines qiiinedemandaient point a rEtatcesonei-eux traitemens dont les budgets europeens se tiouvent surcharges, qui n'avaient ni niagnilicjues ]ia!ais, ni cours brillantes, que les Etats IJuis doivcnt leur grandetu- actuelle. Un marchand, nom- ine Henock, presida i'un des premiers congres americains; un simple imprimeur , Franklin , represcnta le premier , aupres de la cour de France, une republique, qui, admiuistree, represen- tee et diifendue par des plebeiens , sut se faire res])ccter au de- hors, et s'elever a un degre de prosperite dont le contraste fait encore mieux ressortir I'etat de gene et de pauvrete de la plu- part des royaumes d'Europe. II nous sufiira d'offrir a la medi- tation des gouvernemens et des peuples I'etat comparatif de certaines parties des budgets de TAngleterre et des Elats-Unis : liudegt des Elats-Unis. Budget de I' Anglelcrre, L. St. L. St. President et vice-president. . 6,000 Roi 1,000,000 Famille royale » Secretaire d'etat 1,000 3 Seer, et 5 vice - seer, d'etat. 28,000 Secretaire de la tresorerie. . . 1,000 7 lords corainiss.de la tresor. i3,6oo Bureau de la marine 3,4oo Bureau de raitiiraute. . . . iG,ooo Direetenr des posies 600 a Directeurs des postes. . . 5, 000 Chefde la justice 800 Chef de la justice 6,000 Procureur general 600 Procureur general 6,000 Directeur de la ruonnaie. . . 400 Directeur de la luonnaie. . . ro,ono Secretaire du Senat 600 Presid. de la Ch. des lords. 3, 000 Secret, de la Cbaiubre des repr. 600 Presid. de la Cli. des coinra. 6,000 Ambassadeur en Angleterre. 1,800 Auibassad. aux. Etats -Unis. 5,5oo — en France. . . 1,800 — en France. . 11,000 en Russie. . . 1,800 — en Ru.ssie. . ir.ooo — auxPays-Bas. . 1,800 — aux Pays-Bas. i r,ooo — en Espagne. . i,8uo — en Espaguc. i(,ooo — enSuede. . . 1,800 — en Suede. . . 4i5oo — en Portugal. . 1,800 — eu Portugal. . 5,5oo 6 Secretaires de legation. . . 9, 400 4 Seer, d'amb. 3 Seer, delcg. 6,o5o 6 Consuls 3,600 Consuls 3o,ooo Aussi, 80,000,000 de francs suffisent aux depenses des Etats- Unis, tandis qu'il ne faut iien moius que 1, 41 5, 000, 000 de fr. pour satisfaire a celles de I'Angleterre. Aussi, le premier de ccs etats n'a qu'une dette d'environ 400,000,000, qiti sera amortie dans seize ans, tandis que la secondea une dette de 22 milliards qui ronge la nation et forcera pent - etre I'Etat a recourir a la honteuse ressoiuce d'luie banqueroute. Frederic Degeorge. i5i LIVRES ETRANGERS. 4. — Greefi course, comprising extracts, etc. — Cours dc langue jjrecque coniprenant des cxtraits propres k donner aux elevesuiieconnaissaiiceprojj;ressive(lecettelangne;par£ et les beaux-arts sent egalement cultives par les dames auglaises. L'astronomie doit piusieurs decouvertes imporlanlcs a M"'" Soimerville ; et la chimie , aiiisi que la physique, une partie dc leur popularite aux ouvrages elL-mentaires de M'""' Marcet. Les ecrits de miss AiKiN , de miss Benger et de M'"^Thomsox, peuvent prendre rang a cote des meilleurs ouvrages historiques de notre epoque; ceux de miss Eugeworth et de M""= Hoffma?^ oecupent la premijre place parmi les livres consacres a I'enfancp; eniin les poesies de miss Bailie, de miss Lanoox et de RI'"'' Hemans paraissent n'avoir a eiaindre aucune rivalite contemporaine. Il serait assez diflicile de prononcer entre les trois muses insulaires : cbacunc d'elle a sou genie propre, son caractere particulier. Les tendres inspirations, les gracieuses images, les peintures animces indiquent, dans miss Landon, luie aine vierge, un esprit moitie exalte, moitie naif, qui vit encore d'il- lusions, qui se passionne sans se fixer, que tout emeut, que tout inspire; la vue d'unc fleur aussi bien que les grandes scenes de la nature; Ic chant de I'hilomelecomme le tableau desplaisirs ou des miseres dcla vie. La tragedie de Montfort , chef-d'oeuvre de miss Joanna Bailie , aunonoe une ame forte, qui a beaucoup observe; un esprit vaste qui a beaucoup reflechi, un genie pro- fond qui, frappe de I'iuiluence malfaisante des vices, les expose au grand jour, les dcnonce avec energie et les attaque sans pitie. L'amour represente sous toutes ses formes, dans toutes ses phases de bonheur et de souffrauce , d'ivresse et d'angoisse , est le Dicu celehre par miss Landon. Les passions contagieuse<= grande-bhetagne. i 59 ties hommes, les exces qu'elles produisent, les malheurs qn'elles entrainent sont les siijets choisis de preference par miss Bailie. L'aimable auteur de \ IniprovLseitiicc , Au Troubadour et de hi Vioktte d'or, et U; patheti(|iie auteiir de Moittfortel des Martyrs, ii'ont entre eux aucune resseniblance; ni I'un ni Taulre n'ont rien de coninuin aveclechanUe elegant dw Siege de Faience, des .Scenes hlstoriques et du Sanctunire cle la fore't. Pent-etrc, miss Landon et iriss Bailie si'rpassent-elles leur emnle : celie-ci, par la profondeiir des pensees; celle-la, par la fraichcnr des images. Mais aucune d'elles ne sent plus vivement que M'°« He- mans, n'emeut davaiitage et ne se passionne a un plus haut degre pour lout ce qui est grand, noble et gi'-nereux. C'est dans les eampagnes riautes des environs de Londres que la jeune muse de Chelsea , encore enivree des flalteries qui liii sont pro- diguees par les journaux , laisse echapper ses vers si tendrcs et si touehans. C'est au milieu iles moiitagncs du pays de Calles, dans ces lieux agrestes, si feconds en souvenirs de gloire et de liberie, que M"" Hemans vachercher ses poetiques inspirations. Les actions les plus pures, les plus vertueuscs, les ])lus subli- mes , sont celles que cette muse des opprimes se plait a chanter: ie sage, victimc de la tvraimie; le patriote n.ouraut sur m\ echafaud; la tendresse d'une mere , ou la misere dun proscrit , sont les sujets de son ehoix. Ce n'est point parmi ieurs plus longs ouvrages qu'on doit ch^rcher les chefs-d'oeuvre de M''* Hemans et de miss Landon. Tlie golden violet, contient des passages riches de |)0esie et brillans de fraicheur : X Invocation au printems, \ llislolre du pelertn et la Fwsedu troubadour italien sont iSqvc nombre. Mais tout ce poeme n'est, en resume, qu'un compose de recits, de chants, de fetes en I'honneur de I'amour; ce n'est qu'un long madrigal qui fatigue par sa monotonie. Tlie forest sanctuary offre aussi des passages admirables; il exhale une vertueuse indignation centre le fanatisme religieux qui, depuis bien des siecles, desole la malheureuse Espague, et une melancolie pro- fondc s'cmpare du lecteur, an recit des iiifortimes de cet intre- pidecastillan, oblige de chercher dans les forets de I'Amerique un asile eontro les vengeances du saint-office. Le recit de la fuite de cet infortune et de sa famille excite le plus tendre interet; mais cet interet ne se soutient pas, et ce poeme est loin d'egaler les ppemes bcaucoup moins longs de Vallace et Bruce, de la Mart de Coradin , du Siege de Valence , de I'fleure de la mort et de la Foic du printems, etc., dans lesquels, a notre avis, M" Hemans atteint la perfection du genre. II y a sans doiite dans le Cupidon et [hirondelle , de miss Landon, dans iflo LIVRES ETRAATtERS. sa Dnnierc frairi dc V Aitxnir , dans son Erinna , et dans plu- sieiu's autres de scs pieces, de la facilite, de la verve, du pa- thetiqne , et memc de renthousiasme poeticiiie ; mais on n'v rencontre point cette elevation dc penst'-es , cette elegance de style que Ton rcniarque dans les moindres productions de I'aii- teur du Siei^c de Valence. Trop souvent les regies de lapoesie sont violees par missLan- don ; el ses vers ne sont quelquefois , comme dans Ic Lai du troubadour provencol , insere dans The golden violet, que de simples bouts rimes. Jamais de semblables defauts ne se ren- conttent dans les onvrages de miss Bailie etde M"^* Hemans. Les tragedies de la premiere ne sont point restees an theatre; non parceque la poesieen etait denuee de force et d'harmonie, mais parce que, comme I'a dit fort bien un critique dans la Monthly review , I'auteur de Montfort vouhit reunir dans ses pieces la richesse et I'energie dc la versilication anglaise et la rigidite de regies que prescrit I'ecole de Racine. Comme auteur dramati- que, M''* Hemans est inferieurc a miss Bailie; et les dernieres productions de celle-ci ne valent point ses premiers ouvrages. La Mort de Coradin, representee il y a trois ans , sur le theatre (le Covent-Garden, n'indique dans M'* Hemans aucun talent pour la tragedie; mais, comme poetc elegiaque, elle nous pa rait I'emporter sur toutes les femmes poetes dont s'honorent aujourd'hui les trois rovaumes. Frederic Degeorge. i5. — Tales of the O'Hara Family, ete. — Contes de la fa mille O'Hara. Seconde seric. Londres, 1826; Colburn. 3 vol. in-S"; prix, 3i sh. La litterature anglaise a subi, depuis quelques annees, uue sorte de revolution. Les ecrits frivoles ont remplace les ouvra- ges serieux, et les Revues et les Magasins ont obtenu un credit que Ton n'accordait jadis qu'aux chefs-d'oeuvre des grands ecrivains. Au lieu de discussions meta physiques, on lit mainte- nant en Angleterre I'ouvrage de Charles Lnmbe , et the opium eater ( le Mangrur d'opium ) ; on etudie I'histoire dans V Edin- burgh review; I'economie politique, dans le JVestminster ; et les articles de M. Barrow , dans le Quarterly , remplacent les precieux ecrits de Marco Paolo, de Chardin, de Thevenot, du Halde, etc. Tout se ti'aite en quelques pages, et cette fameiise controverse relative a Ylcon Basilikr, qui a I'empli tant de bons et gros volumes et qui a brouille le cerveau de plus d'un antiquaire, vient (ierniei'ement d'etre decidee, par sir fames Mackintosh, dans une trentaine de pages d'une fcuille perio- Hique. La poesie elle-ineme a eprouve cette revolution ; et les sonnets de .i ins^rt^s dans Blackwood's Magazine , et les Eter— GRANDE-BRETAGNE. i6i nelles Jleurs , les Berceaux , les Pleurs, Ics Clairs cle lunc de miss Landon, dont le New-Monthly Magazine est rempli, suc- cedent aux immortels oiivrages de Byron , de Shelly, et dc Wordsworth. II est vrai qu'au milieu de la degeneration que nous venons de signaler , le roman est reste brillant de jeunesse et de frai- cheur : anssi, de meme que nous reportons nos regards vers le siecle d'Elisabeth pour y chercher les terns glorieux du theatre anglais, jde meme, les generations futures trouvcront dans les romans de notre epoque les sublimes inspirations , les grandes idees dont ils semblent aujourd'hui s'etre reserve le monopole, aux depens des autres productions de I'esprit. On ne doit pas oublier de citer, entrc autres, les contes de la famille O'Hara. Nos lecteurs se rappellent sans doute que dc^a, en examinant la premiere serie de ces contes et The Boyne IFater, autre ouvrage sorti de la meme plume ( voy. Rev. Enc. , t. XXXI, p. 122), nous avons assigne a Icur auteur \m rang eleve parmi les ecrivains les plus gracieux et les pins feconds. II est difficile d'etablir aucune comparaison entre the Boyne JVater, et la seconde serie des contes de la famille O'Hara ; I'auteur lui- raeme nous previent, par I'epigraphe qu'il a clioisie, qu'apres avoir peint dans le premier de ces ouvrages les grandes vicis- situdes de la guerre, il ne s'occupera daus celui-ci que des details de la vie privee. Ce dernier ouvrage contient deux nou- velles d'un grand interet. L'intrigue en est trnp compliquee, les evenemcns trop nombreux, et les caracteres frop varies, pour qu'il nous soit possible d'en donner I'analyse; mais nous y si- gnalerons quelques scenes detachees dun effet dramatique superieur a tout ce que nous connaissons. Nous citerons d'abord, dans celle de ces deux nonvelles intitulee, Noivlans, la description d'un menage irlandais, le recit d'un meurtre, et le tableau qui represente un pere con- templant les restes inanimes de sa femme et de son enfant nou- veau-ne, morts d'inanition. Le pr^-mier de ces morceaux est d'une verite frappante; dans les deux autres, I'horreur est portee au comble, et on pourraitmeme Icur reprocher de fati- guer le lecteur, tout en excitant sa pilie pour les victimes et son admiration pour le peintre. Dans la seconde nouvelle , intitulee Pierre da cluiteau , on trouve une scene de noces qui se passe chez un fermier irlan- dais, et dont nous ne pouvons faire im plus grand elogequ'en disant que nous I'avons relue a plusieurs reprises, avec le meme ■plaisir que la description de la famille hospitaliere de Dondie T. xxxiii. — Jam'ier 1827. J i 1 6a LIVRES ETRANGERS. Dinmont, dans Guy Manncriiig; les caracteres sont nalniels «t frappans. Dans ces deux nouvelles, Tinteret est bien soutenu; mais on aime siirtont les sentimens de bonte et d'indulgence avcc les- quels rauteur juge les homnies. II est consolant de lire sur I'lr- lande un ecrit qui n'est point soviille par I'esprit de parti, ct d'entendre sortir de cette malheureuse contree une voix qui ne fait pas entendre les hurlemens du fanatisme. iG. — Alinack , a novel. — Almack , roman de mceurs. Lon- dres , 1 826 ; Colburn 3 vol. in-8° ; prix , 3 1 sli. 6 p. Get ouvrage n'indique point dans son auteiu' un genre de talent bien eleve ; mais il est ecrit avec elegance et facilite, et il est amusant.Doplus, ila le merite assez rare d'etre unecopie fidele des mceurs du grand monde dont il promet la peintuie. On y voit la societe la plus distinguee de Londres parler et agir sans la moindre contrainte; la paraissent dans toute leur naivete I'elegance et la grace des folies de bon ton , et ce tableau devient d'autant plus interessant que I'auteur ne semble pas avoir eu I'intention de repandre du ridicule sur les per- sonnages qu'il met en scene , et croit que les bais , les robes nouvelles et les diners doivent neccssairement faire I'occupalion la plus serieuse de I'esprit humain. II serait aise de prevoir que, si une classe tres-peu nombreuse de la societe recoit une grande importance de ses litres lureditaires ; si des droits absvudes de succession Uii assurent beaucoup de privileges , cette classe se composera en grande partie de gens oisifs, frivoles , ignorans, et dont les moeurs ne seront point irreprochables. He bien ! noire conjecture se Irouverait jusle , et les fails viendraient appuyer nos raisonnemens. Le grand monde, le moiule a la mode que decrit I'auleur d' Almack , pent fournir ime ample matiere a la satire. Le vulgaire , qui forme la grande majorite de I'espece humaine , pent neanmoins se consoler de n'etre pns admis dans cette reunion de beaux esprits qui a donne son nom au roman que nous annoncons , en apprenant qu'il n'y a point de lieu sur la terre ou Ton donne plus d'imporlance aux frivo- lites , et oil les affaires vraiment importantes soient constam- ment traitees avec plus de legerete et d'indifference. Considere dans son ensemble, cet ouvrage merite d'etre lu ; nous craignons cependant qu'un grand nombre de lecteurs n'arrive a des consequences differentes des notres. Plus d'une jeune femme , en voyanl la peintiue d'lme sociele dans laquelle elle ne ponrra jamais etre admise, deplorera sa destinee aver amerlume. R. R. de V U nh'crske de Camhridf^c. i63 RUSSIE. i'^. — * Istor'ia gretches/iikh pro'izchesU'ii. — Histoire des eve- nemens arrives en Grece , depuis le commencement des opera- tions jnsqu'i ce jour; par E. MfItaksa , capitaine de 2* classe dans la marine. Moscou, 1824 - iSaS. % vol. in-S", le i"de ai6 p. et le a« de 262. Le sort des Grecs, ies circonstances de leur liitte desesperee centre les Turcs,et Ies succes d'une j;;nerre sainte ne doi vent pas exciter une simple curiosite; le cceiir doit y prendre uue par.t active. Jusqu'a cejour,nous n'avionsappris que par des relations isolees et incompletes les principaux evenemens qu'il nous im- portail de connaitre; il manquait aux Russes un ouvrage qui reunit avec ordre et fidelite tous les documens qui existent sur cette revolution. M. Metaksa vient remplir une lactme qui s*- •faisait vivement sentir, et son livre repond a un voeu general. Il a choisi pour bases principales de son histoire les ouvrages de Raffenel et Pouqueville, en les rectifiant et en les comple- tant par les recits de temoins oculaires, les ecrits de queiques autres auteurs et ses propres observations. S'eloignant , avec raison , des pompeuses declamations de I'un de ses modeles ( M. Pouqueville, dont I'ouvrage n'en est pas moins Id avec un ' grand interet),il raconte avec simpliciteles faits qui n'ontbesoin d'aucun ornement; mais son style s'anime et se colore forte- ment , dans toutesles occasions 011 1'historien doit s'effacerpour faire place a I'homme. — Nous attendons encore un 3^ volume, .qui doit etre accompagne d'une carte de la Grece (1 ). E. H. 18. — Scholce semestres , etc. — Cours de semestre de I'Uni- versite de Dorpat , etc. Dissertation par Charles Morgenstern. Dorpat, 1825 ; Schunmann. In-fol. de 38 pages. Un usage, etabli en Allemagne et dans les autres contrees du nord de I'Europe, veut que les recteurs, pro-recteurs ou direc teurs des universites, des gyninases, en annoncant les cours pu- blics, et a I'occasion des solennitesperiodiques, traitent queiques questions scientifiques ou Utteraires. De la cette multitude de dissertations qui ontenrichi les bibliotheques. Ainsi, a I'annonce des cours de semestre a I'Universite de Dorpat , est jointe une dissertation extrememcnt erudite de M. Morgenstern , pro- (i) Get article, que nous tradnisons du russe ( n° 16, p. 345 da Telegraphe de Moscou, iSaS , ) est une nouvelle preuve de la part gene- xale qne les penples de la chrelieute out prise an sort de la nation grecque ; cenx qui les gouvernent tarderont-ils long-tems encore a cedei a nne impulsion qn'ils auraient du etre les premiers a donner? i64 LI VRES i::TR ANGERS, fesseiir et consoillci-cretat an service de rempcreiir dc Riissic- Cette dissertation , qni sera piecieuse aiix amateurs de la mi- niismatiqiie, fait suite a im premier memoire piihlie dejii sur li,' ineme siijct; leraii^' distinj^'ue que M. Morgensfern occupedans la republique des lettres est mie garantie de I'interet que doit iiispirer cet ouvrage. En 1826 , oil a imprime a Dorpat ( in-fol. de 26 pages) , sur le meme sujet , line troisieme dissertation de M. Morgenstern , liclie d'erudition , et par laquelle le savant auteur eclaircit divers points de I'liistoire du Bas-Empire et de celle de Russie. G. Oiwrages pcriodiques. ig. — * Sinn Otetchestva , etc. — Le Fils de la Patrie, journal historique, politique et litteraire, redige pariV. Gretch. N°' i5 a 20 ( du 1*' aout au i5 oclobre 1826 ). Saint-Petersbourg , imprimerie du redacteur. Prix de I'abonnement pour I'annee , /i5 roubles. Deja, depnis la fondation de la Revac Encyclopcdique, nous avons donne, dansnos deux sections du Bulletin hibliographique ■ et des Noin'cllcs scientifiities et litteraires, i52 articles consacres a I'annonce plus ou moins detaillee d'ouvrages publics en RussiE, 160 nouvelles interessant les sciences, les lettres ou les arts dans ce pays, 23 articles destines a honorer la memoire d'autant d honnnes qui s'y sont rendus celebres par leur genie ou leurs talens, 78 comptes rendus de Societes savantes ou litteraires, et 49 articles , enfin, oil nous avons passe en revue les principaux journaux qu'elles out pour organes (en tout 462 articles relatifs a la Russie ). Ce sont autant de materiaux que nous reciieillons avec zele et perseverance pour I'instruc- lion de nos lecteurs et pour I'avantage particulier de ceux qui veulent se tenir au courant des progres de la civilisation dans un pays oii, naguere encore, la nation avait tout ^ faire pour se mettre au niveau des autres nations eiuopeennes. La revue . Enc, t. XVI, p. nS-iaa), a la onzieme annee du reciieil qui faitle sujet de cet article, nous avaient ete coram uniquees par un correspondant instruit et zcle. EUes caracterisent bien la marche et I'esprit de ce recueil , et nous permettrout d'entrer tout de suite en matiere, et de nous borner ;\ une simple enu- meration des objets qui sont traites dans les 6 cahiers que nous avons sous les yeux. N" XV. — 1° Fragment traduit de ff'as/ungion Irving. 2" le Manchon de la Vieille , traduit des Contes de M. Bouilly «w.r Enfans de France. 3° Analyse du poeme du prince Chilihmatof sur Pierre - le - Grand. Cette analyse d'un jioeme fort remar- quable, public il y a quinze ans, maisauquel les journaux lit- teraires n'avaient peut-etre pas occorde assez d'atlention, est faite avec beaucoup de gout et de savoir; c'cst d'ailleurs le seul morceau de critique litteraire que renferment les 6 cahiers de ce journal, auquel nous reprocherons d'offrir trop peu de morceaux originaux. [\° Du Genie poetique au xix® siecle, par M. Artaud, article traduit de la Revue Encyclopedique ( Voyez t. XXV, p. 601 ). 5" Critique , et Nouvelles litteraires , de peu d'interet aujourd'hui. 6° De la situation des Cabinets de I Eu- rope, et en particulier de Fintericur de la France , article em- prunte au Moniteur. 7" et 8° Deux fragmeus de poemes russes , dont le second, intitule Orsan et Lila , a pour auteur M. Obo- dovshi, N" XVI. — i°Nouvelle, \x&A\y\\.^ A' Auguste Lafontaine. 2" Fin de I'analyse consacree au pocme sur Pierre-le-Grand. 3° Fin de I'article sur le Genie poetique du xix'' siecle. 4° Anti-critique. 5° Relations politiques entre le Portugal et le Bresil , article em- prunte au N" 189 de la Gazette de Berlin ( Berl. Zeitung 1. N" XVII. — I "^ Fragment de la Viede Gost/ie,icnte par lui-meme, traduit del'allemand. 1° La Prise d'Js/naiil, fragment d'uneiVoM- I'elle Biographic de Soiivorof, ecrite par G. Schmidt , traduit egalemeut de I'allemand. 3" Examen critique du Choix de poesies russes, public en allemand par Von-der-£org. L'auteur de cet article, le meme auquel on clevait deja I'analyse du poeme de Picrre-le-Grand, donne la preference <\ I'Anthologie de M. Von- der-Borg sur celles de MM. Bowring et Dupre de Saint-Maure ( Voy. I'analyse de cette derniere dans notre cahier de decembre 1826, t. xxxii, p. 637, etcelle de la i'^®,t. x, p. 355). Du reste, il s'est moins attache a donner une idee exacte de ce travail (qu'il parait ne pas avoir eu en original sous les yeux) qu'a combattre qnelques jugemens hasardes sur la litterature russe dont ce meme on v rage a etc le sujet dans le N" 60 des Feuilles dc litte-. rature allcmande. 4" et 5° Articles de/;o/^'/«/(/«t' litteraire. i66 LIVRES ETR ANGERS. N° xvai. — 1° Fragment dc Rcdgauntlct , traduit de I'anglais, lie f'Valter-Scott.i.^ Les l^vencnicnn imprevus , noiivelle fraiKjaise. ^'^ Biographic de Dorotliec Von - Rodde , tradiiite de rallemand. <;ette fenime distinguee, qui avait merite le grade de D'' en philosophic, et qui etait (ille dii celebre Schlosser, auqiiel I'his- toire russe est tant redevahle, est morte en France, a A.vignon, le 12 jiiin 1825, a I'agc de 5/| aiis. 4° Lr Fugitif , fragment d'line noiivelle en vers. 5" Coup-d'oeil sur les tfvenemciis poU- tiqurs detuniwe i82/(. N° XIX. — t° Ulllumince, nouvelle traduite de Tallemand , de Zscho/ikc. Les merveiiles du magnetisme animal jouent un grand role dans cette nouvelle ; mais le traducteur avertit le lecteur de ne point y chercherune dissertation en regie sur une science a laquelle les reclierches de quelques medecins mo- dernes sont venues rendre une importance qui pourrait bien tourner au profit du charlatanisme. '2° Le Cointe Saint-Germain, fragment traduit des Memoires de My^^ la comtesse de Genlis. 3° Essai critique sur les ronians de Walter-Scott , traduit du francais. 4" Suite du fragment en vers le Fngitif, commence dans le cahier precedent. 5*> Les Fanarioles et les Turcs, frag- ment traduit de la Rei>uc Encyelopedique (Voy. t. xxv, p. agS), 6° Suite et fin du Coup-d'oeil sur les evenemens politiques del'an- nee 1824. N° XX. — 1" Suite de la nouvelle traduite de Tallemand, de Zschokhe, commeuoee dans le cahier precedent. 2" Analyse de Touvrage de M. Degerando : Du per] ectionnemcnt moral , ou De Veducaliim de soi-meme , traduite de la Revue Encyelopedique ( Voy. t. XXVI, p. 671 ).'i° Jnti-critique. 4° Tentatives failed par les Etats-Unis pour etahlir des colonies de negres en Afrique, article traduit d'un journal allemand ( Politisches Journal , sep- tembre 1825 \ Chacun des cahiers que nous venons de passer en revue donne,eri outre, sous le titre de Bibliographie russe contem- jwraine , les litres de quelques ouvrages nonveaux; ces litres sonl au nombre de aS dans les 6 cahiers que nous annoncous, et Ton renvoie , pour les details , a \ Abeille du Nord, feuille lit- teraire publiee par les memes editeurs. On voit que les six cahiers que nous venons d'examiner sont plus riches eft traductions qu'cn morceaux originaux. Nous avons personnellement a remercier les editeurs du Fils de la fmtrie desemprunts qu'ils out bien voulu faire a iiotre Revue, ct noiisaiuions desin- qu'ils iiouseussent fouiui les moyens deleur rendre a cet egaid la reciprocite. Nuns scions sans doule plus heureux une autre fois, surtout s'ils veulcnt bien nous tenir au RUSSIE. — NORVEGE. 167 com ant de leuis publications , en acceptant I'echange que nous leur avons pro[)Ose entie leur recueil et le notre. ( Voy. ci- apres aux Notwelks , un article sur les anciens journaux russes.) E. Hereau. NORVEGE. 20. — * Kongeriget Norges Storthings Forhandlinger. — Proces- verbaux de la quatrieine diete ordinaire du royaume de Nor- vege, en 1824; publics par M. Paul Holst , archiviste de la diete. Christiania, 1824 et i8a5 Scahiers, fais^nt ensemble 2062 pages petit in-8°. Nous avons annonce dans le terns (Voy. Rei>. Enc. , t.xxviri, p. 169) les resultats des deliberations de la diete norvegienne de 1824- Nous avons fait connaitre comment les trcize proposi- tions faites par le gouverncment, et tendant a introduireautant de changemens et d'innovations dans la loi fondainentale du royaume avaient toutes cte rejetees a I'unanimite. Une de ces ])l"opositions, celle de rendre dt'finitif \c. veto royal, qui, d'a- pres la constitution , n'est que swspcnsif , sera reproduite a la dieteprochaine, qui sQy\\v\vA,dc droit, le premier fevrier 1827. II est presque certain que cette proposition sera de nouveau rojetee, car on a tros-sagement adopte le principc de ne rien changer a la constitution , quelque favorable que puisse pa- raitre, sous certains rapports , le changement propose. Si nous touchons, dit-on gentralcment en Norvege, a un seul article de notre loi fondamentale, pour la modifier , I'alterer ou I'abolir , il n'y aura plus aucune raison pour se refuser a en changer d'autres; etbientot, de cette maniere, notre constitution tom- berait en debris. Un exemple recent et deplorable en ce genre, et chez une nation qui a exerce une grande influence, doit ser- vir de lecon et de preservatif. L'aristocratie suedoise voudrait operer ramalgame complet des deux royaumes sous une seule et meme constitution. Pour atteindre ce but , elle n'a jamais cesse de travaiiler a faire creer en Norvege une noblesse, sans laquelle I'amalgame lui parait absolument impossible. Ce projet, justement odieux a la nation, a ete six fois rejete par autant de dietes ordinaires et extraordiuaires, et toutes composees d'ele- niens nouveaux; mais les partisans des innovations ne se tien- nent pas encore pour battus. Une intrigue ourdie en Suede , et favorisee sans doute par quelques Norvegiens ambitieux , avait voulu travaiiler les dernieres elections de maniere a faire elire presque partout pour la diete prochaine des cultivateurs et des paysans , qui , connaissant fort bien les interets de leur classe, n'ont pas en general les connaissances necessaires pour bien juger les interets de la nation en masse. Heureusement, ce iG8 LIVRES ETR ANGERS, plan a ecliouc; s'il avail roussi, il en scrait resulte, on tie mau- vaises lois , auxquellcs le roi sc serait vu clans la necessite de refuser sa sanction , ou des lois telies que raristocratie en de- niande; otdans le premier cas, on n'aurait pas manque de dire: « Nevoycz-vous pas qu'il faut etablir chez vous lesquatre or- dres, commc en Suede, afm que toutes les classes decitoyeus soieut egalement representees?" Nous avons dans ce moment sous les yeux la liste nominative de tons les deputes ( moins un sen! ) elus pour la diete de 1827. Leur nombre est de 78; et parmi eux, il n'y a que douze cultivateurs ou paysans. Cetle proportion est convenable. Le surplus est compose de proprie- taires , de negocians , d'ecclesiasliques , de militaires et de fonc- tionnaires publics, lous inamovibles , sans aucune exception quelconque. Ainsi, le peuple norvegicn pent se rassurer sur la conservation de sa loi fondamentale dans toute son integrite. Notre confiance, sous ce rapport, est fortifiee par un autre motif: c'est que nous voyons reelus pour la prochaine diete vingt-six des membres les plus distingues de ceux qui compo- saient la diete de 1824. Heiberc. DAN EM ARK. 21. — Grimdaarsagcrne , etc. — Causes principales de la crise commercialeet industrielie qui se Hiit sentir aujourd'hui; par M. J.-C. Lange. Copenhague, 1826. In-8° de 84 pages. L'auteurattribuela crise commerciale et industrielie qui dure encore, ou plutdt les entraves que rencontrent aujourd'hui le commerce et I'industrie de ['Europe, a dix causes principales : 1" I'immense suprematic, toujours croissante, de I'Angleterre et de I'Amerique du Nord; 2" la diminution en Europe des me- taux precieux, produite non-seulement par le commerce avec I'Asic, mais surtout, ct particulierement , par la revolution de I'Amerique meridionale; 3° le defrichement d'une immensitede terres autrefois incultes en Amerique, dans les etats barbares- ques , et meme dans plusieurs parties de I'Europe ; ainsi que les progres toujours croissans de la culture des ponunes de terre ; 4" raugmenlation extraordinaire de !a population par I'intro- (luction de la vaccine et par douze aas de paix generale; 5° I'aug- mentation incroyable des bras sans emploi,par latraprapide introduction des machines et par la cessation de la guerre, qui occu[)ait non-seulement des soldats, mais une grande quantite d'hommes dont elle utilisait les tiavaux; 6" raugmcntalionhors de proportion de toutes les charges publiques,apres une guerre de vingt-cinq ans; les emprunts cpieles gouverncmens ont con- DANEMARK. — ALLEMAGINK. i6g trades , et la penurie de capitaux qui en lesulte; 7" la revolu- tion financiere de plusieurs etats, la reduction deseffets publics, le changement du systeme monetaire, et plusieurs inconveniens qui en ont etc la consequence inevitable; 8° la disproportion qui existe entre la classe des producteurs et celle des consom- mateurs; 9° les monopoles, les corporations et antres obstacles a la libre activite de Thomme, telsque les tarifs immoderesdes douanes, tant maritimes que continenlales , et plusieurs autres entraves que dans plusieurs etats on oppose au commerce ; 10° eu6n , raugmentation du luxe dans les classes moyennes de la societe , combinee avec la diminution de leurs ressources. — Apres avoir accompagne de developpcmens sommaires I'enon- ciation de toutes ces causes, I'auteur indique plusieurs moyens qu'il croit propres, sinon a remedier a la crise actuelle, du nioins a diminuer un pen les embarras qu'elle fait naitre; mais, comme dans tons ces details , I'auteur n'a eu en vue que sa pa- trie et les contrees les plus voisines, nous nous abstiendrons d'en faire mention. Nous ne pouvons cependant nous empecher de citer une note de la page 21 , ofi I'auteur parle des observa- tions faites par un medecin distingue de Copenhague, M. le docteur Otto, et qui constaterit I'existence, dans la Lombardie autrichienne, d'une Affreuse maladie connue sous le nom de Pellagra , et qui ne peut ctre attribuee qu'a la grande pauvrete eta la misere generale d'un peuple, qui habite I'un des pays les plus lertiles, etles plus favorises de la nature. Heiberg. ALLEMAGNE. 22. — * Ueber dit; Gegenstande , etc. — Sur les objets qui peuvent etre soumis a un examcn public, sur le droit ctla ma- niere d'y proceder, par F. W. Carove. Treves, 1823. In-8°. M. le docteur Carove est connu par de bons ouvrages , et celui-ci est I'un de ceux qui ont contribue a fonder- sa reputa- tion. Nous avons a reparcr envers lui le tort involontaire d'un long retard apporto a I'annonce d'un livre estimable sous plu- sieui's rapports. Dans une introduction fort bien ecrite, M. Ca- rove examine d'abord quels sont les objets susceptibles do subir une critique ou une censure publique. Jetant un coup- d'oeil sur le passe , il parle d'Aristophane et des traits qu'il a diriges contre Socrale , Euripide , Cloon ; puis , il cite les sarcasmes satiriques de Lucien , de Dante , de Cervantes , de Wieland , de Goethe, de Paul Richler. Il y a, dit-il , une certaine niesure de critique que Ton dcpassait raremcnt dans I'antiquite, mais que, dc jour en jour, on meconnait davantagts i70 LIVRES liTRAWGERS. La premiere partie de cet ouvrage est fort methodique, et Ton lie peut s'empccher d'adopter une paitie d<'s vues qu'elle renfermc. Je voiidrais seiilement qn'on n'y troin at point I'apo- logie de la censure , chose que j'ai bien de la peine i concilier avec les idees liberales du D"" Carove. II n'apporte d'ailleurs , pour soulenir cette fAcheuse proposition , que cos meines argumens dont les oreilies francaises sent falignees , depuis que chaque annee voit reproduire ;^ la tribune natinnale de nouveaux sophismes pour paralyser I'effet d'angustes pro- messes. On con^oit qu'en ce moment , il soit difficile de lire de sang-froid une apologie de la censure , inslitulion repoiissee par une sorto d'instinct et par le bon sens des peiiples ; mais 06 livre a etc imprime en i825 , et Ion se meprendrait beau- coup si Ton voidait juger par-la des vcritablcs sentimens de I'auteur. II a donne une assez grande preuve d'independance dans son nouvel ecrit sur I'Eglisc romuine (Voy. Rev. Enc. t. XXXI, p. 1 38). Bornons-nous a considerer cette idee comme Ic travers d'un bon esprit, et gardons-nous de confondre M. Ca- rove avec les apotres de I'obscurantisme. Dans sa seconde partie , il recherche a qui appartient le droit de censure publique. II distingue trois sortes de censure et d'examen , suivant qu'il s'agit d'un phenomene naturel , d'un fait historique ou du sens interieur et de la conscience. Car , d'apres sa maniere de trailer son sujet , il ne se borne point aux productions de I'esprit ; il penetre dans toutes les condi- tions et dans toutes les situations , et il embrasse les nations , les associations particulieres et les individus. M. Carove s'eleve a de hautes considerations politiques sur Brutus, sur Guil- laume-Tell, sur la Revolution francaise , puis sur I'Eglise. L'examen approfondi de ce livre exigerait plusieurs longs articles , et son importance philosophiqiie doit lui procurer des lectcurs nombreux et choisis. M. Carove n'a rien omis d'cssentiel : il connait bien la litterature et la philosophic de toutes les nations civilisees de I'Europe , et I'antiquite lui a OHvert ses tresors. Ph. Golbery. a3. — Die Rheinreise. — Le Voyage du Rhin; \^af /osr/j/i Weitzel. Tome I. Wiesbad , iSaS; Ritler. In 8". Dans le tems ou I'Allemagne jouissait de quelque libcrte de la presse, en 1819, M. Weitzel redigeait un bon journal sur les bords dn Rhin ; depuis qu<' la presse est esclave, il consigne ses idees poHtiqucs et philosophiques dans des ouvrages ou re- cucils, publics sous divers litres. Le Voyage du Rhin est dc ce genre. C'est nioins la description des lieux situes eulre Wies- bad et JugLlheim, qu'une set ie de reflexions faites par un hoaimc ALLEMAGNE. 17 i cclaire. " Le peuple des bords du Rhin , dit I'auteur, a plus de superstition que de religion ; il pourra se permettre des raille- ries sur le clerge , et ne pas observer strk;tement les verilables devoirs du christianisme ; mais il tient beaucoup .\ ses messes enmusique, anx processions et aux images miraculeuses. Le luxe du culte en est pour lui la partie imporlante,» etc. M. Weit- zel presente ensuite de sages observations sur les avantages de la publicite, objet de I'aversion des partisans du pouvoir ab- solu. a/j. — Tagebiu'li eitier Reise clurch Griechenland and Alba- nien. — Journal d'un voyage en Grece et en Albanie ; par im Allemandau service de tAngleterve. Berlin, 1826; les libraires associes. Encore un voyage dans la Grece; mais celui-ci n'cst point I'ouvrage d'un Philhellene et n'a point ete entrepris depuis que la Grece a essaye de secouer le joug des Turns. 11 y a plus de dix ans que I'auteur, etant alors au service de I'Angleterre, visita les diverses provinces de la Moree et de la Livadie; il examina les antiquites, et observa en meme terns les moeurs des habitans de ces belles contrees. II fut temoin du despotisme que les Turcs exercaient sur cette malheureuse nation. L'auteur donne des details interessanssurla Beotie> la Doride, la Thessalie, la Pho- cide, la Locrie et I'Etolie; il decrit Delphes, le Mont-Parnasse, les Thermopyles. Ilaconcu une haute opinion des Mainottes; il peint avec de fortes couleurs les Schypetars ou Albanais , belle race d'hommes qui maintient dans ses montagnes une sauvage liberte, et qui a souvent aide les Turcs a opprimer les Grecs. L'auteur parait au.ssi avoir bien etudie les positions militaires de la Grece. D — o. aS. — "* Die Druiden der Kelien , etc. — Les druides des Celtes et les pretres des anciens Germains , introduction a la doctrine religieuse de I'ancienne Germanie; par Charles Earth. Erlangen , 1826. In-8°. II y a beaucoup d'erudition , d'ordre et de melhode dans ce livre, dispose par paragiaphes , suivis chaciin de citations et de passages , transcrits quelquefois en entier. C'est un ouvrage fait en conscience, et fait par un Allemand qui, comme la plu- part des ccrivains de sa nation, met a profit les richesses scien- tifiques de toutes les parties de I'Europe , et ne neglige rien pour completer un travail ingenieux et instructif , mais qui ne porte pas toujours la conviction dans I'esprit du lecteur. Cha- que science a ses lieux communs obliges. M. Earth n'a pu se dis- penser de se livrer a des recherches etymologiques sur le nom des druides. Mais il nc s'arrete pas long-tems aux generalites, 172 LivREs i5:trangers. et son ouvrage est dominu pai- cics viies bien deteiminces. II parait s'etrc propose la tache importante de rechercher quels rapports existaient entre les diverses religions de I'Europe du nord , et notamment entre celles de la Gaule et de la Ger- nianie : c'est cc que Ton remarque surtout dans ses derniers chapitres sur les pretres germains. 11 u'est pas possible d'en- trer dans tons les details de ce volume ; mais c'est pour nous un devoir de I'indiquer comme necessaire aux etudes qui ont la Gaule et la Germanic pour objet. 16. — * Lcsbiacoriim liber. -^ Description et histoire de Lesbos, par Z.Kc/e// Plehn. Berlin, 1826. In-8°. Je ne trouve pas a rendre autrement que par une circonlo- cution la brievete expressive du titre latin qui comprend dans un seul mot tout ce qui se rattache a Lesbos , a son his- toire , etc. Get ouvrage appartient a la haute erudition , et c'est sans contredit I'une des meilleures monographics que je connaisse. La topographic de I'lle ouvre le volume ; puis , on passe a son histoire , a commencer jiar les Pelasges , peuple enigmatique , et generalement peu connu. M. Plehn ue craint pas cependant d'aborder la difficulte : il se met a la suite d'uue autorite recommandable , et reproduit ce qu'a deja dit sur ce pointM.MuUer, dans son Orchomene. En consequence, il separe les Pelasges , anciens habitans de la Grece , de ceux qui sont venus de la Beotie , dans I'Attique a Scyros , ^ Lemnos en Samo-Thrace, a Lesbos et dans la Troade. II faut remarquer qu'au moyen de cette distinction qui met ces Tyrrheniens dans une classe separee , beaucoup de difficultes s'evanouissent , ou , pour mieux dire , sont eludees. Dans tous les cas, un poids im- mense va etre jete dans la balance : la question est traitee a fond dans la nouvelle edition de X Histoire rnmnine de M. jNiebuhr ( i). Scion lui , des Pelasges homogenes etaient repandus autour de plusieurs golfes ; ils occupaient I'ltalie chcz les Siculcs , les Tyrrheniens, les Liburneens, les Venetes, etc.; se letrouvaient en Sardaigne , en Sicile , et d'un autre cote jusque sur les bords du Danube. Ce grand peuple , qui n'etait point grec, otait cependant en rapport avec les Hellenes. Le terns de sa gran- deur n'a pas atteint le moment ou commence I'histoire qui ne rencontre plus qu'un nom dont les siecles ont oublie la signi- jication. Toutcs les traditions sont examinees, et la critique la plus severe , I'esprit le plus exact et le plus scrupuleux (i) La traduction de cet important ouvrage est sous presse et paraftr-j ^ucossamuicut chez Sautelet , libraire , place de la Bourse. ALLEMAGNE. 173 dcvront reconnaitre que le voile qui couvrait ce mystere , s'il n'est pas entierement souleve , a , du moins , desormais une transparence qui nous permet de juger les piincipaux objets dont il couvre encore les details. Mais il faut revenir a Lesbos. Je nc rendrai point comple d'une querelle elevee par M. Plehn contre I'opinion de M. Raoui Rochette , sur la inanieie dont les Pelasges sont venus a Lesbos , mon plan n'etant point d'entrer dans des discussions qui ne peuvent plus avoir lieu , si I'opinion de M. Niebuhr est adoptee. Quatre-vingts ans apres la guerre de Troie , arriverent a Lesbos les Acheens , fuyant devant les Doriens qui envahirent le Peloponese. L'auteur s'occupe des colonies eoliennes , et enfin de celles que Lesbos etablit sur le continent voisin. Tout ce que I'histoire grecque offre de parti- culier a Lesbos est ensuite discute avec soin. Les textes et les inscriptions sont appliques aux lois , aux institutions de Lesbos; puis, les medailles sont examinees, d'apresEckheletM.Mionnet. Le chapitre iv porte le titre de Res sacice , et il fait connaitre les divinites plus specialement honorees dans cette ile. Les parties qui se rapportent i la musique, aux arts , a la poesie, sont traitees avec beancoup d'erudition. Nous finirons eii rap- pelant que Lesbos comptait parmi ses historiens Hellenicus Myrsile , Hermeas , Heraclite , Chares , Theophane. Le style latin de M. Plehn est facile et elegant , et Ton eprouve autant de plaisir k le lire qu'a I'etudier. C'est un digne eleve de M.. Boeckh , auquel ce travail est justement dedie. 27. — Novvou Attyua-iocKOiv fii/iXiei MH. — Les quarante-huit Hvres de Dionysiaques de Nonnus. Nouvelle fVte/o«,publieepar Frederic G'rs.y'e., de V Academic des sciences de Saint-Petersbourg. T. IL Leipzig, i826.In-8°. Nonnus etait un poete chreticn du commencement du v* sie- cle. On a lieu de croire qu'il etait ne dans I'ancienne religion derempire,et qu'il se convertit a la nouvelle. II a consacrc /|8 livres en hexametres aux exploits de Bacchus; puis, il a ecril sur I'Evangile de Saint Jean. Dans son poeme, oii Ton ne remarque ni ordre ni suite, les idees chretiennes se mclent a celles de la fable, et ce n'est pas sans quelque raison qu'on I'a appele un chaos poetiqne, ou I'erudition la plus indigeste tienl la place de I'inspiration; ou les epithetes sont prodiguees sans choix et sans gout. Aussi Nonnus n'a-t-il pas ete souvcnt re- cherche par les editeurs. M. Grsefe est,jecrois, le troisieme qui s'en soit occupe. Dans sa preface, il parle des materianx dont il a fait usage , et de sa maniere de les employer. Ici I'edi- teur donne un exemple de bonne foietde modestie qui devrait tronver plus d'imitateurs. En 1809, M. Moser, I'eleve de 174 LIVRES ETR ANGERS. M. Creutzor , celui qui a piiblie de concert avec cet illostic savant tant de bons Quvrages, fit imprimer six livres de Non- nus ii Heidelberg. Sos vues ne lentraient pas dans les idees de M. Graefe qui le maltraita beancoup dans la premiere partie de son Nonnus, publiee en 1819. En reponsea ces jugeniens acer- bes, M. Moser ent la generosite d'offrir a son rival tout cequ'il avail rassemble de materiaux pour la suite de son ouvrage; et en effet, il Tenrichit de variantes et de corrections de Falken- burg, et de ses propres conjectures. M. Graefe, louche de ce precede si rare, el frappe iui-meme de I'injuslice dontil elait coupable, ne craint pas d'en faire I'objetd'une retractation pu- blique. Nous croyons devoir saisir cette occasion de deplorer ce travers, donl nos doctes voisins se reconnaissent coupabies. Les reproches de la plus grossiere ignorance sent .souveut la consequence d'une divergence d'opinion , ou de systemes diffe- rens, et Ton ne reprendrait pas plus ameremenl un solecisme dans un ecolier, que les erudits ne s'accusent mutuellement de manquer de science. Pourquoi ne pas respecter ce que I'Europe entiere respecte? Pourquoi des noms honores de tout le monde sont-ils ainsi rabaisses par ceux qui ont a craindre pour eux- raeines une semblable injustice ? M. Grjefe accorde de justes regrets au ceiebre Ouvarow, sous les auspices duquel il a pu- blic son edition. Le lexte de Nonnus est accompagne de notes fort succinctes; il n'y a point de version latine. Ph. GOLBERY. a8. — * Das Madchen von Andros , etc. — L'Andrienne, co- inedie de Terence , traduite dans le metre de I'original , par F***; avec une introduction et des notes de M. K. W. I-. Heyse. Berlin , 1826 ; Dummler. In -4" de 102 pages. A la faveur de I'initiale que porle ce litre, nous pouTons reconnaitrc dans le nouveau traducleur d'une des plus belles comedies que nous ait laissees I'antiquite, un jeune compositeur (M. Felix Mendelson , petit-tils de I'auteur du Phedon), donl on a pu deja apprecier a Paris le talent d'execution musicale. Son premier debut dans une nouvelle carriere annonce des disposi- tions peu ordinaires pour la poesie. M. F- iVl. s'esl completemcnt rendu mailre de son sujel ; el loul en donnanl unie traduction presquelitlcrale elfidele du metre employe par lepoele latin, il a reussi a composer un ouvrage qui, memc sur la scene allemande, produirail beaucoup d'effet. On sail quel succes les Jdelplies de Terence , arranges par un habile auleur, onl obtenu sur le theatre de Berhn. Nous felicilons M. F. M. d'avoir choisi pour ses etudes el ses travaux litteraires , un aus§i bon guide que M. Heyse, le savant ALLEMAGNE, 175 aiiteur du Traite abiej^i- dc la prosodie allemaiide. (Knrzge/asxfe Ferslehre; seconde edition. Hanovre , iSiS.) C'est a liii qu'il doit sans donte son excellente methode de traduction , ega- lement eloignee de la nianiere de ces savans, qui en voulant trop se rapprocher dcs expressions de I'original , deviennent obscnrs et inintelligibles, et de la methode de ceux qui, pour donner a leur version une couleur plus moderne , renoncent a la force et a la simplicite de I'auteur ancien. Quelques passages des traductions donnees par les celebres Voss et Wieland , peuvent donner une idee do ces deux genres extremes. M. Heyse a place en tete du volume une savante dissertation sur les vers employes dans I'Andrienne , qui merite de fixer I'attention des philologues. Les dernieres pages renferment la traduction d'une satire d'Horace (la neuviemedu i^'' livre) qui fait desirer la publication du travail complet entrepris par cct habile traducteur. j D — f. ■ Ouvrages periodiques. 2y . — * Sophronizon , oder unparttyisch freymiithige Beytriigc. — Sophronizon, ou pieces impartiales pour servir a I'histoire, a la legislation et a la statistique moderne des etats et des eglises , publiees par le D'' Paulus. Vol. VI, VII et VIII. Heidelbeig, 1826; Oswald. In-8". Le recueil de M. Paulus est du petit nombre des ouvrages periodiques allemands qui defendent avec courage les lumieres et I'esprit du sieclt,-, et tant soit peu la liberte constitutionnelie. L'editeur, quoique fonctionnaire public du gouvernement de Bade, ecrit avec beaucoup de franchise, et il examine, autant que le permet le triste etat de la presse en Allemagne, les evenemens publics qui arrivent dans Tetat et dans I'eglise ; il soumet a la discussion des questions importantes qui sont tout- a-fait a I'ordre du jour. En laissant de cote plusieiirs articles insignifians et d'autres qui se rapportent a des evenemens arri- ves en France, et qui nous sont gencralement connus, tels que la publication et la suppression de la fameuse lettre pastorale de I'archeveque de Toulouse , les menees et les intrigues des jesuites, etc. ^ nous citerons quelques autres articles qui meritent d'etre remarques. De ce nombre sont ceux qui con- tiennent des vues pour I'amelioration du sort des paysans et des ecoles de campagne, ceux qui traitent de I'instruction des cures de village et de la reforme de la liturgie catholiqiie. L'auteur trouve trop de monotonia dans le chant du cultc romain , et pense que cette monotonie n'est pas propre a dis- f]G LIVRES fiTRANGEHS. poser les osprits a ecouter avec fruit Ics sermons qui suiveiit ces tristes psalmodies. Pour I'instruction dcs cures de cam- Eagne, I'auteur voudrait qu'il y eut dans chaque diocese une ibiiotheque remplie, non pas de traitts doi^matiques, mais de livres instructifs, mis a la disposition de tons les ministi'es du culte. Dans un autre article, on fait entendre timidement que Ton est alle beauconp trop loin dans les accusations por- tees contre les universites allemandes. C'est une verite qu'on ose a peine faire entendre en Allemagne, mais que les presses de France et d'Angleterre ont proclamee depuis long-tems. La commission inquisitoriale de Mayence n'a presque rien produit que des rapports aussi lourds qu'embrouilles, qui ont coute cent fois plus qu'ils ne valent. Le recueil de M. Paulus contient d'excellens articles sur les efforts du gouvernement des Pays" Bas pour rcpandre une instruction solide dans la nation, et pour affranchir I'education publique dc I'influence de I'ultra- montanisme , qui n'a rien neglige pour replonger la Belgique dans I'ignorance et le fanatisme d'ou elle avait ete tiree par le regime francais. En general, M. Paulus contribue, autant qu'il est permis de le faire dans un petit etat de la Confederation ger- manique, a defendre la cause de I'humanite et des lumieres contre les fanteurs des tenebres et du pouvoir absolu. Quoique ce recueil ne puisse jouir d'une grande liberie a I'egard des discussions sur les affaires de I'interieur de I'Allemagne, on y trouve pourtant quelques eclaircissemens sur I'etat religieux et sur la lutte entre le protestantisme et le catholicisme dans ce singulier amalgame de petits etats, soumis a la dictature de quelques grandes puissances. D — c. SUISSE. 3o. — * Melanges de chirurgie etrangere , par une Societe de chirui glens dc Genere. T. III. J/ierijsmes ; ligatures d'arteres,. Geneve, 1826; J.-J. Paschoud ; Paris, memc maison. In-8° de 11-582 p. Les auteurs dc ces melanges continuent avec zele et perse- verance leurs honorables travau.x : aux premiers volumes que nous avons deja fait connaitre (voy. Rev. Enc. , tom. xxvii, pag. 170), ils ajoutent aujourd'hui plusieurs memoires em- pruntes a la chirurgie anglaise sur les anevrysmes et les liga- tures d'arteres. La maniere de lier les arteres est encore une question parmi les praticiens ; les experiences raultipliees sur les animaux, les faits observes chez I'homme, quoique fort hombreux , n'ont point resolu ce probleme, un des plus impor- SUISSE. 1-7 tans tie la cbirurgie. Nous devons des remercimens k M. C/t.- Tli. M*uNoiR pour avoir fait passer dans notre langiie le traitc d'uu savant d'outre-nier , le docteur Jones, sur le travail de la nature pour la suppression de I'hemorrhagie dcs arteres divisecs et piquees , ct sur I' usage de la ligature. Dans cet excellent ouvrage, apres une foule d'experiences sur les animaux, pn'-- sentees dans I'ordre le plus methodique, les principales con- clusions que tire I'auteur sont : qu'une ligature bien Faite coupe les tuniques interne et moyenne, met en contact les surfaces blessees dont rinflamniation donne lien a un epanchement de lymphc et a leur adhesion complete; en sorte que le mecanisme de la cicatrisation des arteres est le meme que celui de toute autre partie. M. Jones recherche ensuite les causes des hcmor- rhagies secondaires, apres la ligature des arteres, et il signale comme les plus frequentes les ligatures peu serrees et celles que Ton nommc A'attente , qui, ne divisant pas les tuniques in- terne et moyenne, ne provoquent point d'inflammatiou adhe- sive, tandis qu'elles occasionent I'ulceration de la tunique externe. Outre un grand nombre d'observations d'anevrismes qui rendent ce volume fort interessant, on lira avec plaisir les observations de Benjamin Tbavers sur la ligature des arteres , ainsi que I'expose de la mctliocle du professeur Lawrence, qui consiste a lier les arteres avec des ligatures de sote tres-fine , et a en conper les extremites aussi pres du noeud qu'il est possible de le faire sans compromettre la securite de la ligature. Enfiu , M. Maunoir met sous les yeux du lecteur I'opinion de Philippe Crampton qui , contradictoirement a M. Jones , pense que I'obliteration dune artere pent bien se faire indepen- damraent de la rupture ou de la division des tuniques interne et moyenne, et que cette operation de la Hgature, loin d'etn- essentielle a la reunion , la fait frequemment nianquer. II nous est impossible de discuter les di verses opinions emises sui cet important sujet par les chirurgiens que nous venons de citer; nous nous contenterons de renvoycr a I'ouvrage meme, qui sera apprecie par tons les medecins instruits. Latour, d. m. 3i. — * Bilibald Pirhheimers Schweizerhrieg , etc. — La guerre des Suisses, de Bilibald Pirhheimer , et sa justification contre les calomnies de ses onnemis a Niuemberg; accompaguees de sa Biographie , et du Catalogue de ses ouvrages; par Ernest Munch. Bale, iti^.S; Schweighaeuser. In- 8° de 288 pages. Bilibald Pirrheimf.r fut nn t Vheterie , sur I'etat de la vaccine dans le duche de Savoie, par le docteur Gouvert ; 8° une Notice sur la recherche des monumens an- tiques en-Savoie, par le general Deloche; 9^" une Notice sur la vallee d'Aoste , par le metne. Eufin , cette collection est termi- nee par des observations critiques sur le systeme de Bailly, tou- chant I'origine des arts ct des sciences, par M. Raymond. B. 38. — * Influenza delle passioni siillo scibile luitano , etc. — In- fluence des passions sur les connaissances humaines, c'cst ;Vdire sur les lettres, les sciences et les arts, par /o.vcy;A Sanchez, coii- servaleur de la Bibliotheque royale de Naples. Naples, i8i3; Porcelli. In-8". Get ouvrage contient de longues discussions sur des points qui nc sent nullement en litige, et sur lesquels tout le monde est d'accord. L'auteur , non content de faire etalage de ses connaissances dans le texte, s'est montre encore prodigue d'e- rudition dans une foule de notes plus ou moins longues. A quoi bon tant de citations pom- prouver des maximes ou des vtrites fort simples et fort communes? Des lectures multiplioes i83 LIVRES ETRANOERS. ol dc la nic-moire, plutot qu'un sens droit et tin discernement judicieux paraissent avoir preside a la composition de cet ouvrafje. Nous en offrons pour prenve la division des connais- sanccs liuniaines adoplec par I'autcur. II les considere sous le triple rapport tie la meinoire , de la raison et de I'iniagination. II est etoiinant que Tautcur ait clioisi cette division, depuis que tant d'ideologues en ont deniontre les imperfections; et encore il n'en a pas tire le parii qu'en avaicnt su tirer D'Alem- bert et plusicurs autres. La distinction des sections, des livres , des chapitres n'est bonne a ricn , si les idees ne se tiennent entrc elles par des rapports neccssaires et evidens. Ces formes exterieures et ces subdivisions superflues sont bien loin d'im- primer Ic cachet d'ordre et de methode a des compilations qui n'en ont pas. Combien de clioses auraient du etre sacrifices, si I'autcur se fiit plus souvent demande : Quel rapport ont-eiles avec le sujet que je me suis propose de Iraiter? La table des chapitres, qu'on trouve a la fin de I'ouvrage , pent justifier a elle seule tout ce que nous venons d'avancer. Le style, qui depend surtoist de la nature des idees, se res- sent du meme desoidre. L'auteur, en general, affecte im ton d'eloqucnce , on plutot de rhetorique, qui ne convient point a ce genre d'ouvrages, ct qui serait a peine tolerable dans un discours de ces Academies qui veulent encore suivre I'esprit de la plupart de eelles du xvi^ siecle. Nous sommes d'autant plus surpris que l'auteur soit tombe dans ce genre d'imperfec- tions, qn'il les avait reconnues dans la plupart des livres mo- dernes. II dll quelque part (p. 33), « qu'ils sont ordinairement insipitlcs, ridicules, absurdes et remplis d'expressions trivialcs, d'observations vulgaires, de froides plaisanteries et de lieux communs insignifians; on n'y trouve que des idees vagues, equivoques, incertaines, etc. » Comment ne s'est-il pas mis en garde contre les defauts qu'il avait signales ? 39. — * Isloria civile del regno di Napoli , etc. — Histoire civile du royaume de Naples; par Pierre Giannone. Milan, i823- 182/,, etc. 1 3 vol. in-8°. II circulait deja plusienrs editions de ce grand ouvragc qui honore son auteur et le pays 011 il a vu le jour : mais presque toutes etaicnt peu soignees et plus ou moins incorrectes. Celle que nous annoncons a ete executee sous un gouvernement qui se fit iadis remarquer en protegeant Vinfortune Giannone , et qui n'a jamais cesse de reconnaitre I'importance de son ouvrage et de ses doctrines. Nous venons d'en recevoir quelques volumes. En Itke du pre- mier, s'offre le portrait fort resscmhiant de l'auteur. Mais, ce ITALIE. 189 qui interesse principalement, c'est la notice sur la vie de Gian- none , ecrite par Leonard Panzini. Cet ecrivain napolitain la publia, en 1 770 , lorsqu'il donna son edition dc VHistoire civile de Giannune ( Naples. 2 1 vol. in-S" ), a laquelle il fit qiielques cor- rections et des additions d'apres des' notes manuscrites de I'au- teur, tro^lvees a Geneve apres sa mort. Cette notice occupe la moitie du i^"" volume. Qiioique nn pen trop etendue, on la lit avec interet et profit. Elle donne, en effet, le recit le plus exact des travaux et des persecutions quecouta a I'iliustre Gian- nonela publication de son belouvrage, et un tableau affligeant, mais trop vrai, de son pays et de son siecle. Giannone fut tou- jours poursuivi par les partisans de la cour romaine, etsurtont par les jesuites, qui en ctaient comme les janissaires. lis ne ne- gligerent aucuue manoeuvre, aucune intrigue pour perdre ce defenseuf zele des droits de sa nation. Persecute par lesmoines qui I'accablerent de calomnies soit dans la cliaire, soit dans Icurs ecrits, et qui reussirent a exciter la populace de Naples contre cet apotre de la verite, il fut oblige d'abandonner sa famitle, ses amis, sa pali'ie, et de chercher un asile a Vienne, ou il trouva des juges plus justes et des protecteurs , parmi les- quels on comptait le celebre prince Eugene. Il obtint la faveur de Charles VI. La haine de ses ennemis le poursuivit jusque- la. Oblige de quitter Vienne, Giannone se rendit a Venise, ou il jouit d'un repos de pen de duree. 11 lui fallut encore quitter cette retraite et traverser incognito I'ltalie. II trouva enfin un refuge honorable a Geneve. Pendant qu'il s'occupait d'une edi- tion complete de ses oeuvrcs, et dc la continuation d'un nouvcl ouvrage, intitule 11 Chirrgno , un emissaire de ses enneriiis at- tendait le-iwomcmt favorable pour lesurprendre. Cet hypocrite, jouant le role de I'anii le plus tend re , I'engagea <\ le suivre chez lui daus un village peu eloigne de Geneve, et place sous la juri- diction du Piemont. Giannone donna dans le piege , et toniba entre les mains des satellites de I'inquisition Traine pendant douze ans de prison en prison, prive de la presence de son fils unique, de ses livres , de ses ecrits , la mort seule put le sous- traire aux effets dela haine de ses ennemis. Elle eutlieu en 1748. F. S. 4O. — * Fasti, disastri, sollevazioni e fazioni di guerra degl' Italiani. — Fastes, desastres, soulcvemcns et faits d'armes des Italiens, depuis 1789 jusqu'en i8i5, ou Histoire militairc de I'ltalie. — Les Italiens en Russie i Memoire d'un officier italien pour servir a I'Histoire de la Russie, de la Pologne et de I'ltalie en i8ia. T. I et II. Italic (Florence), 1826. In-8°, avec une carte, par M. Leonard Chouzko. L'ouvrage aura l\ volumes. lyo LivRES Strangers. Lv premier de ces litres semble annoncer riiUcntiou d'elever, pourritalio, un luonument scinblable a reliii c[iii a ^te consacrc aux amies francaises par les auteiirs de I'ouviage intitule : P^ic- toircs ct Conquctcs. Le second designe la partie de I'histoire mili- taire des Italiens qui se irouve traitee dans Ics deux \olumes que nous avons sous les yeux. On trouve, dans le premier: 1° Un resume de I'histoire et un tableau des mceurs et des usages des Russos ; 2° un abrege de I'histoire de Poiogne jus- qu'en 1812, ainsi qu'un apercu de la geographic de ce pays; ces inateriaux ont ete puisos a des sources precieuses ; 3" les tphemerides italiennes, depuis 1792 jusqu'en 1814, et il finit a la reunion des arniees francaises a Bieszenkowicze. Dans le second volume, I'auteur nous conduit jusqu'a la veille de la bataille de Borodino. Les deux autres volumes contiendront le reste de cette memorable campagne. L'histoire de la campagne de 1812 pent encore s'enrichir d'un grand nonibre de faits et de particularites que Ton ne connait pas encore. L'oflicier qui public aujourd'hui ses Me- moires s'est propose surtout de faire connaitre la part que prirent les troupes italiennes a cette celebre expedition. Conime il le dit dans sa preface, il ecrit en soldat, et non en litterateur : il a r^'uni tons ses souvenirs, traces siu- les lieux nicmes, tantot avec un charbon h la lueur dune ville en flammes, tantot sous une temperature de 28 degres de froid. Partout sa plume facile trace avec feu des recits animes qui portent le caractere de la verite; mais, en meme tems, beaucoup de details prouvent suf&samment que ce jeune et bouillant niilitaire, plein d'en- thousiasme et de patriotisme, n'est nullemcnt etranger a I'art mihtaire et a I'histoire contemporaine. Un bon nombre d'anec- dotes nouvelles, de reflexions judicieuses sur les causes et les effets des evenemens; I'impartialite dans les jugemens, donnent un veritable prix a cetouvrage, qui merite d'etre .traduit vn francais. L. (J. 41. — * Memorle tlegli scrittori e letterati Parmigiani , etc. — ■ Memoires des ecrivains et hommes de Icttres de Parme, par le P. Ireneo Affo , et continue par M. Ange Pezzana. Tonic \ I. Parme, i825; typographic ducale. In-Zi", avec le portrait de S. M. Marie-Louise , et celui dn P. Affb. M. Pezzana, qui a succede au P. Affo, dans la direction de la bibliotheque de Parme, ayant entrepris la continuation des Memoires biographiques conuiiences par cet ecrivain, debute par ce premier volume, ou il nous donne d'abord la vie de son predecesseur. On avait accuse le P. Affo d'etre souvent entre jdans des details trop etendus, et de s'etre parfois occn[)e d'ecri-' ITALIE. 191 vains pen riignes d'attention. II est difficile, i\ la verite, de garder iin juste milieu dans ce genre d'ecrits; et, tandis que (les biographes paraissent trop exacts a rapporter jusqu'aiix moindres circonstances , d'autres affectent une sorte d'econo- mie dc details qui est I'effet de leui' paresse et de le'ur ignorance. Nous esperons que M. Pezzana saura eviter ces deux ecueils. Cependant il s'est perniis quelques developpemens dans !a notice sur le P. Affo. La plupart des nombreux travaux iitle- raires de cet ecrivain meriteut sans doute noire attention. Affo a contribue beaucoup a repandre le goiit des lettres, et a in- troduire une critique jndieieuse dans les recherches histoti- ques; il s'est distingue par des travaux siir les antiquiles tie Guasta'.la. Ainsi que Muratori et d'autres ecrivans, il n'a jamais epargne les pretentions habituelles de la cour de Rome; il a fait preuve de la meme franchise, en signalant I'esprit de la cour de Charles-Quint, et en decrivant la tyrannic de Pierre- Louis Farnese, ducdeParme,et de quelques unsde ses ministres. Malheureusement, en sa qualite de moine, il n'oublia jamais les interets nionacaux. Mais, tout franciscain qu'il etait, il publia un oiivrage qui parait peu favorable au fondateur de son ordre. Non contens d'avoir mis Francois d'Assise dans le catalogue des saints, ses biographes en avaient fait aussi un des versificateurs de son tenis. Le P. Affo ht tons ses efforts pour le ehisser du Parnasse; ce qui, a dire vrai, n'etait pas difficile. Ces Memoires , continues par M. Pezzana, sont le meilleiu' ouvrage du P. Affo. RL Pezzana se fait remarquer par la correction de son style, dans le premier article dont nous venons de parler, et auquel il a joint une liste des ou- vrages de son predecesseur, enrichie dc notes bibliographiqnes fort exactes. Nous attendons avec impatience la suite de son travail. 42. — * Lezionl. inlorno le npere di scultura e d'oichitettiira avec des lecherches physiologiques relatives a ce parasite in- commode du corps humain. M. le D"^ Pierre Perione, jeune medecin , done de beaucoup d'intelligence et d'activite, qui publia, en 1824^ la *'' edition de sa traduction des Institu- tions pathologiques en langue latine, du professeur Fanzago ; auxquelles il ajouta un petit traite de semeiotique et de thera- peutique, vient de donner, dans uneserie d'articles, I'exposition des doctrines physiologiques, pathologiques, therapeutiques et medicates de differens medecins italiens distingues, qui, dans leurs ouvrages, se sont livres i\ des speculations theori- ques; tels que MM. Gcromiui , Rolando, Bufalini , Ainorctti , Gallini, Toinmasini , etc. II donne le resume de leurs opinions et de leurs doctrines; il les compare, les critique et les refute en partie , specialement en ce qui regarde la nouvelle doctrine ilalienne. La maniere absoiue dont M. Perrone presentc ses jugemens semble annoncer une trop grande confiance en lui- meme, et souvent ses critiques nous ont paru trop tranchantes. Du reste, les estimables redacteurs de \ Ohservate.ur medical , en soumettant a I'examen les differentes propositions de la theorie medicale de nos jours, ont eu une heureuse idee; ils pourront ramener et reunir les medecins sur la voie des faits, la seule qui puisse conduire i des doctrines solides et invariablcs. Les exemples de Gallilee et de Volta pour la physique; de Lavoisier, de Fourcroy, de Berthollet ct de Davy pour la chimie , de- vraient toujours etre presens a I'esprit des medecins qui se li- vrentaux raisonnemens plus qu'a I'observation et jll'cxperience. FOSSATI, D. M. PAYS-BAS. 46. — Dan. Wyttenbachii birds descriptio institutionum nir- taphy.ncorum , etc. — Elemens de mttaphysiquc; par D Wit- PAYS -B AS. 195 TENBACH, publics pouf la premiere fois par G. - L. Mahne. Gand, 1826; M.-A. Mahne. In-8° de x et 2o3 pages. Wyttenbach mentionne ces element dans sa Bibliothcque cri- tique. M. Mahne, qui a ecrit la vie de ce savant de maniere a prouver qu'il occuperait dignement sa place, a pense avec rai- son qu'on lirait avec interet un resume de I'ancienne metaphy- siqtie, ecrit avec toute I'elegance et la clarte que Ton admire dans les autres ouvrages de I'auteur. Wyttenbach avait eu le tort dejuger legeremeiit les nouvelles idees de Kant dont il avait neglige de s'instruire. Mais le livre que nous annoncons n'enest pas moins rempli d'idees saines et presente surtout un modele du style qu'il conviendrait d'empioyer en traitant des matieres philosophiqucs. De Reiffenberg. /(7. — * Rapport siir la methodc de M. J acotot , presente au departement de I'interieur le 8 septembrc 182C, par /. Kinrer professeur a TUniversile de Liege. Liege, 1826; veuve Desoer. In-8° de 16 p.; prix, 25 c. (Se vend au profit des nralades necessiteux dans les provinces de Groningue.) Le besoin pressant de reformer !e systenie actuel d'educa- tion se fait generalement sentir; ses defauts ont ete signales en Angleterre par le celebre . professeur de philosophic Dugald-Stewart , qui les a fait rcssortir avec toute I'autorite de son experience, et sans doute il n'a pas etc le seul dans ce pays qui ait ete frappe des graves inconveniens qui en resultent pour les peuples ainsi que pour les individus; Pestalozzi en Suisse, M. Jacotot en Belgique, M. Ordinaire en France probablement d'autres homnies encore egalement animes du desir de perfectionnement qui caracterise notre siecle, ont cherche a remplacer la routine des ecoles , par des procedes plus conformes a la marche naturelle de I'intelligence humaine. Deja Rousseau avait employe son eloquence entrainante a mettre au grand jour les vices des methodes traditionnelles alors en usage, et continuees encore de nos jours; mais emporte par la manie des paradoxes, il se jeta dans I'exces oppose a celui qu'il venait de combattre avec tant d'eclat : pour ne pas faire ce qu'il appelait une education babillarde ,\\ creait une espece de sauvage au sein de la societe. C'est qu'il etait parti de cette idee fausse, que I'etat naturel a I'homme n'est pas I'etat social. Depuis la publication de X Emile , les hommes laborieux que nous venons de nonimer ont tente avec succes de ramenei- I'art de renseignement a I'esprit d'analyse et d'observation qui des sciences physiques, doit finir par passer dans toutes les autres parties des connaissances humaines : iis ont tous re- connu que c'etait surtout I'activite de la pensee qu'il fallait J 3. igS LIVRES ETR ANGERS. exciter chez les jeunes gens; car, iiiie fois conlractee, I'liabi- tude do rcflt'cliir ne se perd pins. Leui' but coinmun a done et<- de tenir constammcnt I'attention en eveil , d'inleresser les eleves aux objets qu'on presente a Icms meditations, de Icur inculqiier le gout dcs recherches , et menie de cultiver ieur faculte d'in- vention , qui n'est que cctte nieme disposition portee a nn tres- Ijaut degie. L'on ne sait jamais bien , en effet, que ce que Ton a appris par ses pro]ires reflexions. M. Ordinaire, appliquant I'analyse a I'etudc des langues niortes, a obtenu des succes non contestes dans rinstitution Morin ; et, chaque annee, a I'epoque des examens, I'Universite clle-meme, qui ne doit certes pas etre taxee de partialite en favenr des innovations, rend ])ubliqucment liommage aux re- sullats heureux do sa methode. Voici, a pen pres, en quoi elle consiste : on met un livro latin , d'abord le moins difficile a lire, entre les mains des eleves : avant de le Ieur faire traduire, on Ieur apprend la signification de tous les mots qu'il contient; apres Ieur avoir indiqiio les divcrses modifications que ces mots pcuvent epi'ouver, leurs differentes desinences, et les Ieur avoir fait apprendre par cceur, au moyen d'un tableau figiudtif, on passe a la decomposition grammaticale de la suite des jihrases sans Ieur donner d'avanco de regies theoriques; et, conimo un grand noinbre d'entie elles sont soimiises aux memes formes, cc travail est beaucoiqj moins long qu'on ne pourrait le penser au premier coiqi-d'oeil. On Ieur confie ensnite un nouveau livre (ou se trouvenl necessairemcnt contcnus la plupart des mots deja consideres) sm- lequel on effectue les memos operations : ainsi de suite. Cetle niarche expeditive est deja snivie par plusieurs maitres dans renscigncment dcs langues vivantes. Cost ainsi qu'a I'aide d'lm excrcice coniinuel on appiend simultanement , et les termes qui formcnt le fond de toute langue, et les regies qui doivent presider a Ieur combinaison. Par I'usage qu'ont les eleves d'apercevoir d'eux-memes les analogies, les subtilites de la grammaire ne peuvent plus lour ofliir aucune difficult^. " La veritable logique, ou I'art d'acquerir des connaissances €t de les comnniniquer aux autres, a dit D'Alembert, consiste a ranger les idecs dans I'ordre le plus naturel, a en former la chaine la plus immediate, a decomposer cellos qui en renfer- ment un trop grand nombre fie simples, a les envisager sons toutes lours faces, et enfin a les presenter aux autres sous urn- forme qui la lour rende facile a saisir. » T^ls etaiont aussi les principes qui diiigeaient Pestalozzi dans son enseignement : il cherchait a passer du connu a I'inconnu par une gradation lente et bien menagee; il s'eievnit dcs plus simples elemens de PAYS-BAS. ,y7 iios connaissancfS ii Icuis piincipes les plus abstraits; et il ii'cst ])eiU-etre pas de science on d'art doiit les propositions et les I'cgles ne pnissent etre reduites a des notions simples, disposees entre elles dans un ordre si Inmineux que la chaine ne se tronve nulle part interrompiie. Nous avons rappele les methodes de MM. Ordinaire et Pes- talozzi, parce qu'il nous a senible, autant qu'on pent en juger dans I'expose tres-succinct dn rapporteur, qu'elles ont line i;rande analogic avcc Venseignement universel, ou VenscigneniPric lie soi-meme , ainsi que rappolie M. Kinker, dont toutes les rcniarques annoncent un esprit judicieux et observateur. II reconnait, coinme nous, les nonibreux points de contact de ce nouveau systepic avec celui du philosophe Suisse. Quant aux rapports frappans qu'il nous paralt avoir pour Tetude des lan- giics avec la niarclie suivie par le professeur francais, s'il n'en parle pas , c'est que ces nouveaux procedes lui etaient sans doutt; inconnus. L'eiiscignemcnt unh>ersel a cela de particulier que le maitre y est moins instituteur que compagnon de voyage dans la route suivie par I'eleve : il ne fait qu'attirer I'attention de celui-ci sur les divers objets qui doivent I'occuper, en luilaissant le soin de les observer sous toutes leurs faces par des compo- sitions et decompositions continuelles : operations qui donnent a cette methode un caractere a la fois analytique et synthetique qn'elle ne partage avec aucune autre. C'est bien la le moyen de former les jeunes gens au veritable esprit philosophique qui a fait faire dans ces derniers terns de si grands progies aux sciences physiques et mathematiques. M. Kinker parle des succes merveilleux obtenus par M. Ja- cotot et par ses imitateurs, et qui semblent quelquefois, dit-il , tenir du prodige. C'est dans les pensions de M. de Schuiffer et de M^'" Marcelis, a Louvain, de M. de Facqs a Bruxelles, de RI. de Sceprez a Anvers, et enlin, a Namur, aupres uu capitaine Bouhtay, charge d'enseigner le hollandais a des soldats vallons, qu'il a pu les observer. Ces biillans produits de I'enseignement universel ne I'ont cependant pas ebloui au point de ne pas etre frappe deses defauts. Dans les institutions humaines, il faut toujours faire la part de I'imperfection. II lui rcprochc done de viser trop aux resultats rapides, et ce reproche doit etre fonde;. car il est bien difticile de croire qu'on puisse acquerir I'habitude de I'observation en aiissi pen de terns. La reflexion est une faculte qui ne s'improvise pas. 11 faut encore, pour I'appliquer avec fruit, des niaitres qui, a des connaissances, profondes reu- nissent, comme M. lacotot, un zele ardent, une patience a iqS MVRES Etil/VNGER.S. toule epieiive et I'art si piecicux dc captivor I'iiiteret dcs elevesj tels cnfin qu'on en lencontrc rarement. M. Kinker propose an gonvcrnement , qui i'avait charge d'indiqner los applications (ju'on ponrrait en faire aux diverscs parties do I'instrnction publiqne, d'eriger un i/istitut norninl dans le but de former des maitres, et destine en meme terns u servir d't'cole ponr de jeunes elcves. Le soin d'exaniinor et d'apprecier la methode d'c/iseigncment universal liii avail ete confie d'apres Ic voeu expres du roi des Pays - Bas : cc qui raontre combien ce monarque est jaloux de repandre les liuiiieres et de propager tons les bienfaits qui en derivent. Au. GoNniNET. 48. — Frijnioedige Gedachten over Necr lands Indie, etc. — Observations sur les possessions des Pays-Bas dans I'lnde, et sur radministration du gouverneur- general- Fan dcr Capellen , par J.-E. DooRNiR , D''. M. Amsterdam, 1826. In-8" dc xvi et !?i6 pages. On sait que M. Van der Capellen, qui, depuis I'annee 1816, a administre les possessions hollandaises dans I'lnde, est revcnu dans sa patrie vers le milieu dc Tannee 1826. C'cst contre'son administration que M. Doornik, qui, a ce qu'on dit, n'a pas trouve aupres du gouverncur-general tout I'accueil qu'il desi- rait, s'est permis de publier cette critique, qui nous parait dictee plutot par la malveillance que par I'amour de la verite. Ce que M. Doornik affirmc , page ii , que les habitans des colo- nies doivent jouir des niemes lois et de la meme liberie que les citoyens des metropoles, est une theorie fort belle, mais peut- etre impossible a mettre en pratique. J'avoue que le systeme suivi par les peuples de rF-urope a I'egard de leurs colonies n'est pas trop liberal; mais enfin il existait, et ce n'est pas M. Van der Capellen qu'on pent accuser d'cn etre I'auteur. M. le doctetir accumule les observations pele-mele et sans ordre comme elles semblent se piesenter a son esprit. Souvent il prend le ton de legislateur, en nous disant ce qui devrait etre statue par les lois. Je suis d'accord avec lui, iorsqu'il dit (page 75) que I'esprit du siecle s'oppose a I'etablissement de societes exclusivcs de commerce; mais notre gouvernement ne reconnait-il pas cette verite, en ue concedant aucun privilege exclusif a notre societe de commerce nouvellement etablie ? L'auteur se trompe, en la nommant ( p. -9 et 1 1 7 ), une societe exclusive. Les principes de la liberie des colonies soul etablis ( p. 107 et suiv. ). C'est surtout la culture obligee du cafe et la necessitc de le vendre pour un prix fixe par le gouvernement , que l'auteur desapprouve (p. 1 46 et suiv. ). Les reflexions sur (»•! PAYS-BAS. 1 ,j le systemc tie colonisation (p. 1 60 et suiv. ) sont fort bonnes ; uinis doit-on attribuer tons les inconveniens de ce systeme an sei.l goiivcrneur, Van der Capellen, conime le fait Tautenr ? L'etat des choses etait tel, et M. Van der Capellen ne pouvait ni ne devait le bouleverser. II est vrai qu'il a ose refuser I'exe- cution d'un decret royal (p. 1 87-191 ); mais il croyait la reli- gion du roi surprise, et cerlainement on n'avait pas fait atten- tion a toutes les consequences que pouvait amener I'execiition de ce decret, lorsqu'on I'avait adopte dans la niere-patrie. C'cst surtout le decret du gouvernement de I'lnde, du 6 niai 1823, que I'auteur attaque (p. 196 et suiv.). En attendant, c'est a tort qu'il en appelle a la loi fondamentale des Pays-Bas (p. 21 5). Ses colonies ne sont pas regies par cette loi. La derniere partie de I'ouvrage traite de I'administration des finances, sous M. Van der Capellen i p. 220 ct suiv. }. On ne saurait nier que I'administration dans I'lnde n'ait ete trop couteuse , et que les conditions auxquelles on a du sc procuier les fonds necessaires pour subvenir aux depenses etaient ruineuses. Peut-etre aurait-on du arreter plus tot le mal. Mais , quand il etait parvenu une fois a un tel degre, il 6tait bien difficile d'en enipecher les funestes effets. — L'ouvrage de M. DooRNiK, quoique fort pen impartial, contient pourtant un grand nombre de donnees qui pourront servir aunejusle appreciation du systeme d'administration suivi jusqu'ici dans les Indes hollandaises. Mais I'auteur aurait pu reduire de moitie le nombre des pages, sans rien retrancher d'essenliel. /»9. — Zets over de Vaart op den Ryn. — Sur la navigation du Rhin; par M. Op den Hooff, avocat. Amsterdam, 1826; lieri- tiers Gartman. In-8° de 117 pages. 5o. - — Editc stukJicn hetrcffende de Vaart op den Ryn. — Documcns authentiques relatifs a la navigation du Rhin; par M. L. Elix. Amsterdam, 1826; freres Diederichs. In-8" de XL et 69 pages. Il est de notoriete publique que la commission qui a ete etablie a Mayence pour regler les affaires de la navigation du Rhin, et pour veiller a I'execution de la convention Av. congres de Vienne relative a cet objet , n'a point reussi a surmonter jusqu'a present les obstacles provenant des pretentions de plu- sieurs etats riverains, nommement de la Prusse et des Pays-Bas. Les journanx ont public, il y a quelque tems, deux pieces diplomatiques fort interessantes sur ce sujet. L'une etait une note ecrite par M. le comte de Mier, qui contenait une espece d'acted'accusation dresse par le gouvernement autrichiencontre celui des Pays-Bas. L'autre etait la reponse du ministre des aoo LIVRES tXRAlMGERS. affaires etrangercs des Pays Bas ( M. Verstolk van Soelen }, a ces inculpations ( voy. Rt'i'. Enc. , t. xxxi, p. A^i). Les deux ocrits que nous annoncons sont publics dans Ic seul but d'eclairer le public snr cctte matierc. Cc ne sont pas des mcmoires ecrits pour soulenir les droits du gouvernement beige. Quoique les deux auteurs, apres Texposc des faits, arri- vent a la nieine conclusion, c'est-a-dirc , que le sens de I'articlc f)reniier du reijlement snr la navigation du Rliin, signe i\ Vienne e 24 niars 181 5, portant : La navigation dans tout le cours du Rltin , du point oil il dei'ient navigable jasqu'ii la mer , soit en descendant , soit en remontant , sera entieremcnt litre , n'est pas tel que le gouvernement des Pays-Bas soit oblige de permettre aux navires alleniands de traverser son territoire sous les me- mes conditions que les navires beiges; les parties contractantes n'ont eu d'antre but, en adoptant cet article, que de faire lever les droits si nuisibles de reldche et di'echeUe qui existent encore a Cologne, a Mayence , etc. L'ouvrage de M. Op den Hooff est deja traduit en francais , et public par le meme libraire; il va paraitre aussi, en allemand, h. Mayence. La note de M. Verstolk Van Scelen y est ajoutee p. 1 18-148. L'arrete de S. M. le roi des Pays-Bas, da 10 septembre 1826, sur la navigation du Rhin, est posterieure aux deux ouvrages annonces. On espere que les autres etats riverains y repon- dront par des mesures analogues , aQn qu'on puisse definitive- nient level" tons les obstacles qui, pendant prcs de dix annees , oat rctarde I'execution des dispositions du congres de Vienne en faveur de la liberie du commerce et de la navigation des nations. X. 5i. — * Hollands Roeni in Kunstenen JFetenschappen. — La gloire de la Hollande dans les arts et dans les sciences; par Henri^YAVOw Collot d'Escury. Amsterdam, 1826; Van Cleef freres. La Hollande qui, vu son pen d'etendue compare a plusieurs etats limitrophes, a produit iin nombre etonnant de grands hommes dans tons les genres, occupe sous le rapport du culte des sciences et des arts ime plac^ distinguee panni les peuples civilises. Ses philosophes, sesjurisconsultes, ses litterateurs, ses -peinties, sont connus en Europe; ses historiens, ses orateurs, ses poetes meritent de I'etre. M. d'Escury a concu I'idee emi- nemment patriotique de reunir dans un grand tableau tant de genies difl-erens, et ses laborieiises recherches hii ont I'ait decouvrir des titres de gloirc (pii etaient jusqu'a present indi- gnement ensevclis dans I'oubli. Le troisieme volimie de cet im- portant ouvrage vient de paraitre. L'auteur y a place deux PAYS-BAS. 201 dissertations sur la langue hollandaise et sur Ics travaux des hoUandais dans la litteiature orientale. Ces deux traites sont suivis d'lin grand nombre de notes explicalives, rent'erniant una infinite de details curieiix. M. d'Esciiry, connu dans la Hollande litteraire et politique, eleve, par ce travail penible , dent on desire vivement la continuation, un monument dura- ble a sa patrie; il a droit a sa reconnaissance. Son livi'e sera uu temoignage honorable de son vaste savoir, de son beau talent, de son genereux patriotisme. G. 52. — * liudinicnta linguce hebrnicce , etc. — Rudimens de la langue hebraique a I'usage des cleves dii college philosophiqiic; par G. - /. Bekker.- Louvain,' 1826 ; Von Linthout et Van den Zande. In-8° de vj et 168 pages. Bomberg, imprimeur beige, inort a Venise en i549, y de- pensa plus de trois millions pour la publication de diverses bibles en hebreu , du Talmud et de la Concmdnrice du rabbin Isaac Nathan. Quand Wesselus de Groningue alia a Rome, il ne demanda pour loute faveur au pape Nicolas V , qui voulait le retenir, que la permission d'emporter dans son pays quelques manuscrits hebreux du Vatican. Cleynarts, qui avail sur I'en- seignement des langues des idees si originales, simplifia I'ensei- gnement de I'hebreu; enfin, ce fut a Anvers que parut le Folyglatte d'Arius Montanus. L'intention du gouvernement des Pays-Bas est de ranimer dans ce pays I'etude des lettres sacrees: file devait necessairement avoir entree au college philosophi- que. M. Bekker, qui y professe avec distinction, vient derediger pour ses eleves une grammaire plus claire, plus methodique encore que celle de Cellerier. Ello est terminee par un choix de morceaux de I'ancien Testament, avec des explications gram- maticales en notes et un glossaire assez etendu. De R. Ouvragcs periodirjues. 53. — * Bibliotheqite des institutcurs , journal de I'instruction moyenne et primaire dans les provinces wallones. Mons, 1826; imprimerie de H. J. Hoyois, rue des Fripiers , n° 24. — Ce journal parait a la fin de chaque mois , par cahiers de 2 a '^ feuilles d'imprcssion ; prix de I'abonnement, 2 tl. 5o c. par annee, a Mons; 5o c. de plus, par la poste. Aussi long-tems que notre langue sera parlee, ecrite et im- primee par \\\w partic de nos voisins neerlandais , nous regar- derons leurs journaux comme appartcnant a notre litterature : et si enfin ce nouvel etat parvient a rcndre exclusif sur sou territoire I'usage de I'idiome qui lui est propre , uous cherchc- ao2 LIVRES KTRATNGERS — LIVRES FRANCAIS. rons encore tic rinstruction dans ces journaiix, avec la certi- tude d'en ti'ouver ; la Bibliotlieijue dcs institutcurs est du nonibre de ceu\ que nous consulterons; on y trouve des ma- teriaux dont I'utilite n'est point locale, et que Ton peut em- ployer partout avec succes : on y observe Taction du gouver- nenient sur I'instruction populaire , et Ton voit avec satisfaction qu'il aime niieux gouverner par les lumieres que par les inoines. Les methodes d'enseignement et les ouvruges destines aux ecoles sont apprecies avec discernement; en parcourant toutes les livraisons de cc recueil, on y remarque partout un choix judicieux et une droiture d'intention qui inspirent la confiance. Ce journal durcra , et, ce qui vaut encore mieux, il fera du bien J. LIVRES FRANCAIS. Sciences physiques et naturelles. 54. — * Manuel (I'liistoirc naturelle, comprenant les trois rc- gnes de la nature, ou genera ooniplet des animaux, des vege- taux et des mineraux; par M. Boitard. Paris, 1827; Roret. a vol. in-i8 formant 872 pages; prix, 7 fr. L'auteur de ce manuel ne va point au-dela de son titre, mais il le reniplit. On doit s'attendre que I'liistoire naturelle y est reduite a ce qu'exigent les besoins de Tetude, aux me- thodes de la science; on n'y trouvera done rien pour la siinple curiosite. Les moyens d'etude qu'il renferme ne sont pas com- plets , sans doute , puisqu'il ne suffit pas d'assigner les caracteres generiques, qu'il i'aut descendre jusqu'aux especes, distinguer les varietes, en un mot, terminer la description. Et encore, la tache de naturaliste nc finit point la : il reste, de plus, a considerer le gisement ou I'habitation, la maniere de vivre, les moeurs, etc. : vient ensuite I'etiide des grands phenomenes de la nature, et apres la connaissance des objets isoles, celle de Tensemble qui les reunit, et des lois generales. Le travail tres-utile de M. Boitard ouvre I'entree d'une carriere im- mense, oil I'observateur n'est jamais oisif, ou son attention provoquee de toutes parts ne pourrait suffire a la diversite et a la complication des objets, si les methodes ne venaient point a son secours. II est done a desirer que les jeuncs gens qui veulent .se livrer a I'elude de I'histoire naturelle suivent la di- rection qui leur est tracee par cet ouvrage. F. 55. — * Botanngrapliie elenientaire , ou Principos de bota- liique , d'anatomie et de physiologic vegelales ; par M. Them. SCIENCES PHYSIQUES. 2o3 Lestiboudois , D. M. , professeur de botani'quc a Lille. Lille > 1826; Paris, Roret. Grand in-8" de pres de 600 pages; X , 7 fr. Parmi les principes elementaires dune science , il en est *^Oujours quelques-uns qui rcposent siir des fails dejii connus "es personnes les plus etrangeres a cette science. Les autres , qui sont en general d'autant plus nombreux que la science a fait plus de progres , reposent sur des faits nouveaux pour le cominencant , el dont celui-ci doit uecessairement acquerir la connaissance , s'il veut bien saisir les principes auxquels ces faits servent debase. Quereste-t-il d'ailleursdans la tete de I'eleve qui n'a lu qu'nne foiy un de nos livres elementaires, ou qui n'a suivi qu'un seul coins ? D'abord , le souvenir des principes qui reposent sur les faits qu'il connaissait ; puis, I'acquisition d'un petit nombre de faits nouveaux que I'auteui- ou le professeur n'a pu se dispenser d'exposer pour eviter de trop ennnyer le lecteur ou I'auditoire. Quant aux autres principes-, il fandra, ou bien qu'il les apprenne par coeur, ce qui est toujours nui- sible , ou bien qu'il les regarde comme non avenus, jusqu'a ce qu'il connaisse les faits dont ils decoulent. Cela pose , volci le plan sur lequel nous pensons que devraient etre faits tons les livres elementaires : 1° Exposer les principes qui decoulent des faits qu'on pourrait appeler vulgaires; 2° decrire et demontrer quelques faits nouveaux qui vont servir de base a d'autres prin- cipes ; 3° suivre dans ces descriptions nn ordre tel que les prin- cipes qui ont le plus de rapport avec les principes et les faits deja connus soient developpes les premiers ; 4" termiuei; par I'expose des faits encore peu nombreux on pen connus sur lesquels on n'a pu elablir (\\ie des principes hypolhetiques. Ce n'est point d'apres ce plan qu'a etc fait I'oiivrage que nous annoncons. Cependant nous le regardons comrae nn des meillenrs livres elementaires sur la botanique. Il se compose : 1° D'un discours preliniinaire, rempli de hautes considerations philosophiques sur la science unique , dont toutes les connais- sances humaines ne sont que des divisions et des subdivisions; 2" de generalites sur I'liistoire naturelle , qui condnisent I'au- teur a exposer le plan de sa Bntanograplde , expression mal sonnaiite, a laquelle nous prefererions le mot phytologie; 3" d'une premiere parlie qui , sous le nom d'orgauo/ogie , presente la definition des organes des plantes et de leurs principales modi- fications , ainsi que I'anaromie et la physiologic de ces organes; l^° d'une secondc partie , la phytographie , dans laquelle I'auteur enseignc a bien decriie les plantes , au moyen dun tableau fondamental des descriptions; 5" enfin , d'une troisieme et der- io.\ LIVRES FRANCAIS. nii'i'e parlie, la iaxonomie , ou se troiivciit exposes les svs- tenies ou nu'thodes de cl.issiiication les ))lus conniis , tels que Ic systenii" do Linne, la melhode de Jussieii, la Mctltode clas- iif/iic et unnlytkjKe de la botanographie beige. L'oiivrage est termine par un expose des caiacteres des lamilles natuielles. M. Themis. Lcstiboudois estfds et petit-fils de naluralistes eele- l)ies , qui tons deux out professe la botaniquc. 11 professe lui- ineiiie cette science a Lille avec beaiuoup de distinction, et son livio nous parait nieriter Ic succes qu'd a deja obtenu. 56. — * Annuaire da jardinier ct de I'agronome , pour 1H27, renfermant la description et la culture dc toutes les planUs utiles ou d'agrement qui ont paru pour la premiere fois en 1826 ; contcnant en outre , niois par niois , I'Jrt dc conduire les Sevres , Ic moment et la maniere de scmcr ou de planter tons les vegetaux , de diriger les couches, d'dbtenir des priuieurs , de tailler, ebourgeonner, etc. : suivi d'une Nomenclature de tons les fruits ., d'nne Liste d'arbres et arbustes d'ornenient , tant de pleine terre que d'orangeric , dans I'ordre de leur floraison; eniin , d'un Annuaire du cultivateur, contcnant aussi , niois par niois, tons les travaux appartenant a la grande culture; par un jardinier agronome. Pai'is, 1827. Roret. In-18 de 200 pages; prix , 1 fr. 5o c. Dans ce petit livre dont nous avons annoncc les editions precedentes avec les eloges qu'elles nieritaient , et que colle-ci continue a meritcr, on remarqucra la riche nomenclature des plantes dont les jardins ont fait I'acquisition , en 182C : on en compte plus de 200 especes ou varietes. Si le tribut annuel de I'industrie jardiniere est toujours aussi productif, on epron- vera I'cmbarras des richesses , il faudra se bornt'r, et faire un - clioix; heureuse necessite dont on ne se plaindra point, et qui n'attirera point de rc]iroches a ceux qui I'auront imposee. Les ouvrages tels que celui-ci ne sont pas seulement utiles aux cultivateurs ; on les lit sans avoir un jardin a cultiver, par I'attrait des nouveautes qu'ils annoncent , et des reilexions que fait naitre I'apparitiou de ccs phenonienes vegetaux. L'histoire naturelie vient ici au secours de I'hofticulture; et , nialgre les efforts de la faction obscurante , cette science ne perd auciui de scs amis , ct dc jour en jour die en acquiert de nou- veaux. 57. — * Le bon Jardinier j-nur I'annee 1827, coutenant les jirincipes generaux de la culture ; Tindication , mois par iiiois , des travaux a faire dans les jardins; la description, I'histoiie et la culture de toutes les plantes economiques , potagercs ou SCIENCES PHYSIQUES. ao5 employees dans les arts ; de cellcs propres aiix fourrages ; des oi^nons et plantes a fleurs; des aibres , arbrisseaux et arbustes utiles ou d'agrement, disposes selon la methode da jardin du Roi , et suivis d'un vocabulairc des ternies de jardinage et do botanir/iie ; diuxi jardin dc plantes inedicinales ; d'lin tableau des vegetaux , groupes d'apres la place qa'ils doivent occuper dans les parterres , bosquets, etc. : precede d'une revue de toiU ce qui aparu de noiweaa en jardinage pendant I'annee 1 826 : 28^ edition; j>ar A. PoiTEAU, redacteiir principal , ancien jardinicr en chef des pepinieres royales de Versailles, etc. , et Vilmortn, dc la ■Societe royale d' agriculture , etc. ; dedie et presente ;\ S. A. R. Madame, duchesse de Berry. Paris, 1827; Audot , rue des Macons-Sorbonne, n° 11. In-i 2 de 960 pages , avec 3 planches gravees; prix, 7 fr., et 9 fr. aS c. par la poste. Cet almanach n'est pas iinf- nouvellc connaissance , ni pour le public , ni pour notre Revue : nous n'avons done pas besoin de le recomniander aux jardiniers, ni aux simples amateurs de jardinage. D'ailleurs , le nom des redacteurs serait une assez puissante recommandation , meme pour une premiere publica- tion. La Revue horticole , qui sert d'introduction a cet almanach, ou, pour niieux dire, -a cet ouvrage , pouvait etre nommee revue jardiniere , et le mot horticulture n'est pas plus clair ni plus precis que eelui die jardinage. Nous avons deja eu I'occa- sion de faire cette remarque , et nous ne craignons pas de la renouveler. Taut que les langues ne fourniront pas elles- memes les mots dont elles sentent le l)csoin , tant qu'elles em- prunteront ce qu'elles auraient pu tirer de leur prdpre fonds , elles ne cesseront point d'etre panvres , malgre raccumulation de richesses etrangeres qu'elles croiront avoir acquises. Mais revenons au Bon jardinicr. La Revue horticole de 1826 est fort interessante , et pour les progres de I'art qui s'est enrichi d'un grand nombre d'instrumens nouveaux , et pour I'ornement des jardins ou le luxe des tables. On y remarquera spccialement line classification des varietes de dahlia, au nombre de ii5, divisees en 1 1 sections caracterisees par la conleur de la fleur. Le prospectus d'un ouvrage intitule : Encyclopedic, ou Cours complet de jardinage , termine cette revue. Cette collection de traites qui pourront etre separes , mais que les ledacteius dis- poseront pour qu'ils formcnt un tout dont les parties soient bien iices ; sera divise en six livraisons : 1° Du jardinicr ; %° I'ad ministration d'nnjardin ; 3° elemens de geometric , indis- pensables a im jardinicr; 4" des outils, et ustensiles; .'»'' prin- cipes de la fabrication des outils ; 6" des ustensiles que les jar- diniers ou ram-:iteur pourraient fabriquer eux-memes. On 2o6 LIVRES FRANCAIS. 1 joindra a ces traites VArt du inaraicher, ouvrajje entieremcnt neuf, et le Traitc des prairies artificiclles , des pares et des jar- dins , par M. Yvart. 58. — * Historique dc la creation d'une richesse millionnaire par la culture des pins, on application da traite pratique dc ccttc culture , publie en 1826, ct conseils aux heritiers de I'auteur de cette creation, pour Vutiliser dans tous ses arantages; par L.-G. De- LAMARRE , propric'tairc - cultivateur foi-tjstier. Paris, 1827; M^^Huzard, rue dc I'Epcron, n° 7. In-S" de 3o4 pages, avcc 3 planches; pri.v, 6 fr. , et 7 fr. par la poste. Le titre de cet ouvrage pent tenir lieu de preface; lelecteur est suffisamment prepare , il ne sera point distrait. Cependant , pour captiver encore mieux I'attention qu'on ne lui eut point refusee, I'auteur debute par des observations prelim inaires d'un tres-grand interct, exprimees avec le ton de franchise qui eta- blit sur-le-champ une sorte d'intiniite entre I'ecrivain et son lecteur. M. Delamarre entre dans tous les details qui peuvent instruire le cultivateur et eclairer ses speculations; il decrit son domaine, non pas sommairement, mais par divisions; il expose les travaux qu'il a fait executer, I'epoque et la nature dc ses plantations, les procedes qu'il a suivis, les residtats obtenus, I'etat actuel de ses cultures. II ouvre ses registres , et consent volontiers a dire plus qu'il ne faut pour etre bien compris et pour convaincrc , afin d'etre assure qu'il n'aura rien omis de ' ce qui pouvait etre utile. M. Delamarre a divise son ouvrage en deux parties : la pre- miere est I'exposition de ce qu'il a fait dans son domaine, et des succes de ses plantations; la seconde pourvoit a I'avcnir; r I'auteur s'adrcsse a ses heritiers, et leur transmet les Iccons | d'une experience dont les heureuses applications seront sous 1 leurs yeux. Ses heritiers, il les choisit par des motifs qu'il ex- | plique, et auxquels les hommes de bien applaudiront : apres | avoir rempli avec ime scrupuleuse dclicatesse les convenances i des relations de famille ( M. Delamarre n'a |)oint d'epouse, ni i d'enfans, point de freres on de soeurs, ni de nevcux on de ! nieces ), apres avoir legue a I'amitie et a I'estimc des temoigna- ' ges de son attachement, il dis|)ose de ses plantations en faveur de la Societe ccntrale d' agriculture , et regie I'emploi qu'elle doit en faire. Cette partie de son ouvrage n'est pas moins re- marquable par une noble simplicite de style que par les choses (ju'elle contient; ce n'est qu'au sage qu'il est reserve d'ecrire ainsi, quelque sujet qu'il traite. Nous aurons I'occasion de re- venir sur cet ouvrage , si digne d'etre connu de toutes les classes de lecteurs. F. SCIENCES PHYSIQUES. 207 59. — * Monographic du cacao, ou Manuel do I'aniateur do chocolat ; par A. Gallais , ex-pharniacien. Paris, 1827; Dc- baiive et Gallais , rue des Saints-Peres, n° a6. In-8° de 216 pages d'impression ; prix , 4 fi- C'est un des caracteres distinctifs de notre epoque , que cette passion qui nous porte tous a nous rendre un compte exact do nos jouissanccs , comme de nos peines , et ce n'est pas sans raison que notre age a ete nomme le slecle de t analyse. M. Gallais avoue , dans Vavertissemcnt place en tete de I'ou- vrage que nous annoncons , que tel a ete le principal motif qui I'a porte a prendre la plume pour ecrire riii-stoirc du ca- caoyer , et retracer les regies que Ton doit suivre dans la fabri- cation du chocolat, et dans la preparation de cette savoii- reuse et agreable substance. Deux parties bien distinctes com- posent done la nwnographie du cacao : la partie savante et la partie gastronomique. C'est dire assez que I'homme du monde, comme le naturaliste et le negociant, trouveront plaisir et in- struction dans cet ouvrage. Les derniers, en effet , puiseront dans les rccherches de M. Gallais d'utiles notions sur le ca- caoyer' ct sur sa graine; sxu- les contrees 011 il croit, siir la maniere de le cultiver et d'en recolter les fruits ; sur les ca- racteres comnierciaux dos differentes especes de cacao, etc. L'amateur de chocolat, a son tour, y apprendra la maniere de le bien preparer, les proprietes qui le caracterisent, et meme I'histoire de son introduction en Europe et en France. M. Gal- lais aurait pu donner plus d'etendue a cette derniere partie de son sujet ; et pour cela il lui aurait suffi de consulter quelques pages fort interessantes de Lcgrand d' Aussy , dans son His- toire de la vie privee des Francais yX.. iii, p. 102-108). M. Gal- lais fait remonter I'usage du chocolat en France an mariage d'Anne d'Autriche , fille de Philippe III , et non de Philippe II, avec Louis XIII. Ce mariage eut lieu, en i6i5, et ce n'est qu'en 1661, epoque ou Marie-Therose d'Autriche vint epousir Louis XIV, que Legrand d'Aussy place I'introduction du cho- colat a la cour dc France. II fut d'abord considere comme remede medical, et son usage etait si peu repandu, qu'a. en croire les Mcmoircs de la ducliesse de Montpensier, la reine se cachait ^owY pi'endre son chocolat. Le aS mars 1684 , un me- decin de Paris , nomme Bachot , fit soutcnir aux ecoles de la faculte , pendant sa presidence , une these oil il avancait que le chocolat hien fait est une invention si noble , qu'il devrait etre la nourriture des dieux , plutot que le nectar ct I'ambroisie. Sans mettre autant d'exageration dans notre jugement , nous nous contenterons de regarder le chocolat comme une substance ao8 LIVRES FRANC^VLS. aussi agr<'able an ])alais (|ue favorable a la santt-. II doiine clii Ion ot do la force a rostoiiiac fatigiu'-, et le gourmet y trouve I'avantai^o dun nicts tout a la fois dtlicat et nutrilif. L'aulcur du Manuel de I'amatcur do chocolat , associe de M. Debauve, qui a etendu les limites de son art, et s'est fait unc belle reputation dans le monde medical ot gaslronomiquo, etait plus qu'aucun autre a memo d'ecrire sur cet interossant sujct , ct il I'a fait, moins encore en manipulateur habile, qu'en honimc d'csprit ; c'est dire asscz que son ouvrage merite d'etre lu par tons ceux qui aiment les rechcrches savantcs, cachees sous un style facile, et |)resentees avec les formes les moins soveres. Y. 60. — Des erreurs rclatices a la santc, ouvrage ou Ton traite de I'air, des eaux, des lieux, des alimens, des vetemens, des cosmetiques, des exerciccs, des etudes, des professions, de I'i- magination, des passions, des inhumations precipitees, des charlatans, des maladies, etc.; par Lebrun , D. M., corres- pondant de !a Societe dc medccinc dc Paris. Paris, i8a6 ; Ga- bon, rue de I'Ecolc de Medecine, n° 10. In-8" de 243 pages ; prix, 3 fr. , tt 3 fr. yS c. par la poste. Les ouvrages de medecine, mis a la portee du vulgaire, me- ritent tons un grave rcproche , celui de donner au locteur unc presomptueuse confiance en lui-memc, et dc lui faire penser que qnelques houres lui suffiront pour acquerir les connais- sances qu'un medecin nc possede qu'apres plusieui's annees d'nn penible travail. M. Lebrun ne serait pas tombe dans ce defaut s'il ne fut pas sorti du domaine de Fhygione. II a voulu donner un traite presque complet de medecine; il annonce qu'il traite de toutesles parties do I'hygiene, des maladies , de la police medicalc, etc. Au lieu de grossir inutilement son livre de descriptions imparfaites de maladies et dediscussions iuin- telligibles pour la classe de la societe a laquelle elles sont adressees, il cut mieux atteint son but s'il se fut contente de combattre les prejuges qui existent sur I'art conservateur de la sante. On dirait que I'auteur a fait tons ses efforts pour aug- mentcr ses frais d'impression : a quoi servent, par cxemple , ces lieux conimuns sur la sobriete, qui remplisscnt I'article des alimens? Ce n'est point par prejuge qu'un grand nombre de per- , sonnes se livrent a rintemperance, niais bien pour satisfaire des sens que I'habitude rend de plus en plus exigeans. C'etait ici le cas de s'attacher a detruirc quelques erreurs populaires , de signaler Taction de certains alimens sur le tube digestif et sur I'organisation en general. Au chapitre des vetemens, M. Le- brun devait renverscr un prejuge tellement repandu qn'il est meme partage par plu.sieurs medecins, nous voulons parlerde SCIENCES PHYSIQUES. 209 raction dc la laino appliqure siir la jioaii, dont I'titiiitc est f'aitsscmcnt attribuoe a rabsorptioii . M. 63. — * Annudire pour fan 1827, presente an Roi par le Bureau (les lo/igitncJcs. 'Paris , 1826; Baehelier. In-i8de ijfi pages ; prix , i fr. Dans ce petit volume, dun prix asscz modique pc ur etre a la portee de tout le monde , on trouve . outre les niatieres qui remplissent les almanachs ordinaires , une foule de details curieux et de renseignemens utiles, tires de Tastronomie , J » 212 LIVUKS IRANCAIS. lit- la physiqiio , do la ciiimic, ilo la yeot^iaphie ct cle la statis- tujiio. 11 coiitiftit aiissi deux oxii'aits du Systrine da nioiutc dc M. di; La Place : I'liii, siir Ic noii\'caii sysU'iiic dis poids ct mc- sures, acconipagne dcs tables qui s'y rapportent; I'autre , siir la longitude ct la latitude terrestres. Le celebio academieien fait observer dans cc dernier, qu'on ne eonnait parfaiteincnt la position d'un lieu sur la terre, que, lorsqu'aux deux ordonnecs horizontalcs servant a exprimer sa distance -a Tequatcur et a iin nieridicn detci mine , on pent en ajouter unc troisicnie, celle qui determine Televation du memo point an dessus du niveau dcs mers. Cette troisieme condition est aujourd'hui tres-facilc a remplir, au moyen des tables baromctriques , ct Tannuaire donnc, a cet effet , celles de M. Oltmanns , Ics plus commodes qui aient etc publiecs jusqvi'a ee jour. A cette occasion , nous cmettrons le voeu que les hauteurs deja calculecs soient con- signees sur les cartes ct dans les ouvrages de geograpliie. II scrait peut-etre encore a desirer que les resiiltats d'un interet general , tires du beau travail de M. de /. iimboldt, sur les lignes isothermes (d'cgale chalcur moyenne) , et sur les circonstanccs locales de la temperature du globe , y fussent inscres egale- ment. Dans I'etat actuel des lumieres , la geographic , en con- tact avec toutes les autres sciences physiques, ne pent plus sc borncr a une nomenclature de noms et de distances : elle doit eclairer la route du voyageur instruit; elle doit servir dc guide au nei^ociant desireux de connaitre I'origine ct les directions principales que suivent dans leurs echangcs successifs les demees on les produits manufactures. Parmi les notices scientijiqucs qui enrichissent cc rccueil pour la premiere fois, on remarque un extrait fortctcndu, fait par M- Arago , de I'ouvragc recent du physicien anglais ff'clls , sur la thcorie de la rosee. De toutes les opinions qui avaicnt etc emises sur la cause de ce phenomenc , la plus accreditee etait celle qui I'assimilait a la pluie , en le considerant comme une consequence immediate du refroidissemcnt dc I'atmo- spliere, et par suite de la precipitation d'une partie de I'humi- dite dont elle etait chargee. Par une scrie d'experiences fort ingenieuses , cc savant a etc conduit a rcconnaitre que la veri- table cause de la rosee est le rayonncment du calorique a la surface de la tcrre, et le refroidissemcnt du sol qui en derive. Cet abaissement dc temperature , se communiquant aux cou- ches d'air les plus rappi'ochees , leur fait abaudonner une portion de la vapeur aqueusc qu'elles renfermaient , pour la ceder aux plantcs et aux autres substances donees d'unpouvoir absorbant considerable. SCIENCES PHYSIQUES. 21^ Lcs tables relatives au niouvement de la population , aux lois de la mortalite, a la vie probable , et les observations fort intcressanles de M. Matliicu dent elles sont siiivies , ne lornient pas la partie la moins curicusc de cct annuairc. Cct astro- nome , en s'appuyant sur lcs calculs deja un pen anciens de M. Dnvillard, troyve que, sur 26,000 enfans qui naissent a Paris (terme moyen des huitdernieres annees) , la nioitie atteint I'age de 20 ans , et le tiers seulement , cclui de 45. Avant la revolution , la duree de la vie nioycnne etait, pour la France , de 28 ans ct f. M. Malthus , a I'epoque de la publication de son livre, en 1798, la portait a 3o pour I'Anglcterre. Nous vovons dans ccs tables qu'elie s'eleve aujourd'hui a 3i j, c'est- a-dirc, qu'il faut multiplier par 3i ^ le nonibre des enfans qui naissent dans une annee pour avoir le total des habitans. Quoique consaeree par les auteurs de statistique , cette expres- sion de vie inoycnnt n'est pas exaete , meme dans le cas ou Ton suppose la popidalion stationnaire pour une periode deter- niinee , comme I'ont fait lcs auteurs que nous vcnons de citer. II est evident qu'on ne pent apprc'cier rigoureusement qu'apres leur mort, la nioyenne de la vie des enfans nes dans la meme annee. Ainsi done , les calculs de ces messieurs ne sont que des appreciations plus ou moins approximatives dans lesquelles i) faut tcnir comptc encore d'une autre source d'crreur provenaut de ce que la population est progressive , bien loin d'etre sta- tionnaire : circonstance qui amcne des alterations perpetuelles dans seselemens. Son accroisscment est maintenant d'un iSa'""': S'il continue dans le meme rapport, dit M. Mathieu, la popu- lation de la France sera doublee dans 106 ans. Sans admelfre le fameux principc de population de Malthus, ni toutes les consequences qu'il en tire , nous croyons que les obstacles a cette progression sont tres-uombreux , et qu'ils croissent en meme tems que la popidation elle-meme. Au reste, le pro- longement de la vie moyenne annonce une amelioration sen- sible dans I'hygiene pidjlique , et surlout ime aisance plus generate. Le bien-ctre des ouvriers, ainsi que Fa demontre I'eco- nomiste anglais, augmente les causes repressives du mariage , en fortiiiant chcz les jeunes gens lcs inspirations de la pru- dence , et en les empcchaut de s'engager temerairenient sous les lois de I'hymen. Les indigens; les paysans pauvi'es et les individus voisins d'une extreme misere , sont les seuls qui ne- •f^ligent les conseils d'une sage prevoyance. Ad. GoNnisEr. 6/(. — * Biblioniti])])c , ou Livrc-Cartcs , lecons melhodiqiics ; par une Societc d'hommes dc Icttres.-I 21 4 LIVRES KRAjNC.VIS. tie savans geographes, MM. Dauriou, Eyries, Annee , Albert- Monte mont , Fivicn, etc., et pour le dessin des cartes, M. Per- rot, iugenieur geographe. io% ii', i2«, i3° et ik' cahiers. Paris, 1826; Renard, rueSainte-Anne, n°7i. 5 cahiers oblongs; prix de chacun, 3 fr. 5o c. Dcpiiis I'analyse que nous avons donnee du plan ct des pre- miers cahicrs du £iblia//iappe (Voy. Ret'. Enc, t. xxxi, p. 175), des livraisons nouvelles se sont rapidement succedees ; nous en avons cinq a faire connaitre, et il en reste un nombre egal ii publier pour completer I'ouvrage. Les cinq nouveaux cahiers renferment 16 cartes, avec la description et I'liisloire abregee des etats ci-apres, savoir : 10' cahier, Espagne et Portugal, Turquie d'Europe, Grece, Pologne; 11°, Siberie, Japon, empire chinois; i'^*, Turkes- tan, empire birman, Hindoustan ; i3% Afganistan, Perse, Arabia; et 14% Turquie d'Asie, Egypto, Etats barbaresques. Le soin principal des redacteurs du Bibliomappe a etc d'in- diquer pour chaque etat les lignes de faite et de partage des eaux, la disposition du terrain, les accidens naturels, mers, fleuves, montagnes, communs a plusieurs etats on servant de limites. Des considerations generales , diverses notices sur les migrations des pcuples et sur leur passage dans chaque etat donnent encore un puissant interct a la lecture des descrip- tions purement geograpliiques. II faut done voir ici tout autre chose qu'une froide et seche composition, qu'uue sorte de compilation commc on en voit chaque jour : c'est un ouvrage neuf d'invention, d'execution et de methode, dans lequi;l on descend des descriptions les plus generales du globe, aux des- criptions particulieres voisines de la topographic, et toujours en preferant les divisions naturellesde la terre, qui sont inva- riables, aux divisions politiqnes, exposees a une infinite d'alte- rations. ***. 65. — * Nouvel atlas du royminw de France : Cartes des quatre-vingt-six departemens et des colonies francaises ; cha- que carte est accompagnee d'un tableau statistique et histo- rique; par MM. A. M. Peruot et J. Alpicr ; public par L. DupivAT-DuvERGER. 32" Ct 33' Uvraisous. Paris, 1826; I'editeur, rue des Fosses-Saint-Germain-des-Pres , n° i3. I cahiers in-l"ol. oblong ; prix de I'atlas complet , contenant 98 cartes et no tableaux , 210 francs ; chaque carte se vend separement , 2 fr. , celle de Corse exceptee qui coute 3 f.,, ■Voy. Rev. Enc., t. xxxi, p. 739.) Nous trouvons cinq cartes dans ces deux livraisons , savoir : I" L'ensemble des colonies fran^^'aises occidentales ; 2" la Mar- I SCIENCES PHYSIQUES. ai5 linique; 3° les lies Saint-Pierre et Miquelon ; 4° I'lndostan , ou se trouvent indiquees les possessions francaises ; 5" la Giiiane francaise. Les nouvelles cartes sont executccs avec le menie soin que les autres parties de cetto importantc collection, dont nous avons deja plus d'unc fois signale I'lUilite. I. 66. — * Stntistique de I'nrrondisscincnt dc Fnlaise , par MM. F. Gnle.ron , Jlph. dc Brebissnn , Jul. Dcsnoyer, etc. , avcc des dessins lithograiihics , par MM. Cli. de FaiiqucUn , Albert d' Oilliamson , Tlitod. Gonr/iay , Alpli.de Brehisson , dc Belly , Duloniboy. T. I. Premiere partie. Histoire de la vitle de Falaise, par M. Fred. Galeron. Falaise, 1826; Bree aine , editcur; Paris, Treuttel et Wurtz. In-S** de iv et i52 pages; prix du cahier, 2 fr. pour les soiiscripteurs; 3 fr. pour ceux qui n'ont point souscrit avant le i^"" Janvier 1827. L'ouvrage aura liuit parties ou cahiers. On ne saurait trop encourager les entrcprises du gienrc de celle que nous annoneons, surtout lorsqu'elles offrent, conime celle-ci , la reunion des talens, des connaissances et des efforts d'un certain nombre d'honiines instruits et eclain's. Sans doute les details de I'histoire on de la statistique de Falaisd n'attireront point I'attentiou de la majeure partie de la France; mais si I'interet d'une monographic historique ou topogra- phique ne s'etend pas a un cercle bien etendu, il n'en est que plus vif dans les etroites limites ou il se trouve renferme. D'ail- leurs, il est des choses que des recherches locales peuvent seules eclaircir et approfondir; et, si chaque arrondisscment, cliaquc departement apportait son contingent de faits particu- liers, bien observes, les etudes generales qui embrassent I'en- semble de la France , dc son histoire , de ses institutions , de sa statistique agricole, industrielle et commerciale, etc., devien- draient plus sures, plus riches et plus fructueuses. Une association d'habitans dc Falaise se propose aujourd'hui de payer a la science la dette de leur patrie. Le premier cahier , que nous avons la avec soin, fait espcrer qu'ils s'en acquitte- rontloyalement. En effet , M. Galeron a donne des soins con- sciencieux a son travail, et I'ensemble des faits qu'il presente, choisis et examines avec discernement, permettent dc suivre les destinees de sa ville natale, an milieu des revolutions et des evenemens divers qui ont agite notre France depuis pres de vingt siecles. On n'est point d'accord sur I'epoque de la fondation de Fa- laise, ni sur I'origine de son nom. C'est, au reste, un point qui nous parait pen important, et peut-etre I'auteur a-t-il consacre trop de pages a la critique des diverses etymologies ai6 MVRKS I'RAIVCAIS. (|u'avaioiit piesoiitccs scs prt-clccosscurs ct (ju'il auiait du sc boincr a (iter Irts- bricvcment. Ce qui ost certain , c'cst que cclte ville, trt-s-ancionni', a joiie an role important, ties les premieres epocpies do notrc liistoire. Cost dans ses miirs que naquit le famenx Guillaume, conquerant de rAngleterre. Ildut le jour a la (ille d'un bourgeois de cette ville, pelletier de sou otat, et au due Robert de Normandie, auquel, dit la chroui- que, la jeune Arleite, bcile, bonne et gracicusc pleitt mervcillcu- scment; et tant qiCil la volt avoir a amie. Falaisc , situee dans luie position forte dcja par elle-meme, fut choisic par le belliqueux Guillaume pour lui scrvir de rempart contre les nombi'eux enncmis qu'il eut a combattre ; et il gratilla la ville ou s'etaient eeoules les jours de son enfauce de nouvelles et nombreuses lortitications qui I'exposercnt, pendant plusieurs siecles, aux sieges et aux ravages successifs dcs Anglais et des Francais, (les huguenots et des hgueurs. Deux autrcs bicnfaiteurs dc Falaise furent le roi Jean-sans-Terre , qui le pi emier lui accorda les privild'ges de radministration communale; et Philippe- Auguste, de France, qui, en 1204, apres avoir \i\\m la ville a ses t'tats, lui confirma ses privilt^-ges, pour gagner I'affection dc ses habitans, auxquels il permit en outre dc sc livrer a I'usure, sans crainte dc poursuites, « tant que le taux dc I'in- t«ir(;t ne so nioiitcrait point a im denier pour un denier. » IVous terminerons cct article par unc courte citation. C'est line anecdote asscz curieuse (jui point les tems et les ma-urs. « En 1 386, uno truie d(';vora le fds d'un manceuvre de la ville, nomn>e Janet. Get accident parvint a la connaissance du jugo, qui condamna I'animal a sid^ir publiquemcnt la peine du ta- lion. L'ent'ant avait eu le visage et un bras d(-chir(3s; la truie fut nuuil(^"e de la memo maniere, et cnsuitc penduc par la main du bourrcau. L'execution so fitsur la place publiquc, en prc:- sence de tout le ]K'uple; le vicomtc-juge y pri^'sidait h cJicval , un plumrt siir son citapeau, et le ])oing siirlc cote. Ix- pere de la victime fut tcnu d'assistcr a cette cxd-culion ; on voulait le punir, dit I'historien , pour n'avoir jias surveille son enfant. Quand I'animal fut amene sm- le lieu du su|)plice, il avait des vt-temens d'liomme , linc voste, des haut-de-chausscs ct dcs gants. On lui avait api)lique sur la tete un nias(juo represcntant une figure humaine. » Gette farce honteuse couta a la villt^ 10 sous 10 deiiiors touruois , plus un gaiit neuf de 10 sous (|ue recut rex(icutcur. Et cot t-vt^-nement parut si reinarquable dans le terns , qu'oii on conserva le souvenir ])ar une pclnture a fres(|ue <]u"on voyait encore il y a six ans dans l^'glise de la Sainte-Trinite. SCIENCES PHYSIQUES. a 17 Co pioniiir caliier n'est point encore complt-to : il iie con- fliiit qu'aiix premieres annees dii dix-septiemc siecle : les der- nieres pages scront jointes a la procliaiiie livraison que I'on jiroinet pour le niois.de fevrier prochain, ct qui conliendra la description materielle de la ville actuelle. a,. 67. — * ^ ojdge d'Orcnbourg h Bouhhora, fait en 1820 a tra- vers les steppes qui s'etendent a Test de la mer d'Aral et au- ■ dela de I'aucien Jaxartes, redige par M. le Ijaron George de Meyendokf, ct revu par M. le chevalier Jmedce Jaibert. Paris, 1.826; Dondey-Dupre. In-8", avec une carte et einq planches ; prix , i o fr. Cet ouvrage est un de ceux qui jettent le plus de lumieres sur une des parties les inoins counues de I'Asie centrale, les pays situes a Test de la mer Caspienne. II contient la relation de I'ambassadc russe a Boukhara par M. le baron George do Meyendorf. L'ouvrage sc compose de trois livres : le i^"" ren- ferme le voyage d'Orcnbourg k Boukhara; le second, des de- tails sur quelques principautes voisines de la Boukharic; le 3*^, une description detaillee de ce pays mcme. Il est accompagne d'une carte destinee a representer aux yeux l*s lieux et les po- sitions detcrniinees pendant la dnree de ce voyage. Quelques dissertations sur des sujets qui se rattachent a la Boukliarie suivent ce travail, telle qn'une description des monnaies bou- kliarcs que Ton doit a M. le professeur de Senrowsri, une no- tice de la route comraerciale de Semipalatinok en Siberie jus- qu'au Bachniir, traduite du persan par le meme, et des notes sur I'histoire naturelle des pays parcourus par I'expedition ; enfin , un index des noms geographiques en caracteres arabes et latins, redige par le savant M. Amedee J.\ubert, editeur de l'ouvrage. Cette relation abohde en renseignemens geogra- phiques du plus haut interet; on y trouve entre autres des ob- servations precieuses sur le dessechement graduel des lacs et des rivieres dans les vastes plaines de I'Asie centrale , ])heno- mene tout-a-fait digne de I'attention du naturaliste et du geo- graphe, et dont le savant orientaliste M. Kl.aproth ( Journal Asiatiqac, septembre 1826, p. 180) a fait sentir toute I'im- ])ortance en en raontrant I'existence dans beaucoiq) d'autres lieux qu'il a Ini-meme parcourus. Elle est entremeleede details curieux, propres a faire connaitre les mccurs des habitans vi.si tes par I'ambassade, comme la description du chatinient infligc a un Kirghis (jui avait vole un cheval , crime irremissible cIkv , un peuplc uomade ^\t. 16 ) , el la chassc; (pie font les Khghis an Saiga, e^peee d'antilope ( p. 19). On lira avec interet le 'V* rhapitrc rclatif aux niteurs de ces pcuplades ; et Ic.-^ per ai8 LIVRES FRANCAIS. sonnes qui out reflcchi sur les habitudes des nations encore pen civilisces, no sernnt pas sans doute surprises de voir que iesKirgliis, (|uoiqiie sauvagcs, posscdent cependant quelques etincellcs du gt'nie poi'-tique. Les fraj^mens de chansons , rap- portes par M. de Meyondorf, nc sont pas de nature a donner de leiu- talent une idee tres-iavorable. Cependant, on ne pout en jut^er par de si courts extraits, et il est a peine permis de douter ([uc les chants heroiques, qui retracent les hauls iaits de lours aieux, ne contiennent des jiassages remarquables ct ne reproduisent, avec toute Tenert^ie d'une poesie primitive, les idees d'un peuple belliqueux et feroce. Au reste , les traits de cruaute sauvagc qui deshonorent le caractere des Kirghis , et dont quelques - uns sont rapportes par le voyageur, peuvent jusqu'a un certain point faire juger de la nature de ces poe- sies , et doivent sans doute diminuer nos regrets de ne les point posseder. Arrive a Boukhara, M. de Meyendorff en donne une description nouvelle. An milieu de renseigneniens dont la science geographique saura s'enrichir, on verra avec plaisir des detaTls interessans sin- la population tres- melangee qui ha- bite la Boukharje. On ne regrettera pas non plus les observa- tions faites par le voyageur, sur le commerce interieur et ex- terieur dc ce pays, et surtout sur ses relations avec la Russie , relations entretenues depuis long-tems par la politique russe , qui les regarde comnic un moyen de perpetuer et d'ctendre son influence sur cette partie de I'Asie. On comprendra que tel en ■ i est le veritable but, en lisant ce vceu de I'auteur, qui, apres avoir indi(|ue la possibilite de faire penetrer en Boukharie les lumieres de I'Europe, s'exprime ainsi : " Cost a la Russie qu'lHI' apparticnt de donner aux Ivhanats de I'Asie centrale une im- pulsion salutaire, et de repandre sur ces contrees tous les bien- faits de la civilisation europeenne. « E. B. Sciences religieuses , morales, poUtiques et histnrlqiics. 68. — * Mc'nioire en faveur de la lihcrte des cidtrs ; ouvrage qui a obtcnu le prix dans le concours ouvert par la Societe de la Morale clirrtienne ; par Alexandre Vinf.t. Paris, 1826; Hen- ri Servier. In-S" de xx et 3/io pages ; prix, 5 fr. Cet ouvrage est deja connu par le prix qui lui a ete decerne, et par le rapport rcmarquajjle de M. Guizot sur le resultat du concoiu's ouvert par M. Charles d'Outrejjont, legataireuniversel de M. LanibrecIits[Yo\. Ker. Enc. , t. xxx,p, 256). Aujour- d'hiii que les questions de liberte religieuse, placees a I'ordre du jour, occupeut vivement les esprits, la publication de I'ex- SCIEISCES i>IORAL£S. 21 y cellent livre de M. Vinct a toute I'oppoitunite d'un ecrit de circonstance. II est facile cependant de reconnaitre , a chaque page, que c'est le produit dime conviction longue et raisonnee. L'auteur est un croyant sincere qui ne compiend pas comment la pensee humaine seiait religieuse, si elle n'etait ])as libre, et comment la religion, qui n'est que persuasion, conliance et amour, pourrait profiler en quelque chose des niomerics exte- rieures imposees par la contraintc. II n'est pas de ceux qui sont indifferens a toutes les religions; mais c'est dans les coeursqu'il veut faire prevaloir la sienne, et il ne lui trouve de place ni dans I'etat civil, ni dans I'etat politique oii elle n'est qu'une etrangere. Faire de la religion un nioyen de police, ou de la police un moven de religion , croire asscz peu en la verite , pour la vouloir imposer par la force , ou bien s'egarer dans le culte idolatre de la force jusqu'au point d'yvoir soit une preuve, soil une sanction de la verite, ce sont des inconsequences im- pies, dont M. Vinet met parfaitement a nu toute la faiblesse. Pascal avait fort bien signale cette confusion, nil y a, dit-il, ( Pcnsees , t. i'^'', p. aSa), diverses classes de forts, de beaux, de bons esprits et de pieux, dont chacun doit regner chez soi, non ailleurs. lis se rencontrent quelquefois; et le fort, et le beau se battent sottement a qui sera le maitre I'un de I'auti'e; car leur maitrise est de divers genres. lis ne s'entendcnt pas, et leur faute est de vouloir regner partout. Rien ne le pent , non pas meme la force : elle ne fait rien au royaumc dessavans; elle n'est maitre.sse que des actions exterieures. » II dit ailleurs, ( t. 2, p. 147 ): " La conduite de Dieu, qui dispose toutes choses avec douceur, est de mettre la religion dans I'esprit par les raisons, et dans le cosur par sa grace : mais de vouloir la mettre dans le coeur et dans I'esprit par la force et par les me- naces, ce n'est pas y mettre la religion, mais la terreur. Com- niencez par plaindre les incredules; ils sont assez malheureux. II ne faudrait les injurier qu'au cas que cela servit ; mais cela leur noit. » M. Vinet exprime^ dans une de ses notes, une opinion qui pourrait etre I'objet d'une grave discussion. Touten reconnais- saat quele gouver.fiement n'a aucun droit sur I'instruction reli- gieuse, il lui accorde le droit de contraindre Jes citoyens a faire jouir leurs enfansdu bienfait de I'instruction primaire. Est - il en cela tres-consequent avec ses principes? On peuten donter. L'aveuglement des parens qui resistent a I'instruction de leurs enfans est un malheur deplorable; mais les moyens de persua- sion sont seuls legitimes pour v porter remede. Tout ce que I'etat pent faire, c'est de soumettre I'exercice de» droits de a?o LIVRES IRANCAIS. citoyoii a tic ccil.iines conditions (rinslruclion et du cap.icilc. Si I'on va plus loin, si Ton vent lianspoitcr a lYtat los droits el Ics devoirs dii jieie de fainille, si Ton impose rinstriictioa eommc ua devoir individuel politique on civil, au lieu de la piopager conime une haute convenauce sociale, en se conten- fant de la rendrc abondantc ct facile; si cnfin Ton astreint I'education a eertaincs formes ol»ligatoires, on meeonnait le principc de liberie d'educalion. II y aurail beaueoup a dire sur ee ehapitre. Une cpiestion de cette importance ne saurait etre traitee transiloiremcnt et en quelques mots. L'examen appro- fondi en serail fort utile, si Ton s'v livrait avec la gravite eonsciencieuse qui distingue eminemment M. VineE. Ch. Rf.nouard, amcat. 6t). — * Bibliotlicqiie d' instruction cleiiientairc. — Lccons dr morale pratique h l' usage dc la classe inilustriclle ; par M. Abel DuFRESNE. Ouvragc couronne par la Societe pour I' instruction (Ivmcntairc. Paris, 1826 ; Louis Colas. In- 18 de 36 pages ; prix , 25 c. et 20 fr. leccnt. Ce petit ouvragc, destine a la classe industrielle, atleinl par- faitement le but de I'auteur, instruire et plaire. Puisque les classes de la societe, condamnecs autrefois a vegeler dans I'iguo- rance, sentenl aiijourd'hui lesbienfaits dcs lumieres, el acquic- rent par leur instruction premiere le droit de ]iarlicipcr aux jouissances de I'esprit ; graces soient vendues a I'ecrivain qui consacre sa j)lunie a mettre a leur porlec les lecohs de la mo- rale et de la vertu. M. Abel Dufresne, qui a compose avec succ(~n |)lusieurs rccueils dc conies el d'anecdotes a I'usage des jeuncs enlans, ct s'esl elcve au rang de moralisle, dans ses pcnsccs , niaxinies ct caractercs , ue dedaigne pas dc descendre a des compositions qu'il sail cnnoblir par un but utile et parle lalcnt qu'il y deploic. D. P. 70. — Les Pctits Solitaires , ou Cours a/nusant d'ctudcs pn;- init-rcs. Paris, 1827; Baudouin freres. 3 vol. in-12, avec une gravure a chaquc volume; prix , 7 fr. 5o c. L'autcur dc la Nouvelle Heloisc a dit, dans sa preface: « II laut des spectacles aux grandes villes, et des romans aux pen pies corrompus : j'ai vu les mneurs de nion terns , et j'ai pid)lie ces Icttres.i) 1,'autcur des Petits Solitaires aurait-il dit en hii- meme : « II ne faut que dcs conies a I'cnfancc , lorsque les insti- tutions sont faussees, insidieuscs ct corruplrices; je conIlai^ nion pays, jc vais publicr niou ouvragc ? » Le Tasse embellii des charmcs de sa poesic Timage d'uu enfant malade auqucl on prcscnte un breuvage amer, mais salulaire, dans uu vase doiii Ici bords sont fi-ottes dc mid : celle idee, souvent reproduitc SCIENCES MORALES. 221 tt appliqueeaux oiivragcs dVclucation, nianquc tie justosse, et, lie pent etic sans inconvenient. L'aiiie ties enfans est saine; c'est d'alinicns qu'ellc a bcsoin , et non tie remetles. Et poin- quoi kii tltguiser ces alimcns ? N'y a-t-il tlonc auciin moyen tl<; rentlre retiitle attiayante par elle-nieme, et faiit-il absolument passer par la fiction pour arriver a qiielques verites ? On vciit rentlre la route plus facile et plus agreablc ; a la bonne heurc : mais on la rent! plus longuc, on recule le but, 'on oublic que ie tenis est precieux. Les nieilleurs ouvrages elementaires , les Cours d'etudes les mieux faits sont, a coupsur, ceux qui pro- curent le plus tl'instruction dans le tem.'^ Ic plus court, et les contes instruclifs ne peuvent avoir cette sorte de merite : par- mi les livres destines a I'enfance, on ne pent les niettreau pre- mier rang. Les vues de I'auteur des Petiti Solitaires sont fort diOlciles a comprendre. La situation dans laquelle il met scs elevesetleurs parens, les faits qui I'ont preparee et ceux qu'elle amenc suc- ce.ssivement, tout le canevas roniancsfjue de son Cours d'e- tudes est si extraordinaire, si incroyable, que Ton ne pent s'y arreter. Le lecteur se hate d'arriver au Cours d'etudes; il Ic lit, independamment de la place qu'il occupe dans le livre; il en reunit les parties, et, aprcs I'avoir mis dans cet etat, il ne le trouve pas plus amusant qu'un traite ordinaire dont toutes les parties seraient bienliees, oii toutserait expose avec methode et prt'cision. L'autcur de cet ouvrage a voulu faire un essai fort difficile; elcver des enfans dans la solitude, en mettant a leur portee tout ce que la societe seule pent procurer. Les nioyens qu'il a imagines pour venir a bout de cc tour de force ne sont pas clairs ; on ne peut en suivic le developpcment qu'avec une contention d'esprit qui fatigue bientot, et en faisant des con- cessions f|u'on refuse cnfin, parce qu'on ue peut en prevoir ni le terme ni la mesure. Nous le disons avec regret : I'auteur a pris une fausse route. Son ouvrage est assez bien ecrit; il pent obtenir un succes litteraire , se repandre meme, sans etre utile k I'education. Y. 71. — * La Legislation civile, commerciale et crimineUc de la France , ou Commentaire et Complement des codes francais, par M. le baron Locre. Tomes II etIII. Paris, 1827 ; Treuttcl et Wurtz. 2 vol. in-8° de 5oo et de 476 pages. Prix du vol. 7 fr. pour les souscripteurs , et 9 fr. pour les non-souscripteurs. ( Voyez pour les developpemens tlu litre, I'annonce du i^"" vo- lume. Rev. Enc, t. xxxii, p. /|68. ) Ce grand ouvrage, que nous avons commence a faire con- naitre en annoncant le premier volume, se poiusnit avec acti- ■iTi LIVRES FKAWCAIS. vitt-. Le tome second est consaciu tout entier an titre premier du preitiier livrc dii Code civil, rolatif i\ la jotiissdnre rt a la privation tics dmits civils. Apres line coiirtc notice historique , vient une preiniere partie oii la table raisoniiee de tout co que le volume renferme est placec sous chactin dcs articles du Code. La seconde partie, sous le titre d'lilrmrn.'; fin Conirnrn- taire , contient la discussion de la loi au Conseil-d'Etat, au Tribiuiat et au Corps legislatif. La troisiemc partie , sous le titre A'Ek'iiicns du Compli'mcnt, presente le textc des lois , decrcts, ordounances, avis du Conseil, reudus sur la mcme matiere. Le troisit-nie volume est cpnsacre, d'apres le meme plan, aiix titrcs dcs Actcs de I'etat civil et du domicile. Ch. R— n. 72. — * De la peine de mort , et du systeme penal danx sex rapports avcc la morale et la politique ; par M. /.-B. Sai-avii-lf,. Paris, 182G; M* Huzard. In - 8" de 88 paj^es; prix, 2 fr. et a fr. 5o c. INous nous abstenons, quant a present, d'analyser avcc de- tail cette exccUente brochure, et cela par une raison qui sera sans doute approuvee par I'auteur lui-mcme. La question du maintien ou de I'abolition de la peine capifale ayant fourni , dans I'annee qui vieut de (inir, le sujet de deux concours ou- verts et aujourd'hui I'ermes, Tun a Paris, et I'autre a Geneve, les ouvrages qui aiu'ont etc juges digues des prix ou d'une ho- noral^le mention par les jurys charges de les examiner, seront prol)ablemenf livres a I'impression et rendus publics. Alors , nous pourrons, en rapprochant ces divers ecrits, les reunir dans une seule analyse , 011 nous aurons soin de donner ime place a Texamen de la brochure d(! M. Salaville, que nous an- noncons ici et que nous avons lue avcc beaucoup de plaisir. TVous n'oublierons point non plus , dans cctte circonstance , la brocluue anonyme, en langue allemande , intitulee : Z)/' /V/.c- sassinat juridi(jiie , Opinion de I'ci^tise ( Foni J nstizmordc, cin FoUun drr Kirclie ) , et publiec , il u'y a que deux ou trois mois , par le libraire Suhring, a Leipzig. ( i8'2(). In-8° de iio])ages. ^ En attendant, nous devons recommander al'attention du pu- blic I'ecrit de M. Salaville , qui, scion nous, a tres-bien prouve que la crainte salutaire cjue les legislateius pretendent inspirer par la rigueur des punitions, et notammcnt par la peine de mort, loin dc; diminucr le nombre des crimes , sert plutot a les multijilier, et mcme, en quelque sorte, a les provoqucr. II a de meme fort bien examine la question du pretendu droit de punir, que les societes s'attrihuent. S'il refuse ce droit Ala soeiite , ci'st parce qu'il veut qu'elle previenne les crimes. Il SCIENCES MORA.LES. a-iS aurait du ajouter qne la societe devrait reparer on fiiire repa- rer, tiutant que possible , le inal qui rcsuitu d'une action crimi- nelle, surtout quarid on pent hii assii;ner ponr cause I'im- pcrfection des lois, on la nej^Iij^encc d'une autorite publique quelconque. Hkiukro. 73. — * Des arrestations arbitraires , ou Debats du ])rooes intente a M* Isambert , avocat, etc. Paris, 1827; Baudouin freres. i vol. in- 8"; prix, 1 fr. 5o c. On connait le memorable proces intente a Me Isambert , pour I'article qu'il fit inserer dans la Gazette des Tribunaux , sur les arrestations arbitraires. Le volume que nous annoncons conticnt toutes les pieces de ce proces, ainsi que les eloquentes plaidoiries de MM. Dupin aine et Barthe pour les prevenus. L'interet qui asuivi les graves discussions auxquelles cette affaire a donne lieu, devra faire rechercher cet ouvrage par tous ceux qui veulent connaitrc I'etat de la legislation sur la liberte in- dividuelle dans notre patrie. On pent dire que cette importantc question n'avait jiasencore eteaussi bien approfondic. Toutefois, le jDroces n'cst pas encore tcrmine, et il ne tardera pas a se rouvrir devant la Cour lovale , sous un point de vue encore plus etendu qu'il ne s'est prescnte en premiere instance. Tout en dcplorant les mallieurs particuliers qui peuvcnt resuiter de ces grandes causes, les bonscitoyfius n'y trouvent pas moinsun motif de consolation dans les Itunieres qui jaillissent toujours des principcs que I'autorite veut ainsi contester, et qui se de- hattent avec tant de solennite entre le ministerc public defen- dant les interets du pouvoir, et les avocats combattant pour I'in- terct de la societe toute entiere. A. T. 74. — * Lc Botany- Bay Francais , ou Colonisation des con- damnes aux peincs afflictives et infamantes et des forcats libe- res; par M. T. Ginouvier, auteur du Tableau de I'interieur des prisons de France. Paris , 1 826 ; Charles Bechet. In-8" de 32 p. ; prix , a fr. Les forcats liberes et les condamnes aux peincs afflictives et infamantes doivent - ils etre deportes sur une terre lointaine pour rcnaitre a la vie civile, et , sous I'oeil vigilant d'une au- torite tutelaire , se regenerer par I'influence bienfaisante de I'ordre et du travail ? Faut-il , an contraire, suivant I'usage eta- bli parnii nous, continuer a les entasser dans des bagnes in- fects ou ils finissent de perdre les restes d'honnetete qui pouvaient exciter encore des remords dans leur amc, ou I'ef- Fronterie du vicedevient, en I'absence de toute pudeur , le seul aliment de leur amour-propre; veritables ecoles de corruption qui les rccoivent novices et les rcnvoient nialtres dans la tac- aj,.', I.IVRES FRA.Nr.AlS. ti([nc (111 criiiR'? l''ra[)|>i' dcs ilaiijjjcrs dc la socitir doiit tcs luimmcs dijjratli'S soiit Ics cnncmis hop soiivfiit int'conci lial)lrs, M. Giiiouviev, d'accortl en cola avcc la pliipait dos iTiniinalistes dc iioUc opocjiic, so prononce pour leiir depoi • latioii ; et, panni nos possessions d'oiitre - mer , il desij^ne la Guyane IVanraisc coninie le pays le pins propre a les re- eueillir. La question financierc que faitnaitrc la proposition decettc '^raudo niesure est, dans notre (ems, la question [)riu(ipalc, el ni-illu'ureusenicnt die u'cst qu'edlenrec dans cette brochure. Aprcs quelques apercus legislatif's sur les chnngemcns que son I'Ki'culion devrait introduire dans le Code penal, I'auteur se home a des indications sonimaires sur la constitution interienre de retablissenient colonial (jui en rcsulterait. Puisqu'il sc pro- i)osait d'ecrirc sur cette partie si iniportantc de I'econoniie so- ciale, il aurait dii s'enquerir de I'etat actuel des colonies de la NouvelleGalles du Sud, ou, depuis 1788, les Auglais transpor- tcnt regulierement leurs condamnes, sausnegliger les relations pnhhecs sur I'llc de Van Diemen, qui, des i8o3, partagea I'hon- neur peu envie de recevoir sa part du contingent annuel fourni a I'Australasie par les prisons de la Graude-Bretagne. S'il faut s'cn rapporter aux feuilles anglaises, la depense entiere de ccs colonies jusqu'en 1821 n'aeteque de 5,3oi,o23 liv. st.,soniiTie dans laquelle sc trouvent compris les frais de transport ot Ten- Ireticn do 33,i55 individus, ceiixde I'administration civile, dtr la marine et de la garnison; tandisque, d'apres les evaluations les plus moderees,rentrctien d'un pareil riombre de personnes sur des pontons ou dans des niaisons de correction, toutes choses egales d'ailleurs , aurait etc inliniinent plus dispendieux; - mais il fautteiiir compte, dans ces calculs, de rextreme ferti- litc; des cotes habitees de la Nouvelle -Hollande. Les rapports deccs journaux representent ces etablissenicns commc tre,s-flo- rissans sous le point devue commercial et agronomique. En les envisageant du cote moral, ils rcconnaissent aussi que le tra- vail, joint aux liens du mariage et aux interets de propriete , a, ' sinon retrempe entieremcnt le moral de ces hommes (letris, du moins ramene un grand nomhre d'entre eux aux habitudes d'une bonne conduite. II est vrai de dire que, suspectant a juste titre les dispositions incertaincs dv ccs nouveaux conver- lis, le goHvernement a toujoursempcche leur accumulation sur un niemc point. Mais un vice inherent a ces colonies, et qui .s'oppo.sera toii- jours a la regeneration partaite de leurs habitans, c'estladil ference ('■nornie qui existc entre le nond)re dos individus des SCIENCES MORALES. aaS deux sexes : on y voit uiie femnie contre dix honimes, et ce rapport deja si faible diminue encore de jour en jour par I'effet naturel dc la legislation anglaise qui, en deportant les honimes, condamne lapliipartdes femmes a une simple rechision. M. Gi- nouvier, n'enoncant pas meme ce fait, n'a pas pu nous dire comment on remedierait a un aussi ^ruve inconvenient. Une autre singularite qui n'etait pas non plus indigne de son atten- tion, c'cst qu'on envoie aux travaux forces avec fers, cachots, etc., les auteurs des crimes commis dans la Nouvelle-Galles du Sud, de sorte que , malgre la creation de colonies speciales pour les forcats , les anciens modes de punition ne sont pas entiei'ement bannis des lois anglaises. Cette colonisation eprouverait bien des difficultes dans les premieres annees; mais, avec dc la perseverance, on reus- siraitsans doute a surraontcr tons les obstacles, en piofitant des experiences faites par nos voisins. lis ont d'abord verse dans les Etats-Unis le rebut de leur po]iulation, et il en est resulte une nation eminemmcnt morale et eclairee; ils peuplent aujour- d'hui le nouveau continent aiistral de leurs malfaiteurs , et moins de quarante ans ont suffi pour elever la classe des gra- cies et de leurs enfans libres a un haut dcgre de prosperite. Sur cette nouvelle terre, ou plus de quarante mille Anglais exer- cent deja leur activite industrieuse, la seule ville de Sydney, sa capitale, quoiqu'elle ne contienne encore que sept mille ha- bitans, possede plusieurs Societes savantes et voit s'imprimer trois journaux dans son sein. Rome commenca par servir de refuge a tons les brigands de I'ltalie; elle finit par etre la legis- latrice et la souveraine des nations. Jd. Gondinet. 75. — * Revue pnlitiqiie de la France en 1826; par I'auteur de la Rei'iic poUtunie de F Europe en iSaS, avec cette epigraphe tiree de Campanella (i) : « J m pit plane sunt minislri qui in ar- canis , callidis et abstrusis rationem politiaram cnnsistere censent ; qui mages se adstrictos putant impeiitint ut tueantur quaui con- scientiain illcesani ut consen'ent; qui principi suo obligatos se putant ut ei prosint , nnn ut consulant jnsta. » I,es inipies, ce sont ces ministres qui font consister la politique dans le mystere, I'hv-- pocrisie et I'astuce , qtii se croient engages a soutenir le pouvoir plutot qu'ii conserver une conscience pure, qui se croient alta cbes a leur prince uniquement pour servir ses interets per- sonnels, et non pour lui conseiller des choses justes. » Paris, (i) Moine italien des xvi' et xvnc siecles. II vint u Paris ea 1624 , et y uiourut, en ifiSg, age de 7 t ans. T. xxxiii. Tanvicr 1827. i5 ■}■>('> MVRRS rUANCAIS. 1827; A. Diipont, nio Vivienne, n" 16. In-8" tlo 196 pages^^ prix , 4 f' '• 5o c. II y a bientot deux ans que rapparitioii d'line inince bro- chure, intitulec : Revue dc C Europe, produisit dans le monde litteraire ct politique une veritable sensation. Cette nouvelle production du nieme anteur n'est pas moins remarquable , soit par la hauteur du coup-d'ceil , la justesse et la profondeur des vues, soit par I'eneri^ique chaleur et la piquante vivacite du style , auquel on pourrait neanmoins reprocher quelquefois lui pen de recheiche et de pretention a I'effet. L'auteur, apres avoir expose brievement quelle etait la si- tuation des esprits en France lors du retour ct du retablissement des Bourbons, se demande quels nnages sont venus obscurcir et attrister cette nouvelle ere, dont I'aurore semblait nous pro- mettre tant de calme et de prosjjerite, 11 n'hesite pas a assigner ace deplorable changement une seule cause, Vnrgucil, passion inherente aux deux sectcs dant I'esprit est ici generalise et per- sonnifie sous les noms A'aristocratie et de sacerdoce, et qui regar- dent leur triomphe et leur regne comme inseparables de la do- mination des rois de France. « Des que les rois furent au Louvre, dit-il, en peignant la premiere de ces castes, aujourd'hui plus ridicule peut-etre que redoutable, les courtisans y rentrereni; en fonle, ou, pour mieux dire, ils ne I'avaient point quitte; eux-memes re^urent les rois de France , et leiu' firent les hon- neurs du liOuvre, comme ils les feront toujours aux maitres du palais, quels qu'ils soient. Les rois peuvent tomber, pourvu que le palais reste debout. Ils firent accroire aux rois que c'etait pour les attendre que depuis si long-tems ils remplissaient les escaliers du Louvre : les rois les crurent, et bientot la cour redevint I'ame de I'etat. >> Toutefois, l'auteur parvient sans peine, a I'aide de I'histoire, a isoler les interets des rois de France de ceux de ces deux castes orgueilleuses et fanatiques, souvent rivales et toujours ennemies du pouvoir de la couronne. II rappelle et fait ressorlir avec eloge cette belle fiction de la royaute constitutionnelle, ou le roi , impuissant pour le mal, est toujours tout-puissant pour le bien , et apres avoir mis ainsi la royaute en quelque sorte hors de cause, il passe a I'exposition et a I'examen du systeme et de la marche du ministere qui a precede le ministere actuel , c'est- A-direde celui du due de Richelieu. Ici , l'auteur nous parait montrer beaucoitp trop d'indulgence pour ce systeme ridicule et funeste, si bien earacterise sous le nom de systeme de bascule. Il reproche aux constitutionnels la fauteque, selon lui, ils ont faite en concoui-ant au renvcrsc- I SCIENCES MORALES. aa; hrent do ce systeme et de ces ministrcs dont il dt-ploie trop vive- ttient la chute. Ce n'est pas que I'auteur n'avoue que le due de Richelieu ait fait des fautes, et des fautes c dont les consequences sont, dit-il, devcnucs incalculables; » mais on voit que, do- mine sans doute par quelque sentiment honorable, il cherche a justifier, a pallier ces fautes. II ne s'eleve pas avec assez de force et d'indignation , selon nous, contre les changemens apportes alors au systeme electoral, changemens qui peuvent etre pro- clames comme I'origine et la source de tons nos maux ; change- mens, enfin , de I'importance et du danger desquels ce ministere imprudent fut suffisamment averti par I'explosion de I'opinion etdu mecontentement national. Quoiqu'il en soit, I'auteur, apres un hommage merite, j'aime a le croire, rendu aux qualites personuelles du noble due, arrive a I'epoque de I'elevation du ministere actuel. « C'est au tems, dit-il, a rev(!-ler les secrets de I'histoire. Le silence est la prudence des contemporains. Un voile couvre les intrigues qui ont fait succomber une vertu si emineute. C'est a I'histoire a y porter le jour, et a dire comment le trone a pu se separer d'un homme qui en faisait I'honneur et la surete. Le ronvcrscment du due de Richelieu fut I'eleva- tion des ministrcs actuels ; le choix en etait fait bien avant leur avenement; ils etaient deja les chefs des deux influences occultes si souventdenoncees, si spuvent ni^es, et qui ont enfin declare leur nom sous la protection de ces ministrcs. » L'auteur retrace alors I'administration des ministrcs actuels; il qualifie leurs moyens et signale leur but; peint la marche et I'envahissement de I'hy- pocrisie politique et religieuse , et termine ainsi ce tableau : « Les ministrcs ayant opere la desorganisation de la France constitu- tionnelle, proscrit et disperse ses defenseurs ; ayant mis en masse et en mouvement tons les elemeus retrouves de la contre- revolution, les succes de la conjuration ne paraissaient pas douteux... ; et cependant, avec la reunion de toutes ces forces morales et materielles, avec taut de moyens combines au de- dans et au dehors , la contre-revolution n'a pas ete faite , elle ne se fera pas. » << Trois moyens de salut restent a la France ; sa chambre des pairs , sa magistrature (auxquelles I'auteur se plait a rendre un hommage merite), et enfin son esprit national. » Cependant, tout en I'econnaissant que les tentatives faites aupres de la ge- neration naissante, au moyen de I'education, abandonnee ex- clusivement aux mains des jesnites ou dtes jesuitiques , demeu- reront probablement sans succes , on ne saurait se dissimuler la realite d'un danger que I'auteur signale , et qui fera le sujet d'une derniere citation : « Cependant , dit-il , deux generations aa8 LIVRES FRANCAIS. s'elevent i\ cole I'line »le I'auire , I'mie cians Ic vrai , ratitre dans le faux ; I'mie clans I'amoiir de la laison , Tautie dans le zele du fanatismc ; et des semences dc discotdes civiles sont jeteos sur le sol do la France, ct la mennccnt de ces jonrs desastreiix qui s'eiaient dissipes a l# lueur dii dernier siecle, et dont le retonr piraissait impossible. Toiites les matieres combustibles sont preparees , il ne manquera plus qu'un Henri III on lui Charles IX; et, si la nature n'en fait p:ts , I'education jesuitique saura bien eu faire. 11 manque a la t^loiie de Rome une Saint-Barthelemy de philosoplies , ou une immo- la I ion , selon le langai^e des royalistes. Voiia I'oeuvre des nii- nistres;ils ont cree et arme plusieurs partis ennemis. La dis- corde est au sein des opinions , comme elle est au fond des ccEiu's , et elle serait bientot sur les places pnbliques, si la France constitutionnelle ne dominait I'esprit de faction, et ne planait de sa liauteur sur tons ces nuages politiques... " Mais , si i'auteiu' se Irompait ; si sa noble confiance dans I'esprit du siecle et le genie de la nation se trouvait trahie !... On fremit .\ ridee des malheins dont la France et I'Europe seraient me- nacees. — C'en est assez pour faire juger du merite d'unc production digne sous tous les rapports de survivre aux cir- constances dans lesquelles nous nous trouvons. II est heureux que I'opinion publiqne rencontre ainsi de tems en terns quel- que voix eloquente , interptete de ses jngeniens et de ses pen- sees , et qui temoigne au monde , ainsl qu'aux siecles a venir, que la France de nos joins n'est point encore parvenue a ce degre d'infortune et d'abaissement auquci des esprits anibi- tieux ou brouillons s'efforcent en vain de !a faire descendre. Cette brochure se termine par une pievision , doulouieuse sansdoute, mais que nous partageons entierement, et depnis long-tems. Boucheive Lefer. 76.^- * Du projet de loi sur la police de la prcsse ; lettre adres- see par M. de Chateaubriand au rcdacteur du Journal des Debad: Paris, 1827; imprimerie de H. Fournier, de Paul Re- nouard, de Pinard, etc. In-S" et in - Sa ( se distribue gratis ). 77. — * Observations sur le nouvcau projet de loi relatif a la \ police de la presse, par M. Cottii, conseiller a la cour royalc de Paris. Paris, 1827; Mame et Dclaunay-Vallee, rue Guen»';- gaud, n" aS. In-8° de 70 pages; prix, 2 fr. 78. — * Examendu projet de loi contre la qjresse , par Ch. Re- NOCARD, avocat a la cour royale de Paris. Paris, 1827; Jules Renouard, rue de Tournon, n" 6. In-8° de 75 pages; piix, 1 fr. aS c. 79. — * Examen du projet de hi sur la pressr, par Evariste D u- SCIENCES MORALES. i-mj MOULIN. Paris, 1827; Baudoiiin freres. In-8" de 75 pages; prix , I fr. 5o c. Ln cri d'effroi et d'indignation a retenti d'un bout de la France a I'autre, a rapparition de cette conception niachiave- lique qui tend a rancantissement de la pensee humaine, en renipechant de se reproduiro sous les auspices d'une sage liberie par la voie de la presse. On croirait voir une armee de barbares s'avancer, comme aux siecles passes, pour ren- verser nos institutions ct nous rcplongcr dans les tenebres du moven age en detruisant la civilisation. Aussi , nc faut-il pas s'etonner si des voix gcnereuses se sont elevees de tous cotes pour plaider, au tribunal de I'opinion publique, la cause de la raison outragee, en attendant que la sagesse de nos cbambres legislatives ait fait une eclatante justice de ce ftital complot. Les quatre ecrits dont nous venous de transcrire les titres ont, de concert avec lesjournaux quotidiens, pulverise les di- verscs dispositions de cc projet de loi centre la presse. Cliacun des auteurs a mis dans sa discussion la tournure d 'esprit qui lui est propre etles connaissances speciales qu'il possede. Ainsi, M. de Chateaubriand, dans sa lettre au Journal des Debats, a su resserrer dans un cadre etroit les argumens les plus forts et les plus convaincans centre la hi vnndale , nom igneminieux (ju'il a imprime a I'ignoble conception ministerielle ; et sa letti'e, tiree a '3oo,ooo excmplaires par diverses imprimeries de Paris et des di'partcmens , va dieter a toutes les consciences le juge- ment qu'elles devront porter sur une loi d'eternelle reproba- tion. M. Cottu, qui tient une place si honorable dans la haute magistrature, a etc profondement indigue de I'affront fait aux tribunaux , qui, ne se pretant pas a la servile complaisance que Ton attendait d'eux, out ete probablement la premiere cause des rigueurs de police deployees centre la presse. Un style rapide et anime , qui s'eleve souvent jusqu'a la plus noble elo- quence, caracterise ses Observations. Nous voudrions pouvoir rapporter ici quelques passages de cet ecrit fait pour survivre aux circonstances qui I'ont vu naitre ; mais I'cspace qui nous est reserve nous laisse le regret de ne peuvoir donner a la tin de cet article qu'un seul de ces passages. M. Renouard, que sa position mettait si bien a meme de deraontrer les desastreux resultats du projet, s'il etait jamais convert! en loi, sur le com- merce de la librairie et les industries multipliees qui s'y ratta- chent, a joint aux notions speciales qu'il possedait sur ce sujet les lumieres d'un jurisconsulte instruit et la raison elevee d'un philosophe eclaire. Aussi , sa brochure est-elle du plus haul interet , et elle ne peut qu'etendre et censolider la reputation , 23o LIVRES FRANCAIS. deji si bien ctablie , de son auteur. EnGn , M. Evariste Duinoit- lin, a qui unc longue habitude d'ecrire dans les journaux a donne une experience que peu de personnes peuvent avoir au meme dej^re sur cette matiere, est venu grossir les rangs desi publicistes qui ont deja mis ix nu les hidcuses dispositions de ce projet qui semble eclos du cerveau d'un jes.uite. C'est corps a corps qu'il le combat. II en detache chaque article et suit ainsi pas a pas les inconveniens innombrables qui naitraient d'une semblable loi , si jamais elle etait adoptee. Faisons des vceux pour qu'un si cruel fleau ne soit pas reserve a la France, et disons avec M. Cottu : « La chambre des deputes se lassera d'etre associee a tant d'actes oppressifs, de perdre chaque jour quelque chose de la confiance des peuples , de s'entendre nom- mcj- dans toics leurs plcurs , etde voir leurs esperances se porter toujours vers la chambre des pairs. Elle se rappellera sa noble destination; et les Francais, rassures desormais sur tons les projets qui pourraient etre formes contre leurs liberies, se di- ront avec une pleine securite : Quand les chambres le sauront .' « A. T. 80. — Refutation des calomnies relatct'es aux affaires du Bresil , inserees par un sieur de Loy dans X Independant de Lyon ; par M''* Jose Bonifacio ^^/'Andrada , Antonio Carlos Ri- beiro rf'ANDRADA, et Martin Francisco Ribeirn ^/'Andrada. Paris, 1826 ; imprimerie de Beraud. In-8° de 60 pages. " Parmi les auteurs de sa glorieose independance, le Bresil cite avec orgueil trois freres dont les noms sont devenus po- pulaires dans sa vaste etendue. » M''* d'Andrada , apres avoir consacre une grande partie de leur laborieuse carriere au culte des lettres et au service de la patrie, jouissaient en paix de la I'econnaissance de leurs concitoyens, quand le Bresil, s'aperce- vant enfm qu'il n'etait plus libre, songea a elever une digue contre le despotisme. Jose Bonifacio, I'aine des trois freres, et Martin Francisco , parurent a la tete du peupie de Saint-Paul qui s'agitait, empecherent le sang de couler, deposerent le ge- neral portugais, marcherent sur Rio- Janeiro, suspendirent le depart de don Pedro , que le Portugal rappelait dans son sein ; et, entres dans le ministere de ce jeune prince, ouvrirent au Bresil une nouveile ere de gloire et de splendeur. Des troupes et une escadre s'organisent, les Portugais sont battus sur mer et sur terre; ils sont rejetes du Bresil, qui se declare indepen- dant, etqui proclame don Pedro empereur constitutionnel. Une assemblee nationale est convoquee, et les trois freres sont ap- peles a sieger dans son sein. L'un d'eux, Antonio Carlos, etait passe des cachots de Bahia a la tribune des cortes de Lisbonne, SCIENCES MORALES. a5i oil il se faisait reniarquer par son eloquence, son patriotisme ■et son courage. Defenseur intrepide de la dignite du Bresil , il refuse de jurer la constitution de Portugal, abandonne Lis- bonne sans passeport, et vole a Rio-Janeiro s'asseoir dans le congres de sa patrie. La representation nationale du Bresil s'ouvrit sous les plus fortunes auspices. Le jour de son installation, le nom destrois freres fut mele aux transports de I'allegresse publique; on Icur decerna, d'une voix unanime , le titre Ae peres de In patrie. La conduite de chacun d'erux dans cette chambre ne cessa pas d'etre un seul instant patriotique , loyale et ferme , comme il est aise de s'en convaincre par les journauxde Tasseniblc'e. lis defendirent les libertes publiques et particulieres , I'indepen- dance du Bresil et sa separation irrevocable du royaume de Portugal. Antonio Carlos redigea le serment que preterent les membres de I'assemblee , serment qui garantissait a don Pedro et a sa dynastie la couronne constitutionnelle du Bresil. II re- digea aussi la constitution de I'empire; mais, tandis que la chambre en discutait les articles, elle fut dissoute illegalement, avec un grand appareil militaire, le 12 novembre 1823. Les trois freres, qui s'etaient montres constamnient fideles a leur mandat , furent arretes et exiles en France, avec d'autres deputes. Deux ans et demi s'etaient ecoules depiiis que, tranquilles sur cette terre hospitaliere, ils oubliaient, dans une retraite solitaire , aux environs de Bordeaux, I'ingratitude dont cer- tains hommes avaient paye leurs bienfaits; et, consacrant leurs foisirs a I'etude des sciences et au culte des muses, ils priaient le eiel de permettre que la verite arrivat enfin a I'oreille de leur nionarque cheri ; quand un journal , L'Independant de Lyon , vint troubler par de coupables injures le repos de ces illus- tres exiles que la France avait pris sous sa protection. Plusieurs feuilles de Paris repoussei-ent victorieusement cette attaque imprevue. IW* d'Andrada crurent devoir a I'hospitalite fran- caise une reponse franche. Force de I'inserer , V Independant la partagea en deux fractions, qu'il fit paraitre a deux jours d'in- tervalles, en les accompa^nant de longues reflexions critiques. Ne pouvant done obtenir justice de ce cote, les honorables ))roscrits se sont decides a publier la brochure que nous annon- cons , et qui est un veritable modele d'eloquence, de^agesse, de critique decentc et mesuree. II suftit de la lire pour reconnaitre combien il y a de grandeur dans leur ame, et debassesse dans celle de leurs calomniateurs. L'ouvrage est precede d'un Avant- Propos du a la plume d'un jeune Bresilu-n qui habite Paris. 23a LIVRES IRANCALS. C'est line Notice biogrnpliique pleiiie d'interet siir les trois freres d'Andrada. D. 8 1 . — * Considerations pour scrvir a Cliistoire da dchwloppe- rncnt moral ct littcrairc dcs nations ; par IM. Joseph B\rd ( de la Cotc'-d'Or ) , nitnibic do phisicurs Academics. Paris, 1826;, Pichard , quai Coiiti. Gr. in-8"; prix, (> IV., et 7 Jr. j^ar la postc. Ce titre semblo aiinoncer lo iVuit d'lui labour du ])lusieurs annc'cs, ou iikmiic los resiiltats dcs meditations d'unc vieen- tiere. Malheureusemcnt, il n'en est pas ainsi : I'autenr en con- vient Ini-meme. Ayant passe en province, dit-il , une partie de I'annee qui vient do s'ecouler ( iSaS ")... , il n'avait d'abord eu d'autre but que cclui de charmer par des etudes se- rieuses des loisirs plains de serenite. II n'avait pas songe k soumettre a I'attention publique ces eleniens epais d'un grand travail. Mais, ajoute- t - il avec modestie, il s'y est determine pour proliter des Iccons sih'drcs dc la criti(itic. La notre sera tout entiere dans I'iuteret de son talent , que nous nous empressons de reconnaitre. II embrasse, dans le plan, ou plutot dans les chapitres de son livre , les phis hautes questions dc; la philoso- phic, quelquefois aussi les problemes les plus difliciles de This- • toire : I'etat de societe; la formation des fiimilles, des peu- plades et des nations; I'influence du commerce, des croisades, de la chevalerie sur la civilisation de I'Enrope ; celle de la li~ bcrte fnonarcluqiie sur le developpement de I'intelligence, etc. Ces questions-la sont immenses; et M. Bard a fort bien senti lui-meme qu'elles veulent etre, non pas effleurees, mais creu- sees dans toute leur profondeur. Or, en les approfondissant, il n'aurait pas tarde de s'ape.rcevoir qu'a la suite, ou a cote de ces questions si vastes qu'il effleurc, I'ordre logique et I'ordre des faits auraient du en amener une foule d'auties qu'il ne- glige memo d'indiquer. Il montrc,- frequemment de I'instruc- tion; mais trop souventil ecrjtd'apres des lectures incompletes ; rarement il lui arrive de remonter aux veritables sources, etla precipitation du travail le fait tomber dans des meprises qui sont parfois singulieres. Ainsi, par exemple, on s'etonne de lire, dans ime note de la jiage 188 : « Xenophon, apres sa superbe relraite des Dix-Millc , fut aborde un jour, dans une rue d'Athenes, par Socrate qui lui baira la voic avec uu baton. Ou trouve-t-on les choses les plus utiles a la vie, demauda le philosophe an heros? Au marche, repondit celui-ci. He bien, ajouta Socrate, venez chez moi, et vous I'apprendrez. Xeno- phon ne quitta plus le grand honime ((ue pour se rendrc a I'ar- mee dc Cyrus. » Quelle confusion d'idees ! Comment Xenophon aurait-il pu se rendie a rarmee de Cvrus, apr&s\A retraite des SCIENCES MORALES. aSl^ Dix-Millc ? Qui ne sail que cette retraite n'eut liou qu'^/j/M la jiiovt de Cyrus , et a cause de cette mort uiome ? Ailleurs, nous voyons dans le texte (p. 119) : « Socrate parlant a I'esprit de ses eleves en meine tems qu'il parlait a leur ame, leur mon- trait ilia fois le plus giand ccrivain de I'antiquite et riiomme le plus sage parmi tous les sages de la philosophie paienne. » Qui ne salt encore que Socrate, loin d'etre le plus grand ecri- vain de I'antiquite, n'a jamais ecrit vnie ligne? Qui ne sail que toutes ses compositions litteraircs se hornerent a deux fables d'ilsope qu'il mit en vers dans sa prison? Mais, pent - etre, rinadverlaiice n'est - elle ici que dans les termes ; peut - etre I'auleur a - t - il voulu et cru dire seulement que le mailre de Platon raontrait dans ses discours un talent egal on meme su- perieur a celui des plus grands eerivains. Eu ce cas, on doit I'avertir que sa phrase dit toute autre chose. En general, le style de M. Bard , qui a du feu et meme de I'eclat , manque absolument de naturel ; on y voudrait plus de justessc, depu- rete, de precision. On voudrait aussi que I'autein- oubliatmoins frequemment que , dans les controverses ]3hilosophiques, les convenances prescrivent la mesure et la moderation. Wous ignorons quels sont les eerivains qu'il qualifie ( page 164 ) de dognintiscurs insoleiis ct peivcrs : mais, si c'etaient par hasard , les adversaires de cette Ecole nouvelle qui prelude glorieuacrnerit a son averiir... , et qu'une note de la page 162 nous apprend etre celle de MM. de Bonald, La Mennais, de Maistre, etc. ; dus- sions-nous encourir rexcommunication de la glorieuse Ecole , nous nous ferions un honneur de nous ranger au plus vite tin parti de ces insolens et de ces pervers. Au lieu de multiplier des observations que I'aiiteur est trop eclaire pourne pas faire lui-meme,en se relisantavec attention et severite, nous aimons mieux consacrcr le peu d'espace qui nous reste a une citation assez etendue pour justifier ceque nous avons dit de son talent. « Soitque I'esclavage fletrisse le genie comme il fletrit le corps, soit qu'un organe devenu paresseux depouille peu a peu les causes de sa perfectibilite , les penples qui ont plie constamment soys un joug de fer n'ont jamais con- nu les elans d'une belle imagination; ils n'ont jamais souri aux tableaux de la prosperite publique ; leur coeur ne s'est jamais ouvert qu'a la volupte grossiere des sens. lis n'ont pas meme su mesurer la puissance qui lesecrasait! Eloquence des tribunes, accens triomphateurs du patriotisme et de la philantropie, ils n ont rien eirtendu! Fables ingenieuses, allegories doucesjet seduisantes, ils nont rien senti! Pompes des arts, magnificence des palais eriges 'k la gloire ou au genie , colonnes d'airain , '^34 LIVRES FRANCAIS. coiipolcs majestiieuses qui portent jusqu'au ciel les lecons du passe, ils n'oiit lien vii! Quelles traces a laissees apies lui le de niaturite dans ses idees comnie dans son style, I'auleur poiura pretendre a des succes. Qu'il se souvicnne que, pour les obtenir, I'important est de ne pas les brusquer. Siquelques pieces de pen d'etendue, dans des genres oil I'inspiration est presquo tout, peuvent etre le fruit d'un heu- reux moment, il ne saurait en etre de meme dans un travail qui doit enibrasscr les plus importantes questions de la poli- tique et de riiistoire. Les grands ouvrages , et surtout les ou- vrages de ce genre , ne s'improvisent jamais. T. S. 82. — * L' Art de verifier les dates, depuls I'annee 1770 jusqu'a fios jours , formant la continuation ou troisieme partic de I'ouvrage public sous ce titre, par les religieux benedic- tins de la congregation de Saint-Maur. T. VI et X. Paris 1826 ; Ambroisc Dupont, rue Vivienne, n" 16. 2 vol. in-S"^ de 5o6 et 5oo p. ; prix du volume , 7 fr. ( Voy. Ac. Enc. , t. xxxii , p. 174. ) Le sixieme volume de cet important recueil contient la suite de la chronologic historique des rois de France et de la chronologic historique des rois d'Angleterre. Dans le tome dixieme se trouve la continuation de la chronologic de I'Ame- rique : la Californie, le Peroii, la republique de Bolivar et le Chili. — Ce grand et important ouvrage, ou sont deposees, pour ainsi dire, les archives de toutes les nations, et qui est indispensable a toutes les personnes occupees d'etudes histori- ques , sera plus tard I'objet d'un examen approfondi dans notre section des Analyses. 83. — * Histoire mititaire des Francais , par campagnes , depuis le commencement de la revolution jusqu'a la fin du regne de Napoleon; ornee Ae portraits , cartes et plans. — Cam- pagnes d'Allenwgne el de Prusse , depuis 1802 jusquen 1806 , par M. Saikt-Maurice. — Campagnes d' Allemagne depuis 1807 jusqu'en 1809, par M. Mortonval. — (M. le general Beawvais a revu ces deux volumes pour les details strategi- ques. ) Paris, 1827; Ambroi.se Dupont, rue Vivienne, n° 16. •i. vol. in-i2 de ^17 et 392 p. ; prix, 3 fr. 75 c. chaque volume. L'histoire de nos longues gucrres , dont la revolution fut I'origine, doit etre conuue de tons les Francais; inais tons SCIENCES MORALES. -235 ii'ont pas le tems de lire du gros volumes. II iie convient c|u'aiix militaires d'entrer dans tous les details d'uii combat , (i'un siege, d'une bataille : les gensdu mondc cherchent -ivoir ces objets dans un cadre plus resserre et qui leur permette d'en apercevoir I'ensemble; et meme, la plupart des militaires ont besoin que ces rapprochemens leur iudiquent la place ([u'occupent, dans I'histoire generale, les faits particuliers dent ils furent temoins. La collection qui renfermera I'histoire de ces fanieuses campagnes ne sera pas trop volumineuse : mais , que les redacteurs aient soin de n'onicttre auciin lait essentiel. Dans les deux nouveaux volumes que nous avons sous les veux , nous n'avons point remarque d'omissions, et la fidelite historique y parait observt'e. On ne sera pas nioins satisfait du style que du choix et de la distribution des matieres. R. 84. — * Biograpliie univcrscllc dassiquc , en un seul volume in-S", d'environ 25oo p. , par M. le general Beauvais, auteur des Victoires et Conqne'ifs, et par une Socicte de gens de lettrcs ; revue pour la partie bibliographique par M. A.-A. Barbif.r, anteur du Dictiorinaire des outrages anonymcs , etc., et par M. Louis Barrier fils, employe aux Bibliotheques particulieres du Roi. 5^ livraison. Paris, 1826; Charles Gosselin. Prix de chaque livraison, sur papier carre saline, 6 fr. ; sur papier cavalier velin , 8 fr. Etablie sur un plan sage qui a perniis de reunir dans son cadre une foule de specialites, toutes importantes par rapport a la masse de documens historiques qu'offre leur ensemble , la Biographic universclle classique a ce merite particulier, qu'elle est appropriee a I'usage d'une foule de personnes studieuses auxquelles le prix eleve des grands recueils en rendait I'ac- (juisition impossible. Outre qu'elle contient, comme en re- sume, la substance essentielle des documens epars dans un nombre immense de volumes, elle remplit les lacunes conside- rables que les evenemens de quatre ou cinq annees laissent aujourd'hui dans les recueils les plus complets. Mais ce ne .sent pas la les seuls litres de sa preeminence relative sur les ouvrages qui I'avaienl pre'cedee : ce qui rend ce livre plus recommandable encore, c'est, a noire avis, le sens juste, ferme et impartial dans lequel il est redige. Les faits y sont degages de toute-interpretation captieuse , de toute hypothese ou sup- position. La verite historique n'y est point comme voilee sous ces vains ornemens dont trop souvcnt une erudition ambitieuse se plait a la surcharger ; et les deductions naissent dans I'esprit till lectcur (\y\ simple recil des faits. 2i6 LIVRES FRANCAIS. Voulant donner a cc vaste travail toute la porfeclion desi- lable, rcditcur a fait un appcl aiix. bienveillaiites critiques do ses iiombreux souscripteiirs. En im'-mc terns (pie M. Charles GossELiN se cri'c ainsi do nouvoaux droits a I'lionorable con- liance cpi'il s'est acquise aiipres dos savans ot des amis des lettres ct dos arts, par plusieiirs entrcprisos d'nnc hanto impor- tance, il assure a cellc-ci un succos plus brillant. Deja, un avertissoment previont Ics souscriptours qu'il sera dolivro- (gratis) avec la 6* livraison, un carton pour los pages 2Gf>-ci68 [ i" livraison ), oil , ontre autres rectifications, on trouvera les deu V articles BiLLAUii-VARF.NNF.setBii.LAUT(yW(7A/r.'/iT'«/«) , mal a propos rejetes de la place que lenr assigne I'ordro alphabetique. Les intcrpollations faitcs dans lo corps de I'ouvrage sont tellenicnt considerables (ju'll e,sl a craindre que les provisions de lediteur, relativcment a son cadre, no vicnnent a otre mises en defant : on effot, si, comma on pout le projugcr, la Biogiaphie imivcrsellc classiqup contient, pour la |jartie bioi^raphique seu- lement, plus de deux mille articles en surplus dos grandes collections du memo genre , I'orreur do prevision devra paraltre fort excusable, puisque sa cause est toute an profit du livre, ot par consequent de ses acquerenrs. Aussi, M. Ch. Gosselin a-t-il annonce qu'immediatement apres la mise en vente de la H^ livraison, il fera parailre, avec le supplement, qui sera consacro aux personnages morts pendant I'impression, toute la portion du livre qui aura excodo les buit iivraisons : un sem- blable sup|3lomont paraitra, de deux en deux annees , pour les personnages ct'lebres, litterateurs et grands artistes, morts pendant cos intervalles. Nous no nous sommes attaches jusqu'ici qu'a faire con- naitre, sous le point de vue d'utilite, lo merite de ce grand travail. Nous pensons avoir ainsi paye a ses collaboratours Ic seid tribut de louanges auquel ils aient aspire, puisque la plupart, gardant I'anonyme, se sont desinteresses au profit de I'ouvrage de toute ambition particulierc. Il convient ce- pendant de donner a juger la maniore dont le cadre est rem- pli, et nous le ferons d'une maniore utile par une simple liste des articles les plus saillans contenus dans cette cinquiome livraison : par M. le general Beauvais : les articles Gaina (Vascode), Grotius , les Guise, les Gustave , Holler, les Henri et Henriette , Hnbbes , le general Hoc/ie , etc.; M. Louis Barbier : Gerson , Heinsius , Heyne , etc.; M. Paulin i>f. Chamrobkrt : Garcia Suello , Garcilaso , Gelee ( dit Claude I-orrain ) , Girodet- Trioson , les Haiiy, etc. ; enfin les aiticlos Grece , Gnehves , Guelfes et Gibelins, Hastings ( bataillo do \ SCIENCES MORALES. 23- HoUande , etc.; M. Clair : Gerbier , Herianlt, etc.; M. Bouii- LET : Gassendi , les saints Gudlaume , etc. ; M. Lalleihent fils : Handel, Haydn, Herculanum , etc.; M. ///«««<:/ Guiixaume : Galilee , Herschell, etc.; M. Septavaux : le cointe Gamier, sir Henri Grattan , etc. , M. le D'' Pichot : Galien , van Hclniont , Hippocrate ; M. Ajiar : Herodotc , Hesiode; M. Duviquet : Geojjrof, Ginguene , Gliick , Grcssct , Gretry, Grimm. En deploiant, avec tons les amis des lettres, la perte dou- loiireuse que la science biographiquc a faite dans la personne du savant M. Barbier , les piicipaux coUaborateius de la Biographie universelle classujuc ont plus par lieu iiereinent a regretter, et pour eux-memes, et pour leur livre, la mort de cet ami precieux, si empresse de se montrcr utile ii tons ceux qu'il honorait de son cstime, sentiment qu'aupres de lui il etait facile de changer en affection plus vive. Mais, en descendant dans la tombe, cet illustre savant n'a pas laisse seulenient le souvenir de ses talens ; depuis quelque terns deja il avait associe M. Louis Barbier, son Ills aine, a ses fatigans travaux, et I'achevement de quelques-uns d'entre eux a ete pour ce dernier non-seiilcmcnt un glorieux heritage, mais encore une obliga- tion sacree, qu'il remplit avec un zele digne des plus grands eloges. C'est ainsi que M. Louis Barbier continue, depuis la V livraison de la Biograplne iinu'erselle classique , la revision de la |)artie bibiiographique de cet important ouvrage, partie dans laquelle sa cooperation ne doit pas moins concourir au succes du livre que cellede I'homme celebreauquel il a succede. - M. le general Beauvais, secondedansce travail aussi delicatque penible par M. P. de Chamrobert, revolt avec soin I'ensemble de I'ouvrage, qui lui doit en grande partie cette harmonie do couleur et de style par lequel il se distingue surtout des autres ouvrages de nieme nature. C. J. 85. — * Annaaire necrologique , on Complement annuel ct continuation de toutes les Biograpiues on, Dictionnaires histo- rifjues , etc. ; redige et public par M. J. Mahul. Annee iSaS (6' annee de la collection). Paris, decenibre 1826; Ponthieu. In-S" de IX — 416 pages, avec 4 portraits (ceux de Z. David, du general Foj, de Lacepede, et du cardinal Consalvi); prix, 8 fr. Si I'heureuse idee qui a preside a la conception de cot ouvrage etait une idee simple, et qui ne demandait point de hautes combinaisons , il n'en etait pas de meme de son exe- cution, et pen d'hommes peut-etre etaient aussi en etat que M. Mahul de I'entreprendre avec des chances de succes. Au grand regret de ceux qui ainient a etudier I'histoire publique on privee, morale ou litteraire, de leurs concitoyens, la pin- 238 I.IVRES FRANCAIS. jjai t dc nos hiogiaphies niodornes sont rc'(Jij^<'es avcc Uno pal- tialite qui porte renipivintc cle la ilissidcnco qui a rej^no trop long-tcms dans nos opinions politiques. Cc n'cst done pas avee une mediocre siuprise qu'on a vu un joune publiciste, dont I'anie ost chalcnreuse ct I'osprit plcin do vivacite, se livrer a un travail qui domandait tant dc calme et dc dignitc , et bicn- tot , par son indcpcndancc et son impartialitc , rcnnii" dans le nombre de ses approliateurs les hommcs des partis Ics plus op- poses. Cctte sagessc et cctte conscience dont il ne s'est jamais depart! , relevees encore par dc longues etudes et des connais- sances reelles en bibliographic, ont acquis a son livre toute I'importancc qu'il nitrite; le succes de X Annuairc nccrolos^iquc est desormais assure dans le monde, et Ton pent dire qu'il est devenu im livre indispensable dans toutes nos bibliotheques. On pense bien , du reste, que dans un ouvrage oii I'imagi- nation ne doit entrcr pour rien , et ou Ton cherche surtout des faits, I'auteur est souvent oblige de s'en rapporter aux per- sonnes qui ont etc a mcnie, par leur intimite ou leurs relations avec ceux dont il ecrit la vie, dc connaJtre et dc rccueillir des renseigneniens exacts , et quelquefois en opposition avec la voix publique ; tout son merite, et ce merite est plus grand qu'on ne pense , consiste alors a comparer les faits entre eux , a les discutcr et a en faixe sortir la lumierc et la verite; M. Mahul s'acquitte de cette tache avec tant d'adresse et de bonheur, que toutes les nuances d'opinion ou de redaction se fondent dans une meme couleur, et que son ouvrage parait ne former qu'un ensemble regulier, et qui lui appartient cntiere- ment. Des correspondans zeles , des ouvrages ct des rccueils estimes lui fournissent souvent des materiaux, et il a toujours soin d'en avertir les lecteurs, en les renvoyant pour de plus grands developpemens aux sources ou il a puise. La Revue Encyclopedique , qui le compte au nombre de ses plus anciens collaborateui's , est souvent mise par lui a contribution , et plusieurs des articles les plus importans de I'Annuaire de iSaS sont empruntes en partie a nos TablelU's necrolngiques. Une seule chose paraitrait a craindre pour M. Mahul , ce sont les com- munications trop minutieusementlouangeuses ou complaisantes de parens interesses a la memoire des personnages qu'il evoque dans son livre ; et deux ou trois articles de son dernier volume nous semblent porter quclques traces legeres de ce defaut , dont il faut surtout que I'auteur continue a se preserver dans I'interet de la verite et de I'tinite de son livre. Tel article aussi pent etre trop court ou meme incomplet , proportions gardees avec le personnage qui en est I'objet : M. Mahul ne neglige SCIENCES MORALES. x^cj flUcun moyen de reniplir les lacunes ou les eneuis, lorsqu'or* les lui deniontre, et deiix ou ttois fois deja il est revenu sur se* pas pour remplir ce devoir, qu'il regarde comme sacre. Mais d'autres articles , en revanche , penvent etre trop longs , et nous croyons la critique obligee de lui signaler celui qu'il a consacre a la cointesse de Mont-Cair-Zain ; cet article occupe vingt pages de son volume , remplies en partie d'extraits des memoires romanesques de cette dame , qui prctendait etre fille naturelle de Louis-Francois de Bourbon Conti , et a laquelle d'ailleurs des persecutions et dcs malheurs avaient trop altere I'esprit pour qu'on put en faire un personnage historique in- teressant, a moins de prouver la verite dc ses allegations. Nous avons cru remarquer aussi un passage un peu severe , et qui contraste avec les preuves que M. Mahvd a donnees de son amour pour la philosophic , dans le commencement de I'article consacre a M""" de Krudner, et ou il parle de Ximmoralite et du cynisnie que Ton professait dans la societe de Diderot , de d'Alembert , d'Helvetius et de Grimm. Sans vouloir nous de- clarer les panegyristes de toutes les opinions des philosophes du xviii^ .siecle, nous ne pouvons nous empecher de trouver exagerees et meme injustes les epithetes par lesquelles on cher- che a les caracteriser ici , epithetes d'autant plus deplacees qu'on les rencontre dans I'article d'ime femme qui, apres ^voir ete un objet de scandale par ses moeurs, s'est montree, sur la fin de sa vie , imbue de principcs et d idees qu'une morale severe ne peut confondre avec la veritable vertu. Debairasses de ces legeres observations , que M. Mahul re- portera d'ailleurs a qui de droit , nous n'avons plus que des eloges a lui accorder pour la totalite des articles qui sont com pris dans son Annuaire de iSaS (i) , et pai'mi lesquels nous en avons remarque un grand nombre qui ne laissent rien a de- sirer, malgre la diversite des connaissances qu'ils exigeaient (i) Ce volume renferme i ii noms pour la partie francaise, et 36 pour la partie etrangere ; on y remarqne 9 femmes , celebres par lenr rang , lenrs vertas, lenrs talens, on meme leurs errenrs; ce sont : la princesse Borghese, la C'se de Mont-Cair-Zain (dite Bourbon-Conti) , M'ups Dufrenoy, deGirieux, Malles de neauUeu , la trop fameuse Manson, et dans la partie etrangere , la C^se dH Albany, la D'^e de Defon.f/iire et M^e Krudner. — Ontre la table ordinaire des noras coinpris dans le volume de iSa5, M. Mahul donne cette fois uue table generate de tous ceux que contien- nent les 5 volumes publics jusqu'ici (1821-182.5). Cette table, dit-i] . devra etre desormais reproduite et completee cbaque annee , de maniere a faciliter les recherches que Von aurait a faire dans la collection. a4o LIVRES FRAINCAIS. dans liMir autour ; li-ls soiit ccux cli' I'abbe de Boulogne et du cardinal Consalvi, dos anciens ministies Bii^nt de Preametieu et Fcrta/ul , du grncral For, dcs savans distingut-s Larepcde , A. Earlier, Barbie da Bocage , des med(!cins celebrcs Beclard , Percy ct Jioyer-Col/ard , de I'helleniste Courier, des artistes Dai'id, Denon, Diipaty et GaiUherot , de I'acteur anglais Keniblc ct ih"i Balgiierie-SdiCtefiberg, des Ckas.iiron , des Haassmann et des Saint- Simon , par les(juels nous termineroiis celte galerie, niais qui ineriteraient d'etre places au premier rang pour les services signales dont lenr sont rcdevables ie commerce et I'industrie, qui deviennent de jour en jour une des grandes necessites et un des ressorts les plus puissans de la civilisation moderne. E. Hereau. 86. — * Me moires nil Souvenirs et anecdotes , par M. le comte DE Segur , de I'Academie francaise. Deuxieme edition. T. III. Paris , 1826; Eymery. In-S"; prix , 5 fr. Peu d'hommes ont acquis le droit de parler d'eux-memes : il faut, pour remplir cette mission delicate , etre sur de sa propre conscience et de I'estime des autres. Le public est avide de recevoir les confidences de M. de Segur : on aime a voir dans le meme homme I'ecrivain distingue , I'academiQien ce- lebre retracer les aventiues du courtisan aimable, et les utiles negociations du ministre d'etat. La troisieme partie de ses memoires est remplie d'anecdotes interessantes , et prescjue inconnues, sur les personnages les plus illustres de la fin du dernier siecle. Leur contemporain ct leur ami , M. de Segur, est reste au milieu de la generation prescnte , comme charge de lui transmettre les exemples et les fails dont il est desor- mais I'unique temoin. La nature lui a laisse sous le poids des souffrances la fraicheur de la pcnsee , la puissance de la me- moire , et la plenitude d'un talent brillant de raison , de grace et de finesse. Les evenemens decrits par I'auteur commenccnt avec son voyage en Crimee, et fmissent a I'epoque fameuseoii la France, eclairee par la philosophie , renversa le vieil edifice des prc- juges , ct donna au monde le signal de la regeneration des peuples. Joseph II , Stanislas , Catherine , et les principaux person- nages qui se grbupent autour de ces souverains, sont peints d'une manierc caracteristique, ct leurs portraits laissent une vive empreinte dans la pensee du lecteur, qui , entraine par I'illusion , croit avoir connu lui-meme les modeles. La celebre autocrate apparait avec eclat parmi les grands qui I'en- lourent : pour bien juger les esprits superieurs , il est neces- SCIENCES MORALES. 241 saire de les surprendre dans tous les instans, de les voir de- pouilles du prestige dont ils s'environnent, pour deguiser aux yeiix du vulgaire les faiblesses de riiumauite. L'intimite qui regnait entre elle et M. de Segur a du , pendant un long voyage , donner a I'observateur tous les moyens de sonder les replis de cette anic profonde, qui souvent ainiait a se confier au courtisan sincere, audiplomate eclaire , que Catherine traitait moins en ambassadeur etranger qu'cn ami dont elle appreciait le nierite et le caractere. Kul ecrivain n'a niontre Catherine sous un aspect aussi favorable que le fait M. de Segur ; niais nul ne I'a mieux connue : la voix de I'homme sans tache est un titre irrecusable aux yeux de la posterite. La veuve de Pierre II n'est point irrepiochable , mais n'est point crimi- nelle. La faiblesse de I'cpouse est rachetee par les grandes actions de la souveraine, qui, superieure a sa nation, egala les plus grands hommes de son siecle. Sur un trone absolu, elle avait compris qu'il n'existe de vraie grandeur pour le prince et pour I'etat que dans la sage liberte, qui n'est que la jus- tice, et dans I'egalite, qui n'est que I'absence du privilege donne par le hasard. Les tzars , ses predecesseurs , avaient souille leurs plus belles actions par des meurtrcs prives ou juridi- ques ; Catherine abolit la peine de niort ; elle pensait que si la loi doit bannir de la societe le criminel qui en trouble I'har- monie , il n'appartient qu'a une puissance surhumaine de lui oter la vie. Honneur au legislateur qui , se refusant a punir le meurtre par le meurtre , intcrdira pour jamais cc chatiment feroce, qui ne pcrmet aucun espoir a I'innocence condamnee, ne laissc que le remords au juge trompe par I'apparence, et dont I'ajipareil barbare accoutume le mcchant a la cruaute , et le familiarise avec le sang qu'il n'hesite plus a repandre a son tour. On verra dans les recits de M. de Segur les vastes projets que Catherine avait concus pour I'agrandissement de son em- pire colossal , et quel etait son espoir sur les destins de la Grece. INous laissons a nos lecteurs le plaisir d'apprendre de I'auteur meme des circonstances que son esprit delicat et le charme de son talent rendent si interessantcs. Les memoires de M. de Segur, avidement recherches malgre les distractions fa- tales de la politique , sont un des monumens litteraires et his- toriques les jilus remarquables de notre epoque. P. 87. — * Memoires sur le considat : 1799 a i8o/( ; par un an- cien conseillcr dctat. Paris , 1827 ; Ponthieu, Palais-Royal , ga- lerie de bois. i vol. in-8° ; prix, 7 fr. Cet ouvrage sera lu avec un grand interet par les hommes T. xxxiii. — Janner 1827. 16 a4a LIVRES FRANC AIS. qui ont tncore assez de raison pour etudier la politique dans rhistoire, ct non dans les reveries de nos publicistes romanti- De la comete , effroi du monde , Qui soumet a des lois la coarse vagabonde .' » Le texte ne dit rien de semblable ; et a coup sur, la marche reguliere d€s cometcs n'etait pas meme soupconnee du terns de .lob. Nous signalons avcc confiance ces legers defauts a M. Le- vavasseur, persuades qu'il lui sera facile de les faire disparaitre d'un ouvrage destine a prendre place parnii ccux dont s'honorc nptre litterature. Ch. 94- — * Odes d' Anacrdon , traduitcs en vers francais, avee 248 LIVRES FRINCAIS. le texte en regard ; par Veissikr Df.scombe. Paris, 1827 (18261; Compere jeunc. In-32 de xxxii et 244 pages ; pi'ix^) ^ fr- M. Veissicr Descombes est profcsseur au college de Henri IV; les devoirs dont il s'acquittc a I'egard des eleves coniies a ses soins se trouvent au rang des plus utiles , etil a droit a de nou- veaux elogcs pour avoir consacre ses rares loisirs ;i repvoduirc les inspirations du chantre de Teos , dont le noni seul sourit a tous les amis des graces et de la poesie. La nouvelle traduction plaira aux hellenistes par sa grande iidelite; a tous leslectcurs, par le talent de la versification. Voici, k I'appui de notre juge- mentjUne citation que nous prenons, en ouvrant le volume. Le poete s'adresse a sa lyre : Je veux celtbrer tonr a tour Et Cadmus et les fiers Atrides; De mon lulli les cordes timides Ne rendent que des sons d'amour. J'essayai de changer un jour Ces cordes et ce luth perfide; Je disais les travaux d'Alcide... Et uion luth repondait amour... Adieu done, adieu sans retour, Heros que I'univers admire. Adieu... les cedes de ma lyre Ne rendent que des sons d'amour. Ceux qui feront une plus ample connaissance avec la traduc- tion de M. Teissier le tiendront a coup srir pour un habile interprete du poete grec. Ce volume dont I'impression est fort bien executee, renffrnie, en outre, un choix des imitations d'Anacrenn par nos auteurs les plus connus. Cette modestie de M. Veissier, qui permet ainsi la comparaison et le choix au lecteur, ne pent servir qu'a rehausscr son merite, puisque la plupart des morccaux qui lui appartiennent sont de nature a soutenir honorablement la concurrence. D. E. g5. — * Amours mjthologiqucs , traduits des Metamorphoses f/'OfvV/t', par de Pongerville. Scconde edition. Paris, 1827; Delaforest. In- 18 de xs.xui et 121 pages; prix, 4 f''- Le succes de cet ouvrage , dont nous avons annonce la pre- miere edition dans notre caliier precedent ( voy. Re^'- Enc. , t. xxxii, page 778), a parfaitementrepondu a nos predictions. Le public s'cst empresse de confirmer les suffrages unanimes que les critiques avaient accordes a ces charmans poemes. M. de Pongei ville a proGte de leur reiniprcssion pour faire disparaitre LlTTtRATURE. 249 cjiielques taches legeres ijue lui seulpeut-etre avaitremarquces. II a joint a Tedition que nous annoncons une elegante Notice sur Ovide , qui ajoute un nouveau prix a ce recueil. Ch. 96. — La Loge disputee , ou la guerre des privilegies et des parvenus, poeme heroi-comique en quatre chants; par M. J. L. B. Paris, 1824; Mongie. In- 18 de 76 pages; prix, 2 fr. Le poerae badin presente de tres-grandes difficultes. II faut placer en premier lieu le defaut d'interet. De quoi s'agit-il , en effet? D'un pupitre, d'un perroquet, d'une loge : les noms ou les faits historiques ne sont meme pas la pour nous soutenir , comme dans le poeme heioi^comique dont Voltaire nous a donne le modele. Le poete accepte toute la responsabi- lite;sujet, intrigue, disposition, denoument, personnages, merveilleux, il faut qu'il invente tout, et ce n'est pas encore assez : si la magie de son style ne soutient pas constamment ^'attention du lecteur, si le melange du plaisant et du serieux, et surtout Foriginalite des idees, des reflexions, ou des tour- nures ne la reveille sans cesse , le poete aura perdu sa cause. L'auteur de la Loge disputee parait n'avoir pas conipris tous les obstacles qu'il avait a vaincre : son action se passe a Moulins ; un intendant (c'est probablcment un receveiu- de de- partement; je ne sais pourquoi l'auteur ne I'a point voulu nommcr ) avait une loge au spectacle. Le gouverneur ( c'est sans doute le prefet ) veut s'en emparer; il la fait demander au niaire, qui, n'osant ni la lui refuser, ni I'enlever a I'intendant, lui en envoie une clef, apres avoir fait changer la garde de la serrure. Les deux I'ivaux se trouvent ainsi exclus de la loge, et s'accusent mutuellement : de la , des proces et des combats termines par la nomination d'un autre prefet et I'eloge du roi. Ajoutez a cela des caracteres communs et mal traces, un style faible, une versification sans couleur, et une intrigue qui n'est que la pale copie de I'immortel badinage de Boileau , et vous aurez en deux mots les causes de I'oubli dans lequel est tombe ce poeme depuis sa naissance. B. J. 97. — Almannch des Muses , ou Choix de poesies fugitives pour I'annee 1827 ( 63« annee ). Paris, 1827; Bouquin dc la Souche. I vol. In- 1 2 de 262 pages, avec un titre grave; prix , a fr. 5o c. C'est une chose vraiment digne de remarque, dans les affai- res les plus graves de la vie, comme dans les moins importantes , qiie la puissance des mots sur la multitude. Long-tems le re- cueil dont nous entretenons ici nos lecteurs a ete regardi- comme I'oracle du gout , et les poetes ont brigue la faveur d'\ a56 LIVRES FRANQAIS. faire paraitre leurs ceuvres; ce toms etait celui de notre gloirt littL'iaire, ct Ton retrouve en parcourant les premiers volumes de \ Almanach dcs Muses , les noms les plus connus et les plus distingues sur notre Parnasse. Tout a coup les mots Ae petite litteraiure , Ac poesie d'alinnnachs , etc., sont venus frapper les oreilles delicates dc nos poetes modernes, et blesser leur amour- propre mal cntendii. Sans ruflcchir au jugcment inconsiderc qui enveloppait tons les recueils poetiques dans la mi'me re- probation, ils ont crainl de voir leurs productions, entachees de ridicule, classees dans hi petite litteratiire , et ils ont fini reel- lemeut par ceder le champ a cctte petite littcrature , qui la pre- miere sans doute avail soime I'alarme, dans son depit de se voir repoiissec d'un recueil dont elle envahit biontot apres toutes les pat;;es. Qu'esl-il resulte de cette defection? D'un cote, I'Jl- manach des Muses a beaucoup perdu de son prix et de son ancienne reputation ; il a cesse d'etr*.- recherche des gens de gout , et meme des gens du monde; d'un autre cote, les poetes ont perdu I'avantage d'y jeter les premiers fondemens de leur reputation, d'essayer leurs forces, le genre de leur talent, le gout du public, etplus d'un a regretle de n'avoir pu le faire, en voyant I'accueil glacial avec lequel on reccvait le volume de ses ceuvres, que ne recommandait ni un nom connu, ni un talent eprouve par la critique. II faudrait aujourd'hui un concours de circonstances , bien difliciles a reunir pour rendre a V Almanacli des Muses, son an- cienne reputation; ct si quelque chose pouvait vaincre a cet egard un prejuge qui commence a avoir force de loi, ce serait sans doute la reunion de plusieurs noms tels que ceux quei nous remarquons dans la table de cette annee. Certes , le talent! de MM. Ancelot , Bignan, Chateaubriand, Denne-Baron, Ed-I mond Geraud, Le Bailly, Pongerville, etc., suffiraient pourl alimenter plusicKrs recueils, ct Ton n'essaiera pas sans doutel de nous faire croire, par un abus de mots, que telle piece qui estadmiree dans leurs oeuvres,perd son merite en changeant d? ])lace ct en paraissant dans un almanach. Ne serait-il pas plug raisonnable , au contraire , de pcnser qu'un choix bien fait des ceuvres de plusieurs auteurs doit etre plus varie ct plus interes-^ sant, que les ceuvres completes d'un seul hommc , et trouverait- on beaucoup d'exceptions a ceraisonnement? N'affectons done point de dedaigner un recueil auquel son editeur actuel, M. GEN-i SOUL, donne tons ses soins, et sachons-lui gre des emprnntS qu'il fait pour nous atix porte-feuilles de nos meillcurs poetesJ Quand on sera revenu du prejuge quienvcloppe tons les recueils poi'tiqiu's dans la nitme reprobation, ct quand les auteurs n^ LITl'ERATURE. aSi dedaigneront plus de sfe presenter eux-niemes, nous verrons peut-etre les noms de Btraiiger, Casimir Delavigne, Lamar- tine, et d'aiilres noms chers a la poesie, reparaitre dans V Alma- nack (les Muses , et un plus grand nombre de pieces inedites viendra lui rendre la fraicheur de la jeuuesse et I'attrail de la nouveaute. E. Hkreau. 98. — Fables de Charles Perrault, traduitcs dii latin de Faerne , poete de Cienisne, precedees des P^ies de ces deux ecrivains , et enrichies de notes instruct ives et lltternires , par M. BoiNviLLiERS, de I'lnstitut royal, etc. Paris, 1826; Eug. Balland, rue des Mathurins. In-i8 de 200 p. petit-texte, et erne de quatre gravures ; prix , i fr. 5o c. Faerne naquit a Cremone, ville d'ltalie. Poete distingue, il ecrivit en latin des fables qui obtinrent le plus grand succes; elles furent imprimees a Rome, en i564, avec beaucoup de luxe, par ordre du pape Pie IV, et elles furent dediees au cardinal , son neveu , connu depuis sous le uom de saint Charles Borromee. Charles Perrault les traduisit en vers en 1699, et lespublia, a la satisfaction du grand roi et des gens de lettres de son tems. II les dedia au savant abbe de Dangeau, qui, sous les auspices du marquis de Dangeau, son frere, elevait gratui- tement douze gentilshommcs sans fortune , lesquels , en sortant de ses mains, etaient nommes chevaliers de I'ordre de Saint- Lazare. Les fables de Ch. Perrault (frere de Claude, qui donna le dessin de la belle facade du Louvre ) ne se trouvant plus depuis long-tems dans le commerce, M. Boinvilliers a eu I'idee de les reproduire avec quelques changcmens , devenus indis- pensables, et accompagnees de notes litteraires et de reflexions morales qui ressortent natureliement du sujet. Il est a remar- quer qu'il y a entre Faerne et Perrault cette heureuse confor- mite de caractere et de situation, que I'un et I'autre n'ont use de leur credit aupres de leur souverain respectif que pour etre utiles aux lettres et aux arts. Le recueil des fables de Perrault manquait a la collection des fabulistes francais que M. Eug. Balland se propose de completer; et ce qui manquait a cet ouvrage, devenu introu- vahle, c'etait un commentaire utile qui offrit a la fois des preceptes de gout et un petit code de morale a la portee des jeunes gens. Les hommes de lettres qui savcnt combien les Academies, en general, doivent a Ch. Perrault, et ceux qui se rappellent avec plaisir les contcs defecs de cet ingenieux aca- demicicn, ne liront pas sans interet ses fables, c|ui respirent un air aimable d'antiquite, et oil Ton ne rencontre ni ces expressions ambitieuses, ni ces tours mtitaphoriques qui de- 25a LIVRES FRANCAIS. parent les fables nwdernes. L'cditeiu" a lait prticcder son recueil de I'epitre dcdicatoiie ct de raveitissement meme dc I'auteur, et il I'a tcrminc par les failles que plusieurs littera- teurs dc nos jours ont librement traduites dc Faerne et dc Phcdre , et que notre celebre La Fontaine n'a pas jugc a propos de s'appropricr en les imitant. II a pense avec d'autant plus d(r raison qu'il devait presenter aux jeunes gens ces imitations poetiques, qu'elles leur offrent des eoniparaisons a faire, et qu'il a deja donne en leur faveur une edition soignee des fables de Phedre et de celles de Faerne, avec la traduction en regard de ces deux ecrivains ; I'un du siccle d'Auguste , I'autrc du siecle des Medicis. D***. 9y. — * Fables, par T.-C.-F. Ladoucktte, membre de plusieurs Soeietes savantes et litteraires. Paris, 1827; Saintin. In-i8 de 187 p.; prix, 2 fr. 5o c. II est diflicile d'annoncer ini recueil de fables, sans que celles de La Fontaine ne se presentent a I'esprit, et sans etre tente de faire des comparaisons qui, en general, uc tournent pas a I'avantage du nouvel ouvrage. En effet ^ aucun des auteurs qui ont suivi dans la carriere notre grand fabuliste, ne pent lui etre compare. Soit qu'ils aient cheixlie a I'imiter, soit qu'ils aient piis une route differente, tons sont restes fort loin de lui; et, parmi ceux qui se sont le plus distingues, on pent dire qu'il n'cn est pas un qui soit parvenu a donner a son nom ime veritable celebrite. Mais ce n'est pas eux qu'il faut en accuser : cet effetest trop constant pour n'avoir pas une cause positive et independante du plus ou moins de talent. En y reflechissant , on croit la voir dans les changemens que, depuis La Fontaine, la suite des terns a apportes, non-seulement dans la maniere de rendre ses pensees, mais dans les pensees cUes- menies. Ellcs etaient alors renfermees dans un cercle qui depuis s'est agrandi presque a I'infini : ellcs ne se rapportaient, en quelque sorte, qu'a ce qui touchait directement I'liomnie, sou caractere, ses moeurs, ses eiTCurs; ct elles etaient exprimees avec cette simplicite de diction a la fois riche et concise dont on retrouve les traces dans les ouvrages les plus abstraits du siecle de Louis XIV, et (jui est une des conditions les plus necessaires du genre de la fable. Aujourd'hui , tout a change d'aspect dans la litterature , le style comme les idees. L'impulsion que les ecrits de nos phi- losophes modernes ont donnee a I'esprit humain , et les grands evenemens qui en ont etc la suite, I'ont comme ])orte au-dessus dc lui-meme, et I'ont contraint a se creer des routes nouvelles. L'autem- veut tout cmbrasser, tout approfondir, tout decrirc.. .LITTERATURE. a55 La passion de la verite, si Ton ose ainsi parlor, se mele au besoin dcs lumieres; Fexpression est devenue aussi forte, aussr vive que la pensee : elle s'eleve, elle s'etend, elle s'egare avec elle, et la morale douce et familiere des fables parait insufi!- sante a I'esprit mur , rcmpli d'idecs grandes et positives , el: qui se sent gene par la seulc necessite d'avoir a la cherclier a travers les formes pen brillantes et souvent embarrassees sous- lesquelles le fabuliste la presente. A ces difficultes il s'tn joint une autre plus insurmontable encore. Les ecrivains du siecle de Louis XIV ne cherchaient ■pas, comme ceux de nos jours, a se distinguer dans plusieurs genres de litterature. lis se concentraient dans celui vers lequel ils se sentaient entralnes, et ils s'y devouaient presqu(> uniqirement. Ils s'enrichissaient aussi des tresors que nous ont laisses les auteurs anciens dont ils nous transnicttaient les chefs-d'ceuvre ; et toutes leurs facultes, tout leur talent se reu- nissant ainsi sur un seid point, il en resultait que I'oeuvre du genie etait a peu pres complete, et ne laissait que peuou point a dire a d'autres. C'est ce qu'ont eprouve tous ceux qui ont voulu suivre les traces de Corneille, de Boileau*, de Moliere, et, a plus forte raison, de La Fontaine, dont les petits tableaux, renfermes necessairement dans des limites etroites, se sont plutot epuisos que la critique des moeurs, le developpement des passions, les grands evenemens de I'histoire. Aujourd'hui, la force du lion, la finesse du renard, la sottise de I'ane, ne peuvent plus etre prescntes sans defaveur, meme dans la meilleure fable. II a fallu chercher d'autres tours, d'autres images plus nobles et plus adaptees au gout du siecle. Le recit, la discussion, ont pris la place de I'action ; le trait brillant ou philosophique , de la bonhomie de I'expressiou : il n'est rien dans la nature qui ne soit anime sous la plume du poete, pour raisonner sur les faiblcsses humaines; le langag(; meme des animaux n'a plus «te, comme dans La Fontaine, celui qui leur etait propre, mais I'exprcssion des erreurs et des passions des hommes ; et le genre de la fable a perdu ainsi son caractei'e primitif , sans on prendre \m assez prononce pom- qu'on ait pu jusqu'a pic- sent lui assignor une place veritable. Cepcndant, rien ne parait s'y opposer. Ce genre peut aussi en devenir un ; et s'il acheve de s'elever a la hauteur des idecs philosophiques et de s'affranchir de ces images que Ton peut abandonner a I'^nfance, il prendra aussi .son rang dans la litterature. L'allegoric, la metaphore, qucUcs qu'elles soient, sont un cadre dans lequel la verite, I'analyse des sentinuu-. a54 LIVRES FRAN^AIS. des passions peuventetrc egalcment bien placees; et du moment ou Ton renonce a fairc des comparaisons qui, comme je crois i'avoir pronvo, ne pciivent etrc raisonnablcment etablics, si I'aiiteiir inUrcssc, s'il attache, s'il eclairc, il a ccrtainement atteint son but. Cost CO que Ton pent dire des fables que vient de publier M. Ladoucrtte : on sent, en les lisant, qu'il n'a voulu imiter personne ; que le vers s'est presente a son esprit avec la pensce. II la inontre tour a tour sous la forme de la moralite, de la reflexion, de la digression; mais, en general, il plait et entraine. Son style est celui de la bonne ecolc. II salt I'animer a propos par des vers philosophiqucs, et, ce qui plaira davan- tage a plus d'une jeune lectrice, par des traits gracieux de sentiment. On pourrait hii reprocher quelques negligences echappees a la rapidite de I'inspiration; mais elles ont peu d'importance : elles disparaitront facilcment dans une seconde edition, et elles n'empecheront pas que I'ouvrage n'obtienne «n succes qui sera confirme par tous les gens de gout. Quel- ques-imes do ces fables sont imitees de I'allemand et de I'an- glais : de Pfeffel, de Lessing, de Richardson, etc. Mais cellos que I'auteur tire de son propre fonds nc Icur sont pas infe- rieures ; on en jugera par la citation suivante : Le Flambeau. Dans la cour de son maitre, un jonr le bon Sosthene, Regardant un flambeau , Croit que les aquilons I'eteindront d'une baleine : II brule cepeudant d'liu feu toujours plus beau. Le precepteur, en bomiue sage, Saisit cet a propos, et dit : Mon cber enfant, Tu le vois bien : Tenvieux c'est le vent, Et le flambeau du mcrite est Tiniage. M. de Ladoucette est aussi connu par plusieurs ouvrages es times , entre autres par une traduction du Plulocles de Wieland j par le Troubadour, histoire provencale. Ma-is sa production la plus remarquable est sans contredit son Voyas^c entre Meuse^ et Rhin , qui rappelle les hautes fonctions administratives qufl I'auteur a exercees si honorablement dans ces contrees, et qt lui assure un rang distingue parmi nos litterateurs et nos ot servateurs philosophes. C. de S. loo. — Trois chants heroiques , par Eugene l'Ebraly. ParisJ 1827 ; chez les libraires du Palais-Royal. In-S** de 56 page^ LlTTJfcRA.TURE. a55 Si I'auteur de ces trois chants, qui n'a pas encore attcint sa iS'ue annee , me consultait siir sa vocation poetiqne , j'oserais lui donner quelques esperances. II y a dans le debut du pre- mier, intitule JVatcrlon , et dans quelques passages de son Hcllcnide , de la chaleur et unc sorte d'inspiration ; mais c'est la tout ce qu'il m'est possible de lui accorder. M. L'Ebraly ne sait encore ni tcrire ni penser. Ses idees marchent au hasard; son style , herisse de grands mots et de phrases pompeuses , ne sort de I'obscurite qu'en tombant dans le prosaisme. On voit que I'affectation et I'enluminure a la mode, ont seduit sa jeune muse. S'il continue de faire des vers , il doit s'exercer, avant tout, a ce que dedaignent la plupart de nos jeunes poetes, a s'exprimer a la fois noblement et simplement. (1h. 1 01. — Monsieur Dent.scourt , ou le Cuisinier d'un grand homme , comedie satirique. Paris, 1826; Touquet. In-Sa de Sa pages; prix, 25 c. 102. — L' Academic , oii lei Memhrcs introiivables , comedie satirique en vers, par Gerard. Paris, 1826; Touquet. In-8° de 44 pagf^s; prix, i fr. io3. — Napoleon ct Talma , elegies nationales nouvelles , par Gerard. Paris , 1826 ; Touquet. In- 8" de 10 pages; prix , 3o cent. M. Gerard a eu soin de nous prevenir, dans sa preface et dans son elegie, qu'il n'a que dix-sept ans. Sans nous arreter k lui montrer combien sont faibles les pieces qu'il a presentees au public , nous aimons a reconnaitre dans ses deux satires , de I'esprit, de la gaite et de la verve. Si M. Gerard veut profiter des conseils de quelques critiques severes , et perfectionncr les dons qu'il tient de la nature, il pourra faire dans ce genre des ouvrages qui survivront aux circonstances, et qui assu- reront a leur auteur la seule gloire dont il doive etre avide. Mais , d'abord , (ju'il se garde bien de choisir pour sujet d'une satire ce qui ne pent fournir que la matiere d'une epigramme. Les petits journaux avaient reproduit jusqu'a satiete des plai- santeries sur Esaii , les lentillcs , et le droit d'ainesse ; comme sur M. Roger, le pauvre du Pont-des-Arts , et I'Academie. On avail ri des diners ministeriels , comme de certaines preten- tions litteraires : comment M. Gerard a-t-il pu croire qu'il com- poserait une bonne satire en rassemblant tons les quolibets de la Nouveaute , de la Pamlore et du Figaro ? Et cependant, sa preface prouve qu'il n'a pas voulu faire autre chose. II y peint i'anxiete d'un auteur qui ne sait comment terminer son ou- vrage , et qui, pour y coudre une fm telle quelle , attend que les evenemens le dispenscnt d'en imaginer une. Avec cctte a56 LIVRES -FRANCAIS. maniere tic composer , ridi;e-inere du poeme est la seule reellcnient bonne , et tout le reslc n'ost qu'un remplissage qui accuse on la precipitation , ou Timperitie , ou la paresse do I'auteur. Aussi , dans les deux opuscules dont nous parlons , I'exposition est-elle ce qu'il y a de mieux : dans le Cuisinter (Van grand liomnic , apres luie chaude allocution a tons les fournisseurs, le heros du drame M. Dcntscourt vante a son frere cadet, que d'ailleurs il traitc fort nial , et son genie et sa puissance : « Ignorant que vous etes , lui dit-il, Dans I'etat oil le sort jadis m'avait jete, Un cuistre conime vous seiait toujours reste : Moi, j'en ai su bientot laver rignoniinie : II n'est point d'etat vil pour riiomine de genie. Afia de s'elever, il faut ramper, dit-on; On devient cuisiuler ; mais on nait marniiton. Si les vers ne tombaient pas un a un , convenons que celte nouvclle version du nascuntiir poetce , faint oratores , serait une chute assez heurcuse. D'autres vers ont une tournure pro- vcrbiale. Mais dcs vers et quelques mots mordans, c'est a peu pres tout ce qu'on trouve dans cette pretendue comedie. La satire de I'Academie, bien superienre a tous egards, offre au-j moins une scene (entre deux academiciens) assez bien con- duite , pleine de verve, et malheureusement aussi de negli- gences; mais ou Ton trouve a la fois une pensee bien deve- loppee , et des vers heureux , entre lesquels je me borne a citer ceux-ci , qui sont exempts de personnalites : Vous avez prefere , bi'avant I'ignominie , L'horame grand au grand homine et le rang au genie : Le public sait pourtant distinguer a son gre Le modeste savant de Tignorant titre. Sous la peau du lion I'ane en vain fait merveille, Ou s'y trompe un instant : mais gare au bout d'oreille. II dut bien s'etonner d une telle a venture, Et ponvait s'ecrier, eomnie daus I'Ecrilure, En lisaut son brevet a rimraortalite : Qu'a:-je done fait, Seigneur, pour Tavoir merite? Ces citations suffisent pour montrer que I'auteur sait trouve* Texpression poeticjue, et en mcme tems forte et plaisante , (juand il veut la cliercher : mais c'est ce qu'il oublie trop sou-j vent de fairc. Quant k ses elegies , nous n'en dirons rien, si ce'n'esl que la I LITTERATURE. aS? lecture attentive de ces' deux pieces nous a demontre que I'au- teur lui-meme ne savait pas bien ce qu'il avait k diie , et qu'il avait fait des vers pour faire des vers, en attendant qu'un sujet lui donnat Toccasion de produire quelque chose. B. J. 104. — * Epitre aux Chiffonnicrs sur les crimes de la prcsse , par J.-P.-G. ViENNET ; avec cette epigraphe : « Pais ce que dois , advicmie que pourra.» Paris, 1827; Ambroise Dupont , libraire, rue Vivienne,n° 16. In-8° de 16 pag. ; pri.v, i fr. La muse patriotique de M. Viennct s'est deja rendue plus d'une fois I'inteiprete de Topinion et de la raison publiques , pour dcfendre leurs droits et conibattre leurs adversaires. En dernier lieu , elle a plaide avec energie la cause des Grccs , dans line epitre etincelante de verve, adressee a I'Enipcreur Nicolas (voy. Rei>. Enc. , t. xxix, p. 553). Mais , jamais peut- etre elle ne futniieux inspirec que par I'indignation profonde, legitime et sainte, que tons les coeurs genereux , tons les esprits eleves, tous les bons Francais, tons les amis des lumieres et de I'humanite ont ressentie , en voyant apparaitre , conime un spectre hideux du nioyen age , ce projet de loi vandale (sur la police de la presse) , qui est une insulte publique a luie nation eclairee , une violation manife.'rte de I'un de nos droits les plus precieux , garanti a la fois par notre pacte fondamental , et par les sermens augustcs et solennels du monarque; eniin une de- claration de guerre a rintclligence et a la pensee humaine, dont sans doute nos chambres legislatives feront bientot jus- tice. Desecrivains de toutes les opinions, des citoyens de toutes les classes , des associations commerciales et industrielles, des corps savans et litteraires , a Paiis et dans nos departemens , et la pliipart des journaux les plus repandus , en France et dans les pays etiangers , ont deja fait retentir un cri unanime de protestation contre cette tentative aiidacieuse et inouie, qui nous revele I'avenir que destine a la France et a I'Europe la faction jesuitique et apostolique , si habile a se placer, conime nous le voyons dans la malheureuse Espagne , entre un roi et un peuple, pour dominer le premier etle rendie un docile et servile instrument, pour opprimer et exploiter le second et en faire une victime et une proie. Le cadre ingenieux qii'a choisi M. Vicnnet lui fournit le moyen de produire, sous une forme neuve et piquantc, les ve- rites et les sentinicns qu'il cxprime. A])res avoir dit aux chif- fonniers : Dans votre hotte immonde Vous portez en lasses tons les fleaux du nionde, T. xxxiTi. — Jam'irr 1827. 17 i58 LIVRES FRlNg/VlS. il rappelle ainsi rinvcntion de la fabrication du papier et de rimprimerie : Ce fnt dans ce bon tems oil le pape et les rois Brulaient les Tenopliers , les Juifs et les Vaudois, Qa'iiu Padouan, souffle par son mauvais genie, De ces cliifTons piles foruiant une bouillie,- En lira ce papier, qn'au gre de leurs cerveanx GrifFonnent joar et nuit des milliers de grimauds. Bientot parut Coster ; et le hetre docile Se tailla sous ses doigts en alphabet mobil*. Des fourneanx de Scheffer dans I'argile coule Le plomb seditieux en lettres fut moule. Par Fust et Guttemberg oes lettres assemblces, Furent sar un plateau par la presse foulees; Et le papier retint sur ses fenillets presses L'empreinte des ecrils par le plomb retraces. Le inonde en tressaillant apprend cette merveille.,. Les vers qui suivent presentent un tableau rapide et anime dc I'histoire de la presse et des sci'vices qu'elle rend, en revtlant a I'homme son genie et sa destination, en foarnissant a I'intelli- gence une artillerie formidable pour combattre les abus. IVous ne ponvons resister au desir de citer encore ce tableau si precis de notre revolution : Rien ne put accorder I'esprit et la puissance ; En deux sens opposes ils tirerent la Fi-ance ; Et le cbar de I'Etat, par les siecles use, Fut avec le cocher dans un gouffre ecrase... Tandis que vingt parlis , engendres par I'orage , S'arrachent a I'euvi les debris dn naufrage, Un soldat s'en empare et garde tout pour lui ; An prix d'une couronne il nous vend son appui. Mais, loin de nous batir une France nouvelle, II refait Charlemagne, et declame contre elie; II met la presse aux fers, proscrit la verite, Dans les bras de la gloire endort la liberie ; Et, courant en aveugle oix sa tete le mene, De conquete en conquete il tombe a Saiute-Helenc. L'epitre est ternoinee par une peintiire vraie et vivement sa- tirique de noti'e situation actuelle , et des efforts contre-revolu- tionnaires Des hordes parasites D'intrigans, d'espions, d'esclaves , d'hypocrltes , Qui, faisant de leur zele un trafic eternel , Exploitent les |;rands noms du tr6ne et de I'autel. M. A. J. LITTERATURE. aSg lo5. — Servius Tulliu's, tragedie en cinq actes,par U.-E. Bou- ziQUE. Paris, 1826; M^Levi. In-8° deSi pages; prix , 3 fr. 5oc. La fiUe de Servius TuUius qui, pressee de regner, armeson mari centre son pere; ce vieux roi siiccombant sous les_ coups des patricians pour avoir voulu fonder la liberie publiquc et abdiquer I'empire : voila certes un sujet interessant et drama- tique. Mais , pour dessiner le caractere de TuUie , il faudrait le pinceau de Corneille, et M. Bouzique n'est pas a cette hauteur. Sa piece est faiblement concue , tant sous le rapport des carac- teres que sous celui de Taction ; elle n'offre guere qu'une situation thcatrale , la scene oii Servius Tullius annonce a Tarquin son gendre , et a Junius qui sera pere de Brutus, son projet d'etablir la republique. Le style est generalement pro- sa'ique et neglige. II offre pourtant quelques beaux vers dans la scene que nous venous d'indiquer; nous avons aussi reniar- que la tirade suivante que I'auteur met dans la bouche de Tar- quin , au second acte : « Sais-tu qui la noblesse attaqae en Tullius? Est-ce I'usurpateur de mes droits meconnns ? Non, s'il daignait sur eux laisser tomber ses graces, En eloges bientot finiraient les menaces. lis detestent ce roi de tous les citoyens , Qui met au meme rang nobles et plebeiens ; Ce roi qui, tonjours sage et ferme en sa justice. Refuse aux courtisans le salaire du vice; Et, les conlenant tons aui bornes du devoir, Dans I'iuteret commun exerce le pouvoir. De la tous ces oomplots , ces baines, ces vengeances. Mon empire est pour eux plus ricbe d'esperances : Un roi qu'ils auronl fait, et dont Tautorite S'appuira sur eux seuls centre un peuple irrite, Doit, a ses defenseurs aljandounant les renes , Les laisser a loisir se pajer de leurs peines. Tel est le but oil tend ce zele ofiicieux. lis celebreut Tarquin , ils I'elevent aux cieux; C'est un liberateur, le pur sang de leurs maitres ; lis en feraient uu dieu, pour s'en faire les pretres. » On voit, par ce morceau, que M. Bouzique a quelquefois de la vigueur dans la pensee. Mais il ne possede encore ni le colons poctique, ni la chaleur passionnee qui^ convient au theatre. Cn. 106. — Oiing-Kong , gom'erneur du jeune prince Koukouli : Lettres chinoises. Paris, 1827; Ambroise Dupont. In - 12 de 8 1 pages ; prix , 2 fr. 17- 26o LIVRES FRANCAIS. SciiR-escle tiaits heureux et de ponsi'es profondes, les Lcttres persancs f'urent applaudios avoc trautii)orl par dos Iccteurs dont Montesquieu llattait les sentimens scerets, pcut-etre involoii- tairenient ; et ce succes eelatant (it eclore une I'oule de pales copies qui toutes eiiipruiiterent le cadre de ses tableaux satiri(jues, sans en rapjjeler le brillaut coloris. L'auteur des LcUre.s chinniscs que nous annoncons n'a point pi'etcndu, k riniitation de ee grand niaitre , rclever toutes les inconse- quences dont I'aspect pourrait etonner un voyai^eur etranger a nos usages. Eflrave sans doute de cette tache innnense, il a senti qu'il aurait trop a laire, et nous ne saurions le blanier dc sa discretion. Sous le niodcste voile de I'anonynie, il s'estcon- tente de porter ses regards scrutateurs sur I'education dujeune prince imperial de la Chine qui vient, au sortir de la tutelledes femmes, de passer entre les mains d'un gouverncur. L'allusion, Gonime on voit, n'estpas bien dil'licile a saisir. A titre d'ami de ce gouverneur, il luidonne des conseils sur la conduite a tenir dans les nouvelles fonctions auxquelles vient de I'appeler la faveur du prince. Entre autres preceptes moins importans, il lui re- comniande de donncr a son auguste eieveune leinturegenerale des sciences et des arts, de lui i'aire cultiver les lcttres , dans le but de le preparer a parler en public avec elegance et precision; de I'exereer aux. amies et a la dause, afin qu'il puisse acque- rir la noblesse exterieure, indispensable , aux yeux de ce con- seiUcr, pour attirer les respects des peuples. La noblesse de I'ameest, a notre avis, beaucoiqi plus essentielle. Uans son systeme d'edueation, on ne doit apprendre aucun autre art d'agrenient a I'cnfant royal; car ee precepteur severe ne per- met pas de consacrer , sur le trone, un seul instant aux distrac- tions qui rcniplissent les loisirs de la vie privee. Son attention doit ctre principalcment dirigee vers I'etude dc I'histoire ; niais ' avant tout, il faut le maintenir dans un juste equilibre deprin- cipes religieux , a I'abri de rinfluence des bonzes , espece de ' moines niendians de la Chine, comme on en voit probable- ment en France. Le gouverneur promet de suivre ces instruc- j tions : I'avenir nous apprenclra s'il a etc fidele a sa parole. Le style de ce petit ecrit ne manque ni de facilile , ni de correc- tion ; mais on y chercherait en vain des idees neuves ou pro- i fondes. Nullepart l'auteur nc fait sentir la difference qui cxiste entre un roi'constitutionnel, suivant, sans Ic diriger, le mou- vement de son siecle , spectateurplutotqu'acteur dans les com- ' bats de I'aristocratie et de la democratic, dans la lutte des doc- trines anciennes contre les ojiinions nouvelles, et un monarque absolu , presidant une cour idoiatre et frivole , commandant i] LITTERATURE. aGi tin ])eiti)k' souiiiis ct drvoiu', tels que fiiient Louis XIV ut Francois I*"'. Jrl. V,. 107. — * OEuvrcs co/ii/j fetes fie M. Cooper, americain, tra- diiites de I'anglais, par A.-J.-B. Dkiauconpret. Paris, iSaS- 1826 ; Ch. Gosselin, rue Saint - Germain - des - Pres, n° g. 24 vol. in- 1 2 de 3oo pages enyiron chacun. ( Precaution , ou le Choix d'un innri, precede d'une Notice stir 31. Cooper; 4 vol. — L'Espion ; 4 vol. — Lex Sources (hi Susquehanna, ou les Pionniers , ronian descriptif; 4 vol. — Le Pilote, histoire ma- rine; 4 vol. — Lionel Lincoln ou le Siege cle Boston ; 4 vol. — Le dernier des Mohicans, histoire' de 1757; 4 vol. ) Prix des OEnvres completes , 60 fr. ; de chaque reman detache, 10 fr. M. Cooper dehuta dans la Htterature par un roman moral, Preca/uion , qui apparticnt a I'ecole des miss Burney et Edge- worth , et qui , nieme apres les productions de ccs aimables autcurs, a ete lu avec plaisir. Toutefois , cc n'est point dans ce genre qu'il a obtenix sa grande reputation, a la fois aniericaine et europeenne. L'Espion , les Pionniers , le Pilote, le dernier des Molucans , imitations plus ou moins heurenses des chefs-d'oeu- vre de Walter Scott, re]ion(laicnt mieux aux goiits de notre epoque; et ces productions rcmarquables ont ete accueillies avec faveur, meme apres Tvanhoe , les Puritains et IVaverley. On Y trouve des portraits bien traces et qui ne seraient point renies par le peintre dc Meg - Merrilies, de Dominie Samp- son , etc. ; les heros de la guerre de I'indepcndance v apparais- sent, de terns a autre, commc Richard dans h'anhoe , ou le pretendant dans IVaverley ; enfin , les rives du Susquehanna ou de I'Hudson , les forcts vierges de I'Amerique , les colonies naissantes de I'Etat de New - York , y sont decrites avec cette fi- delite , cette vivacite de couleurs qui ont fait connaitre a I'Eu- ropc entiere les bords du Solway, les glens de la haute Ecosse et les cites d'Edimbourg et de Glasgow. Nous avons I'avantage de posseder maintenant M. Cooper a Paris, ou Ton va publier sous ses yeux la traduction francaise d'une nouvelle production sortie de sa plume , intitulee les Prairies , et qui doit nous offrir la description de plusieui's vastes contrees dc I'Amerique du Nord, oil sont encore des tri- bus errantes et nomades. L'ingenieux romancier et historien a visite les licux qu'il decrit : il a pris la nature sur le fait pour la pcindre; il a observe de pres les peuplades dont il fait con- naitre les usages et les mosurs : il a reflechi long-tems sur les sujets qu'il traite , et que sa riche et feconde imagination em- bellit par des relations pleines d'interet. La publication de son nouvel ouvrage nous fournira I'occasion dc I'evenir sur ses a6a LIVRES FRANCAIS. autres romans et de Ics rappiochcr dans uii exanien compara- * tif, pour en fairc niicux saisir I'cspiit ot I'ensemble. J. io8. — Anruinire anccdoticiuc , on Souveniis contemporains;. Janvifi" mil huit cent vingt-sept. Secondc edition. Paris, 1827; Ponthienet C''= . In-i8 de xiv et 343 paj^es; piix, 3 fr. On lit encore avec plaisir les Memoires de Bachaumont et quelques reciieils du meme genre, ou , parmi beancou]) de choses oisenses, on tronve dcs anecdotes piquantes, des traits carac- teristiqnes qui peignent les tems et les hommes ; enlin , des materiaux que ne doivcnt dedaigner I'historien ni le nio- raliste. L'annuaire dont nous avons a signaler aujourd'hui la seconde apparition (i) , sans presenter le meme degre d'interct, pourra trouver place a cote des collections que nous venons de citer. II sc compose en majeure partie d'emprunts faits a nos joiirnaux , et surtout a ces feuilles legeres qui circulent dans nos cafes et qui nc vivent guere plus long-tems que les modes en tout genre dont elles s'empressent de repandre les arrets. Quelques hommes d'esprit president a la redaction de ces jour- naiix epliemercs; et, de tems a autre, d'heureuses inspirations viennent se perdre dans la foule des fades nouvelles et des essais malheureux auxquels I'obligation quotidicnne de remplir quatre pages doit necessairement donner place. L'auHuairc anecdotique est done destine ii sauver d'un oubli total nn cer- tain nonibre d'anecdotes curieuses et d'epigrammes aiguisees avec malice ; mais, s'il veut lui-mcme survivre a la circonstance , nous conseillerons a ses auteurs plus de gout et de severite dans leurs choix, dussent-ils reduire de quelques pages leurs fastes anecdotiques. 109. — Almnnac.h dcs spectacles , pour 1827 , Nontenant I'analyse des pieces nouvelles, avec les couplets les plus sail- lans de chaque vaudeville; I'indication des debuts; Ic person- nel des theatres de Paris, dcs departemens et de I'etrangcr; la recapitulation des artistes dramatiques francais; la demeure des artistes de Paris; le prix des places aux theatres, specta- , des et etablissemens publics de la capitale; les nomsdes artistes qui se sont distingnes dans le courant de I'annee, ceux qui ont voyage; la nomenclature dcs auteurs qui out ete ou qui sont acteurs;la nomenclature des claqueurs en chef; notes sur les repertoires, les mutations, nouvelles, renseignemens et reglemens concernant les theatres; la necrologie des auteurs , (i) Nous apprenons , pav ravertissement , qu'un Annuaire anecdotique avait ete public deja en Janvier 1 826 , et avail obtenu quelque socces. LITT^RATURE. ^61 acteurs et actrices, morts en 1826; ouvrage utile au.\ etran- j^ers et a toutcs les personnes qui appartiennent aux theatics , ou qui les frequentent. Sixieme annee. Paris , 1827 ; J. M. Barba. In-i8 de 388 pages; pi'ix, 4 fr- Le title de cet aliiianach suffit pour faire connaitre son contenu. Sans en donnor d'analyse plus detaill«e, nous -nous contciiterons d'y puiser quelques faits qui meritent d'etre recueillis. II existe 91 troupes drainatujuesfrancaiscs , dont i3 i Paris (y corapris celle du Theatre iles Nouveautcs); 62 dans lereste de la France; 9 en Belgique qui desservent les theatres de la Haye , Amsterdam, Anvers, Bruxelles, Tournay, Gand et Liege; 1 a Saint-Petersboui'g, qui ne donne guere r.iaintenantque le vaude- ville ; I a Vienne, pour le vaudeville, la comedie de genre et I'opera-comique; i a Londres , qui joue le vaudeville sur le theatre de Tottenham-street; i a la ]\ouvelle-Orleans; i a Rio- Janeiro, qui est cxclusivement consacree au ballet; enfin , i a Berlin et x a Geneve dont I'Almanach ne fait point mention. Ces troupes se composent de 2,994 individus que Ton peut clas- ser ainsi : 1,876 acteurset actrices; i3i danseurs et danseuses; 680 chanteurs et chanteuses des chceurs; 3o7 danseurs et dau- . senses coryphees. Dans cette evaluation ne sont pas com- pris les directeui's, les regisseurs, les musiciens, les employes, les eleves, etc., etc., dont le nombre pent s'elever aussi a 2000 ou 3ooo individus. Dans le conrs de I'annee 1826 , on a represente sur les theatres de Paris 182 pieces nouvelles, savoir : a {'Opera, 3 ; au Ihedtrc- Italien , 3 ; au Thedtre-Frnncais , 1 6 ; a Fejdcaii , 6 ; a VOdeoii , 29; au Theatre de Madame , 21 ; au Vaudeville , 29; aux Va- rietcs , 22; au Theatre de la Gaite , 12; a VAinbigu-Comique, 16 ; au Theatre de la Porte Saint-Martin , 22; et au Cirque de Franconi , qu'un funeste incendie a detruit dans la nuit du i5 au 16 mars, 3 seulement. Surce nombre, on compte 21 operas, dont 3 italiens et 10 traductions; 7 tragedies; 28 comedies et drames; 99 vaudevilles; 11 melodrames et mimodrames; 5 ballets. On a calcule que plus de 120 auteurs ont en les hon- neurs de la representation; ceux qui ont ete les plus productifs sont MM. Theaulon et Scribe qui chacun ont pris part a treize ou quatorze ouvrages. La necrologie theatrale de 1826 comprend, parmi les au- teurs : Ija.xtier , auteur du Voyage d'Jntenor, et des comedies du Flattcur et de V Impatient; Dancourt de Saint- Just , a qui Ton doit les jolis operas de Jean de Paris et du Calife de Bag- dad, embellis par la musique de son\mii Boyeldieu ; Lemontky, 2^4 LIVRES FRANCIIS. de r Academic iVancaisc, qui obtint queltjiics siicces sur fa scene de I'Opera-Coniiqne : parmi les artistes, Talma, le pre- mier tragedicn de notrc epoqiic; et Michot, qui a ete appele le La Fontiiinc da theatre. Dans noticpays, ou le gonvernement s'cst attribueun droit de censure siir Ic theatre, on a toujours vu , aux diverses epo- qiics de notre longue revolution, le parti triomphant bannir de la scene les pieces dont les sentiniens ou les situations pou- vaient donner lieu a dcs allusions desagreables; en compensa- tion , il avait soin d'offrir an public des oiivrages de circon- stance , destines a fairc valoir les vertus ct les actions des dominateurs du joiu\ On fait pen d'attention a ces dernieres compositions taiilecs, dans prcsque tons les tems, sur le meme patron, et dontse sont bien rarcment charges les coryphees de la litterature dramatique. Peut-etre serait-il plus curieux de re- chercher quels ouvrages ont etc ecartes de la scene sous les differens regnes de la Terreur, du Directoirc, des consuls etde I'Enipereur. Nous nous borncrons aujourd'hui a citer , d'apres I'Almariach des spectacles, les titves de quelques pieces dont la representation a ete defenduc, en 1826, sur un des grands thea- tres de la province : Fenelon ; Brutus et la Mort de Cesar ; Charles IX ; Robert, chef de brigands; la Jeunesse de Richelieu et une Demi-hcure de Richelieu; les Victimes cloitrees, les, Rigueurs du cloitre, le Convent, les Visitandines, et Melanie; I'Ami des lois; Mediocre ct Rampant; le Mariage de Figaro;. I'Ermite de Sainte-Avellc , I'Ermite et la Pelerine , le Mari efmite, etc., etc. Ainsi,la censure dramatique n'est point satis- faite d'imposer un frein aux iaspirations de nos jeunes poetes; elle etend ses arrets de prosci'iption a beaucoup d'ouvrages estimes donts'honore la France; et c'est au nom de la monar- chic , de la religion et de la morale , qu'elle frappe a la fois, d'interdiction les plus belles productions du genie, et les plus innocens badinages de I'csprit! «. 110. — * Dictionnaire des ouvrages anonrnics et pseudonjmes, composes, traduits ou publics en francais et en latin, avee les noms des auteurs , traducteurs et editeurs , accompagne de notes historiques et critiques; par M. Barbier. Seconde edition , revue, corrigee et considerablcment augmcntee. T. iv. Paris , 1825 ; Barrois I'aine. In-8° de xxx et 522 pages; prix des 4 vol., 45 fr. et 90 fr., pap. velin. Voici cnfin term nee la seconde edition , ou plutot la refonte generale d'un important ouvrage , que son auteur n'a pas ea la consolation de publier lui-meme jusqu'au bout, mais que la piete filiale la pins tendre et la plus eclairee a pris soin LITTERATURE. 265 d'iichever. CVst ii M. Louis Barbier , heritier des connaissances comme du nom de son pere, que le public est redevable de I'edition de ce quatrienie volume , dont M. Bavbier pere a revu les premieres fenilles. La meilleure partie est remplie par les tables , dont la correction tres-satisfaisante suppose un grand travail. Le volume est orne du mm-\e portrait lithographic de M. Barbier, et de la meme notice qui se trouvent dans le der- nier cahier de la Revue Encyclopedique (decembre 1826). On trouve ensuite le supplement general aux trois volumes du Dictionnaire , contenant Tcnsemblc des trois supplemens par- ticuliers donncs a la fui de chacun des volumes precedens , outre un grand nombre d'articles entierement nouveaux. Les tables sont au nombre de quatre ; savoir : Table alphabetique des pseudonymes ; Table alphabetique des noms et qualifi- cations sous lesquels Voltaire s'est deguise dans beaucoup d'ouvrages ; Table al])habetique des auteurs. Nous avons dit, et mcine prouve dans trois articles diffe- rens (voy. Rev. Enc. , t. xvi , p. 538; t. xix, p. 624 et t. xxv, p. 702.) , que le Dictionnaire des Jnonymes n'etait pas seulement un ouvrage utile , mais qu'il offrait parfois une lecture tres- piquante. Nous allons continuer, par deux citations seulement, ce genre d'eloge non suspect. Jnecdote relative a Napoleon. — « On doit a M. le general Beauvais la publication de I'ouvrage intitule : Correspondance inedite , officielle et conjidcntielle de Napoleon Bonaparte , avec les cours etrangeres , etc. Pai'is , 1819 et 1820; 7 vol. in-8°. Ces lettres sont tirees de la collection manuscrite que Napo- leon avait fait copier avec beaucoup de soin , et relier avec magnificence au nombre d'environ 3o vol. in-fol. et in-4°. On croit que cette collection a ete ensuite envoyee au prince Eugene. — Un volume plus precieux encore que cette corres- pondance , renfermait les lettres autographes et confidentielles ecritesi Napoleon , par plusieurs souverains d'Eiuope. Napo- leon I'avait rccommande d'une maniere particuliere a son frere Joseph; mais cet important recueil s'egara. II fut trans- porte a Londres , et achete pour la somme de 700,000 fr. , par le ministre d'une grande puissance , qui fut rembourse de ses avances , en cedant a divers ministres les lettres de leurs souverains respectifs. >' Anecdote relative aux jesuites. — « M. le due de Praslin , ministre des affaires etrangeres , sous Louis XV, dit M. de Flassan, dans son Histoire de la Diplomatic francaise , fut, par sa place , un des antagonistes les plus ardens des jesuites , lesquels , par I'effet de cette prevoyance qui leur menageait des amis partout, se tiouvaient avoir parmi les chefs des. a65 LIVRES 1 RANgAlS. affaires t-trangeies , iin ancien meinbre de leur societc, I'abbc tie la Ville. Cet employe les servait avec un zele d'autant plus utile, qu'ayant la concspoiidance d'ltalie, il tachait de donncr aux depeches concernaiU les jesuitcs la tournure la plus fa- vorable , tandis que le roi et son conscil avaient resolu leur ruine. M. de Prasliii, qui, dans cette circonstance, ne pouvait j)as toujours goiiter les depeches de I'abbe de la Ville , les faisait refondre en secret par son secretaire prive , M. de Sainte- Foix. Lorsquc le courrier apportait les reponses du ministre de France a Rome (Ic marquis d'Aubeterre) , reponses souvcnt contraires a celles qu'attendait I'abbe de la Ville , qui ignorait les changemens que ses lettres avaient eprouves , celui-ci disait, avec bonhomie et surprise, au due de Praslin : « Ces gens -la ne nous entendent pas; » et le ministre lui repondait : « Mais , il me parait pouitant qu'ils out assez bien saisi la chose. » On sent combien I'etonnement de I'abbe de la Ville devait amuser le due de Praslin. u A. M. Beaux - Arts. III. — * Antiquites de F Alsace. , ou chateaux , eglises et nutres monumens des departemens du Haut-Rhin et du Bas- Rhin, avec un texte historique et descriptif, par MM. de GoLBERY etScHWEiGHOEusER. Paris, 1825 — i826;Engelmann, iditeur. Vingt livraisons, format in-folio; prix de chaque livraison, 9 fr. sur papier de Chine, et 6 fr. sur papiei' blanc. Cet ouvrage sc poursuit avec activite; depuis le dernier ai'ticle que nous lui avons consacre [Rev. Erie, t. xxx , p. 537), il a paru trois nouvelles livraisons : la sixieme du Haut- Rhin, et les cinquieme et sixieme du Bas-Rhin. L'une de celles-ci, la cinquieme, est particulierement consacree a la ville de Strasbourg et a sa magnifique cathedrale, monument du XIII® siecle. Dans cette belle collection , les planches et le texte insplient un egal interet. Si les artistes montrent du gout et du talent dans le choix et I'execution de leurs viies , les deux ecrivains, de leur cote, font preuve, tout a la fois, d'une vastc erudition et d'une critique judicieuse. Tout le monde lira avec profit la notice historique que M. Schweighoeuser a donnee sur la ville de Strasbourg, et je recommande aux personnes 72 LIVRES FRANC AIS. lection aussi curicuse qn'interessante. Le premier morceau pu- blic est uu vicux caiiti(|ue de Cauperin, dispose a trois voixpar M. Choron. On sait que la faniillo Coiiperiu a fourni un nom- bre considerable d'oii;anistes lameiix, et que ce nom celebre s'e^t etoint, il y a un an, dans la personne de Geivais-Francois CouPERiN. Lc canticjuc rej^roduit par M. Choron est de Fraa- cois Couperin, mort plus que sexagenaire en i733, et sur- nomme le Grand, a cause de son habilete comme executant et comnie compositeur. Le second nuniero presente I'odc de J.-B. Rousseau : Paraissez , roi clcs rois , mise en musique par M. Choron, et deja citee par nous avec eloge( Yoy Rci'. Enc. , t. XXXII, p. i()f) ). Le troisieme contient un O Sahuaris de M. Neukomm, excellent compositeur de musique sacree , et auteur d'un grand nombre d'ouvrages de ce genre dont malheu- reusement la plupart sont inedits ou du moins n'ont pas etc publics en Fiance. Ces trois morceaux sont ecrits pour deux dessus et basse ou baryton; ils peuvent se chanter sans partie interniediairc. L'accompagnement d'orgue ou piano ad libitum est traite avec beaucou]) de soin. J. Adrien-Lafasge. Revue des Journaux des departemens. En publiant des notices sur les productions de la presse periodique dans les pays etrangers , nous avons contracte I'obligation de fiiirc connaitre aussi plusieurs journaux fran- cais tres-dignes d'estime , mais qui n'ont pas, comme ceux de la capitale , I'avantage de se repandre dans toute la France et j an dehors. La plupart des journaux de departemens sont dans] ce cas : leurs titres et leur origine les conlinent souvent dansj >un espace etroit que leur merite devrait etendre pour I'interet des lettres et des connaissances usuelles. Nous acquitterona notre dette envers eux , si noUs ne succombons point , ainsJ qn'eux-memes , dans le cours de la campagne ouverte centre la propagation de la pensee , a(in d'etablir la domination du si-J lence. Si les amies de la raison ne sont point victorieuses , sfl la presse ne pent conserver meme une ombre de liberie , il ne sera plus possible de payer a ses plus courageux defenseursj un juste tribut de reconnaissance. Des que les communication^ de la pensee seront generalcment restrcintes , les luniieres s'eteindront insensiblcment, et pour se diriger an milieu deS tenebres qui couvriront tons les domaines de I'intelligence, ijj ne restcra plus que les feux follets de I'imagination , les eclairs echappes des orages, ct les perlides clartes disposees par les brigands. Que les perils conimuns nous rapprochent , et res4 serrent enti'e nous les liens formes par la conformite d'opi-i OUVRAGES PfiRIODIQLKS. 17^ nions sin- Ics principcs de I'ordre social , siir les vc'ritables sources du bonheur des liommcs. Nous alloiis an memo but , nous formons les memes v(ru\ : essayons de nous connaitre les uns les autres, et , s'il se peut, de nous compter, puisqu'il en est tems encore. En raison de notre titre , nous nous cliar- geons de cette revue , ct nous n'admettrons dans nos rangs que des journaux veritablement franrais : les ecrivains devoues aux factions ne suivraient le drapeau de la France que pour I'abandonnor dans I'occasion , 011 pour Ic deshonorer. Nous separerons , suivant I'usage , les journaux dits poli- tiqiies de ceux qui se consacrent exclusivcment aux lettres et aux sciences , ct nous commenceions par ces derniers. Suivant un autre usage , nos anciennes connaissances precederont celles d'une date plus recente : quoique nous en ayons deja parle plus d'une fois, nous ne devons pas les omettre dans une revue generale. Cependant , I'ordre que nous suivrons ne sera pas rigoureusement celui des terns oil les differens ouvrages perio- diques seront venus a notre connaissance , et encore moins un classement d'apres le degie d'importance ou de merite que nous y aurious reconnu : ces evaluations incertaines n'eclaire- raient point nos lecteurs ; elles ne pourraient point obtenir leur approbation , ni influer sur leur propre opinion relati- vement aux journaux que nous aurions pretendu juger. Rien de plus diflicile que de rendre justice a un ouvrage periodique, etre singulier dont I'avenir interesse encore plus que le passe, toujours susceptible de perfectionnement , comme la jeunesse , ou menace d'une deterioration prcsque subite, comme la de- crepitude. Ce n'estqu'apres I'avoir observe assez long-tems que I'on peut augurer de son avenir ; il faut qu'il ait manifeste sa vigueur native, que Ton ait reconnu sa tendance, et qu'il y ait persevere. L'experience nous a rendu quelque peu defians : nous avons vu tant dc desertions politiques, de consciences litteraires a I'cncan, de changemens dont le motif ne pouvait etre que I'interet prive ! lorsqu'il s'agit d'un ouvrage terminr, et qui se presente tout entier, la critique peut s'en emparer, el le juger avec equite : tous les faits qui le concernent sont con- nus , le proces est suffisamment instruit. Mais on sait que plus d'un ouvrage periodique , dont la collection est bien placee dans une bibliothequc , se voit dtlaisse par ses abonnes qui ont aussi de bonnes raisons pour le quitter. Venous enfm a nos journaux de departemens. Cette denomi- nation de journaux a ete beaucoup trop etendue : nous lui donnerons ici un sens plus restreint ; elle ne comprendra que les publications veritablement periodiques , c'est-a-dire , qui T. xxxni. — Janricr 1827. 18 2 74 LIVRES FRANCAIS. paraissent ;\ des epoqucs roguliores dans le coiirs de I'annLO , du niois, de la scniainc, ou tous Ics jours. 117. — * yirchit'cs historiques rt stntlst'ufucs du dcpartcmcnt du Rlionc. Nous rcnvcrrons a iiotic aS'^""" volume (p. 832 ) , pour quelques details sur cettc interessante publication meii- suelle , dont Ic succes merite nc pout qu'augmenter, a mesure quelle sei'a plus connue. Sou litre, dont clle ne s'ecarte point , annonce assez clairement son but; on ne lui repiochera cepeii- dant pas I'aridite qui eloigne les lecteurs superliciels de tout ce qui suppose de I'eiudition ; on la lit avec plaisir, meme sans y chercher autre chose qu'une lecture interessante. — Prix dc rabonnement, 20 fr., pris a Lyon ; chaque cahicr est de 5 f. in-8 ". 118. — Lc Petit Albani Fmnc-Cointois. Cette feuille hebdo- madaire est publiee a Dole , et commence sa cinquieme annee. Les redactcurs s'attachent ;i lui donner une couleur locale ; ce qui doit plaire dans leur voisinage , et ne deplait nuUe part. Do tems en terns , la philosophic vient s'y meler aux flours de la litterature; il en faut dans ce siecle , et surtout a cette opoquc ou tout provoque les meditations les plus serieuscs. Les redac- tcurs du Petit Album Frnnc-Cointois le scntent, coninie toute la Franco , et ils s'attachent a satisfaire cc besoin du moment. iig. — * Les Tablcttes Fraric-Corntoises, journal des sciences, des lettres , des arts , du commerce et de I'industrie. — Unc autre subdivision dc la Franchc-Comte vient d'etahlir son journal litteraire dans rancienne capitale de la province. Son cadre est plus grand que cclui de V Album , et il parait deux fois par semaine. — Prix de Tabonnoment , i5 francs par an, a Besancon , et 18 francs par la poste ; pour six mois, 8 Ir. 5o c. , et 10 fr. — Le n" 3 (dimanche i4 Janvier) contient ui:c Notice interessante sur le docteur Buiot , niembre de la Sociolo de medecine de Bosancon , I'un des professeurs dc I'Ecole dc niedecine dc la meme ville, et membre correspondant de 1' Aca- demic royale dc medecine. Les nombreux ou\ rages do co savant laborieux scront long-terns utiles a la jeunesse studiouso, el souvcnt consultos par los niodecins les plus instruits. Los Toblettcs Franc-Cnmtoises paraissent etre Fun des journaux que la Revue Encyclopcdiqne mettra ([uelquefois a contributioil. 120. — * Le Merrure St'gusien , journal des arts et du com- merce dc Saint-Etiennc et du dopaitcment de la Loire. — C.r journal parait aussi deux fois par semaine. Il ononce ainsi lo- divers objets dont il s'occupe : jiconomie rurale et manufuctu- riere , lltttnttuve , pocsie , sptetdctes , modes , annonees judiriaii c s viavis divers. — Ainsi, I'ajipareil des forges de Vulcain ne fait |)as fuir les Muses; le bruit !Lva.\l deux fois par scmaine. Prix de rabonnement, a Metz , in fr. pour I'annee; 3 fr. 5o c. par tri- inestre ; 2 fr. de plus par la poste. 1 23. — * Le Precurseta- , journal constitutionnel de Lyon et diiMidi, politique, litteraire, scientilique , industriel et com- mercial.— Ce journal, beaucoup moins ancien que le prece- dent, est nc dans le terns ou la crise actuelle se preparait , oii I'effrayante alteration de toutes nos institutions laissait douter qu'elles pusscnt subsister long-tems , et passer a la generation qui nous remplaccra. Des ecrivains pleins de courage et de de- voument pour la patrie n'ont pas desespere de sa cause sacree ; ils ont saisi les amies du raisonnement , confondu le sophisme, demasque I'liypocrisie, attaque les abus, signale la violation des lois. Toujours en peril, toujours sur la breche, leur Constance n'a pu etre ebranlee ; mais leurs genereux efforts ne pouvaient empecher que I'edifice , mine de toutes parts , tandis qu'on I'at- taquait de vive force , ne s'ecroulat enfin , couvrant de ses de- bris les derniers et les plus precieux de nos droits. Lorsque des journaux tels que celui-ci seront reduits au silence, quel espoir pourrait rester encore aux amis d'une sage liberie ? Le courage litteraire est une haute faculte de I'intelligence unie a des sentimens genereux : il n'est done jamais sans talens litteraires. Le Precurseur ne dement point cette observation; on ne sera pas moins satisfait du style des redacteurs que de leurs raisonnemens, de leur noble franchise etdu choix des matieres qu'ils inserent dans leurs feuilles. Nous continueions cette revue, si la loi sur la presse nous en laisse les moyens. Y. Livres en langues etrangeres, anpritnes en France. 124. — * 'ETTiKTyim , etc. — Texte grec du Manuel cl'Epict^te , du Tableau de la vie humaine par Cebes, et de Xd^Pricre a Ju- piter, maitre des dieux ; par Cleanthe ; pidilies par M. Coray , avec la version francaise du professeur Thurot , pour les deux premiers ouvrages, et de Bougainville, pour le troisieme. Paris, 1826; Firmin Didot. i vol. iu-8° de 246 pages. C'est une suite de belles editions d'auteurs grecs, dues au zele patriolique, a I'erudition et aux talens du celebre M. Coray. Les noms des deux traducteurs sont de bons garans du merite des versions ; ef les textes sont accompagnes d'une interessante preface, et d'utilcs notes critiques, redigecs en grec par IVditeur. IV. INOUVELLES SGIENTIFIQUES ET LITTERAIRES. AMERIQUE SEPTENTRIONALE. Etats-Uris. — New-York {\^^ decembre 1826). — A M. le directeur de la Revue Encyclopedique. — Reclamation en faveur de M. M. Noah, fondateur d'une colonic d' Israelites , contre les assertions de plusieurs journaux J'rancais. — On m'a communique, depuis mon sejour en France, des remar- ques faites dans plusieurs journaux de Paris, a Tepoque ou fut publiee la piece extraordinaire connue sous le nom de Proclamation aux Israelites de I'ancicn rnonde, et signee par M. M. Noah , de New- York. Ces remarques , assez severes , jointes aux manoeuvres de queiques Israelites partisans du pouvoir, par interet et par habitude, ont pu faire nailre I'idee que M. M. Noah etait ou bien un fou qui s'essayait a faire le Messie, ou un intrigant cherchant a faire des dupes. Permettez-moi , Messieurs , de me servir de la voie de votre excellent recueil pour faire connaitre la verite sur les motifs qui ont fait agir M. M. Noah. M. M. Noah est un homme qui possede des talens plus qu'or- dinaires : 11 est a la tete dun des journaux quotidiens de New- York; il a rempli les fonctions de consul des Etats-Unis a Tunis, a une epoque tres-difficile. Il a aussi occupe Temploi de sheriff de New - York , pendant plusieurs annees , et n'a laisse que des souvenirs honorables de sa vie publique. Doue d'une imagination vive, attache par conviction a la croyance de ses peres , devoue aux principes sacres de liberte et d'ega- lite qui forment la base du gouvernement des Etats-Unis , il a vu avec peine I'etat avilissant dans lequel sont tenus un grand nombre de ses co-religionnaires, sous les gouvernemens qui n'ont pas encore approuve les changemens salutaires, que reclament les luraieres de notre siecle. II a concu le projet de chercher i attirer le plus grand nombre possible de ses freres dans le pays qui le premier a donne au monde I'cxemple de la liberte civile et religicuse. Il a fait des efforts pour obtenir 278 AMERIQUE SEPTENTRIONALE. de riitat de New- York la donation d'nne ile, appelee aujonr- d'liiii Arrarat , ;\ I'effet d'y ctablir nne colonie entierement com}X)See d'Israclites. Si sa deniande avait etc accneillie, il aiirait offcrt gratnitcment des lots de teire a ceux qui se seraient engages a les ciiltiver. II voulait sadresser a ceux de ses freres d'Europe qui possedcnt des moyens pecuniaires, pour les engager a former une Societe dr charite dont Ic but aurait etc d'avancer aux colons peu aises les fonds necessaires pour se procurer les objets indispensables a I'exploitation dune fernie. L'lle d'Arrarat, dont il serait trop long de faire con- naitrc en detail la position, jouit de tons les avantages que pent di'sirer un peuple a la fois commercant et agriculteur. L'idee d'une donation de terres en faveur d'une classe d'indi- vidus d'nne secte ou d'une nation particulicre n'cst point nou- velle en Amerique : la donation faite par le gouvernement de Washington aux refugies francais, en 1816, d'nn superbe lot de terrains, et la fondation ^' Aigleville , sont des faits connus en France. Trompe dans son espoir, quant a la donation de l'lle par le gouvernement de New- York, qui en etait proprietaire , M. Noah se decida a I'acheter pour en offrir la cession k ses co-religionnaires persecutes dans I'ancien monde. Une dona- tion volontaire d'un shekel ( environ 5 francs) par chaque Israelite devait servir a former un fonds pour le paiement de I'achat de I'ile, et des autres frais a faire pour I'execution de son plan. Je nc pretends pas ici defendre ce que ce projet offre d'inexe- cutable. Les Juifs vivant sous le regime avilissant de la Saxe et des autres contrees, oil il leur est expressement defendu de professer aucun autre etat que celui de colporteur ou d'usurier ( etats qui ieur sont imputes ii crime par rignorance et le fana- tisme, apres qn'on leur a interdit la faculte d'en choisir d'autres), ne sont pas encore capables de devenir agriculteurs, suitout dans les forets de I'Amerique du nord. Ce n'est que parmi quel- ques-uns de ceux qui vivent dans votre belle France, et qui jouissent des avantages de la liberte, depuis 1791, que Ton pourrait trouver des hommes capables de repondre aux vues de M. M. Noah. .Te ne chercherai pas non plus a justifier le style ampoule que prend M. Noah, redacteur du New-York Enqui- rer; mais je |>uis affirmer, et avec connaissance de cause, que cette entreprise a ete concue par lui, sans aucunc vue d interet personnel et avec les intentions les plus nobles et les plus pures. J'ai I'honneur d'etre, etc. J. D., Israelite francais , residantii New-York. a 79 ASIE. Inde britannique. — Benares. — Irruption du cholera-mor- las. — Ce terrible fleau a reparu , dans I'lnde , des le commen- cement du prinlems dernier. II a ravage, an mois de mai, les environs de Calcutta, et a fait perir un grand nombre d'habi- tans. La mortalite a ete encore plus considerable dans la villc de Benares , qui avail ete atteinte la premiere par la nialadie. Les Indiensy mouraient par centaines. II parait que, dans plu- sieurs districts, la population cherchea present son salut dans 4a fuite, et qu'elle abandonne en masse les lieux ou le cholera se declare. L'experience la plus funeste lui a fait adopter pour regie de conduite une sorte d'adag^e dcvenu populaire, et dont le sens est : celui qui fuit, vit. Au mois de mai, la meme maladie a paru a I'autre extremite de I'lnde , dans la ville de Mhow , qui fait partie du gouvernement de Bombay. Les habitans ont quitte leursmaisonset se sont retires a une gvande distance. M. J. AFRIQUE. Ile de France. — Flenux l V agriculture dans cette colonic. — On sail que toutes les colonies ou Ton cultive la canne a Sucre sont devastees par les rats, qui se multiplient d'une maniere presque incroyable , et dcviennent d'une grosseur et d'une hardiesse extraordinaires. Outre ce fleau , I'lle de France est encore ravagee par des oiseaux granivores , qui, au moment de la moisson depouillent entierement les champs de I'iz, du gain qu'allait recueillir le cultivateur. L'annee derniere , ces calaniites s'etant encore accrues, le gouvernement a fait une proclamation pour offrir des recompenses a ceux qui ooopere- raient a la destruction de ces deux especes d'animaux. En exe- cution de cette mesure, huit arrondissemens de I'lle ont en- voye au gouverneur, en un seul mois, 83o,473 queues de rats et 988,549 tetes d'oiseaux, comme temoignage de la destruc- tion de 1,769,000 individus de ces deux races devorantes. M. J. EUROPE. ILES BRITANNIQUES. Expedition au pole arctique. — Le capitaine Parry vient de presenter a I'amiraute d'Angleterre le projet le plus hardi qu on ait encore fait i^our completer I'exploration du globe. D'apres ce projet, que la Societe royale de Londres a sanc- tioune, et dont le gouvernement a ordonne I'execution, le 28o EUROPE. vaisseau VHecla niettra a la voile au coiiimcucenicnt du prin- tems. 11 se rendra dircctcnicut an Spitzbcrg, ct s'eflForcera d'atteindre, a la fin de mai, le liavre do Cloven-Cliff, qui git par 79<>52' do latitude. LccapitaineFR.\NiiLi!N,qu'ont deja rendu celebre ses deux voyages par terre a I'Ocean arctique , partira de CO point avec deux navires, qu'on peut eni|)!()yer egalement sur la glace on sur I'eau, et qui peuvent marcher au nioycn des voiles, ou etre traines par des chiens ou des rennes. Chacuu de ces navires sera monte par deux ofliciers et di.t marins , et muni de provisions pour 92 jours. On calcule qu'a raison de trols lieucs et im tiers par jour, ils peuvent, a raoins d'obstacles insui- montables, arriver dans cet espace de terns aupole, et revenir au Spitzberg ; pendant leur absence , les chaloupes de I'Hecla et les savans qui doivent s'embarquer sur ce batiment, s'occu- peront de I'exploration du Spitzberg. M. J. Revoe sommaire des Societes savantes, litteraires, indus- TRIELLES, DE BIEN PUBLIC, PHILANTHROPIQUES , CtC. , r/e /« Grandc-Bretagrte. Le tableau des associations formees dans un pays pour la propagation des connaissances usuelles, de I'industrie, et de toutes les ameliorations sociales , pour remedier a quelques-uns des maux qui sont la consequence necessaire de I'etat actuel de la societe, et pour preparer dans I'avenir une repartition plus equitable de tout ce qui compose le patrimoine commun de la I'ace humaine; ce resume des efforts reunis des hommes de bien et de savoir, pour approcher du but de toute association civile et politique, le perfectionnement et le bonheur de I'homme , est une statistique des plus interessantes et des plus caracteris- ques. Nous I'entreprendrons successivement pour chacun des pays avec lesquels nous sommes en relation , mais sans preten- dre la completer, ce qui seraittres-difliciledans lepaysmeme, et tout-a-falt impossible de loin. Quelques-unes de ces societes ne font aucunes publications : d'autres se reunissent pour pratiquer en commun et avec plus d'efticacite ces vertus qui cachent dans I'ombre le bien qu'elles ont fait : d'autres entin n'ont en vue que des objets et des interets locaux, et, quoiqu'elles ac- croissent reellement la somme de bien public , leur nianiere de proceder et leurs travaux ne sont point du ressort de uotre recueil. Nous n'avons point la pretention de classer dans aucun ordre les societes de chaque pays , et encore moins d'assigner leur degre d'influence et d'utilite. Outre que ces evaluations n'ont ordinairement d'autre rc'sultat que de satisfaire quelqucf- ILES BRITANNIQUES. 281 amours-propres et d'en offenser d'autres, il seiait presque im- possible, meme siir Jcs lieuxet avec ics meilleurs documens, de les faire avec assez d'exactitnde et de justice. Nous couimencerons par la Grande Bretai^ne, ou ccs sortes d'institutions sont plus mnltipliees et plus varices que partout ailleurs. Quclques-uncs de celles que Ton y reniarquera pour- ront faire naitre le desir de les imiter dans d'autres pays; et, en redigeant cette statistique, nons aurons encore contribue a etendre a plusieurs nations, les bienfaits de quelques institutions qui jusqu'ici etaient proprcs a une seule. Notre but constant est de reunir dans un fonds commun, mis a la portee de tons les peuples, des richesses intellectuelles et des lumieres trop long-tems concentrees sur des points isoles, etqui acqucrront une plus grande puissance de feconditc, si elles deviennent des objets de circulation et d'echanges. SociETES sciENTiriQUES DE LoNDRES. — Socicte rojalc (RoynA Society ). — Cette Societe , fondee par I'honorable Robert Boyle et sir f'Filliam Petty , fut reconnue et autorisee plus tard par Charles II, qui lui donna le titre de Societe royale de Londres pour les progres des connnissances humaines. — EUe a un conseil compose de vingl et un membres, y compris le president. L'admission depend de ce conseil : chaque nouvel associe paie cinq guinees ( 126 fr. 25 c. ) pour droit d'admis- sion, deux guinees et deinie de cotisation annuelle, et recoit le titre 6l associe [fellow of the royal society. — f. r. s. ). — La Societe royale s'occupe de tons les sujets qui sont relatifs aux arts et aux sciences. Elle public chaque annce un volume en deux parties, sous ce titre : «■ PhilosopJucol transactions of the royal society of London, » Travaux scientifiques de la Societe loyale de Londres. — Elle possede un riche niusee et une bi- bliotheque coniposee des meilleurs livres. La reunion annuelle de la Societe, pour I'election des membres aux fonctions admi- nistratives, a lieu le jour de la Saint- Andre. Comme cette Societe est justement comptee an nombre des premieres aca- demies de I'Europe, la notice de ses travaux seia comprise dans la suite des notices sur les academies dont nous devons faire une mention etendue et speciale. — Institution royale (Royal institution). • — Get etablissement , fonde en 1800 , sous la protection de George III , a etc reconnu par une charte royale, sous le nom (['Institution royale de la Grande-Bretagne. — II a pour but d'encourager les inventions nouvelles et le perfectionnemcnt des arts niecaniques, et de repandre les connaissances utiles au moyen de cours publics oHi EUROPE. siir I'iipplicalion de la science , aiix usages joiirnalicis de la vie. Sous ce rapport, il a quelque analogic avec I'ytthenee royal dc Paris , dont la fondaiioii remoiite a I'annee 1785. I.cs rechcrchcs et les decouvertcs importantcs de sir H. Davy, ((ui lut le premier professeur de chiniie de cet etablissement, n'ont pas pen contnbue a le rendrecelebre. La Societe possede un laboratoire de chiniie tres-vaste et tres-ricbe, une belle bibliotheque, uu amphitheatre commode oil Ton fait les conrs, des salles pour la lecture des ouvragcs ]><'Tio(!iques; des appartemcns pour les professeurs , etc. Elle public tons les trois mois un recueil qui a pour tilre : Jour- nal des sciences , de la litteralure et des arts. M. Brande, pro- fesseur actuel de chimie dans I'institution royale , en est I'edi- teiu- ( Voy. Rev. Enr. , torn, xxvii, pag. 768, la revue sunimaire (les ouvi-ages periodicjues publiet en Jngleterre ). — Societe des Arts (Society of Arts). — Cette Societe pour I'encouragenient des arts, des manufactures et du commerce, qui a probablement fourni I'idee de notre Societe pour l' encou- ragement de I' Industrie nationale , a ete fondee, en 1764, par William Shipley. Elle a dcja produit les plus heureux resultats ; et en proposaut des recompenses pecnniaires considerables pour les inventions utiles, les decouvertes, les perfectionne- meiis, elle a pousse I'Angleterre dans la route des ameliora- tions de toute espece. On estime qu'elle a distribue, depuis un demi-siecle, plus de 5oo,ooo livres sterlings (i2,5oo,ooo francs) provenant de souscriptions, ou de donations volontaires. Elle compte plus de dix-sept cents membres, parmi lesquels sont choisis un president et seize vice-presidens. Les assem- blecs generales se tiennent , les mercredis , a sept heures du soir. Toute personne qui recoit de la Societe une recompense pour quelque invention , mecanique ou autre , est tenue de deposei' le modele dans une espece de conservatoire oil se trouve reunic aujourd'hui une collection tres-precieuse et tres- variee de machines et d'ustensiles. La Societe public, tous les ans, le compte rendu de ses tra- vaiix, et la liste des recompenses qu'elle a accordees. Les prix sont distribues aux candidats qui en ont ete juges dignes, le I*'' juin de chaque annee, jour anniversaire de la fondation de la Societe. — Societe des Tngeniears civils. — Cette institution date de I'an- nee 1818. Elle fut fondee par un petit nombre dc jeunes ingii- nieurs pleins de zele, qui cherchaient, dans leurs reunions et ieurs entrctiens, les moyens de s'eclairer mutuellement, et de ILES BRITANNIQUES. 28? perfectionner leur instruction. Le cafe de Kendal fut le lieu de ieurs premieres seances; mais bientot leur Societe devint trop nombreusc pour ce local. Les fondateurs parvinrent a sc concilier la bienveillance et I'intert't des ingenieurs les plus re- nommes , qui ne dedaignerent point de prendre part aux confe- rences. M. 77io/«G^ Helford accepta la presidence en i8>o; deptiis cette epoque, I'instruction flt des progres encore plus rapides, et prit enQn la forme et le caractere qu'on lui voit aujourd'hui. Les premiers racmbres etaient tous ingenieurs civils ; par la suite , des savans qui cultivaient quelques-imes des sciences necessaires aux constructions temoignerent le desir d'etre admis dans la Societe, ou leur presence est tres-utile. Les menibres se reunissent, tous les mardis, a huit heures du soir, depuis le i*^"" Janvier jusqu'au niois de mai. On y traite des questions relatives aux travaux des ingenieurs , et les obser- vations les plus importantes, rccueillies par le secretaire, sont reproduites a la discussion suivante. C'est ainsi que chacun des niembres contribue a I'instruction commune, en perfectionnant ses propres connaissances. Tous les ans, lorsque les conferences recommencent , chaque membre est tenu d'apporter un me- moire. Cette nombreiise collection de materiaux iustructifs est lue dans les assemblees, et fournit les sujets de discussions interessantes. La Societe possede une bibliolheque et una importante col- lection de cartes et de plans. Le nombre des societaires est actuellement de cent trente. Le pays ou tant de travaux gigan- lesques sont entrepris et termines avec une admirable promp- titude, ou les constructions de ponts et de route ont pris une forme nouvelle, ou la science de I'administration des Iravau.x publics semble amenee a la plus grande simplicite, et par con- sequent bien pres de la perfection; ce pays meritc certaine- ment I'attention de nos ingenieurs. En France , I'instruction relative aux travaux publics est faite avec plus d'appareil; mais on ne pent assurer qu'elle aille plus loin que celle des ingenieurs anglais. — Societe royale asiatiquedc la Grandc-Bretagne et de I'lrlnnde. — Cette Societe, formee en 1823, a pour but le progres des connaissances relatives a I'Asie. Placee au centre de toutes les relations de I'empire britannique avec les diverses contrees du globe, elle est a portep de se procurer, sur quelques parties du continent asiatique, des documens qui pourraient man- quer aux Societes de Calcutta, de Bombay, de Madias, de Bencoulen; elle pent soumettre rcnsemblc des documens a un examen plus attentif qu'il n'eut pu I'etre en Asie memc^ 28/, EUROPE. au milieu des interets locaux et des passions qu'ils excitent : eile decerne des medailles aux auteurs des incmoires qui lui sont adivssos sur Ics objets compris dans ses attributions, lorsqne ces memoircs apprcnnent des clioses nouvelles et de quelque importance : elle public ses Transactions , comme Ics auties Societes royales. Son influence nc pent ctrc que ^^e'^-utile. Ses membres residans sont ceux qui habitent dans la Grande -Bretac;ne, on dans ses possessions; les ctrangcrs sont les habitans de tons les autres pays : ainsi, la Societe reside dans les deux Mondes; ses bureaux et ses assemblees generales se tiennent a Londres. Ce mode d'existence est , pour une Societe d'investigateurs, le plus favorable pour I'universalite des succes. Dans presque toutes les autres associations savantes, la distinction cntre Ics membres residans et non residans etablit une aristocratie qui ne pent etre, ni dans le caractere, ni dans I'interet des sciences. Chaque membre residant paie 5 guinees en entrant , et 3 gui- nees de contribution annuelle, ou 20 guinees pour etre membre h vie. Des I'origine , son president fut I'honorable sir Alexander Johnston, auquel les etablissemens anglais dans I'lle de Ceylan sont redevables de retablissement du jury ( Voy. Rev. Enc., t. XXXI, pag. 6 et 238), et les vice-presidcns, MM. Thomas Staun- ton et Thomas Stamford Raffles. Ce dernier vient d'etre en- leve aux nombrcux amis qu'il avait acquis par une vie toute utile et toute vertueuse. fCt-r^e Revue sera continued) F. J. D. RUSSIE. Presse periodique. — Anciens journaux riisses. — Nous avons tenu nos lecteurs au courant des nouvelles publications periodi- ques entreprises en Russie, depuis I'epoquedela creation de notre recueil ; nous sommes meme remontes a I'origine de la plupart de celles qui existent aujourd'hui, en cssayant de les caracte- riser et de fixer la place qui leur appartient dans I'estime publique. Nous allons, pour completer, autant qu'il est en nous, les documens sur ce sujet, donner quelques renseigne- mens sur les journaux russes anciens qui ont cesse de paraitre; nous les puisons dans le 3* volume de VEssai de bibliographie russe , dc Sopikof , ouvrage que nous avons dej.'i mentionne plusieurs fois. Nous trouvons dans ce volume (p. 22 a 72) une liste alphabetique de i3o recueils periodi- ques^ mensuels, hebdomadaires ou autres (1), dont le plus (1) M. de Ferussac , directeur du Bulletin univcrsfl des sciences , tennine en ce moment la redaction d'un ouvrage qni donnera la statislique complete RL'SSIE. 285 auckn remontea I'annee 1755, eta pour litre : Merits mensucls, anmsans et instriictifs', publies a I'Acadcmie des sciences de Saint-Petersbourg, par Ic professeur Miller. Ce journal a ccsse de paraitre en 1765, et les 10 annees de sa collection fonnent 20 volumes in-8", dont le prix est de 3o roubles ; quelques-unes de ses parties out etc reimprimees. Deux autres recueils, I'un intitule: L' Utile avec I'Jgrcable, et I'autre, Le Tcins ferie employe utilemcnt, crees tons deux en 1759, ont cesse de paraitre dans la menic annec; de 1760 a 1780, il en a ete fonde vingt-six ; de 1780 a iSoo, f rente ; et de 1800 a 1814 , soixante-onze. Sur ces i3o recueils periodiques, 88 sont niorts dans I'annee de leur creation; quelquos-uns nieme n'ont eu que deux ou trois mois d'existence ; mais il faut moins en ac- cuser le talent de leurs redactcurs que I'ignorance generate et I'insouciance naturcUe d'un peuple dont les progres dans la civilisation sont encore si recens. On pent remarquer, du reste, que I'accroissement des journaux en Russie, depuis le commencement de ce siecle, est en rapport avec la marche des lumieres dans ce pays , ce qui est une nouvelle preuve a I'ap- pui de cette opinion , que la presse periodique est le thermo- mt'tre de I'etat moral des peuples. Dans la liste de ces journaux, nous en avons remarque 6 consacres aux sciences, a la littcrature et aux arts en general; 3 aux sciences physiques et medicales; i a I'astronomie; 9 a I'agriculture et a I'economie rurale et domestique ; 6 aux sciences morales et religieuses; 9 a I'education; 2 aux voyages et a la statistique; 3 a la politique; 2 a I'histoire; 2 aux sciences mi- litaires; i aux arts et metiers; 2 aux beaux-arts; 18 a la litte- ratme; 3 au theatre; 4 a la musique; 2 airx modes; 9 a la satire, et I, enfin, a des caricatures. Il nous a ete impossible de carac- teriser les autres sur Icur simple titre, et nos souvenirs n'ont pu nous aider a les classer. L'un d'eux, qui porte le titre de Mestchanine , et qui a paru a Saint-Petersbourg, dans I'annee 1773, sous la forme hebdomadaire , in-12, etait sans doute ecrit pour la classe populaire. On appelle, en russe, Mestcha- nine, tout individu libre, qui n'appartient ni a I'eglise, ni a la noblesse, ni a la classe des Ibnctionnaires publics, ni a celle des marchands patentes. Cette classe, qui comprend les gens de de tons le.s journaux du monde civilise , depuis Torigine de Fiinprimerie , jusqu'a I'annee 1826 comprise, et celle des Socieles savantcs et litleiaircs etablies sur les differens points du globe. On y trouvera les litres de ces i3o recueils, avec les indications qu'aura pu fournir sur leur existence "ouvrage riisse que nous avons cite. 286 EUROPE. k'ttres, ceux qui sont livros a des professions liberales ct Ics artisans, a quclqiu; analogic avc*; notre ancii-n tiers-ctat, mais ostbion nioins nombreiiscet n'a pas, a bcaiicoup pres, la memo influence et Ics mcmcs droits politiqucs en Russie qu'en France. Parnii les noms dcs cditcurs dc ces rccucils pcriodiques, nous «n avons retrouve i)lusicurs qui sont chcrs a la littcraturc. Tcls sont ccux de Bogdanovitcli , Dniitricf , Izmailof, Karamzinc , KIwraskof f Kri'loJ , Soumarohof , etc. Quekjucs-ims de ces re- cueils offrent dcs litres bizarrcs : tels sont la Paste infrrnalc, ou Correspondance d'un diable boitcux avec un borgne; la Paste (les esprits ; le Mcrcicr da Parnassc; Ic Discur dc riens ; Qiielqite chose ; Et ceci ct cela; Ni ceci m cela ; Toutes sortcs de chases, accc benefice , etc. Presquc lous ces do'niers sont sati- riqiies; ct, quoiqu'ils n'aienteu qu'iine courtc existence, la plu- part ont obtenu plusieurs editions ct sont fort rai es aujourd'hui ; I'un d'eux, le Peintrc , public en 1770, par Nicolas Novi/,of, n'a en que deux volumes, qui ont etc reimprimcs quatre fois, en 1772 , 1775 ,1781 ct 1792. Enlin, sur les cent-trente journaux que prcsente la liste de M. Sopikof , il ne s'en trouve que cinq qui cxistaient encore au moment de la publication du volume qui la renfcrme ( 1814) et qui continuent a paraitre aujourd'hui; ce sont : 1" le Journal (politique J historiquc , statistique et geogra- phique, redige dans son origine (en 1790) par une societe de savans et de pnblicistes alicniands , sous le titi'e dc Correspon- dant dc Hambourg , et traduit en russe par le professcur Sa/i- hatsfif, lequel a eu pour successcurs, dans la direction de ce joiu'nal, MM. Gai'tilo/cl Nevzorof; 2" le Courrier dc V Europe , fonde par I'liistorien Karomzine, en 1802, et qui a passe depuis sous la direction de M. Katchenovshy ; 3" le Journal tcchnolo- gique, fonde en i8o4 par M. Sei'ciguine, membre de I'Academic des sciences; 4" l*^ Courrier russe , crce par M. Sc?'ges Glinha, en 1808; 5° le Ells de la patric , fonde par M. Nicolas Gietch, en 1812. L'auteur aurait pu comprendre dans cette liste I'lnva- lide russe, feuille quotidienne qui parait depuis i8i3; mais il est vrai qu'il ne s'etait engage, dans son Dictionnaire bibliogi-a- phique , qii'a donner la nomenclatiu'c dcs ouvrages publics en Russie depuis I'introduction de rimprimerie jusqu'a cette meme nnnee i8i3, quoique son dernier volume ait paru, apres sa niort, en 1821, et qu'on y trouve mentionnee quelquefois I'annce 1814. INous avons donnc d'ailleurs tous les renseigne- Jiiens desirables sur ces 6 derniers journaux dans les differens <;ahiers de la Revue Encyclopedique , ou nous nous eii sommes mpagnie proprietaire des mmcs distribne d'abondans secours aux ouvi'iers maladcs, dont le nombre est ordinairement de soixante a cent; elle salarie pour ce service cinq ratdecins. Les ouvriers qui se retirent jouissent de pensions qui varient , sui- vant leurs services, entre 10 et 3o francs par mois, et dont moitie est reversible sur leurs veuves; tout orphelin de pere recoit 3 francs par mois jusqu'a I'age de dix ans ; enfin , la com- pagnie entretient trois ccolcs d'enseignement mutnel : on assure 3o8 FRANCE. que les sonimes emjiloyt'es ;\ cos secoiits de toute nature ap- proclient, cliaqiic aiini'e, dc 200,000 fr. De notables ameliorations ont ete introduites, depuis qiiel- ques anm'es, dans les mines d'Anzin, ct sont dues en grande partie i\ I'administration eclairee et au zele actif du directeur actuel, M. Paulze d'Yvoy. Au premier rang se trouvent celles qui ont eu pour objet ramclioration de I'airage, et qui ont cu un effet marque sur la sante des mineurs. L'introduction des lampes de surete de Davy, dans toutes les couches de houille snjettes au degagement du gaz hydrogenc carbure, a, pour ainsi dire, supprime des accidens dont le renouvellement etait autrefois tres- frequent. Les mines d'Anzin ont ete les pre- mieres oil Ton ait fait, en grand, usage des chemins a ornieres de bois ; depuis quatre ans on y a substitue des chemins de fonte, et Ton a trouve I'economie d'entretieu et de forces qui resulte de cette nouvelle disposition , tres-superieure a I'interet du ca- )iital dont ellc a necessite I'emission. L'opinion des proprie- taires est que le fer forge est preferable a la fonte pour ces sortes de chemins : ils se proposent d'en etablir incessamment pour les transports au jour. Les mines d'Anzin, traversees par I'Escaut, sont en commu- nication par ce fleuve avec tons les potts et toiis les canaux de la Belgiqiie; niais un droit de i fr. 70 c. par hectolitre, et supe- rieur a la valeur de la marehandise, que le gouvernement des Pavs-Bas a mis a I'entree des charbons francais, a totalement ferme un debouche par lequcl s'ecoulaient jadis de sept h. huit cent mille hectolitres par an. LedeveloppenicnttOHJours croissant de la consommation de ce combustible en France a fait plus que retablir I'ancicn cquilibre ; les canaux de la Flandre con- (iuisent les charbons d'Anzin dans le port de Dunkerque et dans toutes les villes importantes des departemens du Nord et du Pas- de-Calais ; le canal du Due- d'Angonleme les repandra bientot sur tons les bords dc la Somme. Si ces canaux etaient convonablemeni entretenus, si les drolls de navigation y etaient combines avec un pen plus de discerncment , il en resulterait nne grande extension dans I'extractlon et le commerce de houille. La comparaison de ce qui est avec ce qui pourrait ^tre n'est nuUe part plus triste que sur le canal de Saint-Quentin, par lequel les charbons flamands arrivent dans le bassin de la .Seine, a Paris et a Rouen, et qui semblerait devoir en etre le principal debouche. Cc canal n'est navigable qu'a demi-charge, «'t avec de telles difficultes, qu'nn bateau met de quaire a ciiK( mois a faire le trajet d'Anzin a Paris, trajet que le roulage fait en cinq jours. Apres ccla, il ne faiit p.is se demander qui es* 1 DEPARTFMENS. — PARIS. 5o9 charjju de I'entretien. Si radministration actuelle avail Ic tcnis de s'occuper des interets de I'industrie, elle poiirrait lui donner line grande marque de sa sollicitude, en cessant de s'occuper de ce canal, et en confiant le soin de I'entretenir a des parti- culiers qui s'en tireraient a beaucoup meilleur marche, et ne laisseraient pas deperir entre leurs mains cette granae, en- treprise. Les details qui precedent suffisent pour donner une idee de I'importance des mines d'Anzin, et de I'influence qu'elles exercenl dans le rayon de leurs debouches ; elles mettent en circulation une valeur brute en combustibles de cinq a six millions, dont une grande partie , consommee par I'industrie, lui fournit uu de ses plus energiques agcns ar M. Dupontel qui represente parfaitement Ies objets sur lesquels il a porte ses recherches. — M. Menaud de la Groye, cor- respondant, lit une note sur un effet, en apparence tres-sin- gulier, que presente la coupe transversale di\ pi/i lUaritime aux endroits veiticilles. — Du 26. — M. Lenoir adresse un memoire sur Ies nhvaux- crrclcs , une instruction sur la regie a calcutcr, avecdes eciian- tillons des regies decrites. (M. Mathieu, commissaire.) — M. Raspail adresse nn memoire sur ies movens de decouvrir 3ij MIANCE. sans aucun piocoJc ohiaiicjue la nalurc dcs divers ttemeus,. f Commission dejk nommee pour im rapport sur ce sujet.) — • Le niiiiistrc de rinlerieur adresse dcs documcns recueillis par \i?. pri'fct du Tarn sur un aerolithe tonibe daus ce departement. (MM. Vauquelin et Thenaid, commissaires). — M. Bunten, (jui a construit depuis quelque tenis des baronietres d'une forme iiouvellc, que les voyageurs out dija soumis a des experiences varices, demande a I'Academie de vouloir Lien les faire exa- niioer. (M3I. Gay-Lussac et Arago , coniniissaires.) — M. Des- Jnntaincs f;ut un rapport verbal sur I'ouviage de MM. Richard, pere et fiU, intitule : Commcntatio hotanicu de coniferis ct cyca- deis. — 31. Cauchy lit deux memoires, I'un sur les integrales delinies qui lenferment des sinus et des cosinus; I'autre , inti- tule : Usage dii calcul des residus pour la solution des problenics de pliysifjue-niathematique. — L'Academie va au scrutin pour I'election d'un correspondant dans la section de botanique. M. Martius (de Munich) est nonime. — MM. ThenardcX. Che- cvcul font un rapport siu" deux memoires de MM. Bussy et Le- c\Nu, intitules, I'un : De la distillation dcs corps gras; I'autre, Essais cliimiijues sur I'huile de ricin. Dans le premier de ces deux niemoiies, ies aiUeurs font voir que les corps firas sapo- iiifiables connus prodnisent dans leur distillation des acidcs semblables a ceux qui se fornient dans leur saponification , tandis que les corps gras inalterables par les alcalis, ou insa- ponifiables, distillent sans production d'acides gras. Ces obser- vations tres - remarquables out conduit MM. Bussy et Lecanu a reconnaitre dans I'huile de ricin trois nouveaux acides gras, et a prouver que cette huile est d'une nature jiarticulierc, ct qu'elle ne conticnt ni oleine ni steariue. Sa distillation donne ])Our residu une matiere solide qui forme presque les deux tiers lie I'huile de ricin. Cette inatiere est fort singuliere. Elle est d'un blanc jaunatre , et semblable jusqu'a un certain point a do la mie de pain mollet; elle est insoluble dans I'eau , I'alcool , I'lither, les huiles lixes et volatiles; soluble, au contraire, dans les alcalis, avec lesqnels elle forme ime sorte de savon propre au savonnage. Elle ne se decompose qu'a une temperature ele- vee, s'enflamme a I'approche des corps en ignition, et briile tres-facilement sans se fondre. Peut-etre pourrait-on en faire usage pour composer des vernis applicables sur des tolcs ou sur des fontes qui doivent subir Taction d'une forte chaleur. I,e travail de MM. Bussy et Lecanu parait aux commissaires fait avec soin et digne d'eloges. L'Academie decide que les deux memoires seront inseres dans le Recueil des savans elrangers. • — M. Brongniart lit, pour son fils, 31. Jdolplic Brongfiart, un PARIS. 3i3 uieinoire sur la generation et le dcvcloijpcment de rembryon dans les vegetaux pharenogames. (MM. Desfontaines et Mirbel, comraissaires. ) — M. Seguin lit une note intitulee : Extrait d'un memoire sur la navigation as sculcment, comnie if I'avait d'abord pense, a 1 ctat PARIS. 3ii oigaiiiqtie. — La commission qui doit examiner Ifs pieces dti concouis pour le prix de mecanique appliquee, t'onde par M. de Montyon, est composee ainsi qu'il suit : MM. de Prony, Dupin, Molard, Girard et Arago. — M. Geoffroy-Saint-Hilaire lit Ic premier chapitrc de son memoire snr les organcs sexucis des ornithorinques. — M. Dupin lit un memoire intitule : Reclierches statistifjucs sur I' instruction et stir la nioraUte coniparees des divers dcpartentcns de la France. — M. Cauchy donne lecture d'uoe note contenant quelques observations snr Tobjet du memoire precedent. — MM. Audouin et Milne Edwards lisent la pre- miere partie de lenr memoire intitule : Reclicrclies anatoniiques et pliysiologiques sur la circulation dans lescnistaces. (MM. Ctjvier et Dumeril, commissaires. ) A. Michelot. — AcADEMiEFRANCAiSE. — Seance clu I \ Janvier. — M. Charles Lacretelle demande , pai- une motion expresse , que la Com- pagnie expose dans une supplique au roi , son aui^uste pro- tectcur, les inconveniens et les dangers dont les lettres lui pa- raissent menacei^s par le nouveau projet de loi sur la police dc la presse. L' Academic arrete qu'elle se reimira le mardi suivant, 1 6 Janvier, pour statuer sur la proposition de M. Lacretelle. — Seance du id Janvier. — Sont presens MM. Lacretelle, Mi- chaud , Villeinain , Souniet , Briffattt ,, Droz , Raynouard , Duval, Andrieux , Picarcl , Jouy, Delavigne , Lacuee , Par- seval, Lemercier , Des tutt- Tracy, Segur, Chateaubriand, Laine, de Levis, Lally, Bonald , Frayssinous , Canipenon , Auger, Roger, Cuvier, et M. de Laplace , directeur. Une lettre se trouve sur le bureau. L'academicien qui I'a ecrite , M. de Quelen , archeveque de Paris , y temoigne des apprehensions sur les suites de la demarche que va faire TAcademie; il laissc percer la crainte que la compagnie ne comprometle son exis.tence. Des voix s'elevent contre la lecture de cette lettre ; M. Frays- sinous (eveque d'Hermopolis), prend la parole pour la de- fendre ; 1' Academic se prononce , et la lecture n'est pas achevee. Aussitot, M. Lacretelle developpe avec etendue les motifs de sa proposition. Quelques membres niettent en doute la competence ; la demarche leiu* parait contraire aux usages de la compagnie. M. Raynouard rappelle une demarche sem- l)lable faite anciennement (sous Louis XV) par I'Academie , dans des circonstances analogues. Des lors, plus d'hesitation ; chacun demande d'aller aux voix. Des viugt-huit membres presens , quatre se recusent , comme appeles a prononcer sur le projet de loidansles scrntins de la chambre despairs; i-fl/^facc, Levis, Lally -Tollendul et Lainc. Les suffrages se donncnt a haut« voix ; et sur vingt-quatre, dix-huit adoptcnt la propo- 3i6 FRANCE. sition. — On nonimc , pour la redaction de la suppUque , Irok coiumissaires , MM. Chdteaubriand , Lacretelle et Fillemain. — Seance da i8 Janvier. — M. Chateaubriand , retenu i\ la chambre dcs pairs par une imporlantc deliberation , n'ayant pu se trouver a la seance , on ajoiirne au mardi suivant le rapport de la commission , qui devait etre fait cc jour-la. — Le luemc jour on lisait , dans la partie oflicielle du Monitcur : « La nomination du sieur Fillemain , niaitre des requetes au Con- seil d'etat , est revoquee. » — « Par decision du roi , M. Mi- cltaiid , de TAcademie francaise , ne fait plus partie des lec- teurs de Sa Majcste. » — « Par arrete de S. Exc. le Ministre de I'interieur , M. Lacretelle a ete revoque de ses fonctions de censeur dramatique.» — ■ M. Delavigne demande qu'il soit nomme une deputation chargee de porter a MM. Lacretelle , Midland et Villemain , I'assurance de I'inalterable attachement de la Compagnie. Un article des statuts, invoque par un des membres , ne permettant pas qu'une proposition soit faite et discntee dans une meme seance, la deliberation sur celle de M. Delavigne est remise , comme le rapport de la commis- sion , au mardi aS Janvier. — Seance du 2^ Janvier. — M. Lally-Tollendal exhorte I'Aca- demie a revoquer sa decision. Une nouvelle discussion s'en- gage ; I'Academie declare persister ; les coramissaires font leur rapport , et le projet de siippUqiie est adopte , sans division , par tons les membres presens (vingt-deux). — M. Delavigne renouvelle sa proposition : MM. Lacretelle, Villemain et Mi- chaud observent que les temoignagcs dinteret et d'attaclie- ment , dont ils viennent d'etre combles au sein de la Com- pagnie , ayant d'avance rempli I'objet de la demarche pro- posee par M. Delavigne , la rendent desorraais superfine ; et la seance est levee. Par une coincidence digne de remarque, le meme jour, I'i Janvier, s'assemblait V Academie de Lyon, pour entendre le rap- port d'une commission nommee le i6, sur la motion de M. Du- mas , secretaire pcrpetuel , composee de quatre academiciens (MM. ToROMBERT, TiiELis , GiLiBF.RT, Cociiet) , et chargec de presenter le projet d'une supplique , analogue a celle de I'Academie francaise. D'autres compagnies savantes s'em- pressent, nous a-t-on assure , d'imiter ce double exemple , re- compense dans les provinces, comme a Paris, par la recon-, paissance publique. Pour nous , voues sans reserve a la cause de la raison ct des Jetties , on nous verra constamment accueillii' de nos eloge& PA.R1S. 3 1 « comme de nos voeux, ceux qui viendront, tot ou tard se ralliei' a cette noble cause. Quelle que puisse etre I'opinion d'un homme (car nous ne parlons point ici politique, mais morale), il lui sera toujours honorable de sacrifier a cette opinion ses interets. Mais , faut-il que I'entliousiasmp poiu' de noiiveaux destitut'S ne laisse que I'indifference a des destitutions beaucoup moins recentes , et ne promette que I'oubli aux consciences qui n'ont point de dis^a-ace a esperer, parce qu'elles ne se sont pretees a recevoir aucune grace? Nous I'avouons , ce n'est pas sans surprise que nous avons trouve dans un de nos journaux ces paroles peu reflechies : « Une longue habitude d'independance dans les pensees , d'elevation dans le carac- tere , de rectitude dans la conduite, ne procure ordinaire- ment que I'estime des gens de bien. La defaveur ministerielle est un appel a I'enthousiasme ; c'est elle qui donne la gloire. » L'auteur de cette observation allfligeante n'approuve pas sans doute, il raconte. Mais, dit-il bien la verite? Si la defaveur, manifestte par des destitutions , appelait seule I'enthousiasme , il faudrait avant tout , pour le meriter ou le faire naitre , avoir brigue ou du moins acccpte les investitures de la faveur ; si les disgraces donnaient la gloire, il suffirait, pour I'obtenir, de deux choses : la premiere, se louer a la puissance; la seconde , rompre son bail dans des circonstances propres a mettre un pareil acte en evidence. Nous voulons bien ne pas deduire les consequences inevitables qu'entrainerait un tel etat des choses et des esprits. Mais , bien certainement , un peuple chez qui rectitude , elevation , independance de con- duite et de caractere ne pourraient se concilier que la froide estime de quelques gens de bien , tandis que la disgrace et la destitution environneraient leurs elus de I'enthousiasme pu- blic, et les investiraient de la gloire ;... allons beaucoup plus loin , un peuple chez qui la fixite de principes , I'invaiiabilite de conduite et d'opinions durant une vie entiere, auraient cesse d'etre le premier, le seul titre universellement reconnu :i la confiance nationale , ne deviendrait pas , en peu de tems , le dernier de tons les peuples , il le serait deja ipso facto. — Seance da i5 Janvier. — M. le chancelier de rAcadt'mie francaise lit une lettre de M. le premier gentilhomme de service , annoncant qu'il avait pris les ordres du rol, et que S. M. avait dit qu'elle ne recevrait point M. le directeur de I'Acadcmie. — L'Acadt'mie a decide que la supplique qu'elle avait votee, et dont elle avait ordonne la transcription sur ses registres, ne 3i8 FRANCE. serait point publi(^c. — On pent regivtter que 1* Academic, dans cettc cirronstance, ait craiut d'employer la voie legitime de la publiritc' pour faire parvcnir sous les yeux du monarque ft de tons k's amis des huniercs IVxpiession de son voeu et un actc dont elle doit s'honorer, en faveur de la noble cause des lettres ct de rintelligence humaine , qu'elle est appelee li servir par ses tiavaux, et h defendre au besoin centre les ennemis qui la menacent. N. Jicolc prcparatnire ctahlic a Paris. — Une institution qui in- teresse bcaucoup Tavenir des etudes classiques en France vient d'etre fondee on plutot retablie par TUnivcrsite. On se soii- vient qu'au mois de septeinbre 1822, uneordonnance, contre- si'^nee par M. de Corbicre , supjmma, sans autre forme do proces , VEcole Normalc , pepiniere deja riche et forte , quoi- que jeune encore, de maitres destines a elever et agrandir notre enseignement public. Cette ordonnance annoncait I'institution d'ecoles normales paiticUes, c'est-a-dire, distributees sur divers points du royaimie, pour fournir des maitres a chacune des Academies de leur ressort. Mais , a moins de confier ce service ail corps le mieux organise qui soit en France, nous voulons dire a la Congi-egation on aiix jesuites, il eut ete bien difficile de reussir dans nos provinces, on I'instruction publique est li- vree a la langueur et au decouragemcnt, grace a Taction de- voraute de la Societe, et a I'arbitraire bureaucratique dont Tadniinistration parisicnne semble ne pas pouvoir se dessaisir, moins par gout sans doute que par prudence. Les ecoles nor- males partidlcs , unique pretcxte d'une destruction qui n'en pouvait offrir aucun autre, sont done restees en paroles dans i'ordonnance. En attendant, comme la seve du corps ensei- gnantavait cesse de se rcnouveler, il devenait urgent de subve- nir a sa detresse. On vient done de fonder a Paris une Ernie prcpnratoirc sur les memes bases, quoique siugulierement re- trecies , que I'Ecole Normale precedente, et destinee au meme obiet, c'esta-dire, a fournir annuellement des sujets eprouves pour remplir les chaires vacantes dans les colleges royaux et communaiix. A la suite d'un concours d'admission lermine a petit bruit, une vingtaine d'eleves environ out eteinstalles dans un quartier du college royal de Louis-le-Grand, ancien ber- cean de I'Ecole Normale, qui y avait passe ses trois premieres annees, avant de s'etablir rue des Postes. La messe d'inangu- ration a ete celebrec, le 2^ novembre dernier, et a etc suivie d'une exhortation paternelle de M. I'eveque d'llermopolis , ministre de I'instriiction publique. Les professeius , appele* PARIS. 3i9 comme par 1« passo , ntailres de conj'ertnces , 8ont en tres- petit nombre dans cet etablissement , dont les roimes ne soniblent pas encoie bion arrc-toes. Nous n'en poiivons de- signer que trois, savoir : M. Leroi, pour Ics niathemati(|ues, professcur d'un mtrite rcconnii et qui a deja rendu de longs services , tant a I'Ecole Polvtechnique qu'a I'anciehne Ecole Normale ; M. Guigniaut, pour lalitterature grecqiie , savant recommande par le beau travail sur les religions de I'antiquite dont il a commence la publication , d'apres I'ouvrago allemand dn D"" Creutzer ; M. Guigniaut avail etc successivemcnt eleve et maitre de conferences, charge dc I'c^nseignemeut de I'histoire ancienne a TEcole Normale; cnfm M. Gibon , ancien eleve tres-distingue de cette meme ecole, excellent hunianiste, qui doit enseigner la litterature latinc. Il reste a nommer un pro- fesseur d'histoire, qui sera en meme terns charge dc faire un corns provisoirc de philosophic, et un ou plusieurs professeurs pour les sciences physiques et naturelles : on assure que M. La- FossR, autre eleve de I'ancienne Ecole Normale, est designe pour ce dernier cnseignement, et cette nomination serait uno garanlie de plus. II parait quo I'administration materielle de retablissement est confiee an proviseur du college Louis-le- Grand ; quant a la direction dcs etudes, elle est remise entre les mains d'un conseil forme d'office et compose d'un certain nombre de hauls fonctionnaires de I'Universite, parmi lesquels se trouvent des noms recommandablesdans lascience, MM. Jin- pere , Then-aid, Lclronne , etc. Notis ne pouvons que faire des voeux sinceres pour les progres et la prosperite d'une ecole dont I'existence etait si necessaire, clou se trouvent heureuscment rapproches quelqucs elemens precieux empruntes aux debris de ce qu'il n'eiit point fallu detruire. R. AcADEMiE DE Paris. — Fficultd dcs Lcttres. — Coiirs d'elo- quence francaisc , par M. Villemaik. — Apres ime inter- ruption causee par ime douloureuse maladie, qui vcnait d'un exces d'etnde, M. Villeniain a repris, cette annee, son conrs d'eioquence francaise : il faisait sa troisieme lecon, lundi ii Janvier. A son entree dans la salle, il a ete recu avec un vif enthousiasme, recompense bien meritee de la noble condnite qu'il venait de tenir. Rien n'est solennel et cnivrant a la fois comme I'acclamation imanime d'un nombreux auditoire; mais e'est aussi une dcs voix les plus imposantes que puisse prendre ['opinion publiqiie. Le jeune professeur a proteste du geste contre les applau- dissemens dont il etait I'cbjet, et les a fait cesser par ces iao FRANCE. paroles : La setiln manu've de me temolgncr vntre esdme el votre amide , c'est voire /presence , ctvotre presence silencieuse. — Apres avoir , dans scs conrs preccdcns , trace le tableau litteraire (les xv^,xvi* et xvii*' siocles , M. Vil'emain expose, cette annee, I'histoire de la litterature dans le siecle dernier. Les premieres seances sont consacrees a 1 rpoque qui sert de transition entre Ic xvii^ et le xviii* siccles. 11 presente avec les coulenrs les plus vives ce groiipe d'ecrivains intermediairos dans leqiiel on frouve, avec la pnrete de j;out dn grand siecle qui finissait, les qnalites hrillantes du grand siecle qui allait naitre. A la facilite avec laquellc M. Yilleniain nianie la parole, on voit que I'improvisation est pour lui nne habitude d'enfance. Dans les mnrs memes du college, il avait plusieurs fois etonne ses condisciples par la fecondite de son imagination, et par la facilite avec laqiielie il improvisait sur tons les tons, lorsqu'il etait appele a remplacer le professenr absent. M. Villemain a done honorablement justifie les esperances qu'il avait donnecs. I/eclat d'une verve toujours soutenue, I'heureuse abondance d'un espiit fertile, et surtout I'liarmonie et I'aisance de la dic- tion ; telles sont les qualites qui brillcnt dans ses discours. II prodigiie les pensees les plus ingenienses, les expressions les plus varices, les plus pittoresques, sans la moindre contention d'esprit. Nous avons dit que, dans son enseignement, M. Villemain suivait I'ordre chronologique. On ne peut nier qu'il ne fassf! naitrc, du rapprochement des livres et dcs terns ou ils furent ecrits, une foule de considerations neuves et importanles. Il nie semble toutefois que, dans I'interet de I'enseignement, il aurait mieux valu etudler I'art oratoire en lui-meme, exposer' les elemens qui le constituent, en classer les differcns genres, et raniener a ces classifications les diverses considerations qui s'y rattachent. Un eleve sorli de la faculle des lettres se rap- pellera confusement quelques be.uix passages des ecrivains anciens et moderncs; il saiira que Demosthenes et Bossuet furent eloquens; mais il ignorera ce que c'est au fond que I'elociuence. Les reflexions partielles du professenr, quelque lumineuses qu'elles soient, ne se reun ssent point dans un foyer rommun, le disciple ne sentira pas un systeme complet so former dans sa tete; il ne possedera plus de regies qui puissent I'aider a jugcr, lorsqu'il n'aura plus I'autorite du maitre pour le guider dans ses decisions. La Harpe avait suivi I'ordre chronologique , comme M. Ville- ttiaiii; et avec ses quinze ou dix-huit volumes, il a fait un ou- Vrage beauconp nioins complet qne les quatre tomes fle la PARIS. 5ii Rlu'toruiuc de Blair. La science consiste moins dans unc nom- brciise collection de faits que dans une rigourenso methode qui les lie et Ics coordonne. On regrette que I'habile professeur ne se niontre pas aussi rigoureux philosophe qu'il est racrveil- leiix artisan de la parole. Le professeur, apres avoir termine Ic portrait de d'Agues- seau, commence dans la precedente seance, est arrive a Rollin, qu'il a presente sous le double point do vue de son carac- tere et de ses ecrits. II a rendu un ('clatant hommage a cet illustre reformateur, qui introduisit Tetude du francais dans les colleges de la France, et qui, pour accomplir une revolu- tion si simple en apparcnce, eut Ijcsoin de toutes les forces de sa logique et de toute I'autorite de son nom. Enfin, par un detour imprevu, I'orateur a amene I'eloge de M. de Chateau- briand, et, pendant dix minutes, la salle a ete, pour ainsi dire, remuee jusque dans ses fondemens par les salves d'ap- plaudissemens et les cris d'enthousiasme de I'auditoire. M. Villemain, voulant finir conime il avait commence, reprit la parole, et dit : « Je sais, Messieurs, qu'il est des applau- dissemens arraches par une emotion purement litteraire. Je vous supplie de ne jamais appliquer ici les votres a un autre sujet; persuadez-vous bien que I'amour des lettres est la seule passion qui convienne ;\ la jeunesse (sans doutc, apres I'amour de la patrie, et apres la noble passion du bien public, qui seule donne aux lettres et a ceux qui les cultivenl leur eclat et leur dignite); nous nc devons y joindrc que notre respect envers le prince et la pi trie. » L'auditoire s'est retire en silence, et gardera loug-tcms la memoire de cette seance remarquable. A. G. Economic pnlitlquc. Dounncs. — A Monsieur le Dircctcur de la Revue Encyclopedique. Paris, ii jamdcr 1827. — Monsieur, entre Ics questions proposecs dans la Revue Encyclopedique (tome XXXI, pages 569-671 ) la derniere semble surtout devoir attirer I'attention des pidjlicistes. La langueur dans laquelle notre commerce est aujoiud'hui plonge donne une extreme importance a la solution de ce probleme : « Quel serait, pour la France , le systcnie de douancs le plus conveiiable a I't'tnt du commerce , de I' Industrie et de V agriculture , et la meilleure classification du tarif, pour rendre la perception des droits plus jbcile aufisc, et moins oncreuse au commerce, etc. » Mais, Monsieur, la question ainsi posec n'est-elle pas trop vaste? Oui : si Ton ne pent y repondre, sans offrir : 1° La discussion raisonnee, et la redaction d'un projct de T. xx.\iii. — Janvier 1827. ai :iaa FRANCE. loi ft d'un tarif; travail qui suppose des connaissances statisfi- ques presquc universelles. 2" La discussion de I'une des questions les plus epineiises de reconomie politique : celle qui traite de la liberie absolue OH limitee du commerce. 3° L'examen d'un usage [draivbacf,- , primes d'exportation) dont le but apparent est de favoriser le commerce d'exporta- tion, et le but veritable de miner et d'aneantir I'industrie etran- gere. 4° Enfin, I'invention de ressources nouvelles pour le tresor public. Essayer de renferiner, dans les bornes d'un simple memoire, des objets si vastos et si divers, c'cst tenter I'impossible. N'an- rait-on pas plus d'espoir d'atteindre le but en ordonnant ainsi la reponse ? « i" De la liberie illimitee du commerce... C'est le point dt- cisif : si le principe dc la liberie absolue est vrai, la plupart des questions proposees tombenl d'elles-memes... Mais, si le principe est faux; si du moins , par sa generalile, il n'est pas applicable a la France..., on ne doit se prononcer qu'apres une discussion approfondie et ptremptoire. — L'affirmalive est sou- tenue par des tlieoriciens dont le noni fait autorite, et que Ton ne doit combattrc qu'avcc des argumcns dignes dc parciis ad- versaires. Cettc parlie de la reponse fournirait seule la matiere d'un bon et long ouvrage. L'auteur qui reussirait a dis^iper tons les doutes, dans un sens ou dans I'autre , meriterait le prix, lors meme qu'il bornerait la sa tache, et negligerait les ques- tions subsequenles. '( 2" Si Ton se prononce pour la negative, une seconde ques- tion se presenle : Les douanes auront - elles une importance financierc ou politique? Doivent-elles etre considerees comme une branche importante des revenus de I'etat, ou seulement comme maintenant Tequilibre dans le commerce et servant d'aiguillon au developpement de rindustrie nationalc? « A la derniere des deux idees, se rattache naturellement l'examen du systeme des primes d'encouragement accordees a I'exportation. ^r M. Jlexanchc Dv\M.. (Mardi, 26decembre 1826.) — L'amour du Tasse pour Leonore d'Est est un fait historique dont les preuves ont etc mises an jour avec beauconp de saga- PARIS. 3-25 cite par Gingiiene, dans la Notice biogrnphique , qu'il a consa- cree au chantre de Godefroi. L'amoiir de Leonore pour le Tasse est moins proiiV(- ; cependant, rnuteur de XHistoire littc- raire d'ltalie a reuni un assez grand nombre d'inductions, d'ou I'ou pent conclure que le cosur de la princesse n'avait pas ete insensible aux tendreshomniages dn poete. Ce sentiment parait avoir bientot cede a reinpirc des convenances; le refroidisse- ment de Leonore estmeme, selon toute apparence, une des causes qui altererent la sante et la raison de I'infortune Tor- quato. M. Duval a profite , en poete habile , de toutes les cir- constances que lui offrait la vie du Tasse; et, par un anachro- nisme, permis aux auteurs dramatiques, il les a rapprochees pour les faire entrer dans le cadre de son action. La scene est a la conr de Ferrare. Le premier acte se passe dans une foret , Leonore, mue par un sentiment de curiosite et de jalousie, est venue incognito a la recherche d'lni petit pavilion ou sontloeees deux femmes qui passent poiir les protegees de Torquato. Elle apprend que ce qui avait excite ses sonpcons est un acte de bienfaisance de la |)artdu poete, qui, apres avoir sauve la vie ci la veuve d'un officier, s'est charge de pourvoir a ses besoins et a ceux de sa fille, la jeune et innoccnte Florella. Leonore, pleine d'admiration poiu- la generosite du Tasse, a bientot une entreviie avec lui dans cette meme solitude ou il vient cher- cher des inspirations. A la suite d'un entretien qii'anime im amour encore mj^sterieux, le Tasse recite a Leonore les vers ou il a trace le portrait de Sophrnnie. La princesse, qui se recon- nait dans ce portrait, donne en recompense iine bague a Tor- quato , et lui abandonnc sa main qu'il rouvre de baisers. Le poete est au comble de la joie. Mais le prince Belmonte, cour- tisan jaloux qui vent faire disgracier le Tasse, epiait I'entretien des deux amans, et il se prometbiend'en tirer parti pour satis- faire sa haine. — Au second acte, la scene est transportee dans le palais du due de Ferrare. Belmonte raconte a Pazzini, gouverneur de la ville , bon et franc militaire , les faveurs ac- cordees par la princesse au jeune poete ; et , tout en protestant qu'il n'y voit point le moindre mal , il le porte adroitement a en parler au due. Mais Alphonse, deja prevenu par sa sceur de ce qui s'est passe, ne leur salt aucun i^^re de cette marque de zele; sur I'avis qu'il recoit bienlck que le due de Mantoue demande Leonore en mariage, il charge le Tasse lui-meme de remettre a la princesse la lettre de ce due, et de I'engager a ne point se prevaloir de la promesse que son Here lui avait faite, de la laisser maitresse de son sort et de sa main. Cette entrevue est dramatique et toue>''>- e; Leonore y laisse prosque echapper rlart FRANCE, I'aveu de son amour. Incertaine du parti qu'elle doit prendrev elle engage le Tasse a venir dans son appartement liii apporter ses conseiis ct sos consolations. Potir donncr a sa visite un pre- texte convcnable, il presentcra on nit'ine terns Florella a sa nouvelle protoctrice. — Nous voici au troisieme acte , et dans I'appartemcut do Lc-onore. Attendrispar I'idee dune st'paration prochainc, Ics deux amans se rappellent, mutucllcmcnt toutes Ics rircoustances qui les ont rapprochis. Get entrotion, plein de melancolie ct d'exaltation , trioniphe de la reserve dc Leo- nore, qui laissc enfm echapper son secret. Mais, tandisque le Tasse se livre aux transports de sa joic , Belnionte entre brus- quement chez la princesse ; on la accuse d'avoir tenu sur son Gompte des propos injurieux, et il vient, dit-il , sc justifier dc cettc caloninic. La princesse, irritee des sarcasnies qu'il lauce contre le Tasse et de la inaniere peu respectueusc dont il s'est introduit cliez clle, se retire avec Florella, ordoune au Tasse de I'attendre, et a Belmonte de sortir. Celni-ci, au lieu d'obeir, liarcele le Tasse par de nouvelles provocations. Ne pouvant plus supporter ses outrages, Ic poele met I'epec a la main. A i'iustantjPazzini arrive, et attestant les lois qui defendentde tirer Tepee dans le palais du<;al , il vcut desarmer le Tasse et I'envoyer en prison. Le Tasse resiste. Mais Leonore se pre- sente ; elie obtient sans peine de Torquato qu'il lui remette son epee, et le determine ^ se rendre dans la prison, en attendant le retour du due, qui est a la cliasse. Pazziiii vent bien se con- tenter de ce desarmement, quoiqu'il ne soit pas dans les formes , et remarque seulement que ces diables de poetes ne font jamais rien comme les autres. — Le quatrieme acte nous transporte dans la prison. Le poete s'y livre aux reflexions les plus sombres. On lui a predit autrefois qu'il ne sortirait de pri- son que pour entrer dans le cercueil. 11 passe dans une cham- bre voisine pour ecrire a Leonore. Florella, qui a suivi son protecteur en prison, ne pouvant le consoler, s'amuse a repeter le commencement de son poeme, qu'elle vcut apprendre par coeur. A peine a t-elle recite quclques vers , que le geolier, sur- venant, acheve I'octave ; ingenieux moyen de rappeler la popu- larite des vers du Tasse. Le geolier annonce la visite de deux dames, et Florella reeonnait avec surprise la princesse Leo- nore et la comtesse Maria, sa dame d'honnenr et son amie. Leonore a craint que le Tasse ne regardat le conseil qu'elle lui a donne de se rendre en prison comme un moyen employe pour se debarrasser de lui , au moment oil clle doit etie fiancee au due de Mantouc. Elle vient le rassurer, le consoler, lui protester que son intention est de se consacrer aux autels^ PARIS. 3*7 mais elle est entrainee pins loiu qu'elle ne voulait ; car, dans un cntrctien passionne qu'ils ont ensemble , maitrisee par Tima- gination bnilante du poete, elle lui promet de fuir avec liii en pajs eiranger, et jure de I'epouser. Cette scene pathetique Cit inlcrrompue par rarrivee de Pazzini ; Leonore se refugie dans la chambre du Tasse. Mais Pazzini, qui a vu se former a la porte dela prison un groupe ducurieux qui pretendent que la princesse y est entree, excite par Belmonte, qui vicnt grossir ce bruit qu'il a fabrique lui-menie, veut penetrer dans la chambre du Tasse, afin de pouvoir justifier la princesse, en affirmant qu'on s'est trompe. Le Tasse fait resistance, et se placant a I'en- tiee de sa chambre oii Ton veut penetrer de force, menace Pazzini de son poignard. Dans ce moment, le due entre ; en appreuant que le Tasse a voulu empecher Pazzini de penetrer dans la se- conde chambre, il s'ecrie : « II a bien fait ! » II disgracje Belmonte, cloigne Pazzini , appelle Leonore qu'il renvoie an palais, et signifie au Tnsse I'ordre de partir pour Rome , oii le pape I'at- tend pour le faire couronner au Capilole. — Le cinquicme acte nous ramene au palais du due. Instruit de la promcsse que sa sceur a faite au Tasse, Alphonse la contraint, sous peine de voir plonger son amant dans le plus affreux cachot, a lui ccrire- une lettre qu'il dicte , et qui lui prescrit de s'eloigner de Fer- rare. Cette lettre, remise au Tasse, porte dans ses sens un trou- ble qui fait craindre pour sa liaison et pour sa vie. Leonore, instruite de ce malheur par les recits que lui font successive- ment Maria et Florella, voit bientot arriver I'infortune Tor- quato, qui ne la reconnait plus. Ce spectacle la plonge dans le plus affreux desespoir. Maria, Florella, toute la cour de Fer- rare partage sa douleur: Alphonse Ini meme est altendri. Dans ce moment, arrive I'envoye du pape, charge d'apporter au Tasse la couronne poetique qui lui a ete dvcernee. Le Tasse, au motde couronne, sent des esperances rcnaitre; il s'imagine, dans son egarement qu'il va etre eleve a un rang qui le rap- prochera de Leonore; mais, a I'aspect de la couronne qui lui est destinee , il s'ecrie douloureusement : " Oh ! elle n'est pas d'or; ce n'est qa'un laurier! n'importe, ajoute-t-il ; mcttez-la toujours sur mon front: Alphonse s'y tronipera pent etre. >> Mais bientot une sueur froide saisit le poete ; il ne reprend: I'usage de la raison qu'au moment de quitter la vie, et il expire, en prononcant le nom de Leonore, qui, bravant desormais les prejuges de la naissance, le presse dans ses bras et s'evanouit sur son sein. — Cette analyse, tout aride qu'elle est, suffira pour faire connaJtre avec quel art M. Duval a su, dans ce drame, graduer le developpement de I'amour et accroitre Tin- 3^8 FRANCE. tercH de scene en scene. II est pen d'ouvrages oii la pcintuie de cette jjassion soit plus energiqiie ct plus touchantc. L'auleui" n'a pas montrc iin talent moins supeiieur a faire contiaster I'indepcndance du poete avec Ics habitudes scrviles des coiir- tisans qui renvironnent. Ce depaysement du genie, au milieu d'une cour, estexprime d'une nianiere a la fois tres-vive et ties- philosophique, dans cette ii'plique du Tasse au prince de Belmonte : « Je ne suis rien ici, et voila poinquni je n'y puis etie I'eselave de personne. » Le personnage du due, constain- ment guide piir la politique et par les convenances, est trace avec une grande habilete; celui de Pazzini est tres-heureuse- nient mele a Taction pour egayer quelques parties du dranie. Enlin , le denounient offre beaucoup de traits dun pathetique neuf et dechirant. Firniin, dans le beau role du Tasse, a etonne le public par la vigueur et I'etendue de son talent, et M"* Mars joue celui de Leonore avec une noblesse et une scnsibilite qui changent en beautes les nioindres mots et quelquefois meme le silence. — Le succes des Amours du Tasse n'a pas etc un seul moment douteux; c'est un des pins brillans que M. Duval ait obtenus : nous pensons qu'il sera durable. Ce drame, digne de prendre rang parmi les ouvragcs qui honorent la scene fran- caise, est encore remarquable sous un autre rapport; c'est un nouveau pas dans la carriere du drame historique, seule forme de cooiposition tlieatrale qui paraisse conveniraux sujets modernes; et il est heureux pour la litterature que I'exemple de ce genre de compositions soit donne a nos jeunes auteurs par celui de nos poetes vivans k qui la scene francaise doit le plus de bons ouvrages ( Voy. le compte rendu des OEuvies de. M. Alexandre Duval, Rev. Enc. , tom. xxviii, pag. 775.). Ch. — Odeon. — Prem. representation de Tliontas Morus, ou le di- vorce de Henri Fill, tragedie en cinq acles , de M. Drap.\rnauij. (Samedi 9 decembre.) — Henri VIII, degoiUe de Catherine d'Aragou, qui ne lui donuait pas d'heritier, poursuivait I'af- faire de son divorce depuis deux annees , lorsque Thomas Mo- rus, famenx par son savoir et son integritt';, fut nomme chan- celier a la place de Wolsey, en iSag. En i53o, Anne de Boleyn, secretement aimee du roi, qu'elle gouvernait entierement , pa- rait avec eclat a la cour; et, I'annee suivante, Morus, en uu- vrant le parlement, declare que les motifs de Henri pour le divorce qu'il soiiicite sont purs et favorables a la prosperite du royaunie. Cependant, en iSSa, Morus, redoutant les suites politiques d'une rupture religieuse avec la cour de Ronie, souf- f'.aut d'ailleurs impatiemment la faveur de Boleyn quil mepri - PARIS. Say sait, remit Ics sceaii\ et se retira loin de la cour. Avant cet evenement , le clerge avait deja decide unanimement que le ma- riage de Henri VIII avec sa belle-soeur avait ete conlracte en opposition a la loi de Dieii ; et ce prince avait secretement epouse la jcune Boleyn. En 1 533 , les reunions du clerge , nommees convocations , et I'archeveque de Cantorbery, Cran- mer, declaretent solennelleinent que le mariage de Henri avec Catherine etait entaclie de nullile; et ce fut deux ans apres, en i535, que Morus fut decapile, pour avoir refuse de pretcr- le sernient de suprematie, et de reconnaitre dans le roi le chef de I'cglise d'Angleterre , litre qui lui avait ete donne par le clerge, des i53i , lorsque Morus etait chancelier, et qui venait d'etre confirnie par le parlement. Quant a Catherine, elle s'etait eloignee de la cour des cette menie annee i53i, et niourut a Kinibolton, en i536, sans avoir jamais voulu quitter le tifre de reine. On voit, par ce resume succinct de I'histoiie de cette epoque, que, si Morus se mela du divorce de Henri, ce ne fut guere que pour I'approuver, et que la veritable cause de sa dis- grace et de sa mort fut une opinion theologique et son attache- jnent a I'eglise roniaine. La lutte de cetle eglise avec le luthera- nisme pouvait sans doute fournir un tableau dramatique; mais la censure ne laissait pas au poete la liberte de I'exposer sur la scene : il a done bouleverse I'histoire pour trouver dans le di- vorce sou action principale, et le motif de la catastrophe dont Morus est victime. II en resulte qu'avec des noms et des faits historiques, I'auteur a compose un veritable loman. Par mal- heur, ceroman est sans interet : on plaint Catherine d'Aragon; mais un divorce ne saurait etre une infortune tragique, lorsqu'il ne fait que deranger une situation sociale; il faut,pour que nous ensoyons vivement emus , qu'il PAULis et Barre. Les autres manquent, a divers degres, de piirete, de finesse et de vigucur dans roxeciition : clles sont modeloes avec negligence; les chairs manquent de flou, les cheveux sont traites avec secheressc. Nous nous dispenserons de designer particulierement ces ouvrages detectueux : la cri- tique directe afflige et decourage les artistes; il suflit dc les engager a suivre une meilleurc route, a voir davantage les grands modeles, a se penetrer des bcautes qui se rencontrent dans les ouvrages des Dupre et des Warin. II faut qu'ils etu- dient les compositions pleines de science, de nature! et dc grace, des artistes de la renaissance, les Pisaiv, les Boldu , les Sperandeus et les Petrecini. S'ils veulent atteindre le grandiose , ils ne sauraicnt trop s'inspirer des chefs-d'oeuvre de I'art nu- mismatique des Grecs et des Romains. G'est la que, par une economic admirable, tout n'est point exprime, et neanmoins tout se sent et se devine. Les contoui's sont gras, les formes principales un pen vivement prononcees; aussi, malgre le tems destructeur, malgre les frottemens des corps durs etlesoxida- tions subies par le metal, une tete conserve sa ph)'sionomie, ime figure son ideal; tons les caracteres principaux se retrou- vcnt. D'autres reproches peuvent s'adresser aux entrepreneurs de medailles. On a le droit de .se plaindre que la langue latine qu'ils emploient soit quelquefois outragee; que, sur plusieiirs medailles, le latin et le francais soicnt meles de maniere que non-seulement la legende de tete est dans une langue et cellc du revers dans I'autre; mais que, du mcmc cote, on trouve line ligne latine et une ligne francaisc. Ce serait ici Ic cas de renouveler cette proposition souvent debattuc, savoir : "Si les monumens dun peuple doivcnt porter des inscriptions ecrites dans la langue vnlgaire, ou dans une langue savante. » La question se reduirait a savoir si Ton vent ou non que le pciiple les comprenue, et si elles sont faites pour quelqucs eruuits, ou pour les neiif dixiemes de la population. PARIS. 335 Les tneilleures medailles qui aient etc publiees I'annee der- niere sont celles du sacre; celle de I'edition de la description de I'Egypte (voy. Rev. Enc, t. xxxii, p. 85i, cahier de decem- bre 1826 ); celles des edifices des bairieres de Paris; les por- traits de Colbert, de Jean de Witt, de la reine de Suede, de Sgricci, de Dupaty et dn jeune Michallon. II y en a, parmi les autres, quelques-unes qui meritent de Tencouragcment; mais_ on est oblige de dire qu'il y en a aussi qui ressemblent a des images populaires, et meme a de veritables caricatures. Quant aux inscriptions, les graveurs ou les entrepreneurs devraient consulter, pour les rediger, des personnes d'un gout sur, ou des litterateurs exerces, et ne pas mettrc sur un revers : Thea- tre francais. Ne a Paris , Ic 1 6 ja/ivier 1 763 ; mnj't /c 19 octobrc 1 826. II ne faudrait pas non plus graver : Systeme du monde. Ne a Beaumont en Auge , le n'i mars 1749- Malgre le juste desir de donner a seslegendes de la concision , il ne faut faire ni contre- sens, ni amphibologies, et on auraitpu nommer dans ces inscrip- tions, Tahna , et M. de la Place. Au revers de la tcte de Vernet, on lit : Batailles de Marengo , Anstcrlitz, Ripoli, etc. Pourquoi ne pas mettre : Tableaux de batailles : Marengo , etc. ? Nous Sa- vons que Vernet est peintre; mais la medaille ne le dit pas, et elje est faite pour la posterite. Nous pourrions pousser plus loin nos critiques, et en faire de plus importantes; mais nous nous arreterons par cgard pour des artistes qui auront sans doute a coeur de rtparer leurs fautes, et qui, nous I'esperons, deviendront bientot les rivaux ou les dignes emules de ceux qui sont encore leurs maitres. Nous ne voulons point froisser des artistes dont nous serous toujours prets a encourager les efforts; notre but est de fixer leur attention sur les fautes a eviter et sur les regies a suivre, et d'etre ainsi utiles ii un art que nous aimons, et qui doit contribuer a la gloire de notre pays et de notre siecle. Dumersan. — Lithographie. — Au moment ou la mort vient de frapper M. Lanjuinais, un des homnies Ifs plus dignes d'estime de notre epoque, on me permettra sans doute de rappeler que M. RouiLLARD en a fait un tres-beau portrait, qui a ete pai- faitement bien lithographie par M. Sudre. Cette estampe, 011 la ressemblance s'unit au nicrite que le lithographe y a deve- loppe, coute 20 fr. sur papier de Chine, et 12 fr. sur papier blauc. — Ventc d'une collection ayunt appartenu, ii M. Sage. — On annonce, pour le 8 fevrier proehain, la vente publique d'une collection formee par M. Sage ; cette vente durera plusieurs jours. I! n'est pas etonnant que le fondatour de la premiere ecole 336 FRANCE. des mines qui ait exist- en France, ait laisse une grande qiian- tite de niineraiix precieux et (i'instrumens de physique; niais on sera pcut-etre surpris d'apprendro que cette collection con- tient en outre beaticoup d'objets ti'art, comnic vases, colonnes, Ijgiiies, busies, etc., et un assez grand nombre de peintures, parnii lesquelles j'ai remarque di iix tableaux dc Callot, quel- ques maitres anciens, et une copic des Noccs aldobraiulincs , attribuee an Poussin. Je pense que Ics amateurs des choses cu- rieuses trouveront Ki de quoi satisfaire leur gout. Reclamations. — Tableaux de David. — Exposition des Grecs. — M. Firmin Didotetses deux Ills possedent plusieurs ouvrages attribues a David, et qu'ils out envoyes a I'exposition auprofitdes Grecs. Lorsque j'ai rendu comptede cette exposition {i. XXX, p. 578), j'ai fait observer que la repetition reduite des Horaces n'etait pas de David, quoiqu'elle portat son nom, et que c'etait Girodet , alors son eleve , qui I'avait exccutee ; j'ai , a cet egard, des donnees certaines. M. Carion Delmotte, ne gociant a Mons, nous ecrit que la Colt-re d'Jchille, ainsi que Tclcmaquc et Eucharis, annonces pour etre des originaux, ne sont egalement que des copies de M™"^ Rude , auxqnelles David , sonraaitre, a mis son nom, apresy avoir fait qiielques retouches, dans les derniers tems de sa vie. II ajoute que Toriginal de Te- lemaque et Eucharis est a Munich, et que ceUii de la Colore d'Achille , qui hii appartient , est maintenant depose chez M. Naigeon , conservateur de la galerie du Luxembourg. Je suis d'autant plus dispose a croire a I'assertion de M. Del- motte , que , dans les deux tableaux dont il s'agit , je n'avais pu me decider a reconnaitre le maitre auquel ils otaient attribues, meme en les comparant avec ses dernieres productions. P. A. — AM*" P. A. — Paris, Z jamncr 1826. — Monsieur, tout en vous remerciant des choses obligeantes que vous dites dc mon otwrage sur les beaux-arts, (voy. Rev. Erie, t. xxxi, p. 782 ) je me permettrai de vous soumettrc quelques observa- tions. Lorsque vous parlez des ouvrages de M. Emeric David et de ceux de M. Coussin , dont j'estime beaucoup la personne et les talens, voussemblez iusinuer que leurs ouvrages ont etc publics avant le mien, et c'est precisement Ic contraire. Nous concourumes ensemble, M. Emeric et moi, en I'an ix, sur le sujet intitide : Quelles ont ete les causes de la perfection de la scidpture antique? M. Emeric David obtint la palme, mais il ne fit imprimer son ouvrage que quatre ans apres; et moi, je publiai le mien chez Baudouin , la meme annee du jugement. C'est ce meme ouvrage, public en Fan ix, que j'ai intercallc en grande partie dans celui que je public aujourd'hui. PARIS. 337 Quant au Mcntoire ■mr V ArchiUtcture, voiis Ic Irouverez im- prime en I'an vi, dans le Magasin Encychpt'dique dc Millin, c'est-a-dire vingt-cinq ans au moins avant la publication dr I'ouvrage important do M. Coussin. Vous avez en la complaisance , Monsieur, de citer avec elogc^ mes notes inst'recs dans la Bidgraphtc Univcrselle , je vous en le- mercie; mais jjcut-etre auriez-vous pu citer plutot qnclcjues- uns de mes ouvrages sur I'histoire ou la politique, dont plu- sieurs ont etc couionnes ou nienlionnes honorablemeut par rinstitut. Vous avez eula bonte de citer tres-scrupuieusement prcsquc tons les articles contenus dans nion recueil, cxcepte le plus important, a cause du sujet. L'Institut mit au concours, il y a quelques annees, cette question : Quelle est I' influence ties beaux-arts sur I' Industrie conimerciale , la gloirc et la prospcrite de I'etat? Nous avions concouru, MM. Amaury-Duval, Emeric David, et moi. Le premier remporta la palnie, et les deux autres obtinrent des marques de la satisfaction de I'lnstitut. Mon memoire est imprime dans mes Melanges, pour la premiere fois; c'est le seul des trois qui le soit. J'ai I'honneur d'etre, monsieur, etc. Ponce. — Reponse de M. p. a. — Il resulte de la lettre meme de M. Poncc que les principaux articles du livre dont j'ai rendu compte ont ete composes et publics, pour la plupart, il y a vingt a vingt-cinq ans; M. Ponce n'a point rappele cette cir- constance. ,T'ai bien pu oublier des dissertations imprimees de- puis un si grand laps de terns; et si M. Ponce, selon I'usage generalcment suivi, avail mis, en tete de chacune de ces dis- sertations, I'epoque a laquelle elle parut pour la premiere fois, le concours pour lequel elle avait etc composee, jc I'aurais rappelee a mon tour. Au reste, je dirai que M. Ponce , en reimprimant les divers traites qui composent ses Melanges sur les hcaux-arts , aurait du, peut-etre, pour leur donner plus d'interct, ne pas oublier que, depuis que ces traites avaient ete ecrits, beaucoup d'au- tres ouvrages, ecrits sur les memes sujets, avaient pani ; que, dans ces ouvrages, plusieurs questions avaient ete presentees sous une face nonvelle, et que, pour ne pas rester trop en arriere des connaissances acquises , il etait , ce semble, indis- pensable de combattre ou de rappeler tout ce qui avait ete dit. posterieuremcnt. Au surplus, ces observations nc m'empeclient pas de per- sister dans les eloges que j'ai donnes a i'ouvrage de M. Ponce ; et, si je n'ai pas cite ceux qu'il a ecrits sur I'histoire et sur la T. xxxiii. — Janvier 1827. %%, ■\U iRANCIv politique, c'esl cji\'ils iravaicnt auciint- connexion avec le Uvic e .• Societe de bienfaisance. — Liege: Societe pour I'ins- tructioa elenientaire. — Bruxelles : Publication procbaine. . 3o4 France. — Anzin ( Nord ) : Mines de hoiiille. — Societes sa- vantes et etablissemens d'utilile publique. — Ljon (Rhone) : Prix propose par I'Academie royale des sciences 3o6 Paris. — Institut. Academic des sciences : seances du 18 decenibre 1826 au i5 Janvier 1827. Academic trancaise : seances des ir, 18, 23 et 26 Janvier. — Ecole preparatoire etablie a Paris, — Academic de Paris. Faculte des lel'.ves : Cours de M. Vil- lemain. — tconomie politique. Douanes. Lettre au Directeur de la Revue. — Lettres inedites de La Pej rouse. — Publication procbaine : Memorial scientifique et industriel, en arabe. — Theatres : Theatre Francais : premiere representation des Amours du Tasse, drame historique. Odc'on : premieres repre- sentations de Thomas Morus , tragedie , ct de Louise, drame. — Concert donne par M. et M""' Stockhausen. — Beaux-arts : Numismatique moderne. Etat de la gravnre en medialles. — Lithographic. Portrait de M. Lanjuinais. — Vente d'une collection formee par M Sage. — Reclamations. — • Necrologie : Paganel; Mazois ; Lanjuinais 3og Avis AUX AMATKDRS DK la tll'IERATURE KTRANGERE. On peut s'adresser k Paris , par rentremise du Bureau cebtbal db LA Rkvue EwcYCLOPEDiQUB, a MM. Trbuttel et Wurtz, rue de Bourbon, n" 17, qui ont aussi deijx maisoiis de librairie, I'un^ 4 Stras- bourg , pour I'Alleniagre , et I'autre a Londres ; — a MM. Arxhus Bebtkand, rueHautefeuille, n" a3; — Rewouabd, rue deTournon,n° 6; — Levtiaui,t, rue de la Harpe, n" 8r , el 4 Strasbourg ; — Bos- SAVBJi pere , rue Richelieu, n°6o; et a Londres, pour se procurer les divers ouvrages Strangers, anglais, allemarids, italiens, russes, polo- nais, boiiandais, etc., ainsi que les autres productions de la litt^rature etrangere. Aux academies et aux sociETEs SAVANTES de tous les pays. Les Academies et les SociETis savantes et d'utiuxb publiqub, francaises et etrangferes, sont invitees k faireparvenir exactement,yranc de port , au Directeur de la Rente Encyclopedique , les comptes rendus de leurs travaux et les programmes des prix qu'elles proposent , afin que la Revile puisse les faire connaitre le plus promptement possible a ses lecteurs. Aux editedrs d'odvrages et atjx libraires. MM. les 6diteurs d'ouvrages p^riodiques, francais et etrangers, qui d^sireraient dchanger leurs recueils avec le n6tre, peuvent compter sur le bon accueil que nous ferons a leurs propositions d'^change , et sur une prompte annonce dans la Revue, des publications de ce genre et 'les autres ouvrages , nouvellement publics, qu'ils nous auront adress^s. Aux editeubs dbs recueils periodiques em argleterbe. MM. les itditeurs des Recueils periodiques publics en Angletcrre sont pries de faire remettre leurs numeros a M. Degeorge, correspondantde ia Revue Enc/clopedique k Londres, n° 38, Norfolk-street, Strand, cher MM. De Cnax, CahH et Marbot, maison de correspondance et de com- mission ; M. Degeorge leur transmettra , cbaque mois , en ^change, les cahiers de la Revue Encyclopedique, poilr laquelle on peut aussi sous- f rire chez lui , soit pour I'annde courante , soit pour se procurer les collections des anneesanterieures, de i8ig a iSaS inclusivemeut. Aux LIBRAIRES ET AUX EDITEURS d'oUVHAGES EN AEI.EMAG»E. M. ZiEGES, libraire k Leipzig, est charge de recevoir et de nous faire parvenir les ouvrages publics en Allemagiie , que MM. les liiraires, les ^diteurs et les auteurs dAireronl faire annoncer dans la Revuf Encjr- clopidique. # LiBRiCiRES chez lesqueh on souscrit dans les pits ktranqkrs. Aix-la'ChapeVe, Laruelle fib. jlinsUrdam, Deliiclinm ; — G. Du- faur. >, yi livers ,^ AticeUe. A'au (Suisse), Sauci l.wiui-i . Berlin, Sclilesinger. Bernv , Clius ; — Bourgclorfer. ISreslan, Th. Korn. liruxillcs, Lecharlier ; — Demat; — Brest vanKempen; — B^u-lhot- Bruges^ Bogaert; — Dumortier. Florence, Piatfl. Ffcboiirff (Suisse) , Alo'ise Eggen- dorfer. Francfort-siir-Mein , Schaeffer; — Bronner. ' Gind, Vandenkerckoven fils. Geneve, J.-J. Paschoud ; — Bar- bezat etDelarue. La flara, les fr^res Langenhuysen. Lausanne , Fischer. ie!y)z(»,Grieshaiiimer; — G.Zirges. Londrss, Dulau et Compagnie; — Treutiel et Wiirt?,; — Bossange. Madrid, Denude; — Per^s. Milan, GJpgler; — Visitiara; B0CC9. Moscoii, Gautierj— Riss ppreeffils. Naples , Bt>rei ; — Marotta' et Wanspaiulock. A'<;McAa/f/ (Suisse), Grcster.. Keiv-York (Etats-Unis), Thoisnier- Desplaces; — BerardetMondon; — Bchr et Kahl. Nouvelle - Orleans , Jourdan ; ~- Roche , freres. Palerme (Sicile), Pedonne et Mu- 4'atorj ; — Boeuf (Cli.). Petersboiirg, Saint - Floi ent ; — Graeff; — Weyher; — Fluthart. StuUgarc et Tubingue , Cotta. rorfr, B. Scalabrini. Ttiriji , Bocca. Varsovie , Glucksberg ; — Za- vadiky. Vienne (AutricL"), Ceroid; — Scliauinbourg ; — Schalbaclier. Liege, Dcsoer Lisbonne , Paul Martin. COLONIES. # GHarfffc(//)(; (Polnte-a-Pitre), Piolet atne. /fc.rfe.F/-a;!cc (Port-Louis), E. Buidet. iiJakinique , Ihouneas , Gaujoux. ' ON SOUSCRIT A PARIS, Au BnRB*lJ DE REDACTION, BDB u'EnpKR-SaIMT-MiCHEL , D" 18, ou doivent *tre envoyes, francs de port, les livres, dessins et gra- vures , dont on desire ramionce , et les Lettres , M6inoires , Notices on Exlraits destines ii ^Ire inseres dans ce Hecueil. AoMosEEENCYci-opiioiQDEjchezBossAivGB pt-re, rue Richelieu, n«tio; CuBK 'rREDTTEL ET WiJExz , Tuc de Bourbuii , a° 17; Rhy et Graviek, quai de$ Augnslins, u" 55; Charles Bechbt, libraire-conini" , quai des Attgustins, ii" J. REJfoUARn, rue de Tournon , n°6 ; RoRBX, rue Hautefeuille , n" 12 ; A. Baudouin , rue de Vaugisard, n" 17 ; Delaukay, Peliciek, PoKTuir.u, la Teste, Cabiwet Litxe- RAiBE, au Palais-Royal. ; A LONDRES. — Geitbrai. Foreigjj Agekcy Office, n" 38, Norfolk- street, Strand; Treuttel et Wiirtz; Bossange; DvlilV btcomp. ; P. RoLAHDi, n°2o, Berners-street, Oxford-street. A'rJM. Les ourragcs atmonces daus la Revue se trouvcnt aossi cbez Roret , rue Hautefenilie, n* la. — — ; J>ARIS.— nt I.'jMl'RIMERIE I)E RIGNOCX, rue (Ics Krancs-Boargeois-S.-JIiilicI , n' 8. Tome I- 1827. ( 33^ de la collection. ) 98' LIVJRAISOW. ENGYCLOPEDI '"° ou ANALYSE RAISONNEE DES PRODUCTIONS LES PLUS REMARQUABLES DANS LA LITTERATUEJE, LKS SCIENCES KT I-ES ARTS. r" Pour les Sciences physitjues et mathematiques et les Arts iadustriels: MM. Ch. DirpiN, GiRARD,KA.viBR,del'Iu&titut; Fbrry, Francxjeur , Ad. Gon- niWET, A. MrCUELOT, de MOHXaERT, MOREA.C »E JOHHES, QOETEIET, T. Bl- CHjkRD, Warden, etc. a" Pout les Sciatces naturelles: MM. Geofprot S AiHT-Hit Aire de I'lnstitut; BoRY DE Saikt-Vikcemt, Correspond ant de I'lnstitut, Mathieu Bonafocs, de Turin; B. Gaillob , de Dieppe; V. Jacqhemont, etc. 3" Pourles Sciences medicates! MM. Bally, Damirok , G.-T.Doiw, Amedeb DiiPAc, FossATi, Gasc; Gerson, de Hambourg^ Georget; Legraiid; de KiRCKHOFF, d'Anvers; RiGOLtoT fils, d'Amiens. 4° Pour \es Sciences philosoj/liiques et morales, poUtiques, geographiques et historiquesililLM. M. A.. Jblhen, de Paris, Fondateur-Directeur de la Revue Eacrclnpedique; Alex, de la Bordb, Jomard, Artadd, M. Avekel, Barbie DU BOC^GE fils, BEMJAMIIt-CONSTAJfT, CkARLES CoMTE , DBPflKG, DuFAU , Dhkoyer, Gctigsiaut.Guizot, A.Jadbekt, Alcx. LaubtBj Lahjuisais fils, P. Lami, Le-scecr-Merliw, Mass^as, A. Metral, Albert Mumtemont, EusEEE Salverte, J.-B. Say; Simomde de Sismordi, de Geneve; Warn- K-OEStG, de Liege, etc. DcriH afuc, Berviile, BoncHEKE-LEFER,CEiVELLi, Ch.REKODARD, Taili.andier, avOcats. 5* Pour \u"LiUcratHrefrancaise et eirangire, la BiWicgraphie ,\'Archgologie et les iJ(?fl«.c-^,tj:MM. Ahdriepx, Amaury-Ddval, Esseric David, Leker- ciER , DE SeGTjr, de I'lnstitut; M"">! L.-Sw. Beli.oc; MM. J.-P. Bais, Bdr- HOOF fils, Chadvet, Chekedolle, de Liege; P.-A. Coupiw, Fr. Degeorge, DtTMSRSAN.PS. OoLiERY, HeIBERG, IIeKRICHs, E.UbREAU, AtrCUSTE JULLIEK fih; Bbkkabd Jol'-iek; Kalvcs, de Zante; .iDRiEifLAFASGE, J.-V. Leclerc, Lof.ve-Veimars , A.Mabdl; Monmard, deLausanne; CPagahel,!!. Patik, Pongerville; de REiFFETfBERG, dc Bruxelles ; de Stassart; Fr. Salfi, M. ScBiNAs, ScHiTZLER, Leon Thiesse, P. F. Tissot, Villenave , S. Vis- COHTi.etc. A PARIS, AU BUREAU CENTRAL DE LA REVUE HNCYCLOPEDIQUE , RUE D'eNFER-S. -MICHEL, ^f" i8; ARTHUS-BERTRAND, LIBRAIRE, RDE HADTE-FEUtLLE, :t° 23. FEYRIER 1827. CONDITIONS DE LA SOUSCRIPTION. Depuis le molsde Janvier 18x9, II parait, par anu^e, douze cahiers de ce Recueil ; chaque cahier , public le 3o du mois, se compose d'ea- viron i4 feuilles d'impression, et plus souventde i5 ou iS. On souscrit a Paris, au Bureau central d'abonnement el d'expidilion indiqu6 sur le litre , et chez les llbraires ci-apr^s : ARTHUS BERTRAND , rue HautefeuIUe , n" a3 ; Au MnsEB ENCTCLOpEDiQUE, CHEZ BossiiTGE p6re,rue Richelieu , noeo; Rekouard, rue de Tournon, n° 6; Prix de la Souscription. A Paris 46 fr. pour un an; 26 fr. pour six mois. Dans les departemens. 53 3o A I'etranger 60 34 En Angleterre yS 4^ Le montantde la souscription, envoye par la poste, doit etre adresse d'avance, franc de port, ainsi que la correspondance , au Directeur de la Revue Encyclopedique , rue d'Enfer-Saint-Michel, n° xi. C'est & la m^me adresse qu'ou devra envoyer les ouvrages de tous genres et les grarures qu'on Toudra faire annoncer, ainsi que les articles dont on desirera Tinsertion. " On pent aussi souscrire chez les Directeurs des postes et chez les principaux Llbraires, a Paris, dans les departemens et dans les pays etrangers. Trois cahiers ou livraisons forment un volume. Chaque volume est termini par une Table des matures alphabetique et analytique , qui eclalrcit et facilite les recherches. Cette Table est toujours jointe au I "^^ cahier du volume suivant, i I'exception de la dernifere Table de 1 ann^e, qui est eip^dl^e isol^ment i tous ceux qui peuvent y avoir droit. On souscrit, seulement k partir de deux ^poques , du 1" Janvier o\x a\x if^rfuillet de chaque ann^e , pour six mois , ou pour un an. On trouve, au burejiu CENTR4.1., les collections des annees 1819, i8ao, lilt, 1832,1823, 1824 ej 1825, au prix de 5o francs chacune. Chaque annee de la Revue Encyclopedique est independante des annees qui precedent, et forme une sorte d'Annuaire scientifique et litteraire, en 4 forts volumes in-8», pour la periode de tems insc^le sur le litre REVUE ENCYCLOPEDIQUE, ou AI^ALYSES ET ANNONCES RAISONNEES DES PRODUCTIONS LES PLUS HEMAUQUABLES DANS LA LlTTERATUr.E, LES SCIENCES ET LES ARTS. I. MEMOIRES, NOTICES, LETTRES ET MELANGES. NOTICE SUR LES ASSURANCES DE TOUTE ESPECE, ET PARTICULIEREMENT SUR LES ASSURANCES QUI SE RAPPORTENT A LA VIE DE l'hOMME. C'est a Fcrmat , Pascal, Jacques Bernoidlli, Moivre , Lam- bert , Euler et Lagrange , que Ton doit la doctrine des proba- bilites, doctrine qui etait entierenient inconnue des anciens. Long-tems environnee d'obscurites ^ cett&theorie a eprouve de vives contradictions , et ce n'est que depuis les travaux de Con- dorcet, D. Sernoailli et M. de Laplace sur ce sujet, qu'elle est devenue une science positive (i). Les assurances en sont una branche particuliere , et sont, par consequent, une decouverte (i) Les traites speciaux composes par M. de Laplace sont VEssai pkilosophique sur les probabilites (5^ edition), Theorie analjtique des probabiiues (3e edition), et plusieurs suppleinens a cet ouvrage. Paris; Bachelier, libraire. T. XXXIII. — Fevrier 1827. a3 35o NOTICE modernc ; on pent dire que Ics premieres idees qu'on en a cues ne remontent pas au-dela du xviiime sieele; ct meme aujour- d'hui que cette thcorie a fait de grands progres, il faut avouer qu'il nous manque encore beaucoup dc donnees experimentales pour Tappliquer avec exactitude a nos besoins, et que nous sommes loin d'etre suffisamnient eclairos sur les cvenemens qui peuvent foiu'nir les valours numeriques, bases fondamentales de toutes les consequences que Ton doit tirer pour chaque cas particulier. Toutefois, dans I'etat actucl des choses, ce qu'on en connait rend chaque jour de si grands services a la societe qu'il importe d'cn multiplier les applications,- et d'en bien concevoir la nature et Timportance. C'est ce que nous aliens developper. Avant tout, donnons unc idee de ce qu'on entend par yjro- babilitc. Les gcometres nommcn-t ainsi une fraction dont les termes sont , d'une part, le nombrc de toutes les chances cgales capables d'amencr un cvenement, ct de I'autre, le nombre total des chances egalement possibles. La probabilite d'amener as avec un de cubique, est, par exemple , \, parce qu'il y a six faces qui ont un droit egal a se presenter, et qu'une de ccs faces est as. De meme , la probabilite d'amener 9 pour somme des points, en jetant deux des, est ^ ou |, parce que, sur 36 wsultats egalement possibles, il n'y en a que 4 qui produisent la somme 9, savoir 6 et 3, 5 et 4 , chacun de deux manieres. Dans ce cas, on dit qu'il y a 4 a parier centre 3a (ou 1 contre 8 ) qu'on amcnera la somme 9 avec deux des, parce que, sur 36 coups egalement possibles , 4 sont favorables et 32 sont contraires. D'apres cette exposition, on voit que: 1° Si la possibilitecsty, il y a autant a parier pom- que contre revcnement , I'incer- titude est absolue : mais cette eventualite Ae\'\e\\\.vraiscmblable, pour pen que la fra ction surpasse -;. L'evenement est d'autant ^Improbable que la fraction croit davantage. II y a enfm cer- titude, quand la fraction devient un; car, si elle est, par exem- ple,-fjde six evenemens seuls possibles, six sont favorables et le fait doit necessairement arriver. II est visible que i'unito SUR LES ASSURANCES. 35i est la plus grande des probabilites , puisque Ic nombre des cas favorables ne pent depasser celui de tons les cas possibles. ■i" Quand la fraction est moindre que -j-, Y incertitude de I'eve- ucment prend plus de force , et cela d'autant plus que la pro- babilite s'affaiblit davantage; en sorte que Ton descend succes- sivement au doute, a \a. presomption , au soupcon, et enfin a Vimpossibilite, quand cette fraction devient nulle. Nous ne pretendons pas, pour cela , qu'il y ait quelque de- pendance eiitre un evenement et la pi'obabilite de son existence; car le fait le moins probable pent certainement arriver tout coinme un autre et dejoucr toutes les mesures de prudence. Mais , quelles que soient les idees qu'ou s'est faites du bonheur et du malheur , nul n'est assez fou pour croire qu'il soit indif- ferent qu'un evenement attendu ait une probabilite grande ou petite; par exemple, qu'on yteut parier a but qu on ameneraa* avec un de. Et ce qui justifie ce sentiment, c'est que, si Ton reitere souvent les essais , I'evenement le plus probable sera celui qui se presentera le plus souvent. C'est ce qui suit de ce theoreme : lorsqu'on/aitde nombreuses epreuves , chacun des di- vers evenemens possibles doit se reproduire dans un rapport indi- que par sa probabilite propre ,'parce qu en evaluantla probabilite que la chose se passe ainsi, le calcul apprend que cette der- niere fraction croit sans cesse vers I'unite, et par consequent, que I'assertion approche de plus en plus, et autant qu'on veut, de la certitude. On pent done parier presque a coup, sur qu'un tel hasard reviendra tant de fois , sur tant d'epreuves , quand la probabi- lite est donnee , pourvu que le nombre de ces epreuves soit tres- considerable; d'ou resulte un moyen de tirer cette probabilite de I'experience , lorsqu'elle est inconnue, en comptant com- bien de fois revenement arrive dans de nombreux essais. Ainsi, lorsqu'on veut appliquer cette mesure de la crainte ou de I'es- perance d'un evenement aux cas qui se presentent, il faut, comme dans les examples cites precedemment, savoir combien il existe de chances, soit favorables, soit contraires; et, lors- qu'on I'ipnore, on consulte Texpericnce pour tirer d'une lon- 2^. - 35a NOTICE guc siiccession dc fails divers la quotito do fois quel'evenement s'est realise. Cc iiombrc compare a celui de tons les essais domic line fraction qu'on preud pour la vraie probabilite : ceci meritc d'etre eclairci. C'csl line des choses les mieiix demontrees par la thcorie, et que rcxpericnce confirnie chaque jour, que, lorsque les circonstances restent les mcnies, les arrets favorables et con- traires prononces par la fortune restent en rapport constant, pourvu qu'on reitere les tentatives un grand nombre de fois. Par example, le joueur qui vent amcner la face as avcc un de parfaitement regulier, do-it croire que cette face se montrera I fois sur six jets, ou plutot loo fois sur 600, 1000 fois sur 6000, etc. Plus le nombre de jets est considerable, plus on ap- proche de la certitude de ce resultat. II faut done que I'enjeu total soit six fois la mise du joueur qui parie amener as avec un de, si Ton veut que le jeu soit equitable : apres un grand nombre d'essais, la fortune se trou- vera avoir dispense ses faveurs avec regularite, et le joueur ayant autant gagne que perdu se retrouvera dans le meme etat qu'au commencement de la partie. Sans doute, dans cette succession d'evenemens, il arrivcra que cet equilibre sera fausse , parce que les resultats particuliers se seront reproduits plus ou moins de fois que ne I'exige notre theorie; mais, apres de longues tentatives, tout rentrera dans I'ordre prescrit, etle rapport assigne ~ entre les resultats et les epreuves se retablira. Si les conventions du jeu attribuaient au joueur un avantage quelconque ; si au lieu de parier i contre 6 , il pariait i contre 9; a la fin, il retrouverait en benefice tout ce que lui attri- bue la difference de 6 a 9. Car, puisqu'apres tout, sur 6 coups, le joueur dfeit en avoir gagne un seul, il aura perdu 5 et gagne g, ce qui lui assure en definitive 4 de benefice, ou les deux tiers des six mises qii'il a faites; cela se realisera, comme s'il ne devait se rencontrer aucune cause contraire, aucune circon- stance aleatoire. D'un autre cote, si Ton admet que le de soit defectueirx, les choses ne se passeront plus ainsi , et la face as se montrera plus SUR LES ASSURANCES. 353 oil moins de fois qu'on ne I'a dit; et, comnie on ignore I'in- fluence qu'exerce siir Ics resuUats le defaut de conformation du de , il suflira pour I'apprecier de faire un grand nombre de jets, et d'enunierer les resiiltats : la coniparaison montrera non- seulement quelle est la face favorisee , niais en quelle propor- tion elle Test. On saiira si Ton veut que as se montre i fois sur 5, et la probaljilite de I'amener sera ^, an lieu de f ; les raises seront dans le rapport de i a 4 ? 'iu lieu de i a 5, pour I'equite du jeu. Les raises doiyent done etre reglees sur la probabilite ; et, s'il en etait autrement, I'un des joueurs serait necessaircment dupe ou favorise , avcc le teras : et, quel que soit, dans I'intervalle , le sort de chacun , on trouvera apres tout que la balance penche du cote qui a quelque petit avantage, et que le benefice est dans le rapport nienie prescrit par la proportion qui determine c€t avantage. Les jeux publics offrent une experience concluante en faveur de cette proposition. Dans ces etablissemens, il est accorde au banquier une faveur qui serable legere au premier coup d'oeil; cette faveur lui est donnee, parce qu'il est force de jouer tres- gros jeu, ce qui I'expose a des pertes enormes : en effet, les joueurs pouvant tons diriger lenrs esperances sur la meme chance, que le hasard peut realiser, la banque pent perdre tout ce qu'elle possede, avant d'avoir pu accomplir la periode d'essais qui servirait h. I'indemniser. Le banquier' a d'ailleurs des frais d'administration ; il paie un impot considerable; enfin, il ne consent a courir ces risques et a>se charger de toutes ces depenses que sous la condition d'un benefice pioportionne a ses peincs. Ces frais sont payes par I'avantagc que le jeu lui accorde , parce qu'il doit infailliblenicnt gagner a la longue. "Les pontes ont consenti a ce gain et achetcnt a ce prix le plaisir de jouer et de conduire leiir jeu corame ils I'entcndent. Or, dans les neuf maisons de jeu, tant de roulette que de trente et un , etablies a Paris, il se joue annuellement 3oo rail- lions environ. Mais, comme Ic nicme argent passe tour a tour, par les chances de la fortune, des joueurs au banquier, et de 354 NOTICE celui-ci aux pontes, si Ton ne tient compte que des sommes differentes jouees cliaque jour , ce qui n'est guere que le dou- zieme des sommes totales, on pourra les evaluer a 24 millions. Nous avons dit que le banquier avait achete du gouvernement, qui lui donne son privilege, un avantage tres-modique en ap- parence ; mais le rctour periodique de cette faveur , met le ban- quier en etat dc payer, outre les frais considerables de son administration, un impot enorme, ct de trouver encore un benefice tres-fort. On estime huit millions la totalite de ces trois quantites; c'est le tiers des sommes jouees chaquc jour. De la il faut conclure que tout homme qui, sortant d'une mai- son de jeu aura perdu le tiers de I'argent qu'il a risque, aura exactement satisfait aux conditions sur lesquellcs le jeu est regie : sa perte sera le prix du plaisir qu'il y aura recu , le paie- ment de sa place a ce genre de spectacle; il ne devra se dire heureux on malheureux , ce jour-la, qu'autant que sa perte sera de moins ou de plus de ce tiers! II se pourra bien que, certains jours, ses depenses soierit raoindres ou plus grandes, ou meme qu'il gagne quelque somme ; mais en continuant de jouer, plus il perseverera dans cet amusement funeste, et plus sa perte totale approchera de la limite assignee. Les chances heureuses et contraires se balanceront, et le retour perpetuel des hasards qui sont a son desavantage rameneront tot ou tard sa situation, a la perte du tiers de ce qu'il a joue ; etle montant definitif des pertes sera d'autant plus considerable qu'il aura risque de plus fortes sommes, puisqu'il en aura perdu le tiers. La loterie offre des chances plus desavantageuses encore que les jeux publics, puisque nos ])udgets en elevent le produit an- nuel k i5 millions que les frais de perception reduisent a i o ( il existe 6 loteries en France ; chacune fait trois tirages par mois : les mises sont de 53 millions par an, dont 10 de profit)! Ces resultats ont plusieurs fois ete exposes a la tribune par des hommes d'un merite eminent; nul n'ose en nier I'af- freuse verite et les consequences deplorables, sous quelque face qu'on les envisage; et cependant , cette institution immorale existe toujours, et brave la religion, la justice et I'honneur! et SUR LES ASSURANCES. 355 pourtant, sous le regime de la terreur, unu loi avail aboli la loterie et les jeux! Aurait-on du s'attendre cju'cn un tems de prosperite et de piete, on laisserait subsister iine institution qu'on a supprimee, comme infiime , au milieu des besoins pu- blics les plus imperieux et des mesures politiques les plus cruelles? Le retour des memes evenemens, dans un long espace de tems, est un des fails les mieux constates, et cela dans des cir- constances ou rien ne pent nous en faire soupconner la cause. Sail-on pourquoi il nait toujours 22 garcons sur 21 Giles? pour- quoi chaque annee, en France, il y a 260,000 jeunes gens de 20 a 21 ans sur lesquels s'exerce la loi de reci'utement? pour- quoi la quantite moyenne et annuelle des eaux pluviales est de 55 centimetres (20 pouces et demi)? pourquoi il nait a Paris 27,000 enfans chaque amiee, et il meurt pres de 23,ooo per- sonues? pourquoi la temperature moyenne de chaque mois, la hauteur moyenne dubarometre,lenombre depassans surchaque pont, et probablement dans chaque rue, la quotite de lettres rebutees a la poste, les sviicides, les enfans trouves, etc. , sont des nombres a peu pres invariables ? On ignore completement pourquoi ces choses sont constantes; du moins, la moyenne Test apres un tems considerable : mais il suffit qu'on soil certain de cette invariabilite pour en faire usage, etprendredes mesines de prudence conlre les evenemens facheux. Maintenant, venons-en aux assurances. Si Ton a remarque que sur vingt nay^res, partis pour une ex- pedition , il en peril ordinairement un , on evaluera la proba- bilite de perte a un vingtieme; on pourra assurer a chaque vaisseau qui voudra operer dans les memes circonstances I'ar- rivee de sa cargaison , sous la condition de payer une prime. Cette pi'ime devra clre reglee de maniere que les sommes livrees par les dix-neuf navigateurs heureux restiluent a I'assureur la somme qu'il paiera pour le vaisseau perdu, et, en outre, lui laisse une indemnite de ses frais d'administration et un bene- fice. L'assureur doit done, avant tout, connaitre par experience quelle est la possibilite de sinistre, ou le rapport cntre les^ 356 NOTICE evenemens licureux ct malheureux, afin tie rogler la prime. L'assurcur ii'a pas besoiii de connaitre Ics causes de succes oil de rcvers des entreprises, mais sculcnicnt quellcs en sont les quotites relatives. II forme de ccs nombrcs la probabilite, la fraction qui mesure avec certitude les pertes et les gains apres line longue suite de tentatives. Si, par line experience longuc et attentive, il connait, dans des circonstanccs donnces, le rapport du nombre des sinistres a celui des entreprises , il pourra calculcr avec surete ses operations , et compter sur les resultats, apres un long tems ct de nombreuscs tentatives, avec tout au- tant de securite que si le hasard n'y cntrait pour rien. Il saura, par exemplc, que, sur vingt navires destines aux expeditions de Terre-Neuve pour la peche de la morue, il s'cn perd commu- ncment un seiil : evaluant la probabilite de pcrte future a un vingtieme, il exigera 5 pour loo de prime pour assurer un de ccs batimens, outre ime somme qui constituera son benefice. Les deux parties contractantes auront gagne a ce marche, si la prime n'cst pas trop clevec ; car I'assureur est certain de ce be- nefice qu'il saitne pas dependre du hasard, quand ses opera- tions sont nombi'euses; et de son cote, I'assure, qui sait quele vingtieme de son navire est nocessairement la proie do la for- tune, acquicrt, moycnnant un leger sacrifice, la surete du reste, et pent compter sur le succes de son entreprise : c'etait un avantage qui lui manquait , et qu'il vicnt d'acheter. Il reste done a evaluer le montant legitime du benefice de I'assui'cur, et c'est ici qu'est la difficulte, parce que, si celui-ci a interet d'elever ses pretentions, et si la concurrence tend a les limiter, on sent bien qu'au fond il doit exister des regies ge- neralcs, independantes de I'avidite des speculatcurs, qui doivent faire apprecier la valeur reelle de la prime : c'est ce que nous allons expliquer. Buffon et D. Bernouilli sont les premiers qui aient etabli les notions de Vesperance morale , si bien developpee depuis par M. de Laplace, qui a enrichi cettc theorie de ses utiles re- cherches. Voici en quoi consiste celte esperance : une somme d'aigent n'a pas pour tous les hommes le mcme degre d'im- SUR LES ASSURANCES. 357 portance ; chacun I'estinie en la coinparant a celle qu'il pos- sede. En ce sens , une piece de 5 fr. est estimee avoit' la meme valeur morale pour celui qui possede 5oo fr. , que i fr. pour celuiqui a loo fr. Une premiere consequence de cetteremarque, c'est qu'il ne faut jamais \oneT aic jea le plus eqiutableinent regie , dans I'cs- poir d'y gagner de I'argent, parce que la valeur morale de la parte surpasse toujours celle du gain. En eflet, supposons qu'un homme possede lOO fr. et joue lo fr. a iin jeu tgal; j'entends par la un jeu ou les gains et les pertes sont exactemcnt pro- portionnels a leurs probabilites respectives. Admcttons que le joueur n'ait pas le dessein de faire de nombreux essais qui le laisscraient en definitive avec loo fr. , mais qu'il ncvoulutseha- sarder qu'uneseule fois, dans I'espoir d'avoir no fr. : la valeur morale de lo qu'il gagne, coniparee a no qu'il possedera, sera ~-^; mais, s'il perd, il ne lui reste que 90 fr., et la valeur morale de sa perte est -|-. Ainsi, sa perte est moralement plus forte a ses yeux que son gain; et poiirtant nous avons suppose que les 10 fr. de perte ou de benefice etaient produits par des chances equitables. Que scrait-ce si le banquier etait favorise! Un homme raisonnablc ne doit done jamais se livrer qu'aux jeux de societe, ou les chances sout egales ou successivcmcnt com- pensees, mais seulement comme delassement de I'esprit, et non pour faire des gains. Lorsqiie la somme hasardee n'est qu'une tres-petite fraction de la fortune totale, la difference entre les valeurs morales de la perto et du gain est tout-a-fait insensible. Ccci bien entendu, on concoitque, dans le contrat appcle police d assurance , si un individu a I'expectative d'une somme asscz forte qui se trouve eire une portion notable de sa for- tune actuelle, s'il possede, par exemplc, 10,000 fr. et qu'il en espere 5,ooo , cettc somme eventuelle est pour lui d'lme si grande valeur morale, qu'il lui importe beaucoup d'assurer cette eventualite et de la rendrc independante des hasards : il fera done sagement d'acheter cette certitude. De son cote, I'assurcur aura, en cas de malheur , son bien diminuc de 5,000 fr., et il doit faire une semblable comparaison de cettc 358 NOTICE somnif h sa fortune, pour regler son benefice. Ainsi, la police d'assurance portera une prime dent la quotite depend des soninies actuellement possedees par les deux contractans. Mais on n'a pas coutume d'avoir egard, dans ces calculs, ii la for- tune dc I'assureur qui reprcsentc ordinairenient une association de capitalistes fort riches, pour qui les sommes eventuelles n'ont presque aucune valeur morale; et d'ailleurs, par I'eten- duc de leurs operations , les assureurs sont certains de lie point eprouver de pertes. L'assure seul est dans la necessite de calculer jusqu'a quel point il peut consentir a I'elevation de la prime, pour, qu'il lui soit moralement avantageux de I'accepter. Ce calcul depend d'une haute analyse, et ce n'est pas ici qu'il convient d'en developper les details : mais, tant que la prime ne depasse pas une limite que la theorie fait connaitre , elle est favorable a l'assure qui doit raisonnablement I'accepter, plutot que de courir les hasards d'un revers. Passe ce terme , la valeur morale de la prime qu'on exige de lui surpasse celle de I'expectative modifiee par les chances du risque qu'il court, et il doit alors se refuser a I'assurancc. Dans Ic premier cas, les deux contractans sont satisfaits de leur marche ; I'un en retire un gain qui devient certain , apres un grand nombre d'opera- tions semblables , et cela sans bourse delier , sans embairas ni craintes de I'avenir : I'autre y trouve la certitude du succes d'une entreprise qui etait douteuse ; il peut en coordonncr le plan, en combiner les details, comme si le hasard n'y etait pour rien , parce que le sort nepeut plus desormais I'attcindre; il a achete d'un autre le droit d'etre delivre de cette crainte, et ce dernier s'est substitue a lui dans cette luttc contre la fortune. Certes, c'est une des plus bellcjj inventions humaincs , que ces engagemens oii tout le monde gagne, sans qu'il puisse en resulter de dommagc, tt qui donnent au commerce et a I'in- dustrie un elan admirable, en permettant des cntreprises telle- ment hasardeuses que, sans cux, il y aurait de la folic a y songer. Toutes les parties de I'univers entreront en libre com- munication; leurs richesses, leurs productions, leurs jouissanccs deviendront communes, les distances seront detruites, les dan- SUR LES ASSURA.NCES. 35y gers nuls, les pertes et les benefices compenses; enfin, si un jour le monde entier est civilise, si tous les besoins physiques et moraux sont satisfaits, c'est a la theorie des assurances que cet avantage sera du. Si Ton pouvait oter du calcul de la prime les frais d'admi- nistration et le benefice de la societe d'assurance , elle serait reduite a son minimum , qui est la part de la fortune ; la prime ne serait plus que la fraction que I'experience aurait determi- nee comme resultant des sinistres. Alois I'assurance aurait tous les avantages que peut permettre I'etat des choses : or , c'est ce qui arrive pour les assurances mutuelles. Que les pro- prietaires des viiigt navires dont on a suppose I'entreprise se reunissent pour s'assurer mutuellement ; chacun sera certain d'avance de perdre une partie de son bien , ^ s'il se perd un seul des navires ; mais il le sera aussi que la fortune n'atteindra pas le reste. Ici, plus de fi-ais d'administration, ni de benefice pour I'assureur : et meme, si Ton s'est trompe en evaluant le sinistre ^ r? > 1''' pcrte n'etant determinee qu'apres que I'experience aura ete faite, sera reglec d'une maniere rigoureusement equitable. Car il ne faut pas oublier que cette probabilite , dans I'etat ac- tuel de nos connaissances, n'est jamais assez bien connue, pour que la conipagnie d'assurance ne soit pas obligee de la porter au taux le plus eleve : cette surevaluation est une perte que les societes mutuelles ne font pas. Ces etablissemens presentent done plus d'avantages aux as- sures , et des conditions plus equitables , que les compagnies d'assurances a prime : malheureusement, ces biens sont com- penses par des inconveniens qu'il ne faut pas dissimuler. 1° Les affaires gerees en commun , ou par des commissaires delegues , ne le sont pas avec autant de zele et de talent que celles des compagnies a prime, qui ont un interet plus pn>- nonce, uue administration plus active, mieux entendue et exercee a ces sortes d'entreprises. 2° S'il y a des proces a suivre contre quelques assures qui refusent de payer leur part du sinistre , ou qui font des recla- mations exagerees , ces querelles sont soutenues avec passion , 36t) NOTICE les actions intontecs sont coiuluites sans unite, ct les pertes s'en accroisscnt d'autant. 3° La pkipart du tcnis , los assurances mutuellcs sont diri- gtes par dcs hommes a qui le gouvcrncment a concede ce droit, qui I'excrccnt ii lenr profit et s'en font un inojen de fortune. II n'est pas rare que les frais d'administration , qui devraient etre nuls, depassent la totalite des sinistrcs. 4" L'adniinistration a souvent des interets directement con- traires a ceux des societaires, et laisse surevaluer les objets assures , pour que, la masse etant plus forte , leurs honoraires s'accroissent : elle veille mal a la conservation des choses, juge legerement la valeur des reclamations, etc. Dans les compagnies a prime , il est prcsque toujours indif- ferent que I'appreciation des choses assurees soit exacte. Qii'importe , en effet, qu'un navire de 200,000 fr. soit estime 3oo,ooo ? S'il se perd , il nc s'en serait pas moins perdu quand meme sa valeur eut etc toutc autre; ct s'il est conserve, il a paye une prime plus forte que celle qu'il devait reellement. Ce qui importc, c'est que la perte ne soit pas volontaire de la part de I'assure , qu'un proces-verbal tres-exact constate I'etat ac- tuel des choses appreciees , pour que les dechets qui ponr- raient y smvenir puissent etre repares i\ prix d'argent , etc. Il est meme souvent avantageux a la Conipagnie que la chose ait ete surestimee pour que la prime soit plus forte , puisque la reparation des sinistres eventuels sera souvent moins cou- teuse. Ccpendant , certaines circonstances petivent etre con- traires a notre remarque ; mais on voit bien que la Compagnie juge si elle doit consentir ii cet arrangement , et qu'elle ne le fait que si elle y trouve son interet. On pent assurer toute sorte de marchandi.ies , les navires en mer, les maisons contrc I'incendie, les recoltes contre I'in- clemence du ciel , le jugement d'un proces , la recctte d'une sommc due par nn creancier douteux , etc. II existe meme des assurances pour des entreprises criminelles, telles que I'in- famc traite des negres , la fraude en niatiere de douanes ou d'octrois , etc. Enfin , Tin homme pent s'assurcr contre 1^ SUR LES ASSURANCES. 36 1 dangers d'un voyage , d'une guerre , de I'invasion d'une epi- demie meurtriere ; il se fait alors avec la Compagnie un con- trat ou rhomme s'estime a une valeur dont on est convenu. Ceci nous conduit a parler des assurances sur la vie dcs homines. De toutes les recherclies qui out pour objet d'evalucr la probabilite des evencniens futurs , en examinant ceux qui se sont realises, celle qui offre le plus d'importance est assure- ment la duree de la vie de I'homme. Les Tables dc mortalite sont destinees a faire connaitre dans quelle proportion la mort frappe les individus. Ce n'est pas ici le lieu d'exposer com- ment I'experience a pu donner les nombres de ces tables , en comptant les naissances et les deces de chaque age, constates par les registres de I'etat civil. Celles qui ont ete publiees par Duvillard , dont \ Annuaire dii bureau des Longitudes reproduit sans cesse le tableau, sont les plus exactes qu'on ait encore donnees, quoique certainement elles laissent beaucoup a de- sirer sous le rapport de la certitude. On y trouve, par exemple , que sur looo personnes qui sont actuellement agees dc 4o ans , il doit en mourir proba- blement 19 dans le cours de I'annee , en sorte qu'a 4i ans il n'en restera que 981 ; il en meurt done i sur 53; au bout de 1 ans , la mort en aura frappe 38, savoir i sur 26 ; apres 3 ans , 57 auront succombe , ou 'j. sur 35 , et ainsi de suite. En subs- tituant la certitude a la probabilite, ainsi qu'on est en droit de le faire pour des speculations en grand , on peut considerer ces mille individus , ages de 40 ans , pris au hasard dans toute une population , conime devant tirer d'une urne dcs bulletins qui designent i pcrdant sur 53 dans la premiei'e annee, i sur 26 en 2 ans , 2 sur 35 en 3 ans , etc. , la perte etant celle de la vie. On y remarquera qu'a I'age de 63 ans , il ne doit survivre que la moitie des personnes qui ont actuellement 4° ans : un individu compris dans cette categoric a ^ pour probabilite de son existence 23 ans apres, en sorte qu'il est aussi probable qii'il sera compris parnii les decedes que parmi les survivans ; 36a NOTICE ce qui signifie qu'un liomme de 4o ans a 23 annees de vie pro- bable uherieure. D'apres cela, on conceit qu'il est bien aise de calculer , pour chaque age , la duree de la vie probable , et d'asseoir sur ces resultats les bases d'une assurance sur la vie, d'une rente viagere, d'une tontine , etc. , puisque , dans des societes de ce genre , oil un grand nombre d'individus sont interesses, le nombre des deces probables pent etre considere comme un arret certain prononce par la nature. On verra des hommes de 4o ans perir avant I'expiration des aS annees; mais d'autres vivront au dela de ce terme ; il y aura des compensations perpetuelles qui re- tabliront I'etat moyen donne par le calcul; et a 63 ans, il ne restera en definitive que la moitie des etres de l\0 ans que Ton avait consideres d'abord. Les tables de niortalite servent a resoudre divcrses ques- tions sur la vie humaine. C'est ainsi que , pour constituer avec equite une rente viagere, on considerera le terme de la vie du rentier comme connu avec certitude : le capital place s'ac- croitrait chaque annee de son interet en fonder, si on I'aban- donnait en totalite , et cet accroissement serait a son tour productif; c'est ce qu'on appelle interet compose. Mais, chaque annee , le rentier viager tonche une somme plus grande que I'interet simple , en sorte qu'au contraire le capital s'affaiblit , et par suite I'interet qu'il porte. Les choses doivent etre telle- ment calculees que , le rentier touchant chaque annee une rente constante , le capital soit precisement reduit a zero le jour de son deces : chaque fois qu'il a touche ses arrerages, il a recu plus que I'interet de son capital actuel , et par consequent un a-comptc sur ce capital sans cesse decroissant; a sa niort, il se trouve avoir recu la totalite de ce qu'on lui devait encore , et cet instant inconnu est cense donne par la table de morta- lite , qui doit etre consideree comme certaine dans les grandes masses. Le calcul d'une rente viagere depend de I'age actuel du rentier, et du taux de I'interet en fonder, stipule selon les terns et les lieux. Ce calcul resulte d'une theorie algebrique com- SUR LES ASSURANCES. 363 pliquee , qui le devient davantage lorsqu'on veut qu'il y ait reversibilite d'une tete sur d'autres ; nous ne pouvons en dire davantage sur ce sujet. Observons seulemenl que le gouver- nement francais, qui autrefois accordait lo pour cent d'interet viager sur tous Ics ages , faisait une operation financiere bien desastreuse , et qui prouvait combien , dans le siecle dernier, on etait loin d'avoir des idecs justes de la nature des condi- tions de ces sortes de contrats. Les tontines sont calculces sur les memes principes ; ces so- cietes supposent que, dans une classe designee de rentiers viagers , les survivans heritent de la part d'arrerages dont jouissaient les decedes : c'est une gageure a qui vivra plus long-tenis. Les assurances sur la vie sont precisement le contraire des constitutions dont on vient de parler : celles-ci finissent a I'instant du deces. Taction des autres commence a cette epo- que; les unes sont dues a un sentiment de personnalite qui veut jouir et absorber de son vivant tout son avoir ; les autres im- posent des privations pour donner des moyens d'existence aux etres qu'on est force d'abandonner. Dans les assurances sur la vie , un homme s'engage a payer une somme chaque annee , tant que durera son existence , sans en recevoir aucun interet , sous la condition qu'a son deces , ses heritiers , ou des per- sonnes designees dans le contrat recevront une somme ou une rente convenue. Le capital que paie I'assure s'accroit sans cesse jusqu'a son deces , et les interets s'y ajoutent graduellement, sans qu'il ait droit d'en I'ien prelcver : le terns durant Icquel il fait ces paiemens est incertain, puisque ce tems a pour limite la fin de son existence ; il pent arriver qu'il ne vive qu'rn an, un mois , un jour meme ; et peut-etre , au contraire , il de- passera de beaucoup le terme ordinaire que fixe la loi de mor- talite : dans ce dernier cas , il consent a payer plus que ce- lui qui s'est soumis a I'assurance , et qui atteint promptement le terme de sa vie ; mais , sous la condition que , s'il tombait dans la categoric qui frappe celui-ci , il gagnerait toute la difference qui resulte de cette chance malheureuse ! II achete 364 NOTICE it ce prix la certitude qui lui manque , en ce qui concerne ses I'pargnes , dc u'avoir pas sa vie abregee ; et une societe prend sur elle les hasards, et iVtablit ;i I'egard de I'assure I'existence d'un ternie nioyen que cliacun est on droit d'esperer, mais craint de ne pas attcindre. Les assurances sur la vie sont d'une grande importance pour la societe; il n'est aucune institution qui soit plus morale ct plus digne d'etre encouragee. Le rentier viager, le tontiuier, sont des ego'istes qui semblent regrcttcr de ne pas emporter tout avec cux en niourant, ct qui, voulant jouir de tout ce qu'ils possedcnt, desheritent leur faniille : ce sentiment, qui fait pen d'honneur a leur time, est rarement excusable. L' assure a vie se prive, au contrairc, d'une partie de son aisance, on nicme de ce qui lui est necessaire, pour assurer a ceux qui lui sont chers la possession d'une somnie que le sort ne lui laissera peut-etre pas le terns d'acquerir. Un homme qui soutient sa faniille par son travail craint qu'une mort prematuree ne le force a quitter la vie sans avoir eu le teuis d'amasscr de quoi soutenir sa famille et la soustraire a la misere. II se prive annuel- lement d'une partie de ses gains pour lui donner un bien-etre que la Providence ne lui permettrait peut-etre pas de lui pro- curer autiement. Quant aux regies de calcul qui font trouver, pour chaque age, le rapport de la somme on de la rente a payer avec celle qui sera restituee au deces de I'assure, elles consistent a regar- der comme fixe le terme probable de la duree de la vie future , terme que Ton regardera comrae un airet certain de la nature. Car, bien qu'il n'en soit presque jamais ainsi, comme la societe s'engage aux memes conditions avec un fort grand nombre d'individus, elle se trouve dans les cas deja exposes, et pent compter sur une exacte compensation entre les deces tardifs et ceux qui sont prematures; elle perd sur les premiers exacte- ment ce qii'elle gagne avec les autres. L'homme de 4o ans , qui a encore 23 ans de vie probable, sera cense devoir mourir toujours a 63 ans, et on fera le calcul de I'interet compose, porte par les sommes qu'il aura payees dans ces aS ans; le ca- SUR I,ES ASSi; RANCE^S. 365 pilal ainsi accru, mais cKminiie des benefices legitimes de la compagnie, sera le montant de la somme a rendre au deces. On volt que cette sonime depend de I'age de I'assure. Les per- sonnes qui savent avec quelle rapidite croissent les interets com- poses, concoivent comment il se fait qu'une somme on unc rente assez modique, payee par I'assure, devient tres-elevee au bout du terme moyen fixe par la nature. Toutefois, ce rapport est bien loin d'etre tel que Tavait suppose une societe malheu- reusement celebre. Lorsque Lafarge promettait aux survivans de les fairejouir, apres i5 ans, de 45 fr. de rente viagere pour un capital de 90 fr. une fois paye , il est impossible qu'il se soit abuse au point de croire ce resultat possible ; sa tontine n'elait done qu'une honteuse deception, que le gouvernemeiit aurait du frappcr d'interdiction et declare)' in fame. Rien entendu que la Compagnie a un grand interet a ne prendre que des assures valides, ot dont la constitution ne soit pas atteinte de cause de destruction : elle prend a cet egard des mesures de prudence avant d'assurer chaque individu. Elle exige aussi que les assures ne se mettent pas dans d<;s conditions nouvelles qui changent la loi de mortalite; ainsi, tout homme qui partira pour un voyage de long cours sur mer, ou aura joue un role dans une I'evolte, ou fera partie d'une armee com- battante, ou aura attente a ses jours , ou se sera battu en duel , perdra,s'ilsuccombedansces circonstances, les droits que lui reserve I'assurance. Ces seuls cas exceptionnels sont prevus da us la police; et, pour la tranquillite morale des assures, ils pcuvent compter que, hors ces circonstances, le contrat sera (idelement execute, parce que la Compagnie est solvable, que son opera- tion est bien concue au profit d'elle-meme et des assures, et qu'enfin elle a un grand interet aconsoliderson credit en obeis- sant a tons ses engagemens, pour accroiti-e en mcme terns le nombre de ses cliens et ses gains legitimes. Si I'assure paie une seule somme, la Compagnie regie la police en y ajoutant les in- terets composes jusqu'au jour du deces, suppose au terme de la vie probable de I'assure; il en ote son droit naturel, qu'on suppose equilablement determine; le restc est la somme qui sera T. xxxiii. — Ft'vric) 1827. 24 366 NOTICE rcslitucL' le jour oula mort aura frappc Tassuro. Si celui-ci s'cst engage a payer iine rente sa vie diirant, il faut que le capital a rondre au deces soit egal a la sonime de tons ccs arrerages, accrus dc leurs interets composes , on prenant pour terme la vie probable. Au reste, il y a bien dcs manieres de varier Ics conditions du contrat : tantot I'assui'ance n'est que temporaire, c'est-a-dire jusqu'a unc epoque future qii'on designe; si I'assure vit au-dela, il consent a perdre tout ce qn'il a paye : ce n'est que dans le cas ou il mourrait avant ce terme que la societe serait tenue a res- titution. On pent admettre des conditions de reversibilite d'unc tete sur une autre, ou etablir I'assurancc sur la tete d'un tiers qu'on choisit, et qui ne laisse a ses heritiers aucun droit a re- clamer de la societe : c'est ce qu'on appelle unc annidte diffcree. Les pcrsonnes qui desireront connaitre plus particuliere- ment la nature des divers contrats d'assiu'ances sur la vie, pourront consulter un ouvrage (i) dans lequel M. Juvigny a fort clairement expose cette tlieonc. L'auteur entre dans tous les developpemens utiles a I'intelligence du sujet, et parle en outre des assurances contre I'incendie, de la caisseLafarge, et com- bat victorieusement les preventions du public contre tous les etablissemens de prevoyance. Ses efforts en faveur des societes mutuelles sont louables : les motifs qui militent pour elles sont puissans, nous les avons enumeres precedemmcnt; mais les ob- jections dont nous avons parle sont victorieuses , et les cliens de ces associations ne sont jamais aussi bien traites que la ihtoiHe semble I'indiquer. Une societe a prime me parait pre- ferable : on salt micux sur quoi compter ; on n'a point a demeler dcs details d'administration , ni a debattre des frais toujours enormes , etc. (i) Coup-d'trll sur les assurances sur la vie dcs hommes , suivi de la comparaison des deux modes d'assurances mutuelles eta prime contre I'incendie, (ermine par une Notice historique et critique sur la Caisse de Lafarge; 4° edition par J.-B. Juvigny. Paris, iSaS ; a la librairie du commerce, Renard , rue Saiute-Anne, n" 71. In-S" de i5o pag. SUR LES ASSURANCES. 3G7 Quant au calcul des interets composes nous renvoyons ;\ uii autre ouvrage du meme autcur (i) , et a uu excellent Traite dc M. Gremilliet , ou se trouvent resolues toutes les questions de ce genre , combinees avec les chances de la vie future (2). Nous terminerons par iinc remarque de la plus haute impop- tance. Toutes les fois qu'on interroge le passe pour assignor la probabilite des deces, il faut bien faire attention a se placer dans les nieraes circonstances ou Ton se trouveva ensuite, quand on voudra appliquer ce resuUat. Ainsi , il faut se garder de croire qu'on puisse employer dans tons les cas les tables de mortalite de Duvillard , qui , erabrassant une population cn- tiere , se rapportent a un ensemble d'indivus valides ou non , dont la vie est tranquille ou orageuse, la sante robuste ou exposee , les moeurs sages ou dertglces , etc. Personne n'ignore que les rentiers , et surtout ceux qui stipulent pour leur vie propre , forment une classe d'elite dans la societe , qui observe une loi de mortalite beaucoup moins rapide. D'ailleurs, les tables generales embrasscnt, outre la mortalite des citoyens , celle des prisons, des hopitaux , des ateliers, des grands eta- blissemens ou des gaz deleteres et des travaux penibles abregent la vie, et enfin celle de la classe inferieure du peuple, que les ecrits recensdeM. Villerme out prouveetre dans une effrayante proportion : tandis que le rentier a plus d'aisance que la plu- part de ses concitoyens , une vie plus reglee , des occupations plus moderees , un regime plus tranquille , conditions qui doivent prolonger son -existence. II faut done baser les calculs d'assurances a vie sur des (i) Mojcn de supplier par raritlinietlque a I'emploi de I'algebre dans les questions d'inter^ls composes, d'annuites, etc. ; par/.-Z?. Juvigny. Paris, 1825 ; Bachelier. (2) Nouvelle theorie du calcul des interets simples el compose's , des annuites, des rentes el des placemens 'viagers , suivie d'un grand nombre de fables pour operer ces sortes de calculs, etc. ; par J.-J. Ghemii.- riET. Paris, 1823 ; I'auleur, rue faub. Saint-Martin, n" i77.In-8» de 3oo pages. 2.',. 368 NOTICE SUR LKS ASSURANCES, tables specialcs qui roprcsentent la loi particuliere dc morta- lite propre aiix professions que I'association embrasse. On doit avouer que nos connaissances ii cet egard ne sont point assez avancees pour qu'on puisse avoir une enliere confiance dans les recherches tentees siir ce sujet. Les Tables de Kebseboom etablics d'apres la mortalite observte sur Ics rentiers viagcrs de HoUande ; cellos de Deparciuux, qui sont basees sur des considerations semblables, sembleut devoir etrc preferees , quoiqu'ellcs laissent beaucoup a desirer. Les ouvrages cites contiennent ces tables que , faute de mieux, on pent utilement consulter, jusqu'a ce que de nouvelles donnees permettent d'en composer de plus parfaites. Francoeub. ESQCISSE HISTORXQUE DES DOCTRINES AUXQUELLES ON A DONNE LE NOM i) IndustriuUsme ^ c'est-a-dire, des doc- trines QUI FONDENT LA SOCIETE SUR iJInduStrie. II ne me semble pas qu'on eut apercu, jusqu'a ces derniers terns , le rapport qui existe entre la science de Vindustrie et la science de la societe ; c'est-a-dire entre la connaissance des lois suivant lesquelles toutes les professions utiles se developpent, et celle des lois suivant lesquelles la societe elle-meme se perfec- tionne. Les philosophes du dernier siecle etaient plus portes a considerer I'industrie, relativement a la societe, comine une cause de corruption et de faiblesse, que comme un principe de ■vie et une base d'organisation. Montesquieu, en remarquant que dans nos etats modernes on ne parle que de manufactures, de commerce, de finances, de richesses, faisait assez entendre qu'on ne pouvait y posseder les vertus necessaires pour avoir de bons gouvernemens. Rousseau declamait contre les arts et les sciences , et il les presentait comme la source de tons nos vices et de tons nos maux. Quoique, depuis une longue suite de sieclcs, les classes les plus directement vouees a I'exercice des profes- sions utiles n'eussent cesse de croitre en richesses , en instruc- tion, en moialite, en consideration, rii importance, on n'ar- ESQUISSE HISTOR. DE L'INDIJSTRIALISME. ^69 livait pas k cette conclusion, pouitant si natuielle et si juste, que I'industrie est le principe vital et doit etre le but d'activite de la societe. 11 ne paiait pas meme que Ton se deniandat quel devait etre le but de I'activite sociale. On raisounait sur I'Dr- ganisation de la societe, abstraction faite des lois qui piesident a ses progres ; et toute la politique se reduisait a disserter sur la nature, le principe, la forme des gouvernemens , ou bien a rechercher abstractivement quelle etait, de toutes les formes de gouvernement, celle qui meritait la preference. Je ne crois pas me tromper beaucoup en disant que c'est \k I'unique objet qu'on ait assigne jusqu'a ces derniers tems a la science qui tiaite de la societe, a la science politique. Si je voulais remonter au-dela de dix annees, j'aurais probablement quelque peine a trouver des ecrivains qui, en traitant de la politique, generale ou particuliere, fassent autre chose que raisonner sur des modes d'organisation soeiale, abstraction faite du but d'activite de la societe. On peut aisement verifier la chose. On n'a qu'a se rappeler ce qui se publiait sur la poli- tique il y a douze ans, apres les evenemens de 1814, et lorsque la destruction cle tous les gouvernemeiis que la revolu- tion avail t'leves viiit ouvrir tout a coup un champ si vasle aux speculations des publicistes. S'agissait-il de politique gene- rale? I'un proposait de reconstituer le pouvoir de I'eglise romaiue (1); I'autre, d'etablir entre les puissances un equilibre bien pondere (2) ; un troir>ieme, d'etendre a I'Europe le regime representatif deja existant dans quelques etats, et au lieu de balancer les foi'ces des puissances, de les subordouner toutes i I'autorite d'un parlement europeen (3). Dans les questions de politique particuliere, il ne s'agissait de meme que de constitu- tions , de formules. Les uns inclinaient pour la concentration des pouvoirs (/j); d'autres pour leur division et leur balance (5). Dans la theorie et dans I'application, pour chaque etat et pour I'Europe eutiere, il n'etait question que d'organisation; nul ne (i) M. DE BoNALD, M. Maistre, etc. — (s) M. nBPfiAnr, etc. — (3) M. Saint-Simon. — (4) Les royalistes. — (5) Les liberam. 370 ESQUISSE HISTORIQUE soiigeait seulenient ii rcconnailrc Ic but d'activitL' tics sociotes inodcincs, ct a sc demander en viie de qiioi ellcs doiveiit etrc organisces. Lcs ccrivains cconomistes , qui vont davantage an fond dcs choscs , ct a qui la nature de leurs travaux aurait du , ce scmble, donner des idces moins superficielles de la politique, n'en faisaicnt de memo qu'unc pure affaire de formes. M. Say, sui- vlSnt en ccla, je crois, I'exemple de Smith, la definissait sim- plement la science cle I' organism ion cles societes (i), sans dire pour quel genre de vie la societe devait etre organisce , quel but il fallait assigner ;\ son organisation, ni meme si cette orga- nisation devait avoir un but; ct il en faisait ainsi une chose icllement value, qu'a ses yeux menies et de son aveu, elle n'in- flue en ricn sur la prosporite publique , et que les ric/iesses sont essenticllcment independantes de I'oi'ganisation de la societe {p.). Je rcpete qu'en remontant au-dela de dix annees, on a peine a trouver des auteursquivoient dansla politique autre choscqu' une science de formes, la science de I'organisation des societes , abstraction faite de leur but et des lois que suit leur develop- pement. Je dois dire, a la gloire de M. Benjamin Constant, qu'il fest le premier ccrivain, du moins a ma connaissance, qui ait fait lemarquer le but d'activite des peuples de notre tems, et qui ait mis ainsi sur la voie de reconnaitre quel est le veritable objet de la politique. Voici ce qu'on lit, dans son ouvrage sur f esprit de conquete considere dans ses rapports acec la civilisation europeenne , ouvrage qu'il avait public a I'etranger en i8i3, et dont il donna une nouvelle edition a son relour en France, im- mediatemcnt apres la premiere restauration : « Tandis que chaque peuple autrefois formait une famille isolee, ennemie nee des autres families, une masse de peuples existe mainte- nant sous differeiis nouis et sous divers modes d'organisation sociale, mais homogeiie par sa nature. Elle est assez forte pour n'avoir rien a craindre des hordes encore barbares; elle est (i) Traitc (feconomie polltbpu' , discours preliminaire , p. i. (?) Ihid. DE LINDUSTRIALISME. .571 assez civilisee pour que la guei re lui soil ii charge. Sa tendance uniforme est vers la paix... Nous somines arrives a I'epoque du commei'ce, epoque qui doit necessairement reniplacer celle de la. guerre, comme celle de la guerre a du necessairement la preceder... La guerre etait I'impulsion sauvage; le commerce est ie calcul civilise. Il est clair que plus la tendance commer- ciale domine, et plus la tendance gucrriere doit s'affaiblir. Lc but unique des nations niodcTnrs , c'est le repos , avec le repos I'aisance, et comme source de I'nisance, l'industrie. La guerre devient cliaque jour nn moyen plus incfficace d'atteindre ce but. Ses chances n'offrent plus aux individus et aux nations des benefices qui egalent les resultals du ti-avad jmisible et des echanges reguliers ( i ) » Ces enonces n'etaicntpas absolumenl irreprochables. M. Ben- jamin Constant, en disant que I'aisance est V unique but des nations modernes, semblait insinuer que les hommes n'ont que des besoins physiques a satisfaire , ce que I'auteur du Traitesur la Religion aurait peut-etre maintenant quelque peine a recon- naitre, et ce qui n'est certainement pas exact. Le but des nations modernes est I'aisance; avec I'aisance, la dignite , la consideration, la gloire,rillustration; et, comme source de tons cesbiens, I'exercice moral et eclaire de toutes les professions utiles , ou, comme s'exprime M. Benjamin Constant, \' Industrie , qui embrasse en effet toules les professions utiles a la societe. Mais, quoique la proposition de I'habile ecrivain manquat peut-etre d'exactitude dans la forme, elle n'etait pas moins tres-importante an fond. C'etait la premiere fois qu'on mon- trait nettement la difference existante entre les anciens et les modernes; c'etait la premiere fois qu'on faisait remarquer aux peuples modernes qu'ils dirigent leur activite vers l'industrie. L'observation , qui maintenant semblerait triviale, etait alors extremement nouvelle, et je crois me souvenir qu'on en fut Iris-frappe. Uu ouvrage public peu de tcins apres par un honime dont les (1) De i Esfnit de conqueu , c!^., lAiap. 2. i72 ESQUISSE HISTORIQUE itU-es b'eloigiiaifiit beaucoup de celles de ce publiciste , con- Iribua encore a arroler les esprits sur son observation. Ce fut le curieux travail de M. Montlosier sur la inonarchie francaise. Cet ecrivain , en signalant ce qn'il appelait les usurpations dcs classes autrefois tributaires , en montrant comment ces classes industrieuses s'etaient affranchies et elevees , avait travaille , sans le \ouloir, a rendre extromement sensible la force vitale de I'industrie. « Nous aliens voir, avait -il dit, s'eleverau milieu de I'ancicn etat un nouvel etat, au milieu de I'ancien peuple un nouveau peuple. Nous aliens. voir un etat double, im peuple double, unordre social double marcher pendant long-temsparal- lelement I'un h I'autre, s'attacjuer ensuite et se combattre avec acharnement... Les proprietes mobilieres se balancent avec les proprietes immobilieres , I'argent avec la terre , les v illes avec les chateaux. La science, de son cote s'eleve pour livaliser avec le couiage, I'esprit avec I'honneur , le commerce et I'industrie avec les armes. Le nouveau peuple, s'elevant de plus en plus, se montrepartout triomphant. Il defait les anciennes formes ou s'en empare; rompt tous les anciens rangs ou les occupe; domiue les villes sous le nom de municipalites ; les chateaux sous le nom de bailiiages; les esprits sous le nom d'universites; chasse bientot I'ancien peuple de toutes ses places, de toules ses fonctions, de tous ses postes; finit par s'asseoir au conseil du monarque, et de \k impose a tout son espi'it nouveau, ses lois et ses inslitutions nouvelles (i). » L'auteur, comme s'il craignait qu'on ne se trompat sur la cause de ces singuliers progres , a soin de dire que le nouveau peuple, en s'elevant, ne renonce ni a ses mceurs , ni k ses occupations ; il ne cesse dc declamer centre ces occu- pations qu'il qualifie de viles; il s'indigne de voir que les sciences , le commerce , I'industrie, aient usurpe les droits sacres de la naissance ; et par le ton d'humeur avec lequel il parle de ces choses, il ne reussit que mieux a faire ressortir leur pouvoir. A I'epoque oil paraissaient ces precieuses productions, une edition nouvelle du Traite d'economie politiqne de M. Sax ») De la Motiarclde fiaiwahe , t. I, p. l35, 1 3(i et lyS. DE L'INDUSTRIALISME. 873 \int ajouter i»reffet qu'elles tendaient a produire, et contribuer i-ncore i faiie reniaiquer la puissance de rindustrie. A la verite , I'economie politique ne considere I'industrie humaine que dans I'une de ses applications, dans son application a la formation des richesses (iites materielles ; mais, en montrant comment les biens physiques dont nous jouissons sent tou- joius le fruit de quelque travail utile, elle conduit a recon- naitre comment tons les biens possibles sent le fruit du travail, et elle tend ainsi a faiie considercr I'industrie, c'est-a-dire la reunion de toutes les professions utiles, comme le seul but qu'on puisse raisonnablement assigner a I'activite de la societe. Ainsi, tandis que M. Benjamin Constant disait que I'industrie est le but unique des nations modernes , M. Montlosier mon- trait historiquenient que ces nations avaient ete creees par I'in- dustrie, et M. Say, reproduisant dans un ordre plus lumineux et avec de notables ameliorations les idees de Smith sur la for- mation des richesses, exposait, de son cote, d'une maniere scientifique, comment tous nos biens physiques sont crees par I'industrie, et nous induisait ainsi a regarder rindustrie, envi- sagee sous un point de vue plus large, c'est-a-dire I'activite humaine consideree dans toutes ses applications utiles, comme I'objet fondamental de la societe. On peutdouter, sans manquer de justice envers ces auteurs, qu'ils eussent vu le parti qu'il y avaita tirer de leurs ecrits pour I'avancement de la politique. — Certainement, M. Montlosier, qui parlait avec tant de regret de I'abaissement des anciens do- minateurs et avec tant d'amertume de I'elevation des classes industrieuses , ne s'etait pas propose de travailler pour I'a- vancement de ces classes et de faire considerer I'industrie comme I'objet naturel de la societe. — Aucun ecrit de M. Benjamin Constant, postcrieur a V Esprit de coHquete , n'a fait voir qu'ii eut apercu les consequences politiques de sou observation que les peuples de nos jours dirigent leur activite vers I'industrie; il ne s'est point occupe depuis de la societe industrielle; il n'a pas recherche comment cette societe vit, suivant quelles lois elle prospere, et comment elle veut etre constituee pour se de- i:/, ESQUISSE HISTORIQUE velopper; la plupait de ses edits roiilent siir dos (pieslions do cette polilique appclee, avec quelquc raison, mc'taphysiqiie, oii Ton s'occupe de rorganisation de la societe, abstraction faitc de son but d'activite. Quant a M. Say,' ancune phrase de son livre nc prouve qu'il cut etcndu ses vues au-dcla de ce qui en tait I'objct special, la production , la distribution , la consomnia- tion dcs richesscs , ct il ne parait pas que I'etude de rccononiie politique lui cut revele la veritable fin de la politique. La defi- nition qu'il donne de cette derniere science indiquerait, an contraire, qu'il ne s'etait pas fait des ideas tres-justes de son objet (i). All reste, s'il est douteux que ces ecrivains eussentapercnles consequences politiques de leurs observations relativenient a I'industrie , il ne Test pas que ces observations ne repandissent sur la politique nn jour nouveau singulierenient favorable a ses progres. Leurs ecrits, tombes dans les mains de quclques hom- uies quifaisaientleur etude speciale de cette science, operercnt une revolution dans leurs idees. Tel fut notamment I'effet qu'ils produisirent sur les au leurs du Ccnscur. Ces ecrivains avaient ete forces ])ar la reaction de i8i5 de suspendre le cours de leurs publications. Cette interruption vio- lente de leui's travaux, qui dura pendant plus d'une annee , leur permit d'examiner a loisir la direction qu'ils avaient suivie jusqu'alors. lis se demanderent si I'opposition liberale, si la politique constitutionnelle, avaient un objet bien determine ; et, sans nier que les efforts qu'on faisait poiu- I'etablissement de certaines institutions ne pussent avoir nn baut degre d'utilite , ils furent obliges de s'avoner qu'cn general on ne savait pas, et que meme on ne se demandait pas ou la societe devait tendre et en vue de quel objet general d'activite elle devait etre cons- titnee. II etait bien visible pourtant que c'etait la premiere chose a connaitre; car des institutions ne peuvent etre bonnes qu'au- (i) Voy. T I aite cl' economic poliuquv ,Y)\&CQurs }^TiA\m\ci. d^ja cite. DE L'lNDUSTRIALlSMK. 375' lant qu'elles sont bien adaptees k I'objet tie la societc; ct il est clair que pour les approprier a cet objet, il faut le cherchei- , il faut le connahre. lis s'appliquerent done d'abord a decouvrir le but vers lequel devait se diriger I'aclivite sociale, ou plutot ce but Icur fut indi- que par les ecrits dont je vieris de faire mention. lis ne dirent pas, avec M. B. Constant, que I'industrie etait I'objet, et I'objet unique des nations modernes : Irop de passions dominatrices(nobilIaires, sacerdotales, niercantiles) occupaient encore la scene pour qu'on put aisement reconnaitre dans les pcuples cette honorable disposition a ne prosperer que par le travail paisible et les echanges reguliers. Mais ce que M. B. Constant mettait en fait , ils le poserent en principe. lis reconnurent , non que I'industrie etait, mais qu'elle devait etre, qu'elie etait destinee a dcvenir, qu'elle devenait de plus en plus le but des nations modernes, et que I'objet de la politique etait a la fois de constater ce but et de rechercher comment la societe pouvait I'atteindre. Tel fut aussi leur objet dans lenouvel ouvrage qu'ils entreprirent, sous le titre de Censeur Earopeen, production tres - differente de celle qu'ils avaient deja publiee sous le simple titre de Censeur, et d'un ordre infiniment plus scientifique et plus eleve. Le merite du Censeur Europeen fut d'apercevoir le parti qu'il y avait a tirer pour les progres de la science sociale de la con- naissance de cefait, bien constate par I'histoire, et sur lequel M. Montlosier venait de jeter une lumiere si nouvelle et si vise, que, depuis les terns les plus rccules, et notamment depuis le xii« siecle, les classes industrieuses n'avaient jamais cesse de gagner en nombre, en richesse, en luinieres, en dignite, en influence.il en tirait cette consequence evidente, que I'industrie estle principe vital de la societe, et il montrait qu'a I'industrie seule il appartient de la conserver, qu'elle seulc est capable de la rendre prospere , morale, paisible, etc. L'industrie etaul I'objet de la societe, le Censeur Europeen en concluait que la societe devait etre constifuec pour I'indus- trie. II faisait observer qu'aux divers ages de la civilisation, les hommes ont toujours tendu h s'arrangcr dc manierc h donner 376 ESQUISSE IIISTORIQUE le phis d'eiUMjjie possible a leuis moyeris naturels d'existenco ; que les peuples chasseurs, par exemple , adoptent presque instinctivoraent, I'ordre le plus favorable a la chasse; que les peuples gucrriers de I'antiquite mettaient la plus grande atten- tion a s'organiser de maniere a assurer le succcs de leurs expe- ditions niiiitaircs; qu'en consequence, nous, qui vivons de I'a- gricuhure, lies arts, du commerce, des lettres, des sciences , nous devons , si nous avons quelque sens , adopter I'ordre social le plus ffivorable an progres de tontes les professions utiles. Parlant de cette idee , le Censeur Europeen cherchait com- mentdevaient ctre composes tons les pouvoirs politiques, depuis les colleges electoraux jusqu'il la pairie; eta cet egard , sa doc- trine constante etait que la composition des pouvoirs sociaux devait etre analogue a I'objet de la societe, et que, puisque la societe vivait, prosperait par I'exercice des professions utiles , il fallait , autant que possible , composer tons les pouvoirs d'hommes distingues dans ces professions. Enfin, le Censeur Europeen examinait quel etait I'ordre que ces pouvoirs devaient faire regner, quelle etait I'espece de ser- vices qu'ils avaient a rendre; et, suivant lui , la seule demande que les professions privees eussent a faire a I'industric poli- tique, c'etait qu'elle les preservat de tout trouble. II soutenait qu'il devait y avoir concurrence libre et illimitee pour toutes les professions; il n'admettait pas qu'il y eut dans la societe d'induslrie capable de diriger toutes les autres; il niait que le pouvoir put intcrvenir utilement dans I'exercice des professions privees, sice n'etait pour les affranchir, avec le moins d'in- conveuiens possible, desentraves dont il les avait si malheu- reusement surchargees dans d'autres tems; et du reste, il bornait son role, comme je le dis, a la fonction sp^ciale de reprimer les violences, de maintenir la tranquillite. Ces principes etaient generalement justes , et il n'y avait guere de reproche a faire au Censeur Europeen que dans I'ap- plication qu'il faisait de son idee fondamentale sur la compo- sition des pouvoirs sociaux. C'etait avec pleine raison qu'il flemandait que la nature de ces pouvoirs fut adaptee a colle de HE L'INDUSTRIALISME. H77 la socitte , f't qu'a une epoqiie ou la societe fonde on devrait fonder son existence sur I'exercice des professions utiles , on composat les pouvoirs publics d'hommes choisis dans ces pro- fessions. Mais c'tlait a tort qu'il voiilait qu'on y appelat prefe- rablenient et presquc excliisivement des hommes appartenant a certaines de ces professions nominativement designees, et par exemple a I'agriculture, a la fabrication, au commerce , a la banque. Rien ne pouvait justifier la preference qu'il accor- dait a ces industries, et I'espece d'exclusion qu'il donnait a toutes les autres. Celles-la n'etaient ni les seules importantes , ni peut- etre les plus importantes ; les hommes qui les exercaient n'a- vaient pas plus de lumieres que d'autres sur les vrais interets de la societe industriolle et sur le regime qui lui convient ; ils n'etaient pas plus que d'autres exempts de pretentions injustes et exclusives. Le Censeur aurait eu raison de rcpousser lei le- giste dont les idees lui paraissaient fausses, tel fonctionnaire public qu'il jugeait unsuppot de la tyrannic; mais c'etait comma esprit faux, et non comme legiste, qu'il devait ecarter Tun; c'etait comme dominateur, etnon commehomme d'etat, qu'ilde- vait repousser I'autre; il est clair qu"il ne fallait exclure aucun homme a cause de sa profession, puisque toutes les professions utiles concourent, chacune a leur facon, a la vie et a la pros- perite sociales : ce qu'il fallait exclnre, c'etaient les sots et les fripons, quel que fut d'ailleurs leur metier; et du reste, il fal- lait admettre les hommes de toute profession a qui Ton pouvait supposer des intentions droites et la capacite de juger les lois generales suivant lesquelles prosperent toutes les bonnes in- dustries. A I'epoqtie ou le Censeur Europeen commenca ses publica- tions, un homme singulier que des personnes severes ont quel- quefois qualifie de fou, et qui eut peut-elre, a certains egards , le malheur de meriter ce titre; un homme qui pretendait des- cendre de Charlemagne; qui se maria une fois pour faire des hommes de genie, et qui n'eut pas meme d'enfans; qui entreprit, ime autre annee, de construire un vaste etablissement, et n'e- leva qu'une immense porte cochere; qui oommen^ait toujours 3:8 ESQUISSE IIISTORIQUE ses publications ea annonrant non pas un ouvrage , mais dcs series d'ouvrages, ct qui ne lit jamais que des prospectus ; et avec tout cela , uu homme done a quclques cgards d'un sens tres-profond, un homme qui ne manquait ni do sagacite, ni d'etcndue dans les vues, et dont I'csprit otait parliculierement propie aux speculations philosophiques et politiques , M. Saint- Simon enfin fut conduit, de son cote, ii envisager I'industrie comme I'objet naturel de la societc, et entreprit une suite de publications dont la tendance ne s'ecartait'que peu, surtout dans les commencemens, de celle du Censeur Europeen. II parait difficile d'admettrc que cette conceptionde M.Saint- Simon fut, comme le pretend le Producteur , le fruit de medi- tations deja anciennes et dut etrc consideree comme la suite uaturelle de quelque precedente publication. On voit, il est vrai, dans quelques extraits de ses premiers ouvrages, qu'il avait fait autrefois I'apologie du travail et considere les sciences positives comme devant remplaccr un jour la theologic. Mais il y avait bien loin de la aux doctrines de Vindustrialisme, telles que les comprit plus tard M. Saint-Simon. On ne trouve aucune trace de ces doctrines dans les publications qu'il fit en 1814 et i8i5. On y voit clairement , au contraire, que ses idees poli- tiques ne differaient alors en rien de celles qui avaient cours. C'etait de la forme, et non du fond de la societe, qu'il s'occu- pait encore. En 181 4, il publiait un plan de reorganisation europeenne fondee sur I'institution d'un parlement europeen. En i8i5, il proposait, dans le Censeur (i), comme moyen d'ordre pour la France, d'organiser et d'armer le parti de Top position , de telle sorte que ses forces pussent balancer celles du ministere. Un peu plus tard, toute sa science politique se rtduisait aconcevoir le projet d'un journal destine a former un parti des proprietaires de biens nationaux(2}. Pendant les cent jours, il placait la source de tout piogres et de tout bien dans (i) Tome HI, p. 334. (2) Voy. le tome iv du Censeur, p. 352. DE L'lNDUSTRIALISME. 3^9 ralliancc de I'Angleterre et de la France (i). On voit combien il y avail loin de la a considerer la societe dans ses travaux, dans ses moyens de paix, de prosperite, de force, et a fonder la po- litique sur I'industrie. M. Saint-Simon n'a public ses premieres idees a cet egard qu'eni8i7, a I'epoque ou le Censcur £uropeen commenca.it h devclopper les memes doctrines, et deux ans apres la publication des ecrits de MM. Benjamin Constant, Montlosier et J.-B. Say, dont j'ai deja fait mention. On nc pent douterque ces ecrits, qu'il connaissait et dont il etait plus qu'un autre en etat de tirer parti, n'aient beaucoup influe sur la direction que prirent ses idees et sur la formation des doctrines qu'il adopta alors et qu'il a exposees depuis dans une suite d'ecrits publies tantot par feuilles , tantot par volumes, tantot sous une forme, tantot sous une autre, mais toujours avoc le meme objet et reproduisant constamment les memes idees fondamentales (2). Il y a dans ces ecrits, il fautle dire, une tres-grande distinc- tion a faire entre ce qui est de la main de M. Saint-Simon et ce qu'ont ecrit pour lui un petit nombred'hommes de merite dont il a mis successivement le talent a contribution. Ce n'est guere que dans les travaux de ces ecrivains, qu'a tort ou a bon droit il appelait ses eleves , qu'on pcut chercher I'exposition des idees qu'on luiattribue (3). II serait difficile, acequ'il me semble, (1) Opinion sur les mesurcs a prendre conlre la coalition de i8i5. ^ Paris , Delaunay. (2) Voici les litres de ces ecrits, dans I'ordre de leur publication : I'industrie, le Politique, l' Organisaieur, le Systeme industriel, le Cate- cliisme des industricls , les Opinions indusirielles et le Nouveau chrislia- nisme. (3) Ilfautdistinguer, parmices travaux, unmorceaudeM. Thierry, intitule : Des Nations el de leitrs rapportj mutuels , insere dans le pre- mier Yohime de I'industrie; des Lettres sur I'Amerique, luserees dans le second volume, et qui sent I'ouvrage d'un jeune professeur de philosophic, mort il y a huit ou neuf ans, de M. Maignien; enfin, divers morceaux de M. Auguste Comte, inscrcs dans I'Organisateur , le. Systeme industriel et le Calecliisme des industries. 380 KSQUISSE HISTORIQUE (Ic tionvei- dans ses proprcs ceuvres de quoi justifier la re- putation colossale qu'cssaient de liii faire d'honorables ecrivaiiis qui se sont portes les heritiers et Ics defenseurs do ses doctrines. M. Saint-Simon, qui aspirait a passer pour un novateur dans les sciences morales et politiques , etait sans contredit I'homine du monde le moins propre a faire recevoir des nouveautcs. Lc ton vulgairc de ses redactions, le charlatanisme qui s'y mele, ses vanteries, ses predictions, ses apostrophes aux rois et aux peuples, la familiarite de ses conseils au chef de I'etat , les pro- jets d'ordonnance qu'il lui presente et par lesquels il kii fait convertir en lui ses propres doctrines, ses perpetuelles allocu- tions aux industriels, les elogcs outres qu'il leur prodigue et les frequens appels de fonds qu'il leur fait, tout cela n'etait i,'uere propre a produire nne impression favorable, surtout de la part d'un homme qui affichait la pretention d'elever la poli- tique au rang des sciences positives , et qui , par cela nieinc , aurait du s'imposcr la loi d'ecarter tout charlatanisme de ses ecrits et de sa conduite. Je demande qui pourrait reconnaitre le ton d'un vrai savant dans des phrases comme celles-ci :>' Apres quarante ans de tra- vaux je suis enfin parvenu a trouver le systemc politique qui con- vient a I'etat present des lumieres... II a fallu , j'ose le dire, de longues meditations sur la marche de la civilisation pour s'elc- ver a cette vue generale qui lie et qui domine tons les faits... Nous entreprenons d'elever tons les industriels au premier de- yre de consideration et de pouvoir... Ce n'est pas legerement que npus faisons cetteentreprise : nous avons employe quarantc- cinq ans a la mediter et a la preparer... Ceque vous venez de dire( c'est le langage qu'il s'adresse a lui-meme par I'organe dim interlocuteur ), ceque vous venez de dire est tres-bon, fort interessant et de la plus grande importance... Si ces mesures ( il s'agit de l'etai)lissement du systeme industriel ), si ces mesures sont prises promptcment, je reponds sur ma tete que la royaute sera affermie dans les mains des Bourbons; si on ne les prend pas promptemcnt , j'ose predire que les Bourbons n'occupernnt pas le trone pendant un an... Princes, ecoutez la voix de Dieu DE L'INDUSTRIALISME. 38t qui vous parle par ma boiiche, et redevenez bons Chretiens, etc. (i)-» Je pourrais remplir des pages entieres de phrases de ce genre; c'est ordinairement de ce ton qu'il ecrit. Ce systeme que M. Saint-Simon disait avoir mis quarante- cinq ans a chercher ne fut autre d'abord que ceiui qu'exposait de son cote le Censeur Europeen, et auquel ses auteurs avaient ete conduits par Tetudc de Teconomie politique, et spccialement par la lecture des ouvrages dont j'ai precedemment parle. C'e- taient les mcmes idees fondamentales. M. Saint-Simon , comme le Censeur Europeen , faisait reposer la soci^te tout entiere sur I'industrie, c'est-a-dire sur I'ensemble des travaux utiles, et regardait I'ordre de chosesle plus favorable a I'industrie comme le plus favorable a la societe. Seulement , il ne sortait jamais de ces propositions generales, et n'arrivait a aucune application. II etait loin de montrer, avec les memes details que le Censeur , les changemensqu'un regime favorable a I'industrie tendrait a introduire dans la police de I'Europe, dans ses systemes mili- taire et mercantile, et en meme tems dans Torganisation ainsi que dans radrainistration interieure de chaque pays. 11 se bor- nait a dire , avec le Censeur , que Tordre de choses que recla- mait I'industrie, c'etait unetatoulegouvernement, au lieu d'in- tervenir comme regulateur des travaux , se bornerait a les preserver de tout trouble. Plus tard meme, il abandonna cette idee, I'une de celles dont Adam Smith et ses principaux succes- seurs ont le mieux etabli la justesse, et il n'eut plus de com- mun avec le Censeur Europeen que cette idee premiere, que la societe doit etre coustituee pour I'industrie. Mais, au lieu de borner le role du pouvoir a defendre les travailleurs de toute violence , il le considera comme le chef naturel de la societe , charge de reunir en faisceau et de diriger veis un but commun toutes les activites individuelles. Seulement il voulait que cette (i) Voy. Lettre a MM. les Jures , p. it , 22 , aS ; Adrcssc au Roi, p. 89; Calechisme des induslriels , p. 4^ , 44 > 7! ^* Nouveau Chrislla- nisme , p. 91. T. xxxni. — Fet'rinr 1827. a5 382 ESQUrSSE HISTORIQUE direction passdt en de nouvelies mains. Voici quelles furent en dernier lieu ses doctrines. M. Saint-Simon posait en fait qne, depuis le xi*^ siecle , c'est-a dire depuis I'epoquc oii , suivant liii , le sj'steme leodal et iheologique avait cte delinitivemeut constitue , deux ordres de capacites positives, les sciences et I'industrie , nces en dehors de ce systeme , n'avaient cesse d'en preparer la disso- lution. Il disaitque lepouvoir ecclesiastiqueet le pouvoir fcodal avaient en effet, depuis cette epoque, continuellement decline; qu'e les sciences etTindiislrie, aucontraire, avaient constamment acquis de nouvelies forces. 11 ajoutait que ces puissances nou- velies avaient du pendant long-tems borner leur role a combattre le systeme qui leur etait oppose; maisqu'aujourd'hui que ce sys- teme etait suffisamment affaibli , elles devaient abandonner la tendance critique et proceder a I'organisation dn systeme in- dustriel , c'est-a dire , d'un systeme oii elles occuperaient la place qu'avaicnt remplie dans I'ordre ancien les pouvoirs fcodal et theologique, et ou la direction dcs interots gentraux de la societe passerait dans les mains des savans , des artistes et des industriels. Sous la denomination de savans , M. Saint-Simon ne comprenait que les hommes professant les sciences physi- ques et mathematiques ; il entendait par artistes ceu\ qui pro- fessaient les beaux-arts , et par industriels , ceux qui exercaient les arts et metiers de toute sorte (i). La societe , suivant lui, etait comprise tout entiere dans ces trois classes d'individus , et il disait assez plaisamment, pour le prouver, que , si la France venait a perdre trois mille de ses hommes les plus dis- tingues dans les arts , les sciences et les beaux-arts , elle tom- berait immediatement dans un etat d'inferiorite tres-marque vis a-vis des nations dont elle est maintcnant la rivale; tandis que la mort pouvait moissonner dans les rangs de ses fonction- naiies, a commencer par les plus elevcs en dignite, un nombre d'hommes decuple de cehii-la, sans qu'elle en fut affectee au- trementque d'une manierc sentimentale, disant qu'il n'etait rien (i) Voy. /e Sysleme induslriel , yt. 262. DE L'liVDUSTRIALISME. . 383 de si aise que de trouver des homines capables d'etie princes , ininistres , eveques , conseilleis d'etat, prefels, etc., aiissi bieii que jVIM. tels et tels. M. Saint-Simon ne reconnaissait d'honimes utiles que ce qu'il appelait les savans , les industriels , et les artistes. II ne parait pas qu'il fut tres-fixe sur I'ordre hierar- chique dans lequel il devait ranger ces trois classes d'individus. II placait en premiere ligne , tantot les artistes , tanlot les sa- vans , tantot les industriels. Je craius que cela ne dependit un peu de I'acciieil plus on moins vif que faisaient a ses doctrines les hommes de I'uue ou I'autre de ces classes avec lesquels il s'etait mis en communication, et dont il allait souvent soUiciter I'interet et rechauffer le zele. Je crois pourtant qu'il s'arretait de preference a I'ordre qui assignait la preeminence aux savans, et ne faisait venir les artistes el les industriels qu'en seconde ligne. Les premiers devaient former le pouvoir spirituel, et les seconds le pouvoir temporel de la societe. La tache des savans devait etre de former les doctrines nationales, et de veiller a ce que personne nc s'en ccartdt (i). II chargeait les industriels de dresser le budget, et de regler loutes les depenses publiques. Enfin les artistes avaient pour mission de passion- ner la societe pour le nouvcl ordre social qu'il se croyait appele a etablir. II y avait au fond de ce systeme quelque chose , sinon de tres-nouveau , du nioins de tres-juste; c'etait ce que M. .Saint- (i) Void les projets d'ordonnances qu'il presente au Roi dans Van deses ecrits. Premiere ordonnance : Considerant, etc. Art. i^f. Toules les classes de I'Institut reunles feroni un Catechisme national , etc. Seconde ordonnance : Considerant que le plus fort lien qui puisse unii- les niembres d'une Societe , c'est la similitude de leurs principes et de leurs connaissances. Art. ic''. L'lnsthul aura la surveillance de I'instruc- tion publique. Il ne pourr\ eire rien enseigne dans les eccles , KI DANS LES CHAIRES , DE CONTRAIRE AUX PRINCIPES ETABLTS DANS LE Catechisime national. {Adresse au Roi, p. io3 et suivantes.) On voit que M. Saiijt-Simon elait bien pres de se cvoire iufaillible. II ne lui manquait que de parier au nom du Ciel. Aussi, a-t-il fini par la : Princes , ecoutez la voir de Dieu qui vous parlc par ma bouche , etc. 25. 384 ESQUISSE HISTORIQUE Simon disalt de la decadence des pouvoirs feodal et theo- logiquc, et du progres des sciences et de I'industrie. Mais, qtiant a sa classification de la societe en savans, en artistes et en indiistriels seulement ; quant a ses attaqiies centre I'esprit d'examen , et ce qu'il appelait la doctrine critique; quant ^ sa ri"m/(7/?ce pretend ue organiqae , et au projet de faire des aca- demies savantes , un pouvoir spirituel charge de fixer les doc- trines sociales, et d'en maintcnir I'uniformite , tout cela , qui pouvalt sembler plus neuf, etait en revanche bicn moins raison- iiable. J'aurai I'occasion tout a I'henre d'exposcr les motifs de ce jugement en parlant d'un ouvrage periodique entrepris de- puis la mort de M. Saint-Simon , et destine a propager ses doctrines industrielles. Mais je dois dire d'abord quelques mots d'un autre ecrit , public anterieurement a cette entreprise , et qui se trouve egalement danslaligne des productions relatives a I'industrialisme , quoiqu'il s'eloigne beaucoup decellcsque je vicns d'analyser. II s'agit de I'ouvrage intitule : F Industrie et la Morale considerees dans leurs rapports avec la libcrte. L'auteur assigne pour objet a I'espece humaine le libre et plein exercice de ses (iicultes , et cherche a quelles conditions cet exercice est subordonne par la nature des choscs. II trouve qu'il depend de la perfection naturelle et acquise de ccs fa- cuUes. Ce n'cst point la une opinion qu'il ait adoptee d'avance; c'est un resultat qui lui est doune par les fails , el qui se trouve egalement avere , soil qu'il compare enlre elles les diverses races d'hommes , soil qu'il parcoure les diverses manieres d'etre par Icsquelles I'hisloire naturelle de I'espece montre qu'elle a successivement passe. Et quelle est de toutes ces ma- nieres d'etre la plus convcnable a sa nature , la plus favorable au plein developpement de ses facitltes? C'est la derniere a la- quellc il arrive , c'est \'etat industrid. L'auteur est done aussi un Indus trialiste ; mais il est loin de I'etre , a la maniere de M. Saint-Simon. Pour lui, la societe industrielle n'est pas une societc composee uniquement de savans , d'artisans et d'ar- tistcs; car aucnne societe ne pent se contenter d'un aussi petit nombre de professions ; mais ime societe oil toutes les profes- J DE L'INDUSTRIALISME. 385 sions sont industrielles, c'est-ii-dire , ou toutes sowl prnductives d'utilite, puisque Industrie c est production d'utilite ; ou toutes sent exemptes d'injustice et dc violence , puisque I'injustice ct la violence sont destructives et non productive s. Telle est la societe industrielle , suivant lui. On voit combieu il s'eloigne de M. Saint-Simon dans la definition qu'il en donne. Mais il s'en eloigne encore davantage dans les idees qu'il a du regime qui lui convicnt. II ne fait pas du pouvoir le regulatcur supreme de tons les travaux ; il no reconnait a aucune Indus- trie la capacite de diriger toutes les autres ; il croit qu'aucun travail ne peut-etre bien conduit que par ceux dont il est I'uni- que ou la principale occupation ; il reduit les attributions du pouvoir a defendre chaque travailleur contre les injustes pre- tentions des autres; et du reste, il met tons les services au con- cours , meme le service public, et parait convaincu que c'est la le seul moyen de faire que les individus et la societe soieut , a tous egards , aussi bien servis que possible. Enfin , ses idees sur la maniere dont se peut etablir la societe industrielle, s'eloignent peut-etre plus encore de celles de M. Saint-Simon. II n'admet pas qu'un nouveau systeme social quelconque soit une chose qu'on puisse fonder a priori, et rea- liser par des ordonnances; il ne redige pas de projets destines a convertir ses doctrines en loi. Par cela seul qu'un certain ordre de choses n'existe pas , il est prouve, suivant lui, qu'il n'est pas encore possible. II pense que tout grand cliangement dans I'etat de la societe ne devient possible, et ne se realise que tres-lente- ment, tres-graduellement, et a mesure que les changemens par- tiels qu'il exige sont compris et voulus avec un pen d'ensemble et dc force... Mais, en voila assez sur cet ecrit; arrivons a celui que j'annoncais tout a I'heure ,. ct terminons cette esquisse dcja bien longue par une analyse ct un examen rapides du Producteur. Disciples de M. Saint-Simon , les auteurs de cet ouvrage I'ont entrepris , ai-je dit , avec le dessein de propager ses doctrines, lis paraissent adopter ces doctrines sans restriction. D'abord, ils revendiquent pour lui I'honncur d 'avoir fonde Vindustria- Usme; ils lui attribuent meme la gloire non petite d'avoir invcnte 386 ESQUISSE HISTORIQUE le mot industrirl. Partant , comme lui, dii fait que les pouvoirs thtologiqiie et feodal out constainmont decline, et que les arts, les sciences et I'industrie n'ont cesse d'acquerir des forces , ils concUient que la direction des affaires doit passer des mains des seigneurs ecclesiastiques ct laiques, dans celies des savans, des artistes et des industrieis. Comme ie maitre, ils reprochent a ces classes do n'avoir encore travaille qu'a s'affranchir , et parce qu'ellcs ont long-tems fait la guerre , de vouloir la faire touJDurs, de rend re eternel ce qui devait n'etre que transi- toire , de se faire iin but de ce qui n'etait qu'un moyen , de vouloir lemplacer I'ancien systeme par la critique qui en a fait apercevoir les inconveniens , de reduirela critique en systeme, de se faire un but de critiquer, sans autre objet que de critiquer. lis les supplient d'abandonner cette tendance critique , qui met , disent-ils, les plus grands obstacles aux progres de la civili- sation , et de prendre la tendance organirjue , de proceder sans perte de terns , a I'organisation du sysleme indiistriel. Ce qu'ils nomment ainsi, c'est , a Texemplede Saint-Simon, unetat social compose uniquement de savans , d'artistes et d'artisans , ou les savans et les artistes les plus distingues forment le pouvoir spi- ritucl , et les industrieis les plus preponderans le pouvoir tem- porel de la societe; ou les premiers soient charges de la forma- tion des idees : les seconds de celle des sentimens, et les der- niers de I'administration des interets materiels'. Ce systeme ne tient point compte des individus ; il ne s'occupe que de I'es- pece humaine tout entiere. Il assigne pour destination a i'espece ['exploitation de plus en plus perfectionnee du globe que nous hahitons. II proclame le principe organisateur d' association pro- ductive entre tous les peuplcs. La loi de celte association n'est pas la liberte. Laissez faire et laissez passer, est un conseil in- suffisant... L'imperfection humaiue cxige qu'il y ait une direc- tion generale du travail social , qui presente continueliement aux travailleurs la loute qu'ils doivent suivre ct ne permette a personne de s'en ecarter... A quoi servirait la capacite des hommes qui explorent les voies de la societe , et qui peuvcnt favoriser sa marche s'il n'existait pas quelque moyen de faire DE L'INDUSTRIALISME. SS-j ronlici- dans la bonne direction les individns qui s'en ecai' tent ?... La masse ne saurait se passer d'line direction generate, ayant pour but de regulariser le travail... La societti ne saurait se passer de directeurs... Et qui done dirigera ? Peisonne? La societe connait si Ijien le but oCi marche I'humanite qu'on n'a pas besoin de conseils generaiix?... La question n'est pas de savoir si !a societe pent se passer de direction, niais de savoir qui dirigera... Les peuples out abandonne leurs lisicres; niais oil est leur raison directrice? Nullepart; elle est toute a creer... Chose etrange ! tous les moyens d'ordre, censui'e, police, passe- ports , garde nationalc , conscription , gendarmes , repugnent a la societe et la blessent... Pourtant la concurrence ne renferme pas de principes d'ordre; I'ordre ne peut resulter que des exceptions faites au principe de la concurrence... Nous cher- cherons coustamment ;i combattre ce principe. . II faudrait que dans chaque branche d'industrie il y cut des associations de capitalistes qui ne fissent des avances qu'aux entrepreneurs et aux entreprises qui en meriteraient... Il faudrait titablir un centre creditaut dans chaque classe industrielle... Il faut des conseils de discipline pour les avocats , les medecins , les bou- langers , les bouchers , les agens de change , les notaires , etc. etc. Les conseils de discipline ue sont pas plus un mal que des directeurs particuliers dans chaque branche d'industrie ne seraient un mal , que les directeurs generaux de la societe , que les gouvernemens en general ne sont un mal. Il faxit de tels conseils pour repondre de la Science et de la moralite de tout homme examine par eux... Seulement ils doivent etre composes d'hommes evidemmcnt superieurs (i). Tel est ce systeme. II est tout dirige contre ce que les auteurs appellent la tendance critique, et vers ce qu'ils appellent la tc/i- dance organiquc. Je repete ce que j'en ai dit, en parlant deM. Saint-Simon : il ne renferme de vrai que I'observation qui lui sert de base, sa- (i) La plupart des phrases dont se compose cet alinea sont extrailei du Producteur. 388 ESQUISSE HISTORIQUE voir, que I'esprit d'industrie tend a I'emporter cliaque jour davantage sur I'esprit de domination; et que, plus la societe avancera, plus elle s'ordonnera dans I'intcret du travail et con- trairement aux intcrcts du brigandage. Mais la remarque n'est pas de M. Saint-Simon.L'invention du mot industrielne lui appar- tient pas davantage. Gemot, quoique assez nouveau, est pour- tant anterieurarusageqiicM. Saint-Simon en afalt; je le trouve dans un vocabulaire qui etait deji ;i sa sixieme edition , en 1 8 1 3, dans le vocabulaire de Wailly. Ce qui est bien a M. Saint-Si- mon, et ce qu'il me parait impossible de lui envier, c'est le systeme auquel il I'applique, c'est le systeme industricl ainsi qu'il I'entend. J'observc d'abord que ce systeme n'est pas snfflsamment de- signe par le nom d'industriel; car la societe, meme telle que la concoit M. Saint-Simon, ne renferme pas seulement des gens d'industrie, mais encore d^s savans et des artistes. II ne Test pas assez non plus par la double qualification de scicntifique- industriel que ses auteurs lui donnent quelquefois; car les ar- tistes ne sont pas encore compris dans cette seconde denomi- nation. Pour que le mot rendit entierement la chose, il est clair qu'il faudrait encore I'etendre et dire le systeme scicntifico' artifico-indastriel. Ce n'est qu'alors, en effet, que le nom de systeme designerait les trois ordres de professions ou de pcr- sonnes qu'il embrasse. Ensuite, le mot industriel qui, ainsi allonge, exprimerait bien le systeme social de M. Saint-Simon , ne designerait pourtant encore qu'une societe tres-incomplete; car il est une multitude de professions, indispensables a toute societe, qui ordinaire- ment ne sont pas comprises, et que M. Saint-Simon lui-meme ne comprend pas sous les denominations generales de savans , d'artistes et d'industriels. Tcllcs sont, notamment, les profes- sions des gens de loi, des officiers de justice, des administra- teurs, des homraes d'etat, des predicateurs, des militaires, sortes de gens qui, de leur metier, ne sont ni mathematiciens, ni cliimistcs , ni pliysiciens, ni astronomes , ui artistes, ni fa- bricans ni agriculteurs, ni commcr^ans, ni banquiers, et qui DE L'INDUSTRIALISME. 389 Deanmoins sont tout aussi necessaires a la soci(5te que ceux-ci, ct qui le seront meme tout aussi long-tems; car la nature morale sur laquelle ils agisseut et qu'ils out pour objet de connaitre et de regler, n'est assurement pas plus aisee a connaitre et a regler que la nature physique sur laquelle agissent les autres. Ainsi, du moment que par le mot indastriel on entend une classe de personnes , ce mot , meme en I'allongeant assez pour lui faire embrasser \es savans et \c& artistes, ne peut designer un corps social complet; car il n'est pas de corps social qui, avec ces trois classes d'individus, puisse faire toutes les fonc- tions necessaires a son existence. Le mot industriel ne peut etre convenablement applique i un systeme social qu'autant qu'il sert a designer, non une classe d'individus, mais une maniere de vivre; non un ordre de profession, mais un caractere com- mun a toutes les professions. On peut dire, par exemple, le systeme industriel, la societe industriclle, si Ton entend par la une societe ou toutes les professions ont un caractere industriel, ou toutes sont productives d'utilite, ou les hommes de toutes les classes , forces enfin de lenoncer a la violence, ne peuvent vivre que des valeurs qu'ils creent par un travail paisible, ou de celles qu'ils obtiennent par des dons volontaires ou des eclianges reguliers; mais il n'y a plus lieu a parler A' etat social industriel , du moment que, par le mot industriel, on n'entend, comme M. Saint-Simon et les ecrivains de son ecole, qu'une ou plu- sieurs classes d'individus ou de professions. Si cette ecole se trompe quand elle ne voit dans la societe que trois grandes classes d'individus, elle ne se trompe pas moins lorsqu'elle vcut qu'on prenne parmi ces individus tous les Kommes dont se composeront les pouvoirs politiques. La capa- cite politique est une capacite speciale, parfaitemcnt distincte de celle qu'exigent les autres professions. Elle consiste dans la con- naissancedes lois generales suivant lesquelles toutes les bonnes professions se developpent, et dans celle du regime social qui convient le mieux a leiu-s progres. Elle importe eminemment a toutes; mais elle n'est particuliere a aucune, et c'est folic de pretcndre qu'on doit etre un publiciste habile, par cela seul iigo esquissp: historique qu'on est un aslionome, un physicion, un <;himiste distingue. Les l(5gistcs, que M. Saint-Simon repousse avcc tant d'humenr du maniement dcs affaires, sont, par la nature de leurs tra- vaux , plus pros d'etre des hommcs politiques que les artistes et les savans. '< Je ne me figure rien de plus extravagant , disait un mombre de I'lnstitut , que ne le serait un conscil d'etat com- pose de tels de mes confreres dont j'admire d'ailleurs Ic genie. » Cc n'est pas que les connaissances politiques soient plus incom- patibles avec la culture des arts et des sciences , qu'avec la pro- fession de juge ou d'avocat. II pent sc former des hommes d'etat dans toutcs les classes. II est extremenient desirable de voir sc multiplier dans toutes le norabre des hommes ayant des notions saines des divers services publics que la sociele reclame, et de la maniere dont ces services doivent el re montes. Mais aucune n'a la science politique infuse , et il est absurde de reclamer pour trois classes le droit exclusif de s'occuper des affaires publiques , surtout quand on trouve insense, comme M. Saint- Simon et ses disciples, de vouloir attribuer ce droit a tout homme sans condition de capacite. Ce qui est a desirer, c'est que la societe ne s'adresse qu'a des hommes capables ct probes; mais ces hommes, il faut qu'ellc puisse les prendre partout ou il y en a de tels. C'est done a tort que les ecrivains dont je parle ne veulent Ini permettre de choisir que parmi des savans, des industriels et des artistes. Mais ils torabent dans une derniere erreur plus grave encore, an sujet du regime qui convient le mieux k I'etat industriel. Leurs plaintes conti'e ce qu'ils appellent le systcmc critifjiie, c'est- a -dire, centre un etat general ct permanent d'examen , de debnt, de concurrence, attaquent la societe dans son^principe de vie le plus actif , dans son moyen de develop- pement le plus efficace. D'abord, ces ecrivains se meprennent tout-a-fait, quand ils accusent la philosophic critique de ne tendre qu'a detruire et de lie sc proposer qu'un but negatif. En travaillant i renverser les obstacles qui s'opposent au libre ot legitime exercicedes facultes humaines, elle tend, au contrairc, a un but tres-positif, c'est DE L'INDUSTRIALISME. • 3gt de placer I'humanite dans une situation ou ses facultes puissent croitre plus a I'aise : le progres de ses facultes, tel est I'objet veritable et assurement tres-positif cju'elle a dcvant ies yeux. Reste a savoir si elle fait assez ponr cet objet, en demandant I'abolition de tout privilege, de tout monopole, de toute res- triction inique et violente, ot en voulant que chacun puisse librement user de ses forces dans Ies limites de la justice et de I'equite. Je dis dans Ies limites de I'equite; car il ne s'agit nullement de savoir si , pour que la societe se developpe, il faut, que Ies desordres soient leprimes, Ies violences punies, Ies differens regies, la justice rendue. Ceci n'est une question pour personne. Ce qui est en question, c'est de savoir s'il ne suffirait pas a la societe d'un gouvernement qui reprimepait bien Ies cxces et reudrait exactcment la justice, et s'il faut en outre qu'elle soit legalement regie, dirigee, gouvernee dans ses travaux. Les disciples de I'ecole pretendue organique voient Ies plus grands inconve»iens a la laisser a elle-meme et a attendre son developpement du libre concours des efforts individuels. Cet etat de concurrence, disent-ils, n'aboutit qu'a I'anarchie des sentimens et des idees, qu'a I'alteration de I'unite sociale, etc. lis ne tarissentpas dans lesreproohes de ce genre qu'ils lui font. Et cependant, par une contradiction singuliere, ils avouent, en meme tems, que la libre discussion est necessaire a de certaines epoques, et lorsque la societe tend a passer d'une doctrine a une autre, d'un etat imparfait a un etat meilleur. Mais, si la discus- sion a quelquefois le pouvoir de produire la lumiere, si elle pent rallier les esprits a la veiite, s'il est dans la nature des choses que des idees communes tinissent par sortir du conflit des opinions divergentes, que signifie le reproclie fait a la liberie, et quand commence-t-elle a etre anarchique? Est-il, dans le cours des siecles,un seul instant oil la societe ne tende, sur une multi- tude de points, a modifier ses idees, a changer sa maniere d'etre? En est-il un , par consequent, ou elle n'ait qiielque bon office a recevoir de la liberie ? Accuser la liberte de ce qui reste oncore de confusion dans les doctrines morales et sociales, c'est 3ya . ESQUISSE HISTORIQUE voir le mal dans 1g remede, et se plaindre precisement dc ce qui doit le faire cesser. L'erreur de I'ecole organique est de croire que la liberie n'est que d'une utilite provisoire. TJn terns viendra , dit-elle , ou toutes les sciences seront positives; et Ton n'aura plus besoin de liberie quand toutes les sciences seront positives : on ne dispute plus sur les veriles demontrees. On ne dispute plus sur ce qui est demontre sans doute ; mais jamais tout le sera-t-il ? Ce qui parait I'etre, le paraitra-t-il toujours? Peut-on repondre que les choses qui semblent le mieux etablies, dans les sciences exp^rimentales, ne seront pas modifiees quelque jour par de nouvelles experiences? Au lieu de dire que nos connaissances deviendront completes et cerlaines, on peut hardimcnl repondre qu'elles laisseront toujours quelque chose a decouvrir ou a rec- tifier. II est done dans la nature des choses que la liberie d'exa- men soil perpetuellement necessaire. La societe, qui vit surtout d'action, agit, a chaque instant, d'apres les notions qu'elle possede; mais, pour agir de mieux en mieux, elle a besoin de travailler constamment ^ perfectionner ses connaissances , et elle n'y peut reussir qu'a la faveur dela liberie : recherche, enquete, examen, discussion, controverse, tel est son elat naturel, et lei il sera toujours, meme alors que ses connaissances auront acquis le plus de surete et d'etendue. Ce n'est pas I'avis de I'ecole organique. Elle croit , au con- traire, que cet etat n'est que passager, et qu'il viendra un tems oii nos connaissances auront acquis un tel degre d'extenrsion et un tel caractere de certitude, qu'il n'y aura plus matiere a dis- cussion. En consequence , et comme si elles etaient deja parve- nues a cet etat de perfection ideale , elle veut qu'on donne des a present a la socielc des directeurs officiels qui soient charges de lui apprendre sa route, et de conduire ses Iravaux conformement a ces connaissances infaillibles et completes qu'elle est destinee a acquerir. C'est partir d'une supposition vaine pour arriver a une conclusion funeste.Il est puerile devouloir decider d'avance ce que deviendront les diverses parties des connaissances hu- maines; nous n'avons aucun moyen de le savoir; il n'y a nulie apparence qu'elles devienaent jamais aussi parfaitcs qu'on Ic sup- DE LINDUSTRIALISME. 39? pose; an moins, est-il certain qu'elles sont encore loin de I'etre, et il est insensede raisonner comme sielles I'etaient deja. Enfin, le fussent-elles; connut-on pleinement le but de la societe et tous les moyens qu'elle aura jamais de I'atteindre ; ii'y eut-il plus rien a decouvrir dans les sciences; sut-on les meillenrs precedes a suivre dans les arts ; eut-on acquis des moyens in- faillibles pour discerner, dans tous les cas, les bonnes et les roauvaises entreprises, il serait encore tres-pernicieux de vou- loir donner aux hommes les niieux instruits de toutes ces cltoses le droit de soumettre les autres a leur direction. On ne hate point par la contrainle la marche de la verite. Le meilleur moyen, au contraire, d'empecher qu'elle ne se propage, c'est de donner aux hommes qui la connaissent le pouvoir de I'im- poser a ceux qui I'ignorent. Loin d'accroitre par-la leur influence, on la detruit. D'une part, on emousse leur activite, ou 1 on donne une fausse direction a leur zele; d'un autre cote, on interesse ceux qu'ils pourraient instruire a leur resister : chacun sent tres-bien I'obligation ou il est de s'abstenir de fa ire violence ; mais nul ne concoit pourquoi il soumettrait en general sa raison a celle d'autrui ; nul ne consent a recevoir une verite imposee de force. Plus done il est desirable que la societe se conduise par les lumieres de ses membres les plus eclaires, et plus il est a souhaiter qu'ils n'aient de pouvoir que celui qu'ils tiennent de leurs lumieres. Les vrais savans n'ont pas besoin d'exercer une magistrature pour etre consultes. La disposition naturelle de quiconque a besoin d'un service, est de s'adresser a qui pourra le mieux le servir. II n'y a que les directeurs imposes qu'on refuse de suivre, et rien n'est moins favorable aux progres de la societe que de donner aux hommes capables de I'eclairer le pouvoir de la contraindre. La sociele ne veut etre contrainte par qui que ce soit, pas plus par des savans que par des pretres ; ce que son interet demande impe- rieusement, au contraire, c'est que toute injuste contrainte soit reprimee. Tels sont les principaux ouvrages dans lesquels ont ete deve- loppccs, depuis dix ans, les doctrines politiques auxquelles ou 394 ESQUISSE HISTORIQUE DE L'INDUSTRIALISME. ilonne le nom d't/it/itstrialisinc. Par ce mot, comme on pent le voir maintcnant, se trouvent dcsignes deux systemes socioii\ qui n'ont guore de comniun que k; nom. — L'un entend par ctat indastricl une societc composee uniqucment de savans, d'artisans et d'artistes; I'autre, une societe ou toutes les pro- fessions ont uu caraotere industriel. — L'un veut que Ton no prenne les homraes dont se composeront les pouvoirs politiqnes que dans trois ordres de professions; I'autre veut qu'iis soient pris dans toutes les professions qui concourent a la vie sociale. — Le premier, enfm, demande que I'autorite poli- tique connaisse de tous les travaux de la societe , qu'elle se charge de les diriger tous ; c\. le second , qu'elle se renferme dans une fonction speciale ; qu'au lieu de se meler de diriger les travaux, elle s'Spplique a proteger la surete des travailleurs. II ne s'agit point de decider ici lequel merite la preference. J 'observe, en fait, que le second est celui auquel I'opinion universelle tend de plus en plus a se rallicr; qu'il est en pro- gres , tandis (jue le premier est en decadence; que, plus la societe avancc et ifeoins elle veut etre gouvernee ; qu'elle ue demande pas seulement au pouvoir de devenir bienveillant , maisde se renfermer dans une sphere plus etroite, et de s'ame- Uorer en se simplifiant; que c'est la, en effet, sa tendance na- turelle, et que, partout ou il se perfectionne , ou le reconnait a ce double signe : que, d'une part, la police est mieux faite, la propriete mieux defendue, la justice mieux administree; et que, d'un autre cote, la societe est moins genee dans ses mou- vemens, que son activite est soiimise a moins d'entraves. C'est done prendre assez mal son tems pour venir proposer de mul- tiplier dans la societe les conseils dirigeans , les regisseurs offi- ciels , les directeurs jures ; et I'ecole organique commence pent- etre a compreudre que ce n'est pas le genre d'organisation que reclame la societe. Apres un an d'efforts et de sacrifices, le journal qui servait d'mterprete a cette ecole, malgre le talent incontestable de plusicurs de ses redacteurs et les intentions honorables de tous , se voit oblige de fermer ses ateliers et de renoncer a paraitre. B. C. Diuvoyf.r. II. ANALYSES D'OUVRAGES. SCIENCES PHYSIQUES. Asiatic researches, etc. — Recherches asiatiques , ou Transactions de la Societe formee dans le Bengale pour s'occuper de tout ce qui concerne V liistoire ^ les antiquites, les arts, Ics sciences et la litterature de VAsie. TomeXV (i). Le monument litteraire eleve par la Societe Asiatique dii Ben- gale sera, pour I'Asie, ce que les travaux des savans francais sur I'Egypte sont actuellement jwur cette contree celebi'e. Si I'etendue des recherches etait proportionnee a celle des lieux qui les provoquent, I'Asie occuperait long-tems encore les sa- vans de la Grande-Bretagne, fussent-ils memo secondes par tous ceux de I'Europe. Dans une grande partie du continent et des lies, il faut que les investigations des sciences soient pre- parees par la victoire , et soutenues par une force militaire , (i) Serampore, iSaS. 10-4" de 56o pages, a\ec des tableaux et des gravures. N. B. Les Memoires des Societcs savantes , qui embrassent, ainsi que les Relations de tioyages , les OEuvres completes , melees , chois'ies , etc. , un grand nombre d'objets differens , se trouvent naturellement classes dans Tune ou I'autre des subdivisions de notre section des analyses, suivant que, dans ces Memoires, dans ces yoyages, etc., on traite plus ou moins specialement , soil des sciences physiques et natureUes , soil des sciences morales et economiqiies , historiques et politiques , soit d'objels concernant la philologie, la litterature, les antiquites ou les beaux-arts. — Les recherches geographiques et stalistiques etant I'un des principaux objets des transactions auxquelles cette analyse est consa- cree, Ini ont fait assigner la place qii'elle occape dans ce cidiicr. BgS SCIENCES PHYSIQUES, comme en Egypte , lors de I'expedition francaise. Si la fortune cessait de favoriser Ics artties britanniques dans I'lnde, si elle forcait Ics Anglais a rcnoncer a leurs magnifiqucs possessions dans cette partie du mondc, tout nc sciait pas perdu pour eux; Ics honorablcs conquotes du savoir nc pcuvcnt leur etre enle- vtes. La grandc experience tentee par les Francaissur I'Egypte n'a pas attcint son but politique; mais elle a laissc dans ce pays des germes de perfeetionncmcnt qui ne demeureront point stc- riles, etrecueilli de precieuses connaissances que le terns alte- rait ou plongeait dans I'oubli : ces rcsultats meritaicnt bien qu'une nation genereuse fit quelqucs efforts pour les obtenir. Plus heureux en Asie que nous ne le fumes en Afrique, les An- glais pourront faire sur les bords du Gauge et de I'lndus le bien que nous mcditions pour la tei're des Pliaraons. Peut-etre menie accompliront-ils dans le bassin du Nil des projets differens, mais non moins utiles que ceux que la France avail concus. La France, reduite a sauver du naufrage quelqucs debris de son ancienne grandeur, ne pouvait conserver d'autre ambition que cclle de continucr a eclaircr le monde par ses travaux et scs ecrits sur toutes les divisions des connaissances humaincs; s'il faut qu'ellc lenoncc aussi a cette gloire et a cette derniere con- solation, que I'arret prononce contre elle ne frappe pas tout le genre humain; que les voies d'amelioration ne soient pas fermces partout, dussent-elles n'etre suivies que par nos rivaux, et mcme par nos ennemis. Loin de nous les pretentions natio- nalcs qui seraient contraires aux interets de I'humanite! Si nous somnies condamnes a etre inutilcs, nos voeux seront en faveur de ceux qui n'ont pas abdique le pouv'oir de faire le bien, et qui manifestent la volonte d'en user. Telle fut, dans tons les tems , la profession de foi de la Rei'ue Encyclopcdique. La collection des Memoires de la Societe du Bengale offrira plusdevarieteque Ics travaux dcla commission d'Egypte : I'his- toire naturelle suffirait seule pour faire pencher la balance du cote de I'Asie; mais les sciences, les arts, I'liistoii-e, laphilologie etleslettres apportent aussi leur poids. D'ailleurs, les savans francais ont presque epuise la mine qu'ils cxploitaient, au lieu SCIENCES PHYSIQUES. 3^7 que rinde et les regions adjacentes n'offrent pas moins de ri- chesses intellectuclles aux espiits capables d'en profiter, que de productions diverses aux speculations des conimerrans. La Societe de Calcutta n'a publie jusqu'a present que quinze vo- lumes de ses Transactions ; c'est bien peu , car la table des matiercs a trailer couvrirait probablement un aussi grand nonibre de pages. Dans les Indes anglaises, comme autrefois dans I'expedition francaise en Egypte , des militaires instruits ont profile du loisir des camps el des garnisons pour se livrer al't'tude, faire des recherches, rediger des niemoires; quel- quefois menie ces occupations leur ont lenu lieu de repos , apres les fatigues de longues marches dans des pays ou les objels dignes d'etre obsei'ves s'offraient de toules parts. La Societe asiatique da Bengnlc se renferme dans ses attri- butions; ellc n'eteud point ses recherches hors de I'Asie. Son but est principalcnienl de recueillir les fails, les observations, les donnees que Ton ne pcul obtenk' que sur les lieux ; en im mot, elle se charge des recherches, secondee par les Socieles de Bombay, de Madras, de Bencoolen, el meme par la Societe royale asiatique de la Grande- Bretagnc et de I'Irlande, qui, malgre son eloignement, recoil aussi des informations, el pent entretcnir avec quelques contrees dc I'Asie des relations qui ne s'etabliraient point avec les Indes. Ainsi, le vaste continent asiatique invest! de toules parts, et possede en parlie par des nations europeennes, observe sous tous les aspects par les amis des sciences el par les interels politiques el commerciaux, ne sera pas moins bien connu que ne lo sont plusicurs contrees de I'Europe. Tanl d'investigations, de doclcs veilles, d'eludes profondes parviendront-elles a reslituer les pages qui man- quenl a I'histoire du genre humain ? Les savans s'abstiendront- ils de conjectures et d'hypolheses, ou les donncront-ils pour ce qu'ellcs seront? Si I'histoire peul nous procurer quelque veritable instruction , c'esl plutot dans ce qui n'est point arrive jusqu'a nous , que dans les narrations conservees , non pas en raison de leur importance, mais par un concours d'evenemens qui leur ont ete favorables. C'est ainsi que, parmi les ecrivains T. vxxTii. — /Vt/vVt 1S27. a6 39« SCIENCES PHYSIQUES, de I'anciennc Rome, dont nous regrcttions les ouvrages, des circonstances inattendiies nous ont rendu' Pctrone, laissant dans I'oubli des produclions plus dignes d'cstimc que cellos do ce spirilucl debauclie. L'Asie est le berceau des Socii'tc's hu- maines; c'cst dans les nionumcns historiquesettraditionnels de celte partie du niontle qu'il faut essayer de retiouver quelqucs vestiges des premiers pas que nous avons faits dans la carriere de la civilisation , ct qui ont fixe la direction qn'il nous a ete fort difficile de changer, et que nous suivons peut-etre encore. Les Societes asiatiques auront bien merite du genre humain, quel que soit le resultat de leui's travaux : I'objet de leurs rc- cherchcs est, eneffct, de la plus grande utilite; leurs decou- vertes peuvcnt changer des opinions auxquelles on accorde aiijourd'hui trop de confiance, et, en nous montrant ce que nous fumes, nous mettrc en etat de niieux apprendre ce que nous sommes et ce que nous pouvons etre. Le i5^ volume des Transactions de la Socirte du Bengale contient onze memoires, outre des extraits des travaux de la Societe correspondante de Benares. On troiive, d'abord, un Essai sttr I'Instoire hindoiic da Cache mire , par M. N. H. Wilson. Dans ces annales , assez semblables a celles de plusieurs Etats europeens, on ne fait presque aucune mention des peuples : on n'y parle point du progres des arts et des connaissances, des institutions, de ce qui eontribue le plus au bien-etre social. Les annales du Cachemire commencent 1/400 ans avant notre ere, et comprennent pres de aSoo ans. Elles sont divisees en cinq periodes, dont la premiere est assez confuse, et sans doute peu certaine. Les dynasties qui ont occupe le trone ont ordinairement fixe une epoque; cependant, cctte sorte de regie n'a pas toujours ete suivie. Parnii les 126 princes dont la chroniquc hindoue fait mention, quelques-uns regnerent fort long-tems, et ne profitereut point de la duree de leur vie et de leur pouvoir pour rendre leurs sujcts plus heureux. Le parri- cide servit a quehjues-uns de degre pour monter sur le trone. L'avarice et la rapacite , la manie des conquetes, la superstition et la debauche caracteriserenr plusieurs de ces monarqurs : il SCIENCES PHYSIQUES. 399 parait que la plupart dcs autres furent sans vices et sans ver- tus; car I'histoire n'cn dit que tres-pou de choses; ellc s'arrete ii I'annee i025 de notre ere. Nous regrettons de ne pouvoir suivre M. Wilson dans ses observations tres-interessautes siu" I'ancien Etat du Cacliemire , sur les princes d'origine tatare qui le possederent et sur les epoques precises de leurs regnes : il faudrait transcrire une grande partie de ce memoire, si Ton voulait en extraire tout ce quiserait a la bienseance des savans ou des curieux. L'auteura reuni bcaucoup de temoignagcs en faveur de I'opinion sur la geologic du Cacliemire ; on croit generalement que ce pays est le fond d'un grand lac dont le dessechement ne remonte pas a une tres-haute antiquite. D'apres les annales indoues et les traditions, M. Wilson le rapporte a I'an 2666 avant notre ere, c'est-a-dire, a I'epoque du deluge, en sorte que cette submer- sion generale de toutes les tcrres habitables aurait eu pour re- sultat d'etendre le domaine de I'homme, et de preparer pour les nations futures des habitations od elles trouveraient le bon- heur , s'il consistait seulement dans la fertilite du sol, la magni- ficence de la vegetation et la salubrite du cliniat. Les Notes ajoutees a ce memoire pourraient etrc considerees comme autant de dissertations speciales sur des points encore mal eclaires dans I'histoire et la geographic de cette partie de rinde. Quelques-unes de ces notes ne sont faites que pour les orientalistes ; mais d'autres sont accessibles aux lecteurs ordi- naires ; ceux - ci ne manqueront pas de consulter M. Wilson sur la situation de Panda , ville de I'ancienne Sogdiarie, sur les Gandarah.i et autres pcuples du Panjab , au nord - ouest de I'lnde, sur I'etat du Boudhisme dans leCachemire, et sur les noms anciens de ce pays , dans les auteurs classiques. On doit encore a M. Wilson une traduction d'anciens do- cumens indous recueillis par M. Jenhlns, et qui repaiident quelque lumiere sur I'etat de la religion dans I'lnde, avant la conquete de presque tout le pays par les sectateurs de Maho- met. Comme les anciennes ecritures indoues sont quelquefois 26. 400 SCIENCES PHYSIQUES. en caractcrcs actiu'Ucmcnt imtsitrs, ot qui ne sont connus que d'un petit nonibre d'eriulits, on n'a ])as toujonrs le bonlunir dc pouvoir los dechiflVer. Cclles dont il s'agit ici sont gravees sni- des planches de cuivrc, tirees du temple de Rajl-Lnchnn, dans la province de Chattisgher. M. YoYSEY a visite les mines dc diamans dans les provinces du Slid , et il decrit leiir situation , le gisement de ces mineraux precieux, les roches qui les renferment, les differens terrains d'alluvion ou ils sent aussi deposes. II resume ainsi ses dbser- vations : i° dans cette contree de I'lnde, les diamans sont en- vcloppes par iin gres argileux; 2" ceux que Ton trouve dans des terrains d'alluvion proviennent vraisemblablement de la decomposition des gres. La formation de ces terrains parait ancienne, et ne pent ctre posterieure au deluge; 3° les pierres que Ton rencontre quelqucfois dans le lit des rivieres y sont entrainees par les eaux pluviales. Les ouvriers occupes au tra- vail de ces mines paraissent etre dans la plus profonde misere , contraste que presentent aussi la pcche des perles et I'exploi- talion de plusieurs auti'es objets du luxe le plus prodigue. Le memoire suivant est une description du Bhustan , par un auteur indou dont M. Scott est I'interprete. Ce pays, que nous nominons Boiitan, est au nord des possessions anglaises dans les Indes , au svid du territoire de Lassa dans le Thibet, et compris dans la region montagneuse, a Test de la chaine de THimalaiia. Cette notice parait etre une assez bonne statistique de la con- treequi en est I'objet; mais on n'y trouve rien dont la geogra- phic physique et I'histoire natiu'cUe puissent s'enrichir. L'au- teur fait renumeration des produits du sol ; mais il ne parle point des precedes dc culture. II dit que Ton possede dans ce pays une espece de navets d'une grosseur prodigieuse, qui at- teigncnt ordinaircment le poids de dix a douze livres. Dans uu autre memoire insert- dans ce volume, on vante beaucoup les navets du Kanawcr , dans la chaine de THimalaia, superieurs a tons ceux de I'Europe, et par leur grosseur, et par leurs ex- cellentes qualites. Il parait que les jai-dins de I'Europe auraient SCIENCES PHYSIQUES. 4oi a fairc plus d'luic acquisition dans ces pays, oii ccpt-ndant la culture est encore dans I'enfanco; car elle est presque exckisi- vement ahandonnee aux fcmnies. Les croyances religicuses da Boutan , la distinction du gou- vernement civil et de I'autorite sacerdotale, les impots ct le mode de perception, I'administration de la justice, les forces militaires, leur organisation, leurs armcs , etleur maniere de combattre, sont lesobjcts que I'auteur indou passe successive- ment en revue, mais sans ordre, et par consequent avec des repetitions qu'il cut evitees en disposant d'avance la table des matieres qu'il voulait trailer. Ce memoire tres-instructif est termine par iin itineraire du Boutan , en partant de Bijui, sur la frontiere des possessions anglaises, et se dirigeant sur Andi- pour, fort situe vers le nord, sur la route de Lassa. Pour don- ner une idee de ce pays et de son gouvernement, il suflit de citer ce que dit I'auteur du memoire sur la maniere dont la justice y est administrec. Lorsqu'un homicide a ete commis , le meurtrier , s'il est riche , paie 126 roupies au deb-raja (gouverneur), et une amende au profit des conseillers d'etat ct des heritiers du defunt : s'il est pauvre, on rattache au cadavre de I'homme qu'il a tue , et Ton precipite I'un et I'autre dans la riviere. (La loi ne fait au- cune distinction entre I'homicide et le meurtre preaiedite.) Les tribunaux ne tiennent aucun compte des plaintes ouileur sont adressees; mais, malheur au plaignant, s'il ne naivient a prouver que ses reclamations sont fondees ! Un creancier qui ne peut contraindre vm debiteur k s'acquitter envers lui , s'a- dresse au deb-raja, ou a un autre juge, et lui dit: Un tel me doit telle sommc ; faites-lc payer, et usez dc cat argent comme s'U vous apparlcnait. Le magistral fait amener sur-le-champ le debiteur, qui se hate de payer, si la dette est reelle, et s'il peut I'acquitter. Dans tous les cas, le juge ne perd rien ; le plai- gnant est i-esponsable de la somme sur laquelle il a cede ses droits. Un naturaliste francais , qui a prouvc , dans I'lnde, que I'a- niour des sciences peut faire braver tous les perils , M. Du- 4o2 SCIENCES PHYSIQUES. VAUCEL (Voy. Rci'. Erie, t. xxvi, p. 274)5 dont notis deplorons encore la Gn preniaturec , a leconnu , dans le cerf noir de Ben- gale , Vhippi'laplie d'Aristote. Une excellente description de cat animal, par notre compatriote, est inseree dans ce volume. Nous aurons I'occasion d'en parlor aillenrs; car les ecrits de ce jcune savant occuperont une place distinguee dans Ics ou- vrages consacres a I'histoire naturellc. L'hippelaphe, suivant M. Duvaucel , ne doit pas etre inconnu dans Ics grandes lies de la Sonde : c'est probablcment cet animal que M. Pennant a nomme grand-axis dc Borneo. On doit a M. A. Stirling une Notice gcograplncjuc, statis- tique et histoiique siir I'Orissa pro pre , oil Cuttach , province maritime de I'ancien empire du Mogol, dont les limites n'ont ete fixees que depuis I'etablissemcnt de la domination anglaise dans ces contrecs. L'auteur a divise son memoire en deux par- ties , dont la premiere est consacree a la geographic et a la statistique, et la seconde , a I'histeire de la province qu'il a decrite. Comma I'auteur a suivi les methodcs de redaction aux- quelles les ecrivains de I'Eiirope sont accoutnmes, il a pu etre aussi court que Ic permettait I'abondance des matieres qu'il avait a traiter. Dans la premiere partie, apres une description generale de I'Orissa, il assigne les limites ancionnes ct nio- dernes de cette province ; il passe ii la description du sol et de ses productions ; il expose ce que Ton peut savoir sur la geolo- gie de cette contree , d'apres la seule inspection du terrain ; il entrc dans qualques details sur les rivieres , les marais, les cotes; apres cet examen de tout ce qui appartient a la natiu'e , il passe aux ouvrages de I'homme : lesvilles, la population, le commerce, I'industrie , la culture, les institutions politiqucs sont passes en revue. Donnons, par- quelques extraits , luie idee du pays qui est I'objet de ce memoire. M. Stirling y forma trois divisions : la premiere s'etend sur les bords de la mer, eta quinze ou vingt milles dans les terres; elle est couverte de forets ou la magnifique vegetation del'Inde prodigue ses richesses et ses orncraens ; mais elle abonde aussi en marais habites par des troupes nombreuses de crocodiles. SCIENCES PHYSIQUES. 4o? La seconde division est une plaine legorement ondult'-e, ou- veite , cultivable ; c'est dans celle-la que les Mahometans se repandiient lorsqu'ils fiient la conquete dii pays : sa largcnr moyenue est d'environ trente millcs. La troisieme division , pa- rallele aux deux premieres , est dans Ics montai^nes. Celle - ci et la premiere ont conserve leurshabitans primitifs; la seconde est devcnue la propriete des conquerans. On ne compte dans la province que trois villes; Cuttack, Balasore et Jagannath. Le grand village de Jajpur est en ve- neration parmi les Indiens qui s"y rendent en pelerinage : c'e- tait I'ancienne capitale. Cuttack est aujourd'hui la capitale de la province. C'etait I'une des residences royalcs, lorsque tout le pays etaitsous la domi- nation des Marattes. EUe est dans une situation agreable et avantageuse pour le commerce. La seule construction qui at- tire les regards des voyageurs est la forteresse de Barabati, qui ne remonte pas au-dela du xiv*" siecle : Cuttack n'a point de monumens plus anciens. Les edifices que les Mahometans y ont eleves ne sont que des mosquces asscz petites. D'ailleurs, Ja ville est bien batie, et plait au premier coup-d'oeil. Le com- merce y a fixe une population de 40,000 habitans, dont plu- sieurs sont dans I'opulence. En general, le people y parait satis- fait de sa position. Les bazars de cette ville rappellent, par leurs noms, les anciens maitres du pays : on y trouve les bazars de Tatar-Khan , dH Ali-Clid , de Tclinga , etc. La situation de Balasore est beaucoup moins satisfaisanteque celle de la capitale. Cette ville, composee d'habitations placees irreguliei'ement snr les bords fangeux du Bum- Bala/ig , est regardee comme un sejour malsain, surtout dans la saison des pluies. Onn'y compte pas plus de 10,000 habitans, qui font iin peu de commerce avec Calcutta , construisent de petits bati- mens, et cultivent le sol peu fertile qui cnvironne ce jiort. Les vaisseaux y abordent assez souvent lorsqu'ils ont besoin de quelques reparations ; c'est encore une ressource pour une po- pulation que la nature n'a pas traitee favorablement, et qu'une Industrie maritime pent seule fixer dans ce lieu. Cependant, le holi SCIKNCES PHYSIQUES, port de Balasorc a quchjue ccliljiitc tlanslcs annales dt; la na- vigation des Europccns ; les Poituj^ais le frequenterent assez long-tenis, et Ton voit encore dans la ville les mines d'une cha- pelle catholi(juc, conslruito par ce penple plus religieux que commercant , plus avcnturicr que politique. Les Anglais y arriverent vers le milieu du xvii" sicclc ; et , dcpuis que cettc ville fait partie de Icurs vastes possessions dans I'lnde, ils ont embelli cette triste residence, autant que la nature et le elimat I'ont permis. On y fabiiquait autrefois de belles nioussclines, et les niontagncs fournissaient des drogues : aujourd'hui, le com- merce a pris une autre route, et Balasore a perdu son aneienne importance, sa splendeur ctsa population. Jagannath tire son illustration dcson temple. Tout cc qui est compris dans son enceinte appartient ii la leligion ; rien de profane n'y est mele. Cependant, I'aspect de cette terre sacree est desagreable, et meme repoussant : des immondices infectes ct des troupes de mendians remplissent les rues et les places pu- bliques. Malgre ces incommodites qu'une bonne police ferait disparaitre, cette ville passe pour le sejour le plus sain qu'il y ait dansl'Inde.Plusieurs Europeensy fixent leur residence pen- dant les grandes chaleurs, depuis le mois de mars iusqu'au mois de juillet, et s'en trouvent tres-bien. L'auteur de ce me- moiro a place, a la fin de la seconde partie, une description de quelqucs monumens religieux de Jagannath , en choisissant ceux qui seniblent appartenir a la plus haute antiquite. En parlant de la population de I'Orissa, M. Stirling nc cite aucun denombrement : en general, il parait que cette province est encore pen connue, meme des Anglais. La partie de la statistique dont la population est I'objet, exige, dans ITnde, un travail plus penible qu'en Europe : les nombreuses subdi- visions et I'isolement des castes et des tribus, la diversite du langage, la confusion quiresulte neccssairement de toutes ces causes rendent ires - souvent Taction du gouvernement incer- taine, et retarder.l ceb effets. L'auteur s'est done borne a I'enu- meration des castCb et des tribus qui habitent 4'Orissa, en assignant a chacune son caractere distinctif. Par un calcul ap- SCIENCES PHYSIQUES. /,o5 proxiniatif, il evalue la |)opulaiion totale a pies tic i,ioo,ooo habitans, dont 80,000 seulemcntsont dans les villes. Nous ne suivrons pas raiitfiir dans les details etendns et rediges avec soin qu'il a recueillis sur les revenus de I'Orissa, sous les anciens possesseurs de ce pays , et depuis qu'il appar- tient aux Anglais : il faudrait transcrire des tableaux, et les accoinpagner de notes, multiplier les chiffres, conveitir les monnaies de I'lnde en valeurs eonnues de nos lecteurseuro- peens, etc. Ce memoire, traduit comme il meriterait de I'etre, fourniraitd'excellensmateiiaux a la stalistique et aux sciences commercialcs. Nous ne detacherons rien de la seconde partie, consacree a I'histoire de I'Orissa. M. Stirling n'a pu en offrir que la chro- nologie et quelques fails principaux ; nne histoire, qui compte plus de 3,000 ans avarit noire ere, ne pent etre reduile a un petit nombre de pages. Quoique I'auteur s'attache principale- ment aux annates les plus authenliques, comme il les suit jus- qu'au milieu du xviii® siecle, il a dii n'en presenter qu'un abrege tres-succinct, et cependant il I'a rendu fort interessant. Ce memoire parait etre le resultat de recherches atten lives et multipliees, et le talent du redacteur nous faitjouir du fruit de ses travaux sans aucune fatigue de noire part; uiie lecture fa- cile et pleine d'attraits devient poiu' nous une source abon- dante d'instruction. En 1819, le capitaine Herbert fut charge de reconnaitre le cours du Setlej dans la cliaine de I'Himalaia, depuis le canton- nement de Kotgerh, dans le Nepaul, jusqu'aux limites des possessions anglaises. Le lieutenant P. Gerard I'accompagna dans celte course, el ces deux officiers remplirent leur mission avec habilele et succes. L'hisloire de leur voyage et le resume de leurs observations, rediges par le capitaine, sont un des memoires les plus interessans de ce volume. Get ecrit corrigera quelques erreurs geographiques; il merite I'attenlion des phy- siciens, des observateurs del'homme, des naluralistes et des cultivateurs , outre les documens qu'il fournit a la statistique et au commerce. 4o6 SCIENCES PHYSIQUES. Le Setlej est I'lin des afilucns les plus considerables de I'lu- dus, et coule de la meme source; on devrait par consequent Ic regarder comme I'une des branches du fleuve. M. Herbert ne put le remonter que jusqu'au village de Shipki, dans le Thibet, hers du terriloire soumis a la domination de laGrande- Bretagne. II pouvait regarder sa mission comme terminec; mais le zele de la science n'etait pas satislait, et il profita, pour continuer ses recherchcs et ses observations, de toute la lati- tude des ordres qu'il avait recus. On regrette qu'il n'ail pas ete raieux pourvu d'instrumens, qu'il ait ete reduit a mesurer les hauteurs par la temperature de I'eau bouillante : ses nivelle- mens ne peuvent etre consideres que comme une premiere approximation , en attendant un travail plus exact. Dans le cours des deux annees precedentes, le lieutenant Gerard, voulant profitcr du loisir des cantonncmens pour faire des observations meteorologiques , avait ete dans la neccssite de faire lui-meme son barometre. L'adresse des observateurs a supplee, sans doute, a I'imperfection des instrumens; mais les besoins de la science et I'authenticite de ses resultats exigent I'emploi des movens de precision, et ne peuvent se contenter de mesures dont I'exactitude n'est point rcconnue. Nous ferons aussi une remarque sur la carte annexee au memoire du capitaine Her- bert : elle est sur une echelle assez grande pour que la figure du terrain put y etre representee plus fideiement. Mais il ne faut pas oublier que cet officier est attache a un regiment de si- payes , ainsi que le lieutenant Gerard : que les connaissances dont ils font un si bon usage sont du nombre de celles que leur profession n'exigeait point. Puisse Icur exemplc exciter I'enui- lation des ofiicicrs francais , et les engager a cultiver les sciences qui ne sont jamais inutiles a I'homme de guerre, etqui lui of- frcnt, en temsde paix, des occupations honorables, des moyens d'entretenir I'activite de I'esprit, cette habitude d'observer qui fait une partie essentielle du talent militaire. Puisque nous avons fait une observation critique sur la carte deM. Herbert, allons jusqu'au bout, et disons qu'en general les planches de ce recueil ne sont pas assez bien faites. Le seul SCIENCES PHYSIQUES. 407 dessin passable que Ton y trouve est celui qui represente 17/^;- pelaphe, ou ccrf ncl Ju Bengale. La lithographic et la gravure n'ont pas encore passe dans les Indes anglaiscs, avec la perfec- tion que ccs arts ont acquise en Europe. Lorsque nous avons compare les Memoires do la Socicte asiatique a ceux de la colli- sion d' i.gypte , les planches n'etaient point comprises dans ce parallele. Ccpendant, I'histoire natureUe et la topographic ne peuv cut se passer du talent du dcssinr.tcur guide par unc con- naissance complete de I'objeta representor. II serait a desirer, sans doute , que les naturalistes et les ingenieurs pussent reunir la faculte de bien peindre a colic de bien observer; mais, lors- que le dessin doit suppleer a ce qu'nne bonne description n'a pu exprimer, et, a plus forte raison, lorsqu'il est le soul moyen d'expression , il ne lui est pluspermis d'etre mediocre, et il le sera necessairement si la main qui le trace n'est pas tros-habile, ou dirigee immediatcment par I'intelligence qui a concu ce qu'il s'agit de representor. Dans son voyage de reconnaissance du cours de Setlej dans les plus hautcs montagnes que Ton connaisse , le capitaine Herbert ne fut pas moins heuroux qu'habile. Parti du can- tonncment de Kotgerh, village du Nepaul, sur le bord de cette riviere, a plus de 2000 metres au-dessus du niveau do la mer, il s'etait arrete a Shipkl, village del'empirede la Chine, a quel- ques milles des frontieres des possessions anglaises , il y atten- dait la permission d'allor jusqu'a Gam, residence dYte du gouverneur de la province chinoise. Cette autorisation ne put venir assezproroptement pour qu'il en profitat; mais le hasard amenait dans le memo village un tatar tres-intelligent, grand voyageur; et, ce qui fut encore plus heuroux, I'Anglais et le Tatar purent s'entretenir sans le secours d'un interprete. Ce dernier etait ne pres des sources du Setlej; il avait domeure long-tems sur cette terre natale, il en parlait avec affection : dans lelangage figure des Orientaux , il comparait a une grappe de raisin les pics nombreux, rapprochcs et converts do neiges qui forment I'enceinte d'un grand lacd'ousortent quatre rivie- res, dont la pi'incipale est I'lndus, et la seconde, dans I'ordre /,o8 SCIENCES PHYSIQUES, lie 1,'randeui-, le Setlej, divisc- d'abord en deux branches qui portent des noms differens , et qui so joignent aprcs un cours d'cnviton cinquantc lieucs. Cette singuliere organisation do inontagiies aussi elcvees est peut-etre unique sur toute la sur- face de la tcrrc. Cc lac, dccrit par le voyageur tatar , doit etre a uue hauteur prodigieuse au-dessus du niveau dc la mer ; car le Setlej qui en sort est encore eleve de 3ooo metres , h quelques milles de Shipki, ct tres-loin de sa source. Si Ton tient compte de rinclinaison nioyenne de son cours devcloppe, cette riviere toniberait d'une hauteur supcrienre a cclle du pic de Tcneriffe. Outre ces docuniens geographiques, le capitaine anglais recut d'inij)ortantcs communications dont ses compatrioles ne man- queront pas de profitcr pour etendre et assurer leur commerce dans I'interieur du continent asiatique. Entre Kotgerli et leur derniere station sur le rcvers oppose de I'Himalaia, que virent Ics voyageurs anglais? Lcs formes caracteristiques des Alpcs, des plantes alpines, des fruits de I'Europe. Partis au mois dc scptembre, ils ne purcnt cueillir rhumble fraise ; mais les groseillers rouge et noir, le pommier et I'abricotier, la vigne, surtout, prosperent dans ces regions montagncuses , et fructifient avec une abondance dont on a pen d'exemples, meme en Italic ct en Espagne. Les hauts paturages de I'Himalaia sont emailles des fleurs que Ton admire sur ceux des Alpes : le bouleau , les pins et les sapins , plusieurs especes de sanies, etc., en un mot, presque tous les vegetaux de ces montagnes n'ont rien d'asiatique, aux yeux des Europeens. L'homme meme y paraitrait peu different de ces montagnards que toute I'Europe se plait a visiter, s'ilportait le meme habit, et s'il parlait la meme langue : mais les animaux doniestiques ou sauvages interrompent le parallelc, ct font reconnaitre I'Asie. Arretons un moment nos regards sur ces analogies et ces differences entre les Alpes et les montagnes du Thiljet. On n'est point surpris de trouver les memes plantes, lorsque le sol, la temperature et le degre d'humidite ou de secheresse sont a peu pres les memes. En quelques lieux que la nature ait place les SCIENCES PHYSIQUES. /(og especes primitives , leurs semences ont pu etre transpoitecs par les vents, on menic par les oiseaux, soitimmediatement et sans station intermediaire, soil de proclie en proche, a I'aide du tems. On concoit aiissi pourquoi les animaux n'ont point franchi d'aussi grandcs distances, ct se trouvent encore anjoiird'hui meme plus rapproches du berceau de chaque race. Quant a rhomme , on sail qu'il pent s'etabiir partont ou la subsistance ne lui est point rcfusee , mais qu'il eprouve I'influence des causes locales qui modifient plus ou moins ses facultes physiques , et meme sa forme, sa couleur ct sa taille, et des causes morales qui ont tant de pouvoir sur ses facultes intellectuelles. II parait constant que le sejour dans les montagnes lui est favorable a plusieurs egards , quoiqu'il y soit expose a quelques infirmitcs dont il est bien plus rarement affecte dans les plaincs. Mais, ce qui merite I'attention la plus serieuse, c'est I'etat moral du montagnard, compare a celui des hommes de meme origine, modifies par un long sejour dans les plaincs. II semble que I'air plus leger des hautes regions, I'aspect d'une nature plus vaiicc, plus imposante, les fatigues meme auxquelles rhomme se soumet, lorsqu'il etablit sa demeure sur ces escarpemens, au pied de ces roches menacantes , sur le bord de ces precipices, ne contribuent pas moins a fortifier son ame que son corps. Sans accorder aux relations des voyageurs plus de eonfiance qu'elles n'en meritent, on ne pent refuser aux habitans des montagnes un peu plus d'estime qu'a ceux des plaines. Quel- ques vertus se sont refugiees dans ceslieux d'un difficile acces, et n'en descendent point. La liberie les regarde comme son dernier asile : la tyrannic ne parvient point a y perpetuer sa do- mination ; et, si quelque oppresseur y construit sa fortcresse, c'est pour y mettre en siirete les depouilles de la plaine , de meme que I'oiseau de proie place son aire au haut d'un rocher d'ou il decouvre an loin les campagnes soumises a ses depre- dations. L'Europe paie un juste tribut d'admiration au courage des Suisses et a la liberte qui en fut Icprix; en Amerique, le Tlascalan avait conserve dans ses montagnes le gouvernement republicain , tandis que les regions plus basses suhissaient le 4io scip:incks physiques. joiig dc la monarchic; dans Ics Andes, I'indomptable Arauca- nicn rcponssa la domination dc I'Espagne. En Asie, i'haljitant dcs montaj^ncs dii Thibet est plus libie que Ic Chinois ct I'Hin- doustani : ajoiitoiis (pi'il est mellleur, dans tons Ics sens lai- sonnables qu'on peat donncr a cet mot ; dans tons Ics villages que Ic capitaine Herbert a visites, il a tronve unc population hospitaliere, probe, laboriense, intelligente. Ces bonnes qua- lites ont etc rcconnues dans presque toutcs Ics peuplades si divcrscs qui habitent les grandcs chalncs dc montagnes, dans Ics deux mondes : Ic Caueasc seul fait une exception remar- quable, et dont la cause pourrait etre assignee, si dcs philoso- phes digncs dc ce nom §e mettaient en voyage pour ctudier riiomme , son histoire morale , les diverscs influences aux- quellcs il est soumis. Lc Caucase devrait etre aujourd'hui le but dc recherches auxquelles on se livre rarcment , parce qu'elles sont extremcment difficiles, que la sagacite et la per- severance n'y suflisent point , qu'elles exigent beaucoup dc terns et le concours de plusieurs observateurs , et surtout d'eminen- tes vertus dirigces par une raison superieure. Avant de les entreprendre, il faudrait consulter ses forces, se soumcttre k un examen sincere et scrupuleux, et commenccr par une pro- fonde etude dcs moyens de recherches. Tel qu'il est aujour- d'hui, ct qu'il fat dans tous les tems, lc Caucase est une barriere entre dcs peuplcs qu'il unirait, si la civilisation pouvait le conquerir. Dans toutes les autrcs chaiues de montagnes, on a trouve les hommes tels que le capitaine Herbert rcpresentc les Kanaweris et les Tatars de I'Himalaia. Les voyageurs anglais font le meme eloge des montagnards de I'Afrique centrale : I'habitant de I'Atlas est meillcur que les Brebcrs dcs plaines : les Espagnols ont , en general , unc bonne opinion des monta- gnards de la peninsulc; niontcs criun Ictrados , (les montagnes crecnt dcs hommes lettres), dit un proverbe castillan. Un jour, peut-etre , cet eloge dcs montagnes retentira jusque dans le Nouveau-Monde, ou Ton trouve d'ailleurs trtnt de choses a louer. La phllologie n'cst pas negligee dans I'excellent et abondant SCIENCES PHYSIQUES. 4ii Memoire dii capitaine Herbert : iin vocabulaire kanaweri est mis en presence des mots corrcspondans dans la langiie tatare. Les recherches de cette nature sont necessaiies dans I'Inde, ou la comparaison des lanyucs pent eclairer des points obscurs de I'histoire, cxpliquer des traditions, suppleer a ee que les monumens ne penvent apprendre. Pour qu'un voyage dans ces contrees pnisse enrichir les sciences, il faut que le voyageur soit erudit, ou le devienne. L'exemple du capitaine Herbert prouve qu'un militaire meme se soumet sans peine a cette loi. On doit au lieutenant Gerard, compagnon de M. Herbert, des observations vietcorologiques faites au fort de Subatlin , eleve de i3oo metres au-dessus de I'Ocean, a pres de Hi° de latitude , et a Kotgerli , village im peu plus au nord et a 700 me- tres plus haut. L'auteur a joint a ses observations une statis- tique agronomique de la partie du Nepaul , qu'il a eu le tems d'etudier et de bien connaitre, pendant deux annees de can- tonnement. Ce Memoire contient plus de choses que son eten- due ne semble le comportcr : pour en donner ime idee, nous nous bornerons a une citation qui sera, pour les cultivateurs europeens, un avertissement qu'ils ne doivent point negliger. " Les mois d'avril , mai et juin , dont la temperature est si inconunode dans les plaines de I'Hindoustan , sont frais a Kotgerh ; a I'ombre et dans I'interieur des maisons , on n'est point tente de quitter les habits de drap. Quoique la tempe- rature moyenne de ce lieu ne surpasse pas celle de Londres de trois degres de Reaumur, les rayons directs du soleil y sont tres-chauds. Le pays est bien boise, et Ton y trouve beaucoup d'arbres de I'Europc, meles a d'autres dont I'Europe pourrait faire I'acquisition : parmi ceux-ci, on compte plusieurs arbris- seaux aromatiques. » L'auteur ajoute, dans une note, qu'une petite espece de bambou, de 8 a 12 pieds, croit sur les plus hautes montagnes, aux environs de Kotgerh. « Cette plante sert a une multitude d'usages domestiques, et les cultivateurs anglais en tireraient un parti tres-avantageux, ainsi que les jardiniers : elle servirait aussi a plusieurs arts, et serait une nouvelle ressource pour notre industrie. » 4i2 SCIENCES PHYSIQUES. Nous sonimes dans la nccessite de nous boi'ncr a indiquer deux mt-moiros, I'uu du capitaino Fell, ctJ'autrc de M. Voysey, deux mcaibres que la Socitte a pcrdus. Lc premier, auquel M. Wilson a joint ses observations , a pour objet deux inscrip- tions en Sanskrit; I'une Tut trouvee a G arlta- Mandela , et I'autre a Benares : ellcs sont des monumens intercssans pour I'histoire de la presqu'ilc de I'lnde. Nous regrettons aussi de ne pouvoir exposer avec assez de details Ics travaux astrononiiques et physiques de MM. W. Cracroft et /. Prinsep , a Benares. Nous aurons I'occasion d'y revenir; car les relations de la Revue Encyclopedique avec les amis des sciences et de I'humanite , si nombreux dans les Indes anglaises, deviendront de jour en jour plus IVequentes et plus fructueuses pour nos Iccteurs : il faudra resumer des travaux, comparer des relations, coordonncr les fails, pre- senter leur ensemble. Notre tacke est longue , et nous oblige de tems en tems a revenir sur nos pas, en suivant le mouvement progressif des connaissanccs, et leurs diverses oscillations. Terminons cet article par I'analyse penible d'un Meinoire sur un orang-outang d'une grandeur remarquable , trouve dans tile de Sumatra, avec la description de quelques parties de cet ani- mal, presentees a la Societeasiatiqueparlecapitaine Cornfoot, et deposecs dans le musee de la Societe. Cc niemoire est du ;\ M. Clarr-Abel, membre de la Societe de Calcutta. L'auteur debute par le recit de la capture de I'animal : cette operation fut tumultueuseet cruelle; I'interet de I'histoire naturelle ne la dirigea point, non plus que cellcs qui la .suivirent. Un individu aussi extraordinaiie eut'fait faii'c a la science des progres tres-im- portans, s'il etait tombe dans des mains plus habilcs. Poursuivi d'aibre en arbre, crible de balles, defornie par d'immenses blessures, on n'a pa connaitrc scs formes exterieures; mais on eut le tems d'observer son agonie, trop semblable a celle de I'homme dans les memes circonstances. Point de description anatomique, ni mcnie de dessin correct; nuUe concordance entre les narrations des capteurs et ce que les planches repre- sentent. Tout ce que Ton pent conclure de ces observations J SCIENCES PHYSIQUES. 4i3 Irouquees et defectueuses , c'est qu'il existe dans les vastes forefs de Tile de Sumatra , et sans doute aussi dans les autres grandes iles de la Sonde , une race de singes de plus de deux metres de hauteur; que cette race est inoffensive pour I'hoinme; que c'est dans les forets oil elle trouve un asile, la subsistance et la liberte, qu'il faut penetrer pour etudier ses moeurs; et cette etude en amenerait peut-etre d'autres non moins philosophiques. Faut-il desesperer que ce grand et vigoureux animal puisse etre amene a I'etat de domesticite, applique au travail , mis en etat de remplacer I'homme dans les cas oil I'homme n'est a peu pres qu'une machine ? Quoi qu'il en soit, si Ton veut parvenir a connaitre cette espece interes- sante, ce n'est pas a des chasseurs qu'il faut confier les re- cherches, mais a des naturalistes, et ce qui serait mieux en- core, a des philosophes. Nous I'avons deja dif, la Societe du Bengale eleve aux sciences un monument digne d'elles : la trop courte analyse que nous avons faite des memoires contenus dans ce quinzieme volume suffit pour faire apprecier les services qu'elle a dejk rendus, et ceux que Ton doit en attendre. Ferry. T. xxxiit. — Fevrier 1827. 27 SCIENCES MORALES ET POLITIQUES. Probleme de l'esprit humain, ou Origine, develop- PEMENT ET CERTITUDE DE NOS CONNAISSANCES ; faisant suite et complenicnl au livre : Du Rapport de la na- ture a Vhomme et de I'homme a la nature; par M. le baron Massias, ancien charge d'' affaires de France^ resident^ consul general a Dantzick (i). SECOND ET DERNIER ARTICLE. ( T^Oy. ci-deSSUS, p. 87-IO/1.) Nous craignons que M. Massias ne se soit pas tenu assez en garde contre I'cmploi de mateiiaux inconciliables dans la cons- truction de son edifice. Aux faits de conscience qu'il a signales et qui justifient en partie sa doctiine, il a mele des inductions problematiques , des assertions dogmatiques , des apercus in- genieux qui ne sauraient etre places sur la nieme ligne, et qui nous semblent nuire a la clarte, comme a la solidite du raison- nement psyehologique. Cette association de principes hetero- gencs qui affaiblit la force probante de ce que ce raisonne- ment offre de donnees vraimcnt fondamentales et puisees dans I'observation des phenomenes du sens intime , s'explique et se revele a la fois par I'enonce des quatre propositions que I'au- teur declare lui avoir servi de boussole durant tout le cours de ses travaux , et dont les trois premieres lui prescrivaient , 1° de remontcr a I' origine des c hoses , si I' on vciit m connaitre hi nature, parce cju'il est impossible qa'elles ne tiennent pas des pro- prietes du principe qui les engendre ; i° d'etudicr I'homme , non point cxclusivement en lui-meme , mais dans la hi qui le fait (i) Paris, iSaS; Firrain Didot, rue Jacob, n" ^xl^. t vol. in-8° de j,x tt 4o4 pages ; piix , j fi-. SCIENCES MORALES ET POLITIQUES. /,i5 et Ic maintient ce qii'il est , parce que cette loi seulc pent f aire connaitre ce qui , en lui , appanient a la nature ; 3° d'eclaircr la metnphysique par la pliyslologie. On sentdereste, combien , en occupant son attention, des le commencement de ses recherches, de tant d'objets simulta- nement , et en embrassant d'un coup d'oeil des questions de na- ture et de portee si diverses, il a ete conduit a un melange dc points de vue et d'oidres d'idees qui ne devaient point se pre- senter, au debut de I'investigation , alignes et concourant en- semble comme elemcns de solution , ayant le meme rang et la meme valeur. Aussi I'auteur a-t-il senti lui-mcme qu'il ne sim- plifiait pas assez I'objet de son etude. Le principe dont il se dit convaineu, et d'apres lequel pour arriver a la connaissance d'un etre , il faut le considerer dans le tout auquel il est incor- pore (i), intervertit la marche naturcUe de I'esprit , disscmine I'attention sur plus de choses qu'elle ne peut en saisir, et n'en- fante que des rapprocliemens plus ou moins instructifs , des hypotheses plus ou moins plausiblcs , sans asscoir la science sur une base inebranlable. « La physiologic , avoue I'auteur , montrant en nous une organisation de deux pieces , deux claviers dont un seul est a la disposition de notre volonte , il fallut se resigner a son sujet, s'abandonner, pour ainsi dire , a son sort, et, en depit des conseils de la prudence, se lancer sur I'ocean du rapport de la nature a I'homme et de I'homme a la natiu'e. » C'est la une navigation aussi laborieuse qu'inutile. A quoi sert de decomposer le clavier et de se rendre raison du jeu de I'instrument? C'est le musicien qu'il s'agit de connaitre et lors- que vous saurez de quels pouvoirs il dispose , Icur application a tel ou tel usage sera une question tres-secondaire dont la solution n'ajoutera rien a la connaissance que vous avez de ses facultes. Le but principal de I'auteur est de determiner quelle est, dans la connaissance , la part de I'homme et quelle est la part (i) Discours preliminaire , p. vii. 4i6 SCIENCES MORALES de la nature. Nous pourrions demander, si Tentreprise ne ^asse pas nos forces. Sans doute, nos perceptions sont I'effet de Tac- tion combincc du sujet et dc Tobjct, et par consequent, le rc- sultat d'un rapport qnelconque entre les deux facteurs dont elles sont le produit. Mais ces deux facteurs, ccs deux termes du rapport entre le moi et ce qui n'est pas moi, il faudrait que nous les connussions en eux-memes pour determiner la nature du rapport et le tribut qu'apporte chacun de seselemens. Pour arrivcr h cette connais^anee, nous n'aurions d'autre moyen que de sortir, de nous elever et de planer au-dessus, de nous- memes. Des que nous tentons de le faire , nous quittons notre terrain, le seul ou nous puissious prendre pied, nous perdons le point d'appui de notre conscience, nous passons du domaine psyehologique qui est bien a nous et dont les limites sont net- tement tracees, dans les regions inconnues et fantastiques de I'ontologie, nous denatui'ons le sentiment de notre moi, nous localisons le moi, nous le transformons en un ctre qui n'est plus moi, c'est-a-dire que nous le detruisons. L'histoire de la metaphysique est la pour nous convaincre de I'inutilite autant que de la lemerite de toute philosophic dogmatique, en d'au- tres termes, de toute entreprise quia pour but de determiner les rapports des deux elemens entre eux , soit qu'elle aboutissc a absorber un des elemens, en incorporant le sujet dansl'objet ou I'objet dans le sujet, comme le materialisme, I'idealisme, le pantheisme, soit qu'elle cherche, dans les doctrines qui ad- mettent une dualite pi'imitive, k fixer la part pour laquelle chacun des deux elemens, le moi et le non-moi, contribue a la formation de nos connaissances. L'enumeration que M. le baron Massias fait de ces systemcs ( p. i3-23 ), est incomplete, etprouve qu'il n'a pu se procurer qu'une notion iniparfaite des essais speculatifs des ecoles mo- dernes dc rAllcmagne. II ne pent exister que trois manieres de se figurer le rapport du sujet a I'objet : ou ce qui est subjectif est une derivation de I'objectif, et ce point de vue est celuidu realLime ; ou I'objectif est considere comme le produit du sujet, ce qui est le caracterc general de Videallsmc ; ou, finalement, ET POLITIQUES. 417 aucun des deux n'etant sacrifieou subordonne a I'autre comme son emanation, on admet leur union dans une synthese qu'o- pere ou que manifeste la conscience, et qui se retrouve dans toutes les subdivisons du daallsmc. Le dualiste duginatique , tel que Descartes et Leibnitz, statue une relation causale eutre le sujct et I'objet, et entreprcnd d'expliquer le mode d'action et de reaction qu'ils exercent mu- tuellement. Le dualiste critique se contente d'admettre la rea- lite de I'un et de I'autre, mais le non-moi est a ses yeux un x dont I'existenceseprcsente inevitablement a I'esprit, parce que les objets de la perception s'offrent a la conscience toujours les memes, parfaitement independans dumoi, et que le moi aassez de confiance dans ses operations pour ne pas douter qu'il ne se reconnut a la longue seul auteur d'une illusion quelque invin- cible qu'on la suppose, si le drame de la vie etait un mono- logue, et pourrepousser la possibilite d'une demence incurable qui, sans jamais eprouver la moindre hesitation, projeterait constamment au dehors des idees et des affections d'origine pm'ement individuellc. Mais la Kant s'arrete. En reconnaissant I'existence de choses exterieures, il ne les met pas en rapport de causalite avec le moi aumemetltre que les objets de Texperience, aveclesquels elles ne doivent pas etre confondues , ceux ci etant le produit du concoui's de deux facteurs, de x d'un cote, de I'autre des formes de la sensibility ou receptivite, etde Taction de I'enten- dement. Kant a ete mal interprete a la fois par quelques-uns de ses disciples et par ses adversaiies. Deja Jac.-Sig.-Beck avait denature la doctrine qu'il s'imaginail exposer , en la transfor- mant en idealisrae par I'elimination de cet x que nous ne con- naissons pas a la verite , en d'autres termes , que nous n'elabo- rons pas dans I'atelier de nos facultes perceptives et concevantes, mais dont la realite nous est attestee par le sentiment. Fichte fit du non-moi une limite posee spontanement par le moi lui- meme et necessaire pour donner naissance au sentiment du moi, et pretendit avoir tire une conclusion indispensable des principes de Rant, en en deduisant I'idealisme transcendental, 4i8 SCIENCES MORALES pretention contic laquelle son maitres'elevaavecla plusgrando ibrce. Nous eioyons devoir ici, pour completer la revue histo- rique do M. Massias et a litre de notice litteraire qui ne sera pas sans interet pour les amis de la metaphysique, presenter le resume tres-succinct des theories dans lesquelles le sentiment de la dualite primitive a ete developpe, analyse , ou reduit a un plienonune illusoire, soitcn clierchant a le deriver de fails de conscience reputes plus elemcnlaires , soil en essayant de le metlre en accord avec le besoin d'unile, espece de molock auqnel la raison speculative tend h immoler loute autre donnee instinctive. jineantisscment da sujet dans le spinosisme etle malerialisme. Elimination de Vohjet dans I'idealisme transcendental de Fichte , d'apres lequel tout ce qui est objectif est produit par le sujet et s'y trouve contenu. Lc sajct et tobjet disparaissent egalement dans le systeme de Schelling, designe sous differentes denominations telles que : realisme ideal, philosophie de la nature , mais ordinairement appele systeme de Videntite , parce qu'il represente le sujet et I'objet comme absolumcnt identiques et se confondant, se com- penelrant dans I'intuition intellecluelle. Cettc ontologie a ete diversement nuancee, motivee, defendue, reconciliee plus ou moins specieusement avec les phenomenes du sens intime , surtout avec le sentiment de la liberie, par J. -J. Wagner, Hegel et dcs philosophes qui I'ont abandonnee depuis ; par exemple Eschenmayer. Selon fVciller, la distinction que la conscience fail entre I'objeclif el le subjectif devienl unite dans I'absolu qui esl la scule realile. Le subjectif ct t objectif ne sont rien , Van sans I'autre. Theorie que son auteur , Bouterweck , a denommee systeme de virtualite. Le synthetisme de Krag fail consister la conscience dans la synlhese originelle du subjectif et de I'objeclif. Bardili, auteur d'un systeme designe sous le nom de realisme rationnel , a soulenu que Tidenlite absolue n'esl ni I'objet ni le sujet, ni ridentite des deux, mais la Divinile se manifestant par et dans la nature. Celte hypothese a eu un moment de cole- ET POLITIQUES. /.ig brite parco qu'elle a trouve un defenseur dans Cli.-L. Rein- hold, le plus habile des interpretes de la philosophic critique , auteur lui-meme d'une nouvelle theorie de la faculte represen- tative, d'apres laquelle il avait rattache ii un fait de conscience la theorie de Rant et specialenient la table des categories, en inontrant que leur classification repose sur ce fait et en epuise le nombre. Dans un des ecrits ou Reinhold a , par un desinte- ressement peut-etre sans exemple dans I'histoire de I'amour- propre philosophique, abjure en faveur des idees de Bardili, ce criticisme qu'il avait si puissamment contribue a faire triom- pher en Allemagne, en se I'appropriant par sa luniineuse ex- position et par des perfectionnemens remarquables, on trouve le tableau le plus mcthodique et le seul completa ma connais- sance de tous les essais tentes pour expliquer la relation du sujet a I'objet (i) : j'en donnerais le precis , si son intelligence n'exigeait une connaissance des questions agitees par les ecoles allemandes qu'on ne peut se flatter de rencontrer dans des lec- teurs etrangers a leurs debats. A ces divers systemes de speculation positive il faut ajouter les resultats negatifs auxquels arrivent par des routes diffe- rentes I'ecole de Jacobi et quelques sceptiques qu'il serait in- juste de comparer aux pyrrhoniens de I'antiquite. Jacobi, que ses concitoyens out surnomme le Platon de I'Allemagne, a chcrche a montrer I'impossibilite d'etablir par raisonnement les rapports de riiomme a la nature et a son auteur, Us contra- dictions auxquelles toute tentative parcille entraine inevitable- ment ses auteurs quelle que soit leur marche ou leur point de depart, et la necessite de s'en tenir a la foi individuelle et d'en fonder les croyances sur le sentin#jnt indelebile et primitif de rhomme. Les philosophes sceptiques enfin, E. Vlatner , G.-E. Schulze, J.- H. Jbiclit, no nicnt point que dans la conscience nous ne (i) Get ouvrage a paru a Yienne en i8o5, sous ce titre : Introduction a la connaissance el a la critique de lous les differens srsiemes de philo- sophie. 4io SCIENCES MORALES sc-parions le subjectif de I'objectif, mais ils n'attribuent a cette distinction et aux rapports qu'eile etabiit qu'une valeur pure- ment subjective, ct soutiennent que c'est une vaine entreprise que de vouloir remonter aux principes de ccs rapports ou d'en scruter les fondcmens. De I'aveu dc toutes Ics sectcs et scion toutes les theories, il y a un fait primitif de la conscience qui est compose de deux eleniens et qui offre une dualite dont les termes paraissent ega- lement neccssaires. Comment les deux mondes qui sortent de son sein se marient-ils ? D'apres quelles lois entrent-ils en rap- ports ? Leur contact n'etant possible que si de lem* double ac- tion il resulte une action commune qui conserve quelquc chose du caractcre de chacune , une communaute pareille est - elle concevable entre deux agens absolument heterogenes ? C'est a cette question que toute metaphysique , surtout la branche de cette doctrine speculative qu'on pourrait appeler gnosologie , s'efforce de repondre. La rcponse de M. le baron Massias ren- tre dans les vues de Leibnitz, mais n'evite pas I'ecueil que I'au- teur de la nionadologie a reussi a tourner. Les objets materiels , dit M. Massias, n'ont de prise sur nous que par leur action immaterielle, puisqu'ils ne nous affectent que par leurs qualites , leurs formes, leurs modifications , en un mot par des rapports , chose qui est du ressort de I'entendement. La nature n'agit sur nous que par la forme et I'impi'ession : la forme ne nous parvient que par un mouvement analyse , li- mite. Les diverses impressions ne sont que des mouvemens di- vers appliques a des formes diverses ou les memes; la variete des formes elle-meme est le resultat de la variete des mouve- mens : ainsi la connaissance , dont les materiaux sont la pro- priete de la nature, nous arrive encore par son action. Par la perception nous nous adjoignons la forme et I'impression qui agissent sur nous (i). Mais comment un mobile materiel peut-il associer son mou- vement a Taction de I'esprit ? Comment I'ctre intelligent peut- (i) P. aaa-223. ET POLITIQUES. 4^' il admettre ce mouvement dans sa proprc action, c'est-i-dire , se depouiller de sa nature, abjurer sa qualite de moi , pour de- venir partie integrante du monde exterieur ? Ici le mot de mouvement trompc parce qu'il est pris a la fois dans son sens propre et dans une acception figuree, et je ne puis voir qu'un jeu de mots dans la maniere dont M. Massias cherche a etablir un point de comparaison et d'identite en disant ( p. 235 ) que la volonte qui passe la oil elle n'etait pas se deplace, parce que son action se porte sur un objet intellectuel different de celui qui I'exercait auparavant. Sans s'en apercevoir I'auteur fran- chit un abime, passe d'un ordre de choses dans un autre qui lui est entierement heterogene, et confond deux spheres qui n'ont aucune analogic, les phenomencs accessibles aux sens externes et les phenomenes qui sont du domaine du sens inte- rieur. Quelque specieuse que soil la theorie de M. le baron Massias, quelque seduisante, sublime meme que soit la vue de I'univcrs que parait developper a nos yeux sa proposition fon- damentale et son dernier resultat : Nous ne percevons que V in- telligible dans la nature ; Taction percue de la nature est iden- tique a. JE. ; nous ne pouvons y voir que le renversement de barrieres infranchissables, la violation desprincipes delasaine methode experimentale en psychologic, I'assujetissement du moi, du sujet du sens intime, aux lois qui regissentle monde des sensexterieurs, etle plus hautdegre duparalogisme signale par les dialecticiens grecs sous la rubrique ^trdcQaa-i; us ct>iM yivts. Sans doute, Taction de la volonte sur elle-meme, ne se presente a I'esprit que sous le symbole du mouvement, parce que la langue, intermediaire entre Taction de la nature et la notre ( verite que M. Massias a lui-meme admirablement bien developpee) (i), ne nous offre qu'un vehicule compose d'ele- mens materiels. Mais cette intervention du laniiajre a um but (i) P. 247-255. Reinhold a rempli une lacaue importunte dans la serie des doctrines philosophiques , en publiant ses Vues sur la parole considerce comme mediatrice entre les sensibdites et I'entendemcnt. Kiel, 1816. Iu-8" de 271 p. /,2a .SCIENCES MOIIALES purement mnemonique et laisse intacte I'absoluc hetcrogeneitc des deux terrains de la psychologie et de la physiologie. Kant, sentant conime Leibnitz los diliicultes insurniontables qui s'offrent ;\ Tadniission d'une cominiuiication immediate entre le moi et la natui'e, mais conduit par le scopticisme de Hume ii les eluder par un autre moyen, a assigne ii la faculte destinee a recevoir des impressions I'espace et le terns pour formes, et , obtenant ainsi pour la sensibilite una veritable pa- rente avec les choses exterieures, il lui a donne en meme tems, par r« priorite de ses formes , une homogeneite desirable avec I'entendement auquel elle fournit par les impressions quelle lui presente, les materiaux de toute experience tant interne qu'ex- terieure. Deux autres prpblemes essentiels a la theorie de notre fa- culte de connaitre ne nous paraissent pas resolus d'une ma- niere satisfaisante par M. Massias. Dans son point de vue , il ne pent, selon nous, etablir ni la legitimite du principe de causalite, ni I'existence de veritesuniverselles et necessaires (i). Au surplus, comnie cette impuissance nous parait lui etre com- mune avec toutes les doctrines philosophiques hors celle de I'ecole critique, nous ne nous permeltons ici que de rappeler I'insuffisance de faits de conscience repetes autant de fois qu'on voudra, pour nous garantir I'autorite infaillible des principes que nous ne pouvons pas ne pas considerer comme invariables et d'une application universelle. Nous le repetons, parce que c'cst une difQculte k laquelle on ne repond toujours que par des formules qui sont tout simplement des expressions synony- mes des axiomes dont il s'agit d'etablir le droit souverain. Ne pouvoir nous empecher d'etendre leur autorite a tons les cas possibles , n'est pas une preuve de leur legitimite objective (i) Voy. p. 34, 4o, 44 ef 69- H ne rend pas compte non plus de la generation des idees fondamentales de I'espace et du tems , et ne repond point 4 cette question d'importance decisive : ces idees sont-elles des intuitions, des notions, des- abstractions? II seniLle les ranger dans la derniere classe. P. gS. ET POLITIQUES. 423 et absolue. De quel droit souniettons-nous les choses et les cas qui ne se sont jamais presentes a nous, a une lej,'islation dont nous n'avons qu'une certitude suljjective ? En rapportant I'ori- gine du principe de causalite au sentiment de notre activite volontaire, de quel droit etendons-nous Fempire de ce prin- cipe sur toutes choses ? L'analogie que nous etablissons sous ce rapport entre le moi et les objets exterieurs auxquels nous at- tribuons une energie causale ou efficiente a I'instar de notre volonte, est-elle autre chose qu'un anthropomorphisnie, ine- vitable, on doit en convenir, mais tirant ses droits uniquement d'une induction qui ne saurait ni motiver notre confiance ine- branlable dans I'autorite objective et sans exception du prin- cipe, ni expliquer comment son application universelle est accompagnee en nous du sentiment d'une evidence et d'une certitude elevees au-dessus de toute crainte de le voir faillir en aucune occurrence possible ? Dans le point de vue de Rant ce sentiment estpleinement justifie pour le champ de I'experience exclusivement, il fautl'avouer. On n'estpasfonde pour cela a ac- cuser le chef de I'ecole critique d'avoir detruit laraison en ne lui reconnaissant qu'une valeur subjective. La raison de Rant est une et souveraine sur les deux terrains de Taction et de la connais- sance. Comme source de toute verite d'experience elle s'appuie sur I'intuition a priori Av\ tems pour former I'ensemble de notre savoir : comme Icgislatrice morale , elle s'appuie sur le fait de la liberte, pour regir cet autie empire. Sans I'intuition pure ou la notion du tems, les lois de la raison ne pourraient s'etendre sur les objets de nos perceptions : sans la notion de la liberte, la raison verrait se paralyser son autorite morale. La realite objective de I'un et de I'autre de ces deux mondes repose done, a la vei'ite, sur une double synthese a priori, ici de la raison et des formes de la sensibilite, la de la raison et de la liberte ; mais il en resulte pour les lois de la raison une autorite non moins reelle qu'absolue dans les deux ordres de choses , dans la nature et dans le monde moral. La loi du devoir obtenant ainsi une suzerainete qui domine les deux mondes, subordon- nes I'un a I'qutre comme but et moycn , rend aux principes ne- 4^4 SCIENCES MORALES cessaires et universcls qui paraissaient restreints a ne valoir que pour Ics objets soumis aux conditions de I'espacc et du tenia, et que nous n'avions pour ainsi dire acceptes que sous benefice d'inventaire, une portee sans liniite et le droit d'exer- cer leur juridiction sur I'universalite des etres et sur leurs rapports de causalite tant efTiciente que finale. 3c sens que ce cadre est vide pour lespersonnes qiiin'ont pas fait une etude speciale de ces questions, mais il sera rempli par ceux qui s'cn occupent et que des notions imparfaites du systeme du grand restaui-ateur de la pliilosophie ont disposes a accueillir les reproches que les ecoles dogma tiques lui adressent. Ce n'est pas qu'il nous paraisse a I'abri d'objections fondees, mais de plus graves difficultes pesent sur les doctrines par lesquelles on a, tres- louablement mais avec un succes au moins pi'oblema- tique, tente de le perfectionner ou de le remplacer. En AUe- magne meme , ou on n'etudie plus Kant dans ses ouvragcs , mais dans les resumes qu'en presentent ses disciples et ses ad- versaires, on a vu s'accrediter contre les articles fondamentaux de sa philosophic theoritique ( car ses principcs de morale re- gnent , purs ou legerement modifies , iion - seulement dans tou- tes les parties de I'enseignement academique , mais dans la plupart des productions litteraires ) (i) , des preventions qu'un examen impartial de I'ensemble du criticisme est bien loin de justifier. Chez un etrangcr les erreurs a I'egard du veritable sens de cette philosophic sont done infmiment excusables. M. Massias s'est mepris sur quelques-uns de ses points fondamentairx. Kant n'a pas nie I'existence des sens, comme M. Massias Ten accuse p. i3; il en fait au contraire la source de toute connaissance (i) La loi de moralite que M. Massias proclame dans plas d'un en- droit de son livre et a laquelle il rend un eloquent hommage, est entie- remenl conforme a cette sainte loi du devoir que Kant a, comme base des sciences morales, pour jamais afiranchie de tout interet materiel et de tout alliage indigne de la dignite Lnmaine. Voy. p. xxii et sniv., 36 , 69 , 226, iDi , 317. ET POLITIQUES. 4a5 objective. II entend par jugcmens synthetiqiies a priori et par les antinomies de la raison tout autre chose que ce que M. Massias lui attribue p. 289, 240 , iSg. J'ai deja indique le vrai sens de rexprcssipn qu'on peutappcler sacranicntelle ■.jugementsjnthe- tique a priori. Elle renfermc le but, I'essence et le resultat dela philosophie crititique. Celui qui a saisi le veiitable sens de ces termes, mais celui-la seul, compreud cette philosophic. Quant aux conclusions contradictoires auxquelles le raisonnement purement speculatif conduit et que Kant a signalecs dans sa table des antinomies , il n'y a dans cette doctrine d'autre mvs- tere que I'application du principe que la verite est le fruit de la cooperation harmonique de tons les pouvoirs de I'hoinnie. Une faculte isolee a des interets speciaux a defendre : consultee a part, elle se trouve frequemment en opposition avec le resultat du travail des facultes reunies. M. Massias remarque lui-meme, conformement a I'esprit de cette regie, que les cieux ne ra- content pas la gloire de Dieu au geometre purement geometre (p. 124). Rien n'est plus juste. Le savant, comme geometre, vise a se passer le plus qu'il pourra d'une cause intelligente. II ne voit dans les causes finales que I'expression de I'ignorance ou nous sommes des veritables causes (i).« L'incredulite, dit M. An- cillon, serait bien rare, si Thomme tout entier jugeait de la verite; mais ordinairement il etablit pour juge une seule de ses facultes, et cette faculte est I'esprit qui ne saisit jamais que des rapports (2), » « Le malheur vent , dit encore le meme ecrivain , que la plupart des hommes ne voicnt I'evidence que dans les preuves, la certitude que dans les raisonnemens ; de la vient (t) Voy. VEssai sur les probabilites, p. 2. Je ne puis trop engager les amis de la philosopliie religieuse a lire les excellentes reflexions de M. Massias sur les rapports de la religion avec la raetaphysique et le spectacle de la nature, p. 124-148. lis trouveront, p. i5o-i53, nn fort bon resume des preuves de I'existence d'un legislateur supreme. Voyez aussi p. 192, au bas, et p. 221 , note. (2) Melanges de philosophie , t. rr, p. 196. 426 SCIENCES MORALES qu'ils doutent de ce qu'il y a de plus certain , des verites pri- mitives »(i). M. Massias appelle le sentiment la plus fondanientalc de nos facultes, ct dit ne I'avoir pas I'angt-c parmi cellcs qui produiscnt nos connaissances , parce que le sentiment est moins uncfacu.lte que le gernie de totites nos facultes , le resultat , Faction retime et confondue des lois qui regissent I' organisation , la pcnsee , la sociahilite ct la mornlite , le mouvement general conservateur et incitateur de la vie. J'avoue que je ne puis attacher aucun sens net a cette definition , ni m'empecher de penser que M. Massias a neglige de faire une distinction importante entre des pheno- menes tres-difftrens, renfermes sous la meme denomination. II y a deux choscs dans le sentiment , annonce et affection ou emo- tion ; il nous informe d'une modification qne nous subissons , d'un changement que nous effectuons ou qui s'bpere en nous , et cette information est accdmpagnee d'emotion, d'unmouvement affectif, d'un ctat de peine ou de satisfaction. Mais I'annoncc elle-meme est de denx especes entierement distinctes que plu- sieurs langues designent par des expressions differentes , mais qui en francais, sont comprises sous un seul et meme mot. Nous avons le sentiment de ce qui se passe en nous , il nous informe des phenomenes en detail ; mais nous possedons en meme tems une faculte d'une natui'e plus elevee qui nous instiiiit de I'en- semble de nos rapports siniultanement. Lorsque nous nous re- plions sur nous-mcmes pour demeler les differentes classes des faits de conscience , nous trovivons en nous I'annonce de notre existence en general , de notre etat individuel present en parti- culier et de notre personnalite comme etres dans lesquels un systeme de pouvoiis forme un tout harmoniquenient lie, et qui, en vertu de cette reunion de forces , appartiennent a la fois a la nature et a un autre ordre de clioses ou regne la liberie morale. (i) Ancillon, Essais philosophiqiies , t. ii, p. 190. Par les meraes raisons , la foi chretienne doit etre consideree comme la fleur de I'Luma- nite , comme le resultat da perfecfionnement harraom'que de toutcs le? facultes humaines. ET POLITIQUES. 7,27 Pour designer cette annonce qui est immediate et fondee dans la constitution primitive de notre nature, de toutes nos percep- tions, |)ensees , appetitions, Volitions, nous n'avons d'autre terme que celui de se/ztiment (^GefiiU). Avant qwc la notion de I'existence entrat dans la serie de nos connaissances, le senti- ment nous garanlissait deja notre existence. La notion de per- sonnalite et d'individualite n'etait pas encore developpee , ni ne pouvait I'etre, que nous nous sentions deja. individus , doues du caractere de personnalite , et comme tels composant un toutbien lie de facultes physiques et intellectuellcs. Enfin avant que nous fussions capables de distinguer la liberte et la necessite , le vice ctla vertu, notre liberte s'annoncait dans le sentiment, et la voix de la conscience prononcait par ce meme organe ses arrets sur la valeur morale de nos actions. De meme, avant que nos idees de la nature et de Dieu pussent se former, nous separions dans un sentiment immediat le monde phenomenal de notre personnalite, et le caractere d'intensite sans bornes, dont nos sentimens moraux portent I'empreinte , nous annoncait un Di«u avec les attributs de saintcte et de beatitude infinies. On a souvent demande s'il pouvait exister pour I'homme un ctat de son ame qui lui offrit la conviction de la realite de I'ideal qui obsede sa pensee, la certitude d'une realisation future du bien parfait dont il poursuit la conquete. Si cet etat existe, il doit se rencontrer dans ce que le sentiment nous fait eprouver. C'est aussi pourquoi les langues sont trop paiwres pour rendre I'im- mensite des sentimens , bien que I'influence que cette myste- rieuse faculte de sentir exerce sur les sujets traites par un vrai poete, se reconnaisse dans le langage poetique qui est le veri- table idiome du sentiment. Le sentiment tel qu'il se revele a la conscience, n'est ni une perception ( idee, representation ), ni un acte de la vo- lonte ou une tendance, et, considere en lid-m^mc , il n'est ni cause ni effet d'lme perception ou d'un effort , mais une modifi- cation de la conscience aussi distincteetindependante des autres changemens qui affectent le sens intime , que Test soit la per- ception soit une determination volontairc. D'apresson caractere 4a8 , SCIENCES MORALES d'unitu qui cxclutle multiple, le sentiment n'admet aucune ana- lyse ct ne tombe que sous I'oeil ou la puissance immediate de la conscience. Le sentiment, cousidere dans sa direction aussi bien que dans sa manifestation, ne pent etre ni entierement satisfait ni epuise; sa sphere ne peut etre remplie, il n'atteint jamais son dernier degre; cependant il est limite dans la forme, sous laquelle il s'offre a la conscience, tout cc qui s'annonce a elle ne pouvant y cntrer que renferme dans des limites. On est ainsi conduit a reconnaitre dans le sentiment la realite se revelant immediate- ment a la conscience , realile a laquelle, en tant que le sentiment a sa source dans I'activite spontanea du sujet , appartient le caractere de rimmensite se manifestant dans les bornes de I'etre Ilni. Ces deux caracteres d'immediatement reel et de limites de I'individualite se melent a toutes les operations aux- quelles le sentiment participe, et se retrouvent dans les actes des facultes de connaitre et de vouloir pour la mesure dans laquelle elles sont en contact et en communaute d'action avec la faculte de sentir. L'homme acquiert done par le sentiment seul la conviction de la certitude ou realite de son existence, de celle des objcts exterieurs , de sa personnalite et de sa liberte. La faculte de connaitre ne lui revele que des rapports , qui sont , pour ainsi dire , le profil de I'existence. Nous pensons que M. Massias, en n^gligeant cctte dis- tinction fondamentale a laisse dans sa doctrine une lacune qui se fait apercevoir d'une maniere plus ou moins sensible dans tout le cours de son ouvrage. Nous lui reprocherons aussi de n'assigner « la raison pour fonction qui la caracterise que le role tres-secondaire de servir de simple terme moyen ou de mesure commune entre deux objets , s'appliquant a I'un et a I'iUitre et verifiant ce enquoiils sont semblables ou differens, en raison de la ressemblance ou de la difference qu'ils ont avec elle-mcme ( voy. p. 85 et suiv. coll. 43 ). II nous semble que c'est presque aneantir, ou degradcr au moins cette noble fa- culte , source d'une double legislation, sans laquejle nous ne ponrrions nous reconnaitre et nous resterions ecrases dans ic KT POIJTIQUES. /,U9 dedale ou sous le fardeau dcs inipressious et clos Lcsoins qui uous pressent de toutes partSy que dc donner a laraisoupom* principale tache le soin de faire des equations et d'etablir des analogies entre les objets, de n'etre qu'une espece de metre commun au moi et aiixchoses exterieures, un mediateur entre raction de la natui-e et la notre (p. 88 ). Mais la plus giave des objectioTis que nous avons alui soumettre, c'est d'avoir debute par se demander quel est le piincipe qui sent, au lieu de com- menccr par eeouter les depositions que font les sens et les pou • voirs actifs de I'homme au tribunal de la conscience. C'est vou- loir caracteriser la cause, avant d'en avoir observe les effets, avant d'etre en possession du seul«ioyen dont nous disposions pom' nous former une idee de cette cause et en deviner la nature. « On nc peut,» dit-il, « poser les bases de I'ideologie, ni d'aucune espece de philosophic, sans determiner quel est le principe dxi sentiment et de I'intelligcnce. La viennent aboutir toutes les questions; la est I'origine de toutes les sciences. Nou.-> sommes tout entiers dans sentir, parce que ce mot emporte ia connaissance de la sensation ( nous ne pouvons admettre cette assertion ). Quel est le principe qui sent? Est-il distinct de la matiere? Suivant que les reponses faites a cette question seront opposees, les doctrines seront divergentes (i). « Nous pensons que les doctrines sont divergentes , parce qu'on s'occupe d'abord de cette question , au lieu d'obsei*ver les phenomenes qui se deploient sous les regards du sens intime. Quand on en aura reconnu les caracteres permanens et les circonstances acciden- telles, les principales classes, les rapports et les lois, alorsil sera tems de chercher a determiner la qualite et les attributs dti principe auquel on doit remonter , auquel on peut senl re- courir, pour se rendre un compte satisfaisant de leur existence et de leur reunion dans le meme champ , sous I'oeil de la con- science. II est vrai que la perception du moi est posterieure a celle de I'existence qui s'annonce par le sentiment. Mais le sen- timent ne nous dit rien sur la nature du principe qui sent, et (i) Voy. 33i et suiv. T. XXXIII. — Fevrier 18^7. -^.8 i,'^o SCIENCES MORA.LES It's fails iloiit la coijscicnce t'st le theatre doiveiit etre etudies, Hvant quo nous puissions aneter nos iilees siu' I'agent dont nous ne voyons d'abord que les manifestations, et qui ne se rcvt^le que par les actes qu'il accomplit ou les modifications qu'il eprouve. Vouloir determiner ce qu'il est , avant de savoir ce qu'il fait ou ce qu'on lui fait faire, c'cst donner pour base du travail ce qui doit en etre la fin et ce qui sera le digne cou- ronnement de I'edifice. Ce n'est pas a dire que M. Massias ait negliiie d'observer et de constater les principaux phenomenes du sens intinie, mais il en a acconipagne le tableau de Texanien de questions dogmatiques qui troublent la niarche prescrite par la saine m«*thode experimentale. Malgre ce melange de discussions metaphysiques et psycho- logiques qui est, selon nous, la principale objection qu'on ait a lui faire, I'ouvrage de M. Massias contient les elemens essen- tiels d'une bonne theorie des operations iutellectuelles , consi- derees comme moyen de mettre I'homme en rapport avec la nature et de lui procurer sur les objets qu'elle ienferme, leur action, leui's analogies avec lui, celles d'entre leurs proprietes qu'il lui importe de connaitre,une information suffisante pour ses besoins physiques et moraiix. Le systemc do I'auteur tend a etablir I'existence d'une espece de fraternite entie le monde materiel et I'intelligence humaine qui plait singulierement a I'iraagination , qui eleve I'ame, qui ennoblit la nature entiere a nos yeux et qui en fait le heraut permanent des adorables perfec- tions de son Createur. Lors meme que nous ne pouvons donner notre assentiment a sa doctrine metaphysique, nous nous in- struisons a I'ecole d'un esprit lumineux et fecond, nous le suivons avec le plus vif interet dans ses developpemens inge- nieux, et nous ne le quittons que penetre d'une profonde cstime pour les sentimens de I'homme etle merite de I'ecrivain. Plus il trouvera de lecteurs, etplus je croirai devoir bien augm'er des progres qu'a faits en France le gout des etudes solides et le salutaire retour a I'examen des plus hautes questions de la phi- losophic. L'ouvrage etant sorti des pi-esscs de M. Firmin Didot, il est inutile de dire que I'execution typographique ne laisse ET POLITIQUES. 43 1 lien a desirer. INous n'avons remarquc que deux fautes d'im- pression qu'il eut et6 utile de signaler dans un errata. P. xix, lig. 1 1 , on doit lire variete ou lieu de verite, et plus loin limita- U'on pour r imitation. P.-A. Stapft.r. L'EdROPE par rapport a la GrECE et a liA REFORMATION DE LA Turqcie; par M. de Pradt, ancien arche- veque de Mallnes (r). Les affaii-es de la Grece avaieut deja exerce la plume d'un grand nombre d'ecrivains , qui s'etaient rendus les organes de I'opinion et de la raison publiqucs. Aujourd'hui , un esprit ac- coutume a observer les choses sous un point de vue eleve re- prend ces importantes discussions , et leur donne un nouveau caractere d'interet. Deux fois precedemment, M. de Pradt avait prete I'appui de sa voix eloquente a une cause qui touche tous les coeurs genereux. Ce fut au moment 011 le monde etonne venait de voir la Grece, semblable au phenLx , renaitre de ses cen- dres : un an n'etait pas ecoule , et deja le double courage qui sait braver le danger et perseverer dans la resistance avait change en une lutte nationale ce qui, au premier abord, avait pu ne paraitre qu'une insurrection partielle. Maintenant, le destin de la Grece, corarae nation independante , n'est plus mcertain : il ne lui faut qu'un dernier effort de Constance pour obtenir une reconnaissance complete de son existence poli- tique. Sa cause' est admise au tribunal de la diplomatic; et cette cause, que I'humanite, la religion et la civilisation de- fendent egalement, est de celles qui sont gagnees, du jour que Ton a consenti a les discutcr. M. dc Pradt etablit avec une grande sagacite que la revolution grecque n'est point une re- Tolution causee par des interets de religion , et meme qu'il y aiirail de I'inconvenient a la presenter sous ce rapport d'une (t) Paris, 1826; Becliel aiiie. Iii-S" de 271 pages; prix , 5 fr. 28. f,ii SCIENCES MORALES iiianieretrop absoluc, Cx-t inconvi'niont aurait deux graves con- sequences : pour la Grece ellc-niemc , do coufondre, des I'ori- j;ine de sa regeneration, I'ordro civil avec I'ordrc religieux; et pour la politique generale de I'Europe , de faire craindre qu'on ne trouvat dans les synodes et les archimandrites grecs des vicaircs trop dociles du tzar-pontife qui regne a Petersbourg. Toutefois, il est d'autres considerations dont il nous semblc que I'habile publiciste n'a pas ete sufiisamment frappe. En pre- mier lieu, s'il existe des motifs politiqucs d'ecarter I'invoca- tion directe de la religion dans I'affaire de la Grece, n'en existe-t-il pas d'aussi imperieux qui justifient ceux qui se sont efforces de I'y appeler ? La religion n'a-t-elle pas ete la cause premiere de la rupture entre I'opprime etl'oppresseur? Le fait de I'oppression politique, que M. de Pradt distingue du fait de la persecution religieusc, y est tellement inherent, qu'il sufii- sait et qu'il suffit encore aujourd'hui au Grec d'abjurer le signe sacre du christianisme, et d'adopter le Coran pour s'e- lever de la condition miserable du raja a I'etat de noblesse du musulman. Or, cette distinction, rendue si facile a con- qaerir, est precisement ce qui a maintenu I'individualite de la nation grecque ; ce qui I'a saiivee de I'aneantissement moral ; ce qui I'a conservee susceptible de tous les progres , aussi bien que de toutes les conquetes de la civilisation. C'est par suite de cette alternative d'apostasie ou de martyre , que s'est gar- dee parmi les Grecs une foi vive et constante , identifiee aux moeurs nationales. De la , il est facile de conclure que Ton a ete fonde a faire intervenir la religion dansl'examen de cette revolution. Tout le monde , par une sorte d'instinct , s'obstine a voir des motifs religieux dans la conduite des Grecs. Cette opi- nion a pu d'ailleurs les servir au commencement de I'insur- rection. A I'epoque deja eloignee de nous, ou les peuples civilises se plurent a decouvrir le signe revere de la croix sur les drapcaux de la Grece renaissante, ce n'etaient pas seulement les vieux ennemis du nom chretien que la neophyte sanglante avait a rcdoutcr. Son berceau , bien qu'entoure des ET I'OLITIQUES. 433 esperances et des voeux des nations , venait d'etre marque du sceau de la reprobation par ces memes hommes qui , avec trop de succes, ont condamne I'ltalie a I'occupation etrangere, et I'Espagne a la barbaric. II etait prudent alors d'elever Ic labarum au-dessus de sa tete ; et peut-etre, sans ce signe sacre, des foudres plus puissans que ceux de Constantinople auraient eteint la civilisation renaissante dans I'Orient. II est juste d'ajouter qu'au-dessus de la question politique, qui se trouve herissee de difficultes par la complication des in- terets, M. Tarcheveque de Malines fait planer la question d'humanite , et qu'il n'hesite pas a prononcer que les vues politiques doivent lui etre subordonnees. Or, I'humanite fait partie essentielle de la religion qui ainie a la parer des noms de charite et d'amour du prochain. Certcs , le clerge catho- lique avait une belle occasion de ressaisir en Europe , sans blesser aucune de ses maximes, sans compromettre et peut- etre en fortifiant quelqu'une de ses pretentions , une popularity qui menace de le fuir. Qui pent calculer jusqu'ou se serait etendue sun impulsion ? Rome n'aurait-elle pas peche cette fois par trop de timidite , si elle avait dedaigne de consommer enfin la reunion tant de fois cssayee de la croix grccque avec la croLx latine? Sans doute, il s'est trouve quelques dignes mi- nistres du Seigneur dont le coeur a senti toute I'importance de cette unique occasion ; mais ils ont ete trop peu nombreux , et leur temoignage isole n'a point suffi pour faire entendre la voix imposante de I'Eglise. La religion reformee a patle plus haut, il est vrai , quoiqu'elle ne se soit pas entierement affranchie des liens de la politique humaine; mais sa theologie rationnelle, et d'un colons moderne , sympathise peu avec les souvenirs , les moeurs , les traditions de I'Eglise et de la nation grecques. Nous persistons a penser que la religion catholique avait beau- coup de bien a operer , et beaucoup de conquetes a faire au sujet de la revolution grecque. C'est un double malheur pour cette religion et pour la Grece que tout cela ait ete com- pletement dedaigne. Une question moins importante , et sur iaqnelle il s'na fa- 434 SCIENCES MORALES cile de tomber d'accord avcc M. de Pradt, c'cst celle dc la Grece considcrce comiiie tcm classiquc. Rien n'est sans dontc ;\ la fois plus mcsqiiin et plus profane , lorsque le sang des martyrs rougit le parvis des temples, que de s'obstiner a u'attacher au noni de la Grece que le souvenir de ce qu'ellc fut autrefois. Cependant , on sait que les diplomates pro- fessent un sublime enthousiasme pour les Grecs de marbre antique , et qu'ils mettent une touchante perseverance a pre- server du cimeterre turc les pierres du Parthenon. Cet amour du beau, tout bizarre qu'il peut paraitre a cote d'une sorte de dedain feroce de I'humanite , meritait sans doute d'etre cul- tive : il est aussi un rayon du ciel ; Thomme perfectionne par la culture est seul susceptible de le sentir avec energie. Cctte corde vibre d'ailleurs avec une force particuliere dans quelques ames ou I'imagination maitrise le jugement. Or, celui qui veut gagner sa cause ne neglige aucun moyen de la defendre : ainsi , ces appels aux souvenirs de la Grece classique , quoique peu en harmooie avec les circonstances , out ea aussi leur op- portunite. Apres avoir savamment discute I'inutilite probable des essais de regeneration tentes sur la Turquie , pour la mettre en etat de concourir a des plans pour lesqiiels elle ne parait point faite , M. de Pradt aborde la dernicrc difficulte de son sujet. Quelle sera I'organisation politique de la Grece ? II lui propose nettement la monarchic constitutionnelle. Mais , sentant d'a- vance que ce| mot applique ii la Grece choque I'oreille comme un solecisme , il se livre d'abord a des theories ingenieuses oil la portion du pouvoir populaire se trouve largement faite aux depens du pouvoir royal. Trop preoccupe peut-etre des con- gres, qui pourtant ne voient accomplir qu'a demi leurs vo- lontes, le publicistc sacrifie facilement la republique grcc- quc a la balance politique de I'Europe. Quelle chimere que cette balance , au milieu des mouvemens qui agitent aujour- d'hui les nations, a I'insu et contre le gre de leurs gouver- ncmens! Tout ce que M. de Pradt dit aux Grecs pour les amener a son idee est assurement tres-specieux, et la plupart ET POLITIQUES. 43i^ dX'Utre eux seraient peut-etre embarrassos d'y rc-pondre. Toutefois, j'cssaierai de presenter iine objection. II est bien evident que, si M. de Pradt consent a detroner en Grece la republique pour faire place a la monarchie , ce n'est qu'a regret et comme force par la volonte imperieuse de quelqnes potentats de I'Europc. Mais en est-il bien ainsi , et n'est-ce pas una supposition gratuite ? Je n'en aurais nullement eon- teste I'exactitude , a I'epoque des congres de Verone et de Laybach , a Tapogee de la ferveur de I'empereur Alexandre , et avant que lord Castlereagh eut saisi son rasoir. Mais, com- bien nous avons devie dcpuis ! Les notes s'echangent aujour- d'hui; les courriers de la diplomatic courent les grandes routes , non plus pour signifier aux peuples libres des ulti- matum d'asscrvissement , mais pour etablir en Europe una constitution , monarchique il est vrai-dans sa forme exterieure , mais au fond toute democratique : « L'Amerique constitue I'Europe , » comme la dit energiquement M. de Pradt. Dans ce nouvel etat da choses , ca qui utait naguere impossible ne Test plus ; il n'est plus impossible d'admettre dans la sociote europeenne una republique de marchands , temperee par une aristocratic naturelle , et (|ui ne serait pas plus insupportable que ne le furent jadis Venise , Genes et les villes anseatiqucs ; que ne Test aujourd'hui meme la Suisse. Ce qui nous parait impossible a nous , c'est d'imposer a la Grace une dynastic qui n'effaroucha aucun des prejuges de cette meme politique , ;\ laquelle on veut immolar la republique grecque; prejuges qui , eteints dans I'esprit des peuples , sont encore vivaces dans les cabinets. Sans doute, si la Grece devait opter antra une exis- tence monarchitjue quelle qu'elle fut, at son aneantissement , il n'y aurait pas a balancer; et, dans ce dernier cas, nous savons pour qui seraient nos voeux; car, il faut avant tout se raftiser a la supposition qu'un roi puisse etre pris dans le pays. Ou est celui dont le nom impose aux ambitions , et dont le genie etouffe les discordos ? Ceux qui n'ont pu trouver un chef qui obtint I'obeissance par la force trouveraient-ils un mo- narque qui rcgnat par les lois ? Mais nous avons une convic- tiMi SCIENCES .^;<)PiAr.J::s lion dilTerente de celle de M. de Pradt. Mous croyons qu'uiie ibis riiTitalion de la Turquie apaisee, pei-sonne ne se dispu- tera un trone bicn pen seduisant par hii-im'nic, niais dont I'ad- jndication survcillee par la pour pourrait hit-n devenir une cause de discordc. L'Angletcrre, qui est a quelqucs egards.une ropublique temperee; I'Angleterre, qui, a I'cpoque dn congres dc Vienne, n'a pas craiut de jeter le noni de republique daus la Mediterranee , obtiendra certainement que la Grece soit libre de faire ce qui pourra lui convenir, pourvu toutetois que cela menie convienne aussi a I'Anyletene. La difleience de sa langue et raenie des caracteres qu'elle emploie, les iles eparscs de la Greee , scs inontai^nes , sa civilisation imparl'aite : voila des motifs que le cabinet de Londres teia valoir dans les con- Reils de I'Europe, pour les rassurer centre la peur de la con- tagion. Les raisons qui ont porte les rois de la vSainte-AUiance a leconnaitre les republiqucs de rAmeriquc meridionale sont toutes valables a I'egard de la Grece. Dans cette situation, nous croirions avoir quelque chose a nous rcprocher, si nous aidions a iairc incliner la balance vers «n systeme qui pent se trouvcr n'etre le plus conforme ni aux developpemens ulterieurs de la civilisation , ni aux voeux eclaires de la Grece elle-meme. Cos voeux ne sont pas impos- sibles a pressentir pour quiconque possede une connaissance suffisante de I'etat de ces peuples. Lour diversite de ma^us , d'interets, de ]josition , parait les rendre aussi propres a une republique federative, qu'elle senible les tcnir eloignes d'une monarchie. Combien il serait difficile de tircr de cc pays , mine par I'esclavage et par la guerre , I'or necessaire a I'entre- tien dn luxe d'une Cour! Les palais du monarque sont encore k batir, et les routes par oil doit passer son char ne sont pas meme tracees. Un roi de Grece serait oblige en debarquant d'apporter sa couche et sa tente. On pent se reposer sur les anciennes families des beys de la Laconic , sur les chefs niili- taires appelcs capita ni , sur les tresors des negocians d'Hydra (la fortune dc Conduriotti, entre autres , ne s'eleve pas a moins de plusieuis millions) ; sur les pretentions des Fana- ET POLITIQUES. 43; riotes; on pent, dis-je, se reposer sur toute ces classes, tin soiii de faire line part suflisante a I'aristocratie. En Grece, les villes et les villages ont des primats qui sont les voritabks aristocrates du pays. H y a lieu dc croire que toute I'activitt; de la democratie de I'Archipel se toumerait, au sein de la paix, vers le commerce; I'epec domincrait dans la Romelie; et dans ia Laconic, ce seraient la puissance territoiiale et I'anciennete de la famillc. Les jeunes i;cns qui ont visite I'Europe, qui ont frequentc ses ecoles et ses academies , parviendraient natu- rellement aux diverses fonctions administratives , et contri- bueraient ainsi aux progres de I'ordre et de la civilisation. 11 parait difficile de trouver dans ces elemens de quoi faire peur, meme aux plus timides ; au contraire , on peiit y voir de quoi constituer un ordre social suffisamment regulier. Je n'entends pas repondre aux objections de ceux qui en sont encore a savoir si le Turc dominera en Grece : je ne discute point avec eux. La Grece marche depuis six ans pour repondre a ceux qui nient son mouvement. Pour nous, qui des ses premiers pas avons pressenti ses futures destinees , respirons en voyant que la voix des nations a su penetrer enfin dans les conseils de leurs chefs , et preparons-nous a redoubler de zele pour consommer et af- fermir ce nouveau miracle de la civilisation. A. M. Le General Dtjmouriez et la Revolutiopj francaise; par M. Ledieu (i). Voici un livre comme il en parait fort peu de nos jours : ce n'est point un sterile hommage offert a I'amitie par ia recon- naissance sur la pierre d'un tombeau; c'est un combat livre pour des cendres qui, depuis quatre annees, reposent dans une terre etrangere , et sur Icsquelles pese encoi'e, apres trente ans de proscription , I'injustice, ou, si Ton veut, la vengeance de (i) Paris, iSsfi; Ponthien, au Palais-Royal; P. Dupont, rue du Bouloi. I vol. in-S" de 5ri pages; prix , 7 fr. 5o c. 438 SCIENCES MORALES tons les partis. Ecrire et publicr Vilogc du g«'ueial Duinouriea pouvait n'etre, pour un ami, qu'un devoir accompli sans dan- '^Qv: fairc son apologic, telle que I'a faite et I'imprime M. Le- dieu , est le devoument dn courage. Cette tache prescrite par I'affection, c'est la conviction qui I'a remj)lie. L'auteur a pu se tromper ; jc crois meme qu'il se trompe quelquefois; jamais il n'a separe sciemment deuxchoses egalement saintes, amitie et sincerite. Mais , a peine a-t-il pris la plume sous leurs nobles inspirations, qu'il voit ses idees s'etendre , et un sentiment qui pour exister doit dominer tousles autres, I'amour de la patrie, vient aussitot agrandir sa carriere, en elevant beaucoupson but. Le general Dumouriez avail pris une part active a nosluttes politiques; c'etait lui qui, le premier, avait conduit a la vic- toire le drapeau de la liberte; toute la partie historique de sa vie etait liee a I'histoire de notre revolution. En discutant les reproches qui s'elevercnt centre lui a la tribune nationale, comme dans les murs de Coblentz, on se trouvait conduit, pour le defendre, a discuter aussi toutes les opinions. M.Ledieu pouvait done, sans trop s'ccarter de sa route, rencontrer a chaque pas quelqu'une de ces hautes questions agitees depuis pres d'un demi-siecle dans les Assemblees des peuples, et dans les Conseils des rois, et sur les champs de bataille. M. Ledieu a fait plus; il les a toutes embrassees et comme entassees dans son vasie plan. 11 y avait a cela des diflicultes de plus d'un genre, et plus d'un peril : mais il a vaincu les obstacles; et quant aux dangers, il les brave : voila ce qui donne a son livre uu interet general. Suivant lui, et I'ou sent qu'il parle avec une intime persua- sion, jamais Dumouriez n'a trahi ni la liberte, ni la France.. Que l'auteur reussisse ou non a convaincre ses lecteurs, comme il est convaincu lui-menie, ce sera toujours du moins une chose honorable au vainqueur de Jemmappes que cette conviction hautement professee par im homme dont le patriotisme egale les lumieres, et qu'on sait avoir fait long-tenisune etude par(i- culiere des pieces de ce grand proces. Son livre est divisti en quatre parties. La premiere est \\\\ ET POLITIQUES. 439 prtcL^ de la vie de Dumoiiriez avant 1789. On y frouvera de rinttret, une grandevariete, beaucoup d'esprit, quelques anec- dotes piquantes. Mais un spectacle d'un autre ordre nous ap- pelle, et deja s'ouvre la scene oii cette vie, jusqu'alors pen celebre, va devenir une vie historique. Sur cette effrayante scene on nous avons vu paraitre et s'eva- nouJr tant de renommees; dans ces luttes politiques qui ont rcmpli la fin du dernier sieclc, et dont la secousse affaiblie agite encore I'Europe, Dumouriez a eu le tort ou I'honneur de mecontenter les deux partis. Tons deux I'accusent ensemble, Tun d'avoir adopte, I'autre d'avoir trahi la cause des peu- ples. Dumouriez a-t-il du suivre le parti de la revolution? Du- mouriez a-t-il dxi quitter ce parti? Telle est la double question qui se prescnte. » La premiere, dit M. Ledieu, n'est pas ime question d'individu. C'est la cause nationale qu'il faut defendre au tribunal de Topinion publique et de la posterite. C'est la France qu'il faut justifier; cav c'est la France qui a voulu la revolution , et qui est accusee. » Repondre a cette accusation, est I'objet de la seconde partic. Pour y repondre , M. Ledieu s'attache a prouver que la revo- lution etait necessaire; et, pour prouver cette necessite, il croit devoir tracer un tableau de notre gouvernement, depuis I'in- vasion des Germains jusqu'a 1789. II etablit, contradictoire- ment a la declaration de Verone, que I'ancienne France n'a jamais eu ni constitution , ni lois fondamentales fixes, ni maxi- mes irrevocables d'administration; que les quatorze siecles de la monarchie ontete quatorze cents ans de revolutions souvent sanglantes et plus souvent insensees; que les etats-generaux, qui n'ont pas ete deux fois convoques d'apres les memes prin- cipes , n'ont jamais offert le caractere ni d'une institution stable, ni d'une diete vraiment nationale; enfin, qu'au moment ou eclata le mecontentement public, precurseur d'une revo- lution nouvelle , les desordres des derniers regnes avaient acheve de rompre tout equilibre entre les divers eltmens dont se composait la nation. En general , dans cette esquisse bardie, le trait de I'auteur 4'.o SCIENCES MORALES est tnergique : sans adopter toutes ses idees , on est prescjue toujoyis entraine a partager ses impressions. II saisit vivement les objets et les retrace de meme; soit qu'il peigne ces rois f&invuns qui semblcrcnt nc passer sur le trone que pour Vchranler et Vavilir; soit qu'il crayonne le portrait de I'astucieux Louis XI , si souvent compare a Tibere, et qui , pour le dire en passant , n'a , selon nioi , merite Ni cet exces d'honneur, ni cette indignite; soit qu'apres nous avoir montre ou seulement fait entrevoir, a la lueur des torches et des buchers , les regnes de Henri II , de Francois II , de Charles IX et de Henri III (i) , il resume ainsi tout ensemble , ses observations et ses peintures , ses emo- tions et ses pensees : « Les voila dans tout leur developpement, dans toute leur energie , les lois constitutives , les principes fondamentaux de la monarchic francaise ! Les droits des rois sont tout ce qu'ils osent, tout ce qu'ils peuvent; les droits des nobles, tout ce qu'ils osent, tout ce qu'ils peuvent; les droits du clerge , tout ce qu'il ose , tout ce qu'il peut ; et les droits du peu- ple, tout ce qu'il ose et tout ce qu'il peut. Les limites de ces pouvoirs, les garanties de ces droits, de ces privileges , deces libertes, decesimmunites, sontlacorde, la hache, lepoignard, des combats, des massacres et des incendies. » Ce coup-d'osil jete sur notre histoire amene et motive la reponse a la premiere des deux questions que le defenseur de Dumouriez s'est pro- pose de resoudre. « La revolution , dit-il , etait devenue immi- nente... EUe n'avait pour but que de retablir I'equilibre, de rendre aux peuples leurs droits, aux lois une autorite imiver- selle, au gouvernement la force necessaire pour les faire exe- cutor ( p. 2o3 ) : elle etait inevitable : Louis XVI, parcc qu'il etait vertueux, parce qu'il etait eclaire, devait en ctre le chef; (i) De I'avenement de Henri U ( i547) ^ I'assassinat de Henri III ( 1 589 ) ; en tout , pres de cinquante annees d'attentats et de calamites publiqiies, qu'il aurait peut-^tre mieux vaiu parcourir que traversef d'une course si rapide. ET POLITIQUES. 44 1 done, Dumoiinez devait en suivre le parti, piiisqne c'ctait celiii clu roi, des lumieres et de la vertu ( p. 197 et 198 ). Jusqu'ici la tache de I'ecrivain ne lui avait pas offert de grandes difficultes : il defcndait une cause gagnee au tribunal de I'Europe. Mais, lorsque dans sa troisieme partie il agite cette autre question, bien moins simple et beaucoup plus epineuse, Ic general Dumouriez a-t-il du abandonner le parti de la i-cvolti- tion? a I'instant, tout se complique, tout change on parait changer. Les memes voix qui, tout u I'heure, s'elevaient pour s'unir a celle de I'auteur, s'elevent maintenant pour le com- battre; et ses premiers adversai^es lui crient, comme ses nou- veaux assaillans : Ce n'etait pas au general qui avait arbore les trois couleurs sur les redoutes de Jemmappes a s'allier au prince de Cobourg. A mesure que I'ecrivain avance et s'enfonce dans la discussion, les obstacles s'agrandissent et se multiplient: il lui faut, a chaque pas, joindre I'adresse au courage; il sem- i)le faire une marclie de flanc entre deux ennemis. C'est, a coup siir, dans ce morceau qu'il a deploye le plus de ressources , le ])lus de force d'argumentation, le plus d'originalite et de pro- fondeur. C'est done aussi sur ce morceau, a tous egards tres- remarquable, que je dois plus particulierement appeler I'at- tention de nos lecteurs. Je vais tacher d'en donner I'idee la plus fidele et la moins incomplete possible , sans en interrompre les developpemens, ni en alterer I'cffetpar aucune especede con- troverse ; sans adopter, sans refuter un seul mot, du moins encore. Ce ne fut point la revolution qu'abandonna Dumouriez. La centre-revolution, par ses appels a la force, par I'irritation que ses menaces n'avaient pas cesse de nourrir dans le parti de la liberie, avait fait naitre un tiers parti , que I'auteur appelle V ultra-revolution , et qui vainquit la revolution mcme. Ce fut par fidelite a la revolution vaincue que Dumouriez voulut de- truire V ultra-revolution triomphante. Peut-etre M. Ledieu se serait-il explique plus clairement, si n'employant que des ex- pressions generalement adoptees, il avait dit : Dumouriez , royaliste constitutionnel, se separa des republicains, comme il avait combattu les emigres, par fidelite aux principes de la 441 SCIENCES MORALES monarchic liniitee. Quoi qu'il en soit, pour mesurer ot montior tout rintcrvalle qui divise la revolution et Tultra-revolution, pour indiquer pas a pas la marche do I'esprit public, signaler les vues do la cour , les projcts de remigration , et les entre- prises dcs jacobins, I'auteur esquisse a grands traits I'histoire dc nos premieres legislatures; ct ce qui ne merito point de me- diocres elogos, de tons lesouvrages publics sur cct inepuisable sujet, le sien est peut-etre cclui qui suppose les plus mures et les plus graves reflexions. On y trouve retracees d'une maniere bardie et les deliberations de I'Assemblee constituante , ctles oppositions de la cour, et les mences de I'emigration, et I'ac- tivite toujours croissante que tant de resistances vaincues avaient sans cesse imprimee au mouvement national. Enfin, la Contre-Revolution , en franchissant, sous les dra- peaux etrangers, les frontieres de la France, porte le dernier coup a la monarchic. Aux canons du due de Brunswick repond le tocsin du Dix-Aout. A peine la nouvelle en est-clle portee a M. La Fayette, que, rassemblant ses soldals, ilrenouvelle et fait renouveler par ses troupes le serment d'etre fideles a la nation, a la loi et au roi. II ordonne aux chefs de sou armee, qui commandent des corps scpares , d'exiger le meme serment. Dumouriez refuse d'obeir. II le devait , affirme I'auteur ; car la demarche de M. La Fayette ne pouvait qu'ajouter aux dangers de la France, et plus encore , k ceux de Louis XVI. Tel fut le motif, ajoute-t-il, le seul motif de Dumouriez , qui ne pouvait point s'attendre k remplacer son general. Mais, dira-t-on, comment Dumouriez, si sincerement atta- che a la Revolution telle que la definit I'auteur, put-il accepter le commandement supreme, lorsque deja V Ultra - Revolution tenait captif le chef de la monarchic, et s'appretait a dechirer le pacte de 1791 ? Cc fut, repond M. Ledieu , parce que I'irri- tation generale qui sculc alimentait I'Ultra-Revolution, et lui pretait chaque jour de nouvelles forces, n'avait ete produite , ct n'etait entretenue que par la craintedu despotisme et les me- naces de la Contre-Revolution. En faisant taire les menaces, on imposerait silence a I'anarchie; en repoussant les dangers ET POLITIQUES. 443 qui avait'iit aigri ies cobuis, on ramenorait Ics esprits aux prin- cipes nioderes de I'Assemblce Constituante. La loyaute n'etait pas encore abolie. Pour retablir Louis XVI dans tous ses droits constitutionnels, il ne faudrait que vaincre I'etranger dont la pornicieuse intervention I'avait jele dans Ies fers. Tellesetaient Ies esperances et Ies vues de Dumouriez. Cependant , la Republique est proclamee : on demande aux troupes un nouveau scrment. Tous Ies liens qui unissaieiit la patrie et le roi etaient rninpus ; mais la patrie et le roi existaient toujuius : ... le general Dumouriez croyait avoir encore des de- voirs a rempUr envcrs I'un etenvers C autre , et etre capable de Ies sauver tous deux ; it devait V entreprendre . II reussit a chasser Ies Prussiens. Mais , au moment ou leur retraite aurait pu inspirer quelque moderation aux chefs du parti vainqueur, I'Autriche renouvela I'irritation, en franchissant, a son tour, une autre de nos frontieres. Dumouriez envoie en Flandre une partie de son armee, et vient lui-meme a Paris, s'instruire de ce qu'ily avail a craindre ou a esperer au sujet de Louis XV 1. Effraye de I'animosite qui regnait entre Ies partis, i7 chercha, poursuit I'auteur , « rallierles Girondins et Ies Impartiaux, pour ubattre Ies jacobins , el sauver le roi. Danton , quoiqu'il se fut montre cruel , n'etait point inaccessible a la pitie ; il pouvait etre fort utile : mais la Gironde refusa de se rapprocher de lui, et Danton ne songea plus qu'a la vengeance. Dumouriez vou- lut se demettre dii commandement : la Gironde Ten dissuada. Alors, il resolutde tenter ce quepourrait I'ascendant dont I'ar- merait une grande victoire. II partit; et , vainqueur a Jemmapes, conquit a la fois la Belgique et I'enthousiasme national. Faible secours! Tant de gloirc ne pouvait balancer I'energie de i'Ultra- Revolution. Vainement, retourne seul a Paris, Dumouriez em- ploya tout, d'abord aupres de la Gironde et de quelques chefs montagnards; enfin aupres du commandant de la Garde Natio- nale' : rien ne put empechepni la condamnation ni le supplice du monarque. « La Revolution avaitperi, continue M. Ledieu : Dumou- riez lui avait ete fidelc ; il I'avait servie avec succes et avec 444 SCIENCES MORALES gloire. I/UltnVRcvolution tiioiiiphait ; et le general , decide a ne la point servir , n'eprouvait que le besoin d'aller pleurer , dans la retraite, des crimes dont il etait innocent et inconso- lable. » II savait hlen que scs jours etaicnt menaces, que les meneurs de la Montagne tramaient deja son arrtstation; mais ces perils nc pouvaient I'cffrayer. Les factions triomplinntcs en- noblissent les eclinfaitds qu'ellcs drcssent au noni de I'anarchic , comme an nom de la royautc : on j pent monter avec gloire. De nouvelles reflexions, et les conseils de quelques amis enga- gerent Dumouriez a ne pas abandonncr la direction d'une armee qui seule pouvait renverser la tyrannic des jacobins. II conser- vait encore I'espoir de sauver la famille royale; et il lui fallait, avant de le tenter, une campagne briilante. Ses plans faisaient presager le plus eclatant succes. Mais la Montagne, qui penetra ses desseins , voidut , dit I'auteur , lefaire battre ; il fut trahi. Un seul moyen lui rcstait ; entrainer une partie de son armee sur Paris , et dissoudre la Convention par la force des baionnettes- Alors, ouvrant a d'illustres captifs les portes de la prison du Temple, il aurait remis en vigueur la constitution de 1791. Mais, s'il s'eloignait de la frontiere, les Autricliiens allaient derechef penetrer dans nos provinces : il devait done, avaut tout, obtenir une suspension d'hostilites. Cela menie ne suffirait point : Tennemi , encourage par I'inferiorite des troupes qu'on aurait laissees devant lui, pourrait trouver quelque pretexte de violer I'armistice. Pour retablir I'equilibre entre les forces des deux camps , Dumoiuiez devait done exiger qu'une partie des regimens autrichiens I'accompagnat dans son mouvement sur Paris. Ce mouvement pouvait porter aux plus terribles violences et la Convention et la Commune; il pouvait devenir le signal du massacre de la famille royale. Pour prevenir des attentats , Dumouriez devait done se donner des otages, et garder en son pouvoir les commissaires de la Convention. Ce n'est point, conclut I'auleur , dont je ne puis, on le sent bien , donner cju'une tres-courte ettres-seche analyse, ce n'est point trahir sa patrie que de s'insurger contre un gouvernementoppresseur; ce ji'est point trahir sa patrie que de trniter avec I'ennemi, quand ET POLITIQUES. 4.^.1 Ui continuation des hostilitc-s no sanrait ctro d'anciin avautage pour la nation ; co n'cstpoint traliir sapatrie quede marcheravec dcs troupes etrangt-res, qiiand on ne lesrccoit sous sesdrapeaux que conirae une garantie de la neutralite de leur chef. Apres cct expose, dont je suis loin d'avoir reproduit tout I'interet, toute I'adresse, ou plutot dont jen'ai fait qu'une es- pece de tabic des matieres , M. Ledieu rappelle les malheurs que rinsurrection du general, si elle avait reussi, aurait epargnes a la France; d'un -cote, les exces de la Terrciir , de I'autre, le dcspotisme de Bonaparte ; et il termine en offrant a ses lec- teurs un parallele tres - remarquable de la restauration telle (jue Dumouriez s'etait propose de la faire en avril 179!^ , et de la restauration telle qu'Alexandre I'a faite en avril 1814. On ne peut mettrc en doute que I'anteur ne soit fortement persuade : on pourrait difficilement pretendre qu'un liomnie de ce merite, apres avoir long - terns vecu dans I'intimite du general , se soit mepris sur les intentions qui avaicnt autrefois guide son vieil ami. Mais alors, ouje m'abuse, ou Dumouriez a bien pen connu les circonstances et les hommes au milieu desquels il se trouvait. Attaqucr la Convention avec des troupes francaises aurait ete une entreprise susceptible, a la rigueur , de succes. Mais, du moment qu'un bataillon , un uniforme au- trichien -flurait paru dans le camp dcs insurges , la Convention n'auiait eii rien a craindrc et rien a faire; elle aurait pu se re- poser, de son salut et de sa vengeance, sur I'indignation pu- blique. Dumouriez ne devait pas mcme s'attendre a soulever son armee : et, en echouant dans sa tentative, il ne pouvait qu'ajouter a I'ascendant, comme aux fureurs de la Montagne ; livrer en butte aux soupcons , rendre suspect le patriotisme de la Gironde, dont les chefs avaient eu et conservaient encore des liaisons avec lui; et par-la meme, assurer d'avance, ou du moins rendre plus facile le triomphe de la Commune , dans la lutte du 3 1 Mai. D'un autre cote, en supposant qu'un coup de main reussit, et que Dumouriez se vit un moment I'arbitrc de nos destinees, la restauration, fiite sous ses auspices, aurait pcu ressemble , T. xxxiii. — Fevrier 1827. 29 445 SCIENCES MORALES selon toute apparence, oil n'aurait pas rcssemble long- terns a I'idee que s'en forme I'auteur. Un mois , huit jours peut-etre apres le triomphe, on aurait derechcf intimc an restaurateur du tronc le manifesto du due dc Brunswick; et, s'il se fut pcrmis dereclamer, oului auraitrepondu : Ceci \ou^ coricetvie , comma tousles autres... Vous avez detruit le mouvement national qui seal pouvait nous arreter. Vous avez conduit a Paris le dra- peau et les mousquets de I'Autriche : nous sommes les maitres : F'cs vi'ctis! Tel est du moins mon avis, on sil'onveut, telles sont mes conjectures , fondees sur dcs raisons trop nombreuses et trop longues a deduirc pour les developper ici, mais que la plupart de mes lecterns retrouveront dans leurs souvenirs. Ce qu'il y a dc bien certain , c'est que le panegyriste , ou plu- tot le defens€ur et I'historien de Dumouriez a montre , dans cette partie deson ouvr'age, autant de lumieres que de devou- raent, autant de talent que de courage. C'est un de ces ecri- vains dont la penetration saisit, dont la reflexion rassemble et coordonnebeaucoup d'idees. II agitc avec force de hautes ques- tions, il exprime avec energie des sentimcns genereux, il rend avee eclat de nobles images. Son livre, plein de choses et d'e- motions, contient un grand nombre demorceaux plus partieu- lierement remarquables, tels, par exemple, que le tableau de la Federation au Champ-de-Mars , le resume des travaux de VJssemblce Constitaante {\) , la pcinture dc la Convention, les reflexions de I'auteur sur la scission dcs Feuillans , et plusieurs autres passages, tout aussi dislingues, que je pouiTais noter encore sans sortir de cette troisieme partie. La (y«a^r/^/rte, quoique moins importante , renferme aussi des discussions et des peintures d'un haut interet. Elle nous montre d'abord Dumouriez proscrit par la Convention , persecute par les Emigres, tourmente par les ministres de I'Autriche, oblige de changer a chaque instant dc retraite, mais sans relache occupe des moyens , preoccupe de I'es- (i) Tout k pacte social qu'elle donna aux Franca is y est renferm(S en une page. ET POLITIQUES. l^t^^ poir de rappeler un jour sa patrie a la forme de gouverne- ment qu'il avail toujours preferee. Nous le voyons ensuite ecrire ses Memoires et son Coup-d'oeil politique sur I'avenir de la France. Nous le suivons avec curiosite dans un voyage k Mittau et a Petersbourg , dont le recit, tres-iapide, offre, en effet, deux anecdotes tres-curieuses. Enfin, les Anglais, me- naces d'une invasion par Bonaparte, lui font demander des plans de defense, et il se fixe dans leur lie. La, continuant de mediter sur la situation politique et les affaires de I'Europe, il continue aussi de publier, a differentes epoques, les resultats de ses meditations. Les evenemens de i8i3 et de 1814 rappel- lent en France I'emigration, ou plutot ses faibles restes. Du- mouriez se refuse a rentrer avec eux. « II pensait , dit M. Ledieu, que les services rendus a sa patrie pendant son geueralat en chef meritaient une recompense nationale, et que la pro- scription qu'il avait encouruc par sa tentative... pour relever le trone constitutionnel , lui donnait quelques titres a la bien- veillance du roi... Ce que son ambition desirait de la nation et du prince, c'etait de pouvoir passer en France le peu d'annees que lui reseivait le ciel, comme I'egal do ceiix a qui il avait donne les premieres lecons de la victoire... Au lieu du baton de marechal, qu'eut honoi'e sa main mutilee, on lui fit offrir 20,000 francs de traitement comme lieutenant-general en retraite; et le general Dumouriez renonca a I'esperance de revoir sa patrie. » Du sein de I'exil on s'ecoulait sa vieillesse, il repondit toujours avec transport au cri de liberte , sur quelque partie du globe que ce cri se fit entendre. II fournit des plans de defense aux Napolitains et aux Espagnols. L'insurrection de la Grece, surtout, produisit sur son ame une impression aussi vive que profonde. II secourut de ses conseils cette nation heroique, regrettant que son grand age lui interdit le bonheur de la servir de son epee. II ne parlait qu'avec enthousiasme d'une lutte, a ses yeux, sacree, et qui avait comme reproduit tous les prodiges de la Grece antique , meme avant ces merveilles de Mlisolonghi , dont une plume accoutumce a retracer I'heroisme 29- 4/,8 SCIENCES MORALES vient de nous domuv rincroyablf tt ccpfmlaiit lidclc liis toi»'e (i). M. Lodieu nous fait coiinaitre quolqiK's ouvragrs do Diunou- riez qui, jiis(|u'a ce join-, n'ont pas ilc roudus publics; il en cite dos fragmens; ct finit par retracor, avcc la double emo- tion de I'amitic et du regret, les vertus privees du general, les sentimens et les pensees qui remplissaient encore sa vie an moment ou la mort I'a frappe. II serait difficile de lire cette (in de I'ouvrage, sans partagcr rinteiet que le vieux guerrier savait inspiier a tons ccux qui I'environnaient, et qui etaient heurcux de rapproclier. On finit par faire plus que compreudre I'inconsolable affliction ou sa perte les a tons plonges : et, tandis qu'ils detournent vers sa tombe iin touchant souvenir d'amour et de respect, on s'unit a eiix par la pensee, en y deposant un regret. Avec la plupart des ecrivains, ma tache serait linie ; niais, quand un autcur a du style , il y aiirait de I'injustice a ne pas offrir aux lecteurs quelqiie citation assez etenduepour les mettre a portee dejuger eux-memes. J'ai marque un grand nombre de morceaux : en voici un qui pcrdra moins que tout autre a etre offert isolement. « Si Dumouriez avait ete I'homme de I'anar- chie, s'il avait pense ne combattre que pour elle , il I'aiu-ait franchement avoue, et loin de Ten disculper..., jc proclamc- rais qu'il a eu raison, etqu'entre les deux fleaux qui nienacaient son pays, il s'est decide pour le moindre. Sans doute, elle est bicn atroce, bien epouvantable, I'anarchie! Nous I'avons vu promener dans nos campagnes ses hordes devastatrices , ses torches et ses haches : mais le despotisme ne lache-t-il pas aussi ses hordes, n'allumc-t-il pas ses torches, et ne frappe-t-il pas des memos haches? L'anarchie, en faisant couler dos tor- rens de sang, en creant de vastos mines, fait-elle autre chose que pratiquer les Iccons de la tyrannic ? Ses proscriptions, ses (i) Voyez, dans notre cahier de Janvier, t. xxxiiide la collection , page 124 > t'analvse de V Hisloire du siege de Missolonglii, par M. Aii- «-uste Fabre. ET POLITIQUES. 449 exils sont moins nombreux encore; et, sans remontcr a des tcnis loin do nous, ne trouvcrais-jc point d'exemplos a titer, des emprisonnemens illeyaux , des exils arbitraires , dos tiibii- naux sanguinaires , des assassinats judiciaires , des massacres ; et, suivant les expressions de Tacite,la proscription de la gloirc , de la vertu, de la fortune et du courage; les mers couvertes de fugitifs?... Au moment ou ces mots tombent de ma plume, j'entends le bruit effrayant des vents et des flots, mes yeux sv. fixent sur I'Ocean, dont les vagues en fureur ouvrent de vastes tombes qu'elles s'empressent de combler. Pres de moi sont des debris qui tout a I'heure etaient des vaisseaux, et dans Ic lointain je vois des vaisseaux qui tout a I'heure seront des debris, et jettcront sur la plage les cadavres des peninsulaires qui ont demande aux orages de la nature un asile contre les orages sans pitie de la tyrannic (i)! Oui, j'ose le dire, a atrocites egales, superieures meme, I'anarchie est prefe- rable au despotisme. La premiere, plus odieuse, plus vile, s'epuise par ses convulsions; et, sans combinaisons, sans liaison , sans avenir dans ses forfaits , elle se detruit par ses propres efforts. Le despotisme froid, methodique, systcma- tique, avec ime apparence de grandeur, trouve dans ses cruautes des moyens de conservation et d'accroissement. L'anarchie n'a qu'une existence passagei'c. Une partie de la generation qui en a ete temoin ou victime lui survit toujours pour la fletrir, et en epouvanter les races futures : mais le despotisme , traversant orgueilleusement les siecles , ecrase des generations entieres,... et souvent, au lieu de I'exe- cration, revetu du manteau de la gloire ( nous I'avons vu ) , il recoit des hommages. » On ne saurait mcconnaitre dans ce morccau, qui n'est ce- (i) •< Ce fut dans la matinee du 23 novembre i8a4 > '"' 'a campagne d'un ami , dont la maison dominait la superbe rade de Plymouth , toute couverte de batimens naufrages , que j'ecri-vis cette page et les precedentes. » ( A'o/e (fc Vauicur. ) /,5o SCIENCES MORALES ET POLITIQUES. pendant pas le meilleur tie I'ouvrage, une energie pen com- mune de pensee et d'expression, de fyrtes et vives images , du mouvemcnt, dii coloris. Quel est celui de nos grands ecrivains qui n'eut pas avoue ce trait : Pres de moi sont dcs debris qui tout a I'heure etaient des vaisscaux , et dans le Inintain je vois des vaisscaux qui tout a theure seront des debris , etc. ? Quand des beautes de cet ordre, et peut-etre meme plus saillantes , se rencontrent frequemment dans ime composition originale et difficile, pourrait-on s'appesantir sur quelques defauts de gout qu'on aperccvrait de loin a loin, sur des tournures ou des locutions insolites, qui viendraient, au moins en partie, du long sejour de I'auteur chez xme nation voisine? Quelques traits de plume tires sur les epreuves d'une seconde edition feront disparaitre ces taches legeres , et I'ouvrage restera. II assure 4 M. Ledieu une place distinguee comme penseur et comme ecrivain. F. I>. T. LITT^RATURE. Obras dramaticas y liricas de D. Leandro- Fernandez DE MoRATiN , entre los Arcades de Roma Inarco Ce- LENIO. OEuVRES DRAMATIQUES ET LYRIQUES dc D. L.-F. DE MoRATIN (l). MoRATiN nitrite certainement le surnom de restaurateur de I'art dramatique en Espagne, que lui ont donne ses contempo- rains. L'honneur d'avoir reforme la scene castillane appartient a celui qui en a banni le mauvais gout, et qui a su y introduire la raison etla philosophic. C'est, en effet, Moratin qui, en of- frant dans ses comedies des tableaux fidelcs de caracteres et de moeurs, a ramcne I'art thcatral a son veritable but, celui d'e- mouvoir pour instruire et corriger : but important que la plu- part despoetes cspagnols avaient presque entierement meconnu jusqu'a lui. La reforme du theatre etait, il est vrai, ardemment desiree par tout ce qu'il y avait en Espagne d'hommes eclaires ; mais il est des epoques malheureuses en litterature, ou les amis de la raison se bornent ii faire des vceux steriles, et pendant lesquelles les ecrits memes dc quelques litterateurs distingues ne sauraient excrcer qu'une influence faible et incertaine sur les prejuges du plus grand nombre. Get empire du mauvais gout a dure, en Espagne, plus long-tems que dans les autres pays de I'Europe. On chercherait done en vain a diminuer la gloire de Mora- tin, en disant qu'il n'a fait que suivre la route deja indiquee par les critiques , ou parcourue par les poetes cspagnols. Des ou- vrages remarquables, sans doute, avaient paru quelques annees (i) Paris, 1825 ; Th. Barrois fils, rue RJcUeheu, u" i5. 3 vol. Jn-8"; prix, 37 fr. 452 LITTERATURE. avant les siens; ils renfermaient dcs icU-es saines sur la littera- tiire en general , et sur I'art draniatiquc en particulicr ; on y faisait apprc-cier avec soin les bcautcs dcs autcurs classiques , aiiciens ct modcrncs; on y ctublissait en memc terns des prift- cipes generaux et des regies fixes sur Felorjuence et sur !a poe- sie. Mais, il ne suflit pas d'avoir de bons codes de litterature : il pent se faire , qu'avec d'excellcns rheteurs , on manque d'e- popees, et de bons ouvrages dramatiques , et qu'avec unc con- naissance approfoudie des regies, on soit loin encore d'atteindre la perfection dans leslettres et dans les arts. On sent aisement, d'ailleurs, quelespoetes dramatiques espagnols, en quittant la route generalcment suivie, out du s'en ecarter avec une grande timidite , et qu'il leur aura fallu bien des menagemens pour in- troduire dans leurs comedies I'usage des regies des unites , puisqu'ils avaicnt affaire a une multitude ignorante, accoutu- mee k tout applaudir sans discerncment, et en possession de trouver ravissantes, admirables, de mauvaises comedies, on de veritables farces. Aussi, a peine pourrait-on nomnier, parmi le petit nombre de poetes comiques qui ont precede Moratin, quelqu'un qui, ayant essaye de prendre une marche reguliere et raisonnable sur la scene , ait su reunir le nature! et la grace , et atteindre le but de I'art dramatique. Si le theatre espagnol jiresente maintcnantquclques bonnes comedies, tracees d'apres les regies , ct selon I'esprit de I'ecole moderne ; s'il pent offrir des modeles dignes d'etre imites , c'est au talent d'observation dont Moratin est doue , a la connaissance appiofondie qu'il a de I'art theatral , a I'etude qu'il a faite des moeuis et de la langue de sa nation, que la litterature espaguole doit ce pre- cieux avantage. Rien ne fera mieux sentir la verite de ces assertions qu'une esquisse de I'etat et des progres du theatre en Espagne, pendant le xviii* siecle, parce qu'elle niontrera combien ces progres ont ete lents, et quels obstacles la raison a du surmonter pour reformer unepartiesiessentiellc delalitterature. II n'cntre point dans notre sujet de recherchcr ici les causes morales , reli- gieuses on politiques qui ont rctarde le trioniphc des saines LITTER A.TURE. /,53 doctrines litteraiies dans cette nation : il s'agit sunplemcnt de constater les fails historiqiies , sans remonter aux causes. On s'accorde a rcconnaitre, dans les ancienncs comedies cspagnoles, de la chaleur, de la verve, des beautes de detail, des descriptions ingenieuses : on ne refuse pas non plus aux poetes comiques cspagnols de rimagination ; niais leur ancicn theatre laisse a desircr dc la raison, de I'ordre, de rensemblc. On regrette surtout de le trouver trop eloigne du but que la comedie ne doit jamais perdre de vuc. Que Ton ne cherche point a excuser cette deviation des principes immuables du gout et de la raison , en disant qu'ils n'etaient pas connus des anciens poetes comiques castillans. Car, outre que I'histoire litteraire de I'Espagne, au xvi^ siecle, nous montre que les anciens poetes grecs et romains etaient generalement etudies par les hommes livres a la culture des Icttres; Bnrthelemy Torres Naharro , 120 ans avant la naissance deBoilcau, avail deja mis en pratique, dans quelques - unes de ses comedies , certaines regies des unites , en quoi il n'eut malheureusement pas d'imitateurs. Onsaitque rimmortel auteur de Z)ort Qidcliotc a traite de la poesie et dc la litteraturc en homme superieur, imbu des preceples d'Aristote et de Quintilien. Lc Pinciano, dans SIX Philosop/iit' dc I' anciennc poesie , ouvrage qu'il fit im- primer en iSgG, insiste sur la necessite de so tracer des regies pour la composition dramatique. I/action, dit-il, ne doit jamais durer plus de trois jours : moins elle aura de duree , mieux elle vaudra. On doit blamer, dit-il ailleurs, ces pieces dans les- quelles on voit les personnages naitre , croilrc , se marier , avoir des enfans, et menie des petits enfans; ce qui ne saurait ctre tolcre dans la fable epique, qui n'est pourlant pas soimiise a des lois aussi severes que la comedie. « Lope dc ^ega, le plus fecond elle plus ingenieux des poetes comiques espagnols, avoue avec une rare franchise que , tout en connaissant les regies de I'art, il ne se souciail nuUemcnt dc les observer dans ses comedies; et il donnc pour motif que, clierchant a piaire au public, (jui lui pavait ses pieces, il ne devait fairc autre 454 LlTTJilRATURE. chose que flatter le gout et Ics caprices de la multitude , tout- ii-fait etrangeie a la connaissancc des regies. Lcs auteurs dramatiques qui vinrcnt apres Lope de Vega ne pousserenl point la franchise aussi loin que ce poete , cour- tisan de la multitude ; mais ils conlinucrcnt d'agir d'apres les memes principes. Voulant ctrc, comma lui, populaircs avant tout, ils conscntircnt ii outrager le gout et la raison, plutot que de mecontenter le peuple, auquel ils avaient envie de plaire. II en resulta que , malgre les conseils des bons maitres, malgre quelques lueurs de bon gout qui se faisaient remarquer de tems a autre dans les comedies, la scene fut inondte de pie- ces ou les preceptes de I'art etaient meconnus ; et la foule se porta au theatre pour y applaudir des farces ignobles , ou des imbroglio depourvus de grace et de raison. Les poetes suivirent leur plan favori, qui etait d'amuser, de faire rire le peuple, sans chercher ni a I'instruire , ni a le corriger ; quelques - uns firent meme tout ce qu'il fallait pour le pervertir par la repre- sentation de pieces, oil non-seulemcnt le vice, mais Ic crime triomphaient avcc eclat, au grand detriment de la morale pu- blique. Nous sommes forces de I'avouer, la deviation plus ou moins choquante des principes de I'art dramatique se fait re- marquer dans presque tous les poetes comiques espagnols, sans en excepter ceux qui se sont illustres a juste titre par la richesse de leur imagination , et par la fecondite de leur genie. Outre Lope de T'ega, des poetes tels que Calderon, Tirso de Molina , Solis, Morcto, et tant d'autres, n'ont pu racheter par des details d'un meritc superieur et incontestable ce defaut essentiel ct fondamental de leur composition. Vers le milieu du dernier siecle, quelques hommes eclaires firent sentir la necessite d'uAe reforme dans la litterature. Lu- zan fut le premier qui osa rappeler aux Espagnols les preceptes d'Aristote sur la rhetorique et sur la poesie. Nourri des mo- deles de I'antiquite, fiappe du desordre et des bizarreries qui degradaient la scene, degoute du g^/jg'omwr?, qui avait envahi la litterature, il s'occupa d'inculquer les regies sanctionnees LITTERATURE. /,55 par I'autorite des meilleurs maitres. Les productions adiuirables de la littcraturefrancaise,sous Louis XIV,avaient eto dues prin- cipalement ii I'observation des preceptes de I'art. La doctrine de Luzan puisa line nouvelle force dans ces modeles recens de correction et de goiit. Sa Poetique parut a Sarragosse, en 1737. Iln'estpas besoin de dire qu'elle n'etait pas une theorie deson invention : die doit etre considerec, au contraire, comme un code renferniant, outre les preceptes d'Aristote, les observa- tions de plusieurs critiques modernes etrangers, tels que Rapin, Corneille , Crousaz, Lamy , et M™e Dacier , parmi les Fran- cais; Muratori et Gravina , parmi les Italiens. Le succes de cet cuvrage fut peu eclatant ; on devait s'y attendre. Pour ce qui est de la reforme iheatrale, il eut ete peu raisonnaljle de comp- ter sur une revolution soudainc, les esprits se trouvant alors fortement cpris des ouvrages de I'c'cole dominante. Malgre les sages conseils de Luzan, la mass* des spectateurs demeura constamment attachee a ses auteurs favoi'is, et les poetcs drama- tiques ne songerent qu'a flatter le gout du public , souverain arbitre de la destinee de leurs comedies. Il aurait fallu , d'ail- leurs, pour enlever aux anciennes comedies la popularite d'ont elles continuaient a jouir, offrir a la multitude des pieces gaies, amusantes , nationales surtout, d'un merite reconnu , faites d'apres lenouveau systeme : or, cela n'etait point facile; car la theorie des unites, pour etre raisonnable, n'en presente pas moins au poete comique des difflcultes nombrcuses. Ainsi , tout ce que Luzan etait fonde a esperer, et ce qu'il obtint en effet par la publication de sa Poetique, fut de se faire com- prendre de quelques esprits droits, et de les initier aux secrets de I'art, preparant ainsi, quoique de loin, I'epoque ou Ton re- viendi-ait generalement a des idees saines sur cette branche de lalitterature. Mayans, Nasarre , Montiano y Luyando, poursuivirent la tache commencee par Luzan : le premier publia sa Rhetorique , calquee sur celle d'Aristote; le second fit imprimer les huit comedies de Cervantes, avec une preface on il lit sentir la ne- cessite de se conformer a des regies fixes, lorsquon veut faire d© 456 LITTERATDRE. bonnes pieces diamatiques. Montiano y Luyantlo lit niieiix : n<' se contcntant point d'enseigncr cettc doctrine, il ajouta Texeni- ple au preccpte, et publia deux tragedies : Firginie et Jtaulpltc, scproposant, rVst liii-mrme qui nous ledit, d'apprendre a sos compatiiotesla niethode pour ecrire dcs pieces scion les regies, et de i'aire voir en meme terns aux etrangers que les Espagnols connaissaient aussi la nature et les principes de I'art drama- tique. Mais, soit que Montiano n'osat pas affronter les dangers de la representation devant dcs spectatevns pen disposes a favo- riser de semblables innovations, soit que d'autres causes vins- sent contraiier ses desirs , Firginie et Jtaulpltc ne furcnl point jouees svu- le theatre public. Alors, on hasarda quelques essais pour la reforme de la • scene. Par malheur, les poetes, partisans de cette reforme, voulurent s'exercer de preference dans la tragedie , genre grave et sublime. Il cut et^ plus raisonnable, puisque celapre- sentait plus de chances de succes devant des spectateurs a qui Ton avait besoin de plaire, pour les convertir au nouvcau sys- teme, de les gagner d'abord par les graces ct le sourire de Thalie, avant de les initier aux fureurs de Melpomene. Qiioi qu'il en soit, don Nicolas- Fernandez de Moratin, pere de notre auteur, mit au jour trois tragedies : Lucrece , Hormcsinde, et Guzman el bueno. Gadahalso publia don Sancho Garcia; Ay ALA, Numance detruitc ; Huerta, Rachel ^\. Agamemnon ; Villaroel marquis de Palacios, Anne Bolene et don Sancho de Castilla. L'abbe Andres, jesuite espagnol , dit, dans son man , Calderon , Moveto , Rojas , Soles, Zamora et Ca'ni- zares ; celles de Razo , Regnard , Laviato , CorticiUe , Moncin , Metastase , Cornelia, Moliere , Valladares , Racine, Zabala , Goldoni, Nifo et Voltaire s'etonnerent de se trouver ensemble. » Ce fut an milieu de ce chaos theatral que le Delinquente Hon- rat/o ( I'Honnete criminel) parut, en 1770. L'auteur de cette comedie fut don Caspar Melchior dc Jovellanos, jeune encore alors, et que tant d'ecrits d'un merite incontestable dans divers /,Co LlTTlilliVTLlRE. t^onros, ct Ics ronctiuiis I'miiicntes (|u"il a rouiplifs avcc eclat dans la haute adniinistralion, ont illustrc depuis. Cettc coinc'- dic, entlercnient originale , malgre I'idcntite dc son litre avcc celui d'uno comcdie francaisc, fut imprimce a Sarragosso, a I'iiisu dc I'aiitcur; inais elle no parut sur la scene que quelcjue tenis apres. Jovellanos fut Ic premier poetc comique espagnol qui s'excrca dans le genre mi\te, appele drainc , auquel les Espagnols ont donne Ic uom de tragi-comcdia. Quoiquc ce genre ne flit pas de nature a obtcnir la faveur populaire, les gens de I'art, ainsi que les spectateurs edaires, se haterent d'applaudir aux sentimens d'huinanite et de philosophic que Jovellanos atlribue a un magistral verlucux et integre, lei que don Justo. lis louercnl avec raison la purete du langage , le dialogue facile, uaturel, que Ton remarque dans cet ouvrage. II etait malheu- reux, sans doiile, que Jovellanos dcbutat par cc genre de eo- medie; mais, a cela pres , on pouvait se feliciler de voir la philosophic monter avec honncur sur la scene, apres en avoir etc si long-lems et si injuslemcnt bannie. La naissance des infans jumeaux et la conclusion de la paix avcc rAnglelerrc donnerent lieua des rcjouissances publiqucs, en 1784. Lavillcde Madrid voulant cclebrer ces evenemens par des repiescnlations iheatrales, un concours ful oiivert devant V Academie royale dc la langue espagnole , qui devajt designer ct couronner les ouvragcs destines a etre joues sur la scene. Les pieces couronnees furent au nombre de trois : les Jrtisans [Mencstrulcs] ,Yt7Lr don Candido-Maria Trigueros; les Noces de Gamache par le celebre Melendez Valpes, et V Ata- Itualpa, par don Christoplic- Maria Cortes. Toutes les Irois eurent les honneurs de la representation ; mais aucunc d'elles 11' est restcc au theatre. Le public s'occupa a peine de YAtahualpa, tragedic donl le sujet avail etc pris dans rhistoire dc I'ancicn empire du Perou, ct qui, malgre sa regularite, manquail d'in- teret. Iriarte ( don Tomas) accabla les Mcnestrales d'epigram- ines el de sarcasmes; il fut impossible a Trigueros de lulter avec un si rude jouteur : la piece ful retiree du theatre, pour ny ]»lus re)>araitrc. Le sort dc cettc comcdie ful nicritc; car, comme LITTERATURE. 461 le reniarque foit bion Marchena ( dans son excellent Discours preliniinaiic dc I'ouvrage espagnol, inipiinie ii Bordeaux, en 1820, sous ce tilre : l.ccciones dcfilosofin moral y de clocuencia , Lecons de philosopliie morale et d'eloquence ), quoiqu'elle soit rcmplie de maximes fort bonnes en elles-memes, on ne saurait les souffrir au theatre, ou Ton ne va point polir entendre des sermons , mais pour assister a une action qui attire la curiosite des spcctateurs et les amuse en les instruisant, de sorte qu'ils deduisent la lecon de morale, non de ce qui leur a ete dit , ,mais de ce qu'ils viennent de voir. Du reste , les interlocuteurs de Trigueros ne ressemblent pas plus a des Espagnols qu'a des Lapons, ou a des Moscovites. Quant aux Noces de Gamache , comedie du genre pastoral , elle n'eut qu'un succes d'estime. Quoique remplie d'excellentes imitations d'Anacreon , de Vir- gile, du Tasse et de Gessner, et nialgre lemerite de la versifi- cation , elle offre un defaut capital , celui de I'union nial assortie de personnages et de caractcrcs n'ayant aucun rapport entre eux : elle manque aussi d'ensemble et d'harmonie. Les sentimens et les idees de Basilio et de Quiteria, le style elegant et fleuri que I'auteur leur prete, vont mal avec les emportemens de don Quichotte, personnage extravagant ct grotesque, dont la folic ne saurait paraifre aimable que sous le pinceau enchanteur de Cervantes. Le chant des oiseaux, les flcurs, les zephyrs, les descriptions bucoliques qui nous rappcllent I'age d'or , font disparate avec la grossiere loquacite de Sancho , avec ses pro- verbes, ses malices etsa poltronnerie. Melendez essaya de rcu- nir dans un meme cadre les dialogues de I'Aminta avec ceux du Don Quichotte; il en resulte un genre mixte, etrange, in- supportable sur la scene, fort au-dessous de ce que le Tasse et Cervantes avaicnt fait dans deux genres opposes. Une comedie parut enfin a Madrid en 1788V, ecrite scion les regies de I'art : on doit la regarder comme la premiere dans I'ordre chronologique de la restauration theatrale; ce fut Ic Sehorito miwado [ le Jciine homme gate ) , par don Tomas Trtarte. On y trouve un plan bien concu , des caracteres habi- lemcnt traces, des intentions comiques, une versification facile, T. xxxni. — Fci'virr 1827. 3o .\G2 LITTERATURE. iin style agreable; mais a ccs qualitcs se melciU ies defaiils raracteristiquos de tous los ouvi'ages du mcme poete : il y a pen de mouvcmeiit dramatiquc, et pen dc chalenr dans I'actiou- Iriarte ocnipera toiijours line place honorable parmi Ies poetes dianiaticjues du second ordre. II ne s'est jamais I'leve au premier rang, parce que tout en connaissant parfaitement Ies preceptes de I'art, et, quoiqu'il fut doue d'un jugement droit, et d'un gout exquis, il lui nianquait ce que la theorie ne peut jamais donner, le fea divin , qui est I'ame de tous Ies ou- vrages poetiques. Le theatre espagnol se trouvait dans I'etat que nous venons d'indiquer lorsquc Moratin parut. Apres un sieclc de travaux et de tentatives reiterees pour faire triompher la raison et ac- climater le bon gout , on commencait enfin a s'avancer vers le but d'un pas plus assure; mais la marche etait toujours lente, penible : on etait encore bien loin de la perfection : il fallait de grands efforts pour bannir du theatre Ies mauvaises come- dies que la foule venait y applaudir : c'etait la tache glorieuse reservee a Moiatin. Hatons-nous d'ajouter qu'il etait digne d'entreprendre la reformc de la scene espagnole. Appele a line aussi haute destinee, il avait sur I'art theatral des idees qui le mettaient en etat de I'accomplir. II sentait tout le desor- dre de I'ancien theatre, et la necessite de ne plus tolerer sur la scene ni Ies licences dc Lope de Vega, ni Ies imbroglio de Calderon : il pensait que la comcdie deyait joindre I'agieable a I'utile; qu'on seraitblamable d'ecrire pour le theatre si Ton ne se proposait d'autre but que d'amuser le public pendant deux heures , bornant ainsi tout le merite d'une piece dramatique a I'effet d'une symphonic. II croyait que Ies autears etant inves- tis, selon Texpression de Nasarre, d'une sorte de ministere public pour instruire leurs concitoyens, et se trouvant appeles par la patrie a etre Ies censeurs de la multitude ignorante, cor- rompue, ou ridicule, on ne saurait leur pardonner de renoncer volontairement aux avantages qu'il leur est facile d'obtenir en faveur de la crvilisation et de la morale , lorsqu'ils ont a leur disposition toutes Ies ressources de I'art jioe.r emouvoir et LITTERATURE. 463 pour persuader. II savait que le succes durable d'une comedie depend de I'observation des regies , et que , comme toutes les sciences, celle du theatre a ses principes fixes, invariables, que les plus grands genies ne sauraient meconnaitre sans s'ega- rer. II voulait suivre les traces de Ciorneille et de Moliere , qui, s'etant mis au-dessus des prejuges populaires, avaient cree la tragedie et la comedie en France. Entin , il voulait tracer au moins une nouvelle route , pour que , dans des tems plus heureux, d'autres pussent la parcourir avec plus de succes et de gloire : quelque difficile que fut cette tache, Moratin fut assez heureux pour la remplir. Remarquons, toutefois, que les circonstances lui etaient favorables pour entreprendre cette reforme. Depuis I'accession de Philippe V, une nouvelle ere avail commence pour les sciences, les lettres et les arts , tombes dans la plus grande de- cadence sous le dernier monarque de la dynastic autrichienne : a I'imitation de son grand-pere , Philippe V se fit gloire de creer des etablissemens scientifiques, de former des academies et de transplanter sur le sol de I'Espagnc les connaissances hu- maines qui avaient deja porte tant de fruits sur celui de la France. Ferdinand VI avait continue a marcher sur les traces de son pere ; et, sous le regne de Charles III , le mouvement des esprits etait devenu rapide , le desir des reformes constant et presque general. Parmi les litterateurs, les partisans des bonnes doctrines se trouvaient etre, si; on en majorite, du moins en nombre considerable. Les principes que Luzon avait jadis professes, et que Mayans , Nasarrc et Lay undo inculque- rent apres lui , Ayala , Codahalso , Moratin pere et don Juan de Iriarte les avaient mis en pratique avec succes : grace a ces reformateurs de la litterature , I'etude des bons modeles de la Grece et de Rome etait generalement cultivee : elle faisait partie de I'education. Ce sont les dernieres annees du regne de Charles III qui forment I'epoque la plus brillante de la litterature espagnole du xviiimpSiecle. On ne pent fixer ses re- gards sur les dix annees ecoidees depuis 1780 jusqu'en 1790 sans etre frappe des grands progres que les lumieres avaient 3o. 464 LITTERATL'RE. fails en Espagnc. JovcUanos , Canipomaiics , Tavira , Roda et Llagttno ctaient a la fois I'orgucil et Ics ajtpuis dc la philosophie et de la saine litttratnrc. Tout etait done change a I'avantagc des I'eformateurs du theatre. II n'existait, au commencement du siede, qu'un petit nombre de personnes eclairees en etat de sentir les beautes dramatiques, et d'apprecier les conseils des bons maitres. On ctait si generalemcnt prevenu en faveur de I'ancienne scene cspagnole, et les prejnges contre la bonne comedie etaient si enracines, que Ton n'eut tolere sur Ic theatre aucune piece faite selon les regies de I'art. Or, cette disposition etait tout-il- fait changee vers la (in de ce siecle. Une partie nombreuse du public, et la plus influente sans contredit, professait ouver- tement la necessite de reformer le theatre, comme ellc eprou- vait le besoin d'entreprcndre tons les pcrfectionnemens possi- bles dans les diverses branches de I'administration publique. Le gouvcrnement etnit le premier a favoriscr ce besoin de civi- lisation-: il s'occupait constamment d'utiles reformes. II avait pris des mcsures importantes sur I'agriculture , le commerce et rindustrie; I'armee, la marine, avaient eprouve des ameliorations considerables : a la voix de I'autorite , il s'etait forme dans les principales villcs de I'Espagne des societcs pati-iotiquei et econo- mic tics , composees des citoyens les plus distingues par leur rang ou par leurs lumieres, pour correspondre avec le gou- vcrnement sur tous les objcts d'utilite, soit generale , soit locale, et pour repandre par tous les moyens possibles, parmi les di- verses classes de la societe les connaissances et les lumieres. De nombreux ecrits, des journaux litteraires d'un merite dis- tingue paraissaient a Madrid, sous la protection du gouvcrne- ment; on s'y livrait a Texamen des plus hautes questions de legislation, de morale et de lilteraturc. II est vrai que, tour en favorisant ce moavcment vers la civilisation , le gouvcrnement se trouvait fort bien des pouvoirs illimites qu'il exercait, et qu'il n'annoncait pas la volonte de s'en dessaisir; mais, si Ton ne peut appiouver ccttc passion pour le despotisme, on eyt du moins assez dispose a excuscr une administration qui se LITTERATURE. ^05 proposait des vues bienfaisantes , et aplanissait les obstacles centre lesquels on avail encore a lutter. On conservait le scandale de I'inquisition; mais son pouvoir L'tait deja tres-borne, son action bien affaiblie; en attendant le moment favorable pour terrasser le monstre, on I'avait mu- scle. EnGn , grace a la sagesse de I'administration , Madrid renferniait dans son enceinte une societe nombreiise , choisic , eclairee, polie; c'etait devant ce public, juge competent des beautes dramatiques, que Moratin allait faire joner ses come- dies. Quelques vues etroites, desinterets de coteries pouvaient essayer de retarder encore le triompbe de la bonne ecolc; mais de semblablcs tentatives devaient echouer; le succes de Moratin etait assure. En 1788 il avait deja termine sa comedie intitulee : El viejo y la n ilia (/e Vieillard et la jeanejille.) Mais, outre les lentcurs et les tracasseries ordinaires des censeurs de tous les pays , qu'il lui fallut subir , il eut encore a dejouer les intrigues de ceux qui trouvaient leur avantage dans I'etat de degradation ou languissait le theatre, et dans le mauvais goiit qui y domi- nait. La representation de cette comedie ne put avoir lieu a Madrid que le 11 mai 1790 : elle fut jouee sur le theatre del Principe. On y applaudit avec raison le sujet eminemment dra-' niatique et moral , la regularite de Taction, la verite des carac- teres, la gaite, le comique , le style, la versificatidn. Les amis de la philosophic purcut se feliciter de voir pour la premiere fois un poetc comique espagnol , tout en imitant les bons au- teurs etrangers, rester neanmoins national par les caracteres qu'il tracait, par les moeurs qu'il cherchait a corriger, et par le style dont la purete rappelait les beaux jours de I'ancienne ecole espagnole. Ce brillant debut, qui annoncait une nouvelie ere theatrale, commenca la reputation de notrc poete : elle ne tarda pas a s'agrandir par la representation de sa seconde comedie, intitulee: le Cafe , ou la Comedia niieva. Le travers d'un vieillard qui se fait illusion sur son age eh «i(s infumites, ct qui vetit epoiiser une jeuue person ne,n'pq)- partieat pas cxclusivemeut a telle ou telle classe de la 5oeiele:. ,66 LITTERATURE. il peut se troiivci" choz dcs homines de tout raiij; et de toute condition : cc sujct etait parfaitcnient dii doniaine de la come- die. II n'en est pas de menie des vices que Moratin se proposa de fletrir, dans' le Cafe : le mauvais gout dramatique et les ecarts dcs poetes qui travaillaient pour la scene. Ces defauts etaient ceux d'une profession speciale; ce qui paraissait les rendre peu propies a etre presentes sur le theatre. Mais, puis- qne ce mauvais gout exercait une funeste influence sur toutes les classes de la societe, il fallait bien I'attaquer et detruire, s'il etait possible, la cause de cette corruption universelle. On repi-esenta le Cafe, a Madrid, en 1792 : le succes fut des plus eclatans. Les poetes que Moratin frappa de sa ferule perdi- rent tout a coup, et comme par enchantement, leur empire sur la scene. Ce que Cervantes avait fait contre les romans de che- valerie , dont il paivint a degouter par son admirable Don Qai- clwtte ; ce que le pere Isla , par k» publication de son Gerundio de Campazas , avait fait contre les mauvais predicateurs qui prostituaient la saintete de leiu* ministere, et parlaient du haut de la chaire un jargon barbare, inintelligible , mele de sacre et de profane; ce meme triomphe, Moratin venait de le rem- porter sur les mauvais poetes dramatiques. En vain, les come- diens et les auteurs , voyant leurs interets compromis , se ligue- rentpour faire tomber la piece, a la premiere representation; en vain , ils repandirent partout des bruits contradictoires sur le merite de cette comedie , qu'ils appelaient tantot un libelle et une satire, tantot un ouvrage froid et ennuyeux; en vain meme eurent-ils recours a la derniere arme de la sottise, la denonciation a I'autorite : la censure ne vit point dans cette piece un libelle, et le public applaudit avec transport a des scenes eminemment comiques, dont le succes annoncait la re- forme complete du theatre espagnol. Les beautes dont bi?ille cette comedie seront sans doute moins senties , a mesure que le tems nous eloignera de I'epoque ou elle fut composee , et que Ton atira perdu de vue les origi- naux dont le poete a trace une si plaisante copie : c'est le sort de toutes les satires qui attaquent des vices ou des travers, LITTER ATUllE. 46; diuie epoquf. Mais on peut avancer , sans ciainlo d'etre de- menli par revenement , qn'alors menie que cetto comedie ne pourra plus etre jouee sur la scene devantdes spectateurs doat les yeuxn'auront pas etc frappes des bizarreries qu'on y fronde,, ellesera toujoursregardeecommeun monument precieuxdel'his- toire litteraire d'Espagne, en cequ'elle lappellcia le tems ou la muse dramatique de Moratin imprima une taclie ineffarable de honteet de ridicule aux mauvais poetes, rendant ainsi Tart thea- tral a sa veritable dignite. On verra toujours , dans don Eleuterio. etdon Hermogenes, deuxpcrsonnages representant I'ignorance et le mauvais gout theatral de cette epoque. La comedie du Siege de Vicnne , dont Moratin imagina d'introduire des scenes dans cette piece , pour avoir occasion d'y grouper les bizarreries qui infestaient le theatre, aura de tout tems le rare merite de presenter sous un point de vue fort plaisant les diverses es- peccs de pedantisme des auteurs contemporains. Apres le Cafe , Moratin fit jouer, a des epoques diverses, quoiqu'assez rapprochces, ses trois autres comedies, tracees d'apres les memes principes et dans le meme esprit litteiaire : celle du Baron, qui, n'ayant d'abord ete qu'une petite piece destinee a ctre mise en musique, un de ces petits operas que les Espagnols appellent zarzucla , devint, par les developpe- niens que I'auteur donna plus tard a Taction, une comedie reguliere. Le poete y fronde la vanite d'une riche villageoise brulant de venger les affronts que iui ont faits les femmes no- bles du lieu, et qui pour cela veut marier sa fille a un grand seigneur de la cour. II se trouve que I'epoux qu'elle Iui destine, et qui se faisait passer pour un personnage important, n'est qu'un aventurier, arrive depuis pen dans le pays, im veritable chevalier d'industrie , tres-habile a caresser la folic vanite de la villageoise, qu'il exploitea merveille. La Mogigata [la Begueule devote), ou Ton trace le caractere faux ct astucieux d'une jeune fille que ses parens, frappes de la singuliere devotion tju'ellc affecte, se proposent de faiie religieuse, et qu'ils re- gardent comme une petite sainte , tandis qu'cUe ecoute fort complaisamment les jnopos galans des jeunes gens, el qu'elle itGS LITTERATURE. partake les sentimcns tant soil pen niondains des autres demoi sellcs de son age; cnfm, £1 si de las riinns [Ic Oui dcs jeunes filics), ( voy. Rev. Enc. , t. ii , p. 487), comedic rcmplic de grace, dont Ic but est de faire sentir aux parens qu'il ne faut point se fier a la docilite que montrent les jeunes (illes lorsqu'on leur propose d'l'-pouser des hommes ages dont on croit la fortune ou la protection utiles a I'interet des families : car la (ille soinnise et obeissante que Moratin nous represente dans cette comedic, bicn loin d'aimer le vicillard que sa mere lui destine, est vivement eprisc du jeune neveu de son pretendu , oflicier dans un regiment, dont elle prefere la legerete et I'etourderie , et a qui I'oncle s'empresse fort sagement de ceder ses droits a la main de la jeune personne , des qu'il s'apercoit de lenr attachement mutuel. Ce sont la les seules comedies originalos de Moratin : elles forment ses principaux titres a la gloiie. En outre, il a rendu un service important a la scene espagnole, et un hommage nierite a Molicre , par la traduction de VEcole dcs Maris et du Medecin malgre lui. La version qu'il en a faite librement , et avec les modifications qui sont indispensables lorsqu'il s'agit de transporter une comedic sur le theatre d'un peuple etranger, est digne des plus grands eloges ; ce qui le prouve evidem- ment, c'est que ces comedies ont ete aussi goutecs et <^ussi applaudies en Espagne qu'clles le sont en France. Moratin dit tres-judicieusement qu'une comedie etrangere ne saurait paraitre avec succes sur la scene espagnole , sans porter man- tilla et hasquiiia : d'apres ce principe , il a su si bien combiner la propriele du langage castillan avec la grace et les situations comiques de Moliere; il a tellement conserve les intentions de I'auteur , que ces comedies, n'ayant plus aucun air d'etrangete, pcuvent aisement passer pour des comedies nationales. II a traduit aussi le chef-d'oeuvre de Shakespeare, Hamlet, avec des notes fort instructivcs , et qui rappellent le poete exerce et le niaitre de I'art dramatique. Il parait qu'il n'a entrepris cette traduction que pour donner a ses compatriotes ime idee juste du genre bi/arrc du theatre anglais, eu letn- nietlantdevanr LITTERATURE. 46y les yeux les beautes sublimes qui s'y trouvent melees, avec des scenes triviales ou ridicules. Hamlet n'a jamais ete joue sur la scene espagnole. Revenons aux comedies de Moratin, ct envisageons-les sous un point de vue general. Tout le monde s'accorde ii y trouver des cadres reguliers, des situations coniiques, des caractercs bien traces, un dialogue facile, vm lahgage correct et pur. C'est plus qu'il u'en faut pour assurer la gloire de cet auteur; c'est un tres-grand merite assurement que d'avoir offert le premier a ses compatriotes des modeles dignes d'etre imites , et d'avoir tente avec succes la reforme du theatre national. On ne saurait dire que Moratin se soit montre moraliste aussi profond, ni philosophe aussi sublime que I'auteur du Tar- tufe : son genie ne s'est point eleve a de si hautes regions. S'il fallait caracteriser la nature de son talent, on pouirait peut- etre le faire avec assez de justesse , en disant que sa muse est plutot correcte et sage, que brillante et bardie; que son genie n'est pas createur, mais qu'il excelle dans les imitations. Ce sont principalement les beautes du langage ct du dialogue, avec une sage ordonnance des scenes et des situations, qui font le nierite des comedies de Moratin. J'ignore I'effet qu'ellcs pourraient produire sur des spectateurs etrangers, sur des. Francais , par exemple, dont le theatre est si riche en situations et en portraits. On est fonde a penser que le succes n'en serait que mediocre; niais, quant aux Espagnols, Moratin leur a offert des caracteres traces avec (idelite, observes avec delicatesse, dont ils voient tons les jours dans le monde les vices et les travers. Au surplus , Moratin a trace ses comedies d'apres I'idee qu'il s'est faite de I'art dramatiquc. Voici la deli- iiition qu'il en donne : La comedie est une imitation , dialoguec en prose ou en vers , dune action arrivee dans un tems donne , a laquelleprennentpartde simples particuliers ; son but est de livrer h la risee publique les erreurs communes dc la societc , en fai- sanl triomphcr la verite ct la vertu. Nous nous abstiendrons de justifier ici revactitudc dechacunt- des parties de celte definition : on pourra lire les cxplirationi 470 LITTKRATURE. qii'en donue iiolri; poete; ellcs soiit de nature a lairo conccvoir une haute idee de scs connaissanees sur I'ait theatral. Nous uous borncroiis a dire qu'il attache un grand prix, non-sonle- nient a la theorie , mais a la severe execution des regies. En nn mot, Moratin appartient a ce parti litteraire qui n'aecorde son admiration qu'aux ouvrages con formes a la raison, et executes selon les regies de I'art. Moratin s'est inscrit parmi les classiques. « Que Ton ne rappelle pas (dit Moratin, dans un prologue qui renferme ses doctrines) I'exemple des grands poetes, qui ont neglige d'ecrire selon les regies ; car ils auraient mieux fait encore, s'ils les eussent suivies. Que Ton ne disc pas qu'il y a une convention tacite de la part des spectateurs de tolerer les invraisemblances : si cette doctrine pouvait etre accreditee , on tomberait bientot dans le chaos dramatique de Shakespeare : les representations theatrales rcdeviendraient des farces; nous reverrions encore les treteaux de Lope de Rueda. Cette convention tacite existe en effet; mais elle se borne a cxcuser les defauts inseparables de I'art , et non pas ceux dans lesquels le poete tombe volontairement. II est de- montre que I'observance des unites est possible, qu'elle est meme utile : tout ce que Ton pourra dire contre ce principe , c'est que I'application en est difficile; mais qui a jamais pense qu'une coraedie fut une chose aisee ? » Get attachement aux principes doit diminuer de beaucoup le merite de Moratin aux yeux de la nouvelle secte litteraii e qui fait profession d'affranchir les poetes de toutes sortes d'entraves, et de proscrire les i-egles, parce qu'elles ne servent, dit-on, qu'a gener le talent, et a lui oter sa verve et son oi'igi- nalite; car Moratin a pense, an contraire, qu'il n'y a point de beautes possibles dans I'art dramatique sans la rigoureuse obsei'vation des lois du gout. Des admirateurs enthousiastes de Lope deVega, et pour qui ("alderon et Quevedo sont sublimes, meme dans leurs concetti et dans leurs bizarrerics, blament les poetes de I'ecole mo- derne espagUole d'avoir adopte la regularite et le bon sens de la litterature francaise; ils les regardeni presque comme des LITTER ATURE. 471 transfiiges, qui, desertant la cause de la poesie nationale, ont adoptc d'autres couleurs tout-a-fait opposees au genie et au caracteie du peuple espagnol; et croyant avoir decide uue grande question litteraire a la faveui' d'une epithete de leur invention ; ils ont appele les modernes litterateurs castillans des Gallicistes. En verite , je ne vois pas pourqnoi on s'arrete en si beau cheniin, ni ce qui empeche qu'on ne leur donne egalement repithote de Romains ou de Grecs : car cette ecole espagnole ne se contentc pas d'iraiter Moliere, Corneille, Racine, Boileau, Fenelon, elle puise aussi ses doctrines et ses modeles dans Homere et Virgile, dans Aristote et Quintilien; elle aime a mediter Ciceron et Tacite; elle conseille d'imiter Horace et Anacreon. Si, dans le dernier siecle, on a suivi en Espagne les traces des hommes eminens qui ont illustre le siecle de Louis XIV, c'est que leurs ouvrages renfernient des beautes avouees par la raison et le bon sens; c'est que leurs ecrits forment le dernier anneau de cette chaine au moyen de laquelle les traditions de la belle litterature nous ont ete transmises. On gemira tant qu'on voudra de ce que la littera- ture espagnole a perdu cette teinte A'orientalisme qui lui allait , nous dit-on, a merveille. Pour nous, nous ne pouvons rien voir de noble ni de grandiose dans des conceptions que la raison desavoue , et nous persisterons a penser que I'ordre, les proportions, le but, les convenances sont des choses que Ton ne doit jamais negliger dans aucun ouvrage, meme d'ima- gination. Cette tactique, d'ailleurs, qui consiste a jeter de la defaveur sur les hommes ou sur leurs doctrines, par des epithetes, n'est pas nouvelle dans I'histoire de la litterature espagnole, quoiqu'elle ne reussisse pas toujours au gre de ceux qui I'emploient. Lorsque Boscan et Garcilaso commen- cerent a tirer la poesie castillane des limitcs etroites ou elle avait ete renfermee jusqu'alors , les partisans de I'ancienne ecole eleverent leurs voix contre les novateurs, et d'une question puremenl litteraire ils voulurent faire alois, comme on fait aujourd'hui, une affaire de patriotisme. Ne trouvant pas d'autres moyens de combattre avcc succcs pour leurs /i7'^ litti;:ra.ture. vieilles erreurs, ils rcprocherent a ces hommes celebres di- deserter la cause nationale, et d'imiter la manierc de Petrarque, et d'autres poetes italiens. Castillojo, le plus zele ou le plus aveugle des partisans dc I'ancienne ecolc, invcnta le mot petrarrjuiste ; il crut que co mot rcnfermait la question tout euticre. He bien! ce fut Castillejo qui eut tort, la raison rcsta aiwx/jetrarqnistes. Des imitations telles que celles de Garcilaso et de Boscan naturaliserent en Espagne les beautes des anciens, et celles des bons auteurs italiens. Sans leurs ouvrages, la poesie espagnole n'eut jamais conquis le rang ou die s'est placee. L'elite des poetes castillans passa du cote de I'ecole modcrne : le Pai'nasse espagnol presque cntier Ae\'\nt petrarquiste. Hiu- tado de Mcndoza , Saa de 'Miranda, Monte mayor , Hcrrcru , surnomme le dicin, Ic perc Lotus dc Leon, Gil Polo, et tant d'autres , furent la gloire de la litterature espagnole. II eu sera de meme de I'ecole actuelle, qu'on appelle gallicistc. Iriarte, Melendez , Moratin , formerout des litterateurs et dei poetes qui, marcliant sur leurs traces, scront un jour I'or- gueil de leur pays ; car la litterature espagnole ne pent que gagner a prendre I'empreinte de la civilisation moderne, et a dcposer la rudesse et la bizarrerie que Ton vante a tort , el que Ton se plait a decorer du nom pompeux , et pourtant assez vague , A'oriehtalismc. Pour ce qui est de la litterature dramatique en particulier, il ' s'agit de determiner : i° S'il y a des piincipes fixes et des regies invariables ; 2° si Moratin, en se conformant a ses regies dans • ses comedies, a su bien peindre les moeurs natiouales sur la scene, s'il y a represente fidelement les vices et les travers caracteristiques de I'epoquc ou il a vecu , et si, en introduisant dans le theatre espagnol I'ordre, la regularite, la decencc de la scene fran*aisc, il a maintenu dans ses tableaux des moeurs espagnoles, la purete et I'energic dc la diction castillane. Quant a la premiere de ces questions, I'affimative nous paiait de- inontree. II n'est pas raisonnable dc supposer que cliaque pays doive avoir des regies differentes dans I'art dramatique. Autaiit vaudrait dire ([ue les proportions des modeles de la scidptiu(; LITTERATLRE. ,'i7^ giectjue no devaient pas etre imitees par les sculptcui's nio- dernes. Tant qu'il y aura sur la tcrre des h'omraes eclaires, les lois de I'epopee ct ccUes de I'art dramatique seront les meines que du terns d'Homere et de Sophocle, sans que Ton puisse tirer des transgressions que Lucain et Stace se sont permises, d'autres inductions, sinon , qu'il y a cu autrefois, comme au- jourd'hui, des esprits indocilcs, passionnes pour la singularito, qui chercherent a so distinguer meme par des ecarts qui bles- sent la raison et le gout. Quant a la seconde question , il n'est pas nioins demontre que les comedies de Moratin ont atteint le but qu'un poete comique espagnol doit se proposer; qu'elles sont espagnoles, et que les caracteres qu'on y trace portent I'empreinte nationale. Il suffira , pour le prouver, de rappeler ce que dit a ce sujet Marchena, dans le Discours preUniinaire deja cite : « Les vieilles de Baron et da Oui des jciines fillcs, dit-il, sont d'un caracterc different, a la verite : la premiere est vaniteuse et credule; elle a de I'ambition : toute sa manie consiste a vouloir briller a la cour et devenir une grande dame pour se venger des affronts qu'elle a essuyes de la part des femmes des hobereaux de son village. La seconde est supersti- tieuse, avide, tlatteuse : elle n'a d'autre but que de jouir de la grande fortune que possede le vieillard a qui elle veut ma- rier sa fdle; mais I'une et I'autre sont des copies fideles des vieilles de notre pays. Y a-t-il un portrait plus rcssemblant des jeunes gens de families riches de nos villages, que celui de I'amant de la Mogigata ? Que peut-il y avoir de plus parfait que le portrait d'un vieil agent d'affaires de Madrid , de ceux qui se rendent tous les jours aux exercices de devotion de saint Pliilippe Neri, que celui du pere de Clara? » II faut pourtant observer, a la louange de Moratin, etpour desabuser ceux qui seraient disposes u le taxer de galUcisme , que , bien loin d'avoir voulu deserter la cause du theatre na- tional, il n'a eu en vue, dans ses comedies, que de venger rhonneur de la litterature castillane. Son but a ete , non-seu- lement d'instruirc ses compatriotes, mais de dissiper aussi les A74 LITTER ATIIRK. preventions contrc Ic theatre espagnol, eoneiies par queUjues etrangers qiii , voyartt le desordre auquel il etait livre, ont imagine d'attribuer le mauvais gout a des causes mal fondees. L'un pretendait que le caractere orgueilleux des Espagnols ne pouvait s'accommodcr des actions des pcrsonnes communes , seul sujet de la veritable comedie; I'autre accusait leur indo- lence; ils seraient honteux, disait-on, de se laisser cmouvoir par les affections de haine, d'amonr on de mepris. ta galan- terie des Espagnols, selon ceux-ci, etait I'heritage des Maures ; ils avaient conserve une teinte africaine qui les distinguait des autres nations de I'Europe. Dans la comedie , suivant ceux-la , les Espagnols aimaicnt toujours les imbroglio de Calderon , Rojas , Moreto, Solis, et autres poetes semblables : il en seia ainsi tant que les fables de ces comedies auront un rapport avec leurs moeurs; car la societe, ditLa Harpe, y reste station- naire depuis des siecles. Moratin a pris a cceur de demontrer la legerete de ces di- vers jugemens, a peine excusables lorsqu'il s'agit d'une partie de I'Europe jadis si influente par sa puissance et par sa littera- ture, et toujours si interessante pour Tobservateur philosophe. Que les etrangers lisent le theatre de notre poete. Ils verront qu'il n'a pas cru ses compalriotes assez orgueilleux pour ne point se plaire aux representations dramatiques executees d'apres les regies de I'ecole moderne : ils ne trouveront point dans ses comedies cette confusion du grotesque et du serieux , cf melange du tiagique et du comique , du vidgaire et du chc- valeresque , que Ton pretend etre du gout des Espagnols : ils verront qu'ils savent rire et s'attendrir, comme les autres peuples, et qu'ils n'ont pas I'immobilite des statues dont I'abbe Quadrio les a gratifies, dans sa Storia poetica. Loin que la societe soit restee stationnaire, ainsi que I'a pretendu La Harpe, et que les mcenrs des Espagnols soient toujours les memes, les comedies de Moratin, goiitees, applaudies par eux, nous representent I'etat de la societe comme etant le meme que dans les autres pays de I'Europe , sans que I'oeii puisse LITTERATURE. 475 apercevoir cette teinte africaine ou orientale que des etrangers pcu instruits de- I'etat I'eel de la societe en Espagne se sont plu ;i lui attribuer. Nous regrettons de nc pouvoir montrer Moratin fuyant constamment les ecarts d'uiie nouvelle secte litteraire qui na- quit de son tems, et dont un des principaux travers etait de vouloir introdnire les mots et les phrases de la langue francaise dans la prose et dans la poesie espagnoles. Rien ne prouverait mieux Teloignement de ce poete pour toute imitation servile et corruptrice, que le soin qu'il mit constamment dans ses ecrits a conserver la purete de la langue castillane; rien ne depose- rait plus en faveur de ses connaissances drama tiques, que la sagesse avec laquelle il emprunta aux modeles de I'art des pre- ceptes et des beautes , sans se permettre aucune imitation que les mceurs et le langage de sa nation auraicnt pu repousser. Moratin vit avec peine la nouvelle espece de ciilteranisnio qui s'etablissait de son tems. Des jeunes gens qui venaicnt a peine de quitter les bancs de I'ecole , et qui ne connaissaient ni les beautes de I'ancienne litterature espagnole , ni leur propre langue, affectant de mepriser les meilleurs ecrivains, sans s'etre donne la peine de les lire, s'imaginerent qu'ils pou- vaient aisement devenir auteurs apres avoir lu quclqnes livres etrangers. lis altererent la syntaxe et la propriete de ia langue; ils accuserent celle - ci de pauvrete, parce qu'ils ne connais- saient point sa richesse : ils remplacerent la phrase et le tour poetique qui lui est propre par des locutions etrangeres que Ton ne pouvait admettre. Ils adopterent des mots bizarressans signification precise , formant ainsi un langage obscur , rempli A'archai'smes , de gallicismes et de neologismes inintelligibles. A ces defauts dans le style, ils en ajoutaient d'autres dans la composition. Ces Espagnoh barhares , qui , selon I'expression de Capmany , prenaient pour stSrilite de leur langue celle de Icurs tetes , n'avaient ni un plan arrete , ni des idees bien deter- minees : ils employaient partout des metaphores absurdes , des mots ambitieux, des epithetes vides de sens. Dans leurs ecrits, on coufondait sans cesse le trivial avec le naturel, la grace /,7f> l.rn^l^.RATURK. avec la piicriliu'r, le siiljlinic avcc Ic gigantcsque, la piofondcur avec I'obscarite : ils joignaient a cela une affectation insuppor • table de scnsibilitc, dc philosophismc et do pliilantropie, qui donnait a Icurs compositions un air pcdantcsquc. Ce flit a cette sectc, a qui t'cjiithc'lo dc ^nlUciste pouvaitetre > « Bruyante et studieuse, elle remplit la ville d'Athenes de ses jeux pour celebrer la venue d'un nouveau disciple , et elle passe de longues heures aux lecons de 1' Academic. Athenes est a la fois remplie d'eglises chretiennes et d'idoles. Le polythcisme s'y conserve protege par les arts. Les defenseurs futurs des deux cultes se trouvent confondus , sans le savoir, dans les momes ^coles. Qes jeunes hommes, si graves et si doux , ad- mires de leurs camarades, doiit ils evitent les folies; ces deux inseparables qui , parrtii les seductions d'Athenes , ne connais- sent que le chemin de I'Eglisc chretienne et celui des ecoles , c'est Gregoire de Nazianze et son ami; on les cite dans toute la Grece ; ils excellent dans les lettres et I'eloquence profane. » L'auteur de ce morceau trace avec la meme elegance le portrait d'Antioche , ville de plaisirs et de sciences ; celui d'Alexandrie , aussi tumultueuse, aussi pleine d'orages qu'An- tioche est paisibie , I'entrepot de tous les commerces , la patrie de toutes les sectes. M. Villemain nous reprcsente aussi Cons- tantinople , la metropole du mondc el de la religion ; c'est-la que brillcnt tour a tour sur le siege episcopal Gregoire de Nazianze et Chrysostome ; mais en meme terns c'est le centre oil viennent aboutir les sectes inventees par I'esprit subtil d'Alexandrie et la philosophie de la Grece ; c'est-la qii'on vient les mettre a profit , en les produisant a la cour, et en tachant d'y gagner quelqne chambellan, ou quelque eunuque du palais. L;i done se montrcnt dans toute leur nudite les miseres de I'empire d'Orient , le despotisme capricieux des princes , les intrigues du palais , la corruption d'une grande ville , faite Irop vite , qui n'etait ni grecquc ni romaine et semblait une colonie plutot qu'une capitale. Mais Constantinople , par sa nouvcautc meme , n'avait rien dans ses monumens , dans ses LITTERATURE. 485 feles , dans ses usages, qui rappelat I'ancien culte. Elle etait de la nieme date que le triomphe du christianisme. A la tete des peres de I'Eglise grecque, M. Villemain nous montre Athariase , le premier et le plus grand d'entre eux peut- etre , par la Constance , le caractere et la volonte; mais non pas le plus utile au monde, puisqu'il consacra sa courageuse vie a des combats centre une doctrine respectable qui est au fond de la conscience du genre humain, ou au projet immense, mais insense, d'etablir dans le monde I'unite religieusequine parait etrenidans les voies de la sagesse , ni dans les decrets de la providence : toutefois , Athanase , par son genie , par sa prevoyance , par les soins qu'il prodiguait aux malheureux , etait le bienfaiteur d'Alexandrie , et sa popularite, qui ne manquait point d'art , avail pour fondement les vertus d'un saint et les services d'un ami de I'liumanite. II ne s'est rien conserve des ecrits d'Arius , le redoutable antagonistc d'Athanase. Les vainqueurs ont de- truit les monumcns de leur adversaire , comme Rome dctruisit autrefois les annales de Carthage. « Mais, ajoute I'auteur, le fon- dateur d'une secte si fameuse , I'homme qui , tant de fois charge d'anathemes, sut gagner a sa cause un nombreux parti dans le peuple , dans les eveques , dans la cour des princes , et qui divisa le christianisme triomphant , etait sans doute done de tous les talens qui font un grand sectaire. Cependant, il fut sur- tout aide par le sentiment secret qui commencait a rendre re- doutables aux en)pereurs la puissance et I'ambition du sacer- doce Chretien. Constantin lui-mcme, avant de mourir, avait senti quels niaitres il s'etait donnes. Constance, sonfils, moins puissant et moins affermi sur le trone , redoutait encore plus cette tutelle. » Je ne puis , a mon grand regret , suivre I'auteur dans la pein- ture qu'il nous fait des etudes , du savoir , de la doctriue et des travaux de Gregoire de Nazianze , de Basile , de Chry- sostome , et de leurs nobles et saints emules , tous plus habiles et plus eloquens que le reste des sophistes paiens de leur tems , et meme que tout cc qui les avait piecedes depuis Plutarque et Tacitc. Saint Basile a fourni les traits les plus heurcu.v a son 486 litti^:rature judicicux atlmiratour. Nous lui dcvons les uienies leiiicrciiiicus pour le portrait tie saint Gicgoire de Nazianze , dont il nous retrace les talens pour la parole ct menie pour la pot-sic. Une citation de cet ami des muses, plcin d'imagination, de foi et de melancolie , uu hynine a la fois grec et cluolien de Synesius , I'eleve de Platou tt lo disciple des eveques d'Orient, meritent une attention particuliore; Tunc est bien au-dessus de telle ode philosophique d'Horace; I'autre , inspire par les souvenirs de la Grece et par I'esprit rcveur du christianisme d'alois , res- pire , avec la douceur de Siniouide , quelque chose de la gran- deur du Dante et de Milton, abinu'-s dans la contemplation des choscs divines. En general tous les morceaux que leur ha- bile interprete emprunte aux peres de I'Eglise grecque sont traduits avec une simplicite , une elegance remarquables. Maitre, comme il Test, de notre languc , qu'il sait plier a tous les besoins de ses divers sujets, il a reconnu que la fidelite est le meilleur moyen de latter avec les modeles antiques. Quand on compare sa version facile, pleine desouplesse et d'harmonie a la baibare traduction du theatre grec donnee par le pere Brumoi , on sent quels progres a faits parmi nous un art si im- portant , puisquc c'est par lui que les peuples peuvent com- mercer et s'enrichir mutuellement des tresors de leurs differens idiomes. Ce que je remarque avec plaisir dans un ecrivain aussi poli, et d'une recherche aussi curieuse, quoique toujours de bon gout, c'est le charme qu'il sait conserver au langage du coeur , temoin les prieres de la mere de Chrysostome a son Ills ; \Andiomaque d'Homere , VJErandre de Virgile n'ont rien qui approche de cette tendresse, et qui fasse couler tant de larmes. Je laisse au lecteur le soin de voir comment M. Villemain a su caracteriser les peres de I'jfeglise latine, saint Ambroise, saint Paulin; mais surtout le sublime saint Jerome, dont la re- traite dans le desert etait peuplee et tourrnentee par les images tou- jours presentes des danses voluptueuses des vierges romaines; ce tendre saint Augustin, qui pleurait d'avoir tant aime Virgile, ot Ic tableau des amours de Didon. Sans offenser une re- nommee htterairc , je crois pouvoir avancer que M. Villc- LITT:tRATURE. 487 main soutient ici la comparaison avec les creations si belles et si neuvcs que ces deux grands hommcs ont inspirees a M. dc Chateaubriand , dans son admirable cinquieme chant dcs Martjrs. L'auteur aurait pu sans doute tlicler plus souvent de hautes considerations politiques k ses reflexions litteraires ; mais sa sobriete k cet egard merite peut-etre plus de louanges que de reproches ; il a voulu se renfermer dans les borncs de son sujet; en cherchant k les franchir, il aurait ete detourne de son but. D'ailleurs il a su faire intervcnir a propos les gouver- nemens, les princes, les pontifes et les peuples, pour nous mettre a nieme de bien juger les causes propres a influer sur la direction des esprits et sur 1' eloquence chretienne, qui jetait un si vif eclat au moment ou elle allait etre precipitee tout a coup dans I'abime , et ensevelie dans un sommeil de mort avec le monde remain , dechire en lambcaux par les barbares. La seule chose qui me paraisse manquer au vaste et briliant tableau de M. Villemain, c'est le portrait des maitres et des sophistes pa'iens qui avaient instruit , ou qui combattaient les peres de I'Eglise et les nouveaux Demosthenes. P. F. TissoT. III. BULLE11N lilBLIOGRAPHrQUE. LIVRES ETRANGERS (r). AMERIQUE SEPTENTRIONALE. ETATS-UNIS. 125. — * Military law of the United-States, etc. — Lois militaires des Etats-Unis, recueillies et publiees avec I'autorite du depar- tement de la guerre; par Trueman Cross. Washington, iSaS. In-8° de 279 pages. Ce reoueil coniplet des lois militaires d'lm grand etat ne forme qu'un mediocre volume , et rcnferme cependant tout ce qui a cte fait et defait par le congres , depuis I'originc de la republique jusqu'en 1825, et de plus la constitution des Etats-Unis , que Ton a toujours soiu d'annexer a tout ce qui emane des autori- tes qu'elle a creees. On y suit avec un grand interet les singu- lieres oscillations de I'etat militaire de la republique. Reduit a 800 hommes apres la guerre de I'independancc, il fallut bientot recreer plusieurs regimens pour combattre les indigenes allies de I'Angleterre qui ne se croyaient point compris dans la paix faite avec cette puissance. Lorsque la revolution francaise de- ploya sa terrible energie, I'Amerique du Nord crut devoir prendre une attitude imposante, etse mettre en mesure de lever au besoin une armee de plus de cent mille hommes. Des que les contestations avec la France furent terminccs, ce formidable etat mililaire fut reduit a trois mille hommes. Le pacifique Jef- ferson tenta vainement de ne pas augmenter la force armee de la nation; la force des circonstances I'emporta sur les genereuses resolutions de ce philantrope. Aujourd'hui que la paix est assu- ree pour long-tems avec I'Europe, et que le casse-tete des indigenes est enterre, I'etat militaire est reduit a 6000 hommes , (i) Nous iodiqiions par un asterisquc (*) , place a c6l;e du titrede chaque ouvrage, ceux des livres etroDgers ou franoais qui paraisseut digues d'une aUen- tJon particulicre , et nous en rendrons quclqucfois cojnpte dans la section dei Analyses, AMERIQUE SEPTENTRIONALE. /,8g pour unc population de plus de dix millions cThahitans : et, nial- gre les progres de la population, cette force armec permanente ne sera peut-etre pas augmentee. La vue d'hommes armes en tems de paix offense les regards des rcpublicains; on pcnsc, en Araerique, que des soldats commencent a etre dangereux des qu'ils sont inutiles. Les moyens de defense de la republique sont classes dans Tordre suivant : la marine; les fortifications; les communications par terre et par eau, c'est-a-dire, les routes et les canaux; I'armee et les milices : c'est dans cet ordre qu'on s'en occupe; et , comme la marine est deja sur un pied respec- table, c'est aux fortifications que Ton donne en ce moment une attention particuliere. Un systeme general de places et de forts fut adopte dans les sessions du congres, en i8ig et 1820; il recevra sans donte quelques modifications, a mesure que les pays auront ete plus etudies et seront mieux.connus. II semble qii'un pays sans force militaire et presque sans places fortes se met imprudemment i la merci du premier con- querant qui serait en etat d'y faire arriver I'une de ces armees qui, en Europe, niaintiennent ou chaugent les destinees des etats. Mais I'interposition de I'Atlanlique et des vaisseaux de guerre sont une assez bonne garantie contre une pareilKj tentative; et, en supposant meme qu'un debarquement put etre effectue^ n'a-t-on pas un noyau d'armee, des milices, des arsenaux bien pourvus, des chefs instruits, des officiers pour tons les emplois? \Ecole militaire de TFest- Point ( voy. Rev. Enc, t. xv, p. 5. ) est une excellente pepiniere qui repand dans tons les etats de I'Union des hommes pourvus de I'instruction la mieux assortie aux besoins d'un etat republicain. Suivant les projets de M. Cal- houn, ministre de la guerre, on a etabli depuis deux ans une E cole pratique d'artillerie a la forteresse de Monroe, en Virginie; mais il parait que cet etablissement n'a pas repondu jusqu'a present aux vues du fondateur. Cet ouvrage de M. Cross est du nombre de reux qui convien- nent a la bibliotheque de I'homme de guerre, destine a devenir quelque jour un homme d'etat. II y apprendra beaucoup; et, ce qui n'est pas moins precieux, il y trouvera des motifs pour changer d'opinion sur plusieurs points essentiels de I'organisa- tion militaire. En Europe , les divers gouvernemens font peu d'experiences et se bornent presque toujours a des imitations : en Araerique , on fait des essais ; et par consequent on est sur la voie qui pent conduire a des perfectionuemens reels et du- rables. J. 126- — * General regulations for the army , etc. — Regie- 490 LIVRES ETRANGERS. mens generaux tie rarmce , on Code militairc. Washington , 1825. In-8° de 42^ pages. Ce Code militairo , redige ct public par ordre du gouver- neincnt des Ktats-Unis , et rcvctu de la sanction du president, y est en vigueur dopuis le i®'' mars iSiS. II a etc revu par un officier distingue de I'armee americaine , M. le major-ge- neral Scott, et se divise en six sections : la premiere traite du rang et du commandement ; la deuxieme des honneurs mili- taircs ; la troisieme de I'economie interieure des regimens et des compagnics ; la quatrieme de I'economie des departemens et des postes militaires ; la cinquieme de I'economie d'une armee en campagne , et la sixieme d'objets divers relatifs a i'armee. W. 127. — * A selection of eulogies , etc. — Choix d'eloges pro- nonces dans divers elats en I'honneur des illustres patriotes et liommes d'etat, John Adams et Thomas Jefferson. Hartford, 1826; Robinson et C'<". In-8° de 426 pages. Ce volume contient dix-neuf discours prononces dans divers lieux des Etats-Unis par des hommes empresses de rendre hom- mage aux cminentes qualites, au patriotisme et aux vertus des deux honorables citoyens dont tons les amis de la liberte ont pleure la perte et reverent la memoire. J. EUROPE. GRANDE-BRETAGNE. 128. — A Memoir adresscd to the Society for the encoura- gement of arts , manufactures and commerce , etc. — Memoire adresse a la Societe d'encouragement pour les arts , les manu- factures et le commerce, sur la plantation et la culture des arbres forestiers; par W. M. Withers, jun. Holt, 1826. Londres , Longman. In-8° de 42 pages. « Le but de ce Memoire , dit M. Withers , est de communi- quer a la Societe les resultats de quelques experiences que j'ai faites sur I'effet des engrais donnes aux terres destinees a des plantations d'arbres ; de faire voir qu'il est absolument neces- saire d'ouvrir la terre par des labours profonds ; de faire des tranchees pour recevoir les plants ; de tenir le sol tres-net , d'arracher les herbes ct tous les vegetaux qui entoureraient les tiges ; ces precautions sont indispensahles pour le succes : on le savait, mais on n'en tenait aucun comptc; la routine et la negligence triomphaient meme dcTinteret personnel. » L'au- GRANDE -BRETAGNE. /.gi teur entie dans Ic detail de ses experiences , et des fails qu'il a observes dans les plantations de ses voisins. Ce qu'il rapporte sur les bons effets de la niarne, repanduc snr le sol apres hi plantation des aybres, ne laisse ancun doute sur la tres-grandc utilite de cette pratique : nxiis , comme les differentes sortes de marnes doivent etre assorties aux diverses natures du sol , ces experiences ne sont pas completes , et laissent encore quel- ques points a eclaiicir. On en conclura seulement qu'il vaut niieiix repandre une marne quelconque sur le terrain d'une plantation , de quelque nature qu'il soit, que de s'abstenir de cette operation dans la crainte de ne pas en tirer le plus grand parti possible. M. Withers pense que dans les premiers tems de leur plantation , les arbres se nourrissent aux depens de la surface du sol , principalement les arbres a feiiilles caduques. On pense bien qu'il ne s'est pas borne a de simples observa- tions , qu'il a mesure ce qui pouvait etre soumis an calcnl , et que ses resultats nieritent la plus grande confiance ; il les a presentes sous la forme de tables , pour la facilite des recher- clies. On ne manquera pas de consul ter ce Memoire, lorsque Ton traitera de nouveau quelques questions relatives a la cul- ture des arbres forestiers. F. 129. — * Astronomical tables and formulce , etc. — Tables et formules astronomiques reunies a un grand nombre de pro- blemes pour en montrer I'usagc, et aux constantes des divers elemens du sj'stemc solaire; par Francis Baily, membre de la Societe royalc et president de la Societe astronomique de Londres. Londres, 1827; Richaid Taylor. In-S° de 267 pages. Le merite de M. Baily est connu de toute I'Europe sa- vante, qui I'a place au rang des plus ilhistres astronomes de notre age : cet ouvrage est digne de lui , et doit devenir le manuel de toutes les personnes qui observent les mouvemens celestes. II est compose de quatre parties ; la premiere contient les elemens de notre systeme planelaire avec tout le degre de precision que comportent les observations les plus recentes. La seconde est une collection de toutes les formules utiles aux as- tronomes, classees par ordreet sans aucune demonstration. La troisieme est formee de tables qui donnent a vue, toutes cal- culees, pour les differens cas, les valeurs resultant de ces for- mules; on y explique I'usage de ces tables. La quatrieme partie est composee d'une serie de problemes astronomiques dont la solution est donnec, soit en recourant aux tables precedentes, soit par des calculs speciaux. Cet excellent ouvrage doit etre d'une immense utilite aux astronomes, aux geographes et aux 492 LIVRES ETRANGERS. navigateurs, dont il est destine a soiilager la memoire et k faci- liter les recheiches. Francoeur. i3o. — * Personal narratwc of a Journey from India to En- gland, etc. — Relation d'un voyage des Indes en Angleterre , par Russorah , Bagdad , les mines de Babylone, le Kurdistan, la cour de Perse , les cotes ouest de la mer Caspienne , Astra- can , Nijni-Nov;/orod , Moscou et Saint - Petersbourg ; fait en i8a4 par lecapitaine George Keppel. Londres, 1827 ; Col- burn. In-/i° avec carte et gravures ; prix, •>. liv. 12 sh. 6 p. Au commencement de Janvier 1824 , le capitaine Keppel fit voile de Bombay pour Bussorah , ou il debarqua dans le mois de fevrier suivant. Apres etre reste quelque tems dans cette ville , situee au fond du golfe Persique , il reraonta le Tigrte jusqu'a Bagdad , visita cette cite et les mines de Babylone , et se remit en marche a travers les provinces depeuplees de I'empire Persan ; examinant siir sa route Kesmanshah , Hamadan , Te- heran , Tabreez et Baku , sur les bords de la mer Caspienne. Il entra en Russie par Astracan , et traversa successivement les villas de Nijni -Novgorod , Moscou et Saint-Petersbourg , et rcntra en Angleterre a la fin du mois de novembre de la meme annee, apres un voyage d'un peu plus de dix mois. Cet ouvrage ne contient rien de bien nouveau sur la Russie et la Perse; il ne fait guere que repeter ce que nous avionS deja lu dans les ecrits de MM. Frazer, Rich, Handerson et Ganiba ; cependant nous pouvons assurer qu'il plaira au plus grand nombre des lecteurs , par le charme de sa narration et par les observations judicieuses , les remarques et les anec- dotes interessantes qu'il renferme. i3 1. — The present state of Cohimbia , etc. — Tableau de la situation presente de la Colombia ; par un officier anciennement ail service de cette republique. Londres, 1827 ; Murray. In-8° de 336 pages , avec une carte ; prix, 10 sli. 6 d. Les personnes qui ont lu les ecrits de Hall, de Cochrane et de Mollien ne trouveront rien de tres-neuf dans cet ouvrage. C'est une sorte de resume de ce que Ton a public depuis deux ou trois ans sur la republique de Colombie. Les deux premiers chapitres contiennent la relation de la guerre soutenue par les Americains contre leur metropole d'Europe ; le troisieme chapitre traite de I'organisation politique de la nouvelle repu- blique; le quatrieme fait connaitre sa division territoriale , sa population et ses forces de terre et de mer ; le cinquleme cha- pitre enumerc ses richesses agricoles, et le sixieme ses ri- chesses minerales. Le merite do I'auteur est d'avoir su choisir C.RANDE-CRETAdNE. ^y-j avec cliscerncmenl, parnii les nombroux documens publics sui- la Colombie, et d'avoir apportc dans son travail beaucoup d'impartiaiite , dc conscience et dc bonne foi. F. D. 132. — Lettre dc Vauteiir dc Greece vindicated, a Louis Frusinate sur son ouvrage : De la Force dans Ics-clioses politi- llliii,s piiil il rcproclu'i' a iin aiitfiir do n'avoir pas (air coiicoriltT CO nH)t av<"c tons Ics aiilres, lorsqiu- cct aiitciu est If pic-niicr qui , dans un Ejiitomc joint a son ouviai^o , a mar que Ic's liaisons qui rattaclicnl cliaciin do sos principcs a tons Ics autres (i)? Ce scrait avec pins dc fondoniont pont-otro qno Ton ponr- rait rcprochor a M. Maltlnis loniploi (jn'il (ait dc cortainos expressions qui nc sont proprcs qu'a consacier dc fansscs idoos , tollos quo colic dc Viiitcrct dc I'ar^crit [interest of money), qn'il dolinit le profit net dun capital en cirgcnt , separe dii ris(iiic et dc la peine dc C employer. Sans doutc , rautcni- nc s'cloii^no point dans ce cas dc I'usage comniun; niais doit-il allcr jus- qu'a respecter ses crreiu's? Toutes Ics personnes instruites , ol M. Malthus lui-meme, savcnt que c'esl un capital, ct non uno sonnne d'argent qui portc intoret, et qu'un capital nc pent ctre employe, ni par consequent donner un profit, qu'apros qu'il a cesso d'etre sous Corme dc monnaic. Heureusement que la plupart dcs definitions dn meme au- tcin- ne sont pas sujcttcs aux memes icproches. Cos definitions ct Ics doveloppeniens qui Ics precedent on qui les suivent , jctteront beaucoup dc jour sur plusieurs questions d'ocononiio politique, et scront tres-ntiles aux Francais qui sontjaloux dc so faniiliariser avce le langage des economistes anglais ; car, on doit cetle justice a restimable auteur de ce petit ouvrage , qu'avce un amour sincere de la verito, son langagc est simple et clair, toutes les fois qu'il n'est pas oblige de suivre ses anta- gonistes dans les abstractions dont ils ont herisse une science qui devrait consister seulement dans I'cxposition des fails et do leurs consequences immediates. J. B. S. xM^. — * Narrative of the Burmese war, etc. — Relation dc la guerre contre les Birmans, contenant Ic detail des operations de I'armee du major general sir Archibald Campbell, depuis son debarquement a Rangon , en mai 1824, jusqu'a la conekision du tralte de paix de Yandabou, du mois de fevrier 1826; par le major Snodgrass, secretaire militaire du general en chef de rexpedition. Londres, 1826; Murray. lu-S" de 3ig pages; prix, 12 sh. An mois de mai de I'annee 1824, la compagnie des Indes (i) Voyez le Traile d'economie politique , on simple exposition de la niani^re dontse forment, so distribuentetse consomment les ricliesses ; par J. B. Say; 5" edition, en 3 vol. au lieu de deux. Paris, 1826; Hapilly, libraire , passage des Panoramas. GRAWDE-I5RKTAGNE. /,,,7 iciuiit, au\ lies du grand Andaman, cinq a six miilc lionniies dc troupes, qui sedirii^erent snr Ranii;on , dont ils s'eniparerent, aprc-s nnc asscz faible resistance. Rangon , que les geographes representent comme la ville la plus coinmcrcante du Pegu, comme ayant plus de 5,ooo maisons et de 3o,<)()(j habitans, n'est (ju'nne miserable bicoqne, composee (Tun vaste assemblage de huttes en bois que les Rirmans abandonnerent, empor- lant toutcs les provisions et tout le materiel de guerre. L'ar- mee anglaise s'arreta a Rangon, et I'ennemi eoncentra scs I'orces au.\ environs de cette ville. Quelqiies escarmouches eu- rent lieu , dans Icsquelles les Birmans furent presqiie continuel lement battus; leurs retrauchcmens ne pouvaient resister aux coups de Tartilleric anglaise : ces f'orlilications, dont on a beau- coup parle, n'etaient que dc liautes palis«ades tres-seriees , lormees de troncs d'arbres fortement plantes en tcrre, et d'une hauteur de seize a dix-hnit pieds. Au mois de juin , les deux arniees se niirent en mouvenicnt, et en n^oins de trois mois ies Birmans eprouverent trois enhecs successils. Ccst alors que Bundoula, general de giande reputation , i'lit a))j)ele an secoius (le Tenipire. II reunit, au mois de decenibre, ]jeu loin de Ran- gon , une armee d'environ 70,000 liommes, avcc laqnelle il essaya, mais vainement, de se rcndrc niaitre de cette place. Scs Ironpes montrerent beaucoup d'ardeiu' et de coinage daris les combats qu'elles livrerent aux Anglais; mais elles (inirent par etre dispersees , et leur chef lui-nieme tomba sous le feu de I'ennemi. Ces succesouvrirent aiix forces britanniques les portes de I'enipire Birman; des renforts leur arriverent du Bengale, et en fevrier iSiS elles marcherent sur Pronie, ou elles arri- verent a la liud'avril, et oi\ elles furent retenues parlespluies et le mauvais tems jusqu'au mois de novembre suivant. Mais, tandis que les operations des troupes anglaises etaicnt ainsi sus- pendues, les Birmans assemblaient une nouveiie armee, qui, forte de 70,000 hommes, vint se faire battre, au-dcssus de Prome, ])ar trois mille Europecns et deux mille Cypayes. Apres cette victoire,qui decida du sort de la guerre, les Anglais mar- cherent sur Ava, dehrcnt toutes Ies troupes qu'on leur oppo- sait, et ils etaieutaquarante milles de cette capitalede Temjiire, Jorsque leur ennemi vint lour offrlr la paix , qui fut conclue et signee a Yandabou. Ces eveneniens, dont nous venons d'o'frir le rapidc resume, sont raconles en detail par le major Snodgrass. Son ouvrage " Sur la vie ct les travaux de Robert Fulton, article traduit du fianrais, du Journa des voyages ; 3° Fragmens d'un voyage dans la France meridionnlc , 5oo LIVRES.IlTR ANGERS. par Kiikelbt'cker. C'cst ai: mrmc ocrivnin que Ton rloit I'anaiysc till pocnu' dc I'iare-lc-Giarid, quo nous avons signaloc, en rcndant compter , lo niois dernici', dc quolques caliicrs du Fits dc la patric. C'cst cc memo Kukelbcckcr, qu'on sc fappcllc avoir enlcndii a I'Atlicncc de P;iris, il y a quclcpics annccs, cf qui a figure dans la derniero cunspiration dc Russie. 4" Frag- ment traduit de VHi.stoire dcs diic! dc Jjoiir!;og//r ; 5" le BaWait hvnpcuv, nouvelle. — Mclangcx : i" Tcembieuicnt dc lerre en IVorvcgc; '2° IVouvcUes du vaisseau anglais the Blossom ; 3° ct 4° Culture de la vigne en Amcrique ct en Angletcrrc. N° XVI. 1° Extraitdu Journaldu Nord, dc Valcriert Nikonof, dedic a riuqjeralrice Elisabeth. Cct extrait entretient Ic lecteur de la fondation de la fortcresse dc Kholmogorc, du monument eleve au poctc Lomonossof, ct de la cathedrale d'Arkhangel. 2" ^f>yrl/i/a//n Schmidt, chaos indigeste oii Ton trouve reu- nis les priricipes les plus simples de la giammaiie generale avec quelques regies particulieres au grec. Au lieu d'enibarrasser son travail de digressions sur la langne des anciens Hellenes , M. Ludemann s'est abstenu de tout ce qui n'est pas necessaire pour apprendre le grec rnoderne: car, si les savans peuvent f'aire eux-niemes les rapprochemens, les ignorans n'y compren- draient rien, quand menie on les leur prtsenterait. M. Lude- mann parle de la tendance qui semble ramener la langue ac- tuclle vers les formes de la langue classique; mals les efforts que Ton fait dans ce but, et les essais qui en sont la suite, ne sau- raient encore etre accneillis dans une grammaire qu'avec beau- (;oup de precaution. De ce nombre sont les tentatives pour reintegrer dans leurs droits le datif , le participe de I'aoristeou les aneiennes constructions des participes. Notre auteur combat I'opinion qui veut que le grec rnoderne soit nne tout autre langue que le grec ancien. A considerer les choses sous leur veritable jour , dit-il , on pourfait soutenir que les Grecs actuels qui ont recu de I'education parlent encore la vieille langue, avec cette difference qu'ellea perdu un grand nombre de formes et de mots, en admettant beaucoup d'elemens heterogenes. Enfin, une incontestable verite, c'est qu'aucune des langues de la famille latine n'est restee aussi pres de sa source. C'est done moins la parole que la penseequia change de nature. Les exem- ples suivent a I'appui de cette remarque. Une chose frappantc de verite, c'est la progression des changemcns, a les prendre en remontant a travers le moyen age jusqu'aux erotiques, puis aux scoliastes, auxnovelles, et enlin aux dcrniers classiques, tels que Pluta/r/ne, Litcien , Stiaboii. Nous ne pouvons analyser une declinaison, ni examiner ici les regies de la syntaxe; mais nous parlerojis de deux appendices qui sont d'lm interet general. Le premier est \\n aperru historique de la litterature grecque nioderne , ct surtout de la poesie populaire; le second, un cata- logue des litterateurs et des ouvrages les plus distingues des tems modernes. L'apercu historique est un excellent morcean de gout et de critique. L'auteur y prend les choses depuis le moment ou, a cote de I'ancienne litterature, il s'en forma une nouvelle, ou le vers politique viut remplacer rhe.\anietrc. II indique comme les plus anciens essais de ce genre I'epltre ct la satire du moine Prodrome qui vivait a Constantinople, au 5o6 LIVRES liTRANGKKS. XII* siecle. Puis, il abordu la poesic popiilaire influciicec par les idees clicvaloivsqnes et ft'-odales do rOccidont , auxquellesse sont molves Ics imitations d'ancions romanciors grecs , tels que Achillc, Tatius et Ht-liodoif. M. Liidemann s'occiipe cnsiiitc dcs chantir-s anibiilaiis qui out qiielque analogic avfc les tronba- donrs on los //ii/ics(i/igcrdcs Alleniands , et cnlin do la prosodie, et do toiitos les formes de vers. Les exeniples qui tcrniinent ce traite sont prcsque tous rolatifs aux exploits des (iiecs contre les Turcs. C'.c livrc n'a que deux cents pages, et cependant on V trouve la grammaire, la syntaxe, des exercices pour traduire et faire des versions et des themes, enfiii rexcellentexpo.se de I'etat de la litteraturc que nous avons signale. 142. — Jnnxagoire Clazoniriiii Fragmenta. — Fragmens d'Anaxagorc, reunis et commentes par Edouard Schaubach, et suivis do deux dissertalions sur la \ic et la philosophic d'Anaxagorc. Leipzig, 1827. In-8°. Anaxagore, qui tient im rang si distingue dans I'antiqiiite, est aujourd'hui pour les philosophes et les philologues un sujet de discussion. On n'est point d'accord sur I'histoire de sa vie ni sur lY-poque de son existence. M. Schaubach s'occupe d'abord de le distinguer des hommes qui furent celebrcs sous le memc nom. Scion Apollodoie, cite par Diogene Laerce , Anaxagore naquit en la 70" olympiade ( 5oo ou 498 ans avant J.-C. ), ce qui se rapporte aux temoignages des auteurs qui le font contemporain de Pericles ou de Socrate. II se voua tout entier a la C(jntemplation des asti'es et des phenomenes physi- ques. M. Schaubach jette du doute sur le voyage de ce philo- sophc en Egypte, ct sur .son arrivee a Athones a I'age de 'io ans; selon hii il n'arriva dans cette villc que sous I'archoiUat do Callias, c'cst-a-dii-e a 45 ans environ. Cost en changeant un K en U qu'on le vieillit ainsi. Quoi qu'il en soil, Anaxagore out pour disciples, Pericles, Euripide, Arclielaiis, Thucydide ; on va memo iu5(|u'a y ajouter Socrate et Empedocle. Anaxagore ne voyant dans la mythologie d'Homere que des allegories, et rapportant toules les croyances populaiies a des causes jdiysi- ques, ne pouvait manquer d'etre accuse d'impiete. II vecut 72 ans, et mourut dans la SS*" olymiuade, ct non dans la 70^, epoque indiquee a tort sans doute par Apollodore. Quant il tnoui-ut, Anaxagore n'etait plus a Athenes : Pericles avail en beaucoup de peine a le sauver de la peine de movt ; et, soit qu'il out ete condamnc a I'exil , ou qu'il s'en fut alle de son gre, il s'etait retire a Lampsaque, ou on lui dressa un autel. M. Schaidjach passe ensuite a Texamcn des ecrits d'Anaxagorc; il pense que lo traite sur la royaute n'est pas de lui, et que ALLEMAGNE. 507 dans sa prison il s'occupa d'un ecrit sur la quadrature du cercle. Son plus imj3ortant ouvrage est celui qui avait pour suiet 1,1 Nature. Lcs fraymcns recuciilis avec soin dans tout ce que I'antiquito nous a laisse, sont ranges selon I'ordre chronolo- gique indique par la vraisembiance. Ce volume est lui supple- ment necessairc aux collections que Ton a deja faites des frag- mens de Parmenides, d'Hcraclite, d'Empedocle; il doit etre place dans toutes les bibliotheques de philosophie ou de phi- lologie. ^ Ph. DE GOLBERY. ' ^|3. — * f^'olksUcder (lev Saben , mctrixch itbersetzt and histo- risck eingeleitet. — Chants populaires des Serbes, traduits en vers et accompagnes d'une Introduction liistorique ; par Talvi. Halle, 1825-1826; Pvenger. 2 vol. in-8<>; pri.x, 1 1 fr. Les Serviens ou Serbes forment une branche considerable de la grande famille des peuples slaves ou esclavons, qui s'eten- dent des bords de la mer Blanche jusqu a I'Adriatique, et dont le plus puissant jette un poids si considerable dans la balance europeenne, landis que d'autres, florissans autiefois et forts d'une grau:le influence politique, ianguissent, depuis qu'ils sont dechus et descendus, pour ainsi dire, au rang de sujets de deux autres puissantes monarchies, auxquelles ils furent long-tems redoutables. Soumis depuis plus de quatre cents ans ii la puis- sance des Turcs, mais en ayantobtenu quchpies privileges qu'ils reussissaient a faire respecter, et dont le gouvcrnem'ent russe s'est dc nos jours declare le defenseur d'une maniere assez positive pour fair-e trembler le sultan d'Istambol sui- son trone chancelant, les Serviens etaient gouvernes autrefois par des souverains de leur propre nation , et formaient une Tsmic puis- sante, qui comprenait, outre la montueuse Rascie, que la Mo- rava arrose, et que les anciens designaient par lenom de Haute- Moesie, I'Albanie, qui sous Scanderbeg tenta encore quelques vains efforts pour se soustraire a la tlomination des feroces Ottomans, la Bulgaria et une grande partie de la Grece pro- prement dite. C'est au commencement du xiv"" siecle que cet empire avait atteint le plus haut degre de splendeur : son tsar Doukhan s'etait fait respecter de s'es voisins, et le trone de Byzance etait pour lui nn appat auquel il n'aurait pu lon--tems resister. Mais ce prince distingue mourut sans laisser un s'licces- seur capable de marcher sur^ses traces et de contenir les chefs guerriers sur lesquels ii avait su etablir sa domination; les grands du royaume partagerent entre eux son heritage et a'ffai- bhrent amsi une puissance qui aurait pu opposer, aux torrens de hordes turques qui fondaient alors sur la triste Europe, un rempart formidable. Battus par Amurath I", les Serbes furent 5()8 LIVRES KTR ANGERS. tntalciiR-iU snljjugiies par Bajazet, (lit Ui I'oudie; le proiniti Iciir avail liviv, en i '^Sf), dans la plainp de Cassora, nnc i^iandt- batailie qui dt'-cida dc K'lir sort. L'epoquc comprise entre la mort du tsar ]3onkhan et la ha- taille elite dii champ des merles ( Ainsclfcld ) a donne matiere a iin grand noiubre de ballades, de j)oemes qui approchent plus on nioins de I'epopee, ct dont la pi apart sont dignes d'etre eonnus. Pi'esqiie tons se rapportent a ces terns heroiques; ((uel- ques-nns remontent plus haut on s'occupent de faits posterieurs ;i la grande bataille qui boideversa ee \aste enijjire , somnit aux Ottomans une nation brave et belliqueuse , et leiir fraya la route (pii plus tarddcvait les conduire juscpie sons les mursde Vienue. Le giand lieios national, qui vit dans tons ces chants , et dont Ic nom se reproduit toujours, csX. J\Jarf,o Kralfevitch [ Marcus, fils du roi ) et les trois Meriuwtchcvitch , son pere et ses deux oncles, qui tons ont combattu jusqu'a la Iin pour I'indepen- dance de leiu- patrie. L'Europe ignoraitl'existence dc ces belles productions d'une litteraJure nouvelle, energiqnes, simples et portaiit nianifestement Tempreinte du genie, quand le savant serbe Wouk Stephanovitcii, echappe a I'esclavage ou gemit sa patrie, etaiourri des souvenirs de son ancicnne splende-ur, vint appelcr sur clles notre attention. Aide du savant phdolo- gue que les lettres et I'eglisc regretteront long-terns et qui s'etait deja occupe avec succes, durant et avant son si^our a Peters- bourg, de la lilterature et de la langue des peupies slaves; aide, disons-nous, du celebre Vater, il commenca par publicr nne i^iammaire de sa langue maternelle et livra ensuite a I'impres- ston les chants popnlaires serbes, qui parurent a Leipzig, dans les annees 182'i et 1824 (^ 3 vol. in-8°). Ce phenomene litte- raire fit alors beaucoup de sensation , et le nestor de la poesie alieniantlc, Goethe, contribua, en recommandant avec empres- sement ces productions remarquables , a fixer sur elles tons les regarc'.;. La collection du savant serbe se compose de deux parties, dont la jireniicrc , intitidee : Chants de fciumes , offre pres de cin(i cents moreeaux de poesie lyrique, oil Ton trouve de la chaleiu-, du sentiment, de I'imagination, et qui celebrent des fetes, des ceremonies religieuses, des jeux et des amours; et dont I'autre, intitulee : Chants dlinmmcs , forme la partie epiquc, et contient 7?^ moreeaux de 100a 1200 vers trochajques acinqpieds avec cesure,(iui pen vent etie compares, sinonpour Telegance et la grace, du moins pour I'energie et la simplicite, aux rapsodies d'Homere. C'est une veritable conquete que la litterature occidentale a faite, et qui rcndra plus commune letude des dialecies slaves ou esclavons : ces accens vigoureux ALLEMIGNE. 609 dune simple et grande nature touchent souvent d'line maniere irresistible et imposent par la ji;randeur , le sublime des idees. II ne nous reste plus qu'i rendre compte de la traduction allemandc, qui vient^de paraitre, et qui est d'autant plus I'emar- quable, que c'est uue dame ( M"*^^ de Jacob, cachee sous \m nom suppose ) qui a procure a nos voisins la jouissance de cette lecture. Le volume que nous annoncons, etqu'un second volume a suivi de pres, offre d'abord un apercu sommaire de I'histoire du peuple serbe; puis, 22 ballades 011 rapsodies eplques, dont douze relatives a Marco et ;i la bataille du champ des Merles; enfin, 54 niorceanxlyriqueschoisis parmi ce que les chants des femmes ont de plus beau. La traduction est libre et s'attache plus a rendre (ijclement les idees qu'a reproduire les memes expressions. II nous est impossible decaracteriser en ce moment avec des details suffisans I'esprit ct la nature de cette poesie rouvelle; nous attcndrons, pour le faire, qu'une etude serieuse nous ait mis a meme de comparer I'original a la traduction; et nous renvoyons nos lecteurs aux Notices sur la poesie poptilaire des Serbes , que M. Kopitar a publiees dernieremcnt dans le xxx^ volume des Annales dc Vienne. J.-H. Schnitzler. 1 44- — Romisc/ie Allerthuiner. — Antiquites romaines de Neuwied et des environs, par G. Borrow. Berlin, 1827. In-4" de 168 p. avec 32 planches. L'un des prlncipaux objets de ce volume est la description d'un fort romain, troiive pres du village de IViedei'-Bieber: on y rend compte de I'une des fouilles les plus importantes et les plus productives que Ton ait cntreprises depuis long-tems. II s'agit d'une ville entiere et de son noni. Des I'annee i7<^i, les tra- vaux avaient etc commences par M. le capitaine Hojfnia/in , qui ne cessa de s'en occuper jusqu'a sa mort, arrivee en 1820. Lii princesse de Neuwied sc plaisait ;\ encourager ces operations, et se montrait ainsi bien digne d'appartenir a I'illustre famille qui vient de faire faire des conquctes a la science dans le nou- veau monde. Aujourd'hui, M. Borrow enumere et decrit les objets recueillis successivement. D'abord, il ilonne sur lebassin -de Neuwied des notions topographiques. Selon Hoffmann et Heyne, ce fut ici, et non a Bonn ou a Xanten, que Cesar passa le Rhin. Le premier de ces savans pensait qu'au terns de Gallien encore il y avail sur le territoire de Nefiwied une ville florissante : Ton y decouvre meme des medailles qui ap- partiennent a des regnes poslerieurs. Quant an nom de la cite ancienne, c'etait, dit-on , Victoria; mais cette assertion n'est pas appuyee de preuves asscz solides. L'auteur passe cnsuitc T. xxxiii. — Fivricr 1827. '^^ 5 10 LIVRF.S ETRA.NGERS. aiix iiiiucs decouvertcs a Ileddesdorf, qu'il pense avoir appar- teiiH au nieme ctablisseiuent. Lcs voutos, les ciieoiivallations, les vcstijics d'anciennes tours, enfin lcs niiirailles romaines d'EHi;ers soiit autatit d'objcts dc discussion. Arrivaiu apres ccia siir la rive gauche du Rhiti , an herd dc la TVette, M. Borrow decrit les autiquitcs dti vi!lai,'e dc Wcisscn-Tliurn ( la Tour- Blanche'), ou Ion voit aujourd'hiii Ic monument du brave ge- neral IIocHE. Bassenheim, Andernach ( Tancion Antcnacum) ne sont pas oiiblies. Enfin, il rcvient au castel de Nicder-Bieber; a sa structure, ii sa distribution interieure, a ses peintures a frcsque, a ses briques de legion. Les details sur la collection d'objets precieux qu'on a reunis dans les diverses fouilles nous entraineraient au-dela des bornes de cet article. Toutefois, nous devons indiqner les paragraphes qui traitent des vases roinains, couune etant d'un grand interet pour les personnes qui se vouent a ce genre d'etudes. Ph. Golbehv. SUISSE. 145. — * Histoirc du passage des Aipes par Antiihal, dans laquelle on determine d'une maniere precise la route de ce ge- neral , depuis Carthagene jusqu'au Tesin , d'apres la narration de Polybe, comparee aux recherches faites sur lcs lieiix : suivie d'un Examen critique de I'opinion de Tite-Livc , et de relies de quelques auteurs modernes ; par J can- Andre Deluc , membre de la Societe de physique et d'lustoire naturelle de Geneve , etc. Seconde edition , corrigee et augmentee. Geneve et Paris , i826;.Paschoud , rue dc Seine, n" 48. In-8" de 391 pages, avec une carte et une planchc; prix , 5 fr. 5o c. Dans la preface de la premiere edition de cet ouvrage , I'au- teur avail reconnu que ses idees sur ie passage des Alpes par Annibal lui avaient ete fournies par un ancien militaire, Ie general Melville, Ecossais; que , muni des renseignemens qu'il tenait de ce savant et habile observateur, il avail revu les lieux, verifie rexactitude de loules les observations , et qu'alors , sur I'invitation exj>resse de M. Melville , il les avail commuuiquees au public. Depuis ce lems, de nouveaux fails sont venus con- firmer encore son opinion el celle du general sur ce fan)eux passage ; et c'esl encore de la Grande-Bretagnc que ces lumieres nonvelles sont venues. Un membre dc I'universite d'Oxford enlreprit , en 1819, un voyage pour verifier sur les lieux memes la narration de Polybe el les conjectures de M. Deluc. La verile parnt alors avec la plus grande evidence; Ie voyageur anglais recounut, sur la route tracee par M. Deliic, en Savoie SUISSE. Ell et dans Ic Piemont, ties traditions relatives a I'armee cartha- ginoise , et rien d'analogne sur la route par le niont Genevre. On pent done rfegarder comnie certain qn'Annibal siiivit la vallee de I'lsere , et penctra dans la vallee d'Aoste par le petit Saint-Bernard. C.e livre n'a pas seulement le merite de resoiitlre une ques- tion historiqiie d'un grand interot : c'est un livrc de voyages. II donue sur plusieurs vallees des Alpes des notions plus com- pletes que celles qu'on a publiees jusqu'a present. L'auteur devait repondre aux objections, anciennes et nouvelles , que Ton a faites a son opinion , sans avoir vu les lieux ; les objec- tions ne pouvaient etre que faibles ; il les reCute sans peine. On trouve , k la fin du livre, une dissertation geologique sur Ics passages etroits par lesquels les rivieres sorlent des niontagnes , et sur I'erosion des rochers par les torrens , cffet auquel on rap- porte I'origine de ces passages. On regrette qu'il soit sorti du domaine de I'histoire naturelle , et qu'il prefere I'audacieuse doctrine des causes finales a I'aveu si convenable , si naturel , de notre ignorance sur c.e que nos observations n'ont pu et ne pourront peut-etre jamais deconvrir. Nous ne coniprenons point les oeuvres du createur, et nous pretendrions penetrer It- secret de ses vues ! Dire que les choses sont partout dans I'ordre et dans I'etat que la volonte divine leur assigue , c'est nqiis ap- prendre ce que nous savions tres-bien : rechercher quels furent les desseins de l'auteur de toutes choses dans certaines dispo- sitions de detail dont nous n'apercevons pas I'origine , c'est un temeraire abus de la raison ; la veritable jAilosophie le repousse. Aureste, cettc uialencontreuse dissertation n'est pas longue ; on sera plus satisfait des considerations sur les pcuples reputes saiicages, par lesquelles l'auteur a terinine ce volume. Y. 146. — * Leonard et Gertrude, traduit de I'allemand de Pestalozzi, par M™*' la baronne de Guimps. Geneve, 1827; Paschoud. Paris, meme librairie, rue de Seine, n" 48. ,In-i2 de VIII et 448 p. ; prix, 3 fr. II y a pres de deuxans, en annoncant une traduction au- glaise du roman de Pestalozzi ( vov. Rev. Enc. , t. xxvi, p. 782 ) , nous avions parle du travail de M'"*^ de Guimps, comme etaut deja connu du public. Nous rectifions aujourd hui cctte erreur, tout en nous felicitant que cette dame, dont la f-'amille el les amis pleurent encore la perte, ait pu terminer la tache qu'elle s'etait imposee, dans le but de faire mieux connaitre a ses compatriotes Ihommc vertneux et I'ecrivain philantrope qui 1 honorait de son amitie. 5ia LIVRES ETll ANGERS. Pcstalozzi, dont la vie entiere a c'te consacrt-e a la catisc de I'enlance et a cello du malhcur, di'sirait avidemcnt la reforme dc'S classes pauvrcs, par line iiouvelle direction donnee a lodu- cation morale et intellectuelle. .Tciine encore, il avail sacrifie toiites les esperances d'tin avenii- brillant, pour sc voucr aux soins penibles que reclamaient de jeiines orjjhclins abandonnes. Plus tard, il oiivril, dans son institut d'Yverdun, un asile a des en fans des deux sexes, cju'il destinait a propager I'instruc- tion, juscpie dans les derniers rangs de la societe. Son roman de Leonard et Gertrude fut inspire par Ic meme sentiment : offert au peuple, il lui presentait le tableau de ses vices et de ses vcrtus, des malheurs qu'amencnt tot ou tard les premiers, et du bonheur paisible qui accompagne le contente- ment de soi-meme. Les lieros de ce roman sont un macon, Leonard , et sa femme Gertrude : la scene est au village de Ronnal. Leonard est laborieux; mais de perlides amis I'entrai- uent souvent au cabaret du bailli Hummel, ou il joue, boit et s'enivre. Les exhortations de sa vertueuse compagne, la vue d'entans cheris que ses defauts menacent d'un complet de- niimcnt, fontnaitre de serieuses reflexions, et Leonard, malgre les basses intrigues du bailli, et grace a la protection du sei- gneur de Bonnal, le comte d'Arnheim, renonce a ses funestes habitudes, et acquiert une honncte aisance. Beaucoup d'autres pei'sonnages paraissent tour a tour sur la scene; et Ic Iccteur passe en revue toute line population villageoise ct ime foule d'evenemens plaisans ou tristes,racontes dans un style simple, naturel, et bien approprie au sujet. Sans doute, Pcstalozzi a atteint le but moral qu'il s'etait propose, et son ouvrage merite de devenir populaire. Peut-etre, en France, dans un pays dont les mceurs different beaucoup de celles qu'avait pu obser- ser le philosophe Suisse, le roman de Leorrard et Gertrude n'aura-t-il plus la meme utilite; mais on y rechercheratoiijours avec empressement cette production originale, qui porte I'em- preinte d'une iime vertueuse et d'un esprit eleve. «. ITALIE. 147. — * Bihlioteca agraria , etc. — Bibliotheque rurale , ou Recucil d'instructions choisies sur I'agriculture; ouvrage dirige par le docteur Moretti, professeur d'economie rurale a I'Uni- versite de Pavie. T. 1. Milan, 1826; Stella. In-12 de 227 pages. Cette interessante collection , publiee par un savant aussi verse dans ragriculture proprement dite que dans les sciences (jni s'y rattachent, sera composee des materiaux suivans : ITALIE. 5i3 1° Eliiinens d'agricultiiiethcorique et pratique , divises en trois sections, savoir : ia chiniie agricole, la physiologic vegetale et lagiiculture pratique; 2" de la culture maraichere; 3° de I'liot- ticultui-e et des jardins paysagers; 4" des arbres fruitiers et lo- restiers; 5° de la pathologic vcgetale ; 6" des animaux domcs- tiques; 7" de I'a'uologie et de la preparation des IVomagcs; 8° traite du droit foncier; 9'' de la jurisprudence relative aux caux et irrigations; 10" de radniinistration rurale; 1 1° de I'ex- pertise des terrcs et de I'art de lever Ics plans. Telle est la dis- tribution de ce Recueil auquel des savans distingues, tols que MM. Chiolini , Romagnosi , Gioja Jstolfi, etd'autres, ont pris I'engagement de coopercr; et, si Icnscnible dc I'ouvragerepond au i""" volume dc chimie agricole, que nous avons sous les veux, cette collection formera une encyclopedic rurale qui manquait encore a I'ltalie. B. 148. — * Esame gencalogico e comparatwo , etc. — E.xanicn gf^nealogique et comparatif des principnles decouvertes et doc- trines medicales, ou Essai d'histoiie philosophique de I'origine, des progres et de I'etat actuel de !a mcdecine, ])ar Louis Chia.- VERiNi, professeur en mcdecine, etc. Naples, i825; Imprimcrie royale. In-S". Dans une courte preface, I'auteur s'attache ;\ demontrer I'importance de I'etude de la mcdecine, la necessitc de rappro- rher et de comparer les diffcrentes opinions des medecins, afin de constater les decouvertes reelles qui honorent la science et consolent I'humanitc. Selon lui, i'expose de ces decouvertes contribuerait encore a prevenir les plagiats et les repetitions inutiies, et permetlrait dc prcvoir et d'indiquer les lacunes que la pcrfcctihilite de la science laisse a remplir aux gcnies futurs. Le but principal de M. Chiavcrini est d'ouvrir des discussions sur la science, d'cclaiicii' Ics doctrines obscures ou donteuscs , et de relevcr le mcrite des decouvertes utiles, dues au genie des Italiens, et que I'arrogance ingenieuse des etrangers ou la nonchalance des uationaux laissent tomber dans I'oubli. Notre autcur a divise son apercu historique en trois epoques : 1" Depuis I'origine de la mcdecine jusqu'a .la dccouverte de la circulation du sang; 2° dc cette deiiiiere cpoque jusqu'a la deconverte du galvanisme ; 3° de la dccouverte de rclectrioitc animalc jusqu'a nos jours. Apres avoir jete un coup-d'ceil sur I'origine et les vicissitudes de la mcdecine dans les terns les plus recules, examine la confusion des idees et les errcurs dc ceux qu'on appelle nos anciens mastrcs , il arrive a la fin de la premiere partie en citant le passage dc Cesalpini, duqucl il 5i4 LIVRES ETR ANGERS. rrsiilterait claiicniont , soloii Tauteiir, qii'il auiait le premier aiinoncc la circulation du san^. Voici ses paroles : « Chez les animaux, la noiirritiiie, an 11103'en do-; veincs, est condnite au coeur, et la, perfectionnee, se distribue a tout le corps, au muvcn des artcrcs : le sana^jjnxsr du ventricule droit du cceui- dans I'artere pulinonaire, cirnilc dans lespounions, oil il se rafraichit, et des poiiinons, au moycn des frequentes anasto- moses, rctourne par la veine jiulmoiiaire au ventriculc! yauche.i' C'cst celte doctrine qu'Hatvcy s'est attache a demoiitier par des experiences ingenieuses. Passant ;V la seconde partie, i! prouve qu'a cette epoque seulement la medecine a commence a jjrendre Ic caractere d'unc veritable science, en abjurant les illusions de I'alchymie, de I'astrologie et de la superstition, en cullivant I'anatomic, la physique et I'histoire natiirelle; enlin , en subslituant atix raisonnemens d'aiitrui les observations authentiques,aux causes occultes les causes reellcs, a la dialectique la philoso])hie induc- tive. Nous trouvons, parmi les opinions des medecins de cette epoque, que Baj^'ivi attribiiait a I'irriiation de IVstomac et des intestius la plus t^rande partie des (ievres et des symptomfs d'inflammation, des convulsions et des faiblesses. L'auteur a passe en revue les opinions et l<^s principes plus ou moins im- portans de tous les hommes de genie qui, dans cette periode, ont exerce quclque influence sur les progres de la medecine , jusqu'a Galvani , a qui Ton doit la decouverte de I'electricite animale. Parvenu a la troisieme partie de I'ouvrage, qui est la plus importante, il donne plus de place a I'examen des opinions et des doetiines professees plus specialement denos jours. Brown, Dcirwin , Kant, Cabanis , Broussais ^ etc., sont tour a tour apprecies, et il n'oublie pas d'exposer a cette occasion sa ma- niere de voir et de raisonner en medecine. L'expose des diffe- rentes doctrines qui paraissent tour a tour dans cette revue histoiique des progrcs de la science , et surtout des doctrines de M. le professeur liosori et de M. le D"" Gall , est fait avec exactitude et precision. La critique trouverait sans doute a reprendre quelques erreurs ou quelques defauts de detail , presque inevitables dans un aussi vaste ouvrage : inais c'est a quoi nous ne pouvons nous arreter. Du reste, I'ouvrage est bien ecrit. Nous dirons seulement qu'un tableau si varie, qui presente tant d'opinions extravagantes et bizarres , au milieu desquelles on ne rencontre qu'un petit nombre de verites et de decouvertes reelles, est bien propre a rendre les medecins plus eirconspects dans I'adoption des doctrines nouvelles, que ITALIE. 5i5 jiioue un eulhousiasme aveu^le. He! qui ne se iiiefieiait de ses ptopres coniiaissances , en consideiant qu'il n'y a pas d'eireur, quelqu'absiude qu'elle soit, qui n'ait fait epoque dans h's ecoles. FossATi , D. M. 149. — * Rcpertorio dellc minie.rc. — Repertoire des mines, pour les annees 181 5 - iSaS. Turin , 1826; imprimerie de Fa- vale. 2 vol. in-8° ; prix , 5 fr. 5o c. Cet important recueil, publie par radministration des mines, atteste la sollicitude eclairee du gouvernemcnt sarde poui' tout ce qui tend a favoriser I'exploitation des substances minerales dans les etats soumis a son influence. Les savans etrangers ap- plandiront eux-memes a la sagesse de la pluparf des reglemens de I'ecole etabiie a Moutiers, en 1S22, pour I'enseignement des sciences qui constituent I'art du mineur. On ne lira point sans interet les dispositions legislatives adoptt'es dans un royaume principalenient riche en mines de fer, de cuivre, de plomb , d'argent, de manganese et de cobalt, ct en eaux minerales de diverses natures; on lemarquera I'attention scrupuleuse avec iaqueile I'autorite surveillc la preparation des briqiies a bAtir , qui ont servi a la construction de la plupart des villes. Cet 011- vrage se termine par une notice historifjue sur la legislation des mines depuis Ic xiii* siecle, et par des articles necrologiques sur MM. de Rob Hand , Graffioii , Belly, Nappione , Aziinonti et Rosemherg, hommes reconmunandables par les services qii'ils ont rendus anx sciences et a I'adininistration. B. i5o. — Dimostnizionc del cjulnto postulato d'Euclide , etc, — Demonstration de la cinquieme dcinande d'Euclide ; par Ca- ywiVt'e MiNARELLi. Bologne, 1826; imprimerie de Nobili. In-8° de 20 pages, avec une planche. La proposition qu'Euclide s'est contente d'enoncer sous la forme de demande, parce qu'il la regardait comme assez claire pour n'avoir pas besoin d'etre prouvee, estcelle-ci : Si deux droites situees dans le inenic plan font avec une troisieme des angles internes dontla soninie soit moindre (jue deux angles droits, elles se rencontrent. Nous regrettons de ne pouvoir placer ici la demonstration tres - facile et tres - claire ue cette verite que M. Minarelli a cru devoir developperet eclaircir, en la rappro- chant des axiomes incontestablcsdontelle est une consequence. II y aurait peut- ctre un moyen encore plus commode et plus general de demontrer tons les theoremes de geometric rela- tifa a la position lespeciive des lignes droites, et ce serait I'a- nalyse qui le fournirait. Lorsque le laisonnement peut «itre exprime par les caracteres algebriques, les methodcs di- I'al- gebre ont I'avantage de fairc «''vitrr les jiaralogismes, qui se- 5i6 LIVRES ETRANGERS. raicnt alors dcs faiites de calciil , et d'offiir a Toeil des icsultati que I'intelligence seule n'eut pent -etic pas soupeonnes. Dans^ I'interet des sciciires et de leiirs applications, il est a desirer que I'analysc mathLiiiatiqiic devienne un inslrument iiniversel , de nieme quune imlustiie bicn ordonnee fait execiiter par des machines tout ce cju'elles sont en etat de Taiie aussi bien, plus promptenient et en pins grande quantite, qne le travail inanuel de riiomnic. ?endice dc ses vices principaux et habitueis. II te- moigne sa surprise de ce qu'aucnn ecrivain n'a traite avant lui la menie maAere ; mais , en ce qui rcgarde particulieremcnt les arts d'imitation , il aurait pu citer an moins .T.-.F. Eni,'el, qui avait public sa Tln'orie dc la mimique , en 1785, deja traduite en francais et recemmcnt en italien, par M. Rasori. Au reste, on ne saurait refuser a I'auteur le merite de plnsieurs lemar- ques judicieuses. Quelque.fois il n'est pas d'accord avec les ob- servations ou les theories des physiologues modernes. La doc- trine de i'illustre Gall ne lui parait point fondee ; mais ses at- taqnes sont plntot le residtat d'opinions traditionnelles, que d'observations neuves et bien constat(^es. II aurait du encore approfondir davantage la distinction que M. le D"" Gall s'est ap- plique a etablir entre les attributs generaux et les facultes pri- mitives et speciales des organes du cerveau. 1 Sa. — * Biograjia universale antica e moderna , etc. — Bio!:;raphie universelle ancienne et moderne , redigee en France par ime Societe dc gens de Icttrcs , et poiu" la premiere fois traduite en italien , avec des additions et des corrections. Vol. XXVIL Venisc , i livraisons, comprenant 240 planches et 120 feuilles de texte. La grande surabondance des matiercs , qui nous fait exceder chaque mois le nombre de feuilles d'impression du a nos sous- cripteurs , et un long retard apporte dans I'envoi de la suite de ee grand et important ouvrage, egalcment precieux pour les hommes verses dans les sciences physiologiques , et pour ceux qui en commencent I'etudti, ne nous ont point permis depuis long-terns de le rappeler a I'attention publique. Les livraisons nouvelles prescntent , avec un texte explicatif , clair et detaille , les descriptions et les figures de la masse ner- veuse cervicale , des membranes et des ncrfs qui appartiur; les abces du foie; I'etat de la moelle epiniere dans la carie vertebrale; les morts subitcs et inipre- vues; les morts lentes, prevues et incxplicables; le tenia et son Iraitement; par P.-Ch.-A. Loins, d. m. , membre adjoint de TAcademie royale de medecine, etc. Paris, 1826; Gabon. In-8° de 563 p. ; prix, 7 fr. Les reclierches de lanatoniie pathologicjue out conduit a considerer les maladies d'une toute autre maiiiire que ue le faisaient les anciens. Pour ceux-ci, une maladie etait un en- semble, une succession de symptomes, dont I'experience avait appris a juger la marche et la terminaison heureusi- ou funeste; les desordres qu'elle pouvait laisser apres die en etaient regar- des comme la consequence, le resultat. Pour lanatoniie patho- logique, au contraire, ces desordres constituent la maladie elle-meme, et il existe autaiit de maladies que uos organes peuvent presenter d'alterations dans leur structure et Icur composition; alterations que les ouvcrtures peuvent seules nous faire bien connaitre. On concoit bien qu'il existe entre ces lesions organiques et les sym|)tomes luie liaison necessaire, et qu'il ne jieut resulter qu'une science incomplete de la consi- deration isolec des unes ou des autres. Mais, malgre les travaux stssidus des raodernes, il reste encore bon nombre de symp- 53a LIVRES FRANCAIS. lollies (|u'oii «io sail a quelle alleratioii . M. 170. — * Tableau de la duree de la vie de Clionune,figuree dans ses phases jjar les saisons de Vannec , et par les quatrt- SCIENCES PHYSIQUES. 533 parties dujour, offrant Ifs types dc ia vie sexuelle de I'homme et de la femme, compares entre eux dans I'etat normal ou dans Voptimum , et la determination du nombre d'annees qu'on pent esperer de vivre encore a chaque age, grave et colorie, avec texte explicatif, par J.-N. C. Paris. 1827 ; I'auteur, rue Saint- Honore, n° 363 , pres ic Grand Bazar; prix , i fr. 171. — Instruction theorique et applications de la regie loga- rithmique ou 11 calculs ; par J. F. Arthur, professeur de ma- thematiques et de navigation. Paris, 1827 ; Carilian-Gceury ; Lenoir, rue Saint-Honore, n" 34o; rauteur, rue Saint-Jacques, n° 56. In-8° de 176 pages, avec line planche gravee en taille douce ; prix , 3 fr. La fiicilite que I'usage des logarithmes donne pour faire les calculs les plus compliques , a ete ingenieusement transportee aux echelles gradiiees selon la loi des logarithmes. On sait qu'a I'aide de ces sortes dc nombres , les multiplications sont re- duites a des additions , les divisions a des soustractions , etc. ; et , comme rien n'cst plus simple que d'ajoiiter ou de soustraire des longueurs, les operations numei'icjiies sont faites avec une extreme promptitude. A I'aide des echelles logarithmiques , on ajoutait , on retranchait avec le compas les longueurs corres- pondantes aux factcurs donnes. Mais bientut on a reconnu que Ton pouvait eviter I'eiaploi du compas , en plaeant dans des positions convenables deux regies logarithmiques exactement egales dans toutes leurs subdivisions. C'est aux Anglais qu'on doit I'idee de faire glisser I'une de ces regies dans une rainure longitudinalc pratiquee dans I'autre; ce qui rend la manceuvre- tres-facile et ajoute beaucoup a la precision des calculs. Ces instrumens, nommes sliding rule , tels que les execute M. Jones- i\ Londj'es , sont d'un usage imiverscl dans toutes les classes en Angleterre. M. Joniard n importe chez nous, en 1814, cette heureusc invention , et maintcnant on fait a Paris , chez M. Lenoir , des regies de ce genre, dont la precision est egale ii celles de M. Jones. Mais, quoiqull soit tres-aise de se servir de la regie a calculs, elle sert a executer des operations numeriques si varices, qu'il est necessaire , pour en tirer parti , d'en apprendre la ma- ncEuvi'e. M. Collardcau a deja public, en 1820, une instruction a ce sujet. Celle que presente aiijourd'hui M. Arthur est beau- coup plus complete. Au premier abord , il scmble etrange qu'il faille un traite de 172 pages pour cnseigner a se servir d'un instrument destine a dispenser des frais de calculs, et on pour- rait croire plus simple d'apprendre I'arithmetique, qui cnseignc a faire ces operations. Mais, dans la necessite d'embrasser- 534 LIVRES FRANgAIS. tous les problemes auxqucls la regie a caleiils pent s'appliquer, ot d'cclaircr ses expositioiis par dc nonibreu.v o.\eiii|)lt's , I'au- teur u'a pu sc dispenser d'enlrer dans des details fort etendns. C'est ainsi qn'on verra dans cet oiivrage des calculs d'arpen- tagc , de toise des bois , d'evaluations dc volumes et de jioids, des questions dc niecanique , de trigononietrie , de combinai- sons chimiques , etc. ; or, pour la tres-grande majorite des honinies, la plupart de ces sujets est sansinteret, et il suflira que chacune prcnne dans le livre la partie qui traite des choscs relatives a ses besoins , ce qui se reduit souvent a un petit nombre de pages. Avec la regie de 25 centimetres dc M. Lenoir, on pent obtenir, a un 3oo^ prcs, Ics resultats de tous les calculs , ct cela par une operation mecanique tres- simple, qu'on pratique, sans crainte d'erreur, au milieu du tunuilte des affaires et des embarras d'une manipulation manu- facturierc, Il serait bien a desirer que I'usage de cette regie fut plus general en France, et nous felicitons M. Arthur d'en avoir facilite I'emploi. Son livre est fort bien fait , et sera ac- cueilli du public. II serait facile d'y critiquer la redaction de certaines phrases qui ne sont pas claires, on qui rendent in- coirectement la pensec de I'auteur : sans doute, ces taches disparaitront dans une autre edition. Francoeur. 172. — * Geometric des artistes at des ourriers , eniolcco/is; contenant un precis des theories les plus utiles de cette science , avec les applications dont elles sont susceptibles, |)armi les- quelles il en est plusieurs qui ti'ont point encore ete decrites : tels sont les procedes pour dresser des regies , executer meca- niquement des prismes , des cylindres , des cones, des spheres; copier des ornemens, des bas-reliefs, des statues, faire le bustu d'une pcrsonue. Ouvrage specialement destine aux ecoles de geometric appliquee aux arts-et-metiers , avec 24 planches ; par A. Teyssedre. Paris,, 1827. Audin , quai des Augustins , n" 25. In-i2 de 464 pag. ; prix, 7 fr. 5o c. A I'avenir, les ouvrages dc mathematiquos destines ;i I'en- seignement industriel seront compares au cours de M. Ch. Du- pin , dont I'experience a constate la praticabilite ; nous em- pruntons a la langue anglaise ce mot qui nous manque. Un livre nouvcau ne sera prefere a ce Cours normal , que dans le cas ou il promettrait une economic de tems, ou I'acquisition de plus de connaissances dans le meme tems. Mais, que les redac- teurs de nouveaux traites y prennent bien garde : ils auront \\ subir une dangereuse epreuve. Entraines par le desir d etre courts , dc faire eviter des etudes inutiles , tie ne meltre que ce qu'il faut , ils restent quelquefois au dessous de cette mcsure SCIENCES PHYSIQUES. 535 dii Eticessaire : les idees transmises par ccs livres nc sont point assez claires , et ne se soiiticnnent point miituellement ; on n'a recu qu'une instruction fnujitivc. II est a craindre que M. Teys- sedie n'ait pas donne assez de developpement aux theories j^eometriqnes. On regrette qu'il ne disc rien des /igures sj/?ie-- triques , si usitees dans les aits. II passe un pen trop rapide- ment sur les figures serablables qu'il eut fallu considerer, non- seulcnient sur un plan , mais dans les trols dimensions de I'es- pacc. Mais il a multiplie les applications , et choisi les plus usuellos. II y en a beaucoup d'autres , sans doute , qui eussent pu trouver place dans son ouvrage, s'il cut vouhi grossir un peu plus son volume , on en faire deux, an lieu d'nn scul , et I'abondance des matieres le lui aurait permis. La theorie a des liniites auxquelles on pent arriver ; car le uombre des verites fecondes et applicables n'est pas tres-grand , et il le sera d'au- tant nioins que les sciences seront plus pres de leiir perfection. Quant aux applications, il est evident que leur nombre aug- merite , a mesure que les arts s'enrjchissent. Aujourd'hui les theories mathematiques out encore besoin d'etre exposees un peu plus longuement qu'on ne le pense , on que la plupart des auteurs ne paraissent le croire : dans les fautes commises par les maitres , a cet egard , les disciples sont au moins complices et souvent provocateurs. On croit apprendre plus prompte- mcnt, parce que le livre qu'on etudie est plus coiu-t ; lorsque I'experience vient detromper ceux que rimpatieuce de savoir a seduits , il n'est plus tems de suivre une autre route. M. Teys- sedrc a ecrit pour les artistes , et il leur donne des notions et des methodcs de perspective. Que les peintres et les architectes en profilcnt; maisqii'ils ne s'en contentent point : leur art exige des connaissances plus approfondies , s'ils veulent en employer toutes les rcssources. Et s'ils craignaient que trop de savoir niatheniatique ne rcfroidlt lour imagination ; s'ils dedaignaicnt de marcher sur les traces dc Leonard de Vinci et de Wren qui furent gcometres pour leur terns , on serait fonde a croire qu'ils ne s'eleveront point a la hauteur de ces grands a.rtistes, C'cst done principalementpar les applications mathematiques que I'ouvrage de M. Teyssedre sera utile, ct il pout I'etre beau- coup. Son expression n'est pas toujours assez correcte : ainsi , lorsque poiu" donner une idee des filets d'une vis , il dit que ce sont des handelcttes roulees sur un cyliudre , et comprises entre deux helices paralleles , on I'accorde sans difficulte; mais lors- qu'il developpe ces bandelettes , pour considerer leur forme apres le developpement , on lui rcprescntera que les surfaces helifoides ne sont pas developpablcs , que I'Dpcration qu'il in- 536 LIVIIES IRANCALS. tliqiic allele ii la f'ois la forme et los diiueiibioiis du ses biin~ (Irlrttes. Ces ubsi rvations ne paraitront pas minutieusos , si Ton fait attention a rinfliionce que des Hvres tcls quo ceUii-ci doivent excrcer siir la justesse des idees. Mais nous le rcpetons avec plaisir : n)al!j;re quelques imperfections I'ouvrat^e de M. Teyssedie pent rendre d'importans services a I'industrie , el il est a desirer dans ce tems si pen favorable aux etudes , qu'aucun obstacle nc vienne empecher cet ouvrajjc d'etre mis entre les mains de la jemiesse iudustrielle. F. 173. — *VArt du geoiut-tre arpcutcur , ou Traite de t^eometrie pratique, ])ar M. Giiy,officier d'artillcrie. Paris, 1827; Mallier, passage Dauphine. In -12 de 375 pages, avec planches; prix , 4 fr- 5o c. , cartonne. Ce volume fait partie d,c\i\.BihHot}iequ(: ittdustrielle. — L'Art du geometre-arpenteur sc compose de quatrc partitas princi- pales : I'arpcntage propiement dit, le nivellement, le lever des plans et I'art dc partager les terres, queronn'appelleplusge'o- desic depuis que ce mot a ete consacie a la science qui a pour objct de faire connaitre les positions et les distances respectives de differens points du globe. L'ouvrage de M. Guy embrasse COS quatre divisions, et nous le felicitous de la methode qui I'a dirige dans son travail. Sans entrer, comme Ver/>a{>en,AAm des descriptions minutieusos d'instrumens ; sans so perdre , comme M. Lcfcbvrc , dans une foulo de cas parliculiers, il n'a donne que les principes goneraux des opei'ations. Ses conseils sui" le lavis sont suffisans pour des arpenteurs de profession , et I'exposition du systeme metrique avec ses applications au oaleul des surfaces et des volumes termine bien son livro , digue de la collection dontil fait partie. Nous ferons cependant une observation, dans I'interel des editeurs de cette collection. M. Guy a cru devoir donner et meme demon trcr les proposi- tions de geometric qui soiU la base des operations qu'il en- seigne : c'est, selon nous, iin soin supcrllu; est-co faire trop d'honneur aux arpenteurs que de lour accorder la connaissauce des olemens de geometric? nous no le peusons pas; d'aillours, il n'en est pas uu qui n'ait, comme il le dit, son Lcgcndrc. Nous cngagerons done I'auleur a faire usage, dans une seconde edition, des 53 pages que ces olemens occupent dans cello- ci pour donner plus de details sur les grandes operations; son ouvrago, ainsi modilio, pourra peut-otro remplacer (|uelques traiti's qui out lo double dofaut d'etre chers et volumineux. T. RlCUARl). 174. — * Resume des Icrons doiinees a V Ecole royalc dc.i jionta cl chanssers sur I' application dc la inecani(iuc a Vetahlissc- SCIENCES PHYSIQUES. 53? ment tics constructions ct des machines. Premiere partie, conte- iiant Ics lecons siir la resistance des inateriaiix, et sur I'eta- blissenieiit des constructions en terre, en maconnerie et en charponte ; par M. Wavier, de V Academic des sciences, inge- nieur en chef an Corps royal des ponts et cliaussees. T. I. Paris, 1826; Firniin Didot. In-S" de 4^5 p., avec 5 planches; prix , 8 IV. L'examcn d'un ouvrage tel que celui-ci vcut du terns et de la maturite. Si, pendant que nous mediterons cette premiere partie, I'auteur mettait Ic public en possession du reste de son travail, nous pourrions presenter a nos lectcurs Ig tableau coniplet de I'instruction mathematique donnee a I'Ecole spe- ciale de nos ingenieurs civils, ecole si digne do servir de modele a toutes les nations qui sont en etat de creer de pareilles institutions. II est vrai que tout la favorise, qu'cUc reunit au plus haut degre tout ce qui pent contribuer a I'instruction. C'est a Paris plus que partout aillcurs qu'elle pent etre une continuation de I'Ecole polytechniquc; ses eleves ont conti- nucllement sous les yeux les monumens et les arts de la capitate; I'enscignement y est entretenu au plus haut point des con- naissances acquises; les decouvertes les plus recentes y pren- nent sur-le-cliamp la place qu'elles doivcnt occuper dans les applications des sciences, et par consequent, dans les sciences meme. L'ouvrage de M. Navier sera le plus beau present que les sciences mathematiques aient fait aux arts de la construc- tion. Comme sa destinee est de porter I'instruction dans tons les lieux ou elle est recherchee, de passer dans les langues de tous les peuples qui cultivcnt les sciences, nous nous attachc- rons a le faire connaitrc : c'est la maniere dont il convient d'en faire I'eloge. F. 175. — Details des prix de tous les oucragcs dc bdtimcns , ;\ I'usage des ingenieurs, architectes, entrepreneurs et proprie- taires ; par Pox -Seurrat, architecte des batimens civils du departement de la Nievre. T. I. Nevers, 1826 ; Paris , Carilian- Goeury. In-8° de 190 pages , avec tableau; prix de Touviage entier. cjui aura 2 vol., aS fr. , pour les non-souscriptcurs. On doit encourager la publication des ouvragcs de ce genre ; ce sont de veritables services rendus aux pcrsonnes qui s'oc- cupent de construction : elles y trouvent leunies une foule d'obscrvations utiles qu'elles ne poiuraicnt souvent recueillir par elles-memes, ou qu'elles n'obtiendraient que d'une longuc experience. L'auteur parait s'elre livr^ a des recherches labo- rieuscs, et leurs resultats sont exposes avec methode et clarte : nous regrettons seulement qu'il ait donne trop de place a des 558 IJVRES FRANCAIS. applications cjiii no soront utiles que pour le lii'-partement de i.i Wievre et pmu lepoque a laquelle il ecrit. Son ouvrage, moins volumineux, aurait ol)tenu plus de sncces. R. r-G. — * L'Art da Charpcnticr , precede de Notions stir in coupe, le dessechertirnt ct la resistance des bois , et t(;rniine par uil f'ocabulairc raisonne dc tons Ics termes employes dans la cliarpcntcric , par Le Pace. Paris, 1827; a la librairie scienti- fique ct iudustrielle de Malhcr et compagnie , passage Dau- pliine. In-i2, cartonne, de 272 p., avec six planches gravees en taille douce; piix, 3 fr. 75. Voici uu excellent nianuel. Sans donte, les details donnes dans un aussi court ouvrage ne suffisent pas pour former des ouvriers charpentiers ; I'art enibrasse trop de choses pour qu'il soit possible d'en resserrer toutes les parties dans aussi pen d'espace : mais les proprietaires , les personnes qvii font executer des constructions y tiouveront les lumieres propres a les eclairer dans leurs entreprises, et a les rendre capables desurveiller avec profit des ouvriers qui quelquefois combinent mal les conditions de solidite , emploient des bois- defectueux, et surtout se servent de charpentes de trop fort ecarissagc, pour augmenterlenombre de pieces de bois et leurs benefices. L'ouvrage est divise en deux parties : dans la premiere, M. Le Page traite du choix des bois, de leurs n)aladies, de leilrs dessechemens, de la resistance dont ils sont susceptibles dans toutes leurs positions, debout, horizontales ou inclinees. La seconde partie donne les divers traits de charpentes, et indique la maniere de les assembler entre elles, scion les circonstances : on y trouve les details ivlatifs aux cloisons, planchers, com- bles, charpentes a la Philibert-Dclorme , escaliers, cintres et echafauds, pieux et pilotis, ponts, etc. Le livi'e est termine par les toises de bois et par des devis et des tables sur la force, la resistance, le cubage et le sciage des bois. On y trouve aussi un vocabulaire raisonne de tous les termes usites en cliarpen- terie, et des planches trcs-bien gravees au trait pour servir a rintelligencc du texte. Nous recommandons au public la lec- ture de cet utile ouvrage, qui contribuera , nous n'en douton.? pas, au succes de la librairie industrielle de- M. Malher, en- treprise dont nous avons deja fait plusieius fois I'eloge, et qui n'a encore produit que de bons livres. 177. — Art d'atteler les animuax selon Icur force , contenant des principes de mecanique , la description d'instrumens au moyen desquels on evalue leur force , la maniere de calculer le poids d lui fardeau pour une pente donnee ; des procedes propres a descmboiu'ber les voitures , faciliter le tirage dans SCIENCES PPIYSIQUES. SSg Ics monlees ; de nouvcaux modes d'attelages ; par A. Tkys- SEHRE. Paris, 1826 ; M'''-^ Levi , libraire, qiiai des Aiigustins , n" a5. ln-11 avcc figures; prix, 2 fr. Si les conceptions du genie industrici, qui ont eleve I'An- gleterre a la puissance colossale oii elle se trouve, sont reelle- ment , conime I'experience et le raisonnement semblent le de- niontrer, les sources les plus abondantes de la force et de la ]irosperite des nations, combicn meritent d'etre accucillis et leeondes les travaux de M. C.h. Dupin , et de ses dignes col- laboratcurs pour propager en France, parnii la classe labo- rieuse , les connaissances mathematiques et physiques qui lui iTianquaient jusqu'ici, a cause des honteuses lacunes existant dans I'enseignement public de notre pays , et des fausses direc- tions qui lui ont toujours ete donnees. Notre gouvernement qui seconde aujourd'hui ces travaux , semble en avoir senti la necessite. Le long titre explicatif que nous avons transcrit nous dis- pense de faire I'analyse de I'interessante brochui'e de M. Teys» sedrc. On ne pent trop applaudir et encourager de semblables applications de la mecanique , niises a la portee du vulgaire. Elles recevront successivenient des developpemens , et it sera facile de les completer par des tables 011 les rapports de la force a la resistance seraient tout calcules , et qui ajouteront a la comniodite de ces utiles ouvrages. Cet opuscule est fort bien redige , et sera tres-utile a con- suiter. J'ai regrette de n'y pas trouver la comparaison des forces des divers animaux , tels que I'homme , le cheval , I'ane , le bceuf, le bufle et le chameau. On sait que ces forces varient beaucoup avec les individus ; mais il eut ete fort utile d'en as- signer les limites , et d'en donner les valeurs moyennes , ainsi que les vitesses dont ces animaux sont capables , leur quantite d'action , la duree du travail diuine, etc. Francoeur. 178. — Syslcine d'artillcrie de campagnc du general Allix, (Compare ai'ec les systemes du comke d'artillcrie de France , dc Gribeaiwal et de fan xi; par G.-A.-F. Allix. Paris, 1827; Auselin et Pochard. In-8" de 3i5 pages ; prix, 5 fr. Cet ouvrage est une reclamation raisonnee, un plaidoyer en faveur des opinions militaires de M. le lieutenant-general Allix sur I'artillerie de campagne. Le comite d'artillcrie n'apoint adopte ces opinions ; le general ne regarde point encore sa cause comme desesperec, il en appelleiaujugemcnt detous ses pairs, et public les resultats de ses recherches, de ses meditations, de son expe- rience. L'auteur prend quelquefois, a son insu, le ton de I'aigreur et du rc5sentiment; dans les discussions de cetto nature, il est 540 LTVHES rRANCAlS. difficile d'etre toiijours calnic, en presence dcs grands inttiV;ts d'unc gloire militaire a laquelle on a des droits et a laquellc '\{ scrait si flatteiir de poiivoir prepnrer les moycns de cueillir encore plus de lainiers. M. le general Allix pcnse que, dans le systeme d'artilleric de campagnc adopte par le comite , les bouches a feu sont trop pesantes , que les affuts et ies autres voitures no sont pas assez solides, quoique la matiere y soit prodiguee en pure perte ; que Texpericnce des longnes i^uerres de la revolution et I'excinple des autres nations con- scillaicnt tout autre chose que ce que Ton va faire. II signaie, paimi les decisions du comite d'artiilerie, ccUes qui lui scm- blent le plus desavantageuses , et il ne les traitc pas avec in- dulgence. II nous serait impossible d'cntrer dans quelques de- tails sur cette discussion si interessante , m6me pour les progres des arts nombreux dont se compose I'art de la guerre; nous ne pourrions nous dispenser de longues explications et de I'em- j)loi de termes techniques, peu familiers au plus grand nombre de nos lecteurs. D'ailleurs, I'equite nousimposerait I'obiigation de connaitre les travaux du comite d'artiilerie par une autre voie que I'ouvrage ou ils sont critiques. Nous nous bornerons done a dire que I'ouvrage de M. le general Allix est tres-in- structif , que les faits y viennent toujours a I'appni des maxi- mes , dcs theories et de leurs applications. Quand meme, apres im mur examen des questions qu'il a traitees, on ne serait pas de son avis, on ne regretcera point de I'avoir lu. Y. i^g. — * Metalbirgic pratiriue, ou exposition detaillee dcs divers procedes employes pour obtenir les metaux utiles; pre- cedee de YEssai et de^ In preparation dcs luincrais ; par M. M. D... et L... Paris; Malher et compagnie. In-12 devi et ^47 p., avec 8 pi. gravees; prix, 4 fi'- 5o c. Si cette verite consolante, que notre siecle est moins frivole, moins leger, moins superliciel que ne I'etait le siecle passe, si vante par des gens trompes ou de mauvaise foi, avait encore besoin d'etre prouvee, on pourrait citer cette quantite de livres utiles publics chaque jour et destines a donner I'essor aux arts, a diriger I'industrie, a propager 1 instruction. Les libraires ne mettraicnt pas autant de zele a leur multiplication, s'ils ne vivaient pas dans un tems ou I'excellent esprit du public les reeoit avec empressement. La libi'airie scientifique et in- dustrielle de MM. Malher et compagnie, d'ou sont dt'^a sortis plusieurs ouvragcs recommandables, vient d'acquerir de nou- veaux droits a nos eloges. Celte metallurgie, les auteurs en conviennent eux-memes avec modestie, n'est pas un traittf e.r profcssn ; c'est unc compilation, discnt-ils : nous ajouterons SCIENCES PHYSIQUES. 541 qu'elle est faitc avcc soin, avec iliscernenient. C'est un travail d'autant plus estimable que son but est de fairc desccndre I'instruction dans les ateliers, d'eviter de nombreuses et difli- cilos recherches a des gens qui resteraient plutot ignorans et routiniers que de s'y livrer, parce qu'ils n'en ont ni ie terns ni les moyens, et qu'il faut deja une certaine instruction pour que Ic desir de s'instruire puisse se manifester. II nous est impossible de faire une analyse ue cet ouvrage, qui n'est lui-memc qu'une analyse tres-succinctc, et cepcndant substantielle. IN'ous regrettons que les auteurs n'aientpas dirige leur attention sur les cokes, et sur leur introduction dans les ateliers des artisans. Bien des doutes et des irresolutions em- pechent encore la majeure partie des ouvriers d'employer ce combustible, dont nos voisins d'outre-mer ont su tirer tant d'avantages. Le savant O'Reilly, auqucl ils ont fait des emprulits , aurait pu levn- fournir a cet egard des renscignemens precieux. Esperons que, dans le traite sin- la manipulation du fer , qu'ils nous promettent, ils repareront cette omission. Nos chefs d'usines et de fabriques sont assez instruits ; ils lisent, ils voyagent, et jusqu'ii present on n'l ecrit que potu" eux; il est terns de s'occuper de I'artisan qui nc quitte point sa bou- tique et de I'ouvrier qui n'a pas lu : ee sont eux qui ont particu- lierement besoin de connaissances et de theories qui puissent combattre victorieusement une routine enracinee et funeste. OE. 180. — Manuel des dames, ou VArt\de la toilette, suivide VArt du modiste et du m.ercier-passcmcntier ; contenant les pro- cedes les plus convenables pour la conservation des cheveux, des dents et du teint; I'art des gestes et corps organises; 5" \a. geognosie , ou la description des terrains i't des masses minerales; 6" les mines , ou la description des terrains exploites; 7° la botMiique, ou Thistoire des plantes , 8" la zoologic, ou I'histoire des animaux; 9" V anthropologic , ou I'histoire de I'homme physique; 10" enfin, les influences ])hysiqiies , ou 4'expose des circonstances principales qui en- 54 A LIVRES FRA^^CAIS. tourent roMsUiicc de tons ks ccnps ut la vif dc Urns ks rtros. Cublies a une epoque encore peu eloignee , ne sufliscnt plus aux etrangers , et les Parisiens eux-memes eprouvent le besoin d'un guide sur qid les conduise dans ces quartiers iuconuus. Le dictionnaire que nous annoncons sera utile aux uns et aux autres : outre les noms des rues, ils y tiouveront quelques details historiques et etymologiqucs. Trois plans acheveronl tie leur laire bien connaitre la topographic de cette immense ville. a. .186. — ' Course duns la Criiycrc , ou Dc.uiipt/on des inceurs (t des sites les, plus reinarquables de erUe i/iteressantc eoiitrec du canton de Fribour^. Paris, 182G; Firniiu Djdot. Iti-12 de 117 pages; priN, /, fr. :,;'iG T.ivi^Es i ran(;ais. Malgrc Ic t^raiul nombrc de voyages en Suisse publics par ♦k'S voyagcurs IVanrais, anglais ou ailemands, plusieurs parties de celte contree ne sont pas aussi connues qu'ellcs meriteraienl de I'otre. On ne doit point s'en etonncr : la ])lupart de ces ecri- vains nomades ne voicnt dans la Suisse que la niatiere d'un livre ; ils n'ont guerc Ic terns de s'y arretcr assez pour observer consciencieiisenient; et, dans le fait, il leiu- importc nioins de bien voir que de bien ecrire. II y a sans doute dcs exceptions lionorables a cette regie; mais le nombrc en est lort petit. Du reste, n'exigeons pas I'impossible. Un bon livre sur la Suisse entiere ne pent etre I'ouvrage que d'un liomme grave ct loyal, qui, a I'exemple du doctcur Ebcl , commence par adopter la Suisse pour sa patrie; puis, la parcoiu't dans tons les sens, s'ar- retant partout, visitant, etudiant toutes les localites, ne re- doutant aucune fatigue, aucun sacrifice de tems. Ce qui reste ii iaire apres cet ecrivain, et dans le nienie genre, ce sont essen- tiellement des monojjraphies, comme celle que nous annoncons. L'auteur de la Course dti/is la Griijere est im habitant du pays meme qu'il decrit; il en connait les localites, les mo?urs, les habitudes; il a saisi toutes les differences caracteristiques que les opinions, les coulumes et I'industriemettent entre les habi- tans des divers villages, dont ces differences font presque au- tant de republiques ; il connait a fond le dialecte grueiien , ses nuances , ses rapports avec le caractere du peuple qui le parle; possedantl'histoire dc son pays , il eclaircit, tantot par la cita- tion d'un document, tantot par un recit, un point que, sans un tel secours, on ne connaitrait qu'imparfaitement. L'auteur n'est pas d'ailleurs etranger aux sciences naturellcs , et sur- toutala botanique ; aussi n'a - t - il point neglige, dans son ouvrage , cette source d'interet. Il resulte de tout cela que son opuscule se fait lire d'un bout a I'autre avec le plus vif inte- ret, parce qu'il renferme plus de faits que certains ouvrages volumincux qui se presentent dans le monde litteraire avec de grandes pretentions. La partie qui traite des mceurs est sur- lout remarquable ; la physionomie nationale y est exprimee dans toute son originalite avec «n singulier bonheur. IDes ta- bleaux gracieux et meme neufs s'y succedentrapidement, mais sans apparat; ils se presentent naivement sous la plume de Tauteur, tels qu'ils sont dans la nature qu'il a devant les yeux. Nous rappoiterons un seul trait de nieeurs qui feraju- ger de I'interet du livre et de lamaniere del'ecrivain. Les pay- sans de la Gruvere liscnt les journaux, (|uelques-uns recoiveut niemc dcs feuilles etrangeres. '■ Lorsqu'elles soul ce qu'ils ap- pellent intercsHWlcs , ils so rcunissent en fnule pour en en- SCIENCES PHYSIQUES. 5/, 7 tendre la lectiue. lis commeiitent , ils discuteiU queiquefois avec line raisou , une sagacite qu'on ne trouve pas Ioujolii s chez les j)orsonnes qui ont hi bcaucoup de livres. Lcs j^ons tin peuplc, en Angleterre, passent ponr avoir une yiandc finesse de tact politique.; je doute qu'ils en aient plus que lcs pay- sans de la Gruyere. Places sous lo regime municipal, accoutu- ines a debattre presque toutes les semaines leurs interets coni- muns, ils contractent de bonne heure I'habitude dcs affaires et deviennent ainsi des hommes toutpositifs. — Leurs assemblees communales sont, comme toutes les reunions d'hommes, im champ de bataille ouvert aux passions, unearene avec son cote droit et son sote gauche, sous la presidcnce d'un syndic, qui a souvent autant de peine que M. Ravez ( le president de la Chambre des deputes, en France ) a contenir lcs orateuis dans les limitcs de la question. Les grands mots a I'ordre dujourn'v sont pas tout - a - fait aussi IVequcmment repetes qu'a Paris ; mais, pour les sarcasmes , ow ne luic/i doit guerc ; ce^tlc fort des Grueriens. » Quoique I'ouvrage soitccrit correctement (;t avec cctte viva cite qui annonce un homme d'esprit , les puristes trouveront a y reprendre iin petit nombre d'expri-ssions et de phrases ; ce- pendant, ces defauts memes ont un merite, c'est de renforcer remprcinte du cachet national , parcc qu'ils tiennent au Ian- gage meme et a la tournure d'esprit des habitans de la Gruyere. L'auteur senible embarrasse ( p. 8 et 9 ) pour expliquer lcs vestiges de la langue latine qu'on trouve dans I'idiome grue- rien, vu que les Romains paraissent n'avoir pas penetre dans le pays ou on le parle. Plusieurs savans s'attachent trop exclu- sivement, selon moi , a faire derivcr par une filiation imme- diate les idiomes de la Suisse romande , de la langue des Ro- mains, seuls maitres de I'Helvetie pendant les trois premiers siecles de I'ere chretienne. Le gouvernement d'Auguste et dc ses successeurs ne pcsa pas moins sur la partie septentrionale de I'Helvetie que sur Toccident de ce pays. Et cependant, les idiomes du nord de la Suisse n'ont guere conserve de la langue latine que quelques noms propres de lieux, alteres par une prononciation tudesque. La statisti(jue des idiomes paries en Suisse demande a eti-e eclaircie par I'histoire de I'ensemblc des invasions succcssives faites dans I'ancienne Helvetic. Quant a Icur grande division, elle s'explique par la domination des Al- lemanni dans la partie oil se parle la langue allcmande, et ])ar le regne dcs Bourguignons dans la partie occidenlale, (jui , meme aprcs la destruction de cc peuplc, dcmcura separce de I 'Helvetic gcrmanisce, et conserva non-sculement le langagc , 54S LIVRES Fll/VTNCAIS. m.iis I'cmprcinti; dcs mcciirs do la race boiiryuignoiio. C'est done dans la laiif^itr loniiinc , telle que la parlaient les peuples de la ]"Yaiice, (ju'il I'aiit ehercher rorii^iiie immediate des idio- mes de la Suisse fraiieaise ; sans cet intermediaire, on est sou- vent embarrasse pour lier la Suisse de nos jours au monde re- main. Je pourrais eitcr, eomme examples, quelques etymolo- gies expliquees par notre auteur. Une etude assez suivie des ouvrages imprimes et manuscrits des trouveres francais m'a donne la conviction que, plus {jeneralemcnt repandue, la con- naissancc de leur langue, jettera dujour sur quelques parties de I'histoire de la Suisse romande. Le petit ouvi'age que nous recommandons a nos lecteiirs , fort bien imprime, par M. Firmin Didot, est orne d'une char- mante gravure representant la vue du chateau de Gruyere et du Molesan. C. Monnard. Sciences religieuscs , morales, politirjues et liistoi'iqucs. 187. — * Metapltysique riouvelle , ou Essai sur le systeme in- tellcctuel et moral de Vhomme. Paris, 1826; Aime Andre. 3 vol. in-8°, ensemble de i485 p.; prix, 21 fr. et aS fr. par la poste. Comme toutes les autres sciences, la metaphysiquc recherche des faits et les rapports qui existent entre eux ; mais les faits dont elle s'occupe ne I'rappent point nos sens; ils se produisent dans la conscience, et c'est la qu'il faut les saisir. Nous ne jjarlons pas ici de la metaphysiquc particuliere a chaque branche de nos connaissanees, et qui en forme la base rationnelle, mais de celle qui traite de Thomme intellectuel et de ses lois; et, certes, il n'est pas de question dont la solution ait ete agitee de plus de manieres divcrses. Cette ardour de recherches s'explique facilement, si Ton considere qu'il n'cst pas d'etude plus soduisante que celle qui promet de reveler I'homme a i'homme. Tandis que I'imagination s'exerce en liberie sur tout ce qui attire notre attention dans la nature, il est bion dilUcile qu'elle reste immobile devant le grand phonomene de la conscience, et qu'elle ne cherche pas a fonder une theorie sur les faits qu'elle peut ou qu'elle croit pouvoir y observer. L'auteur anonymo de I'ouvrago que nous annoncons nous presente aussi un systeme nouveau. II s'empresse de nous pre- venir qu'il n'appartient a aucune ecole; jl pretend ne rien devoir a ses devanciors; mais, comme nous sonimes toujoiu's le produit de notre siocle, memo a notre insu, il lui arrive de donner pour s'ieunes ties idees deja coniuies dans le nionde philosophique. Etendre la portee d'un fait n'est pas le creer, SCIENCES MORAXES. 5/, 9 qiiand on nc I'envisagc d'aillcurs sous aucune face nouvelle. Suivie ce nouveau systemc et tons ses details renrermes dans trois gros volumes, serait une tache trop lonj^aie : nous nous contenterons d'en donner une idee sommaire. Dans le premier iivre , Fauteur eonsidere les facultes consti- tutives et fondamentales de notre etre, et celles qui en derivent immediatement. Ces facultes constitutives sont d'abord les facultes de scntir et d'agir, qu'il regarde comme deux attributs divers d'un menie principe, la sensation, ce qui prouve qu'il est eleve de Condillac. II est vrai que plus tard il insiste sur la faculte d'agir, la principale a ses yeux, et Ton serait tentede croire qu'il regarde, avcc M. Lai'omiguiere , V attention comma le principe fondamental de I'entendement; niais bientot il revient a dire que le sentiment et I'activite, quoique choses distinctes, derivent d'une nieme cause. Voila comment il rend son idee : « Tandis que I'ebranlemcnt d'ou nait la sensation a lieu de la circonference au centre, celui d'ou s'engendre Tac- tion du corps s'opere en sens inverse , du centre a la circon- ference. » La troisieme faculte constitutive, dans son systeme, est celle qu'il nomme faculte d'habitude, et a laqiielle il fait jouer le plus grand role dans tons les phenomenes de I'existence. C'est d'ellc qu'il tire le principe de la memoirc. De la determination, dit-il , qu'imprime aux fibres sensitives Taction des objets sur les sens, dans le plienomene de la sensation, il en dcmeure aux organes certaines dispositions ou manieres d'etre, par suite desquelles ils sont en etat de les reprendre, au moins en partie, en Tabsence des choses, et c'est la qu'est la cause immediate du souvenir. Or, ces dispositions ou manieres d'etre qu'im- prime a Torganc cerebral ou a la fibre sensitive Taction des objets sur les sens, il les nomme habitudes, et la capacite de Torgane ou de la fibre a contracter de tellcs dispositions il Tap- pelle faculte d'habitude. Chaque souvenir particulier est aussi le produit d'une habitude particuliere. Cette faculte d'habitude n'appartient pas exclusivemcnt ii la fibre animale : les corps inanimes eux-memes en sont egalement susceptibles, et cette propi'iete se manifeste dans les arbres de nos jardins, dans la malleabilite des metaux, etc. Quelques lecteurs trouvcront jjeut-etre un peu abstruses ces considerations genei'ales ; mais les j)ersonnes qui font de Tetude de la philosophic Icur occu- pation habituellc, saisiront aisement le systeme de Tauteur dans cette rapide analyse. A Taide de cette puissance de Tha- bitude, il reduit a des actes purement automatiques niille actions du corps et de I'activite intelleloi de la parole de pouvoir a volonte disposer de ces idees dans le travail de la reflexion. Au moral comme au physique, il est impossible, scion notre auteur, de rien nous figurer interieure- ment, de reflechir a rien , sans Ic secours de la parole. II a soin d'ajouter, il est vrai, qu'il etend la defniitioii du langage a tout systemc de signes institues quclconques. Les mots sont, ]>our lui, une sorte d'appendice sensible attache aux idees, et c'est en apprenant leur signification que nous prenons con- naissance de ces memes choses. II nous scmble , au conti'aire , (jue les langucs, connne les nomenclatures dans les sciences physiques, ne sont que I'expression des rapports deja percus : elles servent sans doute de moycns de communication et de rappel des idies ; elles facilitent nos conceptions, en presen- SCIENCES MORALES. 55 1 laiit les clioses eloigneos a I'osil de la conscience ; niais elles nt; soiiL que dos elVets de I'activite de rintelligenee, et non ses priiicipes d'action. II deniontre encore la nccessite d'un sys- tenie designes institues : question absolument oiseuse , puisque nous ne pouvons savoir ce que nous serious, sous 1« point de vue intellectuel, en I'absence de ces instrumens de la pensee. II veut aussi nous faire connaitre les dangers d'une organisation differente dc la notre, dans laquelle notre memoire serait plus parfaite. Nous avons bien assez a faire pour trouver les lois de notre organisation actuelle, si toutefois elles peuvent nous etre parfaitement revelees, sans diriger dans un monde inconnu d'inutiles investigations. Le quatrieme livre n'offre aucun apercu nouveau : il ne sert qu'a developper des points de theo- rie deja prcsentes dans les trois premiers. On voit que le systeme de I'auteur ne conlient aucun fait qui lie soit doja connu, et que iiieme il fait abstraction d'idees regardees commc fondamentales dans certaines ecoles de nos jours, telles que les idees innces ou fails rationnels que des philosophes aujourd'hui fort accredites placent en dehors de la sensation et meme de I'activite combinee avec le principe de la sensibilite. Ses opinions sur les proprietes du langage se rap- prochent beaucoup de celles de Condillac, dont il etend encore la theorie, deja trop cxagerce dans ses consequences. Ce qu'il dit sur nos habitudes (et riionime ii'est, dans son opinion, (|u'un double systeme d'habitades ) renferme beaucoup de re- marques interessantes ; mais il nous semble donner une imp"or- tance trop exclusive a I'influence de cette faculte. Du leste, sou systeme a I'avantage d'etre presente avec ordre et methode. Malheureusement , la difficulte n'est pas de faire lui svstemc avec plus ou raoins d'elemens donnes : les metaphysicicns ii'ont que trop de pente a considerer la nature comme I'eXpression de celui qui sourit a leur imagination, tandis qu'il ne devrait etre que I'image de la nature bien observee. Quant aux formes litteraires de cet ouvrage, il est a regretter que I'auteur ait neglige, pour donner de la clarte a son exposition, I'elegancc et la precision, qualites indispensables dans ces matieres deja si ardues par elles-memes. Ad. Gonuinet. 1 88. — * Les Jennes industricls , ou decnuvertes , experiences , coin'crsations et voyages dc Henri et Lucie; par Maria Edge- worth, traduit de I'anglais par M™" Swanton-Belloc. T. IV. Paris, 1826; Fortic. In-12 de ^68 pages; prix , 14 fr. les 4 vol. Nous avons annonrc, raniiee dcrniere (voy. Rev. Enc., t. xxviii , p. 879 ), le i"^"" volume de cet ihteressant ouviage. Les 552 LIVRES FRANCAIS. 11^ ct 111® volumes out cte publii's avec le luenie siRtts, ct aiijouid'liui parait lo iv" et dernier, non moins riche en con- veisations instructives que les precedons. 11 commence par des entretiens sur relectricite , I'liistoire de sa decouverte, ses principaux plienomencs, ses applications les plus utiles. Lucie anime ces matieres arides dc la gaite et de la vivacite de son age: tout sourit a son imagination enchantee; elle s'inleresse a ces nouvelles experiences avcc non moins d'ardeiu' qu'aux etudes, naguere les objets de ses plus cheres afiections. Re- cevoir une commotion electrique est pour elle le comble ihi bonheur : elle le demande commc une grace. Les chapitres suivans nc fournissent pas des matieres moms attrayantcs a I'avide curiosite des deux enfans; ils abondent en notions scientifiques qui annoncent dans miss Edgcworlh une grande variete de connaissanccs ; ils contiennent aussi des scenes de la vie commune dessinees avec beaucoup de verite. Les dialogues des enfans ontrc cux et avec leurs parens, le tableau anime de leurs etudes, les peintures naives de leurs plaisirs et de leurs peines, tout concourt a presenter I'instruction sous des formes agreables. Le portrait de la jeune personne est rendu avec infiniment de charme et de naturel ; cclui de Henri nous parait offrir quelque prise a la critique. II semble un jieu extraor- dinaire qu'un jeune garcon de 1 5 ans fasse ses delices de I'etude de la physique, et que, pour lui, la plus grande felicite de la vie consiste a inventer un odometre, instrument qui sert a mesurer la longueur de la route parcourne par une voiture. Cc n'est pas dans les combinaisons de la mecanique que so trouvent les joies de cet age. M^'^Belloc, dans un style constammcnt approprie au sujet, a parfaitement saisi et rendu avec beaucoup de bonheur les idees de miss Edgeworth. Ad. G. 189. — * Traite de legislation, ou Exposition des lois gene- rales suivant Icsquelles les peuplcs prosperent , deperisscnt , 011 restent stationnaircs , par Charles Comte, avocat a la Couc royale de Paris, professeur honoraire de droit a TAcademie de Lausanne, auteur du Censeur europeen. Paris, 1826-1827 ; A. Sautelet et compagnie, libraircs, place de la liourse. 4 vol. in-8"; prix, 32 h\ M. Charles Comte nc traite point la legislation comme font la plupart des juristes qui- n'appellent du nom de lois que les injonctions ecrites dans les livres et les registres des assemblees; il les voit dans les forces, quelles (ju'elles soicnt, auxtpielles les homines sunt teiius d'obeir ; il les etudie dans les relations qui existent entre ces forces et les phcnonienes qui en sonl Its SCIENCES MORALES. 553 vcsultats; ii prcntl le mot lots dans le sens que Ini donnent les pliysiciens et Ics natiiralistes. Cette nianiere de Ics consi- dorer renveisc tons les faux systemes, et les remplacc pai- I'observation ct I'etude des fails ; c'cst unc belle application de la methodc expirinientalc aux sciences morales et politiques. Pour decouvrir les lois que suit la civilisation, I'auteur deter- mine Taction que les hommes excrccnt les ims sur les autres , individuellement et coUectivement ; il remonte aux causes de cette action et en suit les consequences; mais, comme elle agit differemment aux differentes epoques de la civilisation, M. Comte en determine les caracteres et les modifications dans toutes les circonstances. II ne trace point un tableau imai^i- uaire; il decrit des faits arrives , montre comment ils decoulent les uns des autres, et indique toujours les sources ou il les ])uise; il nous donne, pour ainsi dire, I'histoire des races dont Tensemble compose I'humanite, et son livre pourrait convenir a ranthropologiste, aussi bien qu'au jurisconsulte philosophe. Les hommes ne subissent pas seulement Taction de ieurs semblables; ils sont, en outre, soumis a Tinfluencc des choses. TJne multitude de circonstances physiques contribuent aux progres d'un peuple, ou le tiennent dans Tabrutissement : c'est la nature ou Texposition du sol, ou bien le cours des eaux, la temperature de Tatmosphere , la facilite des communications et d'autres circonstances analogues ; M. Comte fait remarquer Tinfluence que ces causes diverses ont exercee sur les nations des principales parties du globe. II arrive presque toujours a des conclusions contraires a cdles de Montesquieu. Le plus vastc genie ne pouvait prevoir les observations nombreuses et plus exactes qui devaient etrc faitcs aprcs lui, ct les progres scientifiques qui devaient en etre la consequence. Notre auteur presente sous un jour absolument neuf les motifs et les suites des invasions des habitans des pays froids dans les contrees plus chaudes. Il eclaircit ainsi la science de I'histoire en meme tems que celle de la legislation. On s'aper- coit,enlc lisant, que ces deux sciences ont beaucoup d'ana- logie entre elles, et souvcnt meme se confondent. Elles decrivent des phenomenes qui sc rapportent aux memes etres; seulement. Tune donne des descriptions plus speciales que Tautre. Tout s'enchaine dans la nature. Les evenemens d'aujourd'hui ne sont, dans bien des cas, que des consequences de ceux de la veille. Pom- trouver les causes de Taction que les hommes , in- dividuellement ou coUectivement, excrcent les uns sur les autres, il faut done sou vent les chercher dans un terns qui n'est plus; on est conduit & decrire un efat social qui a cesse 554 LIVRES FRAiNCAIS. d'etre pour avoir I'explieation de celui qui existo, ou prevoir celui qui ne peut tardcr d'cxister. Leshommes qui se livrcnt a I'etude des lois sc divisent au- jourd'hui en deux sectes : les uns forment ce qu'ou appello Yecole liistorique , les autres Ibrment W'cnlc pliilosopliitjue. La methode de M. Comte etant la menie que cclle qui est en usage dans les sciences naturelles, son ouvrage, a proprenient parler, n'appartient a aucune des deux. II n'appartient pas a I'eeole historique, puisqu'il n'arien qui ressemble a unc compilation , ou i\ un arrangement de decisions. II n'appartientpas davantagi- a I'ecole philosophique ; ear on n'y trouve ni systemes, ni raisonnemens a priori. (I'est tout simplement la methode d'ob- servation. Les sciences de fails et de choses n'ont pas de sectes ; clles n'appartiennent pas plus a une nation qua une autre ; I'ouvrage de M. Comte convient done egalement a toutes. Cependant, certaines parties de sou livre sont dc nature a interesser cer- tains peuples, plus que d'autres. La partie qui traite de I'esclavage interessera vivement les peuples ou il existe de nombreux esclaves. A vrai dire, il devrait les interesser tons; car les populations qui se divisent en maitres et en esclaves exercent une influence sur nous- niemes ; niais cette influence n'est apercue que par les hommes habitues a suivre I'enchainenient des effets et des causes. L'in- fluence qu'exerce I'esclavage en Russie, soit sur les maitres, soit sur les serfs, est sentie, au contraire, par la plus grande partie de la population , quoique personne peut - etre n'en apercoive toute I'etendue. Cette partie du Traite dc legislation de M. Comte cxcitera done chez les peuples du nord de I'Eu- rope , chez les nations independantes dc I'Amerique , et dans les colonies qui s'y trouvent encore, un interet plus direct que chez les peuples qui n'ont ni colonies, ni esclaves. L'auteur , apres avoir fait sentir I'importancc du sujet , expose quels sont les divers genres d'esclavage qui ont existe ou qui existent encore; il montre I'influence de I'esclavage sur la constitution physique des maitres et des sujets , de meme que sur leurs facultes intellectuelles et morales ; il observe I'effet qu'il produit sur les personnes libres et industrieuses qui n'ont point d'esclaves. II fait voir son influence sur la production et la distribution des richesses, sur raccioissemcnt ou le declin des diverses classes de la population, sur leurs mceurs et leurs idees religieuses, et meme sur I'industrie et le commerce des autres nations qui n'ont point d'esclaves. Dans toutes ces SCIENCES MORALES. 555 questions , I'auteur sc montie au niveau ties derniers et impor- tans progres de I'economie politique. II fait ressoi'tir les effets de la protection accoi*dee par le gouvernement des metiopoles, aux esclaves centre les violences et les cruautes de leurs mai- tres. II traite enfin de I'abolition de I'esclavage, et de I'inegalite de rangs, de pouvoir et de fortune qui en est la suite. Dans tout cet expose , I'auteur n'est en quelque sorte qu'his- torien; mais cette histoirc est, plus qu'on ne pense, celle de la plus grande partie du genre liumain. Les verites qui sortent des faits ont toute la force qui nait de I'evidence , et offrent a ce qu'il appelle les possessciirs d' honimes , de tons les pays, de grandes et terribles lecons. Les personnes qui s'occupent de cet important sujet, soit en France, soit en AngleteiTe, trou- veront dans le Traite de legislation un examen approfondi de toutes les questions qui s'y rattachent, et des documens que Ton ne pourrait acquerir sans de longues et penibles re- cherches. Quelques pages sont insuffisantes pour faire connaitre im ouvrage aussi considerable auquel nous nous proposons de consacrer un article plus detaille. Y *. 190. — Opinion d'un soldat sur la revision prochaine des lois penales mililaircs ; par le comte Gaspard Depons, capitaine au 7'' regiment d'infanterie legere. Paris , 1827. Anselin et Pochard, rue Daupliine, n" 9. In-.S" de 49 pages; pi'ix, i fr. 5o c. L'auteur de cet ecrit ne connait ni la France , ni le soldat francais , et ne connaitra probablement jamais ni I'un ni I'autre; car on ne fait point dans I'erreur autant de chemin qu'il en a fait sans y etre pousse par luie force irresistible, au milieu des lueurs insidieuses d'une instruction mal dirigee. On ne pent douter un seul instant de la sincerite de M. Depons; s'il n'etait point de bonne foi , il prendrait quelques precautions contre I'increduiite de ses lecteurs. Mais, dans les questions dont il s'agit , ainsi que dans toutes les discussions , c'est la verite qu'il faut chercher, abstraction faite des discutans et de leurs dispo- sitions morales. M. Depons craint que, dans le nouveau Code penal militaire , la ponrsuite des crimes commis par les mili- taires envers les citoyens ne soit confiee aux tribunaux ordi- naires, et il s'ecrie , plein d'indignation : « Que fcra-t-on alors du principe que, nul ne doit etre juge que par ses pairs?" Quoi done ! les crimes commis par les fonctionnaires les plus eminens seront juges par les tribunaux que le soldat ne veut point re- connaitre? Les prefets, les conseillers d'etat, etc., seront les pairs Aes simples citoyens, et tout ce qui aura eudosse I'uni- forme militaire cesseroit de I'etre ! M. le capitaine , si le soldat 556 LIVRES FRA.NCAIS. n'est pas \c pair tla citoyon francais , il ost son cnnomi ; il siif- fira sans doiitt" d'indiqiicr par nn soul mot to qui est incon- vcnant, odicMix nionio clans ccttc nianier<' de considcror I'annec Jrancaise; nous nous absliondrons d(> la montrcr sous I'aspcct ridicule qui la rondrait insoutcnablo dans tout pays on rcj^ncrait ini veritable ot unique esprit public , ct non pas une coalition d'csprits de corporation. SuivantM. Depons, le Code penal militairc actucllement en vi- guourest beaucoup trop indulgent. II n'en sera satisfait quelors- que I'ofQcier gouvernora sa troupe comme Jupitei' gouvernait le nionde , d'un clin d'oeil : il propose ce qu'il croit necessaire et efficace pour obtenir cette obeissance automatique. On sent a chaqne ligno de cette brochure que I'auteur n'a pas pousse assez loin ses etudes militaires , qu'il n'a pas medite les meil- leurs ouvrages anciens et modernes , qu'il n'a pas encore ac- quis le droit de se faire ecouter dans le conseil dcs homnies instruits. On y remarque aussi on dcs notions fausses , ou I'ab- sence de notions suffisantes sur I'esprit de la nation francaise , la nature de son gouvernement, et la direction qu'il lui convient de suivre. F. igi. — * De hi colonisation dcs condamnes , ou dc I'avantagc qu'il y anrait pour la France a adopter cette mesurc; par M. Be- NoisTON DE CiiATEAUNEUF. Paris, 1827; Martinet. In-8° dc 67 pages ; prix, i fr. 5o c. Le fait qui sert de fondement a cet ecrit est I'augmentation cffrayante dcs delits et des crimes, et par suite dcs detenus qui encombrent en France les bagnes, les inaisons de force et les niaisonsde detention. En 1824 , on y comptait 44,48o detenus, dont 9,920 forcats. Le nombre des condamnes a plus d'un an de detention a cte de 18,000 dans cette inemc annee, ct de 19,400 en 1826. Les frais d'entietien de ces condamnes s'ac- croissent de jour en jour dans une progression rapide : ils s'ele-. vent aujourd'hui a plus de 11 millions, dont 3, 680, 000 pour les bagnes. Cet elat de choses prend-il sa source dans le de- faut de luniieres, ou dans i'absence des principes rcligieux, ou dans ces deux causes reunies? Est-ce le manque de tra^ vail et la diminution dcs salaires qui produisent ce triste phenomene? ou plutot ne serait-ee pas Teffct naturel de I'ac- croissement de la population elle n.enie? Ouclque explication qu'on puisse en donncr , il n'en reste pas moins prcssant de rechcrcher des nioyens de correction moins dispendieux , et surtout plus propres a amendcr les criminels , que le systeme actucllement en vigueur. Leur deportation dans les colonies a ete n'clamee de concert par les criminalistcs , par les ecri- SCIENCEiJ MORALES. 55? "vains, par les consoils gent-raiix dcs departenicns, qui ont iiivoque a I'appui de cette opinion il'exempli; dc I'An^le- tene. Mais, le principe de la deportation adniis, il rtste a trailer line foule de questions, parmi lesquelles se presente en premiere ligne le choix de iV'tablissenient colonial oii Ton doit transporter les malfaiteurs. M. Ginou\ier dans une brochiu'e que nous avons annoncec (voy. ci-dcssus p. 228), designe la Guyane francaise, dont la partie habitee lui parait remplir dans cer- taines dc ses contrees, qu'il dit ne pas etre insalubres, touies les conditions necessaires a cette colonisation. D'autrcs indi- quent le Senegal, et trouvent des contradictcurs qui leur opposent egalement I'insalubrite du climat ct la contiguite de tcrritoires favwables a I'evasion des condamnes. S'etayant de I'autorite de M. Moreau de Jonnes , qui a long-tems habite les Antilles, M. de Chateauneuf propose les trois petitos lies de Bieque, dela Desirade et de Saint-Martin. Nous ferons observer a I'auteur que ces pctites colonies seraient bientot insuftisantes, puisque , de son aveu, les trois iles reunies ne pourraient con- tenir qu'une population active de 18,000 individus, non com- pris la garnison et les administrations. Nous trouvions que M. Ginouvier ne s'etait pas assez appe- santi sur retablissement-modele de Botany-Bay. M. de Chateau- neuf ne saurait encourir le meme reproche. Il passe en revue les deux systemes de deportation adoptes d'epuis long-tems par deux grandes nations de I'Europe, I'Angleterre et la Rus- sie; ce qui le conduit a faire ressortir les principes d'huma- nite qu'une civilisation plus avancee a dii introduire dans les punitions infligees aux malfaiteurs. En Angleterre, le legis- lateur a eu principalcment en vue de creer tout ce qui pent contribuer a la regeneration morale ducoupable :lcssouffranc(s physiques lui sont epargnees; son sort s'ameliore en meme terns quesaconduite devientplus reguliere. En Russie, an contraire, ou Ton dcporte annuellement pres de 6,000 condamnes dans les deserts de la Siberie, rien ne pent adoucir leur situation : sous un ciel d'airain et sur une terre desolee, ils vont expicr •■leur crime dans les tourmens physiques; quelques classes meme ont les narines fendues, mutilation cruelle qui denote im grand fonds de barbaric chez celte nation h demi civilisee. L'ecrit de M. de Chateauneuf se recommande par une foule d'observations interessantes, presentees sous ime forme ele- gante. II contient en outre quelques faits de statistique tres- curieux. ^d. Gondinet. 192. — * Discours dAdricn Diiport snr frtabtissement dr.t Jures , la police de surete et la justice crlminelle. Paris, 1827: T. xxxiu. — F^vrier 1827. 36 558 LIVRES FllANCAIS. Verdieic, libraiie, quai ties Aiigustins, n" aS. In-8" de xvi ct i34 pages; prix, 3 IV. ic>3. — * Arte (III pnrlemcnt d'Jnglctcrrc da "xi juin iSaS , modifiant et nhinissaut tons los statiits rolatifs a la formation dcs jiu ys, tradiiit de rani;lais par M. Victor 1'oucher, substitut du ptocureiir du roi a Alcncon. Paris , 1827; P. Dupont. In -8" de 107 pages ; prix, 6 fr. \^(\. — * Du jury anglais ct du juryfrancais; par M. Duver- OiER DE Hauranne, anclcn depute. Paris , 1827. Baudouin freres, In-8° de 60 pages ; prix , v fr. 5o c. ig5. — * Observation sur Ic jury en France; par J.-M. Le^ GRAVEREND, iiiaitre dcs requeles. Deuxiemc edition. Paris, 1827; Bechet a;ne.In-8" de 149 pages; prix, 2 fr. 5o c. Tandis que I'attention publique etait vivement preoccupee par la presentation a la chambre des deputes du projet dc loi centre la presse, le niinistere soumettait a la chambre des pairs une loi sur Ic jury qui , si elle etait adoptee, devrait alterer en-, core cette institution salutaire , dont cependant nous n'avons plus que I'ombre, depuis le code d'instruction criminelle de 1808. Les csprits furent tellement atteres par I'appareil deploye contra la plus precieuse de nos libertes , qu'a peine songea-t-ou qu'une autre franchise non moins utile etait nienacec. Toutefois des publicistes amis de leur pays ehercherent a signaler a I'opi- nion publique les vices de la loi du jury, et tel est le motif principal qui nous parait avoir doune lieu a la publication des ecrits dont nous venons de transcrire les titres. Le premier sur lequel nous appelierons I'attention de nos lec- teurs, est la reimpression du magnifique discours prononce par AdrienYSMvo^t , le2 7novembre 1790, dans leseinde I'assemblee constituante, sur la police de surete, la justice criminelle et I'etablissement des jures. L'editeur a fait preceder ce discours , dont nous ne saurions trop recommander I'etude a tons ceux qui veulent connaitre a fond les principes de I'organisation ju- diciaire en matiere criminelle , d'un extrait d'un autre discours dans lequel le meme orateur traite aussi la question du jury- Mais nous sommes bien loin de ces tems ou Ton discutait avec une si grande bonne foi et de si eclatantes lumieres , les bases de la constitution d'un grand peuple. Tandis que nous suivons vine marche honteusement retrograde, I'Angleterre plus sage ou plus heureuse que nous, apporte, sous I'influence d'un nii- nistere eclaire, les plus importantes modifications a sa vieille legislation dans cette partie. Quoique s'opcrant sans secousse, cette reforme n'est pas moins digne de remarque, et elle est due en grande partie aux genereux efforts de M. Peel: c'est lui qui, SCIENCES MORALES. 55y vn 1 8^5, a faitmodifieretreunir en corps, par le pari enicnt, tous Ics statuts relatifs au jury ct a dote ainsi son pays dune sorte de code coaiplet sur cctte institution.il estvraique I'absurde phra- seologie en usage dans la legislation anglaise, depare encore les sages dispositions contenucs dans cet acte parlenicntaire. Mais, au milieu dune foule de termes obscurs, on pent y reconnaitre toute la inarche de I'lnstitution du jury chez nos voisins, et nous devons savoir gre a M. Victor Fodcher d'avoir mis le pu- blic francais k merae d'etudier cette importante matiere dans le texte original. Une remarque frappera tout homme attentif qui comparera I'acte du parlement anglais au projet de nosminis- tres, c'est que la disposition la plus impopulaire de ce projet, celle qui tend k concentrer dans la seide classe eleotorale la capacite necessaire pour etre jure, et la refuse aux professions liberales comprises dans I'articie 382 du Code d'instruction criminelle, se trouve parfaitement confornie a I'articie 2 du nouveau statut. Effectivement , parmi les personnes que la loi anglaise ecarte des jurys, se trouvent les avocats,les procu- reurs, les solliciteurs, les medecins exercant a Londres, les pharniaciens, les officiers des armees de terre ou de mer, etc. Le principal motif qui, tres-probablement a decide cette me- sure, se trouve dans I'importance et la nature des fonctions remplies par les individus dont nous avons donne I'enumera- tion. D'ailleurs conime les conditions de fortune sont fixees a un degre pen eleve, il en resulte qn'il se trouvera toujours, mal- gre ces exceptions, un uombre sufflsant de citoyens pour exercer ce droit et concourir ainsi a la promote administration de la justice civile et criminelle. Mais il n'en seraitpas de mcme en France, si Ton reduisait le nombre des jures a celui des elec- teurs, et il a toujoms repugne a notre caractere national de considerer un individu payant 3oo francs de contribution comme plus propre a s'acquitter de fonctions diffiriles qu'un homme de lettres, un avocat, un medecin, etc. II serait par trop absurde aussi de concentrer dans la seule classe des elec- teurs, le nombre des citoyens interesses a la tranquillitc et au bien etre du pays. A qui ferait-on croire, en effct , qu'un notaire, proprictairc d'une charge qu'il a payee 5oo,ooo fr. ne doit pas desirer le maintien du bon ordre, tout autant que le negociant , qui, au moyen de sa patente et de sa contribution personnelle , a pu attcindre le cens electoral? Aussi , la chambre des pairs a-t-elle fait une chose eminemment sage en retabiis- sant au nombre des jures les citoyens que le projet ministeriel ■ en retranchait pour lavenir. Cependant, nous devons dire qu'un criminaliste distingue, M. Legraverend, qui a fait reim- 36. 50o HVRES FRANCAIS. piinior i I'occ.ision S<^^- . ..... 108. — * Quelqucs observations sur Ic projet dc loi relatif a la police de la presse; par M. Augl de Fleury. Paris, 1827 ; Firmin Didot. In-8" de 38 pages ; prix , i fr. L'importancc des questions relatives a la presse nous impose le devoir de continuer la revue des principaux ouvrages pu- blics sur ce sujet ( voy. ci-dcssus, p. 228 ). Painii les sciences qui sont propres ;\ repandre la conviction SCIENCES MORALES. 56i dans les espiits, il n'cn est pas dc plus veritableiuent utile que la statistiquf. Ici , les faits pailent d'eux-memes , ct tout le monde salt qu'ils ont bcaucoup plus de puissance que les theories les plus briliantes. Aussi, devons-nous proclamer que M. Daru, par la publication de ses Notions stadstiques sur la librairie, a deniontre sans replique toute rimportance dcs in- dustries qui naisscnt de la presse ; et le resultat que tout homme impartial tirera de ses calculs, c'est qu'uu gouvcrnement bien inspire se gaidera toujours d'attenuer les produits d'une source aussi propre a accroitre !a fortune publique. M. Daru a Jedige ses tableaux statistiques des produits de riuiprimeiie en France d'apres I'utile ^/^/iog7(7/;/;/6' publiee dcpuis I'annee 18 ii par M. Beuchot. On y volt que, depuis le 1'^'' novembre 1811 jus- qu'au 3i decembre 18 a5, les presses francaises ont mis aujour le nombre immense de 1,152,295,229 feuilles, non compris les feuilles quotidiennes, ni les impressions sorties de I'impri- inerie royale. Si nous snivons ensuite, annee par annee, le nombre de feuilles imprimees, nous verrons que le besoin de la lecture a double en dix ou douze aus. Mais nous preferons donner quelques notions sur les industries particulieres qui tieraient a la j)resse. La premiere substance qui sert de base a rimprimerie estle papier, ou plutot lecliiffon, avec lequel il est fabrique. Or, nous voyons que, d'apres la fabrication annuelle du papier, qui estde 2,880,000 rames, la quantitede chiffon necessaire pour fournir a cette fabrication doit etre de 80,600,000 livres pesant. A Paris, une partie considerable du chiffon est ramassee dans les rues par des iudividus dont on evalue le nombre moyen ii 4,000, gagnant I'un dans I'autre en- viron 36 sous par jour. Mais, comme I'objet dont nous nous occupons n'entre guerc que ])our un sixieme dans le gain des chiffonniers, le i-este cousistant dans les os, la vieille ferraille, les debris de verrerie, etc., il en resulte qu'ils ramassentjournel- lement dans les rues de Paris pour 1,200 fr. de chiffon. Ce prix double lorsque le chiffon a passe par les mains des mai- tres chiffonniers, et des marchands en grosqui en font faire le triage et le lavage, operations qui occupent a pcupres 5oo per- sonnes. Eu resume, la villc de Paris fournit aux manufactures de papier pour 4,800 fr. de chiffon par jour, en y comprenant celui qui provient des hospices, des revendeuses a la toilette, des particuliers, etc., ce qui fait 1,752,000 fr. par an, et toute la France presente dans le meme espace de tems un produit de 7,480,000 fr. sur la seule branche du chiffon; ce qui, a raison de 5oo fr. par personne, fait vivre 14,960 individus. Le nombre des papetcries existantes en 1825 etait de 200, et 50-2 LIVRES FRANC AIS. tehii lies ciiveson aclivito dans ces etablissemens sY-leve ;\ 1200. Chaquecuvt! occiipe an uioins i5 personncs; done, le nombre des ouvriei'S employes dans les papeteries nu nionte pasiimoins de 18,000, sans conipler ceiix qui sont oniployes a la prepara- tion des acides et dcs eolles, les niecaniciens , etc. , qui, tout compris , forment un total de plus de 3o,ooo personnes. Il.y a 35 fonderics de caractercs, occupant niille ouvriers, et les pro- duits de cctte fabiication peuvent s'elever a 65o,ooo fr. par an. Enlin, I'encie d'impressionentre dans les fraisde la librai- riepdur 12,000 fr. IN'ous airivons niaintenant a rimprimerie elle-meme, apres avoif passe sommairement en revue les industries qui en fer- ment en quelque sorte la base. Le nombre general des impri- mcries dans toute la France est de 665 , dont 82 a Paris. On comptait en 1825, i55o presses en activite , savoir : dans Paris 85o, y compris celles de rimprimerie royale, au nombre d'environ 80, et a peu pres 700 dans les departemens. Toutes Ces presses out produit, dans cetteannee 1825, environ i3 a i/i,ooo,ooo volumes, dont plus de 400,000 sont sortis des seules presses deM. Firmin Didot. Nousne pourrions suivreici les calculs de M. Daru dans tons leurs details, et nous nouscon- tenterons de dire que le gain des compositeurs , pressiers, gra- vcurs, protes el correcteurs est annuelleraent de i5,26j!,5oo fr. On compte a Paris i32 maitres relieurs; maisil fauty ajou- ler un grand nombre d'ouvriers qui travaillent en chambre et les relieurs des departemens ; ce qui en porte le nombre a 1200, et met en circulation im produit annuel de 2,440,000 fr. , auquel il faut ajouter i,ii5,ooo fr. , provenant du satinage et du bro- rhage. Enfin , il existe a Paris 480 libraires et 84 bouquinistes, et dans les departemens 922 ; ce qui forme un total de i,580 libraires et bouquinistes qui tons concourent au partage des produits de cette immense industiie. ' Le resmne general de ces notions statistiques nous fait voir que i3,5oo,ooo volumes , qui se fabriquent ordinairement par annee, produisent dans le commerce une valeur leelle de 33,750,000 fr. Celte somme comprend depuis le salaire du chiffonnier jusqu'au benefice du libraire et aux honoraires des gens de lettres. II est vrai que ces demiers comptent pour bien peu dans le j>artagc de cette enorme somme, et M. Daru ne pense pas s'ecarter de la verite en estimant ((ue la part des gens de lettres sur le prix de leurs ouvrages ne s'eleve pas a 5oo,ooo fr. II faut songer , en effet , que beaucoup d'cntre vnx nc peuvent oune veulent rien exiger pour le prix de leurs manuscrits; que ceux qui en traitent avec les editeurs n'en ob- liennent qu'un prix bien modique, paye le plus souvent ei> SCIENCES MORALES. CiH'', excniplaires ou sur le prodiiit de la vente, et enfin, que la reim- prt'ssioii des ouvragestombes dans le doinaine public nedonne auf^une retribution. M. Daru termine ces ciirienses rccherches par les observations suivantes : <■ En resultat, I'industrie de la presse cree annuellcment une valeur depres de 34 millions, et cette creation estd'autant plus reelle, d'autant plus profitable, t|uc la matiere premiere que cette industrie manipule se com- pose d'objets presque sans valeur. Pour la papeterie, du chif- fon; pour rimprimerie, du noir de fumee, un peu d'huile, du plomb et quelques peaux^ sonl les seuls objets appreciables (|uc ies papeteries, I'imprimerie et la reliure enlevent a d'autres industries. Dans le langage de reoonomie politique, le ti^avail est la mesure de toutes les valeurs ; mais on pent dire non nioins justement, que la plus noble de toutes les puissances, la puis- sance intellectuelle, change la sterile matiere en objets precieux, et tel est le privilege de la pensee, qu'a elle senle appartien- nent les creations. » Ces sages reflexions sont bien propres i justifier les alarmes de la librairie, occasionees par un projetde loi qui porterait un si grave prejudice a cette branche si importante de uotre in- dustrie. Aussijles principaux imprimcurs et libraires de Paris, all nombre de 23o, se sont empresses de faire connaitre aux Chambres leurs motifs d'apprcltension. Independamment de leur petition, ils viennent de publier des observations pleines «ic mesure et de sagacite sur le rapport de la commission de Ja chambre des deputes. L'auteur de ces observations, M. Charles Renouard, avocat, prouve que le projet, tel qu'il est amende par la commission, n'offrii'ait guere moins (I'inconveniens et d'entraves de tout genre que le projet ministeriel primitif. Pour repousser un argument banal employe par les partisans de la nouvelle loi , M. Renouard demontreque la legislation actuelle est loin d'etre insuftisante pour la repression des delits de la presse , et que les tribunaux n'ont pas toujours monlre cette indulgence donl on les accuse en faveur des hommes de lettres et des libraires. Les recherches faites par l'auteur dans la Ga- zette des Tribunaux, depnis le mois de novembre iSaS, jus- ((u'au 1*' Janvier 1827, font voir que cette feuille a rendu compte . L'aiiteur, rue Cassette, n° 17, et Belin-Mandar, rue Hautefeuille, n" i3. In-iadexviet 120 p. prix, 1 fr. 75 c. Une introduction de 12 pages est cousacree a la comparai- son des alphabets hebreu, grec et remain. L'auteur en tire queiques presomplions en faveur dc ralphabct hannonique qu'il forme pour la languehebra'ique : il croit qu'il aura I'avan- tage de mener rapidenient a la connaissance des analogies qui existent entre ces langues. Sans examiner ici la valcur dc ces analogies, que les philo- logues regardent maintenaiit comine tres-faibles , nous dcvons dire que I'invention d'un alphabet harmoniquepeiil avoir beau- coup d'avantages pour luie iangue dont I'ecriturc est extreme- ment difficile, comme le Sanscrit; mais, quanta I'hebreu, dont les vingt-deux caracteres sont aussi nets que les caracteres ro- mains, une nouvelle forme dans les letties ne parait pas offrir nne grande utilite. Les points-voyelles, je I'avoue, augmentaient beaucoup les difficultes de la iectme et de la grammaire; mais deja ceiix quinc voulaient apprend re I'hebreu que poiu- en avoir une connaissance superficielle, I'apprenaient indepcndamment des voyelles, et reduisaient ain^si les difficultes de la Iangue, bien plus que ne le fait M. Beuzelin ; et quant a ceux qui veulent sa voir a fond I'hebreu et les autres langues scniitiques, pense-t-on qu'ils preferent des lettres factices ji I'alphabet original, herisse de toutes les difficultes que nous ont transmises les rabbins et ta scrupuleuse fidelite des copistes? Laissons toutefois pour ce qu'ellc est cette idee premiere , qui a porte 31. Beuzelin a transcrire dans son systeme le livre de Ruth, I'histoiredeJoseph, des extraits de la Bible, et a com- poser dans im caractere probablement pareil un vocabulaire hebreii-francais. On doit sans doute lui savoir gre d'avoir de- barrasse la grammaire de ces termes barbares, si long-tems multiplies dans I'hebreu. Mais a-t-il toujours employe les divi- sions les plus heureuses, les principes les plus simples? Quelle analyse pent lui donner onze sortes de mots pour I'hebreu, tandis que la grammaire generale reduit facilement a trois le nombre de leurs especes. Les verbes, dit-il , ont sept voix (p. 26). Mais , qu'est-ce qu'une voix? L'auteur scmble n'y voir qu'une difference de forme ; cela ne suffit pas : il compte cinq modes dans chaque voix : mais , n'est-ce pas abuser des termes, que de faire deux modes d'un passe et dun futur (|ui ne sent que des terns? Ensuite I'ordre etabli entre ces modes 3-. §76 LIVRES FRA>Nf:AIS. est-il blen analytiqiic? Poiirqnoi ue pas commciicer par rinfinitit' et If participe, cpii sont les modos Ics phis abstraits, puisqu'ils oxpriment rexistciice, indepciulammcnt de toute idee de per- sonne? Les proiuims affixes qui servent de complemeiis aux verbes,n'aiiiaient-ilspaseteplaces dans le chapitre des pronoms, »lout ils aiiraient pu ctre regardes comine des cas , beaucoup mieiix qu'i la suite des verbes? — Nous soumettons ces criti- ques au jugement de M. Beuzelin lui-inomc. Le desir dc voir I'etude des lettres sacices se repandie de plus en plus parmi nos jeunes ecclesiastiques nous ferait applaudir bien sincere- ment a tout ouvrage qui en aplanirait reellement les difficul- tes ; mais, nous n'avons encore rien trouve de plus avantageux sous ce rapport que la grammaire hebra'ique en tableaux de M. Audran, a laquelleun court commentaire donnerait, selon nous, toutc la perfection desirable. B. J. 208. — * Histoire lltteraire de France , contenant les six pe- riodes anterieurcs a Louis XI, avec un coup d'oeil sur la sep- tieme, et precedee d'une Introduction; par Henrion, avocat. Paris, 1827; J.-J. Blaise, rue Ferou, n" 24. In-8° de 3oo pages environ; prix, 5 fr. L'auteur a divise son sujet en masses distinctes, qu'il a nom- inees/f^Wor/eA- , et il s'attache nioins^aux details et a la chrono- aux institutions paiennes qui avaient jete de si profondes raci- nes; la fusion d'un peuple vierge et d'uue trempe vigoureuse avec line nation amollie et corrompue ; la feodalite qui jaillit de nos discordes civiles et qui doune le premier elan a la litte- vature indigene; les croisades auxquelles celle-ci emprunte une pliysionomie nouvelle; la renaissance et la longue domination des systemes des anciens; I'ltalie et la France devenues I'asile des savans que la barbaric mahometane chassait de la Grece; I'influence quelquefois malfaisante d'une erudition laborieuse qui comprime les esprits; le genie encourage quelquefois par d'augustes protecteurs... tels sont les points capitaux ranges sous les six periodes que ce volume comprend , et qui sont suc- cessivement apprecies par l'auteur. En tete de chaque division, ^es vues generales sur les causes et sur la marche de la civili- sation attestent la direction philosophique qu'il a donnee a ses recherches. Nous recommanderons surtout I'lntroduction , qui semble annoncer que M. Henrion nc se bornera pas au vohune qu'il vient de publier; en abordant des considerations d'un ordrf plus eleve, il examine tour a tour I'influence qu'ont exer- LITTERATURE. 577 fee sur Ics esprits le climat ct le sol de la France, les mceurs de ses habltans, leur religion, la forme du gouveinement. Les avantages de notre situation et la richesse du territoire; rap- plication au developpement de I'esprit francais des idees de Kant sur le sentiment du beau, sur la pitie, la complaisance, riionncur; lecontrastedu paganisme, quisanctionnaitd'injustcs preferences , avec le culte chretien qui commande une egalite salutaire; celui de I'anarchie feodale, protectrice de la licence, avec la monarchic amie d'une sage liberie... telle est la sub- stance de I'lntroduction, ou plutot, de I'ouvrage entier qui en est le developpement. Destine aux jeunes gens et aux liommcs du monde , auxquels il pourra epargner de pecibles recherches , ce livre ne sera peut- etre point deplace entre les mains du savant dont il reveiliera utilemcnt les souvenirs. U. 209. — Tableau historique , chronologiquc , des concours ge- neraiix de V U niversitc , uiicicnne et nouvclle, depuis la fnnda- tion des concours jusqii' en i8i5 inclusu'enient , suivi dii Tableau de la distribution des prix du concours geneial ct ties distribu- tions des liuit colleges de Paris et de Versailles, en 1826; par .•i.-J. de Muncy auteur de \ Atlas historique des litteratures , etc. , sur le jjlau de I'AlIas de J. Lcsage ( comte de Las Cases ). Paris, 1827; L. Hachette, rue Pierre Sarrasin, et chez J. Re- noiiard ; prix , 3 fr. 5o c. ( Sous presse : Tableau historique de I'ecnle pnljtechnique , dcpuis safondation. ) Ce tableau de chronologic universitaire presente des resultats curieux pour I'histoire litteraire. On y retrouve la date des premiers succes remportes dans les colleges par des hommes qui ont joue des roles plus ou naoins imp'ortans, soil en poli- tique , soit en litterature. La fondation des concours generaux de I'ancienne universite remontait a I'an 1747- Parmi Jes laureats du prix d'houneur de I'ancienne universite , on remarquc yViowrt.v( 1749 ) , T. Dclille ( 1755 ) , La Harpe ( 1756 et i7f>7 ) , Dupuis ( 1763 ), le presi- dent^y§w( 1764), MM. Truffer, ]Soel[ i774et 1775), Cauchf, Defauconpret , Lemaire , Terray de Rosicres , MM. N agues, Burnouf \ 1792). Parmi leurs concurrens les plus distingues, on retrouve : De Beauvais ( eveque de Senez); De Calonne ( niinistre); Le Brun[ due de Plaisance); Chamfort; les freres Gueroult; Lavoisier ; Eaiiy ( I'abbe ); Bertin ( le chevalier) ; iJoj- bcspicrh: ; Caniille Desmoulins ; Andre Che/ner; Mathieu de Montmorency ; De Guerle; De ff'ailly , etc. MM. Simeon, Abrial, Mollicn; Ic Cardinal De la Fare ; Clnusel de Coussergues, eveque do Lihartres; les abbes Nicollc, Liautard; MM. Andrieux , de i-jH LIVRES IRANCAIS. "rAradeiiiie (vancahv ; Jioissoz/ade ; Heron dc VilU'fossc ; M.-A. Jullicn , de Paris; Lcsoinnc, de I.ioge; Bnlljr, proviseur du col- lege de Meaiix; Barbicr-Vemars , Panchouchc , etc. Les concours geiieraux , abolis eu 179/1, ^O"*^ retablis eii 1801 . eiitre Ics trois ecoles centrales ; et depiiis vingt-cinq ans , plus de qninze cents eleves out obtenu des prix on des nomi- nations en rhetoriqiie 011 en philosophic dans ces concouis. La liste coiDplote de ces eleves presente nn grand nombre de noms remarqtiablcs. MM. Villemain, de I'Academie fVancaise, Noii- dct, de I'Acadeniie des inscriptions, Victor Leclcrc, Cousin, etc., y precedent leurs eleves; le jeune 6V/3(7/<=,v y ligure a cote des jeiines MontchcUo et Montalivct. Plusieurs etrangers de distinc- tion pnt pris part a ces trioniphes : A. J. Matouchewitz , Polonais , qui remportait le prix d'honneur en 1812, occupe un rang eminent en Russie. Trois eleves de I'universite nouvelle sont nientionnes, par exception, pour des succes obtenus dansd'au- tres classes que la rhetorique et la philosophic, savoir : MM. Cli. Diipin(^ le premier prix de physique, ati renonvelle- nient des concours ), Casimir Dclavigtie, et S. A. R. le due de Cliartres. Les listes des quinze cents pieces couronnes on nommts cette annee completent I'ensenible de ce tableau, dont I'iclee est heu reuse et tout-a-fait universitaire. Z. 210. — * Les Jesuites , ou les autres Tartufes, corned ie en cinq actes et en vers, par M. Etienne Gosse , niembre de la So- ciete philotechnique. Paris, 1827 ; Amb. Dupont et C"'. In-S" dc XXVI et iiSy pages; prix, 4 ft- 5o c. M. Gosse, dont la censure dramatiquea dejaetouffe plusieurs ouvragcs, n'a pas eu, comme on pense bien , Tiutenlion de lui soumettre celui-ci. II nous fait, dans sa preface, un tableau seduisant de la position avantageuse ou se trouve un auteur qui n'ecrit point pour etre represente. « L'epee de Damocles n'est plus suspendue sur sa tete; il est libre; les ciseaux de la censure ne menacent plus ses hemistiches; I'eucre rouge ne souillera pas sa pensee; il n'est plus de ridicule a I'abri de ses coups : I'intrigant politique, I'hypocrite ambitieux, I'ecrivain venal, le fauteur du despotisme, le partisan de I'ignorance , le fonctionnairc qui trahit son niandat, I'anibassadeur qui im- mole son pays a des moincs; enfin, le jesuite, le congrenaniste, et jusqu'a la fausse devote qui quete et sollicite, qui denonce et fait I'amour en mcnie terns, cessent en un instant d'avoir une autorlte qui les cache, un bouclicr qui les protege. L'auteur n'est plusenfernie dans le cerele etroit des intrigues surannecs, d'un dialogue de convention, dune imitation servile, dun LITTERATURE. 579 vieux coimiquo rcpcint a iieuf; la vraie coinedie apparall tout entiere dans ses regards. » D'apies ces reflexions, M- Gosse n'eut point du , ce semble, prendre son sujetdans la vie privee. Les ravages dii fanatisme et de rhypocrisie dans I'interieur des families ont deja ete points an theatre; c'est un champ oil il ne reste plus guere a glaner, apres le Tartiife et Melanie. Dans la piece de M. Gosse, Emilie , fille tres-riche d'un pere qui I'a gatee, a deux amans, Dorval,jcune avocat, et nn certain vi- comte plein de prejuges et de ridicules surannes. De plus, sou pere veut la marier a son ami Blenord, negociant qui arrive tout expres a Paris. Mais celni-ci ne tarde pas a s'apercevoir qu'Emilie est la plus capricieuse des femnies , et il lui prefere sagement la naive Suzanne, sa seeur cadette. Alors, Emilie, egalement dedaignee par Dorval et par le vicomte, tons deux las de ses caprices, se livre aux seductions de son cousin Lau- rent, jeune eleve de Saint-Achcul, qui lui fait la plus enga- geante peinture de la douce vie qu'on mene an convent sous la protection des disciples de Loyola. Ce Laurent est un apprenti jesuite, moitie fanatique et nioitie hypocrite, qui deguise tous ses vices sous des escobarderies et des restrictions mentales. II a introduit chez Emilie le pjre Saturnin et toute la milice des jesuites. On y voit accoiuir vers eux des ambitieiix de toute especes, un prefet, un depute, etc. LE DEPUTE , has Oil pere Saturnin. Ce prefet vous abuse avec son air beniii. 11 est comte aujourd'hui; mais il fut jacobin. LE PERE SATURMN, bas. Je le sals. LE PREFET, bos Oil pere Saturnin. En devot ce depute soupire. Ne vous y fiez pas ; il a servi I'empire. LE PERE SATURNIK, baS. Je le sals. Hientot, le pere Saturnin voit avec joie tomber a ses pieds un proselyte considerable; ce proselyte, c'est Dorval. Mais le triomphe du jesuite est de courte duree; car la pretendue con- version de Dorval amene, au cinquieme acte, une entrevue entre lui et Emilie, et celle-ci, desolee(avec peu de vraisem- blance ) du projet de Dorval, fait tous ses efforts pour le con- server a la societe qui a besoin de ses talens; mais Dorval se nionlre d'abord inflexible et ne consent enlin a rentrcr dans le monde qu'en y ranienaiit Emilie, qui se resigne a changer ses \ oeux reiigieux en serment d'hvmenee. 11 y a dans cette piece de I'esprit, de la malice et des details agreables. Mais la fai- 58o LIVRES FRANCAIS. blessc du plan et la negligence du style trahissent la precipitation avec laquelie elle senible avoir etc composee. Ch. 211. — * La J'illcliade , ou la Prise dii chateau Rivoli , poeme heroi-coniiquc en cinq chants ; par Mery ct Barthe- LEMY. Paris, 1826; A. Dupont. In-8" de vi et 83 pages; prix , 2 fr. 5o c. 212. — * Rome a Paris, poeme en quatre chants, par Mery et Barthelemy-. Paris, 1827; A. Dupont. In-S" de VI et 82 pages; prix, 2 fr. 5o c. 2 1 3. — * La Pcyroneide, Epitre a M. de Peyronnet , pai; Mery et Barthelemy-. Paris, 1827; A. Dupont. In-8° de 3 1 pages ; prix , 1 fr. 5o c. MM. Mery et Barthelemy s'etaient deja fait connaJtre par quelques satires : les Sidicnnes , les Jesuites , l' Epitre a M. le ronite dc Villele avaient revele en eux un talent remarquable. Mais I'apparition de la Filleliade, et son grand succes, ont seuls fixe siir leur comptc I'opinion des critiques ; et d'abord , tous se sont accordes a leur reconnaitre une prodigieuse faci- lite , une abondance extraordinaire de pensees plaisantes et originales , et en meme terns ime verve et ime rapidite pen commimes dans Ic style. Ces eloges ont etc donnes franchement et sans restriction : ils ctaient merites. Mais , tandis que quel- ques critiques attaquaient avec aigreur ce jugement porte par un public impartial , d'autres personnes ont exagere leur ad- miration jusqu'a voir dans ces deux jeunes poetes Tespcrance de notre Parnasse , comme si Beranger et Delavigne n'avaient pas dejii realise plus que nos deux auteurs n'ont encore promis. C'est probablement entre ces deux opinions que se trouve la juste appreciation de leur merite : essayons de le faire con- naitre par I'analyse rapide des deux poemes. Dans la Vilieliadc , un complot forme par les deputes dc I'extremc droite contre le ministre a pour but de niettre a sa place leiu" chef, Labourdonnaye. 11 s'agit de savoir a qui res- tera I'hotel de la rue de Rivoli , que le poeme fait regarder comme le siege de la toute-puissance niinisterielle. Les deux chefs rassemblent leurs troupes et leurs principaux guerriers, dont le poete amene une enumeration , scmblable a celle des guerriers grecs dans liomere , et des chefs des croises dans le Tasse. On se prepare a passer la Seine , lorsqu* des prodiges se manifestent sur ce flcuve; enlin , les deux arrhees se cho- quent : les ministericls ont d abord le dessous ; mais Villele passe en personnc, combat Labourdonnaye, ct met en fiiite les rebelles. Le chef vaincu rallic ses troupes , et le Icndemain , LITTERATURE. 58 1 investit le chateau, dont il s'empare eiilin , apies avoir fait ca- pitiiler Villele, qu'il remplace. Dans le second de ces poemes , le general Fortis convoque tons les jesuites du royaume : ils se rassemblent pendant la nuit au Pantheon , ou Fortis deniande compte aux trois mi- nistres , Fraissinoiis , Corbiere et Peyronnet de ce qu'ils ont fait pour I'avancement et la plus grande gloire de I'ordre ; il finit par leur annoncer I'auto-da-fe de Valence , comme une preuve de I'augmentation de sa puissance. Cependant, le niinistre autrichien Metternich, averti par M"^ Krudener, vent s'opposer aux empietemens de Loyola : mais dt-ja la puis- sance seeuliere ne pent plus lutter contre le pouvoir eccle- siastique. Metternich est battu , ainsi que son armee, et tout courbe la tete devant le pouvoir jesuitique. II est facile de voir que les auteurs prcnant deux sujets en- tierement hypothetiques, et attribmint a des personnages con- nus des actions tout-a-fait imaginaires , ont reellemont encouru le reproche d'invraisemblance. Il est bien vrai qu'ils ne man- queront pas d'exemples pour justifier ce genre de creation : mais ils ne reussiront pas a faire agreer leurs suppositions par ceux qui desirent que , meme en poesie , la verite historique ne soit pas entiercment detruite. Ensuite , n'y aurait-il pas entre les deux poemes un peu trop de ressemblance ? Tous les deux sont allegoriques ; tous les deux se terminent par un combat qui ne pent exister que moralement ; tous les deux supposent achevee une mutation de pouvoir qui est encore indecise. La- bruyere a dit que plusiems hommes reunis ne feraient jamais un excellent ouvrage; et, malgre le bien que nous pensons de ces deux nouvelles productions , nous croyons y trouver une nouvelle preuve a I'appui de son assertion : nous pensons , pour nous exprimer sans deguisement, que ces jjoeraes sont mal compost's ;\e manque d'interet , le defaut de liaison, s'y font trop sentir ; souvent une idee heureuse , ou plaisante, ou hardie , n'est pas bien amenee : tels sont , sans en chercher d'autres exemples , les prodiges qui ont lieu sur la Seine, et I'apparition du cachalot du jardin des Plantes , episodes fort amusans , mais qui ne se trouvent point a leur place. Si nos deux poetes ne sont pas , quant a la composition de leur ouvrage, a I'abri de toute critique, ils peuvent, quant a I'expression , le presenter en toute assurance a leurs amis comme a leurs ennemis. On a cite un grand nombrc de leurs vers; nous choisissons , dans la Filleliadc, quelques passages de I'enunieration des piutisans de Labourdoiuiaye, faite par un des chefs ministeriels, qui , comme Herminie , dans la Jerusalem 582 HVRES.FRANCAIS. dc'livrec, instruit I'lin de sos coiiipagnons dcs noms dcs j^iicr- riers que celui-ci vtut connaltrc ; Quel est dans ce recoin ce clicTalier qui dort , Appuye sur le f'er d'un large coffre-forl? Son Sine tout cntiere y parait renfermee. — C'est Sanlot Baguenaut, le questeur de I'annee : Cast lui qui, soutenant les Ultras aux abois, Kavive YArislarqite expirant cliaque mois. — Et ce fier combattant qui sur son ecu noii- Etale une tiare et deux clefs en sautoir ? — C'est Berthier, depute de la Seine et du Tibre. Sa vigueur de la droite entretient I'equilibre ; Et d'un projet de loi quand il fait Texamen , II se signe a I'exorde et finit par amen. Vertueux depute , si jamais tu composes Des vers assaisonnes d'encens , d'ail et de roses , Tu seras Marcellus !... Cette citation suflit pour piouvcr que la rinie ni la niesuit- ne mettent la nioindre gene dans le style de uos poetes , et qu'une gaite toujoiiis i gale aninie leurs descriptions et leiuti recits. Le sujet etait plus tristc dans Rome a Paris : moins heureux , ou moins bien inspires, MM. Barthelemy et Mery y out en- core repandu moins d'interet : mais il y a un chant qui pent sans desavantage etre compare an meilleur de la Yilleliade ; c'est celui oil, dans une seance nocturne au Pantheon , Fortis, apres un diseours pompeux, recOit le rapport des trois mi- nistres Fraissinous , Corbiere et Peyronnet , et annoncc ses projets. La Peyronneide , qui n'est qu'une epitre, nous parait prefe- rable pour I'ensemble aux deux poemes dont nous venons de parler, quoique , sous le rapport de rinvention , et pciit-etre de I'interet menie , elle leur soit inferieure : mais du moins la verite y est respectee , et nous n'y trouvons point ces luttes et ces combats qui n'ont jamais pu avoir lieu. Les auteurs supposent le garde des sceaux tourmente par quelque peine secrete ; ce sont les dernicrs soupirs de la presse cxpirante qui troublent son repos. Ici viennent les details de la loi (ju'il a proposee , I'annonce prophetique de ses tristes consequences , des maux qu'elle doit entiainer sur la France, des maledictions et de la honte qui retond)eront siit son aiileur. Le style, enlierenienl different (h? ce (|u'ii a etc LITTERATURE. r,8:i »lans k's tltux proimiers poemes , se tc-int ici des sombres cou- li'iirs qu'appelait le desasticux projet dont il est question. Que dans sa nudite Apparaisse en iios vers I'aust^re verite. Ecoute : tu pretends enchainer la fortune : ■ ' Soit. Ta voix a donipte Tune et I'autre tribune; Et le vieux Moniteur, heraut de tes exploits , A grave ton projet au Bulletin des lois. Crois-tu done sans retour dans la France oppressee Avoir sous ta simarre etouffe la pensee , Et, grace au zfele ardent de tes noirs familiers , D'un somnieil eternel frappe nos ateliers ? Oui , d'abord une sombre et froide lethargic, Du typographe oisif glacera I'energie ; Mais bientot I'artisan , conseille par la faim, Aux ateliers secrets demandera son pain. Bientot, la verite proscrite sur la terre, Creusera sous tes pieds ses arsenaux de guerre , Et bravant le pouvoir qui veut la museler, Du fond de ses caveaux viendra nous consoler. Mais nous ne devons pas consacrcr entierement a des cita- tions un article ou nous voulons surtout faire apprecier le genre de talent des jeunes auteius. En exprimant ici les espe- rances que fondent sur leia- talent tons les amis de la poesie nationale, il n'est pas inutile peut-etre de rappeler k MM. Mery et Barthelemy, que les succes qu'ils ont obtenus jusqu'ici tien- nent moins a la perfection de leurs ouvrages qu'a I'impor- tance et a I'interet inseparables des evenemens contemporains. Qu'ils s'attachent desormais a rendre le sort de leurs produc- tions tout-a-fait independant du titre qu'ils placent sur le fron- tispice , et il obtiendront une reputation durable. B. .1. 214. — Epitrc a M. Ic vicomtc de Chdieaahrinud , pair de France , en reponse a sa lettre sur la police de la presse ; par G. S. J. Bertrand, typographe. Paris, 1827; imprimerie de Fain. A la librairie ancienne et modeine, Palais-Royal , Ga- leries de Bois, n°s 263 et 264. In-8° de i5 pages ; prix, 5o c. Ceux qui liront cette epitre partagent sans doute les gene- reux sentimens qui ont inspire I'auteur : aussi n'iront-ils point rechercher les incorrections qu'y a laissees une compo- sition peut-etre trop rapide ; et , sans s'arretcr a examiner le merite de I'expression poetiquc, tons s'uniront a lui pour payer au noble pair le tribut de la reconnaissance nationale, et pour vouer a un eternel opprobre le fuueste projet de loi , dont il a signale, un des premiers, les honteuses diUorniites. E. 21 5. — * Les Douzc hritres dc la mat, esquisscs en vers; par 584 LIVRES FRANCAIS. M. MicHAUX (C/"('<.s), meiiibre dc la Societe philotcchniqnc. Sc- conde edition, aiigmcntet' de Poesies diverses. Paris, 1827; Fournier-Favreiix. In-i 8 de 272 p., oinu d'lmegravure et d'line vignette ; prix , 3 fr. Uii an s'est a peine ecoule depuis que la Revue Encyclopa- dique a rendu conipte de la premiere edition de cet ouvrage ( voy. t. XXVIII, p. 5-4 )> et deja nous avous a en annoncer la reimpression; cette circonstance est une nouveile preuve en favcur de notre siecle, que Ion accuse, un peu legerement pcut- etre, de se montrer enncmi des vers. Si les terns inodernes ne sont pas encore niurs pour I'liistoire, qui vcut juger avec calme et reflexion, leurs evenemens sont du domaine de la pot'sie, qui vit de sentimens et d'inspirations. II est vrai que ce ne sont plus des madrigaux et , par E. Charrierk. Paris, 1826; Pon- thieu. In-8° de ii pages; prix , 1 fr. S'il y a dans la litterature qnelque chose de commode pour I'ecrivain et de fatigant pour le locteur, c'est sans contredit ce genre de poesie meditative qui est aujourd'hui a la mode. Le Francais, si vif, si petulant, a-t-on dit, est le j)lus sago de tons les pcuples , quand il a la plume a la main : voulez-vous la preuve du contraire? lisez cette foule de meditations, de souve- nirs , d'elegics , dc melodies, dont nous sorames inondes depuis quelques annees. De la Ic discredit dans leqnel tombe journelle- ment la poesie : on croit ne devoir exigcr de nos versilicateurs qu'un petit nonibre de pcnsees brillantes, quelques mots ronfl;uis, quelques periodes bien cadencees ; on ne leur demande ni suite dans les idees, ni exactitude dans les raisonnemens : aussi , de bons esprits nieprisent la poesie ainsi denatureo. Comment ne rougiraient-ils pas d'aimer un art qu'on leur dit n'avoir rien de commun avec le bon sens ? Le poeme de M. Charriere est une sorte de meditation vague at vaporeuse sur la vie de Bonaparte, qu'il prend an boiceau, €t que son stvle singulierement lyrique conduit en Italie, on Egypte, en Russie , a Vile d'Elbe et a Sainte-Helcne. B.-J. a 18. — Rose blanche , princfsse de Nemours , Nouvellehisto- riqiie, suivie de Conte.i moroux ; par M. Vernes de Ldze, au- teur de la Deicee, dii Foyngcur sentiuicntal , etc. Paris, 1827 ; Ponthieu; Geneve, Barbozat etDelarue, editeui'S. 2 vol. in-12, onsemble de xj et 362 pages; prix, 5 fr. La Nouvelle de Rose blanche , qui a donne son titre a cos deux \-olumes, n'occnpe que les p. 1 ft 82 du T. ia- lide est la seule ou nous ayons retrouve quelques traces de ce talent d'observation qu'il semblait avoir herite de Sterne. Nous pensons qu'il n'aurait jamais dti sortir de ce genre qu'il s'etait choisi, ou plutot que la nature lui avait indique. Ses autres Nouvelles offrent un melange d'idees religieuses , chevaleres- ques et philosophiqucs, anciennes et niodernes, qu'il n'a pas su fondre dans ses tableaux, et qui peut-etre s'excluaient les imes les autres. Ces deux volumes sont precedes d'une preface, dans laquelle les editeurs font d'avance I'eloge du livre qu'ils offrent au pu- blic et celui de son auteur. lis citent I'autorite de plusieurs criti- ques , et ils invoquent meme celle de la Revue Encyclopedif/ue, a I'occasion de notre jugement sur le Foyageur sentimental , ou la Promenade a Ywrdun. Mais ces prefaces, ou les editeurs, et souvent meme les auteurs, sous le nom de leurs libraires, cherchent a forcer, pour ainsi dire, les suffrages des lecteurs, commencent a devenir un moven un pen banal et qui produit quelquefois un effet contraire a celui qn'on s'en etait promis. De plus grands noms que celui de M. Vernes de Luze, de plus grandes reputations que la sienne, ont ete compromis par des editeurs maladroits; et recemment encore, il n'a pas tenu a I'un d'eux de jeter du ridicule et de la defaveur sur une publication que le nom de son auteur suffisait pourrecommander puissam- 588 LIVRES FRANCAIS. ment aupres tie tons les partisans de son noble caracterc ct de son beau talent poetique. E. H. aiy. — * Cecile , oil les Passions; par M. E. Jouy, de I'Aca- demie francaise. Paris, 1827; chez Tauteur, rue Garenciere , n° /|. 5 vol. in-12; prix , i5 fr. Ce roman ne repondra pas, jc le crains bien, aux esperances que le nom de I'auteur et ses precedens travaux en ce genre devaient faire concevoir. On n'y trouvera point cette piquante peinture des nioeurs contemporaines qui a place si avantageu- sement parmi nos moralistes et nos conteurs I'ingenieux Ermitc de la Cliaussee d'Antbi. II n'offrira nieme pas entierement ce que proraet la generalite un peu anibitieuse de son litre; et a la place des Passions, dont ildevait exprimcr les traits, il ne don- nera guere que le developpement d'une sevL\e passion , qui pent bien suftire, il est vrai, au talent et a I'observation du roman- cier , comme a I'interet de ses lecteurs. Le tableau que M. Jouy, apres taut d'autres, a retrace de I'amour n'est pas sans art et ■sans elegance; mais il manque de profondeur et d'originalite : il a le caractere dune I'eminiscence , plutot que d'une creation. Celane me surprendrait point, si, comme je le soupconne, cette production n'etait pas un fruit de la maturite, mais bien dc la jeunesse de I'auteur, si elle devait sa uaissance a I'admiration d'une imagination novice pour les peintures de la Nouvelle Ht- loise. On remarque, en effet, entre les deux ouvrages le rap- port exact d'une imitation et de son original. Ce sont, comme dans la fiction de Jean-Jacques, et en remontant plus haut, de Richardson, deux amies j I'une serieuse et I'autre gaie; la pre- miere, portee par une vive sensibilite a des ecarts dont la se- conde est defendue par sa legerete meme. Un pere imperieux , une mere confiante et faible; puis, un oncle, que le role de precepteur mene a celui d'amant de sa niece; un ami devoue qui preche en vain la sagesse ; des rencontres qui preoipitent hors des bornes une passion long-tems contenue; an premier baiser de F amour ; la scene meme du cabinet de/w/Zc, a cela pres seulement, que la Julie du nouveau roman est presente aux transports de son amant, qui a besoin, dit-il precieusement, A' intermediaire pour arriver a elle; la fa tale peripetie dont les suites amenent, parmi les personnages que nous connaissons deja , une petite fille fort interessante ; le desespoir qui suit la perte de I'innocence, les soins de I'amitic et de la tendresse maternelle; I'exil du seducteur, qui cherche en vain des conso- lations dans la philoscphie, ct qui, apres une sorte de contro- verse ou il soutient, contre les refutations de son ami et de sa LITTER ATURE. SSg ciiaitresse, quo In Providence est le nnm de bapteinc donne au hasard , finit par devenir foil. Le dtnounif-nt est plus heureiix que ceiui de la Nouoelle Helnise. Anatnu: dc Cesannc recoavre saraison; Cecile , v^uoa avail renfcrmee dans uii convent, sa liberie : ils fuienl ensemble en Auieriqiie, d'ou les evenemens de la revolution lem* permetlent bit ntot de revenir. Ce cadre est commun, et ce defanl n'est pas assez rachete par la non- veaute des details. La forme menie de I'onvrage, qui est celle d'un commerce epistolaire , a quelque chose dc suranne, et qui prouverait seule la date deja. ancienne de cette composition. II est vrai que M. Joiiy, dans sa preface, semble s'etre arrete , par reflexion , nialgre le goijt de son tems , a cette forme pas- see de mode. Mais les argumens par lesquels il en defend I'u- sage ont tout lair d'ime theorie faite aprescotip, et ne sont point convaincans. Elle est, dit-il, I'essence meme dii roman moderne , comme si Vessfnce d'un genre pouvait dependre des formes tout exterieures et tout accidentelles qu'il pent prendre. Et par quelle raison un roman moderne doit-il neccssairement etre ecrit en lettres ? parce que I'auteur y pa rait moins, et les personnages davantage. Mais cela depend de I'art du peinlre, qui peut disparaitre du recit, et qui trop souvent se montre dans ccs correspondances, ou c'est toujours Ini qui s'ecrit else repond. Rousseau est certainement un exemple frappant de ce defaut de verite dans le langage oil conduit naturellement cette forme de composition, qui parait a M. Jouy avoir I'avantage contraire. Si nous ne pouvons avouer ce systeme , nous n'ap- prouvons pas davantage la severite outree de 1 auteur pour les romans historiques de notre tems, qu'il rapproche des produc- tions de Scudery et de la Calprenede, et particulierement pour Walter Scott, auquel il refuse, chose etrange, Tesprit philoso- phique et I'imagination, et dont il reduit le merite a celui d'un adroit arrangeur de chroniques. Une telle altaque n'est guere popnlaire,dans un tems ou toutes les imaginations sont enchan- tees des recits du conteur ecossais ; et il y a de la hardiesse , sinon beaucoup de justice, a braver ainsi le gout de son siecle. Nous nous sommes montres severes envers cette production , etnous avons cru par la rendre hommage a la reputation et au talent de son auteur. Ce livre, qui, par I'elegance du style , se fera lire avec agrement , n'ajontera cependant rien a sa reputa- tion , et M. Jouy est en droit de se plaindre d'un succes qui suffirait a bien d'aulres. ". Paris , 1826 ; I'auteur, rue de Grenelle-Saint-Honore , n" 35. In-B" de xi , et 255 pages, avec 71 planches lithographiees ; pnx, i5 fr. En publiant ce livre , M. de Geslin s'est propose de continuer Teducation musicale dcs amateurs qui out suivi ses cours ou t'tudie son premier ouvrage (i). II avail d'abord developpe la theorie de M. Galin , son maitre , et il etait entrc dans plu- sieurs details qui avaient echappe a ce savant matheniaticieii. Aujourd'hui, il a vouln appliquer a I'enseignement de Thar-, nionie les principes analytiques dont son maitre avait fait usage dans I'etude de la melodic. II se rencontre, dans cet ouvrage, plusieurs idees non admises dans I'enseignement en usage aujourd'hui. Nous som- mes forces de nous abstenir de discuter le merite de ces inno- vations , parce que nous nous trouverions dans la necessite d'entrer dans des details techniques qui n'interesseraient qu'une partie fort peu nombreuse de nos lecteiu's. Du reste , si le sys- teme propose par M. de Geslin pent etre attaque victorieusement sous quelques rapports , ce jeune professeur n'en aura pas moins merite la reconnaissance des amateurs de la musique, en ce qu'il aura contribue par ses lecons et ses ouvrages a po- pulariser un art qui occupe delicieusement nos loisirs. II y a long-tems que I'Allcmagne nous a devances dans cette carriere ou nous n'avons fait quelques pas que depuis peu d'annces. Rcgrettons que les ecoles d'eriseignemcnt mutuel n'aient pas recu du gouvernement francais les encouragemens qu'elles meritaient ; rinlroduction de I'etude de la musique dans I'en- seignement eleraentaire promettait une amelioration reelle et immediate dans la situation des classes inferieures de la societe (Voy. Reo.£nc., t. xvii, p. 241). Souvent, cet enseignement nous (r) Cours analytiquc cle musique', ou HdnoSe devcloppee du Melo- plnste. Paris. In-S" (!^ x-ji pages. 594 LIVRES FRANCAIS. eut levelti d'excellens sujcts d;ins I't'sprit desquels il sufllt de Jeter les premiers gcrraes pour obtenir des fruits : toujours, il aiirait otTert aiix artisans un moyen de rcndre leurs travaux nioins penibles , une occasion dc sc reunir et do resserrer les liens de ramitie , en so livrant a un delasscment agreable. i2. 2 2 5. — * JSIetliode dc plain- chant ordinaire ct mesure , par M. CuoROx , directeur de I'lnstitution de musique religieuse. Paris, iSaCi ; rautcur, rue de Vaugirard , n° (ig. In-i6 de 39 pages gravees, plus 4 pages iniprimees , coutenant un litre et I'avis de I'auteur ; prix , 1 fr. Ce petit ouvrage offre la reproduction, en caracteres de plain-chant, d'un recueil de solf^'gcs elementaires , public il y a quelque terns par M. Choron. On n'y rencontre point de ren- seignemens sur la forme et I'usage des signes usites dans le plain-chant , parco que , dit I'auteur, le premier venu est ca- pable d(! donner sur ces objets tous les eclaircissemcns ([ue Ton pent desirer. Du reste , ceux qui ne se contenteraient pas de ces raisons , ou qui voudraient etudicr le plain-chant d'lme ma- niere plus a])profondie , pourront consulter la methodc de I'abbe LebciiJ , on I'ouvrage aussi excellent que peu connu d'un auteur nomnie Poisson , intitule : Traite theorique et pratique du plain-chant Gregorien , et qui est peut-etre ce qui a paru de meil'eur sur cctte matiere [i). Ceux qui ne voudront que des idees vagues pourront se borner a la volumineuse methodc de I'abbe Lafcillee, qui est fort repandue , quoique tres-peu re- marquable. M. Choron, dans I'avis qui precede sa methode , annonce la publication prochaine d'un ouvrage deja avance , intitule : Introduction a I'etude generate et raisonnee de la mu- sique. Nous devons a I'amitie de M. Choron la communication de plusieurs parties de ce travail. Si notre autorite pouvait etre de quelque poids , nous nc craindrions pas de dire que cot ouvrage , fruit de quarante annees d'etudes , et dont les nombrcux travaux de I'auteur n'ont ete en quelque sorte que le prelude , doit jetcr sur les sciences musicales un jour tout nou- veau. Ce que nous pouvons affirmer, c'est que la theorie de I'au- teur, loin d'etre , comme tant d'aatres , baste sur des donnees plus ou moins fondees , plus ou moins arbitraires , n'est que la conlirmation continuelle des principes emis de tous tems par les grands maitres des meilleures ecoles , et pratiques par les plus celebres compositeurs. J. Adrien-Lafasoe. (1) L'auleurde rot article se propose d'eii publier, d'ici 566 eleves; 82 apparte- nant aux protestans de Charter-Schools, ont 2,255 eleves; 128 autres, contenant i,55o eleves, appartiennent a la Societe Irlandaise, a celle des Missionnaires de Londres, a la Societe Irlandaise-Evangelique, a celle des Dames Hiberniennes, et ci celle des Dames anglaises et irlandaises. Les differentes ecoles etablies par les Societes que nous ve- nous de nommer sont presque entierement suivies par des eleves protestans; les suivantes sont, au contraire, principa- lement destinees aux enfans eatholiques : 46 sont soutenues par des etablissemens de religieuses , et contiennent 7,186 eleves; 852 autres , contenant 38,825 enfans, sont entretenucs par de simples particuliers ; enlin, 24 autres ecoles sont diri- gees par les Freres chretlens , et contiennent 5,454 eleves. Les differentes ecoles particulieres n'ayant aucun rapport avec les Societes s'elevent a 9,852, et comptent 894,782 en- fans. Les ecoles des paroisses, au nombre de 827, ont 40, 758 eleves. Outre ces differentes ecoles, on compte, en Irlande, 1,640 ecoles du dimanche, qui procurent lesbienfaits de I'education a 157,184 enfans: 882 de ces ecoles sont soutenues par de T. XXXIII. — Fevrler 1827. 89 (ki6 EUROPE. simplos pailiculicrs, ct a, Ha aulres par divi'iscs Socit'tt'-s dc bicnfaisance. En i8ii,lt! iiombrc des ecoles, cii Irlande , m; s't'levait qu'ii /},Goo, dans k'sqiielles on comptait soulomciil 200,000 enfans. A la (in do 1 S%!i, lo nonil)ri' dos t-colcs s'elevait a 1 1,823, ct cclui dos t'-levos a 5Go,548. Ainsi , I'aiijiinKMitation a ete en- viron dc deux tiers. Cettc amelioration tovijoiirs jirogrcssive fait csperer quo biontot I'lrlandc, sortie de I'ignorancc qui abrutit maintenant sa population, nieriteia, sous lous les rap- ports, remancipation qu'elle reclame, et qu'alors nul pretcxie ne pourra la lui faire refuser. Fn'-■ L'Acadeniie, qui desire reunir onfin par ce concours les ideos des physiciens sur cos objots aussi delicats (|u'importans , fixe letermedu concours a 2 ans, c'est-a-dircau i^''janvier 1829, ot docernera a celui qui aura completement roussi a fonder d'une maniere irroprochable une des trois hypotheses qui vienncut d'etre nommoes, un prix dc 200 ducats. Pour le cas ou aucun desMomoires no remplirait les vuosde I'Academio, colui qui en aura le plus approcho, ot qvii con- tiendra do nouvelles et importantes rocherchos, obtiendra un accessit dc 100 ducats. (La suite aii caliier proclutin.) (i) II se trouve dans I'ouvrage iiuiluli- : Gruiulriss drr ihcorrlischcn P'lysi/i zitm Cehrauclic fur Forlcsuiigi-n (Esquisses do [iliysique tht'ori-- tique pour I'lisiif;!- des cours , par G.-Fr. Parrot.) Dur|iat, i8o() ; e\ plus rlrtaille dans trois Traites d'opliqne insi-res dans les Auiialvs (k /t/iy.Utfiir lie Gll.MlLlviL. I 81 5. T. l.I. POLOGNE. — NORVEGE. 6i i POLOGNE. "Gallicie. — Leopol. — Fondallon iliUiUte pubiuiue. — Muscc, hihliotheque , collections. — Le feu conite Ossolinski, honora- bioincnt coniiii en Polognc pai" ses travaux litteraires, a laisse i,'ii luourant des I'onds considerables poiu' retablissenient d'un muscc national a Leopol. II a aussi legue , a cet effet , sa belle bibliotheque, composee de 19,000 volumes, ainsi qu'un vaste local destine a recevoir les produits des sciences, des arts, et tout ce qui interesse I'histoiie nationale, comme deslivres, des nianuscrits, des cartes, des niedailles et des monnaics. En veitu d'un arrangement entre le testateur et le prince Henri Lubo- mirski , cet etablissement a ete reuni au majorat de Przeworsk. , a charge pour le chel'actuel, et par ceux qui lui succederont en cette qualite^ d'etre curateur du musee ; ce qui etablit an mode de responsabilite regie par I'acte de fondation. Un plan aussi bien concu, qui repose sur des bases aussi solides, ne pent manquer de recevoir sa pleine execution. Les etats de la Gallicie se sont empresses de lui preter leur appui, en votant la somme de 12,000 florins d'Allemagne en argent, a I'instar de I'impot foncier, et percus dans le courant de I'annee 1827 , destinee a fournir les moyens d'entreprendre immediatement les travaux de reparation qu'exigcnt les bati- mens pour que les objets cpi'ils doivent contenir puissent re- pondre a leur destination, celle de servir a I'instruction du public qui voudra y etudier. Dans cette vue, le prince Henri Lubomirski s'est engage a y placer une collection de niedailles tort interessaiites, et il faut esperer que cetexemple sera suivi parses compatriotes, qui se feront honneur d'enrichir de leurs dons un etablissement dont I'utilite ne saurait etre contestee. En un mot, le nmsec national fonde par le comte Ossolinski parait devoiiproduire les plus heureux resultats dans imc contree oil le culte sacre de la patrie n'a jamais manque d'adorateurs. Il aura aussi , entre autres avantages, celui d'y constater a I'aveuir la tendance des esprits, et la marche progressive de la civili- sation. C. P."* NORVEGE. Drontheim. — Etablissement d'un musee. — La villc de Dront- heim n'avait point en jusqu'ici de musee, ou d'athenee, tel qu'il en existe dans presque toutes les villcs un pen considerables en Europe, a I'usage des liommes instruits on jaloux de s'instruire , qui peuvent y prendre connaissance des progres que font les sciences , les arts et I'industiie dans les pays etrangcrs. On vient de former nn etablissement de cette nature, ou Ton se propose de reunir les ouvrages periodiqucs les jiliis distingues qui se pu- 6i2 EUROPE. blieiit cu France, on Anylctono, en Allcmagnc, en Daneinark ct en Suede. II paiait que la bibliolheque assez consitleial)le de la Societc dcs sciences {[e la menie ville sera mise a la disposi- tion de la nouvelle societe, qui se compose de la plupart des hommes instruits et distingues de la ville de Diontheim et de ses environs. Heihfrg. ALLEMAGNE. Hambourg. — Apcrcii de la situation du commerce de cettc ville ai>ec le continent de l'Jmcr:qi(c, a la Jin de iSiS. — ■ Le commerce direct de la ville de Hambourg avec I'Ameriqiie ne parait pas , en general , avoir fait bcaucoup de progres de- puis quelques annees ; car, sur le nombre dcs vaisseaux qu'a recus le port de cett(; ville dans le corns dc I'annec iSaS , et qui s'eleve a i,86'3 , il y en avail, 39 venant de TAnienque septentiionale ; 79 des Indes-Occidentales ; 12 5 de I'Aineriqae ineridionale. Total. . . 2i3 vaisseaux aiiieiicains. En 1824 > pai' contre, le nombre total des vaisseaux ar- rives dans la menie ville etait de 1,819 (i), ^'^"'^ • 4 I venaient de I'Amerique septentrionjle ; 7 2 des Indes-Occidentales ; 1 3o de rArnerique ineridionale. Total. . . 243 vaisseaux anicricains. Tandis que le nombre des batimcns arrives de I'Angleterre et de I'Ecosse , allant pour la plupart en lest, a augmente considerablement. En iSi/) , il en entra 645, et en iSaS , 767 ; ainsi 1 1 2 de plus : ce qui semble prouver que la Grande-Bre- tagne importe de rAllemagne beaucoup d'objets , tels que de la laine , des toik^ , etc. La plupart des batimens qui sont arrives de I'Amerique ap- jiortaient dcs articles appeles communement denrees colo- niales , et principalcment du sucre et du cale. En revanche , I'importation , et en general tout le commerce du coton , ar- ticle si important pour Tindustrie manufacturiere de rAlle- magne , ne parait jouer a Hambourg qu'un role secondaire. L'importation de cet objet ne s'est eleve , pendant toute rauaee iSiS, qu'a 16,600 balles, doiit an moins la nioitie vcnait dcs Indes-Oiientales, du Levant, de I'Egypte et de ritalie; et il en est reste dans Ics entrepots de la ville cn- (i).Le nombre total des vaisseaux entres en 1807. dans le porl de \l:\m hnnv^, etait de plii'i dc 2100. ALLEMAGNE. 6i3 viron 12,000 balles, venant de cUveiscs parties de rAmo- i'i(iue, panni lesquelles il se troiivait : 3o5 balles venant du nord de I'Amenque ; 3 1 5 du Bresil ; „ I de la Colombia et des ludes-Occidenlales ; 180 surons ) tandis qu'au contraire la quanlite de cette marchandisc restee en magasin etait de 8,845 balles en 182-2 ; de 8,460 en i823; de 3,275 en i824- On peut conclure de ces fails que le coton arrive a Ham- bourg dans les annees indiquees , et siirtout dans la derniere , a ete vendu avoc rapidite. Parmi les diverses qualites de co- ton, celui de Fernambouc est en general le plus estime, et son prix est proportionnellement plus eleve ; celui du Ben- gale, au contraire, n'obtient que le plus bas prix. Dans le cours de iSaS, les prix du coton ont beaucoup varie. Presque tout le cafe importe a Hambourg vient directe- ment de Saint-Doniingue et du Bresil, particulierement de Rio- Janeiro, et de la Havane; le reste y arrive ;par la voie du commerce intermediaire des Etats-Unis. Ee tableau suivant , comprenant I'importation et I'exportation ou consommation de cet article pendant les onze dernieres annccs , prouve , en en montrant les variations , I'importance du commerce du cafe pour Hambourg. IMPORTATION DANS LES ANNEES EXPORTATION ET CONSOMMATION approxiraatives dans les inemes annees : RESTE EN DtPOT CHAQUE ANNEE approxjmativemeut: i8i5 33,147,420 Is. 1816 29,246,580 .. 1817 27,014,900 » 1818 28,036,280 .. 1 8 19 24,386,440 .. 1820 22,975,860 » 1 82 1 21,591,160 » 1822 28,357,940 .. 1823 26,535,100 .. 1824 38,536,720 .. 1825 34,o5r,24o ., 2 3 millions \ de Is. 33 » .. .. 3o .. .. .. 3i .. .. " 26 .. i » 23 .. .. .. 22 » ' » 26 .. \ =. 2 5 „ .". .. 35 .. ' .. 34 ,. : .. 1 5 millions i de Is. 9 „ i. » 5 .. .. " 3 .. i .. 2 .. i » 3 .. i .. 2 » \ » 4 „ ,. ,. 5 .. •; .. 9 „ i » 8 .. \ ■. <»l/, EUROPE. Lo prix du cale dc Saiiil-I)oniiiit;uc a varic , pendant ks miMTiL's annccs , dans les pioportiuns suivantes : VARIATIOJ.S ANNEIiS. EN SCHILLINGS DE BAWyDE la livrc. iSi5 do 8 i ;\ 9 .. i8i6 ^^ 7 i =' 7 : 1817 de 7 ^ a 8 .. de 9 J a 10 " 1818 1 8 19 de l4 K ^ ' ^ J 1820 de i3 5 a 1 82 1 de i3 5 A .. .. 1822 de 1 1 g a 1 2 •■ i8a3 de II.. £1 11^ 1S24 de 8 i a 8 ^ 1825 de C ^ a >' " A^insi nous voyons que Ics pi"ix du rafc- ont , depuis i8iy , diniiuuc a Hanibourg d'annee en ann«'*e de plus de la nioitie de leuf taux le plus eleve en 1819. Cej)endant, en i8'25, les meillcuies qualites etaient propoitionnellement plus i-heres : elles valaient encore de 10 -j a 1 1 -j-, tandis qu'on pou- vait avoir de bonnes qualites coinantes a 6 schil. { ou 6 sehil. y de banque. En general , le cafe est surtout I'article courant du commerce d'importation a Hambourg , meme a un degre plus considerable que celui du sucre. Le cafe de cliicoree , cette production de I'Allemagne, autrefois si fortcment recom- inandee par des patriotes , quoiqu'il en cxisle encore des fa- bricjues considerables , est , maiutenant que le prix du cafe naturel est si bas , pres<[ue enticremcnt oublie. Malgre son tres-bas prix et son pen de debit , I'importation du sHcte a augniente en iSaS. En i8'2/|, I'arrivage de cet ar- ticle a Hambourg fut dc 74,732,500 liv. , et en 1825 , il s'est eleve a 8o,7i5,54o liv., dont la plus grande quantite vient du Bresil et de la Havane. Voici la designation des pays d'ou provicnnent les quantiti's formant I'arrivage de sucre de 182'j, .ivcc I'indication approximative de cc que chacun a fourni. Jl on est arrive de Baliia ■> 1,928 grandes caisses de i ,3oo I. de Rio-Janeiro. . . 7,773 it/. id. id. de Fernamboiic. . 2,800 id. id. id. dc la Havane. . . . /i'l'^Q I'c'ii*'-'' caisses dc 83o I. ALLEMAGNE. (h'i ,_,,,., ( 36 id. iJ. dc 3t>o 1. lies luues-Occideut. rv o . j o i ( 5J8 touneaux. . . de 800 1. / 3,i58petites caisses de 36o 1. de I'Ameiique sepl. ! iSitonneaux. . . de 800 I. I 10,891 sacs de 90 1. D'unaulrecote, lePortug. enaliv. 147 grandes caisses. J^es Indes-Orientales directeuient..^ 1 1 ,262 sacs. f 1,33 1 cffisses di verses. L'Augleterre ( 19,276 tonneaux. ( 4)9-'0 sacs. , _ ( 1,3 1 3 caisses divers es. La France , ( 2,049 sacs. Et d'autres pays, comme la Hoi- ( 11 1 tonneaux. lande , etc ( 1,277 caisses diverses. Bahia a fourni, en iSaS, a Hambourg, i3,ooo giaiidcs caisses dc sucre de nioins qii'en 1824 (i); niais en revanche Cuba en a foiu-ni 17,000 petites caisses. L'Anierique septentriouale 2,000 id. et I'Angleterre 900 / omission n'a point lieu dans d'autres universites allemandes. Nous voyons, par le dernier programme de la petite univer- ALLEMAGNE. 61; '>ito ck' Fiibouii; , qui u'a que 7 cours de jurisprudents, cjuc I'un dc cos cours est consacre a roxplication du tlodc Crancais , ct des modifications qu'y a apportccs la legislation badoise. Cost surtout pour la facultc de niedecine qu'on rcmarquc iinc ctTravante profusion dc cours , dans I'universite de Bonn. Nous en trouvons 44 , dont les deux derniers sont intitides : Disputa- tnriam medical , et Exerciccs dc disputes Intincs sur des objets relatifs a la medccinc. La philosophic est enseignoe dans 1 5 cours, et les niathematiques dans 16, Ics sciences naturcUes , les sciences historiques, la philologie occujjent egalement un giand nonibre dc professeurs. 11 y a 6 cours de langues orien- taies , 1 de langue et de littcraturc allemande, plusieurs autres des langues francaise , anglaise , italienne, russc, etc. II y a memc des cours de beaux-arts et de gymnasticjue. Dans cettc (juantite immense de lecons , il y en a pres de la moitie dont on pourrait se dispenser, et auxquels on suppleerait fort bien a I'aidc d'un bon choix de livres. Il n'en est pas moins etonnant que , dans un etablissement d'instruction qui n'a que dix on douze ans d'existence , on trouve une reunion aussi complete de moyens d'instruction ; reunion qu'on cherchcrait en vain dans une universite francaise, anglaise ou italienne. Una biblio- theque , un musee d'histoirc naturelle , des cabinets de phy- sique, d'antiquites , de technologic, un jai'din botanique, etc., sont ouverts aux studieux. Cette ville possede dc plus deux seminaires , un evangelique et un catholique ; une institution d'agriculture, des sallcs de clinique ; enfm , tous les etabUs- semens qui servent a completer I'instruction. D — g. Fribourg. — Societe d'histoirc. — II vient de se former ici une Socivtc ffhistoiie , dont le but est de propagcr les etudes de statistique et d'antiquites, et d'assurer la conservation des monumens et des objets d'art que le passe nous a legues. La Societe publiera des raemoires et formera des collections ; elle se reunit le premier mcrcrcdi de chaque mois. Les membres qui la composent sont au nombrc de vingt-cinq, sans compter les correspondans, clus comme les membres ordinaires, et in- vites a jjarticiper aux travaux Chaque annee, il y aura une seance publique. Parmi les savans qui ont concouru au premier etablissement, nous citerons M. Munch, auteur du Museum nllemand; M. de Rotteck, auquel on doit une histoire uni- verselle; M. Schreibf.r, qui a public plusieurs dissertations archeologiques; M. Zell, editeur d'Aristote ; enfin, M. Lei- cHLEN, auteur de la Souabe sous les Roinains , et dont notrc Revue a souvcnt annonce les travaux. Ph. ue G. 6i8 EUROPE. SUISSE. Neucuatel. — Progres ie so tout aussi au moyeii tie palettes en piei res fines. Quelques artistes avaient fait observer a M. Houriet(jiie I'eeliap- j)enient et le ressort spiral n'etant pas en acier, il devait eii lesiiltcr rinconvenient d'un degre moindre d'elasticite; niais de nonibrcux essais et d'heureux resultats ont repondu a I'ob- jection , et il a paru evident que I'or durei, soil par le refoule- nient, soit par tout autre moyen connu de I'auteur, est plus elastique que I'acier durci, non trempe. Cettc horlogea marche pendant six jours, exposee au contact d'un aimant artificiel d'une force de iS a 3o livres, sans eprouver aucun derange- ment. Cette nouvelle methode de fabrication des chronometres pourra etre d'une haute importance pour les hardis navigateurs qui , sur les pas du capitaine Parry , iront explorer les regions boreales, dans lesquelles I'influence magnetique exerce souvent une action tres-sensible sur les garde-tems construits suivant les precedes ordinaires. Un bateau a va/jcur , l' Union, est entre dans le port de Neu- ehatel, au bruit du canon et des applaudissemens de la popu- lation accourue de toutes parts pour jouir de ce spectacle nou- veau. On assure qu'ou va creuser le lit de la Thielle , petite riviere, qui ouvrira un passage dans le lac de Bienne, d'ou, mo'yennant quelques travaux , le niemc bateau a vapeur pourra penetrer dans le lac de Morat , et etablir ainsi une communica- tion rapide et commode entre les cantons de Vaud, de Berne, de Neuchatel et de Fribourg. G. Nkcrologie. — Struve ( Henri), ne en i75i, d'lm pere medecin, connu par ses eciits scientifiques. Apres avoir suivi les cours de medecine et de sciences physiques a I'universite deTubingue , Struve, de retour dans sa patrie , fut nomme, en 1784, professeur extraordinaire de chimie. Plus tard, I'ensei- gnement de cette science ayant ete regularise, il recut du gou- vcrnement les titres et les attributions de professeur ordinaire de chimie et de mineralogie, eten outre d'mspecteur des mines. Tout en rcmplissant avec zele ces importantes fonctions, I'ho- norable professeur prouvait encore par de nombreux ecrits qu'il etait digne de porter un nom deja celebre dans les sciences. Nous donnerons ici, d'apres le Noucellistc vaudois , une liste abregee, et peut-etre incomplete, 'des ouvrages publics par Henri Struve. lis sont ranges suivant I'ordre chronologique : I " Methode analjtiqiic des fossiles, fondee sur leurs caracteres exterieur». Lausanne, 1797. In-4°. — 2° Rccueil de memoircs mr les salines et leur application. Lausanne, i8o3. In-8°. — 3° Description abregee des snlines du ci-devant gouverneine/it d'Aigle. Lausanne, 1804. In-S". — 4° Fragmcns sur la theorie 620 EL' ROPE. (Ir.'S soiiiccx , ft siir son apjAicativn it I' exploitation des source'!! salves. Lausanne, i8o/|. In-iu. — 5*^ Itincrairc. dcs salines. Lausanne, iSoT). In-12. — G" Memoires snr differens objcts re- latifs a la geologic , nut: mines et salines. Lausanne, i8o5. In-8°. — jibirge de geologic. Lausanne , 1 8 1 8 ; scconde edition ; 1 8 1 y. In-12. — S*^ Coup-d'teil sur ihypothesc dc M. Cliarpentier. Lau- sanne, 1 8 If). In-12. — 9" Observations sur Ic gisenicnt.du gypse salifere dans le district d'Aigle. Lausanne, iSaS. In-12. — 11 a publii', en oulre, chaqiie annee, depnis i8o5 jusqu'en 1814, un Rapport en un volume in-12 sur les travaux cntrepris on a entreprendre dans les mines et les salines dn district d'Aigle. Pen d'annees avant sa mort, M. Struve avait ete oblige, vu I'etat de sa saute, d'appeler un suppleant pour occupcr sa chaire : sou choix etait tombe sur M. Mercakton, de Vevey^ eleve de recole polytechniquc. Mais dans sa retraite et jus- qu'aux dcrnicrs jours de sa vie , le respectable savant ne cessa de donner dcs preuves de I'interet eclaire qu'il prenait aux etudes de la jeunesse vaudoise : ainsi , la Bibliotheqne cantonalc a recu de lui un bon nombre de livres precieux; il a fait don au musec d'une collection de mineraux; et, la veille memc de sa mort , sentant approcher sa fm , il s'cst empresse dc remettre a un parent le catalogue d'une bibliotheque d'ouvrages relatifs aux sciences naturelles, destinee a ctre deposee au musec; Son testament contenait plusieurs autres dispositions qui annoncent un bon citoyen et un homme eclaire : il a legue, entre autres, a la ville de Lausanne, 4?ooo fr. a perccvoir lorsqu'on aiu-a aboli la mendicite par I'etablissement d'une maison de travail; aux ecoles de charite, Aoo fr. ; a la societe biblique, 400 fr. ; sa collection de mineraux au gouvernement pour I'usage du professeur de mineralogie, cxccpte quclques objets qui man- (juent au musee cantonal et qui y seront deposes; enfui, sa bibliotheqne a I'Academie de Lausanne. M. Struve est mort li- 29 novembrc 1826. — Pestalozzi ( He/?r/), ne a Zurich, le 12 Janvier 1746, vient de mourir, apres une courte et douloureuse maladie, le 17 fevrier dernier, a Neuhof, pres dc Brugg, dans le canton d'Argovie. Pestalozzi occupait le premier rang parmi les philantropes contemporains qui ont entrepris la reforme du peuple par I'education. De hautes vertus, un zele ardent pour le bien, des travaux perseverans dans la carriere dans laquelle il s'elait vo- lontairement engage, des ouvragcs utiles lui ont acquis des droits a la reconnaissance des hommes : nous lui devons le tribut d'hommages que nous aimons a payer a la memoire des plus SUISSE. — ITALIE. 621 illustres bieiifaiteurs dc riiumanitc, et nous acqliitterons notre dette envers Pcstalozzi, dans une notice dotaillee sur sa vie, scs ouvrages et ses etablissemens d'education. Dcpuis quelques annees, Pestalozzi avait vu la decadence progressive , puis , la luine complete de son Institut d'Yver- don , sur lequel il avait fonde jadis de meilleures esperances. Mais, s'il n'a pu terminer sa vie au milieu des amis et des dis- ciples dont les soins et I'affection auraient embelli ses derniers instans , du moins il a du emporter dans la tombe la consolante certitude que ses exemples et ses Iccons n'auront pas ete pro- digues en vain : car deja plusieurs de scs eleves , repandus sur les divcxs points de i'Europe et de I'Amerique, y ont ob- tenu, dans I'application de sa methode d'education , des suc- ces qui avaicnt ete refuses au venerable Peslalozzi, dans son pays et durant sa longue et bienfaisante carriere. «. ITALIE. Naples. — Decouverte d'anciens manuscrits. — Le savant Angela Mai , encourage par le succes de ses recherches , explore maintenant les bibliotheques du royaume de Naples , pour tacher d'y reti-ouv«r, dans la poussiere et dans I'oubli , quelque precieux ouvrage de I'antiquite. On avait annonce qu'il avait dccouvert un classique latin , dans la collection de I'abbaye de Saint-Colombc de Bobbio ; mais on vient d'ap- prendre que c'est un Traite d' agriculture , dont le manuscrit semble du v« siecle. L'ouvrage , qui est beaucoup plus ancien , est ecrit en latin tres-pur. On y trouve cites Coluniellc , Celse, Diophanes , Dioscorides , Julius- Atticus , Nicesius , et des au- teurs grecs inconnus a notre tems. M. de J. Apercu de I'etat scientifique etlitteraire des difjerentes parties del' Italic en 1826. (V. ci-dessus, p. agS-SoS.) — Quoique toutes les parties des connaissances humaines prosperent plus ou moins dans les diverses provinces de la peninsule , quelques- unes sont plus generalement cultivees, surtout si elles sont moins exposees aux regards soupconneux du pouvoir. Los re- cherches et les discussions sur la langue et sur la grammaire ont toujours occupe et occupent encore la plupart des littera- teurs italiens. A les entendre, on serait tente dc croire que la langue italienne, qui compte sept siecles de duree etun si grand nombre d'ecrivains classiques , n'est pas aussi formec que les autres langues modernes. II faut neanmoins separer de cette foule de grammairicns et de rhetcurs insignifians qui ont de tout tems inonde I'ltalie, plusieurs critiques eclaires qui ont «porte dans les memes discussions plus de lumierc et plus de me- T. xxxiii. — Fevricr 1827. l\0 6%1 EIROPK. thodc. Nous (listinguons, parmi los rcrifs de ces dfrniers, les cssais dc Grassi , de Niccolini , de Pezzaua , de Gherardini , do I'abbe Roiunni, ct specialemcnt la Pioposta , di alcune correzioni al vocobolario drlla Crusca, que Ic chevalier Monti vient d'a- chever. Ungrandnombredccescritiquesscsontoccupesd'eclaircir la Divine ro/z/rV/zV- de Daiito. Jamais tllen'a compte autant decom- nientateurs qu'aujoiird'hui. Depuis les poesies de Varann et de M. Monti, les partisans de Dante paraissent voidoir remplacer les petrarquistes da xvi* sierle. Pendant que plusieurs poetes se sont efforces d'imiter les beautes de ce i^rand ecrivain , des commentateurs ne cossent de I'expliquer. A les en croire, la Comedie divine nc serait plus qu'une nouvelle Apocalypse , oil I'on cherche ce qui n'y est pas. Ainsi, ce qui est en quel- que sorle un honneur pour ce poete, deviant iin tourment pour ses lecteurs. Quelques - uns out pretendii que les Italiens devraient consacrer toutc leur vie a I'etude de Dante, en le regardant coninie I'lniique source de tout ce qu'on pent savoir. Ce sont les aberrations d'un cnthousinsme honorable a quelques egards; au rcste la plupart de ces auteurs se per- dent dans un dedale de remarques grammaticales. II ne faut pas cependant confondre avcc eux les ecrivains dont Ic but a ete de nous presenter des observations neuves et ingenieuses «ur ce qui regarde principalement les documens historiques, le merilc es&entiel et poetique de ccttc epopee, et les allusions particiilieres du poete. Telles sont la plupart des dernieres re- cherches que nous dcvons a MM. Foscnlo, Rossctti, Trnya, etc. Les Italiens se sont de tout terns signales dans I'etude des langucs anciennes et orientales; aucunc autre nation ne les a fait servir plus qu'eux a la conuaissance des antiquiles et de la religion. Depuis peu, les grands philologues ct les antiquaires seniblaient avoir disparu avec les Visconti, les Morcclli, les Marini , etc. Pent - etre, le but des nouvelles recherches n'in-' tiTessait-il plus I'esprit du sieclo , qui nc s'attache qu'aux de- couvertes d'line importance reelle. Nous venous cependant d'apprendre que M. Cliampollion jcitiic a communique aux sa- vaus de I'ltalie ime impulsion plus utile par la decouverte et I'application de I'alphabet phonetique. En visitant ce pays,. il a laisse partout des eleves et des amateurs qui se sont propose de marcher sur ses fraei:^. Naples, Bologne, Florence, Turin, et surtoiu Rome, out recomui le nu'rite de ce noinel Heinies, qui ouvre uh nouveau mondeaux regards curieux des antiquaires. Lrs savans les plus recommandahles, tels (jne MM. Moi, Pcy- ron , Oiinli, dc, lui out rendu justice; M. "l^nlcriani lui-meme^ ITALIE. 6aa elle protege ordinairement les romantiques. Quoi qu'il en soit» on dirait que ces deux journaux ont epuise tout ce qu'oft pent dire cle mieux a I'avantage de I'un et de I'autre systeme- Le Journal arcadique de Rome soutient I'ecole des classiques, mais souvent avec plus de zele que de philosophic : s6s articles ne presentcnt pas le meme interet que ceux qu'on rencontre dans la Bibliotheque italienne, et plus souvent dans TAnthO" logic. M. Gkerardini, dans sa traduction du Gnius de litteratare dramatique , de M. Schlegel, avail refute quelques opinions de cet ecrivain. II a ensuite analyse avec assez de precision les principes et les theories romantiques, et il a donne I'avantage a la doctrine des classiques dans ses Elemens de poesic. Tout en ^ respectant le merite deM. Schlegel, de M™e de StaelexAa M. dq SLsnifindi, que les romantiques d'ltalie regardent comme leurs coryphees, il les tvouve souvent peu d'accord entre eux, et re- prouve lout ce qui lui parait plutot nouveau que raisonnable. 4o. 62/, EUROPE. Enmi'iiif toiDS, M. Hermeti Visconti, qui, al'exemple dii inaiquis Boccaria , voiulrait apijliqiKT IV'spi it ct I'analyse de la pliilo- sophie aux niatieics dc la littrratiirc ct dii ji;oiit, a pidilio un Dialogue sur I'uuitr du trnts it cla lieu dans Ics oui'ir/grs drama - tiqiifs. Si It's critiques n'oiit pas ett' convainrus dc la solidite dc ses principos, ils ii'oiit pu lui roruscr boaiiconp do penetration. M. Ala/iznai , done d'un rare talent, et riche de divers genres de connaissances, n'a rien neglige pour soutenir sa theoriedra- matico-roniantique, qui n'est ni celle de Shakespeare, ni celle de Schiller, ni celle des autres , niais qui est toutc a lui. C'cst celle que cherclient a suivre la plupart des roniantiques italiens. Sa doctrine est developpec dans sa Lettre a M. C... sur Vunite de terns et de lieu dans in tragedie. Dans ses deux tragedies , le Comte de Carmagnole ct Adelghis , M. Manzoni avait I'intention de mettre en pratique les regies contenues dans sa theorie. II nous parait avoir echoue dans cette entreprise. Quelques beau- tes se font, il est vrai, rcniarquer dans ces deux ouvrages, que deparent d'ailleurs de grands del'auts ; niais, ces beautes, M. Manzoni les doit a son genie, tandis que les defauts sont le resultat du genre vicieux qu'il a adopte , ct cjn'il s'est vaine- ment efforce de justilier dans la Icttre dont nous venons de parler. Cettc distinction, importante a etalilir, detrompcra plusieurs critiques, qui, confondant les effets du genie avec les principes d'un systeme quelconque,se croientautorises a justilier la bizar- i'erie de ce dernier par I'eclat de I'autre. De la, ces iniitateurs mediocres qui, denues de talent, sont d'autant plus blamables qu'ils n'offrcnt que Ics ecarts de sa methode. On pourrait indi- quer une preuve de ce tjue nous avancons, dans une des trage- dies historiques , Beatrice /Vw^^rt. L'autenr, M. ifedaldi- Fores, avait debute par une autre piece, Bondebnonte ; Tune et I'autre sont pen remarquables. On y reconnait Tintention de suivre les traces de M. Manzoni ; mais il s'en faut Inen qu'il s'approche desonmodele. Quoique ses pieces soientecrites dansle systeme de cet estimable eci'ivain, aucune d'elles ne renferme les beau- tes qui se font remarquer dans le Comte de Carmagnole et dans Adelghis. En general, Beatrice Tenda particulierement est depourvue d'interet; Taction marche Icntcment : et nous y avons vainement cherche les beautes dont il a etc parle avec tant d'emphase. EUe peche aussi sous le rapport de la correc- tion du style, ce qu'on n'a ])as manque de lui reprocher. Les observations que nous venons de faire sur le genre dra- matique peuvent s'appliquer au genre epique. Unjeune pocte, dont le genie est au-dessus de son age, M. Thomas Grossi , ITALIE. 625 qui ivvait nicritc tlfs tloi^cs pouf sa noiiNellc en vers, Vllde- gonda, a voiilu sVlancca- dans une cairieio encoic plus diffi- cile; il a compose une nouvelle epopee, sous ce litre : Zei- Lombards a la premiere, croisade. On avail repele que ce poeme serait snperieur a la Jcriisalcin Delivree.'Lcs censures, les de- bats, les brochures se sont multiplies de lous cotes. Au milieu de ces discussions oray;euses, nous ne craij^nons pas d'avancer que ce poeme renferme assez de beautes d'line part, et damper- lections de I'aulre, pour n'etre jias aussi deprecie ni aussi vante qu'il I'a ete jusqu'a present. Nous nous bornons a remar- «(uer ici que les imperfections qui le dej)arent semblent resul- terdu systemeromantique, tandisqueles beautes appartiennent a I'auteur. Peut-etrc celui-ci a-t-il suppose que les memes res- sorts qui peuvent animer \me noiwclle aussi courte que son lldegoiida , pourraient soutenir rinteret d'une longue epopee; et il s'est trompe. Nous donnerons ailleurs une idee plus precise de ce nouveau poeme. Quelques etrangers qui ont visile I'ltalie pretendent que le nombi'e des hommes de lettres n'y est pas aussi grand que chez les autres nations. Des Francais nieme n'ont pas hesite a repe- ter qu'ils en ont rencontre tres-rarement , meme dans les villes de quelque importance. Nous nous perinettons de lear faire observer que les litterateius en Italic ne se trouvent point I'eunis et concentres dans une seule ville, comme a Paris; mais qu'ils sont disstiniines dans la plupart des villes un peu considerables. Si Ton e.vceptc les capitales des etats les plus avances en civilisation , quelles sont les villes secondaires ou Ton en remarque bcaucoup , et que Ton puisse comparer, sous ce rapport, je ne dis pas a Milan, a Florence, a Rome, a Naples et a Turin; mais a Pise, a Bologne, a Parme, a Mo- dene, a Pavie , a Brescia , a Verone, a Padoue, a Palermc, etc. ? Les Italiens cultivent les lettres plutot par passion que par metier ; ils suivent leurs etudes dans le silence de leur ca- binet; et c'est la qu'il faut les chercher, si I'on veut les con- naitre, et non dans le grand mondc, ou ils paraissent rarement. Voltaire disait : « Les statues se presenlent dans ce pays-la; et les hommes qui pensent se cachent; il faut les deterrer. » On se persuadera sans peine que les connaissanccs sont plus repandues en Italic qu'on ne le croit communement, si Ton considere le nombie prodigieux des academies et des societes savantes et litteraires que Ton y rencontie, et dent nous avons indique les plus celebres, et la grandc quantite de journaux de tout genre que Ton y public. La seule ville de Milan en «b6 EUROPE. «oniptf line vingtainc , indopcndamment des ouvrages trrs- tiombreux qui s'y impriment chaqiie annee... Ce coup-d'oeil, tres-incomplet sur I'etat actiicl des Icttrcs en Italic, peut an moins donner une idte de la tendance des esprits dans ce beau pays, et du merite litteraire des Italiens, non moins favorises de la nature sous Ic rapport des dispositions morales et intellectuelles que sous celui du cliniat , qui parait si favorable aux douces reveries, aux studieux loisirs ct aux nobles inspirations. Fa. Salfi. Rectification. — On nous ecrit d'ltalie que le celebre chan- teur Marcbesi n'est point mort, comrae nous I'avions annonce ( voy. Rev. Enc. , t. xxxii, p. 8i6), ct que, malgre son grand ^ge, il jouit encore d'une parfaite sante et habite toujours Milan, sa patrie. Nous avions emprunte cette nouvelle au journal anglais the Harmonicon , qui la donnait, comme fort connue, dans son xlvi* numero, p. 207. Nous avons etc d'autant plus portes a croire a I'exactitude du joumaliste anglais , qu'il avait place I'annonce de la mort de Marchesi a la suite r5, dont le directeur, M. Onder de Weyncaert-Cantius, est deja nomme. On ne tardera pas a connaitre les nominations des professeurs qui seront charges d'y donner des lecons. Nous rappellerons encore, a cette occasion, que le roi des Pays-Bas avait cree a Bruxelles, depuis quelque tems, un con- seivatoire de musique, un grand jordin des plantes dout RI. Dra- piez est I'un des directeurs; et un Obseiratoire , dont les plans ont etc dresses de concert par MM. Quetelet et Rooet. On s'occnpe actuellement de I'execotion de ces grands projets. ( Voy. Rev. Enc. t. xxxi, p. 548.) — Pro jet d'une histoire generate des Pays-Bas. — Le 23 do»- cembre 1826 , leroi, sur le rapport du ministre de I'interieur, a pris un arrete par lequel, cousiderant qu'il n'existe point encore d'histoire generale des Pays-Bas, redigec sur des pieces authentiques, et qui embrasse toutes les parties du royaurae"; persuade d'ailleurs qu'un tel ouvrage est propre a nourrir Vamour de la patric, a affermir les vertus civiqnes, et a for- 628 EUROPE. tHier le caractere national , ordonne qii'il sera pris des niesures pour publicr les documens historiqucs dignes de voir le jonr. Quant a Thistoire nieme, elle est mise au concours, et I'homme de lettres qui donnera sur sa rLdaction les vues les plus saines, et qui aura la capacite necossaire pour remplir une telle fonction , sera nonime liistoriographe. Heureux pays oil Ton promet des honneurs et des recompenses a ceux qui diront le raieux la verite ! dk Reiffenberg. FRANCE. Terrassoit [Dordogne). — Decouvcrtf d'un nncien atelier d'arinex des Gatdois. — M. le comte d'Abzac , juge de paix du canton de Terrasson , vient de decouvrir au bord de la nouvelle route de Lyon a Bordeaux, entre Terrasson et Azerac, vis-a-vis du hameau de la Boissiere , les restes d'un de ces ateliers ou les anciens faconnaient des amies et des instrumens de silex. M. Jouannet , de Bordeaux , qui a si bien fait con- naitre cette branche d'industrie des anciens habitans du Peri- gord , avait deja trouve dans le Sarladais deux de ces ateliers antiques , et ce dernier, comme les deux autres, est caracterise par une grande quantite de debris de silex , par une multitude de dards ebauches , par le voisinage d'une petite grotte natu- relle qui servait probablement de retraite aux ouvriers , et surtout par un amas considerable d'ossemens d'aniniaux do- mestiques qui conservent encore les traces du feu qui les carbo- nisa sur plusieurs points. On fait remarquer que les silex ne se trouvent en place qu'a deux lieues de la Boissiere, et qu'il fallait en ebaucher beau- coup avant d'obtenir des amies ou des instrumens parfaits , coinnie on pent en juger par le grand nombre de ceux qui onb ete manques et abandonnes; mais, a quoi servaient ces amas d'os ? C'est un problenie qui peut-etre ne sera jamais resolu. M. d'Abzac, a qui Ton doit cette decouverte interessante, est I'auteur d'une entreprise utile et trop pen connue, d'un grand defrichemcnt qu'il a fait executer aux portes de la petite ville de Sarlat , et au moyen duquel il est parvenu a convertir une bniyere sans produit en un canton fertile et peuple. Ce defrichement, qui est au bord de la grande route, fait I'admi- lion de tous ceux qui out vu naitre cette petite colonic , et le bonheur de cent families indigentes. P. B. Societes savantes et Etablissemens d'utilite publique. Caen [Calvados). — Societe d' agriculture et de commerce. — Programme d'un prix pour le meilleur memoire ou le meilleur DEPARTEMENS. — PARIS. 629 precede sur le nioyen de detruire I'insecte connu sous Ic nom de puceron lanigere (Caen, 1826, demi-feuille in-8° ). — Vous parcoiirez au printems la Bretagne , la riche Nor-" mandie et la Picardie : a raspoct de leurs plants argentes de pommiers odorifcrans , vous cioyez aux plus riches recoltes de fruits. Mais I'atmosphere n'aurait contre eux ni bourrasques , ni orages , que deja la plupart de ces fleurs recelent une cause de mort. Un insecte encore plus destructeur devore incessam- ment jusqu'aux racines de I'arbre : c'est V aphis inali (myzoxyle) , ou perce-bois. Semblable aux pucerons par son elonnante fe- condite , et par la petitesse de sa taille , il s'en distingue par son enveloppe soyeuse blanchatre , et par la precaution qu'i! prend de se cacher dans I'arbre qu'il ronge. On presume qu'il a ete apporte en France avec des plantes de I'Amerique du nord ; et deja les ravages qu'il cause jettent le decourage- ment dans plus de vingt de nos departemens , et dans les comtes de I'Angleterre qui cuitivent le pommier a cidre. La Societe d' agriculture de Caen fait la premiere un appel aux agronomes pour trouver un moyen sur de delivrer les campagnes du puceron lanigere. Si ce moyen n'cst pas bientot decouvert , la culture du pommier a cidre sera abandonnee. Une simple medaille de 3oo fr. est le seul prix que cette societe puisse proposer. C'est done au patriotisme qu'elle fait cet appel desinteresse : nous esperons qu'il y sera repondu efticacement d'ici au i<"' mai prochain , epoque ou les memoires doivent etre envoyes a M. Lair, secretaire. Isid.\^ — n. PARIS. Institut. — Academie des sciences. — Seances da 11 Janvier au \'] fevrier 1827 (i). — Le president fait connaitre que, d'apres I'examen des concours piecedcns pour les prix fondes par M. de Montyon pour la physiologic experimentale , aucune decision n'exclut les memoires sur \n physiologic des vegetaux. M. ^rao'o communique une lettre de M. Boussingault, adres- see a M. do Humboldt, et datee de Bogota, dans laquelle ce voyageur decrit le tremblement de terre eprouve dans cette ville le 17 juin 1826. MM. Silvestre et Bosc font un rapport sur deux memoires de M. Saintourens , concernant le defricliement et le deboisc- (1) La necessite de reduii-e le volume de notre Revue nous oblige a retrancher ce qui n'apporte point d'instruction, et par consequent les proces-verbaux des Academies, qui ne sont, le plus souvent, que des actes d'administration , ou qui ne reiiferment que des litres de memoires. ( N. D. R. ) 63o FRANCE. ineiit des terres incultes dti dt-partenienl des Landes. Dnns le premier memoire, intitule Coitp-cfceil , I'autcur compare les produits des landes, lagunes , mares ot terres vagues du depar- tement, avec ceux des terrains cultives qui les limitent en partie; il aflirme que ces terres incultes seraient susceptibles de donner les memcs productions que les secondes, si elies etaient convenablement cultivees. 11 joint a ce premier noe- nioire, \° le plan i:;eometral d'une ferme de deux cents hec- tares divises en poitions , et qu'il suppose cultives de la niauiere la pins avantageuse; 1° une table de la distance en ligne droite des clochers de Mont-de-Marsan a chaque chef-lieu de canton i\u departement. Le second memoire est intitule : Rognures au coup-d' ceil des Landes , et contient des additions au premier et de nouveaux developpemens. Void les conclusions du rapport : '< M. Saintourens nous parait meriter d'etre encourage pour ses bonnes intentions, pour le zele dont il a fait preuve en re- cueillant un grand nombre de materiaux de statistique agri- cole, et en s'occupant avec continuite d'un objet qui est d'un grand interet pour une vaste contree. II doit etre invite d'ail- leurs a terminer le tableau qu'il annonce pour faire connaitre toutes les cultures, constiuctions de batimens, canaux d'irri- fation , plantations d'arbres , clotures , etc. , qui ont ete executes epuis i8i/| dans le departement des Landes. » (Approuve. ) MM. Dulong et Gay-Lussac font un lapport sur le memoire de M. Dumas , qui a pour objet plusieurs points de la theorie atomistique. « Nous croyons , dit le rapporteur, avoir suffi- samment fait sentir I'importance des nouvelles recherches de M. Dumas. On y retrouve le talent d'observation , I'exactitude des methodes experimentales, et la justesse des vues qui ca- racterisent ses autres travaux. Nous proposons done a I'Aca- demie d'accorder son approbation a ce memoire, et d'en or- donner I'impressiou dans le Recueil des savans etrangers. » ( Approuve. ) Au nom d'une commission composee de MM. Geoffroy Saint- Hilaire, De Lamark et Boyer, M. Geoffroy lit un rapport sur un memoire intitule : Description de plusieurs monstruosites liuniaines anencephales , par M. VincentVo^rw., D. M. «Le memoire de M. V. Portal, eleve et parent du celebre medecin de ce nom, est en quelque sorte une expression vivante de I'etat actuel de la science en ce qui concerne les recherches sur les monstruo- sites ; il marque les degres parcouriis, car il nous montre qu'on ne s'en tient plus a de simples et seches descriptions. On sait maintenant qu'on pent mieux faire que de s'etonner a la vue de ces cas rares que nous prenions autrefois pour des man- PARIS. 63i (juemens aux regies et a I'ordre de la nature , et qii'au con- traire ces pretendus desqidres forment aiijourd'hui iin corps de docuine qui est dans une voie progressive d'utiies et pre- cieuses recherches... I/es faits presentes par M. V. Porta! ont ete recueillis avec savoir et sagacite; leur exposition est me- thodique; iis sont facilenient comparablcs, et menent fort heu- reusement aux considerations generales que I'auteur en a de- duites. Nous croyons en consequence le travail de M. V. Portal digne de ['approbation de 1' Academic , ct nous proposons de I'inserer dans le Recueil des savans etrangers. » ( Appixjuve. ) MM. Thenard et Clievrcul font un rapport sur les composes du brome , presentes par 1\I. Sebtjllas. « Le brome, dontM. Ba- lard vient d'enrichir la chimie, a tant d'analogie avec le chlore et I'iode, qu'il forme avec les autres corps des combinaisons semblables a celles que le chlore et I'iode forment eux-memes. C'est ce qui resulte des experiences de M. Balard , et c'est ce que confirment les nouveaux resultats de M. Serulias. Ces nou- veaux resultats consistent dans la production d'un ether hydro- bixjmique et d'un cyaniue de brome qui s'obtiennent de meme que I'ether hydriodit|ue et le cyanure d'iode, et qui s'en rap- prochent singulierement par leur aspect et leurs proprietes. L'ether hydro-bromique est un liquide incolore plus pesant que I'eau, tres-volatil, dune odeiu' forte et etheree, d'une saveur piquante, tres-soluble dans I'alcool, dont il est precipite par i'eau. Quant au cyanure de brome , il cristallise en longues et belles aiguilles tres-deliees , sans coulcur, d'une grande solidite, d'une odeur extremement piquante, et d'lme action si forte sur I'economie animale , qu'un grain de cyanure dissous dans un peu d'cau suflit pour tuer un lapin. D'ailleurs , dans toutes les epreuves auxquelles le cyanure de brome a ete soumis par M. Serulias, il ne s'est presente aucun phenomene qui puisse faire croire que le brome soit un corps compose. Non-seulement M. Serulias a repete devant nous les principales experiences qui soot relatives a l'ether hydro-bromique et au cyanure de bixMne, mais encore il en a fait quelques autres qu'il avait tentees depuis renvoi de son memoire a I'Academie, et qui ont pour objet de prouver que le brome se solidifie a 20° au-dessous de zero; qu'il excrce une grande action sur I'hydriodure de car- bone, et que de la resulte, avec beaucoup de chaleur, un bro- mure d'iode soluble dans I'eau , et un hvdro-carbure de brome. presque insoluble au contraire dans ce liquide, ethere et sucre. Nous pensons que les observations do M. Serulias meritent d'etre inserees dans le Recueil des savans etrangers. " ( Ap- prouve. ) A. M. 63i FRANCE. Theatres. — Theatre fkancais. — F* representation de Louis XI a Pcrotinc , coniedie historiqne en einq actes et en prose, par M. Mely-Janin. (i5 fevrier 1827. ) — Le ronian de Quentin Dunvard, connu sans doute do tous nos lecteurs, me pennettra d'analyser phis rapidement la piece nouvellc, cette piece h'etant elle-meme , ii quelqiies details pres, qu'une analyse dii ronian. Ainsi nous voyons au premier acte, Louis XI parcourant, sous le costume de Maitre Pierre, les environs de son cliateau du Plessis-lcs-Tours. Maisiei, au lieu de son fameux compere Tristan, nous trouvons aupres de lui un certain Mar- tigny, personnage bien moins interessaut. Louis est deja instruit de I'amour de la jeune comtesse de Croye pour Quentin Dur- ward, qu'elle a vu a la cour de Bourgogne, lorsqu'ii apercoit le jeune Ecossais.Le roi I'interroge, le reconnait pour I'aniant dTsa- belle, lui donne a dejeuner, et le determine sans peine a entrcr dans la garde ecossaise , en lui assurant que le credit de Maitre Pierre ne lui sera pas inutile. Martigny, par son ordre, procure nieme a Quentin une entrevueavec la comtesse, que Louis veut a toute force empecher d'epouser le comte de Cievecoeur, vassal et ami du due de Bourgogue. L'ambassade de Crevecceur rem- plit le second acte. Le comte, comme dansle roman, apres avoir enumere les nombreux griefs de son maitre, demande le renvoi d'lsabelie, et , sur le rcfus de Louis , jette a ses pieds le gant par lequel il le defie, au nom du due de Bourgogne. Dunois, Cha- banes, le Balafre , sont prets a s'elancer; niais Louis les arrete, et ordonne a Quentin de relever le gage du combat. II charge pourtant le comte de Chabanes de voir en particulier Creve- cceur, et de chercher desmoyens d'accommodement. Chabanes parvient en effet a empecher le combat; mais Crevecceur ne tardepas a decouvrir que Quentin est aime de la comtesse; les deux rivaux se provoquent en duel , et se donnent rendez-vous sur les frontieres de France et de Bourgogne. Cependant Louis forme le projet de se transporter lui-meme a Peronne, esperant tromper plus facilement son vassal dans unc entrevue que par I'intermediaire d'ambassadeurs. L'astrologue Galcotti, consulte sur ce dessein, assure que les constellations lui sont favorables, et, pour se venger de Martigny qui lui a tendu un piege, il inspire au roi la crainte qu'un de ses confidens ne le trahisse; Louis , par mesure dc precaution , n'hesite pas a faire arreter son cher Martigny. Cet incident appartient a M. Mely-Janin , aussi bien qu'une scene qui termine le troisieme acte. Chabanes, voyant le roi decide a partir pour Peronne, lui fait, sur lim- prudence de cette tentative , des representations trcs-vives et assez peu respectueuses. Louis, pousse a bout, lui ordonne dp PARIS. 653 flechir le genou; Chabancs obeit. Parlez mainteiiant, Iiii dit le roi. Sire, rcpond Chabanes, dans cctte postiue je ne parlequ'a Dieu. Celtc posture, repreiid Louis, est celle dans laquelle on arnie les chevaliers. A ces mots, il hii jette au cou son cordon de St.-Michel, et lui donne Taccolade. L'effet de cette scene est dramatique; il le serait encore davantage , si le personnage de Chabannes etait mieux lattache a Taction. Le quatrienie actc, en nous transportant a Peronne , justifie un pen tard le titre de la piece. Charles-le-Temeraire est fort surpris de la visite de son royal bote. Suivant lis conseils de Philippe de Comines, il sc dispose a le recevoir loyalemcnt, comine son seigneur suzerain. Mais , a I'instant oii Louis est pret a s'asseoir au festin que le due a fait preparer pour lui, le heraut bourguignon Toison-d'Or vient annoncer que Crevecoeur a etc tue sur les frontieres de France. Charles , qui I'avait charge d'aller reprimer la revolte des Licgeois , suppose que Louis I'a fait assassiner. Alors s'elevc entre Charles et les seigneurs bourguignons d'une part, Louis et les seigneurs francais de I'autre, une violente altercation, a la suite de laquelle le roi, par ordre du due, est conduit a la fa- meuse tour d'Herbert. Louis, arrive au cinquieme acte dans cette tour, s'informe curieusement de certain passage secret par lequel furent introduits les assassins de Charles-le-Simple. Mais Comines le rassure sur les intentions de son maitre , et le roi , plus tranquille s'occupe du chatiment de son astrologue. M. Mel v- Janin n'a pas cru devoir risquer sur la scene les preparatifs un peu trop anglais decrits dansie roman; il leur a substitue une lettre de Louis au compere Tristan, que le roi presse Galeotti de porter sur-le-champ a son adresse. Celui ci , devinant sans peine le contenu de cette epitre, se tire d'affaire, comme dans I'histoire et dans le roman, en repondant au roi, qui cherche a le trouver en defaut relativement a sa propre mort, qu'elle precedera de quelques jours celle de sa inajeste. C'est dans la tour meme que Charles vicnt tenir conseil sur le parti qu'il prendra a I'egard du roi. Tandis que Louis , seul sur le theatre, attend avec anxietc le resultat de cette deliberation, qui a lieu dans la salle voisine , un bruit sourd se fait entendre; des pas retentissent dans le passage secret. Louis s'imagine d'abord que Ton vient attenter a ses jours; il est agreablement siupris, en apercevant Quentin DurvFard , qui , a la tete d'une petite troupe, a penetre dans la forteresse et s'en est rendu maitre. Alors, le roi dispose a son tour du sort de son vassal. Mais tout s'explique : Crevecoeur a ete tue en duel par Quentin; Louis n'est pour rien dans cet evenement. Les deux eunemis se recon- cilient, et la main d'Isabelle est le prix de I'heurcu.x liberateur 634 FRANCE. drt monarquc. — Ici, rontoiir s'est boaucoitp ccaito do Walter Scott, de Ihisfoiro , ft, il faiit bicn le dire aiissi , de toiitcs les vraiscmblanccs. Sansdoiite, la guerre de Liege nepouvaitentrer dans lo cadre du drame de M. Mely-Janin. Mais etait-il impos- sible de le denouer par im nioyen plus riaturel que celin qu'il a choisi, et plus conforme aux donnees historiques? Dans ce genre de drames surtout , il est d'une haute importance , nieme pour I'cffet theiitral, de se rapprocher le plus possible de la verite. Cc denoiiment est ce que la critique reprendra avec le plus de severite dansl'ouvrage de M. Mely-Janin. Elle regrettera aHssi,eu faisant la revue de ses personnages, de n'y pas retrou- ver les figures originales du prevot Tristan , du barbier Olivier Le Daiui, du Bohemien Hayraddin, de la comtesse Hameline et quelques autres encore. Elle regrettera surtout qu'il n'ait pas conserve pjus tl'interet aux amours deDiirvrard etd'Isabelle, qui servent de lien a tout I'ouvrage. Ce lien relache, la piece n'at- tache plus que par lui interet de curiosite et par la pcinture dcs moeurs. Enfin la critique remarquera que le dialogue deM. Mely- Janin u'a pas toujours assez de Icgerete et de grace. Mais elle est obligee de reconnaitre qu'il y a beaucoup d'adresse ctde grandes difficultes vaincues dans plusieurs changemens qu'il a faits h la fable de Walter Scott pour I'adapter a notre theatre. Tel est I'amour de Crevecoeur pour Isabellc, son duel avec Durward, et sa mort heureusenient substituec a celle de I'eveque de Liege, pour niotiver I'arrestation de Louis XL Enfin, le trait le plus heureux peut-etre que presente le dialogue appartient a I'auteur francais. » J'ai dans la bouche une langue ecossaise , dit Quentin a Maitre Pierre dans Waiter Scott, el elle est assez bardie pour dire ce que je pense en face du roi Louis; que Dieu le protege. « n Que Dieu le protege ! » repete devotieusement Maitre Pierre, dans la piece nouvelle. Ce mot de caracterc a produit beaucoup d'effet. Le succes de Louis XI n'a ete que faiblement conteste. ll est du en partie au talent de Michelol, charge de representer ce raonarque hypocrite. Son jeu profond et varie, et son excel- lent masque , ont supplee en plus d'lm endroit aux ravages evi- dens de la censure. On doit savoir grc a M. Mtly-Janin de cette courageuse tentative dans un genre eminemment approprie a I'histoire moderne. L'accueil favorable que le public continue de faiie a cette comedie est ime nouvelle preuve que ses suf- frages attendent desormais les auteurs dramatiques qui , en traitant les sujets nationaux , sauront employer des couleurs vraics et un dialogue naturel. Ch. Odeon. — ■ I'^* representation de \' Enthoiisiaste , comedie en trois actes et en vers, par M. LEOXAHn (3i decembre i8a6). PARIS. 635 — M^e Valmore, jeiine veuve, a un proces ct doux amans. L^ gain (le sou proces depeud cii giande partie d'une piece inipor- tante que Jamain, son beau-frere, vient de se procurer. Quant uses amans, il regne entre eux un contraste parfait : Tun, Dubreuil, est un homme froid, circonspect, timide, et qui a pour principe darriver a I'amour par I'estime. « C'est prendre le plus long!»lui dit judicieusement la soubrette. L'autre , Mirbel, est un de ccs hommes qui prennent feu pour le pre- mier projet, pour la premiere idee qu'on Icur presente, pour peu que I'idee soit extraordinaire, ou que le projet soil fou. Aussi, son enthousiasmc change- t-il souvent d'objet, sans autre resultat que de comproraettre sa fortune et de I'exposcr raeme a de plus graves iuconveniens. Mirbel, un beau matin, en lisant le journal chez Dubreuil, son ami, forma le dessein d'une cioisade en faveur des Grecs. Dubreuil va, le lendemain, pour Ten dissuader. Mirbel etait deja parti. Arrive a Lyon, il fut retenu a la noce d'un de ses amis; des-lors, la passion du maiiage allait succeder a I'amour des Grecs , quand par mal- heur un curieux vient a parler du Mont-Jura. Voila aussitot notre homme en voyage; arrive a Venise, les Grecs lui revien- nent en memoire, et il faisait les preparatifs d'une expedition contre les Turcs, quand la police, qui soupconne les gens a moins, s'empare de lui, et il est ramene a Paris de brigade en brigade. C'est le froid Dubreuil qui raconte cette aventure a la jeuue veuve dont te coeur incline sccretement en faveur du bouillant Mirbel. Cependant, Mirbel et Dubreuil se fout reci- proquement I'aveu de leur amour pour ellc, Dubreuil est desole de cette rivalite ; mais Mirbel saisit avec transport I'idee de sacrifier I'amour a I'amitie ; il promet au timide Dubreuil de parler pour lui a M'"" Valmere , et I'engage a se retirer dans un cabinet voisin, a I'approche de celle-ci. En effet, il com- mence une declaration pour Dubreuil; mais bientot, a I'aspect de celle qu'il aime, un autre sentiment I'enHamme; ct quand Dubreuil, qu'il a fait appeler , accourt pleiu de reconnaissance, Mirbel, tombe pour son piopre compte aux genoux de M™^ Val- mere, lui baise tendrement la main. Dubreuil, un peu decon- certe, mais connaissant le caractere de Mirbel, le traite avec indulgence et se dispose meme a lui reudre un service. Mirbel a introduit chez M">'= Valmere un avocat, nomme Dumilard, avec lequel il a fait connaissance au spectacle, il y a deux jours, Enthousiasme des qualites et des talens de son nouvel ami, il est pret a lui remettre 80,000 fr. pour un etablissement chirae- rique d'education que ce Dumilard lui propose. Dubreuil ne voit point d'autre moyen de Ten detourner que de lui dcmander 636 FRANCE. ses fonds pour un projet encore plus extravagant : il lui fait proposer par Jamain I'etablisscment d'un chemin de for d'un pole a I'autrc. Malhourcuscmcnt, Mirbel, contrc son usage, veut executor a la fois Ics deux projets. Plus nialhcureusement encore, il a laisse soustraire par Duniilard la piece sur laquelic ]y[mc Valmere fondait I'espoir du gain de son proces. Ce proces , que Ton juge dans la journee, cause les plus vives alarmes, lorsqu'on voit arriver Mirbel triomphant. II vient du Palais. Ayant vu I'avocat de M"'<^ Valmere mal saisir la question , il s'est precipite au milieu de I'audience ; il a plaide lui-meme la cause avec sa chaleur accoutumee; vainement, n'etant pas avocat, a-t-on voulu lui iniposer silence; il a poursuivi sa harangue; les juges I'ont entendu bon gre malgre, et convaincus par son plaidoyer, out prononce en faveur de M""' Valmere. Ce trait, par lequel Mirbel a repare son imprudence et rendu vaine la friponnerie de Dumilard , determine M'"« Valmere a accepter sa main. — Il y a dejolis details dans cette comedie, et la rivalitt'; de Miibel et de Dubreuil offre une situation comique heureusement developpt e et qui a soutenu I'ouvrage. Mais, dans toutes les autres parties de Taction, les ressorts se heurteut et s'embairassent. Le denoiiment a le double defaut d'etre invraiscmblable et de contrarier les vues de I'auteur qui a voulu sans doutc rendre son enthousiaste ridicule. Ajoutons que ce travers est mis en scene assez mal a propos dans un tems oul'on est bien plus dispose a tirer profit de I'enthousiasme qu'on affiche qu'a etre dupe de celui qu'on eprouve. Ch. — I''^ representation de VAmant de safemnie, comedie en un acte eten vers. ( i fevrier 1827. ) — Julie, mariee a douze ans au jeunccomfe Gustave, n'a fait qu'entrevoir son epoux et n'a point quitte son convent. Quelques annees apres son ma- I'iage elle apprend que Gustave , devenu colonel , fait la cour aux belles de Madrid. Arrivee incognito dans cette ville, elle se deguise en jockei et entre sous le nom do Jules, au service de son mari, qui la prend en grande affection. Ce n'est pas tout : sousle nom de Lorenza, jeune espagnole d'un rang dis- tingue , elle a commence une correspondance amoureuse avec Gustave, qui, fort epris de sa beaute, soUicite un rendez-vous pour le soir. Le rendez-vous est accorde, et memo un pretendu oncle de Lorenza ecrit a Gustave qu'il consent a lui donner la main de sa niece. Cette Icttre , si favorable en apparence a I'amour du colonel, trouble au contraire toutesa joie; car elle lui rappelle qu'il est marie. Dans son desespoir, il parle de rompre ce lien funeste. Mais Jules oppose a ce projet des re- montrances si eloquentes que le colonel en est touche et ne voit PARIS. 637 Lorenza que- pour lui exprimer tristement qu'il nc pent parta- ker son amom. Bicntot, il apprcnd I'arrivce dcla comtesse, et, lorsqu'ilU' sc presente a ses yt'ux, il reconnait en elle, avec autant tie surprise que do plaisir, son jockei Jules et sa mai- trcsse Lorenza. Voila du nioins ce que nous avons cru saisir, au milieu de forage de sifflets (jui a convert la voix des acteurs pendant le dernier tiers de la piece. Hn sujet aussi romanes- '^[ue, aussi invraisemblable, aurait cu besoin, pour se faire excuser, d'amener des situations theatrales relevees par un dialogue piquant. Malheureusement, intiigue et dialogue, tout est languissant et froid. L'ouvrage est d'une dame quia sagement garde ranonyme. Le parterre aurait du, par galan- terie, et meme par esprit de justice, attendre la (in de la piece pour prononcer son arret de condanination. Ch. Beaux-arts. — Exposition des manufactures royales. — Rien ne prouve mieux I'interet qu'inspirent les arts, que le coinage avec Icquel les amateurs et les personnes les plus distinguees de la capitale viennent considerer les produits annuels de ces ma- nufactures. En cffet, I'exposition a lieu non-seulement a I'e- poque la plus rigoureuse de I'hiver, mais encore dans un local qui n'est pas chauffe. D'ailleurs, des salles d'une etendue et d'une hauteur immcnses, ovi Ton n'apei'coit que des murailles nues, et un sol sale et froid de ton, ne conviennentpas du tout a des objets delicats, tcls que les produits de la manufacture de Sevres, la plus importante , sans contredit , des manufactures royales. II faut esperer que Ton sentira, enfin, la necessite d'ap- jnoprier un local a cette exposition. Les produits de Sevres n'ont jamais etc, je crois, si nom- breux, si varies, ni aussi importans; aussi ont-ils beaucoup attire I'attention publique. Je m'arreterai peu a ces objets oil la pei:Uiue n'est employee que commc moyen d'oinement; ce- pcndant, je signalerai, parce que ce sont veritablement des objets precieux, unc tabic ronde d'une grande dimension et tres-" riche, sur laquelle on a peint , en neuf tableaux, les principaux episodes du sacre , et dont le pied est orne de six statuettes rc- presentant les six principales villas de France ; un mcuhle des- tine ci servir de bibliotlieque pour des livres de piete, orne d'un grand nombre de figures de saints, et de portraits d'orateurs et d'ecrivains chretiens. J'avoue que je n'aime pas beaucoup la composition de ce raeuble. Le style gothique, si leger , si ele- gant dans ses details , veut cependant de la masse ; reduit a de si petites proportions, il perd son caractere; d'un autre cote, T. xx-siii. — Fcvrier iSi'j . 4i 638 FR.VNCK. nuisqnc , pom la foriuc du inciiblc, on avail adopti' U' styk- i^olliique, les pciiitiiiTS dont il est oriie auraient du se rappio (MitT I'gak'iiU'iit ralionr sesmalades; c'est an depens de sa sante qu'il deve- nait celebre par ses ecrits. Apres avoir resiste, a diflVientes e|)oques de sa vie, a une nialadie grave, <|ui se reproduisait avee les niemes syniptomes, il y succomba, le ay decembre 1826. Ses eleves cl toute la ville de Besaneon regretteront long-tems le professeur, I'habile chirurgien, le savant dont les ouvrages, estinife et rccherches en France et dans les pays etrangers, honoraient le pays oii Tauteur etait ne, oii il avail acquis sa premiere instruction, et qu'il avait prefere nienie a la capitale pour se livrcr a ses etudes de predilection. TABLE DES ARTICLES CONTENUS DANSIFQUATRE-VINGT-DIX-HUITIEMECAmER, FE FRIER 1827. I. l^IEMOIRES, NOTICES ET MELANGES. I. Notice sur les assurances M. F'ancctur. 3/ic) a. Esquifse historique de rindustrialisme . . . B.-C. Dunoyer. 3fi8 II. ANALYSES d:OUVRAGES. 3. Recherches .asiatiques , ou Transactions de la Societe du Bengale ( onvrage anglais ) Ferry. 39.5 4. Probl6me de I'esprit liumain , j)ar M. Massias, 2* article. P. A. Stopfer. 414 J>. L'Europc par rapport a la Gr^cc, par M. de Pradt . A.M. 43 1 fi. Le geneial Dumourie/. ct la Revolution fraucaise , par M. Ledien ! F. O. T. 437 7. OEuvres dramatiques et lyriques de Moratin (ouvragc espa- gnol. ) Muriel. 45 1 8. Noiiveaux melanges historiques et litteraires, par M. Ville- niain . . . P. F. Tissoi. 477 Hi. BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE. Annonces de T 10 ouvrage.' , francah et rtrangers . Amekique septentrionale. — Efrt^j- t/H/i, 3 48>> EoRO'E. — Grainle-Hretagne, 8 490 — Riissie, I ouvrage periodiqne 4')S — Danemark , !...•._ 5oi — Allemagiie, 7 Ibid. — Suisse ,2 5ro — Italic , 9 , 5 1 2 — Mspagne , i '. 020 — Pays'ilas , 8, dont : ouvrage periodiquc Saa France, 70, savoir : Sciences physiqnes et natiirelle: , 22. . . . 528 — Sciences religieuses , morales , politiqiies el historiques , ig. . . 548 — Litterature , ifi 574 — Beaux- Arts , 4 Sgi — Memoires et rapports de societes swantes, i 5g5 — Oui'rages periodiqiies , y puhVics dans les departemens 696 — Livres en laiieiies etrangeres , imprimes en France, i 5g8 f)44 TABI.F. DF.S ARTICLKS. IV. NOUVELLKS SCIENTIFIQUES ET LITTERAIRES. AMKRroiiR sEPTENTKioNAi.F. — Legislation : Codification. . . fioo AsiK. — Indc britiin/iu/iie : Cnlciitta : Sociele de pliysique et de nicdecine; Prix propose. — Specifique centre le t'liolera-mor- bus 6o3 EUROPE. Ii.ss Britanhiques. — Irlande : Etat de rinstruction populaire. Decouverte d'anciens maniiscrits. — Suite de la Revue som- maiie des Sociites de la Grande' Dretagne : Societe linneenne ; Socic'te mineralogique; Societe zoologique ; Societe entonio- logique (io.) RussiE. — Siiint-Petersbourg : Academie iniperiale des sciences : Prix propose day Pox-oGJVE. — ^a///t(e. ieo/'o/; Fondation d'litilitc publique. . .611 NoR^EGE. — DroHMc/m ; Etablissement d'un iniisee ibid. Allemagne. — Hamboiug : Apercu de la situation du commerce de cette ville avec le contiuent de I'Amerique. — Bonn : Uni- versite. — Fribourg : Societe d'bistoire. 612 Suisse. — Neiichatel : Progres de la civilisation. — Necrologie : Struve; Pestalozzi fitS Itai.ie. — Naples : Decouverte d'anciens manuscrits. — Apercu de i'etat scientifique et litteraire des dit'ferentes parties de ritalie en 1826; 2<' n/-//c7e. — Rectification G7.1 Pays-Bas. — Brcixelles : Academie des sciences ; Instruction publique; Projet d'une histoire generale des Pays-Bas. . . . (iifi France. — Termsson ( Dordogne ) : Decouverte d'un ancien atelier d'armes des Gaulois. — Societes savantes et etablis.«e- mens d'utilile publique : Caen ( Calvados ). Societe d'agricul- ture et de commerce ; Prix propose O58 Paris. — hisdtut. Academie des sciences : seances du 32 Janvier au 17 fevrier 1827. — Theatres : Theatre Francais : premiere reprefentation de Louis XI a Peronne, comedie historique. Odt-on : premieres representations de I'Enthousiaste , et de I'Amant de sa femme, comedies. — Beaux-arts : Exposition dps mauufaclures royales. — Necrologie : Briot 621) Announcement of a Netv Series of THE PHILOSOPHICAL MAGAZINE AND ANNALS OF PHILOSOPHY: COMPREHENDING THE VARIOUS BRANCHES OF SCIENCE, THE LIBERAL AND FINE ARTS, AGRICULTURE, MANUFACTURES, AND COMMERCE. BY RICHARD TAYLOR, F.S.A. F.L.S. Sfc. AND RICHARD PHILLIPS, F.R.S. L.8^E. F.L.S. S^c. To be published Monthly, price Is. Qd. No. I. will appear on the 1st of January 1827. Printed by and for Richard Taylor, Shoe-Lane : and sold by Baldwin, Cradock, and Joy; Longman, Rees, Orme, Brown, and Green ; Cadell ; Sherwood, Gilbert, and Piper ; Simpkin and Marshall ; Underwood ; W. Phillips ; Harding; Highley:— and by Constable and Co. Edinburgh ; and Penman, Glasgow. 1 HE Philosophical Magazine and the Annals of Philosophy are journals which have long- been known to the scientific world, not only as containing- original matter of the greatest importance, but also as exhibiting general views of the progress of science, and the im- provements which have been successively effected in its various departments. The former work was commenced at that period when the discoveries of Lavoisier, Caven- dish, Priestley, and their associates, had established the " New School of Chemistry," and was the second phi- losophical journal that appeared in this country, having been preceded only by Mr. Nicholson's Quarto Journal of Natural Philosophy. In the Philosophical Magazine have been recorded all the great discoveries made since the aera of its commencement, selected from various works, as well foreign as domestic : and the orio-inal communications it contains have for their authors many of the most distinguished cultivators of modern science. PHILOSOPHICAL MAGAZINE AND ANNALS OF PHILOSOPHT. During its progress, too, Mineralogy and Geology have acquired an importance which they never before pos- sessed; and the results of this importance are manifested in the numerous valuable contributions on those subjects that enrich its pages. And within the last few years especially, some of the first Naturalists in this country have furnished papers in their respective departments of knowledge; whilst a series of memoirs on Astronomical subjects, and on the application of Mathematics to Phy- sical Investigations, have, it is presumed, tended mate- rially to raise the character of this Journal. The Annals of Philosophy also first appeared at an interesting epoch in the history of experimental research, when the genius of Sir H. Davy and his fellow-labourers in the same field had greatly extended the boundaries of Chemical Philosophy, by employing the decomposing- powers of the voltaic battery : and the succeeding acces- sions to the science have been announced in this journal with the fidelity due to their importance. The doctrine of definite and multiple proportions in the combination of bodies had also just been developed to a certain extent, and to this very interesting department of Chemistry the pages of the Annals afford many contributions, and like- wise exhibit a general view of its history. The objects of both Journals being similar, the Editors of the Neiu and United Series now announced, conceive that they shall more efficiently serve the cause of Science by combining their labours, and presenting them in a concentrated form ; by this co-operation a single work will not only contain the more important original Com- munications, but the accounts of foreign science and the proceedings of learned societies, hitherto divided be- tween two journals, or given in both, will be found in one publication. In acknowledging the favours of their respective Cor- respondents, the Editors earnestly request a continuance of them as the best means of insurino^ their future sue- cess ; with a view to which, they have also made arrange- ments for introducing material improvements in the New Series, and particularly a regular account of scientific discoveries both domestic and foreign. London, Nov. 1826. %* It is requested that all Communications for this Work may be addresjed to the C^e of Mr. R. Taylor, Printing Office, Shoe-Lane, London. ADVERTISEMENT. ' ~ Jan. 1, 1827, This day is published, price Is. 6d., No. I. ' Op a new series of AND REVIEW OF THEOLOGY AND GENERAL LITERATURE. Printed for the Proprietors by G. Smallfield, Hackney, And sold at the Monthly Ri;fository Office, No. 3, Walbrook Buildings, Walbrook, and by R. HuxNTEe, St. Paul's Churchyard. The Monthly Repository has long been the only periodical publication which could be considered as the organ of the sentiments of Unitariansj and its value in this point of view has been generally felt and acknowledged. The time is, however, arrived when a work upon a somewhat different plan, of a more comprehensive character, and aspiring to a higher excellence of literary execution, seems not only to be called for by Unitarians, but likely to be acceptable to the candid inquirer of every religious denomination, as well as eminently conducive to the promotion of those objects which interest the general body of Protestant Dissenters. With this conviction, the copyright of the Repository has been purchased by a number of individuals, under whose auspices the work will in future be conducted. The New Series of the Monthly Repository will continue to combine the twofold character of a Theological and Literary Miscellany, and hold itself forth as a Repository for the productions of men of learning and talents, on the most interesting topics of Religion, Morals and general Literature. It will seek to stand in the foremost rank of those Journals which are zea- lously devoted to the cause of Liberty : — it will strenuously contend for the abolition of all restraints on the formation and publication of religious opinions ; and it will always be open to the free, but temperate and candid, discussion of those important subjects which properly fall within its province : — it will of necessity be imbued with the opinions and prepossessions of the persons from whom it emanates, but will not on that account be a mere sectarian publication, still less will it become the vehicle of prejudice or in- tolerance. If for the most part it speak the opinions of Unitarians, (using that word in the most catholic and comprehensive sense,) the candid reader even of a different denomination will bear in mind, that it is from a body holding those opinions that a work of which Churchmen and Dissenters may alike avail themselves for the unfettered investigation of religious truth, can alone be expected to proceed. Humbly aspiring- to maintain the character of friends to Peace, Charity and true Religion, the Conductors trust, that when called upon to differ most widely from the majority of professing Christians, they shall do so in the spirit of seriousness and piety, and, above all, of charity and goodwill. They will always court inquiry, and invite NEW SERIES OF THE MONTHLY REPOSITORY. rather than deprecate the freest examination of the grounds of their belief, with this only reserve, that the party who enters the field shall display a competent knowledge of the subject, and keep within the bounds of fair and liberal discussion. The general divisions of the work will be : • 1. Original Papers and General Correspondence, embracing the most important subjects of Doctrinal and Practical Theology, Morals, Meta- physics, History, civil and ecclesiastical. Antiquities, Bibliography, Biblical Criticism, &c. 2. The Review, which will be considerably enlarged, and directed more particularly to the notice of all important works bearing on the great con- troversies of the day and relating to Biblical Knowledge and Religious Liberty, as well as all others which may be considered as within the plan of the New Series of the Monthly Repository now detailed. 3. Religious, Literary and Miscellaneous Intelligence, containing ex- tracts from Foreign Journals illustrative of the state of religious opinion, reports of the proceedings of Religious Associations and of Parliamentary Debates on subjects connected with the rights of conscience. Under this division will be also found the Obituary, comprising original biographical notices of eminent persons recently deceased. The literary merits and general value of the New Series of the Monthly Repository must essentially depend upon the co-operation of those friends of the work who are qualified to enrich its pages with their contributions, and the Conductors earnestly solicit their prompt and continued patronage. For themselves they can only add, that it will be their conscientious endea- vour to render the work worthy of the denomination from which it emanates, by the Christian liberality of spirit which it will display, as well as by the talents which will be enlisted in its execution ; — eminently useful to the general body of Dissenters, as the zealous advocate of Civil and Religious Liberty, and the constant opposer of every species of restraint upon the rights of conscience j — acceptable to all classes of Christian Inquirers after truth, though, perhaps, peculiarly so to those who concur with the Conduc- tors on the great principles of Religion and Morals j — and interesting to the reading public of all classes and opinions, from the nature and importance of the subjects which it will discuss, and the variety and utility of the in- formation which it will convey. Whilst they scruple not to avow and recom- mend their own sentiments, it will be their anxious endeavour never to mis- represent or distort those of others, to avoid whatever is inoFensive or ex- clusive in party spirit, and to dedicate their work to the furtherance of the sacred cause of Religious Freedom, and of Christian Truth, Piety and Virtue. It is requested that all Communications should be addressed to the Con- ductors, at the Monthly Repository Office, No, 3, Walbrook Buildings, VVal- brook, London. *.^* From its circulating among an opulent and reading portion of tlie public in every part of the British dpminions, on the continent of Europe and in America, the Monthly Repository will presenl an eligible channel for Advertisements of Books ; a circumstance to which the Conductors respectfully invite the attention of Authors and Publishers. 2wi '«S?\ nE FAIRE CO>llS Lt) Mt.ME ALTEIU, (JL 1 A I'Olll TtlUt r UE LA MVSIQVE A NAPLES, SVRTOVT PARMl LES JFEMME.S.' Un Volume in-S". Prix : 3 fr. 50 c. PROSPECTUS. JN OTRE siecle abonde en theories , en ouvrages di- dactiques. Aux creations du genie devaienl neces- sairement succeder les conseils de I'experience. Plusieurs femmes , qui jouissent en Angleterre , specialement en France, d'unc haute reputation dc " VoTEz : Constitutionnel , Q seflciahte 1826; Journal uc Paris , 21 octobre 1826; Moniteur , 26 octobre 1826; Revue Encyclopcdi- que , torn. IV, pag, 423 et 424; Conrrier des Thefftres , 5janv. 1827. (2) vcilus el dc luniieres, onL ecril sur reducalion des j)ersonnes do leur sexc. Jc m'absliendrai d'en citer aiicune. Une illuslre Ilalicnne , la signora Cecilia dc Luna Folliero , vicnt. dc publicr a Naples, en 1826, Tcx- cellcnt ouvrage dont nous annoncons ici la traduc- tion. Celte dame avait deja acquis une juste cele- brite par un Recaeil de poesies (Naples , 1823) , dans lesquelles on trouve des idees geniales , une sensibilite vraie , une cbaleur de pensee pen com- mune. Plusieurs de ces poesies ont ete inserees dans le Florilegio , qui s'imprime sous Ics yeux de Mes- sieurs Ics academiciens della Crusca : A I' Eire sii- pyeme, les Tombeaiix , la Vestalc , I'Espe'iance , Mirra , A ma Fille Adelaide , etc. , etc. Quoique tres jeune encore , la sie^nora Folliero traite en mere de famille et en personne consom- mee , de la religion , ce sujet si important au bon- heur de tons ; de Tamitie , des craintes ct des pre- juges des femmes ; du but que I'on doit se proposer dans les connaissances qu'on leur enseigne ; de leurs occupations jour nalieres ; de leur etat dans la societe, etc. , etc. La Conclusion merite de fixer Tattention de toutes les pcrsonnes qui sentent et qui pensent. En general , cet ouvragc a I'inappreciable merite d'etre non seulement utile aux institulrices et a leurs jeunes eleves , mais aux deux sexes de toutes les classes, et quelle que soit leur instra<;tion. On con- naitra par la suite qu'il ne pcut jamais etre assez repandu dans les families, et qu'il est a desirer (pi'il soit aussi connu et apprecie en France qu'il Test en Ilalie. II plait par sa forme, par sa grace cxquise : (3) U parle a la raison , au coeur. Apres I'avoir lu , me- dite avec soin, on est mieux que convaincu, on est persuade. C'est , au reste , par exces de modestie , que cette illustre Italienne n'a pas traduit elle-raeme son ouvrage en francais ; car , si Ton en juge par un petit opuscule qu'elle a public en novembre dernier, qui a pour titre : De la Musiqiie a Naples , surtoat parnii les fenunes , et qui respire un sentiment vif de I'art , elle ecrit notre langue avec autant d'ele- gance que de purete '. Bref , son ouvrage sur la maniere de diriger I'education des personnes de son sexe , doit etre considere comme classiquc ; or, les lecterns de tous les ordres conviendront qu'il est en morale , meme en philosopliie , peu de matieres aussi importantes. LL. AA. RR. Monseigneur le due et Madame la duchesse d'Orleans ont lionore cet ouvrage de leur souscription pour un grand nombre d'exemplaires. ' Ccl ouvrage sera reimprime a la fin dii volume que nous an- noncons. Voyez ce qu'en dit la JRci'ue Encrclopedique , tome IV, page 499 et 5oo , et le Courrier , du 5 Janvier 1827. On 6oii$ciit a ^ 38, Norfolk-street, Strand, chez MM. De Cntsy, Cabet et Marbot, maison de correspondance et de com- mission ; M. Degeorge leur transmettra, chaque mols , en echange, les cahiers de la Revue Encyclopedique, pour laquelle on peut aussi sous- erire chez lui , soit pour I'annde courante, soit pour se procurer les collections des annees ant^rieures, de 1819^ i8>5 inclusivemeut. Aux libraires et aux editeurs d'ouvrages ew aIxemaghe, M. ZiB&is , libraire a Leipzig, estcharg^ de recevoir et de nons faire parvenir les ouvrages publics en Allemague , que MM. les libraires, les editeurs et les auteurs desireront faire annoncer dans U Revue Ency- ciopidique. M LiBUAiRES chez lesquels on aouscrit dans les pats K-rKAMoBlis. Londres, Dulau et Compagnie; — Treuttel etWiirt?.; — Bossauge. Madrid, Denude; — Per^s. ^7(V(i«,Giegler;— Vismara;— Bocca. JWojcou, Gautier; — Riss pereetfiU. Naples , Borcl ; — Marotta et Wanspandock. NeuchaCel (Suisse), Grester. New-York (iltats-Unis), Tlioisnicr- Desplaces; — B^rard etMondonj — Behr et KahL Nouvelle - Orleans , Jourdan ; — Roche , freres. Palerme (Sicile), Pedonne et Mu- ratofi; ■ — Boeuf (Cli.). Petertbourg, Saint -Floreut; — Graeifj— Weyher;— Pluchart. Rome , de Romanis. Scttttgart et Tiibingiie , Cotta. Todi , B. Scalabrini. Turin , Bocca. yarscv ic,G\ackiherg;—Za\adsky. fienne (Antriche), Gerold ; — ; Schauinboisrg ; — Schalbacher. AiX'la-Chapelle, Laruelle fils. Amsterdam, Delachaux; -- G. Du- fonr. Anvers , Ancelle. Arau (Suisse), Sauerlander. Berlin, Schlesinger. Berne , Clias ; — Bourgdorfer. Breslan, Th. Korn. Bruxelles, Lecharlier; — Demat; — Brest Tan Kempen ; — Berthot. Bruges , Bogaert; — Dumortier. Florence, Piatti, Fribourg (Suisse) , Aloise Eggen- dorfer. FranefoTtsuT-Mein , Schae£fer ; — Bronner. Gand, Vandenkerckoven fils. Geneve, J.-J. Pasclioud ; — Bar- bezat et Delarue. La Haje, les freres Laogenhuysen. Lausanne , Fischer. Ztii/>«/^, Grioshaianjer; — G.Zirgfes. Lit'ge , Desoer. Liibonne , Paul Mariio- COLONIES. Guadeloupe (Pointe-a-Pllre) , Piolet aine. Ile-deFrance (Port-Louis), E. Burdet. Martinique, Thounens, Gaujoux. OlS SOUSCRIT A PARIS, Ao Bdkkao de rj^daction, bub d'Ekper-Saikt-Micbbi. , n° 18, oil doivenl ^tre envoyes , francs de port , les livres , dessins et gra- vures, dont on desire I'annoiice, et les Lettres, M^moires, Notices o« Extraits destines a 6tie inseres dans ce Recueil. AuMusEEEncrcLoPEDiQuiijChezBossAKGE pt'rc, rue Richelieu, 11° 60; Chez Trbuttei. et Wurtz , rue de Bourbon , n" 17: Rev et Ghaviek , quai des Augustins, n° 55';; Charles Bechet, libraire-comm" , quai des Augustins, u" 57; J. Benouahd, rue de Tournon , n" 6 j Rorex, rue Hautefeuille, n** i» ; A. BAnDooiK , rue de Vangirard, n" 17 ; DbLAOMAY, Pei-ICIER, PoNTHIEU, LA Tentr, Cabittet Litte- ratrb, au Palais-Royal. A LONDRES. — General For.Eicw .\gej»cy Office, n" 38, Norfolk- street, Strand; Tbedttel et Wurtz; Bossakge; Dulau etcomp. ; P. RoLANDi, n° 20, Berners-street, Oxford-street. Nnta. Les ouvrages aunonces daus la Revue sc trouvent aussi cbez Koeet , rue Hautefeuille, u" la. PARIS. HE L IMPRIMKaiE DE RIOMOUS, rao 'J«3 Fr^ncs-Bocrgeois-S. -Michel , n' 8. Tome I- 1827. ( 33* de la collection. ) 99* LIVRAISON. REVUE ENCYCLOPEDIQUE, ou ANALYSE RAISONNEE DES PRODUCTIONS LES PLUS REMARQUABLES DANS LA T-ITTERATURB, LES SCIEIVCES ET LES ARTS. 1" Pour les Sciences physiques et mathematiques et les Arts indastriels : MM. Ch. Duns, OiRARD, Wavier, del'Iustitut; Ferry, FRASCOEnR , Ad. Con- niNKT, A. MiCHKI.OT, IJE MOHTOiRY, MO»EA0 Dli JoiTnES , QuEIELET , T. Kl- CBARD, Warden, etc. 1" Pourles ScieiKes naturelles: MM. Geoffroy Saikt-HilAire, de I'lDstitnt; P.ORY DE Saint-Vincent, correspondaut de I'lnstitut, Matuieu Bonafocs, lie Turin; B. GAtr.i.ON , de Dieppe; V. JAcyOEMOST, etc. 3° I'our les Sciences rnedicales ; MM. BallY, Damiron , G.-T. DoiIT, Amedee DvPAC, FossATi, Gasc; Gerson, de Uambourg; Georget; Lecrandj de KtRCKHOFP, d' Au vers; RiGOLLOT fills, d' Amiens . etc. /(" Pour \es Sciences phitosoyliiques et morales, politiques , geographiques et hisloriqiies : M.yil. M. A. JuLitEN, de Paris, Fondateur-Directeur de la Revue Encfclcpeclique; Ai-EX. DE I.A BoRDE, JoM iRD, de I'lnstitut, Artahd, M. AvKNET,, Barbie ru Bocage fils, Benjamin-Constant, Chari.es Comte, DErriNG, DuF\u,DoHOYER, GDiGNtAtTT.GuizoT, A. Jaubert, AtEx. Lameth, Lanjuinais lils , p. Lami , Lesueur-Meri.in , Massias , A. Metral, AlBERtMoNTEMONT, EUSEBE SAtVERTE, J.-B. SaY; SiMOITDE DE .SiSMONDI , de Geneve; W art; KOENir., de Liege, etc. DupiH atue, Bervili*, Bouchehe- Lepk R, Cni\ Et.1.1 , Ch. Eenohard, Taillandier . avocats ; etc. 5" Pour la Liiteraturefrancaise et etrangere, la Bibltographie ,\'Archeologie et les B^aux-Arts:'M^i. Akdriecx, AMAURV-DuvArj, Emeric David, Lemer- riER , ns Seucr, de ITu-'ititut; M"'« L.-Sw. Beh.oc; MM. J.-P. Bres, Bur- KOUF ills, Cbauvet, Chf.nedolle, de Liege; P.-A. Couprir, Fr.Degeorge, DUMERSAS.PU. GOLBERY, LeoN HaLEVY , llEtRERG , HeHRICHS, E. HeREAU, Acouste JDLr.ir.Niil.s; Bernard Jollien; KAi.vos.dcZante; Adrien-Lapasge, J.-V. jEciERn, Loeve-Veimars, a. Mahci. ; Monnard , de Lausanne; C. Pagan El, H. Patin, Pongf.rvii.i,e; de Ebiffehberg, de Bruxelles ; DE Stassart; Fr.SaifIj.M. Schinas, ScHiTzpEa, Leoh Tbiesse, P. F. Tissot, YtLLESAVE, S. ViscoNTi, etc. ' A PARIS, AU BURE.\U CENTRAL DE LA REVUE ENCYCLOPl-IDIQUE , HUE u'espeh-s.-michei,, n" i8 ; ARTHUS-BEB.TRAND, LIBRAIRE, RUE aAOTE-FEOILLE, TH" 23, MARS 1827. CONDITIONS DE LA SOUSCRIPTION. Depuis le moisde Janvier 1819, il parait, par ann^e, douze cahiers de ce Recueil; chaque cahicr , pubH6 le 3o du mois, se compose d'en- viron i4 feuilles d'impression , et plus souvent de i5 ou ifi. On touscrit & Paris, au Bureau central d'abonnement et d'expi^cion If moyen de construire une voiture a vapeur. Dans SUR LES CHEMINS DE FER. 653 la meme annee, Olivier Evans demandait en AmeFique un brevet pour le raenie objet. On croit que le premier chariot de ce genre employe en Angleterre (i) fut construit par MM. Trevithick. et Vivian. La machine etait portee sur quatre roues, auxquelles la vapeur donnait le mouvement, a I'aide d'un mecanisme fort ingenieux. Les inventeurs voulurent d'a- bord faire marcher leur chariot sur les routes ordinaires ; mais , nc pouvant reussir a le diriger convenablement , ils tournerent leurs vues vers les chemins de fer. On a successivement employe plusieurs machines , dont I'im- perfcction tenait surtout a la fausse supposition que le frot- tement des roues du chariot reraorqueur sur I'orniere ne pouvait suffire pour lui permettre de trainer a sa suite d'autres chariots charges. M. Blackett demontra que I'adhesion des roues sur les ornieres plates etait suffisante pour cet objet , et les experiences de M. IIedley, en 1814, prouverent la meme chose pour les chemins a ornieres saillantes. Des cha- riots furent aussitot construits sur ce principe ; et, depuis cette epoque , ils ont deja recu de nombreux perfectionnemens. L'ex- perience a fait voir que Ton pouvait faire croitre I'adhesion des roues sur les ornieres en augmentant la charge du cha- riot locomoteur, et le nombre de ses roues , et le rendre ainsi capable de trainer a sa suite des charges enormes. On divise generalement I'espace sur lequel on veut etablir un chemin de fer en plusieurs parties de niveau , qu'on reunit par des plans inclines. Ce mode parait offrir plus d'avantages que celui qui est employe pour les routes ordinaires , et qui consiste a monter les cotes par des pentes dont I'inclinaison ne doit point depasser le rapport de i a aS. Ce procede peut cependant conveuir pour les routes-ornieres ; mais le premier est preferable , lorsqu'on emploie la machine a vapeur pour franchir les montagnes , en ce qu'il permet de suivre la ligne directe , et procure ainsi une tres-grande economic dans I'eta- blisscment de la route. Les charges sont toujours transportees. (i) Voy. Trealhe on rail-roads, hj Wood., p. 124. r.54 ESSAI HISTORIQUE SUR LES CHEMINS DE FER. dans la menie diroctioii , comnic sur Ics chemins destines au transport des produits des usines cl des mines ; on pent faire servir les poids des chariots charges pour remonter les cha- riots vides : tout I'appareil consiste, dans ce cas , en un simple tambour sur lequcl passe unc corde. Aux extreniites de celle- ci sont fixes, d'une part, les chariots charges qui descendent le plan incline , et de I'autrc les chariots vides qui doivent le remonter. Lorsqu'il s'agit de chemins publics, que ks cha- riots charges doivent parcourir dans les deux sens , on a re- cours h des machines a v^pcur fixes, ou bicn on augmente convenablement le nombrc des chevaux. Tous les amis de I'industrie se rejouiront sans doutc de voir s'introduire en France ce nouvcau moyen de communica- tion , qui contribue deja puissamnient a la prosperite de la Grande-Brctagne. Nous ne possedons encore qu'iui seul chemin de ter, dont nous sommes redevables aux lumieres et aux talens de M. Beanier, inspecteur divisionnaire des mines. Ce chemin a pour objet de transporter jusqu'a la Loire les pro- duits nombreux de la ville de Saint-Etienne. L'etablissemenl d'une autre route a ornieres de fer a ete adjugee recemmerit a M. S^GuiN , et confie par le gouvernement il ses soins eclaires (i). Si ces entreprises reussissent, comme on a tout lieu de I'esperer, malgre la cherte du fer et des combustibles , ct les nombreuses imperfections qui affectent encore ce genre d'etablissement , tout porte a croire que I'activite qui regnt? dans les mines augmentera rapidement la quantite de fer (i) M. Naviek a aussi presente un projet de chemin de fer qui au- rait pour but d'etablir une communication entre Paris et le Hdvre ; ce chemin aurait 5o lieues dc longueur, ct couterait 3i millions, d'aprfes les devis de I'auteur du projet ; il depatserait de beaucoup tout ce que les Anglais oat fait jusqu'ici eii ce genre. Trouvera-t-on en France assez de fer et d'un prix assez modere pour une entreprise devant laquelle les Anglais, plus favorises que nous a cet egard , ont recule? Pour ^claircir cette question , on peut remarquer, d'une pari, que ce chemin, execute en ler fondu, enqjloierait environ 5120,000 INTERVENTION DES PEUPLES, etc. 655 versee dans le commerce, et que la diminution de prix qui en resultera pourra permettre ;\ cette invention de contri- buer a la prosperite nationale , en ouvrant a I'industrie , au commerce , a I'agriculture , et peut-etre aux voyageurs , des moyens de transport plus prompts , plus reguliers et plus eco- noraiques que ceux qui ont ete employes jusqu'a nos jours. C. J. Henry , Ancien eleve de I'^cole poly technique. DE L'lNTEllVENTION DES PEUPLES EN FAVEUR DE LA GRECE. Dans la premiere jcHncsse, au moment oii le coeurrecoit des impressions vives, la plupart des Europeens studieux, oubliant presque leur pays, ont I'imagination occupeedel'ancienneRorae, et surtout de la Grece , dont Rome admira le genie, de cette Grece brillante qui apparait toujours au-dela, et peut-etre au- dessus de Rome meme. Ainsi s'explique I'enthousiasme qui s'est propage , au seul bruit des destinees nouvelles dont les enfans de I'Attique, de I'Argolide et de la Thessalie avaient accueilli I'esperance. lis devaient eux-memes leurs plus nobles inspirations au souvenir de leurs ancetres qu'ils avaient trouve inseparable des traditions litteraires , au milieu des ecoles, dans I'AUemagne savante, dans I'ingenieuse Italic, dans la ge- nereuse France. Iln'appartiendrait qu'a la froide diplomatic deregardercomme presque entierement illusoire ee sentiment general. Apres tant quintaux meU'iques de cette matiere, fournis en quatre ans , ou par an 55,000 quintaux; et d'autre part, que les usines existant en France fournissent anniiellement une quantite de fonte de i,()i4,ooo quintaux, que Ton est .issure de voir augmenter iccessamnienl de plus de a5o,ooo quintaux. Un seul haut-fourneau a la houille peut fournic par an 20,000 quintaux metriques de fonte. (N. n. R. ) 656 INTERVENTION DES PEUPLES de siecles, pourrait dire une raison severe, qu'importent les noma de Sophocle, de Timolton, de Xenophon? D'autres pays ont envoye aupres de ces ombres illustres d'autres ombres ega- lement dignes d'une longue memoire. Mais, repondront les innombrables amis des Hellenes, non-seulement les anciens Grecs out transmis a I'Europe d'heureux fruits de la civilisation de rOrient; non-seulement, a I'avantage de nos ancetres, les contemporains de Demosthenes ou de Philopoemen ontadouci, autant qu'il etait possible, la durete de Rome; mais leurs des- cendans ont destitres plus directs aupres de la generation ac- tuelle, dans les pays civilises. Maintenant menie, etmalgre une sorte de degeneration inevitable au milieu de tant de vicissi- tudes, on retrouve encore sur le sol de Corinthe ou d'Olympie des traces de ce genie vif et gracieux, actif et original, qui eut tant de part aux formes caracteristiqucs de la civilisation mo- derne. II est juste que I'Europe adopte les Grecs renaissans ; pour etre des notres , pour se distinguer meme parmi les peu- ples qui ont acquis le plus d'influence morale, il ne leur faut que les souvenirs qu'ils cherissent avec un tact si hcureux, et I'independancc que m> S'il est notoire , ajoute-t-on, que des hommes nes en France n'ont pas craint d'aider de leuis lumieres les Egyptiens, du moins il ne s'est trouve, I'annee precedente , aucune voile francaise au nombre des batimens etrangers nolises par le pacha. Dans une affaire assez vive, a la fin de juin iSaS , un an- cien officier de la marine francaise commandait un mistick ; on a aussi distingue im jeune officier de Bruxclles. Les blesses ont ete secourus par le contre-amiral de Rigny. Au mois de juillet , les journaux anglais parlent du projet de lord Co- CHEANE , d'aller vers I'Archipel scrvir la cause des Grecs. Au milieu d'eux, dans I'ancien Peloponese, sont d'autres ofiiciers anglais. Quant aux Americains , c'est de leurs chantiers que sont sorties deux fregates dontl'equipage restera au service des Hellenes. A Paris , les jeunes gens appartenant au commerce des vins, etjd'autres citoyens de toutes les professions , de toutes les classes, dc toutes les opinions politiques ont pris part a la sous- cription en faveur des Grecs. Toutes les pi'incipales villes de France, et beaucoup de villes du second ordre ne tardent pas a suivre ce noble exemple. Les dames francaiscs les plus dis- EN FAVEUR DE Lk GRfeCE. GSi tinguees triomphent de leur timidite naUirelle pour allcr, dans les maisons parriculieres , pi"ovoquer et recueillir Ics offrandes consacrees a la cause sainte. Les dons se multiplient. Les ora- teurs et les poetes excitent encore et celebrent ce patriotique enthousiasmc. Les chants de Casimir Dclavigne , de M""' Del- phine Gay, de M™« Tastu , de la jeune 'hirondelle athenienne (M"« d'Hcrvilly) retentissent au loin. Une societe de dames s'est formee aux Etats-Unis, comme a Paris, pour faire des quetes en faveur des Grecs; et, en repondant a ces touchans temoi- gnages d'interet , les dames grecques disaient : Nous appren- drons a nos enfans qu'il y a eu des femmes philhellenes, qui , par leurs voeux et par tout ce qui dependait d'elles, ont fiivo- rise notre liberte. On ecrit des iles loniennes que les lettres recues de Nauplion parlent toutes du zele et du devoument des guerriers francais attaches a la cause des Grecs , et qu'un d'eux , le brave colonel Fabvier, vient d'etre nomme avec beaucoup de solennite ^w- tagrnatarqice. Ce guerrier, dont on connait les talens militaires , I'eloignement pour I'intrigue , les habitudes simples , et Ten- tier desinteressement , s'exprime ainsi , dans ime proclamation adressee aux habitans de Salamine , de Thebes et d'Athenes : « En me chargeant de I'organisation de I'armee , je n'ai ac- cepte ni grade , ni emolumens. Lorsque la Grece aura des offi- ciers en etat de dinger ses defenseurs , je retournerai dans mes foyers ; mon seul desir est d'emporter avec moi I'amour des Grecs libres et heureux. » Arrive dans I'Attique, ou il est recu avec acclamation , le colonel Fabvier s'occupe d'y organiser un nouveau regiment qu'il compose de Diacriens et de Marathoniens , et qui de- viendra une sorte d'ecole militaire. A Gastouni , un corps est forme sous les yeux du general napolitain Rosaroll. C'est a ces efforts pour regulariser les mouvcmens des emules des Botzaris et des Nicetas, et pour les rendre aussi fermes dans la plaine qu'ils etaient redoutables au milieu de leurs rochers ; c'est a ces travaux de quelques etrangers que le comite grec fait allusion , en disant , dans un nouvel appel aux cceurs ge- 43, GG4 INTERVENTION DES PEUPLES nereux : « Des essais de tactique , sccours expiatoirc envoye d'Europe , ont puissamment aide le courage des Grecs. » On ocrit de Missolonghi , mcnacLC d'un cinquieme siege : " Nous saluons notrc t'-loqucnt defenseur, M. dc Chateaubriand ; son adresse est dans toutes les bouchcs. Recommandez nos enfans au comite grec dc Paris. » Co comite recoit de M"* Gay, dans les premiers jours de 1826 , une somme provenant de la vente , faite a Munich , des vers que lui a inspires I'heroisme des Hellenes. L'annee precedente , au mois de mars , ce comite s'etait adresse particulierement aux dames de Pai'is. Alors, quarante d'entre elles « offrant la reunion de toutes les vertus et de toutes les graces , ont fait une quete dans les divers quar- tiers de la capitale : elles ont mis au dessus de tous les plaisirs cette pacifique mission. » Deja , dans une occasion analogue , en 1825 , trente-trois dames de Livadie , de Candie, de Salona, d'Hydra, de Chios et d'Atlienes avaient ecrit aux dames phil- hellenides : " Amies de I'Hellade, votre douleur a I'occasion de nos chagrins les a soulages... Votre joie a I'egard des victoires de I'Hellade a souvent augmente notre joie... Votre image est gravee dans nos coeurs ; votre nom aimable sera dans nos bou- ches , tant qu'il nous restera un souffle de vie. » En mars 1826 , une lettre dc M. Eynard , de Geneve , I'un des plus zeles Philhellenes de I'Europe , apprend a M. le due de Choiseul , membre du comite de Paris , un grand avantage remporte par la garnison de Missolonghi. A ailcune epoque , les nouvelles relatives aux Grecs n'ont excite un plus grand interet. Une vive emulation pour leur offrir des secours se pro- page dans toutc la societe europeenne. Les beaux-arts, en France , s'y joignent avec empressement. Un concert est donne dans la capitale ; quelques billets d'entree sont payes jusqu'a aSo fr., et le Due d'Orleans ajoute au prix de sa loge 1,000 fr., prelude de sommes plus fortes. Les premiers amateurs figurent dans ce concert; on y voit aussi les dames les plus distinguees par leur talent pour le chant. Un grand nombre de femmes ont choisi pour leur parure les couleurs du drapeau grec , le blanc et le bleu. On remarque dans une loge particuliere les EN FAVEUR DE LA GRECE. 665 fils de Canaris et de Tsamados. Dijon , Macon , Slrasbourg , Colmar, Amiens, Nantes, Bordeaux, Valence, Lille, Mul- house, Lausanne , et plusieurs autres villes , animees du mcme esprit , donnent aussi des concerts. On reunit, pour une expo- sition piiblique , prolonyee pendant plusieurs niois , de nom- breux morceaux choisis de peinture et de sculpture qui etaient epars dans des maisons particulieres a Paris. Le droit d'entree est percu au profit des defenseurs de Missolonghi. Un peu plus tard , on ouvre de meme dans la seconde ville du royaume une salle d'exposition , oil les artistes de I'Ecole lyonnaise , et des proprietaires de tableaux remarquables apportent egale- ment leur tribut. Vers cette epoque , le montant des quetes et des souscrip- tions doit s'etre eleve ici , en deux semaines seulement , a phis de 3o,ooo fr., d'apres les details contenus dans les ecrits perio- diques ou la cause des Grecs est le plus constamment de- fendue. Munich envoie 45,ooo fr. ; et le comite du canton de Vaud , en Suisse , a reuni 47j000 fr. Les commis-negocians de Lyon veulent remplir une souscription particuliere. Le co- mite philhellenique deGeneve transnietune sommc de 10,000 fr. Rennes , Avranches , Beaune, Caen , Lille , Corbeil , Melun , Versailles, Rambouillet, souscrivent aussi. En neuf jours , au mois de niai, les offrandes montent a 10,000 fr., au seul bureau du Constitiitionnel. On en recueille dans presque toutes les villes de la France. Les Grecs recoivent des munitions, des medicamens, des ha- bits , des moycns de subsistance. On forme au milieu d'eux un hospice fran9ais , ou quelques jeunes medecins vont se devouer au service de leurs malades et de leurs blesses. La chute de Missolonghi , faussement annoncee a Paris des le 9 avril , n'y est bien connue que vers le 1 8 mai , c'est-a- dire , quatie semaines apres I'evenement. Plusieurs volontaires francais , et entre autres le brave Saint-Aubin , out peri dans la defense de cette place importante , dont la mine semble re- doubler encore le zele de tous les amis des Grecs. Quant au clerge , en Occident , un mcmbre du comite philhellenique de 666 INTERVENTION DES PEUPLES la Societe dc la morale chretienne lui reproche eloquemment son indifference pour ie sort dcs Grecs schismatiquos , parmi les- quels se trouvent pourtant aussi des fidcles du culte rouiain. « Tandis que vous cclobrcz, dit M. ivY/x Bouin , votre jubile avec pompe..., des calices de bois baignes de sang, dcs femmes , des vieillards , dcs pasteurs cgorges , les cris des meres et des enfans entasses pour la vente , des fiUcs , qui du harem oh elles sont trainees peuvcnt apercevoLr Ics tctes sanglantcs de leurs peres , voila le jubile des Grecs ! « Les obstacles sont levos dans la Prusse pour des coUectes au profit des Hellenes , et la Gazette d'Etat public en leur faveur un appel signe par le premier medecin du roi , le celebre HUFELAND. A Paris , douze dames se partagent les douze arrrondis- semens , afin de regulariser les quetcs , et d'empecher qu'une vile intrigue ne detourne les fruits d'un zele desinteresse. Plu- sieurs villes etrangeres adressent au comite de Paris les sommes recueillies par elles. L'Allemagne n'a paseu de meme I'avantage d'un point central ; mais on y a pris part sur presque tons les points au sort des Grecs , et deux monarques se sont honores en donnant des temoignages publics de leur interet pour cette genereuse nation. A Grenoble , M"'^ Georges donne des representations dont le produit est destine aux Hellenes. M. Laugier , leiir dediant son Leonidas , gravure digne du tableau qu'elle reproduit , fait hommage au comite grec d'une epreuve de ce beau travail. Quarante villes de France repondent de nouveau a I'appel fait a la bienfaisance pnblique. Des dons sont envoyes de Bruxelles, de Landau, de La Haye , d'Elberfeld, de Breslau , de Stutt- gart , de Bale , de Zurich , de Beilin , de Namur. Un comite se forme aussi dans Liege et dans la capitale de la Saxe. A Paris , I'exposition de peinture en faveur des Grecs attire un nombreux concours. Le comite rcroitun dcmi-mois des recettes du bureau du Cosmoraina, qui a offert les vues de Rhodes, d'Athenes , de Lepante., des Thermopyles et de Missolonghi. Dans une legion de la garde nationnale parisienne , on se co- EN FAVEUR DE LA GRECE. 667 tise pour envoyer aux Grccs une piece do canon , et ties fetes sont donnees a leur benefice par les entrepreneurs des jardins publics. Des expeditions , surveillees par M. Eynard , mettent a la voile a Ancone, et portent en Grece de I'argent, des'rauni- tions, des approvisionnemens. On s'occupe specialement de racheter de resciavage les enfans et les femmes ; dans cette oc- casion , I'argent est fourni surtout par des Suisses et des Fran- cais. Au moment du depart du general Roche pour la France, le president grec Zajdii le charge de dire au comite central de Paris : » Grace aux soins de M. Eynard , la population de la capitale de la Moree mange du pain provenant de la bienfai- sance des Europeens." Les commandans Roumeliotes et Sou- liotes ecrivent a cet officier dans le meme sens, et ajoutent; » Vos amis ne cesseront de combattre pour I'independancc, tant qu'ils auront de la poudre a bmler. « Aupres du colonel Fabvier se distingue le chef de cavalerie Regnault de Saint-Jean d'Angely ; I'experience du colonel Gordon le rend aussi tres-utile. Le regiment de Fabvier est habille par le comite de Paris. Au commencement de juillet , divers journ aux reproduisent, d'apres une Gazette de Suisse, une lettre de cet ofQcier; on y trouve ces lignes caracteris- tiques : « Personne en Europe n'^ peint les Grecs avec exacti- tude, lis ont des cotes affreux (resultat necessaire de plusieurs siecles de servitude et de degradation morale) ; sous d'autres rapports , ils sont admirables , et ils passent I'antique. L'im- pression generale produite par la catastrophe de Missolonghi a ete la resolution de I'imiter. Je vois creneler les villages : huit cent mille Grecs se sont promis de se faire sauter I'un apres I'autre ; chaque paysan creuse une mine sous sa maison , et pour la remplir, il achete de la poudre avec son dernier ecu. » Dans une seule reunion , a Stockholm , une souscription pour les Grecs a prodiiit 10,000 fr. ; on y a execute une cantate dont le fils du marechal Ney avait compose la musique. On lit avidement en Alleroagne un dithyrambe de M. Tiedce sur la ruine de Missolonghi, et ce sujet devient, quelques mois apres. 668 INTERVENTION DES PEUPLES celui du bel ouvrage historique de M. A. Fabre ( Voy. ci-desbus p. 124)- — Ij'appel de M. Mynas en I'aveur de ses compa- triotes, ecrit en grec ancien, lie aux souvenirs de I'antiquite les traits de devoument et d'heroisme dont nous sommes teraoins. La cause des Hellenes compte des proselytes dans les lieux sourais au gouvernement sarde, et jusque dans les hautes vallees du canton de Fribourg. Au Bazar , a Paris, on expose, pour etre vendus au profit des Grecs, de nombrcux ouvrages fails dans ce dessein par des dames. On y voit aussi un buste de Canaris, execute en albatre par un artiste qui a beaucoup connu ce guerrier intrepide. Un comite grec se forme dans Marseille ; celui de Stockholm envoie a Paris 20,000 fr. Les villages meme de la France s'as- socient aux souscriptions. On en fait sur des barques qui des- cendent le Rhone pour la foire de Beaucaire. Dans une ville peuplee de protestans et de catholiques, les fideles des deux cultes se sont reunis indistinctement , et ils ont fourni une somme de 6,000 fr. Le fils de I'amiral grec Tombazi sera eleve a Geneve ; la lettre dans laquelle ce celebre marin exprime sa reconnaissance est ecrite en francais. Le roi de Baviere envoie k M. Eynard 80,000 fr. de sa cassette, et 26,000 fr. donnes par sa famille. II veut qu'on substitue a la depense des fetes accoutumees pendant son sejour aux eaux de Brucknau, des dons partages entre les pauvres du pays, et les families grec- ques tombees dans la detresse. Le Journal universel dc la Grece recapitule ce qui a ete fait en Europe au sujet de la nouvelle Hellenic. «Les Allemands, dit-il, sont entres les premiers dans la carriere; mais cet elan a ete comprime. Les habitans de la Grande-Bretagne n'ont pas tarde a s'y joindre.... A la voix des Francais, se sontrani- mes tons les Philhell^nes de I'Europe.. Ceux de la France ont compose un grand nombre de livres favorables anx Grecs , et pleins de chaleur. » A I'ouverture de VAtheni'e de Paris, au mois de decern - bre 1826, M. Tissot fait allusion h. I'enthousiasme excite par la conduite des Grecs. « Le monde , dit-il , est en possession , et EN FAVEUR DE LA GRfeCE. 669 cependant encore en travail de la liberie. » Cette situation de la plupart des peuples europeens est surtout celle des Grecs , et , en expliquant I'interet qu'ils ont su exciter, elle fait de cet in- teret meme un garant de leur entiere emancipation. L'Europe assiste au combat, et elle ne pourra etrc distraite de ce spec- tacle : il faut qu'on triomphe, quand on a constamment pour auxiliaire le voeu des nations. Cette perseverance de I'opinion aura determine I'intervention des puissances. Long-tems , plu- sieurs d'entre elles avaient paru craindre que Constantinople ne tombat dans des mains ambitieuses. Cependant , I'affran- chissement de la Grece n'exigeait pas la ruine des Osmanlis ; et d'ailleurs, ce n'est pas dans leur force que se trouve la vraie garantie de I'Occident : avec de I'accord et de la sagesse , il possederait d'assez grands moyens pour sa surete. Depuis pres d'une annee , on repand , a I'egard de cette in- tervention , des nouvelles souvent hasardees , ou meme contra- dictoires. On dit successivement que, si le gouvernement an- glais ne veut pas s'attribuer le protectorat de la Grece, il ne pretend pas que d'autres se saisissent de cet avantage ; qu'il s'agit d'une triple mediation; qu'il est deja convenu entre les cabinets de Saint-James et de Saint-Petei'sbourg , que le con- tinent et les lies de la Grece formeront un Etat libre; que I'ambassadeur d'Autriche va se joindre a ceux de I'Angleterre et de la France ; que la position 011 se trouve la Porte ne lui permettra pas de rejeter des propositions conformes aux bases arretees a Saint-Petersbourg ; que ces arrangemens sont dus sur- tout aux instances des trois cabinets deRussie,de France et d'An- gleteri'e , ainsi qu'a la defiance qu'excite dans le Divan le pacha d'lfegypte. A la Sainte- Alliance, formee dans desvuespassageres, semble succeder un pacte moins positif, mais plus durable et sur- tout plus genereux : le Divan lui-meme sera force de prendre part a I'accord universel. Le principal objet de cette soUicitude eclairee doitetre tout le midi de I'Europe : la Peninsule Iberique sera re- generee ; un jour plus pur eclairerala belle Ausonie; et, sous de nouveaux amphictyons, la glorieuse terre des Heraclides re- trouvera quelque chose de sa splendeur antique. S. II. ANALYSES D'OUVRAGES. SCIENCES PHYSIQUES. Memoires de i,a Societe de physique et d'histoire NATUREIVLE DE GeNEVE (i). Les Memoires des societes savantes sont an nombre des ouvrages dont les journaux litteraires et scientifiques rendent compte le plus raremcnt : il est probable que la diversite meme des sujets qui y sont traites est une des causes qui eiripechent de les extraire, et qui engagent souvent ales negliger. Cepen- dant, ces collections ont, aiux yeux de ceux qui aiment a suivre les progres des sciences , divers genres d'interet. Le choix des memoires qu'elles renferment se fait en general avec plus de reflexion que dans la plupart des livres. Ces memoires ont souvent ete elabores par la discussion publique; ils ne sont generalement admis que lorsqu'ils contiennent des faits nou- veaux et constates. Les simples hypotheses sont proscrites par presque toutes les academies modernes. A ces avantages intrin- seques les memoires des .societes savantes joignent un autre genre d'interet, c'est que, tandis que les livres ordinaires ela- bores par un seul homme prouvent le travail ou le talent indi- viduel , les memoires collectifs font par cela meme connaitre I'etat intellectuel de la ville ou du pays qui leur donne le jour. On y voit d'ordinaire assez bicn et la direction generale des esprits, et la preeminence de certaines etudes sur d'autres, et le degre d'instruction generale represente par le nombre de ceux qui, dans une population donnee, sont susceptiblcs de (i) Geneve, 1826 ; Paschoud. Paris, le m^me. 3 vol. in-40 avec gravures. SCIENCES PHYSIQUES. 671 presenter des travaux de choix. La Revue Encyclopediqne, qui a surtout pour objet d'appeler I'attention de ses lecteurs sur les progres de la civilisation et sur les resultats de I'espiit d'asso- ciation, est aussi le recueil ou Ton trouve le plus souvent quel- ques analyses des memoires des socictes. La ville de Geneve a des long-tems la reputation d'une ville instruite, et ou les liaisons sociales sont bien etablies; elle a produit, dans le siecle dernier, plusieurs savans du premier ordre, tels que Bonnet, Dcluc , dc Satissure , etc. Aussi, il est remarquable que les savans et les amateurs des sciences ne s'y soient reunis en societe que vers la fin du dernier siecle, en 1790. Cette association a du sa premiere origine a des reunions amicales qui se tenaient alternativemeut chez ses membres; et elle a conserve quelque chose de ce regime d'amitie, en ce qu'elle n'a point de regime academique , point de president en titre; chacun preside h son tour cette reunion republicaine. On a surtout soin d'y encourager les discussions sur les points difficiles de la science, et les rapports verbaux sur ce que cha- cun des membres a pu appi'endre relativement a la marche des etudes auxquelles il se livre. Apres plusieurs annees de cette existence de societe d'amitie et d'instruction, les membres ont pense qu'ils en augmenteraient I'utilite et qu'ils presenteraient un point d'emulation aux jeunes Genevois voues aux recherches scientifiques , s'ils publiaient graduellement les principaux me- moires lus dans leurs seances. Le premier volume de cette coUectioh a paru en 1821 , et le troisieme vient d'etre acheve. Ces volumes paraissent en deux ou trois livraisons, amesure que les materiaux en sont admis. Une commission renouvelee chaque annee fait le choix des memoires qui doivent y etre imprimes. La seule maniere de faire connaitre une collection de ce genre est d'indiquer succinctementles objets divers dontelle se compose; et c'est ce que nous ferons ici, en classant les prin- cipaux d'entre eux sous les sciences auxquelles ils se rap- portent. U astronomic , qui entre a peine dans le champ des etudes de 672 SCIENCES PHYSIQUES. la Society de physique ct d'histoire naturelle , est representee par deux meraoires de M. Gautieb. Dans I'un, il discute avecsoin la longitude de Geneve , en la rattachant aux grands travaux geodesiques qui occupent en ce moment la France et I'ltalie ,' et il arrive a I'etablir a 3" 48' 5o" 6G. L'autre renferme di- verses obsei'vations astronomiques faites dans I'observatoire de Geneve. Les physiciens trouvent, dans cette collection, un memoire de M. HuBER, contenant la description de quelques instrumens nonveaux de meteorologie , et en particulier un nouvel anemo- metrei^ instrument pour mesurer la force du vent ). M. Dufour a donne une serie d'experiences interessantes sur la maniere de mesurer la force des fils de fer , travail fait par cet ingenieur a I'occasion de la construction de deux ponts suspendus en fil de fer etablis avec succes a Geneve. M. le professeur Prevost a public plusieurs memoires qui montrent que les experiences de Leslie sur le rayonnement s'expliquent toutes dans la theorie de I'equilibre mobile du calorique,etil a, dans d'autres dissertations, applique cette meme theorie a divers phenomenes particu- licrs. Le meme pliysicien a public un memoire posthume de son parent M. Benedict Prevost, sur les mouvemens divers que presentent les corps volatils , tels que le camphre en contact avec d'autres corps liquides. M. Maurice est auteur d'une dissertation sur I'application de la theorie de la vision aux moyens d'expliquer les apparences visibles sous les divers rapports de la forme , de la distance et de la coulenr. Enfin , M. De LA Rive a insere dans cette collection deux memoires sur I'elcctricite dynamique : le premier traite de la distribution de cette espece d'electricite dans les conducteurs de forme ot de nature diverses; et le second, de la propriete quo possedent les metaux qui ont ainsi servi de conducteurs, de developper a leur tour un courant electrique, quand ils sont places dans les ciixonstances favorables. Le meme savant a donne, de concert avec M. Marcet, im memoire sur Taction que certains metaux exercent ii diverses temperatures sur les gaz inflammables, et de concert avec M.Ma- SCIENCES PHYSIQUES. 673 CAiRE, line scrie de faits pour servir a I'histoire de I'acide mu- riatique qui tendent ii prouvor que les deux theories adinises par les divers chiniistes sur la nature du chlore laissent en- core I'une et I'autre quelque chose a desirer. M. Macaire a encore fait connaitre I'analyse du vernis de la Chine , d'apres un echantillon de ce vernis recueilli a Manille par M. Perrottet, et M. Marcet a presente aussi a la societe des analyses de plusieurs produits vegetaux curieiLx par leur origine ou leur emploi. La geologic doit etre une science indigene dans la patrie de de Saussure. Son petit-fils , M. Necrer , a public un memoire sur le Mont-Somma , ou il donne une description geologique de cette montagne; cette description est destinee a en recon- naitre la structure reguliere, et a indiquer les rapports de ses tilons avec les laves qui ont coule du mont Vesuve. M. Pictet a donne une description generale de la contree qui formait I'ancien departement de Rhin et Moselle, et qui est si remar- quable par la multiplicite des petits voicans eteints dont elle est Jierissee. M. Deluc a presente une description detaillee et topographique des blocs de granit epars dans la vallee du Leman , et qu'on y suppose venus des Alpes. Quant a la mineralogic proprement dite, M. Soret a public divers travaux cristallographiques dans les memoires de la societe de Geneve : il a indique les rapports des axes de double refraction avec les divers octaedres primitifs, et il a particulie- rement applique ce principe au mica. II a decrit plusieurs formes nouvelles de cristaux decymophane, de chaux sulfatee, observees dans le musee de Geneve, et, de concert avec M. Mo- RicAND , il a donne la description de plusieurs formes cristallines nouvelles de strontiane sulfatee. La botanique est une des sciences pour lesquelles la collec- tion que nous analysons presente le plus de materiaux. On y trouve en particulier un grand nombre de monographies de genres ou de families , et tons ceux qui connaissent la marche actuelle de la science savent combien les vrais botanistes met- tent de prix k ce genre de travaux, ou toute Tattention se 674 SCIENCES PHYSIQUES, concentre sur un petit nonibre dc points , ct oii les difficiiltes s'cclaircissent en i^randc partie par la comparaison reguliere des fails analogues : les monogiaphies publiees dans ces trois volumes, et toutcs acconipagnees de planches assez nombreuses, sout celles des terestroeniacees et des lythraires, par M. de Candolle , des violacees par M. de Gingins , des dipsacees par M. Coulter, des sclaginees par M. Choisy, des curcubitacees par M. Seringe, des grossulariees par M. Berlandier, des chara et des proles par M. Vaucher. Ces deux dernieres sont rcmar- quables, parce que I'auteuf y fait connaitre la germination jusqu'aLors inconnue de ces deux genres. M. de Candolle a discule, dans deux memoires, la place que les nympheacees et les curcubitacees doivent occupcr dans I'ordre naturel, et il a presente a la societe deux rapports sur les plantes rares on nouvelles qui ont fleuri dans le jardin de Geneve, de 1819 a 1823(1). L'histoire des vegetaiix consideres sous le point de vue phy- siologique s'est enrichie de deux memoires de M. Vaucher : I'un sur la cause de la chute des feuilles et les circonstances de ce phenomene; I'autre sur la seve d'aout et le mode divers du developpenient des arbres a cette epbque. M. Theodore de Saussure a public deux memoires importans : I'un pour mon- trer que I'influence exercee par les fruits avant leur maturite sur I'air qui les entoure, n'cst pas sensiblement differente de celle que les feuilles vertes exercent dans les memes circon- stances; I'autre, pour elablir que diverses graines, et en parti- culier plusieurs cereales jouissent d'une telle force de vitalite, que leur germination peut etre interrompue par une dessicca- tion anificielle, et qu'elles peuvent cependant reprcndre ensuite leur vegetation. M. Marcet a fait connaitre une serie curieuse d'experiences , desquelles il resulte que les poisons absorbes (i) II ne faut pas confondre ces rapports avec I'ouvrage accom- pagne de planches coloriees , que le meme auteur pubiie sous le titre de Plantes rares du jardin de Geneve. II en a parn trois livraisons chez Barbezatet Deiarue, libraires, a Gent-vc. SCIENCES PHYSIQUES. 67$ par Ics plantes agissent sur elles d'une maniere tres-analogue a ractiou qu'ils exercent sur les animaux, et qu'en particulier ceux qu'on regarde comme agissant specialement sur les nerfs des auimaicc, comnie les narcotiques, agissent sur les plantes d'une maniere analogue. M. Macaire a varie et etendu ces resultats curieux, en les appliquant aiix plantes qui, comme la sensitive , presentent des phenomenes lemarquables d'irritabilite. Enfin, . M. Alphonse de Candolle a fait connaitre, sous le nom de Raphides, des organes ou corps singuliers qu'on rencontre dans I'interieur du tissu lache de certains vegetaux, mais dont le role physiologique est encore inconnu. La phjsiologie animale peut aussi revcndiquer quelques-uns desjniemoires de cette collection. MM. Prevost et Dumas y ont insere une dissertation tres-remarquable sur les animalcules spermatiques des divers animaux; travail qui se lie avec leurs grandes recherches sur la generation dont les physiologistes ont admire la sagacite. M. le docteur Prevost, en particulier, a suivi ce memo genre de travail dans le memoire qu'il a pu- blic sur la generation de la moule des peintres. M. Jurine a fait connaitre quelques particuliarites curieuses d'anatomie comparee sur I'oeil du thon et les dents des cyprins ( nom gene- rique de poissons , voy . Dictionnatre classique tChistoire naturelle, t. V, p. 274 et suiv. ). Le meme savant avail prepare, avant sa mort, un ouvrage important de zoologie sur I'histoire des pois- sons du lac Leman. La societe de Geneve a pu retrouver les planches et les manuscrits prepares a ce sujet, et les a publics dans sa collection ; les planches faites sous les yeux de I'auteur ne laissent rien a desirer; le texte extrait de ses notes manus- crites a sans doute beaucoup perdu a n'etre pas redige par lui-meme, mais presente encore I'ensemble des fails les plus importans qu'il avail recueillis. A cette occasion, le meme observateur a decrit la douve a long col [Fasciola lucii), zoo- phyte parasite dans I'estomac du brochel. Pendant que M. Jurine observait les poissons du lac Leman , M. Necker etudiait les mceurs des oiseaux de cette vallee; il en a public un catalogue plein d'observations curieuses sur 676 SCIENCES PHYSIQUES, leur passage et leurs diverses habitudes. M. Huber a decrit aussi les moeurs ct I'histoire du trachuse dore; et M. de Miel- ziNSKi a appele I'attcntion des entomologistes sur une larve extraordinaire qui attaquc les escargots de vive force et parvient malgre sa petitessc relative, a les vaincre et a s'en nourrir. Enfin, c'est parmi les memoires de zoologie qu'on doit comp- ter une notiqe sur une matiere qui, auprintems de iSaS, avail rougi les eaux du lac de Morat, au point de leur donner en certains endroits la couleur du sang et d'attirer sur ellcs I'atten- tion populaire. M. de Candolle a montre que ce phenomena tient au developpcment d'un animalcule qu'il a decrit et figure sous le nom d'oscH/atoria rubescens, et MM. Colladon et Ma- CAiRE ont confirme , par leurs analyses , que cette matiere est de nature animale. Cette courte indication des principaux objets contenus dans le$ trois volumes que la societe de Geneve a deja publics doit faire desirer qu'elle continue cette publication, et nous croyons savoir que la premiere partie du quatrieme volume ne tardera pas a paraitre. S. R. SCIENCES MORALES ET POLITIQUES. Notions statistiques scr la librairie , pour servir a la discussion des lois sur la presse , par M. le comte Daru (i). On a caracterise avec beaucoup de jiistesse le nouveau projet de la loi sur la police d'e la presse , lorsqu'on I'a appele un acta d'accusation dresse contre la societe francaise. Le crime im- pute est d'avoir fait degenerer la liberie en licence, et d'avoir, a force de violations , reduit a I'impuissance la legislation qui nous regit encore. Les accuses sent les ecrivains , les impri- meurs et libraires , les magistrals , et surtout les lecteurs. Les conclusions tendent a condamner a mort la liberte , comma etant mauvaise, attendu que le mal fait plus de mal que le bien ne fait de bien. Les moyens de defense sont nombreux; ce n'est pas ici le lieu d'indiquer ceux qui s'appuient sur les principes philoso- phiques et politiques qui dominent cette grave question. II est de la plus haute importance de signaler aussi des moyens de fait qu'il est du devoir du legislateur de ne point negliger. Les (i) Paris, 1827; Firmin Didot. In-/|.'' de 44 ?•> et un tableau : prix, 4 fr. N. B. Nous avons annonce deja cet ecrit remarquable , au moment de sa publication ( voy. cidessus , p. 56o ) ; mais nous avons cru devoir fixer de nouveau rallention de nos lecteurs sur les resultats des cu- rieuses investigations de M. Daru , parce que la statislique de la littera. tare el de la Ubiairie, en France , rentre essentiellement clans le plan de la Revue Encyclopedique , qui est elle-meme une siatisdque biblio~ grapltique el litteraire , scienlifique et industrielle , morale el philosophique des principales productions dc l' intelligence et de I'industrie humaines dans tous les genres et dans lous les pays , et parce que les fails rapportes et les calculs comparatifs etablis par le savant academicien font de son ouvrage comme un arsenal ou les amis de la liberte de la presse trou- veront des armes puissanles pour la d^fendre. (N. d. R.) T. XXXIII. — Mars 1827. /,/, rt78 SCIENCES MORALES laits perinettent dc suivre I'accusation sur le terrain qu'ellc- nieme a ohoisi. On declame centre la licence ; il ne faut pas se contenter, pour repondre , de dire que la crainte des abus n'autorise pas a proscrire I'usage. La licence, dont on nous fait peur , il n'est pas vrai qu'elle existc ; il n'est pas vrai que la legislation soit incomplete ou inefficace ; il n'est pas vrai que les tribunaux aient ete indulgens jusqu'a la mollcsse. D'apres toutesles leglrfs du droit, ceux qui accusent doi- vent fournir les preuves de la culpabilite. Ici, les detracteurs de la societe, et de la presse qui en est I'organe, accu- jnulent les generalites declamatoires , mals n'articulent aucun fait precis et ne prouvent rien. C'est la presse accusee , qui , elle-meme , fournit la demonstration de son innocence. Que ron interroge ses produits , que Ton recherche quelle tendance de I'esprit du siecle ils manifestent , et Ton verra si la societe est licencieuse , iramorale , impie , amie des diffamations et du scandale ; ou bien , au contraire , si elle ne se porte pas avec une ardeur toujours croissante vers les etudes serieuses , et si le gout pour la verite n'est pas le earactere distinctif qui im- prime a notre siecle le sceau particulier sous lequel il se pre- «entera dans I'histoire. Parmi les nombreuses publications auxquelles la discussion actuelle sur la presse a donne naissance , rien n'est plus remar- quable que le travail de M. Daru. II y a dans ses chiffres une eloquence que nul n'a essaye de refuter. Les tableaux statis- tiques, dresses sur I'etat de la librairie depuis i8i i , interessent vivement I'histoire litteraire , et seraient precieux a recueillir, alors meme qu'ils ne se rattaclieraient pas au grave debat legis- latif al'occasion duquel ils ont etc publics. M. Daru a dresse ces tableaux, pour la partie bibliographique, a I'aide de I'excellent Journal de la Librairie que M. Beuchot redige avec une si louable exactitude. Il faut savoir, pour I'in- telligence du tableau qui va suivre , que les ouvrages n'y sont ,point separes par IcuF format; c'est la feuille d'impression qui a ete prise pour I'unite , servant de, base au calcul ; peu ini- porte que cette feuille soit pliee en 2 , en 4 ? en 8 , en 1 2. (Voy. le Tableau ci-joint.} ET POLITIQUES. Gtq ^EE, EN FRANCE, E 1 8 1 1 jusqu'au 3 1 8.9. i8ao. 1H2I. J7 0,965 5,285,564 7,oii,ii 565,8o3 1,761,394 1,735,4 177,032 7,867,609 I r,i34,3i )7 7,600 6,326,552 7,186,6. ►67,017 1,744,246 2,340,7- (27,671 33,i49)i57 28,357,6; 890,885 1,026,027 773, oc 040,860 20,436,8o3 24,689,4c 944,679 1,202.599 1,345,76 562,682 2,121,25 I 3,424,oC 125,199 80,921,302 87,998,35 vite; savoir dans Paris 85o , y compris celles de Hmprimerie royale, an nombre d'environ 80 , et a peu pre$ 700 dans Ics 7. i«i,S. ,8,9. i8v.ci. 18/1. i8a2^ .82'.. 182,', 18 ■.)■>. .,„„uv ,., i'l.ilo.opbie Alls InduMiiei,-. =,2i4,3o3 •410,598 2,5o9,,5!i 2,83l,f)62 1)3,187 ■^,375,891 1,14.7,400 3,781,826 161, 5a5 1,885,869 1,263,729 i3,8i 5,861 7,833,2o5 1,340,993 ■ 2,934,881 662,830 15,755,904 1,318,496 9,079,639 4,737,705 .,8.5,973 13,409,104 4,213,604 -39,694 i3,oC5,ji8 35o,758 16,043,626 1,090,548 8,162,882 2,546,270 753,185 4,97'.,788 1,371,568 1,634,485 16,226,566 44i,5io 13,353,930 773,099 3,600,648 3,577,262 l,o58,5i7 6,835, 36o 2,098,734 1,479,388 35,410,563 783,644 11,528,363 688,8i3 2,043,5.0 4,408,296 1,872,971 .3,166,030 4,557,053 3,920,378 20,466,969 761,169 14,154,269 916,266 2,629,493 5,791,8.3 1,727,895 11,724,105 5,869,460 3,159,309 30,7.6,3.2 737,763 .7,040,331 1,491,3.8 2,970,707 5,491,300 1,887,825 8,i3o,079 7",3.5,o54 3,865,498 34,773,335 1,865,938 31,980,338 .,.69,193 3,047,063 5,970,965 1, 565, 8, .3 7,677,032 6,97 7, 6o5 3,467,017 22,937,671 .,390,885 19,040,860 1,944,679 3,562,683 5,285,56^ .,76. ,394 7,867,609 6,326,653 1,741,246 33,.49,'57 .,026,027 3o,436,8o3 1,202.599 7,01 I, io3 1,735,458 ..,134,393 7,186,606 2,34«,774 28,157,655 773,099 24,689,405 .,345,766 3,424,067 7,777,5i> 2,o84,ou5 12,723,637 8,oj6,oSi 3,092,398 31,641.829 - 94 ',67 I 25,108,669 1,567,674 3,302,376 s,6i4,j2.'; 2,023,982 13,836,637 7,oo3,73o 1,734,702 33,879,600 894,79' 35,474,686 ',975,699 3,555,3o3 10,024,426 2,778,248 i5,348,2o8 9,263,559 2,758,776 36,124, 8o3 1,336,460 3i,a86,6i5 3054,340 3,944,240 .0,928,277 2,804,183 .7,487,057 ..5,929,839 2,9.5,826 39,457,957 ■,457,«i3 3o,ao5,i58 3,937,301 3,886,973 92,554,234 25,543,464 159,586,643 96,793,401 34,326,57. 363,508,296 .4,35o,858 289,878,763 30,537,316 56,215,693 4 L,-p,laliun. ;„ i;rm„„„!e p ililiijiu', Atliniriihlralion, l-'jnalices, Couhiil-kc. -. Arl, Ailmin S lirllfs-lrtlre ia„„ioa, I,es;.la,io„ ,„i.i,ai,.e [". Olijels dive i8,45;i,7'3 72,080,642 62,627,111 45,675,039 55,549,143 66,853,883 71,218,803 79,525,6.2 73,425,199 80,921,302 87,998,326 96,255,85. 1 98,993,455 .14,709,675 128,010,483 1 1,153,295,337 ET POLITIQUES. 679 Ce tableau ne comprend pas les feuilles quotidienncs, evaluees par M. Daru a un produit annuel de 21,660,000 feuilles; le nombre des abonnemens etant evalue en masse au minimum de 60,000. II ne comprend pas non plus les impressions sorties de I'imprimerie Roy ale , qui a occupe en 1825, environ 80 presses , nombre immense , et qui , par les privileges exorbi- tans accordes a cette administration, portent un prejudice tres- grave a I'industrie privee. En ajoutant aux 128,010,483 feuilles sorties de la presse en 1825, les 21,660,000 feuilles de jour- naux, on a pour 1825, un total de 149,670,483 feuilles; ce qui , en calculant sur 3oo jours de travail dans Fannee , donne par jour 498,908 feuilles ou 4i,S75 volumes de 12 feuilles. La notice du cahier precedent (voy. ci-dessus , p. 56o) fait connaitre en detail les produits de la papeterie, des fonderies de caracteres , et des fabriques d'encre d'imprimerie. Le nombre total des etablisseraens d'imprimerie existant en France , en 1825 , est de 665.' II ne sera pas sans interet de donner ici le tableau de repartition de ces imprimeries par departement. M. Daru I'a divise par arrondissemcns : le defaut d'espace nous oblige d'abreger davantage ; et, au lieu de suivre, comme lui , I'ordre alphabetique , nous classerons les depar- temens d'apres le nombre de leurs imprimeries. Afin d'aug- menter I'interet de ce tableau , et afin de presenter un rap- piochement assez curieux pour la statistique intellectuelle de la France , nous avons mis en regard du nombre d'imprimeurs le nombre de deputes. Ce sont deux sortes d'organes des lumieres et de I'opinion du pays. Nous avons ajoute I'etat de la population de cliaque departement, etat qui nous a ete fourni par la Revae'Encyclnpedique elle-meme (t. xxxii, p. 1 1 ef suiv.). Nous aurions desire pouvoir indiquer aussi le nombre de presses en activite dans chaque departement ; mais cet element n'est point donne par M. Daru , qui fait connaitre seulement ■que Ton comptait en France, en 1825, i55o presses en acti- vite; savoir dans Paris 85o, y compris celles de Hmprimerie coyale, au nombre d'environ 80 , et a peu pres 700 dans les ^epartem«ns. GSo SCIENCES MORALES D^PARTEMENS. Seine Nord Bouches-du-Rhoue Calvados Gironde Seine-Inferienre Vanclnse ■ Rhune ■ Haute Garonne Pas-de-Calais., Charente-Inferienre Heranlt Marue Menrthe Bas-Rhin Soraiue Ille-el-'Vilaine Manche Mease Vosges Aisne Anbe Cote-d'Or Doubs Loiret Moselle • Puy-de-Dome Seine-et-Oise Aude Finistere Hanle-Maine Oise Orne Basses-Pyrenees Saone-et-Loire Sarihe Seine -et-Marne Var Ardennes ■ Dordogne Eure ■ Eure-et-Loir Is«re I NOMBRE NOMBRK lies (les IMPRIM. DEPOT. 82 12 27 la 19 5. 17 7 17 8 17 10 17 4 i5 5 i3 7 12 7 1 1 1 1 6 5 1 1 5 II 5 II 6 lO 7 9 7 9 7 9 4 9 5 8 6 8 3 8 5 8 4 8 5 8 7 8 7 8 7 4 6 4 a 7 5 7 7 5 5 6 3 6 7 6 7 6 4 6 6 817,360 893,390 3 10,563 491,105 508,841 65o,83i 221,319 387,402 366,2o3 618,670 407,733 321,774 807,016 376,002 491,473 5o4,332 53i,48o 590,653 289,286 353,139 453,o32 227,674 355, 2o3 240,416 289,650 371,188 548,076 421,770 25i,997 479-787 230,783 372,985 419,569 394,800 493,671 422,027 299)474 303,923 264,195 451,126 420,589 261,626 499,264 P:T POLITIQUES. 681 DfiPARTEMENS. Jura Loir-et-Cher.. . . . Loire Loire-Inferieure. . . Hante-Vienrie. . . . Yonne AJD Drouie Indre. ....... Indre-et-Loire. . . . Lot-et-Oaronne. . . Morbihan Nlevre Haut-Rhin Vendee Vienue Chareate Gard Gers Haute-Loire Lot Maine-et-Loire. . . Mayenne Tarn Ardeche Aveiron Cautal. ....... Cher C6tes-da-Nord. . . Landes Hautes-Pyrenees. . . Hante-Saone Deux-Sevres. . . . r^rn-et-Garonne. . Allier Haates-A,lpes Arriege Coireze Corse Crease Pyrenees-Orientales. Basses-Alpes., . . . Lojere NOMBaE de: tMPRIM. NOMBRE lies DEPUT. 301,343 255,189 338,38o 428,296 267,722 339,893 328,654 269,961 226,952 278,799 329,304 415,299 228,581 364, io4 3i5,688 257,71 1 343,906 331,290 299)745 274,7^19 273, 48 438,344 34o,3i6 3i 1,922 299,403 337,584 25o,4i6 236,090 349,573 239,354 209,029 3o3,7gr 276,853 237,266 275,597 120,02 r 232,209 269,839 1 79,3o2 244,199 141,829 147, 58i , 1 33,65 3 68*1 SCIENCES MORALES Apres avoir evafue le produit materiel dc rimprimerie, porte, pour iSaS, de i3 a i4 millions de volumes, M. Daru s'occupe d'tivaluer Ics raatieres qu'elle consomme , 4cs personnes qu'elle fait vivre , et les frais qu'elle exige. Pour I'achat du papier, 372,000 rames estimees fr. terme moyen , a i3 fr. 5o cent 5,022,ooo Cette quantite forme les |- seulement du papier a impr'ession ; le reste n'entrant pas dans le com- merce de la librairie , et etant consomme par les actes de I'administration, les affiches, les impres- sions relatives aux affaires privees, qui ne sont qu'une fabrication commercialement sterile. Pour I'encre d' impression , les ~ de la consomma- tion annuelle, qui seule entre dans les frais de I'imprimerie litteraire 1 20,00a Pour les layers, contributions et patentes d'im- primeurs, de libraires, de fahricans de papier, de satineurs , Ae brocheurs , de relieurs , etc. (les^). a23,2oo Pour les ~ de I'entretien des presses, estimts dans la statistique de M. Chabrol , prefet du de- partementde la Seine, a 10 fr. par presse, et par jour de travail; par M. Daru, a 5 fr. seulement, en calculant sur 3oo jours de travail 93o,ooa Pour les ~ du salaire des oiwriers 6,io5,ooo Pour le satinage , qui emploie 4oo personnes. . . 202,5oo Pour la brochure, q.ui occupe au moins 1,200 per- sonnes 912,500 Total des avances de fonds. . i3,5i5,2oo Pour Vinteret de ces avances a 6 p. -j- 810,912 Pour Vinteret des ^ des frais d'etablissement, mo- bilier, etc 578,646 Pour les retributions aux gens de lettres (i) Soo^ooo Pour benefice des imprimeurs , a i3 p. ^ 2,002,618 Total 17,407,376 (1) On lie peut s'empeclier de faire remarquer ici dans quelle faible ET POLITIQUES. 683 Ci-contre 17,407,376 En sprtant des iiuprimeries, une partie dcs li- vres passe dans les ateliers de reliure , dont M. Daru evalue les frais a 2,440,000 Pour les planches , cartes, tableaux j chiffres , langues etrangeres , et anlrei frais extraordinaires.. 1,740,787 Total general ai,588,ii3 Viennent ensuite les benefices et frais du commerce de la librairie. Les frais se composent de loyers de magasins , contributions, brevets, patentes, ecritures , frais d'emballagc , transports, avances de capitaux, mecompte sur le produit des livres qui restentinvendus, et que M. Daru evalue a y de la fabrication. — II faut ajouter les frais d'annonces par catalogues , prospectu:> et autrement. II sera necessaire aussi d'ajouter desormais , pour les impri- meurs et les libraires , un nouveau chapitre de depenses; ce sera celui des amendes, des frais de proces, des sommes a payer pour faire lire, examiner, censurer les ouvrages , etc., etc. M. Daru termine en donnant pour resultat, que i3,5oo volumes produisent dans le commerce une valeur reelle de 33,75o,ooo fr. ; valeur creee presque tout entiere par I'indus- trie, sur une matiere premiere , presque sans valeur. Cette somme comprend depuis le salairedu chiffonnier jus- qu'au benefice du libraire et aux honoraires de I'homme de lettres. Si Ton suppose ce produit, repartiegalement araison de 1,000 f. proportion s'elere I'indemnite des hommes de lettres , comparce au benefice des imprimeurs. La seule compensation de rextr^me modi- cite des avantages pecuniaires et materiels que les ecrivains retirent des produits de leurs longues etudes, de leurs veilles, de leurs tra- vaux , existe , pour un bien petit nombre seulement , dans la portion de consideration et d'estime publique, de reputation et de gloire qu'iis peuvent obtenir, et surtout dans le sentiment intime de la noble mis- sion qu'iis remplissent , lorsqu'ils contribuent a repandre des verites utiles , a eclairer leurs semblables , a honorer leur patrie , k serviF, Vhumanite. ( N. d. R.) 684 SCIENCES MORALES par tctc, on voit que cette industrio fait vivre aunuullenieiit 33,75o personnes; et peu importe, en derniere analyse , ajoutc M. Dam, rintgalite dcla repartition. Car, dit-il, le luxe ap- pclle necessaircmentles classes infcricures au partage de I'opu- lence. Les consequences a deduire de ce beau travail statistique se presentent en foule ii tous les esprits, II faut que la liaine contre la publicite soit bien forte , puisqu'elle pousse vers la destruc- tion d'une Industrie si productive ceux naeme qui ne vivent que sur les produits de I'industrie de leurs concitoyens. Et ce- pendant, les ouvrages les plus graves sont ceux qui chaque jour prenneut le plus defaveur. Les poursuites judiciaires sont rares et lescondaijinations severes. Les ecrits obscenes, si fort en vogue depuis I'enfance de notre litterature, sont presque tous inconnus a la generation actuelle. Aucun des ecrivains de nos jours, dont la France s'honore, ne laisse echapper de sa plume ces debauches d'esprit , auxquelles tant de nos liommes de genie ne savaient pas se refuser, alors qu'ils vivaient au milieu de moeurs qui ne sont plus les notres. Une courtisane aujourd'hui oscrait-elle s'asseoir en spectacle jusque sur les degres du trone? Verrions-nous ramper a ses pieds I'elite de notre litterature ? Ni notre pays ni notre age ne peuvent ac- cepter I'accusation de licence dont certains hommes les fati- guent siobstinement. La depravation des moeurs n'est aujour- d'hui qu'une honteuse exception. Si nos legislateurs veulent serieusement servir la morale publique , la discussion du bud- get leur en offrira vme occasion facile. Qu'ils suppriment la loterie! Qu'ils augmentent les fonds de I'enseignement pri- maire ! Craindre I'immoralite des ecrits et n'eprouver aucune emotion en aidant le tresor public a corrompre le peuple et a se remplir des tributs leves sur I'ignorance, est-ce la se sou-^ cier de paraitre consequens? Ch. Renouaru , Avocat. ET POLITIQUES. 685 Voyage dans le Timanni, le Rouranko et le Sou- LiMANA, fait en 1822 par le ?nty'or Gokdot^ Laing ; traduit en fi-ancais par MM. Eyries et de Larenad- DiERE ; precede dun Essai sur les progres de la geo- graphie de Vinterieurde V Afrique^ et sur les principaux voyages de decoiwertes qui s^j- rattachent ^ par M. de Larenaudiere (i). Les recueils p^iiodiques, specialemcnt consacres a la geo- grapliie, ont dejii parle avec eloge de ce voyage, qui enrichit la science de notions nouvelles et prepare la voie ii des decou- vertes encore plus etendues. lis ont aussi, et avec raison , si- gnale comme iin modele d'analyse , V Essai dont I'a fait preceder ■M. de Larenaudiere, et ou il presente, avec autant de conci- sion que de clarte , le precis de toutes les decouvertes faites dans I'Afrique occidentale, a I'epoque ou M. Gordon Laing a execute son voyage. La Revue Encyclopedique pent considerer , sous un autre point de vue , la I'elation interessante dont MM. Eyries et de Larenaudiere ont enrichi notre langue. On y peut observer , sous'*! eurs veritables traits, ces societes imparfaites, et non barbares, que, si long-tems, I'Europeen n'a visitees que pour y porter la corruption ou la devastation. M. Gordon Laing a successivement visite quatre peuplades differentes. Sa premiere mission le conduisit chez les Mandingues etablis aux bords du Kissi, au N.-N.-E. de la colonic anglaise de Sierra-Leone. Plus spirituels qu'aucune autre nation de I'Afrique septen- trionale, et venus aux bords de la Gambie, du pays de Man- ding, voisin de Sego, les Mandingues, dans Icurs excursions et leursetablissemens, traversent toute I'Afrique, depuis Tanger jusqu'au Cap Mesiirado ou les Nord-Americains ont un etablis- (r) Paris, iSafi; Dclaforcst. i vol. grand iii-8' de lxv t-t 432 n. , avec une carte et 8 planclies; prix, 9 fr. 686 SCIENCES MORALES sement. lis elevent de nombreux tioupeaux; bons agricultcurs, bouchers adroits, ils ne manquent pas d'habilete pour quelques operations chirurgicales. lis ont des esclaves; mais I'esclave ne dans le pays ne pent etre vendu sans son consentement. Cette prerogative le distingue des esclaves pris a la guerre, ou condamnes a la servitude pour crimes ou pour dettes. Un pere est toujours , dans sa vieillesse , nourri et soigne par son fils. L'homme qui a perdu son pere choisit un homme age a qui il rend les memes soins que s'il etait son fils : aussi ne voit - on pas de vieillards pauvres chez les Mandingues. Cos peuples professent I'islamisme. Leurs pretres marchent imraediatement apres le chef supreme et avant les chefs subalternes. Au-dessous de ceux - ci, au - dessus des autres citoyens libres, sent quatre castes qui jouissent de grands privileges : les nrateurs , les mti- siciens ou chanteurs , les cordonniers ou ouvricrs en cuir, et les forgerons. Chez les Foulahs ( ou Poulcs ) et les lolofs qui habi- tent dans le voisinage des Mandingues, quatre professions, au contraire, sont si meprisees qu'un esclave meme ne s'allie- rait pas dans la famille de I'un des hommes qui les exercent ; ce sont les professions de chanteurs , A'ouvriers en cuir, de forgerons et de tisscrands (j). M. Gordon Laing visita ensuite le Timanni , contree situee a Test de Sierra-Leone , et au sud du pays des Mandingues. Cha- que chef de village y est a peu presindependant : la volonte du chef supreme cede aux volontes reunies des citoyens et des chefs subalternes; et ceux-ci paraissent etre elus par le peuple. Les hommes et meme les femmes sont habiles a conduire des pirogues : Industrie naturelle dans un pays coupe de criqueset de rivieres navigables. Tons sont enclins a se livrer au travail , quelque penible qu'il soit, pourvu qu'ils en retirent une retri- bution proportionnee. Ce fait renverse I'opinion ou plutot I'assertion , que la contrainte seule peut induire I'Africain a travailler : il est d'autant plus decisif que les Timanniens, cor- (i) G. MoLLiEN. Voyage dans I'interieur de I'ytfriquc, aux sources du Senegal ct de la Gamble. T. I , p. loa, et p. »8a>284- ET POl-lTIQUES. 687 rompus par la proximite dcs etablissemens eiiropeeus ,*se li- vraient avec ardeur a la traite des esclavcs , et regrettent au- jourd'hui cet infame commerce auquel ils sacrifiaient jusqu'a leurs enfans. Aussi sont-ils pauvres, ivrognes, debauches, fripons et superstitieux. Agriculteurs malhabiles, ils n'ont ni forgerons, ni ouvriers en cuir; a peine quelques tisserands. Toutefois, a mesure qu'on s'ecarte de la cote, on voit renaitre parmi eux I'amour du travail et s'ameliorer les moeurs et les habitudes sociales : la corruption diminue , en proportion de I'eloigneraent de sa cause. Au-dessus des chefs reconnus, regne de fait et despotique- ment , dans le Timanni , le Pourrah : c'est une societe secrete , fondee sur la religion, dont elle pretend faire respecter les droits. Brigandages , enlevemens d'hommes et de femraes, as- sassinats, empoisonnemens , le Po«rr«A se permet tout , parce que le nombre de ses membres, le serment religieux qui les lie, la terreur qii'ils inspirent , empechent s- (2) O. Dapper. Description dc I' Jfrique , p. 368-270. fie//j est le nom de la Divinite. Ibid, p. 259-264- (3) G. Mollien. Voyage dans I'interieur de I'Afrique, etc. T. I, p. 281-282. 688 SCIENCES MORALES Ltd'uu yrand noaibrc d'inscnses ol dc laiuitiques ; audacieiises, alors , impericuses , toute - puissantes , subjuguaiit les princes conime les nations , et , en cas de desobeissance , proclaniant rebelles les rois niome, et leur ravissant le trone etlavie... Qu'importent la couleur des hommes , lo nom dos institutions , le yenre des poisons ou des armes? Henri III , Henri IV , Ic pajje Clement XIV , Ifcs milliers de Franrais egorges a laSaint- Bartlielemi, tantd'autres milliers d'hommes massacres par la meme impulsion ; tous n'ont-ils pas ete les victiraes du Pour- rah organise en Europe, au milieu du xvi° siecle, dissous solen- nellement en 1763 et 1775, et dont, au commencement du XIX '' siecle, des gouvernemens avcugles souffrent la reorgani- sation ? Dans le Kouranko , que M. Gordon Laing visita en sortr.iil du Timanni , I'autorite supreme est elective et non hereditaire. Les habitans ressemblent aux Mandingues pour le costume et pour le langagc ; mais ils ne professent pas Tislamisme. Hospi- taliers, laborieux, actifs, ils cultiveni habilcment un sol fertile ; ils habitent des maisons commodes, bien baties et tenues pro- premcnt. On trouvc parmi eux des ouvriers en cuir et des for- gerons. Ils savent extraire le fcr du mineral , dans des four- neaux d'une construction simple : il serait curieux de comparer le metal qu'ils en retirent, avec le fer forge par les negres du Fouta-Diallon (1). Les tisserands sont nombreux dans le Kou- ranko; ou plutot, la principalc occupation des hommes y con- siste a coudre et a*tisser. M. Gordon Laing parait croirc que ce pays a recu des Europeens I'art de fabriquer les toiles. Mais lui-meme etablit aillcurs, avec beaucoup de vraisemblance , que ce genre d'industric, dont les produits fournissent aux negres voisins de Sierra-Leone la matiere d'un riche com- merce d'cntrepot, a ete apporte des contrees orientales, et non pas invente dans I'interieur de I'Afrique. Presque nuUc dans le Timanni, la fabrication des toiles prend de I'inipor- tance dans le Kouranko; et toujours, a mcsure que Ton s"a (i) MoLMEJi. Voyage dans I'inUhicw dc I' AJriqiie. T. ii, J). 281-283. ET POLITIQUES. 689 vance dans la direction de Test, elle augmente et se perfec- tionne. Deja tres-bonnes dans leSoulimana, les toiles de colon acquierent une beaute remarquable dans Ic Sangara , vaste contree situee a Test, au-dela du Dialliba. On trouve aussi de tres- belles toiles a la Cote d'Or et a la Gote des Dents; et dansl'art de les tisser et de les teindre, les Achantins I'emportent sur les Abyssins eux-memes. Ce n'est pas ici le lieu de discuterles conjectures deBowdich sur I'existence ancienne, en Afrique, d'un&icommunication du nord - est au sud-est, par une diagonale qui coupe plus de trenteraeridiens et pres de 23° de latitude. Ne parlous que de la fabrication des toiles que nous retrouvons aux deux extremites et sur plusieurs points de la ligne indiquee : dans le Rouranko et leSoulimana, elle est la principale occupation des hommes : elle I'etait en Egypte (i), et cela, depuisle tems deSesostris, si Ton encroit un auteur ancien (2) ; les precedes de la fabrication semblent les memes dans ces divers pays ; et cette ressemblance de pro- cedes est unedespreuves qu'alleguait Herodote (3) pour etablir I'origine egyptienne des habitans de la Colchide. Voisins du Kouranko , les Soulimas forment une population grande, robuste, belliqueuse, susceptible de discipline mili- taire, et dont la cavalerie est surtout redoutable; d'ailleurs , doux et hospitallers dans la paix, et attaches aux devoirs de I'amour filial, aussi religieusement que les Mandingues. lis sont idolatres ; le roi seul est musulman, et Test en secret. Dans leurpays, regne la plus grande tolerance religieuse. Les habitans de la capitale doivent au roi trois jours de travail par an, pour semer son riz, le sarcler et le recolter. Le voyageur anglais fut temoin de la premiere de ces operations et du tra- vail tres-rapide et tres-regulier , execute a la fois par pres de trois mille hommes : c'etait un veritable jour de fete. (i) Hkrodot. lib. II, cap. 35. (2) Nymphodoke , cite par le scholiaste de Sophocle. {In OEdip. Coion.,v. 352.) (3) Lib. II, cap. io5. Gg^ SCIENCES MORALES Les Souliraas ont des chants gucrrieis assez poetiques ; ils aiment passionnoment les recits ct les eloges de leurs musi- cians. Cost k la memoireetaux chants de ceux-ci qu'est confiee la conservation des ditaih des Palabres , des conferences pu- bliques ou Ton rend la justice et ou Ton delibere sur les interets communs. Les actes des Palabres sont, au contraire , ecrits et enregistres chez les Foulahs; ennemis contre lesquels les Sou- limas nourrissent une haine si vive qu'ils opt fait disparaitre , parmi eux , du costume des deux sexes, tout ce qui pouvait rappeler le costume des Foulahs. Ces divers traits autorisent peut-etre a chcrcher dans une antipathic nationale tres-profonde, tres-ancienne, entredeux races differentes d'hommes noirs, I'explication d'un contraste que nous avons indique ; I'importance et la dignite des profes- sions de musicien et de tisserand parmi les Mandingues , dans le Rouranko et le Soulimana,et le mepris dont sont frappees ces professions chez les lolofs et les Foulahs. Nous ne relevei'ons pas les plaintes continuelles de M. Gor- don Laing sur les presens que Ton a cxiges de lui dans quel- ques-unes de ses stations : nous ne lui demanderons meme pas si Ton en tiendrait quitte pour des presens ou des droits de douane , un Timannicn , un Mandingue qui , sans autorisation prealable, penetrerait dans les possessions britanniques , etles parcouri'ait, en travaillant a enlever a plusieurs de ces conlrees le benefice etabli d'un commerce d'entrepot , et a les preparer toutes a tomber tot ou tard sous le joug de sa nation. II est plus doux de voir I'ambition anglaise enfanter de bonnes ac- tions. Non-seulement le gouvernement de Sierra-Leone a in- troduit le bienfait de la vaccine dans les pays avec lesquels il s'est ouvert une communication; mais il rachete , autant qu'il le pent , les noirs tombes dans I'esclavage : il les instruit i jouir de la liberte et de la propriete. Dejii leur nombre s'eleve k 12,000; une ville. Free- Town, construite expres pour cet usage, est peuplee de ces nouveaux citoyens; et tous, dans la ville , dans la campagne , se montrent sages , laborieux , dignes d'etre libres, dignes d'etre proprietaires. Ce fait, et I'observa- ET POLITIQUES. 691 tion constante qu'on trouve les iioirs moins vicieiix et plus adonnes au travail, a mesure qu'on s'eloigne de la cote et des foyers de la traite ; n'en est-ce pas assez pouv confondre les caloraniateurs qui s'efforcent de peindre une partie du genre luunain comme creee pour I'esclavage , parce que leur avarice, leur orgueil et leur cruaute leur font un besoin d'avoir des esclaves? jF^we^e Sai.verte. Mbmoires sur la guerre de 1809, EN Allemagne , avec les operations particulieres des corps d'ltalie , de Pologne^ de Sax'e^ de Naples et de Walcheren; pal* le general Pelet (i). La coalition des puissances europeennes a-t-elle ete suscitee par les menaces de la Republique francaise et par les enva- hissemens de I'Empire , ou s'est - elle fprmee par la ligue de toutes les classes privilegiees contre la revolution , et s'est- elle maintenue en etat permanent d'hostilite jusqu'a I'epoque ou elle a retabli I'ancien ordre de choses ? — Ge probleme his- torique, si fecond en apercus et en consequences, a pour nous le plus grand interet, puisqu'il pent eclaircir la situation ac- tuelle de I'Europe , et meme nous reveler une partie de notre avenir. Les ennemis de la France ont peint les souverains sans cesse attaques par nos armees , forces a se defendre, et n'ayarit triomphe que par les exces de notre ambition et par nos fautes. lis ont rejete sur un seul homme la responsabilite de tous les maux qui avaient fait gemir I'humanite. En 181 4, on pouvait se demander quels avaient ete les veritables instigateurs de la guerre. Mais, depuis cette epoque, les evenemens ont parle (i) Paris, 1825-1826 ; Roret, libraire, rue Haulefeuille, au coin de celle du Battoir. 4 vol. in-8* ; prix, 28 fr. — On y souscrit ega- lement pour un Adas de cette guerre qui sera compose avec d'exce!!- lensmateriuux, et grave par les meilleurs graveurs de Paris. 6f)2 SCIENCES MORALES assez haut , ct leuv langage ne dcvait pas etre nioconnu. La question paraissait lesoluc par Tiisagc que les vainqiieurs fai- saicnt de la victoiro. On a pu comparer leur conduite avec leurs paroles. Les peuples peuvcnt dire ce qu'ils ont yu, ce qu'on leur a promis pendant la lutte, et comment on a tenu ces promesses. Cepcndant, les ecrivains francais semblent n'avoir pas ose abordcr cc problemc qui meritait au moins d'etre discute. Quelqucs-uns sont dcvenus les echos de la coalition , en re- petant les louanges prodiguees a ceux que la fortune avait rendus vainqueurs et les accusations dirigees centre celui qu'elle avait tfahi (i). Un historien vient enfi* d'elever la voix. II a dechire le voile dont s'etait long-terns enveloppee la diploma- tie europeenne. II avance et il prouve que la coalition des mo- narques, des cours , des privilegies de toutes les classes, s'est formee, des 1791, contre les reformcs salutaires proclamees en France; que, depuis ce moment, cette coalition n'a cesse d'agir, soit a decouvert lorsqu'elle avait les armes a la main , soit en secret lorsqu'elle les deposait pendant des treves mo- mentanees; qu'cUe s'est maintenue , meme apres la fin des com- bats , pour eonsolider son triomphe et assurer la soumission des peuples. Sous le nom de Sainte- Alliance , elle s'est fait connaitre par des actes qu'il est inutile de retracer. L'liistorien a voulu appuyer ces verites de tout ce qui pou- vait les rendre iucontestables. II rapproche et rectifie les faits; il en deduit des consequences. II a accompagne ses memoires d'un nombre considerable de pieces et de citations, qui ne permettent plus aucun doute. Les premiers chapitres de son histoire exposent la conduite de la coalition dans son origine et pendant sa marche , avec des developpemens qui ont paru un pen longs , mais que rendaicnt indispensables la nouveaute (i) Ajoutez , pour ^tre juste et vrai : « et qui s'et;ut' trahi lui- uieme , en s'abandonnant a I'ivresse de Tambition et de I'orgueil , et en cloignant tous ceux qui avaient voulu lui faire entendre le lan- gage austere et salutaire de la yerite. - ( N. d. R.) ET POLITIOUES. 693 t^t riniportance du sujet. Dans le recit ties evc-nemens do i8og, il devoile la politique des cours qui se cachaient sous le manteau de la neutralite , ou meme do I'alliance ; il decouvre les ressorts qu'elles faisaient mouvoir, leurs projets , leurs rapports. Cette verite a etc long-terns un des grands secrets de I'Em- pire, dont le chef, esperant dompter les fauteurs de la guerre perpetuelle, ne voulait pas decourager les siens par I'aspect des travaiix qui menacaient leur vie entiere. EUe fut surtout le secret des puissances, interessees a deguiser aux yeux des peu- plcs les vues personnelles qui les excitaient. C'est ainsi que beaucoup d'etrangers et memo dc Francais, trompes par les assertions et par les manoeuvres de la ligue, ont favorise ses des- seins et se sont laisse entrainer dans des demarches dont ils deplorent maintenant le triste resultat. Avant la rupture de la paix d'Amiens, lorsque I'etablis- sement de I'Empire regularisa et consolida les principes de la revolution (i), la coalition, divisee jusqu'a ce moment par les interets des puissances, prit une organisation plus com- plete. Desl'origine, I'Angleterre, jalouse de I'etat deprosperite oil taut d'ameliorations allaient porter la France, s'etait mise a la tete de la ligue. Si elle a cache les motifs reels de sa politique, elle a toujours manifcste son systeme hostile; elle proclama bientot la guerre a mort qu'elle avait vouee a I'Empereur et a I'Empire. Des ce moment, les trois principales puissances con- tinentales , I'Autriche , la Russie , la Prusse , preparerent leurs armemens et combinerent leur plan d'attaque. Celui-ci a souvent epruuvedes modifications, mais n'a jamais cte entierement aban- donne, et il a recu, en 1814, sapleine execution. Pendant que I'armee francaise etait sur les cotes de la Blan- che ( i8o5), rAutriche s'elanca dans la lice. La Russie arrivait a gi-ands pas. La Prusse, plus eXposee, agissait avec plus de mesure.... Le premiere fut ecrasee a Ulm, etperdit a Austerlitz (i) Am yeux de quelques-kommes confians et impr^voyans , et par consequent de la masse des hommes qui est toujours credule , confianle et imprevoyanle. (N. d. R.) T. xxxiii. — Mars 1827. /|5 6;>', SCllKNCES MORALES toiites ses osperaiices. L'cmpfiour tic Russie (ilnliit iin s;uil- conduit du vainqueur pour se rolircr avec sou annro battuei. La Prusse, dont les troupes coudiiitcs par Ic Roi otaient deja en Franconie, desavoua ses preparatifs et ses projets. Le traite ou plutot la treve de Presbourg, ct lo ministere do Fox fircnt briller quelque lueur de paix que les intrigues des cours dis- siperent a la niort de ce ministre philautrope. Peu de semaines apres que TAutriche avait implore et obtenu la paix(fevrier i8o6), elle se montrait infidele a ses engagc- mens , et combinait de nouvelles attaques. La Russie avail ren- force son armee. La Prusse, eblouic par les souvenirs de la gloire de Frederic, osa devancer ses allies sur le champ des combats, et intimer aux aigles victorieuses I'ordre de repasser le Rhin. La bataillc d'lena suffit pour I'antantir. Les Russes vinrent recevoir ses debris. Mais ils la sacriCierent lorsque leur t«rritoire allaitetre envahi, et signerent la treve jlTilsitt. Dans les plans et dans les negociations , on put cntrevoir I'ancien projetde retablir lamaison de Bourbon sur le trone de France. Le cabinet autrichien avait hesite, pendant que la fortune mi- litaire semblait flotter entre les deux partis. Quand il se de- cida, le moment favorable etait passe. L'Espagne publia une croisade sur le revers des Pyrenees , pendant que les aigles etaient sur le Niemen. Naples, infidele aux traites, en avail ete deja punie. La cour de Rome fit douter de sa bonne foi malgre les demarches personnelles du pape. Elle rcfusa d'en- trer dans la liguc formee pour maintenir la paix de I'ltalie. Sa conduite prouva qu'clle n'altendait que Toccasion d'agir contre nous. Tilsitl et Erfurt avaient vu les deux grands empereurs de I'Eui'ope serrer les liens de I'amilie. La France en- tiere y intervint dans la personne de son chef. Mais la Russie etait loin d'applaudir a la demarche de son souverain. Les diplomates de la coalition avaient reduil a (juelqucs jours la duree des promesscs failes. L'Autrichc continua ses prepara- tifs de guerre a I'ombre de ses protestations ct des intrigues de son ambassadeur. Elle voulut attaquer Napoleon pendant (pi' on le crovait tout entier a la guerre d'Espagne. La Russie et ET POLITIQllES. 6y5 la Prusse se preparaient a I'aider. La coalition oiganisait une insurrection gcnerale des peuples; olle excitait des souleve- inens jusqu'au milien de I'Empire. II ne fallait qu'un signal. L'Autriche, se flattant que ses victoires allaient le donner, attaqua rarmue francaise sans declaration de guerre. Napoleon arrive du fond de la Castillo et frappe comme la foudre. Dans les champs de la Laber, il bat la coalition toute entiere, et detruit une partie de I'armee autrichienne. Si le reste lui echappe, c'est que ses ordres ne sont pas executes a Landshut et a Ratisbonne. Mais I'Autriche est reduitc a de telles extremites que , vingt jours apres £ivoir commence une agression inouie, son generalissime ecrit pour demander la paix. L'Enipereur veut porter sa reponse a Vienne. L'incendie des ponts donne aux ennemis le terns d'arriver devant cette capitale. II faut passer le Danube en leur presence. La fortune se montre quelques momens incertaine a Essling ; niais ses rigueurs ne servent qu'a manifester toutes les ressources du genie de Napoleon, le devoument extreme et la brillante va- leur du soldat. Le general francais prepare a I'instant meme les elemens de la plus eclatante victoire. Ici commence le iv® volume, dont nous devons rendre un compte particulier. Tons les ennemis secrets et declares de la France , atteres par les triomphes d'Eckmulh , reprirent une nouvelle activite aux premiers bruits de la bataille d'Essling. La Prusse, dont la troupe de Schill formait I'avaflt-garde, avait desavoue ce partisan et cesse tous ses preparatifs ; elle les re- commenca dans les premiers jours de juin. Un aide-de-camp du roi de Prusse etait dans le quartier autrichien ; un envoye de Francois arrivait a Roenigsberg. Les uegociations entre les deux cours devinrent fort actives. Les rapports des ge- neraux et des agens francais ne cessaient de parler des arme- mens de la Prusse. Les troupes russes entrerent alors en Po- logne, pour seconder les mouvemens des Autrichiens , et pour s'opposer a ceux de Poniatowski. Les lettres de ce loyal che- valier, celles des officiers francais et polonais etaient pleines de reproches sur la conduite des Moscovites. Une correspon- 45. 6g6 SCIENCES IMOKAI.IvS dance fort suivie et Ics lolatioiis It's plus iiuiiiies rt'f^iiaienf entre les troupes autrichienncs et nisses. Quelqiies depeches furent saisies ct envoytes a Napoleon qui en porta de vivas plaintes h Alexandre. L'Angleterre preparait dans scs ports dcs armemens qui devaient aider ses intrigues en Espagne , en Belgique , et dans le nord de rAUemagno. EUe fomentait , de concert avcc les cours de Sicile et de Rome , mic insurrec- tion generale dans toute I'ltalie meridionale. L'escadre et I'armee anglo-sicilienne debarquerent aux portes de Naples et de Rome. Au meme moment , le pape lancait une excom- munication centre TEmpeieur. Murat se vit force par I'immi- nencc des dangers qui surgissaient de toutes parts , d'eloigner Pie VII de sa capitale. De la Baltique a la mer de Sicile , s'etend une ligne ter- rible d'ennemis qui menace d'envahir I'Empirc et d'enve- lopper I'armee francaise. Les detachemens autrichiens se re- pandent dans la Saxe, la Franconic et la Souabe qu'ils inou- dent de proclamations incendiaires. Une partie de ces pays se souleve et se lie avec les Tyroliens. Mais Napoleon ne se laisse detourner de ses projets , ni par ces demonstrations eloignees, ni par des menaces plus reelles. II execute sous les yeux de I'ennemi les plus beaux et les plus grands travaux qu'on ait jamais faits a la guerre. II les dispose de telle ma- iiiere , que I'archiduc (Charles (le plus habile des generaux que I'Europe lui a opposes) reste jusqu'a la fin dans I'incertitude sur le but de son adversaire. L'lle de Lobau devient une for- teresse francaise. Dix ponts sont construits pour le passage des trou]ies. L'armee autrichienne est surprise et attaquee sur le point oil elle s'y attendait le moins. L'archiduc voit tons ses projets dejoues , tous ses preparatifs renverses. La bataille est pourtant disputee au milieu des champs de Wagram , ou nul obstacle ne se presente pour arreter ou favoriser les com- battans. « L'armee francaise , dit le general Pelet , manoeuvre comme un regiment , a la voix de son chef. » On ne sait cc qu'on doit le plus admirer, de I'extreme precision de ces im- menses manoeuvres , de la prevoyance qui a tout calcule, tout nrepare , ou de !a grandeur des resultafs qui suivirent cette ET POLITIQLIES. Gij-j t'clataiitc victoire. Une circonstance, unique pcut-etre dans I'histoire , c'est que toutes les dispositions furcnt prescrites bien des jours a I'avance. Les ordres donnos, et une multi- tude de pieces de la plus haute importance ( dont les copies se trouvent encore dans les mains de plusieurs personnes) levent tous les doutes a cet egard. L'historien , depuis long- tems aide-de-camp ct ami de Massena , vit tout ce qui elait prepare et tout ce qui s'executait. Le 16 juin, il avait propose au marechal un systeme d'attaque semblable ii celui qui iut suivi dix-huit jours apres. Dans le tableau que le general fait de cette immense bataillc , on saisit rapidement toute I'ordon- nance ainsi que les moindres details. C'est un modele de pre- cision et de clarte. Le style s'eleve a la hauteur du sujet; et sous ce rapport, le iv* volume est encore supericar aux precedens. Une citation fera eonnaitre comment I'auteur combattait, et comment il ecrit. Un ordre avait etc donne ; les gencraux dcclaraient qu'il etait inexecutable ; le prince Berthier avait pris sur lui de le retirer. L'Empereur attachait une grande importance a I'expe- dition destinee a attirer Tattention de Tarchiduc ; il renou- vela son ordre. « Le chef de bataillon Pclet (it cette operalioii avec 600 voltigenrs. Dans la matinee du 2 juillet, il s'em- barque a la vue de I'ennemi, et traverse le Danube. Aussitot , toutes les batteries autrichiennes tonnent sur la flottille. Le commandant saute a terre le pi'emier; les officiers et les soldats le suivent. L'ile est enlevee; cent autrichiens qui la defendenl sont pris ou tues. L'enncmi vent y rentrcr ; il la couvre de boulets dans toutes les directions ; plusieurs bataillons de Croates s'avancent sur le bord de I'eau. Leurs efforts sont ar- rctes par une fusillade a bout portant. Les Croates se jettent dans les fosses ou ils sont parfaitement a I'abri, et repondent par un feu aussi vif. Rientot une longue coupure rapidement creusee sur le rivage couvre nos voltigenrs. L'archiduc accoiul au bruit de cette nouvelle altacjuc. II raninie le leu de uon ar lillcrie; il fait marcher des renforts pour rejirendre cette ilc qui menace de fort pres le centre de sa ligne. ]\Liis ses troupes ue peuvcul (Vauchir le pclit bias sous io feu meurlricr de notri CujS SCIENCES MORALES mousqiielerie. Les voltigcurs repoussent pliisieurs assauts. En meme tems, on construit le pont dcrriere eux, malgre la ter- rible canonnade qui augmente a chaque instant. Denx cents boulets frappent au milieu des bateaux ; rien n'arrcte les in- trepides pontonniers du capitaino Baillot. En deux heures, ce pont de 70 toises est termine. De nouvelles troupes le passent pour sontenir les voltigeurs que I'ennemi pressait vigoureu- sement. Napoleon , arrivant au feu , dit a Massena : F'ous voyez bien qu'il n'j a rien d' impossible acec de tels soldats Au milieu de ses triomphes, Napoleon accorde aux Autri- chiens un armistice. II fait cesser la discussion qui s'eleve autour de lui , en disant : Assez de sang a ete verse. II an- nonce au conseil des ministres que le traite ne tardera pas a etre conclu. Mais la cour d'Autriche ne vent point la paix. Elle refuse meme pendant quclques jours de reconnaitre I'ar- mistice , et ne le ratifie que pour se preparer a i-ecommencer la guerre. Elle est fortement aidee par I'Angleterre qui envoie une armee de 5o,ooo hommes sur les cotes de la Hollande et de la Belgique , qui fait marcher sur Madrid les divers corps epars en Espagne. Des insurrections eclatent de nouveau dans le Hanovre , embrassent les Alpes du Tyrol et du Voralberg , mcnacent les etats de I'Eglise et dc Naples. Le general P«let decrit cette negotiation et tous les episodes qui I'ont inter- rompue avec autant d'interet que les evenemens militaires : il donne sur la diplomatic des renseignemens aussi precieux que sur la guerre. L'Autriche avait confie ses pouvoirs a ce ministre que les bulletins francais appclaient I'instigateur de I'agrcssion de 1809 , et que I'histoire signalera comme le principal auteur de toutes les guerres depuis cette epoque, comme I'ennemi le plus acharne des droits des nations. La negociation , arretee ^ chaque instant, dura autant de tems que la cam- pagne. L'autriche attendait le secours des puissances continen talcs : Elle pensait que la France , soutenant la guerre en Es- pagne, en Belgique, en Calabre , ne pourrait fournir des ren- forts a son armee d'Allemagne. La paix fut conclue hors du congres d'Altenbourg. Le comte de Bubna, aide-de-camp dc ET POLITIQUE.S. 699 Fi aiKois , utait vemi apportei" uiie letti e de ce monarque a Napoleon. Le due de Bassano eut occasion de liii montitr un etat fidele de la situation de I'armee francaise; et il lui annonca que Napoleon, irrite de tant de delais, allait repondre aux menaces si souvent repetees de recommencer la j:;uerre. L'Au- trichien courut aupres de son maitre, et revint avec le prince do Lichtenstein , porteur de pleins poiivoirs. En peu d'heures, la paix fut signee. Mais Napoleon avait etc si souvent trompc que I'execution du traite fut accompagnee de toutes les precau- tions qu'exige I'etat de guerre declaree. Le jieneral Pelet cite, d'apres les bulletins et surtout d'a- pres leurs actions, les agens des intrigues de la coalition , les principaux instigateurs de cette guerre et de I'insurrection des peuples. On y tiouve les noms de personnages qui ont rempli depuis cette epoque les postes les plus eminens; mais il a neglige de signaler, conime un des leviers les plus actifs et les plus puissans de la Sainte- Alliance et de Rome, les ligoristes ou jesuites de Fribourg en Suisse, et le couvent des peres de la Trajjpe, qui entretenaient des correspoudances cntre les cn- nemis de I'Empire au dehors et au dedans de la France. lis durent prendre a I'insurrection du Tyrol autant de part que les autres moines de la Suisse. Les couvens de cette dernicre contree etaient les foyers les plus ardens des intrigues contre Napoleon. C'est une particularite historique fort interessante, sur laquelle on doit appeler les investigations de I'auteur et de ceux qui s'occupcnt de ces matieres. C'est peut-etre par reconnaissance pour les services rendus des lors par les je- suites que Pie VII les retablit. L'auteur, non nioins citoyen que militaire, se complait daus les descriptions des efforts que les peuples, amis ou ennemis , ont deployes dans cette lutte. Il aime a peindre les ressources , les moycns, les forces que les nations trouvent en elles-memes, et qui les mettent a menie de lutter contre les armees les plus uonibreuses. II oppose le citoyen defendant ses foyers avec les arnies qui sont it la portee de tout le nionde, et le soldat conquerant, niais isole et faible an milieu du pays envahi. Il Iraite , toutes les fois qu'il le pent, les plus grands points de la 700 SCIENCES MORALES, defense dc la patrie qu'il vent prolonger jiisqu'au dernier lionime et au dernier pouce de terrain. Tantot il peint Ics braves Polonais accourant a la voix dc Poniatowski, repoiis- sant en meme terns I'invasion des Autrichiens et les perfidcs secours des Russes. Tantot cc sont les paysans de la Hesse , de la Priisse, de la Souabe, qu'insurgc la noblesse immediate et contrc lesquels doivcnt marcher les rois de Westphalie et de Wurtemberg. Tantot, les montagnards tyroliens, soulevespar des moines , conduits par un simple cabaretier , luttent pendant ime demi-aunee, meme apres I'abandon de I'Autriche, contrc nos legions victorieuses. Plus loin , les anciens et les nouveaii.x departemens du nord de I'Empire se levent lorsque les An- glais debarquent aux bouches de I'Escaut. Alors regnait en France un esprit niilitairc. On n'occupait pas le peiqile de mandemens et dc missions. L'intcrct dc I'etat etait celui de tout le monde. En quelques jours , cent mille citoyens rcpondircnt a I'appel de la patric. Pas un soldatne futdetache des armees combattant dans les pays etrangers. Les Anglais ne retirerent que de la honte de cette immense expedition. lis avaient cru trouver des pai'tisans dans la Belgique; une partic du clerge seulement Icur montra des sentimens favorables. L'historicn considere de tres - haut La situation politique de I'Europe h la fin de 1809. Les cabinets conservent leurs res- sentimens au fond du coeur. lis ont fait I'essai de leurs forces et de leur systemc d'attaque. lis ont pour eux le tems, I'espace, Tor et I'intrigue : ils renouvelleront leurs essais. On pent des lors voir dans I'avenir les catastrophes qui puniront la France d'avoir repondu a la declaration de guerre perpe- tiielle de I'Europe, en elevant sur le trone un simple ci- toyen qui s'etait montre le premier guerrier du monde. Ces Memoires militaires , ecrits par.un de nos generaux les plus dis- tingues, ne cessent d'etre eclaires et soutenus par de hautes considerations politiques. La vuc principale, ccUe de la guerre a mort vouce par la coalition, domine sur tons les faits, et donne a cet ouvrage un interct qui s'etend aux epoqucs qui ont precede et suivi telle de 1809. A. LITTERATURE. Resume de l'histoire litteraire du Portugal, sulvi du Resume de l'histoire litteraire du Bresil ; par . Ferdinand Denis (i). L'histoire litterairt' est, sans auciin doute, I'lin des genres les plus utiles et les plus interessans. Retracer la marche de I'esprit humain chez une nation, indiquer ses progres vers tout ce qu'il y a de beau et de grand , signaler les epoqucs duplo- rables ou, s'engageant dans de fausses routes, le talent n'em- ploie son activite qu'a s'egarer, ses forces qu'a se detruire; faire connaitre les grands hommes qui ontillustre un peuple, et recueillir , dans des citations , tout ce que leurs beautes of- freiit de plus exquis ; enfin , resserrer dans quelques volumes les resultats de I'etude de plusieurs millicrs de volumes; faire gou- ter, en quelques heures, a ses lecteurs les fruits de plusieurs annees de travaux, c'est rendre un grand service au peuple sur lequel on ecrit, et au peuple dans la langue duquel on ecrit. Nous possedons, en France , un modele de ce genre de travail , VHistoire litteraire de l' Italic , due a la plume d'un homme plus remarquable encore peut-etre par la noblesse de son caractere et relevation de son ame que par ses rares talens, qui a laisse, en mourant, un vide immense et funeste dans le parti de la liberte, comme dans celui des saines doctrines lit- teraires, et dont la perte se fait chaque jour plus cruellement sentir. II serait vivement a desirer que nous eussions sur les autreslitteratuies un ouvrage de cette portee; mais on ncpeut guere I'esperer. Pour egaler Ginguene, il ne sufiirait pas (i) Paris, 1826. Lecointe et Durey, libraires, qiiai des Aiiguslins ,, n" 49 ; un vol. iii-i8 de xxv ct 625 pages ; prix , /\ fr. 5o cent. 7oa LITTERATURE. d'avoir, ce qui iie se rencontre j;iiere, son yoiit exqiiis, sa raison superieurc, son talent d'ecrire; il faudrait encore posse- der la litterature etrang^re dont on voiidrait rendre conipte , aussi parfaitementqu'il possedait lui-meme celle de I'ltalie. Or, les connaissahces profondes, si rares a toutes les epoques, le sont bien plus de nos jours , ou tant d'ecrivains ne s'imaginent nieme pas que la profession d'homme de lettres demande la moindre etude, et prouvent, par leur exemple, que IVtiide n'est pas du moins necessaire poiu' obtenir d'ephemeressucces. D'ailleurs, les ouvrages etendus et substantiels Irouveraient peu de lecteurs, maintenant que, d'aniiee en annee, les classes elevees de la nation perdent les traditions et les habitudes qui leur faisaient un besoin des plaisirs de I'esprit. Mais, a nie- sure que ces nobles gouts s'effacent dans la haute societe, I'aniour de I'instruction , ou du moins le desir d'acquerir quel- ques connaissances superlicielles, I'envie de lire, se repand dans line partie du peuple. De ce double mouvement en sens inverse qui s'opere au milieu de nous, est nee, et devait naitre, I'idee de cette foule d'entreprises qui offrent, dans un petit nombre de pages et ;\ tres-bas prix , le resume de ce que renferniont des ouvrages longs et coiiteux. Les recueils de ce genre sont cer- tainement utiles, sous plus d'un rapport. lis le seraient meaie beaucoup, si Ton y trouvait toujours le talent qui se moiitre dans quelques-uns des ecrits qui les coraposent. Malheureuse- ment, les hommes de lettres qui s'en occupent ont k lutter centre deux grands obstacles. lis manquent a la Ibis d'espace et de lems. L'auteiir du iJt,y//w Loui^ Janet , rue Saint-Jiicques , n" iy. ( Voy. Rev. £iu\ , t. xxiv, p. 787). ^. ,04 LITTER A.TU RE. Jean dc Barros cXfreire it^ndvadc ; le faineiix predicateur ^/i- tonio VUira , cl pluslcurs cics eciivains qui ont parcoiuu avec quelque bonheur la carriere de I'epopee. La sage proportion etablie entre les diverses parties de son oiivrage lui a etc surtout avantagcuse, en lui permettant dc donner une analyse detaillee du chef-d'oeuvre de cet hommc faire ronnaitre les derniers chants, ou les defauts, tres- nom- LITTERATURE. 7o5 Ijienx Jans le teste de la composition, deviennent assez rares pour ne point ternir I'eclat de grandes beautes. La traduction ' coniier pour les ap- plications. M. Catdozo indique tres-bien ce que nous Savons mal, ou point du tout; mais il n'obtientpas le meme sncces , lorsqu'il cssaie de subslitucr ses propres opinions a cellesqu'il a refutees. .La subtile distinction entre les richesses et la somme des valeurs est reproduite ici, sans devenir plus claire, et la thcorie de I'impot n'en recoit point de Inmieres nou- velles. Mais comme, jusqu'a present, en economic politique, la discussion est le seul moyen de s'instruire, cet ouvrai;;e ne pent manquer d'utilite, et devrait etre place h cote de cclui de M. Ricardo. F. Ouvrages periodifjiies. 237. — * New-England Galaxy, etc. — La ^oie lac tee , jour- nal de la Nouvelle - Anglelerre, public le vendredi soir, par Joseph T. Buckingham, a Boston. Tres-grand in-folio, chaquc ])age divi.see en 5 colonnes; prix, 3 dollars ( i5 fr. ) par an. Notre vl/ort^ewrn'est qu'un petit journal, en comparaison de ceux des Etats-Unis d'Amerique. Celui que nous annoncons ici oquivant a pres de quatre feuilles d'une impression ordinaire, et u'estpas le pins voliimineuxde ceux qui sortentdes presses ame- ricaines; etplusieurs de ces feuilles iramensesparaissent chaquc jour! Pour se former une idee de celui-ci, ilsuffira de dire que le message adresse le 5 decembre 1826 au Congres par le presi- dent John QuincY Adams nc remplit pas I'une des quatre pages. Les redacteurs ont pris pour epigraphe une pensee de Hume, sur laquclle nous ferons bien de reflechir plus serieusement : La libcite de la prcsse et la liberie des penplcs se soutiennent et ttombent en nienie terns. La politique, les lettres, les sciences, les arts ct quelques annonces remplissent toute la Voie lactee ; mais les annonces n'occupent pas plus de deux colonnes, en sorte que les objets d'un interet plus general, aux Etats-Unis comme en Europe, sont traites avec ctendue, et que les lecleurs ont la certitude de trouver, dans chaque feuille, abondance et variete. De tems en tems, nos gouts europcens different de celui des redacteurs, soit que notre situation politique, tou- jours incertaine et perilleuse, nous ait rendus un peu plus serieux que les Francais d'autrefois, soit qu'effectivement notre maniere de senlir et de juger tiecne a un sens litteraire plus excrce. Nous cherchons la verite dans les anecdotes; nous demandons que cc qui est vieux soit donne pour tcl , sans etre remis a neuf: notre siccle n'est que trop bien ponrvu de ce r. \.\xiii. — Mars 1827. 4? 7a6 LIVRES ETRANGERS. qui pent alimenter les joiirnaiix , exciter toutes les curiosites ct les satisfaire. Pendant notre revolution et ses terribles suites, la liclioii palissait en presence <1<; la realite : rien de plus froid que les ronians (Composes a cette epoque, si on les com- pare a riiistoire conleniporaine. Ce lenis des graodes clioses pent revenir encore, et il convient que les journaux s'y prepa- rent et s'y conforment. Au reste, la T' oie la etc a die Boston est pour nous une nouvelle connaissance qtie nous nous plairons a cultiver. Ce journal parait tres-digne de passer les mers, et de faire connaitre en Europe les Iravaux litteraires de I'Aine- rique. Usons larj^ement du peu de liberte qui nous reste ; entre- ttnons au moins nos relations avec ceux qui jouissent du bonhcur de pouvoir ecrire : qu'ils viennent au secours de nos pensees condamnees a rengouidissement. Ce ne sera peiit-etre pas le seul bienfait que I'ancien moude aura rccu du nouveau. Y. MEXIQUE. 2^8. — Establccimicnto, etc. — Etablissement de la Jante de charite, et Societe pat) iotiquc pour la bonne education de la jeu- nessc , dans la ville et I'etat de la Puebla de los Angeles. La Puebla. In- 1 2 , de 64 pages. La ville de Cholula a ete la premiere qui, dans cette partie du Mexique, ait fonde des ecoles d'enseignemcnt mutuel, con- tre lesquelles la sottise et I'obscurantisme n'ont pas , comme en France, eleve des obstacles. On voit, au contraire, par I'ou- vra^e dont on vient de lire le titre, que, de toutes parts, les autorites ecclesiastiques et civiles agissent de concert pour repandre dans le peuple les connaissances religieuses, morales et scientifiqucs. L'illustrePALAFOx fut, comme on sait, eveque du diocese de» la Puebla, qu'il eclaira par ses ouvrages, qu'il edifia par sa piete et par ses vertus; et Ton apprend avcc plaisir que, dans sa ville episcopale, il y a un seminaire palafoxien , des ecoles palafoxienncs. II est douteux que le jesuitisme puisse s'etablir dans une contree qui, avec des institutions de ce genre, con- serve une veneration profonde pour la meraoire du prelat qui en fut le fondateur. Nous avons sous les yeux uii autre imprime publie a la Puebla, I'annee derniere, contenant Ic projet d'une grande institution religieuse, comprenant quatre etablissemens. Le premier est un asile pour les ecclesiastiques du diocese de la Puebla, auxquels I'agene permet plus de supporter les fatigues deleuretat. Le second reunit, pour des conferences morales ct MEXIQUE. — EUROPE.— GRANDE-BRET AGNE. 727 liturgiqucs, les aspirans au sacerdoce, sous les ycux de vieil- lards qui ont blanchi dans l€s travaux du saint ministere. Lc troisit-me est un hospice pour les pretrcs dc la ville diocesainey attaques de maladies aigues ou chroniques. Le quatrieme est ua asde pour des retraites spirituelles. Cette fondation, pour laqiiflle un ecclesiastique mourant a legue les edifices nccessaiies , et a laquelle d'autres ofTrent des fonds pecuniaires, sera sous la direction de I'eveque de la Pue- bla. Celui qui occupe actnellement ce sw^ est le memequi, membre des cortesd'Espagne, avait redige radinirable discours adresse a Ferdinand VII, au nom de cette assemblee qui lui avait conserve son trone, et dont les membres ensuile... G. EUROPE. GRANDE-BRETAGNE. 23 f). — The substance gf an address to , etc. — Extraits sub- stantiels d'un discours adresse aux etndian-; de I'Hopital-Guy, surla philosophie experiinentale; par fFilliam Ki.i.^t^ , membre de la Societe de Londres, etc. Londres; i8a6. In-8° de 82 pages. Le nom de I'auteiir suffit pour recommander ctt ouvrage. En exposant d'une maniere neuve les merveillcs de la creation, il eleve la meditation vers le crealeur et le redempteur du genre humain. Ob remarquera speciale.ment ic tableau vraiment admirable dans lequel il presente les rapports des facultes physiques et morales de I'licmme avec son bonheur pendant son sejour sur la terre et sa destination a un ordre de choses plus sublime. G. a4o. — * Travels in Mesopotamia. — Voyages en Mesopotamie, par G.-S. Buckingham. Londres, i8'i7; Colburn. In-4" de 571 p., avec une carte et de nombreuses vignettes. Le monde htteraire et politique connait M. Buckingham , cet editeur courageux du Journal de Calcutta , qui fut oblige de ■quitter I'lnde, pour avoir ose faire entendre line voix libre a une population composee d'oppresseurs el d'opprimes. Nos lecteurs, en particulier, ont ete a meme d'apprecier , dans ua article de uotrc savant coliaborateur M. Sismondi, le merite de \ Oriental Herald, recucil periodiqiic , dans lequel M. Buc- kingham defend, avec une Constance digne des phis grands eloges, les interets da peuple indien dont il fait connaitre rhistoirc, les moeurs et le caractere (\ov- Re*: Enc, t. xxx, p. 344,)- 7/S LivRFS i^:trangers. 11 iiDiisserait impossible do siiivrc ici r.iiitcm- clans sa route d'Alcp a Orplia , d'Oipha a Diarbeck , et de celte ville a Bagdad. Peiit-etrc dans une analyse, ou nous coiiiprendrions aiissi los ar lui-mcme; il a consulte les nombrenx onvrages eerits par les etrang(!rs et les nalionniix. Aide de leurs Inmieres, redigeant ses notes sur les lieux memes, et pour ainsi dire, en face des objets, il ne publie que des I'enseignemens dignes de eonfiance. La carte de la 5Ii\sopolamie, jointe a I'ouvragc?, permet de siiivre I'auteur dans ses perillcuses excursions et de reconnaitre les localites qu'il deeiit : les vigni^ttes, plaeees en tete de chacun des vingt-sept chapitres de sou livre, rcpresentent les principales villes ou les sites remarquables dont il nous entre- tient. Enlin, le style de M. Buckingham, quoiqu'il soit quel- quefois nn pen prolixe, est toujours inleressant, parce que son recit est seme d'anecdotes et d'observations qui vienneut distraire le lectenr de la monolonie des descriptions. 2/(1. — * Sketches of Persia , etc. — Estjuisses sur la Perse , extraites du journal d'un voyageur en Orient. Londres, 1827; Murray. 2 vol. in-8"; prix, 18 sh. Le. litre seui de cet ouvrage annoncc qu'on ne doit y eher- cher ni les savantes iccherehes du geographe, ni les hautes conceptions de I'historien. Moins instruclif qu'amusant, plus spirituel que profond, I'auteur neglige les details destatistique et de topographic pour la peiuture des moeurs, des coutumes, des prejuges et des superstitions. On atlribue ces i\e\\y. vo- lumes ks\v/o/in Malcolm, auteur deplusieurs eerits historiques sur la Perse et sur I'lnde ; ils sont pleins d'observations interessantes, exprimees avec elegance; d'anecdotes agreabLes, racontees avec facillte, et de reflexions philosophiiiues. Nous citerons le passage suivant : « J'ai beaucoup voyage , dit I'au- leur; niais j'ai trouve bien pen de difference dans la somme de felieite humaine accordee aux diverses nations. Mon or- gueil ct mon patriotisme ont quelquefois etc flattes par les plaintcs des mecontens; mais je n'ai jamais trouve auctme ma- jorite qui eut volontiers consenti a changer de condition avec auciui autre peuple de la Icrre. Lorsque , apres avoir renssi GRATs'DE - ilRETAGNE. 7 i\y ;i cNciter radiiiiralion tt Tenvio par lo tableau que j'offiais cles avaiila;^es tie notre gouveiuenicnt, j'cxpliquais a quel prix otaieiit achetes oes avanta^cs ; lorsque j'enlrais dans le detail des sacriiices (pi'il fallait faiie d'une parlic de notre liberie indivi- duellc; lorsque j'exjiliquais la severite de nos lois , le fardeaii (1(! nos taxes, etc. etc., alors s'evanouissaicnt les sentiniens d'adniiration et d'envic que j'avais fait uaitie. C'elait I'liistoire de la feiuiiie arabe qui ne pouvait vivre en Anglelerre, parce (pi'ellen'v voyait point (ler/c/Zt'/cv. Ainsi, le roi de Perse, quoique bic'u fouvaiucu des perils qui rentoureiit, ue voudrait point chaui^er son sort coutre celui du roi d'Angleterre... qui nc pent avoir qu'une seide fenime ! » L'auteur de ces Esqtiisscs sail varier son style ct ses snjets : il passe d'une anecdote plaisanle a une discussion serieuse, et cuiiirunte souvcnt aiix ccrivains de la Perse des maxiincs qui, lelles que celles-ci, meriteiit d'etre repitees a nos freres d'Europe. " Passe ton terns a te faire uiie bonne renounnee, ct si tu desires la fortune, aj;prends la moderation. — Tiens-toi en i;arde coutre les rois ; car ils sent seuiblablcs an fen : ils briileut, mais ils bruleut. — Wetends pas tes janibes audela de la laii^eui- de ton tapis. " F. D. 2/|2. — * Tvlcnioirs of Zckir-Eddiii Miihammcd Bahcr, etc. — Meiiioires de Zchir-Eddln Mohatnnicd Bahcr , empereur de I'lndoustau , ecrits par lui-menie il Jai;hatay, ct traduits en partie jiar feu Jolui Leyuen , et le reste par IVilliam Erskine; avec des notes ct une introduction i^trise, ou , lorsqu'il prevoit ce 73o LivRES Strangers. qui doit arriver, la perspective qu'il decouvre est immense, el vcritablemcnt digne de ses legaids. Nous xicgrettoiis de ne pouvoir transcrire ici quelques. extraits de cetle singuliere histoire : mais, pour les presenter convenablement, il faudrait leur accorder iin espace dent nous ne pouvons disposer. Nous nous bornerons done a recoumiander cetle lecture aiix amis de la litterature anglaise , et surtout a ceux qui se plaisent a con- templer les moeurs et les sites de I'Orienl. Les descriptions pittoresques abondent dans ce livre; toutes les curiosites y seront satisfaites. Y. 243. — * Three months in Ireland, etc. — Trois mois en Irlande ; par un protestant anglais. Londres, 18/7 ; Murray. In-8° de 284 pages; prix, 8 sli. 6 p. 244. — * Sketches of Ireland , etc. — Esquisses de I'lrlande. Dublin , 1827 ; W. Curry. In-8° ; prix , 10 s. 6 d. 2^1 5. — * yi plain statement in support of the political claim» of the roman catholics , etc. — IVlenioire en favciir dcs recla- mations poiitiques des catholiqucs romains ; par Lord Nugent, iiiembre du parlement. Londres, 1826; J. Hookham. In-8° de 84 pages ; prix , 2 sh. Ce fut en 1692 que, envahie par les troupes de Guillaume, I'lrlande fut inciirporee a I'Angleterre. Par le traite de Lime- rick, le vainqueur garantissait aux catholiqucs irlandais le libre exercice de leurs droits poiitiques , civils et religieux. Mais ce traite , fait avec la garnisou armee de la place de Limerick, ne fut jamais execute; au lieu de cette egalite de droits solcnnellemtnt promise, les vaincus furent soumis au code infame et draconien de la reine Anne. Cesl ce code qui defendait a un Irlandais catholiquc d'acqnerir aucune jjro- ]iriete; qui, s'il avait im cheval, permcttait de Ic hii prendre pour 5 livres sterling; qui lui interdisait I'usage de toute es|iece d'armes, mcme pour sa defense ; qui lui defendait, sous peine de mort, de s'unir a une prolestante; qui enfin, non moins im- moral que feroce, depouiliait le pere au profit du fils, si celui ci conscutait a changer de religion. Ce code uionstrucux subsista jnsqu'en 1782 , epoque a laquelle I'lrlande , rendue a la liberte, entra dans une ere de prosperite , qui dura jusqu'a I'annee 1798 : n Lorsque i'Augleterre , jaloiisc de sou bonheur, y I'omenta des conspirations , et s'en fit un pretextc pour dissoudre le parlement de Dublin , pour condamner au si- lence les voix eloquentes des Bar/,e , des Prior, des Grattan , des Curran , et operer I'union des deux royaumes. " En lisant les trois ouvrages que nous annoncons , on pourra so former une juste idee de I'etat de misere et de degradation CxRANDE-BRETAGNE. 781 du peuple irlandais. lis confirmeiit tout ce que nous avaient appris les Lettres sur I'lrlande , inserees deinierement dans le Globe, et auxquelles nous empruntons la citation suivante : « Excepte dans quelques villes , dit I'auteur dc ces letties, en vain chercherait-on , en Iiiande , ces classes intermediaiies , ornement et force de la societe. Rien entre le niaitre et I'es- clave, entre le palais et la hutte , entre toutes les douceurs de la vie et le dernier dcgre de la misere... Peut-etre an pre- mier coup-d'oeil , Dublin vous fera-t-il illusion? Une popu- lation vive et noinbreuse, des rues larges , de beaux edifices peuvent masquer d'abord I'affreuse verite. Mais parcourez ces quartiers ou soixante couples couchent pele-mele dans une cave humide ; interroge/ les spectres vivans qui errent autour de vous ; approchez-vous de ces families eutieres qui n'ont d'autre lit que le pave des rues, d'autre nourriture que de mauvaises pommes de terre , et prosterncz-vous, si vous J'osez , devant I'eglise et I'etat. » L'Anglcterre a pu vaincre I'lrlande , quand la population catholique de ce dernier royaume ne se composail que d'en- viron im million d'habitans ; elle a pu la retenir dans I'cscla- vage , tant que , faible, ou abusee par de mensongeres prp- messes , elle se flattait d'une prochaine emancipation. Aiijour- d'hui que cct espoir lui est enleve , que le parlement vient de repousser ses demandos, que Le catholicisme irlandais comptc sous ses bannieres plusieurs millions d'ames , quelle main de fer pourra retenir dans I'oppression cette population , aigrie par de longs malheurs , et poursuivie par la taim ? Sa cause, comme le prouve Lord Nugent , est d'ailleurs celle de la jus- tice. C'estcontre la violation des promesses consacrees par des sermens en 1C92, que les Irlandais eleventaujourd'hiii la voix. lis deffiandeut des droits egaux; ils reclament contre le mo- nopole religieux , contre la persecution exercee au sujet des croyances; ils attaquent une egiise etablie qui, inutile aux -~ de la population , n'en possede pas moins le huitieme du sol en toute propriete , et percoit sur tout le reste le dixieme des produits. lis Iriompheront ; car, nous le repetons , ils com- battent pour la liberie contre la tyrannic , pour la tolerance contre le fanatisme. lis triompherovit ; car, plusieurs millions d'hommes ne sauraient rester soumis au despotisme d'un petil nombre d'oppresseurs. F. Degeorge. 24<>. — * Sculptured metopes discovered amongst the ruins of the temples of the ancient city of Seliuus in Sicily. — Metopes scniptes, decou verts au milieu des riiines de temples apparte- uant a I'ancienne ville de Selinus en Sicjle; par fV. Harris et 732 LIVRES KTR ANGERS. Samuel Angf.ll, en 182^, cl (k'crils par .V. AnoELr, ct 7'/h Evans, architectcs. Londres , 1H2G; Priestley et Wale. Iri-foh de 56 paf;es, avec noiif planches et un plan de Selinonle. Les sculptures decrites Hans cet onvrage appartienncnt .'i deux temples de I'ancienne ville do Selinonle en Sicile, an mi- lieu des mines de laquellc elles sont restees cacliees pendant une periode de plu"; de deux mille deux cents ans ,'y\^(\\\\\. I'e- poque oil elles furent decouvertes en mars 189.!^. .Selinonte, qui n'avait pas jusqu'ici ete visltee avec assez de soin j)ar les voyageurs, contient les ruines de six temples antiques, dont trois out lalsse des restes assez importans pour que les auteurs en aient pu donner leplan. Lesautres n'offrent qit'nn monceau de mines, ou il est difficile de reconnaitre meme IVmplace- ment des anciens edifices. La date de la fondalion decette ville qui a jete quelque eclat, remonte a I'an 65o avant notre ere. Mais on n'est pas egalement fixe snr I'epoque a laquelle ont ele eleves les edifices religieux, dont les auteurs ont donne une description si exacte et si interessante. On conjecture seule- ment que le temple qui leur a fourni les sculptures les plus lemarquables est celui auquel Herodote fait allusion ( liv. v, p. 46 ) sous le nom de temple de Jupiter ogoreux. Ce curieux ouvrage offre desmodeles precieux de I'art grec a une epoque cei'tainement tres-ancienne. En outre, les renseignemens varies dont les auteurs ont accompagne leur dipscription rendent leur travail utile a I'antiquaire, comme a I'artiste. Les planches, partie importante dansun ouvrage de ce genre, sont executees avec une grande perfection. v.. RUSSIE. 2 47- — * Zapiski isdacaiem'ia gossoudarstvennim adinirattels- kim departamentom , etc. — Memoires publiespar le deparfement imperial del'Amiraute, relatifs ti la navigation, aux sciences et k la litterature. Saint-Petersbourg, 1826; Imprimeriede la Ma- rine. In-S". T. VIII, 493 p.,T. XIX, 469P.; prix, 5 r, et 3 roub. La marine russe a re^u dans ces derniers tems des accroi.s- semens considerables; un grand norabre d'instituts, etablis a Saint-Petersbou^-g, y ont contribue efficacement , et les progres de I'art nautique en Russie meritent aujourd'hui d'etre appre- cies eu Europe. Un coup-d'oeil rapide jete sur les deux derniers cahiers du Journal de I'Amiraute fera connaitre ^ nos lecteurs I'importance des raatieres qui s'y trouvent traitees. T. viii. 1° Rapport sur les travaus et les progres du deparlement de TAmiraute , pendant le second semeslre de I'annee 1 824 ; *° de RUSSIE. 733 la secoude expedition du capitaine PAur.y; 3" uxtraitsdu jour- nal de la fregate la Iiapiclc ( Pravornoi) 011 i8'24 ; 4" observa- tions sur la carte des cotes de la uier Glaciale, par le capitaine- lieutenaut baron AVranoel; 5° biographic de I'amiral Ivan MikhaiUwitch Golovine ; 6" voyage de Malespine dans la mer du Sud; 7° sur I'cxpedition dans la mer Glaciale du nord, en 1824 ; 8° instruction sur la constructiou des paratonnerres ; 9" notice sur les premieres ecoles maritiuies et sur I'enseigne- n)ent de I'art nautique; 10° remarquesgeuerales sur la mer Gla- ciale; 11° observations relatives aux elfets (jue pioduil faction du fei" sur I'aiguillc aimantiie de la bonssole; 12° de la navigation du sloop ^ Entrcprise ( Predprlatitsa ) dans la mer du Sud. — T. IX. 1° Memoires sur les travaux du departement de rAuiiraute, pendant le premier semestre de I'annee i825; 2" continuation du voyage du capitaine Malespine ; 3° biogra- phic de ramiral-general comte Apraxine ; 4° idees de feu M. ScHOUBERT, conseiller-d'ctat ; 5" rapport du capitaine-iieu- lenant Kotzebue, commandant le sloop X Entreprise (de retour de son expedition depuis quekjues mois), an College de I'Amiraute; 6° rappoit du capitaine de second rang Lazaref, comman- dant la fregate Kreisar ; 7" Ex I raits du journal de divers phe- nomeues observesaRronstadt, journal tenu a I'Ecoledespilotes, pendant I'annee 1824; 8" Apcrcu des observations meteorolo- giques faitesa Kronstadt, pendant I'anuee 1824. — -Le vin""" volume est enrichi de trois carles, de trois plans et du portrait de Tamiral Golovine, que ses expeditious et sa captivile ont rendu fameux. Nous profitons de cetl(! occasion pour rectifier une erreur que nous avons commise , enaunonrant, d'apres le bruit public, la nomination du celebre navigateur Krusenstef.n ai'.x fonc- tions de curateur del'universile de Dorpat; celte nouvelle ne s'est point confirmee; M. le comte, aujourd'hui prince de Lieven, conseiller prive, reste revetu des iniportantes fonctions que nousavions attribuees a M. Krusehstern , qui est I'un des direc- teurs du Corps imperial des cadets de la marine. 248. — *Istoriia Rossiisko-Avstriishoicampaniii "jgggoda, etc. — Histoire de la campagne austro-russe ( en 1799), sous le commandement de Soumrof-Rimiiiski , publiee par M. E.-.B. FucHS. Saint-Petersbourg, 1826. 3 vol. in-8°. A I'Etat-major On connait siu- le generalissime prince Souvorof uu grand nombre d'anecdotes plus ou moins vraies; mais le caractere de ce guerrier, le talent qui le distingue, I'originalite desou genie, n'ont pas encore etc bien compris. On le jugo par quelques saillies, par quelques paroles remarquables qui lui sont echap- 734 LITRES ETR ANGERS. pees, par la singularite de son genre do vie; on s'en tient iini- quement a lextcrieur, et I'homme qui Ic premier a oppose iine resistance formidable aux armees victorieuses de la republiqne francaise, n'est nullement apprecie. II scmblerait qu'on ait dc- daigne de I'elndier sous son point de vue le plus important. Comnie Pierre-le-Grand , Souvorof attend encore son historien ; mais Ton doit tenirconipte des travauxqui peuvent rendreplus facile la tache de son biographe futur. Ace litre, I'ouvrage du general Fuchs, ancien compagnon d'armes de Souvorof, et tenioin des faits qu'il raconte, est digne de toufnotre interet. II n'cnibrasse, il est vrai, qu'une seule periode de la carriere glorieuse de sonheros; mais il offre toutes les donnees neces- saires pour juger celte grande fignre hislorique. Au merite de reriidition, cet ouvrage joint celui d'un style simple et pur, que Ton ne trouve pastoiijouis dans les ecrivains militaires. La premiere partie est consacree a I'histoire des premiers faits d'armes de Souvorof, lorsqu'il commandait I'armee austro - russe en Italic ; elie eclaircit une partie intcressante de I'histoire des guerres de la revolution. Dans la seconde partie , qui se compose des tomes ii ct iii, I'auteur a rassemble un grand nombre de pieces justificatives importantes ou curieuses. Nous citerons surtout le rapport de Souvorof a I'empereur Paul I*'' et aux monarqiies allies, avec les reponses de ces derniers. Cette partie fait bien connaitre la maniere du grand capitaine, I'originalite de son .^enie et la penetration dc son esprit. En lisant ces pieces, on croit le voir et I'entendre lui-meme. Son ame se developpe a nos yeux : c'est un honime singulier et bizarre sans doiite, mais ingenieux, energique et d'un grand caractere; c'est a juste litre que la Russie s'en glorifie, et t'em- pereur Nicolas s'est honore, en rendant dernierement un hom- mage public a sa memoirc, et a celle du feld inarechal Roumanzof Zadounaiski , en perpetuant leurs noms dans deux regimens de son armee. M. Fuchs se propose de publicr une edition allemande de son Histoire de Souvorof; il s'occupe en ce moment d'un autre ouvrage, destine a developper les immenses avantages de la canalisation. Celui que nous annon^ons est bien imprime , sur un papier assez beau; mais le [lorlrait de Souvorof qui I'accom- pagne est d'une execution fort mediocre. 249. — * Kratkoie islogenir priwil Mia sostavlenia routrhnavo slovara roussAat'o. — Exposition abregce des principes qu'il est necessaire de suivre pour la composition d'un lexique iiiaiiuvl de la laiigue russc , accompagne du specimen dun dictionnaiie. RUSSIE. 7^5 selon les vuesdi; I'atiteur. Moscou, 1826. In -8° dc 28 p. Impri- merie de I'Uuiversite. L'auteur de cette brochure est M. /. Th. Kalaidovitch , que les litterateurs russcs cstimcnt comme un de leurs f^ratn- mairiens les plus distiiigues Depuis long-tenis occupe du soin d'etablir une bonue theorie de cetSe langue , il expose aujour- d'hui les principes qui doivent, selon lui , presider a la compo- sition d'un dictionnaire russe, principes qu'il a suivis lui-meme dans ses travaux. II ne nous appaitient pas de les discuter : nons aurions besoin pour cela d'etre inities plus que nous ne le sommes dans les secrets d'une langueaussi difficile que riche; mais nous croyons pouvoir affirmer que ce peu de pages renferine plus de choses utiles qu'on n'en trouve souvent dans de gros volumes. Les n°* 75 et 76 ( i8a6 ) de \ Aheille du Nord coutiennent sur cet ouvrage , des reflexions critiques trop fines et trop pro- fondes pour qu'on n'y reconnaisse pas le talent de M. Gretch, savant litterateur, auquel la Russie est dcja redevable de tant de travaux iinporlans sur sa langue ct sa litterature. Lui- meme travaille depuis long-tenis a utie graniniaire riissc, dont nous avons vu I'lutroduction; l'auteur y explique la nature de la langue en general, retymologie et la formation des mots. L'ouvrage, compose d'environ cent pages grand in-8°, sortira bientot des presses de M. Gretch liii-meme. Outre un abrege que l'auteur doit en publier, M. Reiff en prepare uue traduc- tion francaise,et nous en aurons une autre en allemand. 2 5o. — * Bassni Ivana Krihn'a , vseini /.nigahh. — Fables de Jean Krilof , en sept livres. Noiwelle edition , corrigee et aug- mentee. Saint-Petersbourg, iSaS; Sleunine. In-8° de 3i2 p., avec portrait, vignettes et sept gravures. Ce fabuliste , suruonniie a juste tilre le La Fontaine russe, est peut-etre aussi connu en Fiance que dans sa patrie, depuis que M. le senateiu- Orloff (qu'une mort subile a enleve I'an- uee derniere aux lettres ) I'a pour ainsi dire naturalise parmi nous, au moyen des imitations en vers francais doutil a fourni les premiers elemens a I'elite de nos poetes modernes. II est peut-etre meme plus apprecie dans I'etianger que dans le Nord; car, bien que ce fabuliste original et ingenieux ait trouve dans sa patrie un grand nombre tl'admirateurs; quoique ses vers, aussi elegans que naifs, soient graves dans la memoire de tous les partisans de la litterature nationale, cette classe est toujours tres-peu nombreuse en comparaisou de celle qui cultive les belles-lettres en France, et qui sans doute n'aura point dc- daigne les productions d'un genie si distingue, si male et si profond. Mais nos lecteurs counaissent deja ce nouveau fabu- 736 LIVRES tTR ANGERS. liste, et, dnns Iciii- opinion, il occupe (lcj;\sa place eiitie La Foii- taiiifC'Kk'llcjt; d'aillcius, I'tiri e''.vdes scmaillcs de la meme espece, etc. , etc., avaient ajoute a ce degre dc fccondite : en un mot, le rapport de la fecondite naturellc , avec la fertilite produite par des moyens artificiels. A cette occasion, il s'occupa des moyens d'appliquer a la pratique cette theorie dc la statistiquc dc I'agriculturc , dont Thaeb avait concu la premiere idee , et que MM. de Wullskn et de Thunkn avaient essaye de developper. II sentit que I'idee ingenieuse du prehiier, dc considerer /r dcgre de fccondite d'un champ, comnie le produit du degre de vigueur natarelle du terrain, mnltiplie par le degre de sa ric/iessc , offiait , en dis- tinguant ces deux quahtes differentes , le moycn de soumettre a I'experience I'effet produit par les eugrais , sans diminuer la vigueur dn terrain , I'effet produit par des melanges de tern; (marnagc), divcrsite de labours , etc. , etc., sur la vigueur, sans alterer la richesse. ALLEMAHiVE. -f,i La difference entre les recoltPS obleniics par romnloi ^/).v 1827. /,8 742 LivRES Strangers. II fallait riiiier coimiie iin ecrivain independant : aiissi , ne laiU-il pas attacher uue graiide importance aux opinions politiquts inanifestees par Taiiteur. C'est comme observateur et historien qu'il faut le considerer et le consulter. II parait que son ou- \Ya'a,c se composera de plusieurs volumes. Le premier ne contient que le commencement de la revolution d'Espagne , et les pre- miers evenemens de cette guerre d'insurrcction, qui sauva la Pe- ninsule du joug etranger, mais en lui iaissant une grande partie de ses prejuges nationaux. M. de Schepeler juge les generaux espagnols qui se signalerent dans cette insurrection , devenue bientot genei ale : il attribue les re vers (ju'essuyerentd'abord les insurges, a I'imprudence des chefs, snrtout de Cuesta etde Blacke : ceux-ci conduisirent leurs troupes mal exercees et a peine disciplinees, en rasecampagne, pour livrer bataille a une armee parfaitement orgauisee et bien agiierrie, esperant opcrer les memesprodigesqui avaient signale les premieres campagnes de la revolution francaise. Blake, dit-il, meprisait la petite guerre; et, malgrc sa bonne volonte, il contribuait beaueoup, par son inertie, aux mallieurs de I'Espagne. Castanos, suivant I'auleur, etait plus habile et plus prudent; mais il partageait tous les prejuges nationaux, etregardait d'ailleurs son quaitier- general comme une cour, et ses officiers comme des courtisans. M. de Schepeler caracterise aussi plusieurs membres de la junte, entre aulres I'aventurier Tilli , qui, selonlui, vendait les em- plois et faisait de ses compagnons de debauche des comman- dans et des fonctionnaires civils. L'auteur traite fort mal I'ar- mee d'iiivasion, et I'accuse des plus grands exces : il pretend que les Italiens surtout s'en rendirent coupables. II n'epargne pas da vantage la faction des Parzistas, c'est-a-dire des ventrus, apostats ou transfuges du parti des Josefinos ,(\v\\ feignirent un grand republieanisme, ou, suivant les circonstances, le royalisme le plus pur, s'insinuerent dans les emplois , et furent les enne- mis les plus ardens des vrais patriotes, qu'ils persecuterent des qu'ils en eurent le pouvoir. M. de Schepeler ne ticnt pas plus a I'Angleterre qu'a la France: sous ce rapport, on peut dire que c'est un t(5moin desinteresse; et il sera utile de consulter les materiaux qu'il a reunis. D — g. 255. — Aristophanes Ecclesiazusce. — L'assemblee jjolif'nne des femmes, pieces d'Aristophane; /iditiondeDiyooRF. Leipzig, 1826. In-8°. De tous les auteurs grecs, Aristophane est peuf-etre C(;lui sur lequel les travaux philologiques s'epuiseront le moins : il y 48. I-/,/, 1,1 V RES li,TRANGERS. a ch«,"« liii di' (|iu)i excrcer Ic savoir des gianiiuaiticns , ties historiens ft des litterateurs. II scnible que, sous ancuii de oes lapporls, on ne soil erufire paivenii a rien d'absolmrient satisfai- sant. On doit done savoir gie nux eriidits qui, sans recheicher !e title pompciix A'editetir universel d Avistopliane , s'attachent a telle on telle de ses comedies , pour en faire ressortir les de- tails, et pour faire coniprendre des allusions qui, sans leurs explications, demeureraient inintelligibics. M. Diiuiorf, dont le nom est avantageusement connu en phiiologie, a deja [uiblie plusieurs comedies d'Aristophane. La piece que nous avons sous les yeux est a la fois la plus deliguree par les copisJes , et la plus difficile a retablir, a cause de la rarete des nianiiscrils. iVi. Dindorf enumere et designe ceux dont il a pu seservir, et rjui sont des xiv^ et xv' siecles. 11 a joml aux variantes les conjectures de Bentley , de Darves, et d'antres; mais il ne s'est pas arrete a les juger, lorsque cela ne lui a point paru uecessaire. Ce n'est pas une edition fort etendue : c'est une bonne reimpression critique, ou, si Ton veut, un secours de plus, pour bien lire cette piece dont le sujet est fort comique. Les femnies veulent se soustraire aux lois de I'elat; leurs deli- berations foiirnissent au poete les plus sanglantes critiques contre la constitution d'Athenes; les scenes burlescpies ne sont pas epargnees. Quelques personncs ont pense que le poete avait voulu tourner en ridicule la republique de Platon; mais ce point n'est pas encore eclairci. 256. — De authentia dcclamationum quce GorgicB Lconlini nomine exstant. — De Tauthenticite des declamations que nous avons sous le nom de Gorgias. Breslau, 1826. In -4° de 40 pages. Cette dissertation est de M. Schoenborn. Il s'agit de savoir si Gorgias, de Leontium , qui vecut plus de 36o ans avant J.-C, est, ou non, I'auteur de deux discours, ou plutot de deux declamations, dont I'une a pour objel I'eloge d'Helene, I'autre I'apologie de Palamede. On pent les lire, a la suite de la tra- duction francaise d'Isocrate par Auger. Selon les anciens, Gorgias fut le premier maitre de I'art oratoire : en philoso- phie, il etait I'eleve d'Empedocle, et ce fut a Alhenes qu'il vint s'exercer au talent de la parole. Ses discours engagerent les Atheniens a envoyer alio vaisseaux en Sicile pour soulenir Leontium, sa palrie, contre Syracuse. Gorgias se vantait d'im- proviser sur tons les sujets i]u'on lui proposait, et son oigueil le porlait queUjuefois a des demarches ridicules. Neannioins, sou ineritc lui valut une grande fortune. On se portait en foule a ses lecons : Isocrate, cntre aufrrs, fut son eleve. Gor- ALLEMAGNE. 7/^5 gias vecut jiiscju'a I'age de 109 ans. La jiliipart de scs ou vrages sont pci'dus; I'un d'eux avait pour litre : Trsfi roZ fit^ ovroj; Siir ce qui n'existe pas. Quant aux drux discour^ dont M. Schoenborn soiitient I'aiithenticite , Fnlvio Orsini fiit lo premier adversaire de cette opinion. Depuis, M. Geel av.iii revcndiqiie pour Gorgias le premier des deux diseours; M. S( hoenborn va plus loin, il les reconnait tous deux. A la verile, on ne peut defend re ni I'une, ni I'autre these jiai* Ics temoignages des anciens; mais on fait valoir d'autres argn- mens : par exemple cenx tires de la nature des sujets qui sont precisem(;nt du genre adopte par Gorgias, et que peut-etre Isocrate eut aussi en vue dans son Enconiion Helence , et dans son apologie de Biisiris. li y a dans cetle dissertation beauconp de savoir et de sagacite. P. Golbery. Almanachs allemands pour 1827. Les almanachs forment tonjours une branche importante du conmierce de la librairie en Allemagne; et, si les ouvrages ciassiques s'impriment snr du papier brouilhird, et si la pur blication des livres utiles se fait quelqiiefnis altendie pendant plusieurs annees, en revanche, la petite litterature des alma- nachs parait loujours a epoque fixe, et dotec de tout le luxe du papier velin, desgravures et des tranches dorees. Les prin- eipaux litterateurs, les ]5lushabiles artistes sont mis en requi- sition pour soigrier le fond et la forme deces livres ephemeres, destines a jirendre place sur les toilettes aupres des objets de parure du beau sexe. Peut-etre est-ce a la grande consomma- tion de Conies et de Nouvelles qui se fait dans les almanachs qu'il faut attribuerla reputation que les auteurs allemands ont acquis depuis le commencement de ce siecle, dans le genre des contes. II y a maintenanten Allemagne plus de conteurs que dans la France et I'Angleterre reunies; et sans douteils con- tent bien, puisque leuis productions out du succes, et passent meme dans les autres langues. Jetons un coup d'ceil rapide sur quelques-uns des almanachs qui offreut au public les pro- duits les plus nouveaux en ce geni-e. 257. — f7ra«/rt, livre de poche pour I'annee 1827, avcc Sgravures. Leipzig; Brockhaus. L'editeur de cet almanach donnait autrefois un prix pour la meilleure piece de vers et lemeilleur conte envoyes jjarles concurrens. h' Urania recoit niaiutenant sans concours des morceaux de tout genre. On trouve, dans le volume de cette annee,/o/i/? ie penitent ; X Amitie du Nord , conte qui renferme 746 LIVRES ETRATVGERS. tout uu niclodrame ; Ic Collnborntcur Lihorius , i.^y\\ vise runte d'interessans details sur les progres de I'esprit d'asso- oiation, de renseignemcnt industriel, etc., a Bale, a Zurich, a Aran, a Berne, etc. La litterature el les sciences u'y sont point negligees, et les productions indigenes de ce genre, pour n'etre p.is tres-nombreuses, n'en sont pas moins souvent dignes d'at- tention. Le Journal de Gcnei'c date des premiers mois de I'annee 1826. Cette feuille, leduite par son plan a ne point franchir les fVontieres de la petite republique 011 elle voit le jour, n'est , (loiu- ainsi dire, qu'un journal de f'amille. Lorsqiie le monde enlier retcntit du bruit de la luttc memorable qui s'engagc pen a pun sur tous les points, entre la ligue nouvelle et ceux qu'elle voudrait asservir et opprimer ii son profit, le .lournal de i SUISSE. — ITA LIE. 74y (ieneve n'entretient ses lecterns que ties seances da canseil leprcsentatif. Nous ignorons si cette interdiction , qui frappe toutes les nouvelles exterieures, menie les plus etrangeres a la politique, nicnie celles qui concernent les autres canions de la Suisse, provJcnt du gouvcrnenient genevois Ini-meme, ou do la sculc volonte des redacteurs : dans tous les cas , ces derniers, s'il leur est defendu, par line loi, ou par un regle- ment quelconque, de s'occuper des affaires du dehors, jouis- sent, quant a celles du dedans, d'une liberie de discussion qui est la plus noble et la phis belle prerogative du citoyen. On pourrait croire qu'apies les restrictions dont nous avons parle, un journal force de se concentrer dans un seul petit etat, ou plutot dans une seule ville quicompte a peine 25,ooo habitans, serait denue d'interet pour les lecteurs etrangers; on se troni- perait. Geneve, I'un des premiers asiles de la reformation, suit depuis trois siecles I'heureuse impulsion qu'elle recut au tcnis Sar- daigne,yaete renouveie ]jar I'tidit royal du iSjuillet 1822. II ii'enlre j^oint dans noire plan de rappeler ici les critiques que la redaction de cette loi a essuyees; M. Arro lui-meme , lais- sant a I'experience et a la sagesse du legislalcur le soin de la perfectionner, s'est conlente du role d'interprete. Son travail a pour but d'aider les jurisconsultes dans I'applicalion du sys- tenie nouveau , extrait engrande partie du livre in, litre 18 du Code civil. C'est dans cette vue qu'il a reuni dans son ou- vrage les decisions les plus remarquables et les arrets des rours francaises qui ont, pour ainsi dire, fixe les points dou- teux de la jurisprudence hypothecaire. II parait neanmoins que Ics partisans des vieilles doctrines ont vu avec regret I'a* I I TALI E. 753 tloption (I'lin systemequi blessait leursidees ctleurs habkudes: voici comment I'.iuteur s'exprime a cet egard dans sa preface: « Si les changemens dans Ic-s lois politiques d'un etat ne sont pas toiijoiirs exempts de difficultes, les reformes introdiiites dans la legislation civile, lorscju'elie est informe et vieillie, ne peuvent etre reprouveesque par des esprits etroits et serviles, seduits par leurs souvenirs et pen capables de lire dans I'ave- nir.i'M. Arro ne craint pasd'affirmer que Ton doit aux lumieres de la philosophic d'avoir vu disparaitre les droits injustes des maris sur leiirsfemmes, des maitres sur leurs esclaves, lesjujje- mens deDieu, les privileges contraircs a I'egalite des charges et les consequences des lois feodales et fideicommissaires que presque tous les codes, en Europe, se sont empresses de proscrire, tandis que des institutions plus sages ont remplace ces traces de I'aucienne barbaric. 11 s'appuie sur I'autorite res- pectable de Jcremie Bentham, qui a dit : « Rejeter toute inno- vation, c'est rejeter tout progres. » Des reflexions aussijudi - cieuses seront certainemeut applaudies par les hommes eclaires; niais nous pensons que I'utiliie du regime des h ypotheques est assez reconnue aujourd'hui pour se passer d'apologie; et les detracteurs qui la conteslent ne meritent pas les reponses et les nienagemens que M. Arro vent bien leur accorder. C. R. 267. — Relazione dclla condotta , etc. — Relation de la con- duite de I'archeveque de Tarente , Mgr. /o5fy?//-t'rt/3w^-Zrt^ro, depuis 1799, ^^^- ' publiee par le chauoine Ange Scura, peni- tencier de la calhedrale de Tarente ( sans indication du lieu de I'impression ). In-8" de i63 pages. Les voyageurs qui vont visiter I'efat de Naples ambition- nent d'etre |)resentesaM. Capece-Latro, ancien archevequede Tarente, et se felicitent, quand ils obtiennent Ihonneur de connaltre un des preiats les plus estimables , les plus aima- bles, les plus savans de I'ltalie. Ces qualites sont loin de mettre a I'abri de la persecution : il en a eu sa part, a travers les catastrophes qui ont rnoditie I'existence de ce pays; mais il a toujours conserve la dignite de son caractere. Pendant quelque tems, ministre de I'iuterieur, et successi- vement appele a diverses fonctions politiques et scientifiques., il a su meriter I'eslime et la conflance qu'il avait obtenues dans la direction de son diocese, ou il a fait tout le bien qu'il etait en son pouvoir pour Tedification et I'instruction religieuse des pasieurs et des tideles. A la verite , la cour de Rome n'etait pas contente d'un homme qui condamnait les abus des dispenses qu'oii y aclietaita prix d'argenf. II vonlait qii'on v pratiquat la 754 LIVRES ETRANGERS. niaxime de I'npotre : Vous avcz recu gratuitement , dorinez gra- tuitciuent. L'ouvrage que nous auuoncons est en panic la biograpliic anticipce d'un homnic qui est creancier honorable de I'histoire par ses actions et par ses ectits. Ces dernieis sont nombreiix : plusieurs ont pour objet la reforme des abus introdnits dans I'ordre ccclesiastiqiie; d'autres concernent la sanclificalion des fcles, la nianiere d'annoncer la parole divine, I'administration du baptenie, la cloture des religieux, un plan pour Teducation des scniinaires, un avis motive sur le refus des bulles papales ponr {'institution desevcques, des considerations sur I'origine et le deelin du pouvoir politique du cleric en Italic. II a, en outre, public un memoire sur la culture de Tapocus dans le territoire de Tarente. M. Capece-Latro, qui depuis 1778 remplissait dignenicnt le siege archiepiscopal de Tarente. avait plusieurs fois offert sa demission, qu'on avait constamnient refusee. On ceda enfin a ses instances en 181G. Sa lettre pastorale du aS novembre de cette annee pour annoncer sa demission est Ires-belle. Retire a Naples, il jouit, dans une heureuse vieillesse, de Tes- time et du respect dus a ses vertus et a ses talens. G. 268. — Tributo di dolore , etc. — Tribut de douleur et de louangej adresse a la memoire du professenr Andre\ kcck-^^y^- I.1NGHIERI, chevalier du Merite, etc. Pise, 1826 ; IV. Capurro. In-8o. C'est le professeur Jean Rosini ,qui paie un juste tribut de regrets a la memoire de I'lUustre |)rofess(ur Vacca, son col- legue et son ami. II parle des qualitc's iutelUctuelles et morales de ce medecin aussi eclaire que bienfaisant, comme unhomme qjii aime a s'arreler aux doux souvenirs d'un ami qu'il a perdu. 269. * — Notizie storiclie spettanti la vita e le opere, etc. • — No- tice sur la vie et les ouvrages de Laurent Leonbruno , celebre peintre manfouan du xvie siecle; par M. Jerome Prandi, pro- fesseur emerite de I'Universite de Bologne. Mantone, iSaS; Typographic virgilienne. In 8". Les editcurs de ce curieux opuscule le dedicnt aux redac- leurs desjonrnaux litteraircs d'ltalie, afin qu'ils fassent con- iiaitre au public un nouvel artiste i\\\ siecle d'or, que les Man- touans vicnnent de decouvrir , et qu'on avait emierement oublie. Nous nous empressons de n'pondre aux voeux des editenrs italiens. Laurent Leonbruno naquit a Mantoue, en 1489. S'etant distingue dans la [)einture des sa premiere jeu- nesse, il alia visiter I'ecole romaine du celebre conite Casti- ITALIE. 755 gliom; , ami de Raphael. II ftit ensiiiie nommu peiutre de la coiir par le marquis Frederic Gouzagiie , depuis due de Man- toue. Mais son biographe soupconne qu'a|)res les faveurs accot dees par ce prince a Jules Romain , Leonbnmo indigne se retira a Milan ct ne revit plus sa patrie. Depuis I'aa i537 , on ne irouve plus aucune tiace de la vie de cet artiste, et il est probable qu'il niourut de chagrin vers cette epoque. Sui- vaut la nienie notice, Jules Romain, abusant de son credit, au- rait cherchc a detruire ious les ouvrages de son rival, et Vasari lui-meme, secondant les vceux de Jules, aurait omis volon- tairement de coniprcndre la vie de Leonbnmo dans ses P^ies des pcintrcs. On vicnt de reconnaitre trois monumens du talent de cet artiste infortune. Le piemier represente uu St.-Jerome, d'une beaute remarc]uable , qui semble surpasser par la subli- mite de I'exprcssion les deux tableaux fails sur le meme sujet par Aug. Caraclie ct par le Dominiquin. Dans le second, repre- sentant la metamorphose de Midas , une belle figure d'Apol- lon attire priucipalement I'attention; enfin, dans le troisieme tableau , I'artiste nous presente le corps de Jesus-Christ entre les bras de la Vierge, entouree d'un beau groupc d'hommes et de femmes , tons profondement attristes de la mort de leur maitre. On distingue dans ce groupe le portrait du peintre lui- meme. Le biographe fait la description de ces tablfeaux avec beaucoup d'intelligence et de gout. On trouve au commence- ment de cette notice le portrait de Leonbruno , et a la fin , les dessins au trait des trois tableaux que nous venons d'indi- quer. 270. — Spicgaziorie ctuna gemma etrnsca del Museo rcale di Parigi , etc. — Explication d'une pierre etrusque du Musee royal de Paris ; suivie de quelques mots sur le systeme de la numeration des Romains chez les ancicns Toscans , par le pro- fesseur F. Orioli. Bologne , 1825 ; Nobili , in-S". Cet opuscule est une nouvelle prcuvc des connaissances et de la sagacite de M. Orioli dont nous avons souvent fait men- tion. Le musee de Paris possede la pierre etrusque dont il s'agit, et dont M. Micali avail deja publie le dessin dans VJtlcis de son ouvrage , \ Italic avnnt la domination des Romains (Table 54 , n° 21). Elle represeute un honniie assis devant un petit echi- quier, sur lequel on voit trois petits globes. II semble dispose a mouvoir d'une main un de ces globes , et de I'autrc il tient une tablettc ou sont marques des chiffres. Dans le contour de la pierre se trouve ecrit en etrusque le mot Apcar. I\L Orioli croit voir dans cette figure un calculateur, et sur la tablette les chiffres numeriques des anciens etrusques , ce qu'on n'avait :56 LIVRES ETR.\Nr.ER,S. encore apercu dans aiicun des anciens nioniimens. II inteiprete le mot apcar pour (ihcuury derive A'abacus , et les trois petits globes pour les ahaciiU que Pline explique pour calculi vitrei (Livre 26 , ch xxxvi) ; il cherche enfin a determiner la valeur des caracteres numeriques traces sur la tablette. F. S. PAYS -B AS. I'jl. — * Positions de physique , on resume d'an cours de phy- sique generate ; |)ar J. QuETELET. T. I. Bnixelles, 1827 ; Tar- lier. In-32. LebutdeM. Quetelet est clairement indiejue dans son epi- graphe : Summa sequar Jastigia. C'est en effet d'un point de vue eleve qu'il a I'habitude de considerer toutes les sciences; maisici il ne louche pas seulement les sommites de la physique, ct, quoi qu'il en disc, son resume est un abrege aussi substan- tiel que niethodique. Il est, en outre, d'une clarte qui procure a I'esprit le moins exerce la satisfaction inattendue de se voir cu presence de lanl de decouvertes precieuses, sans payer par de la fati5j;ue et des degouts les frais d'initiation a ces interes- sans mysteres. M. Quetelet a emprunte son litre au venerable Van SwiNDEN : il n'avait pas besoia de lui emprunter son eru- dition. De Reiffenberg. 272. — Specimen academicum inaugiiralc , etc. — Disserta- tion inaugurale, dans laqnelle soul exposees les methodes qui servent a determiner I'impulsion de I'air etla vitesse dii vent; par £. DoNKER-CuRTius. Lcyde, 1826; J.-C. Cyfvcer. In - l\°. L'auteur observe qu'on a invente, pour determiner les mou- vemens de I'air, divers instrumens dont les unsdonncnt plutot la mesure de Timpulsion du vent; et les autres, de sa vitesse : ilse propose, en consecpience, comme I'ont dejii fait plusieurs savans, d'etablir la relation qui existe eiitre ces deux elemens, et de comparer ensuite les residtats de la iheorie a celles de I'observation. Il considere done, dans la premiere partie de son memoire, le phenoniene general de I'impulsion ; il expose en- suite la loi dont il depend et fait de cette loi des a|)plications diverses, qui , mises a cote des resultatsdc rexpcrience, mon- trent le degre de confi:mce cpie Ion pent y attachcr dans I'etat actuel des sciences. Des observations sur I'impulsion directe du vent, l'auteur conclut (|ue, d'apres Borda el Woltmann, les im- pulsions sont comme les carres des vitesses, mais que, d'apres Schober , ce rapport doit inspirer moins de confiance. Quanta ee qui concerne Tangle d'incidence, il pense , avec M. Christian, (pie la loi est si couipliquee qu'il n'est point elonnant que la PAYS-BAS. 757 tlicorie n'ait pas encore pu tiouvei- (ie fornnde qui Texprime siiffisainaicnt. Dans la derniere paitie de son travail , M. Don- ker-Curtius s'occiipe des niethodes et des instriimcns qui ont ete einpIoy»;s pour determiner la vitesse dii vent, ct il donne la desciiption des aricnionictrcs les plus ingenieux. Dans toute cette discussion, I'auleur fait preuve de discernement et de connaissanccs vaiii'es, et il apporte dans I'exanien des theories cette sage reserve dontle pliysicien ne doit jamais s'ecarter. A. Q. 278. — Compte rendu des trm>aux de la Societe des sciences nu'diccdes et /latarcllcs de Bruxelles ; pnr 31. Van der Linden, D.-M., secsetaiic de la Societe, etc. Bruxelles, 1826; impri- merie de Voglet. In-8° de 124 pages. Nous avous cft^ja fail connaitre( voy. Rev. Erie, t. xxix, p. 592 ) la Societe des sciences medicales et naturelles de Bruxelles, fondee depuis quelqnes annees, et composee de medecins aussi zoles qu'instruits. Le volume que nous aiinon- cons ])rouve que les travaux de cette savante conqjagnie sont bien plus iniportans que ceux d'une foule d'autres associations de ce genre, qui feraient bien de la prendre pour modele. Ce volume, redige par M. Van der Linden, fait honneur a sa plume et a son talent : c'est un resume succinct, mais tres-inte- ressant, de tous les menioires presentes a la Societe depuis I'epoque de sa fondation, le i3juillet 1822. Nous y apprenons tju'elie ne tardera pas a mettre au jour le premier volinne de sesAjinnles, dontnous nous empresserons de rendre compte. De K. 274. — * Histoire generate de la Belgique , par M. Dewez, niembre de X Institut royal des Pays-Bas et secretaire jierpetuel de \ Academic des sciences et belles-lettres de Bruxelles. T. I et II. Bruxelles, 1826; H. Tarlier. 2 vol. in-8" formant ensemble xv-SS") pages. ISHistoire ge/iernle de la Belgique, publiee il y a vingt ans par M. Dewez, etait a lous egards un livre tres-estimable, et I'auleur en debrouiliant le chaos ipie presentaient les vieilles chronicjues, pouvait se flatter d'avoir rendu un veritable service asapaiiie; mais, severe pour lui-meme , plus qu'aucun de ses ciiti(jues, il s'est senti le courage de refcndre entierement son premier travail. Ulustoire qu'il nous donne aujourd'hui, bien que tracee a pen pres sur Tancien plan, doit etre consideree neanmoins comme une production nouvelle. D'assez nom- breuses crreurs ont disparu, graces a des recherches plus approfondies; d'lieureux developpemens jettent un plus grand juur sur certains fails importansj les causes des principau.K T. xxxiii. — Mars 1827. 4(j 758 LTVRES KTR ANGERS. eveneniens soiit indiquces d'line Hianiirro j)Iiis protisc; ciifiri, le style, remarquable par le iiadirel et la chute philot que par Je coloris ct le niouvemeut, sVst beaiiconp anu'liore. M. Dewez renionte a roiigine dcs Beiges, ct son Introduc- tion, dans laquelle il retrace les iisaj^es, les moeurs, la religion, et le gouvernement des premiers siecles , se fait lire avec charine; il passe a la couqiiete sous Jules Cesar , et decrit suc- cessivcment les vicissitudes de la Belgique jusqu'a radniitiis- tration des dues de Lotharingie et des souverains iiarticiiliers. Le tome second se termine a I'inijiortante cpoque de I'etablis- senient des communes, vers la lin du douzieme siecle. Cet OHvrage, encourage |)ar un grand nombre de souscrijUenrs, se composera de six volumes qui se succederont avec rapidite. Stassart. 275. — * Leven van Julius Agricoln , etc. — Vic de Julius Agricola , traduite du latin de Tacite, et augmentee de reniar- ques; par /. KoENDERS. Liege, 1826; J. Desoer. In-12 de xvi et 80 pages. On aimc a voir la litterature d'nne nation voisine de la France, et qui compte dans son sein beaucoup d'ecrivains dis- tingues, s'enrichir par la traduction d'un bon ouvrage, modele de ces biographies qui font partie de I'histoire des sciences et de celle des peuples, etqui, de nos jours, furent trop souvent denaturees par I'esprit de parti et de coterie , par I'esprit de haine et decaloninie, de niensonge et de diffamation. Les veri- tables biographes , dignes de romplir une difficile et noble mission, doivent prendre pour niodeles le grand historien qui peignit Rome et la Germanie, et I'auteur des Vies dcs homines illiistres de la Grece et de Rome : ils doivent s'altacher a trans- mettre aux generations a venir, la vie el les exemples des hommes qui ont honore et servi leur pays par des vertus et des talens. La Biographic des bienfaiteurs de I'lnimanite est un ouvrage nouveaa et utile, dent I'auteur de cet article a esquisse le plan et commence I'execution , et pour lequel il invite les hommes eclaires et les hommes de bieu de tons les pays a lui communiquer des renseignemens et des mateiiaux. II importe de bien faire connaitre les hommes dont les exem])les et les travaux meritent d'avoirdes continuateurs et des imitateurs. M.-A. JuLLiEN, de Paris. 276. — * Collection de poctes beiges. — Poesies de Ph. Les- BKOussART. Biuxelles, 1827 ; Deleiuer. In^i8. Les deux premiers volumes de cette collection seront consa- cres aux poetes morts, en remontant aux terns les plus anciens. Parmi eux, fiyureront sans doutc Froissart, Molinct, Georges PAYS-BAS. ^5 I'histoire doivent tant de reroniraissance; ^irt^eme volume. D'abord, on y lit le poenie des £rl^el , iu-6 SI favorablenient dans le terns , par I'inslitut de Fnince Le coions rappelle I'ecole de Delilie, niais quand elle fait d'ex- cellens vers. Ce.ix de M. Lesbroussart sont presque toujours remarquabies par 1 elegance, la finesse ou la grace. VEpctre .sw/W./t'co/?/,v- sou lien ttres-bieu la coniparaison avec celle dc,Lebrun sur la plaisanterie. Le Manuel du vrai rcnaliste, lEparcau roi dcs Paris, enlin V Hdrdelridc som des inodeles Y dk Saixt-Vincent T. XT. Pniis, 1827; Rev et Gravier, (■diteiirs, qnai des Angus- tins, n** 57. Gr. in-8° avec nn cahier de dix planches ; prix , 10 fr. en noir, et 12 fr. en conlenr (v. Rev. Enc, t. ^^XI , p. 157). Le tome nouvean arrive a la serie N, de sorte que Ic xii*, qn'on dit ne pas devoir se faire beancoiip attendre , pourraif bien ('lutiser le P. On voit par la avec qnelle conscience Ic devis de I'onvrage a etc d'avance etabli. Si Ton en jiige par les asferisqnes destines a signaler !es articles qni ne se troiivaient pas dans les dictionnaires precedens , il y existe environ iin tiers de mots nonveanx en siis ; et cependant, la collection complete ne s'elevera pas a la moitie des tomes dii moins de- lave des livres dn meme genre. Il est certain qu'au lieu de se relacher dans I'execntion de lenr plan, les auteurs montreni: tin rednublement de zele tonjours croissant, et le xje volnmc nous parait encore I'cmporter sur les f)reredens. L'atticle woi'- lusf/ue, de M. DESHAVKS,ne laisse rien a desirer; I'auteur y dif tout ce (lu'il est neccssaire de dire, et, netiranl pas, connne on dit a la feuille , ne fait pas un volume de ce qn'i! pent renfer- mer dans une soixantaine de pages , qui a la verite en vulcnt le double par la matiere qti'elles contienncnt. L'article monstres, traite par M. Gf.offroy ue Saint-Hieaiee , est a la fois nenf et curieux , en nieme terns qne bien ecrit. On y trouve I'ensemble des idees de I'nn de nos plus grands naturalistes sur un point tres-important qui rattaehe les sciences pliysiques aux sciences morales ;ce qui justifie bien cette idee dcM. Rory de Saint-Vincent, dans son article hoinnie , que les l)ases dc celte morale unique reposent dans la nature meme', dont clle n'esf qu'une emanation neccssaire. Ce dernier auteur a enricbi le volume qui nous occupc de I'article vjontagncs , dont nous ne saurions trop recommander la lecHn-e , aussi agreable qu'ins- tructive; I'auteur v peint d'abord eloqucmment ces masses impo- santes et les sensations (juVprouve , en contemplant le Pano- rama pompcux qui se presente a liii, le voyageur parvenu a esealader leur sommet. Ensuite , I'auteur montre <|uelle est la petitesse reelle de ce que notre neant nous fait considers commc des colosses ; i! rednit a \c\\y juste valeur ces theories LIVUES FRANCA.IS. — SCIENCES PHYSIQUES. 763 du globe qu'on a pretendu etablir d'apres rinspcction de veri- tables taupinieres. On pent dire que de la crete de ces points ciilminans du globe, ce savant voit los choses veritable- nient de ires- haul. Une nonvelle division des niontagncs en systemes , avec une liste plus complete qii'niiciine de ceJles qui ont ete donnees jusqu'a ce jour de leurs priiicipales liau- teurs , ajoute beaucoup d'importance a cet excellent traite , que M. Bory de Saint-Vincent devrait publier a part, avec I'article mer, en un on deux jolis volumes , comme il vient de le faire pour son article liomme. Dans ce remarquable essai , I'auteur etablissait qiiinze especes , et leur cherchait des ber- ceaux respectifs ; dans son traite des iners et des montagnes , il a trouve quatorze grandes iles primitives , dont chacuue put etre le point de depart d'une espcce. La qninzieme , essen- tiellement maritime, n'en iiecessitait pas, ne devant jamais , comme les oiseaux aquaiiques, s'eloigner des rivages qui la virent naitre. Un tel resultat est le plus beau ccmpk-meut que puisse esperer de ses meditations profondes le philosophc qui reunit les plus vastes connaissances dans diverses sciences qui se jiretent un secours msitnel. Les articles de MM. Saint- HUaire fits , A. Brongniart , Audouin , Gidllfmin et A. Richard rivalisent d'interet avec cenx qui vienncnt d'etre cites. o. 280. — Flore generale des emnrons de Paris , scion la me- thode jiaturelle ; descri|)tion de toutes les plantcs agames, cryp- togames et phanerogames qui croissenl spontantment ; leurs usages dans la medccine, les arts et I'economie domestique , avec 18 tableaux ico.'ingraphiques ; par M. F.-F. Chevalier. Tome P"". Paris 1826 ; Ferra jeune, rue des Grands-Augustins, n° 23. In-S** de xxiv et 648 p.; pri.x, fig. noires, 12 fr. ; fig. color. , 16 fr. Depuis qne I'elude de labotanique est fort repandue, et que le catalogue de nos richesses vegetales est devcnu si consi- derable, la plupart des autenrs de ces sorles d'ouvrages sautent comme a picds joints par-dessus la cryptogamie, qui, dans le systeme sexuel de Linne, composait la 24" classe, ou celle dans laquelle avaient etc rejctees ce que Ton appelait alors assez communement les plorites obscures ou imparfaites. En effet,dans la presque totalite des siiiopsis , des prodromes et des species, on se borne a faire connaitre les phanerogames, ou les parties de la generation sont tres-distinctes, on v men- tionne tout an plus les fougere s, et Ton promet un volume ou le reste sera traite. II manque ainsi dans la science un ouvra^e oil soient rangees niethodiquemcnt ces ebauches du rej^ne vegetal qui jouent cependjnt un role si important dans la na- 764 LIVRES FRAIVCAIS. tiire. L'aiUcur de I'ouvrai^e que nous annoiinoiis parai£ avoir cssaye de rcmplir cette lacune dans son premier volume, au moins pour les environs de Paris. II y nientionne iine inniien- site d'especes , dont ceiles qui nc sont pas de simples accidens, ou des maladies dc qiielc|iie yrand vei^ctai, enssent ete repqrties dans ce u des noms d'hommes avaient etc pris pour des noms de mi- neraux, et que tons les cartons qu'y vient de faire un savant distingue ont a peine elevc au rang des livres medioci'es. M. Drapiez expose avec methode et clarte ce dont il tiaite ; excellent cliimiste, il ue separe point i^qux scimces qui doi- vcnt bienlot s'identifier , et son livrc; atteint le but qu'il parait s'etre propose, ceiui de populariser une etude fc'Conoint nos lecieurs a le suivre dans les routes 011 il s'egare. C'est ainsi que nous comprenons les devoirs de la critique litteraire. A la fin de V Essai sur raiidition , etc. , M. Deal a mis un epi- logue ^on\. nous croyons devoir citer quelques extraits. lis sont empreints d'une profonde tristesse qui se dissiperait ccrtaine- ment, si I'auteiu' connaissait niieux ceux qui ont parle de lui, et ceux auxquels il reproche de n'en avoir rien dit. « Pourquoi dissiuiulerions-nous notre esjjoir qu'on jour on reconnaitra quelques-unes des verites «yjo«^aine,naluraliste; ciuquienic livraisou. Paris, 1826; F. M. Maurice. Un caliier in-4" avec planches; prix de la livraison , 8 fr. (voy. Rev. Enc, t. xxxii,p. 441 ). Dans celle cinquienie livraisou, Tautenr continue I'exposi- tion des faits tendant a renverser lesidees les plusgeueralement admises sur I'existence d'un virus sypiiihtii|ue. Cc n'est pas seulement par des raisonnemens qui |)araissent fondes, que l'auteur combat cette antique erreur medicale, mais par des observations curieuses et pleines d'iuteret. II puisc ses docu- mens les plus precicux cliez les anciens ecrivains syphiliogra- phes dont le langage avait souvent reru une interpretation uiensongere, et il met en evidence la faussete de la doctrine actuellement accreditee. Cette livraison est remaiqunble par les expeiiences faites sur lui-meme par un medecin philan- trope, dans le but de prouver que cette maladie contagieuse se guorit sans mercure et cede aussi faeilenicnt a la methodc anti|)hlogistiqne que les autres maladies dependant d'un prin- cipe contagieux dont on ignore la nature, telle que la scarla- tine, la rougeole, le typhus, etc. etc. Ce medecin s'exposa trois fois a la contagion; trois fois il coutracta des syniptomes non equivoques <]u'il guerit par le spuI regime et en s'abandonuant aux seules forces de la nature. IVon-seulemeut la guerison eut lieu dans un espaee de tcnis doniR' ; mais, depuis, il n'a ressenti 772 IJVRES FRATS'CAIS. auciuic attointo dc symptomt's conseculifs , qiioiqii'il eut de- daii^nc I'lisaiic dii sjukifltjiw ])ar excellence. Dour ainsi dire , indestructible, si elle n'etait frequentee que par des voitures a un clieval. Ces longs convois de chariots franc- romtois qui circulent dans toute I'etendue dela France doivent faire au moins douter que le roulage par voiture a un cheval soit plus dispendieux que par de grosses voitures ; Ton sait que sur phisieurs routes, et notamment sur celle de Clermont a Paris, les rouliers ;i niaringottcs (voitures a deux roues et un cheval) font tomber presque tous les gros equipages; si ces avantages, dont il ne serait peut-ctre pas tres-difficile de rendrc raison , sont sensibles sur des routes defoncecs par tioi -78 UVRES FRANCAIS. loiirdes voitures, que ne deviendraient-ils pas siir des chemina ou ne passeraieiit que des voitures Icj^eres ! La difiicidte d'en- tretenir nos routes nous conduira peul-ctre un jour a interdire tout-a-fait la circulation des charrettes attelees de plus de trois chevaux. II n'est pas certain que, independamment de la diminution des frais d'eiitretien, il n'en resiiltat une economic uotable dans les frais de transport en general. J.-J. B. 296. — * Projct d'u/ie statistique du departeinent de I'Arriege, et Coup-d'aeil stir les progres des sciences , des ails ct de I'in- diistrie en general ; discours lu a la Societe d' agriculture et des (irfs du departement de tJrriege , dans sa seance solennelle du 4 uovembre 1826, et iaiprime a la demande de la Societe; par M. J. N. d'Espaignol , geometre en chef du cadastre, etc. Foix , 1826. In-S" de 82 pages. Nous reviendrons sur ce discours t<-es-remarquable , et nous parlerons des opinions de M. d'Espaignol sur lesstatistiques en general, en faisant connaitre a nos lecteurs \e journal d' agri- culture ct des arts du departement de I'Arriego, qui s'est empresse de I'inserer dans son cahier du niois de Janvier. Mais il etait convenable a tons egards de detacher cet ecrit, et de le re- pandreseparement: les vues de I'auteur sui; la maniere d'ecrire les statisliques doiveut etre connues ct discutees : il faut qu'on les applique aux meilleures productions de cette espece , a celles dont les resultats utiles ont ete apprecies , ct que Ton parvienne ainsi a fixer I'opinion sur ce que doit etre une statistique de departement , travail encore pen avance et peu correct dans une partie de la France, ou les administrations departemeulales s'lmposeront sans doute I'obligation de le re- commencer. F. 297. — Carte de la Palestine, pour servir a I'intelligence des saintes Ecritures, et particulierement a I'histoire de Notre Sei- gneur J.-C; dressee par ^.-//. Dufour. Paris, i825; Picquet. une feuille de a pieds 2 pouces sur i pied 8 pouces; prix, 7 fr., M. DuFOuaest du tres- petit nombre des savans qui, par leurs. Iravaux, se montrentveritablementdignesdutitredegeographe. Eleve de M. Lapic, comme feu M. Barbie du Socage le fut du ce- lebre Danville ^ il parcourt sous la direction de son digne makre la carriere qu'ont illustree Strabon, Plinc, Ptolemee e\.Joscphe[\). La carte de la Palestine confirme cet elo|,'e : elle est le frui,t des meditations et des discussions les plus approfondies, con-, signees dans I'intcressante analyse qui I'accompagne. (i) M. DiJFOUR doit publier incessamment une Geographic sacree. t fort vol. in-S" avec caries. SCIENCES PHYSIQUES. 779 L'auteur s'est servi , pour le gisement des cotes de la Medi- terranee, depuis Sidon juscju'au Mont Casiiis, des travaux nau- tiqiies ef des observations astrononiiques de M. le capitaine G*UTTiER, et pour !es details de rinterieur, de la carte de la Syrie qui fait partie de la description de I'Egyptc , d'une carte manusciite dressee par Seetzen , des routes decrites par ce voyageiir,'par Jli-Bey, Biirchhardt , J'olney, ct par M. Cltcitsau- briand, etc.; il a aussi consnlte les auteurs anciens et sacres, les geographies de Bodiart , de Damdllc et de Maltchrim. Les principales modifications qui se font remarquer en com- parant cette carte a celles de la Syrie ancienne et moderne , sont: 1° les coins du Jotudain, de I'Hieromax et du Jabok ses afQuens; les configurations de la mer de Galilee, de la vallee du Jour- dain, du lac Asphaltique et de I'Arnon qui s'y jette; 2° la po- sition du golfe Elanitique , celles dc Petra d'Asiongaber et du tombeau du grand- pretre Aaron, reconnus par le voyageur Burckltardt ; 3" les nouvelles determinations de Jerusalem, de Bostra, de Zoara,etc. , resultats des recherches des voyageurs modernos; les points de Cesaree, d'Ascalon, de Joppe, d'Aco, de Tyretdu cap Carmel, determines d'apiesde nouvelles observa- tions astronomiques ; les points donnes par la discussion, lels que Cades-Barne, suLvaut Moise , Rabbath-Ammon , Moab, Pella, d'Abila, Gerasa et Madian. La geographic critique donne a chacune de ces deux dernieres villes iine double position : la premiere pour Gerasa est celle de DanviWe; la seconde, celle de Seetzen, Mannert eiBurchlinrdt. Madian , ville fondee par im des fils d'Abraham et de Cetura, a egalement deux positions sur cette carte: celle de Danville a ete religieusement con- servee. Ce geographe place cette antique cite a I'orient du golfe Elanitique, tandis que M. Dufour, suivant Josephe , lui assigne un emplacement tout oppose a Touest de ce meme golfe, dans la presqu'ile de Sinai ; /," les changempns faits dans I'ortho- graphe de la nomenclature. Deux colonnes, a droite et a gauche de cette carte, contien- nent les indications tirees du texte sacre, selon la vulgate, des lieux oil se sont passes les principaux evenemens de I'hisloire de I'Homme-Dieu, depuis son incarnation jusqu'a son ascension. Toutes les positions de ce texte sont sur la carte : a cette le- gende correspond egalement sur la carte la route suivie par le Messie. Un plan de Jerusalem , qui differe beaucoup de ceux qu'on a publics jusqu'a ce jour, est nnaccessoire du plus grand interet; place a gauche et en regard de la partie de la carte oil les Ifmites des douze tribus sonttracees d'apres Josephe, il sert particulie- 78o LIVRES FRANC AIS. reirient de developpeuient ;i la tribu dc Benjamin , ou est sitiiee la ville de desolation , et permct de suivre tons les evenemens dont cette ville a ete le theatre, ot d'y reconnaitre les cites, les palais, les principanx edifices, ainsi que la topographic na- turelle consacree par I'histoiie de Jesus-Christ. Ce plan a etc drcsse d'apres le texte des Ecritures saintcs, le plan deranibassadeurDcshayo5,envoyeen 1621 par Louis XIII en Palestine, et le memoirc de Danville snr Jerusalem, que I'illustre auteur du Genie dii Clirisdanisme considere comme etant le chef-d'oeuvre de ce celebre geographe. Le cadre de la carte ayant perniis a M. Dufour d'y donner la partie de la presqu'ile de Sinai, formee par les golfes Elani- tique et Heropolite, ainsi que les monts d'Horeb et de Sinai, il a rendu son travail plus interessant, en y tracant la route suivie par Moise, apres que les Hebreux furent sortis de I'Egypte. tin extrait de la table de Peutinger, qui donne les routes ro- maincs de la Palestine , est place a droite et au bas de la carte ; il en complette ainsi les accessoiies. M. Dufour, en dressant cette carte , a eu pour but d'etre utile a I'enseignenient ; aussi a-t-elie ete adoptee par le conseil de I'instruction publique, pour I'usage des colleges. Quoi- qu'elle ait ete specialement redigee pour representer I'etat de la Palestine a I'epoque de Jesus-Christ, elie n'en sera pas moins fort utile a ceux de nos lecteurs qui desireront se trans- porter en imagination dans la Terre Sainte, soit avecleTasse, soit avec M. de Chateaubriand ; toutes les circonstances locales decrites dans I'epopee de Torquato , et dans V Itineraire dc Paris a Jerusalem , s'y trouvent en qiielque sorte reproduites ou indiquees. La gravure topographique d'un burin ferme et savant a ete confiee a M. Blondeau , premier graveur du depot de la guerre. Une vignette symbolique, due au gracieux talent dc M. Deveria, ajoute encore a la belie execution de cette production. Sueur-Merlin. Sciences religieuses, morales , politiques et historiqties. 298. — * Apercu philosophique des connaissances humaines au dix - neuvieme siecle ; par Charles Farcy, de la Societe royale des antiquaires de France et de la Societe academique des sciences de Paris. Paris, 1827; Baudouin freres. In-18; prix , 4 fr. 5o c. « Si je tenais toutes les veriles enfcrmees dans ma main, disait un philosophe normand , je me garderais de I'ouvrir. » M. Farcy, en nous prescntant Ic volume que nous annonc^ons, SCIENCES MORALES. 781 est loin de se montrer aiissi timore que raiileiir de la Pluralile des mondes. Son but est d'offrir, dans un cadre de petite di- mension, les verites iniiversellement reconnues. « On sera d'abord surpris , dit Tautenr , de voir un seul volume annonce commc contenant toules les verites de principe susceptibles d'etre embrassees par I'esprit humain; niais cet etonnement cessera, si Ton considerequ'elles sont en effet peunombreuses dans chaque science, et que les verites sont toiijours en grande minorite, comparees aux erreurs. Montaigne a dit : Mille routes devoyent du hlanc; une y va. La proportion est encore trop faibie, et peut-etre qu'en y regardant bien, on trouvera que le volume eut pu etre reduit davantage. « M. Farcy place, au commencement de son ouvrage, une Classification des connaissances hurnaines . Un semblable tra- vail est de nature a interesser les lecteurs de la Revue Ency- clopedique ; nous croyons devoir le presenter ici. Ideologie , ou science des Idees. — Theologie et Psycho- LOGiE , science de Dieu et science de I'Jme. — Metaphysique GENERALE , Oil scicncc de \'£tre. — Metaphysique particu- riERE, ou science de VEsprit humain. — Morale generale , ou science du Bien et du Mai. — Morale particuliere , ou science de XHomme en societe. Morale proprement dite. Poli- tique. Legislation. Administration. Economic politique. — Ma- thematiqueSjOu science des (JwrtrtiiVej. — Physique generale , ou science des Corps. — Physique particuliere, ouconnais- sance des sciences naturelles. Astronomie. Mecanique. Hydro- statique. Aerologie : Acoustique , Musique, etc. Optique : Lu- jniere , Vision, Coloration, Perspective, e■" I. ■R<:>ueEncyclcped!que, t. xxx„,, p. ;8j. (Mars ,8. TABLEAU SYNOPTIQUE DES CONNAISSANCES HUMAINES, DAPRES UNE NOUVELLE METHODE DE CLASSIFICATION, DEVELOPPifF. DANS zJESSJI SUR LA PHILOSQPHIE DES Sc'lENGE.S, (Oiiviajj,. inedii), PiK M. Mabc-Antoixf JILLIKTV pf. Tabis. ENTENDEMENT, pbik ommun des connaissances. Mes'erdeTn"".^' """''^ "^^ ''''°'»"= ''•'i'^id" et dc Te.p^ce huniaine, et invenieur des connal NDITIOH HUVA1H ucrees, quant i leur objel et a leurs noinbreuscs opplicalions, soil par rapport a Vhommt lui-m&ne. BUT commui HofllME, pi cnianciil, mais qui doivent soil par rapport sxux corps e DeiiT ilfmeii! priniitif; et couslituans dans Vhomme r^nclrl^r.i ^'^K,.^J ™.« : i • Dcx ohjcu distincts des couuaissances InUaimT •,/°"'"'*"'^,? "^"rd comme «r, phx>,q,,.; p,„s, cnmmc /« mor„/ « ,-„««,c(„,;. les .cunJphpiq.es et les ,./,»„•. ™rtIi"/J."I-^',r ' ^' '" '" '"""-S"'".- 'l'"" l'-' «t porte ,1 dislingner deux orrfnr/dc scic, /)«x poim>de Tuc qui s'appliqueut i chacun 'de ces deux objels, suivant qu\ I'liomme ; d ou 1 on pent admetlrc dmx classes dislincces dans cliacun des deux '"'""" ''""<^'*'"'"; lesquclles classes se sulidiviscnt cliai naturelle el progressive de I'csprit hnmain, ainsi qu'il suit desris de la lislingue: inline Ics/nrVi eui-mJmes, ou les mojrrni Imeniis par i de connaissances ; los sciences positives ou tie fnits^ — n q'taire genres , correspondans aux quatrc principaux ORDHES. PREMIER ORDRE. ilYSlQUF.s OU relatives aux corp^ fe&.quisc ;s ou dc metliodes\ ales aatrcsscioaces,et qui ■/ij /«(•(■«(« par riioromi) SF.COND ORDRE. B. Sciences MKTVPHYMou a Viiitfl.'tgerue , B». Positives ou dpj'aiis. PREMIER GENRE ^CRiT les ^ircsct les fail ) Les pfiilosoplies obsen-.tleurs \.Hiitiiirt dtt ftitntti phjtiqu, jiaiiquei. — (Description ilea pb( des fails pailiculiersqui appailier branchc Jes sciences ) GENRES. - SciESCES nBScniPTIVES CI d'ODSBBVATION. dans I'ordre dans lequcl ils s'offrcat a liii, soil p.ir mpport nu lein t plus spccialcmeut proprcs a I'l-tudc des sciences comprises dans iiitoire rivile J« gtiirt It uiiioin oa lies dif- t rcrcnies naiioni, qui csl, dans io ; nae la geograpbic eil dans Ve>p soit algehrlqur giomima. — ( Coinbinoisoii des formes el de grandeurs. ) l:;t. TROISIlfeME GENRE. — Sciences speculatives et n L'esprit humaiu, apr&s avoir commence par observer ct decrire les xrnQUEii ct a recliercher Icurs causes. (Fails etudies dans leurs cauics et cxpliques. ) Ceiie •oisi^me genre de connaissances, oppartienl essenliellement aux phihsnphes t/^eoricie:is. 111. Phj^.ique. CMmit, Phj.iclcgi* qui HI Jr*rtme-nri ;ls, qui est I'ohjel dela pbj^i'jiie cl ili lie. )—Phihtfiphit mon-U. QUATRltME GENRE. — Sciences pratiques ou d'ArPUCAXioN. L'esprit Immain appi.iqde aux beioins et atix usages de I'bomroe toiites les counaissanccs conlcnncs dans les (row genres precedens, pour cli '^lasses tpi'on n delcnu* ' ' ' ' - -■ • "-• — Les pratieieu' IV. jl/, in pre nam ( Application des canses ohservees , comparces, appto/ondics ^ puur produtre des ef)^U. ) Ce quatriemc genre apparticut spccialcmeut ns ue peuvent applicpier avcc succes que les connaUaances dont ils possedeot a fond la ibeorie. » la na.igct tTtchnehgUtrppl, ; 3« Vhj-drauli'tju*! j)" rcmploi ; la tj' «/*u ct des r. hgiqu. (60|' l.onpOU 'c : 8" Il «///.>* ct I ■ 4" Io d ■ phU > laptinlun t i°lagnivu des Scieneti Miuphfti Arts pliys'ico- matlieinaliques iqoe, i-IIectuels. OBSERVATIONS GENERALES. Tl a paru convenable de diviser d'iiboid le objt'ts auxqiieU l?s fcieiices s'appliqueiit ; y que ordre ; eiilln , on a urellc el progressive. )n ne doit point oubliej lodulrc, suivant le poJ ■^ Descriptive, ou d'obi 1° Distinctive, ou de cl le subJivi uples Ac fails oti de methodrs \ picter cetie dii ' de rapportcnt aux operations de I'esprit lii : SOUS lequel on les considere, les qiiatre I'apr^s la natuie m^mc de Tbomine et la nal IX ordres en deux classes, d'apres I,t nature ni( ce qui prodnit quathe cl.xsses de sciences, dei eten classes, par une division correspondante dc! , dans la production des connaissances, et a sa ! notre Tableau, et cliaque science elle-meme, 4° Pr. .cUc,ou de ingement; le, ou d'ap|dicatiou. \ cru iioiivoir admcttre cette division de quatre genres da: reste, nnc mc-thode de classification des connaissances bur marclie de Tesprit qui veut acffuerir une idee claire el positive, quoiqi trop loin I'esprit meihodique, de tourmenler, pour ainsi dne, l ;gen d'apres les caracl^res sp^ciaux qui toule autre raelbode , a principaleinent p( ipliqu^e. On doit done ale, d'une cbose c les distingnent. Dii ur objet d'ai'der la 1 les f-ti r les plier systei lofondle est egalement cbssificadon adopte, niais qui ne doit entrainer aucune idee de preemifience des unes sur les au science dunt il s'occupe, et dont rimportance angmenie a ses yeux, en proportion du lenis et des avant.ioes qu'elle peut comporier, et qn elle parait susceptible de piocurer a I'espece humaine. I.es deux Tableaux qui precedent et les cadres particuliers affect<5s k chacune des brancbes du sa neut rccbcrcber et distinguer, dans celle caitc gcnerak abregee da monde intellectucl, les regions dej'a iVglouB , pour ainsi dire, incultes, ou les parties des sciences qui n'ont pas encore plus lard , a celte mappemoiidc stieniiji'jue , des cartes particuli^res de chaq-" ='•"* sun eiut actuel, les prt-gres qu'elle u fails, les portions de s communication et d'echange avec d'auties parlies des sciences qi N. B. Les di^veloppeniens reladfs h cetle classification des connaissances liumaims se trouvent dans VEsiju, d,s sciences, qui a cte inscr^e datjs les deux derniers cabiers des Annalcs EncYclopediqucs (cahiers de noveud)rc aussi la Ht-me Encycloptdi'juc, t. ii , p. ^08 (Mai i8nj). nveution, qui r^sulte du Bt a un bon esprit a retJi u'ii met h I'approfondlr, de intellectucl, les suffisai , destinees a faire inlcux tent encore a dcfricher, domaii out de 1' humain offrent cct avanlage que Ton rxploitecs par rhomnie , et tes L'auteur se propose d'ajouter >i.r, par une sorte d'intuition , > rapports ct ses inoyens de tdedccembre iStS!) lilosophic — Vov. SCIENCES MORALES. 783 de laligne d'horizon ratioi)nel...»Il ne pent etreici question que de I'horizon sensible ou visuel.Mais nous ne devons voir en ceci que I'effet d'une inadvertance, puisque M. Farcy est aufeur d'un Traite de perspectu'e , estime des artistes , et dont on vient d'annoncer la troisieme edition. Voici comment se termine i'article, Histoire des nations : « II faut done le dire, le seul interet veritable qu'offre I'histoire est le developpement moral des nations, et la consideration des diverses epoques ou leur tendance vers la liberie et les ameliorations de tout genre s'estmanifestee avec plusoumoins de succes. II ne s'agit plus d'ecrire I'histoire des rois, mais bien celle des peuples. Les institutions, les progres de la civi- lisation , I'instiuctiou, le bien-etre qui en est la suite, enQji, tous les faits qui se rattachent aux sources de prosperile pu- blique, sont bien plus importans a connaitre que la vie privee des princes, le recit de leurs guerres, le plus souvent injustes, celuide leurpompe ct de leur magnificence, produits des sueurs de leurs sujets. II faut que leurs oreilles s'habituent a entendre ces verites ; il n'y a plus pour eux qu'un seul role honorable : ceux de conquerant et de despote n'obtiennent plus ni I'admi- ration, ni le respect des hommes.Mais le prince qui fera mon- ler avec lui la vraie philosophic sur le trone fournira aux ecrivains du xix« siecle les plus belles pages que I'histoire ait jamais bffertes. » Brks. 299. — Traite metaphysiqae des dogmes de la Trinite , de V In- carnation, de I'Eucharistic, de la Grace, du peche originelet de la resurrection des corps ; par M. M. De La Marne. Paris, 1826; Hivert. In- 12 de 282 pages; prix, 2 fr. 60 c. ljix\x\.eur[ page 64 ), parlant de la Trinite, se sert d'une comparaison emprunlee du pape Alexandre III, qui distingue dans I'esprit humain I'lntelligence, la memoire, la voloute , Irois facultes qui, sans se confondre, ne sont toutefois qu'un mcme esprit. En traitant des mysteres, il importe de se rappeler ce pas- sage du livre des proverbes : Celuiquiveut sonder la majestc , sera accable de sa gtoire ( proverhe , 25-27 )• ^-'^ bapteme de desir supplee au bapteme d'eau; c'est un principe reconnu dans I'Eglise catholique. L'auteur suppose que les enfans en- core renfermes dans le sein maternel peuvent connaitre Dieu, I'aimer et avoir le bapteme de desir. Plus loin , il s'efforce d'elargir le cliemin du salut , en soute- nant que tous les peuples anciens et modernes furent toujours suffisamment eclaires de la lumiere des revelations divines pour apparlenir a I'Eglise universelle. 784 LIVRES FRA-NCAIS. Pour appuyer ses assertions, il renvoie au\ ouvia^es dc M3I- dc La Mcnnais, Laurcntie, etc. II n'entre pas dans le plan de la Revue d'exaniiner la valeur de ces hypotheses qui stront contestccs certainenient par d'autres theologiens. 11 nous sufht de les avoir signalees, en annoncant I'ouvrage. G, 'ioo. -^- Zrt Colombc , de P.-A. Krummacher; traduit LIVRES FllANCAIS. Jontc la laliliulo osilLon a laquelle ii devait s'attendre : la lettre etait anonyme, il est vrai; mais elle sortait de I'imprimerie royale. Les objections qu'elle opposait a M. Bonard etaient faciles a refuter ; mais pour les combattre , 11 ne s'agissait point d'eclairer la discussion , mais de mettrc la mauvaise foi a decouvert : M. Bonard a eu ce courage. La reponse a la lettre cVun in- connu sur le projet d'affecter 80,000 hectares de forets a la marine royale, etc. (1) , est actuellement inseparable du livre on I'auteur expose ses vues. Dans celui-ci, la I'aison marche avec prudence, soigneuse de ne provoquer aucune passion , et de presenter la verite avec le double merite d'etre a la fois utile et inoffensive : dans la reponse les hostiiites ont com- mence; il faut que la defense soit vigoureuse et se convertisse quelquefois en attaque. Nous regrettons de ne pouvoir mettre (i) Paris, 1827; M""" Huzard. In-S° de 69 pages. 994 LIVRES KRANCAIS. ici (]uelqiics extiaits do ccs deux ccrits tres-dignes d'etre coii- nus et lueditt's : les cssais d'an.ilyse que uous en avons fails excedaient toujonrs , inalj^re uous, les biirnes qui nous sont picscrites. Tel est le caractere des ecrits oii tout est a sa place, oil rien n'est superflu. La Societc ccntrale cVagricuUure n'a pas ete du menie avis que Ic critique anonyme : voici comment M. Hericart i)e Thury, president de cette societe , termine le rapport qii'il a fait sur Touvrage de M. Bonard: " Apres vous eu avoir rendu compte aussi fidelement que pent le permettre un ouvrage aussi concis , aussi fort de rai- sonnement , et particulierement de cet esprit d'ordre et d'ana- lyse que lous nos officiers du service public puisent dans cette eelebre llcole poly technique... ; nous avons I'honneur de vous proposer de reniercier I'auteur du Traite des forets de ta France considerees dans leurs rapports avec la marine rnili- tairc , d'avoir bien voulu vous en faire hommage , et de le feli- citer de la .Tianiere dont il a traite la question de notre amena- genient foreslier naval, en le debarrassant de ce qu'il a pre- sentenient d'irregulier, de precaire , d'oppose aux directions aetuelles de I'opinion et de notre gouvernement ; en fin , en demon (rant qu'il est une partie essentielle de la substance de notre code forestier, dans lequel nous desirons bien vivemeut en voir consacrer les principes. » F. 307. — Defense de I'ordre social attaque dans scs fondemcns aunom da libera lisin e du xix."^" siecle ; par M. Antoine Madrolle , de la Cote-d'Oi. Paris, 1826; Pillet aine. In-8° de 420 pages; prix, (> ir. Au lien d'un plaidoyer ordinaire , d'une simple apologie, I'auteur se porte lui-merne accusateur; et c'est M. de Montlo- sier qu'il accuse d'attaquer I'ordre social jusque dans scs fon- demens. C'est au roi, aux chambres et aux cours royales qu'il porte son accusation; il ne parait pas que cette denonciation ait eu, et sans doute elle ne pouvait avoir, les suites que le titre semble provoquer. La maniere dont s'est prononcee la chara- bre des pairs, si eminente dans notre ordre social, comrae branche de la legislature, et eomme haute cour et sommite de la magistrature francaise, ne permet pas de penser que M. Ma^ drolle ait pu se prumettre quelque succes de sa demarche. Pourrait-il trouver plus d'accueil aujires des autorites qui eon- naissent et venerent ics ancicnnes bases de la monarchic , raffermie.s et restaurees par la charte constitulionnelle, et qui legardent couune leur premier devoir de placer a cote de I'ar- ticle qui declare la religion catholique religion de I'etat, le code trnp pen connu des liberies gallieancs ? SCIENCES MORALES. 7y5 L'histoire bien faite fr. , et 7 fr. 5o c. par la poste. Ces Mernoires out etc tres-recherches ea Aiigleterre, des leur appariiiori; c'est pour la premiere fois qu'ils soul traduits en francais. Le tradiicteiir s'est deja fait contiaitre d'uiie ma- iiiere favorable, en reprodiiisaiit dans notre laiigne VfJistoire tl' Angleterre de Goldsmith ; elle a sontenu dignement sa repu- tation litteraire, dans le nouveau travail qu'elle offre aiijour- d'luii an public. II en est de meme de la notice de M. Al- bert Moniemont, qui a tout le piquant de la nouveaute; ear, jiisqu'a ce jour, Lucy Aikin etait foit pen connue en France. Deux autres volumes completeront ces Mernoires. Nous en presenterons I'analyse , lorsque Touvrage entier aura pani. ***• 3 1 2. — Annales militaires des Francnis , depuis le com- mencement de la revolution jusqu'a la fin du regne de Na- poleon, publiees par J.-D. Magallon : Carnpa^nes d' Italic , de Prusse et de Pologne. Paris, 1827; Chaumerot. 3 petils volumes in-3'2; prix de chaque volnine, 75 c. Ces deux nouvelles livraisons completent la premiere partie des Annales militaires qui forment 6 volumes. II en resle 6 autres a paraitre. Nous roviendrons sur I'ensemble de cette utile et popnlaire entreprise, qui doit etre prochaineraent terminee. A. M. T. 3 1 3. — Histoire de la colonic grecque etahlie en Corse , .iccompagnee de reflexions politiques sur I'etal actuel de la Grece , et d'un couit apercu sur la Corse , oil Ton indique les moyens a employer pour ameliorer le sort des liabitans de cette lie; par Nicolaos Stephanopoli. Paris , i8a6; Tlioisnier- Desplaces, rue de Seine, n° ag. In-ia de 221 pages; prix , 3 fr. 5o c. Cette colonic, fondee en 1676 par les descendans des an- ciens Spartiates , fatigues de supporter !a tyrannic des Turcs , presente le tableau d'une peuplade qui , transplantee parmi une autre nation , conserve long-tems ses moeurs natives et sa physionomie particuliere. On comprend que les details de cette migration ne penvent avoir qu'une bien faible importance dan>; reiiscmble de rhistoire gt'nerale; niais ils nc sont pas SCIENCES MORALES. 799 saus inteiot pour I'histoire de Corse, surtoiU a une <'poque ou cette tt-rre, dont la fccondite appelle de plus nombreux liabi- tans , pourrait servir encore d'asyle a de nouvelies colonies yrecques, si la fortune, complice des cabinets, ne laissait enfin aux citoyens de la Grece d'autre alternative que la fuite 011 Tesclavage. L'histoire de la colonic grecque so trouve deja dans la plu- part des histoires de Corse , et Ton a imprime a Cagliari , en 1 780 , une brochure intitulee : Anecdot-j historique de la co- lonic grecque elablie dans tile de Corse en 1676; par M. L. B. D. V. [le Begue de Filliers). L'auteur de cette anec- dote, lemontaut jusqu'au xi** siecle, fait le recit de la fuite d'un des Gls de TempLreur Alexis Comnene , et de son etablissement a Vitilo , en Moree. Cest ce prince dont pretendent descendre Ics Stephanopoli , qui furent les chefs de Tetablissement fait en Corse. Le recit de M. le Begue de Villiers , tire , dit-il, de manuscrits qui existent entre les mains des Grecs de Corse, ressemble assez bien a un roman , jusqu'a I'epoque dn depart de la colooie , et le nouvel auteur a bien fait de ne le suivre qu'a compter de I'annee 1676. Quoiqu'il ne cite point cet luivrage, il est probable qu'il ne lui est pas inconnu. Le precis hist»orique sur la Corse offre a jjeine une esquisse legere des annales de ce pays. L'auteur est tellemeut succinct dans le recit des fails qu'il ne nomme pas meme le roi Theodore, et ne dit pas un mot de I'occupation angiaise en 1794. Nous ne lui ferons pas un reproche de cette extreme brievete , que son titre annoncc , il nous suftit de le mentionner ici ; mais nous |)ourrioiis desirer plus d'exaclitude : soit lorsqu'il donne pour incontestable un fait tres conteste , la donation de la Corse au saint -siege par les rois de France; soit lorsqu'apres avoir dit que la Corse a produit les plus fortes teles que la nature ait jamais organisees , il nomme seulement Paoli et M. Pozzo di Borgo , et passe entierement sous silence le seul honune dont sa phrase put faire naitre I'idee. Il y a dans cette omission affecteequelque chose d'assez etrange. La meilleure partie de I'ouvrage est celie qui traite de I'etat actuel de la Corse , oil l'auteur montre que cette ile pourrait acquerir un assez haul degre de prosperite, si Ton s'occupait surtout d'y introduire le travail , au moyen de migrations qui offriraient le double avantage de feconder un sol inculte , et d'eveiller rimlustrie chez une population encore inactive. II propose d'y faciliter letablissement de colonies de Francais, ou de Creoles de Saint-noiMingue, ou de Grecs. Les reflexions do l'auteur sur ce point nous out paru fort sages; loutcfois , 8oo LIVRES FRANCAIS. nous conseillons aux C.rccs d'acliover raffranchissement de leur pays avaiit de songer a vcnir defricher la Corse. Eiitre les deux opuscules dont nous venons de rendre conipte, rauteui" a place ses rejlexions sur I'elat ac.lucl de la Greet'. 11 invite la France a secoutir cette malheureuse contree; niais nous ne savons pourcjuoi il ne parle que de I'indepen- dance du Peloponese : la Grece tout enliere doit eire affranchie. jNous ne sonimcs pas non plus de son avis, lorsqu'il aflirme que n le haut caractere de la mediation de la France est encore fortifie par le souvenir recent des actions de ses guerriers qui tranquiiliserent I'Espagne. » Cette Iranquillite que nous avous donnee a I'Espagne doit faire peu d'envie a la Grece ; cet exemple est d'un funeste augure , et notre auteur n'a pas fait preuve d'adresse en le rappelant ici. En general , ces reflexions sont vagues et communes , il y a plus de phrases que d'idees. Mais la derniere moitie de la notice sur la Corse presente, nous le repetons , des vues utiles , et merite d'etre lue. M. A. 3 1 4- — * Biographic universelle , ancienne et rnoderne , ou Histoire, par ordre alphabetique, de la vie publique et privee de tous les hommes qui se sont fait remarquer par leurs ecrits, leurs actions, leurs talens, lenrs vertus et leurs crimes; ou- ATage entieicmc^nt neuf, redige par u/ie Societe de gens de let- tres et de savans. T. XLV et XLVI. Paris, 1826; L.-G. Mi- chaud, libraire-editeur, place des Victoires, n° 3. 2 vol. in-8° de 596 et 608 pages. Cet ouvrage doit etre compose de 5o vo- lumes, formant vingt-cinq livraisons. Prix de la livraison, papier carretin, i6fr.; grand raisin fin, 24 fr.; velin superfin, cartonne a la Bradel, 48 fr. Ces deux volumes ferment la vingt-troisieme livraison d'un vaste recucil qui doit, meme avant d'etre terniine, une repu- tation europeennea I'interet du sujer,aretendue du plan et au merite de ses redacteurs , choisis parmi les savans et les hommes de letlres les plus distingues de la France. Parmi les articles remarquables de cette nouvelle livraison, nous citerons les suivans : M""' de Tencin ,■ par M. Auger; le Tasse, par MM. de Angelis et Miger; Tasman, par MM. Eyries et Rossel; Tas- soni , par M. Noel; Terence , par M. Daunou ; I'abbe Terray, par M. Du Rosoir ; Timon , Theinistius , par M. Leclerc, Toricelli, par M. Biot; Tihulle , par M. Naudet; Thompson, par M. AValckenaer ; Tihere , par M. Villemain ; Theodore Prodome , moine grec, par M. Boissonnade; Troncon Du Coudray, par M. Lesourd; Sainte-Therese , par M. Gley; Tournefort, par M. Duvau; Toussaint-Lomerture , par M. ue Beauchamp, etc. etc. SCIENCES MORAI,ES. 8or Tsous consacrerons quelques articles etendus, dans notre section des Analyses, a cette belle et importante collection, qui nous fournira roccasion de passer rapidement en revue les travaux scicntifiques et litteraires des differentes nations, de- puis I'antiquite la plusreculee jusqu'a nos jours, et derattacher ainsi les souvenirs des tenis passes et des grands ecrivains qui ne sont plus, a nos archives de La Ulterature et de la civilisation moderncs , oil nous recucillons avec soin et impartialite les travaux des auteurs contemporains. La Biographie univcrseUe, bien differente de bcaucoup d'ouvrages ecrits sous I'infldence de I'esprit de parti ou de coterie, qui ont offert sous des titres analogues, sauf quelques rares exceptions, des arsenaux de diftamations et de calomnies, merite d'occuper une place ho- norable dans toutes les bibliotheques, ou elle supplee a un tres grand nombre d'ouvrages, sans qu'aucun ouvrage puisse la suppleer. M. A. J. 3i5. — * Biographie universcUe et portative des contempo- rains, ou Dictionnaire historique des hommes celebres de toutes les nations, morts et vivans; ouvrage entierenient neuf, contenant plus de Irois mille notices qui ne se trouvent pas dans les biographies precedcntes, en un seal volume in-8°, orne de 25o portraits. iS", 14*^, iS", 16^ et 17^ livraisons. Paris, 1827; au bureau de la Biographie, rue S.-Andrc-des-Arcs, n° 65. 5 livraisons in-8°; prix de la livraison, 2 fr. [\oy. Rev. Enc. , t. XXXII , p. 479- ) Nous avons deja signale ce recueil comme la meilleure des biographies des contemporains qui aient encore etepubliees; nous avons aiissi fait remarquer I'impartialite consciencieuse des auteurs qui ont senti toute la difficulte de leur tache , dont Ic but est de transformer des hommes vivans en personnages historiques. Les dernicres livraisons que nous annon^ons I'em- portent encore sur les premieres; et Ton ne saurait trop louer le bon esprit qui dirige des redacteurs auxquels nous aimons d'autant plus a rendre justice qu'ils ne nous sont point connus. Ainsi, ne sachant a qui reviendront nos eloges, par exemple, pour les articles Carnotet Catherine II, on ne pourra supposer qu'ils soient dictes par quelque prevention favorable envers celwi qui en enrichit le recueil oi!i Ton en trouve beaucoup d'au- tres du meme merite. La vie du Caton francais est racontee avec fidelite, et Ton a su y resister au style d'enthousiasrae qu'il eut ete naturel d'employer pour parler d'un tel homme, mais qui ne doit jamais etre celui de I'histoire. II suffit d'ex- poser les actions d'un si grand citoyen pour le louer convena- blement. Le couplet suivant d'une chanson qui fut composec 8o2 LIVRES FRANCAIS. en Belgique, au tems des proscriptions, en dit plus (]irnii long paiii'gyrique : Quel est celui dont la patrie Avec orgueil cite le nom? Qui de Vauban eut le genie Et rSme Cere de Caton ; Qui, pur comnie la vertu meme, Monta jusques au rang supreme, Et, pur comnie elle , en descendit? C'est un proscrit, c'est un proscrit. Nous sjgnalerons, au sujet de,ce mot prose/ it , une erreur dans I'article qui termine la derniere des livralsons de rouvrage que nous annoncons. L'estioiabic litterateur dont il y est parle ne fit jamais partie « de la liste additionnelle qivi s'appelait des trente-huit. m Quant a I'article Catherine II, que nous avons indique comnie tres-saillant, nous remaiquerons combien les reputations his- loriques, surtotit quand il est question de tetes couronnees , doivent inspirer peu de confiance; mais aussi, quel est le pou- voir d'une plume , comme celle de Voltaire, qui fit une heroine de la meurtrierc de Pierre III. La correspondance du philo- soplie de Forney fut pour celle de Catherine ce que les os d'Elisee furent pour ceux des niorts qui pour leiu" bonheur se trouverent inhumes a cote de lui. La posterite , si I'on pent appeler ainsi une trentaine d'annees qui s'est ecoulee depuis la mort de I'imperatrice Catherine, eut consacre peut-etre le titre de mere des Russes que la servilite lui fit decerner pai- ceux memes qu'elle nieprisait, spoliait et tyrannisait de toutes les nianieres , dans nn siecle oil tout ne se (tit pas tot ou tard imprime.LaFredegonde du xvni'' siecle est enfin appreciee ce qu'elle valut. Avis aux puissans de repoquc dont la popularite ne s'etend pas au-dela du cercle de leurs courtisans. B. DE St-\ . 3 1 6. — Fie de saint C/iarles Borromee, traduite et abregee du latin du P. Basilicapetri , par A. Caillot. Paris iSaS; Boiste, rue de Sorbonne, n" 11. In-12, avec gravui'e; prix, 3 fr. 5o c. Une consideration particuliere, tiree du nom meme do Charles, a determine cette traduction de I'ouvrage, estime en Italic, de Basgape, ou Basilicapetri. Disciple du laboriciix archevcquc de Milan, avant d'etre eveque lui-meme, il avait ronnu toutes les particularites de la vie de Charles Borromee, dont la conduite fnt respeclable sous divers rapports, mais SCIENCES MORALES. Hoi doiit If zcle pour Ic niaintien on I'extcnsion de co cju'il n^i^artlait conime les droits de I'eglisc, I'engagea dans iin«> liUtu asscz pen ediliante contre I'autorite des lieutenans dc Philippe II. A I'age de ui ans, etavant d'etre pretre, Charles, iieveii de Pie IV, etait archeveque et cardinal, et il n'en aimait pas nioins a lire Epictete. Non content d'accuniuler, dit le inographe, les abbayes et les dignites siir la tete de son parent , le pontife y ajouta des revenus considerables qui niirent (Charles en etat d'adopter iin genre de vie presque aussi fas- luenx que celui d'un souverain. Quelque tems apres, la sante du jenne prelat s'altera ; il refornia sa maniere de vivre, il proscrivit la danse, il fut giand-penitencier et legat a latere ; enfin, ii montra beaucoup d'activite au conclave pour I'election tie Pie V. Charles etait vigilant; des inspecteurs secrets I'infor- maient de ce qui se passait dans les seniinaires, et il allait lui- ineme conlisquer dans les bibliotheques pnbliques de Milan les livres qui lui deplaisaient. Durant la pcste qui, en 1^76, fit perir dans cctte ville seule environ 5o,doo personncs, la con- duite de Charles fut plus con forme au veritable esprit de I'episcopat. C'est surtout a ces details personnels, pour ainsi dire, que s'est attache Rasilicapetri, jugeant, par exeinple, que, ])our I'intervention de I'areheveque au concile de Trente, on pouvait consulter les actes nieme du concile. Ces sortes d'omis- sions paraissent judicieuses, et le traducteur a bien fait aussi tie retrancher partout ce qui serait maintenant d'un foible intt}- rct, meme pour les eccltjsiastiques. S. 3 17. — * Notice siir les Numg/tc.i de Ic^Sardaigne , considert'-s tlans leurs rapports avec les resultats des rechcrches sur les evclopt^ens on pil'lasgiques , par M. Petit-Radel , de I'lnslitut lie France, etc. Paris, 1826; Delaforest, rue des Filles-Saint- Thomas, n° 7. In-S". de 14S p. , avec des planches litliogra- phit^es; prix, 3 fr. 5o c. Les recherches que M. Petit-Radel a faites sur les plus curieuses de toutes les antiquities que prt5sente la surface du globe, ont pour date le commencement du siecle. Depuis, il ne les a pas discontinuties, et Ton pent se promettre poui- I'tjsultat un travail qui jettera im jour tout nouvcau sur les i'aits dc la periode heroique des nations anciennes, presque toujours confondusjusqu'ici avec les traditions niythologiques, c'est -a- dire enveloppt-s d'tipaisst's ttl-nebres. Des 1810, le savant rapporteur de la commission chargee d'examiner les j)rogies ties sciences historiques depuis 1789, s'expiimait en ces termes, au sujet des travaux de M. Petit-Radel : < II a le prej>iier conru I'idtje de faire distinguer dans les tliverses 8o4 LIVRES FRANCAIS. constructions, ou plutot substructions, des murs dos villes antiques, qucllcs sent Ics parties ancicnnement riiinecs qu'on doit rc'gardcr comnio appartenant aux epoqucs des fondations primitives de ces villes. Partant du principe que des construc- tions faitcs dans des systemes absolumcnt opposes et exclusifs doivcnt ajipartenir a des colonies differentes, il niontre que ces ruincs , formees comme on I'a dit de polyedres irre[j;uliers ct sans cinient, attribuees jusqu'alors par tons Ics antiquaircs, soit aux Etrusques, soit aux Roniains, soit nienie aux Goths et aux Sarrasins, sont les mcmes constructions cyclopeenncs , qui ont ete dcciitcs par les ccrn'ains grecs , et dont rori|j;ine rcmonte incontcstablenicnt a la plus haute antiquite : d'oii il conclut que ces constructions etant semblablcs et dans les assises inferieures des murs des j^lus anciennes villes de la Grece et dans celles des murs des plus anciennes bourgades de ritalie, il doit s'ensuivrc que plusieurs de ces monumens furent I'ouvrage des antiques dynasties auxquelles les anciennes traditions rccueillies par Denys d'Halicarnasse attribuent la civilisation primitive de ces contrees (p. i3i ). » La decouverte de M. Petit-Radel a trouve des opposans et des apologistes, et il scmble veritablement qu'elle doit sortir victorieuse de cettc lutte. L'auteur a reconnu lui-meme , dans ses voyages en Grece ou en Italic, un grand nombre de ces constructions qui n'ont point d'analogues dans notrc pays. Partout elles offrcnt les memes caractercs; partout aussi, les traditions nationalcs en font remonter I'origine au berceau du monde. Les observations de divers voyageurs viennent a I'appui de celles que M. Petit-Radel avait faites par lui-meme. Le point essentiel qu'il a cru pouvoir etablir, c'est que ces constructions cyclopeenncs ou pelasgiques sont antei'ieures aux constructions etrusques, pheniciennes, etc., et que Ics unes et les autres offrent des caracteres fort distincts. La notice que nous annoncons ici est plus specialement des- tinee a demontrer que les nuraglics , monumens si extraordi- naires de I'ilc de Sardaigne, ne sont autres que des restcs des constructions cvclopecnnes ou pelasgiques. Cette opinion, au surplus , avait dejii ete emise dans ce Recueil par un de nos collaboratcurs ( voy. I'analyse des ouvrages de MM. Mimaut et de la Marmora sur la Sardaigne , par M. Jniaiuj Duval , Rev. Enc. , t. XXXI, p. 346), et c'(?st ce qui nous dispense d'ajouter ricn de plus. La description des nuraghes et la representation fidelc qu'en offrent les planches sont fort curieuses. L'imagi- nation est frappee a I'aspect de ces travaux bizarres des plus anciennes tribus qui ont peuple le monde. P. A. Dhfau. LirrERATLRF,. 8o5 . Litterature. 3 1 8. — * Atlas historiquc ct chronohgirjuc dcs Ulteratures an- ciennes et moderncs , des sciences ct dcs beaux-arts , d'aprcs la methode et siir le plan de I'Atlas dc A. Lcsagc (M. de Las Cases ), et propre a former le complement de cet ouvragc, par A. Jarry de Mangy, ancien eleve de I'Ecole normaie, professeiir d'histoii'e de I'Academie de Paris. Pm'Is, 1827; Jules Renouard. L'ouvrage se composera de aS tableaux : 4 tableaux ontdejaparu; prix de chacjue livraisou de 1 tableaux, 8 fr. ( voy. Rei'. Enc., t. xxxi, p. 49^ )• L'art de vivre s'ameliore sensiblement dans le monde actuel; il s'en faut bien que l'art de s'instruire et d'instruire les autres fasse les memes progres, quoique les moyens ou les objets d'instruction se multiplient sans cesse autour de nous. Cette abondance de ressources ne fait pas a la societe tout le profit qu'on en pourrait attendre, a beaucoup pres. Les faits et les decouvcrtes s'accumulent , les livres nous encombrent , les branches du savoir se subdivisent chaque jour en mille rameaux divers. Pour ceux qui cooperent activement au progres de cha- que partie , cette subdivision , qui a quclque analogic avec celle de la |)ropriete libre, offre pen d'inconveniens. II n'est pas a craindre qu'elle amene des specialites trop etroites, non plus que la propriete divisee, des fractions trop mcnucs, parce que le principe de recomposition et d'extension nouvelle opere , dans I'un comme dans I'autrc cas, a c(")te du principe de de- composition. Mais, pour la masse du public, pour ce qui inte- resse I'education et les etudes generales, cette indigeste accu- mulation de matieres historiques, litteraires, scientiGques , a veritablement quelque chose d'cffrayant. Chaque jour, quelque partie de ce qui formait autrefois le fqnds d'un bon cours d'e- tudes , selon les RoUin et les Fleury, en est detachee , soit pour suivie le tourl)illon du siecle sous dcs formes toutes nouvelles, soit pour tomber dans I'oubli de I'arriere. Un livre nouveau chasse un autre livre, plus ancien, et souvent plus solide, plus reellement rieuf: et combien d'ecrivains remplis de sens et de merite du xvi^, du xvii^ siecle, sont ainsi mis a la reforme!... Mais, qui a le tems de songer a eux? Moins limites , moins so- litaires aujoiu'd'hui, les ecrivains out peut-etre moins dc valcur individuelle; mais ils onVcntphisd'interet, comme representans du monde intellectuel inoderne dont I'horizon s'est tantagrandi, ainsi que celui du monde politiijue ct commercial. Qu'arrive- t-il? C'cst qu'on ne connait assez bien ni ccs derniers ni leurs devanciers. Ceux-ci rcstenttrop loin : les autres nous prennent de trop court; ils semblent ne fairc que passer; la critique T. XXXIII. — Mars 1827. 52 8o6 LIVRES FRA^N^AIS. trouve a peine le terns de les lire, de les classer et de leur assi- gnor des rangs. Enfin, un poeme epique est plus tot mort an- jourd'liui, qu'un sonnet dii temps de Benseiade. Aussi, I'at- tention, dissipee de la sorte, donne-t-elle lieu a d'etrange* ignorances. Rien n'etant ordonne , rien ne reste : car, dans I'es- prit comme dans un menage, on nc retrouvc au besoin que ce qui est a sa place. De la, le besoin des methodes de reduction, de recapitula- tion : le succes des resumes bien faits, etla necessite d'adapter a I'instruction generale I'art perfectionne des formes compen- dieuses, a I'aide desquelles chaque title de nos connaissances, dussent elles ne se reduire qu'a des titres, vienne du nioins se ranger a sa place dans notre memoire, et y former une case ou puisse etre deposee sans confusion chaque nouvelle acquisition que le hasard nous procure. Et si ce travail est bien fait, il se trouvcra que les csprits les plus cultives comme les plus ignorans en sauront faire leur profit. On ne sail rien qui ne puisse etre utilement compare a quelque autre connais- sance anterieure ou collaterale : de meme que nul ne sait sa genealogie de maniere a n'avoir rien a apprendre deses aieux, de ses cousins et de ses allies. M. Jarry de Mancy semble avoir concu, dans toute leur importance, les idees que nous venous de developper. Frappe du succes d'un ouvrage dont la vogue , toujours la memo de- puis pres de vingt ans, surpasse les pretentions ordinaires des plus utiles travaux, nous voulons parler de l' Atlas historiquc de M. de Las Cases, M. Jarry de Mancy a concu I'entreprise hardic d'une sorte d'encyclopedic litteraire et scientilique , squmise aux memes procedes synoptiques, synchroniques , et genealogiqucs que M. de Las Cases a su appliquer si heureu- sement a I'histoire proprement ditc. Le projet est vaste sans doutc : il ne s'agit de rien moins que de lever Ic plan de tous les travaux de I'esprit humaiu. Mais I'ardeur laborieuse de M. de Mancv, et son intelligence des secrets les plus ingenieux de la raethode qu'il s'est appropriee, seconde par les eneoura- geraens de son noble devancier, lui promettent de voir arriver k sa iin cet immense travail. A oici ([uelles en seront les divi- sions : 1° Histoiie dm langiics: Un tableau comprenant la Map- pemonde des langagrs huinains ; pourquoi n'en peut-on deter- miner encore la ^e/tealogie complete? Mais enfin on les pent classer par families, par groupes, et c'est ce qu'a fait I'auleur de la maniere la plus instructive et la plus interessante , dans ce tableau qui est deja public. — a" Littemtures nncic/mes. Cette paitie comprendra des tableaux separes pour les litteratiires LITTER AT URE. 807 orientates ; — Grecquc , tableau pi'et a paraltx'e; — Latlne , deja publie; nous en reparlerons en particulier, ainsi que des auties deja en lumiere; — Ecclesiastique , nous ne denianderons pas i M. de Mancy s'il n'entend donner, comma il est probable, que i'eglise ou les egliscs chretiennes; en ce cas, il se trou- verait omcttie une matiere riche et piquante, je veux dire la litterature des cultes non chretiens et en general le tableau des religions de toutc espece, qui, pal- leur role dans I'histoire de I'esprit bumain, meriteraient peut-etre d'etre placees a cote du tableau des laiigues et dc celui des gouvernemens. Mais I'auteur a deja bien assez a fairo : revenons au plan de son Atlas des litteratures , phitot que de Ten detourner. — 3° Litteratures moderncs. Cette classe compreiidra deux divisions, I'une consa- cree a. la litteratnrc jrancaUc , I'autre aux litteratures etrangeres, Nous aurons d'abord, pour la France, des tableaux litteraires du w(yt'« (ige ; — (susiecU; dc Fra/icoisl^^; — de Louis XIV; — de Louis XV ; — des epoques reunics de In levolution , de I' empire , et de la restauration , — enfm, un tableau historique des yr/cadeiities. Ce dernier dejapublie est tres-piquant et ti'es- curieux; c'est le chapitre amusant de I'ouvrage, et il ne laisse pas do suggerer, couune les autres, une foule de reflexions et de rapprochemcns serieux. II est seulemcvit a regretter qu'il sc borne a I'histoire de I'Acadeniie francaise et de celle des ins- criptions. — Pour les peuples etrangers, nous aurons des ta- bleaux do litterature /KiliiviMe ; — cspagnoie e( porta gaise ; — allcniandc ; — anglaisc ; — litteratures du Nord, etc. — 4*^ Sciences. Cette branche sera partagee comme il suit : Droit ancien ct moderne; — sciences mathenralicfues et physiques ; — medccine ; — geographic et voyages. Ce dernier tableau vient de paraitre, et il offre une reunion de renseigneraens qu'on ne pourrait trouver ailleurs sans de grandes fatigues; on y peat admirer, sous les alignemens et les chiffres resserres de ces colonnes, la conscience de I'auteur et la patience qu'il a mise a menager celle des savans dans leurs recherches. En menie tcips on y retrouve cette meme etendue d'horizon qui convient aux es- prits eleves et speculatifs. — 5° La dernicre partie sera cpnsacree aux Meaux-Jrts , savoir : architecture ct sculpture ; — peintare et arts du dessi/i ; — nmsiquc sacree ct profqnc. Enfin , line Table gcnerale alphabetique rer»verra taut d'objets et de noms divers ii leurs cadres respectifs; de sorte que I'ouvrage entier pffrira eo meme tenis les avantages d'un dictioiuiaire et d'un tableau universels encyclopediqucs. D'apres I'interct avec ie- quel nous voyons accueillics du public le* diverses parties deja publitcs , nous ne pouvons douter que rensembje n'en soit 8o8 LIVRES FRAWCAIS. (ligncmentappivcR-, lorsquc toutosces imposaiitt's proportioqs scront nMiiplios avcc Ic meme soiii ct d;uis le nit'inc esprit. V— G— R. 3 1 f). — * Essni stir le systcmc , qui nous retrace le tableau d'une grande catastrophe : c'est toiijours !a meme incoherence dans les idees, la meme exuberance dans les phrases. Quelque.>> passages neanmoins annoncent le gcrme d'un laieut ([uis'c^t trop hate de se pioduire, et souvent aussi un defaiil de juge- raentqui tienta I'inexperience eta I'ignorance. Comment peut- on, a dix-scpt ans , decider en qiielques -Cers les plus graves questions dont I'examen et la solution sont reserves a I'histoii-e et a la posterite ? Ecoutous uotie novice puhliciste celebrant le funeste triomphe de Tambition de Bonaparte immolant d'un, glaive parricide la liberie publique : Hifi LIVRES FRANCAIS. Brisaiit ces libertes, qui n'itaient plus ijii'uii vtVc, Sur Je sceptre conquis il depose son glaive ; La France a lui s'enchai'nc et grandil sous sa lot. Ainsi, jadis aux bords du Tibre, II fallait des lirulus avec im peiiple libra : 11 fallut un Crsa/- avec le peuple-roi. L'auteur croit justifier ainsi, par un jeu de mots, le pIiH grand crime que puisse jamais commottre le citoyen d'uii etat librc; ct continuant d'encenser son idole , il dit que Napo- leon voudrait etrcindre la terre , dut-elte eclater dans ses bras ; quil est t image du dieu de la guerre ; que son pied frappe la terre qui vomit des guerriers sous ses pas belliqueux ; que son aigle arrache a la poudre le rameau sanglant du laurier , etc. II y a loin sans doute de ce pathos aux vers du memepoofc, que nous avons cites avec plaisir dans notre cahier de Janvier ( voy. ci-dessus , p. -^55) : que M. Gerard y trouve la preuve qu'il faut au plus vite sortir de la faussc route oii il s'est en- gage. Qu'il prefere le naturel ;\ cette declamation insignifiante, dont nous n'avons que trop d'excmples. Qu'il ne se presse pas tant de publier ses vers; la loi sur la presse ne Ics tuera pas , comme il parait le craindre, s'ils sontbons ; ets'ils ressembient a ceux de ses elegies, ils niourront bien sans clle. Au reste, si M. Gerard sent veritablement bruler dans son cosnr I'amoiu- sacre de la patrie , la satire dans laquelle il a deja reussi , la satire , telle que nous I'ont laissee Juvenal et Gilbert, telle que deux jeuncs poetcs I'emploient raaintenant, est peut-e!re le. genre de poesie le plus propre a reveiller le sentiment de la dignite nationale : qu'il medite bien sur le caractere de ce genre; qu'il s'attache a bien comprendre ce qu'il vent dire ; qu'il eviteTenflure ct s'exprime naturellement; alors , nous lui garantirons des succes durables. B. J. 326. — Cantate sur les Grecs ; considerations sur le droit politique , et proposition d'une croisade en faveur des Grecs , par le conitc de Franclieu. Paris, 1827; Delaunay, In-8° dc 19 p.; prix, 1 fr. (Se vend au profit des Grecs.) Apres les productions de MM. Bcranger , Casimir Dela- vigne , Viennet , Saintine , auxquels la cause de la Grene a inspire des vers dignes de la pottique contree qui les inspirait, la cantate de M. de Frandieu sera pen recherchee : il faut I'avouer, l'auteur a etc bien mal conseille par son genereux enthousiasmc, lorsqu'il a voulu s'emparer de la lyre du poele. Quant a sa proposition d'une croisade en faveur des Grecs , puisse-t-elle etre mienx accucillie ! Mais, il faut I'esperer, LITTERATURE. 817 riieroiquc nation que M. dc Franclieu voudraif arrachcr aux batbares qui la mcnacent, libre bieiitot des troubles de la l^uerre, pourra faiie respectet" de I'Euiope entiere I'indepen- dance qu'clle ne devia qu'a ses seules vertus. I. 327. — Les Veillees Russes , par M. Heguin de Guerx.e. Palis, 1827; Feret, au Palais-Royal, galerie de Nemours. In- 1 2 de 25o pages; piix , 3 fr. 5o c. Ce volume se compose d'un Coup-d'ceil sur la lltterature russc , qui occupe les pa^j. i a Sg, d'une nouveile en prose , imitee de Joidovsfy , intitulee Ic £ois dc Marie , et de ireize morceaux cmpruntes a neuf poeles differens, et sur lesquels six sont traduits en prose et sept sout imites en vers. Les personnes qui veulent avoir une idee generale d'une litterature encore pen connue en Europe peiivent lire avec fruit ie Coup-dci'il sur la litterature ru.xse, dont elles sauront gre sans doute a I'auteur d'avoir fait preceder ses imitations. Nous de- vons cependant rectifier inie assertion de M. Heguin, au sujet de VHistoire de Russie par Karamsin : « Le seul regret ( dit-il p. 32) que Ton eprouve apres avoir lu cette histoire, c'est que I'auteur, par des motifs qu'il ne nous appartient pas de juger, se soit arrete a la mort de Jean-le- Terrible , en i584. •» Uepuis la publication du t. ix de cette Histoire, qui s'arretait effecti- vement a I'epoque mentionnee par M. Heguin, et dont nous avons annonce, il y a long-tems, la traduction en francais (voy. Rei'. Enc, t. xix, p. 688), les t. x et xi, dus a la plume du meme d-crivain, et qui eonduisent cette histoire jusqu'a la fin du regne du faux Dmitri (en 1606), ont paru et viennent a leur tour d'etre traduits (1). Nous apprenons avec satisfaction a nos lecteurs que la mort du celebrc Karamsin n'arretera point la publication de cet ouvrage, et que I'empereur de Russie, au- jourd'hui regnant, a temoigne ledesir qu'un aussi beau nionu- nnment historique et litteraire fut acheve sous ses auspices. Souhaitons que I'ecrivain qui sera charge de la continuation de VHistoire de Russie ne soit arrete par aucun obstacle dans cette noble tache, et qu'il continue a la remplir avec cette indepen- dance et ce talent qui caracterisaient son predecesseur. La nouveile qui suit, et qui occupe les trois quarts du volume, avait deja paru en 1824 , sous le nom d'Oiislad, ou le Bois de Marie ( voy. Rev. Enc. , t. xxiii, p. 455 ). Celui de nos collabo- rateurs qui en a rendu compte lui a reproche de manqucr d'originalite et d'etre trop francaise. «Le style de son traducteur, (i) Paris, 1827; Bossange p^re. 8i8 LIVRES FRANCAIS. on de son imit.ilouf, coutimie-t-il, coutiibiio encore, par sj» pu- n'te ct son elt'giince, ;\ lui oter tout air otianger. >■ Nous crai- gnous que I'habile critique n'ait pas bicn fait coniprondr*; sa pensec; la pnretc et l\''li'gance soiit tlenx qualiU's qui ue sent a dcdai^n(;r dans auciui ouvrago, et qui nc sauraicut nuire a la fuU'lite d"un« traduc-tion, a jnoins de supposer que, I'orii^iual nianquant de cos deux qualiles, \v tratlucleur ne doive , avatit tout, s'ellorcer de les bannir de son style pour rester plus rigou- reusement fidele a son aiueur. Or, _j« ne crois pas que M. H. P. ait eu Ic nioycn de comparer la nouvcUe incnic de Joukovsky , avec I'iniitation qu'cn a donnee M. Hej^uin, ct nous pouvons Tassun-r que les oenvres de cot auteur russe, place par ses com- patriotcs dans ie nombre des ecrivains roniantiques parce qu'il a surtout iaiite les poetes allcmands, ne sout dejjourNues, du reste, ni de purete, ni surtout d'elt^gance. Quant au re- proche que le critique fait a cettc nouvellc de mau(iuer d'ori- ginalite et d'etre trop francaise, il nous scmlile qu'il s'est trop hatu de conchire du j^eneral au particulier. II est vrai que les traduclions ou imitations du russe que Ton nous a donnees jusqu'ici ne portent pas un cachet d'ori^inalite aussi prononce qu'on pouvait s'y altendre. Mais, d'abcud, il faudrait s'enlendre sur ce mot iVorigina/ite. Lc cneur huniain est partout le meme; parlout aussi les passions de I'homaie sont les niemes; elles se modifient seuleUient d'apres les mosurs parttculieres a lei ou a tel people. L'ecrivain qui se livre specialemcnt a I'etudi; du coeur humain et a la peintiu e de ses passions en i^t'neral a done pour domaine I'univers entier; el ses tableaux , pour elre vrais, doivent etre compris de tout le monde. Les specialites sont le- servees a celui qui s'occupe de descriptions locales , physiques ou morales, au nalaralistc, au les^isfateur , a rhislitricn, au pcintre des niceurs enfin ; niais, pour bien traduire Kurs iders, il faut reunir a la connaissance pariaitu dc leur lnn;;uc celle dn Hujet qn'ils ont traite. De la diKiculte de remplir ccsdeux con- ditions indispensablcs a du iiaitre le grand nombre de mau- vaises Iraductii.ins dont nous soninics inoudcs. Si I'ou joint a cctte difficulle le penchant qui nous porte uaturellement vers ies idees dans lesquelfcs nous avons etc eleves, on ne s'etonnera pas que nos traductcurs aillent choisir, pour la plupart, dans les chefs-d'oeuvre des etrangers, non pas ce qu'ils pees. Les meuioires de la Societe de Lille se sont accumules dans I'espace de trois ans, et ils comprennent plusieurs divisions des connaissances humaines, des theories et des applications, de profondcs recherches et quelques-unes de ces productions le- geres auxquelles on ferait bien d'attacher moins d'imporlance. Celles-ci n'occupent que tres-peu de place; I'utile domine, I'ex- cellent abonde; on y remarque avec satisfaction que les sciences niathematiques sont cultivees a Lille par des hommes que leurs occupations habituelles senibleraient eloigner des paisibles meditations du cabinet, et sui tout des pures theories. Nous avions entrepris de mettre sous les yeux de nos lecteurs une analyse de ces travaux divers, dont les uns enrichissent les sciences, et les autres donnent aux arts de nouvelles j essources, ou des moyens de mieux faire par les procedes connus : mais les limites dans lesquelles nous devons nous renfermer ne nous permetlent pas d'inserer ici , dans un seul cahier , un aussi vo- lumineux article. Cependant, nous ne devons point soustraire a nos lecteurs, et surtout a ceux d'eutre eux qui se livrent a I'etude , la connaissance ou I'indication de plusieurs de ces memoires , dans lesquels ils trouveront des materia ux, de I'ins- truction, iles methodes et des exemples de leur application: nous avons pense qu'il serait plus utile d'isoler ces memoires, de les considerer comme des ouvrages flistincts, de rapprocher coux qui sont analogues, afin que I'on piit mieux apercevoir ce que I'on doit a chaque auteur. Ces analyses partielles dis- tribuees daus plusieurs cahiers seront plus completes; elles feront mieux senlir la ueccssite d'approfondir chaque sujct, au lieu de se borner a un coup-d'oeil rapide et superficiel , disposition de I'esprit et du jugemcnt que les auteurs des re- cueils periodiqucs favoriseraient, s'il ne s'imposaicnt poiqt 83a LIVRES FRAIVCAIS. l'ol)lij;ation de mediter sur les siijcts traitt's dans los oiivragcs doiit ils rendont coniptc, et dc joindre leurs reniaiqucs u I'ex- position des doctiines de cos onviages. Nous troiivoiis dans les menioircs dc la Sociere de Lille plusicurs questions traitees avec un falonh rcniarquable, telle que celle dc la navigation pai' lavapeur, dc la nianiere d'einployer la vitcsse d'un cou- rant poiu' Ic remonter, ou jiour acceleicr la descente. des niovens de desiiifecter les eaiix d'un puits, etc. Nous les passe- rons successivenient en levuc avec les developpemens neces- saiics. Kos iecteurs jugeronl ainsi de I'estime que les travaux de cette Societe doivent obtenir par des litres aussi nombreux etd'une aussi grande importance. Y. 340. — * Memoires et dissertation.'! sur les antirjuites natio- nnlcs et etraiigercs , publics par la Societe royale des antiquaires (le France. — Tome VI. — Memoires sur les langiies , dialectcs et patois , tantde la France que des aiitres pays. Paris, 1826; Gau- thier et C'<=, libraire, rue et hotel Serpente, n" 16. In - 8^ avec tables; prix, 10 fr. Les Gaules etaient partagees en trois confederations , la Belgiqiie , VJquitaine el la Ccltlque ; Cesar nous apprend qu'elles differaient entre elles de moeurs, de lois et delangage; files se subdivisaient eu un grand nombre de peuplades, et Ton peut des lors se figurer corabien il s'y etait introduit do dialectes. Cos idiomes particuliers furent modilios a I'infini par diverses causes, telles que retablissemcnt des Plioeeens aitx Bouches-du Rb6ne,lesrapportsque le commerce et les guerres etrangeres clendirent au dehors, les conquotes des Piomains , les transplantations qu'ils firent des debris de nations vaincnes sur les rives de la Mediterraoee, sur les bords du Rhin , de la Moselle, etc., les invasions des Francs, des Bourguignons, des Huns, des Sarrasins , des Normands , des Saxons, etc. etc., les peuplades qui sont volontairemcnt restees sur le sol de notre patrie, ou que les Merdvingiens y out hxees. La langue ro- mane et la langne tudesque se sont parlage la France; la pre- miere regnait au Midi, la seconde au Nord et dans une (orte partio de I'Est; on remarque particuliorement pros de la Mo- selle les villages qui en formont encore, pour ainsi dire, la demarcation. La premiere a ete aussi designee sous le nom de ian^ue d'Oc, et la seconde sous colui de langue d'Or/. Des provinces entieres ont ete long-tcms soumisos aux Anglais; la victoire et les traites en ont reuni succossivement d'autres au royaume. L'histoire a signale les chaugemens politiques les plus notables. Mais une foule de details locaux est restee in- fonnue. L'elude des dialectes et des patois conduit a retrouvor MEMOIRES ET RAPPORTS. 833 la filiation des peuples , celle de leurs mceiiis, de leurs arts, a suppleer au silence de leurs annales. On voit quelle est I'im- poitance de cettc sorte d'etudes. Le bureau statistiqne du mi- nistere de I'inteiieur s'en etait occupe des I'annee 1807, et il avail pris pour texte la parabole de I'enfiuit prodi'j;ue. La So- ciett; royale des aniiquaires a repris ce travail et I'a suivi avec perseverance; on en trouvo des fragmens dans la collection de ses menioires. Les savans atfendaient avec impatience qu'elle coordonnat en quelque sorle les riches materiaux de cette es- pece, qvi'elle avait dans ses archives. Elle a dignement repondu a cet appel par le volume dont nous allons rendre compte. La Societc a commence a jeter les yeux sur I'Orient, qui fut 'line terre classique , mcme pour les Grecs, et 011 les sciences etaient consacrees, puisque les pretres en eiaient les institu- teurs. M. CIirbied, niembre residant, aconfere I'un avcd'autre deux manuscrits de la version arnn'-nienne, faitedanslev^siecle, de la grammaire de Denis de Thrace, contemporain de Pom- pee ; on montrait cette grammaire dans les ecoles d'Athenes et d'Alexandrie. L'armenicn est plus complet que le texte ori- ginal , public par Fabricius dans sa Bihliotheca grceca, t. vii ; M. Cirbied donne ce texte , ia version arnienienne,et une tra- duction francaise, avec des notes, des eclaircissemenset une excellente preface. M. I abbe de Labouderie, vicaire-general d'Avignon , qui cultive avec un egal succes les lettres et les sciences, et qui est particulierement verse dans la connaissance des langues orientates, offre la traduction enhelireuet en patois auvergnat, du livre de Pvuth, qu'on attribue generalement a Samuel. Nous regrettons de no pouvoir qu'indiquer les articles qui interessent vivement le lecteur. — Extiait d'un glossaire des differens patois en usage dans le departement des Vosges; par M. Richard (des Vosges) , associe correspondant. — Liste, en patois deDommartin, pres de Remiremont, de- partement des Vosges , des ^09 mots proposes par la ci-devant Academic celtique pour etre traduits en patois ; par le meme. — Chansons en patois du pays dc Bresse. — Vocabulaire de la langue rustique et populaire du Jura; par M. Moxnier , associe correspondant. — Continuation des rccherches sur le village de Courtisols, departement de la Marne. — Rccherches sur If s anciens noms de lieu on Normandie ; extrail d'une lett.-e de M. de Gekville, correspondant de la Societe royale des antiqtiaires de France, a Valogne. — Liste alphabetique de quelques mots en usage a Rennes (Ille et Vilaine }, capitale de la ci-devant Bretagne, avec les differentes tournures de phra.ses en usage dans ce pays, principalement dans la classe indigente. 834 LIVRES FRANC/VIS. terminee par quelques details sur les anciens droits qui etaient exerces a Rennes , tels que la Quintaine , la Bouiliie urcee , le Saut dcs marieesa Saint-Helier , le Bocuf vilcct la Chevauchte de Madame I'Abbesse, reciieillis et misen ordre parM. F.-A. Le MiKRE DE CoRVEY, chef Jc bataillon. — Conp-d'ceil surl'einploi de la lantjue latine dans los actes anciens, et sur sa prohihition au xvi^ siecle ; par M. Bkrhiat Saint-Prix , membre residaiit. — Recherches historiques sur la lant,'ue catalane; par F. Jau- BERT DE Passa , correspoiidant de I'lnstitut et de la Sociele royale des antiquaires de France. — M. Coquebert ue AIont- BRET, I'un des inembres de cette Compaguie, a donne beau- coup de soin au classement des versions de la parabole de I'enfant prodigue , transmises au ministere par les prefets, ou ik la Societe par ses corrcspondans. II a place d'abord ceux de la lansjue d'OyI, et specialeinentceux du dialecte wallon ; il a passe ensuite a la langue d'Oe ou romane; on regretle qu'il n'ait pas place eu tete dece recueil la carte qu'il a faite de la France^ divisec d'apres les nuances des langages (ju'ony parte, et que la crainte d'avoir un volume trop fort ait empeche I'insertion de tous les materiaux que possedait la Societe. On doit a M. I'abbe Labouderie, i"^ le Sermon curicux du cordelier Michel Me- not sur la parabole de I'enfant prodigiie ; ce Sermon est en latin macaronique et d'une extreme rarete. 2" La parabole traduite en patois auvergnat, avec la version syriaque en regard. Nous ne placerons pas ici d'observations sur cette version, ni sur les autres que la Societe des antiquaires a publiees. Nous n'en trouvonsqu'une pour le departement des Hautes-Alpes, qui est si richc en ce genre ; mais le lecteur peut y suppleer, en con- sultant a cet egard Vhistoire , anticjuites , usages, dialcctes des Hautes-Alpes; (Paris, Septembre 1820; Fantin. Par M. de La- DoucETTE, membre de la Societe des antiquaires). Nous croyons avoir prouve que le tome vi des Memoires de cette Compagnie merite a un tres-haut degre I'attention des savans. lis ont deja vu par I'article insere dans la Revue Ency- clopedujue { i. xxxi , p. 5ia j, combien les articles archeo- logiques du tome vii etaient de nature a exciter leur interet. Ce dernier volume se trouve chez M. Bottin, redacteur et pro- prietaire de X Almanack du Commerce, rue J. -J. Rousseau, n" ao. I'*- Outrages periodiques. 341. — * Journal des progres des sciences et des institutions medicates en Europe, en Amerique, etc., con tenant 1° une Revue medicate etrangere; 2" un repertoire general des fails, I OUVRAGES PERIODIQUES. 835 experiences et observations; 3** une serie de monographies oriij;inaIes sur les diverses parties de la medecine, etc.; par une Association de inedecins. V^ volume. Paris, 1827; Villeret, edileur , rue de I'EcoIe de Medecine. In-8° de 19 feuilles d'inipression. L'abonncment a ce nouveaa journal differe de ceux aiix- quels on est accoutume, et offre aux abonnes des avantajjes particuliers : ils sont actionnaires dans I'entreprise du journal. Le nonibre des actions est de 1,000, de 3o fr. cliacune,et la raoitie du benefice, reparlie entre les 1,000 actionnaires, fonne un dividende dont il est tcnu compte, chaque annee. Ainsi, « dans la supposition la plus defavorable, on ne court d'autre risque que ceiui de s'etre abonne a un journal pour 3o U\ par an. » Le journal paraitra tons les deux mois, par caliiers , qui contiendroiit an moins autant de matieres que 25 feuilles d'imprcssion ordinaires (i). Le but des redacteurs est de montrer a tous ceux qui culti- vent les sciences niedicales, ct qui j)euvent contribiier ^ leurs proi^res , comment ou les seconde dans toiites les parties du monde savant, de les mettre en correspondance avec leurs collaborateurs les plus eloignes, et d'etablir , ou de ramener autant qu'il est possible, I'unite de tendance, la cooperation la pins efficace de tous les savoirs et de toutes les forces in- tellectuelles, rnniforniite des prcgres, et par consequent, leur plus grande utilite. Comme la medecine n'est pas seulement une science, mais encore un art; commc ce sont les applica- tions de la science qui rcpandent ses bienfaits et en font sentir tout le prix, I'instruction medicale occupera dans ce rccueil une place iniportante. Que les redacteurs agrandissent encore leur plan; qu'ils ne craignent pas d'entrer dans le domaine (le I'economie politique, relativement aux hopitaux, aux se- cours des malades, aux epidemics, a la salubrite pnblique, etc.; qu'ils abordent aussi la medecine legale, et que le flambeau de la veritable philosophic poursuive les erreurs que I'habi- tude, ou peut-etre des vues politiques entretiennent encore dans cette partie de la legislation, (i) La Revue Encyclopedique a. donne jiisqu'ici pres de 4o feuilles d'inipression, tous les deux mois, pour 4^^ fr- par annee. Aucun ou- vrage periodique, sans exception, n'a ete public pour un pri.t si modere , surtout si Ton consid^re la varicte et I'universalite des ma- tieres que celui-ci embrasse , et les difficult^s iniinies do I'execution d'un plan qui comprend toutes les nations et toutes les parties des eonnaissanccs humaines. 836 LIVRES FRANCALS. La (listiibittion ties maticres, telle qu'ellc est etablic dam ce recueil, laissera pent-clre qiielqiies iiicertiludcs : on iic saiira pas toujours a quelle division alti ibiier certains articles. Mais, comment eviter oet embai las dans iine science qui em- brasse un si j^rand nombre d'objets divers? 11 y aurait pcntetre encore plus d'inconvenicns dans la muUiiude des subdivisions. D'aiirctirs, lout journal pent subir, a cet eyard, des changcmens successils, et arrivei-, par une suite d'experiences, a la distri- bution la plus commode pour ses Icclcurs. Celle que les rcdac- teurs de ce journal ont adoptee est exposee dans le titre. La premiere partie (^reyuectran^ere) n^est pas composee senlemcnt d'articles iraduits; on y trouve aussi des dissertations sur Ics doctrines particulieres de quelquos medecins etrangers. Lo pren^ier cahier cpie nous avons sous les yeux contient une exposition raisoim^-e de la doctrine hoinoeopatique de M. lo docteur Hahnemann, par M. Hollard, qui a rapproche des opinions du docteur saxon celle de MM. Hufeland el LicfiW.n- sicedt sur le meme sujet. A la division des monoi^raphics originales , on trouve iin expose des progrc.t et de Vetat acluc! de la science sur cetle question : « I'angine gangreneuse et le croup, consideres sous le rapport de I'etat local qui les cons- titue, sont-ils identiques? » L'auteur de cette dissertation est M. Deslandes. Nous regrettons que les arlicles sur les insti- tutions medicales , conlenus dans ce meme cahier, soient beau- coup trop etendus pour notre Ilei'ue : le plus tot qu'il nous sera possible, nous en offrirons le resume a nos Iccteurs. Si dans les cahiers suivans le repertoire est constamment aussi rich(; en fails qu'il I'est dr d'avoir triomphe avec honiuMir, on repoussant la Taniise qui s'etait fraye un passat,'e dans nos travaux. Alois, comme le liniacon, nous nous soninies retran- chesdans iiotie coquille, dont nous avons bien ferme les j(jints. Dans Oct elat nous avons cntcndu le fond de la riviere, ou une cavite s'etait d'aboid foiniee, tombcr avec violence snr nos tetes. Une seconde secoussc eut moiiis d'effet; ensuite le gra- vierdu fond de la riviere est venn jusqu'i\ nous. Nous somnies enfin parvenus, malgrece melange, a le bien tapisser, et nous voila maintenant a vingt pieds au-dela, sans eirc incommodes par une seule goulte d'eau. Nos ouvriers n'ont jamais mauifeste la moindre inquietude : n'avancant que Ires-lentement, ceux des cadres infeiieurs dormaient bien tranquillement, tjmdis que ccnx du troisieme etagc etaicnt en nage par les efforts qu'ils faisaient pour dominer I'eau qui penetrait. Mon fils a couche la treize nuits; j'y ai couche aussi, et, je I'espere, ce sera une des plus belles pages de notre journal. » Le rapport de M. Schlick (i) sur ce monument de I'audace qu'inspire le genie, seconde par les arts perfectionnes, contient de precieux details sur les moyens d'execution. II est imprime chcz M. Firmin Didot avec le luxe que merite un recit aussi interessant, dans le format in-4", sur papier velin; on y a joint une/j/rtrtc/'ierepresentantle plan des ticux galeries, et une coupe en long. Une coupe transversale, dcssinee plus en grand et en perspective, est placee au bas du litre et tient lieu de vignette. L'ceuvre de M. Brunei appartient aux beaux-arts par le pou- voir qu'elle exerce sur I'imagination, par la grandeur de la pensee qui I'a concue : il convenait a tous egards que le dessin et la typographic lui rendisseut un hommage digne de I'un et de I'autre. Suite de la Revde sommaire ties Societes savantes, litte- RAIRES , INDUSTRIELLES , PHILANTROPIQUES , CtC. , df la Graride-BreUigne. (Voy. ci-dessus, p. aSo-aS/jCt, p. 606-607.) Institution Pliiloniatiquc, ( Philomiitic Institution V — Cette (i) Paris, i8a6; Firmin Didot. Iu-4° de u pages, avec planche. ILES BRlTANiMQUKS. 8/,7 societe a etc etablie en 1807; son but est la (.-ultnre des sciences , des arts et des lettres ; elle a beaiicoiip d'analogie avec X Athenec de Paris. On y fait des coiirs ou des lectures tons les vendriHlis ; le mardi est consaere a la discussion dc diverses questions. II y a , comme dans Tetablissement de Paris, des salles de lecture et de conversation. On est admis dans cette societe sur la presentation de deux niembres ; la souscription annuelle est de deux guinees et deniie (66 fr.). MM. Birhbech , Brouf;ham , Lajfon-Ladeh'it , Lasteyrie , etc., sent membres honoraires de cette institution, dont M. Coli-yer est le president. Lc P Idiomatic journal (voy. Rev. Eric, t. xxviii, p. 1 55), est public par son comite. Societe' medicale. {^Medical Society). — Societe medico-chi- rurgicale ( Medical and chirurgical Society \. — Ce fut au com- mencement du xviiie siecle que furent ouvertes a Londres les premieres ecoles d'anatomie ; et ce fut seulement en 1778 que la premiere societe destinee a la propagation et a I'avan- cement des sciences medieales fut etablie dans cette capi- tate. II existe aujourd'hui a Londres deux etablissemens du meme genre : I'un et I'autre composes de medecins, de chirurgiens, de pliarmaciens, etc., ont egalenient pour but de seconder les progres de I'art de guerir. La i)remiere de ces deux societes possede un vaste emplacement ofi se reunissent- les membres pour faire des experiences et pour donner des consultations ; on y trouve une bibliotheque, composee de plus de trente mille volumes. Cette societe en- courage par des recompenses pecuuiaires les decouvertes utiles faites en pbysiologie et dans les sciences medieales. La societe medico-chirurgicale n'a ete etablie qu'en i8o5 , trente-cinq ans apres la precedente. Elle se propose le meme but; mais elle est moins cclebre. Les recueils intitules : Quar- terly journal of the medical sciences , Medico- chirurgical Re- view, London medical and jihysical journal (voy. Rev. Enc, t. XXVII, p. 768 et 769, et t. XXVIII, p. 802 et 8o3 ) renfer- ment I'analysp des travaux de ces societes. Societe phrenologiquc [Phrenological Society ). — Cette so- ciete , fondee il y a peu d'annees , occupe deja nn rang dis- tingue parmi les corps savans de I'Angleterre. Son objet est de faire connaitre , d'examiner et de discuter le systenie des doc- teurs Gall et Spurzheim , qui, vivement combattu dans I'ori- gine par la phipart des journaux anglais , a maintenaut trouve de nombreux et pnissans defenseurs. La societe-niere existe a Edimbourg, ou elle public le journal phrenologiquc, (Phreno- logical journal), recucil tres-estime qui paraittous les trois mois. 8/,8 EUROPE. C'est le Panoramic miscellany, qui rcml complc dcs tiavaux dc la societc de Londrcs. F. D. RUSSIE. Saint -Petersboiirg. — Academic imperialc dcs sciences. — Questions projtosees a I'occasion tie la fete seculaite de ['Academic , celebree le 29 decenibre 1826 (Voy. ci-dessus , p. 607.) — II. Question d'/tistoire. — «Dovclopper les suites que la domination des Mongols a cues pour la Russia , qui lui ctait soumisc, et faire connaitre I'influence qu'elle a exercee sur Ics relations politiques de I'etat avec le dehors, siu- sa constitution, son administration et sur la civilisation du peuple russe. u La solution de cettc question dependant d'une connaissancc parfaite de I'etat moral et intcllcctucl des deux peuples, a I'epoque de I'invasion, et avant rexistence des rapports intimes que cctte derniere etablit entre cux , on desire que la situation interieure de la Rnssie et ses relations a I'exterieur avant la conqiiete des Mongols soient retracees avec lldelite, et, qu'en rapprochant toutes les donnecs que nous fournissent les chro- niques russes et les sources orientales, aussi bien que celles qui appartiennent a I'Occident, on examine quelle etait, a la meme epoque, la situation du peujile conquerant et la natuie du joug qu'il imposalt aux pays soumis a sa domination, pour passer ensuite aux changcmcns operes dans I'etat de la nation russe pendant le tcms que dura cctte soumission. — III. Question d'economie politirjue. — II estconnu que le prix courant des produits agricoles de la Russie, qui s'etait con- stamment eleve dcpuis le milieu du xvii^ siecle, a commence a baisser dcpuis quelques annees. « Quelles peuvent etre les causes de ce changement? Quelle en est I'epoque precise pour chacun des produits les plus importans, et dans quelle pro- portion leur prix a-t-ilbaisse, soit dans I'interieur del'empire, soit dans le commerce cxlerieur? Est-il vraisemblable, qut; cette baisse durera? EnQn, quelles sont les ressources que la Russie pourrait trouver dans son sol et dans son Industrie pour reparer les pertes qui en resultent pour le revenu national ? » Le terme du concours de la question d'histoire est fixe au i^"" Janvier 1829, et celui de la question d'economie politioin- I'autre de ces deux questions. Outre ces trois questions, I'Aeademie propose encore deux questions d'histoire, dont les prix, de 100 ducats chacun, out RUSSIE. 849 «'t«- deposes ii I'Academie par des personiies qui s'interessent aiix sciences, et particulierement a Ihistoirc de I'empire. Les prix seront dtcernes, d'apres Ic juyenient dc rAcadomie, pour Ic terme du i'"'' Janvier 1829. — lY . Prix propose par S. E. M. le president. — «Trouver les rapports qui existent entre le droit russe le plus ancien et celui des autres peuples d'origine slave. Une comparaison des fragmens de ces droits divers justiiic-t-elle la supposition que les peuples issus de la grande famillc slave sont tons partis des mcmes principes fondamentaux de droit ? Et si cette question est rcsolue affirmativcment, quels sont les points ou il y a diffe- rence essentielle entre le droit geneial de ces memes peuples d'origine slave, et le droit romain, ainsi que celui des Germains? « II convient peut-etre de rappeler a ce sujet I'ouvrage de M. Ewers sur le plus ancien droit des Russes, qui pourra servir avec avantage dans la discussion d'un des points principaux renfermes dans cette question. — V. Prix propose par un anonyme. — « Faire connaitre les inonumens du droit russe le plus ancien qui sont parvenus jusqu'a nous, et en indiquer les sources. » Pour arriver a la solution de cette question, on commencera par proceder a la recherche de tous les nionumens de la legis- lation russe anterieure au xiv^ siccle , tels que des codes de lois entiers ou des lois et des fragmens epars, contenus dans les chroniques du tems, ou conserves isolement dans des copies. On soumettra ces pieces a un examen critique, tant de leuv idiome que de leur contenn. Ce travail sera suivi d'une com- pai-aison des lois de rempiro d'Orient et de celles des peuples germains, nommement des legislations anglo-saxonne, frise, scandinave, d'un cote, et de celle des Russes de I'autre, en tant que cette derniere aurait ete puisee dans celles-la. L'Academie invite les savans de toutes les nations, sans en exclure ses membres honoraires et correspondans , a concourir pour ces prix. Les academiciens seuls, appeles a faire la fonc- tion de juges, sont exclus du concours. Les auteurs n'ecriront point leurs noms sur leurs ouvrages, mais seulemcnt une sentence ou devise, et ils ajouteront a leurs memoires un billet cachete , qui portera au dehors la menie devise, et au dedans le nom, la qualite et la dcmeure de I'au- teur. On n'ouvrira que le billet de la piece couronnee; les autres seront bniles sans avoir ete decachetes. Les memoires doivent etre ecrits d'un caractere lisible, soit en russe , en francais , en allcmnnd ou en latin , et ils seront adresses au secretaire perpetuel de I'Academie, qui delivrera 85o EUROPE. a la personne iiuliqiiec par I'autenr anonyme un rcru iiiai*- qiic dc la devise et dii niiim'-ro dont il aura cote la piece. Le nu'iTioire coitroniu' est iine propriete de I'Acadcmie, et raiitciir ne saiirait le fairc imprimer nulle part sans sa per- mission lornielle. Lcs autres pieces de concours peuvent etre redeniandees au secretaire, qui les remettra, a Saint-Peters- bourg, a la personne qui se presentera chez lui avec uue pro- curation de I'auteur. NORVEGE. Organisation j)oliti(]ue. — Un journal snedois , V.4)gus, a repandu un bruit qui semblcs'accrediler en Norvege. On croit (jue, parmi les propositions que le roi presentera a la diete actuellenient reunie a Christiana, il y en aura une tendante a ce que S. M. soit antorisee a suspendre, dans certains cas , les fonctions (hi gnuvernenr-grneral du royaume, et a confier an conseil-d'elat, pendant la vacance , les attributions de cette charge eminente. On est fonde a croire que des considerations d'une economic extremeincnt louable sont au nonibrc des mo- tifs qui determineront celle jjroposition; et, sous ce rapport, elle sera accueillie par la nation avec reconnaissance. Cepen- dant, la proposition ne pouvant etre presentee a la presente diete que pour elre discutee, adoptee ou rejetee en i83o par la diete prochaine, il est probable que, dans cet intervalle, le roi adoptera une mesure qui depend de lui seul, et qui rendra la proposition encore plus populaire. Un paragraphe de I'art. 14 de la loi fondamentale , dit: Que le roi pent nommer, pour les fonctions de gouverneur-general dn royaqme indistincte- ment, un Norvegien ou un Suedois- Jusqu'ici, aucun IVorvegien n'a encore ete honore de cette marque de la confiance royale. On est persuade qu'en nommant un citoyen de Norvege pour ces hautes fonctions, ne fusse que pour une seule annee, le roi faciliterait beaucoup le sueces de ses intentions honorables et bienveillantes, et fortifierait en meme tems I'altachement invariable que le peuple IVorvegien a constammcnt montre a ses princes. Heiberg. DANEMARK. Nouvelle Sociele d' encouragement pour la litteratiire danoisc. — Le 28 Janvier dernier, jour anniversaire de la naissance du roi, il a ete forme, a Copenhague, ;me reunion dont I'objet est d'encourager la composition et la publication de bons ou- vrages littcraires et historiques dans la langue du pays, et de DANEMARK. — ALLEMrosc, couronnes par elie. II parait que cetfe sociele n'existe plus, on que, du moins, elle a sus|onse dun en Hint de i3 ans, a qui Ton demandait si, dans la supposition qu'on le renvoyat de la maison, il continuerait a voler : "Non, dit-il, si je trouve du travail, et oui, s'il me faut resler dans I'oisivete et le vagabondage, i' Ces mots reiifermeut une grande veiite, dont robservation parait d'abord devoir echapper a un enfant aussijeune: c'e.st que ce sont le plus souvent les seules circonstances qui font I'bonnele hommeou bien le scelerat. Les enfans que I'asile de Koenigsberg renferme recoivent chaque jour des lecons de lectme, d'ecriture et de morale reli- 85a EUROPE. yieuse, et, en outre , ils sont cxerces, soit dans le jardin de la maison, soit dans des ateliers , a divers travaux mecaniques, oti a I'apprentissage d'lin metier qui, jilus tard, pourra suffire a leurs bcsoins. J'ai recu, avec le journal d'oii j'ext^ais ces details un exem- plaire desstatuts de rAssociation, dontle premier but a ete I'e- tablissement de I'asile dont il vicnt d'etre question. Lcsliommcs ks plus respectables , les plus eminens en dignite , se sont charges de le dinger et de I'inspecter. Je dois signaler, parmi les dispositions les plus sages de cos statuts, ce qui concerne les soins que I'Association se propose de prendre des enfans qui sortiront de I'asile. — Agreez,jc vous prie, etc. Villerme,d. m. RuDOLSTADT. — Fondatiou pliilantropiquc. — II existe dans cette ville, depuis troisans,un etablissement pouV Tinstruc- tion de pauvres pctites fiUcs, fonde et dirige par une veuve, jyime Hcmictte de Wcrmb. Cette dame bienfaisante placa d'abord deux enfans cliez la veuve d'un bourgeois ; main- tenant il s'en trouve cinq qui y sont vetus , nourris , ele- vcs et instruits. Sa recette, provenant des contributions vo- lontaires, s'est elevee, dans la premiere annee, outre les effets donnes en nature, a 109 rixdalers; dans la seconde, a 94 rixdalers ; dans la troisieme, a 1 5o. La recette se trouve a peu pres au niveau de la depense. Puisse cette foudation phi- lantropique, quelque modeste que soit son commencement, prosperer et s'agrandir, et faire naitre I'idee de former des etablissemens semblables dans beaucoup d'cndroits ovi ils ne seraient pas moins necessaires. Jh. de L. HoNGRiE. — Jouinnux litteraires. — Statistlque des hautes ecolex. ■ — On compte dans la Hongric neuf ouvrages pe- riodiques consacres aux sciences et aux lettres ; savoir : I. Ttiddmanyos gyiijtemeny. — Recueil seientifique pour les sciences physiques et mathematiqucs; I'histoire, la philologie, la statistique de la Hongrie, la critique des ouvrages litteraires, les avis, etc., public par mois en un volume in-S" d'environ i^o pages. Le redacteur est M. Thaisz, avocat, a Pest. Ce jour- nal existe depuis 1817. 1. Szcp litcratura. — Belles-lettres. Brochure in-8° de 16 pages, qui parait chaque mois avec le journal precedent , depuis 1 82 1. 3. Feb6 Magyar Orszngi Minerva. — La Minerve de la Haute-Hongrie ( histoiie, jurisprudence, physique, mathema- tiqucs, philologie, belles-lettres ). Recueil trimestriel. i vol. in-/,° d'environ i3o pages, publieaKassa;redigeparM.DuLHAzv, bibliothecaire du conite Joseph Desewffy. ALLEMAGNE. 853 l^. Elet es literatura. — La vie et la litteratiire ( philosophic f\ poesie ). Journal trimestriel ; 4 vol. in-8" pour Tannee 1826, formant ensemble 3i2 pages. Rodacteurs, MM. Szemeee et KOLCSEY. 5. Hasznos mulatsagok. — Amuseniens utiles ( Industrie, anecdotes, avis, annonces, etc.). Ce journal, uni au journal politique Hazni j' kulfoldi Tudositasofc , parait a Pest , deux fois par semaine, par numeros de 8 pages in-8". Redacteur, M. KULTSAR. 6. Ked\'eshed6. — L'Amusant (belles-lettres, industrie ). Journal hongrois, public a Vienne, annexe au journal poli- tique Magyar Kurir (Courrier hongrois). 7. Geineinniitzige Blatter , feuilles d'utilite publique, unies au journal politique allemand : Vereinigte OJner und Pester Zeitung ( gazette reunie de Bude et de Pest), parait ii Bude, deux fois par semaine ( Critique des ouvrages litteraires , belles- lettres, industrie, avis, etc. ). 8. Niitzliche Unterhallungsbldtter. — Feuilles utiles et anau- santes ( belles-lettres, industrie, anecdotes, avis, etc.), reunies au journal politique dW^xaz^XxA.: Presburger Zeitung {Q,da,Q\\.Q de Presboiirg ). 9. Journal latin ^ politique et litteraire, qui parait egale- ment a Presbourg. Nombre des etudians qui out frequente les ecoles latines en Hongrie pendant I' annee 1824- I. Catholiques. ( Sur une population totale d'environ sept millions (i). Dans I'lmiversite de Pest 1 169 Dans Ics quatre Academies de Presbourg, deRassa, de Gyor et de Nagy-Varad 1^47 Dans le lycee de I'archeveque d'Erlau 4uo Dans les deux ecoles philosophiques de Szeged et .Sz.ombathely 48 r Dans les cinq gymnases du premier ordre 2327 Dans les quarante-sept gymnases du second ordre. i344i Dans les sept gymnases du troisieme ordre 73i Dans I'Academie d'Agram, en Croatie . 2i5 Dans le gymnase du premier ordre, a Agram 470 Dans les cincj gymnases du second ordre gSg Total 21,540 (l) Tudomanyos Gyiijtemeny. 1826. XII, p. 112. T. xxxni. — Mars 1827. 55 »54 KUROPE. Uans It' gyiiinaso dii proniicr ortlio de Pest, on comj)l;tit , on j8io, 494 etiuliain; en i.Si5, 570; en i8ao, 810; en iSiS, 2. Reform ES. ( Siir un noiiibic total il'environ i,5oo,ooo. ) Dans le college de Debretzin, nonibre nioyen. . . . 2000 (i) Dans eeliii fie Saros-Palak 2000 (2) Dans eel in de Papa 700 Dans sept i^ymnases 25oo Total 7200 3. LUTHERIENS. ( Snr nn nonibte total d'environ 700,000 liabitans. ) Dans le college d'Eperjcs, et dans les ttois lycccs de Presbourg, Kesmark ct Oedenhourg 2000 Dans six gyninases i8oo Total 38oo Le nombre total des etndians catholiques et protestans, en Hongrie, non eoinpris les etudians dn rit grec non uni, s'elcve done a pen jires i 32, 000. En general, il n'y a aiiciin village en Hougrie qui n'ait son niaitre decole (3); aussi, ne trouve-t-on que fort raienient des paysans catholiques ou protestans qui ne saclient pas lire. La menie observation ne s'applique pas a-ux paysans du rit grec non uni, qui, toutefois , ne font guere qu'un huitieini- de la population de la Hongrie. On pent, d'apres cela , juger combien est exacte I'opinion de la Revue tV Kdimbourf; , reproduite en ces ternies dans un ailicle de la Revue Britannique : » Presque tons les habitans de la Hon- grie, de la Transylvanie , de la Croatie, ct de la Bukovine ne savent ni lire ni ecrire. » On doit plaindre I'iuconsequence dcsliommes qui declanient eontrel'ignorance des autres, tandisqu'ils iguorenf eux-memes les choses dout ils parlent. A. B. SUISSE. Berne. — Extrait d'ltne lettre du I'j aout 1826. — Sur les (i) En 1825, 2o36. Tudomanyos Gyiijtemdny. 1826. II, p. 119. (a) En 1807, aafio. Stalislujue Je Hongrie, par Magda.. (■}) Slatlst'iqiic et gcograplde dc la Hong'ic, par Magha, p. ro/j. i SUISSE. 855 Ecoles rumles d'enfans pauvres , et aur une nnuvelle colonie de pelits garcon.t tires d'Hnfwyl , S'lrnnininee la PiOeinsonikre. — Je tevois encore cette Suisse , si cheie a ses heureux habi- tans , si iiitert^ssante pour cette imiltitiide (retrangers qui main- tenant la parcoureiit , et ou plusieiirs d'eiitre eux ont troiive line nouvelle patrie. Ricn lie m'a plus touclie dans ce pays que Ic zele des hommcs occupes par inclination on par devoir d'etat a etendre et a per- fectionner ies etablissemens d'education. ( Avons-nons , en France, beaiicoup d'homnies a citer en ce genre, depuis le chevalier Polot ?). Le P. Giuard, de Fribourg, Pkstalozzi, M. Fellfnbf.rg , se sont consacres a cette noble et bienfai- sanie mission de rinstruction de la jeunesse. Les instituts qii'a fondes ce dernier, a Hofwyi , pres de Berne, et sur d'autres points , sont de veritables ecoles-modcles. M. Fellen- b<'rg a princi]ialement en vue les deux classes extremes , la classe inferieure , comnie la plus malheureuse , la |)lus aban- donnee ; la classe snperieure , comme la plus influentc , la plus capable de repandre les bonnes methodes, et de contribuer ^ Tamelioratioa des anciennes. A I'ecole d'Hofvvyl , I'agricullure fonrnit aux enfans pauvres nne occupation lucrative qui leur permet avec le terns d'ac- quilter par eux-memes les frais de leur pensionnal, et de se preparer un petit ]>ecule pour le moment de leur sortie. L'ecole des pauvres du canton d'Jppenzel , celle du canton de Glarla , ditc colnnie de la Ltnth, que dirige Luschk, un des emules de Wchi^f^) ne laissent aucun doute sur les avan- tages economiques et moraux de cette conibinaison pedago- giquc et agricole, qui change a la fois un sol pauvre en riches cultures , et de malheureux petits mendians en cuUivatenrs honnctes, laborieux et instruits. Hors de leur enceinte , ces ecoles exercent encore une salu- taire influence; le spectacle de leur prospcrite , de I'ordre , des vertus , diibonlieur, qui regnent parmi leseleves, frap- pent I'esprit, gagnent le cceur des parens, et les font inseu- sibh-mcnt participer aux progres de leurs enfans. J'avais traverse im pays inculte et malsain, infeste par la mendicite , cette plaie hontense des Etats civilises. La eolonie, de la Linth m'offrit nne metamorphose complete ; une suite d'occupations bien reglees, une culture methodique et pros- (i) Wehrli , chef de I'Ecole des pauvres d'Hofwyl, est devenu, de simjile paysan, un excellent instituteur. " 55- 85G EUROPE. i>ere , de belles moissons dues anx sciils Iravaiix d'une tren- taine d'enfans , pleins de sante et de satisfaciion. Ces jeunes productcuis forment, sous la direction de Lut.ichf, , iine sorte de conimunaule ou les forces, les talens des plus agessont em- ployes aux progres de I'education des plus jeuiies , et aux developpemens de la prosperite de I'etablisscnient (i). L'ordre et la suite des occupations sent varic-s en raison de la saison et de I'etat du ciel. Le jour de ma visile , apres la priere , I'instruction et 5e repas du matin, Lulschk distribua en plusieurs escouades ses jeunes colons.; chaque escouade a son chef qui preside aux travaux agricoles : les petits enfans sont charges du sarclage; les plus grands de la plantation des haies; d'autres font la recolte. L'instituteur, qui les surveille tous, va continuellenient des uns aux autres, leur donne des avis , des exemples , > Peiit-etie, ce nioven de faiie refiner dans la canipagne ia classe pioletaire qui surcharge nos villes est - it digue de la sollicitude de I'adminislration geneiale. Les homines sont cc (pi'on les fait, et Ton ne se repenlira jamais d'avoir forme de bons agriculleurs. M- de B. ITALTE. Venise. — Theatre. — Musique. — Un nouvel opera-seria , debut dramatique d'un jeune compositeur, M. Campiuti , a obtenu le plus grand succes au theatre .9. Benedetto. 11 a pour titre : Bianca e Fernando. L'ouverlure, pleine d'effets origi- naux, a ete redematidee avec enthousiasme. Tout le reste de la piece offre aussi de nombreux passages dans lesquels I'au- teur s'cst efforce de quitter les routes battues, et de n'etre (|ue lui-meme. M. Campiuti, ne a Udine, a eludie les belles- lettres a I'Universite de Padoue, et se dcstinait au barreau; mais son gout pour la mnsique lui ayanl fait abandonner cette carriere, il a fait ses etudes musicales sous Antoine Calegaui, de Padoue, et s'annonee sous les plus heureux auspices pomme compositeur dramatique. J- A. L. Naples. — Necrologie. — Joseph Piazzi naquit a Ponte , dans la Valteline , en 1746. II fit ses premieres etudes a Milan, dans le college Calchi et dans les ecoles de Brera , et fut dirige dansla Utterature par Tiraboschi , et dans les sciences physico-mathematiques par le P. Beccaria. S'etant consacre a I'ordre des Theatins , il eludia aussi la theologie a Rome , et se perfectionna encore plus dans les mathenialiqucs , sous la direction des PP. Jacquier et Lesueur. Il professa successi- vement ces sciences a Genes , a Malte , a Ravenne , a Rome ; il devint le coUegue du professeur Chiaramonti , depuis Pie VII, qui n'oublia jamais son ancicn ami. Nonime en 1780 profes- seur de mathemaliques transcendanies dans I'universite de Palerme , il v flt bientot disparaitre les restes de cette sco- tastique, qui jusqu'alors y avait domine : on n'y cntendiJ ITALIE. 859 bit'iitot plus que Ics noms dv I.ocke et de Coiulillac. En 1797, il fut creu tlirectcur de robservatoirc fonde dans ceftc ville. C'est a cettc e|)Of|ue qu'il entieprit un voyat^o a Paris ct a Londres. Dans la premiere de ces villes , il vit I.:ilande , Mechain , Dclambre, Bailly, etc.; il suivit Cassini , Mechaiii ct Legendre , charges par !e gouvernement francais d'eta- l)lir la difference des nteridiens eiitre Greenwich et Paris; a Londres , il cultiva I'amitie de Ranisden , du D'' ]Ma->kelyne, d'Herschell, de Yince , de Le Roy, etc. , el donna nn memoire , irisere »Ians les Transactions philosoplmiues , sur I'eclipse so- lairs de 1788. Une letlre qu'il avail adressee a I.alande , con- tenant une notice sur Ranisden , fut inseree vers la nienie epoque dans le Journal des savans , <'t la reconnaissance de ce celebre arliste luivaliit dcs instrumens d'une perfection par- ticuliere , qu'il emporla a Palerme. De retour dans cette ville , il ne s'occupa que de ses observations el de ses calculs. Bien- tot parut son ouvrage sur I'observatoire de Palernie , qui fut snivi d'un second sur I'observatoire de Naples. Un resultat encore plus important de ses Iravaux ful son catalogue de 6,748 etoiles , public en i 8o3 , et couronne par I'institut de France. En 1801 , il avail deja decouvert la nouvelle planete de Ceres , qui donna lieu a la dtcouverte successive de trois autres planetes. Le roi de Naples , Ferdinand IV, se croyant immortalise par Piazzi, qui avail donne son nom royal a cette etoile,ordonna a son tour qu'une mc'daille d'or fut ("rappee pour perpetuer ie nom et le souvenir de I'astrononie. Blais, Piazzi , preferant les interets de la science a sa propre gloire , obtint qu'on entployat la valeur do cello medailie a I'acquisition d'un instrument utile pour son observatoire. II publia dans la suite deux autres otivrages, I'un sur la decouverte de Ceres, ct I autre, sur les re^iultats des ohsen'aiions de cette nouvellti planete; un second catalogue de 7,646 etoiles, dont il avail charge M. Nicolas Cacciatore, parut en i8o5, et fut aussi cou- ronne par rinstilnt de France. Les savantes prefaces de ces deux catalogues furent generalemenl admirees. On a encore de Ce celebre astronome divers trailes el memoiies d'une haute importance, sur I'obliquite de I'ecliptique , sur la parallaxe de quelques etoiles principales, sur la mesure de I'annee tropique solaire , sur les mouvemens propres des etoiles fixes , sur les lois relatives aux poids et mesures pour la Sicile, sur la comele de 181 1 , sur le changement de I'axe de la terre , etc. etc. Piazzi fut loujours traile avec distinction ^iar son gouver- nement, et recut meme des pensions de plusieurs autres. Mais, ce qui I'honore davanlage, ce sont les lemoignages d'esliiUi! 86o EUROPE. que lui doniierent dans dlfferentes occasions la Societe rojale tie Londres , Vinstitut de France, Vlnstitut d'ltalie et la Societe italienne , les Academies dc Ga'ttingue , de Petersbourg , de Berlin, de Turin, etc. , qui toutcs s'cmpresserent de le nominer leur associe correspondant. Du restc pour faire apprccier le merite de cet illustrc savant, il sufUt d'invoquer le tcmoignage de Delanibre , qui disait , que rastronomie devait bien plus a Piazzi et a Maskelyne qu'a tons les autres astionomes , depuis Hipparque jusqu'a nous. Accable par I'age et plus encore par ses longs travaux , Piazzi est inort le 22 juillet 1826 , age de 80 ans. J. Salfi. PAYS-BA.S. Gand. — Universite. — Enseignement industriel. — Nous avons annonce que trois professeurs avaient ete nommes dans les universites nu'-ridionales du royaunie pour I'enseignement de la raecanique industrielle. Leurs cours sont suivis avec beaucoup de zele, et la classe ouvriere en sait apprecier toits les avantages. Les deux professeurs de Liege et de Louvain donnent leurs lecons en langue francaise, et publient actuel- lemcnt le texte dont ils se servent pour leur enseignement. RI. Lemaire, pour approprier ses lecons aux besoins dc ses auditeurs , dont la plupart ne connaissent que le flamand , a prefere s'exprimer dans cette langue : les lecons publiees der- nieremcnt par M. Ch. Dupin servent de texte a son cours. IVous avons fait mention du discours inaugural dans lequci ce professeur a fait rcssortir les avantages du dessin lineaiic ( nov. 1826 ). En pratiquaut aujourd'hui les preccptes qu'il y enon^ait, il a su se concilier les suffrages des amis dcs sciences et des artistes jaloux de profiter des avantages que les progres des lumieres ont mis a leur portee. Q. Namur. — Industrie locale. — Coutellerie. — La coutellei'ie forme, depuis long-tems, une des principales branches d'in- dustrie de la ville de Namur. Sa solidite ct la bonte de sa trempe la font rechercher partout. Les evenemens politiques de 181 3 et les divisions do tcrritoires qui en furent la suite, lui ont etc d'abord si fatales, qu'on croyait qu'clle nc s'en re- leverait jamais; mais les debouches ouverts dans les Indcs el dans TAmerique du sud lui ont fait acquerir depuis quclqucs annees une nouvelle importance. La fabrique la plus remarquable est celle M. Arnould- Raymond, qui, par I'etablisscment d'une machine a vapeur, et par I'invention dcs procedos les plus ingenieux , est parvenu a reduirc considcrablement les prix, et a donner a ses produils PAYS-BAS. 86 1 line perfection a laquelle on n'avait j)u alteindic jusqu'alors. Ce double merite liii a valii une niedaille d'or et deux rne- dailies d'argent aux expositions publiqiics de Tournai, de Gand et d'Harlem. II occiipe environ trois cents ouvrieis. La coutcllcrie de Nannir etant d'un genre different de celle que Ton fabrique en P'rancc, y penetre en grande quantite, malgre la prohibition qui la frappe. Ce serait encore le cas de se departir des vieiix prejuges en matiere de douancs, et d'ad- inettte ce qu'onne pent enipecher d'entrer, en faisant profiler I'Etat de la prime accordee a la fraude et ;i I'inunoralite. Un droit de i5 pour cent sur la valeur atteindrait mieux le but, qu'une prohibition absolue de cet article, d'autant plus facile a introduire qu'il occupe pen ^Ic volume. D. A. LouvAiN. — Universite. — An commencement de ce mois , M. de Reiffenberg a ouvert, an milieu d'un auditoire nom- breux, son cours gratuit d'Economie politique. Dans une lecoii improvisee, comme toutes celles de ce professeur , I'histoire de la science a ete tracee avec rapidite, et exposee surtout dans ses rapports avec les Pays-Bas. M. de Pieiffenberg s'est declare le partisan du systeme de I'industrie; et en ehoisissant M. J. B, Say et Adam Smith pour ses guides, il a pris aussi pour aiixV liaires MM. Sismondi, Schmalz, Ricardo, Ganilh, Malthus. Ses lecons subsequentes ont prouve qu'il ne laisseraitrien echapper d'utile, et I'empressement de ses nombreux auditenrs I'encou- rage a remplir dignement la taqhe difficile qu'il s'est imposee. X. X. Amsterdam. — Institut royal des Pays-Bas. — Seance jiii- hliqiw, de la (juatrieme clrissc , ceiie des bcaitx-arts ( le ag no- vembre 1826). — M. H.-H. Rlyn, president, a ouvert la seance par un discours sur la nccessite d'encourager les heaux- arts et de leur donner une direction utile et convenahle. Le secre- taire perpetuel, M. J. De Yos lit ensuite un rapport sur les travaux de la classe pendant les deux dernieres aunees. Nous en presenterons un rapidc resume. D'apres la demande du gouvernement , la classe s'est occupee des moyens d'ameliorer I'enseignement dans les ecoles de dessin, surtoul: pour les parties qui ont rapport a la geometric et a la geometric descriptive. La classe arecommande , entreautres,la publication d'un bon ouvragc elemcitaire sur ces siijets. M. Humbert de Superville, membre de la classe, vient d'ecrire un ouvi'age fort interessant sur le hut et la nature des beaux - arts , dont quelques parties sout deja connues pai- \xn article de la Rev. Eiic. ( voy. t.xxiv, p. 8'')o). S. M. le roi des Pays-Bas, sur le rapport de la classe, a fait parvenir a lauteur 8G2 EUROPE. IfS fonds nt-cpssairos pour piiblicicft onvragc, avoc toutrs fcs planches qui doivcnt le coiiiplelcr. Depiiis lonj^-tcms, la classe avail soiiinis an ironvcrncmcnt till projc't pour \a fondation d'une ecole uiasicalrlx Anistr-rdam, dont If but principal scrait dc piopaijcr en Ilollandc line bonne nic'lhode dc chant, Des ecolcs de nuisiqiie se tronvent mainte- iiant etablies, par arrete de S. M., a Rrnxellcs , a Liei^e et a la Have. L'ne qiiatrienie est jointe a la direction dn theatre na- tional d'/Vmslerdam. La classc croyant que cetJe derniere niesiire nc reinplira pas le but qn'elle s'etait proposee , en cn- £;ageant le gonvemenient a I'etablissenient de pareilles ecoles s'est erne obligee a comuuiniquer an niinislre ses observations sur ce snjet. La classe s'est aussi occiipee i\c rethercher si Ton ne pour- rait pas etablir nn diapason univcrsel. M. Chcriibini , mvxwhvK associe de la classe a Paris, a bien vonln commnniquer ses idees siir ce snjet, Le resnltat a efe qii'iin tel diapason nni- versel ne s'etablira peut-etre jamais; celiii de I'Academie royale de niusique , a Paris, est a pen pres un demi-lon plus has que celui d'Ainstei dam. M. Kcascls , sciilpteur de beauconp de merite, associe de Vlnstitut residant a Rome, a fait cadeaii a la classe d'un dis- cobole, modele en platre d'aj^res un original en marbre, qii'il a cisele pour un noble anglais. La statue fait honnenr au scnlp- teur beige et sert d'ornemcnt a la bibliotheqne de I'lnstitiit, oii elle a ete placee. Nous ajoutons decoiirtes nolices sur les principaiix discours prononces par les membres de la classe, dans les seances ordi- naires qui out eii lieu dans le cours des deux memes annees. M. Humbert a lu des niemoires sur la perspective et sur les proportions des statues egyptiennes et grecqucs. — M. Van Os a tache surtout d'c^xpliquer quelques proprietes de la sculpture egyptienne, par un passage de Uiod(ne dc Sicile, qui parait y ;ivoir rapport et qui semble avoir echappe aux savans francais lors de rex|iedition en Egypte ; il a comninnique quel(]ues re- flexions sur les lapports qui existent entre la poesic! et la pein- ture. — M. Saportas a traite dc la peinture des paysages, et a iixe rattention surlout sur les differens caracteies des ecoles ilalienne, francaise et ho'landaise. Cest cette derniere qui, selon lui , est la vraie nierede ce genre de peintiire. — M. De Vos s'est occupe dii gout en mnsique. I! recommandc siu'tout aux compositeurs la verite et la siinplicite, qui lui paraissent les denx qualites qu'ils doivcnt surtout rechcrcher; qualitcs PAYS -B AS. 86 > selon lui, bicn neyiigees aiijonrd'lnii par la pliipajt dos com- ])Ositenrs italiens et allemands, qui s'ecartent des traces dc* Haydn, des Mozart vt des Gretry , etc. — M. Den Tkx a Iti iin discours sur les dilfereiis caracti'res des t'coles de musiqiie italienne etaliemande. II s'attache sut tout a caractcriser' le genre de merile dii plus ci''l( bre com])ositeiir de nos joins, M. Rossini. Le meiiie meinbie a donne une dissertation sur la difference des tons en musi(|iie, et tache d'expiiqiier comment il se fait que nous considei ons certains tons comme gais , d'aulies comme tristes. — M. Kltn a traite dans un discours des rap- ports que les beaux-arts etabli'^sent entre le monde materiel et le monde inteliectuel. — M. De Vos a communique encon; quelques idees sur I'art dramatique; il s'est attache surtout a Texamen des Rejlcxions sur Lekain et I'art thedtral , par Talma, placees dans la Collection des memoircs sur I'art dranmtuiue. 11 oppose des doules aux opinions de Talma sur la declamation, sur le costume et sur le natiuel dans le jeu : ii peuse que la 66 FRANCE. posaittlo fairo , I'liivor prochain , ui» corns c'li-nientaire dVco- nomif. induslriellc. M. Bakdiix , professcur do fortification do I'Ecolu d'ai- tilieric , a ouvert, ie r5 novembre , iin cours dc dessin geome- trique. II s'est eleve contre I'lisaLje , nialheiireuscnTcnt trop ropandu, do coiisacrer plusicurs aniiccs au dessin d'iniitation; il a fait ressortir Ics avantaj^scs qui doivcnt rcsuUer pour Ics industricls , dc s'adonner au dessin geometrique , de s'habitucr anx traces rigoureux et a la niethode des projections, qui pent seule Icur fournir Ics moyens dc communiqwer Icursprojets, et de s'en rendre conipte a eux-menies. M. Bardin a divise ses eleves en brigades de douzc pcr- sonnes , a pen pres de memc age ; chacnne a son moiiitcur, son tableau et ses instrumens fournis par la Mairie. Un inoni- teur general et le professcur survcillent les travaux , et , quel- ques jours avant la lecon publique, a lieu celle dc tous les mo- niteurs : les eleves sont tenus de rapporter les traces rigoureu- sement executes sur le papier. Enliu, U; savant capitaine Poncf.let , pi'ofesscur de mcca- nique a I'Ecole d'application de I'artillerie et du genie, com- niencera un cours de mecanique industriclle , vers le mois de mai's , des que celui de la geometric des courbes sera terniine. A i'ouvcrture gencrale de tous ces cours instilues ]3ar la Sociele academiqiic dc Mctz , et dont elle fait en grande partie les frais , le president de cette societe , M. Renault, a felicite les auditeurs sur les progrcs marques que la plupart ont faits dansl'etude dela geometrie : "Encoui-agespar lesbrillans succes qui ont couronne nos efforts, a-t-il dit, nous voulons en tenter de nouveaux, et rendre renseignemcntindustriel aussi complet que cela est possible dans notre chere cite. » L'orateur faisait allusion aux cours de physique et de chimic appUquees , que TAcademie s'oceupe de creer. Ainsi , rarithmetique usuelle , une geometric complete , I'exercice du dessin , la mecanique des arts , I'economie indus- triclle , la physique et la chimic des ateliers , voila ce qu'une societe academique non dotec , mais secondee par I'autoritc locale , et par ses concitoyens , offre genereusement aux ar- tistes et aux ouvriers messins. Ajoutons qu'environ cent ^•inquante de ces ouvriers resolvent gratuitement , apres cha- ijue seance , la leron imprimee , et que la meme societe a fonde .1 ses frais une cxposilion triennule des prodiiits de Vindustrie. Aussi , pouvons-nous I'offrir commc im modele aux autres :>t»cietes savantes du royaume. DKPARTEMENS. — PARIS. 8G7 On trouve tlicz MM. Treuttt-l ot Wiirtz , libiiures , rue dc Bourbon, n" i7;etchez M. Cariliaii-Ga»ury, libraire , quai des Augustins , n° 41 j ^ Paris , Ics cours iadustriels de Metz; savoir : 1° Exerciccs d'arithmetiquc , par M. Woisard. In-8° de /|8 pages ; prix , 5o c. 2° Coitrs d'arithini'tique applifjuec aux speculations intlns- triclles et coninicrciales , par M. Woisard; prix, 20 c. cliaque leren , a peu pres ,1 5o c. pour i vol. in-8°. 3° Geoinctrie appUqaee a Vindustric , par M. Bebgeuy. In-8" de SaS pages , avec i3 planches; prix, 5 fr. 4° Geometric des courbes appliqaee a Vindastrie , par M. Ber- GERY ; prix , 20 c. chaqile leeon , planches et discours corn- pris , environ 3 fr. 5o c. pour le vol. in-8". U. PARIS. Institut. — Acadernie des sciences. — Seances du 19 fe- vrier au 19 mai'S 1827. — Seance du igjevrier. — On lit une lettre de M. Leroy-, d'Etiode.s, relative a des instrumens nou- veaux qui servent a mesurer I'etendne des pierres vesicales; il met ces instrisuiens sous les yeux de I'Academie. ( Renvoye a la commission du prix Montyon. ) — MM, Valz et Gambart adressent des observations et des caiculs siir la comele da Bouvier. — M. Cauchy depose un niemoiresur le choc des corps elastiques. — M. Blaiin'iUe fait uu rapport verbal sur un ou- vrage de 51. le docteur Charvet , intitule: De [action coinpa- ree de V opium el de ses principes constituans sur I'economie animale. Ce rapport est favorable a I'ouvrage. — MIM. Thii- /lard et C/iecreul hi-.t un rapport sur un memoire de MM. Co- i;iN et RoBiQUET, ayant pour titre : Nouve/let- reclicrches sur la matiere colorante de la garance. Pour obtenir eette matiore, les auteurs ont fait macerer i kilogramme de garance dans 3 kilogrammes d'ean; ils ont jete la matiere sur une toile ser- ree, etont presse graduellement le mare. Le liquide resultant s'cst pris engelee, dans un lieu frais; cette gelee, pressee avec ])recaution dans deslinges, a ete reduite en une pate tres-so- lide. Ils one ensuite traite la gelee par I'alcool bouillant, et ont concentre les lavages alcooliqiies fdtres par distillation au 5<' de leur volume ; puis ils ont ajoute de I'acide sulfurique et de I'eau. lis ont recueilli et bien lave uu j>recipilc d'unjaune fauve, lequel, seche et chauffe avec precaution, a doimeun su- Idime cristallise que les auteurs appellcnt alizarine. Cette sub- stance remarquable est en cristaux , dont I'aspect est celui di» ])Iomb rouge de Siberie; elle se volatilise sans residu. Elle se 868 FRANCE. dissonten petite (|«antiti'' dans I'caii boiiillante; sa soliitioiiest d'lin beau rose ct n'a point d'aclion sur les reactifs colores. Eile est ties-soluble dans I'alcool , et suitout dans I'etlier. La premiere solution est d'un ronge orange ; la scconde d'unjaunc legerement orange. La potasse , la sonde , rammoniaque for- menl avec ellc dcs combinaisons bleues ou violettes. Le me- nioire de MM. Colin et Robiqnet est tcnnine ])ar une hen- reuse application de leurs recherches a la preparation des laques carniinees. Voici leur procedc. On delaie i kiIogr.de garance dans 4 livres d'eau. Apres une maceration de lo mi- nutes , on soumet deux fois le tout a une pression menagee ; apres quoi , le marc a une belle couleur rosee. On le delaie alors dans 5 on 6 parties d'eau avec 172 partie d'alun concasse. On fa4t chauffer an bain-marie, pendant deux ou trois heures; on agitc eton coule surune toile serree. La liqueur doit elre fil- tree an papier, puis precipitee par luie solution de sous-car- bonate de sonde. Si Ion divise en trois parties la quantite de ct; sel necessaire pour precipiter tout I'alun employe, et que Ton preci[)ite successivement ia liqueur avec ces trois parties, on obtient trois laques dont la beaute va en decroissant de la pre- miere a la derniere. Les precipites doivent elre laves par decanlation , jusqu'a ce que I'eau de lavage soit sans cou- leur. On tronve dans les lavages de la garance la matiere gc- latineuse , qui donne elle-meme une fort belle laque; par consequent , on ne perd aucune partie de la niatiere colorante. Quelques heures suffisent pour executer toutes ces manipula- tions, qui ont, sous le rapport de I'economie du terns et de la niain-d'ceuvre, un grand avantage sur toutes celles que Ton connaissait jusqu'a present. — M. Mulard, inspecteur des Go- belins et de la Savonnerie,a essaye, sous les yeux des com- missaires, les laques de MM. Robiquet et Colin, dons la pein- ture a Vhuile , comparativement avec les laques carminees de MM. Bourgeois , Cossard, Mtriinee , et meme avec celles du commerce. Les echantillons des auteurs ont soutenu la compa- raison avec les laques carminees, et etaient hors de ligne avec les laques de garance ordinaires de premiere qualile. C'est surtout par la modicite de leur prix que les laques de MM. Co- lin et Robiquet I'emportent sur toutes les autres. En effet, elles ne coutent que 20 fr. la livre, tandis que celles de MM. Bour- geois et Cossard coiitent 24 f'"- > ^^ les plus belles du com- merce, 3o fr. Le beau travail de MM. Colin et Robiquet sera insere dans le recueil des savans etrangers. — M. M irbel f^'it un rapport verbal favorable sur les deux premieres livrai- PARIS. 869 sons des Algues dn Normandie , recneillies et piibliees par . M. Chauvin. — Du 16/cprier. — M. Delessert donne communication des notices qui lui out ete adressees sur un nouveau mode de transport, par le moyen du vide etdeia pression de {'atmo- sphere, invente par M. Vallance , ingeuieur anglais. M. Maihieu fait un rapport sur une metliode pour obtenir I'aire des differentes figures tracees sur un plan , an moyen de I'addition , par M. Malmenayde Audrand. Cette methode exige des conslructiotis t^eometriques qui doivent necessaire- ment donner lieu a des erreurs , et qui forcerout peut-etre a renoncer au precede de M. Audrand. Si I'ou veut I'employer comme un moyen de verifier les resultats obtenus par un cal- cul direct, il est a craindre qu'on ne le trouve trop lonjj; , et que Ton prcfere des precedes qui conduisent plus facilement a une approxima'tion suftisante pour une simple verification. ( Approuve. ) — M. Arago fait part de la nouvelle qui lui a ete donnee par le capitaine Sabine , et portant que le capitaine Franklin a reussi a suivre par terre la cote nord de I'A- merique, dej>uis la haie de Hudson jusquau detroit de Behring. — M. GiRARD continue la lecture de son menioire sur les voies de communication. — M. IVavier presente un travail sur le mouvement d'un fluide elastique qui s'ecoule hors d'un reser- voir ou gazometre. — Du 5 mars. — L' Academic, reuuie a I'heure accoutu- mee au lieu de ses seances , ayant eu la douleur d'apprendre la perte qu'elle venait de faiie d'un des plus illustres de ses membres, en la personne de M. Laplace, les regrets que cette perte a fait eprouver a tons ses membres ont empeche la seance d'avoir lieu ( Voy. I'article Necrologie. ) — Du i-i. ■ — M. Geoffroy Saint-Htlaire annonce qu'il a recu du Cap (ile d'Haiti) de M. Fournier Pescay, la nouvelle que ce medecin est au moment d'envoyer a I'Academie un ou- vrage sur lajievre jaune, qu'il observe depuis (juatre ans, et qu'il declare n'etre en aucune xxidixnQre contagieuse. — M. Geof- froy Saint - Hilaire lit, pour M. Latredle, un rapport sur im ouvrage de M. Payrandeau , intitule : Catalogue descriptif cC methodique des annelides et des mollusques de file de Corse. — M. Cauchy lit un memoire sur la tension ou pression dans les corps elastiques; et un autre sur le choc des corps elas- tiques. — Du 19. — MM. Latredle et Dumeril font un rapport snr le memoire de M. Vallot , concernant les cecidomyes. Ce gienre est un demembrement du genie Tipuln de Linnee , T. xxxTii. — Mars 189.7. ^^ 870 FRANCE. dont les especcs les pins giandes ot 1<'S plus communes sont appelees viilgaircmcnt moitchcx coutuj-ieres Les larves des ceci- •lornyes vivent dans I'inti'rieiir des vegctaux, et il paraitrait 9.'] , rue de Charonne , a. Paris. — Get enfant , du scxe feminin , avail deux visages. II n'a vecu qu'un quart d'heure, parce qn'il etait ne avant tcrme, et que sa mere avait ele blessee; car un autre enfant presque semblabie, qui est ne plusieurs annees auparavant <;n Espagne, avait vecu assez long-terns :il tetait alternativement, tantot par I'une et lantot par I'autre bouche. M. Geoefroy Saiivt-Hilaire a mis le nouveau-ne de la rue de Charonne sous les yeux de X Acndcmie de medecine , et a communique a ce sujet iin travail fort etendu, ou il a expose comment, dans ce cas - ci, de certaines causes mecanlques , provoquees par des aclions du dehors, sont venues porter le trouble dans nn travail qui avait ete regulier jusqu'a la cin- quicme semaine de gestation. De telles monstruosites existent pareillement dans les animaux; M. Geoffroy Saint-Hilaire eh cite parmi les chats et le boeuf , d'ou ce naluraliste conclut qu'il est pour res cas particuliers un autre ordre d'arrange- ment , des conformations suivatit d'autres regies, mais bieii circonscrites et tres-symetriquement ut'velojijji'es. Ces systemcs d'organisatioTis regulieres dans leurs aberrations forment un genre que rauteuriiomme/'o/T-o/;^^, et dontlo caracterc consiste dans les considerations suivantes : Tete fornice 1" par un cer- velet et des oreillcs , coinine pour un seul sujet; et 2° par urp cerveau et d'autres organes des sens , cornme pour deu.v indi- vidus. Le polyops trifidus , ne dernierement a Paris, differe du polyops deturpatus , qui a vecu en Espagne, par des bouches 56. 872 FRANCE. dcfccUieuses coupees en bee de-lievre, et par d'aiUres singu- larites, c|ui tiennent 11 la position des t]iia*re ycux. Galerie d'anliquites cgypliennes de M. PASSALACQUA,/?rt*- sa^e Vivienne. — Ouverture et exaincn d'litte inoinie. — On a Tail, le dix mars, rouverUirc d'uiie momie do la hille col- lection de M. Passalacqiia. S. A. R. Madame a honore de sa presence ceUe syancc, a laciiielle ont assiste plnsieiu's elran- trex's distini:;iies, les niinistres residens dt; Baviere et de Tos- cane , des litterateurs et des savans, MM. Dubois, le conite de Tiirpirt, Geojfroy Saint - Hilaire , et cos laborieiix frercs , MM. ChainpolUon , qu'iiiic grande connaissance de la matiere et unc saqacite admirable ont rcndiis les inlerpietes des mys- terieuses richesscs de rarcheoloi.Me ei.'yptienne. ]MM. les docteurs de Verncuil alDelattre, sccondant M. Pas- salacqiia , ont epronve d'assez giandes difliciillesa rompie le cerciieil interieur, ou tout rexterieiir des bandeleltcs coUees les ones sur les aiitres formait un carton Ires-resistant d'envi- ron dix ligncs d'e])aisseur. La derniere couche avait etc reve- tue de chaux et |)rej)aree pour recevoir des peiiitnres et des explications en caracteres hieroi^lyphiques :1a face elait doree. En cet etat, la momie avait etc placee dans un autre cercu<,'il, fait en planche de Tiguier- sycomore de deux pontics il'eiiais- seur. Des peinturcs et des hieroLjiyplies ornaient aussi I'exle- rieur de cet autre cercueil. Les objets trouves sur la momie sont deux manuscrits hie- raticjucs sur papyrus, I'un a I'enloui- des culsses, et Tautre enve]oppant la tele ; queUiues amulettes placei^s sur la poi- trir.c, unc daite \ers I'appendice xy|>ho'ide et un grand scara- bee, en serpentine, retire du ventre. Les mains etaientetendues snr les aines, la gauche, ordinairement fermee, etait ouverte. Les ongles ontete trouves d'une longueur demesuree et les cheveux touffus et negliges; ce que Ton suppose etre I'effet d'un deuil long-tems et rigoureuscment observe. Les yeux claient remplis pai" un email assez grossicr ; enlin, la cervelle avait etc retiree par une ouverlure pratiquee en aniere du ]>alais. L'cxplorateur avait brise et emporte I'os sj)lien()ide ; la dure-mere etait conservee dans un eiat paifait d'integrile, et pUisieurs ])arties du corps se trouvaient encore tlexibles, en- tre autres le diaphragme. D'apres I'iuterpretation donnec par M. C/iampol/ionjcxme, ce cercueil renfermait le corps de Toutrncnthis , ou Thet- 31othis , fdle du prepose a la garde du petit temple d'Isis k Thebes. Cette femme pouvait avoir de 10 a 25 ans. E. PARIS. 873 Theatres. — Theatre -Frakcais. — F® representation de Julien dans les Gault^s , tragedie en cinq actes, rochai!ic reunion, el Jni doiirie rendi'Z-voiis sur les bords de rEiqohtate , 011 la niort, en pffet, altetid Julien. C^ette coucention c(jnvieiidrait mictix sans doute a Tepopee qu'aii ])oenie draniatique , oil il est difli- cile dc la developper avec vraisemblance , et de la bien faire comprendre. Neanmoins, il y a dn eharme et de la poesie dauscette partie de I'ouvraiiie , et elle ne manqne pas d'iuteret. I.a piece etant-iniprimee et connue depiits long-tenis, nous u'avons pas tni neccssaire d'en faire iine analyse detaillee. Nous nieniionnerons cependant denx persounages princijjaux; Clodomaire , fils d'un roi des Francs, captif a la cour de Ju- lien; et Bellovese, ]}rince i^atdois, et general au service des Roinains. Ce dernier est aussi amoureux de Theora ; mais sa rivalite avec Julien nc produit auciin evencment de qiieUjue importance. — Sauf quelqucs traits il'affectation qu'ii est facile de faire disparaitre, le style est clair et elegant; niais on n'y trouve ni ces traits de profondeur qui forcent a reflechir, ni ces pensees sublimes qiii vous hansportent; et , mal!j;re le talent reel que Ton reconnait dans cet oiivrai^e , on s'apercoit facilement <(u'il ne saurait vivre loni;-tems au theatre. Des succes plus brillans a la scene, et une juste celebrite dans un autre genre, peuvent offrir a I'auteur de Julien un dedom- mager»ent qui n'est le partage que d'un bien petit nombre d'auteurs. D. L. — 'Theatre de l'Odeoii. — Premiere representa!iiend)lable par le tenis qui court ), des opinions beaucoup jjliis raison- nables que sa folle de sosur. L'iiypocrite pense si bien", aux yeiix de la comtesse de Valdaux , qu'elle en voudrait faire un depute ; et , pour le rendre eligible, elle !iii vend une belle propriete, qu'il ne paie pas, et du pi ix de laquelle la comtesse lui douue quittance; c'est une espece de present lie noces 876 FRANCE. «]u'elle lui fait an moment de I'unir avec Julie sa petito-fille, qui, bien loin d'avoir aiiciin penchant pour kii , se sent fort disposee h aimer Hippolyte, lils du baron dc Freneiiil. Mais line riche dot, un brillant mariaj,'e ne siiffisent pas au fourbe. 1! a deja troiive moyen, en saiivant les apparcnces, de se faire donner line place assez belle qii'occupait le jenne Hippolyte; c'est mainienant a la place dii j)ere qti'il aspire, et il niedite ime ruse infaiiie pour s'en einparer. II est possesseiu- d'un ecrit trace en I'an viii de la repub!i(]nc par le baron de Freneuil ; en sujiprimant la date, on pnurra transformer aujonrd'hui I'auteur en crinjinel d'etat; et I'hypocrite espcre obtenir de cette perfide manoeuvre un double avantage, faire destituer le baron, et I'eloigner de la Chambre des deputes, posic d'honneur auquel M. de Freneuil aspire a juste litre, car il est porte par un grand nombre d'elecleurs qui s'assemblent ce jour meme. Derneviile croit avoir besoin d'une main in- connue pour faire parvenir au minisire sa denonciation et le memoire accusateur; il s'onvre a denii a un certain Durand , son secretaire, dont la femmc est gouvernante de Julie. Ce Durand est pauvre, et Derneviile espere le seduire facilement par la proiiiesse de le faire participL-r a sa fortune; niais il se trouve que, malgre son desir de parvenir, Durand est un honnele homme , et au lieu de seconder les mauvais desseins dont on lui a fait la demi - confidence, il avertit Freneuil, et lui offre de demasquer le traitre. Le baron et M""^ de Valdaux se placent dans un petit pavilion, et Durand, sous pretexte de demander a Dcnievilie quelques eclaircissemens neccssaires, I'amene sous les fenetres de ce pavilion, afin de I'obliger a de- voiler son ame devant les bienlaiteurs qn'il vent perdre. Mais, dans rintervalle , Derneviile a ete averii de la ruse; il lient un langage tout oppose h celiii qu'on esperait ,et I'epreuve tourue au profit du fourbe. Durand est chasse ignoniinieusement. Ce- pendant , Freneuil salt que Derneviile possede un papier qui pent lui etre funeste, il le reclame, Derneviile promet de le rendre ; mais il part inopinemcnt pour Paris. Bientot on ap- ])rend que Freneuil a ete denonce , et Ton vient apposer les scelles sur ses papiers. Tons les soupcons se portent sur Der- neviile, iorsque iui-meme arrive, muni d'une lettre du mi- nistre pour Freneuil , et dans laquelle S. Exc. , en fclicitant le baron de ce que con innocence est reconruie , ajoute qu'il doit sa justification a Derneviile, lequel sest empresse d'apporter au ministere les preuves de la ealomuie. Alors , notre hvpo- crife tranche du genereux ; il n'accepte pas la main de Julie, puisque son bonheur ferai' le malheur d'un autre ; il parle dc PARIS. 877 rendre la quittance tlu prix de cette terre qu'il n'a pas payee; et , pour toute recompense de I'eniinent service qu'il vient de rendre a cette famille , il ne veiil que la place de Freneuil, dont celii!-ci va sans doute be demettre , et;int nomme depute. Freneuil Ini promet en effet de I'appuyer de toutes ses forces anpres du ministrc. Mais, au moment ou Je fourbe espere le prix de sa perfidie , arrive un comte d'Erthal , ami de la maison, qui reconnait Derneville pour I'homme qui 0 fail par- venir la denouciation au ministere. Quoique demasc[ue , celui- ci ne perd pas conlcnanre , et dans le propre inlcret de Fre- neuil il lui impobe le plus profond secret sur ce qui s'est passe. Le rcproche le plus grave que la critique puisse faire a cette - comedie, c'est que le caractere jjrincipal manque de physio- noniie ; ses traits sont vagues et mal arretes. C'est un fourbe, mais il y a tant de sortes de fourbes ! On nous dit bien que celui-ci est un hypocrite d'opinion ; mais ou le dit seuiement, nous aimerions niieux le voir par nos yeux. Il est bien evident que ceci ne s'adresse pas a I'auteur; nous ne doulous pas que M. d'Epa^ny n'eut trouve dans son talent tous les nioyens de peindre vigoureusement quelqucs-uns des fourbes (jiii exploi- tent aujourd'hui la societe; mais ce sont la des peintures que la censure ne saurait permettre. II faut done savoir gre au poele d'avoir au moins essaye une esquisse. Peut-etre , le titre d' Homme /lahile esl-\\ma\ choisi, il rend lespectateur exigcant, il nous fait trop remarquer qu'il n'y a point d'habilete de la part d'un fourbe a vouloir prendre pour comp!»!ce un honnete homme qui n'est pas un sot , et a lui dire ouvcrtement , quoi- qu'il manifeste des repugnances assez visibles a se laisscr per- suader : II faut Sur le malheur d'autrui fonder mi subsistance. Un pareil langage doit vous faire un ennemi d'un homme de bien. L'hypocrite s'en apercoit lui-mcMne, lorsqu'il voit son mauvais succes aupres de Diirand ; di\mr:nais /uf^is seul , dit- il alors. II aurait dii s'en apercevoir plus tot ; car ou ne nous le doune pas comme un fourbe novice. II est aussi par trop imprudent a Derneville, lorsque les soupcons sont eveilles sur lui, lorsqu'on salt qu'il est possesscur d'une piece dangereuse pour Freneuil , de produire cette piece le jour meme, et de la remettre en personne. Nous remarquerons enfin que la pre- miere moitie de cette comedie languit ; cela vient surtout de ce que le personnage principal y tient trop pen de place; le poete ne nous le niontre point caressant ses dupes , et on ne voit presque rien qui puisse justifier leur engoument. Tartufe 878 FRANCE. lie par;iit qii'au lioisienio acte; niais les deux premiers soiit pleins lie liii. — Maintenant que nous avons fait une large part a la criticjiie , nous nous haterons d'ajouter que , malgro ses deiauts, cctte comedie est intcressanle ; que la deriiiere nioitie surtoul est vive et llu'alrale; que , si ia scene ou Der- neville , prevenu (ju'on I'ecdiite , change de langage , n'est pas bicii neuve , c'est en revanche une conception dramatique et vigoureuse de le representcr a la fin comme le sauveur de rhomme qu'il a voulu pcrdie. Les incidcns sont inenages avec adresse , et , dans son ensemble I'ouvrage annonce iin honime qui entend la scene; de ineme que plusicurs details heureux montrcnt que le poete ponrrait etre un peiiitre de moeurs , si la censure ue decolorait sa palette. Le dialogue de cette co- medie est naturel , le style est facile et franc, (juclques legeres incorrectious sont presijue insonsibles a la representalion. Le talent de M. d'Epagny tient deja un rang honorable sur notre scene, el i! merite tons les encouragemens de la critique ; c'est ce qui nous engage a iie point dissiuiuler les defauts que nous avons cru apercevoir dans son ouvrage (1). M. A. Beau.k- ARTS. — Gravure. — EtUree d' Henri IF dans Paris, par M. Gerard, ^ravcepar M. Toscm. — Brissac, gouverneur de Paris, Lhuillier prevot des marchands, et Langlois, I'un des echevins, abandonnant la cause de Mayenne, ont prepare rentreed'HenrilVdans la capitale; Brissac introduit les trou- pes royales par la porte neuve, placee entre le Louvre et la riviere. C'etait par cette :neme porle que, six aiis auparavant, Henri III avait fui de Paris. La ligue est vaincue; les ligueurs se cachent ou s'enfuient; les troupes etrangeres se retirent ; Henri IV va, sans obstacles, entendre un Te Deum a Notre- Danie, et, pen d'heures apres son arrivee, les habitaiis ont repris leurs travaux et leurs habitudes : c'est ns. Fkancoeur. — La Rochefoucauld-Luncourt [Francois- Alexandre- Frederic , Due de ) , pair dc. France, memhre de I'lnslitut [Aca- demic dcs sciences), inorl a Paris, le aH mars 1827, a I'dge de 81 ans. — La sainte cause de riiumanite perd chaque jour quelques-uns de ses appuis et de ses deleiiscurs : le due de La RocHEFOucAULK-LiANcouRT vient de kii elre eiileve. La vie enliere de ce venerable philantrope n'a e!e qu'une suite de bonnes actions et de services rendus a sa patrie. 11 a fait in- troduire la vaccine en Franco, et il n'a cesse dc la propa^er, pendant plus de vinij;t annecs, avec un zcle infatii;ablc. II a fonde \es£colesdcs arts et metiers de Compiegne, de Chalons et d'Angers. Il a preside a la creation du Consen^atoire des arts et metiers de Paris. Les hopilaux , \fs priions , dont il a beaiicotip contrihiie a faire ameliorer le regime interieur, et la plnpart des etublissemens consacres a I'enfance abandonnee, h I'indigcnce, a la vieillesse , au niallienr, out tour a tour ele les objets de son aclive bienfaisance. II fut aussi le principal fondaleur des Ecoles d'enseignement miituet , dans notre patrie ; et les deux Societes pour V amelioration de L'enseigne- ment elernentaire, pour I' application dc la morale chretienne aux relations de la vie sociale furent etablies sous ses auspices, et en grande partie par ses soins. II a puissaninient strvi Tin- dustrie dans les Chauibres legislatives, dans les conseils supe- rieurs dont il a etc jnembre, dans la Socicte d' encouragement pour Industrie nationale, et surtout dans la commune de Liancourt, oii ses Iccons et ses exemples out doniie une salu- taire impulsion a loute la contree. Un petit ouvrage, la iStati.\tique du canton dc Creil , qui est comme le testament pa!rioli(pie de ce grand citoyen, et auquel son excessive mo- destie I'a empeclie de niettre son nom, faitconnaitre lesaccrois- semens de ragriculture, de I'industrie , des manufactures, de I'instruciiun |Him.-iire, dans cette partie de la France ou il demeurait habitucllement. Les ennemis acharnes des institu- tions nouvelles et des liberies publiques, n'ont point epargne cet homme excellent, toiijours etranger et superieur a toutes les influences qui auraienl pu gener sa conscience et son amour du bien : oblige d'abandonner plus de six places gratuites, cpi'il honoraitpar ses vertus, il avait senti vivement ladouleur d'etre separe des malheureux cju'i! cherissait comme ses enfans. Les funerailles de M. La Rochefoucauld-Liancourt ont ete celebrees, le vendredi 3o mars, a I'eglise de I'Assomption. Un concours nombreux de pairs de France, de deputes, d'hommes 88a FRANCE. — PARIS, distinf^iu's do loiUes li's clas5«'s de la socitite reprcsentaicnt la capitale et la France, dans ccltc triste cerenionie. Mais, aa milieu du recueillcmcnt et du deiiil ceneial, line profanation sacrilege est venue nieler dans toutes les anics I'indij^nation a la •louleur. Quelques jeunes eleses de I'EcoIe ne Chalons, qui accompagnaient lo convoi, ont vouiu, apres avoir oblenu I'assentiment de la famille, porter cux-memes le ccrcueil qui renferniait les rcstes de leur bienfaiteur et de leur pere. Au- cune loi, aucune ordonnance de police n'intcrdit cet hommage popvilaire, egalement honorable pour celui qui en devient I'objet, et pour eeux qui veulent le rendre. Cependant, un commissaire de police et iin clief militaire ont fait employer ia force armee et les baionettes pour derober le cercueil aux en)])ressemens de la reconnaissance publiquc. Des citoyens ont ele frappes, ren verses dans la bono, mcme blesses; le sang a coule; la biere est tombee dans le ruisseau, et n'a pu etre qu'avec peine replacec sur le corbillard ! ! ! A la barriere do Clichy, oii le corps a ete depose dans une voiture pour etre transporte a Liancourt, M. Charles Dupin, niembre de I'Academie des sciences, a prononce un discours elocpient que nous regrettons de ne pouvoir reproduire, et il s'cst rendu le digne organe des sentimens divers qui agitaient tons les spectateurs. La Chambre despairs, danssa seancedu 3i mars, a ordonne, sur la proposition ' la civilisation dans chaque pays , soit les nations elles-memes, sous ies differens rapports sous lesqijels on a eii occasion de les considerer. A.BERDEEN(C.d').r.Manuscrits. I — (L') , 011 les 3Iembres ntrou- Abzac (C. d'). Foj. Atelier. 1 vables , coniedie satirique, par Academic de Paris, Sig. | Gerard, 255. (') On souscrit, pour ce Recueil scientifiqce et litteraire, dentil parait un cabier de quatorze feuilles d'impression , tous lesinois, au Bureau CENTRAL d'abonnement, rue d'£n/er-Sainl-jVicliel , n" i8; cbez Arthus Bertrand, rue Hautefeuille , u'' 28, et cbez Renouard, rue deTouruon, n" 6. Prix de la souscriptiou ; a Paris, .'16 fr. pour un au; dans les departcmens, 53 fr. ; fio fr. dans I'etrangcr. T. XXXIII. 57 272 ; 886 ACAUEAIIE. yoy. SoclETES S*- VANTES. Acte du parletueut d'Angleterre niodifiant les statuts relatifs .i la formation des jurys, traduit par V. Foucher, 558. Administration des possessions des Pays-Bas dans I'lnde, 198. — du Bresii. Voy. Lettres. Adresse aux blancs , discours prononce par Elie Boudinot , au sujel des indigenes de I'Ame- rique , i49- — au comte 15athurst , contenaiit les plaintes de la population de couleur, a Tile de la Triuite , 255. Adrien-Lafasge (J.). C. — B 594. — N. , 333. Affo (J.). Memoires des ecrivains et homines de lettres, de Parme continues par A. Pezzana, 190. Afrique, 279, 685. AgKICUX-TUKE , 184, 1S6, KJ2, 193, 204, 206, 490, 5l2, 522, 5g6, 597, 629, 789. Aikin (M™'' Lucy). Memoires sur la cour de la reine Elisabeth , traduits par M"ie A. Aragon , avec des notes par A. Mon- temont, 798. Alfieri ( Victor ). C. Salluste , traduit en italieii , SgS. Alienation sientale , 778. Allemagne, 169, 287, 5oi, 612, 736, 85i. Allen (William), yoj. Discours. Allix (G. A. F.). Systeme d'ar- tillerie de campagne du ge- neral Allix , compare, etc., 539. Almack , a novel , 162. Almanacu des Muses, 249. - des spectacles, 262. Almanachs allemands , 745. Amant ( L' ) de sa femme , co- niedie eu vers, 636. Amekique (L'), M. , 17. MERIDIONALE, l54. SEriEKTRIONALE , l47, 267, 277, 488, 600, 723, 840. TABLE ANALYTIQUE I Amours (Les) du Tasse, dramc: historique en prose , par Alexandre Duval, 824. — mythologiques > traduits des Metamor])hoses d'Ovide , par de Pongeiville, 248. Anacicon. ^oj. Veissier - Des- comhe. Analyses (II.) d'ouvrages an- glais : Asiatic Reseat ches (Ferry'), 3g5. — Voyage dans ie Ti- nianny, le Kouranko et le Sou- limana, par le major Gordon Laing (£. Sah'erte), 685. — d'ouvrages espagnols : Obras dramadcas y liricas de I.. F. dc Moratiii (Muriel) , 4^1. — d'ouvrages francals : Voyage de decouvertes aux Terres aus- trales, pentlantlesannees 1800- 1804 , redige par Peron , et continue nar Louis de Frey- cinet (Ferry) ,64. — Piobleme de I'esprit humain , par M. Massias (Stapjer), 87, 414. — Memoires sur la revolution et remigration , par H. de Damp- martin. Souvenirs de remigra- tion , par M. de Marcillac (*) , lo5. — Histoire du siege de Missolonghi , par Auguste Fa- hie (CainiUe Paganel) , 124. — OEuvres completes de Chateau- briand (0), i32. — Voyage pittoresque de la Grece , par C. de Choiseul-Gouffier (.W.) . 14 1. — L'Europe par rapport a la Grece, etc.. par de Pradt (A iV.),43i. — Le general Du- mouriez et la revolution fran- caise, par Ledieu (F. D. T.) , 437. — Nouveaux melanges historiques et litteraires , par Villemain (P. F. Tissot) , 477. — Notions statistiques sur ia librairie , par le comte Daru (Ch. Renouard) , 677. — Me- moires sur la guerre de i8og , en Allemagne, par le general Pelet (A.) , 691. — Resume de Vhistoire litteraire du Por- tugal , par Ferdinand Denis (7. H.), 701. • — d'ouvrages italiens : Histoire de la peinture en Italie , etc. , parl'abbe Lanzi (Salfi), 711. — d'ouvrages publies en Suisse: Meinoires de la societe de phy- sique et d'histoire nature! le de Geneve (5. R.), 670. AjV ATOMIE ,871. — /-^o/. Manuel. — chirurgicale. f^oy. Velpeau. — de rhomnie , etc. , par Jules Cloquet , publiee par C. de Lasteyrie , Sag. Anaxagore. f^oy. Schaubacli. Andrada (J. B. d', A. C. R. d', et M. F. R. d'). Refutation des ca- lomnies relatives aux affaires du Bresil , aSo. Angeloni (L.). Lettre d'un An- glais sur son ouvrage : De la force dans les choses poli- tiques , 4<)3. Angell (Samuel), f^oj. Harris. AjsGLETEimE. f^oj. Grande-Bre- TAGNE. Annales militaires des Francais , depuis le commencement de la revolution , par J. D. Magal- lon , 798. Anne Boleyn , par miss Benger, ouvrage traduit de I'anglais , 570. Annuaire pour I'an 1827, par le bureau des longitudes, 211. — anecdotique , ou Souvenirs contemporains, 362. — necrologique, etc. , par A. Ma- hul , 287. Antilles, i55,84a. Antiquites, i4i, 731 , 8o3, 832, 872. — • romaines de Neuwied et .ses environs , par G. Dorrow , 509. — de I'Alsace , ou Clifiteaux , eglises, etc., par Golbery et Schweighaeuser, afi6. DES MATIERliS. 887 Apercu de I'etat scientifique et litteraire des diffcrentes parties de ritalie, 298 , fiai. — historique sur les chemins de fer, M., 645. Apologie du clerge , des congre- gations et des jesuites , 796. Arabie , 737. Aragon (M""= Alexandrine), ror. Aikin. Archeologie , 5i8 , 5ii) , 754. — ^ojr. ChampoUion-Figeac. Architecture , 191 , 537, 692 , 627. — moderne de la Sicile , par J. Hittorff et L. Zantb , 828. Aristophane. f^oj. Dindorf. yirnao (F. G.). Diccionario de hi ^cadeinin espafiola , 837. Arnaud. f^oy. Souvenirs pitto- resques. Arpenteur. Voy. Guy. Arrestations arbitraires (Des), ou Debats du proces intente a M' Isambert , aaS. Arrb, Giiirispriidenza ipotecaria , 732. Art DRAIWATIQUF. , i5b, 26a. MILITAIRE, 539. — ( L' ) de verifier les dates , depuis I'annee 1770 , jusqu'a nos jours , 234. — (L') de parler en prose et en vers , par Don Josef Gomez Hermosilla , 52o. — d'atteler les animaux selon leur force , par A. Teyssddre , 538. — du Charpentier, 538. Arte (L') del cacciatore di talpe ^ 186. Arthur (J. F.). Instruction theo- riqueet applications de la regie logai ithniique , 533. Artillerie de campagne. Voj. Allix. Arts industriels. ^'oy. Techivo- LOGIE. AscETiQUE. T'oy. Sciences reli- G I BUSES. 5-. 888 TABLE AKALYTIQUE Asiatic Researches , A. , 3g5. AsiR, 217, 279 , (io3. Asile ouvert a Koenigsberg pour les jeunes criminels, 85 1. Assurances. P'oj. Notice. Aslronomical Cables and formulae , by Francis Baily, 491- Atelier (Aucieu) d'armes des Gau- lois , decotivert par le comle d'Abzac , entre Terrasson et Azerac , 628. Atlas (Nouvel) dii royaume de France , par A. M. Perrot et J. Aupick, 214. — gcographique , historique rt chronologique des deux Ame- riques , etc., parBuchon, 18. — gcographique et statistique des departemens de la France , 542. — historique et chronologique des litteratures anciennes et modernes , etc. , par Jarry de Mancy, 8o5. Audition, yoj. Deal. Auge de Fleury. Quelques ob- servations sur le projet de loi relatif a la police de la presse , 56o. Aupick. yoy. Atlas. Babbage. ^oy. Nominations aca.- nEMIQUES. Babinet. Voy. Memorial scienti- lique. Bahlens Lehrbiich fur For.u - and Jagdthier Geschichie , 7^6. Bailie {Miss). The Martyrs, 1 58. Bailleul (J. Ch.). Voy Biblio- mappe. Bailly (C.) Voy. Manuel du jar- dinier. Ilatbacena. Defeza dos tiegociatores do einprestino brasiterio em Lon- dres , 1 54. Barbier(A. A.), yoj. Dlctionnaire d'ouvrages anonymes. • — Voy. Biographie univcrselh-. — (Louis) fils. f'oy. Ibid. Bard ( Joseph ). Consideration l>our servir a I'histoire du de- veloppement moral et litteraire des nations , 282. Earth (C). Die Driiiden der Kelten , Barthelemy. yoj. Villeliade. — ^oy. Rome et Paris. — f^oy. Peyroneide. Basilicapetri (Le P.). J^'oy. Caillot. Bateau (Premier) a vapeur entre dans le port de Neuchatel , 619. Bayle (A. L. J.). Traite des ma- ladies du cerveau, etc. , 53o. — P'or. Manuel d'anatoniie. Beauvais (General). P'oy. Histoire militaire des Francais. — yoy. Biographie universelle. Beaux-arts, i4t, 191, 26(1, 267, 268, 269, 333, 5ig, 591, fi37, 711, 8a5, 826, 828, 878. Beeken {J. L.). Reise i Nortydshland. 5oi. Bekker (G. 7.). Rndimenta lingua hebraicce , 201. Bellart. ^oy. Billecocq. Belles - Lettres. P^oy. Litter a- TURE. Belloc ( M"" Louise Swanton- ). f-'oj: Jeunes industriels. C. — Les articles signcs L- S. B. Benger (Miss). Foy. Anue Boleyn. Benoiston de Chftteauneui'. De 1» colonisation des condamnes , etc. , 556. Berenger, peintre sur porcelaine. Tete de grandeur naturelle , d'apres Rubens , CSg. Bertrand (.\lex.). Lettres sur les revolutions du globe , SaS. Bertrand (G. S. J.). Foj. Epitre. Eeuzelin (L'abhe). Nouvelle me- thode pour etudier I'lirbreu defr saintes Ecritures, 575. Bianca e Fernando. Voy. Cainpiiiti. BlBLIOCRAPHIP. , 147, 2fi4l 4^^ ? 72.3. DES MATIERES. Bibliomappe, ou Livre - Cartes , par J . C. Bailleul , 2 1 3 . Bibliotheque(Petite)generale,his- torique pour tout le monde , 5o3. — catholique belgique, Sal. — d'instruction elementaire , par Abel Dufresne , 220. — rurale , ou Recueil d'instruc- tions sur I'agriculture, par le docteur Moretti , 5i2. Bichebois. yoy. Souvenirs pitto- resques. Biet. yoy. Edifices publics. Billecocq, avocat. Notice bisto- rique sur M. Bellart ,242. Biograjia universale antica e mo- derna , 5 1 6. BioGRAPHiE, i56, igo, 987, 242, 269, 305,753,754,758,802. — uiiiverselle ancienne et mo- derne , publiee par L. G. Mi- cbaud , 800. — et porta tivedescontemporains, en un seul volume, 801. — classique , en un seui volume , par le general Beauvais, revue par A. A. Barbier et Louis Bar- bier fils , 235. Boaden {James). Memoirs of iM". Siddons , 1 56. Boinvilliers. foy. Fables. Bois fossiles decouverts dans le Lincolnshire , 844- Boitard. Manuel d'histoire natu- relle, 202. Bonafowi. Senni sidV introdiizione delle capre del Tibet , etc. , 749- Bonaparte C^Ch. Lticien'). Observa- tions on the nomenclature of Tl'il- son's Ornithology, 723. Bonard. f'oj. Forets. Bory de Saint-Vincent. Voy. Dic- tionnaire classique. — C— B. , 767. BOTANIQUE , 596 , 627, 763 , 7^)5. Botanographie elementaire, par Them. Lestiboudois , 20a. Botany-Bay ( Le ) francais , ou Colonisation des condamnt's aux peines afflictives, etc. , par T. Ginouvier, 228. Bouchene Lefer, C. — B. , 288. Boudinot (Elie). Jn address to the White , etc. , 149. Boukhara. Voy. Meyendorf. Boulgarin et Gretch. Archives du Nord, 498. Bouzique (U. E.). Foy. Servius Tullius. Brard. yoj. Mineralogie popu- laire. Bres. C— B.,783, 812. Bresil, 154,502,569. — (Affaires de). Fof. Andrada. Briot (P. F.). yoj. Neckologib. Brunei. Pont sous la Tamise, 845. Buchon (J. A.). Voy. Atlas. Buckingham's Travels in Mesopo- tamia, 727. BULLETIN EIBLIOGRAPHIQUE (III.) ; Allemagne, 169,501 , 736. — Bresil, i54. — Danemark, 168, 5oi. — Espagne , 52o. — Etats- Uuis, 146,488,723. — France, 202 , 528 , 762. — Grande-Bre- tagne , i55 , 49°? 727. — Italic , 184, 5 12, 749- — Mexique, 726. — Norvege, 167. — Pays-Bas , ig4, 522, 756. — Russie, i63 , 498, 732. — Suisse, 17G , 5io, 747- Burnouf (E.). Observations gram- maticales sur quelques pas- sages de I'Essai sur le Pali, etCj. 809. Cacao, yof. Monographic. Caillot (A.). Vie de Saint-Charles Borromee , traduite du latin du P. Basilicapetri , 802. Calendrier agronomique dc la Societe royale d'agriculture de Turin, 184. Campagues d'Allemagne. foy. SaintrMaurice. — yor. Mortonval. 890 Cumpiuti. Bianca e Fernando, opera seria, 858. Cantate sur les decs , par le conite de Franclieu , Siti. Capece-Latro. f^or. Scura. Cardinali (^.). In lapidem strato- nicensem niipcr inventiiin , etc. Prndiomits , 5 i g. Cardozo {G. N.). Notes on political economy, y^i^. Carion-Nisas (Colonel). Observa- tions sur I'ouvrage de M. le lieutenant-general Max. La- niarque , sur I'Esprit militaire en France , 788. Carove (F. W.). Sur les objets qui peuvent etre soumis a un exanien public, etc. , i6g. Carte de Palestine, par A. H. Du- four, 7-8. Caucliois- Lemaire. f^qy. Lettres historiques. Causes ceiebresetrangeres, 787. Caze (A.). Voj. Tajan. Cebes. f^oy. Coray. Ceciie , ou les Passions , par E. Jouy, 588. Celnart (MUe). P'oj. Manuel des dames. — P\r. Manuel des demoiselles. — F'oy. Manuel du cliarcutier. Cent jours (Les), et Saint-Helene, poemes , par Charles Massas , 812. Champollion - Figeac. Resume complet d'archeologie , 244. — jeune. P^oj. Nominations aca- DEMIQUES. Chamrobert (Paulin de). C. — B., 839. Chant. P^or. Miisique. Cbants beroi'ques (Troi.s), par Eugene I'Ebraly, 254. — nationaux desSerbes, traduits en vers allemands, par Talvi (Mll= de Jacob), 507. Cliarcutier. Foj. Manuel. Charpenterie, 533. Charri<>re (E.). f'oj. Sainte-He- 'ene. TABLK ANALYTIOUE Chateaubriand ( V. de ). roj'. OEuvres compl(>tes. — Foj. Projet de loi. Cheniin de fer. ^o/. Apercu his- torique. Chevalier (F. F.). Foj. Flore ge- nerale. Chevres du Thibet, foy. Bona- fous. Chiaveriii (i.). Esarne genealogico e comparativo , etc., 5i3. Chimie, 527, 627. — T'oy. Manuel. Chine (La); moeurs, usages , cos- tumes , etc., par Ueveria, etc., 268. Ching - Kong , gouverneur du jeune prince Konkouli. Lettres chinoises , 25g. Chikurgie, 176, 2og, 771,772. Foyez aiissi Sciences medi- cares. Chodzko (L.). Foy. Fasti. Choiseul-Gouffier ( C. de). Foj. Voyage pittoresque. Cholera morbus. Ravages de ce fleau dans Tlnde britannique, 279-, . — (specifique contre le), 6o3. Choron (A.). Journal de musique religieuse ,271. — Methode de plain-chant ordi- naire et mesure, 5g4. Chronologie , 2i3, 234, 524- C1V11.1SATION , 149, 232. — (Progres de la) dans le canton de Neuchatel , 618. Civitali (Mathieu). Foy. Mazza- rosa, Clauren (H.). yoy. Liesli. Ch'anthe. f^oy. Coray. Cleineute. Foy. Fontanesi. Clinique de la maladie syphili- tique , par N. Duvergie, 77 i. — Foj. Manuel. Cloquet (Jules), f^oj. Anatomic de riiommo. Code civil (Promulgation d'un), dans I'ctat de la Louisiane 840. DES MATIliRES. -■- dans la republique d'Ha'iti , — militaire , pour I'arm^e des Etats-Unis, 489. — de lois civiles pour les Etats- Unis , 600. Collection de costumes , d'armes et de meubles pour servir a I'histoire de France , par Ho- race de Vieil-Castel, 826. Colonibe (La), par P. A. Krura- macher, 784. Colonic grecque etablie en Corse. Voj. Siephanopoli. Colonisation descondamnes. Voy. Benoiston de Cbateauneuf. Columbia ( The present state of^ , 492. Commerce ( Causes principales de la crise du ) , etc. , par J. C. Lange , 168. — (Situation dn) de la ville de Hambourg , avec le continent de TAmenque, 612. Compte rendu des travaux de la Societe des sciences niedicales de Bruxelles, par Vander-Lin- den , 757. Comte (Charles). T'oj. Legisla- tion. Concert donne a Paris , par M. et M»'B Stockhausen ,332. Concours geneiaux (Tableau liis- torique , cbronologique des) de rUniversite , par A. J. de Man- ^y' ^77. Connaissances humaines. Voy. Farcy. — Voy. Jullien. Conquetomanie (La) , ou Aven- tures burlesques du grand Bar- iiabe , par M''^ V. de Senan- court ,691. Conseil de salubrite. Voy. Rap- port. Conservatoire des arts-et-metiers ctabli a Bruxelles, 627. CojiTES. Voy. Romans. — de la famille O'Hara, 160. Cooper. OEuvres completes , tra- duites de I'anglais , par A. J. B. Defauconpret , 261. CoRAN. Voy. Garcin de Tassy. Coray. Manuel d'Ep!ctt;te,ta}3leau de Cebes et prifere a Jupiter, de Cleanthe, publics avec la ver- sion francaise , 276. Cornelia , almanach allemand , public par A. Schreiber, 74G. CosMOGKAPHiE , 528. Costumes (Memoire sur quelques) des anciens Grecs , par Andre Papadopulo-Pi-eto , 5 18. Cotlu. Voy. Projet de loi. Cour (La) d'un prince reguant , ou les Deux niaitresses , par E. L. B. de Lamothe-Langou , 824. Cours (Dix) publics et gratuits etablis par le roi des Pays-Bas, dans sa residence, 626. — (Reprise des) de sciences in- dustrielles , institues par la So- ciete academique de Metz , 865. Course dans la Grujere , etc. , 545. Coutellerie. Branche remarquable de I'industrie de la ville de Na- inur, S60. Couturier ( A. F. ). Examen du projet de loi sur la legislation militaire, 791. Crivelli , avocat. C. — B. , 887. Crosnier. Voy. Louise. CuLTE. Voy. Sciences beli- GIISUS£S. D Damphotix (£•)• OreeA course , com- prising extracts , etc., 162. Dampmartin (H. de). Memoires sur divers evenemeus de la re- volution et de Temigration , A. , io5. Danemahk , 168 , 5oi , 85o. Daru (C.). Notions statistiques sur la librairie , etc. , 56o , A., 677. David, peintre. f^oy. Reclama- tion. Davy (Sir Humphrey), f^oj. No- minations ACAnEMIQUES. Deal (J. N.). ISouvel essai sur la liiniiereet les couleurs, 7(18. — Essai sur la theorie de I'audi- tion , 768. Decouvertes, f)o6 , 621, 628, 844- Defauconpret (A. J. B. ). f'oj. Cooper. Defense de I'ordre social , etc. , par Antoine MadroUe , 794. Definitions en cconomie politique, par Malthus , 494- Degeorge (Frederic). C. — B., i5i, 160, 73i. — N. 606. De Joiige (J. C). Verhandelingen betrej/ende de Geschiedeiiis der Nederlanden , 5a 4- Delanialle. f'oy. Plaidoyers choi- sis. Delamarre (L. G.). Historique de la creation d'uue richesse mll- lionnaire par la culture des 206. Delia, nouvellerusse, par M'"* L. de Saint-Ouen , BaS. Deluc (J. A.). Histoire du pas- sage des Alpes, par Anuibal , 5io. Denis (Ferdinand). Resume de rhistoire litteraire du Poi tugal, A. , 701. De Pons (C. Gaspard). Opinion d'un soldat sur la revision pro- chaiue des lois peuales niili- taires, 555. Depping (G. B.). Apercu histo- rique sur les mcBurs et les cou- tumes des nations, 797. Deroy- f^oy. Souvenirs pitto- resques. Dessin, 825. Developpement moral et litteraire des nations, f'oy. Bard. Devfcre (L.). I'oj. Salt. Deveria. foy. Chine. TABLE AMALYTIQUK Devvez. Histoire generale de la Belgique , 757. Dictionnaire de i'Academie es- pagnole , abrege par V. G. Ar- nao , 837. — des ouvrages anonvmes el pseudonymes , etc. , par Bar- bier, u()4. — biographique espagnol , 3o3. — encyclopedique, imite du Con- versations Lexicon , 3o5. — geographique universel , par unesocietede geographes,54i. ■ — classique d'histoire naturelle, public par Bory de Saint-Vin- cent, 762. Dieude ( Mme Armando ). f^oy. Lanzi. Dindorf. Aristophanes Ecclesiaziisa: , 743. Dionysiaques de Nonnus. Voy. Graeff. Diplomacy ( The ) of the United- Stales , i5o. Discours adiesse aux etudiaus de I'Hopital-Guy, sur la philo- sophic e.\perimentale,par Wil- 1am Allen , 727. Doctrines medicales (Examen des principales) , etc. , par Louis Chiaverini , 5i3. Doin (J. T.). Galerie medicale. Notices biographiques , 269. Donker-Ctirtitis. Specimen academi- ciim inaugurale , etc. , y!}6. Dooinik {J. £.). 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Duvergie (N.). Voj. Clinique. Duvergier de Hauranne. T'^oy. Jury. E EcoLE preparatoire etablie a Paris , 3 1 8. EcoLES rurales d'enfans pauvres de divers cantons suisses, 855. EcONOMIE DOMESTIQUE, 774. — POLITIQUE, 168, 3ai , 368, 494- — (Notes sur 1') , par G. N. Car- dozo , 724. — KURiLE, 749. Voyez Agricul- ture. EcossE,74. ^oy. aujit Grande- Bretagne. Edgeworth (Miss Maria). Voy. Jeunes industriels. Edifices publics (Choix d'), conr- T. XXXIII. 893 truitsouprojelosenFrance,etc., par Gourlier, Biet , etc., 692. EuucATioN, iq5, 201, 220, 5ir , 551,726, 784, 852. Egypte , 737. Ehrenberg. ^oj. Humboldt. Elix (L.). Echte Stnkken betreffende de Vaart op den Ryn , i oy. Eloges (Choix d') prononces en I'honneur des illustres patriotes J. Adams et T. Jefferson , 490. Emigration. Foj: Dampmartin. — y^oy. Marcillac. Emprunt bresilien. Foy. Barba- cena. Enseignement des sciences ad- ministratives , 290. INDUSTRIEL, 4© , 534, 86o , 865. MUTUEL , 736. — populaire (Effets de 1'), sur les prosperites de la France, par Ch. Dupin, M. , 40. Entliousiaste (L') , comedie en vers, par Leonard, 634- Epagny (D'). Foy. Homme habile. Epictete. Foy. Coray. Epitre aux Chiffoiuiiers sur les crimes de la presse , par J. P. G. Viennet , 257. — a M. le vicomte de Cliiteau- briand , par G. S. J. Bertrand , 583. Erskine (W.). Foy. Leyden. Esclavage , i55. Escury (Henri baron CoUot d'). La gloire de la HoUande dans les arts et dans les sciences , 200. Espagme, 3o3, 520, 742. Espaignol (J. N. d'). Projet d'une statistique du departement de TArriege, etc. , 778. Esprit militaire en France. Foy. Carion-Nisas. Esquisse historique des doctrines auxquelles on a donne le nom d'Industrialisme , M. , 368. Esquisses romantiques , on M6- 894 langes litt^raires en vers et en prose, par Paul T..., 585. Etats-Unis, 147, 277, 488, 600, 7^3 , 840. Ethnographie , i4i , 728, 796. Euclide. yoj. Minarelli. Europe (L') par rapport a la Grece et a la reformation de la Tur- quie , par de Pradt , A. , 43 1. Evangile-Touquet. ^'cy. Henin de Cuvilliers. Expedition du capitaine Parry au pole arctique , 279. Explosion de la chaudlere d'un bateau a vapeur, 864- ExpostTioiJ nationale d'objets d'arts et d'industrie a Neii- chatel, 618. — a Paris des manufactures royales , 637. Eyries. Foy. Gordon Laing. Fables de Jean Krilof, 735. — de Charles Perrault, traduites du latin de Faerne , par Boin- villiers , 25 1. — par J. C. F. Ladoucette , 252. — choisies , dediees a la jeunesse, par H. Gauldree de Boileau , marquis de La Gaze , 820. Fabre(Auguste). Histoiredu siege de Missolonghi , A., 124. Farcy (Charles). Apercu philo- sophique des connaissanceshu- maines au dix-neuvieme siecle , 780. Fasti , disastri , soUevazioni e fa- zioni di ffitrra degV Itallani , TABLE ANALYTIQUE Fllbustier (Le), poeme, par Poirid Saint-Aurele , 810. Flint (James). Recollections of the lait ten years passed in the Taller of Slississipi , l47- Flore generale des environs de Paris, par F. F. Chevalier, 763. Flotte invincible (L'equipenient et la perte de la) de Philippe H, par J. Scheltema, SaD. Folie (La). Voy. Georget. Fondation de M""= Henriette de Wurmb , a Rudolstadt , pour I'instruction de pauvres petites dies, 852. Fontanesi (F.). Discorso sulle opere di sculttira del Cltinente , 5 1 9 . FoBETS, ao6. — (Des) de la France considerees dans leurs rapports avec la ma- rine militaire , par Bonard , 792-. Fossati , C. — B., 194, 5i5. Foucher (Victor). Voy. Acte du parlement d'Angleterre. France, 202, 214, 241, 3o6,528, 542,628, 762, 798,8^4. — (La) guerriere. foj. Gerard. Franclieu (C. de). f^oy. Cantate sur les Grecs. Francoeur, C— M. , 349. — B. , 492 ,534,539, 83I. — N., 881. Freycinet (Louis de). Foy. Voyage de decouvertes. Fiichs (E. B. ). Istoriia Rossi'isAo- Avstriis/io'i campnnii 1 799 goda , etc. , 733. Nominations acade- B. . Fee. T^'oy. MinUES. Ferry. C— A. , 64 , 395. 5i6 , 770. Fievres intermittentes. Voy. Vi- dalin. Finances, 349. Fleaux de I'agriculture dans I'lle de France , 279. Gail (J. B.). Vojr. Lettres inedites. Galerie d'antiquites egyptiennes de M. Passalacqua, a Paris, 872. - — medicale; portraits des mede- cins les plus cel^bres de tous les pays , etc. , par P. R. Vigneron, 269. — souterraine de la Tamise, con- struite par Ch. Brunei , 845. DES MATliRES. Galeron(Fred.). fo>-. Statistique. Gallais (A.) Voy. Monographic. Gambart. Voj . Nomin ATiojfs aca- DEMIQUES. Garcin deTassy. Doctrine et de- voirs de la religion musulmane, tires du Coran, 824. — P'oj. Memorial scientifique. Gedenhschriften in de hedendaag- sche Talen, 526. Geographie, 17, 2i3, 214, 217, 54 r, 542, 778. Geometrie des artistes et des ouvriers,etc., par A. Tevss^dre, 534. Georget. Discussion medico -le- gale siir la folie ou I'alienation inentale , 773. — C. — B., 210. Gerard. L'Academie, coniedie sa- tirique , a55. — Napoleon et Talma, 255. — La France guerri^re , elegies nationales, 8r5. Gerard , peintre. ^oj. Toschi. Geslin ( Ph. de). J''oy. Harmonic. Giannone ( /'. ). Istoria civile del regno di Napuli , 188. Ginouvier (T.). ^o/. Botany-Bay. Goethe, Voy. Nominations aca- demiques. Golbery (Ph.).C.— B , 170, 174, 5o2, 507, 5io, 745. — Voy. Antiquites de I'Alsace. Gondinet ( Ad.\ C. — B., 198,213, 225 , 55 r , 557. Gorgias. Voy. Scboenborn. Gordon Laing ( major ). Voyage dans le Timanni , etc. , traduit en francais par Eyries et de Larenaudiere , A. 685. Gourlier. yoy. Edifices publics. Graeff { F). Novvov Aiovuaiay/ov piSXia MH, 173. Grammaire, 157, 180, 201, 5o4, 575. — latine (Elemens de), par Le~ terrier, 574. Grande -Bretagjve, i55, 279, 4yo, 566, 604, 727, 844- I Grandes routes, f'oy. Thenard. I ^oj. Orvilliers. Grassi. f^or. Salnte-Alliance. Gravure en taille-douce , 878. — er medailles ( Etat de la ) en France, 333. Gkece,i24, i4' . i63,43i,655, 816. Gretch {N.") Sinn Otetchestva, etc., 164. — Voy. Boulgarin. Groningue (Etat de I'agriculture dans la province de ) , Sas. Gruyere (La). Description des inoeurs et des sites les plus re- marquables de cette contree , 545. Gueldre ( Description statistique de la ), 522. Guerre ( Relation de la ) contre les Birmans, par le major Snod- grass , 496. — (La) en Suisse, de Bilibald Pirkheimer, publie par Ernst Munch , 177. Guimps ( Mn'e de ). Voy. Leonard et Gertrude. Guy. L'Art du geometre arpen - teur, 536. H Haas (J. D.). ^oj. Liesli. Habit (L') de chambellan, ou les Jeu,x de la Fortune, par G. Touchard-Laf'osse, 589. Haiti, 842. Harmonic (Cours d'), par Ph. de Geslin , 593. Harris ( W. ) and S. Aiigell. Sculp - lured Metopes discovered amongst the ruins of the temples of the ancient city of Setinus in Sicily, 73r. Hcguin de Guerle. ^oj. Veillees russes. Heiberg. C. — B., 168, 169, 222, 5oi.— N., 287, 612, 85o, 85i. Hell (Thomas), f'oy. Penelope. 58* fSt)6 TABLE AWALTfTIQUE He mans ( >/'< F. ). The forest sanc- titar)-, 1 58. Hempricli. foy. Humboldt. Heniii de Cuvilliers ( B. d' ). Let- tre en faveur du pourvoi en cassation de I'Evangile-Tou- qiiet , 564- Henrion. f'oy. Histoire litteraire. Henry ( C. J. ). C— M.,645. Heusinans (P. J. ). Repertoire de chimie, pharmacie , etc., 627. Hereau ( E. ). C. — B., 167 , 240 , 25i , 5oi, 585, 820. — N., 286, et les articles signes e. h. Hermosilla ( /. G.). /Irte de hablar en piosay verso, Sao. Herschell. P^oy. Nominatioks ACADEMIQUES. Hejse ( A'. W. L. ). Das Madchen von Jndros , 1 7 4. HiEROGLYPHESpbonetiques. Foy. Salt. Histoire, io5, 171, 172, 177, aS/t , 240 ,241, 243, 437, 496) 5o3 ,524, 525, 573, 617, 627, 691 , 761 , 798- — Du passage des Alpes par An- nibal, etc., par J. A. Deluc , 5io. — generale, physique et civile de I'Europe, par le comte de La- cepede, 571. — de la campagne austro-russe en 1799, etc., par E. B. Fuchs. 733. — civile du royaume de Naples, par Pierre Giaunone, 188. — militaire de I'ltalie , 1 8g. — des revolutions d'Espagne et de Portugal , par le colonel de Schepeler, 742. — du siege de Missolonghi , par Auguste Fabre, A., 124. — des Pays-Bas. Documens y re- latifs publics par J. C. de Jonge, 524. — generale de la Belgique, par Dewez , 757. — • de la colonic grecque etablie en Corse, par Nicolaos Stepha- nopoli , 798. — militaire des Francais, par campagnes, revue par le gene- ral Beauvais , 234. — LITTERAIRE , igo, 200, ag8. — (Resume del') du Portugal, etc. , par Ferdinand Denis , A., 701. de France, etc. , par Hen- rion , 576. NATURELLE, 203 , 528, 627, 737, 762. des for(5ts et de la cbasse, pau' E.ienne Bahlen, 736. — de la peinture en Italie, etc., par I'abbe Lanzi, traduite par M»ie Dieude, A. 711. Hittorf. P'oj: Architecture mo- dern e. Hollands Kocm in Kiinsten en We- tenschappen , 200. Hollard (H. ). Fay. Manuel d'a- natomie. Holts ( P. ). Kongcriget Norges Stor- tliings Forhandlinger, 167. Homme habile ( V ), ou Tout pour parvenir, coniedie en vers, par d'Epagiiy, 875. HONGRIE , 852. Humboldt (Alex. de). Essai po- litique sur le royaume de la Nouvelle-Espagne , 568. Rapport sur les voyages scientifiques de MM. Ehren- berg et Hemprich, 737. Hygiehe, ao8. I ICONOGRAPHIE, Sig. Ile-de-Fkance, 279. IniPRIMERIE, 56o , 677. Inclinations (Sur les caracteras apparens des) et des passions , .5x6. — ( Projet d'une ) generale des ; Indes okientales, 279,395, 492- Pays-Ba9,627. j 603,729. ( Observations sur les pos- sessions des Pays-Bas aux), par J. E. Doornik , 198. Indigenes de I'Amerique. ^(y. Adresse aux blancs. — de I'ile de la Trinite. T'oj. Adresse au conite Bathurst. Induslrialisme. fey-. Esquisse his- torique. IwuusTRiE, 368, Soy, 618, 778, 8(30. Influence des passions sur les con- naissances huuiaines , par Jo- seph Sanchez, 187. Institut. Foj. Societes. Instruction elementaire, 220, POPULAIRE, 85i , 855. ( Etat del' ) en Irlande, 604. — puBLiQUE, 290,626, 853. foj. <7H«/.-EcOI,ES,Ul>fIVERSirES,etC. Intervention (Del') des peuples en faveur de la Grece, M., 655. Ireland ( Three months in^ , 730. — (^Sketches of), 730. Irlande, 604, 73o. Voy. aussi : Grande-Bhe'pagne. Isambert. f^oj^. Arrestations arbi- traires. Italie, i55, 184, 189, 298, 5or, 5i2, 621,711, 749, 858. Itineraire etymologique de Paris, par N. Malre, 545. — pittoresque du fleuve Hudson, etc. , d'apres les dessins de J. Milbert , 267. Jacob (Mile de) For. Chants natio- naux. Jacotot. Foy. Kinker. Jaquotot (Mme)^ peintre sur por- celaine. Une tete grande conime nature, d'apres Van-Dyck, 639. Jardinier (Annuaire du ) et de I'agronouie, 204. — ( Le bon ) , par A. Poiteau, 204. — (Manuel completdu), par Noi- sette, 529. — ( Manuel du ) , par Bailly, 767. DES MATIERES. 897 Jarry de Mancy. Fay. Atlas his- torique. Jauberi (Am^dee). /^oj. Meyen- dorf. Jesuites, 564, 794, 796. — (Les), ou les autres Tartufes, comedie eu vers, par Etienne Gosse, 578. Jennes industriels( Les), par Ma- ria Edgeworth , traduit de I'an- glais parMme Swanton-Belloc, 55i. Journaux et eecueils periodi- ques. — publics en Mlemagne : Sophro- nizon , a Heidelberg, 175. — publies aux Etats-Unis : The American Journal of science and arts, a New-Haven, i52. — The North- Jmerican Review, a Boston, 1 52. — New-England Galaxy, a Boston , 725. — publies en France. — Journal de musique religieuse , 271. — Archives historiques du depar- temenl du Rhone, a Lyon, 274. Le Petit Album Franc-Comtois, a D(Me , 274.- — Les Tablettes Franc-Comtoises , a Besancon , 274. — Le ftlercure Segusien , a Saint-Etienne , 274. — - Le Breton, a Nantes, 275. — L'A- beille de la Moselle , a Metz , 275. — Le Precurseur, a Lyon, 276. — Recueil agronomique , a Montauban, 596. — L'Ami des Champs , a Bordeaux , SgG. — Le Lycee Armoricain, a Nantes, 597. — Memoires de la Societe d'Agriculture du departement de I'Aube, 597. — Journal de la Societe d'emulation des Vos- ges , 597. — La Chronique, a Nevers, 597. — Le Memorial Bordelais, SgS. — Journal des progres des sciences et des institutions niedicales en Eu- rope, etc., a Paris, 834. — Es pritet conferences des lois d'in- ter^t general, a Toulouse, 836. 8yS TABLE AN — publics en Hongrie: Neuf ou- vrages periodiques consacres auxsciences et aux lettres, clout six en hongrois, deux en alle- niaud , et un autre en latin , 853. — publics en Ilalie : Archhi del proprietario e dell' agricoltore , a Plaisance , 19a. — U Fattore di campagna , a Bologne, igS. — L'Osservalore medico , a Naples, 193. — publics dans les Pays-Bas : Bi- blioth^que des instituteurs , a Mons , 20 1. — Repertoire de cliimie , pbarniacie, etc., a Louvain, 627. — Archives pour I'histoire civile et litteraire des Pays-Bas, a Louvain ,761. — en Russie; Sinn Otetchestva,2i St.- Petersbourg, 164. — Anciens journaux, 284. — Severni Ar- hhif, a St-Petersbourg , 498. — publics en Suisse. Le Nouvel- liste Vaudois, a Lausanne, 747- — le Journal de Geneve , 747. Jouy ( Etienne ). J^oy. OEuvres completes. Foj. Julien dans les Gaules. Voj. Cecile. Julien dans les Gaules , tragedie d'E. Jouy, 873. JuUien ( M. A. ) , Fondateur-di- recteur de la Revue Encyclo- pedique, C. — M.. i. — B.,758. Et les articles signes M. A. J. Fey. NoMlNATIOMS ACADE- MIQUES. Tableau synoptique et rai- sonne des connaissances hu- maines, extrait d'un ouvrage inedit, intitule : Essai sur la philosophie des sciences, etc., 782. Junte de charite, etablie a la Pue- bla , 726 Jurisprudence, 564 , 787. — hypothecaire , par Arro, 753. Jury. 1'oy. Duport. — (Du) anglais et du jury en ALVTIQUE France, par Duvergier de Hau- ranne, 568. — Voy. Acte du parlement d'An- gleierre. Justice CRiMiNELLE, 222, 223, 557. K Kahudovitch (J. Th.). Specimen d'un dictionnaire de la laiigue russe, 734. Keppeli^ Captain George). Personal narrative of a Journt-j/rom In- dia to England , 49^. Kinker(J.). Rapport sur la me- thodede M. Jacotot, etc., 195. Koenders (J.) Leven van Julius Agricola, 758. Krilof. (J.) Foy. Tables. Krummacher (P. A.), f^oy. Co- lombe. La Caze ( M. de). fey-. Fables choisies. Lacepede (C. de). Histoire gen6- rale de I'Europe, 571. Ladoucette (J. C. F.). Fables.aSa. Lagraciniere ( Camille ) , Voy. Marcellina. Lair (Samuel). Nouvelle methode de traitement des ulceres, etc., 772. La Marne ( De ). Traite meta- physique des dogmes de la Tri- nite , etc., 783. Laniarque (general), l^oy. Carion- Nisas. La Mennais ( L'abbe Fr. de ). Me- langes , 523. Lamotbe-Langon (E. L. B. de ). La cour d'un prince regnant , 824. Landon ( Miss L. E. ). The golden violet, 1 58. Lange(J.C.). Causes principa- les de la crise commerciale et industrielle, etc., 168. La.ngue allemande (Instruction sur la ), 157. — franc.iise , ibid. — grecque ( Cours de ) , par Edouard Damphoux , iSa. — grecque moderne ( Manuel de la), par W. de Ludemann , 5o4. — hebra'ique ( Rudimens de la ) , par G.J. Bekker,aoi. yoj. Beuzelin. — latine. yoj. Grammaire. f^oy. Vaucher. — pali. ^o/. Burnouf. — russe. yoj. Lexique. Lanjuinais, de I'lnstitut. Foy. Ne- CK0I.OGIE. — f^oy. Sudre. Lanzi (Abbe). Histoire dela pein- ture en Italic, traduite de I'ita- lien par M^x^Armande Dieude, A. , 71 1. La Perouse. yoy. Lettres inedites. La Place ( P. S. de),rqr. Necko- LOGIE. Larenaudifere (De) ^or, Gordon Laing. La Rocbefoucauld - Liancourt (F. A. F. due de). Voj. Ne- CROLOGIK. Lasteyrie (C. de) Voy. Anatomie de I'hoinme. Latonr, C. — B., 177, 209, 53r. L'Ebr.nly ( Eugfene ). Voy. Chants hero'iques. Lebrun. Des erreurs relatives a la sante, 208. Le Clerc (J. V. ). C— B., 182. Ledieu. yoy. Dumouriez. Legislation, 556, 558, 600, 750, 785,336,840,842. — (Traite de), parChailes Comte, 552. — civile , commerciale et crimi- nellede la France, par le baron Locre, 221. — niilitaire, 488, 489, 555, 791. LeNormand (L. Seb.). Voy. Ma- nuel du Relieur. Leonard. Foy. Enthousiaste. Leonard et Gertrude, traduit de I'Allemand de Pestalozzi, par Mme de Guimps, 5 11. Leonbruno(Laureut). Foj-. Prand. DES MATIliRKS. 099 Le Page. L'Art du Charpentier , 538. Lesbos. Voy. Plehn. Lesbroussart ( Ph.). Poesies, 758. Lestiboudois (Them.). Botano- graphie elementaire, 202. Leterrier. yoy. Grammaire latine. Lettre de I'auteur de (ireece -vin- dicuted,k Louis Frusinate,etc., 493. — de I'empereur de Russie a M. Livingston des Etats-Unis, Lettres choisies. J^or.Ching-Kong. — historiques adressees a S. G. Mg'" le Comle de Peyronnet , par Cauchois-Lemaire , 796. — inedites de Henri II, Diane de Poitiers, Marie Stuart, etc., par J. B.Gail, 243. de La Perouse, 323. — sur I'admiaistration du Bresil, 569. Levavasseur (B. M. St.). Le Li- vrede Job, traduit en vers fran- cais, 246. Lexique manuel de la langue russe, 734. L'H6te. C.— B., 809. Leyden [John) and IVilliam Ers- kinc. Memoirs of Zehir-Eddiit Muhamed Baber, translated, 729. LiBERTE des cultes. yoy. Vinet. — individuelle, 223. — de la presse, 228, 257, 3i5, 3i7, 56o, 583, 677. LiBKAiRiE, 560, t>77. Liesli , a swiss tale , by H. Claiiren , translated from the ^erman by J. D. Haas , 49S. Linguist ( The ) , » 57. LiTHOGHAPHIE , 267,335. LiTTERATURE allcmande , 175 , 498, 745 , 746. — ancienne classique , 173 , 174 , 247, 348, 598, 627, 743, 744- — anglaise, i58, 160 , 162. — arabe, 323, 824- — belgique-francaise, 758, 759, 761. — biblique, 246, 575. — espagnole , 45 1 , 52o, 887. — goo des fitats-Unls, a6i , 490. — francaise , i32, 244) 246, 249, a5i , 352, 254, 255, 257, 2 5g, 262, 324, 32S, 33o, 477, ^']4> 578,580, 583,585, 586, 588, 589, 591 , 597, 632, 634 , 636 , 8o5, 809, 810, 8ia , 814, 8i5, 8i6, 820, 823, 824, 873, 875. — grecque nioderne , 182. — belvetique allemande , 5i i. — helvetiqiie francaise , 747- — hollandaise, 627. — hongroise, 852. — itaiienne, 190, 298, 621 , 822 , 858. — portugaise , 701. — russe, 164 , 498 ) 735 , 817. — serbienne, 507. Livre de Job. f'o^-. Levavasseur. Locr6 (B.) Foj-. Legislation ci- vile. Loge(La) disputee, ou la guerre des privilegies , poeme hero'i- comique , par J. L. B., 249. Lois ( Recueil des), edits , ordon- nances , etc. , du duche de Pie- moDt, 75o. — militaires des 6tats-Unis, 488 — penales militaires. f o;-. De- Pons. «) LoNDRES. Accroissemens et em- bellissemens de cette ville, 844- Louis ( P. Ch. A. ). Memoires ou Recherches sur le ramollisse- ment,etc.,de la membranemu- queuse de Testomac, 53i. Louis XI a Peronne , comedie historique en prose, par Mely- Janin, 632. Louise, drame en prose, par Pe- lissier et Crosnier, 33o. Lucenay (J.de),C.— N., 616 Ltidemann { JV. ,von). Lehrbiich der neiigriechischen Sprache , 5o4. Liimiere (Essaisurla). Voy. Deal. M MadroUe (A.). Toj. Tordre sociaL TABLE ANALYTIQUF. Magallon (J. D.). T'or. Annales militaires. Mahne (G. L.). Voy. Metaphy- sique. Mahul (A.). Annuaire necrolo- gique, 237. Mai (Angelo). f^oj. Manuscrits. Maire (N.). Voy. Itineraire. Maison penitentiaire de Geneve, construite par Vaucher, 393. Maladies du cerveau. Foy. Bayle. Malaspina Sannazaro. Foy. Me- moria. Malcolm's {Sir John), Sketches of Persia, 728. niahhtis. Definitions in political eco- nomy, 494- Mancy (A. J. de). Voy. Concours generaux. Manuel d'liistoire naturelle, par Boitard , 202. — de chimie , par J. Riffault , 77°- - , . , — d'anatomie generale , par A. J, L. Bayle etH. Hollard , 770. — de clinique cbirurgicale, par A. Tavernier, 771. — com])lel du jardinier, marai- cher, etc. , par Louis Noisette, 529. — du jardinier, par C. Bailly, 767. — du cliarcutier, par M°"' Cel- nart , 774- — du relieur, etc., par L. S^b. Le Normand , 775. — des dames , ou I'Art, de la toi- lette , etc. , par M™e Celnart , 541. — des demoiselles , ou Arts et metiers qui leur conviennent , par la m6me, 54 1- — du voyageur en Italic , par Neigebauer, 5oi. Manufacture royale de porcelaine de Sevres , 637. — des Gobelins, 640. Manufactures. Voy. Taillandier. Manuscrits (Anciens) decouverts Defer de DES MATI^RES. 901 eu Angleterre par le conite d'Aberdeen , 606. — decouverts dans les biblio- theques du royaume de Naples, par Angelo Mai, 621. Marcelliiia , ou I'Arbre des sou- pirs, roman de Defeiidente Sac- chi , traduit en francos par Ca- mille La Graciniere, 822. Marches!. Voj. Rectification. Marcillac (M. de). Souvenirs de reraigration , A. , io5. Martius. Voy. Nominatioks aca- DEMIQUES. Martyrs (Les) , drama anglais , par Miss Joanna Bailie, i58. Massas (Charles), foj. Cent jours. Massias. Voy. Problemedel'esprit Iiuniain. — yoj. Principes de litterature. Mathematiques , 5i5, 533, 53(x Mazois (Francois). Foj. Necro- LOGIE. Mazzarosa (Antonio'). Lezioni in- torriu le opcre di sciduira e d'ar- chitettiira di Matteo Cii>itaU, I g i . Mecanique , 538. — (Application de la) a I'etablis- sement des constructions et des machines , ])ar Navier, 53t. Medecike. Foy. Sciejvces me- IJICALES. Melanges de cliirurgie etrangere, 17 ft. — (Nouveaux) historiques et lit- teraires, par Villemain , A., 477- Melling. Foy. Voyage pittoresque. Mely-Janin. Voy. Louis XL Membrane muqueuse de Testo- mac. I'oj. Louis. Memoire adresse a la Societe d'en- couragemeut pour les arts , les manufactures , etc. , de Lon- dres , par W. M. Withers , 490. Memoires , Notices, Lettkes ET Melanges (L) : Revue des progres des sciences , des lettrcs et des arts, en 1826 (/V. .-/. Jul- T. xxxm. lien), I. — L'Amerique {J . C.L. de Sismondi) , 17. — Effets de I'enseignementpopulaire {Char- les Dupin) , 40. ■ — Notice sur les assurances de toute espece (Franccsur) , 349, — Esquisse historique des doctrines aux- quelles on a donne le noni d'ln- dustrialisme (B. C. Dunoyer), 368. — Apercu historique sur les ciiemins de f'er (C. /. Henry), 645. — De I'intervenlion des peuples en faveur de la Grece (5.), fi55. — ET Rappokts des Socletcs sa- vantes et d'utilite publique ea France, 270, 595, 83i. — de la Societe de physique et d'histoire naturelle de Geneve, A., 670. — de la Societe academique de Savoie, 187. — publics par la troisieme classe de rinstilut royal des sciences, etc., des Pays-Bas , S26. — souvenirs et anecdotes , par le comte de Segur, 240. — de Zehir-Eddin Mohammed Baber, 729. — sur la cour d'Elisabeth , reiue d'Angleterre , par Lucy Aikin , 798- — sur la guerre de 1809, en Al- lemagne , etc. , par le general Pelet , A. , figi. — , anecdotes et observations sur I'etat actuel de I'ltalie et des Italiens, i55. — de M™« Siddons , par James Boaden, i5fi. — sur le consuiat , par un ancien conseiller d'etat, 241- — publics a Saint-Petersbourg , jiar le dcpartement de I'ami- raute, etc. , 732. — sur les langues , dialectes et ]iatois , tant de la France que des autres pays, 832. Memoria sugli a/'/mreiiti carulteri delle incUntiziom e passloni . per &9 yoa TABLE ANaLYtIOUE L. Malaspina Saiinazaro , 5 16. Memorial scientifique et indiis- triel , redige en arabe et puhlie a Paris par Garciii de Tassy et Babinet , ii'i. Memorie degli scriitori e letteiati parmis;iani , etc. , igo. Mery. Foj. Villeliade. — yof. Rome et Paris. — f'oj. Peyroneide. Mesopotamif. , 727. Messiue (C). y<>j. Tajan. Mclaksa {E.). Istoria gretcheskikh pro'tzchestvii ^ 1 63. Mii.vLi.uKGiE , 3o6 , 5i5. — pratique, etc. , par M. D. et L. , 540. Metaphysique ( iSlemens de), par D. Wytteiibach , publics par G. L. Mahne, iy5. — nouvelle, ou Essai sur la sys- teme intellectiiel et moral de I'homme , 548. Meteouologie , an. Metopes. Foy. Harris. Mexique , 726, 841. Meyendorf^B. George de). Voyage d'Orenbourg, a Boukhara,revu par A. Jaubert , 217. Michaux (Clovis). yoy. Douze lieu res. Micbelot (A.), C— N., 3j5, 63i, Milbert (J.). ^'o>-.Itineraire pitto- resque. Military laws of the United-Stales , 488. Minarelli ( C ). Dimostrazione del rj'iinlo jiostiilato d'Eiiclide , 5l5. Minehalogie usuelle , par Dra- piez, 767. — populaire , par Brard , 767. Minerve , almanach allemand , 746. Mirles de houille d'Anzin , 3o6. Misslssipi (Vallee du). f^ojf. Flint. McEurs et coutumes des nations. yoy. Depping. Momie (Ouverture d'une), 872. Monnard(C.). C— B. , 180, 548. Monographic du cacao , etc. , p.-ii- A. Gallais , 307. Mcinsieiir Deiitscourt , ou le Cui- sinier d'un grand liomnu' , co- medie satiriqne , 255. Monstruosite d'un enfant n6 a Paris, 871. Montement (Albert), f^oj. Aikin. Morale , 220. AJornlin (/). Leandro-Fernandezdc). Ob/as diainaticas y liricas , A. 45l. Moreau de Jonnes (A.). C. — N. , 845. iVoretti. Biblioteca agraria , 5ia. Morgenstern (Charles). Cours de semestre de I'Universite de Dorpat , i63. Mort ( La ) de Charles I", roi d'Angleterre , drame , par Charles d'Outrepont , 821. Mortonval. Campagnes d'AUe- magne, depuis 1807 jusqu'en i8og. Munch [Ernest). Bilibald Pirhhei- mers Schweizerkrieg , 1 77. Muriel. C— A. , 45r. MusEE national , fonde a Leopol, en Gallicie ,611. — nouvellement etabli a Dron- theim , en Nprvege , 61 r. MusiQUE , 271 , 332 , 593 , 594, 83o,858. N Napx-es , 188 ,621. Napoleon et Talma , elegies na- tionales nouvelles, par Gerard, 255. Navier. Resume des lecons don- nees a I'Ecole des ponts-et- chaussees sur I'application de la mecanique , etc. , 537- Navigatiom , 732. — par la vapeur, 619, 864- — (De I'etat actuel de la) de I'An- gleterre , discours tradnit par Piclion , 566. • — sur le Rhin. I^or. Op den Hooff. — Foj. Elix. Neckoi,ogiu : Pierre Paganel , ancien secretaire geneial dumi- nistere des relations exteiieures de France, a Bruxelles , 338. — Francois Mazois , architecte , a Paris , 34o. — Le comte Jean- Denis Laiijuinais , niembre de rinstitut, a Paris, 344- — Le professeur Henri Struve , a Lau- sanne , 6ig. — Henri Pesta- lozzi, celebre pedagogue, a Neu- liof , dans le canton d'Argovie, (iio. — Pierre Francois Briot , professeur de pathologic et de clinique chirurgicale a Be^ saiiqon , 641. — Joseph Piazzi , celebre astronome , a Naples , 858. — Pierre-Simon de Laplace, pair de France , menibre tie rinstitut , 880. — Francois- Alexitndre-Prederic , due de La hochefoiicauld- Liancourt , pair de France , menibre de I'lus- litut, 88r. Neigebaiier. HandbiichJTir Reisende in 1 1 alien , 5oi. Nicollet, f'oy. Nomim Axioms aca- DEMIQUES. Niebuhr. foy. Ibid. Noah (M.). f^oy. Reclamatiom. Noisette (Louis), fojr. Manuel du jardinier. NoMIWATIONS ACADEMIQUES : Gccthe ff A'/e^HAr, en Allemagne; Is capitaine/'arr^etsirZ/H/ra/jy^/-^^ Davy , en Angleterre ; Poisson, Charles Diipin , Thenard , ylbel Remusat et Cliampollion ^eune , en France , niembres hono- raires de rAcademie imperiale de Saint-Petersbourg , 287. — Fee, de Lille et M. A. Jidlien , de Paris , membres honoraires de la Societe de mineralogie de Jena , 287. — Martins , de Mu- nich , correspondant de TAca- demie royale des sciences de TIERF.g. go3 Paris, 3 1 a. — Crambart , de Mar.seille; Nicollet, de Paris; Herschell et Dabbage , de Lon- dres , correspondans de I'Aca- demie royale de Bruxelles, 626. — Poiiqueville , menibre de I'A- cademie des inscriptions et belles-lettres de Paris, 871. NoRVEGE , 167, 287, 611, 85o. Notice sur les assurances de toute espece , M. , 349. NoUVELLE -ESPAGNE. Foy. Hum- boldt. NouvELLEs. Foy. Romans. SCIEKTIFIQUES ETI.ITTERAIRKS (IV) : AUeniagne, 287, 612, 85 1. — Antilles, 842.— Dane- mark, 85o. — Espagne , 3o3. — Etais-Unis, 277, 600, 84"- — France, 3o(i, 628,864.— Grande-Bretagne , 279, f)o4 , 844. — Haiti, 842. — He de France, 279. — Indes orien- tales , 279 , 6o3. — Italic , 298 , 621, 858. — Mexique, 841.— Norvege , 287, (111, 85o. — Paris , Bog, 629, 867. — Pays- Bas, 3o4, 626, 860. — Po- iogne , fill. — Russie , 284 , fio7, 848. — Suisse , 293, 618, 854. Nii^ent's [Lord) Statement in sup- port of the political claims 0/ the roman catholics , 730. NiJMisMATiQUE moderne , 333. Nuraghes de la Sardaigne. foy, Petit-Radel. o OEuvKES COMPLETES du \icomte de Chilteaubriand , A., i32, 809. — de Cooper, 261. — d'Etienne Jouy. 246. — diverses de L. V. Raoul , 759. — dramatiques et lyriques de D. L. F. de Moratiu , A. , 461. Op den Hoof. Zeis over de faart op den Ryn, 199. 904 TABLE ANALtTIQOB Orioli {F.). De' paragiandini metiil- lici , etc., i8fi. — Spiegazinne d'linagemma etriisca del Miiseo reale di Parigi , y55. Ornithologie. ^oj. Bonaparte. Orphea , almanach allemantl , Orvilliers(M. d'). Doveloppement d'une proposition relativement a Fentrutien des routes , etc. , 7-6. Oulrepont (Charles d'). La niort de Charles I"^"", 820. Paganel(Camllle), C— A. , 124. — (Pierre). f'oj\ Neckologie. PALEsriNn, 778. PapnJoptt/o-Pre!b {A.). .Vemnrin suUi alciiiii costiimi degli antichi Oreci , 5 18. Paragr^les metalliipies. V. Orioli. Paraiit , peiiilre sur porcelaine. L'eiitree du roi a Paris apres sou sacre , 638. Paris, 209, 545, 629,867. Parry (Capitaine). 1 oj. Expedi- tion. I'OJ. NOMINATIOKS .\C\DE- MIQUES. Passalacqua. Voy. Galerie. Pastoii (Ii). Metliode elementaire de violon , 83o. Paiiliis. Sophrunizon , lyo. Pays-Bas, 194,304,522,626, 7.56, 757, 761, 860. Peine de niort (De la) , et du sys- feme penal dans ses rapports avec la morale et la politique, par J. B. Salaville, 222. Peintube ,711. — sur porcelaine, 638. Pelet (General). Foy. Memoires. Pelissier. For. Louise. Penelope, almanach allemand , publie par Th. He" Peron. ^oj. Voyage vertes. 746. de decou- Perrault (Charles), f^oj'. Fables. Perrot (A. M.). f'oj. Atlas. Pkbse (Esquisses sur la) , attri- buees a sir John Malcolm, 728. Perspective lineaire. f^oj. Thi- bault. Pestalozzi (Henri). Foj. Leonard et Gertrude. — >'oj. Necrolooie. Petition de aSo imprimeurs et lihraires de Paris , sur le projet de loi relatif a la police de la presse , 56o. Petit-Radel. Notice snr les Nu- rp^lies de la Sardalgne , etc. , 8o3. Petits solitaires (Les), ou Cours amusant d'etudes premieres , 220. Peyroneide ( La ) , Epitre , par Mery et Barthelemy, 58o. Pezzana (Angelo). J^ojy. Affo. Pharmacie, 527. PniLOLOGIE, l52, 173, 174 J 27&, 5o6, 575, 743, 744) 809. PhILOSOPHIE , 87, 175 , 187, 2^2 , 244 1 4 '4 » 627, 727, 780. Physiologir , 5l6. Physique, 186, 756, 768. Piazzi (Joseph). Foy. Necro- I.OGIE. Pichon. f^o^-. Navigation. Pins (Culture des). For. Dela- marre. Pirkheimer (Bilibald). r. Munch. Plaidoyers choisis et ceuvres di- verses de M.Delamalle, 787. Plain-chant, f^oy. Clioron. Plehn (L.). Lesbiacorum liber, 172. PoESiE , 1 58, 246, 247, 248, 349, 25i, 252, 254, 255, 357, 451, 58o,583,585, 586,745, 746, 738,759, 810, 812, 8i4, 8i5, 816, 820. — dba:matique, i58, 255, a5(), 324,328, 33o, 45i, 578, 63a, 634, 636, 820, 858, 873, 875. Poctes beiges (Collection de ) , 758. UES M ATI E RES. f)o5 Poirie Saiiit-Aur^le. Voy. Flibus- Progr^s (Coup-d'oeil sur les) dcs tier. Poisson. Voy. Nominations aca- DEMIQUES. Poiteau (A.). Le bon Jardinier, 204. Police , SSj. Politique, 17, 167, 169, aaS, 23o, 43i7 437, 49J) 564, SgS, 730, 794, 796. PoLOGNE , fir I. Ponce. Vny. Reclamation. Pongerville (De). T'oy. Amours inythologiques. PONTS ET CHAUSSEES , 645 , 776, 845. Portugal, 701, 742. Positions de physique , on Re- sume d'un cours de physique generale , par A. Quetelet , 75fi. Pot-Seurrat. Details des prix de tous les ouvrages debatimens, 537. Population (Accroissemenl dela) en Norvege, 287. Pradt (De). Voy. Europe. Prandi (Jerome). Notice sur la vie et les ouvrages de Laurent Leonbruuo , peintre mantouan, 75-i. Principes de litterature , de phi- losophie, de politique et de mo- rale , par le baron IMassias , 244. Prisons , 2g3. Prix de tons les ouvrages de bati- mens. Voy. Pot-Seurrat. Prix proi'oses .• par I'Academie royale des sciences, etc. de Lyon , 309. — Par la Societe de physique et de inedecine de Calcutta, 6o3. — Par I'Aca- demie imperiale des sciences de Petersbourg, 607, 848. — Par la Societe d'agriculture de Caen, 629. — Par i'lnstitut royal des Pays-Bas , 86 !. Probleme de I'Esprit bumain , par le baron Massias, A. ,87,4 '4- ciences , des lettres et des arts, en 1826 , M. , I. Projet de loi (Du) sur la police de la presse , etc. , par de Chateau- briand , 228. — (Observations sur Ic nouveau) relatif a la police de la presse, par Cottu , 228. — (Examen du) contre la presse, par Ch. Renouard , 228. — (Examen du ) sur la presse, par Evariste DnmouJin , 228. — Vny. Auge de Fleury. — Voy. Daru. — Voy. Petition. Quetelet (A.). C.~B. , SaS. — Voy. Positions de physique. R Raoul (L. v.). Voy. OEuvres di- verses. Rapport general sur les travaux du conseil de salubrite de Paris, 393. Reclamation an sujet de quel ques tableaux de David , 336. — de M. Ponce a I'egard de son ouvrage sur les beaux - arts , 336. — en faveur de M. M. Noah, fon- dateur d'une colonic d'lsrae- lites, 277. Rectification au sujet du celebre chanteur Marchesl , a Milan , 626. Regie logarithmlque. Toy. Ar- tliur. Regulations {General) Jor the army of the United-Stales, 489. Reilfenberg (De), C — B. , 19.') , 524, 756, 759. — N., 628. — Archives pour I'hisloire civile et litteraire des Pays-Bas, 761. Relieur. Voy. Manuel. - >bid. , 1. ibid., onoverninnclyke , lisez: onovenvinnelyke ; p. 555 , 1. 22, 3o et 35, Depons, lisez: de Pons; p, 556, 1. 8 , m^me correction; p. 557, 1. Z'j , fendues , lisez : arrachees; p. 558, I. aa , menacee , lisez : menacee ; p. 679, 1. 2 , dans ses regards , lisez : a ses regards; p. 606, 1. avant-derniere, un drupe, lisez : une drupe. Cahier de mars. Page 712, lig. 9, aper^ut, lisez : reconnut; p. 714 , 1. l3 , ^e I'ains efforts , lisez : les vains efforts ; p. 782, 1. 34, t. xtx , lisez : t. ix; p. 745 , 1. 29, acquis , lisez : acquise ; p. 754, 1. 26, sup- primez la virgule aprfes le mot : Rosiki ; p. 780, 1. 3o, d'un burin ferme et savant, ces mots doivent etre enfermes entre deux virgules ; p. 784, 1. 41 , faite , lisez : faire ; p. 86g , 1. 37 ; Payrandeau. lisez : Pajraudeau. 2 FEB.9^ Every Saturday is published, The And Weekly Review ; Consisting of Reviews of New Books, as soon as pub- lished, with interesting and ilhistrative Extracts ; Original Papers on a Variety of Subjects ; and a General Record of New Discoveries and other Matters worthy of Preservation. THE LITERARY CHRONICLE is constantly enriched with Original Articles, on — Painting, Poetry, &c. &c. &c. Philosophy, Biography, Theology, Science, Antiquities, The Drama, History, Morals, Music, And its Distinguishing Features are, — 1. Strict Impartiality in its Critical Examination of every Subject under Review. 2. Perfect Independence; being influenced by no Junta, Literary or Political, nor connected with any Bookselling Establishment. 3. Liberality of Sentiment, combined, on all occasions, with Manliness of Expression. 4. Original Communications from able Correspondents, abroad and at home, on every Branch of the Arts and Po- lite Literature. The Literary Chronicle contains Sixteen Quarto Pages of Forty-eight closely- printed Columns. Price Eightpence, or, postage free, One Shilling. *^* Notwithstanding the high reputation for correct judgment and strict impartiality, which The Literary Chronicle has obtained, together with the unquaHfied praise of many distinguished cotemporaries, (viz, the Editors of the Revue Encyclopedique, the Philomathic Journal, Gentleman's Ma- gazine, Dorset Chronicle, and of many of the London and provincial newspapers, &c.) still further powerful auxiliaries have been recently ob- tained in every department — Poetical, Critical, and Classical, as well as in the various branches of Fine Arts and Antiquities : in proof of which, the literary public are respectfully referred to the numbers of the last two two or three months. Other improvements in the typographical arrange- ment will become apparent in the future numbers, and these circumstances combined, have occasioned an advance in price, which will require no farther apology or explanation to the liberal pursuer of independent, ori- ginal, and elevated literature. London : — Published early every Saturday, by Davidson, 2, Surrey Street, Strand, where Advertisements are received ; it is sold also in Monthly and Quarterly Parts; and maybe obtained of any Bookseller, Postmaster, or Newsvender in the Kingdom. Also, in Paris, of M. Mather et Comp. Li- braires, Passage Dauphine. THE LITEIiARY CHRONICLE for 1826. The Annual Volume of The LiteHary Chronicle, Price .£l.7s. contains 832 closely-printed Quarto Pages, or 2496 Columns of Original and Critical Matter, being as much as Ten Large Octavo Volumes. The Literar^^ Chronicle was established in 1819. Each separate num* ber forms a pleasing and intelligent Record of the current Information of the Day, and each Volume completes a Desirable Annual Register of Polite and Instructive Literature. Avis adx amateurs dk t.a littiSratube ETHAWGiRE. On peut s'adresser k Paris, par rentremise du Bubbatj cektbal dx lA Rkvue Evctclopeoique , a MM. Trbutthl e< Wubtz, rue de Bourbon, n? 17, qui ont aussi deu^ maisons de iibFairie, I'une i Stras- bourg, pour rAilemagne, et I'autre ^ Londres ; — k MM. Art'hus Sbbtrand, rueHaulefeuille, n" a3; — REnouABD, rue deTouruon.n*' 6; — Letbau]:,t, rue de la Harpe, n* 8x , et '4 Strasbourg ; — Bo»- iAsan pere , rue Richelieu, n°6o; et a Londre$,pouc se procurer le» divers ouvrages Strangers, aogIa)s, allemand^, ilaliens, fusses, polo- nais, hollandais, etc., ainsi que les autres productions 4e la iitt^rature ^traog^e. AnX ACADEMIES ET ABX SOCIETES SAVAHTES dt tOUS ICS fitly*. Le? Academies et les Sqcietes savantes et d'ctilitb PUQflQlTB, fran9aises et ^trang^res, sent invitees a faire paxTenir exactement,/^4J^ de port , au Directeur de la Revue Encyciopidique , les comptes reiiflus de leurs travaux et les programnies des prix q.u'elles propo$ent . a|^ que la Revue puisse les faire c.onnaitre le plus promptement pos^ipji)e ^ ses lecteurs. AUX EDITEURS d'oUTBAOES ET AUX IIB&AI&ES. MM. les^diteurs d'ouvrages periodiques, fran^aiset Strangers, m\ d^ireraient echanger leurs recueils avec le notre, penyent compter rar le bon accueii que nous ferons a leurs propositions d'^change , et sor une prompte annonce dans la Revue , des publications de ce genre et des autres ouvrages, nouYellement publics, qu'ijisnous aurtHit adrie*sIE. M. ZiRGis, libraire k Leipzig, estcharg^ de recevoir et denous faire parvenir les oavrages publics en AUemagne , ^ae MM. I«« iifcraires, ks ^iteurs et les auteurs d^sireront faire aDooooer .da)M U *«-«« Snejr- ^»pi4iqu«. LiBRAiRES chez lesquels on souscrk dans les pays ixRANCEKS. Londres, Dulaii et Compagnie; — Treuttel etWiirtz; — Bossange. Madrid, Dennee; — PeriiS. Aix-la-Chapelle, Laruelle fils. Amsterdam, Delachaux ; — G. Du- four. Anvers , Ancelle. Aran (Suisse), Sauerlander. Berlin, Schlesinger. Berne , Clias ; — Bourgdorfer. BreslaUf Th. Korn. Bnixelles, Lecharlier; — Demat; — Brest vau Kempen; — Berlhot. Bruges , Bogaert; — Dumortler. Florence, Pialti. Friboitrg (Suisse) , Aloise Eggen- dorfer. Francfori-sur-Meiii , Schaeffer ; — Bronner. Grt«i , Vaadenkerckoven fils. Geneve, J.-J. Pasclioud ; — Bar- bezatetDelarue. La Haye, les frfires Langenbuysen. Lausanne , Fischer. Zc/pz/g-,Grieshatamer; — G.Zirg^s. Liege, Desoer. iW(7an,Giegler;— Visraara;— Bocca. it/oicoH, Gautier; — Riss p^reetfils. Naples , Borel ; — Marolia et Wanspandock. Neiichatel (Suisse), Grester. Neiv-York (Etats-Unis), Thoisnier- , Desplaces; — ^^Berard etMondonj — Behr et Kahl. NouveUe -Orleans , Jourdan ; — Roche , fr^res. Palerme (Sicile), Pedonne et Mu- ratoii; — Bceuf (Ch.). Petcnboiirg , Saiul-Florent ; — Graeff; — Weyher; — Pluchart. Rome , de Ronianis. Stuttgart et Tubiiigne, Gotta. Todi . B. Scalaluici. Turin , Bocca. /^<7rjo!'ie,Gliicksberg;— Zayadsky. P'ie/ine ( Autriche ) , Gerold ; — Schaumbourg ; — 5^cbalbacher. Lisbonne , Paul Martin. COLONIES. Guadehiiyi (Pointe-a-Pitrc), Plolel aine. Ile-de- France (Port-Louis), E. Burdet. Martinique, Tbounens, Gaujous. ON SOUSCRIT A PARIS, AU BUBE.VU DE REDACTIOJT, KTJE d'EnPEB-SaINT-MiCHEL , n° l8, ou doivent etre envoyes , francs de port , les liyres , dessius et gra- vures , dont on desire ranacace, et les Lettres/Mcmoires, Notices ou Extrr its destines a etre insei'es dans ce Recueil. AuMtJSKEE«cYCi,orEiMQUE,cl»ezBossAXGE pi're, rue Richelieu, to 60; Chez Treuttel et WiJRxz, rue de Bourbon , n" 17; Rrt ET Grivier , quai des, Augus'iins , n" 55 ; Charles Beohet, libraire-comm'''' , quai des Augustins , u° $7; J. Renouard, rue de Tournon , n" 6 ; RoHET , rue Hantefcuille , n" i a ; A. Baudodin, rue de Vangirard, n" 17; DEtAtJNAY, Pelicier, PoNTHiEu, ju V Tekxe, Cabihet Litte- RA.IHE-, au Palais-Royal. A LONDRES. — GENKRit Foreigjj Agency OriicE,n° 38, Norfolk- street, Strand; Treutxei. et Vv'urtz; Bosk-ikge; Duliu et caaip. ; P. RoLANBi, n" 20, Berners-street , Oxford-street. Tfnia. Les ouTTagcs annoncts dans la Revue se trouvcnt aussi chez Rorkt , rne Bautefeuille , a" la. m-^ PARIS.' — riE L IMPRIMERIE DE RIGNOUX. rue (]eslrancs-Coui'geois-S. -Michel, n" S.